La séance est ouverte à neuf heures trente.
Le compte rendu intégral de la séance du jeudi 22 février 2018 a été publié sur le site internet du Sénat.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté.
Mes chers collègues, j’ai le regret de vous faire part du décès de notre ancien collègue Alain Gérard, sénateur du Finistère de 1986 à 2008.
La parole est à M. Roland Courteau, auteur de la question n° 0015, adressée à Mme la ministre des solidarités et de la santé.
Madame la ministre, la désertification médicale est une préoccupation majeure. Plusieurs dizaines de départements ont enregistré une baisse de la densité médicale au cours de ces dix dernières années. Au total, plusieurs millions d’habitants vivraient dans des territoires où la situation serait alarmante.
Ainsi, parmi les raisons qui expliquent que nombre de Français renoncent à consulter un médecin figure, pour 15 % d’entre eux, l’absence de médecin de proximité.
Or, je tiens à le rappeler, selon l’Organisation mondiale de la santé, le droit à la santé comprend également l’accès en temps utile à des soins de santé acceptables.
Pourtant, force est de constater la persistance d’une augmentation des inégalités d’accès aux soins selon les territoires.
Plusieurs mesures ont déjà été mises en œuvre. Je ne vais pas les citer, mais il semble évident que la solution passera par la multiplication de solutions.
Les élus, qui sont en première ligne, ne manquent pas d’en suggérer quelques-unes, comme le numerus clausus géographique ou l’aide à la mobilité des praticiens itinérants. On pourrait aussi conditionner l’installation d’un médecin à un quantum d’années d’exercice dans les zones sous-dotées ou encore envisager que le conventionnement n’intervienne que concomitamment avec la cessation d’activité libérale de médecins exerçant dans des zones fortement excédentaires en offre de soins.
De même est-il suggéré la création d’un statut de « médecin praticien territorial ». Cette initiative s’est traduite par le dépôt, ici même, de la proposition de loi n° 459, que j’ai présentée et qui a recueilli le soutien de l’Association des maires ruraux de France. L’AMRF voit dans ce statut un outil complémentaire, mais indispensable, pour une mobilisation totale autour de cet enjeu de santé publique, de même qu’un moyen pour les médecins de limiter l’isolement d’une pratique médicale en zone rurale, notamment.
Quel est votre sentiment, madame la ministre, sur cette dernière proposition et quel ensemble de mesures comptez-vous mettre en œuvre afin que soit assuré, pour tous, le principe de protection de la santé, garanti par le préambule de la Constitution de 1946 ?
Monsieur le sénateur Roland Courteau, malheureusement, la démographie médicale n’augmentera qu’à partir de 2025.
Pour remédier aux difficultés que rencontrent nos concitoyens en matière d’accès aux soins, vous l’avez très bien dit, monsieur le sénateur, il n’y a pas une solution miracle, mais bien un panel de solutions.
Le plan territorial d’accès aux soins, que j’ai présenté en octobre dernier, est pragmatique : il comprend 26 mesures qui viennent du terrain. Le plan s’appuie en effet sur les propositions qui nous sont remontées des professionnels de santé, des collectivités territoriales et des usagers.
L’accès aux soins ne repose pas seulement sur l’installation d’un médecin, mais surtout sur l’organisation coordonnée de tous les professionnels de santé d’un même territoire.
Ces solutions doivent être trouvées au niveau local, dans chaque territoire, avec les acteurs eux-mêmes.
Les agences régionales de santé sont chargées d’animer la réflexion avec les professionnels de santé et les élus.
Le plan a pour objectif d’augmenter le temps soignant des professionnels de santé. Il généralise également la téléconsultation et la télé-expertise.
Nous doublerons le nombre de maisons de santé pluriprofessionnelles en cinq ans grâce à un programme d’investissement qui est prévu à hauteur de 400 millions d’euros.
Ce plan sera également amené à évoluer en fonction des besoins et des attentes du terrain.
J’ai souhaité associer les organisations des professionnels de santé au pilotage national et régional du plan, afin qu’elles puissent être force de proposition.
À ce sujet, toutes les organisations ont apporté leur signature, voilà quinze jours, à une charte visant à renforcer l’accès territorial aux soins.
Aujourd’hui, 200 millions d’euros d’aides conventionnelles sont prévus pour aider les professionnels en zone sous-dense. Ainsi, nous facilitons le cumul emploi-retraite des médecins libéraux, nous développons des consultations avancées, nous créons des postes d’assistants partagés entre la médecine dite de ville et l’hôpital, nous généralisons le contrat de médecin adjoint.
Enfin, nous favorisons les stages extra-hospitaliers des étudiants en médecine et des internes afin de leur faire découvrir les territoires et nous facilitons les remplacements, de même que l’exercice mixte.
Comme vous pouvez le constater, monsieur le sénateur, nous faisons le nécessaire pour apporter des réponses concrètes aux usagers et aux élus.
Je vous remercie de ces précisions, madame la ministre.
Je souhaite vivement que les mesures que vous proposez soient à même de résoudre ce problème majeur.
En effet, il n’y a pas une solution, mais un ensemble de solutions.
Je reste toutefois persuadé que, dans quelque temps, il faudra bien aller vers la création de ce statut de « médecin praticien territorial ».
Aujourd’hui déjà, nombre de communes – c’est peut-être également le cas des intercommunalités - salarient des médecins, mais il est vrai seulement en qualité de contractuels. Demain, parce que cet outil complémentaire sera de plus en plus utilisé, notamment par les intercommunalités ou par des communes de taille moyenne, ce statut s’imposera, par la force des choses.
J’en suis convaincu, madame la ministre, et je prends date dès à présent.
La parole est à Mme Viviane Malet, auteur de la question n° 0120, adressée à Mme la ministre des solidarités et de la santé.
Madame la ministre, je souhaite évoquer la situation particulière des donneurs d’organes vivant en outre-mer.
Le principe de la gratuité du don d’organes du vivant a pour corollaire la neutralité financière pour les donneurs. Ainsi, les textes garantissent le remboursement par l’établissement préleveur, sur production de justificatifs, des frais de transport et d’hébergement du donneur.
Cela pose néanmoins certaines difficultés pour les Ultramarins devant se rendre en métropole pour effectuer le prélèvement.
En effet, pour les personnes aux faibles revenus vivant outre-mer, le remboursement implique une avance de frais importante et souvent impossible à assumer lorsque le prélèvement a lieu en France métropolitaine.
Aussi, je souhaiterais connaître votre position, madame la ministre, sur la proposition de modification des dispositions de l’article R. 1211-2 du code de la santé publique afin de proposer, non plus un remboursement, mais une avance sur présentation de justificatifs.
Les donneurs ultramarins ne doivent pas être confrontés, du fait de l’éloignement géographique et du coût élevé des billets d’avion, à des difficultés financières.
Il me paraît donc raisonnable de permettre aux établissements hospitaliers préleveurs d’être en mesure de proposer une avance des frais de transport et d’hébergement pour les Ultramarins.
Madame la sénatrice Viviane Malet, le développement des greffes d’organes constitue un enjeu majeur de solidarité nationale et de santé publique, le prélèvement et la greffe figurant dans la loi comme une priorité nationale.
Les donneurs vivants, notamment de rein, constituent des sources significatives de greffons complémentaires au don cadavérique.
À travers notamment le plan Greffe d’organes, de tissus et de cellules 2017-2021, une politique publique volontariste de développement de la greffe est mise en œuvre par le Gouvernement, dans le respect des principes éthiques du don.
L’un des principes cardinaux est celui de la gratuité du don, qui a pour corollaire la neutralité financière pour le donneur.
Cette loi garantit aux donneurs vivants et aux personnes qui les accompagnent le remboursement intégral des frais qu’ils ont engagés au titre du don, ainsi que la prise en charge des dépenses de soins par les établissements de santé chargés du prélèvement et de la greffe.
La prise en charge du donneur et de son accompagnement est large et garantit le principe de neutralité financière du don, sans pour autant constituer une incitation financière au don, qui, elle, est prohibée par la loi.
Ainsi, l’intégralité des frais engagés lors des phases du don est prise en charge par l’établissement de santé préleveur.
Les textes garantissent le remboursement, sur production de justificatifs, des frais de transport, des frais d’hébergement et de la perte de revenus, dispositions qui concernent le donneur et son accompagnant.
Le remboursement des frais de transport et d’hébergement concerne également les déplacements afférents aux examens et aux soins qui précèdent ou suivent le prélèvement, ainsi que les déplacements effectués pour le recueil du consentement du donneur.
De même, le remboursement des frais d’hébergement et de transport est prévu dans le cadre des déplacements afférents aux examens et aux soins qui suivent le prélèvement ou la collecte.
Actuellement, aux termes de l’article R. 1211-2 du code de la santé publique, les frais engagés par le donneur lui sont remboursés sur présentation de justificatifs, afin d’assurer une prise en charge complète des frais engagés, mais aussi le respect du principe de gratuité du don, qui implique l’absence de rémunération ou d’incitation financière.
Dans ces conditions, autoriser une avance sur présentation de justificatifs semble difficile. Elle devrait, a minima, être très strictement encadrée afin de ne pas être assimilée à une incitation financière.
Je suis bien entendu très attentive aux problématiques concernant les outre-mer afin d’améliorer la prise en charge des patients.
Je vous remercie de votre réponse, madame la ministre.
Le but de ma question n’était pas de rechercher de nouvelles mesures de financement pour les donneurs, mais d’alléger le coût du don pour les familles nécessiteuses.
En tant qu’élue de proximité, j’ai eu à traiter le cas difficile d’une fratrie au sein de laquelle le frère du donneur était en arrêt maladie, les deux sœurs au chômage et la maman grabataire. Vous imaginez, madame la ministre, les difficultés financières rencontrées par cette famille pour avancer les frais !
Quoi qu’il en soit, je vous remercie de vous soucier des problématiques des Ultramarins.
La parole est à M. Rémi Féraud, auteur de la question n° 0222, adressée à Mme la ministre des solidarités et de la santé.
Madame la ministre, je souhaite attirer votre attention sur les problématiques de toxicomanie dans le nord-est parisien.
Depuis plusieurs années, l’État et la Ville de Paris ont engagé de nombreux programmes et projets de réduction des risques : points d’accueil et d’information, mise à disposition de matériel stérile et récupération du matériel utilisé dans des structures spécialisées ou des automates, accès à des produits de substitution…
Dans cette logique, et pour compléter ces dispositifs, une salle de consommation à moindre risque a ouvert à la fin de l’année 2016 dans le Xe arrondissement de Paris, dont j’étais le maire. Rendu possible grâce à la loi de modernisation de notre système de santé du 26 janvier 2016, ce projet expérimental, destiné aux usagers de drogue les plus précarisés, visait un double objectif, d’une part de santé publique, en assurant des conditions d’hygiène permettant de réduire les risques, notamment infectieux, liés à leur consommation, d’autre part de sécurité publique, en réduisant les nuisances liées à la consommation de drogue dans l’espace public.
Avec plus de 150 passages par jour, la salle de consommation à moindre risque de Paris remplit aujourd’hui son objectif, permettant une meilleure prise en charge sanitaire et sociale des toxicomanes et diminuant de manière très importante le nombre de seringues retrouvées dans la rue.
Cependant, le Gouvernement ne s’étant pas exprimé sur la toxicomanie depuis mai 2017, plusieurs questions se posent aujourd’hui.
Quel soutien comptez-vous apporter à cette salle de consommation à moindre risque dans la durée ? L’ouverture d’autres salles, outre celle qui a vu le jour à Strasbourg, est-elle envisagée ? Si oui, le Gouvernement soutiendra-t-il ces projets ? Quelles mesures spécifiques au crack sont-elles prévues par le Gouvernement pour endiguer la situation actuelle dans le nord-est parisien, où la consommation est de plus en plus visible dans la rue ou dans les stations de métro ?
Ce sont des questions importantes sur lesquelles l’engagement du Gouvernement, au-delà des seules autorités locales de santé, avec lesquelles nous travaillons en bonne intelligence, est très attendu.
Monsieur le sénateur Rémi Féraud, comme vous l’avez rappelé, l’expérimentation des salles de consommation à moindre risque a été lancée dans notre pays à la suite de la loi de modernisation de notre système de santé de 2016.
Après trente ans d’action pour réduire les risques et les dommages en termes d’addictions, la France a complété son arsenal de réponses et fait aujourd’hui partie des dix pays où de tels espaces ont été ouverts.
Les salles de consommation à moindre risque doivent nous permettre d’atteindre les usagers de drogue injecteurs les plus marginalisés, les plus vulnérables au regard des risques liés à leur pratique. L’accompagnement social de ces personnes est également inclus dans la démarche des salles.
Il s’agit aussi, bien sûr, de réduire les nuisances pour les riverains des quartiers où les usagers sont nombreux, en réduisant notamment les injections et les seringues usagées dans l’espace public.
Un dispositif d’évaluation a été mis en place pour mesurer concrètement l’impact des salles en matière de santé publique, d’acceptabilité sociale et d’ordre public.
Les deux salles expérimentales, à Paris et à Strasbourg, ont déjà produit, en un an, des résultats très positifs, à tout le moins pour les personnes concernées. Un comité national réunissant les acteurs de l’expérimentation, les riverains, les partenaires et les associations assure un suivi attentif des expérimentations.
De nouvelles salles pourront être ouvertes pendant la période d’expérimentation, bien sûr, mais cela ne se décide pas d’autorité. Je ne doute toutefois pas qu’il y aura des candidats.
Par ailleurs, nous travaillons actuellement sur le programme national de santé publique, qui devrait être dévoilé le mois prochain et qui vise, notamment en termes de prévention, à proposer des actions spécifiques en matière de toxicomanie.
Comme vous pouvez le constater, monsieur le sénateur, nous restons extrêmement vigilants et nous sommes mobilisés pour encadrer au mieux ces salles de consommation et continuer d’agir en faveur de la réduction des risques.
Je vous remercie de votre réponse, madame la ministre. Le soutien du Gouvernement à l’expérimentation des salles de consommation à moindre risque dans la perspective d’un progrès dans la réduction des risques est extrêmement important.
Je serai attentif aux annonces qui seront faites lors de la présentation du programme national, dans les semaines qui viennent.
La parole est à Mme Catherine Troendlé, auteur de la question n° 0154, adressée à Mme la ministre des sports, que je salue.
Madame la ministre, je me permets d’attirer votre attention sur la loi n° 2017-261 du 1er mars 2017 visant à préserver l’éthique du sport, à renforcer la régulation et la transparence du sport professionnel et à améliorer la compétitivité des clubs, et tout particulièrement sur les dispositions de son article 17, adopté au Sénat avec l’accord du Gouvernement, j’aime à le rappeler.
Cet article prévoit qu’une association ou une société sportive mentionnée aux articles L. 122-1 ou L. 122-2 du code du sport peut conclure, avec un sportif ou un entraîneur professionnel qu’elle emploie, un contrat relatif à l’exploitation commerciale de son image, de son nom ou de sa voix, au moyen d’une redevance.
Grâce à cette disposition, il sera possible de conserver dans les compétitions nationales certains joueurs qui s’expatrient aujourd’hui. Ces joueurs percevront des rémunérations, ce qui signifie des recettes fiscales et sociales pour l’État. Quant aux redevances, elles seront fiscalisées au titre des bénéfices non commerciaux, les BNC, ou des bénéfices industriels et commerciaux, les BIC.
Or le décret fixant « les catégories de recettes générées par l’exploitation commerciale de l’image, du nom ou de la voix du sportif donnant lieu au versement d’une redevance à ce dernier » reste en attente de parution, madame la ministre.
Aussi, je souhaiterais savoir dans quel délai ledit décret paraîtra.
Madame la sénatrice Catherine Troendlé, l’article 17 de la loi du 1er mars 2017 prévoit en effet la valorisation de l’image de joueurs ou d’entraîneurs professionnels, laquelle peut avoir une valeur marchande.
Cette disposition visant à renforcer la compétitivité du sport professionnel français, qui génère une activité essentielle pour nos territoires, doit s’accompagner d’une mesure réglementaire pour être applicable.
Les sénateurs m’ont souvent interrogée sur les raisons qui faisaient que le décret n’était toujours pas signé un an après la promulgation de la loi, la vérité étant que nous devions préalablement déterminer les catégories de recettes constituant l’assiette de la redevance perçue par les bénéficiaires, joueurs et entraîneurs.
Pour ce faire, des travaux inter-directions – Sport, Budget, Sécurité sociale – sont en cours, sous l’égide du Premier ministre. Je peux vous annoncer ce matin que nous sommes parvenus à un point de convergence, qui a fait l’objet d’une consultation des organisations professionnelles. Nous allons donc aboutir.
Ce mécanisme devra pérenniser les rémunérations des joueurs et entraîneurs les plus vulnérables, mais devra également contribuer à la prévention des comportements d’optimisation fiscale, notamment offshore. L’honnêteté nous oblige à reconnaître que cela existe dans d’autres championnats.
Enfin, en l’absence de règles fiscales communes, ce dispositif doit permettre de réduire l’écart de compétitivité entre les acteurs nationaux et ceux du marché de l’Union européenne. Le renforcement de la compétitivité du sport professionnel devrait se traduire par une revalorisation des flux financiers bénéficiant au sport amateur.
En tant que ministre de toutes les pratiques sportives, je serai extrêmement soucieuse de faire en sorte que tout le sport français puisse en bénéficier.
Un grand merci pour ces précisions, madame la ministre.
J’entends bien les contraintes qui sont les vôtres, mais voilà près d’un an maintenant que le texte a été promulgué. Il appartient aussi aux parlementaires de contrôler l’application des textes législatifs.
Vous nous avez parlé d’un délai raisonnable, madame la ministre. Je me permettrai donc, si nous n’obtenons toujours pas de réponse d’ici quelque temps, de revenir vers vous, mais par écrit.
En tout état de cause, je rejoins vos propos, très précis, sur les enjeux du sport et son impact sur nos territoires.
La parole est à M. Pierre Ouzoulias, auteur de la question n° 0189, adressée à M. le ministre de l’éducation nationale, que je salue.
Monsieur le ministre, ma question porte sur l’avenir du lycée Jean-Monnet de Montrouge, dans les Hauts-de-Seine, un lycée prestigieux et ancien, qui fut inauguré par Edgar Faure et Léopold Sédar Senghor en 1955.
L’été dernier, le conseil régional d’Île-de-France a financé à hauteur de 300 000 euros la rénovation complète de l’atelier de menuiserie.
Connaissant les difficultés budgétaires de toutes les collectivités, je ne peux concevoir que la région ait investi autant d’argent dans une structure obsolète et j’imagine donc que vos services, monsieur le ministre, l’ont encouragée à effectuer cette rénovation.
Je ne comprends donc pas pourquoi le rectorat a décidé, aujourd’hui, de fermer la classe de seconde professionnelle. Au-delà, je m’interroge sur l’avenir de ce lycée, qui rend pourtant des services indispensables à de nombreuses communes du sud des Hauts-de-Seine.
Vous allez me répondre que la fermeture s’impose par manque d’élèves, monsieur le ministre.
Je me permets de vous rétorquer, par prolepse, que cette fermeture a été organisée malheureusement de longue date, en réduisant, et sans contrainte d’effectifs, les formations qu’il accueillait.
Je pense notamment à la suppression du CAP, il y a cinq ans, alors que cette formation était appréciée des professionnels et qu’elle permettait à des jeunes de poursuivre leurs études en lycée.
Le rectorat souhaite aujourd’hui diriger les élèves vers d’autres lycées professionnels du département. Si ces établissements ont une meilleure fréquentation, c’est justement parce qu’ils ont gardé cette pluralité d’offres.
Je connais votre attachement sincère à l’enseignement professionnel, monsieur le ministre. Je vous demande donc de me faire connaître les mesures que vous souhaitez prendre pour sauver le lycée professionnel de Montrouge et son atelier de menuiserie. Des professeurs et des élèves de ce lycée sont présents en tribune pour vous témoigner du prix qu’ils accordent à votre réponse.
Je vous remercie de votre question, monsieur le sénateur Pierre Ouzoulias. Je salue également la communauté éducative du lycée Jean-Monnet.
Bien entendu, ce lycée, dont vous avez rappelé l’histoire, n’est pas menacé, au-delà du sujet spécifique de la filière bois.
Je voudrais dire d’emblée que je partage l’esprit de votre question, monsieur le sénateur. Vous avez bien voulu reconnaître mon attachement à l’enseignement professionnel, et je pense que nous devons être tout particulièrement attentifs à ce type de formation dans le contexte actuel, à l’heure où un certain renouveau de l’économie renforce les besoins dans ces domaines.
Comme vous l’avez souligné, le véritable problème structurel tient au manque de candidatures pour ces filières. C’est sur ce point que nous devons agir dans le futur.
Pour lutter contre cette désaffection des élèves, le rectorat réunit régulièrement, depuis trois ans, les établissements, lycées et CFA - centres de formation d’apprentis -, ainsi que les branches professionnelles du bâtiment, afin de mener des actions de promotion. Il semblerait que ces actions aient été insuffisamment efficaces jusqu’à présent. Le conseil régional d’Île-de-France a été saisi de cette problématique, mais en coordination avec le rectorat.
Le département des Hauts-de-Seine se caractérise également par une offre importante de formations dédiées aux métiers du bois dans le même secteur géographique. Quatre établissements proposent en effet des formations dans ce domaine : le lycée Louis-Blériot, de Suresnes, le lycée de Prony, à Asnières, le lycée Jean-Monnet de Montrouge et le CFA consulaire ou Écoles des éco-activités de Gennevilliers.
Une sorte de concurrence s’opère donc entre ces établissements et le baccalauréat professionnel de technicien, menuisier, agenceur, et la formation, parce qu’elle est isolée et sans autre diplôme dans ce domaine pour la compléter, peine à trouver son public.
J’entends vos arguments sur la disparition du CAP voilà cinq ans. On peut sans doute la déplorer, mais, de fait, cette année, seuls sept élèves ont demandé à intégrer la formation. Finalement, neuf s’y sont inscrits.
Face à ce contexte qui dessert les établissements, il a été décidé de fermer le pôle « bois » du lycée Jean-Monnet afin de resserrer l’offre autour des autres lycées et CFA du département.
Par ailleurs, compte tenu des enjeux liés au Grand Paris et des besoins à venir dans les métiers du bâtiment, une réflexion est engagée avec l’établissement pour enrichir l’offre de formations dans le domaine du gros œuvre, qui fait l’identité de cet établissement en tant que lycée des métiers.
J’ajoute que le rectorat, soucieux du respect des personnels et de leur engagement, a bien entendu maintenu les postes de professeurs concernés, de façon à ce que la vocation de ce lycée puisse perdurer.
Je m’engage toutefois à réexaminer la situation avec le rectorat, car je suis sensible aux arguments que vous avez exprimés sur ce sujet d’avenir, monsieur le sénateur. Sur ces dossiers, nous devons avoir une vision géographique d’ensemble, mais nous devons aussi, comme il est normal, regarder au plus près si cette formation ne correspond pas toujours à un besoin.
Monsieur le ministre, j’ai entendu vos engagements fermes envers cet outil exceptionnel qu’est le lycée Jean-Monnet.
Le lycée professionnel est au fond le seul vrai lycée généraliste, le seul qui s’adresse à l’intelligence de l’esprit comme à l’intelligence de la main, ce que ne font pas les filières dites « généralistes ».
Aujourd’hui, nous devons trouver ensemble une solution pour que davantage de jeunes, notamment issus des quartiers en difficulté de Bagneux, Malakoff ou Montrouge, se dirigent vers cette voie. Je me tiens à votre disposition pour travailler sur le sujet.
( M. Jacques Mézard, ministre de la cohésion des territoires, sourit.) Eh oui, monsieur Mézard !
Sourires sur différentes travées.
Par ailleurs, vous avez évoqué les capacités offertes par d’autres lycées professionnels situés plus au nord dans les Hauts-de-Seine. Je les connais, mais sincèrement, une telle solution n’est pas réaliste au regard des conditions de transport en région parisienne : envoyer un gamin à Suresnes, c’est deux heures de trajet par jour, ce qui est évidemment dissuasif ! Il faut savoir qu’il est aujourd’hui quasiment plus difficile de se déplacer en banlieue parisienne que dans les territoires ruraux… §
C’est pourquoi, monsieur le ministre, nous avons besoin d’une telle offre dans le sud des Hauts-de-Seine. J’ai bien entendu vos engagements, ils sont précieux et je les apprécie à leur juste valeur. Vous êtes manifestement attaché à l’enseignement professionnel et, comme je vous l’ai dit, je suis à votre disposition pour travailler avec vous sur ces sujets.
La parole est à M. Jean-Claude Luche, auteur de la question n° 0196, adressée à M. le ministre de l’éducation nationale.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le nombre de mineurs isolés étrangers accueillis dans nos départements progresse tous les jours. C’est un constat et la situation n’est guère brillante.
Certains de ces mineurs parlent le français, d’autres n’en ont jamais prononcé un mot. Certains ont suivi une scolarité régulière dans leur pays d’origine, quand d’autres ne sont jamais allés à l’école.
C’est avec cette grande diversité de parcours que doivent composer les professeurs enseignant le français dans les collèges proposant le français comme langue étrangère. Jusqu’à présent, ils étaient accompagnés d’assistants, employés avec des contrats aidés. Or, avec la suppression des contrats aidés, ces professeurs de français se trouvent seuls pour enseigner notre langue à des élèves aux profils extrêmement divers.
L’enseignement du français demeure primordial pour ces jeunes afin qu’ils puissent maîtriser les fondamentaux et s’intégrer, le cas échéant, dans notre pays dans les meilleures conditions possible. Abaisser l’encadrement des cours de langue, c’est créer des difficultés supplémentaires pour ces jeunes, qui ont déjà, par définition, une culture différente de la nôtre.
Si l’on ne peut que regretter l’absence de classes spécifiquement dédiées à l’apprentissage du français et de notre culture avant que ces jeunes ne suivent une scolarité normale, on ne peut se résoudre à fragiliser davantage ce dispositif.
Monsieur le ministre, comment pouvez-vous pallier la suppression des contrats aidés dans les cours dits de « français langue étrangère » ?
Monsieur sénateur Jean-Claude Luche, vous avez évoqué la question des contrats aidés et celle de l’accueil par l’éducation nationale des élèves allophones. Normalement, ces deux sujets ne sont pas liés, car les contrats aidés n’ont pas vocation à servir pour cet accueil.
Comme vous le savez, l’éducation nationale a pu, de manière spécifique, préserver 50 000 contrats aidés destinés à l’accompagnement des élèves en situation de handicap, cette politique constituant une priorité nationale. À la rentrée dernière, nous avons également su créer de nouveaux postes d’accompagnants des élèves en situation de handicap, dits AESH.
Les personnels recrutés sous contrat avaient bien l’appui éducatif parmi leurs missions, mais uniquement dans le premier degré. Dans les collèges, la fonction d’assistant au professeur ne peut pas être exercée par des personnels sous contrat aidé ; elle peut cependant être remplie par des assistants pédagogiques, lesquels relèvent du statut des assistants d’éducation qui a été adapté à cette fin par le décret du 22 septembre 2005.
Les moyens en assistants d’éducation sont notifiés aux recteurs d’académie, qui procèdent à leur répartition entre établissements en tenant compte des priorités locales d’accompagnement des élèves.
Par ailleurs, des assistants de langues, qui sont des étudiants étrangers, ont pour mission de participer à la vie d’un établissement dans le cadre des activités pédagogiques valorisant la langue vivante étrangère dont ils sont locuteurs natifs.
Nous n’avons donc pas vraiment, dans nos établissements scolaires, d’assistants de langue pour le français langue étrangère.
En ce qui concerne la scolarisation des élèves allophones nouvellement arrivés en France, je souhaite vous rappeler que l’école est évidemment un droit pour tous les enfants résidant sur le territoire national, quels que soient leur nationalité, leur statut migratoire ou leur parcours antérieur. L’éducation nationale porte une attention particulière à leur accueil et à leur scolarisation, qui sont pensés, par l’institution, dans sa globalité et dans la durée.
La scolarisation des élèves allophones relève du droit commun et de l’obligation scolaire, en application du principe d’inclusion qui s’applique à tous les enfants sans aucune distinction. Ils sont donc scolarisés en milieu ordinaire ; nous voulons offrir le même apprentissage pour tous, mais en tenant évidemment compte des situations sociales précaires.
L’acquisition de la langue à l’école est un enjeu fondamental et l’enseignement du français en tant que langue seconde est dispensé par des enseignants spécialement formés, qui interviennent en complément du travail fait en classe ordinaire par les enseignants des différentes disciplines. Les assistants pédagogiques peuvent contribuer au soutien des élèves qui sont les plus en difficulté vis-à-vis des apprentissages.
Votre question permet de pointer du doigt un sujet très intéressant, mais la diminution du nombre de contrats aidés ne doit pas être vue comme un problème pour la résolution de la question de l’accueil des élèves allophones, parce que leur mission n’était de toute manière pas celle-là. En revanche, il est exact que nos assistants d’éducation pourraient parfois être davantage dédiés à ce sujet, notamment les étudiants qui travaillent sur le français langue étrangère. Cette évolution, qui correspond à l’attente que vous avez exprimée, serait positive et pourrait intervenir dans les temps futurs.
Monsieur le ministre, il n’est évidemment pas question de remettre en cause l’accompagnement, mais le fait est que les contrats aidés ne sont plus disponibles. Dans ces conditions, le véritable problème est le nombre d’assistants d’éducation pouvant accompagner les professeurs, aujourd’hui démunis.
Je rappelle que le français est un élément indispensable d’intégration pour ces mineurs étrangers, en particulier lorsqu’ils souhaitent rester en France.
Je ne méconnais pas les différents problèmes qui peuvent se poser, mais vous devez donner les moyens à l’éducation nationale d’apporter une véritable réponse à ces jeunes, qui sont de plus en plus nombreux à arriver.
Au-delà de la question de l’éducation, l’arrivée de ces jeunes pose une question financière aux départements, puisque le coût de l’accueil leur incombe. J’ai été président de conseil départemental et je sais ce sujet éminemment sensible.
Je remercie M. le ministre de l’éducation nationale de sa présence et de ses réponses.
La parole est à Mme Colette Mélot, auteur de la question n° 0211, adressée à M. le ministre de la cohésion des territoires, que je salue.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’accès au logement pour tous les ménages est une priorité et loger tous ceux qui sont aujourd’hui privés d’un logement décent est une urgence. Je rappelle l’engagement constant des communes, depuis des années, pour financer la construction de logements sociaux et mettre en œuvre des politiques respectant les principes de mixité sociale.
En Seine-et-Marne, la commune de Livry-sur-Seine, qui compte 2 000 habitants, a engagé deux opérations destinées à respecter ses obligations légales selon l’article 55 de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains, dite SRU ; ces opérations incluent 15 logements locatifs et 17 logements en accession, et cela malgré une difficulté de taille : l’absence de foncier disponible, qui oblige la commune à recourir à du foncier privé, ce qui augmente largement les coûts.
Depuis peu, cette commune accueille également un centre d’hébergement d’urgence, ou CHU, qui comprend 38 logements destinés à recevoir 102 personnes en grande difficulté sous la houlette du Secours catholique, qui rénove le château du Clos Notre-Dame où vivent des sœurs dominicaines.
Ce CHU impacte fortement les finances de la commune : scolarisation de 18 enfants, exonération de la taxe foncière sur les propriétés bâties dont bénéficie le CHU pendant 25 ans et absence de taxe d’habitation à percevoir pour chaque logement créé.
Le CHU de Livry a signé un bail de dix ans renouvelable et le gestionnaire a prévu de maintenir les résidents dans les logements durant dix-huit mois en moyenne, avec un encadrement de professionnels qualifiés pour les accompagner dans la durée.
Pourtant, contrairement à un centre d’hébergement et de réinsertion sociale, ou CHRS, ces logements ne sont pas comptabilisés dans le recensement des logements locatifs sociaux, effectué au titre de l’article 55 de la loi SRU, alors que les conditions de fonctionnement de ce centre sont extrêmement proches de celles d’un CHRS.
Monsieur le ministre, sans élargir la définition des logements locatifs sociaux aux CHU, comme ce qui se fait pour les CHRS, je souhaite savoir ce qui pourrait s’opposer à la révision de leur statut. Ne serait-il pas possible de limiter les CHU à l’urgence de courte durée n’excédant pas un an et de qualifier les centres assurant des hébergements de plus de douze mois de CHRS ?
Madame la sénatrice Colette Mélot, vous m’interrogez sur les possibilités d’évolution du statut des centres d’hébergement, afin que les centres d’hébergement d’urgence, les CHU, dont le fonctionnement s’apparente à celui d’un centre d’hébergement et de réinsertion sociale, ou CHRS, puissent être requalifiés en CHRS. Cette évolution permettrait notamment – tel est l’objectif de votre question – d’intégrer au décompte des logements sociaux réalisés au titre de l’article 55 de la loi SRU les places de l’actuel CHU de Livry-sur-Seine.
À la différence des CHU, dont la vocation est de répondre à une situation d’urgence en hébergeant temporairement des personnes sans-abri, les CHRS sont décomptés au titre de la loi SRU, car ils constituent une étape préalable à l’accès à un logement pérenne.
Ces deux types de structures relèvent de statuts différents. Les CHRS constituent une catégorie d’établissements sociaux et médico-sociaux dont le cadre juridique est fixé par le code de l’action sociale et des familles. Leur création est conditionnée à l’obtention d’une autorisation préfectorale garantissant un niveau minimal de prestations d’accompagnement. À l’inverse, les CHU, qui ne sont soumis qu’à un régime déclaratif, ne sont pas tenus aux mêmes obligations d’accueil et d’accompagnement des publics que les CHRS. Ainsi, les différences de régime entre ces deux types de structures sont liées à leurs caractéristiques respectives.
Dans les faits, le fonctionnement de certains CHU peut s’apparenter à celui d’un CHRS, d’autant que le public visé par ces structures est souvent le même. Pour ce type de CHU et en l’état actuel du droit, une transformation en CHRS est d’ores et déjà possible dans le respect de la procédure d’appel à projets définie par le code de l’action sociale et des familles.
Dans le projet de loi Évolution du logement et aménagement numérique, que nous présenterons prochainement en conseil des ministres, une disposition devrait précisément viser à faciliter la transformation d’un CHU en CHRS pour ceux dont le fonctionnement est déjà proche de celui d’un CHRS et pour la durée du plan quinquennal Logement d’abord. Cette mesure permettra de déroger à l’obligation de passer par un appel à projets. Il est possible, madame la sénatrice, que cette évolution vous permette d’obtenir satisfaction.
Monsieur le ministre, je vous remercie des précisions que vous venez d’apporter. La perspective que vous évoquez pourrait effectivement intéresser la commune et lui permettre de trouver une solution convenable.
Vous avez bien voulu reconnaître que le fonctionnement de ce CHU est très proche de celui d’un CHRS. Le fait que les logements proposés constituent un hébergement d’une durée de dix-huit mois implique bien entendu une mission de réinsertion sociale. En outre, le Secours catholique gère aussi de nombreux CHRS.
En tout cas, je vous remercie vivement de la réponse que vous venez de m’apporter.
La parole est à M. Jean-Jacques Lozach, auteur de la question n° 0240, adressée à M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation, que je salue.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je souhaite attirer l’attention du Gouvernement sur la mise en œuvre défaillante du programme LEADER – Liaison entre actions de développement de l’économie rurale – dans le cadre du FEADER – Fonds européen agricole pour le développement rural – pour la période 2014-2020. Ce fonds constitue le second pilier de la politique agricole commune, la PAC.
Quatre ans après le lancement de la programmation 2014-2020, force est de constater le retard considérable que connaît le versement des fonds du programme LEADER, ce qui met en difficulté de nombreux porteurs de projets locaux et les projets eux-mêmes.
Si les conseils régionaux sont devenus l’autorité de gestion de ces fonds, des retards et des blocages sont toujours très présents. L’Agence des services de paiement, l’ASP, est confrontée à des complications récurrentes, en particulier du fait de son outil informatique, et trop peu de moyens semblent attribués aux services instructeurs.
Le risque qui se dessine maintenant est de devoir restituer les crédits qui n’auraient pas été consommés. Le constat actuel est déjà très alarmant : la dynamique de projets s’effrite et leur réalisation incombe complètement aux acteurs locaux, qui disposent d’avances de trésorerie dans certaines régions et recourent aux banques dans d’autres.
Diverses mesures ont été prises pour améliorer la situation, en particulier à la suite de la réunion du comité État-régions de novembre 2016, mais pouvez-vous nous assurer, monsieur le ministre, que cette année sera bien celle de la fin des difficultés du programme LEADER ? Pouvez-vous confirmer qu’il n’y a pas de risque de dégagement d’office des crédits attribués à notre pays ?
Monsieur le sénateur Jean-Jacques Lozach, vous appelez mon attention sur la mise en œuvre du FEADER et le paiement des aides de la mesure LEADER – Liaison entre actions de développement de l’économie rurale. Ce sujet est très important pour de nombreux bénéficiaires et acteurs du monde rural, en particulier dans votre département, la Creuse, et pour le groupe d’action locale Sud-Ouest Creuse Leader que vous côtoyez dans votre circonscription.
Le taux d’engagement national du FEADER atteint 43 % et le taux de paiement 30 %. La France se situe ainsi au treizième rang européen en termes de paiement sur les crédits FEADER – devant l’Allemagne, l’Italie et l’Espagne – et au-dessus de la moyenne européenne. Le rythme soutenu des paiements permet d’exclure tout risque de dégagement d’office à la fin de 2018 pour une très large majorité de programmes.
La France est le premier pays en volume de paiements, ce qui démontre la capacité de l’État, des conseils régionaux et de l’ASP à se mobiliser collectivement, certes après un démarrage très difficile de la programmation 2014-2020.
Plusieurs facteurs ont fortement ralenti le déploiement du FEADER. Le cadre réglementaire n’a été mis à disposition des acteurs que tardivement, y compris en ce qui concerne l’adoption du régime-cadre des aides d’État. L’organisation institutionnelle française a été modifiée à la suite de la décentralisation de la gestion aux conseils régionaux, à laquelle est venue s’ajouter la fusion de certains territoires, tant au niveau régional – je pense à la création de grandes régions à la fin de 2015 – qu’intercommunal. Enfin, le déploiement des outils informatiques de gestion ISIS et OSIRIS a été difficile.
En ce qui concerne LEADER, les conseils régionaux ont sélectionné 340 groupes d’action locale couvrant une large part du territoire et 91 % des conventions sont désormais signées.
Je souhaite vous rappeler que les missions d’instruction des dossiers LEADER sont assurées, dans la plupart des régions, par les conseils régionaux avec l’appui, comme en Limousin, des animateurs des groupes d’action locale LEADER eux-mêmes.
Aujourd’hui, il me semble préférable de chercher ensemble les moyens d’instruire plus vite les dossiers. Cela peut passer par la formation, le recrutement d’instructeurs supplémentaires financé par l’assistance technique du FEADER, la simplification des dispositifs, mais aussi l’élaboration par les conseils régionaux de manuels de procédure, qui sont exigés par la réglementation européenne.
Monsieur le sénateur, la situation est en train de s’améliorer au niveau national. L’ASP, à laquelle nous avons donné de nouveaux moyens dans le cadre de la loi de finances pour 2018, et les autorités de gestion espèrent un rattrapage de l’exécution budgétaire dans les mois à venir, puisque les outils sont presque tous opérationnels et leurs services totalement mobilisés sur ce sujet.
Je vous remercie, monsieur le ministre, pour votre réponse et vos propos qui se veulent rassurants.
Il est vrai que, parmi les différents textes relatifs à l’organisation territoriale de la République adoptés ces dernières années, un certain nombre suscite plus d’attentes et d’espérances que d’autres – je pense en particulier au transfert de la gestion des fonds européens au bénéfice des conseils régionaux.
Force est de constater que nous sommes dans une période de transition et qu’il reste encore beaucoup de dossiers à traiter et de financements à apurer.
Or, cette question est très importante pour l’idée même que la population et les porteurs de projets, publics et privés, se font de l’Europe. Celle-ci doit être proche de la réalité des gens. C’est ce qui est en jeu ici !
La parole est à M. François Bonhomme, auteur de la question n° 0210, adressée à M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ma question porte sur le devenir des zones défavorisées du département de Tarn-et-Garonne et sur les dispositifs d’accompagnement annoncés par le Gouvernement pour soutenir les agriculteurs tarn-et-garonnais.
Monsieur le ministre, vous le savez, l’avenir agricole du Tarn-et-Garonne repose en grande partie sur les aides compensatoires autorisées par le statut des zones défavorisées. Ce statut se révèle essentiel au maintien de nombre d’exploitations familiales du département, qui sont sujettes à des handicaps naturels.
Le Tarn-et-Garonne se caractérise en effet par des exploitations de polyculture-élevage et de polyculture diversifiée, qui exploitent et valorisent des zones à potentiel limité et à relief accidenté. La taille du parcellaire y est très modérée : d’une surface inférieure à 4 hectares en moyenne, elle engendre des surcoûts significatifs, mais autorise, sur le plan environnemental, une biodiversité accrue.
Les critères de diversité des cultures, de taille des parcelles et de pourcentage des exploitations comportant des haies traduisent bien les contraintes de gestion des terres. Or, sans gestion des terres, il n’y a pas d’entretien du paysage rural.
En outre, les zones de transition entre coteaux et vallées, où l’élevage est présent, méritent d’être prises en compte dans les zones défavorisées. Le critère de rendement départemental de blé tendre traduit, quant à lui, les fortes contraintes subies par les agriculteurs de ces territoires.
Monsieur le ministre, le projet de zonage divulgué le 20 décembre 2017 menaçait d’exclure des aides européennes de nombreuses communes tarn-et-garonnaises jusqu’alors éligibles. Vous le savez, des données erronées avaient été prises en compte, mais vous avez modifié les choses, en intégrant des corrections issues des réunions de travail avec les représentants agricoles.
La carte présentée le 20 février dernier aux membres du comité de pilotage national de la réforme des zones défavorisées simples porte le nombre de communes classées à 14 000 contre 13 984 dans le projet de carte présenté le 9 février. Le nombre de communes sortantes est, quant à lui, porté à 1 349 communes au lieu de 1 401 dans la carte du 9 février.
Vous vous êtes engagé à mettre en place un dispositif d’accompagnement qui doit se matérialiser, entre autres, par l’élaboration de diagnostics territoriaux sur le nombre de bénéficiaires sortants et la typologie de leurs situations et de leurs difficultés. La mise en place d’un groupe réunissant des représentants de l’État et des régions afin d’identifier les outils mobilisables et adaptés a également été annoncée.
Monsieur le ministre, je souhaite connaître les dispositifs d’accompagnement envisagés par le Gouvernement. Quels sont vos engagements en la matière ?
Monsieur le sénateur François Bonhomme, vous appelez mon attention sur la réforme des zones défavorisées simples, les ZDS. Je sais que ce sujet est important dans votre département et, depuis la publication des premières données cartographiques, nous avons beaucoup travaillé pour améliorer la situation.
Nul besoin de vous rappeler toute l’histoire : ces ZDS ont été définies en 1976 et la Commission européenne comme la Cour des comptes européenne demandent leur révision depuis 2003. Nous nous retrouvons donc à gérer ce dossier qui avait été mis sous le tapis pendant bien longtemps. La révision était donc complètement nécessaire.
Des discussions ont été engagées en 2016 par mon prédécesseur avec les professionnels agricoles et les conseils régionaux afin d’établir ce nouveau zonage. Plus de 120 simulations ont été faites. Dans votre département, 180 communes étaient classées jusqu’à présent et, à partir de 2019, elles seront encore 150.
Vous le savez, aucune des 120 hypothèses de travail explorées depuis deux ans ne permettait d’aller au-delà. Je sais que certains acteurs contestent la validité des référentiels et des analyses de sols qui ont permis d’établir les simulations.
Je rappelle que ces référentiels ont été constitués à partir des prélèvements effectués depuis plus de trente ans par les chambres d’agriculture et l’Institut national de la recherche agronomique ; ils répondent à des cahiers des charges et à des normes européennes très précises. En outre, ils ont été soumis à des pédologues indépendants avant d’être enfin validés par l’IGCS – l’inventaire de gestion et de conservation des sols. Chacune des vérifications réalisées à la suite des diverses sollicitations reçues a confirmé la robustesse des données dont dispose la France.
La carte du 20 février 2018 constitue désormais la base de travail pour entamer les discussions avec la Commission européenne, notamment en ce qui concerne l’application d’un critère de continuité territoriale, qui pourrait permettre à certaines communes de réintégrer le zonage. Il s’agit donc maintenant pour nous d’engager ce travail avec la Commission européenne.
J’ai bien conscience que les éleveurs qui sortent du classement en zone défavorisée simple sont en attente de solutions et je me suis engagé à leur en apporter. Ce matin, avant de venir au Sénat, j’ai réuni les directeurs régionaux de l’agriculture et de la forêt et nous allons mobiliser des groupes de travail territoriaux pour porter des projets de transformation et analyser la situation individuelle des agriculteurs concernés. Le nombre de ces agriculteurs n’est lui-même pas encore connu, puisqu’il dépend du recensement général agricole de 2010 ; les choses méritent donc d’être affinées.
Nous allons mettre en place un accompagnement grâce au grand plan d’investissement que nous avons annoncé, mais aussi par des mesures sur lesquelles nous allons travailler avec les professionnels et les élus, en particulier les conseils régionaux.
Monsieur le ministre, je prends acte de vos propos et je reconnais bien volontiers que vous avez eu fort à faire pour traiter ce dossier, qui avait été mis sous le tapis et qui constituait une forme de saut dans le vide. Vous avez apporté des corrections qui sont significatives, il faut également le reconnaître.
Pour autant, il reste, dans mon département, entre 25 et 30 communes qui attendent un dispositif d’accompagnement réel. Je souhaite simplement que vous ne proposiez pas une simple pommade ou un sédatif profond, mais des principes actifs qui permettent à ces communes d’envisager l’avenir.
Je remercie M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation de sa présence et de ses réponses.
La parole est à Mme Florence Lassarade, auteur de la question n° 0175, adressée à M. le ministre de la cohésion des territoires.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ma question porte sur l’injustice résultant de l’abandon de certains territoires ruraux non éligibles aux bénéfices de la politique de la ville.
La commune de Castillon-la-Bataille, en Gironde, est l’une des communes les plus pauvres de la Nouvelle-Aquitaine : plus de 25 % d’allocataires du RSA, un taux de chômage de 27 % et plus de 50 % de la population vivant en dessous du revenu médian de 11 250 euros par an.
Elle est pourtant exclue par l’État du périmètre d’intervention de la géographie prioritaire de la politique de la ville. En effet, Castillon-la-Bataille appartient à une unité urbaine de moins de 10 000 habitants et ne répond pas aux critères légaux et réglementaires retenus pour être éligible à la politique de la ville.
Il y aura donc désormais deux sortes de citoyens dans notre pays : les citoyens pauvres vivant dans des aires urbaines de plus de 10 000 habitants, qui pourront bénéficier des aides de l’État et de la mobilisation des acteurs publics dans le cadre de la politique de la ville et, à côté, les citoyens pauvres de la ruralité, exclus des politiques publiques, privés de moyens.
En toute logique, une politique de la ville reposant sur le critère de la pauvreté devrait se traduire par une égale prise en charge des plus pauvres. Or, on assiste à une relégation des zones rurales. Ce n’est pas acceptable.
Afin de faire cesser cette injustice, monsieur le ministre, j’aimerais savoir quelles mesures le Gouvernement entend mettre en œuvre pour prendre en compte ces territoires ruraux en grande difficulté et qui sont situés en « zone grise » des politiques de l’aménagement du territoire.
Madame la sénatrice, Castillon-la-Bataille est célèbre depuis 1453, lorsque les troupes de Charles VII ont bouté les Anglais hors de la Guyenne.
Castillon-la-Bataille est une commune de 3 070 habitants : je veux bien que vous fassiez le rapprochement avec la politique de la ville, mais cela me paraît tout de même un peu délicat…
Cette commune mène aujourd’hui une bataille en vue de trouver des concours financiers, puisque nombre de vos collègues parlementaires de la Gironde sont déjà intervenus pour me signaler la situation particulière de cette commune particulière…
J’ai d’ailleurs reçu personnellement le maire de Castillon-la-Bataille – c’est vous dire l’intérêt que porte le Gouvernement à la situation de cette commune historique. Vous serez d’accord avec moi pour dire que ni le Gouvernement ni le maire actuel, qui n’a accédé à cette responsabilité qu’en 2014, ne sont responsables de cette situation.
Bien évidemment, le Gouvernement sera attentif à la situation de Castillon-la-Bataille et j’ai demandé au maire de me faire parvenir les projets de sa commune afin d’évaluer dans quelle mesure nous pouvions l’aider, par exemple via la dotation d’équipement des territoires ruraux – DETR – ou la dotation de soutien à l’investissement local – DSIL. J’attends de recevoir ces informations avant de me prononcer.
Je rappelle aussi que Castillon-la-Bataille est à treize kilomètres de Saint-Émilion. Autant dire que ce n’est pas forcément le territoire le plus malheureux de notre nation !
Je veux bien que l’on utilise les problèmes d’une commune pour en faire une référence nationale en matière de territoires ruraux, des territoires ruraux que je connais trop bien pour vous laisser affirmer qu’ils seraient tous abandonnés, en situation difficile. Je dirai, pour conclure, que ce n’est pas en répétant que les territoires ruraux sont dans la désespérance qu’on va les renforcer ! Ce n’est pas en tenant de tels propos qu’on va convaincre leurs habitants d’y rester et en persuader d’autres de revenir !
Je vous remercie de votre réponse, monsieur le ministre. J’ai bien noté l’intérêt que vous portez à cette ville de Castillon-la-Bataille. Ce que je veux souligner, c’est que, au-delà de ce cas particulier, d’autres communes sont en cause.
J’ai passé la semaine dernière en Gironde où j’ai rencontré de nombreux maires de communes moyennes et rurales. Ils se sentent totalement orphelins de l’État et des politiques publiques. J’espère que vous prendrez quand même en compte ces pauvres ruraux. S’ils ne sont pas des pauvres urbains, ils ont quand même besoin de votre considération !
Il est évident que la façon dont ces politiques sont menées conduit à un rejet du monde politique en général, assorti d’une attirance vers les extrêmes, ce que nous essayons d’éviter.
La parole est à M. Dominique Théophile, auteur de la question n° 0249, adressée à Mme la ministre du travail.
Monsieur le président, mes chers collègues, je souhaite aujourd’hui alerterMme la ministre du travail – entre autres ! – sur un sujet qui touche de plein fouet notre société.
Malgré la loi Roudy du 13 juillet 1983 sur la parité, les femmes touchent aujourd’hui un salaire inférieur de plus de 9 % à celui des hommes. Pourquoi cette situation ? Tout simplement parce que la loi ne prévoit pas de sanction pénale pour les employeurs qui n’accordent pas l’égalité de salaire entre hommes et femmes.
De même, le code du travail, dans la section intitulée « Plan pour l’égalité professionnelle » engage seulement à prendre des mesures censées assurer l’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes, sans préciser comment l’égalité salariale peut être concrètement mise en place. Les stéréotypes concernant la prétendue moindre efficacité des femmes dans le monde du travail persistent malgré la réponse légale. Une situation consternante pour notre société qui promeut l’égalité entre tous ses citoyens !
À ce titre, je me félicite du plan d’action mené par Mme la ministre du travail, ainsi que Mme la secrétaire d’État chargée de l’égalité entre les femmes et les hommes, Marlène Schiappa, visant à supprimer la différence de traitement entre les hommes et les femmes, à compétences égales. Mme la ministre a déjà annoncé une plus grande transparence dans les indicateurs sur la situation comparée des hommes et des femmes publiés par les entreprises.
Cependant, je m’interroge sur l’application et l’efficacité de ce plan afin que les progrès prévus se concrétisent. Ma question sera donc la suivante : pouvez-vous détailler les mesures prises dans ce plan pour supprimer l’inégalité salariale entre hommes et femmes ?
La parole est à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères, que je salue.
Monsieur le sénateur Dominique Théophile, vous soulevez un problème qui est en effet récurrent. Au cours de cette semaine, qui revêt un caractère particulier, nous devons, au-delà des colloques et des actions symboliques, réfléchir à des actions concrètes.
Il est vrai que le code du travail impose par principe aux employeurs de respecter une égalité de rémunération stricte entre les femmes et les hommes pour un même travail, mais également pour un travail de valeur égale, c’est-à-dire ne correspondant pas forcément à l’exercice de fonctions similaires, mais à des niveaux d’expérience et de responsabilités comparables.
Le fait de méconnaître ces dispositions est d’ailleurs puni d’une amende de cinquième classe, dont le montant peut aller jusqu’à 1 500 euros par salariée concernée, un montant qui peut poser question si l’on veut que la loi soit effectivement respectée. Quoi qu’il en soit, la réflexion mérite d’être ouverte.
En outre, vous le savez, les entreprises de plus de cinquante salariés doivent absolument disposer d’accords et de plans d’action relatifs à l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes. La rémunération effective est la thématique qui doit obligatoirement figurer dans ces plans. À défaut, des pénalités financières susceptibles d’aller jusqu’à 1 % de la masse salariale peuvent être déclenchées. Tel est d’ailleurs le cas. Le taux moyen constaté de pénalité est de 0, 52 % de la masse salariale. J’ajoute que deux tiers des mises en demeure ont permis la régularisation de la situation de l’entreprise au regard de ses obligations. Dans les autres cas, les pénalités sont prononcées.
Toutefois, vous l’avez souligné, monsieur le sénateur, malgré le cadre juridique existant, les inégalités persistent et elles sont inacceptables, intolérables. De nombreux facteurs contribuent à les expliquer : les femmes sont plus nombreuses à occuper un emploi à temps partiel et à travailler dans certaines professions moins bien rémunérées. L’on ne peut cependant pas se satisfaire de cette observation statistique, il faut agir.
Le Gouvernement prépare actuellement un plan ambitieux de lutte contre les inégalités salariales. Muriel Pénicaud et Marlène Schiappa y travaillent d’arrache-pied. Les suggestions et propositions du Parlement seront également les bienvenues. Ce plan est en cours de finalisation. S’il ne m’appartient pas d’en révéler tous les arbitrages, sachez que le Gouvernement a ce sujet à cœur. Nous partageons, me semble-t-il, une même ambition. Je connais votre engagement sur ce sujet important et vous remercie d’avoir attiré à ce propos l’attention du Gouvernement et, au-delà, de l’ensemble de la population.
Nous attendrons la déclinaison du plan et ferons des propositions au moment qui nous paraîtra opportun.
La parole est à M. Yannick Botrel, auteur de la question n° 0208, adressée à M. le ministre de l’Europe et des affaires étrangères.
Monsieur le secrétaire d’État, ma question porte sur la situation fiscale des « Américains accidentels » bénéficiant d’une double nationalité franco-américaine. Ils le doivent aux circonstances, en raison d’une naissance sur le sol américain où ils n’ont parfois jamais résidé.
Très souvent, les personnes dans cette situation n’ont jamais usé de leur nationalité américaine et se voient pourtant appliquer, comme tout citoyen américain, le principe de la Citizen based taxation. Ainsi, il leur faut déclarer leurs revenus auprès de l’administration fiscale américaine. L’application de ce principe a été renforcée depuis la promulgation de la loi dite « FATCA », pour Foreign Account Tax Compliance Act.
L’objectif de ce texte est louable puisqu’il s’agit de lutter contre l’évasion fiscale des Américains vivant à l’étranger et omettant de déclarer leurs revenus auprès de l’administration fiscale américaine.
La France est également confrontée à cette problématique et il apparaîtrait malvenu de contester le bien-fondé de l’objectif.
Néanmoins, en l’espèce, l’application de cette loi a mis dans des situations inextricables de nombreux « Américains accidentels », qui n’ont aucun lien avec les États-Unis, soumettant ces personnes à une obligation de régularisation vis-à-vis de l’administration fiscale américaine, et ce sous peine de se voir « expulsés » par leur établissement bancaire ici même en France.
De plus, la procédure de renoncement à la nationalité américaine implique une mise en conformité fiscale préalable et le paiement d’une taxe qui rend ce processus très coûteux, voire difficilement atteignable pour ceux qui souhaiteraient l’entamer. Dans les deux cas, cela représente des sommes souvent extrêmement importantes pour les personnes concernées.
Le 5 octobre 2016, un rapport parlementaire a proposé des pistes de résolution de cette difficulté, en favorisant notamment une action diplomatique pour le vote d’une disposition législative américaine ad hoc afin d’obtenir un traitement dérogatoire pour les « Américains accidentels », disposition qui leur permettrait, soit de renoncer à la citoyenneté américaine par une procédure simple et gratuite, soit d’être exonérés d’obligations fiscales.
De plus, une association représentant les intérêts des « Américains accidentels » a saisi le Conseil d’État.
Ainsi, monsieur le secrétaire d’État, je souhaiterais connaître les intentions et la position du Gouvernement en la matière.
La parole est à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères.
Monsieur le sénateur Yannick Botrel, vous avez parfaitement résumé la situation, qui est kafkaïenne pour ceux qui la vivent.
Comme vous le savez, en matière de fiscalité, les États-Unis reconnaissent le principe de l’imposition sur la base de la citoyenneté, laquelle peut s’acquérir par la seule naissance sur le sol américain.
Les citoyens français qui ont aussi la nationalité américaine sont tenus, en principe, par le droit américain de procéder à une déclaration de leurs revenus auprès des services fiscaux américains et d’acquitter, le cas échéant, les impôts dus.
L’accord intergouvernemental FATCA, que la France a signé en 2013 et qui est entré en vigueur en 2014, vise à lutter contre l’évasion fiscale. Vous l’avez dit, l’objectif en lui-même ne peut pas être contestable. Il instaure néanmoins un certain nombre d’obligations qui peuvent poser problème, ce qui a d’ailleurs conduit un certain nombre de citoyens français, « Américains accidentels », à se fédérer, portant à la connaissance des uns et des autres toutes les difficultés rencontrées.
Toutefois, la convention fiscale bilatérale de 1994 entre la France et les États-Unis vise à éviter ces doubles impositions. Ce n’est que dans les cas où l’impôt français est inférieur à celui qui est dû aux États-Unis ou quand certains revenus ne sont pas imposés de façon effective en application du droit fiscal français, mais sont taxables selon la législation des États-Unis, qu’une imposition complémentaire pourrait être demandée par les autorités fiscales américaines.
Néanmoins, au regard des difficultés très pratiques rencontrées dans la vie quotidienne par un certain nombre d’« Américains accidentels », le ministère de l’Europe et des affaires étrangères a sollicité toute l’attention des autorités américaines. Nous le faisons également dans un cadre européen. Un courrier a été adressé au secrétaire au Trésor américain par la présidence de l’Union européenne appelant son attention sur toutes ces difficultés concrètes.
Nous avons notamment proposé qu’une renonciation facilitée à la nationalité américaine puisse avoir lieu. Il s’agit de rendre cette renonciation plus simple et moins coûteuse eu égard au fait qu’il faut, en principe, s’acquitter des impôts dus avant de pouvoir renoncer. Nous travaillons à ce type de dispositif, étant entendu que les conditions d’octroi ou de retrait de la nationalité relèvent évidemment de la compétence souveraine et exclusive des États-Unis.
J’implore votre clémence, monsieur le président, pour donner une ultime information à votre collègue, lui indiquant que le Gouvernement exerce également sa vigilance pour s’assurer de la possibilité pour ces « Américains accidentels » d’avoir accès à un compte bancaire. En effet, il est arrivé que certaines banques sortent en quelque sorte le parapluie. Nous rappelons donc, à cette occasion, que ces personnes doivent bénéficier d’un compte et peuvent, le cas échéant, utiliser les procédures de recours devant la Banque de France pour contraindre un établissement bancaire d’accepter l’ouverture d’un compte. En tous les cas, le combat continue pour trouver une solution très concrète et pratique à ces difficultés.
Je remercie M. le secrétaire d’État de sa réponse très complète. Je prends acte des intentions du Gouvernement qu’il vient d’exprimer.
Vous avez utilisé un mot que je reprends à mon compte. Vous avez parlé de situation kafkaïenne, pour ne pas dire ubuesque. Il est vrai que ces personnes, probablement peu nombreuses, se trouvent confrontées à une situation qui les dépasse complètement et qui ne correspond pas du tout à leur vécu. Ces gens sont des citoyens français. Comme ils travaillent et payent leurs impôts en France, ils ne comprennent absolument pas ce qui leur arrive.
Je vous remercie, monsieur le secrétaire d’État, de votre réponse. Nous suivrons, bien entendu, cette affaire avec attention pour voir comment le Gouvernement parvient à trouver une solution réglant définitivement ce problème épineux.
La parole est à M. Rémy Pointereau, auteur de la question n° 0226, adressée à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics, que je salue.
Monsieur le secrétaire d’État, ma question porte sur le recrutement et la gestion des agents non titulaires par les collectivités locales, particulièrement dans le cadre des plus petites communes.
Comme vous le savez, les agents non titulaires sont des agents publics qui ne sont pas fonctionnaires. Leur recrutement s’effectue sans concours et n’entraîne pas leur titularisation, sauf disposition expresse.
Le recrutement d’un agent non titulaire se fait donc par contrat soumis au contrôle de légalité, sauf pour ce qui concerne les recrutements effectués sur la base d’un accroissement temporaire ou saisonnier d’activité.
Depuis la loi du 12 mars 2012 relative à l’accès à l’emploi titulaire et à l’amélioration des conditions d’emploi des agents contractuels dans la fonction publique, le dispositif de recrutement des agents non titulaires est ouvert aux contrats à durée indéterminée, CDI, introduit par la loi n° 2005-843 du 26 juillet 2005.
Ainsi, les communes peuvent permettre à leurs agents non titulaires de décrocher un CDI. Toutefois, cette « CDIsation » n’est permise que sous certaines conditions : parmi celles-ci figure la règle des six années de contrats à durée déterminée, CDD, exercés dans la même collectivité.
Toutefois, les années de service public ne comptabilisent pas les services assurés dans le cadre d’une mise à disposition par le centre départemental de gestion, de contrats aidés, ni les CDD pour des missions de remplacement, d’activités saisonnières ou de renfort.
Cette rigidité comptable empêche de nombreux agents contractuels de jouir d’un CDI leur permettant de sortir d’une situation précaire qui leur fait obstacle pour accéder à des choses aussi essentielles qu’un emprunt pour la rénovation ou l’acquisition d’un bien meuble ou immeuble, par exemple.
Aussi, je souhaite vous interroger sur la nécessaire révision de la comptabilisation de ces six années de CDD. Ne peut-on pas permettre à la commune de comptabiliser, dans ces six années, les activités de remplacement temporaire ou issues de contrats aidés, et octroyer ainsi plus facilement des CDI ?
Il s’agit d’apporter plus de souplesse dans la délivrance de CDI au sein de la fonction publique territoriale, une souplesse qui s’inscrit finalement dans le droit fil de la volonté du Gouvernement, laquelle consiste à augmenter la part de contractuels dans la fonction publique, notamment territoriale.
La parole est à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics.
Monsieur le sénateur Rémy Pointereau, la loi du 12 mars 2012, dite loi Sauvadet, a revu les conditions du passage d’un contrat à durée déterminée à un contrat à durée indéterminée dans la fonction publique. L’article 3-4 de la loi du 26 janvier 1984 ainsi modifiée portant statut de la fonction publique territoriale précise désormais les services pris en compte pour l’appréciation de la condition d’ancienneté requise afin de pouvoir bénéficier d’un CDI.
Ces dispositions statutaires prévoient qu’un agent contractuel qui occupe de manière permanente un emploi permanent sur la base de l’article 3-3 de la loi du 26 janvier 1984 peut bénéficier d’un CDI au bout de six années, comme vous l’indiquez.
Pour l’appréciation des six années de service, sont comptabilisés l’ensemble des services effectués auprès de la même collectivité ou du même établissement public sur le fondement des articles 3 à 3-3 de la loi statutaire.
A contrario de ce que vous indiquez dans votre question, je veux vous apporter les précisions suivantes : sont ainsi pris en compte les contrats sur emploi non permanent pour faire face à un accroissement temporaire ou saisonnier d’activité, les contrats de remplacement d’un fonctionnaire momentanément indisponible, les contrats pour faire face à une vacance temporaire d’emploi dans l’attente du recrutement d’un fonctionnaire, les contrats pour occuper de manière permanente des emplois permanents lorsqu’il n’existe pas de cadre d’emplois de fonctionnaires correspondant, pour les emplois de catégorie A, sous réserve qu’aucun fonctionnaire n’ait pu être recruté, et pour certains emplois des plus petites collectivités.
L’article 3-4 précise expressément que les services accomplis dans cette même collectivité, par mise à disposition du centre de gestion, sont également pris en compte.
En revanche, les services accomplis sur la base d’un contrat aidé ne sont pas, quant à eux, pris en compte. En effet, les contrats aidés sont des contrats de droit privé, destinés à accompagner l’insertion des personnes éloignées de l’emploi. À ce titre, le service horaire de ces agents peut être réduit, de même qu’ils bénéficient d’une formation et d’un tutorat particuliers.
Il faut le rappeler, les personnes recrutées en contrat aidé n’ont pas vocation à occuper un emploi permanent de la collectivité. C’est la raison pour laquelle, contrairement à tous les autres, les services effectués à ce titre ne sont pas pris en compte.
Le Premier ministre a indiqué, le 1er février dernier, lors du premier comité interministériel de la transformation publique, les axes de réflexion issus des travaux engagés dans le cadre du programme Action publique 2022. L’un d’eux est dédié aux assouplissements des conditions de recours au contrat. La contribution des associations nationales d’élus et de collectivités à cette réflexion sera déterminante.
Tel est le sens de la mission de modernisation de la fonction publique territoriale que le Premier ministre m’a confiée et pour laquelle j’aurai l’occasion de faire un point d’étape lors de la prochaine Conférence nationale des territoires, en ayant en tête les réflexions qui sont les vôtres.
Je vous remercie, monsieur le secrétaire d’État, de votre réponse qui, pour le moment, ne satisfait pas à tous nos souhaits. En effet, comme vous l’avez dit, les contrats aidés ne sont pas pris en compte pour passer à un CDI.
Je vous rappelle que nos collectivités locales, notamment les petites communes, n’ont plus, en raison de la baisse des dotations, les moyens de financer la titularisation des stagiaires.
Ma demande est complètement cohérente avec la position du Gouvernement. Je ne comprends pas qu’il fustige les communes parce qu’elles augmentent leurs effectifs de fonctionnaires, d’une part, mais rigidifie les possibilités d’emplois non titulaires dans la fonction publique territoriale, d’autre part.
Je souhaite que l’on introduise un peu plus de souplesse dans la possibilité pour nos petites communes de conclure des CDI.
En tant que maire, j’ai vécu cette situation un peu particulière qui nous confronte à des agents non titulaires investis et motivés. Ils nous demandent de les aider à obtenir un CDI et nous ne sommes pas en mesure de leur donner satisfaction. Je souhaite que nous puissions, dans un proche avenir et grâce à vos propositions, répondre à cette demande pressante de nos communes rurales.
La parole est à M. Yves Daudigny, auteur de la question n° 0197, adressée à M. le ministre de l’économie et des finances.
Monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, ma question a trait aux dispositifs fiscaux applicables aux professionnels de santé regroupés en maison de santé pluridisciplinaire labellisée par les autorités régionales de santé.
Les maisons de santé pluriprofessionnelles, les MSP, offrent des conditions d’exercice susceptibles de répondre aux aspirations des praticiens, notamment les plus jeunes, du fait du travail en équipe et de la mutualisation des moyens. Leur nombre est passé d’une vingtaine en 2008 à 910 en 2017. Elles permettent ainsi, et c’est l’essentiel, d’améliorer l’offre de soins primaires dans les zones sous-dotées.
Ces projets bénéficient de dispositifs publics d’aide à l’investissement. Ils sont toutefois lourds à monter, leur succès repose sur la rencontre entre l’engagement d’un praticien et celui d’une collectivité, donc, sur la confiance.
Or un doute subsiste sur le traitement fiscal dont sont redevables certains professionnels de santé. Je pense notamment à ceux qui sont déjà en activité dans une commune située en ZRR et qui auraient rejoint ou créé une MSP, édifiée au sein de la même commune, avant le 1er janvier 2016. L’administration fiscale du département de l’Aisne leur refuse la faveur de l’exonération prévue par l’article 44 quindecies du code général des impôts.
La direction générale des finances publiques considère que le transfert d’une activité médicale au sein d’une maison de santé située dans la même commune s’analyse comme une reprise par soi-même, exclue du dispositif d’exonération, car le professionnel de santé conserve une partie de sa patientèle.
Telle n’est pas, semble-t-il, monsieur le secrétaire d’État, l’analyse faite par l’administration fiscale dans d’autres départements.
Telle n’est pas non plus l’analyse issue du rapport d’information n° 468 de MM. Jean François-Poncet et Claude Belot, fait au nom de la délégation à l’aménagement du territoire du Sénat et intitulé Le nouvel espace rural français.
Telle n’est pas davantage l’analyse qui leur avait été délivrée par le site de la délégation à l’aménagement du territoire et à l’action régionale, la DATAR.
Aussi, face à cette situation, de nombreux professionnels de santé se voient pris à revers sur leur fiscalité professionnelle au terme de plusieurs exercices.
J’en viens à ma question : monsieur le secrétaire d’État, quel est le dispositif fiscal applicable pour les professionnels de santé intégrant, au 1er janvier 2015, une MSP localisée en ZRR ? Ceux-ci sont-ils susceptibles de bénéficier d’une exonération d’impôt sur les bénéfices au vu de l’article 44 quindecies du code général des impôts ou d’un autre texte ?
L’application promise de cette exonération a contribué, dans un département en grande difficulté économique et sociale, à l’efficacité des dispositifs de lutte contre les déserts médicaux. Il serait aujourd’hui particulièrement injuste de la remettre en cause.
La parole est à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics.
Monsieur le sénateur Yves Daudigny, vous avez attiré l’attention du Gouvernement sur la situation des professionnels de santé qui se regroupent au sein d’une commune dans des maisons de santé pluriprofessionnelles, au regard du dispositif d’allégement d’impôt sur les bénéfices dans les zones de revitalisation rurale, les ZRR.
Je veux vous apporter les précisions suivantes : l’article 44 quindecies du code général des impôts prévoit une exonération de cinq ans d’impôt sur le revenu ou d’impôt sur les sociétés, puis l’application d’un abattement dégressif pour les trois années suivantes, au profit des entreprises qui sont créées ou reprises dans les ZRR jusqu’au 31 décembre 2020.
Ce dispositif a été instauré par la loi de finances pour 2011 non seulement pour favoriser le développement économique et l’emploi des territoires ruraux en difficulté, mais aussi pour faciliter la cession des entreprises existantes. Ainsi, il s’applique notamment aux professionnels de santé qui s’implantent pour la première fois en ZRR ou reprennent le cabinet d’un confrère situé en ZRR, sous réserve de n’avoir jamais bénéficié auparavant d’aucun autre dispositif d’allégement fiscal.
En revanche, lorsqu’un professionnel de santé déjà implanté en ZRR décide de déplacer son cabinet médical ou de se regrouper avec d’autres praticiens dans une maison de santé pluriprofessionnelle sans changer de commune, en restant donc dans la même ZRR, cette démarche s’analyse comme la simple poursuite de l’activité réalisée dans l’établissement en ZRR. À ce titre, le professionnel ne peut prétendre à une nouvelle période de cinq ans d’exonération. Néanmoins, si ce dernier bénéficiait déjà du dispositif de faveur avant le déménagement ou le regroupement au sein de la maison de santé, le régime d’exonération entamé n’est pas remis en cause. Il se poursuivra pour les années restant à courir.
Je vous remercie, monsieur le secrétaire d’État, des précisions que vous avez bien voulu apporter et qui étaient, pour leur plus grande part, largement connues.
Je souhaiterais, monsieur le secrétaire d’État, que le débat ne soit pas définitivement clos à l’issue de cette question. En effet, des professionnels de santé consultent des sites internet tout à fait sérieux – d’origine gouvernementale ou sénatoriale. Ils peuvent y lire : « A été instaurée une exonération d’impôt sur les bénéfices et de taxe professionnelle, lors de la création de l’entreprise. Il en va de même pour les professionnels de santé en cas de regroupement d’activités en ZRR. »
Monsieur le secrétaire d’État, ce que ressentent aujourd’hui ces professionnels, c’est une situation de leurre, de tromperie dont les conséquences sont importantes : inégalités au sein d’une maison pluridisciplinaire de santé, et même injustices, avec de graves conséquences financières et humaines. Il arrive que ces professionnels de santé, qui se sont fortement impliqués pendant plusieurs années dans la création d’une maison de santé pluridisciplinaire, se voient sanctionnés et privés de cet avantage. Or ils doivent assumer des remboursements parfois importants, alors que les collègues nouvellement arrivés dans la même maison, qui ne sont pas impliqués dans sa constitution, bénéficient dudit avantage.
Je souhaite vraiment, monsieur le secrétaire d’État, que vous puissiez, avec vos services, vous pencher à nouveau sur le sujet. Je le souhaite d’autant plus que les informations actuellement en ma possession donnent à penser que les services fiscaux des différents départements de France n’ont pas tous la même analyse que celle que vous avez exposée ce matin.
La parole est à Mme Catherine Troendlé, en remplacement de Mme Christine Bonfanti-Dossat, auteur de la question n° 0232, adressée à M. le ministre de l’économie et des finances.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, c’est avec plaisir que je présente cette question en remplacement de ma collègue Christine Bonfanti-Dossat, car elle porte sur un sujet qui m’est très cher. Elle concerne la situation des services d’incendie et de secours, les SDIS. Vous ne l’ignorez pas, leurs missions opérationnelles ne cessent d’augmenter : une augmentation de 3, 7 % de leurs interventions entre 2015 et 2016, pour atteindre 12 000 interventions par jour, soit une intervention toutes les sept secondes.
Vous ne l’ignorez pas davantage, leur professionnalisme et leur humanité ont permis de bâtir avec les Français une relation de confiance sincère et durable. L’engagement des « soldats du feu » est parmi les plus appréciés de nos concitoyens. Les sapeurs-pompiers continuent de l’assumer avec honneur, bien que le nombre d’agressions dont ils sont victimes augmente – de 17 % en 2016.
Et pourtant, monsieur le secrétaire d’État, la qualité des interventions qu’ils assument – et dont le nombre augmente –, dans un contexte de plus en plus difficile, ne leur épargne pas de fortes tensions budgétaires, liées notamment à la dégradation de la situation financière des conseils départementaux. En 2016, le budget global des SDIS connaît une baisse de 1, 4 % par rapport à 2015, pour atteindre 4, 8 milliards d’euros.
Cette dégradation est appelée à s’amplifier, étant donné que la majorité du parc matériel des SDIS est constituée de véhicules roulants alimentés en carburant diesel et que les augmentations des taxes prévues en 2018 et 2019 sont de nature à impacter fortement ces budgets déjà contraints.
Or certaines professions – les entreprises de collecte de lait, les taxis ou les transporteurs routiers, par exemple – bénéficient de mesures fiscales avantageuses comme l’exonération ou le remboursement partiel de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques, la TICPE.
Les SDIS, lorsqu’ils effectuent des missions opérationnelles d’urgence, pourraient également être exonérés de cette taxe.
En effet, ces équipes, composées à 80 % de sapeurs-pompiers volontaires, font preuve d’un engagement citoyen exemplaire, et demeurent bien souvent le dernier service public de proximité, notamment en milieu rural.
Monsieur le secrétaire d’État, êtes-vous prêt à faire un geste fort en exonérant les SDIS de la TICPE ?
La parole est à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics.
Madame la sénatrice Catherine Troendlé, vous souhaitez, compte tenu de l’augmentation programmée des tarifs de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques, TICPE, applicables aux carburants, que les services d’incendie et de secours, les SDIS, puissent bénéficier d’une exonération de cette taxe pour leurs missions opérationnelles d’urgence étant donné le contexte budgétaire contraint qui est le leur.
Sans méconnaître la qualité exceptionnelle des interventions réalisées par les SDIS, dont les membres sont, pour la plupart, des volontaires – vous l’avez souligné à juste titre –, il n’est pas possible pour le Gouvernement de réserver une suite favorable à votre demande d’exonération.
Vous le savez, le droit européen encadre strictement les possibilités d’exonération de la taxe sur les carburants. Les services d’incendie et de secours ne font pas partie de la liste limitative des possibilités d’exonération arrêtée par le droit communautaire.
Par ailleurs, sur un autre plan, l’augmentation de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques prévue par les lois de finances a pour objet d’affecter, par la hausse du prix des carburants, les consommations de l’ensemble des composantes de la société, y compris les forces armées, les forces de l’ordre, les services publics et les administrations.
Il ne serait donc pas conforme au droit communautaire de réserver une suite favorable à votre demande.
Le Gouvernement est engagé auprès des SDIS, auprès des sapeurs-pompiers, et le ministre d’État, ministre de l’intérieur, a eu l’occasion, au cours des derniers mois, de prendre plusieurs initiatives pour, à la fois, faciliter leur vie, alléger les charges qui pèsent sur eux et participer au renouvellement du matériel – je pense notamment au matériel de lutte contre l’incendie, avec la commande récente de six Canadair.
Il y a un engagement fort, sans faille, du Gouvernement en faveur des SDIS, mais cet engagement ne peut pas aller à l’encontre du droit communautaire qui s’impose en matière d’exonération des taxes sur les carburants.
Monsieur le secrétaire d’État, votre réponse est brutale. Vous me parlez de droit communautaire, mais tous les droits, quels qu’ils soient, peuvent évoluer ! Il suffit pour cela d’une volonté gouvernementale, conjuguée, si nécessaire, avec celle d’autres pays ; si, vraiment, on veut faire avancer le droit communautaire, on peut le faire – on a pu le faire sur d’autres sujets. L’opérationnalité des SDIS est assujettie, de toute façon, à ces nombreux déplacements.
Je veux également vous rappeler, monsieur le secrétaire d’État, que les SDIS suppléent aujourd’hui aux nombreuses carences des services de santé – désertification médicale, SAMU qui n’ont plus les moyens d’intervenir comme il se doit. Pour la santé, le dernier rempart du service public de proximité, ce sont les sapeurs-pompiers.
Vous avez indiqué, il y a quelques instants, qu’il y a de fortes implications budgétaires. Les Canadair, c’est très bien, tout le monde en convient, mais aujourd’hui nous parlons d’un impact financier quotidien pour tous les SDIS. Je tiens à rappeler que ce sont les collectivités qui contribuent de façon très importante au fonctionnement des SDIS, au regard de l’implication de l’État, qui est tout de même moindre.
Je pense que le sujet n’est pas clos, monsieur le secrétaire d’État ; je reprendrai contact avec vous, si vous me le permettez. Je pense qu’il faut absolument faire évoluer le droit communautaire en la matière, et nous pourrions le faire ensemble.
Je remercie M. le secrétaire d’État de sa présence et de ses réponses.
Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à onze heures trois, est reprise à onze heures cinq.
La parole est à M. Loïc Hervé, auteur de la question n° 0171, adressée à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le projet de réforme de la carte judiciaire soulève de vives inquiétudes dans tout le pays – de nombreux collègues partagent, je crois, cette inquiétude –, et particulièrement dans les départements de la Savoie et de la Haute-Savoie.
Si vous affirmez régulièrement, madame la ministre, que votre projet ne supprimera aucune juridiction, les élus locaux, de même que les magistrats, les fonctionnaires et les professions juridiques, s’inquiètent vivement du sort qui sera réservé à la cour d’appel de Chambéry, destinée à fusionner avec celles de Grenoble et de Lyon.
La même inquiétude existe quant au destin de trois de nos tribunaux de grande instance, ceux d’Albertville, de Bonneville et de Thonon-les-Bains. Leur dévitalisation en matière d’activité judiciaire laisse craindre leur suppression à terme, alors que la justice y est aujourd’hui rendue rapidement.
Pacta sunt servanda : ma plaidoirie ne serait pas complète si j’oubliais le droit international public et le traité de Turin, texte qui a donné un certain nombre de garanties à la Savoie au moment où elle devint française. On pourrait considérer cela comme de l’archéologie juridique ; il n’en est rien, et je vous renvoie aux excellents travaux du barreau de Chambéry sur ce point. Les départements de la Savoie et de la Haute-Savoie sont toujours restés, depuis 1860, des territoires frontaliers et des territoires de montagne.
Cela dit, nos départements sont identifiés pour leur dynamisme démographique et économique, en périphérie des métropoles de Lyon, de Grenoble, voire de Genève. Dans ces conditions, un délitement du service public de la justice serait fort préjudiciable à un territoire puissant. Ce serait nier ses besoins, désavouer la performance et l’expertise des juridictions existantes, et négliger les difficultés de déplacement au regard de transports en commun insuffisants et de conditions climatiques et géographiques si spécifiques à la montagne.
Au moment où la survie des territoires intermédiaires et ruraux, en particulier des petites villes, est en jeu, la concentration de toute l’activité dans les seules métropoles constitue la négation même du droit du justiciable à voir traiter son dossier par un magistrat localement compétent et connaisseur des réalités de la vie d’un territoire dans lequel il vit lui-même.
Madame la ministre, envisagez-vous de reconsidérer les schémas d’organisation des juridictions, en discernant les spécificités de chaque territoire, c’est-à-dire en appréciant, entre autres, les distances, les perspectives de développement et les manques de moyens ? Quelles informations rassurantes êtes-vous en mesure de nous apporter ? Comment, dans une telle réforme, comptez-vous associer les élus locaux et les parlementaires au devenir d’un service public aussi essentiel que celui de la justice dans les territoires, a fortiori quand ceux-ci se situent en dehors des principales métropoles du pays ?
Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste. – Mme Martine Berthet, MM. Jean-Pierre Vial et Mathieu Darnaud applaudissent également.
Monsieur le sénateur Loïc Hervé, vous le savez, le Gouvernement a lancé, au mois d’octobre dernier, une large réflexion sur cinq grands chantiers thématiques qui doivent être considérés comme une réforme globale. Ces chantiers portent sur la procédure civile, la procédure pénale, l’efficacité des peines, la numérisation et l’adaptation territoriale de notre réseau de juridictions. Les rapports relatifs à ces cinq chantiers m’ont été remis le 15 janvier dernier ; ils constituent des propositions.
Sur le fondement de ces propositions, j’ai engagé toute une série de concertations avec les organisations représentatives des magistrats, des barreaux, des autres professions du droit, et des élus locaux et nationaux – ce matin encore, je recevais le président de l’Association des régions de France.
Le rapport concernant l’adaptation du réseau des juridictions a été rédigé, vous le savez, par MM. Raimbourg et Houillon. Il conclut à la nécessité de repenser l’architecture de ce réseau pour la moderniser, dans l’intérêt premier de nos concitoyens et des justiciables, que nous n’oublions jamais. En effet – ce ne sont pas que des mots –, ce sont bien les justiciables qui sont au cœur de notre réforme.
La réflexion actuellement menée autour de l’organisation territoriale vise ainsi à satisfaire les intérêts essentiels des justiciables, auxquels on doit garantir un accès à la justice qui soit simple – ce qui veut dire qu’il y aura de puissantes réformes pour garantir la simplicité de l’accès à la justice –, transparent, rapide et direct. Sur la base de ces principes, des évolutions opérationnelles sont envisagées qui devront impérativement concilier l’exigence de proximité, l’efficience des juridictions et, dans certains cas, la spécialisation.
Cette volonté d’évolution du réseau judiciaire, je le répète, ne se traduira en aucun cas par la réduction des effectifs – ce sera même le contraire – ni par la fermeture de sites judiciaires. Je m’étonne ainsi que vous puissiez évoquer la fusion de la cour d’appel de Chambéry avec celles de Grenoble et de Lyon ; il n’est aucunement question de cela.
Le succès de la réforme judiciaire sera conditionné à son ancrage dans la réalité de nos territoires, ce qui se traduira nécessairement par la poursuite des concertations actuellement menées et, bien entendu, par la prise en compte des singularités de chacun de ces territoires.
Je vous remercie, madame la ministre, de ces réponses. J’entends les différents éléments que vous nous apportez.
Néanmoins, notre vigilance ne faiblira pas sur ce sujet. Nous sommes attachés, en pays de Savoie, à une justice très présente dans les territoires – ce sont des territoires, je l’évoquais tout à l’heure, qui sont compliqués.
Mes collègues sénateurs Martine Berthet, Jean-Pierre Vial, Cyril Pellevat, Jean-Claude Carle et moi-même serions demandeurs d’une audience
Mme le garde des sceaux opine.
, pour poursuivre la concertation que vous avez appelée de vos vœux et, visiblement, enclenchée, afin de vous présenter les arguments permettant d’adapter votre réforme dans nos territoires.
Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste. – Mme Martine Berthet, MM. Jean-Pierre Vial et Mathieu Darnaud applaudissent également.
La parole est à Mme Chantal Deseyne, auteur de la question n° 0199, adressée à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.
Ma question s’adresse à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, et porte sur le tribunal de commerce de Dreux, supprimé depuis janvier 2009.
Madame la ministre, les chantiers de la justice, que vous avez lancés le 5 octobre dernier, traduisent la volonté du Gouvernement de transformer la justice de notre pays. Au travers de ces chantiers, notamment de celui qui est consacré à l’adaptation de l’organisation territoriale du réseau des juridictions, on envisage de modifier la carte judiciaire, afin de faciliter l’accès des justiciables aux juridictions.
Les justiciables du tribunal de commerce résidant dans le nord de l’arrondissement de Dreux – Anet, Saint-Lubin-des-Joncherets – doivent parcourir 150 kilomètres pour se rendre au tribunal ou au greffe, à Chartres. Or le tribunal d’instance et le conseil de prud’hommes sont toujours en activité à Dreux, dans le palais de justice. Le greffe de Chartres pourrait ainsi réinstaller sans problème un greffe à Dreux. Cette réouverture faciliterait la prévention des défaillances des entreprises de l’arrondissement le plus industriel du département, du fait de sa proximité avec la région parisienne.
Madame la ministre, je souhaite savoir si vous envisagez de prendre en compte ces considérations et de réinstaller un tribunal de commerce à Dreux.
Merci de votre question, madame la sénatrice Chantal Deseyne. Je ne reprendrai pas le préambule, que j’ai développé précédemment, sur la réflexion qui nous a conduits à envisager une réforme profonde de l’organisation judiciaire.
Simplement, en ce qui concerne l’organisation territoriale des juridictions, je vous rappelle que, à ce stade, celle-ci n’intègre pas de réflexion sur les tribunaux de commerce. Il a d’ailleurs été relevé par MM. Raimbourg et Houillon, qui ont rédigé le rapport sur l’adaptation du réseau des juridictions, que les juridictions commerciales ont des problématiques spécifiques qui supposent une réflexion dédiée.
Je pense également que le cadre de la réforme étudiée actuellement pour les juridictions de première instance de droit commun, qui vise, je le répète, des objectifs de proximité, de spécialisation et de simplification, ne peut pas, en l’état en tout cas, englober ces juridictions spécialisées.
La rationalisation de la carte des juridictions commerciales, entamée en 1999 et poursuivie, vous l’avez dit, en 2005 et en 2008, s’est appuyée sur des critères objectifs : l’activité réduite de la juridiction, ainsi que l’exigence d’une compétence spécifique et d’une pratique suffisante liée à la spécificité et à la technicité de la matière que traitent les tribunaux de commerce.
Pour ce qui concerne précisément le tribunal de commerce de Dreux, ont été pris en compte l’ensemble de ces éléments, auxquels se sont ajoutées des considérations liées à la localisation des chambres de commerce et d’industrie et des barreaux, aux distances, au réseau routier, puisque vous évoquiez ces sujets, et également au nombre de juridictions dans le département au regard des circonscriptions comparables.
Compte tenu de l’ensemble de ces éléments, il n’est pas envisagé, à ce stade, de rouvrir le tribunal de commerce de Dreux.
Je vous remercie, madame le garde des sceaux, de votre réponse, même si elle ne me satisfait pas complètement.
J’entends bien que les juridictions commerciales ne sont pas concernées par la réforme en cours, j’entends aussi votre volonté de rationalisation, mais je pense tout de même que l’on pourrait reconsidérer les tribunaux de commerce. En effet, le temps des chefs d’entreprise est précieux et, au regard de la physionomie des territoires, les expédier à l’autre bout du département n’est pas raisonnable.
La parole est à Mme Françoise Férat, auteur de la question n° 0195, adressée à Mme la ministre auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports, que je salue.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, ma question porte sur le développement de l’activité de fret et de transport de passagers de l’aéroport de Paris-Vatry, dans le département de la Marne, notamment au travers de sa desserte ferroviaire.
J’associe très naturellement mon collègue René-Paul Savary, qui a longtemps porté le dossier de cette plateforme lors de sa présidence du conseil départemental, jusqu’en octobre dernier ; je sais qu’il est toujours passionné par la question.
Il y a quelques semaines, le Gouvernement a pris la décision d’abandonner la construction d’un nouvel aéroport sur le site de Notre-Dame-des-Landes. J’estime que cette décision est une motivation pour relancer le soutien au développement des activités de l’aéroport Paris-Vatry, situé à moins de deux heures de Paris, dernière plateforme construite en France.
À cet égard, l’ambition de l’État pourrait être d’améliorer la desserte ferroviaire actuelle de l’aéroport par un raccordement aux réseaux TER et TGV existants, ainsi que le contrat de plan État-région 2007-2013 en avait retenu le principe. Nous sommes aujourd’hui en 2018, et cette option n’a toujours pas été mise en application. L’État partage cette vision depuis 2013 ; mettons-la conjointement en œuvre désormais.
En effet, en facilitant le transport des personnes et des marchandises, cette infrastructure représenterait un atout majeur de désengorgement des aéroports parisiens et d’attractivité économique pour les logisticiens qui ont aujourd’hui transféré leurs activités sur des aéroports étrangers. Il s’agit, grâce à cet investissement, de rapatrier de l’activité économique en France. En 2017, ce sont 110 000 passagers et 18 000 tonnes de marchandises qui ont transité à Vatry. La Marne est au carrefour de l’Europe, à deux pas du Benelux, de la Suisse et de l’Allemagne, et elle a toutes les capacités de se développer.
Dernièrement, la direction de la sécurité de l’aviation civile nord-est a acté la certification aux normes européennes de sécurité ; l’équipement marnais est « au top », et il le restera longtemps !
Le conseil départemental de la Marne, notamment par l’intermédiaire de son nouveau président Christian Bruyen, est prêt à une étroite collaboration avec les services de l’État et avec les collectivités territoriales partenaires pour concrétiser cette réalisation.
Madame la ministre, je vous demande quelles sont les intentions du Gouvernement dans ce dossier, et comment vous entendez mener ce développement avec les collectivités et les gestionnaires de cet équipement.
La parole est à Mme la ministre auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports.
Madame la sénatrice Françoise Férat, je veux tout d’abord vous assurer que j’ai bien conscience des enjeux forts d’attractivité pour la Marne et pour la région Grand Est que représente l’aéroport de Paris-Vatry. Cet aéroport étant principalement dédié au fret aérien, je conçois également votre volonté de voir cette infrastructure bien connectée aux réseaux ferrés.
C’est la raison pour laquelle l’État s’est engagé, vous l’avez rappelé, dès 2007 au côté de la région Champagne-Ardenne, lors de la signature du contrat de plan État-région précédent, en mobilisant 3 millions d’euros afin d’examiner les conditions de desserte ferroviaire de l’aéroport, en utilisant la ligne actuelle dédiée au fret entre Châlons-en-Champagne et Troyes.
Par ailleurs, le conseil régional de Champagne-Ardenne a commandé en 2009 une étude visant à estimer les besoins de desserte de l’aéroport Paris-Vatry et à évaluer les aménagements nécessaires. Compte tenu de l’ampleur des investissements à prévoir pour accueillir des TER et des TGV, les conclusions des études ont clairement mis en avant l’opportunité de faire circuler des navettes par autocars vers la gare de Châlons-en-Champagne, d’une part, et vers Disneyland, d’autre part.
Vous le savez, ma volonté est de redonner la priorité aux transports du quotidien, tout en veillant à prioriser les financements. Il est en effet indispensable de mettre en adéquation les projets et les ressources disponibles. Le projet de loi d’orientation des mobilités, notamment dans son volet de programmation des infrastructures, que je présenterai prochainement, sera l’occasion de redéfinir le périmètre et les moyens d’intervention de l’État.
En effet, le système actuel montre ses limites au regard des impasses et des besoins de financement identifiés sur nos infrastructures ; il est donc nécessaire de dégager collectivement de nouvelles solutions innovantes et pertinentes, de nature à répondre aux enjeux économiques et sociaux des territoires.
C’est à cette aune que les enjeux de desserte ferroviaire de Paris-Vatry, dont je mesure et reconnais l’importance, pourront être examinés.
Madame la ministre, vos propos ne sont pas du tout de nature à me rassurer.
Je veux insister sur la qualité de cet équipement ; vous l’avez souligné, mais permettez-moi d’y revenir. C’est un dossier qui a été mis en œuvre dans des conditions exceptionnelles. Nous sommes sur une ancienne base de l’OTAN, avec 7 habitants au kilomètre carré, et toutes les habitations de proximité ont été traitées du point de vue acoustique. Nous n’avons pas eu un seul contentieux avec la profession – il y aurait des leçons à tirer sur la méthode, si vous me permettez cette expression –, nous avons obtenu l’adhésion des collectivités partenaires du conseil départemental de la Marne ; cela veut dire que, demain, lorsque nous aurons à entreprendre cette liaison ferroviaire, elles seront toujours à nos côtés, c’est essentiel.
On parle de montants importants, je l’entends bien, mais cela ne me semblait pas de nature à bloquer ce dossier.
Aujourd’hui, nous avons, sur ce site, plus de 700 emplois, et d’autres entreprises souhaitent s’y implanter. Mais, évidemment, le blocage concernant la ligne ferroviaire suffit à freiner ces demandes d’implantation dans un secteur où, vous l’avez compris, l’activité est essentielle – il y a, je le répète, 7 habitants au kilomètre carré. Et je ne reviens pas sur l’obtention, voilà quelques semaines, du label de conformité aux normes européennes…
En outre, permettez-moi d’insister sur cette liaison ferroviaire. Nous avons entendu que, pour remédier à l’abandon du projet de Notre-Dame-des-Landes, des passagers seraient orientés vers Paris. De grâce, essayons aussi de mailler ce territoire ! Vous avez là un équipement qui peut le permettre.
Par ailleurs, il ne s’agit pas de Châlons-en-Champagne et de Disneyland, madame la ministre, pardonnez-moi, cela va au-delà ! On parle d’implantation européenne, d’activités qui s’implantent à l’étranger ; allons au-delà de cette vision très réductrice.
Mme Françoise Férat. Je reviens sur l’engagement du contrat de plan ; de grâce, essayons de le mettre en œuvre, d’autant que vous ne serez pas seule, vous aurez les collectivités à vos côtés.
Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste. – M. Mathieu Darnaud applaudit également.
La parole est à M. Yves Bouloux, auteur de la question n° 0205, adressée à Mme la ministre auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, qu’ils soient routiers ou ferroviaires, les axes de communication sont des vecteurs de développement ; ils sont le système sanguin du pays et, malheureusement, certains territoires souffrent d’une embolie persistante…
Les contrats de plan État-région ont été conçus pour répondre à ce type d’enjeu et pour permettre ainsi l’émergence d’une vision stratégique partagée de développement, traduite par la mise en œuvre de projets structurants.
Il en va ainsi du contrat de plan État-région Nouvelle-Aquitaine de 2015-2020. La route nationale 147, axe parmi les plus accidentogènes de France, a été retenue, avec une forte contribution financière, d’ailleurs, des départements de la Vienne et de la Haute-Vienne.
Néanmoins, contrairement aux attentes des usagers et aux promesses initiales, le prolongement d’un tronçon à deux fois deux voies a été abandonné au profit du contournement à deux fois une voie de la commune de Lussac-les-Châteaux.
Certes, cela décongestionnera, surtout l’été, cet agréable bourg assujetti à des trains de camions toujours plus nombreux, mais ce parti pris est bien loin d’être à la hauteur des enjeux.
L’axe dont je vous parle, madame la ministre, vous le connaissez bien, pour avoir été, à Poitiers, une préfète de région de grande qualité, permettez-moi de le dire. Poitiers n’est plus aujourd’hui capitale régionale, pas plus que sa voisine Limoges, et ces deux villes, malgré les quelques compensations d’usage, sont très fragilisées. La liaison entre elles est indigne, et il est invraisemblable et inacceptable qu’elle ne soit pas traitée, comme tant d’autres, à deux fois deux voies.
J’ajoute que cet axe transversal a une vocation évidente pour le trajet Nantes-Méditerranée, et, en complément des deux départements cités, les Deux-Sèvres souhaitent s’y associer avec la volonté de constituer le chaînon manquant Bressuire-Poitiers-Limoges.
Madame la ministre, je ne m’étendrai pas sur des chiffres que vous connaissez mieux que moi, mais qui parlent plus que tout, avec la croissance inexorable de la circulation de poids lourds et l’effroyable mortalité de la route nationale 147.
Le Président de la République a annoncé un grand programme d’investissement. L’infrastructure dont je vous parle depuis quelques minutes mériterait assurément de bénéficier d’une toute petite part de cette manne, pour enclencher enfin un véritable plan pour cette route qui, d’un cauchemar, pourrait devenir un vecteur de développement.
Il y va de la sécurité des usagers, de l’aménagement du territoire, de la croissance économique, tant pour conforter les pôles urbains que pour redonner vie aux secteurs les plus difficiles de l’hyper-ruralité.
La parole est à Mme la ministre auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports.
Monsieur le sénateur Yves Bouloux, vous appelez mon attention sur les enjeux, pour les départements de la Haute-Vienne et de la Vienne, de la modernisation de la RN 147 entre Poitiers et Limoges.
L’amélioration de la desserte routière entre ces deux villes et dans ce territoire, que je connais bien, est une priorité pour l’État. Je veux, pour cet axe, apporter une réponse adaptée aux attentes légitimes des usagers du point de vue de l’amélioration des temps de parcours et de la sécurité routière.
Le trafic particulièrement élevé que vous avez rappelé, concentré aux entrées d’agglomérations de Limoges et de Poitiers, justifie en particulier des aménagements adaptés à son volume et à ses caractéristiques.
Dans ce but, j’ai commandé au préfet de la région Nouvelle-Aquitaine une étude d’itinéraire, qui devra traiter des enjeux de sécurité, de fiabilisation des temps de parcours pour les usagers et de réduction des nuisances pour les riverains. Ces études permettront d’identifier les opérations d’aménagement nécessaires sur la RN 147, en veillant à ce qu’elles soient adaptées aux niveaux de circulation et à ce qu’elles apportent un gain réel aux usagers. Elles permettront aussi de les prioriser, dans un cadre financièrement soutenable pour l’État et pour les collectivités locales concernées.
Bien sûr, les besoins d’amélioration porteront prioritairement sur les portions qui supportent aujourd’hui la circulation la plus importante, c’est-à-dire, notamment, en Haute-Vienne, entre Bellac et Limoges.
J’ajoute que des aménagements ont d’ores et déjà été réalisés lors des précédentes contractualisations ; c’est le cas de la déviation de Bellac. D’autres sont en cours. En Haute-Vienne, une enveloppe de 67 millions d’euros, dont 46, 5 millions d’euros apportés par l’État, a déjà été inscrite à l’actuel contrat de plan État-région, pour la réalisation d’une première section à deux fois deux voies de 5 kilomètres, au nord de Limoges, et d’un créneau de dépassement entre cette section et Bellac. Je vous confirme que les travaux seront engagés au dernier trimestre de l’année 2020.
Pour finir, je veux vous assurer que l’aménagement de la RN 147 entre Poitiers et Limoges aura toute sa place dans la priorité que je souhaite donner au désenclavement, dans le cadre de la loi d’orientation des mobilités. J’ai du reste eu l’occasion de m’en entretenir la semaine dernière avec le président de la région Nouvelle-Aquitaine. Je profite de cette occasion pour saluer la mobilisation des collectivités locales aux côtés de l’État pour faire avancer la modernisation de cet axe.
Je vous remercie, madame la ministre, et je vous fais confiance. Notre impatience est telle que nous souhaitons aller vite. Nous savons très bien que ces travaux prennent du temps, que ce soit pour les études ou pour le financement. C’est un enjeu très fort en termes de développement, j’y insiste, mais aussi du point de vue de l’accidentalité, qui est tout de même assez effrayante. Je sais que vous connaissez très bien tout cela et je veux bien vous faire confiance.
La parole est à M. Mathieu Darnaud, auteur de la question n° 0231, adressée à Mme la ministre auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports.
J’associe à ma question mon collègue sénateur de l’Ardèche, Jacques Genest. Ma question porte sur la RN 102 et, plus particulièrement, sur le contournement de la commune du Teil, située dans notre département de l’Ardèche.
Madame la ministre, les Ardéchois attendent cette déviation depuis plus de trente ans. Celle-ci a pour objet de réaménager ce segment de la RN 102, axe majeur traversant le département de l’Ardèche d’est en ouest. L’importance de cet axe routier est d’ailleurs telle qu’en 2003 il a été classé « grande liaison d’aménagement du territoire ».
Aujourd’hui, le trafic traversant la commune du Teil concerne plus de 16 000 véhicules quotidiens, parmi lesquels 2 200 poids lourds. Le centre-ville de cette commune de près de 9 000 habitants est donc complètement saturé.
Ce projet répond également à d’autres besoins fondamentaux. La déviation doit permettre de fluidifier et de sécuriser le trafic entre la vallée du Rhône et Aubenas, désenclavant ainsi le sud de ce département, dont je rappelle qu’il ne dispose d’aucune desserte ferroviaire ni autoroutière, cas unique dans l’Hexagone. Or l’Ardèche compte tout de même 330 000 habitants !
Preuve de la volonté affirmée – et unanime ! – des élus locaux, le département et la région Auvergne-Rhône-Alpes ont décidé de porter leur financement à hauteur de 40 % des 64 millions d’euros estimés pour ce projet, soit 28 millions d’euros.
Vous le voyez, madame la ministre, si ces travaux inscrits dans le contrat de plan État-région 2015-2020, dont le commencement était attendu pour 2018, devaient être encore retardés, les conséquences seraient graves tant pour la commune du Teil que pour la mobilité des Ardéchois et le développement du Sud-Ardèche et de l’Ardèche méridionale.
Je sais, madame la ministre, que vous allez prochainement recevoir les élus les plus concernés pour évoquer ce sujet. Pouvez-vous, dès à présent, réaffirmer les engagements pris par l’État, notamment en matière d’aménagement et de financement, ou celui-ci compte-t-il abandonner les Ardéchois à leur enclavement ?
La parole est à Mme la ministre auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports.
Monsieur le sénateur Mathieu Darnaud, vous avez souhaité me faire part de l’attention que vous portez à l’aménagement de la route nationale 102, en Ardèche, notamment au projet de contournement nord de l’agglomération du Teil.
En assurant la desserte de la montagne ardéchoise, la RN 102 constitue un axe important, qui permet de connecter le sud-est du Massif central à la vallée du Rhône et de jouer ainsi un rôle efficace de desserte d’un vaste territoire. Je vous confirme que la réalisation du contournement du Teil fait partie intégrante de la politique d’investissement de l’État en Ardèche.
Ce projet est inscrit à l’actuel contrat de plan État-région, pour un montant notable de 64 millions d’euros, dont plus de 35 millions d’euros apportés par l’État. Sa déclaration d’utilité publique a été prononcée à la fin de 2011 et au mois de septembre 2016.
Vous l’avez rappelé, cette opération est fortement soutenue à l’échelon local, tant par le conseil régional d’Auvergne-Rhône-Alpes que par le conseil départemental de l’Ardèche, qui apportent respectivement 17 millions d’euros et 11 millions d’euros au plan de financement de l’opération, finalisé par une convention signée le 22 janvier 2017.
Conscients des besoins en matière de sécurisation, d’amélioration des temps de parcours et des conditions de vie pour les riverains de la RN 102, les services de l’État sont totalement mobilisés pour faire avancer cette opération, je puis le confirmer. Ainsi, les études de conception détaillée du projet se sont poursuivies et le dossier final comportant une estimation précise des coûts devrait bientôt être approuvé. Des fouilles archéologiques ont d’ores et déjà été menées au cours du premier semestre de 2017. Les procédures pour la maîtrise du foncier nécessaire à la réalisation de l’opération sont terminées, les dernières acquisitions foncières se sont poursuivies tout au long de l’année 2017.
Les contraintes budgétaires de l’Agence de financement des infrastructures de transport de France, l’AFITF, n’ont malheureusement pas permis d’inscrire à la programmation initiale 2018 les travaux du contournement du Teil. J’ai pris note de la proposition du département de l’Ardèche de faire l’avance des crédits de l’État pour permettre un démarrage rapide des travaux, ce qui traduit bien la mobilisation des acteurs locaux autour de ce projet.
Comme j’ai déjà pu l’affirmer à M. le député Hervé Saulignac, j’ajoute que ce projet s’inscrit totalement dans la politique que le Gouvernement engage pour le désenclavement des territoires. Il permettra en effet d’améliorer de façon importante l’accès à la vallée du Rhône et à la Drôme pour les Ardéchois.
Aussi, le financement de cette opération fait l’objet d’un examen très attentif. En outre, nous étudions actuellement la possibilité d’inscrire des capacités de financement supplémentaires.
Madame la ministre, je prends bonne note de la volonté réaffirmée par le Gouvernement d’accompagner financièrement ce projet important – essentiel même – du contournement du Teil. Je regrette et déplore qu’il soit nécessaire que le département de l’Ardèche fasse l’avance des fonds dans un dossier aussi capital et aussi urgent que cet aménagement, dont j’ai évoqué les raisons et que, je le répète, nous attendons depuis plus de trente ans.
Plus généralement, madame la ministre, je tiens à vous alerter sur les aménagements qui sont aujourd’hui vitaux sur la route nationale 102. À l’heure où a lieu le débat sur la limitation de vitesse à 80 kilomètres par heure, tous les éléments sont réunis pour se pencher sur ce dossier. Vous avez évoqué la question des études réalisées par l’État sur les aménagements, notamment en matière de sécurité.
S’agissant de la liaison entre la montagne ardéchoise et Aubenas, nous attendons que ces études soient diligentées et menées dans les meilleurs délais, afin que des travaux de confortement, d’aménagement et de sécurisation puissent voir le jour. Il est temps que cette liaison, dont vous devinez aisément l’importance pour un territoire comme le nôtre, y compris pour son développement, puisse être réalisée dans les meilleurs délais.
La parole est à M. Daniel Laurent, auteur de la question n° 0236, adressée à Mme la ministre auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports.
Madame la ministre, je souhaite me faire l’écho des élus, des acteurs économiques et des usagers concernant la desserte ferroviaire de la Saintonge, du Pays royannais et du Cognaçais, enjeu majeur tant pour l’attractivité du territoire que pour son développement économique et touristique. J’associe bien évidemment à ma question ma collègue Corinne Imbert.
Dans ces territoires, nombre de nos concitoyens n’ont aucune solution de remplacement à la voiture et doivent en plus faire face à une augmentation de la fiscalité sur le diesel. Le retard pris dans la modernisation de la signalisation entre Angoulême, Saintes et Royan et dans le lancement des études d’électrification pénalise la desserte de l’ensemble du département de la Charente-Maritime.
Le rapport Duron ne faisait pas du projet d’électrification Angoulême-Royan une priorité, alors que celui-ci avait été intégré au contrat de plan lorsque vous étiez préfète de la région Poitou-Charentes. Je crois, madame la ministre, que vous vous êtes engagée auprès du président du conseil départemental de la Charente-Maritime, Dominique Bussereau, à ne pas suivre le rapport sur ce point.
De la même manière, le Gouvernement ne devrait pas suivre les recommandations du rapport Spinetta sur le devenir du transport ferroviaire de proximité, façon fort habile, ma foi, de désamorcer la colère des usagers et des élus dans nos territoires.
Concernant l’un des problèmes majeurs qu’est l’axe Saintes-Bordeaux, la région Nouvelle-Aquitaine serait prête à cofinancer rapidement avec SNCF Réseau le lancement des études, pour des travaux à réaliser en 2020. Or il semble que l’État freine aujourd’hui l’avancée du projet, ce qui me semble paradoxal au regard de toutes les annonces que vous avez faites, madame la ministre. Pouvez-vous m’apporter des réponses précises sur ce point ? Qui va financer les projets ? Les régions seules ? Ce n’est pas tenable, sans un accompagnement important de l’État.
Madame la ministre, vous avez annoncé un programme de 36 milliards d’euros pour la modernisation du réseau sur dix ans. Il y a fort à craindre que les collectivités territoriales ne soient pas en mesure de suivre, au regard de l’ampleur des investissements à réaliser.
Le ferroviaire fait partie intégrante des modes de « transports multimodaux » et contribue à conforter l’attractivité, l’aménagement du territoire et la cohésion sociale. Vers quelles mobilités, madame la ministre, souhaitez-vous engager nos territoires ?
La parole est à Mme la ministre auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports.
Monsieur le sénateur Daniel Laurent, la Saintonge, le Pays royannais et le Cognaçais sont en particulier desservis par les axes ferroviaires Angoulême-Saintes-Royan et Niort-Saintes-Bordeaux, dont certaines sections, je dois le dire, ne sont pas en bon état. Cela conduit à des limitations de vitesse sur plusieurs tronçons, par exemple entre Niort et Saintes. Je sais ce que cela représente pour les voyageurs en termes de baisse de qualité de service. Je sais aussi l’importance de ces lignes pour la vitalité des territoires traversés.
De fait, de nombreuses lignes de la région Nouvelle-Aquitaine se retrouvent dans une situation difficile, qui nécessitera une mobilisation financière, naturellement conjointe de l’État et de la région, au cours des dix prochaines années, pour éviter des ralentissements, voire des fermetures.
C’est tout l’enjeu de la remise à niveau de notre réseau ferroviaire, après des décennies de sous-investissement, qui ont contribué à sacrifier le réseau existant, celui de tous les jours. Ce sont ainsi 36 milliards d’euros qui seront investis dans les dix prochaines années.
S’agissant des travaux de modernisation de la signalisation entre Saintes et Angoulême, je partage votre préoccupation, monsieur le sénateur, et celle du président du conseil départemental de Charente-Maritime. J’ai personnellement saisi le président de SNCF Réseau au sujet du report des travaux à 2021 et des mesures qu’il comptait prendre pour en limiter les effets négatifs, que ce soit en termes de délais, de coûts ou de services rendus à l’usager.
Pour ce qui concerne l’électrification de l’axe Angoulême-Saintes-Royan, les réflexions conduites par le Conseil d’orientation des infrastructures n’engagent pas le Gouvernement et sont complétées par une série de consultations que je conduis actuellement en vue d’élaborer le volet programmation et financement des infrastructures du projet de loi d’orientation des mobilités. Je veux que, dans ce cadre, nous définissions les investissements les plus pertinents pour améliorer le plus rapidement possible la desserte du Cognaçais, de la Saintonge et du Pays royannais.
Enfin, concernant la ligne Niort-Saintes-Bordeaux qui accuse aussi un retard d’entretien et de régénération important, la pérennisation de la section Niort-Saintes est évaluée à plus de 50 millions d’euros. La rénovation de la section Saintes-Bordeaux exige également d’investir plus de 100 millions d’euros dans les dix ans. Le travail est donc en cours pour définir une vision globale des investissements nécessaires. Je le répète, monsieur le sénateur, vous pouvez compter sur la mobilisation de l’État.
Un travail d’ensemble a actuellement lieu sous l’égide du préfet de région en lien avec le conseil régional – je m’en suis entretenue avec le président de la région Nouvelle-Aquitaine, la semaine dernière –, afin d’élaborer une vision globale et partagée de la priorisation des actions à entreprendre sur l’ensemble des lignes ferroviaires au sein de la région Nouvelle-Aquitaine au cours des prochaines années.
Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse.
L’électrification de l’axe Royan-Angoulême est un sujet important sur lequel nous sommes tous informés. J’ai surtout insisté sur l’axe Niort-Bordeaux, en particulier la partie Saintes-Bordeaux. Vous le savez, la ville de Saintes, avec toutes ses entreprises, est au centre du territoire de la Charente-Maritime, qui est un territoire rural. La mobilité y est donc indispensable. Or c’est entre Saintes et Bordeaux que le ralentissement est le plus fort.
Il est donc urgent d’engager ces travaux. Comme je l’ai affirmé tout à l’heure, madame la ministre, la région Poitou-Charentes – je le sais depuis hier – est prête à s’engager financièrement sur cet axe-là, qui constitue la partie de travaux importante à réaliser. Je souhaite que le Gouvernement cautionne cet engagement de la région et s’implique pour que ces travaux puissent se réaliser en 2020. C’est important pour ces territoires ruraux.
La parole est à M. Laurent Lafon, auteur de la question n° 0230, adressée à M. le ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire.
Madame la ministre, vous allez me répondre sur un sujet qui ne correspond pas tout à fait à votre domaine d’intervention. La réglementation concernant les établissements scolaires et les crèches construites sur des sites ayant accueilli auparavant des activités industrielles est relativement récente. Résultat, un certain nombre d’établissements construits avant cette réglementation l’ont été sans tenir compte des éventuelles pollutions présentes dans les sols.
En 2012, une campagne nationale a été engagée sous la responsabilité du ministère de l’écologie pour mieux connaître l’empreinte des anciennes activités et, éventuellement, la nature et l’ampleur des pollutions constatées. Il semble que cette campagne ait été suspendue. Sans être connus officiellement, les résultats ont d’ores et déjà été diffusés dans un certain nombre de régions. Pris en l’état, ils peuvent paraître inquiétants, d’autant que le nombre de sites concernés est significatif et loin d’être marginal, entraînant des questions complexes de maintien des activités scolaires dans un nombre élevé d’établissements.
Évidemment, la présence de pollution ne signifie pas automatiquement l’existence d’un risque sanitaire. Au-delà de l’inquiétude première, un travail d’information et de concertation est à mener localement pour déterminer comment le principe de précaution peut se décliner en fonction de l’importance des expositions et des risques avant de décider des mesures à prendre.
Madame la ministre, je souhaite connaître la position du Gouvernement concernant l’appréciation des résultats d’ores et déjà connus de l’enquête. Cette dernière sera-t-elle poursuivie et étendue à l’ensemble des régions, notamment en Île-de-France ? Les autorités sanitaires vont-elles élaborer une conduite à tenir en cas de connaissance d’une pollution ou laisseront-elles les agences régionales de santé définir localement les mesures à prendre ?
La parole est à Mme la ministre auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports.
Monsieur le sénateur Laurent Lafon, vous avez interrogé Nicolas Hulot, ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire. Ne pouvant être présent, il m’a chargée de vous répondre.
Vous soulevez la question des établissements construits sur d’anciens sites ayant connu une activité potentiellement polluante. C’est un sujet important qui a conduit le ministère de l’écologie à lancer, dès 2010, une campagne de diagnostics de la qualité de l’air des crèches, haltes-garderies, écoles, collèges, lycées construits sur d’anciens sites industriels ou à proximité.
Ainsi, depuis 2010, des diagnostics, financés entièrement par le ministère de l’écologie, ont été engagés sur 1 405 établissements. À ce jour, 1 248 établissements ont été diagnostiqués : 486 d’entre eux ont été classés en catégorie A – les sols ne posent pas de problème –, 658 en catégorie B – les aménagements et les usages actuels permettent de protéger les personnes des expositions aux pollutions potentielles ou avérées –, 104 en catégorie C – la présence de pollutions nécessite des précautions ou des mesures sanitaires.
La liste des établissements qui ont fait l’objet d’un diagnostic à ce jour et leur classement sont disponibles depuis le 24 novembre 2017 sur le site du ministère. Aujourd’hui, 150 diagnostics sont encore en cours, dont je puis vous assurer qu’ils seront terminés cette année.
Si une pollution est révélée dans un établissement, la préfecture, le rectorat, l’agence régionale de santé sont saisis pour accompagner les collectivités territoriales qui, en tant que maîtres d’ouvrage, ont la responsabilité de la mise en œuvre des plans d’action. Les parents d’élèves, le personnel enseignant et les autres personnels travaillant dans l’établissement sont également informés de la situation.
Monsieur le sénateur, je tiens à vous assurer que nos services suivent avec attention la situation de ces établissements et que, chaque fois que nécessaire, les mesures sanitaires d’urgence ont été mises en œuvre.
Pour chacun des 104 établissements classés en catégorie C, les préconisations consécutives aux diagnostics ont été réalisées ou sont en passe de l’être cette année. Dans la très grande majorité des cas, des solutions techniques simples suffisent pour obtenir un retour à la normale : meilleur système d’aération, réfection des dalles de sol, apport de terre végétale saine sur les espaces verts, etc.
Dans quelques cas – moins d’une dizaine –, des classes ou l’établissement dans son ensemble ont dû être fermés pour permettre des travaux plus importants afin de limiter l’exposition des personnes.
Vous pouvez compter sur la mobilisation et la vigilance de l’État sur cette question tout à fait prioritaire.
La parole est à M. Jérôme Durain, auteur de la question n° 0228, adressée à M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur.
Madame la ministre, le 15 septembre dernier, dans le cadre de l’examen de la loi organique pour la confiance dans la vie politique, le Parlement a voté la fin de la réserve parlementaire. Celle-ci permettait aux élus d’apporter une aide financière à leur territoire d’élection afin de financer des projets d’utilité publique, nécessaires à la vie des territoires.
La suppression de la réserve parlementaire se justifiait par des raisons de forme, notamment l’opacité, le manque de transparence, le soupçon de clientélisme. Toutefois, le Gouvernement devait renouveler la manière dont serait assuré le soutien aux projets des petites communes dans les territoires. Alors, quand, en Saône-et-Loire, département dont je suis l’élu, nous avons appris que le dispositif de 2018 de la dotation d’équipement des territoires ruraux, la DETR, prévoyait de ne plus financer les projets de petite envergure, c’est-à-dire inférieurs à 5 000 euros, nous avons été surpris et interpellés à nombreuses reprises !
Cette problématique touche d’ailleurs plusieurs départements et je crois, madame la ministre, que des sénateurs d’autres groupes vous interrogeront à ce propos ce matin. De nombreux maires témoignent aujourd’hui des difficultés qu’ils rencontrent lorsqu’ils souhaitent obtenir des financements pour des projets d’échelle modeste.
Si les fonds qui étaient auparavant octroyés à la réserve parlementaire ne sont pas accessibles via la DETR pour financer des projets, les petites communes ne pourront plus faire face aux demandes des citoyens et devront ainsi délaisser des projets essentiels et attendus de leurs habitants. Si l’on ajoute les suppressions de classes dans les territoires ruraux et les inquiétudes qui pèsent sur les petites lignes ferroviaires, vous comprendrez, madame la ministre, qu’une certaine France attend des engagements clairs de la part du Gouvernement.
Convaincu que vous êtes personnellement consciente des enjeux de cette France rurale, j’aimerais savoir comment vous allez répondre aux attentes de ces maires, qui ont déjà proposé des solutions d’assouplissement, comme le passage du seuil de financement de 5 000 euros à 3 000 euros, la création d’une enveloppe spécifique aux petits projets ou encore une augmentation du taux de subvention pour les projets des communes en dessous d’un seuil de population qui serait à définir.
Je n’aborde pas ici la question des subventions destinées aux associations, qui ont été supprimées, elles aussi par souci de lutter contre le clientélisme, pratique critiquable qui pourrait bien revenir à travers les dispositifs privés que semblent mettre en place certains députés de… La République En Marche.
La parole est à Mme la ministre auprès du ministre d’État, ministre de l’intérieur, que je salue.
Monsieur le sénateur Jérôme Durain, vous avez raison de rappeler que la loi organique pour la confiance dans la vie politique a supprimé la réserve parlementaire. Pour que cela ne fragilise pas les projets des petites communes rurales, le Gouvernement avait pris un engagement très clair sur ce point : les crédits auparavant dédiés à la réserve parlementaire s’inscriraient désormais dans le cadre du droit commun des dotations d’investissement.
Le Gouvernement a sécurisé le montant des dotations d’investissement sur le quinquennat à un niveau exceptionnel : les trois dotations principales d’investissement – dotation de soutien à l’investissement local, ou DSIL, dotation d’équipement des territoires ruraux, ou DETR, et dotation politique de la ville, ou DPV – s’élèveront à 1, 811 milliard d’euros en 2018. Je vous rappelle que ce montant est supérieur à celui des années précédentes et sera sécurisé dans les années à venir. Au total, près de 8, 9 milliards d’euros seront consacrés au soutien à l’investissement local sur la durée du quinquennat, alors même que la dotation globale de fonctionnement reste stable, soit deux fois et demie le niveau de la dotation de 2012.
Au cours des débats sur le projet de loi de finances pour 2018, un accord a été trouvé entre le Gouvernement et le Parlement pour que 50 millions d’euros de crédits viennent abonder la DETR, de manière à ce que les communes et les petites intercommunalités rurales disposent de tout le soutien nécessaire à la réalisation de leurs projets. Je rappelle que le Gouvernement a tenu – j’y ai veillé personnellement –, en ce qui concerne l’éligibilité des projets, à ce que la loi ne fixe aucun seuil : toutes les communes métropolitaines dont la population est inférieure à 20 000 habitants sont éligibles et peuvent bénéficier d’une subvention de la DETR.
Toutefois, dans chaque département, il revient à une commission d’élus composée de maires, de présidents d’EPCI et, désormais, de quatre parlementaires de fixer le règlement d’utilisation de la dotation. La commission décide des catégories d’opérations prioritaires qu’elle souhaite retenir et détermine les taux minimaux et maximaux applicables à chacune d’entre elles.
En Saône-et-Loire, la commission d’élus a décidé que le montant minimal de subvention susceptible d’être accordé était fixé à 5 000 euros, afin d’éviter une forme de « saupoudrage » de la dotation. Cette décision relève des pouvoirs de la commission elle-même, qui, je le rappelle, est composée d’élus locaux. Même si, par l’intermédiaire du préfet, l’État peut encourager certains projets ou les orienter, cette décision revient à la commission départementale : le Gouvernement a pris soin de ne fixer aucun seuil dans la loi.
Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse et ai bien compris que vous étiez consciente des difficultés existantes.
Je comprends votre souci d’avoir une dotation globale importante pour l’ensemble des collectivités – c’est tout à fait capital –, comme je comprends le choix du Gouvernement de laisser aux commissions départementales la capacité de fixer le montant minimal des dotations à attribuer aux communes.
Madame la ministre, je vous donnerai quelques exemples, mais vous les connaissez. Sur ma réserve parlementaire, j’ai attribué des subventions de 2 000 euros pour l’aménagement d’une aire de jeu, de 1 000 euros pour un cheminement piéton, de 4 500 euros pour la rénovation du système de chauffage d’une salle municipale. Pour les communes concernées, ces petites subventions sont importantes, car les budgets sont très serrés. Souvent, on ne peut réaliser qu’un ou deux projets de cette nature au cours d’un mandat. Faute de ces subventions, qui paraissent anecdotiques quand on est dans une grande collectivité, les petites communes se trouvent bien démunies.
Les commissions départementales, au sein desquelles les élus siègent, ont toute latitude pour moduler les seuils. Si cela ne passe pas par la voie réglementaire ou législative, peut-être pouvez-vous user de votre pouvoir d’influence, madame la ministre, pour inciter les préfets à baisser le niveau des seuils, ce qui aiderait grandement les maires ruraux.
Sourires.
La parole est à M. Hervé Maurey, auteur de la question n° 0200, adressée à M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur.
Madame la ministre, le 9 août dernier, l’Assemblée nationale supprimait la réserve parlementaire en adoptant définitivement le projet de loi organique pour la confiance dans la vie politique.
L’Assemblée nationale a malheureusement confirmé sa volonté de supprimer la réserve parlementaire en revenant sur un amendement adopté par le Sénat, sur ma proposition, dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances pour 2018, visant à rétablir cette réserve parlementaire si indispensable aux petites communes.
Vous n’êtes pas sans avoir remarqué, madame la ministre, que, dans cette affaire, le Gouvernement a renié tous ses engagements. Il avait promis la création d’un « fonds d’action pour les territoires ruraux et les projets d’intérêt général » ; il ne l’a pas fait. Il s’était engagé devant le Sénat à reconduire l’ensemble des crédits dédiés aux collectivités locales ; il n’a pas fait. Il avait envisagé d’associer les parlementaires à l’attribution des crédits destinés aux communes ; il ne l’a pas fait.
Une partie seulement des fonds de la réserve parlementaire a été redirigée vers la DETR, dispositif qui ne permet ni la même souplesse d’attribution ni le financement des investissements modestes des communes.
En effet, dans de nombreux départements, des règlements intérieurs fixent les planchers de montant des travaux. Souvent, ces planchers sont élevés, par exemple de l’ordre de 10 000 euros dans l’Eure. Dans ce département, nous avons réussi, au sein de la commission DETR, contre la volonté du préfet, à abaisser ce montant à 3 000 euros. Pour autant, rien ne garantit que le préfet qui s’est vu imposer ce seuil ne mettra pas systématiquement de côté tous les projets qu’il jugera d’un montant insuffisant. Il y a même tout lieu de penser que c’est bien cela qui se produira, puisque les services préfectoraux, pour des questions de charge de travail, préfèrent instruire peu de dossiers d’un montant élevé qu’un grand nombre de dossiers d’un montant modeste.
Les élus, qui devaient être associés à l’attribution de la DETR, jouent un rôle très modeste, puisque la loi prévoit que la commission DETR n’est consultée que pour les projets de plus de 100 000 euros, qui ne concernent évidemment pas les petites communes.
La suppression de la réserve parlementaire et le non-respect des engagements pris pour la compenser sont extrêmement préjudiciables aux communes dont les ressources ont gravement diminué avec la baisse des dotations lors du précédent quinquennat et qui s’inquiètent aujourd’hui de la suppression de la taxe d’habitation.
Aussi, j’appelle le Gouvernement à tenir enfin ses promesses. Il n’est jamais trop tard. Madame la ministre, que compte faire le Gouvernement pour garantir aux petites communes que leurs projets pourront être à l’avenir soutenus financièrement ?
La parole est à Mme la ministre auprès du ministre d’État, ministre de l’intérieur.
Monsieur le sénateur Hervé Maurey, je ne peux pas vous laisser dire tout ce que vous avez dit.
Je comprends qu’on puisse se poser des questions. Cependant, comme vous avez pu l’entendre en réponse à la question précédente, je rappelle que nous avons stabilisé de façon importante, voire augmenté les dotations aux collectivités territoriales, à hauteur de 1, 811 milliard d’euros pour 2018. Je ne peux donc pas vous laisser dire que ces dotations sont en baisse.
Par ailleurs, pour être très précise, je rappelle que la question du prolongement de la réserve parlementaire se posait déjà avant l’arrivée de ce gouvernement. Ceux qui étaient sénateurs, comme vous, le savent très bien. À tout le moins, la question du montant minimum des dossiers subventionnés par la réserve parlementaire – à l’époque, on parlait de 1 000 euros – se posait, compte tenu des frais qu’entraînait la multiplication des dossiers. Ces sujets ont longuement été débattus, notamment au sein du groupe auquel j’appartenais ici.
Cela dit, le Gouvernement a pris une décision, confortée par le Conseil constitutionnel, qui a clairement jugé que l’exécution d’un fonds par le Parlement, ou certains de ses membres, revenait pour le Gouvernement à lier sa compétence, ce qui n’est pas conforme à la Constitution. Vous me répondrez que cette pratique existait depuis longtemps. Il n’en demeure pas moins qu’on peut imaginer que, si quelqu’un intervient dans une collectivité locale sur le montant des subventions, cela ne soit pas tolérable compte tenu de l’indépendance des collectivités locales.
Au-delà de la question que vous me posez et des réponses que j’ai déjà apportées, je crois pouvoir dire que le Gouvernement a la volonté de préserver les subventions versées aux petites communes et aux petites intercommunalités via la DETR.
Si la commission dans l’Eure a fixé le seuil à 3 000 euros, si elle l’a imposé au préfet, cela signifie qu’elle a un véritable pouvoir. En outre, comme je l’ai dit au sénateur Durain, le Gouvernement peut insister auprès des préfets pour que ceux-ci s’assurent que les petites communes reçoivent bien des subventions.
Je m’engage à y veiller.
Pour terminer, je rappelle que tous les parlementaires, y compris ceux qui ne siègent pas au sein des commissions, sont désormais informés sur le détail des subventions octroyées au titre de la DETR.
Soyez assuré, monsieur Maurey, de la volonté du Gouvernement de soutenir les petites communes et les petites intercommunalités.
Vous aurez remarqué, madame la ministre, que j’ai été très tolérant s’agissant du temps de parole…
Madame la ministre, vous dites ne pas pouvoir me laisser dire ce que j’ai dit. Je suis désolé, mais je confirme mes propos, car c’est la réalité !
Vous dites qu’il n’y a pas eu de baisse des dotations. Je n’ai pas parlé de baisses des dotations sous ce gouvernement, mais de celles qui ont eu lieu sous le précédent quinquennat. Durant le présent quinquennat, force est de constater que la réserve parlementaire, laquelle permettait de financer les projets des petites communes, a été supprimée.
Vous essayez de noyer le poisson en évoquant le niveau de la DETR. Ce n’est pas le sujet ! Le problème, ce n’est pas le niveau global des subventions aux communes – vous connaissez suffisamment le sujet pour le savoir –, c’est le financement des petits projets. Comment finance-t-on aujourd’hui le remplacement de deux fenêtres dans une mairie pour 3 000 euros ou celui d’une porte d’église pour 4 000 euros ? Comment finance-t-on un défibrillateur à 2 000 euros ? Contrairement aux engagements du Gouvernement, rien n’a été prévu pour financer de tels projets. Cela démontre la méconnaissance totale des problèmes du monde rural de ce gouvernement.
Lorsque le Premier ministre m’a dit que la réserve parlementaire ne servait à rien, je lui ai répondu les yeux dans les yeux que, quand on est maire du Havre, on n’a effectivement pas besoin de 1 000 ou 2 000 euros pour financer un projet. Mais quand on est maire d’une petite commune, on en a besoin ! Malheureusement, et votre réponse le confirme, il n’a toujours rien été prévu pour les petites communes.
Ce que je vous demande, et vous vous y êtes engagée à la fin de votre réponse, c’est que, a minima, les préfets ne fassent pas d’obstruction afin de faciliter le travail de leurs services, qu’ils ne mettent pas de côté tous les dossiers qu’ils jugent d’un montant insuffisant, car c’est plus confortable de ne traiter que ceux d’un montant supérieur à 5 000 euros, ce qu’ils peuvent faire. En effet, même si le seuil a été fixé à 3 000 euros dans l’Eure, le préfet pourra, s’il le veut, mettre de côté les dossiers dont il jugera le montant insuffisant.
Je demande donc que les préfets appliquent au moins la règle fixée par les commissions DETR et qu’on n’étrangle pas davantage les communes rurales.
La parole est à M. Alain Milon, auteur de la question n° 0207, transmise à M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur.
Madame la ministre, je souhaite appeler votre attention sur les conséquences des dispositions de l’article L. 131-13 du code de l’éducation : « L’inscription à la cantine des écoles primaires, lorsque ce service existe, est un droit pour tous les enfants scolarisés. Il ne peut être établi aucune discrimination selon leur situation ou celle de leur famille. »
Ces dispositions ont été reprises dans le jugement du tribunal administratif de Besançon du 7 décembre 2017 opposant la commune de Besançon à l’une de ses administrées. Pour mémoire, il s’agissait pour la requérante de faire annuler les décisions par lesquelles la commune de Besançon avait refusé l’inscription de son fils aux services périscolaires de restauration scolaire et d’accueil du matin et de l’après-midi.
S’appuyant sur les dispositions de la loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017 relative à l’égalité et à la citoyenneté, ainsi que sur les travaux parlementaires préalables, le juge de première instance a ainsi considéré, en ce qui concerne la restauration scolaire, qu’il s’agissait d’un droit opposable et que le manque de place disponible ne saurait être un argument justifiant le refus d’inscription.
Au regard de l’application de ces dispositions législatives, de leur interprétation et de ce jugement, je me demande, madame la ministre, si la reconnaissance du caractère obligatoire du service de restauration scolaire va influer sur l’obligation de prise en charge, par les communes, de dépenses de fonctionnement des écoles privées sous contrat. En effet, en vertu du principe de parité entre l’enseignement privé et l’enseignement public, qui impose, en application de l’article L. 442-5 du code de l’éducation, que les dépenses de fonctionnement des classes sous contrat d’association soient prises en charge dans les mêmes conditions que celles des classes correspondantes de l’enseignement public, il paraît légitime que cette dépense de cantine soit désormais intégrée dans le forfait communal.
Madame la ministre, pourriez-vous nous indiquer si ces dépenses, désormais obligatoires, vont être intégrées dans le calcul des dépenses de fonctionnement des écoles privées sous contrat et si la prise en charge de ces dépenses par les communes peut être applicable dès cette année scolaire 2017-2018 ?
La parole est à Mme la ministre auprès du ministre d’État, ministre de l’intérieur.
Monsieur le sénateur Alain Milon, à la différence du département et de la région, qui sont tenus de mettre en place des services de restauration scolaire, respectivement dans les collèges et dans les lycées, la commune n’en a pas l’obligation dans les écoles maternelles et élémentaires situées sur son territoire. Le Conseil d’État a confirmé que la création d’une cantine scolaire, service public local annexe au service public national de l’enseignement, présente pour la commune un caractère facultatif, fondé sur sa clause de compétence générale. Je tiens à le rappeler.
En janvier 2017, le législateur a inscrit à l’article L. 131-13 du code de l’éducation : « L’inscription à la cantine des écoles primaires, lorsque ce service existe, est un droit pour tous les enfants scolarisés. Il ne peut être établi aucune discrimination selon leur situation ou celle de leur famille. » Ce texte ne remet en cause ni le caractère facultatif du service public de restauration scolaire dans les écoles publiques du premier degré ni la nature des dépenses qui en découlent. En effet, si, comme vous l’indiquez, le tribunal administratif de Besançon a considéré dans son jugement du 7 décembre 2017 qu’une commune ne peut plus refuser l’inscription d’un enfant au service de restauration scolaire faute de place, lorsqu’un tel service existe, ce jugement n’a pas pour effet de le rendre obligatoire s’il n’existe pas.
Pour ce qui est de l’effet de ces dispositions sur le financement des écoles privées, les dépenses de fonctionnement des classes sous contrat d’association sont, comme vous l’indiquez, prises en charge dans les mêmes conditions que celles des classes correspondantes de l’enseignement public. Cette contribution, dénommée « forfait communal », ne prend cependant en compte que les seules dépenses relatives aux activités scolaires.
Si, en complément, les communes et leurs groupements peuvent faire bénéficier de mesures à caractère social tout enfant sans considération de l’établissement d’enseignement qu’il fréquente, le Conseil d’État a jugé qu’il appartient à la collectivité d’apprécier dans quelle mesure celle-ci participe à la restauration des élèves scolarisés dans les écoles privées, dans la limite de sa participation à la restauration des élèves scolarisés dans les écoles publiques. C’est toujours la règle. Ainsi le nouveau régime d’accès à la cantine scolaire est-il sans incidence sur les modalités de prise en charge par les communes des dépenses de restauration scolaire des écoles privées.
J’ai bien compris le sens de votre question, mais le risque que vous évoquez ne peut s’envisager sans évolution législative. Cette question ne relève donc pas du domaine purement scolaire.
Je vous remercie, madame la ministre, de votre réponse. Reste que mes angoisses persistent pour l’avenir sur ce sujet, qui me semble important.
Les maires sont extrêmement inquiets, tout du moins ceux qui ont des cantines scolaires et des écoles privées sur leur territoire. Il est évident qu’une décision de justice, en application de cette loi, pourrait les obliger à participer au financement des cantines des écoles privées. C’est véritablement une question qu’il faut se poser.
La parole est à Mme Véronique Guillotin, auteur de la question n° 0218, adressée à M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur.
Madame la ministre, ma question porte sur la parité dans les exécutifs intercommunaux.
Alors que nous nous apprêtons à célébrer la Journée internationale de lutte pour les droits des femmes, je souhaite appeler l’attention d’une ministre, membre d’un gouvernement paritaire, au sujet d’une situation parfaitement inégalitaire au sein de nos collectivités.
Depuis 2014, dans les communes de 1 000 habitants et plus, les élections municipales ont lieu au scrutin proportionnel de liste et les conseillers communautaires sont élus en même temps par un système de fléchage, les deux devant respecter la parité. Cette modification législative a permis d’améliorer la représentativité des femmes, même si du chemin reste à parcourir. Au 1er janvier 2017, elles ne représentaient en effet que 34 % des conseillers communautaires.
Lorsque l’on s’intéresse à la composition des exécutifs intercommunaux, on constate que ces chiffres baissent dramatiquement. Dans mon département, comme dans de nombreux autres, les exemples sont malheureusement multiples.
Dans la communauté d’agglomération de Longwy, les dix vice-présidences sont attribuées à des hommes. La communauté de communes Terres Touloises compte seulement une vice-présidente, contre treize vice-présidents. Au total, les femmes ne représentent que 18 % des membres des exécutifs intercommunaux en Meurthe-et-Moselle.
Une étude, publiée en 2015 par l’association Elles aussi, nous apprend que cette proportion est identique à l’échelle nationale et que seules 8 % des présidences sont occupées par des femmes. Or l’échelon intercommunal a vu croître ses prérogatives, à l’issue des récentes lois de réforme territoriale. Plus grands, les EPCI se sont vu et se verront transférer plus de compétences. Il est donc d’autant plus inacceptable qu’ils demeurent les dernières assemblées locales où la parité ne s’exerce pas au sein des exécutifs.
En matière de parité, c’est bien la législation qui fait changer les choses. On voit d’ailleurs que la moindre faille est prétexte à un retour en arrière, comme le montrent les fusions d’EPCI ou les recompositions de conseils communautaires, rendues obligatoires à la suite de la décision Commune de Salbris du Conseil constitutionnel.
Des propositions existent pourtant. Je pense notamment à la préconisation du Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes en faveur de tandems paritaires à la tête des exécutifs locaux.
L’égalité entre les femmes et les hommes a été déclarée grande cause nationale du quinquennat par le Président de la République. Pouvez-vous donc, madame la ministre, nous indiquer quelles initiatives le Gouvernement entend prendre en faveur de la parité dans les exécutifs intercommunaux et, plus largement, à la tête des exécutifs locaux ?
La parole est à Mme la ministre auprès du ministre d’État, ministre de l’intérieur.
Madame la sénatrice, comme vous venez de le rappeler, la politique de l’égalité entre les femmes et les hommes est une grande cause nationale du quinquennat. Elle vise à obtenir des changements dans les pratiques et dans les comportements, dans la sphère tant publique que privée, en posant les jalons d’une politique intégrée cohérente, transversale et interministérielle. La parité est un outil autant qu’une fin. Elle est une exigence de justice et de démocratie.
C’est la loi constitutionnelle du 8 juillet 1999 qui a instauré la parité en modifiant les articles 3 et 4 de la Constitution française. Depuis cette réforme, plusieurs lois ont permis d’instaurer cette règle dans les différentes instances de représentation politique, notamment dans les collectivités territoriales. La loi, comme vous l’avez dit, a été décisive pour atteindre ces objectifs. Ainsi, avant la réforme de l’élection départementale, les conseillères départementales représentaient 13 % des assemblées, tandis qu’elles représentent désormais 50 % des élus.
Dans les intercommunalités, on constate en effet des inégalités de représentation dans les exécutifs. Les modalités de constitution des listes aux élections municipales, qui doivent être composées d’autant de femmes que d’hommes, avec alternance obligatoire, concernent les communes de plus de 1 000 habitants. Dans les communes de moins de 1 000 habitants, le scrutin municipal est majoritaire. En outre, contrairement aux dispositions applicables aux communes de plus de 1 000 habitants, il n’y a pas d’obligation de parité entre les femmes et les hommes. Ces modalités particulières d’élection sont destinées à faciliter l’émergence de candidatures dans les communes les plus petites, qui doivent souvent faire face à des difficultés pour susciter des candidatures aux élections municipales.
Je me souviens que, lorsque le débat a eu lieu sur ces questions, certains parlementaires plaidaient pour que la parité soit obligatoire dans toutes les communes, y compris dans celles qui comptent moins de 1 000 habitants. Beaucoup en revanche arguaient que cela serait parfois difficile.
Le déséquilibre que vous avez pointé du doigt au sein des intercommunalités est un fait reconnu. À cet égard, il faut écouter les propositions des associations d’élus, telles que l’association Elles aussi, que je connais bien.
Je suis tout à fait ouverte, tout comme M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur, qui est responsable des élections, à l’idée d’étudier toutes ces possibilités. Ce sujet n’est pas très facile, notamment dans les intercommunalités, qui comptent de nombreuses petites communes. C’est là que le déséquilibre entre les femmes et les hommes est le plus grand. Il nous faut donc véritablement débattre de nouveau de ce sujet.
Madame la ministre, j’ai bien entendu votre détermination à lever les obstacles à l’engagement des femmes dans les collectivités sur les territoires. Je comprends la difficulté de représentativité lorsque les communautés de communes sont composées de petites communes, mais le fait est que l’on constate dans les communautés d’agglomération, qui sont quelquefois importantes, ce même déséquilibre.
Permettez-moi de citer Simone Veil, qui, en 1986, se disait déjà favorable aux quotas pour renforcer la représentativité des femmes dans les parlements : « Il n’y a pas d’autres moyens et on le sait depuis vingt ans. » Cela fait donc cinquante ans qu’on le sait, et le constat est le même s’agissant des EPCI. Il n’y a pas d’autre moyen, et on l’a vu, que la loi pour infléchir la situation et accroître la parité.
Je prends acte de votre volonté de réfléchir à l’amélioration de cet état de fait à chaque fois que cela sera possible, dans l’écoute et la concertation, et je vous en remercie, madame la ministre. Je suis heureuse de trouver au sein du Gouvernement une écoute bienveillante.
Nous en avons terminé avec les réponses à des questions orales.
Mes chers collègues, l’ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à douze heures vingt, est reprise à quatorze heures trente, sous la présidence de M. Thani Mohamed Soilihi.