Séance en hémicycle du 4 juin 2019 à 9h30

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La séance

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La séance est ouverte à neuf heures trente.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Conway-Mouret

Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Conway-Mouret

L’ordre du jour appelle les réponses à des questions orales.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Conway-Mouret

La parole est à M. Max Brisson, auteur de la question n° 633, adressée à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.

Debut de section - PermalienPhoto de Max Brisson

Madame la ministre, la carte de la médecine légale ignore Bayonne et son tribunal de grande instance. En effet, l’institut médico-judiciaire le plus proche se situe à Bordeaux, soit à près de deux cents kilomètres. Or l’activité dans le ressort du TGI de Bayonne est telle que les différents acteurs ont dû s’organiser afin de pallier cette absence de médecine légale financée et officielle, à laquelle pourraient pourtant prétendre Bayonne et sa juridiction : ils ont créé en 2014 une unité médico-judiciaire de fait et non financée, reposant sur la bonne volonté du centre hospitalier de Bayonne et de plusieurs médecins libéraux.

Pour autant, un projet de création d’une unité de victimologie adossée à la création d’une véritable unité médico-judiciaire fait l’objet d’échanges depuis plusieurs années entre la juridiction et les services de la Chancellerie.

Vous le savez, son aboutissement permettrait de construire un pôle officiel avec des moyens propres, de proposer une prise en charge de qualité des victimes d’infractions pénales, de faciliter le lien entre la victime et les services d’enquête, enfin, de faire en sorte que des plaintes soient prises de manière systématique et détaillée.

Requérant des moyens modestes et allant dans le sens d’une plus grande attention aux victimes, ce projet, pourtant à l’arrêt malgré les multiples courriers de relance adressés aux services compétents, est resté sans avancée majeure à ce jour.

Madame la ministre, vous qui évoquez régulièrement la « justice du XXIe siècle », pensez-vous que, dans ce cadre ambitieux, il soit encore envisageable d’envoyer jusqu’à plus de deux cents kilomètres, à Bordeaux, des victimes et des cadavres afin qu’ils soient expertisés ?

Pouvez-vous nous donner un calendrier de travail fiable sur le projet de création d’une unité médico-judiciaire dans le ressort du tribunal de grande instance de Bayonne ?

Debut de section - Permalien
Nicole Belloubet

Monsieur le sénateur Brisson, le schéma directeur de la médecine légale actuel a été instauré par des circulaires interministérielles de 2010 et de 2012.

Ce schéma directeur s’appuie sur un principe de rattachement d’une juridiction à une structure hospitalière dédiée à la médecine légale : soit un institut médico-légal, un IML, soit une unité médico-judiciaire, une UMJ. Ces structures permettent de réaliser un certain nombre d’actes de médecine légale précisément identifiés – autopsie, examen de compatibilité de garde à vue, examen de victime, etc.

Les structures hospitalières dédiées, qui ont été retenues dans le schéma directeur, sont financées sur la base d’un forfait annuel payé par le ministère de la justice.

Les juridictions non rattachées à une telle structure peuvent continuer à recourir aux praticiens du réseau de proximité – urgences hospitalières, médecins libéraux, associations de médecins. L’ensemble des actes médico-légaux pratiqués dans le cadre du réseau de proximité font l’objet d’un paiement à l’acte sur frais de justice de la juridiction.

Le schéma directeur de la médecine légale a été établi afin de structurer à l’échelle nationale une médecine légale harmonisée et de qualité et d’assurer un financement pérenne de cette activité.

Il a été conçu à partir de l’état des pratiques et de l’évaluation des besoins judiciaires, et en fonction des seuils d’équilibre financier ainsi que des seuils d’activité par structure permettant de garantir la compétence des médecins.

Aux termes de l’actuel schéma directeur, le tribunal de grande instance de Bayonne relève, pour la thanatologie, de l’IML du centre hospitalier universitaire de Bordeaux et, pour la médecine légale du vivant – examens de victimes et de gardés à vue –, du réseau de proximité.

C’est pour répondre à ce dernier besoin que le centre hospitalier de la Côte Basque et plusieurs médecins libéraux ont organisé un service baptisé Institut médico-judiciaire, dans le cadre du réseau de proximité, qui se consacre quasi exclusivement à l’examen des victimes d’infractions pénales.

Conformément aux circulaires précitées, ce service est bien financé à l’acte sur les frais de justice du TGI de Bayonne. Entre 2016 et 2018, ce sont 159 989 euros qui ont été versés au centre hospitalier, soit une moyenne d’un peu plus de 50 000 euros par an.

À ce jour, le ministère de la justice n’a pas été destinataire d’une demande d’intégration au schéma directeur du centre hospitalier de Bayonne.

Si la possibilité d’une telle intégration ne peut, en l’état, être exclue, il reste que toute modification du schéma directeur doit s’inscrire dans le cadre d’une concertation interministérielle. Dans l’hypothèse où une telle concertation serait menée, les acteurs locaux ne manqueraient évidemment pas d’être consultés.

Debut de section - PermalienPhoto de Max Brisson

Je vous remercie, madame la ministre, de ces éléments de réponse. Mon intention était d’appeler votre attention sur la fragilité de ce service de proximité, qui repose sur la bonne volonté des praticiens, laquelle est en train de s’amenuiser compte tenu de la situation de la médecine libérale dans notre pays, qui est celle que l’on sait.

Par ailleurs, je suis un peu surpris de la réponse que vous m’apportez, parce que les principaux responsables de la juridiction de Bayonne m’ont bien dit que des demandes avaient été formulées auprès de la Chancellerie.

Toujours est-il que je leur transmettrai votre réponse.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Conway-Mouret

La parole est à M. Richard Yung, auteur de la question n° 763, adressée à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

Ma question porte sur le projet de code européen de droit des affaires.

Cette initiative émane de la société civile européenne, sous l’impulsion de la Fondation pour le droit continental et de l’Association Henri Capitant, bien connue, dans le but de rendre plus accessible, compréhensible et fluide le droit des affaires pour les citoyens et pour les entreprises.

Cette matière essentielle aux échanges, à la mise en œuvre du marché intérieur et au rayonnement de l’Union européenne est complexe, car propre à chaque État membre. Cela veut dire qu’il faut rapprocher les différents droits des affaires de chacun des vingt-huit ou vingt-sept États membres. Il existe bien sûr des disparités entre ces pays, et ces disparités ralentissent les échanges économiques, ce qui conduit à un affaiblissement de la position européenne dans le concert de la mondialisation par rapport à des pays soumis à un droit unique.

À titre d’exemple, je parlerai des difficultés de l’investisseur étranger, qui, souhaitant investir en Europe, se trouve confronté à un choix entre différents systèmes juridiques.

Je ne parle pas du droit bancaire, du droit des hypothèques ou du droit de l’héritage, qui sont tous extrêmement complexes.

Je rappelle que l’Afrique, elle, a monté un système, à savoir l’Organisation pour l’harmonisation en Afrique du droit des affaires, l’Ohada, dont le siège est à Yaoundé et qui regroupe l’ensemble des pays de la zone franc, pour dire simplement les choses.

L’initiative du code européen des affaires répond au souci de revitaliser l’Europe autour d’une volonté politique forte, que ce soit pour répondre à des considérations économiques ou pour faciliter les investissements des PME et des investisseurs étrangers.

En effet, disposer d’une base commune légale permettrait de dynamiser et de rendre plus équitables les relations économiques.

Je crois que tout le monde sera convaincu du caractère positif de cette harmonisation. D’autant qu’avec le départ du Royaume-Uni l’Union européenne sera composée essentiellement de pays de droit continental – je n’ose pas dire de droit napoléonien, mais c’est un peu l’idée…

Madame la ministre, comment se positionne le Gouvernement sur cette question ? Quelles sont les perspectives en la matière et quelles initiatives envisagez-vous éventuellement de prendre ?

Debut de section - Permalien
Nicole Belloubet

Monsieur le sénateur Yung, le projet de code européen de droit des affaires est effectivement une initiative de la société civile. Son premier objectif est de consolider l’acquis européen sous une forme lisible, en particulier pour les petites et moyennes entreprises. Il ambitionne également de donner une impulsion nouvelle à la construction de l’Europe par le droit.

Cette initiative a été positivement accueillie, tant en France qu’en Allemagne. Elle s’accorde pleinement avec l’annonce faite par le Président de la République dans son initiative de la Sorbonne du 26 septembre 2017 de donner « une impulsion franco-allemande » à l’Union européenne, en se fixant « d’ici à 2024 l’objectif d’intégrer totalement nos marchés en appliquant les mêmes règles à nos entreprises, du droit des affaires au droit des faillites ».

Le traité d’Aix-la-Chapelle, signé le 22 janvier 2019, confirme cette approche puisqu’il y est prévu d’« instituer une zone économique franco-allemande dotée de règles communes » et de favoriser « l’harmonisation bilatérale des législations, notamment dans le domaine du droit des affaires ».

Le projet de code européen de droit des affaires s’inscrit donc dans cet objectif d’harmonisation du droit des affaires, entre la France et l’Allemagne, ainsi qu’avec l’ensemble de nos partenaires européens.

Le ministère de la justice suit de près, depuis leur origine, les travaux initiés par l’Association Henri Capitant et la Fondation pour le droit continental.

Avant même sa réalisation, ce projet de code est un lieu d’échanges, de recueil de propositions et d’idées pour la construction européenne, en y faisant participer la société civile et les acteurs concernés, qu’il s’agisse des citoyens ou des entreprises.

La réalisation d’un tel code révèle un niveau élevé d’ambition, tant le champ d’application de cette entreprise est vaste. Le droit des affaires recouvre en effet de nombreuses matières, parmi lesquelles le droit commercial, le droit des sociétés, le droit des entreprises en difficulté ou encore le droit de la propriété intellectuelle.

Conscient des nombreuses opportunités offertes par ce projet, le Gouvernement s’y est montré particulièrement attentif. Le Premier ministre a ainsi demandé que soit entamée une réflexion sur l’élaboration d’un tel code et a confié une mission à Mme la députée Valérie Gomez-Bassac en ce sens.

Cette mission a pour objectif de cerner les contours de ce projet, sa nature, le périmètre des travaux et ses modalités de mise en œuvre, en identifiant les domaines du droit des affaires pour lesquels une codification, voire une harmonisation, serait souhaitable.

Ces réflexions en faveur d’un droit européen plus lisible et ouvert à l’ensemble des entreprises, quelle que soit leur taille, sont nécessaires. Nous souhaitons en effet que le droit européen des affaires soit encore plus proche des petites et moyennes entreprises. Le projet de code européen de droit des affaires doit y contribuer, pour une Europe du droit au soutien de la croissance et des emplois de demain.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

Je me réjouis de l’avancée franco-allemande, à laquelle, d’ailleurs, devraient être associés d’autres pays. Parmi les droits que vous avez cités, madame la ministre, la propriété intellectuelle et industrielle est déjà très largement harmonisée. Il en reste beaucoup d’autres à harmoniser, complexes, comme le droit bancaire, le droit de l’héritage, etc. Nous avons un très grand travail devant nous.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Conway-Mouret

La parole est à M. Michel Dagbert, auteur de la question n° 778, adressée à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Dagbert

Madame la ministre, mon département, le Pas-de-Calais, compte de nombreux établissements pénitentiaires – centres de détention et maisons d’arrêt. Je souhaite attirer particulièrement votre attention sur la situation des établissements pénitentiaires de Béthune et Vendin-le-Vieil.

La maison d’arrêt de Béthune connaît en effet depuis plusieurs années une surpopulation très importante. Aujourd’hui, avec 355 détenus pour une capacité opérationnelle de seulement 180 places, elle présente ainsi une densité carcérale de près de 200 %.

La capacité de ce vieil établissement du XIXe siècle demeure inadaptée : la compétence territoriale du tribunal de grande instance couvre le secteur de deux importants commissariats, ceux de Béthune et de Lens, ainsi qu’une partie des secteurs des brigades de gendarmerie de Lille et de Saint-Omer, soit 600 000 personnes.

Cette situation entraîne une dégradation des conditions de vie des personnes incarcérées, notamment en ce qui concerne l’hygiène et l’intimité.

Elle a également de lourdes conséquences pour les surveillants pénitentiaires, qui pâtissent d’un sous-effectif chronique, subissent le manque de moyens et sont confrontés à un climat très tendu. Je ne reviendrai pas, madame la ministre, sur la longue liste des agressions de gardiens : vous la connaissez comme moi. La dernière en date ayant eu lieu ce 15 avril.

Dans un contexte tout à fait différent, au centre pénitentiaire de Vendin-le-Vieil, les personnels font aussi face à une insécurité croissante. Cet établissement de haute sécurité qui accueille des détenus réputés parmi les plus difficiles et violents a connu cinq incidents majeurs depuis sa mise en service en mars 2015 : agressions, assassinat, prises d’otages.

Je sais l’attention que vous avez portée à cet établissement, vous y étant rendue à deux reprises. Il était prévu que des détenus de la maison d’arrêt de Béthune, dans le cadre d’un aménagement de peine, soient accueillis au centre de détention de Vendin-le-Vieil. Ces derniers, sous le régime d’un placement extérieur, auraient travaillé au profit de structures partenaires en vue de les préparer au mieux à la sortie.

Or le bâtiment destiné à les recevoir et dénommé quartier centre de détention, avec une capacité d’accueil de 34 détenus, est aujourd’hui inoccupé. Son utilisation serait pourtant fort utile, au regard de la surpopulation carcérale à Béthune que j’évoquais précédemment.

Pour m’être rendu dans ces deux établissements, je veux souligner la forte implication des équipes de direction, de même que le grand professionnalisme de l’ensemble des personnels.

Dans ce contexte, madame la ministre, quelles mesures entendez-vous prendre pour améliorer la situation des détenus et, surtout, celle des surveillants de ces établissements pénitentiaires ?

Debut de section - Permalien
Nicole Belloubet

Monsieur le sénateur Dagbert, vous le savez, la surpopulation carcérale n’est pas un phénomène nouveau. Les différents gouvernements ont jusqu’ici échoué à mettre en œuvre l’encellulement individuel, dont le principe est pourtant inscrit dans le code de procédure pénale depuis 1875.

Cette surpopulation recouvre une réalité extrêmement diverse. Elle est prégnante dans les maisons d’arrêt, où elle atteint en moyenne 143 %, alors qu’elle ne touche pas les centres de détention.

Ainsi, la densité carcérale dépassait les 200 % – 203 % exactement – au mois d’avril dernier à la maison d’arrêt de Béthune ; à Vendin-le-Vieil, en revanche, structure dont les caractéristiques sont très différentes et qui accueille une population pénale plus difficile, le taux d’occupation, à la même date, était de 60 %.

Dès ma nomination à la tête du ministère de la justice, je me suis attaquée à cette question de la surpopulation carcérale et à la résolution des difficultés qu’elle engendre – et que vous avez rappelées – en termes de qualité de prise en charge de la population pénale, de conditions d’exercice du personnel pénitentiaire, de sécurité des personnes détenues comme des agents de l’administration pénitentiaire, et d’efficacité même de la peine.

À la demande du Président de la République, j’ai organisé une réponse cohérente à ce phénomène au travers du plan pénitentiaire, dont je rappelle qu’il s’oriente autour de deux axes essentiellement.

D’une part, une refonte de la politique des peines ayant pour objet de favoriser le prononcé de peines autonomes dès lors que l’incarcération ne constitue pas la réponse la plus adaptée. Les dispositions correspondantes de la loi de réforme de la justice seront totalement effectives à partir du mois de mars 2020. Nous en attendons une baisse de la population carcérale d’environ 8 000 personnes à l’année.

D’autre part, un programme immobilier ambitieux, qui nous permettra de construire 15 000 places nouvelles de prison, dont 7 000 seront livrées d’ici à 2022.

Cette augmentation capacitaire s’accompagne d’une diversification et d’une classification du parc immobilier permettant à la fois des réponses très sécuritaires lorsque la dangerosité des détenus l’exige, mais également des possibilités accrues d’accompagnement des personnes qui recouvreront la liberté dans les mois qui suivent.

La loi de réforme de la justice comporte également des dispositions qui autorisent l’affectation des détenus indépendamment de leur statut pénal de prévenu ou de condamné, au regard de leur dangerosité, facilitant ainsi une meilleure utilisation des capacités d’accueil.

Les distinctions selon la nature des établissements, qu’il s’agisse des maisons centrales, des centres de détention, des maisons d’arrêt, des structures d’accompagnement vers la sortie, avec des niveaux de sécurité plus ou moins élevés, doivent cependant, à l’évidence, être maintenues, d’une part, parce qu’elles favorisent la constitution de parcours de peines adaptées, d’autre part, parce qu’elles déterminent pour partie les possibilités d’affectation.

Un travail a été engagé pour mieux articuler cette classification des établissements et les régimes de détention qui y sont associés. Seule cette action, qui est à la fois structurelle et systémique, permettra d’obtenir des résultats en la matière et de répondre à la question que vous avez posée sur les maisons d’arrêt de Béthune et de Vendin-le-Vieil.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Conway-Mouret

La parole est à Mme Éliane Assassi, auteure de la question n° 801, adressée à M. le ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ville et du logement.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Madame la ministre, en avril dernier, je suis allée visiter les locaux d’Interlogement 93, dont dépend le service intégré de l’accueil et de l’orientation – ou SIAO – de la Seine-Saint-Denis. J’ai été témoin de la détresse à la fois des personnes qui attendent des heures au téléphone pour s’entendre dire qu’il n’y aura pas de place de mise à l’abri – y compris pour des femmes enceintes –, mais aussi de celles et de ceux qu’on appelle les répondants, et qui opposent donc des refus tout au long de la journée.

Pour la première fois durant la dernière période hivernale, y compris dans les grands froids, le 115 de la Seine-Saint-Denis n’a pas pu couvrir toutes les demandes de mise à l’abri, malgré des renforts hivernaux.

Depuis le début du gel des places hivernales, le 115 enregistre quotidiennement 400 demandes non pourvues, dont 50 % émanent d’enfants.

M. le ministre Denormandie avait annoncé un programme de pérennisation de places hivernales en mars dernier. Nous avons appris le 10 mai que seules 157 places seront mises à disposition du SIAO 93. Or, d’après les estimations, il en faudrait plus de mille ! Nous sommes particulièrement surpris, pour ne pas dire révoltés, du sort réservé à notre département et, surtout, aux sans-abri.

Le ratio de pérennisation s’établit à vingt points de moins que le ratio national et francilien ; l’égalité républicaine est ici écornée. Clairement, le Gouvernement refuse de prendre ses responsabilités en matière d’hébergement et, de facto, ces difficultés seront reportées sur les collectivités locales et les services déconcentrés, déjà surchargés.

Les personnes en grande détresse s’abriteront – elles le font déjà, d’ailleurs – dans des hôpitaux, dans des commissariats, aux urgences hospitalières, dans les parkings, dans les entrées d’immeubles. Malheureusement, elles ne disparaîtront pas. Limiter les places ne limitera pas le nombre de personnes sans abri !

Madame la ministre, alors que le Premier ministre s’est engagé dans un travail de fond pour l’égalité républicaine en Seine-Saint-Denis, que proposez-vous ?

Debut de section - Permalien
Nicole Belloubet

Madame la sénatrice Assassi, votre question souligne les efforts réalisés par l’État pour les publics sans domicile, même si vous considérez que ceux-ci sont insuffisants. La mise à l’abri des plus démunis est en effet un enjeu de solidarité nationale. Des milliers de gens dorment encore dans la rue et, tant que ce sera le cas, l’action conduite par le Gouvernement devra se poursuivre.

Face à cette réalité, le Gouvernement agit à la fois avec humilité et détermination afin qu’une solution adaptée soit trouvée pour tout le monde.

Jamais autant de moyens n’ont été consacrés à l’hébergement d’urgence : 2 milliards d’euros. Tout à la fois, cela traduit la réalité de l’importance des besoins, que vous avez soulignée, mais cela signifie aussi qu’avec les 6 000 places pérennisées à la sortie de l’hiver, l’État finance et gère avec les associations 145 000 places en moyenne, soit autant de femmes, d’hommes et d’enfants qui ne dorment pas dehors.

Parmi les 6 000 places au niveau national, près de 160 ont été pérennisées en Seine-Saint-Denis. Ces places s’ajoutent aux places pérennisées l’hiver dernier. Ce sont ainsi quasiment 500 places qui ont été pérennisées en deux ans.

Vous soulignez que le nombre de places pérennisées à Paris est supérieur, avec 1 076 places – et non 1 400 comme vous l’avez évoqué. Mais le taux de places pérennisées par rapport au nombre de places demandées par les services déconcentrés est le même à Paris qu’en Seine Saint-Denis : il est de 76 %.

Le ministre de la ville et du logement, Julien Denormandie, est très attentif aux enjeux de répartition territoriale des places d’hébergement : il s’agit de ne pas concentrer la misère dans les endroits les plus en difficulté.

C’est en ce sens, par exemple, que, lors de la campagne hivernale, le Gouvernement a choisi d’ouvrir des sites en plein cœur du VIIe arrondissement de Paris, dans des locaux appartenant au ministère du logement et au ministère des armées.

En Seine-Saint-Denis, le taux d’équipement en places d’hébergement est de 9, 6 places, tous hébergements confondus, pour 1 000 habitants. Celui-ci est largement supérieur au taux d’équipement régional, qui est de 6, 9. La stratégie régionale de pérennisation des places hivernales vise à réduire ces déséquilibres territoriaux.

C’est d’ailleurs la même stratégie qui a été appliquée dans le cadre de la gestion des réservations des nuitées hôtelières. En effet, les SIAO réservent des nuitées hôtelières en dehors de leur département d’implantation, ce qui a conduit à une surmobilisation de certains territoires, notamment celui de la Seine-Saint-Denis.

Les objectifs du plan Hôtel 2015-2017 en termes de localisation ont ainsi permis un desserrement de la réservation hôtelière sur le territoire de la Seine-Saint-Denis par les autres SIAO franciliens.

Vous le constatez, madame la sénatrice, l’action du Gouvernement vise à la fois la satisfaction des besoins et la réduction des déséquilibres territoriaux.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Madame la garde des sceaux, ma question porte malheureusement sur une réalité, et il faut des actes plus forts que ce qui a été fait peut-être ces derniers temps. Je ne suis pas la seule à le dire : je suis accompagnée aujourd’hui d’agents du SIAO 93, qui vivent avec grande détresse le fait d’être obligés de refuser des places à des centaines de personnes dans mon département.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Conway-Mouret

La parole est à M. Michel Savin, auteur de la question n° 755, adressée à Mme la ministre des sports.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Savin

Madame la ministre, je souhaite attirer votre attention sur le développement important du marché des salles de sport et les enjeux de sécurité et de santé publique qui y sont liés.

En 2019, plus de cent nouvelles salles de sport devraient ouvrir rien qu’à Paris et dans la petite couronne parisienne. Ce sont aujourd’hui plus de 17 millions de Français qui pratiquent librement via ces salles, contre 10 à 12 millions il y a cinq ans, pour un chiffre d’affaires estimé à 2, 5 milliards d’euros annuels, contre 1 milliard d’euros en 2013.

Le développement croissant de ces salles peut être considéré comme une bonne chose du point de vue de la pratique sportive, mais il soulève cependant de nouvelles questions, notamment en termes de santé publique et de sécurité.

En effet, alors que les tarifs proposés sont parfois très faibles pour des réseaux de lieux de pratique se densifiant, des économies substantielles sont réalisées par les grands groupes propriétaires, lesquelles peuvent venir menacer la santé et la sécurité des pratiquants.

Force est de constater que, dans de nombreuses salles de sport en libre accès, les activités ne sont ni accompagnées ni encadrées par des professionnels, ce qui peut susciter des risques importants pour la santé et le bien-être des pratiquants. Je pense en particulier à la musculation, véritable pratique à risque sur le plan technique.

En France, l’encadrement des activités physiques est réglementé pour garantir la sécurité des usagers et tout professionnel de l’encadrement de ces activités doit être titulaire d’une qualification reconnue par le ministère chargé des sports. Or, dans ces salles de sport privées, un tel encadrement n’est pas toujours mis en place et les propriétaires ne sont donc pas soumis à cette obligation, car ces lieux de pratique sont uniquement des salles dans lesquelles le pratiquant loue l’accès à un matériel et il ne s’agit pas de salles de sport avec encadrement.

De plus, l’accroissement du recours au coaching virtuel dans ces espaces soulève également la question de la responsabilité et de sa qualification juridique.

Enfin, il n’existe pas de traçabilité des pratiquants, qui peuvent décider d’arrêter leur abonnement pour des raisons tant personnelles que médicales, sans que les opérateurs soient en capacité de mesurer ces impacts sur la santé des personnes inscrites.

Cette tendance ne va pas se ralentir : de grands groupes propulsés par de puissants fonds d’investissement s’implantent, profitant des espaces particulièrement rentables en l’absence de charges de personnel.

Aussi, madame la ministre, comment comptez-vous sécuriser ces pratiques afin de permettre à toujours plus de Français d’exercer une activité physique sans risque ?

Debut de section - Permalien
Roxana Maracineanu

Monsieur le sénateur Savin, vous avez raison, les centres de remise en forme constituent une réponse à la préoccupation grandissante des Français de faire du sport autrement, dans une logique non pas de compétition, mais plutôt de santé, de bien-être et de détente, au sein de structures susceptibles de s’adapter à leur rythme de vie et à leurs envies.

Il est évident que cette pratique doit être proposée dans des conditions de sécurité optimales.

Les prestations de remise en forme, quelle que soit l’enseigne qui les propose, relèvent du champ d’activités des établissements d’activités physiques ou sportives et doivent, à ce titre, répondre à la réglementation prévue par le code du sport, afin de garantir la sécurité physique et morale des pratiquants.

Les salles de remise en forme peuvent dispenser des activités encadrées par du personnel qualifié, mais aussi des activités non encadrées, en accès libre, avec mise à disposition de matériel. Ces salles, dites en accès libre, font l’objet de contrôles ciblés dans le cadre du programme national d’inspection et de contrôle. En 2018, cette démarche a permis d’effectuer de nombreux rappels à la réglementation, voire de contraindre certaines salles à la fermeture.

La réglementation des établissements recevant du public impose, quant à elle, la présence d’un membre du personnel ou d’un responsable en permanence lorsque l’établissement est ouvert. Néanmoins, elle ne s’applique pas aux établissements recevant du public dont la capacité maximale d’accueil est inférieure à vingt personnes, ce qui est le cas de nombreuses salles de remise en forme. Dans les autres, quelqu’un, qui n’est pas obligatoirement un encadrant, doit être présent en permanence.

Au même titre que tous les établissements d’activités physiques ou sportives, les salles de remise en forme sont soumises à des obligations de qualification, d’honorabilité et de sécurité. Ainsi, l’obligation de qualification s’applique aux éducateurs sportifs exerçant dans ces salles leur activité contre rémunération, lesquels doivent se déclarer auprès de l’administration et se voient délivrer une carte professionnelle.

Cette procédure permet de garantir aux pratiquants que les éducateurs sportifs satisfont aux obligations de qualification et d’honorabilité. Le grand public peut s’en assurer en consultant le site internet eapspublic.sports.gouv.fr, sur lequel apparaissent les éducateurs qui ont fait cette déclaration.

Il convient de rappeler que, à l’exception des baignades d’accès payant, il n’existe pas d’obligation de surveillance de la pratique des activités sportives en salle de remise en forme. Toutefois, l’exploitant de la salle qui organise de telles activités est dans l’obligation d’informer chaque pratiquant des capacités requises pour leur pratique. Il doit, par ailleurs, répondre à l’obligation générale de sécurité imposée par le code de la consommation.

De plus, nous avons créé la norme Afnor XP S52-412 « Salles de remise en forme », afin d’aider les exploitants de telles salles à assurer une sécurité maximale des pratiquants. Elle est d’application volontaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Conway-Mouret

Il faut conclure, madame la ministre. Vous avez très largement dépassé votre temps de parole, qui, je le rappelle, est de deux minutes et demie.

Debut de section - Permalien
Roxana Maracineanu

Outre cette norme, nous allons créer un observatoire de l’accidentologie du sport, afin d’analyser de manière fine les phénomènes que vous avez décrits et d’apporter à ce problème une réponse réglementaire plus adaptée.

Je vous prie de m’excuser, madame la présidente, pour ce dépassement de mon temps de parole.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Conway-Mouret

Eh oui, madame la ministre, le temps est compté !

La parole est à M. Michel Savin, pour la réplique.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Savin

À l’évidence, il y a un réel problème de sécurité dans ces salles. La preuve en est que, à la suite de contrôles du respect de la réglementation, certaines d’entre elles ont été fermées. J’espère que des procédures adaptées seront rapidement mises en place pour améliorer l’encadrement de la pratique de ces activités.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Conway-Mouret

La parole est à M. Jean-Jacques Lozach, auteur de la question n° 782, adressée à Mme la ministre des sports.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Lozach

Madame la ministre, deux fédérations nationales, chacune membre du Comité national olympique et sportif français, le CNOSF, et reconnue par le ministère des sports, ont actuellement en charge le cyclisme dans notre pays. Le cadre bicéphale dans lequel ces entités complémentaires et homogènes coexistent se heurte à certaines réalités économiques ainsi qu’au bon sens.

Fondée en 1881 sous le titre d’Union vélocipédique de France et agissant dans un champ de pratiques très populaires, la Fédération française de cyclisme, la FFC, qui, en 2017, comptait 116 000 licenciés à travers 2 600 clubs affiliés pour un budget s’élevant à 17 millions d’euros, assume la formation et la préparation des équipes de France, la participation aux grands championnats et, le cas échéant, leur organisation. Devenue pluridisciplinaire en 1984, elle est le socle à partir duquel se sont construits nos succès sportifs.

Reconnue d’utilité publique depuis 1978, agréée par le ministère chargé des sports depuis 1964 et par le ministère chargé du tourisme en 1991, la Fédération française de cyclotourisme, devenue la FFVélo en avril 2018, s’appuie sur un vivier de 122 000 licenciés répartis dans 3 000 clubs affiliés, avec un budget évalué en 2017 à 8 millions d’euros.

Son objet social peut se résumer ainsi : promotion de la pratique du vélo pour toutes et tous, en particulier les jeunes, les familles et les femmes, dans tous les territoires, aussi bien comme activité de loisir que comme pratique touristique ; lutte contre l’insécurité routière en contribuant à l’aménagement des territoires pour les cyclistes ; défense des intérêts du vélo dans les sports de nature et dans la perspective d’un développement durable.

Les relations entre ces deux fédérations s’inscrivent dans un paysage institutionnel pour le moins insolite. La FFVélo, ex-FFCT, dispose en effet d’une délégation de pouvoir depuis le 4 avril 2006 dans un champ exclusivement non compétitif, limitant ainsi les possibilités de développement en la matière de son homologue, également délégataire.

Dans un contexte où l’État rationalise son engagement financier auprès des fédérations sportives, les ressources propres de ces deux organismes tendent ainsi, par ce modèle pluriel, à se disperser.

En réaction, FFC et FFVélo s’organisent en s’inscrivant dans une logique d’élargissement de leurs cibles et en développant des pratiques de plus en plus concurrentielles.

La responsabilité que porte la FFC, notamment en matière de médailles et de résultats sportifs attendus, est importante. L’intérêt supérieur du sport français impose de lui offrir les moyens nécessaires pour remplir ses objectifs. Une réorganisation bénéficierait également à cette cause nationale qu’est la promotion de la pratique du cyclisme, laquelle entre en relation directe avec des enjeux de société tels que la santé, l’écologie ou la mobilité.

Ne faudrait-il pas envisager, madame la ministre, la mise en place d’un processus de rapprochement stratégique et harmonieux entre ces deux fédérations ? Vous l’aurez compris, j’aurais pu illustrer ce propos en évoquant d’autres disciplines qui ont émergé au cours des dernières années, par exemple dans le domaine des sports de combat.

Debut de section - Permalien
Roxana Maracineanu

Monsieur le sénateur Lozach, la fusion entre les deux fédérations, pour le cyclisme et le cyclotourisme, est un sujet récurrent. Il est aujourd’hui principalement porté par la Fédération française de cyclisme.

Chacune de ces deux fédérations bénéficie d’une délégation ministérielle, l’une pour le champ des activités sportives compétitives, l’autre pour celui des activités non compétitives, pour des motifs liés à la sécurité des pratiques sur les voies et espaces publics.

Cette délégation ministérielle, si elle accorde effectivement à son détenteur certaines prérogatives exclusives – délivrance des titres, sélections aux compétitions internationales et édiction de règles techniques et de sécurité dans les manifestations sportives pour la FFC ; simple édiction de règles de technique et de sécurité pour les manifestations s’agissant de la FFVélo –, ne peut toutefois en aucun cas être assimilée à une forme d’exclusivité en matière d’initiative pour le développement des pratiques, qui relève d’un champ distinct.

En dehors de ces deux fédérations délégataires, les nombreuses initiatives portées par différents acteurs du sport, comme les fédérations affinitaires, le sport scolaire, les collectivités locales, les associations locales, les entreprises et les organisateurs du secteur commercial, démontrent d’ailleurs que la liberté existe en la matière. Ces démarches sont encouragées par le plan national Vélo, qui inclut le « savoir rouler » pris en charge par le ministère des sports.

Aussi, si certains aspects des différentes formes de pratique du cyclisme peuvent conduire à engager une réflexion sur le possible rapprochement entre ces deux fédérations, celui-ci ne paraît pas pouvoir être mené à bien sans que volonté et projet communs aient été préalablement discutés entre ces organismes. Une prochaine réunion se tiendra sous l’égide du directeur des sports pour évaluer de part et d’autre la faisabilité d’un tel rapprochement. Nous encourageons cette dynamique, car nous partageons le souhait de réunir dans une seule fédération pratique de loisir et compétition.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Conway-Mouret

La parole est à M. Philippe Madrelle, auteur de la question n° 773, adressée à M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Madrelle

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, vous le savez, si la France demeure la première puissance agricole européenne avec près de 30 millions d’hectares de surface agricole utile, elle est toujours, hélas, la première utilisatrice de produits phytosanitaires en Europe.

À cet inquiétant constat il faut ajouter l’échec des deux plans successifs lancés depuis 2008 et destinés à réduire l’utilisation des pesticides de synthèse. L’usage de ces produits a continué à progresser malgré la volonté affichée par le Gouvernement d’atteindre les objectifs d’une réduction de moitié de l’utilisation des produits pharmaceutiques d’ici à 2025 et de la sortie du glyphosate d’ici à la fin d’octobre 2020. Force est de constater que l’État a réduit ses ambitions.

Vous me permettrez, madame la ministre, de m’interroger sur le rôle des préfets qui ont été nommés avec la mission de coordonner les secteurs publics et privés – la viticulture, les agences régionales de santé et les collectivités territoriales – engagés en faveur de la réduction de l’utilisation des produits phytosanitaires.

Le groupe Bayer-Monsanto a été condamné à plusieurs reprises, plus de 11 000 procès sont en cours, et les pratiques de ces firmes en matière de fichiers sont pour le moins surprenantes.

Des études menées récemment dans onze communes viticoles du Médoc ont démontré que, contrairement à ce que prétendent les organisations de la viticulture bordelaise, les pratiques ne s’améliorent pas. Alors que 8 % seulement du vignoble bordelais est converti en bio, ces études révèlent une contamination des femmes enceintes, des enfants, et des salariés des vignobles aux fongicides les plus dangereux. Cette persistance de l’utilisation des pesticides pose le problème des pratiques.

Il paraît urgent de suivre les recommandations du rapport de l’Organisation des Nations unies qui préconise de supprimer les autorisations de mise sur le marché des molécules dangereuses et d’interdire l’utilisation des substances classées cancérigènes, mutagènes et reprotoxiques.

Madame la ministre, pouvez-vous nous assurer que la dotation de 30 millions d’euros sera réellement affectée à la recherche pour trouver des solutions alternatives, destinées à cultiver et à protéger les cultures autrement, et respectueuses de la santé et de l’environnement ?

Ne croyez-vous pas qu’il est urgent de faire cesser cette situation d’empoisonnement généralisé ?

Debut de section - Permalien
Roxana Maracineanu

Monsieur le sénateur Madrelle, je vous prie d’excuser l’absence du ministre de l’agriculture, en déplacement à Bucarest pour un Conseil de l’Union européenne. Il m’a chargée de vous transmettre sa réponse.

Votre question porte sur les actions entreprises par le Gouvernement pour réduire l’usage des pesticides et les autorisations de mise sur le marché de certaines molécules dangereuses, telles que les substances classées cancérigènes, mutagènes ou reprotoxiques, les CMR.

Sur ce sujet, le cadre réglementaire européen est très strict et a été renforcé depuis dix ans. Le règlement européen relatif à la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques, en vigueur depuis 2009, prévoit que l’approbation européenne des substances actives dont le classement harmonisé est cancérigène, mutagène ou reprotoxique de catégorie 1 ne soit pas renouvelée, sans qu’il soit besoin de procéder à une évaluation des risques plus approfondie.

Ces critères d’approbation plus stricts que ceux qui figuraient dans la directive précédente, datant de 1991, ont conduit, depuis 2011, au retrait du marché de plusieurs dizaines de substances parmi les plus préoccupantes. Ils vont continuer à produire leurs effets dans les prochaines années sur la vingtaine de substances actives classées CMR 1 qui restent encore approuvées au niveau européen.

Concernant l’usage des pesticides, le Gouvernement, et plus particulièrement le ministère de l’agriculture, s’est pleinement saisi du sujet.

Le plan national d’actions sur les produits phytopharmaceutiques et une agriculture moins dépendante aux pesticides, publié le 25 avril 2018, réaffirme ainsi clairement notre ambition de réduire l’utilisation de ces produits de 25 % d’ici à 2020 et de moitié d’ici à 2025.

Au niveau européen, la France a demandé à la Commission européenne de mettre fin sans tarder à l’approbation des substances classées CMR de catégorie 1 et s’oppose systématiquement à toute proposition de prolongation ou de renouvellement de cette approbation.

Par ailleurs, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, l’Anses, a été saisie afin d’engager une revue de ces substances préoccupantes. Son avis est attendu à brève échéance, avant l’été. Sur cette base, le Gouvernement définira les actions à conduire conformément au plan d’actions. Si nécessaire, des mesures de restriction seront adoptées au niveau national.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Conway-Mouret

La parole est à M. Thani Mohamed Soilihi, auteur de la question n° 721, adressée à M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation.

Debut de section - PermalienPhoto de Thani Mohamed Soilihi

Je souhaite attirer l’attention du ministre de l’agriculture et de l’alimentation sur le développement de l’agriculture biologique à Mayotte.

À l’occasion des États généraux de l’alimentation, les Français ont exprimé leur souhait de consommer mieux, en privilégiant des aliments plus sains, cultivés dans le respect de l’environnement.

Afin de répondre aux attentes de nos concitoyens, le Gouvernement a lancé, le 25 juin 2018, après trois mois de concertation, le plan Ambition bio 2022, dont l’objectif vise à permettre le développement de la production et de la consommation de produits biologiques ainsi que la structuration des filières.

À Mayotte, où la quasi-totalité de la production agricole est destinée à la consommation, on a longtemps estimé que la certification « agriculture bio » était superflue tant la culture des produits locaux était assimilable à celle de produits biologiques.

Une étude publiée en 2017 par la direction de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt de Mayotte est venue attester de l’existence de ce fort potentiel de labellisation pour les productions de fruits et légumes, à condition que les pratiques ne changent pas.

Pourtant, depuis quelques années, les services de l’État constatent un recours accru aux produits phytosanitaires, notamment dans le secteur maraîcher.

Ainsi, par un arrêté du 14 janvier 2019, le préfet a mis sous surveillance la commercialisation des tomates produites à Mayotte, en raison d’un taux de contamination au diméthoate dix-sept fois supérieur à la dose maximale autorisée par l’Organisation mondiale de la santé. Il est apparu que d’autres fruits et légumes, ayant également fait l’objet de prélèvements, contenaient cette substance insecticide, interdite dans notre pays depuis 2016 et introduite sur le territoire par voie clandestine.

C’est la raison pour laquelle je souhaite connaître les mesures que le Gouvernement entend prendre pour développer le potentiel de labellisation existant localement et garantir la santé des consommateurs et des agriculteurs mahorais.

Debut de section - Permalien
Roxana Maracineanu

Monsieur le sénateur Thani Mohamed Soilihi, je vous prie d’excuser l’absence du ministre de l’agriculture, en déplacement à Bucarest pour un Conseil de l’Union européenne. Je vais vous donner lecture de sa réponse.

À la suite des États généraux de l’alimentation, ou EGA, les interprofessions agroalimentaires ont pris des engagements dans les plans de filière afin d’accélérer la transition agroécologique des systèmes alimentaires. Ce mouvement concerne non pas seulement la métropole, mais également tous les territoires ultramarins.

À cet égard, le programme Ambition bio 2022, qui a vocation à soutenir l’agriculture biologique en France, comprend un axe spécifique dédié au développement en outre-mer. Un fonds de structuration des filières, doté de 8 millions d’euros, contribue à la réalisation de ce volet.

Au-delà des enjeux liés à la conversion à l’agriculture biologique, un des leviers consensuels confirmés au cours des EGA consiste à encourager une production et une offre locales au plus près des territoires et, ainsi, de structurer des circuits de proximité répondant à l’exigence d’une alimentation favorable à la santé et respectueuse de l’environnement.

Pour y parvenir, le levier du projet alimentaire territorial, le PAT, est particulièrement pertinent. Sur la base d’un recensement des besoins locaux, ce projet, porté en général par les collectivités territoriales, offre l’avantage de réunir tous les acteurs concernés de l’amont à l’aval, dans le but de favoriser l’approvisionnement local, tout particulièrement au bénéfice de la restauration collective.

Le Livre bleu des outre-mer encourage le développement des PAT comme instruments permettant à la fois de structurer les filières ultramarines et de répondre aux attentes des citoyens à l’égard de leur alimentation.

Enfin, l’utilisation de produits phytosanitaires prohibés sur le territoire français, mais achetés et utilisés illégalement à Mayotte, est en effet très préoccupante. Je tiens à vous confirmer la pleine mobilisation des services de l’État qui agissent dans ce dossier pour informer et contrôler, en vue d’assurer la sécurité des consommateurs.

Dans le cadre du plan Écophyto, une campagne de communication annuelle vise à sensibiliser les utilisateurs aux risques encourus, qui sont juridiques, mais aussi sanitaires et environnementaux. Il s’agira, vous avez raison, d’amplifier ces campagnes d’information.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Conway-Mouret

La parole est à M. Thani Mohamed Soilihi, pour la réplique.

Debut de section - PermalienPhoto de Thani Mohamed Soilihi

Madame la ministre, je vous sais gré de m’avoir donné lecture de la réponse du ministre de l’agriculture. Vous l’avez compris, il s’agit non seulement de développer l’agriculture biologique, mais aussi d’assurer la sécurité des Mahorais. Je suis d’ailleurs heureux que M. le secrétaire d’État Laurent Nunez soit présent, parce qu’un volet de cette question relève du ministère de l’intérieur.

Je ne tarderai pas à prendre de nouveau l’attache des deux ministères afin que des réponses concrètes soient trouvées sur le terrain.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Conway-Mouret

La parole est à M. Claude Nougein, auteur de la question n° 659, transmise à M. le ministre de l’intérieur.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Nougein

Monsieur le secrétaire d’État, en France, le permis de conduire représente une partie de la vie des citoyens, notamment des seniors, pour lesquels le papier rose représente le dernier sentiment de liberté et, en quelque sorte, un gage de bonne santé.

En effet, aucun contrôle obligatoire n’est imposé aux détenteurs du permis B en dehors des cas de maladies spécifiques. Seule une infraction au code de la route peut provoquer une visite médicale, notamment après une annulation ou une suspension de permis. Malheureusement, il est alors souvent trop tard.

Récemment encore, en Corrèze, un cas a provoqué une grande émotion : un dramatique accident sur un parking sécurisé a coûté la vie à un enfant de 15 mois ainsi que de multiples traumatismes physiques et moraux à ses parents.

Pourquoi évoquer cet événement ? Parce qu’il aurait pu, selon moi, être évité : la personne responsable du choc, âgée de 85 ans, souffrait de difficultés visuelles très importantes, mais conduisait pourtant.

Aujourd’hui, plusieurs pays imposent des contrôles périodiques d’aptitude à la conduite. La Suisse oblige les conducteurs de plus de 75 ans à se soumettre à un examen médical tous les deux ans. Aux Pays-Bas, au Danemark ou en Finlande, un tel test est obligatoire à partir de 70 ans ; il l’est plus tôt encore en Italie et au Portugal.

Les statistiques indiquent que les seniors ont moins d’accidents que les autres tranches d’âge d’automobilistes, mais aussi que ces accidents sont souvent plus graves. Alors qu’elles ne constituent que 19 % de la population globale, les personnes âgées représentent ainsi 25 % des personnes tuées sur la route.

Monsieur le secrétaire d’État, je sais que le Gouvernement est soucieux de la lutte contre l’insécurité routière, je connais son engagement à ce sujet – nous l’avons vu avec les 80 kilomètres-heure notamment. Aussi, je tiens à vous interroger sur les perspectives envisagées par le Gouvernement à ce sujet. Ne pourrait-on réfléchir, dans le cadre de la lutte contre l’insécurité routière, à mettre en place un dispositif de contrôle d’aptitude, comme c’est déjà le cas pour les permis poids lourd et super-lourd en France, avec une visite périodique tous les deux ans pour les plus de 80 ans ?

Debut de section - Permalien
Laurent Nunez

Monsieur le sénateur Nougein, vous l’avez dit, les conducteurs âgés provoquent moins d’accidents que les autres. En revanche, ils courent davantage de risques d’être tués lors d’un accident corporel.

Leur fragilité physique, qui s’accroît avec l’âge, explique la remontée du taux de mortalité de ces conducteurs après 75 ans.

Le Gouvernement, qui souhaite défendre la mobilité et l’autonomie des seniors, tout en préservant la sécurité routière, promeut un certain nombre d’initiatives.

Ainsi, les associations, les collectivités locales, les caisses d’assurance maladie et les assureurs organisent, avec le soutien de l’État, des stages destinés à actualiser leurs connaissances et à améliorer la prise de conscience de leurs limites.

Par ailleurs, une large sensibilisation sur l’aptitude médicale à la conduite est régulièrement menée en direction des professionnels de santé et des seniors.

Le Comité interministériel de la sécurité routière de janvier 2018, parmi les dizaines de mesures qu’il a prévues, a également décidé de sensibiliser davantage les médecins traitants pour les pousser à aborder le sujet avec leurs patients. En outre, le Conseil national de la sécurité routière travaille actuellement sur le sujet « seniors, mobilité, conduite » et rendra ses conclusions au Gouvernement d’ici à quelques mois.

Sur le plan réglementaire, le code de la route prévoit un contrôle médical périodique pour les personnes atteintes d’une affection médicale incompatible avec la délivrance ou le renouvellement d’un permis de conduire ou susceptible de donner lieu à la délivrance d’un permis de conduire d’une durée de validité limitée.

Les conducteurs concernés doivent déclarer toute affection médicale, sous peine de voir leur responsabilité personnelle engagée en cas d’accident.

Ces dispositions sont complétées par celles de l’article R. 221-14 du code de la route, qui permet aux proches, lorsque ceux-ci le jugent nécessaire, de faire un signalement au préfet, qui peut alors imposer un contrôle médical au titulaire du permis de conduire.

Si la moitié des États membres indique vérifier l’état de santé des conducteurs âgés, le mode de contrôle varie de la simple déclaration sur l’honneur, au Royaume-Uni, à l’examen systématique de tous les conducteurs, en Espagne.

En raison de son absence d’efficacité, démontrée par les études, il n’est pas prévu d’instaurer à ce stade un contrôle médical spécifique pour les conducteurs seniors au-delà des dispositifs que je viens de rappeler et qui visent à mieux informer les personnes en contact avec ces conducteurs afin de prévoir certains examens médicaux. Aucune obligation n’est donc envisagée.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Nougein

Monsieur le secrétaire d’État, j’ai bien entendu votre réponse indiquant qu’il n’y aurait pas d’obligation. J’avais à l’esprit une démarche engagée avec discernement, et non un contrôle brutal à l’issue duquel 80 % des personnes âgées perdraient leur permis de conduire.

Si, dans un premier temps, on ne souhaite pas instaurer de contrôle, pourquoi ne pas inciter, par exemple par la publicité, les seniors à effectuer des visites médicales que l’État, voire les départements – certains d’entre eux ont ainsi instauré des visites de détection de maladies –, organiserait, afin de se voir recommander des lunettes ou d’autres mesures ? Ce dispositif serait à la fois non contraignant et très utile pour la sécurité routière.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Conway-Mouret

La parole est à M. Bernard Bonne, auteur de la question n° 761, adressée à M. le ministre de l’intérieur.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Bonne

Manifestement, les préfets rencontrent les plus grandes difficultés à faire appliquer leurs décisions en matière de politique migratoire, et notamment celles qui concernent les personnes ayant obligation de quitter le territoire national.

Le taux d’exécution de cette procédure est très faible, de l’ordre de 15 % à 20 %, et nombre de ces personnes restent sur le territoire national à la fin du délai de trente jours généralement accordé.

De même, moins d’une personne placée en rétention sur deux quitte effectivement le territoire à l’issue de la période de rétention.

Cette difficulté de l’État à faire appliquer ses propres décisions emporte de réels problèmes pour les villes. À Saint-Étienne, des bâtiments municipaux ont ainsi été illégalement occupés par des personnes elles-mêmes entrées illégalement en France.

Les maires, dont beaucoup se sont particulièrement investis dans l’accueil de réfugiés fuyant les récents conflits au Proche-Orient, sont particulièrement démunis face à de telles situations.

Aussi, monsieur le secrétaire d’État, pourriez-vous nous indiquer quelles mesures vous entendez prendre afin que les décisions de droit prises au niveau décentralisé soient effectivement exécutées ?

Debut de section - Permalien
Laurent Nunez

Monsieur le sénateur, la notification d’une obligation de quitter le territoire sanctionne un refus d’admission au séjour ou un rejet définitif d’une demande d’asile. Une fois épuisées les différentes voies de recours, ces décisions doivent s’appliquer systématiquement, je vous rejoins sur ce point. Le Gouvernement a mis en place une stratégie résolue à cette fin et y consacre les moyens nécessaires.

La réalisation d’un tel objectif passe d’abord par un cadre juridique adapté permettant l’application de ces décisions. À ce titre, les dispositions de la loi du 10 septembre 2018 permettent, depuis leur entrée en vigueur, de renforcer l’efficacité des éloignements. C’est, par exemple, le cas de l’allongement de la durée de placement en rétention administrative jusqu’à 90 jours, afin de pouvoir obtenir les documents de voyage nécessaires auprès des pays d’origine, ce qui est une des difficultés rencontrées. C’est aussi ce que permet le caractère désormais non systématiquement suspensif des recours introduits devant la Cour nationale du droit d’asile, après rejet de la demande par l’Office de protection des réfugiés et apatrides, l’Ofpra, s’agissant des demandeurs d’asile en provenance d’un pays d’origine sûr.

Cette politique nécessite également des moyens humains et matériels. Un plan ambitieux de rénovation et de création de places de rétention administrative a ainsi été engagé en décembre 2017, avec la création de 480 nouvelles places d’ici à 2020, soit une augmentation de près d’un tiers du parc existant.

Cet accroissement du parc se double d’un effort de remise à niveau des places existantes, avec un plan de rénovation. Pour ce faire, un effort budgétaire significatif a été consenti, avec une hausse de 85, 6 % des autorisations d’engagement et de 64, 5 % des crédits de paiement. En 2018, 331 places ont été ouvertes dans ce cadre ; les travaux se poursuivent pour atteindre 480 places d’ici à la fin de l’année prochaine.

Enfin, nous menons des échanges diplomatiques avec les principaux pays de provenance, pour prévenir les départs et faciliter les retours, notamment par la délivrance de laissez-passer dans des délais extrêmement réduits.

En 2018, tous ces efforts ont permis une augmentation de 13, 6 % des éloignements et une hausse de 10 % des éloignements forcés. Si ces résultats sont bons, nous ne nous en satisfaisons pas et nous poursuivons cette politique avec détermination. La mobilisation des services a été amplifiée et les données du début de l’année 2019 confirment nettement cette dynamique à la hausse. Soyez assuré, monsieur le sénateur, de la totale détermination du Gouvernement à poursuivre en ce sens.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Bonne

Je vous remercie, monsieur le secrétaire d’État, de votre réponse. Le Gouvernement fait, me semble-t-il, un effort en ce sens, mais je veux surtout attirer l’attention sur le fait que les maires sont en première ligne. Il est donc indispensable que les services de l’État, les préfets et les maires confrontés à de telles difficultés travaillent en étroite collaboration.

Vous le savez, de nombreuses associations caritatives prennent parfois une part un peu trop importante dans l’accueil des personnes en situation irrégulière. Aussi, il importe que le préfet soutienne et aide les maires qui se trouvent vraiment en grande difficulté quand des bâtiments communaux ou privés sont occupés.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Conway-Mouret

La parole est à Mme Catherine Deroche, auteure de la question n° 657, adressée à Mme la ministre des solidarités et de la santé.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Deroche

Je souhaite attirer l’attention de Mme la ministre des solidarités et de la santé et de vous, madame la secrétaire d’État, sur la situation médicale des patients atteints de maladies rares ou chroniques lorsque celle-ci n’est pas stabilisée au moment de la détermination de leur droit à la prestation de compensation à domicile du fait de leur handicap.

Certaines maladies sont souvent sévères, évolutives et induisent une perte d’autonomie. L’organisme du patient se dégrade peu à peu de manière inexorable. Il devient alors généralement nécessaire de mettre en place une organisation adaptée concernant la prise en charge de ces patients. C’est à partir des seuils de 50 % et de 80 % d’invalidité que le droit à une prestation de compensation, qui a le caractère d’une prestation en nature ou en espèces selon le choix du bénéficiaire, est ouvert.

Selon le référentiel du code de l’action sociale et des familles, les difficultés du patient pour l’accès à cette prestation sont évaluées sur « une durée prévisible d’au moins un an ». Or cette durée ne correspond pas à la réalité de l’évolution de certaines maladies, qui peuvent entraîner bien avant le délai légal des incapacités, voire des complications graves. Tel est le cas de la plupart des maladies rares – je pense notamment à l’atrophie multisystématisée, l’AMS, pour ne citer que celle-ci. Le plan national Maladies rares en compte 7 000, avec plus de 3 millions de personnes concernées, soit 4, 5 % de la population.

L’AMS, par exemple, a pour conséquence un déficit moteur sensoriel ou intellectuel dans 50 % des cas et une perte totale d’autonomie dans 9 % des cas. Pour les patients et leurs familles, cette maladie appelle des dispositifs ou des innovations qui nécessitent une prise en charge globale et autant que possible personnalisée et rapide. De plus, ces patients doivent rapporter leur pathologie à des administrations qui n’en connaissent ni l’existence, ni les conséquences, ni les difficultés induites dans la vie quotidienne.

Ma question est simple : est-il possible d’anticiper le besoin de compensation lié à la perte d’autonomie des enfants et des adultes en situation de handicap vivant avec une maladie rare ou chronique en raison du caractère intrinsèquement évolutif et inexorable ?

Debut de section - Permalien
Christelle Dubos

Madame la sénatrice, vous évoquez ce matin la situation difficile que rencontrent les patients – des enfants comme des adultes – atteints de maladies rares ou chroniques dont la situation médicale n’est pas stabilisée.

Le troisième plan national Maladies rares 2018-2022, lancé le 4 juillet 2018 par Frédérique Vidal, ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation, traduit la détermination de la France à mener une politique volontariste et solidaire en la matière ; j’y reviendrai dans quelques instants.

En matière d’accès à la prestation de compensation du handicap, la PCH, il convient tout d’abord de préciser que le taux d’incapacité ne constitue pas un critère d’éligibilité à cette prestation.

De manière plus générale, les référentiels qui définissent les règles d’accès des personnes souffrant de maladies rares aux droits et prestations visant à la compensation de leur handicap permettent déjà la prise en compte de la spécificité de ces situations par les équipes pluridisciplinaires des maisons départementales des personnes handicapées, les MDPH.

Ainsi, le référentiel pour l’accès à la PCH précise qu’il n’est pas nécessaire que la situation médicale de la personne soit stabilisée pour confirmer l’éligibilité à la prestation. Néanmoins, la durée prévisible des conséquences doit effectivement au moins être égale à un an.

Par ailleurs, les échanges réguliers entre les équipes médicales expertes de ces pathologies et les équipes des MDPH permettent la prise en compte des singularités symptomatiques de ces maladies.

Des efforts restent toutefois à poursuivre pour améliorer tant l’accompagnement des personnes souffrant de maladies rares que la coordination et le travail en partenariat autour de ces situations.

Le troisième plan national sur les maladies rares, que j’ai évoqué, porte pour cette raison l’ambition de partager l’innovation et de permettre un diagnostic et un traitement à destination de toutes les personnes concernées.

Ce plan comporte ainsi plusieurs axes stratégiques. Il vise la réduction de l’errance et de l’impasse diagnostiques. Il reconnaît le rôle accru des filières de santé Maladies rares pour coordonner les actions des multiples acteurs concernés, accompagner le malade lors de certaines étapes clés, comme l’annonce du diagnostic ou la transition adolescent-adulte, et promouvoir la recherche et l’innovation sur les maladies rares. Enfin, il prévoit le renforcement de la lisibilité du parcours pour les personnes malades et leur entourage par une information accentuée sur des ressources parfois encore méconnues, telles que le site d’information Orphanet.

Parmi les priorités de ce plan figure également l’accompagnement plus étroit des personnes atteintes de handicaps liés à une maladie rare et de leurs aidants. Une action spécifique du plan vise non seulement à renforcer les relations entre les acteurs des filières de santé Maladies rares et les MDPH, en particulier lors des phases charnières, mais également à compléter l’information des équipes pluridisciplinaires des MDPH.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Deroche

Je vous remercie de votre réponse, madame la secrétaire d’État. Le plan national Maladies rares est en effet important, et vous en avez évoqué plusieurs volets.

J’ai parlé plus particulièrement de l’AMS parce que j’ai été sollicitée dans mon département pour un cas dramatique. Au regard de la durée d’un an, entre le moment où la maladie a été reconnue et l’évolution très rapide de celle-ci, une personne n’a pu être prise en charge dans les quelques mois qui lui restaient à vivre, sans parler des conséquences familiales majeures : la femme de cette jeune personne travaillait et leurs enfants étaient scolarisés. La famille s’est heurtée à ce délai d’un an ainsi qu’à des interlocuteurs ayant une mauvaise compréhension de la situation, mais je ne le leur reproche pas, car ce sont des maladies extrêmement rares, avec un pronostic inexorablement difficile.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Conway-Mouret

La parole est à M. Guillaume Chevrollier, auteur de la question n° 731, adressée à Mme la ministre des solidarités et de la santé.

Debut de section - PermalienPhoto de Guillaume Chevrollier

Madame la secrétaire d’État, l’attractivité des hôpitaux publics et l’accès aux soins sont des problématiques qui touchent de nombreux territoires ruraux, et mon département, la Mayenne, n’y échappe pas, malgré la présence de trois centres hospitaliers à Laval, Mayenne et Château-Gontier.

J’aimerais évoquer avec vous la situation du centre hospitalier de Laval, qui attend un investissement fort et une mobilisation de l’État pour redynamiser son attractivité, la qualité de ses services et lui redonner une image positive.

La situation financière de l’hôpital de Laval est dans le rouge. En 2019, l’agence régionale de santé, l’ARS, n’a pas investi un euro et n’a financé aucun nouveau projet. C’est la limite du plan de retour à l’équilibre. Le matériel vieillit, les infrastructures également. Il n’y a jamais eu, en réalité, de véritable plan d’investissement dans les locaux, alors qu’il existe un projet médical d’établissement solide.

Se posent aussi bien sûr des problèmes d’effectifs médicaux, avec des suppressions et des non-remplacements de postes. L’hôpital manque aussi de médecins spécialistes. Par exemple, le service de pneumologie, qui est pourtant une spécialité du quotidien, n’est pas en mesure de prendre en charge les patients mayennais, qui sont alors transférés dans les hôpitaux d’Angers ou de Rennes.

Le service des urgences est, quant à lui, sous-dimensionné et en mauvais état pour les patients et le personnel, dont les conditions de travail se dégradent.

On retrouve ce diagnostic dans de nombreux hôpitaux périphériques. Pourtant, je suis convaincu que ceux-ci peuvent devenir de véritables pôles d’attractivité. L’enjeu est de garantir la permanence des soins et d’assurer un environnement médical de qualité.

Des choix budgétaires et des investissements plus stratégiques, une réorganisation de la gestion des moyens, une meilleure gestion hospitalière, tel est l’avenir que j’espère pour l’hôpital de Laval.

Madame la secrétaire d’État, que faites-vous pour renforcer l’hôpital de Laval et en faire vraiment le pôle central et fort du groupement hospitalier de territoire mayennais ?

Debut de section - Permalien
Christelle Dubos

Monsieur le sénateur, le département de la Mayenne, bien qu’exposé à des enjeux prégnants parfois difficiles en matière d’accès aux soins et de démographie médicale, se mobilise de façon remarquable, permettez-moi de le souligner, grâce à l’implication dynamique des élus, des collectivités locales, des professionnels de santé, des représentants des usagers et des services de l’État.

Il n’y a pas de territoire oublié : le ministère de la santé et l’ARS se mobilisent pour soutenir les projets, qui sont très nombreux et innovants dans ce territoire, et être à l’écoute des difficultés. C’est dans le cadre de cette dynamique partenariale, au plus près des besoins, que les réponses sont les plus adaptées. Coopération, aménagement du territoire, approche graduée et pluriprofessionnelle, innovation sont des marqueurs essentiels du département en matière d’accès aux soins.

Le groupement hospitalier de territoire du département de la Mayenne, le GHT 53, s’organise autour de trois établissements hospitaliers et quatre établissements de proximité ou assimilés, permettant ainsi un maillage territorial resserré.

En parallèle, une dynamique forte a été engagée avec les professionnels de santé pour assurer une organisation coordonnée de leurs interventions et le déploiement de parcours de santé.

L’ARS, en particulier, dans le développement de son projet régional de santé, est particulièrement impliquée dans l’accompagnement des trois centres hospitaliers – le centre hospitalier de Laval support du GHT, le centre hospitalier de Château-Gontier et le centre hospitalier du Nord-Mayenne – sous divers angles : soutenabilité financière pour accompagner les établissements dans leurs évolutions d’activité ; adaptation des organisations et coopérations pour répondre aux nouveaux enjeux du territoire ; accompagnement dans l’adaptation à de nouvelles démarches de soins au regard des évolutions technologiques et des difficultés rencontrées par le territoire, avec, notamment, le déploiement de la télémédecine.

Enfin, l’ARS est fortement mobilisée pour accompagner les acteurs dans la stabilisation de l’organisation, afin d’offrir une réponse adaptée en termes de soins d’urgence dans un contexte de tensions médicales très fortes sur le territoire, rendant complexe et sensible la permanence médicale dans la plupart des disciplines telles que la médecine d’urgence et l’anesthésie.

Des réunions régulières sous l’égide du GHT 53, aidé par les centres hospitaliers de la région, mais aussi celui de Rennes, avec l’appui de l’ARS, sont régulièrement organisées en vue de poursuivre l’offre de soins existante, sans fermer la porte à de nécessaires évolutions en tant que de besoin et en liaison étroite avec chacun des élus de ce territoire.

Nous sommes attachés à développer les aides à l’installation ainsi qu’au maintien des professionnels de santé, à la facilitation à l’exercice coordonné et au soutien des expériences tirées du parcours de santé des personnes âgées en risque de perte d’autonomie, le Paerpa, et des plateformes territoriales d’appui, les PTA, en diversifiant et en qualifiant les lieux et maîtres de stage pour les étudiants en santé. Nous soutenons toute forme d’innovation, notamment avec le déploiement réussi de la télémédecine. D’ailleurs, le projet de loi relatif à l’organisation et à la transformation du système de santé proposé par Agnès Buzyn, que vous examinez cette semaine, avec le plan Ma Santé 2022, répondra aussi aux enjeux des territoires et aux préoccupations des élus et des habitants.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Conway-Mouret

La parole est à M. Guillaume Chevrollier, pour la réplique.

Debut de section - PermalienPhoto de Guillaume Chevrollier

Je vous remercie, madame la secrétaire d’État, de votre réponse. Je compte sur le Gouvernement pour faire en sorte que l’hôpital de Laval soit vraiment le point fort du GHT mayennais et pour qu’il contribue à travailler à l’attractivité de notre territoire, qui ne manque pas d’atouts, notamment sur le plan de la santé.

Je vous fais une proposition. Puisque vous parlez du projet de loi Santé, avec le développement du numérique et de la télémédecine, pourquoi ne pas faire du centre hospitalier de Laval un pôle d’excellence dans ce domaine, en liaison avec le Laval Virtual Center, un autre pôle d’excellence mayennais, spécialisé sur toutes les technologies de pointe relatives au numérique ? Cette approche permettrait de donner une autre identité à l’hôpital de Laval et lui conférerait…

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Conway-Mouret

Vous avez très largement dépassé votre temps de parole, mon cher collègue !

Debut de section - PermalienPhoto de Guillaume Chevrollier

… une attractivité de nature à consolider la santé dans la Mayenne.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Conway-Mouret

La parole est à M. Jean-Louis Tourenne, auteur de la question n° 760, adressée à Mme la ministre des solidarités et de la santé.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Tourenne

Madame la secrétaire d’État, ma question sur le devenir de l’homéopathie précédait les conclusions de l’étude décidée par la Haute Autorité de santé, la HAS. Aussi, votre réponse ne pouvait être à l’époque que provisoire. Maintenant que ces conclusions vous ont été remises, est-il possible de connaître les décisions que vous serez amenée à prendre dans les jours qui viennent ?

Selon toute vraisemblance, vous vous orientez vers le déremboursement. J’imagine que vous avez étudié tous les scenarii possibles et leurs conséquences. Aussi avez-vous peut-être des réponses aux questions qui ne manqueront pas de se poser.

D’abord, j’évoquerai le nombre d’emplois menacés, dommage collatéral extrêmement grave et tragique pour les familles concernées. A-t-on pu estimer les conséquences sur l’emploi, s’il y en a, et imaginer les mesures d’accompagnement nécessaires pour les employés ?

Notons tout de même qu’il s’agirait d’une économie sans doute illusoire, éphémère et très faible : 55 millions d’euros pour le budget de la sécurité sociale, qui dépasse les 500 milliards. Cependant, s’il est démontré que les médicaments homéopathiques sont de nul effet, l’économie même homéopathique ne saurait être négligée.

Toutefois, 56 % des Français disent avoir eu recours à l’homéopathie et s’en être bien trouvés. Comment réagiront-ils alors qu’ils considèrent que l’action d’une molécule dépend tout autant de ses caractéristiques propres que de celles du milieu sur lequel elle agit ? Quel sera leur comportement face au déremboursement ? Vont-ils perdre toute confiance en un produit dont ils pensaient – à tort ou à raison – qu’il leur permettait de mieux vivre ? Continueront-ils de les utiliser ou auront-ils recours à des médicaments conventionnés ?

Décider du déremboursement n’aura-t-il pas des conséquences fâcheuses sur cette autre philosophie de la médecine qu’est l’homéopathie ? C’est une autre façon de considérer le patient, une philosophie qui a fait évoluer la médecine tout entière et continue de le faire, une approche globale qui appréhende la maladie comme la résultante d’un désaccord entre le corps et l’esprit.

Un tiers des médecins ont prescrit des médicaments homéopathiques et un grand nombre d’entre eux, convaincus, consacrent davantage de temps et d’écoute à leurs patients que leurs confrères.

Quelles motivations peuvent conduire au déremboursement ?

Il n’y a pas d’effet secondaire ; le seul risque résulterait d’une possible tendance du malade à différer le traitement adapté à une maladie grave. Mais est-ce le cas ? A-t-on réalisé une étude sur ce point ?

Quelle que soit votre décision, je souhaite – et je suis sûr que telle est votre intention – que soient bien prises en compte et en charge toutes les conséquences.

Debut de section - Permalien
Christelle Dubos

Monsieur le sénateur, l’évaluation de l’homéopathie est parfaitement justifiée dans la mesure où elle dispose, depuis les années soixante, d’un statut et d’un régime dérogatoires.

Le débat sur le remboursement et le déremboursement dure depuis longtemps.

Réévaluer les stratégies thérapeutiques remboursables permet de garantir aux patients des soins pertinents. Il est normal que les médicaments homéopathiques y soient également soumis comme toute autre spécialité.

La question qui est aujourd’hui posée est celle non pas de l’interdiction de l’homéopathie, mais de son remboursement par la solidarité nationale.

Nous avons un principe fort en France pour le remboursement des médicaments : prendre en charge les thérapies avec un effet scientifiquement prouvé.

C’est pour cette raison qu’Agnès Buzyn a saisi la Haute Autorité de santé le 1er août dernier. La commission de la transparence, commission spécialisée de la Haute Autorité de santé, est une instance collégiale scientifique et indépendante qui regroupe cliniciens et membres d’associations de patients et d’usagers.

Cette commission a fondé son évaluation sur les preuves disponibles. Elle a pris appui sur : l’analyse de la littérature nationale et internationale, avec plus de 800 études et recommandations françaises ainsi qu’internationales identifiées ; les données déposées par les trois laboratoires concernés ; et les contributions de parties prenantes – professionnels de santé, patients – provenant de l’appel à contributions mené à la fin de l’année 2018. Il convient d’attendre désormais l’avis définitif de cette commission, qui devrait être disponible d’ici à l’été. En effet, à ce stade, l’avis est provisoire et les laboratoires peuvent formuler des observations.

Enfin, je souhaiterais vous rassurer en indiquant que le Gouvernement est sensible au sujet de l’emploi.

Nous entendons les inquiétudes exprimées au sein des territoires quant aux risques qu’un éventuel déremboursement pourrait faire peser sur l’emploi. Mais je le redis : ne nous trompons pas de débat ! Nous ne sommes pas en train d’interdire l’homéopathie. Même en cas de déremboursement, les industriels continueront à produire, à vendre sur le territoire national et à exporter à l’international.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Conway-Mouret

La parole est à M. Gilbert-Luc Devinaz, auteur de la question n° 802, adressée à Mme la ministre des solidarités et de la santé.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilbert-Luc Devinaz

Madame la secrétaire d’État, le domaine de l’accouchement a ceci de particulier qu’il est pris en charge par deux professionnels différents et complémentaires : des médecins, les obstétriciens, et le corps des sages-femmes.

L’établissement de L’Arbresle, du fait de sa permanence de sages-femmes, s’est révélé être une structure périnatale nouvelle sans accouchements, mais axée sur une activité de prévention globale pré et postnatale. L’activité de prévention se situe en amont et en urgence, au moment où surgit un facteur de risque en dehors des heures ouvrables des consultations.

En supprimant l’hébergement, on supprime cette permanence des sages-femmes. Le code de la santé publique n’interdit aucunement une permanence d’activités de prévention pré et postnatale. L’évaluation de 2016 relative à la réduction des hébergements et aux sorties précoces a porté sur les suites de couches des maternités, mais n’a, en aucun cas, en aucune manière, concerné les séjours en centre périnatal de proximité.

Madame la secrétaire d’État, votre projet de santé défend une offre de proximité prioritaire. Sur quoi appuyez-vous votre décision de supprimer une permanence de sécurisation de prévention périnatale globale, alors que son financement reste modeste et rééquilibre une perte d’actes d’accouchement ? Le modèle de L’Arbresle correspond exactement à la gradation des soins que vous mettez en place. Comment pouvez-vous délaisser une activité novatrice de prévention précoce post-accouchement, qui contribue par ailleurs au démarrage du lien social, celui de la relation mère-enfant ?

Debut de section - Permalien
Christelle Dubos

Monsieur le sénateur, je vous remercie de votre question et, notamment, d’avoir précisé qu’il s’agit non pas de la fermeture du centre périnatal de proximité, le CPP, de L’Arbresle, mais « uniquement » de l’arrêt de l’hébergement de ce centre, mesure prévue et annoncée à tous les acteurs concernés depuis 2016.

Vous le savez, l’hébergement maintenu était autorisé à titre dérogatoire et constituait une exception à la réglementation.

Le code de la santé publique définit les missions des CPP, sans faire référence à de l’hébergement, mais en mentionnant principalement des activités de consultations pré et postnatales, qui seront bien maintenues dans ce centre.

L’agence régionale de santé Auvergne-Rhône-Alpes accompagne le centre hospitalier de L’Arbresle, y compris financièrement, dans le cadre de l’arrêt de cet hébergement, et ce de manière étroite avec l’équipe de direction du centre hospitalier qu’elle a reçue à plusieurs reprises.

L’hôpital de L’Arbresle est situé à vingt-cinq minutes de la clinique du Val d’Ouest, qui a ouvert des capacités d’hébergement en maternité dans un bâtiment neuf en mars 2016. Il est également à trente minutes de l’hôpital de Villefranche-sur-Saône et à vingt-cinq minutes de l’hôpital Saint-Joseph-Saint-Luc, auprès duquel l’hôpital s’est rapproché en 2017.

Cela a été rappelé, la fermeture de l’hébergement du CPP doit être progressive et accompagnée par l’ARS : annoncée dès octobre 2016, la fin de l’hébergement peut raisonnablement intervenir dans un délai de neuf mois à compter du courrier notifiant l’arrêt de l’hébergement.

En parallèle, le programme de service de retour à domicile des patients hospitalisés, dit Prado, destiné à favoriser le retour rapide des parturientes à domicile, est amplifié, à l’instar du développement des politiques de sorties précoces.

Je le répète, il s’agit uniquement de la fin de l’hébergement. Les activités de consultation, de dépistage et de préparation sont maintenues. Un travail itératif est actuellement en cours avec la direction de l’établissement pour travailler sur la définition d’un nouveau projet médical permettant d’assurer la pérennité de l’hôpital.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilbert-Luc Devinaz

Madame la secrétaire d’État, je vous remercie de votre réponse. Je vous signale tout de même que l’ARS n’a jamais voulu recevoir qui que ce soit dans ce centre, aucun des professionnels.

Ce centre accueille 600 familles par an. Vous avez rappelé la proximité d’un certain nombre d’hôpitaux, mais vous parlez par beau temps. Dans les monts du Lyonnais, même avec le réchauffement climatique, nous avons encore des hivers. Il faut en être conscient, en fermant ce centre, plus aucun lit postnatal n’existera entre Saint-Étienne, Roanne, Villefranche-sur-Saône et Écully, aux portes de Lyon. On ne peut tout de même pas demander à un nouveau-né de respecter les horaires d’ouverture des consultations ! Il nous restera à compter sur les pompiers pour certains accouchements.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Conway-Mouret

La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, auteure de la question n° 781, adressée à M. le ministre de l’action et des comptes publics.

Debut de section - PermalienPhoto de Cathy Apourceau-Poly

Madame la secrétaire d’État, le 26 mars dernier, les agents des finances publiques se sont mobilisés contre la mise en place d’ici à 2020 de la réforme « zéro cash ». Ils craignent en effet des suppressions de postes de comptables publics et de nouvelles réorganisations, avec, à la clé, des fermetures de trésoreries.

Mais, plus encore, la fin de la possibilité de payer et de recevoir du numéraire auprès des trésoreries et des centres des finances publiques pose un vrai problème démocratique.

Nos collectivités travaillent main dans la main avec les perceptions, les trésoreries, les centres des finances publiques pour tous les actes administratifs, qu’il s’agisse de déposer des recettes, de monter des dossiers ou d’obtenir un secours pour les habitants les plus fragilisés. Elles sont les premières à investir en France. Elles irriguent les territoires avec une expertise fine. Sans leur soutien, sans les conseils des agents des finances publiques, qui connaissent le terrain, chaque dossier deviendra infiniment plus compliqué.

Le chef de l’État a annoncé vouloir repenser la décentralisation en s’appuyant notamment sur les maires. Cette réforme leur coupe tout soutien. Le virage de la dématérialisation, les bus fiscaux pour sillonner les territoires ruraux, les plateformes téléphoniques… Toutes ces mesures ne peuvent remplacer l’expertise, la connaissance du terrain et la disponibilité des comptables publics qui sont répartis sur le territoire.

En outre, les comptables publics et les agents qu’ils encadrent prodiguent des conseils utiles à tous les décisionnaires territoriaux. Ils garantissent également la régularité des actes, protégeant ainsi les collectivités, notamment les communes, comme ils facilitent la gestion au quotidien des services publics.

La décision du ministère n’est pas encore publique, ni même officialisée, mais les craintes sont nombreuses depuis que des documents internes sur les réorganisations prévues ont fuité.

Nous connaissons tous les effets des dernières réformes de modernisation des services publics : fin de la délivrance de la carte nationale d’identité dans les communes, dématérialisation des relations avec les administrations centrales, difficultés accrues d’avoir un interlocuteur physique. Ce nouveau repli imposé aux services publics aura, quant à lui, des conséquences directes pour les collectivités. De nombreux maires jettent déjà l’éponge, notamment en ruralité, où ils se sentent souvent bien seuls.

Madame la secrétaire d’État, alors que les finances publiques sont, par nature, le service public le plus profitable pour les collectivités et les Français, quel est votre projet ? Comptez-vous casser cet outil républicain ? Quelles garanties l’État pourra-t-il offrir à chaque commune si vous retirez vos agents ?

Debut de section - Permalien
Christelle Dubos

Madame la sénatrice, vous avez appelé l’attention du ministre de l’action et des comptes publics sur la suppression de la gestion des espèces par le réseau de la Direction générale des finances publiques, la DGFiP.

Cette mesure n’est plus seulement une annonce, elle est bien inscrite dans la loi. En effet, l’article 201 de la loi de finances pour 2019 autorise l’État à recourir à un prestataire pour le maniement des espèces.

Ce recours est fortement encadré, d’une part, par la loi en termes de contrôle du prestataire ou de garantie financière, et, d’autre part par le marché en cours de passation, qui exige notamment de ce prestataire un réseau de points de contact au moins équivalent à celui des trésoreries.

Cette réforme vise à améliorer la sécurité des centres des finances publiques, compte tenu des risques associés au maniement du numéraire, à réduire les coûts de gestion des espèces et à redéployer le temps des agents vers des missions à plus forte valeur ajoutée et moins répétitives. Elle permet également de tenir compte du public encore important, souvent socialement défavorisé, qui utilise le paiement en espèces.

Certes, il s’agit d’une réforme importante, mais il ne faut pas non plus en exagérer la portée. À cet égard, je rappelle que les espèces représentent moins de 0, 3 % des montants encaissés par la DGFiP : ils ont diminué de 45 % entre 2013 et 2018. Cette mesure n’a aucun impact sur les autres missions exercées par les postes comptables, y compris celles qui relèvent de l’accueil du public, lequel continuera à être reçu pour tout besoin en termes d’information, de délais de paiement ou de paiement proprement dit par tout autre moyen que les espèces.

Par conséquent, en la limitant aux stricts encaissements, cette réforme laisse intacte la mission de service public exercée par la DGFiP. Bien au contraire, il me semble que le nouveau réseau de proximité des finances publiques que le ministre Gérald Darmanin appelle de ses vœux répond totalement à vos préoccupations et à vos deux inquiétudes.

D’une part, nous souhaitons apporter une offre de service nouvelle en augmentant très fortement les sites où un accueil physique de proximité sera assuré, notamment dans les maisons France service ou dans les mairies, si les maires le souhaitent. L’extension de l’accueil sur rendez-vous améliorera la réponse apportée aux questions des contribuables.

L’objectif est d’augmenter le nombre d’accueils de proximité de 30 % d’ici à 2022. C’est un effort sans précédent, qui rompt, enfin, avec la disparition programmée des accueils de service public.

D’autre part, cette évolution doit également permettre d’améliorer les prestations offertes en matière de gestion financière et comptable des collectivités locales et de conseil aux élus, notamment pour les collectivités les plus petites ou les plus fragiles. À cet effet, la DGFiP dédiera des cadres de haut niveau exclusivement affectés à cette mission et qui seront directement installés dans les territoires, au plus près des élus et des collectivités.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Conway-Mouret

La parole est à M. Daniel Chasseing, auteur de la question n° 799, adressée à M. le ministre de l’action et des comptes publics.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Chasseing

Madame la secrétaire d’État, ma question porte sur le projet de suppression, à plus ou moins long terme, de l’ensemble des trésoreries situées sur le territoire national et leur remplacement par un ou deux services facturiers par département.

Ce projet suscite une certaine émotion chez les maires et présidents de communautés de communes, qui, il faut bien le reconnaître, n’ont pas été consultés, même s’ils en ont été informés, et ce en particulier dans le monde rural.

Ce projet, conçu par la loi de finances pour 2019, s’il était concrétisé, ne sera pas sans conséquence sur l’avenir des territoires dans la mesure où il concerne, certes, les services des impôts des particuliers et des entreprises, mais aussi ceux des communes, notamment les petites, qui consultent très régulièrement leur trésorier, celui-ci exerçant de ce fait la fonction de conseiller financier, surtout dans les EPCI, les établissements publics de coopération intercommunale, éloignés des villes. Je le reconnais, à l’avenir, les choses évolueront, mais, pour l’instant, les maires ruraux s’inquiètent.

Ainsi, bien que le concept de déconcentration de proximité soit formulé, un certain nombre de questions se posent légitimement quant à la mise en œuvre de ce projet de réforme, après l’expérimentation en cours. En particulier, on se demande si les fonctionnaires seront bien au service des usagers en général dans les MSAP, les maisons de services au public, et au service rendu aux élus ruraux dans le cadre de l’établissement des budgets communaux.

Par ailleurs, qui paiera ces agents : l’État ou les collectivités territoriales ? S’il s’avérait que ce seront ces dernières, il serait regrettable – même si nous en avons l’habitude… – qu’une réforme de l’État se traduise par un transfert de charges.

Deux constatations, pour finir. D’abord, des risques résulteront de la disparation de la séparation de l’ordonnateur et du comptable, jusqu’ici l’un des fondements des finances publiques et un outil déterminant de la bonne gestion des collectivités territoriales. Ensuite, le Président de la République a annoncé lors de sa conférence de presse consécutive au grand débat, soit bien après le vote de la loi de finances pour 2019, qu’il faudrait enlever des fonctionnaires de Paris pour les remettre sur le terrain : la suppression des trésoreries ne serait-elle pas contradictoire avec cette volonté politique, que, par ailleurs, j’approuve ?

À titre personnel, je ne suis pas opposé aux réformes et j’ai bien conscience que l’administration doit évoluer en fonction de l’évolution de la société. Mais ne serait-il pas opportun d’adapter progressivement lesdites réformes, en particulier celle-ci, aux spécificités des territoires, à commencer par les territoires ruraux ? Plutôt que de supprimer toutes les perceptions d’un coup, le Gouvernement ne pourrait-il pas agir progressivement, pour laisser à celles du milieu rural le temps de s’adapter à la nouvelle donne ?

Les élus locaux attendent avec intérêt la réponse du Gouvernement sur ce sujet essentiel.

Debut de section - Permalien
Christelle Dubos

Monsieur le sénateur, la réponse qu’a préparée mon collègue Olivier Dussopt étant un peu longue, je me permettrai de vous en transmettre le texte ; dans cette réponse orale, j’irai à l’essentiel.

Le maillage de la DGFiP est l’un des plus denses de l’administration d’État, avec en 2019 près de 3 600 points de contact avec les usagers, particuliers, entreprises et collectivités territoriales. Cette présence importante traduit la diversité des missions qu’exerce la DGFiP et leur évolution, mais elle doit être repensée pour répondre davantage aux besoins actuels des usagers, dont les collectivités territoriales, notamment rurales, et permettre une amélioration des conditions de travail des agents.

La DGFiP voit donc ses missions évoluer profondément depuis deux ans et continuera à se transformer avec des chantiers d’ampleur. Le réseau se transforme en permanence pour s’adapter aux évolutions démographiques et aux nouveaux modes de relation avec le public, liés notamment aux nouvelles technologies, tout en cherchant à s’adapter le plus possible aux besoins.

Depuis 2012, près de 700 points de contact ont été fermés, soit environ 18 % du réseau. Jusqu’à présent, ces évolutions se décidaient annuellement, sans visibilité territoriale d’ensemble et sans que les élus, la population et les agents soient toujours bien informés en amont. Des accueils dans d’autres lieux, mutualisés avec d’autres services publics, étaient parfois prévus, mais pas de façon systématique.

À la suite des annonces du Président de la République et sous l’autorité du Premier ministre, le ministre de l’action et des comptes publics a souhaité engager une démarche fondamentalement différente, privilégiant une réflexion globale, pluriannuelle, concertée et prenant en compte l’attente forte de nos concitoyens de bénéficier d’un service public plus proche d’eux, mais aussi plus efficace.

Le Gouvernement souhaite en effet assurer une meilleure accessibilité des services publics pour la population, notamment dans les territoires où le sentiment d’abandon de l’État se développe. Il entend aussi porter une attention toute particulière aux usagers qui sont peu familiers, voire éloignés des outils numériques, sans renier la nécessaire modernisation des services publics.

Il s’agit de tirer parti des nouvelles organisations du travail comme des nouveaux usages pour s’organiser différemment : d’un côté, concentrer et dématérialiser les tâches non visibles par le public pour gagner en efficacité et en rapidité de traitement, sans dégrader la qualité du service public ; de l’autre, fournir une offre de service nouvelle en augmentant très fortement les sites où un accueil physique de proximité sera assuré.

Enfin, cette évolution doit permettre également d’améliorer les prestations offertes en matière de gestion comptable et financière des collectivités territoriales. Le ministre de l’action et des comptes publics écrira personnellement cette semaine aux grands élus et à leurs associations représentatives pour leur expliquer cette démarche.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Conway-Mouret

La parole est à M. Jean-Marc Boyer, auteur de la question n° 752, adressée à M. le ministre de l’économie et des finances.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Boyer

Madame la secrétaire d’État, la mise en œuvre, depuis 2018, de la dématérialisation des marchés publics dans nos petites communes rurales pose de réelles difficultés. C’est le cas, notamment, dans certaines communes de mon département, le Puy-de-Dôme, qui n’ont pas toujours les moyens techniques et humains de suivre sans embûches cette procédure.

La technicité de la dématérialisation est la première raison de ces difficultés. En effet, nos petites collectivités ont pour seul personnel un secrétaire ou une secrétaire de mairie, confronté à des termes techniques qu’il n’a pas l’habitude d’utiliser, notamment pour la création du profil acheteur et l’enregistrement du dossier de consultation.

La complexification constitue une deuxième raison qui rend ce processus difficilement compréhensible : il est plus long, des étapes auparavant gérées par d’autres acteurs sont désormais prises en charge par la collectivité publique et il existe plusieurs plateformes auxquelles il faut s’adapter à chaque fois. Sans compter la complexification de la réglementation des marchés.

La procédure en ligne a aussi un coût supplémentaire : plus la commune veut de visibilité sur son offre, plus elle doit payer, ce qui restreint l’atteinte de potentiels candidats si la commune ne peut faire cet investissement.

Les problèmes rencontrés face à la dématérialisation dans nos territoires ruraux sont liés aussi à la lenteur des connexions internet, qui, j’espère, sera résolue prochainement pour l’ensemble des communes puydômoises.

En définitive, nos petites communes sont confrontées à une complexification avérée de la passation de leurs marchés publics, sans disposer des ressources humaines et techniques pour y faire face. En outre, l’accompagnement de l’État a été mineur, voire inexistant. Certaines communes ont certes pris la décision de mutualiser un accompagnement, mais ce service présente un coût élevé pour le budget d’une petite commune rurale.

Des difficultés se posent aussi pour les petites entreprises dans la réponse aux appels d’offres. En particulier, l’utilisation de la signature électronique peut être un frein à la concurrence en excluant nos petites entreprises de certains marchés qui l’exigent pour présenter une offre. Du fait du coût élevé de cette signature, de nombreuses petites entreprises n’en prennent pas le certificat, ce qui les empêche de postuler à tous les marchés auxquels elles pourraient prétendre.

Madame la secrétaire d’État, quel est votre avis sur ce dernier point ? Plus généralement, quels moyens le Gouvernement compte-t-il mettre en œuvre pour faciliter et simplifier le quotidien de nos petites communes rurales dans la passation de leurs marchés publics et quel accompagnement compte-t-il leur proposer ?

Debut de section - Permalien
Christelle Dubos

Monsieur le sénateur, M. le ministre de l’économie et des finances m’a chargée de vous présenter sa réponse.

La dématérialisation obligatoire de la passation des marchés publics supérieurs à 25 000 euros est en effet en vigueur depuis le 1er octobre dernier.

L’objectif de cette dématérialisation, qui découle d’une obligation européenne, est de simplifier la vie des acteurs de la commande publique. Elle permet une meilleure gestion des données et évite des tâches lourdes et laborieuses, y compris pour les petits acheteurs et les petites entreprises. La Commission européenne évalue ainsi entre 5 % et 20 % la réduction du coût administratif consécutive à la dématérialisation.

Les services du ministère n’ont pas été saisis de difficultés d’application auxquelles l’échéance du 1er octobre dernier aurait donné lieu sur le terrain.

Par ailleurs, les conséquences de cette réforme sur les petites communes rurales doivent être relativisées, dans la mesure où celles-ci passent rarement des marchés d’un montant supérieur à 25 000 euros : près de 90 % des marchés conclus sont d’un montant inférieur. Il s’agit donc d’un seuil haut, et il était difficile de faire plus sans vider la réforme de son sens.

Au demeurant, le Gouvernement accompagne cette transition par la mise en œuvre d’un plan de transformation numérique de la commande publique. Adopté en décembre 2017, ce plan a été élaboré avec l’ensemble des acteurs de la commande publique – acheteurs, représentant des élus locaux, fédérations professionnelles, entreprises – pour fixer la feuille de route des prochaines années. Des guides « très pratiques » destinés aux acheteurs, mais aussi aux opérateurs économiques ont également été publiés sur le site de la direction des affaires juridiques des ministères économiques et financiers ; continuellement mis à jour, ils ont rencontré un grand succès, auprès tant des acheteurs que des entreprises.

Enfin, le Gouvernement a lancé, le 15 octobre dernier, l’initiative France Num pour la transformation numérique des TPE et PME. Cette initiative a pour objectif de rassembler sous une même bannière l’ensemble des actions menées par l’État, les régions et les partenaires pour accompagner les TPE et PME vers le numérique, notamment dans le cadre des marchés publics.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Conway-Mouret

La parole est à M. Laurent Duplomb, auteur de la question n° 746, transmise à Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurent Duplomb

Madame la secrétaire d’État, nos finances locales voient chaque année plus rouge. Ce n’est pas une nouveauté : malheureusement, nos communes et nos maires s’en lamentent depuis longtemps. Mais à chaque année sa surprise…

Cette fois, c’est la dotation de solidarité rurale, communément appelée la DSR, qu’on fait disparaître pour certaines communes, comme Saint-Paulien, dans mon département, la Haute-Loire. De fait, la fraction cible de la DSR a totalement disparu des ressources de cette commune.

Cette perte importante de dotation – 95 746 euros en moins du jour au lendemain – est due au fait que cette commune n’est plus classée parmi les 10 000 communes les plus pauvres de France. Le motif de ce déclassement est l’intégration de la commune dans une nouvelle intercommunalité, plus grande, par suite des obligations d’élargissement posées par la loi NOTRe. Pour autant, les données économiques du territoire n’ont pas changé : la commune ne s’est pas enrichie et, aujourd’hui comme il y a deux ans, fait partie des 10 000 plus pauvres. Simplement, elle a été obligée d’entrer dans une intercommunalité plus grande – désormais, une communauté d’agglomération.

Et ce n’est pas tout : la DSR fraction bourg-centre et la dotation nationale de péréquation ont également baissé, de 16 981 euros à elles deux.

Au total, donc, ce sont 113 000 euros de perdus pour la commune, soit plus de 25 % du montant total de ses dotations. La situation est d’autant plus mal vécue par elle et les nombreuses autres communes qui connaissent des sorts similaires qu’elles n’ont pas reçu d’information en amont sur cette forte perte de dotation, notamment pas, madame la secrétaire d’État, lors de l’agrandissement des intercommunalités.

En effet, lorsque l’intercommunalité a été conçue, elle l’a été dans sa globalité, et les communes n’étaient pas forcément contre une réflexion sur la modification du périmètre intercommunal. En revanche, aucun élément ne leur a été donné sur les conséquences de cette évolution, alors que l’article L. 5211-41-3 du code général des collectivités territoriales prévoit de tenir compte, pour le calcul des dotations, du degré d’intégration. À mon sens, cet article a été totalement bafoué !

C’est pourquoi toutes les communes de la communauté d’agglomération du Puy-en-Velay qui ont perdu leur DSR cible – Dieu sait s’il y en a… – ont écrit au ministre Collomb.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Conway-Mouret

Mon cher collègue, vous avez très largement dépassé votre temps de parole.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurent Duplomb

M. Laurent Duplomb. Le sujet est tellement passionnant, madame la présidente…

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Conway-Mouret

Je sais bien, mon cher collègue, mais veuillez maintenant poser votre question.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurent Duplomb

Madame la secrétaire d’État, le Gouvernement a compris le problème et décidé de verser cette année aux communes concernées 50 % des sommes perdues au titre de la DSR cible. Ma question est toute simple : pour les années suivantes, comment pensez-vous assurer une sortie en sifflet ou reconnaître cette perte incomprise au départ ?

Debut de section - Permalien
Christelle Dubos

Monsieur le sénateur, veuillez excuser Mme Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, qui m’a chargée de vous répondre.

Vous l’avez interpellée sur la situation d’une commune de votre département de la Haute-Loire, Saint-Paulien, devenue inéligible à la DSR cible l’année dernière. Cette fraction de la DSR est réservée aux 10 000 premières communes de moins de 10 000 habitants éligibles à au moins une des deux autres fractions de la même dotation.

Les communes rurales sont classées en fonction de leur potentiel financier par habitant et du revenu par habitant. Ces deux critères assez classiques permettent de mesurer, d’une part, les moyens financiers dont dispose la commune par elle-même et, d’autre part, si ses habitants ont ou non des besoins plus importants que les autres.

Ils sont appréciés non pas dans l’absolu, mais par rapport à la situation de toutes les autres communes : ainsi, même si ses indicateurs sont stables, une commune peut perdre son éligibilité à la dotation si, dans le même temps, ceux des autres communes se dégradent, faisant apparaître des besoins relativement plus importants.

Le critère du potentiel financier dépend pour partie de l’intercommunalité à laquelle la commune appartient : une commune, en effet, n’est pas dans la même situation selon qu’elle est rattachée à une intercommunalité riche ou pauvre.

La commune de Saint-Paulien a perdu en 2018 son éligibilité à la fraction cible de la DSR sous l’effet d’une hausse importante de son potentiel financier, due en partie à son adhésion à la communauté d’agglomération du Puy-en-Velay en 2017. Les données économiques du territoire ont donc bien changé.

Il n’existait pas, en 2018, de garantie de sortie permettant de lisser les effets d’une perte sèche de la DSR cible. Comme vous l’avez expliqué, monsieur le sénateur, un mécanisme de lissage destiné à corriger de tels effets a été mis en place à compter de cette année : une commune qui devient inéligible à la DSR cible perçoit désormais, l’année de sa sortie, une attribution correspondant à la moitié de la somme antérieurement perçue.

Ce mécanisme s’applique à titre exceptionnel en 2019 aux communes qui, comme Saint-Paulien, sont sorties du dispositif en 2018. Saint-Paulien voit donc sa DSR progresser de 27 % cette année, en récupérant la moitié de la fraction cible perçue en 2017.

Pour le reste de vos questions, monsieur le sénateur, je vous prie de bien vouloir vous rapprocher de Mme la ministre de la cohésion des territoires.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Conway-Mouret

La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian, auteure de la question n° 798, adressée à Mme la ministre du travail.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Taillé-Polian

Madame la secrétaire d’État, ma question porte sur la situation budgétaire critique des missions locales en Île-de-France.

Hier, lundi 3 juin, les salariés des missions locales franciliennes n’ont pas assuré l’accueil des jeunes, car, très fortement engagés dans leur travail, ils se sont mobilisés très nombreux pour maintenir la mission de service public de leurs structures au service de l’insertion socioprofessionnelle des jeunes Franciliens.

Actuellement, les 72 missions locales d’Île-de-France accompagnent 165 000 jeunes, dont 70 000 en premier accueil chaque année. Avec leurs 171 antennes, elles constituent le principal réseau capable d’assumer les enjeux territoriaux et de proximité dans le but d’accueillir et d’accompagner vers l’emploi et l’autonomie tous les jeunes, là où ils vivent. Pourtant, cette mission est menacée par le budget 2019, qui va conduire à la suppression de 70 emplois, soit la capacité d’accompagner 10 000 jeunes Franciliens.

Quelles sont les difficultés auxquelles le réseau des missions locales francilien doit faire face ?

D’abord, le financement de la garantie jeunes en Île-de-France est réduit de 45, 5 % en autorisations d’engagement, bien qu’on connaisse la situation extrêmement préoccupante de la jeunesse dans la région et alors même que les crédits pour la garantie jeunes dans le budget 2019 augmentent globalement.

Ensuite, la dotation de fonctionnement pour les missions locales d’Île-de-France baisse également, de 5, 5 % ; pour certaines structures, la perte peut atteindre 20 %.

Face à ces difficultés, l’association régionale des missions locales d’Île-de-France a rencontré le préfet de région, le 26 avril dernier : un rendez-vous manqué, avec des propositions bien en deçà des attentes – et même pires, sur la question du bonus-malus, c’est-à-dire du travail à l’efficience, que les projets initiaux !

Madame la secrétaire d’État, à l’heure où les missions locales sont mobilisées sur l’ensemble des politiques publiques d’insertion dans l’emploi des jeunes, du plan Pauvreté au plan d’investissement dans les compétences en passant par la garantie jeunes, il est temps d’entendre la mobilisation de centaines de leurs personnels, qui ont un sens aigu de leur mission de service public : que comptez-vous faire pour leur répondre ?

Debut de section - Permalien
Brune Poirson

Madame la sénatrice Sophie Taillé-Polian, la ministre du travail, n’ayant pas pu se rendre au Sénat ce matin, m’a confié le soin de vous répondre.

Vous avez raison : les missions locales sont un maillon essentiel du service public de l’emploi, qui repère, accueille, oriente et accompagne les jeunes en difficulté. Comme vous l’avez souligné, elles sont en première ligne dans le plan massif d’investissement dans les compétences auquel nous consacrons 15 milliards d’euros, notamment au travers de la garantie jeunes, qui bénéficie désormais à 100 000 jeunes par an.

À ce titre, la ministre du travail a souhaité que l’effort financier de l’État en faveur des missions locales soit préservé en 2019, malgré la contrainte budgétaire que nous connaissons tous. En Île-de-France, cette décision se traduit par une quasi-stabilité des moyens qui leur sont attribués, en baisse limitée de 1, 8 %. La répartition de ces crédits reste à la main des services en région, selon des critères prenant en compte les résultats, mais aussi le contexte dans lequel s’inscrit l’action des missions locales.

La ministre du travail a aussi souhaité que soit mise en œuvre à partir de cette année une globalisation des crédits de la subvention socle aux missions locales, ainsi que des crédits d’accompagnement de la garantie jeunes. Vertueuse et source de simplification dans son principe, cette réforme a pu entraîner des difficultés ponctuelles comme celles que vous évoquez.

Aussi la ministre du travail a décidé de procéder à un versement exceptionnel aux missions locales en octobre prochain. Ce versement soldera le précédent système et permet d’ores et déjà de résoudre les difficultés observées.

Madame la sénatrice, nous partageons tous le même objectif : l’emploi des jeunes. Pour mener cette bataille, il faut que les missions locales poursuivent et amplifient leurs actions auprès des jeunes et qu’elles soient bien connectées avec les problématiques d’apprentissage, d’accès à la formation et d’emploi, pour permettre à ces jeunes d’accéder à un avenir radieux, un avenir épanouissant !

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Conway-Mouret

La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian, pour la réplique.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Taillé-Polian

Je ne sais pas comment on peut parler d’avenir radieux pour les jeunes Franciliens quand, pas plus tard qu’hier, l’Institut d’aménagement et d’urbanisme de la région d’Île-de-France a souligné dans un rapport la très forte paupérisation des quartiers populaires de la région…

J’ai compris que la baisse serait maintenue, ce qui est extrêmement grave dans la situation sociale actuelle : ce n’est pas ainsi qu’on mobilisera les salariés des missions locales pour les jeunes, ni les jeunes eux-mêmes pour qu’ils trouvent les moyens de construire correctement leur avenir !

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Conway-Mouret

La parole est à Mme Monique Lubin, auteure de la question n° 800, adressée à Mme la ministre du travail.

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Lubin

Madame la secrétaire d’État, j’attire l’attention du Gouvernement sur les difficultés que pourrait entraîner pour certains lieux de vie et d’activités, définis notamment par l’article L. 312-1 du code de l’action sociale et des familles, l’absence de décret d’application des modalités de suivi de l’organisation du travail des salariés, pourtant prévu au cinquième alinéa de l’article L. 433-1 du même code.

Dans mon département, l’association L’Escale est tout particulièrement concernée. Cette structure accueille des jeunes préadolescents à titre temporaire ou selon un mode séquentiel, à temps complet avec hébergement en internat et encadrement par des équipes qualifiées. Ce travail est mené en partenariat avec le conseil départemental, l’éducation nationale et la protection judiciaire de la jeunesse. L’association bénéficie d’un autre agrément, pour accueillir, pendant les week-ends et les périodes de vacances scolaires, six enfants ou préadolescents âgés de 8 à 14 ans.

Pour cette mission, elle dispose de deux équipes de deux éducateurs permanents, aidées d’un salarié en contrat emploi d’avenir. Du fait de la spécificité de leur mission, les emplois du temps de ces personnels présentent des amplitudes horaires très importantes, rendant impossible l’application des règles de droit commun. L’association devrait en conséquence bénéficier du dispositif dérogatoire prévu à l’article L. 433-1 du code de l’action sociale et des familles, aux termes duquel les permanents responsables de la prise en charge exercent sur le lieu d’accueil un accompagnement nécessairement continu et quotidien des personnes accueillies.

Alors que la mise en œuvre de ce dispositif dérogatoire est subordonnée à l’application de modalités de suivi de l’organisation du travail des salariés définies par voie de décret, mentionné au cinquième alinéa du même article, il semble à ce jour qu’aucun décret n’ait été publié, ce qui pourrait susciter des difficultés d’application et favoriser l’émergence de contentieux de nature à remettre en cause l’existence même de ces structures.

Madame la secrétaire d’État, ces lieux d’accueil doivent être sécurisés : le décret d’application va-t-il paraître ?

Debut de section - Permalien
Brune Poirson

Madame la sénatrice Monique Lubin, je vous réponds en lieu et place de Muriel Pénicaud, ministre du travail, qui n’a pas pu se présenter devant le Sénat ce matin.

Vous vous inquiétez de la situation des lieux de vie et de leurs salariés permanents et assistants permanents, dont la réglementation en matière de durée du travail dépend d’un régime spécifique, inscrit à l’article L. 433-1 du code de l’action sociale et des familles. Cet article renvoie à un décret, qui à ce jour n’a pas été pris, relatif aux modalités de suivi de l’organisation du travail de ces salariés.

Vous vous interrogez aussi sur la nécessité d’adaptations législatives ou réglementaires afin de sécuriser le régime prévu à cet article.

Dans un arrêt récent, la Cour de cassation a considéré que l’absence de décret d’application de l’article L. 433-1 du code de l’action sociale et des familles fait obstacle à l’application du régime prévu par ce texte pour ces salariés. Elle a estimé que, faute de mise en place de modalités de suivi de l’organisation du travail des salariés par un décret, comme la loi le prévoit, l’exigence constitutionnelle de droit à la santé et au repos des salariés n’était pas assurée.

Or la présence de permanents auprès des publics fragiles est une nécessité et justifie des dérogations. C’est donc à raison que vous souhaitez une fondation juridique solide à ce régime dérogatoire, d’autant plus nécessaire depuis l’arrêt que j’ai mentionné.

Je rappelle que la directive 2003-88-CE concernant certains aspects de l’aménagement du temps de travail organise la protection des salariés en matière de durée du travail et permet des dérogations dans le droit national, notamment pour les activités de garde, de surveillance et de permanence caractérisées par la nécessité d’assurer la protection des biens et des personnes. Les activités visées par l’article L. 433-1 du code de l’action sociale et des familles semblent entrer pleinement dans ce cadre.

Les services du ministère du travail, en liaison avec ceux du ministère des solidarités et de la santé, étudient actuellement les possibilités de sécuriser ce dispositif.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Conway-Mouret

La parole est à M. Jean-Yves Roux, auteur de la question n° 757, adressée à M. le ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Roux

La Commission européenne a lancé voilà quelques semaines une procédure d’infraction contre huit pays européens, dont la France, pour réattribuer et renouveler les marchés publics dans le secteur de l’énergie hydroélectrique. Sur 399 ouvrages hydroélectriques français concernés, 150 verront leur concession arriver à échéance d’ici à 2023.

Or la ressource en eau et la contractualisation de ses usages ne constituent pas un bien commun comme les autres, soumis, comme les autres, à la concurrence. L’efficacité de notre politique énergétique en dépend, l’eau étant la première source d’énergie renouvelable.

L’efficacité de notre politique d’adaptation au réchauffement climatique, comme Ronan Dantec et moi-même le soulignons dans le rapport d’information que nous venons de publier au nom de la délégation sénatoriale à la prospective, dépend, elle aussi, de notre capacité à préserver pleinement la ressource en eau, notamment dans le sud de la France.

En outre, des bassins d’emplois et de vie dépendent aussi des choix de gestion qui pourraient être retenus sur le long terme.

Dans les Alpes-de-Haute-Provence, le barrage de Serre-Ponçon, édifié sur la Durance, est l’une des principales centrales hydrauliques de notre pays. Or, même si le métier historique de cette centrale est la production électrique, les barrages participent de la gestion de l’eau destinée à l’irrigation, à la régulation des crues et à l’eau potable. Les retenues d’eau suscitent aussi une importante activité touristique en été autour du lac de Serre-Ponçon. Ces activités multiusages font vivre toute une économie locale. Elles constituent également une source de revenus non négligeable pour les collectivités territoriales, qui connaissent mieux que quiconque la valeur de la ressource en eau.

Madame la secrétaire d’État, la gestion optimale des usages de l’eau du barrage de Serre-Ponçon semble à ce jour incompatible avec le morcellement des acteurs qui pourrait être lié à une éventuelle privatisation. Nous avons besoin du Gouvernement français aux côtés des élus des Alpes-de-Haute-Provence pour défendre une gestion ambitieuse des activités multiusages et du bassin de vie de la centrale hydraulique de notre département.

Où donc en est la procédure d’infraction, et quelle position le Gouvernement va-t-il tenir auprès de la nouvelle Commission européenne ?

Debut de section - Permalien
Brune Poirson

Monsieur le sénateur Roux, vous soulevez une question tout à fait fondamentale et sur laquelle nous travaillons beaucoup et dialoguons tout autant avec la Commission européenne.

Le droit français prévoit que les concessions hydroélectriques échues doivent être renouvelées par mise en concurrence. J’y insiste : il ne s’agit pas d’une privatisation, puisque l’État demeurera propriétaire des ouvrages et exercera un contrôle fort sur l’exploitation, via le contrat de concession.

Eu égard aux enjeux sociaux, économiques et écologiques liés à l’hydroélectricité, les gouvernements successifs se sont donné le temps de préparer la mise en concurrence des concessions hydroélectriques avec l’ensemble des acteurs.

Ces réflexions et les travaux parlementaires sur le sujet ont abouti à plusieurs mesures inscrites, sous le précédent gouvernement, dans la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte : la possibilité pour les collectivités territoriales d’être associées à la concession dans le cadre d’une société d’économie mixte hydroélectrique ; la possibilité de prolongations contre travaux dans le respect de la directive Concession ; l’option de regrouper des concessions hydrauliquement liées pour faciliter leur exploitation et leur sûreté. Cette dernière possibilité répondra, monsieur le sénateur, à votre préoccupation sur la Durance.

Le barrage de Serre-Ponçon, ouvrage de tête de la chaîne hydroélectrique de la Durance, joue un rôle essentiel, aussi bien pour la production électrique que pour l’irrigation et l’alimentation en eau potable, dans une région marquée par un fort déficit en eau pendant l’été. Le fonctionnement de ses aménagements a aussi un effet sur les nombreuses activités touristiques du lac, que nous connaissons tous, de Serre-Ponçon. Leur regroupement permettrait de prendre en compte les enjeux que vous soulevez, monsieur le sénateur, en assurant leur exploitation par un concessionnaire unique.

En ce qui concerne la procédure de mise en concurrence prévue par le code de l’énergie, elle prévoit une démarche d’écoute, de dialogue et de concertation. Ainsi, les différents enjeux, comme le tourisme ou le soutien à l’irrigation, pourront être discutés, et les différents usages intégrés, le cas échéant, à la nouvelle concession.

J’ajoute que les personnels, bien sûr, resteront en place.

Tel est, monsieur le sénateur, l’état d’esprit dans lequel nous poursuivons les discussions avec la Commission européenne. La France se bat pour ses barrages hydroélectriques, et notre position n’est pas toujours conforme à ce que souhaite la Commission européenne. Il faut continuer à défendre les positions françaises, et je vous remercie de votre vigilance à cet égard.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Roux

Je vous remercie de cette réponse rassurante, madame la secrétaire d’État. J’espère que vous veillerez à nous tenir informés, nous les élus, qui sommes très inquiets par rapport à ces aménagements.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Conway-Mouret

La parole est à M. Marc Laménie, auteur de la question n° 780, adressée à Mme la ministre auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laménie

Madame la secrétaire d’État, je souhaite vous faire part de mes vives inquiétudes quant aux menaces qui pèsent actuellement sur la voie d’eau dans le département des Ardennes et à l’échelon national, compte tenu de la réduction des moyens humains et financiers mis à la disposition des services de Voies navigables de France, ou VNF.

Le rapport d’activité de VNF pour l’année 2018, intitulé Pensez fluvial, souligne que « le fluvial est un écosystème vertueux », qui « répond aux trois piliers écologique, social et économique du développement durable. » L’établissement public précise d’ailleurs qu’il « assure un service public essentiel. »

Depuis juin 2018, depuis un an donc, le trafic fluvial est totalement interrompu sur le canal des Ardennes entre Le Chesne et Attigny à la suite de l’effondrement de l’écluse n° 21, située dans la commune de Neuville-Day, dont j’ai été le maire durant seize ans, et ce à cause du débordement d’un ruisseau après de fortes pluies d’orage.

Les délais de reconstruction de cette écluse ne sont toujours pas connus. Cette situation a des conséquences dramatiques pour l’économie locale en raison de l’arrêt total de la navigation qui soutient le tourisme fluvial dans cette vallée de vingt-six écluses.

Par ailleurs, une branche du canal de Vouziers est totalement inutilisable du fait de l’absence d’entretien et de l’envasement.

Le canal des Ardennes, qui relie les bassins de la Meuse à la Seine, est indispensable à l’activité économique et au tourisme. Il s’inscrit dans le cadre du pacte stratégique Ardennes 2022, qui a été signé le 15 mars 2019 avec l’État, et qui prévoit le prolongement de la voie verte et le contrat de canal.

Parallèlement, de vives inquiétudes subsistent sur le devenir de la navigation fluviale – notamment en ce qui concerne le fret – sur le fleuve Meuse, depuis le sud de Verdun jusqu’à Givet à la frontière belge.

En effet, même si l’on déplore l’arrêt du trafic français de fret par péniches, le tourisme fluvial constitue une priorité importante, comme en témoignent les efforts consentis par l’ensemble des collectivités locales : conseil départemental, intercommunalités, communes, région et Europe.

De plus, la voie verte Sedan-Charleville-Mézières-Givet, pour laquelle le conseil départemental des Ardennes s’est beaucoup investi, est un équipement extrêmement remarquable.

Enfin, il convient de rappeler le programme d’investissement portant sur la modernisation des barrages sur la Meuse et sur l’Aisne, soit plus de 300 millions d’euros dans le cadre d’un partenariat public-privé.

Au regard de cette situation, madame la secrétaire d’État, je souhaite connaître les mesures que l’État et VNF comptent prendre pour maintenir le trafic fluvial à la fois sur le canal des Ardennes et sur la Meuse.

Debut de section - Permalien
Brune Poirson

Monsieur le sénateur Laménie, le réseau de voies navigables géré par Voies navigables de France a souffert de décennies de sous-investissement et compte, pour cette raison, nombre de faiblesses, comme en témoigne l’avarie de l’écluse de Neuville-Day.

C’est la raison pour laquelle le Gouvernement, dans le cadre du projet de loi d’orientation des mobilités, augmente significativement les subventions versées par l’Afitf, l’Agence de financement des infrastructures de transport de France, à VNF.

En plus d’accroître les ressources propres de l’opérateur, cette hausse devra marquer un point d’arrêt à la dégradation du réseau. L’objectif est en effet de renforcer sa fiabilité. Ainsi, VNF a déjà pu engager les premières phases de remise en état de l’écluse de Neuville-Day.

Par ailleurs, dans son rapport remis au début de l’année 2018, le Conseil d’orientation des infrastructures pointe le fait que certaines voies navigables n’ont plus vocation à transporter du fret et n’ont plus de réel potentiel touristique. On y circule très peu, voire pas du tout.

Néanmoins, ces voies conservent de nombreux usages : patrimoine paysager, véloroute, alimentation hydraulique ou encore activités nautiques. Il est donc légitime d’examiner, pour chaque voie, les usages en cours et ceux qui pourraient se développer, afin d’adapter les niveaux de service et les priorités d’investissement.

C’est la démarche prospective qui a été engagée par VNF dans le cadre de la préparation de son contrat d’objectifs et de performance. La Meuse, de Charleville-Mézières à Givet et jusqu’à la frontière belge, fait l’objet d’une véritable structuration touristique que VNF souhaite pérenniser.

Pour les autres secteurs, un travail collaboratif avec les collectivités doit permettre de dégager des partenariats et de redynamiser certaines voies. Ces politiques partenariales pourraient utilement figurer dans le contrat d’objectifs et de performance que VNF est en train d’élaborer.

Je tiens, enfin, à souligner que toute adaptation des niveaux de service et des itinéraires dans le cadre de ce contrat d’objectifs et de performance ne pourra se faire qu’en liaison avec les collectivités locales, en fonction des projets que celles-ci portent et des partenariats qu’elles proposent. Ces changements se feront donc sous votre regard vigilant, monsieur le sénateur, puisque je vous sais très attentif à ce sujet.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Conway-Mouret

La parole est à Mme Corinne Féret, auteure de la question n° 788, adressée à Mme la ministre auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports.

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Feret

Madame la secrétaire d’État, nombreux sont les élus locaux et les citoyens, usagers de la SNCF, qui s’inquiètent des évolutions relatives à la présence du service public ferroviaire dans les territoires. Dans mon département du Calvados, on déplore déjà des fermetures de guichets et des réductions d’horaires : ceux-ci voient donc naturellement d’un mauvais œil les nouvelles menaces pesant sur plusieurs guichets et gares, notamment à Vire, Dives-Cabourg ou Pont-l’Évêque.

Le motif généralement invoqué pour justifier la fermeture des guichets est une sous-fréquentation de ces espaces au profit de la vente de billets par internet. D’une part, il est possible de considérer que, si la vente par internet augmente, c’est justement parce qu’il y a moins de points de vente. D’autre part, il est important de rappeler la réalité des zones blanches et de la fracture numérique dans notre pays, puisque 13 millions de Français n’utilisent pas ou peu internet, en raison des difficultés que son usage leur pose.

Dans le Calvados comme ailleurs, ces projets de fermetures contreviennent aux politiques d’aménagement du territoire. Ils posent la question de la présence ferroviaire de proximité en termes de lignes, de dessertes, de gares et de guichets dans des territoires où les habitants doivent évidemment pouvoir se déplacer pour aller travailler ou se soigner, et n’ont souvent pas d’autre choix que de prendre le train.

Cette situation renforce l’éloignement et le délitement des services publics, accentuant le sentiment d’abandon des populations, particulièrement en zone rurale. Il est regrettable de priver progressivement les usagers de la SNCF de la possibilité d’avoir un accueil physique de proximité, et de pouvoir échanger avec des interlocuteurs formés.

Ce faisant, je souhaiterais connaître l’intégralité des projets de la SNCF dans le Calvados, à savoir les gares menacées de fermeture, mais aussi celles qui sont concernées par des suppressions ou des réductions du nombre de leurs guichets.

De même, à l’heure où le projet de loi d’orientation des mobilités est en débat à l’Assemblée nationale, pouvez-vous me préciser les mesures que le Gouvernement entend prendre pour enrayer le démantèlement du service public ferroviaire de proximité et renforcer la concertation entre les régions, autorités organisatrices des services ferroviaires régionaux, SNCF Mobilités et les élus locaux, afin qu’aucune fermeture de gare ou de guichet ne soit plus décidée sans accord préalable, et sans que des solutions de substitution raisonnables et adaptées au territoire soient proposées ?

Debut de section - Permalien
Brune Poirson

Madame la sénatrice Féret, permettez-moi de rappeler que la politique d’ouverture des guichets et des bâtiments des gares régionales relève de la contractualisation entre l’opérateur et les régions.

En effet, en tant qu’autorités organisatrices des services ferroviaires régionaux, ce sont les régions qui supportent les coûts de distribution. Compte tenu de la transformation des comportements d’achat des clients et dans un contexte d’optimisation de la dépense publique, il est compréhensible que celles-ci veillent à un équilibre satisfaisant entre l’intérêt du service offert aux voyageurs et son coût pour les contribuables.

Le Gouvernement reste par ailleurs attaché à ce que SNCF Mobilités, en liaison avec les régions et les élus locaux, examine les moyens de substitution pour accompagner les usagers en cas de fermeture de guichets : il peut s’agir, par exemple, de confier la distribution des titres de transport régional à des partenaires implantés à proximité de la gare, tels que, entre autres, un office de tourisme ou un marchand de journaux.

Cela dit, l’État, en application du principe constitutionnel de libre administration des collectivités territoriales, n’intervient pas dans ces choix.

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Feret

J’entends bien votre réponse, madame la secrétaire d’État, mais il me semble que le Gouvernement, en particulier la ministre des transports, pourrait influencer et insister auprès des collectivités régionales pour que la demande de proximité et d’écoute et que la réponse attendue dans nos territoires ruraux puissent être prises en compte.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Conway-Mouret

La parole est à M. Michel Canevet, auteur de la question n° 804, adressée à M. le ministre de l’économie et des finances.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Canevet

Monsieur le secrétaire d’État, je souhaite attirer l’attention du Gouvernement sur les relations commerciales au sein des réseaux de distribution dans le secteur du bricolage.

Ces dernières décennies, on a observé la fermeture de nombreuses quincailleries dans nos communes au profit de moyennes et grandes surfaces dédiées au bricolage et à l’aménagement. Il me semble pourtant impératif que des enseignes de proximité demeurent pour des considérations d’aménagement du territoire et de service à la population.

Plusieurs adhérents au réseau de l’enseigne Weldom se sont trouvés mis en difficulté par des pratiques du réseau leur étant préjudiciables. Beaucoup de magasins ont fermé dans l’ouest, notamment dans les villes de Crozon, Châteaubriant, Brest et Plouarzel, ce qui est particulièrement regrettable.

Ces adhérents ont été amenés à saisir les services déconcentrés de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, la DGCCRF, afin d’apprécier les difficultés et, surtout, la non-application de la loi du 4 août 2008 de modernisation de l’économie.

Le rapport de l’enquête diligentée par les services de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi – la Direccte – de Bretagne depuis 2016 ayant été transmis à la DGCCRF et, donc, au ministère de l’économie et des finances, je souhaite connaître les suites concrètes qui y ont été données, en particulier pour ce qui concerne les pratiques commerciales dans le secteur du commerce du bricolage.

Debut de section - Permalien
Gabriel Attal

Monsieur le sénateur Canevet, vous interrogez le Gouvernement sur les relations commerciales au sein des réseaux de distribution dans le secteur du bricolage.

Garante de l’ordre public économique, la DGCCRF veille à l’équilibre des relations commerciales au bénéfice de nos entreprises et de l’économie française dans son ensemble. Les relations équilibrées entre les entreprises sont en effet indispensables au développement et, parfois, à la survie de nos PME et, donc, au dynamisme de notre économie. C’est pourquoi elles sont l’une des priorités que le ministère de l’économie a fixées à cette direction.

La DGCCRF est également fortement mobilisée pour garantir le contrôle de la loyauté des relations commerciales et s’assurer que les déséquilibres dans le pouvoir de négociation n’engendrent pas de déséquilibres contractuels, synonyme de difficultés économiques pour les filières. C’est évidemment le cas dans le domaine de la distribution alimentaire, secteur dans lequel le ministère s’est particulièrement impliqué avec les États généraux de l’alimentation.

Mais au-delà de cette action emblématique, la DGCCRF est également mobilisée dans d’autres secteurs : le numérique, tout d’abord, mais aussi la franchise, que vous avez évoquée. Des enquêtes ont ainsi été réalisées dans le secteur de l’habillement, du chocolat ou encore de la restauration rapide, et ont conduit à ce que le ministre de l’économie et des finances assigne de grands franchiseurs devant le tribunal de commerce de Paris, comme Subway l’année dernière.

Concernant le cas particulier auquel vous faites allusion et qui concerne la relation franchiseur-franchisé dans le domaine du bricolage, la question a d’ores et déjà été tranchée par un tribunal qui a rendu un jugement, devenu définitif, ayant donné tort aux plaignants.

Au-delà de cet exemple, je peux vous assurer de la pleine mobilisation du ministère de l’économie et des finances pour protéger les entreprises dans le secteur du bricolage comme dans tous les autres secteurs de notre économie.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Canevet

Monsieur le secrétaire d’État, je ne suis pas particulièrement satisfait de votre réponse. En effet, il me semble impératif de faire en sorte que, dans le secteur du bricolage en particulier, les relations commerciales entre franchiseurs et franchisés soient les plus sereines et les plus loyales possible.

Ce n’est pas le cas aujourd’hui, on le sait bien, puisque certaines remises de fin d’année ne sont pas reversées aux franchisés. On sait aussi qu’il existe des marges absolument considérables, qui obligent les commerçants à vendre beaucoup plus cher, ce qui les rend, de fait, moins compétitifs.

En tout cas, il faut que les services de la DGCCRF s’impliquent davantage et examinent d’un peu plus près les relations dans un secteur, celui du bricolage, qui est déjà relativement concentré dans notre pays.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Conway-Mouret

La parole est à Mme Patricia Morhet-Richaud, auteure de la question n° 745, adressée à M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation.

Debut de section - PermalienPhoto de Patricia Morhet-Richaud

Ma question s’adressait à M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation.

Dans nos départements, nous assistons à la prolifération du frelon asiatique – Vespa velutina nigrithorax –, notamment dans les Hautes-Alpes, où la survie des colonies d’abeilles est en jeu et, par conséquent, l’avenir de l’apiculture compromis.

Reconnu comme espèce exotique envahissante ayant un impact sur l’environnement, les cultures et les élevages, cet insecte apparu accidentellement en 2004 en Aquitaine fait désormais l’objet d’une réglementation spécifique liée aux dangers sanitaires qu’il représente. Le frelon asiatique est d’ailleurs classé à l’échelon national dans les listes des dangers sanitaires de deuxième catégorie pour l’abeille domestique – Apis mellifica.

Si la filière apicole est en charge de l’élaboration et du déploiement d’une stratégie nationale de prévention, de surveillance et de lutte contre le frelon asiatique, elle ne peut à elle seule lutter efficacement contre le frelon asiatique sans l’implication des services de l’État et des différents autres partenaires, conformément à la note du 10 mai 2013. Face à l’ampleur du phénomène, sans stratégie collective, comment imaginer venir à bout de ce fléau ?

Depuis plusieurs années, le Conseil national d’orientation de la politique sanitaire animale et végétale a défini des méthodes de lutte s’appuyant sur les actions de recherche financées par le ministère de l’agriculture et de l’alimentation. Or force est de constater qu’aucun moyen de lutte efficace n’a été validé à ce jour, malgré des expérimentations réussies et des initiatives prises notamment par les professionnels, qui permettent de capturer les reines et de neutraliser les nids.

C’est pourquoi, monsieur le secrétaire d’État, je souhaiterais connaître les moyens et les délais envisagés pour lutter contre le frelon asiatique.

Debut de section - Permalien
Gabriel Attal

Madame la sénatrice Morhet-Richaud, je vous prie d’excuser l’absence du ministre de l’agriculture et de l’alimentation, Didier Guillaume, à qui votre question s’adressait : en effet, il est actuellement en déplacement à Bucarest pour un Conseil de l’Union européenne et m’a chargé de vous donner lecture de la réponse qu’il a préparée à votre intention.

Depuis la découverte du frelon asiatique – Vespa velutina nigrithorax – en France en 2004, plusieurs textes législatifs et réglementaires ont été adoptés, au niveau tant européen que national, dans l’objectif de limiter la diffusion de cette espèce exotique envahissante et de lutter contre sa présence.

Les dangers sanitaires auxquels expose cette espèce sont susceptibles d’être réglementés par le ministère de l’agriculture, mais également par le ministère de la transition écologique et solidaire dans le cadre des enjeux liés à la biodiversité.

Au regard du degré d’envahissement du territoire métropolitain par l’espèce, les opérations de lutte contre le frelon asiatique, qui exigent des moyens humains et techniques, ne sont pas prises en charge par l’État. La destruction des nids reste à la charge des particuliers et peut être, le cas échéant, pris en charge en tout ou partie par des financements locaux émanant de collectivités territoriales.

Dans le cadre de la réglementation sur les dangers sanitaires mise en œuvre par le ministère de l’agriculture et de l’alimentation, la Vespa velutina nigrithorax est classée dans la liste des dangers sanitaires de deuxième catégorie, ou DS2.

Cela implique que l’élaboration et le déploiement d’une stratégie nationale de prévention, de surveillance et de lutte sont de la responsabilité de la filière apicole, l’État pouvant apporter son appui sur le plan réglementaire, notamment en imposant des actions aux apiculteurs pour favoriser la réussite de cette stratégie.

Or, actuellement, aucune stratégie collective contre ce frelon n’est reconnue comme efficace. Ce constat est partagé par les membres du comité d’experts apicole du Conseil national d’orientation de la politique sanitaire animale et végétale.

Afin d’y remédier, le ministère de l’agriculture et de l’alimentation subventionne des actions de recherche, qui visent à valider des méthodes de lutte contre le frelon en tenant compte de leur efficacité et de leur innocuité sur l’environnement, dont la méthode de piégeage collectif des fondatrices au printemps.

Une fois qu’une ou plusieurs méthodes auront été validées, une stratégie nationale pourra être mise en place et s’appuyer sur cette démarche. Dans cette attente, et pour les raisons que je viens d’indiquer, aucune mesure obligatoire ne peut être imposée, même si le Gouvernement est évidemment parfaitement conscient des enjeux que vous avez évoqués.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Conway-Mouret

La parole est à Mme Patricia Morhet-Richaud, pour la réplique.

Debut de section - PermalienPhoto de Patricia Morhet-Richaud

Monsieur le secrétaire d’État, votre réponse ne me convient que partiellement. Quinze ans se sont écoulés depuis l’arrivée du frelon en 2004 : c’est beaucoup trop long ! Toutes les colonies d’abeilles sont aujourd’hui en danger en France. Il y a donc une réelle urgence à valider des dispositifs collectifs de lutte contre le frelon asiatique. Merci de bien vouloir tout mettre en œuvre pour y parvenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Conway-Mouret

La parole est à M. Laurent Lafon, auteur de la question n° 733, adressée à M. le ministre de l’économie et des finances.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurent Lafon

Ma question porte sur les garanties et, plus précisément, sur les sanctions en cas de non-respect des règles en matière de limitation des vols sur l’aéroport d’Orly.

À l’occasion de la privatisation du groupe Aéroports de Paris, ADP, les élus locaux et les associations de riverains ont fait savoir qu’ils estimaient que le cadre juridique encadrant les conditions d’utilisation de l’aéroport d’Orly était insuffisant et nécessitait d’être renforcé.

Aussi, à la faveur d’un amendement parlementaire, la réglementation de l’aéroport d’Orly a évolué : une période de couvre-feu s’étendant de 23 heures 30 à 6 heures 15 du matin, ainsi qu’un plafonnement des vols annuels, fixé à environ 200 000 mouvements, ont été inscrits dans la loi. En revanche, aucune sanction n’a été prévue en cas de non-respect de cette nouvelle réglementation.

Or la privatisation d’ADP change forcément la nature des relations entre l’État et ADP, faisant naître des interrogations sur la capacité de l’État à faire respecter par un exploitant privé les contraintes propres à l’exploitation d’un aéroport en zone urbaine. En tout cas, il est nécessaire qu’un cadre soit fixé en amont de cette nouvelle organisation.

Monsieur le secrétaire d’État, êtes-vous en mesure de nous préciser les sanctions envisagées et appliquées en cas de non-respect de ces règles d’exploitation de l’aéroport d’Orly ? Quelle serait la nature de ces sanctions ? Sont-elles prévues dans le cahier des charges ou entendez-vous compléter le dispositif législatif ?

Debut de section - Permalien
Gabriel Attal

Monsieur le sénateur Lafon, vous interrogez le Gouvernement sur les garanties liées à la privatisation d’Aéroports de Paris.

Je tenais tout d’abord à vous préciser que le Gouvernement a soutenu l’inscription de l’amendement que vous mentionnez dans le projet de loi Pacte, lequel permet de sanctuariser les restrictions d’exploitation. Il s’agit d’une garantie importante contre les nuisances sonores pour les riverains, qui figure désormais dans le cadre de ce texte.

Le Gouvernement s’est attaché à ce que l’opération de privatisation d’Aéroports de Paris soit entourée de toutes les garanties nécessaires pour tenir compte des préoccupations des parties prenantes et, d’abord, évidemment, des riverains.

S’agissant de votre question, la loi Pacte prévoit des sanctions pécuniaires en cas de non-respect des obligations prévues dans le cahier des charges de la société. Par ailleurs, en cas de manquement d’une particulière gravité à ses obligations légales et réglementaires par ADP, l’État peut mettre fin de manière totale ou partielle à la mission confiée à ADP, c’est-à-dire l’exploitation des aérodromes franciliens.

En cas de violation de ces règles, les pouvoirs dont dispose l’État en application du cahier des charges sont donc très larges et dissuasifs, ce qui est de nature à répondre de manière adéquate aux préoccupations encore une fois légitimes que vous exprimez.

Par ailleurs, l’inscription du plafond de mouvements et du couvre-feu dans la loi, ainsi que dans le cahier des charges d’ADP, laisse inchangé le dispositif de sanctions applicable à ces restrictions d’exploitation : l’Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires continuera de sanctionner les manquements commis par les compagnies aériennes en contravention avec les règles environnementales, quel que soit le support réglementaire de ces dernières.

Le code des transports prévoit des amendes administratives en cas de non-respect de ce type de mesures d’un montant maximum de 40 000 euros.

Néanmoins, en 2018, aucune amende n’a été infligée, car les restrictions sont respectées et les compagnies retardataires qui se poseraient trop tardivement à l’aéroport en l’absence de dérogation sont déroutées. Ce fut le cas pour dix-neuf vols l’an passé.

Nous pouvons vous l’assurer : le dispositif restera inchangé avec les modifications législatives et les modifications du cahier des charges d’ADP envisagées.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Conway-Mouret

La parole est à M. Mathieu Darnaud, auteur de la question n° 774, adressée à M. le ministre de l’action et des comptes publics.

Debut de section - PermalienPhoto de Mathieu Darnaud

Ma question s’adressait à M. le ministre de l’action et des comptes publics.

Monsieur le secrétaire d’État, depuis la réforme instaurée par la loi de finances rectificative pour 2017, qui modifie le régime de la taxe de séjour, les hébergeurs, les établissements publics de coopération intercommunale et les offices de tourisme sont confrontés à des difficultés kafkaïennes comme notre pays peut en avoir le secret.

En effet, on constate de nombreux dysfonctionnements en raison de la complexité de la méthode de calcul de cette taxe.

Depuis le 1er janvier 2019, le tarif pour les hébergements non classés ou en attente de classement est calculé sur la base d’une fraction comprise entre 1 % et 5 % par personne et par nuitée hors taxe. Cette tarification est particulièrement lourde à calculer pour les hébergeurs, car ils doivent réévaluer le montant de la taxe à chaque réservation.

De plus, les plateformes de vente en ligne sont à présent chargées de collecter la taxe de séjour avant de la reverser aux collectivités, qui déplorent un manque de transparence, ainsi qu’une absence totale de contrôle. Cela vient notamment du fait que les plateformes ne tiennent pas compte du classement des hébergements qu’elles proposent, et collectent donc au barème unique et réduit des meublés de tourisme non classés.

Ne disposant à ce jour d’aucune liste officielle des plateformes de réservation en ligne qui collectent la taxe de séjour sur leur territoire, les collectivités sont préoccupées par l’éventualité que le produit de cette taxe devienne très aléatoire.

Tous ces dysfonctionnements risquent d’avoir des effets très défavorables sur les budgets 2019 des EPCI ou des offices de tourisme percevant la taxe de séjour qui jouent, comme c’est le cas dans mon département de l’Ardèche, un rôle essentiel dans le financement de la politique de tourisme.

Au regard de ces observations, M. le ministre envisage-t-il des adaptations pour remédier le plus rapidement possible aux difficultés rencontrées en la matière tant par les collectivités que par les hébergeurs ?

Debut de section - Permalien
Gabriel Attal

Monsieur le sénateur Darnaud, les articles 44 et 45 de la loi de finances rectificative pour 2017 et l’article 162 de la loi de finances pour 2019 ont institué une réforme importante de la taxe de séjour à compter du 1er janvier 2019.

Cette réforme repose sur deux mesures principales.

D’une part, les plateformes en ligne qui sont intermédiaires de paiement pour le compte de loueurs non professionnels doivent désormais collecter obligatoirement la taxe de séjour à la place des hébergeurs. D’autre part, les hébergements sans classement ou en attente de classement sont soumis non plus à un tarif, mais à un taux, adopté par les communes et les EPCI, compris entre 1 % et 5 % et appliqué au coût par personne et par nuitée.

Cette réforme représente une avancée, qui accroîtra le rendement de la taxe de séjour pour les collectivités et qui améliorera l’équité de traitement entre les professionnels du tourisme et les acteurs issus de la nouvelle économie.

La taxation proportionnelle n’est ni démesurément complexe ni particulièrement lourde. Le montant de la taxe de séjour appliquée aux hébergements sans classement est égal au produit entre le prix par personne de la nuitée et le taux adopté par la commune ou l’intercommunalité. Son montant est plafonné. Ces informations sont connues des hébergeurs et des plateformes, qui disposent au surplus d’un fichier public mis en ligne par les services de la DGFiP et qui recense le contenu de toutes les délibérations applicables sur le territoire national.

Il n’existe effectivement aucune liste officielle des plateformes de réservation susceptibles de collecter la taxe de séjour. L’établissement d’une telle liste est impossible, car de multiples acteurs locaux, nationaux et internationaux seraient susceptibles d’y figurer.

En effet, la notion d’intermédiaires de paiement pour le compte de loueurs non professionnels recouvre à la fois des plateformes internationales comme Airbnb ou Booking, mais également des agences de voyages ou des agences immobilières. L’existence d’une telle liste, qui, par construction, ne saurait être exhaustive, pourrait conduire à faire croire aux acteurs qui n’y figureraient pas qu’ils seraient dispensés de la collecte de la taxe et, donc, à accroître l’instabilité.

En outre, la loi de finances pour 2019 a considérablement enrichi les informations transmises aux collectivités locales et augmenté les sanctions juridictionnelles applicables en cas de manquement des hébergeurs ou des plateformes. Désormais, chaque commune ou intercommunalité recevra chaque année un état déclaratif complet, dans lequel figureront toutes les informations utiles pour vérifier l’exhaustivité de la collecte de la taxe de séjour.

Enfin, le risque d’une perte de recettes pour les collectivités locales ne semble pas avéré. Entre 2012 et 2018, le produit de la taxe de séjour a progressé de 78 %. Aucune autre imposition locale n’a connu un tel dynamisme. Le rendement de la taxe de séjour a augmenté de 8 % entre 2017 et 2018, date à laquelle certaines plateformes ont commencé à la collecter partiellement. Dès lors, la généralisation de la collecte pour certaines plateformes conduira vraisemblablement, malgré les ajustements qu’elle demande à celles-ci, à collecter un produit de taxe de séjour qui ne l’était pas avant 2019.

Monsieur le sénateur, j’espère avoir répondu à vos inquiétudes.

Debut de section - PermalienPhoto de Mathieu Darnaud

Malheureusement, monsieur le secrétaire d’État, vous n’avez pas réussi à me rassurer ni à apaiser les inquiétudes qui sont celles, à la fois des offices de tourisme et des établissements publics de coopération intercommunale.

Malgré les précisions que vous venez d’apporter, force est de constater qu’il demeure un grand flou. Il est aujourd’hui grand temps d’y mettre fin : nous serons vigilants sur le fait que la loi de finances pour 2019 lève ses ambiguïtés et saurons vous le rappeler si cela n’est pas le cas.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Conway-Mouret

La parole est à Mme Catherine Fournier, auteure de la question n° 750, adressée à M. le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Fournier

Selon l’article L. 131-6 du code de l’éducation, le maire est tenu de dresser, chaque année, à la rentrée scolaire, la liste de tous les enfants soumis à l’obligation scolaire et résidant dans sa commune. En complément, l’article R. 131-4 du même code dispose qu’il doit communiquer au directeur académique la liste des enfants manquants.

Il est ainsi indiqué que le maire peut mettre en œuvre un traitement automatisé de données des enfants concernés et précise les leviers mis à sa disposition. En l’occurrence, je cite l’article L. 131-6 : ces données « lui sont transmises par les organismes chargés du versement des prestations [sociales] ainsi que par l’autorité de l’État compétente en matière d’éducation ».

Certains maires du Pas-de-Calais, ayant tenté de se rapprocher de la caisse d’allocations familiales, la CAF, se sont vu opposer une fin de non-recevoir. Par ailleurs, les familles ne sont pas nécessairement allocataires auprès d’elle ; il est dès lors difficile de recenser les « enfants manquants ».

Comment faire, en pratique, pour repérer les enfants qui ne sont inscrits dans aucun établissement scolaire ou suivraient une instruction à domicile ?

Lors de l’examen du projet de loi pour une école de la confiance, j’ai déposé un amendement tendant à prévoir que les organismes précités, dès qu’un maire leur en faisait la demande, envoient systématiquement et chaque année la liste des enfants concernés. Les maires pourraient ainsi disposer de l’ensemble des éléments leur permettant de remplir correctement leur mission.

Cet amendement a été déclaré irrecevable au titre de l’article 40 de la Constitution, alors que la disposition est bien inscrite dans la loi, mais, on le constate, mal appliquée.

Monsieur le secrétaire d’État, quel dispositif complet, effectif et, donc, efficace pouvez-vous mettre en place afin de simplifier la mission des maires ?

Debut de section - Permalien
Gabriel Attal

Vous avez raison, madame la sénatrice Fournier, certaines communes rencontrent des difficultés matérielles et techniques pour identifier tous les enfants concernés sur leur territoire. Bien évidemment, l’abaissement de l’âge de la scolarité obligatoire à 3 ans, en amplifiant cette situation, appelle une attention toute particulière.

La réponse, c’est le travail et la collaboration entre les services au niveau local.

Lorsque votre question nous a été adressée, nous avons interrogé les intervenants dans le département du Pas-de-Calais. Le directeur de la CAF a fait savoir à nos services qu’il n’avait jamais eu connaissance de message de « fin de non-recevoir ». Par ailleurs, sur les dispositions concrètes de recensement, la CAF et la direction des services départementaux de l’éducation nationale, la DSDEN, sont en contact régulier. Elles sont prêtes à croiser leurs fichiers et à adresser un courrier conjoint aux maires et aux familles repérées.

On a déjà vu une telle coopération entre la CAF et la DSDEN, dans de nombreux territoires, notamment pour la mobilisation des familles concernant la scolarité des enfants de moins de 3 ans.

Par ailleurs, dans le Pas-de-Calais, un travail a été engagé pour mobiliser les inspecteurs de l’éducation nationale, afin d’accompagner et identifier les municipalités qui rencontreraient des difficultés, en particulier au travers d’un partenariat avec la CAF et les services de protection maternelle et infantile, ou PMI, sur les territoires.

Enfin, le maire a effectivement la possibilité d’automatiser le traitement des données. Mais ce traitement ne garantit en rien l’exhaustivité des données, puisque, par définition, seules les familles allocataires y sont recensées. Ainsi, les familles qui développeraient des stratégies complètes d’évitement républicain n’y apparaissent pas.

C’est donc vraiment un travail fin qui doit être mené, sur l’ensemble des territoires, au travers d’une coopération de tous les acteurs.

À la suite de votre intervention, madame la sénatrice, nous avons rappelé toutes les consignes. Les services du ministère de l’éducation nationale et de la jeunesse sont donc pleinement mobilisés sur le sujet, tout comme l’est la Direction générale des collectivités locales.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Fournier

Monsieur le secrétaire d’État, j’ai employé l’expression « fin de non-recevoir » car aucune réponse ni aucune suite n’ont été données aux demandes des maires. Certes, c’est une interprétation de ma part, mais l’on peut tout de même considérer que c’est bien de cela qu’il s’agit !

Il est toujours complexe pour une collectivité – je parle des grandes communes, non des petites – de fédérer, voire, simplement, d’identifier les autorités compétentes de l’État. Or, comme vous l’avez fait remarquer, monsieur le secrétaire d’État, désormais l’obligation de scolarité s’appliquera dès l’âge de 3 ans.

Les maires, sachez-le, essaient d’assumer cette obligation – qu’il est facile de leur transférer sans chercher à l’assumer soi-même – et ils en ont déjà suffisamment à remplir par ailleurs !

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Conway-Mouret

La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone, auteur de la question n° 764, adressée à M. le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Estrosi Sassone

Monsieur le secrétaire d’État, ma question porte sur la place de l’enseignement des langues régionales dans la réforme du baccalauréat.

Actuellement, une langue régionale vaut coefficient 2 lors du passage de l’examen du baccalauréat, mais la réforme qui sera mise en œuvre en 2021 bascule les langues régionales dans une notation en contrôle continu.

Avec cette réforme, l’enseignement des langues régionales court plusieurs dangers, à commencer par le désintérêt des élèves, qui risquent de se détourner d’une matière n’ouvrant plus une « possibilité de points ».

De plus, si la réforme permet en théorie de choisir pour spécialité n’importe quelle discipline, donc une langue régionale, certains professeurs s’inquiètent, car en pratique peu de lycées prendront la décision de définir une langue régionale comme spécialité et préféreront conserver les matières classiques ouvrant aux cursus généraux de l’enseignement supérieur et aux concours.

Avec la restauration du prestige des langues anciennes, qui seront dotées d’un coefficient 3, la question de la concurrence entre les options est directement posée puisque toutes ces langues représentent des vecteurs culturels.

L’offre pédagogique locale sera de fait profondément bouleversée. À Nice, par exemple, il existe une école bilingue nissart-français depuis 2013, dont la pérennité sera inévitablement remise en cause lorsque les parents réaliseront que les efforts de leurs enfants ne seront plus récompensés au baccalauréat.

Monsieur le secrétaire d’État, comptez-vous retoucher la réforme du baccalauréat en faveur de l’enseignement des langues régionales, alors que dans certains territoires l’attache à la langue locale est particulièrement forte et reflète aussi l’expression d’un patrimoine commun, de traditions, de racines historiques, d’un héritage ?

Debut de section - Permalien
Gabriel Attal

Comme vous l’avez indiqué, madame la sénatrice Estrosi Sassone, il existe dans de nombreux territoires un attachement aux langues régionales. Cet attachement, d’ordre culturel, est tel qu’il dépasse la question de la valorisation en points pour les résultats du baccalauréat.

Pour autant, nous avons tenu à ce que, dans la réforme du baccalauréat, la place des langues régionales soit non seulement confortée, mais aussi davantage valorisée.

Je rappelle que la réforme du baccalauréat et du lycée a fait l’objet d’une concertation avec des responsables d’associations œuvrant dans le domaine des langues régionales, ainsi que des représentants de la Fédération pour les langues régionales dans l’enseignement public.

L’arrêté du 22 février 2019 permet de choisir une langue vivante régionale comme enseignement de spécialité, au même titre qu’une langue vivante étrangère. C’est possible dès lors que l’élève suit par ailleurs un enseignement dans cette langue régionale en langue vivante A, B ou C. Elle bénéficie à ce titre d’un enseignement à hauteur de 4 heures en première, puis de 6 heures en terminale. Elle est évaluée dans le baccalauréat pour un coefficient 16 sur un coefficient total de 100.

Cela correspond à un réel progrès par rapport à la situation actuelle, dans laquelle la langue vivante régionale approfondie ne peut être choisie que par une minorité d’élèves, ceux de la série littéraire, dite série L.

Par ailleurs, pour le baccalauréat général, il est toujours possible pour le candidat de choisir une langue vivante régionale en tant qu’enseignement commun, au titre de la langue vivante B, et également en tant qu’enseignement optionnel, au titre de la langue vivante C.

S’agissant de la voie technologique, dans toutes les séries, le choix d’une langue vivante régionale demeure possible au titre de la langue vivante B dans les enseignements communs.

Pour l’enseignement optionnel de la voie technologique, le choix d’une langue vivante régionale est toujours proposé dans la série « Sciences et technologies de l’hôtellerie et de la restauration », en raison de l’intérêt évident que comporte un tel enseignement pour des élèves se destinant à des carrières où l’accueil et le contact avec le public sont primordiaux.

La réforme du baccalauréat conforte le poids des langues régionales dans l’examen. La langue vivante régionale choisie au titre de la langue vivante B constitue l’un des six enseignements communs ayant exactement le même poids dans l’examen, c’est-à-dire que tous ces enseignements comptent dans leur ensemble à hauteur de 30 % dans la note finale et, en y incluant les notes de bulletin, la note de langue régionale compte pour environ 6 % de la note finale.

S’agissant de la langue vivante régionale choisie au titre d’enseignement optionnel comme langue vivante C, tous les enseignements optionnels ont exactement le même poids et les notes de bulletins de tous les enseignements comptent dans leur ensemble à hauteur de 10 % de la note finale de l’examen.

La valorisation des langues vivantes régionales peut enfin s’opérer grâce à l’accent mis par la réforme sur l’enseignement des disciplines non linguistiques en langue vivante, notamment régionale.

L’arrêté du 20 décembre 2018 prévoit ainsi que, hors des sections européennes ou de langue orientale, les disciplines autres que linguistiques peuvent être dispensées en partie en langue vivante, donc en langue régionale, conformément aux horaires et aux programmes en vigueur dans les classes considérées. Par exemple, sur 3 heures d’histoire-géographie, une heure peut être dispensée en langue vivante régionale.

Madame la sénatrice, ces nouvelles dispositions contribuent toutes à valoriser l’apprentissage des langues vivantes régionales pour les élèves des lycées généraux et technologiques. C’est l’objectif politique que nous nous sommes fixé. Nous sommes évidemment prêts à examiner les problématiques locales et étudier la situation d’écoles ou de lycées que vous souhaiteriez porter à notre attention.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Conway-Mouret

La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone, pour la réplique.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Estrosi Sassone

Je vous remercie, monsieur le secrétaire d’État, de ces éléments de réponse. Aujourd’hui, les professeurs de langues régionales ne sont pas vraiment rassurés par le dispositif que le Gouvernement a prévu de mettre en place au niveau de cet enseignement. Ces langues, d’après nous, n’en sortiront ni renforcées ni revalorisées. Comme vous le savez, il y a moins de possibilités et le choix de l’option facultative est nettement défavorisé.

Ce qui a été possible pour les langues anciennes, dont l’enseignement était aussi menacé, doit également être possible pour les langues régionales. Celles-ci, comme je l’ai rappelé dans ma question, constituent de véritables vecteurs culturels : ce sont des langues de patrimoine, d’héritage, de culture et de tradition.

Je reviendrai vers vous car la Fédération des enseignants de langue et culture d’oc de l’éducation nationale a établi un argumentaire ne laissant aucun doute sur l’inquiétude que suscite, parmi eux, votre réforme du baccalauréat et de l’enseignement des langues régionales.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Conway-Mouret

La parole est à Mme Catherine Fournier, en remplacement de Mme Sylvie Vermeillet, auteure de la question n° 713, adressée à Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Fournier

Ma collègue Sylvie Vermeillet, sénatrice du Jura, souhaite attirer l’attention du Gouvernement sur les modalités de transfert de biens appartenant à des communes vers une commune nouvelle.

En effet, les communes historiques ont l’obligation de publier, auprès du service de publicité foncière territorialement compétent, le transfert de propriété des biens vers la commune nouvelle. Cela leur demande un travail considérable de recensement de toutes les parcelles du territoire communal, ainsi que de recherche des origines de propriété des biens à muter.

Certains notaires considèrent que l’arrêté préfectoral créant la commune nouvelle n’emporte pas transfert de droit automatique de propriété, parcelle par parcelle, sans la publicité nécessaire au service de publicité foncière compétent. Outre la lourdeur administrative, cette procédure a également un coût financier non négligeable pour les collectivités concernées.

Est-il possible de nous indiquer quelles mesures concrètes pourraient être envisagées afin de simplifier les procédures, en permettant un transfert systématique du patrimoine des anciennes communes ? Pourrait-il être envisageable, par exemple, que la simple publication des nouveaux numéros du système informatique pour le répertoire des entreprises – ou Siren – des communes au service des publicités foncières entraîne le transfert des biens des « anciennes » communes concernées, de manière systématique et globale ?

Debut de section - Permalien
Marc Fesneau

Madame la sénatrice, la création d’une commune nouvelle par fusion de communes existantes peut intervenir par délibérations concordantes des conseils municipaux des communes concernées ou être décidée par arrêté préfectoral, conformément au code général des collectivités territoriales.

Il ne s’agit pas d’un simple changement de dénomination ni de numéro Siren : cette opération entraîne la création d’une personne morale nouvelle.

Du fait de la fusion, les biens immobiliers qui faisaient partie du patrimoine des anciennes communes sont transférés dans le patrimoine de la commune nouvelle. Ces transferts doivent obligatoirement être publiés au fichier immobilier, en application des dispositions de l’article 28 du décret du 4 janvier 1955.

Le document publié au fichier immobilier constatant le transfert doit respecter les exigences de forme régissant la publicité foncière, conformément aux décrets du 4 janvier 1955 précité et du 14 octobre 1955, notamment l’identification complète des parties et la désignation précise des immeubles concernés.

En application de l’article 1042 A du code général des impôts, la publication de ce transfert est exonérée de taxe de publicité foncière et de contribution de sécurité immobilière, de sorte qu’il n’est pas nécessaire d’évaluer les immeubles.

Recenser dans l’arrêté de fusion ou dans un acte authentique administratif ou notarié l’ensemble des biens concernés par ces transferts, dans le respect des exigences de forme précitées, peut se révéler, comme vous l’avez souligné, lourd à réaliser en pratique, dans la mesure où les opérations de fusion de communes peuvent concerner un grand nombre d’immeubles.

Dans ces circonstances, les transferts de biens peuvent être constatés au fil de l’eau, c’est-à-dire immeuble par immeuble, à l’occasion des mutations postérieures à la création de la commune nouvelle.

Chaque transfert d’immeuble sera alors constaté dans un acte publié antérieurement ou concomitamment à l’acte de cession de cet immeuble par la nouvelle commune, ou dans une disposition de l’acte de cession lui-même.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Fournier

Monsieur le ministre, le Jura comptant 60 communes nouvelles, de réelles difficultés sont rencontrées dans ce département.

Dans le cas de fusions de sociétés commerciales, entraînant parfois des transferts d’actifs, la démarche est nettement plus simple. Ne serait-il donc pas possible d’envisager une simplification ? Mme Sylvie Vermeillet reste à votre disposition pour en discuter.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Conway-Mouret

La parole est à Mme Agnès Canayer, auteur de la question n° 727, adressée à M. le ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé des collectivités territoriales.

Debut de section - PermalienPhoto de Agnès Canayer

Ma question concerne le financement du service départemental d’incendie et de secours de la Seine-Maritime, le SDIS 76.

En 2017, dans le département de la Seine-Maritime, les centres de pompiers sont intervenus 66 165 fois pour des missions de secours, 6 227 fois sur des incendies, 3 114 fois sur des opérations diverses et 2 335 fois sur des risques technologiques. De plus en plus sollicités, ils répondent notamment aux effets de la désertification médicale et du vieillissement de la population. Acteurs de notre territoire, leur présence et leur maillage doivent être garantis et confortés.

Pourtant, comme a pu le soulever la Cour des comptes dans son récent rapport, en date du 26 mars dernier, la situation des SDIS et celle du corps des pompiers sont fragiles.

Plusieurs causes à cela : d’une part, la hausse des charges de personnel, qui représentent aujourd’hui 82 % des charges courantes ; d’autre part, l’arrêt de la Cour de Justice de l’Union européenne du 21 février 2018, considérant que les sapeurs-pompiers entrent dans le champ de la directive de 2003 sur le temps de travail. L’application stricte de cette directive aura des conséquences importantes sur le recrutement des volontaires, de plus en plus difficile depuis de nombreuses années.

Outre les problématiques de recrutement, les SDIS font face à des dépenses en augmentation, comme le prix du carburant ou encore celles qui sont liées à la mise en œuvre du règlement général sur la protection des données, le RGPD.

En parallèle, les financements s’effritent. Ainsi, le dispositif dit « de Cahors » impacte-t-il directement les SDIS, dont les principaux contributeurs sont les collectivités. En Seine-Maritime, cinq collectivités contributrices sont concernées par cette contractualisation : les villes de Rouen et du Havre, la métropole Rouen Normandie, la communauté urbaine Le Havre Seine Métropole et le département. Elles sont dans l’obligation de maîtriser l’évolution de leurs dépenses réelles de fonctionnement, parmi lesquelles figurent les contributions au SDIS.

Ma question est donc simple, monsieur le ministre : comment le Gouvernement compte-t-il accompagner les services départementaux d’incendie et de secours, notamment celui de la Seine-Maritime, qui sont pris en tenaille entre leurs nouvelles contraintes et la baisse de leurs financements ?

Debut de section - Permalien
Marc Fesneau

Madame la sénatrice Canayer, les contrats de maîtrise de la dépense publique, prévus aux articles 13 et 29 de la loi du 22 janvier 2018 de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022, traduisent les nouvelles modalités d’association des collectivités à la maîtrise de la dépense publique.

Les collectivités entrant dans le champ d’application de l’article 29 de la loi de programmation s’engagent sur un objectif annuel d’évolution de leurs dépenses réelles de fonctionnement.

Chaque année, les résultats de gestion font l’objet d’un examen partagé avec le représentant de l’État pour apprécier si l’objectif a pu être atteint.

Ces comparaisons, pour conserver leur pertinence, doivent être effectuées à périmètre constant. Aussi, le niveau des dépenses réelles de fonctionnement prend en compte « les éléments susceptibles d’affecter leur comparaison sur plusieurs exercices, et notamment […] la survenance d’éléments exceptionnels affectant significativement le résultat ».

Les évolutions réglementaires ne constituent pas des éléments exceptionnels à prendre en compte au titre de l’article 29.

L’article L. 1424-35 du code général des collectivités territoriales précise : « La contribution du département au budget du service départemental d’incendie et de secours est fixée, chaque année, par une délibération du conseil départemental au vu du rapport sur l’évolution des ressources et des charges prévisibles du service au cours de l’année à venir, adopté par le conseil d’administration de celui-ci.

« Les relations entre le département et le service départemental d’incendie et de secours et, notamment, la contribution du département, font l’objet d’une convention pluriannuelle.

« Les modalités de calcul et de répartition des contributions des communes et des établissements publics de coopération intercommunale compétents pour la gestion des services d’incendie et de secours au financement du service départemental d’incendie et de secours sont fixées par le conseil d’administration de celui-ci. »

Il résulte de ce qui précède que les contributions au SDIS des collectivités concernées ne pourraient avoir un impact sur la maîtrise des dépenses publiques que si leurs montants varient de façon significative entre deux exercices du fait de la survenance d’un élément exceptionnel.

Or les dispositions de l’article 29 de la loi de programmation permettent de faire face soit à des événements exceptionnels, soit à des besoins d’investissement précis, en prévoyant le retraitement des dépenses concernées.

Ainsi, en cas de catastrophe naturelle de grande ampleur qui nécessiterait d’apporter des financements complémentaires et urgents au SDIS, ces dépenses exceptionnelles pourraient faire l’objet d’un retraitement.

De même, une collectivité peut verser au SDIS une subvention d’équipement dès lors que celle-ci est accordée pour lui permettre d’acquérir ou de créer une immobilisation. Sous réserve que l’immobilisation ainsi financée soit identifiée dès la demande de financement, suivie à l’actif du SDIS et que l’entité versante soit capable de suivre l’existence du lien entre le financement octroyé et l’immobilisation acquise ou créée par le SDIS, cette contribution est bien inscrite en section d’investissement.

Elle n’aura alors aucun impact sur la norme de dépenses contractualisée, concernant les seules dépenses de fonctionnement.

Le dispositif contractuel a ainsi été conçu de manière suffisamment souple pour permettre aux groupements à fiscalité de poursuivre leurs prises de compétences sans effets négatifs sur les conditions d’action des SDIS.

Le Gouvernement a fait le choix de stabiliser ce dispositif, afin de ne pas compromettre la stabilité des relations contractuelles et d’être à même de l’évaluer dans sa conception initiale, résultant des échanges avec les associations d’élus dans le cadre de la Conférence nationale des territoires.

Debut de section - PermalienPhoto de Agnès Canayer

Je vous remercie de cette réponse, monsieur le ministre. On ne peut qu’adhérer à la nécessaire maîtrise de la dépense publique. Néanmoins, je relaie ici l’inquiétude réelle du SDIS 76. Ce dernier se trouve dans une situation particulière : deux de ses principaux contributeurs, finançant ses ressources à hauteur de 73 %, sont soumis à ces contraintes, engendrées par un fonctionnement normal, et non par des motifs exceptionnels.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Conway-Mouret

La parole est à M. Éric Gold, auteur de la question n° 806, adressée à Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Gold

Quel ne fut pas mon étonnement, monsieur le ministre, en recevant, de la part d’une conseillère municipale de mon département, une lettre détaillant la situation ubuesque dans laquelle elle se trouve aujourd’hui, pour avoir poursuivi ses activités d’élue pendant un arrêt maladie.

La caisse primaire d’assurance maladie – CPAM – lui réclame le remboursement de l’ensemble des indemnités journalières qui lui ont été versées dans le cadre de son arrêt maladie. Ces indemnités sont bien sûr liées à son emploi salarié, et non à son activité d’élue, puisque, en tant que simple conseillère municipale, elle n’a perçu aucune indemnité.

La CPAM lui reproche notamment sa participation à trois réunions du conseil municipal pendant son congé maladie. Or le médecin avait bien précisé sur l’arrêt de travail que, compte tenu de sa pathologie, les sorties libres lui étaient autorisées.

D’après les indications de la CPAM, cette précision est inutile et le médecin doit, dans le cas d’un élu, spécifier expressément sur l’arrêt de travail initial que toutes les activités liées au mandat sont autorisées, ce que la plupart des élus et des médecins ignorent.

Cette conseillère municipale, comme beaucoup d’autres, a eu le courage de poursuivre son mandat malgré la maladie. Le devoir de l’État n’est-il pas d’encourager toutes les formes d’engagement, notamment dans un contexte où la crise des vocations se fait de plus en plus ressentir – de manière plus prégnante à l’échelle municipale, sur des fonctions pour lesquelles, dans la majorité des cas, aucune indemnité n’est prévue et où chaque élu s’engage sur son temps personnel pour la collectivité ?

Trois questions se posent ici selon moi.

Comment améliorer le dispositif, pour éviter des situations totalement injustes, où des élus se voient réclamer plusieurs milliers d’euros pour avoir simplement tenu leurs engagements envers leur commune ?

Si le Gouvernement ne souhaite pas modifier le dispositif existant, comment améliorer l’information des élus et des médecins sur ces situations très spécifiques ?

Enfin, dans le cas d’un maire, si l’on considère qu’il ne doit pas poursuivre ses activités d’élu pendant toute la durée de son congé maladie, doit-on, dès lors, considérer que son pouvoir de police est inopérant, ce dernier n’étant pas transférable ?

J’insiste sur cette ultime question, qui, selon moi, décrit parfaitement l’absurdité de situations dans lesquelles peuvent se retrouver des élus en arrêt maladie : d’un côté, on leur demande d’assurer des fonctions primordiales à l’échelle de leur commune ; de l’autre, on leur demande de respecter l’absence de toute activité, au titre de leur arrêt maladie.

Debut de section - Permalien
Marc Fesneau

Mesdames, messieurs les sénateurs, comme la plupart d’entre vous, je connais les difficultés rencontrées par les élus locaux, notamment des plus petites communes, qui se trouvent en arrêt maladie.

Lorsque les élus locaux exerçant une activité professionnelle sont placés en congé maladie, ils perçoivent des indemnités journalières.

Le bénéfice de ces indemnités journalières est toutefois subordonné au respect des dispositions de l’article L. 323-6 du code de la sécurité sociale : le salarié placé en congé de maladie doit observer les prescriptions du praticien, se soumettre aux contrôles organisés par le service du contrôle médical, respecter les heures de sorties autorisées par le praticien et s’abstenir de toute activité non autorisée.

Ainsi, un salarié, par ailleurs élu local, placé en congé de maladie ne peut régulièrement exercer son mandat électif que si son médecin l’y autorise expressément sur l’arrêt de travail. Dans le cas contraire, il peut se voir réclamer le remboursement des indemnités journalières, avec, parfois, une sanction financière, la Cour de cassation assimilant effectivement les indemnités de fonction à une activité donnant lieu à rémunération.

Cette difficulté, que des élus de bonne foi ont pu rencontrer et dont vous avez donné un exemple, monsieur le sénateur Éric Gold, a été soulignée au cours des travaux de la délégation sénatoriale aux collectivités territoriales et à la décentralisation sur les conditions d’exercice des mandats locaux. Elle est effectivement le fruit d’un défaut d’information des élus sur la nécessité de préciser à leur médecin qu’il doit expressément les autoriser à exercer leur mandat électif pendant leur arrêt de travail.

C’est pourquoi nous avons demandé à nos services de travailler à la résolution de ce problème. Ils ont ainsi récemment élaboré, conjointement avec la Direction de la sécurité sociale, une fiche explicative relative aux congés maladie des élus, qui a été transmise à l’ensemble des associations d’élus aux fins d’information de leurs adhérents.

Cette fiche sera par ailleurs intégrée par l’Association des maires de France et des présidents d’intercommunalité à son guide de l’élu local, mis en ligne et régulièrement actualisé.

Dans son intervention du 25 avril dernier, le Président de la République a indiqué souhaiter que soit engagé un véritable travail sur le statut de l’élu. Le Gouvernement entend faire aboutir ce chantier avant la fin de l’été, s’inspirant d’ailleurs des travaux de la délégation aux collectivités territoriales du Sénat, pour que le prochain scrutin municipal se déroule dans un cadre juridique stabilisé, clarifié et prenant mieux en compte les difficultés des élus, notamment des petites communes.

Enfin, vous nous interrogez sur le devenir de l’exercice des pouvoirs de police d’un maire empêché d’exercer ses fonctions. Le droit commun y pourvoit.

D’une part, à titre préventif, le maire peut déléguer ses pouvoirs à un ou plusieurs de ses adjoints et, en l’absence ou en cas d’empêchement des adjoints, à des membres du conseil municipal, conformément à l’article L. 2122-18 du code général des collectivités territoriales.

D’autre part, si le maire se retrouve absent ou empêché sans avoir prévu de délégation particulière, il est provisoirement remplacé, dans la plénitude de ses fonctions, par un adjoint dans l’ordre des nominations et, à défaut d’adjoint, par un conseiller municipal désigné par le conseil ou, à défaut, pris dans l’ordre du tableau. Ce régime général de suppléance, prévu à l’article L. 2122-17 du même code, est destiné à assurer la continuité de l’action municipale et concerne également les pouvoirs de police du maire.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Gold

Je vous remercie de ces précisions, monsieur le ministre. Pour avoir interrogé un certain nombre d’élus et de médecins, je peux vous assurer que le message n’est pas passé pour l’instant. Les dispositifs que vous venez de décrire sont totalement méconnus.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Conway-Mouret

La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, auteure de la question n° 734, adressée à Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

Monsieur le ministre, dans un livre blanc paru en octobre 2018, la Banque des territoires s’est penchée sur les droits de passage télécom pour les collectivités territoriales.

La Banque confirme les problématiques que je constate aujourd’hui dans mon département, notamment à Franqueville-Saint Pierre et à Saint-Martin-de-Boscherville, deux communes de la métropole Rouen Normandie. Je veux parler d’une insécurité juridique liée à l’hétérogénéité du traitement des droits de passage sur le territoire national.

La loi du 26 juillet 1996 de réglementation des télécommunications, transposant le premier paquet Télécoms, a conditionné la délivrance d’une permission de voirie contre l’acquittement de redevances pour l’occupation du domaine public routier.

En 2004, la loi pour la confiance dans l’économie numérique a reconnu la compétence des collectivités territoriales en la matière, tout en instituant une compétence concurrente et partagée entre tous les échelons de collectivités territoriales, mais sans en définir les contours.

Le 9 octobre 2017, la métropole Rouen Normandie a adopté, par décision du conseil métropolitain, la création d’une taxe sur les droits de passage des opérateurs de télécommunications pour le domaine public routier.

Conformément au décret n° 2005-1676 du 27 décembre 2005, la métropole a aligné la tarification des droits de passage sur les montants plafonds fixés. Elle exerce donc un pouvoir fiscal, alors qu’elle ne dispose pas de la compétence de l’enfouissement des réseaux de télécommunications.

En effet, sous couvert d’exercer la compétence voirie, la métropole s’est attribué l’exclusivité de la collecte de ce prélèvement obligatoire. Or les travaux d’enfouissement des lignes de télécommunication ont été entièrement financés par les communes, qui devraient logiquement percevoir les recettes de la taxe sur les droits de passage des opérateurs.

Le 18 janvier dernier, lors d’une réunion du grand débat national à Souillac, le Président de la République a rappelé l’objectif de déploiement du très haut débit sur 100 % du territoire national à l’horizon 2020, défini par le plan France très haut débit en 2013.

De telles expériences n’incitent pas les communes à investir, et à s’investir, dans l’installation d’un réseau de télécommunications souvent coûteuse et techniquement complexe.

Une fois encore, le millefeuille intercommunal engendre des effets contre-productifs, faute de concertation. Au regard des compétences qui leur ont été attribuées en matière d’enfouissement des réseaux de télécommunication, la métropole ne devrait-elle pas, monsieur le ministre, reverser aux communes les recettes de cette taxe ?

Debut de section - Permalien
Marc Fesneau

Madame la sénatrice Morin-Desailly, la métropole Rouen Normandie est compétente en matière de voirie. À ce titre, conformément aux dispositions des articles R. 20-51 et R. 20-52 du code des postes et des télécommunications électroniques, c’est bien le gestionnaire du réseau occupé, c’est-à-dire en l’espèce le réseau de voirie, qui perçoit le montant de cette redevance.

Par conséquent, la métropole Rouen Normandie est bien compétente pour instituer et percevoir la redevance, quand bien même l’enfouissement des réseaux qui sont assujettis à la redevance a été réalisé par les communes et non par la métropole.

Toutefois, en cas d’accord réciproque entre la métropole et ses communes membres, il est loisible à l’intercommunalité de reverser tout ou partie du produit de la redevance à ses communes membres par l’intermédiaire d’une révision libre du montant de l’attribution de compensation, dans les conditions prévues au 1 bis du V de l’article 1609 nonies C du code général des impôts.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Conway-Mouret

La parole est à Mme Anne-Catherine Loisier, auteure de la question n° 751, adressée à Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.

Debut de section - PermalienPhoto de Anne-Catherine Loisier

Monsieur le ministre, ma question porte sur l’avenir des différents régimes zonés après 2020.

Il existe à ce jour huit régimes zonés en France et sept d’entre eux expirent en 2020. Ces régimes, nous le savons, permettent des mesures d’exonération fiscale en faveur des entreprises, d’exonération des charges sociales patronales ou encore des mesures connexes prises en compte dans les dotations aux collectivités ou pour l’octroi d’aides de la part d’agences de l’eau.

Si l’efficacité de certains de ces dispositifs doit être interrogée et évaluée, il est toutefois indispensable de ne pas laisser les territoires concernés sans perspective. De fait, que ce soient les zones de revitalisation rurale, les quartiers prioritaires de la politique de la ville ou encore les zones de développement prioritaire, ces régimes de zonage restent un outil dynamique et un soutien important que les acteurs des collectivités locales doivent pouvoir d’ores et déjà anticiper.

Je souhaiterais donc savoir, monsieur le ministre, comment le Gouvernement envisage le renouvellement de ces zonages. Est-il prévu de maintenir la révision au 1er janvier 2021, de la reporter après 2022, comme l’a fait la Commission européenne s’agissant des zones d’aides à finalité régionale, AFR, ou encore d’avoir une démarche plus progressive, avec adaptation des mesures et report des révisions de zonage après 2022 ?

Debut de section - Permalien
Marc Fesneau

Madame la sénatrice Loisier, la France connaît aujourd’hui huit régimes zonés, dont un zonage européen et sept régimes zonés d’initiative nationale.

Le zonage européen est celui des aides à finalité régionale, les AFR, qui permet d’accorder des aides à l’investissement aux entreprises, voire des aides au fonctionnement dans les outre-mer.

Parmi les sept régimes zonés d’initiative nationale, on trouve : les ZRR, les zones de revitalisation rurale, les zones franches urbaines, les quartiers prioritaires de la politique de la ville, les zones de restructuration de la défense, les bassins d’emploi à redynamiser – j’essaie d’éviter les acronymes… –, les bassins urbains à dynamiser et les zones de développement prioritaire.

Parmi ces huit régimes zonés, six expirent en 2020, vous l’avez rappelé. Il s’agit des ZRR, des zones de restructuration de la défense, des bassins urbains à dynamiser, des zones de développement prioritaire, des bassins d’emploi à redynamiser, des ZFU, les zones franches urbaines. Les deux autres, AFR et quartiers prioritaires de la politique de la ville, ont été prolongés jusqu’en 2022.

Vous l’avez souligné, ces régimes sont très importants pour les territoires, car ils ouvrent droit à des mesures d’exonérations fiscales en faveur des entreprises ainsi que des mesures d’exonérations de charges sociales patronales. Ils sont également pris en compte pour l’octroi de certaines aides, comme c’est le cas concernant les agences de l’eau.

Si le Gouvernement est attaché à ces dispositifs, il convient de procéder à une évaluation fine de la situation dans la perspective des échéances post-2020.

Pour ce faire, le Gouvernement se nourrira naturellement des travaux conduits par les parlementaires, qui sont d’ores et déjà nombreux. Ainsi le dispositif des ZRR a-t-il fait l’objet de plusieurs rapports. Je citerai celui des députés Alain Calmette et Philippe Vigier, et celui, plus récent, des députées Anne Blanc et Véronique Louwagie.

En outre, vos collègues sénateurs Bernard Delcros et Frédérique Espagnac réalisent en ce moment même une mission de contrôle budgétaire des ZRR pour la commission des finances, et ce conjointement avec la mission d’information de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable confiée à votre collègue Rémy Pointereau.

Enfin, dans le cadre de la mission portant sur l’élaboration d’un agenda rural, les services du ministère de la cohésion et des territoires ont demandé aux membres de la mission d’étudier les dispositifs de zonage, dont les ZRR et les BER, afin de faire des propositions en la matière.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Conway-Mouret

La parole est à Mme Anne-Catherine Loisier, pour la réplique.

Debut de section - PermalienPhoto de Anne-Catherine Loisier

Je vous remercie de votre réponse, monsieur le ministre. Le débat avec les parlementaires est lancé. Vous l’avez souligné, il est important, pour la bonne continuité des politiques territoriales, d’informer rapidement les acteurs locaux, qui doivent savoir si ces zonages seront reconduits ou révisés, afin d’anticiper les éventuelles évolutions. En effet, 2021 arrive à grands pas !

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Conway-Mouret

La parole est à M. Daniel Laurent, auteur de la question n° 768, adressée à Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Laurent

Monsieur le ministre, ma question porte sur l’avenir des grands syndicats d’eau et d’assainissement.

Lors de la conférence de presse du 25 avril dernier, le Président de la République a indiqué qu’il souhaitait un nouvel acte de décentralisation, associé au principe, a-t-il déclaré, de la « différenciation territoriale ».

Dans cette perspective, il conviendrait de réviser certaines dispositions qui pénalisent aussi bien les grands syndicats d’eau et d’assainissement que les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre membres de ces syndicats.

Incarnation d’une intercommunalité librement consentie, les grands syndicats d’eau et d’assainissement, souvent de taille départementale, voire interdépartementale, comme c’est le cas dans mon département de la Charente-Maritime, doivent être maintenus et même renforcés.

Ils assurent en effet une mutualisation à large échelle, source d’économies, de réponses adaptées aux enjeux et de solidarité entre zones urbaines et rurales.

L’article 250 de la loi de finances pour 2019, adopté sans aucune concertation ni étude d’impact préalables, prévoit d’intégrer dans le calcul du coefficient d’intégration fiscale, le CIF, des communautés de communes la redevance d’assainissement en 2020, puis la redevance d’eau potable en 2026.

L’augmentation de la valeur du CIF permettra certes à l’EPCI de bonifier sa dotation d’intercommunalité, sous réserve d’exercer lui-même les compétences, quitte à les reprendre aux syndicats d’eau et d’assainissement existants, quelle que soit leur taille.

En d’autres termes, l’objectif consiste à récompenser les communautés de communes qui auront pris ces compétences, sans vraiment se poser la question de savoir si le fait de fractionner une compétence déjà exercée sur un territoire étendu contribuera à réduire les dépenses de fonctionnement, à rationaliser les dépenses d’investissement et à accroître l’efficience des services rendus aux usagers.

Or l’intégration des redevances d’eau et d’assainissement dans le calcul du CIF ne devrait avoir aucune incidence sur la dotation d’intercommunalité d’un EPCI, que la compétence soit exercée par cet EPCI ou transférée à un syndicat mixte de taille plus adaptée.

En conséquence, monsieur le ministre, êtes-vous favorable à l’ouverture d’une discussion avec les acteurs concernés, afin de réexaminer une disposition qui pénalise les grands syndicats supracommunautaires compétents dans ce domaine, ainsi que les intercommunalités qui en sont membres ?

Debut de section - Permalien
Marc Fesneau

Monsieur le sénateur Laurent, la loi de finances pour 2019 a prévu que la redevance d’assainissement des communautés de communes sera prise en compte dans le calcul du CIF des communautés de communes à partir du 1er janvier 2020, alors que tel n’est pas le cas aujourd’hui, hormis pour les communautés urbaines, les communautés d’agglomération et les métropoles.

Par ailleurs, le même article a prévu que la redevance d’eau potable sera comptabilisée dans le CIF de tous les EPCI à fiscalité propre à partir du 1er janvier 2026.

Je rappelle que cette mesure a été introduite par amendement parlementaire. En effet, lors de la première lecture du projet de loi de finances à l’Assemblée nationale, le Gouvernement avait d’abord demandé le retrait de cette disposition, qui n’aurait pas été applicable en 2019, avant de l’accepter à condition que son entrée en vigueur soit reportée à 2020, afin que l’administration puisse, dans le courant de l’année 2019, examiner en profondeur son bien-fondé.

Les sénateurs ont ensuite proposé de mettre le dispositif en cohérence avec la loi du 3 août 2018 relative à la mise en œuvre du transfert des compétences eau et assainissement aux communautés de communes, en repoussant la mesure à 2026, date à laquelle la compétence devient obligatoire pour les communautés de communes. Cette proposition ne paraissait pas complètement illogique, car l’intégration de redevances dans le CIF pose des questions relatives aux modalités de gestion du service public de l’eau et de l’assainissement. Le Gouvernement s’en est donc remis à la sagesse du Sénat sur ce point.

En nouvelle lecture à l’Assemblée nationale, un nouvel amendement a été adopté. Il prévoyait l’intégration de la redevance d’assainissement dès 2020 et celle de la redevance d’eau potable en 2026.

Comme convenu, l’administration vient d’engager des travaux d’examen. Nous avons d’ores et déjà reçu plusieurs courriers nous alertant sur de potentiels effets négatifs de ces dispositions sur l’organisation locale des services d’eau et d’assainissement.

La volonté du Gouvernement n’est pas de perturber le fonctionnement d’un service public indispensable. Nous serons donc particulièrement attentifs aux difficultés qui remontent du terrain pour voir s’il convient, ou non, de mettre en application cette mesure. Le cas échéant, nous tirerons toutes les conséquences de la situation.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Conway-Mouret

La parole est à Mme Florence Lassarade, auteure de la question n° 756, adressée à M. le ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ville et du logement.

Debut de section - PermalienPhoto de Florence Lassarade

Monsieur le ministre, ma question porte sur les difficultés rencontrées par l’office public de l’habitat de Bordeaux Métropole, Aquitanis.

La baisse de l’aide personnalisée au logement décidée par le Gouvernement a contraint Aquitanis à compenser celle-ci à hauteur de 3, 3 millions d’euros en 2018. En 2019, le montant de cette compensation devrait atteindre le même ordre de grandeur. En 2020, ce montant devrait doubler, ce qui représentera alors 6, 5 millions d’euros de ressources disponibles en moins dans le budget d’Aquitanis.

Ainsi, en trois ans, 13 millions d’euros ne pourront pas être investis par Aquitanis dans la production de nouveaux logements ou dans des travaux de maintenance. À titre de comparaison, cela représente la part des fonds propres qui aurait pu être réservée à la construction de 580 logements ou à la réhabilitation de 430 logements.

Monsieur le ministre, je souhaiterais savoir quelles mesures le Gouvernement envisage de mettre en œuvre pour préserver l’avenir du logement social à Bordeaux Métropole, mais aussi, plus largement, en France.

Debut de section - Permalien
Marc Fesneau

Madame la sénatrice Lassarade, le Gouvernement a mis en œuvre depuis 2018 une mesure importante de rétablissement des comptes publics par la mise en place de la réduction de loyer de solidarité, la RLS. Des mesures d’accompagnement avaient été décidées dès 2018, avec notamment le gel du taux du livret A, des prêts de haut de bilan bonifiés, des allongements de dette et diverses autres mesures.

Nous avons néanmoins, comme nous nous y étions engagés, lancé une clause de revoyure dès novembre 2018, qui s’est conclue, sous l’égide du Premier ministre, par la signature avec l’ensemble du monde HLM d’un pacte productif le 25 avril 2019. Il donne un cadre financier aux acteurs pour trois ans, et leur laisse ainsi le temps de se restructurer en utilisant les outils de la loi ÉLAN, ce qui leur permettra de dégager rapidement des marges financières nouvelles.

En contrepartie d’une RLS fixée à 1, 3 milliard d’euros, les bailleurs sociaux bénéficient en effet d’une baisse de cotisations de 300 millions d’euros prise en charge par Action Logement, d’une baisse de la TVA de 10 % à 5, 5 % pour certains types d’opérations, soit un gain de près de 200 millions d’euros, de remises commerciales de la Caisse des dépôts et consignations à hauteur de 50 millions d’euros par an.

Les mesures d’accompagnement via la Banque des territoires décidées en 2018 sont par ailleurs maintenues, voire renforcées pour certaines d’entre elles, avec l’ouverture d’une enveloppe de 800 millions d’euros de titres participatifs. Le plan d’investissement volontaire d’Action Logement prévoit des financements pour l’investissement et la restructuration du secteur pour plus d’un milliard d’euros.

Compte tenu de ce cadre financier, des objectifs ambitieux en matière de construction et de rénovation du logement social ont été définis avec le monde HLM, ce qui illustre bien la volonté du Gouvernement de consolider l’avenir du logement social.

Debut de section - PermalienPhoto de Florence Lassarade

Monsieur le ministre, je vous rappelle que nous accueillons en Gironde 20 000 habitants supplémentaires par an. À Bordeaux, le prix du loyer augmente proportionnellement au prix de l’immobilier. Si nous voulons maintenir une mixité sociale, éviter que les habitants ne recourent au logement indigne en ruralité et ne rejoignent les quelques « gilets jaunes » qui restent sur nos ronds-points, il nous faudra prendre réellement en compte toutes ces données.

Pourtant, au cours des années 2017 et 2018, les fonds n’ont pas été attribués.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Conway-Mouret

Nous en avons terminé avec les réponses à des questions orales.

Mes chers collègues, l’ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à douze heures quarante-cinq, est reprise à quatorze heures trente, sous la présidence de M. David Assouline.