Commission des affaires culturelles, familiales et sociales

Réunion du 5 février 2008 : 1ère réunion

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

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La réunion

Source

La commission a organisé une table ronde intitulée « Quelles réformes pour le secteur de l'audiovisuel ? ».

Etaient présents :

Debut de section - Permalien
Patrick de Carolis

président directeur général de France Télévisions ;

Debut de section - Permalien
Jérôme Clément

président d'Arte France ;

Debut de section - Permalien
Jean-Paul Cluzel

président directeur général de Radio France ;

Debut de section - Permalien
Christian Davin

président du syndicat des producteurs de films d'animation (SPFA) ;

Debut de section - Permalien
Patrice Duhamel

directeur général de France Télévisions ;

- M. Denis Gheerbrant, représentant des organisations du documentaire ;

Debut de section - Permalien
Dahlia Kownator

déléguée générale de l'association des fournisseurs d'accès et de services internet (AFA) ;

Debut de section - Permalien
Jean-Jacques Legouar

membre du syndicat des producteurs de films d'animation (SPECT) ;

Debut de section - Permalien
Michel Brian

vice-président du Syndicat des industries de matériels audiovisuels électroniques (SIMAVELEC) ;

Debut de section - Permalien
Gérard Noël

vice-président directeur général de l'union des annonceurs (UDA) ;

Debut de section - Permalien
Guy Noël

président du syndicat des entreprises de commerce international de matériels audio, vidéo et informatique grand public (SECIMAVI) ;

Debut de section - Permalien
Marc Pallain

président d'NRJ 12 et du groupement télévision numérique pour tous (TNT) ;

Debut de section - Permalien
Nonce Paolini

directeur général de TF1 ;

Debut de section - Permalien
Jacques Peskine

délégué général de l'union syndicale de la production audiovisuelle (USPA) ;

Debut de section - Permalien
Emmanuel Priou

président du syndicat des producteurs indépendants (SPI) ;

Debut de section - Permalien
Pascal Rogard

directeur général de la société des auteurs et compositeurs dramatiques (SACD) ;

Debut de section - Permalien
Thierry de Segonzac

président de la fédération des industries du cinéma, de l'audiovisuel et du multimédia (FICAM) ;

Debut de section - Permalien
Christophe Stener

président d'Alliance TICS (Union des syndicats des industries des technologies de l'information, de la communication et des services associés) ;

Debut de section - Permalien
Nicolas de Tavernost

président du directoire de Métropole Télévision M6 ;

Debut de section - Permalien
Olivier Zegna-Rata

directeur des relations extérieures du groupe Canal +.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Valade

a remercié les acteurs de l'audiovisuel français d'avoir répondu à l'invitation de la commission des affaires culturelles à débattre des réformes annoncées dans ce secteur.

Il a indiqué que le premier thème abordé, mis en exergue par le chef de l'Etat lors de sa conférence de presse du 8 janvier dernier, serait consacré aux conséquences de la suppression de la publicité sur les chaînes publiques et à ses conséquences.

Après avoir affirmé que cette annonce avait surpris tout le monde, il a estimé qu'une telle réforme aurait l'avantage de mettre un terme à l'ambigüité résultant du financement mixte d'une partie de l'audiovisuel public français. Il a souligné que cette décision engendrait néanmoins un certain nombre d'interrogations, au premier rang desquelles les modalités de compensation de cette manne publicitaire appelée à se répartir, à l'avenir, entre « médias » et « hors médias », ainsi que les modalités de financement des émissions destinées à combler l'espace ainsi libéré.

Il a précisé que le second thème concernerait les relations entre producteurs et diffuseurs.

Insistant sur le fait qu'il ne s'agissait pas de faire double emploi avec la mission confiée par la ministre de la culture et de la communication à MM. David Kessler et Dominique Richard sur le même sujet, il a souligné la volonté des membres de la commission d'être informés des enjeux de cet important débat et de préparer avec rigueur les prochaines échéances législatives en ce domaine.

Debut de section - PermalienPhoto de Louis de Broissia

a d'abord présenté les grandes lignes du financement de l'audiovisuel public en s'appuyant sur les données issues de la discussion budgétaire pour 2008.

Il a fait preuve d'une extrême prudence, compte tenu de l'imprécision des chiffres fournis au Parlement par le ministère du budget ces dernières années, tant au niveau du produit de la redevance qu'au niveau des encaissements publicitaires des sociétés publiques.

Il a estimé que cette remarque liminaire n'était pas neutre dans la mesure où la rigueur des évaluations réalisées par les pouvoirs publics conditionnerait le niveau des taxes existantes ou à créer, censées compenser la disparition de la publicité sur les antennes du service public et l'effectivité de la compensation intégrale des recettes du service public.

Cette rigueur permettra également de limiter les polémiques entre acteurs du secteur sur la perte de recettes et le coût des nouveaux programmes à mettre en place, les chiffres circulant depuis quelques semaines -entre 650 millions et 1,2 milliard d'euros selon les sources -reflétant l'ampleur des intérêts économiques en présence.

Pour 2008, il a indiqué que les ressources publiques devraient s'élever à 2,9 milliards d'euros et représenter plus de 75 % du financement de l'audiovisuel public, les ressources propres constituant, quant à elles, un peu moins de 25 % du total, la notion de ressources propres étant bien entendu plus large que celle de recettes publicitaires.

S'agissant des prévisions de recettes publicitaires et de parrainage, M. Louis de Broissia a précisé qu'elles devraient s'établir à 840 millions d'euros pour France Télévisions et 46,5 millions d'euros pour Radio France.

Dans l'attente d'un projet de loi, il a souhaité faire part de deux enseignements tirés de la loi du 1er août 2000 dont l'article 15 réduisait de 12 à 8 minutes la durée des écrans publicitaires de France 2 et France 3.

Le premier enseignement a trait à la force relative des dispositions législatives : alors que le coût de cette mesure devait théoriquement être absorbé par la compensation intégrale des exonérations de redevance pour motif sociaux, force est de constater que 8 ans plus tard cette compensation n'est toujours pas assurée.

Le second enseignement concerne l'importance des rapports d'application prévus par les textes de loi. L'article 15 de la loi du 1er août 2000 prévoyait en effet la transmission par le Gouvernement au Parlement d'un rapport destiné à évaluer l'incidence de cette mesure sur le marché publicitaire.

Or, bien que le paysage audiovisuel français de 2008 ait évolué et que les lignes de force de l'époque se soient déplacées sous l'effet du lancement de la télévision numérique terrestre (TNT) et du développement des nouvelles technologies, ce document, qui aurait pu donner aux parlementaires des indices utiles quant à l'ampleur des transferts à attendre d'une mesure dont l'impact reste difficile à déterminer, n'a jamais été transmis au Parlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Valade

Avant de donner la parole aux participants de la table ronde, M. Jacques Valade, président, a déclaré que les membres de la commission n'avaient aucune position préétablie sur les thèmes proposés et seraient, par conséquent, attentifs à tous les arguments avancés.

Debut de section - Permalien
Patrick de Carolis

a estimé que la suppression de la publicité sur les antennes du service public était une idée ambitieuse qui ne signifiait ni la fin de l'audience, ni la fin du dialogue avec les téléspectateurs, ni la fin d'une ligne éditoriale exigeante tournée vers la création.

Afin de mettre un terme aux polémiques sur le sujet, il a précisé que l'évaluation du manque à gagner engendré par cette mesure pour le groupe France Télévisions en 2008 devait tenir compte :

- de la disparition des 850 millions d'euros de recettes publicitaires et de parrainage à laquelle s'ajoute la disparition de 200 millions d'euros issus de la diversification et des placements financiers du groupe ;

- du remplacement des six heures de coupures publicitaires quotidiennes par des programmes nouveaux pour un montant estimé à 200 millions d'euros, compte tenu des coûts de grille actuels.

Debut de section - Permalien
Jean-Paul Cluzel

a déclaré accueillir cette réforme avec sérénité dans la mesure où les ressources publicitaires et de parrainage ne représentent que 8 % du budget de Radio France, soit 45 millions d'euros par an, la faiblesse du poids publicitaire dans les grilles des deux principales stations du groupe se traduisant d'ailleurs par une stabilité, voire une progression, de leur audience.

Après avoir ajouté qu'il n'y avait aucun coût supplémentaire lié à la production de programmes de compensation dans la mesure où toutes les émissions sont produites par les personnels du groupe, il a assuré que cette décision n'aurait aucun impact sur la poursuite du projet de réhabilitation de la maison de Radio France.

Il a ajouté que, pour compenser le manque à gagner issu de la suppression des recettes publicitaires du service public, il convenait de s'assurer du dynamisme des recettes de substitution envisagées et du taux de la redevance afin de ne pas geler le financement de l'audiovisuel public.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Valade

a rappelé que la commission des affaires culturelles avait proposé, à de multiples reprises mais sans succès, une augmentation du taux de la redevance audiovisuelle.

Debut de section - Permalien
Nonce Paolini, directeur général de TF1

a estimé que la décision du Président de la République constituait une opportunité unique de modifier les règles du jeu du secteur audiovisuel, de relancer la création française et de donner aux opérateurs privés et publics les moyens de se développer avec des moyens propres et adaptés à leurs missions. Très favorable à la suppression de la publicité sur les chaînes publiques, il s'est en revanche déclaré opposé à l'instauration d'une taxe sur les recettes publicitaires des chaînes privées.

Soulignant que les recettes publicitaires étaient aléatoires et correspondaient à une performance commerciale, il a rappelé qu'il pouvait y avoir un écart non négligeable entre les objectifs fixés par la régie publicitaire et les performances effectivement constatées. Compte tenu du contexte publicitaire actuel, il a estimé que les 850 millions d'euros de recettes publicitaires avancés par France Télévisions étaient loin d'être acquis et s'est demandé si le milliard d'euros réclamé par le groupe public était imaginaire ou réel.

Notant qu'il ne fallait pas imposer au marché des charges financières sans rapport avec la réalité des montants dont un service public doit disposer pour financer ses programmes, il a insisté sur l'importance de redéfinir au préalable les missions du service public audiovisuel.

Il a enfin regretté que le taux de la redevance française soit l'un des plus faibles d'Europe (116 euros en France contre 196,5 euros au Royaume-Uni) et a fait remarquer que l'écart entre le budget de la BBC et celui de France Télévisions pouvait expliquer en partie les différences de programmation et d'ambition des deux groupes.

Debut de section - Permalien
Nicolas de Tavernost, président du directoire de M6

a rappelé que la publicité était une contrainte permanente pesant sur la gestion des chaînes et sur leur programmation.

S'interrogeant sur l'opportunité de laisser aux chaînes publiques la possibilité de faire parrainer leurs émissions, il a regretté que les chaînes privées ne puissent pas elles aussi promouvoir sur leurs antennes les programmes des autres chaînes de leur groupe.

Il a considéré qu'il n'y a pas, en France, une bonne télévision publique et une mauvaise télévision privée et affirmé que la réforme souhaitée par le Président de la République permettait de clarifier la situation et les missions des différentes catégories de chaînes composant le paysage audiovisuel français.

Précisant qu'il y avait pour l'heure, sans compter les programmes locaux, quelque 93 chaînes nationales vivant de la publicité, il a estimé que cette réforme n'atteindrait son but que si elle s'accompagnait d'un assouplissement de la réglementation publicitaire nationale, afin d'accroître les ressources financières globales du secteur.

Se déclarant réservé sur la création d'une nouvelle taxe sur les revenus publicitaires des chaînes télévisées, il a affirmé que seulement 50 à 60 % des recettes publicitaires de France Télévisions se reporteraient effectivement sur l'ensemble des autres chaînes de télévision.

Quant aux effets d'aubaine attendus d'une telle réforme, il a rappelé qu'ils ne s'étaient pas produits lors de l'ouverture de la publicité à la grande distribution à la télévision.

Debut de section - Permalien
Patrick de Carolis, président directeur général de France Télévisions

a révélé qu'une étude commandée par le ministère de la culture et de la communication estimait qu'entre 65 % et 80 % des recettes publicitaires de France Télévisions reviendraient aux principales chaînes privées à l'issue de la réforme.

Il a souhaité que personne ne profite de la réforme du financement de l'audiovisuel public pour affaiblir ce dernier et l'empêcher de défendre ses valeurs et de mener à bien les missions qui lui incombent, notamment en matière de création.

Debut de section - Permalien
Marc Pallain, président d'NRJ 12 et du groupement TNT

a estimé que la réforme proposée par le Président de la République allait dans le bon sens et permettrait d'accompagner l'évolution actuelle du paysage audiovisuel français.

Soulignant le rôle joué par les nouvelles chaînes diffusées sur la télévision numérique terrestre dans le développement de la durée d'écoute du média télévisé, il s'est prononcé contre la taxation des nouvelles chaînes de la télévision numérique terrestre dont la situation économique reste fragile.

Il a enfin appelé de ses voeux une accélération de l'extinction de l'analogique, celle-ci pouvant représenter 200 millions d'euros d'économies de frais de diffusion pour le service public.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Valade

t, a rappelé le rôle de la commission dans la fixation d'une date-butoir pour la fin de la diffusion analogique des signaux télévisés.

Debut de section - Permalien
Olivier Zegna-Rata, directeur des relations extérieures du groupe Canal+

a estimé que le groupe Canal+ était d'autant plus libre de mesurer les effets de la suppression de la publicité sur le service public que ce type de recettes représentait moins de 10 % du chiffre d'affaires du groupe.

Il a souhaité que cette réforme ne se traduise pas, à terme, par une diminution des ressources du secteur audiovisuel mais par leur augmentation.

Dans la mesure où le marché de la télévision privée est extrêmement concurrentiel, il a estimé que cette réforme ne pouvait être bénéfique qu'à la condition que la réglementation publicitaire française soit assouplie conformément aux dispositions de la directive européenne sur les services de médias audiovisuels (SMA).

Soulignant que le taux d'une nouvelle taxe prélevée sur les recettes publicitaires des chaînes télévisées privées serait élevé et compromettrait la rentabilité de ces dernières, il a souhaité que l'assiette de la taxe soit la plus large possible.

A l'image de l'Allemagne, qui a compensé la suppression de la publicité sur les chaînes du service public aux heures de grande écoute par l'augmentation progressive du taux de la redevance, il a suggéré d'augmenter de 6 à 7% le taux de la redevance pendant cinq ans afin de compenser la totalité du manque à gagner pour le service public.

Debut de section - Permalien
Gérard Noël, président de l'union des annonceurs

a rappelé que les 3,6 milliards dépensés par les entreprises dans la publicité télévisée en France constituaient un investissement immatériel vital pour leur développement.

Indiquant que la publicité était un facteur essentiel de la croissance économique, il a précisé que sa suppression sur les chaînes publiques revenait à enlever 25 % de l'offre d'espace publicitaire à la télévision faite aux annonceurs.

Il a estimé que les conséquences de cette réforme dépendraient de la manière dont la France appliquerait la nouvelle directive européenne sur les services de médias audiovisuels : si toutes les dispositions de la directive relative à la publicité devaient ainsi être transposées en droit interne, la capacité d'accueil des chaînes privées pourrait augmenter de 5 % à 10 %.

Rappelant que la diminution de 30 % du temps de publicité sur les chaînes publiques en 2000 avait entrainé une hausse de 15 à 20 % du coût des investissements publicitaires, il s'est inquiété des effets d'exclusion provoqués par l'augmentation du coût moyen des espaces publicitaires télévisés.

Il s'est enfin interrogé sur les conséquences de la réforme pour les 543 petites et moyennes entreprises qui investissent exclusivement sur les antennes régionales de France 3.

En conclusion, il a souhaité que la mise en oeuvre du projet soit entourée d'un certain nombre de précautions telles que l'application concomitante des principales dispositions de la directive sur les services de médias audiovisuels, l'absence de taxation supplémentaire des recettes publicitaires des chaînes privées et la mise en place d'une certaine progressivité pour que l'impact sur les entreprises soit limité.

Afin de permettre aux petits annonceurs de s'exprimer à la télévision, M. Nicolas de Tavernost, président du directoire de M6, a proposé que la publicité soit enfin autorisée sur les décrochages locaux de M6.

Debut de section - Permalien
Dahlia Kownator, déléguée générale de l'Association des Fournisseurs d'Accès et de services internet (AFA)

s'est vigoureusement exprimée contre la création d'une nouvelle taxe, avançant des arguments d'ordre économique, politique, relatifs à la concurrence internationale et, enfin, juridiques.

Elle a contesté toute logique économique à une telle taxation et elle a mis en avant l'ampleur des investissements que devront réaliser les fournisseurs d'accès à internet (FAI) pour le déploiement du très haut débit (1 milliard d'euros dans les deux prochaines années), dont bénéficiera le secteur audiovisuel. Elle a estimé qu'une nouvelle taxe devra être compensée soit par une diminution des investissements, de nature à accroître la fracture numérique, soit par une augmentation du prix des abonnements, ce qui reviendrait à une « privatisation de la redevance », peu équitable.

Après avoir fait état de pratiques contraires dans la plupart des pays étrangers, elle a évoqué l'opposition du Conseil constitutionnel à toute décision faisant supporter par les seuls opérateurs privés le coût du service public.

Debut de section - PermalienPhoto de Louis de Broissia

a tenu à rappeler que le rapide développement du haut débit en France avait été rendu possible par l'investissement des collectivités territoriales.

Debut de section - Permalien
Michel Brian, vice-président du Syndicat des industries de matériels audiovisuels électroniques (SIMAVELEC)

a déclaré partager l'argumentation de la représentante de l'AFA. Il a souligné que la création d'une nouvelle taxe accroîtrait encore les difficultés d'entreprises ne bénéficiant que de marges très réduites et, par ailleurs, déjà collectrices de taxes. En outre, il a craint la mise en place d'une « usine à gaz », génératrice de coûts additionnels.

Debut de section - Permalien
Guy Noël, président du syndicat des entreprises de commerce international de matériels audio, vidéo et informatique du grand public (SECIMAVI)

s'est déclaré opposé à ce qu'une nouvelle taxe vienne s'ajouter à la redevance pour financer l'audiovisuel public, d'autant plus qu'un prélèvement sur chaque téléviseur vendu aurait un rendement beaucoup trop faible pour pouvoir compenser la perte des recettes publicitaires.

Debut de section - Permalien
Christophe Stener, président d'Alliance TICS (Union des syndicats des industries des technologies de l'information, de la communication et des services associés)

a considéré qu'il n'y avait pas de logique économique à taxer le matériel, alors que les fabricants de téléviseurs ou de téléphones ne vont pas bénéficier des transferts de ressources liés à la suppression de la publicité sur l'audiovisuel public. Il s'est interrogé sur l'opportunité d'élargir l'assiette de la redevance aux ordinateurs et téléphones portables, alors que la plupart de ces appareils ne permettent pas encore de recevoir la télévision.

Debut de section - Permalien
Jacques Peskine, délégué général de l'Union syndicale de la production audiovisuelle (USPA)

a considéré que la suppression de la publicité ne serait une bonne idée que si elle permet d'engager un débat de fond sur les orientations et moyens de l'audiovisuel public, préalable nécessaire à toute autre question, telle que celle des relations entre producteurs et diffuseurs. Afin de donner à l'audiovisuel public les moyens d'atteindre ses objectifs, il a suggéré d'agir sur la redevance, qui constitue une ressource publique légitime, pérenne et dynamique, et dont le faible montant en France autorise une marge de progression. Enfin, il a plaidé pour une progressivité dans l'application de la mesure, dans un souci de bon fonctionnement du marché publicitaire.

Debut de section - Permalien
Jean-Jacques Legouar, membre du syndicat des producteurs de films d'animation (SPECT)

Après avoir considéré qu'il ne lui appartenait pas de porter un jugement sur une décision politique, M. Jean-Jacques Legouar, membre du syndicat des producteurs de films d'animation (SPECT), a souligné que la suppression de la publicité sur les chaînes publiques pouvait apparaître soit comme une bonne mesure si elle avait pour corollaire un financement assuré, soit comme une catastrophe nationale dans le cas contraire.

Evoquant les propos du Premier ministre sur les possibles économies de gestion, il a affirmé qu'une telle politique conduirait à diffuser les programmes générateurs d'audience et peu coûteux comme le sont les fictions américaines.

Il a souligné qu'un affaiblissement du service public de l'audiovisuel en matière de financement de créations originales conduirait au développement d'une politique d'achat de programmes d'origine étrangère.

Debut de section - PermalienPhoto de Ivan Renar

a souhaité que le débat ne se limite pas à la question de la publicité. Il a rappelé que le débat budgétaire avait mis en évidence le sous-financement du secteur public de l'audiovisuel en matière de création d'oeuvres originales. En l'absence de garanties, il s'est déclaré défavorable à la substitution de ressources nouvelles à celles de la publicité.

Debut de section - PermalienPhoto de Louis de Broissia

a précisé que toute modification du mode de financement de l'audiovisuel public relevait des prérogatives du Parlement.

Debut de section - Permalien
Emmanuel Priou, président du syndicat des producteurs indépendants (SPI)

a rappelé que la proposition de suppression de la publicité à la télévision publique, qualifiée alors de douce utopie, avait été déjà formulée lors des Etats généraux de l'audiovisuel en 2000.

S'interrogeant sur les difficultés de financement et l'absence de concertation, il a affirmé que la redevance constituait le seul moyen pérenne, évolutif et juste de financer le secteur audiovisuel public, ce choix devant relever essentiellement d'une volonté politique. Cette perspective nécessite de mettre en oeuvre une véritable pédagogie à l'égard des citoyens, pour expliquer l'ensemble du champ d'action concerné. Par ailleurs, il a suggéré d'élargir l'assiette de la redevance aux nouveaux outils de réception des programmes audiovisuels.

Debut de section - Permalien
Patrick de Carolis, président-directeur général de France Télévisions

Suite à ces remarques, M. Patrick de Carolis, président-directeur général de France Télévisions, a souhaité rappeler que, sur le montant de la redevance audiovisuelle, qui s'élève à 116 euros par Français, 80 euros étaient consacrés à France Télévisions, ce qui représente une somme de 22 centimes d'euros par jour et par foyer. Si la suppression de la publicité sur la télévision publique devait être intégralement compensée par une augmentation de la redevance, celle-ci devrait être portée à 196 euros.

Debut de section - Permalien
Christian Davin, président du Syndicat des producteurs de films d'animation (SPFA)

a souligné que la question de la nature de la télévision publique devait être centrale dans le débat parlementaire, estimant quant à lui qu'il était impératif que les programmes publics soient à la fois populaires et performants, et qu'il fallait donc maintenir l'exigence d'audience. Il s'est ensuite fermement opposé à l'idée de supprimer la publicité dans les programmes pour enfants sur toutes les chaînes.

Debut de section - Permalien
Pascal Rogard, directeur général de la Société des auteurs et compositeurs dramatiques (SACD)

s'est inquiété de la contrainte de financement que représenterait la suppression de la publicité, parlant à ce sujet de « concours Lépine » de la taxe, déjà lancé pour trouver une solution. Afin que les ressources globales du secteur audiovisuel ne diminuent pas du fait d'une évasion de la publicité sur d'autres supports de communication, il a par ailleurs appelé de ses voeux une suppression progressive de la publicité, qui pourrait au demeurant être plus facilement compensée par une hausse progressive de la redevance.

Debut de section - PermalienPhoto de Jack Ralite

a critiqué l'absence de consultation préalable à l'annonce du Président de la République et a ensuite déploré l'absence de syndicalistes, de journalistes du service public et d'artistes, à la table ronde.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

s'est, quant à elle, étonnée du caractère imprudent de l'annonce présidentielle, tant du fait de sa radicalité que de l'absence de réflexion complémentaire sur la mission de service public de France Télévisions. Elle a enfin insisté, d'une part, sur l'importance de la progressivité de la mesure de suppression de la publicité, et d'autre part, sur la réflexion relative au contenu de la programmation audiovisuelle publique, qui doit s'articuler autour de l'objectif de pluralisme.

La table ronde a alors abordé le second thème : Repenser les relations entre les diffuseurs et les producteurs.

Debut de section - Permalien
Nonce Paolini, directeur général de TF1

Marquant son désaccord avec toute opposition de valeurs entre la télévision publique et la télévision privée, les deux étant selon lui guidées par l'exigence de qualité des programmes, M. Nonce Paolini a indiqué que TF1 contribuait à hauteur de 250 millions d'euros au soutien et développement de la création française. Alors que les « décrets Tasca » ont créé, au fil du temps, une opposition hostile entre diffuseurs, producteurs et auteurs, en imposant aux premiers une réglementation contraignante, il a souhaité que ces relations évoluent vers un véritable partenariat.

Il a insisté, ensuite, sur la nécessité d'améliorer la qualité de la fiction française, qui s'exporte peu et ne répond plus aux goûts des jeunes publics. Il a souhaité, en ce sens, pouvoir reprendre la maîtrise de sa promotion et susciter une production plus active favorisant les jeunes talents, en trouvant de nouveaux moyens financiers et en se libérant de certaines contraintes de diffusion.

Ayant considéré, de même, qu'il était absurde d'opposer télévision publique et privée et que les programmes de tout genre pouvaient être de qualité, M. Nicolas de Tavernost a jugé inefficaces les obligations de plus en plus contraignantes imposées aux diffuseurs et a dénoncé les incohérences résultant de l'empilement de strates successives de réglementations. Il a plaidé pour une plus grande flexibilité de cette réglementation, afin que celle-ci s'adapte aux mutations d'un secteur audiovisuel dont il a souligné la fragilité.

Debut de section - Permalien
Jérôme Clément, président d'Arte France

a insisté sur l'importance du débat concernant la relation entre l'absence de publicité et la qualité des programmes, qu'illustre d'ailleurs Arte. A cet égard, il s'est déclaré surpris par de récentes déclarations pouvant êtres interprétées de façon péjorative, alors même que cette chaîne incarne la politique de civilisation et d'ouverture au monde souhaitée par le Président de la République. Il a précisé que 80 % de son budget d'investissement étaient consacrés à la création de programmes inédits et de programmes patrimoniaux.

Compte tenu de l'enjeu majeur du rôle de la télévision, notamment publique, dans notre pays, il a attiré l'attention sur la façon dont sont articulées les responsabilités des uns et des autres. Puis il a rappelé que les producteurs indépendants étaient une source de créativité essentielle et qu'il convenait de veiller à ce que ce tissu créatif continue à exister dans toute sa variété. A cet égard, il a souligné le lien majeur entre diffuseurs et producteurs.

Evoquant la répartition entre la part des chaînes, comme coproducteurs, et celle des producteurs indépendants, il a jugé majeure la question de la circulation des oeuvres, y compris par le biais de la vidéo à la demande.

Debut de section - Permalien
Patrice Duhamel, directeur général de France Télévisions

a fait part de son étonnement à l'égard des déclarations des représentants des chaînes privées mettant en cause l'appréciation différente portée sur le secteur audiovisuel public et privé, qu'il a considérée comme légitime.

Après avoir fait remarquer que la plupart des groupes audiovisuels publics dans le monde programmaient un nombre variable de séries américaines, il a indiqué que France 2 se limitait à une diffusion hebdomadaire qui rencontrait la faveur des téléspectateurs.

Se prononçant pour une télévision publique différente, il a réfuté tout esprit polémique en matière de programmation audiovisuelle.

Considérant la place majeure de la création audiovisuelle dans les grilles de programmes, il a suggéré, dans la perspective d'un nouveau modèle économique, une augmentation significative de l'investissement en faveur des oeuvres patrimoniales.

Il a relevé le caractère consensuel des propositions du rapport d'étape de la mission conduite par MM. David Kessler et Dominique Richard relatives aux dispositifs de soutien à l'innovation et d'aide aux nouveaux talents.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Valade

a demandé des précisions sur les critiques formulées à propos des droits sportifs audiovisuels.

Debut de section - Permalien
Patrice Duhamel, directeur général de France Télévisions

s'est étonné des velléités des groupes privés de limiter les investissements de France Télévisions dans le domaine des droits sportifs, dans un système de concurrence ouverte et de compétition loyale qui s'exerce au bénéfice des téléspectateurs.

Debut de section - Permalien
Nonce Paolini, directeur général de TF1

a mis en cause les engagements financiers des chaînes publiques au profit de certains sports qui se révèlent particulièrement coûteux. Il a considéré que cette orientation ne relevait pas des missions figurant au cahier des charges du service public et que ce dernier devait privilégier la création française.

Il a précisé également que le caractère pluriannuel des contrats signés contraignait le groupe public à en assurer le financement.

Debut de section - Permalien
Nicolas de Tavernost, président du directoire de M6

a souligné la distorsion de concurrence entre les groupes audiovisuels privés et France Télévisions, qui grâce à un mode de financement mixte se voit attribuer certains contrats de retransmission sportive, à l'exemple de la finale de l'Open d'Australie.

Debut de section - Permalien
Patrice Duhamel, directeur général de France Télévisions

a réfuté ces objections et a affirmé que les téléspectateurs de France Télévisions ne pouvaient être privés de la retransmission des événements sportifs majeurs. Il a évoqué les réticences des représentants des groupes audiovisuels privés envers les programmes de France Télévisions qui rassemblent une large audience et a invité au strict respect des règles de concurrence.

Debut de section - Permalien
Olivier Zegna-Rata, directeur des relations extérieures du groupe Canal+

a estimé que la réglementation actuelle conduisait diffuseurs et producteurs à se regarder en « chiens de faïence » au lieu de nouer des partenariats responsables et mutuellement profitables.

Souhaitant que la réglementation devienne plus simple, plus souple et plus dynamique afin de s'adapter aux évolutions technologiques et aux nouveaux usages des oeuvres, il a pointé un certain nombre de contradictions entre l'objectif initial du cadre réglementaire et ses effets concrets.

Il a enfin déclaré qu'à l'avenir les chaînes devaient pouvoir détenir un certain nombre de droits patrimoniaux sur les oeuvres qu'elles ont largement financées et qui expriment leur identité.

Debut de section - Permalien
Emmanuel Priou, président du syndicat des producteurs indépendants

a rappelé que les obligations des chaînes en matière de diffusion et de production étaient la contrepartie de l'usage gratuit des fréquences hertziennes.

Il a souligné que ces obligations avaient permis de maintenir en France, contrairement à la situation constatée ailleurs en Europe, un tissu dense et diversifié d'entreprises de production.

Après avoir déclaré que le principal désaccord opposant producteurs et diffuseurs portait sur le financement des oeuvres, il a indiqué que le fait pour les producteurs de détenir les droits sur les oeuvres audiovisuelles permettait de préserver leur indépendance.

Soulignant l'importance culturelle et économique de la circulation des oeuvres, il a regretté que les chaînes télévisées gèlent celles-ci pendant 42 mois et réduisent de ce fait la taille du marché secondaire des oeuvres.

Afin de redéfinir les relations entre producteurs et diffuseurs, il a proposé d'augmenter la contribution des chaînes, d'élargir l'assiette de leur contribution à l'ensemble de leur chiffre d'affaire, de diminuer la durée des droits exclusifs, de faire respecter la disposition législative relative au « sous quota » patrimonial et de faire contribuer les nouveaux opérateurs au financement des oeuvres.

Debut de section - Permalien
Denis Gheerbrant, représentant du réseau des organisations du documentaire (ROD)

a ensuite souligné que le succès de toute réforme de l'audiovisuel était conditionné par une consultation préalable des auteurs et créateurs.

Debut de section - Permalien
Thierry de Segonzac, président de la fédération des industries du cinéma, de l'audiovisuel et du multimédia (FICAM)

a cité les menaces pesant sur la création, et auxquelles il est nécessaire de répondre rapidement : l'atomisation de l'audience des diffuseurs, les délocalisations du tournage des films, même si elles sont de moins en moins nombreuses, l'augmentation des salaires des acteurs, sous la pression des diffuseurs, qui est deux fois supérieure à la croissance moyenne des budgets, et enfin le renforcement de l'exigence qualitative sans accompagnement financier.

Debut de section - Permalien
Dahlia Kownator, déléguée générale de l'Association des Fournisseurs d'Accès et de services internet (AFA)

s'est réjouie que le rapport d'étape Kessler-Richard souligne les difficultés des opérateurs résultant de ce qu'elle a qualifié de « congélation » des droits, pendant une période d'exploitation qui peut atteindre 42 mois. Elle a jugé nécessaire d'adapter ces règles et notamment de réduire la durée de ces droits, car cela freine le développement d'une offre attractive en VOD, préconisée par la mission présidée par M. Denis Olivennes sur la lutte contre le téléchargement illicite. Il s'agit par ailleurs d'un risque pour la diversité culturelle, dans la mesure où les séries américaines, par exemple, ne sont pas soumises à de telles contraintes.

Debut de section - Permalien
Jacques Peskine, délégué général de l'Union syndicale de la production audiovisuelle (USPA)

Rappelant que la réglementation était nécessaire en raison du caractère déséquilibré des rapports entre producteurs et diffuseurs, M. Jacques Peskine a souligné que des marges d'action existaient dans le cadre du dispositif actuel, même si des adaptations pouvaient être utiles. Il a réaffirmé l'objectif prioritaire de financement de la création patrimoniale, et notamment de la production indépendante.

Debut de section - Permalien
Emmanuel Priou, président du syndicat des producteurs indépendants

a souligné que la contribution apportée par le Centre national de la cinématographie (CNC) ne devait pas être oubliée et qu'elle expliquait pour une large part la singularité du système français.

Debut de section - Permalien
Pascal Rogard, directeur général de la Société des auteurs et compositeurs dramatiques (SACD)

Marquant son désaccord avec toute description outrée du paysage audiovisuel français, M. Pascal Rogard a rappelé que les règlementations en vigueur trouvaient le plus souvent leur origine dans une négociation antérieure dont elles transcrivaient les conclusions. Aussi n'est-il pas toujours pertinent de les condamner, même si elles devraient sans doute devenir plus souples, afin d'approcher le juste équilibre nécessaire. S'agissant des rapports entre créateurs et diffuseurs, il s'est tout d'abord indigné que le Gouvernement ait renvoyé sine die la parution du décret relatif aux obligations patrimoniales des chaînes de télévision, qui devait être pris en application d'un article adopté à l'unanimité lors du vote de la loi du 5 mars 2007 relative à la télévision du futur. Pour l'avenir, il a estimé indispensable de permettre une vraie circulation des oeuvres sans empêcher les chaînes d'investir dans la création.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Valade

Après avoir remercié l'ensemble des intervenants pour leur présence et la qualité de leurs interventions, M. Jacques Valade, président, a signalé combien il était utile pour la commission et l'ensemble du Sénat d'avoir pu entendre tous les points de vue, qui constituent un état des lieux complet de l'audiovisuel dans notre pays.

Debut de section - PermalienPhoto de Louis de Broissia

Saluant l'intérêt et la richesse des débats, M. Louis de Brossia a mis l'accent, à titre de conclusion, sur la révolution tranquille qui a transformé le paysage audiovisuel français en quelques années et qui permet aujourd'hui à des chaînes bien différentes de trouver chacune leur place et leur public. C'est à ces changements qu'il faut désormais répondre en faisant évoluer à leur tour les modes de financement.

La commission a décidé que le compte rendu de cette table ronde serait publié sous forme de rapport d'information.