La commission procède à l'audition de M. Jean-François Cordet, directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA), candidat à la reconduction de son mandat.
En attendant l'application de l'article 13 de la Constitution -la loi organique n'étant pas encore promulguée-, le Premier ministre nous a avisés que nous pouvions entendre M. Jean-François Cordet, candidat à la reconduction de son mandat à la Direction générale de l'OFPRA. J'ai pensé qu'il était intéressant que celui-ci fasse ici le point sur l'évolution de l'activité de cet office où il a été nommé en juillet 2007.
L'Office s'efforce de maîtriser l'évolution de la demande d'asile. Celle-ci a en effet connu ces dernières années deux pics : 61 000 demandes en 1989, puis 52 000 en 2003. Nous sommes en voie d'atteindre un nouveau pic, alors qu'entre 2004 et 2007, la décrue avait été de presque 50 % au total : moins 36 % en 2006 et moins 10 % en 2007. Depuis août/septembre 2008, la courbe s'est inversée et l'augmentation a été cette année-là de, 20 %. Cette poussée s'est poursuivie en 2009 - avec une augmentation de 12 % - et se poursuit en 2010 avec, cependant, une certaine décélération de la hausse : 8% au premier semestre.
En trois ans, la structure de la demande s'est également modifiée. Cette dernière se décompose en effet en premières demandes, demandes de réexamen et demandes des mineurs isolés. Alors que la demande globale augmentait de 20 % en 2008, le nombre des premières demandes ne croissait que de 12 %. En 2009, inversion de tendance : une hausse de 12 % de la demande globale mais de 23 % pour les premières demandes. Au premier semestre de 2010, celles-ci augmentent encore de 15 %. Aujourd'hui, 70 % des instructions concernent des premières demandes, et 30 % des réexamens. Il y a une dizaine d'années les proportions étaient respectivement de 55 % et 45 %. Cette évolution de la structure de la demande, ainsi que les évolutions législatives, augmentent le travail d'instruction de l'Office.
Nous sommes donc redevenus, et pour la deuxième année consécutive, le premier pays européen pour les demandes d'asile. Mais, pour le premier semestre de 2010, l'augmentation se vérifie également dans d'autres pays : 50 % en Suède, 23 % en Allemagne et 24 % en Belgique ; je ne parle pas de la Grande-Bretagne où les statistiques sont tenues de façon différente.
Des procédures nouvelles nous ont été imposées du fait de la législation, française ou européenne. Auparavant, nous avions un grand nombre de dossiers à traiter selon la procédure normale, dont la durée moyenne est d'environ 100 jours. Depuis 2009, les procédures prioritaires se sont multipliées, qui nécessitent une instruction en 15 jours. D'où une modification structurelle de notre travail où s'introduit une culture de l'urgence.
Cette hausse des procédures prioritaires résulte notamment de l'augmentation du nombre de pays d'origine considérés comme sûrs. Et, lorsque nous voulons utiliser EURODAC, nous devons faire face à un nouveau phénomène : l'effacement des empreintes digitales, de plus en plus fréquent chez les réfugiés originaires d'Afrique et notamment de la Corne de l'Afrique.
En 2010, le nombre de demandeurs d'asile en provenance de ce continent augmente, alors qu'il était en diminution en 2009. Cela n'empêche pas que figurent aux premiers rang de notre liste le Kosovo - en légère diminution - puis la Russie - 47 % de hausse -, la République démocratique du Congo, la Guinée /Conakry - 56 % -, le Bangladesh - 60 %, puis le Sri-Lanka, la Chine etc.
Sur les cinq premiers mois de 2010, après deux années de diminution, le nombre de mineurs isolés augmente à nouveau de 35 %.
J'en viens à notre activité et à notre capacité de traitement. En décembre 2008, nous avons conclu un contrat d'objectifs et de moyens visant à mieux réguler le traitement des demandes d'asile et à répondre à leurs fluctuations. Lors de la conclusion de ce contrat, les demandes étaient en phase de diminution et l'hypothèse retenue était celle d'une augmentation modérée de 7 % par an de 2008 à 2010, et même d'une stabilisation en 2011. Nos efforts de gestion ont parfaitement réussi et nous avons même dépassé les objectifs fixés : pendant trois années consécutives, notre activité a augmenté de 11%. Mais cela ne suffit pas car l'augmentation de la demande est bien supérieure.
En 2009, l'Office a pris 46 000 décisions mais les demandes sont passées à 47 700. Si nous extrapolons, elles seront de 51 à 52 000 en 2010 et de 52 à 55 000 en 2011, alors que notre administration est formatée pour en traiter environ 46 000. Nous accumulons donc chaque année des stocks non traités. A la fin de 2010, le stock sera d'environ 12 000 dossiers, ce qui risque d'aboutir à un retour aux « pics » que l'on avait connus en matière de durée de traitement des dossiers.
Nous négocions donc avec Bercy et je pense que nous obtiendrons des postes supplémentaires d'officiers de protection, sans pour cela être en mesure d'assurer la gestion des flux en 2011. Malgré tous nos efforts de productivité, nous nous retrouverons au début de cette année-là avec un déficit dans le traitement des flux, et un nouveau stock se constituera, ce qui est inacceptable. Il faut adapter les moyens au nombre de demandes d'asile si nous voulons tenir les délais d'instruction des dossiers. A la fin de 2008, ce délai était de 100 jours -c'était le record européen-, en 2009 il est passé à 118 jours, il passera en 2010 à 130 ou 135 jours. Or, cet allongement de quelques semaines implique autant de temps supplémentaire d'hébergement, lequel coûte au total de 15 à 17 millions d'euros chaque mois. Mais, l'asile, c'est aussi la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) ... L'augmentation globale du délai d'instruction, entre les deux institutions, garantit au demandeur environ deux années de séjour. Mais les comparaisons internationales -qui sont importantes dans l'optique d'une communautarisation de l'asile - montrent cependant que nous sommes les plus rapides- certains voisins, la Grande-Bretagne par exemple, ne comptabilisent pas les stocks dans leurs statistiques...
Le budget de l'OFPRA est de 31 millions. L'ajout d'une trentaine d'officiers de protection coûterait 1,5 million - 1,8 avec leurs ordinateurs -, à comparer avec les 15 à 17 millions d'euros que coûte un mois d'hébergement supplémentaire...
L'asile à la frontière diminue depuis 2008 : il a diminué de 36 % en 2009 et de 40 % au premier semestre 2010. Alors que notre contrat d'objectifs et de moyens en prévoyait 5 000 par an, nous en serons à 2 500 à la fin de l'année. C'est important, car une partie de ces demandes d'asile à la frontière deviennent des demandes d'asile classiques à traiter comme telles.
Dans les départements d'outre-mer, l'augmentation du nombre des demandes est plus importante encore qu'au niveau national : 40 % de hausse dans les départements français d'Amérique et à Mayotte. En Guyane, il a doublé depuis 2009 et désormais c'est la Martinique - et non plus la Guadeloupe - qui reçoit l'essentiel de la demande haïtienne.
Pour Mayotte, nous avons pu en 2009 réguler la demande en temps réel. Pendant longtemps l'instruction des dossiers y était fort longue ; d'où l'intérêt des requérants d'y déposer leurs demandes. Le délai d'instruction ayant diminué, le nombre des demandes a lui aussi diminué, avant de remonter à nouveau - en provenance de la Grande-Comore et non plus d'Anjouan. L'augmentation en provenance des pays africains est plus faible et représente 30 % du total. Il s'agit de réfugiés du Rwanda ou du Burundi et ce sont des dossiers difficiles à analyser. Un système de visioconférence permet de traiter les dossiers en temps réel. En outre, nous envoyons sur cette île des missions d'instruction.
Pour les départements français des Amériques, nous avons maintenant une antenne en Guadeloupe, un système de visioconférence est installé dans chacun de ces départements et, malgré cela, nous devons y envoyer de plus en plus de missions spécifiques, notamment en Guyane.
La Turquie, l'Arménie -autrefois présente dans le haut de notre liste -et la Serbie ont rejoint la liste des pays d'origine sûrs. D'où une diminution des demandeurs en provenance de ces pays. Le travail d'instruction se partage par moitié entre les procédures prioritaires - moins de 15 jours d'instruction - et les procédures normales.
Vous dites que le délai global de traitement d'un dossier est de deux ans. Dans le passé, avez-vous été plus courts ?
Pour l'OFPRA seul, nous n'en sommes pas à deux ans, nous en sommes à 135 jours. A la fin de 2008, nous avions connu une période exceptionnelle où le délai n'était que de 100 jours. Mais c'est un délai incompressible que nous ne parviendrons pas à améliorer car il y a de plus en plus d'inconnues de gestion : modification de la structure des demandes, de leur composition avec de plus en plus de demandes de réexamen. En outre, les procédures sont de plus en plus complexes : les demandeurs sont logés dans des structures d'accueil à proximité desquelles officient des conseils juridiques, si bien que les dossiers sont de plus en plus élaborés. Nous ne descendrons donc jamais au-dessous de 100 jours, ce qui est déjà un très bon résultat. Le travail sur les dossiers est de plus en plus qualificatif. En outre, le taux de convocation des demandeurs est désormais de 100 % et leur taux de présence de 82 %. Tout cela augmente notre temps de travail et je crains qu'à la fin de 2010, nous n'en soyons plutôt à 150 jours et à 170 en 2012.
La corrélation est étroite entre le stock et les délais, et notre actuel plafond d'emplois de 125 officiers de protection ne permet pas de les diminuer. Nos 20 % de contractuels sont totalement utilisés ; donc notre capacité de traitement n'a aucune marge de croissance.
Quels sont les pays d'origine des mineurs isolés et leurs filières d'arrivée ?
Ce sont pour l'essentiel des jeunes de 16 à 18 ans et ils viennent principalement d'Afrique. Certaines de leurs filières d'arrivée sont démantelées mais on compte aussi des arrivées spontanées.
J'ai le plaisir de représenter le Sénat au conseil d'administration de l'OFPRA, aux côtés d'Etienne Pinte qui représente l'Assemblée nationale, et nous ne désespérons pas d'y rencontrer un jour le représentant du Parlement européen...
On ne peut isoler le travail de l'OFPRA de celui de la CNDA. Le problème des délais concerne davantage celle-ci. Quelles sont les relations de l'Office avec la Cour depuis que celle-ci s'est substituée à la Commission de recours des réfugiés et qu'elle a obtenu son indépendance financière ? Je m'inquiète du nombre de décisions de l'OFPRA annulées par la CNDA. Il y a 18 mois, François-Noël Buffet a déposé une proposition de loi sur le transfert du contentieux des décisions de refus d'entrée sur le territoire français au titre de l'asile, laquelle s'est, depuis, perdue dans les dédales de l'Assemblée nationale. Nous nous étions interrogés à l'occasion de l'examen de cette proposition de loi sur le point de savoir s'il ne serait pas pertinent de transférer au directeur général de l'OFPRA la décision de refus d'entrée en France au titre de l'asile. Aujourd'hui, le ministre de l'immigration suit en effet toujours l'avis de l'OFPRA.
Depuis la mise en place du système actuel les relations entre les deux institutions ont tendance à s'améliorer et nous n'hésitons pas à échanger sur nos préoccupations générales car le système du droit d'asile est global. Mais cela n'est pas suffisant. Si nous parvenons à harmoniser certaines situations et si nous mutualisons les tâches et les coûts d'interprétariat, qui sont importants, en revanche, il nous est difficile de rapprocher nos analyses sur les pays d'origine. Pour progresser il nous faudrait pouvoir échanger dans un lieu commun - le Conseil d'État par exemple ? - mais, pour l'instant, nous sommes en désaccord sur un certain nombre d'États. Pour le Bangladesh, par exemple, notre taux d'accord est de 2 % tandis que le leur est de 30 %. Nous n'avons pas totalement tort car, dans les autres pays européens, le taux d'accord est proche du nôtre, c'est-à-dire qu'ils considèrent eux aussi qu'il s'agit de demandes d'asile infondées. C'est là un sujet de fond dont il faudra traiter car, entre les deux institutions, ce n'est pas la juridiction qui doit continuer à accorder l'essentiel de l'asile. On en est actuellement à un pourcentage de 52 % de décisions favorables de l'OFPRA et 48% de la CNDA. Notre Office doit aussi travailler la qualité et la sécurité juridique de ses décisions mais il ne peut tout faire seul.
J'en viens à votre proposition de loi : il ne s'agit plus là réalité de droit d'asile mais de droit au séjour et seul le ministre a compétence en ce domaine.
Monsieur le préfet, je vous ai entendu parler de « flux », de « stocks », de chiffres. Cela m'a heurtée car, derrière les chiffres il y a d'abord des hommes et des femmes qui doivent être respectés.
On nous avait annoncé qu'avec la création d'un ministère de l'Immigration la coordination serait bien meilleure. Est-ce le cas ? Les liens entre l'OFPRA, l'Intérieur et les Affaires étrangères permettent-ils d'avoir une vision globale de la situation ?
Le demandeur d'asile se heurte souvent à un problème d'éloignement géographique et il a du mal à savoir à quel endroit, proche de son lieu d'hébergement, il peut se faire entendre. Enfin, le problème des « ni/ni » est en train de ressurgir : il s'agit de ces déboutés du droit d'asile qui, ne pouvant ni travailler, ni être logés, ni être expulsés, sont contraints à la clandestinité.
Notre taux d'accord est de 14,5 %. Il était d'environ 15 % pendant quelques années. Celui de la CNDA étant de 18 à 20 %, le taux global était d'environ 35 %. Aujourd'hui ce taux d'accord global est de 29 %.
Pendant les 135 jours du traitement de son dossier, quelles sont les obligations du demandeur d'asile ? Où en sont les bornes d'empreintes digitales, importantes dans la mesure où, au niveau européen, c'est la première demande d'asile qui compte ?
A propos du Bangladesh, vous avez fait allusion à vos divergences avec la CNDA. Certains demandeurs présentent leur requête jusque devant la Cour européenne des droits de l'homme. Existe-t-il avec cette Cour, des contentieux susceptibles de modifier la politique d'asile de la France ?
Ce n'est pas au directeur général de l'OFPRA de répondre sur la politique d'immigration. Ce qui ne veut pas dire que tous les vrais demandeurs d'asile soient menacés : pour beaucoup, la motivation est avant tout économique. Dans mon secteur, deux ressortissants du Cap Vert - pays qui, à ma connaissance, n'est pas à feu et à sang - m'ont dit avoir l'intention de demander l'asile, après plusieurs années en France, pour s'assurer au moins deux ans de tranquillité !
Pardon si ma réponse était par trop technocratique, madame Escoffier. Notre travail concerne avant tout les personnes : l'instruction est essentiellement individuelle, non collective.
Le changement de tutelle n'a pas ému grand monde, ni changé grand-chose au travail quotidien. Il a en revanche amélioré la coordination de l'information, et donc notre appréciation sur tel ou tel pays. Les délais ont été raccourcis, les liens bonifiés. Le Quai d'Orsay reste représenté au conseil d'administration, où il explique la politique diplomatique et apporte ses éclairages. Nous maintenons des liens étroits via les télégrammes diplomatiques. C'est avec les ambassadeurs que nous menons des missions d'information, comme récemment sur le Sri Lanka, la République démocratique du Congo ou encore l'excision au Mali. À la suite de cette dernière mission, nous avons radicalement changé notre doctrine sur ce problème, et la CNDA sa jurisprudence. Bref, les circuits sont raccourcis, l'information plus transparente, l'action administrative plus protectrice des individus.
Le demandeur d'asile s'adresse en premier lieu à la préfecture, ce qui garantit la proximité géographique. La date de sa convocation à l'OFPRA étant connue deux mois à l'avance, il a le temps de s'y préparer. Nous avons mis en place une antenne en Guadeloupe, pour éviter aux demandeurs concernés de devoir se rendre à Paris. Le taux de présentation étant aujourd'hui de 82 %, il paraît difficile de faire davantage...
Le problème des « ni-ni » n'est pas de ma compétence : il résulte de l'application de la loi. D'autres pays ont fait d'autres choix ; au Canada, le demandeur d'asile travaille dès son arrivée. Les demandeurs d'asile ont droit à un logement, et à l'allocation temporaire d'attente ; ils sont bien mieux lotis qu'autrefois ! Pouvons-nous faire plus, compte tenu de l'accroissement du nombre des demandes, et du coût budgétaire ?
Madame Des Esgaulx, je vous indique que le demandeur d'asile n'est soumis à aucune obligation. Il remplit un questionnaire, qui est transmis à l'OFPRA ; il est convoqué, puis reçu en entretien personnalisé par un officier de protection ; enfin, il attend la décision de l'OFPRA. Le récit de la personne est vérifié par l'officier de protection en fonction de ses connaissances et d'éléments obtenus auprès des ambassades ou de notre direction de l'information et de la documentation.
La plupart des préfectures disposent désormais de bornes Eurodac. Reste le problème des demandeurs d'asile qui effacent leurs empreintes, dont le nombre risque de croître compte tenu d'une jurisprudence protectrice...
Nous avons un projet de système communautaire d'appréciation de l'information sur les pays d'origine, autour de logiciels communs, partagés avec les juridictions. Dans notre système de plein contentieux, la CNDA est dans un système recognitif. Elle apprécie à nouveau la situation du demandeur d'asile plusieurs mois après l'OFPRA : celle-ci peut avoir changé, mais le magistrat peut aussi avoir une appréciation propre sur la situation du pays d'origine.
Le contentieux en suspens au niveau européen ne concerne pas le droit d'asile mais plutôt le droit au séjour. Il serait d'ailleurs difficile au juge européen de faire des reproches à la France sans blâmer les autres États européens !
Merci de ces précisions. Comment les officiers de protection de l'OFPRA sont-ils recrutés ?
Par concours administratif. Plusieurs concours d'officier de protection ont été ouverts ces trois dernières années, à la fois pour constituer un stock de titulaires et pour remédier à la situation précaire des contractuels recrutés lors des pics d'activité.
La commission désigne ensuite M. Jean-Pierre Michel en qualité de candidat proposé à la nomination du Sénat pour siéger comme membre titulaire au sein de la Commission consultative des archives audiovisuelles de justice.
La commission examine le rapport de Mme Marie-Hélène Des Esgaulx et le texte qu'elle propose pour la proposition de loi n° 290 (2009-2010), adoptée par l'Assemblée nationale, relative au régime de publicité applicable devant les juridictions pour mineurs.
Examen du rapport
Cette proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale en première lecture le 16 février 2010 à l'initiative de MM. François Baroin et Jack Lang, introduit une dérogation au principe de la publicité restreinte des débats devant les juridictions pour mineurs lorsque l'accusé, mineur au moment des faits, est devenu majeur. Pour ses auteurs, il s'agit de renforcer le droit au procès public, « gage d'un bon fonctionnement de la justice, de sa transparence, de la garantie des droits de la défense, du respect dû aux victimes, et de la nécessaire dose de pédagogie que comporte toute procédure judiciaire vis-à-vis de la société ». Je vous proposerai d'adopter ce texte, en limitant son champ aux cours d'assises des mineurs et en adaptant son dispositif afin de mieux respecter la spécificité de la procédure applicable aux mineurs.
La publicité des débats est une garantie de transparence et d'impartialité, et figure parmi les principes fondamentaux de la procédure pénale. Elle est consacrée par l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme et par le Conseil constitutionnel, dans sa décision du 2 mars 2004. Ce principe implique l'accès du public à la salle d'audience et autorise les journalistes à diffuser les comptes rendus des débats. Il peut toutefois être aménagé afin d'assurer la sécurité publique, l'équité de la procédure, le respect de la présomption d'innocence ou de la dignité de la personne, comme le prévoit d'ailleurs l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme. Le Conseil constitutionnel considère également que des « circonstances particulières » peuvent justifier les débats à huis-clos.
Devant les juridictions de droit commun, le huis clos peut être ordonné lorsque la publicité risque de porter atteinte à l'ordre ou aux moeurs, à la sérénité des débats, à la dignité de la personne ou aux intérêts d'un tiers. Il est de droit à la demande d'une victime de viol ou de tortures et actes de barbarie accompagnés d'agressions sexuelles. L'arrêt ou le jugement sur le fond est toujours prononcé en audience publique.
Le principe de la publicité restreinte devant les juridictions pour mineurs découle du principe de spécialité du droit pénal et de la procédure pénale applicable aux mineurs, principe fondamental reconnu par les lois de la République. Il implique notamment que les mineurs soient jugés « par une juridiction spécialisée ou selon des procédures appropriées ». Il s'agit de prendre en compte à la fois le devoir de protection et d'éducation des mineurs délinquants, dont la personnalité est en devenir, et la spécificité de cette délinquance.
Les mineurs auteurs d'infractions relèvent de juridictions spécialisées : le juge des enfants, le tribunal pour enfants, compétent pour les délits et contraventions de cinquième classe et les crimes commis par des mineurs de moins de 16 ans, la cour d'assises des mineurs, compétente pour juger les mineurs de 16 à 18 ans auteurs de crimes.
Publicité restreinte ne signifie pas huis clos. Seul un nombre limité de personnes peuvent assister à l'audience, et le président peut à tout moment ordonner que le mineur ou les témoins se retirent. Corrélativement, la publication du compte rendu des débats ou de l'identité du mineur est interdite. En effet, la présence du public est susceptible de traumatiser les enfants, au point de les empêcher de participer réellement à leur défense, ce qui constitue, pour la Cour européenne des droits de l'homme, une violation des règles du procès équitable. Il s'agit également de protéger les mineurs de l'opprobre et de la vindicte populaire qui pourraient compromettre leur future insertion sociale et leur évolution personnelle. Ces considérations ont d'ailleurs conduit la commission Varinard à préconiser le maintien du principe de la publicité restreinte dans le futur code de la justice pénale des mineurs.
La proposition de loi ne vise que les individus qui, mineurs au moment des faits, sont devenus majeurs le jour de leur comparution. En aucun cas la publicité restreinte ne pourrait être levée si l'un des accusés est toujours mineur le jour de l'ouverture des débats.
En 2008, 233 des 237 personnes jugées par les cours d'assises des mineurs étaient majeures au moment de leur condamnation en premier ressort ; plus aucune n'était mineure au moment du jugement en appel. De fait, le délai entre les faits et la condamnation est de cinq ans en moyenne pour les condamnations prononcées par les cours d'assises des mineurs, de 7,6 ans s'agissant des condamnations en appel. En revanche, seules 44 % des personnes condamnées par un tribunal pour enfants étaient majeures au moment de leur condamnation.
Depuis 2002, le code de procédure pénale permet à l'accusé, comparaissant majeur devant une juridiction pour mineurs, de demander à bénéficier d'un procès public. Ces dispositions, adoptées à l'initiative de notre collègue Jean-Pierre Michel, alors député, visaient à répondre à l'affaire Patrick Dils, rejugé à 31 ans devant la cour d'assises des mineurs. La proposition de loi étend le champ de cette dérogation, en permettant à la cour ou au tribunal d'ordonner la levée de la publicité restreinte à la demande du ministère public, de la partie civile ou d'un autre accusé, sauf s'il existe un autre accusé toujours mineur ou si la personnalité de l'accusé, mineur au moment des faits, rend indispensable que, dans son intérêt, les débats ne soient pas publics. Enfin, les peines encourues en cas de publication de l'identité de l'accusé seraient aggravées.
La plupart des personnes que j'ai entendues se sont montrées réservées, relevant notamment qu'un jeune n'est guère plus mûr à 19 ans qu'à 17, et que ces jeunes majeurs sont tout aussi susceptibles d'être affectés dans leur développement par une publicité donnée à des faits commis dans leur adolescence. Par ailleurs, les magistrats craignent une atteinte au principe d'égalité des citoyens devant la justice, le régime de publicité applicable devenant fonction, non seulement de l'âge de l'accusé au moment des faits, mais également des délais d'instruction des affaires.
Le texte issu de l'Assemblée nationale, qui a considérablement amendé la proposition de loi initiale, paraît relativement équilibré et tend toujours à préserver, sous le contrôle du juge, l'intérêt du mineur devenu majeur. La publicité restreinte demeurerait la règle ; en cas d'opposition de l'une des parties à la publicité, la décision appartiendrait en dernier ressort à la juridiction. In fine, l'intérêt du mineur devenu majeur devrait dicter la décision de la juridiction. Je vous proposerai un amendement afin de réaffirmer ce point.
Au regard des garanties présentées par ce dispositif, il m'a semblé pouvoir être appliqué devant les cours d'assises des mineurs. En revanche, son extension aux tribunaux pour enfants ne me semble pas opportune. Les cours d'assises des mineurs connaissent des affaires les plus graves, qui peuvent justifier, dans un souci de pédagogie envers l'ensemble de la société, que les débats soient publics. Tel n'est pas le cas des affaires portées devant les tribunaux pour enfants.
En outre, lorsqu'une affaire criminelle met en cause à la fois des mineurs âgés de 16 à 18 ans et des majeurs, le juge d'instruction peut renvoyer l'ensemble des accusés devant la cour d'assises des mineurs, afin que l'affaire soit jugée globalement. Dans l'affaire du « gang des barbares », sur les 27 personnes renvoyées devant la cour d'assises des mineurs, seules deux étaient mineures au moment des faits. L'ensemble des coaccusés ont été jugés selon le régime de la publicité restreinte car l'une de ces mineures, devenue majeure depuis, n'a pas souhaité un procès public. En 2008, un tiers des personnes condamnées par une cour d'assises des mineurs étaient majeures au moment des faits, ce qui justifie une dérogation au principe de la publicité restreinte, dès lors que cela ne paraît pas contraire à l'intérêt de l'accusé mineur au moment des faits. À l'inverse, la disjonction des procédures est obligatoire en matière correctionnelle : les tribunaux pour enfants ne jugent que des mineurs et de jeunes majeurs, pour lesquels le maintien de la publicité restreinte conserve toute sa pertinence.
Je vous proposerai donc de limiter le champ de la proposition de loi aux cours d'assises des mineurs, et de réaffirmer l'exigence de protection du mineur devenu majeur au moment de son jugement par la cour d'assises.
Je remercie Mme Des Esgaulx pour son excellent rapport, mais elle ne va pas au bout de l'argumentation ! Cette loi de circonstance vise à contraindre une jeune fille, mineure au moment des faits, et vraisemblablement manipulée pour y participer, à un procès public en appel, ce que, contrairement au chef de gang, elle n'a pas souhaité. N'y a-t-il pas d'ailleurs conflit d'intérêt à ce qu'un parlementaire avocat dépose une proposition de loi favorable à un client du cabinet qui l'emploie ? Le conseil national du barreau est hostile à ce texte, qui pose notamment un problème de constitutionnalité. La convention européenne des droits de l'homme, la convention internationale des droits de l'enfant, le Conseil constitutionnel dans sa décision du 29 août 2002 ont réaffirmé la spécificité du droit des mineurs, qui inclut la publicité restreinte.
On peut également s'interroger sur l'opportunité de ce texte. Le 16 mars dernier, Mme Alliot-Marie a annoncé que la réforme du droit pénal des mineurs, engagée à la suite de la commission Varinard, était prête. Or cette commission a préconisé le maintien de la publicité restreinte... De même, la Garde des sceaux a annoncé le 8 juin la réforme de la procédure pénale relative aux assises. Elle a enfin rappelé devant l'École nationale de la magistrature son attachement à des réformes globales, porteuses d'une philosophie du droit, plutôt qu'à des réformes partielles. Pour suivre la Garde des Sceaux, il faut donc repousser cette proposition de loi !
A défaut, nous déposerons un amendement de repli prévoyant que seuls l'accusé, le ministère public et le président de la cour peuvent demander la levée de la publicité restreinte, à l'exclusion des parties civiles.
J'ai apprécié le rapport de Mme Des Esgaulx, qui s'est posé beaucoup de questions. Sa conclusion est toutefois en demi-teinte... La principale dérogation au principe de publicité concerne les mineurs. La proposition de loi n'est pas neutre : 98% des jeunes qui ont commis un crime entre 16 et 18 ans sont majeurs lors de leur comparution devant la cour d'assises - l'an dernier, ils étaient 233. Il faut en rester au principe selon lequel l'âge s'apprécie au moment des faits, sauf à abaisser de fait l'âge de la majorité ! La minorité est un tout. La publicité des débats complique la réinsertion et le développement des jeunes mis en cause, qui n'est pas achevé à 19 ou 20 ans.
Laisser chaque cour d'assises libre d'apprécier l'opportunité du huis clos entraînerait une application hétérogène de la loi pénale sur le territoire de la République, et introduirait une inégalité entre justiciables.
La République s'honore d'avoir combattu le penchant pour les procès-spectacles, souvent source de dérives : n'en rajoutons pas ! Ni la population ni les professionnels ne demandent cette réforme. Ne nous laissons pas entraîner par quelques personnes, qui visent un cas particulier. Le problème réel des co-accusés, illustré par l'affaire du « gang des barbares », ne justifie pas que l'on change la législation. Bref, je suis opposé à cette proposition de loi.
Je salue à mon tour le travail de Mme Des Esgaulx : certains rapports sont plus difficiles que d'autres... Je suis totalement opposé à ce texte, qui n'est demandé que par quelques individus, et rejeté par l'ensemble des avocats et la majorité des magistrats. Je n'en comprends pas la justification : quels sont les effets pervers de la publicité restreinte ? Nous n'avons pas à céder à la loi de la communication généralisée !
Il ne faut pas traumatiser les mineurs, dit Mme Des Esgaulx. Mais en autorisant la publication incontrôlée des débats dans la presse, on donne entière liberté aux pires tabloïds de marquer ces mineurs au fer rouge ! Nous proposerons un amendement de repli, mais sur le fond, nous sommes contre ce texte.
Ce n'est malheureusement pas incompatible !
Je félicite Mme Des Esgaulx pour son rapport : ses arguments devraient nous conduire à repousser l'ensemble du texte ! Pourquoi introduire cette scorie ? Pourquoi ouvrir une brèche qui risque de nous être reprochée par la Cour européenne des droits de l'homme ? La commission des lois ferait oeuvre utile en rejetant ce texte en bloc. Ce n'est pas aux parties civiles de définir la marche du procès ! Or Me Szpiner a déjà annoncé qu'il aura fait changer la loi avant le procès en appel du « gang des barbares » ! On ne légifère pas pour permettre le délire médiatique autour d'un procès, quel que soit le caractère odieux du crime. Je voterai contre ce texte, tout en saluant le travail du rapporteur.
Les arguments du rapporteur nous invitent en réalité à voter contre ce texte. Nos propositions de loi sur la garde à vue ont été rejetées au motif que la question devait être traitée dans le cadre d'une réforme globale ; pourquoi en irait-il autrement ici ? Une importante réforme de la justice des mineurs est annoncée. Nous ne nous honorerions pas à voter cette loi de circonstance. Cette mesure concernerait la quasi-totalité des procès devant la cour d'assises des mineurs. Or il y a déjà suffisamment de publicité outrancière autour des procès d'assises : n'en rajoutons pas !
Étant donnée la personnalité des auteurs de cette proposition de loi, je m'attendais à un texte novateur et progressiste, non à une telle régression de notre droit ! Heureusement, notre rapporteur en limite les conséquences...
Si la publicité des débats était gage de qualité de la justice, cela se saurait ! Gage de transparence ? Cela reste à démontrer... Le cas d'accusés mineurs au moment des faits, devenus majeurs lors de leur comparution, est dû à la durée de l'enquête : on ne peut faire dépendre la publicité du procès d'un tel facteur ! Il faut en rester au principe selon lequel on se place au moment des faits - ou avoir le courage de fixer la majorité à 16 ans ! On ne peut faire d'un mineur, qui est juridiquement un incapable, un majeur par aspiration le jour où on lui applique une loi répressive. Je me réjouis que le rapporteur propose de supprimer l'article 2 ; quant à l'amendement de M. Michel excluant les parties civiles, il revient à vider la proposition de loi de l'essentiel de sa portée... Dès lors, pourquoi voter le texte ?
Je salue à mon tour la qualité du rapport. Une meilleure conclusion eût été le renvoi en commission, ou la suppression des deux articles ! Cette proposition de loi répond peut-être aux exigences de journalistes, mais n'apporte aucun progrès sur le plan du droit. Si l'on veut abaisser la majorité à 16 ans, qu'on le dise ! Mais remettre ainsi en cause l'excuse atténuante de minorité, c'est ouvrir une brèche dans le traitement pénal particulier des mineurs. Même l'amendement de repli de M. Michel laisserait subsister une grave scorie.
L'audience devant la cour d'assises des mineurs n'a rien à voir avec celle devant la cour d'assises pour majeurs. La grande majorité des comparutions sont liées à des affaires de moeurs, sachant que le huis clos n'est pas automatique. Or à 25 ou 30 ans, la situation de l'accusé a évolué ! On ne peut ouvrir une telle brèche sous prétexte de régler un cas médiatique.
Cette proposition de loi sera examinée dans le cadre d'une semaine d'initiative parlementaire ; pour cela, il faudrait qu'un groupe en demande l'inscription...
Plusieurs travaux sont en cours : projets de la Chancellerie, rapport d'information de Mme Des Esgaulx et M. Peyronnet...
Monsieur Michel, il ne s'agit pas de contraindre la jeune fille en cause : la cour pourra décider la publicité, c'est tout. Je suis convaincue qu'elle ne le fera que rarement. Le principe de publicité du procès a valeur constitutionnelle, comme l'a rappelé le Conseil constitutionnel dans sa décision du 2 mars 2004. Je suis d'accord qu'il vaut mieux une réforme globale. Je travaille d'ailleurs avec M. Peyronnet à un rapport d'information sur la justice pénale des mineurs. Je retiens également votre idée d'exclure les parties civiles du dispositif.
Monsieur Zocchetto, le rapport d'information sera l'occasion de recadrer le débat. La cour apprécie la personnalité des mineurs au moment des faits. N'oublions pas qu'il ne s'agit que d'une question de police d'audience, et que la primauté de l'intérêt de l'accusé est réaffirmée.
Monsieur Anziani, le Sénat a été saisi par l'Assemblée nationale : il nous faut bien examiner le texte ! Aux termes de l'article 40 de la Convention internationale relative aux droits de l'enfant, les États parties reconnaissent à tout enfant suspecté, accusé ou convaincu d'infraction à la loi pénale le droit à un traitement adapté. Par ailleurs, je proposerai un amendement interdisant totalement la publication de l'identité des personnes en cause.
Monsieur Frimat, la commission Varinard ne s'est pas prononcée sur le cas des mineurs devenus majeurs.
Madame Borvo Cohen-Seat, tout est question d'équilibre. On ne peut évacuer le problème des dérogations.
Enfin, je rappelle à MM. Pillet et Mézard qu'il ne s'agit que d'une question de procédure : sur le plan du droit, les mineurs devenus majeurs seront bien jugés selon le droit pénal des mineurs.
Si jamais quelqu'un a déclaré qu'il fallait changer les procédures avant le procès d'appel, je ne serais pas disposé à obtempérer. Je désapprouve le fait que, dans des textes de plus en plus nombreux, ce n'est plus le ministère public qui pilote. Cela remet en cause notre droit ! C'est une tendance qui s'instille progressivement dans nombre de discours. Mme le rapporteur, je pense que, quand une grande réforme est en cours, on renvoie les textes partiels en commission.
Cette proposition de loi n'est, de toute façon, pas encore inscrite à l'ordre du jour.
Si elle ne vient pas en séance, nous avons tout le temps de travailler le sujet et, avec le rapport, nous sortirons le compte rendu des débats de notre commission, qui sera intéressant ! Quant à la question posée par Jean-Pierre Michel, elle est un peu marginale mais il faudra la traiter.
Elle est conforme à la jurisprudence de la commission des lois : lorsqu'on veut modifier un petit aspect d'une question et que l'ensemble de la question est en cours de modification, on renvoie en commission !
Je suis ravie de cette proposition de renvoi. Mais si le texte était inscrit à l'ordre du jour et s'il n'était pas renvoyé en commission, serait-il adopté tel quel ?
C'est le texte de l'Assemblée nationale qui serait discuté. Nous pourrions déposer des amendements.
Le dépôt d'une motion de renvoi en commission en cas d'inscription à l'ordre du jour est décidé à l'unanimité.
La commission procède ensuite à l'examen d'une pétition relative à l'absence d'obligation de déclaration du chiffre d'affaires des auto-entrepreneurs.
Nous devons examiner ce matin une pétition qui conteste l'absence d'obligation de déclaration du chiffre d'affaires des auto-entrepreneurs. Il est vrai que la disposition avait créé des distorsions de concurrence mais, depuis, tout est rentré dans l'ordre.
Le régime de l'auto-entrepreneur, créé par la loi du 4 août 2008 de modernisation de l'économie et entré en vigueur au ler janvier 2009, a déjà fait l'objet de modifications en ce sens. L'immatriculation au répertoire des métiers des auto-entrepreneurs exerçant à titre principal une activité artisanale a en effet été rendue obligatoire par la loi de finances rectificative pour 2009. En mars 2010, la commission des finances du Sénat a organisé une table ronde sur le statut de l'auto-entrepreneur, au cours de laquelle le président Arthuis a rappelé que les sénateurs étaient vivement intéressés par cette question, ce que démontrait le nombre de questions écrites ou d'amendements déposés sur différents textes et visant à modifier le régime de l'auto-entrepreneur.
Ces questions ont été abordées lors de l'adoption de la loi du 15 juin 2010 relative à l'entrepreneur individuel à responsabilité limitée, puisque le président de la commission des finances avait déposé un amendement visant à mieux encadrer le régime de l'auto-entrepreneur. Celui-ci a été rejeté. Je vous ai rappelé à cette occasion que « la commission des lois n'a pas été en mesure de traiter ce sujet, de trop nombreux éléments nous manquant, en dépit de la table ronde fort intéressante (. . .). Si le Gouvernement ne bouge pas, le Parlement pourra néanmoins, à l'avenir, prendre des initiatives en vue d'évaluer le statut d'auto-entrepreneur, par exemple en élaborant une proposition de loi ». M. Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation précisait, quant à lui, que des travaux d'évaluation avaient été engagés avec la réunion d'un comité de pilotage dont l'étude d'impact devrait être publiée au début de l'été.
Les préoccupations actuelles des pétitionnaires ont été portées à la connaissance du Gouvernement par l'intermédiaire d'une vingtaine de questions écrites de sénateurs, posées au cours du mois de juin 2010 et actuellement en attente de réponse. Enfin, une proposition de loi relative aux cotisations sociales versées par les auto-entrepreneurs a été déposée le 5 juillet 2010 au Sénat par Mme Muguette Dini, MM. Jean Arthuis, Dominique Leclerc et Alain Vasselle.
La pétition relevant du domaine de compétence de la commission des lois, je vous propose de répondre aux pétitionnaires en leur indiquant les éléments ainsi rapportés.
Je ne suis pas du tout convaincu que la question soit réglée. J'ai participé au dernier congrès de la CAPEB dans mon département. Le statut de l'auto-entrepreneur pose de réels problèmes aux artisans et, dans de nombreux cas, il sert à légaliser le travail dissimulé. Pour les artisans qui ont des obligations de formation, de déclarations et de formalités administratives diverses, la concurrence est faussée. Je suis d'accord pour qu'on leur livre ces éléments de réponse mais je persiste à penser que la question n'est pas du tout réglée. L'auto-entreprise était une fausse bonne idée. Pas une seule chambre de métiers n'est satisfaite et le malaise est général dans le monde de l'artisanat et parmi les PME du bâtiment.
C'est pour d'autres raisons qu'ils sont mécontents.... Il y a la crise.
Un artisan doit assurer une masse d'obligations alors que, par ailleurs, on peut créer une entreprise sur Internet, en moins de 24 heures, et s'affranchir de toutes ces obligations ! Il y a là un problème...
L'Union professionnelle artisanale n'a pas le même point de vue que vous.... De toute façon, une proposition de loi est déposée.
On a apporté de nombreuses corrections à ce statut et je vous rappelle que nous avons voté celui de l'EIRL.
Je ne suis pas d'accord avec vous, monsieur Sueur, car des auto-entrepreneurs exercent une activité ailleurs que dans l'artisanat. Par exemple, heureusement qu'il en existe pour trouver un jardinier en province ! Car il n'existe aucune entreprise de jardinage. En revanche, pour trouver un maçon, je m'adresse évidemment à une entreprise. Et je suis de l'avis du président : si les artisans sont mécontents, c'est pour d'autres raisons que cette concurrence des auto-entrepreneurs.