La séance est ouverte à neuf heures.
Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
L’ordre du jour appelle, à la demande du groupe socialiste, la discussion en deuxième lecture de la proposition de loi, adoptée avec modifications par l’Assemblée nationale, visant à la suspension de la fabrication, de l’importation, de l’exportation et de la mise sur le marché de tout conditionnement à vocation alimentaire contenant du bisphénol A (proposition n° 171, texte de la commission n° 202, rapport n° 201).
Dans la discussion générale, la parole est à Mme la rapporteur.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous examinons aujourd’hui, en deuxième lecture, la proposition de loi relative aux conditionnements alimentaires comportant du bisphénol A, ou BPA.
Nous avons longuement débattu de ce texte le 9 octobre dernier et, avant de vous présenter les modifications apportées par l’Assemblée nationale au texte du Sénat, je souhaite vous rappeler en quelques mots le contexte.
Le bisphénol A est très largement utilisé dans les produits de la vie courante et il fait l’objet, depuis plusieurs années, de nombreuses études et évaluations scientifiques. Celles-ci permettent de tisser aujourd’hui un faisceau d’indices que l’Institut national de la santé et de la recherche médicale, l’INSERM, et l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, l’ANSES, ont analysés en 2011 et en 2012. Il existe dorénavant un certain consensus autour de quatre conclusions principales.
La toxicité du BPA est avérée chez l’animal et suspectée chez l’être humain. L’alimentation en constitue la source principale d’exposition. Le BPA ne répond pas à l’approche toxicologique classique et peut notamment produire des effets à faibles doses, avec des mécanismes encore mal élucidés. Enfin, les périodes de grossesse et du début de la vie sont critiques et constituent une zone de vulnérabilité.
C’est dans ce contexte scientifique qu’intervient la discussion de la proposition de loi dont l’objectif principal est de supprimer le bisphénol A des conditionnements alimentaires.
Quelles sont les principales modifications adoptées par l’Assemblée nationale en deuxième lecture ?
Commençons, bien sûr, par ce qui nous a beaucoup occupés, tout le monde s’en souvient, à savoir la date.
Premièrement, la suspension de la commercialisation des conditionnements destinés aux nourrissons et enfants de moins de trois ans avait été fixée par le Sénat au 1er janvier 2013. L’Assemblée nationale a conservé ce principe, mais, par prudence, au cas où le calendrier parlementaire ne permettrait pas une adoption définitive avant cette date, elle a prévu que cette suspension entrerait en vigueur le premier jour du mois suivant la promulgation de la loi.
Je vous rappelle que les industriels ont largement anticipé ce vote, ce qui démontre l’intérêt de tels débats parlementaires, et qu’il n’existe quasiment plus de conditionnements alimentaires pour bébés comportant du BPA.
Deuxièmement, en ce qui concerne les autres conditionnements, notre commission avait proposé de prévoir un délai de deux années entre la promulgation de la loi et la suspension de la commercialisation. Un débat a eu lieu, en séance, entre les tenants du 1er janvier 2015, position défendue par notre commission, ceux du 1er juillet et ceux du 1er janvier 2016.
Ce débat, certes long, était pourtant nécessaire, car il était utile d’entendre les différents arguments échangés et de mesurer la portée de la décision que nous allions prendre. Finalement, le Sénat avait opté pour le 1er juillet 2015.
Je ne sais s’il s’agissait de la légendaire sagesse de notre Haute Assemblée, mais je milite toujours pour un objectif plus volontariste. Alors que les industriels travaillent depuis déjà plusieurs années sur la substitution du BPA, je ne suis pas certaine qu’ajouter six mois leur soit nécessaire. A contrario, ce délai serait un signal de relâchement ou d’incertitude, alors qu’au fond nous sommes très largement, voire unanimement, d’accord sur l’objectif.
L’Assemblée nationale a, de son côté, approuvé la date du 1er janvier 2015, qui me semble d’autant plus acceptable par le Sénat que nos collègues députés ont fait un pas sensible vers le compromis, en adoptant deux mesures complémentaires.
Première mesure : seuls les conditionnements entrant en contact direct avec les aliments seront concernés, alors que le texte englobait également, jusqu’alors, les surfaces externes des emballages ou des récipients. Cette précision importante est cohérente avec les expressions utilisées en droit communautaire en la matière. En outre, elle conserve toute sa validité à notre objectif qui, conformément au cadre scientifique aujourd’hui établi, est d’éviter la migration de BPA dans les aliments.
Seconde mesure complémentaire : le Gouvernement remettra, avant le 1er juillet 2014, un rapport au Parlement pour évaluer les substituts possibles au BPA au regard de leur éventuelle toxicité. Ce rapport permettra, plus de six mois avant l’entrée en vigueur de la suspension, de faire un point d’étape et, le cas échéant, d’adapter notre législation, par exemple si nous nous rendons compte qu’il n’existe pas de substitut acceptable pour certains aliments, notamment ceux qui ont une acidité élevée.
En outre, l’Assemblée nationale n’a pas modifié l’habilitation que nous avions introduite pour que les agents de la répression des fraudes puissent contrôler effectivement le respect des dispositions de la proposition de loi.
Enfin, elle a confirmé la présence d’un avertissement sanitaire déconseillant l’usage des conditionnements alimentaires comportant du BPA aux femmes enceintes ou allaitantes et aux nourrissons et enfants en bas âge.
Au Sénat et à l’Assemblée nationale, le texte s’est enrichi de dispositions concernant les dispositifs médicaux ou certains produits destinés aux nourrissons.
Sur l’initiative de notre collègue Chantal Jouanno, le Sénat avait transposé le mécanisme applicable aux conditionnements alimentaires à tous les dispositifs médicaux destinés aux femmes enceintes ou allaitantes, aux nourrissons ou aux enfants jusqu’à trois ans et comportant soit une substance CMR : cancérogène, mutagène ou reprotoxique, soit un perturbateur endocrinien.
L’Assemblée nationale a supprimé cette mesure, estimant que son champ d’application très large était susceptible d’englober certains dispositifs indispensables au traitement ou à la prise en charge d’un patient et sans produit de substitution connu. Cette difficulté est d’autant plus forte que le nombre de substances concernées est très élevé : l’Assemblée nationale évoque le nombre de quatre cents, mais le tableau des substances CMR concernées représente plus de mille pages du Journal officiel de l’Union européenne, soit plusieurs milliers de substances.
Je n’évoquerai pas plus cette question à cet instant, car nous en aurons l’occasion plus tard dans la matinée.
Dans le même esprit et sur l’initiative de notre collègue Gilbert Barbier, le Sénat avait introduit une autre mesure, plus ciblée, qui consistait à interdire, à compter du 1er juillet 2015, dans les services de pédiatrie, néonatologie et maternité, l’utilisation de matériaux de nutrition parentérale, tubulures et contenants comportant certains phtalates.
L’Assemblée nationale a conservé cet ajout du Sénat, l’estimant à juste titre pertinent, mais elle en a défini plus précisément le champ d’application. Je crois que la rédaction trouvée à l’Assemblée nationale non seulement ne dénature pas l’amendement adopté au Sénat, mais en respecte l’objectif. En outre, la demande de rapport dont je viens de parler a été complétée par une étude sur la présence de ces phtalates dans les dispositifs médicaux.
Par ailleurs, l’Assemblée nationale a inséré deux interdictions supplémentaires.
Les collerettes de tétines et de sucettes, et les anneaux de dentition comportant du BPA seront interdits sans délai. L’utilisation de biberons comportant du BPA sera explicitement interdite, même s’ils relèvent de la catégorie des dispositifs médicaux, ce qui ne peut constituer qu’une régularisation de la loi de 2010.
J’aborderai un dernier point avant de conclure. Sur l’initiative du groupe écologiste, le Sénat avait demandé la remise d’un rapport du Gouvernement au Parlement sur les perturbateurs endocriniens. Même si nous avons déjà eu plusieurs rapports de ce type, notamment celui de Gilbert Barbier pour l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques, l’OPECST, le Gouvernement pourra ainsi actualiser les données scientifiques et présenter la politique qu’il entend mener à ce sujet. Je le disais, ce rapport devra également contenir des informations sur les dispositifs médicaux, ce qui est tout à fait pertinent.
En conclusion, je constate que la navette parlementaire a été fructueuse : nous avons eu des débats approfondis sur la date d’entrée en vigueur de la fin programmée des conditionnements alimentaires comportant du bisphénol A et nous avons enrichi le texte de mesures complémentaires.
À ce stade de la deuxième lecture, je crois que nous avons abouti à un compromis tout à fait satisfaisant, qui conforte nos ambitions dans un cadre réaliste.
Au regard des mesures restant réellement en discussion, il me semble inutile de reporter l’adoption définitive du texte de plusieurs semaines. En adoptant conforme le texte résultant des travaux de l’Assemblée nationale, le Sénat adresserait, dès aujourd’hui, un signal politique déterminant, puisque notre pays serait alors le premier au monde à programmer effectivement la fin de l’utilisation du bisphénol A dans les conditionnements alimentaires.
Tant à l’Assemblée nationale qu’au Sénat, il existe une très large majorité, voire un consensus, sur le principe et les grandes modalités.
C’est pourquoi, mes chers collègues, je vous propose, au nom de la commission des affaires sociales unanime, d’adopter la proposition de loi transmise par l’Assemblée nationale sans modification. §
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, tout d’abord, je vous serais reconnaissante de bien vouloir excuser Mme Marisol Touraine, qui ne peut être au Sénat aujourd’hui en raison du lancement du plan de lutte contre les déserts médicaux.
J’en viens à cette proposition de loi, qui se fonde sur une seule exigence : assurer la sécurité de nos concitoyens. C’est elle qui doit guider nos choix en matière de santé publique.
En appliquant le principe de précaution, notre objectif n’est pas de sanctionner. Toutefois, lorsque la santé des Français est en jeu, les intérêts privés doivent être relégués au second plan.
La qualité de l’environnement est une préoccupation majeure du Gouvernement. Aujourd’hui, nous savons que certains produits, dont nous avons un usage quotidien, ont un impact néfaste sur notre santé. Nous pouvons établir avec certitude que de nombreux objets entourant les Français dans leur vie quotidienne ne sont pas exempts de risques.
Il est donc essentiel de soutenir et d’amplifier les initiatives qui ont été développées à l’échelle communautaire. Je pense notamment à la directive REACH, qui nous a permis de parfaire nos connaissances scientifiques dans ce domaine en constituant une large base de données sur les produits utilisés dans l’Union européenne.
L’Assemblée nationale et le Sénat ont voté à l’unanimité, en 2010, l’interdiction de l’utilisation des biberons contenant du bisphénol A. Ce fut une étape majeure et le début d’un processus qu’il nous revient aujourd’hui de poursuivre.
De nombreuses études mettent régulièrement en garde les pouvoirs publics contre les effets nocifs du bisphénol A sur notre état de santé. Celles-ci ont prouvé, vous l’avez rappelé, madame le rapporteur, que le BPA est une substance toxique pour l’animal. Par ailleurs, nous savons que ce produit est un perturbateur endocrinien.
En 2010, l’ex-Agence française de sécurité sanitaire des aliments avait synthétisé les travaux de recherche sur le sujet et reconnaissait la présence de « signaux d’alerte » dans les études scientifiques.
Très concrètement, cela signifie que nous pouvons aujourd’hui établir un lien clair entre le bisphénol A et certaines pathologies humaines, telles que les maladies cardiovasculaires et métaboliques.
Un an plus tard, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, l’ANSES, a montré que les nourrissons, les femmes enceintes et les femmes allaitantes étaient plus touchés par le bisphénol A. Ces populations fragiles en seraient ainsi les premières victimes.
Il serait totalement irresponsable de ne pas agir : douter de l’innocuité d’une substance doit nous suffire à appliquer le principe de précaution.
C’est la conviction du Gouvernement.
C’est également le devoir du législateur que d’encadrer, de réglementer, de contrôler et, le cas échéant, de sanctionner.
C’est tout le sens de cette proposition de loi.
Le bisphénol A représente un véritable danger : il est en effet utilisé dans la fabrication d’objets qui entourent nos concitoyens au quotidien. Il entre notamment dans la composition d’un nombre considérable de contenants alimentaires. Or nous savons aujourd’hui que le bisphénol A peut spontanément migrer vers les aliments et que nos concitoyens peuvent donc l’ingérer.
Voilà un an, de nombreux députés ont cosigné ce texte, dont Jean-Marc Ayrault et Gérard Bapt, qui est à l’initiative de cette démarche, que je salue. La proposition de loi que nous défendons vise à la « suspension de la fabrication, de l’importation, de l’exportation et de la mise sur le marché de tout conditionnement à vocation alimentaire contenant du bisphénol A ».
Notre volonté, c’est donc d’aller plus loin dans la protection des consommateurs et de compléter les textes législatifs déjà en vigueur.
Nous ne pouvons plus nous permettre d’attendre pour protéger les populations les plus fragiles des effets nocifs du BPA.
Toutefois, notre ambition est plus grande encore, car c’est bien l’ensemble des Français qui est aujourd’hui menacé par le BPA. Il nous faut donc assurer la protection de tous nos concitoyens des effets néfastes des perturbateurs endocriniens.
Sur ce sujet, nous pouvons être fiers que la France soit pionnière en Europe.
Le Gouvernement a pris la mesure des enjeux en matière de santé-environnement. La conférence environnementale a été l’occasion de rappeler notre mobilisation et notre engagement sur ce sujet essentiel.
Le Premier ministre avait d’ailleurs exprimé son soutien quant à l’initiative législative qui visait à interdire le bisphénol A dans les contenants alimentaires.
La proposition de loi que nous examinons aujourd’hui permettra, le 1er jour du mois suivant la promulgation de la loi, de suspendre les contenants alimentaires produits avec du bisphénol A à destination des enfants de moins de trois ans.
En 2015, elle fera disparaître l’ensemble des contenants alimentaires fabriqués avec cette substance.
Ce n’est que par réalisme que nous avons fait le choix de procéder en deux étapes. Il ne suffit pas de décréter l’interdiction de l’utilisation d’une substance, encore est-il nécessaire de trouver des produits de substitution qui remplaceront le bisphénol A et qui ne présenteront aucun risque nouveau pour les consommateurs.
Cette proposition de loi est une étape décisive, mais nous devons poursuivre notre mobilisation.
La conférence environnementale nous a également permis de rappeler notre volonté de prévenir, avec pragmatisme, les risques de santé-environnement. En faisant vivre la démocratie environnementale, nous avons fixé des objectifs et établi une méthode afin d’inscrire notre action dans la durée.
La table ronde relative à la « santé-environnement » et animée par Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé, nous a permis de redire l’importance de faire face à l’apparition des risques « émergents ». Ceux-ci sont particulièrement difficiles à appréhender. Leurs effets sur la santé sont encore trop mal connus. C’est la raison pour laquelle il est essentiel de miser sur la recherche. Une mobilisation européenne et internationale est aujourd’hui primordiale.
En outre, nos concitoyens sont confrontés à d’autres expositions au BPA et à des molécules dites cancérogènes, mutagènes et reprotoxiques. Nous attendons beaucoup des travaux scientifiques qui ont été engagés. Leurs résultats devraient nous permettre de prendre rapidement les mesures qui s’imposent.
Cependant, pour certains produits, nous ne pouvons plus attendre. Les expositions environnementales aux perturbateurs endocriniens, particulièrement durant le développement fœtal, sont par exemple suspectées d’être à l’origine d’une diminution de la concentration spermatique dans les pays industrialisés. Il a été observé qu’au contact de l’un des phtalates les plus communément utilisés, le DEHP, 40 % des cellules à l’origine de la production des spermatozoïdes disparaissaient au bout de trois jours.
C’est pourquoi, à la suite d’un amendement de son rapporteur adopté par la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale, l’article 3 de ce texte prévoit d’interdire les tubulures comportant du DEHP dans les services de pédiatrie, de néonatologie et de maternité. Cette interdiction sera applicable dès 2015 ; un substitut inoffensif existe et les industriels produisent déjà des tubulures l’utilisant.
En nous saisissant de la question des phtalates, nous serons précurseurs, dans une Europe où les règles de santé publique doivent s’appliquer à tous les industriels. La protection des consommateurs doit constituer notre unique objectif. Ce texte marque la fin du laisser-faire.
Le Gouvernement s’est également saisi du sujet des dispositifs médicaux. Si le BPA est aujourd’hui interdit dans les biberons vendus en pharmacie ou en grande surface, il ne l’est pas dans ceux que les consommateurs peuvent trouver dans les maternités et les services de néonatologie. Nous avons fait le choix de corriger cette situation inacceptable.
Ces deux dispositifs sont également l’occasion de dire aux industriels qu’il est urgent d’accélérer leurs travaux sur les produits de substitution des phtalates et des perturbateurs endocriniens. En effet, nous ne pourrons pas nous permettre d’attendre que les industriels s’adaptent une fois que les études auront été publiées.
Je tiens enfin à redire devant vous, mesdames, messieurs les sénateurs, que la prévention des risques sanitaires environnementaux est un thème majeur de la politique de santé du Gouvernement.
L’action que nous mènerons se déclinera autour de trois axes.
Le premier, c’est la constitution d’un groupe de travail qui associe l’ensemble des acteurs de la lutte contre les perturbateurs endocriniens. D’ici à juin 2013, il aura pour mission d’élaborer une stratégie nationale globale : son objectif est de coordonner efficacement les actions de recherche, d’expertise, d’information du public et de réflexion sur l’encadrement réglementaire.
Le deuxième axe, c’est la priorisation de nos actions. Pour faire face aux enjeux de demain, nous ne pouvons pas nous limiter au BPA : l’ensemble des perturbateurs endocriniens, tels que les phtalates, doivent faire rapidement l’objet de notre attention. Pour chaque sujet, il faut aborder le problème en nous fondant sur une expertise plurielle et contradictoire, dans laquelle l’industrie ne sera pas juge et partie de ce processus de recherche.
Enfin, le troisième axe concerne les produits de substitution : ils ne devront pas être à l’origine de doutes nouveaux ou de risques insoupçonnés pour les Français. Il nous faut donc les mesurer.
Mesdames, messieurs les sénateurs, notre priorité en matière de santé publique, c’est la sécurité des Français. Je vous appelle donc à soutenir unanimement cette proposition de loi, mais je vous appelle également à voter conforme ce texte. Il est en effet essentiel que la suspension du bisphénol A dans la fabrication des contenants alimentaires soit effective le plus rapidement possible. Il y va de la sécurité de nos enfants et des populations les plus fragiles.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste ainsi que sur certaines travées de l'UMP.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, notre assemblée examine en deuxième lecture la proposition de loi du député M. Gérard Bapt visant à suspendre la fabrication, l’importation, l’exportation et la mise sur le marché de tout conditionnement à vocation alimentaire contenant du bisphénol A.
Je rappelle que ce produit représente un danger sanitaire principalement lorsqu’il est porté à haute température au contact d’un aliment, comme le lait dans les biberons chauffés au micro-ondes. Par conséquent, les personnes les plus exposées sont les nourrissons et les enfants de moins de trois ans, puisque leur système hormonal est encore immature.
La loi du 30 juin 2010 tendant à suspendre la commercialisation de biberons produits à base de bisphénol A avait été adoptée pour ces raisons : il s’agissait, en application du principe de précaution, de protéger dans l’urgence une population à risque.
Je rappelle que l’initiative en revient à notre Haute Assemblée.
Cette interdiction était à l’époque entièrement justifiée étant donné la nocivité avérée du BPA pour cette population dans ces conditions d’utilisation.
La question se pose de façon différente pour l’extension de cette interdiction à d’autres contextes : non chauffé et sans contact direct avec des aliments, il représente un risque moindre.
Entendons-nous bien : nous sommes évidemment favorables par principe à toute mesure qui pourrait améliorer la protection de la santé de nos concitoyens, a fortiori des nourrissons et des enfants en bas âge, mais nous devons procéder de façon pertinente, pour éviter que le remède ne s’avère pire que le mal. Notamment, il est nécessaire, avant de nous prononcer définitivement, de prendre en compte deux enjeux essentiels : d’une part, la garantie de l’innocuité des substituts au BPA et, d’autre part, le délai d’adaptation des industriels concernés.
S’agissant des substituts, nous n’avons, en l’état actuel de la recherche, aucune garantie scientifique qu’ils représenteraient un danger sanitaire moindre que le BPA. Dans un rapport de 2011 et une note de 2012, l’ANSES a présenté 73 substituts possibles. Le constat est clair : sur ces 73 produits, aucun ne présente de garantie d’innocuité.
Nous ne disposons pas encore du recul nécessaire pour déterminer quels produits pourraient améliorer la sécurité sanitaire par rapport au bisphénol A. C’est pourquoi il nous semble nécessaire de prendre le temps de la recherche et de la précaution si nous voulons vraiment privilégier la sécurité sanitaire.
C’est dans cet esprit que nous approuvons les mesures adoptées par l’Assemblée nationale, particulièrement le nouvel alinéa 6 de l’article 1er, qui sont de nature à apporter des garanties quant à la validation de l’innocuité des substituts envisagés pour les applications industrielles.
Le Gouvernement devra remettre au Parlement un rapport évaluant les substituts possibles au bisphénol A, pour ses applications industrielles, au regard de leur éventuelle toxicité. Au cas où certains usages du bisphénol A n’auraient pas pu trouver de substitut sûr, le législateur pourra réexaminer les présentes dispositions en vue d’aménager l’entrée en vigueur de l’interdiction selon les produits.
En effet, l’adaptation des industriels français à la production de substituts est plus délicate qu’il n’y paraît. Le bisphénol A est un composant chimique très utilisé pour le conditionnement de produits alimentaires en raison de son efficacité pour leur conservation. Sans BPA, nous serions confrontés à des problèmes d’altération et de contamination des denrées alimentaires par leurs contenants mêmes.
Nous ne devons donc pas nous précipiter en décidant une interdiction trop rapide et potentiellement contre-productive. Il nous semble indispensable de laisser aux industries le temps de préparer l’interdiction complète dans de bonnes conditions.
En outre, nous sommes un des rares pays européens à avoir une réglementation stricte sur le bisphénol A ; une entrée en vigueur prématurée de l’interdiction générale risquerait de pénaliser nos industries en Europe.
C’est pour cette raison que notre groupe avait défendu en première lecture un amendement visant à reporter l’entrée en vigueur de cette interdiction générale au 1er janvier 2016.
Finalement, les députés ont fixé la date de cette interdiction au 1er janvier 2015, rejoignant ainsi la position de la commission des affaires sociales du Sénat. Ce délai est à notre avis raisonnable, comparé à celui qui figurait dans le texte initial, à savoir un terme fixé au 1er janvier 2014.
Par ailleurs, comme je l’ai déjà rappelé, nous approuvons l’entrée en vigueur prochaine de l’interdiction du BPA pour les contenants destinés aux enfants de moins de trois ans.
En outre, nous soutenons l’article 4, qui prévoit la remise d’un rapport par le Gouvernement sur les conséquences sanitaires et environnementales de la présence des perturbateurs endocriniens dans notre alimentation, notre environnement et notre organisme. Ce document devra permettre d’élaborer une réglementation complète et scientifiquement à jour pour garantir à nos compatriotes une protection sanitaire de qualité.
En conclusion, le groupe UMP votera ce texte.
Applaudissements sur les travées de l'UMP, de l'UDI-UC et du groupe écologiste.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, protéger l’environnement ainsi que nos concitoyens des dangers pouvant potentiellement naître de l’activité humaine, telle est la responsabilité qui nous incombe, une responsabilité politique et juridique depuis que notre pays a conféré au principe de précaution une valeur constitutionnelle.
Cet impératif, qui fait de la prévention des scandales sanitaires une obligation, aurait dû nous conduire à l’adoption d’une mesure législative qui, permettez-moi de le dire, soit moins frileuse.
En 2010, nous avions soutenu la proposition de loi visant à suspendre la commercialisation des biberons produits à base de bisphénol A, et déjà nous regrettions que cette loi n’ait pas été le support législatif pour une interdiction totale.
Nous avons également voté la présente proposition de loi en première lecture, faisant encore une fois le constat qu’il aurait été préférable que les impératifs sanitaires prédominent sur les intérêts économiques. Nous avons à cette occasion regretté le report au 1er juillet 2015 de la date d’interdiction de commercialisation et d’importation de produits contenant du BPA.
Aussi, mes chers collègues, compte tenu des débats et des travaux de l’Assemblée nationale, vous pouvez imaginer combien nous sommes déçus.
Certes, les députés ont souhaité que le texte, destiné à devenir prochainement une loi, soit d’application plus rapide que ce qui avait été décidé par la Haute Assemblée.
Malgré cela, la mesure d’interdiction est considérablement réduite. Ainsi, la suspension de la fabrication, de l’importation, de l’exportation et de la mise sur le marché de contenants produits à base de BPA ne portera plus désormais que sur les seuls contenants ayant un contact direct avec les produits alimentaires.
Cette disposition, dont chacun sait qu’elle était défendue par l’industrie agroalimentaire, ne nous paraît pas totalement satisfaisante.
Nous souhaitons que tous les moyens soient mobilisés pour que la recherche sur les substituts au BPA permette de déboucher rapidement sur des résultats concrets. Nous souhaiterions savoir comment les pouvoirs publics peuvent l’accompagner, voire y participer. Les conclusions de cette recherche peuvent avoir des conséquences importantes pour la santé de nos concitoyens, ce qui justifie qu’elle ne soit pas laissée à la seule volonté des industriels.
L’Assemblée nationale a également supprimé l’amendement présenté par la sénatrice Chantal Jouanno et adopté par la Haute Assemblée en première lecture, interdisant l’utilisation dans la composition des dispositifs médicaux destinés aux nourrissons, jeunes enfants et femmes enceintes, l’ensemble des substances cancérogènes, mutagènes et reprotoxiques – CMR de catégorie 2 – ainsi que des perturbateurs endocriniens. Cette disposition, qui concernait près de 400 produits, était sans doute trop ambitieuse pour être pleinement opérationnelle à l’horizon du 1er janvier 2015. Toutefois, sa suppression pure et simple nous paraît regrettable. Là encore, nous souhaiterions que le Gouvernement puisse nous rassurer sur la mobilisation des pouvoirs publics dans la recherche concernant les produits mis en cause par l’amendement de nos collègues. Si des doutes existent, tout doit alors être mis en œuvre, même en l’absence d’un impératif d’interdiction.
Nous formulons les mêmes regrets quant à l’adoption au sein de la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale, sur l’initiative du rapporteur Gérard Bapt, d’une mesure réduisant la portée de l’amendement voté par le Sénat sur l’initiative de Gilbert Barbier.
Alors que la disposition retenue par le Sénat interdisait l’utilisation, dans les unités de néonatologie et de maternité, de matériel de nutrition parentérale contenant l’un des trois phtalates classés comme CMR, les députés ont préféré n’interdire qu’un phtalate, le di ou DEHP, considérant que seul celui-ci présentait une documentation scientifique capable de justifier son interdiction.
Là encore, on voit toute l’importance d’intensifier la recherche publique.
L’exercice qui consiste à légiférer sur la base du principe de précaution n’est pas aisé. Il s’agit de trouver le juste dosage entre les connaissances scientifiques acquises, les doutes possibles, probables ou certains, et la nécessité de protéger les consommateurs et/ou l’environnement. L’exercice est certes complexe, mais, vous le voyez, nous regrettons que la portée de cette proposition de loi soit réduite par rapport à ce que le Sénat avait proposé.
Pour autant, en dépit de ces reculs, nous n’ignorons pas que le rejet de cette proposition de loi aurait pour effet de revenir à la situation actuelle, c’est-à-dire à la simple interdiction d’utilisation du BPA dans les biberons. L’adoption de cette mesure en 2010, bien qu’insuffisante à nos yeux, n’est pas pour rien dans le dépôt du texte que nous examinons aujourd’hui.
Nous savons également que la loi de 2010 a permis de faire bouger les lignes au-delà de nos frontières, puisque trois pays européens ont décidé d’interdire la commercialisation des contenants de produits alimentaires comportant du bisphénol A et destinés aux nourrissons.
Pour toutes ces raisons, mes chers collègues, le groupe CRC votera en faveur du texte transmis par l’Assemblée nationale.
Applaudissements sur les travées du groupe CRC, du groupe socialiste et du groupe écologiste.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l’objet de cette proposition de loi est à l’évidence consensuel. Son objectif est de supprimer le bisphénol A des conditionnements alimentaires ; elle a déjà été longuement débattue par notre assemblée voilà deux mois. La question n’est pas de savoir si nous devons adopter ce texte, mais selon quelles modalités concrètes nous devons le faire.
Il est en effet avéré aujourd’hui par les études scientifiques et les agences sanitaires que le bisphénol A, très largement utilisé dans les produits de la vie courante, est toxique chez l’animal et très fortement suspecté de l’être chez l’homme. Il est également prouvé que l’alimentation constitue la source principale d’exposition.
Par ailleurs, contrairement aux critères classiques de la toxicologie, selon laquelle « seule la dose fait le poison », le BPA produit des effets à faibles doses.
Enfin, il est établi que les femmes enceintes ou allaitantes, les nourrissons et les jeunes enfants sont particulièrement vulnérables à la toxicité du BPA.
Cela doit nous conduire à être particulièrement vigilants et à prendre des mesures spécifiques pour protéger ces populations.
C’est ce qu’avait entrepris le Sénat en adoptant en 2010 la proposition de loi tendant à suspendre la commercialisation des biberons produits à base de bisphénol A.
C’est également ce que prévoit le présent texte en maintenant la date d’interdiction pour les conditionnements destinés aux nourrissons et enfants de moins de trois ans au premier jour du mois suivant sa promulgation. C’est une bonne chose, et cela ne pose en effet aucun problème aux industriels, lesquels ont déjà anticipé cette disposition : comme Mme le rapporteur l’a rappelé tout à l’heure, il n’existe quasiment plus de conditionnements alimentaires pour les nourrissons comportant du BPA.
La navette parlementaire a permis, en outre, de trouver un accord sur plusieurs points ayant fait l’objet de longs débats dans nos assemblées. Il faut saluer ces avancées.
Ainsi, s’agissant de la date d’entrée en application de la suspension pour l’ensemble de la population, l’Assemblée nationale a retenu le 1er janvier 2015. Cette date nous semble raisonnable pour donner la possibilité aux industriels de s’adapter et de proposer des substituts dont l’innocuité ne fera aucun doute.
En outre, la disposition introduite par l’Assemblée nationale prévoyant que, un an avant l’entrée en vigueur de l’interdiction, le Gouvernement remettra un rapport évaluant les substituts possibles au bisphénol A pour ses applications industrielles, au regard de leur éventuelle toxicité, permettra d’adapter la législation si cela s’avère nécessaire. Nous approuvons ces mesures réalistes qui rendront la loi applicable.
Concernant l’élargissement de la suspension aux dispositifs médicaux, l’Assemblée nationale est revenue sur la mesure adoptée à l’unanimité par le Sénat sur l’initiative de Chantal Jouanno, en limitant l’interdiction à un phtalate – le DEHP – dans les services de maternité, de néonatalogie et de pédiatrie.
Nous vous proposons de nouveau d’exclure la présence de tout perturbateur endocrinien ou de toute substance cancérogène, mutagène et reprotoxique dans tous les dispositifs médicaux, estimant que tous les produits au contact des femmes enceintes ou allaitantes et des bébés doivent exclure la présence de perturbateurs endocriniens. Nous y reviendrons au cours de la discussion des articles.
Au-delà de cette proposition, c’est bien l’ensemble des problématiques liées à la santé environnementale qui doivent être traitées et faire l’objet d’une volonté déterminée du Gouvernement. C’est le message que, sur l’initiative de Chantal Jouanno, déjà très à la pointe sur cette question lors de son passage au ministère de l’écologie, le groupe UDI-UC souhaite vous adresser en déposant à nouveau cet amendement, monsieur le ministre. En effet, on peut regretter que le Gouvernement ait pris peu d’engagements concrets sur ce sujet lors de la Conférence environnementale à laquelle j’ai participé, notamment lors de la table ronde dédiée à la « santé environnementale ».
Nous saluons l’annonce faite au début de la semaine par la ministre de l’écologie, d’objectifs de diminution de l’exposition des populations aux perturbateurs endocriniens et de lutte contre leurs impacts sanitaires et environnementaux. Nous devons en effet agir pour la réduction des risques liés à l’exposition aux perturbateurs endocriniens. On est encore très ignorant des effets « cocktail » et des effets à long terme de ces polluants.
Nous agissons au niveau national, ce qui est une bonne chose. Mais, nous le savons, il faut aussi agir sur ces questions à l’échelon européen, au niveau du droit communautaire, pour que ces décisions soient efficaces, comme l’a montré la directive européenne interdisant la commercialisation de biberons contenant du bisphenol A, adoptée dans la foulée de la loi du 30 juin 2010. N’oublions pas non plus dans ce contexte les enjeux liés aux phénomènes de distorsion de concurrence.
Comme l’avait noté notre collègue Muguette Dini en première lecture, des signes positifs au niveau européen peuvent être relevés. Ainsi, vont dans la bonne voie, d’une part, la demande de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail, l’ANSES, de classer, dans le cadre du règlement sur l'enregistrement, l'évaluation, l'autorisation et les restrictions des substances chimiques, ou REACH, le bisphenol A comme toxique pour la reproduction, et, d’autre part, le vote, en février prochain, d’un rapport au Parlement européen sur « la protection de la santé publique contre les perturbateurs endocriniens ».
Cependant, nous savons que l’Autorité européenne de sécurité des aliments est en retrait sur ces sujets, et notamment sur les perturbateurs endocriniens dont elle met en doute les risques pour la santé humaine.
Madame la ministre, il vous faut convaincre la Commission européenne et vos collègues européens pour aller plus loin sur ces questions de santé environnementale, notamment dans le cadre de la révision prochaine de la stratégie communautaire relative aux perturbateurs endocriniens. La France doit rester à la pointe de ce combat.
En adoptant cette proposition de loi, le législateur national fait un pas important. Mais la question ne doit pas se limiter au seul BPA. Nous le voyons bien par les initiatives de nos collègues, il nous faudra traiter rapidement et plus largement de l’ensemble des perturbateurs endocriniens avérés et des substances cancérogènes, mutagènes et reprotoxiques, les fameux phtalates et autres parabènes.
En votant cette proposition de loi, la France sera le premier pays au monde à mettre fin à l’utilisation du bisphénol A dans les conditionnements alimentaires. C’est un signal politique fort.
Nous saisissons également l’occasion pour aborder de nouveaux aspects de nos politiques sanitaires. Il nous faut poursuivre dans cette voie.
Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, au stade où nous sommes parvenus dans l’examen de la présente proposition de loi, il n’est me semble-t-il plus utile de justifier le bien-fondé de ce texte. Nous sommes tous ici convaincus que le laisser-faire n’a pas sa place en matière de santé publique : douter de l’innocuité d’une substance est suffisant pour agir.
Du reste, le groupe du RDSE – je me permets de le rappeler – a joué un rôle précurseur dans cette démarche en déposant, dès 2010, une proposition de loi visant à interdire, au nom du principe de précaution, le bisphénol A dans les plastiques alimentaires. À l’époque, même s’il n’existait pas de preuves tangibles des effets de cette substance sur l’homme, l’ex-Agence française de sécurité sanitaire des aliments, l’Afssa, avait reconnu dans des études scientifiques la présence de signaux d’alerte.
En séance publique, le Sénat avait limité la portée de ce texte, en suspendant uniquement la commercialisation des biberons produits à base de bisphénol A. Adoptée à l’unanimité des deux assemblées, la loi du 30 juin 2010 opérait un premier pas, faisant de la France une pionnière en Europe sur ce sujet : la Commission européenne a, de fait, étendu par la suite cette mesure à l’ensemble des États membres.
Depuis lors, plusieurs études ont confirmé les dangers du bisphénol A, en particulier pour les nourrissons, les jeunes enfants, les femmes enceintes ou allaitantes, et ce même à de faibles niveaux d’exposition. J’ai moi-même conduit une mission au nom de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et techniques, l’OPECST, sur les perturbateurs endocriniens, mission dont les conclusions établissaient sans ambiguïté que les risques, pour l’environnement comme pour la santé humaine, de ces substances classées pour la plupart cancérogènes, mutagènes et reprotoxiques, ou CMR, étaient suffisamment nombreux et précis pour inciter à l’action.
C’est dire que je souscris tout à fait aux préoccupations des auteurs de la présente proposition de loi, qui souhaitent interdire tout conditionnement à vocation alimentaire contenant du bisphénol A.
Je suis même allé plus loin, en proposant de proscrire l’utilisation, dans les unités de néonatologie et de maternité, des matériels de nutrition parentérale contenant trois phtalates classés comme CMR et déjà interdits pour les jouets et matériaux au contact des jeunes enfants. L’amendement que j’avais déposé à cette fin a été adopté par le Sénat. Je regrette que l’Assemblée nationale ait amputé cette interdiction d’une partie de son contenu. De fait, restreinte aux tubulures comportant du di(2-ethylhexyl) phtalate, cette mesure ne s’attaque plus en pratique aux contenants, notamment aux poches en plastique. J’espère cependant que ces dernières pourront un jour être interdites, sous cette composition.
Je rappelle tous ces faits car je ne voudrais pas qu’on se méprenne sur les motifs qui m’ont poussé à déposer, à l’article 1er, deux amendements que j’avais d’ailleurs déjà défendus en première lecture.
La présente proposition de loi suggère une démarche ciblée et progressive qui me paraît pertinente au regard du contexte scientifique.
Il s’agit tout d’abord de suspendre rapidement, c’est-à-dire dès la promulgation de ce texte, la commercialisation des conditionnements comportant du bisphénol A destinés à l’alimentation des nourrissons et des enfants en bas âge. Compte tenu de la vulnérabilité particulière de ces derniers à une telle exposition – elle a été identifiée via de nombreuses études –, il n’y a évidemment pas à tergiverser sur ce point.
Comme cela a d’ailleurs été déjà relevé, il semble que les industriels n’utilisent d’ores et déjà quasiment plus de bisphénol A dans les conditionnements alimentaires pour bébés.
Il s’agit ensuite d’intégrer un avertissement sanitaire déconseillant l’usage des conditionnements comprenant du bisphénol A aux femmes enceintes ou allaitantes, ainsi qu’aux enfants de moins de trois ans. J’avais moi-même préconisé cette mesure dans mon rapport ; je souhaite simplement que le message soit un peu plus clair et lisible que le pictogramme figurant sur les boissons alcoolisées, pictogramme dont nous sommes plusieurs, au sein de la commission, à avoir dénoncé l’inefficacité.
Enfin, il s’agit à terme, c’est-à-dire à compter du 1er janvier 2015, d’interdire tout conditionnement alimentaire comprenant du bisphénol A. Je suis évidemment favorable à cette mesure, sur le plan du principe. Toutefois, j’exprimerai une légère divergence concernant l’échéance retenue. Il faut accorder un délai suffisant aux industriels pour leur permettre de vérifier le plus sérieusement possible que les solutions de substitution sur lesquelles ils ont déjà engagé des recherches sont adaptées aux différents usages alimentaires et satisfont aux exigences de sécurité pour le consommateur.
J’entends ici ou là que le problème, déjà à l’étude dans certaines entreprises, serait résolu dans un an au plus. Ce serait en particulier le cas pour Nestlé. Toutefois, restons sérieux : les PME les plus modestes n’ont pas les mêmes moyens que cette grande firme. De plus, Nestlé ne met pas en boîtes du cassoulet de Castelnaudary et ne recourt donc pas aux résines époxy ! Or c’est précisément pour ces dernières, et non pour les polycarbonates, que subsistent le plus grand nombre de problèmes techniques.
Le remplacement des résines époxy contenant du bisphénol A par d’autres résines ne s’opère pas de la même manière pour tous les aliments, eu égard aux réactions variables du « couple contenant contenu » précédemment évoqué.
S’agissant par exemple des denrées acides, une oxydation peut survenir au bout de quelques mois. De nombreux tests sont donc nécessaires avant de valider, dans la durée, l’étanchéité des nouvelles résines et d’assurer la sécurité microbiologique des aliments. Ces vérifications par familles de produits, dont certains ne se récoltent qu’une fois l’an, sont indispensables.
Le Sénat, dans sa grande sagesse, avait adopté mon amendement tendant à instaurer un délai supplémentaire de six mois. L’Assemblée nationale, quant à elle, est revenue à la date du 1er janvier 2015.
Toutefois, madame le ministre, je ne peux m’empêcher de noter que, en commission, le rapporteur Gérard Bapt s’est dit dans un premier temps satisfait de la date du 1er juillet 2015, et qu’en séance publique plusieurs députés, notamment socialistes, vous ont appelée à émettre un avis de sagesse sur ce compromis.
J’ignore si je parviendrai à convaincre une fois de plus la Haute Assemblée de la pertinence de cette date. Toutefois, je le répète, restons à la fois exigeants et réalistes dans la concertation avec les professionnels de la filière agroalimentaire, pour la santé sanitaire de la population.
Pour conclure, j’insisterai sur le point suivant : notre action, pour être efficace, doit s’inscrire dans une perspective plus large, à l’échelle de l’Union européenne. Cet impératif a d’ailleurs été déjà mentionné. Nous devons être particulièrement vigilants quant à l’évolution de cette question au niveau européen. Je vous saurais donc gré, madame la ministre, de bien vouloir intervenir en ce sens pour convaincre nos collègues.
Nous savons que le bisphénol A est un perturbateur endocrinien, qu’il est cancérigène et neurotoxique, qu’il altère la croissance, qu’il entraîne un avancement de la maturation sexuelle secondaire et des changements comportementaux, qu’il altère le système nerveux et peut causer un déclin cognitif, qu’il prédispose à l’obésité, qu’il a des effets profonds sur le métabolisme du glucose, pouvant favoriser le développement du diabète, y compris par des expositions à faibles doses, qu’il augmente le risque de cancer, qu’il entraîne des lésions de l’ADN du sperme et affecte partant la fertilité, et, surtout, que ses effets sont héréditaires et transgénérationnels, même à des niveaux d’exposition très faibles.
Pour l’ensemble de ces raisons, le groupe écologiste se félicite du travail parlementaire constructif auquel a donné lieu la présente proposition de loi, déposée par Gérard Bapt en juin 2011.
Le texte qui nous arrive aujourd’hui de l’Assemblée nationale opère certes un retrait sur la question des dispositifs médicaux et sur celle des conditionnements concernés par l’interdiction du bisphénol, puisque seuls les emballages en contact direct avec les denrées alimentaires sont désormais visés. Néanmoins, il faut le reconnaître, cette proposition de loi comporte également des avancées notables.
Tout d’abord, les députés ont rétabli la date du 1er janvier 2015 pour la suspension de la fabrication, de l’importation, de l’exportation et de la mise sur le marché de tout conditionnement, contenant ou ustensile comportant du bisphénol.
Chers collègues, c’est l’échéance que nous avions été conduits à arrêter en commission, en première lecture. J’ai déjà eu l’occasion de l’indiquer à cette tribune, cette décision nous avait beaucoup coûté, à nous, écologistes, qui souhaitions un délai moins long. Au reste, il me semble que cette date tient déjà largement compte des difficultés du tissu industriel à s’adapter au changement de normes. J’ai déjà précisé qu’il s’agissait du « maximum acceptable pour nous », et qu’il était « hors de question que nous cédions un jour de plus ». Sur ce plan, cette nouvelle version du présent texte nous satisfait donc réellement.
Ensuite, nos collègues de l’Assemblée nationale ont introduit une demande de rapport, que le Gouvernement sera tenu de remettre au Parlement avant le 1er juillet 2014, au sujet des substituts possibles au bisphénol A pour ses applications industrielles au regard de leur éventuelle toxicité. Cette disposition nous semble constituer un bon compromis, propice à rassurer ceux d’entre nous qui, ici même, avaient exprimé leur inquiétude lors des débats en première lecture.
Pour ma part, j’attends ce rapport sereinement. En effet, je sais que de nombreux substituts au bisphénol A existent déjà et sont fiables. Je songe notamment au plastique polycarbonate et, selon les applications, au verre et à l’acier inoxydable, au copolyester Tritan, au polypropylène et aux Grilamid, aux oléorésines, aux résines reformulées, aux films en polyéthylène téréphtalate ou films en PET, aux plastiques de haute performance, ou encore aux briques cartonnées Tetra Pak.
De surcroît, une modification de l’article 2 a introduit une interdiction sans délai des collerettes de tétines et de sucettes, ainsi que des anneaux de dentition comportant du bisphénol A.
En outre, à l’article 3, est établie une interdiction des biberons comportant du bisphénol A et utilisés au titre de dispositifs médicaux. Nous ne pouvons également que nous en réjouir.
Pour toutes ces raisons, le groupe écologiste votera en faveur d’une adoption conforme du présent texte résultant des travaux de l’Assemblée nationale, solution que la commission des affaires sociales a d’ailleurs adoptée avant-hier soir, à l’unanimité des présents. Comme les précédents orateurs l’ont rappelé avant moi, nous nous félicitons de pouvoir montrer ainsi l’exemple en Europe et dans le monde.
Certes, il est frustrant de renoncer à apporter des précisions supplémentaires à cette proposition de loi, y compris sur la question des dispositifs médicaux ; disant cela, je songe notamment à l’amendement de notre collègue Chantal Jouanno, que nous-mêmes avions contribué à faire adopter en novembre dernier.
Toutefois, ce qui doit primer aujourd’hui, c’est notre volonté d’éviter la convocation d’une commission mixte paritaire. En effet, cette procédure retarderait encore l’entrée en vigueur du présent texte et repousserait en particulier la mise en œuvre des dispositions concernant les nourrissons et les enfants en bas âge, censée intervenir « à compter du premier jour du mois suivant la promulgation de la loi ».
Par ailleurs, ce compromis ne nous empêche pas de continuer à nous battre sur d’autres points, et notamment sur les perturbateurs endocriniens en général.
Sans doute avez-vous entendu parler de cette étude publiée le mercredi 5 décembre dernier dans la revue Human Reproduction à la suite des travaux conduits par l’épidémiologiste Matthieu Rolland, de l’Institut de veille sanitaire, l’InVS. Ces travaux montrent notamment que la concentration du sperme des Français en spermatozoïdes a chuté d’environ 32 % entre 1989 et 2005, et que ce résultat peut être lié « à des facteurs environnementaux, dont les perturbateurs endocriniens ».
Le débat sur la dangerosité des perturbateurs endocriniens, dont le bisphénol A n’est qu’un exemple, doit donc se poursuivre. La demande de rapport introduite à l’article 4, sur l’initiative de notre groupe, lors de la première lecture par le Sénat, s’inscrit dans cette perspective. De fait, cet article établit que « le Gouvernement présente au Parlement, dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport relatif aux perturbateurs endocriniens ». Ce document doit préciser les conséquences sanitaires et environnementales de la présence croissante de perturbateurs endocriniens dans l’alimentation, dans l’environnement direct, dans les dispositifs médicaux et dans l’organisme humain. Il s’agit d’examiner, en particulier, l’opportunité d’interdire un certain nombre de phtalates dans l’ensemble des dispositifs médicaux au regard des matériaux de substitution disponibles et de leur innocuité.
Nous serons particulièrement attentifs à ce que ce rapport puisse être élaboré dans de bonnes conditions, et dans les délais indiqués par le présent texte.
Madame la ministre, nous avons bien entendu vos propositions et vos engagements concernant la constitution d’un groupe de travail et de réflexion consacré à la mise en œuvre de ce cadre normatif et aux progrès de la recherche publique sur les points qui restent à préciser. Nous serons également vigilants sur ce sujet.
Mes chers collègues, je vous remercie par avance de permettre, au cours des mois et des années à venir, la poursuite de ce débat, absolument nécessaire et urgent, sur l’ensemble des perturbateurs endocriniens. J’espère que nos discussions futures seront aussi efficaces que celles que nous avons consacrées au bisphénol. §
Monsieur le président, madame la ministre, madame la rapporteur, mes chers collègues, je tiens en premier lieu à remercier Gérard Bapt de son heureuse initiative législative visant à suspendre l’usage du bisphénol A dans tout conditionnement à vocation alimentaire.
Il me semble que ce texte a désormais pris sa forme définitive et que la deuxième lecture ne devrait pas remettre en cause l’équilibre auquel nous sommes parvenus.
Pour l’essentiel, l’intention originelle de cette proposition de loi, telle qu’elle a été élaborée par l’Assemblée nationale et enrichie par le Sénat, a été maintenue. Le mot « suspension » souligne sans équivoque la volonté forte qui anime l’ensemble des parlementaires, quelles que soient leurs attaches partisanes, d’affirmer le principe de précaution en matière de santé publique.
En effet, le BPA est utilisé à grande échelle dans la fabrication de plastiques et de résines destinés, entre autres, au revêtement de la paroi intérieure des canettes de boisson et de la majorité des conserves. C’est l’un des constituants des plastiques rigides tels que le polycarbonate.
En 2010, un rapport du ministère de la santé canadien indiquait qu’on avait détecté des concentrations urinaires de bisphénol A chez 91 % des personnes âgées de 6 à 79 ans. Le BPA s’élimine rapidement, en quelques heures, et ne s’accumule pas dans les graisses. Si l’on en trouve des traces dans la quasi-totalité des échantillons urinaires, cela signifie qu’ici et là nous sommes tous exposés quotidiennement au BPA.
Or la liste des effets suspectés de cette substance est longue : malformations génitales chez les nouveau-nés garçons, apparition précoce de la puberté chez les jeunes filles, baisse de la qualité du sperme de l’homme – mais cela reste controversé, madame Archimbaud –, trouble des systèmes hépatique et reproducteur, déficit d’attention, hyperactivité, dépression, obésité, diabète, etc.
L’absence de certitudes, compte tenu des connaissances scientifiques et techniques du moment, ne doit pas retarder l’adoption de mesures préventives et proportionnées visant à empêcher un risque sanitaire possible. Aussi, nous ne réglerons pas le problème des risques avérés de santé du BPA pour les publics à risque si nous ne protégeons pas l’ensemble de l’alimentation.
En première lecture, le Sénat avait précisé la rédaction du texte, s’agissant notamment de la date d’interdiction de la présence du BPA dans les produits alimentaires, en repoussant cette date de dix-huit mois. Il avait veillé, en outre, à ce que la procédure de retrait de cette substance ne soit pas irréversible.
L’Assemblée nationale n’a pas remis en cause la plupart de nos améliorations, et le texte qui nous est soumis en deuxième lecture ne soulève pas de difficulté insurmontable. La seule modification d’importance concerne la date d’interdiction de la présence du BPA dans les produits alimentaires, écourtée de six mois.
En effet, le choix du Sénat à ce propos, en octobre dernier, fut l’objet de critiques de toute part. Les associations demandaient le 1er janvier 2014 ; les entreprises réclamaient le 1er janvier 2016. Les députés ont décidé finalement de couper la poire en deux en ramenant la date d’interdiction au 1er janvier 2015. C’était la position initiale du groupe socialiste et de Mme la rapporteur en première lecture ; elle reste toujours d’actualité pour cette deuxième lecture.
Cet apport nous paraît constituer un compromis acceptable. Si nous mettons en avant l’obligation de santé publique, nous devons également prendre en considération la capacité de nos entreprises à affronter une période économique particulièrement malaisée. L’impératif de redresser notre économie n’est pas incompatible avec la volonté de protéger nos concitoyens.
Conscients des risques du bisphénol, les industriels n’ont pas attendu la discussion de ce texte pour travailler depuis quelques mois sur des produits alternatifs. La mouture actuelle – la date du 1er janvier 2015 – leur laisse du temps pour trouver les procédés innovants, les mettre en œuvre et vérifier l’innocuité des substances alternatives.
À cet égard, cette proposition de loi pourra même représenter une chance pour l’industrie française. En effet, partout en Europe, les pays commencent à appliquer des législations interdisant le BPA. J’ai pu lire, hier, un excellent article dans Le Monde sur le débat qui fait actuellement rage en Europe entre ceux qui préfèrent privilégier les entreprises et ceux qui se préoccupent aussi de prévention en matière de santé publique.
Si nos entreprises sont en avance pour la fabrication de ces substituts, ce sera un avantage économique majeur de pouvoir présenter des produits qui ne seront pas suspects d’avoir des effets nocifs. Sur les marchés extérieurs, en Allemagne, en Italie ou au Royaume-Uni, les consommateurs ne sont pas moins attentifs à leur état de santé que leurs homologues français.
Sur ce sujet, l’Assemblée nationale a écouté les avis de l’ensemble de la société civile, en adoptant deux mesures de compromis.
Premièrement, seuls les conditionnements entrant en contact direct avec les aliments seront concernés, alors que le texte sénatorial englobait également, jusqu’alors, les surfaces externes des emballages ou des récipients. Cette précision importante répond aux attentes industrielles – nombre d’entre nous ont été saisis de ce problème – et il est en cohérence avec le cadre scientifique aujourd’hui établi d’éviter la migration de BPA dans les aliments.
Deuxièmement, l’Assemblée nationale a décidé que le Gouvernement remettra avant le 1er juillet 2014 un rapport au Parlement pour évaluer les substituts possibles au BPA au regard de leur éventuelle toxicité. Ce rapport permettra, plus de six mois avant l’entrée en vigueur de la suspension, de faire un point d’étape et, le cas échéant, d’adapter notre législation, par exemple s’il n’existe pas de substitut acceptable pour certains produits alimentaires.
Enfin, à ce stade de la discussion parlementaire, il ne paraît pas raisonnable au groupe socialiste de rouvrir le débat sur des sujets portant sur les dispositifs médicaux.
Disant cela, je pense notamment aux deux amendements adoptés précédemment par le Sénat sur l’initiative de Chantal Jouanno et Gilbert Barbier.
Le premier amendement visait à interdire dans tout dispositif médical destiné aux femmes enceintes ou allaitantes, aux nourrissons et aux enfants jusqu’à trois ans, soit l’une des substances définies comme cancérogènes, mutagènes et reprotoxiques de catégorie 2, soit un perturbateur endocrinien identifié dans les mêmes dispositions réglementaires.
Plus de 400 molécules étant ainsi visées, l’Assemblée nationale a estimé que, en raison du champ très large des dispositifs médicaux et des substances concernés, il existait un risque sérieux de se priver d’un dispositif médical indispensable au traitement voire à la survie d’un patient. Nous comprenons cette position et il nous paraît souhaitable de revenir, après étude plus approfondie, sur le dossier spécifique des dispositifs médicaux. Nous veillerons d’ailleurs à ce que tel soit le cas, le moment venu.
Prenons l’exemple des outillages nécessaires à la constitution de poches de sang : on autorise les poches de sang contenant des substances potentiellement nocives, car, pour l’instant, et même si quelques initiatives sont prises ici ou là, on ne sait pas les fabriquer autrement et les transfusions deviendraient impossibles sans elles. Ne nous précipitons donc pas sur ce dossier et essayons de travailler à la recherche des solutions les meilleures possible.
Le second amendement, déposé par Gilbert Barbier, tendait à interdire trois catégories de phtalates dans des dispositifs médicaux destinés aux services de maternité, de néonatalogie et de pédiatrie.
Pour l’un des trois phtalates, à la fois le plus utilisé et le plus décrié par les scientifiques, le di (2-ethylhexyl) phtalate ou DEHP, les représentants du secteur paramédical ont confirmé l’existence de substituts, et les députés ont entériné son interdiction. Nous pouvons donc être rassurés sur ce point.
Quant aux deux autres phtalates, l’Assemblée nationale a proposé que le rapport prévu à l’article 4 étudie la recherche de substituts. Cela me semble être une bonne solution.
Bref, en ce domaine, je pense que l’opportunité d’interdire s’examine en fonction d’une comparaison entre les bénéfices de l’usage du dispositif médical et les risques que ce dernier implique. En effet, contrairement aux produits de consommation courante, un médicament ou un dispositif médical peut à la fois présenter des risques, parfois graves, et être tout de même autorisé, le danger encouru devant absolument être mis en rapport avec le profit attendu pour le patient. De même, dans le cas de certains médicaments utilisés à titre expérimental, l’on s’attache davantage à leur action qu’à leur éventuel danger.
Pour toutes ces raisons, j’insiste sur le caractère urgent d’un vote conforme de ce texte, afin de permettre au Gouvernement d’appliquer ce dernier dès à présent. Ce faisant, il s’agit de protéger nos concitoyens.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.
Je tiens à remercier l’ensemble des orateurs, quelles que soient les travées sur lesquelles ils siègent : leurs interventions témoignent de la volonté de mener un travail parlementaire constructif.
Nous partageons tous les mêmes objectifs, et je me félicite que les avancées notables aient été soulignées à plusieurs reprises.
L’importance que revêtira l’action de Mme la ministre auprès de ses collègues européens a également été soulignée. Je suis bien évidemment convaincue qu’elle saura porter avec beaucoup de détermination les engagements qu’elle a pris devant vous, et que j’ai eu l’occasion de rappeler dans mon propos liminaire.
Enfin, je remercie Mme la rapporteur pour l’ensemble de son travail.
Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?…
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion des articles.
(Non modifié)
La loi n° 2010-729 du 30 juin 2010 tendant à suspendre la commercialisation de biberons produits à base de bisphénol A est ainsi modifiée :
1° Après les mots : « commercialisation de », la fin du titre est ainsi rédigée : « tout conditionnement comportant du bisphénol A et destiné à recevoir des produits alimentaires » ;
2° L’article 1er est ainsi rédigé :
« Art. 1er. – La fabrication, l’importation, l’exportation et la mise sur le marché à titre gratuit ou onéreux de tout conditionnement, contenant ou ustensile comportant du bisphénol A et destiné à entrer en contact direct avec des denrées alimentaires pour les nourrissons et enfants en bas âge, au sens des a et b de l’article 2 de la directive 2006/141/CE de la Commission, du 22 décembre 2006, concernant les préparations pour nourrissons et les préparations de suite et modifiant la directive 1999/21/CE, sont suspendues à compter du premier jour du mois suivant la promulgation de la loi n° … du … visant à la suspension de la fabrication, de l’importation, de l’exportation et de la mise sur le marché de tout conditionnement à vocation alimentaire contenant du bisphénol A, jusqu’à ce que le Gouvernement, après avis de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, autorise la reprise de ces opérations.
« Cette suspension prend effet, dans les mêmes conditions, au 1er janvier 2015 pour tout autre conditionnement, contenant ou ustensile comportant du bisphénol A et destiné à entrer en contact direct avec des denrées alimentaires.
« Avant le 1er juillet 2014, le Gouvernement remet au Parlement un rapport évaluant les substituts possibles au bisphénol A pour ses applications industrielles au regard de leur éventuelle toxicité. » ;
3° L’article 2 est ainsi rédigé :
« Art. 2. – Tout conditionnement comportant du bisphénol A et destiné à entrer en contact direct avec des denrées alimentaires doit comporter, dans des conditions fixées par décret, un avertissement sanitaire déconseillant son usage, du fait de la présence de bisphénol A, aux femmes enceintes, aux femmes allaitantes et aux nourrissons et enfants en bas âge, au sens des a et b de l’article 2 de la directive 2006/141/CE de la Commission, du 22 décembre 2006, précitée. » ;
4°
Suppression maintenue
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 2 est présenté par M. Lecerf.
L'amendement n° 10 est présenté par M. Patriat.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéas 2, 4, 5 et 8
Remplacer les mots :
comportant du
par les mots :
produit à base de
Ces amendements ne sont pas soutenus.
Toujours sur l’article 1er, je suis à nouveau saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 4 est présenté par M. Lecerf.
L'amendement n° 9 est présenté par M. Barbier.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 4
Supprimer les mots :
, l’exportation
L’amendement n° 4 n'est pas soutenu.
La parole est à M. Gilbert Barbier, pour présenter l'amendement n° 9.
Cet amendement vise à assurer une certaine protection aux entreprises de notre pays qui fabriquent des contenants alimentaires contenant du bisphénol A, en autorisant l’exportation, au moins pour quelque temps, de leur production.
Ces emballages resteront en effet autorisés dans nombre de pays, en Europe et dans le monde.
Les PME françaises ont besoin de ces marchés à l’exportation pour survivre. C’est pourquoi je souhaite que l’on puisse retirer de la liste des interdictions l’exportation de ces produits, ne serait-ce que pour un certain temps.
Cet amendement vise à autoriser la seule exportation des conditionnements alimentaires contenant du bisphénol A.
Or, si nous suspendons la commercialisation de ces conditionnements alimentaires, c’est que ces derniers présentent à notre avis un risque pour la santé humaine.
Comment accepterions-nous, dès lors, d’en exporter ? Pourrions-nous, en toute connaissance de cause, écouler à l’étranger des produits que nous estimons nocifs en France ?
La commission avait déjà émis un avis défavorable sur ce même amendement déposé en première lecture. Son avis reste défavorable en deuxième lecture.
Je partage l’analyse de la commission. C’est un problème d’éthique : on ne peut pas interdire ces conditionnements en France, pour des raisons de santé tout à fait légitimes, et encourager leur emploi dans d’autres pays.
En conséquence, le Gouvernement émet un avis défavorable.
Je comprends l’argument qui vient d’être avancé. Je rappelle toutefois que le principe d’interdiction est pour l’instant très novateur, et que ce sont les petites entreprises qui seront essentiellement pénalisées, les autres pouvant faire le choix de fabriquer ces produits à l’étranger.
J’entends toutefois le problème éthique que soulève cet amendement et, dans ces conditions, je le retire.
L'amendement n° 9 est retiré.
L'amendement n° 5, présenté par M. Lecerf, est ainsi libellé :
Alinéas 4 et 5
Remplacer les mots :
conditionnement, contenant ou ustensile
par les mots :
emballage, conditionnement, vaisselle, récipient ou ustensile de cuisine
Cet amendement n'est pas soutenu.
Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 6, présenté par Mme Aïchi, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Remplacer l'année :
par l'année :
La parole est à Mme Leila Aïchi.
Cet amendement vise à rétablir les délais d’exécution qui figuraient dans le texte initial voté par l’Assemblée nationale le 12 octobre 2011. Ce texte prévoyait en effet une interdiction du bisphénol A dans l’ensemble des contenants et ustensiles alimentaires à partir du 1er janvier 2014, et dans les contenants destinés aux enfants en bas-âge à partir du 1er janvier 2013.
Lors de la première lecture du texte au Sénat, la commission des affaires sociales a voté un amendement repoussant au 1er janvier 2015 la date d’entrée en vigueur de l’interdiction générale. Une entrée en vigueur en juillet 2015 a même été votée en séance, avant que la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale ne la ramène à janvier 2015, notamment grâce au travail de mes collègues écologistes. Ces derniers, malgré leurs efforts, n’ont toutefois pas réussi à en revenir à 2014.
Pourtant, ce report contre-productif et dénué de fondement économique prolonge inutilement un très sérieux problème sanitaire.
De quoi s’agit-il exactement ?
En reportant d’une année l’application de cette mesure, nous programmons un désastre sanitaire en surexposant 830 000 femmes enceintes au poison qu’est le bisphénol A. Dès lors, nous acceptons d’y exposer des enfants à naître parmi lesquels nous savons déjà que 400 petits garçons souffriront de troubles de la fertilité.
Pourtant nous savons ! Depuis octobre 2011, de nouvelles études montrent que le bisphénol A induit des maladies métaboliques et cardio-vasculaires, des cancers hormono-dépendants, des troubles du comportement et de la reproduction.
La récente étude scientifique de l’Institut de veille sanitaire, l’InVS, mise en ligne le 5 décembre 2012 met en évidence une altération du système de reproduction et précise que le cancer de la prostate a quintuplé entre 1978 et 2008 avec un déplacement du pic d’incidence vers des catégories plus jeunes de la population. Au cours de la même période, les incidences sur le cancer du sein et des testicules ont également doublé. En outre, les conséquences financières sur le déficit de la sécurité sociale sont lourdes.
Face à l’urgence sanitaire, l’argument économique ne fait pas le poids. De nombreux industriels ont déjà développé des substituts au bisphénol A, pour ses différents usages, et je ne comprends pas que l’on n’interdise pas cette substance dès le 1er janvier 2014.
Si la date du 1er janvier 2013 est conservée pour les contenants destinés aux enfants en bas âge, cela signifie bien que certaines entreprises peuvent se conformer à la nouvelle législation en trois mois à peine. Il semble dès lors envisageable que le reste du marché puisse s’adapter pour l’ensemble des contenants avec un délai supplémentaire de douze mois. Les industriels sont avertis depuis un an du projet d’interdiction, et ils ont pu déployer les moyens de recherche nécessaires.
Il existe, par exemple, des modèles de conserverie en carton supportant l’autoclave, qui constituent un emballage alternatif sans bisphénol A, pouvant s’adapter aux légumes cuisinés, légumes secs, soupes, sauces, etc. Quelque 3, 2 millions d’emballages pourraient être fabriqués en carton. Rappelons également que la production de ces nouveaux emballages émettrait une quantité notablement moindre de gaz à effet de serre et permettrait la création de nouveaux emplois. Cent dix grandes marques à travers quarante pays, dont l’Italie et la Suède, utilisent déjà ces emballages alternatifs. Compte tenu de l’urgence sanitaire, je ne comprends pas pourquoi nous ne faisons pas de même en France !
Les deux amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 1 est présenté par M. Lecerf.
L'amendement n° 8 est présenté par MM. Barbier, Mézard, Baylet, Collin et Hue, Mme Laborde et MM. Mazars, Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 5
Remplacer la date :
1er janvier 2015
par la date :
1er juillet 2015
L’amendement n° 1 n'est pas soutenu.
La parole est à M. Gilbert Barbier, pour présenter l’amendement n° 8.
Cet amendement vise à rétablir la date d’entrée en vigueur adoptée initialement par la Haute Assemblée, soit le 1er juillet 2015.
Aux considérations éthiques que l’on m’opposera sans doute, j’avancerai deux arguments.
Tout d’abord, je rappelle que l’on a toujours refusé de définir les produits à base de bisphénol A.
L’amendement déposé à cet égard n’a pas été soutenu tout à l’heure. Il était important, car, si le terme « comportant du bisphénol A » est maintenu dans le texte, des entreprises pourront continuer à utiliser le BPA en production, mais la présence de cette substance sur les produits ne sera pas détectée lorsqu’on la recherchera. C’est un problème technique qu’il est regrettable que nos assemblées n’aient pas résolu. L’adoption de la mention « produit à base de bisphénol A » aurait permis d’interdire l’utilisation de cette substance dès le début de la production, plutôt que d’interdire seulement sa présence sur le produit lui-même. Certains produits pour la fabrication desquels on aura pu utiliser du bisphénol A n’en contiendront plus ensuite ou en posséderont à des doses infinitésimales et indétectables.
Par ailleurs, M. Cazeau a évoqué tout à l’heure la question des perfusions et des poches en plastique pour les transfusions sanguines. Sur cette question, l’Assemblée nationale s’est rangée, un peu rapidement à mon sens, à la demande des industriels. En réalité, nous avons utilisé le verre durant de nombreuses années pour les transfusions sanguines et même pour les perfusions, et il était tout à fait possible de revenir à ce conditionnement, comme cela a été le cas pour les biberons. Je sais bien que l’utilisation de poches plastiques est beaucoup plus pratique, mais que l’on ne me dise pas qu’il s’agit là d’un problème technique insolvable !
On pouvait donc très bien interdire le bisphénol A dans ces poches. Avouez qu’il est un peu curieux de l’interdire dans les tubulures et pas dans les contenants ! L’argument éthique n’est donc pas très pertinent contre ma proposition.
Pourquoi repousser la date d’interdiction au 1er juillet 2015 ? Parce qu’il faut que nos entreprises s’adaptent, et que ce n’est pas si simple. Leur donner six mois de plus pour résoudre un problème qui existe depuis quarante ans ne me paraît quand même pas un drame !
Les amendements n° 6 et 8 visent à modifier la date du 1er janvier 2015. M. Barbier et plusieurs membres du groupe du RDSE entendent la repousser au 1er juillet 2015 ; Mme Aïchi souhaite l’avancer au 1er janvier 2014.
Nous avons eu longuement ce débat lors de la première lecture.
La commission estime que le compromis adopté par l’Assemblée nationale permet à la fois de prendre une décision ambitieuse ― je le répète, la France sera le premier pays au monde à programmer la fin de l’utilisation du bisphénol A dans les conditionnements alimentaires ― et réaliste pour les industriels, puisque ces derniers disposeront de deux ans, alors même qu’ils ont entamé les travaux de recherche de substituts depuis plusieurs années déjà.
Je trouverais vraiment regrettable de reporter l’adoption définitive de la proposition de loi au moins jusqu’au mois de février, en fonction des contraintes du calendrier parlementaire, à cause d’une divergence portant sur six mois !
Le Gouvernement remettra le 1er juillet 2014 un rapport évaluant les substituts possibles au bisphénol A et leur éventuelle toxicité. En cas de difficulté, nous pourrons alors légiférer à nouveau.
En outre, le Gouvernement pourra toujours, d’après le texte même de la proposition de loi, autoriser certaines opérations si nous nous rendons compte qu’il n’y a réellement pas de solution alternative. C’est pourquoi il nous faut maintenir la date du 1er janvier 2015.
La commission émet donc un avis défavorable sur ces deux amendements.
Le Gouvernement partage l’avis de la commission. Je pense que, face à l’un et l’autre des amendements proposés, nous devons apprécier le travail de compromis mené au sein de l’Assemblée nationale et considérer que cette future loi doit maintenant entrer en application le plus rapidement possible. À cette fin, j’invite tant Mme Aïchi que M. Barbier à retirer leur amendement pour que ce texte puisse être adopté conforme et entrer en application le plus vite possible. Il importe à la fois d’aller vite et de donner à certains industriels le temps nécessaire pour se mettre en adéquation avec les dispositions du texte et pour vérifier que les substituts au bisphénol A envisagés sont de qualité. Si ces amendements n’étaient pas retirés, le Gouvernement émettrait alors un avis défavorable.
Oui, monsieur le président, je le maintiens.
Je vous rappelle une fois encore que l’étude scientifique dont je viens de vous parler met en évidence une altération du système de reproduction.
Madame la ministre, vous avez relevé à juste titre que, lors du développement fœtal, l’exposition au bisphénol A entraînait des conséquences sur la formation des organes génitaux. Vous avez également affirmé, à juste titre, que nous ne pouvions plus attendre. Je ne comprends donc pas pourquoi nous ne tirons pas les conséquences de ces analyses en interdisant le bisphénol A au 1er janvier 2014.
L'amendement n'est pas adopté.
Je comprends bien qu’il faut savoir faire des compromis, et je vais donc retirer cet amendement. J’espère que les promesses faites par Mme la ministre pour le 1er juillet 2014 seront bien tenues et que les industriels pourront ainsi s’adapter en six mois aux nouveaux conditionnements. C’est une période très courte, mais je compte sur votre diligence, madame la ministre, pour que ce processus se mette en place dans les faits.
L'article 1 er est adopté.
(Non modifié)
I. – La section 1 du chapitre V du titre Ier du livre II du code de la consommation est complétée par un article L. 215-2-4 ainsi rédigé :
« Art. L. 215-2-4. – Les agents mentionnés à l’article L. 215-1 sont habilités à rechercher et à constater, dans les conditions prévues au présent livre, les infractions à la loi n° 2010-729 du 30 juin 2010 tendant à suspendre la commercialisation de tout conditionnement comportant du bisphénol A et destiné à recevoir des produits alimentaires. »
II. – Après le 1° de l’article L. 5231-2 du code de la santé publique, il est inséré un 1° bis ainsi rédigé :
« 1° bis Des collerettes de tétines et de sucettes et des anneaux de dentition comportant du bisphénol A ; ».
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 3 est présenté par M. Lecerf.
L'amendement n° 11 est présenté par M. Patriat.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéas 2 et 4
Remplacer les mots :
comportant du
par les mots :
produit à base de
Ces deux amendements ne sont pas soutenus.
Je mets aux voix l'article 2.
L'article 2 est adopté.
(Non modifié)
Le titre Ier du livre II de la cinquième partie du code de la santé publique est complété par un chapitre IV ainsi rédigé :
« Chapitre IV
« Interdiction de certains matériaux dans les dispositifs médicaux
« Art. L. 5214 -1. – À compter du 1er juillet 2015, l’utilisation de tubulures comportant du di (2-éthylhexyl) phtalate est interdite dans les services de pédiatrie, de néonatologie et de maternité.
« Art. L. 5214 -2. – Est interdite l’utilisation des biberons comportant du bisphénol A et répondant à la définition des dispositifs médicaux mentionnée à l’article L. 5211-1. »
L'amendement n° 7, présenté par Mme Jouanno, MM. Capo-Canellas et Guerriau, Mme Goy-Chavent, M. Pozzo di Borgo, Mme Létard, MM. Namy, Tandonnet, Jarlier et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Remplacer cet alinéa par trois alinéas ainsi rédigés :
« Art. L. 5214-1. - Sont suspendues à compter du 1er juillet 2015 la fabrication, l’importation, l’exportation et la mise sur le marché à titre gratuit ou onéreux de tout dispositif médical destiné aux femmes enceintes, aux femmes allaitantes, aux nourrissons ou aux enfants jusqu’à trois ans comportant :
« 1° soit une des substances définies comme cancérogènes, mutagènes ou reprotoxiques de catégorie 2 au sens de la partie 3 de l’annexe VI du règlement CE n°1272/2008 du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relatif à la classification, à l’étiquetage et à l’emballage des substances et des mélanges, modifiant et abrogeant les directives 67/548/CEE et 1999/45/CE et modifiant le règlement (CE) n°1970/2006 ;
« 2° soit un perturbateur endocrinien présentant de probables effets sérieux pour la santé humaine, identifié dans les conditions fixées à l’article 59 du règlement (CE) n°1907/2006 du Parlement européen et du Conseil du 18 décembre 2006 concernant l’enregistrement, l’évaluation et l’autorisation des substances chimiques, ainsi que les restrictions applicables à ces substances (REACH), instituant une agence européenne des produits chimiques, modifiant la directive 1999/45/CE et abrogeant le règlement (CEE) n°793/93 du Conseil et le règlement (CE) n°1488/94 de la Commission ainsi que la directive 76/769/CEE du Conseil et les directives 91/155/CEE, 93/67/CEE, 93/105/CE et 2000/21/CE de la Commission.
La parole est à M. Vincent Capo-Canellas.
Cet amendement vise à en revenir à la disposition adoptée à l’unanimité par le Sénat en première lecture, sur l’initiative de notre collègue Chantal Jouanno, avant d’être supprimée en deuxième lecture par l’Assemblée nationale. Il est la traduction législative de la proposition n° 10 de la mission commune d’information portant sur les dispositifs médicaux implantables et les interventions à visée esthétique, que Chantal Jouanno présidait. Il vise à interdire l’ensemble des substances cancérogènes, mutagènes et reprotoxiques de catégorie 2 ainsi que les perturbateurs endocriniens dans les dispositifs médicaux destinés aux nourrissons, jeunes enfants et femmes enceintes.
Comme l’affirmaient les conclusions du rapport sénatorial adopté à l’unanimité, il n’est pas acceptable de considérer qu’un dispositif médical est moins dangereux qu’un jouet quand il est question de substances cancérogènes, mutagènes et reprotoxiques et qu’il est destiné aux prématurés et aux jeunes enfants.
En rédigeant cet amendement, nous avons pris soin d’en limiter le champ d’application aux dispositifs médicaux à destination des nourrissons et des femmes enceintes. En outre, la date d’application a été fixée au 1er janvier 2015 pour se donner le temps de revenir sur le dispositif.
Retenir l’objectif d’une interdiction de la présence de perturbateurs endocriniens dans les produits spécifiquement destinés aux jeunes enfants et femmes enceintes, qui sont des publics cibles prioritaires, était également l’une des préconisations de notre collègue Gilbert Barbier, dans son rapport remis en juillet 2011 au nom de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques. Je le cite : « par précaution, il ne paraît pas disproportionné de proposer d’éliminer tout perturbateur endocrinien des produits destinés aux bébés et femmes enceintes ».
Après deux rapports parlementaires étayés par des analyses scientifiques, le temps de la précaution n’est-il pas enfin arrivé ? Nous pourrons nous féliciter de l’adoption de ces rapports et de la mise en lumière des problèmes des perturbateurs endocriniens qu’ils ont soulevés, mais pourrons-nous pour autant nous satisfaire de n’avoir pas agi raisonnablement rapidement ?
Il est difficilement compréhensible d’interdire en 2015 des perturbateurs endocriniens dans les contenants alimentaires mais de permettre leur maintien dans les dispositifs médicaux destinés aux nourrissons et aux femmes enceintes. Le principe de précaution serait donc invocable pour l’ensemble du grand public mais inopérant pour des publics cibles, à savoir les nourrissons et les femmes enceintes, pourtant clairement identifiés par l’ensemble des études.
J’ajoute que l’argument du délai de convocation d’une commission mixte paritaire, si le texte adopté par le Sénat n’était pas strictement conforme à celui de l’Assemblée nationale, paraît de faible portée. Le délai n’a après tout rien d’insurmontable, et l’argument de l’urgence est malheureusement souvent utilisé pour éviter le débat.
En première lecture, le 9 octobre dernier, le Sénat avait adopté cet amendement, après un débat animé. Je souhaite prendre ici le temps d’expliquer en quoi la question soulevée est essentielle et pourquoi la réponse apportée est, à ce stade, prématurée.
Tout d’abord, la mission commune d’information portant sur les dispositifs médicaux implantables et les interventions à visée esthétique, présidée par Chantal Jouanno et dont Bernard Cazeau était le rapporteur, a clairement montré, dans son rapport, combien l’encadrement du secteur des dispositifs médicaux était inadapté et qu’il était nécessaire, pour reprendre les termes du rapport, de « créer les conditions d’une véritable sécurité ».
Renforcer le contrôle des dispositifs médicaux à toutes les étapes et instituer une véritable surveillance, telles sont les propositions du rapport, que j’approuve.
D’ailleurs, sur l’initiative du groupe écologiste, l’article 4 de la proposition de loi prévoit que le Gouvernement présentera au Parlement, dans un délai d’un an, un rapport relatif aux perturbateurs endocriniens qui précisera, notamment, les conséquences sanitaires et environnementales de leur présence dans les dispositifs médicaux. Ce n’est qu’à partir de cet état des lieux que nous pourrons légiférer en toute connaissance de cause.
Pourquoi la réponse proposée dans l’amendement est-elle aujourd’hui inadaptée ?
Tout d’abord, le champ de cet amendement est beaucoup trop large, et ce sous deux aspects.
Ensuite, la logique ne peut pas être la même s’agissant d’un dispositif susceptible de sauver la vie d’une personne ou d’un simple conditionnement alimentaire.
L’amendement n° 7 vise tous les dispositifs médicaux destinés aux femmes enceintes ou allaitantes ainsi qu’aux nourrissons ou aux enfants de moins de trois ans et comportant une substance CMR ou un perturbateur endocrinien.
D’abord, nul n’est capable de dire – c’est d’ailleurs un problème ! – combien de dispositifs sont concernés, et lesquels.
En outre, il serait très difficile pour un hôpital de distinguer, dans ses achats, les dispositifs destinés aux services de pédiatrie ou de néonatologie. Donc, en pratique, tous les dispositifs médicaux seraient concernés.
Ensuite, les substances visées sont, elles aussi, très nombreuses : le rapport de l’Assemblée nationale fait état de quatre cents, mais le nombre réel est largement plus élevé. J’ai voulu consulter hier la liste des substances CMR visées, mais j’y ai renoncé : ce sont au moins 6 000 substances qui sont répertoriées dans plus de mille pages du Journal officiel de l’Union européenne ! Sans compter les perturbateurs endocriniens, également visés par l’amendement…
Qui plus est, par la formulation retenue dans l’amendement, pourraient être concernés les dispositifs électroniques, par exemple, dont l’un des composants internes contient l’une de ces substances, même si ce composant ne peut en aucun cas entrer en contact avec le patient. C’est le cas, par exemple, du lithium. Les dispositifs médicaux ne pourraient donc plus utiliser de batteries comportant du lithium. En outre, le lithium est employé dans de nombreuses applications médicales, y compris dans des médicaments. Devons-nous également les interdire ?
Enfin, comme je l’ai souligné en première lecture, ainsi que, mardi dernier, en commission, l’autorisation d’un médicament ou d’un dispositif médical doit obligatoirement répondre à la question du rapport entre le bénéfice qu’il apporte au patient et le risque qu’il lui fait encourir.
S’il est toujours possible de se passer d’un jouet ou d’un conditionnement alimentaire, il n’en est pas de même d’un traitement médical, qui par définition présente toujours des risques : il est nécessaire de les évaluer pour estimer s’ils sont inférieurs aux bénéfices attendus pour le patient.
C’est pourquoi je souhaite le retrait de cet amendement, dont l’adoption serait source des risques importants en termes de santé publique, alors même que ses auteurs entendent précisément appliquer le principe de précaution.
Je tiens tout d’abord à dire combien nous respectons l’amendement déposé par Mme Jouanno, car les questions qu’elle soulève sont importantes.
Nous savons la volonté du Sénat de travailler sur l’interdiction des phtalates et nous reconnaissons son implication en la matière.
Toutefois, permettez-moi de rappeler, après Mme la rapporteur, que les dispositifs médicaux sont des produits de santé pour lesquels le rapport bénéfice-risques joue un rôle central. Dès lors, le niveau de risque acceptable doit être considéré au regard du bénéfice que le malade tire du dispositif médical.
Ensuite, cet amendement présente des incertitudes quant à son champ d’application : celui qui est prévu est en effet imprécis et bien trop large, comme l’a remarqué Mme la rapporteur.
En outre, trop d’incertitudes demeurent encore sur les solutions de substitution existantes et sur l’innocuité de certaines d’entre elles.
La question des substituts se pose depuis plusieurs années, et avec elle celle de leur innocuité. À cet égard, je tiens à dire que cette proposition de loi marque une avancée supplémentaire puisqu’elle va au-delà des contenants alimentaires en interdisant le bisphénol A dans les biberons et les dispositifs médicaux, ainsi que le DEHP dans les tubulures servant notamment à l’alimentation parentérale. Voilà qui témoigne fortement de la volonté du Gouvernement d’avancer sur ce sujet.
Enfin, au-delà de la problématique des substituts éventuels, nous n’avons pas de visibilité quant aux délais de mise en œuvre. Or, vous le savez, la mise sur le marché des dispositifs médicaux répond à des obligations réglementaires.
La modification d’un dispositif médical exige des fabricants qu’ils conduisent des études pour évaluer les propriétés physico-chimiques et l’innocuité des substances, qu’ils modifient en conséquence leur procédé de fabrication et qu’ils présentent un nouveau dossier de marquage pour faire valider la conformité du dispositif médical objet de ces modifications.
Telles sont les raisons pour lesquelles le Gouvernement demande le retrait de cet amendement. Même si nous entendons bien la nécessité de poursuivre l’action en la matière, il n’est pas possible, en l’état actuel, de donner une suite favorable à cet amendement.
Si, comme l’ont souligné Mme la rapporteur et Mme la ministre déléguée, le champ de l’amendement est trop large, pourquoi ne pas nous avoir proposé de le restreindre ? Nous aurions été ouverts à toute suggestion en ce sens.
J’aurais compris que l’on me demande de limiter le champ de l’amendement, mais je ne peux pas ne pas m’interroger sur le recul opéré ici s’agissant d’une proposition de la mission commune d’information qui avait été adoptée à l’unanimité en première lecture.
J’ajoute que certains des arguments qui m’ont été avancés pour étayer la demande de retrait me paraissent curieux. En effet, on pourrait tout aussi bien les faire valoir sur d’autres volets du texte et en déduire qu’il n’y a, finalement, pas lieu d’aller si vite en la matière.
C’est pourquoi je maintiens l’amendement n° 7, monsieur le président.
Dois-je en déduire, madame la rapporteur, que la commission est désormais défavorable à l’amendement n° 7 ?
L’amendement de Mme Jouanno reprend les préconisations formulées par la mission commune d’information portant sur les dispositifs médicaux implantables et les interventions à visée esthétique, dont j’ai été le rapporteur. Je suis tout à fait d’accord avec les éléments d’analyse présentés par notre collègue Vincent Capo-Canellas.
Toutefois, dans ce domaine précis, mes chers collègues, il faut prendre du temps. Ainsi que l’a souligné Mme la ministre déléguée, il n’est pas possible de modifier brutalement les dispositifs médicaux. Il faut suivre toute une procédure, qui est d’ailleurs en train d’évoluer au niveau européen grâce au rapport que nous avons publié. Nous avions en effet rencontré des commissaires et des élus.
Comme je l’ai dit tout à l'heure, un débat majeur est aujourd’hui ouvert sur tous ses problèmes. Au niveau européen, rien n’est simple : il y a, d’un côté, les économistes fougueux et, de l’autre, ceux qui pensent prévention et santé des citoyens.
Aussi, je me range aujourd'hui à l’avis de l'Assemblée nationale et je partage la position défendue à la fois par Mme la rapporteur et par Mme la ministre déléguée : il est souhaitable de prendre du temps. Nous n’avons jamais pensé que les quelque trente propositions que nous avons formulées dans notre rapport seraient mises en œuvre dans les six mois !
Il faudra plusieurs années pour qu’elles trouvent leur concrétisation, au niveau européen comme au niveau national.
Le législateur français, me direz-vous, a bien le droit d’établir ses propres lois et de fixer ses propres interdits, mais il me semble aujourd'hui souhaitable d’attendre les conclusions des études à venir, car tout cela n’est pas encore scientifiquement complètement établi.
Sur la méthode, je souhaite personnellement que toutes les propositions concernant les dispositifs médicaux fassent l’objet d’une approche globale : on ne peut pas se contenter d’adopter un jour telle mesure et, le lendemain, telle autre.
À mon avis – chacun le sien ! –, il est nécessaire de traiter la question de manière plus globale.
Pour aujourd'hui, ne retardons pas le processus et acceptons le consensus que nous proposent l'Assemblée nationale et le Gouvernement en adoptant les dispositions visées, car il importe d’aller vite. Mais prenons le temps d’examiner, dans leur ensemble, toutes les préconisations que nous avons formulées dans le rapport de la mission commune d’information.
J’admire les contorsions verbales de Mme la rapporteur et de Mme la ministre déléguée !
Je comprends bien que ce problème les gêne, mais on ne peut pas, d’un côté, dire qu’il faut prendre le temps de la réflexion et, de l’autre, refuser de repousser de six mois, pour des raisons techniques, la date de l’interdiction du bisphénol A dans les contenants alimentaires. C’est pourtant ce à quoi on nous invitait il y a quelques minutes !
On va donc laisser les femmes enceintes et les prématurés subir des traitements impliquant des produits dont la nocivité est avérée… La nocivité des trois catégories de phtalates visés est établie ; point n’est besoin d’attendre de nouvelles études. On ne veut pas appliquer ici le principe de précaution que l’on défend par ailleurs.
Quant aux substances de remplacement, elles existent, notamment pour les tubulures, dans lesquelles on vient d’interdire la présence de phtalates. De même pour les contenants : ainsi que je l’ai dit tout à l'heure, on peut trouver des solutions, par exemple le verre.
Certes, je comprends bien la démarche qui consiste à vouloir un vote conforme pour obtenir un texte le plus rapidement possible. Toutefois, les principaux problèmes ne sont pas réglés pour autant.
Concernant le traitement des prématurés, la concentration sanguine de bisphénol A et de phtalates est de cent à cinq cents fois supérieure – cela a été démontré scientifiquement – à ce qu’elle peut être pour un adulte. Et on nous dit que nous devons prendre notre temps !
Monsieur Cazeau, vouloir concrétiser les trente propositions contenues dans votre rapport en une seule fois relève de la pure utopie !
La mission commune d’information que Chantal Jouanno a présidée a beaucoup travaillé sur tous les produits dont nous parlons. Monsieur Cazeau, un certain nombre des mesures que vous avez proposées dans votre excellent rapport, dont celle-ci, pourraient trouver rapidement leur application dans le cadre de la présente proposition de loi.
Si la Haute Assemblée devait repousser cet amendement, je le regretterais.
Nouveaux sourires.
Rires.
Pour ce qui concerne l’amendement n° 7, présenté à titre principal par Mme Jouanno, j’observe que l’interdiction prévue doit s’appliquer à compter du 1er juillet 2015, ce qui n’est tout de même pas précisément demain ! Un délai est donc ménagé qui permettra d’organiser le retrait des dispositifs concernés et leur remplacement par de nouveaux produits.
En outre, je considère, comme Gilbert Barbier, que la nécessité d’un vote conforme ne justifie pas que nous renoncions à régler un vrai problème. Au contraire, je trouve que le Sénat enverrait un très bon signal en adoptant cet amendement. Certes, une commission mixte paritaire devrait être réunie. Certes, une nouvelle lecture serait nécessaire. Certes, l’entrée en vigueur de la proposition de loi serait un tout petit peu retardée. Mais, franchement, je ne crois pas que la sécurité sanitaire en pâtirait !
Madame la ministre, nous sommes prêts à accepter un sous-amendement portant sur la date d’entrée en vigueur ou sur le champ d’application de la mesure que nous proposons. Mais votre opposition à cet amendement, si elle devait être confirmée par le Sénat, serait un très mauvais signal pour la sécurité sanitaire que nous nous efforçons par ailleurs de promouvoir !
Mesdames, messieurs les sénateurs, je ne suis pas médecin, mais j’attire votre attention sur la nécessité, tout en respectant le principe de précaution, de bien apprécier les risques en présence.
En particulier, il faut tenir compte du fait que tous les actes médicaux et chirurgicaux n’ont pas le même degré de gravité. Les interventions chirurgicales pour lesquelles sont utilisés les instruments visés par l’amendement n° 7 étant très lourdes, il faut être certain que le produit de remplacement n’aura pas d’effets plus néfastes que ceux du produit actuellement en usage !
Si les défenseurs de cet amendement sont en mesure d’apporter la démonstration que des produits de substitution existent et que leur innocuité est établie, l’interdiction doit être décidée. Mais, en l’état actuel des études, je ne crois pas que nous puissions avoir cette certitude.
La position du Gouvernement n’est donc pas un recul : nous sommes déterminés à aller vers la suppression de tous les phtalates et nous avons donné un signe fort de notre volonté à propos du DEHP.
Si le principe de précaution doit être appliqué avec détermination lorsque des produits de substitution existent dont l’innocuité a été prouvée, nous n’avons pas la certitude qu’en adoptant l’amendement n° 7 au nom de ce même principe de précaution, on ne ferait pas courir des risques nouveaux, qui plus est pour des actes chirurgicaux lourds.
Madame Goulet, le problème n’est pas aussi simple que cela. Ce serait beau si la recherche pouvait, en quelques mois, obtenir les résultats que l’on attend d’elle !
Nous voulons à la fois appliquer le principe de précaution et nous assurer que les éventuels risques nouveaux sont bien appréciés, notamment lorsqu’il s’agit d’actes médicaux lourds.
Le fait que le Gouvernement demande le retrait de cet amendement ne signifie pas qu’il manque de détermination. Je pense véritablement que, en l’état actuel des choses, les auteurs de l’amendement n° 7 feraient preuve de responsabilité en ne le maintenant pas.
Je suis tout à fait d’accord avec Mme la ministre déléguée.
Monsieur Barbier, j’ai du mal à comprendre votre position. Pour avoir été chirurgien, vous devez savoir que la notion de dispositif médical est très large et s’étend bien au-delà des dispositifs médicaux implantables. Par exemple, l’amendement n° 7 ne visant pas spécifiquement les dispositifs en contact avec les patients, les dispositifs électroniques de surveillance entrent aussi dans son champ d’application.
Au surplus, comment contrôler le respect d’une interdiction portant sur plusieurs milliers de substances ?
Mes chers collègues, vous devez mesurer le risque réel que l’adoption de l’amendement n° 7 entraînerait !
L'amendement n'est pas adopté.
L'article 3 est adopté.
(Non modifié)
Le Gouvernement présente au Parlement, dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport relatif aux perturbateurs endocriniens. Ce rapport précise les conséquences sanitaires et environnementales de la présence croissante de perturbateurs endocriniens dans l’alimentation, dans l’environnement direct, dans les dispositifs médicaux et dans l’organisme humain. Il étudie, en particulier, l’opportunité d’interdire l’usage du di (2-éthylhexyl) phtalate, du dibutyl phtalate et du butyl benzyl phtalate dans l’ensemble des dispositifs médicaux au regard des matériaux de substitution disponibles et de leur innocuité –
Adopté.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble de la proposition de loi.
J’informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à la création de la Banque public d’investissement est parvenue à l’adoption d’un texte commun.
Mes chers collègues, l'ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures, pour des questions cribles thématiques consacrées à l’hébergement d’urgence.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à dix heures cinquante, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Jean-Pierre Bel.