La commission a tout d'abord procédé à l'audition de M. Jean Marimbert, directeur général, et Mme Marie-Laurence Gourlay, responsable du département publicité et bon usage des produits de santé, de l'agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps).
a rappelé l'historique des programmes d'accompagnement des patients. Des demandes de mise en oeuvre de ces programmes ont été soumises à l'Afssaps par les entreprises pharmaceutiques alors que le cadre légal de ces actions n'était pas précisément défini. Entre 2001 et 2006, quinze programmes portant sur des produits de santé à prescription obligatoire ont ainsi été transmis à l'Afssaps pour autorisation.
L'agence a estimé que ces programmes ne relevaient pas du régime juridique applicable à la publicité des médicaments et a considéré qu'il était nécessaire de dégager des critères spécifiques pour l'instruction de ces dossiers.
Au total, l'agence a délivré huit avis favorables, après avoir demandé aux promoteurs d'ajuster leurs projets initiaux, et rendu sept décisions défavorables. Ces dossiers ont été instruits par la commission chargée du contrôle de la publicité et de la diffusion des recommandations sur le bon usage des médicaments. Une méthodologie pratique a été mise en oeuvre prévoyant notamment la consultation d'experts cliniciens et des associations de patients concernées par les pathologies visées.
Les dossiers ont été examinés au regard de six critères :
- la justification du programme d'accompagnement par la nature de la pathologie. Des programmes relatifs à la prise en charge de la sclérose en plaques, de l'ostéoporose, de l'hypertension artérielle ou de l'obésité ont leur pertinence. Cette justification a paru moins nette dans d'autres cas comme le diabète, la migraine ou la polyarthrite et ces programmes n'ont donc pas été autorisés ;
- la nécessité de s'assurer que chaque médecin traitant est bien informé de la participation de ses patients à de tels programmes ;
- le fait que la personne malade doit pouvoir se retirer à tout moment d'un programme d'accompagnement et que les données recueillies ne doivent être utilisées que dans le cadre du programme ;
- le contrôle, par les autorités sanitaires, de la bonne articulation entre les programmes d'accompagnement et les programmes institutionnels existants, même si ces derniers sont aujourd'hui peu nombreux, puisque seule la caisse nationale de l'assurance maladie (Cnam) a mis en oeuvre un programme d'accompagnement des patients souffrant de diabète ;
- la compatibilité de la durée du programme avec l'objectif poursuivi ;
- le caractère non indispensable d'un lien direct entre l'administration d'un produit et un programme d'accompagnement. L'Afssaps a ainsi autorisé trois projets principalement centrés sur la délivrance de conseils hygiénico-diététiques aux patients.
Puis M. Jean Marimbert a indiqué qu'en 2006, la commission chargée du contrôle de la publicité et de la diffusion des recommandations sur le bon usage des médicaments a souhaité pouvoir instruire les dossiers relatifs aux programmes d'accompagnement dans un cadre juridique approprié. L'agence a alors saisi le ministère chargé de la santé de cette question et ce processus a débouché sur une première proposition de réglementation des programmes d'accompagnement évoquée à l'occasion de l'examen du projet de loi relatif à l'adaptation au droit communautaire dans le domaine du médicament en janvier 2007.
Des recommandations ont été d'ailleurs émises par l'inspection générale des affaires sociales (Igas) dans son rapport sur l'encadrement des programmes d'accompagnement des patients associés à un traitement médicamenteux, financés par l'industrie pharmaceutique. Elles s'inspirent des critères définis par l'agence.
a souligné que l'Igas a introduit un critère supplémentaire : la prise en compte de l'amélioration du service médical rendu (ASMR) des produits susceptibles de faire l'objet d'un programme d'accompagnement.
a voulu connaître les raisons qui ont conduit l'Afssaps à refuser la mise en oeuvre d'un programme d'accompagnement des patients souffrant de migraines.
a indiqué que ce programme n'a pas été autorisé pour deux raisons essentielles. D'une part, le traitement de la migraine ne pose pas de problèmes d'observance particuliers puisque les patients sont amenés à traiter des crises aiguës dont la fréquence peut varier. D'autre part, l'administration du traitement ne pose aucune difficulté technique et ne nécessite donc pas la mise en oeuvre d'un programme d'apprentissage.
Elle a rappelé que la moitié des programmes soumis à l'Afssaps concerne les modalités d'administration des traitements.
a regretté que la procédure suivie pour instruire les demandes d'autorisation de programmes d'accompagnement n'ait pas été rendue publique, ce qui empêche toute évaluation de la méthodologie suivie par l'Afssaps.
a indiqué que l'Igas a reçu tous les éléments nécessaires à l'évaluation des travaux menés par l'Afssaps. L'instruction des dossiers a été particulièrement rigoureuse et les différentes étapes de la procédure ont été motivées au fur et à mesure. Tout au long de ces procédures, l'agence a eu conscience d'évoluer dans un domaine juridiquement mal encadré et a donc redoublé de précaution.
Il a souligné que les programmes autorisés n'ont pas provoqué d'effets indésirables.
a rappelé que certains laboratoires ont spontanément mis fin à leurs programmes d'accompagnement sans justifier les raisons de cet arrêt.
Les programmes d'accompagnement doivent, à son sens, être réservés aux molécules nouvelles qui améliorent vraiment la prise en charge des malades.
a précisé que la mise en oeuvre des programmes d'accompagnement peut apporter une aide aux patients et permet de renforcer la surveillance des produits de santé.
En effet, les plans de gestion du risque et les autorisations accordées dès le stade de l'autorisation de mise sur le marché (AMM) pour la mise en oeuvre de programmes d'apprentissage permettent aux autorités sanitaires de mieux appréhender le bénéfice-risque des produits.
Limiter les programmes d'accompagnement aux seuls produits disposant d'une ASMR élevée aurait des effets réducteurs. Par exemple, si l'utilisation de « stylos injecteurs » nécessite un apprentissage de la part des patients concernés, le recours à cette technique d'administration n'est pas limité aux seules molécules innovantes. Par ailleurs, dans une classe thérapeutique donnée, seuls les premiers produits présentés aux autorités sanitaires bénéficient d'une ASMR élevée ; en conséquence, l'application systématique de ce critère limiterait les cas dans lesquels l'agence estime nécessaire de prendre des mesures d'accompagnement des patients.
a rappelé, pour le regretter, que la commission de la transparence, intégrée à la Haute Autorité de santé (HAS), n'a pas en sa possession tous les éléments nécessaires pour évaluer l'ASMR d'un produit, notamment en raison du refus des autorités compétentes de systématiser le recours à des essais comparatifs entre produits.
Il a estimé que l'examen des demandes de mise en oeuvre des programmes d'accompagnement doit être confié à la commission de la transparence.
Il a souligné que les autorités sanitaires doivent s'attacher à développer le suivi des médicaments, notamment par l'intermédiaire des études post-AMM, plutôt que de favoriser l'apparition de fausses innovations.
a considéré que la nécessité de développer un programme d'apprentissage pour faciliter l'administration d'un produit doit être évaluée par l'Afssaps, qui dispose de pouvoirs de police sanitaire, et non pas par la commission de la transparence.
Il a estimé que l'agence doit pouvoir demander la mise en oeuvre d'un programme d'accompagnement lorsqu'elle estime cette démarche nécessaire.
a voulu savoir si l'agence européenne du médicament a déjà imposé une telle obligation lors de la délivrance d'une AMM, notamment dans le cadre d'un plan de gestion du risque (PGR).
a indiqué qu'il existe peu ou pas d'exemples d'une telle demande, mais cette situation est susceptible d'évoluer dans les années à venir avec le développement des PGR. Ceux-ci ont été intégrés dans la législation communautaire en 2004 et l'évolution de la législation communautaire relative à la pharmacovigilance, prévue dans les mois à venir, sera l'occasion de renforcer le rôle de ce dispositif dans le cadre de la lutte contre l'iatrogénie médicamenteuse.
s'est étonné que les entreprises pharmaceutiques développent des programmes d'apprentissage destinés à apprendre à un patient comment réaliser une injection, alors que cette tâche pourrait être accomplie par un professionnel de santé.
a estimé que la formation à l'auto-injection peut s'avérer nécessaire pour les patients souffrant d'asthme ou de polyarthrite.
s'est interrogé sur la nécessité d'adopter une législation spécifique pour encadrer les programmes d'accompagnement ou d'apprentissage.
a estimé indispensable de préciser la législation relative à ces programmes, sans pour autant se limiter à une approche centrée sur les produits de santé. Parmi les dossiers déjà instruits par l'Afssaps, trois concernent des programmes transversaux visant à améliorer l'éducation thérapeutique des malades.
M. Nicolas About, président, a souligné que ces programmes sont alors très proches de ceux développés par la Cnam en direction des patients diabétiques. Il s'est alors interrogé sur l'opportunité de confier à un assureur public une compétence en matière d'accompagnement des patients.
a estimé que, dans la mesure où les règles déontologiques du programme d'apprentissage sont applicables à des programmes d'éducation thérapeutique à visée plus large, il n'y a aucun inconvénient à confier à la Cnam la responsabilité de conduire de tels programmes. Mais cette intervention obéit à une logique différente de celle de l'agence puisque l'assureur public n'a pas de compétence en matière d'évaluation de la balance bénéfice-risque d'un produit de santé. Il faut distinguer les programmes d'apprentissage, qui relèvent de la compétence de l'autorité sanitaire, des programmes d'éducation thérapeutique.
s'est interrogé sur les conditions dans lesquelles ces programmes d'apprentissage seront contrôlés.
a estimé que la loi doit fixer les critères de compétences et d'indépendance de ces opérateurs. Le contrôle et l'évaluation des programmes seront assurés par l'agence, éventuellement en collaboration avec l'association de patients concernée ou un cabinet d'audit.
s'est inquiété du manque de lisibilité des notices fournies avec les produits de santé, en raison notamment de l'absence de hiérarchisation et de la complexité des informations fournies aux malades.
M. Jean-Claude Etienne a voulu savoir si l'Afssaps a étudié les interférences entre les produits de santé et les produits domestiques à forte toxicité, par exemple les pesticides.
a rappelé que la compétence de l'Afssaps est circonscrite aux produits de santé et dispositifs médicaux. Les produits domestiques ne relèvent pas de son champ de compétences. Toutefois, l'agence renforce des collaborations avec l'agence française de sécurité sanitaire de l'environnement et du travail (Affset), notamment pour établir les interactions possibles entre médicaments, produits cosmétiques et alimentaires.
En ce qui concerne le contenu des notices, celui-ci est fortement encadré par la réglementation ou la jurisprudence européenne qui imposent aux laboratoires d'informer les patients sur les risques fréquents mais également sur les effets indésirables les plus rares. Une réflexion est en court pour améliorer la lisibilité des notices, en collaboration avec les associations de patients.
a voulu savoir si l'Afssaps a autorisé des programmes d'accompagnement au cours des douze derniers mois.
a précisé que le précédent ministre de la santé a habilité l'agence à poursuivre l'instruction des dossiers dans l'attente de l'adoption d'une législation spécifique, mais l'Afssaps ne souhaite pas exercer cette compétence sans texte législatif et ne procède donc à l'instruction d'aucun dossier depuis maintenant près de dix-huit mois.
Puis la commission a entendu M. Didier Tabuteau, coauteur du rapport « De l'observance à la gouvernance de sa santé ».
a indiqué que l'étude des programmes d'observance fait partie des priorités de recherche retenues par la chaire « santé publique » de Sciences po et l'institut droit et santé de l'université Paris V. Cet axe de travail a été considéré comme prioritaire en raison du nombre de plus en plus élevé de personnes atteintes de maladies chroniques, de l'augmentation prévisible de ces pathologies et du développement de traitements de plus en plus sophistiqués pour la prise en charge des malades, notamment avec l'apparition de la pharmacogénomique.
La question de l'observance est appelée à prendre de l'ampleur dans les années à venir et soulève à terme des questions de sécurité sanitaire. Un débat important a déjà lieu au niveau européen, dont les conclusions serviront de base à la définition d'un encadrement juridique des programmes d'observance que la commission européenne souhaite proposer prochainement. Au niveau national, le débat est encore limité mais ce dossier ne peut pas être abordé sans évoquer la responsabilité des patients dont les fondements juridiques sont définis par la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé.
La définition de la notion d'observance ne va pas de soi. Dans son acception stricte, elle évoque la concordance entre la prescription d'un médecin et son exécution par un malade ; dans une acception plus large, elle recouvre l'ensemble des comportements d'un patient pour faire face à sa maladie, c'est-à-dire le suivi des prescriptions hygiéniques, diététiques et médicamenteuses qui lui ont été faites. Cette difficulté à cerner la notion d'observance accroît le risque de confusion avec d'autres thèmes proches, comme l'éducation thérapeutique, expression qui ne figure d'ailleurs plus dans le code de la santé publique depuis 2004, ou les programmes d'accompagnement des patients.
La nécessité d'encadrer l'observance se justifie par trois motifs principaux :
- en termes de santé publique, la multiplication des traitements majore les risques d'iatrogénie médicamenteuse et renforce la nécessité de respecter les conditions pour lesquelles l'administration des traitements à été autorisée par les autorités sanitaires ;
- au regard de l'action des entreprises pharmaceutiques, la mise en oeuvre d'un programme d'accompagnement doit relever de la relation exclusive entre le patient et son médecin, et éventuellement des associations de patients. Bien que l'Afssaps ait réalisé un travail de grande qualité lors de l'instruction des premières demandes d'autorisation de mise en oeuvre des programmes d'accompagnement, il faut se pencher sur les ambiguïtés qui existent entre information, observance, éducation du patient, accompagnement et publicité. Une intervention du législateur est donc indispensable. Le cadre juridique doit fixer les règles déontologiques à respecter, les modalités de financement et la répartition des compétences entre les différents acteurs ;
- pour ce qui concerne le rôle de ces programmes dans le système de santé, il doit être précisé notamment sur le point de savoir s'il existe un risque d'engagement de la responsabilité du patient : la prise en charge des dépenses de santé sera-t-elle liée au respect du protocole thérapeutique ? Cette question a été soulevée mais l'instauration d'un lien de ce type constituerait une atteinte fondamentale au principe de solidarité.
a observé que la réglementation doit également tenir compte de l'évolution des connaissances scientifiques qui permettront, à terme, de mieux identifier les causes des pathologies. La tentation de rendre l'individu responsable de sa santé pourrait alors apparaître. Le progrès médical et la normalisation des pratiques en matière de santé ne doivent pas porter atteinte aux libertés individuelles et aux garanties de la protection sociale.
s'est interrogé sur la nécessité de déterminer un encadrement juridique spécifique pour ces programmes.
a rappelé que la loi régit déjà la relation patient-médecin et prévoit une règle de codécision. L'intervention d'un tiers doit donc faire l'objet d'un encadrement législatif. Les composantes des programmes d'accompagnement doivent être identifiées : apprentissage, aide dans la durée, assistance au respect des préconisations du protocole thérapeutique. Toutes ces démarches doivent être organisées, autorisées et contrôlées par les autorités publiques.
Les intervenants doivent respecter la relation médecin-patient et le suivi thérapeutique du malade doit demeurer du ressort du médecin. Les règles financières et déontologiques doivent être connues.
a souhaité savoir comment les rôles peuvent être répartis entre les différents acteurs, tels l'Afssaps, la Haute Autorité de santé (HAS) et les entreprises pharmaceutiques.
a indiqué que les compétences en matière d'autorisation et de contrôle pourraient être confiées à l'Afssaps pour les traitements médicamenteux et à la HAS dans les autres cas.
Si des institutions de moyens, c'est-à-dire des opérateurs, viennent prêter assistance au médecin et au malade, le choix de ce dernier doit être exprimé dans la plus totale indépendance. Peu d'organismes de ce type existent aujourd'hui, c'est donc un domaine dans lequel tout est à construire.
a voulu connaître l'appréciation que M. Didier Tabuteau porte sur les recommandations du rapport de l'Igas relatif à l'encadrement des programmes d'accompagnement des patients associés à un traitement médicamenteux, financés par les entreprises pharmaceutiques.
a estimé important de définir les éléments qui garantissent l'indépendance des parties. Il a mis en garde contre la construction d'une bureaucratie de l'observance. Les recommandations faites par l'Igas permettent d'éviter une partie de ces écueils.
a voulu connaître les mesures à prendre en priorité pour encadrer le développement des programmes d'observance.
s'est inquiété des effets indésirables provoqués par la multiplication des intervenants dans le domaine de la santé. Il s'est interrogé sur les raisons qui justifient l'intérêt des entreprises pharmaceutiques pour les programmes d'observance.
a estimé que les programmes d'observance ne peuvent être élaborés que dans l'intérêt des malades. Une étude récente réalisée par un grand cabinet d'audit nord américain a considéré que les programmes d'observance peuvent être mis à profit par les entreprises pharmaceutiques pour fidéliser leur clientèle.
Il a estimé que les programmes d'observance ne doivent être autorisés que pour les médicaments qui disposent d'une amélioration de service médical rendu (ASMR) élevée.
Il a noté le paradoxe existant entre la volonté exprimée par les pouvoirs publics de limiter la consommation des médicaments et la multiplication des programmes d'observance, qui ont précisément l'effet inverse.
a fait part de son scepticisme sur la possibilité de définir des catégories précises de produits susceptibles de faire l'objet de programmes d'observance ; en effet, ces programmes ne sont pas toujours liés à un médicament.
Les programmes d'observance ne doivent pas être confondus avec les programmes de gestion du risque (PGR) élaborés à la demande des autorités européennes.
Par ailleurs, les agences sanitaires doivent conserver la possibilité de demander la mise en place de programmes d'accompagnement pour des produits ciblés ou pour des motifs de sécurité sanitaire.
La relation patient-médecin doit constituer le socle des programmes d'observance, même si il est vrai que, dans certaines pathologies, les associations de patients ou les réseaux de soins jouent un rôle. Il faut aussi adapter les programmes d'observance aux déterminants socioculturels. En effet, le traitement des pathologies aiguës suppose une bonne compréhension de la prescription par le malade et une meilleure connaissance des déterminants psychosociologiques dans la mise en oeuvre des traitements est indispensable.
a souligné la nécessité d'aider chaque malade à appréhender la pathologie dont il souffre et à adapter ses conditions de vie. La maîtrise de ces paramètres permet de limiter les prescriptions médicamenteuses sans lien direct avec la pathologie.
Enfin, la commission a organisé une table ronde à laquelle ont participé MM. Jean-François Knopf, président de la section « exercice professionnel » du conseil national de l'ordre des médecins (Cnom), Gérard Raymond, président de l'association française des diabétiques (AFD) et Christian Saout, président du collectif interassociatif sur la santé (CISS).
a constaté que les termes d'observance, d'apprentissage et de programmes d'accompagnement des patients sont utilisés indifféremment par les différents acteurs pour qualifier la notion d'observance. Parmi ces activités, quelles sont celles qui pourraient utilement être encadrées par la loi ?
a estimé que la loi doit donner une définition précise de ces notions et des opérateurs autorisés à les mettre en oeuvre.
a considéré que l'observance est, avant tout, le résultat d'une relation de confiance entre le médecin et son patient. Or, le temps médical est aujourd'hui insuffisant pour proposer à chaque patient une éducation thérapeutique. Certaines tâches pourraient donc utilement être déléguées, proposition qui se heurte toutefois à la pénurie d'infirmières.
Il s'est également inquiété du désintérêt des étudiants pour la médecine générale. L'organisation actuelle du cursus médical les conduit en effet à ne connaître que la médecine hospitalière et la carrière universitaire. La médecine générale devrait être remise au centre des études médicales.
s'est interrogé sur la place qui pourrait être confiée aux opérateurs extérieurs, si l'on considère que l'observance dépend essentiellement de la relation entre le médecin et le patient.
a rappelé que si l'observance fait l'objet de discussions depuis dix-huit mois, il s'agit d'une préoccupation plus ancienne. La nouveauté est que l'observance recouvre aujourd'hui, ce qui est naturel, une dimension plus économique : le traitement doit être suivi non seulement pour des raisons sanitaires, mais aussi pour éviter les gaspillages.
L'accompagnement des patients diffère de l'éducation thérapeutique, qui doit être confiée aux seuls médecins. Ces deux actions non exclusives permettent d'assurer l'observance du traitement, qui constitue donc un objectif plus qu'une procédure. Le rôle de la loi est d'encadrer les actions d'accompagnement des patients menées après la prescription du traitement, y compris celles proposées par l'industrie pharmaceutique.
Le manque de temps médical utile devrait effectivement conduire à ce que d'autres acteurs soient encouragés à intervenir auprès des patients dans un cadre légal défini.
a demandé si la participation de l'industrie pharmaceutique doit être limitée aux seuls programmes d'accompagnement, sans investir le domaine de l'éducation thérapeutique.
a indiqué que telle est la position de l'Igas.
Rappelant que les laboratoires ont, par le passé, largement contribué au développement des associations de patients, M. Nicolas About, président, a souhaité connaître la nature actuelle de leur participation auprès de ces instances.
a fait valoir que la Cnam participe déjà à des programmes d'accompagnement alors même qu'à son sens, elle n'est pas plus légitime à le faire que l'industrie qui en est actuellement empêchée.
a reconnu que l'industrie a souvent agi, dans le domaine de la santé, pour pallier l'inaction des pouvoirs publics.
a estimé que les structures et les acteurs ne doivent pas être cloisonnés mais, au contraire, être invités à participer, chacun à leur niveau, à l'accompagnement des patients.
Dans le cas du diabète par exemple, les stades successifs de la maladie nécessitent des modalités de prise en charge et d'accompagnement adaptées qui peuvent être confiées à différents opérateurs.
La participation de tous est d'autant plus nécessaire que les besoins de financement pour ces programmes sont élevés et appellent la mise à contribution de l'Etat, mais aussi de la sécurité sociale et des laboratoires.
en est convenu et a réitéré son souhait de voir les médecins libérés de certaines charges au profit des autres professionnels de santé, afin de libérer du temps médical consacré à l'éducation thérapeutique. Une enquête de l'Ipsos montre qu'une majorité de médecins partage ce point de vue.
Le programme d'observance doit, à son sens, être défini conjointement entre le médecin et le patient, ce dernier conservant le droit de le refuser. En tout état de cause, l'éducation thérapeutique constitue un préalable indispensable au libre choix d'un traitement par le malade, qui ne doit pas devenir captif d'un produit ou d'un laboratoire. Cette éducation doit être réalisée par le médecin, éventuellement par des associations de patients, en évitant tout lien direct entre le malade et l'industrie.
a demandé si cette absence de relation directe s'applique également à un service rendu par l'intermédiaire d'une plate-forme téléphonique.
en est convenu, remarquant toutefois que les laboratoires sont déjà très actifs dans le milieu hospitalier, même s'il n'existe pas, à sa connaissance, de contact direct avec les malades.
Rappelant les difficultés que rencontre un malade chronique pour suivre un traitement sur le long terme, M. Jean-François Knopf a considéré que l'industrie ne peut assurer cette observance, dans la mesure où son rôle est de promouvoir le produit qu'elle fabrique sans se préoccuper des conséquences du traitement sur le patient.
s'est fait l'écho de la proposition de certains de lier le remboursement du traitement à son suivi effectif par le malade. Est-ce une position acceptable ?
s'est déclaré indigné par cette hypothèse, rappelant que le choix de suivre ou non un traitement constitue un droit fondamental du patient.
a estimé que l'observance ne doit pas résulter d'une contrainte qui pèse sur le remboursement mais d'un contrat entre le médecin et son patient.
a considéré que la Haute Autorité de santé (HAS) a un rôle à jouer dans la définition des programmes d'accompagnement et dans le contrôle des informations diffusées sur les traitements. Ces informations doivent être transparentes et facilement accessibles, ce qui n'est pas toujours le cas des notices de médicaments. De même, les médecins n'expliquent pas suffisamment aux patients le rapport bénéfice-risque d'un traitement, pour leur permettre de prendre en toute connaissance de cause la décision de le suivre.
a approuvé la définition, donnée par M. Christian Saout, de l'observance comme un objectif qui peut être atteint par l'éducation thérapeutique, dont il a regretté à cet égard qu'elle ne soit pas définie par la législation.
Il a estimé que les médecins doivent, dans le cadre de la formation continue, être formés à mieux informer les patients sur les traitements disponibles.
a rappelé que l'éducation thérapeutique est déjà réalisée par les médecins hospitaliers. Elle doit aujourd'hui être proposée par l'ensemble des médecins.
a fait valoir que ce souhait se heurte à l'absence de formation à l'éducation thérapeutique chez les médecins généralistes. Plus généralement, la médecine générale souffre d'un déficit d'enseignement, même si le fait de l'inscrire parmi les spécialités a permis de revaloriser un peu la filière.
Concernant la formation médicale continue (FMC), il a déploré que de nombreux médecins renoncent à la suivre, faute de trouver un remplaçant durant ces périodes.
L'évaluation des pratiques professionnelles (EPP) qui, à la différence de la formation continue, ne doit pas être confiée à l'industrie, mérite également d'être renforcée, de même que le travail en équipe.
a estimé qu'un temps médical précieux ne doit pas être perdu par des actions d'accompagnement des patients, qui peuvent facilement être confiées à d'autres opérateurs.
a déploré la multiplication des tâches administratives au détriment du temps médical.
a indiqué que, si de multiples acteurs peuvent effectivement participer à l'accompagnement, il convient de définir le rôle et la participation financière de chacun. Les programmes d'accompagnement peuvent prendre des formes multiples mais, in fine, c'est souvent la qualité de vie du patient qui permet une observance satisfaisante du traitement.
Reconnaissant que le médecin est au centre du dispositif d'accompagnement, M. Paul Blanc s'est interrogé sur les moyens d'inciter les étudiants à s'orienter vers la médecine générale.
a constaté qu'il existe souvent un dilemme entre les exigences croissantes des patients et la nécessité de maîtriser les dépenses de santé. Il a souhaité savoir par quels réseaux les associations assurent la transmission des informations aux patients.
a précisé que l'AFD est composée de cent vingt associations de proximité. L'action de ces associations est encore trop récente, puisqu'elle résulte de la loi du 4 mars 2002 sur les droits des malades et la qualité du système de santé, pour être complètement efficace auprès des patients. Elles se mettent en place progressivement et plus de 14 000 représentants des associations sont supposés siéger dans les conseils d'administration de multiples structures du système de santé. Les associations ont besoin de temps et de moyens financiers pour remplir le rôle que leur ont confié les pouvoirs publics. Il convient donc de leur donner les moyens de devenir de véritables acteurs de santé en créant un statut attractif de bénévole et en proposant des formations.
Il a enfin estimé qu'il est illusoire de penser que les programmes d'accompagnement amélioreront le comportement de l'ensemble des malades chroniques face au traitement. Leur objectif doit surtout être d'éviter les complications liées à un traitement inadapté ou mal suivi.
est convenu que la limitation des complications devra constituer le principal critère de réussite d'un programme.
a fait valoir que toutes les associations ne sont pas prêtes ni capables de s'engager dans des programmes d'accompagnement. Le lancement de ces programmes doit donc obéir à un appel d'offre pour choisir le candidat le mieux à même de les mettre en oeuvre. Ils devront également être encadrés par des règles précises, notamment l'absence de lien direct entre les laboratoires et les patients, le respect du choix de ces derniers et une évaluation régulière.
Demeure toutefois posée la question de leur financement puisque l'industrie refuse la mutualisation des moyens, préférant financer ses propres programmes.
a estimé que les laboratoires veulent rester maîtres des programmes qui concernent leurs produits car ils s'en sentent responsables.
a considéré que cette position de principe se heurte au droit, pour le patient, de choisir son traitement. Tel ne sera pas le cas si un laboratoire ne s'attache qu'à son produit dans le cadre d'un programme d'accompagnement. Or, il existe par exemple deux traitements différents contre l'hépatite C et quatre classes de produits destinés aux personnes hémophiles. Certains traitements s'appliquent mieux que d'autres à certains malades, ce que l'on peut sous-estimer si l'on s'en tient à un seul produit.
Le fait de confier ces programmes aux seuls laboratoires pose donc, à tout le moins, un problème éthique. Les laboratoires, qui demeurent attachés à cette revendication, pensent tirer de substantiels revenus du « service après-vente » de leur traitement. Les professions de santé ont d'ailleurs tenu un raisonnement identique, s'agissant des actions d'éducation à la santé, dans le cadre des conventions signées avec l'Uncam.
En réponse à M. Paul Blanc, M. Jean-François Knopf a indiqué que la désaffection des étudiants pour la médecine générale s'explique par le souhait de ne plus travailler seuls, notamment pour les gardes et les astreintes, et par la réticence des conjoints à s'installer en milieu rural ou dans une banlieue sensible, accrue encore par la féminisation de la profession de médecin.
Il a souhaité que les gardes du samedi soient enfin rémunérées dans l'ensemble des départements et autorisées dans des sites multiples, comme le proposent les délégations interministérielles à l'aménagement et à la compétitivité des territoires (Diact).
a déploré que, s'agissant des gardes effectuées dans des cabinets secondaires dans les ZRR, l'administration fiscale refuse d'exonérer les médecins de charges.
a souhaité que des solutions soient trouvées pour attirer de jeunes médecins, notamment des remplaçants, dans des zones sous-médicalisées.