La séance est ouverte à neuf heures trente.
Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
La parole est à M. Olivier Henno, auteur de la question n° 1616, adressée à M. le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports.
Madame la secrétaire d’État, ma question peut paraître anachronique après l’intervention du chef de l’État hier soir sur l’incitation vaccinale, puisqu’elle concerne les tests salivaires et les autotests dans les écoles.
Cependant, il se pourrait bien que les autotests et les tests salivaires deviennent, dès la rentrée prochaine, le complément indispensable de la politique en faveur du vaccin, pour les plus de 12 ans et plus encore pour les enfants au-dessous de cet âge.
Alors que le rythme de croisière de 300 000 tests par semaine, prévu initialement pour la mi-mars, a été atteint tardivement en fin d’année scolaire, des équipes enseignantes ont relevé de nombreux couacs dans la mise en œuvre de cette stratégie de tests sur le terrain.
Les délais entre la flambée des cas dans certaines écoles et l’arrivée des tests salivaires ont souvent été un peu longs. Les difficultés de mise en place de cette politique de tests massifs dans les écoles se couplent à un autre sujet particulièrement alarmant : la menace d’une nouvelle vague avec le variant delta, qui est – on l’a entendu hier soir – au cœur de l’actualité.
Il semble donc urgent de préparer dès à présent les mesures sanitaires qui seront appliquées dans nos écoles à la rentrée, car elles seront un vecteur important de lutte contre la propagation du virus. Il semble aussi opportun de donner l’autorisation aux collectivités locales de lancer des campagnes massives de tests et d’autotests. Laissons faire les élus locaux, qui sont sur le terrain : leur organisation plus souple permettra de faire réaliser ces tests de manière plus performante, pour casser plus rapidement les chaînes de contamination et renforcer la sécurité sanitaire.
Monsieur le sénateur Olivier Henno, vous avez tout à fait raison : les tests et les autotests sont un outil d’évaluation de la situation sanitaire complémentaire des décisions annoncées hier par le Président de la République. Depuis le démarrage en février 2021 des campagnes massives de dépistage par test PCR sur prélèvement salivaire, plus de 4 millions de tests ont été proposés aux élèves et aux personnels travaillant dans les écoles et les établissements scolaires.
Mieux adaptés aux plus jeunes enfants que d’autres catégories de tests, ces tests sont proposés majoritairement dans les écoles maternelles et élémentaires. L’objectif du Gouvernement de réaliser 600 000 tests par semaine a été atteint à la mi-mai, conformément aux échéances fixées. Ces campagnes ont permis, vous l’avez dit, monsieur le sénateur, de dépister plus massivement chez les mineurs et de lutter contre les contaminations en milieu scolaire.
Sur ce point, je vous invite à consulter les données mises en ligne par Santé publique France sur le portail Géodes, et en particulier le focus par niveau scolaire qui est extrêmement intéressant parce qu’il est régulièrement mis à jour avec les données issues d’un certain nombre de laboratoires. Vous pourrez constater par exemple qu’entre le début du mois de février et la mi-mai le taux de dépistage des 6-10 ans, une tranche d’âge que vous avez évoquée, a presque été multiplié par trois tandis que, dans le même temps, celui des plus de 18 ans diminuait légèrement.
Massivement déployés, ces tests ont bien été acceptés par le corps enseignant et les parents, avec un taux d’adhésion de 60 % à 70 % pour les élèves des écoles élémentaires. Le taux de positivité s’établissait en moyenne à 0, 3 %.
L’organisation de ces tests PCR sur prélèvement salivaire reposait sur une coopération extrêmement étroite entre les services académiques et les agences régionales de santé, ce qui a permis l’application de la stratégie « tester, alerter, protéger » en milieu scolaire, notamment au retour des vacances d’hiver, un moment important.
Après le déploiement des tests, le ministère a pris contact avec l’ensemble des associations d’élus locaux : c’est avec ces derniers que nous pouvons mettre en place sur les territoires un déploiement encore plus massif des tests. Depuis le début du mois, nous travaillons, toujours en lien extrêmement étroit et renforcé avec les associations d’élus, pour préparer la rentrée scolaire.
Dans mon périmètre d’action, je vous indique que nous déployons cet été plus de 6 millions de tests et d’autotests dans les colonies de vacances, les centres aérés et les centres d’accueil de jour, afin de poursuivre cette détection massive et lutter contre le virus.
Je vous remercie, madame la secrétaire d’État. Nous sommes d’accord sur l’utilité des tests et des autotests, et votre réponse est nette et claire.
J’ajouterai un point complémentaire : il est nécessaire de permettre l’intervention souple et adaptée des communes, et particulièrement des maires, qui ont une responsabilité dans le domaine scolaire.
La parole est à Mme Angèle Préville, auteure de la question n° 1707, adressée à M. le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports.
Madame la secrétaire d’État, j’évoquerai un enseignement qui a quasiment disparu, l’éducation manuelle. Tout enfant doit pouvoir être en mesure d’acquérir des savoirs et des savoir-faire. C’est pourquoi il a droit à une éducation manuelle, qui est un levier puissant pour comprendre, apprendre, progresser et se construire.
La main et le cerveau sont liés et travaillent ensemble. Nous sommes nés de cela, nous avons évolué grâce à cette synergie, et ce depuis l’aube de l’humanité.
Alors que notre société est de plus en plus informatisée, numérisée, dématérialisée, alors que nous avons tant besoin de prise directe avec la réalité, alors que nos enfants grandissent beaucoup trop devant les écrans, pourquoi les priver de ce ressort magnifique de connexion avec le réel, de ce chemin de facilité vers la connaissance ?
Faire avec ses mains permet d’aider à acquérir toutes les notions et à les consolider, y compris les notions les plus abstraites et les plus intellectuelles. Sinon comment un élève qui n’a pas la chance d’avoir des parents artisans ou bricoleurs, qui n’a donc pas vu, senti, vécu ni essayé le travail manuel et qui n’a plus goût à l’école peut-il savoir qu’il est fait pour travailler manuellement, qu’il va aimer cela et qu’il sera heureux d’embrasser une profession manuelle, laquelle lui permettra de se réaliser ?
Nous sommes nombreux à avoir grandi en suivant des cours d’éducation manuelle. De tels cours manquent cruellement aujourd’hui. Si tous les enfants pouvaient, durant leur scolarité, s’essayer à la menuiserie, à la couture, à la poterie, à la cuisine, au tricot, à la vannerie et à mille autres choses, ils pourraient s’orienter en connaissance de cause. Ils seraient alors certains qu’ils peuvent trouver là les moyens de s’accomplir.
La pandémie a été riche d’enseignement : l’éducation manuelle aurait été d’un grand secours, ne serait-ce que pour faire un masque. Imaginez comment les enfants auraient pu participer, s’investir dans l’élan de solidarité nationale et dans cette situation si difficile à vivre en tant qu’acteurs impliqués, être reconnus et faire partie de ceux qui ne sont pas restés uniquement sidérés !
Lors de la discussion du projet de loi pour une école de la confiance, j’avais fait inscrire dans le code de l’éducation la nécessité de favoriser l’éducation manuelle. Le ministre Jean-Michel Blanquer partageait alors mon point de vue, puisqu’il avait été favorable à mon initiative. Ne serait-il pas temps maintenant d’inscrire concrètement dans les programmes de l’éducation nationale l’éducation manuelle, de l’école maternelle jusqu’au lycée ?
Madame la sénatrice Préville, je vous remercie de votre question. J’estime très sincèrement que vous avez raison de remettre en lumière une méthodologie d’acquisition des compétences qui n’a, en réalité, rien de désuet. Vous connaissez peut-être l’association L’Outil en Main, qui se déploie un peu partout sur nos territoires : cette association, avec laquelle mon ministère travaille très étroitement, accompagne les jeunes dans la découverte des métiers de l’artisanat.
Je vous remercie d’autant plus pour cette question que je sais que le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports a à cœur de déployer plus fortement une acquisition des compétences par le savoir-faire, la découverte des métiers et un enseignement complémentaire à l’éducation théorique ou technique.
Ces compétences sont présentes dans le socle commun de connaissances, de compétences et de culture, dans les programmes de toutes les disciplines, mais elles ont vocation à être complétées.
Dans les informations qui m’ont été transmises par le ministre de l’éducation nationale, il est indiqué que, dès le cycle 1, c’est-à-dire la maternelle, les compétences manuelles sont enseignées par le biais de manipulations simples pour les tout-petits, et vont jusqu’à la construction d’objets et la découverte des métiers comme ceux que vous avez cités – je pense à la vannerie en particulier.
Ces modalités permettent aux élèves de progresser dans l’acquisition de ces compétences et des savoirs associés, mais également d’affiner l’habileté manuelle, qui n’est malheureusement parfois pas pratiquée à la maison. Comme nous ne vivons pas tous dans le même type d’environnement ou de territoire, on constate une certaine inégalité d’accès à ce type d’activités.
L’éducation manuelle est plus particulièrement une priorité dans l’enseignement intégré de science et technologies proposé en classe de sixième et de cinquième. Dans le cadre de projets pluridisciplinaires ou non, les enseignants sont amenés à proposer de faire de la construction au sens très large : maquettes, jardin, élevage, affiches. L’expérience et la définition d’une procédure requérant des gestes maîtrisés au service de la recherche sont au cœur des enseignements de spécialité de sciences de la vie et de la terre et de physique-chimie au lycée général, et sont aussi présentes dans les lycées technologiques, avec la dynamique du chef-d’œuvre en CAP.
L’idée du ministre de l’éducation nationale est d’intégrer l’acquisition des compétences manuelles dans l’ensemble des parcours, qu’ils soient technologiques ou généraux, dès le plus jeune âge, c’est-à-dire à la maternelle, et jusqu’au lycée.
En conséquence, l’éducation manuelle comprise comme l’ensemble des « activités d’investigation, de conception, de modélisation et de réalisation » est présente et a vocation à être renforcée, de la maternelle au lycée.
Cette omniprésence permettra aux élèves d’acquérir des compétences encore plus larges au sens pédagogique, dites « d’analyses distanciées et critiques », mais également de développer cette habileté si chère aux plus jeunes enfants.
Voilà, madame la sénatrice, les éléments que je souhaitais vous indiquer pour répondre à votre question.
Je vous remercie, madame la secrétaire d’État, mais je voudrais insister sur le sujet.
Je suis d’accord, l’éducation manuelle est pratiquée dans les écoles primaires et les écoles maternelles, mais elle est cruellement absente au collège ! Si elle était une matière à part entière, elle permettrait aux jeunes de développer leur autonomie et de réaliser des projets. Ce que j’aurais voulu, c’est que l’éducation manuelle soit inscrite aux programmes.
La parole est à M. Michel Savin, auteur de la question n° 1752, adressée à Mme la ministre déléguée auprès du ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports, chargée des sports.
Madame la secrétaire d’État, je souhaite aujourd’hui vous interroger sur l’engagement du Gouvernement concernant les Global Games.
Alors même que les échéances de France 2023 et de Paris 2024 se dessinent, l’action du Gouvernement en faveur de la pratique sportive pour les personnes en situation de handicap, visible ou invisible, n’est pas très claire.
La Fédération française du sport adapté organisera à Vichy en 2023 les Global Games, accueillant ainsi près de 1 000 athlètes du monde entier dans dix différentes disciplines sportives.
En 2024, Paris accueillera les jeux Paralympiques, qui rassembleront, quant à eux, plus de 10 000 athlètes pour près de 330 épreuves.
Les Global Games sont un événement phare et une chance pour les sportifs de haut niveau ayant une déficience intellectuelle. Cet événement doit montrer la place que la France donne au sport, qui, au-delà de son impact sur la santé et le bien-être, est également, par les valeurs qu’il incarne, un élément moteur de cohésion sociale pour notre société.
Malgré un réel engagement pour Paris 2024 et les jeux Paralympiques, il est regrettable qu’aucune action de promotion ou de soutien n’ait été prise pour le moment par le Gouvernement pour cet événement majeur qui se déroulera à quelques mois des jeux Paralympiques.
Madame la secrétaire d’État, comment le Gouvernement compte-t-il concrètement soutenir cet événement et s’engager auprès des athlètes de sport adapté, qui, au vu de leurs parcours difficiles et de leurs performances sportives exceptionnelles, sont vraiment exemplaires ?
Monsieur le sénateur Michel Savin, permettez-moi de vous faire part de la réponse transmise par ma collègue Roxana Maracineanu, ministre des sports, qui ne pouvait pas être parmi vous ce matin.
Portée par la Fédération française du sport adapté, la candidature de Vichy pour l’accueil de la plus grande compétition internationale de sport adapté avait été dévoilée des 2019 par Laurent Wauquiez, président de la région Auvergne-Rhône-Alpes, et par Sandrine Chaix, conseillère spéciale régionale au handicap.
Le savoir-faire du centre de ressources d’expertise et de performance sportive (Creps) Auvergne-Rhône-Alpes de Vichy et des acteurs locaux a ainsi été reconnu et conforté. Les Global Games sont organisés tous les quatre ans et réunissent le plus grand nombre d’athlètes de sport adapté, qu’ils soient en situation de handicap physique ou mental, visible ou invisible.
Vous l’avez dit, l’édition 2019 s’est déroulée à Brisbane avec une délégation française composée de 83 sportifs, qui ont participé à 7 des 9 disciplines. La France a remporté plus de 87 médailles, dont 39 titres, 23 médailles d’argent, 25 médailles de bronze, et s’est classée au deuxième rang des nations participantes.
Le Gouvernement reconnaît l’importance de cet événement, qui constitue la plus grande compétition internationale pour les sportifs déficients intellectuels. Les Global Games 2023 sont inscrits au calendrier des grands événements paralympiques internationaux par la délégation interministérielle aux grands événements sportifs, et sont soutenus à hauteur de 700 000 euros pour un budget de 3, 256 millions d’euros, soit 21 % de taux de soutien.
L’Agence nationale du sport accompagne également la Fédération française du sport adapté et tous ses sportifs de haut niveau au travers d’un contrat de performance, à hauteur de 900 000 euros en 2021.
Depuis 2019, l’accompagnement a été fortement renforcé par l’Agence nationale du sport, sachant que la Fédération française du sport adapté a fait le choix de recevoir, non pas des aides personnalisées versées par le Comité national olympique et sportif français, mais une enveloppe de 75 000 euros gérée directement par la Fédération dans le cadre de l’enveloppe de son contrat de performance.
L’opérateur, qui est l’Agence nationale du sport, accompagne donc les sportifs de haut niveau des sports adaptés au travers de la Fédération, que ce soit pour les trois sports paralympiques – athlétisme, natation, tennis de table – ou pour les sports non paralympiques reconnus de très haut niveau.
J’espère, monsieur le sénateur, que ces éléments d’information ont pleinement répondu à votre question.
Madame la secrétaire d’État, je vous remercie de votre réponse. Vous avez souligné l’engagement fort de la région Auvergne-Rhône-Alpes, avec son président Laurent Wauquiez et sa vice-présidente Sandrine Chaix, qui se mobilisent fortement pour l’organisation de l’édition 2023.
Vous avez évoqué l’édition 2019, et les excellents résultats de la délégation française. Vous reconnaissez l’importance des Global Games, mais, lorsque j’entends que le taux de participation de l’État français à leur organisation est de 20 %, est-ce bien à la hauteur d’un tel événement ? Il aurait mérité un effort supplémentaire de la part du gouvernement et de l’État français.
Vous n’avez pas répondu à un point, sur lequel il faudrait peut-être se pencher : il faudrait faire la promotion de cet événement et le mettre en valeur pour valoriser l’engagement de ces jeunes filles et de ces jeunes hommes, qui se mobilisent et qui s’impliquent complètement dans la préparation malgré leur handicap, lequel est souvent important.
C’est la plus belle image que l’on pourrait envoyer de l’organisation de cette manifestation !
La parole est à Mme Denise Saint-Pé, auteur de la question n° 1736, adressée à M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation.
Madame la secrétaire d’État, permettez-moi de questionner la pertinence de soumettre des productions traditionnelles telles que l’Ossau-Iraty au système du Nutri-score.
Ce fromage au lait de brebis, fabriqué dans les Pyrénées-Atlantiques, est classé en appellation d’origine contrôlée (AOC) depuis 1980 et en appellation d’origine protégée (AOP) depuis 1996.
Il s’agit d’un produit traditionnel, de grande qualité, tant par sa fabrication – du lait cru non chauffé – que par le mode d’élevage de la filière ovine concernée : le pâturage en estives basco-béarnaises.
Or cette spécialité est aujourd’hui confrontée à un déficit d’image en raison du dispositif Nutri-score qui lui est appliqué. En effet, elle est classée D dans cette grille, alors que des produits industriels transformés se voient paradoxalement attribuer des notes bien meilleures.
À un moment où le consommateur souhaite légitimement être informé des produits qu’il va trouver dans son assiette, il est paradoxal que le Nutri-score, qui limite l’information à la simple composition nutritionnelle, devienne prédominant.
Il convient de le rappeler, le cahier des charges des AOC et AOP est très strict et les modes de fabrication ainsi que la composition des produits ne peuvent pas être modifiés, ce qui ne permet pas d’adapter leur composition pour répondre aux exigences du Nutri-score.
De plus, Santé publique France envisage d’interdire la publicité des aliments notés D et E pour préserver les enfants et adolescents du marketing publicitaire, ce qui entraînera l’impossibilité d’assurer la promotion de tels produits sous indication géographique.
Cette situation me semble aller à l’encontre de la préservation de notre agriculture traditionnelle, alors même qu’elle paraît répondre à une demande du consommateur qui privilégie les circuits courts.
Aussi, madame la secrétaire d’État, serait-il envisageable de ne pas soumettre les productions traditionnelles au système du Nutri-score, celui-ci paraissant inadapté dans ces cas-là ?
Madame la sénatrice Denise Saint-Pé, notre gastronomie est la plus belle des richesses de notre pays. La France, c’est d’abord ses fromages, ses paysages, ses terroirs et ses agriculteurs. J’apporterai à votre question la réponse qui m’a été fournie par le ministre de l’agriculture et de l’alimentation, dont je vais vous faire lecture pour être la plus exhaustive possible.
Le logo Nutri-score, issu d’une démarche scientifique innovante et inclusive et fondé sur le dialogue entre les parties prenantes, offre aux consommateurs une information lisible, qui facilite la compréhension.
La démarche d’engagement de chaque producteur en faveur du Nutri-score est volontaire, en conformité avec le droit européen. Le Nutri-score est aujourd’hui plébiscité par les Français. En juillet 2020, plus de 415 entreprises étaient engagées dans cette démarche en France, et les parts de marché des produits affichant le Nutri-score représentaient environ 50 % des volumes de ventes ; 94 % des Français ont déclaré être favorables à la présence de cette information sur les emballages.
Sa diffusion rapide suscite toutefois des questions légitimes, que vous avez soulevées, madame la sénatrice. Vous avez évoqué celle des fromages sous AOP. D’autres sont apparues : pourquoi les frites n’ont-elles pas de Nutri-score ? Le Nutri-score prend-il en compte les additifs ? Une large campagne de communication de Santé publique France est en cours de diffusion pour répondre à ces questions.
Le Nutri-score et les signes officiels d’identification de la qualité et de l’origine (SIQO) répondent à des objectifs différents. Les SIQO constituent une garantie pour les consommateurs en termes de qualité, de savoir-faire, de protection de l’environnement, d’origine et de terroir, alors que le Nutri-score les informe sur la qualité nutritionnelle des produits transformés et permet donc de les comparer.
Si les fromages sont classés, dans leur très grande majorité, en D et parfois en E, c’est parce qu’ils contiennent des quantités importantes de graisses saturées de sel et qu’ils sont également caloriques.
Le ministère de l’agriculture et de l’alimentation a toutefois demandé, en lien avec le ministère de la santé, que le comité scientifique institué au niveau européen se saisisse de la question des fromages, afin de mieux traduire la corrélation entre les teneurs en protéines et en calcium des fromages.
Quoi qu’il en soit, cela ne doit pas pour autant exclure ces produits de notre consommation équilibrée : le Nutri-score est une information supplémentaire donnée aux consommateurs ; il ne saurait être l’unique paramètre de leur choix.
Ce n’est en tout cas pas la position du Gouvernement. Je l’ai rappelé au début de mon propos, notre pays est riche de ses terroirs, de ses produits sous signe de qualité, et de sa gastronomie reconnue dans le monde entier, qu’il faut protéger et soutenir.
Nous pensons qu’il vaut mieux nous pencher sur les spécificités nutritionnelles des produits sous AOP. Ainsi, sept pays sont désormais engagés dans cette démarche : la France, la Belgique, l’Espagne, l’Allemagne, les Pays-Bas, le Luxembourg et la Suisse. Un comité composé d’experts scientifiques, réuni pour la première fois le 12 février dernier, aura pour mission d’évaluer la pertinence scientifique des propositions d’évolution du mode de calcul du Nutri-score. La France tentera d’influer, dans le cadre de ce comité, pour que soient prises en compte les spécificités de nos AOP.
Voilà, madame la sénatrice, des éléments de réponse en faveur de notre ambition collective de protéger nos produits agricoles et les femmes et les hommes qui font vivre les savoir-faire.
Madame la secrétaire d’État, il faut absolument que la France arrive à obtenir de l’Union européenne qu’elle reconnaisse cette spécificité de l’économie montagnarde, comme le demandent nos concitoyens.
La parole est à M. Jean-Pierre Decool, auteur de la question n° 1751, adressée à M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation.
Madame la secrétaire d’État, au Nord, il n’y a pas que les corons, il y a aussi les coulonneux. C’est comme cela que l’on appelle les colombophiles, ces passionnés de courses de pigeons voyageurs. En effet, dans les Hauts-de-France, on joue énormément « à pigeons », on enchaîne les courses. Les colombiers cultivent le bien-être animal, la convivialité et la compétition sportive.
Si j’ai décidé d’introduire mon propos de cette façon, c’est pour mettre en exergue un aspect important de ce sport : le lien social. C’est un lien fort et unique qui lie entre eux les colombophiles non seulement européens, mais aussi britanniques.
Toutefois, comme chacun sait, le Brexit est arrivé et avec lui son cortège de complications. Les pigeons voyageurs en provenance du Royaume-Uni bénéficiaient, jusqu’alors, d’une autorisation d’introduction sur le territoire français. Dorénavant, ils ne peuvent plus être transportés aussi facilement et le lien qui unit les passionnés des deux côtés de la Manche en pâtit.
C’est le règlement européen 2020/692 qui régit dorénavant les importations d’oiseaux captifs, dont les pigeons voyageurs. Ce dernier impose une quarantaine de trente jours, mettant en difficulté la tenue des compétitions colombophiles. Je sais que cette problématique a été prise en compte et que le texte européen est en cours de modification.
En attendant, les pigeons voyageurs sont naturellement soumis aux dispositions nationales. À ce jour, les postes de contrôle frontaliers des Hauts-de-France – Dunkerque, Calais port et Calais tunnel – ne sont pas en mesure d’assurer le contrôle à l’importation de ces animaux.
Madame la secrétaire d’État, j’aimerais donc vous poser deux questions. Pouvez-vous m’informer, d’une part, de l’état d’avancement de la modification du texte européen ? Acceptez-vous, d’autre part, de prendre des dispositions pour permettre aux postes de contrôle frontaliers des Hauts-de-France d’assurer le contrôle à l’importation de ces animaux et permettre ainsi à ce sport traditionnel de reprendre son cours ?
Monsieur le sénateur Jean-Pierre Decool, nous avons tellement été privés de lien social que, dès que nous en avons l’occasion, nous nous attachons à rebâtir ce lien !
Je vous fais part de la réponse du ministre de l’agriculture et de l’alimentation, qui ne pouvait malheureusement pas être là ce matin pour vous répondre, sur ce sujet qui lui tient à cœur. Si vous le permettez, comme pour Mme Saint-Pé, je vous en ferai lecture car il s’agit d’une question technique.
Les services du ministère de l’agriculture et de l’alimentation ont bien pris en compte les difficultés engendrées par la mise en place de ce nouveau règlement, qui concerne les importations de pigeons voyageurs. Vous l’avez dit, des travaux sont actuellement engagés par la Commission européenne : ils devraient conduire à la parution d’un acte délégué modificatif du règlement, spécifiquement dédié aux nouvelles modalités d’importation en provenance des pays tiers.
La date de parution de cet acte délégué ne nous a pas encore été transmise. Je sais que c’est l’information que vous espériez obtenir, mais les services de la Commission européenne nous ont fait part de leur souhait d’une parution « rapide », au sens diplomatique du terme, laquelle reste toutefois soumise au processus de validation des actes modificatifs prévu par la législation européenne.
Dans l’attente de cette publication, les importations sont actuellement possibles sous couvert du respect des dispositions nationales fixées par l’arrêté ministériel du 19 juillet 2002. Ce texte impose notamment que tous les animaux vivants en provenance des pays tiers soient soumis aux fameux contrôles vétérinaires d’introduction dans un poste de contrôle frontalier.
À ce jour, et cela répond à votre seconde question, seuls les postes de contrôle frontalier de Caen-Ouistreham, de Cherbourg et de Saint-Malo sont désignés et disposent des infrastructures adaptées pour le contrôle de ces animaux sur la façade Manche. Vous l’avez dit, ce n’est pas tenable en l’état.
Les demandes d’extension du champ de désignation d’autres postes de contrôle frontaliers relèvent non pas de la compétence du ministère de l’agriculture et de l’alimentation, mais de celle des gestionnaires des points d’entrée – ports et tunnels – au regard de leur appréciation de l’opportunité d’investir dans des infrastructures nécessaires, considérant les flux attendus.
Aussi, si ces derniers l’estiment opportun, ils peuvent présenter un dossier de désignation, qui sera bien évidemment étudié par les services du ministère de l’agriculture et de l’alimentation avec attention, en particulier par le service d’inspection vétérinaire et phytosanitaire aux frontières, puis transmis à la Commission européenne afin de recueillir son accord.
Monsieur le sénateur, je tiens à vous assurer que le ministre de l’agriculture et de l’alimentation est attaché comme vous au lien social que cette activité permet de créer dans nos territoires, mais il est aussi le garant du respect des règles sanitaires applicables à l’entrée de l’Union européenne.
Soyez convaincu que les services suivent de très près ce dossier et reprendront au plus vite la désignation de nouveaux postes. Nous vous tiendrons évidemment au courant des évolutions.
Madame la secrétaire d’État, je vous remercie pour cette réponse du ministre de l’agriculture dont je ne peux, vous l’imaginez bien, me satisfaire.
Je vous invite à relayer mon attente pour être plus rapide que les rapides. La saison colombophile internationale est déjà bien entamée ; dans un mois et demi, elle sera achevée. J’ai le sentiment que, lorsque les réponses vont arriver, les compétitions seront terminées.
Au-delà du lien social, nous avons aussi avec les Britanniques des relations économiques. Je vous adresse cette supplique : il faut tout faire pour que nous obtenions une réponse extrêmement rapide.
La parole est à M. Yannick Vaugrenard, auteur de la question n° 1450, transmise à Mme la ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation.
Madame la ministre, je souhaite vous interroger sur la possibilité de rendre obligatoire un stage en PME pour les étudiants des grandes écoles, comme l’École nationale d’administration (ÉNA), l’École polytechnique ou encore l’École nationale supérieure des Mines de Paris.
En effet, bien que la situation sanitaire actuelle occupe une grande partie des actions menées par le Gouvernement, il est essentiel de ne pas mettre de côté des initiatives qui pourraient aider les entreprises, notamment les plus petites, les PME et les très petites entreprises (TPE).
En 2015, 63 % des salariés étaient employés dans une PME, mais ces entreprises embauchent beaucoup moins de jeunes diplômés que les grandes sociétés. Or cela leur porte préjudice, car de nombreuses études montrent l’importance de ces profils pour le développement mais aussi pour le dynamisme des entreprises.
D’autres pays européens, comme le Royaume-Uni, se sont saisis du problème et ont mis en place des programmes spécifiques associant grandes universités et PME et facilitant les stages. En Allemagne, le niveau moyen d’encadrement des entreprises est bien meilleur que celui des PME et entreprises de taille intermédiaire (ETI) françaises, notamment parce que les jeunes diplômés s’y orientent naturellement à la sortie de leurs études.
Il paraît donc opportun de faire découvrir aux futurs grands décideurs ce qui fait notre richesse économique. Trop souvent, les étudiants des grandes écoles intègrent directement de grands établissements, privés ou publics, ce qui ne les confronte pas à la diversité économique de notre pays et de nos territoires. Nos dirigeants sont par ailleurs très demandeurs de ce type d’initiative et la Banque publique d’investissement, Bpifrance, y a déjà travaillé. C’est une volonté forte exprimée par les réseaux de petites et moyennes entreprises.
Il me semble donc primordial d’instaurer, de manière systématique, au moins un stage dans une petite entreprise dans le cursus des étudiants de nos grandes écoles françaises.
Je vous saurais gré de bien vouloir m’indiquer, madame la ministre, ce que le Gouvernement compte faire sur ce sujet.
Monsieur le sénateur Vaugrenard, les grandes écoles, notamment celles du service public, ont toujours attaché une importance particulière aux expériences en milieu professionnel de leurs étudiants.
Ainsi, à l’ÉNA, les élèves suivent un stage de sept mois en préfecture ou en collectivité territoriale, au cours duquel ils effectuent une « mission entreprise » de deux mois, au sein d’une PME ou d’une PMI du territoire. Il s’agit d’une nouveauté, datant de 2019, mise en place sous l’impulsion du directeur de l’école, car, auparavant, les stages en entreprise avaient lieu majoritairement dans de grandes entreprises françaises. Les retours d’expérience de ce nouveau stage sont particulièrement positifs, de la part tant des élèves que des entreprises.
En outre, dans le cadre de l’Institut national du service public, qui sera créé au 1er janvier 2022, ces stages en entreprise seront pérennisés et l’ouverture des élèves sur le secteur privé sera renforcée par la création d’un tronc commun à toutes les écoles de service public.
Toujours dans la même dynamique, l’Institut national des études territoriales prévoit un stage d’ouverture de quatre semaines pouvant s’effectuer dans le secteur privé. Le Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) met à la disposition des employeurs de la documentation sur les modalités de transmission des offres de stage.
Cela correspond aussi à la volonté de Polytechnique, école dans laquelle les élèves ingénieurs participent, dès la première année, comme dans toutes les écoles d’ingénieurs, à un stage de terrain dans les territoires. Ils effectuent également un stage en entreprise durant leurs deuxième et quatrième années de formation. Ainsi, les élèves ingénieurs de l’École supérieure des Mines ParisTech passent au minimum douze mois en entreprise sur les trois années de formation.
Le Gouvernement est par ailleurs attaché au renforcement des liens entre l’ensemble des étudiants et le tissu des PME de nos territoires. Les volontariats territoriaux en entreprise permettent, par exemple, à des étudiants du supérieur d’avoir des expériences en PME industrielle, avec des soutiens financiers. L’apprentissage est également un levier puissant d’accueil d’étudiants dans des PME. L’innovation des PME est également encouragée via le renforcement des partenariats public-privé.
Le Gouvernement est donc mobilisé pour établir un lien fort et durable des étudiants avec les petites et moyennes entreprises. J’encourage l’ensemble des établissements d’enseignement supérieur, universités et écoles, à signer des partenariats, en lien avec les collectivités et les PME-PMI qui les entourent.
Je vous remercie de votre réponse, madame la ministre.
Vous avez indiqué, au début de votre intervention, que les élèves de l’ÉNA faisaient des stages en sous-préfecture – c’est le cas la plupart du temps – et un stage de quelques semaines en entreprise. Il me semblerait préférable d’inverser ce ratio, afin que les étudiants passent beaucoup plus de temps dans nos petites et moyennes entreprises et dans nos entreprises de taille intermédiaire. Cela leur permettra probablement d’être beaucoup plus conscients, lorsqu’ils occuperont des postes importants dans la haute administration et qu’ils rédigeront des décrets d’application ou des projets de loi ou de directives, des réalités du terrain et de l’« applicabilité » des mesures que nous décidons, à l’échelon national.
Il est donc important de renforcer ce qui a déjà été commencé. Il existe une fracture culturelle, territoriale et sociale ; une telle mesure éviterait ou, tout au moins, diminuerait ce type de fracture, que chacun regrette.
La parole est à M. Bruno Sido, auteur de la question n° 1676, adressée à Mme la ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation.
Madame la ministre, j’appelle votre attention sur la licence professionnelle consacrée au bois et à l’ameublement du lycée Charles-de-Gaulle de Chaumont, en Haute-Marne.
Cette licence professionnelle consacrée au bois et à l’ameublement, avec option « création et design du cadre de vie » ne devait plus être dispensée dans le lycée, à partir de la rentrée 2021. Cette décision a provoqué une grande incompréhension dans le département, alors que cette formation est dispensée depuis huit ans et que, l’année dernière, pas moins de 70 candidatures ont été reçues pour seulement 15 places.
Fort heureusement, cette décision ministérielle a été annulée après la mobilisation de nombreux acteurs contre cette fermeture, et je m’en réjouis.
Ce que je regrette, en revanche, c’est le manque de concertation entre le Gouvernement, l’université et ses enseignants, ainsi que les élus locaux et les chambres consulaires. Si cette décision avait été justifiée, elle aurait été acceptée, probablement. Dans ce cas précis, elle ne l’était pas, bien au contraire.
La filière bois a un réel avenir sur notre territoire, puisque notre département possède désormais le premier parc national des forêts de plaines et de nombreux atouts dans ce domaine. Des efforts ont été réalisés pour dynamiser notre territoire et offrir des formations post-bac aux jeunes du territoire, en adéquation avec notre environnement et nos projets économiques et touristiques. Par conséquent, il était incompréhensible de mettre fin, sans concertation, à une formation qui offre aux jeunes diplômés des débouchés immédiats en Haute-Marne. Proposer des formations post-bac permet à nombre de jeunes d’étudier dans le département puis d’y rester pour y travailler.
Madame la ministre, il faut promouvoir les formations pourvoyeuses d’emplois.
Par conséquent, que compte faire le Gouvernement pour que les formations en lien avec la filière bois perdurent dans le département de la Haute-Marne et que les jeunes puissent ensuite y travailler et y vivre ? D’une manière générale, les enseignants, les élus locaux et le monde professionnel seront-ils dorénavant consultés sur les filières post-bac, afin que les jeunes s’engagent dans des filières d’avenir avec des emplois à la clé ?
Vous l’avez rappelé, monsieur le sénateur Sido, les licences professionnelles sont proposées par les universités et l’université de Reims Champagne-Ardenne a été accréditée, en 2018, pour délivrer le diplôme de licence professionnelle Bois et ameublement, dont l’enseignement est dispensé au lycée Charles-de-Gaulle de Chaumont.
Comme vous le soulignez, il s’agissait d’une formation innovante, répondant à une réelle demande territoriale ; c’est bien pour cela que mon ministère soutenait cette formation.
Néanmoins, la formation proposée n’était pas conforme à la réglementation applicable aux licences professionnelles, avec notamment un nombre trop faible d’enseignants-chercheurs ou d’enseignants universitaires au sein de l’équipe pédagogique. L’accréditation avait par conséquent été donnée pour trois ans et assortie d’une demande de réexamen à mi-parcours ; ces trois années devaient permettre à l’université de se mettre en conformité avec la réglementation, en garantissant le caractère universitaire de la formation.
L’université de Reims Champagne-Ardenne a transmis, en octobre 2020, un dossier de demande de prolongation de l’accréditation pour cette licence. Cette demande a été instruite par le collège des conseillers scientifiques et pédagogiques de la direction générale de l’enseignement supérieur et de l’insertion professionnelle (DGESIP), qui a sollicité des compléments d’information auprès de l’université, notamment des données chiffrées portant sur l’insertion professionnelle et sur la composition de l’équipe pédagogique.
L’université a répondu à cette demande, mais la réponse apportée a été jugée insatisfaisante sur les deux aspects cruciaux de la formation professionnalisante : d’une part, l’implication de l’université demeurait trop faible, seuls 8 % des enseignements étant dispensés par des enseignants-chercheurs ou enseignants de l’université ; d’autre part, la relation avec le tissu économique était réduite à l’évocation d’une seule et unique entreprise locale, ce qui est assez peu, vous en conviendrez, en matière de perspectives d’insertion professionnelle pour les étudiants…
La DGESIP a donc émis un avis défavorable sur le renouvellement de cette accréditation. Néanmoins, j’ai été sensible aux réactions que cela a suscitées et qui m’ont touchée ; j’ai donc décidé de surseoir, pour un an, à la fermeture de cette licence.
L’accréditation de l’université a ainsi été prolongée jusqu’à 2022, avec une liste très claire d’exigences, dont la réalisation sera vérifiée dans six mois, portant tant sur l’implication de l’université que sur les perspectives d’insertion professionnelle des étudiants.
Chaque année, environ 2 000 licences professionnelles sont accréditées par le ministre, ce qui représente plus de 52 000 étudiants. Il s’agit d’un diplôme phare de l’université, parce qu’il permet une réelle insertion professionnelle. C’est dans cet esprit et en concertation avec les acteurs locaux que mes services continueront d’instruire ce dossier.
Je vous remercie de votre réponse, madame la ministre ; je comprends désormais mieux le problème.
Je conçois parfaitement que l’on ferme des formations qui ne trouvent pas de débouché, mais, en l’occurrence, il y a des débouchés et les demandes en faveur de cette formation sont nombreuses. Il appartient donc à l’université de Reims Champagne-Ardenne de régler les problèmes internes, mais nous tenons au maintien de cette formation en Haute-Marne.
La parole est à Mme Corinne Imbert, auteure de la question n° 1572, adressée à Mme la secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées.
Madame la secrétaire d’État, ma question porte sur les difficultés liées au manque de place en institut thérapeutique, éducatif et pédagogique (ITEP) et en institut médico-éducatif (IME), structures accueillant des enfants et des adolescents en situation de handicap.
À l’inverse, depuis plusieurs années, on observe une augmentation importante du nombre de places en service d’éducation spéciale et de soins à domicile (Sessad). Cette évolution s’explique par une volonté d’accompagner les enfants dans les différents lieux dans lesquels ils évoluent quotidiennement et de développer l’école inclusive, démarche qui est à saluer.
Toutefois, l’augmentation du nombre de places en Sessad se fait au détriment du nombre de places en ITEP et en IME. Or nombre d’enfants en situation de handicap ne peuvent être accompagnés dans ce format externalisé et doivent être suivis dans des établissements spécifiques et équipés pour les accueillir. C’est pourquoi de nombreux enfants et adolescents se retrouvent actuellement sur liste d’attente, pour une éventuelle admission dans un ITEP ou dans un IME.
Aussi, madame la secrétaire d’État, je souhaite savoir si le Gouvernement entend procéder à une augmentation des moyens ou à un rééquilibrage du nombre de places entre, d’un côté, les ITEP et les IME, et, de l’autre, les Sessad, afin de répondre aux besoins spécifiques des enfants en situation de handicap.
Madame la sénatrice, je salue l’attention que vous portez à la transformation de l’offre médico-sociale pour les enfants.
Cette transformation conduit à réviser les équilibres de répartition de places entre solutions d’hébergement en structure spécialisée et services d’accompagnement à domicile et en milieu ordinaire, c’est-à-dire à l’école.
Cela dit, nous préservons aussi les offres destinées aux enfants qui ont les besoins les plus complexes. Je tiens à vous le signaler, depuis quatre ans, 1 368 places ont été créées dans les ITEP, IME et instituts médico-professionnels (IMPro) ; cela représente une augmentation de plus de 2 % et nous permet d’atteindre près de 70 000 places pour répondre à ces besoins.
Cette dynamique de transformation est nécessaire pour répondre aux nouveaux besoins des enfants et pour aller dans le sens de l’école inclusive, que vous mentionnez, qui se fonde sur la coopération entre l’école ordinaire et le médico-social. C’est ainsi que Jean-Michel Blanquer et moi promouvons cette trajectoire, consistant à ouvrir largement les portes des établissements spécialisés et de l’éducation nationale afin que cette coopération soit une réalité pour les enfants et pour leurs familles, qui plaident pour une telle évolution.
Aujourd’hui, nous créons des unités d’enseignement spécialisé – les classes adaptées pour les autistes et les classes externalisées – afin de mettre en œuvre cette coopération si indispensable. Nous créons aussi des formations conjointes entre les enseignants et le secteur médico-social pour mieux répondre aux besoins, même les plus complexes, des enfants.
C’est ainsi que nous créons – je tiens à souligner cette grande avancée – des classes externalisées pour les enfants polyhandicapés, dont le rapport à l’apprentissage est complexe mais qui ont le droit d’apprendre au milieu des autres.
C’est comme cela que nous transformons le regard sur la différence et sur la grande différence, et c’est ainsi que nous ferons croître le degré d’acceptation de la différence en France, afin de permettre au handicap de « circuler » plus facilement. Cela permettra également aux familles de changer de regard sur leurs enfants, même ceux dont les besoins sont les plus complexes.
Donc, oui, nous devons répondre.
Par ailleurs, nous sommes aussi confrontés à une grande urgence : la résolution de la situation des jeunes relevant de l’amendement Creton – communément appelés les « amendements Creton », ils sont près de 6 000 en France –, qui bloque des entrées en IME ou en ITEP. Pour beaucoup, cela se fait en coopération avec les départements, car nombre de notifications concernent des foyers de vie. Nous répondrons différemment, avec l’habitat inclusif ; nous développons plus de 10 000 places, qui sortiront beaucoup plus vite pour ces jeunes adultes, dont la prise en charge est, elle aussi, inadaptée.
Cette transformation est massive et mise en œuvre en pleine coopération avec l’éducation nationale, les organisations gestionnaires, les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) et les départements, car c’est ainsi que nous pourrons répondre à tous les besoins des enfants.
Je vous remercie, madame la secrétaire d’État, de votre réponse.
Oui à l’inclusion, bien sûr ! Vous vous en doutez, je partage votre sentiment sur ce point ; je sais à quel point vous êtes impliquée dans vos fonctions. Je ne suis évidemment pas du tout opposée à la transformation de l’offre destinée aux enfants en situation de handicap.
Pourquoi ai-je posé cette question ? Parce que je me suis appuyée sur l’exemple du département dont je suis élue et que vous connaissez bien, madame la secrétaire d’État, la Charente-Maritime, et je sais la qualité des relations que vous entreteniez avec le président Dominique Bussereau. Or, récemment, on comptait 74 jeunes inscrits sur liste d’attente pour intégrer un institut médico-éducatif et environ 13 jeunes en attente d’une place en ITEP.
Face à ce manque de place, les enfants étaient redirigés vers les unités localisées pour l’inclusion scolaire, les fameuses ULIS, en lien avec l’éducation nationale. Parfois, parce que les choses sont compliquées et qu’il faut du temps pour les mettre en route, on ne pouvait pas forcément prendre en charge comme il se devait ces enfants, qui relevaient d’un autre type d’établissement mais qui se retrouvaient, par défaut, en ULIS, où ils ne bénéficiaient pas de l’accompagnement souhaité.
Voilà ce sur quoi je souhaitais attirer votre attention, madame la secrétaire d’État. C’est un travail de longue haleine, je le sais, mais attention à ne pas réduire trop le nombre de places en IME !
Par ailleurs, vous évoquiez les « amendements Creton ». Le département a redéployé des moyens pour créer des places en foyer occupationnel, de façon à libérer des places en IME. La première année, cela a fonctionné, les résultats étaient bons, mais, avec la baisse des places en IME, nous avions l’impression que nos efforts étaient anéantis.
La parole est à Mme Corinne Imbert, en remplacement de Mme Catherine Belrhiti, auteure de la question n° 1599, adressée à M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation.
Madame la secrétaire d’État, je pose effectivement cette question au nom de ma collègue Catherine Belrhiti, retenue dans le département dont elle est élue et qui vous prie de bien vouloir excuser son absence.
Nous allons changer totalement de sujet.
Le schéma directeur régional des exploitations agricoles (SDREA) régule l’accès des exploitants au foncier agricole en fonction des enjeux nationaux et locaux. Ce schéma, encadré par les articles L. 331-1, R. 331-1 et suivants du code rural et de la pêche maritime, soumet certaines opérations de mise en valeur des terres – installation, agrandissement ou réunion d’exploitations – à autorisation préalable.
Il est particulièrement utilisé pour permettre aux petites structures d’être privilégiées par rapport aux grandes exploitations, dans l’obtention de l’autorisation d’acquérir et d’exploiter les terres agricoles libérées. Il permet de lutter contre la concentration excessive des terres et de consolider les petites exploitations.
Il paraît néanmoins que, même si le schéma permet aux agriculteurs français d’être mis en concurrence dans des conditions justes et équitables, ce n’est pas le cas lorsqu’il s’agit d’agriculteurs étrangers frontaliers, qui sont nombreux, notamment dans la région Grand Est. Alors que le contrôle des structures est pleinement appliqué pour un agriculteur français et que l’ensemble des terres agricoles qu’il cultive sont prises en compte, seules les terres exploitées par un agriculteur étranger en France sont comptabilisées et soumises au contrôle administratif du préfet.
Les agriculteurs étrangers sont donc favorisés si la majeure partie de leur exploitation est située à l’étranger. Il en résulte une distorsion flagrante de concurrence puisque les agriculteurs français ont plus de difficultés à obtenir l’autorisation d’exploiter de nouvelles terres agricoles.
Cette situation ne peut se résoudre uniquement à l’échelon national. Même si le code rural exige de prendre en considération l’ensemble des superficies mises en valeur par le candidat, sous quelque forme que ce soit et toutes productions confondues, le Gouvernement français doit agir à l’échelon européen pour faire respecter l’équité et la libre concurrence entre tous les agriculteurs.
Je souhaite donc savoir, madame la secrétaire d’État, si le Gouvernement compte agir afin de faire en sorte que l’ensemble des terres des agriculteurs puissent être contrôlées, qu’elles soient situées en France ou dans des pays limitrophes.
Je réponds également au nom de l’un de mes collègues, M. le ministre de l’agriculture.
Comme vous le mentionnez, madame la sénatrice, l’application, aux agriculteurs étrangers, de la réglementation du contrôle des structures peut poser certaines difficultés. Si tout agriculteur, quelle que soit sa nationalité, doit respecter les dispositions du contrôle des structures sur notre territoire, la loi française est soumise au principe de territorialité. Les terres exploitées à l’étranger ne sont ainsi pas soumises au contrôle administratif du préfet.
Mme Belrhiti défend l’idée d’une action à l’échelon européen pour résoudre ces difficultés. L’Union européenne a marqué son intérêt, au cours des dernières années, pour les questions relatives à la régulation du foncier agricole : d’une part, avec la publication du Rapport sur l ’ état des lieux de la concentration agricole dans l ’ Union européenne : comment faciliter l ’ accès des agriculteurs aux terres ?, ayant donné lieu à une résolution adoptée par le Parlement européen en avril 2017 ; d’autre part, en septembre 2017, au travers de la communication interprétative de la Commission sur l’acquisition de terres agricoles et le droit de l’Union européenne. La réflexion mérite d’être poursuivie.
Pour autant, l’article 345 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne dispose : « Les traités ne préjugent en rien le régime de la propriété dans les États membres. » Les règles régissant l’utilisation des terres agricoles relèvent ainsi de la compétence des États membres. La possibilité de tendre vers un cadre de réglementation harmonisé à l’échelon européen me semble donc très hypothétique au regard de la complexité du sujet et de contextes différents, y compris entre pays frontaliers.
Si les circonstances locales le justifient, des solutions peuvent être toutefois trouvées dans la coopération transfrontalière. Je peux ainsi citer les travaux menés dans le cadre de la conférence transjurassienne : à cette occasion, les autorités françaises et suisses ont mis en place une commission technique de conciliation foncière, qui permet de coordonner la régulation du foncier entre les deux pays. Cette commission a permis de mettre en place un protocole de suivi des exploitants suisses en France relevant d’une collaboration entre l’administration française, dans les départements du Doubs et du Territoire de Belfort, et le service des douanes suisses. Cela ne résout pas tous les problèmes juridiques, mais cela permet de fluidifier les échanges dans le traitement des dossiers.
La parole est à Mme Corinne Imbert, pour la réplique ; vous avez vingt-deux secondes et pas une de plus, ma chère collègue !
Je serai brève, monsieur le président.
Je vous remercie de votre réponse, madame la secrétaire d’État. Ma collègue Catherine Belrhiti en prendra connaissance avec beaucoup d’attention, même si j’ai bien compris qu’il y avait peu d’espoir en cette matière, sauf à faire appel à l’intelligence locale, au travers de coopérations transfrontalières.
Il est curieux que cela fonctionne avec la Suisse, qui n’est pas membre de l’Union européenne, mais, après tout, ceci explique peut-être cela…
Sourires.
La parole est à Mme Sabine Van Heghe, auteure de la question n° 1720, adressée à Mme la ministre déléguée auprès de la ministre de la transition écologique, chargée du logement.
Madame la secrétaire d’État, depuis maintenant deux ans, je me mobilise pour des familles demeurant dans le département dont je suis élue, le Pas-de-Calais, plus particulièrement dans la commune de Leforest, victime de l’épisode de sécheresse-réhydratation des sols de 2018.
En août 2019, le maire de cette commune a été contraint de prendre un arrêté de péril imminent relatif à certaines habitations, forçant ainsi des familles à quitter leur domicile. En effet, ces logements étant construits sur une zone argileuse, qui se gonfle ou se rétracte au gré des épisodes météorologiques, d’importantes fissures sont apparues sur les murs intérieurs et extérieurs des bâtiments, à la suite de l’épisode de sécheresse de 2017 ; depuis lors, elles ne cessent de s’étendre.
Or les familles continuent de payer des traites pour les maisons qu’elles ne peuvent plus habiter et doivent, en outre, s’acquitter des loyers des logements dans lesquels elles ont dû évacuer.
Les difficultés semblaient inextricables jusqu’à une excellente nouvelle, datant de samedi dernier : la reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle pour des communes supplémentaires touchées par la sécheresse de 2018, dont Leforest. Je me réjouis de cette annonce, qui récompense la mobilisation des élus, des associations et de la commission interparlementaire créée à cette occasion, pour que justice soit rendue à ces communes touchées.
Reste toutefois un problème de taille pour certaines familles : leurs assureurs les ont lâchées en résiliant leur contrat d’habitation, en raison de l’importance du risque à supporter. La toute récente reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle pour la commune de Leforest doit maintenant permettre l’indispensable indemnisation de ces familles.
Je vous demande donc, madame la secrétaire d’État, que le Gouvernement soit très attentif à l’implication et à l’accomplissement du devoir des assureurs, dont certains ont abusé du droit à résiliation. Il y va de l’avenir de ces familles, déjà très durement éprouvées.
Madame la sénatrice, vous interrogez ma collègue ministre déléguée chargée du logement, dont je vous prie d’excuser l’absence, sur la situation des victimes de l’épisode de sécheresse-réhydratation des sols de 2018.
Le Gouvernement est très attentif à cette question. Il convient d’abord de rappeler que le Gouvernement, en application de la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique (ÉLAN) et par arrêté du 22 juillet 2020, a pris des mesures préventives concernant la construction neuve, en imposant des études géotechniques dans les zones d’aléas pour le retrait-gonflement d’argile. Il s’agit d’assurer que ce type de dégâts ne se reproduise pas pour les constructions à venir.
À plus court terme, afin de remédier à certaines situations d’urgence liées à la sécheresse de 2018, la loi de finances pour 2020 a prévu la mise en place exceptionnelle, à hauteur de 10 millions d’euros, d’un dispositif de soutien aux victimes les plus affectées par la sécheresse de 2018. Ce fonds, forcément limité, doit en priorité aider les ménages qui se trouvent dans les situations les plus difficiles. Ainsi, sont éligibles uniquement les travaux lourds et coûteux, qui nécessitent une intervention sur la structure ou les fondations. Il a également paru nécessaire de cibler prioritairement les propriétaires aux revenus modestes, qui n’auraient pu réaliser de tels travaux sans cette aide.
Cela étant, comme vous le soulignez, la typologie des demandes reçues depuis la mise en place de ce fonds a conduit à étudier son ouverture à des ménages aux revenus intermédiaires. Aussi, le Gouvernement a élargi par décret, fin mai dernier, le périmètre d’attribution de l’aide, pour y inclure les ménages aux revenus intermédiaires, compris entre les cinquième et huitième déciles de l’échelle des revenus, et a prolongé l’ouverture du dépôt des demandes jusqu’au 31 juillet 2021.
Plus largement, le régime de catastrophe naturelle s’avère être un dispositif ancien, dont les critères s’adaptent difficilement à la multiplication des sécheresses. Aussi, dans une perspective de plus long terme, pour concevoir une solution structurelle et pérenne face aux dégâts qui en découlent, le Gouvernement a mandaté plusieurs inspections – Inspection générale des finances, Inspection générale de l’administration et Conseil général de l’environnement et du développement durable –, qui ont remis leur diagnostic et leurs propositions en mai dernier.
Sur le fondement de ce travail, certaines dispositions législatives nouvelles pourraient être introduites, via la proposition de loi du député Stéphane Baudu portant sur ce sujet. Ce texte, après avoir été adopté à l’unanimité, en première lecture, à l’Assemblée nationale, en janvier dernier, doit désormais être examiné au Sénat. Vous aurez donc l’occasion d’y revenir.
Je vous remercie de vos propos, madame la secrétaire d’État. La reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle va permettre l’indemnisation des victimes par les assurances, sous réserve que celles-ci jouent leur rôle.
Cette décision est récente ; cela fait trois ans que ces familles vivent dans l’angoisse, il est temps que la lueur d’espoir se transforme en apaisement et en un retour à la vie normale. Je compte sur le Gouvernement pour les accompagner jusqu’au bout.
La parole est à M. François Calvet, auteur de la question n° 1710, adressée à M. le ministre de l’économie, des finances et de la relance.
Madame la ministre, je souhaite attirer votre attention sur la nécessité d’accorder le périmètre prévu par la convention fiscale franco-espagnole du 10 octobre 1995, déterminant la qualité de travailleur frontalier, au bassin d’emploi de l’hôpital transfrontalier de Cerdagne.
Cet établissement a été institué sous la forme d’un groupement européen de coopération territoriale (GECT) par la convention du 26 avril 2010, signée par la France, l’Espagne et la Généralité de Catalogne. Cette convention a été suivie par la ratification de l’accord-cadre de coopération sanitaire transfrontalière entre la République française et le Royaume d’Espagne, autorisée par le Parlement, au travers de la loi du 28 avril 2014.
La vocation première de l’hôpital transfrontalier de Cerdagne, situé côté espagnol, dans la commune de Puigcerdà, est de fournir des soins médicaux aux habitants du plateau de Cerdagne, de part et d’autre de la frontière franco-espagnole. Il s’agit d’une population d’environ 30 000 personnes, qui n’avaient pas d’accès facile aux soins, leur région montagneuse étant enclavée.
De façon logique, le bassin d’emploi de l’hôpital correspond à sa zone de compétence : le plateau de Cerdagne est un peu plus étendu que la zone frontalière prévue par la convention fiscale franco-espagnole. Le rayon prévu par cette convention n’est que de 20 kilomètres de part et d’autre de la frontière, mais il s’avère manifestement insuffisant, car nombre d’employés de l’hôpital habitent au-delà, quelquefois même plusieurs kilomètres plus loin, et ne peuvent par conséquent bénéficier du statut de travailleur frontalier, ce qui leur est particulièrement préjudiciable. À titre de comparaison, j’observe qu’un rayon de 30 kilomètres avait été retenu pour définir les déplacements transfrontaliers lors des derniers confinements liés à la pandémie de la covid-19.
Je souhaite donc savoir, madame la ministre, si le Gouvernement envisage de modifier la convention fiscale franco-espagnole afin d’élargir cette zone transfrontalière et, dans l’affirmative, dans quel délai.
Monsieur le sénateur François Calvet, vous l’avez évoqué, afin de sécuriser la situation de leurs travailleurs frontaliers, la France et l’Espagne se sont accordées dès les années 1960 sur un régime frontalier spécifique. Ce régime a été modifié à plusieurs reprises, puis intégré dans sa forme actuelle dans la convention, actuellement en vigueur, du 10 octobre 1995.
Le point 12 du protocole de la convention garantit aux travailleurs frontaliers d’être imposés sur leurs revenus d’activité dans l’État dont ils sont résidents.
Conformément à l’article 2 de l’accord complémentaire entre la France et l’Espagne relatif aux travailleurs frontaliers, le statut de frontalier est reconnu aux travailleurs résidant dans une liste limitative de communes situées à une distance de 20 kilomètres au plus de la frontière espagnole. Il est précisé que ce régime est tout à fait comparable, sous cet aspect, à celui qui a été conclu avec les autres pays frontaliers, la Belgique et l’Allemagne par exemple.
La question des travailleurs frontaliers, et plus particulièrement la révision du régime prévu, peut difficilement être envisagée sous le seul angle des besoins exprimés par les travailleurs de l’hôpital transfrontalier de Cerdagne. En effet, une extension à 30 kilomètres de la zone frontalière aurait, par construction, des conséquences plus larges et générales.
La modification de ces règles devrait nécessairement passer par un accord bilatéral, ce qui suppose un accord de nos partenaires espagnols et une révision de la convention, dont la ratification prendrait plusieurs années. Je vous rappelle qu’il a fallu près de trente-cinq ans pour parvenir à l’accord consolidé de 1995 !
Par ailleurs, aucun accord fiscal temporaire n’a été conclu avec nos voisins espagnols pour prévenir les conséquences de la crise sanitaire, car ils ne l’ont pas souhaité.
C’est pourquoi, au regard de l’ensemble de ces éléments, l’extension de la zone transfrontalière que vous évoquez dans votre question, et dont la pertinence est pleinement reconnue, n’est pas envisagée à ce jour.
Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse.
Nous avons réussi, avec l’hôpital, à avancer sur de nombreux sujets, notamment sur l’agrément des médecins. Je n’y insiste pas.
Cela dit, je souhaite que ce point soit inscrit à l’ordre du jour d’un prochain sommet franco-espagnol.
Mme Nathalie Delattre remplace M. Georges Patient au fauteuil de la présidence.
La parole est à M. Georges Patient, auteur de la question n° 1539, adressée à M. le ministre de l’économie, des finances et de la relance.
Madame la ministre, je veux attirer l’attention du Gouvernement sur la sous-évaluation de la population de Guyane. Cette sous-évaluation, importante et persistante, est, par ricochet, très préjudiciable pour les ressources des collectivités quand on sait que le montant des dotations qui leur sont attribuées est fonction de leur nombre d’habitants.
On peut affirmer avec certitude que le chiffre réel de la population est nettement au-dessus des 280 000 habitants que lui attribue l’Insee : le chiffre de 350 000, voire de 400 000 habitants correspondrait plus à la réalité du territoire.
La cause en est le recensement fait par l’Insee, qui, certainement par nécessité, continue à appliquer les mêmes méthodes que dans l’Hexagone, alors que la situation de la Guyane est toute particulière et, surtout, très différente.
Effectivement, contrairement à ce qui se passe dans les communes de l’Hexagone, il y a, en Guyane, une forte croissance démographique, de nombreux quartiers d’habitat spontané, des zones forestières difficiles d’accès et à forte dangerosité, en raison de la présence de garimpeiros – les chercheurs d’or – et d’une forte immigration clandestine.
Dans ces conditions, utiliser les seules sources administratives est loin de suffire : il faudrait y ajouter les enquêtes de terrain, les données sur la consommation d’eau et d’électricité et le volume des déchets si l’on veut parvenir à une fiabilité en matière de recensement.
Pour illustrer mes propos, et à titre d’exemple, alors que la croissance annuelle moyenne sur les dix dernières années est de 2, 6 %, l’Insee n’a pas hésité à publier une croissance de la population négative pour 2020, à –0, 26 % ! C’est une première. Qui peut le croire, à part l’Insee ?
Aussi, madame la ministre, j’aimerais savoir quelles mesures le Gouvernement entend prendre pour assurer un contrôle des données de 2020, d’une part, et pour améliorer la fiabilité des données issues du recensement en Guyane, d’autre part.
Monsieur le sénateur Georges Patient, votre question m’invite à vous répondre en deux temps.
En ce qui concerne la croissance de la population guyanaise en 2020, les populations légales des communes de Guyane intègrent, depuis le début de l’année 2020, une rénovation dans la méthode de recensement des zones d’orpaillage clandestines. Cette rénovation vise à en améliorer la précision et à assurer l’égalité de traitement des communes guyanaises entre elles et avec le reste du territoire français, afin de fiabiliser les chiffres utiles pour l’édiction des dispositions réglementaires qui en découlent.
Désormais, la collecte dans ces zones fait l’objet de contrôles qualité renforcés de l’Insee. Lorsque, pour des raisons de sécurité, la collecte sur le terrain n’est pas possible, la population de ces zones est mise à jour via la préfecture de Guyane, à partir des données de l’Observatoire de l’activité minière. Ce n’était pas le cas auparavant, ce qui conduisait à une surestimation du nombre de personnes résidant dans les zones d’orpaillage.
L’évolution des populations légales des communes guyanaises entre 2019 et 2020 traduit l’ajustement opéré pour corriger cette surestimation. Elle ne doit pas être confondue avec l’évolution démographique de la population résidant sur ces territoires, qui s’est poursuivie selon la même dynamique.
En ce qui concerne le report des opérations de recensement sur le terrain en 2021 et l’actualisation des populations légales au 1er janvier 2022, l’Insee a engagé des travaux méthodologiques pour disposer d’estimations fiables, en l’absence de collecte sur le terrain.
Les premiers résultats ont fait l’objet d’une présentation devant la Commission nationale d’évaluation du recensement de la population le 13 avril dernier. La qualité des estimations de populations obtenues est pleinement satisfaisante et lève les craintes que l’actualisation des populations légales, dans le contexte d’un report de l’enquête annuelle de recensement, a pu susciter.
Madame la ministre, votre réponse ne me satisfait pas. On ne parvient pas à corriger la sous-estimation de la population que nous ressentons tous. Voilà pourquoi j’insiste pour qu’il y ait davantage d’enquêtes sur le terrain.
J’espère que l’Insee finira par prendre l’attache des exécutifs locaux et procédera à un recensement exhaustif satisfaisant tout le monde et, surtout, sécurisant les ressources des collectivités locales.
La parole est à Mme Annick Billon, auteure de la question n° 1725, adressée à M. le ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargé des comptes publics.
Madame la ministre, comme le prévoit l’article 1605 nonies du code général des impôts (CGI), une taxe sur la première cession d’un terrain rendu constructible s’applique indifféremment de la qualité du cédant, qu’il soit une personne physique ou morale.
À ce titre, une commune doit acquitter la taxe dès lors qu’elle réalise une plus-value sur la vente d’un terrain qu’elle aura rendu constructible.
Or la plus-value est calculée sur la différence entre le prix de cession et le prix d’acquisition. Ainsi, l’ensemble des travaux inhérents à la viabilisation du ou des terrains, les études d’urbanisme et autres frais engagés pour la réalisation d’un lotissement, par exemple, ne sont pas pris en compte dans le calcul de la plus-value.
L’augmentation du prix de vente du terrain, qui permettrait d’imputer indirectement la taxe afin que la commune ne réalise pas une opération déficitaire, ne constitue pas une solution de substitution pertinente pour de nombreuses communes rurales qui souhaitent développer leur territoire et qui manquent de logements pour répondre aux besoins des salariés des entreprises environnantes. Cela est d’autant plus irréaliste dans le cas de logements sociaux.
Les débats que nous avons eus hier soir sur l’urbanisme et le logement attestent des difficultés et des freins rencontrés par de nombreuses communes, lesquels s’ajoutent au désintérêt des opérateurs.
C’est pourquoi, madame la ministre, je vous demande s’il est envisageable de revoir la méthode de calcul de la taxe prévue à l’article 1605 nonies du CGI.
Madame la sénatrice Annick Billon, comme vous l’indiquez, la taxe prévue à l’article 1605 nonies du code général des impôts s’applique aux cessions de terrains nus rendus constructibles.
Les cessions de terrains nus faisant l’objet d’un lotissement sont soumises à cette taxe, qui s’applique quelle que soit la qualité du cédant – personne physique ou personne morale de droit privé ou de droit public – et sans égard pour le régime fiscal de celui-ci.
La taxe est assise sur un montant égal au prix de cession diminué du prix d’acquisition. Ce prix d’acquisition correspond au prix stipulé dans l’acte ou, à défaut, à la valeur vénale réelle à la date d’entrée dans le patrimoine du cédant.
Le prix de cession est calculé d’après les mêmes règles que celles qui sont applicables en matière d’imposition des plus-values immobilières à l’impôt sur le revenu.
Ainsi, ce prix de cession peut être réduit, sur justificatifs, du montant de la taxe sur la valeur ajoutée acquittée et de certains frais supportés par le vendeur à l’occasion de cette cession. Les frais engagés pour la cession peuvent donc être déduits, sous réserve qu’ils soient explicitement listés par le code général des impôts.
Par exemple, peuvent être déduits les frais versés à un intermédiaire ou à un mandataire, les frais liés aux certifications et diagnostics rendus obligatoires par la législation en vigueur au jour de la cession, les honoraires versés à un architecte à raison des études de travaux permettant d’obtenir un accord préalable au permis de construire ou encore les frais de mainlevée d’hypothèque.
En revanche, ce droit à déduction ne s’étend pas, comme à l’impôt sur le revenu, à des dépenses telles que les frais de viabilisation des terrains cédés, qui ne sont pas directement liés à la cession.
Par ailleurs, il convient de relativiser les inconvénients de ces règles de calcul pour les collectivités.
Tout d’abord, cette taxe ne s’applique que lorsque le rapport entre le prix de cession et le prix d’acquisition ou la valeur vénale est supérieur à 10, c’est-à-dire pour les plus-values substantielles. Ensuite, les règles de calcul de la taxe assurent que le montant dû ne soit pas trop élevé, via un abattement de 10 % par année de détention au-delà de la huitième année suivant la date à laquelle le terrain a été rendu constructible, avec des taux modérés.
Il est difficilement envisageable de modifier ces règles uniquement pour les collectivités, qui ne constituent que des redevables de la taxe parmi d’autres, au risque de créer une rupture d’égalité devant l’impôt.
En outre, autoriser la déduction des frais de viabilisation serait incohérent avec les objectifs de cette taxe, qui, je vous le rappelle, a pour effet de freiner la transformation de terres agricoles en terrains à bâtir. Son produit est ainsi affecté à un fonds qui finance des mesures en faveur de l’installation et de la transmission en agriculture.
Je vous remercie de ces réponses, madame la ministre.
Vous affirmez que ces contraintes sont prévues pour limiter la consommation de terres agricoles. Or cette dernière est d’ores et déjà limitée dans les documents d’urbanisme, plans locaux d’urbanisme (PLU) et schémas de cohérence territoriale (SCoT).
Comme je l’ai dit, il existe des dérogations, mais celles-ci sont bien souvent inapplicables aux communes qui souhaitent les faire valoir.
Bien entendu, nous ne demandons pas que les communes puissent se soustraire au paiement de l’impôt. Nous demandons simplement qu’elles aient la possibilité de développer du logement, notamment social.
Je pense à certaines communes de Vendée, comme Les Brouzils ou encore Pouzauges, laquelle compte énormément d’entreprises, notamment d’entreprises de taille intermédiaire (ETI), et un certain nombre de salariés qui ne trouvent pas de logement.
Les communes ont besoin de produire du logement et de viabiliser les terrains. Elles n’en ont pas les moyens, ces travaux représentant un coût substantiel.
M. Georges Patient remplace Mme Nathalie Delattre au fauteuil de la présidence.
La parole est à M. Didier Marie, auteur de la question n° 1753, adressée à M. le ministre de l’économie, des finances et de la relance.
Madame la ministre, en juin 2020, la papeterie normande Chapelle Darblay, unique entreprise à fabriquer du papier 100 % recyclé en France, fermait, malgré sa rentabilité, en raison, selon son propriétaire finlandais UPM, d’un manque de compétitivité et du déclin structurel du papier journal.
Cette usine, fleuron de l’économie circulaire en activité depuis près d’un siècle, pouvait absorber jusqu’à 480 000 tonnes de papier à recycler par an, soit le résultat du tri de 24 millions d’habitants. Dans l’espoir d’une reprise, elle n’a pas été démantelée. Depuis sa fermeture, ses machines et sa chaudière biomasse sont dormantes, mais restent utilisables.
Les repreneurs avaient jusqu’au 30 juin 2021 pour se signaler. Or, le 2 juillet, le propriétaire de l’usine a présenté, dans le cadre d’un comité social et économique exceptionnel, une offre de rachat pour le moins étonnante, puisqu’il s’agit d’une transformation du site en une unité de production d’hydrogène.
Cette offre, issue d’un acteur qui se positionne partout en France, reprendrait seulement partiellement les pièces des machines du site. Elle n’implique ni fret maritime ni fret fluvial et prévoit seulement 70 emplois – pour rappel, ce sont 230 personnes qui ont été licenciées en juin 2020, lors de la fermeture du site.
Référence en matière de transition écologique, Chapelle Darblay représente un important savoir-faire en matière de recyclage, secteur dont l’avenir ne fait aucun doute.
Dans une lettre d’intention, Veolia, géant du traitement de l’eau et des déchets, a présenté, avec deux partenaires, un projet de reprise sérieux et cohérent, qui permettrait de prolonger son activité papetière. Ce groupe a besoin de trois mois pour finaliser ce projet et le transformer en offre concrète. Je me réjouis, dans ce contexte, que, grâce à la mobilisation des salariés de l’usine, la décision finale ait été retardée au mois de septembre prochain.
Compte tenu de l’intérêt de ce projet, qui préserve les compétences de Chapelle Darblay, et de l’engagement pris par le Gouvernement en matière de transition écologique, je vous demande, madame la ministre, de bien vouloir intervenir auprès du propriétaire de ce site pour en assurer la sauvegarde à tous points de vue et de m’indiquer les mesures que le Gouvernement compte prendre en ce sens.
Monsieur le sénateur Didier Marie, je vous remercie de votre question, qui me permet de rappeler l’engagement, sur ce dossier, de la ministre chargée de l’industrie, Agnès Pannier-Runacher. Celle-ci travaille activement à la reconversion du site emblématique de Chapelle Darblay, en instance de cession par son propriétaire, le groupe finlandais UPM.
Je ne vous apprends rien : ce site a dû fermer il y a un an faute de repreneur, dans un contexte sanitaire défavorable. Le Gouvernement a œuvré pour favoriser une reprise, aux côtés des représentants du personnel, dont nous saluons l’implication décisive. L’État a engagé une troisième prospection internationale au début du mois de septembre 2020, via Business France, aux côtés de la région Normandie.
En parallèle, ma collègue a confié une mission au Conseil général de l’économie pour déterminer des pistes de reconversion durable pour Chapelle Darblay.
Le marché du papier journal étant en forte décroissance, la pérennité de l’emploi et de l’activité industrielle exigeait de nouvelles perspectives.
De plus, des pistes de valorisation des actifs présents sur le site, en particulier de la chaudière de biomasse et de la station d’épuration, ont été recherchées. Le Gouvernement et les services de l’État sont en contact direct avec plusieurs acteurs industriels.
Enfin, la convention de revitalisation conclue entre l’État et UPM prévoit le versement de 500 000 euros par UPM, attribués au projet de reprise du site.
Comme vous le savez également, à quelques kilomètres de Chapelle Darblay, une autre papeterie produisant du papier d’impression et comptant 180 emplois, Alizay, se trouvait en grande difficulté.
Nous avons pu garantir la reprise de ces deux sites papetiers normands. Pour chacun d’eux, nous avons une solution d’avenir.
Alizay est reprise par le cartonnier VPK et deviendra un grand pôle de recyclage, avec la production de papier carton pour emballage et la construction d’une usine de recyclage de papiers. Ces productions bénéficieront de l’énergie verte produite par une chaudière biomasse.
À Chapelle Darblay, l’offre de reprise que vous avez mentionnée est portée par deux groupes, Samfi et Paprec, dont les activités sont complémentaires. Alors que 70 emplois seront créés à court terme par l’entreprise Paprec, spécialiste du recyclage et de la valorisation des déchets, 140 emplois supplémentaires seront créés par le groupe Samfi et sa filiale H2V, pour la production d’hydrogène. Nous parlons donc de 210 emplois au total.
Quant à l’entreprise Veolia, présente dans la procédure depuis plus d’un an, elle n’a pas souhaité déposer d’offre ferme pour la reprise de Chapelle Darblay. La lettre d’intention transmise à quelques jours de la fin de la procédure n’a pas suffi à assurer un caractère sérieux.
Nos objectifs sont néanmoins remplis : la filière du recyclage en Normandie, l’activité industrielle à Chapelle Darblay et Alizay et 400 emplois seront maintenus et assurés.
Je vous remercie, madame la ministre, mais votre réponse ne me satisfait pas.
Le groupe Veolia, associé à deux autres entreprises, a rédigé une lettre d’intention qui ne l’engage pas juridiquement, mais a demandé trois mois de plus pour finaliser sa proposition.
Le préfet a indiqué que le dépôt de projet était reporté au mois de septembre prochain, ce qui nous convient. Nous souhaitons que le Gouvernement s’engage fortement en faveur d’une reprise par Veolia, en accompagnant ce projet dans tous les domaines qui puissent le faire aboutir.
La parole est à M. Joël Labbé, auteur de la question n° 1704, adressée à M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation.
Madame la ministre, ma question concerne les pesticides.
La protection des riverains face aux épandages des pesticides est un enjeu de santé publique majeur.
Dans son dernier rapport, publié à la fin du mois de juin dernier, l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) rappelle et alimente ce triste constat : l’exposition aux pesticides a bien un effet sur la santé – en premier lieu, sur celle des utilisateurs, mais aussi sur celle des riverains.
Malgré les vifs débats suscités par la loi du 30 octobre 2018 pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous – la loi Égalim –, malgré une injonction du Conseil d’État de 2019 à revoir la réglementation sur les pesticides, la réponse apportée est toujours plus que décevante. Elle consiste, en effet, à la mise en place de chartes départementales, supposées définir des règles de « bon voisinage », mais dont la fonction essentielle, sur le terrain, est de permettre de déroger aux distances d’épandage fixées par les textes, pourtant très réduites.
Sources majeures de tension à l’échelon local, ces chartes ont été attaquées et, en mars dernier, le Conseil constitutionnel les a jugées non conformes, estimant que la procédure de participation prévue pour leur élaboration ne respectait pas la Charte de l’environnement.
Pas plus tard qu’hier, dans le cadre d’un nouveau recours, le rapporteur public, présentant ses conclusions, appelait le Conseil d’État à annuler les textes encadrant l’épandage des pesticides, en demandant notamment l’information du public avant tout épandage, une distance de 20 mètres sans pulvérisation pour les pesticides CMR 2 – substances cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction de catégorie 2 – et une protection pour les travailleurs à proximité des zones d’épandage.
Le Gouvernement vient pourtant – au cœur du mois de juillet – d’inviter les préfets à mettre en consultation de nouvelles chartes, sans attendre la décision du Conseil d’État, prévue d’ici à quelques semaines.
Ce passage en force est, pour nous, inacceptable. Aussi, le Gouvernement prévoit-il de sortir de l’inaction sur ce sujet et de mettre en place de nouveaux textes qui soient réellement protecteurs ?
Monsieur le sénateur Joël Labbé, comme vous le rappelez, dans la décision n° 2021-891 QPC qu’il a rendue le 19 mars dernier à la suite d’une question prioritaire de constitutionnalité, le Conseil constitutionnel a déclaré inconstitutionnelles les dispositions relatives à la mise en consultation des chartes d’engagements prévues par le code rural. Plus précisément, le Conseil constitutionnel a relevé que la procédure particulière de concertation introduite dans le code rural par la loi Égalim du 30 octobre 2018 ne répondait pas aux exigences imposées par l’article 7 de la Charte de l’environnement, laquelle figure en préambule de notre Constitution.
En conséquence, les chartes qui n’ont pas été mises en consultation conformément aux dispositions du code de l’environnement doivent faire l’objet d’une consultation adaptée, donc de nouvelles discussions.
Il me semble important de préciser que cette décision ne remet pas en cause les chartes, qui ont pour objet de formaliser les engagements des acteurs sur un territoire. C’est la manière dont elles ont été concertées, avec les parties prenantes, qui n’est pas conforme aux attendus du droit.
Il convient également de rappeler que l’adaptation des distances de sécurité repose sur une série de mesures apportant des garanties en matière d’exposition des résidents par rapport aux conditions normales d’application des produits.
Le Gouvernement a pris acte de la décision du Conseil constitutionnel et s’est rapidement mis en capacité de se conformer à cette décision. Un recensement des modalités précises de mise en consultation publique des chartes a ainsi été effectué.
Monsieur le sénateur, je vous confirme l’ambition du Gouvernement de préserver la démarche vertueuse que constituent les chartes élaborées dans les départements. Celles-ci favorisent le dialogue entre les parties prenantes, dans l’intérêt de tous.
Madame la ministre, la réponse du ministre de l’agriculture et de l’alimentation ne me satisfait pas vraiment.
Nous parlons, en effet, de pesticides cancérogènes, mutagènes et toxiques pour la reproduction.
Le ministre met en avant le label Haute Valeur environnementale (HVE), mais ce dernier permet de poursuivre l’utilisation de ces substances, particulièrement toxiques.
On se rend compte que le Gouvernement aide à ce que l’on appelle « la modernisation de l’agriculture », en baissant les aides à l’agriculture qui n’utilisent pas ces produits.
Nous espérons que les choses évolueront dans le bon sens !
La parole est à M. Bernard Delcros, auteur de la question n° 1421, adressée à M. le ministre des solidarités et de la santé.
Madame la ministre, au début de l’année 2018, j’avais questionné Mme la ministre des solidarités et de la santé de l’époque sur la demande d’installation d’une pharmacie faite par la commune de Vézac, dans le Cantal.
Ce petit bourg a su mettre en œuvre, avec efficacité, une politique de développement qui porte ses fruits et il veut compléter son offre de services en créant un pôle santé. Il a déjà réussi à installer un cabinet d’infirmiers, de kinésithérapeutes et des discussions sont en cours en vue de l’installation d’un médecin.
Mais, alors qu’un pharmacien est prêt à rejoindre ce pôle santé, l’autorisation d’ouverture d’une officine lui a été refusée.
Dans sa réponse à ma question, la ministre avait ouvert une perspective d’assouplissement des critères, au travers de l’ordonnance du 3 janvier 2018. Depuis, le maire a sollicité le directeur général de l’agence régionale de santé (ARS), que j’ai moi-même saisie. Dans sa réponse, cette dernière motive son refus par la non-parution du décret d’application de l’ordonnance.
Comment peut-on empêcher des professionnels de santé de s’installer dans des territoires ruraux, alors même que ces territoires doivent relever le défi de leur attractivité et d’une offre de soins qui s’est considérablement dégradée ?
Madame la ministre, je vous poserai donc deux questions.
Pouvez-vous me dire quand paraîtra le décret d’application de l’ordonnance de janvier 2018, que nous attendons depuis trois ans ?
Le Gouvernement est-il prêt à réviser les critères de façon à répondre à la réalité des besoins des populations du secteur rural – dans le cas présent, en autorisant l’implantation d’une pharmacie dans la commune de Vézac ?
Monsieur le sénateur Bernard Delcros, je vous remercie de votre question. Je partage votre préoccupation : venant d’un territoire très rural, je suis moi aussi confrontée à ce genre de difficultés.
La France est plurielle. Elle fait d’ailleurs une richesse de la diversité de ses territoires. Mais il nous faut prendre en compte cette diversité pour adapter les politiques publiques en conséquence et répondre à l’aspiration légitime de nos concitoyens à l’égalité dans l’accès aux soins et aux traitements.
Le décret relatif aux territoires fragiles doit permettre aux agences régionales de santé, selon une méthodologie définie, d’identifier les territoires pour lesquels l’accès au médicament n’est pas assuré de manière satisfaisante.
Ainsi, les transferts d’officines dans ces territoires seront facilités et pourront se traduire par une installation, à proximité, par exemple, d’une maison de santé pluriprofessionnelle ou d’un centre commercial, sans être contraints par un seuil de population résidente.
Des transferts d’officines pourront être autorisés vers un ensemble de communes contiguës listées par arrêté de l’ARS, dès lors que ces communes sont dépourvues d’officine, que l’une d’elles comprend au moins 2 000 habitants et que l’ensemble atteint le seuil de population global requis.
Ce choix d’un seuil de 2 000 habitants pour au moins l’une des communes a pour objectif d’assurer une offre pharmaceutique qui, d’une part, réponde aux besoins d’une population, et, d’autre part, garantisse les conditions de survie économique de l’officine sur ce territoire.
D’ores et déjà, une première version de la méthodologie de zonage a été partagée et testée auprès de quatre ARS.
La méthodologie nationale envisagée tient compte du rapport IGAS-IGF de 2016, confirmé par un rapport de la Cour des comptes, qui ont constaté un maillage officinal satisfaisant, avec 97 % de la population vivant à moins de dix minutes en voiture d’une officine et 99, 5 % à moins de quinze minutes.
Ce constat partagé avec la profession nécessite de bien mesurer le choix de la maille, si vous me permettez l’expression, et des indicateurs consacrés.
Le projet de décret relatif aux territoires fragiles vise ainsi à permettre aux ARS d’identifier, à partir de critères précis, les territoires pour lesquels l’accès à une pharmacie pour la population ne serait pas satisfaisant.
L’évolution de la situation sanitaire devrait permettre de finaliser ces travaux réglementaires dans le courant de l’année 2022 avec l’ensemble des acteurs mobilisés.
Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse, mais la réalité nous impose de déroger à la règle des 2 000 habitants.
Cette règle n’est pas la bonne, ainsi que je vais le démontrer rapidement.
Mon département compte aujourd’hui 25 pharmacies installées dans de petits bourgs ruraux et apportant une offre de services à un bassin de vie composé de 10 à 15 communes rurales autour de ce bourg-centre. Ces pharmacies sont installées dans des communes de moins de 2 000 habitants, voire, pour certaines d’entre elles, de moins de 1 000 habitants. Elles ont fait la démonstration de leur utilité et de leur viabilité économique.
Avec les critères en vigueur aujourd’hui, ces pharmacies seraient interdites d’installation. C’est bien la meilleure preuve qu’il faut revoir les conditions d’installation des pharmacies en milieu rural !
Je compte vraiment sur le Gouvernement pour tenir compte de cette réalité.
Sachez que le maire et les élus de la commune de Vézac attendent avec impatience de pouvoir déroger à la règle des 2 000 habitants.
La parole est à Mme Céline Brulin, auteure de la question n° 1660, adressée à M. le ministre des solidarités et de la santé.
Madame la ministre, la fin du numerus clausus devait permettre de former plus de médecins.
Mais la mise en œuvre chaotique de la réforme des études de santé, l’insuffisance de places pour accueillir à la fois les redoublants de l’ancien système et les nouveaux entrants conduisent à une tout autre réalité.
C’est en premier lieu insupportable pour les jeunes qui s’engagent dans des études de santé et voient leur parcours semé de tant d’embûches. Ils ont passé leurs examens dans le flou et l’incertitude, sans connaître le nombre de places ouvertes en deuxième année, sans savoir s’ils pourront continuer leur parcours ni où et comment.
C’est en second lieu quand tant de nos territoires manquent de médecins et de professionnels de santé.
L’université de Rouen voit ainsi le nombre de places en deuxième année de médecine augmenter de 6 % seulement – 9 % si l’on prend l’ensemble des filières médecine, maïeutique, odontologie, pharmacie. On est loin des 14 % d’augmentation annoncés par le Gouvernement et encore plus de certaines universités parisiennes, alors que la Normandie est l’une des régions les plus déficitaires en médecins.
Le Conseil d’État vient d’enjoindre à quinze universités, dont celles de Rouen et de Caen, d’augmenter de 20 % leurs capacités d’accueil. Pour ce faire, il leur faut impérativement des postes de chefs de clinique, par exemple, mais aussi de quoi réaliser des investissements.
La faculté de médecine de Rouen a augmenté ses capacités d’accueil de plus de 220 % depuis le début des années 2000, à moyens constants. Pour accueillir davantage d’étudiants, il lui faut plus de moyens.
Madame la ministre, que compte faire le Gouvernement, sachant que le projet de loi de finances rectificative que nous venons d’examiner ne comprenait aucun crédit supplémentaire en faveur des études de santé ?
Madame la sénatrice Céline Brulin, vous l’avez rappelé vous-même, le Gouvernement a agi sans tarder en supprimant le numerus clausus, qui grevait le nombre de professionnels de santé formés année après année. La question du nombre et de la répartition des professionnels de santé sur le territoire est donc une préoccupation majeure du Gouvernement.
Pour l’année 2021, 16 750 places sont offertes pour accéder à la deuxième année des études médicales, soit une augmentation sans précédent, au niveau national, de 12 % par rapport à l’année dernière. Cette augmentation s’inscrit dans la trajectoire prospective proposée par la conférence nationale du 26 mars 2021 en remplacement du numerus clausus, au travers des objectifs nationaux pluriannuels de professionnels de santé à former.
Cette conférence, qui réunit l’ensemble des acteurs de la santé et les représentants d’élus locaux, a proposé de former 81 055 professionnels de santé, toutes filières médicales confondues, pour la période 2021–2025, soit une augmentation de plus de 14 % des effectifs sur cinq ans qui sera arrêtée par le Gouvernement. Pour la région Normandie, ce seront plus de 4 140 professionnels de santé qui seront ainsi formés.
C’est un véritable changement de paradigme dans la régulation de la démographie médicale, désormais définie au plus près des territoires. Le choix s’opère sur la base d’un large éventail d’indicateurs. Leur planification pluriannuelle visera à mieux répondre aux besoins de santé identifiés à l’échelon de chaque région, tout en tenant compte des capacités de formation des universités et des centres hospitaliers universitaires.
Cette augmentation ne se décrète pas simplement : nous devons accompagner la transformation des capacités d’accueil et de formation hospitalière pour donner corps à notre ambition. Cela ne peut se faire, vous en conviendrez, qu’en maintenant la qualité de ces formations, qui nécessitent un haut niveau d’exigence.
Par ailleurs, en plus du pilotage territorial, nous maintiendrons des objectifs nationaux pour disposer d’une capacité de suivi quantitatif.
Notre action en matière de régulation s’apprécie également à travers l’ouverture des postes d’internat. Depuis 2017, nous opérons un rééquilibrage territorial en augmentant chaque année le nombre de postes offerts dans les régions les moins bien dotées en médecins, tout en stabilisant les effectifs dans les régions les mieux dotées.
Madame la ministre, nous connaissons tous ces chiffres, que l’on nous répète à l’envi.
Votre région étant particulièrement concernée, vous savez, comme moi, que certains services d’urgences, par exemple, vont devoir fermer cet été ou ne pas respecter leur amplitude habituelle. De même, des praticiens, des médecins de ville ne vont pas pouvoir être remplacés durant leurs congés… Il y a donc une urgence absolue à former davantage de médecins.
Certes, les capacités d’accueil ne se décrètent pas, mais le Gouvernement n’y consacre pas suffisamment de moyens. Je rappelle que le Conseil d’État a demandé à une quinzaine d’universités d’accroître ces capacités de 20 % dès la prochaine rentrée. Il faut donc débloquer des moyens en urgence.
La parole est à M. Bernard Fournier, auteur de la question n° 1675, adressée à M. le ministre des solidarités et de la santé.
Madame la ministre, je souhaite attirer votre attention et celle du Gouvernement sur les difficultés de constatation d’un décès en zone rurale.
En zone rurale, faire constater un décès par un médecin devient un exercice de plus en plus difficile, en particulier le week-end et les jours fériés, où le manque de médecins disponibles est encore plus flagrant.
Le 15 avril dernier, le maire de la commune de Les Salles, dans mon département, M. Jean-Hervé Peurière, a vécu cette expérience très difficile et désagréable. Entouré de pompiers et de gendarmes, après avoir contacté, pendant plusieurs heures, cinq cabinets médicaux, le médecin du SMUR (structure mobile d’urgence et de réanimation), le bureau du procureur, sans aucun résultat, il a dû appeler son médecin personnel pour faire constater le décès d’une personne de 81 ans.
Face à cette situation, les maires sont en première ligne et sont régulièrement interpellés par leurs administrés. Ils se retrouvent seuls, souvent démunis, confrontés à des situations humaines extrêmement douloureuses et compliquées à gérer. La seule solution possible est actuellement de procéder à une réquisition administrative, procédure exceptionnelle et lourde pour un élu local.
Cette responsabilité pesante pour les maires n’est satisfaisante ni humainement ni juridiquement. De plus en plus d’élus souhaitent l’évolution des modalités de constatation d’un décès en cas d’absence d’un médecin disponible sur un territoire, et ce dans des délais raisonnables. Certains proposent de faire exceptionnellement appel aux pompiers ou aux infirmiers. Ce serait aussi une avancée considérable pour les familles, qui, dans ce moment de deuil, ne comprennent pas ces carences.
Ainsi, madame la ministre, je souhaite connaître les mesures que le Gouvernement envisage d’adopter pour répondre aux préoccupations des élus et à la souffrance des familles.
Monsieur le sénateur Bernard Fournier, pour venir d’un territoire rural, je mesure toute la difficulté qu’une telle situation peut représenter et ajouter à la douleur des familles éprouvées par le deuil. De même, je connais la volonté d’engagement de nos édiles, déjà très investis au quotidien.
Le ministère a procédé à une modification du code général des collectivités territoriales, afin d’étendre à d’autres professionnels pleinement compétents la possibilité d’établir un certificat de décès – médecins retraités, étudiants de troisième cycle ayant validé deux semestres au titre de la spécialité qu’ils poursuivent, praticiens à diplôme étranger hors Union européenne, à compter de la deuxième année de leur parcours de consolidation.
Cette extension permet de répondre à un double enjeu : celui d’une diversification des personnes susceptibles d’être présentes sur le territoire tout en respectant le caractère médical d’un certificat de décès. L’établissement de ce certificat suppose en effet un diagnostic sur les causes de décès après examen du corps du défunt. Ce diagnostic est d’autant plus important qu’il est utilisé pour la veille sanitaire.
Les données figurant sur les certificats de décès sont utilisées pour établir les statistiques de décès et servent à identifier des alertes de santé publique de nature à appeler des mesures de la part des autorités sanitaires nationales ou régionales.
Il emporte également des conséquences sur les opérations funéraires dans la mesure où un obstacle médico-légal peut venir les retarder. Les médecins sont formés à évaluer la présence ou non d’un obstacle médico-légal, ce qui n’est pas le cas des pompiers ou des infirmiers.
Pour l’ensemble de ces raisons, une évolution nouvelle des catégories de professionnels susceptibles d’établir un certificat de décès n’est pas actuellement envisagée. Cependant, le ministère des solidarités et de la santé est à l’écoute de toutes les propositions constructives que vous pourriez formuler.
Madame la ministre, je vous remercie et de votre réponse et de votre écoute.
Toutefois, la modification du code général des collectivités territoriales que vous avez évoquée me semble encore insuffisante. Il faudra poursuivre la recherche de solutions innovantes.
La parole est à Mme Kristina Pluchet, auteure de la question n° 1735, transmise à M. le ministre des solidarités et de la santé.
Madame la ministre, voilà presque un an que le masque est obligatoire à l’école primaire en France métropolitaine. Cette décision reposait sur une hypothèse sanitaire, qui n’a pas donné lieu à réévaluation.
Depuis, de nombreuses études sont parues sur le sujet. Les enfants d’âge primaire participent très faiblement à la circulation du virus. Les clusters sont surtout familiaux et non scolaires, comme l’ont confirmé les campagnes de tests. Sans compter les difficultés de port du masque à cet âge.
A-t-on pris en compte ces éléments ? Les professionnels de l’enfance alertent et s’interrogent. Une étude allemande du 30 juin dernier a mis en évidence des taux de CO2 expiré après port du masque de cinq à six fois supérieurs à la normale. Quel impact sur le cerveau en construction de nos enfants ?
Pédiatres, psychologues, pédopsychiatres, ORL, ophtalmologistes relatent divers troubles de la croissance et pathologies dus au port quotidien du masque par un enfant en développement.
Enfin, le masque met en difficulté les élèves les plus fragiles, inhibe les interactions entre enfants et est pourvoyeur de retards d’apprentissage pour la lecture et l’écriture. Voix forcée, baisse de l’écoute et de l’intelligibilité, altération de la conscience phonologique, somnolence sont le quotidien de nos enfants. Tout cela a-t-il fait l’objet d’une étude d’impact pluridisciplinaire ?
Compte tenu des enjeux de développement de toute une génération, les sociétés savantes de pédiatrie ont appelé, le 17 juin dernier, à une fin d’année à visage découvert sans être entendues, alors même que nos voisins belges et anglais, à circulation virale plus intense, ont statué – avec réactivité – sur la suppression du masque pour les enfants à l’école primaire dès le printemps.
Ne pourrait-on imaginer une politique de bon sens, qui ajuste le port du masque en fonction de la saisonnalité du virus ? En outre, en cas de pic épidémique, des campagnes de dépistage salivaire territorialisées permettraient de limiter le masque aux seules classes touchées.
La covid et tous ses variants ne sont pas des maladies pédiatriques. Les adultes doivent protéger les enfants et non faire peser sur ces derniers le soin de leur protection, et ce d’autant moins que nous disposons maintenant de différents moyens de lutter contre le virus.
Madame la ministre, quelle sera la politique du Gouvernement en matière de port du masque à l’école primaire pour la rentrée prochaine ? J’espère votre réponse courageuse ; elle est attendue par des millions de Français.
Madame la sénatrice Kristina Pluchet, depuis septembre 2020, les élèves ont été accueillis au sein des écoles maternelles et élémentaires dans le respect du protocole sanitaire élaboré sur la base des avis du Haut Conseil de la santé publique.
Depuis le début de la crise sanitaire, notre ligne de conduite vise non seulement à protéger, mais aussi à permettre le plus possible la scolarisation des élèves, en particulier des plus jeunes.
Pour tâcher de concilier ces impératifs, une foire aux questions a été établie pour adapter la mise en œuvre du protocole sanitaire dans chaque territoire, en fonction de la configuration des établissements et de la situation sanitaire locale.
Ce choix de garder les classes ouvertes, dans la mesure du possible, selon l’intensité de circulation du virus, et la mobilisation de tous les acteurs ont permis à l’ensemble des élèves du primaire de bénéficier des enseignements en présentiel. La continuité a permis d’atténuer l’impact des confinements et restrictions depuis le début de la crise. Le ministre de l’éducation nationale nous confirme que les résultats des évaluations nationales mi-CP et CE1 témoignent de l’effet positif de cette décision.
Face à la circulation du virus et à l’apparition de différents variants plus contagieux, tous les moyens ont été mobilisés : réalisation de tests salivaires, respect des distanciations sociales, port du masque en classe. Le risque avéré de transmission du virus entre les enfants demeure, particulièrement dans les écoles, qui sont des lieux clos et des zones de brassage de la population.
Tant la Société française de pédiatrie, en accord avec les recommandations de l’OMS, que le Haut Conseil de la santé publique se sont prononcés en faveur du port du masque pour les enfants de plus de 6 ans.
Dans son avis du 29 octobre 2020, le Haut Conseil a souligné qu’il n’existe pas de contre-indications dermatologiques, pneumologiques, ORL, phoniatriques ou psychiatriques au port du masque.
Pour autant, l’obligation du port du masque dans les établissements scolaires n’est pas absolue. Les élèves de l’école maternelle, en plein apprentissage du langage, n’en portent pas, et des masques inclusifs ont été mis à disposition de leurs enseignants. Un décret prévoit également des exceptions sur avis médical, notamment pour les enfants en situation de handicap.
Par ailleurs, lors de la prise des repas, de la pratique d’une activité sportive, le port du masque n’est pas obligatoire. Dans ces situations, une attention particulière est portée à la limitation du brassage.
À ce jour, le développement rapide du variant delta ne nous permet pas d’apprécier précisément la situation de la rentrée scolaire prochaine. Le protocole sanitaire au sein des écoles sera adapté en fonction de la situation que nous connaîtrons.
Plusieurs scénarios pédagogiques sont d’ores et déjà élaborés afin d’organiser la rentrée des élèves de la façon la plus sereine possible.
De nouveau, notre priorité est double, et je pense que vous en partagerez les objectifs : allier sécurité sanitaire et ouverture des écoles. Jusqu’ici, le pari est tenu, notre pays ayant maintenu ses classes plus ouvertes que nombre de nos voisins.
Les variants, madame la ministre, il y en aura encore beaucoup d’autres.
La vaccination avance pour les populations à risque, dont les enfants ne font pas partie. Pouvons-nous laisser encore des années ces enfants muselés et sous-oxygénés huit heures par jour, alors que les professionnels nous alertent sur des répercussions inquiétantes ?
La parole est à Mme Évelyne Renaud-Garabedian, auteur de la question n° 1742, transmise à M. le ministre de l’Europe et des affaires étrangères.
Madame la ministre, un plan de vaccination pour les Français de l’étranger avait été annoncé en janvier 2021. Il comportait une classification des pays en trois catégories, selon qu’ils recevaient ou non le vaccin. Qu’en est-il de cette liste ?
Le ministère des affaires étrangères ne nous l’a toujours pas transmise. Or nous en avons besoin pour comprendre l’action du Gouvernement. Des doses ont été envoyées dans certains pays, mais sans cohérence apparente.
Ainsi, certains pays ont reçu des doses de Johnson & Johnson – vaccin réservé aux plus de 55 ans –, alors même qu’ils avaient commencé leur campagne vaccinale avec un vaccin homologué. Que faire des doses qui restent ? Envisagez-vous d’en envoyer de nouvelles ?
À l’inverse, la France n’a envoyé aucune dose dans des pays où aucun vaccin homologué n’est disponible, comme en Argentine, par exemple, qui utilise Spoutnik V et Sinopharm. Quels sont les critères retenus pour l’envoi des vaccins ?
Interrogée à ce sujet, vous avez expliqué devoir attendre les autorisations d’importation des pays concernés. Aujourd’hui, de nombreux pays, comme la Tunisie, acceptent l’importation. Il ne doit plus y avoir de retard.
La France, dans le cadre du programme Covax, a envoyé des vaccins en Afrique et en Asie – je pense notamment à la Côte d’Ivoire, au Togo, à l’île Maurice – avec recommandation aux Français de se faire vacciner. Or il s’agissait de vaccins AstraZeneca manufacturés en Inde, non homologués par l’Union européenne. Les Français de l’étranger, qui n’ont pas été prévenus, se sentent bien évidemment trompés.
Et quid des difficultés rencontrées par les Français de l’étranger, qui rentrent en France pour se faire vacciner sans carte vitale active, avec des tests qu’on leur fait toujours payer ? Ou de ceux, effectivement vaccinés avec un vaccin homologué en France et en Europe, qui ne peuvent obtenir de QR code, alors que le passe sanitaire va devenir vital et indispensable à la suite des annonces du Président de la République, hier soir ?
Madame la ministre, compte tenu de l’introduction des motifs impérieux, pouvez-vous nous indiquer si les Français de l’étranger vont être abandonnés ? Comment faire pour les rassurer ?
Madame la sénatrice Évelyne Renaud-Garabedian, nous partageons une volonté commune d’une vaccination collective, massive. Dès lors, nous pouvons faire l’économie de procès d’intention. Les ministres Le Drian et Lemoyne, qui m’ont demandé de vous répondre, sont particulièrement investis sur le déploiement de notre stratégie vaccinale.
Je voudrais rappeler tous les efforts que la France déploie depuis le début de la crise pour que la vaccination soit accessible à tous et dans tous les pays – en somme, pour faire de ce vaccin un bien public mondial.
La solidarité vaccinale, dont la facilité Covax est la meilleure incarnation, est un impératif moral, mais aussi la seule façon de mettre fin, ensemble, à la pandémie.
Par ailleurs, et c’est un principe intangible, la France est aux côtés de ses citoyens, où qu’ils soient dans le monde. Elle est le seul pays à avoir lancé la vaccination de ses communautés à l’étranger, là où n’existe pas de solution locale de vaccination avec des vaccins reconnus par l’Agence européenne des médicaments. En comparaison, certains de nos partenaires européens et internationaux ont des plans de vaccination, certes, mais uniquement pour leurs agents publics expatriés.
Dès le mois de décembre dernier, nous avons lancé des travaux en ce sens, avant même que la vaccination ne démarre sur le territoire national. Les premières doses ont été envoyées début mai, en Inde et à Madagascar. Deux mois plus tard, des doses ont été envoyées dans plus de cinquante pays et des envois supplémentaires sont étudiés pour de nombreux autres pays.
Jusqu’ici, cette vaccination a été organisée en s’appuyant sur les ressources propres des ambassades et des consulats généraux, avec l’appui de structures sanitaires locales partenaires. Comme vous le savez, il s’agit d’opérations logistiquement lourdes et complexes, qui supposent l’accord des pays dans lesquels elles sont réalisées. Les autorisations ne sont parfois pas encore données et nous travaillons activement avec ces pays pour résoudre les freins dans les meilleurs délais.
Par ailleurs, conjointement avec le ministère de l’Europe et des affaires étrangères, nous allons amplifier nos efforts dans les semaines à venir, en lien avec l’élargissement de la politique vaccinale nationale. L’avis de la Haute Autorité de santé du 9 juillet dernier sur la vaccination des Français de l’étranger avec le vaccin Janssen nous invite à nous inscrire à la fois dans une géographie plus vaste et dans une autre temporalité.
En outre, lors de leur passage en France, par exemple pour leurs congés, cet été, nos compatriotes de l’étranger peuvent tous se faire vacciner gratuitement. Je rappelle que les délais d’injection entre deux doses ont été réduits au plus court, à savoir 21 jours, ce qui permet un recours le plus vaste possible à cette opportunité pour nos concitoyens résidant le reste de l’année à l’étranger.
Ceux de nos compatriotes qui reviennent d’un pays en liste rouge et qui seraient soumis à une quarantaine administrative, et non à un isolement, peuvent sortir quelques heures par jour pour des raisons essentielles, dont la vaccination – je vous invite, madame la sénatrice, à le rappeler à nos concitoyens concernés.
Enfin, seuls les vaccins homologués…
… par l’Agence européenne des médicaments sont reconnus. Notre unique préoccupation est l’efficacité vaccinale et la protection de nos concitoyens.
La parole est à Mme Dominique Vérien, auteure de la question n° 1682, transmise à Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.
Monsieur le secrétaire d’État, je souhaitais vous alerter sur les difficultés rencontrées par les élus locaux dans l’interprétation et l’application de leur avis d’arrêt de travail pour congé maladie.
De nombreux élus, de bonne foi, convaincus de pouvoir continuer à exercer leur mandat, se voient réclamer a posteriori le remboursement intégral des indemnités perçues au titre de leur travail salarié pour seulement quelques heures passées à exercer un mandat local – et, comme vous le savez, pour une indemnité de quelques euros seulement…
En effet, très peu d’élus savent qu’ils doivent préalablement solliciter auprès de leur médecin une autorisation spécifique d’exercer une fonction élective pendant le congé maladie. Il est d’ailleurs important de noter que les praticiens eux-mêmes ne sont bien souvent pas au courant de cette subtilité, contrairement à ce que prétend la Caisse nationale de l’assurance maladie (CNAM).
Il n’est pas acceptable que ces élus, qui ne comptent pas leurs heures au service de leurs concitoyens, soient sanctionnés de la sorte, d’autant que les voies de recours sont limitées.
Une autorisation du médecin a posteriori n’est pas recevable et le droit à l’erreur n’est pas non plus applicable, dans la mesure où ce serait le médecin, et non l’élu, qui aurait commis l’erreur en remplissant incorrectement le formulaire… À moins que ce ne soit l’élu qui commette une erreur en oubliant d’indiquer sa qualité, ce que ne reconnaît pas la caisse primaire d’assurance maladie (CPAM).
Cette situation n’est pas nouvelle: le ministère de la santé et la Caisse nationale de l’assurance maladie ont été maintes fois alertés par le passé, notamment par mes soins.
L’année dernière, le Gouvernement avait reconnu un défaut d’information des élus et des médecins. La CNAM avait annoncé une campagne de communication à destination des praticiens, ainsi qu’une évolution de la rédaction du formulaire Cerfa d’avis d’arrêt de travail, avec l’apparition distincte d’une mention autorisant l’activité de l’élu local, à l’instar des dispositions existantes en matière d’horaires de sortie.
Malheureusement, force est de constater que la situation n’a pas changé. Les exemples récents d’élus qui se heurtent à l’inflexibilité de l’administration sont encore trop nombreux. Il paraît donc urgent de concrétiser les engagements pris.
Madame la sénatrice Dominique Vérien, je connais les difficultés que rencontrent parfois les élus locaux en arrêt maladie, notamment dans les petites communes.
Lorsqu’ils exercent une activité professionnelle, les élus locaux placés en congé maladie perçoivent des indemnités journalières, dont le bénéfice est subordonné au respect des dispositions de l’article L. 323-6 du code de la sécurité sociale : le salarié placé en congé maladie doit observer les prescriptions du praticien, se soumettre aux contrôles organisés par le service du contrôle médical, respecter les heures de sorties autorisées par le praticien et s’abstenir de toute activité non autorisée.
Ainsi, un salarié par ailleurs élu local placé en congé maladie ne peut régulièrement exercer son mandat électif que si son médecin l’y autorise expressément sur l’arrêt de travail. Dans le cas contraire, il peut se voir réclamer le remboursement des indemnités journalières, la Cour de cassation assimilant les indemnités de fonction à une rémunération d’activité.
Cette difficulté, que des élus de toute bonne foi ont pu rencontrer, a été soulignée par les travaux de la délégation sénatoriale aux collectivités territoriales et à la décentralisation sur les conditions d’exercice des mandats locaux. Elle était le fruit d’un défaut d’information des élus sur la nécessité de préciser à leur médecin de mentionner, le cas échéant, qu’ils sont autorisés à exercer leur mandat électif pendant leur arrêt de travail.
Cette réglementation a déjà fait l’objet d’un très large débat à l’occasion du vote de la loi relative à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique, dont l’article 103 a modifié le code de la sécurité sociale, qui dispose que « les élus locaux peuvent poursuivre l’exercice de leur mandat, sous réserve de l’accord formel de leur praticien ».
Il ressort des débats qu’un renversement de ce principe aurait soulevé de nouvelles difficultés. En effet, si un patient ne prévient pas son médecin qu’il est également élu local, le médecin n’indiquera pas, de toute bonne foi lui aussi, l’incompatibilité de l’état de son patient avec son mandat, ou les réserves partielles qu’il pourrait y opposer. C’est alors la responsabilité du médecin qui serait engagée.
Pour répondre de façon efficace à ce problème, nous avons cherché à mieux informer les élus sur leurs droits en cas de maladie. Dans ce cadre, la direction générale des collectivités locales (DGCL) et la direction de la sécurité sociale ont conjointement rédigé une fiche pratique sur cette thématique, que l’Association des maires de France et des présidents d’intercommunalité, que je remercie, a intégrée en page 23 de son guide sur le statut de l’élu local.
Enfin, cette information est également présente sur Ameli, le site internet de l’assurance maladie, que vous connaissez bien.
Madame la sénatrice, sachez que nous sommes prêts à regarder avec vous comment poursuivre l’amélioration de cette information.
Je répondrai à votre invitation avec grand plaisir, monsieur le secrétaire d’État.
Quand un élu et son médecin se rendent compte de leur erreur et qu’ils sont prêts à la corriger, l’assurance maladie reste inflexible. Ce n’est pas normal !
La parole est à M. Ronan Le Gleut, auteur de la question n° 1684, transmise à M. le secrétaire d’État auprès de la ministre du travail, de l’emploi et de l’insertion, chargé des retraites et de la santé au travail.
Monsieur le secrétaire d’État, ma question est double et porte sur les difficultés multiples endurées par les retraités ou futurs retraités français établis hors de France.
Les retraités français qui résident à l’étranger subissent de trop lourds retards dans le traitement de leurs dossiers, ce qui laisse certains d’entre eux sans ressources, parfois pendant plusieurs mois.
Si chacun peut comprendre qu’il faut éviter la fraude et produire des certificats de vie ou attestations d’existence, les tracasseries administratives et refus de certificats de vie pourtant valables entraînent des suspensions indues de versement de retraite. Pourtant, nos compatriotes établis à l’étranger soulignent souvent qu’ils envoient leurs certificats de vie ou attestations d’existence par la poste et par voie électronique, parfois à plusieurs reprises. Malgré cela, des difficultés demeurent et ils ne touchent pas un centime de leur retraite.
La mise en place récente d’un centre unique pour toutes les réclamations devrait apporter quelques améliorations, mais de grands problèmes demeurent.
En ce qui concerne les futurs retraités, on constate également de nombreux cas de blocages ou de retards importants dans le traitement des rachats de trimestres des périodes à l’étranger.
Ce type de rachat permet aux assurés, qui ont exercé une activité dans un pays sans convention avec la France ou dans plusieurs pays étrangers, et qui sont alors sous le coup de la règle de non-cumul des conventions, d’atteindre le taux plein pour le calcul des retraites françaises.
La Caisse nationale d’assurance vieillesse (CNAV) se doit de leur proposer un devis correspondant aux trimestres rachetables. Or les demandes restent sans réponse – dans certains cas, depuis des mois.
Monsieur le secrétaire d’État, pour traiter ces multiples retards, ne peut-on envisager un renforcement de personnels au groupement d’intérêt public Union Retraite et à la CNAV, afin d’apurer ces nombreux dossiers en souffrance et de mettre fin à cette situation aussi inacceptable qu’injuste ?
Monsieur le sénateur Ronan Le Gleut, vous interrogez le Gouvernement sur le délai de traitement par la CNAV des dossiers de Français établis hors de France pour la liquidation des retraites, mais aussi pour des dispositifs tels que le rachat de trimestres de périodes réalisées à l’étranger.
Les délais de traitement de liquidation de retraite se sont en effet récemment allongés, bien que plus des trois quarts des dossiers restent traités en moins de 120 jours. Cet allongement résulte essentiellement de spécificités liées à la conjoncture : la crise sanitaire a eu des effets sur le processus de liquidation, en particulier pour les assurés ne maîtrisant pas les outils numériques et n’utilisant pas la demande de liquidation en ligne, qui est facultative.
Ainsi, les échanges pour consulter les dossiers ont été plus complexes, et les délais de traitement allongés.
J’évoquerai également la hausse conjoncturelle des demandes de liquidation. On a en effet observé une hausse des demandes de plus de 50 % au premier semestre 2021 par rapport à l’année précédente.
Des plans d’action sont actuellement déployés pour le traitement de ces demandes. L’ensemble des leviers à disposition de la CNAV sont mobilisés : formation d’agents redéployés, recours à des CDD, augmentation du nombre d’heures supplémentaires, voire modification des méthodes de traitement.
Plus globalement, le Gouvernement, bien conscient du problème, a saisi la CNAV depuis plusieurs mois pour améliorer sa qualité de service. Nous souhaitons en effet réduire les délais de traitement, mais aussi assurer la justesse du calcul de la pension, qui est parfois particulièrement complexe, en particulier pour les assurés ayant une partie significative de leur carrière réalisée à l’étranger.
Sur ce plan, les premiers mois de l’année 2021 sont plutôt encourageants.
Il convient effectivement, monsieur le secrétaire d’État, de reconnaître ces retards.
Derrière les numéros de dossiers se cachent parfois des drames humains. Nous avons des témoignages de femmes et d’hommes qui ne touchent plus un centime de retraite. Puisque vous reconnaissez ces retards, il faut agir vite et fort !
La parole est à Mme Toine Bourrat, auteure de la question n° 1672, adressée à Mme la ministre de la culture.
Il est aujourd’hui un bien triste constat : notre langue française est étrillée par l’écriture dite inclusive.
En effet, un nombre croissant d’établissements universitaires contreviennent à la circulaire du 21 novembre 2017, en usant du point médian ou de la syntaxe dite épicène. Parmi eux – la liste n’est pas exhaustive -, la faculté de droit de Nanterre, où les panneaux d’affichage, les mails de la présidence ou des supports de travaux dirigés sont affectés, l’université Paris Dauphine, où ce sont les sujets de partiels ou les polycopiés de cours qui sont touchés.
Ce phénomène concerne à la fois des communications internes adressées aux étudiants et des publications destinées au public.
Mais il y a plus grave encore : des rapports publiés par un certain nombre d’institutions relaient eux aussi cette orthographe néfaste.
Pourtant, en février 2019, le Conseil d’État avait rejeté un recours soumis à son appréciation et confirmé l’esprit de la circulaire Philippe, en enjoignant aux administrations de respecter les règles grammaticales et syntaxiques en vigueur dans la rédaction de leurs actes administratifs.
Cette jurisprudence ne doit pas être minimisée, car elle vient consacrer les conclusions d’un rapport de l’Académie française mettant en garde depuis près de trois ans contre « un péril mortel pour la langue nationale ».
Le 2 mai dernier, Jean-Michel Blanquer, ministre de l’éducation nationale, a étendu l’interdiction de l’écriture inclusive aux usages pédagogiques. C’est une avancée louable, mais encore insuffisante, alors qu’un nombre substantiel d’administrations, de rectorats ou de directions d’établissements publics d’enseignement s’en exonère.
Vous inaugurerez en mars prochain la Cité internationale de la langue française à Villers-Cotterêts, où fut prise l’ordonnance généralisant l’utilisation du français dans les actes administratifs. Or c’est précisément par ces actes administratifs que l’écriture inclusive bafoue aujourd’hui notre héritage culturel.
Au regard de la violation flagrante de la circulaire Philippe, n’est-il pas temps d’initier une réponse législative pour consacrer définitivement les principes posés par notre académie ? C’est un patrimoine sensible que nous avons à préserver. Comme l’écrivait la philosophe Simone Weil, « nous sentons vivement que les choses vraiment belles devraient être assurées d’une existence éternelle et ne le sont pas. » Il en va de même pour notre langue, aujourd’hui en péril.
Madame la sénatrice, je vous prie de bien vouloir excuser Mme la ministre de la culture, qui m’a chargé expressément de vous répondre.
Avec la circulaire du Premier ministre du 21 novembre 2017 que vous avez citée, le Gouvernement a clairement rappelé les principes de rédaction des textes officiels. Cette circulaire invite au maintien des règles en usage, qu’elles soient typographiques, par l’exclusion du recours aux formes abrégées par un point médian ou par tout autre séparateur graphique faisant ressortir l’existence d’une forme féminine en complément de la forme masculine, ou grammaticales, avec le masculin comme forme neutre.
Les administrations de l’État doivent se conformer à ces règles, pour des raisons d’intelligibilité et de clarté, non seulement parce que la complexité de la typographie dite inclusive pénalise les personnes affectées d’un handicap, mais aussi parce que la majorité de nos concitoyens en ignore les mécanismes et ne reconnaît plus d’ailleurs sa propre langue.
L’apprentissage et la maîtrise de la langue française relevant des missions fondamentales de l’école, il était important que le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports rappelle les principes de rédaction dans la circulaire du 5 mai 2021, adressée aux rectrices et aux recteurs d’académie, aux directrices et directeurs de l’administration centrale et à leur personnel.
La langue française apprise et pratiquée par les élèves et les lycéens reste soumise à la règle commune. L’exclusion de la typographie inclusive ne saurait cependant accréditer l’idée que la langue française conforte les inégalités entre les femmes et les hommes. Nous devons renforcer notre engagement pour l’égalité, et privilégier les recommandations de la circulaire du 21 novembre 2017 en faveur de la féminisation de notre langue.
Cela passe notamment par la promotion du recours à la féminisation systématique des noms de métier ou de fonction exercés par une femme ou à des mots épicènes.
L’application systématique de ces préconisations, qui accorde aux femmes, à l’écrit comme à l’oral, autant de visibilité et d’égards qu’aux hommes, contribue à la consolidation et à l’évolution de la langue française, sans pour autant la dénaturer.
La parole est à Mme Émilienne Poumirol, auteure de la question n° 1689, adressée à Mme la ministre de la culture.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, les salles de spectacles et les lieux culturels ont rouvert depuis le 19 mai pour la plus grande joie des acteurs du secteur.
Cependant, le virus menace toujours, notamment depuis l’apparition du variant Delta, plus contagieux, en particulier dans les lieux clos.
Le constat est simple : malgré l’accélération de la vaccination, il nous faudra désormais apprendre à vivre avec la covid et ses variants pour les années à venir.
Pour faciliter l’organisation du secteur culturel et de l’événementiel, des solutions innovantes émergent. Parmi elles, je veux citer l’expérimentation menée par le centre de congrès et d’exposition de Labège, Diagora, en Haute-Garonne, dans mon département, en partenariat avec Dassault Systèmes, sur l’analyse des flux d’air et la simulation numérique pour la réouverture des salles de spectacles et d’événementiel.
Ce dispositif, développé par un jeune ingénieur toulousain, s’appuie sur le logiciel de Dassault Systèmes, déjà utilisé par plusieurs hôpitaux à travers le monde pour lutter contre les contaminations.
Cette expérimentation permettrait que les lieux culturels puissent accueillir du public dans les meilleures conditions, avec des mesures sanitaires adaptées et des conditions de placement scientifiquement démontrées. Cette solution innovante permettrait non seulement d’améliorer la sécurité des spectateurs avec une ventilation optimisée, mais également de répondre à la souffrance du secteur culturel sur l’ensemble de notre territoire.
Elle consiste à construire un « jumeau numérique » de la salle pour y étudier les flux d’air. Ces derniers sont ensuite modifiés en fonction des résultats, afin d’empêcher qu’ils atteignent les personnes dans la salle. Il ne serait ainsi plus nécessaire d’instaurer une jauge limitant le nombre de spectateurs présents.
Ce dispositif serait une mesure complémentaire au passe sanitaire actuellement en vigueur et garantirait une assurance supplémentaire pour les spectateurs.
Pour que cette expérimentation puisse aboutir, il est nécessaire de l’élargir au plus grand nombre d’acteurs culturels et événementiels, afin de leur permettre de reprendre au plus vite leurs activités de manière pérenne.
Monsieur le secrétaire d’État, ma question est la suivante : le Gouvernement entend-il soutenir cette expérimentation, qui faciliterait le bon déroulement des spectacles et événements culturels, et comment ?
Madame la sénatrice, le Gouvernement a été particulièrement mobilisé sur cet enjeu des expérimentations dans les salles de spectacles et de concerts dès le début de l’année 2021. Mme la ministre de la culture a eu l’occasion d’annoncer un soutien à plusieurs d’entre elles au mois de février.
Ces expérimentations consistent en une démarche scientifique encadrée par des protocoles stricts. Vous l’avez rappelé, elles visent à évaluer les risques de contagion ou de surexposition à la covid-19 au sein des salles de spectacles et ainsi à contribuer à la définition de protocoles sanitaires transposables à grande échelle.
De nombreuses collectivités se sont manifestées pour organiser ces expérimentations. Vous avez cité l’exemple de la communauté d’agglomération du sud-est toulousain, Sicoval, dans votre département de la Haute-Garonne. Je le souligne, elles demandent des mois de préparation, un soutien financier conséquent et, surtout, des protocoles scientifiques particulièrement complexes.
À ce jour, une seule a pu avoir lieu à l’occasion du concert d’Étienne de Crécy et du groupe Indochine, le 29 mai dernier à l’Accor Arena de Paris.
Sur l’initiative du syndicat national des producteurs, diffuseurs, festivals et salles de spectacle musical et de variété (Prodiss) et de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP), le dispositif sanitaire a permis à 5 000 personnes d’y assister. Les résultats de l’étude rendus publics la semaine dernière par l’AP-HP sont très encourageants, puisque les scientifiques considèrent qu’il n’y a pas eu de surrisque de transmission du covid-19 pendant le concert. Ces résultats doivent pouvoir être également analysés par le ministère de la santé et l’ensemble des autorités sanitaires.
Ces expérimentations étaient, je crois, utiles dans cette période d’attente de la reprise. Vous le savez, les salles de spectacles et de concerts ont pu rouvrir leurs portes le 19 mai dernier et les restrictions de jauges ont été levées depuis le 1er juillet.
Nous avons mis en place des règles sanitaires strictes, pour que cela se passe dans les meilleures conditions possible, notamment avec la mise en place du passe sanitaire, dont la mise en œuvre sera renforcée, à la suite de l’allocution du Président de la République hier soir. En tout état de cause, il s’agit d’une des conditions de la reprise.
Le ministère de la culture reste évidemment en dialogue avec l’ensemble des parties prenantes. L’enjeu est de mieux comprendre et de mieux maitriser tout ce qui peut avoir une influence sur la transmission du virus, notamment les flux d’air dans les lieux culturels.
Dès le 30 avril dernier, nous avons envoyé un courrier à ce sujet à Mme Bachelot.
Il s’agit de construire un démonstrateur permettant d’aboutir à une norme qui pourrait être utilisée ensuite. Son intérêt concerne non pas uniquement les spectacles, mais aussi le monde institutionnel : tous les hémicycles pourraient être étudiés et bénéficier d’une jauge normale.
En outre, ces modèles sont facilement duplicables et peu chers, si on les compare à l’expérimentation que vous avez évoquée dans le cadre du concert d’Indochine. Les tarifs ne sont absolument pas du même ordre !
La parole est à M. Olivier Rietmann, auteur de la question n° 1538, adressée à M. le ministre de l’intérieur.
Madame la ministre, en novembre dernier, après une longue gestation, le Livre blanc de la sécurité intérieure était enfin dévoilé.
Une proposition figurant dans le titre intitulé « Renouveler le pacte de protection et de sécurité » a retenu toute mon attention, et suscite surtout beaucoup d’inquiétude. Il est proposé de définir une nouvelle méthode pour partager sur le territoire national les compétences de la police et de la gendarmerie.
Pour mémoire, selon la règle en vigueur, la responsabilité de la police nationale dans une commune est soumise au cumul de deux critères : une population supérieure à 20 000 habitants et une délinquance ayant les caractéristiques de celle des zones urbaines.
Le Livre blanc préconise une évolution de ce seuil de population. Au-dessous de 30 000 habitants, le principe serait de confier le territoire à la gendarmerie. Entre 30 000 et 40 000 habitants, l’attribution reviendrait à la force la mieux adaptée aux caractéristiques du territoire et au-dessus de 40 000 habitants, le principe serait de confier la compétence à la police nationale.
Mécaniquement, les départements les plus ruraux se verraient donc totalement exclus des zones de la police nationale, y compris pour leur chef-lieu.
La Haute-Saône serait placée dans un tel cas, ce qui ne manque pas de raviver l’inquiétude des personnels du commissariat de Vesoul, qui sont exposés depuis plusieurs années à des incertitudes récurrentes.
Je ne doute pas de l’opportunité de faire évoluer les critères de répartition des forces de sécurité et je partage l’ambition de passer d’un « modèle quantitatif » à un « modèle qualitatif reposant sur une analyse locale, pragmatique et objective », comme on peut le lire dans le Livre blanc.
Pourtant, la première évolution proposée est l’augmentation du seuil ! Je vous remercie d’avance, madame la ministre, de m’expliquer cette contradiction et, surtout, les critères objectifs sur lesquels se fonderait cette réorganisation, qui ne doit avoir qu’un seul but : assurer à tout citoyen un service de sécurité publique le mieux adapté aux réalités du territoire sur lequel il se trouve.
Assurez-nous enfin que la dimension budgétaire n’est pas le critère principal de cette préconisation, ce qui serait de mon point de vue insupportable.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, monsieur Olivier Rietmann, apporter des réponses concrètes aux problèmes de délinquance et d’insécurité de nos concitoyens exige des moyens. C’est pourquoi le Gouvernement a décidé le recrutement de 10 000 policiers et gendarmes supplémentaires sur le quinquennat et la mobilisation de moyens financiers, notamment du plan de relance, pour moderniser et améliorer les équipements et moyens d’intervention des forces de l’ordre.
Les questions de gouvernance, d’organisation et de doctrines opérationnelles sont essentielles pour une adaptation constante aux évolutions de la délinquance, pour répondre à l’objectif majeur du renforcement de la présence sur la voie publique et pour donner aux policiers et gendarmes les moyens d’assumer leurs missions dans les meilleures conditions d’efficacité possible.
La police nationale a d’ores et déjà accompli ou engagé d’importantes réformes en la matière. Je pense ainsi à la création d’échelons zonaux en sécurité publique et en police judiciaire et à l’expérimentation, dans trois départements, de directions départementales de la police nationale.
Les coopérations et complémentarités entre la police et la gendarmerie, notamment la répartition de leurs forces sur le territoire, constituent également un enjeu important de notre dispositif de sécurité et un sujet auquel sont particulièrement attentifs les élus locaux.
Une organisation optimale des forces de sécurité de l’État est en effet essentielle pour développer les synergies et les mutualisations et pour assurer leur plein ancrage dans les territoires.
Trois vagues de redéploiements territoriaux ont été opérées entre la police et la gendarmerie entre 2002 et 2014 pour adapter leur organisation aux évolutions de l’urbanisation et de la délinquance, accroître l’homogénéité des zones de compétence et permettre aux deux forces de renforcer leur complémentarité et d’optimiser leur potentiel opérationnel.
À l’occasion de son déplacement en Haute-Garonne le 9 octobre 2020, le Premier ministre a indiqué vouloir ouvrir la voie à une réflexion prudente et concertée sur le redécoupage des zones de police et de gendarmerie. Cette ouverture fait écho au Livre blanc de la sécurité intérieure, qui préconise de mieux faire coïncider la répartition des forces avec les caractéristiques spécifiques de chaque territoire.
M. le ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, a demandé à la direction générale de la police nationale et à la direction générale de la gendarmerie nationale de poursuivre les travaux sur le sujet. Il s’agit notamment d’objectiver les améliorations espérées. En tout état de cause, dans la Haute-Saône comme ailleurs, toute éventuelle évolution se fera d’abord en concertation avec les élus locaux et les parlementaires.
La parole est à M. Édouard Courtial, auteur de la question n° 1708, adressée à M. le ministre de l’intérieur.
Madame la ministre, la sécurité routière, comme toute politique publique, requiert, à mon sens, pour être pleinement efficace, de la transparence et de la pédagogie.
Or, bien que nous puissions pleinement partager l’objectif de limiter les risques pour les usagers de la route, les mesures que vous avez prises concernant la généralisation à l’ensemble du territoire national des voitures radars banalisées par des opérateurs privés ne présentent aucune de ces deux exigences.
J’évoquerai tout d’abord le manque de transparence. Où est la transparence, face à l’absence de toute communication sur les résultats obtenus en termes d’amélioration de la sécurité routière ? Où est la transparence, face à l’absence d’un calendrier clair et d’une méthode explicitée ? Où est la transparence, face à l’absence de garanties sur les contrôles de ces opérateurs ?
Je pense aux témoignages inquiétants d’automobilistes sur des dérives constatées par certaines compagnies visant à les piéger pour les inciter à franchir les limitations de vitesse, privilégiant ainsi la rentabilité à la sécurité…
J’évoquerai ensuite le manque de pédagogie. Où est la pédagogie face à l’absence d’une campagne de prévention de grande ampleur parallèlement au déploiement de ce dispositif ? Où est la pédagogie, puisque vous refusez un système d’identification des véhicules radars privés ? Où est la pédagogie, face à une sanction automatique et aveugle conduisant les automobilistes à être focalisés uniquement sur leur vitesse ?
Sans transparence et sans pédagogie, les Français voient cette nouvelle mesure comme un nouvel impôt déguisé, un moyen pour l’État de remplir les caisses sur leur dos, d’autant que, si l’on en croit différentes projections, on passerait de 1, 5 million de PV à 12 millions. Ils y voient le symbole d’une politique de sécurité routière ayant définitivement basculé dans le tout répressif. Ils y voient enfin, et surtout, une nouvelle rupture d’égalité entre les urbains et ceux qui habitent dans les territoires ruraux, ces derniers n’ayant d’autres choix, pour se déplacer, que d’utiliser leur voiture chaque jour.
Abaissement de la vitesse sur les routes secondaires à 80 kilomètres par heure, puis rétropédalage, augmentation des radars tourelles, qui ne sont pas toujours signalés dans mon département, et, enfin, voitures radars banalisées par des opérateurs privés. Cela commence à faire beaucoup, y compris pour les plus conciliants ! Prenez garde, madame la ministre, à ne pas souffler sur les braises.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, monsieur Courtial, le déploiement des voitures radars banalisées suscite, vous l’avez dit, un certain nombre d’interrogations légitimes. Toutefois, certaines informations sont inexactes, et je souhaiterais dans un premier temps y revenir.
Tout d’abord, le nombre de voitures radars n’a pas explosé depuis 2020. Les premières voitures radars banalisées ont progressivement été déployées à compter de 2013. Avant le lancement, en 2018, de la mesure d’externalisation, on en comptabilisait 383, exclusivement conduites par des policiers ou des gendarmes.
Depuis 2018, le déploiement progressif de voitures radars à conduite externalisée, au nombre de 145 à ce jour, a entraîné la suppression de 116 voitures radars, qui seront, à terme, toutes remplacées. Cette mesure permet aux forces de sécurité intérieure d’accomplir d’autres missions de sécurité routière qui ne peuvent être automatisées.
Ensuite, le contrôle des vitesses par voitures radars est un dispositif non pas répressif, mais dissuasif. La projection ayant permis d’établir le chiffre de 12 millions de PV n’est fondée sur aucun constat. Aujourd’hui, la mesure d’externalisation de la conduite des voitures radars permet d’accroître l’utilisation des voitures, sans pour autant engendrer une multiplication des PV.
S’agissant de la pertinence de mettre en place un système d’identification des voitures radars à conduite externalisée, j’observe que cette demande reprend l’idée de la proposition de loi du député Pierre Cordier visant à modifier l’article L. 413-5 du code de la route. Cette idée, séduisante a priori, car renforçant le caractère dissuasif du dispositif, pose un problème de sécurité pour les conducteurs employés par les entreprises de conduite externalisée : des actes malveillants à leur égard sont régulièrement constatés dans les régions concernées, prenant parfois la forme d’actes dangereux, dont certains ont donné lieu à dépôt de plainte ou de main courante.
M. le ministre de l’intérieur a demandé à ses services d’étudier la pertinence d’une publication par les préfectures, sur leur site internet, de la cartographie des axes contrôlés par ces véhicules, comme l’ont déjà fait les préfectures de Loire-Atlantique et de Maine-et-Loire.
Enfin, monsieur le sénateur, vous affirmez que l’État utilise ces dispositifs pour alimenter son budget, sans gain pour la sécurité routière. C’est une inexactitude démentie par les documents budgétaires transmis chaque année au Parlement : on y découvre, d’une part, que l’argent des radars est utilisé à plus de 85 % en faveur de la sécurité routière dans le cadre d’un compte d’affectation spéciale et, d’autre part, que l’insécurité routière coûte 50, 2 milliards d’euros par an, ce qui est très largement supérieur à ce que le « contrôle automatique » rapporte au budget de l’État.
Pour finir, je rappellerai avec gravité que la vitesse est toujours responsable dans notre pays d’un tiers des accidents mortels et que le contrôle automatisé permet, dans certains cas, d’y parer, en la limitant.
Je vous remercie, madame la ministre, de votre réponse.
J’insiste sur la distinction entre les urbains et les ruraux, entre ceux qui peuvent prendre les transports en commun et ceux qui sont obligés de prendre leur voiture. Ces derniers, même s’ils reconnaissent que chacun doit être associé à la politique de sécurité routière, ne veulent pas se faire racketter. Ils veulent plus de pédagogie et de transparence.
La parole est à M. Jean-Michel Arnaud, auteur de la question n° 1723, adressée à M. le ministre de l’intérieur.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le 4 juillet dernier, aux environs de deux heures du matin, des coups de feu ont été tirés dans le centre-ville de Gap dans les Hautes-Alpes. Lors de l’intervention, trois personnes ont été blessées, dont un policier, qui a été blessé au genou.
Un tel événement n’est pas anodin : il révèle non seulement les relations difficiles qu’entretiennent certains de nos concitoyens avec les forces de sécurité, mais aussi une réalité du quotidien pour les forces de l’ordre, confrontées à un manque de moyens. En effet, cette fusillade a entraîné l’intervention du seul et unique équipage de nuit du commissariat de Gap. Oui, madame la ministre, la sécurité nocturne de Gap, préfecture des Hautes-Alpes, et de ses 42 000 habitants, repose sur un équipage.
Il ne s’agit malheureusement que de la partie émergée de l’iceberg de la sécurité. En effet, la réduction structurelle des effectifs a pour conséquence une dégradation des conditions de travail des personnels de police et un service rendu à la population d’une qualité moindre.
Alors que le commissariat de Gap comptait 64 personnes en décembre 2018, ils ne sont plus que 51 en 2021. Ce sous-effectif de fonctionnaires de police rend impossible la mission de sécurité que l’on doit aux Gapençaises et Gapençais. D’ailleurs, dans le même temps, la délinquance ne cesse de croître à Gap, et les manifestations sur la voie publique y ont été multipliées par cinq en moins de trois ans.
La conséquence directe de cette situation tendue est une baisse de l’attractivité des postes, la moyenne d’âge des policiers de Gap étant de 48 ans, contre 24 ans, soit deux fois moins, en région parisienne.
Outre les problèmes d’effectifs, les locaux du commissariat de Gap manquent d’entretien et sont vétustes. À titre d’exemple, sachez, madame la ministre, que les vestiaires des agents féminins ont été installés dans des locaux précédemment occupés par les véhicules de service ! Comment peut-on traiter nos forces de l’ordre de cette manière, pour ensuite leur demander de risquer leur vie au quotidien pour protéger nos populations ?
Certes, les Hautes-Alpes ne représentent que 0, 20 % de la délinquance nationale. Pour autant, nos concitoyens méritent d’être traités de la même manière que dans les grandes agglomérations. Tel est le sens de l’engagement républicain de tous, notamment de nos forces de police.
Alors que le maire de Gap a écrit à M. le ministre Gérald Darmanin, les 7, 12 et 28 mai dernier sur ces sujets, la réponse faite en substance a été d’inciter au recrutement de policiers municipaux. Que comptez-vous faire, madame la ministre, face au manque de fonctionnaires de police à Gap ? Allez-vous enfin renforcer les effectifs comme il est demandé ? Quels seront précisément les moyens alloués à ce commissariat en termes d’investissements ?
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, monsieur le sénateur Jean-Michel Arnaud, en matière de sécurité, les attentes des Français sont fortes et légitimes. Le Gouvernement met tout en œuvre pour y répondre.
Avec des crédits en hausse de 1, 7 milliard d’euros depuis 2017 et avec les 621 millions d’euros du plan France Relance, nous renforçons et modernisons les moyens des forces de sécurité.
L’arsenal législatif se renforce et s’adapte, avec la récente proposition de loi pour une sécurité globale préservant les libertés, mais aussi avec les lois portées par mon collègue garde des sceaux. Le Beauvau de la sécurité décidé par le Président de la République et piloté par le ministre de l’intérieur permettra, dans la concertation, de nouvelles avancées.
Notre objectif principal est d’accroître la présence des forces sur le terrain et de faire reculer la délinquance.
J’en viens maintenant au cœur de votre question, monsieur le sénateur, qui concerne la ville de Gap. La sécurité publique, notre police de la sécurité du quotidien, y dispose d’un effectif opérationnel qui a augmenté de 10 % depuis le début du quinquennat, pour atteindre à ce jour 53 gardiens de la paix. Je tiens à préciser, monsieur le sénateur, que Gap se trouve ainsi en situation favorable par rapport à d’autres circonscriptions de sécurité publique comparables.
Aux policiers qui s’engagent au quotidien pour la sécurité de tous, dans des conditions souvent dangereuses, nous devons des conditions de travail dignes. Je suis notamment sensible à l’exemple que vous avez évoqué, monsieur le sénateur, concernant les locaux destinés aux personnels féminins. Avec le ministre de l’intérieur, nous avons fait une priorité de la situation des locaux. Il s’agit d’un enjeu de première importance, pour les victimes, mais aussi et surtout pour les conditions de travail quotidiennes des policiers.
S’agissant de Gap, le commissariat est installé, je le rappelle, dans la cité administrative Desmichels et le bâtiment, quoique de capacité insuffisante – vous avez raison –, est dans un état global considéré comme satisfaisant. Des travaux y sont régulièrement menés. L’accueil a par exemple été rénové en 2017. Par ailleurs, en 2020 et au cours des cinq premiers mois de 2021, ce sont plus de 50 000 euros qui ont été engagés pour divers travaux du quotidien relatifs à la maintenance, à l’entretien et à la sécurisation. En outre, le réaménagement du chef de poste a été programmé.
J’ajoute que la création du secrétariat général commun départemental au sein de la préfecture devrait conduire, à terme, à des modifications dans l’occupation de la cité administrative. La sécurité publique devrait à cette occasion gagner de l’espace supplémentaire, par exemple pour accueillir le service départemental du renseignement territorial.
Monsieur le sénateur, qu’il s’agisse des conditions de travail des policiers ou des moyens qui leur sont nécessaires pour accomplir efficacement leurs missions, vous pouvez compter sur notre engagement et notre parfaite vigilance. Je vous remercie des points sur lesquels vous avez aujourd’hui attiré notre attention.
La parole est à Mme Catherine Procaccia, auteur de la question n° 1755, transmise à M. le ministre délégué auprès de la ministre de la transition écologique, chargé des transports.
Madame la secrétaire d’État, ma question concerne les inondations à répétition de la RN 19, notamment dans le tunnel de Boissy-Saint-Léger.
Les fortes précipitations et les orages intervenus voilà quelques semaines dans le Val-de-Marne ont provoqué des inondations sur la RN 19, entre Boissy-Saint-Léger et Bonneuil-sur-Marne, dans le tunnel. L’axe a été rapidement infranchissable, piégeant plusieurs automobilistes et saturant la circulation sur cette zone.
Hélas, ce n’est pas une première, puisque deux inondations quasiment similaires étaient survenues en 2020, avant que ne soit ouverte, en avril 2021, la déviation de Boissy-Saint-Léger.
La RN 19 est une artère très empruntée par les Franciliens. Or il semble que, aujourd’hui, pluie rime inéluctablement avec inondation. Certes, la forme de cuvette de cette section n’aide naturellement pas l’eau à s’évacuer, mais les défaillances répétées du système de pompage sont aussi en cause.
Sur place, les élus évoquent une erreur de conception et l’absence d’une retenue d’eau capable de faire face aux forts orages.
Si la direction des routes de l’Île-de-France semble résignée face à ces situations, tel n’est pas le cas des élus. Ces inondations paralysantes et éminemment dangereuses ne sont acceptables ni pour les automobilistes ni pour les riverains, qui ne peuvent accepter leur multiplication.
Que comptent faire les services de l’État, dont dépend cette route, pour permettre aux automobilistes de l’emprunter dans des conditions optimales de sécurité ?
Je vous invite, madame la secrétaire d’État, à regarder cette photo §Est-il normal qu’une route récente, réaménagée après sept ans de construction, en soit à ce point-là ?
Madame la sénatrice Procaccia, vous interpellez le ministère des transports sur ce tronçon de la RN 19 qui comprend le tunnel de Boissy-Saint-Léger. Vous le savez, les agents et les services compétents du ministère sont pleinement engagés dans cette maintenance et cette modernisation du réseau routier national, qui sont absolument nécessaires – nous avons longuement évoqué ce sujet dans le cadre de l’examen du projet de loi d’orientation des mobilités.
Ces agents sont mobilisés jour et nuit et par tous les temps pour satisfaire les besoins des usagers en matière de sécurité et de libre circulation, notamment pour garantir le bon écoulement des eaux sur le réseau routier national et à côté du réseau, mission absolument essentielle.
Concernant en particulier la RN 19 entre Boissy-Saint-Léger et Bonneuil-sur-Marne, elle présente en effet un point bas qui est soumis à une accumulation d’eau en cas d’orage.
Le dispositif d’assainissement est dimensionné pour évacuer des événements pluvieux d’ampleur décennale – c’est logique –, comme c’est la norme pour toute conception routière. On a pu observer que les pluies des étés 2020 et 2021, qui ont conduit à des fermetures de la RN 19 – vous l’avez dit –, avaient été particulièrement exceptionnelles, correspondant à des périodes de retour de trente à quarante ans. C’est ce contexte tout à fait particulier qui explique que le dispositif d’assainissement, dont les capacités sont pourtant importantes, ait été malgré tout saturé.
Dans le cadre de ces épisodes pluvieux exceptionnels, des difficultés sont observées, notamment des dysfonctionnements du système de pompage. Des opérations de maintenance, dotées d’un budget important, sont en cours dès cette année pour améliorer le fonctionnement de la station. Concrètement, il s’agit de mettre définitivement hors d’atteinte des équipements électriques qui se montreraient vulnérables par forte pluie. Afin d’assurer la pérennité des dispositifs mis en place, la direction interdépartementale des routes d’Île-de-France va accroître ses efforts de maintenance et de surveillance de la station de pompage.
L’État est pleinement conscient de ces difficultés et de ces problèmes ; les équipes et agents sont totalement mobilisés et nous vous apporterons sans attendre des réponses adaptées.
Merci, madame la secrétaire d’État. La direction des routes d’Île-de-France, la Dirif, nous a dit qu’elle fermait la route, tout simplement, lorsqu’une inondation survenait ; qu’elle s’en contente ne serait pas acceptable, et vous nous dites que ce n’est pas le cas.
On observe des problèmes de conception : il est anormal que les armoires électriques soient sous l’eau s’agissant d’un ouvrage moderne et complètement neuf, comme il est anormal qu’il faille attendre les appels à l’aide des maires pour que la Dirif vienne mettre en route la deuxième pompe de la station de pompage !
Nous comptons sur vous et sur votre engagement pour que ces situations cessent de se reproduire. Cette route est quand même la voie principale menant à la Francilienne !
La parole est à M. Frédéric Marchand, auteur de la question n° 1658, adressée à Mme la ministre déléguée auprès de la ministre de la transition écologique, chargée du logement.
Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, je souhaite attirer l’attention du Gouvernement sur la question de la prise en compte des cellules pénitentiaires dans la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains (SRU).
L’article 55 de cette loi de décembre 2000 prévoit l’obligation pour certaines communes de disposer d’un nombre minimal de logements sociaux proportionnel à leur parc résidentiel. Cette disposition arrivant à échéance en 2025, elle fait aujourd’hui l’objet de débats multiples – ainsi dans cette assemblée, dans le cadre de la première lecture du projet de loi 4D.
Il me semble pertinent, sur la base de l’exemple de la ville de Sequedin, dans la métropole européenne de Lille, d’étudier la possibilité d’une évolution qui consisterait à inclure les cellules d’établissements pénitentiaires dans le décompte des logements sociaux des communes.
L’implantation d’une prison est en effet une décision unilatérale de l’État et n’est pas sans conséquence sur la vie de la commune ; les impacts sont importants, notamment, sur son budget. La prison de Sequedin comprend ainsi 368 cellules pour une superficie de 35 000 mètres carrés, sans compter la zone de sécurité qui l’entoure.
En outre, la création d’un établissement pénitentiaire signifie un accroissement de la population communale, puisque les détenus sont comptabilisés par l’Institut national de la statistique et des études économiques dans la population légale de la commune. Cette comptabilisation peut avoir pour conséquence de faire franchir des seuils démographiques impliquant de nouvelles obligations. Ainsi des communes ont-elles été soudain soumises à l’obligation d’atteindre un taux de 25 % de logements sociaux à la suite de la construction d’un tel établissement sur leur territoire.
Accueillir une prison impose par ailleurs à la commune d’assurer un service public auprès des détenus en matière d’état civil.
L’État intègre déjà dans l’inventaire des logements locatifs sociaux un certain nombre de structures collectives d’hébergement spécialisé telles que les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad), les logements pour étudiants saisonniers, les centres d’hébergement et de réinsertion sociale, les centres d’accueil de demandeurs d’asile. Les places occupées dans ces structures sont assimilées, en totalité ou partiellement, à des logements sociaux.
La réalisation de logements sociaux est à nos yeux légitime et nécessaire ; il s’agit d’un enjeu essentiel pour permettre l’accès de tous à un logement de qualité tout en favorisant la mixité sociale.
Il est néanmoins indispensable de prendre en compte les spécificités de chaque territoire, pour ce qui est notamment du foncier disponible et des structures collectives installées sur le territoire des communes.
Aussi, madame la secrétaire d’État, je vous remercie de bien vouloir m’indiquer quelles sont les pistes étudiées pour permettre l’intégration, totale ou partielle, des cellules des établissements pénitentiaires dans l’inventaire des logements locatifs sociaux des communes concernées.
Monsieur le sénateur Marchand, vous souhaiteriez que le projet de loi 4D prévoie le décompte des cellules d’établissements pénitentiaires comme logements sociaux au titre de l’article 55 de la loi SRU.
Cette loi SRU fixe un taux minimal de logements sociaux dans les territoires qui concentrent les besoins ; elle vise avant tout à développer une offre pérenne de logements locatifs sociaux, accessible de façon universelle à tous les ménages sous plafond de ressources.
Il est donc en tout état de cause évident que la finalité des établissements pénitentiaires ne saurait être assimilée à celle du logement social. Je rappelle que le parc social loge aujourd’hui un Français sur six et que, deux millions de demandeurs de logements sociaux étant en attente, les besoins restent importants.
Le Gouvernement a donc refusé que le dispositif SRU soit ainsi détourné de sa finalité, considérant comme inappropriée la comptabilisation comme logement social de ce type de structures.
Un amendement visant à prendre en compte les établissements pénitentiaires dans ce décompte de la loi SRU a d’ailleurs été rejeté vendredi dernier, vous le savez, dans cet hémicycle – l’avis de la commission et celui du Gouvernement étaient défavorables.
Le titre III du projet de loi 4D, consacré au logement, pérennise le dispositif SRU en conservant ses fondamentaux, lesquels – l’examen du texte par le Sénat l’a montré – font désormais l’objet d’un consensus transpartisan. Il y apporte par ailleurs des adaptations nécessaires pour tenir compte des difficultés de certaines communes, imputables à des spécificités locales. Il importe de maintenir cet équilibre.
Je souhaite rappeler, en outre, que l’installation d’une prison sur le territoire d’une commune induit le versement par l’État de concours financiers complémentaires. L’augmentation de la population recensée par l’Insee sur le territoire d’une commune entraîne notamment une hausse de la part forfaitaire de sa dotation globale de fonctionnement comprise entre 64 et 129 euros par habitant. Une telle augmentation est également susceptible de conduire à la hausse des autres dotations versées à cette commune.
La parole est à M. Laurent Burgoa, auteur de la question n° 1490, adressée à Mme la ministre de la transition écologique.
Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, après d’importantes pluies, en 2012, la commune de Robiac-Rochessadoule subissait l’effondrement d’un tunnel sur l’un de ses ruisseaux dits couverts.
Cet effondrement a engendré un cratère de quarante mètres de diamètre, emportant une aire de jeux pour enfants, un terrain de tennis et une partie du terrain de football !
Ces tunnels, qui sont présents dans bien d’autres communes gardoises, avaient été édifiés sur des ruisseaux afin de créer des plateformes suffisamment vastes pour y accueillir des infrastructures inhérentes à l’activité minière.
Malheureusement, lorsque les exploitants ont mis fin à leur activité, ils ont suivi une procédure prévue par une réglementation qui ne prenait pas en compte ces ouvrages. Aujourd’hui, personne ne peut ignorer que ces tunnels sont de véritables menaces pour les habitants vivant à proximité, ni que ces ouvrages étaient bel et bien inhérents à l’activité minière.
À la fermeture des mines, nationalisées depuis 1946, l’État a vendu une grande partie de ses terrains. Ainsi les acquéreurs, qu’ils soient publics ou privés, ont-ils hérité, sans être en mesure d’en être parfaitement conscients, des contraintes afférentes au droit du sol. Ni les particuliers ni les communes ne peuvent assumer seuls la prise en charge des dépenses liées à la sécurisation de ces ouvrages gigantesques.
Depuis l’effondrement évoqué, la quinzaine de communes concernées a constitué un syndicat intercommunal à vocation unique (SIVU) ; celui-ci travaille depuis deux ans dans le sens des demandes de l’État – programme d’actions de prévention des inondations, programme d’études préalables –, et ce – je dois le dire – en bonne intelligence avec la direction départementale des territoires et de la mer (DDTM), la direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement (Dreal) et l’Office national des forêts (ONF).
Mais il faut désormais des moyens ! De nouvelles catastrophes sont à craindre et le Gouvernement ne pourra pas se dédouaner. Il est urgent que l’État soutienne l’entretien de ces ruisseaux couverts. Madame la secrétaire d’État, prendrez-vous vos responsabilités ?
Monsieur le sénateur Burgoa, les ruisseaux couverts du Gard, comme vous le soulignez, sont des ouvrages hérités d’anciennes exploitations minières, créés afin d’optimiser la surface disponible et de répondre à des besoins logistiques inhérents à l’exploitation. Constitués de tunnels et de galeries permettant le passage de l’eau, ces ruisseaux couverts sont aujourd’hui, pour certains d’entre eux, fortement dégradés, ce qui peut occasionner, pour les propriétaires de terrains, d’importantes difficultés financières.
Même si les dégradations sont susceptibles de porter atteinte à la sécurité des personnes et des biens situés en surface, les ruisseaux couverts ne sont pas des installations minières ; ils n’ont donc pas fait l’objet d’un encadrement réglementaire au titre du code minier.
Ces ouvrages relèvent bien de la responsabilité des personnes qui ont souhaité en récupérer la propriété. Ainsi les droits et responsabilités afférents, notamment les travaux de réhabilitation et d’entretien que vous évoquez, reviennent-ils aux actuels propriétaires, souvent des communes, dont les moyens techniques et financiers sont parfois limités.
Compte tenu des faibles ressources financières de ces propriétaires, des modalités d’accompagnement au titre de la solidarité nationale sont mises à l’étude – une participation des crédits du fonds de prévention des risques naturels majeurs, le fameux fonds Barnier, aux travaux de réhabilitation de ces ouvrages est notamment envisageable. Cette aide plafonnée à 30 % des dépenses hors coûts d’entretien est réservée aux travaux jugés indispensables à la mise en sécurité des personnes dans le cadre d’un programme porté par une collectivité territoriale ou un établissement public de coopération intercommunale développant une approche globale du risque.
Nous nous tenons à votre disposition pour évoquer plus avant ces dossiers.
Merci, madame la secrétaire d’État, pour votre réponse. Je vous lance une invitation : venez visiter ces lieux. Les communes concernées sont de petites communes dotées de peu de moyens financiers ; elles attendent que l’État intervienne.
Prenons date et venez le plus rapidement possible dans le Gard !
La parole est à M. Rémy Pointereau, en remplacement de M. Louis-Jean de Nicolaÿ, auteur de la question n° 1524, adressée à Mme la ministre de la transition écologique.
Madame la secrétaire d’État, mon collègue Louis-Jean de Nicolaÿ souhaite vous interroger sur la façon dont le Gouvernement compte intervenir au soutien des acteurs ayant fait le choix de développer un hydrogène vert, notamment dans les territoires.
La filière hydrogène, véritable promesse d’énergie décarbonée, a été lancée dès 2018 et développée depuis cette date via un plan hydrogène doté, dans le cadre du plan de relance, d’une enveloppe de 2 milliards d’euros pour la période 2020-2022, auxquels s’ajouteront 7 milliards d’euros en vertu de la trajectoire dessinée jusqu’en 2030.
Dans ce secteur, la France a clairement choisi de développer la filière électrolyse, un objectif ambitieux de 40 gigawatts en 2030 étant défini.
Les territoires, acteurs incontournables d’un maillage efficient, ont pareillement pris le sujet à bras-le-corps ; la région des Pays de la Loire débloque ainsi 100 millions d’euros d’ici à l’année 2030 pour cette filière d’excellence.
Dans le même temps, lesdits territoires ont su miser sur d’autres techniques, complémentaires à l’électrolyse de l’eau, consistant à produire massivement de l’hydrogène vert en utilisant de la biomasse agricole.
Or, pour convaincre, ces procédés nécessitent un accompagnement et une garantie.
Plus performant qu’un électrolyseur et plus rentable qu’une éolienne, le procédé de gazéification à très haute température est duplicable et adaptable partout dans les territoires ruraux.
Par ailleurs, cette pratique, qui n’entre pas en concurrence avec les cultures vivrières, nettoie les sols, purifie les nappes phréatiques, capte massivement du CO2 par photosynthèse et augmente de 10 à 15 % le rendement des cultures suivantes.
Cette technique est un véritable challenge qui nécessite avant tout alliances et synergies entre autorités publiques nationales et locales, entreprises, organisations de la société civile et autres parties prenantes.
Aussi, à l’heure où les différents plans sectoriels de relance gouvernementaux se multiplient, quelle est la place réservée à cette technique importante dans le déploiement stratégique du plan hydrogène vert en France ? Et quelles sont les mesures de soutien qui seront consacrées à la valorisation de cet hydrogène renouvelable et décarboné, répondant pleinement à la « stratégie de l’hydrogène pour une Europe climatiquement neutre » élaborée par la Commission européenne ?
Monsieur le sénateur Pointereau, vous nous interrogez sur le soutien de l’État à la filière hydrogène vert. Cette mise en œuvre de la stratégie nationale pour le développement de l’hydrogène décarboné se fait – vous le savez – à un rythme accéléré, depuis son lancement en septembre dernier, afin d’accompagner les projets sur l’ensemble de la chaîne de valeur.
L’appel à projets « Écosystèmes territoriaux hydrogène », doté de 275 millions d’euros pour la période 2020-2023, rencontre un très vif succès auprès des industriels. Le montant cumulé des aides qui seront versées aux vingt-deux projets déjà sélectionnés dépasse les 156 millions d’euros, pour des investissements dont le montant s’élève à 490°millions d’euros. Quant à l’appel à projets « Briques technologiques et démonstrateurs hydrogène », il a été modifié pour permettre le financement en subventions jusqu’à 75 %.
L’appel à manifestation d’intérêt lancé en 2020 afin d’identifier les initiatives qui pourraient participer à un projet important d’intérêt européen commun sur l’hydrogène a conduit à présélectionner plusieurs projets portant sur le développement de giga-usines de production d’électrolyseurs et de composants clés, sur la mobilité lourde ou sur la décarbonation de l’industrie.
Tout cela représente un montant de 1, 5 milliard d’euros d’aides pour la France.
Le projet que vous évoquez plus particulièrement, porté par Quairos Énergies, vise à l’installation d’une usine de gazéification de chanvre sur le territoire de Trangé dans le cadre de l’appel à projets « Briques technologiques et démonstrateurs hydrogène ». Après analyse et au regard du classement des différents candidats, il n’a pas été sélectionné.
Ce projet prévoit notamment de produire du gaz de synthèse destiné à être injecté dans le réseau de gaz naturel. Or, dans un souci constant d’efficacité énergétique, la priorité du Gouvernement a été, et sera, tant que l’hydrogène décarboné sera coûteux à produire, de soutenir son usage direct plutôt que sa transformation en gaz de synthèse.
Par ailleurs, la faisabilité de l’injection sans risque d’un tel gaz de synthèse contenant un taux résiduel d’hydrogène dans un réseau de gaz naturel n’est pas encore démontrée.
Je sais que les gestionnaires de réseaux de gaz naturel réalisent des études à ce sujet. Je tiens d’ailleurs à compléter mon propos : le porteur de projet ayant indiqué que des études de faisabilité et de design étaient en cours concernant la méthanation et la purification notamment, il gagnera à déposer un nouveau dossier de candidature lorsque la maturité technique du projet sera mieux caractérisée. L’Ademe (Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, dite Agence de la transition écologique) avait d’ailleurs déjà partagé ses interrogations avec le porteur à la suite d’une réunion de préprojet, l’invitant à renforcer son dossier en conséquence avant dépôt.
La parole est à M. Stéphane Sautarel, auteur de la question n° 1569, adressée à Mme la ministre de la transition écologique.
Madame la secrétaire d’État, ma question porte sur les inquiétudes soulevées par la multiplication des projets d’implantation de parcs éoliens dans les territoires ruraux, en particulier dans le Cantal.
S’inscrire dans une logique de croissance des énergies renouvelables, j’y suis favorable, bien évidemment. En revanche, le faire de manière durable, harmonieuse et réfléchie serait un gage de confiance adressé aux élus de nos territoires, à nos concitoyens et à l’ensemble des acteurs économiques et agricoles.
Il est toujours paradoxal de voir débarquer à la hussarde des entreprises démarchant nos territoires, exigeant des rémunérations mirobolantes et faisant fi de l’acceptabilité sociale, environnementale et touristique de tels projets, tout cela, pour l’essentiel, sur le dos du contribuable français. Alors que les contraintes d’urbanisme ne cessent de limiter les prérogatives des communes, il semble qu’en l’espèce tout soit possible, en dehors de toute règle !
À écouter le Président de la République attester lui-même que « le consensus autour de l’éolien est en train de nettement s’affaiblir dans notre pays ». Mais sachant que l’on ne donne qu’un avis consultatif aux maires, même si le Sénat propose d’y remédier, et qu’on ignore les citoyens, comment s’étonner de la perte de confiance dans la cohérence de l’action publique territoriale ?
L’exemple du projet d’implantation d’éoliennes sur la commune de Cézens dans le Cantal témoigne, parmi tant d’autres, de ces ambiguïtés et de ces incohérences.
Cette commune, située au pied du Plomb du Cantal, à quelques pas de la vallée de Brezons, la plus belle vallée glaciaire d’Europe selon Haroun Tazieff, se voit imposer l’implantation d’un mât de mesure sans que les expressions municipales et locales aient été entendues.
Ces mesures vont s’étendre sur une durée comprise entre un et quatre ans. Comment la commune et son intercommunalité peuvent-elles, dans ces conditions, faire avancer sereinement leurs projets ? Comment les habitants peuvent-ils vendre leurs maisons avec cette épée de Damoclès au-dessus de leur tête ? Comment accueillir de nouvelles populations demandeuses de nos espaces et de nos paysages ?
Comment comptez-vous, madame la secrétaire d’État, redonner confiance aux territoires, à leurs élus et à leurs habitants et faire en sorte qu’une réelle pertinence et une réelle cohérence prévalent dans l’action publique en matière d’éolien ?
Par ailleurs, quand le Parlement va-t-il être enfin saisi du plan de programmation de l’énergie ? C’est nécessaire si l’on veut espérer mettre un terme à ces injonctions paradoxales et contradictoires.
Monsieur le sénateur Sautarel, vous nous interrogez sur la question de l’installation d’éoliennes en zone rurale et faites état des inquiétudes soulevées chez les élus locaux.
Vous le savez, nos objectifs climatiques exigent une électrification massive de notre économie pour réduire notre dépendance aux énergies fossiles. De fait, malgré nos efforts en matière d’efficacité énergétique, la consommation d’électricité va augmenter dans les années à venir ; il sera donc nécessaire de mettre en service de nouvelles installations de production d’électricité décarbonée.
Il est donc en effet crucial d’augmenter nos capacités de production d’énergie renouvelable électrique, mais dans la concertation et en favorisant l’acceptabilité des projets – je vous rejoins. L’éolien terrestre est une des énergies renouvelables les plus compétitives ; il contribue significativement à notre sécurité d’approvisionnement, enjeu clé. En 2019, le parc éolien français a permis d’éviter l’émission de 15 millions de tonnes de CO2, soit l’équivalent de la circulation annuelle de près de 8 millions de véhicules.
Ces éoliennes sont soumises à une réglementation stricte : elles doivent obtenir une autorisation environnementale préfectorale préalablement à leur implantation, afin de démontrer que les dangers et les inconvénients du projet pour les populations, la biodiversité et les paysages peuvent être prévenus. En particulier, tout développeur éolien fournit une analyse de l’impact paysager du projet – vous m’interpellez sur ce point également –, qui est incluse dans la demande d’autorisation.
Enfin, les projets éoliens doivent respecter les dispositions des documents d’urbanisme, en particulier celles du plan local d’urbanisme, le PLU, quand il existe. Pour mieux associer les riverains et les collectivités, il est surtout important de mieux planifier le développement de l’éolien en prenant en compte les spécificités locales. Le Gouvernement a récemment, par une instruction en date du 26 mai 2021, demandé à chaque préfet de région d’élaborer sous un an une cartographie des zones favorables au développement de l’éolien, afin de sécuriser l’atteinte des objectifs de la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE).
Il faut donc redéfinir ces zones dans la concertation la plus large. Quant à savoir à quelle date le Parlement sera saisi des questions de devenir de notre mix énergétique, la loi Énergie et climat de 2019 a introduit, à la demande du Sénat, le principe d’une loi quinquennale de programmation en matière d’énergie et de climat. La première loi quinquennale doit être promulguée avant le 1er juillet 2023, conformément à l’article L. 100-1 A du code de l’énergie. Elle fixera le cadre de la prochaine révision de la PPE, qui déclinera les objectifs ainsi précisés.
Pour ce qui est du mix énergétique et de la PPE, nous pouvons nous rejoindre sur les objectifs. En revanche, concernant le sort réservé à nos paysages lorsque l’éolien s’implante dans des territoires ruraux, en particulier dans des parcs naturels, la concertation doit encore être grandement améliorée. L’objectif de la PPE, c’est-à-dire le développement des énergies renouvelables, ne peut être recherché à l’exclusion de toute autre considération, d’autant que, compte tenu des durées engagées, ces dossiers font peser beaucoup d’inconnues sur nos territoires.
La parole est à M. Rémy Pointereau, auteur de la question n° 1585, adressée à Mme la ministre de la transition écologique.
Ma question concerne l’Office français de la biodiversité.
Nous tenions, au Sénat, lorsque l’OFB a été créé, à ce qu’il puisse travailler de concert avec les élus locaux. Les différents comptes rendus de réunions des commissions sénatoriales concernées en témoignent : nous voulions que l’Office exerce ses prérogatives en adoptant une sensibilité écologique équilibrée, mais surtout en bonne intelligence avec l’ensemble des acteurs de terrain, maires, agriculteurs, entreprises.
Malheureusement, dans les faits, les actions de l’OFB prennent souvent la forme de la répression, sans phase de médiation préalable. J’en veux pour preuve de nombreux exemples qui m’ont été rapportés. Ainsi une agricultrice a-t-elle reçu, pour avoir cessé d’irriguer une heure trop tard, une convocation en justice assortie d’une procédure d’enquête très musclée et d’un interrogatoire qui n’avait rien à voir avec les faits, tout cela sur simple dénonciation, sans preuve formelle et sans que l’intéressée soit avertie au moment des faits.
Autre exemple : le maire d’une commune rurale comprenant un étang communal créé voilà plus de trente-cinq ans, qui était géré, à l’époque, par la direction départementale de l’équipement (DDE) et financé par l’État, se voit convoquer en justice pour défaut de déclaration de prélèvements d’eau dans la nappe via le puits éolien qui y est installé.
Par conséquent, madame la secrétaire d’État, n’est-il pas opportun d’envisager, dans de tels cas, une étape de médiation préalable à la phase répressive ?
Monsieur le sénateur Pointereau, concernant ces relations entre les agents de l’Office français de la biodiversité et les élus locaux, je sais, en tant que ministre de tutelle – vous l’imaginez bien – le dévouement et l’implication de ces agents. Le travail de médiation qu’ils effectuent est nécessaire, au quotidien, dans des situations parfois extrêmement tendues sur le terrain. Nous ne devons pas laisser s’installer des incompréhensions ou des tensions qui seraient préjudiciables à l’obtention d’accords et d’équilibres soutenus par les élus locaux.
L’OFB contribue à la surveillance, à la préservation, à la gestion et à la restauration de la biodiversité ainsi qu’à la gestion équilibrée et durable de l’eau ; il exerce ses missions de connaissance, de recherche, de mobilisation de la société, de conseil, de financement, d’animation d’actions mais aussi – vous l’avez dit – de police en interagissant fortement avec les acteurs sur les territoires.
La mission de police de l’Office prend différentes formes ; elle consiste notamment en une contribution, à la demande des services déconcentrés de l’État, à l’instruction et à l’élaboration des prescriptions visant à ce que l’eau et la biodiversité soient prises en compte en amont de la réalisation des projets.
L’OFB intervient également dans le contrôle administratif, sous l’autorité des préfets, dans le cadre de plans de contrôle établis par les missions inter-services de l’eau et de la nature (Misen). Dans ce cadre, il peut effectuer un constat de situation, les éventuelles suites à donner en cas de non-conformité constatée relevant des services de l’État.
Pour ce qui est des procédures judiciaires, les inspecteurs de l’environnement de l’OFB, comme leurs homologues des services déconcentrés de l’État, agissent sous l’autorité des parquets. Ils instruisent sur saisine, en toute objectivité, comme le font d’autres officiers de police judiciaire. Les agents sont formés au respect des règles évidentes de déontologie et du principe d’une instruction à charge et à décharge.
En matière de police de l’eau et de la nature, les Misen sont un cadre d’échange entre l’opérateur et les services déconcentrés permettant de hiérarchiser les actions de contrôle en fonction des enjeux propres à chaque département et d’assurer la bonne coordination entre services. La bonne connaissance des milieux et des acteurs permet aux agents de l’OFB, qui sont souvent des personnalités locales, de tisser ce dialogue, cette concertation, ce partage, sur les enjeux de préservation de la biodiversité ; ainsi peut-on faire cesser les infractions et remettre en état les milieux.
Cela se traduit par des réglementations – je pense à la séquence « éviter, réduire, compenser » – et, parfois, par des suites administratives prises par le préfet ou par des suites judiciaires mises en œuvre par le parquet, mais toujours dans une visée d’amélioration des situations.
Les missions de police des agents de l’OFB sont indispensables à la préservation de l’environnement et à la lutte contre les pollutions. À cet égard, les agents sont pleinement engagés – je le sais – mais aussi à l’écoute de leurs territoires.
Je vous remercie de nous alerter sur certaines situations qui pourraient cristalliser des tensions, monsieur le sénateur ; nous devons absolument accompagner cette médiation et permettre à chacun de s’approprier les enjeux environnementaux tout en veillant au respect du droit, donc à l’efficacité des mesures de police.
Merci, madame la secrétaire d’État, pour votre réponse partielle. L’OFB et ses agents doivent agir avec discernement, et non jouer les gros bras comme c’est souvent le cas. Les élus ne sont pas au-dessus des lois, c’est vrai, mais ils ne sont pas non plus au-dessous !
Or ils ont trop fréquemment l’impression – d’autres citoyens, agriculteurs ou entrepreneurs condamnés pour des faits mineurs, sont d’ailleurs dans le même cas – d’être traités comme de vulgaires délinquants. Les faits incriminés, qui, encore une fois, sont mineurs, mériteraient que soit engagée une médiation plutôt qu’une répression et une procédure souvent lourde.
De grâce, madame la secrétaire d’État, faites passer le message aux agents de l’Office français de la biodiversité : qu’ils fassent preuve de discernement, vraiment ! Qu’ils cessent d’arriver sur le terrain l’arme au poing…
… pour condamner des élus qui font construire des fossés, par exemple, sans en avoir forcément l’autorisation.
La parole est à Mme Martine Filleul, auteure de la question n° 1690, adressée à Mme la ministre de la transition écologique.
Dans la nuit du 9 au 10 avril 2020, la digue d’un bassin de la sucrerie Tereos à Thun-Saint-Martin, dans le Nord, s’est rompue, engendrant la fuite de 90 000 mètres cubes d’eaux polluées dans l’Escaut.
Cet événement est une des pires catastrophes écologiques survenues dans la région depuis des décennies.
Selon l’Office français de la biodiversité, l’OFB, 12 millions de poissons sont morts – autrement dit, 70 % de la population piscicole a disparu – et 40 % de la flore a été détruite, sans compter le développement d’une espèce parasite.
Il ressort des conclusions du rapport analysant l’accident, d’une part, que l’entreprise Tereos n’aurait pas respecté la réglementation, l’entretien des bassins et digues n’étant pas satisfaisant, et, d’autre part, que la prise de conscience par les services de l’État de la gravité de la pollution aurait été trop tardive. En effet, les services compétents pour la qualité de l’eau n’ont pas été associés dès le début à la gestion de l’accident.
Aucune coordination des services de l’État n’a ensuite été mise en place pour organiser le suivi de la pollution. De plus, des acteurs qui auraient pu contribuer à la surveillance du milieu aquatique et à la gestion de ces conséquences n’ont été ni informés ni associés. Enfin, les autorités compétentes en Belgique n’ont pas été prévenues à temps.
Ces manquements successifs de l’entreprise et des services de l’État posent question.
Quels sont les moyens réels donnés à l’État pour contrôler le respect par les entreprises des mesures environnementales ? Comment mieux coordonner la réponse des services étatiques face à ce type de crise ?
Madame la sénatrice Filleul, vous m’interrogez sur la terrible pollution environnementale survenue le 10 avril 2020 sur le site de l’entreprise Tereos de Thun-Saint-Martin.
Nous avons été très sensibles à cet accident dramatique pour les milieux aquatiques. À la demande du ministère, une mission a été diligentée pour analyser cet incident et ses conséquences afin d’en dégager les retours d’expérience nécessaires. Les recommandations du rapport remis à cette occasion ont déjà été totalement prises en compte et, pour la plupart d’entre elles, complètement mises en œuvre.
Le préfet consolidera en un seul arrêté l’ensemble des obligations réglementaires du site, après examen par l’inspection des installations classées des études mises à jour par Tereos.
Un protocole définissant plus précisément le rôle des différents services de l’État en cas de pollution touchant les milieux aquatiques et impliquant pleinement l’Office français de la biodiversité (OFB) est en cours de finalisation.
Un comité de pilotage relatif à la restauration écologique de l’Escaut a été mis en place – il s’est déjà réuni trois fois – et associe toutes les parties prenantes, dont les riverains.
Par ailleurs, l’inspection des installations classées a inspecté chaque site agro-industriel des Hauts-de-France comportant d’importants bassins de lagunage dès 2020. La remise en eau des bassins, elle, n’a été autorisée qu’après la réalisation d’études et de travaux.
Concernant la question de la responsabilité pénale, une procédure judiciaire est en cours, qui devra déterminer les causes de l’accident, ainsi que les manquements imputables à l’exploitant. En parallèle, le préfet va engager la procédure en responsabilité environnementale de Tereos.
Dans ce cadre, Tereos a admis sa responsabilité sur le linéaire français. Cette procédure permettra de prescrire à l’exploitant les mesures de réparations environnementales adaptées après qualification des dommages causés par la pollution.
Après arrêté préfectoral et sur proposition d’un groupe d’experts intégrant les parties prenantes, sera présentée prochainement au conseil départemental de l’environnement et des risques sanitaires et technologiques (Coderst) du Nord une prescription de restauration des zones d’habitat propices à la reproduction piscicole sur plusieurs secteurs de l’Escaut.
Enfin, le ministère a mis en place un dispositif de vigilance renforcée pour les sites faisant l’objet d’incidents réguliers ou de non-conformité. Tereos en fera bien évidemment partie.
Vous m’informez des conclusions d’un rapport que je connaissais d’ores et déjà. Cette réponse me laisse donc partiellement insatisfaite. Je continue à m’interroger : qui paiera la note ?
La Cour des comptes européenne, dans un rapport spécial consacré au principe pollueur-payeur, souligne que ce sont souvent, en bout de chaîne, les citoyens de l’Union européenne qui paient la facture de ces dégâts environnementaux.
Quid également des moyens accordés par l’État pour contrôler les entreprises tant en amont, avant les accidents, qu’en aval, pour mesurer l’efficacité des mesures qu’elles mettent en place ?
L’entreprise Tereos met en œuvre des réparations, notamment par un rempoissonnement, dont on ne connaît pas l’effectivité…
La parole est à M. Jean-Marie Janssens, auteur de la question n° 1724, adressée à Mme la ministre de la transition écologique.
Depuis plusieurs années, les organismes publics, notamment ceux chargés de la gestion environnementale et de la gestion de l’eau, exercent une pression forte sur les propriétaires de moulins à eau et les communes possédant des moulins sur leur territoire.
Au nom de la continuité écologique, il leur est en particulier demandé de procéder à des travaux importants, dont l’arasement du vannage des moulins à eau, c’est-à-dire l’abaissement de la crête de l’ouvrage. Ces ouvrages sont, en effet, jugés responsables d’altérer le fonctionnement écologique et la biodiversité des rivières et cours d’eau.
Outre le fait que la prise en charge de ces travaux est hors de portée financière pour la plupart des propriétaires, il n’est pas établi que ces vannages soient à l’origine de la dégradation de la faune et de la flore constatée depuis quelques décennies dans nos rivières.
Au contraire, beaucoup d’acteurs locaux considèrent que la destruction des vannages des moulins entraîne des conséquences néfastes et irréversibles sur l’hydraulique des rivières. Elle s’accompagnera, selon eux, d’une réelle dégradation de la faune et de la flore.
Parmi ces conséquences, on relève l’accélération du courant, la modification des berges, l’aggravation des crues, ainsi que des étiages très importants en cas de manque de pluie.
Les vannages permettent, en effet, de stocker l’eau dans des zones humides ou inondables afin de prévenir les inondations en aval.
Il semble donc indispensable de repenser cette politique d’arasement et d’opérer des concertations locales les plus larges possible avant d’imposer des travaux coûteux dont l’intérêt semble discutable. Quelle est la position du Gouvernement sur ce sujet sensible dans beaucoup de départements ruraux ?
Monsieur le sénateur Janssens, vous m’interrogez sur les opérations réalisées sur les vannages des moulins, notamment sur les enlèvements de vannage dans le cadre de la restauration de la continuité écologique des cours d’eau.
C’est un débat que nous avons eu très largement ici même, ainsi qu’à l’Assemblée nationale, dans le cadre de l’examen du projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, dit « Climat et résilience ».
Vous le savez, et j’en suis d’ailleurs absolument désolée, de nombreuses incompréhensions ont amené les parlementaires à adopter une disposition qui exclut l’effacement des seuils comme solution de restauration des continuités écologiques, à la suite de quelques dossiers territoriaux litigieux qu’il aurait fallu réexaminer de plus près.
En tout état de cause, le réchauffement des eaux, la concentration des sédiments et des pollutions, le remplacement d’espèces d’eau courante par des espèces plus banales, adaptées aux eaux stagnantes, la disparition d’habitats diversifiés liée à la variation des niveaux d’eau d’une rivière courante et dynamique, tout cela a des impacts au niveau écologique. Chaque seuil génère des difficultés. Il est donc nécessaire de travailler à ces rétablissements de continuité écologique, comme le cadre européen nous l’impose.
Les blocages plus ou moins importants des sédiments dans les retenues engendrent des déficits en aval, avec des dégâts plus importants lors des crues. En effet, l’énergie de l’eau n’est plus dissipée par le transport des sédiments et des cailloux.
Retirer des vannages obsolètes lorsque le propriétaire ne souhaite plus investir dans leur préparation, leur gestion et leur entretien au quotidien était une option avantageuse à la fois pour l’écologie et pour le propriétaire. C’est d’ailleurs un point sur lequel la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable du Sénat, dans le cadre de l’examen du projet de loi Climat et résilience, était tombée d’accord.
L’effacement des seuils est donc une option qui n’existe plus dans le cadre dudit projet de loi puisqu’elle a été supprimée ici même au Sénat, et que texte a été adopté en commission mixte paritaire cette nuit sans cette disposition.
Il faudra donc trouver des solutions d’entretien et de gestion performantes du point de vue environnemental pour assurer cet objectif de restauration des continuités, même si ces dernières sont plus coûteuses.
Je demeure évidemment à l’écoute des différents porteurs de projet. J’ai d’ailleurs proposé que nous nous retrouvions à l’automne, après l’examen des consultations sur les schémas directeurs d’aménagement et de gestion des eaux (Sdage), pour une concertation avec les acteurs des territoires et les élus, au premier rang desquels les parlementaires impliqués sur ces questions, afin d’évoquer dans le cadre d’une médiation nationale les situations les plus complexes.
Je vous remercie, madame la secrétaire d’État. J’espère que nous obtiendrons davantage de résultats, car il s’agit d’un problème très important.
La parole est à Mme Monique de Marco, auteure de la question n° 1651, adressée à Mme la ministre de la transition écologique.
Madame la secrétaire d’État, j’ai été alertée du problème engendré par une demande de plan de gestion qui menace gravement le mode de gestion appliqué depuis des siècles dans la forêt usagère de 3 800 hectares de La Teste de Buch, située au pied de la dune du Pilat en Gironde, et qui est classée Natura 2000 et zone naturelle d’intérêt écologique, faunistique et floristique (Znieff).
Cette forêt est régie depuis le XVe siècle par un mode de gestion particulier défini par un ensemble de conventions dit « des baillettes et transactions ». Il s’agit d’un statut unique en Europe, qui élève les arbres au rang de bien commun mis à la disposition de la population locale.
Leur prééminence sur le droit forestier a été rappelée en 1983 par la Cour de cassation. Cette décision avait réaffirmé qu’est « interdite toute coupe de bois qui ne serait pas autorisée par les syndics généraux de la forêt usagère, et ce exclusivement dans le cadre de l’exercice des droits d’usage ».
Or il est parvenu à la ministre de la transition écologique une demande d’agrément pour un plan simple de gestion. Si le ministère l’approuve, ce plan sera non conforme à cette gestion ancestrale. Une telle approbation ouvrirait la porte à une exploitation généralisée et mutilante de la forêt, et mettrait fin à ce mode de gestion vertueux et respectueux de l’environnement, en place depuis plus de cinq cents ans.
Depuis des siècles, l’absence d’exploitation sylvicole industrielle préserve l’intégrité génétique des pins et permet la conservation des habitats de la faune, faisant de cette forêt usagère un écosystème riche.
Connaissant l’intérêt que porte Mme la ministre à la protection de l’environnement et au respect de la biodiversité, je souhaite donc lui demander de ne pas accorder l’agrément de ce plan de gestion et de réaffirmer la prééminence des baillettes et transactions sur le droit forestier.
Madame la sénatrice de Marco, vous m’interrogez sur la protection de la forêt usagère de La Teste de Buch, située sur le site classé de la dune du Pilat, laquelle bénéficie effectivement d’un mode de gestion très atypique remontant au régime contractuel dit « des baillettes et transactions », datant du XVe siècle.
Ce site classé constitue un espace naturel littoral très sensible et fragile, qui se caractérise par la diversité de la végétation. Ce mode de gestion sylvicole très original, fondé sur ces droits d’usages ancestraux, constitue un élément du patrimoine culturel local. Il explique aussi, d’ailleurs, la richesse écologique de cette forêt, qui mérite d’être préservée.
Au titre du site classé, l’instruction de la demande d’approbation de ce plan de gestion auquel vous faites référence a fait l’objet d’avis favorable par les services de l’État et de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites.
C’est dans ce cadre que l’accord du ministère pour l’autorisation de ce plan de gestion au titre du site classé a été sollicité, sans préjudice, je le rappelle, de l’application en forêt usagère du système de droit privé qui prévoit que les représentants des usagers donnent aussi leur accord.
J’ai bien conscience de l’émotion suscitée localement par la perspective de l’autorisation de ce plan de gestion au titre du site classé. Il est primordial que la situation s’apaise et que chacun puisse exercer ses droits et usages sur cette zone.
Nous avons donc choisi de surseoir à toute décision sur ce plan de gestion et de diligenter une mission d’inspection, qui formulera des propositions pour concilier la protection de ce patrimoine forestier naturel et culturel original avec les enjeux de résilience des peuplements forestiers, dans un contexte de changement climatique et de maîtrise des risques incendie.
Nous nous intéresserons également aux modalités de gouvernance et de dialogue à adopter dans ce contexte très spécifique de la forêt usagère. Nous serons donc tout à fait mobilisés et pleinement attachés au respect de ces enjeux.
Je remercie Mme la ministre d’avoir accepté de surseoir à ce plan de gestion et d’avoir diligenté une concertation au niveau local.
Nous en avons terminé avec les réponses à des questions orales.
Mes chers collègues, l’ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à douze heures quarante-cinq, est reprise à quatorze heures trente, sous la présidence de M. Pierre Laurent.