Séance en hémicycle du 16 février 2012 à 15h00

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • d’égalité
  • inégalité
  • l’entreprise
  • l’égalité
  • l’égalité salariale
  • partiel
  • salariale

La séance

Source

La séance, suspendue à douze heures quarante-cinq, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Jean-Pierre Raffarin.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

Il va être procédé à la nomination de sept membres titulaires et de sept membres suppléants de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi relative à l’organisation du service et à l’information des passagers dans les entreprises de transport aérien de passagers et à diverses dispositions dans le domaine des transports.

La liste des candidats établie par la commission des affaires sociales a été affichée conformément à l’article 12 du règlement.

Je n’ai reçu aucune opposition.

En conséquence, cette liste est ratifiée et je proclame représentants du Sénat à cette commission mixte paritaire :

Titulaires : Mme Annie David, MM. Claude Jeannerot et Georges Labazée, Mmes Patricia Schillinger, Marie-Thérèse Bruguière, Isabelle Debré et Catherine Procaccia ;

Suppléants : M. Gilbert Barbier, Mme Caroline Cayeux, MM. Jean Desessard et Jean-Léon Dupont, Mme Colette Giudicelli, M. Ronan Kerdraon et Mme Gisèle Printz.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

Je rappelle au Sénat que M. le Premier ministre a demandé au Sénat de bien vouloir procéder à la désignation d’un sénateur appelé à siéger au sein de la Commission consultative de suivi des conséquences des essais nucléaires.

La commission des affaires sociales a fait connaître qu’elle propose la candidature de Mme Michelle Demessine pour siéger au sein de cet organisme extraparlementaire.

Cette candidature a été affichée et sera ratifiée, conformément à l’article 9 du règlement, s’il n’y a pas d’opposition à l’expiration du délai d’une heure.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

L’ordre du jour appelle la discussion, à la demande du groupe socialiste et apparentés, de la proposition de loi relative à l’égalité salariale entre les hommes et les femmes, présentée par Mme Claire-Lise Campion et les membres du groupe socialiste et apparentés (proposition n° 230, texte de la commission n° 342, rapport n° 341, rapport d’information n° 334).

Dans la discussion générale, la parole est à Mme Claire-Lise Campion, auteur de la proposition de loi et rapporteur de la commission des affaires sociales.

Debut de section - PermalienPhoto de Claire-Lise Campion

Monsieur le président, madame la ministre, madame la présidente de la commission des affaires sociales, madame la présidente de la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes, madame la rapporteur de la délégation, mes chers collègues, le préambule de la Constitution de 1946 prévoit, certes, que « la loi garantit à la femme, dans tous les domaines, des droits égaux à ceux de l’homme » et le code du travail réaffirme, depuis 1972, le principe de l’égalité de rémunération. Pourtant, aujourd’hui encore, on observe un écart de rémunération de l’ordre de 25 à 27 % entre les femmes et les hommes. Qui plus est, cet écart considérable a cessé de se réduire depuis le milieu des années quatre-vingt-dix.

Les femmes, dans l’ensemble, exercent des métiers moins qualifiés que les hommes et connaissent aussi des interruptions de carrière plus fréquentes, liées notamment à la maternité, ce qui freine leur progression dans l’entreprise et réduit leurs primes d’ancienneté.

De plus, on constate une inégalité entre les femmes et les hommes en matière de temps de travail. En effet, le travail à temps partiel, le plus souvent subi, concerne les femmes dans 80 % des cas, et, en moyenne, les femmes effectuent moins d’heures supplémentaires et complémentaires que leurs collègues masculins.

La précarité, grandissante en période de crise, touche majoritairement les femmes, qui occupent 60 % des contrats à durée déterminée et voient se multiplier les contrats de moins de quinze heures de travail par semaine. Le phénomène des « travailleurs pauvres » touche fréquemment les femmes, plus particulièrement celles qui élèvent seules leurs enfants.

Ces disparités pendant la carrière professionnelle conduisent à des écarts de revenus considérables une fois le temps de la retraite arrivé.

Pourtant, les dispositions législatives en faveur de l’égalité n’ont pas manqué au cours des quarante dernières années : loi du 13 juillet 1983 portant modification du code du travail et du code pénal en ce qui concerne l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, dite « loi Roudy » ; loi du 9 mai 2001 relative à l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, dite « loi Génisson » ; loi du 16 novembre 2001 relative à la lutte contre les discriminations ; loi du 23 mars 2006 relative à l’égalité salariale entre les femmes et les hommes et, plus récemment encore, la loi du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites en son article 99.

À l’évidence, notre arsenal législatif est très complet, mais il manque une réelle volonté de le faire appliquer !

Les auditions auxquelles j’ai procédé en ma qualité de rapporteur l’ont confirmé : l’égalité entre les femmes et les hommes n’est pas une priorité pour les partenaires sociaux !

En effet, si l’on considère le bilan de la négociation collective pour l’année 2010, on constate que seules trente-sept branches professionnelles sur plus d’un millier ont signé un accord spécifique sur l’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes et qu’une centaine d’accords de branche abordent la thématique.

De surcroît, sur les trente-sept accords spécifiques dont je parle, dix-sept ont été étendus avec des réserves par le ministère du travail, parce qu’ils se contentaient d’établir un diagnostic en renvoyant aux entreprises le soin de définir les mesures de suppression des écarts. Certains accords, en effet, se bornent à rappeler les dispositions légales, sans aucune plus-value pour la résorption des inégalités entre les hommes et les femmes…

Au niveau des entreprises, le bilan de la négociation collective est également décevant : en 2010, un peu plus de deux mille accords ont abordé la question de l’égalité professionnelle, soit moins de 9 % du nombre total d’accords signés. Le plus souvent, l’égalité professionnelle est traitée en même temps que d’autres thèmes, dans le cadre des négociations annuelles obligatoires.

Mme la présidente de la commission des affaires sociales acquiesce.

Debut de section - PermalienPhoto de Claire-Lise Campion

L’examen des rapports de situation comparée fournit une autre illustration du manque d’investissement des entreprises sur les questions d’égalité.

En effet, depuis l’adoption de la loi du 13 juillet 1983, la loi Roudy, les entreprises qui comptent plus de trois cents salariés doivent élaborer un rapport annuel de situation comparée des conditions générales d’emploi et de formation des femmes et des hommes en leur sein.

Ces rapports sont très utiles pour établir un diagnostic sur les inégalités dans l’entreprise. Pourtant, les contrôles menés par l’inspection du travail montrent que l’obligation d’établir ce rapport de situation comparée n’est respectée que par 45 % des entreprises concernées…

Bien sûr, au sein de toutes les organisations syndicales comme au sein des organisations d’employeurs, des hommes et des femmes se mobilisent sur ces questions d’égalité. Et, désormais, personne ou presque ne se déclare opposé à l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes. Mais il manque une impulsion pour que les partenaires sociaux s’emparent véritablement du sujet et mettent en œuvre une action concrète et déterminée en faveur de l’égalité. Ma conviction est que cette impulsion devrait venir du politique. Or, malheureusement, au cours des dernières années, le Gouvernement a singulièrement manqué d’ambition en la matière…

J’en veux pour preuve le décret du 7 juillet 2011 pris pour l’application de l’article 99 de la loi du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites. Cet article a prévu que le rapport de situation comparée devrait comporter, à partir du 1er janvier 2012, un plan d’action destiné à assurer l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes et comportant des objectifs ainsi que les mesures prévues pour les atteindre.

Les entreprises n’ayant ni plan d’action ni accord collectif sur l’égalité professionnelle s’exposent à une pénalité, dont le montant représente au maximum 1 % de leur masse salariale.

Au départ, l’introduction de cette pénalité avait été perçue comme une avancée. Malheureusement, à considérer le décret pris par le Gouvernement, on a la forte impression que tout a été fait pour qu’elle soit appliquée le plus rarement possible...

En effet, une entreprise qui n’est pas couverte par un accord ou par un plan d’action sur l’égalité professionnelle, d’abord mise en demeure par l’inspection du travail, dispose de six mois pour régulariser sa situation. C’est seulement à l’expiration de ce délai que la pénalité peut être appliquée, de surcroît sans effet rétroactif.

En outre, le montant de la pénalité peut être modulé par l’administration en fonction de la gravité des manquements constatés. La pénalité peut même être supprimée si l’entreprise invoque des difficultés économiques.

Au total, la pénalité introduite par la loi du 9 novembre 2010 constitue davantage une mesure d’affichage qu’une disposition réellement dissuasive. Nous sommes nombreux à avoir le sentiment que le Gouvernement nous a trompés en affaiblissant la portée d’une mesure qu’il a lui-même proposée il y a deux ans !

J’ajoute que les obligations prévues par la loi du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites sont elles-mêmes en retrait par rapport aux objectifs fixés par la loi du 23 mars 2006 relative à l’égalité salariale entre les femmes et les hommes.

En effet, cette dernière loi avait prévu que les écarts de rémunération devraient être supprimés à la date du 31 décembre 2010. Comme il n’en a rien été, la loi portant réforme des retraites a purement et simplement fait disparaître cette date butoir et renvoyé à plus tard la réalisation de cet objectif !

Debut de section - PermalienPhoto de Claire-Lise Campion

Aujourd’hui, aucun délai n’est plus fixé pour la résorption des écarts de rémunération entre les hommes et les femmes.

Pour donner une dernière illustration du peu d’intérêt que le Gouvernement porte à la question de l’égalité professionnelle, je rappelle que, dans la loi de finances pour 2012, la dotation du programme « Égalité entre les hommes et les femmes » a subi une très forte diminution, passant de 5, 5 millions d’euros pour 2011 à 4, 9 millions d’euros pour 2012.

En conséquence, le Gouvernement prévoit de financer seulement cent trente-trois contrats pour la mixité des emplois et l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, contre cent soixante-cinq l’an dernier. Les subventions versées aux différents intervenants en matière d’emploi, notamment dans le tissu associatif, connaissent également une diminution très sensible.

Dans ce contexte, la proposition de loi déposée par le groupe socialiste que nous examinons cet après-midi prévoit deux mesures fortes destinées à relancer la négociation collective.

D’abord, dans le cadre de la négociation annuelle sur les salaires, les entreprises devront conclure un accord sur l’égalité salariale entre les femmes et les hommes. Faute d’un tel accord, elles perdront le bénéfice, d’une part, de l’exonération de cotisations sociales sur les bas salaires, d’autre part, de toutes les réductions d’impôt prévues par le code général des impôts.

Ensuite, les entreprises qui ne transmettraient pas le rapport de situation comparée à l’inspection du travail dans un délai de quinze jours après l’avis du comité d’entreprise ou des délégués du personnel, seront soumises à une pénalité équivalente à 1 % de leur masse salariale.

Ces deux mesures me paraissent de nature à inciter les entreprises à engager, enfin, une politique déterminée de réduction des inégalités salariales entre les hommes et les femmes. La commission des affaires sociales, considérant que les obligations édictées par le code du travail sont restées trop souvent lettre morte faute de sanctions dissuasives, les a approuvées, tout en y apportant des améliorations de forme.

Comme je l’ai précédemment indiqué, la présente proposition de loi introduit une condition que devront remplir les entreprises pour continuer à bénéficier de l’allégement de cotisations sur les bas salaires. Compte tenu du coût de cette dernière mesure pour les finances publiques – environ 20 milliards d’euros –, il ne me paraît pas anormal que l’État fixe quelques contreparties à la charge des entreprises.

Vous l’avez compris, mes chers collègues, cette proposition de loi porte essentiellement sur l’égalité salariale : elle vise à garantir que les hommes et les femmes perçoivent la même rémunération pour un même travail ou pour un travail de valeur égale. Ce texte ne suffira donc pas à rétablir la justice entre les genres et devra être complété, à l’avenir, par d’autres mesures, afin de répondre à l’ensemble des problèmes que rencontrent les femmes au cours de leur carrière. Accès à l’emploi et à la formation, promotion professionnelle, conditions de travail, articulation entre vie professionnelle et responsabilités familiales sont autant de thèmes sur lesquels il nous faudra avancer.

Le rapport que notre collègue Michelle Meunier a remis, au nom de la délégation aux droits des femmes, contient de nombreuses recommandations dont nous pourrions nous inspirer.

Je suis particulièrement sensible à la proposition de lancer un vaste plan interministériel de lutte contre les inégalités professionnelles piloté par un véritable ministère chargé de l’égalité entre les femmes et les hommes.

Ce plan devra comporter des mesures très concrètes, par exemple, une campagne de sensibilisation aux discriminations dont sont victimes les femmes, un soutien à la négociation collective afin de faciliter la conclusion d’accords, ainsi qu’une réforme du congé parental.

Ce plan devra aussi s’attacher à déconstruire certains stéréotypes qui demeurent tenaces, y compris dans la sphère privée, où le partage des tâches est loin d’être équitable… Ces stéréotypes continuent de peser sur les choix d’orientation des jeunes filles et les cantonnent dans certains métiers, qui ne sont généralement pas les plus rémunérateurs et qui sont réputés exiger des qualités dites « féminines ».

Ces mêmes stéréotypes éloignent aussi les femmes des postes de responsabilité et d’encadrement : dans l’imaginaire collectif, le pouvoir est encore trop souvent associé à une figure masculine et les responsables masculins ont parfois tendance à reproduire ce schéma lorsqu’ils décident d’une promotion, par exemple.

Ces phénomènes expliquent une part importante de l’écart de rémunération entre les femmes et les hommes. Ils continuent à faire sentir leurs effets y compris dans la sphère politique, où les partis ont, à mon avis, un devoir d’exemplarité qui devrait se manifester au moment où sont attribuées les investitures pour les élections législatives, notamment…

Je souhaite également que nous nous penchions sur le problème de l’inégalité entre les hommes et les femmes dans le domaine du travail à temps partiel. Je l’ai dit, 80 % des salariés qui exercent une activité à temps partiel sont des femmes qui, le plus souvent, n’ont pas choisi de travailler en horaires réduits. Dans certains secteurs – citons la grande distribution ou les services à la personne –, le travail à temps très partiel se développe ; souvent, il est associé à un morcellement qui provoque de grandes amplitudes horaires, ce qui crée de vraies difficultés pour les salariées qui ont des responsabilités familiales à assumer. Je pense notamment aux mères qui élèvent seules leurs enfants.

C’est la raison pour laquelle, au nom de la commission, je soutiendrai l’amendement déposé par les sénateurs de mon groupe qui vise à limiter le recours excessif au travail à temps partiel dans les entreprises.

Enfin, au cours de notre réflexion, nous ne devrons pas négliger la question de l’égalité professionnelle dans la fonction publique.

Les règles d’avancement et de rémunération des fonctionnaires sont apparemment neutres dès lors qu’elles répondent à des grilles indiciaires. Pourtant, les femmes ont tendance à bénéficier de promotions moins rapides, lorsque celles-ci sont faites au choix et non à l’ancienneté, notamment parce que l’on reproche aux mères de famille leur moindre disponibilité. Ce constat nous rappelle que l’égalité professionnelle restera inaccessible tant que nous n’aurons pas obtenu, au sein du couple, un meilleur partage des tâches domestiques et des responsabilités familiales.

En conclusion, je le répète une fois encore, l’égalité salariale ne deviendra une réalité que si apparaît une forte volonté politique en ce sens. La présente proposition de loi est la première traduction de ce volontarisme que nous appelons de nos vœux. Elle vise à envoyer un signal fort aux partenaires sociaux et à rouvrir le débat sur l’égalité salariale et professionnelle entre les femmes et les hommes.

Certes, elle devra être complétée par d’autres mesures, mais elle répond déjà, j’en suis persuadée, aux attentes de millions de nos concitoyennes et de nos concitoyens qui sont confrontés tous les jours à des inégalités et à des injustices dans le cadre de leur activité professionnelle.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

La parole est à Mme la présidente de la délégation aux droits des femmes.

Debut de section - PermalienPhoto de Brigitte Gonthier-Maurin

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la proposition de loi que nous examinons ce jour nous permet d’évoquer l’égalité professionnelle et salariale entre les hommes et les femmes, qui est au cœur de l’émancipation des femmes.

Simone de Beauvoir insistait déjà en 1949, dans Le Deuxième Sexe, sur la place centrale occupée par le travail dans l’émancipation de la femme : « C’est le travail, écrivait-elle, qui peut seul lui garantir une liberté concrète. Dès qu’elle cesse d’être une parasite, le système fondé sur la dépendance s’écroule ». Encore faut-il que les revenus que la femme en tire lui permettent d’accéder à une véritable autonomie et ne se limitent pas à la seule fonction de « salaire d’appoint ».

Certes, en un demi-siècle, les femmes ont massivement investi le monde du travail, ce qui constitue, en soi, un progrès considérable. En 1962, seulement 42 % des femmes âgées de vingt-cinq à quarante-neuf ans travaillaient et nombre d’entre elles interrompaient leur activité au moment de la naissance des enfants. Aujourd’hui, c’est le taux d’activité des femmes en âge d’avoir des enfants qui a le plus progressé, pour s’établir à 84 %. Ce doublement ne s’est pas effectué au détriment de la natalité, la France se situant au deuxième rang de l’Union européenne en matière de fécondité.

Mais cette émancipation des femmes par le travail est un processus inachevé et les signes d’une stagnation, voire d’une dégradation de la situation se sont multipliés au cours des dix dernières années. Les nouvelles formes d’organisation du travail, plus flexibles, mais aussi source de plus de précarité, débouchent sur de nouvelles problématiques auxquelles nous devons nous montrer attentifs dans une perspective « genrée ». C’est pourquoi j’ai proposé à notre délégation aux droits des femmes de se donner cette année le thème de réflexion suivant : « Femmes et travail ».

Certes, les femmes représentent aujourd’hui près de la moitié de la population active française – exactement 47, 7 % –, mais, par rapport à l’emploi masculin, l’emploi féminin présente trois handicaps.

Le premier handicap tient au temps de travail. En 2009, les femmes représentaient 82 % des salariés exerçant une activité à temps partiel, lequel est d’ailleurs plus souvent subi que choisi. La crise économique actuelle a aggravé cette situation. Cela se traduit par une forte augmentation du travail à temps partiel, une réduction du nombre d’heures travaillées, le développement des horaires flexibles, la multiplication des contrats pour une même personne, avec pour conséquence la montée de la précarité et de la pauvreté.

Or le travail ne peut plus être considéré comme un facteur d’émancipation des femmes dès lors qu’il ne leur permet plus de vivre décemment, dignement.

Le deuxième handicap tient à la segmentation de l’emploi féminin. Près de la moitié des emplois occupés par des femmes sont concentrés dans dix familles de métiers – évidemment pas les plus rémunérateurs – sur les quatre-vingt-six existantes.

Le troisième handicap relève d’une ségrégation verticale : c’est le fameux phénomène du « plafond de verre ».

La conjugaison de ces différents facteurs explique que les femmes gagnent, en moyenne, 27 % de moins que les hommes. Mais elle n’explique ce fait qu’en partie, car, selon les économistes qui ont cherché à pondérer le poids respectif de ces éléments, 6 % du différentiel resteraient inexpliqués et correspondraient à l’effet des discriminations.

Cette infériorité des parcours professionnels féminins pouvait trouver une explication voilà quelques années au regard du moindre niveau d’éducation des femmes. Ce n’est plus le cas aujourd’hui ! Le fait que la réussite scolaire et universitaire des filles n’ait pas eu raison de l’inégalité professionnelle et salariale témoigne de l’injustice dont sont victimes les femmes et plaide en faveur d’une politique volontariste.

De fait, l’organisation de la société reste profondément régie par un mode patriarcal.

La loi du 27 janvier 2011 relative à la représentation équilibrée des femmes et des hommes au sein des conseils d’administration et de surveillance et à l’égalité professionnelle ainsi que certaines des dispositions du projet de loi relatif à l’accès à l’emploi titulaire et à l’amélioration des conditions d’emploi des agents contractuels dans la fonction publique que l’Assemblée nationale vient de voter vont ouvrir des brèches dans le « plafond de verre ». Mais ces avancées ne doivent pas nous distraire des enjeux cruciaux des négociations relatives à l’égalité salariale.

Négocier au niveau des branches et des entreprises, établir un rapport de situation comparée, toutes ces obligations constituent des leviers, mais encore faut-il qu’elles soient respectées. Or, elles le sont trop peu, faute d’être assorties de sanctions. La loi portant réforme des retraites en a certes créé, mais les dispositions d’application prises par le Gouvernement en ont sérieusement amoindri la portée et font douter de la volonté de les faire appliquer.

Les sanctions fortes contenues dans la proposition de loi que nous examinons donneront, en revanche, un signal clair de la volonté de la représentation parlementaire de voir enfin effectivement appliqué un dispositif depuis longtemps consacré par la loi.

D’autres leviers doivent également être envisagés : la délégation aux droits des femmes formule sept recommandations, que vous présentera notre rapporteure, Michelle Meunier.

Il est important, particulièrement dans la crise économique que nous traversons, que nous agissions pour relancer la dynamique de l’égalité professionnelle, seule à même d’assurer aux femmes cette autonomie économique sans laquelle il n’est pas de véritable émancipation. Faire droit à l’égalité professionnelle et salariale des femmes constituerait bien, de surcroît, un levier de relance efficace de la croissance.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC, du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

La parole est à Mme la rapporteur de la délégation aux droits des femmes.

Debut de section - PermalienPhoto de Michelle Meunier

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, effectivement, près de trente ans après la loi Roudy, dix ans après la loi Génisson, plus de cinq ans après la loi du 23 mars 2006, les femmes perçoivent aujourd'hui encore une rémunération inférieure de 25 à 27 % à celle de leurs homologues masculins.

Vous l’aurez compris, en matière d’égalité salariale et, plus largement, en matière d’égalité professionnelle, l’enjeu, à l’heure actuelle, est moins de produire de nouvelles lois que de faire appliquer celles qui existent !

La délégation aux droits des femmes, qui m’a désignée rapporteure de la proposition de loi que nous examinons, a toujours mis le sujet de l’égalité professionnelle au cœur de ses préoccupations.

En 2002, elle consacrait son rapport d’activité aux inégalités salariales entre les femmes et les hommes ; en 2004, elle procédait à une première évaluation et à un contrôle de l’application de la loi du 9 mai 2001 relative à l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes et en dressait un bilan mitigé ; en 2008, elle dédiait son rapport annuel à l’orientation et à l’insertion professionnelle.

Dans la continuité de ces travaux, elle vient de rendre un rapport d’information sur l’égalité salariale entre les femmes et les hommes, à l’occasion de l’examen de la proposition de loi présentée par Claire-Lise Campion, Michèle André, Catherine Génisson, François Rebsamen et les membres du groupe socialiste et apparentés, que je félicite de nous avoir donné la possibilité d’ouvrir de nouveau ce débat.

Le constat dressé dans notre rapport s’inscrit dans la continuité de celui qui avait été établi en 2004 par notre délégation : l’égalité professionnelle, plus particulièrement salariale, ne fait pas partie des sujets prioritaires des entreprises, lesquelles se sont très peu emparées des dispositifs légaux qui s’imposent pourtant à elles.

Quelques chiffres suffiront à vous donner un aperçu de la faible application de la loi : en 2010, selon les données du ministère du travail, sur environ 400 entreprises de plus de 300 salariés, moins de la moitié avaient transmis un rapport de situation comparée à l’inspection du travail, alors que ce rapport est obligatoire depuis 1983 !

Cela signifie que nous ne disposons toujours pas à l’heure actuelle de statistiques fiables sur les conditions générales d’emploi et de formation des femmes et des hommes dans l’entreprise.

Quant à la négociation collective obligatoire, selon les mêmes sources, seulement 37 branches sur plus de 1 000 étaient parvenues à un accord spécifique et on évalue à 2 000 entreprises celles qui ont conclu un accord spécifique à l’égalité salariale et professionnelle en 2010.

Face à ce maigre bilan, certains parlementaires ont estimé que l’introduction de la menace d’une pénalité financière était devenue inévitable si l’on voulait réellement faire appliquer la loi.

C’est l’objet de l’article 99 de la loi portant réforme des retraites, qui prévoit une sanction équivalente à 1 % de la masse salariale, des rémunérations et gains bruts versés par l’entreprise, à l’encontre des entreprises d’au moins cinquante salariés qui n’auraient pas conclu d’accord d’égalité professionnelle ou, à défaut, qui n’auraient pas défini les objectifs et les mesures constituant un plan d’action pour obtenir l’égalité professionnelle.

Toutefois, comme l’a souligné l’auteure de la proposition de loi, le décret d’application du 7 juillet 2011 et la circulaire du 28 octobre 2011 ont largement réduit la portée de cette pénalité.

Non seulement les entreprises contrevenantes, si elles sont contrôlées, disposeront d’un délai de six mois pour transmettre un plan d’action, mais, surtout, la circulaire confie aux directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi, les DIRECCTE, le soin de moduler la sanction financière de 1 %, si bien que certaines entreprises contrevenantes pourront en être dispensées si elles justifient de difficultés économiques, ou même de leur bonne foi…

Enfin, le chef d’entreprise peut fournir un plan d’action unilatéral à défaut d’accord portant sur les salaires : nombre de syndicats dont nous avons rencontré les représentants y ont vu la remise en cause du dialogue social en matière d’égalité professionnelle.

Notre délégation ne peut se contenter de ce dispositif, applicable, je vous le rappelle, depuis le 1er janvier de cette année. Elle a donc accueilli avec une grande satisfaction le dépôt puis l’inscription à l’ordre du jour de la proposition de loi aujourd’hui soumise à notre examen.

Les sanctions que le texte prévoit sont très lourdes et certains d’entre nous, même au sein de la délégation, se sont interrogés sur leur caractère réaliste.

Pourtant, dans une matière où l’on n’obtiendra pas d’avancées sans un changement des comportements, la délégation estime qu’il faut envoyer un signal fort aux acteurs de l’entreprise.

À titre liminaire, il me semble essentiel de rappeler l’esprit général qui a présidé à la formulation de nos recommandations.

D’une part, les inégalités de salaires entre les femmes et les hommes sont l’aboutissement d’une accumulation d’inégalités de traitement et de pratiques discriminatoires qui font partie intégrante de la politique sociale des entreprises.

D’autre part, ces inégalités ont des conséquences graves pour les droits qui se rattachent à la rémunération, tels que les droits à l’assurance maladie, à l’assurance chômage ou à la retraite, et expliquent donc, en grande partie, le maintien des femmes dans la pauvreté.

Le traitement de cette question repose, par conséquent, sur une approche globale, que la délégation a adoptée pour formuler ses recommandations.

Tout d’abord, nous souhaitons que toutes les entreprises de plus de cinquante salariés remettent le rapport écrit qui donne la mesure réelle des conditions générales d’emploi et de formation des femmes et des hommes en leur sein : trop peu d’entreprises rédigent un rapport de situation comparée, et, quand elles le font, le document n’est souvent qu’une paraphrase des dispositions légales ou un amoncellement de chiffres inexploitables...

La délégation demande donc au Gouvernement de lancer, dans le cadre d’un plan interministériel de lutte contre les inégalités professionnelles, une campagne d’information à destination des entreprises, des organisations syndicales, des chambres de commerce et d’industrie, des chambres de métiers et des chambres d’agriculture pour leur rappeler la réglementation applicable et leur faire connaître les supports méthodologiques disponibles.

Nous nous sommes intéressés ensuite aux modalités de négociation des conditions salariales, puisqu’il revient aux partenaires sociaux de proposer des mesures concrètes pour résorber les écarts de salaires.

Comment s’étonner que les organisations syndicales soient peu mobilisées, quand on sait que les femmes ne représentent que 22 % de leurs membres, ce chiffre tombant à 14, 1 % au sein des organisations patronales ?

Les organisations syndicales ne sont pas opposées à ce que, par la loi, nous imposions une représentation plus équilibrée des femmes au sein des instances professionnelles chargées de veiller à la mise en œuvre du dispositif.

Mme le ministre fait un signe dubitatif.

Debut de section - PermalienPhoto de Michelle Meunier

Notre délégation souhaite faire en sorte que les listes de candidature aux élections au comité d’entreprise et à la délégation du personnel permettent une représentation proportionnelle des femmes et des hommes, reflétant leur poids respectif au sein des effectifs. Elle est ouverte à une discussion pour trouver la meilleure méthode permettant de mettre en œuvre cette proposition.

La délégation a ensuite souhaité prendre en compte les inégalités salariales propres à la tranche d’âge des vingt-cinq – quarante ans, car pèse sur les femmes le « soupçon » de la maternité. À ce moment-là, les femmes sont particulièrement fragiles dans l’entreprise et sont moins armées pour faire face aux discriminations.

La délégation souhaite, d’une part, qu’un suivi obligatoire de la personne qui a interrompu son travail pour maternité soit mis en place. Un entretien avant la reprise d’activité lui permettrait d’être informée des changements qui ont eu lieu dans son service pendant son absence et ainsi de mieux préparer son retour.

La délégation envisage, d’autre part, les modalités de prise en charge du droit à la formation pendant le congé parental. Vous le savez, l’article L.1225-56 du code du travail prévoit le droit à une telle formation, mais aux frais de l’intéressé, ce qui en limite l’accès à celles et ceux qui peuvent se le permettre.

J’insiste sur ce point : on ne résoudra la question des inégalités salariales que de manière globale.

À l’instar du plan interministériel de lutte contre les violences faites aux femmes, dont vous avez lancé le troisième volet le 13 avril dernier, madame la ministre, la délégation souhaite le lancement d’un plan interministériel de lutte contre les inégalités professionnelles.

Ce plan traduira une double ambition : maintenir une vigilance collective soutenue ; structurer un réseau territorial de soutien à la négociation collective de branche et d’entreprise qui s’appuiera sur les DIRECCTE ainsi que sur les réseaux des déléguées régionales aux droits des femmes, et qui associera tous les acteurs concernés, dont les collectivités territoriales et le réseau associatif présent sur les territoires.

Ce plan prévoira un calendrier précis, s’appuiera sur des référents désignés sur les territoires et des moyens suffisants, permettant de mettre en œuvre des actions précises et d’en contrôler les résultats effectifs dans le cadre d’un rapport annuel public.

La délégation est ouverte à la discussion avec votre ministère, madame la ministre, pour envisager le lancement de ce plan.

Par ailleurs, ce sont les administrations déconcentrées qui mettent en œuvre quotidiennement les dispositifs relatifs à l’égalité professionnelle et salariale. Nous regrettons qu’à l’heure actuelle le réseau déconcentré des DIRECCTE et les déléguées régionales aux droits des femmes auprès du secrétariat général pour les affaires régionales, le SGAR, ne concertent pas leurs actions.

Associer les déléguées régionales au sein du SGAR aux missions des DIRECCTE en leur confiant, par exemple, des programmes communs d’action pourrait s’inscrire dans le cadre des programmes régionaux stratégiques actuellement mis en place par le service des droits des femmes et de l’égalité entre les femmes et les hommes.

Pour conduire ce plan d’envergure nationale, il manque aujourd’hui un pilotage fort au niveau national.

La délégation a toujours appelé de ses vœux la création d’un ministère aux droits des femmes qui aurait la légitimité politique pour impulser et imposer une nouvelle politique publique d’envergure nationale. Nous reprenons donc ce souhait exprimé de longue date.

À défaut, l’installation d’un ou d’une déléguée interministérielle à l’égalité des femmes et des hommes rattachée aux services du Premier ministre permettrait d’identifier une personne dont l’autorité est reconnue comme référent de la politique publique en faveur de l’égalité professionnelle.

Enfin, la délégation estime qu’en qualité de parlementaires mais aussi en tant qu’élus locaux, nous devons nous montrer vigilants à l’égard des mauvaises pratiques des entreprises qui ignorent, délibérément ou non, leurs obligations légales en matière d’égalité professionnelle et salariale.

La Charte européenne pour l’égalité entre les femmes et les hommes dans la vie locale prévoit, en particulier, l’intégration de la dimension du genre dans toutes les politiques et les activités des collectivités. Je vous invite à vous engager en ce sens, chers collègues, vous qui êtes nombreux à exercer des responsabilités dans la vie locale.

En conclusion, je vous propose de saisir l’opportunité qui nous est donnée avec l’inscription de cette proposition de loi à l’ordre du jour du Sénat pour fixer des objectifs ambitieux aux partenaires sociaux.

Car, derrière la question spécifique de l’égalité salariale entre les femmes et les hommes, c’est celle plus large, d’un équilibre sociétal qui est posée.

Il s’agit de bâtir une société plus juste, plus équilibrée et davantage respectueuse des temps de vie professionnelle, personnelle et familiale dont doivent profiter les femmes, les hommes, mais également les enfants de notre pays.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre des solidarités et de la cohésion sociale

Monsieur le président, madame la présidente de la commission des affaires sociales, madame la présidente de la délégation aux droits des femmes, madame la rapporteure de la commission, madame la rapporteure de la délégation, mesdames les sénatrices, messieurs les sénateurs, c’est la troisième fois cette semaine que nous nous retrouvons pour parler d’égalité entre les hommes et les femmes, et je m’en réjouis.

Je vous remercie de vous saisir une nouvelle fois de cette question essentielle qu’est l’égalité salariale entre les femmes et les hommes. J’y vois un signe fort de votre volonté, comme d’ailleurs de celle de vos collègues députés, d’encourager de nouvelles initiatives afin de faire progresser cette égalité de manière concrète.

Un constat s’impose et, à cet égard, je partage le diagnostic qui a été fait par les trois oratrices précédentes, tout particulièrement celui de Claire-Lise Campion et de Brigitte Gonthier-Maurin, auquel sont venues s’ajouter les observations de Michelle Meunier. Je vais redire à mon tour les chiffres car, plus on les martèle, plus on en pénètre l’opinion publique.

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre

Comme l’indiquent les données pour 2006 de la Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques, la DARES, les salaires des femmes sont inférieurs de 27 % à ceux des hommes, tous temps de travail confondus. En prenant en compte uniquement les salaires des travailleurs à temps complet, le salaire net annuel moyen d’une femme était, dans le secteur privé ou semi-public, inférieur de 19, 2 % à celui d’un homme en 2008.

Un tel constat au XXIe siècle est inacceptable, pour vous, mesdames, messieurs les sénateurs, comme pour le Gouvernement. C'est pourquoi nous devons faire en sorte que l’égalité salariale entre les hommes et les femmes devienne une réalité de la vie de nos concitoyennes mais aussi, il faut le dire, de nos concitoyens.

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre

Nous pensons que, pour cela, il faut d’abord se concentrer sur la mise en œuvre des textes existants, et ils sont nombreux.

Nous le savons, le principe de l’égalité de rémunération entre les femmes et les hommes est inscrit dans le code du travail depuis 1972. Oui, c’est bien la loi du 22 décembre 1972, il y a donc quarante ans, qui a introduit le principe « à travail égal, salaire égal ».

Ensuite, en 1983, on a rendu obligatoire l’élaboration d’un rapport de situation comparée dans les entreprises d’au moins cinquante salariés.

En 2010, la négociation sur l’égalité professionnelle au niveau des branches a gagné en qualité bien qu’elle continue à baisser en quantité. Ainsi, cinquante-quatre accords de branche évoquent la problématique de l’égalité professionnelle, contre soixante-quinze en 2009, trente-quatre en 2008 et vingt-quatre en 2007. Trente-sept accords de branche traitent spécifiquement de ce thème, contre trente-quatre en 2009, dix-neuf en 2008 et neuf en 2007.

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre

Je partagerai volontiers le constat de Michelle Meunier : les partenaires sociaux ne se sont pas vraiment saisis de cette question, pourtant capitale.

Il s’agit du quatrième thème de négociation au niveau de la branche. Nous avons constaté que le nombre d’accords déclaratifs était en diminution et qu’un réel effort était fait dans la programmation d’actions concrètes en matière d’égalité professionnelle et salariale.

Le constat est donc en demi-teinte. Entre 2007 et 2010, la part des accords étendus faisant l’objet d’une réserve de la part de l’administration a diminué de moitié : en 2007, 86 % des accords étaient étendus avec réserve, contre seulement 46 % en 2010. Toutefois, en 2011, la direction générale du travail a refusé l’extension de deux accords de branche qui se contentaient de rappeler les dispositions légales.

N’oublions pas le rôle joué par le réseau des présidents de commissions mixtes paritaires, qui apporte un soutien en fournissant des précisions sur le thème de l’égalité professionnelle et salariale aux branches négociant sur le sujet.

Au niveau de l’entreprise, plus de 2 124 accords ont été signés en 2010 par les délégués syndicaux ou les salariés mandatés, ce qui place l’égalité professionnelle au sixième rang des thèmes de négociation. Le nombre d’accords est assez variable suivant les années, avec 2 522 accords en 2009, 1 723 en 2008 et 1 214 en 2007. Les évolutions se font donc avec une assez grande amplitude selon les années.

La loi du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites, qui a été évoquée par les trois oratrices précédentes, institue, à compter du 1er janvier 2012, une pénalité financière pour les entreprises d’au moins 50 salariés qui ne sont pas couvertes par un accord collectif - un accord d’entreprise et non de branche -, ou, à défaut d’accord, par un plan d’action relatif à l’égalité professionnelle.

Cette pénalité, qui constitue un mécanisme unique en Europe, peut atteindre jusqu’à 1 % des rémunérations et gains versés aux travailleurs salariés ou assimilés.

Les modalités de contrôle du dispositif prévues par le décret d’application du 28 octobre 2011 ont été précisées dans une circulaire du même jour.

Première étape, l’autorité administrative, c'est-à-dire l’inspecteur ou le contrôleur du travail, vérifie l’existence d’un accord ou, à défaut, d’un plan d’action d’une entreprise entrant dans le champ d’application de la pénalité.

Lors du contrôle de l’entreprise, l’agent doit vérifier que l’accord ou le plan d’action intégré au rapport contient effectivement des objectifs de progression, des actions permettant de les atteindre et des indicateurs chiffrés de suivi. Selon la taille de l’entreprise, cela porte sur deux ou trois des huit domaines d’actions suivants : embauche, formation, promotion professionnelle, qualification, classification, conditions de travail, rémunération effective, articulation entre vie professionnelle et vie familiale.

Deuxième étape, l’entreprise dispose de six mois pour négocier ou compléter son accord collectif sur l’égalité professionnelle ou, à défaut d’accord, pour établir ou améliorer son plan d’action. Ces documents sont transmis à l’inspecteur ou au contrôleur du travail par lettre recommandée avec accusé de réception. Cette période permet de donner le temps à l’entreprise de mettre en place des actions efficaces, opérationnelles et suivies en faveur de l’égalité.

Troisième étape, pour les entreprises qui n’auraient pas régularisé la situation, c’est la DIRECCTE, sur la base des éléments transmis par l’inspecteur du travail, qui fixe le taux de la pénalité. Le taux de 1 % est un maximum et il sera possible de moduler en fonction de la situation objective de l’entreprise.

À ce jour, il est trop tôt pour faire une évaluation du dispositif, qui n’est entré en vigueur, je le rappelle, que le 1er janvier dernier.

En matière d’égalité salariale entre les femmes et les hommes, il y a donc eu des avancées réelles.

Cela étant, je l’ai dit devant la délégation, l’enjeu aujourd’hui n’est pas d’élaborer de nouvelles lois. Nous avons un corpus législatif qui est l’un des plus complets, sinon le plus complet parmi ceux des pays comparables au nôtre.

J’en viens à la proposition de loi, qui est composée d’un article unique comportant quatre alinéas.

Le deuxième alinéa prévoit de sanctionner l’absence d’accord collectif en faveur de l’égalité salariale. Ainsi, toute entreprise qui ne serait pas couverte, à compter du 1er janvier 2013, par un accord visant à définir et programmer les mesures permettant de supprimer les écarts de rémunération entre les femmes et les hommes se verrait ôter le bénéfice des allégements et exonérations de cotisations sociales prévus par le code de la sécurité sociale, ainsi que des réductions d’impôt prévues par le code général des impôts.

Cet alinéa fixe donc une obligation de conclure un accord, sans possibilité de passer par un plan unilatéral. À défaut d’accord, la totalité des exonérations serait supprimée.

Je tiens à dire qu’une telle sanction serait inconstitutionnelle au regard des principes de liberté conventionnelle et de proportionnalité des sanctions.

Par ailleurs, un tel dispositif est redondant, puisque la proposition de loi ne supprime pas pour autant la pénalité de 1 % de la masse salariale issue de la loi portant réforme des retraites pour les entreprises non couvertes à compter du 1er janvier 2012 par un accord ou un plan d’action.

À la différence du dispositif issu de la loi portant réforme des retraites qui exige – je l’ai rappelé – que les accords aient un contenu précis pour satisfaire à l’obligation légale, la proposition de loi est silencieuse sur ce point. Ainsi, un accord purement déclaratif pourrait exonérer l’entreprise de la suppression des cotisations, ce qui n’est pas le cas pour la pénalité de 1 %.

Le dispositif est également redondant, car le délit d’entrave est toujours dans notre panoplie, qui punit d’un an d’emprisonnement et de 3 750 euros d’amende le non-respect de l’obligation annuelle de négocier sur l’égalité entre les femmes et les hommes prévue à l’article L. 2243-2 du code du travail.

En outre, le mécanisme de conditionnalité des allégements de charges prévu par la proposition de loi reposerait en pratique sur la déclaration par l’employeur du non-respect de son obligation de négocier sur l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, au plus tard lors de la remise du tableau récapitulatif adressé aux URSSAF l’année suivante.

Il ferait reposer sur les inspecteurs des URSSAF la charge du contrôle du respect d’obligations du code du travail et nécessiterait la mise en place d’une procédure complexe d’échanges entre les services des unités territoriales qui enregistrent les accords, les services de l’inspection du travail compétente pour contrôler le respect des obligations légales et les services des URSSAF.

Mesdames, messieurs les sénateurs, j’entre dans les détails techniques, mais il faut bien mesurer, me semble-t-il, le poids des obligations qui seraient imposées aux entreprises.

Enfin, le poids des allégements et exonérations sociales variant fortement selon les secteurs – faible dans l’industrie, élevé dans les services, notamment dans le commerce – et la taille de l’entreprise, la sanction risquerait de se révéler inadaptée par rapport à l’objectif visé et source d’une rupture d’égalité injustifiable.

Le quatrième alinéa de la proposition de loi prévoit la mise en place d’une pénalité financière de 1 % de la masse salariale pour toute entreprise qui n’aurait pas transmis à l’inspecteur du travail le rapport de situation comparée entre les femmes et les hommes accompagné de l’avis des institutions représentatives du personnel.

Aujourd’hui, les entreprises de 300 salariés et plus doivent, conformément aux dispositions de l’article L. 2323-57 du code du travail, soumettre pour avis aux institutions représentatives du personnel un rapport écrit sur la situation comparée des femmes et des hommes. Le fait de ne pas respecter cette obligation est constitutif du délit d’entrave et donc puni, comme je le disais, d’un emprisonnement d’un an et d’une amende de 3 750 euros.

En application de l’article L. 2323-58 du code du travail, les entreprises de 300 salariés et plus doivent transmettre à l’inspection du travail le rapport de situation comparée, modifié, le cas échéant, pour tenir compte de l’avis motivé du comité d’entreprise, dans les quinze jours qui suivent cet avis. Cette absence de transmission par l’entreprise ne fait l’objet d’aucune sanction.

Outre son caractère manifestement disproportionné, la sanction proposée apparaît également redondante par rapport au mécanisme de pénalité issu de la loi portant réforme des retraites, les plans d’actions élaborés par les entreprises devant figurer dans les rapports de situation comparée transmis à l’inspection du travail.

Le Gouvernement ne peut donc souscrire à ce texte, même s’il reconnaît la nécessité d’aller de l’avant, car les inégalités touchant encore les femmes sont une réalité.

Cela a été rappelé, les emplois à temps partiel concernent majoritairement les femmes.

En 2009, alors que 30, 1 % des femmes salariées travaillaient à temps partiel, seuls 6, 7 % des hommes salariés étaient dans cette situation. Depuis 1980, comme je le rappelais hier devant la délégation, la part des femmes parmi les travailleurs à temps partiel est toujours supérieure à 80 %.

Le temps consacré aux tâches domestiques est de 3 heures et 48 minutes pour les femmes et de 1 heure et 59 minutes pour les hommes. En vingt ans, la participation des hommes a augmenté de quelques minutes, ce dont nous ne pouvons que nous féliciter, car tout progrès est bon à prendre ! Mais, disons-le, messieurs, il y a là d’évidentes marges de progression…

L’accès aux postes à responsabilités demeure difficile pour les femmes. Le rapport de situation comparée ne serait élaboré que dans 45 % des cas.

Les inégalités, donc, ne manquent pas, et elles touchent chaque sphère de la vie.

Pour y remédier, je suis convaincue depuis fort longtemps qu’il faut aborder la question de l’égalité entre les femmes et les hommes de manière globale, afin d’apporter des réponses favorisant l’égalité.

Le Gouvernement s’est mobilisé sur cette question. Nous avons fait voter la loi Copé-Zimmermann de janvier 2011 pour féminiser les conseils d’administration et de surveillance des grandes entreprises. Cette loi ne concerne que peu de femmes, certes, mais sa valeur symbolique est importante et les résultats sont au rendez-vous. S’agissant des entreprises concernées, le taux de féminisation est passé de 10, 5 % en 2009 à 20, 8 % en 2011, et ce alors que les mesures de coercition ne sont pas encore entrées en application ! Voilà un phénomène d’autoréalisation que nous devons à l’exemplarité de ce texte.

Accompagner les entreprises vers l’égalité professionnelle, c’est aussi faire en sorte que les femmes puissent créer leur entreprise. Là encore, l’État s’engage. Dans cette perspective, nous avons créé un fonds de garantie pour la création, la reprise et le développement des entreprises à l’initiative des femmes afin de leur permettre d’accéder aux crédits bancaires.

Ce fonds, doté de 3, 6 millions d’euros en 2011 et de 4, 7 millions d’euros en 2012 – j’ai voulu cette augmentation de 30 % de ses crédits – par le Fonds de cohésion sociale géré par la Caisse des dépôts et consignations, est en pleine croissance.

Alors que, en 2008, ce sont 744 garanties qui avaient été accordées, leur nombre a doublé en 2011 : ces 1 501 garanties représentent 1 961 emplois créés.

C’est précisément pour encourager ce type d’initiatives que je viens de signer avec la Caisse des dépôts et consignations l’accord-cadre en faveur de l’entreprenariat féminin.

Mais si nous voulons que les femmes puissent créer leur entreprise, il faut leur permettre de mieux concilier leur vie professionnelle et leur vie familiale. C’est pourquoi le Président de la République a décidé de lancer un plan de développement de la garde d’enfants afin de créer 200 000 solutions de garde. Les objectifs quantitatifs de ce plan sont tenus et nous les aurons donc atteints à la fin du quinquennat.

Nous devons bien sûr encourager les initiatives, récompenser les entreprises et les organismes qui s’engagent en faveur de l’égalité professionnelle.

Le « Label Égalité » apporte une réponse concrète non seulement aux attentes des salariés en matière d’égalité professionnelle, mais également aux enjeux de performance économique et sociétale. Les entreprises comme les salariés l’ont bien compris. À ce jour, ce sont 47 organismes, regroupant plus d’un demi-million de salariés, qui bénéficient de ce label, né en 2004.

Pour le Gouvernement, il s’agit aussi de diffuser très tôt auprès des enfants, garçons et filles, une culture de l’égalité. Nous le savons bien, les stéréotypes de genre s’enracinent très précocement dans les mentalités et ils ont la vie dure, comme l’ont rappelé les oratrices qui m’ont précédée. Diffuser une culture de l’égalité à l’école, c’est tout l’objet de la convention interministérielle sur l’égalité entre les filles et les garçons.

Il faut aussi associer les médias à la démarche. C’est pourquoi j’ai pérennisé en 2011 la commission sur l’image des femmes dans les médias, présidée par Michèle Reiser. Cette dernière m’a remis en décembre dernier un rapport très intéressant dans lequel elle souligne la nécessité de continuer à dénoncer les stéréotypes pour mieux les combattre.

Dans la même perspective, j’ai confié à Chantal Jouanno une mission sur l’hypersexualisation des filles, notamment dans la publicité. Je lirai avec beaucoup d’attention ses recommandations pour mieux sensibiliser les parents et la communauté éducative de l’enfant à cette question.

Enfin, je vais signer, le 6 mars prochain, la charte sur le respect de l’image de la personne humaine dans la publicité avec l’Autorité de régulation professionnelle de la publicité.

Il importe de diffuser une culture de l’égalité dans la fonction publique aussi. L’État doit jouer un rôle exemplaire pour briser le « plafond de verre ». Je veux saluer ici l’engagement de François Sauvadet sur le sujet : la mesure qu’il porte a été adoptée, à la quasi-unanimité, par l’Assemblée nationale. Il s’agit d’instaurer progressivement, d’ici à 2018, un quota de 40 % de femmes parmi les hauts fonctionnaires, actuellement très majoritairement des hommes.

Plus largement, l’État a conçu un plan d’action interministériel pour l’égalité entre les femmes et les hommes qui sera officiellement présenté le 8 mars, à l’occasion de la Journée internationale de la femme.

Ce plan vise à garantir l’égalité à tous les niveaux et dans toutes les politiques. En effet, la question de l’égalité est de la responsabilité non seulement des pouvoirs législatif et exécutif, mais aussi, bien entendu, de l’ensemble du corps social !

Pour ma part, comme je l’ai d'ailleurs dit aux organisations syndicales, avec lesquelles j’ai eu des échanges approfondis, je serais tout à fait favorable à l’accession du principe de parité à la qualité de critère de représentativité dans le dialogue social.

À ce sujet, Michelle Meunier a cité des chiffres édifiants sur la faible représentation des femmes dans les organisations syndicales.

Après tout, beaucoup d’organismes représentatifs participant à la gestion de la Nation pourraient s’imposer ce que nous nous sommes imposé, ce que le corps politique s’est lui-même imposé !

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Génisson

Ce que certains partis se sont imposé, voulez-vous dire !

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre

Au risque de tempérer l’optimisme de Michelle Meunier, je dois dire que je n’ai pas rencontré un franc succès en évoquant ce point devant les organisations syndicales : ces dernières ont estimé qu’il n’y avait, globalement, pas de problème.

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre

À l’heure où nous voulons que l’égalité entre les femmes et les hommes existe non plus seulement dans les principes, mais aussi dans les faits, j’ai la profonde conviction que la solution n’est pas d’ajouter une nouvelle loi aux textes qui existent déjà.

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre

Nous le savons, il faut gagner la bataille des esprits pour faire advenir une révolution des mentalités.

Pour cela, il faut développer nos politiques publiques, …

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. … pour les rendre toujours plus ambitieuses et, ainsi, changer concrètement les comportements.

Applaudissementssur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, à l’évidence, dans cet hémicycle, nous partageons tous le même constat sur la situation d’inégalité salariale entre les femmes et les hommes et nous souhaitons tous, à l’instar des auteurs de la présente proposition de loi, voir enfin l’écart de rémunération se réduire, mieux, disparaître.

En effet, force est de constater que, si les textes sur l’égalité salariale se succèdent, les écarts de rémunération entre les hommes et les femmes, eux, restent stables depuis la fin des années quatre-vingt-dix.

Alors que le taux d’activité des femmes entre quinze et soixante-quatre ans est de 84 %, un homme touchait, en 2010, un salaire brut supérieur en moyenne de 26 % à celui de son homologue féminine, à poste équivalent. Surtout, plus inquiétant, les derniers chiffres de l’INSEE montrent un creusement de l’écart de revenu pour les vingt-cinq à cinquante-cinq ans, tranche d’âge sensible, car c’est dans ces années-là que les femmes doivent gérer l’articulation entre vie familiale et vie professionnelle.

Cette tendance est alarmante.

Certes, la crise économique que nous traversons est d’une extrême gravité. Certes, les entreprises souffrent et doivent s’adapter. Mais nous devons faire preuve d’une très grande vigilance afin que les ajustements, quand ils touchent à la gestion des ressources humaines, ne se fassent pas au détriment des catégories les plus fragiles, dont les femmes font malheureusement encore trop souvent partie.

Comme le disait Édouard Herriot, « il est plus facile de proclamer l’égalité que de la réaliser ».

M. Alain Gournac approuve.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

En la matière, il faut bien, hélas ! s’y résoudre, les déclarations de bonnes intentions et les incitations ne peuvent à elles seules produire un résultat probant : l’exemple de la loi tendant à favoriser l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives, dite « loi sur la parité », nous le rappelle.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

Lorsque les mesures incitatives peinent à produire leurs effets, vient le temps où la coercition s’impose. Les auteurs de la proposition de loi dont nous débattons s’inscrivent dans cette démarche.

Cette coercition, nous en avions envisagé la nécessité dès 2006. Lors de l’examen au Sénat de la loi du 23 mars 2006 relative à l’égalité salariale entre les femmes et les hommes, j’avais déposé, avec les membres de mon groupe, un amendement visant à ce qu’une contribution assise sur les salaires soit applicable aux entreprises qui n’auraient pas satisfait, à l’issue d’un délai de cinq ans, à l’engagement de négociations sérieuses et loyales prévues à l’article L. 132-27-2 du code du travail.

En effet, une nouvelle intervention du législateur, visant à mettre en place un mécanisme coercitif en cas d’échec des négociations, me paraissait alors inutilement lourde, puisque nous pouvions, dès 2006, inscrire, en quelque sorte par précaution, une possibilité de sanction dans la loi. Hélas ! les faits nous ont donné raison.

Nous avons dressé un bilan plutôt pessimiste, à l’occasion de la question orale avec débat sur le sujet dont notre groupe avait obtenu l’inscription à l’ordre du jour du 20 décembre 2010 de la Haute Assemblée. D'ailleurs, je regrette que les précédents orateurs n’aient pas mentionné cette étape utile dans la réflexion, notamment pour notre délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les femmes et les hommes.

À l’époque, j’avais déjà dénoncé l’absence de progrès en matière d’égalité salariale et fait des propositions pour relancer une dynamique en la matière. Ces propositions rejoignent au demeurant celles que formule aujourd'hui notre délégation.

Les chiffres du rapport d’information que vient de publier cette dernière confirment ce constat. Si un rapport de situation comparée est bien établi par 45 % des entreprises de plus de 400 salariés, son contenu n’est vraiment intéressant et force de propositions que dans, au mieux, 15 % des cas ; 37 accords de branche traitent spécifiquement de l’égalité professionnelle et seulement 2 000 entreprises déclarant un délégué syndical ont signé un accord collectif abordant la question de l’égalité professionnelle.

Du reste, le Gouvernement a pris acte de cet échec puisqu’il a jugé bon, lors de la discussion du projet de loi portant réforme des retraites, de proposer un mécanisme de sanction. C’est l’objet de l’article 99 de la loi du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites, lequel prévoit d’instituer une sanction financière à l’encontre de toutes les entreprises d’au moins 50 salariés qui n’auraient pas conclu d’accord d’égalité professionnelle

Mme Michèle André marque son scepticisme.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

Nous attendions beaucoup de ce dispositif. Toutefois, force est de constater que l’économie en a été fortement compromise par le décret d’application.

Ainsi, en vertu du décret du 7 juillet 2011 et de la circulaire du 28 octobre 2011, les entreprises pourront encore disposer d’un délai de six mois après la constatation de la carence pour se mettre en conformité avec la loi. La sanction sera modulable en fonction des « efforts constatés », l’entreprise pouvant même en être totalement dispensée par l’autorité administrative si celle-ci le juge opportun.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

De plus, le nombre d’indicateurs sur la situation comparée des femmes et des hommes dans l’entreprise est abaissé à trois, ce qui, bien sûr, réduit considérablement la portée du texte.

J’y suis d’autant plus sensible que j’ai fait adopter dans la loi portant réforme des retraites un amendement réécrivant la description du plan d’action et mettant en exergue le fait qu’il soit « fondé sur des critères clairs, précis et opérationnels » et qu’il détermine « la définition qualitative et quantitative des actions permettant de les atteindre et l’évaluation de leur coût ».

Cet amoindrissement de la portée de la loi est regrettable et préoccupante. Il nous amène, à l’instar des auteurs de la présente proposition de loi, à considérer qu’il faut corriger cette dérive.

Toutefois, la solution qui nous est proposée offre elle aussi matière à interrogation. En effet, le présent texte nous semble à la fois incohérent sur le plan juridique et inadapté.

Comme l’a rappelé Mme la ministre, cette proposition de loi se présente sous la forme d’un article unique comprenant deux parties, correspondant à deux dispositifs. Notons d'ailleurs que le premier d’entre eux reprend un amendement d’origine communiste, adopté - je m’en souviens, car j’étais présente -, à l’occasion de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2012 ; c’est Mme Pécresse qui, ce jour-là, représentait le Gouvernement dans l’hémicycle. Les décrets d’application étaient alors en cours d’élaboration.

Or, dans la rédaction actuelle du texte, l’articulation de ces deux dispositifs semble quelque peu problématique.

Les deux premiers alinéas proposent, ni plus ni moins, la suppression des allégements de charges pour les entreprises non couvertes par un accord relatif à l’égalité salariale. Vous en conviendrez, il s’agit là d’une véritable bombe atomique pour les entreprises !

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

Les deux alinéas suivants sanctionnent d’une pénalité équivalente à 1 % du montant de la masse salariale les employeurs qui ne transmettraient pas le rapport de situation comparée à l’inspecteur du travail.

Dans la mesure où la négociation d’un accord prévu par le premier dispositif repose nécessairement sur le constat et les propositions contenus dans le second, est-il nécessaire de cumuler ces deux sanctions ?

Il y a lieu de s’interroger sur l’opportunité de la première de ces deux sanctions, telle qu’elle est formulée. En effet, les femmes elles-mêmes pourraient en être les premières victimes. Leurs salaires étant souvent faibles, elles bénéficient grandement des dispositifs d’allégements de charges.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

N’y aurait-il pas un paradoxe à pénaliser très fortement les entreprises qui les emploient ?

Enfin, dans le texte que vous proposez, chers collègues, les entreprises ne pourront conserver leurs allégements de charges que si elles sont couvertes par un accord d’égalité salariale.

Dans la pratique, les négociations de ce type peuvent se dérouler de manière moins simple. Que se passerait-t-il si aucune des organisations syndicales ayant pris part à une négociation n’acceptait au final de signer l’accord ? Il ne s’agit pas d’un simple cas d’école : une telle situation pourrait concerner des accords de très bonne qualité.

Autrement dit, il nous semble qu’il faut être plus pragmatique. Avec ma collègue Valérie Létard, nous vous proposerons un amendement en ce sens, tendant à ce que les allégements de charges ne soient supprimés que pour les entreprises qui n’auront pas mis au point un projet d’accord, que ce dernier ait ou non été signé.

Au-delà, il me semble important d’insister sur la nécessité de réécrire le décret d’application du 7 juillet 2011, dans le sens d’une plus grande fermeté, conformément à la volonté exprimée par le législateur lors des débats parlementaires.

En effet, il importe que, du fait de la latitude d’appréciation laissée à l’autorité administrative, les entreprises ne soient pas amenées à penser que le montant de la sanction serait toujours négociable ou évitable. De même, un large panel de leviers d’action doit être pris en compte pour évaluer la situation de l’entreprise, le nombre de ces leviers devant être proportionnel à la taille de celle-ci.

Madame la ministre, j’aimerais que vous puissiez nous apporter des assurances quant à la réécriture de ce décret, dont, le 20 décembre dernier, vous aviez ici même souligné l’importance, en déclarant qu’« un peu de contrainte ne nuit pas à la conviction ».

Nous ne doutons pas de votre mobilisation sur le sujet ; vous nous l’avez encore prouvée tout à l'heure. Cela me laisse d'ailleurs penser que vous n’avez sans doute pas été assez entendue au moment de l’arbitrage interministériel…

Il est désormais impératif que le Gouvernement s’engage à publier un décret « offensif », qui corresponde véritablement à ce que les parlementaires ont voulu, et ont voté.

Mes chers collègues, il me semble que nous disposons aujourd'hui de l’arsenal législatif nécessaire et qu’il nous faut privilégier l’efficacité des mesures déjà votées – très récemment, d'ailleurs – par rapport à l’inapplicabilité d’un texte dont Mme la ministre vient de souligner l’inconstitutionnalité.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Cohen

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, après l’examen, ce lundi, de la proposition de résolution sur les violences faites aux femmes, la thématique du droit des femmes est, pour la deuxième fois cette semaine, à l’ordre du jour de notre assemblée, et ce quelques jours avant la fin de nos travaux en séance publique.

C’est la preuve que ce thème sera au cœur des campagnes à venir et, surtout, qu’il y a, en la matière, encore beaucoup à faire.

En effet, alors que Nicolas Sarkozy promettait en 2007 de faire avancer l’égalité entre les femmes et les hommes, force est de constater que, dans ce domaine comme dans tant d’autres, et contrairement à ce qu’a dit Mme la ministre, le bilan est maigre, pour ne pas dire inexistant. D'ailleurs, si ce n’était pas le cas, nous ne serions pas réunis cet après-midi pour débattre de cette proposition de loi relative à l’égalité salariale entre les hommes et les femmes.

La droite a aggravé la situation des femmes de notre pays : manque de moyens pour faire appliquer la loi relative aux violences faites spécifiquement aux femmes ; recul de la parité au travers de la terrible et antidémocratique réforme des collectivités ; recul sur le droit à disposer de son corps via l’attaque de notre système de santé et la fermeture de maternités et de centres d’interruption volontaire de grossesse ; aggravation des conditions de vie du fait de la crise et des politiques libérales, dont les premières victimes sont les femmes ; retrait de la date butoir pour la suppression des différences de rémunération entre les femmes et les hommes. Et je pourrais citer d’autres exemples.

Dès lors, il n’est pas étonnant de constater que, selon le rapport annuel du Forum économique mondial consacré à la question des inégalités entre les sexes, la France vient une nouvelle fois de rétrograder, passant, pour les écarts de salaire, du cent vingt-septième au cent trente et unième rang – sur cent trente-cinq pays ! – et, entre 2009 et 2011, pour l’accès des femmes à l’éducation, la participation économique et les responsabilités politiques, de la dix-huitième à la quarante-huitième position.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Cohen

Mme Laurence Cohen. Le moins que l’on puisse dire est que l’on n’avance pas sur cette question. On peut même dire que l’on recule…

Mme la ministre manifeste un certain découragement.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Cohen

Je voulais, par ces quelques exemples, restituer le contexte peu glorieux dans lequel nous débattons de la proposition de loi déposée par nos collègues socialistes.

Je tiens d’ailleurs à saluer la qualité des auditions réalisées au sein de la commission affaires sociales et de la délégation aux droits des femmes.

Si certains peuvent penser secrètement qu’il s’agit encore d’une énième loi pour l’égalité salariale, c’est bien parce que nous sommes toujours loin du compte, malgré, effectivement, une certaine abondance législative en la matière. La loi Roudy a marqué en ce sens une importante étape historique et fondatrice, malheureusement peu suivie d’effets. Les chiffres que mes collègues ont déjà cités illustrent à l’envi la situation d’inégalité professionnelle que vivent les femmes.

Ce leitmotiv de l’égalité salariale, ce serpent de mer, cette arlésienne est tout sauf la lubie de quelques féministes, c’est un droit, une nécessité pour le bien-être de chacun et de chacune !

Comme le souligne l’économiste Françoise Milewski, le « soupçon » qui pèse sur les femmes d’être avant tout des mères, ou de futures mères, amène l’employeur à considérer que leur motivation professionnelle serait diminuée ou qu’elles auraient tendance à interrompre temporairement ou définitivement leur emploi. Et pourtant, une étude de la DARES montre que les femmes qui n’ont jamais arrêté de travailler perçoivent un salaire horaire brut inférieur de 17 % à celui des hommes présentant également un parcours continu, en dépit du fait qu’elles sont en moyenne un peu plus diplômées que les hommes. L’essentiel de cet écart n’est donc pas explicable par des différences de caractéristiques effectives.

La proposition de loi de nos collègues est donc doublement intéressante : d’une part, parce qu’elle prévoit, en cas de défaut de transmission du rapport de situation comparée, une pénalité d’un montant fixé à 1 % de la masse salariale de l’entreprise ; d’autre part, parce qu’elle fixe une date butoir, le 1er janvier 2013, et formalise, pour la première fois, une sanction financière.

Lors de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2012, notre groupe avait d’ailleurs fait adopter un amendement similaire, qui visait à supprimer les exonérations sociales pour les entreprises qui ne respectent pas l’égalité salariale.

À l’Assemblée nationale, nos collègues du groupe de la Gauche démocrate et républicaine s’étaient également saisis de cette question salariale, en mars 2011, en déposant une proposition de loi visant à instaurer un montant de pénalité « fixé au maximum à 10 % des rémunérations et gains », en cas de non-respect de l’égalité.

Je le disais tout à l’heure, l’égalité entre les femmes et les hommes contribuerait à l’amélioration de la situation de tous et toutes. J’illustrerai mon propos en m’appuyant sur une étude de l’INSEE de 2008 qui démontre que la sécurité sociale perd plus de 52 milliards d’euros de cotisations en raison des inégalités salariales entre les femmes et les hommes. Ainsi, la résorption des inégalités salariales permettrait de réduire de moitié le déficit cumulé de la sécurité sociale qui, je vous le rappelle, s’élève à 100 milliards d’euros !

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Cohen

Notre groupe votera donc cette proposition de loi, relayant les batailles menées par les féministes. Je pense notamment à la belle campagne nationale intitulée « Égalité des salaires maintenant », une campagne menée sur l’initiative de Femmes Égalité et soutenue par de nombreuses organisations associatives, syndicales et politiques. Elles organisaient un colloque samedi dernier ; il fut riche de témoignages, d’expériences sur le vécu des femmes salariées, vendeuses, femmes de ménage, caissières, assistantes maternelles, aides soignantes. Toutes ont dénoncé la pénibilité de leur travail, un travail sous-rémunéré et peu reconnu ; toutes ont appelé au respect et à la dignité, ces mêmes femmes qui commencent à se faire entendre et qui luttent – les dernières semaines ne manquent pas d’exemples, je pense aux caissières de DIA d’Albertville ou aux salariées de Lejaby.

Il nous apparaît donc essentiel non seulement de voter cette proposition de loi, mais encore de mener une grande campagne en faveur de la nécessaire sensibilisation à la mixité des métiers, à la lutte contre les stéréotypes, à l’égalité d’accès aux filières de formation, à la lutte contre la précarité du travail des femmes, à la création d’un service public de la petite enfance, à une reconnaissance des compétences des femmes avec des équivalences entre les métiers, à un meilleur accès aux emplois.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Cohen

Il conviendrait en fait d’aller plus loin, en lançant un débat sur la réorganisation du travail et en menant une autre grande campagne sur le véritable partage des tâches dans la sphère privée : ce seraient autant de propositions qui contribueraient, enfin, à une amélioration des conditions de travail et à une véritable égalité dans tous les domaines de la vie entre les femmes et les hommes.

Je ne sais pas si nous sommes tous et toutes d’accord, mais, si nous le sommes, il faut voter cette proposition de loi !

Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC, du groupe socialiste et du groupe écologiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Requier

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je m’exprime aujourd’hui au nom de ma collègue Françoise Laborde, vice-présidente de la délégation aux droits des femmes, qui a dû partir prématurément et vous prie de l’excuser.

Je suis certain que, dans cette assistance très féminine, vous ne verrez aucun inconvénient à ce que le porte-parole du RDSE soit un homme…

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Personne n’est parfait

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Requier

… et que ce groupe, l’ancien groupe de la Gauche démocratique, le plus ancien du Sénat, soit ainsi à l’avant-garde sur les questions de société.

Pour commencer, je tiens à saluer l’initiative de notre collègue Claire-Lise Campion, soutenue par le groupe socialiste, qui a déposé cette proposition de loi relative à l’égalité salariale entre les hommes et les femmes avec l’intention d’envoyer un signal fort aux entreprises, vingt-neuf ans après la loi Roudy, qui a posé les premiers jalons en matière d’égalité professionnelle. Le texte qu’elle nous propose d’adopter aujourd’hui vise à mettre fin à la bienveillance dont bénéficient les entreprises qui ne respectent pas l’esprit de cette loi.

Plusieurs lois ont d’ailleurs été adoptées depuis 1983, je pense notamment à la loi Génisson – je salue ici l’auteur – qui a rendu obligatoires les négociations annuelles sur l’égalité professionnelle dans les entreprises, ou encore à la loi de 2006 qui, notamment, fixait au 31 décembre 2010 la date butoir pour la suppression des écarts de salaire entre les femmes et les hommes.

Au fil des décennies, la France a véritablement mis en place une politique incitative en matière d’égalité professionnelle et s’est dotée d’un arsenal législatif de plus en plus renforcé. Mais que risquent les entreprises qui ne respectent pas la loi ? En réalité, presque rien !

En effet, si l’article 99 de la loi portant réforme des retraites a institué une sanction financière pour les entreprises d’au moins cinquante salariés non couvertes par un accord relatif à l’égalité professionnelle, son décret d’application énumère de nombreux motifs de défaillance que l’entreprise peut invoquer pour justifier son inaction en matière d’égalité professionnelle.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Requier

Il est trop tôt, cependant, pour établir un bilan, car ce décret n’est effectif que depuis le 1er janvier 2012.

Force est de constater qu’en l’absence de sanctions sérieuses la situation professionnelle des femmes est encore aujourd’hui marquée par l’inégalité salariale, phénomène qui aurait même tendance à s’amplifier ces dernières années.

Les chiffres publiés par le Forum économique mondial, en novembre dernier, dans son rapport annuel sur les inégalités entre les sexes, sont excessivement sévères pour la France. Classée en dix-huitième position en 2009, puis en quarante-sixième en 2010, la France continue sa dégringolade, pour s’afficher au quarante-huitième rang cette année.

Cette chute s’explique principalement par la mauvaise place qu’occupe notre pays en matière d’écarts de salaire : selon une récente étude de l’Observatoire des inégalités, l’écart de rémunération entre les hommes et les femmes, à poste et expérience équivalents, en tout début de carrière, serait ainsi de 10 %.

L’égalité professionnelle semble être une marotte sur laquelle tout le monde s’accorde, mais pour laquelle personne ne fait quoi que ce soit : des lois, des déclarations, des promesses et, au final, toujours la même réalité !

Madame la ministre, cette proposition de loi nous donne, vous donne l’occasion de lancer une réflexion plus globale sur la société et de prendre des engagements collectifs en ce sens. Il est évident que l’égalité salariale ne pourra devenir une réalité sans une évolution des mentalités et que la discrimination positive n’est pas forcément la meilleure solution.

Mme Chantal Jouanno s’exclame.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Requier

Je regrette que les tâches domestiques et l’éducation des enfants soient, encore aujourd’hui, l’affaire des femmes, souvent contraintes de mettre leur vie professionnelle entre parenthèses. Les mères sont en permanence tiraillées entre leur volonté de s’épanouir au travail et leurs obligations à la maison.

Si les études récentes affichent un écart moyen de rémunération de 27 % entre les hommes et les femmes, c’est que ces dernières connaissent des interruptions de carrière plus fréquentes. Elles travaillent cinq fois plus souvent que les hommes à temps partiel et sont victimes du « plafond de verre ».

Je déplore que beaucoup de femmes soient contraintes de se retirer du marché du travail parce qu’elles n’ont pas trouvé de solution de garde pour leurs enfants ; le congé parental est alors vécu comme un choix forcé. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : après une naissance, 22 % des femmes actives cessent de travailler et 12 % d’entre elles réduisent leur temps de travail ou leurs responsabilités, faisant ainsi passer leur carrière professionnelle au second plan.

Peu d’entreprises mettent en place des aménagements qui permettent aux femmes de concilier maternité et progression de carrière. La loi doit inciter à faire évoluer les mentalités en la matière. S’il existe de meilleures solutions pour opérer cette mutation, nous devons nous rendre à l’évidence, mes chers collègues, notre pays n’a pas encore réussi à les inventer ni à mobiliser les ressources nécessaires et suffisantes pour les mettre en œuvre : le financement du congé de paternité en est un bon exemple.

Il est nécessaire, je le répète, de changer les mentalités et nous devons mener un combat de chaque instant en ce sens ! Cela impose, notamment, de modifier le partage des tâches parentales au sein de la famille, de mettre en place des actions pour augmenter l’offre de garde des jeunes enfants, de favoriser le télétravail, mais aussi d’inciter les entreprises à développer leurs propres crèches, ou encore à supprimer les nombreuses réunions, indispensables ou présentées comme telles, programmées après dix-huit heures.

Pour toutes ces raisons, la majorité des sénateurs du groupe RDSE votera ce texte avec résolution !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste.

MM. Jacques Gautier et Alain Gournac applaudissent.

Debut de section - PermalienPhoto de Chantal Jouanno

Monsieur le président, madame la ministre, mesdames les présidentes, chères et chers collègues, le principe fondamental de la République, son essence même, est la méritocratie. Nous avons tous les mêmes droits et nous réussissons uniquement en fonction de nos talents, de nos compétences. Les précédents orateurs l’ont rappelé, ce principe de base est bafoué par la discrimination, qui touche grosso modo la moitié de la population.

Oui, madame Campion, comme vous, nous sommes indignés devant la permanence de cette situation et l’hiatus entre les discours, car aucun ne conteste le principe de l’égalité salariale, et la stagnation constatée sur le terrain.

Debut de section - PermalienPhoto de Chantal Jouanno

Je trouverai toujours des critiques pour me rétorquer que c’est faux, que les femmes sont en train de prendre la place des hommes et que les choses changent dans la réalité. Malheureusement, les chiffres, comme les faits, sont extrêmement têtus.

Par sympathie, j’éviterai le terrain de la politique, celui du sport, des administrations ou même des médias, pour me concentrer sur l’économie et les entreprises. Les chiffres ont été rappelés : les écarts de rémunération perdurent et sont de l’ordre de 25 % à 27 %, dont dix points, selon le Conseil économique, social et environnemental, semblent relever de la discrimination pure.

Pourtant, vous l’avez tous rappelé, le principe d’égalité salariale entre les hommes et les femmes est inscrit depuis 1972 dans notre code du travail et quatre grandes lois ont été adoptées depuis : la loi Roudy de 1983, la loi Génisson de 2001, la loi Zimmerman-Copé de 2006 et, enfin, la loi de 2010.

La loi est claire, elle est limpide, ses dispositions sont même assez fortes. Nous déplorons donc non pas un vide législatif, mais une carence dans l’application concrète de la loi, par tous les acteurs confondus. Mme la ministre l’a rappelé tout à l’heure, les représentants syndicaux eux-mêmes ne s’investissent pas suffisamment sur le sujet.

Je ne reviendrai pas sur les chiffres concernant les rapports de situation comparée ou les accords de branche, ils ont déjà été cités. Il est frappant de constater que si nombreux sont ceux qui s’empressent d’approuver le principe de l’égalité salariale, ils le sont beaucoup moins à le défendre effectivement, à l’exception des femmes et de quelques hommes dans cet hémicycle. En effet, être féministe aujourd’hui, c’est s’exposer à être assimilée à une « femme à problèmes » – je sais de quoi je parle !

Comment expliquer cette situation ? Nous nous heurtons à une réalité sociétale, donc à une réalité qui n’est pas uniquement économique. En témoigne, par exemple, le fait que seulement 10 % des ingénieurs sont du genre féminin… J’ai lu dans un rapport qu’il s’agit d’un « plafond d’acier » culturel, d’un « corset invisible » intégré par les jeunes filles dès leur plus jeune âge, …

Debut de section - PermalienPhoto de Chantal Jouanno

Mme Chantal Jouanno. … phénomène dont j’ai malheureusement le sentiment qu’il se renforce actuellement, comme je peux le constater dans le cadre de la mission que m’a confiée Mme Bachelot-Narquin – je vous bénis tous les jours, madame la ministre !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Chantal Jouanno

Pour autant, je veux considérer cette proposition de loi comme un texte d’appel, utile pour ouvrir un débat dans notre hémicycle et, plus largement, au niveau national. Vous comprendrez bien, cependant, que nous ne puissions pas la voter, puisqu’il nous est impossible de cautionner vos assertions sur l’inaction du Gouvernement, d’autant moins que l’article 99 de la loi du 9 novembre 2010 prévoit des sanctions extrêmement fortes, uniques en Europe.

Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Génisson

La loi est vidée de sa substance par le décret d’application !

Debut de section - PermalienPhoto de Chantal Jouanno

Oui, le décret et la circulaire d’application ont trop tardé…

Debut de section - PermalienPhoto de Chantal Jouanno

… – je ne doute pas que des pressions ont été exercées – et ils peuvent vraisemblablement être améliorés.

Toutefois, plutôt que d’adopter cette proposition de loi, qui reviendrait à faire payer aux entreprises le prix d’une carence de l’administration, évaluons dans un délai d’un an, comme je vous l’avais proposé, la mise en application des dispositions existantes. À ce moment-là, nous en rediscuterons.

Debut de section - PermalienPhoto de Chantal Jouanno

Cela fait même quarante ans, madame Borvo Cohen-Seat !

Debut de section - PermalienPhoto de Chantal Jouanno

Le Gouvernement prévoit un système d’appréciation pour moduler les sanctions en fonction des efforts : cela relève du bon sens. Nous aurions peut-être dû privilégier une appréciation collective et non pas uniquement administrative, mais je ne peux cautionner les propos affirmant que le Gouvernement n’a rien fait !

Les accords de branche ont quadruplé depuis 2006. Le Gouvernement s’est attaqué aux fondamentaux, tout particulièrement à la question de l’orientation initiale. À cet égard, madame la ministre, il serait utile que vous nous dressiez le bilan de la convention interministérielle pour le développement de la mixité au sein des filières de formation initiale.

Convenez que l’instauration de quotas au sein des conseils d’administration et, demain, au sein de la fonction publique est très positive.

J’ajoute que cette proposition de loi pose un problème de fond, sur lequel je m’étais déjà exprimée et dont j’aimerais que nous puissions débattre de manière constructive.

Votre principe est de supprimer des exonérations de charge sur des bas salaires si l’égalité salariale n’est pas respectée ou pas engagée, ce qui présuppose une mise en balance entre des emplois peu qualifiés et la féminisation des entreprises. Je préfère très largement l’idée d’une sanction assise sur la masse salariale telle qu’elle a été votée en 2010 ou sur d’autres critères financiers, voire – pourquoi pas ? – sur les rémunérations des dirigeants.

Pour conclure, je souhaite que ce débat soit constructif. Nous sommes confrontés à un véritable problème de société, qui perdure, qui progresse, mais qui s’exprime inconsciemment.

Un précédent orateur soulignait que les femmes devaient trouver un équilibre entre leurs obligations professionnelles et domestiques. Mais les hommes aussi ont des obligations domestiques ! Le rapport sur l’hypersexualisation des petites filles sur lequel nous travaillons souligne la culpabilisation des mères : ce sont elles qui n’habillent pas leurs filles correctement, qui cèdent devant elles, etc. Ce sont toujours les mères que l’on culpabilise en cas de problème à la maison. Le phénomène, tout à fait inconscient, est bien ancré dans les esprits.

Nous ne ferons donc bouger les lignes que par des mesures désagréables, qu’il s'agisse de discrimination positive ou de quotas temporaires. Il s’agit certes d’un aveu d’échec de la société, mais nous en sommes rendus là.

Debut de section - PermalienPhoto de Chantal Jouanno

Nous ferons également bouger les lignes, je l’espère, avec les travaux en cours au sein de la délégation aux droits des femmes qui sont consacrés à la question des femmes et du travail, dans une acception très large. Je précise d'ailleurs que j’ai adhéré à la grande majorité des recommandations de la délégation aux droits des femmes.

Madame Campion, je vous remercie d’avoir porté ce débat dans l’hémicycle, de nous avoir rappelé à toutes et à tous que nous avons aujourd'hui un devoir d’indignation, …

Debut de section - PermalienPhoto de Chantal Jouanno

Mme Chantal Jouanno. … que nous n’avons pas à nous cacher, à nous excuser de revendiquer ce droit et qu’il faudra sans doute se montrer plus incisif et rompre l’ignorance des médias. Sur ce dernier point, je ne puis que vous renvoyer à l’excellent rapport sur l’image des femmes dans les médias remis à Mme la ministre, qui formule des propositions extrêmement intéressantes.

Applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre

Bravo !

Debut de section - PermalienPhoto de Aline Archimbaud

Monsieur le président, madame la ministre, mesdames les présidentes, mesdames les rapporteurs, mes chers collègues, comme l’ont souligné les précédents intervenants, il ne s’agit pas ici de créer une nouvelle législation concernant le salaire des femmes – nous disposons déjà d’un certain nombre de lois à cet égard – mais d’en assurer, enfin, l’application.

En effet, nous en sommes réduits à chercher les moyens de faire appliquer des lois existantes, ce qui est tout de même préoccupant pour une démocratie ! La présente proposition de loi a justement pour objet de proposer des avancées concrètes afin de permettre cette application. C’est pourquoi nous la soutiendrons.

Je ne citerai pas toutes les lois antérieures, mais j’en analyserai à mon tour brièvement quelques-unes pour montrer qu’elles sont précises. La loi Roudy du 13 juillet 1983 crée le fameux rapport de situation comparée, dit RSC, que les employeurs doivent élaborer sur les conditions d’emploi et de formation des femmes et des hommes dans les entreprises, puis transmettre pour avis au comité d’entreprise ou, à défaut, aux délégués du personnel.

Les exigences du contenu de ce RSC ont été complétées par la loi Génisson du 9 mai 2001, et je salue ma collègue pour le travail réalisé, qui correspondait largement à une volonté d’instaurer des indicateurs pertinents, des éléments chiffrés permettant une analyse plus lisible de la situation.

Mes chers collègues, vous avez évidemment évoqué la loi de 2006.

Enfin, je citerai le célèbre article 99 de la loi du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites, instaurant une sanction financière à l’encontre des entreprises d’au moins cinquante salariés qui n’auraient pas conclu d’accord sur l’égalité professionnelle.

Cet article a été vidé de sa portée par le décret d’application du 7 juillet 2011, qui permet à l’entreprise mise en demeure de disposer d’un délai de six mois pour se mettre en conformité avec la loi, qui instaure des pénalités applicables uniquement après ce délai sans effet rétroactif et autorise la modulation de la sanction en fonction « des efforts constatés », sanction dont l’entreprise peut même être totalement dispensée…

Dès lors, nous connaissons les faits : en 2010, seules 45 % des entreprises ont transmis un RSC à l’inspection du travail, seules 37 branches professionnelles sur plus de 1 000, soit 3, 7 %, sont parvenues à un accord et seules 2 000 entreprises ont conclu un accord spécifique ! Tout semble fait pour que cette mesure ne soit jamais appliquée.

Oui, ce Gouvernement s’est largement désengagé de l’égalité salariale entre les femmes et les hommes, et ce n’est pas le budget pour 2012 entérinant une baisse de 5 % des crédits du programme 137 consacré à l’égalité entre les hommes et les femmes, dont une diminution de 13, 7 % des crédits de l’action « Égalité entre les femmes et les hommes dans la vie professionnelle, économique, politique et sociale », qui prouvera le contraire.

Par conséquent, les lois existent, mais rien n’est fait pour qu’elles soient appliquées, ni dans les entreprises ni, ne l’oublions pas, dans la fonction publique, ce qui est inadmissible.

L’écart de salaire entre les femmes et les hommes, après s’être réduit au cours des années quatre-vingt, stagne depuis le milieu des années quatre-vingt-dix et reste au niveau très élevé et inadmissible de 27 %.

Certes, me diront certains, mais les femmes représentent 83 % des emplois à temps partiel, donc comparons ce qui est comparable. Toutefois, le salaire brut horaire total d’une femme est inférieur de 16 % à celui d’un homme et de 13 % si l’on prend en compte uniquement le salaire horaire de base, et ce alors que le niveau moyen d’éducation des femmes a dépassé celui des hommes. Par exemple, le salaire horaire des femmes cadres est inférieur de 19, 4 % à celui des hommes.

Si l’on écarte les effets de structure liés à la nature des postes qu’occupent les femmes, la discontinuité des carrières due notamment au fait que les femmes assument 80 % des tâches domestiques – ce qui représente dix-neuf semaines de travail supplémentaires sur une année – et occupent 60 % des postes en contrat à durée déterminée, l’écart résiduel des salaires de dix points ne peut s’expliquer que par des pratiques inégalitaires et discriminatoires.

Au classement du World Economic Forum réalisé pour 134 pays, la France arrive en 127e position en ce qui concerne les écarts salariaux.

J’évoquais la part des femmes employées à temps partiel et en CDD. Dans l’ensemble de l’Union européenne, une femme sur trois travaille à temps partiel, contre un homme sur dix. En France, 80 % des emplois précaires sont occupés par des femmes. Une femme salariée sur quatre perçoit un bas salaire, contre un homme sur dix.

Le temps partiel subi représente près de la moitié des temps partiels des femmes, qui sont surtout présents dans quatre secteurs, par ailleurs fortement féminisés : la grande distribution – 84% des caissiers –, les services personnels et domestiques – 74% des agents d’entretien –, la santé et l’action sociale – 91 % des aides-soignants, 99 % des assistants maternels – ainsi que l’hôtellerie et la restauration.

Ces emplois peu qualifiés sont principalement occupés par des femmes jeunes et peu diplômées. Les horaires sont imposés dans 74 % des cas et le plus souvent atypiques.

Face à cette situation, il est plus qu’urgent d’agir vraiment pour que les lois soient enfin respectées, mises en application, et pour que l’égalité entre les femmes et les hommes, aujourd'hui formelle, devienne réelle. Cela implique, selon nous, de véritables sanctions incitant réellement les entreprises à équilibrer les salaires.

Nous, écologistes, proposons également d’introduire une clause d’égalité salariale obligatoire pour tout marché public ou toute aide publique aux entreprises et de réserver l’exonération de charges sociales aux emplois en contrat à durée indéterminée de plus de trente heures par semaine.

Cela implique également de favoriser l’investissement des hommes dans la sphère privée, de mettre en place une politique éducative et de prévention ambitieuse passant par la formation initiale et continue aux inégalités de genre de tous les acteurs de l’éducation, de la petite enfance à l’université, de réformer les congés de parentalité, de lutter contre les stéréotypes et d’obtenir, enfin, la création d’un grand ministère d’État de l’égalité entre les femmes et les hommes.

Cela passe aussi, selon nous, par des changements législatifs qui imposent la parité effective – une parité de résultat et non pas seulement d’intention – dans les partis politiques, dans l’ensemble des assemblées territoriales et législatives. Nous ne pouvons plus accepter, c’est une nécessité démocratique, que les femmes ne représentent en France qu’un parlementaire sur cinq !

Pour toutes ces raisons, vous l’aurez compris, le groupe écologiste votera en faveur de cette proposition de loi fixant des délais clairs, des objectifs chiffrés, des dates butoirs, bref, marquant un premier pas dans la bonne direction !

Applaudissements sur les travées du groupe écologiste, du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

Monsieur le président, madame la ministre, mesdames les présidentes, mesdames les rapporteurs, mes chers collègues, en écoutant mes collègues, plus jeunes que moi pour la plupart, je me disais que ce débat était à la fois lassant et rajeunissant.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

La proposition de loi déposée par notre collègue Claire-Lise Campion, que j’ai signée avec enthousiasme, a simplement pour ambition de rendre applicable le droit.

La réalité est tout aussi simple : l’écart de salaire moyen entre les hommes et les femmes est de 27 %, malgré les engagements internationaux.

Le cadre européen, en 1957, posait l’égalité professionnelle et salariale comme la pierre angulaire de la lutte contre les discriminations, et tous les traités qui ont suivi, rencontre internationale après rencontre internationale, dans tous les pays du monde, l’ont repris – je pense notamment à l’Union interparlementaire, l’UIP, et à l’Assemblée parlementaire de la francophonie, l’APF.

Le dispositif français, je n’y reviens pas, est assez complet. J’ai eu la chance, en tant que déléguée régionale au ministère des droits des femmes, à l’époque de la loi Roudy de 1983, de mettre en place quelques contrats d’égalité professionnelle dans de grandes entreprises, comme les eaux de Volvic, aujourd'hui intégrées au groupe Danone, qui nous demandaient de nous activer pour élaborer ces documents, tout simplement.

J’évoquerai également la loi du 2 août 1989, qui avait été l’occasion de progresser sur les négociations de branches. Le fonds de garantie pour la création d’entreprises à l’initiative des femmes que j’avais alors mis en place est d'ailleurs toujours actif.

Je mentionnerai enfin la loi Génisson du 9 mai 2001 et la loi Ameline du 23 mars 2006, qui reprenaient des dispositifs identiques.

Venons-en maintenant aux promesses. Je me souviens de celle de Nicolas Sarkozy, qui assurait, en 2007, que l’égalité salariale et professionnelle serait totale en 2010. Cela a dû nous échapper, car 2010, c’était avant-hier !

Je me souviens, madame la ministre, que vos anciens collègues Xavier Darcos et Éric Woerth nous assuraient, la main sur le cœur, qu’une grande loi sur l’égalité professionnelle serait votée. On allait voir ce qu’on allait voir ! Et on a vu, en effet, l’article 99 de la loi portant réforme des retraites, en date du 9 novembre 2010. On a surtout vu et entendu la déception suscitée par le décret d’application de cette loi, qui a été rejeté par l’ensemble des représentants syndicaux du Conseil supérieur de l’égalité professionnelle.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

Au fond, ne sommes-nous pas toujours prisonniers de cette vieille idée selon laquelle le travail des femmes est un travail d’appoint pour un salaire d’appoint ?

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

L’activité féminine est toujours une variable d’ajustement, hélas, susceptible de retour en arrière ou de surplace prolongé, même si de grandes déclarations prétendent le contraire.

Il nous faudrait, madame la ministre, de la volonté – toujours de la volonté ! –, de l’action, des outils opérationnels et des personnes capables de s’en servir. Mais où sont aujourd'hui les délégations régionales aux droits des femmes et tous les services qui travaillaient avec elles ?

Mme la présidente de la commission des affaires sociales acquiesce.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

Au moindre prétexte, les droits des femmes sont mis en danger. Je rappelle que, au moment de la discussion de la loi pour le développement de l’alternance et la sécurisation des parcours professionnels, en juillet 2011, le Gouvernement n’avait pas émis un avis négatif sur un amendement proposé par un député, qui, en modifiant le mode de calcul des heures supplémentaires, visait à supprimer la majoration de 25 % qui leur est attachée. Cela aurait pénalisé les salariés à temps partiel, dont 82 % sont des femmes, dans la grande distribution notamment, qui ont souvent recours aux heures supplémentaires.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

Cela aurait fait perdre entre 50 et 80 euros par mois à des salariés qui touchent autour de 1 000 euros ! Mes chers collègues, mesurons bien la portée de ces chiffres.

Je conclurai mon intervention par une phrase de François Mitterrand, qui siégea dans cette assemblée et qui fut Président de la République lorsque j’étais secrétaire d’État aux droits des femmes. Il m’avait dit un jour, sans doute de découragement – un jour comme aujourd'hui, peut-être, où l’on hésite entre lassitude et rajeunissement –, « Moi, je ne verrai pas la véritable égalité des hommes et des femmes, je ne serai plus de ce monde. Mais vous, oui. Cela prendra deux générations ». Si nous voulions nous fixer un objectif, cela signifierait une égalité atteinte en 2030 ou 2040 ! C’était possible, selon lui, mais « à condition de ne jamais changer de cap ».

Or en cette matière comme dans d’autres, madame la ministre, j’en suis d’ailleurs désolée pour vous, le Gouvernement dont vous faites partie n’a pas tenu le « cap ». Je le regrette profondément.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Génisson

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je commencerai mon propos en indiquant que l’important, en la matière, c’est de convertir les droits formels en droits réels ; cette transformation me semble être au cœur du sujet dont nous traitons aujourd'hui.

Je tiens aussi à rappeler, ainsi que l’a fait Mme Cohen, que les femmes participent au développement économique. Mme Cohen nous a ainsi indiqué que, si les femmes étaient reconnues à leur juste valeur, elles participeraient à l’enrichissement collectif de notre nation et pourraient, notamment, réduire de façon très significative le déficit de la protection sociale.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Génisson

Il y a un an de cela, j’ai été interloquée par le résultat d’un sondage, paru juste avant le 8 mars 2011. Il était demandé à nos concitoyens ce qu’ils pensaient devoir être fait pour lutter contre la situation de chômage et de crise que nous traversons. Or, si 70 % des hommes répondaient qu’il serait pertinent que les femmes retournent à la maison, 49 % des femmes disaient la même chose !

Le sujet est donc sociétal et culturel. Nous avons vraiment beaucoup à faire, au-delà de l’engagement politique, économique et social.

L’inégalité salariale entre les hommes et les femmes est aujourd'hui de 27 %, voire 32 % pour les fonctions les plus élevées, comme le rappelle le rapport de Mme Grésy, remis en juillet 2009. Ce constat nous impose l’obligation absolue d’y apporter une solution crédible, efficace et rapide. Et j’espère, chère Michèle André, que nous y parviendrons avant 2030 ou 2040 ! Les prochaines échéances électorales nous offriront peut-être des perspectives en la matière.

La proposition de loi que nous examinons aujourd'hui n’est pas un texte opportuniste, mais d’opportunité. Soulignons d’ailleurs – faisons-nous plaisir ! – que l’Assemblée nationale a voté à la quasi-unanimité des dispositions permettant d’améliorer le sort des femmes dans les fonctions publiques.

En effet, si leur situation n’est pas brillante dans le monde de l’entreprise et la sphère privée, elle ne l’est guère plus dans les fonctions publiques. C’est dû non pas tant aux salaires, où les différences avec les hommes sont moins marquées que dans le privé, qu’aux revenus, du fait des systèmes de primes, et aux positions qu’elles occupent. En effet, si plus de 60 % des fonctionnaires sont des femmes, moins de 10 % d’entre elles accèdent aux fonctions les plus élevées.

Notre pays connaît encore des inégalités salariales entre hommes et femmes de l’ordre de 27 %, dont 6 % sont parfaitement inexplicables, donc dus à de la discrimination véritable. L’inégalité salariale est le constat le plus visible des inégalités professionnelles. Elle est presque la conséquence de ces dernières.

Marques d’approbation sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Génisson

Disons-le, il y a encore des discriminations à l’embauche. Elles ne sont peut-être pas voulues. Elles existent car le modèle masculin préside au modèle d’organisation de l’entreprise. Inconsciemment, la plupart du temps, à compétence égale, on embauchera plutôt un homme qu’une femme.

Ces inégalités sont aussi la conséquence des différences dans l’accès à la formation entre les femmes et les hommes. C’est un sujet majeur, me semble-t-il. À 35 ans, une femme a deux fois moins de chances d’accéder à une formation qu’un homme. En outre, les femmes travaillent le plus souvent dans les PME, où l’accès à la formation est plus limité.

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre

Absolument.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Génisson

Je ne parle pas non plus des différences dans la promotion professionnelle. Les disparités en matière de mobilité sont un facteur extrêmement discriminant pour les femmes.

Plus globalement, je crois aussi que nous devrions réfléchir, tous ensemble, aux conditions d’organisation du travail. Cela vaudrait d’ailleurs pour les hommes comme pour les femmes. Nous pourrions ainsi considérablement améliorer la situation de tous.

Cela nous oblige à établir un diagnostic précis de la situation des hommes et des femmes, ce qui explique l’exigence du rapport de situation comparée, qui a été instituée par la loi Roudy et complétée par la loi de mai 2001. En effet, pour appliquer un traitement efficace, il faut poser un diagnostic précis.

Ainsi, nous devons réfléchir, de manière collective, à la création d’outils faciles à mettre en place et utilisables par les TPE. En effet, notre propos porte souvent sur les moyennes et grandes entreprises, mais ce n’est pas faire grief aux dirigeants des TPE, me semble-t-il, que d’imaginer des outils d’évaluation valables et des moyens d’accompagnement tendant à favoriser l’égalité entre les hommes et les femmes et à améliorer les postes de travail pour les femmes.

On ne peut évoquer l’inégalité professionnelle entre les femmes et les hommes sans mentionner le temps partiel subi. Je le dis avec force, au nom de la justice sociale et de la justice tout court !

Je le répète après d’autres, le temps partiel s’est considérablement développé. Il concernait environ 8 % de la population active en 1975, contre 18 % aujourd'hui. Or 80 % des salariés à temps partiel, le plus souvent subi, sont des femmes, dont le temps moyen de travail est de 23, 5 heures par semaine. De plus, 55 % des salariés à temps partiel gagnent moins de 800 euros par mois, primes et compléments compris. Ces femmes se situent donc en dessous du seuil de pauvreté !

Compte tenu des horaires complètement décalés que suppose l’organisation du temps partiel subi, ces femmes ne peuvent occuper deux emplois. Un certain nombre d’entre elles sont en outre chefs de famille monoparentale. Vous pouvez donc aisément imaginer les conséquences que cela peut avoir sur l’éducation des enfants.

Sur ces sujets – inégalité professionnelle, temps partiel subi –, il est impératif d’agir directement sur le lieu de travail, aussi bien au sein des fonctions publiques que dans le monde de l’entreprise. Reconnaissons ensemble que le sujet doit être traité en amont.

Tout le monde s’accorde à dire que les inégalités commencent très tôt. Nous devons ainsi lutter contre les stéréotypes culturels, dont les hommes et les femmes partagent la responsabilité du maintien. Mme la ministre et d’autres orateurs ont également ciblé le rôle important joué par les médias.

Nous devons également porter une attention particulière à l’enfant qui s’insère dans la vie collective, aussi bien à la crèche que dans les écoles.

Aujourd'hui encore, l’orientation des filles et des garçons au collège et au lycée est un problème majeur qu’il s’agit de traiter.

On dit assez plaisamment que les filles réussissent plus brillamment que les garçons dans leurs études, comme l’attestent en particulier les résultats du baccalauréat. Or elles sont orientées, c’est bien connu, vers les filières et les formations intermédiaires, alors que les garçons sont dirigés vers les filières scientifiques, qui les conduisent à des carrières beaucoup plus valorisantes. Aussi, comme l’a montré Mme Jouanno, seules 10 % des femmes sont cadres supérieurs ou ingénieurs. Cette situation ne correspond pas du tout aux compétences qui sont les leurs.

Cela a été évoqué, l’articulation des temps de vie professionnelle et familiale doit être améliorée. Il faut d’ailleurs se féliciter que la France ait mené une politique familiale riche, qui a permis aux femmes de travailler. En effet, 80 % des femmes âgées de 25 à 55 ans travaillent, grâce aux allocations familiales et aux mesures d’accompagnement. Nous avons cependant encore beaucoup de progrès à faire en matière de conditions d’accueil, en tenant compte, par exemple, des nouvelles formes de travail, comme le travail posté.

Notre vigilance doit aussi se porter sur la prise en charge des enfants en milieu rural.

Il sera également nécessaire de se pencher sur la question du congé parental, car ce qui semble être une bonne idée est en réalité une trappe à pauvreté pour les femmes les moins qualifiées. Ce sujet doit donc nous mobiliser tous.

Dès lors, nous devons voter la présente proposition de loi, madame la ministre. Vous avez avancé des arguments que je qualifierai de « techniques » pour ne pas l’adopter. J’ai envie de dire : cela suffit ! Voilà quarante ans que cela dure !

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Génisson

En 1972 a été inscrit dans la loi le principe « à travail égal, salaire égal ». La loi Roudy de 1983, largement citée, passait d’une logique de protection du travail des femmes à une logique d’égalité. La loi de 2001, quant à elle, a fait l’apologie de la négociation sociale, tant spécifique qu’intégrée. La loi Ameline de 2006 a permis d’aborder les sujets des congés maternités et de l’égalité en matière de primes. Enfin, le fameux article 99 de la loi sur les retraites de 2011 s’est traduit par un décret d’application malheureusement lamentable. Aussi, ayons la volonté d’avancer, votons la présente proposition de loi !

Mes chers collègues, je terminerai mon intervention en vous citant ces propos que j’apprécie particulièrement : « L’admission des femmes à l’égalité parfaite serait la marque la plus sûre de la civilisation, et elle doublerait les forces intellectuelles du genre humain ». J’aurais aimé écrire cela, mais c’est Stendhal qui nous l’a dit.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Joëlle Garriaud-Maylam

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je voudrais tout d’abord saluer notre collègue Claire-Lise Campion pour son diagnostic des obstacles persistants à une réelle application des lois sur l’égalité professionnelle. Je souhaite également remercier Mme la ministre Roselyne Bachelot-Narquin de son analyse et de ses propositions fort opportunes.

L’application de sanctions aux employeurs ne respectant pas la loi est indispensable. Définir des objectifs précis et vérifiables assortis de sanctions financières est nécessaire pour surmonter les blocages.

Je me souviens des résistances, il y a un an, face à l’instauration de quotas de femmes dans les instances dirigeantes des entreprises. Rapporteur de ce texte pour la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes, j’avais rencontré de grandes difficultés à faire accepter une telle mesure, qui a finalement pu être votée. Résultat : le taux de féminisation des conseils d’administration du CAC 40, même s’il était très faible au départ, a quasiment doublé entre 2009 et 2011 !

Le ministre François Sauvadet utilise d’ailleurs la même recette de quotas et de sanctions pour féminiser la haute fonction publique, et je voudrais l’en remercier ici.

Soulignons également que c’est la réforme des retraites qui a instauré un système de sanctions financières en cas de discrimination envers les femmes. Ce mécanisme, qui est entré en vigueur le 1er janvier dernier, fait de la France une pionnière au plan européen.

En ce qui concerne l’objectif d’une meilleure application des lois et la nécessité de sanctions, je rejoins donc notre collègue Claire-Lise Campion. En revanche, certaines dispositions techniques et le cadre juridique de ce texte posent problème.

Même – et surtout ! – en période électorale, nous avons le devoir d’aller au-delà des déclarations de principe et de nous soucier de leur application concrète.

Conclure un accord collectif sur l’égalité n’est pas toujours le moyen le plus adapté. Si l’élaboration d’un plan d’action unilatéral permet d’arriver aux mêmes progrès qu’un accord collectif, pourquoi ne pas s’en satisfaire ? C’est ce principe d’efficacité qui a prévalu lors de la réforme des retraites de 2010.

Sous couvert de féminisme, la présente proposition de loi, de par ses lacunes juridiques, pourrait être contreproductive et entraîner des reculs. Contrairement à la loi sur les retraites, elle reste silencieuse quant au contenu des accords. Ainsi, des entreprises pourraient éviter les sanctions en adoptant des accords purement déclaratifs, dépourvus de tout engagement concret.

Surtout, mes chers collègues, je ne voudrais pas que nous nous trompions de cible en nous focalisant excessivement sur la politique salariale des entreprises, au risque d’éluder d’autres facteurs essentiels.

Les statistiques le montrent, l’écart salarial entre hommes et femmes travaillant à temps plein, qui s’était fortement réduit des années soixante aux années quatre-vingt-dix, stagne depuis une vingtaine d’années. Nous n’arrivons plus à descendre en deçà du plancher de 27 % à 25 %, qui a été évoqué.

Certes, les salaires des femmes progressent un petit peu plus vite que ceux des hommes. Mais, selon une étude réalisée sur 34 000 cadres par un très célèbre institut britannique, il faudrait non pas 20 ans, comme cela a été dit plus tôt, mais 98 ans, soit un siècle, pour arriver à une réelle égalité salariale !

Pourquoi un tel blocage ? Est-il uniquement lié à des politiques salariales discriminantes de la part des employeurs ? Je ne le crois pas. L’égalité salariale ne se réduit pas au fait qu’une femme gagne autant qu’un homme à compétences et à postes égaux : la comparaison des situations à l’instant T n’est que la partie émergée de l’iceberg. Les inégalités s’inscrivent dans des trajectoires professionnelles.

S’il est devenu si difficile ces dernières années de réduire davantage l’écart salarial, c’est sans doute aussi parce que ce dernier est de moins en moins lié à des discriminations directes et légalement sanctionnables.

Cet écart de 25 %, que nous n’arrivons plus à réduire, est, je crois, surtout lié à la progression professionnelle bridée des femmes.

Congés maternités, refus du travail en soirée ou mise aux quatre cinquièmes font des femmes les grandes oubliées des promotions professionnelles. Parfois aussi, les femmes s’autocensurent, refusant des choix professionnels trop pénalisants pour leur famille. Au Quai d’Orsay, par exemple, les femmes ne représentent que 27 % des personnels de catégorie A et moins de 15 % des ambassadeurs.

Ce problème d’évolution de carrière est beaucoup plus difficile à résoudre que les discriminations salariales proprement dites. Car il touche à nos codes culturels de répartition de rôles entre hommes et femmes, mais aussi à l’organisation globale du travail.

Les trois quarts des salariés à temps partiel sont des femmes. Peut-on décemment y voir un choix de vie ? Combien d’employeurs accepteraient qu’un homme, surtout un cadre, quitte régulièrement le bureau en fin d’après-midi pour aller chercher ses enfants ou pose des jours de congés en cas de maladie de ses enfants ou de grève d’école ? Combien d’employeurs confieront à une mère de famille des responsabilités si elle ne s’engage pas à une totale disponibilité en soirée ?

Aujourd’hui, les hommes et les femmes qui souhaitent conserver du temps pour leur vie familiale sont pénalisés sur le plan professionnel.

Il s’agit donc non pas simplement de défendre les « droits des femmes », mais de promouvoir pour tous une meilleure conciliation de la vie familiale et professionnelle ; beaucoup d’hommes y aspirent aussi.

Flexibiliser notre organisation du travail est également une question de survie pour nos entreprises, en cette période de crise, où la pression sur les salariés est particulièrement forte et où des efforts considérables sont demandés à chacun.

M. David Assouline s’exclame.

Debut de section - PermalienPhoto de Joëlle Garriaud-Maylam

Pourquoi ne pas nous inspirer du rythme de nos voisins d’Europe du nord ou de certaines méthodes anglo-saxonnes de rationalisation du travail ? Limiter les réunions en soirée et développer le télétravail sont des pistes à explorer.

M. Jean-Jacques Mirassou s’exclame.

Debut de section - PermalienPhoto de Joëlle Garriaud-Maylam

Par exemple, le Quai d’Orsay limite depuis 2008 les réunions tardives non motivées par l’urgence et autorise depuis 2009 le télétravail pour ses agents de catégorie A. Je voudrais aussi saluer l’initiative du député Pierre Morel-A-L’Huissier, qui a fait voter la semaine dernière à l’Assemblée nationale un amendement visant à ouvrir le télétravail aux fonctionnaires.

La crise contre laquelle nous nous battons est systémique et impose une vraie réorganisation de nos modes de travail. Saisissons donc la chance qui nous est donnée d’utiliser la recherche d’une meilleure égalité entre femmes et hommes pour atteindre cet objectif plus global et rendre service non seulement aux femmes, mais aussi à nos entreprises et à notre économie.

Applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Gisèle Printz

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je commencerai mon intervention par un constat que tout le monde connaît, mais qu’il est toujours utile de rappeler : les femmes représentent plus de 50 % de la population française et contribuent par leur travail à la richesse de notre pays.

Debut de section - PermalienPhoto de Gisèle Printz

Malheureusement, elles ne sont pas traitées sur un pied d’égalité avec les hommes.

La situation des femmes sur le marché du travail est même préoccupante. On y observe des inégalités persistantes. Cela commence très tôt, dès la fin de la scolarité. En effet, bien que les filles obtiennent de meilleurs résultats que les garçons au baccalauréat et qu’elles soient majoritaires dans la population étudiante, leur réussite professionnelle devient ensuite inversement proportionnelle à celle de leurs homologues masculins. Ainsi, un homme âgé de 40 ans et bachelier a 13 % de chances d’être cadre, contre 6 % pour une femme dans la même situation.

La structure de l’emploi des femmes est aussi un élément clef de la discrimination. En effet, 75 % des emplois à temps partiel sont occupés par des femmes, et toutes les enquêtes montrent qu’il s’agit très majoritairement de temps partiel subi. Pourquoi ?

Autre élément à noter, concernant l’articulation des temps de vie : les femmes consacrent toujours deux fois plus de temps que les hommes aux tâches domestiques. De plus, le fait d’avoir un enfant dans les sept premières années de la vie active pèse essentiellement sur la situation professionnelle des jeunes femmes. Alors que les hommes en couple restent, pour 90 % d’entre eux, à temps plein, quel que soit le nombre d’enfants, les femmes ne sont plus que 68 % à travailler à temps complet avec un enfant et seulement 39 % avec plusieurs enfants.

Enfin, et c’est l’aboutissement logique de ces situations qui perdurent, les femmes gagnent en moyenne 27 % de moins que les hommes. Depuis plus de vingt ans, cet écart ne se réduit plus, malgré l’adoption de plusieurs textes comme la loi Roudy, la loi Génisson, la loi du 23 mars 2006 relative à l’égalité salariale entre les femmes et les hommes et l’article 99 de la loi du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites.

Fallait-il encore un nouveau texte ? Oui. Car les précédents n’ont été que partiellement appliqués. Il faut aujourd’hui cesser cette coupable indulgence et marquer clairement notre volonté de réaliser l’égalité dans le monde du travail.

Ainsi, cette proposition de loi comporte un article unique, visant à sanctionner lourdement les entreprises qui ne seront pas couvertes par un accord à la date du 1er janvier 2013.

C’est une étape nécessaire. Mais il faudra à l’avenir s’attaquer à la question dans sa globalité.

La lutte contre le temps partiel subi des femmes est essentielle, car ces dernières subissent une double peine, en connaissant la précarité pendant leur vie active, mais aussi à la retraite. Comme le montant des pensions découle directement des salaires perçus, les disparités perdurent à la retraite

Pour ce qui est des conséquences de la maternité, il est essentiel que la loi évolue. Le congé parental, à cause de la baisse de rémunération qu’il implique, est massivement pris par les femmes. La France doit donc proposer à tous les couples un dispositif s’inspirant du modèle suédois, où le congé parental de seize mois est mieux rémunéré et partagé entre les deux parents.

Il faut agir aussi en amont, sur l’orientation professionnelle des filles, qui laisse à désirer.

Il nous faut donc mettre en œuvre une réelle politique publique d’égalité entre les hommes et les femmes, ce qui n’a pas été fait au cours de la législature qui s’achève. D’ailleurs, le Président de la République et le Premier ministre ont toujours refusé de créer un ministère au droit des femmes.

Pourtant, un tel ministère n’est pas réducteur ; il est essentiel pour avancer sur toutes ces questions, au niveau national, mais aussi à l’échelon décentralisé. Actuellement, les délégations régionales aux droits des femmes manquent cruellement de moyens et de pouvoirs pour mener à bien leurs missions.

Il reste beaucoup à faire. Mais il faut surtout en avoir la volonté et s’en donner les moyens. Le texte que nous examinons aujourd'hui ne réglera pas tous les problèmes, mais il constitue une étape nécessaire vers le changement. Nous le voterons sans hésiter. §

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?…

La discussion générale est close.

La parole est à Mme la ministre.

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, à défaut de répondre aux différents orateurs et oratrices qui se sont exprimés – j’ai été suffisamment exhaustive dans mon intervention liminaire –, j’aimerais apporter quelques éléments complémentaires.

De nombreux intervenants ont affirmé que le décret du 7 juillet 2011 était en retrait par rapport aux objectifs de la loi. Or c’est exactement le contraire.

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre

D’abord, le décret fixe un contenu exigeant pour les accords ou plans d’action, qui doivent définir des actions opérationnelles et des objectifs de progression associés à des indicateurs. Ce point ne figurait pas dans la loi.

Ensuite, la mise en demeure adressée à l’entreprise ne respectant pas ses obligations vise à donner un levier spécifique efficace, bien connu des inspecteurs du travail, qui savent parfaitement utiliser ce type de procédures. C’est donc également une avancée par rapport à la loi.

Enfin, la possibilité de moduler le taux de pénalité permet d’adapter la sanction à la situation particulière de chaque entreprise. Le fait de prononcer une sanction n’empêche pas d’être intelligent et de tenir compte de l’état éventuel de fragilité d’une entreprise ou de ses spécificités. Et celles qui ne jouent pas le jeu seront plus lourdement sanctionnées que les autres.

Le décret a donc pleinement décliné les objectifs de la loi : se donner les moyens d’engager les entreprises dans une dynamique de résultats en matière d’égalité entre les femmes et les hommes.

Certains m’ont interrogée sur les motifs de la suppression de l’échéance du 31 décembre 2010, qui était prévue par la loi votée en 2006. Je le rappelle, la loi de 2006 avait fixé cette échéance en vue de l’adoption par branche et par entreprise des mesures destinées à supprimer les écarts de rémunération.

La loi du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites a effectivement supprimé cette échéance. Mais les obligations consistant à aborder l’égalité salariale entre les femmes et les hommes dans le cadre de la négociation collective obligatoire sur les salaires ont été maintenues.

Surtout, le principe d’une sanction financière, qui était simplement évoqué dans le texte de 2006, a été retenu ; il s’appliquera lorsque les négociations collectives n’aboutiront pas à des résultats satisfaisants. Il s'agit là d’une avancée considérable.

Enfin, certains ont fait référence à la classification du World Economic Forumpour dénigrer la France. Mesdames, messieurs les sénateurs, je vous en supplie : allez-y voir de plus près. En effet, ce classement est tout simplement grotesque, et je pèse mes mots !

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre

Savez-vous quels sont, dans ce document, les six premiers pays en matière d’égalité entre les hommes et les femmes ? Je ne résiste pas à l’envie de citer ce palmarès et j’invite ceux qui s’y réfèrent à visiter les pays figurant en haut du classement : ils pourront constater à quel point l’égalité homme-femme y est respectée !

Le premier pays pour l’égalité entre les hommes et les femmes est l’Égypte – les manifestants de la place Tahrir apprécieront particulièrement ce coup de chapeau. Deuxième pays, le Lesotho. Troisième pays, l’Albanie. Quatrième pays, la Malaisie. Cinquième pays, Singapour, et sixième pays, l’Ouganda.

Sourires.

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre

De grâce, cessez de faire référence à ce classement ridicule ! §

L’Italie, où l’écart de salaire entre les hommes et les femmes n’est que de 5, 5 %, est classée en 125e position ! Or l’Italie est un pays remarquable en matière d’égalité homme-femme. Où a-t-on été trouver cette étude absolument risible ?

Je vous demande donc instamment de ne pas utiliser la classification du World Economic Forum pour critiquer notre pays ! §

L’article L. 2242-7 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« À compter du 1er janvier 2013, les entreprises qui ne sont pas couvertes par un accord relatif à l’égalité salariale entre les femmes et les hommes ne peuvent bénéficier de la réduction de cotisations sociales prévue à l’article L. 241-13 du code de la sécurité sociale ni des réductions d’impôt prévues par le code général des impôts. »

Après le premier alinéa de l’article L. 2323-57 du code du travail, il est inséré un nouvel alinéa ainsi rédigé :

« Dans un délai de quinze jours après l’avis du comité d’entreprise, préparé éventuellement par la commission de l’égalité professionnelle, ou, à défaut, des délégués du personnel, l’employeur transmet le rapport de situation comparée entre les femmes et les hommes, ainsi que l’avis à l’inspecteur du travail. À défaut de cette transmission, l’employeur est soumis à une pénalité équivalente à 1 % du montant des rémunérations et gains, au sens du premier alinéa de l’article L. 242-1 du code de la sécurité sociale et du premier alinéa de l’article L. 741-10 du code rural et de la pêche maritime, versés aux travailleurs salariés ou assimilés au cours de l’année écoulée. Les modalités de recouvrement sont fixées par décret. »

Debut de section - PermalienPhoto de Samia Ghali

Madame la ministre, la prise en compte de l’égalité homme-femme est une tâche digne de Sisyphe, un perpétuel recommencement. Il nous faut garder cette priorité en tête, car, en la matière, on dérape vite si l’on ne progresse pas.

Le volontarisme de Claire-Lise Campion est donc le bienvenu et je la félicite du travail qu’elle a effectué.

Les femmes aujourd’hui, cela a été souligné à maintes reprises, ont une rémunération inférieure de 27 % à celle des hommes.

L’une des raisons fondamentales de cette ségrégation professionnelle est l’inégalité entre les hommes et les femmes au regard des devoirs et obligations parentales.

Les femmes ont plus tendance à travailler à temps partiel ou à interrompre leur carrière lorsqu’elles doivent s’occuper de leurs enfants. Lorsqu’elles recommencent à travailler à temps plein après une pause de carrière ou une période de travail à mi-temps, elles se voient proposer des salaires plus bas que leurs homologues masculins qui n’ont pas interrompu leur carrière.

Même les femmes sans enfant sont considérées comme des mères potentielles et se voient parfois refuser des promotions. Or la maternité ne doit pas être un handicap, mais un élément positif ! Force est de constater que l’écart de rémunération entre les hommes et les femmes a tendance à s’accroître davantage là où les systèmes de garde d’enfants se font de plus en plus rares.

Dans son discours de Périgueux, Nicolas Sarkozy, candidat d’hier et d’aujourd’hui à la présidentielle, s’était engagé à faire « cesser la situation insupportable de la mère qui travaille, qui élève seule ses enfants et qui n’arrive pas à les faire garder ». Il avait donc proposé « que le droit de faire garder ses enfants quand on travaille ou quand on est à la recherche d’un emploi devienne opposable afin d’obliger tout le monde à créer au plus vite les capacités d’accueil nécessaires ». Ces promesses sont loin d’être réalisées, madame la ministre !

J’avais eu l’occasion de le souligner lors de l’examen de la branche famille du projet de loi de financement de la sécurité sociale, en France, seul un enfant sur deux de moins de trois ans peut bénéficier d’un accueil. Dans certains départements, ce taux est plus bas et il est même encore beaucoup plus faible dans certains quartiers défavorisés ou dans les zones rurales.

Il faut donc augmenter l’offre et imaginer de nouveaux dispositifs. Parmi ceux-là, il en existe un, et je terminerai par là mon intervention, qui mérite notre attention, parce qu’il tente de concilier très concrètement vie professionnelle et vie privée. Je veux parler des crèches d’entreprise.

Depuis 2004, l’État a mis en place un nouveau dispositif de financement pour favoriser la création de ce type de crèches en France. La crèche d’entreprise est un mode de garde plébiscité par les parents. Faire garder son enfant à quelques mètres de son lieu de travail offre plus de souplesse et moins de stress. La proximité de la crèche, la possibilité d’aller voir son enfant à l’heure du déjeuner et des horaires adaptés permettent de meilleures conditions de travail et donnent une plus grande tranquillité d’esprit aux parents.

Les entreprises ont tout à y gagner, également, car un parent rassuré est un salarié plus motivé et plus investi dans son travail. Les crèches d’entreprise sont aussi un argument au moment du recrutement, un moyen de fidéliser le personnel et, bien sûr, une façon d’améliorer l’image de marque de la société.

Le plan « crèches 2004 » a été doté de 200 millions d’euros. Malheureusement ces crédits sont loin d’être consommés.

L’information auprès des entreprises, en direction aussi bien des PME que des grands groupes, doit être renforcée et une évaluation du mécanisme des aides financières et des avantages fiscaux effectuée, afin de soutenir cette politique.

Tout à l’heure, j’ai écouté avec plaisir l’intervention de Michèle André, entre autres. Il y a deux jours, j’avais discuté avec ma fille âgée de douze ans de son programme d’éducation civique, qui aborde la question de l’égalité salariale entre les hommes et les femmes. Michèle André me faisait remarquer que cette question était sur le tapis depuis 1965. Cette année-là, je n’étais pas née et, aujourd’hui, je parle encore de ce problème avec ma fille de douze ans ! Mme André a rapporté que selon François Mitterrand ce droit deviendrait réalité en 2020 ou en 2030. Finalement, c’était un visionnaire sur cette question !

J’espère que nous arriverons, dès 2012 et après les prochaines échéances électorales, à mettre en place une politique d’égalité salariale entre les hommes et les femmes. §

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Courteau

Bien évidemment, je voterai cet article unique.

Il est temps d’envoyer un signal fort, permettant d’engager enfin un mouvement d’ampleur susceptible de corriger les inégalités salariales dans les entreprises.

Répétons-le inlassablement, autant de fois qu’il le faudra : les femmes gagnent en moyenne 27 % de moins que les hommes, et depuis une vingtaine d’années cet écart ne se réduit pas. Une telle situation est inacceptable. Rien ne peut justifier de tels écarts ni ces disparités persistantes.

Ceux qui se risquent à expliquer l’injustifiable admettent néanmoins qu’une grande partie de ces disparités est le reflet de pratiques ou de processus discriminatoires. D’ailleurs, le Conseil économique, social et environnemental a semblé reconnaître que cet écart salarial, qui est de l’ordre de 15 % à catégorie professionnelle équivalente, relève, pour partie, de la discrimination pure.

Les inégalités salariales sont bien l’aboutissement, ainsi que Michelle Meunier l’a souligné dans son rapport, d’une accumulation d’inégalités de traitement et de discriminations.

Nous avons là un enchaînement de faits et une conjonction de préjugés qui aboutissent à désavantager gravement les femmes.

Pourtant, la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, qui interdit toute discrimination fondée notamment sur le sexe, précise que « l’égalité entre les femmes et les hommes doit être assurée dans tous les domaines, y compris en matière d’emploi, de travail et de rémunération ».

De nombreuses directives ont mis en œuvre ce principe, ainsi que plusieurs lois françaises. Je pense – je me tourne vers ma collègue Catherine Génisson – à la loi Roudy. Sans doute a-t-il manqué une volonté politique forte et des moyens, à partir de 2002, madame Génisson, pour engager une campagne d’information auprès des femmes sur les possibilités de négociation dans les branches et les entreprises.

J’évoquais à l’instant la nécessité d’adresser un véritable signal. Il faut un déclic. Cette proposition de loi sera ce signal et ce déclic ! Elle est, en tout cas, la manifestation de cette volonté politique indispensable à la résorption des inégalités salariales qui, jusqu’à présent, a tant fait défaut.

C’est ainsi que nous attendions avec impatience le décret d’application relatif au dispositif prévu par la loi portant réforme des retraites. Très sincèrement, je ne me faisais pas trop d’illusions et je ne m’attendais pas à grand-chose. Je n’ai donc pas été étonné de constater que l’amoncèlement des conditions fixées par le décret a rendu, de fait, le dispositif en partie inopérant, madame la ministre.

En tout cas, ce décret est loin, quoi que vous nous disiez, de faire avancer l’égalité professionnelle. Il est révélateur du manque de volonté politique pour appliquer le dispositif de sanctions prévu par la loi.

Si certains doutaient encore de ce manque de détermination, je les renvoie aux choix budgétaires du Gouvernement ces dernières années, plus précisément aux coupes budgétaires dans le programme « Égalité entre les hommes et les femmes » du projet de loi de finances pour 2012.

Bref, il était temps d’en finir avec la persistance, malgré l’existence de nombreux textes, des inégalités salariales entre les femmes et les hommes. L’application des lois doit passer par des mesures plus contraignantes.

J’approuve donc tout à fait l’article unique, qui vise à rendre obligatoire la conclusion d’un accord sur l’égalité salariale entre les femmes et les hommes dans les entreprises, sous peine de suppression des allégements ou exonérations de cotisations sociales et des réductions d’impôt prévues par le code général des impôts.

Je suis tout à fait d’accord, également, avec l’obligation qui est faite à l’employeur de transmettre le rapport de situation comparée sous peine d’une pénalité égale à 1 % de la masse salariale.

Je vous approuve, madame Claire-Lise Campion, lorsque vous affirmez dans votre rapport que cette proposition de loi est la seule façon de faire évoluer la situation actuelle, car des textes votés depuis longtemps ne sont pas appliqués.

Je ne suis donc pas étonné que le MEDEF soit opposé à cette proposition de loi en raison, a-t-il précisé, « des mesures contraignantes et répressives qu’il contient ». L’Union professionnelle artisanale, l’UPA, quant à elle, préférerait que le législateur oriente son action vers un travail pédagogique.

Pourtant, après tant d’années, après tant de lois, le moins que l’on puisse dire, c’est que le MEDEF et l’UPA n’ont manqué ni de temps ni d’explications, et qu’il leur a souvent été demandé de respecter les lois ! Tout a une limite. La période des tergiversations est terminée.

Je voterai donc résolument cet article unique, qui corrige une très grave et inacceptable injustice dont les femmes sont collectivement victimes !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Mirassou

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je commencerai mon intervention par une question. Pourquoi sommes-nous si peu nombreux dans cet hémicycle chaque fois qu’a lieu un débat de société ? Est-ce une fatalité ?

La gauche, dont il faut souligner que les rangs sont un peu plus garnis que ceux de la droite, …

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Mirassou

… est convaincue que l’essence du travail parlementaire est d’arriver à faire « bouger » la société sur un certain nombre de sujets bien précis.

Ce débat sérieux et de qualité peut nous permettre d’évaluer le chemin qu’il reste à parcourir pour déboucher, rapidement nous l’espérons, sur l’égalité professionnelle et salariale entre les hommes et les femmes.

Madame la ministre, vous avez avancé contre ce texte l’argument selon lequel il présenterait, dans son application, des risques d’inconstitutionnalité.

Pourtant, au XXIe siècle, le constat d’une si puissante distorsion entre les hommes et les femmes pour ce qui concerne leurs conditions de travail et leurs rémunérations n’est-il pas anticonstitutionnel parce qu’il est antirépublicain, et antirépublicain parce qu’il bafoue à la fois la liberté et l’égalité ?

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Mirassou

Je ne voudrais pas m’enfermer dans une sorte de discours de la méthode pour déterminer, de la manière la plus précise possible, ce qui, sur le plan réglementaire, législatif ou constitutionnel, pourrait, ou non, aboutir dans les faits. J’estime que le constat que nous partageons tous sur ces travées justifie un passage forcé, et l’on peut en effet considérer que c’est ce à quoi tend cette proposition de loi. C’est du reste la raison pour laquelle, en ce qui me concerne, je la voterai avec enthousiasme.

Au-delà, il s’agit d’un sujet éminemment politique, au sens le plus littéral du terme, et notre débat d’aujourd'hui n’aurait-il qu’un mérite, ce serait de nous donner l’occasion de redéployer une argumentation de nature politique, singulièrement dans la période où nous nous trouvons.

Qu’on cesse donc enfin de nous faire le coup de la jeune femme issue d’un milieu populaire et devenue capitaine d’un grand groupe industriel ! Qu’on arrête de se servir d’elle comme d’un alibi pour masquer que tant d’autres doivent accomplir un véritable parcours du combattant et sont laissées pour compte ! Il suffit de considérer le pourcentage, qui reste sinistrement bas, de celles qui ont accès aux grandes écoles…

Oui, nous devons manifester notre volonté politique, une volonté qui, certes, nous anime toutes et tous, mais dont j’ai la prétention de penser qu’elle est un peu plus marquée du côté gauche de l’hémicycle.

Mme Chantal Jouanno proteste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Mirassou

… car ce qui a pu être entrepris au cours des quarante dernières années n’a, au fond, débouché sur rien de très positif, mais elle éprouvait aussi une forme d’espoir au seuil de la période qui nous attend.

Madame la ministre, je ne vous cacherai pas que la gauche tout entière place son « invincible espoir », comme aurait dit Jean Jaurès, dans l’après-mai 2012, sur cette question comme sur les autres !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

L'amendement n° 4 rectifié ter, présenté par Mmes Létard, Morin-Desailly, Dini et Goy-Chavent, MM. Dubois, Guerriau, Roche et Tandonnet, Mme Férat et MM. Merceron, J.L. Dupont, Détraigne, Capo-Canellas, Amoudry et Namy, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Après les mots :

entre les femmes et les hommes

insérer les mots suivants :

, ou qui n’ont pas transmis aux services de l'inspection du travail et aux organisations représentatives du personnel un tel projet d'accord,

La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

Bien que, comme je l’ai dit dans la discussion générale, nous ne comprenions pas très bien, d’un point de vue juridique et logique, la construction de la proposition de loi, nous souhaitons malgré tout tenter d’introduire de l’efficacité et du bon sens dans les dispositions qui nous sont présentées aujourd'hui.

Ainsi, en application de cet amendement, seules les entreprises qui n’auraient pas transmis aux services de l’inspection du travail et aux organisations représentatives du personnel un projet d’accord relatif à l’égalité salariale entre les femmes et les hommes pourraient être privées du bénéfice des réductions de cotisations sociales.

Rendre applicable une telle sanction – très dure, surtout en période de crise – à toutes les entreprises non couvertes par un accord pourrait en effet avoir des conséquences problématiques et, surtout, très injustes, puisque les organisations syndicales, après avoir négocié, peuvent décider de ne pas signer un accord.

Dans un tel cas, après avoir tout fait pour s’acquitter de son obligation légale, l’entreprise se verrait pénalisée, alors même que l’accord proposé pourrait être de bonne qualité.

Par cet amendement, nous souhaitons donc introduire un peu de justice et, encore une fois, de pragmatisme dans cette proposition de loi, étant rappelé qu’il a été dit au cours de la discussion générale que la délégation aux droits des femmes s’était elle-même posé la question du réalisme de celle-ci.

Debut de section - PermalienPhoto de Claire-Lise Campion

Nous venons de comprendre, au travers des explications de Mme Morin-Desailly, que l’objet de l’amendement est de permettre aux entreprises qui ont élaboré un projet d’accord relatif à l’égalité salariale de conserver le bénéfice de leurs allégements de charges et de leurs réductions d’impôt.

À l’évidence, une telle disposition affaiblirait beaucoup la proposition de loi et n’inciterait pas les entreprises à rechercher un accord avec les syndicats, alors que notre objectif est de faire « bouger » les choses.

De plus, elle risquerait de se heurter dans son application à de réelles difficultés du fait de son imprécision. On peut notamment se demander qui serait chargé d’apprécier la qualité et le sérieux du projet d’accord. Serait-ce l’inspection du travail, les instances représentatives du personnel ?...

Ces raisons ont amené la commission à émettre un avis défavorable sur cet amendement.

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre

Je remercie Mme Morin-Desailly de sa proposition, qui traduit une vision beaucoup plus pragmatique que celle des auteurs de la proposition de loi. J’ai souligné d'ailleurs, dans mon propos liminaire, le côté irréaliste et disproportionné de ce texte.

Néanmoins, madame Morin-Desailly, l’adoption de votre amendement ne lèverait pas toutes les difficultés que crée ce texte.

Je rappelle que les dispositions de la loi portant réforme des retraites prévoient que, à défaut d’accord signé, l’employeur doit impérativement mettre en place, unilatéralement, un plan comprenant des objectifs de progression, des actions permettant de les atteindre et des indicateurs chiffrés. Ce plan, qui est intégré au rapport de situation comparée, est transmis aux institutions représentatives du personnel et à l’inspection du travail. L’objectif, qui est d’engager l’entreprise à agir, est donc pleinement satisfait, même lorsque la conclusion d’un accord n’est pas possible.

Au bénéfice de ces explications, madame Morin-Desailly, je vous invite à retirer votre amendement, faute de quoi j’émettrais un avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

Madame la ministre, j’entends d’autant mieux vos explications que je sais bien, comme je crois d’ailleurs l’avoir clairement dit lors de la discussion générale, que cet amendement ne lève absolument pas les incertitudes ressortant du texte de cette proposition de loi, avec ces deux paragraphes qui semblent presque se contredire.

Son objet, comme vous l’avez rappelé, était d’apporter un peu de réalisme et de pragmatisme dans la réflexion en montrant que les choses ne sont pas si simples. Si elles étaient si simples, certains des gouvernements qui se sont succédé depuis quarante ans – plusieurs de mes collègues ont en effet souligné que le problème durait depuis aussi longtemps – auraient d’ailleurs réussi à obtenir l’égalité salariale !

Soyons donc conscients de la nécessité de travailler de façon collective sur ces sujets pour avancer.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

En ce qui concerne mon amendement, je le retire très volontiers, madame la ministre. C’était d’ailleurs d’autant plus logique que j’estime que la proposition de loi présente des risques d’inconstitutionnalité forts, ce qui est aussi la position du groupe UCR.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

Je rappellerai donc seulement que nous souhaitons la réécriture du décret dans un sens offensif, et non plus a minima. Le dispositif législatif existe ; il a été amélioré dans le cadre de la réforme des retraites. Concentrons-nous donc avant tout sur l’essentiel et mesurons l’efficacité du dispositif dans quelques mois.

Je retire donc cet amendement, monsieur le président.

L'article unique est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

L'amendement n° 3, présenté par Mmes Génisson, Printz, M. André, Campion, Meunier et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :

Après l’article unique

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La section 4 du chapitre Ier du titre 4 du livre 2 du code de la sécurité sociale est complétée par un article L. 241-19 ainsi rédigé :

« Art. L. 241-19. – À compter du 1er janvier 2013, les entreprises de plus de vingt salariés, dont le nombre de salariés à temps partiel est au moins égal à 25 % du nombre total de salariés de l’entreprise, sont soumises à une majoration de 10 % de cotisations dues par l’employeur au titre des assurances sociales, des accidents du travail et des allocations familiales pour l’ensemble de leurs salariés. »

La parole est à Mme Catherine Génisson.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Génisson

Cet amendement vise à encadrer le recours au temps partiel, sujet sur lequel je me suis largement expliquée dans mon propos liminaire.

Je veux toutefois rappeler, d’une part, que les emplois à temps partiel représentent environ 20 % dans l’organisation du travail et sont à 80 % occupés par les femmes ; d’autre part, qu’il s’agit très majoritairement de temps partiel subi, puisque la plupart des personnes concernées, qu’il s’agisse d’ailleurs des femmes ou des hommes, souhaiteraient avoir un emploi à temps plein.

Il faut encore ajouter que le temps partiel correspond souvent à des horaires atypiques, puisque l’on y recourt particulièrement pour des emplois de services ou des emplois de logistique. Les salariés à temps partiel commencent donc très tôt, reprennent leur travail très tard, sont astreints à des interruptions dans leur journée de travail très longues, mais qui ne leur permettent pour autant ni d’occuper un autre emploi dans l’intervalle, ni de rentrer chez eux – et surtout chez elles –, notamment du fait de la faible valorisation salariale du temps partiel. Avec une moyenne de 800 euros par mois, on est en effet sous le seuil de pauvreté !

De telles situations ont des conséquences graves sur l’éducation des enfants, en particulier lorsqu’elles touchent des femmes chefs de famille monoparentales.

Or, aujourd'hui, il n’y a aucun encadrement du recours au temps partiel pour ce qui est de la valorisation des heures complémentaires, c'est-à-dire les heures supplémentaires par rapport au contrat de travail qui est signé dans le cadre du temps partiel. Il n’y a pas davantage de mesure préférentielle en faveur de ces hommes et ces femmes à temps partiel leur permettant d’accéder à un emploi à temps plein si un tel poste se dégage dans l’entreprise.

Je précise que notre proposition n’est pas contraire au bon fonctionnement de l’entreprise. Il faut en effet qu’un quart au moins des effectifs soient employés à temps partiel pour que le dispositif que nous proposons, à savoir une valorisation de 10 % des cotisations sociales, soit mis en place.

Nous considérons qu’une entreprise dont plus du quart de l’effectif est à temps partiel pourrait certainement trouver d’autres modes d’organisation du temps de travail, ce qui lui permettrait sans doute d’ailleurs d’optimiser son fonctionnement.

Debut de section - PermalienPhoto de Claire-Lise Campion

Cet amendement a pour objet de dissuader les entreprises de recourir de façon excessive au travail à temps partiel en prévoyant une augmentation de 10 % du montant de leurs cotisations sociales lorsqu’elles emploient plus de 25 % de salariés à temps partiel.

Mme Génisson a souligné qu’un tel pourcentage correspondait à un recours élevé au temps partiel. C’est d’autant plus vrai que, globalement, dans l’économie française, la moyenne est de 17 %. Il s’agit donc bien de ne pénaliser que le recours abusif au travail à temps partiel.

La commission a donc émis un avis favorable sur cette amendement, qui a toute sa place dans le texte que nous discutons.

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre

Si je peux faire mienne la description que vous venez de tracer du temps partiel subi – celui-ci, comme je l’ai souligné dans la discussion générale, frappe en effet plus spécifiquement les femmes –, je ne puis être d’accord avec votre amendement.

Vous visez en effet indistinctement les entreprises, quelles que soient leurs caractéristiques. Vous atteindrez sans doute celles qui utilisent de façon abusive le temps partiel, mais pourront tout aussi bien être sanctionnées des entreprises dans lesquelles le temps partiel est choisi.

Il serait dommageable de s’engager dans une démarche aussi géométrique. Il me semble beaucoup plus profitable de poursuivre dans les voies que nous avons évoquées, en faisant confiance au dialogue qui s’instaure et, évidemment, aux dispositifs que nous avons mis en place.

Dans certains secteurs, il existe des entreprises particulièrement performantes qui privilégient un temps partiel choisi concernant tant les hommes que les femmes. Si votre proposition de loi est adoptée, ces sociétés se verront imposer une majoration de 10 % des cotisations. Or l’un des principaux handicaps de notre pays dans la compétition internationale, nous le savons bien, est précisément le niveau très élevé de ses charges sociales. Toutes les études le montrent : ce niveau nuit à la compétitivité de notre économie. Et vous proposez d’en rajouter encore ! Je ne peux être d'accord.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Cohen

Nous soutenons cet amendement. Au cours de ce débat, plusieurs intervenants ont lancé un appel au pragmatisme. Nous avons décrit une réalité : l’inégalité salariale n’a que trop duré. Faire confiance aux acteurs privés, cela ne marche pas ! Il faut des mesures, des choix politiques clairs et nets.

La proposition de loi va dans ce sens, et l’adoption de cet amendement l’améliorerait, de manière très souple qui plus est, puisque cette disposition ne concerne que les entreprises dont le nombre de salariés à temps partiel est au moins égal à 25 % du nombre total de salariés de l’entreprise. Il ne faut donc pas faire dire à cet amendement plus qu’il n’en dit !

Les chiffres qui ont été cités le prouvent : dans la majorité des cas, le temps partiel est imposé ; il entraîne une plus grande flexibilité, accentue les inégalités salariales et ampute les retraites. On ne peut pas accepter cette situation ! C'est la raison pour laquelle nous approuvons l’amendement n° 3.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

Pour les raisons qu’a fort bien exposées Mme la ministre, nous ne voterons pas cet amendement, qui vise à sanctionner de manière autoritaire et, surtout, non nuancée le recours au temps partiel.

Notre société doit réfléchir à de nouvelles formes d’emploi ; je pense, notamment, à la manière dont nos seniors pourraient quitter progressivement le milieu de l’entreprise, ainsi qu’à la façon d’intégrer certains employés.

Il est vrai que le temps partiel subi frappe particulièrement les femmes et qu’il faut trouver des moyens d’améliorer la situation de ces dernières. Toutefois, j’ai du mal à saisir les subtilités et les nuances de la proposition formulée au travers de cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

La parole est à Mme Michèle André, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

Je voudrais simplement rappeler quelques chiffres, afin que chacun prenne conscience de la situation. Aujourd'hui, les femmes représentent 75 % des salariés rémunérés au SMIC et 82 % des personnes travaillant à temps partiel.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

Sans doute allons-nous tous, de temps en temps, nous approvisionner dans des grandes surfaces. Dans certaines d’entre elles, il n’y a plus de caissières ; les caisses sont automatiques. Il faut être attentif à ce problème : dans le secteur de la grande distribution, même si les employeurs sont en règle avec le droit du travail et ont les meilleures intentions, de nombreuses jeunes femmes diplômées sont obligées, pour des raisons de survie, d’exercer des fonctions qui constituent pour elles un véritable déclassement. Elles ne travaillent parfois que vingt-huit ou vingt-neuf heures par semaine.

Ce sont ces femmes dont, l’été dernier, un député voulait encore aggraver les conditions de travail, car il estimait que la majoration de 25 % des heures supplémentaires était excessive ; il s’agissait d’un député du Nord, sans doute influencé par quelques distributeurs implantés dans cette zone géographique…

Regardons la réalité en face : c’est beaucoup de malheur pour ces jeunes femmes ! Si elles n’ont pas de compagnon pour les aider à payer leur loyer, elles sont dans une situation de véritable pauvreté.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

Tout ce qui peut améliorer leur situation mérite d’être pris en compte dans cet hémicycle, où nous sommes tous – quel que soit le banc sur lequel nous sommes assis – conscients des difficultés que rencontrent ces femmes. Si nous ne faisons rien, cela signifiera que nous n’avons pas observé comment notre société est construite, et qui, en son sein, est au service de qui.

Je plaide donc en faveur de cet amendement. Alors que nous parlons de la pauvreté, notamment de celle des enfants, c’est de ces femmes-là, qui sont souvent chefs de famille – on parle pudiquement de « famille monoparentale » –, dont nous devons nous occuper. Nous pouvons améliorer un tant soit peu leur situation en faisant en sorte que les entreprises leur proposent davantage d’emplois à temps plein : cela leur permettrait de gagner davantage d’argent, et quand on perçoit 1 000 euros par mois, il n’est pas indifférent de toucher 300 ou 400 euros de plus.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Noëlle Lienemann

Mme André a très bien insisté sur l’aspect humain du problème et sur la nécessité d’un modèle social qui organise autrement le travail, notamment à temps partiel.

Je voudrais répondre à Mme la ministre. Certes, on peut être sensible au besoin de marges de manœuvre de certains secteurs d’activité exposés à la concurrence mondiale. Cependant, le temps partiel subi ne concerne pas ces secteurs mais, pour l’essentiel, les services ainsi que des secteurs liés à la consommation nationale. Ce sont d'ailleurs les mêmes secteurs qui bénéficient des exonérations de cotisations sociales sur les bas salaires, dont il a été prouvé qu’elles n’ont pas, pour la plupart d’entre elles, entraîné de créations massives d’emplois ni amélioré la compétitivité du pays.

Par conséquent, ce ne serait pas mettre des semelles de plomb à l’économie française et à nos entreprises que de sanctionner le recours – pour des raisons de facilité, en général – au temps partiel. Au contraire, une telle mesure, si elle s’accompagnait d’une négociation collective intelligente marquée par une volonté d’organiser autrement le travail et les services, permettrait la création de davantage d’emplois à temps plein, ce qui est indispensable à la dignité des salariés.

Je ne vous répéterai pas, madame la ministre, le discours que j’ai tenu tout à l'heure à votre collègue, Xavier Bertrand, sur la question des licenciements boursiers, mais vous comprendrez que l’on ne peut pas à la fois dire que la valeur travail est centrale et refuser de donner à nos concitoyens les moyens de vivre dignement de leur travail. §

Debut de section - Permalien
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre

Je vais répéter ce que j’ai dit voilà quelques minutes. Les dispositions de cet amendement posent deux problèmes : d'une part, elles ne distinguent pas le temps partiel subi du temps partiel choisi ; d'autre part, et surtout, elles ne prennent pas en compte les spécificités de certaines entreprises.

Je prendrai un exemple tout simple : il existe des entreprises dont tous les salariés travaillent à temps partiel, du fait des caractéristiques mêmes de leur activité. C’est le cas des salles de spectacle, puisque certaines représentations n’ont lieu que le soir ; tous leurs employés, ou du moins la moitié d’entre eux, travaillent donc à temps partiel. Or vous proposez de soumettre ces entreprises à une majoration de 10 % des cotisations sociales. Vous voyez bien qu’il s’agit d’une absurdité !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Mirassou

Est-ce que ces entreprises gagnent de l’argent, ou non ? Là est la question !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

La parole est à M. Jean Louis Masson, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Louis Masson

Je conçois tout à fait que le temps partiel, en particulier quand il est imposé aux femmes, pose problème. En effet, le recours au temps partiel entraîne des situations dramatiques, notamment lorsque les personnes concernées prennent leur retraite, puisqu’elles ne perçoivent alors qu’une toute petite pension.

Cependant, cet amendement me surprend beaucoup, dans la mesure où son adoption n’apporterait rien de plus aux salariés à temps partiel. Il aurait fallu prévoir que les suppléments de cotisations contribuent à majorer les pensions de ces salariés ; actuellement, ce n’est qu’une possibilité ouverte aux employeurs. Si un amendement avait été déposé pour imposer cette majoration, je l’aurais approuvé.

Je veux bien qu’on pleure sur le sort des travailleurs à temps partiel – il s'agit d’un véritable problème –, mais dans ce cas, prenons des mesures concrètes en leur faveur, …

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Mirassou

Nous sommes pour la dignité, pas pour la compassion !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Louis Masson

… au lieu de nous contenter de compliquer la tâche des employeurs.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l'article unique.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

Avant de mettre aux voix l'ensemble de la proposition de loi, je donne la parole à Mme Catherine Morin-Desailly, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

Mes chers collègues, la position de notre groupe ne vous surprendra pas, puisque j’ai déjà largement exposé les raisons qui nous conduisent à nous abstenir ; Muguette Dini s’était d'ailleurs abstenue lors de l’examen de cette proposition de loi par la commission des affaires sociales.

Comme certains d’entre vous, je regrette que nous soyons si peu nombreux – c’est un fait, et sur toutes les travées de cet hémicycle – lorsqu’il s’agit de questions sociétales ; cette situation s’est produite plusieurs fois ces dernières années.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

Je vous remercie de bien vouloir m’écouter, mes chers collègues ! Je pense vous avoir écoutés tout à l'heure. Ces moments sont importants, et nous avons l’habitude de nous écouter les uns les autres dans le cadre de la délégation parlementaire aux droits des femmes ; en tout cas, c’était le cas lorsque j’en faisais partie.

Le problème est toujours devant nous. Par conséquent, la mobilisation doit rester forte dans cet hémicycle.

Je répète officiellement ma demande, afin qu’elle soit bien consignée dans le compte rendu intégral des débats de cette séance : je souhaite que le fameux décret d’application de l’article 99 de la loi du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites soit examiné très précisément, car il ne me semble pas assez offensif.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

Peut-être faudrait-il également une implication plus forte des services de l’inspection du travail : ils pourraient effectuer davantage de contrôles dans les entreprises. En effet, pour que ces dernières soient à égalité devant la loi, encore faudrait-il que les contrôles soient plus réguliers et plus nombreux.

Beaucoup de sujets doivent encore être abordés. J’espère qu’il ne faudra pas attendre à nouveau quarante ans ; je suis tout à fait d'accord avec vous sur ce point, chère Michèle André ! Je souhaite que nous puissions travailler de manière efficace et pragmatique sur ces questions importantes. J’ai bien compris qu’il s’agissait aujourd'hui d’une proposition de loi d’appel – le mot a d'ailleurs été prononcé –, ce qui signifie que nous devons rester extrêmement mobilisés.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Procaccia

Nous avons débattu aujourd'hui d’un véritable problème ; je crois que nous en sommes tous conscients.

Je veux saluer votre présence, messieurs, car je me souviens qu’il vous est arrivé d’être moins nombreux en séance pour d’autres débats sur l’égalité hommes-femmes ! Vous êtes les bienvenus, et je pense que si nous discutons à nouveau de ce sujet l’an prochain – ce qui signifierait malheureusement que nous n’aurions pas beaucoup avancé –, vous serez encore plus nombreux. En tout cas, la présence de sénateurs dans cet hémicycle me fait plaisir, et j’ai apprécié que l’un d’entre eux se soit exprimé à la tribune, car il ne s’agit pas d’un débat hommes-femmes mais d’une question de société, qui nous concerne tous.

Je ne rappellerai pas les propos de Mme la ministre et de Laurence Cohen sur les inégalités dont sont victimes les femmes qui ne se sont jamais arrêtées de travailler pour élever un enfant. Ayant travaillé pendant quarante ans dans une entreprise privée, j’ai bien vu que, à diplômes et à parcours égaux, les femmes ne recevaient pas le même salaire que les hommes.

Pour autant, l’actuel gouvernement comme ceux qui l’ont précédé ont déjà pris des mesures et fait adopter un certain nombre de lois. Je salue d'ailleurs le travail de Mme Génisson, que je connaissais, avant son élection au Sénat, par la proposition de loi relative à l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, devenue la loi du 9 mai 2001, qu’elle avait présentée.

Un certain nombre de mesures que nous avons prises vont dans le bon sens. La sanction financière de 1 % de la masse salariale que les députés ont introduite l'année dernière est unique en Europe. Mme la ministre l’a rappelé, le classement qui a été évoqué surprend, et il étonne davantage encore quand on découvre les pays qui sont placés devant nous ! Nous avons décidé d’adopter cette mesure, alors même que nous savions bien que ses résultats ne seraient pas immédiats. Il faut laisser aux dispositions législatives le temps de s'appliquer.

Sur le fond, les entreprises de plus de 50 salariés devront mettre en œuvre un accord collectif ou un plan d’action qui fixera des objectifs de progression. Les actions devront toucher deux ou trois domaines, selon la taille de l’entreprise.

La loi sur les retraites impose un contenu précis pour les accords, alors que la proposition de loi est silencieuse sur ce point, Mme la ministre et mes collègues UMP l’ont rappelé.

Ainsi, un accord purement déclaratif pourrait exonérer l’entreprise de la suppression des cotisations, ce qui n’est pas le cas pour la pénalité financière de 1 %. Nous avons bien vu que nous ne pouvions pas faire confiance complètement aux entreprises pour appliquer la loi. Par conséquent, si nous voulons adopter un nouveau texte législatif, veillons à sa précision, afin qu’il puisse être mis en œuvre.

Le groupe UMP juge cette proposition de loi redondante avec les dispositions qui ont été récemment votées.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Procaccia

De plus, le poids des allégements et exonérations sociales variant fortement selon les secteurs – il est faible dans l’industrie, mais élevé dans les services, notamment le commerce –, la sanction risquerait d’être inadaptée à l’objectif visé et source de rupture d’égalité.

Le second mécanisme, qui prévoit une pénalité financière pour l’entreprise n’ayant pas transmis à l’inspecteur du travail le rapport de situation comparée prévu par le code du travail, me semble également redondant avec le dispositif de la loi sur les retraites.

Enfin, je veux rappeler que, la semaine dernière, le travail parlementaire a permis de réaliser un grand progrès en matière de lutte contre la précarité dans la fonction publique. L'Assemblée nationale a en effet adopté le projet de loi relatif à l’accès à l’emploi titulaire et à l’amélioration des conditions d’emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique, un texte qui réajuste les nominations aux hautes fonctions entre hommes et femmes.

La vigilance sur la question de l’égalité entre les hommes et les femmes ne doit pas cesser, nous en sommes tous convaincus. Pour autant, il ne faut pas légiférer une nouvelle fois. Au contraire, comme l’a souligné Catherine Morin-Desailly, mieux vaut vérifier l’efficacité des dispositifs déjà en place.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Procaccia

Le groupe UMP ne souscrit pas à l’exposé des motifs très critique des auteurs de cette proposition de loi et votera contre ce texte.

Au mois de juin 2011, nous avons débattu d’une proposition de loi relative à la modernisation du congé maternité en faveur de la protection de la santé des femmes et de l’égalité salariale et sur les conditions d’exercice de la parentalité, dont Claire-Lise Campion était l’auteur.

Sur ce sujet, ma position n’a pas changé : cela fait des dizaines d'années que je préconise l'obligation d'un véritable congé paternité. Lorsque les hommes seront contraints de s’arrêter de travailler pendant une durée minimale d’un mois, ils seront aussi défavorisés dans leur carrière que les femmes. L’année dernière, ma proposition a suscité un certain nombre de railleries, sur l'ensemble des travées d'ailleurs. Pourtant, quelques semaines plus tard, un rapport de l’Inspection générale des affaires sociales allait dans ce sens, ce qui m'a donné beaucoup de satisfaction.

Je suis intimement persuadée que c'est non par des lois, mais par des mécanismes complètement différents que nous parviendrons un jour à imposer une véritable égalité entre les hommes et les femmes dans l'entreprise.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Louis Masson

Sur le principe, je suis partisan de prendre des mesures en faveur de l'égalité, notamment professionnelle, entre les hommes et les femmes. Je ne voterai donc pas contre cette proposition de loi.

Au cours des dernières années, des progrès ont été réalisés. §Je suis tout à fait d'accord pour reconnaître qu’ils restent insuffisants. D'ailleurs, dans certains domaines, le Gouvernement et les sphères d'influence ont mené un combat d'arrière-garde contre les dispositions législatives votées. Ainsi, on ne peut pas dire que tous les ministres aient fait preuve de beaucoup d'enthousiasme pour prendre les décrets d'application... On peut même regretter que certains textes règlementaires n’aient toujours pas été publiés malgré le passage des années.

Je conclurai mon intervention en formulant une remarque plus générale. Je constate que, à quelques mois des élections, à droite comme à gauche, on multiplie les initiatives dans tous les domaines.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Louis Masson

Discutons-nous pour adopter des textes ou pour déclarer que nous avons débattu ? On est en droit de se le demander.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Mirassou

Il fallait venir avant et assister à la discussion générale !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Louis Masson

M. Jean Louis Masson. Ma réflexion ne vaut pas seulement pour aujourd'hui, d'ailleurs ; elle est valable pour bien d’autres propositions de loi.

Protestations sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Louis Masson

Du reste, peu d’entre nous imaginent que, compte tenu du calendrier électoral à venir, la proposition de loi que nous examinons aujourd'hui aura un avenir.

Debut de section - PermalienPhoto de René Teulade

Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, ce débat a été d'une exceptionnelle qualité et d’une grande richesse. Il touche à l'un des plus éminents et des plus beaux textes de notre histoire contemporaine : la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen.

Tout au long de l’examen de ce texte, je pensais aux progrès qui ont été accomplis, peu à peu, en faveur de la cause féminine. Il est un peu triste de constater qu'il a fallu la guerre et le départ des hommes au combat pour que les femmes s’émancipent, notamment dans les zones rurales.

Toute avancée dans ce domaine est un pas vers la liberté. Aujourd'hui plus que jamais, dans une société marquée par l'individualisme des parcours et l'éclatement de la structure familiale, l'égalité entre les hommes et les femmes passe essentiellement par l'égalité professionnelle, en particulier salariale.

Il est de notre devoir d'élus de favoriser tout progrès qui peut être réalisé dans ce domaine, afin de faire avancer notre société vers plus de fraternité et de justice.

Pour toutes ces raisons, le groupe socialiste votera ce texte qui, même s’il n'est pas parfait, constitue une avancée.

Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

Personne ne demande plus la parole ?...

Je mets aux voix l'ensemble de la proposition de loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

Je rappelle que la commission des affaires sociales a proposé une candidature pour un organisme extraparlementaire.

La présidence n’a reçu aucune opposition dans le délai d’une heure prévu par l’article 9 du règlement.

En conséquence, cette candidature est ratifiée et je proclame Mme Michelle Demessine membre de la Commission consultative de suivi des conséquences des essais nucléaires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

J’informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à l’accès à l’emploi titulaire et à l’amélioration des conditions d’emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique est parvenue à l’adoption d’un texte commun.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au lundi 20 février 2012, à quinze heures, le soir et, éventuellement, la nuit (jusqu’à zéro heure trente) :

1. Conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi relatif à l’accès à l’emploi titulaire et à l’amélioration des conditions d’emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique ;

Rapport de Mme Catherine Tasca, fait pour le Sénat au nom de la commission mixte paritaire (382, 2011-2012) ;

Texte de la commission (n° 383, 2011-2012).

2. Nouvelle lecture de la proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale, relative à la simplification du droit et à l’allègement des démarches administratives (320, 2011-2012) ;

Rapport de M. Jean-Pierre Michel, fait au nom de la commission des lois (366, 2011-2012)

3. Proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, visant à assouplir les règles relatives à la refonte de la carte intercommunale (363, 2011-2012) ;

Rapport de M. Alain Richard, fait au nom de la commission des lois (367, 2011-2012) ;

Texte de la commission (n° 368, 2011-2012).

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

La séance est levée à dix-huit heures dix.