Séance en hémicycle du 20 novembre 2012 à 9h30

Sommaire

La séance

Source

La séance est ouverte à neuf heures trente.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Courtois

Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Courtois

L’ordre du jour appelle les réponses à des questions orales.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Courtois

La parole est à M. Georges Patient, auteur de la question n° 22, adressée à M. le ministre des affaires étrangères.

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Patient

Madame la ministre, je tiens à attirer l’attention du Gouvernement sur les relations transfrontalières entre la France et le Brésil.

Depuis toujours, les habitants des villes de Saint-Georges-de-l’Oyapock, en Guyane, et d’Oiapoque, au Brésil, entretiennent des relations étroites d’ordre économique, social, culturel et familial, relations que l’isolement de ces deux villes a également renforcées.

Ces dernières années, deux événements sont venus effriter cette harmonie : d’une part, l’accès par la route à la commune de Saint-Georges-de-l’Oyapock, en 2003, qui a augmenté le flux de personnes transitant par les deux villes ; d’autre part, l’annonce et la construction du pont sur l’Oyapock, ce dernier symbolisant la volonté de la France et du Brésil d’établir une coopération efficace.

L’ouverture de ce pont a eu pour conséquence l’accroissement des forces de la police aux frontières, la PAF, ce qui a totalement bouleversé le quotidien des populations riveraines et a rendu leurs échanges de plus en plus tendus du fait de contrôles de police difficiles sur les deux rives.

Sur la rive guyanaise du fleuve, les Brésiliens qui avaient coutume de venir faire leurs courses et de voir leurs familles sont interpellés à leur débarquement, contrôlés, conduits au poste de la PAF. Certains sont même déshabillés et gardés pendant des heures avant d’être refoulés sans motif.

De la même manière, comme une sorte de représailles, il arrive que, sur la rive brésilienne, des Guyanais soient contraints de passer par le bureau de la police fédérale, afin que leurs passeports soient tamponnés, ce qui n’était jusqu’à présent pas l’usage : ils devaient seulement se présenter au poste de police à l’arrivée et au départ d’Oiapoque.

Je tiens à souligner que, si les Guyanais peuvent entrer au Brésil sans visa, les Brésiliens désirant se rendre en Guyane sont soumis à l’obligation de visa, ce qui n’est pas le cas s’ils veulent aller directement en France métropolitaine. Il s’agit là d’une situation spécifique à la Guyane, puisque c’est le dernier territoire français où cette pratique a cours !

Cet état de fait, lié à une pression migratoire réelle, a d’ailleurs conduit les autorités brésiliennes à envisager l’instauration d’un visa pour les Guyanais voulant se rendre au Brésil.

À la veille de l’ouverture du pont sur l’Oyapock, il est nécessaire d’améliorer la circulation des riverains et de définir un statut transfrontalier afin de jeter des bases favorables au développement de la coopération transfrontalière entre la Guyane et l’État d’Amapá.

Madame la ministre, qu’en est-il de ce statut maintes fois annoncé ?

Debut de section - Permalien
Hélène Conway-Mouret, ministre déléguée auprès du ministre des affaires étrangères, chargée des Français de l'étranger

Monsieur le sénateur, je vous prie tout d’abord d’excuser Laurent Fabius qui ne peut être présent au Sénat ce matin.

Le Gouvernement prête une attention toute particulière à la question de la circulation des personnes entre les deux rives de l’Oyapock, notamment dans la perspective de l’inauguration du pont en 2013.

En 2011, les Brésiliens ont rappelé leur position de principe sur la réciprocité en matière de circulation des personnes. Ils demandent la suppression de l’exigence de visa pour leurs ressortissants à l’entrée de la Guyane, à l’occasion de l’ouverture de ce pont. Comme vous l’avez rappelé, monsieur le sénateur, pour des séjours de moins de trois mois, les ressortissants brésiliens peuvent entrer sans visa en France métropolitaine et dans les départements, régions et collectivités d’outre-mer, excepté en Guyane.

Compte tenu des difficultés liées à l’immigration clandestine, la suppression des visas pour les ressortissants brésiliens entrant en Guyane ne peut être envisagée à ce stade. Toutefois, afin de ne pas pénaliser les populations riveraines, habituées à circuler entre les deux rives, la France et le Brésil ont décidé d’établir un régime de facilitation de la circulation de part et d’autre de l’Oyapock au bénéfice des frontaliers : seraient concernés les habitants des deux communes de Saint-Georges-de-l’Oyapock et d’Oiapoque pouvant attester d’un an de résidence dans ces localités. Des cartes de frontalier seraient établies au nom de ces habitants et permettraient le passage de la frontière sans autre formalité, c'est-à-dire en exemption de visa pour les frontaliers brésiliens. Le point de passage de la frontière serait situé au pont.

Pour ce faire, la France va modifier l’arrêté du 26 juillet 2011 relatif aux documents et visas exigés pour l’entrée des étrangers sur le territoire de la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique, La Réunion et de la collectivité de Saint-Pierre-et-Miquelon, afin de prévoir une exemption de visas pour les résidents brésiliens bénéficiaires de ce régime de facilité de circulation transfrontière.

Par ailleurs, pour améliorer la circulation des personnes, nous avons ouvert une antenne consulaire à Amapá : le consul de France honoraire y délivre des visas depuis le 9 septembre 2011. Ce mode d’entrée des Brésiliens en Guyane pourrait représenter environ le tiers du total des accès d’ici à la fin de l’année 2012.

Dans nos discussions avec les autorités brésiliennes, nous sommes animés par la volonté de faire de ce pont un véritable trait d’union, favorisant la mise en place d’un espace partagé de développement économique et social, où serait assurée à terme la fluidité de circulation la plus ample possible.

La visite d’État de la présidente de la République fédérative du Brésil, Mme Dilma Rousseff, les 11 et 12 décembre prochain, doit être l’occasion d’avancer sur la mise en place des conditions de l’inauguration de ce pont : accords sur les transports routiers, les produits de subsistance sur la zone frontière, la sécurité civile, pour permettre aux secouristes des deux bords d’intervenir sur la zone frontière, et la création du Conseil du fleuve Oyapock.

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Patient

Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse. L’inscription de ma question à l’ordre du jour de cette séance tombe à point nommé, puisque je me suis rendu la semaine dernière à Saint-Georges-de-l’Oyapock et à Oiapoque en compagnie du président de la commission des affaires européennes du Sénat, Simon Sutour. Nous avons pu recueillir les témoignages de Mme le maire de Saint-Georges-de-l’Oyapock et de M. le préfet de la Guyane.

Nous nous réjouissons des avancées sur ce point. Néanmoins, la discussion porte surtout sur le fait que le pont est le seul passage autorisé. Les populations concernées se situent à plus de dix kilomètres de ce pont, et les transports se font habituellement en pirogue : les riverains sont donc déposés en plein milieu des deux villages. Il faudrait à mon avis prévoir, en plus du pont, un passage dans les centres-bourgs par les pirogues.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Courtois

La parole est à M. Richard Yung, auteur de la question n° 159, adressée à M. le ministre délégué auprès du ministre des affaires étrangères, chargé des affaires européennes.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je souhaite interroger le Gouvernement sur l’inquiétante situation budgétaire dans laquelle se trouvent plusieurs programmes européens, notamment Erasmus et le Fonds social européen, ou FSE.

Depuis le début du mois d’octobre, le FSE est en cessation de paiement. Le reste à liquider s’élève à plusieurs milliards d’euros. Quant au programme Erasmus, il connaît un déficit de 90 millions d’euros. Au total, il manque 9 milliards d’euros pour couvrir les besoins de paiement d’ici à la clôture de l’exercice 2012, soit dans un mois.

Cet état de fait s’explique par le décalage croissant entre les autorisations d’engagement et les crédits de paiement. Ainsi, les crédits de l’année N+1 servent de plus en plus à payer les factures de l’année N. Par conséquent, le manque de fonds augmente de façon exponentielle en fin d’exercice.

La situation actuelle est d’autant plus préoccupante que le cadre financier pluriannuel 2007-2013 touche à sa fin et que le nombre de demandes de paiement transmises à la Commission européenne par les États membres est en nette augmentation.

Le 23 octobre dernier, la Commission européenne a présenté un budget rectificatif qui vise à augmenter le budget de l’exercice 2012 de 9 milliards d’euros en crédits de paiement, dont 90 millions d’euros pour Erasmus et 3 milliards d’euros pour le FSE.

Malheureusement, les négociations sur ce projet de budget rectificatif sont au point mort : les États membres, à commencer par les contributeurs nets, sont divisés sur les modalités de paiement de cette rallonge budgétaire. Certains pays, dont la France, ont réclamé la réaffectation de crédits non utilisés afin d’éviter de remettre de l’argent frais, mais la Commission européenne leur a répondu que ces crédits avaient déjà été affectés : c’est le plan de relance adopté à la fin du mois de juin dernier par le Conseil européen.

En cas d’échec des négociations, le budget pour 2013 devrait en partie être utilisé pour couvrir le solde négatif de cette année. Par conséquent, la mécanique de règlement des factures de l’année N sur le budget de l’année N+1 se poursuit.

Voilà quelques jours, une centaine de personnalités européennes ont adressé une lettre ouverte aux chefs d’État et de gouvernement européens afin d’exprimer leur attachement au programme Erasmus. Je salue cette initiative. Comme eux, je pense qu’il faut sortir de l’impasse.

Par ailleurs, le risque est grand de voir remise en cause la stratégie européenne pour l’emploi. Face à la montée du chômage, le FSE est le principal outil de l’Union européenne.

Dans ces conditions, je souhaite connaître la position du Gouvernement sur ce projet de budget rectificatif.

Debut de section - Permalien
Hélène Conway-Mouret, ministre déléguée auprès du ministre des affaires étrangères, chargée des Français de l'étranger

Monsieur le sénateur, je vous prie d’excuser M. le ministre chargé des affaires européennes qui ne peut être présent ce matin. J’espère apporter des éléments de réponse importants pour les étudiants Erasmus et leurs familles.

Vous l’avez souligné, le président de la commission des budgets du Parlement européen, M. Lamassoure, a déclaré le 4 octobre dernier que le programme Erasmus se trouverait prochainement en cessation de paiement. Ce faisant, il souhaitait alerter de façon plus générale le Conseil européen sur l’insuffisance des crédits de paiement en fin d’année. Je rappelle d’ailleurs que ces crédits avaient été négociés par le précédent gouvernement.

J’en viens plus précisément au programme Erasmus. Les prévisions d’exécution de la Commission européenne anticipaient bien, et ce dès le mois de juin 2012, un manque de crédits en fin d’exercice de l’ordre de 156 millions d'euros.

Toutefois, la Commission européenne n’envisage aucune cessation de paiement à compter du mois d’octobre 2012. Dans une note d’information en date du 16 octobre dernier, elle affirme au contraire que, « jusqu’à la fin de l’année, il ne devrait pas y avoir de problème de paiement des bourses Erasmus aux étudiants qui se rendent à l’étranger pour une période d’études ou pour un stage ».

De fait, à l’échelon national, l’agence Europe-Éducation-Formation France, en charge du programme européen pour l’éducation et la formation tout au long de la vie, dont le programme Erasmus est une composante, dispose d’une trésorerie qui lui permet de faire face jusqu’à la fin de l’année 2012 à ses engagements vis-à-vis des bénéficiaires des programmes qu’elle gère.

Dans une proposition de budget rectificatif pour 2012 qu’elle a présentée le 23 octobre dernier, la Commission européenne a néanmoins demandé 90 millions d’euros supplémentaires pour abonder cette année les crédits du programme Erasmus. La France a appuyé cette demande, compte tenu de l’importance qu’elle attache à ce programme. Le Premier ministre a ainsi rappelé dans son intervention à l’Assemblée nationale le 2 octobre 2012 l’attachement du Gouvernement français à la continuation et au renforcement de ce programme : « Aujourd’hui, l’Europe ne consacre que 1 % de son budget à l’éducation et à la formation. Mon gouvernement demandera une augmentation sensible de cette part. C’est ainsi que le programme Erasmus devra monter en puissance et bénéficier à un nombre plus important d’étudiants, notamment issus de familles modestes. »

L’échec des négociations entre le Parlement européen et le Conseil a empêché l’adoption du budget rectificatif. Cependant, comme je l’ai déjà souligné, le paiement des bourses est assuré jusqu’à la fin de l’année et de nouveaux crédits seront disponibles en 2013.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

Je me réjouis que la France soutienne l’initiative de la Commission européenne, qui a demandé une rallonge de 90 millions d'euros pour le programme Erasmus et de 3 milliards d'euros pour le Fonds social européen, le FSE, dans le cadre d’un projet de budget rectificatif pour 2012.

Le problème est que les États pourraient échouer à trouver un accord sur ce projet. Dans ce cas on n’avancerait pas, on continuerait à tourner en rond.

Tout ce que je peux faire, c’est apporter mon soutien à la position du Gouvernement français et l’inciter à convaincre ses partenaires, et notamment les principaux bailleurs de fonds, d’accepter la proposition de la Commission européenne.

Nous avons certes les moyens de verser les bourses, mais grâce à un système de cavalerie : nous utilisons les crédits de l’année prochaine pour payer les dépenses de cette année. Ce n’est pas ce système qui résoudra le problème. La solution réside dans l’augmentation des crédits du programme Erasmus dans le budget rectificatif mais aussi dans le budget pluriannuel 2014-2020 ; la Commission européenne a proposé une hausse de 70 % sur la période. Cela correspond d'ailleurs aux propos du Premier ministre lors de sa déclaration de politique générale à l’Assemblée nationale.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Courtois

La parole est à M. René-Paul Savary, auteur de la question n° 69, adressée à M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt.

Debut de section - PermalienPhoto de René-Paul Savary

Je souhaite attirer l’attention de M. le ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt sur les droits de plantation, sujet cher aux habitants du département de la Marne. Les choses ont évolué depuis le dépôt de cette question, mais il me semble plus que jamais nécessaire de connaître l’avis du Gouvernement, compte tenu du calendrier européen et de l’avancée des travaux dans ce domaine.

Le régime des droits de plantation a été mis en place en 1972 par la Communauté économique européenne. Aujourd’hui, l’Union européenne estime que ce système est un frein au développement des exploitations. C'est pourquoi le groupe de réflexion à haut niveau, ou GHN, sur les droits de plantation, mis en place par le commissaire européen à l’agriculture et au développement rural, M. Dacian Ciolos, s’est réuni pour examiner les conséquences de la libéralisation totale des droits de plantation à partir du 1er janvier 2016.

Ces conséquences seraient catastrophiques aussi bien pour les viticulteurs que pour les négociants. En effet, les rendements seraient illimités, les pratiques œnologiques élargies et, pour ce qui est de l’appellation Champagne, n’importe quel producteur pourrait la revendiquer sur ses étiquettes sans avoir à tenir compte des caractéristiques géologiques et des pratiques traditionnelles. En outre, s'agissant toujours du vignoble champenois, qui représente 30 000 hectares uniques au monde, l’équilibre interprofessionnel qui a fait la force de son économie pourrait être gravement compromis.

Il est donc essentiel de faire le point sur ce dossier crucial pour l’avenir économique de tous les vignobles français et européens.

Deux questions précises se posent : la première est relative à l’avancée des travaux visant à légiférer pour revenir sur la suppression totale des droits de plantation ; la seconde porte sur les actions que le Gouvernement compte entreprendre, ou entreprend déjà, auprès de la Commission européenne pour s’assurer que les recommandations concrètes qui seront formulées à l’issue des réunions du GHN sur les droits de plantation, le 14 décembre prochain, seront acceptables pour tous. Il y va de l’intérêt économique des régions viticoles.

Debut de section - Permalien
Guillaume Garot, ministre délégué auprès du ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, chargé de l'agroalimentaire

Le « laisser-faire, laisser-aller » des marchés ne peut être la réponse à l’avenir de la viticulture française et européenne. Nous le savons bien, l’absence de régulation de la production ferait perdre à la viticulture ses spécificités et la richesse de sa diversité. Je partage votre opinion : ce serait un retour en arrière, alors même que de nombreux élus se sont battus aux côtés des professionnels depuis tant d’années pour améliorer la qualité de la production française. Ni vous ni moi ne croyons que le développement de vins sans indication géographique compenserait la perte de valeur causée par cette libéralisation.

Lors des premières réunions du groupe de réflexion de haut niveau sur les droits de plantation, la France a défendu le maintien d’un dispositif européen de régulation du potentiel de production. Comme vous le savez, le ministre de l’agriculture, Stéphane Le Foll, a été à l’initiative de la rédaction d’une plate-forme commune avec d’autres États membres, qui a été transmise à la Commission européenne en septembre dernier. Lors de la dernière réunion du GHN sur les droits de plantation, la Commission a présenté pour la première fois aux États membres une proposition de régulation de l’offre ; elle est donc revenue en partie sur sa position initiale.

Cependant, le Gouvernement français estime que cette proposition n’est pas encore satisfaisante, en particulier sur la question des vins sans indication géographique. C'est pourquoi la France prépare, avec les treize États signataires de la plate-forme commune, une nouvelle proposition pour réguler le potentiel de production viticole en Europe, car cette régulation – vous l’avez souligné – est indispensable à la compétitivité et à la qualité de la filière.

Nous défendrons cette proposition devant la Commission européenne lors de la prochaine réunion du GHN sur les droits de plantation, qui se tiendra en décembre prochain.

Dans ce contexte, nous comptons sur le soutien des parlementaires et de l’ensemble des élus. En effet, nous sommes convaincus que, dans le débat difficile que nous menons avec la Commission européenne et certains États membres, il est capital de constituer un front uni pour convaincre nos partenaires d’avancer dans la bonne direction.

Le Gouvernement est confiant, parce qu’il est déterminé à faire évoluer la Commission sur cette question primordiale pour le secteur viticole français, la qualité des produits et la pérennité de cette filière qui, je le rappelle, représente une part importante de nos exportations et joue un rôle essentiel dans la préservation de nos territoires et de nos terroirs.

Debut de section - PermalienPhoto de René-Paul Savary

Je vous remercie de ces précisions, monsieur le ministre. Nous sommes un certain nombre à être aussi confiants que le Gouvernement. Cependant, nous devons rester vigilants, car rien n’est acquis.

J’ai lu le dernier entretien du président du GHN sur les droits de plantation, M. José Manuel Silva Rodríguez : il a certes avancé dans notre direction, mais il parle encore d’encadrement des extensions de plantation et de clause de sauvegarde en fonction de l’augmentation potentielle de production. Par conséquent, nous ne sommes pas à l’abri de prises de position qui entraveraient les démarches entreprises à l’unanimité.

Je vous demande donc de rester particulièrement vigilant sur ce dossier : il y va de l’économie tant de la Champagne que de l’ensemble de nos vignobles, dont nous savons qu’ils jouent un rôle primordial pour notre balance commerciale.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Courtois

La parole est à M. Jean Besson, auteur de la question n° 148, adressée à M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Besson

Ma question porte sur la situation de l’agriculture drômoise à la suite des nombreuses intempéries qui ont eu lieu cette année. En effet, monsieur le ministre, le département de la Drôme, que je représente, a subi à plusieurs reprises des événements climatiques d’une ampleur exceptionnelle qui ont touché plus particulièrement deux zones – autour de la colline de l’Hermitage, au nord, et de Loriol-sur-Drôme, au sud – et détruit la quasi-totalité des productions fruitières et légumières. Plus de 2 000 hectares ont été ainsi frappés, avec une perte moyenne de chiffre d’affaires supérieure à 50 %. Près de 400 emplois ont été supprimés dans ces secteurs d’activité, qui, vous le savez, demeurent essentiels pour la vitalité de nos territoires ruraux.

Face à la gravité de cette situation, les agriculteurs sinistrés ont demandé au ministère de l’agriculture de déclencher le dispositif des calamités agricoles et de le compléter par l’activation pour raison exceptionnelle du dispositif prévu en cas de perte de fonds consécutive à une taille sévère de la vigne. Dans ces circonstances, la solidarité nationale doit pleinement jouer son rôle.

Je souhaiterais donc savoir quelle réponse le Gouvernement a apporté à ces demandes d’aide d’urgence légitimes.

Par ailleurs, une étude de la Fédération départementale des syndicats d’exploitants agricoles, la FDSEA, de la Drôme – c’est le principal syndicat dans ce département –, diligentée après ces différents épisodes météorologiques, a montré que seulement 30 % des exploitations concernées étaient assurées. Certains freins expliquent cette situation, notamment – c'est la raison pour laquelle je vous interpelle, monsieur le ministre – la réticence de l’État à remplir une fonction de réassurance publique qui interviendrait en appui du marché.

J’aimerais donc connaître les mesures incitatives que le Gouvernement entend prendre afin de faciliter la progression de l’assurance récolte.

Debut de section - Permalien
Guillaume Garot, ministre délégué auprès du ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, chargé de l'agroalimentaire

Monsieur le sénateur, l’agriculture drômoise, et en particulier l’arboriculture, a été très durement touchée par un épisode de grêle survenu l’été dernier. Je veux d’abord rappeler la solidarité de l’État et du Gouvernement avec toutes les victimes.

Vous connaissez l’état du droit, monsieur le sénateur : les pertes de récolte subies par les agriculteurs ne sont pas indemnisables au titre du régime des calamités agricoles, car le risque grêle est un risque assurable. Toutefois, le ministre de l’agriculture, Stéphane Le Foll, a demandé aux services de l’État de tout mettre en œuvre pour permettre, le cas échéant, une indemnisation des pertes de fonds consécutives à la grêle. Il s’agit dans un premier temps d’identifier les parcelles touchées, en vue d’une éventuelle indemnisation en 2013. Cette indemnisation pourrait intervenir si une perte de récolte supérieure à 30 % était constatée en 2013. Un dossier de demande de reconnaissance en calamité agricole pourra alors être constitué par la direction départementale des territoires de la Drôme pour examen par le Comité national de gestion des risques en agriculture, le CNGRA, qui statuera sur cette reconnaissance.

La demande d’augmentation du seuil des aides de minimis pose la question générale de la prévention des risques dans le secteur agricole, en particulier pour les producteurs de fruits ; vous m’avez d'ailleurs interrogé sur ce point.

Force est d’abord de constater que les vergers touchés par cet épisode n’étaient pas équipés de ce que l’on appelle des filets paragrêle, lesquels permettent de prévenir les pertes de récoltes consécutives aux orages de grêle. À cet égard, je rappelle que le dispositif de rénovation des vergers, géré par FranceAgriMer, permet de soutenir les investissements en filets paragrêle lors du renouvellement des vergers.

Ensuite, les arboriculteurs sinistrés n’avaient pas souscrit d’assurance contre la grêle, alors même qu’existe un dispositif de prise en charge des cotisations d’assurance, à hauteur de 65 % des primes d’assurance.

Plus largement, le développement de l’assurance récolte est un objectif des politiques publiques, qui s’est traduit par un soutien public, national ou communautaire, accru.

Cependant, j’y insiste, les surfaces assurées varient considérablement d’un secteur à l’autre. Ainsi, elles représentent 30 % pour les grandes cultures, 15 % pour les légumes et la viticulture, mais seulement 2 % pour les fruits.

Le taux d’assurance récolte est très dépendant de l’offre des assureurs. En France, les pouvoirs publics, malgré le taux de prise en charge des primes d’assurance, n’ont que peu de visibilité sur cette offre des assureurs, contrairement au système en vigueur en Espagne, par exemple.

Enfin, les discussions en cours dans le cadre de la réforme de la PAC conduiront à un changement des paramètres du soutien public.

C’est pourquoi, dans ce contexte assurément complexe d’un point de vue juridique, économique et financier, M. Stéphane Le Foll, ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, conduira une nouvelle réflexion sur la gestion des risques en agriculture. La question du partage entre les risques qui relèvent de l’assurance et ceux qui ressortissent aux mécanismes de solidarité mérite en effet d’être posée à nouveau, en particulier pour certains secteurs fragiles sur le plan économique, qui n’ont que peu recours à l’assurance.

Telle est donc l’orientation de nos travaux ; il va de soi que nous tiendrons les élus des territoires concernés directement informés de leur avancée.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Besson

Monsieur le ministre, je vous remercie de cette réponse largement positive, que je vais communiquer dans la journée même à mes amis agriculteurs drômois.

Il s’agit, certes, d’un problème conjoncturel, mais il importe aussi de réfléchir aux problèmes que je qualifierai de structurels. Dans le cadre de la négociation de la future PAC avec nos partenaires européens, il faudra faire figurer ce point parmi nos priorités, à l’instar de la question des droits de plantation évoquée tout à l’heure par mon collègue René-Paul Savary.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Courtois

La parole est à M. Antoine Lefèvre, auteur de la question n° 53, adressée à M. le ministre de l'intérieur.

Debut de section - PermalienPhoto de Antoine Lefèvre

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, depuis 2006, l’alcool est la première cause de mortalité sur les routes françaises, avec près d’un tiers des tués.

Dans le cadre de leur politique visant à limiter les cas de conduite sous l’empire d’un état alcoolique, les autorités publiques ont décidé d’imposer la possession d’un éthylotest par le conducteur d’un véhicule terrestre à moteur – c’est le décret en date du 28 février 2012.

La mise en œuvre de cette disposition était initialement prévue à compter du 1er juillet 2012, les premières verbalisations devant intervenir à partir du 1er novembre. Mais, monsieur le ministre, vous venez de repousser cette dernière date de quatre mois, soit au 1er mars 2013.

Ce report s’explique par la pénurie d’éthylotests dans les différents commerces, avec pour conséquence une forte augmentation des prix, ces derniers passant de un à cinq euros.

Selon le dernier baromètre de la sécurité routière, 90 % des Français sont maintenant informés de l’obligation de détenir un éthylotest, ce qui est révélateur d’un réel consensus.

Néanmoins, une difficulté d’application n’a pas été anticipée, puisque la notion de « véhicule terrestre à moteur » englobe également les engins agricoles, tels que tracteurs, moissonneuses, etc.

Cette extension de la mesure suscite, de façon compréhensible, l’étonnement et l’incompréhension des agriculteurs, cette disposition semblant inadaptée aux tracteurs agricoles.

En effet, l’appareil doit satisfaire aux conditions de validité, tenant notamment à sa date de péremption, définie par le fabricant. Pour un éthylotest chimique, cette dernière varie de dix-huit à vingt-quatre mois ; il faudra donc en changer tous les deux ans.

Par ailleurs, ces éthylotests ne doivent pas être conservés en deçà de zéro degré Celsius ou au-delà de trente degrés Celsius. Il s’agit donc de conditions difficilement respectables, en été comme en hiver, notamment pour les engins agricoles non équipés de la climatisation, qui sont encore la grande majorité sur le territoire. Autrement dit, les tracteurs sont ouverts tantôt au vent et à la pluie, tantôt aux fortes chaleurs estivales. De plus, ces engins sont beaucoup plus souvent dans les champs que sur la route, et les conducteurs de chaque véhicule sont multiples.

Monsieur le ministre, un hebdomadaire rapportait récemment que votre collègue ministre de l’agriculture, M. Le Foll, se serait rapproché de vous pour demander que cette mesure ne s’applique pas aux tracteurs. Par conséquent, je vous remercie de bien vouloir nous indiquer votre position sur ce sujet.

Debut de section - Permalien
Manuel Valls, ministre de l’intérieur

Monsieur Lefèvre, vous l’avez rappelé, la conduite sous l’empire d’un état alcoolique reste la première cause d’accidents mortels routiers. Les conducteurs de tous les véhicules sont concernés. Il est donc important de permettre à chacun d’auto-évaluer le plus rapidement possible son imprégnation alcoolique au moyen d’un éthylotest chimique ou électronique. L’amélioration de la sécurité routière est notre objectif. Depuis l’engagement très fort du président Jacques Chirac en 2002, tous les gouvernements qui se sont succédé depuis lors ont poursuivi ce travail.

Le décret du 28 février 2012 oblige tout conducteur d’un véhicule terrestre à moteur à posséder un éthylotest non usagé, disponible immédiatement. J’espère que chacun de vous en possède déjà un ; je sais que M. Garot en a plusieurs. §

Comme vous le savez, les premiers contrôles du respect de cette obligation et, le cas échéant, les premières verbalisations pour défaut de présentation d’un éthylotest devaient intervenir à compter du 1er novembre dernier. Compte tenu de difficultés d’approvisionnement recensées dans certaines régions, j’ai décidé de reporter cette date au 1er mars 2013.

Aussi, j’ai demandé à M. Péchenard, délégué interministériel à la sécurité routière, de mettre à profit ce délai pour évaluer de manière plus générale l’efficacité et la lisibilité de cette obligation, en étroite association avec le Conseil national de la sécurité routière, lequel sera réinstallé le 27 novembre prochain. Le périmètre de l’évaluation pourra comprendre l’examen de l’intérêt de cette mesure pour les conducteurs des véhicules que vous avez évoqués, lorsqu’ils sont amenés à emprunter les voies ouvertes à la circulation publique, ce qui peut arriver. En attendant cette évaluation, j’ai eu l’occasion d’évoquer ce problème avec MM. Le Foll et Garot. Disons le clairement : si, comme ils me l’ont dit, la mesure n’est pas justifiée, au vu de la vitesse et de l’absence d’accidents constatés, une mesure concernant directement ces véhicules pourra alors être prise. Mais vous comprendrez que j’attende la réinstallation du Conseil national de la sécurité routière et l’évaluation qui me sera présentée pour arrêter définitivement notre position.

Debut de section - PermalienPhoto de Antoine Lefèvre

Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse. Comme vous, nous attendrons l’évaluation et serons très attentifs aux mesures qui seront décidées en faveur des agriculteurs.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Courtois

La parole est à Mme Jacqueline Farreyrol, auteur de la question n° 158, adressée à M. le ministre de l'intérieur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Farreyrol

Monsieur le président, monsieur le ministre, mesdames, messieurs les sénateurs, comme vous le savez, le tourisme représente, pour les territoires ultramarins notamment, un secteur porteur de développement économique important.

Dans ce contexte, l’île de la Réunion, qui fait des efforts importants afin de développer et de diversifier ses clientèles, cherche à conquérir les marchés porteurs, émergents, que sont notamment l’Afrique du Sud, l’Inde et la Chine.

Monsieur le ministre, le développement des nouvelles technologies a considérablement influencé les choix de destinations de vacances, en réduisant le délai entre l’achat du séjour et le départ effectif.

Or les ressortissants des pays cités à l’instant sont soumis, pour se rendre à la Réunion, à l’obligation d’obtenir un visa, ce qui entraîne des procédures décourageantes, de par leur longueur, et dissuasives, de par leur coût.

Le secrétaire général de l’Organisation mondiale du tourisme déclarait lui-même récemment : « Les procédures longues, onéreuses et compliquées de délivrance des visas et les politiques limitant le développement des voyages aériens sont des obstacles à la poursuite de l’expansion des voyages et du tourisme. Éliminer ces obstacles permettra de doper la demande, d’accroître les exportations, de muscler l’économie et de créer des emplois. »

Les pays de la zone Océan Indien situés autour de la Réunion délivrent, quant à eux, un visa aux touristes, le plus souvent gratuitement, dès leur entrée sur le territoire. Cette différence de législation est donc très nettement en défaveur de la Réunion.

Or il existe une liste blanche de pays dont les ressortissants sont exemptés de visa lorsqu’ils se rendent, pour des motifs de tourisme, dans certains territoires français. C’est le cas pour les habitants de plusieurs pays caribéens, par exemple, qui désireraient se rendre en Guadeloupe, en Martinique ou en Guyane. Nous souhaitons un tel dispositif pour la Réunion : c’est pourquoi j’ai souhaité voir l’Afrique du Sud, la Chine et l’Inde inscrites sur cette liste blanche.

Le Gouvernement a tenu compte de ma demande en annonçant, par la voix de M. le ministre des outre-mer, la suppression des visas pour les ressortissants sud-africains. Je lui en suis très reconnaissante.

Deux questions restent cependant posées : à quelle date l’arrêté dispensant les ressortissants sud-africains de visa sera-t-il publié et prendra-t-il effet ? Quelles décisions le Gouvernement entend-il prendre pour les ressortissants indiens et chinois, lesquels représentent le plus fort potentiel d’augmentation du nombre de touristes dans les prochaines années ?

Debut de section - Permalien
Manuel Valls, ministre de l’intérieur

Madame la sénatrice, vous l’avez dit, les départements, territoires et collectivités territoriales d’outre-mer, ainsi que la Nouvelle-Calédonie, sont soumis à des régimes de circulation et de séjour particuliers. Contrairement aux départements métropolitains, ils ne font pas partie de l’espace Schengen.

L’arrêté du 14 décembre 2009 puis celui du 26 juillet 2012 ont défini les documents et visas exigés pour l’entrée des étrangers sur le territoire de la Guadeloupe, de la Guyane, de la Martinique, de la Réunion et de la collectivité de Saint-Pierre-et-Miquelon. Ils ont également simplifié les conditions d’entrée sur le territoire de ces départements et collectivités.

Cet arrêté prévoit la dispense de visa pour les séjours de moins de trois mois, par période de six mois, pour les ressortissants d’un certain nombre de pays, harmonisant ainsi le régime de circulation avec celui qui est applicable au territoire métropolitain.

Des mesures plus spécifiques ont par ailleurs été instaurées en faveur de ressortissants de certaines nationalités soumises à l’obligation de visas de court séjour : je veux parler notamment des nationalités sud-africaine, chinoise et indienne.

Afin de favoriser l’entrée dans les départements et collectivités d’outre-mer de ces demandeurs présentant un fort potentiel en termes touristiques, donc un atout incontestable pour la Réunion, l’arrêté dispose que les personnes déjà titulaires d’un visa de circulation délivré pour la métropole par une autorité consulaire française sont dispensées de visa de court séjour pour entrer dans ces départements.

En juin 2011, une convention conclue entre le préfet de la Réunion, le président du conseil régional et le syndicat national des agences de voyages a mis en place un dispositif, baptisé « visa Vanille », consistant à faciliter la circulation de touristes ressortissants de quatre pays : Afrique du Sud, Chine, Inde, Russie. Elle permet donc à ces derniers, lorsqu’ils ont passé au préalable un séjour à l’île Maurice, de bénéficier d’une procédure dérogatoire de délivrance de visa à l’entrée sur le territoire de la Réunion.

J’ai décidé de donner un caractère pérenne à cette expérimentation, en l’inscrivant dans le droit. Je souhaite également qu’une expérimentation complémentaire puisse être menée pour les touristes en provenance des Seychelles.

S’agissant des Sud-Africains, j’ai été sensible aux arguments développés pour encourager, au moyen de la politique des visas, le développement de la destination « la Réunion » du fait de sa proximité géographique avec l’Afrique du Sud et de la desserte hebdomadaire opérée par Air Austral entre Johannesbourg et Saint-Denis-de-la-Réunion.

Victorin Lurel, mon collègue ministre des outre-mer, a eu l’occasion de l’annoncer voilà quelques jours, comme vous l’avez souligné : la décision est prise et les ressortissants sud-africains seront très prochainement dispensés de visas de court séjour ; un arrêté ministériel rendra effectif cette suppression dès le 1er janvier prochain 2013.

Madame Farreyrol, une telle décision représente un engagement fort du Gouvernement tout autant qu’un changement de point de vue. Je tenais à le rappeler en cet instant.

Toutefois – c’est là où les choses se compliquent –, votre demande vise à étendre la dispense de visa de court séjour aux ressortissants chinois et indiens. Je ne suis pas favorable à cette option s’agissant de pays pour lesquels l’absence de risque migratoire n’est pas avérée. Pour lesdits ressortissants, nos consulats ont néanmoins passé des accords locaux avec des agences de voyages, qui permettent un traitement plus rapide des dossiers pour lesquels des garanties sont apportées.

Le Gouvernement et moi-même resteront évidemment attentifs à marquer, par des décisions pragmatiques et ouvertes, notre attention au développement des départements d’outre-mer, tout en évitant ce qui, à terme, pourrait contribuer à leur déstabilisation.

En tout cas, nous restons ouverts à toute discussion sur le sujet. Tels sont le sens et le cadre de la politique gouvernementale en matière de visa.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Farreyrol

Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse. J’espère que toutes les mesures annoncées permettront de booster véritablement notre tourisme. Il faut le savoir, la Réunion abrite une grande communauté chinoise et indienne, et la population locale exprime très fortement son souhait de pouvoir rencontrer ses homologues de l’océan Indien, en raison de traditions culturelles et cultuelles partagées et encore très vivantes sur l’île.

L’encadrement de la procédure par les tour-opérateurs, les agences de voyages et la préfecture, mis en place à la fin de l’année 2011 pour les ressortissants chinois, a très bien fonctionné. Puisse-t-il être pérennisé.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Courtois

La parole est à M. Jean Bizet, auteur de la question n° 112, adressée à M. le ministre délégué auprès de la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

Ma question s’adresse effectivement à M. le ministre chargé des transports, de la mer et de la pêche, qui, je le sais, est retenu à Bayonne par d’autres obligations. Elle est relative à la nécessité de renforcer la compétitivité du transport routier.

Le transport routier est en effet un secteur stratégique essentiel pour le dynamisme de notre économie. À ce titre, il me semble important d’autoriser dès à présent une expérimentation autorisant la circulation des poids lourds de 25, 25 mètres, et ce afin de réduire autant que possible la distorsion de concurrence de plus en plus vive existant avec l’Allemagne et la plupart des pays d’Europe du Nord, qui se sont déjà engagés dans une telle démarche.

Dans un contexte de renchérissement incessant du carburant, je veux souligner les avantages du transport par gros porteurs : diminution du nombre de rotations et de poids lourds, réduction de l’empreinte écologique, même si cette réalité peut en choquer certains, et amélioration de la compétitivité des entreprises. J’observe également que le risque « sécurité routière », lié à la circulation de ce type d’ensembles routiers, est limité par les dispositifs techniques mis en œuvre pour assurer la sécurité passive du véhicule, la formation plus importante des conducteurs et la répartition plus efficace de la masse transportée sur le nombre d’essieux.

Je suis convaincu de la nécessité de créer un choc de compétitivité, pour reprendre une expression à l’ordre du jour à plus d’un titre, comme nous avons pu encore nous en rendre compte au cours des quarante-huit dernières heures, pour des raisons que chacun connaît. Il importe de permettre à l’économie française de mieux s’insérer dans la mondialisation, et je considère que le transport routier a une importance cruciale en la matière.

Madame la ministre, quelle suite le Gouvernement entend-il réserver à une démarche d’expérimentation « grandeur nature », qui consisterait à faire rouler quelques véhicules de grande longueur sur des parcours dédiés sur l’ensemble du territoire national ?

Debut de section - Permalien
George Pau-Langevin, ministre déléguée auprès du ministre de l’éducation nationale, chargée de la réussite éducative

Monsieur le sénateur, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser mon collègue Frédéric Cuvillier, retenu ce matin à Bayonne pour les assises du littoral maritime.

Vous le savez, le précédent gouvernement a beaucoup hésité sur la question de l’expérimentation relative à la circulation de poids lourds de 25, 25 mètres. S’y étant déclaré d’abord favorable, il a ensuite demandé un rapport à l’Observatoire énergie, environnement, transports pour en étudier les enjeux énergétiques et environnementaux, avant de décider de ne rien faire.

Du reste, la question est fortement controversée au sein même de l’Union européenne. Le Royaume-Uni, l’Autriche, la Grèce et le Luxembourg se déclarent fermement opposés à l’introduction de véhicules de ce type. À l’inverse, le Danemark, les Pays-Bas et la Norvège les autorisent sous conditions – poids total maximal limité, nombre de véhicules restreint, itinéraires imposés –, alors que la Suède n’impose aucune restriction.

En Allemagne, une expérimentation a été lancée depuis le 1er janvier 2012 pour une période de cinq ans. Celle-ci n’autorise la circulation des camions de 25, 25 mètres que sur certains itinéraires et dans quelques Länder. La gestion du dossier est néanmoins difficile, car l’expérimentation ne mobilise qu’un nombre très faible de véhicules et rencontre une forte opposition de la majorité des Länder.

Aujourd’hui, le Gouvernement s’emploie à restaurer la compétitivité du transport routier et à stabiliser le cadre d’exercice de cette profession, mis à mal par nos prédécesseurs.

Ainsi, les priorités du ministre délégué aux transports sont avant tout de trois ordres.

Il s’agit, premièrement, de simplifier le dispositif de répercussion de la taxe poids lourds sur les chargeurs, afin que cette taxe ne pèse pas sur les transporteurs routiers dont les marges sont faibles.

Il s’agit, deuxièmement, de publier le décret relatif aux camions de 44 tonnes et 5 essieux, avec limitation de charge à l’essieu, pour mettre fin à la situation d’incertitude créée par le précédent gouvernement, qui fragilisait le secteur.

Il s’agit, troisièmement, d’affirmer l’opposition du Gouvernement à toute libéralisation supplémentaire du secteur, qui ne serait pas accompagnée d’un mouvement d’harmonisation des conditions de travail au niveau européen.

À ce stade, monsieur Bizet, le ministère des transports, qui exclut toute hypothèse de généralisation des poids lourds de 25, 25 mètres, est donc extrêmement réservé sur l’intérêt d’une expérimentation, et ce pour deux raisons principales : d’une part, l’incidence sur la circulation routière ; d’autre part, le signal négatif qu’une telle expérimentation constituerait, alors que le Gouvernement souhaite développer le fret ferroviaire, le transport combiné et les autoroutes ferroviaires.

Toutefois, le ministère des transports est évidemment prêt à écouter les arguments des différentes parties prenantes sur cette question.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

Madame la ministre, j’apprécie la courtoisie avec laquelle vous m’avez répondu, comme celle avec laquelle les services du ministère concerné reçoivent régulièrement les professionnels en la matière.

Cela étant, la courtoisie est une chose, l’efficacité en est une autre ! Je ne peux donc me satisfaire de la situation actuelle, qui conduit tout simplement à une véritable distorsion de concurrence, sur le territoire national, avec d’autres pays de l’Union européenne.

Je sais que le mode de transport que je préconise ne fait pas l’unanimité, mais, il faut le rappeler, un certain nombre de pays l’utilisent déjà.

Mon objectif, que je partage avec d’autres, est simple. Nous souhaitons, dans un premier temps, précisément pour affiner ce dossier, que le Gouvernement engage une expérimentation, afin que lui-même puisse ensuite prendre sa décision.

Il est vrai que le gouvernement précédent a tergiversé quelque peu, mais nous étions à quelques semaines de l’élection présidentielle. Par correction, même si un certain nombre de points avaient d'ores et déjà été validés, il n’a pas voulu prendre une décision définitive.

Je vous le dis très clairement, j’ai demandé à la commission des affaires européennes du Sénat de se saisir de la question, l’objectif étant d’aller vers une harmonisation.

Je tiens à le souligner, les professionnels de ce secteur, qui est au cœur de la compétitivité de l’économie française, n’ont que trois possibilités : ou bien ils s’engagent vers la désobéissance civile, ce que nous ne pouvons leur conseiller ; ou bien ils se lancent dans une délocalisation, ce qui n’est pas non plus dans l’intérêt de notre pays ; ou bien ils ont le souci de cheminer, et nous avec eux, tous ensemble, vers une harmonisation en la matière, question que nous ne pourrons pas éluder plus longtemps.

Je continuerai à aller voir le ministre correspondant chargé de ce sujet de façon à obtenir quelque chose de concret en la matière.

Debut de section - Permalien
George Pau-Langevin, ministre déléguée

Le débat est ouvert !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Courtois

La parole est à M. Michel Savin, auteur de la question n° 115, adressée à M. le ministre de l’éducation nationale.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Savin

Ma question concerne les conditions d’application de la circulaire du 30 décembre 2011 relative aux écoles situées en zone de montagne. Y est affirmée, notamment, la nécessité de garantir l’égalité des chances aux enfants scolarisés dans les écoles de montagne et de promouvoir, en tenant compte de leur situation particulière, un développement équilibré de l’offre scolaire.

Cette circulaire prend en compte différents paramètres : non seulement, bien sûr, la distance entre le domicile des élèves et l’école, mais également les aléas climatiques et le temps de trajet pour accéder à l’établissement scolaire.

Madame la ministre, mes chers collègues, vous serez certainement d’accord avec moi sur le fait que l’on ne peut décemment imposer à des enfants de maternelle près de deux heures de trajet par jour entre leur domicile et l’école.

Ces conditions difficiles d’accès à l’école sont d’ailleurs l’un des critères importants de renoncement à l’installation des familles en zone de montagne, alors que l’accueil de nouvelles familles est une préoccupation majeure des élus locaux, lesquels luttent pour maintenir leur niveau de population et leurs services publics.

Or, force est de constater que, sur l’ensemble du territoire national, la circulaire semble être appliquée de manière très diverse par les différentes autorités académiques, certaines considérant d’ailleurs que le texte ne s’impose pas à elles.

Aussi, madame la ministre, afin d’anticiper dans les meilleures conditions possible la rentrée 2013, je souhaite savoir quels moyens le Gouvernement compte mettre en œuvre pour garantir l’application effective de cette circulaire dans les quarante-huit départements comprenant des zones de montagne.

Debut de section - Permalien
George Pau-Langevin, ministre déléguée auprès du ministre de l'éducation nationale, chargée de la réussite éducative

Monsieur le sénateur, vous le savez, Vincent Peillon et moi-même attachons beaucoup d’importance au maintien, dans les zones de montagne comme dans les zones rurales, d’une école de qualité offrant aux élèves un environnement favorable pour apprendre et pour réussir.

Aux termes de la loi du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne, les zones de montagne sont des entités géographiques, économiques et sociales, dont le relief, le climat, le patrimoine naturel et culturel nécessitent la définition et la mise en œuvre d’une politique spécifique de développement, d’aménagement et de protection.

En ce qui concerne l’école, la circulaire du 30 décembre 2011 sensibilise les services déconcentrés à la prise en compte du contexte local pour attribuer les moyens et adapter l’évolution du réseau scolaire aux distances, aux conditions d’accès, et ce en fonction des aléas climatiques.

Il s’agit donc notamment de privilégier une concertation suivie entre les autorités académiques et les représentants des collectivités locales et territoriales, d’apprécier l’évolution des effectifs sur le moyen terme, c'est-à-dire deux ou trois ans, afin de parvenir à une meilleure stabilisation des structures scolaires et de favoriser le déploiement d’Internet, qui constitue un outil incomparable pour relier les classes entre elles, mener des activités communes et des travaux collaboratifs.

Vous vous inquiétez, monsieur Savin, de l’application inégale de la circulaire dans les départements comprenant des zones de montagne.

En effet, force est de constater que les territoires ruraux isolés voient leurs difficultés particulières souvent mal prises en compte, alors que celles-ci font parfois obstacle au bon déroulement des parcours scolaires.

Aussi, je puis vous l’assurer, je demanderai aux recteurs des académies concernées par la gestion d’écoles de montagne d’être particulièrement vigilants quant au respect des préconisations de la circulaire pour la rentrée 2013.

Le Gouvernement attache comme vous une importance particulière aux écoles maternelles, lesquelles ont malheureusement été quelque peu sacrifiées au cours de la période précédente.

Au-delà, j’ai souhaité que, dans le cadre de la concertation nationale, lancée le 5 juillet dernier en Sorbonne à Paris, concertation qui doit conduire à la refondation de l’école, la question de l’école en montagne soit particulièrement prise en compte, afin de construire une école plus juste pour tous les territoires.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Savin

Madame la ministre, j’ai bien entendu votre réponse, qui va dans le bon sens, à savoir permettre une bonne diffusion de l’information auprès des rectorats.

Je vous suggère aussi de désigner un référent pour faire en sorte que les élus, en particulier les parlementaires, soient en mesure d’alerter rapidement le ministère sur les quelques dysfonctionnements qui pourraient perdurer.

Si les parlementaires disposaient au ministère d’un contact pour traiter de ces sujets, cela règlerait beaucoup de problèmes, me semble-t-il. En effet, si petites qu’elles peuvent paraître à l’échelle d’un ministère comme celui de l’éducation nationale, ces difficultés n’en prennent pas moins, sur le terrain, en termes d’aménagement du territoire, une dimension véritablement importante.

Je vous propose donc, à l'échelle du ministère, de nommer un référent qui serait la courroie de transmission entre les parlementaires, le ministère et les rectorats.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Courtois

La parole est à M. Rémy Pointereau, auteur de la question n° 122, adressée à M. le ministre délégué auprès de la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche.

Debut de section - PermalienPhoto de Rémy Pointereau

Madame la ministre, ma question concerne la commission de révision du schéma national des infrastructures de transports, constituée le 17 octobre dernier, et le projet POCL, c'est-à-dire Paris-Orléans-Clermont-Ferrand-Lyon, dit « Cœur de France ».

En ce qui concerne cette commission, appelée « Duron », je souhaiterais connaître les critères objectifs autres que la faisabilité financière ou la rentabilité qui ont été retenus pour hiérarchiser les projets.

Selon le président de la commission particulière du débat public, M. Michel Gaillard, le débat public sur le projet POCL « Cœur de France » a été exemplaire. Couronné par un véritable succès, il a réuni plus de 14 000 participants, donnant lieu à la remise de 220 cahiers d’acteurs et de plus de 700 contributions. Avec le débat sur le Grand paris, c’est le plus grand débat public qui ait eu lieu en France.

Il existe une unanimité pour que ce projet se réalise le plus rapidement possible au profit des cinq régions traversées, dont le Centre et l’Auvergne, jusque-là mises à l’écart de la grande vitesse.

Il s'agit d’un véritable projet d’aménagement du territoire qui permettra, en même temps, de décongestionner la ligne à grande vitesse existante Paris-Lyon. En outre, il existe un consensus de tous les acteurs politiques et économiques autour d’un seul tracé, dit le « tracé ouest amélioré », ce qui fait de ce projet certainement le meilleur de ceux qui concernent des LGV.

L’Association TGV Grand Centre Auvergne, que je préside, est composée de 34 parlementaires et de 275 élus, toutes sensibilités confondues. Elle a contribué, grâce à ses actions, à une grande part de ce succès et de ce consensus.

Compte tenu de tous ces éléments, nous ne pouvons douter un instant du caractère prioritaire et de la faisabilité de ce projet POCL « Cœur de France ».

Toutefois, nous exprimons notre incompréhension face aux études engagées avec le scénario médian. En mettant à l’écart Orléans-Bourges-Vierzon et Châteauroux, ce scénario ne répond pas à la volonté de la quasi-unanimité des élus.

Nous demandons, au titre de la rentabilité du projet et du tracé ouest, que des études complémentaires soient réalisées afin de prendre en compte le report potentiel sur la ligne POCL de voyageurs issus du Paris-Orléans-Limoges-Toulouse, dit « POLT », sans passer par Paris. Cela permettrait d’améliorer la rentabilité et le financement du projet et du tracé Ouest en économisant la réalisation du barreau Limoges-Poitiers. Très coûteux – à hauteur de deux milliards d’euros pour une seule voie – celui-ci ne sera, qui plus est, jamais rentable.

Le Gouvernement a souhaité que seules les régions soient représentées au sein du nouveau comité de pilotage. Celui-ci sera donc le seul à avoir un pouvoir de décision ; puis, sur proposition de RFF, Réseau ferré de France, il vous soumettra le scénario retenu. Enfin, le Gouvernement décidera.

Madame la ministre, si vous allez à l’encontre de la volonté des élus, comment voyez-vous l’issue de ce dossier ?

Debut de section - Permalien
George Pau-Langevin, ministre déléguée auprès du ministre de l'éducation nationale, chargée de la réussite éducative

Monsieur le sénateur, vous avez voulu appeler l’attention de M. le ministre délégué en charge des transports, de la mer et de la pêche sur les suites que le Gouvernement entend donner au projet de ligne nouvelle à grande vitesse Paris-Orléans-Clermont-Ferrand-Lyon, dit « POCL ».

M. Frédéric Cuvillier est aujourd’hui retenu par les assises de l’économie maritime du littoral qui se déroulent à Bayonne. Soyez assuré qu’il connaît bien vos préoccupations sur ce dossier. Vous avez, d’ailleurs, été reçu, au mois de juillet dernier, par son cabinet, avec le maire de Nevers, M. Florent Sainte Fare Garnot, afin de faire un point sur le projet.

Frédéric Cuvillier a installé, le 17 octobre dernier, une commission. Composée de parlementaires et de personnalités qualifiées, elle est, en effet, présidée par M. le député Philippe Duron. Sa mission est d’établir un diagnostic sur la pertinence et la faisabilité du projet de schéma national des infrastructures de transport, le SNIT. Annoncé par le précédent gouvernement, son montant est évalué à 245 milliards d’euros sur vingt-cinq ans, au vu, tout d’abord, de la situation actuelle et des perspectives de nos finances publiques, mais aussi, et surtout, de la priorité que le Gouvernement entend donner aux transports du quotidien, à la réduction de la fracture territoriale et à la rénovation des réseaux existants.

La commission est indépendante et détermine les critères objectifs à retenir. Elle s’attachera surtout à analyser les besoins réels des territoires et les problématiques d’enclavement. Elle s’interrogera sur la véritable utilité de tel ou tel projet en vue de réduire la fracture territoriale, cherchant, par exemple, ce que l’on peut réellement en attendre en termes de croissance économique et de développement durable. Quant à la soutenabilité financière et à l’intérêt socio-économique, ils doivent être systématiquement envisagés, projet par projet.

Les interactions entre les différents projets, un aspect que vous abordez dans votre question, feront également partie des réflexions de la commission.

Sur le fond, vous le savez, monsieur le sénateur, le projet de LGV-POCL a fait l’objet, d’octobre 2011 à janvier 2012, d’un débat public dont vous convenez qu’il a été approfondi. Au terme de ce débat, le conseil d’administration de Réseau ferré de France a décidé de poursuivre les études du projet. Celles-ci constitueront une étape préliminaire aux études préalables à l’enquête d’utilité publique.

Conformément au résultat du débat public, dont vous vantez, à juste titre, l’exemplarité, les études examineront les conditions de poursuite du projet sur la base des scénarios ouest et médian dans leur variante Roanne.

Vous le voyez, le scénario ouest, pour lequel vous plaidez, a bien été pris en considération. Ces études viseront, notamment, à définir les conditions de la faisabilité financière du projet, à approfondir son évaluation socio-économique et à préciser les performances des dessertes envisageables, ainsi que l’horizon de saturation de la LGV-Paris-Lyon existante.

Le ministre chargé des transports a désigné le préfet de la région Auvergne comme coordonnateur de cette nouvelle phase d’étude du projet. Le comité de pilotage associant, comme de coutume, l’État et les cinq conseils régionaux concernés par le projet, a été mis en place le 3 octobre dernier.

Des structures d’échange et d’information ont, par ailleurs, été instituées afin que les associations puissent faire valoir leur point de vue préalablement aux réunions du comité de pilotage. Je ne doute pas que les élus locaux sauront faire entendre leur voix durant ce processus, comme je ne doute pas qu’ils sauront alimenter la réflexion des membres de la commission « Mobilité 21 ».

Frédéric Cuvillier a remis de la méthode là où il n’y avait jusqu’ici que de vaines promesses : les études se poursuivent, dans la transparence. Le travail actuellement effectué sur la LGV-POCL en est effectivement un bel exemple.

Le Gouvernement mène, en toute transparence et en toute démocratie, une réflexion d’ensemble sur les projets d’infrastructures annoncés par son prédécesseur.

Debut de section - PermalienPhoto de Rémy Pointereau

Madame la ministre, vous n’avez pas apporté de réponse à toutes les questions que je posais. Vous avez évoqué les problèmes des finances publiques, incontestables compte tenu de la crise que nous traversons. Toutefois, le Président de la République a parlé de croissance. Or pour gagner des points de croissance, il faut faire des investissements.

Il existe, vous le savez, une bonne et une mauvaise dette. La mauvaise dette, c’est celle qui est destinée à couvrir les frais de fonctionnement. La bonne dette, c’est celle qui finance les investissements d’avenir. Ce sont ceux-là qu’il ne faut pas ignorer !

L’union sacrée se réalise autour du projet et du scénario que j’ai évoqués. C’est la raison pour laquelle je souhaite que l’on tienne vraiment compte de la volonté des élus locaux.

Vous parlez souvent de démocratie territoriale, de démocratie participative. Il faut en tenir compte dans ce projet. En effet, cette dernière va tout à la fois répondre aux exigences du Grenelle de l’environnement, en permettant d’économiser 200 000 tonnes de CO2, et aller dans le sens souhaité par le ministère de l’égalité des territoires mis en place par le Président de la République. Car l’égalité des territoires, c’est aussi donner les mêmes chances à tout le monde, sur tous les territoires, en termes d’accès aux LGV !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Courtois

La parole est à Mme Valérie Létard, auteur de la question n° 182, adressée à M. le ministre délégué auprès de la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, en charge des transports, de la mer et de la pêche.

Debut de section - PermalienPhoto de Valérie Létard

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, ma question s’adressait à M. le ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche. Elle porte sur l’état d’avancement du programme de développement et de modernisation des itinéraires routiers du Nord et, plus spécifiquement, sur l’opération programmée d’achèvement de l’échangeur autoroutier A2-A23 dans le Valenciennois.

Les premiers travaux de cet équipement autoroutier ont déjà été engagés au cours de l’année 2011. Leur achèvement est une priorité pour la desserte d’un bassin industriel de 350 000 habitants sur l’arrondissement et, plus largement, pour environ un million d’habitants vivant sur le territoire du Hainaut – le sud du département –, à l’intersection des autoroutes reliant Lille à Valenciennes – l’A23 – et Paris à Bruxelles – l’A2.

Ces autoroutes supportent un trafic très élevé de plus de cent mille véhicules par jour. Leur aménagement représente donc un enjeu essentiel pour le Valenciennois. C’est si vrai que les collectivités locales concernées ont accepté de prendre à leur charge une partie du financement. Elles apportent aujourd’hui à l’opération 5, 7 millions d’euros, dont 3, 83 millions d’euros pour la seule communauté d’agglomération Valenciennes Métropole, ce qui représente une prise en charge de 12 % de l’opération.

À cela, il convient d’ajouter le coût des réalisations des protections acoustiques pour lesquelles, sur un total de 7, 5 millions d’euros, la même communauté d’agglomération va apporter 40 % du financement, soit 3 millions d’euros supplémentaires, ce qui porte son effort total pour accompagner cet échangeur A2-A23 à un montant de 6, 8 millions d’euros.

Madame la ministre, si nous acceptons de faire cet effort financier très important pour notre agglomération, pourtant située sur un territoire connu pour être difficile, c’est parce qu’il est vraiment nécessaire de réaliser cet équipement rapidement, sauf à vouloir pénaliser le développement économique de tout l’arrondissement. Sur cette partie du bassin, en effet, se trouvent concentrées toutes les grandes entreprises industrielles de notre région.

Alors même que cette opération faisait a priori partie de la programmation envisagée pour l’investissement routier dans le département du Nord pour 2012, et alors même qu’a déjà été engagée une première tranche de travaux, soit un côté – il nous reste l’autre –, il apparaît qu’aucune ligne de financement ne serait, au final, attribuée cette année à la poursuite des travaux. Cela signifierait l’arrêt d’un chantier pourtant déjà bien engagé, suscitant l’incompréhension des élus comme de la population.

C’est pourquoi je vous demande, madame la ministre, de bien vouloir me confirmer si cette opération fait toujours l’objet d’une programmation dans le calendrier des crédits routiers du département du Nord, et, si tel bien le cas, de bien vouloir m’en indiquer très précisément l’année et l’échéancier, afin que la population et l’ensemble des acteurs économiques du territoire puissent savoir dans quel délai cet ouvrage, vital pour leur développement, pourra enfin être ouvert à la circulation.

Debut de section - Permalien
George Pau-Langevin, ministre déléguée auprès du ministre de l'éducation nationale, chargée de la réussite éducative

Madame la sénatrice, j’interviens au nom du ministre délégué en charge des transports, de la mer et de la pêche, retenu ce matin à Bayonne par les assises de l’économie maritime du littoral.

L’échangeur entre l’autoroute A2 et l’extrémité de l’A23 au sud de Valenciennes autorise aujourd’hui une liaison directe dans le sens Lille-Bruxelles. L’aménagement prévu vise, à terme, à permettre les liaisons directes Lille-Paris et Paris-Lille. Le montant global de l’aménagement a été estimé à 40 millions d’euros.

Une première phase de travaux portant sur la réalisation de la bretelle Lille-Paris a été financée dans le cadre du contrat de projets État-régions, le CPER, 2000-2006, pour un montant de 8, 2 millions d’euros. Une seconde phase, correspondant à la réalisation de la bretelle Paris-Lille, est inscrite au programme de modernisation des itinéraires routiers, le PDMI, établi pour la période 2009-2014 pour un montant de 32 millions d’euros, dont 26 millions d’euros de participation de l’État.

Vous connaissez les contraintes dans lesquelles s’inscrivent aujourd’hui les finances publiques, notamment en matière d’investissement routier. Les exigences de bonne répartition des ressources obligent, plus que jamais, à hiérarchiser les projets à financer et à donner la priorité aux opérations dont les travaux sont d’ores et déjà engagés.

Malgré l’intérêt incontestable que revêt la seconde phase de travaux de l’échangeur A2-A23, les financements nécessaires pour lancer le chantier n’ont pu, pour le moment, être mobilisés. Je rappelle qu’il est très difficile de définir un phasage de l’opération, puisque celle-ci repose, pour l’essentiel, sur la réalisation d’ouvrages d’art de franchissement. Il serait ainsi nécessaire de mobiliser au moins 21 millions d’euros dès 2013.

La répartition des crédits alloués au budget 2013 est actuellement en cours de définition. Le ministre des transports, de la mer et de la pêche a bien pris note de votre interpellation. La possibilité d’inscrire les crédits nécessaires aux travaux de l’échangeur A2-A23 au budget 2013 sera examinée avec la plus grande attention au regard des besoins et des priorités sur l’ensemble des opérations à l’échelon national.

Debut de section - PermalienPhoto de Valérie Létard

Je vous remercie de ces précisions, madame la ministre, et je me félicite que M. Cuvillier ait l’intention d’examiner la possibilité d’inscrire les crédits nécessaires à l’achèvement de cette opération dans le cadre de l’exercice 2013.

À l’heure où nous voulons préserver notre industrie et la dynamique économique du pays, nous devons comprendre que cet aménagement s’inscrit au cœur du nœud logistique routier-ferroviaire-fluvial dont dépend l’intermodalité de l’ensemble du territoire situé au nord de Paris, au carrefour de l’Europe du Nord. Il est vital pour les entreprises installées au centre de cet arrondissement, parmi lesquelles figurent Alsthom, Bombardier, Peugeot, Toyota et Vallourec, que toutes les conditions soient réunies pour tenir le cap en cette période économique sensible.

Il faut à l’heure actuelle traverser une commune pour passer d’une autoroute à l’autre, une seule partie de l’échangeur ayant été réalisée. Le contexte économique étant ce qu’il est, nous devons absolument achever ces travaux. Il y va de la desserte d’un territoire d’un million d’habitants.

Ce qui est en jeu au travers de cette opération, véritable nœud stratégique reliant deux grandes parties de notre territoire, c’est la dynamisation économique de notre région et l’avenir du transport de fret dans notre pays.

Je vous serais donc reconnaissante, madame la ministre, de bien vouloir transmettre ces éléments d’information à M. Cuvillier afin qu’il puisse les intégrer dans sa réflexion.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Courtois

La parole est à M. Hervé Maurey, auteur de la question n° 37, transmise à M. le ministre délégué auprès de la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Maurey

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, malgré l’absence de M. le ministre délégué chargé des transports, je tiens à attirer l’attention du Gouvernement sur la situation ferroviaire en Normandie, l’une des rares régions françaises à ne pas être desservies par une ligne à grande vitesse, et sur l’attachement des élus normands au projet de ligne nouvelle Paris-Normandie.

Annoncée en 2009 par le précédent président de la République, la ligne nouvelle Paris-Normandie a pour but premier de relier le Grand Paris à la façade maritime normande. Elle constitue, à ce titre, un formidable espoir pour notre région en termes de développement économique et d’aménagement du territoire.

L’ensemble des acteurs concernés, élus de tous bords et responsables économiques, se sont mobilisés en faveur de ce projet. Un débat public a eu lieu d’octobre 2011 à février 2012, qui a rencontré un très vif succès : 25 réunions ont été organisées, 6 600 personnes y ont participé et plus de 100 cahiers d’acteurs ont été transmis à la commission particulière du débat public ligne nouvelle Paris-Normandie. Au vu de ce travail, le conseil d’administration de Réseau ferré de France, RFF, s’est prononcé le 5 avril dernier en faveur de la poursuite du projet en vue de l’enquête d’utilité publique.

Depuis le changement de majorité, le Gouvernement semble malheureusement faire marche arrière et renoncer à ce projet. Le ministre du budget a en effet déclaré le 11 juillet dernier à propos des projets de lignes à grande vitesse que « le Gouvernement n’aura d’autre choix que de renoncer à certaines options ». Une commission a été mise en place pour choisir les projets qui seront maintenus. Ses arbitrages, annoncés dans un premier temps pour la fin de l’année, ont été reportés à la fin du premier trimestre 2013 et devront traduire « des priorités du Gouvernement ».

Vous comprendrez donc, madame la ministre, que les élus et les habitants de l’Eure s’inquiètent des orientations, qui ont trouvé ces derniers jours un écho dans la presse, visant à une requalification en ligne classique de ce projet au profit du seul désengorgement du nœud mantois et de l’amélioration de la desserte de Rouen.

Quelles que soient la nécessité et l’urgence de ce désengorgement, celui-ci ne saurait répondre aux légitimes attentes des Normands et aux ambitions qui sont les nôtres pour la Normandie.

L’abandon de la ligne nouvelle Paris-Normandie serait un très mauvais coup porté au développement économique de la région et à l’aménagement du territoire normand. En effet, comme le soulignait le président socialiste de la région Basse-Normandie au lendemain des déclarations de Jérôme Cahuzac : « Ce que nous défendons n’est pas seulement un projet de ligne nouvelle, c’est un projet d’aménagement du territoire ».

Nous souhaiterions, madame la ministre, connaître les intentions du Gouvernement concernant la ligne nouvelle Paris-Normandie, savoir sur quelles bases seront rendus les arbitrages, quels critères seront pris en compte et s’ils intégreront, notamment, le développement économique et l’aménagement du territoire.

Debut de section - Permalien
George Pau-Langevin, ministre déléguée auprès du ministre de l’éducation nationale, chargée de la réussite éducative

Monsieur le sénateur, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser l’absence de M. le ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche, retenu ce matin aux assises de l’économie maritime du littoral qui se déroulent à Bayonne.

Vous avez bien voulu appeler son attention sur les suites que le Gouvernement entend donner au projet de ligne nouvelle Paris-Normandie. Celui-ci a pour principal objectif de relier le Grand Paris à sa façade maritime, avec un temps de parcours cible réduit à une heure quinze entre Paris et le Havre.

Comme vous le rappelez, le débat public relatif à ce projet s’est tenu d’octobre 2011 à février 2012. Il a porté sur quatre scénarios pour la partie située à l’ouest de Mantes-la-Jolie et deux familles de scénarios pour la partie francilienne. Le coût total du projet est estimé entre 10, 4 et 14, 9 milliards d’euros, aux conditions économiques de 2010.

À la suite de ce débat public, RFF a décidé, lors de son conseil d’administration du 5 avril 2012, que les études d’approfondissement porteraient notamment sur les trois scénarios retenus par RFF pour la partie située à l’ouest de Mantes-la-Jolie, n’écartant à ce stade que le scénario C, qui prévoyait une traversée de l’estuaire de la Seine et présentait des caractéristiques économiques nettement moins favorables. Ces études aborderont en particulier la traversée de l’Eure et les conditions de desserte des agglomérations d’Évreux et de Louviers-Val de Reuil.

Ainsi, le projet se poursuit. Bernard Cazeneuve avait d’ailleurs saisi de ce dossier le ministre délégué chargé des transports dès son arrivée. Ce dernier a déclaré, lors de son déplacement à Cherbourg en juillet dernier, qu’il avait conscience des enjeux que représente cette infrastructure pour les territoires concernés.

De manière plus générale, et vous l’avez mentionné, monsieur le sénateur, les priorités du Gouvernement, conformément aux orientations fixées par le Président de la République, sont bien les transports du quotidien, la réduction de la fracture territoriale et la rénovation d’un réseau existant, et ce dans un contexte budgétaire restreint.

Vous conviendrez qu’il est aujourd’hui nécessaire de remettre de l’ordre dans l’ensemble des grands projets d’infrastructures inscrits au projet de schéma national des infrastructures de transport pour 2011 par le précédent gouvernement, car ils ne peuvent tous être réalisés à court terme. Ont en effet été prévus 245 milliards d’euros d’investissement sur vingt-cinq ans, quand la capacité budgétaire annuelle de l’Agence de financement des infrastructures de transport de France, l’AFITF, est de 2 milliards d’euros par an.

La commission composée de personnalités qualifiées et de parlementaires installée le 17 octobre dernier par Frédéric Cuvillier pour mettre en perspective dans le temps l’ensemble des projets, en veillant à rechercher l’optimisation de l’investissement public et à répondre aux priorités fixées pour cette nouvelle législature, étudiera toutes les possibilités et solutions envisageables pour réaliser le projet de ligne nouvelle Paris-Normandie.

Compte tenu du temps nécessaire à la réalisation de grandes infrastructures, cette commission devra par ailleurs formuler des propositions visant à rénover et à moderniser les réseaux et les matériels existants. L’objectif qui nous rassemble est donc bien d’améliorer dans les meilleurs délais les conditions de déplacement quotidien de nos concitoyens.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Maurey

Je vous remercie de votre réponse, madame la ministre. Je partage bien sûr votre avis : il est indispensable d’améliorer les conditions de transport quotidien de nos concitoyens, notamment normands.

Je le partage d’autant plus que les lignes desservant la Normandie connaissent aujourd’hui de graves problèmes. C’est le cas de Paris-Caen-Cherbourg, identifiée par le président de la SNCF comme une « ligne malade », et de Paris-Rouen-Le Havre. Les retards sont constants, les matériels roulants présentent des défauts de qualité et sont souvent vétustes ; enfin, il existe des cas de dangerosité avérée dans certaines gares.

Néanmoins, il nous faut aussi nous préoccuper de la construction de l’avenir. À cet égard, la ligne nouvelle Paris-Normandie me paraît très importante en termes de développement économique et d’aménagement du territoire. Je comprends très bien les contraintes budgétaires auxquelles doit faire face l’actuel gouvernement, au même titre que le précédent. Il est absolument nécessaire, en effet, de rétablir la situation de nos finances publiques, mais tailler dans les investissements n’est pas forcément la façon d’agir la plus pertinente. Nous devons surtout nous efforcer de maîtriser les dépenses de fonctionnement, sans trop sacrifier les dépenses d’investissement.

Vous avez rappelé, madame la ministre, que la ligne nouvelle Paris-Normandie permettrait de relier Le Havre et Paris en une heure quinze. C’est évidemment très important, mais vous auriez pu ajouter que, grâce à elle, tout l’ouest du département de l’Eure ne serait plus qu’à cinquante minutes de la capitale. Les enjeux de développement économique de cette ligne pour la région normande sont donc très importants.

Pourriez-vous faire en sorte que le Gouvernement n’oublie pas, lors des arbitrages budgétaires et de la définition des diverses contraintes à retenir, ces facteurs décisifs pour l’avenir économique et le développement de nos territoires ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Courtois

La parole est à M. Christian Namy, auteur de la question n° 185, adressée à M. le ministre de la défense.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Namy

Je souhaite attirer l’attention du ministre de la défense sur la disparition, dès 2013, du 8e régiment d’artillerie de Commercy dans le cadre des mesures de dissolution, de réorganisation et de transfert des unités et établissements du ministère de la défense prises le 31 juillet dernier.

Si la réduction du format, voire la suppression, du 8e RA était évoquée depuis de nombreuses années, il était convenu, et le précédent président de la République s’y était engagé, de surseoir à ces choix tant que des compensations correspondantes ne seraient pas garanties. Le contrat de développement du bassin de Commercy avait ainsi été signé le 18 juillet 2011 afin de permettre de préparer en douceur la réduction du format du régiment. Toutefois, le contrat ne prévoyait en aucun cas la disparition de ce dernier.

Le bassin de vie de Commercy se trouve donc menacé par ce départ brutal, l’arrivée future de l’entreprise Safran et les effets du contrat de développement ne correspondant pas, à ce jour, aux pertes subies par la suppression du régiment. Je vous rappelle que ce territoire est structurellement fragilisé, avec un taux de chômage atteignant pas moins de 12 % de la population active, ce qui lui a valu d’être placé en zone de revitalisation rurale.

Au-delà de la rupture historique entre un régiment et un territoire, c’est tout le confort de vie des habitants qui est menacé. En effet, les soldats du 8e RA ont des conjoints et des enfants. Les uns exercent une activité professionnelle qu’ils avaient une quasi-certitude de pouvoir poursuivre pendant quelques années encore. Les autres remplissent les écoles et ont noué des liens affectifs avec des habitants du territoire environnant.

Dans la sphère publique, les collectivités ont investi des sommes importantes afin de renforcer la qualité de vie des habitants du bassin de Commercy, rénovant les établissements scolaires, l’habitat, et accompagnant des entreprises qui souhaitaient se développer.

Ces entreprises se sont organisées en se fondant sur un objectif prévisionnel tronqué, engageant des investissements lourds afin de répondre aux besoins de leur clientèle. C’est donc encore une fois l’esprit d’innovation et le dynamisme des entreprises qui sont frappés en plein vol, autant d’éléments non pris en compte dans cette décision brutale et justifiée par la seule nécessité comptable.

Alors même que le Gouvernement annonce vouloir agir pour l’emploi, cette décision menace, dans un contexte de crise d’une violence inouïe, le quotidien de centaines de familles, au-delà des seuls militaires du 8e RA. L’État, loin de nous venir en aide, nous plonge dans le néant.

Madame la ministre, le Gouvernement ne pourrait-il revenir sur sa décision de fermer dès 2013 la base militaire de Commercy, afin que nous puissions trouver une solution satisfaisant le plus grand nombre et, surtout, assurant la survie d’un territoire fragilisé par cette décision ?

Debut de section - Permalien
George Pau-Langevin, ministre déléguée auprès du ministre de l’éducation nationale, chargée de la réussite éducative

Monsieur le sénateur, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser l’absence de Jean-Yves Le Drian, retenu par d’autres obligations.

La dissolution du 8e régiment d’artillerie, qui interviendra effectivement à l’été 2013, a été décidée dès 2008 par le précédent gouvernement. Elle s’inscrit dans la logique de rationalisation de l’artillerie qui a prévalu lors des travaux du précédent Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale.

Commercy bénéficie depuis le 18 juillet 2011 d’un contrat de développement économique, seul contrat de ce type signé dans le cadre du plan de restructuration des armées 2008-2015, qui a la particularité de permettre d’engager les actions de redynamisation économique du territoire en amont de la dissolution effective de la formation.

L’effort budgétaire ainsi consenti par l’État est exceptionnel : il s’élève à 14, 5 millions d’euros sur un total de 25 millions d’euros de financement prévus par le CDE.

Une enveloppe de 4 millions d’euros a été plus spécifiquement mise à la disposition de la commission locale du FRED, le Fonds pour les restructurations de la défense, qui a déjà accordé, en un an, plus d’un million d’euros de subventions à vingt-sept entreprises du bassin de Commercy, ce qui a permis la création de plus de cent trente emplois.

L’entreprise Système Bois Massif a également déjà transféré son siège social et une partie de sa production de la région parisienne à Commercy. Ce transfert a été subventionné par les crédits du FRED, à hauteur de 0, 6 million d’euros, en contrepartie de l’engagement pris par la société de créer soixante emplois sur trois ans.

Le groupe aéronautique Safran, dont vous avez parlé, va également s’implanter à Commercy. Cette unité de production, qui représentera un investissement d’environ cinquante millions d’euros, créera dans un premier temps cent quatre-vingts emplois. L’effectif pourrait atteindre, au total, quatre cents salariés.

Le site français devrait alors produire 50 % des aubes et carters nécessaires à la nouvelle génération de moteurs LEAP, plus économes en carburant, dont 3 500 exemplaires sont déjà commandés pour l’équipement des futures flottes d’avions courts et moyens courriers d’Airbus ou de Boeing.

Ce projet a par ailleurs reçu l’appui du conseil régional de Lorraine, soucieux de développer la filière aéronautique de la région, du conseil général de la Meuse et de la ville de Commercy.

Le groupe Cockerill Maintenance & Ingénierie, domicilié en Belgique, est en pourparlers avec le ministère de la défense afin d’étudier l’opportunité et la faisabilité de la création, sur le site de Commercy, d’un centre de formation de tireurs canons et de mécaniciens de tourelles dans le cadre d’une assistance à l’exportation de matériels militaires.

Ainsi, ce sont près de six-cents emplois directs qui sont déjà attendus sur le territoire.

Certes, il y a un décalage qu’on ne peut nier entre le calendrier du départ du dernier militaire et l’arrivée effective de ces nouveaux emplois sur la zone. Néanmoins, d’une part, on retrouve la même situation dans tous les contrats de site, et, d’autre part, le niveau des futurs emplois, ainsi que leur pérennité au vu des projections de commandes de Safran, constitueront un avantage réel par rapport au passé.

En effet, contrairement au 8e RA, qui est autonome pour son gardiennage, sa restauration et ses transports, les entreprises qui s’installent, en particulier Safran, seront créatrices d’un nombre important d’emplois indirects dans ces domaines de soutien.

S’agissant des emplois induits, il importe de rappeler que les effectifs du 8e RA sont très largement composés de personnels célibataires logés au quartier. Le nombre de familles de militaires résidant actuellement sur Commercy est relativement faible, et s’il est bien entendu trop tôt pour évaluer l’importance des ménages qui s’installeront sur le bassin d’emploi dans les années à venir, il n’est pas exclu que le bilan soit positif sur ce plan également.

Par ailleurs, la commune de Commercy bénéficie aussi du dispositif de cession à l’euro symbolique. Elle a d’ailleurs commencé à en profiter par la cession du pavillon des Capucins, ensemble de logements de famille inutilisés.

En conclusion, le contrat de Commercy fait l’objet de beaucoup d’attention, d’investissements humains et de financements. Les résultats attendus sont très encourageants et seront à la hauteur des promesses, voire supérieurs à celles-ci.

Le ministre de la défense a demandé qu’une réunion placée sous le pilotage du préfet soit organisée dans les meilleurs délais afin de faire un point précis sur le degré d’avancement des mesures d’accompagnement de cette restructuration.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Namy

Madame la ministre, je vous remercie de vos propos. Je note que, le ministre de la défense ne pouvant être parmi nous, vous l’avez représenté, mais j’observe aussi qu’il ne répond même pas aux courriers que, élus nationaux de toutes sensibilités politiques, nous lui adressons.

Je ne peux pas non plus dire que je suis pleinement satisfait de votre réponse.

En ce moment même, le maire – socialiste – de Commercy manifeste devant l’Élysée avec l’ensemble des élus locaux pour faire savoir à quel point il est insatisfait des mesures qui sont prises actuellement.

En fait, tout le monde reconnaît l’effort accompli par le Gouvernement, par les gouvernements successifs. Je rappelle toutefois, et c’est là le vrai sujet de contentieux entre nous et l’État actuellement, que le précédent président de la République – et je considère que, en République, quand un président prend une décision le président suivant doit la tenir – s’était engagé à ce que la disparition du 8e RA n’intervienne que dès lors que les emplois seraient effectivement créés sur place. Or, actuellement, il ne s’agit que de propositions de créations d’emploi.

Certes, l’implantation de l’usine Safran représente un formidable investissement, auquel mon département contribue d'ailleurs largement, avec l’aide de la région Lorraine, mais la décision prise par le ministre de fermer purement et simplement le 8e RA n’en est pas moins incompatible avec les engagements pris antérieurement.

Je vous demande donc simplement, madame la ministre, d’insister auprès de M. le ministre de la défense et de lui dire qu’il y a peut-être d’autres solutions.

D’une part, puisque nous sommes en train d’établir le Livre blanc, nous aurions peut-être pu attendre que celui-ci soit achevé pour savoir quelles étaient les conséquences effectives sur le terrain.

D’autre part, vous avez parlé, avec raison, du contrat de développement économique, mais, et c’est là la difficulté, ce contrat s’applique dans des conditions strictes et draconiennes et il n’a pas l’ampleur que nous souhaitions.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Courtois

La parole est à M. Jacques Berthou, en remplacement de M. Rachel Mazuir, auteur de la question n° 44, transmise à Mme la ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Berthou

Madame la ministre, permettez-moi tout d’abord de vous présenter les excuses de mon collègue Rachel Mazuir, qui est retenu dans l’Ain.

Il a souhaité interroger le Gouvernement sur les difficultés d’application du décret du 16 août 2011 relatif aux nouvelles règles d’attribution de l’allocation aux adultes handicapés, l’AAH. Ce texte précise – enfin – les conditions d’attribution de l’AAH : le demandeur doit être atteint d’un taux d’incapacité permanent d’au moins 80 % ou compris entre 50 % et 79 % et « avoir une restriction substantielle et durable d’accès à un emploi, compte tenu du handicap ».

Or cette définition de la notion de « restriction substantielle et durable d’accès à l’emploi » est trop restreinte.

Auparavant, en effet, chaque MDPH, ou maison départementale des personnes handicapées, disposait d’une certaine marge de manœuvre pour apprécier cette notion chez les personnes présentant un taux d’incapacité compris entre 50 % et 79 %.

Désormais, seul le handicap, sous son aspect médical, sera pris en compte.

En outre, ce décret modifie la durée d’attribution de l’AAH. Jusqu’à présent, elle était accordée pour une période d’un à cinq ans, quel que soit le taux d’incapacité du bénéficiaire. Or, dans certaines situations, principalement pour les personnes handicapées qui travaillent et ont été orientées en établissements et services d’aide par le travail, la restriction substantielle et durable pour l’accès à l’emploi est définitive.

Le fait que l’AAH ne puisse être accordée que pour deux ans maximum alors que l’orientation médicosociale en ESAT est acquise pour cinq ans provoquera une augmentation très sensible du nombre de dossiers à traiter pour les MDPH : les personnes concernées devront en effet constituer régulièrement un nouveau dossier pour pouvoir continuer de prétendre à l’AAH.

Cette situation augmente les risques de rupture des droits pour les usagers, qui seront donc relancés par les MDPH six mois avant l’expiration du délai des deux ans, ce qui entraînera une surcharge de travail et des frais supplémentaires importants.

Pour toutes ces raisons, madame la ministre, il serait souhaitable que le Gouvernement puisse revenir sur les dispositions arrêtées dans ce décret et porter de nouveau à cinq ans la durée d’attribution de l’AAH.

Debut de section - Permalien
Marie-Arlette Carlotti, ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion

Monsieur le sénateur, ne doutant pas que vous me remplacerez avantageusement, je vous charge de transmettre mes propos à votre collègue Rachel Mazuir.

En 2010 et 2011, la Direction générale de la cohésion sociale a développé une importante concertation avec l’ensemble des associations de personnes handicapées. Cette concertation a débouché, en août 2011, sur la publication d’un décret précisant les critères permettant de reconnaître une « restriction substantielle et durable pour l’accès à l’emploi », notion introduite par la loi de finances pour 2007.

Le décret précise la notion de « restriction substantielle et durable pour l’accès à l’emploi », condition nécessaire, vous l’avez rappelé, de l’attribution de l’allocation aux adultes handicapés pour les demandeurs dont le taux d’incapacité reconnu par la MDPH est égal ou supérieur à 50 % mais inférieur à 80 %.

Ce texte rappelle que la restriction substantielle et durable peut être évolutive en fonction de nombreux facteurs, propres à la situation du demandeur, médicaux notamment, ou extérieurs à celle-ci, comme les moyens de compensation du handicap.

Par ailleurs, la circulaire qui l’accompagne a permis de diffuser un outil concret d’aide à la décision, qui est aujourd’hui partagé et reconnu par l’ensemble des membres des CDAPH, les commissions des droits et de l’autonomie des personnes handicapées, de nombreuses MDPH.

Vous regrettez que cette définition limite les marges de manœuvre des MDPH. Cependant, la CNSA, la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, et plusieurs institutions de contrôle, comme l’Inspection générale des affaires sociales ou la Cour des comptes, ont pu constater des disparités territoriales en matière d’attribution de l’AAH par les CDAPH. À ce propos, la CNSA, dans un rapport de juillet 2009, a conclu que, une fois gommées les différences socioéconomiques et démographiques entre départements, environ un tiers des écarts demeurent inexpliqués.

On peut donc conclure, en effet, à des différences de pratiques d’instruction ou d’interprétation des textes selon les territoires. Les écarts d’attribution peuvent ainsi varier d’un à quatre en ce qui concerne les taux d’accord par rapport aux demandes d’AAH déposées.

La plus grande fréquence d’examen des situations individuelles doit permettre de réduire ces écarts, donc d’améliorer l’égalité de traitement devant une prestation décisive pour la qualité de vie des personnes concernées.

Vous rappelez en outre que le décret d’août 2011 fixe une durée d’attribution de l’AAH comprise entre un et deux ans, contre cinq ans auparavant. Cette modification normative a pu entraîner localement une augmentation de la charge de travail des MDPH, mais elle est la conséquence directe des constats effectués par les maisons départementales elles-mêmes.

Il faut en effet rappeler que, selon les chiffres de la CNSA publiés en 2012, les demandes d’AAH ne représentaient que 16, 5 % des demandes formulées par des adultes en situation de handicap, étant entendu qu’un nombre important de demandes reçues en MDPH concerne des enfants. En outre, on a constaté dans un nombre important de départements que la durée moyenne d’attribution de l’AHH au titre de l’article L. 821-2 du code de la sécurité sociale avant la réforme était seulement très légèrement supérieure à deux ans.

D’une manière générale, l’intérêt de la réforme réside dans la possibilité laissée aux CDAPH d’évaluer beaucoup plus fréquemment la situation de la personne. Cela permet d’adapter en conséquence les mesures d’accompagnement socioprofessionnel prises par la commission et par ses partenaires du service public de l’emploi de manière à éviter tout risque d’exclusion durable du monde du travail. Le principe d’une évaluation plus fréquente de l’employabilité des personnes handicapées est donc en soi bénéfique, y compris pour les bénéficiaires de l’AAH orientés en ESAT.

Enfin, la durée d’orientation en ESAT, de cinq ans maximum, n’est pas conditionnée par l’octroi de l’AHH, les deux décisions étant de nature différente.

Les services déconcentrés de la cohésion sociale et les équipes pluridisciplinaires des MDPH ont été formés parallèlement par la Direction générale de la cohésion sociale et par la CNSA, entre octobre 2011 et mars 2012, sur les conséquences de l’évolution normative de l’AAH, en particulier sur la notion de restriction substantielle et durable pour l’accès à l’emploi.

À ce jour, le bilan est positif et des échanges fructueux ont pu s’établir entre les services de l’État et les MDPH afin de parvenir à une connaissance partagée et une approche commune de la restriction substantielle et durable dans une très grande majorité de départements.

Pour l’ensemble de ces raisons, le Gouvernement n’entend donc pas revenir sur les dispositions du décret du 16 août 2011, qui avaient fait l’objet, bien sûr, de nombreuses contestations, mais aussi d’une véritable concertation avec l’ensemble des associations de personnes handicapées.

Naturellement, le Gouvernement reste attentif aux éventuelles difficultés que pourrait poser son application, et je serai moi-même particulièrement vigilante.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Berthou

Madame la ministre, je vous remercie de ces nombreuses précisions. En effet, l’interprétation de ces dispositions par les MDPH pouvait aboutir à des inégalités selon les départements. Nous sommes assurés aujourd’hui de votre vigilance à faire en sorte qu’il y ait moins d’interprétations différentes et que les décrets soient plus précis.

Vous le savez, les conseils généraux rencontrent beaucoup de difficultés et toute entrave supplémentaire ne fait qu’accroître la charge de travail quotidienne. Or les MDPH ont de moins en moins de moyens pour assurer leurs missions. Les outils mis à leur disposition sont limités.

Dans l’Ain, par exemple, la MDPH a perdu le dispositif Appui projet, mis en place par l’Association de gestion du fonds pour l’insertion professionnelle des personnes handicapées, l’AGEFIPH, afin d’examiner les capacités de travail et la mise en situation professionnelle. Désormais, seuls les services de Pôle emploi, Cap emploi ou les missions locales pourront les mobiliser, alors même que ces services sont très limités et souvent surchargés.

Les personnes handicapées à la recherche d’un travail seront encore plus touchées et ne pourront plus bénéficier d’un suivi rapproché de leurs demandes d’emploi. Il s’agit pourtant des principales victimes du chômage, celles qui auraient justement besoin de plus de soutien dans leurs démarches.

Il faut donc faire en sorte, madame la ministre, que tous les moyens nécessaires soient accordés afin de faciliter la tâche des MDPH et des conseils généraux.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Courtois

La parole est à M. Martial Bourquin, auteur de la question n° 119, adressée à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.

Debut de section - PermalienPhoto de Martial Bourquin

Madame la ministre, en 2007 et en 2008, des milliers de personnes ont quitté leur emploi en pleine tourmente économique, pensant ainsi sauver leur entreprise et laisser leur place à de plus jeunes.

Elles sont parties parce qu’elles avaient la certitude de toucher l’allocation équivalent retraite, l’AER, en relais de leur allocation chômage, dans l’attente de la retraite.

Elles ont été trompées par leur entreprise et par les administrations, qui ont validé les plans de départ dits « volontaires » en ne leur indiquant pas que l’AER allait être supprimée par le gouvernement Fillon, le 1er janvier 2009.

Ces personnes étaient environ 60 000 ; elles sont aujourd’hui beaucoup moins nombreuses. Certaines d’entre elles sont nées en 1952, mais la majeure partie est née en 1953, et elles n’ont jamais perçu l’AER. Les plus chanceuses continuent de bénéficier de l’allocation spécifique de solidarité, l’ASS, mais les autres ne perçoivent aucun subside.

Aujourd’hui, madame la ministre, rien n’est prévu pour ces personnes qui ont travaillé toute leur vie, souvent plus de quarante ans, dans des conditions pénibles et en suivant des parcours hachés. Elles se trouvent en dehors de tout dispositif de solidarité nationale : elles ne sont concernées ni par le décret créant l’allocation transitoire de solidarité, l’ATS, parce qu’elles n’ont pas 60 ans, ni par le décret de la retraite à 60 ans de juillet 2012. Elles ne sont concernées que par la retraite à 62 ans – c’est-à-dire pas tout de suite –, par le chômage massif des seniors, par la précarisation et surtout par une détresse angoissante.

Ces personnes ont été précipitées par l’ancien gouvernement dans la pauvreté. Il n’est pas possible d’attendre la réforme des retraites pour agir en leur faveur, car en 2013 et en 2014 la question ne se posera plus : elles seront enfin à la retraite.

Nous proposons, madame la ministre, une solution immédiate : l’élargissement des conditions d’accès à l’ATS en faisant sauter le verrou des 60 ans. Nous vous invitons à tenir rapidement une réunion interministérielle afin d’envisager les modalités de cet élargissement.

Madame la ministre, je propose que, ensemble, nous rendions à ces personnes la dignité dont elles ont été privées. Leur situation nous bouleverse, mes collègues et moi-même, au plus haut point. Nous devons préparer le budget de la Nation en prenant en compte leur détresse et en essayant de les sortir de la situation angoissante dans laquelle elles ont été mises bien malgré elles.

Debut de section - Permalien
Marie-Arlette Carlotti, ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion

Monsieur le sénateur, je me permets de vous répondre au nom de Mme la ministre de la santé et je salue votre intervention à la fois émouvante et politiquement forte.

La question des fins de carrière et de la transition entre l’emploi et la retraite est au cœur des préoccupations du Gouvernement.

Dès le 2 juillet dernier, le décret abaissant l’âge de départ à la retraite à 60 ans, pour les personnes ayant commencé à travailler tôt et ayant la durée de cotisation requise, est venu réparer la principale injustice de la réforme de 2010. Les premiers départs au titre de cette mesure ont lieu depuis le début de ce mois ; en année pleine, plus de 100 000 personnes pourront en bénéficier.

L’accord sur le contrat de génération, qui vient d’être conclu par les partenaires sociaux, a notamment pour objectif de favoriser le maintien dans l’emploi ainsi que l’embauche des seniors. Il prévoit que l’accès au contrat de génération soit possible à 55 ans en cas d’embauche, au lieu de 57 ans. Le projet de loi sera présenté en conseil des ministres le 12 décembre prochain et fera l’objet d’une inscription très rapide à l’ordre du jour du Parlement, afin d’entrer en vigueur au début de 2013.

Dans le cadre de la « feuille de route sociale », une réforme globale du système de retraite sera mise en chantier en 2013 pour assurer la pérennité et l’équité de celui-ci. C’est alors que devra être abordée la question de la transition entre emploi et retraite, ainsi que celle des conditions de départ à la retraite.

Dans le contexte budgétaire qui est le nôtre, le Gouvernement a fait le choix d’agir avec détermination pour l’emploi. Priorité a été donnée aux politiques d’insertion professionnelle durable des jeunes et de soutien actif à l’emploi des seniors. Ainsi, face à l’urgence, il a été décidé de mobiliser 40 000 contrats aidés supplémentaires d’ici la fin de l’année, en sus des 80 000 déjà annoncés en juillet dernier, et de renforcer le service public de l’emploi avec la signature de 2 000 CDI supplémentaires.

En 2013, l’enveloppe de contrats aidés sera stabilisée – hors emplois d’avenir – à son niveau de 2012, ce qui permettra aux seniors demandeurs d’emploi, notamment de très longue durée, d’en bénéficier, puisque les jeunes seront orientés en priorité vers les emplois d’avenir.

Aménager un nouveau dispositif de ce type conduirait à retrancher environ 120 millions d’euros du budget de l’emploi pour une dizaine de milliers de bénéficiaires.

La solution aux difficultés rencontrées par les travailleurs seniors à se maintenir dans l’emploi ou à retrouver un emploi ne passe pas par le retour à des politiques de préretraites qui ont montré leurs limites. Elle relève avant tout de la mobilisation d’un ensemble de moyens visant à faciliter les fins de carrière et les transitions entre emploi et retraite.

L’ensemble de ces questions, notamment celle des anciens bénéficiaires de l’AER, ont vocation à être abordées dans le cadre de la réflexion globale sur les retraites prévue en 2013. Elle nous permettra de définir, avec les partenaires sociaux, des réponses à la fois justes et financièrement responsables pour faire évoluer notre système de retraite.

Contrairement à l’approche purement financière retenue par les gouvernements de droite, une réforme des retraites de gauche doit placer au cœur de ses préoccupations les questions d’équité, notamment en matière d’emploi des seniors, sans lesquelles aucune réforme des retraites ne peut réussir.

Debut de section - PermalienPhoto de Martial Bourquin

Madame la ministre, j’ai bien pris note de l’ensemble des mesures gouvernementales en faveur de l’emploi et de la retraite et je ne peux que les approuver.

Cependant, vous n’avez pas répondu à ma question sur la situation de ces 20 000 à 30 000 personnes qui ont quitté leur entreprise en ayant la certitude de toucher l’allocation équivalent retraite.

Je pourrais vous lire des dizaines de lettres. Je connais une dame qui vit dans une caravane parce qu’elle ne veut pas vendre son appartement : elle le loue pour pouvoir en payer les traites. On ne peut rester insensible devant une telle situation.

Le Gouvernement doit élargir son dispositif et faire sauter le verrou des 60 ans de l’ATS. Il ne s’agit pas d’une mesure qui aurait un coût considérable. De plus, ce ne serait que justice envers ces personnes qui ont tant travaillé et qui ont permis à notre société d’être ce qu’elle est aujourd’hui. Il aurait été heureux que le décret sur les retraites prenne en charge la question de ces allocataires de l’AER. Tel n’a malheureusement pas été le cas.

Il nous faut aujourd’hui rectifier le tir et intégrer au panel des mesures que vous nous avez proposées l’élargissement de l’ATS pour les anciens allocataires de l’AER ou pour ceux qui ne l’ont encore pas perçue parce qu’ils étaient au chômage économique.

Il s’agit d’une question de justice sociale. Je vous ai parlé tout à l’heure de situations bouleversantes. Nous devons justice à ces femmes et à ces hommes qui ont travaillé avec leurs mains, avec leur tête, et qui sont fiers du travail qu’ils ont accompli.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Courtois

La parole est à M. Yves Chastan, auteur de la question n° 162, adressée à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Chastan

Madame la ministre, en tant que président du conseil de surveillance d’un établissement public hospitalier, celui de Privas, je suis confronté à la problématique de sa fusion avec un autre établissement, situé à Vernoux-en-Vivarais, dans le centre de l’Ardèche, alors même qu’une première fusion avait déjà intégré un établissement médico-social de La Voulte-sur-Rhône au centre hospitalier de Privas.

M’appuyant sur cette expérience, ainsi que sur un rapport de l’IGAS, l’Inspection générale des affaires sociales, de mars 2012, intitulé Fusions et regroupements hospitaliers. Quel bilan pour les quinze dernières années ?, je veux aborder plus généralement la question des fusions entre établissements publics de santé.

Tout d'abord, une opération de fusion n’est jamais anodine. Le processus suppose notamment d’harmoniser et de négocier la politique sociale suivie par les établissements, de revoir les systèmes d’information pour les rendre compatibles, de reprendre la comptabilité, de retravailler les budgets, de modifier la gouvernance... Bref, de subtils équilibres nouveaux sont à trouver.

Il est donc essentiel d’expliquer les raisons pour lesquelles des établissements doivent fusionner. Le rapport de l’IGAS incite à préciser et assumer les raisons qui poussent à de telles opérations, quand bien même ces « restructurations ne se justifient que pour des raisons de rationalité économique ». Car, à l’inverse, il peut émerger de l’échange constructif que « des raisons d’intérêt général s’opposent à certaines opérations de rationalisation, au nom, par exemple, de la nécessité de préserver l’accès aux soins dans des zones isolées ».

Dans le projet de fusion précité, certains syndicats manifestent leur opposition pour diverses raisons – craintes de pertes d’emplois ou d’avantages divers –, mais avant tout, je crois, car ils n’en comprennent pas toujours la finalité. Pourtant, une direction commune, déjà créée en l’occurrence, disposant d’un projet médical commun, apparaît suffisante et pertinente pour adapter l’offre de santé sur le territoire concerné.

Sans un temps de concertation suffisant, sans une approche globale des conséquences, une fusion « au forceps » ne prend pas. D’ailleurs, les deux conseils de surveillance et les deux communes consultées pour avis, ont émis des avis défavorables sur la fusion, en tout cas sur une fusion « précipitée », telle qu’elle a été demandée par l’ARS courant 2012 pour aboutir le 1er janvier 2013.

Une concertation préalable impliquant toute la communauté hospitalière ainsi que les représentants des usagers me paraît donc indispensable, tout comme l’écoute des acteurs locaux. Si la loi prévoit bien une consultation des conseils de surveillance et des conseils municipaux concernés, ce qui est tout à fait positif, n’y aurait-il pas tout intérêt à réfléchir à une meilleure prise en compte des avis des acteurs locaux ainsi consultés et, en tout cas, à mener une concertation plus en amont des projets ?

Cet engagement pour plus de démocratie participative dans l’hôpital public s’inscrirait à rebours de la logique jacobine et libérale sous-tendant fortement la loi HPST, c'est-à-dire Hôpital, patients, santé et territoires, adoptée lors de la précédente législature. Je crois savoir d'ailleurs que c’est ce que vous souhaitez, madame la ministre.

Expliquer, écouter, mais aussi accompagner : il s’agit d’une des conclusions du rapport de l’IGAS. Il faut effectivement accompagner les acteurs de ces éventuelles fusions car « sur le plan des ressources humaines notamment, les acteurs locaux sont fréquemment confrontés à des problèmes qu’ils ne peuvent régler qu’en disposant de moyens juridiques et/ou financiers spécifiques ». Toute fusion étant « source de surcoûts ou de dysfonctionnements », l’IGAS recommande ainsi à la DGOS, la direction générale de l’offre de soins, de travailler avec les ARS et les établissements, en créant des outils supplémentaires d’appui aux acteurs de la démarche.

Madame la ministre, pouvez-vous nous indiquer quelles sont vos orientations quant à la politique des fusions promue par la loi HPST et à ses conséquences éventuelles sur le service public de santé et son maillage territorial ?

De plus, lorsque les fusions sont souhaitables – cela arrive ! – et acceptables par les partenaires et usagers des territoires de santé, que préconisez-vous pour une meilleure concertation et un réel accompagnement des établissements et de leurs responsables par les ARS ?

Debut de section - Permalien
Marie-Arlette Carlotti, ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion

Monsieur le sénateur, l’adaptation constante de l’offre de soins aux besoins de santé et au contexte économique peut nécessiter des recompositions de natures très diverses, telles que des fusions d’établissements publics de santé.

Leur opportunité est à apprécier au regard d’un diagnostic objectif à réaliser à l'échelle territoriale – déficit ou excédent d’offre, équilibre de la démographie des professionnels de santé, équilibres financiers des structures – ou de référentiels nationaux – régulation des activités de soins, régulation financière. Les agences régionales de santé, les ARS, ont en charge le pilotage et l’accompagnement des opérations de recomposition.

Dans le cadre des travaux qu’elle a lancés autour du pacte de confiance pour l’hôpital, la ministre des affaires sociales et de la santé a souhaité qu’un volet social figure dans les projets régionaux de santé des ARS. Il ne s’agit pas pour ces dernières de se substituer aux établissements dans le dialogue social local, mais de veiller à ce que la concertation soit assurée lorsque sont menés des projets concernant plusieurs établissements.

La ministre des affaires sociales et de la santé pense en effet, comme vous, qu’un des éléments clefs du succès des opérations de recomposition hospitalière est l’assurance que les personnels concernés sont informés et associés aux projets. Les ARS doivent jouer un rôle d’accompagnement auprès des élus, des communautés médicales et soignantes, des chefs d’établissement.

S’agissant de l’accompagnement social des restructurations, les agences régionales de santé disposent d’ores et déjà, à travers le fonds d’intervention régional, de la capacité d’accorder des aides financières individuelles aux agents concernés – aides à la mobilité, indemnités de départ volontaire, aides à la conversion professionnelle, remboursement du différentiel de rémunération – et peuvent également mettre en place des cellules locales d’accompagnement social et de modernisation.

En outre, dans le cadre de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie pour 2013, la ministre des affaires sociales et de la santé a identifié une enveloppe spécifique dédiée à l’accompagnement de ces opérations de réorganisation. Par ailleurs, elle aura l’occasion, sur la base des propositions des travaux de concertation engagés autour du pacte de confiance pour l’hôpital public, de formuler de nouvelles propositions dès le début de l’année 2013.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Chastan

Ma réplique sera brève, madame la ministre. Les réponses que vous avez apportées au nom de Marisol Touraine me satisfont dans l’ensemble, notamment les éléments relatifs au volet social du pacte qu’elle a proposé et à l’enveloppe spécifique d’accompagnement. Les précisions que vous venez de donner rejoignent l’une des préoccupations que j’ai exprimées.

Ces propositions sont aussi de nature à prolonger, poursuivre et amplifier l’action du Gouvernement, qui vise à reconstituer un service public de santé hospitalier digne de ce nom. La réhabilitation de ce secteur est déjà en cours et elle sera poursuivie. J’en suis personnellement très heureux et je vous assure que, dans les territoires, les mesures qui vont dans le bon sens ne soulèvent pas d’objections a priori.

Une fusion peut dans certains cas se révéler nécessaire, à condition qu’elle ne soit pas conçue à la va-vite, mais au contraire convenablement préparée et anticipée, et que l’ensemble des membres de la communauté hospitalière et de santé, y compris les usagers, bien évidemment, puissent y être associés et comprendre les enjeux et les conséquences pour les établissements appelés, le cas échéant, à se regrouper.

Notre objectif à tous – je ne doute pas, bien entendu, que le Gouvernement y souscrive également – est de prendre en compte ces évolutions quand elles apparaissent nécessaires et utiles pour la qualité des soins et de l’accueil des usagers, notamment au sein du service public hospitalier, sur lequel repose aujourd’hui l’essentiel de l’accueil des patients et des usagers, particulièrement dans les zones rurales et les zones urbaines déshéritées.

Nous sommes favorables à ces évolutions, mais il convient de les anticiper et les accompagner, afin que nous puissions, tous, mieux en percevoir les enjeux.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Courtois

La parole est à M. Daniel Dubois, auteur de la question n° 164, adressée à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Dubois

Madame la ministre, l’ARS, l’agence régionale de santé, de Picardie a arrêté, le 3 août 2012, son cahier des charges régional de la permanence des soins ambulatoires. Je souhaite vous alerter sur les conséquences de cette nouvelle organisation pour le milieu rural dans le département de la Somme.

L’ARS propose de passer de trente-deux secteurs géographiques de garde de nuit à quinze secteurs, voire à dix d’ici à un an.

Cette proposition est inadaptée aux contraintes liées au milieu rural : elle risque non seulement de dégrader l’offre de soins, mais aussi d’aggraver la désertification médicale, bien connue dans les territoires ruraux, voire de mettre, une fois de plus, les collectivités locales à contribution.

En premier lieu, en ce qui concerne le patient et la dégradation de l’offre de soins, la nouvelle permanence de soins effectuée par les médecins généralistes est fixée de vingt heures à vingt-quatre heures, tous les jours de la semaine, y compris le week-end. En revanche, la garde de ces mêmes médecins généralistes est supprimée en nuit profonde, de minuit à huit heures du matin.

L’ARS contraint donc le patient à se déplacer obligatoirement pour se rendre au cabinet du médecin de garde.

On ne tient pas compte des personnes qui ne peuvent se déplacer : les personnes âgées ou isolées, les mères ou pères vivant seuls avec des enfants en bas âge, les personnes sans voiture, sans permis ou celles qui sont en fin de vie.

Aussi, baisser le nombre de secteurs revient à augmenter leur taille, donc à accroître la distance d’accès aux soins par les routes de campagne.

En second lieu, l’ARS préconise que, à terme, les gardes soient assurées dans « des lieux fixes de consultation tels que les maisons médicales de garde, de préférence adossées aux structures hospitalières ». Toutefois, de quelles structures hospitalières parle-t-on, puisqu’il n’en existe quasiment plus en milieu rural ? Et qu’appelle-t-on proximité ? L’ARS la définit comme « une limite d’accès aux soins maximale de quarante minutes »…

Madame la ministre, la problématique n’est pas la même en milieu rural et en ville, où l’on peut compter sur les services d’urgence des hôpitaux et des structures telles que SOS Médecins.

J’entrevois donc deux conséquences, dont l’une, malheureusement, est bien connue.

Première conséquence : la désertification de la démographie médicale en milieu rural.

Pour assurer la permanence de soins, un jeune médecin devra intervenir sur un plus grand secteur et, à terme, se rendre dans une maison médicale à proximité d’un hôpital très éloigné de son domicile, dans les mêmes conditions que s’il était étudiant interne salarié de l’hôpital !

Quant aux gardes en nuit profonde, de minuit à huit heures du matin, elles étaient, jusqu’alors, effectuées par les médecins généralistes, chacun dans leur secteur. Dorénavant, seuls quatre médecins volontaires pourront effectuer les gardes de nuit profonde dans tout le département !

Deuxième conséquence : la mise à contribution les collectivités.

En effet, selon vous, qui va devoir répondre aux diverses impossibilités de se déplacer ? Très certainement les ambulanciers, mais aussi les sapeurs-pompiers, payés par les collectivités : la boucle est ainsi bouclée.

Dès lors, madame la ministre, quelles mesures le Gouvernement a-t-il l’intention de prendre pour assurer la permanence des soins en milieu rural ? Comment envisagez-vous d’intervenir sur cette nouvelle proposition d’organisation de l’ARS dans le domaine que je viens d’évoquer ?

Debut de section - Permalien
Marie-Arlette Carlotti, ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion

Monsieur le sénateur, vous le savez, la nouvelle organisation de la permanence des soins, en phase de lancement dans la plupart des régions, est le résultat de la mise en œuvre des dispositions de la loi HPST. Les agences régionales de santé ont construit une réponse aux besoins, dans ce cadre.

Cependant, ces réponses sont très largement dépendantes de la question de la désertification médicale. En effet, il est très difficile de trouver des médecins volontaires dans les zones démédicalisées, alors que ces praticiens sont déjà surchargés en journée pour répondre aux besoins de leur patientèle. L’amélioration de la permanence des soins est donc très liée à notre capacité à traiter la question des déserts médicaux.

Une réforme globale de la permanence des soins ambulatoires ne doit pas intervenir immédiatement. Tout d’abord, les nouvelles organisations viennent d’être lancées et il est souhaitable que nous disposions d’un peu de recul pour en analyser le fonctionnement. Ensuite, il me semble important que les mesures qui seront prises pour les territoires en voie de démédicalisation aient commencé à produire leurs premiers effets.

À court terme, il faut s’assurer que les organisations mises en œuvre par les ARS offrent la meilleure réponse en fonction de chaque situation régionale.

Concernant la Picardie, qui est l’une des régions les plus touchées par la désertification médicale, l’exercice était particulièrement difficile. Les mesures prises visent à améliorer la situation : sur les 82 secteurs de garde qui existaient jusqu’à présent, seuls 51 étaient couverts avant minuit, soit 62 %, et 43 l’étaient après minuit, soit 53 %.

Ainsi, l’agrandissement des territoires de garde permet de limiter le nombre de médecins à mobiliser et, néanmoins, de couvrir l’ensemble du territoire. Dans les zones les plus défavorisées, l’activité en nuit profonde, de minuit à huit heures, était tellement faible qu’il a été décidé de renforcer la capacité de la régulation médicale téléphonique, qui permet de répondre aux demandes des patients et d’envoyer si nécessaire une intervention médicale d’urgence.

Ainsi, les médecins libéraux ne sont plus mobilisés en nuit profonde et sont davantage disponibles sur les plages horaires qu’attendent les patients, avant minuit et le dimanche. L’agence régionale de santé de Picardie va mettre en place un comité de suivi de la permanence des soins dans les prochains jours, pour vérifier que le système répond correctement aux besoins.

À moyen terme, c'est-à-dire à la fin de l’année 2013, le dispositif sera évalué pour améliorer ces organisations de manière tangible pour tous les Français. Comme pour la question des déserts médicaux, je pense que nous devrons être inventifs pour créer de nouveaux dispositifs, qui doivent permettre de mieux assurer, en complémentarité entre la ville et l’hôpital, la réponse médicale aux besoins de nos concitoyens, aux heures de fermeture des cabinets.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Dubois

Je vous remercie de votre réponse, madame la ministre, même si je ne suis pas tout à fait d’accord avec vos propos.

Vous nous dites finalement que le système ne fonctionnait pas bien, puisque seules 62 % des permanences étaient tenues en journée, et 53 % en nuit profonde.

Pour répondre à ce problème, vous avez décidé d’agrandir les secteurs. J’ai plutôt tendance à penser qu’il aurait fallu faire le contraire. Si l’on veut vraiment apporter une réponse pour les territoires ruraux, ce n’est pas, me semble-t-il, en éloignant le médecin du patient que l’on y parviendra !

Vous nous dites par ailleurs : on va évaluer. Vous me rassurez ! Il est toujours bon en effet de se demander si un système fonctionne. Toutefois, je serais presque tenté de vous donner dès aujourd’hui la réponse : à mon avis, ce système ne fonctionnera pas, tout simplement.

Je voudrais surtout vous dire deux mots à propos du département de la Somme. Avec 782 communes, 544 de moins de 500 habitants et 750 de moins de 1 000 habitants, c’est le troisième département français en nombre de communes.

Mettre en place un système sans tenir compte de ces spécificités, c’est, encore une fois, ne pas répondre à la problématique de santé qui se pose dans les territoires ruraux.

Effectivement, je pense qu’il conviendra d’évaluer très sérieusement le dispositif et je vous demande, madame la ministre, de suivre attentivement ce dossier.

En attendant, j’espère qu’il n’arrivera rien à un parent qui vit seul avec ses enfants ou à une personne âgée. En tout état de cause, je ne vois pas comment on pourra attirer de jeunes médecins en leur disant : le jour où vous serez de garde, vous ne resterez plus chez vous, vous n’irez pas au cabinet médical qui se situe à proximité de votre domicile, mais vous serez contraint d’aller dormir dans une petite chambre, à cinquante kilomètres de chez vous, pour assurer trois ou quatre consultations par nuit, comme lorsque vous étiez interne !

Évidemment, la problématique n’est pas la même en milieu urbain, où tous les services sont disponibles, notamment l’hôpital ou SOS Médecins.

Pour conclure, si le problème est réel, madame la ministre, la réponse que vous lui apportez ne me semble pas adaptée.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Courtois

La parole est à M. Daniel Reiner, auteur de la question n° 183, adressée à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Reiner

M. Daniel Reiner. Je constate, non sans un brin d’amusement, que notre collègue, à travers sa question et sa réplique, vient de dresser un bilan catastrophique de la politique de santé menée depuis dix ans !

Sourires sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Reiner

J’en reviens à ma question, qui s’adresse à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice. Je souligne au préalable que cette dernière m’a personnellement informé, vendredi dernier, qu’elle ne pourrait répondre elle-même à cette question et qu’elle vous avait donc chargée de le faire en son nom, madame la ministre. Je tiens à saluer cette élégante attention – je suis parlementaire depuis quelque temps, et j’avoue que c’est une première !

Comme plusieurs de mes collègues, j’ai été interpellé par une association adhérente du collectif Citoyens et Justice sur la menace que représente la logique de mise en concurrence de la mesure de placement à l’extérieur.

Cette mesure, qui constitue une alternative à la détention pour les courtes peines ou les fins de peine, a aujourd’hui fait ses preuves. Elle présente l’intérêt d’être moins onéreuse qu’une place de détention et favorise la réinsertion et la prévention de la récidive.

Ces orientations correspondent aux objectifs de la nouvelle politique pénale qui ont été présentés par Mme la garde des sceaux en conseil des ministres et transmis dans une circulaire aux parquets le 19 septembre 2012.

Historiquement, depuis le début des années 1980, le placement à l'extérieur a été développé par les associations dans le cadre d'un partenariat avec l'administration pénitentiaire. Celle-ci reconnaît elle-même que la réussite de ce dispositif repose très largement sur le savoir-faire des associations qui en ont la charge, leur implantation locale et les réseaux qu'elles ont pu constituer.

Dans le département de Meurthe-et-Moselle, de quatre-vingts à cent personnes sont accueillies chaque année par près d'une dizaine d'associations, reconnues pour la qualité de leur travail d'accompagnement social.

Or, depuis août 2008, l'administration pénitentiaire est engagée dans une réforme du mode de financement qui la conduit à opter pour la passation d'un marché public. Cette volonté s'est concrétisée en avril 2011 lors de la première publication d'un appel d'offres dans le département de l'Isère. Elle a été confirmée dans une note de la direction de l'administration pénitentiaire du 13 mars 2012.

Face à cette évolution, qui met en péril le travail des associations garantes des éléments fondamentaux de la mesure de placement à l’extérieur ― relation de partenariat forte, souplesse de la mesure, notion de parcours, hébergement, entre autres ―, les fédérations nationales concernées se sont unies pour manifester leur opposition et demander un moratoire, au moins jusqu’à ce que les discussions en cours aillent à leur terme.

Au regard de ces éléments, je vous remercie, madame la ministre, de m’indiquer la réponse que vous souhaitez adresser à ces associations et les dispositions que vous entendez mettre en œuvre pour atteindre l'objectif que vous avez défini, et auquel je souscris pleinement, à savoir faire de « l'aménagement des peines d'emprisonnement » une « priorité ».

Debut de section - Permalien
Marie-Arlette Carlotti, ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion

Monsieur le sénateur, vous avez raison de saluer le panache de Christiane Taubira, qui m’a chargée de vous transmettre la réponse extrêmement précise qu’elle a préparée à votre question.

Vous avez souhaité attirer son attention sur la menace que pourrait représenter pour les associations, qui en ont actuellement la charge, l’application des règles de la commande publique aux prestations de placement à l’extérieur.

Mme Taubira partage votre point de vue sur l’intérêt de la mesure de placement à l’extérieur. Cette dernière comprend un hébergement, en général dans un foyer de type centre d’hébergement de réinsertion sociale, ou CHRS, parfois dans un établissement spécialement conçu qui n’accueille que des condamnés, avec un encadrement socio-éducatif par les travailleurs sociaux de l’association gestionnaire, en lien avec le service pénitentiaire d’insertion et de probation, le SPIP. Elle a pour objet de favoriser l’insertion sociale et elle comprend une aide à la recherche d’emploi. Elle propose parfois un emploi, permet une incitation aux soins selon les cas, et ce, hors détention.

Ainsi que vous le rappelez, la circulaire de politique pénale du 19septembre 2012 pose le principe de l’individualisation des peines et de leur exécution.

Parmi les alternatives à l’emprisonnement, le placement à l’extérieur est une excellente mesure, qui permet notamment un accompagnement global très intéressant pour les jeunes majeurs et les publics très désocialisés.

C’est la raison pour laquelle le budget alloué au financement des placements à l’extérieur en 2013, a été maintenu à hauteur de 8 millions d’euros, pour 754 mesures de placement. Il s’élevait à 7, 8 millions d’euros en 2012.

J’en viens aux procédures de financement. Aujourd'hui, l’administration, à l’échelon local, celui de la direction interrégionale ou du directeur départemental, signe des conventions avec des organismes, sur la base d’un nombre de places et d’un prix de journée qui s’ajoute souvent à une dotation globale de fonctionnement, quand il s’agit de CHRS.

Ces prestations et leurs coûts ont été définis après un travail sur les cahiers des charges effectués ces dernières années avec les deux grandes fédérations d’associations qui mettent en œuvre ces mesures : Citoyens et Justice, d’une part, et la Fédération nationale des associations de réinsertion sociale, la FNARS, d’autre part. Toutes deux sont cocontractantes de l’administration pénitentiaire dans les établissements pénitentiaires en gestion déléguée.

En l’état du recensement, sur 151 organismes conventionnés, tous sont des associations, sauf un, la société GEPSA, partenaire habituel de l’administration pénitentiaire dans la gestion déléguée.

J’en viens à la problématique que vous abordez, monsieur le sénateur. Jusqu’à présent, le financement de ces mesures était réalisé de façon classique, sur la base de conventions avec les associations.

En décembre 2011, le ministère de l’économie et des finances a fait savoir à l’administration pénitentiaire que les activités des associations socio-judiciaires dans le cadre du placement à l’extérieur de détenus relevaient du code des marchés publics. Il estime que les associations qui mettent en œuvre des placements à l’extérieur sont des opérateurs économiques publics ou privés, organismes obligatoirement soumis au code des marchés publics.

Il fonde son argumentation sur une analyse de la jurisprudence de la Cour de justice des communautés européennes et du Conseil d’État relative à la définition de ces opérateurs, résultant de la directive du 31 mars 2004 relative à la coordination des procédures de passation des marchés publics de travaux, de fournitures et de services.

Les associations et fédérations d’associations ― seuls opérateurs qui, aujourd’hui, mettent en œuvre les placements à l’extérieur ― contestent cette interprétation de la jurisprudence et estiment que cette activité ne relève pas obligatoirement du code des marchés public. Vous vous êtes fait ici même leur porte-parole, monsieur le sénateur.

Le précédent garde des sceaux avait néanmoins demandé à l’administration pénitentiaire de travailler à la mise en œuvre d’appels d’offres conformément au code des marchés publics. Une seule expérimentation a été menée, …

Debut de section - Permalien
Marie-Arlette Carlotti, ministre déléguée

… dans l’Isère, en effet. Elle a été interrompue du fait de difficultés extérieures à cet aspect de la question.

À la demande de Mme la garde des sceaux, les services de l’administration pénitentiaire procèdent à une nouvelle étude des modes de financement possibles de cette mesure. Mme la garde des sceaux souhaite notamment que les avantages et les inconvénients de chacune des modalités de financement soient clairement identifiés.

En effet, la mesure de placement à l’extérieur a été historiquement portée par le secteur associatif, qui a développé une expertise importante – j’y insiste – en la matière.

En outre, l’intervention de ces associations sur l’ensemble du champ de la prise en charge, tant du public concerné par des procédures judiciaires que du public relevant de dispositifs de droit commun, permet la mise en œuvre de compétences professionnelles élargies.

La mixité du public dans nombre d’établissements est aussi un facteur favorisant l’insertion par le retour au droit commun.

Enfin, de façon générale, la présence d’associations concourant à la mission de service public de la justice sur le champ de l’exécution des peines est le gage du maintien d’une intervention citoyenne, souvent bénévole, que je crois essentielle à notre société. Pensons, par exemple, au soutien des relations entre parents et enfants.

La question de la récidive et de la réinsertion des condamnés qui se sont acquittés de leur dette ne doit pas être du ressort de la seule administration et de prestataires de service du secteur privé. Les associations doivent y garder leur place.

Dans l’hypothèse où la procédure de marché public serait incontournable – nous verrons ce qu’il en sera –, Mme la ministre de la justice a demandé à ses services de travailler aux conditions de sa mise en œuvre, et notamment de réfléchir au contenu des appels d’offres.

En effet, les critères de sélection des offres étant élaborés par le pouvoir adjudicateur, conformément à l’article 53 du code des marchés publics, la compétence des prestataires en matière de suivi et d’accompagnement des personnes devrait être particulièrement valorisée. Les associations pourraient alors faire valoir leur savoir-faire spécifique dans leurs offres. Il faut que la richesse et la qualité du partenariat constaté sur le terrain soient préservées.

Quelle que soit l’option retenue quant à la procédure applicable aux mesures de placement extérieur, et face à la grande disparité qui existe entre les territoires en termes de partenariats, Mme la ministre encouragera la généralisation de cette mesure d’aménagement de peine sur tout le territoire hexagonal et en outre-mer.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Reiner

Je remercie Mme la ministre de la justice de la précision de cette réponse et de l’attention qu’elle a portée à cette question. Je suis naturellement heureux qu’elle partage notre point de vue et, surtout, celui des associations.

Nous avons besoin d’un regard citoyen sur ces questions. Avec l’ensemble des associations, je lui apporte tout mon soutien dans le bras de fer qu’elle va mener avec le ministère de l’économie et des finances.

Il me paraît évident que, s’agissant d’une politique publique, le passage par l’appel d’offres systématique n’est pas très raisonnable dans ce domaine, même en application d’une directive européenne. J’ai bien noté cependant que si cette obligation s’imposait, il conviendrait de trouver le moyen de conserver la relation avec ces associations, dont l’histoire montre, à l’évidence, qu’elles ont su bien travailler.

Je vous remercie, madame la ministre, d’avoir apporté la réponse de Mme la garde des sceaux.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Courtois

La parole est à M. André Vairetto, auteur de la question n° 176, adressée à Mme la ministre de l'artisanat, du commerce et du tourisme.

Debut de section - PermalienPhoto de André Vairetto

La rénovation de l’immobilier de loisirs est un enjeu majeur pour le devenir des stations de ski. En effet, entre 20 % et 40 % du parc sont obsolètes, en termes de surface et d’équipement. Les experts estiment qu’il faudrait réhabiliter 20 % des logements tous les dix ans pour maintenir le stock existant.

Cette rénovation aurait des incidences multiples. Elle apporterait une réponse aux attentes nouvelles de la clientèle, elle favoriserait une diminution de la consommation énergétique, elle permettrait une limitation de l’urbanisation en utilisant mieux le parc existant, ainsi qu’une relance de l’activité du bâtiment.

Le constat est malheureusement aujourd’hui unanime : les outils mis en place – opérations de réhabilitation de l’immobilier de loisirs, ou ORIL, et villages résidentiels de tourisme, ou VRT –, ainsi que les expérimentations conduites sur les territoires n’ont pas permis d’obtenir les résultats escomptés. Une impulsion nouvelle est donc aujourd’hui nécessaire.

En 2011, un groupe de travail relatif à la rénovation des hébergements touristiques, s’inscrivant dans le cadre de la loi du 22 juillet 2009 de développement et de modernisation des services touristiques, a mené une réflexion sur ces questions. En avril 2012, ce groupe a émis diverses propositions et orientations structurantes pour la réhabilitation de l’immobilier de montagne, issues de la « boîte à outils » élaborée par la SCET, la Société centrale pour l’équipement du territoire, une filiale de la Caisse des dépôts et consignations, à l’aide de tests et d’entretiens dans dix stations, dont sept en montagne.

Madame la ministre, je vous demande de bien vouloir m’indiquer où en est l’élaboration du plan de réhabilitation des hébergements touristiques pour restaurer l’attractivité des stations françaises que vous avez annoncé au mois de juillet 2012, mais aussi de me préciser si un débat sur les réflexions et orientations proposées précédemment est prévu dans ce cadre et comment seront associés les acteurs de terrain.

Debut de section - Permalien
Sylvia Pinel, ministre de l'artisanat, du commerce et du tourisme

Monsieur le sénateur, vous m’avez posé la question de la réhabilitation de l’immobilier de loisirs et des suites que je compte donner aux travaux du groupe de travail qui avait réuni des acteurs locaux, des élus, des parlementaires et des opérateurs privés. C’est un sujet essentiel, pour la montagne comme pour les stations balnéaires, d'ailleurs.

Comme vous le savez, le phénomène dit « des lits froids et des volets clos », c’est-à-dire la sous-occupation chronique des meublés de tourisme, entraine une perte pour le tourisme proprement dit, mais aussi pour l’ensemble de l’activité économique de la station, des domaines skiables aux commerces. Les causes de cette sous-occupation sont multiples et cumulatives.

Les travaux précédemment menés ont abouti à des propositions de mesures présentées sous forme thématique dans une « boîte à outils » testée auprès de dix stations volontaires.

Je trouve ce concept intéressant, car il répond à deux idées fortes. Tout d’abord, les causes du phénomène étant multiples, la réponse ne peut être unique mais doit résulter de la combinaison de plusieurs mesures. Ensuite, cette « boîte à outils » n’est pas un instrument obligatoire plaqué d’en haut sur une situation complexe : l’utilisation des outils doit varier selon les problématiques locales et être à la disposition des collectivités locales, qui décideront, ou non, de son utilisation.

Cette boîte comprend des outils qui appartiennent à trois registres : des outils nécessaires à la gouvernance et à la stratégie, des outils de nature à restructurer les biens physiquement hors marché ou vieillissants, enfin des outils visant à faciliter la commercialisation des meublés de tourisme et à y inciter.

Ces différentes propositions sont en cours d’expertise. Un plan de réhabilitation de l’immobilier de loisirs, qui comportera différentes séries de mesures tendant à remettre sur le marché de la location ce patrimoine aujourd’hui délaissé, est en cours de finalisation. Au cours du premier trimestre de 2013, il fera l’objet d’une concertation entre les autres ministères concernés, mais aussi, bien entendu, entre les élus et les acteurs institutionnels et économiques, avant que j’en arrête définitivement les modalités et que j’en définisse le périmètre.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Courtois

La parole est à M. Alain Bertrand, auteur de la question n° 36, adressée à M. le ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Bertrand

C’est, me semble-t-il, une bonne idée…

Mon intervention a trait aux fameuses niches fiscales.

D’après les documents budgétaires qui nous ont été remis, les niches fiscales devraient représenter en 2013 quelque 70, 769 milliards d’euros, dont 34, 38 milliards d’euros au titre du seul impôt sur le revenu des personnes physiques. Sur proposition du Président de la République, le ministre de l'économie et des finances et le ministre chargé du budget font passer les avantages fiscaux de 20 000 euros par foyer fiscal à 10 000 euros, ce qui représente une diminution importante.

À cet égard, permettez-moi de poser deux questions.

Premièrement, estime-t-on que ces niches fiscales sont justes ? Pour ma part, je partage l’ambition de François Hollande et de Jean-Marc Ayrault de rétablir une fiscalité sereine, progressive et juste. Or ces niches s’adressent essentiellement aux personnes disposant d’un revenu élevé, qui bénéficient ainsi d’une réduction d’impôt ou d’un crédit d’impôt. Voilà qui est injuste.

D’ailleurs, peut-on parler d’une petite injustice quand on sait que le plafonnement à 10 000 euros représente tout de même les dix douzièmes d’un SMIC net annuel ? Moi, je ne le pense pas ; il s’agit au contraire d’une grande injustice !

Vous l’aurez compris, madame la ministre, je souhaiterais que ces niches, dont je bénéficie d’ailleurs moi-même au titre d’un emploi à domicile, soient réduites de manière drastique.

Dans la période actuelle, une déduction fiscale ne serait-ce que de 3 000 euros par an représente – pardonnez-moi de revenir à nos francs ! – un peu plus de 20 000 francs ou encore 2 millions de centimes de nos anciens francs. C’est beaucoup au regard de ceux qui gagnent 1 000 euros par mois !

Deuxièmement, la stratégie que poursuit le Gouvernement pour rétablir les comptes publics et relancer la croissance, une stratégie à laquelle je souscris, ne devrait-elle pas plutôt consister à faire un point zéro ? Feu mon ami Georges Frêche disait parfois : à un moment, il faut que ça saigne en politique !

Compte tenu des impératifs budgétaires, je pense qu’il aurait fallu faire un point zéro en supprimant toutes les niches fiscales, pour ne conserver que celles qui sont indispensables à l’emploi et à la jeunesse. Reverser tous ces milliards d’euros au budget général de l’État aurait été de nature à redonner des marges de manœuvre au Gouvernement, en vue de favoriser la croissance, d’aider les jeunes en créant des emplois d’avenir, d’aider les collectivités territoriales et les communes en contribuant à l’aménagement d’infrastructures. Ce dispositif serait bien plus complet.

Telle est la stratégie que je vous propose de suivre, madame la ministre. Je vous demande d’en tenir compte.

Debut de section - Permalien
Sylvia Pinel, ministre de l'artisanat, du commerce et du tourisme

Monsieur le sénateur, permettez-moi tout d’abord d’excuser l’absence de M. Cahuzac, qui m’a chargé de vous transmettre cette réponse.

Le plafonnement global des avantages fiscaux à caractère incitatif ou liés à un investissement a été mis en place en 2009, pour éviter que le cumul des réductions et des crédits d’impôt ne réduise la progressivité de l’impôt sur le revenu au-delà de ce que peut justifier l’objectif d’intérêt général propre à chaque dispositif.

Initialement fixé à 25 000 euros majorés de 10 % du montant du revenu imposable, ce plafond a été progressivement diminué, pour s’établir aujourd'hui à 18 000 euros majorés de 4 % du revenu imposable.

Afin de renforcer l’équité de ce dispositif et de mieux garantir la progressivité de l’impôt, l’article 56 du projet de loi de finances pour 2013 prévoit d’abaisser le niveau du plafonnement global en diminuant, ainsi que vous l’avez rappelé, monsieur le sénateur, la part forfaitaire de 18 000 euros à 10 000 euros et en supprimant la part proportionnelle de 4 %.

Toutefois, afin de préserver l’attractivité des investissements ultramarins, qui nécessitent la mobilisation de sommes importantes au service des économies concernées, le plafonnement actuel serait maintenu pour les réductions d’impôt sur le revenu en faveur des investissements outre-mer.

Il en est de même pour la réduction d’impôt accordée au titre de la restauration complète d’un immeuble bâti, car les niveaux de dépenses sont tels qu’ils ne seraient pas compatibles avec le nouveau plafond.

L’abaissement du niveau du plafonnement général, qui correspond à la mise en œuvre des engagements pris pendant la campagne présidentielle, permet de renforcer l’efficacité du dispositif en termes de justice fiscale et de mieux garantir la progressivité de l’impôt.

Toutefois, dans le contexte budgétaire actuel, que vous avez rappelé, le Gouvernement n’entend pas se limiter à cette seule mesure de plafonnement global des dépenses fiscales. Toutes les mesures de nature à supprimer les avantages fiscaux inutiles, à les réduire ou à en améliorer l’efficacité, si elles sont nécessaires, seront examinées. Des propositions supplémentaires en ce sens seront donc faites dans le cadre des projets de loi de finances à venir.

Enfin, et surtout, l’abaissement du plafonnement global des avantages fiscaux n’est pas une mesure isolée. Le projet de loi de finances pour 2013 comporte, en effet, un ensemble plus large de mesures liées à l’impôt sur le revenu visant à instaurer plus de justice fiscale.

Ainsi, la création d’une nouvelle tranche d’imposition au taux de 45 % pour les revenus supérieurs à 150 000 euros, l’imposition au barème progressif de l’impôt sur le revenu des revenus du capital ou encore l’abaissement du plafonnement des effets du quotient familial constituent des mesures d’équité fortes, qui sont soumises au Parlement et qui vont dans le sens des préoccupations que vous avez exprimées.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Bertrand

Je vous remercie, madame la ministre, de la qualité de votre réponse.

Le dispositif global mis en place va dans le bon sens, car il tend à plus de justice fiscale. Il faut poursuivre dans cette voie, en allant jusqu’à supprimer toutes les déductions d’impôt sur le revenu. Si l’on veut favoriser les emplois à domicile ou les dons, on peut prévoir, dans les ministères concernés, des aides publiques directes. Il faut aboutir à un barème clair, progressif, allant de zéro à l’infini. C’est cela la justice !

En poursuivant la réflexion, je suis sûr que François Hollande et le Gouvernement franchiront ce nouveau pas, car l’équité est au cœur de leurs préoccupations. C’est pourquoi votre réponse me satisfait.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Courtois

La parole est à Mme Odette Herviaux, auteur de la question n° 184, adressée à M. le ministre de l'économie et des finances.

Debut de section - PermalienPhoto de Odette Herviaux

Madame la ministre, permettez-moi tout d’abord de vous dire que je suis très heureuse de votre présence parmi nous, car, dans le grand domaine de l’économie en général, qui nous intéresse tous, l’artisanat, le commerce et le tourisme sont très liés à la question que je vais vous poser.

Lors du comité central d’entreprise extraordinaire qui s’est tenu le 21 septembre dernier, la Banque de France a présenté le projet de modernisation de son réseau territorial intitulé « Construisons la Banque de 2020 ».

On ne peut qu’adhérer, à la première lecture, au très beau document que tous les parlementaires ont reçu de la part du directeur de la Banque de France, qui nous présente les défis majeurs à relever d’ici à 2020. Mais à considérer les cartes figurant à la fin du document, force est de constater que cette ambition risque de masquer en réalité une stratégie de recentralisation et de déshumanisation des services au public, fondée sur la prédominance des nouvelles technologies et, il faut bien le dire, sur le démantèlement des organismes locaux.

Madame la ministre, je souhaite donc vous interroger sur les conséquences économiques, à tous les niveaux, sociales et territoriales des restructurations prévues, notamment dans mon département, le Morbihan.

Malgré les efforts importants déjà consentis dans le cadre du plan de 2006, les fermetures programmées du bureau d’accueil et d’information de Pontivy et de la caisse de Lorient ainsi que les menaces qui pèsent à moyen terme sur l’existence de la succursale de Vannes pourraient conduire à la disparition pure et simple, dans le Morbihan, des services fournis par la Banque de France.

Dans le contexte de crise actuel, où les dossiers de surendettement ne cessent de s’accumuler et où les entreprises, quelle que soit leur taille, ont plus que jamais besoin d’être accompagnées, cette réorganisation à marche forcée est-elle opportune ? Elle suscite en tout cas des inquiétudes d’autant plus grandes qu’elle conduirait à fragiliser le maillage économique et social de tous les territoires et à reporter, pour certaines actions, sur le budget des collectivités locales le coût de plusieurs démarches précédemment prises en charge par la Banque de France.

Profondément touchées par la RGPP, la révision générale des politiques publiques, les collectivités territoriales, plus particulièrement le Centre Bretagne, ont déjà payé un lourd tribut à la réorganisation des services publics, qu’il s’agisse de la réforme de la carte judiciaire, de celle des douanes, de la fermeture de tribunaux, de celle de bureaux de la Banque de France et des déclassements en « bureau secondaire ».

Alors que le Président de la République a encore récemment réaffirmé son attachement au développement durable des territoires, particulièrement en milieu rural – des propos auxquels bien sûr je souscris totalement –, je souhaite connaître les intentions du Gouvernement quant à l’avenir du réseau territorial de la Banque de France.

Debut de section - Permalien
Sylvia Pinel, ministre de l'artisanat, du commerce et du tourisme

Madame la sénatrice, je vous prie de bien vouloir excuser l’absence du ministre de l’économie et des finances, Pierre Moscovici. Celui-ci m’a chargée de répondre à votre question, qui entre d'ailleurs aussi dans le champ de mes attributions ministérielles.

Comme le Gouvernement a déjà eu l’occasion de souligner devant le Sénat, il accorde une grande attention au problème que vous avez soulevé. Notre politique consiste à moderniser l’action publique et celle de ses opérateurs pour les adapter aux changements de notre société tout en préservant la qualité du service public.

Permettez-moi, madame la sénatrice, de vous rappeler sur quels principes repose la réforme du réseau territorial de la Banque de France. La loi confie à cette dernière le secrétariat des commissions de surendettement, et ce rôle ne sera pas remis en cause. La concentration du traitement des dossiers de surendettement vise à optimiser l’organisation des processus de gestion ; en aucun cas la Banque de France ne se désengagera de son activité dans ce domaine.

Toutes les succursales conserveront, outre leur fonction de secrétariat de la commission de surendettement, un service d’accueil auquel les particuliers pourront s’adresser pour lui poser toute question générale ou individuelle.

Par ailleurs, des bureaux d’accueil et d’information, des BAI, seront maintenus ou ouverts dans les villes où des antennes économiques auront été fermées si la Banque de France y reçoit plus de mille visiteurs par an, c’est-à-dire environ cinq visiteurs par jour ouvré. Ces BAI permettront de préserver une certaine proximité sur le terrain.

Si la Banque de France envisage, comme tous les services publics, de proposer un portail de télédéclaration sur Internet, qui pourrait être utilisé par les surendettés eux-mêmes ou par les travailleurs sociaux qui les accompagnent, c’est afin d’améliorer le service rendu. Je le répète, l’accueil au guichet des particuliers souhaitant déposer un dossier ou s’informer sur un dossier en cours de traitement n’est pas remis en cause.

Madame Herviaux, votre question porte plus spécifiquement sur la présence territoriale de la Banque de France en Bretagne.

Dans votre région, le réseau de la Banque de France s’organisera autour de la succursale de Rennes, qui assurera à la fois les activités de traitement des dossiers et les fonctions opérationnelles de proximité, notamment en matière de surendettement.

En outre, conformément au principe de la départementalisation, la région disposera de succursales départementales à Saint-Brieuc, à Vannes et à Brest ; l’implantation de Brest conservera donc son statut de succursale départementale, bien qu’elle ne soit pas située dans le chef-lieu du Finistère.

La Bretagne bénéficiera également d’une antenne économique associée à un centre de traitement du surendettement, à Quimper, ainsi que d’un bureau d’accueil et d’information à Lorient. Au total, madame la sénatrice, le Morbihan comptera donc deux implantations de la Banque de France.

Cette réforme permettra de garantir aux usagers une action efficace et de continuer à leur fournir un haut niveau de services, sans que les activités de la Banque de France soient remises en cause.

Soyez assurée, madame la sénatrice, que le Gouvernement restera attentif à la qualité du dialogue entre les parties prenantes, notamment avec les élus locaux.

Debut de section - PermalienPhoto de Odette Herviaux

Madame la ministre, cette question nous touche particulièrement. Hier après-midi, dans notre hémicycle, M. le ministre délégué chargé de l’économie sociale et solidaire et de la consommation, Benoît Hamon, a pris part à un débat sur le crédit à la consommation et sur le surendettement.

Or presque tous les orateurs qui se sont exprimés au cours de ce débat ont souligné la nécessité de la proximité, compte tenu de la fragilité des publics touchés par le surendettement ; pour ces personnes, l’éloignement du service, qu’il résulte de la distance géographique ou de difficultés à maîtriser les outils utilisés, représente un handicap supplémentaire.

Madame la ministre, votre réponse est relativement satisfaisante, puisque vous dites vouloir moderniser le service tout en préservant sa qualité. C’est notre souhait à tous ! Toutefois, j’attire de nouveau votre attention sur la nécessité de maintenir les relations humaines avec les populations les plus en difficulté et de limiter autant que possible les distances à parcourir, qui sont sources de dépenses supplémentaires.

Enfin, je considère qu’il est important de maintenir une antenne spécifique chargée des problèmes économiques, même si je regrette que sa localisation soit un peu éloignée des autres implantations.

Quoi qu’il en soit, madame la ministre, je vous remercie de votre réponse.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Courtois

Mes chers collègues, l’ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à douze heures vingt, est reprise à quatorze heures trente, sous la présidence de Mme Bariza Khiari.