La commission a tout d'abord procédé à l'audition de M. Pierre-Etienne Bisch, président-directeur général de Météo France, et de M. Patrick Gandil, secrétaire général du ministère des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer, sur le suivi du rapport d'information n° 264 (2004-2005) de M. Jean-Pierre Masseret, concernant l'enquête de la Cour des comptes relative à Météo France.
a indiqué en préliminaire que cette nouvelle audition de Météo France constituait une « piqûre de rappel » par rapport à la précédente audition, qui s'était tenue le 22 mars 2005, sur la communication issue de l'enquête de la Cour des comptes. Rappelant que la commission avait alors constaté les grandes marges de progression qui s'offraient à Météo France pour l'amélioration de sa gestion comptable et des ressources humaines, il a souhaité que le débat et les explications du président de l'établissement public permettent de vérifier que les recommandations de la commission et de la Cour des comptes avaient été, un an après, suivies d'effet.
a rappelé le caractère animé de la précédente audition. Il a énuméré les points qui avaient, alors, fait l'objet des interrogations de la commission et qui concernaient, notamment, la gestion du personnel et les comptes de l'établissement public.
S'agissant de la gestion du personnel, il a précisé que le débat avait porté sur l'évolution des effectifs budgétaires de Météo France, la modulation du régime indemnitaire et l'absence de gestion prévisionnelle des emplois.
En ce qui concerne les questions financières, l'audition de mars 2005 avait mis en évidence un manque de lisibilité et l'absence de comptabilité analytique.
Félicitant M. Pierre-Etienne Bisch de sa nomination en tant que président de Météo France, il l'a invité à préciser les décisions et évolutions qu'il entendait mettre en oeuvre. Il a souhaité également que la commission soit éclairée sur les perspectives de regroupement des localisations des services de Météo France.
En conclusion, M. Jean-Pierre Masseret, rapporteur spécial de la mission « Transports », a noté que, si la météorologie figurait, au sein de la mission « Transports » comme un programme spécifique, un autre rattachement avait parfois été évoqué consistant à intégrer le programme météorologie dans une mission de nature interministérielle sur la prévention des risques. Il a demandé si cette solution avait été définitivement écartée.
invité par M. Jean Arthuis, président, à répondre précisément aux interrogations de la commission, a présenté les mesures prises par Météo France depuis un an dans le domaine financier. Il a indiqué, en préambule, que l'exercice 2005 avait été positif et qu'il avait enregistré une hausse de 8 % des recettes commerciales, qui ont dépassé d'1 million d'euros l'objectif figurant au contrat conclu entre l'Etat et l'établissement public. Météo France a pu maintenir sa capacité d'autofinancement, dégageant un résultat positif de 5 millions d'euros. Cette amélioration devra cependant être jugée dans la durée, car les marges restent réduites et l'équilibre fragile.
Il a relevé également que l'endettement de Météo France était nul et sa situation financière saine, et précisé que l'établissement public serait en mesure d'accueillir des commissaires aux comptes dès le milieu de l'année 2007.
S'agissant de la comptabilité analytique, M. Pierre-Etienne Bisch a précisé qu'elle pouvait désormais être mise en oeuvre, après l'aboutissement de la rénovation du système d'information. Il a fait observer qu'un indicateur de productivité avait été introduit dans le projet annuel de performances (PAP), comme l'avait souhaité la commission des finances.
Abordant ensuite la question des ressources humaines, il a indiqué que le contrat d'objectif avait prévu la suppression de 70 postes, représentant le non remplacement d'un tiers des départs, répartis en 36 postes en 2005/2006 et 18 postes dont la suppression sera prévue dans le budget 2007. Soulignant les progrès accomplis par Météo France dans l'optimisation de son organisation, il a noté, toutefois, que l'établissement était parvenu à un équilibre en termes de réduction de postes permanents, désormais limités à 80, et dont une partie importante correspond à des besoins de veille sur les plates-formes aéronautiques. Il a noté qu'il lui paraissait difficile de poursuivre dans cette voie.
Il a indiqué également qu'un exercice de comparaison internationale entre Météo France et ses équivalents avait été lancé afin de disposer d'informations sur les modes de gestion des personnels et les effectifs.
En réponse à M. Jean Arthuis, président, qui l'interrogeait sur les particularités de gestion des personnels communs rémunérés par la direction générale de l'aviation civile (DGAC), M. Pierre-Etienne Bisch a précisé qu'il s'agissait d'un effectif de 600 personnes, composé de personnels administratifs et ouvriers, administrés par la DGAC et dont la rémunération est ensuite remboursée par Météo France. Il s'est déclaré ouvert à une centralisation de l'ensemble des actes de gestion de ces personnels auprès de Météo France qui dispose de l'autorité hiérarchique, mais éprouve parfois des difficultés à imposer son point de vue, compte tenu de la « puissance » de la DGAC et de sa logique de gestion différente.
ayant souligné l'incohérence consistant à séparer l'acte de paiement de la gestion des personnels, M. Pierre-Etienne Bisch a convenu de l'intérêt d'une unification tout en indiquant que, si la fusion des corps techniques pouvait être un objectif, cette perspective restait encore au stade de la réflexion. Il a également souhaité que les arbitrages ne pénalisent pas Météo France, dont il a souligné l'état de relative sous-administration. M. Patrick Gandil, secrétaire général du ministère des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer, a ajouté que l'existence de corps communs n'était pas incompatible avec une gestion différenciée.
S'agissant de la réforme du régime indemnitaire, M. Pierre-Etienne Bisch a précisé qu'une modulation fonctionnelle avait été mise en place en 2006 et qu'elle serait complétée par une modulation individuelle à partir de 2007/2008. Il a également indiqué que l'intégralité des textes régissant les rémunérations complémentaires versées aux agents avait été publiée conformément aux recommandations de la Cour des comptes.
Abordant la question de l'application des 35 heures, il a souligné que cette question était close avant sa prise de fonctions. En réponse à M. Jean Arthuis, président, qui observait que Météo France continuait curieusement à intégrer la pause méridienne dans le temps de travail, il a indiqué que les critiques faites par la commission des finances sur ce point étaient notées avec beaucoup d'attention.
Il a précisé ensuite qu'il avait décidé de mettre en place des instruments de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences et qu'à cette fin, une directrice des ressources humaines et deux ingénieurs avaient été recrutés par l'établissement.
a ensuite présenté les objectifs de Météo France en ce qui concerne le transfert et la localisation de ses services. Il a précisé que l'établissement, dont l'effectif total est de 3.700 personnes, disposait de trois sites à Toulouse (1.400 personnes), Trappes (200 personnes) et Paris (200 personnes). L'implantation de Trappes regroupe les services techniques et la direction départementale des Yvelines, alors que l'implantation parisienne du quai Branly accueille également la direction interrégionale d'Ile-de-France. Il a indiqué qu'en 2005 deux opérations étaient étudiées, la première pour un déplacement des services de la direction des systèmes d'observation de Trappes vers Toulouse, et la seconde pour le transfert, vers Trappes, du siège du quai Branly et de la direction interrégionale d'Ile-de-France.
Il a déclaré qu'il avait décidé de retenir la première proposition, qui répondait à une logique technique forte, mais il a observé qu'elle serait difficile à faire accepter par des personnels qui, à 92 %, se sont déclarés défavorables à cette opération.
En réponse à M. Jean Arthuis, président, qui s'interrogeait sur l'utilité pour Météo France de disposer sur son site de Trappes d'une imprimerie, M. Pierre-Etienne Bisch a précisé qu'elle avait été achetée il y a un an et demi et qu'il veillait à ce que la plus large part possible des prestations d'impression réalisées pour Météo France y soit exécutée. Revenant sur le coût financier des opérations de transferts de sites, il a noté que la dépollution du site et la construction d'un nouveau siège à Trappes étaient estimées à 36 millions d'euros, alors que la cession du siège de l'Alma ne pourrait rapporter que 34 millions d'euros, les locaux étant vétustes et situés en zone inondable. Il a observé, en outre, que le déplacement du siège de Météo France dans les Yvelines rendrait plus difficiles les liens avec les médias et les interlocuteurs ministériels principaux que sont, pour Météo France, la défense et l'environnement. Enfin, il a signalé une difficulté particulière liée au fait qu'une partie des locaux de la Présidence de la République, pour une surface de 1.000 m2 sur le site de l'Alma, était utilisée par Météo France dans le cadre d'une superposition de gestion.
Au total, il a conclu que le scénario le plus souhaitable reviendrait à laisser subsister, sur l'implantation de Trappes, l'imprimerie et le service départemental des Yvelines qui assure l'observation météorologique pour l'ensemble de la région parisienne, grâce à un radar dont le coût de déplacement, évalué à 1 million d'euros, serait trop élevé au regard de l'intérêt de l'opération. Cette perspective fait l'objet de discussions avec le maire de Trappes.
a demandé si les opérations de transfert de localisation et les projets de cession d'implantations de Météo France faisaient intervenir les organismes interministériels et, en particulier, le conseil de l'immobilier de l'Etat. Il a souhaité disposer d'informations complémentaires sur les conditions de l'estimation de la valeur vénale du quai Branly, estimant les chiffres avancés particulièrement faibles, ainsi que sur l'acquisition d'une imprimerie par Météo France.
a précisé qu'il ignorait si les instances interministérielles étaient compétentes s'agissant d'un établissement public administratif, mais qu'il apporterait au rapporteur général des éléments plus précis dans les jours à venir, tout en notant que le ministère du budget était représenté au conseil d'administration. Il a indiqué que le matériel d'imprimerie avait été acquis après accord de la commission interministérielle compétente et que l'estimation du prix de cession du siège de Météo France avait été réalisée par un établissement privé.
Abordant ensuite l'organisation territoriale de Météo France, M. Pierre-Etienne Bisch a souligné l'importance du volet relatif à la sécurité civile dans l'action de Météo France, notamment au niveau des départements. Observant l'extension des compétences de l'établissement ces dernières années, notamment par la mise en place des opérations « grand froid » ou « canicule », il s'est toutefois interrogé sur l'opportunité de traiter tous les départements de manière identique, sans moduler la présence de Météo France en fonction des caractéristiques géographiques et de la sensibilité particulière aux phénomènes météorologiques. Il a indiqué qu'une mission d'étude stratégique serait confiée à un prestataire extérieur sur ce sujet.
s'est félicité des réponses apportées et a déclaré qu'il faisait confiance aux fonctionnaires chargés du service public pour mettre en oeuvre les orientations ainsi définies. Il a précisé que dans le cadre de ses fonctions de rapporteur spécial, il procéderait à un nouveau bilan à l'occasion de l'examen du projet de loi de finances initiale pour 2007.
s'est inquiété de la situation de Météo France sur le marché de la prévision météorologique vis-à-vis de ses concurrents, et notamment de Météoconsult.
a souligné que cette question était centrale pour Météo France qui obéit à deux logiques, celle du service public avec une participation budgétaire de l'Etat en diminution progressive, et celle d'activités commerciales en progression dans un environnement de plus en plus concurrentiel. Il a indiqué que, seuls, trois pays, les Etats-Unis, le Canada et les Pays-Bas, avaient opté pour une logique pure de service public où les informations de prévision sont délivrées gratuitement à tous les opérateurs. Il a estimé que le cas de Météo France poserait à l'avenir le problème de la compatibilité entre les statuts d'établissement public administratif et la logique concurrentielle.
M. Jacques Sallois, président de la 7e chambre de la Cour des comptes, après avoir rappelé que la Cour des comptes n'était présente que comme auditeur, s'est félicité du grand intérêt de cette audition qui démontre amplement la nécessité d'assurer un suivi des enquêtes réalisées.
a justifié le rattachement du programme météorologie à la mission « Transports » par ses liens étroits avec les transports aériens, routiers et maritimes. Il a cependant observé que d'autres domaines étaient directement concernés tels que la santé, l'environnement, l'agriculture ou la défense. Il a salué le rôle de Météo France dans le domaine de la recherche, et déclaré adhérer aux propos de son président quant à l'adaptation de la structure territoriale de Météo France, en soulignant qu'elle devrait être réalisée avec précaution, et en répondant aux attentes croissantes qui lui sont adressées pour un service de conseil disponible et de proximité.
En conclusion, M. Jean Arthuis, président, s'est réjoui des échanges instructifs auxquels avait donné lieu ce suivi de l'enquête de la Cour des comptes. Il a estimé indispensable une clarification rapide de la situation des 600 personnels communs « partagés » avec la DGAC et souhaité obtenir des informations complémentaires et détaillées sur l'imprimerie de Météo France. Enfin, il a invité le président de l'établissement à populariser, auprès des personnels, l'idée qu'il ne fallait pas considérer comme acquises les règles de comptabilisation des temps de travail en usage à Météo France.
A l'issue de cette audition, la commission a décidé, à l'unanimité, d'autoriser la publication de ces débats sous la forme d'un rapport d'information.
Puis la commission a procédé à l'audition de MM. Jacques Sallois, président de la 7e chambre de la Cour des comptes, Olivier Mary, chef de mission à la direction générale de l'alimentation, Philippe Vinçon, sous-directeur de l'élevage et des produits animaux à la direction des politiques économique et internationale au ministère de l'agriculture et de la pêche, Bernard Bezeaud, directeur général adjoint du CNASEA, Olivier Caillou, chef de bureau à la 7e sous-direction à la direction du budget au ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, et de MM. Bertrand Oudry, attaché principal à la sous-direction des produits agricoles et alimentaires à la DGCCRF, Yves Berger, directeur général de l'ONIEP et Jean-Jacques Pinet, adjoint au chef de bureau à la direction du commerce, de l'artisanat, des services et des professions libérales représentant le ministère des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat et des professions libérales, pour suite à donner à l'enquête de la Cour des comptes relative au fonctionnement du service public de l'équarrissage (SPE).
a tout d'abord précisé que la commission des finances était réunie pour une « audition de suivi » d'une enquête réalisée par la Cour des comptes, en application des dispositions de l'article 58-2° de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), qui prévoit la réalisation par la Cour des comptes de toute enquête demandée par les commissions de l'Assemblée Nationale et du Sénat chargées des finances sur la gestion des services ou organismes qu'elles contrôlent.
Il a indiqué que le sujet traité est une communication sur le fonctionnement du service public de l'équarrissage que la Cour des comptes avait transmise à la commission des finances le 27 janvier 2006.
A cet égard, il a estimé que le sujet était complexe et particulièrement d'actualité, puisque le service public de l'équarrissage avait fait l'objet d'une réforme d'envergure dans le cadre de la loi de finances initiale pour 2006, réforme sur laquelle la commission des finances avait dû se prononcer dans l'urgence et sans l'apport de cette enquête de la Cour des comptes, qui lui aurait pourtant apporté un éclairage précieux.
En outre, il a indiqué qu'il lui avait semblé nécessaire d'organiser une audition conjointe des représentants des administrations compétentes sur le sujet du service public de l'équarrissage, en présence de M. Jacques Sallois, président de la 7e chambre de la Cour des comptes, de MM. Jean-Pierre Lafaure et Francis Brun-Buisson, conseillers maîtres, et de M. Jean-Pierre Sekely, rapporteur.
S'agissant de l'administration, il a précisé que le ministère de l'agriculture et de la pêche était représenté par M. Olivier Mary, chef de mission à la direction générale de l'alimentation, et M. Philippe Vinçon, sous-directeur de l'élevage et des produits animaux à la direction des politiques économique et internationale. Il a également salué la présence du directeur général adjoint du CNASEA, M. Bernard Bezeaud, ainsi que celle de M. Yves Berger, directeur général de l'Office national de l'élevage et des productions.
Il a précisé que le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie était représenté par M. Olivier Caillou, chef de bureau à la 7e sous-direction de la direction du budget et M. Bertrand Oudry, attaché principal à la sous-direction des produits agricoles et alimentaires à la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF).
Enfin, il a salué la présence de M. Jean-Jacques Pinet, adjoint au chef du bureau commerce, distribution et artisanat représentant le ministère des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat et des professions libérales.
Puis M. Jean Arthuis, président, a indiqué que l'audition était ouverte à la presse afin d'assurer un débat le plus ouvert et fructueux possible, ainsi qu'aux membres de la commission des affaires économiques.
Il a indiqué qu'il donnerait prioritairement la parole, dans le cours du débat, aux deux rapporteurs spéciaux concernés, l'un M. Joël Bourdin, qui avait suggéré fin 2004 le thème de cette enquête au nom de la commission des finances, l'autre Mme Nicole Bricq, actuelle rapporteure spéciale des crédits de la mission « Sécurité sanitaire ».
Puis, pour replacer les choses dans leur contexte, il a rappelé que la communication de la Cour des comptes avait notamment mis en évidence les failles de la gestion du SPE, et plus particulièrement l'impuissance de l'Etat et de ses représentants locaux à faire jouer les règles de mise en concurrence et de passation des marchés locaux ; la dissociation de la fonction d'ordonnateur entre les préfets et le directeur général du CNASEA ; l'insuffisance du contrôle du « service fait » par les équarrisseurs ; enfin les difficultés financières associées à la gestion du SPE.
En outre, il a indiqué que la communication de la Cour des comptes avait souligné les incertitudes liées à la mise en oeuvre de la réforme votée en loi de finances initiale pour 2006, notamment économiques et financières, susceptibles de continuer à affecter la gestion et le coût du SPE et qu'elle avait estimé que le recours à un appel d'offres pour l'exécution de ce service ne suffirait pas à instaurer d'emblée un régime de concurrence dans une profession très concentrée. Il a précisé que la communication de la Cour des comptes s'inquiétait également des incertitudes qui continuaient d'affecter le bilan financier du SPE, notamment les contentieux administratifs en cours, ou la capacité des pouvoirs publics à obtenir des éleveurs une participation significative, conformément aux règles imposées par la Commission européenne.
Puis M. Jean Arthuis, président, a donné la parole à M. Jacques Sallois, président de la 7e chambre de la Cour des comptes, pour présenter les principales conclusions de l'enquête réalisée par la Cour des comptes sur le fonctionnement du service public de l'équarrissage.
a d'abord souhaité faire trois observations liminaires. Sa première observation concernait le contexte dans lequel s'était déroulé le contrôle de la Cour des comptes sur le service public de l'équarrissage (SPE), le premier depuis son instauration par la loi du 26 décembre 1996. Il a rappelé, à cet égard, que les informations techniques et financières disponibles sur le SPE étaient encore, en mars 2005, insuffisantes, irrégulières, peu fiables et au surplus, disparates quant à leur origine et hétérogènes quant à leur contenu, celles collectées auprès des services vétérinaires par le ministère de l'agriculture ne faisant pas exception. Il a précisé que les incertitudes résultant de cette imperfection des outils statistiques et d'analyse disponibles avaient d'ailleurs contribué à accroître les difficultés du pilotage de ce service public, y compris sur le plan de la prévision financière et fiscale. En outre, il a fait valoir que ce manque d'informations précises expliquait, lorsque le Parlement et le gouvernement avaient décidé, de façon concertée, de préparer une nouvelle réforme du SPE, sur le fondement de la loi du 23 février 2005, qu'il était apparu nécessaire de disposer, au préalable, de données fiables pour décrire une situation en réalité mal connue. Aussi bien, deux études avaient-elles été lancées par le gouvernement au printemps 2005 : une première enquête, placée sous la responsabilité du comité permanent des inspections du ministère de l'agriculture afin de dresser le bilan du SPE et de proposer les principes de sa révision ; une seconde enquête, réalisée par les inspections générales des finances et de l'agriculture, qui portait sur le financement, le coût et le contrôle du SPE pour l'année 2004. Il a expliqué que l'instruction de la Cour des comptes avait été conduite parallèlement à la réalisation de ces deux enquêtes et que la Cour des comptes avait pris connaissance de leurs résultats à la fin de l'été, alors qu'elle était engagée dans des contrôles sur pièces et sur place, auprès des services nationaux et locaux de l'Etat ainsi que des organismes chargés de la mise en oeuvre du service public. Enfin, il a précisé que la Cour des comptes avait pris acte des décisions de réforme adoptées par le gouvernement sur le fondement du décret du 28 septembre 2005 et du projet de loi de finances pour 2006.
Puis il a fait part de sa deuxième observation relative aux modifications, à la fois profondes et fréquentes, qui ont affecté le régime juridique de l'équarrissage depuis une trentaine d'années. Sans retracer l'historique complexe d'une législation qui remonte à 1942, il a indiqué que trois périodes pouvaient être définies. D'abord, il a cité la création, en 1975, par la loi d'un « service d'utilité publique », bâti sur un subtil équilibre entre, d'une part, le monopole du traitement des sous-produits animaux (destinés notamment à être transformés en farines dont l'utilisation se développait dans l'alimentation animale) consenti aux opérateurs privés dans un cadre géographique déterminé par arrêtés préfectoraux et, d'autre part, l'obligation qui leur était faite, en contrepartie de ce monopole, de collecter systématiquement et gratuitement les animaux morts, pour l'essentiel chez les éleveurs. Il a souligné que cet équilibre, assuré par la valorisation des produits d'origine animale obtenus à partir des cadavres collectés par les équarrisseurs, avait permis à l'outil de production d'évoluer fortement, en se concentrant et en se modernisant, conformément aux objectifs annoncés par le législateur à l'époque. Puis il a fait allusion à la crise de la vache folle en 1996, qui avait déjà suscité, dès 1990, de nombreuses mesures réglementaires d'organisation sanitaire pesant sur les marchés de l'équarrissage. Il a précisé que cette crise avait rompu cet équilibre en faisant perdre aux sous-produits animaux toute valeur marchande et en étendant le champ de la collecte obligatoire des sous-produits par les équarrisseurs aux matières à risques issues de l'activité des abattoirs, ateliers de découpe et boucheries. Il a indiqué, en outre, que le maintien de la gratuité, pour les éleveurs, du service public de collecte, de transport, de transformation et de destruction assuré par les entreprises d'équarrissage avait conduit à la prise en charge de son coût par l'Etat et à son financement par des ressources fiscales spécifiques. Enfin, il a souligné qu'en 2005, la régression de l'épizootie, les contestations professionnelles et communautaires du dispositif mis en place en 1996, avaient imposé une nouvelle réforme, intervenue par le biais du projet de loi de finances initiale pour 2006.
a ensuite fait part de sa troisième observation liminaire relative à l'économie générale du SPE telle qu'elle résulte de la réforme adoptée en loi de finances initiale pour 2006 et qui se traduit schématiquement par une réduction du périmètre du SPE, désormais cantonné à l'élimination des cadavres d'animaux trouvés morts en exploitation ; par l'exclusion des déchets d'abattoirs désormais tous traités dans un cadre contractuel de droit privé ; par une aide aux boucheries agréées pour la collecte des colonnes vertébrales prise en charge par le ministère chargé de l'artisanat.
En outre, il a précisé que plusieurs mesures visant à remettre de l'ordre dans la gestion du SPE avaient été adoptées : le dispositif en vigueur pour la commande publique des prestations d'équarrissage, qui reposait jusqu'alors en principe sur des marchés publics départementaux de prestations a été modifié, avec le lancement d'un appel d'offres national le 29 novembre 2005 ; un nouvel équilibre financier a été recherché dans l'appel aux contributions respectives de l'Etat, des éleveurs et de la filière viande à travers la taxe d'abattage, enfin, la gestion du service public de l'équarrissage a été transférée à compter du 1er juillet 2006 à l'Office National Interprofessionnel de l'Elevage et de ses Productions (ONIEP).
Après ce propos introductif, M. Jacques Sallois a fait connaître les deux grandes séries de leçons tirées par la Cour des comptes de l'analyse du fonctionnement passé du SPE.
Il a d'abord constaté l'impossibilité de faire jouer les règles de la concurrence et de maîtriser les tarifs dans le cadre des monopoles locaux historiquement consentis aux équarrisseurs. Il a rappelé, en effet, que le secteur de l'équarrissage était dominé par deux opérateurs, qui détiennent une part importante du marché (de l'ordre de moitié pour le premier, du tiers pour le second), qui bénéficient en outre, en application de la loi de 1975, de monopoles locaux. De ce fait, il a indiqué que la passation des marchés publics prévus par la loi de 1996, adoptée après la crise de la vache folle et le bouleversement économique que cette crise avait entraîné pour le secteur de l'équarrissage, s'était avérée irréaliste face à une profession oligopolistique à laquelle l'Etat demandait de surcroît, par un durcissement de la législation sanitaire, un volume de prestations toujours plus important. Il a constaté que, devant cette impossibilité de mettre en oeuvre les dispositions de la loi de 1996, et devant la nécessité impérative d'assurer l'exécution du service public, les préfets avaient eu recours à des réquisitions irrégulières en raison de leur caractère systématique et permanent.
En outre, il a souligné que, bien que ne disposant pas d'informations économiques et financières fiables, l'Etat avait été contraint de consentir durablement aux équarrisseurs des tarifs très fortement rémunérateurs. Il a précisé que cette pratique était également contraire aux règles de la réquisition, car l'indemnité de réquisition ne doit pas permettre de dégager un bénéfice. Il a, en outre, fait savoir que lors des contrôles sur place, les interlocuteurs de la Cour avaient reconnu dégager des marges très confortables, qu'ils ne pouvaient parfois pas distribuer aux actionnaires en raison des contraintes associées à certaines structures juridiques, telles que les Sociétés d'Intérêt Collectif Agricole (SICA).
S'agissant du second constat, M. Jacques Sallois a fait part d'une extrême difficulté pour l'Etat de maîtriser les problèmes de gestion de contrôle du service fait et de financement. Il a d'abord rappelé qu'en 2004, lors d'un contrôle du CNASEA dont les conclusions avaient été communiquées à la commission, la Cour des comptes avait souligné le caractère juridiquement fragile de la situation actuelle où la fonction d'ordonnateur de la dépense est dissociée entre les préfets, qui engagent et liquident la dépense publique, et le directeur général du CNASEA, qui en est l'ordonnateur. Il a confirmé cette analyse et souligné les difficultés de gestion du SPE que cette situation avait provoquées. En outre, il a indiqué que lors de son enquête, la Cour des comptes avait constaté que les prestations facturées au service public de l'équarrissage faisaient l'objet d'un contrôle fort inégal et essentiellement documentaire par les services déconcentrés de l'Etat, d'une part, de l'ordonnateur et du comptable du CNASEA, d'autre part, ce qui était à l'origine de tolérances excessives vis-à-vis des opérateurs. Il a estimé que la sincérité, la fiabilité, voire la régularité des déclarations pouvaient ainsi fréquemment être mises en cause : mort des animaux non avérée ; éligibilité non assurée au SPE en raison de la modicité des poids collectés ; pesées imprécises ; recours au SPE, gratuit, en lieu et place d'un service, obligatoire et payant, d'élimination des déchets de cliniques vétérinaires ; déplacements systématiques générateurs de facturations rentables. Il a estimé qu'une telle carence des administrations compétentes était difficilement compréhensible sur une aussi longue période. Enfin, il a souligné que les fréquentes modifications de la réglementation, en fonction de l'évolution des dispositions sanitaires, visant à pallier, dans l'urgence, les conséquences successives des crises dites « de la vache folle », sans que les conditions de leur mise en oeuvre administrative soient précisément définies, avaient lourdement affecté le bilan financier du SPE. A cet égard, il a rappelé que les dépenses publiques liées à la mise en oeuvre de la politique d'équarrissage avaient dépassé 2,1 milliards d'euros à la fin de 2005 et a estimé que les difficultés financières avaient été amplifiées par le refus de mettre à contribution des éleveurs en vertu du principe « pollueur-payeur » et par les conséquences des contentieux européens et professionnels suscités par l'assujettissement des grandes surfaces à la taxe sur les achats de viandes. Il a, en effet, indiqué que ce mode de financement, qui n'avait pas été notifié aux autorités européennes, avait été déclaré non conforme au droit communautaire, ce qui avait obligé l'Etat, après contentieux, de rembourser le produit de cette taxe sur les achats de viandes, perçu entre 1997 et 2000 et alors directement affecté au financement du SPE, soit un coût de 387 millions d'euros.
Au delà de ces leçons tirées pour le passé, M. Jacques Sallois a estimé que quatre grandes questions demeuraient pour l'avenir.
Il a d'abord cité le risque contentieux continuant d'affecter le bilan passé du SPE et a indiqué que le refus par l'Etat de rembourser les taxes perçues entre 2001 et 2003, qui étaient alors budgétisées afin de rompre le lien entre le produit de la taxe sur les achats de viande et les aides publiques à l'équarrissage, avait fait l'objet d'un contentieux devant les juridictions administratives. Il a précisé que les sommes en jeu étaient très importantes, puisque le produit de la taxe sur les achats de viande entre 2001 et 2003 était de près de 1,7 milliard d'euros (638 millions d'euros en 2001, 527 millions d'euros en 2002, 515 millions d'euros en 2003) et qu'au cours de la même période, 1,1 milliard d'euros avaient été consacrés au financement du SPE. Il a fait état d'un premier jugement du tribunal administratif de Marseille, en date du 22 novembre 2004, qui avait ordonné le remboursement des taxes perçues après 2001 et de la décision de la cour administrative d'appel de Marseille rendue le 15 décembre 2004 favorable à l'administration, en annulant la décision du tribunal administratif de Marseille. Il a cependant précisé que cette décision avait fait l'objet d'un pourvoi en cassation devant le Conseil d'Etat dont les requérants s'étaient ensuite désistés. De ce fait, il a indiqué que la décision de la juridiction administrative marseillaise était définitive, mais que l'issue du débat était loin d'être assurée, puisque 9.500 contentieux restaient pendants.
Puis M. Jacques Sallois a estimé que les objectifs et les conditions du transfert de la gestion du SPE à l'Office National Interprofessionnel de l'Elevage et de ses Productions (ONIEP) méritaient d'être précisés. Il a indiqué que le transfert de la gestion du service public de l'équarrissage relatif aux animaux trouvés morts en exploitation à l'Office National Interprofessionnel de l'Elevage et de ses Productions mettrait un terme à la dissociation de la fonction d'ordonnateur entre les préfets et le directeur général du CNASEA, puisque le directeur général de l'ONIEP deviendra la personne responsable du marché public (PRM). Toutefois, il a indiqué que ce transfert n'était pas, par lui-même, de nature à résoudre l'ensemble des difficultés de gestion constatées par la Cour des comptes.
Il a estimé qu'il serait utile que l'ONIEP et ses administrations de tutelle précisent le dispositif mis en place au sein de cet office pour reprendre la gestion du SPE dans les prochains jours et les résultats qu'ils attendent de ce transfert.
La troisième question abordée était relative à l'échec de la nouvelle procédure de passation des marchés publics d'équarrissage.
a précisé que la Cour des comptes avait souligné les incertitudes, voire l'impossibilité, de lancer un appel d'offres national à lots départementaux pour l'exécution du SPE. Il a indiqué que l'administration avait reconnu que la décision de recourir désormais, pour l'exécution du service, à des appels d'offres nationaux ne suffirait pas, par elle-même, à instaurer d'emblée un régime de concurrence dans une profession très concentrée, juxtaposant des monopoles territoriaux de fait suscités à l'origine par l'Etat lui-même. Il a indiqué que les premiers éléments dont disposait la Cour des comptes concernant cet appel d'offres confirmaient le bien-fondé de ces observations. Il a précisé, en effet, que le résultat de la passation du marché se traduisait par une forte hausse du coût du Service Public de l'Equarrissage et laissait apparaître des indices sérieux de concertation entre les opérateurs. Il a estimé souhaitable que les administrations concernées précisent les suites qu'elles ont réservées à l'engagement d'une procédure de marché négocié, leur incidence sur les modes de gestion du SPE en cours de réforme et les enseignements qu'elles tirent, pour le moyen terme, des difficultés rencontrées afin d'instaurer un degré minimum de concurrence sur les marchés concernés.
Enfin, M. Jacques Sallois a fait valoir que l'équilibre financier du SPE ne semblait pas encore garanti.
Il a rappelé que la dernière réforme du SPE avait pour principal objectif de profiter du retour à une situation sanitaire normale pour alléger la charge des finances publiques en réduisant le périmètre du SPE au traitement des cadavres d'animaux, à l'exclusion des autres déchets soumis à réglementation. Il a indiqué que, sur la base d'une estimation réalisée par les inspections générales des finances et de l'agriculture, la charge totale du SPE a été abaissée à 136 millions d'euros dans les prévisions de la loi de finances initiale pour 2006, étant entendu que le lancement d'un appel d'offres national le 29 novembre 2005 visait un abaissement des tarifs des équarrisseurs, qui n'a toutefois pas été obtenu. De ce fait, il a indiqué que le coût du SPE serait nettement plus élevé que prévu, de l'ordre de 152 millions d'euros.
Il a rappelé que, selon l'arbitrage rendu par le Premier ministre en juin 2005, le financement du SPE devait être assuré par une contribution des éleveurs de 8 millions d'euros, une dotation budgétaire de 44 millions d'euros, le solde, soit 84 millions d'euros, devant être financé par le produit de la taxe d'abattage.
Or, il a annoncé que la participation des seuls éleveurs de porcs et de volailles (4 millions d'euros) pourrait être inférieure de moitié aux prévisions, en dépit des engagements d'un ensemble d'organisations professionnelles. Par ailleurs, il a constaté que le produit net de la taxe d'abattage devrait s'élever à 77 millions d'euros, à taux inchangés. En conséquence, il a souligné qu'une contribution du budget de l'Etat à hauteur de 44 millions d'euros laisserait subsister une impasse à financer de 27 millions d'euros. Il a estimé, dès lors, que tout surcoût budgétaire viendrait alourdir le coût de la réforme pour l'Etat, à la charge duquel restait, outre une moins-value fiscale de 13 millions d'euros du fait de la récupération de la TVA par les bouchers (3 millions d'euros) et les abattoirs (10 millions d'euros), l'aide de 10 millions d'euros prévue en faveur des bouchers, soit 23 millions d'euros au total. Au surplus, il a indiqué que les modalités de la prise en charge budgétaire de l'aide de 10 millions d'euros accordée aux entreprises de boucherie agréées pour l'élimination des colonnes vertébrales par la direction des entreprises commerciales, artisanales, de service et des professions libérales (DECASPL) ne semblaient pas encore avoir été définitivement arrêtées. Enfin, il a constaté que les objectifs d'économies associés à la réforme du SPE ne seraient pas atteints, du moins à court terme. Il a estimé utile que l'administration précise le montant des charges non financées dans le cadre prévu par la loi de finances, les modalités envisagées pour leur couverture - soit par le budget de l'Etat soit par le relèvement des taux de la taxe d'abattage - ainsi que les solutions étudiées pour le retour à une situation normale de la commande publique.
En conclusion, il a souhaité attiré l'attention de la commission des finances sur la persistance, en dépit de certaines évolutions favorables du système français de l'équarrissage, de dysfonctionnements auxquels il est impossible de se résigner. A cet égard, il a estimé, d'une part, que le coût global du SPE à financer demeurait très élevé, alors que son équilibre pesait toujours fortement sur les finances publiques, d'autre part, que la réforme en cours n'avait toujours pas réussi à instaurer un mécanisme de régulation efficace des marchés et des prix face à un oligopole d'opérateurs.
a remercié M. Jacques Sallois pour son intervention et a estimé que l'enquête de la Cour des comptes avait permis de mettre en évidence de graves dysfonctionnements associés au fonctionnement du service public de l'équarrissage. En outre, il a souligné que la récente réforme adoptée dans le cadre de la loi de finances initiale pour 2006 constituait une vaine et ultime tentative pour mettre fin aux atteintes aux règles du marché ainsi qu'au déficit financier du service public de l'équarrissage. Puis il s'est adressé aux différents intervenants afin de savoir quelle était l'autorité responsable du service public de l'équarrissage au sein de l'administration.
a indiqué que la sous-direction de l'élevage et des produits animaux à la direction générale des politiques économique et internationale du ministère de l'agriculture et de la pêche était responsable du fonctionnement du SPE et qu'elle s'y était beaucoup investi. En outre, il a tenu à souligner que cette direction générale avait nourri des échanges approfondis avec la Cour des comptes dans le cadre de son enquête et qu'elle partageait la plupart des observations formulées par la Cour des comptes, en particulier s'agissant de l'absence de concurrence dans ce secteur économique. Pour expliquer cette situation, il a rappelé que, pendant très longtemps, l'Etat avait payé l'intégralité du service de l'équarrissage en ayant recours à la taxe sur les achats de viande pour couvrir ses frais.
s'est alors adressé au représentant de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) en rappelant que, d'après l'enquête de la Cour des comptes, la DGCCRF avait été saisie de plusieurs indices de pratiques anticoncurrentielles dans le secteur de l'équarrissage et avait constaté que les tarifs relevant du SPE étaient plus élevés que ceux des prestations correspondantes exercées à titre privé. Or la Cour des comptes a relevé que plusieurs enquêtes avaient été classées en dépit du sérieux des indices et des constats. Dès lors, il a souhaité savoir pourquoi la DGCCRF n'avait pas donné suite à ces enquêtes.
En réponse, M. Bertrand Oudry a précisé que la DGCCRF avait en effet lancé deux enquêtes dans des conditions différentes. Il a souligné que la première enquête, réalisée dans le cadre de pouvoirs renforcés, avait été déclenchée au moment de la deuxième crise de l'ESB en France à la fin de l'année 2000 et qu'elle avait permis de mettre en évidence l'existence de pratiques anticoncurrentielles. Il a indiqué que les résultats de cette enquête auraient pu justifier une saisine du Conseil de la concurrence, mais que le directeur général de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes avait décidé, en opportunité, de ne pas saisir le Conseil de la concurrence en raison d'un contexte particulièrement dégradé pour les équarrisseurs, caractérisé notamment par la décision des pouvoirs publics d'interdire totalement l'utilisation des farines animales. Dès lors, il a indiqué que la DGCCRF avait classé cette enquête sans suite en janvier 2004 en raison du caractère trop ancien des faits reprochés.
A cet égard, M. Jean Arthuis, président, s'est interrogé sur le délai de trois ans entre la constatation de pratiques anticoncurrentielles par la DGCCRF et le classement sans suite de cette enquête, malgré les indices existants.
a estimé que la période des faits avait été caractérisée par un vrai bouleversement économique du secteur de l'équarrissage et que, dès lors, le rapport d'enquête de la DGCCRF avait été mis de côté et conservé en attente.
Puis il a fait état de la deuxième enquête menée par la DGCCRF dans le secteur des déchets valorisables, exercée cette fois avec des pouvoirs d'enquête classiques, au début de l'année 2004, à la demande du cabinet du ministre des petites et moyennes entreprises. Il a précisé que les délais fixés pour les résultats de cette enquête avaient été trop stricts et n'avaient donc pas permis de mettre en évidence l'exercice de pratiques anticoncurrentielles par les opérateurs. Il en a conclu qu'à l'avenir il serait utile à la DGCCRF, dans ce secteur, d'utiliser systématiquement des pouvoirs d'enquête renforcés.
a souhaité intervenir pour souligner que l'absence de concurrence dans ce secteur économique était évidente, puisque le secteur était caractérisé par un duopole national, représenté par les sociétés Saria et Caillaud, et par des situations de monopoles locaux. En outre, il a noté que cette concentration était le fruit d'une configuration historique. Puis il a indiqué que la réduction du périmètre du SPE, notamment par la loi de finances initiale pour 2006, avait entraîné une baisse de prix de l'ordre de 20 % en moyenne dans les domaines désormais privatisés.
a estimé que cette information constituait un indice de l'existence de pratiques anticoncurrentielles dans ces secteurs avant leur libéralisation.
En réponse, M. Bertrand Oudry a estimé que, si la DGCCRF était en mesure de constater l'existence actuelle de pratiques anticoncurrentielles et de les sanctionner, elle ne pouvait pas sanctionner un marché historiquement habitué à ne pas exercer des pratiques concurrentielles. En effet, il a rappelé que les monopoles territoriaux aujourd'hui en vigueur avaient été mis en place par la loi de 1975 instaurant un service d'utilité publique de l'équarrissage et que le faible nombre d'opérateurs sur le marché constituait un héritage historique. En outre, il a précisé qu'au sein du service public de l'équarrissage, le coût de la collecte des déchets était prédominant.
s'est alors interrogé sur la possibilité de dissocier les coûts de la collecte de ceux du traitement des déchets.
a précisé que les opérateurs du SPE s'étaient constitués des marges confortables, mais a concédé que le choix historique d'une modernisation du réseau technique de l'équarrissage avait été une réussite. Il a toutefois fait valoir que le prix à payer pour cette modernisation avait été l'instauration de monopoles locaux et d'un oligopole national.
Puis M. Jean Arthuis, président, a insisté sur la nécessité pour ces opérateurs privés de pouvoir rendre compte, au sein de leur comptabilité analytique, des coûts du service public de l'équarrissage.
s'est alors interrogée sur la capacité de l'appel d'offres européen pour le marché national d'élimination des cadavres animaux, lancé le 29 novembre 2005 par le ministère de l'agriculture et de la pêche, à instaurer d'emblée un régime de concurrence dans une profession très concentrée. Elle a également souhaité connaître le nombre de réponses à cet appel d'offres, si elles étaient satisfaisantes et à quelle date le nouveau dispositif pourrait être mis en oeuvre.
En réponse, M. Philippe Vinçon a précisé que pour 92 lots départementaux, le ministère de l'agriculture et de la pêche avait reçu 96 réponses, mais que sur l'ensemble du pays les réponses émanaient de huit sociétés d'équarrissage différentes seulement et que, dans certains départements, seule une réponse par lot avait été enregistrée. En outre, il a précisé qu'aucune concurrence émanant de sociétés européennes sur des lots transfrontaliers n'avait été constatée.
Puis Mme Nicole Bricq, rapporteure spéciale, a souligné que, s'agissant des difficultés financières du SPE en 2004-2005, la Cour des comptes avait relevé que les besoins résiduels de financement du SPE s'étaient élevés à 93 millions d'euros au total pour la période 2004-2005. Elle a souhaité savoir quelles avaient été les raisons de ces difficultés financières et comment l'Etat avait couvert ce besoin de financement.
En réponse, M. Olivier Caillou a rappelé que la réforme votée en loi de finances initiale pour 2004 avait eu pour objet le remplacement de la taxe sur les achats de viande par une taxe d'abattage en vue de l'instauration d'un système de financement théoriquement équilibré. Il a précisé que le chiffre de 93 millions d'euros cité par Mme Nicole Bricq émanait du rapport conjoint de l'inspection générale des finances et de l'inspection générale de l'agriculture sur le financement du SPE, qui avait constaté, d'une part, une sous-exécution des recettes, liée à la contestation de la légitimité de la taxe sur les achats de viande par les contribuables, d'autre part, une dépense supérieure à celle qui avait été escomptée. Toutefois, il a précisé que le montant de 93 millions d'euros correspondait au cumul, fin 2005, de l'ensemble des dossiers présentés par les équarrisseurs aux directions départementales avant d'être présentés au Centre national pour l'aménagement des structures des exploitations agricoles (CNASEA) et qu'il existait donc un décalage dans le temps entre le dépôt de ces dossiers et le paiement par le CNASEA, organisme gestionnaire.
Puis en réponse à une question de M. Jean Arthuis, président, sur la nature des autorités responsables du contrôle, M. Philippe Vinçon a précisé que les directions départementales des services vétérinaires (DDSV) exerçaient le contrôle du « service fait » par les équarrisseurs, qui consistait dans un contrôle sanitaire effectué au moment de la collecte et du traitement des déchets, mais n'avait pas de dimension fiscale.
Puis M. Philippe Vinçon a souhaité rappeler l'importance de la décrue, pour les finances publiques, de la charge associée au service public de l'équarrissage. Ainsi, il a précisé qu'en 2001 le service public de l'équarrissage représentait un montant de l'ordre de 480 millions d'euros à la charge du budget de l'Etat, contre 154 millions d'euros en 2005. Il a souligné qu'un transfert de charges avait été opéré sur la filière, sous la pression des règlements communautaires notamment. Toutefois, il a précisé que ce transfert avait eu lieu au détriment des abatteurs, car les éleveurs avaient d'abord été majoritairement exonérés de toute participation.
a souhaité revenir sur la question de la couverture du besoin de financement du SPE sur la période 2004-2005.
a précisé que ce besoin de financement avait été couvert par l'ouverture de 50 millions d'euros en loi de finances rectificative pour 2004 associée à l'inscription de 30 millions d'euros en loi de finances initiale pour 2005.
Puis Mme Nicole Bricq, rapporteure spéciale, s'est intéressée à la gestion du SPE au cours de l'année 2006. En effet, elle a rappelé les propos introductifs de M. Jacques Sallois indiquant une impasse budgétaire de l'ordre de 27 millions d'euros en 2006. Dès lors, elle a souhaité savoir, d'une part, si les pouvoirs publics seraient en capacité d'obtenir des éleveurs une participation significative au financement du SPE, comme prévu par la loi de finances initiale pour 2006, d'autre part, si une augmentation du taux de la taxe d'abattage était envisagée par les pouvoirs publics et dans quelles proportions, enfin, si une augmentation de la contribution publique, sous forme de dotation budgétaire, au financement du SPE était prévue. A cet égard, elle a rappelé que le Parlement avait voté la dernière réforme en date du SPE, au sein de la loi de finances initiale pour 2006, sans pouvoir disposer de toutes les informations nécessaires, sous la réserve que la réforme votée permette une diminution de la contribution budgétaire de l'Etat.
En réponse, M. Philippe Vinçon a précisé que la participation directe des éleveurs devait théoriquement s'élever à 4 millions d'euros, dont 2 millions d'euros pour les éleveurs de porcs avec l'accord de l'interprofession porcine, et 2 millions d'euros pour les éleveurs de volailles, somme qui demeurait toutefois incertaine en raison de la réticence des éleveurs de volaille à contribuer au SPE dans une période marquée par la crise d'influenza aviaire. Il a également précisé que les éleveurs bovins participeraient par le biais d'une compensation au sein de l'interprofession afin d'alléger les charges pesant sur les abattoirs. Puis il a indiqué qu'une réunion se tiendrait prochainement afin de décider de la fixation d'un nouveau taux de la taxe d'abattage.
a relevé les incertitudes pesant encore sur la participation des éleveurs et s'est interrogée sur la nécessité de mettre davantage à contribution le budget de l'Etat.
a rappelé que la direction du budget avait été très active sur le sujet du financement du service public de l'équarrissage en assurant notamment la sécurisation du dispositif financier mis en place en 1997, la mise en oeuvre de conditions d'exercice de nature à améliorer la situation sanitaire, enfin le retour des prix de la viande bovine à des niveaux supérieurs. Puis il a indiqué que la direction du budget plaidait pour un respect du schéma de financement instauré par la loi de finances initiale pour 2006, à savoir une dotation du budget de l'Etat fixée à 44 millions d'euros, une contribution des éleveurs fixée à 8 millions d'euros, enfin une taxe d'abattage dont le rendement avait été fixé à 84 millions d'euros, mais qui ne rapporterait en 2006, d'après les projections actuelles, que 72 millions d'euros.
a dès lors estimé que l'évaluation du coût du SPE par la loi de finances initiale pour 2006 n'était pas correcte, puisque celui-ci serait vraisemblablement de 152 millions d'euros, contre 134 millions d'euros prévus initialement.
a estimé que la participation des éleveurs était minime par rapport au coût total du service public de l'équarrissage.
a précisé que cette participation avait été fixée au minimum requis par les obligations communautaires.
Puis M. Joël Bourdin, rapporteur spécial de la mission « Agriculture, pêche, forêt et affaires rurales », a constaté que la Cour des comptes avait mis en évidence les difficultés et l'hétérogénéité du contrôle du service fait par les équarrisseurs, exercé par les directions départementales des services vétérinaires (DDSV). Il a souhaité savoir quelles étaient les mesures envisagées par l'administration pour remédier à ces carences.
a indiqué que la gestion du SPE serait transférée du CNASEA à l'ONIEP à compter du 3 juillet 2006 et que l'office, disposant de contrôleurs de terrain, serait amené à remédier à ces carences.
Puis M. Yves Berger, directeur général de l'ONIEP, a fait valoir que le rôle de l'office en matière de service public de l'équarrissage serait double. D'une part, il assurerait la gestion de l'ancien dispositif en lieu et place du CNASEA. D'autre part, il mettrait en place un nouveau dispositif de contrôle avec une quinzaine d'agents de terrain dédiés au contrôle du service fait par les équarrisseurs sur la totalité de leurs opérations. Il a souligné que la pression du contrôle serait plus forte que celle exercée actuellement. En outre, il a précisé qu'une commission serait mise en place au sein de l'office et serait constituée de représentants de toute la filière.
a souhaité savoir quelles seraient les modalités pratiques de mise en oeuvre des aides aux bouchers décidées le 1er janvier 2006 et connaître le montant de ces aides. En outre, il s'est interrogé sur les difficultés associées à une répercussion « en pied de facture » de l'augmentation de la taxe d'abattage et sur la contestation de cette répercussion par les bouchers.
En réponse, M. Jean-Jacques Pinet a estimé qu'il fallait distinguer le sujet de la sortie, par les bouchers, du dispositif du SPE et celui de l'aide accordée aux bouchers au début de l'année 2006, aide qui constitue un soutien au savoir-faire artisanal des bouchers, sans lien avec le service public de l'équarrissage.
s'est alors interrogé sur l'opportunité de cette aide sectorielle et a souhaité connaître le montant individuel de cette aide ainsi que le coût de son traitement administratif.
a indiqué que cette aide était de 500 euros par boucher et que le coût de son traitement administratif n'avait pas été évalué.
a rappelé que le coût total de cette aide en faveur des bouchers était estimé à 10 millions d'euros en 2006, somme à laquelle il fallait ajouter la récupération de TVA, par les bouchers d'une part, pour un montant de 3 millions d'euros, par les abattoirs d'autre part, pour un montant de 10 millions d'euros. Il a également indiqué que, s'agissant du financement de cette aide, un débat avait vu le jour entre la direction du budget du ministère de l'agriculture et la direction du commerce, de l'artisanat, des services et des professions libérales du ministère des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat et des professions libérales.
a précisé que le principe de l'aide accordée aux bouchers était issu du fait que, jusqu'en janvier 2006, l'élimination des déchets de boucherie était partie prenante du service public de l'équarrissage et que la modification du périmètre du SPE votée en loi de finances initiale pour 2006 avait renvoyé le coût de l'élimination des déchets à la profession. Dès lors, pour assurer la transition, un dispositif d'accompagnement des bouchers avait été mis en place. La décision avait dès lors été prise de renvoyer la gestion de cette aide au ministère des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat et des professions libérales.
a précisé que ce soutien était accordé aux opérateurs disposant d'un atelier de découpe certifié par les services vétérinaires et que les grandes surfaces n'étaient pas concernées par ce soutien.
a souhaité apporté une réponse à M. Joël Bourdin, rapporteur spécial, sur la notion de « pied de facture » et précisé que ce système permettait de répercuter l'incidence de la taxe d'abattage sur les prix de vente aux clients, mais que cette pratique n'était pas conforme aux règles de facturation, ni à celle du code du commerce.
a fait valoir que lorsque la grande distribution répercutait autrefois la taxe sur les achats de viande sur ses fournisseurs, il s'agissait d'un abus de position dominante qui aurait dû être sanctionné par la DGCCRF.
Pour conclure, M. Jean Arthuis, président, a indiqué que la commission des finances était amenée à se prononcer sur l'opportunité de publier la communication de la Cour des comptes sur le fonctionnement du service public de l'équarrissage. Il a rappelé que cette communication avait, selon la Cour des comptes, posé quatre questions majeures. D'abord, s'agissant du risque financier associé au contentieux national, il s'est interrogé sur la nécessité pour l'Etat de devoir constituer une provision pour 2007 et d'assurer ainsi la sincérité de ses comptes.
a indiqué qu'il venait de recevoir la maquette budgétaire de l'Etat et qu'il ne pouvait se prononcer, à ce stade, sur cette question.
Puis M. Jean Arthuis, président, a évoqué la question du transfert de la gestion du SPE du CNASEA à l'ONIEP. A cet égard, il a rappelé que, s'agissant de la gestion budgétaire, financière et comptable du SPE par le CNASEA, la Cour des comptes avait relevé des difficultés significatives ayant conduit notamment à des coûts d'intervention non négligeables pour le CNASEA et à des délais de paiement importants. A cet égard, la Cour des comptes avait indiqué que les intérêts de retard dus par le CNASEA n'avaient pas été payés systématiquement et spontanément, mais seulement sur réclamation, et étaient demeurés exceptionnels. Il a donc souhaité savoir si une évaluation du surcoût, en termes de fonctionnement, pour le CNASEA avait été réalisée.
En réponse, M. Bernard Bezeaud a précisé que les délais de traitement étaient de l'ordre de trois à quatre mois et qu'ils représentaient, fin 2006, une charge de plus de 80 millions d'euros.
a évoqué le troisième point développé par la Cour des comptes dans sa communication, relatif à l'échec de la mise en oeuvre par l'Etat de procédures d'appel à la concurrence et a indiqué qu'aucune réponse satisfaisante à cette question n'avait été apportée à ce stade. En tout état de cause, il a estimé qu'une plus grande transparence, à défaut de concurrence, était souhaitable.
Enfin, s'agissant du quatrième point, à savoir l'équilibre financier du SPE, il a constaté que des doutes subsistaient.
a alors estimé que, globalement, la présente audition avait permis de faire avancer le dossier du fonctionnement du service public de l'équarrissage.
La commission a ensuite décidé d'autoriser la publication de la communication de la Cour des comptes sous la forme d'un rapport d'information.
La commission a ensuite désigné M. Henri Torre, comme candidat proposé à la nomination du Sénat pour siéger au sein du conseil d'administration de l'établissement public de réalisation de défaisance (EPRD).