Séance en hémicycle du 30 octobre 2014 à 15h00

Résumé de la séance

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La séance

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La séance, suspendue à treize heures, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Gérard Larcher.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

L’ordre du jour appelle les réponses à des questions d’actualité au Gouvernement.

Je rappelle que l'auteur de la question dispose de deux minutes trente, de même que la ou le ministre pour sa réponse. Ce rappel n’est pas de pure forme, et je prie chacun de bien vouloir se conformer à la règle.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour le groupe UDI-UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Goulet

Ma question s'adresse à Mme la secrétaire d'État chargée de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Madame la secrétaire d’État, le Conseil d’État vient de vous infliger un revers légitime, mérité, attendu et espéré, en suspendant la suppression des bourses au mérite décidée au cœur de l’été.

Cette décision était d’autant plus inexplicable, indépendamment de son caractère rétroactif, qu’elle pénalisait des étudiants méritants qui avaient besoin de ces bourses.

À ce stade, je veux féliciter Thaïs Cesto et Julie-Anne Kervalla, deux jeunes filles de Flers, monsieur le président – ville qui nous est chère –, qui ont suscité une mobilisation citoyenne et recueilli plus de 11 000 signatures via l’association Touche pas à ma bourse, je la mérite. Elles ont ainsi obtenu, en déposant un recours, comme je le leur avais suggéré, la suspension de cette mesure.

Le principe de la récompense au mérite semble vous poser une difficulté, madame la secrétaire d’État, puisque vous avez décidé de supprimer les bourses au mérite, mais de répartir les fonds en en élargissant l’assiette des bénéficiaires. À telle enseigne qu’un hebdomadaire titrait cette semaine Cette gauche qui n’aime pas le mérite

Madame la secrétaire d’État, comptez-vous supprimer cette bourse pour l’année 2015 et les années à venir ? Ne pensez-vous pas qu’en supprimant cette bourse, source de motivation pour les très bons élèves qui ont leur baccalauréat avec une mention « très bien » et qui obtiennent cette aide sous conditions de ressources, vous faites un très mauvais pari sur la jeunesse de ce pays ?

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de l’enseignement supérieur et de la recherche.

Debut de section - Permalien
Geneviève Fioraso

Madame la sénatrice, le Conseil d’État a en effet, sur la forme, émis un avis défavorable concernant notre décision de supprimer progressivement les bourses au mérite.

En attendant la décision sur le fond, nous allons rétablir ces bourses, pour cette année et pour la première année – les autres étaient maintenues –, ce qui représente un effort de près de 15 millions d’euros pour cette année, l’effort global étant de 39 millions d’euros.

Notre décision sur les aides au mérite n’a pas été prise par idéologie. C’est un faux débat, et un faux procès. Nous sommes favorables au mérite, mais nous pensons également qu’il était nécessaire d’évaluer ce dispositif, douze ans après sa création par Claude Allègre. Nous avons donc revu l’ensemble des aides aux étudiants avec les organisations étudiantes.

Car le constat est implacable : le système d’éducation français est le plus injuste de tous ceux des pays de l’OCDE. On n’est plus dans la reproduction sociale, on est dans la dégradation sociale, avec un facteur de quatre à un. On compte ainsi un étudiant issu des classes les plus modestes pour quatre personnes actives venant de ces milieux.

Le problème est grave ; il engendre une désespérance sociale. En outre, il est très mauvais pour notre économie de ne pas réussir à qualifier des jeunes issus des milieux les plus modestes.

Ce déterminisme social – tous les pédagogues le savent, tous les rapports le disent – s’installe dès le plus jeune âge, au CP, au moment de l’acquisition des savoirs fondamentaux. C’est donc là qu’il fallait agir en priorité et c’est ce qui a été fait en ciblant les premières années d’apprentissage lors de l’attribution des 60 000 nouveaux postes et en rétablissant le volet professionnalisant de la formation des enseignants, supprimé au cours du précédent quinquennat.

Par ailleurs, les aides au mérite, justifiées lorsque Claude Allègre les a mises en place, à une période où le pourcentage de mentions « très bien » au baccalauréat était inférieur à 3 %, se justifient plus difficilement aujourd'hui alors que ce pourcentage est de 12 %, sans toutefois que la proportion de jeunes boursiers issus des milieux les plus modestes – ce sont eux qui bénéficient des aides au mérite –, ait augmenté. Avec aujourd’hui plus de dix ans de recul – on ne pouvait pas le voir avant –, on s’aperçoit que la mesure n’a pas eu d’impact.

Valérie Pécresse elle-même l’avait bien compris, puisqu’elle avait réduit de 20 % à 2 % le nombre d’étudiants en master bénéficiant de ces bourses. L’évaluation était tellement difficile qu’elle donnait lieu à des recours.

Pour notre part, nous avons préféré investir 458 millions d’euros dans une réforme des bourses sur critères sociaux. C’est une réforme historique, inédite. Elle vise à permettre la réussite de tous les étudiants, en particulier de ceux qui sont issus des milieux les plus modestes.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste . – Mme Hermeline Malherbe applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme Marie-Hélène Des Esgaulx, pour le groupe UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Hélène Des Esgaulx

Ma question s'adressait à M. le Premier ministre.

Je souhaite revenir sur la saga de l’écotaxe.

Exclamations ironiques sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Hélène Des Esgaulx

L’écotaxe, c’est tout cela à la fois. Oui, les décisions ont été pour le moins mal préparées. Je passe sur les annonces de Mme Royal, faites dans le mépris le plus total du Parlement, alors que l’écotaxe a été votée par le Parlement.

Je retiens surtout que les décisions de suspension de cette taxe ont été prises en oubliant que le contrat de partenariat public-privé, lui, se poursuivait.

Le plus grave, c’est l’effet désastreux sur nos finances publiques de cette affaire, qui tombe particulièrement mal. Non seulement la dernière suspension, dite « sine die » – nouveau concept juridique peut-être, mais qui n’est rien d’autre qu’un abandon pur et simple – nous prive d’une ressource essentielle pour le financement de nos infrastructures, non seulement tous les automobilistes verront le prix du gasoil augmenter, ce qui aura un effet sur leur pouvoir d’achat, mais en plus l’État s’engage sur la voie d’une résiliation unilatérale du contrat de partenariat public-privé, une solution extrêmement onéreuse – 830 millions d’euros dans le meilleur des cas – et qui n’est pas financée dans le projet de loi de finances pour 2015.

Ma question est simple et directe : quelle est la position du Gouvernement sur l’application, ou non, du contrat de partenariat public-privé ?

Le Gouvernement va-t-il vers une résiliation du contrat par voie contractuelle d’ici demain, 31 octobre, date résultant du protocole que l’État a signé cet été avec la société Ecomouv’ ? En tout état de cause, comment cette résiliation sera-t-elle financée ? Le sera-t-elle sur le budget des transports ?

Ces questions, mes chers collègues, intéressent le Parlement, mais aussi tous les Français.

Pour ma part, j’ai peur que l’on assiste tout simplement à un gâchis d’argent public, et tout cela uniquement à des fins politiciennes !

Applaudissements sur les travées de l'UMP et sur certaines travées de l’UDI-UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des transports, de la mer et de la pêche.

Protestations sur les travées de l'UMP.

Debut de section - Permalien
Alain Vidalies

Madame la sénatrice, vous le savez, l’État a été confronté à des difficultés insurmontables dans la mise en œuvre de l’écotaxe, même dans sa version aménagée.

Dans un premier temps, à l’issue d’un dialogue avec les transporteurs, le Gouvernement a décidé la suspension de la mise en œuvre et a annoncé que la participation des transporteurs au financement des infrastructures pour l’année 2015 se ferait par l’augmentation de 4 centimes de la taxe sur le gasoil qu’ils acquittent, soit une recette de 350 millions d’euros par an pour l’Agence de financement des infrastructures de transport de France, l’AFITF.

Un groupe de travail a été mis en place pour trouver une solution pérenne qui permettrait notamment de faire payer les camions étrangers. Je vous confirme que l’AFITF disposera, pour 2015, de l’ensemble du financement attendu, soit 1, 9 milliard d’euros. Pour être encore plus précis, madame la sénatrice, quelles que soient les circonstances, le financement des infrastructures sera dans tous les cas sanctuarisé.

Le Gouvernement a décidé de résilier le contrat de partenariat conclu avec Ecomouv’ le 20 octobre 2011. Dans la lettre de résiliation, il sera rappelé que des doutes ont été émis sur la validité du contrat initial au regard des exigences constitutionnelles qui s’imposent à l’État lorsqu’il confie à des personnes privées la gestion de certaines activités.

Madame la sénatrice, vous connaissez ces objections, puisqu’elles ont été soulevées par d’éminents juristes lors de leurs auditions devant la commission que vous présidiez. Je ne doute pas que vous aurez dès lors à cœur d’accompagner la défense des intérêts de l’État, aux côtés du Gouvernement, en toutes circonstances.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à M. Jacques Mézard, pour le groupe du RDSE.

Exclamations laudatives sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

M. Jacques Mézard. Ma question s'adressait à M. le Premier ministre, mais auparavant, au nom du groupe du RDSE, je tiens à exprimer à M. le ministre de l’intérieur notre soutien face aux attaques détestables dont il est l’objet à la suite du drame de Sivens.

Vifs applaudissements sur les travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste, de l'UDI-UC et de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

La nouvelle Commission européenne entrera en fonction dans deux jours, le 1er novembre. Son président a déclaré devant le Parlement européen, avant d’obtenir son investiture : « Cette Commission sera celle de la dernière chance. Soit nous réussissons à rapprocher les citoyens de l’Europe, à réduire le chômage de manière draconienne et à redonner une perspective aux jeunes, soit nous échouons. » C’est en effet l’avenir du projet européen qui se joue et, avec lui, celui de notre pays.

Le dossier prioritaire, l’urgence de la nouvelle Commission, est attendu avant Noël, a annoncé M. Juncker. Il s’agit du plan d’investissement de 300 milliards d’euros pour l’Union européenne.

Si ce plan, soutenu par la France et l’Allemagne, reste à construire, nous savons qu’il se concrétisera par de grands chantiers d’infrastructures dans les domaines de l’énergie, des transports, des réseaux numériques, et qu’il comportera un volet social. Au moment où nos collectivités vont connaître des difficultés financières, il est urgent d’avancer dans ces secteurs.

On sait aussi qu’il s’agira de stimuler l’investissement privé, sans creuser les déficits. Une liste de projets, accompagnés de leurs plans de financement, doit être présentée au sommet européen des 18 et 19 décembre. D’ici là, la Commission, la Banque européenne d’investissement et les États membres vont devoir travailler à la mise en œuvre de ce plan très attendu pour retrouver le chemin de la croissance et de l’emploi.

Monsieur le ministre, quelles sont les propositions que la France s’apprête à adresser au président Juncker en vue de l’élaboration de ce plan d’investissement ? Quels projets concrets la France souhaite-t-elle voir figurer dans ce plan ?

Pour notre part, défenseurs convaincus de la construction européenne, nous sommes également convaincus que la relance économique n’est possible que grâce à une politique ambitieuse d’investissements en Europe. C’est la raison pour laquelle nous sommes favorables à ce plan de 300 milliards d’euros. Pouvez-vous donc nous dire comment la France entend œuvrer activement à sa construction et, plus encore, à sa réussite ?

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. le ministre des finances et des comptes publics.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Savin

Monsieur Mézard, vous avez souligné l’importance du plan européen d’investissement de 300 milliards d’euros actuellement en préparation. Après vous, je veux rappeler pourquoi il me paraît être la bonne réponse, adaptée à la fois à la situation de l’Europe et à celle de la France.

Notre croissance en Europe, en zone euro tout particulièrement, est trop faible : elle était trop faible l’année dernière, elle est trop faible cette année et, si rien n’est fait, elle risque de l’être également l’année prochaine. Or la croissance n’est pas qu’un mot : derrière elle, il y a l’activité des entreprises et donc l’emploi. Si nous n’avons pas une croissance supérieure, nous n’arriverons donc pas à faire reculer le chômage de manière durable.

Que manque-t-il aujourd’hui à l’Europe et à la France ? Des investissements. Je ne veux pas abuser de chiffres, mais, aujourd’hui, le niveau des investissements publics et privés est inférieur d’environ 20 % au niveau d’avant la crise, en 2008. Mesdames, messieurs les sénateurs, 20 % d’investissements en moins, ce sont des emplois en moins et, pour notre pays, des capacités d’agir en moins, y compris des capacités budgétaires.

C’est donc par l’investissement que nous pouvons trouver une porte de sortie aux difficultés que nous connaissons. L’investissement, en effet, c’est à la fois de l’activité immédiate, puisque ce sont des travaux, des marchés, des emplois sur nos territoires, mais aussi, dès lors qu’il s’agit de bons investissements, dans les infrastructures de transport, dans les infrastructures énergétiques et numériques ou dans la recherche et l’innovation, c’est un moteur de la croissance pour les années à venir.

Au fond, ce plan d’investissement, qui comprend tout ensemble des investissements publics et privés, permet de réconcilier les tenants de la politique de la demande et les tenants de la politique de l’offre autour d’une seule et même initiative.

Est-ce que chaque pays européen peut porter seul cet effort d’investissement ? Peut-être est-ce le cas de certains, qui bénéficient de marges budgétaires suffisantes, parce qu’ils ont accompli des efforts plus tôt que nous. Mais d’autres pays ont des moyens d’action bien plus réduits, et, pour notre part, nous devons bien sûr poursuivre nos efforts en matière budgétaire.

Le niveau européen est donc le bon niveau, le niveau approprié pour venir appuyer les investissements à l’échelle de nos territoires dans les domaines que je viens d’énumérer. Nous avons formulé des propositions franco-allemandes et je fais des propositions avec mon collègue ministre de l’économie, Emmanuel Macron, visant à privilégier des investissements qui sont prêts à faire démarrer l’activité dans les mois qui viennent, mais aussi des investissements en profondeur, car il ne s’agit pas de saupoudrer. De tels investissements existent en France, monsieur Mézard, vous en connaissez dans votre région, dans votre département et dans vos agglomérations. Ce sont ces investissements qu’il faut lancer !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Ronan Dantec, pour le groupe écologiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Ronan Dantec

Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie.

Madame la ministre, dimanche dernier, dans la nuit, un jeune homme est mort à l’aube de sa vie. Il est mort pour s’être dressé contre un projet qu’il jugeait injuste, un barrage destructeur de zones humides où 8 millions d’euros d’argent public vont être engloutis au bénéfice de quelques dizaines d’exploitations agricoles. Mes premières pensées vont à la mémoire de ce jeune homme et à sa famille.

Ce drame, madame la ministre, nous interpelle tous. La responsabilité collective du Gouvernement et de la représentation nationale est aujourd’hui de répondre sur le fond, pour éviter que la reproduction des mêmes causes ne conduise demain à d’autres drames humains.

Rodomontades ou propos incendiaires ne sont pas des réponses à la hauteur de la gravité du moment.

Debut de section - PermalienPhoto de Ronan Dantec

Je crois profondément, madame la ministre, à un État de droit dont l’exemplarité est notre socle démocratique, et cela vaut aussi pour l’action des collectivités territoriales.

Sur ce dossier du barrage du Testet comme sur d’autres projets, la prise de décision publique n’a pas respecté nos règles collectives. Comme l’a souligné le rapport de l’expertise que vous avez diligentée, la conduite de ce projet est entachée de fautes lourdes, comme le conflit d’intérêt entre l’expertise et la conduite des travaux ou la sous-évaluation des enjeux environnementaux, ce qui est malheureusement une tradition française.

Madame la ministre, il nous faut tous réagir pour sortir de la spirale tragique de la montée des affrontements dans la société française, qui ne se régleront pas en déployant de bataillons de gardes mobiles.

L’État doit aujourd’hui reconnaître que, sur un certain nombre de dossiers, il est passé en force, ou que, pour le moins, il n’a pas assez cherché à faire respecter par les porteurs de projets les réglementations, notamment environnementales. La remise à plat d’un certain nombre de projets d’aménagement, contestés précisément pour la manière dont ils ont été élaborés, serait une vraie réponse politique d’apaisement, après ce drame national.

Madame la ministre, êtes-vous prête aujourd’hui à vous mobiliser pour un État exemplaire, et de ce fait capable de mener ses projets à terme, car leur raison d’être aura été discutée en toute rigueur et exemplarité ? Si tel est le cas, nous vous demandons de traduire rapidement cette volonté en actes concrets, qui ne se réduisent pas à la seule question du barrage du Testet.

Ma question se veut donc précise : êtes-vous d’accord pour répondre favorablement aux propositions de l’ACNUSA, l’Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires, qui demande une nouvelle étude indépendante sur le plan d’exposition au bruit de l’aéroport actuel de Nantes-Atlantique ainsi que sur le projet de Notre-Dame-des-Landes, l’ACNUSA pointant les grandes faiblesses des hypothèses présentées par la Direction générale de l’aviation civile, c’est-à-dire par l’État lui-même ?

Exclamations sur certaines travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Ronan Dantec

Répondre favorablement à cette demande émanant d’une autorité indépendante et nullement contestée peut conduire à l’apaisement. France Nature Environnement, qui a perdu un de ses militants, écrit aujourd’hui avec grande dignité que la démocratie et le dialogue restent les meilleures réponses face à la violence. Madame la ministre, vos propres réponses sont ici attendues, elles ne doivent pas souffrir d’ambiguïté.

Applaudissements sur les travées du groupe écologiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie.

Debut de section - Permalien
Ségolène Royal

Monsieur le sénateur, je voudrais tout d’abord m’associer à la profonde tristesse des parents et des amis de Rémi Fraisse, ainsi qu’à celle de l’association France Nature Environnement, dont il était membre.

Je voudrais aussi, au côté de M. le ministre de l’intérieur, exprimer toute ma solidarité aux forces de gendarmerie qui ont été blessées dans l’exercice de leurs difficiles fonctions.

Debut de section - Permalien
Ségolène Royal, ministre

Mesdames, messieurs les sénateurs, la violence n’a pas sa place dans la République quand il s’agit de remettre en cause les grandes infrastructures de notre pays, et je sais que vous partagez ce point de vue.

Ce cas montre, avec d’autres, que les procédures sont beaucoup trop longues. Concernant le respect de la réglementation, je voudrais vous rassurer, monsieur le sénateur, les procédures qui ont été suivies sont parfaitement légales et toutes les autorisations ont été données, contrairement à ce que vous avez dit.

Le problème tient au fait que certains recours ne sont pas suspensifs, ce qui crée ensuite des tensions, des tensions démocratiques, puisque les gens ne comprennent pas pourquoi, alors que des recours ont été déposés, les travaux commencent. Cette situation est parfaitement légale, puisque, encore une fois, un certain nombre de recours ne sont pas suspensifs.

Un problème important se pose donc, qui est celui de la durée : des ouvrages conçus parfois dix ans ou quinze ans auparavant, qui ont déjà fait l’objet de premières procédures et de recours suspensifs et qui ont donc été retardés de ce fait, subissent une deuxième vague de recours, eux, non suspensifs, alors que les travaux ont commencé.

Je veux mettre fin à cette situation

Marques d’approbation sur certaines travées de l'UMP.

Debut de section - Permalien
Ségolène Royal, ministre

C’est pourquoi, dans le projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte, je pose le principe de l’autorisation unique, qui permettra de réduire les délais, notamment les délais de recours.

Je souhaite vraiment que le Sénat s’empare le plus rapidement possible de ce projet de loi, afin que nous puissions mettre au clair les droits et les devoirs de chacun, ceux des maîtres d’ouvrage, qui doivent ou ne doivent pas décider de la suspension des travaux en fonction des recours déposés, mais qui doivent aussi avoir la stabilité juridique pour les entreprises afin que les grands équipements se construisent.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste ainsi que sur certaines travées du RDSE, de l’UDI-UC et de l’UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Thierry Foucaud, pour le groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Monsieur le ministre, samedi dernier, le Président de la République qualifiait de « très banale » la lettre de recadrage budgétaire de notre pays adressée par la Commission européenne.

Il précisait fermement que la France avait « fait ce qu’elle avait à faire ». Cette lettre est en effet la concrétisation du traité Merkel-Sarkozy, qui porte un coup terrible à la souveraineté budgétaire de la France.

La souveraineté budgétaire – faut-il vous le rappeler, monsieur le ministre ? – est un élément clé de la souveraineté populaire, démocratique en un mot, qui trouve sa source dans l’article XIV de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen.

Les termes de cette lettre sont humiliants. La Commission demande des explications sur « les raisons qui ont conduit la France à dévier des objectifs budgétaires fixés par le Conseil ».

« Dévier », « objectifs », « fixer » : les termes symbolisent l’autoritarisme de cette Europe. Malheureusement, dès lundi, vous avez fait acte de soumission. Vous avez trouvé 3, 6 milliards d’euros pour calmer le courroux des maîtres bruxellois. Tout à coup, vous avez redécouvert le scandale de l’évasion et de la fraude fiscales, mais seulement pour l’effleurer, en ne récupérant que 900 millions d’euros sur les 80 milliards d’euros annuels qu’elles représentent, faut-il le rappeler ?

Aujourd’hui, vous tentez de transformer cette nouvelle capitulation en tour de force. Selon vous, l’Europe aurait validé votre budget sans exiger plus d’austérité.

Monsieur le ministre, ce n’est pas vrai !

Premièrement, le budget pour 2015 est déjà marqué au fer rouge par l’austérité du pacte de stabilité européen.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Deuxièmement, vous savez bien que, d’ici à la fin du mois de novembre, vous devrez présenter au nouveau commissaire à l’économie et aux finances des réformes structurelles, des réformes libérales, épousant les exigences du marché et du patronat, afin d’obtenir un délai supplémentaire pour revenir aux 3 % de déficit.

Monsieur le ministre, rappelez-vous ces termes du programme de François Hollande

Ah ! sur certaines travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Dès lors, mes questions seront simples, monsieur le ministre : quel mandat électoral détenez-vous pour accepter le diktat de Bruxelles ? Quelle légitimité vous permet de négocier avec Bruxelles sur des bases contraires aux engagements pris devant les Français en 2012 ? À l’heure où les forces de progrès sont taxées de « passéistes » par le Premier ministre lui-même, n’est-il pas temps de changer le logiciel de l’Europe, ce vieux logiciel libéral et antidémocratique ?

Applaudissements sur les travées du groupe CRC ainsi que sur certaines travées du groupe écologiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. le ministre des finances et des comptes publics.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Savin

Monsieur le sénateur, ce sont des questions sérieuses que vous posez et je veux y répondre avec tout le sérieux qu’elles exigent.

Nous avons une monnaie commune avec dix-huit pays européens : l’euro. Que je sache, vous ne proposez pas de sortir de l’euro et vous avez bien raison, car le fait d’avoir une même monnaie nous confère aujourd’hui une vraie force dans la mondialisation, qui est parfois, à juste titre, source d’inquiétudes.

Oui, mesdames, messieurs les sénateurs, cette force tient au fait que dix-huit pays ont choisi de se doter d’une monnaie commune et unique.

Parce que nous avons une monnaie unique, il est légitime que nous nous observions les uns et les autres et que nous nous concertions sur les autres aspects des politiques publiques. Car la politique budgétaire n’est pas complètement indépendante du reste de la politique économique, bien au contraire, elle a des conséquences sur cette dernière : je suis sûr, par exemple, que vous soutenez la politique monétaire actuelle de la Banque centrale européenne, qui est une bonne politique, car elle maintient les taux d’intérêt à des niveaux peu élevés et contribue à la baisse de l’euro, qui est beaucoup moins cher qu’auparavant. Il faut aussi se préoccuper de la coordination entre nos politiques budgétaires.

Il est donc légitime, et cela n’est pas de l’ordre du diktat, que nous discutions ensemble, entre pays européens, ainsi qu’avec la Commission.

Debut de section - PermalienPhoto de Cécile Cukierman

On nous impose bien des objectifs à atteindre !

Debut de section - Permalien
Michel Sapin, ministre

M. Michel Sapin, ministre. Je le répète devant l’ensemble des sénateurs et des sénatrices après l’avoir dit devant les députés : la souveraineté nationale s’exerce par le vote du budget et ce vote a lieu au Parlement, à l’Assemblée nationale et ici, au Sénat. Nulle part ailleurs !

Mme Cécile Cukierman s’exclame.

Debut de section - Permalien
Michel Sapin, ministre

On a pu entendre que la Commission européenne avait retoqué ou allait rejeter le budget de la France. C’est entièrement faux : c’est, ici, au Parlement, que cela se décide, et nous aurons d’ailleurs à débattre ici du budget de la France dans peu de temps, y compris les aspects qui correspondent au dialogue que nous avons eu avec la Commission.

Un dialogue confiant avec la Commission européenne d’un côté, un dialogue avec vous, Parlement, incarnation de la souveraineté nationale, de l’autre : c’est ainsi que nous concilions notre souveraineté nationale avec les exigences de l’Europe, cette Europe que nous construisons ensemble.

Quelle est notre préoccupation à tous ? Il faut plus de croissance, je viens d’en parler en réponse à M. Mézard, et je suis persuadé, monsieur le sénateur, que vous êtes favorable au projet européen d’investissement.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

C’est une autre politique qu’il nous faut, plutôt que davantage d’investissements !

Debut de section - Permalien
Michel Sapin, ministre

M. Michel Sapin, ministre. Retrouvons les chemins de cette croissance qui nous fait défaut, ayons une politique budgétaire adaptée à la situation – c’est ce que nous proposons à l’ensemble de nos partenaires européens – et nous pourrons relever ensemble le défi de la croissance et de l’emploi.

Applaudissementssur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Éric Jeansannetas, pour le groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Eric Jeansannetas

Ma question s'adresse à M. le ministre de l'intérieur.

« Un jeune de vingt et un ans est mort. Quelles que soient les circonstances, quand un jeune disparaît, meurt, la première des attitudes, la première des réactions, c’est celle de la compassion ».

« Ce qui s’impose en premier lieu à tous, c’est la compassion pour la douleur de sa famille ; c’est la solidarité. Nous témoignons tous de notre solidarité à cette famille ».

Ces mots sont ceux du Président de la République et du Premier ministre, et je les fais miens aujourd’hui.

La mort d’un jeune homme, quelles qu’en soient les causes, est bien sûr une tragédie, et je veux exprimer ici, à mon tour, toute ma compassion pour l’incommensurable chagrin de sa famille, de ses amis, en mon nom et au nom de la représentation nationale dans son ensemble.

Ce drame de Sivens nous interpelle tous. Il nous interpelle sur la difficulté croissante du dialogue démocratique dans notre société. Les collectivités territoriales portent des projets structurants, des projets d’équipements ; elles prévoient l’avenir de leur territoire, et c’est heureux.

Mais, nous le constatons, les infrastructures nouvelles font de plus en plus souvent l’objet d’une contestation forte, organisée, médiatisée, parfois violente, souvent portée par des associations militantes de site en site, extérieures au territoire concerné.

Le droit de ne pas être d’accord avec les pouvoirs locaux ? Oui, on peut tout à fait l’entendre. Le droit de manifester ? Oui, bien sûr, c’est une liberté fondamentale. Le droit de s’opposer par tout moyen légal ? Oui, c’est l’essence même de notre République. Mais la violence, l’utilisation de la force, l’organisation, des semaines durant, d’actions qui s’apparentent à de la guérilla contre les forces de police ou de gendarmerie ne sont jamais acceptables.

Debut de section - PermalienPhoto de Eric Jeansannetas

Ces situations tendues sont autant de risques accrus pour les forces de l’ordre et pour les manifestants eux-mêmes. Tout élu de la République a le devoir de condamner ces méthodes pour mieux défendre la liberté de manifester.

Quels que soient ses engagements et ses convictions, personne ne devrait mourir pour un projet de barrage. C’est ce qu’a exprimé notre collègue Thierry Carcenac, président du conseil général du Tarn, qui est dévasté par cette tragédie et à qui nous apportons aussi tout notre soutien.

Monsieur le ministre, après ce drame, vous l’avez évoqué vous-même, il y a un devoir et une exigence de vérité. Vous avez immédiatement suspendu, dès la mise en cause des jets de grenade par la gendarmerie, l’emploi des grenades offensives. L’enquête en cours doit permettre de faire toute la lumière sur les responsabilités, personnelles ou collectives.

Monsieur le ministre, pouvez-vous nous apporter des éclairages sur cette situation ?

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve

Monsieur le sénateur, vous avez dans votre propos évoqué la dimension dramatique des événements qui se sont produits à Sivens, dans la nuit de samedi à dimanche.

Je veux avec vous, après Ségolène Royal, avoir une pensée pour la famille et les amis de Rémi Fraisse, pensée que j’ai aussi exprimée à l’Assemblée nationale mardi et à travers un communiqué dans la journée de lundi.

En effet, dans ces circonstances, alors que la tristesse est insondable, incommensurable, les manifestations de solidarité et de sympathie comptent.

Ensuite, il y a un devoir moral pour l’État, celui de la vérité. Nous avons indiqué, dès les premières heures après le drame, que nous souhaitions bien entendu que cette vérité advienne, et qu’elle advienne vite. C’est la raison pour laquelle l’ensemble des administrations de l’État, notamment la mienne, se sont mises à la disposition de la justice pour que la vérité soit possible et que tous les éléments lui soient communiqués.

Le juge procède à ses investigations, il enquête, et les premiers éléments qu’il a communiqués témoignent de la détermination de tous à savoir.

Je veux maintenant apporter des éléments de réponse aux interrogations légitimes qui ont été formulées, et aux critiques aussi.

La présence des forces de l’ordre était-elle nécessaire à Sivens, alors que le chantier avait été débarrassé vendredi ?

Cette présence des forces de l’ordre se justifiait pour deux raisons.

Premièrement, il y avait des risques de contre-manifestations. Et si ces contre-manifestations s’étaient produites et avaient donné lieu à des affrontements causant des morts en nombre plus important encore, on aurait demandé où étaient les forces de l’ordre.

Deuxièmement, des violences ont aussi été à déplorer : je rappelle que, depuis le 1er septembre dernier, 56 gendarmes ont été blessés…

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre

… et 81 procédures judiciaires ont été ouvertes.

Je veux exprimer à ces gendarmes, qui font leur travail avec des valeurs et un sens profond de la République, mon soutien, ma reconnaissance et ma gratitude, parce que dans la République, cela doit aussi être dit.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, de l'UMP et de l'UDI-UC.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre

On m’a reproché, ce matin encore, de manquer de cœur et de ne pas faire preuve de compassion. Devant la représentation nationale, je veux m’exprimer en toute sincérité sur ce sujet.

Au cours des dernières années, j’ai eu à connaître des drames dans ma propre circonscription. Je pense notamment à l’attentat de Karachi, qui a causé 14 morts, et sur lequel j’ai conduit des investigations loin des caméras – car on peut faire preuve de compassion sans être devant les caméras ! Lorsqu’un événement de ce type se produit et que vous êtes ministre de l’intérieur, vous interrogez votre conscience au plus profond, vous essayez de trouver les mots justes et de les adresser, avec toute la pudeur qui s’impose, à ceux auxquels ils doivent être adressés.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre

Voilà ce que j’ai essayé de faire, voilà comment j’essaie de me comporter dans cette épreuve, une épreuve pour la famille de Rémi Fraisse, bien entendu, mais aussi pour moi-même.

Je regrette que certains profitent de cet événement, non pas pour que la vérité l’emporte, mais pour faire de la politique en abaissant tout !

Applaudissements prolongés sur les travées du groupe socialiste et du RDSE, ainsi que sur les travées de l'UDI-UC et de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à M. Roger Karoutchi, pour le groupe UMP.

Applaudissements sur certaines travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, permettez-moi d’abord de saluer la dignité de la réponse de M. le ministre de l’intérieur.

Ma question, qui s’adresse à M. le ministre des finances et des comptes publics, porte sur le même sujet que celle de notre collègue Thierry Foucaud, mais je ne m’exprimerai pas exactement dans les mêmes termes…

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Monsieur le ministre, vous avez été franchement maître d’œuvre, après une lettre prétendument banale de la Commission européenne, qui soulignait le dérapage du budget de la France pour 2015.

Vous avez aussitôt trouvé 3, 6 milliards d’euros, non pas d’économies – n’exagérons rien ! –, mais au titre du produit de la lutte contre la fraude fiscale et de la baisse des taux d’intérêt.

Vous mettiez à l’instant en avant la souveraineté du Parlement, mais vous avez trouvé ces 3, 6 milliards d’euros après le vote du budget par l’Assemblée nationale, à laquelle vous aviez caché qu’il existait encore des marges pour réduire le déficit de 2015 !

Sourires et applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Je ne connais pas le commissaire européen Jyrki Katainen – il commence toutefois à être connu –, mais cet homme a assurément beaucoup de mérite. Il a déclaré hier à la presse que la France et l’Italie ne devaient pas se réjouir trop vite, car les décisions définitives de la Commission européenne ne seraient prises qu’à la fin du mois de novembre, lorsque le bilan réel des économies pour 2013, 2014 et 2015 aurait été effectué et que l’ensemble des prévisions et des programmes de ces pays auraient été étudiés.

Autrement dit, validation pour le moment, mais décision définitive dans un mois, après étude complète !

Or, monsieur le ministre, en examinant, hier, le projet de loi de programmation des finances publiques, la commission des finances du Sénat a constaté, premièrement, que vous envisagiez un déficit inférieur à 3 % mais après 2017 seulement – après moi, le déluge ! – et, deuxièmement, que vos prévisions de croissance n’étaient pas celles des agences et organismes spécialisés.

Par conséquent, la Commission européenne risque fort de nous adresser une critique simple, celle d’un excès d’optimisme, qui conduit à prévoir trop de rentrées fiscales, pas assez de réduction du déficit et pas assez d’économies.

Ne craignez-vous pas, monsieur le ministre – c’est toute la question de la sincérité et de la transparence budgétaires – que l’affichage, ici ou à l’Assemblée nationale, qui ne correspondrait pas à ce que vous dites à Bruxelles, finisse par valoir à la France des sanctions au niveau européen ?

Ne payons-nous pas finalement le débat interne à la gauche et au PS, entre ceux qui ne veulent pas réellement la réduction de la dépense publique, parce qu’ils considèrent qu’elle crée de la croissance, et ceux qui sont plus orthodoxes, et qui souhaitent la réduction des déficits ?

Applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. le ministre des finances et des comptes publics.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Savin

M. Michel Sapin, ministre des finances et des comptes publics. Je vous remercie de votre question, monsieur Karoutchi. Elle exprime de façon parfaitement légitime les préoccupations de la représentation nationale, plus particulièrement de la majorité du Sénat à laquelle vous appartenez, devant la situation de la France et son déficit, dont je vous rappelle qu’il était aux alentours de 7 % en 2009, et qu’il se situe aujourd’hui aux alentours de 4, 4 %. S’il fallait parler de déluge, j’ai le sentiment que, le déluge, c’était avant moi, et non après moi…

Sourires et applaudissements sur les travées socialistes.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Savin

Pour le reste, et sur le fond des choses, M. Katainen, dont vous aurez aujourd’hui fait connaître le nom à l’ensemble des Français, fait parfaitement le travail dont les pays membres de l’Union européenne et de la zone euro l’ont chargé, à savoir le travail de dialogue, de discussions et d’échanges entre les uns et les autres que je décrivais à l’instant. En effet, il est normal, puisque nous avons la même monnaie, que nous nous préoccupions aussi de coordonner nos politiques budgétaires. C’est ce que fait M. Katainen, et il le fait en respectant parfaitement les règles – je ne reviendrai pas sur le calendrier, vous l’avez décrit, sinon pour ajouter qu’il se déroule parfaitement normalement.

Je veux en revanche rappeler ici la préoccupation principale du Gouvernement, dont nous aurons à débattre lors de l’examen du budget. Avant toute chose, nous voulons éviter que l’Europe et la France ne connaissent une longue période de trop faible croissance et de trop faible inflation.

Les Français pourraient croire qu’une trop faible inflation est une bonne nouvelle, parce qu’ils comprennent que les prix ne vont pas augmenter. Il s’agirait en réalité d’une très mauvaise nouvelle du point de vue économique.

En effet, si les acteurs économiques anticipent uniquement des baisses de prix, à un moment donné la machine s’arrête, et on replonge dans la récession, ce que nous ne voulons pas.

Il me semble dès lors possible d’exprimer très simplement la bonne politique à mener, au niveau européen comme au niveau national : oui, la France doit continuer à réduire ses déficits – c’est bien ce que nous faisons –, mais elle doit le faire à un rythme adapté à la situation de faible croissance d’aujourd’hui.

Debut de section - Permalien
Michel Sapin, ministre

Si nous voulons à toute force réduire nos déficits pour telle ou telle raison impérative, alors nous retomberons dans la récession.

À l’inverse, si nous le faisons de manière coordonnée et raisonnable, nous répondrons à l’impératif de rééquilibrage de nos finances publiques tout en soutenant la croissance, qui sera plus forte.

C’est exactement le chemin que nous vous proposons, avec, d’un côté, 40 milliards d’euros pour soutenir les entreprises et l’emploi et, de l’autre, 21 milliards d’euros d’économies budgétaires, qui sont nécessaires à la France, et qui sont sans précédent.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. – Mme Hermeline Malherbe applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme Hélène Conway-Mouret, pour le groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Conway-Mouret

Ma question s'adresse à Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.

Madame la ministre, le virus Ebola se glisse aujourd’hui trop souvent dans les conversations courantes. S’il a même été mis en chanson par des artistes africains, dans l’espoir de sensibiliser les populations à risque, son nom suscite désormais la plus grande inquiétude.

Identifié pour la première fois en 1976, alors qu’il venait de tuer près de 280 personnes dans des villages isolés d’Afrique centrale, on impute à ce virus en octobre 2014 la mort de plus de 4 900 personnes, tandis que l’épidémie touche autant les grands centres urbains que les zones rurales et se propage d’un pays à l’autre, partant de Guinée pour toucher la Sierra Leone, le Liberia, le Nigeria, le Mali, le Sénégal, mais aussi les États-Unis, l’Espagne ou la France.

Nous savons que le virus se transmet à la suite de contacts directs avec des personnes infectées ou des surfaces et matériaux contaminés par les fluides corporels de ces personnes. Nous savons aussi que nous vivons désormais dans un village global, où les échanges sont incessants, dans ce monde fini si cher à Paul Valéry.

Mais justement, parce que cette épidémie a pris une ampleur planétaire, la réponse ne peut être qu’universelle. Aux décès déjà constatés s’ajoutent en effet 10 000 personnes infectées, et les spécialistes prévoient 1, 5 million de malades en 2015 si l’épidémie n’est pas stoppée dans des pays aux systèmes de santé fragiles, qui manquent aussi cruellement de ressources humaines et d’infrastructures.

Les réponses sont pour l’heure multiples, sans coordination évidente au niveau international. Certaines sont contestées, comme la quarantaine imposée par les États-Unis aux soignants revenant des pays touchés, ceux-là mêmes qui ont le plus besoin de personnel médical. Un tel réflexe ne peut que décourager les volontaires de santé. Dans d’autres pays, comme l’Espagne, la gestion gouvernementale de la situation a transformé l’urgence sanitaire en crise politique.

À l’approche des fêtes de fin d’année et de l’accroissement attendu des déplacements à cette occasion, compte tenu par ailleurs de la multitude de points d’entrée en France, il semble important de faire preuve de pédagogie, de rassurer tout en informant, afin d’éviter une psychose collective.

À cette fin, et compte tenu des erreurs qui ont pu être commises dans le passé, notamment dans la gestion de la crise liée à la diffusion du virus H5N1, je souhaiterais connaître les mesures que le Gouvernement a prises, au plan national et régional – nos territoires abritent nombre de ports et aéroports – et international – je pense ici à la protection de nos populations expatriées et au rôle que nos postes consulaires peuvent jouer.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, Mme Conway-Mouret a raison de souligner que l’Afrique de l’Ouest est confrontée à une épidémie massive, laquelle a d’ores et déjà touché près de 15 000 personnes, dont plus de 5 000 sont mortes. Si nous n’arrivons pas à enrayer l’épidémie, des dizaines de milliers de nouveaux cas seront à déplorer.

Face à ce drame, nous avons une responsabilité collective internationale. Dans ce cadre, la France joue tout son rôle et assume toutes ses responsabilités pour permettre de soigner sur place ceux qui ont besoin d’être soignés.

Nous envoyons des professionnels de santé et des pompiers au titre de la protection civile. Samedi prochain partira une équipe de douze réservistes sanitaires qui vont aller installer le centre de traitement que François Hollande s’est engagé, au nom de la France, à mettre en place au centre de la Guinée forestière, à Macenta.

D’autres installations vont suivre : des centres de traitement, deux centres de formation pour les professionnels de santé sur place, car nous devons former les intervenants locaux, un centre dédié à l’accueil des personnels de santé locaux qui pourraient être contaminés.

Évidemment, cette maladie inquiète aujourd’hui bien au-delà de l’Afrique de l’Ouest, même si, je veux le dire avec force et fermeté, notre vigilance écarte tout risque d’épidémie dans notre pays.

Mesdames, messieurs les sénateurs, la France est prête à prendre en charge des malades touchés par le virus Ebola, qu’il s’agisse notamment des professionnels de santé, rapatriés depuis l’Afrique de l’Ouest, comme nous l’avons fait avec la jeune infirmière de Médecins sans frontières, ou d’autres cas.

Cependant, nous ne sommes pas, dans notre pays, confrontés à un risque d’épidémie.

Pour informer l’opinion publique, j’ai mis en place un numéro vert gratuit et un site internet dédié à Ebola a été également ouvert. Par ailleurs, des contrôles de santé sont prévus au départ et à l’arrivée des avions à Roissy, ainsi que dans les ports.

Madame la sénatrice, nous sommes mobilisés, nous sommes vigilants, et nous devons rassurer.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste . – Mme Hermeline Malherbe applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Jérôme Durain, pour le groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Durain

Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, ma question s'adresse à M. le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.

Ces dernières semaines, des revendications un peu étonnantes, voire choquantes, se sont multipliées. Le patronat de notre pays s’estimerait maltraité. Alors que l’action gouvernementale a été équilibrée ces deux dernières années, les organisations patronales crient au scandale et demandent à l’exécutif de revenir sur des dispositions pourtant équilibrées : je pense ici au dispositif pénibilité ou à la reprise des entreprises par les salariés. Je me félicite d’ailleurs de la fermeté du Gouvernement en la matière : un recul aurait été très mal perçu par nos concitoyens.

Mais soyons honnêtes : tous les chefs d’entreprise de ce pays ne se reconnaissent pas dans les incartades de M. Gattaz. Je pense notamment à M. Xavier Niel, dirigeant de Free, qui a rappelé que la France était « un pays fantastique pour créer sa boîte ».

Puisque les patrons reconnaissent eux-mêmes que tout ne va pas si mal pour eux, je vous propose de nous intéresser davantage aux salariés et aux travailleurs de ce pays.

Quand les sempiternelles complaintes du MEDEF font souvent la une des journaux, les médias ont parfois du mal à mettre en avant les attentes des travailleurs, salariés ou demandeurs d’emploi, et de nos concitoyens qui traversent des difficultés.

Murmures continus sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Durain

Monsieur le ministre, la lutte contre le chômage constitue une volonté partagée sur l’ensemble des travées du Sénat et une priorité du Gouvernement, mais cette priorité n’est pas la seule mission de votre ministère : votre rôle est aussi d’aider à la conquête de nouveaux droits sociaux.

M. Roger Karoutchi s’esclaffe.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Durain

Depuis le 1er octobre, de nouveaux droits sont disponibles pour les demandeurs d’emploi : il s’agit du dispositif dit « des droits rechargeables », issu de négociations entre les partenaires sociaux.

Exclamations sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Durain

Monsieur le ministre, pourriez-vous nous détailler les modalités de ces droits rechargeables, qui changent en profondeur le dispositif d’indemnisation et de retour à l’emploi ?

Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste . – Exclamations ironiques sur les travées de l’UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Lenoir

M. Jean-Claude Lenoir. M. le ministre est surpris ; il ne sait pas quoi répondre !...

Rires sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. le ministre du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social. .

Debut de section - PermalienPhoto de François Rebsamen

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, M. Durain a raison : par-delà les postures, il faut s’intéresser aux nouveaux droits qui ont été donnés dans le cadre de l’assurance chômage.

Monsieur le sénateur, vous avez cité un dispositif tout à fait nouveau et intéressant, celui des droits rechargeables, entré en application le 1er octobre de cette année.

En France, on ne parle pas assez des avancées, de ce qui fonctionne bien, et je vous remercie donc de votre question.

Exclamations amusées sur les travées de l'UMP.

Debut de section - Permalien
François Rebsamen, ministre

Je vais prendre un exemple : avant ces droits rechargeables, un salarié qui enchaînait plusieurs contrats de courte durée ne se voyait accorder aucun droit nouveau, alors même qu’il avait cotisé auprès de l’assurance chômage.

Depuis le 1er octobre, un salarié recharge ses droits dès son premier mois de travail. Ainsi, après avoir bénéficié de deux CDD – un de deux mois et un de trois mois –, le salarié aura augmenté de cinq mois la période pendant laquelle il pourra être indemnisé au titre du chômage.

Ce dispositif est profitable à l’emploi pour trois raisons.

D’abord, les droits rechargeables permettent de mieux protéger les carrières courtes, hachées, celles de la précarité des contrats courts.

Ensuite, avec ce dispositif, nous sortons d’une situation assez absurde dans laquelle la reprise d’une activité sur une courte durée pouvait ne pas être prise en compte pour le calcul des droits.

Enfin, l’assurance chômage ne met plus le demandeur d’emploi devant le choix cruel de savoir s’il est préférable ou non pour lui de reprendre un travail, même pour une courte durée.

C’est donc une incitation forte à revenir dans l’emploi.

Ce nouveau droit est l’exemple de ce qui se fait de mieux dans le dialogue social. Il s’agit d’une réforme lancée par la CFDT, FO et la CFTC, qui ont su créer les conditions d’un accord majoritaire avec le patronat, et elle est aujourd’hui largement acceptée.

Aussi, je vous remercie de me permettre de la faire connaître et de la diffuser. Elle est opérante, efficace et juste. C’est la marque d’une avancée intelligente réalisée par les partenaires sociaux. C’est aussi la marque de fabrique du quinquennat de François Hollande !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste . – Rires sur les travées du groupe UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme Élisabeth Lamure, pour le groupe UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Élisabeth Lamure

Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, ma question s'adresse à M. le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.

Je veux rendre hommage à votre franchise, monsieur le ministre, lorsque vous avouez votre souffrance, vous qui devez annoncer chaque mois une nouvelle augmentation du chômage, comme lorsque vous reconnaissez l’échec du Gouvernement, ce qu’a fait hier le Premier ministre lui-même.

Pourtant, vous attendiez, nous attendions tous l’inversion de la courbe du chômage. Au lieu de cela, c’est une situation dramatique à long terme que vous pressentez. On comprend pourquoi 88 % des Français ne font plus confiance au président Hollande en matière de lutte contre le chômage...

Vous tentez une conversion tardive à l’économie, avec des déclarations d’amour aux entreprises

M. M. Alain Gournac s’esclaffe.

Debut de section - PermalienPhoto de Élisabeth Lamure

Comment croire le Gouvernement quand, encore récemment, il provoque incompréhension, confusion et, surtout, exaspération des entrepreneurs à la publication des décrets du futur compte pénibilité ?

Avec l’obligation d’informer les salariés en cas de cession de leur entreprise, pensez-vous possible de les rassurer ?

Et il semblerait que votre majorité ait maintenant la volonté de taxer encore les dividendes !

Comment voulez-vous que la confiance revienne ?

Debut de section - PermalienPhoto de Élisabeth Lamure

En outre, quand vous persistez à baisser les dotations des collectivités, vous faites un très mauvais calcul : vous privez les entreprises des investissements publics que les communes ne pourront pas réaliser, ce qui sème la désolation, notamment dans les entreprises du BTP, qui sont au bord du sinistre.

Ici, au Sénat, nous nous réjouissons de l’initiative prise par notre président, Gérard Larcher, en vue de créer prochainement une délégation aux entreprises, car ces dernières, comme les collectivités, doivent être au cœur de nos préoccupations.

Monsieur le ministre, quand et comment allez-vous enfin redonner confiance à ceux qui entreprennent, qui s’exposent personnellement chaque jour et qui prennent des risques pour créer de la richesse, de l’emploi et pour faire fonctionner ce pays ?

Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP, ainsi que sur certaines travées de l’UDI-UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. le ministre du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.

Debut de section - PermalienPhoto de François Rebsamen

Madame Lamure, effectivement, oui, j’ai parlé de souffrance. Beaucoup de mes prédécesseurs l’ont sans doute ressentie, mais ils ne l’ont pas exprimée. Je voulais le préciser.

J’ai également parlé d’échec, et je confirme qu’il s’agit bien d’un échec collectif. Savez-vous que, depuis quarante ans, alors que le PIB de notre pays a été multiplié par deux, c’est-à-dire que la richesse de ce pays a doublé, dans le même temps, le taux de chômage a été multiplié par trois, et le nombre de chômeurs, par quatre ?

Mesdames, messieurs les sénateurs de l’UMP et de l’UDI-UC, de vous à moi, sereinement, vous n’avez pas vraiment de leçons à nous donner en la matière.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de François Rebsamen

En effet, si le taux de chômage est aujourd’hui de 9, 7 % en France métropolitaine, savez-vous quand il a atteint son pic ? C’était en 1996, sous le gouvernement de M. Juppé, avec un taux de 10, 7 %. Nous pouvons tous ensemble faire ce constat.

Debut de section - Permalien
George Pau-Langevin, ministre des outre-mer

À partir de 1997, avec le gouvernement de Lionel Jospin !

Debut de section - Permalien
François Rebsamen, ministre

C’est en effet M. Jospin qui a ensuite fait baisser le taux de chômage.

Je voudrais aujourd’hui vous dire que nous avons compris et analysé les retards de compétitivité de nos entreprises. Il est vrai que, depuis dix ans, pas un emploi n’a été créé dans le secteur industriel ; depuis 2008, il se détruit tous les jours des emplois dans le secteur de la construction. Vous le voyez, il y a une vraie continuité.

Nous nous sommes donc efforcés de redistribuer pour redonner des marges aux entreprises : 2 points de PIB, soit 40 milliards d’euros ! Un tel effort n’a jamais été fait ! Ce pacte de responsabilité et de solidarité va porter ses fruits.

Ah bon ? sur les travées de l'UMP.

Debut de section - Permalien
François Rebsamen, ministre

D’ores et déjà, des branches, comme la chimie, la métallurgie, la banque, se sont engagées.

Debut de section - Permalien
François Rebsamen, ministre

Demain, c’est la branche des assurances qui suivra.

C’est de l’emploi, de l’investissement, de l’alternance que nous proposons. Tout cela va dans le bon sens, celui de l’emploi.

Enfin, s’agissant du compte pénibilité, madame la sénatrice, je ne voudrais pas vous accabler, mais je ne peux pas ne pas vous rappeler que ce dispositif avait été mis en place par l’un de mes prédécesseurs, en 2010. Il était d’une extrême complexité et il m’est revenu de le simplifier. C’est ce que nous faisons avec les partenaires sociaux, pour le bien de l’économie française.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste – Exclamations sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Nous en avons terminé avec les questions d'actualité au Gouvernement.

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux quelques instants.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à seize heures, est reprise à seize heures quinze.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. Mes chers collègues, j’ai le très grand regret de vous faire part du décès de notre ancien collègue Xavier de Villepin, qui fut sénateur représentant les Français établis hors de France de 1986 à 2004.

M. le ministre de l’intérieur, Mmes et MM. les sénateurs se lèvent.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Comme vous le savez, le président Xavier de Villepin a consacré toute sa vie au rayonnement international de la France, d’abord dans sa carrière professionnelle, durant laquelle il exerça d’importantes responsabilités industrielles, puis dans son parcours politique et parlementaire, au service de la nation.

Après avoir défendu la francophonie et la place du français dans le monde au sein de l’Assemblée internationale des parlementaires de langue française, il fut un président très respecté, et très apprécié, de notre commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Chacun de ceux qui ont siégé avec lui – j’en fus, comme d’autres ici – se souvient de ses analyses géopolitiques lumineuses et de ses initiatives, qui transcendaient les clivages politiques.

Président du groupe de l’Union centriste du Sénat, Xavier de Villepin contribua au rassemblement des diverses sensibilités politiques de la famille à laquelle il appartenait, et contribua aussi à rassembler les familles libérale et gaulliste, au sein de notre assemblée.

Comme sénateur, il était reconnu par ses collègues pour sa sagesse, son aménité, son esprit brillant et sa grande hauteur de vues.

À cet instant, j’ai une pensée pour sa famille, en particulier pour ses trois enfants – je me suis entretenu avec son fils Dominique il y a peu –, et je sais que le Sénat tout entier s’y associe, notamment ceux d’entre nous qui ont connu et apprécié notre ancien collègue.

Mme Isabelle Debré remplace M. Gérard Larcher au fauteuil de la présidence.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre le rapport relatif aux substituts du bisphénol A, en application de l’article 1er de la loi n° 2010-729 du 30 juin 2010 tendant à suspendre la commercialisation des biberons à base de bisphénol A.

Acte est donné du dépôt de ce rapport.

Il a été transmis à la commission des affaires sociales.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Nous reprenons la discussion en deuxième lecture du projet de loi, modifié par l’Assemblée nationale, relatif à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral.

Dans la discussion des articles du chapitre Ier, nous poursuivons l’examen de l’article 1er.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Je suis saisie de cinq amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

Les deux premiers amendements sont identiques.

L’amendement n° 29 est présenté par MM. Labazée et Fortassin.

L’amendement n° 136 rectifié ter est présenté par M. Lasserre, Mme Loisier et MM. Tandonnet, Médevielle, Roche et Vanlerenberghe.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

I. – Alinéa 6

Rédiger ainsi cet alinéa :

« – Aquitaine et Midi-Pyrénées ;

II. – En conséquence, alinéa 14

Rédiger ainsi cet alinéa :

« – Limousin et Poitou-Charentes ;

L’amendement n° 29 n’est pas soutenu.

La parole est à M. Henri Tandonnet, pour présenter l’amendement n° 136 rectifié ter.

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Tandonnet

Le même amendement a été déposé par des sénateurs du Grand Sud-Ouest, notamment, et siégeant sur les travées du groupe socialiste, du RDSE et de l’UDI-UC.

Puisque je l’ai fait lors de la discussion générale, je n’insisterai pas davantage sur l’incohérence de la démarche qui consiste à découper les régions sans connaître la nature des compétences et des moyens qui leur seront attribués.

Le cas des régions Aquitaine et Midi-Pyrénées est une illustration de cette incohérence et des difficultés que nous rencontrons depuis hier au sujet de ce découpage.

L’Aquitaine doit-elle être évaluée comme une région appuyée sur la seule métropole de Bordeaux, c’est-à-dire une Aquitaine de l’Atlantique, ou faut-il l’envisager réunie à la région Midi-Pyrénées dans une grande région du Sud-Ouest, adossée aux Pyrénées et à l’Espagne ?

Cette deuxième solution est celle que préconisent les auteurs de cet amendement : ils souhaitent regrouper les régions Aquitaine et Midi-Pyrénées et laisser les régions Limousin et Poitou-Charentes vivre de leur côté.

Cette solution privilégie la cohérence d’un bassin de vie qui a déjà développé des partenariats importants sur deux pôles essentiels - un pôle aéronautique reconnu, dans la vallée de la Garonne, de Toulouse à Bordeaux, et un pôle agroalimentaire non moins reconnu, le Sud-Ouest étant même en pointe pour l’exportation de ses produits – sans oublier un potentiel touristique important.

Ce bassin de vie irait au-delà des métropoles de Toulouse et de Bordeaux. Il est encore impossible de répondre à la question du partage des compétences entre les métropoles et les régions. On sent bien, depuis l’adoption de la loi de janvier 2014, que les métropoles joueront un rôle important sur le terrain économique et vont se trouver en concurrence avec les régions. C’est pourquoi nous défendons l’idée de définir des régions plus étendues, permettant le développement de l’activité économique et de grandes infrastructures.

Enfin, les auteurs de cet amendement souhaitent aussi aborder la question des rapports avec l’Espagne, puisque ce rapprochement pourrait les améliorer.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

La grande Aquitaine, c’est le Poitou-Charentes, cher collègue !

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Tandonnet

M. Henri Tandonnet. Vous parlez du domaine d’Aliénor d’Aquitaine !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

M. Jean-Pierre Raffarin. Oui, c’est la grande Aquitaine !

Nouveaux sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Les trois amendements suivants sont identiques.

L’amendement n° 2 rectifié est présenté par MM. Courteau et Duran et Mme Jourda.

L’amendement n° 48 est présenté par MM. Grand et Laufoaulu.

L’amendement n° 144 est présenté par le Gouvernement.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Alinéas 13 et 14

Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :

« – Languedoc-Roussillon et Midi-Pyrénées ;

La parole est à M. Roland Courteau, pour défendre l’amendement n° 2 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Courteau

Je serai relativement bref, puisque je me suis déjà exprimé sur ce sujet lors de la discussion générale.

Nous considérons qu’il faut doter les régions françaises d’une taille critique qui leur permette non seulement d’exercer leurs compétences stratégiques, mais aussi de faire face à la concurrence des autres régions d’Europe.

Les auteurs de cet amendement proposent de rétablir la fusion envisagée par le texte initial entre les régions Languedoc-Roussillon et Midi-Pyrénées. Il s’agit pour nous d’additionner les forces de ces deux régions pour en faire un nouveau territoire à l’échelle des grandes régions européennes, avec un PIB de plus de 144 millions d’euros, à comparer au PIB de notre grande voisine, la Catalogne, qui avoisine les 200 milliards d’euros.

Une réelle complémentarité existe entre ces deux régions, qui ont déjà établi des coopérations : l’Eurorégion Pyrénées-Méditerranée, associant Catalogne, Languedoc-Roussillon, Midi-Pyrénées et Baléares ; le pôle de compétitivité EAU, qui réunit Midi-Pyrénées et Languedoc-Roussillon, ou encore le pôle DERBI, consacré aux énergies renouvelables dans le bâtiment et l’industrie.

Nous sommes convaincus que nos atouts respectifs ou communs nous donneront une réelle force de frappe. Je citerai notamment à ce titre la viticulture, l’agriculture, bien sûr, mais aussi le tourisme, secteur important, avec l’ouverture sur la Méditerranée, le canal du Midi, les Pyrénées, ou encore la puissante aéronautique, ainsi qu’un fort potentiel de développement dans la fonction logistique et les transports.

Nous avons de surcroît une histoire commune, et la même culture. La fusion sera donc un véritable levier pour le développement de nos langues régionales.

Bref, la fusion de ces deux régions nous permettra de constituer un véritable carrefour au cœur de l’arc méditerranéen, à la confluence des grands courants d’échanges.

Aidez-nous, mes chers collègues, à ne pas laisser passer cette chance historique en adoptant l’amendement qu’Alain Duran, Gisèle Jourda et moi-même vous présentons. Il est en effet temps de transformer, pour plusieurs décennies, l’architecture territoriale de la République. Il est temps d’additionner les forces du Languedoc-Roussillon et celles de Midi-Pyrénées, afin de préparer l’avenir à travers cette communauté de destin du grand Midi de la France.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

La parole est à M. Jean-Pierre Grand, pour présenter l’amendement n° 48.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Grand

Cet amendement tend à fusionner les régions Languedoc-Roussillon et Midi-Pyrénées. En effet, rien ne justifie que Languedoc-Roussillon reste isolé, comme la Corse, au moment où les autres régions fusionnent.

Nos deux régions sont complémentaires et leur fusion tombe sous le sens.

Permettez-moi cependant de redire, monsieur le secrétaire d’État, que le regroupement de régions ne suffira pas pour atteindre les objectifs fixés, en particulier dans le domaine économique.

Nous allons nous trouver en concurrence directe avec d’autres régions d’Europe – pour nous, en Languedoc-Roussillon, il s’agit de la Catalogne – qui ont un atout supplémentaire du fait d’une forte déconcentration des pouvoirs de l’État. C’est la raison pour laquelle nous ne pourrons pas faire l’économie d’une réflexion sur ce point, mais ce débat est encore à venir.

J’insiste, parce qu’il faut vous préparer à ce débat sur la déconcentration, monsieur le secrétaire d’État. Aujourd’hui, nous fabriquons de magnifiques 38 tonnes, mais ils auront des moteurs de 2 CV ! Nous devons donc rester extrêmement attentifs.

Pour l’instant, je souhaite que les régions Languedoc-Roussillon et Midi-Pyrénées n’en fassent qu’une et j’en appelle à la sagesse de notre assemblée pour que cet amendement soit adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

La parole est à M. le secrétaire d’État, pour présenter l’amendement n° 144.

Debut de section - Permalien
André Vallini, secrétaire d’État auprès de la ministre de la décentralisation et de la fonction publique, chargé de la réforme territoriale

En ce qui concerne la fusion des régions Languedoc-Roussillon et Midi-Pyrénées, comme pour les autres fusions, j’ai déjà eu l’occasion de dire qu’il n’existe pas de carte idéale. Chacun a sa propre vision, selon son territoire et son département d’élection.

Ce débat est d’ailleurs passionnant, parce que les clivages, ici comme à l’Assemblée nationale, traversent les formations politiques : il arrive que des sénateurs du même parti et de la même région ne voient pas l’avenir de leur région de la même façon. C’est ce qui rend la tâche difficile, mais passionnante, aussi.

L’objectif du Gouvernement est de limiter le nombre de nouvelles régions et de leur donner une assise démographique et géographique suffisante pour qu’elles assument pleinement les missions qui leur seront confiées, notamment en matière de développement économique.

Il est aussi nécessaire, pour le Gouvernement, de rechercher des formes de péréquation au sein de ces nouvelles régions, afin de leur donner à toutes les mêmes capacités d’intervention en faveur de leurs populations et, notamment, de leur tissu économique, singulièrement les PME : aide à l’innovation et à l’internationalisation, aide aux entreprises, formation professionnelle, apprentissage, voire accompagnement vers l’emploi.

M. le Premier ministre a en effet ouvert cette porte avant-hier : on pourrait envisager de décentraliser le service public de l’emploi au moyen de conventions passées entre les régions et Pôle emploi.

La carte adoptée en première lecture par l’Assemblée nationale est, de ce point de vue, plus conforme aux objectifs du Gouvernement que je viens de rappeler, en permettant notamment la formation de douze régions, sans compter la Corse, contre quatorze régions dans le projet de la commission spéciale du Sénat.

C’est la raison pour laquelle l’amendement du Gouvernement tend à rétablir le regroupement de la région Languedoc-Roussillon et de la région Midi-Pyrénées que vient d’approuver Jean-Pierre Grand.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Courteau

M. Roland Courteau. Et aussi Roland Courteau !

Sourires.

Debut de section - Permalien
André Vallini, secrétaire d’État

En effet, vous l’aviez d’ailleurs fait dès avant-hier, monsieur le sénateur, lors du débat qui a suivi la déclaration de M. le Premier ministre.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Quel est l’avis de la commission spéciale sur les amendements n° 136 rectifié ter, 2 rectifié, 48 et 144 ?

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

Sans surprise, la commission spéciale a émis un avis défavorable sur l’amendement n° 136 rectifié ter, ainsi que sur les amendements identiques n° 2 rectifié, 48 et 144.

La commission spéciale, à l’occasion de cette deuxième lecture, a en effet confirmé sur ce point particulier ses choix de première lecture. Elle reste donc constante dans sa volonté de ne pas voir réunies les régions Languedoc-Roussillon et Midi-Pyrénées.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 136 rectifié ter ?

Debut de section - Permalien
André Vallini, secrétaire d'État

Avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

La parole est à M. Yannick Botrel, pour explication de vote sur l'amendement n° 136 rectifié ter.

Debut de section - PermalienPhoto de Yannick Botrel

Le groupe socialiste se rallie aux arguments du Gouvernement et à ceux de notre collègue Roland Courteau, qui a défendu avec une grande conviction le regroupement des régions Midi-Pyrénées et Languedoc-Roussillon, de même que M. Grand.

Ces arguments sont convaincants. Il s’agit en effet de deux régions complémentaires, proches tant de l’Espagne que de la Méditerranée. Bien sûr, dans ce cas aussi, il n’y a pas de vision unique des territoires, mais, en dépit des justifications avancées par la commission spéciale pour s’opposer au regroupement de ces deux régions, celui-ci répond à la volonté animant le Gouvernement. Le groupe socialiste votera l’amendement présenté par M. Courteau.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Je rappelle à nos collègues que nous en sommes à l’amendement n° 136 rectifié ter, qui vise à rapprocher les régions Midi-Pyrénées et Aquitaine ! Ce sont les amendements suivants qui portent sur le rapprochement entre les régions Midi-Pyrénées et Languedoc-Roussillon. Nous avons déjà perdu beaucoup de temps ; si chacun s’exprime par anticipation sur des amendements dont le vote interviendra ultérieurement, nous n’en finirons jamais !

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

J’ai bien précisé, monsieur le président de la commission spéciale, que je donnais la parole pour explication de vote sur l’amendement n° 136 rectifié ter.

Personne ne demande plus la parole ?...

Je mets aux voix l’amendement n° 136 rectifié ter.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

La parole est à M. Roland Courteau, pour explication de vote sur les amendements identiques n° 2 rectifié, 48 et 144.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Courteau

Je n’ai pas très bien compris l’argumentation de M. le rapporteur. Je pensais qu’il me donnerait davantage d’explications quant à la position de la commission spéciale. J’imagine que celle-ci a des arguments de fond pour s’opposer au rapprochement entre Languedoc-Roussillon et Midi-Pyrénées : j’aurais aimé les connaître.

Que pèseraient, isolément, ces régions face à leurs grandes voisines, telles la Catalogne ou la région Aquitaine-Poitou-Charentes-Limousin ? N’y a-t-il pas rupture d’équilibre ?

On nous dit que la taille des régions n’est pas le seul élément à prendre en compte, mais il ne faut pas ignorer toutes les évolutions économiques, sociales, démographiques qui ont eu lieu depuis la création des régions, ni la transformation profonde des compétences des conseils régionaux, qui sont devenus de véritables échelons stratégiques et de planification dans les domaines de l’économie, de l’aménagement du territoire et des transports.

En outre, n’est-il pas temps d’adapter la carte à l’Europe des régions ? N’est-il pas temps de permettre nos régions dotées de compétences stratégiques de rivaliser avec les autres régions d’Europe ? N’est-il pas temps de transformer pour plusieurs décennies l’architecture territoriale de la République ? Et qui peut contester que la fusion entre Languedoc-Roussillon et Midi-Pyrénées conduira à additionner les forces de ces deux régions et à donner au nouveau territoire ainsi constitué une réelle force de frappe ?

C’est une chance historique que cette union des régions du Midi de la France ! Nos atouts géostratégiques réunis sont indéniables. Il s’agit, ni plus ni moins, de constituer un véritable carrefour au cœur de l’arc méditerranéen !

Voilà nos arguments : ils me semblent peser davantage que ceux que j’ai pu entendre de la part de M. le rapporteur !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Monsieur Courteau, lors de la première lecture, la commission spéciale avait examiné ce problème avec attention, et estimé que la fusion ne s’imposait pas, étant donné l’existence de deux métropoles et la dimension suffisante des deux régions. Notre excellent collègue Christian Bourquin, président de la région Languedoc-Roussillon, avait d’ailleurs démontré que ce n’était pas forcément la meilleure des idées. Nous n’avons pas arrêté cette position au doigt mouillé ou pour faire plaisir à qui que ce soit ! Je le redis, il nous a semblé que réunir ces deux régions poserait plus de problèmes que de les laisser en l’état.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Cette position avait été adoptée à une très large majorité en première lecture par la commission spéciale, qui a confirmé son choix. Je ne vois pas quels arguments nouveaux justifiant la fusion ont été apportés, par vous-même ou d’autres de nos collègues.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

Je voudrais rappeler que, lors des débats en première lecture, le précédent rapporteur avait consulté les élus de ces régions et que, de cette consultation, n’avait pas émergé de choix tranché en faveur de l’une ou de l’autre des solutions.

C’est à la faveur du débat qui a eu lieu en commission spéciale, singulièrement marqué par l’intervention de notre regretté collègue Christian Bourquin, que celle-ci a pris la décision de maintenir l’« autonomie » – si je puis m’exprimer ainsi – des deux régions.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

La parole est à Mme Hermeline Malherbe, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Hermeline Malherbe

Je parle ici au nom de l’ensemble des élus de la région Languedoc-Roussillon, qui ont voté à soixante-cinq pour et un contre le maintien de la situation actuelle. C’est tout de même un acte fort, le résultat d’un vote démocratique !

Par ailleurs, je rappelle que la population, consultée sur l’initiative de notre défunt collègue Christian Bourquin via le site internet de la région, s’est prononcée à une large majorité pour que le Languedoc-Roussillon continue à constituer à lui seul une région.

De plus, cela a été dit, chacune des deux régions concernées dispose d’une métropole.

On avance l’argument de la complémentarité, mais la complémentarité ne suffit pas forcément pour faire un bon mariage.

On a également invoqué l’histoire : pour ma part, je préfère me référer à la République de Rome et à la Via Domitia plutôt qu’au comté de Toulouse, symbole de la royauté ! Outre que nous sommes ici des élus de la République, une telle référence fait sens pour l’identité culturelle de la région Languedoc-Roussillon.

J’entends aussi parfois, même dans cet hémicycle, évoquer la région Languedoc, ce qui exclut le Roussillon. Il ne me semble pas digne de la République qu’une région se fonde en excluant une partie des siens !

Outre les habitants de la région Languedoc-Roussillon, les acteurs sociaux et économiques ont également pris position contre la fusion. Je ne prendrai que deux exemples des difficultés concrètes qu’induirait celle-ci.

Premier exemple, la marque Sud de France, qui stimule de façon importante le commerce extérieur de la France et qui est source d’emplois locaux, qu’il s’agisse de l’agriculture, de la viticulture, du tourisme, de la logistique ou du transport, a du sens pour une région qui ne se réduit pas à sa démographie, mais se définit aussi par son dynamisme et son attractivité. En effet, c’est l’une des régions de France qui attirent le plus de nouveaux arrivants. Cette dynamique est à prendre en compte.

Second exemple, la mobilité dans la région Languedoc-Roussillon a été facilitée avec le train à 1 euro, « grand frère » du bus à 1 euro du département des Pyrénées-Orientales. Cette initiative, qui favorise l’accès à l’emploi et apporte un surcroît de pouvoir d’achat à nos concitoyens, a du sens pour l’ensemble des habitants du Languedoc-Roussillon.

Enfin, pour revenir sur l’exclusion du Roussillon dans le discours de certains, je rappellerai, en ma qualité d’élue de la République, que le Roussillon, c’est l’accent catalan de la République française !

M. Jacques Mézard applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

La parole est à M. Jean-Pierre Grand, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Grand

Je voudrais répondre à la commission spéciale.

Le Languedoc-Roussillon seul, c’est un taux de chômage de 17 %. Mme Malherbe vient de nous expliquer que notre région attire beaucoup de nouveaux habitants. Cela est vrai : finalement, la misère est plus douce au soleil… Mais, ma chère collègue, un tel taux de chômage doit nous amener aujourd’hui à nous interroger.

Le budget des régions Languedoc-Roussillon et Midi-Pyrénées réunies ne s’élèverait qu’à 2, 7 milliards d’euros : c’est très peu ! La fusion est incontournable. D’ailleurs, la métropole de Montpellier et celle de Toulouse travaillent déjà au rapprochement, parce que, pour nous, l’enjeu est économique. Il s’agit de réindustrialiser le Languedoc-Roussillon, de former une main-d’œuvre susceptible d’attirer des industries. À cet égard, Toulouse et Montpellier sont parfaitement complémentaires. Ces deux villes sont reliées par une grande avenue de 200 kilomètres, l’autoroute A 9. Nous avons besoin de la dynamique de Toulouse et Toulouse a besoin de la dynamique de Montpellier. La région Midi-Pyrénées a besoin de nos ports, d’un accès à la mer ; nous, nous avons besoin de son industrie. Est-il positif de voir des entreprises industrielles de Midi-Pyrénées aller s’implanter ailleurs que dans le Languedoc-Roussillon ? Je crois que nous devons avoir aujourd’hui une véritable vision.

On nous dit que les membres du conseil régional ont voté à la quasi-unanimité contre la fusion : évidemment, ils ont peur de perdre leur siège ! §

Debut de section - PermalienPhoto de Cécile Cukierman

La gauche et la droite ont voté contre par soixante-cinq voix contre une !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Grand

Je le redis, la question aujourd’hui, c’est d’avoir une vision. Cette réforme devra s’accompagner d’une déconcentration des pouvoirs de l’État, pour que nos régions aient les moyens de mener leurs politiques. Cela ne peut pas se faire à l’échelle d’une petite région, comme l’est la nôtre actuellement. Si nous avions été capables de régler seuls les problèmes de la région Languedoc-Roussillon, cela aurait déjà été fait !

J’ai toujours soutenu la politique de Georges Frêche, …

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Grand

… parce qu’il avait une vision. Nous devons renouer aujourd’hui avec cette vision : je vous y invite du fond du cœur ! Franchement, l’argument tenant à l’existence de deux métropoles est bien faible. Si la nouvelle région compte deux métropoles, c’est un atout, pas un handicap !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Grand

Non, il y en aura deux, Toulouse et Montpellier.

Je maintiens que l’enjeu, pour nous, est économique, humain. Je ne peux plus accepter que, dans ma région, dans mon département, il y ait 17 % de chômeurs !

M. Jacques Bigot applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

La parole est à Mme Gisèle Jourda, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Gisèle Jourda

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, si je suis favorable au regroupement entre Midi-Pyrénées et Languedoc-Roussillon, c’est parce que, à mon sens, la carte des régions adoptée en première lecture à l’Assemblée nationale répondait bien mieux à l’objectif ambitieux de rendre les régions plus fortes, plus attractives et plus pertinentes, à l’aune tant nationale qu’européenne et internationale.

Pour l’Audoise que je suis, fière d’appartenir au Languedoc-Roussillon, le rapprochement avec Midi-Pyrénées est la voie du bon sens. Il constitue une véritable chance, sous deux aspects essentiels.

C’est tout d’abord une question de cohérence historique. Ce rapprochement permettra en effet de retrouver les racines d’une longue histoire commune des pays d’oc, avec les départements limitrophes de la Haute-Garonne, de l’Ariège, du Tarn et du Tarn-et-Garonne. Je n’évoquerai ici que celle, récente, liée aux réseaux de Résistance.

Le rapprochement permettra ensuite, au travers d’un aménagement du territoire efficient, de dresser des perspectives d’avenir par la mise en synergie des atouts économiques majeurs des deux régions, dont la puissance cumulée pourra se comparer, notamment, à celle de la dynamique Catalogne voisine, le Languedoc-Roussillon offrant à Midi-Pyrénées une ouverture sur la Méditerranée et, par là même, sur l’Afrique.

Il ne s’agit en aucun cas de faire prévaloir les spécificités de l’une des deux régions sur celles de l’autre. Je regrette vraiment les procès d’intention faits en la matière. Personne ne doit absorber personne : l’objectif est de construire ensemble un espace géographique, économique et social pour tous, générateur de développement. Il s’agit de relever avec force et conviction le défi de bâtir une entité nouvelle, riche de ses potentialités, forte de celles à créer par l’innovation, la recherche et le soutien aux entreprises sur nos territoires.

Refuser cette alliance et vouloir rester seuls constitue un repli sur soi, une sorte de peur de l’avenir. Or il n’est pas opportun de rester figés ; nous nous devons, au regard du futur, de l’avenir économique de nos territoires et de notre pays, de nous adapter pour construire des régions qui soient de taille à affronter les défis européens et internationaux.

Je suis convaincue que le mariage entre Midi-Pyrénées et Languedoc-Roussillon, alliant deux métropoles de caractère, à l’accent occitan et catalan, Toulouse et Montpellier, chacune harmonisant des départements à dominante rurale, est une réponse adaptée aux enjeux de demain, tant pour les territoires que pour les femmes et les hommes qui y vivent.

Ce rapprochement va dans le bon sens. Ne nous privons pas d’unir nos complémentarités et de les mettre au service de l’intérêt général et des populations. Cela est primordial ! C’est pourquoi, mes chers collègues, je voterai cet amendement, en espérant vivement vous avoir convaincus de faire de même. §

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

La parole est à M. Jacques Mézard, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

J’étais aux côtés du président Christian Bourquin lorsqu’il a posé, au début de juillet, une question d’actualité au Gouvernement portant sur l’avenir du Languedoc-Roussillon. Il a exprimé avec force et conviction la volonté de la quasi-unanimité de son conseil régional de refuser la fusion. Quand j’entends aujourd’hui affirmer qu’un tel vote ne fait que traduire la volonté de ces élus de conserver leur siège, …

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

… je me dis que ce débat n’est pas d’un très haut niveau. Il est assez grave, mon cher collègue, que l’on puisse avoir une telle conception de la démocratie et de l’expression des élus régionaux !

Quand les membres de toutes les forces politiques d’un conseil régional s’unissent pour dire leur volonté, en tant qu’élus du peuple, de conserver leur région telle qu’elle est, il est tout de même surréaliste d’entendre affirmer par certains que leur vote n’a aucune valeur. Et ce sont parfois les mêmes qui voulaient s’opposer à la fusion du Nord-Pas-de-Calais et de la Picardie ! C’est un peu fort de café !

Debut de section - PermalienPhoto de Cécile Cukierman

Eh oui, on est passé de l’autre côté de la Loire…

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Il ne s’agit pas de donner des leçons, mais que ceux qui veulent de très grandes régions demandent à leurs collègues du Gard ce qu’ils pensent du rattachement de leur département à Toulouse. Il y aura certes deux métropoles, comme il y a plusieurs communautés d’agglomération dans certaines régions, mais il n’y aura qu’une seule métropole régionale ! Il n’est pas raisonnable ni sérieux de prétendre que ce rôle sera partagé entre deux villes : cela ne sera pas la réalité de demain.

Le Midi-Pyrénées a effectivement une histoire, que je respecte. Son président, Martin Malvy, disait hier que la fusion entraînerait un accroissement des pouvoirs dévolus à la nouvelle région. Ainsi, faire de grandes régions permettrait de donner davantage de pouvoir aux présidents de région… Nul doute, mes chers collègues, que tel sera bien le cas : le mode d’élection étant conservé, le président de région et les fonctionnaires qui l’entourent auront en effet plus de pouvoir. Telle est la réalité ! Comme avancée démocratique, il y a mieux !

Quels arguments nous oppose-t-on ?

« Faisons de grandes régions », tel est le leitmotiv du Gouvernement. Mais cela vaut surtout pour le sud de la Loire : en Bretagne, par exemple, les avis divergents sont davantage écoutés. On peut également modifier les limites des grandes régions si elles ne conviennent pas au maire de Tulle… En revanche, lorsque le conseil régional du Languedoc-Roussillon vote par soixante-cinq voix contre une en faveur du maintien de la région telle qu’elle est, cela ne plaît pas au Gouvernement !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Grand

Ce ne sont pas les conseillers régionaux qui font la loi !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Ils ont le droit de s’exprimer, et un gouvernement se doit d’entendre la voix des élus locaux ! Ces derniers se sont exprimés voilà quelques semaines ; il convient d’entendre leur point de vue, quel qu’il soit.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Dans le jeu de Monopoly, il y a des cartes « reculez de deux cases », « retournez à la case départ » et « allez tout droit en prison ». J’espère que vous laisserez aux régions davantage de liberté !

Mme Hermeline Malherbe applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Ronan Dantec

Le groupe écologiste soutient l’amendement de Roland Courteau. En effet, les écologistes des deux régions concernées, après en avoir discuté, sont arrivés à la conclusion que la formation d’une grande région Languedoc – soit dit sans exclure le Roussillon ! – n’était pas une mauvaise chose.

Ce n’est pas parce que le conseil régional a émis un vote à une majorité écrasante que la même quasi-unanimité prévaut dans la région, comme en attestent certaines prises de position à Montpellier.

Dans ce cas précis, n’aurait-il pas été pertinent d’organiser un référendum pour régler la question ? Le léger désaccord que j’ai avec mes collègues communistes, dont je partage largement les avis sur cette réforme, tient à ce que, selon moi, la tenue d’un référendum ne doit pas être obligatoire dans tous les cas. En effet, cela risque de bloquer le processus de fusion lorsqu’un consensus existe déjà. Il convient donc de ne pas y recourir systématiquement. En revanche, dans le cas présent, où la fusion fait véritablement débat, la question aurait pu être tranchée par référendum, ce qui aurait exigé la tenue d’une vraie discussion sur le fond, en particulier sur la nature et la mise en œuvre des outils de solidarité territoriale à l’échelle de la nouvelle grande région. Faute d’avoir vraiment répondu à ces questions, on en reste à des débats surtout théoriques, les uns invoquant les cathares, les autres les rois de France… En Bretagne, on peut remonter au moins jusqu’au VIe siècle, avec les premiers migrants venus d’Irlande ! §Je trouve donc ce débat assez faible.

Par ailleurs, en cas de fusion entre les deux régions qui nous occupent, se posera aussi la question du droit d’option, en particulier pour le département du Gard. Si l’on en reste au statu quo, si l’on conserve de petites régions, le droit d’option sera plus compliqué à mettre en œuvre.

Enfin, le devenir de la partie catalane, que je ne confonds pas avec le Languedoc, constitue lui aussi un enjeu en soi. Quel sera demain le statut de ce territoire ? Dans quelle organisation territoriale s’inscrira-t-il ? Tout le monde a souligné, y compris pour justifier le maintien de l’entre-soi, l’importance de la question de la collaboration par-delà les frontières. Cela ouvre aussi un débat sur l’Europe. En l’occurrence, se pose la question du renforcement des liens avec la Catalogne espagnole.

Tous ces éléments doivent être versés au débat, qui a du mal à progresser parce qu’il a été mal structuré. Pour notre part, les écologistes des deux régions concernées ayant conclu que la fusion pouvait être une bonne chose, nous soutiendrons cet amendement.

Debut de section - Permalien
André Vallini, secrétaire d'État

Sur la fusion envisagée entre Languedoc-Roussillon et Midi-Pyrénées, permettez-moi tout d’abord de donner quelques éléments chiffrés.

Ces régions comptent chacune moins de 3 millions d’habitants. Isolément, elles n’atteignent pas la taille critique pouvant leur permettre de développer davantage leur attractivité dans les années à venir. Les spécialistes en géographie économique le disent tous.

Ensemble, ces deux régions pourront disposer de six pôles de compétitivité et de quarante-trois laboratoires d’excellence. Elles sont situées, et ce sera encore plus vrai si elles fusionnent, à la convergence d’axes économiques importants et appartiennent déjà, l’une et l’autre, à l’eurorégion Pyrénées-Méditerranée, avec la puissante Catalogne et les îles Baléares.

La nouvelle région qui résultera de cette fusion constituera un exemple d’une région plus grande, plus efficace, plus attractive, avec 5, 7 millions d’habitants et un PIB moyen par habitant de l’ordre de 25 000 euros.

Beaucoup d’orateurs ont eu recours à des références historiques. Mme Malherbe est ainsi remontée à l’Empire romain, d’autres ont évoqué le comté de Toulouse et l’Occitanie. Tout cela est passionnant et il n’est pas question, pour le Gouvernement ainsi que pour tous ceux qui soutiennent l’évolution de la carte régionale, de gommer des identités qui, pour la plupart, remontent à l’Ancien Régime, voire bien au-delà, et ont survécu à la Révolution française, à la Restauration, à deux empires, à cinq républiques, pas plus que d’en forger de nouvelles. Il s’agit simplement – si j’ose dire – de construire ensemble des régions puissantes, attractives, compétitives, qui, même fusionnées, continueront à cultiver les identités spécifiques du Roussillon, du Languedoc, du Midi, des Pyrénées.

Par conséquent, ne nous trompons pas de débat. La nouvelle carte doit être élaborée dans le respect de l’histoire et des identités culturelles, dans le respect du travail accompli par Georges Frêche et Christian Bourquin pour le rayonnement du Languedoc-Roussillon. Néanmoins, les temps changent, et il faut que les régions aussi sachent évoluer. C’est la raison pour laquelle le Gouvernement appelle à l’adoption de ces trois amendements identiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Je mets aux voix les amendements identiques n° 2 rectifié, 48 et 144.

J'ai été saisie de deux demandes de scrutin public, émanant l’une du groupe UMP, l’autre du RDSE.

Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

Il est procédé au dépouillement du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Voici le résultat du scrutin n° 7 :

Le Sénat n'a pas adopté. §

Je suis saisie de deux amendements identiques.

L'amendement n° 4 rectifié bis est présenté par MM. Bouvard et Pellevat.

L'amendement n° 20 rectifié est présenté par MM. Mézard, Castelli, Collin, Collombat, Esnol, Fortassin et Hue, Mmes Laborde et Malherbe et M. Requier.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

I. - Alinéa 7

Supprimer les mots :

et Rhône-Alpes

II. - En conséquence, après l'alinéa 18

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« - Rhône-Alpes. »

La parole est à M. Michel Bouvard, pour présenter l’amendement n° 4 rectifié bis.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Bouvard

Cet amendement, que j’ai déposé avec M. Pellevat et qui est très largement approuvé par les élus savoyards, tend à maintenir la région Rhône-Alpes en l’état.

Le 14 avril dernier, le président du conseil régional, Jean-Jack Queyranne, après présentation de la réforme, s’exprimait en ces termes : « Est-ce que Rhône-Alpes doit s’agrandir ? Nous sommes déjà une région de taille européenne, grande comme la Suisse. Si la question de la taille se pose pour d’autres régions, ce n’est pas le cas pour Rhône-Alpes. »

Je demande à la commission spéciale de faire preuve de cohérence. Elle a souhaité que, dans un certain nombre de territoires, on garde des petites régions ou des régions de taille moyenne. Cela a été le cas pour l’Alsace, au nom de l’identité, pour le Languedoc-Roussillon et pour Midi-Pyrénées. En quoi la région Rhône-Alpes, qui compte 6, 2 millions d’habitants, soit davantage que les régions que je viens de citer et que l’on a finalement renoncé à fusionner, dont le PIB régional est le deuxième de France, qui représente un dixième du territoire national et la sixième région européenne, serait-elle trop petite ? En quoi n’est-elle pas de taille européenne ?

Bien évidemment, il ne s’agit pas d’un refus de solidarité à l’égard de l’Auvergne. C’est une question de cohérence. J’ai eu l’occasion de rappeler ce matin que la région Rhône-Alpes est déjà le produit d’une fusion. En effet, à l’origine, il avait été envisagé de créer une région Rhône et une région Alpes distinctes. De fait, la région Rhône-Alpes compte deux pôles : le pôle alpin, que vous connaissez bien, monsieur le secrétaire d’État, et le pôle rhodanien.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Bouvard

La fusion avec l’Auvergne serait potentiellement un facteur de déséquilibrage de la région, au travers d’un recentrage sur Lyon et, progressivement, d’une marginalisation de l’aire alpine et du sillon alpin.

Je précise que la région Rhône-Alpes comporte d’ores et déjà deux métropoles intramuros, Lyon et Grenoble. Il en est une troisième, que l’on oublie toujours, la métropole genevoise, sous l’influence de laquelle vit toute une partie de la région. Nous avons besoin que le travail accompli avec la métropole genevoise soit conforté, que l’économie de la partie alpine de notre région, notamment des territoires qui n’appartiennent pas à l’aire métropolitaine grenobloise, puisse continuer à se développer.

Or nous savons très bien, car c’est le discours que l’on nous tient régulièrement depuis vingt ans, qu’avec l’intégration de l’Auvergne l’accent sera mis sur un rééquilibrage de la région vers l’ouest, assorti d’un basculement des moyens au profit de cette partie de l’espace régional. Cela entraînera la marginalisation progressive des territoires frontaliers, qui sont pourtant confrontés aux problématiques des risques, de l’altitude, de la croissance démographique et de la coopération avec les deux pays voisins.

Debut de section - PermalienPhoto de Cécile Cukierman

Rassurez-vous, l’or blanc des sommets restera attractif !

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

La parole est à M. Jacques Mézard, pour présenter l'amendement n° 20 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

J’ai déjà élevé une protestation solennelle contre l’annexion de l’Auvergne par Rhône-Alpes, car, si nous votons la loi, nous avons aussi vocation à représenter le territoire qui nous a élus.

Je parle d’« annexion », car nous ne pouvons vivre autrement la démarche projetée. On nous objecte aujourd’hui que les présidents de région sont d’accord, mais, en fait, ils le sont devenus.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Pour avoir eu le privilège de recevoir ici, dans les heures qui ont suivi l’annonce de la fusion, le président du conseil régional d’Auvergne, mon ami René Souchon, je puis témoigner qu’il n’était guère enthousiaste. C’est un euphémisme !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Il n’en reste pas moins que la mise en œuvre de ce qui nous est proposé emportera des conséquences néfastes pour de très longues années. En effet, les deux régions ont un poids très différent : puisque vous parlez à l’envi de pouvoir, de puissance, d’économie, sachez que la région Rhône-Alpes est six fois plus « puissante » que l’Auvergne. C’est pourquoi on ne peut pas parler de fusion.

Surtout, dès lors que vous entendez raisonner, monsieur le secrétaire d'État, uniquement en fonction de la carte actuelle, en bloquant pratiquement l’exercice du droit d’option, il faut tenir compte du fait que, au sein de ces deux régions, on trouve des territoires différents.

La préfecture de mon département est la plus enclavée de France ; je sais que vous vous en souciez peu, monsieur le secrétaire d’État, j’ai déjà eu l’occasion de m’en rendre compte. Pour rejoindre Paris, il nous faut quatorze heures aller-retour par le train et douze heures par la route. Un aller-retour à la future métropole régionale nous prendra onze heures par le train et neuf heures par la route. Autrement dit, votre projet signera la fin d’un territoire ! En effet, vous n’allez pas nous annoncer aujourd’hui, comme vos camarades locaux, que la nouvelle grande région va nous construire les routes que la République n’a pas pu nous faire depuis cinquante ans ! §Il faut être sérieux ! On ne peut pas faire croire n’importe quoi à nos concitoyens !

Je comprends bien que vous vous désintéressiez totalement du sort d’un petit département : vous avez des préoccupations autrement plus importantes. Il n’en reste pas moins que ceux qui vivent dans ce territoire condamnent des méthodes qui excluent l’écoute, qui font bien peu de cas d’eux. Mon devoir est de vous le dire, monsieur le secrétaire d'État, car je sais que vous ferez état de grandes considérations, sans rien répondre sur le fond, si ce n’est « on verra », « il faut être confiants », « on trouvera des solutions »…

Je demande donc à mes collègues de voter cet amendement. §

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

La commission spéciale a émis un avis défavorable sur ces amendements identiques.

La réunion des régions Rhône-Alpes et Auvergne n’a pas fait l’objet de très longs débats au sein de la commission spéciale, qui a estimé le nouveau périmètre tout à fait possible.

Nous avons bien entendu ce qu’a dit M. Mézard, mais si l’Auvergne n’était pas rattachée à Rhône-Alpes, à quelle région le serait-elle ? Resterait-elle seule ?

Étant moi-même élu de Lyon, je voudrais souligner, sortant de mon rôle de rapporteur, que nous n’avons eu de cesse depuis des années, à l’échelon de l’agglomération lyonnaise, d’essayer de travailler en direction de l’Auvergne, en particulier de Clermont-Ferrand, et de relier nos territoires par des infrastructures importantes.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

M. François-Noël Buffet, rapporteur. À M. Bouvard, qui, pour paraphraser l’objet de son amendement, craint que cette fusion ne se fasse au détriment des départements alpins qui se trouveraient alors marginalisés

M. Michel Bouvard approuve.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

Nous connaissons la diversité et la richesse du territoire de Rhône-Alpes, première région française après l’Île-de-France. Elle représente 10 % de la population nationale, 11 % du PIB national… Il s’agit d’un territoire riche, quasiment dans toutes ses composantes. S’il advenait que la fusion avec l’Auvergne aboutisse, je ne crois pas que ce serait à son détriment, loin de là.

Par ailleurs, un certain nombre d’habitants des bassins de vie auvergnats profitent déjà beaucoup des atouts de notre région Rhône-Alpes.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

Enfin, nous savons l’enjeu essentiel que représente la région genevoise pour Rhône-Alpes.

Concernant la situation plus spécifique du département de notre collègue Mézard, l’honnêteté intellectuelle nous impose de nous interroger sur des difficultés que l’on ne peut passer sous silence. Peut-être une solution pourra-t-elle être trouvée à travers l’exercice du droit d’option… Quoi qu’il en soit, on ne peut rester sourd aux propos qu’a tenus M. Mézard, car ils sont justes sur le fond.

Debut de section - Permalien
André Vallini, secrétaire d'État

Plusieurs arguments plaident en faveur de cette fusion, ou plutôt de cette « union », pour reprendre un terme employé hier par Éliane Giraud, aboutissant à créer une région Rhône-Alpes-Auvergne ou Auvergne–Rhône-Alpes. Votre commission spéciale, comme en première lecture, et l’Assemblée nationale, en juillet dernier, y ont d’ailleurs souscrit, ainsi que les deux présidents de région concernés. Je ne sais quelle a été la réaction de René Souchon à l’origine, mais je peux vous dire que, lors d’une réunion récente, Jean-Jack Queyranne et lui se sont déclarés enthousiastes à l’idée de cette union.

Debut de section - Permalien
André Vallini, secrétaire d'État

Pour être tout à fait honnête, je crois que René Souchon aurait préféré une région Massif central. À défaut, il estime que l’union avec Rhône-Alpes ne peut que profiter à l’Auvergne.

Quant à Jean-Jack Queyranne, je me permets de dire que, s’il n’était pas demandeur, il est aujourd’hui favorable à cette union avec l’Auvergne. Certes, Rhône-Alpes est une région rayonnante, puissante, qui se développe déjà bien sans l’Auvergne, mais Jean-Jack Queyranne pense que les choses iront encore mieux avec celle-ci, qu’une véritable synergie s’établira entre les territoires.

Les maires de Saint-Étienne, ville de Rhône-Alpes proche de l’Auvergne, et de Clermont-Ferrand, capitale de l’Auvergne, sont également très favorables à cette union.

Certaines choses fonctionnent déjà très bien entre les deux régions : je citerai le pôle de compétitivité ViaMéca, le cancéropôle, les deux écoles vétérinaires…

Debut de section - Permalien
André Vallini, secrétaire d'État

M. André Vallini, secrétaire d'État. Bien sûr, monsieur Mézard, le Cantal est un cas particulier. Ce département du sud de l’Auvergne est déjà quelque peu éloigné de Clermont-Ferrand et il le sera encore plus de Lyon. C’est un véritable problème, dont nous sommes conscients. Toutefois, le fait d’être intégré à une grande région puissante et riche devrait vous permettre de bénéficier de retombées économiques et financières.

M. Jacques Mézard manifeste son scepticisme.

Debut de section - Permalien
André Vallini, secrétaire d'État

Monsieur Bouvard, j’ai parlé tout à l'heure des identités régionales : l’identité savoyarde existe, et personne ne la remet en cause.

Vous partagez l’objectif, évoqué par Hervé Gaymard en juillet dernier, de fusionner les deux départements de Savoie, …

Debut de section - Permalien
André Vallini, secrétaire d'État

… ce qui permettra aux Savoyards de peser davantage au sein de Rhône-Alpes et de mieux valoriser leurs atouts, notamment touristiques.

Or souvenez-vous que, au moment de la création de Rhône-Alpes, dans les années soixante, personne ne croyait à la cohérence d’une région s’étendant des portes de Genève, au bord du lac Léman, jusqu’à celles d’Avignon. S’il n’y a pas d’identité rhônalpine, il y a un dynamisme rhônalpin, une cohérence de la région Rhône-Alpes, qui avance et se développe par-delà les identités savoyarde, dauphinoise ou même provençale, au sud de la Drôme.

M. Michel Bouvard acquiesce.

Debut de section - Permalien
André Vallini, secrétaire d'État

Il n’y a pas de contradiction. Les deux Savoie pourront évidemment continuer à se développer au sein de la nouvelle région Rhône-Alpes-Auvergne, et l’Auvergne, à mon avis, a tout à gagner à une union avec Rhône-Alpes.

Quant au département du Cantal, monsieur Mézard, nous sommes conscients, je le redis, de l’existence d’une problématique particulière, qui rejoint d’ailleurs celle de la plupart des départements situés aux frontières des futures grandes régions, a fortiori s’ils sont enclavés et ruraux. Comme vous le savez, des dispositions vont être prises – le Gouvernement l’a donné à entendre – pour adapter la future architecture administrative à la spécificité des départements ruraux. Il en a notamment été question lors des discussions entre le Premier ministre et le président de votre parti, M. Jean-Michel Baylet.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

La parole est à M. Henri Tandonnet, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Tandonnet

Je me fais ici le porte-parole de mes collègues Gérard Roche, sénateur de Haute-Loire, et Pierre Jarlier, sénateur du Cantal.

La fusion entre Rhône-Alpes et l’Auvergne peut constituer une réelle chance pour cette dernière. La nouvelle région se classera au deuxième rang en France et au sixième en Europe. Mes collègues tiennent à rappeler que beaucoup d’acteurs économiques, de nombreuses collectivités souhaitent cette fusion.

Il faut saisir cette opportunité de mettre en réseau la région Auvergne et la ruralité avec une métropole. C’est le meilleur moyen d’unir de façon plus forte les secteurs métropolitains, où se crée aujourd’hui l’essentiel des richesses, et les territoires ruraux, qui disposent eux aussi de nombreux atouts, mais doivent pouvoir bénéficier d’une forte solidarité pour être en mesure de les valoriser. Opposer aujourd’hui les métropoles à la ruralité ne profiterait qu’aux territoires urbains les plus riches et pourrait être fatal aux territoires ruraux, qui souffriraient encore plus de leur isolement.

Une telle opposition n’a plus de sens : ces territoires, certes très différents, doivent être conçus comme complémentaires au sein d’une vraie stratégie d’aménagement du territoire, de dimension régionale. C’est à ce prix qu’une réelle solidarité territoriale pourra se mettre en place.

Quelle est cette fameuse solidarité que les élus ruraux appellent de leurs vœux ? Elle doit permettre un juste équilibre entre le développement des métropoles et celui des massifs, qu’il s’agisse des Alpes ou d’une grande partie du Massif central.

Ce qui est certain, c’est que même si nous conservons les compétences de solidarité territoriale aux seuls départements, ce qui serait en soi légitime, les plus pauvres d’entre eux ne seront pas en mesure d’assurer cette mission essentielle, visant à garantir un aménagement équilibré du territoire.

C’est bien au sein de grandes régions que pourront être mis en œuvre politiques spécifiques de montagne, grandes infrastructures, équipements et projets structurants ; ils trouveront leur place dans les schémas régionaux d’aménagement du territoire.

Voilà une belle occasion, pour les territoires les plus ruraux, les plus isolés, de rompre avec un sentiment d’abandon trop souvent ressenti actuellement, en mobilisant les capacités d’action de cette future grande région Rhône-Alpes-Auvergne.

Mes deux collègues n’éprouvent aucune crainte : cette fusion constitue une opportunité de développement, mais elle sera surtout ce que les élus en feront.

Le groupe UDI-UC votera contre ces deux amendements, dont l’adoption isolerait l’Auvergne. Je rappelle que mon collègue Jarlier est un élu du nord du Cantal.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

La parole est à Mme Michèle André, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

On dit que les gens heureux n’ont pas d’histoire. Ils débattent tranquillement, sans se répandre dans la presse nationale. C’est ce qu’il s’est passé en Auvergne, lorsque la proposition d’une union avec Rhône-Alpes a été avancée.

Certes, j’ai bien entendu notre collègue Mézard indiquer que le président Souchon avait peut-être, initialement, une autre idée, celle de constituer une grande région Massif central. Mais ce projet n’est plus d’actualité, et nous savons bien que le Massif central est autant une barrière qu’un facteur commun pour les territoires concernés.

Les parlementaires et les membres du conseil général du Puy-de-Dôme, département qui regroupe environ la moitié de la population de la région Auvergne, ont mené avec René Souchon une réflexion, à laquelle se sont associés Pierre Jarlier, Gérard Roche et le nouveau maire de Clermont-Ferrand, Olivier Bianchi. Nous avons vu tout l’intérêt qu’il y avait à s’insérer dans ce nouvel espace. Il n’est d’ailleurs pas si nouveau que cela : chez nous, les jeunes, lorsqu’ils veulent voir un beau match de football, n’hésitent plus à se rendre à Saint-Étienne ou à Lyon. Par l’autoroute, cela va vite ; la situation est moins favorable pour le train, mais je suis certaine que nous l’améliorerons.

Je suis donc un peu étonnée d’entendre parler d’annexion…

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

Et c’est la présidente de la commission des finances qui parle !

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

Mme Michèle André. Certes, la ruralité tient une place importante dans nos territoires, et je sais bien qu’il n’est déjà pas aisé de se rendre d’Aurillac à Clermont-Ferrand.

M. Jacques Mézard opine.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

Nous, parlementaires du Puy-de-Dôme ou de l’Allier – Vichy est tout proche de Lyon –, estimons que Clermont-Ferrand et son agglomération peuvent représenter un pôle d’équilibre, au sein de la nouvelle région, en face de Grenoble, sans que cela enlève rien aux deux Savoie. Notre identité ne pâtira pas non plus de la fusion. Nous resterons ce que notre histoire a fait de nous.

Il y a déjà des échanges entre les universités, les hôpitaux des deux régions, qui relèvent en outre de la même zone de défense. Doit-on craindre que Lyon ne devienne trop puissante ? Non, bien évidemment ! Il s’agit simplement de nous inscrire ensemble dans une même dynamique.

En conclusion, j’appelle à ne pas voter ces deux amendements.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

La parole est à Mme Éliane Giraud, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Giraud

Je voudrais simplement dire à Michel Bouvard, avec qui j’ai beaucoup travaillé et travaille encore, que l’idée alpine perdurera. Elle n’est pas remise en cause par le travail qu’accomplit Jean-Jack Queyranne à la tête du groupe d’intérêt public du Massif central, qu’il préside aujourd’hui, ayant succédé à René Souchon.

L’idée du Grand Genève est déjà en marche, notamment à travers le projet CEVA – Cornavin-Eaux-Vives-Annemasse –, qui vise à relier les réseaux ferroviaires du canton de Genève et de la Haute-Savoie. Jean-Jack Queyranne dit d’ailleurs souvent que Genève est l’autre capitale de Rhône-Alpes.

Je ne crois donc pas que les projets s’opposent. Au contraire, nous avons l’occasion de constituer, en fusionnant avec l’Auvergne, une région extrêmement attractive, en termes non pas de pouvoir, monsieur Mézard, mais d’atouts. En effet, elle comptera des métropoles importantes, des pôles de recherche de premier plan, de grandes universités, et son territoire sera très équilibré entre l’urbain et le rural, entre la montagne et la plaine. Avec trois massifs, nous pourrons les uns et les autres, élus nationaux et élus locaux, travailler sur les réalités du monde rural et de la vie en zones de montagne. Je ne nie pas, monsieur Mézard, que l’on éprouve dans certains territoires un sentiment d’éloignement : il en est ainsi parfois en Chartreuse, dont je préside le parc naturel régional.

Nous élus devons donc travailler à rapprocher les territoires et à renforcer la proximité, notion qui, à mon sens, ne se résume pas à une question de kilomètres ; bien plus largement, elle doit s’inscrire dans nos politiques.

Le travail de rapprochement qui a été engagé entre l’Auvergne et Rhône-Alpes est très respectueux de l’identité de chacun. Il est fondé sur la réciprocité. C’est dans cet esprit que nous entendons travailler tous ensemble, comme nous y incitent les deux présidents de région.

M. le secrétaire d’État l’a souligné, les identités perdureront ; elles aussi feront la force d’une nouvelle région puissante, dotée de moyens importants, visible à l’échelon international, où toutes les solidarités devront jouer, y compris au sein des départements. Dans l’Isère, par exemple, nous étudions comment renforcer la proximité.

Nous avons la responsabilité de construire une région inclusive, pour en faire progressivement, avec l’ensemble des acteurs économiques, des associations, des forces vives, un levier pour reconquérir des parts de marché, retrouver une dynamique économique, acquérir une visibilité à l’international.

Ce pari, j’ai envie de le prendre, avec les Auvergnats et l’ensemble des acteurs. Des synergies existent déjà : on a cité ViaMéca, Limagrain, mais je pense également, dans le secteur agricole, aux complémentarités entre les circuits courts et les cultures bio. Nous disposons de tous les éléments pour bâtir une très belle région, solidaire et dynamique. C’est en tout cas ce à quoi je compte m’atteler, avec vous aussi, monsieur Bouvard ! §

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Cécile Cukierman

J’entends bien les inquiétudes que suscite ce projet de fusion. Cela étant, il y aura toujours de la neige dans les Alpes, de l’aligot dans le Cantal ou de la fourme dans la Loire… Les spécificités territoriales demeureront quelle que soit la taille de la région, tout le monde en est convaincu.

En réalité, nous le savons tous, le problème tient au fait que ce texte, qui n’en dit pas beaucoup, sera suivi d’un autre qui affirme une volonté de renforcer la compétitivité et l’attractivité des territoires, passant par la constitution de régions plus fortes, sans que soit aucunement évoquée la correction des inégalités territoriales. Or, en l’occurrence, la fusion entre la région Rhône-Alpes et l’Auvergne en créera de très fortes !

À ce titre, monsieur le secrétaire d’État, permettez-moi de vous faire remarquer que lorsque vous évoquez les différents territoires de la région Rhône-Alpes, vous n’en citez pas un qui soit situé à l’ouest du Rhône. Pourtant, cette région comprend bien les départements de l’Ardèche et la Loire. Cet oubli est sans doute dû à un souci de concision…

Debut de section - Permalien
André Vallini, secrétaire d’État

J’ai parlé de Saint-Étienne !

Debut de section - PermalienPhoto de Cécile Cukierman

Il est vrai que vous avez ensuite évoqué la position des maires des communes situées dans les territoires proches de l’Auvergne. Néanmoins, la vision géographique, très générale à mon avis, que vous venez de présenter ne rend pas compte de la réorientation des politiques régionales vers l’ouest de Rhône-Alpes, qui fut, je tiens à le souligner, une des réussites de la majorité régionale conduite depuis 2004 par Jean-Jack Queyranne. D’ailleurs, il n’est sans doute pas anodin que l’on s’accorde à nommer la future région, dans la presse régionale par exemple, « Rhône-Alpes-Auvergne » plutôt qu’« Auvergne–Rhône-Alpes », comme le voudrait l’ordre alphabétique, qui prévaut habituellement. Cela augure mal de la suite !

On est en droit de douter de l’efficacité d’une fusion envisagée dans la précipitation. Je le rappelais ce matin encore, un certain nombre d’administrations et de grands organismes ont anticipé le processus et se préparent à réduire leur présence dans certains territoires de la future grande région. En effet, ce projet de création d’une grande région intervient dans un contexte de baisse des dépenses publiques, de diminution des dotations aux collectivités territoriales, de grande incertitude. Vous dites que l’on verra après comment régler les problèmes. M. le ministre de l’intérieur déclarait hier soir que la confiance devait prévaloir entre le Parlement et le Gouvernement, mais permettez-moi tout de même de douter que ce texte, dans sa rédaction actuelle, ou celui qui suivra remédieront aux difficultés rencontrées par certains territoires…

Enfin, je ferai observer que ce projet de fusion, comme d’autres, n’a pas fait l’objet d’une consultation démocratique digne de ce nom. En outre, l’harmonisation des régimes indemnitaires des agents des deux collectivités posera des problèmes.

En conclusion, nous soutiendrons, là encore, les amendements tendant à s’opposer à la fusion projetée.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

La parole est à M. Jacques Mézard, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Il faut, me semble-t-il, en revenir à la géographie. Vous vous contentez de nous dire, monsieur le secrétaire d’État, que, effectivement, nous avons un problème.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

C’est cela ! Vous savez, nous n’avons pas pour habitude de croire n’importe quoi ! Cela fait des décennies que nous sommes confrontés à un problème qu’aucun gouvernement n’a voulu résoudre, parce que la population de notre territoire n’est pas suffisamment nombreuse ! Je n’ai rien contre Lyon, mais nous n’avons rien à voir avec cette métropole : nous sommes de l’autre côté des montagnes !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Le droit d’option n’existe pas, chère collègue ; il est bloqué, nous le savons bien !

Que fera le Gouvernement ? Si vous m’aviez promis, monsieur le secrétaire d’État, dans votre grande sagesse, la résolution de notre problème d’enclavement, nous aurions pu discuter. Mais vous ne l’avez pas fait, et je sais que vous ne le ferez pas, puisque vous bloquez depuis deux ans le programme de modernisation des itinéraires routiers, le PDMI. Et l’abandon de l’écotaxe ne va pas arranger les choses…

Par conséquent, vous n’avez rien à nous proposer. Rien ! Vous vous bornez à reconnaître que nous avons un problème. Pour le reste, nous devrions nous estimer heureux de garder un conseil général, à la suite des discussions qui se sont tenues entre le Premier ministre et le président Baylet ! Eh bien non, nous ne pouvons pas être heureux avec de telles méthodes antidémocratiques – je l’affirme –, qui ne tiennent pas compte des réalités géographiques, humaines, économiques et sociales ! Je sais bien que la situation de mon territoire ne vous empêchera pas de dormir, monsieur le secrétaire d’État, mais nous n’avons pas la chance de mon collègue élu de Saint-Flour, qui voit l’autoroute passer sous ses fenêtres et est lui aussi tout à fait indifférent aux difficultés que rencontrent la préfecture et les trois quarts du département…

Face à un vrai problème, il faut proposer des solutions. Or vous ne m’en présentez aucune, monsieur le secrétaire d’État. Telle est la réalité !

Debut de section - Permalien
André Vallini, secrétaire d’État

Madame Cukierman, il est vrai que j’aurais dû parler tout à l’heure, outre de Saint-Étienne, du Forez et de l’identité forézienne.

Monsieur Mézard, j’entends votre argumentation ; elle est tout à fait recevable et pertinente. Je connais, je le répète, le problème de l’enclavement du sud du département du Cantal. Cependant, vous dites vous-même que, depuis quarante ans, rien n’a été fait pour y remédier, ni par l’État, ni par la région Auvergne, …

Debut de section - Permalien
André Vallini, secrétaire d’État

… ni même par le conseil général, ou si peu.

Debut de section - Permalien
André Vallini, secrétaire d’État

Dans ces conditions, plutôt que de défendre le statu quo, pourquoi ne pas saisir la chance de vous intégrer dans une grande région plus riche ? Monsieur Mézard, vous dites vous-même que les choses vont très mal aujourd’hui.

Debut de section - Permalien
André Vallini, secrétaire d’État

Qui vous dit qu’elles iront encore plus mal ? Je crois vraiment à la chance que peut représenter, pour tout le Cantal, l’appartenance à une grande région puissante et plus riche.

Debut de section - Permalien
André Vallini, secrétaire d'État

Comment pourrais-je prendre des engagements au nom des futurs élus régionaux, qui auront à répartir les crédits entre les départements ?

Je le répète, c’est une chance à saisir pour tout le Cantal. Je fais confiance à tous les élus du sud du Cantal pour se faire entendre dans la grande région Rhône-Alpes-Auvergne.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

La parole est à M. Michel Bouvard, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Bouvard

Je prends acte, monsieur le secrétaire d’État, de l’accueil positif réservé par le Gouvernement au projet de fusion des deux départements savoyards, qui est pour nous très important. En plus d’être vecteur d’économies, la fusion nous permettra de recevoir demain, de la part de la région, des délégations de compétences sur des sujets qui nous concernent directement.

Par ailleurs, je regrette que Mme André ait pu considérer comme blessant que je parle de solidarité ; ce n’était surtout pas mon intention ! Je pense simplement que la solidarité a vocation à s’exercer aussi bien à l’échelon national qu’au plan régional. Cela étant, il faut aussi prendre en compte les charges de chacun des territoires, ainsi que la réalité de leur géographie. Nous n’allons pas aborder ici, car ce n’est pas le lieu, la question de la gouvernance des régions, mais si les élus alpins avaient été associés au débat entre les présidents des régions Rhône-Alpes et Auvergne, au travers de la conférence des exécutifs régionaux, cela aurait pu aider à la bonne compréhension de ce projet par tous. §

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Je mets aux voix les amendements identiques n° 4 rectifié bis et 20 rectifié.

J'ai été saisie d'une demande de scrutin public émanant du groupe de l'UDI-UC.

Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que l’avis du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

Il est procédé au dépouillement du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Voici le résultat du scrutin n° 8 :

Le Sénat n'a pas adopté.

Je suis saisie de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

Les deux premiers amendements sont identiques.

L'amendement n° 3 est présenté par M. Vaugrenard, Mme Meunier et M. Raoul.

L'amendement n° 67 rectifié est présenté par M. Zocchetto, Mmes Doineau, Billon et Gatel et M. Kern.

Tous deux sont ainsi libellés :

I. – Alinéa 9

Rédiger ainsi cet alinéa :

« – Bretagne et Pays de la Loire ;

II. – En conséquence, alinéa 17

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. Yannick Vaugrenard, pour présenter l'amendement n° 3.

Debut de section - PermalienPhoto de Yannick Vaugrenard

Une large majorité semble se dégager, au sein de la Haute Assemblée, pour s’accorder sur la nécessité, eu égard à l’élargissement de l’Union européenne, d’avoir de grandes régions. Les difficultés commencent quand on aborde la question de leur délimitation…

Le rapport Raffarin-Krattinger, auquel il est souvent fait référence, se bornait d’ailleurs à affirmer qu’il convenait de ramener à huit ou à dix le nombre des régions, sans préciser leurs contours. C’est pourquoi j’aurais apprécié que notre collègue Jean-Pierre Raffarin fasse preuve ce matin d’un peu plus d’humilité.

J’évoquerai maintenant l’union des régions Bretagne et Pays de la Loire, qui me paraît nécessaire pour trois raisons.

D’abord, avec l’extension vers l’est de l’Union européenne, le caractère périphérique de ces régions se trouve aggravé. L’union des régions Bretagne et Pays de la Loire s’impose donc pour réaliser des infrastructures routières, ferroviaires ou aéroportuaires permettant de nous rapprocher de l’est de la France et du centre de l’Europe.

Ensuite, ces deux régions ont depuis de nombreuses années la bonne habitude de travailler ensemble, dans les domaines de l’agroalimentaire, de la pêche, des énergies marines et renouvelables ou encore de la formation : la première université commune à la Bretagne et aux Pays de la Loire ouvrira ses portes au mois de janvier 2016. Je pourrais également évoquer les interventions conjointes auprès de la Commission européenne ou du Fonds européen agricole pour le développement rural, le FEADER. Il conviendrait de renforcer encore cette coopération !

Enfin, une telle fusion correspond aux souhaits des acteurs économiques et des populations concernées. Selon un sondage récent, 42 % des Ligériens y sont favorables, quand 3 % seulement souhaitent une union avec la région Poitou-Charentes et 2 % penchent pour un rapprochement avec la région Centre.

Au demeurant, MM. Jean-Marc Ayrault et Edmond Hervé, anciens maires respectivement de Nantes et de Rennes, ont très longtemps œuvré de concert sur des projets communs aux deux régions. Quant aux maires nouvellement élus de ces deux villes, de Brest ou de Saint-Nazaire, ils se sont prononcés en faveur de la fusion entre les régions Bretagne et Pays de la Loire.

Sentant poindre le statu quo, je souhaiterais que nous prenions le temps de réfléchir à une telle union. Peut-être sera-t-il ensuite pertinent, voire indispensable, d’envisager la constitution d’un véritable espace régional de dimension européenne incluant le Val de Loire. Cessons de jouer « petit bras » !

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

La parole est à Mme Élisabeth Doineau, pour présenter l'amendement n° 67 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Elisabeth Doineau

Comme beaucoup, dans cet hémicycle et ailleurs, je regrette l’improvisation et la précipitation dont le Gouvernement a fait preuve sur un sujet aussi déterminant pour l’avenir de notre pays.

À mon sens, cette carte des régions subit des vicissitudes rocambolesques dignes du père Ubu, né sous la plume d’Alfred Jarry, auteur mayennais.

À vrai dire, nous sommes tous en train de faire de la pataphysique, discipline répondant au principe suivant : « Je m’applique volontiers à penser aux choses auxquelles je pense que les autres ne penseront pas. »

Je vais donc, à mon tour, défendre un amendement tendant à définir un périmètre différent de celui qui a été proposé par le Gouvernement, différent aussi de celui qui a été établi par l’Assemblée nationale.

Je souhaite la fusion de la Bretagne et de la région Pays de la Loire. Mais soyons clairs : non pas un cinquième ou deux cinquièmes des Pays de la Loire, mais bien l’ensemble de la région. Il s’agit d’ajouter l’intégralité des Pays de la Loire à l’intégralité de la Bretagne. Plus qu’un amendement, c’est un plaidoyer !

Cette proposition se fonde d’abord sur nos réussites respectives, sur de remarquables bilans et sur des liens tissés depuis plus de trente ans. Elle se fonde ensuite sur près de 400 mutualisations et coopérations, qui ont d’ailleurs fait l’objet d’un inventaire détaillé par le conseil économique, social et environnemental régional des Pays de la Loire. Elle se fonde enfin sur des réalités humaines, sociales et économiques partagées par les femmes et les hommes de l’Ouest.

Je ne me lancerai pas dans une énième énumération des arguments en faveur d’un tel rapprochement, dont mon collègue Yannick Vaugrenard a très bien montré l’intérêt. Chacun peut d’ailleurs consulter les nombreux rapports et études plaidant en ce sens.

Ainsi, tout nous rapproche. Nos obligations doivent s’énoncer clairement et simplement. Volonté, sincérité et identités : inscrivons ces mots, telle une devise, au fronton de nos ambitions. Volonté de réussir, de parier sur notre capacité à défier les difficultés d’un marché économique mondial chaotique ; sincérité de nos intentions, de nos engagements et de nos idéaux, autour de nos identités plurielles assumées.

La fusion de la Bretagne et des Pays de la Loire se justifie donc pleinement. Mes chers collègues, je vous invite à écrire ensemble l’histoire contemporaine de nos deux régions, en adoptant cet amendement.

M. Jean-Marie Bockel applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

L'amendement n° 132, présenté par MM. Guerriau et Canevet, Mme Gatel et MM. Paul et Cadic, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 9

Compléter cet alinéa par les mots :

et le département de la Loire-Atlantique

II. – En conséquence, alinéa 17

Compléter cet alinéa par les mots :

, sauf le département de la Loire-Atlantique

La parole est à M. Michel Canevet.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Canevet

Nous aurions préféré que l’élaboration de la nouvelle carte des régions procède d’une autre démarche. Malheureusement, tel n’a pas été le choix du Gouvernement. Nombre d’orateurs avant moi l’ont déploré.

Il nous revient donc de travailler sur la nouvelle carte en gardant à l’esprit que les populations concernées n’ont pas été associées aux choix opérés. Il eût pourtant mieux valu les consulter, afin que la représentation nationale puisse élaborer une carte répondant à leurs aspirations.

La Normandie, qui va enfin être réunifiée, et l’Alsace ont obtenu satisfaction. J’espère également qu’une région Sud-Ouest répondant aux attentes des habitants de cette partie du pays verra le jour.

Pour ce qui concerne l’Ouest, les deux options en débat sont l’union des régions Bretagne et Pays de la Loire et la reconstitution de la Bretagne de toujours, par adjonction de la seule Loire-Atlantique. C’est ce choix que je défends.

Avec 4, 6 millions d’habitants, la nouvelle région Bretagne à cinq départements aurait une taille tout à fait satisfaisante, puisqu’elle se classerait au vingt-deuxième rang européen. Elle aurait en outre beaucoup de sens pour ses habitants, dont bon nombre expriment depuis des décennies, via des enquêtes d’opinion ou les vœux des collectivités, leur souhait de voir la Bretagne réunifiée.

Par ailleurs, la Bretagne ainsi réunifiée deviendrait la première région maritime de France. Or j’ai la conviction que la politique maritime peut être l’un des axes de développement de notre pays, permettant de créer des emplois et de trouver des ressources pour bâtir un avenir meilleur. Une telle politique pourrait être construite à l’échelon d’une Bretagne à cinq départements.

Enfin, un débat public se tient actuellement chez nous sur la desserte ferroviaire de la Bretagne : ce sujet concerne à la fois Rennes, Nantes et la Bretagne occidentale. Pour nous, il ne s’agit pas, en reconstituant la Bretagne historique, d’établir des frontières avec nos voisins : nous pourrons mettre en place des coopérations avec d’autres régions.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

L'amendement n° 26, présenté par MM. Germain, Filleul, Lorgeoux et Sueur, est ainsi libellé :

I. - Alinéa 10

Compléter cet alinéa par les mots :

et Pays de la Loire

II. - En conséquence, alinéa 17

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. Jean Germain.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Germain

Monsieur le secrétaire d'État, mon intervention sera un peu désespérée, mais pas résignée.

Je voudrais rappeler le principe d’unicité du peuple français, car, on le voit bien, lorsque les particularismes sont lâchés, tout va très vite ! Les habitants de la région Centre n’ont pas moins de droits que d’autres.

On nous explique à l’envi qu’il faut de grandes régions. Vous le savez, monsieur le secrétaire d'État, dans la région Centre, nous étions d’accord. Dans un premier temps, on nous a annoncé que nous fusionnerions avec le Poitou-Charentes et le Limousin.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Germain

–, on nous a dit que nous pourrions peut-être nous unir avec les Pays de la Loire. Cette dernière région n’ayant pas voulu d’une telle union, nous nous retrouvons donc seuls…

Pourtant, on explique depuis maintenant de nombreux mois à l’ensemble de la population qu’il faut constituer de grandes régions. Pourquoi ? Parce que ! Mais nous, nous ne serons qu’une petite région… Ce n’est pas grave, nous dit-on : le Centre n’est ni l’Alsace, ni la Corse, ni la Bretagne, ce n’est pas une région importante, il ne sert qu’à fournir des recrues à quelques régiments d’infanterie en temps de guerre !

Je ne retracerai pas l’histoire de ma région depuis Jules César jusqu’à la Renaissance et au-delà, mais nous existons, monsieur le secrétaire d'État ! On ne peut pas nous traiter comme on l’a fait, au motif qu’il faut respecter les desiderata d’importantes personnalités politiques, qui elles ne veulent pas que leur région fusionne avec d’autres pour en former une grande…

Alors nous allons faire silence dans les rangs, comme on nous le demande, mais si je suis un peu désespéré, je ne suis pas résigné. En effet, nous avons pris contact avec un certain nombre de députés de Bretagne et des Pays de la Loire. Quelles que soient les réformes, la Loire continuera de couler du mont Gerbier-de-Jonc jusqu’à l’Atlantique. Nous pensons que, un jour, la Loire-Atlantique usera du droit d’option pour demander son rattachement à la Bretagne. Alors s’opérera sans doute une réunion de ce qui restera des Pays de la Loire avec la région Centre. Si cela ne se fait pas, la région Centre éclatera, là aussi par l’exercice du droit d’option.

Je sais que vous connaissez la situation, monsieur le secrétaire d'État, je sais que les choses ne sont pas faciles, mais les Corses, les Bretons et les Alsaciens ne sont pas seuls à avoir des droits. Nous aussi, nous sommes Français. En vertu de l’unicité du peuple français, nous demandons justice !

MM. Jean-Jacques Filleul et Jacques Mézard applaudissent.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

La commission spéciale a émis un avis défavorable sur l’ensemble de ces amendements.

Je rappelle que, à l’occasion des débats en première lecture et des consultations qui ont été menées par mon prédécesseur, aucun consensus n’a émergé. Ainsi, la Bretagne ne souhaitait pas fusionner avec les Pays de la Loire, en tout cas pas avec l’intégralité de cette région… Quant à l’idée d’un rapprochement entre le Centre et les Pays de la Loire, avancée alors par la commission spéciale, elle n’a pas prospéré.

Au vu de cette situation, la commission spéciale a maintenu la carte telle qu’issue des travaux de l’Assemblée nationale et a émis un avis défavorable sur l’ensemble des amendements.

Debut de section - Permalien
André Vallini, secrétaire d'État

Nous touchons là à un problème compliqué. Tous le sont, mais celui-ci l’est particulièrement.

Le Gouvernement est défavorable à l’ensemble de ces amendements. Néanmoins, il pense, comme les sénateurs Vaugrenard et Germain, que les choses ne sont pas figées pour toujours.

Aujourd'hui, la fusion entre les Pays de la Loire et la Bretagne n’est pas suffisamment consensuelle pour être adoptée. Il en va de même pour le rattachement de la Loire-Atlantique à la Bretagne. Quant à la région Centre, c’est à bon droit qu’elle s’interroge sur son avenir. Comme vous, monsieur le sénateur Vaugrenard, nous pensons qu’il faut procéder par étapes. Comme vous, monsieur le sénateur Germain, nous croyons que le droit d’option pourrait s’exercer dans les années à venir et que la situation évoluera, peut-être plus vite que certains ne l’imaginent.

Cependant, pour l’heure, le Gouvernement pense préférable d’en rester aux trois régions actuelles.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

La parole est à Mme Catherine Deroche, pour explication de vote sur les amendements identiques n° 3 et 67 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Deroche

Je m’exprimerai en tant que représentante du Maine-et-Loire et élue ligérienne.

J’ai entendu les propos de mes collègues Yannick Vaugrenard et Élisabeth Doineau. Je partage d’ailleurs leur vision des liens existant entre les Pays de la Loire et la Bretagne. Les enquêtes le montrent, notamment une récente étude du CESER, de tous les liens que les Pays de la Loire ont pu nouer avec d’autres régions, ce sont ceux avec la Bretagne qui sont le plus forts, même s’il ne faut nullement négliger ceux nous unissant à la région Poitou-Charentes ou, dans certains domaines, à la région Centre.

Je suis également d’accord avec mes collègues pour souhaiter que les Pays de la Loire ne soient pas démembrés ni démantelés. Nous élus du Maine-et-Loire sommes attachés à la préservation de l’unité d’une région qui s’est construite au fil des années et qui fonctionne bien. Elle a désormais une identité assez forte.

Si c’est donc avec la Bretagne que les liens sont le plus forts, je ne voterai néanmoins pas ces amendements, car mon groupe a adopté une position claire : celle de s’en tenir à la décision de la commission spéciale, dont François-Noël Buffet a bien retracé la réflexion, tant en première lecture qu’en deuxième lecture.

Cela étant, ce n’est pas une raison suffisante : je ne voterai pas ces amendements surtout parce que ne se manifeste pas une volonté unanime de la Bretagne de fusionner avec les Pays de la Loire. Je ne vois pas l’intérêt de contracter un mariage forcé avec une région qui ne veut pas forcément de nous, hormis certains élus.

Par ailleurs, ce point a été souligné tout au long du débat, les choses ont été faites à l’envers. La démarche engagée s’apparente à une mayonnaise dont les ingrédients auraient été mélangés en dépit du bon sens et qui, de ce fait, ne prend pas ! Tant que nous n’aurons pas examiné le texte relatif aux compétences des régions et des départements, il me semble prématuré de s’engager dans une fusion.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

La parole est à M. Yannick Botrel, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Yannick Botrel

Je trouve la démarche des auteurs de ces amendements assez curieusement unilatérale. Jusqu’à aujourd'hui, il n’y a pas eu véritablement de négociation entre les deux régions ; je me garderai de parler d’« annexion », car je déteste les termes excessifs. Quoi qu’il en soit, les propos que je viens d’entendre me donnent le sentiment d’une improvisation à peu près totale. Çà et là, en Bretagne, des individualités ont pu manifester leur intérêt pour un rapprochement avec les Pays de la Loire, mais elles sont loin de représenter l’opinion majoritaire dans la région.

Beaucoup de questions se posent. Quelques-unes ont été évoquées par notre collègue Canevet. En particulier, que deviendrait l’extrémité de la péninsule dans le cas d’un rapprochement entre les deux régions ? Un problème de périphéricité se pose en Bretagne. Par ailleurs, des territoires du centre de la Bretagne ont besoin de la solidarité régionale, singulièrement dans la période de crise économique que nous traversons.

Dès lors, puisqu’il n’y a pas eu de discussions approfondies, tout ce qui est proposé relève d’une improvisation dangereuse. Ne nous exposons pas au même reproche que celui qui est adressé au Gouvernement, à savoir d’avoir redessiné la carte des régions sur un coin de table. Il ne faudrait pas que le rapprochement entre nos deux régions se fasse selon la même méthode, de manière impromptue.

Concernant toujours la méthode, j’ai été un peu étonné de voir le président des Pays de la Loire se tourner dans un premier temps vers la région Poitou-Charentes, avant de solliciter la région Centre, puis d’achever sa danse nuptiale en Bretagne ! Cela semble signifier qu’aucune solution ne s’impose spontanément, dans cette partie de la France, pour former une grande région : si le président des Pays de la Loire a adopté une telle attitude, c’est qu’il considérait qu’il y avait d’autres possibilités que la fusion avec la Bretagne. Dans ces conditions, j’estime que la proposition qui nous est faite au travers de ces amendements tient de l’OPA inamicale !

On a beaucoup parlé d’économie et de démographie. Il est exact qu’il existe des coopérations entre les régions, qui se poursuivront quoi qu’il arrive. De même, certaines réalités sont indéniables, telle l’expansion géographique des aires d’influence de Rennes et de Nantes, qui désormais ne sont plus séparées que par dix kilomètres, celle de Nantes remontant le long de la côte Atlantique jusqu’à Vannes, ville qui est en lien avec Rennes. On assiste ainsi à une métropolisation de l’est de la Bretagne.

On a aussi parlé de démocratie. Pour ma part, je constate que la majorité du conseil régional de Bretagne est défavorable à une fusion avec les Pays de la Loire. Quant à la population bretonne, si elle n’a pas été consultée, les sondages reflètent l’existence d’un fort sentiment régional en son sein, même s’il est sans exclusive, l’identité bretonne étant une identité ouverte.

Enfin, puisque l’on a beaucoup parlé d’histoire, je rappellerai que la Bretagne est la seule province française dont les limites aient été intégralement respectées quand les départements ont été constitués, à la fin de 1789 et au début de 1790. Cela étant, concernant la proposition d’un rapprochement entre la Bretagne et la Loire-Atlantique, même si je rejoins les propos de mon collègue Michel Canevet, il me semble que, en l’état, son amendement a fort peu de chances de prospérer. Il faudrait d’abord que la Loire-Atlantique manifeste clairement une volonté de fusion. Or ses élus, à ce jour, ne se sont pas exprimés en ce sens. Peut-être cela viendra-t-il ? Il ne faut pas insulter l’avenir… Sur ce point, je rejoins tout à fait notre collègue Jean Germain. Tout en déplorant, à titre personnel, qu’un accord de la Loire-Atlantique pour rejoindre la Bretagne ne se soit pas fait clairement entendre, je considère que l’avenir nous appartient.

J’appelle à débattre sans précipitation. Des élections se tiendront dans quelques mois. Je l’ai dit hier à la tribune, nous aurions tout intérêt, monsieur le rapporteur, monsieur le président de la commission spéciale, à fluidifier le droit d’option, qui aujourd'hui n’est pas facile à mettre en œuvre par les départements.

Debut de section - PermalienPhoto de Yannick Botrel

Il convient de le rendre opérationnel en desserrant le carcan, car c’est un outil qui peut nous permettre de régler positivement le cas qui nous occupe.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

La parole est à M. Éric Doligé, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Doligé

Ceux qui veulent se marier ont avancé d’excellentes raisons pour cela, tout comme ceux qui ne veulent pas se marier ; mais, au final, il y aura beaucoup de frustration, puisque rien de ce qui est souhaité par les uns ou les autres ne se fera.

Une carte a été préparée par le Président de la République, la commission spéciale a essayé d’en dessiner une autre et de s’y tenir. Si l’on adopte le moindre amendement, plus rien ne tiendra ! Dès lors, la frustration est générale…

En tout cas, quel beau piège que ce texte ! Chacun intervient de façon pertinente, mais, en définitive, on ne peut donner satisfaction à qui que ce soit.

Le Président de la République a dû éprouver un plaisir immense à dessiner cette carte des régions avec ses crayons de couleur, même s’il a dû effectuer quelques corrections pour tenir compte de remarques formulées par certaines personnalités d’importance. Cependant, cette carte est totalement inapplicable faute de vision et d’autorité, comme l’a dit tout à l’heure M. Raffarin. Nous sommes donc dans le brouillard.

Cela m’amuse d’entendre certains déclarer vouloir se marier avec telle ou telle région, sans savoir comment les compétences seront réparties. Dès lors que la corbeille de la mariée est vide, je ne vois pas l’intérêt d’envisager un mariage.

Nous sommes tombés dans le piège qui nous était tendu ! Tout à l’heure, lors des questions d’actualité, j’ai entendu un membre du Gouvernement évoquer la marque de fabrique du Président Hollande : le présent texte la porte… Le Président Hollande a fait sa propre synthèse et la carte qu’il a établie sème la pagaille, parce qu’il ne peut en aller autrement.

Concernant la région Centre, j’ai conservé toute une pile de coupures de presse. Au début, on a voulu nous marier avec l’Auvergne. Le président de la région a trouvé l’idée formidable : les sources de la Loire se trouvant en Auvergne, il y avait donc une continuité. Manque de chance, ces sources ne sont pas en Auvergne… Mais ce n’est pas grave !

Ensuite, on a projeté de nous marier avec le Limousin et Poitou-Charentes. Voilà qui fera une belle région ! Mais finalement, le Limousin et le Poitou-Charentes ont dit qu’ils ne voulaient pas de la région Centre… Puis les Pays de la Loire, sollicités, nous ont dit oui à 2 % ! Dans ces conditions, le mariage promettait de ne pas durer longtemps.

En conclusion, tout le monde nous a rejetés, et nous sommes restés tout seuls. Finalement, nous sommes très bien ainsi ! On en est revenu au point de départ, la seule évolution étant que la région s’appellera désormais, aux termes de l’article 2, Centre-Val-de-Loire. Cela valait tout de même le coup d’élaborer ce texte pour ça ! C’est vraiment du beau travail ! Plus sérieusement, quel gâchis que de passer autant de temps à élaborer des propositions pertinentes de grande qualité pour en arriver à cette unique grande décision, que l’on va pouvoir vendre à toute la presse : le Centre devient le Centre-Val-de-Loire, sans que ses contours soient modifiés !

Je trouve que la démarche suivie est véritablement machiavélique. Les ministres doivent rire en leur for intérieur. Ils patientent, sachant que, au bout du compte, il ne sortira pas grand-chose de ces trois jours de débats. C’est assez décevant.

J’espère simplement que l’on va progresser sur la question du droit d’option : ce sera peut-être la petite ouverture qui nous permettra de croire encore à la possibilité d’une évolution. Espérons que la discussion du texte relatif aux compétences nous permettra d’entrevoir enfin le bout du tunnel.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Ronan Dantec

Ce matin, quand je me suis exprimé sur l’Alsace, j’ai expliqué que j’envisageais la question avec un certain détachement, n’y ayant pas d’intérêt spécifique. Il en va autrement à cet instant puisque, voilà un peu plus d’un quart de siècle, je vivais mes premiers enthousiasmes militants en présidant le comité pour l’unité administrative de la Bretagne. On se posait alors les mêmes questions qu’aujourd’hui, exactement dans les mêmes termes… Cela me fait tout de même un peu sourire.

La crédibilité de cette réforme s’est fracassée sur l’ouest de la France. Nous assistons à un véritable bal des hypocrites !

Le ministre nous a expliqué que garder en l’état les trois régions Bretagne, Pays de la Loire et Centre n’avait strictement aucun sens, mais que l’État n’avait pas le courage d’en faire plus et qu’un jour, peut-être, entre demain et cinquante ans, on trouverait enfin la solution…

Je suis d’accord avec Jean Germain : on s’est tout de même un peu payé la tête de la région Centre, qui s’appellera donc désormais Centre-Val-de-Loire. On aurait peut-être pu la baptiser « variable d’ajustement », ce nom aurait assez bien correspondu à la réalité de ce qui s’est passé ces dernières semaines.

L’État, faute de méthodologie, n’a pas fait jouer son autorité, pour reprendre le mot de Jean-Pierre Raffarin. Si l’État considérait que nous devions aboutir à une carte des régions à peu près équilibrée, il fallait qu’il pose quelques règles et que, surtout, il annonce qu’il imposerait sa solution si nous ne réussissions pas.

L’État ayant estimé que l’on ne devait pas trop contrarier un ministre de la défense – il dispose des commandos de marine ! –, l’idée que la Bretagne ne bougerait pas a très vite prévalu.

Par ailleurs, en face, dans les Pays de la Loire, beaucoup vont maintenant nous jurer, la main sur le cœur, qu’ils voulaient absolument la fusion avec la Bretagne. Or les mêmes, depuis vingt-cinq ans, consacrent énormément d’énergie à empêcher que cette fusion puisse se faire… Un tel niveau d’hypocrisie collective me laisse stupéfait !

Depuis des années, le président Auxiette tient un discours anti-breton incroyable : tous les poncifs sur l’identité bretonne, qui serait un repli sur soi, y sont passés. Comment voulez-vous faire la fusion avec des gens qui ne cessent de dénigrer les Bretons ? Il est tout de même difficile d’y parvenir sur de telles bases !

Je suis tout aussi critique à l’égard de l’attitude de mes amis bretons, qui se montrent incapables d’admettre qu’une partie de l’avenir de l’ouest breton tient au lien fort qui unit celui-ci à la métropole de Bretagne sud et capitale historique de la Bretagne qu’est Nantes.

Le débat, tel qu’il est posé, constitue un moment politique important et assez triste pour l’Ouest, en ce qu’il marque un effondrement de la capacité collective à porter un projet. Mes propos sont extrêmement sévères, parce que je crois que c’est vraiment ce à quoi nous assistons aujourd’hui.

Les uns et les autres invoquent ensuite le droit d’option, en nouant des alliances un peu étonnantes. J’ai ainsi vu passer une proposition visant à réunir la région Centre et l’ouest breton, en passant par-dessus les Pays de la Loire… On invente toutes sortes de choses qui n’ont strictement aucun sens. Je crois qu’il nous faut réagir collectivement devant cette impasse, cette incapacité à mener un projet collectif. Il faut peut-être redonner la parole au peuple, mais ceux-là mêmes qui prônent la fusion voteront contre toute capacité d’initiative référendaire et limiteront l’exercice du droit d’option, parce que celui-ci les tétanise. Les incohérences vont donc se poursuivre, dans l’attente de l’émergence d’une vision partagée.

Debut de section - PermalienPhoto de Ronan Dantec

Il n’y a, selon moi, que deux possibilités : soit on veut deux régions avec une armature urbaine, ce qui amène à réunir la Bretagne avec les départements les plus proches des aires urbaines de Nantes et de Rennes, à savoir la Vendée et la Mayenne, tandis qu’un grand axe ligérien s’étendra jusqu’à Angers et Le Mans, mais je sais très bien que cela ne fait pas consensus ; soit on se montre capable de faire vivre une identité bretonne forte et reconnue au sein d’une nouvelle région regroupant la Bretagne et les Pays de la Loire, mais j’ai cru comprendre que ceux qui, pendant des années, se sont battus contre la reconnaissance de l’identité bretonne ne sont pas prêts à cet effort. Je crains donc que l’on en reste encore longtemps au statu quo.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

La parole est à M. Dominique de Legge, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique de Legge

Comme mon collègue Éric Doligé, depuis vingt-quatre heures, j’écoute patiemment. J’ai pu constater que nous sommes tous d’accord pour dire que le résultat sera mauvais. L’une des raisons pour lesquelles il en sera ainsi apparaît au travers des amendements en discussion à cet instant.

Monsieur le secrétaire d’État, le Gouvernement n’a pas du tout cherché à faire une carte des régions ; il a simplement cherché à diviser le nombre de régions par deux. Par conséquent, on nous a dit que nous allions devoir nous débrouiller pour marier des régions dont le périmètre serait laissé constant.

Nous le voyons à propos des régions Centre, Pays de la Loire et Bretagne : le choix est impossible. Pour trouver une solution, il faut sans doute imaginer un redécoupage un peu plus cohérent entre ces trois régions, en acceptant de prendre en compte la réalité départementale. Mais comme vous ne voulez pas entendre parler du département et que, depuis le début, malgré les discours, malgré les correctifs, malgré vos changements de pied, ce projet de loi est inspiré par la négation des départements, nous ne pouvons pas avancer ! Il s’agit donc d’un marché de dupes.

En ce qui concerne la région Bretagne, il est évident que la Loire-Atlantique est bretonne. Un grand nombre de communes de Loire-Atlantique ont le mot « Bretagne » accolé à leur nom. Qui ira nier qu’Anne de Bretagne habitait Nantes ? Tout à l’heure, mon collègue Hugues Portelli me disait qu’il avait visité la chapelle Saint-Yves-des-Bretons à Rome : pour les Italiens, la Loire-Atlantique fait évidemment partie de la Bretagne. Et nous, nous ne le saurions pas ?

Monsieur le secrétaire d’État, vous nous avez expliqué tout à l’heure très doctement qu’il fallait réunir Midi-Pyrénées et Languedoc-Roussillon, au motif qu’il faut bâtir de grandes régions. En revanche, que la Bretagne continue à ne regrouper que quatre départements et un peu plus de 3 millions d’habitants ne vous choque pas du tout ! Il va falloir m’expliquer pourquoi ce qui est vérité dans le Sud ne le serait plus dans le Nord et à l’Ouest.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique de Legge

Nous Bretons sommes dans la pire situation qui soit : notre région sera la plus petite –encore que la situation de l’Alsace ait évolué – et la plus périphérique de France. Je ne peux pas m’en satisfaire et, par conséquent, je voterai tous ces amendements, qui ont pour objet, à défaut de régler le problème de façon définitive, de nous permettre à tout le moins de sortir d’une situation qui est la plus mauvaise possible pour nous.

Permettez-moi, en conclusion, de m’étonner que l’on puisse tenir un discours en Bretagne et un autre à Paris.

Le conseil régional de Bretagne, au sein duquel j’ai siégé pendant plusieurs années, sous deux majorités différentes, a adopté je ne sais combien de vœux, à l’unanimité, pour demander que la Bretagne retrouve ses limites originelles. Il se trouve que deux ministres du Gouvernement, également conseillers régionaux de Bretagne, ont fait campagne en cette qualité pour que la Bretagne retrouve ses limites historiques. Je les trouve bien silencieux aujourd’hui… §Ces deux ministres, dont l’un est en charge des collectivités territoriales, ne trouvent rien à redire à la présente carte.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

La parole est à M. Jean-Jacques Filleul, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Filleul

J’ai bien conscience que le débat sur cette région de l’ouest est complexe et je ne sais pas si l’amendement n° 26 pourra « prospérer », comme dirait le rapporteur, mais je tiens à dire pourquoi je l’ai cosigné.

Comment admettre en effet que, dans la construction de la nouvelle carte des régions, l’ouest et le centre-ouest soient figés, qu’ils ne connaissent aucune évolution ? Par cet amendement, nous avons voulu démontrer que nous avions la volonté de franchir les obstacles, de ne pas en rester à cet état de fait tel qu’il apparaît dans les différentes cartes présentées jusqu’à ce jour.

Nous optons pour un territoire régional regroupant les régions Centre et Pays de la Loire. Cette région Val de Loire correspondrait à notre histoire et à notre identité.

Nous savons les réticences de nos collègues des Pays de la Loire.

S’il est vrai que la région Centre était constituée, à sa création, de territoires hétérogènes, il est clair aujourd’hui qu’elle a su faire valoir ses atouts, mobiliser les énergies…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Filleul

… et mettre en œuvre de nombreux projets, qui ont tous contribué à une meilleure visibilité, à faire du Centre une région qui compte. Elle n’a pas seulement vocation à accueillir des visiteurs dans ses nombreux sites touristiques. Elle est la sixième région industrielle de notre pays et la première pour l’agriculture céréalière.

En fusionnant nos atouts et nos territoires, avec comme épine dorsale le fleuve Loire, notre démarche sera forcément très positive pour la culture, l’économie et l’environnement, auxquels nous sommes attachés, du Val de Loire.

Cette démarche est soutenue par la plus grande partie des parlementaires de la région Centre et unanimement par le conseil régional. La région Val de Loire est une évidence pour les élus de la plupart des villes et une idée cohérente pour les populations.

Monsieur le secrétaire d'État, je tenais à vous dire que le Val de Loire mérite mieux que de rester figé pour des décennies dans la nouvelle carte que nous sommes en train de dessiner.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Mon cher collègue, je n’ai pas voulu vous interrompre, mais je vous rappelle que nous en sommes aux explications de vote sur les amendements identiques n° 3 et 67 rectifié. Je considérerai donc que vous vous êtes d’ores et déjà exprimé sur l’amendement n° 26.

La parole est à M. Yannick Vaugrenard, pour explication de vote sur les deux amendements identiques précités.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Heureusement que tous les groupes se sont engagés à « faire court » !

Debut de section - PermalienPhoto de Yannick Vaugrenard

Madame la présidente, je vous remercie de me donner de nouveau la parole.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Exactement : de nouveau ! Si ça continue, il faudra changer le règlement !

Debut de section - PermalienPhoto de Yannick Vaugrenard

J’estime en effet que des propos exagérés ont été tenus, notamment à l’endroit du président de la région des Pays de la Loire, M. Auxiette, qui n’est bien évidemment pas là pour se défendre.

Lorsque M. Dantec dit, pour faire bref, que M. Auxiette est hostile à la culture bretonne, c’est totalement inexact, dépourvu de tout fondement. J’ai été rapporteur du budget de la région des Pays de la Loire pendant neuf ans et je peux vous assurer que, durant ces années, et même avant, le soutien à la politique culturelle bretonne a été très important. On peut apporter un soutien objectif à une culture et à un patrimoine, en y consacrant des moyens, au-delà des discours, et souhaiter que, sur le plan administratif, les deux régions s’unissent parce que, dans les faits, elles travaillent déjà ensemble depuis un certain nombre d’années.

Ce sont à la fois un constat de l’existant et une logique de projet objectif qui nous conduisent à dire aujourd’hui qu’il est nécessaire que l’ouest de la France ne devienne pas le Far West de l’Europe, et donc que les régions de Bretagne et des Pays de la Loire s’unissent. Est-ce que, pour autant, cela remet en cause l’identité culturelle de la Bretagne ? Bien sûr que non !

Des expressions fortes ont été employées. Parfois, ceux qui parlent de « bal des hypocrites » se trouvent au milieu de la piste de danse ! Quant à parler d’une OPA inamicale, restons sérieux ! OPA sur qui ? Sur quoi ?

Aujourd'hui, on ne peut que constater l’existence de coopérations fortes entre la Bretagne et les Pays de la Loire.

Par ailleurs, une union des deux régions se justifierait par des raisons objectives d’aménagement du territoire et de perspectives d’avenir.

Toutefois, il ne faut pas écarter la perspective d’un ensemble Bretagne–Pays de la Loire–Centre, qui serait un atout considérable pour l’ouest de la France.

J’appelle simplement les uns et les autres à la raison. L’aspect culturel et historique est important. Lorsque le président de la région des Pays de la Loire a été attaqué avec beaucoup de virulence, et même presque physiquement, lorsque les transports régionaux ont été sauvagement vandalisés, j’aurais souhaité que ceux qui parlent aujourd’hui de bal des hypocrites réagissent avec un peu plus de vigueur…

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

La parole est à M. Gérard Cornu, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Cornu

Madame la présidente, comme les amendements sont en discussion commune, mon intervention portera sur l’amendement n° 26. Cependant, pour satisfaire le président de la commission spéciale, je m’engage à ne pas reprendre la parole lorsque nous en arriverons au vote sur cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Il ne s’agit pas de me satisfaire, il s’agit de débattre de manière aussi organisée que possible !

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Cornu

J’appartiens à la région Centre, qui sert – on peut le dire ainsi – de variable d’ajustement, et cela s’est manifesté dès la création des régions.

Comme l’a dit Éric Doligé, la grande avancée, c’est qu’il s’agit maintenant de la région Centre–Val de Loire, avec un « e » !

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Cornu

Le problème vient du fait que mon département est celui de l’Eure-et-Loir, sans « e » ! Allons-nous devoir ajouter un « e » pour être cohérent avec notre appartenance à la région Centre–Val de Loire ?

Plus sérieusement, je voudrais répondre à M. Germain et à M. Filleul. Je ne suis pas d’accord pour dire que la région Centre est une petite région !

À voir la carte des régions telle qu’elle va sans doute ressortir de cette assemblée, sa superficie sera plus grande que celle de la Bretagne, de la Normandie réunie, de l’Alsace – et même de l’Alsace-Lorraine si elles étaient réunies –, de Midi-Pyrénées ou de Languedoc-Roussillon.

En ce qui concerne le nombre d’habitants, nous nous situons au même niveau que Bourgogne–Franche-Comté. De ce point de vue, nous ne sommes donc ni petits ni grands !

Sur le plan économique, nous nous appuyons sur des villes importantes, Orléans et Tours.

La région Centre est une belle région, dont nous n’avons pas à rougir.

Je suis, pour ma part, défavorable à une union avec les Pays de la Loire parce que, à entendre mes collègues de cette région, il est clair qu’ils ne veulent pas de nous ! Ils l’ont dit, ils préfèrent se tourner vers la Bretagne, ce que je peux comprendre : il n’est peut-être pas cohérent, pour eux, de voir l’Indre et le Cher associés aux Pays de la Loire…

Restons donc la région Centre et nous verrons bien ce qui se passera.

De toute façon, il faut attendre, comme on l’a dit et répété, de connaître les compétences. Si l’on fait de véritables régions stratégiques avec des départements de proximité, il sera peut-être temps, à ce moment-là, de réfléchir à une grande région stratégique de l’ouest de la France, et faire de même pour son équivalent à l’est. D’ici là, il est urgent d’attendre.

En tout cas, je ne veux pas faire un mariage avec des gens qui ne veulent pas de nous !

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

La parole est à M. Olivier Cadic, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Cadic

Je suis un élu des Français de l’étranger, mais j’ai tenu à cosigner l’amendement n° 132, qui vise au rattachement de la Loire-Atlantique à la Bretagne.

Pour les Français de l’étranger, le grand moment de réunion, c’est le 14 juillet, où l’on chante la Marseillaise tous ensemble. Il n’empêche que, entre eux, la première question qu’ils se posent les uns aux autres, c’est : « Et toi, de quelle région es-tu ? » L’un vient de Bretagne, un autre de Corse… Le sentiment régional est fort dès lors que l’on vit à l’étranger. Pour nous, la région d’origine, cela signifie vraiment quelque chose : l’Alsace, c’est l’Alsace, la Bretagne, c’est la Bretagne… Bref, la région, cela signifie quelque chose ; on vient toujours d’une région bien identifiée.

Moi qui suis breton, lorsque je passe à Nantes, je vois le château d’Anne de Bretagne. Quand je vais à Guérande, je suis bien en Bretagne. Et je remarque qu’en Loire-Atlantique on met beaucoup en valeur les produits bretons, quelquefois même avec le label made in Bretagne. Et c’est très bien comme ça !

Pour favoriser le tourisme, l’Institut géographique national a, en 2010, substitué à la carte administrative de la Bretagne une carte historique.

La Bretagne a besoin de se développer à l’international, dans le respect de son identité culturelle et historique. Selon un proverbe bien connu, « tout ce que l’on peut offrir à un enfant, ce sont des racines et des ailes ». Moi, pour les prochaines générations, je souhaite que l’on rende à la Bretagne toutes ses racines, pour lui permettre de prendre son envol à l’international. §

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

La parole est à Mme Odette Herviaux, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Odette Herviaux

Beaucoup de choses m’ont gênée dans ce débat, notamment lorsqu’on s’est mutuellement reproché d’avoir, à tel ou tel moment, pris des positions qu’il n’aurait pas fallu prendre…

Je voudrais simplement rappeler un certain nombre de faits.

Cela peut avoir quelque chose d’agaçant, mais il est vrai que, quand on évoque la Bretagne, cela « parle » à la plupart des gens, comme vient de le dire M. Cadic. Pour autant, il existe aussi des réalités géographiques : sur les quatre départements de la région, seules deux seulement ont une ou des frontières communes avec une ou deux autres régions : le Morbihan, qui a une toute petite frontière avec les Pays de la Loire, et l’Ille-et-Vilaine.

Ce caractère périphérique de la Bretagne, nous le vivons au quotidien. Nombreux sont ceux qui me disent qu’il faut seulement deux heures de TGV pour rallier Rennes à Paris. Certes, mais c’est oublier que Rennes n’est que la porte de la Bretagne ! Il faut autant de temps, ensuite, pour aller à Brest ou à Quimper qu’il en a fallu pour venir de Paris.

Il n’est donc pas inutile de prendre le temps d’expliquer pourquoi la solution particulière retenue pour la Bretagne n’est ni le fait du hasard ni le fait du prince. Ce n’est pas parce qu’il y avait des commandos de marine derrière un ministre ! Il y a une réalité, et cette réalité repose sur deux éléments.

Le premier, c’est l’image de la Bretagne à l’extérieur : non pas une image passéiste ou fondée uniquement sur les langues régionales et la culture, mais une image liée à son dynamisme économique.

Le second, c’est le fait que la première communauté de communes est née en Bretagne. Depuis lors, tout le territoire national s’est couvert de communautés de communes et de pays. Nous avons donc une vraie tradition de coopération et de travail avec les autres et, dès lors, le reproche qui nous est fait de ne pas vouloir partager avec nos voisins des Pays de la Loire ne saurait être fondé.

Debut de section - Permalien
André Vallini, secrétaire d'État

Mesdames, messieurs les sénateurs, je veux répondre brièvement à tous les propos, fort intéressants, qui viennent d’être tenus sur les régions Bretagne, Pays de la Loire et Centre, et, au-delà, sur ce qui est dit depuis quelques heures dans cet hémicycle.

Je veux d'abord réagir aux nombreuses critiques que suscite la méthode.

Tout à l'heure, Yannick Botrel a évoqué les constituants de 1789 et 1790. Il se trouve que je suis en train de lire la dernière biographie de Robespierre… §

Debut de section - PermalienPhoto de André Vallini

Je parle de la Constituante : c’était bien avant la Terreur !

J’en suis justement arrivé au passage qui concerne la création de la carte des départements. Pour élaborer cette carte des départements, totalement artificiels à l’époque, un « comité de la carte » s’est réuni pendant six mois. Six mois de débats dans les capitales de province et à Paris, à la Constituante : c’est ce qu’il aura fallu pour que sorte la carte des départements.

De même, ensemble – Gouvernement, Sénat et Assemblée nationale –, nous aurons mis six mois pour dessiner une nouvelle carte des régions. §En six mois, le débat aura eu lieu !

Vous dénoncez une réforme précipitée et improvisée, mais cela fait dix ans, quinze ans même, que l’on parle de reconfigurer la carte régionale de la France ! Franchement, croyez-vous vraiment que les choses auraient changé si l’on avait pris six mois, un an ou deux ans de plus ? Les mêmes problèmes se seraient finalement posés devant le Sénat et devant l’Assemblée nationale, à l’ouest, à l’est, au sud et au nord de Paris !

Par conséquent, la réforme de la carte n’est ni précipitée ni improvisée. Le Gouvernement a proposé une carte, et je vous fais observer que ce n’est pas sur elle que nous travaillons aujourd'hui puisque, depuis, l’Assemblée nationale, bien que sa majorité soutienne le Gouvernement, a adopté une carte différente. C’est dire si le Gouvernement est à l’écoute des parlementaires ! §Je m’inscris donc en faux contre le procès qui nous est fait sur la méthode.

Au reste, le débat a également eu lieu dans les provinces, dans nos régions et dans nos départements. Des motions ont été adoptées par les conseils régionaux d’Auvergne et du Languedoc-Roussillon. Les conseils économiques, sociaux et environnementaux régionaux, les CESER, ont été saisis. La presse quotidienne régionale a beaucoup parlé de la carte régionale, et les Français s’en sont emparés.

Debut de section - Permalien
André Vallini, secrétaire d'État

Je le répète, dans six mois ou dans un an, nous aurions eu les mêmes problèmes, très difficiles, à résoudre.

Je me tourne maintenant vers le groupe CRC. On peut évidemment organiser des référendums sur tous les sujets, notamment sur celui-ci. Mais, là encore, sur quels critères ? Avec quelles informations ? Pour combien de temps ? Sur un tel sujet, le rôle du Parlement n’est-il pas aussi de prendre ses responsabilités ? Les sénateurs sont des représentants du peuple, à l’instar des députés. Ils sont aussi les représentants des territoires. En cette double qualité, vous devez savoir écouter – quand vous siégez, en fin de semaine, dans les instances délibérantes des assemblées locales –, consulter, vous forger une opinion, puis trancher ! Il vous a d'ores et déjà été demandé de vous prononcer, et il vous le sera encore dans quelques heures, à l’issue de nos échanges.

Je veux maintenant réagir sur le fond.

Monsieur Doligé, je vous ai entendu dire, à la suite de Jean-Pierre Raffarin, qu’il n’y avait pas de vision sur la carte régionale. Cette vision existe, et elle est très simple : comme je l’ai indiqué tout à l'heure, il s’agit d’édifier de grandes régions, puissantes, attractives et compétitives sur le plan économique, à l’échelle européenne, voire mondiale, pour attirer les investisseurs et aider les entrepreneurs, y compris les plus petits, à se développer sur nos territoires.

La compétence économique, de l’innovation à l’internationalisation, de l’apprentissage à la formation, en passant par le tourisme, et peut-être, demain, le service public de l’emploi, en somme, tout ce qui fait l’attractivité d’une région, son essor, son rayonnement, ressortira alors de la compétence régionale.

C’est à partir de ce critère, essentiel, majeur, qu’il vous est demandé de vous prononcer sur une carte régionale.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Je mets aux voix les amendements identiques n° 3 et 67 rectifié.

J'ai été saisie de deux demandes de scrutin public émanant, l'une, du groupe UMP et, l'autre, du groupe du RDSE.

Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

Il est procédé au dépouillement du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Voici le résultat du scrutin n° 9 :

Le Sénat n'a pas adopté.

Je mets aux voix l'amendement n° 132.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

La parole est à M. Jean Germain, pour explication de vote sur l'amendement n° 26.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Germain

Je serai très bref, pour ne pas fâcher le président Hyest.

Néanmoins, pour avoir assisté – comme d’autres – à l’intégralité des débats sur le texte et ne m’être exprimé que trois minutes au nom de la région Centre, je pense, eu égard au temps que nous avons passé sur l’Alsace, avoir quelque droit à prendre la parole. L’égalité le commande, même s’il ne faut évidemment pas trop allonger les débats.

Je veux simplement dire à M. le secrétaire d’État que les habitants et les entreprises de la région Centre veulent vivre dans une grande région à taille européenne. Le sujet est là ! Nous souscrivons à cette réforme depuis le début, et je ne suis pas le seul à le dire. Or, après avoir prétendu nous unir de tous côtés – avec Poitou-Charentes, avec l’Auvergne, avec le Limousin, avec les Pays de la Loire –, on nous demande maintenant de rester dans notre coin !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Germain

Au demeurant, il semble que cela arrange beaucoup de monde.

Nous savons bien que nous n’avons pas beaucoup de chances d’obtenir une réponse positive aujourd'hui, mais nous avons pris contact avec de nombreux députés et nous allons continuer à nous battre afin de pouvoir bénéficier de la réforme.

Les habitants comme les entreprises et les salariés de la région Centre veulent vivre dans une grande région à dimension européenne, et nous considérons que nous en avons autant le droit que les autres. Nous demandons donc au Gouvernement et à l’État de nous accorder ce droit.

Comme je le disais à mon collègue d’Eure-et-Loir tout à l'heure, prenons rendez-vous dans un an : si, alors, les grandes régions sont constituées et dotées d’un certain nombre de compétences et donc de capacités – techniques, politiques, économiques et sociales – leur permettant d’attirer des entreprises et d’assurer le développement de diverses infrastructures, que dira-t-on si nous, dans le Centre, nous sommes restés sans bouger, nous contentant de nous satisfaire d’une certaine forme de qualité de vie ? Mes chers collègues, la qualité de vie n’existe que pour ceux qui en bénéficient ! Que signifie la qualité de vie pour un chômeur ou pour un entrepreneur potentiel ?

Je comprends donc ce qui a été dit, même par M. Doligé. Nous ne sommes pas du tout dans l’hostilité. Simplement, nous ne pouvons être mis à l’écart de la réforme. Nous avons le droit d’en bénéficier, et nous le revendiquons. Je le dis dans cette enceinte, et de nombreux collègues députés le répéteront à l’Assemblée nationale.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

La parole est à Mme Odette Herviaux, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Odette Herviaux

À titre personnel, j’aurais été tentée de voter cet amendement, tant il est vrai que, comme le disait M. de Legge tout à l'heure, cela fait dix ans que la région Bretagne affirme sa volonté de retrouver son unité.

Néanmoins, je crois que ces questions sont bien trop importantes pour donner lieu à de la politique politicienne et, cher collègue Jean Germain, même si je partage votre analyse, même si je comprends très bien que le fait que la région Centre se retrouve seule alors qu’elle sera entourée par d’autres grandes régions pose un certain nombre de problèmes, je ne pourrai pas voter votre amendement, car j’estime que l’on ne peut pas marier les gens de force.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Ronan Dantec

Je veux dire à notre collègue Jean Germain que sa demande est tout à fait légitime.

Toutefois, et je rejoins assez largement ce qu’a dit Odette Herviaux sur ce point, l’heure n’est pas à la tactique. La question qui est adressée au Gouvernement est la suivante : existe-t-il, dans le Val de Loire, un ensemble de villes réunies dans un pôle métropolitain, présentant toutes les caractéristiques, tous les attributs d’une métropole ? Le cas échéant, l’État devra participer ! Mais, tout à l'heure, le discours était plutôt : débrouillez-vous et l’État suivra…

Sans coup de pouce de l’État en faveur de la création d’un pôle métropolitain Val de Loire disposant de l’ensemble des attributs d’une métropole, ce qui supposera probablement une discussion – je ne prétends pas qu’elle sera facile – avec Angers, rien ne bougera ! Il existe donc, me semble-t-il, une responsabilité collective à cet égard.

Nous sommes un certain nombre d’élus bretons à avoir pris des initiatives pour dépasser les blocages, autour du collectif « Pour une Bretagne rassemblée ». La démarche peut aujourd'hui être élargie, sur les trois régions concernées, à l’ensemble des élus qui ne se satisfont pas de la situation et avancent, en lien avec l’État, de véritables réponses.

Quoi qu’il en soit, les choses n’évolueront pas par la force ou par des postures, dont l’amendement sur la réunification de la Bretagne est d’ailleurs une illustration.

Pour régler la question sérieusement, il nous faut donc en passer par la création de deux pôles métropolitains – l’un sur l’ouest breton et l’autre sur le Val de Loire – et y travailler collectivement.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

La parole est à M. Yannick Botrel, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Yannick Botrel

Dans cette affaire, il me semble que nous devons avoir le souci de la cohérence.

Les amendements tendant à fusionner Bretagne et Pays de la Loire ont été repoussés et nous avons développé un certain nombre d’arguments pour expliquer en quoi leur adoption n’était pas souhaitable. J’ai dit à mon collègue Michel Canevet que, bien que souscrivant à la proposition consistant à réunir la Bretagne historique dans un même ensemble, les conditions ne me paraissaient pas réunies pour une telle évolution.

J’ai maintenant le regret d’indiquer à mon éminent collègue Jean Germain, malgré toute la sympathie que je porte à sa proposition – proposition intéressante, qu’il conviendra éventuellement de faire prospérer à l’avenir –, qu’il nous faut tirer les conséquences du rejet des trois premiers amendements de cette discussion commune et de notre incapacité à trouver une majorité autour de cette autre proposition. C’est ainsi ! Mais je sais mon collègue suffisamment avisé pour partager cette conclusion…

Par conséquent, je m’abstiendrai sur cet amendement.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

L'amendement n° 76, présenté par MM. Favier et Le Scouarnec, Mmes Assassi, Cukierman et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéa 20

Remplacer l’année :

par l’année :

La parole est à M. Christian Favier.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Favier

Nous proposons de repousser d’un an l’application de l’article 1er du projet de loi. Un tel report permettrait d’éviter toute précipitation et les prochains élus régionaux pourraient ainsi être les artisans de la mise en place du nouveau découpage territorial des régions, au lieu des conseillers régionaux actuels, qui ne seront pas forcément réélus.

Un vrai débat citoyen pourrait alors être organisé autour des conditions des différentes fusions, à l’occasion de la campagne électorale pour les élections régionales. Il porterait sur la mise en œuvre des politiques publiques au sein des futures régions puisque, chacun le sait, des différences existent dans la façon dont les régions déploient leurs compétences ; de ce fait, la fusion de deux, voire trois régions soulèvera également des questions d’harmonisation.

Reporter d’un an la mise en œuvre de la loi permettrait donc aux citoyens d’en devenir, pour partie, les acteurs.

En outre, cette proposition est en cohérence avec un autre de nos amendements, déposé à l’article 12 et ayant pour objet d’organiser les prochaines élections régionales, non pas en décembre 2015, mais en mars 2016. Nous éviterions ainsi une élection en pleine préparation des fêtes de fin d’année, à une période qui, on le sait, est souvent incertaine sur le plan climatique dans plusieurs zones du territoire.

Nous avons évidemment conscience que, si ce report était accepté, les fusions de régions ne pourraient être mises en œuvre au cours de l’exercice budgétaire 2016, d’où la cohérence du présent amendement de repli, visant à reporter la mise en œuvre de l’article 1er au 1er janvier 2017.

Enfin, notre commission spéciale et la commission de l’Assemblée nationale semblant désormais s’accorder sur un nombre inchangé de conseillers régionaux, les futures élections peuvent se dérouler dans le cadre des périmètres actuels des régions. Là où les périmètres auront été modifiés, les assemblées des futures régions seront alors constituées par addition des assemblées des anciennes régions.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

La commission n’ayant pas remis en cause le principe de l’application de la carte à compter du 1er janvier 2016, l’avis est défavorable.

Debut de section - Permalien
André Vallini, secrétaire d'État

Défavorable également.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

L'amendement n° 11 rectifié, présenté par M. Masson, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - À compter du prochain renouvellement général des conseils régionaux, le conseil économique, social et environnemental de chaque région est supprimé.

Cet amendement n'est pas soutenu.

L'amendement n° 99, présenté par MM. Dantec, Placé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… – Afin de prendre en compte le nouveau découpage des régions prévu par le présent article, les découpages administratifs fondés sur les régions actuelles sont revus par décret avant le 1er juillet 2015.

La parole est à M. Ronan Dantec.

Debut de section - PermalienPhoto de Ronan Dantec

Cet amendement vise à prévoir que l’ensemble des découpages régionaux prévus par nos textes réglementaires seront revus avant le 1er juillet prochain. La fusion de certaines régions rend indispensable cette révision des cartes régionales qui ne relèvent pas de la loi.

Il s’agit en fait d’un amendement d’appel. J’aimerais entendre M. le secrétaire d’État nous dire comment l’État compte évoluer, de son côté, quant à cette évolution de la carte.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement. Ce dernier tendrait effectivement à faire injonction à l’État de s’organiser, ce qui n’entre pas dans nos prérogatives. C’est même contraire à tous les principes !

Debut de section - Permalien
André Vallini, secrétaire d'État

Il convient en effet de bien distinguer ce qui relève du législateur, en l’espèce le découpage de la nouvelle carte régionale et les compétences des collectivités locales, et l’organisation territoriale de l’État, qui relève de l’État lui-même.

Pour autant, monsieur Dantec, vous avez raison : le Gouvernement doit tirer les conséquences de la nouvelle carte des collectivités régionales sur l’organisation de ses propres services. C’est pourquoi le Premier ministre a présenté une communication relative à la réforme de l’État lors du conseil des ministres du 2 juillet dernier et a confié au ministre de l’intérieur le soin de lui proposer un schéma de réorganisation de l’administration territoriale de l’État avant la fin du premier trimestre 2015.

Sur proposition du ministre de l’intérieur, huit chantiers relatifs à la réforme de l’administration territoriale de l’État ont été précisés par circulaire du Premier ministre en date du 16 septembre 2014. Parmi ceux-ci, figure une rénovation de la charte de la déconcentration, afin de maintenir une présence efficace de l’État sur les territoires et de pouvoir, plus encore qu’aujourd'hui, adapter la mise en œuvre des politiques publiques aux réalités locales.

Le Premier ministre a par ailleurs mandaté une mission inter-inspections afin qu’elle fasse des propositions précises, toujours pour le début de l’année 2015, sur l’organisation territoriale de l’État, en particulier au niveau régional. Le ministère de l’intérieur conduit déjà des travaux de réflexion en ce sens, qui seront enrichis par le rapport de cette mission.

Ainsi, l’objectif du Gouvernement est d’être au rendez-vous du 1er janvier 2016, avec une montée en gamme des services publics. Il n’y a donc pas lieu de fixer dans la loi des dispositions particulières sur ce point ou d’établir un calendrier de publication des décrets avant le 1er juillet 2015.

Vous le voyez, le Gouvernement se prépare, lui aussi, à réorganiser ses services au niveau territorial en fonction de la nouvelle carte régionale qui aura été adoptée par le Parlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote sur l'amendement n° 99.

Debut de section - PermalienPhoto de Ronan Dantec

Comme je l’ai indiqué, mon amendement était un amendement d’appel et M. le secrétaire d’État a parfaitement répondu à mes préoccupations. Je le remercie de sa réponse et je retire cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

L'amendement n° 99 est retiré.

La parole est à Mme Sophie Primas, pour explication de vote sur l’article.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

Depuis deux jours, j’ai assisté à l’ensemble des débats sans prendre la parole. En tant qu’élue de l’Île-de-France – même si je suis aussi, bien sûr, élue de la République –, je ne me sentais pas la légitimité de le faire. J’ai donc écouté avec beaucoup d’attention les différentes interventions, et je dois dire que j’en retire un sentiment étrange.

Je suis en effet très admirative devant l’attachement profond, viscéral, que tous les orateurs, indépendamment des couleurs politiques, ont témoigné à leur territoire, et de l’ambition qui est la leur pour ces territoires. Toutefois, à titre personnel, je vais m’abstenir sur cet article, car, malgré le travail méritoire de la commission spéciale, je ne me reconnais toujours pas le droit, au bout de deux jours, de « tripatouiller » la France depuis cet hémicycle, comme nous nous apprêtons à le faire.

Depuis le début, le Gouvernement a pris cette réforme à l’envers. Nous sommes d’accord sur la nécessité de réformer, monsieur le secrétaire d’État, mais cette transformation doit émaner de cette « intelligence des territoires » qu’on a tant invoquée au cours de ces deux jours.

À nous, parlementaires, à l’Assemblée nationale et au Sénat, il revient d’abord de définir ce que nous voulons pour notre France. Nous le ferons en décembre et croyez bien que nous prendrons toute notre part dans ce débat. Nous devons d’abord fixer des objectifs ambitieux, arrêter une méthode, un planning, puis nous devons demander aux territoires de définir le détail de l’organisation, au niveau des régions et des départements. C’est ainsi qu’il faut procéder, alors qu’on nous demande de faire l’inverse !

C’est pourquoi je m’abstiendrai sur cette nouvelle carte des régions, même si, encore une fois, j’ai conscience du travail réalisé par la commission spéciale sur la carte.

Je ne sais pas en mesure de dire à nos amis d’Alsace s’ils ont plus raison que nos amis de la Lorraine ! Je ne suis pas en mesure de dire à nos collègues du Nord-Pas-de-Calais – et nous avons entendu des témoignages poignants – si leurs arguments sont plus convaincants que ceux de nos collègues de Picardie ! Je ne suis pas en mesure de dire à nos amis bretons, auxquels je suis très attachée, s’il faut ou non rattacher à leur territoire le département de Loire-Atlantique ou telle ou telle région !

Je pense que, avec cette loi, nous nous trompons et je ne veux pas cautionner la méthode ici à l’œuvre pour tripatouiller notre France !

Mes chers collègues, la carte que nous dessinons aujourd'hui se retrouvera dans les livres de géographie de nos enfants. Nous portons une responsabilité historique, qu’il faut prendre au sérieux. Bien sûr, nous devons faire des économies et la réforme territoriale doit y contribuer. Mais, mes chers amis, nous ne sommes pas à une année près ! Les efforts que nous devons réaliser porteront leurs fruits dans dix ans ! S’il vous plaît, prenons le temps !

Voilà pourquoi je ne cautionnerai pas plus la carte qui sortira de cet hémicycle que celle de l’Assemblée nationale. Je le répète, à titre personnel, je ne me sens pas légitime à prendre une telle décision.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de René-Paul Savary

Dans la continuité de l’intervention de ma collègue Sophie Primas, je tiens à souligner que nous partons sur de mauvaises bases.

Ainsi, l’Île-de-France n’est pas concernée par cette réforme, qui traite des provinces… Mais où donc se posent les problèmes sur lesquels, depuis deux jours, nous nous appesantissons ? Sur les départements et régions de la troisième couronne, de la périphérie du Bassin parisien, avec des villes « portes d’entrée du Grand Paris » comme Rouen, Reims et Orléans, et leurs alentours !

Trop loin de Paris pour bénéficier de ses avantages, mais trop près pour ne pas en subir les inconvénients, ces territoires partagent les mêmes problèmes. Ils accueillent des populations en provenance de l’Île-de-France, attirées par le moindre coût de la vie, mais se délocalisant avec leurs difficultés. En effet, ces personnes n’ont pas forcément de travail et, si elles en ont un, elles peuvent très rapidement y renoncer en raison des contraintes liées aux déplacements.

Ni le produit intérieur brut de ces zones ni leur densité de population ne sont particulièrement élevés et, bien entendu, leur taux de chômage est supérieur au taux constaté en Région parisienne, du fait, précisément, de leur situation périphérique et des difficultés qui en découlent.

C’est pourquoi la logique veut que ces régions soient massifiées et dotées d’une taille supérieure à celle d’autres régions. Lorsqu’un territoire comprend une grande métropole, on peut envisager une petite région. Mais les régions n’accueillant pas de grande métropole doivent être agrandies et massifiées. Bien sûr, tout dépend des compétences qui seront attribuées au « contenant »… Et aussi du maintien, ou non, des départements.

L’important, à partir de maintenant, monsieur le secrétaire d'État, ce sont les possibilités de détachement afin de parvenir, à travers cet exercice incohérent, à une certaine rationalité territoriale. C’est grâce au détachement de départements, me semble-t-il, que l’on réussira peut-être à élaborer une carte répondant mieux aux préoccupations de nos concitoyens dans ces différentes zones.

C’est la raison pour laquelle, malgré le travail important réalisé par la commission spéciale sous la houlette de son président, je ne pourrai pas voter pour l’article 1er. Je m’abstiendrai, mais il s’agit d’une abstention constructive destinée à approfondir la démarche et à faire en sorte que nous puissions, demain, proposer à nos concitoyens une carte plus présentable.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laménie

Comme d’autres collègues qui ne s’étaient pas encore exprimés, à l’instar de Sophie Primas voilà quelques minutes, je voudrais exposer brièvement ma position sur l’article 1er avant qu’il ne soit mis aux voix.

J’aurais pu intervenir lorsque a été évoquée la région Champagne-Ardenne, et elle l’a été à plusieurs reprises par René-Paul Savary, sénateur de la Marne. De même, je l’aurais pu lorsque est venu en discussion un amendement que j’avais cosigné avec Philippe Leroy et quelques autres collègues, qui visait à regrouper Alsace, Champagne-Ardenne et Lorraine, mais qui n’a pas été retenu. Bien entendu, nous respectons les choix des uns et des autres.

Certes, aucune cartographie n’est simple, je peux en témoigner en tant que géographe. Il a d’ailleurs été beaucoup question de géographie au cours de nos débats. Cela m’a fait plaisir car, lorsque j’étais étudiant dans cette discipline, on me disait toujours qu’elle n’offrait guère de débouchés, hormis l’enseignement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission spéciale. C’est comme la philosophie !

Nouveaux sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laménie

Il est vrai que quelques-uns d’entre nous sont professeurs d’histoire-géographie. Du reste, durant ces trois jours de discussion, nous avons eu droit à de nombreux cours d’histoire et de géographie, venant de toute part. Je me souviens qu’à une certaine époque, l’apprentissage du nom des départements et des chefs-lieux occupait une large place dans l’enseignement primaire… Il me paraît utile, dans des circonstances comme celle-ci, de les avoir toujours en mémoire !

J’ai également été tenté de prendre la parole tout à l'heure quand notre collègue Jacques Mézard est intervenu pour évoquer le Cantal. Mais il m’aurait sans doute fait remarquer que les Ardennes sont assez éloignées du Cantal… Il n’en reste pas moins que j’ai quelques origines auvergnates. §

Plus sérieusement, je crains que ce texte ne produise beaucoup d’amertume, en opposant une région à une autre, un département à un autre. C’est bien dommage !

J’hésitais à voter cet article 1er dessinant la carte des régions. Je le ferai néanmoins par sagesse, par respect pour le travail de fond qui a été réalisé par la commission spéciale.

Nous le savons, il n’existe pas de cartographie idéale.

Cela étant, je tiens à réaffirmer, après Bruno Retailleau, Philippe Bas et quelques autres, que le maintien des départements est indispensable. C’est un échelon de proximité irremplaçable en termes d’efficacité et de travail en commun.

Il faut en outre penser à l’inquiétude qu’éprouvent les personnels des collectivités territoriales depuis quelques années. Malheureusement, nous sommes toujours dans le brouillard quant à leur sort futur.

Trouverons-nous la bonne solution ? Ferons-nous réellement des économies d’échelle ? Les regroupements de régions régleront-ils beaucoup de problèmes ? Nous n’en sommes pas pleinement convaincus...

On aurait pu organiser d’amples consultations et concertations. S'agissant des cantons, on nous a écoutés, mais nous avons été, d’une certaine manière, mis devant le fait accompli avec la nouvelle carte cantonale. Nous nous retrouvons souvent, hélas ! devant le fait accompli.

Nous partageons tous un même amour de notre beau pays. Nous sommes attachés à nos villes, à nos villages, à nos départements, à nos régions : défendons-les ! Après, c’est un problème de gouvernance et de ressources.

Voilà le témoignage que je souhaitais apporter. §

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

La parole est à M. Gérard Cornu, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Cornu

Pour les raisons que viennent d’évoquer Sophie Primas et René-Paul Savary, je m’abstiendrai sur cet article 1er.

Qu’on ne considère pas ma position comme un désaveu du travail de la commission spéciale, mais, moi, je ne sais pas travailler dans de telles conditions. Il s’agit aussi d’une question de méthode : j’aurais de loin préféré définir les compétences, avec des régions stratèges et des départements assurant la proximité. Tel n’a pas été le choix du Gouvernement.

Je ne suis pas satisfait de cette carte. D'ailleurs, je ne sais pas comment on peut définir une carte sans connaître les compétences.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

La parole est à M. Christian Favier, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Favier

Nos longs débats sur cet article 1er auront malheureusement confirmé les limites et les dangers de ce projet de loi. Malgré les efforts de certains d’entre nous, siégeant sur toutes les travées de notre hémicycle, l’expression des égoïsmes territoriaux a trop souvent pris le pas sur la défense des intérêts généraux.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Favier

Nous avons la confirmation que la mise en concurrence de nos territoires se soldera par celle des populations.

Le Gouvernement, de ce point de vue, porte une lourde responsabilité en ayant proposé ce texte sans avoir posé les termes du débat ni défini ses objectifs. Il n’a ni présenté de réelles études de faisabilité et d’impact, ni défini les critères pris en compte pour justifier ses propositions, ni mis en place une méthode de travail, après s’être refusé à organiser une réelle concertation avec les forces sociales, en particulier les élus régionaux et départementaux touchés par ces fusions, alors que la loi lui en fait pourtant l’obligation.

Il est doublement responsable en mettant la charrue avant les bœufs, en proposant d’instaurer de nouvelles frontières avant d’avoir mis en débat les compétences et les moyens dont disposeront, demain, les régions.

Au cours de notre intervention dans la discussion générale, nous vous avions alertés sur le fait que ce texte risquait d’attiser les concurrences, les appétits identitaires de chaque territoire, en soulignant ce qui nous différencie plus que ce qui nous rassemble. Les débats nous ont malheureusement donné raison.

Avec cette carte, en ouvrant et en facilitant le droit d’option des départements qui souhaiteront quitter leur région d’origine, nous allons propager la dérive de nos débats, constatée au-delà de nos rangs, partout en France. Les élus départementaux et régionaux vont se déchirer sur des options contradictoires et, à juste raison, nos concitoyens vont bien entendu faire irruption dans ces débats.

Or vous leur avez retiré tout droit d’intervention dans ce domaine qui les concerne pourtant au premier chef. Nous allons donc faire monter encore les antagonismes et les égoïsmes. Notre pays risque de se déchirer avec la recherche et la désignation de nouveaux boucs émissaires potentiels, au seul profit du populisme.

Toutefois, si le Gouvernement porte la première responsabilité dans ce domaine, la droite sénatoriale y a pris sa part. À force de vouloir que le Sénat définisse sa carte, à force de vouloir elle aussi mettre en place de grandes régions, en faisant croire que cela allait mécaniquement accroître leur capacité d’action, elle a finalement accepté et soutenu les termes du débat posés par le Gouvernement, et contribué à faire monter les antagonismes.

J’en veux pour preuve le long débat que nous avons eu et son attitude face au lobby alsacien, qu’elle a soutenu et auquel elle a cédé.

De même, elle a soutenu et même amplifié la suppression de tout droit d’intervention citoyenne, privant ainsi notre peuple de son droit à la parole, de sa souveraineté.

Pour faire passer ce chambardement de nos institutions locales, le passage en force est la méthode choisie, car notre peuple n’est pas favorable à cette réforme, ainsi que le montre un tout récent sondage : 54 % de nos concitoyens se prononcent contre le redécoupage de nos régions.

Ce texte est donc un mauvais coup porté à notre démocratie et ne répond en rien aux difficultés auxquelles nos concitoyens sont aujourd'hui confrontés.

Nous regrettons aussi que nos collègues socialistes renient la vision décentralisatrice au service de l’émancipation humaine que nous avions portée ensemble durant des décennies, au profit d’une reconcentration locale, d’une recentralisation régionale, d’une mise sous tutelle des collectivités territoriales, ouvrant la voie au fédéralisme, en lieu et place de notre République une et indivisible, forgée par l’histoire et l’intelligence de notre peuple.

Pour toutes ces raisons, avec regret compte tenu des enjeux qui sont dorénavant devant nous, nous ne voterons pas la carte régionale définie à l’article 1er.

Debut de section - PermalienPhoto de Yannick Botrel

Madame la présidente, nous souhaiterions une suspension de séance d’une dizaine de minutes.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Je vous accorde cinq minutes !

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à dix-neuf heures vingt-cinq, est reprise à dix-neuf heures trente.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

La séance est reprise.

Nous reprenons les explications de vote sur l'article 1er.

La parole est à M. Jacques Bigot.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Bigot

Mes chers collègues, en 1995, j’ai été élu maire d’une commune qui vote pourtant toujours à droite. De 1998 à 2010, j’ai été conseiller régional d’Alsace. De 2008 à 2014, j’ai été président de la communauté urbaine de Strasbourg. J’ai rejoint cette respectable assemblée voilà à peine un mois. J’ai souhaité être élu parce que je crois au rôle des collectivités territoriales, parce que je me suis investi à leurs côtés et que je suis plutôt girondin que jacobin.

Je déplore sincèrement que, en première lecture, le Sénat n’ait pas effectué le travail de d’élaboration de la carte qui aurait sans doute permis que celle-ci soit un peu plus cohérente.

J’ai noté, à la lecture des premiers rapports qui ont été déposés, mais aussi au cours de nos débats, qu’un problème se posait quant à la philosophie des régions qu’il convenait d’avoir : faut-il de vastes régions, de taille européenne, ou des régions plus proches de ce qu’elles sont aujourd'hui ? Ce débat, nous l’avons eu, et vous avez eu raison, monsieur le secrétaire d'État, de dire qu’il était passionnant et constructif, source tantôt de consensus, tantôt d’oppositions, au-delà de nos sensibilités politiques.

Dans ce contexte, le groupe socialiste doit saluer, je le dis sincèrement, l’effort qu’a fait la nouvelle majorité sénatoriale pour s’impliquer dans le débat.

En revanche, concernant l’Alsace, je regrette que certains pensent que les choses seront de toute façon réglées à l’Assemblée nationale, avec le Gouvernement. Cela ne peut que conduire un sénateur nouvellement élu à s’interroger sur l’utilité du Sénat… Je ne suis pas sûr que, en l’espèce, nous ayons réussi à la démontrer ! J’ai toutefois l’espoir que nous y parviendrons au cours des six prochaines années, parce que les collectivités territoriales le méritent.

Voilà ce qui conduira le groupe socialiste à s’abstenir sur l’article 1er.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Ronan Dantec

Le groupe écologiste s’abstiendra sur l’article 1er.

Debut de section - PermalienPhoto de Ronan Dantec

Cet article comporte quelques avancées, principalement en ce qui concerne l’Alsace, sur laquelle le débat a été intéressant. Je pense qu’une majorité claire s’est dessinée au Sénat sur cette question et j’espère que l’Assemblée nationale l’entendra. Nous avons collectivement effectué un travail positif sur ce sujet, travail qui n’a d’ailleurs pas uniquement opposé la majorité à l’opposition. On l’a bien vu, la dimension territoriale transcendait souvent l’appartenance à un groupe politique.

Néanmoins, je pense que nous ne sommes pas parvenus à dépasser les difficultés initiales liées à l’absence de méthodologie, que nous n’avons pas été capables – mais l’inverse aurait étonné tout le monde – d’avancer sur la situation ubuesque qui touche l’ouest de la France.

Cette absence de méthode ayant conduit à une carte totalement déséquilibrée, même si deux ou trois avancées sont à noter, le groupe écologiste, je le répète, s’abstiendra. §

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Je mets aux voix l'article 1er.

J'ai été saisie d'une demande de scrutin public émanant du groupe UMP.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

Il est procédé au dépouillement du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Voici le résultat du scrutin n° 10 :

Le Sénat a adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Je suis saisie de trois amendements identiques.

L'amendement n° 30 rectifié est présenté par Mme Troendlé, M. Danesi, Mme Keller et MM. Kennel et Reichardt.

L'amendement n° 57 rectifié bis est présenté par MM. Kern, Bockel, Luche, Cadic, Lasserre, Guerriau, Vanlerenberghe, Longeot et Delahaye, Mme Loisier et Mlle Joissains.

L'amendement n° 120 rectifié est présenté par MM. Dantec, Placé et les membres du groupe écologiste.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’application en Alsace de la procédure de fusion prévue à l’article L. 4124-1 du code général des collectivités territoriales, ce même code est complété par une partie ainsi rédigée :

« HUITIÈME PARTIE

« AUTRES COLLECTIVITÉS RÉGIES PAR L’ARTICLE 72 DE LA CONSTITUTION

« LIVRE UNIQUE

« COLLECTIVITÉ TERRITORIALE D’ALSACE

« TITRE Ier

« DISPOSITIONS GÉNÉRALES

« CHAPITRE UNIQUE

« Art. L. 8111 -1 . – L’Alsace constitue une collectivité territoriale de la République régie par l’article 72 de la Constitution qui exerce les compétences attribuées à un département et à une région ainsi que toutes les compétences qui lui sont dévolues par la loi.

« Art. L. 8111 -2 . – La collectivité territoriale d’Alsace succède aux départements du Bas-Rhin et du Haut-Rhin et à la région Alsace dans tous leurs droits et obligations.

« Art. L. 8111 -3 . – Pour l’application du présent code à la collectivité territoriale d’Alsace :

« 1° La référence au département ou à la région est remplacée par la référence à la collectivité territoriale d’Alsace ;

« 2° La référence au conseil régional ou au conseil départemental est remplacée par la référence à l’assemblée d’Alsace ;

« 3° La référence au président du conseil départemental ou au président du conseil régional est remplacée par la référence au président de l’assemblée d’Alsace ;

« 4° La référence aux conseillers départementaux ou aux conseillers régionaux est remplacée par la référence aux conseillers à l’assemblée d’Alsace. »

La parole est à Mme Fabienne Keller, pour présenter l’amendement n° 30 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Fabienne Keller

Cet amendement vise à présenter l’organisation de la collectivité unique d’Alsace.

Vous le savez, chers collègues, car nous en avons beaucoup parlé, c’est le projet de fusion des deux départements et de la région qui justifie notre souhait de préserver l’Alsace dans la réforme engagée par le Gouvernement.

Toutefois, les débats en commission spéciale nous ont permis de comprendre que la description complète de ce projet trouverait plus naturellement sa place dans le texte sur les compétences, dit « projet de loi NOTRe ». C’est pourquoi, madame la présidente, nous retirons cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

L'amendement n° 30 rectifié est retiré.

L’amendement n° 57 rectifié bis n’est pas soutenu.

La parole est à M. Ronan Dantec, pour présenter l'amendement n° 120 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Ronan Dantec

Je vais retirer cet amendement, mais je souhaite insister sur le fait que ce que nous avons proposé pour l’Alsace devra être défendu avec le même enthousiasme et la même force par les élus alsaciens dans la future loi. Nous comptons sur eux !

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

L'amendement n° 120 rectifié est retiré.

L'amendement n° 65 rectifié, présenté par MM. Vergès, Favier et Karam, est ainsi libellé :

Après l’article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’avant-dernier alinéa de l’article 1er de la loi n° 2011-884 du 27 juillet 2011 relative aux collectivités territoriales de Guyane et de Martinique est ainsi rédigé :

« En Guadeloupe et à La Réunion, le congrès des élus départementaux et régionaux est composé des membres du conseil général et du conseil régional. » ;

La parole est à M. Christian Favier.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Favier

Je présente cet amendement au nom de mon collègue Paul Vergès, qui ne pouvait être présent cet après-midi.

La Réunion présente des caractéristiques propres, qui conduisent à s’interroger sur la pertinence de son organisation institutionnelle et des compétences dont elle dispose au regard des enjeux de développement.

Dans cet esprit, les projets de loi de réforme territoriale constituent une occasion que la Réunion doit saisir afin d’ouvrir une nouvelle étape de son développement, en réalisant l’adéquation de sa double appartenance à l’Europe et à son environnement géo-économique.

La Réunion est une région monodépartementale. Ainsi, deux collectivités cohabitent sur un même territoire : la région et le département. Cette organisation a montré ses limites, malgré les efforts constants d’harmonisation des compétences des exécutifs des deux assemblées.

La Réunion, comme les autres départements d’outre-mer, bénéficie de dispositions spécifiques afin que son caractère de région monodépartementale soit pris en compte.

C’est notamment le cas depuis la loi du 13 décembre 2000 d’orientation pour l’outre-mer. Cette loi avait créé, dans son article 62, une instance nouvelle dans les régions et les départements d’outre-mer : le congrès. Celui-ci réunit les élus départementaux et régionaux ; il est habilité à faire des propositions d’accroissement et de répartition des compétences entre les deux collectivités. Il peut également proposer une évolution institutionnelle adaptée aux conditions spécifiques de chaque département et région d’outre-mer. Cette nouvelle possibilité a malheureusement été supprimée pour la Réunion par la voie d’un amendement adopté en 2001.

La Réunion a été privée de toute perspective d’évolution institutionnelle et l’accroissement du champ de ses responsabilités a connu un nouveau recul avec l’acte II de la décentralisation et la révision constitutionnelle de mars 2003.

En effet, en vertu du nouvel alinéa 5 de l’article 73 de la Constitution, les dispositions de l’alinéa 3 du même article, qui permettent aux régions et aux départements d’outre-mer d’adopter des règles spécifiques relevant du domaine de la loi ou du règlement, s’appliquent à la Guadeloupe, à la Martinique et à la Guyane, mais pas à La Réunion.

La Réunion se trouve donc aujourd’hui condamnée au statu quo institutionnel, alors même que les autres régions et départements d’outre-mer ont pu se saisir des opportunités offertes par les nouvelles dispositions constitutionnelles et législatives.

Ainsi, la Martinique et la Guyane se sont engagées dans la voie de la création, sur leur territoire respectif, d’une collectivité unique se substituant à la région et au département après délibération de leur congrès en ce sens et avec le consentement des électeurs, conformément aux dispositions constitutionnelles. Quant à la Guadeloupe, elle continue à bénéficier de l’instance du congrès, institué par la loi du 13 décembre 2000.

La situation de blocage dans laquelle se trouve la Réunion est ressentie aujourd’hui par les acteurs. À titre d’exemple, le président du conseil régional de la Réunion ainsi que la présidente du conseil général plaident pour une réévaluation de leurs compétences. Parallèlement, notre collègue Paul Vergès a déposé une proposition de loi visant à supprimer l’alinéa 5 de l’article 73 de la Constitution.

Il existe donc aujourd’hui, à la Réunion, un consensus pour accroître les responsabilités locales et rechercher une meilleure organisation institutionnelle.

Le rétablissement, pour la Réunion, de l’instance du congrès des élus régionaux et départementaux, tel qu’initialement prévu dans la loi du 13 décembre 2000, apparaît aujourd’hui s’imposer comme une disposition de bon sens. Cette instance permettra aux élus réunionnais de débattre et de formuler des propositions de nature, notamment, à mettre fin à la situation atypique de coexistence de deux collectivités sur un même territoire.

Il faut donc modifier l’article L. 5911-1 du code général des collectivités territoriales en vigueur et, pour ce faire, convient de modifier la loi « mère ». C’est le sens de cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

C’est un sujet très intéressant et qui porte sur des enjeux réels. Pour autant, la commission a considéré, d’une part, que cet amendement pouvait poser un problème de conformité avec la Constitution et, d’autre part, qu’il méritait un examen spécifique et beaucoup plus approfondi qui n’a pas sa place dans la présente discussion.

C’est pourquoi, cher collègue, la commission vous demande de bien vouloir retirer votre amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre de l’intérieur

Même avis.

Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, adopte l'amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 1er.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à dix-neuf heures quarante-cinq, est reprise à vingt-et-une heures quarante-cinq, sous la présidence de M. Thierry Foucaud.