Séance en hémicycle du 27 janvier 2015 à 14h30

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • l’investissement

La séance

Source

La séance est ouverte à quatorze heures trente.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Le compte rendu intégral de la séance du vendredi 23 janvier a été publié sur le site internet du Sénat.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté.

Mmes et MM. les sénateurs ainsi que M. André Vallini, secrétaire d’État chargé de la réforme territoriale, se lèvent.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

J’ai ce matin accompagné à sa dernière demeure notre ancienne collègue.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, nous avons appris avec beaucoup d’émotion le drame qui s’est déroulé hier après-midi sur la base aérienne d’Albacete, en Espagne. Onze aviateurs, dont neuf de nos compatriotes, qui effectuaient un exercice aérien dans le cadre de l’OTAN, sont décédés après qu’un avion de combat grec s’est écrasé. Dans cet accident ont par ailleurs été blessées une vingtaine de personnes, dont cinq personnels mécaniciens français, gravement touchés. La majorité des victimes françaises étaient originaires de la base aérienne de Nancy-Ochey.

Au nom du Sénat tout entier, je veux assurer les familles endeuillées, mais aussi l’ensemble des personnels de l’armée de l’air de notre compassion sincère et leur présenter nos condoléances les plus attristées.

Nous tenons également à saluer le sens exemplaire du dévouement et l’abnégation de ces personnels, officiers et sous-officiers. Ils se préparaient pour les missions opérationnelles de l’armée de l’air, qui contribue, au Sahel ou en Irak, à la lutte contre les groupes terroristes et à la consolidation de notre sécurité.

Monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je vous propose d’avoir en cet instant une pensée pour eux.

Mmes et MM. les sénateurs ainsi que M. André Vallini, secrétaire d'État chargé de la réforme territoriale, observent un moment de recueillement.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

En application de l’article 32 de l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, j’ai reçu de M. le ministre de l’intérieur une communication de laquelle il résulte que, à la suite des opérations électorales du dimanche 25 janvier 2015, M. Olivier Cigolotti a été proclamé élu sénateur de la Haute-Loire.

Au nom du Sénat tout entier, je lui souhaite la plus cordiale bienvenue.

Applaudissements.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Je vois un président de groupe tout à fait réjoui !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

J’informe le Sénat que le groupe Union des démocrates et indépendants-UC a fait connaître à la présidence le nom du candidat qu’il propose pour siéger à la commission des affaires sociales, en remplacement de M. Jean Boyer, démissionnaire de son mandat de sénateur.

Cette candidature va être publiée et la nomination aura lieu conformément à l’article 8 du règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Par lettres en date du 23 janvier 2015, M. le président du Conseil constitutionnel m’a communiqué le texte de trois décisions rendues le même jour par lesquelles le Conseil constitutionnel a rejeté trois requêtes présentées respectivement dans les départements de l’Hérault, du Rhône et de l’Yonne à la suite des opérations électorales qui se sont déroulées le 28 septembre 2014.

Acte est donné de ces communications.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Le Conseil constitutionnel a communiqué au Sénat, par courriers en date du 23 janvier 2015, deux décisions du Conseil relatives à des questions prioritaires de constitutionnalité portant sur :

- la déchéance de nationalité (n° 2014-439 QPC) ;

- la récupération des charges locatives relatives aux énergies de réseaux (n° 2014-441/442/443 QPC).

Acte est donné de ces communications.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

L’ordre du jour appelle les explications de vote sur l’ensemble et le vote par scrutin public sur le projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République (projet n° 636 [2013-2014], texte de la commission n° 175, rapport n° 174, avis n° 140, 150, 154, 157 et 184).

Monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, nous avons achevé, vendredi dernier, au terme de plus de soixante-dix heures de débats réparties sur dix jours, l’examen du projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République.

Nous avons ainsi travaillé, comme je l’avais souhaité dans mon allocution inaugurale du 21 octobre dernier, « sans excès de lenteur ni de vitesse » pour bâtir un texte exprimant la position du Sénat dans le dialogue qui va maintenant pouvoir s’ouvrir entre l’Assemblée nationale et le Gouvernement.

Ce résultat, nous le devons tout d’abord à la commission des lois, à ses rapporteurs, MM. Jean-Jacques Hyest et René Vandierendonck – je sais que ce dernier aurait bien voulu être parmi nous pendant ces longs débats et nous formons pour lui des vœux de prompt rétablissement –, à son président, M. Philippe Bas, et à tous ses membres qui ont œuvré pour permettre à nos délibérations de produire un texte fruit d’un large consensus et des réflexions menées par notre assemblée sur un sujet au cœur de sa raison d’être, la représentation des collectivités territoriales.

Je remercie également tous ceux d’entre vous qui sont intervenus, mes chers collègues, ainsi que le Gouvernement, présent tout au long d’une discussion qui, parfois passionnée et exigeante, a laissé subsister un certain nombre d’attentes, n’en doutez pas.

Nos débats ont connu des moments de tension et de déception. Pour autant, nos échanges ont montré la volonté de construire un texte. En écho aux propos tenus vendredi soir par Jean-Jacques Hyest faisant la synthèse de nos travaux, je dirai que, loin d’avoir « détricoté » le projet de loi, comme on a pu le lire dans la presse, le Sénat l’a au contraire « retricoté », ordonné et enrichi.

J’avais exprimé le souhait, le 21 janvier dernier, que nous imaginions ensemble de nouveaux modes de votation. Nous y travaillons activement : le groupe de travail sur la gouvernance du Sénat et le groupe de réflexion sur nos méthodes de travail se réunissent régulièrement, et pas plus tard que ce matin autour de Roger Karoutchi et d’Alain Richard pour ce qui est du groupe de réflexion.

Le projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République est incontestablement l’un de ces textes importants qui méritent que nous manifestions solennellement nos choix.

La conférence des présidents a donc décidé de faire une première application des dispositions existantes, mais jamais utilisées, de l’Instruction générale du Bureau qui permettent d’organiser des scrutins publics en forme solennelle, en salle des conférences.

Je rappelle qu’une seule délégation de vote sera autorisée par sénateur, conformément aux dispositions de la loi organique.

Avant de passer au vote, je vais donner la parole à ceux de nos collègues qui ont été inscrits par les groupes pour expliquer leur vote.

Je vous inviterai ensuite, mes chers collègues, à vous rendre dans la salle des conférences pour voter et je suspendrai la séance pendant la durée du scrutin, prévue pour une heure.

Je proclamerai enfin le résultat à l’issue du dépouillement, aux alentours de dix-sept heures, avant de donner la parole au Gouvernement, s’il souhaite s’exprimer.

M. André Vallini, secrétaire d'État chargé de la réforme territoriale, le confirme.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Et nous ne quitterons pas le sujet des collectivités locales, puisque nous aurons ensuite un débat sur l’évolution des finances locales !

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

J’indique au Sénat que la conférence des présidents a fixé, à raison d’un orateur par groupe, à dix minutes le temps attribué à chaque groupe politique, les sénateurs ne figurant sur la liste d’aucun groupe disposant de trois minutes.

La parole est à M. Michel Mercier, pour le groupe UDI-UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Mercier

Ce travail avait été commencé avec notre collègue René Vandierendonck, qui n’a cependant pas pu participer à nos débats. Je sais qu’il le regrette et je pense qu’il regrettera encore plus quand il connaîtra les résultats du vote.

Les travaux que nous avons poursuivis tout au long de ces soixante-dix heures nous permettent de dire que le texte qui va être mis aux voix est plus cohérent et plus clair que celui qui a été soumis à notre assemblée, même s’ils nous laissent un goût d’inachevé.

Le texte issu de nos travaux est donc plus clair et plus cohérent que le projet de loi initial. En effet, le Sénat, suivant sur ce point le Gouvernement, a décidé de supprimer la clause de compétence générale de la région et du département.

Monsieur le secrétaire d’État, à force de reprendre la loi de 2010 que votre majorité a voulu mettre à bas dès son arrivée aux responsabilités, vous parviendrez à la rétablir en totalité, même si vous y passez tout le quinquennat ! Vous nous aurez seulement fait perdre cinq ans…

Applaudissements sur les travées de l’UDI-UC et de l’UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Mercier

Si vous aviez bien voulu, dès le départ, ne pas détricoter ce qui était tout fait, et relevait du pur bon sens, nous vous en aurions été reconnaissants !

Si l’on veut clarifier le rôle de chaque collectivité territoriale et déterminer ses compétences, il faut bien sûr refuser de reconnaître aux régions et aux départements une clause de compétence générale qui, par nature, ne peut s’appliquer qu’à l’État et aux communes. S’appuyant sur cette base, le Sénat a essayé de développer une vision claire et cohérente de notre organisation territoriale.

La région est confirmée dans son rôle de leader des collectivités territoriales pour le développement économique. Le Sénat a su aller plus loin que la simple proclamation d’un principe en donnant à la région les moyens d’exercer cette compétence, en lui ouvrant en quelque sorte une porte sur les services de l’emploi. En effet, pour nos concitoyens, le développement économique est lié à l’emploi, car il doit leur permettre, le cas échéant, de trouver du travail. Si l’on refuse aux conseillers régionaux toute possibilité d’intervention auprès des services de l’emploi, c’est un marché de dupes que l’on propose à nos concitoyens.

De l’affirmation de ce principe découlent un certain nombre de conséquences que l’on trouve rassemblées dans le schéma régional de développement économique, d’innovation et d’internationalisation, le SRDEII. Nous avons accepté le principe même de ce schéma, ainsi que son caractère prescriptif. Je pense que nous aurions pu le renforcer en supprimant un certain nombre de sous-schémas : par exemple, le tourisme, en tant qu’activité économique, aurait pu tout à fait être inclus dans le SRDEII. Quoi qu’il en soit, cette affirmation du rôle de la région représente un vrai progrès et nous ne reviendrons pas dessus !

Restait la question des départements. Le Sénat a fait le choix de la clarté, …

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Mercier

… pour une raison relativement simple : le Gouvernement a convoqué les électeurs les 22 mars et 29 mars prochain, c’est-à-dire dans moins de deux mois, pour élire des conseillers départementaux avec un mode de scrutin que l’on peut qualifier, pour le moins, d’improbable.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Mercier

M. Michel Mercier. Ma chère collègue, vous êtes bien la seule à défendre ce mode de scrutin, et je vous en félicite, parce que d’autres que vous, bien que l’ayant voté, ne le soutiennent déjà plus ! Ils ont d’ailleurs tout à fait raison !

Rires sur les travées de l'UDI-UC et de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Mercier

Mais on ne peut pas convoquer les électeurs pour des élections départementales tout en essayant de supprimer le département ! Le respect dû aux électeurs devait nous conduire à affirmer le maintien du département. Les atermoiements du Gouvernement et du pouvoir exécutif sur cette question ont plutôt nui à la clarté de nos débats…

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Mercier

On ne peut pas convoquer les électeurs pour la fin du mois, tout en leur disant qu’ils vont voter pour des personnes qui n’auront plus aucun pouvoir. Encore une fois, c’est une question de respect !

Il fallait bien sûr revoir les compétences du département ; cela a été fait. Là aussi, la commission des lois et le Sénat ont travaillé pour la clarté et l’efficacité de l’action publique.

Néanmoins, ce travail de clarification laisse à un grand nombre d’entre nous un goût d’inachevé.

Prenons les deux collectivités qui deviennent des métropoles à statut particulier, Paris et Marseille.

S’agissant de Paris, nous avons bien compris – et le Sénat est allé dans ce sens – qu’il fallait trouver un compromis. Un compromis, ce n’est pas forcément ce qu’il y a de plus clair, mais c’est souvent un moindre mal. Je crois que le Sénat a su faire en sorte de dégager ce « moindre mal » dans le compromis obtenu au terme d’une séance de travail très approfondie. Le Gouvernement a fait des propositions et il a accepté qu’elles soient très largement amendées par le Sénat.

Quant à Marseille, les débats ont été, il est vrai, moins longs. Tous nos collègues n’y ont pas trouvé leur compte, c’est le moins que je puisse dire, et certains membres de notre groupe n’ont pas obtenu que leur position soit entendue – c’est notamment le cas de Mme Joissains. Notre groupe considère qu’il n’y a pas eu de concertation. L’opposition locale est très forte : ils sont 113 maires sur 119 à contester à la fois le périmètre, la gouvernance et les compétences de cette nouvelle métropole !

Je crois, monsieur le secrétaire d'État, que, si l’on veut introduire de grandes innovations dans l’organisation territoriale, il faut, d’abord et avant tout, rechercher l’accord local et, visiblement, là, il n’y est pas !

Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Mercier

M. Michel Mercier. Probablement pouvons-nous nous interroger sur un autre sujet, je veux parler de l’intercommunalité.

Exclamations sur les mêmes travées.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Mercier

Pour ma part, je suis favorable au développement de l’intercommunalité, comme pratiquement tous nos collègues, me semble-t-il.

Faut-il instituer un seuil de population ?

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Mercier

À cette question, le Sénat a clairement répondu par la négative. Je ne crois pas que ce soit le seuil de population qui compte.

Monsieur le secrétaire d'État, je me réfère aux derniers travaux de l’ex-DATAR, dont vous avez changé le nom.

Debut de section - Permalien
André Vallini, secrétaire d'État auprès de la ministre de la décentralisation et de la fonction publique, chargé de la réforme territoriale

Maintenant, c’est le Commissariat général à l’égalité des territoires, le CGET !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Mercier

Le CGET, donc !

Il est clair qu’il n’y est pas question de seuil chiffré. (Pour avoir le document en mains, je constate qu’il est rédigé sans ambiguïté : on nous parle de « territoire vécu ». Or à quoi tient la vie sur un territoire ? Certainement pas à un seuil de population, mais bien plutôt à des collèges, à des lycées, à des établissements pour personnes âgées !

De ce point de vue, je regrette que le Gouvernement ne nous ait pas dit à quoi servirait l’intercommunalité, ce qui pose un vrai problème.

Si nous n’avons pas réussi à nous accorder ici, au Sénat, à la fois sur l’intercommunalité et sur les compétences du département, j’espère que les pistes ouvertes sur ces deux sujets pourront aboutir lors de la navette. C’est dans cet espoir que le groupe UDI-UC, dans sa très grande majorité, votera le texte qui nous vient de la commission.

Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à M. Bruno Retailleau, pour le groupe UMP.

Applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, dans quelques instants, nous aurons à nous prononcer, par un scrutin solennel, sur un texte important, important pour la Haute Assemblée, parce qu’il se situe au cœur même de nos compétences, mais important, je le crois également, pour les Français.

Nous allons donc nous prononcer en la forme solennelle. Je voudrais très sincèrement, au nom de vous tous, mes chers collègues, remercier le président du Sénat, Gérard Larcher, d’inaugurer précisément sur ce texte ce mode de votation, qui me paraît correspondre à une double exigence de démocratie et de rénovation des pratiques du Sénat.

Le texte que nous avons travaillé et sur lequel nous allons nous prononcer – pour sa part, le groupe UMP le votera – n’est pas le même, monsieur le secrétaire d'État, que celui qui nous avait été soumis par le Gouvernement.

Je le redis et je le redirai, le Sénat, dans son ensemble, a, comme il le fait souvent, remis à l’endroit un texte qui nous était arrivé parfois à l’envers. En effet, ce projet de loi, sur beaucoup de dispositions, était mal parti !

Il reposait d’abord sur un faux procès, instruit avec de fausses accusations et de fausses preuves. Je le dis solennellement : non, les collectivités territoriales de France ne sont pas responsables des 2 000 milliards d'euros de la dette française !

Vifs applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC. – M. le président de la commission des lois applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

Bien sûr, les collectivités territoriales veulent prendre toute leur part dans l’effort national, mais elles ne veulent pas être désignées comme des boucs émissaires sur la base de fausses accusations, reposant sur de fausses preuves !

La règle d’or, nous l’avons, nous l’appliquons. Vous le savez parfaitement, cette règle d’or nous interdit de financer par l’emprunt nos dépenses de fonctionnement, ce qui n’est pas le cas pour les dépenses de fonctionnement de l’État.

Mal parti, ce texte l’était aussi parce que nous avons souvent eu le sentiment qu’il n’exprimait pas une ligne clairement définie, un cap précis, une vision cohérente. Où est la cohérence quand il y a eu, sur la question du maintien ou non des départements, tant de volte-face et tant de tête-à-queue ?

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

Où était cette cohérence lorsque l’on a mis la charrue avant les bœufs, en commençant par déterminer les périmètres avant de discuter des compétences ? Où est la cohérence quand on fait passer le contenant avant le contenu ? Sur toutes les travées, ce même reproche est revenu !

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

Très souvent, notre conviction a été que le Gouvernement voulait assurer telle ou telle autorité de sa volonté réformatrice, une volonté réformatrice qu’il entendait préciser en découpant quelques grandes régions.

Ce que nous avons également ressenti, c’est que, au bout du compte, le fond des choses ne l’intéressait pas. Une fois son découpage obtenu, le reste pouvait aller. Or le reste, c’est le fond, et c’est le plus important !

Faire une réforme territoriale, c’est en même temps répondre à des questions graves posées par les crises qui traversent notre pays : la crise territoriale, la crise économique, la crise démocratique, aussi.

Sur toutes les travées, nous avons cette conviction que nous parviendrons à raccommoder la démocratie nationale en crise non pas par le haut mais par le bas. Et en ce sens, la réforme territoriale est importante.

Mes chers collègues, je pense que le Sénat a montré qu’il était utile. Nous avons fait un travail tout à la fois approfondi, rigoureux et audacieux. Je voudrais à mon tour remercier le président de la commission des lois et notre rapporteur – lequel a d'ailleurs payé de sa personne !

Vifs applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

Le Sénat a posé un cadre. Il a dessiné une ligne claire, autour de trois principes qui sont autant de choix nettement affirmés : la proximité, la décentralisation et la modernité qu’expriment nos territoires dans leur diversité.

Sur le premier choix, la proximité, nous avons dit oui à de grandes régions. Toutefois, monsieur le secrétaire d'État, dès lors que vous choisissiez de redécouper la France en de grandes régions, la suppression des départements ne tenait plus ! Le second choix devenait parfaitement incompatible avec le premier !

De grandes régions appelaient, bien entendu, le maintien des départements…

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

… dans leur double vocation de solidarité sociale et de cohésion territoriale.

Mes chers collègues, permettez-moi de vous le faire remarquer, nous avons dépassé les clivages traditionnels dans lesquels certains voudraient nous enfermer, je veux parler ici du fameux face à face entre le rural et l’urbain. En effet, nous n’avons pas voulu que la régionalisation se fasse au détriment du fait départemental, pas plus que nous n’avons souhaité que la régionalisation se fasse au détriment de la métropolisation.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

Nous avons voulu – et nous y tenions – faire en sorte que les régions soient aux manettes pour ce qui est du développement économique, mais sans porter préjudice au pouvoir des grandes métropoles françaises notamment, qui ont un rôle absolument évident en la matière.

Ce même souci de la proximité nous a encore guidés lorsqu’il s’est agi de répartir les compétences. Nous avons dit oui aux grandes régions, oui aux régions fortes, mais pas aux régions obèses ! Là encore, il y avait un paradoxe, et même une contradiction, à vouloir élargir leur périmètre tout en rabaissant leur horizon, à vouloir agrandir leur surface tout en leur confiant les transports scolaires, les routes départementales, les collèges, bref, des compétences de gestion.

Les régions doivent rester des collectivités de missions, de projets. Il ne faut surtout pas les laisser s’empêtrer dans le quotidien ! Pour ce genre de tâches, les collectivités territoriales, départementales, intercommunales ou communales seront toujours beaucoup plus pertinentes que les régions, et ce en raison de leurs périmètres.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

La décentralisation, tel était le deuxième de nos choix. Là aussi, nous avons été confrontés à un paradoxe. Ce gouvernement de gauche, nous l’attendions au fond sur la lignée de Gaston Defferre. Or, nous avons eu un texte qui est finalement plutôt recentralisateur.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

En tout cas, ce projet de loi n’est certainement pas un texte de décentralisation. Vous avez commis deux erreurs : une erreur historique, d’abord, parce que nous connaissons tous ici la tendance au jacobinisme de notre pays, obsédé qu’il est par son unité. En même temps, nous savons parfaitement que cette unité ne peut respirer que dans la diversité. François Mitterrand avait exprimé l’idée que la France avait eu besoin de la centralisation pour se faire et que, désormais, elle avait besoin de décentralisation pour ne pas se défaire. C’est cette idée qui a finalement guidé le Sénat.

Mais vous avez commis une deuxième erreur importante, quand vous avez omis d’envisager dans le même mouvement la réforme de l’État et une vraie décentralisation. Sans décentralisation, sans confier aux collectivités de nouvelles compétences, vous êtes incapables de réformer l’État ! C’est la vraie question et c’était une autre erreur de votre part !

Applaudissements sur les travées de l’UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

Logiquement, le choix que nous assumons, et bien au-delà des seules travées de l’UMP, monsieur le secrétaire d'État, c’est celui d’une décentralisation notamment à l’échelon régional, qui est le niveau pertinent pour le développement économique. Notre choix, monsieur le secrétaire d’État, c’est de confier aux régions plus de responsabilités pour la coordination des politiques de l’emploi, pour une meilleure territorialisation de ces politiques.

Confier la politique de l’emploi aux régions était, à mon sens, un choix judicieux, qui a été salué au-delà des clivages partisans.

De même, nous n’avons pas voulu faire le choix d’un jacobinisme régional.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

Nous n’avons pas voulu des schémas prescriptifs, cette sorte de Gosplan régional, dans lesquels vous imposiez la volonté de la région jusque dans le PLU de petites communes de quelques centaines d’habitants. Cette solution digne tout au plus du XXe siècle ne peut pas être celle de notre XXIe siècle ! Nous avons donc voulu que ces schémas soient co-élaborés. Nous avons préféré qu’ils soient compatibles plutôt que conformes en tous points, sur tous les niveaux des collectivités.

Le troisième choix que nous avons fait, c’est celui de la diversité et de la modernité. M. Michel Mercier l’a dit à l’instant : pourquoi vouloir absolument faire passer tous les territoires de France sous la même toise ?

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

C’est méconnaître la diversité française, et je vous renvoie à cet égard à la très belle Composition française de Mona Ozouf.

Pourquoi vouloir faire passer sous cette toise tous nos territoires ? Pourquoi vouloir faire fi de la volonté des élus et de l’intelligence territoriale en oubliant, par cette règle du nombre ô combien technocratique, la vraie dimension humaine que doit porter une réforme territoriale de cette ampleur ? C’était une faute !

C'est la raison pour laquelle nous avons non seulement refusé de relever le seuil à 20 000 habitants, mais nous avons écarté l’idée même de seuil. Pour nous, appliquer un carcan de chiffres sur le territoire français, c’était une idée technocratique, et certainement pas une idée moderne et démocratique !

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

Oui, mes chers collègues, je pense que le Sénat a fait œuvre utile. Nous avons montré que nous avons une connaissance vécue, intime de nos territoires. Or, parmi les reproches que beaucoup de nos concitoyens adressent aux élus, on retrouve souvent l’éloignement du terrain.

M. Jean - Louis Carrère s’exclame.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

Eh bien, cette discussion, quelles que soient les travées sur lesquelles nous siégeons, a montré que le terrain, nous le connaissons. Nous avons cette connaissance « charnelle » de nos territoires, pour parler comme le faisait Charles Péguy. Nous en sommes fiers !

Nous avons aussi montré notre capacité à dépasser les clivages sur bien des questions. C’est également important en ce moment particulier que vit notre pays.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

Je vais conclure sur ce moment particulier. Je pense que les Français attendent aussi que nous ayons toujours comme ligne d’horizon l’intérêt général, l’intérêt de la France, au-delà des clivages partisans. C’est ce que nous avons fait.

Nous avons entendu le Premier ministre déclarer ici, la main sur le cœur, devant tous les sénateurs – il répondait à une question de M. Mézard – qu’il voulait absolument obtenir le consensus entre le Sénat, l’Assemblée nationale et le Gouvernement. Le Sénat a fait son travail, monsieur le secrétaire d'État ; il appartient désormais au Gouvernement et à l’Assemblée nationale de faire le leur !

Bravo et vifs applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Michel Delebarre, pour le groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Delebarre

Je suis certain qu’il aurait eu à cœur d’intervenir à de nombreuses reprises au cours des différents échanges que nous avons eus durant ces deux semaines de débat.

Car l’examen de ce projet de loi aura connu bien des vicissitudes. Conçu à l’origine dans la perspective de la suppression du département comme échelon territorial, ce texte a finalement été adapté à une nouvelle donne, grâce à l’esprit de dialogue dont a fait preuve le Gouvernement. D’aucuns y verront une reculade ou un changement de direction malvenu. C’est bien triste !

Honnêtement, face à une réforme de cette importance, qui engage notre pays pour de très nombreuses années, ne fallait-il pas accepter ce revirement pour concevoir la meilleure architecture possible ? C’est ce que je crois, même si l’épreuve fut et demeure périlleuse. J’estime en effet que le Parlement, et tout particulièrement le Sénat, a été entendu par le Gouvernement, ce dont je me félicite.

Je resterai, pour ma part, proche de ce texte et de nos débats. Je constate que les orateurs qui m’ont précédé ont préféré s’en échapper... Leurs interventions ressemblent un peu à nos échanges, dont très peu, sur soixante-dix heures, ont été vraiment consacrés au projet de loi, quelques dizaines d’heures ayant concerné d’autres sujets.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Delebarre

Je veux toutefois rester optimiste, car j’ai senti que de nombreux collègues, quelles que soient leur appartenance politique ou leur préférence territoriale, ne remettent plus aujourd’hui en cause le rôle moteur des régions dans l’action économique.

L’objectif de la réforme est d’assurer à la République française une nouvelle organisation permettant de parvenir à davantage de croissance, d’emploi et de succès économiques pour les entreprises, au bénéfice de chacun des niveaux de territoire et de l’ensemble du pays. Nul ne saurait remettre cela en cause aujourd’hui.

La commission avait d’ailleurs renforcé les prérogatives des régions en matière de développement économique du territoire, en consolidant la compétence dans ce domaine. Moins ambitieux, le texte issu de nos travaux en séance publique transfère certaines politiques de développement économique à la région. Le renforcement du schéma régional de développement économique d’innovation et d’internationalisation en est d’ailleurs un bon exemple.

La région obtient la compétence pour la définition des orientations au travers de ce schéma. Elle est compétente pour l’aide aux entreprises, le soutien à l’internationalisation, ainsi que pour l’aide à l’investissement immobilier et à l’innovation.

Le rôle de chaque niveau de collectivité est précisé, afin de ne pas aboutir à un enchevêtrement d’actions qui ne soient pas coordonnées. La commune, l’agglomération et la métropole peuvent continuer à intervenir, de même que les départements, par délégation.

Après le développement économique, qui a fait l’objet de longs débats dans cet hémicycle, l’article 6 du projet de loi conforte le rôle stratège de la région dans le domaine essentiel de l’aménagement du territoire.

Rappelons-le, la loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles du 27 janvier 2014, dite « loi MAPTAM », a renforcé le rôle de chef de file de la région en matière d’aménagement du territoire. Aujourd’hui, le projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République complète efficacement ce dispositif en faisant du schéma régional d’aménagement et de développement durable du territoire, le SRADDT, un schéma intégrateur.

Le SRADDT permettra d’apporter de la clarté en faisant de la région l’échelon qui impulse et coordonne la définition de ces objectifs, tout en préservant la concertation avec les autres collectivités concernées, ainsi qu’avec l’État, les syndicats ou encore les chambres consulaires.

Le groupe socialiste se félicite de ces avancées, ainsi que de l’adoption d’un volet « littoral » dans le schéma par le biais de deux amendements proposés par le groupe. Nous regrettons cependant que le Sénat n’ait pas souhaité adopter notre amendement visant à intégrer un volet spécifique relatif au désenclavement des territoires ruraux.

Nous avons également longuement débattu de la régionalisation du service public de l’emploi.

Si le groupe socialiste n’a jamais défendu l’idée d’une régionalisation de Pôle Emploi, il lui semble logique que la région, chef de file des politiques de formation et d’orientation professionnelles, soit davantage impliquée dans la coordination des politiques de l’emploi. Le Sénat entend favoriser le développement des actions territorialisées de lutte contre le chômage, qui réuniraient tous les partenaires associés à cette démarche.

De nombreuses expériences ont montré leur efficacité sur le plan local, il convient de poursuivre dans cette voie. Je pense que, sur ce sujet précis, nous pourrons parvenir à un compromis intelligent au gré des différentes lectures, et avec l’aide du Gouvernement.

Je me félicite également que le Sénat ait confié aux régions de plus grandes responsabilités en ce qui concerne la carte régionale des formations supérieures et de la recherche. C’est un apport dont on peut se féliciter.

Le Sénat a également accepté, avec quelques ajustements et amendements, le projet du Gouvernement sur la métropole du Grand Paris. Il a également amélioré le statut de la métropole Aix-Marseille-Provence. Reconnaissons que ces deux points représentent des avancées plus que significatives.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Delebarre

Conformément aux engagements du Premier ministre énoncés ici même, devant le Sénat, le Gouvernement a proposé de maintenir les départements dans leur rôle de protection des populations les plus fragiles et de soutien technique aux communes. Le Sénat a ainsi suivi les propositions du Gouvernement de recentrage des compétences du département sur la solidarité sociale et territoriale.

J’en viens maintenant aux points les plus débattus au cours de nos débats : les compétences dites « de proximité » des départements.

Le Gouvernement avait accompli un geste d’ouverture en maintenant la gestion des collèges aux départements, alors que son texte initial en prévoyait le transfert aux régions. Le département conserve également la compétence en matière de transports et de voirie. Pour reprendre une expression lue dans la presse, le Sénat est en quelque sorte « en communion » avec les départements !

Pour autant, il convient de ne pas opposer de manière stérile régions et départements. Le groupe socialiste est parfaitement conscient de la nécessité de préserver des solidarités de proximité, et le département a tout son rôle à jouer à ce niveau. Néanmoins, on ne peut pas ignorer l’importance stratégique du rôle des régions dans le contexte économique et social que nous connaissons aujourd’hui.

Le projet de loi avait pour objectif de réformer et de rationaliser notre organisation territoriale afin d’en faire le levier d’un développement économique profitant à tous les territoires. Dès lors que cette vocation régionale était réaffirmée, cela mettait un point final à l’ancien débat sur la rivalité entre régions et départements. Et ces départements, tout comme les EPCI, les établissements publics de coopération intercommunale, apparaissaient alors comme les pouvoirs locaux de proximité.

En ce qui concerne la voirie départementale, j’ai le sentiment que le Sénat s’est prononcé pour le statu quo faute d’alternative. Ce n’est là en effet qu’une solution par défaut. Un certain nombre de routes départementales qui sont des axes structurants se trouvent en mauvais état. Nous avons amorcé en séance publique un débat dont j’espère qu’il aboutira au cours de la navette parlementaire.

Il me semble que le Gouvernement et tous les sénateurs sont d’accord pour approfondir ce débat, non pour refuser le transfert de routes départementales aux régions, mais pour refuser le transfert de la totalité de ces routes. On pourrait transférer aux régions de grandes infrastructures, des itinéraires d’intérêt régional et des axes structurants, tout en prenant en compte une exigence de désenclavement.

En tout état de cause, le groupe socialiste a su montrer sa capacité à être force de proposition. Je souhaite revenir quelques instants sur la thématique du tourisme. Là encore, le débat est loin d’être clos.

Il est tout à fait normal que les régions disposent de la compétence relative au tourisme. Comment imaginer qu’un département puisse faire la promotion de son territoire à Shanghai, Los Angeles ou Buenos Aires ? Pour autant, et ce n’est pas incompatible, il est normal que les départements conservent la capacité d’entreprendre des actions de promotion touristique à leur niveau.

Il me semble que l’articulation de ces deux mouvements, bien accordés entre régions et départements, constitue la voie à privilégier.

Il en va de même pour les transports : le groupe socialiste estime que la gestion des transports scolaires revient aux départements, tandis que les régions semblent parfaitement qualifiées pour administrer les transports interurbains, notamment les TER, en lien avec leur compétence « transport ». C’est d’ailleurs ce qu’a souhaité le Sénat en confiant aux régions la responsabilité des routes interurbaines.

Cette articulation intelligente me semble bien plus pertinente qu’une opposition systématique entre les deux niveaux de collectivité.

J’en viens maintenant au seuil relatif à l’intercommunalité. Là encore, dans son amendement, le Gouvernement a fait preuve d’ouverture en proposant des adaptations au seuil de 20 000 habitants prenant en compte la densité démographique ou géographique, ainsi qu’une dérogation pour les intercommunalités qui viennent seulement de se constituer.

Le groupe socialiste du Sénat a cherché à trouver un équilibre entre plusieurs éléments : le respect des élus locaux et la prise en compte de la diversité des territoires, avec une marge de manœuvre laissée aux élus composant les CDCI, les commissions départementales de la coopération intercommunale, afin de pouvoir déroger au seuil des 15 000 habitants pour certaines zones de notre territoire.

Notre objectif est de fixer un seuil incitatif suffisant permettant de construire des intercommunalités fortes, capables de mettre en œuvre des politiques publiques adaptées à l’échelle des bassins de vie, tout en prenant en compte la diversité des territoires.

Hélas, nous ne sommes pas parvenus à convaincre ! La majorité sénatoriale a préféré maintenir le seuil à 5 000 habitants. Que n’avons-nous pas entendu à ce sujet lors de nos débats ? Les plaidoyers pour le « small is beautiful », pour le repli dans des limites communales multiséculaires, ont fleuri dans cette enceinte. §Ce n’est pas ainsi que l’on réglera le problème de l’émiettement communal, ni que l’on proposera davantage de services publics à nos concitoyens !

Comment imaginer qu’une commune seule puisse proposer des services publics de qualité et de proximité, avant tout en milieu rural, sans passer par un regroupement avec d’autres communes voisines ?

M. Jean-Louis Carrère applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Delebarre

Au final, cette première lecture nous offre des points de satisfaction : la région sort renforcée pour ce qui concerne le développement économique, et c’est là essentiel. En outre, un équilibre a été trouvé entre les différentes strates de collectivités, et également avec les métropoles.

Certains points doivent encore être approfondis, comme le transfert de compétences des départements aux régions. Nous pourrons revenir sur ces questions à l’occasion de la deuxième lecture au Sénat.

Dans un esprit d’ouverture et de bonne volonté, le groupe socialiste s’abstiendra sur ce texte.

Exclamations sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Delebarre

M. Michel Delebarre. Je forme le vœu que nous puissions progresser encore, tous ensemble, pour assurer le développement de nos territoires dans toute leur diversité.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Ronan Dantec, pour le groupe écologiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Ronan Dantec

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, nous voilà parvenus à la conclusion de ce marathon, commencé avant les fêtes, que fut l’examen de ce troisième volet de la réforme territoriale.

Il est donc temps de reprendre son souffle et d’essayer de mesurer le chemin parcouru, sachant que, suivant le tracé choisi, à vol d’oiseau, nous ne sommes pas très loin du point de départ, même si nous avons parcouru beaucoup de kilomètres !

Des dizaines d’heures de débat sur l’organisation territoriale de la République disent obligatoirement quelque chose des blocages et des priorités de la France d’aujourd’hui.

En ce début d’année marqué par un moment de barbarie que nous savons nourri aussi des fractures sociales de notre pays, ce débat était important pour dire notre volonté collective d’une action publique plus forte et cohérente. Mais, à notre avis, il n’aura malheureusement pas permis de dégager des lignes claires.

Les objectifs des écologistes étaient, quant à eux, très clairs et s’articulaient autour de deux grands objectifs : assurer un meilleur équilibre des territoires, ce qui passe, d’après nous, par des régions fortes, seules à même d’imposer une redistribution entre les plus riches et les plus fragiles de leurs territoires ; renforcer la démocratie locale et régionale, ce qui nécessitait une réforme en profondeur du millefeuille territorial, une lisibilité sur le « qui fait quoi », mais aussi, car c’est essentiel, des modes de scrutin légitimant l’action publique territoriale.

Le groupe écologiste a abordé cette discussion sans dogmatisme. Je rappelle, pour éviter tout faux débat, que, lors d’une précédente intervention à cette tribune, j’avais déjà pris acte du maintien de l’échelon départemental, conforté dans son rôle en matière d’action sociale puisque, très clairement, personne ou presque – ni les régions ni les intercommunalités – n’avait manifesté la volonté de reprendre ses attributions en la matière.

Ces grands principes qui ont constamment guidé nos interventions et amendements ne sortent guère renforcés de ces quinze jours de débat, et nous en sommes déçus : détricotage et raccommodage n’ont pas vraiment permis de confectionner un habit neuf, ni, au final, très seyant. Il s’agit de comprendre pourquoi.

Évidemment, il y a les habitudes prises, le goût pour nos vieux vêtements, même rapiécés, dans lesquels nous nous trouvons finalement assez confortables, même si l’usure risque de faire lâcher les coutures. Le sénateur se méfie des modes ; cela peut s’entendre, mais il s’agissait bien, ici, de gagner en agilité et en vitesse d’intervention, avec des habits moins nombreux et plus souples, adaptés à la vie d’aujourd’hui.

Malgré tout, c’est l’attachement à la vieille garde-robe qui l’a emporté. Toutes les couches ont été conservées, un peu élargies ici ou là, mais toujours aussi suturées les unes aux autres, au risque donc d’entraver les mouvements et de continuer à désorienter les citoyens, peu attirés par un tel accoutrement.

Bien plus – et il faudra en débattre –, ce qui s’est exprimé ici, c’est une terrible méfiance des élus territoriaux les uns vis-à-vis des autres.

Si certains ont défendu leurs intérêts acquis, leur cagnotte financière ou leur territoire politique – ce genre de réflexe doit bien exister un peu, c’est humain –, je reste étonné de l’incroyable défiance qui s’est manifestée.

Nous sommes tout de même nombreux à avoir quelques valeurs communes, à considérer qu’aucun territoire ne doit rester en dehors de la République, que le maintien du service public, des offres de mobilité, des accompagnements d’implantation d’entreprises, sont de notre responsabilité collective d’élus et de responsables politiques. Pourtant, nos réponses en termes d’organisation territoriale sont parfois diamétralement opposées ou presque.

Ce débat s’est en particulier focalisé sur l’avenir du département, parfois présenté comme le dernier rempart face à des « mégarégions » aux mains d’appareils politiques, d’apparatchiks et de technostructures, régions qui auraient donc vite fait de faire passer par pertes et profits les territoires excentrés, notamment ruraux. Je ne crois pas caricaturer ce que j’ai entendu pendant deux semaines.

C’est un terrible procès d’intention, qui témoigne de notre fragilité collective, y compris du climat de méfiance entre élus du même bord...

Ces quinze jours de débat sonnent ainsi comme un signal d’alerte sur un émiettement politique. Il faut l’analyser. En effet, si nous ne retrouvons plus le sens de l’action collective entre échelons de collectivités, nous ne pourrons pas développer d’action efficace ; aucune réforme ne permettra de suppléer une telle défiance. Nous devrons donc de nouveau en débattre et aller au bout de l’analyse.

Les élus régionaux, moins présents dans cet hémicycle, doivent aussi entendre ce message et apporter de vraies réponses face à cette défiance. Et c’est un régionaliste convaincu qui s’exprime ici !

Exclamations sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Ronan Dantec

Pour restaurer cette confiance, notre proposition d’un bicamérisme régional, une chambre élue au suffrage universel direct, l’autre par les territoires, n’était probablement pas si « extraordinaire », …

Debut de section - PermalienPhoto de Ronan Dantec

M. Ronan Dantec. … pour reprendre l’un des mots préférés du rapporteur Jean-Jacques Hyest, dont je salue l’engagement sur ce texte.

Applaudissements sur quelques travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Ronan Dantec

Je regrette que cette idée ait été totalement balayée. Il y avait place pour l’expérimentation et l’approfondissement. Toutefois, je m’engage à redéposer des amendements en ce sens dès que vous le souhaiterez, ...

Debut de section - PermalienPhoto de Ronan Dantec

… voire, si vous préférez, un amendement unique visant à prévoir deux chambres et un exécutif spécifique, comme c’est déjà le cas pour la collectivité territoriale de Corse.

Debut de section - PermalienPhoto de Ronan Dantec

C’est l’occasion pour moi de souligner que, dans le débat, sont apparues un certain nombre d’idées nouvelles. Je pense à ce qui a été proposé pour la Savoie, à savoir la fusion des deux départements et l’expérimentation d’une collectivité territoriale à statut particulier.

Debut de section - PermalienPhoto de Ronan Dantec

Lors de la discussion du projet de loi sur la réforme de la taille des régions, nous avons rappelé que nous considérions qu’avec moins de régions il fallait moins de départements. La question de la fusion entre départements qui est revenue ici dans le débat est certainement une solution d’avenir : elle se posera peut-être demain en Alsace ; je ne dis pas après-demain en Bretagne. En tout cas, c’est une dynamique possible.

Debut de section - PermalienPhoto de Ronan Dantec

Pour éviter que les territoires ne soient marginalisés dans ces grandes régions, il paraissait tout à fait logique de renforcer les intercommunalités. Accroître leur taille va dans ce sens. C’est pourquoi nous ne pouvons pas suivre la majorité sénatoriale dans son refus d’intercommunalités plus grandes : elles sont nécessaires pour une meilleure mutualisation des actions ; elles doivent correspondre à de vrais bassins de vie.

Je regrette que le Sénat ait maintenu une carte pourtant souvent aberrante et peu adaptée à l’action publique.

Je regrette aussi, une nouvelle fois, la teneur du débat sur le scrutin direct pour les intercommunalités. J’ai eu l’occasion de dire à quel point le scrutin actuel était inégalitaire, confortant le sentiment de relégation des communes périphériques où l’on n’a pas accès au même type de débat que dans les communes centres, notamment au moment des élections municipales.

Un président d’intercommunalité élu directement serait plus fort pour défendre son territoire, ce qui est tout à fait en ligne avec le besoin d’une défense plus forte des territoires fragiles. Je ne doute pas que nous parviendrons un jour à nous mettre d’accord avec Jacques Mézard.

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Ronan Dantec

Le débat en est resté au stade du « touche pas à ma commune ! », ce que je trouve un peu court, d’autant, mes chers collègues, que vous avez été assez nombreux à vous plaindre du fonctionnement de nombreuses intercommunalités où l’on n’a pas su dépasser le stade de la concurrence entre les maires.

Il faudra bien un jour s’attaquer à ces quelques petites contradictions...

Sur ces questions, le Sénat est en retard sur les territoires, souvent prêts à avancer plus vite sur le périmètre, les mutualisations, voire le scrutin direct, qui n’est pas du tout un sujet tabou. Pour avoir des échanges réguliers à ce propos avec les élus de mon département, je puis témoigner qu’ils sont souvent plus audacieux que nous.

Je relève toutefois quelques avancées démocratiques, dues aux amendements déposés par le groupe écologiste. Le ratio reste faible, monsieur le rapporteur, mais je remercie malgré tout le Gouvernement et la commission de l’attention et du soutien qu’ils ont apportés à quelques amendements de mon groupe.

Debut de section - PermalienPhoto de Ronan Dantec

Nous avons ainsi élargi les droits de l’opposition dans des communes de 1 000 à 3 500 habitants, ce qui était logique et cohérent avec la modification du mode de scrutin pour ces communes.

Nous avons élargi le droit de proposition d’adaptation réglementaire à l’initiative des régions, ce qui facilitera une action publique au plus près des territoires et donnera peut-être un signal pour un meilleur dialogue entre l’État et les régions. L’histoire retiendra d’ailleurs que nous avons fait voter ici le premier amendement d’adaptation réglementaire correspondant à une proposition régionale, en l’occurrence le droit de mouillage défendu par la collectivité territoriale de Corse.

Enfin, nous avons fait adopter deux amendements sur les droits culturels, sur les politiques culturelles régionales, que ma collègue Marie-Christine Blandin a défendus.

Quel bilan tirer de ces débats ?

Je vous l’avoue, mes chers collègues, nous avions prévu de voter contre le texte issu des travaux du Sénat. §Nous pensions qu’il ne resterait pas grand-chose du texte initial.

Debut de section - PermalienPhoto de Ronan Dantec

Il a été un peu chahuté, c’est sûr. On note quelques aberrations dans le texte : des articles vidés de leur sens, des transferts aux régions supprimés par une défense un peu excessive d’un département qui n’était pourtant plus menacé. Je pense à la compétence « transport » – des transports collectifs aux infrastructures – qui doit être clairement assumée par la région.

Debut de section - PermalienPhoto de Ronan Dantec

Je pense ici, c’est pour nous un point essentiel, aux schémas prescriptifs sur le développement économique comme sur l’aménagement du territoire, qui ont été maintenus. Certes, ils sont un peu fragilisés, sans véritable mode d’emploi, mais maintenus. Le Sénat adresse donc ici un message intéressant à l’Assemblée nationale, qui pourra rédiger une nouvelle notice d’utilisation.

Nous regrettons les retards pris dans la mise en place de la métropole du Grand Paris, qui réduiront les péréquations financières et la solidarité entre territoires de la grande métropole. Dieu sait pourtant s’il y a urgence !

Le maintien d’une métropole intégrée à terme nous semble aller dans le bon sens, même si nous aurions aimé aller plus vite.

Debut de section - PermalienPhoto de Ronan Dantec

Je conclus, monsieur le président.

En nous abstenant, nous disons donc notre espoir que le débat se poursuive pour donner aux élus territoriaux des outils à la hauteur des enjeux. En effet, au-delà des patriotismes d’organisation, les collectivités territoriales sont d’abord le lieu de l’action publique au service de nos citoyens, d’abord des plus fragiles d’entre eux. Ne le perdons jamais de vue.

Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe écologiste. – MM. Claude Dilain et Bernard Lalande applaudissent également.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Christian Favier, pour le groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Favier

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, nous voici parvenus au terme d’un long débat parlementaire sur un sujet essentiel pour l’avenir de notre pays. Je veux saluer à mon tour le travail et la disponibilité de notre rapporteur Jean-Jacques Hyest.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Favier

Si ce débat avait bien commencé – de nombreuses auditions ont été organisées –, sa préparation a ensuite été affectée par la précipitation entre le travail de la commission et le dépôt des amendements sur son texte. Puis, l’organisation des débats a été perturbée par la longue coupure entre la discussion générale et nos discussions sur les amendements.

Enfin, il est dommageable que la richesse de nos échanges ne puisse trouver sa traduction dans les explications de vote, du fait de l’organisation d’un scrutin public qui se déroulera dans des conditions inédites, ne permettant qu’une seule intervention par groupe.

Cette procédure réduit ainsi au silence toutes les sénatrices et tous les sénateurs qui ont pris part à nos échanges, qui ont soumis des amendements, défendu des points de vue contradictoires, parfois même en décalage avec les prises de position officielles de leur groupe.

Cette richesse des arguments défendus par les uns et par les autres ne se retrouvera donc pas dans notre dernier échange sur ce projet de loi. Nous le regrettons.

Mais revenons à notre appréciation sur le projet de loi.

Pour mesurer le travail législatif effectué par la Haute Assemblée, je veux rappeler rapidement notre analyse sur le texte gouvernemental.

D’abord, nous avons déploré de devoir parler des compétences des collectivités territoriales sans examiner conjointement les ressources dont elles pourraient disposer pour les mettre en œuvre. Nous avons ainsi rappelé combien cette restructuration de l’action publique était difficile dans un contexte de restriction drastique des dotations de l’État aux collectivités.

Cette critique demeure.

Par ailleurs, nous considérons qu’il faut inscrire ce texte dans un ensemble d’autres lois plus anciennes, en particulier depuis la réforme territoriale de 2010 inspirée par la commission Balladur qui, dès cette époque, se fixait comme objectif « l’évaporation des départements ».

Le projet de loi NOTRe que nous venons d’examiner continue de mettre en œuvre ce dessein.

Ce texte renforce certains aspects de la loi MAPTAM, en particulier en faveur de la concentration des pouvoirs locaux aux deux niveaux régional et intercommunal. Il réduit les compétences des départements et les met sous la tutelle des régions dans un grand nombre de domaines.

Pour mesurer l’impact de ce texte, il faut aussi ne pas perdre de vue que la carte des régions vient d’être révisée pour installer de nouvelles régions aux périmètres étendus, qui demain verront leurs compétences elles aussi renforcées.

C’est donc bien une logique de régionalisation qui est en marche, aux côtés d’une métropolisation qui s’accélère.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Favier

Suivant cette orientation, nous devons reconnaître, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, que vous avez gardé le cap. En témoignent les amendements que vous avez présentés au nom du Gouvernement pour concentrer les pouvoirs locaux entre les mains d’intercommunalités une nouvelle fois renforcées, poursuivre l’évaporation des communes et des départements, renforcer les compétences régionales en réduisant la libre administration des autres collectivités territoriales, tenter de les hiérarchiser derrière des pilotes et des chefs, après avoir réduit leurs ressources et mis sous contrôle leurs dépenses.

Aussi, c’est en raison de l’ensemble de ces éléments, qui sont toujours contenus dans ce projet de loi, malgré les nombreuses modifications apportées par le Sénat, que nous continuons de contester ce texte. Nous aussi, nous gardons le cap !

Nous continuons d’affirmer que le millefeuille est une affabulation, que l’avenir appartient aux communes, aux départements et aux régions, développant leur coopération et travaillant avec un État stratège garant de l’égalité des citoyens.

Nous réaffirmons l’utilité de chacune des collectivités. Toutes doivent disposer de compétences identifiées, mais non exclusives, d’outils de coopérations, de moyens pour agir en faveur de projets partagés. Elles doivent aussi avoir la possibilité d’intervenir quand les intérêts de leur territoire sont en cause.

C’est pourquoi, au cours de ce débat, nous avons longuement défendu le maintien de la compétence générale aux régions et aux départements et que nous continuerons de le faire. Celle-ci reste, à nos yeux, consubstantielle des lois de décentralisation, des droits et libertés locales auxquels nous restons attachés et qui permettent la mise en œuvre du principe constitutionnel de subsidiarité.

L’heure n’est pas pour nous à la caporalisation de l’action locale !

Nos institutions doivent au contraire travailler ensemble, se coordonner, coopérer en réseau, en partenariat, en respectant la place et le rôle de chacun, dans le cadre de projets d’actions publiques partagées, pour décupler leurs capacités d’action et ainsi mieux répondre aux besoins et aux attentes de la population.

C’est forts de cette vision de nos institutions locales et de leur nécessaire évolution que nous avons défendu un grand nombre d’amendements et en avons soutenu certains venant d’autres travées de notre assemblée.

Aucun jeu politicien, aucun souci de marchandage ne nous ont animés au cours de ces débats. C’est une certaine idée de notre organisation territoriale que nous avons tenté de défendre et de préserver. Et nous savons qu’elle est partagée par bon nombre de nos concitoyens et par une majorité d’élus locaux, quand on les écoute vraiment.

À cet égard, nous n’avons aucune illusion sur certaines majorités qui se sont parfois retrouvées dans cet hémicycle pour défendre les prérogatives de telle ou telle collectivité. Certaines sont de circonstances, prenant en compte les mécontentements qui s’expriment.

Quant à nous, nous n’oublions pas qui est à l’origine de l’intercommunalité contrainte, qui a soutenu une réduction bien plus grande encore du nombre de régions, qui voulait la disparition des départements par leur fusion au sein des régions, qui voulait le conseiller territorial, qui a souhaité réduire le nombre d’élus locaux, y compris les conseillers municipaux.

Nous avons toujours combattu de telles orientations et poursuivrons sans relâche notre action parlementaire, aux côtés des élus locaux, en faveur d’une décentralisation au service de nos concitoyens et du renforcement de notre démocratie locale.

Le résultat de nos travaux est là : les propositions du Gouvernement sur un certain nombre d’articles ont été rejetées, et nous nous en félicitons. Ainsi les départements ont-ils recouvré leurs compétences alors que le texte initial prévoyait de les dévitaliser afin de mieux les faire disparaître.

Pour autant, les départements sont-ils à l’abri ? Malheureusement, nous ne le pensons pas.

Certes, des paroles rassurantes ont été prononcées, donnant à penser que la disparition des départements n’était plus à l’ordre du jour.

Cependant, madame la ministre, le dépôt par le Gouvernement d’amendements visant à rétablir le texte initial, que la commission avait modifié à une très large majorité, a pu laisser penser le contraire.

En outre, les derniers propos du Président de la République ont laissé craindre le retour à l’ordre du jour de cette question une fois les élections départementales passées. La mobilisation ne doit donc pas faiblir.

Du fait de la création des super-régions, jamais l’utilité du département comme échelon intermédiaire efficace et réactif n’a été aussi évidente.

Le texte tel qu’il résulte des travaux du Sénat marque quelques avancées sur d’autres sujets, sans toutefois, reconnaissons-le, parvenir à remettre en cause la machine infernale de la concentration et à enrayer la volonté affirmée de réduction permanente des dépenses, laquelle est devenue l’alpha et l’oméga de toutes les réformes de nos collectivités territoriales. Pourtant, l’austérité sans limite imposée à la Grèce devrait faire réfléchir chacune et chacun.

C’est particulièrement vrai pour la métropole du Grand Paris. Certes, dans sa nouvelle rédaction, le texte prend en compte un certain nombre de demandes des maires de ce territoire, mais il ne leur donne toujours pas de réelles capacités d’action en commun, au plus près des besoins. En outre, le texte garde l’objectif d’une métropole fortement intégrée, au risque de créer un monstre bureaucratique et technocratique très éloigné des populations, coupé des dynamiques territoriales, surtout.

Aussi, tout en appréciant la richesse de nos débats, nous mesurons les limites de l’exercice.

L’essentiel des objectifs du projet de loi subsistent dans le texte du sénat. Au nom de la clarification, c’est d’abord une réduction inquiétante de l’action publique locale qui s’annonce. Nos inquiétudes concernant l’avenir des personnels restent donc aussi fortes.

Chacun l’aura compris, nous ne nous reconnaissons pas dans le texte qui nous est aujourd’hui soumis.

Cependant, madame la ministre, compte tenu de l’opiniâtreté avec laquelle vous avez tenté de rétablir le projet de loi dans sa version initiale et avec laquelle vous avez défendu, pied à pied, la disparition future des départements, nous ne souhaitons pas voter contre un texte rétablissant à leur profit un grand nombre des compétences que vous souhaitiez leur ôter, en particulier les collèges et les routes.

Pour notre part, nous prenons en compte la réécriture du texte et les évolutions, insuffisantes mais significatives, concernant la création de la métropole du Grand Paris. Certes, nous regrettons que la proposition qui correspondait à une demande très majoritaire des élus consistant à donner aux territoires de la métropole un statut d’EPCI à fiscalité propre n’ait pas été retenue, mais nous apprécions certaines avancées votées par notre assemblée, comme la suppression du PLU métropolitain ou l’attribution de la contribution foncière des entreprises aux territoires.

Nous comptons sur la navette parlementaire pour améliorer encore ce texte.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Favier

Aussi le groupe CRC s’abstiendra-t-il sur ce projet de loi. Il s’agira d’une abstention combative et vigilante. Nous souhaitons ainsi, en nous appuyant sur le texte du Sénat, que les préoccupations qui se sont exprimées au cours de nos débats soient entendues par nos collègues de l’Assemblée nationale et que d’autres avancées soient possibles.

Cette abstention combative est aussi une forme de soutien aux mécontentements qui s’expriment sur ce texte. Les premières mobilisations ont déjà permis de ne pas tuer les départements et les communes. Il faut donc amplifier le mouvement. Rien n’est inéluctable. Telle est notre conviction !

Applaudissements sur les travées du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Jacques Mézard, pour le groupe du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

M. Jacques Mézard. Monsieur le président, je vous remercie de réunir aujourd'hui tant de nos collègues : leur présence dans cet hémicycle montre que le Sénat est bien le représentant des collectivités territoriales.

Applaudissements sur les travées du RDSE, de l'UDI-UC et de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Je remercie ensuite MM. les rapporteurs du travail considérable qu’ils ont effectué, conjointement et solidairement : Jean-Jacques Hyest, tout d’abord, qui a tenu le choc de la séance, mais aussi René Vandierendonck, dont la sagesse et l’expérience ont manqué à tous.

Madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, il ne pourra être reproché au Sénat d’avoir rendu copie blanche. Notre assemblée a construit sans préjugés et a modernisé sans réticences. Elle a rempli son rôle constitutionnel au cours de la discussion de ce projet de loi, laquelle a été longue et ardue. La commission des lois, sous l’égide de nos deux rapporteurs, issus de la majorité et de l’opposition, a œuvré pour façonner un texte plus équilibré.

Comment ne pas rappeler certaines incohérences entre les textes successifs qui nous ont été soumis ? Ainsi, notre excellent collègue Gérard Collomb a-t-il relevé avec justesse et efficacité certaines contradictions au cours de ce débat entre la loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles et le présent texte, les compétences exclusives des régions dans le domaine économique se carambolant avec celles des métropoles.

Comment ne pas rappeler la loi sur les binômes, que notre groupe a longuement combattue ici et dont je me rends compte aujourd'hui qu’elle compte peu d’adeptes sur le terrain ?

Bravo ! et applaudissements sur les travées du RDSE, de l'UDI-UC et de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Nous avons ensuite vécu la fusion des grandes régions, puis l’examen du projet de loi NOTRe, sans que jamais, mes chers collègues, un texte sur les finances locales ne nous soit soumis.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

M. Jacques Mézard. En janvier 2014, le Président de la République, lors de la présentation de ses vœux à Tulle, a loué les conseils généraux. Quatre mois plus tard, il nous annonçait la suppression des départements.

M. Bruno Sido s’esclaffe.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Mardi dernier, ceux qui étaient présents à l’Élysée ont entendu que les départements seraient préservés, mais « pour un temps » - la précision a son importance. Pour sa part, le groupe du RDSE n’a pas cessé de réclamer la clarté et la vérité.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Que veut le Gouvernement ?

La vérité, on peut la subodorer, sans d’ailleurs forcément la craindre.

Ce que veut le Gouvernement in fine, c’est la suppression des départements, tout au moins dans certains territoires, et cela peut se comprendre, compte tenu de la création des métropoles.

Ce que veut le Gouvernement, ce sont de grandes régions et de grandes intercommunalités, résultant de la fusion de nombre de communes – cela peut s’entendre – et le développement des communes nouvelles.

Tout cela mérite d’être dit clairement. Après tout, on peut être d’accord ou pas. Mais on ne peut pas faire un pas en avant, deux pas en arrière, puis de nouveau trois pas en avant et deux pas en arrière. Comme nous le disons depuis le début, ce n’est pas la bonne solution.

Permettez-moi quelques remarques sur la méthode qui a présidé à l’élaboration de cette réforme. L’exposé des motifs du projet de loi, rappelons-le, évoquait la suppression de l’échelon départemental à l’horizon 2020. Depuis, les déclarations pour le moins ambiguës sur ce sujet se sont multipliées.

Madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, le Gouvernement a déposé des amendements visant à revenir au texte initial, ce qui peut se concevoir, mais il a ainsi fait peu de cas du grand travail réalisé par notre commission.

M’éloignant du texte de mon intervention écrite, je vous dirai ce que j’ai sur le cœur, c’est plus simple et sans doute plus efficace.

Aujourd'hui, où en sommes-nous ?

Je pense que, in fine, le Gouvernement consentira à abandonner les collèges aux départements…

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

… pour montrer qu’il a fait un effort. Chacun appréciera, surtout après les élections départementales…

En revanche, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, je pense que vous évoluerez peu en ce qui concerne la voirie départementale. Je me suis d’ailleurs longtemps demandé pourquoi. À partir du moment où l’on considère que les conseils départementaux doivent être préservés, on doit leur laisser la voirie départementale : s’il y a bien un domaine qui doit être géré près du terrain, c’est bien celui-là !

Certes, on peut penser que certains grands itinéraires seraient mieux gérés à l’échelle régionale.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

On peut en discuter, ce serait logique et, là encore, cela peut s’entendre, mais, madame la ministre, je ne vois qu’une explication au dépôt de vos amendements visant à transférer la voirie départementale.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

M. Jacques Mézard. Dans votre esprit, ces grandes régions que vous avez voulues, que vous aimez et qui auront beaucoup de pouvoirs – elles en auront tant d’ailleurs que, faute d’avoir réformé le système électoral, vous favoriserez l’avènement de super-hiérarques – ces grandes régions, donc, auront besoin de financements.

Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Dès lors, il faut vraisemblablement leur transférer, à ces grandes régions, les recettes de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises !

Mme Marylise Lebranchu, ministre de la décentralisation et de la fonction publique, le conteste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

M. Jacques Mézard. De grâce, dites-le, et discutons-en de façon loyale et transparente, madame la ministre.

Applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Pour les transports scolaires, nous nous sommes expliqués : les communes et les intercommunalités ont déjà du mal à les gérer, quelle drôle d’idée de les transférer à des centaines de kilomètres !

J’évoquerai maintenant les intercommunalités. Oui, nous sommes ici, en grande majorité, favorables au développement de l’intercommunalité, qui est d’ailleurs le vrai moyen de préserver le bloc communal ; mais pourquoi contraindre les communes à la fusion en retenant un seuil de 20 000 habitants ? Ce seuil n’a strictement aucune justification de terrain. §Il est totalement arbitraire !

C’est une chose d’être conseiller municipal à Paris ou dans la région d’Ile-de-France - je rappelle d’ailleurs que les conseillers municipaux de Paris sont également conseillers généraux, ce que personne ne dit. C’en est une autre dans des dizaines de départements que nous connaissons : comment créer des intercommunalités de 20 000 habitants, sans lien aucun avec les bassins de vie et la réalité de terrain ? Cela n’a de sens, madame la ministre, que si vous entendez véritablement supprimer les départements, auquel cas le seuil de 20 000 habitants…

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

… est effectivement insuffisant. Il faut prévoir un seuil plus élevé. Telle est la réalité !

Nous ne pouvons pas vous suivre sur ce seuil, madame la ministre, car il est totalement arbitraire et aboutira à des situations catastrophiques.

Avant de conclure, je dirai un mot sur tous ces schémas, sur toutes ces usines à gaz prévus dans le texte. Nos territoires, nos collectivités, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, ont besoin de liberté et non de schémas prescriptifs.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

M. Jacques Mézard. Malheureusement, nous n’y sommes pas encore !

Applaudissements sur les travées du RDSE, de l'UDI-UC et de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

En conclusion, permettez-moi de rappeler cette citation empruntée au discours de Belleville de Gambetta – je me réfère souvent à l’histoire de la IIIe République : « Par cette institution du Sénat bien comprise, bien appliquée, la démocratie est souveraine maîtresse de la France. »

C’est dans cet esprit que la très grande majorité du groupe du RDSE votera le texte du Sénat.

Applaudissements sur les travées du RDSE, de l'UDI-UC et de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Philippe Adnot, pour les sénateurs ne figurant sur la liste d’aucun groupe.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Adnot

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, compte tenu des trois minutes qui me sont imparties, j’irai à l’essentiel.

Merci d’abord à vous, monsieur le président de la commission des lois, et, à travers vous, à l’ensemble de la commission.

Merci à vous, monsieur le rapporteur, cher Jean-Jacques Hyest, qui, avec votre conviction habituelle, …

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Sido

Et notre collègue va au bout de ses convictions !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Adnot

… nous avez permis de nous retrouver, avec l’ensemble de nos collègues, pour élaborer un texte qui, s’il n’est pas parfait à mes yeux, du moins sauvegarde l’essentiel.

Merci pour les communes, qui ont poussé un ouf de soulagement quand elles ont su qu’elles n’auraient pas à tout reconstruire de force au niveau intercommunal.

Merci pour les entrepreneurs, qui, devant la situation bloquée qui s’annonçait, voyaient s’éloigner la perspective de carnets de commandes.

Merci pour les départements, qui, avec le texte que nous allons adopter, conservent l’essentiel de leurs compétences. Le principe de réalité, s’agissant de la clause de compétence générale, finira par nous donner raison !

Les régions veulent être leaders en matière économique ? Soit ! Nous verrons le résultat et le jugerons à l’aune de l’efficacité.

Mais ce texte va voyager vers une autre assemblée : je veux croire que les députés ouvriront les yeux devant les risques que ferait courir, par exemple, l’attribution des routes aux régions.

Depuis la décentralisation, et particulièrement la dernière vague, s’agissant des routes, nous avons patiemment intégré les personnels des parcs, mis fin au compte de commerce, rationalisé l’organisation, mutualisé avec les services de moyens des finances, de l’informatique, des ressources humaines, des marchés, de manière à être efficaces. Sur le terrain, les équipes nous l’ont rendu en élargissant leurs compétences et en améliorant leurs performances.

Au moment du transfert des services de l’État, mon département a reçu 250 personnels au titre des routes. Aujourd’hui, nous en comptons 35 de moins, malgré l’augmentation de la charge de travail.

C’est tout cela qui peut être remis en cause, avec le risque de générer des dépenses supplémentaires incroyables tout en diminuant l’efficacité de l’action au service de nos concitoyens.

N’oublions pas que, au moment où l’on nous a décentralisés, l’État avait une autorité, localement : il avait le préfet, il avait la DDE. Si l’on transfère les routes aux régions, où sera l’autorité locale ? À quel responsable s’adressera-t-on ?

Tout le monde perçoit bien l’énorme dépense qu’il faudrait engager pour essayer de reconstituer cette puissance que nous avons aujourd’hui mais que les régions n’auront jamais, parce qu’elles n’ont pas d’autorité dans les départements.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Adnot

Je veux croire, madame la ministre, que vous n’allez pas jouer la politique du pire et que vous aiderez l’Assemblée nationale à partager la sagesse du Sénat.

Les prochaines élections départementales seront pour nous l’occasion d’aller devant nos concitoyens : ils ne manqueront pas de nous demander des explications. Il serait bon, dans cette perspective, que les versions issues des travaux de nos deux assemblées soient assez proches, sinon, l’exaspération de nos concitoyens pourrait bien atteindre des sommets, et la situation risque d’être difficile à gérer !

Pour ma part, je soutiendrai le texte issu des travaux de la commission et du Sénat.

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Personne ne demande plus la parole ?...

Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République dans le texte de la commission, modifié.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Je vous rappelle qu’une seule délégation de vote est admise par sénateur.

Le scrutin est ouvert.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à quinze heures cinquante, est reprise à dix-sept heures.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Voici le résultat du scrutin n° 84 sur l’ensemble du projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote :

Nombre de votants344Nombre de suffrages exprimés203Pour l’adoption192Contre 11Le Sénat a adopté.

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI -UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Je remercie Mmes et MM. les secrétaires d’avoir participé à l’organisation de cette première. Les opérations de vote se sont bien déroulées, dans un délai un peu plus bref que prévu.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La conférence des présidents en tirera les enseignements.

La parole est à M. le secrétaire d'État.

Debut de section - PermalienPhoto de André Vallini

Au terme de ces débats très riches, permettez-moi d’avoir à mon tour une pensée pour René Vandierendonck, qui a suivi nos débats sur internet. Il reviendra nous apporter toute son expérience et sa sagesse lors de la deuxième lecture de ce texte.

Je voudrais remercier la commission des lois, son président Philippe Bas et, bien sûr, son rapporteur, Jean-Jacques Hyest, qui a siégé sans discontinuer.

Applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de André Vallini

Nos discussions ont été très utiles et constructives. Contrairement à ce que j’ai pu lire ici ou là, le Sénat n’a absolument pas détricoté le texte du Gouvernement. Il a apporté sa vision des choses, qui diffère de celle du Gouvernement sur certains sujets – je pense notamment au seuil de population pour les intercommunalités ou au transfert des routes aux régions –, mais la rejoint sur nombre de points, comme la clause de compétence générale ou le transfert de la compétence en matière de transports. Sur les collèges, le Gouvernement a fait un pas dans la direction souhaitée par le Sénat.

Le texte va maintenant être soumis à l’Assemblée nationale, …

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Revet

C’est là qu’il risque d’être détricoté !

Debut de section - Permalien
André Vallini, secrétaire d'État

… puis il y aura les élections départementales. À cet égard, ne serait-il pas possible d’inverser la perspective ? Beaucoup d’entre vous disent que ces élections vont être difficiles parce que les compétences ne seront pas encore réparties entre régions, départements et intercommunalités.

Debut de section - Permalien
Un sénateur du groupe Ump

Et voilà !

Debut de section - Permalien
André Vallini, secrétaire d'État

Je vous donne donc rendez-vous, mesdames, messieurs les sénateurs, pour un débat qui sera, je n’en doute pas, aussi utile et constructif qu’il l’a été en première lecture.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du groupe CRC et du RDSE.

Debut de section - Permalien
Marylise Lebranchu

Je voudrais saluer à mon tour la présence continue au banc de la commission de M. Jean-Jacques Hyest, dont les réponses extrêmement précises et documentées sur chaque amendement nous ont tous impressionnés.

Je m’associe aux propos d’André Vallini. Nous avons fait des pas les uns vers les autres : le Gouvernement a accepté des amendements et le Sénat a adopté certains de ceux qu’il a présentés. Nous soumettrons à l’Assemblée nationale un texte qui n’a pas beaucoup changé, qui a ses équilibres, même s’ils ne sont pas forcément approuvés par tous.

Nous avons rencontré, pendant deux jours, des représentants de départements très ruraux. Ces derniers n’attendent pas simplement de nous le transfert de compétences, mais aussi une réflexion sur la manière d’aider les territoires le plus en difficulté. Nous avons avant tout entendu une demande de solidarité et de péréquation, envers tant les territoires suburbains que les grandes zones rurales.

Je vous donne moi aussi rendez-vous pour la deuxième lecture, mesdames, messieurs les sénateurs, en vous remerciant pour la qualité des débats de la première lecture. Ils ont été exempts d’invectives, en dépit de la difficulté de certains sujets, tels que Paris et Marseille. Nous avons tous cherché à avancer, même si les choses sont compliquées.

Nous nous retrouverons en deuxième lecture avec, je le crois, la volonté partagée de faire prévaloir la solidarité entre les territoires.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du groupe CRC et du RDSE. – M. Michel Mercier applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Je rappelle au Sénat que le groupe UDI-UC a présenté une candidature pour la commission des affaires sociales.

Le délai prévu par l’article 8 du règlement est expiré.

La présidence n’a reçu aucune opposition.

En conséquence, je déclare cette candidature ratifiée et je proclame M. Olivier Cigolotti membre de la commission des affaires sociales, en remplacement de M. Jean Boyer, démissionnaire de son mandat de sénateur.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

L’ordre du jour appelle un débat sur l’évolution des finances locales, organisé à la demande du groupe UMP.

La parole est à M. François Baroin, orateur du groupe auteur de la demande.

Debut de section - PermalienPhoto de François Baroin

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, chacun comprendra aisément que l’évolution des finances locales soit au cœur de nos préoccupations.

L’article 24 de la Constitution donne au Sénat une mission « de représentation des collectivités territoriales de la République » ; son article 72-2 précise que « les collectivités territoriales bénéficient de ressources dont elles peuvent disposer librement dans les conditions fixées par la loi ».

La question des moyens est donc constitutive de nos collectivités territoriales en ce que ceux-ci donnent corps à la mise en œuvre de leurs compétences.

Chacun connaît l’état de nos finances publiques, et cette question doit donc être abordée en toute objectivité.

Madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, vous le savez, aucune personne sérieuse, à la tête d’une collectivité locale, quels que soient son engagement politique, ses responsabilités ou son expérience, ne conteste la nécessité de réduire les déficits publics de notre pays. Chacun doit apporter sa part, sa contribution : c’est une question de responsabilité, il y va d’une certaine idée de l’intérêt général, de la souveraineté de notre pays. Avec une dette publique de plus de 2 000 milliards d’euros et un déficit public s’établissant largement, aujourd’hui encore, au-dessus du maximum fixé par les traités européens qui engagent la France, et donnant lieu à une difficile négociation avec Bruxelles, chaque source de dépense doit être envisagée à l’aune de cette nécessité.

Il ne s’agit pas uniquement de respecter nos engagements communautaires ; il s’agit aussi d’assurer la compétitivité du « pavillon France », de faciliter la création des emplois de demain, de ne pas transmettre aux générations futures une dette fondée sur des dépenses de fonctionnement que les générations actuelles doivent assumer.

Notons que, sur ce point, le cadre juridique de nos collectivités locales est exemplaire : elles ne peuvent emprunter que pour financer des dépenses d’investissement. Je regrette que cette règle d’or n’ait pas été inscrite dans la Constitution. Lorsque j’étais ministre du budget, j’avais engagé des discussions sur ce sujet avec les représentants de l’actuelle majorité : nous avions commencé à avancer sur un texte qui visait à modifier notre loi fondamentale afin d’interdire d’emprunter pour financer des dépenses de fonctionnement, que ce soit auprès des marchés financiers ou d’établissements prêteurs tels que la Caisse des dépôts et consignations.

(Mme Marylise Lebranchu, ministre, marque son approbation.) Je n’ai, personnellement, rien à retirer à ces propos. C’est auprès des bons auteurs que l’on trouve les meilleures sources, et je me permettrai de vous citer dans quelques instants, madame la ministre !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de François Baroin

Cette règle d’or ne s’applique donc qu’aux collectivités territoriales. Vous me permettrez, dans un esprit de concorde nationale, de citer le Président de la République, qui, dans son discours de candidat à Dijon, avait déclaré que « si l’État était soumis aux mêmes contraintes que les collectivités locales, sa défaillance aurait été constatée depuis longtemps » ! §

La trajectoire financière du rééquilibrage de nos comptes publics ne sera soutenable que si les trois acteurs, l’État, la sécurité sociale et les collectivités territoriales, concourent équitablement à l’effort.

La situation est bien connue. Dans le contexte d’une crise économique internationale majeure, j’avais, en tant que ministre du budget, assumé totalement le gel des dotations de l’État aux collectivités locales. Il s’agissait, à l’époque, d’un effort de l’ordre de 1, 5 milliard d’euros, avec une inflation un peu plus élevée qu’aujourd’hui, effort partagé entre l’État et les collectivités locales de façon justement équilibrée au travers de la révision générale des politiques publiques, prévoyant notamment le non-remplacement d’un fonctionnaire partant à la retraite sur deux.

En ce qui concerne la sécurité sociale, nous avions réduit l’objectif national de dépenses d’assurance maladie, qui n’avait jamais été respecté depuis 1993, à un niveau tel que tout le monde nous expliquait que notre objectif était impossible à tenir. Finalement, l’objectif d’une augmentation de 2, 7 % des dépenses d’assurance maladie pour l’exercice budgétaire 2011 a été atteint : lorsque l’équilibre est juste et l’effort partagé par tous, l’objectif fixé est atteignable par chacun !

Cette mesure de gel des dotations aux collectivités territoriales correspondait à des gains de productivité possibles, notamment dans le cadre de la réforme territoriale : suppression de la clause générale de compétence, réduction du nombre d’élus, meilleure coordination par l’institution du conseiller territorial… L’État s’imposait également une réduction de ses effectifs en appliquant la règle du non-remplacement d’un fonctionnaire partant à la retraite sur deux que je viens d’évoquer.

Dans ce débat, il ne peut donc pas y avoir, me semble-t-il, de postures : droite et gauche ont voté successivement des mesures contraignantes pour nos collectivités. Les élus locaux sont responsables et prêts à contribuer au redressement des finances publiques.

Le débat d’aujourd’hui porte non pas sur la nécessité de consentir des efforts, mais sur le positionnement judicieux du curseur, à la hauteur des responsabilités de chacun.

Le Gouvernement a décidé de réduire de 30 % le montant des dotations versées aux collectivités pour la période 2014-2017. Il s’agit, au total, d’une ponction de 28 milliards d’euros sur le budget des collectivités en quatre ans, ce qui n’a rien de comparable avec le gel des dotations que nous avons connu.

La répartition de ces efforts est profondément inéquitable, et même dangereuse au regard du rôle joué par les collectivités locales pour soutenir la croissance, à travers l’investissement public et la commande publique, qui engendrent un volume d’activité permettant aux entreprises de maintenir les emplois en période de crise ou d’en créer en période plus favorable.

Sur les trois sources de dépenses, la plus importante est celle de la sécurité sociale – 650 milliards d’euros environ –, la deuxième est celle de l’État – 280 milliards d’euros, hors dettes et pensions –, la plus modeste est celle des collectivités territoriales – 230 milliards d’euros. N’oublions pas que l’investissement public est assuré à 70 % par les collectivités locales, dont 58 % par le bloc communal – communes et intercommunalités. Pour aller à l’encontre de tant de rapports orientés, qu’il me soit permis de souligner, au nom du groupe UMP, que la part des collectivités locales dans la dette publique de 2 000 milliards d’euros de notre pays n’est que de 9, 7 %, dont 4 % pour le bloc communal. Et l’on demande aux collectivités locales une contribution à l’effort global de 25 % ! L’objectif est inatteignable en volume et dans le calendrier prévu.

L’examen attentif des objectifs de réduction du déficit public fait apparaître un objectif de réduction globale des dépenses chiffré à 11, 5 milliards d’euros à l’horizon 2017, soit une réduction des dépenses de l’État équivalente à la réduction des recettes des collectivités locales. En effet, le programme de stabilité prévoit explicitement que la contribution des collectivités correspondra en totalité à une diminution des concours financiers de l’État, qui seront réduits de 11 milliards d'euros.

L’État ne peut s’exonérer de conduire de véritables réformes structurelles et transférer ainsi à nos collectivités le coût de dépenses de fonctionnement qu’il n’a pas su maîtriser. Le transfert de l’impôt national à l’impôt local est le fil rouge de ce plan de réduction des déficits. Ce n’est pas acceptable. Nous sommes en profond désaccord avec vous sur ce point.

Dans un rapport récent, la Cour des comptes a expliqué que, de son point de vue, les collectivités locales pouvaient parfaitement assumer ce choc en augmentant les impôts locaux ou la dette. Il me faut réfuter cette argumentation développée par la Cour des comptes.

L’augmentation de la fiscalité locale est un choix souverain des instances délibérantes municipales ou intercommunales. Les décisions en matière d’investissement et de fiscalité locaux sont profondément politiques. La plupart des élus, de gauche comme de droite, ont fait, peu ou prou, campagne sur le thème de la stabilité fiscale, au moins à périmètre constant. Je ne connais pas un élu local qui ait fait campagne sur une sévère augmentation des impôts ! S’il en existe un, il doit être doté d’un immense talent…

Quelques semaines après les élections, nous avons appris cette mesure « guillotine » de réduction des dotations sur la période 2014-2017. Nous nous sommes donc trouvés dans l’obligation de préparer un budget en augmentant soit les impôts – mais les collectivités refusent ce transfert de l’impôt national vers l’impôt local –, soit l’endettement, mais la dette d’aujourd'hui, c’est l’impôt de demain, et il n’est donc pas concevable de financer durablement l’investissement public par la dette. Pour l’exercice 2015, les collectivités vont réduire leur autofinancement afin d’atteindre les objectifs fixés ; en 2016, les comptes de nombreuses collectivités territoriales basculeront dans le rouge… §

Nous attirons solennellement votre attention sur la question de l’investissement public, madame la ministre. Toutes les études convergent : le choix des élus sera naturellement de réduire l’investissement public.

Debut de section - PermalienPhoto de François Baroin

Le cycle électoral, période traditionnellement blanche ou grise en matière d’investissement public, se conjugue à deux éléments très importants.

Le premier est le décalage des discussions budgétaires. Même les villes moyennes ou grandes, qui avaient l’habitude de voter leur budget avant la fin de l’année après un débat d’orientation budgétaire à l’automne, ont décalé ce vote d’au moins trois mois. La loi permet de le décaler jusqu’au 15 avril. Le temps de lancer la commande publique, rien ne se produira avant la fin du mois de juin, c'est-à-dire au début de la période estivale, quand les gens partent en vacances. Par conséquent, il n’y aura aucun investissement public des collectivités locales avant le début de l’automne. Un impact direct sur l’activité économique, la croissance, le soutien à l’investissement, notamment dans le secteur du bâtiment et des travaux publics, se fera donc fortement sentir dès cette année.

Le second élément est la baisse prévisible de l’investissement public du bloc communal sur la période 2014-2017, qui est estimée à 30 % par des études objectives comme celles de la Banque postale ou de l’Association des maires de France. Or une baisse de 30 % de l’investissement public d’ici à 2017 représente une perte de 0, 6 point de croissance. Sans entrer dans un débat polémique, je souligne que le projet de loi Macron table sur un gain de croissance de 0, 1 point grâce à des changements de la réglementation… Au total, la perte de croissance sera donc d’au moins 0, 4 point. Cela représente entre 4 milliards et 6 milliards d'euros en moins pour financer les politiques publiques. Disons-le clairement, la gravité de la situation exige la tenue d’urgence d’une conférence entre l’État et les collectivités locales : il faut dire la vérité à nos concitoyens.

Madame la ministre, derrière les chiffres et les plans de communication, il y a la vie quotidienne des Français. Je m’efforce depuis plusieurs semaines, avec bon nombre de mes collègues, de réveiller votre fibre d’élue locale, qui s’est un peu endormie malgré votre solide expérience. Vous n’êtes pas frappée d’amnésie : vous savez la difficulté de la gestion locale et l’impact des choix gouvernementaux sur les services publics ou l’investissement.

Comment croire un seul instant que le prélèvement sur nos collectivités que vous prévoyez n’aura pas d’impact sur les services de proximité, les crèches, les écoles, l’action sociale, l’animation culturelle ou sportive de nos territoires ? Comment croire un seul instant que le tissu associatif ne sera pas affecté ? On parle d’une réduction de 10 % à 12 % par an des subventions aux associations sur la période 2015-2017, soit une baisse cumulée de 30 %, comme pour l’investissement public. Où les associations trouveront-elles l’argent nécessaire pour assurer leurs missions, qui accompagnent très utilement l’action des collectivités locales ?

Alors qu’une crise politique, économique et sociale profonde traverse notre pays, l’action de nos collectivités pour maintenir la cohésion nationale est particulièrement attendue par nos compatriotes. Nous ne pouvons laisser au bord du chemin les plus fragiles d’entre eux. L’inclusion sociale doit rester au cœur du projet républicain, surtout dans la période actuelle. Sans l’apport des collectivités, cette ambition ne pourra être soutenue. De grands rassemblements ont appelé au vivre-ensemble : permettons aux territoires de conduire les politiques indispensables pour répondre à cette aspiration collective.

Derrière les chiffres, il y a aussi la question de l’accueil et du développement des entreprises. Nos collectivités agissent directement pour le développement de leur territoire, dont l’attractivité se mesure à l’aune de la qualité de l’accueil des salariés en matière d’habitat, de transports publics et d’autres services de proximité. Le choix d’une entreprise de s’installer sur un territoire ne tient pas uniquement à la fiscalité : il dépend aussi du cadre général, de la présence de filières d’enseignement supérieur, de la qualité des transports publics, des équipements culturels et sportifs, de l’habitat… Tous ces paramètres influent sur les décisions des acteurs économiques qui envisagent d’investir.

Améliorer l’attractivité d’un territoire justifie la mise en place de politiques publiques d’accompagnement des zones de développement. Ce sont des dépenses d’investissement productives, des dépenses d’avenir, qui ouvrent des perspectives de développement à notre pays. Qui prendra le relais des collectivités après cette disette budgétaire imposée ? La vie économique de notre pays est aussi liée à la capacité d’investissement de nos collectivités.

Bien sûr, nous devons poursuivre nos efforts, mais les dépenses de fonctionnement des collectivités sont difficilement compressibles. Il y a une corrélation entre la fonction publique d’État, la fonction publique hospitalière et la fonction publique territoriale : les choix effectués au niveau national ont une incidence directe sur la gestion du budget de fonctionnement des collectivités, au travers des charges de personnel.

Madame la ministre, vous êtes chargée de mener la difficile négociation avec les syndicats de la fonction publique, dont les représentants, je puis en témoigner, sont par ailleurs des personnes remarquables, attachées à l’esprit du service. Les décisions que vous prendrez au sujet du glissement vieillesse-technicité ou de la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales auront un effet direct sur les budgets des collectivités territoriales.

Debut de section - PermalienPhoto de François Baroin

Vous déciderez, nous appliquerons… Nous ne voulons pas ouvrir le débat sur le statut de la fonction publique. Il n’en reste pas moins que, en raison du lien entre les trois fonctions publiques, nous devons faire des choix en fonction de ce que vous décidez.

Madame la ministre, vous avez eu une vie avant d’entrer au Gouvernement.

Debut de section - Permalien
Marylise Lebranchu

Je m’en souviens !

Debut de section - PermalienPhoto de François Baroin

Vous avez été présidente de la Fédération nationale des élus socialistes et républicains.

Debut de section - Permalien
Plusieurs sénateurs du groupe Ump

Ah !

Debut de section - PermalienPhoto de François Baroin

En cette qualité, par une curieuse inversion des rôles, vous avez déclaré, dans un communiqué de presse en date du 29 septembre 2010, que le gel des dotations était une mesure « dangereuse pour l’activité économique alors que les collectivités [représentaient] plus de 70% de l’investissement public » et que ce gel allait « entraîner un recul fort et néfaste de l’investissement public aux dépens de la croissance ».

Debut de section - PermalienPhoto de François Baroin

Dépassons les frontières partisanes, dans l’esprit de responsabilité qui nous anime tous : la baisse des dotations aura un impact trop fort. Selon la Fédération nationale des travaux publics, entre 60 000 et 70 000 emplois, sur un total de 260 000, devraient être supprimés dans ce secteur dans les trois années à venir, soit un emploi sur cinq, à cause de la réduction de l’investissement public qui découlera de la réduction des dotations de l’État aux collectivités locales.

Dans le même esprit de responsabilité, je voudrais formuler quelques propositions. Les collectivités doivent prendre leur part à l’effort national, mais leur juste part. La baisse des dotations doit être réajustée en 2016, étalée dans le temps, revue en volume. La rationalisation de la décentralisation et la simplification des normes doivent également être réexaminées. L’excellent rapporteur général et la présidente de la commission des finances avaient évalué à 1, 2 milliard d'euros l’impact de l’inflation normative – l’année dernière, 253 normes nouvelles, soit une trentaine par mois, ont été instaurées – et de l’aménagement des rythmes scolaires. Il faut remettre en cause ces mesures.

Il convient également d’identifier la partie de la dette qui finance les investissements. Il est parfaitement possible de négocier avec Bruxelles une non-prise en compte des investissements publics au titre du critère maastrichtien. Il est curieux de constater que, d’un côté, on se prépare à éteindre le dernier moteur de l’investissement public en baissant les dotations des collectivités locales, tandis que, de l’autre, on envisage une relance de l’investissement public à l’échelle européenne à travers le plan Juncker de 300 milliards d'euros.

Mme Jacqueline Gourault remplace M. Gérard Larcher au fauteuil de la présidence.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, disserter de l’évolution des finances locales en huit minutes relève de la gageure, surtout lorsqu’on sera peut-être, dans quelque temps, chargé des affaires. J’ai préféré me livrer à un exercice de prospective générale en traitant le sujet selon les quatre points suivants, avec peut-être un œil plus universitaire : les bases à retenir pour un nouvel impôt local, l’hétérogénéité des territoires et la péréquation, l’autonomie fiscale, une nouvelle gouvernance des finances publiques.

Quelles peuvent être les bases d’un nouvel impôt local ? L’histoire de la fiscalité locale moderne comporte des étapes clefs : en 1789, on crée les contributions directes nouvelles ; en 1917, on substitue aux contributions directes l’impôt sur le revenu, tout en conservant la référence aux « principaux fictifs » ; l’ordonnance du 7 janvier 1959 fonde une nouvelle fiscalité – qui ne sera mise en place que dans les années soixante-dix puis quatre-vingt –, assise sur des valeurs locatives et instaurant la taxe professionnelle ; enfin, la réforme de 2010-2015, marquée par le constat de la nécessité de revoir les bases de l’impôt économique, vidé de sa substance et devenu dotation d’État pour moitié, et la naissance de la contribution économique territoriale, la CET.

Nous avons incontestablement manqué d’audace depuis 1789, alors que nous aurions pu déconnecter le système local du système national, pour lui donner une certaine indépendance. En 2015, alors qu’il nous appartient de finaliser la réforme en cours, je suis de ceux qui pensent que nous serons à nouveau conservateurs : premièrement, la pression fiscale générale empêchera d’orienter la fiscalité locale selon des critères touchant aux revenus, ce qui n’est pas fait pour me déplaire ; deuxièmement, le besoin de ressources dynamiques auquel est confronté l’État l’empêchera de consentir au transfert d’impôts nouveaux souhaité.

On peut donc estimer que, en la matière, nous nous acheminons vers le statu quo, avec une orientation renforcée vers un système de dotations, sans oublier, bien sûr, les effets induits par le transfert de compétences issu de l’adoption de la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République et ceux de la contribution à l’effort de redressement national, qu’a si bien évoqués M. Baroin. Il importera, bien entendu, que l’équité fiscale soit renforcée par le biais de la révision des valeurs locatives, qui ne doit plus souffrir d’aucun retard.

En ce qui concerne l’hétérogénéité des territoires, la mondialisation et la péréquation, je dirai que, jusqu’à la fin du XXe siècle, chacun a pu se satisfaire d’un système largement corrélé aux fondamentaux de notre fiscalité nationale que sont les investissements ou biens corporels et leur localisation géographique, le credo reposant sur le lien entre le contribuable et l’élu avec, au faîte du dispositif, le rapport de l’impôt économique avec le territoire concerné.

Cette règle a longtemps trouvé sa justification, tant que l’économie pouvait se déployer harmonieusement sur le seul territoire national, en accordant une prime aux plus ingénieux et à ceux qui déployaient de justes efforts pour attirer et capter industrie et économie.

Depuis une ou deux décennies, cependant, force est de constater que notre géographie économique, altérée par la mondialisation, s’est cristallisée autour de zones stratégiques, portuaires, de convergence logistique ou de consommation, et autour des zones urbanisées qui offrent la main-d’œuvre qualifiée attendue. Est apparue une dichotomie territoriale entre territoires à fort potentiel et hyper-ruralité, sans que la perspective de la métropolisation soit en mesure de remédier à cette fracture.

Dès lors, le choix que nous avons fait de ne pas répartir nationalement l’impôt économique nous obligea à amplifier la péréquation pour assurer la survie des territoires ruraux.

En contrepartie, cette situation nous oblige à plusieurs constats et mesures. L’hétérogénéité des territoires exige que nous passions le plus rapidement possible à une territorialisation des politiques et des financements, ainsi que de l’évaluation des besoins, et à l’agrégation des potentialités. Nous ne pouvons plus raisonner de manière macro-économique sur l’ensemble de l’Hexagone pour faire nos projections. Nous devons recourir à une modélisation des divers territoires existants pour vérifier leur comportement et les effets des réformes successives.

Par exemple, l’objectif d’évolution de la dépense publique locale, l’ODEDEL, fixé par la dernière loi de programmation, avec l’option de chiffres globalisés sur l’Hexagone, ne permet pas la lecture de la diversité territoriale.

Il conviendra, bien sûr, de prendre aussi la mesure de toutes les péréquations et contre-péréquations existantes sous toutes leurs formes, et de pallier l’incohérence des valeurs locatives en la matière, en raisonnant sur ces territoires agrégés.

Les mécanismes de la péréquation doivent être affinés et adaptés aux modélisations, et les effets nocifs actuels corrigés, mais chacun doit intégrer le fait qu’elle est désormais consubstantielle au système existant, d’autant que la contribution de 12, 5 milliards d’euros est prélevée sur les collectivités à l’aune de leurs recettes et n’a donc aucun caractère péréquateur.

À cet égard, les choix du Gouvernement ne peuvent porter que sur le degré de renforcement de la péréquation ou l’allongement de la période de contribution à l’effort de redressement…

J’en viens à la question épineuse de l’autonomie fiscale. J’aurais pu l’éliminer du débat en disant que, d’après les réformes constitutionnelles de 2003 et de 2004 et la décision du Conseil constitutionnel sur la loi de finances de 2010, l’autonomie fiscale n’existe pas en droit français.

Le concept, né avec les lois des années soixante-dix, qui ont donné l’illusion – et plus – d’une autonomie fiscale avec le droit de voter les taux, correspondait à une aspiration et à un besoin réel du système local, l’État n’étant plus en mesure d’assumer lui-même le développement du pays et l’idée de lui substituer les collectivités pour partie s’étant instillée. Le mouvement fut accentué au cours des Trente Glorieuses, et c’est ainsi que progressa l’idée de la décentralisation et de l’autonomie.

Toutefois, alors que ce système se mettait en place vers 1975, apparurent la première crise mondiale et les premiers budgets nationaux en déséquilibre. La suite ne sera que l’expression de ce mouvement contradictoire entre l’énergie nouvelle libérée au profit des collectivités et la tentation de l’État de la tempérer afin de retrouver l’équilibre budgétaire perdu. Nous aurions sans doute dû employer ces années de lutte stérile à troquer cette illusoire autonomie fiscale contre des parties d’impôts nationaux sans pouvoir de taux, mais corrélés à l’activité économique, à l’instar de ce qui se pratique autour de nous. Mais on ne refait pas l’histoire…

Il reste que l’État a fait dépendre assez largement le financement des collectivités de dotations, a diminué le poids de l’impôt économique au sein du panier de ressources pour mieux en assumer le contrôle en ces temps difficiles. Ces deux effets cumulatifs de perte d’autonomie fiscale et d’encadrement par une enveloppe normée contribuent à un sentiment justifié de recentralisation.

Enfin, j’évoquerai une nouvelle gouvernance des finances publiques. Je suis de ceux qui militent, depuis quelques lustres, en faveur d’une remise à plat des finances publiques afin qu’elles ne forment qu’une seule entité et qu’elles soient régulées au travers d’un système partenarial de contrôle.

Atteindre un tel objectif nécessite que nous clarifiions notre fonctionnement systémique. C’est ce que nous tentons de faire actuellement, avec plus ou moins de bonheur, au travers du projet de loi NOTRe, après la loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, la loi MAPTAM. Nous devons, pour ce faire, mettre en place un lieu de dialogue et les outils d’une telle gouvernance.

La Conférence nationale des finances publiques et le Haut Conseil des territoires relèvent de ces tentatives, et les aspirations financières traduites dans le projet de loi NOTRe visent à en réintroduire les principes. La volonté d’institutionnaliser le Comité des finances locales, le CFL, est aussi présente : cela constitue une nouvelle tentative de réinstaurer cette normalisation du dialogue.

Si l’État a beaucoup de progrès à faire sur le plan de la qualité de sa démarche, le CFL, ou l’instance qui sera retenue, au sein de laquelle le Sénat, représentant des territoires, doit avoir tout son rôle, ne doit pas être une simple chambre d’ajustement, mais doit bien devenir un espace de co-construction des finances publiques. Nous devons aller dans cette direction, ainsi que dans celle d’un meilleur accès aux informations de l’État pour le Parlement et les autres acteurs concernés.

Le pouvoir politique et la libre administration dépendent largement du pouvoir fiscal. Aussi, faute d’avoir la liberté d’agir sur les taux, les collectivités doivent-elles pouvoir participer à la décision. Parallèlement à ce mouvement, les collectivités doivent aussi s’engager dans la normalisation et la modernisation des procédures, des évaluations, de la mutualisation, ce qu’elles font à grands pas. Le projet de loi NOTRe nous entraîne vers la certification, vers une dépense circonstanciée. Les collectivités devront choisir entre la dépense vertueuse ou un arbitrage démocratique plus étroit de la décision.

Ma conclusion sera brève.

Je ne pense pas que l’évolution des finances locales nous réservera, pour l’immédiat, de grandes surprises s’agissant des bases nouvelles de l’impôt : l’essentiel a été fait. La mutation prochaine interviendra lorsque le système fiscal national aura, lui aussi, intégré la numérisation de l’économie qui érode les bases fiscales actuelles, ce qui dépendra assez largement de l’élaboration d’un consensus international.

La crise économique actuelle et la résorption durable de la dette nous contraindront à ne pas élargir le spectre fiscal des collectivités à des impôts plus dynamiques, l’État se les réservant.

La fracture croissante entre nos territoires, qui ne sera pas amoindrie par la mise en œuvre de la transition énergétique, va accentuer le besoin de péréquation, mais aussi, eu égard à son ampleur, celui d’en adapter les outils pour qu’elle atteigne véritablement ses objectifs en matière d’équité.

Enfin, l’autonomie fiscale sera pour longtemps remisée et nous devrons nous évertuer à rechercher avec l’État un équilibre, dans la gouvernance, entre la soutenabilité des finances publiques, exigée sur le plan international, et la réalité politique, économique et sociale que la République veut conserver à ses collectivités. §

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Vincent

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la situation des finances locales est une question très importante. Mon temps de parole étant limité à six minutes, je me contenterai d’aborder, ou plutôt d’effleurer, trois aspects de cette question : premièrement, l’évolution récente de la situation financière des collectivités ; deuxièmement, l’importance de l’investissement local ; troisièmement, le problème des emprunts toxiques, qui s’aggrave de nouveau.

En ce qui concerne la situation financière des collectivités territoriales, une certaine incompréhension, il faut le dire clairement, règne entre ce qui est vécu sur le terrain et ce qui est perçu à l’échelon central, notamment à Bercy. Certaines collectivités territoriales, plus particulièrement les départements, ont vu leurs ressources fiscales stagner ou augmenter légèrement, et leurs dépenses, en particulier sociales, parfois exploser.

Sur le terrain, la persistance des normes, les transferts de compétences pas toujours compensés à 100 % et, maintenant, la réduction de la dotation globale de fonctionnement engendrent logiquement des discours peu positifs, pointant la dégradation des finances locales et l’ampleur des difficultés à venir, révélateurs d’une vision assez pessimiste de la situation actuelle et des perspectives d’avenir.

À Bercy, mais aussi dans les études macroéconomiques de l’INSEE ou de la Banque postale, le constat est plus nuancé. Je souligne que, de 2004 à 2013, l’épargne brute des collectivités a augmenté de 31 milliards à 38 milliards d’euros selon la Banque postale ; malgré l’augmentation concomitante de la dette, il ne fallait, en 2013, que 4, 4 années d’épargne brute pour rembourser la dette des collectivités, ce qui laisse, objectivement, des marges de manœuvre.

Dans une grande ville que je connais bien, au moment de la discussion des orientations budgétaires, j’ai pu moi-même constater que, pour 2015, la baisse des dotations était évaluée à 5 millions d’euros, mais que la croissance des bases était un peu supérieure à 4 millions d’euros et que la baisse des taux d’intérêt engendrait une économie de 1, 5 million d’euros. Malgré les difficultés, on peut donc considérer que la situation est gérable.

En revanche, pour 2016 et 2017, on est en droit d’être inquiet. On attend des collectivités des efforts de rationalisation, mais chacun sait bien que ces efforts ne produisent tous leurs effets que dans le temps, tandis que les ponctions sur les budgets des collectivités annoncées pour 2016 et 2017 ne sont pas négligeables. Personne ne peut affirmer qu’il sera facile, pour les collectivités, de réaliser les économies nécessaires sur leurs dépenses de fonctionnement. L’État doit le reconnaître. La situation serait encore pire si, comme on l’entend parfois demander, le plan d’économies sur les dépenses publiques devait s’élever à 150 milliards d’euros au lieu de 50 milliards…

Que peut-on envisager pour 2016 et 2017 s’agissant de l’investissement local ? C’est une question essentielle. Plusieurs éléments extérieurs, tels que la baisse de l’euro, la diminution du prix du pétrole, la nouvelle politique de la Banque centrale européenne, ouvrent des perspectives de croissance devant à mon sens être accompagnées, sur le terrain, par une reprise de l’investissement local, qui représente plus de 70 % de l’investissement public.

Sur le plan macroéconomique, les collectivités peuvent aller plus loin, en étant raisonnables, grâce à la faiblesse de leur taux d’endettement. Cela étant, il me semble nécessaire que l’État prenne des initiatives pour éviter la déprime collective qui risque de s’installer dans l’esprit d’un certain nombre de nos collègues élus locaux. En économie, on le sait, les facteurs psychologiques sont souvent aussi importants, voire davantage, que les réalités objectives. Il faut donc tout faire pour que, contrairement aux prévisions qui circulent aujourd’hui, l’investissement public se redresse en 2016 et en 2017 et apporte ainsi son concours à la croissance.

Un économiste de l’Observatoire français des conjectures économiques, Éric Heyer, soulignait récemment que 1 euro d’investissement public engendrait 3 euros d’activité et par suite, compte tenu du niveau actuel des prélèvements obligatoires, 1, 5 euro de recettes fiscales, ce qui contribue à la résorption des déficits. C’est un point que nous devons avoir à l’esprit.

En conclusion, je dirai quelques mots des emprunts toxiques. C’est une longue histoire, qui a conduit voilà quelques années à la mise en place d’un fonds de soutien. Celui-ci a permis d’aider certaines collectivités, sans résoudre pour autant tous les problèmes. Plusieurs dizaines d’entre elles sont aujourd’hui confrontées à la forte hausse du franc suisse par rapport à l’euro. Il faut se pencher sur ce problème, important pour les collectivités concernées mais aussi pour le système bancaire, notamment pour la Société de financement local, la SFIL. En 2012, ce type d’emprunts représentait un risque de 3 milliards d’euros ; il serait souhaitable de savoir ce qu’il en est aujourd’hui après cette évolution des parités et combien de collectivités sont touchées, sachant que ces dernières devront faire face à des taux d’intérêt délirants, qui pourront atteindre 25 %, 30 %, voire 40 % ! Cette situation n’est acceptable pour les contribuables locaux ni sur le plan financier ni sur le plan moral. Il convient donc de relancer la réflexion et l’action sur ce sujet.

Mes chers collègues, je me souviens avoir participé, à la fin de 2008, à des réunions d’élus locaux au sujet des emprunts toxiques. Il nous avait alors semblé nécessaire de résoudre le problème au plus vite, de peur qu’il ne prenne des proportions explosives. Sept ans plus tard, malheureusement, l’explosion nous menace !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. – M. Christian Favier applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Ronan Dantec

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, les dotations de l’État aux collectivités territoriales diminueront de 11 milliards d’euros entre 2015 et 2017, après avoir déjà baissé de 1, 5 milliard d’euros en 2014. Cela a déjà été souligné, les possibles répercussions de ces baisses sur la qualité des services rendus à la population sont préoccupantes.

Sans perdre de vue l’équilibre des comptes de la nation, les écologistes s’opposent à la baisse de ces dotations : nous n’acceptons pas que la résorption de la dette publique se fasse au détriment des services publics territoriaux !

Nous considérons que la forte baisse annoncée met en péril la capacité d’animation des collectivités territoriales, et donc le dynamisme des territoires. En effet, comme nos collègues Dallier, Mézard et Guené, nous estimons que, dans bien des cas, la baisse des dépenses de fonctionnement ne suffira pas à équilibrer les budgets locaux – même s’il est vrai qu’il existe de grandes différences entre collectivités territoriales, et que certaines sont bel et bien en mesure de réaliser des économies de fonctionnement –, de sorte que les investissements devront également être revus à la baisse. Or réduire la capacité d’investissement des collectivités territoriales nous semble particulièrement périlleux en période de crise, alors que cet investissement joue un rôle central pour l’emploi local.

Les écologistes, qui n’ignorent pas les contraintes que le contexte budgétaire tendu fait peser sur l’action du Gouvernement, ont plusieurs pistes d’avenir à présenter en matière de finances locales.

La première concerne la réforme de la dotation globale de fonctionnement, ou plutôt des dix-huit dotations que l’État verse aux collectivités territoriales, sur le fondement d’une myriade de critères qui se superposent, rendant le mécanisme à peu près illisible. Il faut clarifier les choses, avec l’objectif prioritaire de réduire les inégalités qu’engendre ce dispositif : aujourd’hui, les montants de DGF par habitant varient de un à quatre ! Ainsi, les élus locaux ne font souvent plus le lien entre, d’une part, la situation de leur territoire et les décisions qu’ils prennent, et, d’autre part, l’évolution de la DGF.

Madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, une mission parlementaire va commencer à travailler sur ce dossier. Elle devra déboucher sur des propositions précises, visant à améliorer à la fois la lisibilité et la prédictibilité du dispositif, ainsi que la solidarité territoriale et les péréquations qui doivent être au cœur de la DGF.

Je rappelle que le groupe écologiste avait déposé un amendement au projet de loi NOTRe visant à établir un principe directeur en matière de péréquation : il s’agissait de fixer une fourchette maximale d’écarts de richesse, et de ne pas prendre en compte seulement des critères monétaires.

Il faudra aussi bien préciser comment la charge de la baisse annoncée de la DGF sera répartie entre les différents territoires. En ce qui nous concerne, nous proposons de lier la baisse de la dotation à la situation sociale du territoire et au respect, par la collectivité territoriale, d’un certain nombre d’obligations. Par exemple, il serait simple et pertinent d’indexer cette baisse sur le taux de logements sociaux du territoire. De fait, mes chers collègues, nous connaissons tous des collectivités territoriales qui n’ont toujours pas fait l’effort d’augmenter leur taux de logements sociaux ; il serait assez normal qu’elles soient particulièrement touchées par la baisse de la DGF.

Il est tout à fait clair que certaines communes, notamment en deuxième couronne parisienne et en banlieue, disposent de ressources fiscales faibles alors qu’elles comptent un très grand nombre de ménages modestes. Nous savons bien qu’elles ne pourront pas faire face à une baisse de la DGF.

Cela m’amène à évoquer la nécessaire réforme des bases fiscales. Je ne doute pas que notre collègue François Baroin, président de l’Association des maires de France, fera preuve de volontarisme sur ce sujet. Le fait est que la situation actuelle est source de difficultés pour un grand nombre d’intercommunalités.

Par ailleurs, en ce qui concerne la péréquation horizontale, il convient de réexaminer les marges de manœuvre disponibles au sein du Fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales, le FPIC.

À cet égard, nous avons proposé, au cours de l’examen du projet de loi portant nouvelle organisation de la République, l’instauration d’une péréquation entre les communes d’une même région, sur le modèle de celle qui est assurée par le Fonds de solidarité des communes de la région d’Île-de-France, le FSRIF. Un mécanisme de ce type donnerait une traduction concrète, au-delà des discours ou des procès d’intention, de la volonté politique de faire participer plus clairement les métropoles et les territoires riches au financement des besoins de développement de l’ensemble du territoire régional.

Un autre vaste chantier s’ouvre devant nous : celui de la mutualisation. Le rapport d’évaluation des mutualisations au sein du bloc communal, remis le 22 janvier au Gouvernement et à l’AMF, tombe à pic. Il ouvre quelques pistes intéressantes, à commencer par l’idée d’accompagner les mutualisations d’un soutien financier, sous la forme d’une incitation fiscale ou du maintien de la dotation pendant la phase de mise en place. En effet, toute mutualisation commence par engendrer un surcoût avant de produire des économies.

Or, sous l’effet de la baisse de la DGF, qui a déjà commencé, on assiste plutôt à une forme de repli, notamment des intercommunalités : comme les recettes diminuent, les présidents d’intercommunalité sont souvent extrêmement réticents à approfondir les mutualisations, alors que celles-ci représentent l’un des gisements possibles d’économies de fonctionnement. Le mécanisme est simple à comprendre : quand on a moins, on est réticent à développer de nouveaux services et, en définitive, on mutualise moins.

Le rapport envisage aussi la possibilité d’assouplir le cadre juridique. Cela nous semble nécessaire, en vue notamment d’autoriser la mutualisation de tous les types de services entre intercommunalités ou entre communes et intercommunalités. Ainsi, la mutualisation pourrait être pratiquée plus largement.

Nous soulèverons de nouveau cette question au cours de l’examen en deuxième lecture du projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, puisque les amendements que nous avions déposés sur ce sujet en première lecture n’ont pas été adoptés et que les réponses données par M. le rapporteur ne nous ont pas pleinement satisfaits. Peut-être pourrons-nous mettre à profit le temps qui nous sépare de la deuxième lecture pour faire avancer ce débat important et trouver des formulations qui fassent consensus entre nous.

Une autre piste à explorer est particulièrement d’actualité, alors que nous sommes sur le point d’entamer l’examen du projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte : celle des investissements publics liés à la transition énergétique. Outre qu’ils entraînent à terme une baisse des charges, le retour sur ces investissements concourt à une bonne gestion des collectivités territoriales.

Madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, compte tenu de l’urgence climatique et de la menace planant sur les investissements publics, ne pourrait-on pas faire bénéficier ces investissements liés à la transition énergétique d’une prise en compte différenciée pour le calcul du taux d’endettement des collectivités territoriales ? Ainsi, les collectivités territoriales qui se mobilisent sur ce dossier ne seraient pas pénalisées par une explosion de leur niveau d’endettement. Cette question est technique et assez complexe, mais elle représente un enjeu majeur dans la perspective de la transition énergétique.

Pour conclure, je tiens à insister sur une évidence : les collectivités territoriales riches, souvent dotées de moyens humains plus importants que les collectivités territoriales plus petites et plus fragiles, sont davantage capables que ces dernières de développer de nouveaux projets, et donc de capter les financements. Les régions, garantes demain de l’équilibre territorial, devront être attentives à ce problème et mettre en place des outils d’accompagnement en amont des projets.

Telles sont, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, quelques-unes des propositions que les écologistes ont à verser à ce débat. Le chantier est vaste, mais les enjeux sont essentiels : il s’agit ni plus ni moins que de remettre la solidarité et l’équilibre des territoires au cœur de l’action publique ! §

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Bocquet

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, on ne peut que saluer l’initiative du groupe UMP d’avoir proposé l’inscription à l’ordre du jour de ce débat sur l’évolution des finances locales.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Bocquet

Il s’agit d’un sujet récurrent et ô combien important pour les représentants des communes de France que nous sommes.

Les uns et les autres, nous avons participé, ces dernières semaines, aux cérémonies de vœux dans nos territoires respectifs. Je suis prêt à parier un euro – symbolique – que nous avons tous entendu s’exprimer l’inquiétude des maires et des élus locaux face à la baisse des dotations aux collectivités territoriales et aux difficultés qui s’annoncent pour la mise en œuvre des programmes sur lesquels les maires ont été élus il y a moins d’un an !

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Bocquet

Il faut malheureusement souligner que nous sommes passés du gel des dotations, en vigueur pendant le dernier quinquennat, à une baisse de 11 milliards d’euros annoncée pour les trois années qui viennent. L’histoire des finances locales s’apparente décidément de plus en plus à une régression lente mais certaine !

Pourtant, le budget des collectivités territoriales est obligatoirement équilibré, et leur dette est parfaitement stable depuis trente ans. En outre, elles réalisent encore plus de 70 % de l’investissement public dans notre pays, or l’investissement crée des actifs, et non du déficit ! À cet égard, nous partageons le constat dressé par M. Baroin, même si nous avons combattu les choix opérés par le gouvernement dont il faisait partie.

Voilà vingt-deux ans, le gouvernement de M. Balladur réformait profondément la dotation globale de fonctionnement et procédait au gel des dotations. Deux ans plus tard, le ministre de l’économie centriste d’un autre gouvernement, notre ancien collègue Jean Arthuis, créait l’enveloppe normée des concours budgétaires de l’État aux collectivités territoriales, dispositif resté en vigueur depuis lors. Quatre ans après cette brillante initiative, le ministre de l’économie d’un nouveau gouvernement, M. Strauss-Kahn, décidait de supprimer la part de la taxe professionnelle assise sur les salaires.

En 2010, sous l’impulsion du président Sarkozy, la mise en extinction de la taxe professionnelle, engagée dès 1999, a été consommée. Cet impôt a été remplacé par une contribution économique territoriale largement insuffisante, qui a fait de nombreux mécontents, et pas seulement parmi les élus locaux.

Voici que la loi de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019 prévoit une réduction de 11 milliards d’euros des dotations placées sous enveloppe, à raison d’un tiers de cette somme chaque année pendant trois ans.

Si l’on veut connaître l’avenir, mes chers collègues, il vaut mieux de temps à autre se rappeler le passé ! Or il montre que l’insuffisante évolution de la DGF et l’imparfaite compensation des réductions d’impositions locales expliquent pour une bonne part la progression de la fiscalité locale.

Le débat se situe aussi sur le plan institutionnel, puisque le paysage des collectivités territoriales est mouvant et que d’aucuns escomptent évidemment de la nouvelle organisation territoriale de la République qu’elle conduise à faire partager, dans un consensus établi, l’effort de réduction des dotations.

Une première question se pose : la décentralisation, trop souvent assimilée à un simple transfert de charges de l’État vers les collectivités territoriales, constitue-t-elle toujours la clé universelle des problèmes sociaux et économiques du pays ? La lutte contre le chômage appelle une politique nationale vigoureuse, au besoin relayée par les collectivités territoriales, dont il faut sans cesse rappeler le poids dans l’économie des territoires.

J’en viens à la question fiscale. L’équilibre actuel de la fiscalité locale n’est pas satisfaisant, indépendamment de la spécialisation croissante des ressources par type de collectivités territoriales.

Je profite de ce débat pour mettre de nouveau le doigt sur la différence de traitement entre communes rurales et communes urbaines : les premières perçoivent en moyenne 64 euros de DGF par habitant, les secondes 128 euros !

La contribution économique territoriale n’est plus fixée, pour l’essentiel, par les décisions des collectivités territoriales et de leurs assemblées délibérantes ; elle fait l’objet d’une répartition au niveau national de la seule cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, la CVAE.

L’un des aspects clés du débat est connu : il s’agit de la révision des valeurs locatives cadastrales, une réforme dont le report incessant depuis 1989 a achevé de tronquer totalement le rendement de la taxe d’habitation et celui des taxes foncières.

La soumission à certains dogmes libéraux est la seule cause de la situation ubuesque que nous connaissons aujourd’hui : les logements sociaux de nos zones urbaines sensibles sont surcotés par rapport à la valeur locative des appartements anciens de nos quartiers placés sous protection architecturale et paysagère. Il est temps de mettre un terme à cette situation.

Les principes qui guident le plafonnement de la taxe d’habitation doivent être étendus à la taxe foncière sur les propriétés bâties pour les propriétaires occupants, par exemple.

Faut-il majorer la taxation des résidences secondaires ? La question doit être envisagée, même si l’application d’un correctif fondé sur la capacité contributive du ménage occupant en ce qui concerne la seule habitation principale nous semble un élément de différenciation suffisant.

Concernant la taxe professionnelle, ou du moins l’impôt économique des entreprises, il importe de s’interroger sur les effets de la dernière réforme et, in fine, sur la non-prise en compte, dans l’assiette de la contribution économique territoriale, d’un élément à nos yeux déterminant de l’actif des entreprises : la réalité de leurs actifs financiers.

De longue date, le groupe que je représente ici en a appelé à l’instauration d’une cotisation nationale, donnant lieu à péréquation, sur les actifs financiers des entreprises et leur utilisation. Nous versons de nouveau au débat cette proposition, dont la mise en œuvre assurerait enfin une réelle égalité de traitement fiscal entre les entreprises. En effet, la dernière réforme, menée en 2010, n’a toujours pas résolu le problème que représente l’évidente sous-imposition des secteurs de la banque et de l’assurance et, plus généralement, de nombreuses entreprises de services.

Si cette réforme a permis de réduire l’imposition de certaines branches industrielles, n’oublions pas qu’elle s’est aussi traduite par l’augmentation de la contribution de dizaines de milliers de très petites entreprises.

Certains ont pu qualifier la taxe professionnelle d’« impôt imbécile ». Sans doute eût-il été préférable de la rendre intelligente, plutôt que d’en décider la suppression pure et simple…

Selon nous, il serait de quelque utilité de donner aux très petites entreprises une bouffée d’air frais sous forme de réduction d’impôt, mais il est surtout temps que nous puissions disposer, via la taxation des actifs financiers, d’un véritable outil de péréquation entre les différents niveaux de collectivités.

Madame la ministre, monsieur le secrétaire d'État, les collectivités sont prêtes à jouer leur rôle de levier économique dans leurs territoires respectifs, et donc dans l’ensemble de notre pays. N’oublions jamais que l’égalité de traitement entre les collectivités territoriales doit être la clé de voûte de la réalisation et de la défense des valeurs de la République. §

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

M. Jacques Mézard. Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je vais m'efforcer d'être mesuré…

Mme la ministre rit.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Nous venons d’adopter le projet de loi NOTRe et les dispositions de la loi de finances pour 2015 entrent en vigueur. Celle-ci prévoit une baisse historique des dotations aux collectivités territoriales.

Ce que nous demandons, une fois de plus, c'est de pouvoir identifier précisément la stratégie de l’exécutif. Les finances locales sont semblables à une grande maison dont les murs sont très fissurés, et dans laquelle chaque gouvernement hésite à faire des travaux en raison du risque d'effondrement total de l’édifice. Nous le savons, à chaque réforme des finances locales, ceux qui payent moins sont silencieux, et ceux qui payent plus hurlent, ce qui rend les choses difficiles, quel que soit le gouvernement en place…

En outre, ce grand édifice héberge des habitants dont les conditions de confort sont très variables, marquées par des déséquilibres considérables. J’ai souvent eu l’occasion de le dire à cette tribune : à capital foncier égal, un propriétaire à Paris paie dix fois moins d’impôts qu’un propriétaire à Aurillac. Cette situation est profondément injuste et insupportable pour nos concitoyens ! La révision des bases est urgente et indispensable, tout comme la réforme de la DGF, mais, pour avancer, sous quelque gouvernement que ce soit, il faut un immense courage politique.

Sans faire de procès à personne, je déplore que des réformes soient engagées sans visibilité fiscale. En l’absence de véritable étude d’impact, elles sont forcément dangereuses. Nous l’avons vu avec la suppression de la taxe professionnelle. Au nom de mon groupe, j’avais demandé la création d’une mission sur les conséquences de la suppression de la taxe professionnelle. Je vous invite, mes chers collègues, à lire les conclusions de cette mission, dont Charles Guené était le rapporteur et Anne-Marie Escoffier la présidente : ce fut une réforme menée aux forceps

Mme la ministre acquiesce.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Aujourd'hui, nous nous retrouvons face à une situation similaire. Avec nos collègues Charles Guéné et Philippe Dallier, j’ai souhaité que nous fassions un rapport sur les conséquences des baisses de dotations annoncées par le Gouvernement. Notre travail, qui n’est pas achevé, porte sur l’évolution des finances de plus de 38 000 collectivités, réparties en neuf catégories. Nous nous sommes appuyés sur deux indicateurs principaux : le taux d’épargne brute et la capacité de désendettement. Vous connaissez les conclusions de notre rapport d’étape, madame la ministre : je n’ai pas entendu s’exprimer, à leur propos, de véritable contestation…

Avant même l’entrée en vigueur du plan d’économies supplémentaires de 11 milliards d’euros, nos collectivités étaient déjà confrontées à une diminution de leurs marges de manœuvre. Notre rapport a construit deux scenarii pour la période 2015-2017, fondés, d’une part, sur une projection « au fil de l’eau », reposant sur une baisse de dotation de 1, 5 milliard d’euros en 2014 suivie d’une seconde baisse, du même montant, en 2015, et, d’autre part, sur la prise en compte du plan triennal d’économies de 11 milliards d’euros. Même dans le scénario « au fil de l’eau », les chiffres obtenus montrent que la situation des collectivités est difficilement tenable, tant la dégradation des finances publiques, quoique lente, est constante.

Notre rapport a mis en lumière un effet de ciseaux, avec un accroissement des dépenses plus dynamiques que celui des recettes. En prenant en compte les transferts de dépenses de l’État vers les collectivités territoriales – liés par exemple à la suppression de l’ATESAT, l’assistance technique de l’État pour des raisons de solidarité et d’aménagement du territoire aux communes, ou à l’instruction des permis de construire –, on constate que le taux d’épargne brute des collectivités s'est réduit de plus de 5 % entre 2012 et 2013 et que le recours à l’emprunt s’est développé. Telle est la réalité !

Madame la ministre, de nombreux élus locaux, maires, présidents d’intercommunalité, de conseil général ou de région, ont alerté le Gouvernement. Notre rapport a fait apparaître que les communes de plus de 10 000 habitants et les départements sont les collectivités qui pâtiront le plus de cette évolution. La limitation de la hausse des dépenses de fonctionnement des collectivités à hauteur de l’inflation ne permettra pas, à elle seule, de compenser la baisse des dotations. La situation des finances locales est par conséquent appelée à se dégrader, s’agissant tant du taux d’épargne brut que de la capacité de désendettement moyenne.

Nous savons qu’un nombre important de collectivités ne pourront pas tenir, ne seront plus gérables. Madame la ministre, monsieur le secrétaire d'État, j’attends que vous confirmiez ou infirmiez nos évaluations. Si elles sont exactes, les conséquences seront dramatiques pour un certain nombre de collectivités.

Mme Françoise Laborde acquiesce.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Voilà pourquoi, madame la ministre, monsieur le secrétaire d'État, nous souhaitions à la fois une réduction et un étalement plus important de ces baisses de dotations. Il est dans l'intérêt général de permettre à nos collectivités de tenir le coup, de préserver l’investissement et la vie de nos concitoyens. §

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je voudrais d'abord, au nom du groupe UDI-UC, remercier le groupe UMP d’avoir organisé ce débat sur l’évolution des finances locales. Certes, entre l’examen de la loi de finances pour 2015 et celui de la loi de programmation des finances publiques, nous avons déjà eu l’occasion d’aborder ce sujet, mais la pédagogie est l’art de la répétition ! Concernant les finances des collectivités territoriales, il est des choses dont il faut bien se pénétrer, sauf à aller droit dans le mur.

C'est entendu, l’état budgétaire et financier de notre pays impose des efforts, et nous sommes tous d’accord pour que les collectivités locales y participent. Cependant, ces efforts doivent être justes et équitablement répartis : c'est là que le bât blesse !

Nous n’avons pas la même conception des économies à réaliser que le Gouvernement. Ce dernier considère que si la dépense augmente un peu moins vite, on fait déjà des économies. Pour nous, madame la ministre, une économie, c'est une diminution de la dépense. Selon vous, comme cela apparaît dans la loi de programmation des finances publiques, si la dépense publique n'augmente que de 60 milliards d’euros en trois ans, alors qu’elle aurait dû s'accroître de 110 milliards d’euros, on fait 50 milliards d’économies.

Voilà comment est calculée l’économie de 50 milliards d’euros qui nous est présentée ! On nous dit ensuite que, sur cette masse, la part des collectivités, c'est 11 milliards d’euros, mais il s’agit en fait, pour elles, d’une véritable diminution de la dépense, et non d’une décélération de sa hausse ! Il existe donc dès le départ entre nous un malentendu, et il sera impossible d’avancer si nous ne le levons pas.

Si l’on fait le cumul, on voit que, en 2017, les dotations des collectivités seront inférieures de 28 milliards d’euros par rapport à 2014, soit une baisse de 13 % au regard des 220 milliards d’euros de budget de l’ensemble des collectivités locales ! J’aimerais que l’État fasse les mêmes efforts : nous n’aurions plus de problèmes budgétaires ni de déficit, nous serions sortis d’affaire !

Mais l’État dit qu’il lui est impossible de réduire l’exercice d’un certain nombre de missions. Pourtant, c’est bien ce que font les collectivités, qui représentent 20 % des dépenses publiques et 9 % de l’endettement, contre 33 % des dépenses publiques et 90 % de l’endettement pour l’État. C'est donc l’État qui vit au-dessus de ses moyens ! Il lui incombe, madame la ministre, monsieur le secrétaire d'État, de faire des efforts. Je souhaite la transposition à l’échelon de l’État de la règle d’or, évoquée par M. Baroin, qui s'applique aux collectivités territoriales. Cela nous aiderait à faire collectivement les efforts qui s'imposent.

Les collectivités locales connaissent donc une baisse considérable, déraisonnable, de leurs dotations, mais elles subissent de surcroît les conséquences, sur leurs recettes, de dispositions antérieures. Ainsi, la taxe professionnelle a été remplacée par différentes taxes, notamment la contribution sur la valeur ajoutée des entreprises, dont l’évolution annuelle du produit est incompréhensible pour les élus locaux : les services fiscaux ne sont pas en mesure de leur expliquer les motifs de baisses tout à fait imprévisibles. Les collectivités locales, qui bénéficiaient auparavant d’une taxe professionnelle assez dynamique, sont donc confrontées à un sérieux problème de gestion.

Je ne m'attarderai pas sur la dynamique des droits de mutation, qui s'est totalement inversée. Par ailleurs, même si nous partageons tous l’objectif de solidarité entre les collectivités, la mise en œuvre et le rythme de progression de la péréquation ont été décidés à une époque où l’on parlait de gel des dotations, et non de baisse drastique ! §Le contexte n’est donc plus du tout le même, et nous devons remettre à plat ce système de péréquation.

En ce qui concerne les dépenses, certaines nous sont imposées par l’État.

Debut de section - Permalien
Marylise Lebranchu, ministre

C'est vrai.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

Je veux bien que l’on revalorise les personnels de catégorie C pour compenser le gel de la valeur du point d’indice, mais qui supporte cette dépense ? D’abord les collectivités locales, et non l’État ! C'est très facile de distribuer de l’argent versé par d’autres…

De même, la suppression du jour de carence entraîne un coût supplémentaire pour les collectivités locales. La réforme des rythmes scolaires représente aussi pour elles une charge considérable ! Je pourrais également évoquer l’augmentation des cotisations au Centre national de la fonction publique territoriale, des retraites… Toutes ces décisions ne relèvent ni des maires, ni des présidents de conseil général, ni des présidents de conseil régional, mais ce sont les collectivités territoriales qui en supportent les conséquences financières.

Dans le même ordre d’idées, le millefeuille territorial constitue sur le plan local un facteur de dépenses supplémentaires, et non d’économies ; la Cour des comptes l’a elle-même reconnu. Telle est la réalité, qui n’est pas conforme à ce qui avait été prévu. Certains transferts et intégrations de compétences ne sont pas accompagnés du transfert des personnels correspondants. On a encouragé l’intégration à l’échelon des intercommunalités, mais je ne suis pas sûr que ce soit la meilleure réponse à apporter. Il convient, selon moi, de favoriser et d’encourager davantage la mutualisation. Intégration et mutualisation ne doivent pas être confondues : ce sont deux notions différentes. Tâchons d’identifier ce qui peut être mutualisé entre collectivités territoriales. À mes yeux, c’est une voie à suivre pour l’avenir.

Des recettes en forte baisse et des dépenses en hausse : cette situation met forcément en péril l’investissement local, variable d’ajustement risquant de subir de plein fouet la baisse des dotations. C’est un danger pour notre économie, 70 % de l’investissement public reposant sur les collectivités locales. On ne peut donc pas trop jouer sur ce levier. Sinon, la croissance de l’économie française, qui n’est déjà pas très brillante, en prendra encore un coup.

J’en viens à la fiscalité locale. C’est inscrit dans la loi de programmation des finances publiques, le Gouvernement anticipe son augmentation. Il est vrai que faire des économies et réduire l’investissement sera sans doute insuffisant : je suis convaincu que de nombreuses collectivités territoriales seront contraintes d’augmenter les impôts, même si elles ne l’ont pas annoncé, même si elles ne l’avaient pas prévu, même si elles ne le souhaitent pas. Elles seront tout simplement dans l’incapacité de faire autrement.

Par ailleurs, Mme la ministre a donné son accord à la réforme, annoncée par le Gouvernement, de la dotation globale de fonctionnement. À mes yeux, dans le contexte actuel de baisse drastique et historique de cette dotation, il s’agit d’une mission impossible.

Certaines collectivités sont d’ores et déjà au bord du gouffre. Comment pourraient-elles accepter une réforme de la DGF qui fera forcément des perdants ? Vous n’y arriverez pas, j’en prends aujourd'hui le pari, sauf à renforcer encore la tempête qui souffle sur les finances locales et à susciter la révolte des dindons de la farce, à savoir les collectivités territoriales. On a eu la révolte des pigeons, celle des poussins, demain ce sera celle des dindons ! On sent monter, sur le terrain, les protestations des élus locaux. Si le Gouvernement ne les entend pas, la révolte viendra non seulement d’eux, mais aussi de tous les habitants, qui subiront à la fois les coupes effectuées dans les services publics et les augmentations d’impôts. Nombre de nos concitoyens ne l’admettront pas.

Je souhaite que l’on prenne le temps de tout remettre à plat, que l’on regarde bien les conséquences de la réforme de la taxe professionnelle, de la mise en œuvre de la péréquation et des diverses dispositions qui ont été prises, qu’il conviendrait selon moi de geler. Nous n’en prenons pas le chemin, car le projet de loi NOTRe impose aux régions d’élaborer un schéma de développement économique. Je dis « stop » ! Laissons aux régions le soin de décider, si elles le souhaitent, l’élaboration d’un tel schéma, dont le coût n’est pas nul. Pourquoi rendre cette dépense obligatoire pour les régions ? Il faut laisser aux collectivités de la liberté, ainsi que les moyens de vivre, de se développer, de faire des choix. Au contraire, le Gouvernement leur impose aujourd'hui des baisses drastiques des dotations, qui finiront par provoquer, je vous l’assure, une révolte tant des élus locaux que des habitants.

J’espère que le groupe UDI-UC sera entendu et que cette remise à plat sera mise en œuvre. Nous comptons sur vous, monsieur le secrétaire d’État. §

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Bouvard

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je ne reviendrai pas sur l’intervention de François Baroin, ni sur la nécessaire contribution des collectivités à l’amélioration de la situation de nos finances publiques. Cependant, après le gel des dotations décidé dans le passé, on leur demande un effort considérable, sans précédent, de 28 milliards d’euros d’ici à 2017.

Je ne reviendrai pas non plus sur les propos de Charles Guené, qui a rappelé avec raison que la DGF n’était que la transformation d’une ancienne fiscalité locale, et non pas une dotation généreusement accordée par l’État.

Je voudrais aborder, dans le temps qui m’est imparti, la problématique de la péréquation. Évidemment, plus on diminue les dotations et plus les collectivités, qui se sentent étranglées financièrement et cherchent à faire face aux dépenses qui leur incombent, en appellent à une péréquation plus importante.

La péréquation, entre ses composantes verticale et horizontale, représente 10 milliards d’euros, c'est-à-dire une somme équivalant à l’effort demandé chaque année aux collectivités.

Il faut également évoquer, monsieur le secrétaire d’État, la sédimentation caractérisant l’ensemble de notre dispositif en matière de fiscalité locale. La péréquation a commencé avec le FSRIF, le Fonds de solidarité des communes de la région d’Île-de-France, instauré en 1991. Depuis, nous avons créé six autres fonds de même nature : un pour le bloc communal, le FPIC, le Fonds de péréquation intercommunal et communal, quatre pour les départements et un pour les régions.

Ce dispositif est-il aujourd'hui satisfaisant ? La Cour des comptes rappelle, dans son rapport sur les finances publiques locales, que le législateur est intervenu à plusieurs reprises pour développer les dispositifs de péréquation existants et en créer de nouveaux. Elle précise que, « pour autant, l’augmentation des moyens financiers consacrés à la péréquation ne s’est pas accompagnée de l’adoption d’un cadre global permettant d’assurer la cohérence de l’ensemble et d’en évaluer l’efficacité. La péréquation financière ne s’accompagne pas d’une définition claire des objectifs qui lui sont assignés. Elle repose sur un ensemble de dispositifs ajoutés les uns aux autres par sédimentation. » Tout est dit !

Madame la ministre, je souhaite que, en même temps que nous travaillerons sur l’évolution de la DGF, nous réfléchissions aussi sur la péréquation, afin de l’adapter, comme cela a été fait dans d’autres pays. La péréquation ne doit pas s’appuyer simplement sur la ressource fiscale des collectivités territoriales, qui, certes, présente des écarts importants : elle doit également prendre en considération la réalité des charges. J’ai étudié la manière dont la péréquation financière est mise en œuvre en Suisse, avec un dispositif de compensation pour charges excessives : il ne s’agit pas seulement des charges sociodémographiques, comme c’est souvent le cas chez nous, mais aussi des charges géotopographiques.

On ne doit pas non plus oublier que la montée en puissance de la péréquation affecte principalement les communes, les départements et les régions qui assurent l’essentiel des 70 % de l’investissement public financés par les collectivités.

C’est notamment le cas des communes touristiques, qui sont aussi des entreprises ayant besoin de se développer, de financer des aménagements pour rester compétitives dans l’un des seuls secteurs où notre pays crée encore des emplois. Or elles subissent parfois un prélèvement de 1, 5 million d’euros par an au titre du FPIC. Leur capacité d’investissement se trouve de ce seul fait réduite de 15 millions d’euros, ce qui n’est pas neutre.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Bouvard

Il n’y a pas que Courchevel, qui n’est d’ailleurs pas la commune qui paie le plus ! Aujourd'hui, la quasi-totalité des communes touristiques subissent un prélèvement au titre du FPIC.

Les communes touristiques s’étaient vu attribuer, voilà quelques années, une dotation leur permettant justement d’accompagner leur développement. Or il se trouve – chacun a fait des erreurs, il faut avoir l’honnêteté de le dire – que, dans le cadre de la réforme de la DGF de 1995, la DGF des communes touristiques a été cristallisée, ce qui signifie que les communes qui ont continué à investir n’ont pas vu progresser leur dotation touristique, alors que celles qui bénéficiaient d’un effet de rente l’ont acquis définitivement. En effet, dans le cadre de la cristallisation, la péréquation qui existait au sein de l’ancienne dotation touristique a été supprimée.

Il convient donc de remettre à plat l’ensemble du dispositif, en examinant, conformément à ce qui a été inscrit dans la loi de finances – j’en sais gré à nos collègues et au Gouvernement –, la soutenabilité de la péréquation.

C’est un sujet qui concerne aussi les départements. En effet, un certain nombre d’entre eux se trouvent aujourd'hui face à une double mécanique de péréquation, celle-ci étant inhérente à la DGF des départements. Vous le savez, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, la réfaction de la DGF des départements a un effet péréquateur, dans la mesure où on prend en compte à la fois le revenu moyen par habitant, censé représenter les charges des départements – ce qui n’est pas le cas –, et le niveau des taux de fiscalité, censé représenter les marges de manœuvre possibles. Or, à cette diminution de la DGF s’ajoutent les prélèvements sur les droits de mutation à titre onéreux. Dans certains départements, c’est 25 % du budget d’investissement qui disparaît du fait de la combinaison de ces deux facteurs.

Voilà pourquoi, madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, je souhaite que l’on puisse procéder à une remise à plat des dispositifs de péréquation.

M. Charles Revet applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Boulard

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, en matière de finances locales, nous souhaiterions d’abord avoir un peu de stabilité, en contrepartie de la durabilité de nos engagements. Mais je sens bien que ce vœu a peu de chances d’être entendu…

L’effet cumulé du recul des dotations, du financement de la péréquation et de la réforme de la DGF risque de poser des problèmes tout à fait redoutables dans certains territoires.

Le recul des dotations peut être comparé à un régime. Les premiers kilos ne sont pas trop difficiles à perdre, mais les choses se compliquent lorsque l’on commence à perdre de la masse musculaire… Un repli massif de l’investissement constitue un risque bien réel pour 2016 et 2017. Nous avons en effet une gestion prudentielle, un culte de l’excédent, et nous nous dirigeons probablement vers un recul très important de l’investissement. Ne négligeons pas ce premier phénomène.

Concernant la péréquation, on lui fait jouer aujourd'hui un rôle un peu pervers. Elle a été instaurée pour réduire les écarts de richesse. Je rappelle toutefois qu’un territoire subit un prélèvement au titre de la péréquation dès lors que sa richesse atteint seulement 90 % de la moyenne. On utilise de plus en plus la péréquation pour atténuer les effets des reculs des dotations. Ceux qui croient qu’une telle situation pourra perdurer s’illusionnent. Il s’agit en effet d’un usage assez pervers de la péréquation.

Enfin, la réforme de la DGF ne peut pas se limiter à la réduction des écarts. En effet, certains écarts s’expliquent, sont légitimes, par exemple ceux qui sont liés au niveau d’intégration des compétences, justifiant l’existence d’un coefficient d’intégration fiscale, sur lequel est indexée la DGF, ou aux charges de centralité. À cet égard, permettez-moi de citer le cas du maire de Baugé-en-Anjou, ville de 3 800 habitants, qui crée une commune nouvelle pour mieux répartir ces charges de centralité. On ne peut donc pas limiter la réforme de la DGF à la simple réduction des écarts.

S’agissant maintenant de la fiscalité locale, je rappelle que, depuis quarante ans, on ne cesse de supprimer des impôts locaux au profit de dotations que l’État, mais que le gouvernement en place, quel qu’il soit, après avoir annoncé qu’il ne toucherait jamais à ces dotations parce qu’elles sont sacrées, finit toujours par les réduire.

Le Sénat avait donc souhaité, lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2015, mettre effectivement en œuvre le principe de sanctuarisation de la fiscalité locale et, en conséquence, rétabli trois taxes qu’avait supprimées l’Assemblée nationale en première lecture : la taxe pluviale, la taxe de trottoirs et la taxe sur les spectacles de variétés. Malheureusement, nos collègues députés ne nous ont finalement pas suivis. On aurait pourtant pu penser qu’au moment où l’on assiste à un repli des dotations l’heure était venue de mettre définitivement fin à ce mouvement de suppression des impôts locaux.

Sommes-nous d’accord pour sanctuariser la fiscalité locale ?

Par ailleurs, il convient de clarifier cette fiscalité en actualisant l’ensemble des bases locatives, commerciales ou d’habitation. À cet égard, se présente évidemment une difficulté : s’agissant d’impôts de répartition, l’allégement des uns peut entraîner l’augmentation, fût-elle légère, des autres. La prudence s’impose donc dans cette démarche ; d’où la nécessité absolue de procéder à des simulations.

Dernier point : l’autonomie. Je ne pense pas que l’autonomie fiscale de certaines collectivités locales doive passer par la remise en cause de celle d’autres collectivités.

La réforme de la taxe professionnelle a eu pour conséquence de réduire extraordinairement l’autonomie des régions et des départements, mais le recouvrement légitime par elles de leur pleine autonomie fiscale ne doit pas se faire au détriment de celle du bloc communal. Or la tentation de procéder ainsi existe, comme on a pu le constater avec la question du versement transport.

Avant de conclure, mes chers collègues, je veux citer trois mots dont il faut se méfier dès lors qu’il est question de fiscalité locale.

Derrière le mot « simplification » – surtout lorsque ce sont des inspecteurs des finances qui l’emploient –, se dissimule l’idée de « suppression ».

Derrière le mot « toilettage », il y a l’idée qu’on peut être tondu. §

Et quand on parle de « mise à plat », il faut comprendre qu’on va rouler sur les jantes !

Nouveaux sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Boulard

Ces mots-là sont toujours dangereux !

Enfin, ne serait-il pas possible d’obtenir que l’emprunt qui finance l’investissement ne soit plus compris dans la dette publique ? Mais a-t-on encore le droit, à la tribune du Sénat, d’être keynésien ? Je n’en suis pas certain.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. – M. Patrick Abate applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Doligé

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, bien sûr, je n’éviterai pas certaines redites puisque, comme notre collègue Michel Bouvard, je parlerai de la péréquation et, comme notre collègue Vincent Delahaye, je citerai un certain nombre de chiffres. Mais, ainsi que le disait tout à l’heure l’un des intervenants, il n’est pas inutile de répéter tant prévaut l’impression qu’on ne prend pas en compte toutes les remarques que nous pouvons formuler.

Bien sûr, madame la ministre, les élus ici présents et tous ceux qui ont des responsabilités exécutives sont conscients qu’il leur faut contribuer à l’effort national. Toutefois, ils s’interrogent sur cet effort : à quoi sert-il et est-il justement réparti ?

Je le rappelle, il était prévu que cet effort porterait sur 1, 5 milliard d’euros par an pendant trois ans, à partir de 2014, soit 4, 5 milliards d’euros, avant qu’on ne nous annonce les fameux 11 milliards d’euros. Comme l’a démontré tout à l’heure notre collègue Vincent Delahaye, au total, l’effort demandé sera de 28 milliards d’euros au bout de trois ans. Ce sont là des montants considérables au regard des recettes des collectivités locales.

Celles-ci auraient-elles fauté ? Auraient-elles commis des erreurs ?

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Doligé

Elles ne sont pas responsables – ou si peu – des 2 000 milliards d’euros de dettes et, à la différence de l’État, elles ne sont pas contraintes d’emprunter à partir du mois d’octobre pour couvrir leurs frais généraux et leurs frais de fonctionnement.

Vous savez certainement, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, que le poids relatif des prélèvements obligatoires des administrations publiques, qui comprennent les impôts locaux et le transfert des recettes fiscales, a baissé entre 2009 et 2013.

Vous savez aussi que les collectivités réalisent 70 % des investissements publics.

Et vous n’ignorez pas que, plus les années passent, plus la liberté fiscale de nos collectivités s’amenuise. Ce mouvement, enclenché voilà trois ou quatre ans, se poursuit au fil du temps. À ce jour, l’État dispose de la majeure partie des budgets locaux. Si je prends le cas des départements, ceux-ci maîtrisent au maximum 20 % de leur fiscalité, l’État décidant de l’essentiel de leurs dépenses, sans oublier les transferts non financés.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Doligé

Quelques mots sur la péréquation financière des départements.

Nous constatons une accumulation des dispositifs de péréquation, qui sont devenus complexes et illisibles. Ce n’est pas nous qui le disons, c’est l’Inspection générale des finances et l’Inspection générale de l’administration qui l’ont démontré dans des rapports.

Par ailleurs, les dispositifs sont inéquitables. Ainsi, 79 % des fonds départementaux de péréquation vont aux départements détenus par la majorité

M. Michel Bouvard applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Doligé

On constate également que les taux d’administration sont disparates et que les dispositifs sont inefficaces au regard de l’ampleur des dépenses sociales.

Tous ces constats devraient nous conduire à envisager une péréquation s’appuyant sur de véritables critères de bonne gestion. On nous dit toujours que ce n’est pas possible. Pour ma part, j’ai la conviction qu’on peut définir de tels critères et je vais d’ailleurs vous en citer quelques-uns : le rythme d’évolution de la masse salariale – cela devrait vous plaire puisque, à plusieurs reprises, j’ai entendu dire qu’il fallait la maintenir –, le rythme d’évolution des charges à caractère général, les taux d’imposition et leur évolution, enfin, le niveau du taux d’épargne et la capacité de désendettement.

Autre proposition : la nature et la répartition des ressources fiscales devraient reposer sur des principes simples et lisibles par tous ; il n’est plus possible d’affecter des impôts et des taxes procycliques à des dépenses également procycliques. Comment peut-on financer le RSA, qui ne cesse d’augmenter, au moyen des DMTO, qui, eux, baissent ? C’est impossible !

Le principe d’autonomie financière doit également être revisité.

Je vais citer des exemples vécus de transferts sournois imposés par le Gouvernement en 2015.

Dans mon département, la réévaluation du RSA, c’est 1 % du budget ; la baisse de la dotation globale de fonctionnement, c’est 2 % ; la perte du produit de l’écotaxe, c’est 1 % ; la péréquation de la CVAE, le fonds de solidarité, la loi Peillon et la réforme des rythmes scolaires, les mesures en matière de ressources humaines, c’est 1 % ; l’accroissement du reste à charge des allocations individuelles de solidarité, c’est 2 %. Au total, on en arrive à une surcharge annuelle de 7 % du budget, soit 42 millions d’euros.

Madame la ministre, ce sont 42 millions d’euros de pertes dans un département moyen comme le mien, mais quand même 4 milliards d’euros sur le plan national. Cela veut dire de l’autofinancement en moins, de la capacité d’investissement en moins et donc de l’emploi en moins.

Les chiffres du chômage viennent juste d’être publiés : au mois de décembre, on a enregistré 8 100 chômeurs de plus, soit 189 000 de plus en un an ; on en compte désormais 3, 496 millions. Il n’y a pas de quoi parler de réussite ! Et que faites-vous ? Vous pénalisez les collectivités !

Tout à l’heure, François Baroin, chiffres à l’appui, a expliqué les conséquences de ce moindre investissement des collectivités par la réduction de leurs capacités d’autofinancement.

Madame la ministre, tout cela devrait donner à réfléchir. Écoutez-nous et entendez-nous ! En 2015, nous allons à la catastrophe. Je me permets de le dire une nouvelle fois.

Applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Raynal

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, le groupe UMP nous propose donc aujourd’hui un débat sur l’évolution des finances locales. Il me semblait pourtant que celui-ci avait déjà eu lieu récemment – il fut chaque fois très long, d’ailleurs –, tant lors de l’étude de la trajectoire de nos finances publiques que lors du vote de la loi de finances pour 2015.

Peut-être nos collègues se sont-ils rendu compte qu’en ces différentes occasions, ils n’avaient pas voulu s’extraire du seul débat sur la baisse des dotations de l’État pour porter un jugement plus nuancé et aller vers des propositions plus constructives sur le sujet qui nous occupe.

Je ne saurais, en tout cas, faire le moindre rapprochement entre ce troisième débat sur les finances locales au sein de notre assemblée et quelque échéance électorale que ce soit. §

Le rapport d’information sur l’évolution des finances locales à l’horizon 2017 déposé par la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation s’ouvre sur une évidence : « La nécessité de redresser les finances locales ne date pas des dernières annonces du Gouvernement. » Plus loin, ses auteurs écrivent : « Avant même l’annonce par l’État de la réduction de 11 milliards supplémentaires du concours aux collectivités d’ici 2017, la poursuite de la divergence observée entre les dépenses et les recettes locales apparaissait difficile à envisager... »

Le rapport précise qu’en 2013, entre 10 % et 15 % des communes de plus de 10 000 habitants et des départements affichaient d’ores et déjà un encours de dette représentant plus de quinze années d’épargne brute, c’est-à-dire qu’ils étaient techniquement en situation d’insolvabilité.

Il est clair que la baisse programmée des dotations de l’État pour les années 2015-2017 ne peut qu’aggraver la situation. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle le groupe socialiste a souhaité étaler dans le temps cette baisse de dotations, et nous reprendrons sans doute cette proposition lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2016.

Pour autant, mes chers collègues, n’oublions jamais les causes premières de cette baisse de dotations, et avant tout celles qui ont contribué à dégrader les structures financières de notre pays. Rappelons-nous : la loi de programmation pour les finances publiques votée en 2008 prévoyait pour 2012 un déficit de 0, 5 %. Le résultat du gouvernement Fillon a été de 4, 9 %, soit dix fois ce qui était espéré ou, en tout cas, annoncé.

Alors, certains objecteront que le pays a eu à faire face à une crise sans précédent en 2008. Certes ! Pour autant, alors qu’elle était soumise à la même crise, l’Allemagne a affiché dès 2012 un budget excédentaire, là où nous frôlions, mes chers collègues, les 5 % de déficit.

Voilà la réalité crue de dix années de gestion de la droite, voilà la situation du pays que nous a laissée le parti – l’UMP – qui, aujourd’hui, nous propose ce débat : c’est sans doute qu’il souhaite en tirer toutes les conséquences... Bossuet ironisait sur ces hommes qui se plaignent des conséquences alors qu’ils chérissent les causes.

Qui faut-il croire ? Ceux qui, légitimement, s’inquiètent des difficultés des collectivités locales ou ceux – mais ce sont parfois les mêmes – qui préconisent par ailleurs, avec François Fillon, un doublement des économies à engager à hauteur de 110 milliards ou de 120 milliards d’euros, avec à la clé, forcément, de nouvelles diminutions de ressources pour les collectivités locales ?

Notre récent débat sur la loi de finances pour 2015 a, sur ce point, été éclairant, les pistes d’économies pour le budget de l’État présentées par la majorité sénatoriale étant particulièrement pauvres au regard de l’ambition revendiquée.

Une fois les responsabilités clairement identifiées, peu parmi nous contestent la nécessité vitale pour la nation de contenir le déficit du budget de l’État et de la dette publique. La plupart de nos collègues comprennent parfaitement que les collectivités locales contribuent au rétablissement des comptes publics.

Je l’ai déjà dit ici, plus que l’ampleur de l’effort demandé, c’est la vitesse à laquelle celui-ci devra être réalisé qui pose question – nous sommes tous d’accord sur ce point –, tant sont rigides les budgets de nombre de collectivités.

Ce sujet reviendra donc à coup sûr en débat lors de la prochaine loi de finances.

Pour l’heure, nous devons réfléchir aux voies et moyens qui permettraient aux collectivités de passer au mieux ces années forcément tendues, particulièrement en ce qui concerne le bloc communal, qui, fournissant à leurs citoyens un grand nombre de services publics, ont à faire face à de nombreuses charges de centralité.

La prise en compte par les communes membres des intercommunalités de ces charges de centralité, notamment pour les bourgs centres en milieu rural, devra être rapidement recherchée, sauf à risquer de voir la situation de ces bourgs centres se dégrader rapidement.

De même, les schémas de mutualisation doivent se multiplier et certaines délégations de service public être renégociées.

Les politiques d’achat public doivent être revues, tout comme les consommations de fluides et d’énergie.

En matière de ressources, une action peut être engagée sur les assiettes de l’impôt local, ainsi que sur les tarifs des services publics.

Ces différentes mesures et quelques autres permettront de répondre pour partie à l’objectif du Gouvernement. Il nous faut partout prendre des initiatives pour aider chacun des responsables locaux à les mettre en œuvre.

Plus largement, l’année à venir doit être mise à profit pour revisiter la répartition de la baisse des dotations entre les collectivités du bloc communal. La répartition selon les recettes réelles de fonctionnement, que nous avons choisie, pourrait être affinée eu égard à l’effort demandé, en tenant compte, peut-être, des revenus par habitant et de l’effort fiscal.

On le voit, le temps qui est devant nous doit être celui, non plus de la polémique, mais plutôt du nécessaire travail sur l’efficience et la pertinence des politiques publiques locales, dans l’attente d’un nouveau débat qui nous réunira à la fin de l’année, lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2016, sur les conditions de la poursuite – revues, je l’espère – de la baisse des dotations de l’État.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Husson

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, en mai 2012, l’engagement n° 54 du programme de François Hollande promettait « un pacte de confiance et de solidarité [pour les collectivités], garantissant le niveau des dotations à leur niveau actuel ». Pourtant, les collectivités territoriales abordent l’année 2015 avec anxiété.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Husson

Tenues de présenter un budget à l’équilibre, elles sont aujourd’hui confrontées à une baisse drastique des dotations de l’État.

Ce retrait de l’État intervient alors que l’épargne brute des collectivités ne cesse de diminuer depuis 2012 – de presque 10 % –, du fait de la faible croissance des recettes fiscales et des premières diminutions des concours financiers de l’État.

Le ralentissement des dépenses de gestion des collectivités depuis trois ans ne réduit pas l’effet de ciseaux, d’autant qu’une hausse des frais de personnel et des diverses prestations sociales, comme l’a dit notre collègue Vincent Delahaye, a été imposée aux collectivités.

La baisse, déjà observée, de l’épargne brute a une double conséquence : la diminution de l’investissement et l’augmentation de la dette.

Au lieu de considérer que les collectivités avaient apporté leur contribution au redressement des finances publiques et de leur laisser le temps de rétablir l’équilibre de leurs comptes, votre gouvernement, madame la ministre, monsieur le secrétaire d'État, a fait le choix de programmer une baisse des dotations de 11 milliards d’euros d’ici à 2017 ! Ainsi, les collectivités auront subi une diminution de 28 milliards d’euros, pas moins, de 2013 à 2017.

Le bloc communal sera plus particulièrement visé par ces baisses : alors qu’il représente 56 % des dépenses publiques locales, il supportera une baisse de 70 % des dotations qui lui sont destinées.

Dans votre budget, le montant de l’emprunt est de 200 milliards d’euros environ, pour des investissements de 16 milliards d’euros environ. Les collectivités, soumises, elles, à une obligation d’équilibre budgétaire et ne pouvant emprunter que pour investir, seraient-elles le dindon de la farce ? L’État semble en tout cas avoir plus de facilité à imposer une rigueur budgétaire aux collectivités qu’à lui-même !

Pour illustrer l’effort demandé par l’État aux collectivités, j’indiquerai que le montant total des moyens budgétaires mis en œuvre par les seize communautés urbaines et métropoles est de 11 milliards d’euros, soit le coût de la totalité des actions des communes et des communautés de France en matière de culture et de sport.

De nombreux spécialistes estiment que les dépenses d’équipement vont diminuer de 30 %, sans pour autant freiner l’endettement des collectivités locales, comme nous avons pu l’observer en 2014, des collectivités qui devront donc arbitrer entre la préservation du capital existant et la réalisation de nouvelles infrastructures ou d’investissements répondant à des besoins nouveaux ; je pense notamment au numérique, à la performance énergétique.

Dans le domaine des travaux publics, François Baroin l’a dit tout à l’heure, c’est la perte de 70 000 emplois qui est quasiment annoncée.

Par conséquent, loin de soutenir la croissance, l’effort qui est demandé aux collectivités locales fait peser un risque réel de récession.

La loi de programmation des finances publiques 2015-2017‎ instaure un objectif national d’évolution de la dépense publique qui regroupe les dépenses de fonctionnement et d’investissement des collectivités locales, hors amortissement des emprunts.

Le Gouvernement entend ainsi inciter les collectivités à participer à l’effort national de réduction des déficits. C’est logique ! Sinon que, le choix d’un tel indicateur montre à quel point le Gouvernement est dans l’erreur : consolider les dépenses de fonctionnement et d’investissement n’apparaît pas des plus judicieux. L’effort des administrations doit essentiellement porter sur le fonctionnement, afin de dégager de l’épargne et de soutenir les dépenses d’investissement, vertueuses pour le développement économique de nos territoires.

Au-delà de la baisse des dotations, votre gouvernement évoque régulièrement depuis un an l’idée de réformer « sans attendre » la DGF, ce qui suscite questionnement et inquiétude.

Lors des dernières Assises de la ruralité, le relevé de conclusions prévoyait de « rééquilibrer les dotations et aides financières aux collectivités rurales, en faveur des territoires ruraux ».

Si l’on peut accepter de revoir, sur le principe, les dotations aux collectivités, convenons que leurs écarts résultent de calculs connus et ont leur justification. Surtout, évitons que cette question ne dérive trop vite vers le faux débat « urbain contre rural ».

Il convient d’ailleurs de rappeler que la DGF n’est pas une dotation mesurant l’aide de l’État ; elle n’est que le remboursement d’un prélèvement fiscal opéré par l’État en remplacement d’un autre prélèvement fiscal opéré antérieurement par les collectivités locales.

Enfin, s’agissant des dotations aux collectivités locales et/ou des modalités financières de leur accompagnement, permettez-moi, madame la ministre, de formuler une proposition.

Puisqu’il faut essayer de faire mieux avec moins, essayons d’être imaginatifs et audacieux, en sortant quelque peu des sentiers battus. Pourquoi ne pas imaginer un dispositif nouveau et incitatif de dotations qui seraient attribuées par un système de bonification pour les projets d’investissement qualifiés de structurants, qui répondraient à des choix stratégiques s’intégrant par exemple dans des schémas de service et d’équipements élaborés par les élus et participant aux dynamiques de développement et d’attractivité des territoires ? La durée de bonification pourrait être limitée, pour permettre d’adapter le montant des enveloppes dédiées dans le temps et selon les territoires.

L’objectif serait d’inviter les collectivités à hiérarchiser leurs projets et à privilégier les opérations structurantes, considérant qu’aujourd’hui de nombreux projets qui s’inscrivent dans cet esprit et cette démarche ne peuvent plus être financés.

Je pense, par exemple, aux projets scolaires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Mon cher collègue, je vous prie de conclure, car vous avez déjà largement dépassé votre temps de parole.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Husson

Je conclus, madame la présidente.

L’accueil des enfants, le périscolaire, la restauration scolaire, les lieux de pratique sportive, l’empilement des normes et les nouveaux rythmes scolaires ont progressivement transformé nos écoles, qui se limitaient hier aux seules salles de classe, en de nouveaux « complexes polyvalents de services éducatifs et scolaires », gourmands en espace et fort coûteux.

Si l’on ajoute, par exemple, les équipements sportifs et de loisirs, vous mesurez la nécessité de penser les projets à de nouvelles échelles, pour conforter la vitalité et l’attractivité de nos territoires, de nos villages comme de nos villes : beau défi qu’il nous faut relever ensemble. §

Debut de section - PermalienPhoto de François Patriat

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, je consacrerai l’essentiel de mon intervention au fonds de soutien aux collectivités territoriales, mais je souhaite préalablement répondre à ceux de nos collègues qui sont revenus sur le problème des dotations.

Je crois qu’il faut cesser ce jeu qui consiste, un jour, à réclamer des économies et, le lendemain, à crier au loup quand un gouvernement essaie d’en faire.

On peut très bien, aujourd’hui, en tout cas dans un premier temps, procéder à des économies de fonctionnement sans toucher à l’investissement. J’en veux pour preuve la région que je préside actuellement et qui vient d’adopter son budget : nous avons diminué ce dernier, mais nous avons augmenté les dépenses d’investissement de 5 % parce que nous avons réduit les dépenses de fonctionnement de 13 millions d’euros. Nous avons même voté un plan de relance pour l’investissement de 193 millions d’euros pour soutenir le secteur du bâtiment et des travaux publics ainsi que d’autres secteurs, en accélérant des processus précédemment mis en place.

Exclamations sur les travées de l’UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de François Patriat

Il est possible de sortir du discours misérabiliste : les économies, il faut en faire, tout le monde est d’accord sur ce point. Cela vaut pour tout le monde, et pas seulement pour les autres…

Je suis d’accord sur le fait que cette baisse du fonctionnement va inéluctablement régler le problème que soulève le projet de loi NOTRe, car nous allons être obligés de nous replier intégralement sur nos compétences obligatoires et d’oublier celles qui sont optionnelles.

Debut de section - Permalien
Marylise Lebranchu, ministre

Très bien !

Debut de section - PermalienPhoto de François Patriat

Évidemment, les collectivités locales que nous aidions disposeront sans doute désormais d’un budget plus limité pour le sport, la culture et l’environnement.

Je veux également dire quelques mots du FPIC, le fonds national de péréquation des ressources communales et intercommunales, dont le mécanisme aboutit aujourd’hui à une situation aberrante, avec de plus en plus de communes contributrices – et ce sont parfois des communes de petite taille –…

Debut de section - PermalienPhoto de François Patriat

… et de moins en moins de communes bénéficiaires.

Un rapport d’information sénatorial sera remis avant le 1er septembre 2015 sur le sujet. J’en attends beaucoup, espérant que, dans la prochaine loi de finances, il nous permettra d’établir un peu plus de justice et d’équilibre. §

J’en viens au fonds de soutien aux collectivités territoriales ayant souscrit des emprunts à risque.

La question de son utilité se pose actuellement avec une grande acuité compte tenu de la hausse du franc suisse. La Suisse a décidé de laisser s’envoler sa monnaie vis-à-vis de l’euro, et de très nombreuses collectivités vont être frappées de plein fouet. Leur cas risque de poser problème au regard du nombre et des montants des contrats de prêt qui avaient été conclus sur la base de la parité entre l’euro et le franc suisse.

C’est une nouvelle douche froide pour les collectivités locales, madame la ministre, car cette appréciation du franc suisse met de plus en plus en péril les finances de beaucoup de communes, …

Debut de section - PermalienPhoto de François Patriat

… mais aussi de nombreux départements et régions ayant souscrit des emprunts toxiques.

Ce n’est pas le premier coup de semonce pour les collectivités, qui avaient déjà eu des sueurs froides en 2011. Depuis, les choses ont évolué, mais les renégociations avec les banques, notamment la Société de financement local, la SFIL, sont loin d’être achevées. Les collectivités devront pourtant s’y astreindre si elles veulent bénéficier du nouveau fonds de soutien de 1, 5 milliard d’euros, créé pour les aider à se « désintoxiquer ».

Un grand nombre des emprunts toxiques « non déclenchés », c’est-à-dire « dormants », car assis sur une parité euro/franc suisse, qui ne posait pas de problème jusqu’à présent, sont aujourd’hui touchés de manière colossale. Très souvent, les taux d’intérêt sont multipliés par deux pour les collectivités, ce qui explique en partie la crainte du monde local.

Institué par la loi de finances pour 2014, le fonds de soutien aux organismes publics ayant souscrit des contrats de prêt ou des contrats financiers structurés à risque est en passe d’être absorbé. Il avait été calibré sur une indemnité de remboursement anticipé globale et simulée à l’instant t, qui ne prenait évidemment pas en compte la possible activation de ce risque.

Je me réjouis que le Gouvernement compte faire un geste envers les 900 collectivités locales ayant souscrit ce type d’emprunts. Après l’appréciation brutale de la devise helvétique, et l’envol des taux d’intérêt affectant ces emprunts, il est urgent d’agir pour éviter des conséquences dramatiques sur les finances publiques.

Est déjà actée une remise à plat des modalités du fonds de soutien, qui serait alimenté par les banques et l’État. Ce fonds devait être initialement doté « de 1, 5 milliard d’euros sur quinze ans pour aider les collectivités locales les plus fortement affectées par les emprunts structurés et alléger le coût de sortie de ces emprunts à risque », comme l’a rappelé ici M. le secrétaire d’État au Budget, Christian Eckert – il devrait nous le redire demain matin en commission des finances.

Toutefois, l’appréciation du franc suisse a définitivement rendu la dotation du fonds de soutien obsolète. En effet, la somme de 1, 5 milliard d’euros devait couvrir en partie l’indemnité de remboursement anticipé globale – estimée à 6 milliards d’euros – dont devaient s’acquitter les collectivités pour en finir avec cette affaire des prêts toxiques.

Avec l’appréciation du franc suisse, cette indemnité globale a bondi de plusieurs milliards, absorbant le 1, 5 milliard d’euros du fonds.

Conscient de l’effet significatif de ces évolutions sur les finances locales, le Gouvernement doit donc faire le point sur les conditions d’accompagnement des collectivités par le fonds de soutien.

Madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, faut-il faire payer davantage les banques ?

Pour résoudre cette crise, la voie retenue semble donc être l’augmentation des moyens du fonds de soutien, ainsi que la répartition de la charge entre État, banques et collectivités locales. Une question reste en suspens : quelle part prendront les banques dans la résolution de cette affaire qui ne les concerne à vrai dire quasiment plus puisque la banque la plus impliquée, la SFIL, est publique ? Je le rappelle, celle-ci a repris la plus grande partie des activités de la défunte Dexia, l’ancien leader du marché des prêts aux collectivités locales.

Si elles ne sont quasiment plus concernées, les banques privées ont toutefois participé à la commercialisation des prêts durant les années 2000 et abritent, pour certaines, des entités qui ont confectionné des produits financiers structurés complexes, ensuite adossés aux prêts souscrits par les collectivités, prêts qui sont à l’origine de cette crise. Avez-vous, madame la ministre, la volonté d’agir pour les faire payer davantage ?

C’est le fonctionnement du fonds qui doit être revu au regard de l’envolée du franc suisse. Ce fonds doit être alimenté, à raison de 200 millions à 300 millions d’euros chaque année, par l’État et par la taxe sur le risque systémique prélevée auprès des banques. §

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, plus de trente ans après la décentralisation de 1982, les collectivités territoriales sont des acteurs majeurs au service des citoyens, des entreprises et des territoires. Réalisant plus de 70 % de l’investissement public et assumant à elles seules 21 % de l’action publique, elles constituent un des derniers moteurs actifs de la croissance et préparent, au travers des réalisations d’aujourd’hui, la France de demain.

Ainsi, l’évolution des finances locales est un enjeu non seulement pour l’équilibre économique et budgétaire global de notre pays, mais aussi pour la vie quotidienne des collectivités et des habitants des territoires, dans toute leur diversité.

La brutalité de la baisse massive des dotations, laquelle représentera 12, 5 milliards d’euros entre 2014 et 2017, est d’autant plus regrettable qu’elle s’inscrit dans un contexte fiscal nouveau.

Depuis la réforme de la taxe professionnelle, les collectivités sont privées du pouvoir de taux sur les deux tiers de la nouvelle fiscalité économique constituée de la CVAE et de la CFE.

Gardons à l’esprit cette réalité que François Baroin a rappelée en ouvrant ce débat : la dette des collectivités, qui pourrait être qualifiée de « bonne dette » dans la mesure où elle correspond à des investissements, représente moins de 10 % de la dette publique nationale.

En réduisant aussi fortement les dotations au cours des prochaines années, le Gouvernement va fragiliser la situation financière des collectivités.

En outre, cette décision ne tient pas compte de la spécificité des collectivités et des marges de manœuvre très étroites dont elles disposent.

Pour faire face à leurs dépenses contraintes, les départements ne disposent que de leviers à l’effet très réduit : les taux de DMTO, de taxe d’aménagement, de taxe sur la consommation finale d’électricité et de taxe foncière sur les propriétés bâties. Dans l’Aveyron, le département dont je suis l’élu, en augmentant ces taux d’un point, le conseil général ne dégage guère que 450 000 euros de recettes supplémentaires, somme qu’il convient de mettre en regard des quelque 362 millions d’euros que représente son budget.

Je n’évoquerai pas les régions, dont les marges de manœuvre sont encore plus étroites.

Quant aux communes, elles doivent assumer le coût des nouvelles charges et politiques publiques, à commencer par la réforme des rythmes scolaires. Sans revenir sur la question de la pertinence de cette réforme, je signalerai amicalement au Gouvernement que l’Aveyron applique la semaine de quatre jours depuis plus de vingt ans et que ses résultats sont les troisièmes meilleurs de France pour l’enseignement primaire !

Avec l’augmentation des charges et la diminution des dotations, l’effet de ciseaux se précise. Il est particulièrement dangereux pour les collectivités, et donc pour l’investissement.

L’heure est bien à l’ajustement du rythme d’évolution de la dépense publique locale, mais je crains que, dans l’urgence, les réductions ne portent d’abord sur les dépenses d’investissement.

En tant qu’élu d’un département rural, je suis inquiet. En effet, certaines communes ne seront pas en mesure d’engager les projets qu’elles avaient envisagés et qui auraient permis d’alimenter les carnets de commandes des entreprises locales. Si les commandes régressent, le petit tissu économique local, composé en grande partie d’entreprises familiales, sera le premier à souffrir au sein des communes rurales aveyronnaises.

Madame la ministre, je ne puis manquer d’évoquer l’actualité, à travers le projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République.

Chaque année, le département de l’Aveyron consacre entre 50 millions et 60 millions d’euros d’investissements aux routes.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

M’honorant de présider la commission des infrastructures routières et des transports publics du conseil général, je puis vous assurer qu’il s’agit bien des seuls investissements, et non de l’entretien.

La compétence des routes doit être transférée à la région. Or l’Aveyron, qui est à mi-chemin entre Montpellier et Toulouse, ne disposera que de neuf conseillers régionaux sur les cent cinquante que comptera la grande région Midi-Pyrénées–Languedoc-Roussillon. Quel sera son pouvoir de décision politique en la matière, alors qu’il faut aménager une seconde rocade autour de Toulouse et une autre autour de Montpellier ? Ce pouvoir n’existera tout simplement plus. Ainsi, l’investissement routier aveyronnais perdra entre 50 millions et 60 millions d’euros, mais aussi 1 000 emplois directs liés aux routes. Je vous invite à méditer ces chiffres, dans la perspective de la deuxième lecture du projet de loi NOTRe !

Debut de section - PermalienPhoto de François Patriat

Les emplois en question ne vont pas disparaître !

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

Certes, cher collègue, mais ils quitteront l’Aveyron pour aller vers Montpellier et Toulouse.

Debut de section - Permalien
Marylise Lebranchu, ministre

C’est vous qui le dites…

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

Cet élément mérite d’être pris en compte.

L’effort d’économies doit porter prioritairement sur les dépenses de fonctionnement. M. Patriat a cité l’exemple de sa région à cet égard. Pour sa part, le département de l’Aveyron a vu ses effectifs passer en six ans de 1 800 à moins de 1 700 personnes : nous aussi, nous avons donc accompli des efforts considérables sur le fonctionnement. Des gains de productivité et d’efficacité sont bel et bien possibles.

Au niveau du bloc communal, le temps de la mutualisation et de la recherche systématique des gains de productivité est venu. Toutefois, mutualisation ne signifie pas agrégation à tout prix des collectivités. En effet, en pareil cas, le fonctionnement de ces dernières finit souvent par coûter plus cher, alors que, par le jeu des conventions, la création de syndicats mixtes, etc., on peut obtenir une véritable mutualisation sans alourdir les coûts de fonctionnement.

J’aimerais d’ailleurs que la vérité des comptes s’impose et qu’elle soit vérifiée. Pour l’heure, force est de reconnaître que nous avons régressé dans la connaissance de la réalité de la dépense locale.

La recherche des bonnes pratiques et le « rapport qualité-prix » du service public local doivent devenir la règle. Ils sont préférables à des transferts à l’aveugle entre collectivités, opérés par le biais d’amendements parlementaires au gré des rapports de force du moment.

Mes chers collègues, les élus locaux que nous sommes ont pris conscience de la crise des finances publiques. L’État, qui porte 80 % de la dette publique, …

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

… est désormais dans l’incapacité, et pour longtemps, de soutenir les transferts financiers entre son budget et ceux des collectivités territoriales.

C’est une nouvelle étape qui s’ouvre pour les finances locales. Si nous devons l’accepter, nous devons exiger, en contrepartie, que l’État nous laisse les marges de manœuvre indispensables pour répondre à ce défi. §

Debut de section - PermalienPhoto de André Vallini

Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, avant que Marylise Lebranchu ne conclue nos débats, je tiens à vous apporter quelques précisions.

Monsieur Patriat, vous avez évoqué le problème que pose la récente appréciation à la hausse du franc suisse liée à la décision des autorités monétaires helvétiques.

Vous l’avez rappelé, dans le cadre de la loi de finances pour 2014, le Gouvernement a mis en place un fonds de soutien doté de 1, 5 milliard d’euros sur quinze ans. Le rôle de ce fonds est d’aider les collectivités territoriales les plus fortement affectées par les emprunts structurés, dits « emprunts toxiques », à en sortir ou à en alléger le coût.

Ce fonds est alimenté par les banques et par l’État. Il peut intervenir, pour chaque emprunt, jusqu’à hauteur de 45 % du coût de sortie.

La Banque nationale suisse, la BNS, ayant décidé le 15 janvier 2015 de modifier sa politique de change, le franc suisse s’est apprécié de près de 20 % par rapport à l’euro. L’annonce de la BNS a eu un impact direct sur les emprunts à risque indexés sur ce taux de change, emprunts que certaines collectivités territoriales ont souscrits.

Le taux de change entre l’euro et le franc suisse sert en effet de référence dans le calcul des intérêts et de l’indemnité exigible en cas de remboursement par anticipation d’une part des prêts structurés.

Le Gouvernement est bien conscient de l’impact que ces évolutions auront sur les finances des collectivités concernées dès les prochaines semaines. Néanmoins, ces conséquences dépendront de la parité franc suisse–euro, laquelle, à ce stade, ne peut encore être précisément déterminée : elle peut encore évoluer.

Le Gouvernement conduira sans tarder, avec l’ensemble des parties prenantes, notamment les banques et les associations d’élus, un premier dialogue approfondi sur l’évolution des conditions d’accompagnement des collectivités territoriales affectées par ce problème. Conformément à vos souhaits, monsieur le sénateur, deux principes guideront ces travaux : l’équité et la soutenabilité du dispositif de solidarité que nous devrons instaurer.

J’en viens à la baisse des dotations.

La situation présente est très dure, mais, Dieu merci, il y a un avenir, et des solutions permettent de faire face aux difficultés financières. Marylise Lebranchu les exposera dans quelques instants.

Sans relativiser ou sous-estimer en quoi que ce soit les difficultés financières auxquelles les collectivités sont confrontées, il convient de situer la baisse des dotations de l’État aux collectivités territoriales dans son contexte et, d’abord, de rappeler que cette réduction des dotations s’inscrit dans le cadre de l’indispensable redressement des finances publiques. Chacun en convient dans cet hémicycle, cet effort de maîtrise des finances publiques est nécessaire, et François Baroin l’a d’emblée reconnu.

Qu’il me soit permis de souligner que le plan d’économies du Gouvernement s’élève à 50 milliards d’euros sur trois ans, alors que le principal parti d’opposition, l’UMP, représenté au sein de cette assemblée – c’est d’ailleurs sur l’initiative du groupe UMP que le présent débat a été organisé –, propose pour sa part un plan de 150 milliards d’euros d’économies. Je ne sais quel sort serait réservé aux collectivités avec un tel plan… Pour notre part, nous nous « limitons » donc à 50 milliards d’euros.

Avec la majorité de l’Assemblée nationale, qui a voté la dernière loi de finances, nous avons décidé d’étaler sur trois ans la baisse de 11 milliards d’euros dont font l’objet ces dotations, à raison de 3, 670 milliards d’euros par an.

Pour 2015, la baisse est répartie entre chaque niveau de collectivités selon son poids dans les recettes totales : on aboutit à des montants, arrondis, de 2 milliards d’euros pour le bloc communal, 1, 1 milliard d’euros pour les départements et 450 millions d’euros pour les régions.

Cette répartition n’est pas figée pour 2016. Elle sera de nouveau en discussion lors de l’examen du projet de loi de finances, cet automne.

L’effort demandé aux collectivités territoriales représente en moyenne 1, 6 % de leurs recettes totales, soit 3, 670 milliards d’euros sur 229 milliards d’euros. C’est loin d’être neutre, mais ce n’est pas nécessairement l’étranglement que certains décrivent.

Debut de section - Permalien
André Vallini, secrétaire d'État

Cet effort, aussi important soit-il, est proportionné au poids de la dépense publique locale dans la dépense publique globale, à savoir 20 %. Ces 11 milliards d’euros représentent 21 % des 50 milliards d’euros d’économies. L’effort demandé est donc à l’image de la part des dépenses du bloc communal, des départements et des régions dans la dépense publique française.

Sur ces 50 milliards d’euros d’économies, étalés sur trois ans, l’État va supporter 18 milliards d’euros.

Certains orateurs ont affirmé que l’État ne s’imposait pas à lui-même ce qu’il exigeait des collectivités territoriales.

Debut de section - Permalien
André Vallini, secrétaire d'État

C’est faux : l’État s’astreint à un effort bien plus sensible.

Quant au secteur social, il assumera 21 milliards d’euros d’économies.

Pour ce qui est, maintenant, de la péréquation, il est vrai que le dispositif actuel n’est pas parfait. Divers mécanismes de péréquation, au rang desquels le FPIC, se sont accumulés au fil du temps. M. Guené a parlé de sédimentation : l’architecture d’ensemble est devenue très compliquée, voire illisible

M. Michel Bouvard acquiesce.

Debut de section - Permalien
André Vallini, secrétaire d'État

Il n’empêche que la péréquation signifie la solidarité. À système constant, nous avons veillé à la renforcer. Je songe à la péréquation verticale, renforcée de 407 millions d’euros pour le bloc communal et de 20 millions d’euros pour les départements. Je songe également à la péréquation horizontale, avec 210 millions d’euros supplémentaires pour le FPIC, qui atteindra ainsi 780 millions d’euros en 2015.

Par ailleurs, les recettes des collectivités territoriales vont, en dépit des contraintes, continuer à croître en 2015.

Ce mouvement est dû, d’abord, à la revalorisation des bases fiscales. Ces dernières seront rehaussées de 0, 9 %, …

Sourires sur les travées de l'UMP.

Debut de section - Permalien
André Vallini, secrétaire d'État

… ce qui représente une augmentation de recettes d’environ 1 milliard d’euros.

En outre, le produit de la CVAE va augmenter.

De surcroît, le Gouvernement a pris, au titre de la TVA, deux mesures que vous connaissez déjà.

D’une part, le taux de remboursement du fonds de compensation pour la TVA, le FCTVA, est accru, avec la suppression de la réfaction de 0, 9 point du taux de remboursement ; cela représentera 26 millions d’euros en 2015, compte tenu du décalage de remboursement, mais à partir de 2016, en année pleine, 300 millions d’euros.

D’autre part, l’évolution spontanée du FCTVA sera prise en compte hors enveloppe normée en 2015, ce qui représentera 166 millions d’euros au cours de cette année.

Parallèlement, les départements vont pouvoir continuer à majorer le taux des DMTO : le Gouvernement avait ouvert cette possibilité l’année dernière et elle est reconduite cette année. Elle représente environ 130 millions d’euros de recettes supplémentaires pour les conseils généraux.

Enfin, la revalorisation de la taxe de séjour pourra représenter jusqu’à 150 millions d’euros de plus.

Je conclurai en évoquant l’investissement public.

De nombreux orateurs l’ont rappelé avec raison, l’investissement local est assumé à hauteur de 65 % à 70 % par le bloc communal – communes et intercommunalités confondues.

Il se trouve que, en vertu d’une forme de « jurisprudence » liée au cycle électoral, l’investissement baisse systématiquement l’année suivant les élections municipales.

Debut de section - Permalien
Marylise Lebranchu, ministre

Tout à fait !

Debut de section - Permalien
André Vallini, secrétaire d'État

Il y a à cela deux raisons.

En premier lieu, les équipes sortantes réélues ont souvent beaucoup investi juste avant les élections – on se demande pourquoi… §

En second lieu, les équipes nouvelles n’ayant pu mettre tout à fait au point leur projet, leurs investissements subissent nécessairement un certain décalage.

On observe ce phénomène depuis une trentaine d’années : le cycle électoral conduit toujours à une baisse de 5 % à 6 % de l’investissement communal au cours de l’année qui suit les élections.

Le Gouvernement et le Parlement ont pris plusieurs mesures en faveur de l’investissement local. Ces dispositions ont fait suite aux rencontres que le Premier ministre a multipliées avec les associations d’élus, à l’occasion de différents congrès : l’Association des régions de France, l’Assemblée des départements de France, l’Association des maires de France, bien sûr, mais aussi de l’Association nationale des élus de montagne et de l’Assemblée des communautés de France.

Le Premier ministre et le Gouvernement ont entendu les légitimes inquiétudes exprimées par les élus. Au-delà des mesures que j’ai indiquées au sujet du remboursement de la TVA, le Premier ministre a annoncé, lors du congrès des maires, en novembre dernier, que la dotation d’équipement des territoires ruraux, la DTER, augmenterait d’un tiers, soit de 200 millions d’euros, pour atteindre 800 millions d’euros en 2015. Dieu sait si ce dispositif est important pour soutenir des territoires parfois en difficulté !

Je mentionne enfin une mesure de soutien au logement, avec 100 millions d’euros accordés au titre du fonds dit « des maires bâtisseurs ».

Je le répète, il ne s’agit en aucun cas de relativiser ou de sous-estimer les craintes, les inquiétudes, les difficultés des élus locaux. Il convient simplement de replacer l’effort demandé aux collectivités, que vous représentez, mesdames, messieurs les sénateurs, au sein de l’effort général que doit consentir la nation pour redresser ses comptes.

Applaudissements sur plusieurs travées du groupe socialiste.

Debut de section - Permalien
Marylise Lebranchu

Mesdames, messieurs les sénateurs, j’ajouterai quelques éléments aux nombreuses précisions qu’André Vallini vient de vous apporter.

Avant tout, je vous remercie de la qualité et de la densité de vos interventions, que nous relirons en détail d’ici à la réunion du 10 février prochain.

M. Baroin – il n’est plus présent, mais j’imagine qu’il n’en suit pas moins nos débats – a souligné, avec raison, l’ampleur de la baisse des dotations des collectivités territoriales. On ne peut nier cette réalité ou refuser d’admettre la difficulté de la situation. Toutefois, M. Baroin oublie un certain nombre d’éléments, alors même qu’il a été ministre du budget

Sourires sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - Permalien
Marylise Lebranchu

Compte tenu de la situation des finances publiques, pour verser ces dotations aux collectivités territoriales, l’État est contraint de s’endetter. Ainsi, pour permettre aux collectivités de respecter cette fameuse règle d’or, à savoir de ne pas emprunter, l’État emprunte lui-même, et cet emprunt est celui de tous les citoyens français !

Il convient donc de rappeler que le budget est un tout, qu’une partie de l’endettement de l’État s’explique par ces dotations de l’État aux collectivités et que la dette de la France s’entend dotations aux collectivités territoriales comprises !

Celles-ci ont été gelées par l’ancien gouvernement – j’assume entièrement mes propos de l’époque à ce sujet –, puis baissées de 2013 à aujourd’hui, comme l’a expliqué André Vallini. Il est vrai que, auparavant, elles augmentaient régulièrement en fonction de la progression de la dépense des collectivités territoriales, qui n’était le fruit de la seule volonté des élus locaux, mais aussi du coût des compétences transférées.

En analysant la situation à travers ce prisme-là, on peut commencer par se réjouir que le plan Juncker prenne en compte les demandes des collectivités territoriales concernant leurs investissements. Un certain nombre d’entre elles se sont déjà organisées, en particulier les régions – François Patriat le sait bien – afin que cet effet levier soit important. Les associations d’élus ont ainsi déjà désigné certains projets prioritaires. Nous y reviendrons le 10 février.

Par ailleurs, choisir d’accroître la compétitivité des entreprises grâce au crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, qui représente 12 milliards d’euros d’allégements en 2014 et 20 milliards d’euros en 2015, c’est mobiliser une part de l’emprunt national pour aider directement les entreprises, car il faut bien compenser la baisse des cotisations.

Ce choix de la compétitivité a été largement approuvé par les entrepreneurs, qui en bénéficient. Dès lors, sont-ils fondés à nous reprocher aujourd’hui que ce choix se traduise aussi par une baisse des dotations aux collectivités et, par conséquent, par un certain ralentissement de leurs investissements, donc de leurs commandes aux entreprises ?

Chacun sait que ce choix est contesté. M. Éric Bocquet a rappelé tout à l’heure qu’il y était fermement opposé et qu’il aurait préféré que l’on reversât ces sommes aux collectivités territoriales.

Nous, nous faisons le choix de la compétitivité de la France, et c’est un choix que porte, avec difficulté, le budget de l’État. Cela devra également faire partie de la discussion.

M. Baroin, ancien ministre du budget et actuel président de l’AMF, nous rappelait tout à l'heure que j’avais qualifié le gel des dotations de récessif. Oui, la baisse de la dépense publique a toujours un effet récessif, quelle que soit la catégorie de dépense publique concernée, qu’elle vise à redistribuer de l’argent ou qu’elle contribue à l’investissement. Personne n’a pu démontrer le contraire ! Mais nous avons assumé ce choix dans le cadre du pacte de responsabilité et à travers l’aide directe à nos entrepreneurs.

François Hollande évoquait le risque de défaut de la France dans son discours de Dijon. Nous n’avons peut-être pas suffisamment expliqué nos choix difficiles de juillet 2012 : le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, c'est-à-dire une aide aux entrepreneurs, d’une part, et des économies, d’autre part. Il s’agissait d’éviter le défaut. Quand on voit ce qu’implique une véritable austérité, notamment pour les collectivités territoriales et pour les services publics, pour un pays en général, il semble bien que nous ayons eu raison !

Sans revenir sur le partage des responsabilités quant à la situation, je rappelle tout de même que l’accroissement de la dette, à la fin 2012, était considérable. Aux 30 milliards d’euros hérités de l’ancien gouvernement se sont ajoutés nos propres engagements, d’un coût équivalent. C’est alors que nous avons décidé d’arrêter, car nous nous dirigions vers le défaut.

Il est vrai que nous avons imposé un certain nombre de normes aux collectivités, en particulier s’agissant de la fonction publique territoriale. Ces décisions ont cependant été prises en commun : les employeurs territoriaux siègent avec nous au Conseil supérieur de la fonction publique territoriale. Son président, pourtant membre de l’opposition, a d’ailleurs déclaré à l’occasion de ses vœux qu’il assumait ces décisions, car les fonctionnaires territoriaux de catégorie C étaient trop mal payés. Il va même jusqu’à admettre que le gel du point d’indice de la fonction publique lui pose problème !

Ces mesures ne sont donc pas le fait du seul Gouvernement, mais bien de l’ensemble des employeurs, réunis avec les organisations syndicales.

Fallait-il renoncer à augmenter nos fonctionnaires territoriaux les moins avantagés ? Pensons à ceux qui travaillent de nuit dans les EHPAD, les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes : ils avaient besoin de ce coup de pouce. Par ailleurs, pour la vie de nos collectivités territoriales, il était important que le pouvoir d’achat de ces personnels leur permette de consommer un peu plus.

Entendons-nous donc sur ce que sont les choix du Gouvernement : on peut les critiquer, mais nous devons assumer ensemble la responsabilité des décisions que nous avons prises ensemble !

M. Charles Guené a évoqué certains points sur lesquels nous reviendrons le 10 février, en particulier les valeurs locatives ou cadastrales.

Jacques Mézard a, lui, rappelé la différence entre la taxe d’habitation à Paris et la taxe d’habitation dans les petites villes. C’est en effet terrifiant !

Il existe, entre nos collectivités, des différences majeures, qui nous interdisent de les traiter par strate, en considérant comme égales toutes les régions, comme égaux tous les départements. Entre nos régions, entre nos départements, entre nos intercommunalités, entre nos communes, les inégalités sont parfois énormes.

Nous avons commencé à remonter la pente par la péréquation. François Patriat peut témoigner que la nouvelle carte des régions va nous permettre de retrouver une répartition plus homogène du PIB par habitant entre les régions.

À l’époque, avec Gilles Carrez, nous avions soutenu l’utilité de cette péréquation pour essayer de corriger quelques grandes différences entre les uns et les autres. Aujourd’hui, à bien y regarder, malgré ce dispositif, des inégalités considérables persistent, dans les situations comme dans les moyens. J’entends bien m’y atteler.

Il ne s’agit pas non plus d’opposer les communes urbaines aux communes rurales.

Nous connaissons tous des communes rurales qui n’empruntent pas un euro. Mais elles n’ont pas beaucoup de services à prendre en charge, sachant que ce sont les communes voisines qui les assurent.

Pour analyser vraiment les situations, il faut donc tout se dire !

Lorsqu’une station de sports d’hiver supprime le chauffage des trottoirs par mesure d’économie, elle ne se prive que d’une forme de luxe.

Lorsque le maire d’une commune située à une heure de Paris affirme disposer de 80 millions d’euros de provisions sans avoir d’emprunt à rembourser, c’est tout de même le signe d’une criante injustice !

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Doligé

Peut-être a-t-il simplement mieux géré sa commune…

Debut de section - Permalien
Marylise Lebranchu, ministre

Il est donc temps de remettre tout cela à plat. Notre idée, justement, consiste à repartir de la DGF. De strate en strate, nous n’avons pas suffisamment pris la mesure de l’effet de rente et des inégalités.

Nous voulons travailler, à partir du 10 février, avec tous les parlementaires qui le souhaitent. J’ai déjà dit que je regrettais le refus de la majorité sénatoriale de participer à la mission parlementaire sur le sujet. Soyez pourtant assurés que le rapport des deux parlementaires missionnés sera totalement indépendant du Gouvernement.

Nous voulons disposer d’une analyse « à froid » de la situation, en vue de rebâtir ensemble une DGF plus juste, pour que la péréquation soit verticale et qu’on limite le besoin de péréquation horizontale. En effet, ce qui est difficile pour une collectivité, quelle qu’elle soit, c’est de recevoir pour devoir aussitôt redonner. À l’intérieur d’une intercommunalité, des communes pauvres se trouvent assujetties alors qu’elles-mêmes sont en difficulté.

Debut de section - Permalien
Marylise Lebranchu, ministre

Cela n’est pas juste. Nous voulons retrouver de la péréquation verticale. Ce sera difficile parce que certaines collectivités qui bénéficiaient de dotations importantes vont les voir un peu diminuer. Mais d’autres, en revanche, qui rencontrent aujourd’hui des difficultés, seront mieux dotées et pourront relancer l’investissement.

Il est tout de même troublant qu’un pays comme le nôtre connaisse une fracture territoriale si violente, et qui traverse toutes les strates.

On nous dit que nous n’aurions pas dû supprimer telle ou telle taxe. C’était peut-être le moment de le faire : ces taxes ne concernaient plus que quelques communes et ne rentraient donc pas dans le panier global.

Ensemble, nous devons trouver des solutions, redéfinir des critères. Oui, monsieur Dantec, nous avons tous à l’esprit la nécessité de critères justes. Nous devrons prêter attention à la CVAE, réaliser de véritables simulations, prévoir le lissage nécessaire… L’objectif est bien de bâtir des dotations plus justes. Naturellement, je ne vous dirai pas qu’elles augmenteront ensuite de façon exponentielle, mais elles doivent être plus justes.

François Patriat dit aujourd’hui avoir réussi à réduire son budget tout en augmentant l’investissement. Il a raison lorsqu’il dit que la loi NOTRe obligera de toute façon les régions à se recentrer sur leurs compétences strictes.

Selon le rapport de l’OCDE, les deux métropoles Aix-Marseille-Provence et Paris organisées par la loi MAPTAM et la loi NOTRe vont nous permettre de gagner 0, 8 % de PIB sur dix ans. Je lis que j’aurais été éprouvée par le dossier de la métropole parisienne. C’est faux. J’ai été très agréablement surprise par ce rapport de l’OCDE, à qui nous n’avions rien demandé.

Nous savons que la mise en place des métropoles va créer de la richesse parce qu’elles porteront assistance à des communes qui, aujourd’hui, souffrent tellement qu’elles n’investissent plus du tout. La solidarité, c’est, par exemple, la construction de logements. Or ce dossier est justement l’une des épines que nous avons dans le pied, à Paris comme ailleurs.

Les ressources des collectivités locales, leur engagement, la mise en commun des moyens, mais aussi du foncier, pourraient permettre de régler ce problème.

L’OCDE prédit, je le répète, une croissance de 0, 8 % due aux métropoles et de 0, 3 % pour l’ensemble de la loi NOTRe. C’est donc un rapport qui nous encourage.

Vous avez tous repris les chiffres de l’Observatoire des finances locales. Sans doute avez-vous raison de vous y référer. Ils indiquent bien que l’épargne brute de certaines collectivités locales peut être touchée, mais montrent aussi que cela ne les concerne pas toutes.

Je résume mon propos en redisant que les dotations de l’État représentent aussi de la dette publique, que, lorsque l’on décide de réaliser 50 milliards d’euros d’économies, cela concerne tout le monde et que, lorsque l’on décide au surplus d’aider nos entreprises, la marge de manœuvre de l’État est encore plus réduite.

Tous ces sujets doivent être au menu des discussions politiques pour que nous prenions acte, in fine, de notre volonté commune d’établir une plus grande justice grâce à la DGF. C’est cela qui, simplement, nous permettra d’absorber plus facilement la baisse des dotations.

Certains se plaignent de ne plus pouvoir construire de routes. Ce matin, en Limousin, une élue du conseil général me disait son inquiétude de retrouver cette compétence. Dans son département, dont le nombre d’habitants baisse, la pression fiscale est à son maximum alors que le nombre de kilomètres de routes ne diminue pas.

C’est ce que je vous expliquais il y a quelques jours : ces élus de départements très ruraux espéraient bénéficier d’une péréquation au niveau de la région pour leurs routes départementales.

Rien n’est simple, et nous devons nous garder de tout manichéisme dans ce débat. Le sens de la dépense publique fait l’objet d’un grand débat politique, comme l’égalité entre les territoires. Nous engageons un autre grand débat, technique, sur les moyens de rendre juste la DGF, car, aujourd’hui, elle ne l’est pas. §

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Nous en avons terminé avec le débat sur l’évolution des finances locales.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

J’informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi relative à l’amélioration du régime de la commune nouvelle, pour des communes fortes et vivantes est parvenue à l’adoption d’un texte commun.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Le Conseil constitutionnel a informé le Sénat, le mardi 27 janvier 2015, qu’en application de l’article 61-1 de la Constitution, la Cour de cassation a adressé au Conseil constitutionnel une décision de renvoi d’une question prioritaire de constitutionnalité portant sur les articles 698-1 et 698-2 du code de procédure pénale (Infractions militaires en temps de paix et mise en mouvement de l’action publique) (2015-461 QPC).

Le texte de cette décision de renvoi est disponible à la direction de la Séance.

Acte est donné de cette communication.

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à dix-neuf heures trente, est reprise à vingt-et-une heures trente, sous la présidence de M. Claude Bérit-Débat.