Séance en hémicycle du 2 novembre 2009 à 22h00

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • courrier
  • postal
  • postale
  • société anonyme

La séance

Source

La séance, suspendue à dix-neuf heures quarante-cinq, est reprise à vingt-deux heures cinq, sous la présidence de M. Gérard Larcher.

(Texte de la commission)

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

L’ordre du jour appelle la discussion du projet de loi relatif à l’entreprise publique La Poste et aux activités postales (procédure accélérée) (projet n° 599 rectifié, 2008-2009 ; texte de la commission n° 51 ; rapport n° 50).

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Le Cam

Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, avant d’entamer l’examen du projet de loi relatif à l’entreprise publique La Poste et aux activités postales, je souhaite soulever la question du rôle du Parlement et du processus d’élaboration de la loi dans ce domaine qui accentue au plus haut point l’organisation sociale et économique de notre pays.

La méthode de M. Sarkozy et de ses amis est celle du fait accompli. Que ce soit sur la taxe professionnelle, sur la réforme des collectivités, notamment sur les modalités d’élection des futurs conseillers territoriaux ou, dès aujourd’hui, sur La Poste, le message adressé aux parlementaires est clair : circulez, il n’y a rien à voir !

Le débat parlementaire devrait, pour le Président de la République, être une formalité.

L’objectif n’est pas de confronter les points de vue, d’examiner au plus près la loi et ses conséquences, mais il est d’aller plus vite pour éviter la mobilisation et satisfaire, dans les meilleurs délais, les desiderata des milieux patronaux et financiers : procédure accélérée ; pas d’examen par le Sénat du projet de loi modifié par l’Assemblée nationale à la mi-décembre ; délais imposés très courts, soit cinq jours pour examiner la mise à mal du « joyau national », si cher au rapporteur, M. Hérisson, et pour débattre d’un texte de 29 articles sur lesquels sont déposés 620 amendements. Ce chiffre illustre, d’ailleurs, la densité du débat à venir, mais aussi la volonté et le sérieux de l’opposition parlementaire.

Pourtant, la mobilisation citoyenne contre ce projet de loi, l’exigence grandissante d’un référendum sur l’avenir d’un service public qui relève d’une certaine idée de la France, bien loin des inepties nauséabondes de M. Besson, devrait inciter le Gouvernement à organiser un grand débat national et à abandonner la voie dangereuse du passage en force.

Monsieur le ministre, que vaut le fait d’inscrire dans le texte le caractère non privatisable de La Poste par voie d’amendement gouvernemental ? Le Président de la République n’a-t-il pas démontré par A plus B qu’il était possible de jurer la main sur le cœur que GDF ne serait pas privatisé et de privatiser cette entreprise deux ans plus tard ?

De telles galéjades n’ont pas leur place dans un débat qui se veut sérieux. Cette annonce relève de la désinformation et de la manipulation.

Il faudra un second texte de loi pour privatiser la Poste. Chacun sait, en particulier M. Hérisson, qui parle de « réforme en douceur », que le changement de statut est une marche décisive dans la libéralisation d’une entreprise, et que la mise sur le marché aboutit fatalement à la privatisation. C’est l’unique objectif de ce projet de loi : toute autre allégation est mensongère.

M. Bailly lui-même, le 23 août dernier, ne déclarait-il pas que l’État resterait largement majoritaire de La Poste ? Cet aveu n’est pas le moindre. M. Bailly, président de La Poste, confirme lui-même ses plans : vendre au plus vite au privé une partie des actions de La Poste.

La contre-vérité et la précipitation sont donc la méthode du pouvoir pour faire adopter l’abandon du statut d’entreprise publique de La Poste.

La campagne de presse menée à grands frais par le Gouvernement au début du mois d’octobre – 700 000 euros de dépenses – est claire : La Poste change de statut, mais reste un service public à 100%.

À quoi sert le débat ? Pour le Gouvernement, la décision est prise en faisant fi de la discussion parlementaire.

Les sénateurs du groupe CRC-SPG tenteront tout au long de ce débat, avec l’ensemble de l’opposition sénatoriale, et avec le mouvement social et citoyen, de contrer cette stratégie du passage en force de ceux qui veulent tuer le service public de La Poste.

Commencer l’examen de ce texte le jour des trépassés est d’ailleurs un symbole de très mauvais augure !

Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste. – M. Robert Tropeano applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Monsieur le président, j’ai déjà fait un rappel au règlement avant la suspension de séance pour demander que soit soumise au vote la décision de surseoir à nos travaux car nous commençons aujourd'hui bien tardivement l’examen de ce projet de loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

M. Guy Fischer. Le débat sur le fret ferroviaire, monsieur Hérisson, devait avoir lieu dans les meilleures conditions. Vous n’allez pas reprocher à l’opposition d’avoir tenu sa place, toute sa place

Ça oui ! sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

, alors que vous êtes en train de tout brader !

Plusieurs sénateurs de l’UMP s’esclaffent.

Rires sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Monsieur le président, je souhaite, à tout le moins, que vous soumettiez à l’approbation de notre assemblée ma demande de reporter à demain après-midi l’examen de ce projet de loi afin que nous puissions entamer dignement le débat sur La Poste. Il y aura alors bien plus de monde dans l’hémicycle. Certes, la gauche est très bien représentée ce soir, …

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

… mais ce n’est pas le cas de la majorité.

Debut de section - PermalienPhoto de Jackie Pierre

Ce n’est pas la quantité qui fait la valeur !

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Acte vous est donné de ces rappels au règlement, mes chers collègues.

Nous en venons maintenant à la discussion générale.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ Union centriste.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Teston

Je demande la parole pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Je vous donnerai la parole une fois que M. le ministre se sera exprimé, monsieur Teston.

Vous avez la parole, monsieur le ministre.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre chargé de l'industrie

Monsieur le président, monsieur le président de la commission de l’économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, j’ai l’honneur de vous présenter aujourd’hui, avec Michel Mercier, au nom du Gouvernement, le projet de loi relatif à l’entreprise publique La Poste et aux activités postales, qui vise à garantir la modernisation et l’avenir de La Poste.

L’objectif visé au travers de ce projet de loi est d’apporter à La Poste les moyens financiers qu’elle réclame pour son développement, soit 2, 7 milliards d’euros – c’est un engagement financier qu’aucun gouvernement n’a pris jusqu’ici – tout en lui garantissant son caractère 100% public.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre

Nous voulons donner à cette belle entreprise les moyens de son avenir tout en préservant son identité à laquelle les Français sont attachés.

Pourquoi La Poste a-t-elle besoin de 2, 7 milliards d’euros ?

La Poste est aujourd’hui confrontée à deux défis majeurs.

Premièrement, elle doit faire face à l’ouverture à la concurrence au 1er janvier 2011. Ce n’est pas un sujet théorique, c’est une préoccupation bien réelle ! La Poste sera très bientôt concurrencée non seulement par les grands opérateurs européens de courrier – la Deutsche Post, la TNT néerlandaise –, mais aussi par les petits opérateurs alternatifs qui se sont d’ores et déjà réunis.

Ces opérateurs de petite taille, souvent uniquement implantés au niveau local, et dont personne ne se méfiait jusqu’ici sont, eux aussi, prêts à concurrencer La Poste !

Deuxièmement, elle est confrontée à la montée en puissance d’internet : les volumes de courrier de La Poste diminuent de jour en jour. Nous enregistrons depuis deux ans une baisse de 10 % des volumes de courrier.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre

Dans quatre à cinq ans, la baisse se situera entre 30% et 50%. C’est un choc rapide et violent sur le cœur de métier historique de La Poste !

Le Gouvernement ne pouvait pas priver La Poste des moyens de réagir. Il ne pouvait pas la laisser attendre que ces évolutions lui tombent dessus de manière inéluctable.

Nous avons tout simplement pour ambition de donner sa chance à La Poste.

Tout d’abord, nous voulons lui donner la chance de faire face aux deux chocs majeurs que sont la disparition totale du monopole et l’essor du courrier électronique. C’est d’ailleurs afin d’être capable d’affronter la concurrence et de résister à la montée en puissance d’Internet que le président de La Poste a sollicité du Gouvernement cette réforme.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre

M. Christian Estrosi, ministre. Car, oui, le projet de modernisation de La Poste, ne l’oublions pas, répond à une demande de ses dirigeants !

Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre

Ensuite, nous voulons donner à La Poste sa chance de montrer qu’un modèle postal public à 100 %, au service de tous, présent sur l’ensemble du territoire, et en même temps rentable, cela fonctionne !

Enfin, nous voulons lui donner sa chance de continuer à faire ce qu’elle fait aujourd’hui, en le faisant même encore mieux ! Les 2, 7 milliards d’euros vont servir à conforter les activités et missions de service public de La Poste, notamment ses quatre missions que sont le service universel postal, l’aménagement du territoire, le transport de la presse et l’accessibilité bancaire.

Le projet du Gouvernement est donc un projet d’avenir, réformateur, …

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre

… un projet responsable, qui donnera à La Poste les moyens financiers de sa modernisation et de son développement.

Toutefois, avant de donner ces moyens financiers à La Poste, il faut passer par la case « changement de statut ».

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre

Le changement de statut n’est pas une fin en soi, il est un moyen au service d’un projet de développement. En effet, comme vous le savez, un établissement public ne peut pas réaliser d’augmentation de capital. Il est donc nécessaire de transformer La Poste en société anonyme pour permettre ensuite une augmentation de capital.

Mais je précise bien que cette augmentation de capital sera souscrite uniquement par l’État et la Caisse des dépôts…

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre

M. Christian Estrosi, ministre. … et que le capital de La Poste restera donc public à 100 %, même après le changement de statut !

Applaudissementssur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre

M. Christian Estrosi, ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs, permettez-moi de vous demander, au passage, si vous connaissez un seul pays au monde qui aurait la volonté de privatiser un tel établissement en commençant par y injecter 2, 7 millions d’euros d’argent public…

Rires et exclamations sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - Permalien
Plusieurs sénateurs socialistes

La France !

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre

M. Christian Estrosi, ministre. Attendez, quand ça va vous tomber dessus, ça va faire mal !

Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre

Ces 2, 7 milliards d’euros serviront tout d’abord…

Debut de section - Permalien
Un sénateur du groupe socialiste

À préparer la privatisation !

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre

… à développer les quatre métiers de La Poste.

Dans le métier du courrier, l’enjeu est de donner à La Poste les moyens de faire face à l’essor d’Internet en se lançant dans le courrier électronique : qui mieux que La Poste, avec sa connaissance fine du courrier papier, pourrait se lancer dans l’activité de gestion du courrier électronique ?

Dans le domaine du colis et de l’express, La Poste doit devenir une grande entreprise de logistique, voire un leader européen dans ce domaine.

Dans le domaine financier, La Banque Postale doit rester une « banque pas comme les autres », au service des plus modestes.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre

Cela signifie que nous devons lui donner les moyens d’atteindre le niveau de performance des autres banques.

Enfin, le réseau des bureaux de poste doit continuer à améliorer la qualité du service rendu : rénovation des locaux, amélioration de l’accueil...

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

On voit ce que cela donne : il n’y a plus personne au guichet !

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre

C’est précisément pour cette raison qu’il faut continuer à améliorer la qualité du service et, pour y parvenir, donner des moyens à La Poste !

En effet, si vous trouvez que tout va bien à La Poste et qu’il ne faut surtout rien changer, je n’ai pas le sentiment que les Françaises et les Français partagent cet avis !

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre

Si le Gouvernement propose au Parlement d’apporter 2, 7 milliards d’euros à La Poste pour se moderniser, c’est donc aussi pour fournir un meilleur service aux Français.

Voilà pourquoi, dans l’esprit du Gouvernement – et je suis convaincu qu’il en va de même pour tous les parlementaires, où qu’ils siègent –, si ces 2, 7 milliards d’euros doivent servir à financer les quatre métiers de La Poste, cela ne veut pas dire pour autant qu’ils constituent un chèque en blanc.

Dans cette optique, j’ai fixé trois objectifs aux 300 cadres dirigeants de La Poste que j’ai invités récemment au ministère de l’industrie.

Le premier objectif concerne les postiers : face à des changements aussi considérables que ceux que La Poste connaît en ce moment, la dimension humaine est plus que jamais essentielle.

Exclamations sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre

Les femmes et les hommes ne doivent pas être la variable d’ajustement de la performance de l’entreprise.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Pourtant, c’est ce qui se passe ! Dans le huitième arrondissement de Lyon, un tiers des postes de facteur a été supprimé !

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre

La dimension humaine doit être le préalable à toute décision stratégique. La Poste doit garantir des conditions de travail exemplaires et mettre en œuvre des mesures pour garantir le bien-être au travail.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre

Le deuxième objectif concerne les relations de la Poste avec les élus, dont vous êtes. J’ai rappelé aux cadres dirigeants de La Poste que les élus sont les représentants du peuple français !

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Et le peuple français veut être consulté, les sénateurs devront se le rappeler !

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre

Souvent, sur toutes ces travées, vous m’avez fait part de votre sentiment de ne pas être vraiment consultés, même si vous étiez informés, et de rester en dehors de la prise de décision.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Ce n’est pas seulement un sentiment : c’est la réalité !

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre

Organiser une concertation ne se limite pas à informer, mais consiste aussi à discuter, échanger et, au final, trouver un accord.

Debut de section - PermalienPhoto de Raymonde Le Texier

Il faudrait le dire à vos collègues ministres !

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre

J’ai aussi demandé à ces cadres de réfléchir à des mesures simples : pourquoi ne pas étendre la compétence des commissions départementales, dans lesquelles sont représentés les élus, aux transformations affectant les centres de tri ?

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Parlez-en aux postiers de l’aéroport de Lyon-Saint-Exupéry !

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre

Les élus sont consultés sur les transformations de bureaux de poste, mais pas sur les transformations de centres de tri, qui, pourtant, emploient souvent des centaines de personnes.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre

Les consulter aussi sur ces transformations-là serait un moyen d’associer encore mieux les élus.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre

Enfin, troisième et dernier objectif : j’ai demandé aux dirigeants de La Poste d’améliorer le service aux Français.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre

J’entends des gens se plaindre de devoir attendre vingt-cinq minutes lorsqu’ils vont chercher un recommandé le samedi matin.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre

J’entends des gens expliquer que les colis n’arrivent pas toujours à temps, notamment dans les moments où l’on en a pourtant le plus besoin, par exemple pendant les fêtes de fin d’année : on attend un colis le 24 décembre et il n’arrive que le 29 !

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Ces activités ont été privatisées ! C’est Adrexo qui les assure !

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre

Sur ces points, il faut que La Poste change ! Je le répète, les 2, 7 milliards d’euros que vont apporter l’État et la Caisse des dépôts ne sont pas un chèque blanc.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre

Le projet du Gouvernement est équilibré et responsable : il consiste à donner à La Poste les moyens financiers d’affronter un nouvel environnement beaucoup plus concurrentiel, sans rien toucher à ce qui fait sa force et son identité.

Ce projet de loi a, par ailleurs, été amélioré grâce au travail de votre commission de l’économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire, lors de ses réunions des 20 et 21 octobre dernier, qui ont notamment permis d’apporter deux clarifications primordiales au texte du Gouvernement.

S’agissant de la détention du capital, tout d’abord, je sais que beaucoup ont craint une éventuelle privatisation de La Poste et se sont émus d’une potentielle ouverture de capital à des actionnaires privés.

Debut de section - Permalien
Plusieurs sénateurs du groupe Crc-Spg

C’est ce qui va se passer !

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre

M. Christian Estrosi, ministre. La clarification apportée par votre rapporteur ne laisse désormais plus subsister le moindre doute : le capital de La Poste sera intégralement détenu par l’État et par des personnes de droit public.

Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre

Il n’y aura pas un euro de capitaux privés à La Poste !

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre

Le Gouvernement a même décidé d’aller plus loin encore et acceptera un amendement qui vise à préciser que La Poste est un « service public à caractère national », ce qui, en application du préambule de la Constitution de 1946, rend La Poste « imprivatisable », j’utilise ce néologisme à dessein !

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

C’est faux ! Le Conseil constitutionnel a déjà tranché !

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Le Conseil constitutionnel dit le contraire, et vous le savez !

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre

M. Christian Estrosi, ministre. Cette avancée majeure apporte la garantie constitutionnelle que La Poste ne pourra jamais être privatisée !

Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre

Maintenant, si les sénateurs de l’opposition, pour se refaire une santé morale, agitent la menace de la privatisation, je leur rappellerai les privatisations d’Air France, de France Télécom, …

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre

M. Christian Estrosi, ministre. … de Thomson, d’EADS, d’Autoroutes du Sud de la France, dont ils sont les seuls responsables.

Bravo ! et applaudissementssur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

Pour vous, Thomson ne valait plus qu’un euro !

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre

M. Christian Estrosi, ministre. Aujourd’hui, vous vous trouvez en grande difficulté

Riressur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre

Je citerai un autre exemple, concernant les missions de service public, notamment la mission d’aménagement du territoire. Michel Mercier peut le confirmer, le projet de loi du Gouvernement est très clair sur ce point puisqu’il « sanctuarise » les quatre missions de service public de La Poste, dont celle d’aménagement du territoire.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre

M. Christian Estrosi, ministre. La commission de l’économie est d’ailleurs allée plus loin encore à cet égard puisque les 17 000 points de contact sont désormais inscrits dans le texte, grâce au groupe de l’Union centriste.

Exclamations amusées sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre

C’est une garantie majeure pour ceux qui s’inquiétaient – à tort – du maintien de la présence postale sur l’ensemble du territoire !

Michel Mercier et moi-même sommes satisfaits que cet amendement, qui inscrit clairement les 17 000 points de contact dans la loi, ait pu être adopté par votre commission.

Celle-ci s’est aussi préoccupée du financement de la mission d’aménagement du territoire de La Poste. Le Gouvernement partage sa volonté de veiller à une juste compensation de cette mission de service public, mais sur la base d’une évaluation incontestable.

Au total, je me présente aujourd’hui devant vous avec un projet de loi qui a d’ores et déjà été amélioré par votre commission, et qui pourra l’être encore plus en séance.

Je sais que les sénateurs du groupe UMP ont déposé un amendement prévoyant que les salariés actuels de La Poste resteront affiliés à l’Institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l’État et des collectivités publiques, l’IRCANTEC, même après le changement de statut de La Poste.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre

C’est un point très important pour les salariés, et le Gouvernement sera naturellement favorable à ce dispositif, comme je l’avais d’ailleurs annoncé dès le mois de juillet.

De la même manière, je sais que certains sénateurs du groupe RDSE ont déposé un amendement prévoyant que les fonctionnaires de La Poste, à l’instar des salariés de La Poste, pourront bénéficier d’un dispositif de prévoyance santé. Cette avancée importante pour les fonctionnaires de La Poste témoigne, elle aussi, du fait que ce projet de loi ne remet nullement en cause les droits et statuts des agents de La Poste. Au contraire, il les conforte et les améliore, qu’il s’agisse des salariés de La Poste, avec l’IRCANTEC, ou des fonctionnaires de La Poste, avec la prévoyance santé !

Tel est, en définitive, mesdames, messieurs les sénateurs, l’esprit avec lequel nous nous présentons devant vous : notre texte est équilibré et, sans rien toucher à ce qui fait la force et l’identité de La Poste, il permet de lui apporter les moyens de sa modernisation ; l’État s’engage clairement sur le maintien des quatre missions de service public, le maintien du statut des agents, le maintien du caractère intégralement public de l’entreprise.

Nous abordons le débat dans un esprit d’ouverture, car La Poste appartient à tous les Français, …

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre

… et le Gouvernement a d’ores et déjà accepté plusieurs amendements significatifs en commission.

Le Gouvernement est prêt à accepter d’autres amendements encore, quelle que soit la couleur politique de leurs auteurs, s’ils vont dans le sens des intérêts des agents de La Poste, de ses clients et, plus généralement, de son avenir !

En revanche, mesdames, messieurs les sénateurs, après les garanties que je viens de vous offrir, je regretterais que, sur certaines travées, on continue de s’enfermer dans une attitude consistant, au mieux, à avoir le seul souci de l’obstruction, en déclarant par exemple : « On va leur pourrir la semaine ! »

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ Union centriste. – Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre

Ce sont là des propos des représentants mêmes de l’opposition !

Telle n’est pas ma conception du débat démocratique !

Au pire, une telle attitude manifesterait une volonté clairement affichée de nuire à La Poste, aux postiers et aux missions de service public qu’ils remplissent. Certains amendements, hélas, tendent à le démontrer. J’en mentionnerai quelques-uns, qui me paraissent emblématiques.

L’amendement n° 99 du groupe CRC-SPG vise à supprimer le prix unique du timbre, qui est pourtant une garantie à laquelle les Français sont très attachés !

L’amendement n° 96 du groupe CRC-SPG tend à supprimer l’obligation faite à La Poste de distribuer le courrier six jours sur sept. Si cet amendement était adopté, La Poste pourrait distribuer le courrier uniquement cinq, voire quatre jours par semaine, voire encore moins !

Les amendements n° 69 et 503 des groupes socialiste et CRC-SPG visent à supprimer la possibilité pour les fonctionnaires et salariés de La Poste d’être actionnaires de leur entreprise : on prive ainsi les postiers d’un droit que leur ouvre le projet du Gouvernement !

Les amendements n° 70, 308, 510 et 599 des groupes socialiste et Vert, CRC-SPG, et de certains sénateurs du groupe RDSE tendent à priver les salariés et fonctionnaires de La Poste de la possibilité de recevoir des actions gratuites qui seraient susceptibles de leur être offertes par l’établissement et qu’ils pourraient revendre ensuite.

Quant à l’amendement n° 598 de certains sénateurs du groupe RDSE, il tend à prévoir que les salariés de La Poste qui achèteraient des actions de La Poste seraient privés de droits de vote sur ces actions, ce qui est contraire à tous les principes du droit du commerce !

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre

Ce ne sont que quelques exemples, mais il y en a encore beaucoup d’autres.

Mesdames, messieurs les sénateurs, une logique politicienne conduit ceux qui déposent des amendements d’obstruction à supprimer des dispositions essentielles pour les missions de service public de La Poste et les droits de ses agents. Je leur réponds qu’il faut être responsable et donner à La Poste les moyens de faire face à l’avenir. Comme l’écrivait M. François Ailleret dans son rapport, La Poste a « encore un bel avenir ». Ce projet de loi est là pour le montrer et, surtout, pour lui garantir cet avenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, qui a souhaité réagir à certains propos de M. le ministre et a bien voulu attendre la fin de son intervention.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Je me permets d’intervenir pour éclairer le débat, et je le crois d’autant plus nécessaire que M. le ministre chargé de l’industrie s’est permis de faire état de certains de nos amendements en les tronquant.

Monsieur le ministre, vous nous dites que, grâce à vous et à M. le rapporteur, le texte garantira que La Poste demeurera un service public national.

Or le Conseil constitutionnel, dans une décision du 30 novembre 2006 relative à Gaz de France, a très clairement précisé que le fait d’inscrire dans une loi qu’un service public est national, dès lors que cela ne figure pas dans la Constitution, n’empêche en rien son transfert vers le secteur privé. (

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Autrement dit, monsieur le ministre, la disposition à laquelle vous avez fait allusion est nulle et non avenue et ne garantit en aucun cas le caractère de service public de La Poste.

Vifs applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Michel Teston, pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Teston

J’avais effectivement souhaité, monsieur le président, faire un rappel au règlement, à la suite de ceux de MM. Le Cam et Fischer, avant que M. le ministre ne prenne la parole, mais vous m’avez fait comprendre que je m’étais manifesté un peu trop tard.

Je me suis déjà exprimé, à l’ouverture de la séance, sur le contexte dans lequel nous examinons ce projet de loi et sur les choix effectués par le Gouvernement : d’une part, celui-ci a décidé de recourir à la procédure accélérée ; d’autre part, nous avons été contraints d’examiner ce texte en une seule semaine quand deux auraient été nécessaires.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Teston

En conséquence, à chaque suspension de séance, nous sommes obligés de participer à des réunions de commission pour examiner les amendements, si bien que ceux-ci sont examinés trop rapidement.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Teston

Voilà ce que je voulais dire d’emblée.

Mais comment ne pas réagir à l’emportement dont a fait preuve M. le ministre ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

M. Jean Desessard. Il nous a « pourri la semaine » !

Sourires sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Teston

On ne peut pas entamer ce débat autrement que dans la sérénité. Or, depuis déjà quelques semaines, le Gouvernement fait preuve d’un manque total de sérénité. Je rappellerai certaines réactions peu amènes à l’égard du résultat de la votation citoyenne, résultat pourtant particulièrement probant.

Je crois que Christian Estrosi, …

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Teston

M. Michel Teston. … qui est par ailleurs un homme charmant, doit « garder ses nerfs°», afin que nous puissions avoir un vrai débat.

Marques d’approbation sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Teston

Je voudrais également réagir à ce qu’il a indiqué à propos des privatisations. Mais qui diable a privatisé Gaz de France après avoir indiqué que l’État conserverait au moins 70 % du capital ? N’est-ce pas votre majorité, après qu’un certain Nicolas Sarkozy eut solennellement déclaré ici même, au banc du Gouvernement, que cet engagement ne serait jamais remis en cause ?

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Teston

Quant à France Télécom, c’est en 1996 que sa privatisation a été décidée. Or, à ma connaissance, en 1996, la gauche n’était pas au Gouvernement...

Je souhaite à mon tour évoquer l’amendement de Bruno Retailleau, qui a beaucoup agité le Landerneau politique et médiatique et auquel M. le ministre chargé de l’industrie a fait allusion dans son intervention.

Comme l’a dit Nicole Borvo Cohen-Seat, selon la décision du Conseil constitutionnel, le fait « qu’une activité ait été érigée en service public national sans que la Constitution l’ait exigé, ne fait pas obstacle au transfert au secteur privé de l’entreprise qui en est chargée ». Toutefois, ce transfert suppose que « le législateur prive ladite entreprise des caractéristiques qui en faisaient un service public national ».

En effet, mes chers collègues, il n’existe pas de supra-légalité.

Protestations sur les travées de l ’ Union centriste et de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Ou alors il faut alors constitutionnaliser La Poste !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Teston

Ainsi, ce que le Parlement décide un jour, il peut le changer le lendemain. Quand bien même cette formule serait inscrite dans le texte, elle ne fournirait donc aucune garantie pour l’avenir !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Teston

Du reste, si l’on analyse ce texte et si l’on envisage, notamment, les conséquences de l’ouverture totale à la concurrence, la suppression du monopole est certaine. Dès lors, le risque de privatisation est évident, si bien qu’il est impossible de se retrancher derrière le préambule de la Constitution de 1946.

J’aurai l’occasion de revenir sur ces différents points tout à l'heure, dans la discussion générale, mais je tenais à indiquer dès à présent qu’il ne faut pas faire croire à l’opinion que nous allons fixer pour l’avenir et de façon définitive un statut public national alors que le Parlement est libre, à tout moment, de changer le cadre législatif. La supra-légalité n’existe pas en droit public français.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Hérisson

Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, nous entamons l’examen d’un texte aussi politisé que médiatisé, sur un sujet capital, La Poste et les activités postales, que le Sénat suit depuis longtemps.

Vous-même, monsieur le président, en êtes un grand connaisseur puisque, dès 1997, vous avez produit des rapports qui ont fait date et ont incité La Poste à « prendre le train de la réforme ».

Beaucoup de choses ont été dites à propos de ce texte, dont certaines ne correspondent pas à la réalité. Aussi, je voudrais le resituer dans son contexte et rétablir quelques vérités, avant de vous présenter les apports de la commission sur ses principaux enjeux.

Nous sommes tous, me semble-t-il, très attachés à La Poste et aux services qu’elle nous rend quotidiennement, et ce depuis Louis XI. Mais au-delà de l’image d’Épinal du timbre-poste et du facteur, La Poste est avant tout un groupe d’envergure européenne, comptant près de 300 000 salariés, ce qui en fait le deuxième employeur français, après l’État. La Poste intervient dans des domaines d’activité économique des plus variés – courrier, colis express et, dernièrement, activités bancaires – et dégage plus de 20 milliards d’euros de chiffre d’affaires chaque année.

La Poste est aussi une entreprise chargée par la loi de missions de service public : le service universel postal, sans doute le plus large au sein de l’Union européenne, c’est-à-dire des services postaux de base rendus de façon permanente en tout point du territoire et à des tarifs abordables ; le service public du transport et de la distribution de la presse, indirectement abordé par le projet de loi, et qui fait l’objet d’un accord de financement tripartite ; la mission d’accessibilité bancaire, qui consiste à proposer des produits et services financiers pour le plus grand nombre, notamment le livret A ; enfin, celle à laquelle nous sommes le plus sensibles en tant qu’élus locaux, la mission d’aménagement du territoire.

L’objectif de cohésion sociale assigné à La Poste lui impose une très large présence, dont elle s’acquitte à travers 17°091 points de contact.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Hérisson

Il y a très précisément 10°778 bureaux de poste, 4°446 agences postales communales ou intercommunales et 1°758 relais poste.

Devant ce «°joyau national » – oui, monsieur Fischer, monsieur Le Cam, j’assume cette formule ! – qu’est notre poste se profilent aujourd’hui plusieurs obstacles d’importance.

Le premier réside dans la concurrence de nouveaux modes de correspondance, résultant de la dématérialisation des moyens de communication. Cette évolution devrait certes permettre à La Poste de tirer profit de nouveaux relais de croissance, avec le développement intensif du e-commerce et des services en ligne. À court terme, cependant, ce changement touche de plein fouet l’activité « courrier » du groupe, qui s’est réduite de 3, 5°% en 2008 et devrait diminuer de 20 % à 40°% au cours des prochaines années.

L’ouverture du marché à la concurrence constitue un second obstacle. Les directives postales de 1997, 2002 et 2008 ont prévu une libéralisation progressive du secteur postal, qui doit être parachevée au 31 décembre 2010, exception faite des nouveaux États membres. À cette date, que la France a réussi à repousser de deux ans, en partie grâce au Sénat, La Poste perdra le monopole dont elle jouit aujourd’hui sur le « secteur réservé », soit essentiellement les courriers de moins de 50 grammes, et devra affronter des opérateurs puissants, animés de grandes ambitions.

Le troisième obstacle découle en réalité des deux précédents : la difficulté à financer certaines missions de service public.

Le problème est à peu près réglé pour la mission de service universel postal, qui, a fait l’objet d’un fonds de compensation dans la loi de 2005 et sera mis en place le jour de la suppression du secteur réservé, pour celle de l’acheminement de la presse, grâce à l’accord tripartite précité, ainsi que pour celle de l’accessibilité bancaire, par le biais de la rémunération complémentaire que perçoit La Poste.

En revanche, le problème demeure pour la mission d’aménagement du territoire. Selon la loi de 1990, modifiée en 2005, cette mission est financée par un fonds national de péréquation. Or le surcoût net, évalué pour l’instant à 250 millions d’euros environ, n’est couvert qu’en partie, à hauteur de 137 millions d’euros, au travers de l’allégement de fiscalité locale dont bénéficie La Poste.

Pour permettre à La Poste de faire face à l’ensemble de ces nouveaux défis, le présent projet de loi prévoit notamment d’en changer le statut juridique en le faisant passer de celui d’établissement public industriel et commercial à celui de société anonyme. Il s’agit par là de la doter d’un capital social afin qu’elle puisse faire appel à de nouveaux investisseurs, à hauteur de 2, 7 milliards d’euros dans l’immédiat.

Je rappellerai ici quelques éléments fondamentaux.

Tout d’abord, c’est à la demande du président de La Poste qu’a été envisagé ce changement de statut. Cet argument peut paraître formel, mais il l’est moins lorsque l’on connaît la personnalité et le parcours, dans le secteur public, de l’intéressé : M. Jean-Paul Bailly.

Ensuite, cette évolution semble naturelle. D’ailleurs, elle a été constatée dans vingt-cinq des vingt-sept pays de l’Union européenne.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Hérisson

La France est l’avant-dernier pays de l’Union européenne à transformer le statut de La Poste en société anonyme. Si nous en décidons ainsi, le Luxembourg restera l’exception.

En outre, ce changement de statut s’accompagne de garanties plus que solides : le capital de La Poste restera entièrement public et ne donnera donc absolument pas lieu à quelque privatisation que ce soit.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Hérisson

D’ailleurs, si tel était l’objet de ce projet de loi, je serais le premier à voter contre !

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Hérisson

M. Pierre Hérisson, rapporteur. Mes chers collègues, il vous sera difficile de me prendre en défaut sur les choix et les votes que j’ai exprimés ici depuis 1996 à propos de cette grande entreprise publique !

Applaudissementssur les travées de l’UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Hérisson

Les quatre missions de service public de La Poste seront maintenues et même consacrées dans un article spécifique. La Poste restera prestataire du service universel postal pendant quinze ans. Sa présence territoriale ne sera en aucune manière affectée.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Hérisson

Le statut des agents de La Poste restera inchangé, qu’ils soient fonctionnaires ou salariés, et une solution équilibrée sera présentée pour le régime de retraite complémentaire de ces derniers.

J’ajoute que, très clairement, il n’y avait pas d’autre solution envisageable que cette transformation en société anonyme : ni le statu quo, qui aurait conduit à renoncer à des investissements et aurait entraîné un déclin assuré du groupe, ni une dotation directe de l’État à l’établissement public, qui aurait été qualifiée d’aide publique par Bruxelles, ni encore un recours à l’endettement, qui s’élève déjà aujourd'hui à plus de 6 milliards d’euros pour le groupe.

Au final, cette réforme devrait permettre à La Poste de se moderniser, de s’affirmer sur les secteurs matures et de conquérir de nouveaux marchés. Car c’est bien de cela qu’il s’agit !

Très concrètement, il lui sera possible d’améliorer l’accueil du public ou encore de financer des projets de développement durable tels que le recours à des véhicules électriques, le transport par TGV ou par conteneur.

Outre son titre Ier ô combien fondamental et qui a, ces derniers temps, cristallisé l’attention, le texte vise, dans son titre II – on l’oublie un peu trop ! – à transposer la troisième directive postale du 20 février 2008. Celle-ci comporte deux éléments d’une importance capitale, bien que moins médiatisés.

D’une part, il s’agit de l’ouverture totale des marchés postaux au 1er janvier 2011, qui correspond à la fin du « secteur réservé », pour ne pas dire du monopole, dont bénéficiait La Poste pour financer ses obligations de service universel. Il n’y a, sur ce point, aucune marge de manœuvre ; le texte se contente de reprendre le calendrier fixé par la directive. Cependant, cet horizon nous appelle à nous mobiliser d’urgence.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Hérisson

Il faut donner aussi tôt que possible à La Poste les moyens juridiques et financiers de se moderniser en vue du grand rendez-vous de 2011.

D’autre part, la directive exige une régulation équilibrée. Il s’agit d’empêcher l’opérateur historique La Poste d’user d’une position naturellement dominante sur le marché postal pour empêcher l’entrée ou la concurrence accrue d’opérateurs alternatifs, tout en le laissant capable d’assurer la mission de service universel qui lui est reconnue par la loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Hérisson

Pour le titre Ier relatif au changement de statut de La Poste, la commission a cherché à mettre au point des propositions concrètes de nature à apaiser les craintes soulevées par la transformation de l’opérateur en société anonyme. C’est ainsi que nous avons garanti un système qui empêche un désengagement de l’État et assure le caractère 100 % public du capital de La Poste.

Concernant la présence postale territoriale, nous avons inscrit noir sur blanc le maintien des 17 000 points de contact.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Au bazar du village, à l’épicerie, à la boulangerie, dans les stations de métro…

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Hérisson

M. Pierre Hérisson, rapporteur. En outre, la commission a prévu que chacun des points de contact offrirait un socle de prestations adapté, alors que la politique conduite dans tous les autres pays de l’Union européenne a consisté à réduire par milliers les points de présence postale sur leur territoire : 5 000 en Allemagne, 1 000 en Suisse

Souriressur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Hérisson

Je profite de cette occasion pour souligner les témoignages de satisfaction qui nous sont parvenus des élus, de toute appartenance politique, à l’égard du développement des agences postales communales. J’ajoute que celles-ci sont considérées dans les autres pays de l’Union européenne comme une réussite ; on s’y intéresse d’ailleurs beaucoup à la façon dont nous avons organisé la présence postale sur le territoire français !

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Hérisson

Du reste, nous avons inscrit dans le texte une disposition permettant d’assurer intégralement le financement de cette présence au travers d’une exonération totale de taxe professionnelle. Ce système mérite cependant d’être affiné et nous y reviendrons lors de l’examen des amendements.

Enfin, la commission a modifié la composition du conseil d’administration afin que les actionnaires, y compris l’État bien entendu, aient la majorité des droits de vote, ce qui est bien normal dans une société anonyme.

Pour le titre II, consacré à la transposition de la troisième directive postale, nous avons eu pour objectif d’assurer un meilleur équilibre dans la régulation entre La Poste et les opérateurs alternatifs, de renforcer le mécanisme de financement du fonds de compensation du service universel et de mieux informer le Parlement sur les conditions d’exécution de ce dernier.

Mes chers collègues, telle est l’économie générale du texte qui vous est proposé. Des progrès ont été réalisés et d’autres avancées seront possibles au cours de la discussion des articles. Nous avons examiné ce projet de loi de façon très ouverte au sein du groupe d’études « Postes et communications électroniques », dans le cadre duquel ont été menées les auditions ; puis en commission, où les débats ont été intéressants et constructifs avec tous les membres de celle-ci, et ce quelle que soit leur appartenance politique. J’espère qu’il en sera de même en séance publique, car ce texte représente une chance de salut réelle, mais ultime, pour La Poste. S’il est toujours risqué d’agir, il l’est plus encore de ne rien faire !

Aussi sommes-nous aujourd’hui appelés à « bouger avec La Poste » ! J’espère, à ce titre, que nous saurons prendre nos responsabilités en votant ce texte.

Très bien ! et applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ Union centriste.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Courteau

Nous aussi, nous prenons nos responsabilités !

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Il n’y a pas écrit : « La Poste » sur nos fronts !

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Maurey

Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, je tiens tout d’abord à remercier et à féliciter M. le rapporteur pour le travail considérable qu’il a réalisé au cours des derniers mois et des dernières semaines, …

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Maurey

… notamment en procédant à de très nombreuses auditions, ce qui prouve une fois de plus sa compétence et son esprit de dialogue.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Maurey

Je tiens également à remercier M. le président de la commission, Jean-Paul Emorine, ainsi que les collaborateurs de la commission qui se sont montrés, comme toujours, aussi disponibles qu’avertis.

Cela étant dit, je m’étonne de la polémique, totalement artificielle, qui a été savamment organisée autour de ce texte.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Maurey

M. Hervé Maurey. À cet égard, je profite de cette tribune pour dénoncer les conditions scandaleuses de la pseudo-votation qui a été organisée sur notre territoire.

Huées sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Maurey

M. Hervé Maurey. Que n’a-t-on raconté à nos concitoyens ? Qu’on allait privatiser La Poste ! Mais soit vous n’avez pas lu le projet de loi, soit vous êtes d’une parfaite mauvaise foi !

Hourvari.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Courteau

Respectez les 2 millions et quelques personnes qui ont participé à la votation citoyenne !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Il y a d’autres scandales que celui-là à dénoncer !

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Maurey

Dans la ville de 12 000 habitants que j’administre, où le bureau de poste n’est évidemment pas menacé, les organisateurs de cette pseudo-consultation, les mêmes d’ailleurs qui avaient perdu les élections municipales quinze jours auparavant, ont expliqué à mes concitoyens qu’ils devaient aller voter car le bureau de poste risquait de fermer.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Courteau

En tout cas, dans beaucoup d’endroits, c’est ce qui va se passer !

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Maurey

C’est dire la malhonnêteté intellectuelle dont l’opposition fait preuve dans cette affaire depuis des semaines !

Je comprends que l’opposition tente d’exister et de se refaire une santé en menant des combats contre des ennemis qui n’existent pas, …

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Maurey

M. Hervé Maurey. … à moins, comme l’a très justement souligné M. le ministre chargé de l’industrie, que ce soit pour faire oublier les privatisations qu’elle a elle-même organisées dans le passé.

MM. Jacques Blanc et Jean-Claude Carle applaudissent.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Maurey

Je tiens également à dire combien je trouve regrettable la bataille d’obstruction à laquelle l’opposition a commencé à se livrer avant même le commencement de l’examen de ce texte. En effet, elle s’est arrangée pour que notre débat, qui devait s’ouvrir en milieu d’après-midi, ne commence que ce soir !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

C’est le recours à la procédure accélérée qui est regrettable !

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Maurey

M. Hervé Maurey. De plus, nous avons maintenant 600 amendements à examiner alors que l’opposition n’en avait déposé aucun en commission !

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Vous êtes au Parlement, cher monsieur, pas dans un meeting !

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Maurey

En quinze jours, 600 amendements ont éclos, uniquement pour pratiquer cette obstruction ! Eh bien, je le dis, cela n’est pas digne des enjeux de ce débat…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

On n’a plus le droit de déposer des amendements ?

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Maurey

M. Hervé Maurey. … ni des 300 000 salariés de l’entreprise publique qui en est l’objet !

Applaudissements sur les mêmes travées. – Vives protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Maurey

M. Hervé Maurey. Je joue à rétablir la vérité et à dénoncer une attitude scandaleuse !

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ Union centriste.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Maurey

En effet, comme l’ont excellemment précisé M. le ministre et M. le rapporteur, le texte qui nous est proposé vise à transformer le statut de La Poste, qui deviendra une société anonyme, une société anonyme de droit public, …

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Danglot

Une société anonyme de droit public, cela n’existe pas !

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Maurey

… à ceci près que les salariés qui le souhaitent pourront prendre part à l’augmentation du capital qui leur sera réservée pour devenir actionnaires.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Les sociétés anonymes de droit public sont devenues privées !

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Maurey

M. Hervé Maurey. Comme l’a rappelé M. le rapporteur, ce système prévaut dans tous les pays européens, à l’exception du Luxembourg. Mais je n’avais pas compris que le Luxembourg était l’idéal économique de l’opposition !

Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Maurey

Cette réforme est nécessaire pour que La Poste puisse faire face aux défis qu’elle a à relever, que ce soit en termes d’ouverture totale à la concurrence ou de dématérialisation du courrier.

À cet égard, je salue d’ailleurs les formidables évolutions que l’entreprise a connues au cours de la dernière décennie, grâce à ses dirigeants et à ses salariés. C’est ainsi que La Poste a réussi à développer ses métiers – je rappelle qu’elle est aujourd’hui le deuxième opérateur pour les colis – et à créer de nouveaux services.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Maurey

Par ailleurs, elle a compensé, avec succès, la diminution de l’activité courrier. Fort heureusement, est aujourd'hui révolu le temps où le président Larcher déplorait, à juste titre, l’immobilisme de La Poste !

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

C’est vous qui avez défendu le travail le dimanche ! C’est vous qui allez faire vos emplettes à Rome le dimanche !

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Maurey

Aujourd’hui, La Poste a besoin de 2, 7 milliards d’euros pour investir et se moderniser, afin d’être un acteur européen majeur. Or, pour ne pas enfreindre les règles européennes ni accroître l’endettement de l’entreprise, la seule solution est de créer une société anonyme.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Ce n’est pas parce que vous allez le répéter sans cesse que vous allez convaincre !

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Maurey

Là encore, le conservatisme dont fait preuve l’opposition risquerait, ni plus ni moins, de mettre l’entreprise en péril. (MM. Jacques Blanc, Paul Blanc et Jean-Claude Carle applaudissent.) On ne sauve pas un service public en le momifiant ! Le propre d’un service public est de savoir s’adapter !

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Parlez-en aux usagers des établissements qui ont été privatisés !

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Maurey

Naturellement, le changement de statut ne doit pas remettre en cause les missions de service public de La Poste. Cette entreprise n’est pas et ne doit pas être une entreprise comme les autres. Nous sommes d’ailleurs fermement attachés à ses missions de service universel postal, de distribution de la presse, d’accessibilité bancaire et d’aménagement du territoire.

C’est pourquoi le groupe de l’Union centriste est extrêmement fier d’avoir fait inscrire dans le projet de loi qui nous est soumis le nombre de 17 000 points de contact postal en France : ce n’est pas rien !

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Cela ne veut rien dire ! Beaucoup sont des bureaux de tabac ou des guichets de la RATP !

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Maurey

Et, même si le système mérite d’être revu à l’occasion de nos débats, nous sommes très heureux d’avoir également contribué à augmenter les moyens du fonds postal national de péréquation territoriale.

Nous avons en outre permis que les commissions compétentes du Parlement soient consultées sur la nomination du président du conseil d’administration de La Poste, ou encore que soit remis un rapport annuel sur le financement de l’aménagement du territoire.

Au cours de la discussion qui va commencer – une vraie discussion, je l’espère, et non de l’obstruction politicienne en permanence §...

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Maurey

... nous proposerons d’améliorer encore le texte, et je suis très heureux que le ministre soit dans cette disposition d’esprit.

Nous proposerons notamment d’affirmer que l’État a vocation à rester actionnaire majoritaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Maurey

Les autres personnes morales de droit public ne pourront donc être que des actionnaires minoritaires.

Nous proposerons aussi de conforter les différentes missions de service public de La Poste.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Maurey

S’agissant du service universel, nous proposerons d’instituer une obligation de distribution au plus tard le surlendemain, ainsi que de renforcer les pouvoirs de l’ARCEP sur les différents tarifs qui en relèvent.

Nous souhaitons également que soit réaffirmée la mission de service public de La Poste en matière bancaire et nous proposerons que soit inscrite dans la loi la possibilité d’effectuer des dépôts et des retraits dans les points de contact, et non pas seulement dans les bureaux.

En matière d’aménagement du territoire, sur l’initiative de notre collègue Daniel Dubois, nous avons déposé un amendement destiné à conforter la présence postale en milieu rural.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Maurey

Nous avons également déposé un amendement tendant à inscrire dans la loi la participation financière de La Poste au fonctionnement des agences postales, de manière à éviter tout désengagement à l’avenir.

Nous reviendrons sur la question du financement parce qu’il nous semble très important que le coût de l’aménagement du territoire soit désormais évalué non plus par La Poste, comme c’est le cas aujourd’hui, mais par un organisme indépendant ; nous proposerons que ce soit l’ARCEP. Nous souhaitons que cette évaluation ait lieu périodiquement et que l’affectation des moyens dont La Poste a besoin soit déterminée au vu de cette évaluation fiable et transparente.

Nous avions déposé un amendement prévoyant une dotation de l’État, comme cela se fait, par exemple, pour le service public de l’audiovisuel. Cela n’a pas été possible en application de l’article 40, mais je pense que nous y reviendrons au cours des débats.

Telle est, mes chers collègues, l’attitude du groupe centriste. Loin de l’attitude doctrinaire que je déplorais tout à l’heure…

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Maurey

M. Hervé Maurey. Je comprends que cela vous dérange !

Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Maurey

Mais votre réaction atteste la justesse de mon propos !

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Maurey

Loin, disais-je, de cette attitude doctrinaire, la nôtre vise à apporter notre soutien à une réforme qui est indispensable à l’entreprise pour lui permettre de remplir ses missions de service public, et, au terme de l’adoption de ce projet de loi, nous veillerons à ce que celles-ci soient confirmées et confortées.

J’espère que nous bénéficierons d’un large soutien dans cet hémicycle, car c’est, je crois, ce qu’attendent très sincèrement de nos travaux les élus locaux et nos concitoyens

Exclamations sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Maurey

M. Hervé Maurey. … qui, nous le savons, sont attachés à l’entreprise nationale qu’est La Poste.

Applaudissements sur les travées de l ’ Union centriste et de l ’ UMP. – Exclamations sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Écoutez vos concitoyens ! Demandez-leur ce qu’ils en pensent ; ils vous le diront !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Teston

Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, le moins que l’on puisse dire, c’est que l’examen du projet de loi relatif à l’entreprise publique La Poste et aux activités postales ne débute pas au Sénat dans une ambiance de grande sérénité du côté du Gouvernement.

Debut de section - Permalien
Henri de Raincourt, ministre chargé des relations avec le Parlement

Ah bon ?

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Teston

En témoignent le choix de la procédure accélérée, d’un débat organisé sur une seule semaine et son refus d’organiser un référendum sur la question du statut de La Poste...

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Blanc

Pour quoi faire ? D’ailleurs, ce n’était pas possible !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Teston

... en se retranchant derrière l’argument de l’absence d’une loi organique d’application de l’article 11 révisé de la Constitution.

Comment ne pas y voir du cynisme lorsque l’on sait que, depuis quinze mois, aucun projet de loi organique de mise en œuvre de cet article n’a été déposé ni même programmé ou annoncé ?

Debut de section - Permalien
Henri de Raincourt, ministre

Faux, totalement faux !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Teston

Le manque de sérénité du Gouvernement apparaît aussi clairement dans la réunion organisée à Bercy, le 19 octobre dernier, par Christian Estrosi, pour plus de 300 cadres, avec comme objectif, selon le compte rendu du Figaro, de faire partager à ces derniers sa vision de La Poste.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre

Vous avez de bonnes lectures !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Teston

Les commentaires peu amènes d’un certain nombre de membres du Gouvernement sur la votation citoyenne au cours de laquelle plus de 2, 2 millions citoyens se sont prononcés pour le maintien du statut actuel dissimulent mal une réelle inquiétude du pouvoir exécutif.

Le Premier ministre est même monté en première ligne en adressant à tous les maires une lettre qui se veut rassurante. Dans ce courrier, il présente le changement de statut comme la seule solution pour donner à La Poste les moyens de répondre aux défis qui lui sont lancés, dans un environnement marqué par un usage grandissant des techniques de l’information et de la communication, l’ouverture complète à la concurrence du secteur postal au 1er janvier 2011 et un endettement du groupe de 6 milliards d’euros.

Pour avoir participé, depuis l’automne dernier, à de très nombreuses auditions sur la situation et l’avenir de La Poste au sein de la Commission supérieure du service public des postes et des communications électroniques, la CSSPPCE, …

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Hérisson

Du groupe de ladite commission dont vous êtes vice-président !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Teston

… au sein du groupe d’études Postes et communications électroniques du Sénat ou encore à des auditions organisées par le groupe socialiste du Sénat, j’ai acquis la conviction, partagée par tous les parlementaires de gauche, que le changement de statut n’est pas la solution pour assurer l’avenir du groupe La Poste, lequel est non seulement le plus ancien et le plus emblématique de nos services publics, le premier employeur de France après l’État, un maillon essentiel du lien social par sa présence sur tout le territoire avec la distribution du courrier six jours sur sept et ses 17 000 points de contact, mais aussi un acteur essentiel de péréquation avec le prix unique du timbre.

Pour nous, la seule solution consiste dans le maintien du statut actuel, celui d’exploitant autonome de droit public, …

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Teston

… qui a été assimilé par la jurisprudence à celui d’établissement public à caractère industriel et commercial, ou EPIC.

Notre groupe est donc opposé à l’adoption du premier volet de ce projet de loi, comme d’ailleurs du second, relatif à la suppression du secteur réservé.

La première partie de mon intervention sera consacrée à l’exposé des principales raisons de notre opposition à ce texte. La seconde partie consistera à présenter une série de propositions constituant une solution alternative à celle du Gouvernement.

Nos critiques s’appuient sur des constats et sur une analyse prospective des conséquences prévisibles d’un changement de statut.

S’agissant des constats, aucune législation-cadre européenne n’oblige à changer le statut de La Poste.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Teston

Ensuite, si le constat peut être fait d’une insuffisance des fonds propres de La Poste, il est nécessaire de se poser la question suivante : à qui la faute ?

La responsabilité de cette situation incombe à l’État, …

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Teston

M. Michel Teston. … qui n’assume pas ses obligations à l’égard du groupe La Poste

Eh oui ! sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Teston

Je tiens à rappeler que de telles interventions financières sont parfaitement possibles dans la mesure où ces deux missions de service public sont considérées par la Commission européenne comme relevant de la compétence des États membres.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Teston

M. Michel Teston. Comment ne pas rappeler aussi que, chaque année depuis cinq ans, lors de l’examen du projet de loi de finances initial, je propose l’inscription de davantage de crédits pour ces deux missions de service public ? Si le Gouvernement n’avait pas fait la sourde oreille, les fonds propres de La Poste auraient été progressivement augmentés et le rapport fonds propres/dette serait bien meilleur. Évidemment, en cas de réponse à cette demande, le Gouvernement n’aurait pas pu tirer argument du niveau insuffisant des fonds propres pour tenter de justifier un changement de statut !

Et voilà ! sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Teston

Alors, parlons-en du changement de statut et de ses conséquences !

Le premier risque, parfaitement identifié par nombre de nos concitoyens, notamment dans un récent sondage, est celui d’une privatisation progressive de La Poste. La formule figurant à l’article 1er du projet de loi initial, à savoir : « Le capital de la société est détenu par l’État ou par d’autres personnes morales appartenant au secteur public », ne laissait planer aucun doute sur ce qui allait se passer.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Teston

Écrire « l’État ou » signifiait clairement que celui-ci se réservait la possibilité de sortir du capital.

Quant à la formule : « d’autres personnes morales appartenant au secteur public », elle laissait à penser qu’il pourrait s’agir de personnes morales exerçant des missions de service public au sens fonctionnel et non organique du terme, c’est-à-dire dont le capital pouvait ne pas être entièrement public.

La nouvelle formulation adoptée par la commission, à savoir : « Le capital de la société est détenu par l’État et par d’autres personnes morales de droit public », a le mérite d’obliger l’État à demeurer dans le capital.

Toutefois, il ne vous a pas échappé qu’aucun plancher n’est fixé au sujet de sa participation.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Teston

Celle-ci pourrait donc, à terme, se réduire très sensiblement, avec pour objectif l’affectation du produit de la vente d’actions à la réduction de sa colossale dette.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Teston

En outre, la nouvelle formulation n’apporte pas toutes les garanties nécessaires. En effet, par les termes : « autres personnes morales de droit public », il faut entendre essentiellement les collectivités territoriales et les entreprises publiques. Or, en application d’une loi du 2 juillet 1986, une entreprise du secteur public est une entreprise dont au moins 51 % du capital social est détenu par l’État, les administrations nationales, régionales ou locales.

Par conséquent, la formule adoptée par la commission n’apporte pas la garantie que les autres actionnaires que l’État seront des personnes morales – des entreprises publiques, notamment – dont le capital est à 100 % public.

Nous sommes donc clairement face à une logique, celle du Gouvernement, bien assisté par le rapporteur, qui consiste à faire le dos rond face aux nombreuses réactions que suscite le texte, en adoptant une position de repli qui permet de faire sauter le verrou que constitue le statut actuel.

Il restera à attendre patiemment une « lucarne de tir » pour proposer un nouveau projet de loi ouvrant le capital de La Poste, à l’instar de ce qui a été fait pour France Télécom et GDF. Cette opportunité est offerte par le second volet du projet de loi, c’est-à-dire la suppression du secteur réservé, en réalité la suppression du monopole résiduel pour la levée, le tri et la distribution des plis de moins de 50 grammes, suppression dont il ne faut pas sous-estimer les conséquences.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Hérisson

La suppression du monopole, ce n’est pas nous, c’est une obligation !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Teston

En effet, le texte actuel, s’il est adopté – y compris avec l’amendement de Bruno Retailleau –, permettra, avec la disparition du monopole, d’élargir le nombre d’opérateurs dans la distribution du courrier. Une autre loi pourra alors faire descendre en dessous de 50 % la part du capital public, …

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre

C’est faux, et je vais le démontrer !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Teston

…et cela sans enfreindre le préambule de la Constitution de 1946, qui prévoit qu’un service public national doit devenir mais aussi rester la propriété de la collectivité.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre

Vous avez mal travaillé !

Debut de section - Permalien
Un sénateur socialiste

Au contraire, c’est une belle démonstration !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Teston

Cette décision sera évidemment politique ! Mais elle pourra s’appuyer, notamment, sur le constat de la nécessité de renforcer à nouveau, à l’avenir, les fonds propres de La Poste.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Teston

Cette hypothèse est crédible, car le mode de financement retenu pour le fonds de compensation du service universel postal n’est pas suffisant. L’expérience que nous en avons dans le domaine de la téléphonie fixe nous laisse dubitatifs quant à son efficacité. L’opérateur historique supporte l’essentiel du financement, les autres opérateurs contestant bien souvent, y compris par voie judiciaire, la quote-part mise à leur charge par I’ARCEP. Même Pierre Hérisson a récemment qualifié « d’usine à gaz » ce dispositif de financement.

Par ailleurs, l’ouverture totale à la concurrence risque de laminer les résultats de La Poste, du fait que la concurrence ne sera réelle que sur les secteurs d’activité les plus lucratifs.

Qui peut penser que, si une augmentation de capital s’avérait nécessaire, l’État et la Caisse des dépôts et consignations seraient en mesure ou accepteraient d’y consentir ? La Caisse des dépôts a-t-elle d’ailleurs vocation à demeurer très longtemps au capital d’une entreprise ?

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Teston

Il nous sera alors expliqué qu’une « ouverture limitée » du capital est nécessaire…

J’arrête là, tout le monde connaît la suite, on nous a déjà fait le coup avec France Télécom et GDF !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Teston

Pensez seulement, mes chers collègues, aux conséquences en matière de présence postale, de levée et de distribution du courrier. Et qu’en sera-t-il du prix unique du timbre ?

Quels autres risques un changement de statut pourrait-il induire ?

Ils concernent, tout d’abord, le personnel. Avec le basculement de La Poste dans le droit commun, l’emploi de personnels contractuels, qui était une possibilité, devient la règle. En l’absence de convention collective des activités postales, les opérateurs concurrents risquent de pratiquer une politique de dumping social, dangereuse non seulement pour leurs salariés, mais aussi pour ceux de La Poste.

Par ailleurs, le texte ne prévoyant pas de dispositif idoine, les agents de La Poste vont automatiquement basculer du régime complémentaire de retraite de l’IRCANTEC à celui de l’AGIRC-ARRCO, moins favorable aux agents. Et cette évolution remet de surcroît en cause l’équilibre financier de l’IRCANTEC.

Force est de constater que, ces dernières années, les suppressions d’emplois se sont multipliées à La Poste. Nous avons de bonnes raisons de penser que, avec le changement de statut et l’ouverture à la concurrence du secteur postal, leur rythme pourrait s’accélérer. Dès lors, une question se pose : les 2, 7 milliards d’euros promis par l’État et la Caisse des dépôts et consignations ne vont-ils pas surtout servir à financer un plan social ?

Par ailleurs, quelle sera l’incidence de ce texte sur le cadre contractuel prévu avec les communes ? Des fonctionnaires territoriaux pourront-ils exercer des missions de service public pour le compte d’une société anonyme ? Quelles seront les réactions des concurrents de La Poste ? Quant aux nouvelles conventions relatives à l’organisation des agences postales communales, ne seront-elles pas soumises à l’obligation d’un appel d’offres, mode normal de choix d’un prestataire en cas de délégation de service public ? Si tel est le cas, nous n’avons aucune garantie que les communes seront systématiquement retenues pour exercer ces délégations.

J’en viens à nos propositions alternatives.

À notre sens, l’avenir de La Poste passe par une bonne identification des besoins des usagers et des territoires auxquels doit répondre le service public postal, par la mise en place d’un financement suffisant et pérenne et par une bonne régulation de son fonctionnement.

Cette analyse nous conduit d’abord à renouveler notre demande d’un référendum sur le service public postal. Messieurs les ministres, il n’y a aucune urgence à se prononcer sur ce texte. La date butoir prévue par la directive postale est fixée non pas au 1er janvier 2010, mais bien au 1er janvier 2011.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Teston

Il appartient au Gouvernement de préparer un projet de loi organique rendant possible l’organisation d’un tel référendum, de le soumettre au Parlement et, une fois ce texte adopté, d’organiser effectivement le référendum sur le service public postal.

Sur le fond, notre groupe est favorable au maintien du statut d’établissement public à caractère industriel et commercial, personne morale de droit public, dotée d’une autonomie financière et chargée d’exercer, à la place de l’État ou des collectivités locales, mais sous leur contrôle, la gestion d’un service dans un but d’intérêt général. Ce statut nous paraît totalement adapté, y compris au contexte créé par la prochaine ouverture totale à la concurrence du secteur postal. Il n’interdit pas, je le répète, les aides financières de l’État dans certains cas.

Aussi, en attendant que l’État se décide à accompagner l’EPIC La Poste en matière de présence postale et à le soutenir véritablement pour ce qui concerne le transport de la presse, nous vous proposons de prévoir l’alimentation du fonds postal national de péréquation territoriale par tous les prestataires de services postaux et d’en confier la gestion à la Caisse des dépôts et consignations.

Il nous paraît également nécessaire de prolonger le moratoire relatif à l’application de l’accord État–presse–Poste, inadapté dans le contexte actuel.

Il convient, en outre, de mieux définir les critères d’accessibilité aux points de contact, ainsi que les amplitudes horaires d’ouverture au public. Un moratoire sur les suppressions de postes devrait également être mis en place par le groupe.

Un autre moratoire s’impose concernant l’entrée en vigueur de la directive supprimant le secteur réservé. Il vous est proposé, mes chers collègues, de donner un signal fort au Gouvernement à ce sujet. En effet, un certain nombre d’États de l’Union européenne seraient prêts à croiser le fer avec la Commission sur ce point, considérant à juste titre qu’en période de très grave crise financière, économique et sociale il est inopportun de supprimer un mode de financement adapté et efficace du service universel.

La jurisprudence constante de la Cour de justice des communautés européennes – je vous épargnerai la liste des arrêts en cause – donne des arguments en ce sens, en reconnaissant la possibilité, pour les États membres, de conférer à des entreprises chargées de la gestion de services d’intérêt économique général des droits exclusifs qui peuvent faire obstacle à l’application des règles de la concurrence.

Enfin, quel que soit le sort réservé à ce projet de loi, les associations d’usagers devraient pouvoir siéger au sein des instances décisionnelles de La Poste.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Teston

Pour le cas où la majorité sénatoriale se laisserait aller à voter le changement de statut et la suppression du secteur réservé, il nous a semblé indispensable de déposer des amendements de repli.

L’un d’eux vise à maintenir les contractuels dans le régime complémentaire de retraite géré par l’IRCANTEC. Un autre tend à limiter les pouvoirs conférés à l’ARCEP, le rôle du politique devant être réaffirmé face à la multiplication des autorités indépendantes. Le ministère, la CSSPPCE et l’Observatoire national de la présence postale doivent avoir leur mot à dire sur la manière dont fonctionne le service universel postal. Un troisième amendement prévoit l’élargissement du champ des activités pour le calcul de la contribution au fonds de compensation.

Au cours des nombreux débats et échanges qui ont précédé l’examen de ce projet de loi, aucun argument solide n’a été présenté par le Gouvernement pour justifier l’abandon du statut d’EPIC. Nous affirmons qu’il est adapté, y compris à l’ouverture totale à la concurrence du secteur postal.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Teston

Le Gouvernement veut rapidement faire sauter le verrou que constitue le statut actuel pour pouvoir ouvrir le capital de La Poste lors de l’examen d’un texte de loi ultérieur. S’il était décidé, le changement de statut interviendrait au plus mauvais moment, en pleine crise économique.

Face à cette réforme qui pose plus de questions qu’elle n’apporte de solutions, notre groupe, mais aussi l’ensemble de la gauche, propose une alternative : elle consiste en un maintien du statut actuel, accompagné d’une bonne identification des besoins des usagers et des territoires auxquels doit répondre le service public postal, de la mise en place d’un financement enfin suffisant et pérenne et d’une régulation efficace.

Cette solution alternative n’est pas seulement celle de la gauche parlementaire. Elle est aussi et avant tout celle des plus de 2, 2 millions de citoyens qui se sont exprimés et dont tous les élus de gauche seront les interprètes lors des débats.

Contrairement à ce qu’affirment certains membres du Gouvernement, notre position n’est pas conservatrice. Pour reprendre la terminologie gouvernementale, elle est au contraire moderne, au bon sens du terme, car elle tient compte non seulement de notre culture du service public, mais aussi d’une bonne compréhension de la profonde crise actuelle, qui devrait conduire le Gouvernement à mettre en veilleuse, pour le moins, l’idéologie libérale qui inspire son action.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Teston

M. Michel Teston. En adoptant cette position, nous sommes fidèles à nos valeurs et nous défendons le plus ancien et le plus emblématique des services publics, lesquels constituent dans leur ensemble le patrimoine de tous, et particulièrement de celles et ceux qui n’en ont pas !

Bravo ! et applaudissements prolongés sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE. – Mmes et MM. les sénateurs du groupe socialiste se lèvent et congratulent l’orateur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Plancade

Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, l’avenir de La Poste est, bien sûr, un sujet de préoccupation pour chaque citoyen. En effet, cela a été rappelé sur toutes les travées, nous sommes tous particulièrement attachés à cette entreprise. Cet attachement s’explique non seulement par des raisons symboliques, La Poste étant l’un des plus anciens de nos services publics, mais aussi par des raisons concrètes, car il s’agit d’un service public de proximité indispensable, qui crée du lien social.

Messieurs les ministres, réformer La Poste est aujourd’hui, j’en conviens, une nécessité imposée par le contexte juridique et économique, notamment européen. Mais reconnaître cette nécessité ne nous autorise pas pour autant à donner un blanc-seing à toute réforme et à accepter comme tel un texte de loi qui, de notre point de vue – même si vous avez évoqué, monsieur le ministre chargé de l’industrie, l’adoption en commission d’un amendement déposé par le groupe du RDSE –, n’est pas suffisamment « bordé » pour empêcher la dérive à laquelle est déjà confronté cet établissement, à savoir la primauté absolue des exigences économiques sur les missions du service public.

En écoutant les interventions des uns et des autres, je me suis souvenu du soir où, alors que je venais d’être élu au Sénat, un de mes amis, beaucoup plus ancien dans cette assemblée, me donna cet avertissement : « Fais attention à ce que tu vas dire ! On dit dans l’opposition des choses que l’on ne fait pas quand on arrive au gouvernement et on fait au gouvernement des choses que l’on n’avait pas dites lorsqu’on était dans l’opposition. »

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Plancade

Selon moi, il s’agit d’un débat quelque peu dépassé. En effet, depuis 1986, on constate un véritable consensus national en faveur de la libéralisation des services publics : à droite, à gauche, au centre, partout on est d’accord ! C’est un processus continu, poursuivi sous tous les gouvernements. En 1986, sous la présidence de François Mitterrand, Laurent Fabius étant Premier ministre, la France a signé l’Acte unique européen. Toute une série de directives, conformes à la politique que nous avions choisie de façon quasi unanime, s’est ensuivie. Faire croire que l’on peut agir autrement aujourd’hui, c’est manquer d’honnêteté politique !

Toutefois, la pensée politique elle-même a évolué. Ainsi, au moment de la création des établissements publics, le ministre de gauche de l’époque avait insisté sur leur nécessaire autonomie. Il considérait en effet, et à juste titre, que le Gouvernement n’avait pas à se mêler de la politique commerciale des établissements publics, en particulier de La Poste.

Il y a eu ensuite la période où l’on a décidé que, pour accomplir des missions de service public, il convenait de créer des sociétés d’économie mixte, sociétés de droit privé associant capitaux privés et publics.

Aujourd’hui, vous prévoyez de constituer une société à capitaux exclusivement publics, monsieur le ministre, et l’on vous accuse de vouloir privatiser La Poste ! En ce sens, il est vrai que vous n’avez guère de chance et que l’on vous fait un procès assez injuste. Mais ne vous réjouissez pas trop vite, monsieur le ministre, car j’ai aussi des choses moins plaisantes à vous dire !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. Il vous faudra les dire dans les trois minutes qui vous restent, mon cher collègue !

Nouveaux sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Plancade

Nous considérons que la forme juridique de l’entreprise qui accomplira la mission de service public n’est pas fondamentale. La preuve en est que le statut actuel de La Poste n’a pas empêché les mesures de compression du personnel et la fermeture de nombreux guichets et bureaux de poste.

S’il est vrai que la défense du statut juridique ne saurait donc être une religion, la satisfaction des besoins de nos concitoyens doit, en revanche, être intangible. Une entreprise de droit privé peut parfaitement remplir une mission de service public, mais il appartient alors au politique de fixer les conditions de sa réalisation, ce que le projet de loi ne fait pas.

Vous pourriez nous accuser, nous aussi, de vous faire un procès d’intention, monsieur le ministre, mais les exemples sont malheureusement nombreux où, après avoir créé des sociétés de droit privé pour exercer une ou plusieurs missions de service public, le politique s’est cru dégagé de toute responsabilité à l’égard du contenu de cette mission, oubliant trop souvent que transférer une mission ne veut pas dire transférer la responsabilité politique.

C’est pourquoi nos concitoyens sont perdus : ils ne savent plus où se situe réellement le centre de décision et finissent par douter de l’État et de sa classe politique. Ce sentiment est renforcé par le fait que ces sociétés, selon un mécanisme aisément compréhensible, s’enferment trop souvent dans une logique gestionnaire, commerciale et concurrentielle, en oubliant le service public qu’elles ont la charge d’assurer.

L’État, aujourd’hui contraint par l’histoire de mettre la mission du service public postal en concurrence, a la responsabilité de définir précisément les besoins et les missions qui s’imposeront à ce nouvel organisme, et d’établir un cahier des charges précis afin de pouvoir choisir l’organisme qui sera à même d’exploiter au meilleur coût le service public postal. C’est précisément là que le bât blesse : si le projet de loi énumère effectivement les missions du service public postal, il ne détaille pas suffisamment les conditions d’exploitation de ce dernier.

Je tiens à remercier le rapporteur de ses engagements, de sa conviction et de sa sincérité dans ce débat, même si nous ne partageons pas toujours ses positions.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Plancade

M. Jean-Pierre Plancade. Parmi les amendements déposés par le groupe du RDSE, un seul a été retenu en commission. Nous continuons donc à penser que, en l’état, ce texte est insuffisant et n’offre pas toutes les garanties nécessaires. Notre groupe souhaite que le contenu de la mission de service public soit plus précisément défini et que les conditions d’exploitation de ce service soient nettement plus détaillées et formalisées qu’elles ne le sont actuellement. Nous allons donc suivre avec grand d’intérêt l’évolution que connaîtra ce texte au cours du débat.

Applaudissements sur les travées du RDSE - M. Jacques Blanc applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

Demain mardi, comme tous les jours ouvrés, près de 2 millions de Français franchiront le seuil de l’un des 17 000 points de contact du réseau postal.

Demain mardi, 100 000 facteurs distribueront le courrier dans 30 millions de boîtes aux lettres. Ils apporteront bien sûr des lettres ou des colis, mais aussi une présence humaine, un sourire ou un regard à des gens qui en manquent, et souvent dans des lieux de profonde solitude.

C’est dire que, dans notre inconscient collectif, au-delà des services qu’elle rend, La Poste incarne sans doute la conception que nous nous faisons du service public à la française.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

Puisque le sujet est d’actualité, il se peut que le service postal, notamment à travers le service universel et sa mission d’aménagement du territoire, apporte une réponse concrète aux deux grandes passions françaises que sont l’égalité et son frère jumeau : l’universalisme.

Le lien affectif et objectif qui unit les Français au service postal est bien réel. Dès lors, notre mandat ne consiste certainement pas à jeter aux orties ce socle de services et de valeurs que représente La Poste, …

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

… mais au contraire à le pérenniser et à le renforcer, et cela plus encore dans le monde de demain, fort différent de celui d’hier.

Hier, abritée derrière le monopole, La Poste agissait dans un univers centré sur la distribution d’objets matériels. Dans le monde de demain, celui de l’ouverture à la concurrence, de la révolution numérique et de la dématérialisation, La Poste distribuera toujours moins de courrier et toujours plus de courriels. Chaque jour, mes chers collègues, 150 milliards de courriels sont échangés à travers le monde, et la crise contribue paradoxalement à accélérer un peu plus cette mutation.

La modernisation de La Poste n’est donc pas une option : c’est une nécessité. Pour que La Poste puisse lutter à armes égales avec ses principaux concurrents et offrir un service de grande qualité à nos concitoyens, qui sont aussi ses clients, cette nécessité doit devenir une grande ambition. Celle-ci suppose de donner à La Poste suffisamment de moyens pour rénover son réseau et ses bureaux de poste, ainsi que pour industrialiser ses outils et ses systèmes de traitement du courrier.

Aujourd’hui, deux questions se posent principalement.

Premièrement, fallait-il un changement de statut ? Je le pense. Les autres solutions constituaient de fausses pistes, qu’il s’agisse d’alourdir encore la dette de l’établissement public, alors qu’il supporte déjà un endettement deux fois supérieur à tous les ratios prudentiels classiques…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

C’est un mauvais critère pour un service public !

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

… ou de capitaliser ses filiales, au risque de faire imploser l’unité du groupe et de l’affaiblir, ou encore d’accorder des subventions puisque celles-ci sont interdites par Bruxelles au titre de la réglementation sur les aides d’État.

Pour renforcer les capitaux propres de La Poste, la modification du statut était donc inévitable.

Deuxièmement, la modernisation de La Poste est-elle compatible avec une très haute exigence pour le service public postal ?

Je le crois, à condition que La Poste ne soit pas privatisée. À cet égard, je me réjouis du verrou posé par la commission, et je félicite son président, M. Jean-Paul Emorine, ainsi que son rapporteur, M. Pierre Hérisson. Nous pourrions d’ailleurs en poser un second, sous la forme d’une référence à la jurisprudence de 2006 du Conseil constitutionnel, qui interdit a contrario de privatiser un service public de caractère national.

Une autre garantie consisterait à financer les missions de service public à la juste hauteur de ce qu’elles coûtent. Sur ce point également, le travail en commission a permis de progresser. Tous les élus locaux attendent désormais un robuste processus de financement de la présence territoriale. Celui-ci passe par la réaffirmation du principe de compensation à l’euro près, par une évaluation annuelle effectuée par une autorité indépendante et, enfin, par une actualisation du financement de la compensation en fonction des résultats de l’évaluation. Ainsi, les choses seraient claires, et la présence postale sur le territoire s’en trouverait renforcée.

Le statu quo est intenable, car il conduirait à un déclin inévitable, comme l’a souligné Pierre Hérisson. À l’opposé, nous nous renierions en voulant copier des modèles qui se contentent d’une ouverture à la concurrence. La voie française du service public me semble passer par la combinaison d’une modernisation audacieuse et d’une forte exigence pour le service public postal. Merci de nous aider à suivre ce chemin, monsieur le ministre.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ Union centriste, ainsi que sur le banc des commissions.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Danglot.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Danglot

Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, 2 300 000 citoyens se sont déplacés dans toute la France pour se faire entendre du Gouvernement et du Président de la République ; 2 300 000 citoyens ont exprimé leur refus de voir ce projet de loi examiné en urgence et au pas de charge par le Parlement ; 2 300 000 citoyens ont exigé que l’avenir du service public postal fasse l’objet d’un référendum institutionnel !

Pourtant, nous sommes réunis, en ce 2 novembre – quel symbole ! –, pour engager le processus mortifère de transformation de l’entreprise publique en société anonyme. Utiliser les élus du peuple contre le peuple, voilà un bel usage de la démocratie parlementaire !

Le Gouvernement et la majorité n’ont pas trouvé de mots assez durs pour combattre l’organisation d’une votation citoyenne sur ce projet : « pantalonnade », « tromperie », « simulacre de démocratie »… Bref, une honte pour la République, rappelant « les plus belles heures de l’Union soviétique », selon M. Estrosi.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat s’esclaffe

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Danglot

M. Sarkozy, lui, pour conduire sa politique, multiplie les sondages établis sur la base d’échantillons de 1 000 personnes ! Est-ce que le peuple que le peuple peut se résumer à 1 000 personnes ?

La question était tronquée, nous dit-on, puisqu’elle portait sur la privatisation et non sur le changement de statut. Notre éminent rapporteur a d’ailleurs fait savoir à cette occasion que lui-même n’était pas partisan de la privatisation de La Poste, mais que, en l’occurrence, il n’en était nullement question.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Danglot

Sur tous les tons, les ministres ont fait savoir dans les médias qu’il ne s’agissait pas de privatisation. Quiconque prétendrait le contraire serait un menteur et un manipulateur, y compris les élus locaux qui ont soutenu cette votation. Celle-ci n’a peut-être aucune valeur à vos yeux, mais elle en a suffisamment aux yeux des préfets pour traîner les maires devant les tribunaux !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Danglot

Avez-vous donc si peur de l’expression citoyenne pour que vous vous sentiez ainsi obligés d’afficher un tel mépris ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Danglot

Monsieur Maurey, vous avez insulté non seulement l’opposition sénatoriale, mais aussi les nombreux élus qui ont participé à cette votation citoyenne aux côtés de leurs administrés. Vous préférez faire comme si personne dans ce pays ne se souvenait de ces entreprises qui, d’abord transformées en société anonyme, ont été ensuite privatisées : GDF, France Télécom et tant d’autres.

Puisqu’il le faut, je vais donc entreprendre un bref rappel historique, comme d’autres de mes collègues le feront ou l’ont déjà fait.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Danglot

Nous verrons bien alors qui se rend coupable de manipulations et de mensonges.

Ainsi, Jacques Chirac affirmait le 19 mai 2004 : « EDF et GDF sont de grands services publics, ce qui signifie qu’ils ne seront pas privatisés. »

Sarkozy, alors ministre de l’économie, le 6 avril 2004, s’exprimait en ces termes : « Je redis qu’EDF et GDF ne seront pas privatisés. »

François Fillon, actuel Premier ministre, s’agaçait le 11 juin 1996 : « Devrais-je le répéter encore et encore, le caractère public de France Télécom est préservé dès lors que l’État détient plus de la moitié du capital social. »

Je ne saurais omettre, dans ce florilège, les propos que vous teniez, monsieur le président du Sénat, en tant que rapporteur de la loi sur France Télécom : le 10 juin 1996, vous nous exhortiez « à ne pas affirmer qu’il s’agit d’une loi de privatisation ». Aujourd’hui, l’État ne détient plus que 26 % du capital de France Télécom !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Danglot

Vous l’aurez compris, on pourrait en sourire s’il ne s’agissait pas de sujets aussi graves. Les accusations de malhonnêteté formulées par la majorité sur la démarche entreprise par le comité national de défense de La Poste sont, au mieux, mal placées, au pis, scandaleuses.

Nous maintenons donc qu’il s’agit d’un projet de loi de privatisation ou, s’il faut jouer sur les mots, d’un projet de loi qui appelle la privatisation à plus ou moins long terme de La Poste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Danglot

Vous vous en défendez en arguant que le capital sera détenu par l’État et des personnes morales de droit public. Vous nous dites que par « personnes morales de droit public », vous entendez la Caisse des dépôts et consignations. Mais quand des amendements déposés en commission visent à dire les choses aussi clairement, vous incitez leurs auteurs à les retirer.

Comment donc ne pas croire qu’une fois le verrou symbolique du statut envolé, vous n’allez pas très vite enclencher l’étape suivante en cédant une partie du capital au privé ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Danglot

Les faits sont têtus ; nous pensons donc que ce projet de loi n’est qu’un prélude à la privatisation de La Poste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Danglot

Le rapport remis par la commission Ailleret en décembre 2008 a servi de base à la rédaction de ce projet de loi. Je rappelle que, à cette époque, le président de La Poste appelait de ses vœux une introduction en bourse pure et simple de l’opérateur public.

De façon intéressante, l’étude d’impact fait d’ailleurs écho à cette intention première. Il y est en effet affirmé qu’un « EPIC n’a pas d’actionnariat » et que « les investisseurs qui lui apporteraient des fonds propres n’auraient droit ni à participer au conseil d’administration ni à versement de bénéfices ».

Là est bien le problème : la possibilité pour les investisseurs de pouvoir prétendre à un retour sur investissement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Danglot

Il faut dire que La Poste a des arguments : voilà une entreprise, malgré tout ce que nous pouvons entendre, qui a vu sa rentabilité augmenter de 10 % entre 2002 et 2007.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Danglot

Il s’agit d’un argument de taille pour changer le capital de La Poste : que la Caisse des dépôts puisse en tirer des dividendes. Je vise la Caisse des dépôts, car l’État, selon la législation actuelle, en a déjà le droit.

Malheureusement, la qualité publique d’un actionnaire n’induit pas toujours une action désintéressée. Mais, pour justifier le changement de statut d’un grand service public national, cet argument est irrecevable.

Officiellement, le changement de statut part d’un constat simple : La Poste a besoin d’être modernisée pour faire face à la concurrence organisée par les directives européennes et transposées en droit interne par ce projet de loi. Cette modernisation oblige l’entreprise à se doter de nouveaux fonds propres pour financer les investissements à réaliser. L’État et la Caisse des dépôts sont donc appelés à souscrire à une augmentation de capital à hauteur, respectivement, de 1, 2 milliard d’euros et de 1, 5 milliard d’euros.

Ainsi, vous nous soutenez, au regard de la législation européenne, que, pour moderniser La Poste, l’État ne pourra lui apporter son aide que si l’opérateur public change de statut. Pourtant, vous oubliez que l’Europe ne préjuge en rien le régime de propriété et que peu importe la forme juridique du destinataire, toute aide d’État étant simplement prohibée.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Danglot

M. Jean-Claude Danglot. À cet égard, le point 39 de la directive de 1998 est particulièrement clair puisqu’il dispose que « cette directive n’entache pas le respect de la réglementation relative aux aides d’État ». Il s’agit donc d’un mauvais argument.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG. – M. Jean Desessard applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Danglot

À l’inverse, le rôle des services publics est reconnu par les traités, qui laissent aux États membres le soin de les définir et de prévoir leur financement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Danglot

Je ne crois pas que la France, à aucun moment, ait fait l’objet de quelconques poursuites pour la compensation par l’État des charges de service public supportées par l’opérateur public.

Une véritable modernisation aurait pu passer par une meilleure définition des obligations de service public dans le sens de leur extension et, par conséquent, d’une meilleure compensation par l’État. Ce n’est qu’un exemple qui montre que d’autres solutions existaient.

Si vous souhaitez ouvrir le capital de La Poste, c’est donc bien dans une logique de privatisation de l’entreprise publique.

Certes, nous vous concédons que les politiques de libéralisation et de déréglementation menées par l’Union européenne et les gouvernements encouragent la perte de maîtrise publique. Les institutions européennes n’ont cessé, en effet, de prôner la concurrence libre et non faussée, contraignant les opérateurs à se lancer comme des prédateurs économiques dans de vastes opérations de fusion-acquisition à l’international.

Rappelons, par exemple, que cette course à l’international s’est soldée chez France Télécom par une dette abyssale atteignant 70 milliards en 2000.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Danglot

Tout cela pour quoi ? Ces entreprises concurrentielles rendent-elles aujourd’hui un meilleur service aux usagers ? Cette pseudo-modernisation est-elle bien utile ?

Partout en Europe, les services postaux ont été dégradés ainsi que les conditions de travail des agents du service public. Je vous parlais il y a quelques instants de France Télécom : la situation de cette entreprise devrait nous inciter à la prudence concernant l’avenir de La Poste.

Debut de section - PermalienPhoto de Martial Bourquin

Certains ont eu droit à deux minutes supplémentaires, monsieur le président !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

M. Jean Desessard. Si tu tapes sur l’opposition, tu auras droit à ces deux minutes !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Danglot

En Europe, rien que dans le domaine postal, 300 000 emplois ont été supprimés. En Allemagne, en Suède, les bureaux de poste ont fermé. La Grande-Bretagne, qui s’était séparée de la filiale bancaire, a été obligée de la racheter à prix d’or.

En France, depuis 2004, La Poste a supprimé 40 000 emplois au nom de la modernité. En revanche, le prix des services ne cesse d’augmenter.

Cela ne vous suffit donc pas ? Aimer La Poste, ce n’est donc pas la privatiser, c’est conforter ses missions de service public !

Vous justifiez également ce besoin de fonds propres par la dette supportée par l’entreprise publique, qui atteint les 6 milliards d’euros. Je souligne à cette occasion l’amalgame qui est régulièrement fait entre dette et déficit. Premièrement, l’entreprise n’est pas déficitaire en raison de la dette.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Mon cher collègue, je vous demande instamment de conclure.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Danglot

Je conclus, monsieur le président.

Il faut s’interroger non seulement sur l’origine de cette dette, mais également sur son utilité. Cette dette, rappelons-le, est en grande partie le fruit de la non-compensation par l’État des obligations de service public de La Poste. En outre, celle-ci a servi à financer la modernisation de l’entreprise et de ses bureaux.

Pour conclure mon intervention, monsieur le président, je formulerai quelques rapides propositions..)

Nous ne voulons ni changement de statut ni statu quo. Notre logique est différente. À votre exigence de rentabilité maximum, nous opposons les complémentarités et les coopérations comme base du service public et de la cohésion nationale.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Monsieur Danglot, vous n’allez guère laisser de temps de parole aux autres orateurs de votre groupe !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Danglot

Je conclus, monsieur le président !

Mettre en œuvre des réseaux transeuropéens, cela a du sens. En revanche, organiser une guerre fratricide entre les services publics nationaux n’aboutit, à l’inverse, qu’à un gâchis humain et financier épouvantable.

À l’échelon national, nous opposons à votre projet le chantier de création d’un pôle public financier s’articulant autour de la Banque de France, de La Poste, de la Caisse des dépôts et consignations et d’OSÉO.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste. – M. Robert Tropeano applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Monsieur Danglot, je vous signale que vous avez dépassé votre temps de parole de près de trois minutes.

La parole est à M. Jackie Pierre.

Debut de section - PermalienPhoto de Jackie Pierre

Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, le projet de loi qui nous est présenté aujourd’hui est imprégné des grands principes que le rapport de la commission Ailleret pour le développement de la Poste a consacrés.

Je cite ce dernier : « L’avenir de La Poste passe par un confortement de son identité profonde et de l’unité du groupe cimenté par le réseau postal. Elle doit demeurer une entité publique, ancrée sur des services publics et universels de qualité, mais avec une adaptation de son modèle économique cohérente avec son ambition de croissance en France et en Europe, de modernisation, de compétitivité et de progrès social. »

Certes, La Poste n’est pas une entreprise publique comme les autres ; elle est avant tout le symbole du service public de proximité. Ce symbole, illustré par la vie d’un bureau de poste d’une commune rurale dans le film Bienvenue chez les Ch’tis, a sans aucun doute contribué au formidable succès que ce dernier a rencontré.

En fait, nous sommes autant attachés au passage régulier du facteur qu’au bureau de poste proprement dit. Le passage du facteur six jours sur sept et la présence sur l’ensemble du territoire à travers un réseau de plus de 17 000 points de contact constituent un lien social indiscutable, assurant à La Poste une notoriété et une image auprès de l’ensemble des Français.

Si La Poste n’est pas une entreprise publique comme les autres, elle n’en est pas moins soumise à l’obligation de faire évoluer ses structures et ses métiers pour garantir la qualité de ses services dans la durée ainsi que l’emploi de ses personnels.

Parce que le 1er janvier 2011 le marché postal européen n’aura plus de frontières, La Poste va devoir fournir un effort considérable pour se hisser au niveau de ses grands concurrents, allemand ou néerlandais notamment, qui ont entamé de longue date leur métamorphose.

En Europe, en effet, seuls deux pays n’ont pas transformé le statut de leur poste : le Luxembourg et la France.

L’ouverture totale à la concurrence le 1er janvier 2011 du marché du courrier, sur lequel La Poste bénéficie aujourd’hui d’une situation de monopole, est un vrai défi qu’il va falloir relever. Le colis express, la banque postale et la diversification des services courrier recèlent d’importants potentiels de croissance, qui supposent néanmoins que l’entreprise investisse des montants supérieurs à sa capacité d’autofinancement.

La Poste a donc besoin d’argent pour réaliser ces investissements indispensables et le changement de statut est tout simplement juridiquement obligatoire pour faire entrer la Caisse des dépôts et consignations dans son capital.

Le président de La Poste réclame donc légitimement un traitement identique à l’ensemble des postes européennes, qui ont un statut de société anonyme, et ce au nom de l’égalité des chances dans l’ouverture à la concurrence.

Le changement de statut en société anonyme – à capitaux uniquement publics – ne modifiera en rien la situation des personnels, fonctionnaires et contractuels, qui conserveront leur statut de fonctionnaires de l’État, ainsi que les garanties d’emploi et de retraite qui y sont associées. Le Gouvernement s’y est engagé et le texte est clair sur ce point, sans aucune ambiguïté, contrairement à ce que certains voudraient faire croire.

Mes collègues du groupe UMP et moi-même sommes convaincus de l’impérieuse nécessité de cette réforme, qui va permettre à La Poste d’éviter un déclin et un démantèlement. Ce nouveau contexte, dicté par les obligations européennes, est en fait une formidable opportunité, qui va redonner un élan et un dynamisme inespérés à l’un des plus anciens services publics de notre pays.

L’annonce d’un changement de statut de La Poste a suscité de nombreuses et légitimes inquiétudes. Il apparaît néanmoins que les garanties apportées par le Gouvernement y répondent pleinement.

J’ai reçu de nombreux courriers, par lesquels leurs auteurs s’expriment « contre la privatisation de La Poste » et me demandent de voter contre ce projet de loi parce qu’ils « sont persuadés de mon attachement à la défense et au développement des services publics ». Or c’est précisément la force de cet attachement qui me fera voter pour la réforme engagée.

Debut de section - PermalienPhoto de Jackie Pierre

Tout le monde sait que l’activité du courrier diminue depuis dix ans ; les courriels et Internet font chuter chaque jour un peu plus le chiffre d’affaires de l’activité courrier de La Poste. Celle-ci doit réagir vigoureusement, notamment par la mise en œuvre d’un projet de développement ambitieux. Tel est l’objectif du projet de loi que nous discutons aujourd’hui.

La Poste a donc besoin d’investir dans de nouveaux centres de tri, de moderniser le service Chronopost, de se mettre à l’heure du courrier électronique, de diversifier ses missions, notamment dans le domaine logistique, et de développer ses services de proximité, en particulier dans les territoires ruraux. Elle doit surtout ne pas se faire « manger », le 1er janvier 2011, par les gros opérateurs étrangers qui bénéficient d’une position dominante et qui mènent une stratégie de croissance mondiale.

La présence postale territoriale en zone rurale reste une préoccupation majeure, que je partage largement. Dans les zones de montagne ou dans les zones à faible densité démographique, la présence postale est non seulement un vecteur de cohésion sociale, mais également un facteur essentiel d’attractivité et d’ancrage de la population du territoire.

Dans mon département, les Vosges, 92, 6 % de la population est à moins de cinq kilomètres d’un point de contact de La Poste, c'est-à-dire à moins de vingt minutes de trajet automobile, comme l’exige la loi relative au développement des territoires ruraux. C’est tout à fait acceptable pour un département de montagne.

Mais sait-on que 1 522 bureaux de poste sont ouverts moins de trente minutes par jour et que 1 080 sont ouverts entre trente minutes et une heure ? Prévoyante et prudente, La Poste a déjà entrepris une transformation progressive de ses bureaux de poste ruraux très peu fréquentés et aux horaires d’ouverture réduits pour s’adapter à la demande réelle des usagers et à leurs nouveaux besoins, mais également pour limiter ses coûts.

Quand on déplore la fermeture d’un bureau de poste, on oublie de préciser que, parallèlement, un ou plusieurs points poste ont été ouverts afin de maintenir à l’identique la présence postale dans les territoires ruraux. Il s’agit d’agences postales communales hébergées en mairie ou de relais poste commerçant implantés dans les commerces des villages.

La grande différence entre les bureaux traditionnels qui ont été fermés et les nouveaux points poste est que les premiers étaient largement déficitaires alors que les seconds sont aujourd’hui bénéficiaires, notamment en raison des plages horaires d’ouverture beaucoup plus larges qui correspondent mieux aux nouveaux besoins de la population.

Les enquêtes réalisées par TNS Sofres pour La Poste en juin 2006 attestent des niveaux de satisfaction très élevés sur les deux nouvelles formes de présence postale.

Debut de section - PermalienPhoto de Jackie Pierre

Cela ne signifie pas que des améliorations ne soient pas attendues. Il faut sans doute envisager d’augmenter le nombre des opérations prises en charge par les agences postales et les relais poste et d’assurer davantage de confidentialité et de sécurité lors des retraits d’argent. Pour cela, il sera probablement nécessaire de compléter la formation des personnels en contact avec le public, sans oublier d’améliorer l’équipement des relais poste. Ce sont les objectifs poursuivis par La Poste.

Le relais poste commerçant a aussi le grand avantage de maintenir en activité le dernier commerce présent dans les petites communes rurales. Ce que nous souhaitons, c’est que les relais poste se multiplient en fonction des besoins de la population.

La Poste a aussi pour mission de garantir l’accessibilité bancaire. L’État a confié à La Poste des missions financières dans les zones les plus reculées du territoire, non desservies par les banques privées. On peut rappeler, pour mémoire, le rôle tenu par La Poste dans la création des mandats et de l’épargne populaire à la fin du xixe siècle. Il s’agit d’une mission séculaire, qui a été un vecteur de promotion et d’élargissement de l’accès aux services bancaires de tous les citoyens : elle doit être garantie.

La modernisation de La Poste est un impératif qui a été trop longtemps différé. Il faut le dire clairement : sans réforme, La Poste est condamnée à voir dépérir son fabuleux réseau de proximité, condamnée à ne plus jouer de rôle majeur en Europe et à être, en France, sous perfusion d’aides publiques. Elle ne serait donc plus, dans ce cas, en mesure d’offrir un avenir aux postiers ni d’assurer ses missions de service public ni d’apporter à ses clients les services qu’ils attendent. Est-ce cela que l’on veut ? Je me tourne vers mes collègues socialistes et communistes : est-ce cela que vous voulez ? Il faut arrêter de voir le diable là où il n’est pas !

Les inquiétudes sur la pérennité des missions de service public de La Poste sont totalement infondées.

Exclamations sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jackie Pierre

La commission a aussi confirmé le caractère entièrement public du capital de La Poste. Elle a en outre amélioré le financement du réseau de points de contact en portant de 85 % à 100 % l’abattement dont bénéficie La Poste sur ses bases d’imposition locale, accroissement dont le coût ne sera pas supporté par les collectivités territoriales. La commission a ainsi voulu assurer la compensation de la mission d’aménagement du territoire qui est assignée à La Poste.

Avec mes collègues du groupe UMP, nous aimerions, monsieur le ministre, que vous vous engagiez sur ce point devant notre Haute Assemblée.

La commission a enfin apporté des garanties sur le maintien de la présence postale territoriale à travers un réseau comptant au moins 17 000 points de contact, équitablement répartis sur le territoire. Je me permets d’insister sur ce point, car la présence postale doit être maintenue à l’identique dans les zones rurales. Monsieur le ministre, nous souhaitons que vous vous déclariez favorable à l’inscription de ces 17 000 points de contact dans le projet de loi.

Le réseau de La Poste est sans nul doute unique en Europe. Le service public français de La Poste est une richesse. Il possède deux atouts principaux sur lesquels il doit s’appuyer pour renforcer et élargir son potentiel : ses réseaux et son personnel. Il faut donc en assurer l’avenir et garantir, c’est indispensable, le financement de ses missions dans la durée.

La poste française, au quatrième rang des postes européennes en 2000, a réussi aujourd’hui à se hisser à la deuxième place, derrière la poste allemande.

Debut de section - PermalienPhoto de Jackie Pierre

Que pouvons-nous souhaiter sinon qu’elle devienne la première poste européenne ?

Développer La Poste, c’est financer le service public postal. Il n’est pas envisageable, et encore moins responsable de refuser d’accompagner un grand service public dans sa modernisation.

Messieurs les ministres, pour toutes ces raisons, l’ensemble du groupe UMP apportera son total soutien à ce projet de loi, enrichi des amendements de la commission de l’économie.

Permettez-moi en conclusion d’évoquer les travaux de la commission, auxquels j’ai participé. Très constructifs, ils ont permis de compléter, de préciser et d’améliorer le projet de loi du Gouvernement. Je tiens personnellement à rendre hommage au rapporteur, mon collègue et ami Pierre Hérisson, pour ses grandes compétences et l’important travail qu’il a réalisé.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ Union centriste.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Dubois

Monsieur le président, messieurs les ministres, monsieur le président de la commission de l’économie, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, à en croire certains, le facteur et sa voiture jaune, présents six jours sur sept dans le moindre petit village de France, distribuant le courrier jusque dans la moindre ferme isolée, symboles s’il en est du service public à la française, seraient menacés.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Dubois

Les mêmes prétendent que faire évoluer le statut juridique du groupe La Poste, d’établissement public à caractère industriel et commercial en société anonyme à fonds exclusivement publics, signerait la fin de ce grand service public.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Dubois

Sachez que nous voulons, nous aussi, que La Poste reste un grand service public proche de ses clients et ancrée dans les territoires.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Dubois

Volontairement, mon cher collègue, car les citoyens sont aussi des clients.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Parlez-en à ceux qui ont pris part au référendum.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Dubois

Nous considérons également que La Poste, qui a déjà beaucoup changé depuis dix ans, doit, face à l’évolution de ces marchés, poursuivre sa modernisation. Il faut donc lui en donner les moyens.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Vous direz cela à vos électeurs lorsque La Poste aura été privatisée !

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Dubois

Ces deux enjeux stratégiques sont-ils antinomiques ou, au contraire, complémentaires ?

Sourires sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Dubois

Y a-t-il aujourd’hui une autre solution viable à terme dans le concert de la concurrence européenne ?

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

Et Michel Teston l’a très bien dit tout à l’heure !

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Dubois

C’est toute la question ! Nous le savons tous, l’environnement de La Poste a profondément évolué depuis dix ans. Il a changé avec l’arrivée de la concurrence, qui sera totale dès le 1er janvier 2011, avec l’émergence de géants européens comme l’allemand DHL ou le néerlandais TNT sur certains segments du marché, en particulier le colis et l’express. Il a également changé avec le développement d’Internet, qui a contribué à l’affaiblissement du volume du courrier traité : le rythme de diminution de celui-ci est passé de 1 % en 2007 à 6 % en 2009 ; certains spécialistes s’accordent pour dire que, d’ici à 2015, le volume du courrier pourrait avoir baissé de 30 %.

La Poste a déjà apporté des réponses à ces deux évolutions majeures. Elle a diversifié ses activités avec, entre autres, la création de la Banque Postale, mais elle a aussi et surtout modernisé son activité courrier et su lancer, en 2004, le programme ambitieux Cap Qualité Courrier.

Toutefois, pour résister à la concurrence qui s’annonce, La Poste doit achever cette évolution industrielle et commerciale afin de se battre à armes égales avec des géants européens constitués depuis quelque temps déjà tout en gardant son entité globale de groupe, j’insiste sur ce point.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Dubois

Il lui faut donc trouver des financements, à hauteur de 3 milliards d’euros.

Comment l’État peut-il apporter son soutien financier sans être en contradiction avec le droit européen ? Il apparaît que le changement de statut d’établissement public en société anonyme est le seul moyen régulier d’y parvenir, d’autant que la Caisse des dépôts et consignations ne peut doter un établissement public en capital.

La levée de ces fonds, nous le savons tous, est indispensable pour permettre à La Poste de finaliser son programme de modernisation. C’est pourquoi le groupe Union centriste ne souhaite pas réduire le débat au seul changement de statut de La Poste.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Dubois

Nous serons particulièrement vigilants sur la préservation de la qualité du service public et la présence territoriale de La Poste.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Dubois

Le groupe de l’Union centriste se félicite d’ailleurs d’avoir pu garantir, en commission, la présence postale dans nos territoires en gravant dans le marbre le nombre minimum de 17 000 points de contact.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Dubois

Nous souhaitons aller encore plus loin, en proposant de renforcer l’irrigation postale de nos territoires ruraux.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Dubois

Encore faut-il qu’elles aient des clients !

Ce sont non seulement les exigences de maillage territorial, mais aussi ses modalités d’exécution qui doivent être garanties. C’est pourquoi nous proposons de renforcer la transparence dans la détermination du surcoût lié à cette mission en la confiant à l’ARCEP.

Bref, sur ce sujet et, plus généralement, tout au long du débat sur les missions de service public, le groupe Union centriste entend défendre des positions constructives qui vont dans le sens d’une garantie des missions de service public.

La Poste est un service universel, dont la qualité doit être maintenue et garantie financièrement par l’État, et ce en toute transparence. Notre exigence va vers un contrôle accru de la tarification des produits relevant du service universel pour que La Poste reste financièrement accessible à tous et qu’elle ne soit pas tentée d’abuser de la position dominante qui sera la sienne sur ce segment. Nous souhaitons donc préciser et améliorer la rédaction du présent projet de loi afin de donner l’ARCEP les moyens de remplir pleinement sa mission de régulation.

Le soutien que nous apportons à ce projet de loi vise non seulement à préserver l’existant, mais aussi à renforcer et à garantir le service public postal afin de répondre à l’ensemble des besoins et attentes de la population en tout lieu du territoire, tout en donnant à notre première entreprise nationale les moyens de réaliser ses ambitions économiques.

Alors oui, en tenant compte de modifications apportées à ce texte, la transformation de La Poste en société anonyme à fonds exclusivement publics, qui lui permettra de terminer sa modernisation, peut être complémentaire de ses missions de service public et de son véritable ancrage territorial.

Applaudissements sur les travées de l ’ Union centriste et de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Mirassou

Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, M. Michel Teston a fort bien mis au jour les chausse-trappes du présent projet de loi en ce qui concerne les aspects réglementaire et financier. Je m’efforcerai pour ma part de traduire devant notre assemblée le sentiment de l’opinion publique sur ce sujet.

Le débat sur le devenir de La Poste a été lancé voilà maintenant un an, à l’occasion de la publication du rapport Ailleret. Depuis, ce débat a mobilisé et continue à mobiliser beaucoup d’énergie et, le moins que l’on puisse dire, c’est que les lignes n’ont pas bougé, bien au contraire.

Certains ont eu la tentation d’en minimiser les enjeux, en expliquant qu’il se résumait à une querelle entre les « modernes », regroupant ceux qui sont favorables au changement de statut de La Poste, et les « archaïques », attachés au maintien du statut de droit public de cet établissement public à caractère industriel et commercial.

Notons au passage que les prétendus « archaïques » doivent être nombreux dans ce pays puisque pas moins de 2, 3 millions de Françaises et de Français se sont clairement exprimés, lors de la votation citoyenne, en faveur du maintien du statut actuel de La Poste. Et ce n’est pas fini !

L’intérêt manifesté à cette occasion par la population aurait dû légitimement, monsieur le ministre, inciter le Gouvernement à organiser une consultation nationale par le biais d’un référendum, du reste réclamé aujourd’hui par beaucoup d’entre nous, pour évaluer en grandeur réelle le sentiment de nos concitoyens à ce sujet.

Manifestement, il n’est pas dans les intentions du Gouvernement de jouer la carte de la démocratie alors que, dans le même temps, le ministre de l’immigration n’hésite pas à engager un grand débat national dans un registre, il faut bien le dire, plus que « douteux » et chargé d’arrière-pensées, celui de l’identité nationale.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Courteau

Et à la veille des élections régionales ! On ne fait pas mieux en matière de dignité républicaine !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Mirassou

Au total, et malgré la tentative qui est la vôtre de travestir la nature du clivage qui va immanquablement se faire jour ici, il y aura bien – ce n’est pas une surprise – une nette ligne de partage entre les positions de la gauche et les vôtres. Elle se manifestera aussi sûrement qu’apparaissent aux yeux des Françaises et des Français les véritables enjeux du projet de loi que vous nous soumettez aujourd’hui.

Nos concitoyens sont d’ailleurs de plus en plus nombreux à redouter que le changement de statut de La Poste ne constitue la première étape de sa privatisation.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Mirassou

Pourtant, le Gouvernement ne cesse de répéter que ce texte n’a rien à voir avec un tel objectif et il essaie de nous faire croire que ses intentions se limitent à un simple ajustement technique. Vous comprendrez que nous ne pouvons pas nous cantonner à une lecture crédule des textes que vous nous soumettez, car les faits ne plaident pas en votre faveur !

Souvenons-nous des promesses faites le 15 juin 2004 par Nicolas Sarkozy, alors ministre de l’économie et des finances, à l’Assemblée nationale : « Je l’affirme parce que c’est un engagement du Gouvernement : EDF et GDF ne seront pas privatisés. [...] Le Président de la République l’a rappelé solennellement lors du conseil des ministres au cours duquel fut adopté le projet. » §

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Mirassou

On sait où nous en sommes cinq ans plus tard !

Ne soyez donc pas surpris, messieurs les membres du Gouvernement, si nous faisons peu de cas de vos promesses en ce qui concerne la pérennité des institutions publiques transformées en sociétés anonymes.

Nous sommes, quant à nous, fermement opposés à ce qui est au cœur du présent projet de loi : le changement de statut de La Poste en société anonyme, qui tournerait alors définitivement le dos à une institution ayant franchi, vous l’avez dit, monsieur le rapporteur, les siècles et les régimes, et qui est considérée, à juste titre, comme l’emblème du service public « à la française ».

L’EPIC garantit jusqu’à présent un service qui rythme le fonctionnement de notre société grâce, notamment, à la distribution du courrier six jours sur sept et à j+1.

Malgré tous vos efforts, vous n’arriverez pas à nous faire croire qu’une société anonyme, fût-elle transitoirement à capitaux publics, est programmée pour répondre à cette exigence, en assurant par ailleurs l’aménagement du territoire et en tissant du lien social.

Une fois déchue de son statut d’EPIC, La Poste serait à la merci des pulsions de « réformateurs zélés » – il y en a quelques-uns ici. Le caractère public de cette entreprise ne serait alors plus qu’un simulacre à l’espérance de vie limitée.

Pour autant, il faut bien le constater, La Poste se porte mal aujourd’hui : le recours aux contractuels, le non-remplacement des départs à la retraite ont contribué à la perte de 7 400 emplois. Le diagnostic se voit donc ainsi, malheureusement, confirmé.

Mais nous refusons catégoriquement pour La Poste la perspective d’une entreprise recherchant, à toute force, la rentabilité au détriment de sa mission essentielle, celle qui garantit l’intérêt général et l’égalité de traitement pour tous ses usagers, quel que soit leur statut social ou leur situation géographique.

Qu’il me soit par ailleurs permis de relever que le diagnostic que j’évoquais tout à l’heure résulte d’un désengagement coupable de l’État, qui s’exerce du reste dans bien des registres.

À coup de révision générale des politiques publiques et de refontes budgétaires, on saccage depuis quelques années le pacte républicain, et nous subissons de plein fouet l’avalanche des fermetures de centres de perception, de brigades de gendarmerie et autres tribunaux.

L’ancrage territorial de l’État, pilier de la péréquation et de la solidarité nationale, nous le voulons quant à nous dynamisant pour la collectivité, protecteur et garant des institutions construites au fil de l’histoire de notre République, singulièrement à travers le programme du Conseil national de la Résistance.

Le service universel postal, l’aménagement du territoire, le transport et la distribution de la presse, l’accessibilité bancaire sont autant de services publics et d’amortisseurs sociaux devant être assurés par des acteurs publics, régis par des règles de droit public.

Vos protestations de bonne foi ne peuvent pas nous convaincre. Rappelons que le groupe majoritaire, lors de l’examen du texte en commission, a voté l’amendement proposé par Pierre Hérisson dans lequel il est précisé que « le capital de la société est détenu par l’État et par d’autres personnes morales de droit public ». Cet amendement décrédibilise vos affirmations, monsieur le ministre, puisqu’il inscrit dans le texte ce que vous affirmiez y lire depuis le début !

Soyons clairs : le groupe socialiste a parfaitement conscience de la nécessite d’aider La Poste à mettre toutes les chances de son côté pour lui permettre de remplir ses tâches de service public et de franchir les difficultés qu’elle rencontre, à plus forte raison dans la perspective de l’ouverture du marché à la concurrence. Mais nous considérons comme une dérive ou un pis-aller la multiplication des agences postales communales et des relais postes commerçants, qui se substituent peu à peu aux vrais bureaux de poste.

C’est la raison pour laquelle cette fixation sur la conservation des 17 000 points de contact ne veut rien dire, car, ce qui compte, c’est le ratio entre ces différentes structures.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Mirassou

Dans la population, la crainte est grande de voir cette dérive s’accélérer.

Il faut donner les moyens à La Poste de sortir par le haut, et c’est en respectant son statut d’EPIC que les pouvoirs publics doivent proposer à cette institution les réformes et les ressources financières lui permettant d’affronter, au service de la collectivité, les enjeux du xxie siècle.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre

Et comment ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Mirassou

Je conclurai en constatant que nous sommes bien loin du débat que vous avez tenté de nous imposer en nous faisant un faux procès. D’ailleurs, aux obsédés de la modernité, nous demandons de ne pas se cacher derrière le président de La Poste, qui serait, selon eux, à l’origine du projet de loi de réforme de cet établissement. Qu’ils ne désignent pas non plus l’Union européenne comme bouc émissaire, cette dernière n’ayant rien à voir avec la disparition, programmée par l’exécutif français, d’un EPIC qui appartient aux citoyens.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Mon cher collègue, il est vraiment temps de conclure, maintenant !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Mirassou

Le Gouvernement doit prendre la mesure de sa responsabilité dans une fuite en avant, qui consiste à démanteler le service public en s’attaquant à l’établissement public qui le fait vivre.

En ce qui nous concerne, nous mettrons tout en œuvre pour empêcher cela.

Vifs applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Tropeano

Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, l’automne est arrivé avec son wagon de réformes.

Alors même que la crise financière impose la solidarité de la puissance publique, le Président de la République a réussi, dans un ordre du jour plus que chargé, à introduire successivement la transformation de La Poste, la suppression de la taxe professionnelle et la réforme des collectivités territoriales.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Tropeano

Préparons-nous à un hiver rude, mes chers collègues, car, en janvier, nos collectivités se retrouveront fort peu vêtues, c'est-à-dire privées d’une grande part de leurs ressources, et elles le seront aussi bientôt de l’un de leurs derniers services publics : je veux parler de leur bureau de poste.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Tropeano

L’acheminement du courrier est le service public par excellence ; il est le plus ancien de tous. La Poste est l’administration historique, qui reste encore dans les esprits comme les PTT, Postes Télégraphes et Téléphones, alors que l’entreprise publique a débuté son adaptation au monde du numérique et communique par « spots » publicitaires.

La Poste est une administration ancrée dans le cœur des Français, une grande maison autrefois vecteur d’ascension sociale. Bien plus qu’une entreprise, La Poste est, dans notre inconscient collectif, l’un des piliers de la vie communale, au même titre que l’école et la mairie. Le postier, à l’instar du maire et de l’instituteur, est bien souvent le dernier lien avec le monde extérieur, que ce soit dans le monde rural ou dans les zones urbaines où la solidarité fait défaut.

Le président Yvon Collin l’a annoncé le 20 octobre, la majorité du groupe du RDSE défend l’idée selon laquelle les citoyens doivent avoir la possibilité d’intervenir sur cette réforme touchant leur service public. Plus de soixante organisations politiques, syndicales et associatives collaborant à cette démarche ont permis à une partie d’entre eux de s’exprimer lors de la votation citoyenne organisée le 4 octobre dernier.

Le Gouvernement, mes chers collègues, nous oppose une impossibilité législative à l’organisation d’un référendum d’initiative populaire. Cependant, les dispositions de l’article 11, issues de la révision constitutionnelle de 1995, demeurent applicables et nous permettent l’adoption d’une motion référendaire. La population ne doit pas être écartée d’un choix aussi déterminant pour l’avenir.

Pour diminuer de moitié le nombre d’élus sur notre territoire, le Gouvernement se targue d’avoir le soutien de l’opinion publique. M. Brice Hortefeux, ministre de l’intérieur, a affirmé ici même, mercredi dernier : « Nous ne craignons rien, la réforme des collectivités est populaire auprès de l’opinion. »

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Tropeano

Deux poids, deux mesures !

Vous vous exemptez de sondages, d’enquêtes d’opinion, et vous ignorez le déplacement de 2, 3 millions de personnes qui ont montré l’attachement qu’elles portaient à leur service public postal.

Alors, monsieur le ministre, afin que vous puissiez une nouvelle fois asseoir votre réforme sur le soutien de l’opinion, dès demain, nous proposerons une motion référendaire allant en ce sens.

J’en reviens à la teneur même de la réforme.

La longue période de stabilité juridique a associé La Poste à l’avènement du service public dans l’imaginaire collectif. Pourtant, même si elle est une incarnation emblématique du service public, La Poste est avant tout, et depuis 1991, une entreprise publique qui a déjà démontré ses capacités d’adaptation, d’évolution et de mutation au fil des directives et de la libéralisation du secteur. On l’a vu, La Poste s’est adaptée à chaque directive, à chaque nouvelle percée de la libre concurrence. Pourquoi subordonner toute perspective d’avenir à sa transformation en société anonyme ?

Ni les directives européennes ni la situation financière de La Poste ne justifient le changement de statut.

Nous aurions pu renégocier le maintien du monopole, compte tenu de l’évolution des mentalités de nombreux États membres. Ces derniers penchent désormais vers le maintien du monopole résiduel des postes nationales pour la levée, le tri et la distribution des plis de moins de 50 grammes.

Le statut d’EPIC n’est en rien un frein à l’ouverture à la concurrence. La transformation en société anonyme, en définitive, est plus symptomatique de la situation d’un État « ruiné » nourrissant l’ambition d’ouvrir le capital de son entreprise publique pour faire face à ses dettes.

Si le but n’est pas l’ouverture à la concurrence, alors il n’y a aucun intérêt à modifier le statut juridique de La Poste.

L’article 9 de notre Constitution protège La Poste tant qu’elle exerce une mission de service public. Monsieur le ministre, a été signé en juillet de l’année dernière avec La Poste, pour la période 2008-2012, un contrat dénommé « contrat de service public ». Je ne doute donc pas que vous soutiendrez l’amendement déposé par mon groupe visant à formaliser définitivement le service public national de La Poste.

Plusieurs points me tiennent à cœur.

Tout d’abord, le sort du personnel, qui est trop souvent stigmatisé, doit être au centre de nos préoccupations.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Tropeano

La Poste, en effet, a longtemps incarné l’État, l’« administration bureaucratique » au sens que Max Weber donne à cette expression. Cela tient également au fait que ses salariés, en majorité issus des classes populaires ou moyennes, ont pu réaliser une certaine forme d’ascension sociale.

Fort de cet esprit et du sentiment d’appartenance à un corps public, le personnel a accompagné La Poste, « son entreprise », dans toutes ses transformations. Oui, les postiers font bien leur travail ! Et même si, quelquefois, monsieur le ministre, le courrier arrive en retard ou si les colis sont distribués après le jour de Noël, ce n’est pas toujours la faute des postiers : c’est peut-être aussi parce qu’il manque du personnel dans les bureaux de poste !

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Tropeano

Comment remercie-t-on ces salariés ? En proposant aujourd’hui un projet de loi ayant pour objet une réforme qui ignore le maintien de leurs droits, prive certains d’entre eux de régime de mutuelle complémentaire, fait basculer les autres dans un régime de retraite moins favorable.

La transformation de La Poste en société anonyme aura une incidence certaine sur le statut du personnel, notamment sur le régime de retraite complémentaire des salariés, comme l’a expliqué mon collègue Michel Teston.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Tropeano

En effet, 140 000 d’entre eux sont affiliés à l’IRCANTEC, régime concernant les agents publics non-fonctionnaires. La création de la société anonyme La Poste entraînerait leur basculement vers le régime AGIRC-ARRCO.

Mes chers collègues, La Poste a prouvé qu’elle pouvait s’adapter, et son intervention dans les secteurs concurrentiels a été réalisée avec succès. Le débat doit porter sur la nécessaire compatibilité de sa modernisation avec le maintien de sa capacité à assurer ses missions de service public.

La Poste doit maintenir le maillage territorial. Il est vrai que le maintien des 17 000 points de contact nous a été confirmé. Mais je suis, comme de nombreux élus locaux, attaché aux bureaux de plein exercice. Or ceux-ci sont peu à peu transformés en agences postales communales ou en relais poste. C’est par ce biais que seront conservés les 17 000 points de contact !

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Tropeano

M. Robert Tropeano. Cela ne nous convient pas, car les services rendus ne seront pas les mêmes.

Bravo ! et applaudissements sur les travées du RDSE, du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Tropeano

De ce fait, la présence postale, lien social unique et indispensable, en particulier dans les zones rurales ou dans les quartiers populaires, est de plus en plus menacée.

Ce service public est notre bien commun, enraciné au plus profond de la vie des villages et des quartiers, où la question de la présence postale prend une dimension particulière.

Même si la loi de 2005 fixe certains critères, le débat sur la nature de la présence postale rebondit avec la prise de conscience que l’on ne trouvera pas les mêmes prestations en fonction de la nature des points de contact.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Tropeano

Monsieur le ministre, la transformation de La Poste en société anonyme est inutile et néfaste tant pour ses usagers que pour ses salariés.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Tropeano

La Poste dispose à l’heure actuelle de tout l’outillage juridique pour se défendre face à ses concurrents.

Aujourd’hui, l’avenir de La Poste ne peut se concevoir que dans le cadre d’un service public national maîtrisé par l’État. Il est bien évident que, si ces principes ne sont pas respectés, je voterai contre ce projet de loi relatif à l'entreprise publique La Poste et aux activités postales, qui vise à transformer l’établissement public de La Poste en société anonyme.

Bravo ! et applaudissements sur les travées du RDSE, du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Emorine

Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, nous entamerons demain la discussion des articles du projet de loi, sur lesquels de nombreux amendements ont été déposés.

En application de l’article 49, alinéa 2, du règlement, et pour la clarté du débat, je propose d’éviter que, lorsqu’un amendement tend à supprimer ou à rédiger complètement un article ou une disposition, tous ceux qui suivent ne soient mis en discussion commune. Bien sûr, il ne s’agit aucunement de faire tomber l’un ou l’autre de ces amendements, …

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Emorine

… et les présidents des groupes politiques du Sénat, que j’ai pris le soin de consulter, sont d’accord pour que nous procédions ainsi.

Mes propositions concernent, au titre Ier, les articles 1er, 2 et 2 bis.

À l’article 1er, je demande l’examen séparé des amendements de rédaction globale n° 439 et 443, ainsi que des amendements de suppression partielle n° 24, 25, 28 et 445.

À l’article 2, je propose l’examen séparé de l’amendement n° 195 de rédaction globale de cet article.

Enfin, à l’article 2 bis, je demande l’examen séparé de l’amendement n° 52, qui est également de rédaction globale.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Il n’y a pas d’opposition ?...

Il en est ainsi décidé.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Par lettre en date du 29 octobre 2009, M. Richard Yung m’a fait connaître qu’il retirait la proposition de loi tendant à élargir le collège électoral des sénateurs représentant les Français établis hors de France (308, 2008-2009), déposée le 31 mars 2009.

Acte est donné de ce retrait.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, mardi 3 novembre 2009 :

À neuf heures trente :

1. Questions orales.

À quatorze heures trente et le soir :

2. Suite du projet de loi relatif à l’entreprise publique La Poste et aux activités postales (Procédure accélérée) (n° 599 rectifié, 2008-2009).

Rapport de M. Pierre Hérisson, fait au nom de la commission de l’économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire (50, 2009-2010).

Texte de la commission (n° 51, 2009-2010).

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

La séance est levée le mardi 3 novembre 2009, à zéro heure trente-cinq.