La séance, suspendue à dix-neuf heures quarante, est reprise à vingt et une heures quarante, sous la présidence de M. Guy Fischer.
Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Enseignement scolaire », et article 54 ter.
La parole est à M. Gérard Longuet, rapporteur spécial.
Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, je me réjouis tout d’abord de la présence au banc du Gouvernement des deux ministres en charge de cette mission « Enseignement scolaire », qui concerne, pour l’essentiel, la rue de Grenelle, mais aussi la rue de Varenne, pour rester dans le VIIe arrondissement de Paris.
Mon intervention au nom de la commission des finances sera sobre et s’articulera autour de trois points.
Tout d’abord, cher Luc Chatel, vous avez poursuivi la mise en œuvre d’une politique d’enseignement personnalisée, s’efforçant de mobiliser les moyens de l’éducation nationale vers la réussite individuelle des élèves, dans la ligne du projet de loi que François Fillon avait fait voter en 2005, lorsqu’il était ministre de l’éducation nationale. J’évoque ces orientations parce qu’elles témoignent de la volonté de votre ministère et des enseignants français de s’intéresser avant tout à ceux dont ils ont la charge.
Ces orientations se sont traduites par la mise en place des programmes personnalisés de réussite éducative, qui couvrent désormais l’enseignement primaire et les collèges. Vous avez conduit cette réforme à moyens constants, ce qui n’est pas une mince performance !
Vous avez mis en place des aides personnalisées en CM1 et en CM2, grâce au redéploiement des heures dégagées par la suppression des classes du samedi matin : ces aides permettent aux élèves en difficulté de surmonter les obstacles qui peuvent freiner durablement leur acquisition du socle de connaissances.
Vous avez également mis en place un accompagnement éducatif pour les élèves de l’éducation prioritaire, dans l’enseignement primaire et au collège. Vous avez réussi cet effort en mobilisant des moyens importants : en 2010, une dotation de près de 280 millions d’euros est prévue au titre de l’accompagnement éducatif, dont 100 millions d’euros pour les heures supplémentaires.
Je voudrais évoquer une quatrième mesure, dont la presse s’est fait largement l’écho, et tant mieux : il s’agit de la réussite des stages de remise à niveau pour les élèves de CM1 et de CM2, financés eux aussi à partir d’heures supplémentaires.
Ces deux dernières mesures reposent sur le volontariat, ce qui représente sinon une limite, du moins un élément qui doit nourrir notre réflexion : comment faire en sorte que ce volontariat puisse être étendu et généralisé, du côté tant des élèves que des enseignants ? Je serais heureux de connaître votre position sur cette orientation, monsieur le ministre.
J’ajoute enfin deux observations importantes.
Tout d’abord, la prise en charge continue des élèves handicapés pèse sur votre budget, monsieur le ministre, à hauteur de 300 millions d’euros. La commission des finances s’interroge chaque année sur la légitimité de cette imputation : cette politique relève-t-elle de la mission « Enseignement scolaire » ou devrait-elle être rattachée, pour partie, à une mission regroupant les crédits liés à la solidarité à l’égard de nos compatriotes handicapés.
Ensuite, vous avez-vous-même annoncé, monsieur le ministre, l’introduction de l’aide personnalisée au lycée, dans le cadre de la réforme générale du lycée. Il s’agit de faire des lycées des établissements vivants, disposant de plus d’autonomie et de responsabilités et, par conséquent, de plus de moyens pour accompagner la réussite des projets pédagogiques développés en leur sein.
Cette personnalisation de l’enseignement se double d’une politique beaucoup plus difficile, qui pèse lourdement, en apparence, sur votre ministère et que vous avez su jusqu’à présent traiter sans compromettre la présence effective des enseignants et des adultes devant les élèves ; je veux parler de la réduction des effectifs selon le principe général du non-remplacement d’un départ en retraite sur deux, auquel votre ministère est astreint comme tous les autres, mais dont l’application est beaucoup plus délicate dans le cas de l’éducation nationale.
Les chiffres parlent d’eux-mêmes : ils sont spectaculaires. À la rentrée de 2007, 8 512 postes ont été supprimés. La réforme des décharges envisagée par Gilles de Robien a été abandonnée ; vous vous êtes donc intéressé essentiellement à la réduction du nombre d’enseignants surnuméraires et vous avez tiré parti de la baisse démographique des effectifs du deuxième degré.
En 2008, 11 200 postes ont été supprimés. Votre prédécesseur, M. Xavier Darcos, a utilisé le recours plus large aux heures supplémentaires et, là encore, poursuivi la réduction du contingent des enseignants surnuméraires, c’est-à-dire des enseignants qui, hélas ! n’ont pas d’élèves en face d’eux dans leur discipline. Dès lors, il semble naturel de souhaiter en diminuer le nombre.
Par ailleurs, les années 2007 et 2008 ont été marquées par une politique drastique de reprise de détachements ou de mises à disposition.
Monsieur le ministre, votre administration s’est attaquée, en 2008, au problème extraordinairement difficile de la réorganisation du remplacement. Alors que 13 000 emplois ont été supprimés à la rentrée de 2009, cette réorganisation s’est poursuivie en 2009 par l’optimisation des remplacements et une meilleure mobilisation nationale des capacités de remplacement, sans aller jusqu’à la mise en place de l’agence nationale qui avait été évoquée. Mais je suis persuadé que vous aurez à cœur, dans votre réponse, de nous préciser les raisons de cette décision.
En revanche, nous constatons, en 2009, une diminution des effectifs affectés aux réseaux d’aides spécialisées aux élèves en difficulté, ou RASED, c’est-à-dire à ce soutien nomade apporté à certains élèves. Vous avez, en cours d’année, décidé d’en limiter l’impact, sans doute à raison, car les RASED accompagnent, d’une certaine façon, la politique d’enseignement personnalisé que j’évoquais tout à l’heure et qui constitue assurément une orientation positive.
En 2010, 16 000 suppressions d’emploi sont annoncées. En réalité, la quasi-totalité d’entre elles sont liées à la réforme du recrutement des enseignants. Je ne parlerai pas d’une sorte de jeu comptable… Néanmoins, ce sont les conséquences administratives d’une modification de statut qui vous permettent de réduire les effectifs, sans pour autant diminuer le nombre d’adultes présents face aux élèves.
Comment avez-vous justement réussi – vous-même, monsieur le ministre, et vos prédécesseurs – à poursuivre une politique de réduction des effectifs sans restreindre cette présence des enseignants ? Par le recours aux heures supplémentaires et par la diminution du nombre des enseignants surnuméraires, dont il faut d’ailleurs cesser de faire un mythe ! C’est une réalité, une friction inévitable sur un effectif de plus de 900 000 enseignants. On ne peut que vous savoir gré de cette réduction d’année en année.
En revanche, vous avez développé des formes de présence qui n’apparaissent pas dans les effectifs budgétaires de votre administration. Les personnels d’assistance éducative sont rémunérés sur des crédits de fonctionnement et, heureusement, la diminution du plafond des effectifs de votre administration ne se répercute pas sur ces personnels. Nous comptabilisons ainsi 53 000 assistants d’éducation, 43 500 agents en contrats aidés, plus de 2 100 auxiliaires de vie scolaire qui n’apparaissent pas dans les effectifs ; il faut simplement savoir qu’ils existent !
Le sentiment de la commission des finances – ce sera le troisième point de mon intervention – est que nous arrivons au bout d’un exercice qui a permis au Gouvernement de faire face aux obligations qu’il s’était assignées, avec le soutien du Parlement, en matière d’effectifs de la fonction publique. Toutefois, pour les années 2011 et 2012, il devra vraisemblablement s’attaquer à la réorganisation de l’offre éducative.
Nous connaissons les chiffres des pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques, l’OCDE, et nous savons qu’en matière d’enseignement secondaire la France se caractérise par l’année la plus longue en heures de cours et la plus courte en journées de cours. C’est la meilleure façon de mal utiliser les effectifs : ceux-ci sont trop importants pour des années trop lourdes !
Plus de 30 000 départs à la retraite sont annoncés en 2011 et un peu moins de 30 000 en 2012, puisque la pyramide des âges se modifie légèrement. Compte tenu de l’importance de ces chiffres, il est évident, monsieur le ministre, que vous ne pourrez faire face à cette obligation que dans le cadre d’une réflexion sur l’offre éducative et d’une réorganisation de cette offre.
La commission des finances vous propose quelques pistes de réflexion.
Elle vous suggère, par exemple, d’utiliser le Centre national d’enseignement à distance pour répondre à des besoins d’enseignement diversifiés dont les effectifs sont trop dispersés sur le territoire national et, ainsi, d’optimiser les moyens humains dont vous disposez.
Nous pourrions également imaginer des regroupements de filières, en particulier dans les disciplines technologiques et professionnelles, en acceptant le recours à l’internat qui est, en soi, une bonne solution pour toute une série de jeunes s’orientant vers des formations professionnelles extrêmement spécialisées.
Enfin, il serait souhaitable de relancer la bivalence des enseignants pour mieux optimiser, notamment en matière de remplacement, les moyens disponibles.
En conclusion, ayant la responsabilité de ce rapport, au nom de la commission des finances, depuis maintenant quatre ans, je me permets de relancer trois sujets récurrents qui, d’année en année, progressent peu.
Le premier concerne la mise en place des établissements publics d’enseignement primaire, dont le principe avait été retenu dans le cadre de la décentralisation et, précisément, de la loi de 2004 Or nous sommes en 2009 !
Le deuxième sujet est le principe de l’expérimentation en matière d’organisation et de direction des lycées, qui avait également été acté en 2004 et qui n’est toujours pas appliqué.
S’agissant enfin du troisième sujet, la présence des deux ministres – M. Luc Chatel et M. Bruno Le Maire – me réjouit et me rassure. Il s’agit d’assurer une bonne coopération en matière de soutien à l’enseignement technique agricole, pour lequel un certain nombre de promesses ont été tenues lentement, tardivement et incomplètement. Sur ce sujet, messieurs les ministres, j’aurai l’occasion de présenter des amendements ayant pour objet de vous réconcilier, ce qui est naturellement le souhait de votre majorité.
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et sur le banc des commissions.
Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, cette intervention ne participera évidemment pas d’un exercice d’autosatisfaction.
C’est peu de dire que la mission « Enseignement scolaire » constitue un élément fondamental de mesure des choix politiques d’un gouvernement : l’école, c’est tout simplement le vécu quotidien de douze millions de jeunes de notre pays et c’est bien à l’aune de la qualité d’un système éducatif que l’on mesure la réalité du progrès social.
Si l’on sait agir pour la santé, pour l’école, pour le logement et pour répondre aux besoins des plus vulnérables, alors on mène une politique de progrès social.
Rapporteur spécial de la commission des finances, qui a adopté le rapport présenté par notre collègue Gérard Longuet, je ne peux partager la logique comptable qui préside, et ce de plus en plus, à la définition de la politique éducative de notre pays.
Nous trouvons, dans ce projet de budget pour 2010, la traduction brutale de cette logique comptable : suppression de 16 000 emplois ; précarisation renforcée des conditions de formation initiale des enseignants ; recherche permanente d’économies diverses tendant à comprimer autant que possible la dépense d’éducation – le débat sur le baccalauréat professionnel en trois ans en est une illustration.
En étant limité à un niveau inférieur à 60 milliards d’euros, le budget de l’enseignement scolaire n’échappe pas à la règle imposée : dans la logique gouvernementale, l’école, et singulièrement l’école publique, doit payer sa part dans l’effort de réduction des déficits, et tant pis pour nos jeunes !
Je le regrette, parce qu’on ne peut réduire la demande sociale d’apprentissage, d’enseignement, d’éducation à de quelconques moyennes, statistiques ou données chiffrées.
Vingt-cinq élèves dans une école du sixième arrondissement de Paris, même si celle-ci n’est pas forcément exempte de subir le processus de suppression de postes observé un peu partout, ce n’est pas pareil que vingt-cinq élèves dans une école du Val-Fourré, ou même vingt élèves dans une classe accueillant les enfants de différentes communes d’un même canton, dans le cadre d’une école de campagne fonctionnant en regroupement pédagogique intercommunal.
De mon point de vue, il faut à chaque fois partir du terrain et ne pas se contenter de la « règle à calcul », si facilement maniée par ceux qui décident des fermetures et ouvertures de classes.
Ce qui est vrai dans ce domaine, c’est que les quelques secteurs où l’on va constater une augmentation des effectifs des équipes éducatives, notamment lorsque le développement démographique l’exige, n’auront pas le nécessaire pour la mise à niveau de leurs moyens, tandis que les secteurs victimes des ajustements à la baisse se retrouveront dangereusement dépourvus. Par exemple, pour les postes qu’il faut créer dans les académies d’outre-mer ou dans celle de Montpellier, on est loin du compte !
Là où l’on ferme des écoles, où l’on réduit l’offre éducative dans les collèges et les lycées, les dégâts risquent fort de s’annoncer irréversibles, notamment dans les zones urbaines sensibles où jouent à plein les effets d’éviction découlant des politiques menées depuis plusieurs années.
Je souhaiterais faire état, ici, de notre légitime inquiétude devant la suppression progressive de la carte scolaire et les aménagements des rythmes scolaires, avec, entre autres, la suppression de l’école le samedi.
Comme on pouvait s’y attendre, la suppression progressive de la carte scolaire a favorisé les effets d’éviction, dont on pouvait craindre qu’ils ne se produisent dès l’annonce de l’expérimentation.
D’ores et déjà, des rapports mettent en évidence que, comme on pouvait le penser, les établissements présumés les plus « difficiles » ont perdu leurs élèves les plus brillants ou les mieux intégrés, phénomène qui permet à quelques établissements plus réputés de se donner bonne conscience tout en ghettoïsant un peu plus encore les établissements d’origine de ces élèves. Même la Cour des comptes le souligne !
En vérité, la mobilité des élèves, que la suppression de la carte scolaire est censée encourager, joue toujours dans le même sens et s’avère susceptible de justifier, demain – et même dès aujourd’hui, dans bien des cas –, la suppression de moyens humains et matériels dans les établissements délaissés. Il s’agit d’une sorte de mobilité asymétrique, que l’on peut rapprocher de la fongibilité asymétrique des crédits de personnel théorisée par la LOLF…
Ce que le Gouvernement attend d’ailleurs des parents d’élèves, c’est qu’ils contribuent « à l’insu de leur plein gré », par les choix et les options qu’ils auront finalement arrêtés eux-mêmes, à la maîtrise de la dépense publique pour l’éducation, dont d’aucuns se félicitent aujourd’hui.
La fermeture de l’école le samedi, alors même que les rythmes scolaires en France ne sont pas aussi insupportables que certains l’affirment et que le nombre de jours de classe y est souvent moins élevé qu’ailleurs – 140 jours de classe par an contre 185 en moyenne dans les pays de l’OCDE –, participe de la même logique.
Outre qu’elle ne change pas grand-chose à la vie des familles, cette fermeture de l’école le samedi permet quelques menues économies – en termes de décharges d’enseignement, par exemple – qui, mises bout à bout, finissent par constituer une source de réduction des dépenses budgétaires.
Je ne suis aucunement convaincu que ces choix politiques, qui trouvent leur traduction budgétaire dans le projet de loi de finances pour 2010, soient les plus propres à nous permettre d’atteindre les objectifs ambitieux de la loi Fillon pour l’avenir de l’école, singulièrement pour ce qui concerne le niveau de formation initiale des élèves. En tant que co-rapporteur spécial des crédits de l’enseignement scolaire, je pense même que c’est tout le contraire qui risque de se produire.
J’aurais pu également évoquer les réseaux d’aides spécialisées aux élèves en difficulté, les RASED, dont l’efficacité, en termes de progression dans les acquisitions scolaires et d’amélioration des compétences cognitives, a été objectivement prouvée. Or vous décidez de ne pas pérenniser le dispositif et continuez de « bricoler » avec les accompagnants scolaires.
Tels sont les commentaires que je souhaitais faire à propos des crédits de la mission « Enseignement scolaire ». On l’aura compris, je n’invite pas le Sénat à aller dans le sens de la commission.
M. Jean-Claude Carle, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, je vais essayer, en quelque cinq minutes, de présenter l’avis de notre commission sur les 60 milliards d'euros du projet de budget de l’enseignement scolaire. Je n’aurai pas l’orgueil de dire que chaque minute de mon intervention vaut 12 milliards d’euros !
Sourires
Le projet de budget de l’enseignement scolaire pour 2010 témoigne du maintien de l’effort du Gouvernement en faveur de l’éducation, dans un contexte économique et budgétaire pourtant difficile. Je me félicite de ce que l’objectif de maîtrise des dépenses publiques n’ait pas conduit à l’abandon des réformes ambitieuses dont a besoin le système scolaire et qui visent à donner sa chance à chaque élève.
Les crédits de personnel représentent 93 % du budget de l’enseignement scolaire, et il faudrait y ajouter les rémunérations inscrites sur les crédits d’intervention de la mission.
Autant dire que beaucoup repose sur la politique de ressources humaines, quelle que soit l’importance des réformes pédagogiques, que je ne conteste pas, bien au contraire. Je suis convaincu que la rénovation pédagogique ne verra pas le jour sans une rénovation des ressources humaines. Notre société, où la valeur caractéristique de l’espace-temps semble passée, en quelques décennies, de la journée à la nanoseconde, exige, tant du secteur public que du secteur privé, une réactivité optimale, appuyée sur une connaissance profonde des réalités socioéconomiques.
La modernisation de la gestion des recrutements, des carrières et des compétences des enseignants et des autres personnels doit habiter toutes vos démarches, monsieur le ministre de l’éducation nationale.
Le schéma d’emplois de la mission est très largement issu de la réforme de la « mastérisation ». Je soutiens sans réserve la réforme du recrutement des enseignants. Toutefois, la plus grande attention doit être portée à la définition des maquettes des nouveaux masters, ainsi qu’à l’organisation des stages d’observation et en responsabilité dans les classes, afin que l’élévation du niveau de connaissances s’accompagne vraiment d’un développement parallèle des qualités pédagogiques.
Il me paraît indispensable que tous les nouveaux masters permettent aux étudiants d’acquérir une certaine connaissance de l’organisation du système éducatif et du fonctionnement du marché du travail. Ainsi, les futurs enseignants pourront aider leurs élèves à élaborer un projet professionnel et à choisir l’orientation qui leur convient.
Sous l’impulsion de vos prédécesseurs, monsieur le ministre, notamment de Xavier Darcos, la gestion des ressources humaines de l’éducation nationale s’est améliorée, particulièrement en matière de surnombres disciplinaires. Mais les efforts doivent se poursuivre, surtout en vue d’améliorer les remplacements d’enseignants, tant de courte durée que de plus de quinze jours, dont aujourd’hui personne n’est satisfait.
En outre, il devient urgent de répondre au déficit de médecins et d’infirmiers scolaires. L’exercice libéral ou en hôpital est en effet plus attirant qu’une carrière au sein de l’éducation nationale. Ces difficultés de recrutement sont accrues dans les zones rurales ou les zones urbaines sensibles. Devant cette carence, il me semble souhaitable de contractualiser avec la médecine libérale.
Je salue l’ampleur de la rénovation engagée depuis un an dans l’enseignement primaire. Reste un point qui n’est pas abordé de front par la réforme, mais que je considère pourtant comme capital : le pilotage local de la politique éducative.
La rénovation du statut des directeurs d’école devrait être très rapidement entreprise. Je propose que leur soit attribué un plein statut de chef d’établissement, en adéquation avec les nouvelles responsabilités qui leur sont confiées. Cette transformation irait de pair avec la création des établissements publics d’enseignement primaire, les EPEP.
La loi du 13 août 2004 prévoyait une expérimentation de ce dispositif. Celle-ci était cependant soumise à la publication d’un décret en Conseil d’État, qui n’a toujours pas eu lieu. Je le déplore vivement, monsieur le ministre.
L’ampleur de la réforme entreprise dans le primaire appelle une redéfinition parallèle de la gouvernance. J’ai confiance dans votre volonté, monsieur le ministre, d’agir sur ce terrain.
Vous aurez compris, mes chers collègues, que nous considérons avec beaucoup de bienveillance le projet de budget de l’éducation nationale. Cependant, inquiète du mauvais sort réservé à l’enseignement agricole, …
… la commission de la culture a émis un avis de sagesse sur les crédits de la mission « Enseignement scolaire ».
Le Gouvernement a entendu nos inquiétudes, comme nous le dira dans quelques instants notre collègue Françoise Férat. Je tiens d'ailleurs à saluer la présence, au banc du Gouvernement, du ministre de l’agriculture, car cela est suffisamment rare pour être noté.
M. le président de la commission de la culture applaudit.
C’est pourquoi je suis désormais très favorable à l’adoption de ce projet de budget, sous réserve de celle de l'amendement présenté par MM. Longuet et Legendre et de l’engagement du Gouvernement de remédier à la situation inacceptable de l’enseignement agricole.
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ Union centriste.
Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, tout au long des neuf années pendant lesquelles j’ai officié en qualité de rapporteur pour avis des crédits de l’enseignement scolaire, je n’ai pu que constater une lente détérioration de la situation de l’enseignement agricole.
L’abondement de 38 millions d’euros des crédits du programme 143 voté par notre assemblée l’an passé m’avait fait espérer en l’avènement d’une ère plus favorable pour l’enseignement agricole. J’ai accueilli avec une certaine déception le projet de loi de finances pour 2010.
Certes, les 38 millions d’euros en question, après un gel de six mois, ont été débloqués et utilisés. Ils ont notamment permis de revaloriser la subvention aux organismes de formation des établissements privés et de réduire le report de charges du temps plein et du rythme approprié. Ces reports avaient atteint un niveau insupportable et minaient la crédibilité des engagements futurs de l’État. Je ne puis que me réjouir de cet apurement, qui avait largement motivé l’amendement que j’avais déposé l’an passé.
Malheureusement, le projet de loi de finances pour 2010 n’a repris qu’une faible partie des 38 millions d’euros octroyés grâce à l’intervention du Sénat. Les crédits du programme 143 enregistrent donc une baisse de 15, 6 millions d’euros à périmètre courant.
La situation des établissements du rythme approprié est particulièrement difficile : persiste en effet à leur détriment un report de charges de 8, 5 millions d’euros, et la dotation pour 2010 ne prévoit pas la poursuite du rattrapage. Or la subvention versée au rythme approprié comprend la rémunération des enseignants. C’est donc l’offre de formation et la capacité d’accueil des établissements qui sont directement touchées.
De plus, les suppressions de postes d’enseignant sont extrêmement préoccupantes. Ainsi, ce sont 201 emplois d’enseignant qui seraient supprimés, pour 306 départs à la retraite. Deux départs à la retraite d’enseignant sur trois ne seraient donc pas compensés, ce qui est nettement plus sévère que la règle du « un sur deux », vous en conviendrez.
Cette rigueur particulière s’agissant des personnels enseignants ne peut que conduire, inexorablement, à la réduction des effectifs scolarisés.
Entre les rentrées 2005 et 2008, l’enseignement agricole a perdu 5 500 élèves sur un effectif de 170 000 environ. Cette diminution ne peut s’expliquer que par le verrouillage de l’offre, puisque je constate, sur le terrain, combien la demande des familles est forte. Malheureusement, les fermetures de classes s’accélèrent : soixante-cinq sont prévues l’année prochaine, après les vingt-cinq fermetures intervenues cette année.
Ce mouvement de resserrement de l’offre de formation, particulièrement préjudiciable dans les zones rurales, remet en cause la mission d’aménagement du territoire que l’enseignement agricole doit aussi assurer.
Je ne peux m’expliquer cette limitation du volume de l’enseignement agricole, d’autant que ses performances en matière d’insertion professionnelle et de poursuite d’études dans le supérieur sont tout à fait remarquables et reconnues par tous.
Ces succès témoignent de la capacité de l’enseignement agricole à rester à l’écoute des territoires et des mutations du monde économique. Contrairement à l’image trop facilement véhiculée, peu de ses diplômés s’installent comme agriculteurs. Ils poursuivent une grande variété de carrières, y compris dans les services et les métiers du développement durable, qui ne manqueront pas de connaître un essor rapide dans les années à venir.
Sans doute serait-il opportun de trouver pour l’enseignement agricole une nouvelle dénomination qui mettrait en avant son ancrage territorial. Peut-être pourrait-il s’appeler « enseignement technique rural » ou « enseignement de l’environnement et de la ruralité » ? Bref, vous l’avez compris, le concours de la meilleure dénomination est ouvert !
Pour assurer la pérennité de l’enseignement agricole, j’estime nécessaire qu’un vrai régime de coresponsabilité entre les deux ministères de l’agriculture et de l’éducation nationale soit mis en place. C’est là l’esprit même de la LOLF, tant vantée, qui devait permettre d’abattre les cloisonnements administratifs mais qui est, vous en conviendrez, largement battue en brèche dans la pratique.
Une coopération plus étroite avec l’éducation nationale aurait tout son sens. Elle permettrait d’accélérer la diffusion de bonnes pratiques pédagogiques et administratives tout en procurant des économies grâce à la mutualisation des moyens.
J’ai l’espoir qu’en empruntant cette voie il sera possible de regagner des marges de manœuvre budgétaires pour l’enseignement agricole, avant que ne soit menacée sa capacité d’innovation. L’apprentissage des langues, l’information et l’orientation des élèves constituent des domaines dans lesquels des actions concrètes pourraient être rapidement menées. Il pourrait également être envisagé de progresser encore dans l’organisation des concours de recrutement et des épreuves d’examens nationaux.
Cependant, j’en suis particulièrement convaincue, il faut éviter toute absorption au sein de l’éducation nationale : cette solution de facilité n’est souhaitée ni par les enseignants et les formateurs, ni par les familles.
La mutualisation des moyens devra donc impérativement respecter la singularité et la culture propre de chacun de ces deux systèmes d’enseignement.
Déçue du sort réservé, malgré son excellence, à l’enseignement agricole, la commission de la culture avait émis un avis de sagesse sur l’adoption des crédits de la mission « Enseignement scolaire ». Tenant compte de nos critiques, le Gouvernement nous a assuré qu’un amendement serait déposé sur le projet de loi de finances rectificatives pour solder les reports de charges et qu’il soutiendrait celui de nos collègues Gérard Longuet et Jacques Legendre, visant à réduire les suppressions de postes d’enseignant. Au bénéfice de l’adoption de ces deux initiatives, que j’approuve sans réserve, j’émets, à titre personnel, un avis favorable sur l’adoption des crédits de l’enseignement scolaire.
Applaudissements sur les travées de l ’ Union centriste et de l ’ UMP.
Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, permettez-moi, à titre liminaire, de regretter les conditions difficiles de préparation de mon avis sur le projet de budget de l’enseignement professionnel. Les documents budgétaires demeurent en effet déficients. Certains indicateurs de performance ne sont même pas renseignés. De plus, le ministère n’a pas été en mesure de me fournir en temps utile des données précises sur la rentrée de 2009.
Je me suis attachée, pour ce projet de budget, à faire notamment le point sur la mise en place du baccalauréat professionnel en trois ans. Je souhaite rappeler que je n’étais pas hostile, par principe, à la possibilité de conduire certains élèves en trois ans jusqu’au baccalauréat professionnel, mais que je m’étais inquiétée du sort des élèves les plus fragiles.
Je suis aujourd’hui convaincue que l’enseignement professionnel est profondément déstabilisé par l’onde de choc de la réforme. La précipitation avec laquelle elle a été menée et l’absence de doctrine pédagogique claire sont responsables des dysfonctionnements constatés dans les lycées.
C’est très net, par exemple, pour la mise en œuvre de l’accompagnement personnalisé. Laissés à eux-mêmes, les enseignants et les chefs d’établissement rencontrent de sérieuses difficultés d’organisation et de construction pédagogique.
Plus généralement, il faudra éviter deux écueils liés à l’extension de l’autonomie des établissements : d’abord, un risque majeur de rupture d’égalité entre les territoires et entre les élèves, que seul un cadre national fort permettra d’écarter ; ensuite, le danger d’une multiplication des marchandages entre les enseignants et les chefs d’établissement, qui ne peuvent que diviser les équipes éducatives et favoriser une concurrence stérile entre les projets.
La carte des formations est un enjeu crucial de la réforme. L’offre de CAP a été en effet accrue, afin d’absorber les flux dirigés jusqu’à présent vers le BEP. Mais cette stratégie ne doit pas conduire à une orientation excessive vers le CAP à l’issue de la troisième. Il serait particulièrement préjudiciable de restreindre d’emblée l’accès au baccalauréat, en le réservant à une minorité : cela risquerait de consolider les inégalités sociales dans l’accès à l’éducation et de freiner l’élévation du niveau général de qualification, à l’encontre des objectifs affichés par le Gouvernement.
De plus, il faudra porter une attention particulière aux élèves de troisième en difficulté, issus notamment de sections d’enseignement général et professionnel adapté – les SEGPA – ou de classes d’insertion : aucun d’entre eux ne doit être laissé de côté.
Enfin, la cohérence des formations doit être assurée : sur un même territoire, devraient coexister une offre de CAP et une offre de bacs professionnels dans des spécialités proches. L’efficacité des passerelles en dépend aussi étroitement : à défaut, les élèves ne se verraient pas offrir un véritable choix et opteraient pour le diplôme pouvant être préparé près de chez eux.
Le statut de la certification intermédiaire est le dernier point qui méritera une évaluation attentive. Le BEP est aujourd’hui un diplôme reconnu par les branches professionnelles et bien identifié par les entreprises, mais sa version rénovée et rebaptisée « certification intermédiaire » laisse planer beaucoup d’incertitudes, sans que l’on puisse prévoir la réaction des employeurs. L’articulation de la certification intermédiaire et des programmes scolaires menant au baccalauréat mérite d’être clarifiée. Le choix du contrôle en cours de formation peut remettre en cause l’égalité entre élèves et la valeur du diplôme.
J’évoquerai enfin la « mastérisation » de la formation des professeurs de lycée professionnel.
Le concours externe de recrutement ne sera plus ouvert, dans les spécialités professionnelles, aux candidats justifiant de huit ans de pratique professionnelle et d’un diplôme de niveau V. Cette fermeture du concours à des personnes peu qualifiées, mais bénéficiant d’une solide expérience, est injustifiée. Je demande donc le rétablissement de cette possibilité de présentation du concours de professeur de lycée professionnel supprimée par le décret du 28 juillet 2009.
Parallèlement à mon enquête sur la mise en œuvre du bac professionnel en trois ans, j’ai poursuivi l’évaluation des dispositifs de préparation à l’orientation mis en place au collège.
Les conditions d’une authentique éducation à l’orientation ne me semblent pas réunies. L’idée d’un parcours progressif tout au long du collège et du lycée n’est pas sans valeur, mais il faut admettre que les différentes séquences organisées actuellement de la cinquième à la troisième manquent de cohérence et présentent un intérêt limité. C’est pourquoi je reste convaincue qu’il faut prévoir un accompagnement dans la durée par un adulte référent, spécialement formé pour cela.
La mise en place d’adultes référents ne doit pas cependant se faire au détriment des conseillers d’orientation-psychologues, les COP, dont le statut et les missions doivent être confortés. L’action des COP est particulièrement précieuse, notamment auprès des élèves les plus fragiles. Je ne peux que m’inquiéter de l’extinction du recrutement des COP, alors même que leur effectif actuel est déjà trop bas. Je souhaite que cette tendance puisse s’inverser.
Devant la déstabilisation très réelle de la voie professionnelle et la déficience des dispositifs d’orientation, gouvernés par une logique utilitariste, je ne peux qu’émettre, à titre personnel, un avis défavorable à l’adoption des crédits de la mission « Enseignement scolaire ». §
J’indique au Sénat que la conférence des présidents a décidé d’attribuer un temps de parole de dix minutes aux porte-parole de chaque groupe politique et de cinq minutes à la réunion des sénateurs ne figurant sur la liste d’aucun groupe.
Le Gouvernement répondra aux commissions et aux orateurs pour quinze minutes.
Puis nous aurons une série de questions avec réponse immédiate du Gouvernement. La durée de la discussion de chaque question est limitée à six minutes réparties de la manière suivante : deux minutes trente pour la question, deux minutes trente pour la réponse et une minute pour une réplique éventuelle.
La conférence des présidents a décidé d’attribuer cinq questions aux groupes UMP et socialiste, deux questions aux groupes de l’Union centriste, CRC-SPG et RDSE, et une question à la réunion des sénateurs ne figurant sur la liste d’aucun groupe.
Dans la suite du débat, la parole est à M. René-Pierre Signé.
Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, notre école ne va pas bien. Elle ne répond pas à nombre d’attentes, comme le prouvent la réalité de l’échec scolaire, trop lourd dans tous les cycles, et la multiplication des réformes auxquelles elle est soumise depuis quelques années, la dernière faisant toujours apparaître que la précédente n’avait pas atteint l’excellence…
L’enseignement scolaire, qui est au cœur de notre socle républicain, doit être une priorité nationale, et non pâtir d’arbitrages budgétaires. Si le budget de la mission « Enseignement scolaire » demeure le premier de l’État, il témoigne, comme les années précédentes, de peu d’ambition. Certes, il s’élèvera à 60, 84 milliards d’euros en crédits de paiement, contre 59, 9 milliards d’euros en 2009 et 59, 1 milliards d’euros en 2008, soit une hausse de 1, 5 %, mais ces crédits sont largement inférieurs à ceux qui étaient prévus au titre de la programmation pluriannuelle pour 2009-2011, soit quelque 63 milliards d’euros.
Ce projet de budget pour 2010 reste marqué par le non-remplacement d’un fonctionnaire partant à la retraite sur deux : 16 000 suppressions d’emploi viendront s’ajouter aux 13 500 de 2009 et aux 11 200 de 2008. Depuis 2003, près de 45 000 postes ont été supprimés dans les collèges et les lycées, ce qui va à l’inverse de la poussée démographique qui se poursuit à l’école.
Les conséquences de cette situation sont lourdes pour le personnel, pour les élèves, ainsi que pour les conditions de travail, d’étude et d’enseignement, qui ne s’améliorent pas. Suppression des options, surcharge de classes, alourdissement de la charge de travail, baisse de l’offre éducative, remplacements non assurés, multiplication des heures supplémentaires et des compléments de service, non-scolarisation des enfants de deux ans, réduction des possibilités de formation professionnelle pour les enseignants : excusez cette litanie ! Un regard sur l’enseignement privé permet de constater que le principe de parité n’est pas respecté, puisqu’on supprime inégalement les postes dans le privé, que la loi Carle conforte encore en instaurant une relation marchande entre usager et commune, avec ou sans accord du maire.
Les mesures prises par M. Darcos dans le cadre de la réforme de l’enseignement primaire – semaine de quatre jours, évaluations, nouveaux programmes, stages de remise à niveau, accompagnement éducatif – suscitent bien des critiques. L’inspection générale a récemment pointé les perturbations de rythme, l’alourdissement des conditions de travail, la désorganisation des écoles par la multiplication des dispositifs hors et pendant le temps scolaire et les interrogations portant sur l’efficacité même du dispositif de l’aide personnalisée, quand les écoles qui rencontrent les plus grandes difficultés ne disposent d’aucun moyen supplémentaire.
Le démantèlement des RASED, dont l’efficacité a pourtant été prouvée, ou les incertitudes concernant les emplois vie scolaire ou les auxiliaires de vie scolaire, personnels indispensables à la scolarisation des enfants handicapés, ajoutent encore une note négative. L’absence de statut de ces intervenants, depuis longtemps dénoncée, les empêche d’être reconnus dans le monde de l’éducation, où ils atténuent pourtant les discriminations.
Les nouvelles évaluations nationales sont également sur la sellette : confusion sur la finalité des évaluations, calendrier inadapté, manque de concertation avec les enseignants, absence d’accompagnement des équipes. Ces constats sont partagés par les enseignants, les parents d’élèves et nombre d’autres acteurs de l’école.
Force est de constater, une fois de plus, que tout dispositif imposé dans la précipitation soulève de nombreuses difficultés.
Quant aux lycées, dont la réforme a déjà fait l’objet de débats, les persistantes mobilisations ont poussé le Gouvernement à répondre à des demandes fortes, s’agissant par exemple de la reconnaissance de la voie technologique – la technologie étant plus proche de la société que la science –, de la prise en compte de la diversité des publics scolarisés et du rééquilibrage des séries générales, avec une rénovation de la série L.
Quelques mesures nouvelles doivent être signalées.
En seconde, sont introduits deux enseignements d’exploration d’une durée hebdomadaire d’une heure et trente minutes chacun, dont au moins un enseignement d’économie, le second devant être choisi parmi diverses matières : sciences médicosociales, biotechnologies, littérature et monde contemporain, arts, etc. La nouvelle seconde a pour objectif de devenir une véritable classe de détermination.
La classe de première bénéficiera d’un ensemble d’enseignements communs – français, langues vivantes, histoire-géographie – représentant 60 % de l’emploi du temps et de stages « passerelle », censés permettre les corrections de trajectoire. Les lycéens auront désormais un droit à l’erreur et la possibilité de changer de série en cours de première. À cette fin, un tronc commun à toutes les filières est donc créé.
La classe de terminale offrira un choix élargi d’enseignements spécialisés pour projeter l’élève vers l’enseignement supérieur.
Tous les élèves pourront bénéficier d’un tutorat, et des groupes de compétences seront constitués au profit des élèves, qui bénéficieront de deux heures d’accompagnement individualisé par semaine, en seconde et en première. C’est peut-être la meilleure mesure, si les moyens affectés sont à la hauteur. Mais les modalités restent floues, et il reviendra aux établissements eux-mêmes de les définir. Toute tentative de confier aux établissements la gestion d’une partie de la dotation horaire, qui serait globalisée, ne fera que renforcer autonomie et mise en concurrence.
En outre, il reste des zones d’ombre, s’agissant en particulier de la formation des enseignants et de la prise en compte égalitaire bien affirmée des quatre voies du lycée : générale, professionnelle, technologique et agricole. L’un de mes collègues évoquera tout à l’heure l’enseignement agricole, dont le projet de budget fera l’objet d’un amendement. Les crédits destinés à financer les actions pédagogiques complémentaires à l’enseignement des langues vivantes et des technologies de l’information et de la communication à l’école ont baissé de moitié en une année, de même qu’ont été réduits les partenariats dans les domaines artistique, littéraire, culturel et scientifique.
Malgré quelques mesures intéressantes, cette réforme ne paraît guidée que par la volonté d’économiser des moyens. Ainsi s’accentue le caractère sélectif du lycée et se ferment les portes de l’enseignement supérieur aux lycéens qui ont le plus de difficultés.
L’aide aux élèves ne doit pas être renvoyée et résumée à un accompagnement personnalisé, assuré hors temps scolaire et financé par une réduction des horaires d’enseignement.
Le lycée professionnel est vraiment peu promu dans cette réforme. Le Président de la République a affirmé qu’il n’y aurait pas de nivellement par le bas, pas d’abaissement du niveau d’exigence. On en prend note ! Il n’est pas inutile qu’une exigence de qualité soit affirmée si elle s’accompagne de moyens supplémentaires, ce qui signifie pas de suppressions de postes, des pratiques pédagogiques plus étudiées en matière d’orientation et de parcours de formation, ainsi que l’élargissement de filières aujourd’hui insuffisamment ouvertes, au point que des élèves n’ont pu y trouver de place.
Quant à l’assouplissement de la carte scolaire, il a accentué les phénomènes de ghettoïsation et d’évitement de certains établissements. La réforme de la sectorisation a entraîné une perte d’effectifs – jusqu’à 10 % – et une concentration des élèves en difficulté dans nombre d’établissements, notamment ceux qui relèvent de l’éducation prioritaire.
Pis encore, au mépris des constats sur les effets positifs d’une scolarisation précoce, le désengagement de l’État à l’égard des plus petits se traduit par la création des jardins d’éveil, nouvelles structures d’accueil des enfants de deux à trois ans. Celles-ci ne sauraient remplacer l’école. Le jardin d’éveil, forme de halte-garderie sans grande ambition éducative, va soustraire les enfants les plus fragiles à un premier lieu de socialisation et d’éducation.
Avec la disparition programmée des instituts universitaires de formation des maîtres, les IUFM, et la « mastérisation », on peut légitimement s’interroger sur les moyens qui seront consacrés à la formation des enseignants. Le principe de base est de relever le niveau de recrutement de bac+3 à bac+5. Mais le Gouvernement veut surtout, on le dit moins, revenir à une formation disciplinaire et à la certitude que ce métier s’apprend. Les enseignants se formeront sur le terrain. Cependant, rien, dans le détail, n’est bien établi, en particulier la définition des masters qui seront préparés par ces étudiants. Les jeunes professeurs risquent d’arriver fort démunis devant leurs élèves.
L’école subit une crise qui suit l’évolution des connaissances nécessaires à l’entrée dans la vie. Dans cette perspective, il faut lui donner les moyens de réhabiliter l’ascenseur social, grippé par des inégalités criantes, par des disparités qui sautent aux yeux dès le départ, mais qui sont tolérées d’abord, et aggravées ensuite ; il faut aussi reconsidérer les savoirs professionnels, qui méritent mieux que l’intérêt qu’on leur porte actuellement.
L’école publique doit être considérée non pas comme une charge, mais comme un investissement pour l’avenir. La politique de restriction budgétaire menée selon une logique purement comptable, alors qu’il s’agit d’un pilier essentiel de notre République et d’un instrument majeur de l’égalité des chances – toujours réaffirmée, mais toujours plus lointaine –, affiche sans complexe votre volonté de faire de l’école une machine à sélectionner, avec une stratégie éducative de tri social : réussite pour les uns, avenir incertain, réduit au minimum, pour les autres.
L’État doit développer une offre de qualité, diversifiée et répartie sur l’ensemble du territoire. Oubliant cette obligation essentielle, le système éducatif peine à réduire les inégalités sociales.
Au moment où l’on parle d’identité nationale, l’école doit donner une densité nationale à tous ses élèves, surtout là où la nationalité est découplée ; elle doit marquer la volonté du « vivre ensemble », que Renan appelait fort justement et joliment le « plébiscite permanent ». On peut craindre, au contraire, que votre école ne porte en elle les prémices d’une école à deux vitesses, ce qui va à l’encontre des objectifs de l’école républicaine.
Tout cela nous conduira à ne pas voter les crédits de la mission « Enseignement scolaire ».
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.
Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, avec 292 millions d’euros, l’enseignement scolaire est le premier budget de l’État. Ces crédits permettent à celui-ci d’assurer l’une de ses principales missions régaliennes. À ce titre, ils ne doivent pas s’inscrire dans une logique purement financière de court terme, mais, au contraire, correspondre à des objectifs à long terme et de contenus.
Les sommes consacrées à cette mission doivent permettre de garantir l’égal accès de tous à un socle commun de connaissances et à un enseignement de qualité, quelle que soit la filière choisie, quel que soit le territoire.
En y regardant de plus près, ligne par ligne, programme par programme, ces chiffres ne sont malheureusement pas à la hauteur du défi à relever. Comment l’enseignement scolaire et l’éducation nationale peuvent-ils trouver un nouveau souffle pour conduire leur nécessaire modernisation avec un budget en hausse de seulement 1, 6 % ? Rapportée au taux d’inflation de 1, 2 % attendu pour cette année, la hausse nette est plus que modeste.
Je partage les inquiétudes du monde enseignant et des familles, car, à ce rythme, la qualité de l’enseignement dispensé aux générations futures pourrait être sérieusement hypothéquée. La question est donc bien celle des contenus. Avec des crédits pédagogiques pour le premier degré de l’enseignement public qui connaissent une baisse sans précédent, passant de 12, 3 millions d’euros à 5, 9 millions d’euros, quel type de citoyen l’État espère-t-il pouvoir former ?
Lors de votre audition par la commission, monsieur le ministre, vous avez même reconnu l’existence de certains dysfonctionnements, mais vous n’en avez pas tiré les conséquences dans l’élaboration de votre projet de budget.
Vous avez aussi rendu hommage « à la politique de gestion des ressources humaines de l’éducation nationale, qui participe à l’effort de redressement des finances publiques de l’État ». Malheureusement, nos conceptions de l’effort à réaliser en matière de gestion du personnel divergent considérablement.
Vous vous placez dans la logique de la RGPP. Pour ma part, je la déplore, même si une rationalisation de la gestion des ressources humaines est un principe comptable à respecter –encore faut-il savoir au service de quels objectifs.
J’estime que l’effort budgétaire devrait justement porter sur le personnel, avec une ouverture du robinet des recrutements, de la formation et de la titularisation des contractuels. Il devrait aussi permettre de tourner davantage l’école, le collège et le lycée vers des activités complémentaires : partenariats culturels, scientifiques, artistiques ou éducation à la santé et à l’environnement.
Il est vrai que l’on ne peut pas reprocher son immobilisme au gouvernement auquel vous appartenez. L’examen du projet de loi de finances intervient en effet dans un contexte de réformes tous azimuts. Conduites dans la précipitation, en particulier depuis un an, celles-ci ne vont pas sans provoquer oppositions et incompréhensions, dans le monde enseignant comme dans les familles.
Vous avez lancé conjointement, au cours de l’année qui vient de s’écouler, plusieurs réformes de taille : à l’école primaire, le service minimum d’accueil, les nouveaux programmes, la semaine des quatre jours et un dispositif d’accompagnement scolaire personnalisé des élèves parallèlement à la suppression, dite « sédentarisation », des postes affectés aux RASED ; au collège, l’aide au devoir ; au lycée, la réforme des programmes avec pour objectif de conduire 50 % d’une classe d’âge à un diplôme de l’enseignement supérieur, la rénovation de la voie professionnelle, le bac professionnel en trois ans, ainsi que l’amélioration des passerelles entre les différentes voies de l’enseignement secondaire, sans oublier la réforme des IUFM et celle des enseignements artistiques.
Ces réformes semblent plutôt creuser les inégalités. Sans pour autant dresser un catalogue à la Prévert des points noirs de votre budget, je voudrais évoquer plus longuement ceux qui me préoccupent. Mes collègues du groupe du RDSE compléteront ces interrogations par deux questions complémentaires, relatives au manque criant de remplaçants et à la carte scolaire.
Permettez-moi de commencer ma démonstration avec les emplois vie scolaire et les auxiliaires de vie scolaire. Le sort qui leur est réservé est symptomatique des effets d’annonce du Gouvernement.
Le nombre d’enfants handicapés accueillis en école banalisée n’a cessé d’augmenter, atteignant 185 000 élèves en 2009. Cependant, vos orientations budgétaires sont insuffisantes pour rendre possible cet accueil dans des conditions décentes.
Environ 1 300 accompagnants ont été licenciés en août dernier, à la fin de leur contrat. Vous nous avez affirmé avoir pérennisé les 17 000 contrats existants, mais il ne s’agira pas des mêmes personnes physiques. Je regrette que les compétences acquises se soient ainsi perdues dans la nature.
Se pose aussi la question des moyens qui pourraient être consacrés à la formation professionnelle. En effet, on n’intègre pas des enfants en difficulté avec du personnel qui n’est pas formé. Il est devenu urgent de mettre en place un véritable statut professionnel. Lui seul permettra de garantir un service d’accompagnement compétent et de qualité pour les enfants concernés.
J’en viens maintenant à la question des réseaux d’aide aux enfants en difficulté. Ils sont, eux aussi, traités selon la logique de la RGPP.
Comme je l’avais déjà exposé lors de l’examen des crédits de la mission pour 2009, le soutien scolaire ne peut pas remplacer le travail spécifique effectué par ces personnels spécialisés. Une équipe de chercheurs de l’université Paris-Descartes a d’ailleurs présenté les résultats d’une analyse comparative portant sur l’efficacité des aides personnalisées et des aides spécialisées du type de celle qui est apportée par les RASED.
Les aides personnalisées correspondent à deux heures hebdomadaires de soutien scolaire et permettent la révision de notions non acquises. Cette étude conclut que 20 % des élèves font effectivement des progrès grâce à cette méthode.
Les aides dispensées par les enseignants spécialisés des RASED sont beaucoup plus diversifiées et complexes. Parmi les élèves ayant bénéficié de cette forme d’aide, 70 % font des progrès, non seulement en matière d’acquisitions scolaires, mais également dans le domaine des compétences cognitives, sociales et relationnelles.
Les chercheurs concluent que « la nature de la réponse institutionnelle apportée à la difficulté scolaire a des conséquences directes sur la nature et les finalités de l’école. L’école doit-elle permettre aux élèves d’utiliser des notions de base telles que la lecture, l’écriture et le calcul ou doit-elle également former des citoyens capables de vivre dans une société, d’y apporter une contribution personnelle, de développer leurs compétences et leurs talents ? » Je crois que tout est dit !
Permettez-moi d’évoquer la question des autres personnels spécialisés, dont le recrutement est insuffisant : je veux parler des infirmiers, des médecins ou encore des psychologues scolaires. Comment comptez-vous améliorer la prévention en matière de santé, ainsi que l’écoute des enfants et des adolescents, en dehors du cadre strict de la classe, sans y consacrer plus de moyens humains, et donc financiers ? La question reste en suspens…
L’adéquation des compétences du personnel se pose également en ce qui concerne les enseignements artistiques. Avec le recul, il s’avère que confier ces enseignements aux professeurs d’histoire-géographie est inapproprié, le programme de ces disciplines étant déjà très chargé. Il faut franchir une étape supplémentaire, en mettant en place un programme à part entière et en recrutant des enseignants spécialisés. Garantir l’égalité d’accès à la culture pour tous par le biais de l’école est à ce prix. Comme je l’ai d’ailleurs déjà indiqué vendredi au ministre de la culture, il ne suffit pas de prendre des engagements, les moyens doivent suivre.
Comme l’affirme l’académicien Pierre Rosenberg, « l’histoire de l’art est peut-être l’une des meilleures idées de ces dernières années, encore faudrait-il que le ministère se donne les moyens de dispenser un enseignement de qualité plutôt qu’une culture du saupoudrage. C’est une discipline à part entière, l’enseigner est un métier qu’on apprend, on ne s’improvise pas professeur d’histoire de l’art. »
Venons-en à la réforme des IUFM et à la « mastérisation » de la formation des enseignants, qui sera effective en 2011. Mes chers collègues, je vous prie d’excuser le côté répétitif de mes interventions, mais Mme Pécresse ne m’a pas répondu sur ce point hier.
Rapatrier les IUFM au sein des facultés et créer des masters pour revaloriser le diplôme, soit ! Cependant, le contenu est inadapté à la réalité de ce métier, qui nécessite, d’une part, la maîtrise de connaissances polyvalentes, et, d’autre part, une formation à la dimension didactique et pédagogique de la profession, permettant la prise en charge d’une classe.
Par ailleurs, je m’oppose farouchement à la suppression de l’année de stage rémunérée, tout comme au fait que les enseignements soient essentiellement théoriques.
La formation professionnelle des enseignants devrait désormais être placée sous la responsabilité de l’université. Or, selon l’université et le parcours choisis, elle ne sera pas organisée dans les mêmes conditions, ce qui engendrera une véritable fracture territoriale. Se pose aussi le problème des IUFM installés dans des villes moyennes où n’existe pas d’université. Que deviendront ces établissements ?
La rupture d’égalité, je la constate aussi au vu de la différence de traitement entre l’enseignement privé et l’enseignement public. Ainsi, les suppressions de postes au titre du projet de budget pour 2010 interviendront lorsque la diminution d’effectifs sera de soixante-seize élèves dans l’enseignement privé, contre seulement trente-six élèves dans l’enseignement public. Cela se passe de commentaires…
Concernant l’accueil de la petite enfance, point dont nous avons déjà eu à débattre grâce à une question orale posée par notre collègue Françoise Cartron en octobre dernier, la réponse apportée n’est pas satisfaisante. Je regrette vivement que davantage de moyens ne soient pas mobilisés pour financer un service public d’accueil gratuit, notamment par la scolarisation en maternelle à partir de deux ans.
Pour terminer sur une touche positive, j’évoquerai rapidement l’initiative heureuse lancée en faveur de l’école numérique rurale en 2009. Cette opération est destinée à attribuer aux communes de moins de 2 000 habitants un crédit de 10 000 euros en vue d’acquérir du matériel informatique pour équiper leurs écoles. Cette opération, limitée à un quota de 5 000 dossiers, a connu un très vif succès, avec plus de 8 000 candidatures déclarées. Monsieur le ministre, comptez-vous pérenniser cette opération ? Si oui, de quelle façon ?
En conclusion, les membres du groupe du RDSE déplorent la précipitation dans laquelle sont conduites toutes ces reformes et vous demandent de prendre désormais du temps pour l’évaluation, afin de permettre les ajustements nécessaires en concertation avec les personnes concernées.
Par ailleurs, nous serons particulièrement attentifs aux questions relatives à la laïcité dans l’enseignement scolaire et l’enseignement supérieur.
Eu égard aux insuffisances relevées, nous ne voterons pas les crédits de la mission « Enseignement scolaire ».
Applaudissements sur les travées du RDSE, du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
M. Alain Vasselle. Sans négliger l’enseignement agricole, mon propos portera essentiellement sur les domaines qui ressortissent à la compétence directe de M. Chatel : je suis chargé de vous dire, monsieur le ministre, tout le bien que le groupe UMP pense de l’action que vous menez.
Exclamations ironiques sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.
Mme Férat et MM. Longuet et Carle ayant déjà présenté dans le détail les crédits de la mission, avec plus de talent que je ne saurais en montrer, je me bornerai à solliciter de votre part quelque éclairage complémentaire sur trois points.
S’agissant en premier lieu de la réforme du lycée, nul ne contestera le fait, je pense, que chaque année 50 000 élèves quittent le lycée sans avoir obtenu le baccalauréat et qu’un étudiant sur deux échoue à l’issue de la première année d’université, parce qu’il a été mal orienté.
Ce constat étant posé, quels sont les éléments de la réforme du lycée qui permettront de modifier la situation ?
Cela fait sept ans que vous répétez la même chose ! Qu’avez-vous fait ?
M. Alain Vasselle. Ne critiquez pas trop l’action du Gouvernement : la situation ne s’est pas améliorée lorsque vous étiez aux affaires !
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
Monsieur le ministre, je tiens à saluer la méthode employée, qui est importante dans un ministère ô combien sensible.
M. Alain Vasselle. Vous avez écouté attentivement l’ensemble des acteurs, engagé le dialogue avec les professionnels, les représentants des parents d’élèves et ceux des enseignants. C’était un préalable absolument indispensable, conforme d’ailleurs à la méthode que le Gouvernement a suivie dans le traitement de tous les dossiers dont il a la charge.
Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC -SPG.
Monsieur le ministre, quels changements les lycéens vont-ils connaître ? Surtout, quelles sont les grandes innovations pour les classes de seconde, de première et de terminale ? Comment allez-vous favoriser une orientation plus progressive, plus ouverte et plus juste ? Renforcerez-vous l’apprentissage des langues étrangères, …
… l’accès à la culture et la connaissance de l’économie ?
En ce qui concerne la connaissance de l’économie, j’ai reçu de nombreux courriers d’enseignants qui s’inquiètent du contenu de la réforme et de la teneur de l’enseignement dispensé.
Nous pourrions aussi évoquer le nécessaire rééquilibrage entre la voie générale et la voie technologique, …
… mais c’est incontestablement l’accompagnement personnalisé qui constitue la mesure phare de votre projet de budget. Le lycée va-t-il davantage soutenir l’élève en vue de la réussite de sa scolarité ? Comment les lycéens seront-ils mieux responsabilisés ? Je sais, monsieur le ministre, que vous êtes déterminé à faire en sorte que cette réforme soit une réussite et réponde aux attentes de notre jeunesse et à celles du pays.
En deuxième lieu, j’évoquerai brièvement l’enseignement primaire et la réforme de l’école élémentaire. Les enseignants et les parents se sont approprié les actions menées dans ce domaine, et les choses se passent assez bien. Cependant, il me semble que nous n’avons pas encore réussi à assurer dans des conditions satisfaisantes un enseignement précoce des langues étrangères, dès la maternelle. §J’ai déjà eu l’occasion de m’en entretenir à plusieurs reprises avec le président Legendre, qui est particulièrement sensible à cette problématique.
À cet égard, des expériences tout à fait concluantes sont menées dans certaines régions frontalières, …
… notamment en Alsace-Lorraine ou dans le Nord-Pas-de-Calais, mais souvent elles s’essoufflent et ne sont pas poussées jusqu’à leur terme. J’ai moi-même lancé, dans mon département de l’Oise, une expérimentation d’enseignement précoce des langues, dès la moyenne section de maternelle, permettant aux enfants de bénéficier de six heures hebdomadaires d’enseignement d’une langue étrangère, alors que, à l’heure actuelle, trois quarts d’heure de cours de langue étrangère sont dispensés dans l’enseignement primaire.
Je vous adresse d’ailleurs mes remerciements, monsieur le ministre, car cette action volontariste a pu être menée grâce à un partenariat entre le conseil général, les collectivités territoriales et l’éducation nationale. Nous prenons en charge la moitié du coût de cet enseignement : cela pèse sur les budgets des collectivités, mais les résultats tout à fait intéressants que nous obtenons aujourd’hui, évalués par le rectorat et l’inspection académique, démontrent que l’expérience est positive et mériterait d’être étendue. Les enfants qui ont suivi un tel enseignement de l’allemand ou de l’anglais, selon les cas, arriveront en sixième avec un acquis.
Il me semblerait souhaitable d’encourager, de conforter et d’évaluer ces expériences, monsieur le ministre, pour en tirer les enseignements avant de les généraliser sur l’ensemble du territoire. Quelle action le Gouvernement entend-il mener pour aller au-delà des trois quarts d’heure hebdomadaires de cours actuellement dispensés à l’école élémentaire, qui sont largement insuffisants ?
En troisième lieu, je voudrais revenir, à la suite de Mme Laborde, sur l’école numérique rurale, qui a remporté un tel succès que le ministère a été quelque peu débordé et n’a pu satisfaire qu’une partie des demandes. Entendez-vous prolonger l’opération ?
Je relève quelques difficultés pratiques dans sa mise en œuvre à l’échelon des communes. Actuellement, dans mon département, sur 160 candidatures, 120 ont été retenues. Pour une douzaine de communes, nous ne savons pas si le financement pourra être assuré. Une difficulté tient à la communication des procès-verbaux de recettes par les communes pour encaisser la subvention de 20 % permettant de boucler le financement. Cette subvention pourra-t-elle être débloquée avant la fin de l’année ? Cela dépend de la fourniture des équipements par les entreprises. L’inspecteur d’académie a pris quelques mesures d’assouplissement concernant les justificatifs à fournir, mais nombre de communes continuent d’interpeller régulièrement l’Union des maires de l’Oise, que je préside, pour savoir si votre ministère pourrait accorder des facilités supplémentaires.
En conclusion, monsieur le ministre, je vous confirme que vous pouvez compter sur le soutien du groupe UMP, qui votera ce projet de budget.
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, je déplore que l’examen des crédits de la mission « Enseignement scolaire », fondamentale pour notre pays et pour l’avenir de notre jeunesse, premier budget de l’État, intervienne à une heure aussi tardive. Cette situation est d’autant plus regrettable que ce projet de budget marque une nouvelle étape décisive dans la déconstruction du service public de l’éducation que le Gouvernement a engagée depuis plusieurs années.
Vous vous êtes fixé pour objectif de réduire la dépense et les emplois publics. Ainsi, budget après budget, s’égrènent les suppressions d’emplois : 16 000 sont annoncées pour 2010, s’ajoutant aux 13 500 de 2009 et aux 11 200 de 2008. Je dis « annoncées », car l’exécution budgétaire de 2008 a montré que plus de 13 000 postes avaient finalement été supprimés cette année-là, notamment au détriment du premier degré, pour lequel le plafond d’emplois a donc été sous-utilisé, à concurrence de 1 232 postes.
Malgré l’augmentation des effectifs d’élèves en 2008, les créations de postes affichées et votées par le Parlement n’ont pas eu lieu. Ainsi, pour les enseignants du premier degré, alors que le plafond d’emplois de chaque projet de loi de finances était annoncé à la hausse depuis 2006, l’exécution de 2008 s’avère en fait inférieure, à hauteur de plus de 1 000 emplois, au plafond de 2006. Voilà pour les promesses non tenues ! C’est là toute la perversité de la notion de plafond d’emplois, qui recouvre finalement une réduction d’effectifs.
Au lieu de créer des postes, vous généralisez et institutionnalisez les heures supplémentaires, au point d’en faire un mode de gestion qui, en définitive, favorise le développement de la précarité. Cela apparaît de façon tout à fait criante dans le second degré, où le nombre de contractuels s’est accru de 21 % en deux ans, et au collège, qui a perdu 8 000 postes parallèlement à une augmentation de 18 % des effectifs de contractuels.
Cette situation gagne aussi le premier degré. Ainsi, le nombre de postes de professeur des écoles mis au concours est en baisse depuis 2008, et le recours aux listes complémentaires a considérablement diminué, quand il n’a pas disparu.
Or, dans le même temps, les effectifs d’élèves croissent. La hausse est confirmée pour 2010, aux niveaux tant élémentaire que préélémentaire, et la tendance ne va pas s’inverser, si l’on se réfère aux chiffres de l’INSEE sur l’augmentation des naissances. Je m’interroge d’ailleurs, monsieur le ministre, sur la manière dont vos services intègrent ces données dans les statistiques.
Cette évolution démographique se conjuguera aux départs massifs à la retraite d’enseignants « baby-boomers ». Comment ferez-vous alors pour pallier les vacances de postes et garantir le « face-à-face pédagogique » ?
Certains recteurs ont d’ores et déjà trouvé la solution et se tournent maintenant vers des vacataires. En effet, à la différence des candidats inscrits sur les listes complémentaires – qui deviendront des enseignants stagiaires, avant d’être titularisés –, le vacataire présente l’avantage, si j’ose dire, de permettre la réalisation d’économies tant sur la formation que sur la rémunération.
Cette question se posera avec plus d’acuité encore à la rentrée de 2010. En effet, dans le présent projet de budget, vous prévoyez la suppression de 9 182 postes d’enseignant stagiaire dans le premier degré. Employés à quart de temps, ils représentent tout de même 2 296 emplois. Or vous affichez la création de 2 182 postes seulement : le solde est, là encore, négatif, alors même que vous prévoyez d’accueillir 5 300 élèves supplémentaires.
Dans les écoles, ces suppressions de postes auront des conséquences très concrètes, au premier chef sur le taux d’encadrement des élèves.
Permettez-moi, à ce sujet, de formuler une remarque sur les conditions d’accueil à la maternelle. Les effectifs du préélémentaire sont revus à la hausse pour 2010. Or le Gouvernement s’est clairement déclaré hostile à la scolarisation des enfants âgés de deux à trois ans. Ce projet de budget ravive donc nos inquiétudes quant à la fin programmée de la scolarisation des tout-petits, qui est en chute libre du fait de la pression démographique et faute de postes et de classes en nombre suffisant. Le problème touche aussi les enfants atteignant l’âge de trois ans en fin d’année.
L’État, volontairement, ne se dote plus des moyens de remplir les obligations imposées par le code de l’éducation. Le développement des jardins d’éveil n’est pas une réponse adaptée – j’ai déjà eu l’occasion d’expliquer les raisons de mon opposition à ce projet.
Ce qu’il faut, au contraire, c’est offrir « plus » et « mieux » d’école maternelle, en ouvrant la possibilité d’accueillir les enfants de deux ans quand les parents le souhaitent. Investir dans l’école maternelle, c’est investir pour l’avenir de chaque élève.
Par ailleurs, ces suppressions de postes auront des conséquences sur la formation même des enseignants. Vous affirmez que celle-ci sera « revalorisée » par votre réforme, mais cette analyse est largement contestée par la communauté éducative, qui redoute au contraire une détérioration de la formation initiale et des conditions d’entrée dans le métier, ainsi qu’un risque accru de précarisation pour ceux qui resteront « sur le carreau » à l’issue de leur master. Nous sommes loin de la revalorisation promise !
À l’inverse, ce que nous constatons avec certitude, à la lecture de ce projet de budget, c’est que cette réforme sera source d’économies. Ce sera même un véritable jackpot : plus de 173 millions d’euros d’économies dans le premier degré, et 252 millions d'euros dans le second !
Ce budget est donc aussi celui de l’instrumentalisation de la réforme de la formation. Sous le vernis de la « revalorisation », l’objectif reste le même : supprimer des emplois. Pour y parvenir, vous exploitez cette année la source des enseignants stagiaires, mais celle-ci n’en est pas moins tarissable… Que ferez-vous l’année prochaine ? Et comment, après avoir supprimé en trois ans plus de 40 000 postes, qui s’ajoutent aux 35 000 détruits depuis 2003, pouvez-vous continuer à affirmer aux familles que l’offre éducative n’est pas dégradée ?
Les familles et les personnels constatent d'ailleurs déjà les dégâts : classes surchargées, enseignants non remplacés, options supprimées ou non assurées…
Nous ne sommes plus dans l’anecdote, le cas isolé, dissimulable derrière des moyennes ! La vérité est tout autre, et elle vient d’être confirmée par M. Longuet. « Si l’on veut par la suite continuer à diminuer les emplois, dans une optique de réduction de la dépense publique à long terme, il faudra alors modifier en profondeur le système éducatif et les méthodes d’enseignement », souligne d'ailleurs Yves Censi, député UMP et rapporteur spécial pour le budget de l’enseignement scolaire à l’Assemblée nationale.
Réforme des programmes du primaire, fin des cours le samedi, suppression de postes en RASED, préparation du baccalauréat professionnel en trois ans, réforme du lycée demain, avec une diminution des heures d’enseignement, réforme de la formation des professeurs, avec la « casse » de leur statut : en échange de ces pilules amères, vous généralisez l’aide individualisée, présentée comme une solution miracle !
En effet, cette mesure devrait, à elle seule, résoudre les difficultés de tous les élèves et améliorer l’orientation – élément pourtant décisif, qui mérite et réclame un véritable engagement.
Ces « nouveaux services », comme vous les appelez, ont surtout l’avantage de correspondre au mode de gestion que vous avez institutionnalisé en généralisant les heures supplémentaires et de ne s’inscrire dans aucun cadrage national. Il revient aux enseignants et aux établissements de se débrouiller, comme on a pu le voir avec la mise en place catastrophique de l’aide individualisée dans les lycées professionnels, et cela en faisant fi de l’égalité de traitement entre les élèves.
C’est à tel point vrai que, depuis trois ans, et en toute logique, tous les postes et les crédits qui participent de ces missions fondent dans le budget comme neige au soleil : les RASED, les conseillers d’orientation-psychologues et les conseillers principaux d’éducation sont supprimés, tandis que les crédits pédagogiques sont divisés par trois dans le primaire alors qu’ils financent des activités complémentaires dans les domaines artistique, littéraire, culturel, scientifique, dans l’enseignement des langues vivantes, le développement des nouvelles technologies, l’éducation à la santé, à la sécurité et à la connaissance du patrimoine… En outre, les subventions aux établissements publics locaux d’enseignement baissent de 14 %. Partout, la dotation par élève diminue. Le collège est particulièrement touché, avec une diminution de ses crédits de 12 %, alors que le nombre d’élèves augmente depuis 2007.
Pour les établissements, vous revendiquez toujours plus d’autonomie. C’est déjà le cas pour les lycées, qui seront mis en concurrence, et ce le sera bientôt pour les écoles, si le projet des EPEP venait à se réaliser.
Budget après budget, vous orchestrez un projet de société qui remet en cause les fondements de notre système éducatif, celui d’un service public de l’éducation gratuit et laïc, dont l’ambition est d’assurer l’égalité d’accès pour tous, sur l’ensemble du territoire, à un haut niveau de culture générale, et d’aider chacun à relever le défi de l’émancipation.
En réalité, votre projet promeut une visée utilitariste d’employabilité immédiate pour l’économie, qui est source d’inégalités et qui est portée, faut-il le rappeler, par la stratégie dite de Lisbonne, à laquelle vous vous référez.
Ce projet est déjà particulièrement avancé, aujourd'hui même, dans un enseignement qui constitue pourtant une voie de réussite incontestée et un levier indispensable pour le développement de nos territoires : l’enseignement agricole. À force d’arbitrages et de restrictions budgétaires, cette filière, notamment sa composante publique, est en état de choc.
Mes chers collègues, c’est donc aujourd’hui l’épreuve de vérité : apporter son soutien au projet de budget pour 2010, c’est prendre la responsabilité de voir se généraliser ce que tout le monde aujourd’hui semble prêt à dénoncer pour l’enseignement agricole. C’est pourquoi mon groupe votera contre ce projet de budget. §
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, la crise que nous traversons aujourd’hui fait indiscutablement apparaître que nous avons besoin de davantage d’éducation. Celle-ci n’a sans doute jamais été aussi nécessaire dans le monde.
En effet, le diplôme est certainement la meilleure arme contre la crise. Il est probablement le remède face aux situations difficiles que nous rencontrons de nos jours. Je le rappelle, un jeune de moins de vingt-cinq ans a cinq fois plus de chances de trouver un emploi s’il est diplômé que s’il ne l’est pas.
L’école est bien le lieu où se prépare la France de demain, qui misera encore davantage sur l’intelligence que celle d’aujourd’hui pour relever les défis qui se présenteront à elle et affronter la concurrence internationale.
Mesdames, messieurs les sénateurs, le projet de budget que nous vous présentons doit permettre à l’école de remplir pleinement les missions que la nation lui a confiées : instruire, éduquer, insérer professionnellement nos jeunes, transmettre à tous les savoirs qui forment la culture commune nécessaire tout au long de la vie, aider chaque élève à affermir ses goûts, à exercer son esprit critique, à forger un projet d’avenir ; tout cela pour l’accompagner vers les responsabilités de l’âge adulte. Y a-t-il plus beau projet ? Je ne le crois pas. Les moyens que je vous propose d’y consacrer doivent, c’est ma conviction, permettre de le réaliser.
Les crédits des cinq programmes de la mission « Enseignement scolaire » relevant de ma compétence représentent quelque 59, 6 milliards d’euros, soit, à périmètre constant, une progression de 1, 6 % par rapport à la loi de finances initiale de 2009, alors que le budget de l’État augmente dans son ensemble de 1, 2 %. L’éducation nationale reste donc une priorité, et demeure le premier poste budgétaire de l’État.
Ce projet de budget doit nous permettre de mettre en œuvre les engagements qui ont été pris devant les Français par le Président de la République. Il s’agit d’adapter l’éducation nationale à de nouveaux défis, de favoriser l’égalité des chances entre les élèves, enfin de participer à l’effort de redressement des finances publiques tout en permettant une politique de gestion des ressources humaines ambitieuse pour les personnels de l’éducation nationale.
La nécessité d’adapter l’éducation nationale à de nouveaux défis tient au fait que le monde a changé, que nos jeunes ont changé. Notre système éducatif doit donc être capable de s’adapter à la diversité des élèves et des établissements scolaires. On ne peut pas travailler dans les classes de la même manière que par le passé, quand 20 % d’une classe d’âge fréquentait le lycée ; aujourd'hui, cette proportion s’élève à 66 %. Les élèves sont différents, les classes sont hétérogènes, et notre système éducatif doit pouvoir prendre en compte cette diversité.
Un certain nombre de réformes substantielles ont déjà été engagées par mon prédécesseur. Je les poursuivrai, en m’engageant dans plusieurs directions.
À l’école primaire et au collège, tout d'abord, notre objectif est de conduire tous les élèves à la maîtrise du socle commun de connaissances et de compétences.
Dans cette perspective, de nouveaux programmes, davantage axés sur les enseignements fondamentaux et sur des évaluations nationales, ont été mis en œuvre. En outre, l’accompagnement des élèves a été renforcé, grâce à une nouvelle organisation de la semaine scolaire. En primaire, comme M. Longuet l’a rappelé, la libération du samedi a permis…
Sourires sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.
… de proposer à tous les élèves qui rencontrent des difficultés deux heures d’aide personnalisée.
Par ailleurs, l’apprentissage des langues étrangères constituait, monsieur Vasselle, l’une des priorités de la loi du 23 avril 2005 d’orientation et de programme pour l’avenir de l’école. Dans les classes du cycle III, c'est-à-dire le CE2, le CM1 et le CM2, tous les élèves bénéficient aujourd’hui d’un enseignement de langue vivante d’une heure trente par semaine, soit 54 heures par an.
De plus, 31, 4 % des élèves de CP et 72, 4 % de ceux de CE1 bénéficient également d’un enseignement de langue vivante.
Parmi les nouveaux défis auxquels nous sommes confrontés figure aussi la rénovation de la voie professionnelle : nous devons faire en sorte que cette dernière soit véritablement une formation qualifiante, qui permette l’insertion professionnelle.
C’est tout l’enjeu de la réforme qui a été mise en œuvre en septembre 2009, non pas pour faire des économies, monsieur Foucaud, mais pour élever le niveau de qualification des élèves, limiter le nombre de ceux qui sortent du système éducatif sans qualification, donner à tous les jeunes la possibilité d’obtenir un diplôme de niveau V et, au total, tenir compte des perspectives d’insertion dans la vie professionnelle.
S’adapter à de nouveaux défis, c’est enfin mettre en place des dispositifs liés à l’orientation des élèves et améliorer les processus en la matière. Nous avons mis en œuvre progressivement, depuis la rentrée de cette année, le parcours de découverte des métiers et des formations. En 2010, nous développerons les plates-formes d’information multimédias de l’ONISEP, l’Office national d’information sur les enseignements et les professions, qui ont fait l’objet d’une expérimentation dans l’académie d’Amiens.
Toutefois, l’enjeu essentiel en matière d’orientation, c’est indiscutablement la réforme du lycée : nous voulons passer d’un système d’orientation subi, dans lequel il faudrait, à quinze ans et pour la vie, choisir son avenir professionnel, à un dispositif beaucoup plus progressif, réversible, qui autorise les corrections de trajectoire et reconnaisse le droit à l’erreur.
Madame Gonthier-Maurin, vous avez souhaité qu’un adulte référent puisse accompagner les élèves dans ce parcours, qui est souvent vécu comme une épreuve par les familles et par les jeunes eux-mêmes. Or, madame la sénatrice, dans la réforme du lycée, nous proposons que ce soient les enseignants qui assurent ce tutorat des élèves, pour accompagner ceux qui n’ont pas la possibilité d’être bien informés, étant entendu que cette mission est complémentaire de celle des conseillers d’orientation, dont le rôle est irremplaçable.
S’adapter aux nouveaux défis, c’est donc moderniser notre lycée. Comme MM. Gérard Longuet, Jean-Claude Carle et Alain Vasselle l’ont rappelé, il s'agit d’un objectif essentiel du Gouvernement pour les prochains mois.
Monsieur Vasselle, nous sommes effectivement partis d’une large phase de concertation menée au printemps dernier par M. Richard Descoings. Elle a permis de dégager certains consensus, et c’est sur cette base que j’ai proposé des orientations que le Président de la République a présentées le 13 octobre dernier et que j’ai déclinées devant les organisations syndicales à partir du 19 novembre.
L’objectif est que cette réforme soit mise en place à partir de la rentrée de 2010 en classe de seconde. En découlera une modification de l’organisation des études au sein du lycée, la seconde devenant une classe générale de détermination, avec deux authentiques enseignements d’exploration d’une heure trente par semaine, dont un nécessairement en économie. L’idée est d’ouvrir le champ des possibles pour les élèves, de leur faire découvrir de nouvelles disciplines, afin qu’ils puissent améliorer leur parcours d’orientation et se déterminer en vue de l’année de première.
Je tiens à ce que l’ensemble des élèves puissent découvrir l’économie, au moins une fois dans leur vie. L’économie pour tous, c’est à mon sens une avancée importante de cette réforme du lycée.
Nous entendons également améliorer l’apprentissage des langues, au travers d’un plan d’une ampleur sans précédent, avec la mise en place de groupes de compétences, le recours aux moyens multimédias, le renforcement des échanges entre établissements scolaires. Nous voulons multiplier les moyens, pour permettre à nos élèves de quitter le lycée en maîtrisant parfaitement leur première langue vivante.
Il nous faut aussi ouvrir le lycée sur le monde, en faire un lieu davantage tourné vers la culture, améliorer la vie lycéenne, confier davantage de responsabilités à nos lycéens ; c’est dans cette direction que nous nous sommes orientés.
M. Longuet a évoqué le coût de cette réforme. Le Président de la République l’a rappelé le 13 octobre dernier, elle se fera à moyens constants. Les horaires des élèves ne seront pas augmentés, les deux heures par semaine d’accompagnement personnalisé pour tous se substituant à des enseignements traditionnels et relevant donc des obligations réglementaires de service des professeurs. L’accompagnement personnalisé des élèves ne représentera pas de coût supplémentaire.
Instaurer une plus grande égalité des chances entre les élèves constitue un autre défi que nous avons à relever : l’idée est de rendre l’école plus juste, ce qui signifie qu’il faut faire davantage pour aider les élèves qui en ont le plus besoin.
Au travers du renforcement du dispositif de l’accompagnement éducatif en collège, nous apportons une vraie réponse. En 2008-2009, 870 000 collégiens en ont bénéficié, soit environ 30 % des effectifs, proportion qui est montée jusqu’à 40 % dans certains départements ruraux. Le projet de loi de finances initiale pour 2010 prévoit d’y consacrer 278 millions d’euros.
Rendre l’école plus juste, c’est aussi accorder des moyens supplémentaires à l’éducation prioritaire. Ainsi, 1, 2 milliard d’euros sont prévus pour 2010 au titre du plan de relance de l’éducation prioritaire, au travers des réseaux « ambition réussite », qui concernent 400 000 élèves, et des réseaux de réussite scolaire, touchant plus de 1 100 000 élèves.
M. Foucaud a évoqué la carte scolaire. À l’occasion de mon audition par la commission des finances du Sénat sur ce sujet, à la suite de la publication du rapport de la Cour des comptes, j’avais indiqué d’emblée que les effets de l’assouplissement de la carte scolaire n’étaient pas univoques : en effet, 20 % des établissements concernés ont vu leurs effectifs augmenter. Nous avons maintenant besoin d’une évaluation en profondeur de ces deux années d’assouplissement, avant d’aller plus loin dans ce sens. J’ai demandé à mes services de procéder à une telle évaluation.
À cet égard, j’ai évoqué plusieurs pistes devant la commission des finances du Sénat. Par exemple, j’ai émis l’idée que les élèves issus des écoles relevant des réseaux « ambition réussite » soient prioritaires pour le choix de leur collège. J’ai également parlé de la nécessité de stabiliser les équipes éducatives des collèges de ces réseaux, en affectant dans ces établissements des personnels bien formés et préparés à ce type de défi. C’est un enjeu en matière de ressources humaines. Nous pourrions nous inspirer de l’exemple des internats d’excellence, qui ont fait l’objet de recrutements spécifiques.
Une école plus juste, c’est aussi une école qui accueille toujours davantage d’enfants handicapés. Cette année scolaire, nous accueillons 185 000 élèves handicapés, soit 10 000 de plus que l’année dernière, 40 % de plus qu’en 2005, année du vote de la loi sur le handicap. En 2010, de nouvelles unités pédagogiques d’intégration seront créées. Au total, 292 millions d’euros de crédits sont prévus à cette fin.
J’indique à M. Signé qu’il n’y a plus d’incertitudes sur l’avenir des auxiliaires de vie scolaire individuels. Outre que le Gouvernement a décidé de prolonger les 17 000 contrats qui arrivaient à échéance, le Premier ministre a accepté la création de 5 000 postes supplémentaires : c’est un effort sans précédent ! De plus, j’ai décidé de signer des conventions avec quatre associations – la quatrième signature, avec l’association Autisme France, est intervenue cet après-midi – afin qu’elles puissent reprendre des contrats d’auxiliaire de vie scolaire parvenus à échéance mais ne pouvant être renouvelés, avec un financement de l’État. Ce règlement de cas difficiles a été rendu possible par l’adoption d’un amendement important par le Parlement.
Une école plus juste, monsieur Vasselle, c’est enfin une école capable de lutter contre la fracture numérique des territoires. C’est un sujet qui vous tient à cœur, je le sais. Dans votre département de l’Oise, 111 projets d’école numérique rurale sur 123 seront financés. Le plan de relance allouait 50 millions d’euros au financement de 5 000 écoles numériques rurales, situées dans des communes de moins de 2 000 habitants. Devant le succès de ce dispositif, le Premier ministre a décidé de redéployer des crédits. J’ai annoncé hier, avec Patrick Devedjian, que 17 millions d’euros supplémentaires seraient mobilisés afin de répondre à des demandes qui avaient été instruites mais auxquelles nous ne pouvions jusqu’alors donner une suite favorable. Cette somme nous permettra de traiter de 7 500 à 8 000 dossiers.
Quant aux formalités administratives que vous avez évoquées, monsieur Vasselle, j’en saisirai mes services, afin que les communes ayant procédé à des investissements puissent recevoir les subventions attendues dans les délais.
Au travers de ce projet de budget pour 2010, nous proposons de mettre en place une politique de gestion des ressources humaines de nos personnels d’éducation plus ambitieuse, tout en étant compatible avec la participation de l’éducation nationale à l’effort de redressement des finances publiques.
Le Président de la République l’a encore rappelé aujourd’hui, il n’est pas question de revenir sur le principe de la non-compensation d’un départ à la retraite sur deux dans la fonction publique. Au sein de l’éducation nationale, le schéma d’emplois pour 2010 se traduira par la suppression de 16 000 postes, chiffre qui correspond à la disparition de 18 202 emplois de stagiaire, liée à la « mastérisation » et conjuguée à la création d’emplois d’enseignant, dont 2 182 dans le premier degré, 144 dans le second degré pour des zones particulièrement défavorisées, ainsi que 476 dans l’enseignement privé. Je souligne, monsieur Signé, que nous respectons scrupuleusement, pour l’enseignement privé, la proportion de 20 % des suppressions ou des créations de postes.
Mesdames, messieurs les sénateurs, les chiffres que je vous indique témoignent de la capacité de notre système éducatif de s’adapter à la réalité locale : certes, 16 000 postes seront supprimés en 2010, mais des créations d’emplois interviendront là où se manifestent des besoins, de manière que le taux d’encadrement puisse être maintenu. La qualité de l’enseignement ne souffrira donc pas de l’application du principe de la non-compensation d’un départ à la retraite sur deux.
La contrepartie de ces mesures, le Président de la République l’a toujours dit, c’est une revalorisation du traitement de nos enseignants. Une enveloppe de 196 millions d’euros est prévue à cette fin dans ce projet de budget. Les négociations ont démarré et devraient se poursuivre jusqu’à la fin du mois de janvier. La revalorisation sera importante, puisqu’elle représentera environ un mois de salaire supplémentaire en début de carrière.
Vous avez évoqué, mesdames, messieurs les sénateurs, la réforme de la formation des maîtres, avec la « mastérisation ». Allonger d’une année la formation de nos futurs enseignants est effectivement une mesure importante. Il s’agit bien, madame Laborde, de respecter un équilibre entre l’enseignement disciplinaire et la formation didactique.
Après la réforme, les étudiants en licence pourront bénéficier de stages d’observation. Ceux de master 1 suivront 108 heures de stage d’observation, une même durée de stage en responsabilité étant prévue en master 2, année au cours de laquelle aura lieu le concours, dont les lauréats seront nommés professeurs stagiaires. Rémunérés, ils bénéficieront d’une formation en alternance : deux tiers du temps en classe, un tiers en formation complémentaire.
Quant aux IUFM, le transfert de leurs compétences aux universités remonte à la loi Fillon de 2005. Les universités prépareront désormais les étudiants au master et aux concours de recrutement. L’éducation nationale, elle, a la responsabilité de l’organisation de ces concours, ainsi que de l’accueil des étudiants, puis des professeurs stagiaires, dans les classes. Les bâtiments et les équipements des IUFM, en particulier les antennes départementales, continueront à être affectés, notamment, à des formations universitaires, en concertation avec leur propriétaire, c'est-à-dire, le plus souvent, le conseil général.
Mesdames, messieurs les sénateurs, j’ai la conviction que ce budget nous permettra de poursuivre l’effort de réforme, de moderniser nos enseignements, d’adapter en profondeur notre système éducatif à la situation actuelle : assurer la réussite de chaque élève, tel est bien l’objectif prioritaire que s’est assigné le Gouvernement.
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ Union centriste.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais tout d’abord exprimer mon attachement personnel, et celui du Gouvernement, à l’enseignement agricole public, qui est un enseignement de qualité, concernant plus de 300 000 élèves et présentant des taux de réussite aux examens de plus de 80 %. Surtout, le taux d’insertion professionnelle des élèves de cette filière est supérieur à 85 % : cela en fait, à mon sens, un véritable modèle en matière d’enseignement.
Ayant constaté, à mon arrivée au ministère, un sentiment de désarroi au sein de l’enseignement agricole public, j’ai pris immédiatement un certain nombre de décisions qui étaient attendues depuis de longues années.
La première a été d’organiser des assises de l’enseignement agricole public.
Exclamations ironiques sur les travées du groupe socialiste.
J’ai décidé d’un moratoire sur toutes les fermetures et fusions d’établissements durant les travaux de ces assises.
Par ailleurs, le Premier ministre a décidé de rétablir, à la rentrée de 2009, 60 équivalents temps plein afin d’accueillir 400 élèves supplémentaires et de résorber les listes d’attente. Grâce à l’adoption d’un amendement utile et constructif de Mme Férat, nous avons pu débloquer 38 millions d’euros en 2009. Nous solderons le report de charges de 8, 2 millions d’euros qui était dû à l’enseignement agricole privé par un amendement gouvernemental au projet de loi de finances rectificative pour 2009.
Toutes ces décisions ont permis de rassurer l’enseignement agricole public quant à ses missions et à l’engagement du Gouvernement en sa faveur.
Dans cette perspective, le budget que nous avons construit doit permettre à l’enseignement agricole public de remplir ses missions dans le courant de l’année 2010. Comme tout budget, il est perfectible. J’ai donc écouté avec attention les remarques des rapporteurs, en particulier celles de M. Longuet et de Mme Férat, qui entendent améliorer encore le budget pour 2010 afin de donner à l’enseignement agricole public davantage de moyens pour assurer ses missions l’année prochaine. Je ne puis qu’accueillir très favorablement leurs propositions.
Luc Chatel et moi-même en avons parfaitement conscience, il est temps, dans l’intérêt général et dans celui de l’enseignement agricole, de renforcer les liens entre le ministère de l’éducation nationale et celui de l’alimentation, de l’agriculture et de la pêche. Cela permettra de résoudre les difficultés, récurrentes depuis plusieurs années, que nous rencontrons en ce qui concerne la gestion des emplois et des activités.
Nous ouvrirons ainsi la voie à la coopération que Mme Férat appelle de ses vœux, en engageant formellement un travail en ce sens entre nos deux ministères, qui portera par exemple sur l’organisation de concours ou sur les relations entre établissements géographiquement proches. Il y va de l’intérêt de l’enseignement agricole et de celui des élèves, que nous entendons tous défendre ici.
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.
Je voudrais interroger M. le ministre de l’éducation nationale.
Il est clair que la richesse de l’éducation, ce sont les enseignants. Les salaires et les charges sociales constituent d’ailleurs l’essentiel de votre budget, monsieur le ministre.
S’agissant des effectifs, la mission « Enseignement scolaire » va rémunérer 979 000 emplois en 2010, soit près de la moitié du plafond d’emplois de l’État autorisé.
Cela étant, nous éprouvons quelques difficultés à appréhender la réalité des effectifs. En effet, s’ils sont en partie placés sous le contrôle de l’État-employeur, des établissements tels que les collèges et les lycées, qui sont dotés d’une personnalité morale ainsi que d’un budget, et qui reçoivent des dotations de l’État, peuvent rémunérer directement un certain nombre de collaborateurs – on en dénombre environ 97 600, à raison de 53 000 assistants d’éducation, de 42 500 contrats aidés et d’un peu plus de 2 000 auxiliaires de vie scolaire.
Ces établissements ne sont pas considérés comme des opérateurs de l’État, contrairement aux universités. Dans ces conditions, il n’y a pas d’encadrement, visible du moins, de l’évolution des effectifs en leur sein.
Par conséquent, peut-être faudrait-il envisager de modifier le statut de ces établissements, pour en faire des opérateurs de l’État. La question pourra d’ailleurs se poser aussi un jour pour les écoles : à cet égard, un décret se fait attendre depuis 2004.
Si l’on devait procéder à une telle modification du statut des collèges et des lycées, il serait bon alors de fixer des règles claires en matière d’encadrement des effectifs. L’effectivité du contrôle du Parlement passe sans doute par le renforcement des procédures.
Sur ce point, je souhaiterais, monsieur le ministre, que vous nous fassiez connaître vos intentions.
Nous avons célébré, il y a quelques semaines, les vingt-cinq ans du statut des EPLE, les établissements publics locaux d’enseignement.
Ce sont ces établissements qui recrutent directement des personnels pour des emplois aidés ou des assistants d’éducation, soit pour leur propre compte, dans le cadre de l’action quotidienne de l’éducation nationale, soit pour le compte d’écoles, puisque celles-ci n’ont pas de statut particulier.
Ces contrats apparaissent non pas dans les effectifs du projet de budget que vous examinez, mais dans le budget de fonctionnement, où l’on trouve une rubrique concernant les assistants d’éducation, les auxiliaires de vie scolaire et les emplois aidés. Au total, plus de 1, 5 milliard d’euros sont inscrits à ce titre, pour rémunérer un nombre de collaborateurs supérieur à ce que vous avez annoncé, puisqu’il faut aussi prendre en compte 6 000 personnes employées au titre de l’accompagnement éducatif.
Faut-il, au nom d’un souci fort légitime de transparence budgétaire, faire apparaître ces contrats comme des emplois et, en conséquence, revoir le statut de ces établissements ?
Cette question n’a pas été abordée au cours du colloque que nous avons organisé voilà deux mois à l’occasion du vingt-cinquième anniversaire du statut des EPLE, mais je ne suis pas opposé à ce que l’on engage cette réflexion tout à fait intéressante sur une éventuelle amélioration du dispositif dans le sens que vous souhaitez, même si je mesure mal la portée juridique d’une telle évolution statutaire.
Mes chers collègues, nous allons maintenant procéder à un échange de questions, de réponses et de répliques.
Je rappelle que l’auteur de la question dispose d’un temps de parole de deux minutes trente, de même que le ministre pour sa réponse. L’auteur de la question peut ensuite, s’il le souhaite, reprendre la parole pour une durée n’excédant pas une minute.
La parole est à M. Claude Domeizel.
Ma question porte sur l’aide personnalisée.
Pour la deuxième année, les écoles élémentaires expérimentent ce dispositif mis en place de façon concomitante avec la suppression des cours le samedi matin. Après un démarrage difficile de ce service imposé et non concerté, il paraît utile d’observer ce qu’il en est aujourd’hui.
La mise en œuvre de l’aide personnalisée a mis à contribution les directeurs d’école, qui ont dû adapter les différents temps scolaires et périscolaires se superposant dans la journée.
Selon les écoles et les circonscriptions, l’aide personnalisée, plus ou moins intégrée dans les projets d’école, est dispensée soit le matin avant la classe, soit entre midi et deux heures, soit le soir après la classe. Dans tous les cas, ce fut, reconnaissons-le, un vrai casse-tête pour tous les intervenants – personnel enseignant, personnel communal, animateurs périscolaires –, mais aussi pour les familles dont les enfants sortent de l’école à des heures différentes.
Pour les enfants, les journées doivent paraître très longues, puisqu’elles peuvent atteindre dix heures s’ils vont à la garderie le matin et fréquentent la cantine le midi, puis la garderie ou l’étude le soir.
Certes, ces heures d’aide personnalisée peuvent être profitables lorsque les difficultés rencontrées par les élèves sont légères ou passagères, mais ce soutien est-il efficace pour les enfants connaissant des difficultés plus lourdes et plus marquées, d’ordre scolaire, psychologique ou social ? J’en doute profondément.
Il est en outre regrettable de constater que, désormais, règne une certaine confusion entre aide personnalisée et intervention des RASED. Il ne faut pas s’étonner si les nouvelles dispositions d’aide personnalisée ont finalement et paradoxalement mis en lumière le caractère indispensable du travail des RASED, dont le maintien est vivement souhaité par les enseignants.
À l’issue de ces deux années d’expérience, il nous paraît indispensable de faire un bilan en consultant les personnes concernées – enseignants, enfants et parents –, mais aussi les communes.
Monsieur le ministre, comptez-vous expertiser ce nouveau service d’aide personnalisée, de manière à mesurer son efficacité concrète, ainsi que les problèmes rencontrés avec les divers intervenants, tout en le comparant au service rendu par les réseaux d’aides spécialisées aux élèves en difficulté ?
Le dispositif d’aide personnalisée mis en place dans le primaire a déjà été évalué par l’Inspection générale de l’éducation nationale, qui a remis en juillet 2009 un rapport intitulé Troisième note de synthèse sur la mise en œuvre de la réforme de l’enseignement primaire.
L’Inspection générale de l’éducation nationale conclut à un bilan largement positif de la mise en œuvre de cette aide personnalisée. Ainsi, le rapport indique que les parents et les élèves ont plébiscité le dispositif : « L’aide personnalisée est vue comme un privilège que les élèves demandent pour eux-mêmes. »
Ce dispositif est une avancée et constitue même, à mon sens, la bonne réponse au problème, évoqué tout à l’heure par M. Longuet, de la prise en compte de la diversité des élèves, qui représente une grande richesse de notre système éducatif.
Au-delà des programmes et des enseignements nationaux, dont je suis, en tant que ministre de l’éducation nationale, le garant, le système doit être capable de s’adapter aux spécificités de chaque élève. C’est l’objet de ces deux heures d’aide personnalisée, surtout en primaire, au moment de l’apprentissage des fondamentaux, quand les difficultés de lecture peuvent commencer à être perçues, avant l’entrée en sixième.
Nous avons souhaité laisser les établissements libres de s’organiser : c’est le directeur d’école qui décide, après avis du conseil d’école, et cela me semble une bonne chose. Dans ma ville de Chaumont, par exemple, plusieurs écoles ont fait des choix différents, en fonction des besoins des élèves et de l’avis des parents. Il faut laisser aux acteurs de terrain et à la communauté éducative la liberté de décider de cette organisation.
S’agissant de la prise en charge des enfants qui ont davantage de difficultés que d’autres, il ne faut pas mélanger les deux dispositifs : l’aide personnalisée est potentiellement destinée à tous les élèves, tandis que les RASED s’occupent de ceux qui rencontrent de grandes difficultés. La sédentarisation de 1 500 personnels a permis de rapprocher ces derniers de la réalité du terrain.
Monsieur le ministre, vous évoquez un rapport de l’Inspection générale de l’éducation nationale, dont j’ignorais l’existence. Je souhaiterais pouvoir en prendre connaissance, et savoir s’il compare le service rendu par l’aide personnalisée à l’action des RASED. Pourrions-nous, monsieur le ministre, avoir plus de précisions sur ce rapport ?
Ma question porte sur la carte scolaire.
La réforme de la carte scolaire a été engagée en juin 2007 et entrera dans sa phase finale en 2010. Elle a pour objet d’assouplir les règles d’affectation des élèves dans les collèges ou les lycées.
Conforté, monsieur le ministre, par la progression du nombre des demandes de dérogation, vous souhaitez poursuivre et renforcer les mesures d’assouplissement, sur le fondement d’une rénovation profonde du système scolaire qui conduira à terme à placer les établissements d’enseignement et leur projet éducatif au cœur du système scolaire, ainsi qu’à apprécier et à évaluer les projets et les équipes pédagogiques.
Si l’objectif est louable, le résultat me paraît incertain. Tous les acteurs socioéconomiques, la Cour des comptes, les commissions des assemblées parlementaires, les étudiants eux-mêmes et l’Inspection générale de l’éducation nationale relèvent les nombreux effets secondaires, indirects et néfastes de cette réforme au regard du principe de l’égalité des chances et de l’équité pour l’accès à un établissement de qualité.
Ainsi, les services d’inspection notent que cette réforme concerne surtout les villes présentant une forte densité d’établissements et particulièrement bien desservies par les transports urbains.
Ils concluent, en revanche, à la difficulté, voire à l’impossibilité « technique », en milieu rural, de disposer de ce même droit à choisir effectivement et librement son établissement.
Pis encore, chacun constate que cette suppression de la carte scolaire conduit finalement, en réalité, à organiser un palmarès implicite des établissements scolaires et des équipes enseignantes. En outre, inéluctablement, les chances d’instaurer une mixité scolaire et sociale se réduisent alors comme peau de chagrin, ce qui entraîne un réel danger de ghettoïsation.
C’est pourquoi je souhaiterais, monsieur le ministre, connaître les premiers résultats de l’évaluation du dispositif d’assouplissement de la carte scolaire que vous vous êtes engagé à conduire.
J’aimerais également savoir quelles mesures vous permettront, comme vous vous y êtes aussi engagé, d’assurer aux établissements dont l’effectif se réduira la conservation de leurs moyens et la mobilisation de l’équipe enseignante pour améliorer la réussite des élèves.
Enfin, je voudrais que vous nous disiez, monsieur le ministre, si cette réforme est véritablement adaptée aux territoires ruraux, difficiles d’accès et où l’on est moins prompt à opérer des choix. Ne serait-il pas plus raisonnable de suivre le conseil de la commission de la culture et de réfléchir de manière plus approfondie sur les équilibres plus précaires du milieu rural, afin de pallier la disparition programmée des collèges et lycées « de campagne », qui se traduirait in fine par une amplification du phénomène de désertion de nos territoires ruraux ?
La carte scolaire a été créée en 1963. Cette mesure se justifiait pleinement à une époque où l’on construisait à la fois, sur une grande échelle, de nouveaux quartiers de banlieue et des établissements scolaires. L’objectif était alors d’assurer une bonne mixité sociale.
Plus de quarante ans après, force est de constater qu’un effet pervers est apparu. L’application de la carte scolaire a abouti, de l’avis unanime, à des inégalités, avec le contournement du système par ceux qui le connaissent et envoient leurs enfants dans un établissement autre que celui qui leur est désigné par la carte scolaire. J’ai coutume de dire qu’il s’agit là d’un délit d’initiés, et la ghettoïsation dont vous avez parlé, madame le sénateur, résulte précisément du fonctionnement du dispositif de la carte scolaire !
Le Gouvernement a donc décidé, en 2007, d’aller vers la suppression de la carte scolaire en procédant de manière progressive, par un assouplissement. Nous avons ainsi mis en place de nouveaux critères de dérogation, en donnant la priorité aux enfants boursiers et aux enfants handicapés.
Deux ans après, nous constatons que le nombre de dérogations a augmenté de plus de 11 %. Cette progression sensible est due à la prise en compte des demandes exprimées pour les élèves boursiers et handicapés, qui ont été satisfaites dans deux cas sur trois.
Comme je l’ai indiqué voilà quelques jours devant la commission de la culture, j’ai demandé à mes services de procéder à une évaluation plus approfondie de ces deux premières années d’assouplissement de la carte scolaire. Dès que j’en aurai les résultats, je les communiquerai à votre assemblée.
Il nous faut aller plus loin, et j’ai évoqué tout à l’heure un certain nombre de pistes.
D’abord, les élèves issus des écoles des réseaux « ambition réussite », les anciennes zones d’éducation prioritaire, doivent pouvoir choisir plus facilement leur collège, en vue d’une plus grande mixité sociale.
Il nous faut ensuite travailler sur les projets de ces établissements. Je le disais tout à l’heure, 20 % des 250 collèges des réseaux « ambition réussite » ont vu leurs effectifs augmenter : la raison en est que ces établissements ont construit un projet, auquel adhèrent les équipes pédagogiques ; ils ont bâti une identité forte et mis en place des partenariats. Il faut donc utiliser ces expériences et les diffuser dans d’autres établissements.
J’ai pris la décision qu’aucun collège ne serait fermé du seul fait des conséquences de l’assouplissement de la carte scolaire : les moyens affectés à un collège en difficulté doivent pouvoir servir à reconstruire un projet pédagogique. J’approuve l’idée qu’un collège puisse recruter sur profil des enseignants bien préparés et bien adaptés à sa situation.
Je reviendrai dans quelques semaines vous présenter le bilan que j’ai évoqué et vous soumettre des pistes de réflexion. Un certain nombre de syndicats m’ont proposé de travailler avec eux sur le sujet de la carte scolaire. Encore une fois, il nous faut aller plus loin et dépasser la situation actuelle : c’est bien le fonctionnement perverti du dispositif de la carte scolaire qui aboutissait à la ghettoïsation.
Monsieur le ministre, les délits d’initiés que vous évoquez, nous les connaissions, certes, et depuis bien longtemps. Je pense néanmoins qu’ils posaient moins de problèmes que le système actuel.
Les inspecteurs d’académie que nous rencontrons soulignent combien l’assouplissement de la carte scolaire, dont je persiste à penser qu’il n’a probablement pas été assez préparé, suscite de véritables difficultés au regard de la répartition des horaires, des transports scolaires, de l’accompagnement scolaire : autant d’aspects qui n’ont pas été anticipés.
Cela étant, je me réjouis qu’une véritable étude soit en cours de réalisation, qui nous permettra de voir si cet assouplissement répond vraiment aux besoins de nos élèves.
Le Gouvernement a mis en œuvre, dès la rentrée de 2009, une réforme du lycée professionnel. L’objectif de cette réforme, que nous soutenons, est d’amener davantage de jeunes jusqu’au baccalauréat professionnel. Je tiens d’ailleurs à souligner que les principales orientations de cette réforme ont été approuvées par le rapport annuel du Haut Conseil de l’éducation, remis au Président de la République le 17 novembre dernier.
L’objet de cette réforme est non seulement d’augmenter le nombre de bacheliers professionnels et de favoriser leur accès à l’enseignement supérieur, mais aussi d’améliorer la lisibilité des diplômes pour les élèves et pour les chefs d’entreprise qui les recrutent. Il s’agit, surtout, de réduire significativement le nombre de jeunes quittant le système scolaire sans qualification.
Cette réforme a été fondée sur le constat suivant : un élève sur deux ayant choisi la voie professionnelle n’allait pas plus loin que le BEP. En effet, les élèves faisaient face à plusieurs types de difficultés.
Tout d’abord, le choix d’une spécialisation ou d’une filière se posait en des termes particulièrement contraignants pour l’élève. En ce sens, nous saluons la simplification et la souplesse de l’organisation de l’enseignement rendues possibles par la mise en place de passerelles entre les spécialisations et entre les filières.
Ensuite, la préparation d’un baccalauréat en quatre ans, contre trois ans pour les autres filières, apparaissait pénalisant pour les élèves. Je me félicite donc de ce que l’accès au baccalauréat professionnel soit désormais facilité, grâce à la création d’un parcours en trois ans, au lieu de quatre.
Cependant, je m’interroge sur les conséquences de l’accélération des apprentissages. En effet, pour de nombreux jeunes, la première année de BEP constituait une année de remise en confiance après une scolarité difficile. Pouvez-vous nous préciser, monsieur le ministre, quel est l’avenir des CAP et des BEP ?
Applaudissements sur les travées de l’UMP.
Madame le sénateur, vous avez rappelé l’importance et l’enjeu de la réforme de la voie professionnelle. Ma conviction profonde est qu’il n’y a pas une filière unique d’excellence dans notre pays.
Par le passé, nous avons trop souvent eu le sentiment que la voie générale, et particulièrement la série S, constituait, en quelque sorte, la voie royale, en dehors de laquelle il n’y avait point de salut !
Il convient donc de diversifier les voies et les filières d’accès à l’excellence. C’est précisément l’enjeu de cette réforme du bac professionnel : le passage à trois ans vise à le revaloriser, pour le mettre sur un pied d’égalité avec le bac général et le bac technologique.
Nous avons la volonté de créer des passerelles qui permettent une orientation progressive des élèves. Dans cette perspective, ceux-ci recevront des formations correspondant à plusieurs spécialités du baccalauréat professionnel.
Nous avons également travaillé sur l’insertion de ces jeunes, afin de limiter le nombre d’élèves qui quittent le système sans diplôme ni qualification, dont on sait qu’une grande partie vient de la filière professionnelle.
Que deviennent, dans ces conditions, le CAP et le BEP ? Le passage à trois ans du parcours conduisant au baccalauréat professionnel modifie le niveau V, en faisant du CAP le diplôme d’insertion à ce niveau et du BEP une simple étape. Jusqu’à présent, un jeune sur deux arrêtait ses études après le BEP. L’objectif étant d’améliorer le niveau de qualification et d’amener le maximum de nos jeunes jusqu’au baccalauréat professionnel, le BEP va devenir une étape du cursus vers le baccalauréat professionnel.
Monsieur le ministre, je vous remercie de ces précisions : nul doute qu’elles vont rassurer les nombreux jeunes qui fondent de grands espoirs sur votre réforme du baccalauréat professionnel.
Monsieur le ministre, je voudrais revenir sur la question des RASED. L’opacité du projet de loi de finances pour 2010 quant à l’avenir de ces réseaux m’amène à tirer de nouveau la sonnette d’alarme et à exercer une sorte de droit de suite.
Alors que le projet de loi de finances pour 2009 prévoyait la sédentarisation ou, pour mieux dire, la suppression de 3 000 postes en RASED, soit 1 000 équivalents temps plein travaillé, pour la rentrée, M. Darcos avait dû reculer devant la mobilisation. Il avait alors pris l’engagement de ne supprimer que 1 500 postes, soit 500 équivalents temps plein travaillé, ou ETPT. La suppression de ces 3 000 postes en RASED devait, en fait, permettre de combler le vide laissé par 3 000 départs à la retraite
Le projet de loi de finances pour 2009 prévoyait un plafond d’emplois de 318 912 ETPT pour le premier degré. Si l’engagement de ne supprimer que 1 500 postes en RASED avait été tenu, le plafond aurait dû logiquement être relevé de 500 ETPT. Or, à la page 50 du « bleu » budgétaire de cette année, que lit-on pour le plafond d’emplois au titre de 2009 ? La même chose que l’an dernier, soit 318 912 ETPT !
Les engagements ne sont donc pas tenus, sauf à penser qu’ils l’ont été au détriment d’autres postes. Monsieur le ministre, sans doute allez-vous pouvoir m’éclairer sur ce sujet.
De plus, je regrette, comme mon collègue Domeizel, que nous ne disposions pas d’une évaluation du dispositif de l’aide personnalisée. Vous parlez d’un bilan positif, mais il se fonde surtout, me semble-t-il, sur des données quantitatives. Que sait-on réellement de ce qui est fait pendant ces deux heures hebdomadaires ? Quels sont les élèves concernés ? Quel type d’activité est pratiqué ? Et avec quelle efficacité ?
J’ai entre les mains une étude que vous devez connaître. Publiée en septembre 2009 par la Fédération nationale des associations de rééducateurs de l’éducation nationale, la FNAREN, et l’université Paris-Descartes, elle porte sur les différences de traitement des difficultés scolaires entre l’aide personnalisée et l’aide spécialisée des RASED.
L’efficacité de l’aide personnalisée est confirmée pour les seuls élèves dont le niveau, même bas, est homogène. En revanche, pour ceux dont les difficultés relèvent d’une multiplicité de facteurs, l’aide rééducative des RASED permet des progrès dans le domaine des acquis scolaires, mais aussi dans celui des compétences cognitives, sociales et relationnelles.
Le fait que les difficultés de beaucoup d’élèves soient d’origine multifactorielle implique qu’il est nécessaire d’apporter des réponses adaptées et diversifiées. Ma question sera donc simple : allez-vous poursuivre la mise en œuvre de cette logique budgétaire de réduction de postes au détriment des enfants, ou bien allez-vous enfin entendre les arguments des professionnels qui militent pour une école ambitieuse, de la réussite pour tous, où les RASED doivent avoir toute leur place et être reconnus pour leur efficacité sur le terrain ?
J’ai rappelé tout à l’heure que, dans le premier degré, le traitement des difficultés scolaires et la lutte contre l’échec scolaire constituaient pour le Gouvernement un objectif prioritaire.
Nous avons donc mis en place un dispositif complet permettant la prise en charge de tous les types de difficultés rencontrées par les élèves.
Deux heures d’aide individualisée sont dispensées chaque semaine par les enseignants, cette aide étant potentiellement accessible à tous les élèves, par exemple à ceux qui rencontrent des difficultés de lecture.
Des stages de remise à niveau, naturellement gratuits, sont mis en place pendant les vacances scolaires pour les élèves de CM1 et de CM2 rencontrant des difficultés en français et en mathématiques.
Les enseignants ont donc la possibilité de traiter eux-mêmes les difficultés liées à l’apprentissage, dans le prolongement de leurs classes.
Dans ce contexte, la contribution des enseignants spécialisés des RASED a évolué : ils interviennent désormais en cas de très grandes difficultés. À la rentrée de 2009, les maîtres spécialisés des RASED, dont l’action est donc tournée vers les situations que les professeurs des écoles ne peuvent pas gérer, étaient 8 000, nombre auquel il convient d’ajouter les 1 500 maîtres spécialisés itinérants, affectés à titre de surnuméraires dans une ou deux écoles.
Ce dispositif a été reconduit dans ces termes dans le projet de budget pour 2010.
J’observe que je n’ai pas reçu de réponse à la première partie de ma question !
Il me semble qu’une véritable confusion est entretenue entre les deux types d’aides.
M. Darcos m’avait indiqué, l’année dernière, que l’échec scolaire devait être résolu par les enseignants dans les classes. Or, l’aide spécialisée n’est pas dispensée en classe, mais vient s’ajouter aux horaires de cours.
Cela nous a d’abord amenés à nous inquiéter des effets du rallongement de la journée scolaire, l’aide personnalisée intervenant souvent à l’heure du déjeuner ou le soir.
En outre, quid des « bons » élèves, qui perdent ainsi pas moins de 540 heures d’enseignement du CP au CM2 ?
Quant aux enseignants, ils doivent devenir des « super-formateurs » polyvalents : enseignement, orientation à la place des conseillers d’orientation-psychologues, bivalence pour assurer plus de remplacements, aide aux élèves à la place des RASED.
Dans le même temps, les crédits de la formation continue sont réduits. Par exemple, les enseignants du premier degré perdront à la rentrée prochaine l’équivalent de 165 900 jours de formation continue : c’est une preuve supplémentaire que ce budget s’inscrit toujours dans une logique comptable.
Monsieur le ministre, vous avez commencé votre intervention, tout à l’heure, en disant que le monde avait besoin de davantage d’éducation ; je suis tout à fait d’accord avec vous sur ce point, mais permettez-moi d’ajouter que l’éducation a besoin de moyens.
Or, au travers de ce projet de budget, vous poursuivez l’œuvre de réduction massive des moyens humains entreprise depuis 2002.
En 2010, 16 000 postes seront supprimés, tandis que 13 500 l’avaient déjà été en 2009. Au total, près de 45 000 postes ont disparu depuis 2003, alors que, dans le même temps, les effectifs du premier degré ont progressé de plus de 15 000 élèves.
Dans la logique de la fameuse RGPP, le Gouvernement avait annoncé que, en ce qui concernait l’enseignement scolaire, deux départs à la retraite sur trois devaient être compensés. Or, aujourd'hui, la réalité nous apparaît : le taux de remplacement ne sera que de un sur deux.
Les effets de cette politique se font déjà sentir, hélas ! et, dans certaines académies, on doit désormais recourir à des contractuels ou à des retraités pour assurer les remplacements… quand les remplacements sont assurés. Dans certains établissements, les horaires normaux d’éducation physique et sportive ne peuvent être dispensés, faute d’enseignants.
Dans ce domaine comme dans d’autres, l’obsession comptable et la politique du chiffre ne peuvent mener qu’à la dégradation du service public.
L’année dernière, toujours au nom de la rationalisation, le Gouvernement avait décidé de supprimer un grand nombre de postes en RASED. Les heures d’intervention des RASED ont été remplacées par des heures de soutien assurées par les enseignants : or, quand elles ont effectivement été mises en place, ces heures de soutien ont été le plus souvent dispensées au moment de la pause du déjeuner, ce qui est en totale contradiction avec les recommandations issues des études portant sur les rythmes scolaires. De plus, aucun contenu sérieux n’a été défini pour cette aide.
En réalité, on a sacrifié les RASED, qui accomplissaient un travail remarquable auprès des enfants en difficulté scolaire, pour leur substituer une solution inadaptée, qui peut apparaître comme un contresens pédagogique.
Quels critères avez-vous retenus, monsieur le ministre, pour l’évaluation du dispositif d’aide ? Au travers de vos propos, j’avais perçu qu’il s’agissait plutôt d’un indice de satisfaction que d’un critère relatif à la réussite de l’enfant.
Par ailleurs, jusqu’à quand allez-vous persister à ne compenser qu’un départ à la retraite sur deux, en privant ainsi notre enseignement public des moyens dont il a besoin ?
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.
Madame le sénateur, j’ai rappelé tout à l’heure les propos tenus par le Président de la République cet après-midi ; ils apportent, me semble-t-il, des éléments de réponse à votre seconde question.
Nous pouvons nous retrouver sur un point au moins : l’éducation a besoin de moyens. Or justement, le projet de budget que je vous présente ce soir, avec 59, 6 milliards d'euros, est le plus gros budget que vous ayez jamais eu à voter, mesdames, messieurs les sénateurs, pour l’éducation nationale.
J’ai également rappelé que, dans l’environnement budgétaire contraint que la commission des finances du Sénat connaît bien, marqué par une augmentation de 1, 2 % des dépenses de l’État l’année prochaine, l’éducation nationale voit, quant à elle, son budget progresser de 1, 6 %, ce qui signifie bien que nous nous situons au-delà de la simple contrainte budgétaire.
Je rappellerai enfin, madame le sénateur, que, depuis 1975, la France n’a cessé d’augmenter son budget pour l’éducation nationale et qu’elle consacre 16 % de plus à ses élèves du secondaire que la moyenne des pays de l’OCDE.
En conséquence, s’il suffisait de multiplier les moyens pour obtenir des résultats, 150 000 jeunes ne quitteraient sans doute pas chaque année notre système éducatif sans diplôme, comme c’est le cas aujourd’hui.
Nous n’avons pas fait le choix de tailler dans les effectifs de manière systématique : nous adaptons aux priorités et aux évolutions démographiques les moyens de l’éducation nationale, par exemple en créant cette année plus de 2 000 postes dans le primaire et dans les zones urbaines sensibles.
S’agissant de l’évaluation de l’aide individualisée, j’ai fait référence tout à l’heure à un rapport de l’Inspection générale de l’éducation nationale. Un autre outil nous sera fourni par l’évaluation des élèves décidée dans le cadre de la réforme : l’aide individualisée est maintenant en place depuis une année pleine, et nous allons donc pouvoir mesurer, auprès des élèves, les effets qu’elle peut avoir. Les résultats de ces évaluations étant publics, ils seront naturellement largement diffusés.
Monsieur le ministre, vous avez dit, à juste titre, que le monde avait changé et nos élèves aussi ; dès lors, il est sans doute normal que les moyens aient augmenté sur les vingt dernières années.
Par ailleurs, si vous voulez comparer ces moyens à ceux qu’allouent les autres pays de l’OCDE à leur système éducatif, il faut entrer dans le détail et examiner quel usage en est fait et à quelles priorités ils sont affectés.
Pour ma part, je constate avec inquiétude qu’il y a une diminution des moyens consacrés à l’accompagnement des élèves en difficulté. Or, c’est sur ces élèves-là que nous devons faire porter notre effort si nous voulons réduire le nombre des élèves qui sortent sans qualification de notre système éducatif.
Sur un budget de presque 60 milliards d’euros devant être consacrés à la mission « Enseignement scolaire » en 2010, le système du remplacement mobilisera 2, 7 milliards d’euros.
Depuis quelques années, les parents se plaignent de l’inefficacité des remplacements, et les enseignants eux-mêmes les jugent inadaptés aux besoins des écoles, mais aussi et surtout des élèves.
Nous sommes dans une situation telle qu’il s’agit avant tout d’organiser la pénurie. À chaque rentrée, du fait des suppressions de postes, les conditions d’enseignement se dégradent et la gestion quotidienne des remplacements se trouve compliquée.
Dans mon département, le Tarn-et-Garonne, la situation à cet égard est devenue très alarmante dans les écoles primaires.
Alors que la population scolaire du premier degré s’est accrue de 1 140 élèves entre 2006 et 2008, les créations de postes n’ont pas suivi. Le Tarn-et-Garonne a ainsi la particularité d’avoir un des taux de remplacement les plus bas, soit 6, 95 %, alors que la moyenne de l’académie de Toulouse est de 8, 5 %, et la moyenne nationale de 8, 4 %. En 2007, le département se classait, sur ce plan, à l’avant-dernier rang national, devant le Morbihan.
Comment faire accepter aux parents cette situation de sous-dotation chronique ? Cette année, l’affectation de deux remplaçants supplémentaires, pour un total de quatre-vingt-deux, ne suffira pas à rattraper le retard accumulé, d’autant que, sur ces deux postes, un demi-poste a été créé pour compenser la fermeture d’une classe à Montaigu-de-Quercy.
Les difficultés sont telles que sept enseignants du Lot voisin ont été intégrés, mais nous sommes encore loin des moyennes académiques. En outre, monsieur le ministre, que deviendront ces postes l’an prochain ?
À la rentrée de 2010, 777 élèves supplémentaires seront attendus dans les écoles primaires du Tarn-et-Garonne, ce qui devrait avoir pour conséquence l’allocation d’une dotation exceptionnelle au titre de l’évolution démographique, correspondant à une vingtaine de postes. Par ailleurs, si des créations de postes de remplaçant sont envisagées pour la rentrée de 2010, se feront-elles au détriment des nécessaires ouvertures de classes ?
Monsieur le ministre, la question des remplacements recouvre deux enjeux majeurs : d’une part, la continuité de la scolarité des enfants ; d’autre part, la formation continue des professeurs. Quelles garanties pouvez-vous donc nous apporter pour rassurer des parents et des enseignants très inquiets ?
Avant d’évoquer le cas de votre département, je présenterai la situation générale au regard des remplacements.
Il est exact que le système des remplacements doit être amélioré dans notre pays. Il est aujourd'hui beaucoup trop rigide, et nous avons décidé d’y remédier.
Pour lui donner davantage de souplesse, mon prédécesseur avait envisagé la création d’une agence du remplacement, évoquée tout à l’heure par M. Longuet. Je ne suis pas sûr que le terme « agence » soit forcément approprié, mais le principe d’une amélioration du système des remplacements doit demeurer. J’ai donc confié une mission sur ce thème à M. Michel Dellacasagrande, ancien directeur des affaires financières de l’éducation nationale, qui doit me rendre dans les prochains jours les conclusions de ses travaux. J’annoncerai des mesures d’amélioration de notre système du remplacement au début de l’année prochaine.
Aujourd'hui, 91 % des absences sont compensées dans le premier degré, mais le taux de mobilisation des titulaires remplaçants est de 80 % seulement. Il nous faut donc aller plus loin.
Dans le second degré, le remplacement est assuré à 96, 5 %, mais le taux de mobilisation des TZR, les titulaires en zone de remplacement, est de 85 %.
Par ailleurs, on constate de fortes disparités entre académies : dans l’une, il y aura des enseignants disponibles dans certaines disciplines, mais pas de besoins ; dans une académie voisine, il y aura des besoins dans ces mêmes disciplines, mais pas d’enseignants disponibles…
Telle est la situation, et je reviendrai donc vous présenter en début d’année prochaine, mesdames, messieurs les sénateurs, des propositions tendant à l’améliorer.
Quant à la situation particulière du Tarn-et-Garonne, monsieur Collin, les chiffres qui m’ont été transmis montrent que votre département a reçu des dotations en postes significatives pour faire face à la pression démographique. Il a en effet bénéficié de seize des quarante-quatre emplois créés dans l’ensemble de l’académie à la rentrée de 2007, et de vingt-cinq des quarante postes créés, toujours dans l’ensemble de l’académie, à la rentrée de 2009. Le Tarn-et-Garonne s’est donc vu octroyer 62, 5 % des emplois créés à la rentrée de 2009 alors qu’il compte moins de 10 % des effectifs du premier degré de l’ensemble de l’académie. Par conséquent, je n’ai pas le sentiment que votre département ait été mal traité par le rectorat !
J’ai bien noté, monsieur le ministre, que le fonctionnement des remplacements ne vous paraît pas idéal et que vous envisagez de l’améliorer dès la rentrée prochaine.
Les chiffres que j’ai cités pour le département du Tarn-et-Garonne sont parfaitement exacts. Si vous le souhaitez, je suis tout à fait disposé à poursuivre cette discussion.
Monsieur le ministre, la loi du 11 février 2005 a renforcé les actions en faveur de la scolarisation des enfants handicapés. Elle affirme le droit, pour chacun, à une scolarisation en milieu ordinaire, au plus près de son domicile, à un parcours scolaire continu et adapté. Elle permet en outre aux parents d’être plus étroitement associés à la décision d’orientation de leur enfant et à la définition de son projet personnalisé de scolarisation.
Comme l’a rappelé le Président de la République lors de la première Conférence nationale du handicap du 10 juin 2008, la scolarisation des enfants handicapés reste un objectif prioritaire.
Dans cette perspective, une solution concrète en faveur des enfants handicapés scolarisés a été adoptée lors de l’élaboration, en juillet dernier, de la loi relative à la mobilité et aux parcours professionnels dans la fonction publique.
Cette mesure prévoit que l’aide individuelle de l’État en faveur des enfants présentant un handicap particulier pourra être assurée par une association ayant fait l’objet d’un agrément et conclu une convention avec le ministère de l’éducation nationale, et ce après la signature d’un accord entre l’inspecteur d’académie et la famille de l’enfant. Cette solution innovante permet de garantir la continuité de l’aide scolaire entre l’école et le milieu familial, dans l’intérêt supérieur de l’enfant.
Pouvez-vous nous rassurer, monsieur le ministre, sur la mise en œuvre de cette mesure ?
Par ailleurs, en ce qui concerne les auxiliaires de vie scolaire, force est de constater les progrès qu’ils font accomplir à l’élève dont ils ont la charge, grâce à la relation de confiance qu’ils instaurent avec lui. Dans ces conditions, la fin de leur contrat de travail est souvent déstabilisante pour l’enfant handicapé, comme pour sa famille. Quelles mesures pourraient être prises pour éviter ces difficultés, monsieur le ministre ?
Enfin, pouvez-vous nous préciser le nombre d’unités pédagogiques et de postes d’auxiliaire de vie prévus dans le projet de budget ?
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
Madame le sénateur, j’ai rappelé tout à l’heure la forte volonté du Gouvernement d’intégrer les élèves handicapés à l’école et les progrès qui ont été réalisés depuis quatre ans : 185 000 enfants handicapés sont aujourd’hui scolarisés au sein des établissements.
Nous avons ouvert, lors de la dernière rentrée, 200 nouvelles unités pédagogiques d’intégration. Elles sont désormais au nombre de 1 800 dans notre pays, l’objectif étant de passer le cap des 2 000 UPI à la rentrée de 2010.
Par ailleurs, nous ouvrons chaque année, dans le premier degré, une centaine de classes pour l’inclusion scolaire, les CLIS. Aujourd’hui, plus de 4 000 CLIS accueillent environ 41 000 élèves.
S’agissant des auxiliaires de vie scolaire, j’ai déjà dit que nous avions fait le choix de reconduire les 17 000 contrats existants. Nous avons en outre créé 5 000 postes supplémentaires, ce qui signifie qu’aujourd’hui 22 000 postes d’auxiliaire de vie scolaire individuel sont inscrits dans le projet de budget.
Nous avons conscience des difficultés rencontrées par certaines familles en termes de continuité dans l’accompagnement de leur enfant lorsque le contrat d’un auxiliaire de vie scolaire arrive à échéance et ne peut être renouvelé, bien que le poste continue d’exister. Le Gouvernement a donc présenté un amendement, que le Sénat a adopté au mois de juillet, visant à permettre la prise en charge de ces personnels par les associations, qui prennent ainsi le relais.
J’ai signé une convention en ce sens, avant la rentrée scolaire, avec l’Union nationale des associations de parents et amis de personnes handicapées mentales, l’UNAPEI, la Fédération générale des pupilles de l’enseignement public et la Fédération nationale des associations au service des élèves présentant une situation de handicap, la FNASEPH, puis, cet après-midi même, avec l’association Autisme France. Ce dispositif, qui prévoit le versement d’une aide de l’État, doit permettre d’assurer un portage et la continuité de la présence des mêmes auxiliaires de vie scolaire auprès des enfants handicapés scolarisés.
Pour l’avenir, il serait bon, comme vous l’avez souligné, madame le sénateur, de pérenniser ces emplois de façon durable. Ma collègue Nadine Morano et moi-même réfléchissons à la constitution d’une véritable filière professionnelle, comme il en existe dans le secteur médico-social, car il s’agit là d’un vrai métier, appelé à se développer dans les années à venir. Des auxiliaires de vie ont été formés et ont acquis de vraies compétences ; il ne faut pas les laisser perdre.
Je vous remercie de vos réponses, monsieur le ministre, qui sont de nature à rassurer les familles des enfants handicapés. Il nous faut toujours avoir à l’esprit les difficultés qu’elles rencontrent pour trouver un établissement qui convienne au type de handicap de leur enfant. C’est toujours un véritable parcours du combattant, car chaque cas est unique.
La situation s’améliore, mais il faut encore trouver des solutions au cas par cas, dans l’intérêt de l’enfant.
En 2009, un projet de création d’une agence nationale du remplacement était censé justifier la suppression de 3 000 postes d’enseignant. Aujourd’hui, ce projet semble abandonné, mais les 3 000 postes ont bel et bien été supprimés. Dans les documents budgétaires, on parle désormais en équivalents temps plein, officiellement pour décompter de façon plus exacte les temps partiels, mais, en réalité, pour que l’on ne puisse plus distinguer les emplois précaires des emplois statutaires.
Sous couvert d’une amélioration de la gestion des remplacements, vous procédez littéralement à une précarisation à marche forcée des enseignants affectés à une mission de remplacement dans le second degré. En effet, la proportion de non-titulaires ne cesse d’augmenter, particulièrement dans le cadre du service du remplacement.
Alors que le budget affecté au remplacement est en baisse, on ne peut que s’interroger sur la volonté du ministère : souhaitez-vous avoir de plus en plus recours à une main-d’œuvre bon marché, malléable car désemparée, ou à une cohorte de précaires embauchés selon les besoins et payés à la vacation ?
La réforme de la formation des maîtres est d’ailleurs une aubaine au regard de cette politique, qui transforme les jeunes diplômés en génération « kleenex » : combien d’étudiants se retrouveront sans poste, à l’issue de leur master d’enseignement, faute d’un recrutement suffisant de titulaires ? Ce seront autant de jeunes diplômés disponibles pour assurer suppléances et vacations à bas coût, sans aucune perspective !
Avec l’autonomisation des établissements qui, faute d’enseignants disponibles, affectent à l’année des titulaires sur zone de remplacement, les TZR, on assiste à une baisse du potentiel de remplacement, d’où l’augmentation du recours à des précaires. C’est d’autant plus pratique que ces précaires sont rémunérés sur les budgets d’heures supplémentaires effectives et qu’ils ne sont donc pas comptabilisés au titre du plafond d’emplois : encore une économie facile réalisée par le ministère, au détriment de l’offre éducative !
Cet ensemble de mesures d’économie déstabilise le dispositif de remplacement, ce qui conduit à une augmentation du nombre d’enseignants non remplacés. On se rappellera la création par la Fédération des conseils de parents d’élèves des écoles publiques, la FCPE, en septembre 2009, d’un site de recensement des enseignants non remplacés, témoignage du désarroi des parents face à la dégradation bien réelle de l’offre éducative.
On peut aussi s’interroger sur la pertinence de l’indice de performance, qui ne comptabilise, pour calculer le taux de remplacements, que ceux de longue durée, excluant ceux de moins de quinze jours, qui posent justement le plus de problèmes.
Étant donné les répercussions réelles, sur le terrain, de la diminution du nombre de postes, après la suppression de 3 000 postes de remplaçant, les TZR étant en outre moins nombreux et souvent affectés à l’année, eu égard à cette importante baisse du potentiel de remplacement, par quels moyens envisagez-vous de remplacer les enseignants absents cette année ? Va-t-on continuer à précariser toute une génération de jeunes diplômés ?
Monsieur le sénateur, ce projet de budget prévoit, pour le premier degré, 27 000 postes de titulaire remplaçant, soit 8, 5 % du nombre total d’enseignants du premier degré, et 21 000 enseignants remplaçants pour le second degré, dont 75 % de titulaires, soit 15 700 TZR, et 25 % de contractuels, soit 5 300 vacataires, souvent faute de titulaires disponibles dans la discipline concernée.
Je précise que ces vacataires sont souvent des étudiants ayant échoué au concours de recrutement et qui vont le représenter l’année suivante. Ils bénéficient ainsi d’une formation permanente complémentaire, en attendant le prochain concours.
J’ai déjà rappelé que la situation globale du remplacement ne me satisfaisait pas. C’est la raison pour laquelle j’ai confié une mission sur ce sujet à M. Dellacasagrande, qui me rendra ses conclusions dans les jours prochains. Ma conviction est que nous devons nous orienter vers un système beaucoup plus souple et plus efficace, permettant aux académies d’interagir et d’affecter les moyens là où sont les besoins.
Vous avez omis d’évoquer, monsieur le ministre, la désormais célèbre circulaire de M. le recteur de l’académie de Créteil relative à l’ « amélioration des pratiques liées au remplacement ».
Au travers de ce document, dont la presse s’est largement fait l’écho et qui fera date, les chefs d’établissement sont invités à remédier aux problèmes de remplacement des professeurs absents, le rectorat n’étant plus, de son propre aveu, en capacité de le faire, car il ne dispose pas du corpus d’enseignants suffisant. Aussi les responsables d’établissement sont-ils appelés à trouver et à recruter « des étudiants ou des personnes titulaires au minimum d’une licence ou ayant des compétences avérées » à qui, en « cas d’urgence », on pourrait confier immédiatement des élèves.
Cette situation est difficilement acceptable, d’autant que ce sont souvent les établissements des quartiers les plus défavorisés qui connaissent les plus grands besoins en matière de remplacements. Il est indispensable, tout particulièrement dans ces établissements, que les remplacements soient assurés par des enseignants formés et expérimentés, et non par des jeunes livrés à eux-mêmes face à des élèves qui feront, eux, les frais de l’inexpérience de leurs professeurs.
Comme j’ai pu le dire hier matin à Mme Pécresse lors du débat sur le projet de budget de la recherche et de l’enseignement supérieur, la précarité est en passe de devenir une véritable plaie pour l’ensemble de notre système d’enseignement et de recherche. Prenez-y garde, monsieur le ministre !
« Un plan d’urgence pour les langues » : c’est ainsi que le Président de la République a qualifié, le 13 octobre dernier, la nouvelle politique qu’il entend promouvoir en matière d’enseignement des langues étrangères, en affichant l’ambition de former des bacheliers bilingues, voire trilingues.
Bilinguisme, trilinguisme : ce sont bien les termes employés par M. Sarkozy. Cette ambition est remarquable !
Sénatrice des Français de l’étranger et observatrice particulièrement attentive de l’incroyable enrichissement que représentent non seulement la maîtrise d’une autre langue, mais aussi la connaissance inhérente d’une autre culture, d’un autre mode de pensée, je souscris totalement à cet ambitieux projet ; j’attendais donc des idées neuves de la réforme du lycée.
Mais dans les faits, monsieur le ministre, à quoi correspond ce « plan d’urgence » ?
Est annoncée, d’abord, la répartition des élèves par groupes de compétence. Mais les groupes de niveau ne sont-ils pas déjà prévus par les textes ? Leur mise en place effective n’est empêchée, bien souvent, que par le manque de moyens…
Est prévu, ensuite, le recours à des locuteurs natifs. Mais que sont les assistants, présents dans nombre d’établissements, sinon des locuteurs natifs ? Et ce n’est pas une nouveauté, puisqu’ils existaient déjà à l’époque lointaine où je fréquentais le lycée !
Est proposé, enfin, l’enseignement de matières non linguistiques en langues étrangères. C’est un excellent moyen, en effet, de témoigner que la langue étrangère, plus qu’une simple discipline, est avant tout un outil de communication permettant, en l’occurrence, d’acquérir des connaissances.
N’est-ce pas le rôle des sections européennes, telles que nous les connaissons depuis bientôt vingt ans ?
Monsieur le ministre, le bilinguisme que vous appelez de vos vœux, c’est bien autre chose, et cela nécessite bien d’autres moyens. Cet objectif peut être approché grâce, d’abord, à l’enseignement précoce, c’est-à-dire dès la maternelle, les professeurs des écoles ne devant cependant pas se limiter à l’apprentissage de comptines, et grâce, ensuite, à la généralisation de l’enseignement de disciplines fondamentales non linguistiques par des locuteurs natifs.
Mais l’éducation nationale dispose-t-elle des ressources humaines adéquates ? J’en doute. Pour parvenir à cette fin, une vision au minimum européenne est nécessaire, accompagnée d’échanges d’enseignants. Dans ce cadre, le récent programme Jules Verne, sorte de programme Erasmus des professeurs, est prometteur, c’est vrai, mais à la condition qu’il soit davantage développé.
Bien entendu, il n’est pas question de mettre en concurrence les professeurs de l’éducation nationale et les enseignants locuteurs natifs. L’expérience des écoles françaises à l’étranger – je les connais bien – témoigne de la parfaite complémentarité de leur travail pour le bienfait de tous. Qui mieux qu’un natif peut enseigner non seulement la langue, mais aussi les codes interculturels et la communication non verbale ?
Je vous poserai une seule question, monsieur le ministre : au-delà des mots, l’éducation nationale se donnera-t-elle les réels moyens de faire en sorte que chaque lycéen approche au moins le bilinguisme à sa sortie du lycée ?
Madame le sénateur, nous partageons le même objectif : nous ne nous résignons pas à ce que notre pays demeure dans les profondeurs des classements internationaux : il occupe la soixante-quatrième sur cent neuf du classement TOEFL. Nous avons décidé de prendre le taureau par les cornes, si vous me permettez cette expression, et de multiplier les initiatives dans le domaine de l’apprentissage des langues.
Les décisions que nous avons prises font suite à des expérimentations qui ont été menées avec succès dans de nombreux lycées. Les groupes de compétences, consistant à regrouper les élèves par niveau homogène et à dispenser un enseignement en petits groupes aux élèves connaissant davantage de difficultés, existent dans un certain nombre d’établissements. Ils ont montré leur efficacité.
Par ailleurs, certaines disciplines seront enseignées en langue étrangère. Dans la filière littéraire, qui doit devenir une filière linguistique d’excellence, deux heures et une heure trente de littéraire étrangère seront dispensées respectivement en première et en terminale. Il s’agira d’enseignements supplémentaires. Cette solution est l’une des bonnes réponses au problème de l’apprentissage des langues.
La généralisation du recours aux multimédias pour l’apprentissage de la langue anglaise, notamment, permettra de réaliser des progrès très significatifs, comme ce fut partout le cas où nous l’avons expérimenté.
Enfin, chaque lycéen devra avoir effectué au moins une fois un échange avec un établissement dans un pays dont la langue officielle est sa première langue vivante, ce qui contribuera également à un bon apprentissage des langues.
C’est non pas une seule mesure mais l’addition de plusieurs initiatives, pour la plupart expérimentées avec succès, qui permettra de régler le problème. Nous voulons généraliser ces dispositions à tous les lycées.
Monsieur le ministre, je vous remercie de ces précisions.
Vous avez évoqué l’enseignement en langue étrangère de la littérature. On pourrait imaginer qu’il en soit de même pour l’histoire, par exemple. J’insiste sur le fait que cet enseignement pourrait être dispensé par des locuteurs natifs.
Je veux vous donner l’exemple du lycée français de Munich, que je connais très bien, où la littérature allemande et l’histoire sont enseignées par un enseignant ou une enseignante allemande. Un tel enseignement concourt non seulement à améliorer l’accent des élèves – point important –, mais aussi à diffuser une autre vision.
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
Mon intervention porte sur la formation des enseignants, volet fondamental pour mener à bien la réforme globale de l’éducation nationale dans laquelle vous vous êtes engagé, monsieur le ministre.
Au mois de juillet dernier, lors de votre audition par la commission de la culture, de l’éducation et de la communication, vous avez présenté les grands axes de votre projet. J’aimerais obtenir des précisions sur certains points.
Ma première question concerne l’objectif d’élévation du niveau de qualification des enseignants, désormais recrutés au niveau du master. Nous savons tous que le contenu des formations, de même que le fonctionnement des concours, ne permet plus de répondre aux besoins et aux attentes, sur le plan tant intellectuel que disciplinaire, du système éducatif. Comment la « mastérisation » pourra-t-elle répondre à ce double défi, et surtout, quelles mesures, à l’image du compagnonnage, l’accompagneront ?
Ma deuxième question vise la répartition des compétences entre l’État et les universités dans la mise en œuvre de la réforme de l’éducation nationale. En effet, leur complémentarité est seule garante d’une amélioration notoire de la qualité de l’éducation.
Je pense à la préparation aux concours, à l’adaptation des contenus, et, évidemment, à l’avenir des IUFM, qui ont vocation à s’intégrer pleinement dans la réforme et sont des éléments importants de l’attractivité de nos territoires. Pouvez-vous m’éclairer sur ce point ?
Monsieur le ministre, je n’oublie pas la célèbre formule de Victor Hugo : une école qui ouvre, c’est une prison qui ferme. Pouvez-vous donc nous éclairer encore sur la mise en œuvre de cette réforme essentielle pour les futurs enseignants et pour l’éducation des citoyens de demain, en précisant les moyens budgétaires qui lui seront alloués ?
J’ai eu l’occasion de revenir tout à l’heure sur les grands enjeux de la réforme de la formation des enseignants. Ces derniers doivent atteindre le haut niveau de compétences nécessaire à l’exercice de leur métier, ce qui sera possible grâce à l’allongement d’une année de la formation des maîtres. La revalorisation des carrières est par conséquent indispensable.
Les futurs enseignants, à l’issue de l’obtention d’une licence, suivront un master disciplinaire. En master 1, ils effectueront des stages dits d’« observation ». Ils passeront le concours au début du master 2 et suivront des stages de mise en situation au cours desquels ils seront confrontés à la réalité.
Les épreuves d’admissibilité des concours doivent avoir vocation à sélectionner les étudiants ayant le meilleur niveau scientifique, les meilleurs « disciplinaires », si je puis dire. Ensuite, lors de la phase d’admission, leur réelle aptitude à enseigner et, pour les CPE, à exercer des missions éducatives, sera vérifiée.
En réalité, il s’agit d’une part, de s’assurer de l’acquisition par les enseignants de bases scientifiques solides – l’allongement d’un an de leur formation répond à cet objectif –et, d’autre part, de vérifier leurs aptitudes pédagogiques. Ce sera l’objet des épreuves d’admission.
Comme je l’indiquais tout à l’heure, la « mastérisation » se traduit par la revalorisation financière en début de carrière. J’ai rappelé le montant dédié dans le présent projet de budget à ce poste. Les enseignants mieux formés pendant une année supplémentaire doivent être mieux rémunérés en début de carrière. Je souhaite que, d’ici à la fin du mois de janvier, la négociation engagée avec les organisations syndicales ait pu être bouclée.
Mlle Sophie Joissains. Monsieur le ministre, me voila rassurée et surtout pleine d’espoir : le talent pédagogique des futurs professeurs rejoindra leurs capacités scientifiques.
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
Monsieur le ministre, comme l’ont fait observer de nombreux collègues de gauche, ce budget comporte de nombreuses insuffisances mais aussi, malheureusement, beaucoup d’incohérences.
J’en veux pour preuve les crédits alloués à l’accompagnement des élèves handicapés.
Aujourd’hui, près de 160 000 d’entre eux sont scolarisés et, comme vous l’avez vous-même précisé, ils seront plus de 185 000 à la rentrée prochaine. On ne peut, bien sûr, que se féliciter d’une telle intégration.
Force est de constater cependant que les ressources mobilisées pour permettre cette intégration manquent cruellement : actuellement, à peine plus d’un quart de ces élèves sont accompagnés par un auxiliaire de vie scolaire individuel.
Ce taux d’encadrement est très faible ; il est d’autant plus anormal que, en 2003, un plan d’adaptation et d’intégration scolaire des élèves handicapés prévoyait la création de 6 000 postes d’auxiliaires de vie scolaire, ou AVS. Or, à ce jour, seulement 2 000 postes d’AVS collectifs, ou AVS-co, ont été créés. Ce manque est d’autant plus considérable qu’il n’est pas compensé par les AVS individuels, ou AVS-i.
Cette situation ne devrait pas s’améliorer, puisque le « bleu » pour 2010 ne précise pas le nombre de postes d’AVS collectifs qui seront créés. De plus, aucun chiffrage fiable relatif aux postes d’AVS individuels déjà créés ou devant être créés en 2010 n’est disponible.
C’est pourquoi le budget que vous nous proposez, monsieur le ministre, est incohérent : vous ne pouvez pas, d’un côté, prôner l’accueil d’un plus grand nombre d’enfants handicapés et, de l’autre, ne pas débloquer les crédits nécessaires au recrutement d’AVS en nombre suffisant.
Cette situation rend difficile, voire impossible l’intégration par un enseignant d’un élève handicapé dans sa classe parallèlement à une bonne gestion de ses autres élèves, faute de l’aide nécessaire.
De la même manière, il n’est pas acceptable que les AVS ou les emplois de vie scolaire, qui, eux aussi, participent à ces missions d’accompagnement, ne bénéficient pas d’un réel statut et de la reconnaissance sociale qui l’accompagne. Cette précarité les pénalise d’ailleurs doublement, puisqu’ils ne bénéficient pas du dispositif de validation des acquis.
Ce manque de personnel pénalise aussi et surtout les élèves handicapés et remet en cause leur intégration scolaire.
Dans ce domaine, l’État doit se donner les moyens de ses ambitions et débloquer les crédits correspondants aux engagements pris. Tel n’est manifestement pas le cas dans le budget qui nous est proposé aujourd'hui.
Les membres du groupe socialiste souhaitent donc connaître les mesures que vous comptez prendre pour respecter vos engagements, monsieur le ministre. Dans la réponse que vous venez d’apporter à Mme Mélot, les chiffres que vous avez cités ne sont pas les mêmes que ceux qui sont en ma possession.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.
Monsieur le sénateur, je vous le répète, 185 000 élèves handicapés sont bien scolarisés cette année, et non 160 000. Cette évolution est significative : leur nombre est deux fois plus important qu’il y a dix ans et enregistre une hausse de 40 % par rapport à 2005, au moment du vote de la loi pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées.
Monsieur Bérit-Débat, vous considérez que les ressources manquent. J’ai eu l’occasion de rappeler les moyens supplémentaires déployés par le Gouvernement, ainsi que la création d’unités pédagogiques d’intégration supplémentaires. À la rentrée 2009, 200 unités pédagogiques d’intégration ont été ouvertes et le Gouvernement espère disposer au total de 2 000 de ces unités à la rentrée 2010, soit la création de 200 unités supplémentaires.
Je rappelle, comme je l’ai indiqué à Mme Mélot, qu’une centaine de CLIS ont été créées dans le premier degré à la rentrée.
Non seulement nous avons voulu pérenniser les 17 000 postes d’AVS-i dont certains arrivaient à renouvellement, mais encore nous avons décidé, dans le cadre des mesures d’accompagnement du plan de relance, de créer 5 000 postes supplémentaires, ce qui porte le nombre de ces personnels à 22 000.
De tels moyens n’ont jamais été déployés jusqu’à présent dans le domaine de l’accompagnement du handicap !
Enfin, pour assurer la continuité de l’accompagnement des enfants handicapés par leur auxiliaire de vie scolaire, nous avons rendu possible leur portage en recourant à des associations d’enfants handicapés, avec un financement de l’État. Ce fut l’objet de l’amendement que vous avez adopté cet été, mesdames, messieurs les sénateurs, et des conventions que j’ai signées avec quatre associations.
Monsieur le ministre, les moyens d’accompagnement des élèves handicapés ont connu une baisse, significative, de 3 % en 2007 et de 14 % en 2008
Les chiffres que vous venez d’annoncer – j’en prends note –permettent, certes, de rattraper le retard accumulé au cours de ces années, mais partiellement seulement. Je veillerai à ce que ces chiffres se traduisent dans la réalité, ne serait-ce que dans les écoles de mon département et de ma ville.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ma question porte sur l’enseignement agricole.
Lors de l’examen des crédits de la mission « Enseignement scolaire », les sénateurs de la commission des finances et de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication se sont montrés critiques vis-à-vis du traitement réservé à l’enseignement technique agricole. Le Gouvernement doit y entendre un signal fort de l’attachement des sénateurs à cette filière d’excellence, excellence dont témoignent ces quelques chiffres : près de 338 000 élèves, étudiants, apprentis et stagiaires, répartis dans 1 385 établissements dans toute la France ; un taux d’insertion dans la vie professionnelle supérieur à 85 %.
Monsieur le ministre, je ne méconnais pas l’engagement du ministre de l’agriculture en faveur de la valorisation de la filière de l’enseignement agricole. Il s’est en effet exprimé sur ce sujet dès sa prise de fonction et à plusieurs reprises depuis. Il a fait de l’enseignement agricole son cheval de bataille, notamment en lançant, dès septembre dernier, les Assises nationales de l’enseignement agricole public.
Ces assises ont pour objet de réaffirmer les principes fondamentaux qui ont fait et qui font la force de l’enseignement agricole, d’élaborer dans la concertation une stratégie pour l’enseignement agricole public et de mieux faire connaître et reconnaître l’enseignement agricole.
Malgré cela, il est certain que ce projet de budget suscite de fortes craintes parmi les personnels de l’enseignement agricole.
Nous avons bien conscience des difficultés que rencontre le ministère de l’agriculture. Alors que le ministère de l’éducation nationale supporte l’ensemble des suppressions d’emplois dues à la mise en place de la mastérisation, l’enseignement agricole, quant à lui, ne peut supporter que 30 suppressions d’emplois sur les 224 suppressions de postes prévues dans le projet de loi de finances pour 2010.
Que comptez-vous faire, monsieur le ministre, pour que cette filière ne devienne pas le parent pauvre de l’enseignement et qu’elle reste avant tout une filière d’excellence ?
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
Monsieur le sénateur, le budget de l’enseignement agricole représente 2, 1 % de la mission « Enseignement scolaire ». En tant qu’élu d’un département rural, je connais, comme vous tous, la tradition de l’enseignement agricole ; je connais, comme vous tous, la spécificité de cet enseignement, qui constitue une offre de formation complémentaire à destination des populations rurales.
Nous sommes, Bruno Le Maire et moi-même, en quelque sorte les héritiers d’un système qui est loin d’avoir fait ses preuves, Mme Férat en a témoigné tout à l’heure.
M. Longuet défendra dans quelques instants un amendement résultant des discussions qui ont eu lieu entre nos deux ministères ces dernières semaines et qui vise à répondre aux inquiétudes et aux interrogations que suscite chez certains d’entre vous ce projet de budget.
Par ailleurs, monsieur le sénateur, mon devoir est de vous indiquer que cette situation ne pourra pas perdurer et qu’il nous faudra bien trouver une solution. Pour simplifier à l’extrême, il me semble assez logique, pour un bon contrôle de l’engagement des fonds publics et de la répartition des moyens, que, à un moment, le décideur, le gestionnaire et le payeur soient la même entité. Cela serait une sage décision.
Plusieurs réunions interministérielles ont été organisées sur le sujet. Bruno Le Maire et moi-même sommes très désireux de trouver, dans le cadre de la préparation du projet de loi de finances pour 2011, une solution qui nous permette d’éviter les gesticulations auxquelles nous avons dû procéder cette année, notamment dans le cadre de l’arbitrage que nous évoquerons tout à l’heure avec l’amendement de M. Longuet.
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
M. Jackie Pierre. Je vous remercie, monsieur le ministre. J’espère que ces filières trouveront leur compte dans vos propos. Il s’agit là d’un sujet important, qui pose de nombreux problèmes, particulièrement dans les départements comme le vôtre et le mien.
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous sommes tous d’accord sur les travées de cet hémicycle sur le fait que l’enseignement agricole est aujourd’hui dans une situation d’une extrême gravité. Les acteurs sont très inquiets. Le programme « Enseignement technique agricole » est, on peut le dire, le parent pauvre de l’enseignement scolaire, et ce de façon récurrente depuis cinq ans. Et la donne ne change pas cette année !
La réduction drastique de l’emploi public va à l’encontre d’une réflexion sereine sur le rôle et la place de l’enseignement agricole dans le système éducatif français.
Ces crédits font une nouvelle fois l’objet d’une partie de ping-pong entre le ministère de l’éducation nationale et le ministère de l’agriculture, tant et si bien que personne n’en est responsable !
Avec l’organisation des Assises nationales de l’enseignement agricole public, on pouvait espérer que la situation allait évoluer de manière positive. Mais non ! Le budget de l’enseignement agricole est toujours en baisse et le lot de suppressions d’emplois prévu augure mal du « nouvel élan » que ces assises étaient censées donner. Quelle déception pour la commission, qui a unanimement demandé, lors de votre audition, monsieur le ministre, de véritables moyens en faveur de cet enseignement, dont l’excellence est reconnue.
L’enseignement agricole apporte aux futurs acteurs du monde rural un savoir-faire à la fois technique et humain, nécessaire à l’insertion professionnelle des jeunes. Plus que tout autre, il intègre les notions de changement climatique, de perte de la biodiversité et de dégradation des ressources. Il prend également en compte les problèmes liés au déséquilibre Nord-Sud.
Cet enseignement, c’est le choix d’une école pour la réussite de tous, ouverte, pratiquant la mixité sociale, plaçant l’élève et ses apprentissages au cœur de ses missions et de son organisation.
L’enseignement agricole, M. le ministre de l’agriculture le rappelait, c’est un taux d’insertion professionnelle exceptionnel.
Dans le discours qu’il a tenu à Poligny, le Président de la République a vanté les mérites de l’agriculture. Il nous a alors expliqué qu’il fallait plus de formation, plus d’apprentissage en considération du développement durable, que c’était l’avenir. Il vantait une formation d’excellence pour une vraie réconciliation du monde agricole avec la société, sur fond d’agenda 21 et de Grenelle de l’environnement. Tout le monde est d’accord et, pourtant, le budget diminue. Des postes sont une nouvelle fois supprimés.
Jugez plutôt : 244 emplois ont été supprimés en 2009, 106 en 2008, 210 en 2006, 94 en 2005 et 126 en 2004. En outre, 200 classes ont été fermées, alors que les effectifs sont en progression constante. Les établissements techniques agricoles, qui scolarisent cette année plus de 170 000 élèves dans 820 établissements, ont dû refuser des inscriptions.
Les effectifs doivent s’adapter aux petits moyens que vous affectez à ces établissements.
Monsieur le ministre, après les Assises nationales de l’enseignement agricole public, après le Grenelle de l’environnement, après les beaux discours du Président de la République sur la valorisation de l’agriculture et à l’heure des Assises des territoires ruraux, nous attendions pour le moins une stabilité des effectifs d’enseignement et d’encadrement. Or, avec votre logique de démolition de l’enseignement public, nous n’avons droit, pour toute réponse, qu’à des coupes budgétaires et à des suppressions de postes.
N’est-il pas encore temps, monsieur le ministre, de vous ressaisir et de décider immédiatement d’un moratoire sur les suppressions de postes afin de mettre vos actes en cohérence avec vos paroles ?
Monsieur le sénateur, j’ai rappelé à l’instant à M. Pierre les enjeux du maintien de l’enseignement agricole en milieu rural, ainsi que la complémentarité de ce type d’enseignement avec l’enseignement général, technologique ou professionnel.
Ce rappel étant fait, je ne me laisserai pas entraîner sur votre terrain. Vous avez parlé de moratoire. Or l’enseignement agricole ne peut s’exonérer des contraintes existantes, notamment en matière budgétaire. Les règles sont claires : les efforts doivent être partagés entre les différentes fonctions publiques et, au sein de l’enseignement, entre les différentes formes d’enseignement.
Vous avez évoqué la partie de ping-pong qui se joue entre le ministère de l’éducation nationale et le ministère de l’agriculture. Il y sera mis un terme cette année grâce à un accord qui sera matérialisé par l’amendement que Gérard Longuet présentera dans un instant. Cet accord ne sera que provisoire, notre souhait, à Bruno Le Maire et moi – le Premier ministre en est d’accord – étant de vous présenter l’année prochaine un projet de loi de finances réglant définitivement la situation de l’enseignement agricole, car ce types d’échanges entre nos deux ministères ne peut perdurer d’année en année.
On nous a tenu quasiment les mêmes propos l’année dernière. Seuls les ministres – il s’agissait alors de M. Xavier Darcos et de M. Michel Barnier – étaient différents ! Dès qu’il s’agit d’enseignement agricole, on parle certes de filière d’excellence, mais force est de constater que rien n’est fait pour en assurer l’avenir.
Les moyens continuent d’être réduits, des postes sont supprimés. Il arrivera un moment où il ne sera plus possible de tenir. Croyez-moi, je me fais ici le porte-parole des nombreux enseignants et de directeurs d’établissements que j’ai rencontrés aux cours de ces derniers mois et qui sont véritablement en souffrance. Les familles sont également en attente.
La seule chose que nous voyons, c’est la dégradation de l’enseignement agricole aujourd'hui. Les acteurs de cet enseignement attendent très rapidement des signes concrets leur permettant d’espérer un meilleur avenir.
Nous en avons terminé avec les questions-réponses-répliques.
Nous allons maintenant procéder à l’examen des crédits de la mission « Enseignement scolaire », figurant à l’état B.
En euros
Mission
Autorisations
d’engagement
Crédits de paiement
Enseignement scolaire
Enseignement scolaire public du premier degré
Dont titre 2
17 557 933 756
17 557 933 756
Enseignement scolaire public du second degré
Dont titre 2
28 888 162 571
28 888 162 571
Vie de l'élève
Dont titre 2
1 709 608 984
1 709 608 984
Enseignement privé du premier et du second degrés
Dont titre 2
6 286 946 362
6 286 946 362
Soutien de la politique de l'éducation nationale
Dont titre 2
1 327 214 814
1 327 214 814
Enseignement technique agricole
Dont titre 2
812 851 905
812 851 905
L'amendement n° II-91 rectifié, présenté par MM. Carle, Humbert et Beaumont, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
En euros
Programmes
Autorisations d'engagement
Crédits de paiement
Enseignement scolaire public du premier degré
Dont titre 2
Enseignement scolaire public du second degré
Dont titre 2
Vie de l'élève
Dont titre 2
Enseignement privé du premier et du second degrés
Dont titre 2
Soutien de la politique de l'éducation nationale
Dont titre 2
Enseignement technique agricole
Dont titre 2
TOTAL
SOLDE
La parole est à M. Jean-Claude Carle.
Je ferai trois observations, mes chers collègues, sur l’amendement que je vous propose.
Premièrement, cet amendement ne modifie en rien l’équilibre du budget de la mission « Enseignement scolaire », car il n’ajoute ni ne supprime aucun crédit.
Deuxièmement, cet amendement ne remet pas en cause le souhait du Gouvernement de financer le plan de soutien à l’agriculture en faisant appel à la solidarité de toutes les lignes du budget de la nation. Je partage cette volonté et je la soutiens. À cet égard, je salue l’action du ministre de l’agriculture dans ce domaine.
Troisièmement, comme vous le savez, M. Éric Woerth, ministre du budget, a prélevé 21, 5 millions d’euros sur la mission « Enseignement scolaire », dont 11, 5 millions sur le programme « Vie de l’élève ». Or les crédits de ce programme servent à financer des actions destinées aux élèves handicapés, des mesures d’accompagnement éducatif, la santé scolaire ou des actions sociales, en particulier les bourses.
Tous ces domaines, mes chers collègues, me semblent importants et prioritaires. En outre, ils concernent tant l’enseignement public que l’enseignement privé.
À mon sens, la réduction de ces crédits risque de fragiliser, voire de remettre en cause ces actions prioritaires, ce qui n’est pas souhaitable en cette période de crise économique. En outre, monsieur le ministre, réduire ces crédits, c’est adresser un message négatif à la communauté éducative.
Je vous propose donc, mes chers collègues, non pas, je l’ai dit, de remettre en cause la décision du Gouvernement de faire appel à la solidarité de toutes les lignes du budget de la nation à l’égard du monde agricole, mais de le faire sur une autre ligne de la mission, à savoir le programme « Soutien de la politique de l’éducation nationale ». Ce programme est doté de 2 milliards d’euros, dont une partie est destinée à l’administration centrale.
Cette modification permettrait à ce grand corps qu’est l’administration centrale d’adresser un signe de solidarité à un secteur de notre économie qui est parmi les plus méritants et les plus exposés.
Tel est l’objet de mon amendement, monsieur le président.
La commission des finances n’a pas à proprement parler examiné cet amendement. Je m’exprimerai donc non pas en son nom.
L’amendement de M. Carle pose problème, même si on en comprend bien la motivation, qui est tout à fait légitime. S’il était adopté, cet amendement ferait en effet peser l’effort voulu par M. Woerth d’une façon différente de celle qu’il a envisagée lorsque cette disposition a été adoptée à l’Assemblée nationale. M. Woerth souhaite en effet répartir les efforts suivant une clé de répartition traditionnelle entre l’enseignement public, à hauteur de 80 %, et l’enseignement privé, à hauteur de 20 %.
Si nous suivions M. Carle, certes, nous augmenterions la contribution du programme « Soutien de la politique de l’éducation nationale », donc de l’administration centrale, mais nous augmenterions d’une façon significative la contribution de l’enseignement public au programme « Vie de l’élève », alors que nous diminuerions d’une façon non moins significative la contribution de l’enseignement privé. Cela serait contraire au statu quo, principe que notre commission a systématiquement défendu jusqu’à présent pour éviter de rouvrir le lancinant débat sur la répartition des efforts.
Par conséquent, mon cher collègue, même si je comprends votre préoccupation, je pense ne pas trahir la jurisprudence constante de la commission des finances, qui est de faire contribuer l’enseignement privé et l’enseignement public à un même effort financier, en vous demandant de bien vouloir retirer cet amendement.
Je ne puis qu’être sensible à la volonté du sénateur Jean-Claude Carle de renforcer les crédits du programme 230 « Vie de l’élève ».
Toutefois, je voudrais indiquer à la Haute Assemblée que le programme 214 « Soutien de la politique de l’éducation nationale » est sous une forte contrainte depuis plusieurs années. À périmètre constant, les crédits hors titre 2 ont diminué de 14 % de 2007 à 2009, soit 100 millions d’euros, auxquels s’ajoutent 8, 6 millions d’euros d’économies dans le projet de loi de finances pour 2010.
Les établissements publics nationaux, comme le Centre national d'enseignement à distance, le CNED, cher à M. Gérard Longuet, sont particulièrement affectés par une telle situation. En deux ans, leurs crédits ont diminué de 17 %.
Malgré les efforts de rationalisation et de redéploiement interne qui ont été engagés, la gestion de ce programme demeure particulièrement tendue, car celui-ci supporte un certain nombre de dépenses très contraintes.
Je pourrais ainsi évoquer les investissements immobiliers en outre-mer – nous avons encore la responsabilité de l’investissement, notamment dans le cadre du Grenelle de l’environnement – ou encore la montée en charge du système de gestion des ressources humaines, en lien avec le futur opérateur national de paye du ministère, qui rend impérative l’inscription de crédits informatiques à un niveau suffisant.
Dans ce contexte, le programme doit faire face à des dépenses nouvelles ; il ne me paraît donc pas pertinent d’accroître encore les contraintes qui pèsent sur lui.
C'est la raison pour laquelle je sollicite le retrait de cet amendement. À défaut, l’avis du Gouvernement serait défavorable.
J’ai bien entendu les explications qui viennent d’être apportées tant par M. le rapporteur spécial que par M. le ministre.
Pour autant, mon amendement respecte bien la règle dite du « 80-20 ». Il y a trois lignes budgétaires pour l’enseignement public, en l’occurrence une pour l’enseignement scolaire du premier degré, une pour celui du second degré et une pour la vie de l’élève, contre une seule pour l’enseignement privé. La règle est donc globalement respectée.
De mon point de vue, le retrait de cet amendement serait un signal négatif adressé à la communauté éducative sur des sujets aussi prioritaires que l’accueil des élèves handicapés ou le soutien scolaire.
Comme je l’ai déjà indiqué, l’adoption de mon amendement ne pénaliserait pas l’administration centrale, dont la ligne budgétaire est dotée de 2 milliards d’euros.
J’ai la conviction que les partisans du statu quo se trompent. Et, quand j’ai une conviction, je la défends jusqu’au bout.
C'est la raison pour laquelle je maintiens mon amendement, monsieur le président.
Cet amendement présente un certain intérêt et la proposition de M. Carle nous satisfait globalement, puisqu’elle vise à garantir les crédits du programme « Vie de l’élève ».
Cela étant, nous ne pouvons pas accepter la totalité du dispositif proposé. En effet, mon cher collègue, en présentant votre amendement, vous avez déclaré vouloir préserver l’offre éducative dans l’enseignement privé.
Pour ma part, et sans verser dans l’idéologie, j’estime que le rôle de l’État est plutôt de renforcer l’offre éducative dans l’enseignement public.
D’ailleurs, monsieur Longuet, l’enseignement privé n’est tout de même pas trop maltraité. Comme vous avez pu le constater, on supprime un poste d’enseignant pour trente-six élèves dans l’enseignement public, contre un poste pour soixante-seize élèves dans l’enseignement privé !
Par conséquent, nous ne nous opposerons pas à l’amendement de M. Carle ; nous serions même prêts à aller dans le sens que notre collègue propose. Mais, en raison de la réserve que nous émettons sur l’enseignement privé, nous serons dans l’obligation de nous abstenir.
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, pour explication de vote.
Nous voyons bien dans quelles affres nous plonge le dogme de la réduction des dépenses publiques. La démonstration est claire : même les plus fervents défenseurs de cette politique en voient les limites et les risques, d’où l’amendement qui nous est soumis.
Les contraintes budgétaires de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances, la LOLF, ont conduit M. Carle à proposer un remède qui est, pour nous, inacceptable. À cet égard, je souscris à ce qui vient d’être souligné par M. Bodin : l’aide de l’État doit aller en priorité à l’offre éducative publique.
Ce qui nous pose tout de même problème, c’est que, si j’ai bien compris, l’auteur de cet amendement propose de réduire les crédits dédiés à l’innovation pédagogique, dans le programme « Soutien de la politique de l’éducation nationale ». Or ces crédits ne sont pas négligeables. Ils concernent tout de même les subventions accordées à des associations, comme la Ligue de l’enseignement, d’ailleurs soutenue par le ministère, ou à des agents en détachement, par exemple au sein d’associations ou au Centre national de documentation pédagogique, le CNDP.
Nous le voyons bien, le « tricotage » qui nous est proposé vise en réalité à surmonter le fameux dogme de la baisse des dépenses publiques, qui crée tant de soucis…
C’est pourquoi nous voterons contre cet amendement.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° II-126, présenté par MM. Longuet et Legendre, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
En euros
Programmes
Autorisations d'engagement
Crédits de paiement
Enseignement scolaire public du premier degré
Dont titre 2
1 809 185
1 809 185
Enseignement scolaire public du second degré
Dont titre 2
Vie de l'élève
Dont titre 2
Enseignement privé du premier et du second degrés
Dont titre 2
Soutien de la politique de l'éducation nationale
Dont titre 2
Enseignement technique agricole
Dont titre 2
1 809 185
1 809 185
TOTAL
SOLDE
La parole est à M. Jacques Legendre.
Nous aurons beaucoup évoqué l’enseignement agricole aujourd'hui.
Cet amendement vise à apporter certains éléments de réponse aux problèmes qui ont été soulevés dans ce cadre. Nous voulons également tenir compte des propos tenus lors de l’ouverture des Assises nationales de l’enseignement agricole public. Trois mesures avaient alors été annoncées : le rétablissement de 60 postes, le gel des décisions de fermeture de classes et d’établissements, la révision du plafond d’emplois pour le programme.
Il nous a donc semblé important, à M. Gérard Longuet et à moi-même, d’abonder les crédits du programme « Enseignement technique agricole » dès le projet de loi de finances pour 2010.
À ce titre, nous proposons de minorer le plafond des autorisations d’emplois du ministère de l’éducation nationale de 50 équivalents temps plein travaillés et de majorer à due concurrence celui des autorisations d’emplois du ministère de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche.
Une telle évolution avait notamment été souhaitée par Mme Françoise Férat, rapporteur pour avis de la commission de la culture, et, plus généralement, par l’ensemble des membres de notre commission.
Tel est l’objet de cet amendement.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la commission des finances ne peut que remercier MM. Longuet et Legendre d’avoir déposé cet amendement.
En effet, lorsque le rapporteur spécial Gérard Longuet avait analysé, en compagnie de M. Thierry Foucaud, devant la commission des finances les crédits de la mission « Enseignement scolaire », il avait laissé entendre qu’il y aurait sans doute une initiative à prendre en la matière.
En l’occurrence, son initiative est judicieuse. Elle permettra à M. le ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche de mettre en œuvre les dispositions qu’il a annoncées en ouvrant les Assises nationales de l’enseignement agricole public. Je pense notamment au rétablissement de 60 postes, au gel des fermetures de classes et à la révision du plafond d’emplois, engagements qui n’étaient inscrits ni dans les crédits de la mission ni dans les plafonds d’emplois.
Par conséquent, cet amendement vient judicieusement combler une telle lacune.
La commission des finances, qui ne s’est pas réunie, mais qui avait vivement encouragé Gérard Longuet à proposer un tel dispositif, aurait certainement émis un avis favorable si elle avait dû se prononcer sur cet amendement.
J’ai eu l’occasion d’indiquer tout à l’heure la position du Gouvernement sur la question de l’enseignement agricole.
J’ai rappelé qu’il y avait eu de nombreux échanges entre la commission, M. Legendre, M. Longuet, Mme Férat et l’ensemble des sénateurs concernés.
Nous avons décidé de soutenir cet amendement, qui nous permettra d’apporter une réponse ponctuelle dans le projet de loi de finances pour 2010.
Encore une fois, nous devrons travailler pour vous présenter une structure budgétaire différente l’année prochaine, afin qu’une telle situation ne se reproduise pas.
Les années se suivent et, malheureusement, se ressemblent. Les ministres se succèdent et, malheureusement, disent la même chose.
Nous serions prêts à croire sur parole l’engagement qui vient d’être pris ce soir et que différents intervenants ont salué.
Malheureusement, nous avons constaté, les années précédentes, que les engagements n’étaient jamais concrétisés.
On nous tient chaque année le même discours, en promettant de régler le problème. Il est vrai qu’un tout petit effort est fait cette année : M. le ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche s’est déplacé pour être aux côtés de M. le ministre de l'éducation nationale…
Autant nous constatons l’insuffisance des crédits affectés à l’enseignement agricole et nous estimerions juste de les renforcer, autant nous refusons que cela s’effectue au détriment de l’enseignement scolaire ! En particulier, il ne saurait être question de retirer des crédits du programme « Enseignement scolaire public du premier degré », dont les dépenses de fonctionnement et d’intervention baissent déjà respectivement de 13, 1 % et de 7, 6 %. Une telle option n’est absolument pas acceptable.
Les années précédentes, nous attendions des modifications et nous espérions que chacun, au premier chef le ministère de l’agriculture puis le ministère de l’éducation nationale, prendrait ses responsabilités. C’est pourquoi nous nous sommes souvent abstenus lors de l’examen de telles dispositions.
Mais, aujourd'hui, vous vous êtes solennellement engagé à faire en sorte que ce soit la dernière fois. Pour notre part, nous vous prenons tout aussi solennellement au mot : cette année, nous voterons contre !
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, pour explication de vote.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, j’aimerais vous faire part de ma consternation, de ma colère et de mon désarroi, aussi.
Demain, je dois rencontrer l’intersyndicale. Je devrai alors expliquer à mes interlocuteurs ce qui se sera passé dans cet hémicycle.
Chacun a rappelé ici que l’enseignement agricole était une voie d’excellence, une voie d’insertion professionnelle, une voie de « remédiation », une voie importante pour le défi du développement durable que nous devons tous relever ensemble.
Chers collègues, si c’est une voie d’excellence, elle a besoin de moyens pérennes. Il faudra bien, inévitablement, que nous nous posions la question du plafond d’emplois qui est accordé à cette voie d’excellence.
On nous propose une nouvelle ponction du budget consacré à l’enseignement scolaire. M. le ministre a parlé de « gesticulations ». J’aurais, pour ma part, eu un mot plus violent : celui de « bricolage » me venait à l’esprit !
Exclamations sur les travées de l ’ UMP.
On nous propose de ponctionner le programme de l’enseignement scolaire public du premier degré, qui plus est sans aucun fléchage quant à la répartition ultérieure au sein de l’enseignement technique agricole ! Ces fonds iront-ils à l’enseignement agricole public ou à l’enseignement agricole privé ?
Pour toutes ces raisons, nous nous prononcerons contre cet amendement.
L'amendement est adopté.
Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Enseignement scolaire », figurant à l’état B.
J’ai été saisi d’une demande d’explication de vote dans le délai limite.
La parole est à Françoise Férat, pour explication de vote.
Je tiens avant tout à saluer l’action de mes collègues Jacques Legendre et Gérard Longuet lors de l’étude de la mission « Enseignement scolaire ». Je suis fort satisfaite de l’excellent travail qu’ils ont accompli à cette occasion.
Le vote de l’amendement tendant à restituer 50 postes nous permet d’adresser un signal fort à tous nos partenaires de la grande famille de l’enseignement agricole et de leur redonner un peu de souffle.
Vous vous rappellerez certainement ma détermination en faveur de l’enseignement agricole lors de l’examen du précédent projet de loi de finances, puisque nous avions transféré 38 millions d’euros de crédits afin de soutenir l’enseignement dans cette filière.
Cette année, n’en doutez pas, mon engagement à l’égard de l’enseignement agricole n’a pas faibli. C’est pourquoi je ne peux pas, nous ne pouvons pas nous satisfaire d’un budget en baisse.
L’enseignement agricole est en effet à la croisée des chemins et, pour franchir l’étape de sa renaissance, il a besoin de nous, et de notre reconnaissance. Reconnaissance tout à la fois de sa spécificité, puisque c’est un enseignement professionnalisant, de son identité, fortement ancrée dans la ruralité, de son potentiel, au service de l’économie « verte », de sa capacité à relever les défis de demain.
Or on observe que, au-delà de ses bons résultats en termes de réussite et d’intégration professionnelle, des leitmotive de l’engagement gouvernemental, l’enseignement agricole n’a toujours pas la reconnaissance qu’il mérite.
C’est chaque année un vrai parcours du combattant ! La situation, comme vous le disiez, monsieur le ministre, ne peut plus durer.
Messieurs les ministres, l’enseignement agricole a besoin de vous, et de vous deux, pour porter ensemble l’éducation de tous nos jeunes, qu’ils se destinent à l’un ou l’autre de ces systèmes d’enseignement. Je sais que le ministre de l’agriculture en a pris l’engagement, et je vous ai également entendu monsieur Chatel.
Des mesures peu coûteuses peuvent être mises en place à cet effet, notamment en mutualisant les moyens entre vos ministères – les possibilités sont fort nombreuses – pour valoriser, avec détermination, cet enseignement d’excellence.
Il vous faut porter ensemble tous ces jeunes qui entrent dans le parcours éducatif. Alors que la réforme du lycée à venir fait la part belle à l’orientation des élèves, il ne serait pas cohérent de laisser au bord du chemin, pour une simple question de moyens, ceux qui ont fait le choix d’une orientation vers l’enseignement agricole.
Or le présent projet de loi restreint les moyens consacrés à l’enseignement agricole, alors même que c’est lui qui forme les agriculteurs mais aussi les acteurs de la croissance « verte » de demain et couvre donc une grande variété de carrières dans l’industrie, les services et l’agronomie, pour ne citer que ces secteurs d’activité.
J’apprécie en revanche le signe que vous envoyez en donnant un avis favorable à l’amendement de mes collègues permettant de « sauver » 50 emplois d’enseignant agricole.
De même, je prends note de l’amendement gouvernemental de 8, 5 millions d’euros déposé à l’occasion de la discussion du projet de loi finances rectificative à l’Assemblée nationale.
C’est parce que je ne doute pas de votre engagement pour l’avenir que notre groupe votera les crédits relatifs à la mission « Enseignement scolaire ».
Je mets aux voix, modifiés, les crédits de la mission « Enseignement scolaire ».
Ces crédits sont adoptés.
J’appelle en discussion l’article 54 ter, rattaché pour son examen aux crédits de la mission « Enseignement scolaire ».
Enseignement scolaire
Au plus tard le 30 juin 2010, le Gouvernement transmet au Parlement un rapport sur les moyens financiers et en personnels consacrés à la scolarisation en milieu ordinaire des élèves handicapés.
L'amendement n° II-14, présenté par M. Longuet, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
Ce rapport précise également l'impact sur les charges des collectivités territoriales, notamment les coûts spécifiques de transport scolaire et d'aménagement des établissements publics locaux d'enseignement.
La parole est à M. Gérard Longuet, rapporteur spécial.
Il s’agit de compléter le rapport que le Gouvernement doit adresser au Parlement sur les coûts humains et financiers de l’accueil des élèves handicapés en milieu scolaire ouvert, par une évaluation des dépenses de transport qui sont à la charge des collectivités locales et qui constituent, nous le savons, une lourde responsabilité tant technique que financière.
Demander à ce que ce rapport fasse le point sur les transports scolaires et principalement sur celui des handicapés est une idée judicieuse.
Vous savez tous combien les conseils généraux sont impliqués dans ces transports scolaires et principalement celui des enfants handicapés. C’est une tâche très importante qui leur incombe et qu’ils assument.
Mais je m’interroge sur cet amendement. En effet, les conseils généraux, du moins est-ce vrai dans mon département, affrètent chaque matin entre 350 et 400 bus, qui devront être équipés pour accueillir des handicapés, et, dans le même temps, disposent d’un parc de 150 à 200 voitures pour transporter les enfants jusqu’à leurs écoles.
Nous ne pouvons pas supprimer le transport des élèves handicapés par voiture, et ce pour plusieurs raisons. D’une part, les voitures permettent la prise en charge des enfants handicapés à la porte du domicile, ce que ne permet pas le bus, l’arrêt pouvant être à deux cents mètres, au mieux. Et il arrive parfois que le chauffeur aille lui-même chercher l’enfant handicapé à son domicile quand ses parents sont déjà partis au travail !
De la même façon, au moment de l’arrivée à l’école, la solution de la voiture permet de déposer l’enfant à proximité de la classe, tandis que le bus laisse souvent l’enfant à l’entrée de l’établissement, voire dans la cour, ce qui rend nécessaire une autre intervention humaine. Enfin, l’enfant handicapé peut avoir besoin d’un accompagnateur à côté de lui.
Je ne conçois pas, au moment où il est nécessaire de réaliser des économies, que l’on exige de tous nos bus qu’ils soient équipés pour le transport des personnes handicapées, alors que, dans le même temps, les conseils généraux continueront comme il se doit à financer d’autres modes de transport, même si ces dépenses sont importantes.
Je crois que l’on risque d’avoir demain deux postes de dépenses : d’une part, l’adaptation des véhicules collectifs, d’autre part, le transport en voiture quand le bus ne constitue pas un moyen adéquat.
J’aimerais que ce rapport puisse tenir compte de l’ensemble de ces considérations. Est-ce une bonne formule d’équiper l’ensemble des bus ou le système actuel est-il plus satisfaisant ? Je demande à ce qu’une vraie réflexion soit menée sur ce sujet avant que les conseils généraux et les transporteurs n’en supportent le coût.
C’est exactement l’objet de ce rapport que de permettre une évaluation de l’ensemble des efforts consentis par les uns et par les autres et de comparer l’opportunité et la pertinence des différentes solutions.
L'amendement est adopté.
L'article 54 ter est adopté.
Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Enseignement scolaire ».
Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, mercredi 2 décembre 2009, à dix heures trente, à quatorze heures trente et le soir :
- Suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2010, adopté par l’Assemblée nationale (n° 100, 2009-2010).
Examen des missions :
Politique des territoires
M. François Marc, rapporteur spécial (rapport n° 101, annexe n° 20) ;
M. Rémy Pointereau, rapporteur pour avis de la commission de l’économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire (avis n° 105, tome VI).
Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation (+ article 51)
M. Jean-Marc Todeschini, rapporteur spécial (rapport n° 101, annexe n° 5) ;
Mme Janine Rozier, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales (avis n° 103, tome I).
Gestion des finances publiques et des ressources humaines
Compte spécial : prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés
Compte spécial : avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services publics
Compte spécial : gestion du patrimoine immobilier de l’État
M. Bernard Angels et Mme Nicole Bricq, rapporteurs spéciaux (rapport n° 101, annexe n° 14) ;
Mme Jacqueline Gourault, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d’administration générale (Fonction publique – avis n° 106, tome II) ;
Mme Éliane Assassi, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d’administration générale (Modernisation de l’État – avis n° 106, tome VI).
Régimes sociaux et de retraite
Compte spécial : pensions
M. Bertrand Auban, rapporteur spécial (rapport n° 101, annexe n° 24) ;
M. Dominique Leclerc, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales (avis n° 103, tome III).
Remboursements et dégrèvements
Mme Marie-France Beaufils, rapporteur spécial (rapport n° 101, annexe n° 26) ;
Santé (+ articles 59, 59 bis et 59 ter)
M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur spécial (rapport n° 101, annexe n° 27) ;
M. Alain Milon, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales (avis n° 103, tome IV).
Travail et emploi (+ articles 61, 62 et 63)
M. Serge Dassault, rapporteur spécial (rapport n° 101, annexe n° 32) ;
M. Alain Gournac, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales (avis n° 103, tome VII).
Plan de relance de l’économie
M. Jean Arthuis, rapporteur spécial (rapport n° 101, annexe n° 19) ;
M. Charles Revet, rapporteur pour avis de la commission de l’économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire (avis n° 105, tome V).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
La séance est levée le mercredi 2 décembre 2009, à une heure vingt-cinq.