La séance, suspendue à dix-neuf heures, est reprise à vingt-deux heures.
La séance est reprise.
Mes chers collègues, la conférence des présidents, qui s’est réunie ce soir, a établi comme suit l’ordre du jour des prochaines séances du Sénat :
SEMAINE SÉNATORIALE
Mercredi 18 juin 2014
À 22 heures :
- Proposition tendant à la création d’une commission spéciale chargée d’examiner le projet de loi relatif à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral ;
De 22 heures à minuit :
Ordre du jour réservé au groupe socialiste :
- Deuxième lecture de la proposition de loi permettant la création de sociétés d’économie mixte à opération unique.
Jeudi 19 juin 2014
De 9 heures à 13 heures :
Ordre du jour réservé au groupe CRC :
1°) Suite de la proposition de loi relative à la nationalisation des sociétés concessionnaires d’autoroutes et à l’affectation des dividendes à l’agence de financement des infrastructures de transports (n° 59, 2011-2012) ;
2°) Proposition de loi relative à la réhabilitation collective des fusillés pour l’exemple de la guerre de 1914-1918, présentée par M. Guy Fischer et plusieurs de ses collègues (n° 212, 2011-2012).
La conférence des présidents a fixé à une heure la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe.
En outre, à 12 heures :
- Désignation des trente-sept membres de la commission spéciale chargée d’examiner le projet de loi relatif à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral.
Les candidatures à cette commission spéciale devront être remises au secrétariat de la direction de la législation et du contrôle avant le jeudi 19 juin, à 11 heures.
L’inscription des auteurs de questions devra être effectuée à la division des questions et du contrôle en séance avant 11 heures.
De 16 heures 15 à 20 heures 15 :
Ordre du jour réservé au groupe UMP :
4°) Suite de la proposition de loi tendant à moderniser diverses dispositions de la législation applicable dans les départements de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin (texte de la commission, n° 613, 2013-2014) ;
5°) Proposition de résolution relative au financement de la protection sociale et à l’allégement des charges des entreprises présentée, en application de l’article 34-1 de la Constitution, par M. Serge Dassault et plusieurs de ses collègues (n° 566, 2013 2014).
La conférence des présidents a :
SEMAINE DU 23 JUIN ET LUNDI 30 JUIN
RÉSERVÉS PAR PRIORITÉ AU GOUVERNEMENT
Lundi 23 juin 2014
Ordre du jour fixé par le Gouvernement :
À 16 heures :
1°) Conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi d’orientation et de programmation relative à la politique de développement et de solidarité internationale (texte de la commission, n° 585 rectifié, 2013 2014).
La conférence des présidents a fixé à une heure la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire avant le vendredi 20 juin, à 17 heures.
2°) Deuxième lecture de la proposition de loi, modifiée par l’Assemblée nationale, visant à répartir les responsabilités et les charges financières concernant les ouvrages d’art de rétablissement des voies (texte de la commission n° 640, 2013-2014).
La conférence des présidents a fixé :
À 21 heures 30 :
3°) Débat préalable à la réunion du Conseil européen des 26 et 27 juin 2014.
La conférence des présidents a décidé d’attribuer, à la suite de l’intervention liminaire du Gouvernement de dix minutes, un temps d’intervention :
Mardi 24 juin 2014
Ordre du jour fixé par le Gouvernement :
À 14 heures 30 :
1°) Projet de loi autorisant l’adhésion de la France à l’accord portant création de la Facilité africaine de soutien juridique (texte de la commission, n° 630, 2013- 2014) ;
2°) Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant l’approbation du protocole entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Serbie portant sur l’application de l’accord entre la Communauté européenne et la République de Serbie concernant la réadmission des personnes en séjour irrégulier (texte de la commission n° 626, 2013-2014) ;
3°) Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Serbie relatif à la coopération dans le domaine de la défense et au statut de leurs forces (texte de la commission n° 628, 2013-2014) ;
4°) Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Kosovo relatif à la réadmission des personnes en séjour irrégulier et de son protocole d’application (texte de la commission n° 625, 2013-2014).
5°) Conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi habilitant le Gouvernement à adopter des mesures législatives pour la mise en accessibilité des établissements recevant du public, des transports publics, des bâtiments d’habitation et de la voirie pour les personnes handicapées (texte de la commission n° 632, 2013-2014).
La conférence des présidents a fixé à une heure la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire avant le lundi 23 juin, à 17 heures.
Le soir :
6°) Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, tendant à renforcer l’efficacité des sanctions pénales (texte de la commission, n° 642, 2013-2014).
La conférence des présidents a fixé :
Mercredi 25 juin 2014
Ordre du jour fixé par le Gouvernement :
À 14 heures 30 et le soir :
- Suite du projet de loi tendant à renforcer l’efficacité des sanctions pénales.
Jeudi 26 juin 2014
À 9 heures 30 :
Ordre du jour fixé par le Gouvernement :
1°) Deuxième lecture de la proposition de loi, adoptée avec modifications par l’Assemblée nationale en deuxième lecture, tendant à encadrer les conditions de la vente à distance des livres et habilitant le Gouvernement à modifier par ordonnance les dispositions du code de la propriété intellectuelle relatives au contrat d’édition (texte de la commission n° 638, 2013-2014).
La conférence des présidents a fixé :
De 15 heures à 15 heures 45 :
2°) Questions cribles thématiques sur la pollution de l’air.
L’inscription des auteurs de questions devra être effectuée à la division des questions et du contrôle en séance avant 11 heures.
À 16 heures et le soir :
Ordre du jour fixé par le Gouvernement :
3°) Suite du projet de loi tendant à renforcer l’efficacité des sanctions pénales.
Éventuellement, vendredi 27 juin 2014
Ordre du jour fixé par le Gouvernement :
À 9 heures 30, à 14 heures 30 et le soir :
- Suite du projet de loi tendant à renforcer l’efficacité des sanctions pénales.
Lundi 30 juin 2014
Ordre du jour fixé par le Gouvernement :
À 16 heures :
1°) Débat sur le bilan annuel de l’application des lois (demande de la commission sénatoriale pour le contrôle de l’application des lois).
La conférence des présidents a :
À 21 heures 30 :
2°) Débat sur la Corse et la réforme territoriale (demande du groupe du RDSE).
La conférence des présidents a :
SESSION EXTRAORDINAIRE 2013-2014
Mardi 1er juillet 2014
À 15 heures et le soir :
1°) Ouverture de la session extraordinaire 2013-2014 ;
2°) Projet de loi relatif à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral (procédure accélérée) (n° 635, 2013-2014).
La conférence des présidents a fixé :
Mercredi 2 juillet 2014
À 14 heures 30 et le soir :
- Suite du projet de loi relatif à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral.
Jeudi 3 juillet 2014
À 9 heures 30 :
1°) Suite du projet de loi relatif à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral.
À 15 heures :
2°) Questions d’actualité au Gouvernement.
L’inscription des auteurs de questions devra être effectuée à la division des questions et du contrôle en séance avant 11 heures.
À 16 heures 15 et le soir :
3°) Suite du projet de loi relatif à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral.
Éventuellement, vendredi 4 juillet 2014
À 9 heures 30, à 14 heures 30 et le soir :
- Suite du projet de loi relatif à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral.
Lundi 7 juillet 2014
À 16 heures et le soir :
- Sous réserve de sa transmission, projet de loi de finances rectificative pour 2014 (AN, n° 2024).
La commission des finances se réunira pour le rapport le mercredi 2 juillet matin.
Mardi 8 juillet 2014
À 9 heures 30 :
1°) Questions orales.
L’ordre d’appel des questions sera fixé ultérieurement.
- n° 748 de Mme Catherine PROCACCIA à M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche
Enseignement de l'informatique
- n° 784 de M. Yannick VAUGRENARD à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice
Associations d'aide aux victimes d'infractions et de médiation pénale
- n° 795 de M. Charles REVET à M. le secrétaire d'État chargé des transports, de la mer et de la pêche
Aquaculture
- n° 799 de Mme Catherine MORIN-DESAILLY à Mme la ministre de la décentralisation et de la fonction publique
Contrat de plan interrégional relatif à la vallée de la Seine
- n° 805 de M. Henri TANDONNET à M. le ministre du travail, de l'emploi et du dialogue social
Temps partiel
- n° 806 de M. André GATTOLIN à M. le ministre de l'économie, du redressement productif et du numérique
Activité postale dans le département des Hauts-de-Seine
- n° 810 de M. Yannick BOTREL à Mme la ministre du logement et de l'égalité des territoires
Détermination des secteurs de taille et de capacité d'accueil limité
- n° 811 de Mme Éliane ASSASSI à M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche
Fermeture d'une école maternelle à Cahors
- n° 813 de M. Didier MARIE à Mme la secrétaire d'État chargée de la famille, des personnes âgées et de l'autonomie
Difficultés des associations d'aides à domicile
- n° 815 de M. Christian CAMBON à Mme la ministre du logement et de l'égalité des territoires
Protection des habitants contre l'expropriation massive à Ivry
- n° 816 de Mme Hélène CONWAY-MOURET à M. le ministre des affaires étrangères et du développement international
Vote électronique des Français de l'étranger
- n° 817 de M. Jean-Paul FOURNIER à Mme la ministre du logement et de l'égalité des territoires
Atteinte à la typicité de l'urbanisme méditerranéen
- n° 818 de M. Jean-Claude LENOIR à M. le ministre des finances et des comptes publics
Difficultés rencontrées par certaines communes du fait du gel du FNGIR
- n° 821 de M. Jean-François HUMBERT à Mme la ministre de la décentralisation et de la fonction publique
Réforme des collectivités territoriales
- n° 824 de M. Éric BOCQUET à Mme la ministre de la culture et de la communication
Défense de la langue française et conditions d'un développement harmonieux de la diversité linguistique
- n° 825 de Mme Anne EMERY-DUMAS à M. le secrétaire d'État chargé de la réforme territoriale
Élus locaux et périmètres des espaces territoriaux de solidarité et de réciprocité
À 14 heures 30 et le soir :
2°) Suite du projet de loi de finances rectificative pour 2014
Mercredi 9 juillet 2014
À 14 heures 30 et le soir :
- Sous réserve de leur transmission, projet de loi portant réforme ferroviaire (procédure accélérée) (AN, n° 1468) et proposition de loi organique relative à la nomination des dirigeants de la SNCF (procédure accélérée) (AN, n° 1877).
La conférence des présidents a décidé que ces deux textes feraient l’objet d’une discussion générale commune.
Jeudi 10 juillet 2014
À 9 heures 30, à 14 heures 30 et le soir :
- Suite du projet de loi portant réforme ferroviaire et de la proposition de loi organique relative à la nomination des dirigeants de la SNCF.
Vendredi 11 juillet 2014
À 9 heures 30, à 14 heures 30 et le soir :
- Suite du projet de loi portant réforme ferroviaire et de la proposition de loi organique relative à la nomination des dirigeants de la SNCF.
Mardi 15 juillet 2014
À 14 heures 30 et le soir :
1°) Débat sur l’orientation des finances publiques et, sous réserve de sa transmission, projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2013 (procédure accélérée) (AN, n° 1984) ;
La conférence des présidents a décidé de joindre la discussion générale de ce projet de loi au débat sur l’orientation des finances publiques.
2°) Sous réserve de sa transmission, projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014 (AN, n° 2044).
La commission des affaires sociales se réunira pour le rapport le mercredi 9 juillet matin.
Mercredi 16 juillet 2014
À 14 heures 30 et le soir :
- Discussion des articles du projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014.
Jeudi 17 juillet 2014
À 9 heures 30 :
1°) Suite du projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014.
À 15 heures :
2°) Questions d’actualité au Gouvernement.
L’inscription des auteurs de questions devra être effectuée à la division des questions et du contrôle en séance avant 11 heures.
À 16 heures 15 et le soir :
3°) Suite éventuelle du projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014 ;
4°) Sous réserve de leur dépôt, conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi relatif à l’économie sociale et solidaire.
La conférence des présidents a fixé à une heure la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire avant le mercredi 16 juillet, à 17 heures.
Par ailleurs, la conférence des présidents a décidé l’organisation d’une séance de questions orales le mardi 22 juillet 2014, à 9 heures 30.
Y a-t-il des observations sur les propositions de la conférence des présidents relatives à la tenue des séances et à l’ordre du jour autre que celui résultant des inscriptions prioritaires du Gouvernement ?...
Ces propositions sont adoptées.
La conférence des présidents a décidé de s’opposer à l’engagement de la procédure accélérée sur le projet de loi relatif à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral (n° 635, 2013-2014).
Cette décision a été notifiée à M. le président de l’Assemblée nationale.
L’ordre du jour appelle, en application de l’article 16, alinéa 2, du règlement, la proposition de création d’une commission spéciale chargée d’examiner le projet de loi relatif à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral (n° 635, 2013-2014).
Je vais soumettre cette proposition au Sénat.
Il n’y a pas d’opposition ?...
Madame la présidente, vous nous demandez s’il n’y a pas d’opposition… Vous comprendrez que, en tant que président d’une commission qui a désigné un rapporteur et qui a déjà longuement entamé son office en organisant cet après-midi, en présence de soixante-six sénateurs, une remarquable séance d’auditions, au cours de laquelle ont été reçus pas moins de dix présidents de région…
ou leurs représentants, ainsi que M. le ministre de l’intérieur, je demande à m’exprimer en cet instant.
Madame la présidente, si j’avais été informé de l’idée qu’avaient certains de nos collègues de l’UMP, du RDSE et du CRC de proposer la création d’une commission spéciale, j’eusse pris les dispositions appropriées. Mais j’apprends la nouvelle aujourd'hui même !
Les auteurs de cette proposition rétorqueront à juste titre qu’il fallait que le texte eût été adopté par le conseil des ministres, …
… ce qui est le cas depuis ce matin.
Je trouve qu’en commission des lois nous travaillions dans des conditions correctes – je le dis à l’imparfait, mais cela vaut pour le présent et cela vaudra pour le futur.
Aussi, quand vous me demandez si j’approuve la constitution de cette commission spéciale, je vous réponds, madame la présidente, que je ne l’approuve pas.
Toutefois, comme je suis très respectueux de nos institutions en général et du Sénat de la République en particulier, je pense que nous allons travailler très positivement au sein de cette commission spéciale, qui ne comprendra pas quarante-neuf membres, comme c’est le cas de la commission des lois, mais seulement trente-sept. C’est que nos collègues de l’UMP, du RDSE et du CRC le souhaitent ainsi ! Ils estiment préférable de discuter de ce sujet à trente-sept plutôt qu’à quarante-neuf. Je ne sais pas comment ils argumentent en la matière, mais toujours est-il que telle est leur conception, et je me dois de la respecter.
Nous travaillerons donc dans cette nouvelle configuration, dans un esprit positif, afin d’envisager ensemble, monsieur le secrétaire d’État, de nouveaux projets pour la décentralisation, sujet auquel nous sommes forcément très attachés.
Vous avez posé une question, madame la présidente, et je vous réponds, tout en m’empressant de préciser que nous envisageons la suite dans un esprit constructif.
Il n’y a pas d’opposition formelle ; vous avez fait part de vos observations, monsieur le président de la commission des lois.
Je soumets donc au Sénat cette proposition de création d’une commission spéciale.
Il n’y a pas d’opposition ?...
Il en est ainsi décidé.
Conformément à la décision de la conférence des présidents, le délai limite de remise des candidatures à cette commission spéciale est fixé au jeudi 19 juin, à onze heures, et la désignation des trente-sept membres aura lieu en séance publique, à douze heures.
La commission spéciale se réunira le lundi 23 juin, à dix-sept heures.
M. Mézard, que je rejoins au banc de la commission, car il est notre rapporteur sur le texte dont nous nous apprêtons à commencer l’examen, me fait observer que, dans mon propos, je n’ai pas mentionné le groupe de l’UDI-UC, qui a dû, lui aussi trouver un argument idéologique fort pour justifier le fait que seulement trente-sept collègues plutôt que quarante-neuf seraient amenés à discuter du sujet. Je répare donc mon oubli, car M. Mézard serait fâché que je n’associe pas l’UDI-UC à une initiative dont la force conceptuelle mérite d’être soulignée, ce que je fais à l’instant !
Monsieur le président de la commission des lois, vous nous faites part de l’existence d’une majorité d’idée : je vous donne acte de ce complément.
L’ordre du jour appelle la discussion en deuxième lecture, à la demande du groupe socialiste et apparentés, de la proposition de loi, modifiée par l’Assemblée nationale, permettant la création de sociétés d’économie mixte à opération unique (proposition n° 519, texte de la commission n° 615, rapport n° 614).
Dans la discussion générale, la parole est à M. le secrétaire d’État.
Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, votre assemblée examine ce soir en deuxième lecture la proposition de loi de MM. Jean-Léonce Dupont et Hervé Marseille permettant la création de sociétés d’économie mixte à opération unique, après que l’Assemblée nationale a elle-même voté ce texte le 7 mai dernier, à l’unanimité, comme ce fut le cas ici même, au Sénat, lors de l’examen du texte en première lecture.
Cette proposition de loi s’inscrit dans le débat récurrent sur les modes de gestion des services publics.
Des élus de plus en plus nombreux souhaitent en effet reprendre le contrôle de certains services, sans avoir toutefois les moyens de créer, pour des raisons techniques ou financières, des régies municipales ou communautaires.
En une dizaine d’années, les législateurs successifs ont donc été amenés à créer plusieurs outils de développement local ; après les sociétés publiques locales d’aménagement et les sociétés publiques locales, les sociétés d’économie mixte à opération unique répondent incontestablement à cette attente.
Comme vous le savez, la SEM à opération unique reprend les caractéristiques principales de la société d’économie mixte locale, à commencer par la forme de société anonyme, la soumission de l’entreprise aux règles du code de commerce et les conditions de création des sociétés d’économie mixte locales.
D’abord, l’initiative publique est préservée, puisque seuls des collectivités territoriales ou leurs groupements sont autorisés à créer de telles sociétés, dans le cadre des compétences qui leur sont reconnues par la loi.
Ensuite, l’objet social de ces sociétés reste limité « à la réalisation d’une opération de construction, de développement du logement, d’aménagement ou à la gestion d’un service public ou toute autre activité d’intérêt général relevant de la compétence de la collectivité actionnaire ».
Enfin, la création d’une société d’économie mixte à opération unique suppose que les actionnaires publics sont associés à au moins une personne privée. Cela vise à garantir le caractère « mixte » de la société. Le principal ajustement de la législation sur l’économie mixte locale correspond à la possibilité de limiter le nombre d’actionnaires à deux seulement, et non pas sept, comme le prévoit le droit commun des sociétés applicable aux sociétés d’économie mixte locales.
La présente proposition de loi reprend ainsi une évolution amorcée par la loi du 28 mai 2010 pour le développement des sociétés publiques locales, qui avait créé les SPL. Pour autant, la SEM à opération unique n’en demeure pas moins une société particulière.
Elle se différencie en effet de la société d’économie mixte locale classique sur quatre points : la composition du capital social, la mise en concurrence des actionnaires minoritaires, la durée de vie de la société et la notion d’opération unique.
La création de la SEM à opération unique répond en fait à une demande ancienne des collectivités territoriales de pouvoir créer des sociétés dont elles ne seraient pas nécessairement les actionnaires majoritaires. La loi permettra ainsi la création de sociétés dont les collectivités territoriales détiendront « entre 34 % et 85 % des actions ainsi que 34 % au moins des voix dans les organes délibérants ».
Pourquoi ce double seuil ?
La limite de 34 % de participation garantit une minorité de blocage aux collectivités territoriales. La limite de 85 % de participation publique, quant à elle, garantit l’existence d’un capital public-privé.
Ce dispositif est compatible avec le droit communautaire, sur le fondement de la décision Acoset de la Cour de justice de l’Union européenne, en date du 15 octobre 2009.
Dans cet arrêt, la Cour de justice a en effet admis que le choix d’une entreprise privée pour entrer au capital d’une entreprise à capitaux publics et privés créée spécialement pour un service public puisse se faire en même temps que l’attribution de la concession à cette entreprise.
Il faut premièrement que l’associé privé soit sélectionné sur appel d’offres public, après vérification des conditions financières, techniques, opérationnelles et de gestion se rapportant au service à assurer et des caractéristiques de l’offre au regard des prestations à fournir.
Il faut deuxièmement que la procédure d’appel d’offres en question soit conforme aux principes de libre concurrence, de transparence et d’égalité de traitement imposés par le traité européen pour les concessions.
Je tiens à souligner que ce procédé correspond exactement à ce que préconisait la Commission de Bruxelles dans son Livre vert de 2008 sur les partenariats public-privé institutionnels.
Il convenait donc d’adapter le droit français à la mise en œuvre de cet outil et la proposition de loi que nous examinons ce soir va le permettre.
Après l’important travail fourni par le Sénat en décembre 2013, sous la houlette du rapporteur, Jacques Mézard, les députés ont souhaité apporter quelques précisions techniques, sans toutefois remettre en cause l’ensemble du dispositif.
La commission des lois de l’Assemblée nationale a ainsi substitué la notion d’« opérateur économique » à celle de « personne privée » pour la désignation du partenaire de la personne publique au sein de la SEM à opération unique. Cette terminologie, issue du droit européen de la commande publique, permet de ne pas exclure certaines personnes publiques, comme les établissements publics industriels et commerciaux, de l’accès au capital des SEM à opération unique.
L’Assemblée nationale a également précisé que l’objet unique de la SEM à opération unique ne pourrait être modifié pendant la durée d’existence de cette société.
Les députés ont aussi prévu que le partenaire appelé à constituer la SEM à opération unique serait sélectionné, non par une procédure spécifique d’appel public à manifestation d’intérêt – comme vous l’aviez initialement envisagé –, mais par une procédure unique d’appel public à la concurrence respectant les règles de la commande publique prévues selon l’objet du contrat destiné à être signé entre la SEM à opération unique et la personne publique.
Dans le même esprit, alors que le Sénat avait prévu la possibilité que la procédure d’appel public à manifestation d’intérêt puisse prévoir la possibilité pour le candidat d’inclure dans son offre des contrats de sous-traitance, l’Assemblée nationale a souhaité replacer toutes les questions relatives à la sous-traitance dans le cadre des règles de droit commun de la commande publique.
Je souhaite dire un mot sur cette question importante pour expliquer en quoi le recours au droit commun pour l’encadrement de la sous-traitance ne pose pas de difficultés, car je sais que certains d’entre vous ont pu s’interroger sur ce point.
Dans la mesure où la SEMOP se substitue, au terme de la procédure, à l’actionnaire opérateur choisi par la personne publique, c’est à cette société qu’il reviendra d’exécuter ledit contrat, en mettant en œuvre l’ensemble des capacités professionnelles, techniques et financières acquises conjointement. Il va de soi que la SEMOP se servira des capacités de son opérateur pour réaliser l’opération projetée – savoir-faire, logiciels ou brevets de l’opérateur, outillage, etc. C’est d’ailleurs au regard de ses capacités et de la manière de répondre aux exigences du pouvoir adjudicateur que l’opérateur sera choisi.
Concernant les prestations intrinsèquement liées à l’objet du contrat, celles-ci doivent pouvoir être anticipées par le pouvoir adjudicateur, formulées en amont et insérées dans les documents de consultation. Le candidat dispose alors de plusieurs possibilités, sans mise en concurrence ni publicité : soit candidater seul, s’il estime être en capacité de satisfaire les besoins de la collectivité et de répondre à ses exigences pour réaliser l’opération projetée ; soit constituer un groupement momentané d’entreprises – le candidat dispose alors de toute latitude pour choisir son cocontractant ; soit recourir à la sous-traitance, le candidat pouvant alors présenter, lors du dépôt de son offre, des sous-traitants à même de réaliser les prestations annexes pour lesquelles il ne dispose pas de la capacité ou des moyens techniques adéquats.
Le contrat de sous-traitance est conclu si l’offre du candidat est acceptée. La notification de l’attribution du contrat vaut acceptation du sous-traitant.
Dans l’hypothèse où les prestations intrinsèquement liées à l’objet du contrat n’ont pas été prévues initialement dans le contrat et surviennent en cours d’exécution, deux hypothèses doivent alors être distinguées.
Première hypothèse : la SEMOP n’est pas soumise aux dispositions de l’ordonnance du 6 juin 2005 sur les marchés non soumis au code des marchés publics ou de celle du 15 juillet 2009 sur les concessions de travaux publics – cela devrait être le cas dès lors que les besoins d’intérêt général qu’elle vise à satisfaire présenteront un caractère industriel ou commercial. La SEMOP sera alors libre de choisir ses sous-traitants et notamment de recourir à des filiales de l’opérateur économique actionnaire, qui devront être agréés par la collectivité territoriale ou le groupement de collectivités territoriales concernés.
Deuxième hypothèse : l’entreprise est soumise aux dispositions de l’ordonnance du 6 juin 2005 sur les marchés non soumis au code des marchés publics ou de celle du 15 juillet 2009. La SEMOP ne pourra pas recourir aux sous-traitants de son choix, mais devra les sélectionner en respectant les procédures applicables aux marchés relevant de l’ordonnance de 2005.
La commission des lois de l’Assemblée nationale a aussi prévu que les informations obligatoires nécessaires à cet appel public à la concurrence seraient complétées par un document de préfiguration de la SEM à opération unique.
Elle a également adopté un amendement de réécriture de l’article 1er bis présenté par son rapporteur, permettant d’assurer que la procédure de sélection de l’actionnaire opérateur économique, comme l’attribution du contrat à la SEM à opération unique créée à l’issue de la procédure, puisse faire l’objet d’un référé précontractuel ou d’un référé contractuel.
Enfin, en modifiant le titre de la proposition de loi, les députés ont précisé que son objet est de permettre la création, par les collectivités territoriales et leurs groupements, de SEM à opération unique.
En séance publique, l’Assemblée nationale a adopté six amendements, dont l’un prévoit que plusieurs opérateurs économiques pourront être retenus pour créer une SEMOP s’ils constituent un groupement pour répondre à l’appel public de la collectivité.
Conscient de l’équilibre général du texte, le Gouvernement n’a présenté que deux amendements de précision, qui ont été adoptés par les députés.
À l’article 1er, il s’agissait de préciser que le quantum minimum de parts attribuables aux actionnaires opérateurs économiques s’entend bien pour l’ensemble des acteurs économiques, et non considérés individuellement.
À l’article 1er bis, il apparaissait nécessaire de prévoir que l’assemblée délibérante de la collectivité ou du groupement de collectivités se prononce, de manière effective, sur le principe même du recours à la SEM à opération unique.
Comme l’avait déjà indiqué le Gouvernement en première lecture devant le Sénat, en la personne de Mme Escoffier, que je salue et dont je salue l’engagement sur ce texte, la SEM à opération unique répond à un besoin évident et reconnu des collectivités territoriales et des entreprises.
Je tiens à cet égard à relever la qualité du travail entrepris par le rapporteur, Jacques Mézard, ainsi que par l’auteur de cette proposition de loi, le vice-président du Sénat Jean-Léonce Dupont, dont chacun sait qu’il est aussi président de la Fédération des entreprises publiques locales et qu’il connaît parfaitement le sujet. Je n’oublie pas les nombreux autres sénateurs et députés, de différents groupes, qui ont déposé des propositions de loi identiques, dont certaines ont d’ailleurs été jointes à l’examen du présent texte. C’est la preuve, s’il en fallait, du caractère transpartisan de cette attente des élus locaux et du travail législatif remarquable accompli pour y répondre.
Si l’intérêt de ce nouvel outil n’est plus à démontrer, il était indispensable d’en assurer la sécurité juridique afin de permettre aux différents acteurs de se saisir pleinement de cet instrument nouveau destiné à améliorer la qualité des services publics locaux.
C’est désormais chose faite.
En l’état, la proposition de loi répond à deux exigences : la maîtrise politique et la sécurité juridique.
Maîtrise politique, d’abord, car le nouvel outil proposé répond à la volonté des collectivités de renforcer leur rôle et leur visibilité dans la gouvernance des services publics locaux, sans pour autant revenir à des formules intégralement publiques.
Sécurité juridique, ensuite, car les élus bénéficient du régime de mandataire de la collectivité locale et de la protection afférente à ce statut, même quand la collectivité est actionnaire minoritaire. Par ailleurs, le risque financier pris par la collectivité est limité à son apport au capital.
Ce soir, après une première lecture dans chacune des deux chambres, nous nous retrouvons avec un texte qui, grâce aux apports respectifs du Sénat puis de l’Assemblée nationale, améliore la proposition de loi initiale tout en en gardant ce qui en faisait l’essentiel.
Mesdames, messieurs les sénateurs, votre proposition de loi n’est pas seulement utile, elle est audacieuse, puisqu’elle se situe un cran au-dessus des exemples étrangers et des instruments auxquels on peut déjà se référer dans le droit positif.
Son champ d’application sera vaste – n’en doutons pas – et les instruments qu’elle met en place rendront possibles de nombreuses opérations utiles à nos collectivités territoriales et donc à nos concitoyens.
Le Gouvernement vous remercie de votre engagement dans l’élaboration de ce texte, qui intègre ainsi des dispositions pragmatiques et qui apporte une réponse efficace aux attentes de nos élus locaux.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du RDSE, de l'UDI-UC et de l’UMP.
Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, notre Haute Assemblée est appelée ce soir à se prononcer, en deuxième lecture, sur la proposition de loi adoptée par l’Assemblée nationale le 7 mai dernier et permettant la création de sociétés d’économie mixte à opération unique.
À cette proposition de loi, déposée par notre collègue le président Jean-Léonce Dupont, auquel je rends hommage eu égard au travail qu’il a réalisé sur les entreprises publiques locales, ont été jointes deux autres propositions de loi identiques déposées respectivement par le président Daniel Raoul et par Antoine Lefèvre, ici présent.
Cela souligne, comme vous l’avez noté, monsieur le secrétaire d’État, le caractère transpartisan de cette initiative parlementaire, ce dont on peut se féliciter et se réjouir. Je ne sais pas s’il en ira de même avec les prochains projets de loi relatifs aux collectivités locales…
En effet, je crains que ce ne soit moins évident !
Cela montre en tout cas que, lorsque l’on a des objectifs concrets, on arrive à surmonter certains clivages pour faire avancer nos collectivités et améliorer la vie de nos concitoyens.
Cette initiative de notre collègue Jean-Léonce Dupont avait abouti à un texte que le Sénat avait adopté, je le rappelle, à l’unanimité des suffrages exprimés, le 13 décembre dernier.
Cette nouvelle forme de partenariat public-privé institutionnalisé, selon la terminologie européenne, que créent ces propositions de loi a pour objectif d’optimiser le fonctionnement des services publics locaux en réintégrant leur gouvernance au sein des collectivités territoriales, tout en cherchant très naturellement à bénéficier du savoir-faire du secteur privé.
La réalisation de cet objectif passe par la création d’un nouvel outil, une entité mixte, composée d’une personne publique et d’au moins une personne privée chargée d’exécuter, par contrat, une opération unique bien déterminée.
Cette opération consisterait en la réalisation d’un ouvrage ou en la gestion d’un service public. Il convient de rappeler que plusieurs États européens ont déjà mis en place un tel instrument, qui a été validé par la Commission européenne et par la Cour de justice des Communautés européennes. Nous savons en effet que la création de ce type d’outil a donné lieu à des débats juridiques assez délicats.
La spécificité de cette nouvelle forme de société d’économie mixte, la SEM à opération unique – appellation d’ailleurs créée par le Sénat –, réside dans l’organisation d’une seule procédure de mise en concurrence, non pas pour l’attribution du contrat à ladite société, mais pour le choix de la personne privée qui participera à cette entité. Dans ce cadre, la personne privée devra faire la preuve de son expertise technique, opérationnelle et budgétaire, afin de justifier de sa capacité à répondre aux attentes et aux besoins de la collectivité territoriale.
Je souhaite souligner un point qui me paraît important. Les SEMOP ne visent pas à remplacer les outils traditionnels que sont les SEM classiques, ni à rendre caduques les formules traditionnelles de gestion des services publics locaux, comme la délégation de service public. Le but est de mettre à disposition des élus locaux qui le souhaitent un nouvel instrument destiné à répondre à des objectifs très déterminés.
Ce nouvel outil ne présente pas plus de risques juridiques ou financiers que d’autres plus classiques. L’exemple des sociétés publiques locales, créées en 2010 – j’ai eu le privilège d’être le rapporteur de la proposition de loi les instaurant, et je tiens à saluer le travail qu’avait accompli Anne-Marie Escoffier sur ce dossier –, est particulièrement probant à cet égard : à ma connaissance, ces sociétés fonctionnent sans difficultés particulières ni dérives.
Enfin, autre point important, la comparaison avec les contrats de partenariat ne me paraît pas pertinente. Nous connaissons les inquiétudes de certains professionnels, en particulier ceux du second œuvre ou de la maîtrise d’œuvre, mais il est faux de dire que la SEM à opération unique est de même nature que le PPP.
En effet, la personne publique disposera, au sein d’une SEMOP, de plusieurs outils destinés à la protéger : détention de la présidence de la SEM et, pour le moins, d’une minorité de blocage – ce sera souvent une majorité – au conseil d’administration. Par ailleurs, les projets pour lesquels les élus locaux utiliseront une SEMOP seront généralement d’une envergure plus modeste que ceux faisant l’objet d’un contrat de partenariat.
Enfin, ces SEMOP sont conçues pour permettre aux élus locaux de recourir à des entreprises locales et donc, aussi, pour être un moyen de redynamisation de nos territoires. On a d’ailleurs pu constater l’intérêt manifesté par de nombreuses collectivités lors de la création des sociétés publiques locales, dont les SEMOP seront un complément.
Guidée par le souci de protéger le rôle des élus locaux au sein de cette nouvelle entité tout en conservant une certaine souplesse afin de garantir son efficacité, la Haute Assemblée a renforcé, en première lecture, sur notre initiative, la sécurité juridique du dispositif, pour que soient respectées les exigences communautaires en matière d’égalité de traitement, de transparence et de publicité des procédures, et pour permettre aux élus locaux de se saisir pleinement de cet instrument.
Je citerai quelques améliorations que nous avons adoptées en première lecture.
Premièrement, le changement de dénomination, de SEM-contrat en SEM à opération unique, permet de mettre en exergue la limitation du champ d’activité à l’exécution d’un contrat unique qui constituera l’objet de la future SEM, tout en conservant les spécificités de cette entité.
Deuxièmement, nous avons clarifié les différentes étapes de la création d’une SEMOP et de la conclusion du contrat. Toute personne publique souhaitant recourir à une SEMOP devra adopter une délibération dans laquelle elle déterminera ses besoins et définira les principales caractéristiques de la future société.
Troisièmement, nous avons clarifié la procédure de mise en concurrence pour la sélection de l’actionnaire opérateur, qui reposera sur un appel public à manifestation d’intérêt, respectant les principes de liberté d’accès, d’égalité de traitement et de transparence des procédures. Sur la base de la délibération de la personne publique, les candidats devront déterminer leur part de capital au sein de la future SEM, ainsi que les moyens techniques et financiers permettant la réalisation de l’opération conclue avec cette dernière. À la suite du choix de l’actionnaire opérateur, sera créée la SEMOP qui conclura, avec la personne publique, le contrat à l’origine de la démarche.
En fait, tout en conservant l’esprit et la structure de la proposition de loi adoptée par le Sénat, et dans la continuité de nos travaux, la commission des lois de l’Assemblée nationale a conforté la simplification du dispositif, en réaffirmant le caractère unique de la procédure. Parmi les évolutions adoptées par nos collègues députés, on retiendra les suivantes.
Tout d’abord, si l’on pourrait gloser sur la substitution de la notion d’opérateur économique à celle d’actionnaire opérateur pour désigner la personne privée qui participera au capital de la SEMOP, afin de ne pas préjuger de la forme juridique et de la propriété du cocontractant, je crois qu’il n’y a pas lieu d’y revenir. Il me semble d’ailleurs que la Caisse des dépôts et consignations était attachée à cette évolution.
J’évoquerai ensuite la sélection du partenaire opérateur dans le strict respect des procédures de mise en concurrence existantes. En d’autres termes, la procédure de mise en place d’une SEMOP sera celle en vigueur pour l’appel public à la concurrence selon la nature du contrat à conclure.
Je mentionnerai aussi la suppression de la possibilité d’attribuer des contrats connexes ou de sous-traitance simultanément au choix de l’actionnaire opérateur, l’établissement d’un document de préfiguration prévoyant les caractéristiques, modalités et coût de la structure ainsi mise en place – c’est un point important, car cela permet de répondre à certaines inquiétudes exprimées par des représentants des professionnels du second œuvre ou de la maîtrise d’œuvre –, la possibilité de constitution d’un groupement permettant à plusieurs opérateurs économiques de répondre à l’appel à la concurrence d’une personne publique, enfin l’intervention de l’organe délibérant des collectivités pour se prononcer sur le principe et la pertinence du recours à une SEMOP. Toutes ces dispositions visent à renforcer la transparence dans la mise en place de ce type de structures.
La commission des lois du Sénat a approuvé l’ensemble des modifications adoptées par l’Assemblée nationale, car les dispositions ainsi amendées tendent, à nos yeux, à renforcer et à conforter la sécurité juridique des SEMOP. Elles répondront, selon nous, aux attentes de nombreux élus locaux soucieux d’optimiser le fonctionnement des services publics locaux dans un contexte budgétaire particulièrement difficile, tout en garantissant la qualité du service rendu à nos concitoyens et, ajouterai-je, sans présenter les risques, que nous connaissons bien, des PPP.
Par ailleurs, la commission des lois est attachée à une entrée en vigueur rapide du texte afin de permettre à nos collectivités de se saisir pleinement de ce nouvel outil. C’est pourquoi elle a adopté la présente proposition de loi dans la rédaction issue des travaux de l’Assemblée nationale. Je vous invite, mes chers collègues, à en faire de même ce soir en séance publique. §
Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, mon intervention à l’occasion de cette deuxième lecture de la proposition de loi permettant la création de SEM à opération unique sera brève, et même très brève.
Très attendu, le texte qui nous revient de l’Assemblée nationale, où il a fait l’objet d’un quasi-consensus, vise à autoriser la création d’une nouvelle catégorie d’établissement public local, conformément à l’avis du Conseil d’État de décembre 2009. Je me félicite qu’il recueille une très large approbation, ayant eu l’honneur de présenter cette proposition de loi à mes collègues du groupe UMP, à la suite de l’initiative du président Jean-Léonce Dupont, dont on vient de rappeler l’inlassable engagement au service des SEM.
La mise en place de ces partenariats sécurisés et économiquement performants permettra d’ouvrir le champ à certaines réalisations, dans un souci évident de bonne gestion de nos territoires. En effet, alors que le transfert de compétences vers les collectivités locales va croissant, il n’est souvent pas accompagné de financements suffisants. Les responsabilités des collectivités locales évoluent donc de façon inversement proportionnelle au montant des dotations de l’État, et les choses ne vont pas aller en s’arrangeant, hélas !
Les difficultés budgétaires que cela entraîne pour les collectivités territoriales exigent donc la mise en place d’outils innovants, tels que les SEM à opération unique, pour éviter que certains services publics de proximité ne soient affectés. Il faut ajouter que ce type de SEM est d’usage courant et est apprécié dans de nombreux pays d’Europe. La France accusait jusqu’à présent un certain retard en la matière.
Les aménagements apportés par nos collègues députés sécurisent davantage encore le dispositif, par une simplification du texte initial. Certes, à l’usage, quelques ajustements apparaîtront probablement nécessaires, comme pour tout nouveau dispositif. Ceux-ci pourraient d’ailleurs être apportés lors des discussions à venir sur les nouveaux transferts de compétences, qui interviendront de fait avec les prochaines lois de décentralisation.
Nous soutenons d’autant plus ce texte que toutes les garanties juridiques ont été apportées. Les marques de confiance reçues à propos de ce dispositif nous invitent à l’adopter.
Je sais que certains ont exprimé des inquiétudes, en particulier au sujet des contrats de sous-traitance. Cependant, comme l’a rappelé notre excellent rapporteur, ce sujet a été débattu en commission des lois, et le fait qu’aucun amendement sur la question n’a été déposé montre que ces inquiétudes ont pu être levées.
Je suis certain que le débat de ce soir nous éclairera davantage encore et permettra de rassurer les architectes, qui ont d’ailleurs été reçus par notre rapporteur, s’agissant des appels d’offres.
Pour toutes ces raisons, les membres du groupe auquel j’appartiens voteront avec conviction cette proposition de loi qui est attendue par les acteurs locaux et leurs partenaires économiques. §
Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, à l’automne 2013, plus d’une centaine de députés et de sénateurs, issus de la plupart des groupes politiques, prenaient l’initiative de déposer simultanément, en termes identiques, dans les deux chambres, six propositions de loi permettant de créer des SEM-contrat.
Sur l’initiative fort opportune de notre rapporteur, Jacques Mézard, l’intitulé « SEM à opération unique » a été substitué à celui de « SEM-contrat ». Je constate d’ailleurs que l’acronyme SEMOP fait rapidement son chemin ; ainsi, nombre d’entre nous, dans cet hémicycle, se le sont déjà approprié.
Le nom a certes changé ; pour autant, à l’issue de l’adoption à l’unanimité de cette proposition de loi par le Sénat, le 11 décembre, puis par l’Assemblée nationale, le 7 mai, le texte que nous examinons ce soir comprend toujours les huit grands principes arrêtés par les 106 parlementaires à l’origine de cette initiative législative et rappelés tout à l’heure par M. le secrétaire d’État.
Ces huit principes sont les suivants.
Le premier est que la SEMOP comporte bien dans son nom l’expression SEM, pour affirmer son appartenance à la famille des entreprises publiques locales, dont elle partage les valeurs d’intérêt général, d’enracinement territorial, de maîtrise politique et de management d’entreprise.
Le deuxième est que la SEMOP repose sur une mise en concurrence unique lancée par la collectivité en amont de la constitution de la SEM pour désigner l’actionnaire ou le groupement d’actionnaires qui s’associera avec elle. Le choix de l’actionnaire opérateur s’effectue donc en fonction de la procédure correspondant au type de contrat retenu.
Le troisième est que le principe de l’attribution de la mission à la SEMOP soit entériné dans le cahier des charges, en amont de l’appel d’offres.
Le quatrième est que l’essentiel du droit applicable aux SEMOP soit celui des SEM, et donc des sociétés anonymes. Le texte renvoie donc largement aux dispositions du code général des collectivités territoriales relatives aux SEM, en particulier pour ce qui concerne les règles de protection des élus mandataires de la collectivité. Les règles traditionnelles de reprise des personnels s’appliquent également, en cas de transfert, d’arrêt ou de reprise d’activité.
Le cinquième principe est que la SEMOP soit mono-contrat, avec une durée de vie limitée à la durée et à l’exécution exclusive du contrat unique qui constitue son objet social.
Le sixième est que le nombre d’actionnaires puisse descendre à un minimum de deux, et que l’un d’entre eux puisse être une structure regroupant plusieurs partenaires.
Le septième est que la part du capital public ne puisse pas descendre en dessous de la minorité de blocage de 34 %, ni dépasser 85 %.
Le huitième principe, enfin, est que la maîtrise politique soit garantie par l’attribution de droit de la présidence à un élu, quel que soit le niveau de détention du capital par la personne publique, et par des statuts ou un pacte d’actionnaires précisant la gouvernance, les décisions relevant de l’unanimité ou d’une majorité qualifiée, la composition et l’évolution du capital, etc.
Sous l’impulsion des éminents rapporteurs qu’ont été à tour de rôle Jacques Mézard et Erwann Binet, avec le soutien du Gouvernement, en la personne d’Anne-Marie Escoffier, que je tiens à remercier vivement, puis d’André Vallini, le Sénat puis l’Assemblée nationale n’en ont pas moins apporté au texte initial des améliorations significatives, toutes destinées à optimiser l’appropriation de ce nouveau type d’entreprise publique locale par l’ensemble des parties prenantes. Je citerai les principales d’entre elles.
Tout d’abord, le Sénat comme l’Assemblée nationale ont simplifié le texte. Ils ont ainsi opportunément renforcé l’affirmation du caractère unique de la procédure. Ils ont également consolidé l’alignement clair et sans ambiguïté de cette mise en concurrence sur les procédures déjà existantes de commande publique, en fonction de la nature du contrat considéré : délégation de service public, marchés publics, concession d’aménagement, etc.
Autre évolution importante, le Sénat a ajouté l’obligation, pour la collectivité ou le groupement, de préciser dans l’appel d’offres initial la part de capital qu’il souhaite détenir.
L’Assemblée nationale et le Sénat ont également renforcé l’alignement de l’ensemble du dispositif sur le droit commun afin de dissiper toute ambiguïté quant à la mise en place d’une procédure sui generis. C’est ce qui a conduit le Parlement à sensiblement modifier la forme de cette proposition de loi, qui s’articule désormais autour d’un article principal, les suivants n’intégrant que des modifications nécessaires dans le code de justice administrative ou le code général des collectivités territoriales.
Soyons clairs, la SEMOP est une entreprise à part entière, qui relève du droit idoine, et non un nouveau type de contrat qui viendrait concurrencer ou au contraire conforter telle ou telle procédure de commande publique déjà existante.
L’Assemblée nationale a ajouté le bail emphytéotique administratif comme type de contrat pouvant être attribué à une SEMOP, ce qui renforce le positionnement de la SEMOP comme entreprise publique locale pouvant exercer tout type de contrat pour sa collectivité.
L’Assemblée nationale a souhaité substituer la notion d’opérateur économique à celle de personne privée pour désigner l’actionnaire opérateur. Cette terminologie permet de ne pas préjuger de la forme juridique du co-contractant. Elle présente donc l’avantage de ne pas exclure certaines personnes publiques, comme les EPIC, les établissements publics à caractère industriel et commercial, de la possibilité d’être actionnaires opérateurs.
Pour affirmer la maîtrise du politique sur la SEMOP dès sa genèse, l’Assemblée nationale, sur proposition du Gouvernement, a prévu enfin, comme c’est le cas pour les sociétés publiques locales, une délibération de la collectivité locale sur le principe du recours à la SEMOP.
D’aucuns pensent que le texte que nous étudions ce soir reste à parfaire – notre collègue Antoine Lefèvre y faisait allusion tout à l’heure –, en particulier pour y apporter un certain nombre de précisions permettant de tout border, reborder, rereborder, et au final, peut-être, de déborder ! §
Ne nous trompons pas de cible : l’objectif qui est le nôtre est de mettre à la disposition de l’action publique locale un nouveau type d’entreprise. À cet égard, le bon fonctionnement de chaque SEMOP, comme c’est le cas dans les pays d’Europe où cet outil existe déjà, reposera sur l’affectio societatis qui se mettra en place entre ses différents actionnaires au travers de statuts et de pactes d’actionnaires équilibrés.
Ne cédons pas, chers collègues, à la tentation de tout verrouiller par un carcan législatif qui ne précisera jamais tout et s’avérera rapidement obsolète. Les exemples dans ce domaine ne manquent pas. Donnons toute sa place à la liberté d’entreprendre ! Faisons confiance tant aux élus locaux qu’aux dirigeants d’entreprises qui s’associeront à eux !
Comme cela a déjà été souligné à plusieurs reprises, nos territoires ont besoin, maintenant, des SEM à opération unique. Ces structures ont déjà fait leurs preuves dans de nombreux autres pays d’Europe et leur corpus juridique est validé, M. le secrétaire d’État l’a rappelé, par le droit communautaire.
Elles sont attendues par les élus comme par les actionnaires opérateurs potentiels, dans un contexte marqué à la fois par la raréfaction de la ressource publique et par l’aspiration des élus à jouer un rôle plus important dans la gouvernance de leurs services publics, sans pour autant totalement les réinternaliser. La prise de position unanime des associations d’élus en faveur de la création des SEMOP est à cet égard extrêmement parlante.
Depuis plusieurs mois, le Sénat puis l’Assemblée nationale ont œuvré à bâtir un texte clair, court, simple et sécurisé juridiquement. Tout cela doit contribuer à optimiser l’appropriation de la SEMOP par l’ensemble des parties prenantes, qui trouveront toute leur place dans ce nouveau type d’entreprise publique locale : les collectivités locales, les actionnaires opérateurs, les tiers actionnaires et les sous-traitants, qu’il s’agisse de grands groupes ou de PME.
Je suis convaincu que la SEMOP saura rapidement trouver sa place au sein de la gamme des entreprises publiques locales, aux côtés de la SEM classique et de la SPL, portée sur les fonts baptismaux par la loi Raoul du 28 mai 2010. Il n’est donc que temps de mettre la SEMOP à la disposition de nos territoires ! §
Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, vous m’en voyez désolée, mais je ne tiendrai pas, sur la création des SEM-contrat, devenues en cours de route des SEM à opération unique, ou SEMOP, les mêmes propos que les orateurs qui m’ont précédée…
La navette aura permis d’aboutir, reconnaissons-le, à un dispositif juridiquement plus efficient, en réintégrant la procédure de création de ces nouvelles structures dans le droit commun des procédures existantes de commande publique et en supprimant ainsi la procédure ad hoc initialement instaurée.
Nous nous félicitons également que le texte contraigne dorénavant les collectivités à se poser, au préalable, la question de l’intérêt de la création d’une telle SEM au regard de l’existence des autres outils de la commande publique ; c’est là, nous l’avions déjà souligné, un minimum.
Pourtant, malgré la solidité juridique de ce nouveau dispositif, les remarques de fond que nous avions formulées en première lecture restent valides.
Cette proposition de loi, nous le savons tous, est née du contexte d’asphyxie financière des collectivités, victimes d’une diminution de leurs ressources du fait de la baisse accélérée des dotations de l’État parallèlement à la croissance des besoins des populations. Pour autant, ces mêmes collectivités souhaitent, et c’est bien légitime, mieux maîtriser les services publics délégués. Mais comment faire ? Quand bien même elles auraient la volonté de les assurer en régie, elles ne disposent plus, bien souvent, ni du savoir-faire ni des ressources nécessaires.
Au fond, de quoi s’agit-il ? Cette proposition de loi est emblématique de ce qui ronge les collectivités : la RGPP, devenue la MAP, la modernisation de l’action publique, qui a saigné l’emploi public dans une proportion telle que ni les collectivités ni même les services de l’État ne sont plus en mesure d’assumer leurs missions au service de l’intérêt général, ce qui place le plus souvent les pouvoirs publics en situation de dépendance à l’égard d’organismes extérieurs.
Les SEM à opération unique sont donc présentées comme une alternative aux délégations de service public et aux contrats de partenariat, alliant une maîtrise publique toute relative à un savoir-faire qui est aujourd’hui l’apanage du privé. Toutefois, est-ce vraiment une alternative ? Cette proposition de loi répond-elle à l’objectif de renforcer la maîtrise publique ? Nous sommes au regret de devoir répondre, pour notre part, par la négative.
Ainsi, en matière de gouvernance, et à l’inverse de ce qui prévaut pour la grande majorité des SEM actuelles, la puissance publique pourrait, si elle le décidait, ne plus être majoritaire face à ses partenaires privés, le seuil minimal de participation étant fixé à 34 %. Qualifier de SEM ce nouvel outil est, de ce fait, quelque peu abusif. Il s’agit d’une structure foncièrement différente, plus proche, cela a été dit, d’un partenariat public-privé que d’un outil public. Traditionnellement, les SEM et les sociétés publiques locales ont été le bras séculier de nos collectivités, l’outil qui leur a permis de mener des politiques d’aménagement ambitieuses au service de l’intérêt général.
Toutefois, demain, quelle sera la capacité réelle d’une collectivité qui aura décidé d’être minoritaire au sein d’une SEM à opération unique à peser réellement sur les choix de gestion et les décisions ? On nous dit qu’elle conservera une minorité de blocage, mais rien n’indique aujourd’hui que 34 % des voix constitueront bel et bien celle-ci : qu’est-ce qui nous le garantit ? Comment un rapport de force favorable à la collectivité pourra-t-il être créé, une fois le pacte d’associés défini et le contrat attribué ? Quel pouvoir décisionnaire pourra-t-elle conserver face à un partenaire privé dont l’objectif principal est la rentabilité ?
De plus, en participant au capital de cette SEM, la collectivité sera amenée à assumer, avec le partenaire privé, un financement, et donc un risque, qui trouvera sa traduction au sein du pacte d’associés et qui, au vu des scandales et des dérives auxquels ont donné lieu les PPP, pourrait se révéler extrêmement coûteux. Ainsi, si aujourd’hui, dans le cadre d’une délégation de service public, la rémunération du délégataire est liée principalement au résultat d’exploitation, il pourra en aller tout à fait différemment dans le cadre d’une SEM à opération unique.
Étant donné que l’objectif affiché est de donner aux collectivités des outils pour mieux contrôler les entreprises privées délégataires de missions de service public, comment comprendre que celles-ci accueillent cette proposition de loi avec un tel enthousiasme ? Elles ont bien compris que ce texte leur ouvrirait la possibilité d’étendre leur emprise sur le secteur public, et peut-être même d’augmenter leurs profits. Au final, nous contribuons certes, en créant ce type de structures, à offrir de nouveaux outils aux collectivités, mais cela va dans le sens d’une privatisation rampante des services publics. Nous ne partageons pas cette orientation.
Autre interrogation : alors que les SEM traditionnelles associent souvent des acteurs privés locaux, les futurs partenaires des SEMOP seront probablement des mastodontes des secteurs du bâtiment et des travaux publics, de l’environnement ou des transports, car seules de telles entreprises auront les reins assez solides pour répondre à des appels d’offres de cette nature. Cette spécificité suscite l’inquiétude. ATTAC a ainsi souligné que le recours à ce type de SEM « limitera drastiquement l’accès à la commande publique pour les PME, qui n’auront pas les capacités juridiques et financières de souscrire au capital de la SEM ».
Finalement, cette proposition de loi n’aura pas d’effet sur les différents types de marchés publics, mais elle emportera des conséquences sur les prestataires, en tendant à mettre en concurrence à la fois les projets et les partenaires. La création des SEMOP est présentée comme une innovation positive, mais nous considérons pour notre part qu’il s’agit plutôt d’une remise en cause des fondements mêmes de la commande publique.
L’Ordre national des architectes est très sceptique à l’égard de ce type de montage, qui « les subordonne à des intérêts marchands au sein d’une société où les partenaires, c’est-à-dire les collectivités et les actionnaires, seront juges et parties, à la fois maîtres d’ouvrage, maîtres d’œuvre et entreprise ». Une telle situation contrevient totalement aux principes de la loi du 3 janvier 1977 sur l’architecture.
Au regard de l’ensemble de ces éléments, la majorité des sénateurs du groupe CRC s’abstiendront une nouvelle fois sur cette proposition de loi qui, même après deux lectures, reste à nos yeux des plus ambiguës.
Applaudissements sur les travées du groupe CRC.
Madame Didier, je tiens à vous informer – si vous ne le savez déjà – que la commission des lois a, ce matin même, salué à l’unanimité une autre avancée, rendue possible, elle aussi, grâce au concours du Gouvernement : je veux parler de la proposition de loi visant à répartir les responsabilités et les charges financières concernant les ouvrages d’art de rétablissement des voies, sujet sur lequel vous travaillez depuis plusieurs années ! Je vous l’accorde, c’est là une manière de rééquilibrer le partage des charges publiques.
Tout comme vous, les membres du groupe socialiste ont manifesté leur circonspection face aux risques de débordement et de « consanguinité » que présente le partenariat public-privé.
Cela étant posé, concentrons-nous sur le texte qui nous occupe ce soir. J’en donne acte à M. le rapporteur comme aux auteurs de la présente proposition de loi : tout ce qui pouvait ressembler, de près ou de loin, à un « cousinage » entre la SEM à opération unique et le partenariat public-privé a été systématiquement écarté. §
Monsieur Jean-Léonce Dupont, je ne reprendrai pas les huit points que vous avez parfaitement rappelés. Un travail remarquable a été effectué par tous les groupes, preuve, s’il en était besoin, que c’est possible ! Il existe même des commissions spéciales réunissant des représentants de tous les groupes parlementaires… §
Monsieur le rapporteur, je tiens à saluer particulièrement le travail que vous avez accompli en première lecture avec les membres de la commission des lois, notamment Alain Richard, ancien conseiller d’État, qui en 2009 avait rédigé un avis sur le sujet. Vous avez systématiquement repris les différents points en discussion pour sécuriser juridiquement le dispositif.
Je rends bien sûr hommage à Mme Escoffier, qui a bien compris que, en matière de décentralisation, il faut distinguer les déclarations d’amour des preuves d’amour. §On invoque volontiers la nécessité d’assouplir les normes ou de réduire leur nombre. En l’espèce, ce texte comporte des mesures très concrètes ! Plus précisément, cette réforme garantit une réelle sécurité juridique, tant pour les collectivités et les élus locaux que pour les opérateurs.
Je vous assure, mes chers collègues, que je n’ai rien contre la régie. Lorsqu’une collectivité territoriale est en mesure d’y recourir, elle n’a pas à hésiter ! Cela étant, la présente proposition de loi, répondant aux réalités économiques, offre une solution médiane entre la régie et la délégation de service public. Elle donne aux acteurs privés les moyens de concourir au service public. Parallèlement, même lorsqu’elle ne sera pas majoritaire, la collectivité pourra conserver le contrôle, non seulement lors de l’élaboration du contrat, mais aussi lors de son exécution. Elle restera donc très impliquée dans la gestion du service public.
Aussi, j’approuve sans réserve le travail accompli et, à celles et à ceux qui souhaitent aller plus loin, je donne rendez-vous lors du débat sur la transposition dans notre droit interne de la directive relative à la commande publique. Quant à celles et à ceux qui s’intéressent plus spécifiquement aux sociétés d’économie mixte, j’indique que les SEM hydroélectriques figureront dans le projet de loi sur la transition énergétique.
En attendant, je tiens à remercier le Gouvernement d’avoir créé les conditions d’une véritable simplification de la vie des collectivités. Ce texte fera date. Il s’inscrit dans le mouvement d’allégement des normes et participe de la défense du service public, que le partenariat public-privé ne garantit pas suffisamment. Un prochain rapport de la commission des lois l’établira de manière irréfutable !
Enfin, je tiens à dire bravo à M. Dupont ! §
Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, nous arrivons au terme de l’examen d’un texte très attendu, qui vient fort opportunément doter les collectivités territoriales d’un nouvel outil en matière de commande publique.
Dans ce même hémicycle, mais en d’autres temps, je saluais la forte mobilisation des élus locaux et des acteurs économiques, qui avaient su emporter l’adhésion du Sénat pour élaborer et faire adopter une première version de cette proposition de loi. Cela a été souligné avec beaucoup de conviction, et j’en suis pour ma part certaine : demain, ce texte permettra de faciliter l’action de tous les décideurs locaux, aujourd’hui tenus de choisir entre, d’une part, l’exploitation et la réalisation en régie, et, de l’autre, l’externalisation par voie de délégation de service public.
À l’époque, j’avais modestement relevé divers points qui méritaient à mes yeux une réflexion complémentaire. Il s’agissait notamment du quantum de capital détenu par l’actionnaire public, de l’encadrement des contrats de sous-traitance, des procédures de mise en concurrence.
Le texte dont je disais, le 11 décembre 2013, qu’il était presque abouti a cheminé avec une bien belle efficacité à l’Assemblée nationale. En effet, monsieur le secrétaire d’État, lors de votre « baptême du feu », le 7 mai dernier, il a été adopté par nos collègues députés avec de substantielles améliorations, ce qui vous a permis de conclure les débats par ces mots : « Je me réjouis de ce quasi-consensus sur une forme nouvelle de mariage entre le secteur privé et la sphère publique qui va permettre aux collectivités territoriales de faire encore mieux leur travail. » Oserai-je le dire, vous avez alors ajouté que ce consensus augurait peut-être de celui que susciterait la future réforme territoriale !
La commission des lois du Sénat a de nouveau examiné cette proposition de loi après son adoption par l’Assemblée nationale. Comme l’a excellemment souligné M. le rapporteur, cela a permis de prendre en compte la plupart des attentes des différentes parties. Sans revenir sur les huit points qui ont été développés très largement par les orateurs m’ayant précédée, j’évoquerai à cet égard le caractère d’unicité de l’opération justifiant la création d’une SEMOP et l’interdiction, au terme de cette opération, de transformer la structure en société d’économie mixte ou en société publique locale, les précisions apportées concernant l’appel d’offres, en particulier sur la part de capital de la collectivité territoriale ou de son groupement, l’affirmation du caractère unique de la procédure pour la sélection du candidat et la dévolution du contrat, la possibilité pour les tiers actionnaires d’être parties prenantes au pacte d’actionnaires.
Je veux aussi souligner la détermination des deux assemblées, que vous avez vous-même encouragées, monsieur le secrétaire d’État, à conforter l’alignement du dispositif de la SEM à opération unique sur le droit commun, s’agissant en particulier de la mise en concurrence.
Au terme des débats nombreux et constructifs qui se sont succédé, le présent texte répond, dans sa forme actuelle, aux interrogations que d’aucuns ont soulevées quant à l’attribution simultanée de contrats de sous-traitance. Rien n’interdit l’attribution de tels contrats sans appel d’offres, dès lors que la collectivité territoriale n’est pas majoritaire. À l’inverse, si tel est le cas et si l’intervention de la SEM à opération unique concerne l’un des secteurs dits « spéciaux » –l’eau, l’énergie, les transports, les communications –, sa qualification d’entité adjudicatrice lui permettra de bénéficier, pour sa sous-traitance, de règles assouplies.
Je ne crois pas nécessaire de commenter plus longuement un texte dont tous les intervenants, tous les acteurs, tous les partenaires concernés ont compris l’utilité, dans un cadre juridique sécurisé et rénové.
Les membres du RDSE voteront en faveur de l’adoption de cette proposition de loi. Je forme le vœu que son dispositif soit rendu opérationnel aussi vite que celui de la société publique locale, née dans cette enceinte, dans cette assemblée dont on ne mesure peut-être pas toujours suffisamment la sagesse et l’intérêt des travaux, la connaissance approfondie du fonctionnement de nos collectivités territoriales, de leurs pratiques, de leur quotidien, des difficultés structurelles, organisationnelles ou financières auxquelles elles sont confrontées. Elle mériterait souvent d’être davantage écoutée, …
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion du texte de la commission.
(Non modifié)
Le livre V de la première partie du code général des collectivités territoriales est complété par un titre IV ainsi rédigé :
« TITRE IV
« SOCIÉTÉS D’ÉCONOMIE MIXTE À OPÉRATION UNIQUE
« Art. L. 1541 -1. – I. – Dans le cadre de ses compétences autres que l’exercice de missions de souveraineté, une collectivité territoriale ou un groupement de collectivités territoriales peut créer, avec au moins un actionnaire opérateur économique, sélectionné après une mise en concurrence dans les conditions définies à l’article L. 1541-3, une société d’économie mixte à opération unique.
« La société d’économie mixte à opération unique est constituée, pour une durée limitée, à titre exclusif en vue de la conclusion et de l’exécution d’un contrat avec la collectivité territoriale ou le groupement de collectivités territoriales dont l’objet unique est :
« 1° Soit la réalisation d’une opération de construction, de développement du logement ou d’aménagement ;
« 2° Soit la gestion d’un service public, pouvant inclure la construction des ouvrages ou l’acquisition des biens nécessaires au service ;
« 3° Soit toute autre opération d’intérêt général relevant de la compétence de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales.
« Cet objet unique ne peut être modifié pendant toute la durée du contrat.
« Le contrat peut inclure la conclusion, entre la société d’économie mixte à opération unique et la collectivité territoriale ou le groupement de collectivités territoriales, d’un bail emphytéotique administratif nécessaire à la réalisation de son objet.
« II. – Sous réserve des dispositions du présent titre, la société d’économie mixte à opération unique revêt la forme de société anonyme régie par le livre II du code de commerce et par le titre II du présent livre. Elle est composée, par dérogation à l’article L. 225-1 du code de commerce, d’au moins deux actionnaires. Elle ne peut pas prendre de participation dans des sociétés commerciales.
« III. – Les statuts de la société d’économie mixte à opération unique fixent le nombre de sièges d’administrateur ou de membre du conseil de surveillance dont dispose chaque actionnaire. Ils sont attribués en proportion du capital détenu, ce nombre étant, le cas échéant, arrondi à l’unité supérieure.
« Le président du conseil d’administration ou du conseil de surveillance est un représentant de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales.
« La collectivité territoriale ou le groupement de collectivités territoriales détient entre 34 % et 85 % du capital de la société et 34 % au moins des voix dans les organes délibérants. La part de capital de l’ensemble des actionnaires opérateurs économiques ne peut être inférieure à 15 %.
« IV. – La société d’économie mixte à opération unique est dissoute de plein droit au terme du contrat avec la collectivité territoriale ou le groupement de collectivités territoriales ou dès que l’objet de ce contrat est réalisé ou a expiré.
« Art. L. 1541 -2. –
Supprimé
« Art. L. 1541 -3. – I. – Sous réserve du présent article, la sélection du ou des actionnaires opérateurs économiques et l’attribution du contrat à la société d’économie mixte à opération unique mise en place sont effectuées par un unique appel public à la concurrence respectant les procédures applicables aux délégations de service public, aux concessions de travaux, aux concessions d’aménagement ou aux marchés publics, selon la nature du contrat destiné à être conclu entre la collectivité territoriale ou le groupement de collectivités territoriales et la société d’économie mixte à opération unique.
« Sont applicables les procédures subséquentes pouvant être mises en œuvre lorsque l’appel public à la concurrence est infructueux.
« II. – Les candidats susceptibles d’être sélectionnés pour être actionnaires opérateurs économiques de la société d’économie mixte à opération unique doivent respecter les conditions de recevabilité des candidatures propre à la procédure applicable au contrat destiné à être conclu.
« III. – En complément des informations obligatoires selon la nature du contrat destiné à être conclu, l’avis d’appel public à la concurrence comporte un document de préfiguration, précisant la volonté de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales de confier l’opération projetée à une société d’économie mixte à opération unique à constituer avec le candidat sélectionné.
« Ce document de préfiguration de la société d’économie mixte à opération unique comporte notamment :
« 1° Les principales caractéristiques de la société d’économie mixte à opération unique : la part de capital que la collectivité territoriale ou le groupement de collectivités territoriales souhaite détenir ; les règles de gouvernance et les modalités de contrôle dont la collectivité ou le groupement de collectivités souhaite disposer sur l’activité de la société définies, le cas échéant, dans un pacte d’actionnaires ; les règles de dévolution des actif et passif de la société lors de sa dissolution ;
« 2° Le coût prévisionnel global de l’opération pour la collectivité territoriale ou le groupement de collectivités territoriales et sa décomposition.
« IV. – Les critères de sélection des candidats sont définis et appréciés par la collectivité territoriale ou le groupement de collectivités territoriales conformément aux règles applicables selon la nature du contrat destiné à être conclu avec la société d’économie mixte à opération unique. Le coût global de l’opération est apprécié en tenant compte de la souscription au capital et au financement de la société d’économie mixte à opération unique.
« V. – À l’issue de la mise en concurrence et de la sélection du candidat, sont arrêtés et publiés les statuts de la société d’économie mixte à opération unique, ainsi que, le cas échéant, le pacte d’actionnaires conclu.
« VI. – Le contrat, comportant les éléments prévus par l’appel public à la concurrence, est conclu entre la collectivité territoriale ou le groupement de collectivités territoriales et la société d’économie mixte à opération unique, qui est substituée au candidat sélectionné pour l’application des modalités de passation prévues selon la nature du contrat.
« Art. L. 1541 -4 et L. 1541 -5. –
Supprimés
« Art. L. 1541 -6. – I. – En cas de transformation, de fusion ou de rattachement de la collectivité territoriale actionnaire d’une société d’économie mixte à opération unique au sein d’une autre collectivité territoriale ou d’un groupement de collectivités territoriales, la collectivité territoriale actionnaire lui cède ses actions, à leur valeur nominale, à la date à laquelle la transformation, la fusion ou le rattachement est devenu exécutoire.
« En cas de transformation, de fusion ou de rattachement du groupement de collectivités territoriales actionnaire d’une société d’économie mixte à opération unique au sein d’un autre groupement de collectivités territoriales, le groupement de collectivités territoriales actionnaire lui cède ses actions, à leur valeur nominale, à la date à laquelle la transformation, la fusion ou le rattachement est devenu exécutoire.
« La collectivité territoriale ou le groupement de collectivités territoriales bénéficiaire de la cession est substitué au cédant dans tous les actes, délibérations, contrats et décisions en lien avec l’objet de la société d’économie mixte à opération unique.
« II. – En cas de transfert de la compétence qui fait l’objet du contrat conclu avec la société d’économie mixte à opération unique de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales actionnaire au bénéfice d’une autre collectivité territoriale ou d’un autre groupement de collectivités territoriales, la collectivité territoriale ou le groupement de collectivités territoriales actionnaire lui cède ses actions, à leur valeur nominale, à la date à laquelle le transfert de la compétence est devenu exécutoire.
« La collectivité territoriale ou le groupement de collectivités territoriales bénéficiaire de la cession est substitué au cédant dans tous les actes, délibérations, contrats et décisions en lien avec l’objet de la société d’économie mixte à opération unique. »
L'amendement n° 2, présenté par M. Leconte, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
La création d’une société d’économie mixte à opération unique est soumise aux conditions prévues par l’article L. 1414-2 du code général des collectivités territoriales pour les contrats de partenariat.
La parole est à M. Jean-Yves Leconte.
Je suis un peu embarrassé de présenter des amendements à ce stade, alors qu’une quasi-unanimité se dessine pour apporter une réponse à un réel problème.
Les travaux menés en première et en deuxième lectures ont permis de mieux sécuriser ce texte. Je reconnais qu’il est souhaitable que l’initiative parlementaire aboutisse ce soir, mais je veux néanmoins exprimer mon inquiétude sur deux points, au travers de ce que j’appellerai des amendements de témoignage.
Même s’il existe bien entendu des différences entre les contrats de partenariat prévus dans notre droit et les SEM à opération unique que nous nous apprêtons à créer, dans les deux cas, un opérateur pas totalement public interviendra pour le compte d’une collectivité publique. Il y aura donc des transferts d’argent, des engagements financiers, le cas échéant hors bilan.
Au demeurant, certains ont souligné que la création des SEM à opération unique constitue en quelque sorte une réponse à la disette budgétaire actuelle : la puissance publique prendra des engagements financiers envers une société au sein de laquelle elle aura une participation, mais qui n’en sera pas moins de droit privé.
Dès lors, il me semblerait préférable que la procédure de choix de l’opérateur d’une SEM à opération unique soit la même que celle qui est prévue par le code général des collectivités territoriales pour les contrats de partenariat. Cela permettrait de trancher de la manière la plus équitable possible entre les différentes options qui s’offrent à la puissance publique.
Bien entendu, l’adoption de cet amendement empêcherait, par définition, un vote conforme, mais je tenais à exprimer les doutes que m’inspire l’instauration, pour les SEM à opération unique, d’une procédure spécifique de choix de l’opérateur. Il serait, me semble-t-il, plus clair de retenir une procédure unique : si elle ne peut être assimilée à un partenariat public-privé classique, la SEM à opération unique constituera une forme de PPP institutionnalisé, induisant des engagements financiers de la puissance publique envers une entité privée. Cela étant, je salue le travail de M. le rapporteur.
La commission demande le retrait de cet amendement. À défaut, elle émettra un avis défavorable.
Monsieur Leconte, nous avons déjà débattu longuement de ce sujet ce matin en commission. Vous voulez absolument assimiler les SEM à opération unique à des partenariats public-privé : nous ne pouvons vous suivre.
Aux termes de l’objet de cet amendement, il serait nécessaire que le recours à la création d’une SEM à opération unique soit « précédé d’une évaluation préalable afin de prendre en compte les coûts liés à la création de la SEM, à sa gestion pendant la durée de son existence ainsi que les implications juridiques liées à une société composée de représentants de collectivités et d’entreprises privées ».
Je vous rappellerai simplement, mon cher collègue, que PPP et SEMOP sont deux choses différentes et qu’il est prévu – cela a encore été souligné dans la discussion générale – que la collectivité publique établisse un document de préfiguration dans lequel elle explicitera les éléments constitutifs de la future SEM et du projet prévu.
L’exécutif ne nous entend pas toujours, mais nous demandons souvent, dans cette enceinte, que l’on fasse confiance à l’intelligence territoriale. À trop vouloir multiplier les contraintes pour nos collectivités locales, on ne leur rend pas service, me semble-t-il, non plus qu’à l’économie de nos territoires.
Les PPP ont donné lieu à certaines dérives, connues et reconnues, et vous voudriez, monsieur Leconte, que l’on procède pour les SEMOP comme pour les PPP ! Cela ne me paraît pas logique.
Eu égard à tous les éléments de sécurisation que nous avons, les uns et les autres, mis en place, il serait bon, à mon avis, que ce texte fasse l’objet d’un vote conforme. Cela constituerait un signal positif adressé à nos collectivités.
Pour les raisons que M. le rapporteur vient d’indiquer, le Gouvernement est lui aussi défavorable à cet amendement.
Si nous créons ce soir ensemble, sur l’initiative du Sénat, un nouvel outil à destination des collectivités locales, c’est justement pour éviter les risques que les PPP font courir à celles-ci. Les intervenants dans la discussion générale ont bien exposé toutes les garanties qui entoureront les futures SEMOP.
Monsieur Leconte, vos craintes sont respectables et il est légitime que vous les exprimiez, mais elles ne sont pas fondées. Le Gouvernement a décidé de soutenir cette initiative sénatoriale visant à permettre la création de SEMOP par les collectivités qui le souhaiteront. L’exécutif, monsieur le rapporteur, a lui aussi la plus grande confiance en l’intelligence territoriale et il connaît le sens des responsabilités des élus locaux, ainsi que leur souci de bonne gestion.
Par réalisme, je le retire, madame la présidente. Il n’a pas vocation à prospérer, dans la mesure où tout le monde ou presque appelle à un vote conforme.
Je relève néanmoins un léger paradoxe dans les réponses qui m’ont été faites. Je proposais de mettre en place un verrou pour garantir qu’un certain nombre d’études seront réalisées avant qu’une collectivité ne décide de se lancer dans ce type d’engagement. Il me semblait cohérent d’instaurer une procédure unique, afin que les collectivités puissent choisir entre les différentes options qui s’offrent à elles.
Cela étant, je retire donc cet amendement, sans être pour autant entièrement convaincu par les arguments qui m’ont été opposés. Je garde en mémoire certains articles de la loi de finances relatifs à des engagements pris par des collectivités à l’égard de certaines banques ou institutions financières… Mieux vaut prendre en amont des dispositions protectrices et prévenir ainsi d’éventuelles difficultés !
L'amendement n° 2 est retiré.
L'amendement n° 3, présenté par M. Leconte, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 9
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque le contrat confié à la société d’économie mixte à opération unique a pour objet la réalisation d’une opération de construction ou de développement de logement, ou la gestion d’un service public incluant la construction d’un ouvrage, le choix de l’équipe de maîtrise d’œuvre fait l’objet d’une mise en concurrence indépendante, par la collectivité ou le groupement de collectivités à l’initiative de la constitution de la société à économie mixte à opération unique.
La parole est à M. Jean-Yves Leconte.
Cet amendement vise à répondre à une préoccupation évoquée, lors de la discussion générale, par notre collègue du groupe CRC.
Les architectes, entres autres acteurs de l’aménagement des villes et de l’urbanisme, s’inquiètent du fait que des opérateurs pourraient ne plus s’appuyer sur des maîtres d’œuvre indépendants répondant aux conditions posées par la loi sur l’architecture, le code de l’urbanisme, le code des marchés publics et la loi relative à la maîtrise d’ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d’œuvre privée.
Ces textes encadrent, dans notre pays, les opérations lancées par la puissance publique en matière de construction. Il sera possible de créer une SEMOP pour mener ce type d’opérations, même si cet outil n’a pas été conçu dans cet esprit. Dans cette hypothèse, s’il n’était pas recouru à un maître d’œuvre indépendant pour surveiller et superviser les opérations de construction, on serait en droit de s’inquiéter des conséquences que cela pourrait avoir.
Une telle préoccupation peut sembler étonnante de la part d’un sénateur représentant les Français de l’étranger, mais il se trouve que je suis amené à voyager dans beaucoup de pays où les règles d’urbanisme sont plus anarchiques que chez nous. J’ai l’occasion d’observer les conséquences que cela peut emporter en termes d’organisation des villes et sur la société dans son ensemble.
La commission demande également le retrait de cet amendement. À défaut, son avis serait défavorable.
M. Leconte propose que le choix de l’équipe de maîtrise d’œuvre fasse l’objet d’une mise en concurrence indépendante.
Le texte de la proposition de loi est en parfaite conformité avec toutes les dispositions légales relatives à la maîtrise d’œuvre, y compris avec celles de la loi de 1977.
Mon cher collègue, vous voyagez beaucoup, dites-vous, ce qui vous permet d’observer la situation en matière de construction dans un certain nombre de villes étrangères. Nous, initiateurs de cette proposition de loi, sommes tous des élus locaux, responsables d’exécutifs locaux.
Vous avez voté pour l’interdiction du cumul des mandats. Celui-ci présente pourtant l’avantage de permettre à nos travaux de bénéficier de l’expérience de parlementaires qui gèrent des exécutifs locaux, qui connaissent le fonctionnement de nos collectivités et leurs besoins. Sur le terrain, nous avons l’habitude de faire appel à des maîtres d’œuvre, à des entreprises. On pourrait discuter longuement de la notion de maître d’œuvre indépendant que vous avez employée. Je sais pour ma part que c’est le maître d’ouvrage qui décide, qui commande, qui a un projet et qui paye !
L’étude de préfiguration permettra à la collectivité de définir ce qu’elle veut faire. L’opérateur unique qu’elle retiendra s’appuiera sur un ou plusieurs maîtres d’œuvre, selon le type de construction à réaliser. Cela se fera naturellement en totale conformité avec les dispositions légales en vigueur. Adopter votre proposition, monsieur Leconte, serait source de complexité et même de difficultés.
.Pour avoir moi-même longtemps exercé une profession libérale, je comprends les inquiétudes de l’Ordre des architectes. Il est naturel qu’un certain corporatisme se manifeste parfois. Notre devoir est de rassurer les architectes en explicitant les objectifs du législateur, ainsi que toutes les garanties qui ont été introduites dans cette proposition de loi.
Je vous demande moi aussi de bien vouloir retirer cet amendement, monsieur le sénateur.
Nous avons bien noté que la création de ce nouvel outil qu’est la SEMOP avait suscité des inquiétudes de la part de certains maîtres d’œuvre intervenant au profit des collectivités locales, en particulier des architectes, qui se sont beaucoup manifestés auprès des parlementaires et du Gouvernement.
Je précise, à la suite de M. le rapporteur, que cette proposition de loi ne modifiera en rien la loi du 3 janvier 1977 relative à l’architecture, qui restera inchangée et qui s’appliquera dans toutes ses dispositions aux opérations que conduiront les SEMOP. Les collectivités locales ou leurs groupements, lorsqu’ils auront décidé de constituer une SEMOP, continueront bien sûr à s’appuyer sur les compétences et le savoir-faire des architectes pour mener à bien leurs projets. Il n’y a donc aucune inquiétude à avoir.
Je veux à mon tour rassurer les architectes : ils continueront à faire leur travail auprès des collectivités locales, de leurs groupements et des SEMOP.
Je vais le retirer, madame la présidente, après avoir formulé deux remarques.
Tout d’abord, la richesse du Sénat tient à la diversité des expériences de ses membres. C’est grâce à cette diversité que le débat peut produire les meilleurs résultats !
Ensuite, j’ai bien noté que le présent texte ne modifiera pas la loi de 1977 sur l’architecture. En revanche, les conditions dans lesquelles les SEMOP feront appel aux maîtres d’œuvre ne seront pas les mêmes que pour les autres types d’opérations de construction. C’est bien là le sujet !
Recourir à un maître d’œuvre indépendant de celui qui paye représente, pour la puissance publique, une garantie quant au respect de l’ensemble du cahier des charges, à la recherche non pas du moins-disant, mais du mieux-disant. La collectivité ne dispose pas toujours de l’ensemble des compétences permettant de s’en assurer.
Cela étant dit, je retire mon amendement.
L'article 1 er est adopté.
(Non modifié)
Le code de justice administrative est ainsi modifié :
1° À la fin du premier alinéa des articles L. 551-1 et L. 551-5, les mots : « ou la délégation d’un service public » sont remplacés par les mots : « la délégation d’un service public ou la sélection d’un actionnaire opérateur économique d’une société d’économie mixte à opération unique » ;
2° La deuxième phrase du premier alinéa de l’article L. 551-6 est complétée par les mots : « ou à la constitution de la société d’économie mixte à opération unique » ;
3° Au premier alinéa de l’article L. 551-10, après la première occurrence du mot : « contrat », sont insérés les mots : « ou à entrer au capital de la société d’économie mixte à opération unique » et, après les mots : « collectivité territoriale », sont insérés les mots : «, un groupement de collectivités territoriales ». –
Adopté.
(Non modifié)
L’article L. 1411-19 du code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :
1° À la première phrase, après le mot : « locale », sont insérés les mots : « ou à une société d’économie mixte à opération unique » ;
2° À la fin de la seconde phrase, les mots : « que doit assurer la société publique locale délégataire » sont remplacés par le mot : « déléguées ». –
Adopté.
(Non modifié)
I. – Le titre VI du livre VIII de la première partie du code général des collectivités territoriales est complété par un chapitre III ainsi rédigé :
« Chapitre III
« Sociétés d’économie mixte à opération unique
« Art. L. 1863 -1. – Les articles L. 1541-1 à L. 1541-6 sont applicables aux sociétés d’économie mixte à opération unique créées par les communes de la Polynésie française ou par leurs groupements. »
II. – Le chapitre Ier du titre VIII du livre III du code des communes de la Nouvelle-Calédonie est complété par un article L. 381-10 ainsi rédigé :
« Art. L. 381 -10. – Les communes et leurs groupements peuvent créer, dans le cadre des compétences qui leur sont attribuées par la loi, des sociétés d’économie mixte à opération unique.
« Sous réserve de dispositions contraires, les articles L. 1541-1 à L. 1541-6 du code général des collectivités territoriales sont applicables aux sociétés d’économie mixte à opération unique mentionnées au premier alinéa du présent article. » –
Adopté.
Les autres dispositions de la proposition de loi ne font pas l’objet de la deuxième lecture.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble de la proposition de loi dans le texte de la commission.
La proposition de loi est définitivement adoptée.
Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au jeudi 19 juin 2014 :
De neuf heures à treize heures :
1. Suite de la proposition de loi relative à la nationalisation des sociétés concessionnaires d’autoroutes et à l’affectation des dividendes à l’agence de financement des infrastructures de transports (n° 59, 2011-2012) ;
Rapport de Mme Évelyne Didier, fait au nom de la commission du développement durable (n° 275, 2013-2014) ;
Résultat des travaux de la commission (n° 276, 2013-2014).
2. Proposition de loi relative à la réhabilitation collective des fusillés pour l’exemple de la guerre de 1914-1918 (n° 212, 2011-2012) ;
Rapport de Mme Michelle Demessine, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (n° 603, 2013-2014) ;
Résultat des travaux de la commission (n° 604, 2013-2014).
À quinze heures :
3. Questions d’actualité au Gouvernement.
De seize heures quinze à vingt heures quinze :
4. Suite de la proposition de loi tendant à moderniser diverses dispositions de la législation applicable dans les départements de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut Rhin (n° 826, 2012-2013) ;
Rapport de M. Jean-Pierre Michel, fait au nom de la commission des lois (n° 612, 2013-2014) ;
Texte de la commission (n° 613, 2013-2014).
5. Proposition de résolution relative au financement de la protection sociale et à l’allégement des charges des entreprises, présentée en application de l’article 34-1 de la Constitution (n° 566, 2013-2014).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
La séance est levée à vingt-trois heures trente.