Séance en hémicycle du 15 janvier 2013 à 14h30

Résumé de la séance

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La séance

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La séance, suspendue à douze heures trente, est reprise à quatorze heures trente-cinq, sous la présidence de M. Jean-Pierre Bel.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Mes chers collègues, nous reprenons nos travaux alors que les forces françaises viennent d’être engagées par le Président de la République dans une difficile opération au Mali, en réponse à la demande du président Dioncounda Traoré et dans le respect des résolutions votées par le Conseil de sécurité des Nations unies.

En application de l’article 35, deuxième alinéa, de la Constitution, le Premier ministre m’a adressé, le samedi 12 janvier, une lettre m’informant de cette intervention. Je vous en ai transmis copie par voie électronique dès réception.

Comme l’indiquait son courrier, M. le Premier ministre m’a reçu hier soir avec le président de l’Assemblée nationale, les présidents des groupes politiques des deux assemblées et ceux des commissions des affaires étrangères et de la défense du Sénat et de l’Assemblée nationale, pour nous présenter les objectifs et les modalités de l’opération engagée au Mali. Nous aurons l’occasion d’en débattre dès demain après-midi.

Je veux, à cet instant, saluer en votre nom à tous le courage et le dévouement de nos forces armées, dont les membres combattent au péril de leur vie depuis cinq jours.

L’opération Serval a coûté la vie à un officier français, le lieutenant Damien Boiteux, du quatrième régiment d’hélicoptères des forces spéciales de Pau. Mes pensées vont à sa famille, si cruellement éprouvée. Au nom de la Haute Assemblée, je lui présente mes condoléances les plus attristées.

Je vous demande d’observer une minute de silence à la mémoire du lieutenant Damien Boiteux, ainsi qu’à celle des militaires tués lors de la tentative de libération de l’otage français Denis Allex en Somalie.

M. le ministre, Mmes et MM. les sénateurs se lèvent et observent une minute de silence.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je souhaite m’associer, au nom du Gouvernement, à l’hommage qui vient d’être rendu à l’officier Damien Boiteux, tombé au Mali le 12 janvier.

Comme M. le président du Sénat vient de l’indiquer, le lieutenant Damien Boiteux était chef de bord d’hélicoptère au sein du quatrième régiment d’hélicoptères des forces spéciales de Pau. L’opération Serval est menée pour faire reculer les terroristes qui menacent l’intégrité territoriale du Mali et portent quotidiennement atteinte aux valeurs auxquelles nous croyons. J’ai une pensée pour sa famille et ses proches, à qui je présente mes condoléances. M. le Premier ministre et M. le ministre de la défense président en ce moment même une cérémonie d’hommage aux Invalides.

Je veux également rendre hommage à la mémoire de nos soldats tombés en Somalie, dans le cadre d’une opération destinée à libérer l’un de nos agents retenu depuis plus de trois ans dans des conditions extrêmement éprouvantes. Nous ne pouvons que saluer l’unanimité qui prévaut pour soutenir nos soldats, engagés au péril de leur vie sur des théâtres d’opérations difficiles.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

L’ordre du jour appelle la discussion, après engagement de la procédure accélérée, du projet de loi autorisant la ratification du traité relatif à l’adhésion de la République de Croatie à l’Union européenne (projet n° 225, texte de la commission n° 237, rapport n° 236).

Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre délégué.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, le processus d’adhésion de la Croatie à l’Union européenne est engagé depuis de très nombreuses années. Nous le savons, les procédures sont longues. En effet, le cadre de négociation, rigoureux et exigeant, comporte des dispositifs itératifs de contrôle et d’évaluation afin de garantir que les engagements pris par les pays candidats à l’adhésion seront scrupuleusement respectés.

Le fait que nous puissions débattre aujourd'hui d’un projet de loi autorisant la ratification d’un traité relatif à l’adhésion de la Croatie à l’Union européenne témoigne de la paix retrouvée dans cette région des Balkans. Dans un passé récent, encore bien présent à nos mémoires, cette partie de l’Europe était déchirée par des conflits extrêmement meurtriers. Des populations auxquelles nous sommes liés par l’histoire étaient exposées à la violence, à la guerre, parfois même à la barbarie.

La Croatie a aujourd'hui retrouvé durablement le chemin de la paix. Elle entretient des relations apaisées avec ses voisins. Des efforts sont réalisés partout, dans cette région, pour lutter sans relâche contre la corruption et le crime organisé et faire triompher les valeurs auxquelles nous croyons tous ici : les droits de l’homme, l’indépendance de la justice, la séparation des pouvoirs, la liberté de la presse, la démocratie.

En Croatie, ces valeurs ont progressé, grâce au cadre exigeant de négociation qui régit les relations entre ce pays et l’Union européenne depuis 2005. Par des vérifications constantes, nous avons pu nous assurer que l’agenda pour l’adhésion de la Croatie à l’Union européenne était bien respecté selon chacun des critères.

Aujourd’hui, nous avons à examiner le traité définissant les dispositifs particuliers qui régiront l’adhésion de la Croatie à l’Union européenne et les neuf annexes à l’acte d’adhésion, visant à préciser les modalités de celle-ci, ainsi qu’un protocole, un acte final et quatre déclarations. Ces textes, dont la portée juridique est considérable, ont été étudiés au sein des différentes institutions de l’Union européenne et par la commission des affaires étrangères du Sénat. Ils témoignent de la rigueur du cadre de négociation qui a régi les discussions entre la Croatie et l’Union européenne.

Bien entendu, ces textes signifient aussi que la Croatie, qui sera partie intégrante de l’Union européenne à compter du 1er juillet prochain, sous réserve de la ratification du traité d’adhésion par l’ensemble des États membres, reprendra tout l’acquis communautaire, y compris les textes dérivés ou les politiques mises en œuvre par l’Union européenne, qui constituent autant de règles communes auxquelles les pays membres de celle-ci doivent se conformer.

La reprise de l’acquis communautaire, l’application du droit dérivé ne signifient pas qu’il n’y aura pas des possibilités d’adaptations transitoires sur un certain nombre de sujets, dans le cadre d’un dialogue établi et de conventions acceptées entre l’Union européenne et la Croatie.

Je pense, par exemple, aux dispositions qui s’appliqueront en matière de politique de la pêche ou de politique agricole, aux nécessaires adaptations qui seront mises en œuvre en matière de droit de la concurrence. Je pense aussi aux règles particulières qui régissent l’espace de Schengen.

Néanmoins, en dépit de ces adaptations, l’idée est bien que la Croatie mette en œuvre immédiatement la totalité du droit communautaire et reprenne l’intégralité de l’acquis communautaire, ce qui a exigé beaucoup d’exigence, de rigueur et de vérifications au cours de la négociation. Cette dernière s’est ouverte en octobre 2005, pour se conclure en juin 2011 : c’est dire si elle s’est inscrite dans un temps long. Ce temps long de la négociation européenne a permis aux institutions de l’Union et au Gouvernement de la Croatie, dans le cadre d’un dialogue exigeant, itératif, d’examiner tous les sujets qui étaient à l’ordre du jour.

Je voudrais en évoquer quelques-uns, qui témoignent de la rigueur de la discussion et du niveau d’exigence de l’Union européenne lorsqu’il s’agit de procéder à un élargissement. Certains ont tendance à considérer que l’élargissement est un processus sans fin, qui ne serait assorti d’aucune exigence et pourrait conduire bien des pays aujourd’hui aux portes de l’Union européenne à entrer en son sein sans conditions. En réalité, il n’en est rien.

L’Union européenne impose aux pays qui souhaitent l’intégrer le respect d’un certain nombre de valeurs portées par le Conseil de l’Europe, celles de la démocratie. C’est là une extraordinaire incitation, pour ces pays, à adapter leurs institutions, à les faire évoluer, à les moderniser, à les démocratiser. La perspective d’une adhésion à l’Union européenne les encourage dans une mesure considérable à accélérer le processus de réforme de leurs institutions, dans le sens de la promotion de la liberté, de la démocratie, du respect des droits de l’homme.

Ce qui se passe depuis quelques mois dans les relations entre l’Union européenne, la Serbie, le Kosovo et d’autres pays témoigne de cette extraordinaire dynamique qui est à l’œuvre. L’Union européenne, en ouvrant la perspective d’une adhésion, incite des pays à se moderniser et à s’engager dans la voie des indispensables réformes démocratiques.

La Croatie s’est ainsi engagée sur un chemin dont les étapes ont été constamment respectées. Tous les six mois, la Commission européenne a évalué le déroulement du processus d’adhésion et en a rendu compte au Conseil européen, jusqu’à ce que ce processus arrive à son terme et que l’adhésion soit possible.

J’insiste sur ce point, cela a permis à la paix de s’instaurer durablement dans une partie de l’Europe marquée hier par les conflits. Les relations entre la Croatie et la Serbie sont désormais pacifiées. Des coopérations ont été engagées, y compris dans des domaines sensibles comme la sécurité et la défense. Le resserrement des liens entre les deux pays a contribué à créer dans la zone un climat nouveau.

Il en a été de même pour les relations entre la Croatie et la Slovénie, grâce notamment à l’acceptation par la Croatie de l’intervention d’un tribunal arbitral sur la question de la baie de Piran.

Par-delà l’amélioration des relations de voisinage, on ne saurait négliger, au titre du chapitre 23 du cadre de négociation, les progrès réalisés par la Croatie en matière de promotion de l’État de droit, de modernisation et d’indépendance de la justice, de séparation des pouvoirs, de reconnaissance des droits fondamentaux, de liberté de la presse. C’est ainsi toute la démocratie qui progresse dans ce pays.

On ne peut pas non plus ignorer, en regard des réels efforts accomplis par la Croatie, l’importance de l’engagement de l’Union européenne, qui s’est manifesté d’abord par une mobilisation politique : les représentants permanents des pays de l’Union européenne ont participé à pas moins de treize réunions de négociation, auxquelles ont fait écho treize Conseils des ministres des affaires étrangères pour mener à son terme le processus et faire en sorte que l’adhésion intervienne dans des conditions maîtrisées.

La mobilisation n’a pas été uniquement politique et diplomatique ; elle a également été financière. Ainsi, près de 1, 5 milliard d’euros ont été consacrés par l’Union européenne à l’accompagnement financier de la Croatie dans le processus d’adhésion. En effet, les pays candidats à l’adhésion qui connaissent quelques retards par rapport aux États déjà membres ont parfois besoin d’être accompagnés sur le chemin de la démocratie et de l’intégration dans l’Union européenne.

Nous ne pouvons pas non plus ne pas souligner le travail très important qui a été accompli par les forces politiques croates, souvent toutes tendances confondues, pour rendre cette évolution possible.

Le processus d’adhésion a également contribué à créer un climat de coopération renforcée sur le plan économique entre la France et la Croatie, ce qui permet aujourd’hui à un certain nombre de nos grandes entreprises d’être présentes sur des chantiers importants : je pense notamment à la construction de l’aéroport de Zagreb ou des autoroutes d’Istrie.

Il faut aussi mentionner l’importance de la coopération culturelle entre les deux pays, qui s’est traduite par l’ouverture d’une saison croate en France, en septembre dernier. À cette occasion, les œuvres d’artistes croates ont été exposées dans les plus beaux musées de Paris, en particulier le Louvre ou le Palais de Tokyo. Des musiciens, des créateurs, des plasticiens ont été accueillis dans notre pays. En octobre, le président croate a participé au côté du président Hollande au vernissage d’une magnifique exposition d’art croate.

Au terme d’un processus rigoureux et exigeant de négociation, la Croatie s’apprête donc aujourd’hui à intégrer l’Union européenne. Parallèlement, la France a approfondi ses relations avec elle.

La présentation de ce projet de loi témoigne du chemin accompli conjointement par l’Union européenne et la Croatie pour aller l’une vers l’autre. Je ne puis que vous inviter, mesdames, messieurs les sénateurs, à l’adopter. §

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Mes chers collègues, j’ai reçu ce jour de M. le Premier ministre une lettre m’informant que le Gouvernement fera à l’Assemblée nationale et au Sénat une déclaration sur l’engagement des forces armées en réponse à la demande d’intervention militaire formulée par le Président du Mali.

Cette déclaration aura lieu demain mercredi 16 janvier à quinze heures, simultanément dans les deux assemblées. Elle sera suivie d’un débat.

Après concertation avec les présidents de groupe, je vous propose, pour l’organisation de ce débat, d’attribuer, après l’intervention du Gouvernement :

- un temps de parole de dix minutes au président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées ;

- un temps de parole de quinze minutes à l’orateur du groupe UMP et à celui du groupe socialiste, et de dix minutes à l’orateur de chacun des autres groupes politiques ;

- un temps de parole de trois minutes au représentant des non-inscrits.

Il n’y a pas d’opposition ?...

Il en est ainsi décidé.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Nous reprenons la discussion du projet de loi autorisant la ratification du traité relatif à l’adhésion de la République de Croatie à l’Union européenne.

Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

Au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, je m’associe à l’hommage qui a été rendu à nos soldats par le président du Sénat et par le ministre.

Le métier des armes n’est pas un métier comme les autres. Il est fait de sens du devoir, d’esprit de sacrifice. Il requiert du courage. Il comporte l’acceptation du risque. La France doit à son armée d’être restée ce qu’elle est, une nation libre. Elle lui doit aussi son indépendance et son rayonnement dans le monde. Tel était l’engagement de ces hommes tombés au Mali et en Somalie ; ils sont morts pour des valeurs justes et hautes.

J’assisterai tout à l’heure avec certains d’entre vous, mes chers collègues, à la cérémonie d’honneurs funèbres en hommage au lieutenant Damien Boiteux. C’est d’ailleurs au sein de l’unité dans laquelle il servait que j’ai fait mon service militaire.

Je pense aussi, à cet instant, aux agents de la Direction générale de la sécurité extérieure, la DGSE. Je le dis en votre nom à tous, mes chers collègues : nous n’oublierons pas nos soldats morts au combat !

J’en viens maintenant au projet de loi autorisant la ratification du traité relatif à l’adhésion de la République de Croatie à l’Union européenne.

Je tiens d’abord à saluer la présence dans notre tribune officielle de M. Ivo Goldstein, nouvel ambassadeur de Croatie en France.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je me réjouis que ce projet de loi soit le premier texte examiné par le Sénat en 2013. C’est une bonne façon de commencer l’année !

En accueillant la Croatie, le 1er juillet 2013, l’Union européenne passera de vingt-sept à vingt-huit États membres. Nous vivons donc aujourd’hui une étape importante de l’histoire de cette communauté de destin et de valeurs qu’est l’Europe.

C’est la dernière fois que le Parlement français pourra autoriser la ratification d’un élargissement de l’Union européenne à la majorité simple ; les prochains élargissements devront être approuvés soit par référendum, soit, depuis la dernière révision constitutionnelle de 2008, par le Parlement, mais à la majorité qualifiée des trois cinquièmes.

Je ne reviendrai pas sur le long chemin qui, conformément au « consensus renouvelé sur l’élargissement de 2006 », a conduit la Croatie au seuil de l’Union européenne. Devant vous, cet après-midi, je me bornerai à aborder brièvement deux questions : la Croatie est-elle prête pour l’adhésion ? Quelle est la situation dans les Balkans occidentaux ?

Tout d’abord, la Croatie est-elle prête pour entrer dans l’Union européenne ?

À la différence du grand élargissement à l’Est, qui a scellé la réconciliation d’une Europe artificiellement divisée par le rideau de fer, l’entrée dans l’Union des pays des Balkans occidentaux se fait de manière différenciée, uniquement en fonction de l’état de préparation de chacun d’entre eux, sans calendrier préétabli, en tenant compte à la fois des critères dits « de Copenhague renforcés » et de la capacité d’absorption de l’Union européenne. C’est donc un véritable marathon que la Croatie a dû parcourir, dans une mobilisation vers son avenir européen qui ne s’est pas démentie.

Les critères ont-ils été plus rigoureux que pour les précédents entrants, la Roumanie et la Bulgarie ? Oui, sans aucun doute. C’était nécessaire, tant pour assurer la transformation en profondeur du pays – il faut « laisser du temps au temps »… – que pour restaurer la crédibilité, auprès de nos opinions publiques, d’un processus d’élargissement suscitant une certaine « fatigue », pour ne pas dire une certaine lassitude.

Le nombre de « chapitres » de l’acquis communautaire est passé de trente à trente-cinq, avec un nouveau chapitre 23 « pouvoirs judiciaires et droits fondamentaux », dans le domaine de l’État de droit. Le nombre et la rigueur des critères d’ouverture ont été augmentés. Un nouveau type de suivi, entre la signature et l’adhésion, a été mis en place, sur l’initiative de la France et de l’Allemagne, afin de maintenir la pression des réformes et l’élan du changement, non seulement de la législation, mais aussi des pratiques. Dans ce cadre, dix actions clés très concrètes ont été identifiées en octobre, et je ne doute pas que la dernière évaluation, attendue au printemps prochain, ne soit positive, compte tenu de l’important travail mené en ce moment même à Zagreb.

Depuis 2001, la Croatie a bénéficié de 1, 5 milliard d’euros d’aides de préadhésion, soit environ 363 euros par habitant. La somme prévue en 2013 au budget européen augmentera à partir de 2014 pour les fonds structurels, les fonds de cohésion et les crédits de la politique agricole commune. La Croatie aura douze députés européens et disposera, au jour de son adhésion, d’un commissaire européen.

Peuplée de 4, 5 millions d’habitants d’origine slave, de religion catholique et utilisant un alphabet de caractères latins, située au carrefour des influences de la Méditerranée, de l’Europe centrale et des Balkans, la Croatie est aujourd’hui prête à devenir le vingt-huitième État membre de l’Union européenne. Ancre de stabilité dans la région, elle a su affronter son passé et se tourner vers l’avenir. Elle montre la voie à ses voisins.

Nous sommes lucides, il reste malgré tout des difficultés : les complications territoriales et financières avec la Slovénie, la question du contrôle – et du tracé ! – de la frontière avec la Bosnie-Herzégovine, les relations avec la Serbie, l’autre « grand » de la région… Mais nous avons confiance, et nous répondons sans hésitation : oui, aujourd’hui la Croatie est prête pour entrer dans l’Union européenne.

Seconde question : où en sont les Balkans occidentaux, dont Bismarck disait que les États « produisent plus d’histoire qu’ils n’en peuvent consommer » ?

Leur « vocation européenne », c’est-à-dire le principe de leur adhésion à l’Union européenne, a été clairement reconnue au Conseil européen de Zagreb, en 2000, sous la présidence française de l’Union européenne, et régulièrement réaffirmée depuis. Dix ans après ces déclarations, le bilan est finalement assez mince. La Croatie sera, après la Slovénie, membre depuis 2004, le deuxième État de cette région à entrer dans l’Union européenne. Le Monténégro et la Serbie ont le statut de candidat, mais les négociations ne sont pas ouvertes, non plus qu’avec la Macédoine, bloquée par le veto grec.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

L’Albanie a déposé sa candidature ; la Bosnie-Herzégovine et le Kosovo demeurent en quelque sorte « sur le seuil de la porte ».

Cette lenteur est due aux difficultés de la transition démocratique et de la construction des institutions, aux imbroglios historiques, ethniques et frontaliers, ou à la part, dans certains États, de l’économie criminelle et de la corruption.

En Serbie, les élections ont porté au pouvoir des dirigeants aux antécédents nationalistes, tandis que le dialogue avec Pristina vient tout juste de reprendre. En Bosnie-Herzégovine, la solution institutionnelle semble introuvable. En Macédoine, les relations interethniques se tendent. En Albanie, la situation politique était bloquée il y a peu de temps encore, et le bilan des réformes est mince, en termes d’instauration d’un État de droit notamment.

Or, dans cette région, l’adhésion à l’Union européenne agit comme un instrument de stabilité et de réconciliation. On pourrait même dire que, pour certains États, l’intégration européenne est à l’origine du processus de construction nationale.

Certains agitent la menace que les Balkans, dont les pays sont las de soupirer à la porte d’une Europe concentrée sur la gestion de ses propres crises, ne deviennent un lieu de compétition entre puissances émergentes, un peu comme au XIXe siècle entre les anciens empires : tropisme russe de la Serbie, présence traditionnelle de la Turquie dans la région, ou encore montée en puissance économique de la Chine, à la recherche de portes d’entrée vers le grand marché européen à partir des ports grecs.

Je pense quant à moi que l’Union européenne restera, pour ces États, un horizon de stabilité et de prospérité à long terme. Mais soyons attentifs à ce que l’élan européen continue bien à être le moteur de la transformation de ces sociétés.

Au fond, la vraie question est celle-ci : quelle est aujourd’hui la force d’attraction et la capacité propulsive du projet européen ? Sommes-nous capables de faire autre chose que de gérer nos crises, que de donner une image d’impuissance et d’immobilisme ? Comment retrouver l’élan des pères fondateurs ? Par exemple, saurons-nous construire l’Europe de la défense ? Saurons-nous relancer une croissance qui fasse renaître l’espoir ?

Ne nous jugeons toutefois pas trop durement : bien sûr, beaucoup reste à faire, mais déjà nous avons travaillé, ces derniers mois, à réorienter l’Europe et à restaurer son rayonnement.

Pour l’élargissement, nous devons trouver un équilibre, délicat, entre la nécessaire dynamique européenne à enclencher dans une région où la réconciliation demeure fragile et l’indispensable crédibilité d’un élargissement qui doit vraiment renforcer l’Union, et non pas la fragiliser. L’élargissement doit respecter le tempo fixé par les États membres, sans les entraîner dans un engrenage. Les États membres doivent rester maîtres du jeu.

Je suis persuadé que la Croatie sera, au sein de l’Union européenne, une alliée pour trouver ce juste équilibre. Notre commission vous invite donc, mes chers collègues, à approuver la ratification du traité d’adhésion.

« Croatie, la voici ! » nous dit le slogan de la saison culturelle croate à Paris. J’ajouterai, au nom de la commission des affaires étrangères et, je l’espère, au nom du Sénat tout entier : « Croatie, bienvenue ! ». §

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

La parole est à M. André Gattolin, au nom de la commission des affaires européennes.

Debut de section - PermalienPhoto de André Gattolin

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, j’ai plaisir à saluer le rapport de la commission des affaires étrangères et je remercie M. Carrère de l’enthousiasme qu’il montre à l’occasion du retour de la Croatie dans le concert des nations européennes.

La commission des affaires européennes du Sénat partage évidemment cet enthousiasme. Notre intérêt pour la Croatie est grand et ancien, et nous sommes particulièrement heureux de l’accueillir en tant que vingt-huitième État membre de l’Union européenne, en autorisant la ratification du traité d’adhésion.

Une délégation de notre commission s’est rendue en novembre 2011 à Zagreb à l’invitation du Parlement et du Gouvernement croates. Nous avons pu alors mesurer la très forte implication de l’ensemble des forces politiques croates dans la dernière ligne droite conduisant le pays vers son entrée dans l’Union.

Quelques jours après notre retour, la commission des affaires européennes du Sénat a d’ailleurs adopté à l’unanimité une proposition de résolution européenne présentée par Simon Sutour et Michèle André, présidente du groupe d’amitié France-Croatie, dont je salue ici le très grand engagement en faveur du rapprochement entre nos deux peuples. Ce texte, visant à demander une ratification très rapide par notre pays du traité d’adhésion de la Croatie à l’Union, est devenu une résolution du Sénat le 29 novembre 2011.

Les relations entre la France et la Croatie sont aujourd’hui excellentes et de nombreuses coopérations économiques et institutionnelles ont déjà été mises en place.

Les relations de notre Sénat avec le Sabor, la chambre unique du Parlement de la République de Croatie, ainsi qu’avec le Gouvernement et la présidence croates, sont particulièrement intenses depuis deux ans. Le président Jean-Pierre Bel a, en octobre dernier, accueilli au Sénat Ivo Josipovic, l’actuel président de la République de Croatie, et il recevra demain son homologue Josip Leko, président du Sabor. Je salue, au nom de la commission des affaires européennes, la présence, dans notre tribune officielle, du nouvel ambassadeur de Croatie en France.

Depuis quelques années, la question de l’élargissement fait souvent débat au sein de l’Union européenne. On a pu dire qu’il s’opérait parfois au détriment de l’approfondissement, ou que certaines adhésions avaient été mal préparées. S’agissant de la Croatie, force est de constater que toutes les conditions semblent réunies pour faire de son adhésion une réussite.

Comme l’indiquent les traités européens, confortés par la Charte des droits fondamentaux, tout État européen qui respecte les valeurs de l’Union et qui s’engage à les promouvoir peut demander à devenir membre de celle-ci.

L’Union européenne est fondée sur les valeurs du respect de la dignité humaine, de la liberté, de la démocratie, de l’égalité de tous les citoyens en droits et en devoirs, du respect de l’État de droit et du respect des droits de l’homme.

Or, incontestablement, la Croatie est aujourd’hui pleinement un État de droit. C’est le premier point que je veux souligner : elle jouit d’une grande stabilité démocratique et institutionnelle.

Les institutions que la Croatie a mises en place en retrouvant sa souveraineté sont stables et, depuis vingt ans, il a été prouvé qu’elles résistaient efficacement aux alternances politiques. Plus exactement, elles permettent l’alternance politique, la dernière datant du mois de décembre 2011.

La Croatie jouit d’une grande stabilité grâce à une constitution remontant déjà à vingt ans, qui a su établir un bon équilibre entre présidentialisme et parlementarisme, équilibre qui d’ailleurs n’a pas été affecté par une période de cohabitation politique intervenue dans un passé assez récent.

Deuxième point important à nos yeux : pour les minorités, les réfugiés et les déplacés, la Croatie a trouvé des solutions à la fois efficaces et respectueuses.

La Croatie a su résoudre le problème de ses minorités. On ne reviendra pas sur la « mosaïque des peuples » propre aux Balkans. En l’occurrence, la population de la Croatie est plus homogène que celle de la plupart des pays voisins, mais elle n’échappe cependant pas totalement à son destin balkanique, et le pays compte sur son territoire des minorités auxquelles elle a accordé, ces dernières années, des droits importants.

Par une loi constitutionnelle de 2002 sur les droits des minorités nationales, la Croatie a su créer un climat de confiance au sein de ses frontières pour ses minorités serbe, bosniaque, italienne, hongroise, albanaise et slovène. Concernant les membres de la minorité serbe qui avaient fui après la guerre, la Croatie a ainsi accepté leur retour et leur réintégration dans la nation.

Troisième point essentiel au regard de la ratification : la Croatie a établi un État de droit digne de ce nom.

La Croatie a satisfait aux exigences requises pour l’ensemble des chapitres ouverts à la négociation, mais il n’est pas indifférent que celle-ci n’ait abouti qu’à la fin du processus pour le chapitre le plus délicat, c’est-à-dire le chapitre 23, relatif à la justice et aux droits fondamentaux.

La Croatie a longtemps souffert d’un système judiciaire vicié, hérité de l’ancien régime yougoslave. C’était, pour l’Union, sans doute le point le plus sensible. Les mauvaises expériences roumaine et bulgare en la matière ont conduit les institutions européennes à relever le niveau de leurs exigences. C’est ainsi qu’il a été instamment demandé aux autorités croates – parfois sans ménagements diplomatiques, il faut bien le reconnaître – des efforts très intenses en matière de réforme de la justice, tant dans le domaine du recrutement et de la formation des magistrats qu’au regard de l’indépendance des juges.

La Croatie a été priée d’intensifier ses efforts et de soutenir activement la réforme judiciaire et la lutte anti-corruption jusqu’à son entrée dans l’Union, tout en fournissant tous les six mois des rapports convaincants sur les progrès accomplis.

Des efforts très importants ont été mis en œuvre, en particulier pour réduire le nombre d’affaires en souffrance et rationaliser le système judiciaire, par l’agrandissement des tribunaux et la spécialisation des juges.

La Croatie a créé une école des professions judiciaires et renforcé l’indépendance en matière de nomination aux fonctions judiciaires.

Au cours des négociations, la corruption est également apparue comme un problème majeur, et la lutte contre celle-ci est devenue une priorité pour le Gouvernement croate. Son action énergique dans ce domaine au cours des dernières années a été saluée par tous les observateurs européens. Une bonne coopération s’est installée entre la justice croate et les agences internationales. Chacun convient qu’il faut poursuivre le renforcement des capacités administratives des services de lutte contre la corruption, en particulier celles de l’Office de prévention de la corruption et de la criminalité organisée, l’USKOK.

Enfin, un effort supplémentaire a été consenti pour corriger les insuffisances en matière de transparence dans le domaine des dépenses publiques et dans celui du financement de la vie politique.

La recherche de relations pacifiées avec les pays voisins a bien évidemment été aussi au cœur des actions de la République de Croatie ces dernières années. C’était tout à la fois une nécessité pour que sa candidature à l’entrée dans l’Union européenne soit prise au sérieux et une conséquence des négociations entourant cette candidature, puisque l’Union européenne veut être le moteur de semblables entreprises de réconciliation.

En l’occurrence, c’est avec la Serbie et la Slovénie que les différends étaient les plus nombreux.

La Croatie et la Serbie, tout d’abord, se sont durement affrontées voilà une vingtaine d’années. Leurs gouvernements ont réalisé de grands pas l’un vers l’autre en reconnaissant et en regrettant la violence et les brutalités commises de part et d’autre. Les plus hautes autorités serbes ont été reçues à Zagreb et les plus hautes autorités croates l’ont été à Belgrade. Il n’y a pas si longtemps, cela aurait semblé inimaginable !

Avec la Slovénie, la dispute est plus actuelle. Elle concerne le littoral du golfe de Piran, et donc le territoire maritime de la Slovénie, ainsi que, de manière peut-être plus aiguë ces derniers temps, la restitution d’avoirs croates auprès de la Ljubljanska Banka.

Sur la question des eaux territoriales, la Slovénie et la Croatie ont accepté de s’en remettre à un arbitrage international, dont tous les responsables politiques croates que nous avons rencontrés, de la majorité comme de l’opposition, ont déclaré qu’ils respecteraient les conclusions, quelles qu’elles soient. C’est là un signe très positif en vue de la pacification des relations avec la Slovénie.

S’agissant des avoirs croates détenus par la banque précitée, la situation est plus embarrassante, la Slovénie menaçant de ne pas ratifier le traité d’adhésion de la Croatie à l’Union européenne. La résolution de ce problème pourrait intervenir, me semble-t-il, dans les mois qui viennent. Il faudra toutefois être vigilants sur ce point.

Enfin, des efforts importants ont également été accomplis pour rendre l’économie croate compatible avec le marché unique. Ce point a été peu évoqué, mais la Croatie a réalisé des progrès économiques remarquables au cours des deux décennies écoulées. Avant la crise économique, elle jouissait d’un taux de croissance de 4 % à 5 % par an ; en vingt ans, ses revenus ont doublé, et le revenu par habitant en Croatie atteint à présent 63 % de la moyenne de l’Union européenne.

La Croatie entrera dans l’Union dotée d’une économie dynamique et concurrentielle et elle aura parachevé sa transition vers une économie de marché, même si le taux de croissance prévu pour 2013 stagne autour de 1, 5 %.

On rappellera que la Banque européenne d’investissement et la Banque européenne pour la reconstruction et le développement ont investi dans le pays près de 500 millions d’euros par an en 2009 et en 2010 et ont décidé d’appuyer fortement la Croatie dans la phase finale de son accession à l’Union européenne.

Il faut ajouter à cela l’appui du fonds d’adhésion, pour un montant de 3, 6 milliards d’euros, utilisables pendant les deux premières années suivant l’adhésion, ainsi que les investissements directs étrangers et les capacités de financement locales.

La Croatie a décidé la mise en œuvre de trente grands projets d’investissement pour une valeur de 13 milliards d’euros, dont une dizaine à lancer tout de suite. Ce programme n’est pas irréaliste et pourrait s’avérer efficace, pour autant qu’il permette de réamorcer l’investissement privé dans le pays.

En dépit d’un tissu industriel encore limité, la capacité de rattrapage de la Croatie demeure intacte : son potentiel touristique et sa situation géographique font d’elle une plate-forme multimodale régionale dotée de ressources humaines qualifiées et de bonnes infrastructures. De plus, l’inflation y a été maîtrisée au cours des dernières années.

Le secteur agricole ne représente plus que 5 % du PIB du pays, contre 22 % pour le secteur secondaire. Le secteur des services représente à lui seul 73 % du PIB.

Je l’ai dit, le tourisme, en particulier, est en plein essor. En effet, la Croatie reçoit près de 10 millions de visiteurs par an et cette croissance devrait se confirmer au cours des prochaines années, avec le développement d’infrastructures modernes pour l’accueil des touristes étrangers.

Cependant, l’ensemble de ces chiffres ne reflète pas réellement les efforts énormes fournis par la population croate et les sacrifices endurés par tous les salariés et les entrepreneurs pour mener à bien ce rattrapage.

Le référendum sur l’adhésion du pays à l’Union européenne s’étant tenu en janvier 2012, en plein cœur de la crise de la zone euro et à un moment où l’activité économique connaissait un ralentissement, on pouvait redouter que les électeurs croates ne se montrent assez eurosceptiques.

Tel n’a pourtant pas été le cas. La participation à ce référendum aurait certes pu être plus élevée, mais l’adhésion à l’Union a été validée par plus de 67 % des votants. J’y vois la preuve d’un enthousiasme lucide, d’une volonté de progresser par l’Europe et de faire progresser l’Europe ; nous ne pouvons que nous en réjouir. Je suis heureux de pouvoir saluer devant vous, mes chers collègues, ce sursaut héroïque et historique de nos amis Croates.

Maintenant que l’État de droit est établi en Croatie, le pays va pouvoir tirer parti de ses atouts, fruits d’une longue et riche histoire européenne.

C’est avec joie et une grande confiance que nous nous apprêtons à accueillir dans l’Union la Croatie, très ancienne nation qui ne fera que revenir à ses origines en nous rejoignant. Le 1er juillet 2013 marquera la dernière étape du long cheminement qui a permis de renouer la chaîne du temps.

Un pays qui bénéficie d’une remarquable situation géographique, d’une population jeune ayant le don des langues, d’une agriculture diversifiée, d’un excellent réseau de petites et moyennes entreprises, d’un bon système éducatif et d’un potentiel touristique très enviable ne peut que réussir son intégration.

Il y a un peu plus d’un an, j’ai fait partie de la délégation de la commission des affaires européennes conduite par notre collègue Simon Sutour. Je m’étais rendu plusieurs fois par le passé en Croatie ; j’y ai notamment séjourné plusieurs jours au plus fort de la guerre avec la Serbie, à l’automne de 1991, alors que le front n’était qu’à une douzaine de kilomètres de la capitale. Pour la première fois de ma vie, j’ai vécu la guerre et compris ce que pouvait être un bombardement. Pendant mon séjour, j’ai passé davantage de temps dans des abris, durant les multiples alertes, que dans les rues de Zagreb. Cette courte expérience m’a beaucoup marqué, comme elle a, dans des proportions bien évidemment incomparables, affecté la population croate, en laissant des traces très profondes dans la mémoire de toutes celles et de tous ceux qui ont vécu au quotidien ce dramatique conflit.

Le but premier de la construction européenne, dans les années ayant suivi le terrible conflit qui a ravagé notre continent durant la première moitié des années quarante, était précisément la pacification durable de nos territoires et la reconstruction irréversible de l’État de droit.

Le plus fort symbole de la construction européenne de l’après-guerre est sans nul doute la réconciliation entre la France et l’Allemagne, qui a débouché sur l’instauration d’une amitié solide et durable. Nous aurons d’ailleurs l’occasion de célébrer le cinquantième anniversaire de cette réconciliation la semaine prochaine, avec la commémoration de la signature du traité de l’Élysée.

L’adhésion de la Croatie à l’Union européenne, c’est aussi pour nous tous, d’une certaine façon, la réactualisation du rêve européen tel que les pères fondateurs de l’Europe l’avaient formulé.

Bien sûr, de nombreuses questions restent à régler dans les Balkans. Je l’ai dit, la Croatie a encore des différends à aplanir avec certains de ses voisins, mais son formidable parcours depuis la fin de la guerre est un encouragement à poursuivre l’aventure et un pilier sur lequel s’appuyer dans les années à venir pour approfondir nos relations avec l’ensemble des pays de la région.

Mes chers collègues, lors de mes voyages en Croatie, j’ai eu l’occasion de me lier d’amitié avec le traducteur croate des œuvres d’Albert Camus, qui écrivait que « la paix est le seul combat qui vaille d’être mené ». En cet instant, je pense à ce vieil homme ; j’imagine qu’il doit être particulièrement d’accord, aujourd’hui, avec le philosophe qu’il a tant lu et traduit. Si la paix est effectivement le seul combat qui vaille d’être mené, c’est alors une bataille que viennent de remporter la Croatie, ses partenaires et l’Union toute entière.

Au nom de la commission des affaires européennes, je vous appelle, mes chers collègues, à voter ce projet de loi autorisant la ratification du traité d’adhésion de la Croatie à l’Union européenne. §

M. Jean-Léonce Dupont remplace M. Jean-Pierre Bel au fauteuil de la présidence.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

M. le président Bel s’est absenté pour assister à l’hommage rendu aux Invalides au lieutenant Boiteux, tombé au Mali.

Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Jean-Michel Baylet.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Michel Baylet

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je m’associe, au nom des radicaux de gauche et du groupe du RDSE, à l’hommage qui a été rendu tout à l’heure aux soldats français tombés au Mali et en Somalie.

Lors de la remise du prix Nobel de la paix à l’Union européenne, à Oslo, le 10 décembre dernier, MM. Barroso et Van Rompuy ont intitulé leur discours « De la guerre à la paix : une histoire européenne ». Dans la vie parlementaire, nous avons parfois l’occasion de participer à l’écriture de cette histoire. Au cours de son allocution, M. Van Rompuy déclara : « La guerre est aussi ancienne que l’Europe. » Ce constat est encore plus vrai s’agissant des Balkans.

Heureusement, dans cette région trop longtemps troublée, le processus d’adhésion à l’Union européenne agit comme un outil d’apaisement des conflits nés de l’éclatement de la Yougoslavie ou de haines plus profondes encore, qui resurgissent malheureusement de façon épisodique.

Examinons le traité dont la ratification est soumise à l’approbation de notre assemblée à travers le prisme de l’histoire de ce territoire où se sont mêlés les héritages slave, autrichien et hongrois, mais qui se trouva également dans la sphère d’influence de Venise, puis de l’Italie unifiée, tout en se situant aux marches de l’empire ottoman. Souvenons-nous également que Napoléon incorpora à l’Empire français les provinces de Dalmatie et de Dubrovnik, au sein des provinces illyriennes, entre 1809 et 1813. De par son histoire, la Croatie se situe bel et bien au cœur de l’Europe.

Nous ne pouvons cependant évoquer l’histoire sans rappeler l’équilibre des alliances européennes issu de la Première Guerre mondiale et des solidarités nées de ces années de dévastation.

D’aucuns, rejouant la Triple Alliance contre la Triple Entente, voient dans la Croatie un allié de l’Allemagne, à opposer à la Serbie amie de la France. Je n’oublie pas, pourtant, que dans le parc de Kalemegdan, à Belgrade, se dresse le monument de la reconnaissance à la France, ni que lors de la campagne de Serbie, en 1915, ce sont des bateaux français qui évacuèrent l’armée serbe en retraite et le roi Pierre Ier, pour les transporter sur l’île de Corfou.

Au nom de ces liens anciens, je forme ici le vœu, monsieur le ministre, que la Serbie, dont les négociations d’adhésion devraient débuter dans les mois qui viennent, en tout cas au cours du premier semestre de 2013, rejoigne à son tour rapidement l’Union européenne, dans laquelle elle a toute sa place.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Michel Baylet

L’un des apports majeurs de la construction européenne est qu’elle nous permet de transcender les vieux antagonismes que je viens d’évoquer. Depuis la cessation des conflits qui ont embrasé les Balkans à la fin du siècle dernier, l’Union européenne, notamment au travers des processus d’adhésion, joue le rôle de vecteur de stabilisation d’une région qui était, il y a peu, considérée comme une poudrière.

L’adhésion de la Croatie à l’Union européenne, après celle de la Slovénie, en 2004, marquera une nouvelle étape de l’élargissement en direction des Balkans occidentaux. Elle s’opère en tirant les enseignements de la précédente vague d’adhésions, qui, entre 2004 et 2007, a vu une partie des pays de l’Europe centrale et orientale rejoindre l’Union européenne.

En effet, l’adhésion de ces douze pays était aussi motivée par la promesse de réconciliation d’une Europe qui, pendant plus de quarante années, fut coupée en deux par le rideau de fer. La dimension symbolique de cette réunification des « deux Europe » a sans doute éclipsé le respect d’une partie des critères habituellement pris en compte lors des négociations. En d’autres termes, l’engagement moral a parfois occulté les difficultés des États candidats à remplir les conditions requises, tant politiques qu’économiques, ou à reprendre l’acquis communautaire.

À la suite de l’élargissement à l’Est, les institutions européennes ont renforcé les exigences envers les États candidats en matière de reprise de l’acquis communautaire ou de garanties de l’État de droit, ce qui était nécessaire, et ont introduit un dispositif de suivi des réformes engagées entre la signature du traité d’adhésion et l’adhésion elle-même.

De plus, la Commission européenne semble avoir fait du cas croate un modèle, en termes de négociations, pour les autres pays des Balkans occidentaux, qui sont tous engagés dans un processus de rapprochement avec l’Union européenne, à des degrés et selon des rythmes divers.

Néanmoins, en ce qui concerne la Croatie, plusieurs questions soulevées demeurent encore sans réponses. Elles concernent les efforts à accomplir en matière de réforme judiciaire, de lutte contre la corruption et le crime organisé. De même, dans ses relations avec ses voisins, les motifs de crispation ne manquent pas : participation au Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie, question du retour des réfugiés, notamment de la minorité serbe…

Par ailleurs, le différend frontalier et le conflit bancaire avec la Slovénie, s’ils ne trouvaient de solution, pourraient retarder la ratification du traité d’adhésion par les autorités de Ljubljana.

Cependant, en dépit de ces écueils, il nous faut souligner les efforts réels et les réformes entrepris par la Croatie pour se conformer aux « standards européens ».

Il est aussi utile de noter que, tout au long du processus de négociation, les gouvernements croates successifs ont partagé le même objectif de mener ce pays vers l’adhésion à l’Union européenne.

Les auteurs du rapport d’information intitulé « La Croatie, 28ème État membre de l’Union européenne » et publié en juin 2011, à savoir nos anciens collègues Jacques Blanc et Didier Boulaud, ne disaient pas autre chose : « Toutes tendances politiques confondues, les responsables croates ont souligné qu’une telle perspective viendrait couronner les efforts considérables de réformes déployés par le pays ces dernières années. »

Certes, au sein de la population, l’enthousiasme initial suscité par la perspective de rejoindre l’Union s’est sensiblement érodé, au bénéfice d’une lassitude née de la longueur des négociations et de la crise économique et institutionnelle que traverse l’Europe depuis plusieurs années. En effet, lors du référendum sur l’adhésion, si la victoire du « oui » fut nette, avec plus de 66 % des suffrages, le taux de participation ne s’éleva qu’à 43, 5 %.

La ratification de ce traité portera donc à vingt-huit le nombre des États membres de l’Union européenne. Bien sûr, d’autres pays seront amenés à les rejoindre dans les prochaines années : l’Islande, mais aussi le Monténégro, la Macédoine, la Serbie et la Turquie, que nous devrions cesser de stigmatiser, sans parler des « candidats potentiels » que sont l’Albanie et la Bosnie-Herzégovine.

S’il sera moins considérable que le précédent, ce nouvel élargissement ne pourra se faire sans une réforme de la gouvernance européenne. Mes chers collègues, vous le savez, les radicaux sont historiquement favorables à une évolution fédéraliste de l’Union. À plus de trente membres, comment mener cet approfondissement de la construction européenne ?

En marge du sommet des 18 et 19 octobre dernier, le Président de la République a précisé les grandes lignes de sa politique européenne, au cours d’une interview accordée à six journaux européens : « En changeant de dimension, l’Europe a changé de modèle. Ma démarche, c’est une Europe qui avance à plusieurs vitesses, avec des cercles différents. » Nous ne pouvons que partager cette vision. Dans le même entretien, François Hollande a déclaré, à propos de l’attribution du prix Nobel de la paix à l’Union européenne : « L’hommage, il est adressé aux pères fondateurs de l’Europe, capables d’avoir réussi la paix au lendemain d’un carnage. L’appel, il est lancé aux gouvernants de l’Europe d’aujourd’hui, pour qu’ils soient conscients qu’un sursaut est impérieux. »

C’est donc en se plaçant dans cette double perspective historique et prospective que les radicaux de gauche, ainsi que la grande majorité des sénateurs du groupe RDSE, voteront pour la ratification du traité d’adhésion, pour une Europe réconciliée, pour une Europe puissante, pour une Europe de l’avenir. §

Debut de section - PermalienPhoto de Leila Aïchi

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, bien évidemment, nous nous associons nous aussi à l’hommage rendu en ce moment même au lieutenant Boiteux, et présentons nos sincères condoléances aux familles des victimes.

L’adhésion à l’Union européenne de la Croatie, qui en deviendra ainsi, le 1er juillet 2013, le vingt-huitième État membre, constitue une bouffée d’air frais pour notre continent, en ces temps de doutes quant à la construction d’un ensemble politique toujours plus cohérent.

Au sein des Balkans occidentaux, dont la « vocation européenne » a été affirmée dès le sommet de Zagreb –organisé sur l’initiative de la France –, en novembre 2000, la situation de la Croatie se distingue.

La mission effectuée à Zagreb, en mai 2011, par la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées du Sénat a permis de délivrer un message très clair de soutien à la candidature croate à l’adhésion à l’Union européenne.

La Croatie n’a pas démérité et a fait énormément d’efforts, qu’il s’agisse du renforcement des institutions, notamment par l’augmentation des fonds alloués à la cour constitutionnelle, des réformes électorales, de l’intégration des réfugiés ou de l’amélioration des statuts des minorités.

Mes chers collègues, l’adhésion de la Croatie sur laquelle nous devons nous prononcer aujourd’hui souligne avec force la vocation première du projet de construction européenne : l’Europe, c’est la paix.

Hélas, la Croatie ne connaît que trop bien le prix de cette dernière, ayant payé un très lourd tribut lors de la violente dislocation de l’ensemble yougoslave, à la fin du siècle dernier.

Il est vrai que la guerre fut incomparablement plus longue et plus sanglante en Croatie qu’en Slovénie. Elle s’est déroulée sur une période de près de dix ans, depuis les premières altercations, en 1990, jusqu’à la reconquête totale du territoire, en 1998, par le gouvernement croate, avec son funeste lot de tueries, de déplacements de populations et d’emprisonnements.

Le conflit a été très dur : on a dénombré près de 16 000 tués et 40 000 disparus. Les dommages directs et indirects, pour l’économie, ont été évalués à quelque 37 milliards de dollars, soit presque deux fois le PIB de la Croatie.

Les sièges de Vukovar et de Dubrovnik, de sinistre mémoire, sont devenus les symboles de cette guerre atroce. Ces joyaux de l’architecture médiévale ont subi d’énormes destructions, certaines irrémédiables.

D’un point de vue environnemental, l’agriculture croate n’a pas encore retrouvé ses niveaux de production de 1990. Les conséquences du conflit sont encore importantes : près de 1 million d’hectares ne seraient pas exploités, soit l’équivalent de la surface agricole actuellement mise en valeur. Cette situation est liée, d’une part, à la présence de mines antipersonnel, et, d’autre part, à l’existence de problèmes de propriété foncière concernant des terres appartenant à des ressortissants de minorités qui ont fui vers d’autres régions et ne sont pas revenus jusqu’à présent. Le cheptel bovin a été décimé : en 2007, il restait encore inférieur à 60 % de son effectif d’avant-guerre.

Souvenons-nous, mes chers collègues, que ces tragiques événements ont eu lieu sur notre continent, à une époque relativement récente !

Ainsi, l’adhésion de la Croatie à l’Union européenne souligne la vocation universelle de cette dernière en matière de promotion de la paix et des droits de l’homme.

À ce titre, nous ne pouvons que nous réjouir que, en décembre dernier, nos collègues députés européens aient solennellement accueilli à Strasbourg la médaille symbolisant le prix Nobel de la paix attribué à l’Union européenne.

De même, l’optimisme des Croates à l’égard du projet européen contraste très singulièrement avec le climat eurosceptique ambiant, prospérant sur fond de défiance au sein de la zone euro.

Mes chers collègues, je n’ai pas besoin de vous rappeler quelle fut l’âpreté des débats, au sein de notre chambre, sur le Mécanisme européen de stabilité ou le traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance…

Certes, l’enthousiasme pro-européen des Croates, partagé selon les sondages par plus de 80 % de la population en 2003, a pu s’éroder au fil des négociations, qui se sont prolongées de 2005 à 2011, en raison de la rigueur des critères fixés par Bruxelles et de la crise économique qui secoue l’Union européenne.

En outre, un vieux différend bancaire avec la Slovénie pourrait retarder l’adhésion de la Croatie si aucun accord entre les deux pays n’est conclu avant le 1er juillet 2013 : il s’agit de l’affaire de la banque slovène Ljubljanska Banka.

Lors de l’éclatement de l’ex-Yougoslavie, quelque 430 000 Croates avaient placé leurs économies dans cette banque, qui a fait faillite dans les années quatre-vingt-dix. Par la suite, la Croatie a dédommagé les deux tiers de ces épargnants, pour un montant d’environ 270 millions d’euros, et elle exige désormais que la Slovénie lui restitue ce montant.

Or, comme vous le savez, mes chers collègues, la ratification du traité par les vingt-sept pays actuellement membres de l’Union européenne est indispensable pour valider l’adhésion de la Croatie.

L’entrée de la Croatie dans l’Union européenne n’est donc pas une simple formalité : elle témoigne, au contraire, d’une démarche enthousiaste et déterminée de la part des Croates, en dépit des difficultés que j’ai énumérées.

Ainsi, le 22 janvier 2012, soit près de vingt ans après la déclaration d’indépendance de leur pays, et malgré un fort taux d’abstention, les Croates se sont exprimés par voie référendaire et ont voté, à 67 %, en faveur de l’adhésion de leur pays à l’Union européenne, lors d’un scrutin jugé crucial par les autorités de la jeune république.

Cette nation de 4, 2 millions d’habitants a donc décidé, en toute conscience, d’arrimer son destin à celui d’un projet toujours en mouvement – la construction d’un ensemble politique efficient à l’échelle de notre continent –, malgré les crises et les difficultés.

Dans cette optique, nous ne pouvons que nous féliciter de l’adhésion à l’Union européenne de ce nouveau membre.

En effet, approfondir l’intégration continentale est vital si nous voulons relever les immenses défis économiques, démographiques et environnementaux suscités par la globalisation et l’émergence de nouvelles puissances.

Enfin, en tant qu’européenne convaincue, je reste persuadée que l’agrandissement de la famille européenne représente plus que jamais une formidable chance pour notre pays. §

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je veux à mon tour saluer, au nom du groupe UMP, le grand professionnalisme des soldats français, où qu’ils soient déployés, et m’associer à la douleur des familles des militaires décédés au Mali, en Somalie ou en Afghanistan.

Monsieur le ministre, mes chers collègues, je me félicite de ce que le premier texte que nous examinions en 2013 ait pour objet de permettre à l’Union européenne de compter, à partir du 1er juillet prochain, un nouvel État membre, la Croatie.

L’intégration de ce pays témoigne de l’existence d’une soif d’Europe, en une période de turbulences et de mutations qui fait douter certains. Cette intégration doit donc être un modèle, ainsi que l’occasion de rappeler ce qu’est l’Europe.

Adhérer à l’Union européenne, c’est, au travers de la Charte des droits fondamentaux, s’approprier un certain nombre de valeurs qui, au fil des siècles, ont forgé nos démocraties occidentales : le respect de l’homme, des minorités, le souci constant de maintenir des institutions stables garantissant un État de droit, le désir de paix.

Adhérer à l’Union européenne, c’est assumer une responsabilité : celle de mettre en place une économie de marché viable, capable de faire face aux forces du marché et à la pression concurrentielle s’exerçant à l’intérieur de l’Union européenne, celle de faire siens les objectifs de l’union politique, économique et monétaire.

Être membre de l’Union européenne ne peut se résumer à bénéficier d’une sécurité budgétaire lors de crises financières.

Être membre de l’Union européenne ne peut se résumer à calculer les retombées financières de la répartition des fonds de cohésion ou des crédits de la politique agricole commune.

Être membre de l’Union ne peut se résumer à s’abriter sous un « parapluie » sécuritaire en cas de crise ou de conflit armé. Je souligne, à cet instant, que la France est actuellement seule sur le terrain au Mali…

Être membre de l’Union, c’est assumer un engagement pour mieux répondre aux défis posés par une mondialisation qui constitue désormais notre quotidien, non pas au travers d’un protectionnisme faussement protecteur, mais grâce à l’excellence, fondée sur la recherche et l’innovation, à la réciprocité, bâtie sur le respect de règles exigeantes en matière environnementale, sanitaire ou sociale, à la solidarité et à la complémentarité entre États membres.

Être membre de l’Union, c’est avoir une haute exigence face à la corruption. À cet égard, certaines pratiques avaient encore cours il y a peu, comme nous le rappellent des articles parus dans des quotidiens de Zagreb, tel le Jutarnji List, relatant la mise en examen de 500 médecins accusés de collusion avec certaines industries pharmaceutiques, ou la récente condamnation d’un ancien premier ministre, M. Ivo Sanader, à dix ans de prison.

Les responsables croates ont donc des défis à relever. L’Union européenne vient de leur exprimer sa confiance, en permettant à la Croatie de devenir le vingt-huitième État membre.

Cette intégration ne sera pas soumise au mécanisme de coopération et de vérification mis en œuvre en 2007 suite à celle, quelque peu imparfaite car trop hâtive, de la Roumanie et de la Bulgarie, dont il faut tirer les enseignements. Ce mécanisme a pour objet de garantir la poursuite, par les pays adhérents, de leurs efforts dans des domaines fondamentaux tels que les réformes judicaires ou la lutte contre la corruption, à tous les échelons de la société.

Je profite de l’occasion pour saluer, à la suite de M. Gattolin, les travaux de nos collègues de la commission des affaires européennes, qui ont rendu un rapport intitulé : « La Bulgarie et la Roumanie : la transition inachevée ».

Cette adhésion à l’Union européenne d’un vingt-huitième État relève d’une procédure de ratification par le Parlement qui est employée ici pour la dernière fois. Désormais, toute adhésion sera régie par l’article 88-5 de notre Constitution, c’est-à-dire qu’elle fera l’objet d’un référendum, sauf approbation des assemblées à la majorité qualifiée des trois cinquièmes.

Je voudrais surtout profiter de ce débat pour délivrer trois messages ; certains pourront considérer que je m’écarte du sujet qui nous occupe aujourd’hui, mais je ne m’en éloigne pas tant que cela.

Mon premier message s’adresse à la Grande-Bretagne. Je souhaite exprimer la profonde inquiétude que m’inspire l’intention de David Cameron de confirmer, vraisemblablement dans les prochains jours – ce pourrait être le 22 janvier, à La Haye –, l’organisation d’un référendum sur l’appartenance de la Grande-Bretagne à l’Union européenne.

Comme le dit fort pertinemment Jean-Dominique Giuliani, le président de la fondation Robert Schuman, voilà ce qui se produit quand une classe politique néglige la politique européenne en faisant croire que tout se décide au niveau national, quand des leaders font des promesses inconsidérées dans le seul but de gagner les élections, quand on fait de l’Europe le bouc émissaire de ses propres turpitudes.

La place de la Grande-Bretagne est dans l’Union européenne, et non ailleurs, même s’il est vrai qu’elle a acquis le bénéfice, au fil du temps, de « régimes spéciaux », à mon sens trop nombreux. Le général de Gaulle avait redouté une telle évolution et en avait tiré les conséquences que l’on sait.

Écoutons ce que dit le secrétaire d’État adjoint américain chargé de l’Europe, Phil Gordon, sur ce point précis : « Nos liens se renforcent avec l’Union européenne en tant qu’entité qui a une influence grandissante dans le monde, et nous voulons que le Royaume-Uni ait une influence croissante en son sein. […] Nous souhaitons une Union européenne tournée vers l’extérieur, et que le Royaume-Uni en fasse partie. » Mes chers collègues, monsieur le ministre, on ne saurait être plus clair !

Mon deuxième message est à l’adresse du couple franco-allemand. L’Union européenne a besoin d’une entente franco-allemande forte. Nos deux pays ont des différences, voire des divergences, mais l’exemple du général de Gaulle et du chancelier Adenauer nous démontre que c’est en les surmontant que l’on donnera à l’Union européenne, aujourd’hui riche de vingt-huit États membres, sa vraie dimension, à la fois monétaire, budgétaire et économique. Et c’est parce que les différences entre nos deux pays sont des complémentarités que le couple franco-allemand est la clé pour une Europe forte.

Comme le souligne notre ancien ambassadeur à Berlin, à la veille de la célébration du cinquantième anniversaire du traité de l’Élysée, nous avons deux défis à relever : celui de l’énergie et celui de la défense.

Mettre en place une vraie politique européenne de l’énergie, clé de la compétitivité de nos entreprises, est une urgente obligation.

Instaurer une politique plus volontariste en matière de défense est tout aussi urgent. Dans un monde dangereux, la première puissance économique mondiale qu’est l’Union européenne ne doit pas s’engager vers un désarmement, bien au contraire. Des crédits, de la recherche, de l’innovation, des alliances sont nécessaires ; ils ne peuvent se concevoir que dans la coopération entre États membres. Je tiens d’ailleurs, à cet instant, à saluer la coopération existant aujourd’hui entre Londres et Paris.

Mon troisième message, enfin, s’adresse plus directement à la France. Il porte sur les réformes structurelles que nous devons continuer à mettre en œuvre.

Si je me réjouis que, dans les dernières propositions budgétaires du président Van Rompuy, le montant des crédits affectés à la compétitivité soit fixé à 139, 543 milliards d’euros, il nous faut, comme nous y invite l'Union européenne, rendre notre marché du travail plus flexible et nos coûts salariaux plus compétitifs, ainsi que réduire nos dépenses publiques, qui sont encore trop élevées aujourd’hui. Si nous ne parvenons pas à opérer ces mutations – elles sont difficiles, j’en conviens, mais, je le redis à cette tribune, l’opposition actuelle se montrera constructive –, nous ne pourrons utiliser ces crédits avec efficacité et pertinence.

Si je me suis permis cet aparté sur les réformes structurelles, c’est tout simplement pour rappeler qu’adhérer à l’Union européenne – je ne crois pas que M. Arthuis me contredira – emporte pour tous les États membres, anciens et nouveaux, l’obligation de mettre en œuvre au niveau national les objectifs décidés à l’unanimité à Bruxelles.

En conclusion, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’intégration de la Croatie doit être une réussite, pour les Balkans occidentaux, qui étaient hier encore une poudrière, mais aussi pour les vingt-sept autres États membres, qui peuvent être légitimement fiers d’avoir tracé la voie à ces pays dont la soif d’Europe, de justice, de liberté et de démocratie est d’autant plus grande qu’ils ont été trop longtemps privés de ces valeurs.

Le groupe UMP du Sénat votera le projet de loi autorisant la ratification du traité relatif à l’adhésion de la République de Croatie à l’Union européenne. §

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Billout

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’examen de ce projet de loi autorisant la ratification du traité relatif à l'adhésion de la Croatie à l'Union européenne nous donne l'occasion de mener une réflexion plus générale sur le processus d'élargissement.

Si l’ensemble des pays membres de l’Union européenne ratifient cette adhésion, par voie parlementaire ou référendaire, la Croatie deviendra au mois de juillet prochain le vingt-huitième État membre à part entière. Elle aura pour cela su franchir avec succès toutes les étapes d’un long et difficile processus.

Cela veut-il dire, pour autant, que la réalité de la situation de ce pays satisfait pleinement aux critères dits de Copenhague, que, pour ma part, je conteste parce qu'ils imposent aux pays le modèle de développement néolibéral ?

Non, des problèmes importants demeurent. C'est pourquoi, d'ailleurs, la Croatie est encore soumise au mécanisme spécifique de suivi renforcé de ses engagements, institué pour tenir compte des enseignements tirés de l'intégration peu aboutie de la Roumanie et de la Bulgarie. Il lui reste du chemin à faire pour mettre en place une société répondant aux canons européens actuels, c'est-à-dire dotée d'une économie de marché et d'un arsenal législatif parfaitement aligné sur celui de l'Union européenne.

Les autorités européennes ont ainsi assez fermement invité les responsables croates à poursuivre leurs efforts dans une dizaine de domaines, allant de la privatisation totale des chantiers navals jusqu'à l'aboutissement de procédures judiciaires, tels certains procès pour crimes de guerre, en passant par des recrutements dans la police des frontières ou l'adoption rapide des décrets d'application d’une loi sur la police.

Il est donc important de ne pas sous-estimer les difficultés que rencontre ce pays en matière économique ou en termes de capacités judiciaires ou administratives.

Toutefois, d'un autre côté, la perspective de l'adhésion et les rapports de suivi des autorités européennes peuvent aussi constituer pour la Croatie une incitation à mener les réformes nécessaires en matière de justice et de lutte contre la corruption ou contre le crime organisé.

Cependant, je crains que, comme ses prédécesseurs d'Europe centrale, la Croatie ne subisse les mêmes conséquences néfastes d'une stricte application des exigences communautaires.

Par exemple, les conditions d'acceptation au titre de l'un des critères de Copenhague, la reprise de « l'acquis communautaire », ne tiennent aucun compte des inégalités qui se creusent, des problèmes sociaux du pays, de la situation réelle de l’emploi, de la fragilité de l’économie, ainsi que de certaines spécificités nationales.

En réalité, au nom de l'exigence, inscrite dans les critères de Copenhague, de se montrer capable d'affronter la concurrence du grand marché européen, ce pays est poussé, comme les autres, à privatiser, à précariser à tout-va la situation des salariés, à libéraliser et à déréglementer les échanges, quitte à créer un énorme déficit commercial.

Ce mécanisme fait ainsi des bas salaires une sorte d'avantage comparatif dans le jeu de la concurrence, ce qui aboutit à élargir les marchés européens sans que les droits des peuples suivent.

D'une façon générale, la politique d'élargissement de l'Union européenne à de nouveaux pays est souvent mal comprise et suscite de grandes inquiétudes dans les opinions publiques. En effet, le processus semble s'accélérer depuis quelques années, être mal maîtrisé et surtout mal défini. Les peuples d'Europe, mais aussi leurs élus et leurs dirigeants, ont besoin de savoir où ils vont, pourquoi « élargir », à qui et jusqu'où.

En outre, au moment où l'Union européenne est confrontée à une grave crise économique et financière, ayant de lourdes conséquences pour les économies et la vie des peuples, et se montre impuissante à parler d'une seule voix sur la scène internationale en raison de divergences entre les vingt-sept États membres, on peut légitimement s'interroger sur l’intérêt de poursuivre son élargissement.

Le passage de l’Union européenne de quinze à vingt-sept pays membres avait déjà eu pour conséquence de modifier la nature du projet européen initial, l’Union tendant à devenir une simple zone de libre-échange, à cause des fortes disparités existant entre États membres.

Le projet européen que nous connaissons, dont les peuples subissent aujourd'hui les conséquences négatives, a été principalement conçu, dès l’origine, pour des raisons strictement économiques. Il s’agit avant tout de permettre une libre circulation des capitaux et des marchandises dans un marché unique. Les grands et généreux principes, l'histoire, les idées et les valeurs communes, la libre circulation des personnes, les droits de l'homme, la paix ou le nécessaire progrès social n'ont été mis en avant qu'après coup.

Dans le contexte de la crise actuelle, certains préconisent une pause dans l'élargissement et évoquent la nécessité de procéder à un approfondissement de l'Union européenne avant d'envisager de porter le nombre de ses membres de vingt-sept à trente ou davantage, comme il est prévu de le faire avec l’adhésion de l'ensemble des pays des Balkans.

Pour ma part, je pense qu'il faut plutôt préciser, et mieux encore redéfinir, les principes sur lesquels doit se fonder la politique d'élargissement de l'Union européenne.

En effet, s'il s'agissait simplement de fixer des limites à l'Europe, il se trouve que le Conseil de l'Europe l'a déjà fait il y a quinze ans en définissant, par la géographie, la culture et la volonté d'adhésion, les critères d'appartenance des quarante-sept pays qui la composent.

Les problèmes que soulève aujourd'hui la politique d'élargissement ne sont pas, à l'évidence, de même nature, car la construction européenne traverse en réalité une profonde crise d'identité.

Pour tenter de s'adapter aux difficultés de tous ordres que pose l'élargissement, l'Union européenne a déjà mis en place, en son sein, plusieurs cercles, plusieurs strates, plusieurs frontières, ainsi que des mécanismes de coopération à plusieurs vitesses et différenciés.

C'est pourquoi les problèmes suscités par le développement de l'Union européenne tiennent moins aux limites territoriales de celle-ci qu'au projet de société qu'elle prétend réaliser.

C'est donc moins la politique d'élargissement en elle-même que la façon dont elle est appliquée qui pose problème. C'est cette politique qui menace la cohésion de l'Union européenne.

Ce qui pourrait menacer plus gravement encore la construction européenne, ce n’est pas un risque de dilution lié à la poursuite de l’élargissement ; comme l’a montré la récente crise de la zone euro, ce sont plutôt les difficultés et la lenteur à trouver des solutions solidaires face à la crise financière, ainsi que l’absence de volonté politique des dirigeants européens de prendre des mesures fortes de régulation pour lutter efficacement contre la spéculation sur les marchés financiers.

En effet, n’oublions pas que la seule réponse des gouvernements à la crise financière qui a failli emporter l’Europe a consisté, au bout du compte, à en faire payer les conséquences par les populations, en rendant encore plus contraignant l’ancien pacte de stabilité et de croissance et en sanctionnant les pays qui ne respectent pas le dogme aveugle et socialement injuste de la lutte contre les déficits budgétaires.

La véritable menace, pour la construction européenne, vient du fait que les nouveaux entrants doivent se soumettre à la concurrence effrénée qui prévaut au sein du marché unique et les contraint à une privatisation généralisée de leur économie, entraînant une généralisation des bas salaires et la précarisation de l’ensemble de la population. Cela induit un dumping social, qui provoque en retour chez nous des délocalisations d’entreprises, au détriment de notre économie.

Est-ce à ces conditions, dans ce contexte, qu’il faudrait accueillir la Croatie au sein de l’Union européenne ? Cela mérite évidemment réflexion. On comprend que les politiques d’élargissement puissent inspirer des craintes et des réticences. En tout cas, j’estime que ce n’est pas en différenciant les niveaux d’intégration des pays accueillis, comme certains le proposent, que l’on résoudra les problèmes.

Je souhaite un changement fondamental des orientations de la construction européenne, mais, en attendant, faut-il différer l’adhésion de la Croatie ?

Je suis lucide et sans illusions sur les conséquences néfastes pouvant résulter de cette adhésion réalisée aux conditions définies par les critères néolibéraux de Copenhague et dans le contexte de la plus grave crise politique, financière, économique et politique que l’Europe ait jamais connue.

Dans le même temps, il faut bien mesurer que le peuple croate manifeste un désir certain de rejoindre l’Union européenne ; il en a approuvé le principe par référendum, à une majorité de 66 % des voix. Ne pas répondre à cette attente pourrait être dangereux, car cela risquerait de nourrir le populisme et d’encourager le retour d’un nationalisme d’extrême droite toujours vivant dans ce pays.

En outre, la perspective européenne peut et doit être un facteur de paix et de stabilité dans cette région des Balkans occidentaux qui a tant souffert.

Mes chers collègues, c’est principalement en considération de cette double nécessité – respecter la volonté exprimée par le peuple croate et installer une paix durable dans la région – que le groupe communiste, républicain et citoyen se prononcera en faveur de la ratification du traité relatif à l’adhésion de la République de Croatie à l’Union européenne.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC, du groupe socialiste et du groupe écologiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les sénatrices et les sénateurs du groupe UDI-Union centriste s’associent à l’hommage qui a été rendu à nos soldats tombés au Mali et en Somalie, et tiennent à exprimer leur compassion à leurs familles.

Au moment où l’Europe traverse une très grave crise interne, tant économique que financière et institutionnelle, nous sommes appelés à nous prononcer sur l’adhésion de la Croatie à l’Union européenne.

Ainsi va l’Europe, mécanique et pathétique. Le dysfonctionnement est manifeste, mais l’élargissement progresse tel un automate ! L’immeuble menace-t-il de s’écrouler ? Peu importe, il reste ouvert à de nouveaux arrivants…

Loin de nous, bien sûr, l’idée de stigmatiser la Croatie. Au contraire, nous joignons nos voix au concert de louanges qui lui a, à juste titre, été adressé. Au cours de son audition par la commission des affaires étrangères et la commission des affaires européennes du Sénat, le 4 décembre dernier, Stefan Füle, le commissaire européen à l’élargissement, a bien exposé à quel point, au cours d’un processus de négociation long de plus de six années, la Croatie avait su progresser « dans tous les domaines ».

Cette réussite est d’autant plus remarquable que la Croatie est sortie il y a seulement vingt ans du conflit douloureux et meurtrier auquel elle doit son indépendance. De plus, le processus de négociation a été plus exigeant pour la Croatie que pour les derniers États ayant adhéré, notamment en ce qui concerne le respect des droits fondamentaux.

Aussi sommes-nous pleinement conscients que, si la Croatie est aujourd’hui à même de devenir, le 1er juillet prochain, le vingt-huitième État membre de l’Union européenne, c’est parce qu’elle a consenti un effort considérable, que nous saluons à notre tour. C’est en considération de cet effort que nous voterons le projet de loi autorisant la ratification du traité relatif à l’adhésion de la République de Croatie à l’Union européenne.

Cependant, au-delà du seul dossier croate, ce débat nous donne l’occasion de poser une question fondamentale : n’est-il pas temps de marquer une pause dans la marche forcée vers l’élargissement ?

En effet, l’aveuglement actuel ruine l’espoir de donner à l’Europe le pilotage politique qui lui fait si tragiquement défaut.

Depuis le premier élargissement, en 1973, la logique de l’élargissement s’oppose à celle de l’approfondissement. Nous aimerions que cette opposition ne soit que rhétorique ; hélas, elle ne l’est pas, et ce moins encore que jamais dans la situation actuelle.

Non seulement la crise que j’ai évoquée au début de mon propos n’est pas terminée, mais elle ne se terminera pas tant que nous n’aurons pas franchi une étape cruciale dans l’intégration européenne. Il s’agit en effet d’une crise systémique, conséquence naturelle et logique des limites structurelles du modèle de gouvernance économique de l’Union européenne.

Mes chers collègues, permettez-moi de procéder à un bref rappel historique pour expliquer ma position.

Pour contrer une instabilité monétaire devenue incompatible avec les objectifs de croissance et d’emploi assignés au marché unique, nous nous sommes dotés d’une monnaie unique. Seulement, cette monnaie est restée orpheline d’un État, puisqu’il n’y a pas d’État européen. Dès lors, pour compenser l’absence de gouvernance de la zone euro, nous avons imaginé une sorte de règlement de copropriété : le pacte de stabilité et de croissance, la stabilité venant en réalité bien avant la croissance. Il s’agissait d’un dispositif transitoire, mis en place dans l’attente d’une intégration politique qui n’est toujours pas venue.

Chacun connaît la suite : ce pacte a été allègrement transgressé, l’euroscepticisme dont faisaient preuve à l’époque les chefs d’État et de Gouvernement l’emportant face à une Commission européenne pusillanime, sous l’arbitrage complice des marchés financiers et des agences de notation, qui croyaient que la zone euro était un espace fédéral ! Cette situation a conduit à la crise des dettes souveraines, qui a éclaté en 2009 – étonnamment tard – et dont nous ne sommes toujours pas sortis.

Oui, mes chers collègues, c’est la chose la plus importante que nous devons conserver à l’esprit : nous ne sommes pas sortis de la crise.

Certes, après ce que l’on pourrait appeler les « années folles de l’euro », nous avons réagi. De nouvelles procédures de rigueur et de surveillance ont été mises au point : le « six-pack », à la fin de 2010, et, aujourd’hui, le traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l’Union économique et monétaire, le TSCG.

Bien entendu, ces instruments sont beaucoup trop jeunes pour avoir déjà pu porter leurs fruits : le TSCG est ainsi entré en vigueur le 1er janvier dernier. Surtout, ils seront à terme insuffisants, parce que les racines du mal demeurent.

Par exemple, monsieur le ministre, il est manifeste qu’à l’égard de Chypre, qui a intégré l’Union européenne en 2004 et a même été admise dans la zone euro en 2008, le contrôle prudentiel de l’Union européenne a été totalement défaillant, à telle enseigne que ce pays vient de solliciter l’assistance financière de l’Union européenne. Or il faut se représenter que, à Chypre comme au Luxembourg, les deux tiers du produit intérieur brut sont constitués de revenus financiers.

Où en est le contrôle prudentiel des banques chypriotes ? En cas de sinistre, combien cela va-t-il coûter à la zone euro ? En effet, comme dans le cas de la Grèce, ce n’est pas l’Union européenne qui réglera l’addition, mais les budgets nationaux des États membres de la zone euro, via des prêts bilatéraux ou l’abondement du Mécanisme européen de stabilité. J’ai le sentiment que l’on ne sait pas très bien ce qui se passe à Chypre, alors que les engagements des banques chypriotes, y compris en Russie et au Moyen-Orient, représentent de sept à huit fois le produit intérieur brut national. Les conséquences potentielles de cette situation pour nos finances publiques sont très inquiétantes, et ce n’est là qu’un exemple…

Chaque élargissement a un coût, que l’Union européenne est de moins en moins capable d’assumer, surtout compte tenu des risques que son absence de gouvernance budgétaire continue à faire peser sur elle. Certes, la Croatie est vertueuse : dont acte. Elle va adhérer à l’Union européenne, et c’est très bien, mais combien faudra-t-il embaucher de traducteurs à la suite de son intégration ? Au total, depuis 2001, la Croatie a bénéficié de 1, 5 milliard d’euros d’aides de préadhésion. En 2013, 687 millions d’euros sont prévus à son intention, et ce montant devrait augmenter à partir de 2014, en raison de la montée en puissance progressive des fonds structurels, des fonds de cohésion et des crédits de la politique agricole commune. La Croatie aura en outre douze députés européens, et bien sûr son commissaire.

Mes chers collègues, le problème de fond est que le budget de l’Union européenne ressemble à une table de casino. Le fonctionnement administratif de l’Union européenne consomme 7 % de son budget : cela correspond à la rémunération du croupier ; après avoir payé celui-ci, chacun essaye de récupérer le maximum de jetons et, comme à toute table de casino, il y a des gagnants et des perdants… Mais un tel système, monsieur le ministre, ne fait pas une politique européenne, ni l’Europe !

Dans ces conditions, notre conviction est que, une fois la Croatie intégrée, il faudra suspendre le processus d’élargissement. Tant que nous n’aurons pas mis en place une gouvernance digne de ce nom, nous devrons nous en tenir à des partenariats de coopération.

M. Roland du Luart acquiesce.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

La Croatie a bénéficié jusqu’à présent d’un tel accord. La Bulgarie et la Roumanie, dont chacun reconnaît qu’elles ont été intégrées trop vite dans l’Union européenne, en bénéficient toujours, même après leur adhésion… C’est dire l’absurdité de la situation ! Ces deux pays sont aujourd’hui incapables de mobiliser les crédits mis à leur disposition.

Hélas, on ne paraît pas vouloir privilégier les accords de coopération, ce qui nous inquiète au plus haut point. En effet, persévérer dans la démarche actuellement suivie revient à caricaturer la construction européenne et, finalement, à discréditer le projet européen.

L’élargissement apparaît comme un processus autonome, incontrôlable, qui s’auto-entretient – signe patent de l’impéritie des instances de gouvernance de l’Europe. Lorsque, le 4 décembre dernier, j’ai interrogé le commissaire Füle sur les problèmes que je viens de soulever devant vous, il m’a fait une réponse extrêmement symptomatique : il a fait valoir, de bonne foi, que le sujet ne relevait pas vraiment de la politique d’élargissement. Cela est vrai, mais c’est aussi très grave, parce que cette situation est très représentative de la schizophrénie de l’Europe actuelle, animée par deux forces œuvrant parallèlement, non pas conjointement : d’une part, des institutions et des normes sources de dépenses publiques ou freins à la compétitivité et à la croissance ; d’autre part, une zone euro impuissante à réduire la dépense publique et à améliorer la compétitivité, pour donner un contenu et de la robustesse à la croissance.

L’élargissement, pour l’heure, relève de la première de ces forces. C’est un élargissement à marche forcée, qui s’emballe depuis 2004.

La vocation européenne des pays des Balkans occidentaux a été reconnue au Conseil européen de Zagreb, en 2000, et n’a jamais été démentie depuis. Outre la Croatie, trois d’entre eux ont déjà le statut de candidat : la Macédoine, le Monténégro et la Serbie. Trois autres sont des candidats potentiels : l’Albanie, la Bosnie-Herzégovine et le Kosovo. Par ailleurs, l’Islande est aussi candidate, de même que la Turquie, dont le dossier est toujours aussi problématique. Enfin, qui doute que, tôt ou tard, des pays tels que l’Ukraine, la Géorgie ou la Moldavie ne le soient à leur tour ?

Comme pour nous rassurer, il nous est annoncé que c’est la dernière fois que le Parlement français pourra ratifier un élargissement de l’Union européenne à la majorité simple, que les prochains élargissements devront être adoptés soit par référendum, soit, depuis la dernière révision constitutionnelle de 2008, par le Parlement, mais à la majorité qualifiée des trois cinquièmes.

Stop ! Nous ne pourrons pas accueillir tous ces pays sans avoir eu recours, au préalable, au seul remède capable de nous guérir de notre maladie de gouvernance. Ce remède est connu : c’est le fédéralisme.

Mes chers collègues, le jour où nous avons opté pour la monnaie unique, nous avons pris un billet aller sans retour vers une souveraineté partagée. Seulement, nous n’avons pas assumé les conséquences de cet engagement ; c’est là l’origine de la crise. Il est désormais impératif de faire de la zone euro le noyau de cristallisation du fédéralisme européen.

Dès lors, nous devons mettre en place un pilotage politique. Cela implique la nomination d’un ministre européen de l’économie et des finances…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

… à temps plein, et non à temps partiel, qui soit chargé d’assurer, à l’abri des conflits d’intérêts, une coordination budgétaire. Il devra également être membre de la Commission et pouvoir s’appuyer sur un Trésor européen, lequel reste à créer. On a bien créé, pour Mme Ashton, un service qui compte 3 000 personnes ! Et pour quelle politique extérieure de l’Union européenne…

Il convient aussi, bien sûr, d’instaurer une légitimité démocratique incontestable par l’institution d’une instance parlementaire de contrôle de la gouvernance de la zone euro associant dans une enceinte commune, permanente, des députés européens et des parlementaires nationaux de la zone euro. La crise grecque nous a démontré que la solidarité au sein de celle-ci n’a rien de commun avec les liens qui unissent les vingt-sept membres de l’Union, qui seront bientôt vingt-huit.

Monsieur le ministre, l’Europe est en danger. Sa gouvernance est caricaturale : l’élargissement compulsif en est l’une des manifestations. Nous nous devons d’y remédier. Dans cette attente, une première mesure s’impose selon nous : supprimer le poste de commissaire européen à l’élargissement ! §

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à seize heures vingt, est reprise à seize heures vingt-cinq.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

La séance est reprise.

Dans la suite de la discussion générale, la parole est à Mme Josette Durrieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Josette Durrieu

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, de ce débat sur l’adhésion de la Croatie à l’Union européenne émergent, et c’est tant mieux, des mots qui font consensus : satisfaction et confiance.

Vous avez évoqué, monsieur le ministre, le temps long des négociations : plus de six ans, la demande d’adhésion de la Croatie remontant à dix ans. Avant d’être candidate à l’entrée dans l’Union européenne, la Croatie a été candidate au Conseil de l’Europe. À ce titre, elle a également été soumise à un long temps de monitoring, de 1996, année de son admission au sein du Conseil de l’Europe, jusqu’en 2003. En tant que présidente de la commission concernée du Conseil de l’Europe, j’ai été amenée à clore cette période de monitoring par anticipation, tant les progrès accomplis par la Croatie étaient manifestes et importants. Il fallait en prendre acte.

Comme cela a été dit tout à l’heure, le processus est long et les populations des pays candidats à l’adhésion sont fatiguées, mais si cet accompagnement est incontestablement une épreuve, il est aussi une chance.

Les conclusions que j’ai formulées en 2003 à propos de la Croatie rejoignent celles que nous a présentées aujourd’hui M. le rapporteur.

En 2003, nous disions toute notre confiance en la Croatie, qui avait respecté la majeure partie des engagements qu’elle avait pris auprès du Conseil de l’Europe, en consolidant son système parlementaire, ses réformes démocratiques, l’intégration de ses minorités, ce qui n’était pas évident au départ.

Nous soulevions aussi à l’époque un certain nombre de difficultés, les mêmes qu’aujourd’hui, en termes de mise en œuvre de la décentralisation, de la régionalisation, des privatisations. Nos exigences n’étaient pas forcément comprises et les dommages qui résultaient de cette incompréhension n’étaient pas mesurés.

Je me souviens d’une remarque faite par le ministre croate des transports de l’époque à propos des privatisations : la France accepterait-elle de privatiser ses chemins de fer ? Non… Et pourtant, c’est ce que nous demandions à la Croatie !

Les Croates avaient le sentiment que nos exigences allaient au rebours de l’effort exceptionnel de construction qu’ils venaient d’accomplir et que, d’une certaine façon, nous leur demandions de déconstruire. Nous allions trop vite !

Toutefois, à cette époque, on notait déjà un certain nombre de progrès remarquables, qui avaient modifié mon regard sur ce pays. On ne peut changer l’histoire, mais j’avais découvert un peuple qui voulait tourner la page de la guerre, en se lançant, sans aucune aide, dans une grande entreprise de reconstruction, notamment d’un parc de logements destinés à des familles serbes de retour en Croatie. Cette démarche m’avait fortement impressionnée.

Aujourd’hui, la Croatie, plus que la Grèce, est un facteur de stabilité dans la région des Balkans. Elle a tourné très tôt la page de la guerre.

Je ne suis pas sûre que la Serbie l’ait fait. J’étais dans ce pays lors des élections, et j’ai pu constater qu’un certain nombre de choses avaient changé ces dernières années. Malgré tout, je ne suis pas certaine que tout soit définitivement accepté, y compris la perte du Kosovo.

Selon moi, la Croatie a très vite affirmé son avenir européen, comme le référendum l’a d’ailleurs prouvé. Bref, à la question « la Croatie est-elle prête à entrer dans l’Union européenne ? », nous répondons par l’affirmative.

Concernant l’élargissement, nos craintes sont légitimes. Incontestablement, la déception qui a suivi les précédentes adhésions est grande. Notons cependant que les responsabilités sont partagées. Pourquoi sommes-nous déçus ? Pourquoi avons-nous des craintes ? Pourquoi, comme vient de le rappeler l’orateur qui m’a précédée, devons-nous être extrêmement prudents ?

Bien sûr, les pays concernés sont responsables d’une telle situation. On oublie toutefois qu’ils portent le fardeau de leur histoire immédiate, rien n’ayant été totalement soldé. On oublie aussi les difficultés nouvelles, bien que nous les évoquions parfois, telles que la corruption et le crime organisé. On ne parle pas non plus des peurs et des craintes, qui expliquent d’ailleurs que le processus de la défense européenne soit, à certains endroits, bloqué, la protection de l’OTAN inspirant une plus grande confiance. Personne n’a évoqué le repli identitaire.

L’Union européenne en est-elle responsable ? Oui ! Un certain nombre d’erreurs d’appréciation ont été commises, concernant l’élargissement, cela a été dit, avec l’adhésion de la Roumanie et de la Bulgarie. Des erreurs de méthode sont sans doute à déplorer : l’approfondissement aurait dû être mis en œuvre plus tôt. Il est donc important de réajuster et de réorienter notre action stratégique.

Mais peut-être l’Union européenne est-elle responsable d’autre chose. Elle témoigne en effet d’un certain nombre de faiblesses et d’impuissances, qui lui causent du tort. Vous avez évoqué tout à l’heure des problèmes, notamment frontaliers. Comment se peut-il que nous n’arrivions pas à résoudre la situation chypriote ? Sommes-nous à la veille de proposer des solutions, alors même que surgit sans doute un problème nouveau, puisque du gaz a été trouvé dans cette zone de la Méditerranée ? Je ne suis d’ailleurs pas sûre que cela facilite les choses…

Et l’impuissance de l’Europe à faire rêver la jeunesse ! Au cours de mon voyage en Serbie, j’ai rencontré des jeunes. Ils ne parlaient plus du Kosovo, ce qui m’a paru extrêmement positif. Pour autant, ils n’évoquaient pas non plus l’Europe. Or, lors des élections, ils se sont abstenus et les nationalistes ont gagné ! Selon moi, le principal échec collectif de ces dernières années est probablement la montée des nationalismes dans ces pays. C’est un mal profond qui risque de faire imploser l’Europe.

Mes chers collègues, en tant que membre du Conseil de l’Europe, je voudrais dire un mot de cette institution.

Tous les pays que nous venons d’évoquer sont d’abord membres du Conseil de l’Europe. Ils essaient ensuite d’intégrer l’Union européenne.

Le Conseil de l’Europe devrait être – il l’est peut-être ! – le creuset où se forge la conscience européenne. Malheureusement, je le dis ici avec beaucoup de regrets, parce que j’y aurais passé une grande partie de ma vie politique, le débat est bloqué sur un certain nombre de thèmes : les minorités, les identités, les nationalités. Finalement, on y cultive les nationalismes.

Nous n’avons pas été assez prudents. Oui, les menaces et les risques existent ! Tout à l’heure, monsieur le ministre, vous avez affirmé à juste titre que cette région est stable. Pour ma part, je ne pense pas qu’elle soit définitivement stabilisée et que l’intégration et la réconciliation soient achevées.

Debut de section - PermalienPhoto de Josette Durrieu

Que dire de ces constructions artificielles que sont la Bosnie-Herzégovine et le Kosovo ? Que dire de la Serbie, grande perdante, réduite à un État croupion, privée de la République Srpska et du Kosovo ? Que dire des voisins proches, assez menaçants ? Je pense à la Russie, qui a déstabilisé les pays baltes, la Moldavie et la Transnistrie, où le conflit est gelé, et qui aurait bien voulu déstabiliser un peu plus le Kosovo. Veillons également à la situation du Monténégro et n’oublions pas les rêves ottomans expansionnistes de la Turquie !

Il y a urgence à stabiliser les frontières est de l’Europe, de l’Europe du sud-est et les Balkans, en considérant que la Méditerranée constitue la frontière sud de l’Europe.

En contradiction complète avec mon propos, j’affirme pourtant que la solution réside dans l’intégration de ces pays à l’Union européenne !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de André Vallini

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la Croatie est aujourd’hui prête à entrer dans la famille européenne. Nous devons l’y accueillir. Il revient donc aujourd’hui au Sénat de la République française d’autoriser la ratification du traité relatif à l’adhésion de la République de Croatie à l’Union européenne.

Le destin de la Croatie est européen. L’histoire, bien sûr, est là pour en témoigner, mais le présent aussi, car la Croatie est aujourd’hui un pôle de stabilité, certes relative, comme vient de l’expliquer notre collègue Josette Durrieu, dans les Balkans, région dont chacun sait à quel point elle est compliquée et souvent instable.

Les cicatrices de la tragédie de l’ex-Yougoslavie se sont peu à peu refermées et, depuis dix ans, la Croatie a mis en œuvre des réformes ambitieuses, parfois difficiles et exigeantes, notre collègue vient de nous l’expliquer à l’instant, afin d’atteindre les exigences posées par l’Union européenne. Il faut ajouter que la mobilisation de la classe politique croate en faveur de l’entrée du pays dans l’Union européenne a été unanime, dépassant les clivages partisans.

L’Europe et la France se doivent de reconnaître ces efforts et de valider ces réussites. Pour autant, si cette adhésion est aujourd’hui possible et nécessaire, elle pose la question des élargissements futurs.

D’autres orateurs, notamment Jean-Louis Carrère, ont évoqué le Monténégro et la Serbie, qui ont le statut officiel de candidat, ainsi que la Macédoine, bloquée par le veto grec, et l’Albanie, qui a déposé sa candidature. Quant à la Bosnie-Herzégovine et au Kosovo, ils demeurent en quelque sorte sur le pas de la porte.

Souvenons-nous des problèmes qu’ont posés les adhésions récentes mais trop rapides de la Bulgarie et de la Roumanie, pour lesquelles il a fallu instaurer un « mécanisme de coopération et de vérification », en particulier sur la réforme judiciaire de la lutte contre la corruption, alors même que ces pays avaient déjà adhéré à l’Union européenne.

Comme l’a dit notre collègue Jean Arthuis, il semble aujourd’hui évident que l’Europe doit, dans les années qui viennent, privilégier son approfondissement plutôt que son élargissement.

Se pose alors la question d’une Europe à plusieurs vitesses, qui pourrait réussir à concilier demain les aspirations des différents États en matière économique, budgétaire, fiscale ou encore militaire. Il est en effet de plus en plus évident que la seule solution est celle d’une Europe constituée de cercles concentriques, dont le cœur serait le couple franco-allemand, élargi bien sûr aux six pays fondateurs, qui pourraient pousser aussi loin que possible leur intégration économique, budgétaire et fiscale. On peut aussi envisager une Europe de la défense – le Sénat y travaille – autour du groupe de Weimar, qui réunit la France, l’Allemagne et la Pologne, et de Weimar Plus, selon la terminologie adoptée par les spécialistes, qui associe également l’Italie et l’Espagne. Je n’oublie pas non plus, depuis les accords de Lancaster House, la Grande-Bretagne.

Certains dénonceront peut-être une Europe à la carte. Je ne partage pas leurs réticences. Comment peut-on imaginer faire fonctionner une Europe avec vingt-huit pays dont le niveau de développement est à ce point inégal et, surtout, dont les aspirations ne sont pas forcément identiques ?

Les seuls principes intangibles, les seules exigences fondamentales sur lesquels on ne saurait transiger demeurent le respect de la démocratie, qui doit animer chacun des membres de l’Union européenne, et la volonté qu’ils doivent avoir en partage de réaliser le rêve de nos pères fondateurs, celui d’un continent de paix et d’amitié entre les peuples.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, permettez-moi de saluer la présence, dans notre tribune d’honneur, d’Ivo Goldstein, nouvel ambassadeur de Croatie, avec lequel je tisserai certainement, en ma qualité de présidente du groupe France-Croatie, les mêmes liens d’amitié que ceux qui m’ont unie à Mirko Galić.

C’est la dernière fois que nous sommes amenés à nous prononcer, dans le cadre de la procédure législative ordinaire, sur l’adhésion d’un nouvel État à l’Union européenne. En effet, les révisions constitutionnelles de 2005 puis de 2008 disposent que toute nouvelle adhésion devra être approuvée par référendum ou par le Parlement réuni en Congrès, ce qui risque de présenter quelques inconvénients, comme l’avait indiqué, à l’époque, la commission des lois du Sénat. Notre crainte se vérifiera sans doute, c’est du moins ce que je redoute, même si, pour ce qui concerne la Croatie, le recours à l’une ou l’autre de ces procédures n’aurait pas posé de difficulté. Je suis donc satisfaite que le Sénat se prononce sur l’adhésion de ce pays, grand ami de la France.

Je tiens avant tout à saluer les efforts que la Croatie a su déployer depuis l’ouverture des négociations d’adhésion en 2005.

D’abord, de nombreux orateurs l’ont souligné, le processus de négociation a été plus exigeant que celui qui avait été appliqué lors des élargissements précédents et l’acquis communautaire qu’elle a dû assimiler n’a pas eu d’équivalent. La Croatie a démontré sa capacité à mettre en œuvre des réformes de grande envergure dans tous les domaines de la société.

Ensuite, elle a surmonté le différend territorial qui l’opposait à sa voisine, la Slovénie, en acceptant le recours à l’arbitrage, et je me réjouis du rôle qu’a pu jouer la France dans ce dénouement.

En outre, elle a su vaincre les démons du passé en acceptant une plus grande collaboration avec le Tribunal pénal international de La Haye pour l’inculpation de Croates coupables de crimes de guerre.

Dès le 24 juin 2011, le Conseil européen a appelé à une conclusion rapide des négociations, position qui a été suivie par la Conférence intergouvernementale du 30 juin 2011, après un processus qui aura duré près de six ans.

Le 9 décembre 2011, le traité d’adhésion a enfin été signé à Bruxelles.

Après l’approbation par référendum du peuple croate, c’est au tour des États membres de ratifier cette adhésion. Mon seul regret est que la France ne s’y soit pas attelée plus tôt.

Aussi, monsieur le ministre, je veux remercier le Gouvernement, qui a accepté, en relation avec le président du Sénat, Jean-Pierre Bel, que soit examiné dès le début du mois de janvier ce projet de loi de ratification. Il était utile et important que la France soit le premier des grands pays à approuver cette adhésion.

Il s’agit aujourd’hui d’applaudir la Croatie, un État responsable, développé et moderne ayant pleinement fait siens les valeurs européennes et ses standards démocratiques.

Le comité Nobel norvégien vient d’attribuer à l’Union européenne le prix Nobel de la paix pour avoir « contribué pendant plus de six décennies à promouvoir la paix et la réconciliation, la démocratie et les droits de l’homme en Europe ». Si la construction européenne, débutée au lendemain de la Seconde Guerre mondiale sur l’idée du « plus jamais ça », a permis l’intégration des anciennes dictatures du Sud et, surtout après 1989, des ex-démocraties populaires, elle n’a pas su empêcher, en Croatie, puis en Bosnie, que se déroule, dans des conditions tragiques, la première guerre sur le territoire européen depuis 1945.

L’attribution du prix Nobel de la paix à l’Union européenne, en plein aboutissement de l’adhésion de la Croatie, vingt ans après le conflit des Balkans, ne constitue pas une simple coïncidence ; j’y vois un symbole. Au-delà de l’espoir donné aux autres pays des Balkans occidentaux, c’est la réaffirmation des idéaux de paix, d’amitié et de progrès que véhicule l’Union européenne.

Ce rappel du fondement originel de l’Union est aujourd’hui plus que jamais nécessaire. Dans la période difficile que nous traversons, faite de doutes et de crispations nationales, l’entrée de la Croatie est un espoir pour elle.

Le peuple croate s’est prononcé le 22 janvier 2012 à une très large majorité en faveur d’une adhésion de son pays à l’Union européenne.

Cette volonté, si clairement exprimée, même si le peuple croate s’était quelque peu lassé d’attendre l’issue de ce long processus de négociation, sonne comme un rappel pour les Européens de leur chance de vivre en paix depuis six décennies et comme la promesse que cet idéal n’est pas cassé.

C’est aussi une chance pour la France. Les liens d’amitié qui nous unissent sont anciens et profonds, comme l’ont rappelé les intervenants au colloque que le groupe d’amitié que je préside a organisé, de concert avec l’ambassade de Croatie, en octobre dernier. D’ailleurs, la plus belle avenue de Split, l’équivalent de notre avenue des Champs-Élysées, porte le nom du général Marmont, en mémoire de celui qui administra les provinces illyriennes sous Napoléon. Voilà un lieu où ce dernier aura laissé un bon souvenir…

Le festival « Croatie, la voici », qui s’est déroulé tout au long de l’automne en France, a permis aux Français d’approfondir leur connaissance des richesses culturelles qu’offre la Croatie. Comment ne pas évoquer le talent d’Ivan Meštrović et la beauté des klapas, que nous redécouvrons ?

En outre, l’adhésion de la Croatie va renforcer la place du français dans l’Union européenne, car plus de 6 % des Croates sont francophones et la Croatie est État observateur au sein de l’Organisation internationale de la francophonie depuis 2004. J’ai plaisir à côtoyer nos collègues croates lors des rencontres qui ont lieu dans le cadre de l’Assemblée parlementaire de la francophonie.

L’appui sincère et continu de la France à la Croatie, tout au long du processus d’adhésion, a resserré ces liens d’amitié et nous savons que nous pourrons compter l’un sur l’autre pour défendre nos idéaux communs et œuvrer pour une Europe toujours plus solidaire.

Mes chers collègues, les hasards de ma vie professionnelle m’ont fait découvrir la Croatie voilà plus de trente-cinq ans. De Zagreb à Vukovar, de Šibenik aux lacs de Plitvice, en temps de paix comme en tant de guerre, comme l’a indiqué André Gattolin se référant à sa propre expérience, j’ai eu l’occasion de parcourir ce pays, autrefois Yougoslavie, aujourd’hui Croatie. J’ai toujours cru en sa destinée européenne, et je suis fière aujourd’hui de défendre devant vous son adhésion officielle à l’Union européenne.

Je remercie la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, la commission des affaires européennes, son président, Simon Sutour, auteur, avec moi-même, d’une proposition de résolution sur l’adhésion de la Croatie à l’Union européenne, devenue résolution du Sénat en novembre 2011. Je remercie également André Gattolin, qui a nous a fait part avec talent de son amour pour la Croatie.

Pour conclure, j’aurai une pensée pour celui qui m’a fait connaître ce pays, un immense professeur d’université, Petar Guberina, grand linguiste polyglotte originaire de Dalmatie, porteur des valeurs de liberté, ancien étudiant à la Sorbonne, ami de l’université, de Césaire, de Senghor. Cet homme a ouvert les chemins de la connaissance, de la tolérance, de l’intelligence qui lient les peuples. Aujourd’hui, dans cet hémicycle, j’ai simplement voulu faire vivre sa mémoire.

Applaudissements.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Leconte

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, permettez-moi à mon tour de saluer la présence, dans notre tribune d’honneur, de M. l’ambassadeur de Croatie.

Notre assemblée se réunit aujourd’hui pour approuver le projet de loi autorisant la ratification du traité relatif à l’adhésion de la République de Croatie à l’Union européenne. C’est un beau symbole que cette nouvelle adhésion, car elle témoigne que le projet européen n’est pas mort, qu’il garde toute sa force, alors que l’Union européenne traverse une période de crise et de doute. C’est le témoignage que celle-ci réunit autour de valeurs qui sont toujours actuelles, qui ont une signification à ses frontières, particulièrement pour les Balkans occidentaux, qui furent, voilà peu de temps, le théâtre de tant de tragédies.

Avec cette adhésion, comme nous le rappelle également le cinquantième anniversaire du traité de l’Élysée, on en revient aux fondements de la construction européenne : la construction de la paix, qui demeure une exigence forte, essentielle et fondatrice. Il est important d’en avoir pleinement conscience à un moment où l’Europe fait face à de nombreuses difficultés qui ne doivent en rien nous conduire à tout remettre en cause ou à croire que les acquis de la construction européenne sont éternels.

N’imaginons pas que, pour la Croatie, cette adhésion n’a pas signifié de nombreux efforts, voire des sacrifices. Il a fallu, bien sûr, transposer en droit interne les acquis communautaires, mais c’est aussi dans son activité, dans la structure de son économie et de son agriculture que la Croatie a dû accepter de nouvelles règles. Je pense aux chantiers navals, où cela a été particulièrement douloureux, ou à son économie, qui était fortement intégrée à celle de la Bosnie-Herzégovine.

L’entrée dans l’Union européenne modifie profondément les habitudes, oblige à réorienter des coopérations commerciales et industrielles, rend moins facile pour la Croatie son commerce avec la Bosnie-Herzégovine ou la Serbie. Pourtant, la Croatie a voulu cette adhésion, qui est le symbole de son retour dans la famille européenne. Mais cela crée pour nous une obligation : poursuivre la démarche, ne pas laisser de côté les autres États des Balkans occidentaux, qui doivent pouvoir adhérer à leur rythme et quand ils le pourront. Il en va non seulement de la crédibilité du projet européen, du sens que nous donnons à nos valeurs communes, mais aussi de la stabilité de la région.

Malheureusement, dans les Balkans du sud-ouest, il n’y a à ce jour de négociation ouverte qu’avec le Monténégro, et ce depuis peu. Faudra-t-il attendre au-delà de 2020 pour que l’Union européenne atteigne une intégrité territoriale dans cette région, au risque d’engendrer d’ici là de nouvelles instabilités ?

Reprenons tout d’abord le processus de négociation tel qu’il a été conduit avec la Croatie. Il a su tirer les leçons de la vague précédente de négociations avec la Bulgarie et la Roumanie, ce qui explique qu’il ait été plus âpre, plus exigeant.

Les accents portés sur l’indépendance de la justice et sur la lutte contre la corruption ont permis de tester la stabilité des institutions croates, notamment lorsqu’il s’est agi de poursuivre de très hauts dignitaires du pouvoir en place.

De même, l’arrestation de personnes supposées coupables de crimes de guerre dans le cadre de la coopération avec le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie n’a pas entraîné l’exacerbation de tensions nationalistes pourtant coutumières à Zagreb dans les années quatre-vingt-dix.

Enfin, le compromis passé au début des années deux mille entre les forces politiques croates sur le bien-fondé de l’adhésion a permis au pays de procéder à une profonde remise en cause de son modèle politique, que nous pouvons aujourd’hui considérer comme exemplaire. Les alternances politiques se sont déroulées sereinement, les minorités nationales sont associées aux prises de décision, les forces syndicales sont parties prenantes à tous les sujets concernant le modèle social ou la restructuration du tissu économique. Nous pensons en particulier aux difficiles négociations sur la réforme du système de retraite ou à la privatisation des chantiers navals.

Néanmoins, l’expérience de certaines adhésions – je pense notamment à celles de la Hongrie et de la Roumanie – souligne que, si nous savons être exigeants sur l’appropriation de notre système de valeurs et l’intégration des acquis communautaires durant les périodes de négociation, il y a ensuite un réel relâchement quand ces nouveaux membres deviennent acteurs de nos institutions.

À ce jour, seul le Parlement européen dispose d’une réelle capacité de mobilisation de l’opinion publique européenne dès qu’un État membre s’écarte de l’esprit de nos traités fondateurs. Pourtant, les instances de contrôle existent, mais elles semblent totalement anesthésiées par la place trop importante laissée à l’Europe intergouvernementale, au détriment d’une Europe plus intégrée institutionnellement.

Nul doute qu’il y a, là aussi, un débat à mener de façon urgente, car ce qui pèche aujourd’hui, ce n’est pas l’élargissement, mais ce sont les retards pris dans l’approfondissement.

À l’heure où l’on disserte sur une prétendue « fatigue de l’élargissement », il est urgent de montrer combien ce processus contribue au renforcement de l’État de droit sur notre continent, au renforcement du poids de l’Europe et de ses valeurs dans le monde.

La réussite de l’adhésion croate est donc vitale non seulement pour la relance de cette politique, mais aussi pour notre capacité à approfondir notre modèle politique, les deux étant intimement liées. Mais, ne vous en déplaise, monsieur Arthuis, la causalité n’est pas celle que l’on croit : ce sont les difficultés de l’approfondissement qui freinent l’élargissement, et non l’inverse !

Un nouveau membre, c’est une nouvelle jeunesse pour nos valeurs, car il en rappelle l’actualité. Les drames vécus voilà vingt ans par la Croatie et le chemin qu’elle a parcouru depuis lors en témoignent.

C’est un beau symbole d’ouvrir les travaux du Sénat français en 2013 avec ce projet de loi de ratification. Dans l’intérêt de l’Union européenne tout entière et de l’ensemble du continent européen, il serait judicieux que l’agenda d’une adhésion au 1er juillet 2013 soit respecté. Là où il pourrait exister des différends bilatéraux ou des difficultés liées à l’agenda politique interne de pays membres de l’Union européenne, aucun de ceux-ci ne devrait interférer avec la finalisation du processus d’adhésion et sa ratification par les parlements nationaux.

J’ai confiance en la bonne volonté de toutes les parties et de tous les États membres pour que nous puissions ensemble accueillir notre vingt-huitième membre le 1er juillet prochain.

Vive la Croatie dans l’Union européenne !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...

La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion de l’article unique.

Est autorisée la ratification du traité relatif à l'adhésion de la République de Croatie à l'Union européenne (ensemble neuf annexes et un protocole), signé à Bruxelles le 9 décembre 2011, et dont le texte est annexé à la présente loi.

Debut de section - PermalienPhoto de René Teulade

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je salue moi aussi la présence dans notre tribune d’honneur de M. l’ambassadeur de Croatie.

Au moment du déclenchement et de l’enlisement de la troisième guerre balkanique, en 1991, l’Europe était, selon les mots de Paul Garde, universitaire slavisant émérite, « en retard sur l’événement » ; vingt ans plus tard, sur la voie de l’intégration des pays de l’ex-Yougoslavie, l’Union européenne est à l’heure. En effet, au 1er juillet 2013, la Croatie deviendra le vingt-huitième État de l’Union européenne, sous réserve de la ratification du traité d’adhésion par l’ensemble des États membres.

Cette dernière couronne les nombreux efforts et progrès réalisés par l’État croate depuis son accession à l’indépendance à l’été 1991.

En deux décennies, la Croatie a effectué d’importantes réformes, notamment en matière de justice et de respect des droits fondamentaux, afin d’être en conformité avec les principes constitutifs de l’Union européenne.

Le travail réalisé par les gouvernements croates successifs doit être d’autant plus salué que le processus d’adhésion s’est déroulé dans le cadre du consensus renouvelé sur l’élargissement, adopté par le Conseil européen de décembre 2006, qui prévoit l’application d’une stricte conditionnalité et met l’accent sur les questions relatives à l’État de droit.

Ainsi, bien que certaines problématiques restent d’actualité, telles que la restructuration des chantiers navals, la lutte contre la corruption et les conflits d’intérêts, l’organisation du système judiciaire, le plan d’action révisé adopté par le gouvernement croate le 31 octobre dernier est de nature à satisfaire les dernières exigences communautaires.

Par ailleurs, l’entrée de la Croatie dans le sérail européen est l’opportunité de rappeler la « vocation européenne » des Balkans occidentaux, reconnue par le Conseil européen de Zagreb en 2000, et réaffirmée par celui de Thessalonique en 2003. Sans brûler les étapes, les institutions et États européens doivent se fixer l’objectif d’intégrer au plus tôt la Serbie, le Monténégro, la Macédoine, la Bosnie-Herzégovine, l’Albanie et le Kosovo, dès lors qu’il sera reconnu par l’ensemble des pays de l’Union européenne et par la Serbie.

Le traumatisme de la guerre est encore vivace dans cette région, comme dans nos mémoires, confuses devant le souvenir des exactions commises, les charniers humains non pas aux portes de l’Europe – abus de langage que certains employaient –, mais en son cœur, à la lisière du berceau de la civilisation européenne : la Grèce ; confuses aussi devant notre impuissance, dont la réminiscence prend la forme d’une interrogation : où étions-nous ? Ni à Vukovar, ni à Srebrenica, ni à Bihać, ni dans toutes les provinces qui portent, encore aujourd’hui, les stigmates de la guerre. Et permettez-moi une brève observation : où sommes-nous aujourd’hui en Syrie ? Peut-être partout, mais probablement nulle part ; l’histoire jugera !

L’Union européenne doit donc continuer à promouvoir, avec vigueur, la réconciliation et l’unité des États de l’ex-Yougoslavie, dans le respect des différences de chacun, en soutenant ardemment les initiatives qui donnent corps à l’esprit de rassemblement et de tolérance, à l’instar du dialogue nourri entre Ivo Josipović et le précédent Président serbe, Boris Tadić, dont je tiens à mettre en exergue le courage politique dont il fit preuve lorsque, en 2010, il reconnut officiellement – ce n’était pas facile – le massacre de Srebrenica.

Afin de lutter contre le nationalisme exalté qui gangrène toujours cette région, l’Union européenne doit demeurer un idéal tangible, accessible, et ne doit pas se muer en un idéal lointain que les États des Balkans occidentaux n’apercevraient que d’une infime lucarne donnant sur un mur politique. Ce mur politique, c’est le risque d’affadissement des valeurs consubstantielles à l’Union européenne, pourtant fondatrices de la politique d’élargissement définie par l’article 49 du traité sur l’Union européenne et réclamées aux États souhaitant faire partie du projet européen ; c’est le risque aussi de voir la tolérance et la solidarité, valeurs éminentes posées par l’article 2 du traité sur l’Union européenne, s’évaporer dans un contexte de crise et de défiance généralisée au profit d’un individualisme d’État que l’on retrouve, malheureusement, dans les discussions actuelles portant sur le budget communautaire.

Au sortir de la tragédie des deux guerres mondiales, Jean Monnet avait fait de la méthode des « petits pas » le moyen de rassembler les États européens autour d’intérêts communs, à travers une gestion collective et, par là même, avait créé une solidarité de fait. Aujourd’hui, cette solidarité ne doit plus seulement être la résultante de petits pas, elle doit être l’expression de grandes consciences européennes qui permettent d’approfondir et d’élargir le projet européen à tous ceux qui adhèrent à son esprit, à sa vocation et à sa vision, qui est sans doute une des rares et une des seules visions d’avenir. Telle est la signification du traité qui est aujourd’hui soumis à notre approbation, et j’espère qu’il sera adopté à l’unanimité.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

Personne ne demande plus la parole ?...

Je mets aux voix l'article unique constituant l’ensemble du projet de loi.

Le projet de loi est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

M. le président. Je constate que le projet de loi a été adopté à l’unanimité des présents.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

L’ordre du jour appelle la discussion en deuxième lecture du projet de loi, modifié par l’Assemblée nationale, portant diverses dispositions d’adaptation de la législation au droit de l’Union européenne en matière économique et financière (projet n° 224, texte de la commission n° 248, rapport n° 247).

Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre délégué.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, le projet de loi de transposition des directives en matière économique et financière qui vous est présenté aujourd’hui est bien connu de vous.

Il a été adopté en première lecture le 26 septembre dernier par l’ensemble des groupes du Sénat, sous réserve de l’abstention du groupe communiste républicain et citoyen.

Il a ensuite été adopté le 12 décembre dernier à l’unanimité par l’Assemblée nationale, dans une version ne différant du texte du Sénat que par des modifications rédactionnelles.

Votre commission des finances ayant elle-même adopté le texte de l’Assemblée nationale le 19 décembre dernier, le projet de loi qui vous est soumis aujourd’hui reste au plus près de celui que vous aviez examiné en septembre.

Sans revenir sur les débats que vous aviez eus alors ici en présence de mon collègue Benoît Hamon, je voudrais tout d’abord remercier votre commission des finances, en particulier son rapporteur, Richard Yung, pour ses travaux approfondis sur ce texte, travaux qui ont beaucoup facilité son parcours.

D’importants enjeux s’attachent en effet à l’adoption rapide de ce projet de loi, et ce, d’abord, au regard de nos obligations européennes.

Dès sa prise de fonctions, Pierre Moscovici a tenu à remédier à des retards qui s’étaient accumulés dans la transposition des directives économiques et financières. L’objet de ce texte est de transposer en droit français trois directives adoptées par la France et ses partenaires en septembre 2009, en novembre 2010 et en février 2011.

Il est d’autant plus nécessaire de le faire que, en raison du retard accumulé pour la transposition de la première de ces directives, relative à la monnaie électronique, la France est exposée à une menace de sanction pécuniaire par la Cour de justice de l’Union européenne.

Il y va surtout du crédit de la parole de la France en Europe et de la sécurité juridique pour nos concitoyens et nos entreprises. Chacun a bien à l’esprit que, à l’échéance de leur transposition, les directives sont invocables devant les juridictions et que le juge écarte au besoin la loi nationale contraire. C’est donc à un embrouillamini juridique considérable que les opérateurs économiques et nos concitoyens sont confrontés lorsque surviennent des retards de transposition.

Les opérateurs français de monnaie électronique n’ont pas manqué de le rappeler en se plaignant de l’incertitude juridique dans laquelle ils se trouvent depuis deux ans, alors que leurs concurrents européens peuvent d’ores et déjà appliquer le cadre juridique commun à l’ensemble des États membres.

Quant à l’objet même de ce projet de loi, ce sont en outre, vous le savez, des mesures assurément utiles qu’il vous est proposé d’adopter définitivement.

Avec la transposition de la directive du 16 septembre 2009 sur la monnaie électronique, les consommateurs disposeront de moyens de paiement sûrs, ce qui est plus que jamais nécessaire en période de crise, et ce, en permettant aux opérateurs nationaux d’agir dans un cadre juridique stabilisé, alors qu’ils souffrent d’être les derniers en Europe à ne pas bénéficier entièrement du régime européen.

Les dispositions de transposition de cette directive prévoient la création d’une nouvelle catégorie d’acteurs dans le secteur des moyens de paiement, à savoir les établissements de monnaie électronique qui seront habilités à émettre de la monnaie électronique à destination de leurs clients. Elles fixeront les règles d’exercice de cette activité.

Ce nouveau régime doit contribuer au développement de la monnaie électronique en fixant un cadre simplifié pour ces établissements et sécurisé pour ses utilisateurs, dans le respect des règles de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme.

Avec la transposition de la directive du 24 novembre 2010, dite « Omnibus I », nous allons contribuer au renforcement de la régulation financière européenne, à laquelle le Gouvernement est tout particulièrement attaché et dont vous savez qu’elle connaît actuellement des avancées importantes, dans le droit fil des conclusions du Conseil européen de juin 2012.

Par ailleurs, les mesures de transposition correspondantes sont en complète cohérence avec le projet de loi de régulation bancaire et financière déposé en décembre par le Gouvernement. Elles renforcent les échanges d’information entre les autorités de supervision nationales – l’Autorité de contrôle prudentiel et l’Autorité des marchés financiers – et les autorités européennes de supervision, contribuant ainsi à l’efficacité de la supervision des acteurs financiers.

Enfin, avec l’achèvement de la transposition de la directive du 16 février 2011 concernant la lutte contre les retards de paiement dans les transactions commerciales, nous allons contribuer au soutien aux petites et moyennes entreprises et franchir une première étape vers l’objectif de réduction à vingt jours, d’ici à 2017, des délais de paiement de l’État, ce qui constitue la décision n° 3 du pacte national de compétitivité, de croissance et d’emploi, adopté le 6 novembre dernier.

Les dispositions de transposition de la directive prévoient un renforcement des sanctions en cas de retard de paiement des sommes dues en exécution d’un contrat de la commande publique, afin de réduire les délais de paiement de la sphère publique et d’améliorer ainsi la situation de trésorerie des entreprises. Elles instaurent notamment une indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement en sus des intérêts moratoires, dont le taux sera augmenté par décret.

Pour être au rendez-vous de l’échéance de transposition fixée en mars, le ministère de l’économie et des finances a d’ores et déjà mis en ligne depuis le 29 novembre dernier, sur son site internet, pour consultation publique, les éléments du dispositif réglementaire qui permettra d’appliquer la loi.

Vous en avez été convaincus dès sa première lecture, ce texte est donc non seulement nécessaire, mais surtout utile.

Permettez-moi, avant de conclure, de revenir sur la méthode de transposition choisie par le Gouvernement, car cette méthode a elle aussi son importance.

Nous avons écarté la solution qui aurait consisté à placer en quelque sorte le Parlement au pied du mur, en lui demandant de voter de toute urgence des habilitations à transposer par ordonnances des directives dont les mesures nationales de mise en œuvre avaient manqué d’être prises en temps utile.

Nous avons choisi de soumettre à la délibération du Parlement, par le présent projet de loi, l’intégralité des mesures législatives qui restent nécessaires à la transposition des trois directives dites « monnaie électronique », « Omnibus I » et « retards de paiement ».

Il est dans l’intention du Gouvernement de procéder de la même manière dans les prochains mois avec des projets de loi d’adaptation au droit de l’Union européenne thématiques, dans d’autres domaines que le droit économique et financier.

Entendons-nous bien, dans le domaine de la transposition des directives, le plus important est que, comme cela a été le cas pour ce projet de loi, le Gouvernement et le Parlement aient un dialogue étroit afin de déterminer les voies et moyens les plus adaptés pour assurer, dans la durée, la meilleure articulation possible entre le droit de l’Union européenne et le droit national. Il est objectivement des situations dans lesquelles ce dialogue pourra conclure à la nécessité de recourir ponctuellement au mécanisme de l’ordonnance ou à l’engagement de la procédure accélérée sur un texte d’adaptation au droit de l’Union européenne à caractère essentiellement technique. Mais ce ne peut évidemment être la solution de référence, comme cela a pu être trop souvent le cas par le passé.

À la faveur du dialogue étroit qui a commencé à se nouer entre Gouvernement et Parlement au sein d’un comité de liaison de la transposition des directives, en accord avec le Premier ministre, MM. Claude Bartolone et Jean-Pierre Bel, nous aurons à vérifier ensemble si certaines transpositions appellent des solutions particulières, comme le recours aux ordonnances, pourvu, bien évidemment, que ce ne soit pas au prétexte de retards que le Gouvernement aurait lui-même laissé naître faute d’avoir préparé en temps utile les mesures d’adaptation de notre droit.

Tel est l’un des éléments tangibles du respect que le Gouvernement porte aux travaux de la représentation nationale, suivant les souhaits du Président de la République et du Premier ministre.

Mesdames, messieurs les sénateurs, les mesures qui sont aujourd’hui soumises à votre examen sont non seulement une nécessité juridique, mais aussi une modernisation de notre droit attendue par nombre de consommateurs et d’opérateurs économiques. Le Gouvernement souhaite donc que, tout comme cela a été le cas en première lecture, au Sénat et à l’Assemblée nationale, ces mesures recueillent aujourd’hui le plus large assentiment, pour être définitivement adoptées.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

, revient au Sénat en deuxième lecture. Comme l’a rappelé M. le ministre, ce texte vise à transposer en droit français trois directives européennes, dont la principale est relative à la monnaie électronique.

La France aurait dû transposer cette directive voilà plus d’un an et demi. Nous sommes par conséquent sous la menace d’un recours devant la Cour de justice de l’Union européenne et d’une condamnation pécuniaire, qui n’est pas négligeable, puisqu’elle pourrait être de l’ordre de 20 millions d’euros. Dans la phase actuelle de lutte contre les déficits, avouez qu’il y a mieux à faire !

La Commission européenne se fait de plus en plus pressante ; il est donc urgent de conclure l’examen de ce projet de loi.

D’un côté, nous pouvons espérer que des entreprises se saisissent de ce nouveau cadre réglementaire pour développer des activités de monnaie électronique en France.

De l’autre, nous subodorons que le texte européen sur la monnaie électronique de même que la directive sur les établissements de paiement sont déjà plus ou moins dépassés compte tenu de l’évolution rapide du paysage des paiements en Europe.

Il est donc probable que, dans peu de temps, l’ouvrage devra être remis sur le métier. En tout état de cause, cette remarque n’aurait pas lieu d’être si nous avions transposé la directive en temps et en heure.

Les deux autres directives concernées par le projet de loi DDADUE sont la directive dite « Omnibus I » et la directive relative à la lutte contre les retards de paiement dans les transactions commerciales.

La directive « Omnibus I » rend possible l’échange de données entre les autorités prudentielles françaises et les trois nouvelles autorités prudentielles européennes : l’Autorité bancaire européenne, l’Autorité européenne des assurances et l’Autorité européenne des marchés financiers. Ces mesures rejoignent, cela a été dit, les dispositions qui figureront dans le projet de loi bancaire que nous examinerons prochainement. Cette transposition est donc nécessaire pour que les différentes autorités prudentielles disposent d’une base juridique pour collaborer entre elles.

Enfin, la transposition du volet public de la directive contre les retards de paiement dans les transactions commerciales permettra d’inciter les différentes autorités publiques à mieux gérer les relations financières avec leurs fournisseurs. En effet, le délai maximal pour effectuer un paiement sera fixé à trente jours, et ce pour l’ensemble des contrats de la commande publique, sous peine du paiement d’une indemnité forfaitaire de 40 euros au minimum.

L’enjeu économique et financier n’est pas négligeable, que ce soit pour les personnes publiques ou pour leurs partenaires privés.

Voilà, mes chers collègues, les principaux éléments de ce projet de loi.

En première lecture, au Sénat, la commission des finances avait adopté une dizaine d’amendements sans modifier substantiellement le texte proposé par le Gouvernement. Elle avait également adopté deux amendements tendant à insérer un article additionnel afin de mettre en cohérence le droit monétaire et financier avec les nouvelles règles européennes relatives aux agences de notation et aux ventes à découvert. Je vous rappelle que les agences de notation sont sous le contrôle prudentiel de la seule Autorité européenne des marchés financiers ou, et non de l’Autorité des marchés financiers.

En séance publique, aucun amendement n’avait été déposé.

L’Assemblée nationale a adopté 93 amendements rédactionnels, ce qui est quelque peu étonnant pour un texte en préparation depuis deux ans...

Au total, en deuxième lecture, 23 articles sur 46 sont encore en discussion.

Sur le fond, l’Assemblée nationale n’a donc pas du tout bouleversé l’équilibre du projet de loi.

En conséquence, et compte tenu de l’urgence, la commission des finances a adopté sans modification les 23 articles restant en discussion.

Je vous invite désormais à confirmer cette position, puisqu’aucun amendement n’a été déposé en vue de son examen en séance publique, et d’établir ainsi le texte définitif de la loi.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste. – MM. Jean Arthuis et Michel Bécot applaudissent également.

Debut de section - PermalienPhoto de André Gattolin

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je commencerai mon intervention en faisant le constat que cette nouvelle année dans notre assemblée débute sous le signe de l’Europe, ce qui est, je le crois, un bon présage.

Le premier texte que nous avons examiné concernait le traité d’adhésion de la Croatie à l’Union européenne.

Le second texte – celui que nous examinons actuellement – renvoie, lui, à un projet de loi portant transposition de plusieurs directives européennes à caractère économique, que nous avions voté en première lecture le 26 septembre dernier, et qui nous revient après son passage à l’Assemblée nationale.

L’année qui s’est achevée a montré combien les questions européennes étaient présentes au cœur du débat politique national.

L’année qui s’ouvre a officiellement été proclamée « année européenne des citoyens ». Il est en effet essentiel que la dimension citoyenne de la construction européenne soit aujourd’hui renforcée pour donner à celle-ci un cadre démocratique à la hauteur des valeurs et des principes édictés par nos institutions, au niveau tant national que communautaire. Celle-ci doit naturellement s’affirmer en parallèle, je tiens à le souligner – et non en concurrence ou en substitution –, avec le renforcement de la place et du rôle de la représentation nationale dans ce processus conduisant à davantage d’Europe dans nos institutions comme dans notre vie quotidienne.

En France jusqu’à présent, le Parlement a été insuffisamment associé au travail de transposition de la législation européenne dans notre droit national. C’est pourquoi nous saluons aujourd’hui l’initiative du Gouvernement de nous impliquer plus étroitement dans ce processus déterminant.

Après les modifications substantielles que le Sénat avait apportées au texte, les députés ont fait preuve d’une certaine diligence. En effet, 23 articles sur 46 restent encore en discussion, soit 50 % du texte ; cela paraît beaucoup, comme l’a rappelé M. le rapporteur, mais les 93 amendements qui ont été adoptés par nos collègues sont tous des amendements de nature rédactionnelle.

Le groupe écologiste du Sénat votera cette nouvelle mouture, comme il avait voté la précédente, autant par cohérence qu’en raison de l’urgence dans laquelle nous nous trouvons concernant des directives pour la transposition desquelles nous accusons un certain retard.

Je reviens brièvement sur les directives en question.

La directive « Omnibus I » appartient aux textes élaborés depuis le début de la crise économique et financière pour renforcer la supervision européenne des secteurs de la finance.

Les deux autres textes – la directive sur la monnaie électronique et celle sur les retards de paiement dans les transactions commerciales – sont plus détachés de cette actualité.

La première de ces directives est sans doute déjà obsolète en raison des efforts déployés entre-temps pour la mise en place d’une union bancaire.

Quant à celle qui concerne la monnaie électronique, notre pays aurait dû la transposer voilà plus d’un an et demi ! Nous sommes d’ailleurs sous le coup de poursuites devant la Cour de justice de l’Union européenne et nous risquons de nous voir infliger des sanctions financières de l’ordre de 20 millions d’euros pour lesquels, M. le rapporteur l’a rappelé, nous pourrions sans doute trouver des usages bien plus intéressants.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, j’avais souhaité, en septembre dernier, appeler l’attention sur les problèmes de méthode que ce retard révélait. En effet, il est dû au curieux expédient que la majorité précédente avait souhaité mobiliser afin de procéder à cette transposition. Je veux parler des ordonnances qu’avait permises la fameuse habilitation Warsmann, avant que le Conseil constitutionnel n’intervînt pour invalider l’ensemble de la procédure.

Le Gouvernement avait souhaité aller plus vite en se passant de tout examen parlementaire approfondi. Au final, il alla moins vite et ledit examen parlementaire n’en fut pas moins bénéfique une fois qu’il put avoir lieu.

Vous vous rappelez sans doute que nos échanges ont permis, depuis, d’améliorer substantiellement le projet de loi en question.

Pour être honnête, il faut noter que le gouvernement et la majorité précédents ne furent pas les seuls à avoir quelques difficultés en matière de transposition. Notre pays a même été, d’une certaine manière, parmi les plus mauvais « transposeurs » de l’Union ! En juillet dernier, nous avions à notre encontre douze procédures en manquement pendantes devant la Cour. Il faut reconnaître aussi que de nombreux efforts ont été réalisés au cours des derniers mois afin de diminuer nos retards en matière de transposition, ce qui n’est rien moins qu’essentiel, surtout lorsqu’on voit que la Commission et la Cour ont tendance à se montrer toujours plus sévères en ce domaine.

On le sait, les transpositions laissent peu de marge aux gouvernements et aux parlements nationaux. Mais cela ne veut pas dire que les uns et les autres peuvent se montrer cavaliers pour autant. Au contraire, lorsque l’ensemble des acteurs concernés travaillent de concert, l’élaboration des directives s’avère mieux encadrée et leur adaptation en droit interne mieux réalisée. Le débat public en sort également grandi, comme d’ailleurs la connaissance que nous-mêmes pouvons avoir des débats européens et de leur évolution.

Le Gouvernement a fait savoir qu’il entendait procéder autant que possible, à l’avenir, par voie parlementaire et qu’il éviterait de recourir aux ordonnances. M. le ministre l’a d’ailleurs rappelé dans son propos.

Avec mon groupe, je salue cette intention et formule le souhait que cela soit effectivement le cas. Je suis convaincu que l’Union européenne, ses États membres et l’ensemble de leurs citoyens ont tout à gagner d’un dialogue permanent entre les différentes branches des pouvoirs publics, au niveau national comme européen, aussi en amont que possible du processus législatif.

Applaudissements sur les travées du groupe écologiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le présent projet de loi, qui a pour objet la transposition dans notre droit national de trois directives européennes, ne pose pas de difficultés au groupe auquel j’appartiens.

En première lecture à l’Assemblée nationale, saisie après le Sénat, le texte a fait l’objet seulement de modifications rédactionnelles et a été adopté à l’unanimité par les députés.

Notre groupe, comme en première lecture, approuve la transposition de ces trois directives relatives à des questions économiques, monétaires et financières, car elles visent à renforcer la cohésion européenne.

La transposition de la première directive du 16 septembre 2009 permettra d’harmoniser le cadre juridique au sein de l’Union européenne, régissant les règles d’utilisation de la monnaie électronique, forme moderne de la monnaie scripturale, mais encore très peu développée. Elle permettra également de sécuriser davantage l’utilisation des moyens de paiement électronique par les consommateurs et de supprimer le monopole bancaire en matière d’émission de monnaie électronique.

Les cartes prépayées, le porte-monnaie électronique et l’ensemble des autres moyens de paiement électronique sont en effet encore faiblement utilisés. Aussi l’harmonisation européenne va-t-elle permettre d’en développer l’utilisation, par exemple pour les Français voyageant dans l’Union européenne.

Le développement d’établissements français de monnaie électronique indépendants des établissements bancaires pouvant fournir de tels services de paiement va également dans le bon sens, dans la mesure où de tels établissements, anglais ou luxembourgeois, sont déjà autorisés à exercer en France sans qu’aucun établissement français n’ait pu être agréé jusqu’à présent.

Cela va dans le sens d’une concurrence libre et non faussée.

Enfin, il appartiendra de veiller à la lutte contre le blanchiment ; nous resterons vigilants sur ce point.

De la même façon, nous approuvons la transposition de la directive du 24 novembre 2010 sur l’adaptation des secteurs bancaires, des assurances et des marchés financiers à la nouvelle supervision européenne.

Le groupe UMP avait approuvé la création du nouveau système de surveillance financière. Il importe désormais de remédier à ses carences, constatées à l’aune de la crise financière, notamment en clarifiant les compétences des diverses autorités, afin d’assurer une meilleure cohérence au sein de l’Union européenne.

La coopération entre l’Autorité bancaire européenne, l’Autorité européenne des assurances et des pensions professionnelles, l’Autorité européenne des marchés financiers et le Comité européen du risque systémique, avec les autorités nationales de supervision, à savoir l’Autorité des marchés financiers et l’Autorité de contrôle prudentiel pour la France, va ainsi être renforcée et améliorée.

La transposition de la directive permettra de faciliter l’échange d’informations entre les États membres, et la stabilité de notre système financier en sortira indéniablement renforcée.

Enfin, ce projet de loi tend à transposer dans notre législation la directive du 16 février 2011 concernant la lutte contre les retards de paiement dans les transactions commerciales. Nous y sommes très favorables. Nous approuvons donc cette directive qui fait bénéficier les PME de meilleures conditions de paiement concernant les transactions entre les entreprises et les pouvoirs publics, notamment dans le cadre de contrats de marché public.

En cette période de difficultés financières pour un grand nombre d’entreprises, le délai de paiement est un élément très important pour leur trésorerie. Il y aura désormais un délai maximal de paiement, fixé par décret. En cas de retard, des intérêts moratoires seront versés à l’entreprise, ainsi qu’une indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement.

Je rappelle que la Cour des comptes a critiqué, en la matière, le système français, en soulignant que nos entreprises sont trop dépendantes, non seulement du crédit bancaire, mais aussi du crédit interentreprises.

Je rappelle également que, dans la loi du 22 mars 2012 relative à la simplification du droit, une partie de cette directive avait déjà été transposée, mais que, curieusement, l’actuelle majorité avait alors voté contre.

Pour notre part, nous restons constants dans nos positions. C’est la raison pour laquelle le groupe UMP, de manière responsable, votera le projet de loi de transposition de ces trois directives, qui sont utiles à notre économie, à la France et à l’Europe.

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’adoption du projet de loi que nous examinons permettra de dispenser la France de subir quelques amendes de l’Union européenne pour cause de non-transposition dans notre droit national, dans les délais requis, de trois directives déjà anciennes.

M. le ministre l’a rappelé, et nous avons déjà eu l’occasion de le souligner, l’abondante production législative et réglementaire européenne crée un encombrement assez sérieux de notre ordre du jour parlementaire. Il me semble qu’il nous faut, en l’espèce, tirer quelques leçons de ce constat.

Le présent projet de loi tend donc à transposer trois directives distinctes.

La première directive est relative à la mise en place de systèmes – et surtout d’opérateurs – de monnaie électronique. Sa transposition tardive dans notre droit n’aura comme autre conséquence que de mettre au jour que d’autres pays vont servir de « base arrière » à ces opérateurs, en particulier le Luxembourg. Ce dernier est décidément toujours à la pointe du combat lorsqu’il s’agit d’innovation en matière d’ingénierie financière.

Le fait que le Grand-Duché soit ainsi privilégié par les opérateurs signifie, de manière assez évidente, que les opérateurs de monnaie électronique ont privilégié le pays le moins regardant, voire le plus accueillant en matière financière. À nos yeux, cela ne peut que renforcer la méfiance de certains consommateurs à l’égard de ce nouveau type de création monétaire.

La deuxième directive porte sur la coopération entre les autorités prudentielles en matière financière et bancaire, au cœur de la directive « Omnibus I », qui, au demeurant, est déjà quasi obsolète maintenant que la supervision des activités financières va se trouver de plus en plus dévolue à une super autorité prudentielle au niveau communautaire, dans le cadre de ce qu’on appelle l’« union bancaire ».

Pour peu que l’on ait suivi l’affaire, on a compris que le contrôle de cette union bancaire sera confié à la Banque centrale européenne. Or la clairvoyance de cet établissement a fait tant de miracles depuis l’été 2008 que l’on peut se demander si l’orientation prise est forcément la meilleure en pareille situation…

Enfin, la troisième directive a trait aux délais de paiement en matière de commande publique pour les entreprises, et singulièrement pour les PME. Dans les faits, il s’agit de donner aux créanciers de personnes publiques quelques menues garanties de recouvrement de leurs créances, dès lors qu’un retard peut être constaté dans le règlement de ces situations.

On peut évidemment adhérer à l’objectif visé, tout en rappelant que ce qui constitue malgré tout le principal obstacle au développement et, parfois, à la survie même de certaines PME, tient plutôt aux retards de paiement enregistrés en matière de commande privée – on appelle cela le crédit fournisseur du point de vue des « mauvais payeurs » – ou encore à l’inégalité d’accès au crédit, nombre de banques refusant bien souvent la moindre avance de trésorerie à destination des entreprises ayant pourtant des créances à présenter à l’escompte.

Au demeurant, le renforcement de la supervision bancaire et l’adaptation probable des règles prudentielles les plus récemment recommandées par le comité de Bâle, tels que prévus par les projets d’union bancaire, risquent fort de placer nombre de PME face à des difficultés nouvelles ou renforcées dans l’accès au crédit.

De plus, si, comme le soulignait le rapport en première lecture, la commande publique souffre de l’application d’un logiciel de règlement inadapté ou mal maîtrisé par les personnes chargées du mandatement et du règlement des dépenses, bon nombre d’entreprises risquent fort de se heurter à de nouvelles difficultés.

En tout état de cause, les trois directives visées par le présent projet de loi constituent la nouvelle illustration d’une production normative communautaire engendrée par la mise en œuvre des principes de la concurrence libre et non faussée, principes que de tels actes communautaires viennent en quelque sorte « aménager », en attendant des aménagements ultérieurs dont certains sont déjà sur les rails, comme on l’observe en matière de supervision bancaire.

Nous comprenons très bien l’esprit qui anime M. le rapporteur, qui, en recommandant l’adoption conforme du projet de loi, souhaite clore l’épisode et passer à autre chose. Toutefois, il s’agit de voter un texte en grande partie inapplicable ou qui restera inappliqué en France métropolitaine. Cette quasi-inapplication risque tout de même de nous valoir quelques soucis financiers avec les instances européennes.

Dans ce contexte et sous réserve des observations déjà formulées, nous ne pourrons donc que confirmer notre abstention sur l’ensemble du projet de loi.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Michel Baylet

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous l’avons compris en écoutant M. le rapporteur, que je félicite au passage pour son travail et sa présentation claire et synthétique de ce texte très technique, il y a urgence.

Il y a urgence à transposer la directive sur la monnaie électronique, qui fait l’objet du titre Ier du projet de loi, puisque nous aurions dû l’incorporer dans notre droit interne depuis le 30 avril 2011. Nous avons donc déjà plus d’un an et demi de retard et risquons tout de même une condamnation de l’ordre de 20 millions d’euros !

Il faut le dire, c’est une somme que nous pouvons difficilement nous permettre de verser, alors même que nous demandons des efforts importants à tous les Français et cherchons des sources d’économies pour redresser nos finances publiques qui en ont bien besoin.

M. le rapporteur acquiesce.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Michel Baylet

Il est vrai que nous, Français, restons des spécialistes en matière de retard dans la transposition des textes européens. Cette habitude est bien sûr tout à fait regrettable. Il est dommage que nous attendions toujours le dernier moment pour transposer des textes qui revêtent une véritable importance pour nos concitoyens.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Michel Baylet

Nous contribuons ainsi à « technocratiser » encore davantage l’Union européenne aux yeux des Français, qui ont l’impression qu’arrivent uniquement de Bruxelles des directives et des règlements techniques inaccessibles au commun des mortels.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Michel Baylet

Pourtant, reconnaissons-le, ces textes peuvent avoir un impact concret et important sur le quotidien des Français, pour peu qu’ils leur soient expliqués et présentés de la meilleure des manières.

En outre, nos concitoyens ont le sentiment que les représentants de la souveraineté nationale que nous sommes laissent faire ce « monstre technocratique » et n’exercent aucune influence sur les multiples textes européens, que nous nous contentons de transposer avec plus ou moins de retard – en l’espèce avec beaucoup de retard !

Or c’est à nous de donner aux Français l’envie de comprendre l’Europe et de se saisir pleinement de leurs droits de citoyens européens. C’est à nous de leur expliquer que la représentation nationale joue un rôle dans les choix européens. Mais encore faudrait-il que nous nous saisissions véritablement de ces sujets. Nous ne le faisons que trop rarement !

Pourtant, de nouveaux outils sont ou seront bientôt à notre disposition. J’espère ainsi que la conférence interparlementaire prévue par le traité européen sera rapidement mise en place.

Quoi qu’il en soit, je regrette que l’on nous soumette régulièrement des projets de loi qui sont de véritables « paquets de transpositions » de directives souvent très hétéroclites, quand il ne s’agit pas de textes totalement distincts, dont on profite pour transposer, au passage, quelques directives européennes. Or ces textes européens mériteraient souvent un examen indépendant et approfondi, ainsi, disons-le, qu’un véritable débat démocratique.

Le texte que nous examinons aujourd’hui vise à transposer trois directives qui n’ont en commun que leur thématique économique et financière.

La transposition de certaines de ces directives est purement formelle, nous permettant d’éviter une condamnation, alors qu’en réalité, comme le rapporteur l’a souligné, elles sont déjà en grande partie obsolètes.

Ainsi, la directive « Omnibus I », qui concerne les différentes autorités prudentielles, dont l’Autorité bancaire européenne, est déjà largement dépassée avec la mise en place qui s’annonce de l’union bancaire et les nouvelles impulsions politiques données à l’Union européenne grâce à l’action du Président de la République et du Gouvernement.

La directive sur la monnaie électronique, qui date de septembre 2009, est elle aussi plus ou moins dépassée, mais, cette fois, par les évolutions technologiques et sociales. Elle devrait néanmoins permettre un développement de la monnaie électronique en France, domaine dans lequel nous sommes peu actifs, du fait, notamment, du monopole bancaire qui prévalait jusqu’à présent pour son émission. Laissons donc une chance à la monnaie électronique en transposant enfin cette directive !

La troisième directive que ce projet de loi vise concerne les retards de paiement dans les contrats de la commande publique. Il s’agit ici d’une avancée importante pour nos PME.

Enfin, ce projet de loi a été enrichi en première lecture par la commission des finances de notre assemblée, sur l’initiative du rapporteur, ce dont je me réjouis. Ainsi, une coordination entre l’Autorité des marchés financiers et l’Autorité européenne des marchés financiers concernant l’enregistrement et la surveillance des agences de notation est désormais prévue. C’est un point important.

Les choses évoluent vite en Europe depuis quelques mois, grâce notamment au rôle joué par la France. Au mois de septembre dernier, lors de la première lecture de ce projet de loi, ma collègue Françoise Laborde était intervenue en faveur d’une supervision bancaire intégrée pour la zone euro. Nous y arrivons à grands pas avec les décisions prises lors du dernier Conseil européen des 13 et 14 décembre.

Ainsi, la première étape de l’union bancaire, la supervision intégrée pour l’ensemble des banques de la zone euro, devrait être mise en place très prochainement. Cela permettra la recapitalisation directe des établissements financiers par le Mécanisme européen de stabilité, actée dès le mois de juin. C’est un point très important.

La deuxième étape de l’union bancaire, le mécanisme commun de résolution des crises, devrait entrer en vigueur dès la fin de l’année, suivi du troisième élément de cet ensemble, la garantie des dépôts des épargnants. L’union bancaire devrait donc être achevée dès 2014, c’est une avancée extrêmement importante vers une plus grande solidarité en Europe.

Il faut poursuivre les efforts dans le sens non seulement d’un véritable gouvernement économique européen, j’en ai souvent formulé le souhait à cette tribune, mais aussi d’une union budgétaire, avec la mutualisation des dettes, sous la forme d’obligations communes, conjointes, ou d’une capacité d’emprunt pour la zone euro. Les radicaux de gauche soutiendront donc, conformément à leur habitude, toutes les avancées impulsées par le Gouvernement en direction d’une Europe plus démocratique, plus responsable, plus solidaire et donc plus protectrice pour nos concitoyens.

En attendant, conscients des avancées qu’apporteront ces directives et souscrivant à l’argument de l’urgence développé par le rapporteur, la totalité des membres du groupe du RDSE votera en faveur du projet de loi.

Applaudissements sur certaines travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?…

La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion des articles.

Je rappelle que, aux termes de l’article 48, alinéa 5, du règlement, à partir de la deuxième lecture au Sénat des projets et propositions de loi, la discussion des articles est limitée à ceux pour lesquels les deux assemblées du Parlement n’ont pas encore adopté un texte identique.

Sur les articles du texte élaboré par la commission, je ne suis saisi d’aucun amendement ni d’aucune demande de parole.

TITRE Ier

CONDITIONS RÉGISSANT L’ÉMISSION ET LA GESTION DE MONNAIE ÉLECTRONIQUE ET PORTANT CRÉATION DES ÉTABLISSEMENTS DE MONNAIE ÉLECTRONIQUE

Chapitre Ier

Dispositions modifiant le code monétaire et financier

Section 1

Dispositions relatives à la monnaie fiduciaire

(Conforme)

Section 2

Dispositions relatives aux instruments de la monnaie scripturale

(Non modifié)

I. – L’article L. 131-45 du code monétaire et financier est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, après les mots : « un banquier, », sont insérés les mots : « à un établissement de monnaie électronique, » ;

2° Au deuxième alinéa :

a) À la première phrase, après les mots : « au banquier », sont insérés les mots : «, à l’établissement de monnaie électronique » ;

b) À la seconde phrase, après les mots : « le banquier », sont insérés les mots : «, l’établissement de monnaie électronique » et le mot : « autre » est supprimé ;

3° Après le deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Il est interdit à un établissement de monnaie électronique d’encaisser tout chèque aux fins d’émission de monnaie électronique, sauf à en être lui-même bénéficiaire. » ;

4° Le troisième alinéa est ainsi rédigé :

« Un banquier, un établissement de monnaie électronique ou un établissement de paiement ne peut acquérir un chèque barré que d’un de ses clients, d’un chef de centre de chèques postaux, d’un autre banquier, d’un établissement de monnaie électronique ou d’un établissement de paiement. Il ne peut l’encaisser pour le compte d’autres personnes que celles-ci. » ;

5° Au dernier alinéa, après les mots : « le banquier », sont insérés les mots : «, l’établissement de monnaie électronique ».

II. – À la première phrase du troisième alinéa de l’article L. 131-71 du même code, après les mots : « un établissement assimilé », sont insérés les mots : «, d’un établissement de monnaie électronique ».

III. – L’article L. 131-85 du même code est ainsi modifié :

1° Aux premier et dernier alinéas, après les mots : « les organismes mentionnés au 5 de l’article L. 511-6 », sont insérés les mots : «, les établissements de monnaie électronique » ;

2° Au dernier alinéa, après les mots : « un financement », la fin est ainsi rédigée : «, une ouverture de crédit ou de délivrer un moyen de paiement. »

IV. – L’article L. 133-1 du code monétaire et financier est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa du II, les mots : « à Saint-Barthélemy, » sont supprimés ;

bis Au second alinéa du II, les mots «, à Saint-Martin ou à Saint-Barthélemy » sont remplacés par les mots : « ou à Saint-Martin » et les mots : «, à Saint-Barthélemy » sont supprimés ;

2° Il est ajouté un IV ainsi rédigé :

« IV. – Sans préjudice de l’application de la section 12, le présent chapitre s’applique à l’émission et la gestion de monnaie électronique. »

V. – À la fin du III de l’article L. 133-25 du même code, la référence : « L. 315-1 » est remplacée par la référence : « L. 316-1 ».

VI. – Le chapitre III du titre III du livre Ier du même code est complété par une section 12 ainsi rédigée :

« Section 12

« Les modalités de remboursement de la monnaie électronique

« Art. L. 133-29. – Les unités de monnaie électronique sont remboursées par l’établissement émetteur au détenteur de monnaie électronique qui en fait la demande.

« Art. L. 133-30. – Le remboursement de la monnaie électronique par l’émetteur de monnaie électronique mentionné à l’article L. 525-1 est effectué sans frais pour le détenteur de monnaie électronique.

« Art. L. 133-31. – Par exception à l’article L. 133-30, lorsque les parties sont liées par un contrat prévoyant expressément un terme, elles peuvent convenir de frais consécutifs à un remboursement exclusivement dans les cas suivants :

« 1° La demande de remboursement est antérieure au terme du contrat ;

« 2° Le détenteur de monnaie électronique résilie le contrat avant son terme ;

« 3° Le détenteur de monnaie électronique demande le remboursement plus d’un an et un jour après le terme du contrat.

« Art. L. 133-32. – Le montant des frais consécutifs à un remboursement est proportionné et en rapport avec les coûts réellement supportés par l’émetteur de monnaie électronique.

« Art. L. 133-33. – Lorsque la demande de remboursement de la monnaie électronique intervient avant le terme stipulé au contrat, hors cas de résiliation du contrat, la demande peut porter sur la totalité ou sur une partie de la monnaie électronique détenue.

« Art. L. 133-34. – Lorsque la demande de remboursement de la monnaie électronique intervient dans le délai d’un an à compter du terme stipulé au contrat ou dans le cadre d’une résiliation du contrat, le remboursement de la monnaie électronique détenue est total.

« Art. L. 133-35. – Lorsque la demande de remboursement de la monnaie électronique intervient dans le délai d’un an à compter du terme stipulé au contrat liant un établissement de monnaie électronique exerçant des activités de nature hybride au sens de l’article L. 526-3 et un détenteur de monnaie électronique, le remboursement est total si la proportion des fonds qui seront utilisés sous forme de monnaie électronique n’est pas prévue entre les parties.

« Art. L. 133-36. – Les remboursements prévus à la présente section s’effectuent selon le choix exprimé par le détenteur de monnaie électronique, en pièces et en billets de banque ayant cours légal ou par une opération de paiement ordonnée par l’émetteur au bénéfice du détenteur de monnaie électronique.

« Pour le remboursement en pièces et en billets, l’émetteur de monnaie électronique peut convenir avec le détenteur d’un remboursement par transmission de fonds. Nonobstant toute clause contraire, les frais afférents à cette opération sont à la charge de l’émetteur de monnaie électronique.

« Art. L. 133-37. – Sauf dans les cas où le détenteur de monnaie électronique est une personne physique agissant pour des besoins non professionnels, il peut être dérogé contractuellement aux articles L. 133-30 à L. 133-36.

« Art. L. 133-38. – Lorsque l’émetteur de monnaie électronique recourt à une personne pour distribuer, au sens de l’article L. 525-8, pour son compte, de la monnaie électronique, il demeure responsable du remboursement prévu à la présente section. »

L'article 2 est adopté.

(Conformes)

Section 4

L’émission et la gestion de monnaie électronique

(Non modifié)

I. – L’intitulé du titre Ier du livre III du code monétaire et financier est ainsi rédigé : « Les opérations de banque, les services de paiement et l’émission et la gestion de monnaie électronique ».

II. – Le code monétaire et financier est ainsi modifié :

1° Après le 7 de l’article L. 311-2, il est inséré un 8 ainsi rédigé :

« 8. L’émission et la gestion de monnaie électronique. » ;

2° Au second alinéa de l’article L. 311-3, après la référence : « L. 311-1 », sont insérés les mots : «, les activités d’émission et de gestion de monnaie électronique ».

III. – À la première phrase du second alinéa de l’article L. 312-4 du même code, après les mots : « des établissements de crédit, », sont insérés les mots : « des établissements de monnaie électronique, ».

IV. – Les chapitres V et VI du titre Ier du livre III du même code deviennent respectivement les chapitres VI et VII, l’article L. 315-1 devient l’article L. 316-1 et les articles L. 316-1 à L. 316-3 deviennent les articles L. 317-1 à L. 317-3.

V. – Au titre Ier du livre III du même code, il est rétabli un chapitre V ainsi rédigé :

« Chapitre V

« L’émission et la gestion de monnaie électronique

« Section 1

« Définition

« Art. L. 315-1. – I. – La monnaie électronique est une valeur monétaire qui est stockée sous une forme électronique, y compris magnétique, représentant une créance sur l’émetteur, qui est émise contre la remise de fonds aux fins d’opérations de paiement définies à l’article L. 133-3 et qui est acceptée par une personne physique ou morale autre que l’émetteur de monnaie électronique.

« II. – Les unités de monnaie électronique sont dites “unités de valeur”, chacune constituant une créance incorporée dans un titre.

« Art. L. 315-2. – Chacune des unités de monnaie électronique est émise sans délai contre la remise de fonds.

« Art. L. 315-3. – Chacune des unités de monnaie électronique ne peut être émise que pour une valeur nominale égale à celle des fonds collectés en contrepartie.

« Section 2

« Rémunération

« Art. L. 315-4. – Il est interdit à tout émetteur de monnaie électronique qui collecte des fonds de verser sur ces fonds des intérêts, toute rémunération ou tout autre avantage liés à la durée de détention de monnaie électronique.

« Section 3

« Obligations contractuelles

« Art. L. 315-5. – Le chapitre IV du présent titre s’applique aux activités d’émission et de gestion de monnaie électronique, sans préjudice des exigences supplémentaires prévues à la présente section.

« Art. L. 315-6. – Avant tout contrat ou offre liant les parties, les conditions contractuelles sont communiquées dans les conditions prévues au I de l’article L. 314-13 dans des termes clairs et aisément compréhensibles au détenteur de monnaie électronique.

« Elles sont communiquées en français sauf convention contraire des parties.

« Art. L. 315-7. – Le contrat liant l’émetteur et le détenteur de monnaie électronique établit clairement les conditions et le délai de remboursement des unités de monnaie électronique.

« Si, par exception à l’article L. 133-30 et dans le cadre de l’article L. 133-31, des frais consécutifs à un remboursement sont prévus, ils sont clairement précisés dans le contrat.

« Le contrat précise le montant, la nature et le détail de calcul de ces frais.

« Art. L. 315-8. – Le contrat précise que le remboursement est effectué à la valeur nominale des unités de monnaie électronique. »

VI. – L’article L. 316-1 du même code, dans sa rédaction résultant de la présente loi, est ainsi modifié :

1° À la première phrase du premier alinéa, après le mot : « crédit », sont insérés les mots : «, de monnaie électronique » ;

2° Après la référence : « L. 314-12 », la fin de la dernière phrase du deuxième alinéa est ainsi rédigée : « y compris sur le contrat mentionné au premier alinéa de l’article L. 315-7, sur les relevés de compte, ainsi que sur le support mis à disposition du détenteur sur lequel la monnaie électronique est stockée. »

VII. - Le chapitre VII du titre Ier du livre III du même code est ainsi modifié :

1° L’article L. 317-1 est ainsi modifié :

a) Le premier alinéa est ainsi rédigé :

« Des agents de la Banque de France commissionnés par le ministre chargé de l’économie et des fonctionnaires habilités à relever les infractions aux dispositions des articles L. 113-3, L. 121-35 et L. 122-1 du code de la consommation sont qualifiés pour procéder dans l’exercice de leurs fonctions à la recherche et à la constatation par procès-verbal des infractions aux dispositions des articles L. 312-1-1, L. 312-1-2, L. 314-12, L. 314-13 et L. 315-6 à L. 315-8 du présent code. » ;

b) Au troisième alinéa, les références : « L. 314-12 et L. 314-13 » sont remplacées par les références : « L. 314-12, L. 314-13 et L. 315-6 à L. 315-8 », les mots : « la Communauté » sont remplacés par les mots : « l’Union » et les mots : «, à Saint-Barthélemy » sont supprimés ;

2° Au premier alinéa de l’article L. 317-3, la référence : « L. 315-1 » est remplacée par la référence : « L. 316-1 ». –

Adopté.

(Conformes)

Section 5

Les émetteurs de monnaie électronique et les établissements de monnaie électronique

(Conforme)

(Non modifié)

Le code monétaire et financier est ainsi modifié :

1° À la première phrase de l’article L. 511-4, après la référence : « L. 311-2 », sont insérés les mots : «, aux établissements de monnaie électronique pour l’émission et la gestion de monnaie électronique et leurs opérations mentionnées à l’article L. 526-2 » ;

2° Au premier alinéa de l’article L. 511-6, après le mot : « investissement, », sont insérés les mots : « ni les établissements de monnaie électronique, » ;

3° Les trois derniers alinéas de l’article L. 511-7 sont supprimés ;

4° Au 2 de l’article L. 511-15, après les mots : « ainsi que », sont insérés les mots : « les opérations de gestion de monnaie électronique déjà émise et » ;

5° Au a du 4 de l’article L. 511-21, la référence : « et 7 », est remplacée par les références : «, 7 et 8 » ;

6° À la première phrase du troisième alinéa de l’article L. 511-29, après la seconde occurrence des mots : « des établissements de crédit, », sont insérés les mots : « des établissements de monnaie électronique, » ;

7° À la première phrase du quatrième alinéa de l’article L. 512-92, après le mot : « banque », sont insérés les mots : «, émettre ou gérer de la monnaie électronique » ;

8° À la première phrase du second alinéa de l’article L. 518-25, après le mot : « investissement, », sont insérés les mots : « d’établissement de monnaie électronique, » ;

9° L’article L. 519-1 est ainsi modifié :

a) Le début de la première phrase du II est ainsi rédigé : « Le second alinéa du I ne s’applique ni aux établissements de crédit, ni aux établissements de monnaie électronique qui fournissent des services de paiement, ni aux établissements de paiement, ni aux personnes physiques salariées d’un établissement de crédit, d’un établissement de monnaie électronique qui fournit des services de paiement ou d’un établissement de paiement, ni aux établissements de crédit, aux établissements de monnaie électronique qui fournissent des services de paiement, aux établissements de paiement et aux personnes physiques salariées d’un établissement de crédit, d’un établissement de monnaie électronique qui fournit des services de paiement ou d’un établissement de paiement, intervenant… §(le reste sans changement). » ;

b) Au second alinéa du III, après le mot : « crédit », sont insérés les mots : «, un établissement de monnaie électronique qui fournit des services de paiement » ;

10° Au premier alinéa de l’article L. 519-2, après le mot : « crédit », sont insérés les mots : «, un établissement de monnaie électronique qui fournit des services de paiement, » ;

11° À l’article L. 519-3-2, après le mot : « crédit, », sont insérés les mots : « les établissements de monnaie électronique qui fournissent des services de paiement, » ;

12° À la première phrase de l’article L. 519-3-4, après le mot : « crédit, », sont insérés les mots : « d’un établissement de monnaie électronique qui fournit des services de paiement, » ;

13° À la fin du premier alinéa et au second alinéa de l’article L. 519-4-2, les mots : « ou de paiement » sont remplacés par les mots : «, de paiement ou de monnaie électronique qui fournissent des services de paiement ». –

Adopté.

(Non modifié)

I. – L’intitulé du titre II du livre V du code monétaire et financier est ainsi rédigé : « Les prestataires de services de paiement, les changeurs manuels et les émetteurs de monnaie électronique ».

II. – Au I de l’article L. 521-1 du même code, après les mots : « les établissements de paiement », sont insérés les mots : «, les établissements de monnaie électronique ».

III. – Le II de l’article L. 521-3 du même code est ainsi modifié :

1° À la première phrase du deuxième alinéa, après le mot : « déclarant », sont insérés les mots : «, après avis de la Banque de France au titre du troisième alinéa du I de l’article L. 141-4, » ;

2° Le dernier alinéa est ainsi rédigé :

« Ces entreprises adressent à l’Autorité de contrôle prudentiel, qui le transmet à la Banque de France, un rapport annuel justifiant le respect des dispositions précitées et la sécurité des moyens de paiement qu’elles émettent et gèrent. » ;

3° Sont ajoutés trois alinéas ainsi rédigés :

« Dès qu’une entreprise prévoit de ne plus remplir les conditions mentionnées au I du présent article ou au 1° de l’article L. 311-4, elle dépose une demande d’agrément auprès de l’Autorité de contrôle prudentiel en application de l’article L. 522-6.

« Lorsque l’Autorité de contrôle prudentiel notifie à une entreprise que les conditions mentionnées au I du présent article ou au 1° de l’article L. 311-4 ne sont pas remplies, l’entreprise dispose d’un délai de trois mois pour prendre les mesures nécessaires pour respecter les conditions précitées ou pour déposer une demande d’agrément auprès de l’Autorité de contrôle prudentiel en application de l’article L. 522-6.

« Tant que l’Autorité de contrôle prudentiel ne s’est pas prononcée sur la demande d’agrément, l’entreprise veille à respecter les conditions prévues au I du présent article ou au 1° de l’article L. 311-4. »

IV. – À l’article L. 522-1 du même code, les mots : « et autres que » sont remplacés par les mots : «, les établissements de monnaie électronique et ».

IV bis. – Au début du dernier alinéa du II de l’article L. 522-4 du même code, les mots : « En conséquence, » sont supprimés.

V. – Au I de l’article L. 522-6 du même code, après les mots : « au titre du troisième alinéa », sont insérés les mots : « du I ».

VI. – Le second alinéa de l’article L. 522-9 du même code est supprimé.

VII. – Le I de l’article L. 522-19 du même code est complété par huit alinéas ainsi rédigés :

« Les établissements de paiement peuvent communiquer des informations couvertes par le secret professionnel aux personnes avec lesquelles ils négocient, concluent ou exécutent les opérations mentionnées aux 1° à 5°, dès lors que ces informations sont nécessaires à celles-ci :

« 1° Prises de participation ou de contrôle dans un établissement de paiement ;

« 2° Cessions d’actifs ou de fonds de commerce ;

« 3° Cessions ou transferts de contrats ;

« 4° Contrats de prestations de services conclus avec un tiers en vue de lui confier des fonctions opérationnelles importantes ;

« 5° Lors de l’étude ou l’élaboration de tout type de contrats ou d’opérations, dès lors que ces entités appartiennent au même groupe que l’auteur de la communication.

« Outre les cas mentionnés aux 1° à 5°, les établissements de paiement peuvent communiquer des informations couvertes par le secret professionnel au cas par cas et uniquement lorsque les personnes concernées leur ont expressément permis de le faire.

« Les personnes recevant des informations couvertes par le secret professionnel, qui leur ont été fournies pour les besoins d’une des opérations ci-dessus énoncées, doivent les conserver confidentielles, que l’opération susvisée aboutisse ou non. Toutefois, dans l’hypothèse où l’opération susvisée aboutit, ces personnes peuvent à leur tour communiquer les informations couvertes par le secret professionnel dans les mêmes conditions que celles visées au présent article aux personnes avec lesquelles elles négocient, concluent ou exécutent les opérations énoncées ci-dessus. »

VIII. – À l’article L. 523-5 du même code, après la référence : « L. 522-19, », est insérée la référence : « de l’article L. 526-35, ».

IX. – Au premier alinéa du II de l’article L. 524-1 du même code, après les mots : « les établissements de crédit, », sont insérés les mots : « les établissements de monnaie électronique, ». –

Adopté.

(Non modifié)

Le titre II du livre V du code monétaire et financier est complété par un chapitre V ainsi rédigé :

« Chapitre V

« Les émetteurs de monnaie électronique

« Section 1

« Généralités

« Art. L. 525-1. – Les émetteurs de monnaie électronique sont les établissements de monnaie électronique et les établissements de crédit.

« Art. L. 525-2. – Lorsqu’ils émettent de la monnaie électronique, les institutions et services suivants sont également considérés comme des émetteurs de monnaie électronique, sans être soumis aux dispositions du chapitre VI du présent titre et dans les limites des dispositions législatives qui, le cas échéant, les régissent :

« 1° La Banque de France et l’Institut d’émission des départements d’outre-mer ;

« 2° Le Trésor public ;

« 3° La Caisse des dépôts et consignations.

« Art. L. 525-3. – Il est interdit à toute personne autre que celles mentionnées aux articles L. 525-1 et L. 525-2 d’émettre et de gérer de la monnaie électronique au sens de l’article L. 315-1 à titre de profession habituelle.

« Art. L. 525-4. – Les titres spéciaux de paiement dématérialisés soumis à des dispositions législatives ou réglementaires spécifiques ou à un régime spécial de droit public qui en destinent l’usage exclusivement à l’acquisition d’un nombre limité de catégories de biens ou de services déterminées ou à une utilisation dans un réseau limité ne sont pas considérés comme de la monnaie électronique au sens de l’article L. 315-1. Les entreprises qui émettent et gèrent ces titres, pour la partie de leur activité qui répond aux conditions du présent article, ne sont pas soumises aux règles applicables aux émetteurs de monnaie électronique mentionnés à l’article L. 525-1. La liste des titres spéciaux de paiement dématérialisés concernés par le présent article est fixée par arrêté du ministre chargé de l’économie.

« Dans le cadre de ses missions fondamentales, la Banque de France s’assure de la sécurité des titres spéciaux de paiement dématérialisés et de la pertinence des normes applicables en la matière. Si elle estime qu’un de ces titres spéciaux de paiement dématérialisés présente des garanties de sécurité insuffisantes, elle peut recommander à son émetteur de prendre toutes mesures destinées à y remédier. Si ces recommandations n’ont pas été suivies d’effet, elle peut, après avoir recueilli les observations de l’émetteur, décider de formuler un avis négatif publié au Journal officiel.

« Pour l’exercice de ces missions, la Banque de France procède aux expertises et se fait communiquer, par l’émetteur ou par toute personne intéressée, les informations utiles concernant les titres spéciaux de paiement dématérialisés et les terminaux ou les dispositifs techniques qui leur sont associés.

« Les entreprises mentionnées au présent article adressent à la Banque de France un rapport annuel justifiant de la sécurité des titres spéciaux de paiement dématérialisés qu’elles émettent et gèrent.

« Art. L. 525-5. – Par exception à l’article L. 525-3, une entreprise peut émettre et gérer de la monnaie électronique en vue de l’acquisition de biens ou de services, uniquement dans les locaux de cette entreprise ou, dans le cadre d’un accord commercial avec elle, dans un réseau limité de personnes acceptant ces moyens de paiement ou pour un éventail limité de biens ou de services, à la condition que la capacité maximale de chargement du support électronique mis à la disposition des détenteurs de monnaie électronique à des fins de paiement n’excède pas un montant fixé par décret. Pour la partie de son activité qui répond aux conditions mentionnées au présent alinéa, l’entreprise n’est pas soumise aux règles applicables aux émetteurs de monnaie électronique.

« Les moyens de paiement mentionnés au présent article demeurent soumis à la surveillance de la Banque de France, conformément aux dispositions des troisième et quatrième alinéas du I de l’article L. 141-4.

« Art. L. 525-6. – Avant de commencer à exercer ses activités, l’entreprise mentionnée à l’article L. 525-5 ou au 1° de l’article L. 311-4 adresse une déclaration à l’Autorité de contrôle prudentiel, sauf si la monnaie électronique émise ou gérée par cette entreprise est délivrée exclusivement pour l’achat d’un bien ou d’un service déterminé auprès d’elle ou auprès d’entreprises liées avec elle par un accord de franchise commerciale.

« L’Autorité de contrôle prudentiel dispose d’un délai fixé par décret à compter de la réception de la déclaration ou, si celle-ci est incomplète, du même délai à compter de la réception de toutes les informations nécessaires pour notifier au déclarant, après avis de la Banque de France au titre du troisième alinéa du I de l’article L. 141-4, que les conditions mentionnées à l’article L. 525-5 ou au 1° de l’article L. 311-4 ne sont pas remplies.

« Le silence gardé par l’Autorité de contrôle prudentiel vaut approbation du respect des conditions susmentionnées.

« Les entreprises mentionnées à l’article L. 525-5 adressent à l’Autorité de contrôle prudentiel, qui le transmet à la Banque de France, un rapport annuel justifiant le respect des dispositions précitées et la sécurité des moyens de paiement qu’elles émettent et gèrent.

« Dès qu’une entreprise prévoit de ne plus remplir les conditions mentionnées à l’article L. 525-5 ou au 1° de l’article L. 311-4, elle dépose une demande d’agrément auprès de l’Autorité de contrôle prudentiel en application de l’article L. 526-7.

« Lorsque l’Autorité de contrôle prudentiel notifie à une entreprise que les conditions mentionnées à l’article L. 525-5 ou au 1° de l’article L. 311-4 ne sont pas remplies, l’entreprise dispose d’un délai de trois mois pour prendre les mesures nécessaires pour respecter les conditions précitées ou pour déposer une demande d’agrément auprès de l’Autorité de contrôle prudentiel en application de l’article L. 526-7.

« Tant que l’Autorité de contrôle prudentiel ne s’est pas prononcée sur l’octroi de l’agrément, l’entreprise veille à respecter les conditions prévues à l’article L. 525-5 ou au 1° de l’article L. 311-4.

« Art. L. 525-7. – Il est interdit à toute entreprise autre que celles mentionnées à l’article L. 526-1 d’utiliser une dénomination, une raison sociale, une publicité ou, d’une façon générale, des expressions faisant croire qu’elle est agréée en tant qu’établissement de monnaie électronique ou de créer une confusion en cette matière.

« Section 2

« La distribution de monnaie électronique

« Art. L. 525-8. – Les émetteurs de monnaie électronique peuvent recourir, dans les limites de leur agrément, aux services d’une ou plusieurs personnes en vue de distribuer, pour leur compte, de la monnaie électronique et effectuer, dans ce cadre, les activités suivantes :

« 1° La mise en circulation de monnaie électronique, y compris le rechargement de monnaie électronique ;

« 2° Le remboursement de monnaie électronique.

« En l’absence d’une caisse séparée alimentée par l’émetteur de monnaie électronique en vue de la réalisation des opérations mentionnées au 2°, les dispositions relatives aux opérations de guichet s’appliquent à ces personnes.

« Art. L. 525-9. – Les émetteurs de monnaie électronique qui recourent à une ou plusieurs personnes pour distribuer, au sens de l’article L. 525-8, de la monnaie électronique respectent les dispositions réglementaires relatives à l’externalisation.

« Art. L. 525-10. – Les émetteurs de monnaie électronique veillent à ce que les personnes mentionnées à l’article L. 525-8 apportent à la clientèle et au public, par tout moyen approprié et de manière visible et lisible, les informations relatives à la dénomination sociale, à l’adresse et au nom commercial de l’émetteur de monnaie électronique.

« Art. L. 525-11. – Nonobstant toute clause contraire, les émetteurs de monnaie électronique demeurent responsables à l’égard des détenteurs de monnaie électronique de la monnaie électronique distribuée par les personnes mentionnées à l’article L. 525-8.

« Art. L. 525-12. – Pour l’application de l’article L. 511-33, de l’article L. 526-35, de l’article L. 571-4 et de l’article L. 572-17, les personnes mentionnées à l’article L. 525-8 sont assimilées à des personnes employées par les émetteurs de monnaie électronique.

« Art. L. 525-13. – Les conditions d’application de la présente section sont fixées par arrêté du ministre chargé de l’économie. » –

Adopté.

(Non modifié)

Le titre II du livre V du code monétaire et financier est complété par un chapitre VI ainsi rédigé :

« Chapitre VI

« Les établissements de monnaie électronique

« Section 1

« Définitions

« Art. L. 526-1. – Les établissements de monnaie électronique sont des personnes morales, autres que les établissements de crédit et autres que les personnes mentionnées à l’article L. 525-2, qui émettent et gèrent à titre de profession habituelle de la monnaie électronique telle que définie à l’article L. 315-1.

« Art. L. 526-2. – Outre l’émission, la gestion et la mise à disposition de la clientèle de monnaie électronique, les établissements de monnaie électronique peuvent :

« 1° Fournir des services de paiement définis au II de l’article L. 314-1 dans le respect des dispositions législatives et réglementaires applicables à la fourniture de ces services ;

« 2° Fournir des services connexes à la prestation de services de paiement mentionnés à l’article L. 522-2 dans le respect des dispositions législatives et réglementaires applicables à la fourniture de ces services ;

« 3° Fournir des services connexes opérationnels ou étroitement liés à l’émission et la gestion de monnaie électronique, tels que des services de change définis au I de l’article L. 524-1, des services de garde et l’enregistrement et le traitement des données.

« Art. L. 526-3. – Sans préjudice des dispositions de l’article L. 526-10, les établissements de monnaie électronique peuvent exercer à titre de profession habituelle une activité commerciale autre que l’émission et la gestion de monnaie électronique ou autre que les opérations mentionnées à l’article L. 526-2, sous réserve des dispositions législatives et réglementaires applicables à cette activité.

« Pour ces établissements de monnaie électronique, exerçant des activités de nature hybride, les activités autres que l’émission et la gestion de monnaie électronique ne doivent pas être incompatibles avec les exigences de la profession, notamment le maintien de la réputation de l’établissement de monnaie électronique, la primauté des intérêts des clients et le jeu de la concurrence sur le marché considéré.

« Les modalités selon lesquelles les établissements de monnaie électronique exercent, à titre de profession habituelle, une activité autre que l’émission et la gestion de monnaie électronique sont fixées par arrêté du ministre chargé de l’économie.

« Le présent article s’applique aux établissements de monnaie électronique qui exercent, à titre de profession habituelle, une activité commerciale d’émission et de gestion des titres mentionnés à l’article L. 525-4.

« Art. L. 526-4. – Les comptes ouverts par les établissements de monnaie électronique, dans le cadre de la fourniture de services de paiement, respectent les dispositions législatives et réglementaires applicables aux comptes et aux opérations de paiement.

« Art. L. 526-5. – Les fonds représentatifs de monnaie électronique collectés par des établissements de monnaie électronique en vue de l’émission et de la gestion de monnaie électronique ne constituent pas des fonds reçus du public au sens de l’article L. 312-2.

« Les fonds d’utilisateurs de services de paiement collectés par des établissements de monnaie électronique en vue de la prestation de services de paiement ne constituent pas des fonds reçus du public au sens de l’article L. 312-2, ni des fonds représentatifs de la monnaie électronique.

« L’établissement de monnaie électronique ne peut disposer des fonds mentionnés au présent article pour son propre compte.

« Art. L. 526-6. – Chaque établissement de monnaie électronique est tenu d’adhérer à un organisme professionnel affilié à l’Association française des établissements de crédit et des entreprises d’investissement mentionnée à l’article L. 511-29.

« Section 2

« Conditions d’accès à la profession

« Sous-section 1

« Agrément

« Art. L. 526-7. – Avant d’émettre et de gérer de la monnaie électronique, les établissements de monnaie électronique obtiennent un agrément délivré par l’Autorité de contrôle prudentiel, après avis de la Banque de France au titre du troisième alinéa du I de l’article L. 141-4.

« Art. L. 526-8. – Pour délivrer l’agrément, l’Autorité de contrôle prudentiel s’assure de l’aptitude de l’entreprise requérante à garantir une gestion saine et prudente de l’établissement de monnaie électronique et apprécie la qualité des actionnaires ou associés qui détiennent une participation qualifiée.

« Art. L. 526-9. – Pour délivrer l’agrément à un établissement de monnaie électronique, en application de l’article L. 526-8, l’Autorité de contrôle prudentiel vérifie si celui-ci :

« 1° Est une personne morale ;

« 2° A son administration centrale et son siège statutaire sur le territoire de la République française ;

« 3° Dispose, au moment de la délivrance de l’agrément, d’un capital libéré d’un montant au moins égal à une somme fixée par voie réglementaire ;

« 4° Est dirigé effectivement par deux personnes au moins possédant l’honorabilité ainsi que la compétence et l’expérience nécessaires à leur fonction et requises pour les activités d’émission et de gestion de monnaie électronique ;

« 5° Dispose d’un solide dispositif de gouvernement d’entreprise, comprenant notamment une structure organisationnelle claire avec un partage des responsabilités bien défini, transparent et cohérent ;

« 6° Dispose de procédures efficaces de détection, de gestion, de contrôle et de déclaration des risques auquel il est ou pourrait être exposé et d’un dispositif adéquat de contrôle interne, y compris de procédures administratives et comptables saines. Le dispositif et les procédures sont adaptés aux caractéristiques et au volume de monnaie électronique émise et en circulation, ainsi qu’aux modalités de gestion et de distribution par l’établissement de monnaie électronique ;

« 7° Ne voit pas l’exercice de son contrôle entravé soit par l’existence de liens de capital ou de contrôle directs ou indirects entre l’entreprise et d’autres personnes, soit par l’existence de dispositions législatives ou réglementaires d’un État qui n’est pas partie à l’accord sur l’Espace économique européen et dont relèvent une ou plusieurs de ces personnes ;

« 8° Dispose d’une description de son réseau de distribution conforme aux dispositions des articles L. 525-8 et suivants.

« Art. L. 526-10. – Lorsqu’un établissement de monnaie électronique exerce des activités de nature hybride au sens de l’article L. 526-3 ou des activités mentionnées aux articles L. 525-4 ou L. 525-5, l’Autorité de contrôle prudentiel vérifie que la personne responsable des activités d’émission et de gestion de monnaie électronique remplit les conditions mentionnées au 4° de l’article L. 526-9.

« L’Autorité de contrôle prudentiel peut exiger également qu’une personne morale distincte soit créée pour les activités d’émission et de gestion de monnaie électronique si les autres activités de l’établissement de monnaie électronique portent ou menacent de porter atteinte à la santé financière de l’établissement de monnaie électronique ou à la qualité du contrôle opéré sur le respect par l’établissement de monnaie électronique des obligations qui lui sont imposées.

« Art. L. 526-11. – Dans un délai fixé par voie réglementaire à compter de la réception de la demande ou, si la demande est incomplète, dans le même délai à compter de la réception de toutes les informations nécessaires aux fins de la décision, l’Autorité de contrôle prudentiel notifie sa décision au demandeur.

« Dans le cas où la décision concerne une entreprise qui exerçait jusque-là une activité au titre de l’article L. 525-5 ou du 1° de l’article L. 311-4, la décision précise le délai, qui ne peut être supérieur à un an, laissé à l’entreprise pour assurer la mise en conformité de la monnaie électronique en circulation émise préalablement à l’agrément, en tenant compte notamment de la durée de validité de ladite monnaie électronique.

« Art. L. 526-12. – L’établissement de monnaie électronique satisfait à tout moment aux conditions de son agrément.

« Toute modification des conditions auxquelles est subordonné l’agrément délivré à un établissement de monnaie électronique ayant une incidence sur l’exactitude des informations et pièces justificatives fournies pour la mise en œuvre des dispositions des articles L. 526-8 et L. 526-9 fait l’objet d’une déclaration auprès de l’Autorité de contrôle prudentiel. Les modalités de cette déclaration et les conséquences qui peuvent en être tirées sont fixées par arrêté du ministre chargé de l’économie.

« Art. L. 526-13. – À l’exception des opérations réalisées à l’intérieur d’un groupe au sens de l’article L. 233-3 du code de commerce, toute opération de prise, d’extension ou de cession de participation, directe ou indirecte au sens de l’article L. 233-4 du même code, dans un établissement de monnaie électronique est soumise à autorisation préalable de l’Autorité de contrôle prudentiel.

« Sans préjudice des sanctions qui peuvent être infligées par l’Autorité de contrôle prudentiel en cas de non-respect de l’obligation d’autorisation préalable, l’autorité peut demander au juge la suspension des droits de vote attachés aux actions ou parts qui auraient dû faire l’objet de l’autorisation préalable prévue au premier alinéa du présent article.

« Sans préjudice des sanctions qui peuvent être infligées par l’Autorité de contrôle prudentiel en cas de non-respect de son opposition à une demande d’autorisation préalable, l’autorité peut demander au juge soit la suspension des droits de vote attachés aux actions ou parts de l’acquéreur, soit la nullité des votes émis.

« Les modalités de demande et de délivrance de cette autorisation préalable sont fixées par arrêté du ministre chargé de l’économie.

« Art. L. 526-14. – Le retrait de l’agrément d’établissement de monnaie électronique est prononcé par l’Autorité de contrôle prudentiel à la demande de l’établissement.

« Art. L. 526-15. – Le retrait de l’agrément d’établissement de monnaie électronique peut également être décidé d’office par l’Autorité de contrôle prudentiel lorsque l’établissement :

« 1° Ne fait pas usage de l’agrément dans un délai de douze mois ou a cessé d’exercer son activité pendant une période supérieure à six mois ;

« 2° A obtenu l’agrément au moyen de fausses déclarations ou par tout autre moyen irrégulier ;

« 3° Ne remplit plus les conditions auxquelles est subordonné son agrément ou une autorisation ultérieure.

« Art. L. 526-16. – Le retrait d’agrément prend effet à l’expiration d’une période dont la durée est déterminée par l’Autorité de contrôle prudentiel.

« Pendant cette période :

« 1° L’établissement de monnaie électronique demeure soumis au contrôle de l’Autorité de contrôle prudentiel. L’Autorité de contrôle prudentiel peut prononcer à son encontre les sanctions disciplinaires prévues à l’article L. 612-39, y compris la radiation ;

« 2° L’établissement ne peut émettre de la monnaie électronique ;

« 3° Il ne peut faire état de sa qualité d’établissement de monnaie électronique qu’en précisant que son agrément est en cours de retrait ;

« 4° Il ne peut fournir que les garanties d’exécution d’opérations strictement nécessaires à l’apurement de sa situation.

« Art. L. 526-17. – Dans les cas prévus aux articles L. 526-14 et L. 526-15, les fonds de détenteurs de monnaie électronique collectés par un établissement de monnaie électronique sont restitués aux détenteurs ou transférés à un établissement de crédit, à un autre établissement de monnaie électronique habilité ou à la Caisse des dépôts et consignations.

« Au terme de la période prévue à l’article L. 526-16, l’entreprise perd la qualité d’établissement de monnaie électronique et doit avoir changé sa dénomination sociale. Les opérations d’émission et de gestion de monnaie électronique que l’entreprise a engagées ou s’est engagée, avant la décision de retrait d’agrément, à réaliser peuvent être menées à leur terme.

« Par dérogation aux 4° et 5° de l’article 1844-7 du code civil, la dissolution anticipée d’un établissement de monnaie électronique ne peut être prononcée qu’après décision de retrait de son agrément par l’Autorité de contrôle prudentiel. La publication et l’inscription modificative au registre du commerce et des sociétés concernant le prononcé de cette dissolution mentionnent la date de la décision de retrait d’agrément par l’Autorité de contrôle prudentiel. Jusqu’à la clôture de sa liquidation, l’établissement reste soumis au contrôle de l’Autorité de contrôle prudentiel, qui peut prononcer l’ensemble des sanctions disciplinaires prévues à l’article L. 612-39 du présent code. Il ne peut faire état de sa qualité d’établissement de monnaie électronique sans préciser qu’il est en liquidation.

« Art. L. 526-18. – La radiation d’un établissement de monnaie électronique de la liste des établissements de monnaie électronique agréés peut être prononcée à titre de sanction disciplinaire par l’Autorité de contrôle prudentiel.

« Pour un établissement de monnaie électronique exerçant des activités de nature hybride au sens de l’article L. 526-3, la radiation s’entend comme une interdiction faite à l’établissement d’exercer les activités pour lesquelles l’agrément d’établissement de monnaie électronique lui avait été octroyé.

« Pour les autres établissements, la radiation entraîne la liquidation de la personne morale.

« Tout établissement qui a fait l’objet d’une telle sanction disciplinaire demeure soumis au contrôle de l’Autorité de contrôle prudentiel jusqu’à, respectivement, l’arrêt de toute activité ou la clôture de la liquidation. Jusque-là, il ne peut effectuer que les opérations de gestion de monnaie électronique strictement nécessaires à l’apurement de sa situation. Il ne peut faire état de sa qualité d’établissement de monnaie électronique qu’en précisant qu’il a fait l’objet d’une mesure de radiation.

« Art. L. 526-19. – Les établissements de monnaie électronique dont les activités commerciales dans leur ensemble génèrent une moyenne de la monnaie électronique en circulation inférieure à un montant fixé par décret peuvent être exemptés du respect des dispositions de la section 3 du présent chapitre à l’exception des articles L. 526-32 à L. 526-34.

« Les articles L. 526-21 à L. 526-26 ne s’appliquent pas aux établissements visés au premier alinéa du présent article.

« L’exemption cesse un mois après que l’Autorité de contrôle prudentiel constate que les conditions prévues au présent article ne sont plus remplies.

« Les unités de monnaie électronique incorporées dans un instrument de monnaie électronique émis par un établissement mentionné au premier alinéa ne peuvent dépasser un montant fixé par décret.

« Les conditions d’application du présent article sont fixées par arrêté du ministre chargé de l’économie.

« Les établissements mentionnés au premier alinéa sont tenus d’adresser à l’Autorité de contrôle prudentiel une déclaration périodique par laquelle ils certifient qu’ils respectent ces conditions.

« Art. L. 526-20. – Les conditions d’application des articles L. 526-14 à L. 526-18, notamment les modalités selon lesquelles les décisions de retrait d’agrément et de radiation sont portées à la connaissance du public, sont fixées par arrêté du ministre chargé de l’économie.

« Sous-section 2

« Libre établissement et libre prestation de services sur le territoire des États parties à l’accord sur l’Espace économique européen

« Art. L. 526-21. – Dans la présente sous-section et pour l’application des dispositions relatives au libre établissement et à la libre prestation de services :

« 1° L’expression : “autorités compétentes” désigne la ou les autorités d’un autre État membre de l’Union européenne ou d’un autre État partie à l’accord sur l’Espace économique européen chargées, conformément à la législation de cet État, d’agréer ou de contrôler les établissements de monnaie électronique qui y ont leur siège social ou leur administration centrale ;

« 2° L’expression : “État d’origine” désigne, pour un établissement de monnaie électronique, l’autre État membre de l’Union européenne ou l’autre État partie à l’accord sur l’Espace économique européen où il a son siège social ou si, conformément à son droit national, il en est dépourvu, l’autre État membre ou l’autre État partie à l’accord sur l’Espace économique européen dans lequel est située son administration centrale ;

« 3° L’expression : “État d’accueil” désigne tout autre État membre de l’Union européenne ou tout autre État partie à l’accord sur l’Espace économique européen dans lequel l’établissement de monnaie électronique exerce son activité par le biais d’une succursale ou d’un intermédiaire ou de la libre prestation de services ;

« 4° L’expression : “succursale” désigne une ou plusieurs parties, dépourvues de la personnalité morale, d’un établissement de monnaie électronique et dont l’objet est d’émettre et de gérer de la monnaie électronique. Tous les lieux d’exploitation établis dans le même autre État membre de l’Union européenne ou dans le même autre État partie à l’accord sur l’Espace économique européen par un établissement de monnaie électronique dont le siège social se trouve dans un autre État membre ou dans un autre État partie à l’accord sur l’Espace économique européen sont considérés comme une succursale unique.

« Art. L. 526-22. – Tout établissement de monnaie électronique ayant son siège social sur le territoire de la France métropolitaine, dans les départements d’outre-mer ou à Saint-Martin et désirant établir une succursale ou recourir à une personne pour la distribution de monnaie électronique implantée dans un autre État membre de l’Union européenne ou dans un autre État partie à l’accord sur l’Espace économique européen notifie son projet à l’Autorité de contrôle prudentiel. Cette notification est assortie d’informations dont la nature est déterminée par arrêté du ministre chargé de l’économie.

« Dans un délai fixé par voie réglementaire à compter de la réception de cette information, l’Autorité de contrôle prudentiel communique aux autorités compétentes de l’État d’accueil les informations mentionnées au premier alinéa du présent article. Sous réserve des dispositions de l’article L. 526-23 et lorsque les formalités déterminées par arrêté du ministre chargé de l’économie sont effectuées, l’Autorité de contrôle prudentiel inscrit la succursale sur la liste prévue à l’article L. 612-21 ou prend connaissance des accords d’externalisation communiqués en application de l’article L. 526-31.

« Art. L. 526-23. – Si les autorités compétentes de l’État d’accueil ont de bonnes raisons de soupçonner que, en liaison avec le projet d’établissement de la succursale ou le recours à une personne pour la distribution de monnaie électronique, une opération ou une tentative de blanchiment de capitaux ou de financement du terrorisme est en cours ou a eu lieu, ou que l’établissement de cette succursale ou le recours à cette personne pourraient accroître le risque de blanchiment de capitaux ou de financement du terrorisme, l’Autorité de contrôle prudentiel peut refuser d’inscrire la succursale sur la liste prévue à l’article L. 612-21 ou contester les accords d’externalisation communiqués en application de l’article L. 526-31, si elle a été informée par les autorités compétentes de l’État d’accueil.

« Art. L. 526-24. – Tout établissement de monnaie électronique ayant son siège social sur le territoire de la France métropolitaine, dans les départements d’outre-mer ou à Saint-Martin, désirant intervenir dans un autre État membre de l’Union européenne ou dans un autre État partie à l’accord sur l’Espace économique européen par voie de libre prestation de services notifie son projet à l’Autorité de contrôle prudentiel. Cette notification est assortie d’informations dont la nature est déterminée par arrêté du ministre chargé de l’économie.

« Art. L. 526-25. – Dans la limite de l’activité d’émission et de gestion de monnaie électronique qu’il est habilité à exercer sur le territoire d’un État membre de l’Union européenne ou d’un État partie à l’accord sur l’Espace économique européen autre que la France et en fonction de l’agrément qu’il y a reçu, tout établissement de monnaie électronique peut, sur le territoire de la France métropolitaine, dans les départements d’outre-mer ou à Saint-Martin, établir une succursale ou recourir à une personne pour la distribution de monnaie électronique, sous réserve que l’Autorité de contrôle prudentiel ait été informée par l’autorité compétente de l’État d’origine, dans des conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l’économie.

« Si l’Autorité de contrôle prudentiel a de bonnes raisons de soupçonner que, en liaison avec le projet de recours à une personne pour la distribution de monnaie électronique ou d’établissement de la succursale, une opération ou une tentative de blanchiment de capitaux ou de financement du terrorisme est en cours ou a eu lieu, ou que le recours à cette personne ou l’établissement de cette succursale pourraient accroître le risque de blanchiment de capitaux ou de financement du terrorisme, elle en informe les autorités compétentes de l’État d’origine.

« Art. L. 526-26. – Dans la limite de l’activité d’émission et de gestion de monnaie électronique qu’il est habilité à exercer sur le territoire d’un État membre de l’Union européenne ou d’un État partie à l’accord sur l’Espace économique européen autre que la France et en fonction de l’agrément qu’il y a reçu, tout établissement de monnaie électronique peut, sur le territoire de la France métropolitaine, dans les départements d’outre-mer ou à Saint-Martin, intervenir en libre prestation de services, sous réserve que l’Autorité de contrôle prudentiel ait été informée par l’autorité compétente de l’État d’origine, dans des conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l’économie.

« Section 3

« Dispositions prudentielles

« Art. L. 526-27. – Les établissements de monnaie électronique sont tenus de respecter des normes de gestion destinées à garantir leur solvabilité ainsi que l’équilibre de leur structure financière. Ils disposent également d’un dispositif approprié de contrôle interne leur permettant notamment de mesurer les risques et la rentabilité de leurs activités, y compris lorsqu’ils confient à des tiers des fonctions ou autres tâches opérationnelles essentielles ou importantes.

« Ils respectent un niveau de fonds propres adéquat.

« Les conditions d’application du présent article et, en particulier, les modalités de calcul afférentes aux exigences en fonds propres sont fixées par voie réglementaire.

« Art. L. 526-28. – Les fonds propres d’un établissement de monnaie électronique ne peuvent être inférieurs aux exigences édictées au 3° de l’article L. 526-9 et par le deuxième alinéa de l’article L. 526-27.

« Art. L. 526-29. – L’Autorité de contrôle prudentiel peut adresser aux établissements de monnaie électronique une recommandation ou une injonction à l’effet d’assurer l’existence de fonds propres suffisants pour l’émission et la gestion de monnaie électronique, notamment lorsque les activités autres que l’émission et la gestion de monnaie électronique de l’établissement portent ou menacent de porter atteinte à la santé financière de l’établissement de monnaie électronique.

« L’Autorité de contrôle prudentiel peut également adresser aux établissements de monnaie électronique exerçant des activités de nature hybride au sens de l’article L. 526-3 une recommandation ou une injonction à l’effet de créer une personne morale distincte pour les activités d’émission et de gestion de monnaie électronique lorsque les activités autres que l’émission et la gestion de monnaie électronique de l’établissement portent ou menacent de porter atteinte à la santé financière de l’établissement de monnaie électronique ou à la capacité de l’Autorité de contrôle prudentiel de contrôler si l’établissement respecte toutes les obligations qui lui sont imposées.

« Art. L. 526-30. – Les établissements de monnaie électronique sont tenus de respecter les articles L. 522-14 à L. 522-18 lorsqu’ils fournissent des services de paiement au sens du 1° de l’article L. 526-2.

« Art. L. 526-31. – Tout établissement de monnaie électronique qui entend externaliser des fonctions opérationnelles en informe l’Autorité de contrôle prudentiel.

« L’externalisation de fonctions opérationnelles essentielles ne peut pas être faite d’une manière qui nuise sérieusement à la qualité du contrôle interne de l’établissement de monnaie électronique ou qui empêche l’Autorité de contrôle prudentiel de contrôler que cet établissement respecte bien toutes les obligations auxquelles il est soumis.

« Les conditions d’application du présent article sont définies par arrêté du ministre chargé de l’économie.

« Art. L. 526-32. – Les fonds collectés en contrepartie de l’émission de monnaie électronique sont protégés conformément à l’une des deux méthodes suivantes :

« 1° Les fonds collectés ne sont en aucun cas confondus avec les fonds de personnes physiques ou morales autres que les détenteurs de monnaie électronique.

« Les espèces collectées en contrepartie de l’émission de la monnaie électronique sont déposées sur un compte distinct auprès d’un établissement de crédit habilité à recevoir des fonds à vue du public au plus tard à la fin du jour ouvrable, au sens du d de l’article L. 133-4, suivant leur collecte.

« Les fonds autrement collectés en contrepartie de l’émission de la monnaie électronique sont déposés sur le compte mentionné au deuxième alinéa du présent 1° dès leur crédit au compte de l’établissement de monnaie électronique et, en tout état de cause, au plus tard cinq jours ouvrables, au sens du d de l’article L. 133-4, après l’émission de la monnaie électronique.

« Ils peuvent aussi être investis en instruments financiers conservés dans des comptes ouverts spécialement à cet effet auprès d’une personne morale mentionnée aux 2° à 5° de l’article L. 542-1, dans des conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l’économie.

« Ces fonds sont protégés, dans les conditions prévues à l’article L. 613-30-1, contre tout recours d’autres créanciers de l’établissement de monnaie électronique, y compris en cas de procédures d’exécution ou de procédure d’insolvabilité ouverte à l’encontre de l’établissement ;

« 2° Les fonds collectés en contrepartie de l’émission de monnaie électronique sont couverts, dans le respect des délais mentionnés au 1° du présent article, par un contrat d’assurance ou une autre garantie comparable d’une entreprise d’assurances ou d’un établissement de crédit n’appartenant pas au même groupe au sens de l’article L. 233-3 du code de commerce, selon des modalités définies par arrêté du ministre chargé de l’économie qui assurent ou garantissent les détenteurs de monnaie électronique contre la défaillance de l’établissement de monnaie électronique dans l’exécution de ses obligations financières.

« Le présent article s’applique aux fonds collectés par les personnes mentionnées à l’article L. 525-8, les délais mentionnés au 1° du présent article commençant à courir à partir de la collecte par lesdites personnes.

« Le présent article s’applique aux personnes mentionnées à l’article L. 525-8 ou aux établissements de monnaie électronique dès que le détenteur a remis les fonds à l’un d’entre eux en vue de la création de la monnaie électronique.

« Les fonds collectés sont protégés tant que la monnaie électronique émise est en circulation.

« Art. L. 526-33. – Lorsque les fonds remis peuvent être utilisés, d’une part, en contrepartie d’émissions de monnaie électronique et, d’autre part, pour des services autres que l’émission de monnaie électronique, la partie des fonds collectés en contrepartie de l’exécution d’émission de monnaie électronique est protégée selon les modalités prévues à l’article L. 526-32. Si cette partie est variable ou ne peut être déterminée à l’avance, les établissements de monnaie électronique procèdent à l’évaluation de la part représentative des fonds collectés en contrepartie de l’émission de monnaie électronique, en respectant les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l’économie. La part représentative ainsi déterminée est protégée dans les conditions prévues à l’article L. 526-32.

« Art. L. 526-34. – Les établissements de monnaie électronique fournissent à leurs clients, de même qu’à toute personne qui en fait la demande, toute information utile sur les modalités de protection des fonds collectés. Les modifications sont portées à la connaissance des clients. L’usage à des fins publicitaires de ces informations est interdit.

« Section 4

« Secret professionnel, comptabilité et contrôle légal des comptes

« Art. L. 526-35. – Tout membre d’un conseil d’administration et, selon le cas, d’un conseil de surveillance et toute personne qui, à un titre quelconque, participe à la direction ou à la gestion d’un établissement de monnaie électronique ou qui est employée par un établissement de monnaie électronique est tenu au secret professionnel.

« Outre les cas où la loi le prévoit, le secret professionnel ne peut être opposé ni à l’Autorité de contrôle prudentiel, ni à la Banque de France, ni à l’autorité judiciaire agissant dans le cadre d’une procédure pénale.

« Les établissements de monnaie électronique peuvent communiquer des informations couvertes par le secret professionnel aux personnes avec lesquelles ils négocient, concluent ou exécutent les opérations mentionnées aux 1° à 5°, dès lors que ces informations sont nécessaires à celles-ci :

« 1° Prises de participation ou de contrôle dans un établissement de monnaie électronique ;

« 2° Cessions d’actifs ou de fonds de commerce ;

« 3° Cessions ou transferts de contrats ;

« 4° Contrats de prestations de services conclus avec un tiers en vue de lui confier des fonctions opérationnelles importantes ;

« 5° Lors de l’étude ou l’élaboration de tout type de contrats ou d’opérations, dès lors que ces entités appartiennent au même groupe que l’auteur de la communication.

« Outre les cas mentionnés aux 1° à 5°, les établissements de monnaie électronique peuvent communiquer des informations couvertes par le secret professionnel au cas par cas et uniquement lorsque les personnes concernées leur ont expressément permis de le faire.

« Les personnes recevant des informations couvertes par le secret professionnel qui leur ont été fournies pour les besoins d’une des opérations ci-dessus énoncées doivent les conserver confidentielles, que l’opération susvisée aboutisse ou non. Toutefois, dans l’hypothèse où l’opération susvisée aboutit, ces personnes peuvent à leur tour communiquer les informations couvertes par le secret professionnel, dans les mêmes conditions que celles visées au présent article, aux personnes avec lesquelles elles négocient, concluent ou exécutent les opérations énoncées ci-dessus.

« Art. L. 526-36. – L’article L. 232-1 du code de commerce est applicable aux établissements de monnaie électronique dans des conditions fixées par l’Autorité des normes comptables, après avis du comité consultatif de la législation et de la réglementation financières.

« Art. L. 526-37. – Lorsqu’ils établissent leurs comptes sous une forme consolidée, les établissements de monnaie électronique appliquent les règles définies par règlement de l’Autorité des normes comptables, pris après avis du comité consultatif de la législation et de la réglementation financières.

« Ils sont dispensés de se conformer à ces règles lorsqu’ils utilisent les normes comptables internationales adoptées par le règlement (CE) n° 1606/2002 du Parlement européen et du Conseil, du 19 juillet 2002, sur l’application des normes comptables internationales.

« Art. L. 526-38. – Tout établissement de monnaie électronique publie ses comptes annuels dans des conditions fixées par l’Autorité des normes comptables après avis du comité consultatif de la législation et de la réglementation financières.

« L’Autorité de contrôle prudentiel s’assure que les publications prévues au premier alinéa sont régulièrement effectuées. Elle peut ordonner à l’établissement de monnaie électronique de procéder à des publications rectificatives en cas d’inexactitudes ou d’omissions relevées dans les documents publiés.

« Elle peut porter à la connaissance du public toutes informations qu’elle estime nécessaires.

« Art. L. 526-39. – Les établissements de monnaie électronique sont tenus aux obligations des articles L. 511-38 et L. 511-39. Toutefois, lorsqu’ils exercent des activités de nature hybride au sens de l’article L. 526-3, l’avis de l’Autorité de contrôle prudentiel n’est pas requis pour la désignation de leurs commissaires aux comptes.

« Art. L. 526-40. – Lorsqu’ils exercent d’autres activités en application de l’article L. 526-3, les établissements de monnaie électronique établissent des informations comptables distinctes relatives aux activités d’émission et de gestion de monnaie électronique et aux services connexes opérationnels ou étroitement liés à l’émission et la gestion de monnaie électronique mentionnés à l’article L. 526-2, selon les règles définies par règlement de l’Autorité des normes comptables, pris après avis du comité consultatif de la législation et de la réglementation financières.

« Les informations comptables prévues au premier alinéa du présent article font l’objet d’un rapport d’audit établi par les commissaires aux comptes des établissements dans des conditions définies par voie réglementaire. » –

Adopté.

(Non modifié)

Le code monétaire et financier est ainsi modifié :

1° L’article L. 561-2 est ainsi modifié :

a) Après le 1° bis, il est inséré un 1° ter ainsi rédigé :

« 1° ter Les établissements de monnaie électronique régis par le chapitre VI du titre II du présent livre ; »

b) Le 11° est abrogé ;

2° L’article L. 561-3 est complété par un VI ainsi rédigé :

« VI. – Les établissements de paiement et les établissements de monnaie électronique ayant leur siège social dans un État membre de l’Union européenne ou dans un État partie à l’accord sur l’Espace économique européen qui recourent, pour exercer leur activité sur le territoire national, aux services d’un ou plusieurs agents ou à des personnes en vue de distribuer au sens de l’article L. 525-8 de la monnaie électronique, sont soumis aux sections 3 et 4 du présent chapitre et au chapitre II du présent titre.

« Chaque établissement désigne un représentant permanent, résidant sur le territoire national. Ce représentant permanent peut être désigné parmi les agents ou les personnes qui distribuent de la monnaie électronique au sens de l’article L. 525-8. Dans des conditions déterminées par décret, quand la nature ou le volume de l’activité exercée en France le justifient, l’Autorité de contrôle prudentiel peut demander à l’établissement que cette fonction soit exercée par une personne spécialement désignée à cet effet et à l’exclusion de toutes autres activités exercées pour le compte et au nom de l’établissement de paiement ou de l’établissement de monnaie électronique.

« Le représentant permanent procède au nom de l’établissement aux déclarations prescrites aux articles L. 561-15 et L. 561-15-1. Il répond aux demandes formulées par le service mentionné à l’article L. 561-23, en application des sections 3 et 4 du présent chapitre et du chapitre II du présent titre, ainsi qu’à toute demande émanant de l’Autorité de contrôle prudentiel, de l’autorité judiciaire et des officiers de police judiciaire. » ;

3° Après l’article L. 561-15, il est inséré un article L. 561-15-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 561-15-1. – Les personnes morales mentionnées aux 1°, 1° bis et 1° ter de l’article L. 561-2 ainsi que les établissements mentionnés au VI de l’article L. 561-3 déclarent au service mentionné à l’article L. 561-23 les éléments d’information relatifs aux opérations de transmission de fonds effectuées à partir d’un versement d’espèces ou au moyen de monnaie électronique. Un décret précise le seuil à partir duquel est requise une déclaration auprès du service à compétence nationale TRACFIN ainsi que les conditions et les modalités de cette déclaration. » ;

4° L’article L. 561-33 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Pour l’application du présent article, les agents mentionnés à l’article L. 523-1 et les personnes auxquelles les établissements de monnaie électronique ont recours en vue de distribuer de la monnaie électronique au sens de l’article L. 525-8 sont assimilés aux personnels des personnes mentionnées à l’article L. 521-1. » –

Adopté.

(Non modifié)

Le titre VII du livre V du code monétaire et financier est ainsi modifié :

1° À l’article L. 571-5, après le mot : « investissement, », sont insérés les mots : « des établissements de monnaie électronique, » ;

2° Le chapitre II est ainsi modifié :

a) L’intitulé est ainsi rédigé :« Prestataires de services de paiement, changeurs manuels et émetteurs de monnaie électronique » ;

b) Est ajoutée une section 3 ainsi rédigée :

« Section 3

« Émetteurs de monnaie électronique

« Art. L. 572-13. – Sans préjudice des dispositions des articles L. 525-5 et L. 525-6, la méconnaissance de l’interdiction prescrite par l’article L. 525-3 est punie de trois ans d’emprisonnement et de 375 000 € d’amende.

« Art. L. 572-14. – Les personnes physiques coupables de l’infraction prévue à l’article L. 572-13 encourent également les peines complémentaires suivantes :

« 1° L’interdiction des droits civiques, civils et de famille, suivant les modalités prévues à l’article 131-26 du code pénal ;

« 2° L’interdiction d’exercer une fonction publique ou d’exercer l’activité professionnelle ou sociale dans l’exercice ou à l’occasion de laquelle l’infraction a été commise, pour une durée de cinq ans au plus, suivant les modalités prévues à l’article 131-27 du même code ;

« 3° La fermeture, pour une durée de cinq ans au plus, des établissements ou de l’un ou plusieurs établissements de l’entreprise ayant servi à commettre les faits incriminés ;

« 4° La confiscation de la chose qui a servi ou était destinée à commettre l’infraction ou de la chose qui en est le produit, à l’exception des objets susceptibles de restitution ;

« 5° L’affichage ou la diffusion de la décision prononcée dans les conditions prévues aux articles 131-35 ou 131-39 du code pénal.

« Art. L. 572-15. – Les personnes morales déclarées pénalement responsables, dans les conditions prévues à l’article 121-2 du code pénal, de l’infraction prévue à l’article L. 572-13 du présent code encourent :

« 1° L’amende, suivant les modalités prévues à l’article 131-38 du code pénal ;

« 2° Les peines complémentaires mentionnées à l’article 131-39 du même code.

« L’interdiction mentionnée au 2° de ce même article 131-39 porte sur l’activité dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de laquelle l’infraction a été commise.

« Art. L. 572-16. – La méconnaissance de l’une des interdictions prescrites par l’article L. 525-7 est punie de trois ans d’emprisonnement et de 375 000 € d’amende.

« Le tribunal peut également ordonner l’affichage ou la diffusion de la décision prononcée dans les conditions prévues à l’article 131-39 du code pénal.

« Art. L. 572-17. – La méconnaissance par les personnes mentionnées à l’article L. 526-35 du secret professionnel est sanctionnée par les peines prévues à l’article 226-13 du code pénal.

« Art. L. 572-18. – Le fait, pour les dirigeants d’un établissement de monnaie électronique, de ne pas répondre, après mise en demeure, aux demandes d’informations de l’Autorité de contrôle prudentiel, de mettre obstacle de quelque manière que ce soit à l’exercice par celle-ci de sa mission de contrôle ou de lui communiquer des renseignements inexacts est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 € d’amende.

« Art. L. 572-19. – Le fait, pour les dirigeants d’un établissement de monnaie électronique, de ne pas, pour chaque exercice, dresser l’inventaire, établir des comptes annuels et un rapport de gestion dans les conditions prévues à l’article L. 526-36 est puni de 15 000 € d’amende.

« Art. L. 572-20. – Le fait, pour les dirigeants d’un établissement de monnaie électronique, de ne pas provoquer la désignation des commissaires aux comptes de l’établissement ou de ne pas les convoquer à toute assemblée générale est puni de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 € d’amende.

« Est puni de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 € d’amende le fait, pour tout dirigeant d’un établissement de monnaie électronique, ou pour toute personne au service de l’établissement, de mettre obstacle aux vérifications ou contrôles des commissaires aux comptes ou de leur refuser la communication sur place de toutes les pièces utiles à l’exercice de leur mission, et notamment de tous contrats, livres, documents comptables et registres de procès-verbaux.

« Art. L. 572-21. – Le fait, pour les dirigeants d’un établissement de monnaie électronique, de ne pas établir les comptes sous forme consolidée, en application de l’article L. 526-37, est puni de 15 000 € d’amende.

« Art. L. 572-22. – Le fait, pour les dirigeants d’un établissement de monnaie électronique, de ne pas publier les comptes annuels dans les conditions prévues à l’article L. 526-38 est puni de 15 000 € d’amende. » –

Adopté.

Section 6

Les institutions en matière bancaire et financière

(Conforme)

(Non modifié)

Le code monétaire et financier est ainsi modifié :

1° Au 2° du II de l’article L. 612-1, après la référence : « 4° », est insérée la référence : « et au 8° » ;

2° Le A du I de l’article L. 612-2 est ainsi modifié :

a) Après le 7°, il est inséré un 8° ainsi rédigé :

« 8° Les établissements de monnaie électronique. » ;

b) À la première phrase du dernier alinéa, la référence : « au 3° » est remplacée par les références : « aux 3° et 8° » ;

3° Au 8° de l’article L. 612-5, après le mot : « banque, », sont insérés les mots : « d’émission et de gestion de monnaie électronique, » ;

4° Le A du II de l’article L. 612-20 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, la référence : « et 4° » est remplacée par les références : «, 4° et 8° » ;

b) À la première phrase du 1°, après la référence : « L. 522-14 », est insérée la référence : «, L. 526-27 » ;

5° Au premier alinéa de l’article L. 612-21, après la référence : « L. 612-2 », sont insérées les références : « et aux articles L. 521-3 et L. 525-5 » ;

6° Après le 8° de l’article L. 612-26, il est inséré un 9° ainsi rédigé :

« 9° Aux agents et aux personnes auxquelles des fonctions opérationnelles importantes ou essentielles sont confiées. » ;

7° L’article L. 612-39 est ainsi modifié :

a) Aux 4° et 5°, les mots : « dans le cas d’un établissement de paiement exerçant des activités hybrides, des personnes déclarées responsables de la gestion des activités de services de paiement » sont remplacés par les mots : « dans le cas d’un établissement de paiement ou d’un établissement de monnaie électronique exerçant des activités hybrides, des personnes déclarées responsables, respectivement, de la gestion des activités de services de paiement ou des activités d’émission et de gestion de monnaie électronique » ;

b) (Suppression maintenue)

c) Au treizième alinéa, la référence : « et L. 522-15-1 » est remplacée par les références : «, L. 522-15-1 et L. 526-29 » ;

8° Au premier alinéa de l’article L. 612-43, après le mot : « manuels, », sont insérés les mots : « des établissements de monnaie électronique exerçant des activités de nature hybride, ». –

Adopté.

(Non modifié)

I. – L’intitulé du chapitre III du titre Ier du livre VI du code monétaire et financier est ainsi rédigé : « Dispositions spécifiques aux établissements de crédit, entreprises d’investissement, établissements de monnaie électronique et établissements de paiement ».

II. – L’intitulé de la section 2 du même chapitre III est ainsi rédigé : « Dispositions relatives au traitement des établissements de crédit, des établissements de monnaie électronique, des établissements de paiement et des entreprises d’investissement en difficulté ».

III. – L’intitulé de la sous-section 1 de la même section 2 est ainsi rédigé : « Mesures spécifiques à la sauvegarde, au redressement ou à la liquidation judiciaires des établissements de crédit, des entreprises d’investissement, des établissements de monnaie électronique et des établissements de paiement ».

IV. – Le premier alinéa de l’article L. 613-24 du même code est ainsi modifié :

1° Après les mots : « un établissement de crédit, », sont insérés les mots : « un établissement de monnaie électronique, » ;

2° La référence : « ou à l’article L. 521-2 » est remplacée par les références : «, à l’article L. 521-2 ou à l’article L. 525-3 ».

V. – Aux premier et deuxième alinéas de l’article L. 613-27 du même code, après les mots : « établissement de crédit, », sont insérés les mots : « d’un établissement de monnaie électronique, ».

VI. – Au premier alinéa de l’article L. 613-29 du même code, après les mots : « établissement de crédit, », sont insérés les mots : « d’un établissement de monnaie électronique, ».

VII. – À l’article L. 613-30-1 du même code, avant le dernier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Le présent article s’applique aux fonds collectés au profit d’un établissement de monnaie électronique en vue de la fourniture de services de paiement. »

VIII. – Après l’article L. 613-30-1 du code monétaire et financier, il est inséré un article L. 613-30-2 ainsi rédigé :

« Art. L. 613-30-2. – L’ouverture d’une procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaires ainsi que toute procédure d’exécution et toute procédure judiciaire équivalente ouverte sur le fondement d’un droit étranger à l’encontre d’un établissement de monnaie électronique n’affectent pas les fonds collectés des détenteurs de monnaie électronique déposés ou investis en instruments financiers conservés dans les comptes ouverts spécialement à cet effet dans les conditions prévues à l’article L. 526-32.

« En cas d’ouverture d’une procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaires d’un établissement de monnaie électronique, l’administrateur judiciaire ou le liquidateur, conjointement avec l’administrateur provisoire ou le liquidateur nommé, le cas échéant, par l’Autorité de contrôle prudentiel, vérifie que les fonds collectés en contrepartie de l’émission de monnaie électronique déposés ou investis en instruments financiers conservés dans des comptes ouverts spécialement à cet effet dans les conditions prévues à l’article L. 526-32 sont suffisants pour que l’établissement de monnaie électronique puisse remplir ses obligations vis-à-vis de ses détenteurs. En cas d’insuffisance de ces fonds, il est procédé à une répartition proportionnelle des fonds déposés entre ces détenteurs. Ces fonds sont restitués aux détenteurs qui sont dispensés de la déclaration prévue à l’article L. 622-24 du code de commerce.

« Pour la créance correspondant aux fonds dont la disposition n’aura pu être rendue à ces détenteurs, en raison de l’insuffisance constatée, ceux-ci sont dispensés de la déclaration prévue au même article L. 622-24.

« Le juge commissaire est informé du résultat de la vérification opérée par l’administrateur judiciaire ou le liquidateur et, le cas échéant, de la répartition proportionnelle des fonds.

« Un décret en Conseil d’État précise les conditions d’application du présent article. »

IX. – La section 3 du chapitre III du titre Ier du livre VI du même code est complétée par un article L. 613-33-3 ainsi rédigé :

« Art. L. 613-33-3. – Sous réserve de la surveillance exercée par les autorités compétentes mentionnées au 1° de l’article L. 526-21, l’Autorité de contrôle prudentiel est chargée de contrôler le respect, par les personnes mentionnées aux articles L. 526-25 et L. 526-26, des dispositions législatives et réglementaires qui leur sont applicables. Elle peut examiner les conditions d’exercice de leur activité d’émission et de gestion de monnaie électronique et l’adéquation de leur situation financière à cette activité.

« Elle exerce sur ces établissements les pouvoirs de contrôle et de sanction définis aux sections 5 à 7 du chapitre II du présent titre. La radiation prévue au 7° de l’article L. 612-39 s’entend comme une interdiction faite à l’établissement de monnaie électronique d’émettre de la monnaie électronique sur le territoire de la République française.

« Lorsqu’un établissement mentionné aux articles L. 526-25 et L. 526-26 fait l’objet d’un retrait d’agrément ou d’une mesure de liquidation, l’Autorité de contrôle prudentiel prend les mesures nécessaires pour l’empêcher de commencer de nouvelles opérations sur le territoire de la République française et pour assurer la protection des détenteurs de monnaie électronique.

« Un décret en Conseil d’État détermine les procédures que suit l’Autorité de contrôle prudentiel dans l’exercice des responsabilités et des missions qui lui sont confiées par le présent article. Il détermine, en particulier, les modalités de l’information des autorités compétentes mentionnées au 1° de l’article L. 526-21. » –

Adopté.

(Conformes)

Chapitre II

Dispositions modifiant le code de commerce

(Conforme)

Chapitre III

Dispositions modifiant le code de la consommation

(Non modifié)

Le code de la consommation est ainsi modifié :

1° Au dernier alinéa de l’article L. 113-3, après le mot : « crédit, », sont insérés les mots : « les établissements de monnaie électronique, » ;

2° Au dernier alinéa de l’article L. 122-1, après le mot : « crédit, », sont insérés les mots : « les établissements de monnaie électronique, » ;

3° Au début de l’article L. 313-10, après les mots : « Un établissement de crédit, », sont insérés les mots : « un établissement de monnaie électronique, » ;

4° L’article L. 331-3 est ainsi modifié :

a) À la première phrase du deuxième alinéa du I, après le mot : « paiement », sont insérés les mots : «, aux établissements de monnaie électronique » ;

a bis) Au dernier alinéa du I, après le mot : « crédit », sont insérés les mots : «, l’établissement de monnaie électronique » ;

b) Au cinquième alinéa du II, après le mot : « crédit, », sont insérés les mots : « des établissements de monnaie électronique, » ;

5° À la première phrase du second alinéa de l’article L. 331-11, après le mot : « paiement », sont insérés les mots : «, aux établissements de monnaie électronique » ;

6° Le I de l’article L. 333-4 est ainsi modifié :

a) À la première phrase du deuxième alinéa, après la référence : « livre V du code monétaire et financier, », sont insérés les mots : « aux établissements de monnaie électronique et » ;

b) Au troisième alinéa, après le mot : « crédit », sont insérés les mots : «, des établissements de monnaie électronique » ;

7° À la seconde phrase de l’article L. 534-7, la référence : « L. 315-1 » est remplacée par la référence : « L. 316-1 ». –

Adopté.

Chapitre IV

Dispositions modifiant le livre des procédures fiscales

(Conforme)

Chapitre V

Dispositions transitoires et finales

(Non modifié)

Les établissements de crédit agréés, avant la promulgation de la présente loi, en qualité de société financière et dont l’activité est limitée à l’émission, la mise à la disposition du public ou la gestion de monnaie électronique sont réputés être titulaires de l’agrément d’établissement de monnaie électronique et respecter les exigences fixées aux articles L. 526-8 et L. 526-9 du code monétaire et financier. Ils mettent leurs statuts en conformité avec les exigences relatives à la qualité d’établissement de monnaie électronique dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi. –

Adopté.

(Non modifié)

Les établissements de crédit, autres que ceux mentionnés à l’article 25, peuvent opter, dans les six mois à compter de la promulgation de la présente loi, pour le statut d’établissement de monnaie électronique mentionné au chapitre VI du titre II du livre V du code monétaire et financier. Ils notifient leur choix à l’Autorité de contrôle prudentiel en précisant les opérations qu’ils souhaitent fournir ainsi que, le cas échéant, le maintien des formalités de reconnaissance mutuelle de leur agrément effectuées sous le statut d’établissement de crédit. L’Autorité de contrôle prudentiel se prononce dans un délai de deux mois à compter de la réception de la notification.

À défaut d’une telle notification, ils sont réputés garder le statut d’établissement de crédit à l’issue du délai d’option.

Lorsqu’ils optent pour le statut d’établissement de monnaie électronique et ont fourni à l’Autorité de contrôle prudentiel la preuve du respect des exigences fixées aux articles L. 526-8 et L. 526-9 du même code, les établissements de crédit sont réputés être titulaires de l’agrément pour exercer l’ensemble des opérations notifiées sur le territoire de la République, ainsi que, le cas échéant, dans les autres États membres de l’Union européenne ou dans les autres États parties à l’accord sur l’Espace économique européen. Ils mettent leurs statuts en conformité avec les exigences relatives au statut d’établissement de monnaie électronique. –

Adopté.

(Non modifié)

Les articles 25 et 26 sont également applicables aux entreprises qui ont fait l’objet d’une décision d’agrément sous conditions suspensives. Les conditions suspensives prévues avant la promulgation de la présente loi sont maintenues en l’état et conditionnent l’agrément substitué. –

Adopté.

(Non modifié)

L’Autorité de contrôle prudentiel peut demander à un établissement de crédit agréé avant la promulgation de la présente loi qui n’effectue pas d’opérations de banque au sens de l’article L. 311-1 du code monétaire et financier à la date de promulgation de la présente loi et qui n’a pas souhaité bénéficier des dispositions de l’article 25 de lui présenter toutes les informations de nature à justifier cette situation. –

Adopté.

(Non modifié)

Les établissements de crédit habilités à agir sur le territoire national qui, à la date de promulgation de la présente loi, ont recours à des intermédiaires en opérations de banque et en services de paiement pour distribuer de la monnaie électronique se mettent en conformité avec les articles L. 525-8 et suivants du code monétaire et financier dans un délai de trois mois à compter de la promulgation de la présente loi. –

Adopté.

(Conforme)

(Non modifié)

Les entreprises qui bénéficient, à la date de promulgation de la présente loi, d’une exemption accordée au titre du II de l’article L. 511-7 du code monétaire et financier, dans une version antérieure à la présente loi, confirment dans les douze mois qui suivent la promulgation de la présente loi, auprès de l’Autorité de contrôle prudentiel, qu’elles satisfont aux ou se mettent en conformité avec les exigences fixées aux articles L. 525-5 et L. 525-6 ou à l’article L. 526-7 du même code. –

Adopté.

(Non modifié)

La présente loi, à l’exception des articles 7 et 14, s’applique aux contrats liant l’établissement émetteur et le détenteur de monnaie électronique conclus avant la promulgation de la présente loi.

Les clauses des contrats contraires à la présente loi sont caduques à compter de la même date.

Les établissements émetteurs informent, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, leurs clients ne disposant pas d’un contrat mis en conformité avec la présente loi de la mise à leur disposition à leurs guichets ou, au besoin, par tout autre moyen approprié, d’un contrat mis à jour et de la possibilité d’en recevoir un exemplaire sur support papier sur simple demande lorsque le contrat a été conclu avant la promulgation de la présente loi.

Les établissements émetteurs sont tenus de mettre les contrats les liant à leurs clients détenteurs de monnaie électronique en conformité avec la présente loi dans les six mois à compter de sa promulgation.

Lorsqu’un contrat est conclu dans les six mois à compter de la promulgation de la présente loi, les établissements émetteurs qui n’ont pas été en mesure d’adapter leurs nouveaux contrats sont tenus de fournir une information écrite à leurs clients sur les conséquences des dispositions introduites par la présente loi et préciser qu’elles s’appliquent immédiatement au contrat. –

Adopté.

(Non modifié)

Les sanctions mentionnées aux articles 7 et 14 ne peuvent être prononcées qu’à raison de la méconnaissance des obligations mentionnées soit à l’article L. 351-1 du code monétaire et financier, soit aux articles L. 572-13 à L. 572-22 du même code intervenue postérieurement à la promulgation de la présente loi et, pour les contrats en cours à cette date ou nouveaux, six mois après cette promulgation. –

Adopté.

TITRE II

TRANSPOSITION DE LA DIRECTIVE « OMNIBUS I » RELATIVE AUX COMPÉTENCES DES AUTORITÉS EUROPÉENNES DE SUPERVISION

(Non modifié)

Le code monétaire et financier est ainsi modifié :

1° À la seconde phrase du deuxième alinéa du I de l’article L. 330-1, les mots : « la Commission européenne » sont remplacés par les mots : « l’Autorité européenne des marchés financiers » ;

bis (Suppression maintenue)

2° L’article L. 613-20-4 est ainsi modifié :

a) La seconde phrase du premier alinéa est supprimée ;

b) Les deux dernières phrases du deuxième alinéa sont supprimées ;

b bis) Après le deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Pour l’application des deux premiers alinéas, dans le cas où l’une des autorités compétentes concernées a saisi l’Autorité bancaire européenne, l’Autorité de contrôle prudentiel suspend sa décision dans l’attente de celle de l’Autorité bancaire européenne. Dans le cas contraire, l’Autorité de contrôle prudentiel se prononce et communique la décision prise aux autorités compétentes concernées. » ;

c) La dernière phrase du dernier alinéa est remplacée par deux phrases ainsi rédigées :

« L’Autorité de contrôle prudentiel peut saisir l’Autorité bancaire européenne. Si aucune autorité n’a saisi l’Autorité bancaire européenne, la décision de l’autorité chargée de la surveillance sur base consolidée est applicable en France dès sa communication à l’Autorité de contrôle prudentiel. » ;

d) §(Suppression maintenue)

3° À l’article L. 613-20-5, après les mots : « ces États », sont insérés les mots : «, l’Autorité bancaire européenne et le Comité européen du risque systémique » ;

4° §(Suppression maintenue)

5° L’article L. 621-8-3 est ainsi modifié :

a) Le premier alinéa est complété par les mots : « et l’Autorité européenne des marchés financiers. » ;

b) Au deuxième alinéa, le mot : « violer » est remplacé par le mot : « enfreindre » et, après le mot : « document », sont insérés les mots : « et l’Autorité européenne des marchés financiers » ;

c) Au dernier alinéa, après les mots : « Commission européenne », sont insérés les mots : « et l’Autorité européenne des marchés financiers » ;

6° Après la sous-section 1 de la section 1 du chapitre II du titre III du livre VI, est insérée une sous-section 1 bis ainsi rédigée :

« Sous-section 1 bis

« Coopération et échanges d’informations avec les autorités européennes de supervision

« Art. L. 632-6-1. – Par dérogation aux dispositions de la loi n° 68-678 du 26 juillet 1968 relative à la communication de documents et renseignements d’ordre économique, commercial, industriel, financier ou technique à des personnes physiques ou morales étrangères, l’Autorité de contrôle prudentiel et l’Autorité des marchés financiers coopèrent avec l’Autorité européenne des marchés financiers, instituée par le règlement (UE) n° 1095/2010 du Parlement européen et du Conseil, du 24 novembre 2010, instituant une Autorité européenne de surveillance (Autorité européenne des marchés financiers), l’Autorité bancaire européenne, instituée par le règlement (UE) n° 1093/2010 du Parlement européen et du Conseil, du 24 novembre 2010, instituant une autorité européenne de surveillance (Autorité bancaire européenne), l’Autorité européenne des assurances et des pensions professionnelles, instituée par le règlement (UE) n° 1094/2010 du Parlement européen et du Conseil, du 24 novembre 2010, instituant une autorité européenne de surveillance (Autorité européenne des assurances et des pensions professionnelles) et le Comité européen du risque systémique, institué par le règlement (UE) n° 1092/2010 du Parlement européen et du Conseil, du 24 novembre 2010, relatif à la surveillance macroprudentielle du système financier dans l’Union européenne et instituant un Comité européen du risque systémique, et échangent avec eux les informations utiles à l’accomplissement de leurs missions, dans le respect des conditions posées dans les règlements les ayant institués. L’Autorité de contrôle prudentiel et l’Autorité des marchés financiers peuvent, à cet effet, transmettre des informations couvertes par le secret professionnel. » ;

7° À la fin de la seconde phrase du second alinéa de l’article L. 633-1, les mots : « la Commission européenne » sont remplacés par les mots : « le comité mixte des autorités européennes de surveillance » ;

8° Après le mot : « France », la fin de l’article L. 633-9 est ainsi rédigée : « appartenant à un conglomérat financier est tenue de transmettre aux autorités européennes de surveillance les informations utiles à l’accomplissement de leurs missions. Si le coordonnateur est une autorité d’un État membre ou d’un autre État partie à l’accord sur l’Espace économique européen, elle est tenue de transmettre au coordonnateur, à sa demande, toute information pouvant intéresser la surveillance complémentaire. » ;

9° Le premier alinéa de l’article L. 633-14 est ainsi modifié :

a) À la première phrase, la référence : « L. 334-9 » est remplacée par la référence : « L. 633-2 » ;

b) Est ajoutée une phrase ainsi rédigée :

« Si une autorité compétente concernée saisit l’Autorité bancaire européenne ou l’Autorité européenne des assurances et des pensions professionnelles, l’Autorité de contrôle prudentiel suspend sa décision et prend une décision conforme à celle retenue par l’autorité saisie. » –

Adopté.

TITRE II bis

MISE EN COHÉRENCE DU CODE MONÉTAIRE ET FINANCIER AVEC CERTAINS ASPECTS DU DROIT EUROPÉEN EN MATIÈRE FINANCIÈRE

(Non modifié)

Le code monétaire et financier est ainsi modifié :

1° L’article L. 544-4 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, les mots : « pour l’enregistrement et la supervision des agences de notation de crédit au sens de l'article 22 », sont remplacés par les mots : « au sens » ;

b) Le second alinéa est supprimé ;

2° Le 5° du II de l’article L. 621-5-3 est abrogé ;

3° Le XI de l’article L. 621-7 est abrogé ;

4° Le II de l’article L. 621-9 est ainsi modifié :

a) Le 16° est abrogé ;

b) À l’avant-dernier alinéa, les références : «, 11° et 16° ci-dessus » sont remplacées par la référence : « et 11° du présent II ». –

Adopté.

(Conforme)

TITRE III

LUTTE CONTRE LES RETARDS DE PAIEMENT DANS LES CONTRATS DE LA COMMANDE PUBLIQUE

(Non modifié)

Les sommes dues en principal par un pouvoir adjudicateur, y compris lorsqu’il agit en qualité d’entité adjudicatrice, en exécution d’un contrat ayant pour objet l’exécution de travaux, la livraison de fournitures ou la prestation de services, avec une contrepartie économique constituée par un prix ou un droit d’exploitation, ou la délégation d’un service public, sont payées, en l’absence de délai prévu au contrat, dans un délai fixé par décret qui peut être différent selon les catégories de pouvoirs adjudicateurs.

Le délai de paiement prévu au contrat ne peut excéder le délai fixé par décret. –

Adopté.

(Conformes)

TITRE IV

DISPOSITIONS RELATIVES À L’OUTRE-MER

(Non modifié)

Dans un délai de neuf mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnances, dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, les mesures de nature législative permettant :

1° D’une part, de rendre applicables, avec les adaptations nécessaires, les dispositions de la présente loi concernant la monnaie électronique, les établissements de monnaie électronique et la surveillance prudentielle de ces établissements en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna, pour celles qui relèvent de la compétence de l’État, ainsi que de procéder aux adaptations nécessaires en ce qui concerne les collectivités de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin et de Saint-Pierre-et-Miquelon ;

2° D’autre part, de rendre applicables, avec les adaptations nécessaires, les dispositions de la présente loi relatives aux compétences des autorités européennes de supervision en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna, pour celles qui relèvent de la compétence de l’État, ainsi que de procéder aux adaptations nécessaires en ce qui concerne les collectivités de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin et de Saint-Pierre-et-Miquelon.

Les projets de loi portant ratification de ces ordonnances sont déposés devant le Parlement au plus tard le dernier jour du troisième mois suivant la publication des ordonnances. –

Adopté.

(Conforme)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

Personne ne demande la parole ?...

Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.

Le projet de loi est adopté définitivement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à dix-sept heures quarante-cinq, est reprise à vingt-et-une heures trente.