Amendement N° 55 (Retiré avant séance)

Commission mixte paritaire

Discuté en séance le 11 octobre 2016
Avis de la Commission : Défavorable
( amendements identiques : 9 10 13 15 17 31 61 63 69 139 161 172 327 331 354 425 442 463 577 594 601 604 607 608 609 610 660 665 679 686 690 693 742 )

Déposé le 20 septembre 2016 par : M. Kaltenbach.

Photo de Philippe Kaltenbach 

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

La loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse est ainsi modifiée :

1° Le cinquième alinéa de l’article 24 est ainsi modifié :

a) Après le mot : « humanité », sont insérés les mots : «, des crimes de réduction en esclavage ou d’exploitation d’une personne réduite en esclavage » ;

b) Sont ajoutés les mots : «, y compris si ces crimes n’ont pas donné lieu à la condamnation de leurs auteurs » ;

2° Après le premier alinéa de l’article 24 bis, sont insérés trois alinéas ainsi rédigés :

« Seront punis des mêmes peines ceux qui auront nié, minoré ou banalisé de façon outrancière, par un des moyens énoncés à l’article 23, l’existence d’un crime de génocide autre que ceux mentionnés au premier alinéa du présent article, d’un autre crime contre l’humanité, d’un crime de réduction en esclavage ou d’exploitation d’une personne réduite en esclavage ou d’un crime de guerre défini aux articles 6, 7 et 8 du statut de la Cour pénale internationale signé à Rome le 18 juillet 1998 et aux articles 211-1 à 212-3, 224-1 A à 224-1 C et 461-1 à 461-31 du code pénal, lorsque :
« 1° Ce crime a donné lieu à une condamnation prononcée par une juridiction française ou internationale ;
« 2° Ou la négation, la minoration ou la banalisation de ce crime constitue une incitation à la violence ou à la haine à l’égard d’un groupe de personnes ou d’un membre d’un tel groupe défini par référence à la prétendue race, la couleur, la religion, l’ascendance ou l’origine nationale. » ;

3° Après l’article 48-1, il est inséré un article 48-1-1 ainsi rédigé :

« Art. 48-1-1. - Toute association régulièrement déclarée depuis au moins cinq ans se proposant, par ses statuts, de lutter contre l’esclavage ou de défendre la mémoire des esclaves et l’honneur de leurs descendants peut exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne les infractions d’apologie, de négation, de minoration ou de banalisation des crimes de réduction en esclavage ou d’exploitation d’une personne réduite en esclavage prévues aux articles 24 et 24 bis.
« Toutefois, quand l’infraction a été commise envers des personnes considérées individuellement, l’association n’est recevable dans son action que si elle justifie avoir reçu l’accord de ces personnes ou si elle justifie que ces personnes ne s’opposent pas aux poursuites. »

Exposé Sommaire :

La lutte contre les discriminations doit être une priorité. Elle passe par la reconnaissance de ses formes les plus extrêmes, que sont les crimes contre l’humanité, notamment les crimes de génocide et d’esclavage.

La spécificité de ces crimes impose qu’ils puissent être jugés et reconnus par la justice aussi longtemps que leurs auteurs subsistent, c’est la raison pour laquelle ils sont imprescriptibles. Elle implique également de lutter, au-delà, contre leur négation ou leur banalisation.

La remise en cause de ces crimes, qu’il s’agisse de génocides, de traite et d’esclavage ou de tout autre crime contre l’humanité, lorsqu’elle contredit des faits qui ont été jugés et reconnus par la justice, ou lorsqu’elle incite à la haine ou à la violence, ne peut en effet être tolérée.

Le député Victorin Lurel a souhaité apporter une amélioration importante lors de l’examen du texte en commission à l’Assemblée nationale, en élargissant le champ de la répression de la contestation ou de la banalisation des crimes contre l’humanité, aujourd’hui limitée à la négation de la Shoah, à l’ensemble de ces crimes et notamment à la traite et à l’esclavage.

Le Gouvernement qui partage cet objectif et soutient cette démarche avait souhaité en conséquence garantir le meilleur niveau de sécurité juridique sur une question délicate, ainsi que l’ont montré une décision du Conseil constitutionnel en 2012 et un avis du Conseil d’Etat en 2013.

C’est dans cette logique que le Gouvernement avait déposé un amendement qui a conduit à la mise en place de l’article 38 ter tel qu’il a été adopté par l’Assemblée nationale.

Ce dernier ayant été supprimé par la commission spéciale au Sénat, l’amendement présent vise à le rétablir.

Cet amendement, en rétablissement l’article 38 ter, aura pour conséquences :

- De mieux distinguer l’apologie des crimes contre l’humanité, qui relève de l’article 24 de la loi sur la presse, qu’il convient donc de compléter pour y mentionner l’esclavage, de leur négation. Il convient par ailleurs de préciser que pour les apologies de l’article 24, il n’est pas exigé que les auteurs des crimes aient été condamnés.

- De mieux définir le délit de négation ou de banalisation de ces crimes en respectant à la fois les exigences constitutionnelles et la décision-cadre 2008/913/JAI du 28 novembre 2008 sur la lutte contre certaines formes et manifestations de racisme et de xénophobie au moyen du droit pénal. Deux hypothèses sont ainsi prévues : soit les crimes ont fait l’objet d’une condamnation prononcée par une juridiction internationale ou par une juridiction française, soit la négation ou la banalisation de ces crimes est exercée d’une manière qui incite à la violence ou à la haine.

Alors que seule la négation de la Shoah est aujourd’hui réprimée, ce texte permettra de sanctionner la contestation ou la banalisation de l’ensemble des crimes contre l’humanité ou des crimes de guerre, de manière non limitative, dès lors qu’ils auront été reconnus par une juridiction. Il permettra, au-delà et de manière plus générale, de prendre en compte des crimes historiquement reconnus, même si leur ancienneté exclut de fait toute possibilité pour la justice de se prononcer, lorsque leur contestation ou leur banalisation sera commise dans des conditions incitant à la haine ou à la violence.

- De permettre aux associations de lutte contre l’esclavage ou de défense la mémoire des esclaves et l’honneur de leurs descendants de se constituer partie civile dans des procédures visant ces délits.

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