La commission a procédé à l'audition de Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi, et de M. Alain Marleix, secrétaire d'Etat à l'intérieur et aux collectivités territoriales, sur le projet de suppression de la taxe professionnelle et la réforme des finances locales.
a rappelé que le projet de loi de finances pour 2010 inclura une importante réforme des finances locales et une suppression de la taxe professionnelle, ce qui explique que cette audition se déroule en commission élargie à l'ensemble des sénateurs. Il a relevé que les ultimes arbitrages ne sont pas encore rendus, en raison du report d'une semaine, soit au 30 septembre, de la présentation du projet de loi de finances pour 2010 en conseil des ministres.
Après avoir salué la présence de nombreux sénateurs, Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi, a souligné l'ambition de cette réforme, qui ne se limite pas à la taxe professionnelle et prévoit une simplification et une spécialisation des finances locales. Conformément à l'engagement pris par le Président de la République, la suppression, à compter de 2010, de la taxe professionnelle sur les équipements productifs, impôt peu efficace et facteur de délocalisations, contribuera à soutenir l'investissement. En outre, le calendrier sera propice puisque la réforme devrait intervenir au moment où les entreprises bénéficieront d'une légère reprise de l'activité et d'une reconstitution de leur trésorerie.
Evoquant les engagements formulés par le Premier ministre, elle a indiqué que le projet respectera pleinement le principe constitutionnel d'autonomie financière des collectivités territoriales et maintiendra un lien étroit entre les entreprises et les territoires par l'affectation d'une recette dynamique pesant sur les entreprises, la cotisation économique territoriale, qui comportera une part foncière et une fraction assise sur la valeur ajoutée. La nouvelle ventilation des recettes entre collectivités se veut la plus simple possible : sous réserve d'arbitrages encore à rendre, les impositions correspondant aux « quatre vieilles », dont l'actuelle part foncière de la taxe professionnelle, seront affectées aux communes, et la nouvelle cotisation sur la valeur ajoutée aux départements et régions.
a ensuite rappelé les récentes étapes de la réforme. Après la remise du rapport du comité présidé par M. Edouard Balladur, un premier projet a été présenté le 10 avril 2009 et a fait l'objet de critiques variées. De nombreuses consultations des représentants des collectivités territoriales et des entreprises ainsi qu'un travail technique approfondi durant l'été ont permis d'aboutir au présent projet, dont elle a exposé les grands principes.
Elle a précisé que la suppression de la taxe professionnelle sur les équipements et biens mobiliers sera effective à compter du 1er janvier 2010, ce qui représente une perte de recettes de 22 milliards d'euros pour les collectivités territoriales et une baisse brute de dépense de 15 milliards d'euros pour l'Etat. La composante foncière de la taxe professionnelle sera cependant reprise dans la nouvelle cotisation locale d'activité, et une cotisation complémentaire aura pour assiette la valeur ajoutée. Elle a rappelé son engagement que la part foncière n'augmente pas, la diminution devant être de l'ordre de 15 % pour les établissements industriels. Si un lien a été initialement envisagé entre les deux composantes de la contribution économique territoriale, la taxe locale d'activité sera bien « découplée » de la cotisation complémentaire, dont les taux seront fixés au niveau national et dont l'assiette sera dynamique.
Elle a indiqué que le niveau des recettes des collectivités territoriales demeurera cependant inchangé, grâce à une double compensation :
- d'une part, le transfert d'impôts aujourd'hui perçus par l'Etat, tels que la cotisation minimale de taxe professionnelle, une partie des frais d'assiette et de recouvrement, la taxe sur les conventions d'assurance, la taxe sur les surfaces commerciales et la part des droits de mutation à titre onéreux, qui revient actuellement à l'Etat, et qui sera transférée aux communes ;
- d'autre part, une augmentation des dotations budgétaires, dans une proportion toutefois largement inférieure à la limite permise par le principe constitutionnel d'autonomie financière des collectivités territoriales.
Rappelant que la taxe professionnelle est aujourd'hui répartie entre six niveaux de bénéficiaires et que sa suppression entraînera mécaniquement celle des dégrèvements de l'Etat, Mme Christine Lagarde a défendu le principe d'une meilleure spécialisation des impôts locaux, dont les modalités pourront néanmoins être aménagées.
Elle a ensuite exposé que la charge fiscale pesant sur les entreprises sera globalement allégée de 4 à 5 milliards d'euros, en montant brut. Elle a annoncé que le gain sera toutefois atténué pour les entreprises susceptibles de bénéficier largement de la réforme, en particulier dans les secteurs des transports et de l'énergie, par un relèvement de certaines taxes sectorielles. Tous les secteurs d'activité seront « gagnants » ou verront leur situation inchangée, comme par exemple le secteur financier. Dans le détail, environ 70 000 entreprises ont été identifiées comme perdantes, dont 42 000 dans d'assez grandes proportions en valeur absolue ou relative.
Elle a ajouté que les entreprises réalisant moins de 500 000 euros de chiffre d'affaires seront exonérées de la cotisation complémentaire sur la valeur ajoutée. Le taux applicable sera ensuite progressif jusqu'au seuil de 50 millions d'euros, puis s'établira à 1,5 % de la valeur ajoutée au-delà. Enfin, elle a entendu apaiser d'éventuelles inquiétudes sur une réintroduction de l'assiette des salaires par l'intermédiaire de la valeur ajoutée, en précisant que la charge fiscale pesant sur cette dernière diminuera en valeur absolue, passant de 14,7 milliards d'euros à 12,1 milliards d'euros.
a observé l'ampleur de la réforme et souligné la mutation profonde que connaîtra le pouvoir fiscal des régions et des départements. Il a néanmoins relevé un risque d'incompréhension sur le taux effectif d'imposition de la valeur ajoutée. Dans la mesure où celle-ci inclut notamment les amortissements, les salaires et les cotisations sociales patronales, le taux plafond de 1,5 % représentera en réalité un prélèvement d'environ 2,5 % sur les salaires bruts, ce qui pourrait être un facteur de délocalisation.
En réponse, Mme Christine Lagarde a indiqué que la valeur ajoutée a été considérée par la grande majorité des entreprises et des élus locaux comme la meilleure assiette fiscale possible. Sa définition sera par ailleurs améliorée, en particulier pour les activités de services financiers, dans le sens d'une plus grande justice fiscale. Des dispositifs particuliers pourront également être mis en place afin d'alléger la charge que représentera la contribution complémentaire pour certaines entreprises, par exemple les petites entreprises d'intérim qui, actuellement, ne paient pas de taxe professionnelle.
Enfin, elle a rappelé que l'objectif n'est pas de brider l'emploi en contrepartie de l'allégement de la charge pesant sur les investissements mais que la question du niveau des charges sociales est un autre débat, qui pourra éventuellement être abordé dans le cadre de la contribution climat-énergie.
a rappelé que, si la consultation des associations d'élus est un point positif, seuls les membres du Parlement possèdent la légitimité pour voter la réforme proposée. Celle-ci pose deux séries de questions :
- si les entreprises sont gagnantes et que les collectivités territoriales n'y perdent pas, quel sera le coût de la réforme et sur qui pèsera-t-il ? Quel sera son impact sur le déficit public ?
- comment se forger une opinion sur cette réforme sans chiffres détaillés sur ses effets ? Pour les entreprises comme pour les collectivités territoriales, il conviendra de fournir des simulations très précises permettant de déterminer, par taille et nature d'activité ou par strate démographique, les perdants et les gagnants.
a affirmé tenir à la disposition de l'ensemble des sénateurs un ensemble de simulations. En ce qui concerne les entreprises, tous les secteurs macroéconomiques seront gagnants suite à la réforme. Les activités financières seront les moins bénéficiaires tandis que les secteurs les plus favorisés seront le bâtiment-travaux publics, les transports, les services aux entreprises et l'industrie agroalimentaire.
En termes de taille des entreprises, celles qui profiteront le plus de la réforme seront celles dont le chiffre d'affaires est compris entre 1 et 3 millions d'euros, les moins favorisées celles dont le chiffre d'affaires est supérieur à 7,6 millions d'euros.
Puis, Mme Christine Lagarde a détaillé l'équilibre global de la réforme pour les finances publiques :
- le coût avant impôt sur les sociétés est de 7,1 milliards d'euros ;
- net d'impôt sur les sociétés, ce coût s'élève à 5,5 milliards d'euros ;
- les mesures spécifiques portant sur les « super-gagnants » de la réforme devraient rapporter 1,125 milliard d'euros supplémentaires, net d'impôt sur les sociétés (1,5 milliard brut) ;
- enfin, les mesures visant les quelques perdants de la réforme, qui restent à arbitrer, pourraient coûter 440 millions d'euros ;
- soit un coût global de la réforme d'environ 4,8 milliards d'euros.
Elle a rappelé que parallèlement sera mise en place une contribution climat-énergie, que M. Philippe Marini, rapporteur général, a souhaité ne pas mêler au débat sur la taxe professionnelle.
a rappelé la nécessité que les économies réalisées par les entreprises grâce à cette réforme soient répercutées sur les prix afin de produire de réels gains de compétitivité. Il a ainsi mis en doute le relèvement mécanique des rentrées d'impôt sur les sociétés évoqué par la ministre.
En réponse à M. Philippe Marini, rapporteur général, M. Alain Marleix, secrétaire d'Etat à l'intérieur et aux collectivités territoriales, a indiqué que les instructions ont été données à ses services pour que toutes les simulations soient fournies dès les derniers arbitrages rendus.
a souligné que la réforme des finances locales est un élément majeur de la réforme des collectivités territoriales. Les dépenses sociales représentent environ 40 % des dépenses des départements et sont très dynamiques. Or, le projet actuel réduirait de 35 % à 12 % voire à 10 % la part des recettes des départements sur lesquels ceux-ci ont une marge de manoeuvre. Faire face à la croissance des dépenses sociales impliquerait donc d'augmenter les impôts locaux de 30 % ou de réduire les autres dépenses, cet effort paraissant impossible. Des doutes pèsent par ailleurs sur le dynamisme supposé des nouveaux impôts affectés aux départements. La réforme risque donc de faire des élus départementaux de simples « agents de l'Etat ».
a fait part de la vive inquiétude des élus locaux quant à cette réforme, qui implique de revoir l'ensemble des finances locales puisqu'elle a un impact sur la notion de potentiel fiscal et sur les coefficients d'intégration fiscale. Elle impliquera par ailleurs des changements brutaux, potentiellement inéquitables, pour les collectivités territoriales.
Un vrai système de compensation, différent des dispositifs insatisfaisants ayant été mis en place jusqu'à aujourd'hui, devra être créé. Enfin, il sera difficile pour les établissements publics de coopération intercommunale ayant massivement investi pour le développement économique de leur territoire d'en retirer à l'avenir de moindres ressources fiscales.
a souhaité obtenir plusieurs précisions sur le niveau de plafonnement de la contribution économique territoriale, sur les conséquences de la réforme sur les mécanismes de péréquation, et sur les modalités de fonctionnement du fonds national de garantie des ressources.
L'ampleur de la réforme risque de rendre caducs les travaux du Sénat sur la réforme des collectivités territoriales. Enfin, comment peut-on affirmer que l'autonomie financière des collectivités territoriales sera respectée alors que les départements n'auront plus de marge de manoeuvre que sur 12 % de leurs ressources fiscales et les régions plus aucune capacité de fixer leurs taux de fiscalité ?
s'est déclaré en accord avec M. Eric Doligé et a jugé que cette réforme va dans le sens d'une suppression des départements. Dans la Sarthe, elle conduirait à réduire de 70 % les recettes fiscales sur lesquelles le département a une maîtrise, ce qui ne permettrait pas de faire face à une hausse des dépenses sociales de l'ordre de 3,5 % à 4 % par an. Par ailleurs, les droits de mutations à titre onéreux seront-ils affectés aux départements ?
a souligné la difficulté de la réforme et s'est interrogé sur le devenir des cotisations sur le chiffre d'affaires de certaines professions libérales et de celles soumises au régime des bénéfices non commerciaux. En outre, l'ensemble du mouvement de regroupement intercommunal ayant été fondé sur le principe de la taxe professionnelle unique, comment justifier que les intercommunalités ne bénéficient pas du tout de la contribution complémentaire, alors qu'elles ont massivement investi pour attirer les entreprises ?
Après avoir rappelé que le calendrier de mise en oeuvre de cette importante réforme est « difficile », M. Gérard Longuet a souligné deux problèmes :
- le manque de clarté dans l'articulation entre cette réforme de la taxe professionnelle et la réforme globale des collectivités territoriales, qu'il est pourtant « impossible » de dissocier l'une de l'autre ;
- le fait que, même après la réforme proposée, l'Etat sera le premier contribuable local ce qui est discutable puisque, en pratique, cela revient à faire payer au contribuable national le coût des politiques locales.
a rappelé que toutes les réformes fiscales créent nécessairement des tensions et a évoqué à cet égard l'échec de la taxe départementale sur le revenu au début des années 1990. Il s'est interrogé sur les conceptions du Gouvernement en matière de spécialisation et de simplification de la fiscalité locale, jugeant qu'aucune articulation n'est proposée entre l'assiette des impôts locaux et les compétences de chaque strate de collectivités territoriales. Il semblerait par exemple logique que le département bénéficie d'une part de contribution sociale généralisée (CSG) du fait de l'importance de son rôle en matière de politique sociale.
Comme déjà indiqué par M. Gérard Longuet, il a estimé que cette réforme pose un problème de calendrier avec celle de l'architecture territoriale.
Il a soulevé deux problèmes :
- si la réforme a un objectif clair pour les entreprises, elle manque d'objectif en ce qui concerne les collectivités territoriales, qui jouent pourtant un rôle majeur en matière d'investissement ;
- des incertitudes importantes pèsent sur les modalités de compensation financière des pertes subies par les collectivités territoriales.
Enfin, il a rejoint Mme Nicole Bricq sur la nécessité absolue de la péréquation et a jugé que les simulations qui seront produites ne doivent pas nourrir les égoïsmes locaux.
a estimé que la réforme est profitable aux entreprises mais qu'elle pose une série de problèmes pour les collectivités territoriales. Quels seront les impôts que conserveraient les départements dans le projet de réforme ? Est-il raisonnable de spécialiser la fiscalité locale par strate de collectivité territoriale alors que celles-ci ont besoin de sécuriser leurs ressources et donc de les diversifier ? Quelles seront les conséquences de cette réforme pour les établissements publics de coopération intercommunale à taxe professionnelle unique ? Enfin, quel est le lien avec la réforme proposée des collectivités territoriales ?
a souhaité que des précisions soient fournies sur la nouvelle définition de la valeur ajoutée retenue pour le calcul de la cotisation complémentaire. De plus, les entreprises ayant déjà bénéficié de nombreux allègements fiscaux en matière de charges sociales ou de taxe professionnelle, un bilan de ces réformes devrait être dressé en matière de créations d'emplois et de dynamisme économique.
Elle s'est interrogée sur la pertinence des projets de taxation spécifique des entreprises de réseau non soumises à la concurrence internationale, telles que Réseau ferré de France (RFF) ou Electricité de France (EDF), qui exercent des missions essentielles de service public, investissent massivement et seront appelées à jouer un rôle majeur dans la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement.
Elle a regretté que la réforme des finances locales soit dissociée de celle des collectivités territoriales et souhaité obtenir trois précisions : est-ce que seuls les dégrèvements de taxe professionnelle seront supprimés ? Comment s'appliquera le plafonnement de la contribution économique territoriale ? L'abattement de 15 % sur l'assiette foncière s'appliquera-t-elle également à la taxe foncière sur les propriétés bâties ?
a estimé que la réforme bouleversera les conditions d'exercice des mandats locaux. Il a souligné la naïveté des discours relatifs à l'autonomie financière des collectivités territoriales et s'est interrogé sur l'ampleur des incertitudes et des questions encore en suspens à quelques semaines de la mise en oeuvre de la réforme. Il a constaté que les associations d'élus sont unanimement défavorables au projet, malgré les espoirs suscités par les premières annonces du Gouvernement. Les départements et les régions bénéficieront d'un impôt dynamique mais dont ils ne maîtriseront pas le taux tandis que les intercommunalités, pourtant censées être des acteurs majeurs du développement économique, devront se contenter principalement d'impôts sur les ménages, le lien entre le territoire et l'activité économique ayant disparu.
a considéré que le projet du Gouvernement n'est source d'aucune incertitude mais qu'il suscite des débats, depuis le mois d'avril, au travers de travaux itératifs auxquels ont participé de nombreux acteurs et notamment des sénateurs. Elle a jugé utile les observations formulées par les intervenants successifs et a estimé que, si la logique du projet du Gouvernement, qui repose sur une séparation claire entre les impositions bénéficiant aux communes et intercommunalités, d'une part, et aux départements et régions, d'autre part, est bonne, elle n'en est pas pour autant intangible. A ce titre, il est concevable que les intercommunalités à taxe professionnelle unique bénéficient d'une fraction du produit de la cotisation assise sur la valeur ajoutée. Elle a reconnu la réalité du problème structurel engendré par la différence de rythme d'évolution entre les dépenses locales et les recettes des collectivités, tout en considérant que ce problème n'a pas de lien direct avec la réforme de la taxe professionnelle. Elle a affirmé que le transfert aux collectivités territoriales de ressources fiscales nouvelles en compensation de la suppression de la taxe professionnelle permet de respecter le principe constitutionnel d'autonomie financière, qui n'est pas en contradiction avec le fait que les collectivités disposeront de peu de marge de manoeuvre en matière de vote des taux de ces nouveaux impôts. Elle a confirmé que le projet du Gouvernement ne prévoit aucun changement s'agissant des modalités d'imposition des activités libérales. Elle a considéré que cette réforme est inéluctable, en premier lieu parce qu'elle correspond à un engagement du Président de la République, en deuxième lieu parce qu'elle renforce la compétitivité de la France et, en troisième lieu, parce qu'elle s'inscrit dans le sens de l'Histoire, notamment depuis que la part « salaires » a été supprimée.
a rappelé que les réformes des finances locales sont les plus difficiles à conduire, et qu'il convient d'être particulièrement attentif aux aspects méthodologiques. Il s'est interrogé, d'une part, sur les raisons qui conduisent à compartimenter les réformes de la taxe professionnelle, de la taxe carbone et de la gouvernance locale et, d'autre part, sur la logique et la cohérence d'ensemble de ces projets. Il a jugé que, pour les promoteurs de la réforme de la taxe professionnelle, l'objectif unique semble être la recherche de la compétitivité de l'économie, l'impact pour les collectivités n'étant qu'une conséquence. Il a trouvé curieux que les simulations ne commencent à être élaborées qu'une fois les arbitrages rendus alors que de telles données auraient pu utilement éclairer la prise de décision. Des simulations par catégories et strates de collectivités ne sont pas suffisantes, en raison des disparités importantes pouvant exister entre communes de même taille, par exemple lorsqu'elles disposent sur leur territoire, comme c'est parfois le cas en montagne, d'installations importantes telles qu'un barrage. Il a souhaité que les ressources des communes soient encadrées à l'intérieur d'une fourchette de façon à leur garantir un « filet de sécurité » et à éviter les injustices. Après avoir rappelé que les programmes d'investissement en cours sont fondés sur la situation actuelle et pourraient être remis en cause par la réforme, il a insisté sur la question du calendrier, en invitant à réfléchir aux inconvénients de la précipitation. Il a considéré que l'autonomie financière des communes est mise à mal par la réforme mais qu'elle est déjà devenue largement illusoire, notamment en raison de leur dépendance à l'égard des subventions des départements et des régions.
a estimé que les compensations versées par l'Etat deviennent de plus en plus aléatoires, dans un contexte d'accroissement des compétences locales et de désengagement financier de l'Etat. Elle s'est demandé si ce projet répond aux attentes des élus locaux en matière de lisibilité de l'évolution de leurs ressources. Elle a souhaité connaître l'impact du projet sur les établissements publics de coopération intercommunale, notamment ruraux. Elle a considéré que l'avantage principal de ce projet sera de lever un obstacle à l'adhésion à des structures intercommunales de communes qui, aujourd'hui, ne souhaitent pas partager le produit procuré par les bases de taxe professionnelle situées sur leur territoire.
a souhaité disposer de simulations individuelles pour chacune des communes de plus de 5 000 habitants et d'une analyse conséquente de la réforme pour les fonds de péréquation, en particulier le Fonds de solidarité des communes de la région Ile-de-France (FSRIF). Il a craint que les communes qui, faute de bases de taxe professionnelle importantes, pratiquaient des taux élevés en matière d'impôts sur les ménages, soient pénalisées par cette réforme.
a salué la participation active des sénateurs Charles Guené, Edmond Hervé et Albéric de Montgolfier aux travaux préparatoires à la réforme et a félicité le président Arthuis pour la qualité de son rapport d'information rendu public en juillet 2009 et intitulé « La suppression de la taxe professionnelle : nécessité de compétitivité pour les entreprises, espoir de réforme pour les finances locales ». Il a précisé que le projet de suppression de la taxe professionnelle a été conçu par le ministère de l'économie, de l'industrie et de l'emploi, que le ministère de l'intérieur s'est efforcé d'en influencer le contenu et qu'il est d'ailleurs parvenu à obtenir plusieurs garanties : les pertes de ressources seront compensées intégralement pour chaque collectivité ; l'autonomie financière des collectivités territoriales, au sens de la loi organique du 24 juillet 2004, sera préservée par le transfert de ressources fiscales ; le lien entre l'activité économique et les collectivités territoriales sera maintenu, même s'il prendra des formes nouvelles puisque les collectivités percevront désormais la cotisation locale d'activité, la cotisation complémentaire - assise sur la valeur ajoutée et dont il a jugé l'intitulé peu heureux - ainsi que plusieurs taxes sectorielles assises sur des équipements parfois sources de nuisances et acquittées par des entreprises très bénéficiaires de la réforme. Il s'est félicité que le Gouvernement propose des avancées en matière de spécialisation des impôts, une revendication souvent entendue dans les congrès des associations d'élus. En cela, la réforme de la taxe professionnelle est liée à celle de la gouvernance locale, puisque la clarification en matière de répartition des impôts est appelée à être complétée par une clarification des compétences des collectivités dans le projet de loi en cours de préparation par le Gouvernement.
S'agissant de l'autonomie financière, M. Alain Marleix a souligné que les premières versions du projet prévoyaient un niveau de compensations budgétaires nettement plus élevé, de l'ordre de 6 milliards d'euros, alors que le texte actuel comprend un important volet de compensations de nature fiscale. S'agissant des impôts transférés, il a relevé que la liste ne comprend plus la taxe intérieure sur les produits pétroliers (TIPP) et a évolué dans le sens souhaité par les associations d'élus. Il a souligné l'effort important consenti par l'Etat en renonçant à une partie des frais d'assiette et de recouvrement, pour 2,1 milliards d'euros, ainsi que l'effet de cette diminution sur le produit des impôts locaux. Il s'est également félicité du découplage de la contribution locale d'activité et de la cotisation complémentaire, qui permettra une augmentation du produit par rapport à l'actuelle cotisation minimale.
a noté que le secteur communal souhaite bénéficier d'une part du produit de la cotisation complémentaire et a jugé qu'une avancée est possible sur ce point. Après avoir invité le Sénat à, comme à son habitude, modifier le texte dans le bon sens, il a réfuté tout désengagement financier de l'Etat à l'encontre des collectivités territoriales, rappelant que ce produit s'établit à près de 100 milliards d'euros. Il a souhaité rassurer les élus départementaux en leur rappelant que, s'ils perdent la taxe d'habitation et la taxe foncière sur les propriétés non bâties, ils conservent la taxe foncière sur les propriétés bâties, qui leur assure un lien avec les ménages, et deviennent bénéficiaires de la taxe sur les assurances, de l'ensemble des droits de mutation à titre onéreux et de la nouvelle cotisation complémentaire.
a indiqué que le projet prévoit l'affectation aux communes et intercommunalités de la cotisation locale d'activité ainsi que le transfert de la part régionale de la taxe foncière sur les propriétés bâties des régions et de la part départementale de la taxe d'habitation. Les départements bénéficient de la cotisation complémentaire et conservent leur part de la taxe foncière sur les propriétés bâties. Il a assuré que chaque collectivité sera individuellement compensée de ses éventuelles pertes de recettes, tout en précisant que la question de l'inclusion dans l'enveloppe normée de la compensation aux collectivités territoriales n'est pas encore tranchée.
a insisté sur le fait que la réforme conduira les établissements publics de coopération intercommunale à taxe professionnelle unique à voter des taux additionnels sur les « impôts ménages » pour maintenir le niveau de leurs ressources. Il a alerté sur les effets de la réforme en matière de liaison des taux.
a demandé si la réforme aura un impact effectif sur les budgets locaux en 2010.
a expliqué que, en 2010, en l'état actuel du projet, les collectivités continuent à voter une taxe professionnelle, avant de basculer dans le nouveau régime en 2011. Il a précisé que l'année 2010 sera mise à profit pour tirer les conséquences de l'impact de la réforme sur la répartition des dotations et sur le calcul du potentiel financier, qui devra demeurer stable pour ne pas modifier artificiellement la répartition des dotations. Il conviendra sans doute d'intégrer au potentiel financier les compensations reçues et, pour les communes qui seraient « trop gagnantes » dans cette réforme, d'en retirer les prélèvements.
En réponse à M. Jean Arthuis, président, qui s'interrogeait sur l'inscription en seconde partie de la loi de finances pour 2010 des dispositions relatives à l'impact de la réforme sur les collectivités territoriales, M. Alain Marleix, secrétaire d'Etat à l'intérieur et aux collectivités territoriales, a indiqué que le Gouvernement attend sur ce point la position du Conseil d'Etat. Il a précisé que l'intention du Gouvernement est de maintenir les dispositifs de péréquation horizontale tels que le FSRIF, en leur apportant les adaptations nécessaires. Il a assuré que les fonds départementaux de péréquation de taxe professionnelle seront conservés.
a indiqué que, dans le projet préparé par l'administration, les modalités de calcul du dégrèvement, ou de son équivalent, qui sera versé en 2010 aux collectivités territoriales, n'ont pas encore été arrêtées. Elle a indiqué qu'il importe de définir le taux qui permette le moins d'effets d'aubaine tout en retenant les bases les plus contemporaines possibles pour que les collectivités bénéficient des évolutions les plus récentes de l'activité économique sur leur territoire. La dégradation de la conjoncture économique rend, en tout état de cause, les marges de manoeuvre financières très étroites. Elle a évoqué plusieurs scénarios possibles, dont par exemple celui d'une prise en compte des bases de 2010 et des taux de 2009 ou de 2008, ou encore celui d'une prise en compte des bases 2009 et des taux 2009.
a conclu des propos de Mme Marie-Christine Lepetit que des simulations détaillées sont indispensables pour mesurer l'impact de la réforme sur les budgets locaux.
En conclusion, M. Jean Arthuis, président, a souhaité que le Gouvernement soit attentif à sa communication sur ce sujet, afin d'éviter que le débat ne s'enflamme et ne suscite des crispations sur un sujet fondamental pour ceux qui ont la charge de l'administration des collectivités territoriales. Il a insisté sur la nécessité de disposer de simulations très détaillées.