M. François Zocchetto est candidat au rapport sur l'adaptation de la procédure pénale au droit de l'Union européenne.
Ces choses-là doivent s'apprécier sur la durée.
M. François Zocchetto est nommé rapporteur sur le projet de loi n° 482 (2013-2014) portant adaptation de la procédure pénale au droit de l'Union européenne.
La commission procède à la désignation de candidats pour faire partie de l'éventuelle commission mixte paritaire chargée de proposer un texte pour les dispositions restant en discussion du projet de loi renforçant les dispositions relatives à la lutte contre le terrorisme.
MM. Philippe Bas, Jean-Jacques Hyest, Jean-Patrick Courtois, Michel Mercier, Jean-Pierre Sueur, Alain Richard et Mme Éliane Assassi sont nommés candidats titulaires et Mme Esther Benbassa, MM. Yves Détraigne, Christophe-André Frassa, Jean-René Lecerf, Jean-Yves Leconte, Jacques Mézard et François Pillet sont nommés candidats suppléants.
La commission procède tout d'abord à l'examen des amendements sur son texte n° 10 (2014-2015) pour le projet de loi n° 807 (2013-2014), adopté par l'Assemblée nationale, de lutte contre le terrorisme.
EXAMEN DES AMENDEMENTS DES RAPPORTEURS
Article 1er
L'amendement de coordination n° 83 est adopté.
Article 2
L'amendement rédactionnel n° 86 est adopté.
Article 6
L'amendement rédactionnel n° 85 est adopté.
Article 9
L'amendement de coordination n° 84 est adopté.
Article 13 bis
Article 14
Le Gouvernement nous a fait remarquer que les experts devaient être agréés, d'où mon amendement n° 89 rectifié.
L'amendement n° 89 rectifié est adopté.
Article 15 quinquies
Lorsque nous ratifions des ordonnances, nous pouvons être amenés à effectuer des rectifications. C'est ce que fait l'amendement n° 88 en introduisant notamment des dispositions relatives au Défenseur des droits dans le code de sécurité intérieure.
C'est bien la preuve qu'il faut toujours vérifier. La codification est certes censée ne rien changer, mais il peut y avoir des lacunes ou des évolutions depuis le dépôt du texte.
La commission a donc bien fait son travail.
L'amendement n° 88 est adopté.
Passons maintenant aux amendements du Gouvernement.
EXAMEN DES AMENDEMENTS DU GOUVERNEMENT
Article 1er
Par son amendement n° 73, le Gouvernement revient à son texte initial donnant dix jours à la personne concernée pour présenter ses observations, ce qui crée une procédure contraignante pour l'administration comme pour l'intéressé. J'avais cru pouvoir améliorer la rédaction en donnant un délai de huit jours à celui-ci. La commission appréciera.
L'amendement du Gouvernement met la personne concernée sous la même contrainte.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 73.
L'amendement n° 72 donne un effet immédiat à l'interdiction de sortie du territoire (IST) pour éviter que les personnes visées s'abstiennent d'aller chercher le recommandé qui la leur notifie et puissent ainsi sortir du territoire dans les quinze jours de mise en instance du recommandé. Avis favorable à ce complément utile.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 72.
Article additionnel après l'article 1er
L'amendement n° 80 crée pour les ressortissants étrangers suspects d'activités terroristes une interdiction d'entrée sur le territoire que le Gouvernement avait annoncée à l'Assemblée nationale. C'est en effet plus judicieux que de les laisser entrer pour les expulser ensuite. La notification par courrier pourra poser un problème - en l'absence d'adresse connue ou si la poste est défaillante -, mais alors elle peut avoir lieu à l'entrée sur le territoire, ou même juste après, l'interdiction valant expulsion.
L'application de cette mesure conservatoire me semble compliquée. Et les étrangers résidents en France ?
Il semble difficile d'interdire à un Belge résidant sur le territoire français de retourner en Belgique. L'objet est plutôt d'empêcher par une décision relevant de la souveraineté française des personnes repérées pour une association à un réseau terroriste d'entrer sur le territoire français.
Quelle conséquence cela aura-t-il sur le système d'information des visas ?
Par construction, si une telle procédure est engagée, une coopération policière avec le pays de résidence l'est aussi.
La commission émet un avis favorable à l'amendement n° 80.
Article 4
Avec son amendement n° 74, le Gouvernement revient à sa rédaction initiale en insérant toutes les provocations au terrorisme, même verbales, dans le code pénal, ce qui induit l'application de procédures lourdes : 96 heures, sonorisation, etc. Nous souhaitons que seul Internet soit concerné. Le Gouvernement a cherché des explications, mais le seul cas de provocation dans le code pénal concerne la provocation à la désobéissance pour les militaires - c'est daté. La stratégie des terroristes passe par Internet ; c'est là ce qui intéresse les juges. Nous nous en tenons à notre position, même si M. Mercier n'est pas d'accord.
Je suis contre cet amendement. La loi sur la presse est très importante ; nous y dérogeons, mais sous de strictes conditions. La position du Gouvernement est excessive.
Il s'agit bien d'une affaire de procédure, et non de fond. Les provocations les plus graves - au génocide, à la haine raciale - relèvent de la loi de 1881. En revanche, les structures organisées du terrorisme sur Internet appellent des moyens lourds. Nous ne refusons pas, comme certains le font accroire, de poursuivre la provocation au terrorisme !
Je ne suis pas du tout hostile à la loi de 1881 ; mais comme elle conduit à ne jamais condamner, elle décourage les poursuites. Dans mon projet de loi, j'avais proposé la même mesure que le Gouvernement et le Sénat m'avait fait la même réponse. Il faut être efficace dans notre lutte contre les terroristes, qui ne sont pas, eux, très attachés au principe de liberté de la presse.
Ma position est connue : je défendrai un amendement créant une incrimination spécifique, dès lors que l'on peut constater un début d'organisation. Avec les mêmes préoccupations que les rapporteurs, je placerais la frontière ailleurs. Entre les deux positions, je préfère toutefois le texte actuel.
Je suis inquiète pour la presse en ligne. Dans un texte liberticide, cet amendement va plus loin contre la liberté de la presse, notre bien commun. Imaginons qu'elle parle des djihadistes sur un ton qui paraisse provocateur. Quel est le bon ton pour parler du terrorisme ?
Il s'agit bien là de la provocation au terrorisme et non de la provocation en général : le juge aura tous les moyens pour opérer la distinction.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 74.
Article 5
La commission émet un avis favorable à l'amendement rédactionnel n° 75, ainsi qu'à l'amendement de précision n° 76.
Article 9
L'amendement n° 77 marque l'insistance du Gouvernement pour que la mise en demeure de l'éditeur et de l'hébergeur du site Internet de retirer les contenus illicites soit assortie d'un délai de 24 heures et non de 48 heures, qui nous semblait plus raisonnable. Je m'en remets à la sagesse de la commission.
Le délai de 48 heures est préférable pour donner le temps à l'expression de la raison avant l'apparition d'une contrainte inutile.
Je suis, comme la semaine dernière, favorable au délai de 24 heures: il n'y a pas lieu de différer une mesure nécessaire.
J'avais été convaincu par les explications du rapporteur et reste sur cette position.
La commission émet un avis de sagesse sur l'amendement n° 77.
Article 14
Nous avions proposé, à la demande des magistrats antiterroristes et pour faciliter leur travail, de dispenser d'agrément préalable les chevaux de Troie informatiques placés à leur demande par des experts informatiques ; mais nous n'avions pas à l'esprit le risque suivant : certains experts pourraient en profiter pour y introduire un autre système de récupération des données. Dans le monde des hackers et des contre-hackers, l'appréciation de l'éthique est diverse... Avis favorable.
De toute manière, l'autorisation administrative est donnée préalablement : les cas d'urgence peuvent être traités.
La commission émet un avis favorable à l'amendement n° 78.
Article 15
Le Gouvernement revient par son amendement n° 79 à l'extension à trente jours de la durée de conservation des interceptions de sécurité. Je me suis efforcé de faire comprendre au ministère de l'Intérieur qu'il perdrait ce combat, en vain.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 79.
Article additionnel après l'article 15 quater (supprimé)
L'amendement n° 82 ajoute un article concernant les mesures de sécurités imposées à certaines compagnies aériennes, en cohérence avec un règlement européen de 2008.
La commission émet un avis favorable à l'amendement n° 82.
L'amendement n° 81 pérennise des mesures - contrôles d'identité dans les trains internationaux, accès à des données de connexion et certains fichiers - créées par la loi de 2006 à titre temporaire, puis prolongées par les lois de 2008 et de 2012. Les reconductions successives prouvent en effet qu'elles sont utiles et l'absence d'opposition dans la société montre qu'elles sont supportables.
La commission émet un avis favorable à l'amendement n° 81.
EXAMEN DES AUTRES AMENDEMENTS DE SÉANCE
Article additionnel avant l'article 1er
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 55.
Article 1er
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 56.
Par son amendement n° 35, M. Leconte pose la question de l'interdiction de sortie du territoire des étrangers ; il ne me semble pas raisonnable d'interdire à un étranger de retourner chez lui.
Une telle disposition serait pourtant cohérente, et conforme aux résolutions de l'ONU qui autorisent les États à agir lorsqu'une personne est identifiée comme susceptible de commettre des actes terroristes.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 35.
Jacques Mézard nous fait remarquer par son amendement n° 27 que « ressortissants français » peut être avantageusement remplacé par « Français ». Avis favorable.
La commission émet un avis favorable à l'amendement n° 27.
L'amendement n° 67, au vu des critiques de la Commission nationale consultative des droits de l'homme sur les risques d'atteintes arbitraires à la liberté d'aller et venir, met en place des garanties, notamment en matière de présomption d'innocence.
Il s'agit d'une mesure de prévention qui peut être sanctionnée par le juge. Il n'est pas nécessaire de préciser que les motifs ne peuvent être que des preuves matérielles concordantes : c'est précisément ce que vérifie le juge. Avis défavorable.
M. Mézard propose dans son amendement n° 16 une rédaction très proche du texte actuel ; il n'y a pas matière à modification. Avis défavorable.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 16.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 59.
L'amendement n° 38 abaisse à quatre mois la durée de l'interdiction de sortie du territoire, atteinte grave à la liberté d'aller et venir et au principe de proportionnalité.
C'est une nuance par rapport à la position de la commission ; une durée de six mois me semble offrir les garanties suffisantes. Avis défavorable.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 38.
L'amendement n° 31 précise que l'interdiction de sortie du territoire repose sur des faits ou renseignements propres à persuader un observateur objectif que l'individu en cause se prépare à commettre des actes de terrorisme.
C'est inutile. Les décisions de justice reprennent une telle formule sacramentelle. Faut-il la faire remonter au niveau législatif ? Ce serait désobligeant pour l'administration et alourdirait la loi.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 31.
L'amendement n° 36 propose de préciser que les personnes visées font l'objet d'un signalement aux services de l'Union européenne et de la Turquie. Les services le font, bien évidemment, et cela n'a pas sa place dans le texte législatif. Avis défavorable.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 36.
Il peut paraître compréhensible que l'interdiction de sortie du territoire ne soit pas soumis à une procédure contradictoire. Ce serait incompréhensible pour son renouvellement. C'est ce que corrige l'amendement n° 30.
J'ai été tenté par cette idée : le renouvellement ne revêt pas le même caractère d'urgence. Mais la loi de 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations prévoit deux exceptions au caractère contradictoire des procédures administratives : l'urgence et les exigences de sécurité. Je propose donc le retrait, quand vous aurez vérifié que le droit commun s'applique bel et bien ; nous donnerons les détails en séance.
La commission demandera le retrait de l'amendement n° 30.
L'amendement n° 17 reprend une proposition de la CNCDH, soit un réexamen régulier de la situation de la personne concernée par l'interdiction de sortie du territoire.
J'y suis plutôt défavorable : le réexamen pourra être demandé en cas de fait nouveau ; il n'y a pas lieu de préciser cette règle générale.
Il y aurait même un a contrario dans la rédaction proposée : le réexamen serait impossible en dehors du cadre trimestriel imposé.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 17.
L'amendement n° 66 prévoit que le juge administratif se prononce, dans le cadre du référé-liberté, dans les 48 heures, avec possibilité d'appel devant le Conseil d'État, qui statue lui-même en 48 heures.
Ces dispositions sont en vigueur. De surcroît, l'article cité n'est pas le bon : il s'agit du 521-2, et non du 521-1.
La commission demandera le retrait de l'amendement n° 66 et, à défaut, émettra un avis défavorable.
Le retrait de la carte nationale d'identité est une mesure particulièrement grave et attentatoire aux libertés individuelles, d'où l'amendement n° 40.
D'autres documents justifient de l'identité sans autoriser, comme vous le dites vous-mêmes dans l'objet de l'amendement, les voyages vers de nombreux territoires.
Nous y sommes opposés ; c'est pourquoi nous avons déposé un amendement similaire, le n° 60.
Un décret précisera la forme du récépissé. Aujourd'hui, deux motifs existent : le contrôle judiciaire ou la garde à vue. Remettons-nous en aux assurances que donnera le Gouvernement.
La commission émet un avis favorable à l'amendement rédactionnel n° 18.
L'amendement n° 34 vise à appliquer les dispositions de l'article 1er à titre seulement expérimental pendant cinq ans, afin qu'un dispositif concerté puisse être mis en place au sein de l'espace Schengen.
Il est difficile de se fixer ainsi à soi-même un délai pour coordonner des systèmes de droit souvent très différents. Avis défavorable.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 34.
Article additionnel après l'article 1er
Même critique que pour le délai de conservation des écoutes : faut-il, pour un cas particulier, rétablir l'autorisation parentale de sortie du territoire pour toute la population ? Le Parlement l'a supprimée en 2010, il avait de bonnes raisons. Avis défavorable.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 13 rectifié.
Article 2
La commission émet un avis favorable à l'amendement n° 20.
Article 4
Article 5
L'amendement n° 64 rend cumulatifs les éléments prévus aux alinéas 9, 10, 11 et 12. Il est peu probable qu'une personne qui a l'intention de commettre des actes terroristes se livre à la fois aux quatre types d'activités mentionnées. Avis défavorable.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 64.
La formulation de l'incrimination inscrite à l'article 5 respecte le principe de légalité et de nécessité des peines. La précision apportée par l'amendement n°11 ne semble pas nécessaire. Avis défavorable.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 11.
Contrairement à ce qui est avancé par les auteurs de l'amendement n° 47, l'alinéa 12 n'incrimine pas en tant que telle la consultation habituelle de sites faisant l'apologie du terrorisme ; seule l'association de ce comportement avec les autres éléments prévus par l'article constitue le délit. Avis défavorable.
Article additionnel après l'article 5
L'amendement n° 22 rectifié prévoit une aggravation générale des peines en cas d'usurpation d'identité sur un réseau de communication en ligne. À cette fin, il modifie l'article 132-79 du code pénal qui prévoyait déjà une telle aggravation pour l'utilisation d'un moyen de cryptologie. L'amendement porterait à sept ans la durée de l'emprisonnement en matière d'apologie ou de provocation au terrorisme. Or, l'usurpation d'identité, contrairement à la cryptologie, est déjà punie en tant que telle. Avis défavorable.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 22 rectifié.
Article additionnel après l'article 6
L'amendement n° 14 rectifié fait écho à un certain bruit de fond dans le débat politique actuel : il vise à supprimer le droit aux prestations sociales pour les personnes soupçonnées d'activités terroristes. Une telle mesure relève du code de la sécurité sociale et elle devrait respecter ses procédures. Elle est assez éloignée de l'objet de ce texte. Retrait.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 14 rectifié.
Article 7
L'amendement n° 49 vise à limiter la compétence concurrente de la juridiction parisienne aux délits liés au non-respect des obligations de la personne condamnée pour actes de terrorisme.
Avis défavorable, la commission a pris une position inverse la semaine dernière.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 49.
Articles additionnels après l'article 8
L'amendement n° 3 ajoute une mesure de précaution qui devrait figurer dans le code monétaire et financier. Il s'agit d'interdire de payer un billet d'avion en monnaie métallique ou fiduciaire. La réglementation existante en ce domaine me paraît suffisante, d'autant plus qu'elle est bien appliquée. Avis défavorable.
Cet amendement mérite, je crois, un examen plus approfondi, car il facilite l'identification de l'acheteur d'un billet d'avion : remonter à son compte bancaire peut être fort utile.
Un paiement en liquide fait déjà l'objet d'un signalement par les compagnies.
De toute façon, des cartes de crédit anonymes peuvent être utilisées en France. Mme Goulet et moi-même avions dénoncé leur existence.
Les décisions en ce domaine sont prises au sein des organes internationaux de la sécurité financière. En outre, tous les touristes n'ont pas les mêmes habitudes que nous, beaucoup d'étrangers paient en liquide des sommes considérables. Je vous rappelle aussi que le droit français confère aux espèces une valeur libératoire pour les sommes inférieures à 3 000 euros. Les montants que nous envisageons sont plus faibles.
Je regrette que ce débat intervienne avant que la commission d'enquête sur les réseaux djihadistes ait rendu ses conclusions. Ceux-ci ne fonctionnent pas sans d'importants flux financiers, auxquels la commission devra s'intéresser.
Mais il y a urgence à légiférer sur ce point en apportant une première série de réponses. On pourrait ajouter que nos voisins n'apportant pas les mêmes restrictions au paiement en espèce, il suffira de partir du Luxembourg ou de Francfort. C'est égal, nous pouvons tout de même rendre plus difficiles les paiements en espèces. Les mesures sont contournées, le législateur en prend d'autres, et ainsi de suite...
L'amendement n° 2 apporte une précision inutile au regard des dispositions existantes du code monétaire et financier.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 2.
L'amendement n° 5 supprime un contrôle existant. Défavorable, d'autant que nous ne sommes ici hors sujet par rapport au projet de loi.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 5.
La mesure proposée par l'amendement n° 9 serait difficile à appliquer. Les billets d'avion sont de plus en plus souvent dématérialisés.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 9.
Article 9
L'amendement n° 33 apporte une précision importante : c'est en son sein que la Cnil doit désigner un représentant. Si les autorités administratives indépendantes (AAI) se mettent à désigner des personnes qualifiées, nous entrons dans une nouvelle logique... M. Gélard a préparé deux propositions de loi sur les AAI, que j'ai volontiers cosignées afin qu'elles aient plus de chances de prospérer.
Nous avions prévu de laisser à la Cnil le temps de la réflexion. Sa présidente m'a indiqué que ses membres - parmi lesquels figure notre collègue M. Gaëtan Gorce - étaient partagés, mais qu'elle était plutôt favorable, si le législateur devait se prononcer, au choix d'un représentant en son sein. De fait, il serait malheureux de créer un précédent de désignation d'une personnalité qualifiée par une AAI. Avis favorable, sous réserve d'une transformation de cet amendement en sous-amendement à mon amendement qui réécrit cet article.
Je suis d'accord avec vous. Les AAI se multiplient, et tentent de prendre de plus en plus de pouvoir. Il n'est pas souhaitable de donner à la Cnil, ou à toute autre AAI, dont les membres sont toujours nommés selon des procédures bien définies, la capacité de déléguer leurs fonctions à une personnalité extérieure.
La commission émet un avis favorable à l'amendement n° 33.
Article 10
L'article 10 prévoit la captation de données informatiques. L'amendement n° 24 supprime les mots « dans les conditions de perquisition prévues au présent code », critiqués par les juges antiterroristes. L'article 57-1 du code de procédure pénale, modifié par notre article 10, prévoit la création d'un régime de perquisitions informatiques dans le cadre d'une enquête préliminaire, où les officiers de police judiciaire agissent sur ordre du parquet. Cependant les juges d'instruction ne recourront donc pas à ces dispositions s'ils veulent récupérer des données informatiques à l'insu de la personne : ils utiliseront les procédures des articles 706-102-1. Avis défavorable.
Articles additionnels après l'article 10
L'amendement n° 25 précise dans quel cadre se feront les réquisitions numériques : le terme « informations » est en effet préférable au terme « documents », qui semble renvoyer à des documents de papier. Avis favorable.
La commission émet un avis favorable à l'amendement n° 25.
L'amendement n° 26 aggrave la peine encourue en cas de refus d'une personne morale de répondre à une réquisition. Il s'inspire d'une recommandation du rapport de M. Marc Robert. Mais la seule aggravation des peines encourues ne suffira pas à améliorer la sanction de ce comportement. Puis, il convient de maintenir une cohérence dans l'échelle des peines. Avis défavorable.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 26.
Article 15
L'amendement n° 71 exclut systématiquement la prolongation à 30 jours du délai de conservation des écoutes. Avis défavorable : nous devons tenir compte des cas où cette prolongation est justifiée par des difficultés de traduction.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 71.
Articles additionnels après l'article 15 ter
L'amendement n° 15 rectifié aurait plutôt sa place dans une révision de la loi pénitentiaire. Il prévoit une règle qui s'appliquerait dès le prononcé de la peine et pendant toute sa durée, ce qui n'est pas faisable en pratique - cela ne correspond pas aux réalités de la vie pénitentiaire. Mieux vaudrait créer un nouveau motif d'isolement, qui ne soit pas une mesure permanente et serait inséré dans la loi pénitentiaire. Avis défavorable.
Je comprends votre point de vue, mais lorsque j'avais interrogé le ministre de l'intérieur sur les mesures qu'il prendrait pour lutter contre la radicalisation, dont il reconnaissait lui-même qu'elle avait surtout lieu en prison, ses propositions nous avaient laissés sur notre faim. C'est pourquoi, avec M. Courtois, nous avons déposé cet amendement : l'encellulement individuel nous paraît la meilleure réponse.
La meilleure façon d'éviter le prosélytisme radical est de promouvoir la formation d'imams sous l'égide du Conseil français du culte musulman. Pour cela, il faut prévoir une indemnisation plus importante. Dans les maisons d'arrêt, l'encellulement individuel est rare. Nous devrons bientôt légiférer pour repousser le délai imposant sa généralisation : à cette occasion nous pourrons traiter ce point.
Pour avoir visité de nombreuses prisons, je sais que l'administration pénitentiaire s'assure, en pratique, d'isoler certains condamnés dans un quartier spécifique, notamment les violeurs et ceux qui ont commis des crimes contre des enfants, pour les protéger des autres détenus. Ne suffirait-il pas d'aménager ce système ?
Attention ! Ce serait ajouter une sanction à une autre, sans qu'il y ait d'infraction nouvelle, ce qui dérogerait au droit commun. L'isolement que vous évoquez est mis en oeuvre pour protéger la personne isolée, non des tiers. La loi pénitentiaire prévoit déjà des sanctions en cas de violence ou de prosélytisme.
L'administration pénitentiaire s'est dotée il y a quelques années d'un état-major de sécurité chargé de surveiller les personnes susceptibles de se radicaliser. Il s'acquitte fort bien de cette mission et alerte le cas échéant les directeurs d'établissements pénitentiaires, qui peuvent décider d'une mise en cellule individuelle. Celle-ci n'est pas toujours perçue comme une sanction, plutôt comme une amélioration, à preuve cette loi qui en a imposé la généralisation. Faisons confiance au travail de notre administration pénitentiaire.
Nous sommes tous favorables à l'encellulement individuel, qu'il faut distinguer de l'isolement.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 15 rectifié.
L'amendement n° 54 facilite le travail des agents qui procèdent aux palpations de sécurité à l'entrée des stades.
Il s'agit d'une mesure souhaitée par le Gouvernement, qui concerne la gestion des différentes professions intervenant dans la sécurité privée. Certaines d'entre elles sont déjà autorisées à faire des palpations de sécurité, par exemple à l'entrée des grands magasins ou dans les aéroports. Cela requiert une formation spécifique, que la plupart des agents ont désormais suivie. Ce présent amendement vise à supprimer l'agrément pour ces personnes. Or, cette mesure est éloignée de l'objet du texte. En outre, lorsque cette procédure particulière avait été ouverte à certaines professions du secteur privé, le Conseil constitutionnel ne l'avait approuvée qu'en l'assortissant de nombreuses restrictions. Avis défavorable, donc, sous réserve des explications que le Gouvernement pourra donner en séance.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 54.
Article additionnel après l'article 18
L'amendement n° 37 est inutile : le rapport qu'il réclame fera double emploi avec les conclusions de la commission d'enquête que nous avons évoquée.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 37.
Nous devrons peut-être apporter quelques modifications aux conditions d'application de ce texte dans les collectivités d'outre-mer pour tenir compte des amendements adoptés.
La commission adopte les avis suivants :
AMENDEMENTS DU RAPPORTEUR
AUTRES AMENDEMENTS DE SÉANCE
La commission procède ensuite à l'examen du rapport et du texte qu'elle propose sur le projet de loi organique (2011-2012), adopté par l'Assemblée nationale, portant application de l'article 68 de la Constitution.
Je salue le talent de notre rapporteur qui, nommé hier en commission, nous présente ce matin son travail !
Puisque nous avons élu un bureau, je souhaite qu'il soit réuni régulièrement, notamment pour examiner les conditions de nomination des rapporteurs.
Le texte que je vais vous présenter constitue la dernière loi organique nécessaire à l'application intégrale des dispositions de notre Constitution. Son origine remonte à l'affaire des emplois fictifs de la Ville de Paris, dans les années quatre-vingt-dix. Quel juge était compétent pour juger les infractions susceptibles d'avoir été commises par le chef de l'État en dehors de ses fonctions ? Le Conseil constitutionnel a estimé que c'était la Haute Cour de justice, composée à l'époque de 12 sénateurs et de 12 députés - ce qui octroyait au chef de l'État un privilège de juridiction. La Cour de cassation, dans son arrêt Breisacher, a de son côté jugé que, pour les affaires qui n'étaient pas liées à l'exercice de sa fonction, le président de la République était un justiciable ordinaire ; elle a également fabriqué un statut d'inviolabilité du président. Le Conseil constitutionnel ayant répondu à une question qui ne lui était pas posée, sa décision n'avait pas vraiment l'autorité de la chose jugée ; la Cour de cassation avait inventé de toutes pièces l'inviolabilité du président.
Réélu en 2002, M. Chirac confia donc à une commission d'experts le soin de réécrire les articles 67 et 68 de la Constitution. Cette commission, présidée par M. Pierre Avril, rendit ses conclusions en décembre 2002. Au passage, elle élargit les termes du débat et revint sur la « haute trahison », qui n'avait jamais été invoquée depuis les débuts de la Vème République. Reprenant les conclusions rendues par la Cour de cassation en 2001, les experts proposèrent que le président de la République soit inviolable pendant la durée de son mandat, et redevienne ensuite un justiciable ordinaire. Pour les actes accomplis dans le cadre de l'exercice de sa fonction, ils préconisaient de remplacer l'expression de « haute trahison » par celle de « manquement à ses devoirs manifestement incompatible avec la poursuite de son mandat ».
Se trouvaient ainsi résolus deux problèmes. D'abord, celui de la nature exacte de la Haute Cour de justice : émanation des assemblées, il s'agissait d'un organe politique qui remplissait une fonction juridictionnelle. Elle pouvait même s'affranchir du code pénal pour infliger une peine ad hoc, ce qui n'était pas compatible avec la convention européenne des droits de l'homme, puisque le président de la République n'avait pas droit à un procès équitable. La suppression de son caractère juridictionnel, reflétée par la nouvelle appellation de « Haute Cour », a résolu ce problème : elle n'a plus à juger mais à prononcer éventuellement une destitution.
Il fallait aussi trouver une solution pour traiter d'éventuels crimes commis par le président de la République pendant la durée de son mandat. L'expression de « manquement à ses devoirs » y pourvut. Le Parlement, réuni en Congrès sous l'appellation de Haute Cour, vérifierait la réalité de ce manquement, et procéderait à sa destitution. Une majorité des deux tiers des membres de chaque assemblée était requise pour réunir la Haute Cour ; puis celle-ci devait se prononcer à la majorité des deux tiers, sans possibilité de délégation et par scrutin public.
Ces propositions ont été reprises dans un projet de loi constitutionnelle relatif aux articles 67 et 68 de la Constitution, qui finit par être adopté par le Parlement réuni en Congrès en février 2007. Soit quatre ans après... Les dispositions relatives à l'article 67 étaient directement applicables. La mise en oeuvre de celles du nouvel article 68 nécessitait une nouvelle loi organique pour fixer la procédure régissant l'adoption de la résolution tendant à la réunion de la Haute Cour dans les deux chambres, sa transmission à la Haute Cour et les conditions dans lesquelles celle-ci statuerait.
Cette loi tardant à arriver, le groupe socialiste a déposé au Sénat en 2009 une proposition de loi organique qui fut, après un renvoi en commission, votée le 15 novembre 2011, quelques mois après que le Gouvernement, sans doute aiguillonné par cette initiative, eut déposé à l'Assemblée nationale un projet de loi organique sur le sujet. La commission des lois de l'Assemblée nationale y a intégré, entre autres grâce à M. Urvoas, plusieurs éléments issus du texte voté par le Sénat. Examiné début 2012 en séance publique, ce texte a recueilli 294 votes favorables, 32 défavorables - essentiellement issus du groupe communiste - et 145 abstentions. Le groupe UMP au Sénat a proposé que nous examinions ce texte dans le cadre de son espace réservé, pour boucler enfin le dossier. Le gouvernement de M. Ayrault a déposé plusieurs projets de loi constitutionnelle, dont un modifiant l'article 67, pour limiter l'inviolabilité du chef de l'État, et l'article 68-1, concernant les membres du Gouvernement, mais il ne s'est pas intéressé aux dispositions de l'article 68 dont nous parlons ici.
Le présent projet de loi organique ne comporte que quelques articles. L'article 68 de la Constitution prévoit des délais très courts : 15 jours après le vote de la première assemblée pour que la seconde se prononce, et un mois ensuite pour que la Haute Cour statue. Si ces délais sont dépassés, la procédure s'arrête. De même si l'une des deux assemblées ne vote pas la proposition de résolution : car il ne s'agit pas d'une procédure législative, il n'y a pas de navette. La procédure étant politique et non juridictionnelle, elle n'est pas susceptible d'être déférée devant la Cour européenne des droits de l'homme. Celle-ci s'est prononcée sur ce point en 2011 à propos de la destitution du président de la République de Lituanie, et a estimé qu'elle n'était pas compétente sur une décision qui n'est pas d'ordre juridictionnel.
L'article 1er porte sur les modalités de dépôt et d'examen de la proposition de résolution. Alors que les résolutions constituent, en principe, l'acte unilatéral d'une assemblée, celle-ci présentera un caractère bicaméral, et devra être votée dans les mêmes termes par les deux chambres. Le Gouvernement avait prévu que la commission des lois de chaque assemblée puisse s'opposer à l'inscription à l'ordre du jour d'une résolution. La commission des lois de l'Assemblée nationale a estimé que ce barrage ne correspondait pas au texte de l'article 68 et, à l'initiative de M. Urvoas, elle l'a supprimé. La proposition de résolution devra être adoptée à la majorité des deux tiers des membres de chaque assemblée, sans possibilité de délégation.
La Haute Cour, comme le Congrès, est présidée par le président de l'Assemblée nationale. Elle se dote d'un bureau mixte, composé d'un nombre égal de membres des Bureaux de l'Assemblée nationale et du Sénat. Elle constitue une commission de six sénateurs et six députés, chargée d'éclairer les travaux de la Haute Cour, en auditionnant, s'il le souhaite, le président de la République, qui peut se faire représenter. Ses auditions doivent se tenir dans un délai de 15 jours suivant l'adoption de la proposition de résolution. La Haute Cour n'a ensuite que 48 heures pour se prononcer, à l'issue d'un débat qui doit être contradictoire, et dans lequel le président de la République a le dernier mot. Une fois adoptée, la décision de la Haute Cour est d'application immédiate. Si le président de la République est destitué, il redevient un citoyen comme les autres et peut faire l'objet de poursuites judiciaires - tout comme il peut se présenter à nouveau aux élections, ce qui revient à demander au peuple de trancher le conflit.
Le projet de loi organique abroge l'ordonnance de 1959, qui avait créé la Haute Cour de justice - celle-ci n'existe d'ailleurs plus depuis 2007.
Ce texte ayant fait l'objet d'un débat assez large au sein de la commission des lois de l'Assemblée nationale, qui a intégré nombre d'amendements issus de notre travail, je ne vois rien à y ajouter et vous propose une adoption conforme.
Merci pour cet exposé très riche. Si nous adoptons ce texte, ce sera l'aboutissement d'un processus visant à appliquer une loi constitutionnelle votée il y a sept ans !
Et cela comblera un vide juridique ouvert par le vote du Congrès en 2007...
Merci à notre rapporteur pour la clarté de son exposé. Il a fallu un septennat pour que ce texte soit examiné. La proposition de loi organique avait été déposée par MM. Patriat et Badinter. Nous approuvons ce texte. Nous proposerons néanmoins quelques amendements. Pourquoi le président de la République peut-il se faire représenter devant la commission ou la Haute Cour ? Cela nous semble contraire à l'esprit de cette modification constitutionnelle : la Haute Cour doit avoir en face d'elle le président de la République et non un représentant.
Le projet de loi organique est adopté sans modification.
Puis la commission examine le rapport sur la proposition de loi n° 292 (2013-2014) tendant à interdire la prescription acquisitive des immeubles du domaine privé des collectivités territoriales et à autoriser l'échange en matière de voies rurales.
Cette proposition de loi, déposée par Henri Tandonnet et neuf autres de nos collègues, tend à interdire la prescription acquisitive des immeubles du domaine privé des collectivités territoriales et à autoriser les échanges en matière de voies rurales.
Même si nous ne disposons pas d'un recensement exhaustif, il existe des centaines de milliers de kilomètres de chemins ruraux. Bien qu'affectés à l'usage du public, ils ne sont pas classés comme des voies communales et ils appartiennent donc au domaine privé de la commune. De ce fait, ils ne bénéficient pas de l'imprescriptibilité, qui est l'apanage de la domanialité publique et peuvent, après 30 ans de « possession » - ou d'occupation - par un particulier devenir la propriété de celui-ci. Ce texte tend à supprimer cette faculté en rendant imprescriptibles non seulement les chemins ruraux mais aussi l'ensemble des immeubles du domaine privé des collectivités.
En outre, ce texte propose de revenir sur l'impossibilité d'échanger des chemins ruraux en raison de leur affectation à l'usage du public. Pour ce faire, il faut aujourd'hui procéder d'abord à la désaffectation du chemin, ce qui suppose une enquête publique organisée selon les mêmes modalités qu'une enquête d'expropriation pour cause d'utilité publique, puis procéder à l'aliénation du chemin et au rachat d'une autre parcelle en remplacement. Cette solution complexe est évidemment critiquée.
Notre collègue Tandonnet a été confronté à de nombreuses reprises - du fait de son expérience professionnelle d'avoué à la Cour que d'élu local - aux contentieux abondants générés par l'appropriation par des particuliers, via la prescription acquisitive, d'éléments importants du domaine privé des collectivités tels que chemins ruraux, jardins, voire anciens moulins, presbytères ou granges, hypothéquant des possibilités d'aménagement futur par les collectivités. Il a constaté que les cas d'expropriation de chemins ruraux passant au milieu des champs, qui finissent pas échoir à celui qui les cultive, sont plus fréquents qu'on ne l'imagine, du moins dans des secteurs où il n'y a pas eu de grands remembrements et où les parcelles - bâties ou non bâties - sont nombreuses. Ces cas sont rares dans la plaine champenoise ou picarde, mais bien plus fréquents dans le sud-ouest.
Notre collègue voulait proposer aux exploitants concernés ou aux propriétaires tentés de clôturer un chemin rural traversant leurs propriétés, d'échanger des parcelles pour déplacer les chemins en bordures des champs ou des propriétés afin d'en maintenir la continuité, ce qui est impossible aujourd'hui. C'est pourquoi il a déposé cette proposition de loi. L'article 1er propose de rendre imprescriptibles les immeubles du domaine privé des collectivités territoriales, de leurs établissements publics et de leurs groupements par l'ajout d'un article L. 1311-1-1 nouveau au code général des collectivités territoriales (CGCT). L'article 2 prévoit une insertion similaire à l'article 2227 du code civil. L'article 3, enfin, facilite l'échange entre un terrain sur lequel est situé un chemin rural et un terrain appartenant à une personne privée.
Cette proposition de loi, dont je comprends l'intérêt, pose néanmoins quelques problèmes. Si le patrimoine des collectivités est couvert par une imprescriptibilité générale, la mesure ne risque-t-elle pas d'être contreproductive et d'aboutir à une mauvaise gestion du patrimoine communal ? Ne faudrait-il pas mieux inciter les collectivités à procéder périodiquement à l'inventaire de leur patrimoine afin de décider, s'il y a lieu, de conserver ou d'aliéner tel ou tel de ses éléments ? La législation relative à la protection du patrimoine n'apporterait-elle pas dans certains cas de meilleures garanties de préservation que le seul maintien dans le domaine privé de la collectivité ?
En toute état de cause, décider aussi rapidement, puisque j'ai été nommé rapporteur hier, et sans pouvoir mener plus avant une revue de tous les types d'immeubles concernés et des conséquences pratiques que provoquerait leur imprescriptibilité générale, me paraît pour le moins précipité. C'est pourquoi il serait plus judicieux de se cantonner à la question des chemins ruraux pour lesquels le problème de la prescription acquisitive se pose le plus fréquemment et soulève aujourd'hui d'autant plus de problèmes qu'un nombre croissant de collectivités cherche à les reconstituer et à les aménager pour des questions de tourisme et de mise en valeur du patrimoine naturel.
J'ai donc examiné la possibilité d'un basculement des chemins ruraux dans le domaine public des collectivités, ce qui serait assez simple à prévoir pour le législateur et emporterait l'imprescriptibilité de ces chemins tout en permettant des échanges conformément aux prescriptions du code général de la propriété des personnes publiques. Mais cela aurait aussi pour conséquence une obligation d'entretien de ces chemins par la commune, ce qui risque de ne pas les enthousiasmer. Je vous propose donc une formule médiane tendant à rapprocher le régime des chemins ruraux de celui du domaine public sans les y faire entrer, en les rendant imprescriptibles et en facilitant l'échange des chemins ruraux pour garantir leurs continuité. Si l'affectation au public des chemins ruraux justifie un régime dérogatoire d'aliénation - désaffectation préalable et enquête publique - cela peut aussi légitimer l'imprescriptibilité. Pour ce qui est des échanges, il est aujourd'hui possible de concilier échange et protection de l'intérêt général puisqu'on peut échanger des propriétés du domaine public avec des biens appartenant à des personnes privées ou relevant du domaine privé d'une personne publique sans même devoir les désaffecter au préalable.
Merci pour cette présentation, mais je ne pourrai voter cette proposition de loi.
Pour la sécurité du droit et des droits constitués, les prescriptions sont indispensables. Et la prescription trentenaire laisse le temps de réagir ! En outre, il faut bien distinguer les prescriptions acquises de celles qui ne le sont pas. Or cette loi, si elle est votée, portera sur des situations très différentes. Les appropriations de chemin en zones viticoles ne posent pas de problème. En revanche, que faire lorsqu'un hangar ou une usine a été construit ? Et s'il s'agit d'une voie de TGV ?
Sommes-nous là pour nous substituer à des volontés mal exprimées ou à des élus négligents ? Il y a une solution au problème : il suffit que la commune, avant la prescription acquisitive, intègre dans le domaine public le chemin ou l'immeuble qu'elle veut conserver. Malgré l'excellent travail de notre rapporteur, nous allons au-devant de multiples contentieux. Le problème est réel, mais il mérite une réflexion approfondie.
La protection constitutionnelle de la propriété doit être prise en compte. La collectivité publique a le choix de classer telle ou telle voie dans le domaine public ou de la laisser à l'état de chemin rural, donc sous un statut privé, ce qui entraîne des conséquences juridiques auprès des voisins. Inévitablement, une question prioritaire de constitutionnalité sera posée pour demander si le droit de propriété comporte le droit à une prescription acquisitive chez le voisin. Si tel est le cas, n'y aurait-il pas rupture d'égalité dès lors que les voisins d'une parcelle appartenant au domaine privé d'une collectivité ne pourraient l'acquérir par prescription ?
Il n'est pas inconcevable de prévoir un régime particulier de protection des chemins ruraux, mais il faut rester dans le schéma traditionnel de notre droit civil.
Notre rapporteur a raison de ne pas préconiser le basculement dans le domaine public, car cette solution implique des obligations d'entretien.
Imprescriptibilité, insaisissabilité, inaliénabilité, telle est la trilogie traditionnelle qui caractérise le régime de la domanialité publique. À l'inverse, le droit privé et l'ensemble de ses prérogatives, y compris la prescription acquisitive, s'applique à la domanialité privée des collectivités territoriales. Le chemin rural est un hybride : une domanialité privée par détermination de la loi. Supprimer la prescription acquisitive sur un bien soumis au code civil ne va pas de soi.
Quand une collectivité veut vendre ou aliéner un chemin rural, elle est tenue à une enquête publique et à un affichage ; une mise en demeure d'acquérir au bénéfice des riverains est également prévue par la loi. En cas d'échange, il faut que les droits des riverains soient respectés.
Ce texte ne reflète-t-il pas la crise des finances locales et le désir de communes de céder certains biens qui sont dans leur domanialité privée ? Il convient de bien réfléchir avant de toucher aux concepts fondamentaux de notre droit.
Nous savons que la domanialité publique diffère de la domanialité privée. Il nous faut régler le problème des chemins ruraux mais il n'est pas envisageable que l'ensemble de la domanialité privée devienne imprescriptible.
Je n'ai jamais vu construire une voie de chemin de fer ou une usine sur des terrains dont le maître d'ouvrage n'était pas propriétaire !
En revanche, dans les communes extrêmement vastes et qui ne comptent que quelques centaines d'habitants, il arrive que des exploitants occupent des biens ou des chemins ruraux, sans que la municipalité réagisse. Ces chemins doivent être défendus, sans pour autant qu'ils soient versés dans le domaine public pour éviter que la collectivité ne soit tenue de les entretenir.
Pendant de nombreuses années, les chemins ruraux ne suscitaient aucun intérêt. Aujourd'hui, les choses ont changé : les plans départementaux des itinéraires de promenade et de randonnée (PDIPR) se sont multipliés. Ces chemins ruraux sont aussi utilisés pour des activités économiques, comme le débardage du bois. Enfin, il y a l'usage croissant des quads ou autres engins à moteur.
Ne pourrait-on distinguer deux catégories de chemins ruraux ? Depuis l'édit de Moulins, le domaine public est imprescriptible. Il suffirait de dire que le chemin rural affecté à un service public est imprescriptible ; ce serait l'application de l'arrêt du 11 mai 1959, dit des Alyscamps : dès lors qu'il y aurait une affectation à un service public, la domanialité publique s'appliquerait.
Merci, monsieur le rapporteur, d'avoir réduit le champ d'application de ce texte, mais on ne peut se désintéresser de ce problème.
Nos collègues se réfèrent à la distinction traditionnelle entre les domaines privé et public et craignent la remise en cause de grands principes de notre droit. Je me suis volontairement limité au problème des chemins ruraux car, précisément, ils bénéficient déjà d'un statut hybride, appartenant au domaine privé mais avec des contraintes et des prérogatives d'ordre public. On ne peut rejeter cette proposition de loi qui est liée à l'évolution de la société et qui soulève de vraies questions. Entre hier matin et aujourd'hui, nous n'avons pas eu le temps d'organiser beaucoup d'auditions, mais nous avons reçu une représentante du ministère de l'agriculture qui nous signalait qu'en Picardie, il existerait 40 000 kilomètres de chemins ruraux selon le cadastre dont 30 000 seulement pourraient encore être parcourus aujourd'hui : que sont devenus les 10 000 autres ? Nous avons donc intérêt à renforcer la protection de ces chemins.
Le sujet est complexe et pose des problèmes juridiques. Ne serait-il pas opportun de voter un renvoi en commission, après la discussion générale ?
Bien au contraire ! Si le Sénat rejette le texte, il sera définitivement enterré, alors qu'avec un renvoi en commission, la réflexion se poursuivra.
Si le débat en séance va à son terme, on risque le rejet, ce qui serait dommage. Si le groupe UDI-UC en est d'accord, il serait sans doute préférable de renvoyer ce texte en commission afin de procéder à des auditions complémentaires et de mener à bien le recensement des chemins communaux.
Notre débat a démontré les problèmes qui se posent, mais nous ne pouvons voter ce texte en l'état, sinon des chemins occupés depuis 29 ans deviendraient imprescriptibles. Et je confirme que des bâtiments agricoles et des usines ont été construits sur des chemins ruraux !
Nous ne sommes pas en état de régler cette question aujourd'hui. Il faudrait poursuivre la réflexion.
Ce texte n'est pas encore inscrit à l'ordre du jour. Il le sera éventuellement ce soir par la Conférence des présidents. Le groupe UDI peut choisir de ne pas l'inscrire.
Cette question ne relève pas de la commission. La motion de renvoi en commission sera discutée si le groupe UDI maintient le texte.
Il y a quelques jours encore, je ne connaissais pas le sujet. Mais je me suis rendu compte hier que le statut hybride du chemin rural posait de réels problèmes. La sagesse, c'est de ne pas enterrer ce texte et de poursuivre la réflexion. (Assentiment)
La commission décide de déposer une motion de renvoi en commission de la proposition de loi.
La commission examine enfin le rapport et le texte qu'elle propose sur la proposition de loi n° 782 (2013-2014) autorisant l'accord local de représentation des communes membres d'une communauté de communes ou d'agglomération.
Je remercie l'Association des maires de France, l'Association des communautés de France et la direction générale des collectivités locales qui ont accepté d'être auditionnées dans des délais très courts.
Alors que nous pensions être parvenus à un juste équilibre pour la répartition des sièges au sein des conseils communautaires, le Conseil constitutionnel, saisi par la commune de Salbris, a déclaré le 20 juin que les dispositions du deuxième alinéa du I de l'article L. 5211-6-1 du CGCT étaient contraires à la Constitution. Ce fut un véritable coup de tonnerre.
La loi de réforme des collectivités territoriales du 16 décembre 2010 représente une étape majeure supplémentaire dans le processus de la décentralisation initié par les lois de 1982 qui prônaient le renforcement de la démocratie locale. L'élection au suffrage universel direct, dans le cadre de l'élection municipale, des conseillers communautaires répondait à ce souci. L'article L. 5211-6-1 du CGCT, créé par la loi de décembre 2010, prévoit que le nombre de siège à pourvoir était fixé par un tableau variant en fonction de la population totale de l'EPCI à fiscalité propre. Ces sièges sont répartis à la représentation proportionnelle à la plus forte moyenne, mais chaque commune doit avoir au minimum un délégué afin que sa représentation soit garantie. Enfin, aucune commune ne doit disposer de plus de la moitié des sièges.
Une possibilité d'accord amiable était prévue dans les communautés de communes et d'agglomération, sous réserve de son acceptation par les deux-tiers des conseils municipaux des communes intéressées représentant la moitié de la population totale de la communauté, ou de la moitié des conseils municipaux représentant les deux-tiers de la population. À défaut d'accord, le principe proportionnel à la population s'appliquait, comme pour les communautés urbaines et les métropoles.
La loi du 16 décembre 2010 a été modifiée par la loi du 31 décembre 2012 afin de permettre une meilleure transition entre les modes de représentation des communes au sein des conseils délibérants et des bureaux des communautés de communes. Cette loi assouplit la représentation communale dans ces EPCI à fiscalité propre. Une augmentation du nombre de conseillers, dans la limite de 25 % au lieu de 10 % précédemment, a ainsi été prévue. Elle a aussi augmenté le nombre de vice-présidents, sans pour autant que le nombre dépasse 30 % des effectifs ou soit supérieur à quinze.
Ces dispositions n'ont pas été censurées par le Conseil constitutionnel qui rappelle que les intercommunalités exerçant des prérogatives au nom des communes, le principe d'égalité devant le suffrage suppose que les communes n'y soient pas représentées de manière disproportionnée au regard de leur population. La règle de l'égalité devant le suffrage est énoncée à l'article 3 de la Constitution et l'égalité des citoyens est proclamée par l'article 6 de la Déclaration des droits de l'Homme.
L'article L. 5211-6-1 s'est appliqué entre la fin 2012 et l'automne 2013 à l'occasion de la répartition des sièges communautaires avant les élections municipales de mars 2014. Or, 90 % des 2 125 conseils communautaires sont parvenus à des accords locaux, s'écartant du barème strictement démographique. Pourtant, le Conseil constitutionnel saisi d'une QPC a jugé que la liberté de détermination de la représentation communale permise par l'article L. 5211-6-1 déroge au principe général de proportionnalité de la représentation communale dans une mesure manifestement disproportionnée.
Seule reste donc en vigueur la règle de représentation purement démographique. A la suite de cette décision, la composition des conseils communautaires doit être revue dans deux hypothèses : pour les contentieux en cours sur la composition de l'organe délibérant et lorsque le conseil municipal d'une commune membre d'un EPCI est partiellement ou intégralement renouvelé. Les cas d'élections partielles commencent à se multiplier alors que les décisions d'annulation sont définitives. Dans les communautés de communes ou d'agglomération où un accord de représentation avait été trouvé, un bon nombre de conseillers communautaires vont se retrouver privés de leur mandat, mettant fin à l'équilibre arrêté il y a six mois.
Nous avons interpellé le gouvernement sur ces difficultés qui allaient mettre à mal le fonctionnement des communautés de communes et d'agglomération. Le groupe UMP a posé une question d'actualité le 17 juillet et MM. Richard et Sueur ont déposé cette proposition de loi le 24 juillet. MM. Gélard, Leleux et Milon ont déposé un texte quasiment identique le 3 septembre. L'exposé des motifs du texte soumis à la commission souligne que le défaut reconnu à la disposition permettant l'accord local de représentation ne tient pas à son existence même mais au décalage de représentation manifestement disproportionné. En conséquence l'article 1er introduit au sein de l'article L.5211-6-1 la faculté de composer l'organe délibérant des communautés de communes et d'agglomération par accord entre les conseils municipaux intéressés à la majorité qualifiée des deux-tiers -moitié dans des limites cohérentes avec la jurisprudence constitutionnelle. Il établit des limites chiffrées aux écarts, en référence à la représentation qui résulterait de l'application du barème démographique pur. L'écart accepté par le juge constitutionnel est fixé à 20% par rapport à la moyenne. Ce seuil retenu par le législateur en 1986 et 2009 pour délimiter les circonscriptions législatives au sein d'un même département a été validé par le Conseil constitutionnel. La proposition de loi adapte cependant les écarts autorisés à la réalité intercommunale : elle retient la limite des 20% dans le cas de sous-représentation d'une commune par rapport au nombre de sièges qu'offrirait la représentation démographique. En revanche, « pour les améliorations de représentation en faveur des petites et moyennes communes, il est impossible pratiquement de fixer le même butoir en pourcentage. Quasiment toutes les communes intéressées n'ont droit qu'à un ou deux sièges en application du barème démographique ; si on ouvrait droit à une hausse de 20 % de représentation, cela équivaudrait en chiffres à zéro et le droit à l'accord local serait privé de son utilité : les villes principales pourraient renoncer à une part de leur représentation mais cette marge ne pourrait bénéficier aux plus petites ». Aussi le texte estime que l'ajout d'un siège est la limite de surreprésentation dans l'équilibre d'un accord local. La proposition de loi maintient également la faculté de créer 25 % de sièges supplémentaires par rapport au total résultant du tableau et des sièges de droit.
Enfin, les intercommunalités touchées par cette censure pourront bénéficier de cette proposition de loi. À cette fin, pendant une période de six mois après la promulgation du texte, les communes membres des communautés de communes et d'agglomération, dont l'organe délibérant a été modifié après le 20 juin, pourront conclure un accord à la majorité qualifiée pour répartir les sièges selon les règles définies par l'article 1er.
Je propose d'adopter cette proposition de loi. Toutefois je dois vous faire part d'une réserve. Certains écarts de surreprésentation risquent d'excéder les bornes de la jurisprudence constitutionnelle. Mais les limiter à 20 % viderait l'accord intercommunal de sa substance au moment où la carte de l'intercommunalité sera remise sur le métier. En outre, l'amendement n° 1 de M. Alain Richard prend en compte les réserves du juge et atténue la surreprésentation pour les communes ayant bénéficié de la garantie d'un siège de droit. Sous réserve de l'adoption de cet amendement et de mes sous-amendements, je vous propose d'adopter cette proposition de loi qui répond à de nombreuses attentes.
Cette fois-ci, mieux vaudrait que cela marche... Pour m'en assurer j'ai relu avec attention la décision du Conseil constitutionnel et ses commentaires. Sa jurisprudence est ancienne ; elle s'est appliquée pour le découpage des circonscriptions législatives ou des cantons, pour l'élection des conseillers de Paris, etc. Son contrôle est minimal. Le Conseil constitutionnel rappelle qu'il ne dispose pas d'un pouvoir d'appréciation identique à celui du législateur et qu'il ne censure que les « disproportions manifestes ». C'est pourquoi j'ai préféré être prudent et préciser, dans mon amendement n°1, que l'attribution d'un siège supplémentaire ne pouvait faire passer une commune de zéro siège à un.
Si l'on veut être certains de la constitutionnalité du texte, pourquoi ne pas saisir le Conseil constitutionnel ? Rien n'empêche les parlementaires de le saisir en ce sens. La saisine ne constitue pas nécessairement un acte d'opposition destiné à obtenir une déclaration de non-conformité. Rien n'interdit aux parlementaires de demander au Conseil constitutionnel d'affirmer la constitutionnalité d'un texte. Après les lois de 2010 et 2012, longuement discutées, c'est la troisième fois que nous travaillons sur ce texte. Si nous ne faisons rien, nous risquons de voir posée une QPC. Pourquoi ne pas prendre l'initiative d'une saisine commune à plusieurs groupes ?
Je partage les analyses de Mme le rapporteur et de M. Alain Richard. Avec l'amendement n° 1 et le sous-amendement n° 2, toutes les précautions sont prises pour ne pas donner à une commune un avantage indu. M. Richard propose de saisir a priori le Conseil constitutionnel pour garantir la constitutionalité du texte. Les députés ont déjà utilisé cette faculté au sujet de la géolocalisation, mais selon moi, cette procédure doit rester exceptionnelle : certains trouvent déjà que le Conseil constitutionnel a trop de pouvoirs... Sinon, nous entrerions dans le régime de l'autorisation préalable.
Pour certains textes, il serait pertinent de solliciter l'avis du Conseil constitutionnel. Pourquoi les présidents des assemblées ne prendraient-ils pas l'initiative de cette démarche ? Elle revêtirait une dimension institutionnelle sans doute mieux acceptée.
Je suis hostile à cette démarche. Il ne faut pas mélanger les genres ! La révision constitutionnelle de 2008 a ouvert la possibilité au Parlement de saisir le Conseil d'État pour examiner les propositions de loi. Ce serait judicieux, compte tenu de la proximité - qui n'est pas seulement géographique - entre le Conseil d'État et le Conseil constitutionnel...
Je remercie les auteurs de cette proposition de loi car la décision du Conseil constitutionnel pose des problèmes importants sur le terrain. Il ne s'agit pas seulement de l'annulation de l'élection de plusieurs conseils municipaux, mais de l'arrêt de fusions en cours. Nous avions réussi, dans le Cher, à regrouper plusieurs communautés de communes. Or le processus a subi un coup d'arrêt. Cette proposition de loi procède d'une initiative heureuse et, une fois n'est pas coutume, je ne me plaindrai pas que le rapporteur ait travaillé en 24 heures. La solution proposée a l'avantage de tenir compte des territoires. Ne prendre en compte que le nombre d'habitants, cela n'est pas suffisant. Une commune de 40 habitants de 20 000 hectares peut légitimement prétendre obtenir plus de représentants qu'une commune de 500 habitants de 1 000 hectares ! Le territoire a une réalité qu'il est difficile d'inscrire dans une équation mais dont les accords tenaient compte. Égoïstement, j'espère que ce texte sera adopté pour sauver les fusions des communautés de communes dans le Cher !
Ce texte ne résoudra pas tout, mais s'il n'est pas adopté, la seule stricte proportionnalité s'appliquera.
À mon tour de remercier les auteurs de cette proposition de loi très attendue. Plus vite elle sera votée, mieux cela sera. Mais l'application stricte du tableau n'est pas non plus une catastrophe...Il faut surtout tirer les conclusions politiques du cas de Salbris : en l'occurrence, les petits villages se sont ligués contre la ville-centre. Salbris n'est qu'un chef-lieu de canton mais elle représente la grande ville pour les petits villages des alentours. La répartition était manifestement disproportionnée. Cette affaire pose la question de la majorité qualifiée. A-t-on bien fait de supprimer l'accord de la ville-centre en 2010 ? Je ne crois pas. La propension à s'opposer à la ville-centre est répandue. Toutefois, à l'heure des bassins de vie, même si l'on défend la ruralité, il ne faut pas sous-estimer le rôle des villes-centres ou des chefs-lieux de canton. Le Conseil constitutionnel a été juste. Défendre systématiquement la ruralité contre l'urbanité peut conduire à des injustices.
À court terme cette proposition de loi est bienvenue. À plus long terme, peut-être faudra-t-il changer la Constitution pour préciser que la souveraineté appartient au peuple qui l'exerce par ses représentants, par la voie du référendum ou par les décisions du Conseil constitutionnel ! Nous nous approchons du gouvernement des juges ; le Conseil constitutionnel se donne bonne conscience en ne prétendant censurer que les erreurs manifestes d'appréciation du législateur, mais il en est seul juge ! Je suis surpris de l'attachement exclusif du Conseil constitutionnel au principe de proportionnalité démographique. À terme, 90 % du territoire ne sera plus représenté ! Il conviendrait de modifier la Constitution car la représentation doit concerner non seulement la population mais aussi les territoires. Évitons que ne se renouvelle cette situation clochemerlesque. Le Gouvernement et le Parlement étaient d'accord pour revoir la délimitation des cantons. Ils représentent davantage le peuple que le Conseil constitutionnel !
Merci pour cette intervention dont beaucoup de membres de la commission partagent le sens et l'orientation.
Je partage la position de M. Lecerf. Je remercie les auteurs de cette proposition de loi que le président Sueur avait appelée de ses voeux à la fin de la dernière session. Pour la première fois les délégués communautaires ont été élus au suffrage universel direct. Il est surprenant que le Conseil constitutionnel ait balayé d'un revers de main une élection au suffrage universel. Loin d'opposer les villes et les villages, les accords dans mon département avaient toujours été le fruit d'un accord à l'unanimité entre les communes, les cas de contentieux restant exceptionnels. Avec cette décision, de nombreuses communautés de communes risquent de se voir remises en cause. Dans bien des cas les accords ont été constitués en fonction des représentations à la communauté de commune. Ne faudrait-il pas que la décision du Conseil constitutionnel ne prenne effet qu'après les prochaines élections pour ne pas créer d'incertitudes au cours de ce mandat ?
Le Conseil constitutionnel a déterminé lui-même les conditions d'entrée en vigueur de sa décision. Elle ne menace pas immédiatement les accords passés, mais elle implique qu'à chaque renouvellement partiel ceux-ci devront être remis en cause et que les nouvelles fusions devront obéir à la règle de proportionnalité. La proposition de loi atténue ce système, en améliorant la représentation de certaines communes. Il n'est pas possible constitutionnellement de différer la date d'entrée en vigueur de la décision.
La Constitution de 1958 a mis en oeuvre des principes développés par les juristes après la première guerre mondiale, comme Mirkine-Guetzévitch ou Michel Debré. Elle a privé le Parlement de son pouvoir absolu. Il ne peut plus tout faire et doit se contenter d'un domaine d'action limité. Le Conseil constitutionnel y veille. Nous pouvons être mécontents, d'autant plus que nous sommes les premiers responsables devant les citoyens, mais la Constitution est là...
Le Conseil constitutionnel a toujours préféré sanctionner les élus locaux que les élus nationaux. Il est plus facile de définir des grands principes à l'occasion des élections locales que des élections nationales ! Il y a peu, nous avons voté la loi de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles, sur le rapport de M. Vandierendonck, qui prévoit la création d'une métropole à Lyon au 1er janvier 2015. Malheureusement nous avons habilité le gouvernement à recourir aux ordonnances. Le Gouvernement fait ce qu'il peut pour faire échouer la métropole de Lyon. Vu ses efforts, il n'est pas impossible qu'il y parvienne ! Un projet d'ordonnance concerne le découpage électoral de la métropole afin de constituer le conseil métropolitain en 2020. L'application du principe de proportionnalité démographique est difficile : doit-elle s'appliquer à la liste ou aux individus ? Le Gouvernement propose une application à l'individu sur la liste. Il a divisé la population par le nombre de sièges, ce qui ouvre la porte aux manipulations souhaitées... Il faudra revenir sur l'application de ce principe. Nous ne ferons pas l'économie d'un nouveau texte.
Au nom du groupe socialiste je remercie les auteurs de cette proposition de loi. Nous l'avons inscrite dans notre espace et la voterons. La décision du Conseil constitutionnel a créé une insécurité. Il était urgent que le législateur reprenne la main.
Monsieur Pillet, je ne suis pas favorable à la définition d'un critère de représentativité fondé sur la superficie. La représentativité concerne la population, non les hectares ! Autrement nous violerions le principe d'égalité devant le suffrage et reviendrions à la pratique des bourgs pourris, qui n'a pas existé qu'en Angleterre. La jurisprudence du Conseil constitutionnel empêche que cette situation ne se produise en France. Certains présidents des États-Unis ont été élus avec moins de voix que leur adversaire, mais plus de grands électeurs. Lors du découpage cantonal en France des écarts de un à 44 étaient apparus, ce qui était inacceptable. Le Conseil constitutionnel avec sagesse a fixé des principes. C'est la règle des 20%. L'objet de cette loi est de prévoir des adaptations.
Monsieur Lecerf, je partage votre avis, une révision constitutionnelle est souhaitable.
Madame Gourault, votre analyse est sévère. Les communes rurales ne se liguent pas toujours contre la ville-centre, même si en l'espèce ce fut le cas. La grande majorité des accords locaux ont été des succès. Salbris avait droit à 13 sièges en application du principe de proportionnalité mais elle n'en a obtenu que sept aux termes de l'accord : la disproportion manifeste.
Enfin, pour préserver les situations existantes, les auteurs de la proposition de loi ont prévu à l'article 2 que, dans les six mois qui suivront la loi, il sera possible de revenir à un accord local sur la base de la proposition de loi.
Les communautés de communes seront contraintes de modifier leurs accords...
EXAMEN DES AMENDEMENTS
Article 1
L'amendement n° 1 prévoit que l'adjonction d'un siège dans le cadre de l'accord local ne peut bénéficier qu'à une commune ayant au moins un siège dans le barème légal. De plus les communes qui consentiront une baisse de leur représentation ne pourront recevoir une part des sièges dans le conseil communautaire inférieure à 80 % de leur proportion dans la population totale de l'intercommunalité.
Mon sous-amendement n° 3 garantit que la représentation d'une commune ayant bénéficié du siège de droit, et donc exclue de l'attribution d'un siège supplémentaire dans le cadre de l'accord local, ne sera, au terme de la répartition des sièges, inférieure de plus d'un cinquième par rapport à la proportionnelle démographique.
J'y suis favorable sous réserve d'une correction rédactionnelle : au II, il faut écrire « inférieure de plus d'un cinquième à sa part dans la population totale ».
Le sous amendement rectifié n° 3 est adopté, ainsi que l'amendement n° 1 sous-amendé.
Article 2
Dans ce cas, je transforme en sous-amendement mon amendement n° 4 pour faire référence aux chiffres de population municipale en vigueur.
L'amendement n° 4 rectifié est adopté.
La proposition de loi est adoptée dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Le sort des amendements examinés par la commission est retracé dans le tableau suivant :
Notre commission est saisie au fond du projet de loi relatif à la simplification de la vie des entreprises, adopté par l'Assemblée nationale en juillet dernier et pour lequel la procédure accélérée a été décidée par le Gouvernement. Ce texte devrait être examiné par le Sénat en séance publique la semaine du 3 novembre.
Quatre commissions se sont saisies pour avis : la commission des affaires économiques, la commission des affaires sociales, la commission du développement durable et la commission des finances.
M. André Reichardt, rapporteur de notre commission, propose à notre commission de déléguer au fond aux commissions saisies pour avis les articles qui ne relèvent manifestement pas du domaine de compétence de la commission des lois. Les commissions pour avis doivent se réunir avant nous, de façon à ce que nous puissions nous en remettre à leur position sur les articles délégués au fond et, le cas échéant, intégrer leurs amendements dans le texte de la commission que nous adopterons. Ces propositions de délégation concernent 31 articles sur un total de 48 dans ce projet de loi et sont formulées, bien sûr, après échange avec les commissions concernées et ne suscitent pas de conflits de compétence ou de contestations de la part des autres commissions.
M. André Reichardt propose de déléguer à la commission des affaires sociales les articles 1er à 2 quater, qui concernent le droit du travail et la sécurité sociale, les articles 23 et 24, relatifs au recouvrement des créances des hôpitaux publics, ainsi que l'article 31, relatif au contrôle des régimes de retraite supplémentaire.
Il propose de déléguer à la commission des affaires économiques l'article 7, relatif aux opérations d'aménagement et de construction, l'article 9, relatif au défrichement des espaces boisés pour la réalisation de gazoducs et d'oléoducs, les articles 10 et 11 bis A, qui concernent le secteur de l'énergie également, l'article 20, qui traite des taxes sur le carburant pour les exploitants agricoles, l'article 28, relatif au statut des écoles des chambres de commerce, l'article 29, qui propose la fusion d'Ubifrance avec l'Agence française des investissements internationaux, ainsi que les articles 31 bis et 34 bis, qui concernent le tourisme.
Il propose de déléguer à la commission du développement durable l'article 8, qui prévoit un régime de décision préfectorale unique pour autoriser les installations de production d'énergie renouvelable, l'article 11, relatif aux expérimentations en cours en matière d'autorisation unique pour les installations classées prévues par la loi de simplification du 2 janvier 2014, sans oublier l'article 11 bis relatif au transport des clients des restaurants d'altitude par motoneige.
Enfin, il propose de déléguer au fond à la commission des finances les articles 13 à 18, qui traitent de droit fiscal, de prérogatives de l'administration fiscale et de règles de paiement, l'article 21, relatif aux règles de recouvrement des redevances de stationnement, l'article 22, relatif aux frais de recouvrement des créances publiques non fiscales, l'article 30, qui concerne le suivi du financement des entreprises par la Banque de France, ainsi que les articles 33 et 35, qui procèdent à diverses corrections rédactionnelles dans des codes relevant de la commission des finances.
Les autres articles, au nombre de 17 sur un total de 48, seraient donc conservés au fond par notre commission.
Il en est ainsi décidé.
La réunion est levée à 12 h 43