Séance en hémicycle du 7 juillet 2014 à 21h45

Résumé de la séance

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La séance

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La séance, suspendue à dix-neuf heures quarante-cinq, est reprise à vingt et une heures quarante-cinq, sous la présidence de M. Thierry Foucaud.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Pour le cas où le Gouvernement déciderait de provoquer la réunion d’une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion sur le projet de loi de finances rectificative pour 2014, il va être procédé à la nomination des membres de cette commission mixte paritaire.

La liste des candidats a été affichée ; je n’ai reçu aucune opposition dans le délai d’une heure prévu par l’article 12 du règlement.

En conséquence, cette liste est ratifiée, et je proclame représentants du Sénat à cette éventuelle commission mixte paritaire :

Titulaires : MM. Philippe Marini, François Marc, Mme Nicole Bricq, MM. Michel Berson, Éric Bocquet, Francis Delattre et Vincent Delahaye ;

Suppléants : Mme Michèle André, MM. Yannick Botrel, Yvon Collin, Philippe Dallier, Éric Doligé, Philippe Dominati et Jean Germain.

Cette nomination prendra effet si M. le Premier ministre décide de provoquer la réunion de cette commission mixte paritaire et dès que M. le président du Sénat en aura été informé.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, de finances rectificative pour 2014.

Je rappelle que la discussion générale a été close.

Nous passons à la discussion des articles.

La prévision de solde structurel et de solde effectif de l’ensemble des administrations publiques pour 2014 s’établit comme suit :

Prévision d’exécution 2014

Solde structurel (1)*

Solde conjoncturel (2)**

Mesures exceptionnelles (3)*

Solde effectif (1 + 2 + 3)**

* En points de produit intérieur brut potentiel.

** En points de produit intérieur brut.

Debut de section - PermalienPhoto de Gaëtan Gorce

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, n’ayant pu intervenir dans la discussion générale, je saisis l’opportunité de l’examen de l’article liminaire pour évoquer les questions qui ont été abordées cet après-midi.

Nous sommes confrontés à un problème assez difficile : rétablir l’équilibre de nos comptes publics sans casser les perspectives de croissance.

À cette question économique, me semble-t-il, la réponse est d’abord politique. Je m’interroge toujours sur les raisons qui conduisent, au fond, les uns ou les autres à ne pas traiter cette affaire sur le plan politique qui convient.

La question est économique, je n’ai pas besoin d’insister sur ce point, chacun ici en est conscient. Nous avons à faire en sorte que la situation de nos budgets réponde non seulement aux engagements européens que nous avons pris, mais aussi, de manière plus générale, aux exigences d’équilibre auquel doit se soumettre tout gouvernement. De ce point de vue, il faut saluer l’effort accompli depuis deux ans, qui a permis d’améliorer la situation financière de notre pays, sans pour autant véritablement permettre de relancer l’activité économique, et c’est bien là qu’est la difficulté.

Lors du débat sur le projet de loi de finances initiale, j’avais eu l’occasion de dire, de différente manière, même si je n’avais pas pu, là encore, m’exprimer dans le cadre de la discussion générale, que je ne voyais pas comment on pouvait approuver un budget qui aurait forcément un effet récessif sur l’activité.

En dépit des dispositions qui ont été ajoutées dans le projet de loi de finances rectificative qui nous est soumis, notamment les aides apportées aux ménages, l’effet récessif de ce budget est encore démontré : nous étions à peu près à un peu plus d’un point de PIB en décembre dernier par rapport aux prévisions budgétaires, nous sommes sans doute à un peu moins d’un point actuellement.

Or le paradoxe dans lequel nous nous trouvons aujourd'hui, c’est que l’action publique, qui, à entendre mes collègues ainsi que le Gouvernement, est censée se concentrer exclusivement sur la croissance, a, au contraire, pour effet, de freiner cette croissance et de l’embarrasser, au nom des objectifs d’économies, qui sont, comme je l’ai relevé, parfaitement respectables, mais qui aboutissent à la situation que nous connaissons, à savoir une relative stagnation de l’activité – les différentes prévisions dont nous disposons indiquent que la croissance sera probablement de moins d’un point cette année – et, surtout, une augmentation très nette et très forte du chômage.

Dans ces conditions, le Gouvernement a essayé de dégager des solutions nouvelles. Il s’y est engagé au travers du pacte de responsabilité et de solidarité, qui a fait suite au CICE, le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi. Il nous est donc demandé de mobiliser plusieurs dizaines de milliards d’euros, pour l’essentiel, pour diminuer les cotisations et réduire l’imposition des entreprises.

Après tout, c’est une option, mais elle présente plusieurs inconvénients.

Premièrement, elle ne garantit pas que les entreprises consacreront ce rétablissement des marges au développement économique, faute de perspectives de croissance. Mais, au fond, ce n’est pas là l’essentiel, c’est un pari, que l’on peut comprendre.

Deuxièmement, elle accrédite l’idée, qui me paraît fausse et que j’avais pourfendue lorsque nous étions dans l’opposition – je n’étais pas alors le seul à le dire ! –, selon laquelle ce qui fait la compétitivité c’est non pas la baisse du coût du travail, mais la qualité de ce travail, la qualité de l’investissement et de la formation. En poursuivant cette démarche de baisse des cotisations, nous encourageons des pratiques qui ne sont pas les bonnes pour assurer la compétitivité de notre économie. Même s’il est nécessaire de réduire, pour une part, les cotisations, le faire dans de telles proportions avec, comme unique outil de politique économique, la baisse des cotisations, c’est se préparer à des lendemains qui déchantent.

J’ajoute que, concernant la question touchant directement à l’Europe, c’est, au fond, théoriser, et mettre en pratique ensuite, l’idée que l’Europe est non pas un espace de solidarité, mais un espace de compétition. Puisqu’il s’agit de faire cette compétition par la baisse du coût du travail, comme l’ont fait les Espagnols ou les Italiens, il y aura donc demain des vainqueurs et des vaincus.

L’Europe se construira par conséquent dans le succès pour les uns et dans la défaite, pour les autres, y compris à l’intérieur de la zone euro. Or c’est très exactement cette absence de solidarité et de convergence des objectifs qui a provoqué la crise que nous connaissons aujourd'hui.

Il faut donc chercher une autre réponse, qui consiste, me semble-t-il, à soutenir beaucoup plus fortement l’investissement de manière coordonnée, si possible à l’échelle européenne. Vous me direz : l’Europe n’en veut pas, pas plus que l’Allemagne !

M. Michel Sapin, ministre des finances et des comptes publics, acquiesce.

Debut de section - PermalienPhoto de Gaëtan Gorce

Je vous vois acquiescer, monsieur le ministre. Aussi, je m’interroge. Votre politique, est-ce la résignation ? Le choix européen consiste-t-il à dire que la France ne compte pas et que l’intérêt vital de la France, qui est de préserver l’économie et l’emploi, ne compte plus pour vous, monsieur le ministre ? Je ne puis le croire. §J’imagine que vous avez, comme nous, cette volonté. Dans ce cas, pourquoi ce gouvernement ne prend-il pas plus d’initiatives en la matière ?

Pourquoi, lors du dernier sommet européen, ce gouvernement ne s’est-il pas battu – car là est la question politique ; tout ce que l’on peut dire par ailleurs sur les incantations à croissance ne compte pas – pour obtenir de l’Allemagne qu’elle fasse ce que l’on est en droit d’attendre d’un pays ayant des excédents, c'est-à-dire contribuer à la relance de l’activité économique. J’entends des incantations à la tribune, des déclarations de ministres, mais je ne vois pas d’actions concertées à l’échelle européenne pour y parvenir. §

Pourquoi ne nous battons-nous pas lors des sommets européens, non pas comme l’ont fait nos amis britanniques – chacun sa méthode ! –, mais avec la même détermination, pour obtenir la mise en place d’un plan de relance coordonné ? Pourquoi attendons-nous ? Pour une raison simple, malheureusement, nous savons que l’Allemagne ne bougera pas si nous ne proposons pas un plan de consolidation politique de l’euro. Nous n’avons aucune chance de faire bouger les Allemands, non pas parce qu’ils seraient embarrassés d’une théorie économique particulière ou d’une idéologie particulière, mais parce qu’ils attendent une consolidation politique de l’euro.

Il faut donc que nous prenions nos responsabilités sur ce que nous voulons faire de l’euro.

Le principal reproche que je fais à ce gouvernement et, d’abord, au Président de la République – pardonnez-moi de le dire aussi directement, mais les enjeux sont considérables –, c’est justement de rester en retrait, de rester, j’allais presque dire, inerte par rapport à cet enjeu essentiel qu’est la relance de la construction européenne au service du développement économique.

Si l’on poursuit dans cette voie, celle qui nous est tracée par ce projet de budget, le risque que nous prenons – je vais le prendre avec vous, mais je ne le prendrai pas encore très longtemps : cela n’a pas beaucoup d’importance, mais j’aurai exprimé mes convictions ! –, c’est ni de rétablir l’équilibre de nos comptes – car nous voyons bien la difficulté que nous aurons à y parvenir avec une croissance faible –, ni de faire reculer le chômage. Si nous échouons sur ces deux terrains, je ne vous dis pas dans quelle situation sera notre économie et dans quelle situation sera notre pays d’un point de vue politique !

Aussi, il est temps – ce pourrait être le rôle du Sénat, monsieur le rapporteur général – de dire au Gouvernement qu’il convient non pas de changer de politique, mais de passer la surmultipliée, en menant une action vigoureuse, ce qui suppose d’utiliser des moyens politiques, visibles et diplomatiques pour que la donne change à l’échelle européenne.

En nous refusant d’agir de cette manière, en négociant simplement étape par étape, nous préparons, au fond, l’affaiblissement de ce pays, et cet affaiblissement, c’est la démocratie qui en paiera le prix.

M. André Gattolin applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

L'amendement n° 2, présenté par M. Marc, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Alinéa 2, tableau, 2nde colonne, 2ème et 3ème lignes :

Rédiger ainsi ces lignes :

La parole est à M. le rapporteur général.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Cet amendement, que nous avons déjà évoqué cet après-midi, tend à rétablir l’article liminaire dans sa rédaction initiale.

En effet, cet article a été modifié par l'Assemblée nationale, sur l’initiative de sa commission des finances, contre l’avis du Gouvernement. La modification apportée vise à améliorer la prévision du solde structurel pour 2014 et à dégrader celle du solde conjoncturel.

Nos collègues députés ont considéré que l’écart entre le PIB effectif et le PIB potentiel, qui sert à calculer le solde structurel, était sous-estimé au début de la période de programmation. Selon eux, l’activité économique serait ainsi plus éloignée de son potentiel que ne le laissent entendre les hypothèses retenues dans la loi de programmation des finances publiques.

Tel est le raisonnement ayant prévalu à l’adoption de cet article tel qu’il nous est proposé.

Quand bien même cela serait le cas – sur ces sujets, les opinions peuvent diverger selon les uns et les autres ! –, il ne me paraît pas souhaitable de réévaluer en cours de route les hypothèses de PIB potentiel et de croissance potentielle figurant dans la loi de programmation et, par conséquent, la prévision du solde structurel. En effet, si l’on s’autorisait à revoir les hypothèses sur lesquelles on travaille, cela nous conduirait à modifier sans cesse notre objectif de solde structurel et, surtout, le niveau d’efforts à réaliser pour y parvenir – nous serions donc confrontés en quelque sorte à ce que l’on appelle « le syndrome de la cible mouvante » –, et nous porterions atteinte à la crédibilité de la France auprès de ses partenaires.

En effet, s’écarter des méthodes définies dans nos textes donnerait le sentiment que les autorités françaises s’arrogent le droit d’améliorer, comme bon leur semble, leur trajectoire de solde structurel.

Dans ces conditions, et dans le souci de respecter la permanence des hypothèses et des méthodes à partir desquelles est estimé le solde structurel, cet amendement prévoit de rétablir l’article liminaire dans la version initiale proposée par le Gouvernement.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget

Le Gouvernement partage le raisonnement de la commission des finances, que vient d’exposer très précisément M. le rapporteur général.

Nous vous rejoignons dans l’idée que l’article liminaire, imposé par la loi organique relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques, adoptée en décembre 2012, doit être en cohérence avec la loi de programmation des finances publiques en vigueur. Or si celui-ci était modifié comme en a décidé l'Assemblée nationale, ce ne serait plus le cas, ce qui risquerait de poser un problème à la fois technique et juridique : le Conseil constitutionnel pourrait alors estimer que cet article n’est pas conforme à la loi organique précitée.

Je voudrais donc remercier la commission des finances du Sénat d’avoir proposé de rétablir cet article liminaire dans sa version initiale, ce qui ne nous empêche pas – je rejoins, là aussi, M. le rapporteur général – d’avoir ultérieurement, peut-être à l’occasion de l’examen de la prochaine loi de programmation des finances publiques, une discussion sur la croissance potentielle et les paramètres conduisant au calcul du déficit structurel par rapport au déficit nominal.

Par conséquent, l’avis du Gouvernement est favorable à cet amendement n° 2.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. Vincent Delahaye, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

Ces définitions de soldes structurel et conjoncturel nous interpellent effectivement depuis un moment.

C’est l’Allemagne qui nous a proposé de faire cette distinction. Or elle se trouve dans une situation bien différente de la nôtre puisque son budget est souvent proche de l’équilibre. Alors qu’il s’agissait pour elle de se donner quelques marges de manœuvre pour faire de la relance budgétaire en cas de conjoncture défavorable, nous sommes, pour notre part, comme cela a été largement souligné à la tribune, dans une recherche d’assainissement budgétaire.

Personnellement, je suis donc, depuis le début, opposé à ces notions et j’ai toujours pensé que cela nous conduirait sans doute à voir évoluer le déficit structurel à la baisse et le déficit conjoncturel à la hausse. Les finances publiques ne sont déjà pas forcément très faciles à comprendre par le commun des mortels, y compris parfois par nous-mêmes, élus… Il serait donc bon, d’après moi, d’abandonner cette distinction et de revenir à une notion de déficit effectif, c'est-à-dire de déficit réel.

Je précise que le déficit structurel est aujourd'hui calculé sur la base d’une croissance potentielle de 1, 5 % ou 1, 6 %

M. le secrétaire d’État opine.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

Je partage également le point de vue de M. le rapporteur général quant à la nécessité de ne pas changer les critères à chaque vote. Les modifications adoptées par l’Assemblée nationale doivent donc être revues et je voterai cet amendement n° 2 plutôt deux fois qu’une, même si, sur le fond, comme je l’indiquais, je préférerais que l’on utilise la notion de déficit effectif, et non celles de déficit structurel et de déficit conjoncturel.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. Gaëtan Gorce, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Gaëtan Gorce

Je comprends parfaitement le raisonnement de notre commission des finances, suggérant d’en revenir à une lecture classique, et la position que vient de défendre M. Delahaye.

Ce que nos collègues de l’Assemblée nationale ont voulu indiquer, me semble-t-il, c’est que, pour une part, les difficultés auxquelles nous sommes confrontés sont très clairement liées à une insuffisance de la stimulation économique. Souligner l’importance d’un déficit que l’on pourrait qualifier de conjoncturel revient effectivement à souligner la faiblesse des efforts réalisés en la matière.

On peut bien sûr prétendre que notre économie s’essouffle et que ses perspectives en termes de croissance sont faibles. Mais nous savons tous, au vu de la situation de nos entreprises, que les capacités de production inemployées sont considérables. La baisse de la productivité en témoigne. Aujourd'hui, les entreprises sont prêtes, dans la plupart des secteurs, à accompagner un effet de relance de manière très significative, et je ne parle même pas de la demande, sur laquelle les moyens sont difficiles à mobiliser.

Or nous ressentons une insuffisance de soutien à l’activité, comme le montrent les chiffres à notre disposition sur le mouvement de relance de l’activité et de la croissance engagé au début de l’année 2010. Cet élan a été brisé par le double effet des restrictions budgétaires trop fortes et de la crise du désendettement affectant les États.

Notre économie française et les autres économies européennes disposent d’une très importante capacité de rebond, pour autant que l’Union européenne et les différents États se donnent les moyens de l’enclencher. Considérer, comme on l’entend parfois dans ces débats, et comme notre collègue Nicole Bricq, avec qui j’en débattrai volontiers, l’a fait précédemment, qu’il n’y aurait de choix qu’entre l’assainissement financier et une politique de relance tous azimuts, c’est envisager la situation d’une manière trop limitée.

Debut de section - PermalienPhoto de Gaëtan Gorce

Mais nous ne pouvons pas faire payer à nos concitoyens, et aux habitants de l’Europe entière, le prix de cet assainissement, alors même que nous disposons de capacités économiques inexploitées et que d’autres pays ou régions du monde se développent et partent à la conquête de marchés.

Cette situation est absurde, d’autant que cela se fait au détriment de l’investissement, c’est-à-dire la préparation de l’avenir ! §

Voilà pourquoi, bien loin de soutenir l’idée d’une relance par le pouvoir d’achat dont nous n’avons pas les moyens, je pense, à l’instar de mes collègues de l’Assemblée nationale, que nous avons la responsabilité d’engager une action de relance par l’investissement.

Nous avons aujourd'hui une épargne disponible et peu chère, des besoins de production qui existent, des besoins de modernisation qui sont considérables. Dois-je citer, comme exemple de modernisation possible, les moyens qui seront nécessaires à la SNCF pour remettre à niveau une partie de son réseau ? Dois-je mentionner les enjeux liés au numérique ? Dois-je évoquer l’université et la recherche ? Les besoins ne sont-ils pas immenses dans ces domaines ?

Or investir, ce n’est pas créer du déficit et de la dette, c’est créer de l’actif futur, qui servira à porter la croissance de notre économie ! En ne respectant qu’une logique d’assainissement, nous sommes en train de bloquer toute perspective de modernisation de notre pays !

J’ai entendu Jacques Delors, qui n’est apparemment pas un révolutionnaire et n’est pas plus étiqueté à l’extrême gauche ou membre des altermondialistes, défendre ces thèses à plusieurs reprises. Mais je vois que tout cela vous ennuie, monsieur le ministre. J’ai pourtant le droit de m’exprimer !

Debut de section - Permalien
Michel Sapin, ministre des finances et des comptes publics

Cessez d’interpréter mes gestes ! Vous vous trompez à chaque fois !

Debut de section - PermalienPhoto de Gaëtan Gorce

Ne pouvant interpréter vos paroles, j’interprète vos gestes, monsieur le ministre. Mais peut-être me répondrez-vous…

Dès lors qu’un gouvernement me déçoit, je le dis ! Si un parlementaire vous déçoit, vous le direz ! Pour ma part, j’attendais autre chose de votre gouvernement que cette politique-là !

Quand Jacques Delors, donc, plaide pour la rigueur aux États, mais la relance à l’Europe, il pose bien les deux termes de l’action. Se résigner à la montée du chômage parce qu’il est impossible, nous dit-on, de faire bouger l’Allemagne n’est pas digne du Gouvernement de la France, que cela plaise ou non au ministre des finances !

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. Éric Bocquet, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Bocquet

Je ne vais pas entrer dans le débat technique, souvent éloigné des préoccupations de nos concitoyens, sur les notions de déficit structurel et de déficit conjoncturel, l’un se définissant par défaut vis-à-vis de l’autre.

Je souhaite simplement, dans le cadre de cette explication de vote, revenir sur la notion plutôt trouble de PIB « potentiel ».

Essayons de faire en sorte qu’elle le soit un peu moins, en partant du concret. Deux facteurs de production sont mobilisés pour créer la richesse dans notre pays, dans le cadre de l’activité économique globale : d’une part, le capital, dont la forme peut être autant immatérielle que matérielle, et, d’autre part, le travail, considéré dans toutes ses dimensions, c’est-à-dire la force de travail de la main-d’œuvre, formations initiale et continue comprises.

La France connaît tout de même un problème structurel, qui nécessite, selon moi, quelques réflexions.

Le PIB marchand dans notre pays dépasse assez nettement 2 000 milliards d’euros.

Le ralentissement de la hausse de la productivité du travail, constaté au cours des dernières années, a une origine bien connue : c’est le produit de la rencontre entre une aspiration patronale et une politique publique.

Le recours massif aux politiques d’allégement du coût du travail, devenues depuis quelques années le principal élément des politiques publiques de l’emploi, a fortement encouragé le développement d’emplois de service à faible valeur ajoutée et à rémunération souvent indigente. Ces politiques n’ont pas permis, loin de là, d’éviter la décrue de l’emploi industriel.

Mais un autre facteur structurel de handicap devient de plus en plus préoccupant. Faiblement dotée en emplois de qualité et porteurs de croissance, notre économie a engendré un volant de main-d’œuvre privée d’emploi qui ne cesse de croître.

Ainsi, notre économie libérale de marché s’autorise le luxe de laisser sur le côté du chemin des millions de personnes sans emploi, véritable « armée de réserve » d’un marché du travail qui les exclut durablement.

C’est là, de fait, un des obstacles qui se dressent encore sur la route de l’amélioration de la situation des comptes publics, comme de la situation économique et sociale du pays en général.

Une observation vaut d’ailleurs pour les banques, qui continuent à jouer avec parcimonie la fonction d’appui aux activités économiques non financières.

Chacun sait que la France, par la qualité de sa main-d’œuvre, son équipement industriel, les disponibilités financières qui y circulent, dispose des moyens nécessaires à une croissance plus forte, susceptible d’apporter plus de richesses et d’en assurer un plus équitable partage. Au lieu de cela, nous avons rendez-vous avec l’austérité, la réduction de la dépense publique comme objectif ultime et suprême, et des mesures particulièrement impopulaires.

Comme nous l’avons déjà dit, il est temps de changer de politique et de mener enfin une vraie politique de gauche, audacieuse et ambitieuse !

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. Dominique de Legge, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique de Legge

On peut le qualifier à sa guise, un déficit reste un déficit ! Par conséquent, je n’entrerai pas dans la subtilité de tous ces distinguos, qui, parfois, nous échappent.

Il n’en demeure pas moins que les conditions dans lesquelles cette modification a été apportée à l’Assemblée nationale sont assez révélatrices de la situation actuelle de votre majorité, messieurs les ministres. Nous venons encore d’en avoir la démonstration avec l’intervention de M. Gorce. Nous sommes dans une situation pour le moins étonnante puisque vous vous retrouvez, à l’Assemblée nationale, désavoués par votre majorité et soutenus par l’opposition !

Pour notre part, nous avons suffisamment dénoncé l’insincérité du budget pour ne pas en rajouter et il nous apparaît souhaitable, sous toutes les réserves que je viens d’émettre, de le placer au moins à l’abri d’un risque d’inconstitutionnalité. C’est pourquoi le groupe UMP votera cet amendement n° 2.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. Jean-Pierre Caffet, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Caffet

De là à conclure que les choix du Gouvernement seraient frappés d’indignité, il y a un pas que, personnellement, je ne saurais franchir !

Sur quoi porte ce débat ? Sur la position du curseur entre, pour reprendre les noms qu’on leur donne traditionnellement, la politique de l’offre et la politique de la demande. S’agissant de cette dernière, aussi dénommée politique de la relance, il convient de rappeler que la demande se compose principalement de la consommation des ménages et de l’investissement.

Fort heureusement, je constate que les défenseurs d’une relance par la consommation des ménages sont peu nombreux, en tout cas dans cet hémicycle. Ce serait une consommation à crédit, qui, de fait, nous entraînerait dans une situation tout à fait comparable à celle de 1981, engendrant un creusement extraordinairement important de notre déficit extérieur, en outre financée par de la dette supplémentaire.

Nous pourrions passer la nuit sur les notions de déficit structurel, de déficit conjoncturel, de PIB potentiel, etc. Cela a-t-il franchement un intérêt ? Après tout, si nous utilisons la notion de déficit structurel, c’est en accord avec le traité que nous avons ratifié et qui a ensuite été mécaniquement traduit en droit français à travers la loi organique votée par nos soins. Nous sommes bien obligés d’utiliser ces concepts.

Encore une fois, nous pourrions discuter à l’infini du calcul du niveau des déficits structurel et conjoncturel, voire de l’hypothèse sous-tendant ce calcul, à savoir le PIB potentiel. En toute franchise, cela n’a rigoureusement aucun intérêt.

L’élément robuste, celui qui importe à mon sens, ce sont les variations du déficit structurel, calculé selon la même méthodologie, c'est-à-dire l’effort que consent la nation d’une année sur l’autre pour réduire ce déficit structurel. Voilà l’important, le reste n’est que littérature !

Indépendamment des mesures et des définitions, dont on peut penser ce que l’on veut, la question posée dans le cadre du débat à l’Assemblée nationale, repris ici par M. Gaëtan Gorce, est celle de la politique économique et de la position du curseur entre politique de l’offre et politique de la demande. Pour affirmer qu’il fallait une relance par la demande en France, que ce soit par la consommation ou par l’investissement, on a décidé de changer les chiffres. C’est aussi simple que cela !

Chaque année, le même thermomètre est utilisé. Il ne nous convient pas parce que la politique du Gouvernement ne nous convient pas… Alors, nous allons simplement en changer ou le casser. Nous allons modifier la répartition entre déficit structurel et déficit conjoncturel.

Selon moi, même si le problème est réel, ce n’est pas la bonne méthode pour aborder un débat de politique économique. Je souligne d’ailleurs, à la suite du Gouvernement, le risque d’inconstitutionnalité qu’entraînerait le maintien dans le collectif budgétaire de la disposition telle qu’elle a été adoptée par l’Assemblée nationale.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, ce sujet est révélateur des contradictions qui existent au sein du parti socialiste, et entre l’Assemblée nationale et le Sénat.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

À juste titre, avec cet amendement, le rapporteur général s’oppose à sa collègue de l’Assemblée nationale qui a cru astucieux de modifier les données pour laisser croire qu’il serait possible de faire moins d’efforts d’économies. C’est bien ce qui a motivé le dépôt de l’amendement qui a été adopté à l’Assemblée nationale.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

En répartissant différemment les éléments entre ce qui est conjoncturel et ce qui est structurel, on oriente la politique économique et on peut définir de manière différente les efforts à réaliser pour contenir, voire réduire les finances publiques.

Je le maintiens, le rapporteur général a eu raison de revenir au texte initial du Gouvernement. Il s’agit d’éviter que la France ne soit prise en flagrant délit de manipulation de méthode et d’interruption de la continuité de la cohérence des séries.

À l’occasion de ce débat, rappelons-nous que les notions économiques complexes dont nous parlons, qui nécessitent un éclairage objectif par un Haut Conseil des finances publiques, sont inévitablement d’un maniement lui-même complexe, à la fois pour l’exécutif et pour le législatif, et d’un abord ingrat pour l’opinion publique. Pour autant, il faut en passer par là, car c’est la mesure commune qui s’impose à l’ensemble des budgets de l’Union européenne, plus particulièrement de la zone euro. C’est l’un des outils de la convergence et de la cohérence entre les pays qui partagent une même monnaie.

Il n’en reste pas moins que, pour faire comprendre à nos concitoyens ce qui se passe et à quel point il est nécessaire de les faire participer à l’effort d’assainissement des finances publiques, PIB potentiel, efforts structurels sont d’un secours assez limité. §Ces notions, il faut en convenir – je vous vois sourire, monsieur le ministre –, trouvent difficilement leur place dans le débat public.

Même si ces notions sont indispensables et représentent un instrument de mesure commun, un thermomètre qu’il faut respecter en tant que tel, il serait opportun de conserver une appréciation du solde effectif, car les économies ne se mesurent pas seulement par rapport à une tendance. Certes, monsieur le secrétaire d'État, vous avez très justement rappelé que cette méthode était appliquée depuis un certain nombre d’années, ce que je ne conteste pas, mais, pour rendre compte de la réalité de façon intelligible, il n’existe que cette présentation : il y avait tant de crédits en 2013, il y en a tant en 2014 en euros courants. C’est la seule façon de montrer qu’il y a véritablement un effort, que l’on demande – pardonnez-moi de le dire – quelques sacrifices à tel ou tel dispensateur de l’argent public.

Au demeurant, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, s’il est bien un domaine où vous agissez ainsi, c’est celui des collectivités territoriales : les dotations diminuent bien en euros courants. De ce point de vue, vous utilisez la bonne méthode, si j’ose dire, puisque vous commencez par articuler le montant de la baisse. Cela constitue, au moins pour le budget de l’État, une véritable économie.

Je conclurai en revenant sur le reproche que je formulais à l’adresse du Gouvernement dans la discussion générale. Pour la programmation de nos finances publiques dans les années à venir, il est indispensable d’avoir une prévision des mesures en recettes avec leur rendement en euros et des mesures en dépenses avec leur appréciation en euros, et non en fractions de point de PIB, unités qui, il faut en convenir, sont d’un maniement assez technique et complexe.

Dans l’immédiat, je pense que l’initiative du rapporteur général est opportune et s’inscrit dans le droit fil des méthodes à poursuivre.

L'amendement est adopté.

L'article liminaire est adopté.

M. Jean-Claude Carle remplace M. Thierry Foucaud au fauteuil de la présidence.

PREMIÈRE PARTIE

CONDITIONS GÉNÉRALES DE L’ÉQUILIBRE FINANCIER

TITRE Ier

DISPOSITIONS RELATIVES AUX RESSOURCES

RESSOURCES AFFECTÉES

I. – Les contribuables domiciliés en France au sens de l’article 4 B du code général des impôts bénéficient, au titre de l’imposition des revenus de l’année 2013, d’une réduction d’impôt sur le revenu lorsque le montant des revenus du foyer fiscal défini au 1° du IV de l’article 1417 du même code est inférieur à 14 145 € pour la première part de quotient familial des personnes célibataires, veuves ou divorcées et à 28 290 € pour les deux premières parts de quotient familial des personnes soumises à imposition commune. Ces limites sont majorées de 3 536 € pour chacune des demi-parts suivantes et de la moitié de cette somme pour chacun des quarts de part suivants.

II. – Le montant de la réduction d’impôt est égal à 350 € pour les contribuables célibataires, veufs ou divorcés et à 700 € pour les contribuables soumis à imposition commune.

Par dérogation, pour les contribuables mentionnés au I du présent article dont le montant des revenus défini au 1° du IV de l’article 1417 du code général des impôts excède 13 795 € pour la première part de quotient familial des contribuables célibataires, veufs ou divorcés et 27 590 € pour les deux premières parts de quotient familial des contribuables soumis à imposition commune, ces limites étant majorées de 3 536 € pour chacune des demi-parts suivantes et de la moitié de cette somme pour chacun des quarts de part suivants, le montant de cette réduction d’impôt est limité à la différence entre la limite de revenu applicable mentionnée au I du présent article et le montant de ces revenus.

La réduction d’impôt s’applique sur le montant de l’impôt sur le revenu calculé dans les conditions fixées à l’article 197 du même code.

III. – Le 5 du I du même article 197 est applicable.

La réduction d’impôt n’est pas prise en compte pour l’application du plafonnement mentionné à l’article 200-0 A du même code.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

L'amendement n° 140, présenté par M. Delahaye, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Vincent Delahaye.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

Lorsque le Président de la République a annoncé le pacte de responsabilité au début de l’année, il m’a semblé entendre, à l’instar de nombreux commentateurs, qu’il souhaitait d’abord et avant tout restituer des marges aux entreprises et mettre l’accent sur ce que l’on appelle la politique de l’offre. En effet, ces marges sont aujourd'hui si faibles que cela pénalise fortement l’investissement et la création d’emplois.

J’ai été très surpris, lorsque j’ai entendu le Premier ministre annoncer, juste avant les élections européennes, un geste en faveur des personnes à revenus modestes. On en voit aujourd’hui la traduction dans ce projet de loi de finances rectificative. C’est presque d’ailleurs l’unique motivation de ce texte, puisque, pour le reste, il ne s’agit que de simples ajustements.

Pour ma part, je m’attendais plutôt à des dispositions en faveur des entreprises. De ce point de vue, on ne voit que la prolongation, une année de plus, de la contribution exceptionnelle sur l’impôt sur les sociétés.

Nous avons appris que la disposition en faveur des ménages aux revenus modestes, qui me semblait aussi exceptionnelle, allait finalement devenir pérenne, et qu’elle serait cette année financée grâce aux amendes payées par les riches fraudeurs ; sur le plan moral, il n’y a rien à redire. Néanmoins, si cette mesure est appelée à devenir pérenne, comment la financer durablement sinon par l’emprunt ? Or je ne suis pas favorable au financement de cadeaux fiscaux par ce biais.

Le financement de cette mesure n’est pas assuré de manière pérenne et cela me gêne. Qui plus est, il s’agit d’une mesure destinée à corriger un certain nombre d’effets des excès fiscaux que vous avez vous-même provoqués, avec la suppression de la défiscalisation des heures supplémentaires. Valérie Rabault, rapporteur général de la commission des finances de l’Assemblée nationale, a très bien montré dans son rapport que de nombreux foyers se retrouvaient imposables du fait de vos décisions.

À mon sens, tout le monde devrait payer des impôts, même s’il s’agit de montants très faibles, liés à des revenus très faibles. J’ai un fils qui est en contrat en alternance. L’année dernière, en percevant le SMIC, il a gagné environ 14 000 euros. D’après mes calculs, il aurait dû payer entre 200 euros à 300 euros d’impôt. Il ne les paiera finalement pas.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

Pour autant, je n’aurais pas trouvé cela anormal.

C'est la raison pour laquelle j’ai déposé cet amendement de suppression de l'article 1er.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

À titre personnel, je suis défavorable à cet amendement de suppression. En effet, la réduction exceptionnelle d’impôt sur le revenu proposée par le Gouvernement bénéficiera à près de 3 700 000 de ménages, dont 1 900 000 deviendront non imposés. Cette mesure correspond au total à une restitution de pouvoir d’achat de 1, 16 milliard d’euros, financée par les bons résultats de la lutte contre la fraude fiscale. Elle est simple, lisible et d’effet immédiat. De plus, elle n’exclut pas une réforme de fond de l’impôt sur le revenu, que le Gouvernement a annoncée pour 2015. Il me semble donc tout à fait de bon sens de mettre en œuvre une telle disposition.

C’est cette position que j’ai soumise à la commission des finances. Malheureusement, celle-ci s’est majoritairement prononcée en faveur de cet amendement.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d'État

Le Gouvernement émet bien sûr un avis défavorable sur cet amendement de suppression. En effet, comme cela a été évoqué lors de la discussion générale, l’article 1er justifie en partie ce projet de loi de finances rectificative pour 2014.

Je formulerai deux remarques.

En premier lieu, monsieur Delahaye, vous affirmez que ce texte ne contient pas de mesures favorables aux entreprises, hormis le report à l’année prochaine de la fin de la « surtaxe » à l’impôt sur les sociétés. J’ai eu l’occasion de souligner au cours de la discussion générale qu’il fallait considérer globalement le projet de loi de finances rectificative et le projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale. En effet, la Constitution nous oblige à avoir deux textes différents s’agissant de deux sujets différents.

Dans le projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014, dont vous connaissez la teneur, le Gouvernement proposera la suppression d’une première part de la C3S, pour 1 milliard d’euros. À ce propos, je précise, parce que je ne l’ai pas encore fait, qu’elle sera mise en place à la faveur d’un abattement d’assiette de 3 millions d’euros sur le chiffre d’affaires des entreprises. Elle profitera donc mécaniquement aux petites entreprises, du moins aux plus petites de celles qui payent la C3S ; cela représente 200 000 entreprises sur les 300 000 qui paient aujourd’hui la C3S, soit les deux tiers. Est également prévue une mesure à hauteur de 4, 5 milliards d’euros d’allégement de cotisations sociales pour les entreprises sur les salariés. C’est la mesure dite « zéro charge payée à l’URSSAF » au niveau du SMIC, l’exonération étant dégressive entre 1 SMIC et 1, 6 fois le SMIC. Ces mesures lourdes – 1 milliard d’euros, d’un côté, et 4, 5 milliards d’euros, de l’autre – se trouvent dans le projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale.

En second lieu, on peut polémiquer sur les raisons qui ont conduit un certain nombre de contribuables à entrer dans l’impôt sur le revenu et sur l’opportunité qui consiste à permettre à certains d’en être complètement exonérés. Un certain nombre de raisons sont imputables à la précédente majorité : la demi-part des veuves, le gel successif du barème de l’impôt sur le revenu. D’autres mesures ont été prises après l’alternance. Le Gouvernement souhaite revenir en arrière pour éviter que trop de contribuables ne deviennent imposables. Le débat – qui paie l’impôt sur le revenu, la TVA, la CSG ? – est extrêmement intéressant.

Pour en revenir au financement de cette mesure, je doute que l’ensemble des dossiers traités par le service de traitement des déclarations rectificatives, le STDR, le soient cette année. En outre, comme je l’ai mentionné au cours de la discussion générale, un élargissement de l’assiette de l’impôt de solidarité sur la fortune est à attendre, qui, à mon avis, servira à financer une part, pas la totalité, du coût de cette mesure. Nous y reviendrons lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2015.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

La parole est à M. Francis Delattre, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

Après les vacances, les Français vont recevoir leur feuille d’impôt. Or, si des exonérations sont prévues, à la marge, dans ce texte, il n’en demeure pas moins que l’impôt sur le revenu augmentera, pour 3 à 5 milliards d’euros supplémentaires.

Dans le même temps, 95 % des 9 millions de salariés effectuant des heures supplémentaires seront touchés par la suppression de la défiscalisation et perdront de ce fait 500 euros en moyenne par an. Par ailleurs, 7 millions de retraités au minimum se retrouveront imposables et verront leur retraite amputée de facto. Et je ne ferai qu’ n’évoquer la fiscalisation des majorations de pension de 10 % des retraités ayant élevé trois enfants ni l’inclusion dans l’assiette de l’impôt sur le revenu des complémentaires santé.

En réalité, le Gouvernement ne souhaitant pas revivre ce qu’il a connu à la dernière rentrée – et on le comprend –, un certain nombre de mesures ponctuelles ont été prises. Si elles vont à notre avis dans le bon sens, elles ne bénéficient cependant pas aux couches moyennes de la société française : le Gouvernement a choisi, et ne sont concernés que les ménages dont le revenu fiscal de référence n’excède pas 1, 1 SMIC, soit 3, 7 millions de ménages sur les 36 millions de foyers fiscaux que compte notre pays.

Pour notre part, nous considérons que votre approche de la classe moyenne est fausse. Ceux qui touchent 1, 2 SMIC ou plus n’auront que le droit de payer totalement leurs impôts et toutes les charges qui vont avec !

Monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, les classes moyennes jouent, en général, dans ce pays, le rôle de stabilisateurs de la République, pour ne pas dire de la démocratie - en général, mais vous avez pu, avec nous, constater, lors des dernières élections européennes, les dégâts qui peuvent résulter a contrario. Il était donc selon nous indispensable d’étendre ce dispositif à une tranche beaucoup plus large, de 10 à 12 millions de foyers fiscaux.

Du fait de cette approche erronée de la réalité des classes moyennes, le dispositif que vous proposez est nettement insuffisant.

Pour toutes ces raisons, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, nous soutiendrons et voterons l’amendement de nos collègues de l’UDI-UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

La parole est à M. Éric Doligé, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Doligé

Partageant totalement le point de vue de notre collègue, je vais tenter de ne pas répéter ce qu’il a fort bien dit.

Je tiens tout d’abord à remercier notre collègue Vincent Delahaye d’avoir déposé cet amendement. Nous savons tous que l’article 1er est en général celui qui donne le sens d’un texte. Ainsi, dans le projet de loi relatif à la délimitation des régions, que nous avons examiné la semaine dernière, l’article 1er était le plus important. Vous avez vu quel sort lui a réservé notre assemblée. Peut-être l’article 1er du projet de loi de finances rectificative connaîtra-t-il le même…

Cela étant, je me demande si le texte que nous examinons est toujours nécessaire. En effet, si, comme le Président de la République l’a proclamé lors de la conférence sociale, s’aidant d’un grand geste de la main, la crise est terminée, ce n’est peut-être plus la peine de se donner tant de mal pour essayer de trouver des solutions afin de relancer notre activité et notre économie !

L’article 1er du projet de loi de finances rectificative prévoit une mesure de pouvoir d’achat. Si l’objectif est louable, le moyen choisi n’est pas le plus pertinent.

L’objectif est louable, même s’il met en évidence les revirements de position incessants de la majorité, qui, après avoir assommé fiscalement les Français pendant deux ans, fait aujourd'hui machine arrière et décide de leur rendre une partie de ce qu’elle leur avait prélevé !

Pour autant, le moyen n’est pas pertinent, pour les raisons qui ont été avancées par notre collègue Francis Delattre. Les classes moyennes sont en effet totalement laissées de côté. Ainsi, un couple qui gagne entre 2 400 et 3 500 euros par mois ne sera pas concerné par la baisse de la fiscalité au titre de l’impôt sur le revenu. En outre, ceux qui sortiront de l’impôt ne seront pas forcément exactement ceux qui y sont rentrés. Cela pose un certain nombre de problèmes.

La véritable justice fiscale serait de rétablir ce que vous avez supprimé, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, afin que chacun se retrouve dans la situation qui était la sienne antérieurement.

Je rappelle que, à l’automne prochain, la hausse de la fiscalité qui a été votée ces dernières années sera durement ressentie, notamment par les classes moyennes, qui ne bénéficieront d’aucune mesure en faveur du pouvoir d’achat.

Ainsi, la fiscalisation des heures supplémentaires touchera plus durement encore les 8 millions de salariés concernés, puisque, en 2014, elle portera sur les revenus, donc sur les heures supplémentaires, de l’année 2013 tout entière, alors que, en 2013, seuls quelques mois de l’année 2012 avaient été pris en compte, la loi ayant été promulguée en août. Cette année, l’impôt sera donc plein pot pour les contribuables qui bénéficiaient de cet avantage fiscal !

De surcroît, la réduction d’impôt proposée par le Gouvernement aura un coût pour les finances publiques, 1, 1 milliard d’euros, soit à peu près ce que coûtait l’avantage sur les heures supplémentaires, 1 milliard d’euros. Cependant, si l’on compare, il faut comparer tout : la défiscalisation des heures supplémentaires concernait 8 millions de salariés, alors que le dispositif proposé à l’article 1er ne touchera que 3, 7 millions de Français. Il était donc facile de rétablir cette mesure.

Telles sont les raisons pour lesquelles nous pensons qu’il n’est pas bon de vous suivre, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État. Nous voterons donc bien évidemment cet amendement de suppression présenté par notre collègue Vincent Delahaye.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

La parole est à M. Gaëtan Gorce, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Gaëtan Gorce

M. Gaëtan Gorce. Je remercie nos collègues Vincent Delahaye et Éric Doligé : quand je vois ce que fait le Gouvernement, je me pose parfois des questions, mais, quand j’entends l’opposition, je m’y retrouve !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Gaëtan Gorce

M. Gaëtan Gorce. Vous qui avez voté sans hésitation le bouclier fiscal

M. Vincent Delahaye fait un signe de dénégation.

Debut de section - PermalienPhoto de Gaëtan Gorce

Je vous remercie donc de m’aider à retrouver un peu mes esprits dans ces débats économiques que je trouve déjà suffisamment compliqués, car, pour le coup, je les trouve d’une très grande clarté !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Je souhaite faire un commentaire d’ordre purement budgétaire.

L’article 1er du collectif budgétaire crée, sans doute de façon durable – sinon, on ne comprendrait pas la finalité du dispositif –, une dépense supplémentaire de 1, 16 milliard d’euros. La décision en la matière a été prise et annoncée très vite, en l’espace de quelques semaines. Cette amélioration du barème, qui vous semble tout à fait évidente aujourd'hui, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, et qui est approuvée avec beaucoup de conviction par notre collègue Gaëtan Gorce, par exemple, ne faisait pas partie de l’analyse qui avait prévalu lors de l’élaboration du projet de loi de finances pour 2014, il n’y a pourtant que quelques mois.

Alors qu’on nous dit que ce pays fait des efforts en vue d’assurer la convergence de ses finances publiques, je m’interroge sur le financement de cette mesure.

Fort opportunément, vous avez trouvé une plus-value de 1 milliard d’euros au titre des recettes issues des rapatriements de capitaux par rapport à l’estimation qui en avait été faite dans la loi de finances initiale. De manière extrêmement habile, vous dites que les retours des personnes qui détenaient des capitaux à l’étranger vous permettent d’alléger la charge de ces ménages modestes pour lesquels vous avez, dites-vous, un intérêt incontestable.

Pour en revenir à des considérations de rigueur budgétaire pure, il est préférable qu’en face d’une dépense permanente il y ait une recette elle aussi permanente. Or je me demande jusqu’à quel point la recette issue des rapatriements de capitaux sera permanente. Mon collègue Gilles Carrez a posé quelques questions à ce sujet lors du débat à l’Assemblée nationale. D’ailleurs, nous allons nous-mêmes, monsieur le secrétaire d’État au budget, vous questionner plus précisément en ce domaine.

Ainsi, si cette plus-value comporte, par exemple, le produit de pénalités, celles-ci ne vont pas se reproduire. Dans le rapatriement des capitaux et parmi les recettes qu’il engendre, quelle part doit-elle être considérée comme récurrente et quelle part est-elle, si j’ose dire, « one shot » ?

Je pense que cette démonstration n’a pas encore été faite. En tout état de cause, il serait utile que vous nous éclairiez sur ce sujet.

Debut de section - Permalien
Michel Sapin, ministre des finances et des comptes publics

Tout d’abord, mesdames, messieurs les sénateurs, je suis heureux d’être parmi vous pour appuyer le secrétaire d’État chargé du budget dans cette discussion importante.

Contrairement à ce que j’entends dire ici ou là, l’analyse du Gouvernement sur la situation macroéconomique et sur les besoins de notre économie n’est pas en noir ou blanc. Ce n’est pas soit l’offre, soit la demande, soit les entreprises, soit les ménages.

Nous pensons que les entreprises ont aujourd'hui un problème considérable que nous qualifierons de « problème de compétitivité », c’est-à-dire de capacité non seulement à faire face à la demande en France - les Français vont parfois acheter les produits à l’extérieur –, mais aussi à vendre leurs produits à l’extérieur.

Dans un contexte de concurrence internationale, nos entreprises sont insuffisamment armées. Leur situation se dégrade de manière continue, non pas depuis deux mois ou deux ans, mais depuis plus de dix ans. Il est donc nécessaire de mettre en œuvre une politique qui leur redonne des capacités : des capacités d’investissement – c’est aussi une forme de demande –, des capacités d’innovation, des capacités de combat à l’exportation, et des capacités d’embauche lorsque le besoin s’en fait sentir dans l’entreprise.

Nous n’avons jamais prétendu que les entreprises étaient le seul sujet et que, pour faire face à la situation d’aujourd'hui, il suffisait d’agir sur ce seul levier. Nous avons toujours dit que les catégories les plus modestes de Français avaient des problèmes que nous qualifions de « problèmes de pouvoir d’achat », qui peuvent se traduire aussi sur la consommation, du fait tout particulièrement des augmentations décidées, soyons justes, par les uns comme par les autres, des impôts pesant sur les ménages, surtout sur les plus modestes d’entre eux.

Je pourrais, après Christian Eckert, détailler certaines des mesures qui, décidées par la précédente majorité, continuent à produire des effets aujourd'hui encore. Je pense, par exemple, à la demi-part des veufs et des veuves, mais je pourrais également citer, évidemment, le gel du barème de l’impôt sur le revenu, que vous aviez institué, mesdames, messieurs les sénateurs de l’opposition, et qui a eu des conséquences récurrentes pour les ménages les plus modestes, de ce fait devenus imposables.

La mesure que nous proposons à l’article 1er a pour objectif de rendre non imposables non pas la totalité de ceux qui, alors que leurs revenus n’avaient pas augmenté, sont devenus imposables au titre de l’impôt sur le revenu – nous ne sommes jamais sûrs de pouvoir le faire ménage par ménage –, mais en tout cas une grande partie de ceux qui, en raison de telle ou telle mesure adoptée par vous ou par nous, sont entrés dans l’imposition.

Je tenais à apporter cette précision, car je n’apprécie pas trop les raisonnements de type « tout ou rien ». Dans une économie comme la nôtre, dans une situation aussi complexe que celle que nous vivons, il ne faut pas être dans le tout ou rien. Il faut tenter de prendre des mesures, mêmes si elles sont discutables, et toujours discutées, évidemment, d’un point de vue à la fois économique et politique, les plus équilibrées possible et les plus adaptées à la situation.

Je vais maintenant répondre à votre question, au demeurant parfaitement légitime, monsieur le président de la commission. Au préalable, permettez-moi cependant de vous reprendre sur un terme. Vous dites que nous créons une dépense supplémentaire. Or nous diminuons un impôt.

Debut de section - Permalien
Michel Sapin, ministre

Pour le solde, oui, mais voyez quel étrange mélange s’opère entre les notions… On a même parlé, à un moment donné, de « dépenses fiscales », …

Debut de section - Permalien
Michel Sapin, ministre

… parce que l’on ne pouvait plus décider de « dépenses budgétaires » – vous en aviez fait beaucoup. Et l’on s’est mis à faire plein de ces dépenses fiscales. Comme vous l’avez dit vous-même, monsieur le président de la commission, l’effet est le même : le solde s’est dégradé.

Aujourd'hui, nous essayons d’être rigoureux et de raisonner en termes de pression fiscale. Nous baissons la fiscalité sur les plus modestes des Français. Par ailleurs, nous raisonnons en termes de dépenses budgétaires, dépenses que nous cherchons à maîtriser, et parfois même à diminuer. Je pense que vous y reviendrez dans quelques heures, à l’occasion de l’examen d’articles tendant à supprimer un certain nombre de dépenses budgétaires.

L’autre impôt, puisqu’il s’agit bien d’un impôt, qui viendrait compenser la diminution de l’imposition des ménages les plus modestes fait également partie des prélèvements obligatoires : nous baissons les prélèvements obligatoires pour les plus modestes et nous les augmentons pour ceux sur qui ne pesait aucun prélèvement obligatoire parce que leurs acquis à l’étranger n’étaient pas déclarés.

Debut de section - Permalien
Michel Sapin, ministre

Je souhaite faire une seconde petite rectification de vocabulaire, afin que nous nous comprenions bien. Il ne s’agit pas de gagner de l’argent sur le rapatriement des capitaux. Le contribuable français qui place de l’argent en Suisse, pour choisir un exemple au hasard, a parfaitement le droit de le faire, s’il considère que le banquier suisse va mieux gérer son avoir. En revanche, il n’a pas le droit de le cacher et de ne rien déclarer au fisc français : il doit déclarer les revenus de ses capitaux ainsi que la valeur de ceux-ci, laquelle est également susceptible d’être imposée notamment à l’ISF.

Je conclus : nous avions d’abord prévu, au titre des avoirs désormais imposés et des pénalités encourues parce qu’ils n’avaient pas été déclarés à temps, une rentrée de 300 millions d’euros. Puis, au cours de la discussion budgétaire de la fin de l’année 2013, nous avions porté cette prévision à 800 millions d’euros.

Or il se trouve que le retour de ces avoirs qui échappaient auparavant à l’impôt va beaucoup plus vite que prévu : nous avons dépassé le chiffre de 1 milliard d’impôts et de pénalités ; nous avons presque atteint aujourd'hui la somme de 1, 2 milliard d’euros ; il n’y aura par conséquent aucune difficulté à atteindre, à la fin de l’année, 1, 8 milliard d’euros, la somme qui nous permettra de compenser à l’euro près, et même au-delà, la baisse de l’imposition des ménages les plus modestes…

Debut de section - Permalien
Michel Sapin, ministre

… pour cette année, monsieur le président de la commission des finances - j’ai bien compris votre question et j’y réponds.

Nous équilibrerons donc dès cette année la mesure de diminution de l’imposition, qui est exceptionnelle dans son principe et non exceptionnelle dans sa durée – voilà en quoi votre question est pertinente –, par une recette qui, sans être totalement exceptionnelle, n’est certes pas reconductible d’année en année. En effet, une fois que les avoirs sont déclarés, il n’y a plus de pénalités à payer !

Je pense cependant que nous n’aurons pas tout à fait épuisé les régularisations avant l’année prochaine. Le phénomène est rapide, mais peut-être certains des contribuables seront-ils plus lents à comprendre où est leur intérêt, même si aujourd'hui un bon nombre de ceux qui gèrent leurs actifs les poussent à déclarer leurs revenus de manière transparente. Je pense donc que les recettes issues des régularisations seront encore importantes l’an prochain.

Certes, le jour viendra où, tout ayant été déclaré, il ne s’agira plus que de recouvrer les impôts normaux payés sur des sommes déclarées.

À titre d’information pour le Sénat, les sommes sorties de l’ombre à l’occasion de ces déclarations, dont le montant permet de soutenir que l’État a perçu 1, 2 milliard d’euros, s’élèvent à plus de 25 milliards d’euros. À ce rythme, on peut penser que l’on dépassera 50 milliards d’euros, pour atteindre peut-être 60 milliards d’euros d’avoirs hier non déclarés qui le seront dorénavant. Or ces 60 milliards d’euros d’avoirs produisent des revenus qui seront imposés, et imposés de manière durable et reconductible, monsieur le président de la commission des finances.

En outre, les 60 milliards d’euros appartiennent pour une large part à des personnes qui paient par ailleurs l’impôt de solidarité sur la fortune. Il s’agit donc d’une base nouvelle qui est sortie de l’ombre et qui va servir au calcul de l’ISF pour les années à venir, de manière récurrente.

Les recettes de l’État sur ces sommes ne se maintiendront pas au niveau de cette année – j’en conviens –, mais elles resteront à un niveau tout à fait important. Vous comprenez donc bien que faire sortir ces sommes de l’ombre rapporte de l’argent à l’État non seulement immédiatement, mais aussi dans la durée.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

La parole est à M. Vincent Delahaye, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

Cette disposition me surprend, d’abord parce que, comme je l’ai dit, le Premier ministre Jean-Marc Ayrault, en octobre 2012, avait affirmé dans cet hémicycle que les augmentations d’impôts ne toucheraient pas neuf Français sur dix. Certes, il n’est plus Premier ministre, mais, avant de partir, il nous a annoncé une remise à plat totale du système fiscal français.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

Nous avions répondu « Chiche ! », mettant beaucoup d’espoir dans cette annonce. Hélas, cette remise à plat, nous ne la voyons pas venir.

Au lieu de cela, on nous présente cette première disposition qui ne figurait pas – pas même une allusion à un dispositif de ce type - dans la déclaration de politique générale lue au Sénat par Laurent Fabius, je m’en souviens fort bien. Pourtant, dans le premier texte financier que présente ce gouvernement au Sénat, la première mesure est ce cadeau fiscal !

Je suis favorable à une remise à plat totale du système fiscal français, y compris pour les revenus modestes. Je souhaite que cette remise à plat soit effectuée tranquillement et avec la participation de tous. Je suis en revanche défavorable à des mesures ponctuelles, visiblement décidées dans l’urgence et dont le financement – j’y insiste – n’est pas pérenne. Cette mesure sera par conséquent financée par de la dette.

C’est pourquoi je maintiens mon amendement de suppression de l’article 1er.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Je mets aux voix l'amendement n° 140.

J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe UMP.

Je rappelle que l'avis de la commission est favorable, tandis que l’avis du Gouvernement est défavorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

Il est procédé au dépouillement du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Voici le résultat du scrutin n° 215 :

Le Sénat n'a pas adopté.

Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 55, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

I. - Le 1. du I de l’article 197 du code général des impôts est ainsi rédigé :

« 1. L’impôt est calculé en appliquant à la fraction de chaque part de revenu qui excède 6 254 € le taux de :

« - 5, 50 % pour la fraction supérieure à 6 254 € et inférieure ou égale à 12 475 € ;

« - 14 % pour la fraction supérieure à 12 475 € et inférieure ou égale à 27 707 € ;

« - 30 % pour la fraction supérieure à 27 707 € et inférieure ou égale à 74 280 € ;

« - 41 % pour la fraction supérieure à 74 280 € et inférieure ou égale à 110 000 € ;

« - 45 % pour la fraction supérieure à 110 000 € et inférieure ou égale à 150 000 € ;

« - 50 % pour la fraction supérieure à 150 000 €. »

II. - La perte de recettes résultant pour l’État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

III. - La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

IV. - La perte de recettes résultant pour les collectivités territoriales du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.

... – La perte de recettes résultant pour l’État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Éric Bocquet.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Bocquet

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, l’impôt sur le revenu est de longue date l’élément principal du débat fiscal dans notre pays, alors même qu’il ne constitue qu’une partie insuffisamment pertinente de notre système fiscal.

Nous constatons d’ailleurs que le présent projet de loi de finances rectificative comporte une mesure, à l’article 1er, qui fait de cet impôt le témoin affiché de la démarche de réduction des impôts promise par le Gouvernement.

Que pèseront cependant les 350 euros de ristourne aux ménages d’ici trois ans, quand nous aurons vu, par ailleurs, 38 milliards d’euros de cotisations sociales et d’impôts rendus aux seules entreprises ?

L’amendement que nous présentons vise à renforcer la progressivité du barème de notre impôt sur le revenu, lequel a été plusieurs fois remodelé ces dernières années selon une tendance structurelle à la réduction de la contribution des plus hauts revenus et à l’accroissement relatif de la contribution des bas et moyens revenus.

Il importe de prendre une nouvelle orientation dès ce projet de loi de finances rectificative : il nous faut assurer un bon rendement de l’impôt en respectant la justice et l’équité.

Pour cela, deux mesures nous semblent être d’une nécessité impérieuse.

D’une part, il faut revenir sur le gel du barème de l’impôt sur le revenu en ajustant les seuils des différentes tranches de l’impôt à une évolution au moins équivalente au niveau de l’indice des prix à la consommation qui a servi de base de calcul macroéconomique pour les dernières lois de finances.

D’autre part, nous proposons de créer une nouvelle tranche d’imposition à 50 % des revenus – 45 % du revenu de départ en réalité – pour un revenu déclaré par part de plus de 150 000 euros.

Tout en restant très éloigné d’une logique confiscatoire qui a cependant été évoquée dans cet hémicycle, l’impôt sur le revenu ainsi modifié présenterait un caractère plus progressif et donc plus juste, tout en assurant à l’État un rendement suffisant pour constituer enfin une recette essentielle de son budget.

De fait, cet amendement tend principalement à procurer à l’État un certain rendement fiscal, ce qui permettrait à notre système d’être mieux équilibré et plus juste, tout en dégageant les ressources nécessaires à une politique publique fondée sur la réparation des inégalités sociales.

Mes chers collègues, nous vous invitons à adopter cet amendement afin de mettre en œuvre un impôt sur le revenu plus justement prélevé pour une allocation judicieuse de l’argent public.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

L'amendement n° 98 rectifié, présenté par MM. Mézard, Collin, Fortassin, Baylet, C. Bourquin et Collombat, Mmes Escoffier et Laborde et MM. Requier, Tropeano et Vall, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 1, seconde phrase, et alinéa 3

Remplacer le montant :

par le montant :

II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Yvon Collin.

Debut de section - PermalienPhoto de Yvon Collin

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, comme nous l’avons annoncé lors de la discussion générale, nous aurions préféré une refonte globale de notre système fiscal afin de le rendre plus lisible et plus juste, mais nous soutenons l’article 1er de ce collectif budgétaire, qui vise à préserver les ménages modestes dont les revenus n’ont pas augmenté des effets d’une entrée dans le barème de l’impôt sur le revenu. Ce sont 3, 7 millions de foyers fiscaux qui devraient être concernés par cette mesure exceptionnelle ; 1, 9 million de foyers deviendront ou resteront non imposés ; 1, 3 million de foyers non imposés verront leur restitution augmenter et 500 000 verront leur impôt diminuer.

La réduction de l’impôt sur le revenu prévue par cet article est en partie « familialisée », c'est-à-dire qu’il est tenu compte de la composition du foyer fiscal pour l’attribution, les limites de revenus pour bénéficier de cet allégement étant majorées de 3 556 euros par demi-part supplémentaire afin de prendre en compte le nombre de personnes à charge.

Le présent amendement vise à élargir la mesure en augmentant la majoration du seuil de revenu par demi-part, ce qui permet aux familles de bénéficier de la réduction d’impôt plafonnée à 700 euros pour un couple soumis à imposition commune.

Nous proposons donc que les limites de revenus soient majorées de 4 000 euros par demi-part, au lieu de 3 556 euros, afin de permettre à un nombre plus élevé de foyers de bénéficier de cette mesure de justice fiscale.

Voilà le sens de cet amendement que je vous propose bien sûr d’adopter.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

L’avis de la commission est à peu près identique pour les deux amendements.

L’amendement n° 55, défendu par M. Bocquet, vise à réindexer le barème de l’impôt sur le revenu sur l’inflation des années 2011, 2012 et 2013, ainsi qu’à créer une tranche supplémentaire imposée à hauteur de 50 %.

En fait, contrairement à l’argumentation qui nous a été présentée par notre collègue - ces deux dispositions engendreraient des recettes supplémentaires -, nos propres estimations conduisent à penser que la réindexation pour trois années consécutives, sans dégager de recettes, se révélerait probablement assez coûteuse.

Du reste, comme cela a été évoqué dans la discussion que nous avons eue sur l’article 1er, nous savons que le Gouvernement a procédé à certains arbitrages afin de restituer du pouvoir d’achat. Le Gouvernement a choisi de mettre en place un dispositif pour les ménages qui devenaient imposables, lequel consiste en une réduction d’impôt de 350 euros pour un célibataire ou 700 euros pour un couple. Cela constitue déjà une restitution de pouvoir d’achat importante, de plus de 1 milliard d’euros.

Toutes ces raisons me conduisent à émettre un avis défavorable sur un amendement qui serait probablement coûteux et qui ne tient pas compte des arbitrages rendus afin d’alléger l’impôt des ménages modestes.

Quant au second amendement, défendu par nos collègues du RDSE, j’en sollicite le retrait, en raison de son coût budgétaire important, sachant que d’autres mesures sont prises par ailleurs pour alléger l’impôt sur les ménages modestes, à la fois dans ce projet de loi à l’article 1er et dans le PLFRSS.

À défaut de retrait de cet amendement, l’avis de la commission sera défavorable.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d'État

Le Gouvernement rejoint l’avis de M. le rapporteur général concernant l’amendement défendu par M. Bocquet.

Selon notre analyse, le coût de cette mesure serait de 2, 7 milliards d’euros, la surrevalorisation des tranches inférieures du barème n’étant pas compensée par la majoration de la dernière tranche.

Vous comprendrez, monsieur Bocquet, que pareille dépense soit inenvisageable dans le contexte budgétaire actuel. Il est donc impossible de donner une suite favorable à votre amendement, indépendamment d’autres arguments que l’on pourrait lui opposer.

Quant à l’amendement n° 98 rectifié, je voudrais dire à ses auteurs que le dispositif prévu à l’article 1er prend déjà en compte la situation familiale, puisqu’il majore le seuil du revenu fiscal de référence ouvrant droit à la réduction d’impôt. Vous proposez de porter la limite de 3 536 euros à 4 000 euros. D’abord, comme l’a dit M. le rapporteur général, cette mesure aurait un coût dépassant 100 millions d’euros. Ensuite, le seuil de 3 536 euros n’a pas été fixé par hasard, mais calculé selon la même méthode que la majoration par enfant octroyée aux bénéficiaires de la prime pour l’emploi, en retenant 25 % du seuil fixé pour une personne seule.

En conséquence, le Gouvernement sollicite le retrait de cet amendement. À défaut, il émettra un avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

La parole est à M. Gaëtan Gorce, pour explication de vote sur l'amendement n° 55.

Debut de section - PermalienPhoto de Gaëtan Gorce

M. Gaëtan Gorce. À peine le ministre des finances et des comptes publics a-t-il ouvert le débat qu’il est, malheureusement, déjà reparti !

On approuve sur les travées de l’UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Gaëtan Gorce

Je vais donc lui répondre indirectement, en m’adressant à M. Eckert et en inscrivant mon propos dans le prolongement de la discussion que nous avons eue.

Je m’en tiendrai à cette observation et je n’insisterai pas davantage, puisque le Gouvernement n’a manifestement pas envie que l’on discute de ces questions. Nous pourrons ensuite poursuivre l’examen du texte lui-même.

M. Sapin soulignait à l’instant que notre problème de compétitivité et nos difficultés économiques dataient des dix dernières années au moins. Si l’on regarde l’évolution de notre industrie et de nos emplois industriels, cette affirmation est vraie.

Debut de section - PermalienPhoto de Gaëtan Gorce

Le rapport de M. Gallois a montré que nous avions perdu, en l’espace de vingt ans, plus de 2 millions d’emplois industriels et près d’un tiers de la valeur ajoutée de notre industrie sur les dix dernières années.

On peut en déduire différentes conséquences. La nécessité de jouer la carte de la compétitivité par la baisse des cotisations sociales est une hypothèse, certes, mais qui est avancée surtout parce que l’on a renoncé à jouer la carte du soutien à l’activité économique et de la relance européenne.

Je comprends que le Gouvernement veuille s’engager dans cette voie, puisqu’il n’a manifestement pas voulu, ou n’a pas été capable de trouver d’autres options. Je voudrais tout de même souligner la faiblesse de cette démarche.

En effet, la plupart de ceux qui examinent la situation sur les dix dernières années nous expliquent que nos difficultés industrielles sont moins liées à un problème de compétitivité qu’au fait que, dans une zone monétaire unique, l’essentiel de l’activité industrielle a tendance à se concentrer là où se situe déjà la puissance industrielle. Autrement dit, la force industrielle attire la force industrielle, sauf si vous mettez en œuvre des politiques sectorielles et régionales à l’échelle de la zone. Or ce sont ces politiques que précisément nous n’avons pas.

C’est pourquoi j’indiquais que la seule piste véritablement raisonnable sur laquelle nous pourrions nous engager serait de travailler à la consolidation de la zone euro. C’est la vraie réponse aux problèmes auxquels nous sommes confrontés, qui traduirait à la fois la nature de notre engagement dans cette zone et notre volonté d’en faire un outil de solidarité, et pas seulement l’outil d’une compétition où la loi du plus fort finirait par s’imposer.

Nous devons définir une convergence de nos politiques économiques, mettre en place un outil politique de gestion de ces convergences et de nos politiques budgétaires, et donner une priorité à la relance par l’investissement. Autant de choix politiques.

Quand j’entends que nous n’aurions pas d’autres politiques que celle que nous faisons, je comprends en effet que nous n’en avons pas d’autres si nous renonçons à nous battre pour défendre les valeurs qui sont les nôtres et les engagements que nous avons pris.

Mais dès lors que nous faisons partie d’une entité, l’Union européenne, qui s’est construite autour d’un principe de solidarité, la logique serait que le Gouvernement français, plutôt que d’expliquer aux ménages, comme à l’instant sur le quotient familial, qu’il ne peut pas faire d’efforts supplémentaires – je peux le comprendre –, explique surtout qu’il est en train de se battre pour que l’Europe redevienne un îlot de prospérité et de croissance, et non une zone au sein de laquelle la seule logique serait celle de la rigueur et de l’austérité, au détriment des emplois industriels de nations comme la nôtre, qui n’ont pas d’avantages majeurs dans ce domaine.

Je suis vraiment désolé que nous ne puissions pas avoir ce débat, d’autant que le Gouvernement ne s’explique pas sur ses orientations.

Il faudrait au moins que l’on sache pourquoi cette option n’a pas été défendue dernièrement à Bruxelles. On nous explique que c’est l’Allemagne qui décide. J’ai un très grand respect pour notre voisin, qui a accompli des réformes significatives expliquant en partie sa situation. Toutefois, l’Allemagne ne constitue pas un modèle, ni pour l’économie ni pour la politique françaises. C’est à nous de définir quels sont nos intérêts et comment nous voulons les défendre. Qui plus est, nos intérêts vont dans le sens d’une coopération européenne renforcée.

On ne peut pas faire l’euro, c'est-à-dire la solidarité à travers une monnaie unique, si l’on ne bâtit pas aussi la solidarité à travers des politiques régionales sectorielles et industrielles.

À défaut de nous engager sur ce chemin, nous sommes en train de préparer le repli national, comme nous l’avons déjà constaté aux dernières élections européennes. Si l’on ne va pas jusqu’au bout de la logique de la zone euro, les tenants du repli national auront tous les arguments en main, puisque les partisans de l’intégration européenne à l’intérieur de la zone euro auront renoncé à construire cette entité comme ils l’auraient dû.

C’est un moment de responsabilité extrêmement fort que nous vivons, mes chers collègues, et cela dépasse de loin la question de la discipline de vote au sein des groupes politiques. Ce sont les intérêts du pays qui sont en jeu, et les engagements que nous avons pris depuis un certain nombre d’années.

Si les résultats des dernières échéances électorales ne suffisent pas à éclairer la majorité et le Gouvernement sur ce qu’il convient de faire…

Debut de section - PermalienPhoto de Gaëtan Gorce

J’en connais qui ne veulent pas entendre !

Rassurez-vous, mes chers collègues, je ne vais pas me répéter toute la soirée. J’essaye simplement de poser les termes d’un débat sur lequel nous devrions pouvoir avancer.

On peut considérer que le rôle de la représentation nationale est simplement de se prononcer par oui ou par non sur les amendements budgétaires tendant à modifier à la marge ou de façon importante telle ou telle disposition du projet de loi. Pourquoi pas ?

Pour ma part, je considère que, dans la situation où nous sommes, nous devrions engager un vrai débat économique, débat qui n’a pas eu lieu ni dans cet hémicycle ni à l’Assemblée nationale.

Je ne suis pas partisan de la position qui consiste à faire de la guérilla parlementaire par amendements. Mais il convient à tout le moins que les choses soient dites ici, car les Français qui nous ont élus nous regardent !

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Monsieur Collin, l'amendement n° 98 rectifié est-il maintenu ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

L'amendement n° 98 rectifié est retiré.

Je mets aux voix l'article 1er.

L'article 1 er est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

L'amendement n° 192, présenté par M. Delattre et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :

Après l’article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le 2 du I de l’article 197 du code général des impôts est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, le montant : « 1 500 € » est remplacé par le montant : « 2 000 € » ;

2° À la fin de la première phrase du deuxième alinéa, le montant : « 3 540 € » est remplacé par le montant : « 4 040 € » ;

3° À la première phrase de l’avant-dernier alinéa, le montant : « 1 497 € » est remplacé par le montant : « 997 € » ;

4° À la première phrase du dernier alinéa, le montant : « 1 672 € » est remplacé par le montant : « 672 € ».

II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Francis Delattre.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

Nous souhaitons, à travers cet amendement, revenir sur la baisse du plafond de l’avantage procuré par le quotient familial - de 2 000 à 1 500 euros par demi-part -, une mauvaise décision prise dans le cadre de la loi de finances initiale pour 2014.

Pour nous, le quotient familial n’est pas vraiment une mesure sociale, mais plutôt un mécanisme de solidarité à l’égard des familles. À revenus comparables, le fait d’avoir des enfants limite en effet le niveau de vie. Nous considérons même que le quotient familial peut s’apparenter à un investissement d’avenir !

Naturellement, le coût d’une telle mesure est élevé - vous nous parlez de 1 milliard d’euros, monsieur le rapporteur général, mais vous nous dites aussi que vous voulez soutenir la croissance. Or, précisément, les familles qui ont des enfants dépensent et investissent, ne serait-ce que pour l’école.

Le groupe UMP juge donc que cette atteinte au quotient familial, non seulement est fort détestable, mais se révèle aussi économiquement très défavorable.

Tout le monde considère en effet que c’est une nécessité absolue de relancer la croissance pour commencer à réduire notre chômage.

Notre collègue Gaëtan Gorce a rouvert le débat sur la compétitivité. Les rapports sur la question sont connus. M. Gallois nous a laissé un rapport ; il est passé à autre chose depuis et occupe aujourd’hui un grand pose, mais, des trente mesures qu’il a préconisées, il n’en reste plus qu’une, le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, le CICE, dont nous attendons d’ailleurs de connaître les vrais chiffres, monsieur le rapporteur général. En réalité, nous savons très bien, notamment au regard des dépenses effectuées par la Banque publique d’investissement, la BPI, l’an dernier, que l’on sera loin d’atteindre les 20 milliards d’euros annoncés.

Notre collègue nous a interpellés en affirmant que, grâce à l’opposition, il retrouvait ses marques au parti socialiste !

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

Je lui conseillerais de consulter le rapport de la Cour des comptes, qui contient un graphique très intéressant sur l’évolution des dépenses publiques en France et en Allemagne depuis 2001. Je rappelle tout de même que cette date marque le passage de l’économie française aux trente-cinq heures… Ce n’est sans doute pas le seul facteur – on peut en discuter –, mais c’est incontestablement l’un des facteurs importants qui peuvent expliquer la situation.

En 2001, l’écart de nos deux pays en termes de part des dépenses publiques dans le PIB était de quatre points. Aujourd’hui, il est de douze points ! Or l’Allemagne a un taux de croissance et un solde du commerce extérieur bien meilleurs que les nôtres – la Cour des comptes établit d’ailleurs un parallèle entre dépenses publiques et croissance.

Si l’augmentation des dépenses publiques a donc un effet sur la croissance, monsieur Gorce, on peut raisonnablement se demander dans quel sens !

Quoi qu’il en soit, cet amendement vise à rétablir un quotient familial décent pour aider les familles à élever leurs enfants.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

Je suis surpris d’entendre notre collègue Francis Delattre se faire subitement le défenseur d’une relance par la consommation, une position qui vient complètement contredire celle qu’il a pu soutenir jusqu’à présent !

Quoi qu’il en soit, cette mesure reviendrait à priver les comptes de l’État de 1 milliard d’euros de recettes. Nous ne saurions donc y souscrire.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d'État

J’ajouterai aux arguments du rapporteur général que nous n’avons pas supprimé le quotient familial, comme nous l’entendons trop souvent. Nous en avons simplement abaissé le plafond.

Cette diminution du plafond a été instaurée pour assurer l’équilibre de la branche famille et pour respecter une idée qui, me semble-t-il, fait consensus, celle de l’universalité des allocations familiales. On peut rouvrir le débat, mais la consultation engagée à l’époque avait plutôt exclu de faire dépendre ces allocations du revenu ou de les assujettir à l’impôt, deux options qui étaient sur la table.

En conséquence, je rejoins le rapporteur général : l'avis du Gouvernement est défavorable e je souhaite que le Sénat repousse cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

La parole est à M. Francis Delattre, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

On ne peut pas dire, monsieur le rapporteur général, que nous n’avons pas un problème de croissance dans ce pays, et que la consommation des ménages n’est pas un facteur qui contribue à une meilleure croissance, comme d’ailleurs les investissements des entreprises. Il s’agit des deux principaux moteurs de la croissance.

Nous pensons pour notre part que ce relèvement du plafond du quotient familial est mieux ciblé qu’un certain nombre de vos mesures. En effet, les familles ont des besoins ; elles vont donc dépenser, et non thésauriser. Et cela doit être valable à Brest comme dans toute la France !

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

L'amendement n° 101 rectifié, présenté par MM. Mézard, Collin, Fortassin, Baylet, C. Bourquin et Collombat, Mmes Escoffier et Laborde et MM. Requier, Tropeano et Vall, est ainsi libellé :

Après l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Au 4 du I de l'article 197 du code général des impôts, le montant : « 508 € » est remplacé par le montant : « 514 € ».

II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Yvon Collin.

Debut de section - PermalienPhoto de Yvon Collin

Dans la lignée de l’amendement n° 98 rectifié, cet amendement vise à renforcer les mesures en faveur des ménages modestes.

Plusieurs dispositions importantes ont déjà été adoptées dans les textes budgétaires précédents. Nous avons ainsi voté, dans le projet de loi de finances pour 2014, la fin du gel du barème de l’impôt sur le revenu et la revalorisation des seuils du revenu fiscal de référence, qui détermine, comme chacun le sait, un grand nombre d’abattements et d’exonérations.

La décote qui permet de réduire les effets de seuil liés à l’entrée dans le barème de l’impôt sur le revenu pour les ménages modestes a été revalorisée de 9 % en 2013, puis de 5, 8 % en 2014. Elle est ainsi passée de 480 à 508 euros.

Ces mesures sont tout à fait essentielles, et témoignent de la priorité accordée par le Gouvernement et la majorité aux plus défavorisés.

Avec cet amendement, nous proposons d’accentuer cet effort en augmentant à nouveau la décote de l’impôt sur le revenu, qui passerait de 508 à 514 euros.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

La commission demande le retrait de cet amendement.

Nous avons pris note que le Gouvernement avait décidé de procéder successivement à deux revalorisations exceptionnelles de la décote : une revalorisation de 9 % en 2013 et une revalorisation de 5, 8 % en 2014, c’est-à-dire bien au-delà de l’inflation. Cette dernière revalorisation représente une rétrocession de pouvoir d'achat de 193 millions d'euros pour l’année 2014.

Au vu de ces deux revalorisations, ainsi que des autres mesures prises en faveur des ménages modestes – le dégel du barème et la revalorisation des seuils de l’impôt sur le revenu, la réduction exceptionnelle d’impôt sur le revenu prévue par le projet de loi de finances rectificative, la baisse des charges sociales, etc. –, je suggère le retrait de cet amendement, dont l’adoption aurait un coût important pour les finances publiques ; à défaut, je ne pourrai qu’y être défavorable.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d'État

Encore une fois, le Gouvernement rejoint totalement l’avis du rapporteur général, qui a énuméré les mesures d’ores et déjà adoptées par le Parlement. Monsieur le sénateur, vous avez vous-même rappelé, dans la présentation de votre amendement, que la décote avait déjà été fortement réévaluée par les deux dernières lois de finances.

La mesure prévue par l’article 1er, que le Sénat vient d’adopter, est suffisante. Le coût supplémentaire de la nouvelle surréévaluation de la décote que vous proposez ne serait pas admissible. Nous avons calibré notre action : la réduction d’impôt sur le revenu complète les mesures adoptées en loi de finances initiale. Il n’y a donc pas lieu d’adopter cet amendement ; s’il n’était pas retiré, l’avis du Gouvernement serait défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Monsieur Collin, l'amendement n° 101 rectifié est-il maintenu ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

L'amendement n° 101 rectifié est retiré.

L'amendement n° 100 rectifié bis, présenté par MM. Mézard, Collin, Fortassin, C. Bourquin et Collombat, Mmes Escoffier et Laborde et MM. Requier, Tropeano et Vall, est ainsi libellé :

Après l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le premier alinéa du 1° de l’article 81 du code général des impôts est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Ces dispositions ne s’appliquent qu’aux journalistes, rédacteurs, photographes, directeurs de journaux et critiques dramatiques et musicaux dont le revenu brut annuel n’excède pas 62 340 €. »

La parole est à M. Yvon Collin.

Debut de section - PermalienPhoto de Yvon Collin

M. Yvon Collin. Monsieur le secrétaire d'État, vous n’avez pas aimé mes deux premiers amendements, mais vous allez adorer celui-ci…

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Yvon Collin

En effet, il s’agit cette fois de réaliser des économies, en limitant le bénéfice d’une niche fiscale dans un souci de justice et d’équité. Je tiens à préciser que notre Haute Assemblée a déjà adopté un amendement identique dans le cadre du projet de loi de finances pour 2014.

L’article 81 du code général des impôts prévoit un abattement permettant aux journalistes et à d’autres professionnels, comme les critiques musicaux ou les photographes, d’affranchir de l’impôt leurs rémunérations jusqu’à 7 650 euros. Nous proposons de réserver le bénéfice de cette exonération aux seuls journalistes et autres professionnels concernés dont la rémunération n’excède pas 62 340 euros bruts annuels, soit 4 000 euros nets par mois. Cette mesure poursuit un double objectif de justice fiscale et d’économie, pour contribuer au redressement de nos finances publiques.

C’est pourquoi je vous invite à confirmer le vote intervenu cet automne en adoptant le présent amendement, et avec enthousiasme !

Nouveaux sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Cet amendement vise à réserver le bénéfice de l’exonération d’impôt sur le revenu en faveur des journalistes aux seuls journalistes dont le revenu mensuel est inférieur à 4 000 euros nets.

Un amendement identique avait effectivement été adopté par le Sénat dans le cadre du projet de loi de finances pour 2014. À l’époque, j’avais indiqué que je comprenais tout à fait la préoccupation, légitime, des auteurs de l’amendement et j’avais émis un avis de sagesse.

Cependant, il faut rappeler que la mesure proposée aboutirait à réserver la déductibilité des frais professionnels à certaines catégories de journalistes, ce qui semble difficilement justifiable en droit. Elle susciterait également des effets de seuil assez forts. Enfin, il ne faut pas oublier que la dépense fiscale visée par l’amendement constitue une forme d’aide à la presse, cette presse dont chacun connaît les difficultés actuelles.

Pour ces trois raisons, je préconise le retrait de cet amendement ; la commission des finances a émis le même avis ce matin.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d'État

Le Gouvernement estime que la mesure proposée est contraire au principe d’égalité devant les charges publiques. En effet, l’amendement consiste à réserver la modalité particulière de prise en charge des frais professionnels des journalistes à une partie seulement d’entre eux.

Vous proposez qu’elle ne soit accordée que sous condition de ressources. À notre sens, cela introduirait une rupture d’égalité devant les charges publiques. La fragilité constitutionnelle de la mesure nous paraît donc évidente.

Je vous suggère de retirer votre amendement ; à défaut, je souhaite que le Sénat le repousse.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

La parole est à M. André Gattolin, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de André Gattolin

Par nature, les écologistes ne sont pas favorables aux privilèges ni aux niches fiscales. Cependant, il est extrêmement important de rappeler la situation de la presse dans ce pays.

Nous comptons environ 37 000 journalistes détenant une carte de presse. De plus en plus de personnes appartenant à l’univers journalistique sont au chômage, en situation précaire. Depuis le milieu des années 2000, le nombre de journalistes régresse, alors que le nombre de supports d’information augmente, notamment grâce au développement des nouveaux médias, comme Internet.

Bref, la richesse et la qualité de l’information sont en train de disparaître. Pour animer les sites d’information, il y a moins de journalistes professionnels et plus de gestionnaires de contenu, qui n’ont pas de formation, qui font ce que l’on appelle du desk, de la compilation d’informations déjà publiées.

Dans l’univers des aides à la presse, dont on peut contester le montant ainsi que certains choix, l’exonération d’impôt des journalistes est l’une des rares qui soutiennent le volume et la qualité journalistiques. Cet avantage fiscal permet indirectement de proposer des salaires intéressants et donc d’employer des personnes de qualité ; il est particulièrement utile aujourd'hui, compte tenu de la situation économique difficile des entreprises de presse, et notamment de la presse quotidienne, celle qui emploie le plus de journalistes.

La Cour des comptes évalue à 60 millions d'euros le coût de cette niche fiscale. L’amendement vise à exclure du dispositif les journalistes dont le revenu mensuel est supérieur à 4 000 euros nets. J’ai fait le calcul : 13 % des journalistes seraient concernés. L’économie n’atteindrait pas 60 millions d'euros, mais, toujours d’après mes calculs, au maximum 8 à 10 millions d'euros. Il s’agirait donc d’une économie relativement secondaire.

Je ne serais pas hostile à une mesure progressive. En revanche, il faut éviter les politiques de stop and go. Outre le problème de la rupture d’égalité, la mesure proposée créerait des effets de seuil problématiques. Dans une rédaction, les personnes qui gagnent plus de 4 000 euros par mois, ce sont le rédacteur en chef et les rédacteurs en chef adjoints, ou des journalistes de plus de cinquante ans, qui ont trente ans d’expérience et dont l’évolution salariale est souvent liée à l’ancienneté. Avec la mesure proposée, tous ces gens perdraient du revenu net en franchissant la barre des 4 000 euros par mois.

M. Éric Doligé s’exclame.

Debut de section - PermalienPhoto de André Gattolin

Il faut tenir compte des équilibres économiques du secteur.

Je rappelle en outre que, si la presse d’information relève du secteur privé, elle n’en remplit pas moins une mission de service public, celle d’assurer le pluralisme.

Alors, non, on ne joue pas avec ce type de niche !

Un travail de réforme des aides à la presse a été entamé. Je pense sincèrement qu’il faut maintenir les aides qui incitent à embaucher des personnes de qualité. Avant la qualité de l’impression, de la diffusion et du marketing d’un support de presse, le premier élément important est la qualité et la richesse de sa rédaction.

Pour toutes ces raisons, le groupe écologiste votera contre l’amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Je voudrais dire à notre excellent collègue Yvon Collin que son initiative est tout à fait méritoire et utile, mais que son amendement, tel qu’il est libellé, peut sans doute se heurter à certains obstacles.

Il me semble que nous avons là un exemple type de ce que peut produire un système comme le nôtre, rongé par tant et tant d’exceptions et de dépenses fiscales, de niches, en d’autres termes. Nous savons bien que ce système de niches ne va pas pouvoir durer très longtemps, parce que chacune provient de démarches professionnelles, corporatives, d’intérêts bien regroupés qui se sont fait valoir auprès de la puissance publique et ont obtenu ceci ou cela au fil du temps.

En ce qui concerne nos amis journalistes, il s’agit, si je ne me trompe, d’un régime de déduction forfaitaire. Si M. le secrétaire d'État a répondu qu’il pouvait y avoir un problème d’égalité devant l’impôt, c’est peut-être parce que la création d’une barrière empêchant certains journalistes, à raison de leurs revenus, de bénéficier d’une déduction forfaitaire de leurs frais professionnels peut se heurter à cette question de principe.

En revanche, si ce n’était pas un régime de calcul forfaitaire des frais professionnels, mais un autre procédé, il serait possible, me semble-t-il, d’établir une distinction en fonction des revenus. Il doit exister bien des précédents de régimes fiscaux privilégiés assortis d’un plafond de revenus. À cet égard, je comprends la démarche de nos collègues du RDSE.

Monsieur le secrétaire d'État, je profite de cet amendement pour vous demander si vous avez réellement l’intention d’entrer dans une démarche de plafonnement de la dépense fiscale. En effet, plus on regarde chacune des niches l’une après l’autre, plus on se convainc qu’il est impossible de changer quoi que ce soit. Ne serait-il pas temps d’entrer dans une démarche d’évaluation de la dépense fiscale, dans une démarche de maîtrise puis de réduction de la dépense fiscale par le plafonnement de ses effets, afin de mieux gérer le solde des finances publiques ?

Ou alors pensez-vous que notre rôle soit de nous livrer, dans ce théâtre d’ombres, à un débat comme celui-ci, qui se conclut généralement de la même façon, c'est-à-dire par le retrait de l’amendement, non sans avoir permis aux intervenants de montrer à la fois leur souci de la maîtrise des finances publiques et leur compréhension amicale pour la corporation concernée ?

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

La parole est à M. Éric Doligé, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Doligé

Les amendements de ce type revenant tous les ans, mais en vain, il serait plus judicieux de ne plus jamais parler de la niche fiscale des journalistes !

Chaque année, quelques essais sont tentés pour voir si l’on peut y toucher, mais, finalement, on assiste à un repli généralisé, car on a bien compris qu’il ne fallait pas toucher à cette corporation, pour des raisons diverses et variées. Notre collègue du groupe écologiste a donné les siennes ; d’autres ont donné les leurs.

Cela fait vingt ans que j’entends parler de cette niche, et cela fait vingt ans que l’on recule systématiquement devant toute évolution !

À mon sens, il serait donc plus raisonnable qu’on n’en parle plus jamais, en considérant comme établi budgétairement qu’il y a une niche fiscale pour cette catégorie-là. Ainsi, il serait permis de toucher aux avantages de certaines catégories, mais les journalistes feraient partie des intouchables. Les choses seraient claires, sans avoir à parler de préférence pour telle ou telle catégorie. La règle serait fixée: on ne touche pas à cette niche fiscale, et l’on n’en parle plus !

Debut de section - PermalienPhoto de Yvon Collin

Monsieur le président, je retire l’amendement !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Je ne m’étais pas trompé !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

L'amendement n° 58, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Après l’article premier

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Après le 2 bis de l’article 81 du code général des impôts, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« … – Les majorations de retraite ou de pension pour charges de famille ; ».

II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Thierry Foucaud.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Nous ne pensons pas que c’est en mettant plus lourdement à contribution celles et ceux, surtout celles, d’ailleurs, qui ont mené de pair vie professionnelle et vie familiale que nous parviendrons à résoudre les difficultés budgétaires de l’État, d’autant qu’il y a des dépenses sur lesquelles nous ne sommes pas regardants…

À nos yeux, le gel des retraites dont le montant est supérieur à 1 200 euros, voté dernièrement au Palais-Bourbon, n’est pas une bonne mesure, à l’heure où nous aidons le grand patronat à coups de milliards !

Aujourd’hui, le problème n’est pas tant que le niveau des retraites ait progressé plus vite que celui des salaires, mais bien plutôt que les salaires soient aussi bas.

L’objet de cet amendement est donc de rendre du pouvoir d’achat aux ménages, salariés et retraités, singulièrement aux plus modestes et à ceux qui n’ont toujours vécu que du produit de leur travail, ce qui passe par une remise en question de dispositions inéquitables prises récemment.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

La commission est défavorable à cet amendement, qui coûterait plus de 1 milliard d’euros s’il était voté. De plus, il s’agit d’une mesure anti-redistributive.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d'État

Monsieur Foucaud, vous ne souhaitez tout de même pas recommencer l’exercice de la loi de finances initiale pour 2014…

Évidemment, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.

D’ailleurs, vous avez parlé d’une disposition qui ne figure pas dans le texte que nous examinons aujourd’hui, puisque le gel des pensions relève du projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale, alors que votre amendement a pour objet de revenir sur une autre mesure.

J’en profite pour répondre au président de la commission des finances sur le problème des niches. Nous venons d’en évoquer une, mais il y en a d’autres concernant les pensions qui sont régulièrement mises en avant par la Cour des comptes, laquelle est abondamment citée ce soir.

Oui, monsieur Marini, le Gouvernement entend bien plafonner les niches. Il l’a d’ailleurs déjà fait, ce qui a, me semble-t-il, provoqué un certain émoi, notamment lorsque nous avons introduit le plafond de 10 000 euros.

Le Gouvernement a également fait évoluer, et j’espère que nous pourrons aller encore plus loin, les dispositifs de défiscalisation outre-mer, que vous connaissez bien.

Nous avons fait bouger les choses et nous comptons bien poursuivre dans cette voie. À cet égard, il ne vous aura pas échappé, à la lecture des derniers chiffres publiés, que, si les dépenses fiscales n’ont pas diminué, elles n’augmentent pas non plus. En effet, nous sommes autour de 70 milliards d’euros pour l’ensemble des niches. Encore faudrait-il s’entendre sur la signification du terme et l’étendue de la notion, puisque, là aussi, les discours et les analyses sont très controversés.

Je pense notamment à l’abattement pour frais de 10 % sur les pensions et retraites que la Cour des comptes classe régulièrement comme la principale niche fiscale. En effet, autant l’application de cette mesure pour les frais professionnels des actifs peut se concevoir, autant, pour les retraités, c’est plus discutable. La Cour des comptes considère en tout cas qu’il s’agit d’une niche fiscale, et il y en a bien d’autres, d’ailleurs.

En tout état de cause, monsieur Marini, soyez rassuré, le Gouvernement a l’intention de poursuivre le plafonnement des niches et de la dépense fiscale.

L’avis est donc défavorable sur cet amendement, en raison également de son coût, qui vient d’être rappelé par M. le rapporteur général.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Leconte

M. Jean-Yves Leconte. Il n’y a pas de possibilité de retour de la confiance sans justice. C’est la raison pour laquelle l’article 1er va dans le bon sens en permettant de redonner un peu de pouvoir d’achat à ceux qui avaient été le plus mis à contribution depuis 2010, en particulier au fil des collectifs budgétaires successifs de la fin du gouvernement Fillon.

Exclamations sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Leconte

C’est une bonne chose que cet article ait été voté par le Sénat à l’instant, …

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Leconte

… M. le rapporteur général ayant bien montré qu’il tendait à redonner de pouvoir d’achat aux Français les plus touchés par les mesures précédentes.

Toutefois, je profite de la discussion de l’amendement de nos collègues communistes pour réagir à certaines prises de position que j’ai entendues lors de nos débats.

Chers collègues, comme s’il y avait des Français qui payaient l’impôt et d’autres qui ne le payaient pas ! Mais tout le monde le paie, car toute personne vivant sur notre territoire et disposant d’un revenu de son travail est soumise à des prélèvements obligatoires, CSG et impôt sur le revenu. Tous les travailleurs sont au moins assujettis à la CSG, qui est quasiment une flat tax.

Par ailleurs, lorsque l’on compare nos prélèvements sur le revenu avec ceux de nos voisins européens, il faut bien avoir en tête que ce dispositif combiné de la CSG et de l’impôt sur le revenu est unique, les autres pays ne connaissant pas un tel système. Il faut donc procéder aux comparaisons en tenant compte de cette spécificité. Aussi, lorsque j’entends, en particulier sur les travées de l’UMP, qu’une bonne partie des gens ne participent pas à la solidarité nationale parce qu’ils ne paient pas d’impôt sur le revenu, je m’inscris en faux !

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

Personne n’a dit cela sur les travées de l’UMP !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Leconte

Vous l’avez dit en expliquant que la mesure prévue à l’article 1er n’était pas bonne et qu’il fallait au contraire donner du pouvoir d’achat à ceux qui payaient un peu plus d’impôt sur le revenu.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Leconte

Les différents amendements présentés montrent que cette combinaison CSG-impôt sur le revenu n’est plus acceptable lorsque nous essayons tous de trouver le moyen d’aider les Français les plus fragiles, les plus modestes, qui sont à la lisière de l’impôt sur le revenu, mais paient tout de même de la CSG.

Il est bien évidemment impossible de réaliser une telle réforme à l’occasion d’un collectif budgétaire, mais, si nous voulons réellement redonner du pouvoir d’achat à l’ensemble des Français, en particulier aux plus modestes, il est important de lancer cette réflexion sur une CSG qui serait non plus une sorte de flat tax, mais une contribution légèrement progressive, du moins au début.

En tout cas, il faut, sans nuire à la facilité de la collecte de cette CSG, permettre aux plus modestes qui travaillent, et qui paient des prélèvements obligatoires en conséquence, de bénéficier d’une certaine progressivité. De cette manière, nous pourrions éviter le retour de ces amendements portant sur des niches fiscales qui montrent que notre système est à bout de souffle !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

La parole est à M. Thierry Foucaud, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Pour compléter ce qui vient d’être dit, peut-être faudrait-il rappeler les politiques d’allégement du coût du travail lancées à l’automne 1993, quelques mois après la réforme des retraites, notamment avec la loi quinquennale relative au travail, à l’emploi et à la formation professionnelle, la loi TEPA.

Cette politique n’a finalement jamais cessé de prendre de la vigueur depuis.

Pour rappel, à l’époque, on avait dépensé 1 milliard d’euros pour alléger les charges supposées des entreprises. Aujourd’hui, cette dépense fiscale atteint, mon cher collègue, 30 milliards d’euros. Peut-être auriez-vous dû rappeler cette somme, que le CICE ne fera qu’alourdir…

À cet égard, il serait intéressant de calculer le rapport entre cette subvention annuelle et les quelque 800 000 emplois mal payés créés : à mon sens, mes chers collègues, c’est un peu cher, ce qui devrait vous faire prendre conscience de la nécessité de réviser vos politiques, si l’on en juge au niveau moyen des pensions.

Rétablir la non-imposition des majorations des pensions est, me semble-t-il, la moindre des choses que nous puissions faire.

Dans le contexte historique récent, je pourrais aussi rappeler les réformes des retraites, à commencer par celle de Balladur en 1993, puis la réforme, que l’on a appelée « Fillon I », de 2003, et, enfin, la « Fillon II », de 2010, lesquelles ont également tendu à comprimer le montant des pensions des classes de population très nombreuses, et très expérimentées, qui ont quitté le monde du travail au début du XXIe siècle.

La vérité commande de dire que, sans les réformes Balladur, Fillon et autres, le montant moyen des pensions aurait été plus élevé.

Je le répète, ce qui a été voté dernièrement au Palais-Bourbon n’est pas de bonne politique et n’aidera pas à régler les problèmes budgétaires du pays. C’est pourquoi il faut revenir sur cette mauvaise décision.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

La parole est à M. Éric Doligé, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Doligé

Monsieur Leconte, je tiens à vous préciser que personne sur les travées de l’UMP n’a tenu les propos que vous nous imputez. Peut-être certains l’ont-ils pensé, mais, en tout cas, ils ne l’ont pas exprimé…

Par ailleurs, vous avez déclaré que tout le monde payait la CSG. C’est faux : un certain nombre de personnes ne paient rien, alors qu’elles sont bénéficiaires des prestations d’un certain niveau, et même d’un niveau certain - souvent deux fois le SMIC. Je peux citer des exemples dans mon département, 30 000 personnes.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Leconte

J’ai bien pris soin de parler de revenus du travail !

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Doligé

Il y a des gens qui ne travaillent pas et qui touchent deux fois les revenus de ceux qui travaillent et qui paient, eux, et la CSG et l’impôt sur le revenu !

Comprenez que cela puisse choquer. Pour ma part, je souscris à la remarque de mon collègue sur la nécessité de faire payer certaines personnes qui sont exemptées actuellement. Si vous le souhaitez, pour illustrer mon propos, je vous apporterai des documents que je ne tiens pas à rendre publics ici.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

L'amendement n° 197, présenté par M. Delattre et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :

Après l’article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Après l’article 81 ter du code général des impôts, il est inséré un article 81 quater ainsi rédigé :

« Art. 81 quater. – I. – Sont exonérés de l’impôt sur le revenu :

« 1° Les salaires versés aux salariés au titre des heures supplémentaires de travail, définies à l’article L. 3121-11 du code du travail et, pour les salariés relevant de conventions de forfait annuel en heures, prévues à l’article L. 3121-42 du même code, des heures effectuées au-delà de 1 607 heures, ainsi que des heures effectuées en application de l’avant-dernier alinéa de l’article L. 3123-7 du même code. Sont exonérés les salaires versés au titre des heures supplémentaires mentionnées à l’article L. 3122-4 du même code, à l’exception des heures effectuées entre 1 607 heures et la durée annuelle fixée par l’accord lorsqu’elle lui est inférieure.

« L’exonération mentionnée au premier alinéa est également applicable à la majoration de salaire versée, dans le cadre des conventions de forfait annuel en jours, en contrepartie de la renonciation par les salariés, au-delà du plafond de deux cent dix-huit jours mentionné à l’article L. 3121-44 du même code, à des jours de repos dans les conditions prévues à l’article L. 3121-45 du même code ;

« 2° Les salaires versés aux salariés à temps partiel au titre des heures complémentaires de travail définies au 4° de l’article L. 3123-14 et aux articles L. 3123-17 et L. 3123-18 du même code ;

« 3° Les salaires versés aux salariés par les particuliers employeurs au titre des heures supplémentaires qu’ils réalisent ;

« 4° Les salaires versés aux assistants maternels régis par les articles L. 421-1 et suivants et L. 423-1 et suivants du code de l’action sociale et des familles au titre des heures supplémentaires qu’ils accomplissent au-delà d’une durée hebdomadaire de quarante-cinq heures, ainsi que les salaires qui leur sont versés au titre des heures complémentaires accomplies au sens de la convention collective nationale qui leur est applicable ;

« 5° Les éléments de rémunération versés aux agents publics titulaires ou non titulaires au titre, selon des modalités prévues par décret, des heures supplémentaires qu’ils réalisent ou du temps de travail additionnel effectif ;

« 6° Les salaires versés aux autres salariés dont la durée du travail ne relève pas des dispositions du titre II du livre Ier de la troisième partie du code du travail ou du chapitre III du titre Ier du livre VII du code rural et de la pêche maritime au titre, selon des modalités prévues par décret, des heures supplémentaires ou complémentaires de travail qu’ils effectuent ou, dans le cadre de conventions de forfait en jours, les salaires versés en contrepartie des jours de repos auxquels les salariés ont renoncé au-delà du plafond de deux cent dix-huit jours.

« II. – L’exonération prévue au I s’applique :

« 1° Aux rémunérations mentionnées aux 1° à 4° et au 6° du I et, en ce qui concerne la majoration salariale correspondante, dans la limite :

« a) Des taux prévus par la convention collective ou l’accord professionnel ou interprofessionnel applicable ;

« b) À défaut d’une telle convention ou d’un tel accord :

« – pour les heures supplémentaires, des taux de 25 % ou 50 %, selon le cas, prévus au premier alinéa de l’article L. 3121-22 du code du travail ;

« – pour les heures complémentaires, du taux de 25 % ;

« – pour les heures effectuées au-delà de 1 607 heures dans le cadre de la convention de forfait prévue à l’article L. 3121-46 du même code, du taux de 25 % de la rémunération horaire déterminée à partir du rapport entre la rémunération annuelle forfaitaire et le nombre d’heures de travail prévu dans le forfait, les heures au-delà de la durée légale étant pondérées en fonction des taux de majoration applicables à leur rémunération ;

« 2° À la majoration de salaire versée dans le cadre des conventions de forfait mentionnées au second alinéa du 1° et au 6° du I, dans la limite de la rémunération journalière déterminée à partir du rapport entre la rémunération annuelle forfaitaire et le nombre de jours de travail prévu dans le forfait, majorée de 25 % ;

« 3° Aux éléments de rémunération mentionnés au 5° du I, dans la limite des dispositions applicables aux agents concernés.

« III. – Les I et II sont applicables sous réserve du respect par l’employeur des dispositions légales et conventionnelles relatives à la durée du travail.

« Les I et II ne sont pas applicables lorsque les salaires ou éléments de rémunération qui y sont mentionnés se substituent à d’autres éléments de rémunération au sens de l’article 79 du présent code, à moins qu’un délai de douze mois ne se soit écoulé entre le dernier versement de l’élément de rémunération en tout ou partie supprimé et le premier versement des salaires ou éléments de rémunération précités.

« De même, ils ne sont pas applicables :

« – à la rémunération des heures complémentaires lorsque ces heures sont accomplies de manière régulière au sens de l’article L. 3123-15 du code du travail, sauf si elles sont intégrées à l’horaire contractuel de travail pendant une durée minimale fixée par décret ;

« – à la rémunération d’heures qui n’auraient pas été des heures supplémentaires sans abaissement, après le 1er octobre 2012, de la limite haute hebdomadaire mentionnée à l’article L. 3122-4 du même code. »

II. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° L’article L. 241-17 est rétabli dans la rédaction suivante :

« Art. L. 241 -17 . – I. – Toute heure supplémentaire ou complémentaire effectuée, lorsqu’elle entre dans le champ d’application du I de l’article 81 quater du code général des impôts, ouvre droit, dans les conditions et limites fixées par les dispositions de cet article, à une réduction de cotisations salariales de sécurité sociale proportionnelle à sa rémunération, dans la limite des cotisations et contributions d’origine légale ou conventionnelle rendues obligatoires par la loi dont le salarié est redevable au titre de cette heure. Un décret détermine le taux de cette réduction.

« Ces dispositions sont applicables aux heures supplémentaires ou complémentaires effectuées par les salariés relevant des régimes spéciaux mentionnés à l’article L. 711-1 du présent code dans des conditions fixées par décret, compte tenu du niveau des cotisations dont sont redevables les personnes relevant de ces régimes et dans la limite mentionnée au premier alinéa du présent article.

« II. – La réduction de cotisations salariales de sécurité sociale prévue au I est imputée sur le montant des cotisations salariales de sécurité sociale dues pour chaque salarié concerné au titre de l’ensemble de sa rémunération.

« III. – Le cumul de cette réduction avec l’application de taux réduits en matière de cotisations salariales, d’assiettes ou de montants forfaitaires de cotisations ou avec l’application d’une autre exonération, totale ou partielle, de cotisations salariales de sécurité sociale ne peut être autorisé que dans des conditions fixées par décret. Ce décret tient compte du niveau des avantages sociaux octroyés aux salariés concernés.

« IV. – Le bénéfice de la réduction est subordonné à la mise à disposition du service des impôts compétent et des agents chargés du contrôle, mentionnés à l’article L. 243-7 du présent code et à l’article L. 724-7 du code rural et de la pêche maritime, par l’employeur, d’un document en vue du contrôle des dispositions du présent article dans des conditions fixées par décret. Pour les salaires pour lesquels il est fait usage des dispositifs mentionnés aux articles L. 133-8, L. 133-8-3 et L. 531-8 du présent code, les obligations déclaratives complémentaires sont prévues par décret. » ;

2° L’article L. 241-18 est ainsi rédigé :

« Art. L. 241 -18. – I. – Toute heure supplémentaire effectuée par les salariés mentionnés au II de l’article L. 241-13, lorsqu’elle entre dans le champ d’application du I de l’article 81 quater du code général des impôts, ouvre droit à une déduction forfaitaire des cotisations patronales à hauteur d’un montant fixé par décret. Ce montant peut être majoré dans les entreprises employant au plus vingt salariés.

« II. – Une déduction forfaitaire égale à sept fois le montant défini au I est également applicable pour chaque jour de repos auquel renonce un salarié dans les conditions prévues par le second alinéa du 1° du I de l’article 81 quater du code général des impôts.

« III. – Le montant mentionné aux I et II est cumulable avec les autres dispositifs d’exonérations de cotisations patronales de sécurité sociale dans la limite des cotisations patronales de sécurité sociale, ainsi que des contributions patronales recouvrées suivant les mêmes règles, restant dues par l’employeur, et, pour le reliquat éventuel, dans la limite des cotisations salariales de sécurité sociale précomptées, au titre de l’ensemble de la rémunération du salarié concerné.

« Ce montant est déduit des sommes devant être versées par les employeurs aux organismes de recouvrement mentionnés aux articles L. 213-1 du présent code et L. 725-3 du code rural et de la pêche maritime.

« Le bénéfice des déductions mentionnées aux I et II est subordonné au respect des conditions prévues au III de l’article 81 quater du code général des impôts.

« Le bénéfice de la majoration mentionnée au I est subordonné au respect des dispositions du règlement (CE) n° 1998/2006 de la Commission du 15 décembre 2006 concernant l’application des articles 87 et 88 du traité aux aides de minimis.

« IV. – Les employeurs bénéficiant de la déduction forfaitaire se conforment aux obligations déclaratives prévues au IV de l’article L. 241-17 du présent code. »

III. – Les dispositions du II sont applicables aux rémunérations perçues à raison des heures de travail accomplies à compter du 1er janvier 2013.

IV. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale des I à III ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

V. – La perte de recettes résultant pour l’État des I à III ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Francis Delattre.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

Il s’agit de rétablir un dispositif qui a fait ses preuves pour le pouvoir d’achat.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

Une des différences entre vos propositions et les nôtres, monsieur le secrétaire d’État, réside justement dans la référence à la valeur travail.

Pour notre part, nous souhaitons faire en sorte que les travailleurs faisant des heures supplémentaires aient un avantage fiscal. De surcroît, avec ce dispositif, les entreprises ont la possibilité d’adapter les rémunérations versées à leur carnet de commandes, lui-même lié à la situation du moment. En somme, il convient d’apporter un peu de souplesse dans un système dont tout le monde s’accorde, me semble-t-il, pour reconnaître qu’il est assez rigide.

Il s’agit à la fois d’injecter du pouvoir d’achat de manière intelligente et de permettre aux entreprises de gérer leur carnet de commandes de façon tout aussi intelligente.

Ce dispositif, qui figurait donc déjà dans la loi TEPA, une loi que vous avez beaucoup critiquée, bénéficiait à 8 ou 9 millions de salariés. C’est considérable par rapport aux 3, 7 millions de personnes concernées par le dispositif que vous avez retenu pour tenir compte des revendications des frondeurs de l’Assemblée nationale et faire en sorte que les plus modestes échappent à l’impôt sur le revenu.

Le dispositif que nous souhaitons rétablir concerne vraiment les classes moyennes, celles qui travaillent et gagnent en moyenne 1, 5 fois le SMIC.

Au demeurant, plus personne ne croit les représentants du parti socialiste quand ils disent qu’ils défendent les classes en difficulté, les bas revenus. Aux dernières élections municipales et européennes, moins de 10 % des ouvriers ont voté pour vous !

Votre discours passe de moins en moins bien, car il se heurte à la réalité des chiffres, à savoir que 8 ou 9 millions de personnes se retrouvent aujourd'hui avec des revenus en nette diminution, ce qui leur cause un préjudice certain. D’ailleurs, il y a quelques mois, des parlementaires de votre groupe ont reconnu que la suppression de la défiscalisation des heures supplémentaires avait été une belle erreur. Nous vous offrons ici l’occasion de la réparer.

Certes, cette mesure coûte cher, mais, si vous aviez voté la suppression de l’article 1er, le financement était presque trouvé ! Quoi qu’il en soit, ne doutant pas que vous allez nous opposer le financement de la mesure, je vous livrerai quelques pistes.

Première piste, la franchise de l’aide médicale d’État, l’AME : nous avons déposé un amendement en ce sens, nous l’examinerons plus loin. Deuxième piste, le fameux jour de carence qui a été supprimé. Ce sont des mesures à 250 millions d’euros. Si vous voulez aller jusqu’à 1 milliard d’euros, voici une troisième piste : les 500 millions d’euros de la réforme des rythmes scolaires, réforme dont la plupart des maires reconnaissent aujourd'hui qu’il s’agira d’un beau fiasco à la rentrée prochaine.

L’occasion vous est donc donnée, en votant cet amendement, de corriger ce qui fut une erreur commise il y a deux ans, et d’injecter directement, et intelligemment, au profit de la population un vrai pouvoir d’achat susceptible de soutenir la croissance.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

La commission a émis un avis défavorable. Nous avons déjà eu des débats longs et nourris sur la question de la fiscalisation des heures supplémentaires.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Je vous rappelle que la défiscalisation des heures supplémentaires représenterait 1 milliard d’euros de recettes en moins. Je l’ai bien noté, monsieur Delattre, vous considérez que les mesures en faveur de la relance du pouvoir d’achat étaient insuffisantes. C’est donc une nouvelle preuve de votre conversion à la politique de relance par la consommation et par l’augmentation du pouvoir d’achat. Vous avez complètement changé votre ligne politique, mais, dans des débats de ce genre, tout est possible, et je comprends que l’on puisse proposer d’abord une chose, puis son contraire !

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Doligé

D’autant que vous passez votre temps à ça !

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d'État

Le Gouvernement ne souhaite pas revenir sur cette disposition. Vous ne pouvez pas nous reprocher de changer tout le temps de politique et, parallèlement, nous accuser de ne pas en changer !

Comme M. le rapporteur général l’a souligné, ce débat a eu lieu. Personne n’empêche les entreprises de s’adapter en ayant recours aux heures supplémentaires, d’autant qu’il existe très peu de limitation grâce à l’annualisation et aux autres dispositifs prévus.

Monsieur le sénateur, vos arguments sur la flexibilité des effectifs pour répondre aux évolutions du marché du travail ne tiennent pas un seul instant. Pour le reste, nous avons eu un débat de fond sur la question de savoir s’il fallait ou non encourager les heures supplémentaires plutôt que l’embauche. Tout a été dit, sur les effets d’aubaine, sur le peu d’heures supplémentaires nouvelles enregistrées après l’adoption de cette mesure, sur son coût – sous réserve de vérification, largement sous-évalué -, ainsi que sur ses conséquences en termes de cotisations sociales. Je vous rappelle en effet que la défiscalisation des heures supplémentaires s’accompagnait d’une exonération de charges.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d'État

Voilà pourquoi le Gouvernement est totalement défavorable à cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

La parole est à M. Francis Delattre, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

Le fait que nous défendions certains amendements ne signifie pas que nous avons totalement changé de stratégie !

Depuis deux ans, notre pays compte 450 000 chômeurs de plus ! Cela ne vous fait-il pas réfléchir ? Nous vous écoutons et nous partageons parfois certaines de vos analyses. Nous pensons qu’il faut un peu des deux : il faut à la fois relancer la consommation et les investissements. Nous ferons donc également des propositions pour soutenir l’investissement.

Quand vous dites que les entreprises, que vous évoquez abondamment, doivent retrouver leur compétitivité, nous sommes d’accord. Nous défendrons des amendements en ce sens.

Nous vous proposons, par exemple, depuis déjà au moins un an, de supprimer la non-déductibilité fiscale des intérêts des entreprises pour favoriser l’investissement. Dans ce pays, il n’y a pas de fonds dédié aux investissements des entreprises, alors que 90 % des PME-PMI ont besoin de prêts bancaires. Et vous avez osé mettre en place une ingénierie financière aussi désastreuse pour les investissements des entreprises ?...

En tout état de cause, nos divergences politiques ne nous amènent pas pour autant à proposer des dispositifs différents des vôtres sur un certain nombre de sujets.Nous les lions simplement à la valeur travail pour activer la relance !

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Avec 1 million de chômeurs de plus ? Ça suffit !

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

M. Francis Delattre. Nous n’avons pas déposé que des amendements orientés vers la relance de la consommation.

Protestations sur les mêmes travées.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

Au contraire, nous reconnaissons qu’il y a deux moteurs : l’investissement des entreprises et la consommation !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Leconte

On a vu ce que vous avez fait pendant dix ans !

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

Si vous êtes contents de vos résultats, alors tant mieux !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Chiron

Et vous ? Êtes-vous satisfait de votre bilan ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Un peu de calme, mes chers collègues !

La parole est à M. Yvon Collin, et à lui seul, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Yvon Collin

Plusieurs membres du groupe du RDSE avaient déposé, lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2014, un amendement identique à celui-ci. Par conséquent, nous confirmerons ce soir notre vote de novembre dernier en soutenant très majoritairement cet amendement.

Comme nous l’avons dit dans la discussion générale, nous appelons ardemment à une refonte globale de notre système fiscal afin de le rendre plus lisible et plus juste. En effet, si, dans un système fiscal « idéal », défiscaliser les heures supplémentaires peut sembler injuste, il en va tout autrement en l’état actuel de notre fiscalité, et de notre économie.

Il est évident que la pression fiscale est aujourd’hui très élevée, sans doute trop élevée pour une majorité de contribuables, et pas seulement pour les plus favorisés d’entre eux.

Nous devons entendre leur incompréhension face à une augmentation brutale et parfois extrêmement importante de leur imposition pour des revenus identiques à ceux de l’année précédente. Sur un tel sujet, il nous semble impératif de savoir faire preuve de pragmatisme. Il convient de sortir d’un discours idéologique fondé sur des principes trop éloignés de la réalité vécue par un grand nombre de Français.

C’est pourquoi il nous paraît indispensable de préserver un certain nombre de ménages d’une charge fiscale trop lourde, en exonérant de nouveau les heures supplémentaires d’impôt sur le revenu et de cotisations sociales.

Cette mesure est une nécessité pour encourager la reprise économique qui s’amorce à peine, en soutenant le pouvoir d’achat des ménages, moteur de la croissance.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Je mets aux voix l'amendement n° 197.

J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe UMP.

Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

Il est procédé au dépouillement du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Voici le résultat du scrutin n° 216 :

Nombre de votants311Nombre de suffrages exprimés290Pour l’adoption152Contre 138Le Sénat a adopté.

Exclamations amusées sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 1er.

L'amendement n° 102 rectifié, présenté par MM. Mézard, Collin, Fortassin, Baylet, C. Bourquin et Collombat, Mmes Escoffier et Laborde et MM. Requier, Tropeano et Vall, est ainsi libellé :

Après l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le 1 de l’article 195 du code général des impôts est ainsi modifié :

1° Après le mot : « distincte », la fin du a est supprimée ;

2° Après le mot : « guerre », la fin du b est supprimée ;

3° Après le mot : « ans », la fin de la seconde phrase du e est supprimée.

II. – La perte de recettes pour l’État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Yvon Collin.

Debut de section - PermalienPhoto de Yvon Collin

Cet amendement a déjà été adopté par la Haute Assemblée dans le cadre de la discussion du projet de loi de finances pour 2014.

Il vise à corriger l’injustice que constitue la suppression du bénéfice de la demi-part fiscale supplémentaire accordée aux personnes veuves. Cette demi-part a en effet été supprimée par la précédente majorité pour les veufs et veuves qui ont élevé leurs enfants seuls pendant moins de cinq ans.

Aujourd’hui, l’article 195 du code général des impôts ne concerne plus, en effet, que les contribuables veufs qui ont supporté à titre exclusif ou principal la charge d’un ou plusieurs enfants pendant au moins cinq années au cours desquelles ils vivaient seuls. Or ce seuil de cinq ans nous semble non seulement injustifié, mais aussi injuste. C’est pourquoi nous vous proposons de le supprimer en adoptant cet amendement qui vise à rétablir la demi-part fiscale pour toutes les personnes veuves.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Cet amendement vise à restaurer l’ancienne demi-part pour toutes les personnes, c'est-à-dire sans la condition des cinq ans.

Il nous semble que, dans le contexte budgétaire actuel, il n’est pas raisonnable de restaurer un avantage fiscal accordé à vie aux personnes vivant seules, même si celles-ci n’ont pas assumé la charge effective de leurs enfants et bien longtemps après le départ de ces derniers.

Le Gouvernement a fait le choix de concentrer les aides sur les familles ayant effectivement des enfants à charge, par exemple en revalorisant de 25 % les aides aux familles monoparentales dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2014.

Le bénéfice de la demi-part des personnes veuves est dorénavant subordonné à la condition d’avoir assumé la charge de famille pendant cinq ans. Cette condition nous semble raisonnable et ne remet en cause ni l’esprit ni la vocation du dispositif.

Pour l’ensemble de ces raisons, la commission demande le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d'État

Le Gouvernement rejoint l’analyse du rapporteur général et émet un avis défavorable.

Nous avons déjà eu ce débat. Ce dispositif a été institué de manière à entrer progressivement en application à compter de 2009 et nous parvenons cette année à la dernière étape de sa mise en œuvre.

Je profite de cette occasion pour indiquer au Sénat que, à l’issue de l’examen de la première partie du présent projet de loi de finances rectificative, le Gouvernement demandera une seconde délibération sur l’amendement n° 197, précédemment adopté.

Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, n'adopte pas l'amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

L'amendement n° 115 rectifié quater, présenté par MM. Leconte et Yung, Mmes Conway-Mouret et Claireaux et MM. Néri et Poher, est ainsi libellé :

Après l’article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

« La troisième phrase du deuxième alinéa de l’article 11-7 de la loi n° 88-227 du 11 mars 1988 relative à la transparence de la vie politique est ainsi rédigée :

« Si le 1er juillet de l'année suivant l'exercice, la commission constate un manquement aux obligations prévues au présent article, le parti ou groupement politique perd immédiatement le droit jusqu'au 31 décembre de l'année suivante, au bénéfice des dispositions des articles 8 à 10 de la présente loi et les dons et cotisations versés à son profit après le 1er juillet jusqu'au 31 décembre de l'année suivante, ne peuvent ouvrir droit à la réduction d'impôt prévue au 3 de l'article 200 du code général des impôts. »

La parole est à M. Jean-Yves Leconte.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Leconte

L’article 200 du code général des impôts prévoit une réduction d’impôt sur le revenu égale à 66 % du montant des sommes versées, dans la limite de 20 % du revenu imposable, à une association de financement électorale ou à un mandataire financier d’un candidat ou des cotisations versées aux partis et groupements politiques par l’intermédiaire de leur mandataire.

En matière de financement de la vie politique, la dernière année a été en particulier marquée par le « sarkothon », dont on peut estimer qu’il a privé l’État d’environ 5 millions d’euros de recettes, compte tenu des dispositions que je viens d’évoquer du code général des impôts.

Les partis politiques doivent faire certifier leurs comptes par deux commissaires aux comptes et doivent les déposer avant la fin du premier semestre de l’année suivant l’exercice. Cela veut dire qu’au 1er juillet la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, la CNCCFP, est susceptible de constater si les obligations légales en matière de certification et de dépôt des comptes sont effectivement remplies par les partis politiques.

L’année dernière, lors de l’examen de la loi du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique, sur l’initiative de Gaëtan Gorce, le Sénat a adopté un amendement – devenu l’article 17 de la loi – disposant qu’un parti politique qui ne déposerait pas ses comptes dans les délais – à savoir le 1er juillet – ou dont les comptes ne seraient pas certifiés serait sanctionné par l’impossibilité, l’année suivante, à partir du 1er janvier, pour les personnes effectuant des dons ou versant des cotisations en sa faveur de bénéficier d’une réduction d’impôt.

Comme on peut le constater, ces personnes disposent néanmoins d’un « délai de grâce », si je puis dire, de six mois, période pendant laquelle le parti en cause peut profiter du temps pour anticiper la sanction applicable à compter de l’année suivante. C’est pourquoi j’ai déposé cet amendement, qui vise à préciser que, dès lors que les deux obligations légales - dépôt des comptes et certification par deux commissaires aux comptes – ne sont pas remplies au 1er juillet de l’année suivant l’exercice, alors, à partir de ce moment et jusqu’à la fin de l’année suivante, le parti en cause ne pourra pas faire bénéficier ses donateurs et ses cotisants de la réduction d’impôt prévue à l’article 200 du code général des impôts.

Cette proposition a pour objet de contraindre les partis politiques à respecter la loi, le mieux possible et le plus justement possible.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Dans un premier temps, j’avais proposé à la commission des finances le retrait de cet amendement, qui me semblait satisfait, dans son esprit, par l’article 17 de la loi relative à la transparence de la vie publique. La commission m’avait suivi. Entre-temps, mon cher collègue, vous avez rectifié votre amendement puisque vous proposez désormais que la suspension de la réduction d’impôt sur le revenu soit effective à compter du 1er juillet de l’année en cours, et ce, si j’ai bien compris, jusqu’au 31 décembre de l’année suivante, soit un total de dix-huit mois au lieu de douze mois. Cela permettrait ainsi de combler la faille de six mois durant laquelle le parti pouvait continuer à bénéficier de la réduction d’impôt.

Compte tenu de cet élément nouveau, peut-être le Gouvernement serait-il à même de nous éclairer sur cet aspect technique de l’amendement. Auquel cas, je serais éventuellement conduit à émettre un avis différent de notre avis initial.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d'État

Monsieur Leconte, le Gouvernement vous remercie d’avoir soulevé cette question ; ce sera l’occasion pour moi de préciser la législation actuellement en vigueur.

Un certain nombre d’événements agitent légitimement l’opinion. Ce ne sont pour l’instant que des soupçons, mais, à tout le moins, ces éléments interpellent. Toujours est-il qu’un candidat à la présidence de la République s’est vu refuser le remboursement de ses frais de campagne. La justice est saisie.

J’ai entendu ou lu un certain nombre de déclarations selon lesquelles cela n’avait rien coûté à l’État. Au contraire ! Compte tenu des nouvelles évolutions du dossier, la question se pose bien du coût pour l’État.

Certes, l’État n’a pas eu à rembourser les frais de campagne du candidat à la suite de la décision rendue par le Conseil constitutionnel ; néanmoins, il a dû supporter une part significative – à hauteur de 66 % de leur montant – des dons qui ont été versés au parti politique qui s’est substitué, selon des informations aujourd’hui publiques, pour le remboursement des frais de campagne du candidat. C’est donc là un vrai sujet.

Sur le fond, je considère que votre amendement est satisfait. Néanmoins, je mettrai un bémol, qui tient à la date à partir de laquelle un parti politique qui, pour une raison ou pour une autre, n’aurait pas déposé ses comptes dans les délais ou ne les aurait pas fait certifier par deux commissaires aux comptes, perdrait le droit à pouvoir faire bénéficier ses généreux donateurs de la réduction fiscale.

Vous l’avez rappelé, à la suite du vote d’un amendement de votre commission des finances, un article 17 a été inséré dans la loi du 11 octobre 2013 complétant l’article 11-7 de la loi du 11 mars 1988 relative à la transparence financière de la vie politique. Aux termes de cet article, lorsque la commission constate un manquement aux obligations comptables prévues par cet article – soit les comptes n’ont pas été déposés, soit l’obligation de tenir une comptabilité certifiée n’a pas été respectée –, à compter de l’année suivante, le parti politique ne peut plus faire bénéficier ses donateurs ou ses cotisants de la réduction d’impôt prévue à l’article 200 du code général des impôts.

Vous suggérez que ce soit à partir du moment où la CNCCFP a constaté le manquement de ce parti à ses obligations légales que soit interdit ce droit à réduction d’impôt. Cela pose un problème de rétroactivité, puisque les certificats qui donnent droit à cette réduction sont généralement produits par les partis ou les associations de financement en fin d’année et ne prennent pas en compte le moment du versement. En clair, quand bien même le parti serait « délabellisé » au 1er juillet, le don, qu’il ait été versé avant ou après le 1er juillet, donnera lieu à la délivrance d’un même certificat.

Je ne trahirai aucun secret en précisant que, dans certains cas, les versements se font mensuellement, par prélèvement, et donnent lieu en fin d’année à la délivrance d’un relevé unique qui récapitule l’ensemble des versements effectués au cours de l’année.

Sur le plan technique, votre proposition me paraît donc très difficile à mettre en œuvre.

En outre, elle pose le problème d’une certaine forme de rétroactivité. Clairement, le donateur ne peut ignorer de quoi il retourne puisque, aux termes d’un décret en date du 26 juin 2014, « le reçu délivré par un mandataire d’un parti ou groupement politique au titre des fonds perçus l’année suivant le constat par la commission d’un manquement du parti ou groupement politique concerné aux obligations prévues à l’article 11-7 de la loi du 11 mars 1988 susvisée, précise que le don ou la cotisation consentis à son profit ne peut ouvrir droit à la réduction d’impôt prévue au 3 de l’article 200 du code général des impôts ». Ainsi, dans le cas où un manquement serait constaté l’année suivante, les contribuables concernés seraient pleinement informés du fait qu’ils ne peuvent bénéficier d’aucun avantage fiscal.

Votre amendement soulève des problèmes techniques, mais il est satisfait par l’article 17 de la loi du 11 octobre 2013, inséré, je le répète, sur l’initiative de votre commission des finances. Aux termes de celui-ci, l’inéligibilité à la déduction est prononcée dès lors que le manquement est constaté, même si ce n’est que l’année suivante.

Un don qui aurait été fait dans l’ignorance de l’impossibilité de bénéficier d’une déduction fiscale poserait tout de même un problème déontologique. C’est l’effet rétroactif de la mesure que vous proposez.

C’est pourquoi j’estime qu’il y a lieu de s’en tenir aux dispositions en vigueur. Toutefois, par votre amendement, vous faites la démonstration qu’il faut être très rigoureux. Je le répète, il se pourrait bien que les opérations que tout le monde a en tête puissent avoir eu un coût pour l’État. Les investigations en cours montreront si tel est le cas.

Je vous invite à retirer votre amendement, monsieur le sénateur ; à défaut, le Gouvernement émettra un avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Monsieur Leconte, l'amendement n° 115 rectifié quater est-il maintenu ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Leconte

Non, je vais le retirer, monsieur le président, à la demande de M. le secrétaire d’État.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Leconte

Toutefois, je tiens à préciser que mon amendement n’est pas totalement satisfait, compte tenu de cette différence de dates que vous avez d’ailleurs signalée, monsieur le secrétaire d'État.

Si, à compter du 30 juin, un parti politique ne respecte pas ses obligations légales, il peut malgré tout continuer à percevoir pendant six mois des dons déductibles tout en incitant ses donateurs à être encore plus généreux afin d’anticiper l’interdiction qui le frappera au 1er janvier suivant.

M. Philippe Dallier s’exclame.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Leconte

À cet égard, l’article 1 du décret du 26 juin 2014, pris en application de la loi relative à la transparence de la vie publique – il traite à a fois des micropartis et du cas qui nous occupe présentement – stipule bien que les reçus doivent indiquer la date et la manière par laquelle les versements ont été faits – chèque, espèces, carte bancaire, virement, prélèvement automatique. Par conséquent, il est possible de tracer les paiements et de savoir s’ils ont été faits avant ou après le 30 juin.

Si une personne souhaite faire un don ou verser une cotisation à un parti politique, il me semble qu’elle devrait au moins être informée de la manière dont ce parti remplit ses obligations légales en matière de financement de la vie politique.

Par conséquent, si je retire cet amendement, c’est davantage parce que le décret date seulement de quelques jours, que l’amendement a été rectifié à quatre reprises et que peut-être il n’y a pas eu suffisamment d’échanges sur cette question. Je reste néanmoins persuadé que les dispositions légales actuelles ne sont pas suffisantes, car ces six mois de « trou » permettent au parti politique d’anticiper la sanction à venir l’année suivante…

Par ailleurs, je ne pense pas que le dispositif prévu dans l’amendement puisse être rétroactif ; au contraire, j’ai bien pris soin en le rédigeant que ce ne soit pas le cas.

Compte tenu donc de la précipitation qui a entouré son examen, tout en restant convaincu qu’il y a là une anomalie qu’il faudra prochainement corriger, je retire cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

L'amendement n° 115 rectifié quater est retiré.

L'amendement n° 106 rectifié, présenté par MM. Mézard, Collin, Fortassin, Baylet, C. Bourquin et Collombat, Mmes Escoffier et Laborde et MM. Requier, Tropeano et Vall, est ainsi libellé :

Après l’article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Au b du 2 de l’article 200-0 A du code général des impôts, après la référence : « 199 vicies A, », est insérée la référence : « 199 sexdecies,  » et après la référence « 200 quater A, », est insérée la référence : « 200 quater B, ».

II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Yvon Collin.

Debut de section - PermalienPhoto de Yvon Collin

Il s’agit d’un amendement d’appel visant à alerter le Gouvernement sur la situation très préoccupante d’un secteur à la fois essentiel pour notre économie, mais aussi pour la solidarité dans notre pays, notamment intergénérationnelle : je veux parler des services à la personne.

La solution que nous proposons n’est peut-être pas la plus appropriée, mais nous en appelons au Gouvernement, monsieur le secrétaire d’État, pour trouver une issue à un problème qui nous paraît urgent.

Je rappelle que le secteur des services à la personne représente plus de 1 million d’emplois. Comme d’autres secteurs d’activité, il a été durement touché par la crise économique et, en 2011, le nombre d’heures de travail à domicile rémunérées par les particuliers a baissé pour la première fois, de 1, 8 % exactement.

De surcroît, plusieurs mesures, comme la hausse de la TVA et des charges sociales, conduisent à une recrudescence de l’activité non déclarée dans ce secteur.

Pour prévenir le développement du « travail au noir », dont certaines études estiment qu’il représente quand même 12 % de l’activité économique réelle, et favoriser le développement des services à la personne déclarés, nous proposons donc d’exclure les réductions d’impôt accordées au titre de l’emploi d’un salarié à domicile du plafonnement global des « niches fiscales ».

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

La commission a demandé le retrait de cet amendement, qui vise à exclure les services à la personne du plafond global des 10 000 euros par an dont peuvent bénéficier les foyers fiscaux au titre des différentes dépenses fiscales.

En effet, si, aujourd’hui, il est nécessaire, indéniablement, de donner un « coup de pouce » aux services à la personne, le Gouvernement s’est engagé le 28 mai dernier à l’Assemblée nationale, par la voix de M. le secrétaire d’État, à réfléchir à un geste en faveur des salariés à domicile.

Il nous semble donc que c’est dans le cadre d’une prochaine loi de finances que cette question pourrait être examinée, comme d’ailleurs, je crois, le prévoit le Gouvernement.

Par ailleurs, cher Yvon Collin, le dispositif que vous proposez ne nous a pas paru totalement équitable, dans la mesure où il profite d’abord aux foyers aisés, qui exploitent déjà de nombreuses niches fiscales et qui bénéficient du plafond.

Dans l’attente du débat budgétaire de l’automne, je vous invite donc à retirer cet amendement.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d'État

Le Gouvernement n’est pas favorable à votre amendement en l’état, monsieur Collin, et ce pour plusieurs raisons.

D’une part, alors que nous parlions tout à l’heure de plafonner les niches fiscales, vous proposez maintenant de les déplafonner, ce qui est un peu contradictoire !

D’autre part, des plafonds existent qui s’appliquent à chacun des types de travail à domicile : par exemple, pour les heures de ménage, le montant maximal de l’avantage fiscal d’un couple avec un enfant est de 6 750 euros et n’atteint le plafond de 10 000 euros que dans certaines situations très particulières liées à l’invalidité ; de même, pour les frais de garde des jeunes enfants, le montant maximal d’avantage fiscal est fixé à 1 150 euros par enfant à charge, ce qui veut dire que l’on n’atteint quasiment jamais le plafond des 10 000 euros avec la seule déduction prévue au titre de l’emploi de salariés à domicile.

Je ne pense donc pas que le plafond soit de nature à limiter le recours aux services à la personne, dont vous avez vous-même dit l’importance en présentant votre amendement.

J’ajoute que les autres avantages fiscaux sont conservés, et que, comme j’ai déjà eu l’occasion de vous l’indiquer, le niveau de la réduction de charges, fixée actuellement à 75 centimes d’euro de l’heure pour les particuliers employeurs, fait l’objet d’un décret, et donc pourrait évoluer à la faveur d’un prochain décret en fonction de l’avancement des textes, notamment lors de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale, puisque ce sont bien des questions de charges sociales qui sont ici posées.

Dans l’attente, monsieur Collin, je vous propose de retirer cet amendement. Le Gouvernement est bien conscient du problème que vous soulevez et a déjà pris un certain nombre d’orientations sur le sujet dont j’espère qu’il les confirmera prochainement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Monsieur Collin., l'amendement n° 106 rectifié est-il maintenu ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

L'amendement n° 106 rectifié est retiré.

L'amendement n° 119 rectifié, présenté par M. Marini, est ainsi libellé :

Après l’article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le septième alinéa du V de l’article 212 bis et de l’article 223 B bis du code général des impôts est ainsi modifié :

1° Le mot : « exclusivement » est supprimé ;

2° Il est complété par les mots : « et afférentes aux biens acquis et construits par une de ses filiales conformément au premier alinéa du présent V ».

II. – La perte de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Philippe Marini.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

La loi de finances pour 2013 a instauré un dispositif de limitation de la déductibilité des charges financières de l’assiette de l’impôt sur les sociétés, dispositif dont nous parlait à l’instant notre collègue Francis Delattre.

Ce « rabot » général n’est toutefois pas applicable aux charges financières afférentes aux biens acquis ou construits dans le cadre de conventions de service public, de concessions de travaux publics et de contrats de partenariat, ce afin de ne pas pénaliser l’investissement dans les infrastructures et d’éviter que l’augmentation du coût ne soit reportée sur la personne publique concédante, c’est-à-dire sur les usagers.

Je crois d’ailleurs me souvenir que notre commission des finances avait amendé le dispositif proposé par le Gouvernement relatif à cette question de la déductibilité des charges financières au titre de l’impôt sur les sociétés.

L’exception que je viens de rappeler est également applicable aux holdings dont l’unique objet est la détention de titres de sociétés intervenant dans ces domaines. Il s’agissait de s’assurer que l’exception était neutre du point de vue de l’organisation capitalistique des sociétés de travaux publics ou de service public en question.

Toutefois, à mon sens, la formulation retenue dans le code général des impôts apparaît trop restrictive, car seules les holdings détenant des sociétés exclusivement concessionnaires peuvent voir leurs charges financières exonérées. Si elles détiennent des titres de sociétés non concernées, et cela de manière accessoire par rapport à leur vocation principale, leurs charges financières se voient appliquer le rabot, y compris pour celles d’entre elles qui sont pourtant bien afférentes à des concessions de travaux publics ou de service public.

Voilà les raisons pour lesquelles, mes chers collègues, je vous soumets cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Il s’agit là de traiter d’un problème spécifique rencontré par certains opérateurs.

M. Philippe Marini acquiesce.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

En effet, cet amendement vise à étendre une exonération, ce qui, me semble-t-il, serait assez coûteux – de l’ordre de plusieurs dizaines de millions d’euros, ce n’est pas négligeable – et qui, en outre, serait difficile à mettre en œuvre, en particulier lorsqu’il s’agirait d’identifier le lien entre les charges de la société mère et les biens acquis ou construits par la société fille.

Dans ces conditions, l’éclairage du Gouvernement serait fort utile et je sollicite donc son avis.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d'État

Le Gouvernement n’est pas favorable à cet amendement, pour une raison assez simple : il ne souhaite pas introduire de dérogation à la règle de la limitation de la déductibilité des charges, notamment financières, des entreprises.

Il est vrai que, au terme d’une vaste discussion, l’Assemblée nationale avait accordé une telle dérogation, d’ailleurs très limitée et dont l’efficacité a été extrêmement réduite, pour une affaire de stocks à rotation lente dans certaines industries, notamment agroalimentaires.

En revanche, une disposition figurant dans une loi de finances permet aux délégations de service public et aux partenariats public-privé de bénéficier d’une dérogation, à condition qu’ils aient été conclus antérieurement à la date d’entrée en vigueur de la loi de finances en question. Là encore, cette disposition avait fait l’objet d’une discussion assez vive entre le gouvernement de l’époque et la majorité à l’Assemblée nationale, je suis bien placé pour vous le dire. Un compromis avait finalement été trouvé entre le tout ou rien : la dérogation avait été autorisée, mais uniquement pour les délégations de service public et les partenariats public-privé en cours.

Monsieur Marini, outre que la pertinence de la solution que vous proposez ne va pas de soi, comme l’a montré M. le rapporteur général, la voie législative ne paraît pas la mieux indiquée pour traiter ce problème. Je propose plutôt de laisser l’administration travailler sur les quelques cas qui pourraient être rencontrés, puis de voir s’il y a lieu de légiférer ou si l’interprétation de la législation en vigueur permet d’apporter une réponse satisfaisante à l’interrogation légitime que vous venez de formuler.

Je vous invite donc à retirer cet amendement et, le cas échéant, si aucune solution n’était trouvée et si les quelques problèmes existants justifiaient une modification législative, je vous proposerais d’y revenir, notamment à l’occasion de la discussion du projet de loi de finances initiale.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Je remercie vivement M. le secrétaire d’État de sa réponse très argumentée. J’en conviens, il y a lieu d’attendre et de voir si l’administration peut, en examinant les cas qui lui seraient soumis, tenir compte de la difficulté que j’avais souhaité exposer à l’occasion de cet amendement.

Dans l’immédiat, je retire l’amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

L'amendement n° 119 rectifié est retiré.

La parole est à M. le président de la commission.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Je rappelle aux membres de la commission des finances que nous nous réunissons demain, à neuf heures, pour remettre quelques amendements dans la machine !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Je précise que nous avons examiné 13 amendements et qu’il en reste 172.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, mardi 8 juillet 2014 :

À neuf heures trente :

1. Questions orales

Le texte des questions figure en annexe

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

À quatorze heures trente et le soir :

2. Projet de loi de finances rectificative, adopté par l’Assemblée nationale, pour 2014 (671, 2013-2014) ;

Rapport de M. François Marc, fait au nom de la commission des finances (672, 2013-2014).

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

La séance est levée le mar di 8 juillet 2014, à zéro heure trente.