La séance, suspendue à vingt heures quinze, est reprise à vingt-deux heures quinze.
La séance est reprise.
L’ordre du jour appelle la discussion du projet de loi relatif au plan d’aménagement et de développement durable de Corse (projet n° 688 [2010-2011], texte de la commission n° 16, rapport n° 15).
Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, avant de présenter le projet de loi dont l’examen nous réunit ce soir, je voudrais tout d’abord remercier les membres de la commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire, notamment son président, M. Daniel Raoul, et son rapporteur, M. Alain Houpert, du travail qu’ils ont réalisé pour la préparation de ce débat.
Le Gouvernement souscrit d’ailleurs aux modifications qu’ils ont utilement proposées, sur un texte qui peut paraître technique, mais qui comporte des principes et des enjeux importants pour la Corse.
Mesdames, messieurs les sénateurs, la Corse a besoin d’orientations claires pour se projeter dans son avenir, à travers l’élaboration d’un plan d’aménagement et de développement durable.
Je vous rappelle que la Corse s’est vu reconnaître depuis près de trente ans le droit d’élaborer son schéma d’aménagement. La loi du 30 juillet 1982 donnait déjà compétence à la région Corse pour adopter un schéma d’aménagement fixant « les orientations fondamentales en matière de protection, de mise en valeur et de développement de son territoire […] la destination générale des différentes parties de l’île, l'implantation des grands équipements […] et la localisation préférentielle des activités […] ainsi que des extensions urbaines ».
Cependant, ce régime restait fortement encadré par l’État. L’avis conforme du préfet était exigé sur les dispositions valant schéma de mise en valeur de la mer, lequel était soumis à approbation par décret en Conseil d’État. L’État pouvait se substituer à la région en cas de carence de celle-ci.
Le nouveau statut particulier issu de la loi du 13 mai 1991 a institué un schéma d’aménagement de la Corse. Celui-ci a été élaboré par l’État et approuvé par décret du 7 février 1992. Il est toujours en vigueur aujourd’hui, presque vingt ans après son élaboration, et le constat qu’il n’est plus adapté aux enjeux actuels fait désormais consensus.
Enfin, la loi du 22 janvier 2002 a institué un document unique, le plan d’aménagement et de développement durable de Corse, dont la collectivité territoriale a dorénavant l’entière responsabilité, en ce qui concerne tant l’élaboration que l’adoption. Il n’est plus prévu de validation par l’État. Le PADDUC est donc déjà un cas unique, puisque les autres documents comparables relèvent d’une approbation par l’État, qu’il s’agisse du schéma directeur de la région d’Île-de-France ou des schémas d’aménagement des régions d’outre-mer.
Cette compétence, totalement décentralisée, d’élaboration d’un plan d’aménagement est majeure. Pour résumer les choses, je dirai que la collectivité de Corse est compétente pour définir un équilibre entre les objectifs du développement économique nécessaire de l’île et les impératifs de protection de son environnement exceptionnel.
Je l’affirme clairement, le Gouvernement n’entend apporter aucun changement à cette liberté d’élaboration, qui constitue l’un des éléments fondamentaux du statut particulier de la Corse.
Conformément aux engagements pris par le Président de la République, le projet de loi ne préjuge en rien les choix de développement, qui n’appartiennent qu’aux élus de l’île et qui sont au cœur de la vie politique locale.
Les cinq années d’un travail considérable de préparation du premier projet de PADDUC, qui ont suivi les élections territoriales de mars 2004, ont souligné toute la difficulté de définir ce point d’équilibre entre le développement et l’environnement, au point que le projet volumineux ainsi élaboré, après beaucoup de discussions et de modifications, n’a finalement été soumis ni à l’examen ni au vote des conseillers territoriaux, au mois de juin 2009.
À l’occasion de son déplacement à Ajaccio, le 2 février 2010, le Président de la République s’est ému de cette situation : presque dix ans après la loi de 2002, le PADDUC n’avait pas encore abouti. Il a donc souhaité faciliter l’adoption de ce plan, tout en respectant la compétence de la collectivité territoriale de Corse et en y intégrant très logiquement les prescriptions du Grenelle de l’environnement contenues dans la loi du 12 juillet 2010. À cet effet, le Président de la République a annoncé le dépôt du présent projet de loi.
Mesdames, messieurs les sénateurs, comme le souligne fort bien votre rapporteur, Alain Houpert, dans son rapport très documenté, une autre spécificité corse est également à l’origine de la rédaction du texte qui vous est proposé : le statut de la collectivité territoriale de Corse prévoit la consultation de l’Assemblée de Corse sur les projets de loi et décrets qui concernent spécifiquement la Corse.
C’est donc très logiquement que le Gouvernement lui a soumis, à l’automne 2010, un avant-projet de loi tendant à faciliter l’adoption du PADDUC et son adaptation normale au Grenelle de l’environnement. C’est tout aussi logiquement que l’Assemblée de Corse a rendu son avis sur ce texte, le 17 décembre 2010.
Sur le plan strictement juridique, le Gouvernement n’est pas lié par cet avis. Toutefois, il est évident qu’il essaie de tenir, à chaque fois que cela est possible, le plus grand compte des avis de l’Assemblée de Corse, ce qui est parfaitement conforme à la lettre et à l’esprit de la loi du 22 janvier 2002.
En l’occurrence, l’assemblée territoriale a donné un avis à l’unanimité de ses membres, ce qui n’est pas habituel sur un sujet aussi sensible, essentiel pour la Corse. Cela signifie que les forces politiques sont tombées d’accord sur ce que devait être la configuration d’un futur PADDUC, même si, bien sûr, elles ne sont pas encore d’accord sur son contenu.
Il est évident pour le Gouvernement qu’il doit être tenu le plus grand compte de cet avis unanime de l’Assemblée de Corse, par principe, naturellement, mais aussi parce que le futur plan d’aménagement devra se construire sur des bases qui doivent être aussi consensuelles que possible.
Un plan d’aménagement et de développement durable est indispensable pour avancer, mais c’est un exercice difficile qui requiert beaucoup de volonté de rassemblement.
Le Gouvernement a donc délibérément retenu, à chaque fois qu’il le pouvait, les propositions de l’Assemblée de Corse. Elles sont parfois novatrices, notamment parce qu’elles donnent au PADDUC une place qu’aucun autre texte n’occupe dans notre droit de l’urbanisme.
Nous connaissons déjà d’autres documents comparables à ce plan, tels que le schéma directeur d’aménagement de la région d’Île-de-France ou les schémas d’aménagement régionaux outre-mer. Toutefois, nous ne pouvons pas nous y référer dans ce texte, car ils ne s’imposent pas directement aux actes individuels.
Or, et c’est l’innovation proposée par l’Assemblée de Corse qui a été reprise dans ce projet de loi, le PADDUC pourra, dans certains cas qui seront encadrés, s’imposer aux décisions individuelles d’urbanisme. Nous avons veillé strictement à ce que cette opposabilité respecte les principes de libre administration des collectivités territoriales et de non-tutelle d’une collectivité sur une autre.
Nous proposons, comme nous le verrons dans la discussion des articles, une solution qui préserve évidemment les libertés communales et qui exprime en même temps cette volonté de donner au PADDUC toute l’effectivité souhaitable.
Nous fixons notamment un degré de précision maximale à l’échelle qui sera adoptée pour la cartographie générale de plan. Nous réservons en outre les cartographies plus contraignantes aux espaces jugés stratégiques par l’Assemblée de Corse. Nous préservons aussi expressément la valeur des documents locaux d’urbanisme adoptés ou en cours d’adoption, qui continueront d’être opposables aux décisions individuelles.
M. le rapporteur a parfaitement analysé cette construction juridique minutieuse et je tiens à l’en remercier.
Je précise enfin que le projet de loi ne modifie en rien l’articulation du PADDUC avec la loi relative au développement et à la protection de la montagne, dite « loi Montagne », ni avec la loi relative à l'aménagement, la protection et la mise en valeur du littoral, dite « loi Littoral », telle qu’elle a été définie par le législateur de 2002.
Le texte reprend strictement les termes de la loi du 22 janvier 2002, qui prévoit que le plan peut « préciser les modalités d’application » de ces deux lois. Il est normal que le futur plan ait à préciser, dans certaines situations géographiques, la façon dont s’articulent ces deux textes, puisque de nombreuses communes de Corse sont soumises aux deux à la fois. Mais la loi Littoral et la loi Montagne resteront strictement applicables à la Corse, comme le Gouvernement s’y est engagé à plusieurs reprises devant les élus locaux.
Tels sont donc les principes essentiels qui nous ont guidés dans l’élaboration de ce projet de loi. Je précise aussi que ce texte intègre les prescriptions du Grenelle de l’environnement, contenues dans la loi du 12 juillet 2010, comme le souhaitait le Président de la République, de façon tout à fait logique.
Il permet également une articulation avec les autres plans et schémas régionaux, ce qui nécessite plusieurs adaptations importantes de textes existants.
Ce projet de loi permet aussi de tenir un débat d’orientation préalable à la discussion et je note que la commission de l’économie a également ajouté des précisions utiles au cadrage de ce débat.
Le Gouvernement tient beaucoup à cet important débat d’orientation. L’Assemblée de Corse l’a approuvé. Il ne faut pas se lancer dans un travail technique aussi considérable qu’un PADDUC sans avoir débattu de ses orientations générales qui sont, à l’évidence, déterminantes.
Enfin, le projet de loi prévoit la mise en place d’une véritable procédure de révision partielle ou totale, là encore comme le Gouvernement le souhaitait.
Telles sont les précisions que je tenais à apporter au Sénat avant d’entrer plus avant dans le détail du texte.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de loi relatif au plan d’aménagement et de développement durable de Corse, dont le Sénat est saisi en première lecture, met aujourd’hui à l’honneur l’île de Beauté.
À cette occasion, je souhaite saluer chaleureusement nos collègues corses, ainsi que la population de l’île. Oui, la Corse porte bien son nom d’île de Beauté : y poser son regard ne procure que du bonheur !
Sourires
La Corse a grandement contribué à l’histoire de notre pays. Comment ne pas évoquer Napoléon Bonaparte, dont l’héritage est encore vivant ici même, au Palais du Luxembourg ? De beaux esprits, comme Jean-Jacques Rousseau, ont exprimé l’intérêt et la solidarité du continent pour l’île. C’est donc sur le fond d’un héritage historique et culturel commun que nous engageons aujourd’hui l’examen du projet de loi relatif au PADDUC.
Belle, la Corse n’en est pas moins complexe. La République doit aujourd’hui l’aider à aller de l’avant tout en surmontant les tensions qui la traversent, à envisager son développement économique tout en préservant ses espaces naturels remarquables.
Tel est bien le sens de ce texte, qui a pour objectif de répondre à une situation de blocage politique et de vide juridique.
En effet, depuis le vote de la loi du 22 janvier 2002 relative à la Corse, la collectivité territoriale de Corse a compétence pour élaborer un PADDUC, document-cadre d’aménagement et de planification spatiale du territoire qui est assimilable à une directive territoriale d’aménagement et de développement durable, ou DTADD. La différence principale réside dans le fait que, alors qu’une DTADD est élaborée par les services des ministères compétents et arrêtée par un décret en Conseil d’État, le PADDUC est, lui, élaboré et approuvé par la collectivité territoriale de Corse.
Toutefois, le conseil exécutif ne parvint pas à trouver de majorité au sein de l’Assemblée de Corse pour approuver le projet de PADDUC qu’il avait élaboré au cours des années suivant le vote de la loi de 2002. En conséquence, il dut le retirer de l’examen en séance, le 15 juin 2009.
Le projet de loi prévoit donc des modifications de la procédure d’élaboration du PADDUC, qui devraient rendre plus facile la recherche d’un consensus. Il tend également à intégrer dans ce document-cadre les apports du Grenelle de l’environnement et à en préciser la portée juridique.
Pour éclairer les enjeux de ce texte, j’ai souhaité effectuer un déplacement de trois jours dans l’île, au cours duquel j’ai rencontré des représentants de tous les groupes politiques de l’Assemblée de Corse, le président de celle-ci, des élus locaux, des représentants des services de l’État, des représentants des associations protectrices de l’environnement, le président du Conseil économique, social et culturel de Corse, ainsi que les présidents des chambres d’agriculture et des chambres de commerce et d’industrie. J’ai aussi eu des entretiens avec la quasi-totalité des élus nationaux représentant la Corse au Parlement, notamment avec le président de la collectivité territoriale, qui est également député, M. Paul Giacobbi.
Ces contacts multiples m’ont permis de bien saisir les besoins du développement économique de la Corse, mais aussi de prendre conscience des difficultés particulières de l’aménagement dans cette belle île.
En ce qui concerne les caractéristiques de l’économie corse, ce qui frappe d’abord, c’est une croissance démographique marquée. Depuis les années soixante-dix, l’île ne se dépeuple plus, mais gagne au contraire des habitants à un rythme plus rapide que l’ensemble de la France, avec une progression annuelle de 1, 8 % entre 1975 et 1999, contre seulement 0, 7 % à l’échelon national. Alors que la Corse compte aujourd’hui 294 000 habitants, la prolongation théorique de la tendance actuelle aboutirait à une population de 400 000 habitants en 2030. Ce dynamisme démographique s’explique plus par les apports extérieurs à l’île, venant soit de France continentale, soit de l’étranger, que par la croissance naturelle. Au total, c’est un flux de l’ordre de 3 000 personnes, qu’il faut bien loger, qui vient grossir chaque année la population de la Corse.
Sur le plan macroéconomique, cette base démographique explique en partie les bonnes performances de l’économie corse, qui a amorcé son rattrapage par rapport au continent. La croissance est tirée par le tourisme et par le secteur de la construction, et les performances de l’économie insulaire sont, sur la période récente, supérieures à la moyenne nationale. Entre 1996 et 2006, le produit intérieur brut de la Corse a augmenté au rythme de 3 % par an, alors que celui de l’ensemble de la France métropolitaine ne progressait, sur la même période, que de 2, 3 % par an. Jusqu’en 2008, le taux de chômage a reculé, pour passer au-dessous du niveau national.
La croissance démographique et la bonne tenue de l’économie corse, ajoutées à une forte demande de résidences secondaires, expliquent que le marché immobilier de l’île ait connu une hausse constante au cours de la dernière décennie. On peut même parler de « bulle » immobilière, laquelle se traduit par une forte pression sur le marché du foncier et provoque également des tensions sur le marché du logement. Les résidents de l’île trouvent de plus en plus difficilement à se loger, y compris en location. En effet, la priorité des investisseurs va au logement locatif saisonnier, et non au logement locatif annuel. Les résidences secondaires représentent en Corse 35 % du parc de logements, contre 10 % en moyenne nationale. Le taux de logements sociaux n’est en Corse que de 10 % des résidences permanentes, contre 17 % en moyenne nationale.
Une démographie dynamique, une croissance économique plus forte qu’ailleurs et des besoins de logement non satisfaits expliquent que l’île ait de réels besoins en termes d’aménagements. Toutefois, l’aménagement présente en Corse des difficultés particulières, que nous devons avoir bien à l’esprit en examinant ce projet de loi.
Premièrement, la Corse est une « montagne dans la mer », avec près de 1 000 kilomètres de côtes, plus de 200 sommets de plus de 2 000 mètres d’altitude et une altitude moyenne de 568 mètres. Cette donnée naturelle constitue une contrainte pour l’aménagement de l’île : en dehors de la plaine orientale, les espaces plats sont rares, ce qui accentue inévitablement les conflits d’usage entre agriculture et développement urbain.
Deuxièmement, l’urbanisation en Corse est peu dense. La moitié de la population est concentrée dans les agglomérations d’Ajaccio et de Bastia, le reste résidant dans de petites villes, de gros bourgs et des villages. Cette faible urbanisation explique que les espaces artificialisés ne représentent qu’un peu plus de 3 % du territoire corse, contre environ 9 % en France continentale. Par ailleurs, même là où existe une urbanisation, celle-ci prend souvent des formes extensives. Certaines communes comportent non pas une agglomération bien identifiée, mais un ensemble de hameaux éparpillés sur leur territoire. Cet urbanisme traditionnellement diffus peut rendre très délicate l’application de la notion d’urbanisation en continuité avec les agglomérations existantes, qui vise à éviter le « mitage » du territoire.
Troisièmement, les espaces forestiers et les milieux semi-naturels représentent environ 85 % du territoire de l’île, dont une partie considérable fait l’objet d’une protection. Un parc naturel couvre la chaîne montagneuse centrale, les réserves naturelles marines sont au nombre de six, et les sites classés ou inscrits encore bien plus nombreux. Le Conservatoire du littoral a acquis 23 % du linéaire côtier de l’île, contre 11 % seulement sur le plan national.
Cette géographie particulière explique qu’un quart des communes corses soient soumises à la loi Littoral et la plupart d’entre elles à la loi Montagne, 20 % du total des communes étant concernées par ces deux textes à la fois.
Enfin, la planification de l’aménagement est pénalisée, en Corse, par les lacunes des documents locaux d’urbanisme.
D’une part, ceux-ci sont relativement rares : sur un total de 360 communes, 129 seulement, soit 35, 8 % de l’ensemble, disposent d’un plan local d’urbanisme, d’un plan d’occupation des sols ou d’une carte communale.
D’autre part, lorsqu’ils existent, ces documents d’urbanisme souffrent d’une grande fragilité juridique. Dans la période récente, une série de jugements successifs du tribunal administratif de Bastia ont annulé, sur le fondement de la loi Littoral, les plans d’occupation des sols de plusieurs communes, dont ceux de Sartène et de Porto-Vecchio. Chaque fois, le juge administratif a relevé des extensions d’urbanisation qui n’étaient pas en continuité avec les agglomérations et villages existants, la difficulté étant de savoir si l’existant peut, ou non, être considéré comme urbanisé. La réponse n’est pas évidente lorsqu’il s’agit d’habitat diffus. À la suite de l’annulation de leur plan local d’urbanisme, les communes se retrouvent soumises au règlement national d’urbanisme, encore plus restrictif que la loi Littoral.
En bref, l’aménagement répond en Corse à de vrais besoins, mais se trouve soumis à de fortes contraintes.
Monsieur le ministre, mes chers collègues, examinons maintenant les dispositions du projet de loi.
Comme je vous l’ai indiqué, ce texte est une réponse à l’échec du précédent PADDUC, retiré en séance le 15 juin 2009. Il était devenu nécessaire de revoir le cadre législatif d’élaboration du PADDUC avant de remettre celui-ci en chantier.
Conformément au statut, l’Assemblée de Corse a été consultée sur un avant-projet de loi le 8 novembre 2010. En réponse, elle a adopté à l’unanimité, le 17 décembre 2010, une délibération demandant des modifications de ce texte sur plusieurs points. L’ensemble de ces demandes ont été prises en compte par le Gouvernement et intégrées au projet de loi tel qu’issu de son examen par le Conseil d’État. L’Assemblée de Corse a été entendue, notamment lorsqu’elle a sollicité l’adjonction au PADDUC d’une cartographie dont elle pourra déterminer l’échelle, ainsi que l’opposabilité du PADDUC aux tiers dans le cadre des procédures d’autorisation d’urbanisme. Nous aurons l’occasion de revenir sur ces deux points lors de l’examen des amendements présentés par notre collègue Nicolas Alfonsi.
Je tiens à souligner l’importance politique du vote unanime de l’Assemblée de Corse sur l’avant-projet de loi, qui augure favorablement de la possibilité de parvenir à un consensus, ou au moins à une majorité, sur l’adoption du prochain PADDUC.
Le projet de loi apporte des améliorations dans trois domaines.
Premièrement, il intègre les apports du Grenelle de l’environnement en prévoyant, à l’article 1er, que le PADDUC devra être compatible avec les plans de gestion des risques d’inondation, et, à l’article 3, qu’il vaudra schéma régional de cohérence écologique.
Deuxièmement, il consolide la valeur juridique du PADDUC. L’article 1er précise l’insertion de ce dernier dans la hiérarchie des documents locaux d’urbanisme, qui seront dans une relation de compatibilité par rapport à lui. Par ailleurs, les orientations fixées par le PADDUC seront assorties d’une cartographie adaptée. L’article 1er prévoit une carte générale au 1/100 000e, qui pourra être précisée par des cartes à plus petite échelle pour certaines zones prévues aux articles 3 et 4.
Troisièmement, l’article 5 améliore la procédure d’adoption et de modification du PADDUC, de manière à rendre plus facile la constitution d’une majorité pour l’approuver. Ainsi, un débat d’orientation préalable au sein de l’Assemblée de Corse permettra au conseil exécutif d’être éclairé sur les attentes de celle-ci avant de commencer le travail d’élaboration du projet de PADDUC. La liste des organismes associés à cette élaboration est complétée et les avis obligatoires devront être rendus dans des délais stricts. Notre collègue Thierry Repentin nous propose des amendements tendant à préciser encore davantage cette liste des organismes associés ou consultés.
Par ailleurs, une procédure nouvelle de modification est instaurée, plus légère que la procédure de révision. Enfin, le délai au terme duquel le conseil exécutif doit procéder à une analyse globale des résultats de l’application du PADDUC, notamment du point de vue de l’environnement, est réduit de dix à six ans.
Sur ce texte qui suscite l’approbation de tous les acteurs concernés, je n’ai proposé à la commission de l’économie que des amendements rédactionnels ou visant à apporter des améliorations de détail sur les cinq points suivants.
À l’article 1er, la commission a précisé que la cartographie associée au PADDUC devra recenser les surfaces correspondant à la bande de cinq mètres le long de certains cours d’eau, qui doit désormais, en application du Grenelle de l’environnement, être laissée en végétation naturelle.
À l’article 4, la commission a maintenu inchangée la rédaction des dispositions du code général des collectivités territoriales prévoyant que le PADDUC peut préciser les modalités d’application, adaptées aux particularités géographiques locales, des articles du code de l’urbanisme relatifs aux zones de montagne et aux zones littorales. Comme j’aurai l’occasion de le redire lors de l’examen d’un amendement de Mme Didier sur cet article, cela n’autorisera pas l’Assemblée de Corse à déroger à la loi Montagne, ni à la loi Littoral.
À l’article 5, la commission a prévu de donner à l’Assemblée de Corse la possibilité de recourir à une simple procédure de modification lorsqu’elle décide d’adapter le PADDUC au vu de l’analyse globale de ses résultats, que le conseil exécutif est tenu de faire six ans après son adoption.
À l’article 5 toujours, la commission a supprimé la clause prévoyant la caducité du PADDUC dès lors que l’Assemblée de Corse ne délibère pas sur le sort réservé à celui-ci dans le délai d’un an à compter de la transmission de l’analyse globale de ses résultats. En effet, cette clause lui a paru d’une sévérité excessive.
Enfin, à l’article 6, la commission a précisé l’articulation dans le temps entre le PADDUC et les plans de gestion des risques d’inondation qui pourraient être arrêtés peu de temps avant son approbation.
En conclusion, ce projet de loi appelle de ma part deux observations.
Première observation : ce texte comporte un risque d’inconstitutionnalité, mais celui-ci me paraît maîtrisé. En effet, la compétence donnée à la collectivité territoriale de Corse d’adopter des cartes à plus petite échelle que celle de la carte générale de destination du territoire de l’île au 1/100 000e pourrait conduire à placer les documents d’urbanisme de rang inférieur dans une relation de conformité, et non plus de compatibilité.
Or les principes constitutionnels s’opposent à ce que la collectivité territoriale exerce ainsi une forme de tutelle sur les communes. Toutefois, ce risque me paraît maîtrisé dans la mesure où ces cartes à plus petite échelle ne porteront que sur certains secteurs du territoire de l’île, pour lesquels un degré supérieur de précision se justifie spécifiquement. La collectivité territoriale de Corse devra néanmoins veiller, lorsqu’elle aura à déterminer l’échelle de ces cartes, à ne pas descendre à un trop grand degré de détail.
Seconde observation : le projet de loi est fondé sur la confiance qu’il accorde aux Corses pour prendre leur destin en mains. Dans la filiation des statuts de 1982, de 1991 et de 2002, ce texte affirme la capacité des Corses à déterminer eux-mêmes une stratégie de développement durable pour leur île, c’est-à-dire à fixer les objectifs de son développement économique, social, culturel et touristique, tout en préservant son environnement.
Monsieur le ministre, mes chers collègues, je suis convaincu que les Corses sont les mieux à même de déterminer, dans le respect des lois nationales, la meilleure manière de concilier les aménagements rendus nécessaires par une croissance démographique marquée et une économie dynamique avec la préservation de cet environnement exceptionnel, à tous points de vue, qui fait de « l’Île de Beauté » une composante unique du patrimoine naturel et culturel de la France.
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP, ainsi que sur certaines travées du groupe socialiste-EELV. – M. le président de la commission de l'économie applaudit également.
J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour cette discussion sont les suivants :
Groupe socialiste, apparentés, et groupe Europe écologie Les Verts rattaché, 30 minutes ;
Groupe Union pour un mouvement populaire, 29 minutes ;
Groupe de l’Union centriste et républicaine, 11 minutes ;
Groupe communiste républicain et citoyen, 9 minutes ;
Groupe du Rassemblement démocratique et social européen, 8 minutes ;
Réunion administrative des sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe, 3 minutes.
Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Marc Daunis.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, il est bien naturel qu’un tel texte soit examiné en premier lieu par la Haute Assemblée, car il revient d’abord aux sénateurs de concilier lois de la République et spécificités des territoires.
La Corse nous invite souvent à ce délicat exercice, à ce passionnant débat, elle dont l’histoire, la culture, l’exceptionnelle beauté des paysages ont, au long des siècles, forgé une identité forte et singulière.
Ce débat se poursuit aujourd’hui au travers de l’examen d’un texte important pour l’avenir de l’un des territoires de la République, la Corse, qui doit permettre à celle-ci de lever les blocages de toutes sortes qui minent depuis trop longtemps son développement.
Ce projet de loi a trait à l’élaboration du futur plan d’aménagement et de développement durable de la Corse, le PADDUC. Mesurons bien le fait, mes chers collègues, qu’il s’agit d’un document-cadre d’aménagement et de planification spatiale du territoire sans équivalent dans aucune autre région de France métropolitaine. Il a valeur de directive territoriale d’aménagement et de développement durable, de schéma de mise en valeur de la mer, de schéma régional d’aménagement du territoire et de schéma régional du territoire. Croyez-le bien, monsieur le ministre, les élus locaux que nous sommes aussi mesurent bien l’originalité et l’importance d’un tel document.
Dans cette perspective, permettez-moi, mes chers collègues, de regretter, au nom du groupe socialiste et apparentés, que nous n’ayons pas pu disposer de davantage de temps pour approfondir le sujet et examiner plus en détail un texte qui fera de la Corse la région de France métropolitaine la plus décentralisée.
Ce texte constitue une marque de confiance à l’égard des élus insulaires : cela est devenu si rare ces dernières années, monsieur le ministre, que je m’empresse de le souligner.
Les conditions d’élaboration du PADDUC méritent donc une attention toute particulière de la part de la représentation nationale.
Au cours des cinq ans qui ont suivi le vote de la loi, le conseil exécutif de la collectivité territoriale de Corse a tenté, en vain, de trouver une majorité au sein de l’Assemblée de Corse pour approuver le projet de PADDUC. Il a dû retirer le texte de l’ordre du jour des travaux de celle-ci, le 15 juin 2009.
Il y a des raisons de fond à cet échec ; M. le rapporteur, que je salue, les a rappelées à juste titre en commission.
Le projet, selon ses détracteurs, avait le tort d’orienter le développement de la Corse vers une économie presque exclusivement tournée vers le tourisme et, surtout, d’ouvrir trop largement le littoral et les terres agricoles à l’urbanisation, avec évidemment pour conséquence une demande d’assouplissement des conditions d’application des lois Littoral et Montagne.
C’est particulièrement ce point qui a suscité la polémique. Il faut aborder cette question, essentielle pour la Corse : elle sera, à n’en pas douter, le fil rouge de nos discussions sur ce projet de loi.
En tant qu’élu des Alpes-Maritimes, cette problématique m’est familière. Dans mon département aussi, les montagnes entrent dans la mer, ce qui a une forte incidence sur les possibilités d’aménagement. Notre département a d’ailleurs fait l’objet de la première directive territoriale d’aménagement appliquée sur le territoire national, et certaines de ses communes relèvent elles aussi à la fois de la loi Montagne et de la loi Littoral.
Quelle est la situation en Corse ?
L’évolution démographique de l’île, sa croissance économique et ses besoins insatisfaits en matière de logement induisent de réelles et profondes attentes en termes d’aménagement, lequel pose des difficultés tout à fait particulières.
La Corse est, en effet, il est banal de le dire, une « montagne dans la mer ». En dehors de la plaine orientale, rares sont les espaces facilement urbanisables ou pouvant accueillir des activités agricoles à caractère maraîcher.
Que l’on me permette de revenir sur quelques données essentielles rappelées par M. le rapporteur.
L’urbanisation est peu dense et prend souvent des formes extensives. Bon nombre de communes ne comportent pas d’agglomération bien identifiée, mais se composent d’un ensemble de hameaux éparpillés sur leur territoire. Cette situation, qui rend les choses très complexes, renvoie à la notion d’urbanisation en continuité avec les agglomérations existantes, à laquelle la loi Littoral fait référence.
Enfin, les espaces forestiers et les milieux semi-naturels représentent plus de 80 % du territoire de l’île, dont la majeure partie fait l’objet d’une protection. Le Conservatoire du littoral – je parle sous le contrôle de son premier vice-président – a acquis 23 % du linéaire côtier de l’île, alors que cette proportion ne s’élève qu’à 11 % sur le plan national. Pour bien fixer les enjeux, je soulignerai que le littoral de la Corse est aussi long que celui qui s’étend de Menton jusqu’à Collioure !
Sur un total de 360 communes, un tiers à peine disposent d’un plan local d’urbanisme, d’un plan d’occupation des sols ou d’une carte communale. Par ailleurs, il n’existe, à ma connaissance, aucun schéma de cohérence territoriale en Corse.
Je voudrais enfin insister sur un élément qui ne vaut pas pour d’autres régions et dont l’importance a souvent été sous-estimée : les lois Littoral et Montagne, au demeurant excellentes et dont il est heureux qu’elles aient été adoptées, sont antérieures au développement démographique de la Corse.
Le décor ayant ainsi été planté au travers de ces quelques constats, il faut donc sécuriser juridiquement le dispositif pour concilier efficacement développement et protection durable d’un territoire exceptionnel. Tel est bien l’enjeu de notre débat, tel est aussi le défi que doivent relever les Corses eux-mêmes.
Face à la complexité et à la multiplicité des enjeux, en Corse comme ailleurs, rien ne pourra se faire sans l’adhésion et l’engagement des élus et des populations concernés.
Rien n’a été facile. Une mandature de la collectivité territoriale de Corse s’est écoulée, à partir de 2002, sans qu’un consensus, ou au moins une majorité, ne se soit dégagé sur ce sujet. Il était donc urgent d’avancer.
Je veux saluer, à cet instant, le travail effectué par la nouvelle majorité…
Sourires.
Non, de l’Assemblée de Corse !
Cette nouvelle majorité, installée depuis à peine dix-huit mois, et le président du conseil exécutif de la collectivité territoriale de Corse, Paul Giacobbi, sont parvenus à aller de l’avant. Conformément au statut, l’Assemblée de Corse a été consultée sur l’avant-projet de loi le 8 novembre 2010. Elle a adopté à l’unanimité – j’y insiste –, le 17 décembre 2010, la délibération évoquée précédemment par M. le rapporteur et M. le ministre.
Il y a donc, et c’est tout à fait remarquable, consensus sur cet avant- projet de loi. Cela représente l’espoir de voir le prochain PADDUC adopté à une forte majorité pour le moins.
Loin de moi, cependant, l’idée que le législateur doive se soumettre. Le débat doit avoir lieu, et il aura lieu.
Le texte contient bien plus encore que ce que j’ai souligné. Je pense notamment à l’intégration des conséquences de l’adoption de la loi portant engagement national pour l’environnement, qui constitue un autre objectif central, ainsi qu’à l’amélioration et à la simplification de la procédure d’élaboration et de modification du PADDUC prévues à l’article 5.
Le groupe socialiste a d’ailleurs déposé deux amendements importants à l’article 5 : le premier vise à intégrer dans le champ du débat public les dérogations accordées à l’Assemblée de Corse pour l’application des lois Montagne et Littoral ; le second tend à associer à l’élaboration du projet toutes les parties normalement prenantes à l’élaboration des directives territoriales d’aménagement et de développement durable, dans l’esprit de l’article L. 113-2 du code de l’urbanisme. Ces deux amendements, que nous avons présentés avec notre collègue Thierry Repentin, nous paraissent extrêmement importants. Ils constituent une garantie supplémentaire et exposent en toute transparence les éventuelles adaptations aux spécificités locales, particulièrement géographiques.
Nos collègues Nicolas Alfonsi et Évelyne Didier ont quant à eux déposé des amendements à l’article 4, portant sur le degré d’appréciation octroyé à l’Assemblée de Corse pour déterminer l’échelle des documents cartographiques, ainsi que sur les modalités d’application des lois Littoral et Montagne.
Le débat aura donc bien lieu dans l’hémicycle, mais, je le répète, le Sénat doit prêter une oreille attentive à ce qui s’est dit au sein de l’Assemblée de Corse : le consensus était recherché, l’unanimité a été obtenue.
Bien sûr, nous devons être vigilants. Le passé a montré, en Corse comme ailleurs, que les lois de la République pouvaient parfois être sinon bafouées, en tout cas contournées. Cela étant, je note que le président de l’Assemblée de Corse, Dominique Bucchini, ancien maire de Sartène et défenseur acharné de la loi Littoral, a exprimé sa confiance et voté la délibération.
Mes chers collègues, si les sénateurs ne font pas confiance aux élus locaux, qui le fera ? Vous l’avez compris, le groupe socialiste aborde l’examen de ce texte dans un tel esprit de confiance. Ce débat est très attendu par nos amis corses, ainsi que par toutes celles et tous ceux, dont je suis, qui croient aux vertus de la décentralisation et du débat citoyen, qui ont confiance en l’intelligence des territoires et au sens de la responsabilité des élus locaux.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous examinons aujourd’hui un projet de loi qui tend à revoir la procédure d’élaboration et le contenu du plan d’aménagement et de développement durable de la Corse, cela pour plusieurs raisons.
Tout d’abord, l’insécurité juridique est forte : en effet, l’absence de SCOT, combinée à l’échec du précédent PADDUC, a abouti à un vide juridique et à une absence d’articulation entre les documents d’aménagement, ce qui constitue un handicap pour le développement du territoire corse et sa compatibilité avec la protection de l’environnement.
Ce vide juridique est d’autant plus grand que bien peu de communes sont dotées de documents d’urbanisme, qu’il s’agisse de cartes communales, de plans d’occupation des sols ou de plans locaux d’urbanisme. Par ailleurs, plusieurs PLU ont été annulés par le tribunal administratif au cours des deux dernières années.
Rappelons que l’ancienne Assemblée de Corse n’était pas parvenue à un consensus et avait été critiquée en raison d’un manque de concertation, d’une part, et de sa volonté d’apporter des assouplissements à la loi Littoral, d’autre part.
La nouvelle Assemblée de Corse, élue en 2010, s’était alors vu soumettre par l’État une proposition de modification législative du cadre d’élaboration du PADDUC, qu’elle a examinée en décembre 2010 et sur laquelle elle a adopté, à l’unanimité, un certain nombre de propositions. Certaines d’entre elles ont été reprises par l’État et intégrées dans le texte qui a été discuté en commission.
La volonté du groupe CRC est double : assurer à la Corse la possibilité de se doter dans les meilleurs délais d’un PADDUC juridiquement renforcé et soutenu par les élus de l’Assemblée de Corse, tout en veillant à ce que ce texte n’altère pas l’esprit des grandes références législatives que sont les lois Montagne et Littoral.
D’emblée, je tiens à souligner la qualité du travail du rapporteur, qui est allé au fond des choses, même si certains choix peuvent être contestés et si certaines dispositions sont d’un maniement délicat. L’examen des amendements que nous avons déposés nous donnera l’occasion d’en débattre.
Auparavant, je souhaite revenir sur les motifs de satisfaction que nous offre ce texte : l’intégration d’un certain nombre d’apports de la loi Grenelle II, en particulier la compatibilité du PADDUC avec les objectifs des plans de prévention des risques d’inondation, les PPRI, et la mise en œuvre de la trame verte et bleue, sur laquelle je reviendrai plus en détail ultérieurement ; la référence aux articles L. 110 et L. 121-1 du code de l’urbanisme, qui s’inscrit dans la création d’un cadre juridique commun à l’ensemble des documents d’aménagement et d’urbanisme ; la tenue d’un débat au sein de l’Assemblée de Corse préalablement à l’élaboration du PADDUC, qui permettra de s’assurer des attentes des élus corses, avant même d’engager tout le travail d’élaboration de ce plan, la procédure permettant en outre d’associer un maximum d’acteurs ; la procédure de modification, plus souple que celle de la révision, destinée à permettre d’intégrer plus efficacement des modifications marginales et d’adapter le document aux évolutions de l’île ; la mise en cohérence du délai au terme duquel est menée l’évaluation environnementale avec celui qui est prévu pour les SCOT, soit six ans au lieu de dix ; la possibilité de tenir compte de cette évaluation par le biais de la procédure de modification, et non par la seule procédure de révision, ce qui permet aussi de justifier la suppression de la menace de caducité qui pesait, dans le texte initial, sur le PADDUC, en cas d’absence de délibération de l’Assemblée de Corse sur l’opportunité d’une révision, dans la mesure où, avec une procédure simplifiée, il est plus facile de tenir des délais raisonnables ; enfin, les mesures transitoires concernant la trame verte et bleue, ainsi que la mise en compatibilité avec le PPRI.
Quelques sujets de débat subsistent toutefois dans ce texte.
Le principal concerne l’application des lois Montagne et Littoral.
Si la possibilité de préciser dans le PADDUC les modalités d’application des lois Littoral et Montagne faisait en effet partie des demandes exprimées par les élus corses, il ne me semble pas que ces derniers aient jamais évoqué l’adaptation de ces lois aux particularités géographiques locales. L’Assemblée de Corse avait bien demandé que soit ouverte la possibilité de préciser la législation en vigueur dans les zones littorales et de montagne, mais jamais celle d’adapter cette législation ! À moins que l’on ne nous démontre le contraire, il s’agit bien là d’une porte ouverte à l’instauration de dispositions dérogatoires à ces deux textes de loi. Vous avez dit dans votre propos liminaire, monsieur le ministre, qu’en aucun cas il ne pourrait être porté atteinte aux lois Littoral et Montagne ; nous espérons que vous nous apporterez, au cours de l’examen des amendements, des précisions susceptibles de nous rassurer sur ce point. D’ailleurs, n’évoquer que les particularités « géographiques » locales, c’est peut-être adopter une vision assez restrictive des choses.
Ce débat a déjà eu lieu devant le Parlement voilà précisément dix ans, à l’occasion de l’examen du projet de loi relatif à la Corse, qui intégrait la question du nouveau PADDUC. Le problème suivant s’était alors posé : la loi Montagne, et surtout la loi Littoral, pouvaient-elles éventuellement faire l’objet d’adaptations, afin de permettre une meilleure valorisation du littoral à des fins touristiques et de développement économique ? Plusieurs dispositions avaient fait l’objet de vifs débats, tant à l’Assemblée nationale, alors majoritairement de gauche, qu’au Sénat, alors majoritairement de droite…
Les choses ont bien changé depuis ! Le gouvernement de Lionel Jospin et les parlementaires socialistes cherchaient à satisfaire les revendications de certains élus corses, qui constataient que le littoral insulaire n’avait rien à voir avec le littoral continental et que des adaptations étaient nécessaires. La droite, alors qu’elle était farouchement opposée à toute dérogation à la loi Littoral à l’Assemblée nationale, en avait accepté le principe au Sénat, à la surprise générale. Plus compliquée était la situation au sein de la majorité de l’époque. Certains députés lui appartenant, après avoir cherché à renforcer les conditions de ces adaptations, avaient finalement considéré que celles-ci échapperaient rapidement au contrôle des élus, et demandé la suppression de cette possibilité. Les communistes défendaient déjà cette idée, et le député Michel Vaxès était parvenu à établir, avec la majorité plurielle, un compromis tendant à limiter considérablement les possibilités d’adaptation. Or il semble que notre rapporteur nous propose aujourd’hui d’ouvrir à nouveau la boîte de Pandore… Nous en discuterons.
Mes chers collègues, si les majorités se sont inversées depuis lors dans les deux chambres, nos convictions, quant à elles, sont restées les mêmes : nous demeurons opposés à toute dérogation à la loi Littoral et à la loi Montagne. Nous reviendrons sur ce sujet à l’occasion de l’examen des amendements.
Je souhaite à présent aborder une réflexion plus générale sur l’économie du texte qui nous est soumis.
Il est certain qu’il existe une tension forte entre la nécessité de pouvoir déterminer de façon lisible la destination générale des différentes parties du territoire et celle de ne pas imposer, pour autant, la tutelle d’une collectivité sur les niveaux de collectivités inférieurs. Si je reconnais que ce texte parvient à concilier ces deux impératifs de manière assez satisfaisante, certaines incohérences et certaines contradictions demeurent néanmoins. En particulier, le plafonnement de l’échelle de la carte associée au PADDUC peut sembler surprenant, dans la mesure où il reviendra à l’Assemblée de Corse de déterminer les échelles pour toutes les cartes précisant ce plan. La fixation de ce plafond relève-t-elle vraiment du domaine de la loi ? Je pense que les élus chargés de l’élaboration du PADDUC sauront montrer suffisamment de bon sens pour faire en sorte que leur plan ne soit pas entaché d’inconstitutionnalité, au motif qu’il présenterait un degré de précision excessif, transformant le rapport de compatibilité avec les documents de niveau inférieur en rapport de conformité. Cela correspond tout de même à une revendication des élus de l’Assemblée de Corse : ils veulent pouvoir s’emparer de cette question technique déterminante pour la qualité et la pertinence des documents d’aménagement. Il me semble que nous pouvons tous nous accorder sur le point que, en matière d’aménagement, un minimum de décentralisation est de mise.
À l’opposé, toutes les spécifications liées à la trame verte et bleue ne descendent-elles pas parfois à un degré de précision excessif ? Il est question d’une carte au 1/100 000e, précisée par des cartes plus détaillées encore pour certaines zones. Considérons les ordres de grandeur : avec une telle échelle, un centimètre sur la carte représente un kilomètre sur le terrain. La bande des 100 mètres de la loi Littoral tiendrait alors dans l’épaisseur du trait, et que dire de la bande des 5 mètres le long des cours d’eau ? Il faudrait retenir une échelle au 1/10 000e, voire moins, pour la faire apparaître dans l’épaisseur du trait ! Il me semble que l’on devrait réserver certains détails aux documents de rang inférieur, sauf à mettre à mal le difficile équilibre entre lisibilité des documents et libre administration des communes.
Bien entendu, nous n’avons pas l’intention d’entraver le cheminement de ce texte : j’ai dit combien il était urgent qu’il aboutisse. Toutefois, il me semble indispensable d’avoir une discussion permettant d’approfondir la réflexion menée par le rapporteur et d’amender ce projet de loi, pour garantir que les lois Montagne et Littoral ne seront pas écornées – les propos de M. le ministre seront importants à cet égard –, que la sécurité juridique ne sera pas amoindrie, que les élus corses s’y retrouveront ; il s’agit, en définitive, d’améliorer la qualité d’un texte dont l’équilibre, j’en conviens bien volontiers, est difficile à trouver.
Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste-EELV.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, j’aborde l’examen de ce texte avec perplexité, lassé d’entendre vanter en permanence la beauté des paysages corses et le souci que nous avons, tous les quatre ou cinq ans, de prendre notre destin en main… Pour paraphraser Boileau, je dirai que le Gouvernement doit avoir l’âme bien chevillée au corps pour remettre ainsi, quatre fois, l’ouvrage sur le métier.
L’âge étant là, j’ai pour ma part connu pas moins de quatre textes sur le sujet. Celui de Gaston Defferre disposait, si ma mémoire est bonne, que la collectivité territoriale de Corse devait établir son plan d’aménagement dans un délai de dix-huit mois. Or, pendant dix ans, rien ne s’est passé. Puis, quand la majorité régionale a voulu procéder, dans un sursaut, à l’établissement de ce schéma, M. Joxe, alors ministre de l’intérieur, a dit qu’il était trop tard. Et alors que, pendant dix ans, personne n’avait protesté contre la carence de l’Assemblée de Corse, il a été subitement décidé, après avis du Conseil d’État, que l’État se chargerait d’établir le schéma d’aménagement !
Dans une deuxième période, nous avons eu le texte de Pierre Joxe, qui était un « copié-collé » de celui de Gaston Defferre, mais qui prévoyait, pour l’élaboration du schéma d’aménagement, un délai d’un an, et non plus de dix-huit mois. Puis, à nouveau, plus rien ne s’est passé pendant dix ans…
Sous le gouvernement Jospin sont intervenus les accords de Matignon, qui ont abouti à la loi relative à la Corse du 22 janvier 2002. Il ne s’agissait alors plus d’un schéma d’aménagement, mais d’un PADDUC, la terminologie ayant changé et la mode du développement durable étant apparue. Il n’était plus question de délai dans le nouveau texte, sans doute par prudence : ses auteurs estimaient probablement que l’échéance ne pourrait jamais être tenue.
Nous revenons aujourd’hui sur ce sujet à l’occasion de l’examen du présent projet de loi. Je sens bien, à cet instant, qu’il existe une contradiction très forte, s’agissant de l’échelle de la cartographie, entre l’avis unanime de l’Assemblée de Corse et celui du Conseil d’État.
Je vous demande, mes chers collègues, de ne pas accorder trop d’importance à l’avis de l’Assemblée de Corse, car celle-ci vote très souvent ses textes à l’unanimité, dans le cadre d’un consensus mou. Je vous mets au défi de me dire quels textes ont fait l’objet de discussions féroces au sein de cette assemblée : il n’y en a pas !
Il peut donc y avoir une contradiction, sur laquelle nous reviendrons dans un instant, entre l’avis de l’Assemblée de Corse et celui du Conseil d’État. Comment concilier les deux ? Toute la difficulté est là ! On ne peut y parvenir, car l’avis de la collectivité de Corse, je le souligne, c’est la « légitimité » de la Corse !
Un leader nationaliste a récemment déclaré dans la presse que la co-officialité ayant été votée par 70 % des élus, l’Assemblée de Corse représentait la légitimité de la Corse. Or, il y a dix ans, nous avons été deux élus, sur cinquante et un, à voter contre les accords de Matignon. À ce moment-là, la légitimité était de 90 % ! Mais lors du référendum de 2004 organisé par le Président de la République – j’évoque un souvenir douloureux ! –, le résultat fut : 51 % de voix contre, 49 % pour…
Méfiez-vous donc de ce concept de légitimité, selon lequel il faudrait, en permanence, considérer comme un avis définitif ce que peut dire l’Assemblée de Corse.
J’évoque ce problème d’entrée de jeu, afin d’aborder le texte non pas avec l’esprit chagrin, mais avec la sérénité nécessaire à nos travaux ! Il nous faudra, en effet, aboutir, même si la majorité sénatoriale a changé. Après tout, sur un texte d’une « telle importance », un consensus peut se faire jour dans cette assemblée, avec quelques nuances tout de même…
Nous devons garder à l’esprit cet aspect des choses. J’ai souvent eu l’occasion de dire que l’étalon du « temps corse » ressemble un peu à celui du temps judiciaire.
Sourires.
Je ne m’épuiserai pas à énumérer toutes les difficultés qui peuvent se présenter, mais je reviendrai sur une observation dont j’avais fait part au rapporteur, concernant l’inconstitutionnalité du texte.
Le principe de l’autonomie des collectivités territoriales doit être respecté. Vous avez fort opportunément rappelé à l’instant, madame Didier, que, dans l’échelle fixée par le Conseil d’État, un centimètre sur la carte représente un kilomètre sur le terrain, et que la Corse compte de 900 à 1 000 kilomètres de côtes. Actuellement, le Conservatoire du littoral, dont je suis le premier vice-président, se fondant sur des techniques informatiques plus appropriées, considère d’ailleurs que le littoral corse s’étend en réalité sur 1 200 kilomètres. Vous imaginez ce que représente une échelle du 1/100 000e, très précise pour un document censé être le plan de développement de la Corse !
Quant à l’éventuelle anticonstitutionnalité du projet de loi, je ferai observer au passage que l’Assemblée de Corse ne se prive pas de voter des textes anticonstitutionnels : je pense à toute une série de sottises, dont la distinction entre deux catégories de citoyens sur le modèle calédonien…
Mais si le projet de loi que nous examinons est anticonstitutionnel, qui va soulever son anti-constitutionnalité ? Personne ! Que se passera-t-il alors ? Pendant deux ou trois ans, un texte anticonstitutionnel pourra être appliqué, jusqu’à ce qu’un jour soit posée une question prioritaire de constitutionnalité, par exemple sur l’initiative d’un propriétaire lassé de voir ses droits bridés.
Entre-temps, on aura accrédité l’idée, au sein de la population corse, qu’une fois encore des textes ayant été adoptés ne pourront pas être appliqués, ce dont il aurait fallu s’apercevoir plus tôt. Gardons cela à l’esprit. Il en ira ainsi, d’ailleurs, si est voté un jour, ce qu’à Dieu ne plaise, un texte relatif aux résidences corses, qu’elles soient secondaires ou principales, avant qu’il ne soit censuré par le Conseil constitutionnel.
Ces problèmes étant complexes, je ne m’y attarderai pas davantage. J’en reviens au texte.
L’article 1er, comme l’a souligné M. le rapporteur, soulève des problèmes de constitutionnalité. Je vous précise, mes chers collègues, qu’une décision du Conseil constitutionnel de 2002 et un avis du Conseil d’État de 1991 relatif à l’Île-de-France, tous deux visés par le rapport de la commission, prônent une extrême prudence.
En l’espèce, le texte respecte l’avis du Conseil d’État, mais pour tenir compte de l’avis de l’Assemblée de Corse, qui veut à tout prix gérer la cartographie à sa façon, en définissant les échelles, vous êtes obligés de concilier l’inconciliable : d’où l’article 4, qui permet au plan d’aménagement et de développement durable de Corse de statuer sur des espaces géographiques limités en raison de leur caractère stratégique. Mais qu’est-ce qu’un site stratégique ? Comment définir des espaces limités ? Ces derniers risquent d’être au texte que nous allons adopter ce que représentent les hameaux nouveaux, dont la définition n’est pas aisée, pour la loi Littoral. Il peut y avoir là une source de difficultés, c’est pourquoi je propose, par voie d’amendements, de faire simple en supprimant tout cela.
L’article 2 ne suscite aucune observation particulière de ma part.
L’article 3 et l’article 4 s’articulent de façon pyramidale. Au lieu de simplifier, je redoute que l’on ne charge la barque, d’autant que, au-dessus du schéma, s’appliqueront encore la loi Littoral et la loi Montagne.
Mon cher collègue, je vous prie de bien vouloir vous acheminer vers votre conclusion…
M. Nicolas Alfonsi. Monsieur le président, ne pourrais-je pas emprunter les trois minutes allouées aux non-inscrits ?
Sourires.
Des contradictions risquent de se faire jour. Qui dit que, à un moment donné, le document d’urbanisme lui-même ne sera pas illégal au regard de la loi Littoral ? La situation est très compliquée ; il faut y réfléchir à deux fois.
J’en viens à l’article 5. Le plan d’aménagement et de développement durable de Corse serait élaboré par l’Assemblée de Corse. Pourquoi pas ? Une grande enquête devra toutefois être menée auparavant. Cela donnera lieu à un grand défoulement. Je n’aurai pas la cruauté de lire le rapport de la conseillère exécutive chargée de ce texte à l’Assemblée de Corse : une multitude de réunions devront être organisées. Il sera très difficile de respecter l’échéance rapprochée fixée pour l’élaboration du schéma, à savoir 2013.
Nous sommes en présence d’un texte surréaliste. Nous l’avons attendu pendant trente ans, mais il y est prévu que la révision interviendra dans un délai non plus de dix ans, mais de six ans. C’est un progrès considérable !
Exclamations sur les travées du groupe socialiste-EELV.
Je termine, mes chers collègues, car j’ai l’impression de vous ennuyer.
Faut-il vraiment un schéma d’aménagement dans une île de 8 000 kilomètres carrés et de 300 000 habitants ?
Il fut un temps où le président du conseil exécutif ne partageait pas nécessairement cette idée : la Corse n’est ni la Basse-Seine, ni la région Rhône-Alpes, ni l’Île-de-France. En réalité, les non-dits sont nombreux.
Mes chers collègues, je ne me suiciderai pas si vous n’adoptez pas les amendements que j’ai déposés
Sourires.
Je ne voudrais pas être pessimiste. Ainsi que je l’ai dit d’emblée, je n’ai pas l’esprit chagrin, mais si, comme je le pressens, la majorité sénatoriale s’associe à M. le ministre de l’intérieur sur un texte qui n’est pas anodin, que voulez-vous que je fasse ?
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, mon propos sera probablement moins chantant et plus banal que celui de M. Alfonsi. Mais ceux d’entre nous qui, sans être corses comme lui, connaissent un peu les spécificités de son île, peuvent comprendre les observations qu’il a formulées, même si les lois de la République doivent s’appliquer dans ce territoire comme ailleurs.
Je voudrais tout d’abord rendre hommage au rapporteur de la commission de l’économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire, notre collègue Alain Houpert, qui a su nous éclairer sur les enjeux du présent texte et a tenu à entendre les principaux acteurs, à savoir les membres de l’Assemblée de Corse, les élus locaux et nationaux de ce territoire, ainsi que les représentants des services de l’État, des associations protectrices de l’environnement ou encore des assemblées consulaires.
Aux termes de la loi n° 2002-92 du 22 janvier 2002, la collectivité territoriale de Corse a compétence pour élaborer un plan d’aménagement et de développement durable de la Corse. Ce plan emporte les mêmes effets qu’une directive territoriale d’aménagement ; il constitue le document stratégique de la Corse.
Un premier projet de plan d’aménagement et de développement durable a été élaboré en 2008. Le moins que l’on puisse dire est qu’il a suscité, à l’époque, un débat passionné à l’Assemblée de Corse.
Dans une démocratie, le débat est naturel et nécessaire. Il doit surtout être fructueux, et pour cela il doit être sincère et objectif. En tout état de cause, le débat n’a pu s’engager dans la sérénité, le document ayant été « diabolisé » dès le départ.
L’examen de ce premier projet a donc été retiré de l’ordre du jour de l’Assemblée de Corse au bout de quelques mois, en 2009, et reporté.
Depuis 2003, ce plan a fait l’objet de toutes les discussions et de toutes les expertises ; il est aujourd’hui en panne. Ce sont donc les dispositions du schéma d’aménagement de la Corse approuvé par décret en Conseil d’État du 7 février 1992 – il y aura donc vingt ans l’année prochaine – qui sont toujours en vigueur à ce jour.
La crainte d’un développement touristique de l’île qui se ferait au détriment de son environnement littoral avait plané tout au long des débats. La peur du « tout-tourisme », de l’économie résidentielle, de la spéculation, de la dépossession et du bétonnage des côtes a abouti à la non-adoption du plan d’aménagement proposé.
Un nouveau projet a, en conséquence, été élaboré. L’Assemblée de Corse a donné son aval à l’avant-projet de loi et l’a fait compléter. Il n’y a aujourd’hui plus aucune ambiguïté sur le dessein de ce plan d’aménagement et de développement durable de la Corse.
Le nouveau projet affiche clairement une stratégie de développement durable et partagé, qui valorise les atouts propres et identitaires de la Corse.
Lors de son déplacement à Ajaccio, le 2 février 2010, le Président de la République a précisé qu’il souhaitait que soient intégrées dans le PADDUC les dispositions du Grenelle de l’environnement. Le nouveau plan d’aménagement et de développement durable de la Corse est donc la traduction d’orientations annoncées alors par le Président de la République. Il porte une vision de la Corse et de son avenir à moyen terme : un tourisme maîtrisé et équilibré en rapport avec la densité de la population résidente, un développement rural, agricole et forestier assaini financièrement, assis sur des projets collectifs et la recherche de la qualité, tel qu’il est défini dans le plan de développement rural de la Corse approuvé par l’Union européenne, un développement du tissu entrepreneurial fondé sur la responsabilisation du secteur privé, comme le prévoit le schéma directeur de développement économique, ainsi qu’une réelle valorisation du capital environnemental, inestimable richesse de la Corse.
Le nouveau PADDUC définit donc une véritable stratégie pour l’avenir de la Corse durant les quinze à vingt prochaines années, en synthétisant aussi harmonieusement que possible les grands objectifs du développement économique social et culturel, les principales orientations données à l’aménagement du territoire et surtout les préconisations faites pour assurer la protection de l’environnement.
Le projet de loi qui nous est soumis ce soir tend à modifier le contenu et la procédure d’élaboration du plan, jugée trop lourde et trop complexe. L’objectif est triple : préciser la vocation du plan en confortant son rôle de document structurant en matière d’aménagement ; intégrer les prescriptions du Grenelle de l’environnement et préciser la façon dont le plan s’inscrit dans la hiérarchie des normes en matière d’urbanisme ; améliorer et simplifier la procédure d’élaboration, notamment en instaurant un débat sur les orientations fondamentales au sein de l’Assemblée de Corse.
Il importe d’insister sur le fait que, consultée sur l’avant-projet de loi, l’Assemblée de Corse, dans une délibération du 17 décembre 2010, a émis, à l’unanimité, un avis favorable, en demandant toutefois que soient pris en compte un certain nombre de modifications et d’ajouts, précisant notamment l’insertion du plan dans la hiérarchie des normes en matière d’urbanisme.
Le présent projet de loi tient compte, pour l’essentiel, de ces souhaits, et il faut s’en féliciter. Il modifie le contenu du PADDUC. Il s’agit non pas de recentraliser cette démarche, mais plutôt de donner à la collectivité la possibilité d’élaborer une vision nouvelle, qui ne soit pas figée pour toujours et qui intègre la préoccupation nationale du développement durable, telle qu’elle ressort du Grenelle de l’environnement.
Les Corses souhaitent que ce plan soit le point de départ d’une nouvelle stratégie orientée vers un développement durable, la protection de l’environnement, particulièrement de l’environnement littoral, dans le respect de la loi Littoral et de la loi Montagne.
L’environnement est le ressort essentiel du développement de la Corse. Il est à la fois un atout qu’il faut préserver et un facteur de richesse. Tout découle de cette idée : les choix énergétiques, l’organisation des transports intérieurs, la conservation des terres à valeur agronomique, l’aménagement des espaces littoraux et de montagne, la préservation des sites, une bonne gestion de l’eau et du couvert végétal.
Cette stratégie doit permettre à la Corse de concilier de manière harmonieuse compétitivité, identité, aménagement et environnement.
Il est temps que la Corse prenne enfin pleinement confiance en elle-même et en ses potentialités. Elle se trouve aujourd’hui à un tournant de son histoire ; elle regarde vers l’avenir.
Monsieur le ministre, le projet de loi qui nous est soumis aujourd’hui ne peut que recueillir l’adhésion des sénateurs du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. C’est avec enthousiasme que nous voterons ce texte.
Monsieur le président, monsieur le ministre, chers collègues, les continentaux qui ont la chance de découvrir la Corse éprouvent souvent un double sentiment : d’émerveillement, bien entendu, devant la beauté de ces paysages préservés, dont ils ne se lassent pas, mais aussi, presque au même degré, d’étonnement.
En effet, pour tous ceux qui connaissent les rivages bétonnés de la Méditerranée, de l’Espagne à l’Italie, découvrir des paysages aussi peu urbanisés est souvent source d’interrogations. Comment la Corse a-t-elle pu résister ainsi à l’appétit des promoteurs et aux tentations touristiques, dans une Méditerranée où un certain tourisme de masse à courte vue a pris possession de tant de rivages et de sites magnifiques ?
C’est une histoire bien complexe qui a conduit à cette situation. Je ne la détaillerai pas ici, car nous n’en n’avons pas le temps, mais elle nous a légué un patrimoine unique, que notre première responsabilité est de préserver.
L’important aujourd'hui est de nous concentrer sur l’enjeu qui se dessine : conserver sur l’Île de Beauté un équilibre entre tourisme de découverte et préservation des paysages et des cultures, assurer à la Corse un revenu touristique régulier et important tout en préservant ses attraits et ses équilibres démographiques, montrer la voie d’un tourisme soutenable et, finalement, chercher ainsi à établir un véritable « modèle corse », qui pourrait s’appliquer en d’autres lieux, en Méditerranée ou ailleurs.
La nouvelle démarche d’élaboration d’un PADDUC qui nous est proposée aujourd’hui peut répondre à ces défis. Telle est notre conviction.
Un premier projet de PADDUC, défendu par une autre majorité à l’Assemblée de Corse, a été fortement contesté par nombre d’élus et de représentants de la société civile pour sa conception centrée sur le tourisme, sacrifiant littoral et terres agricoles.
En effet, l’application de ce plan aurait supprimé 10 % des espaces naturels remarquables du littoral, soit 7 000 hectares. Les Corses ne pouvaient laisser faire cela, et ce projet a amené la constitution d’un véritable front anti-PADDUC, réunissant plusieurs dizaines d’associations, de syndicats et d’organisations politiques et culturelles appelant, au travers d’une pétition largement diffusée, à s’unir contre un modèle qui « mis[ait] sur un tourisme massif, un déséquilibre démographique et une bétonisation des côtes. […] Dans ce type de société, la démocratie régresse, le pouvoir des clans s’intensifie, les grandes multinationales et l’argent douteux gèrent l’économie et le politique. » Voilà qui était clairement énoncé !
L’adoption du présent projet de loi, alternatif à ce premier PADDUC, est donc extrêmement attendue en Corse. Arriver à un consensus sur un sujet aussi sensible que celui-ci n’était pas évident. Pourtant, l’Assemblée de Corse a adopté à l’unanimité le cadre juridique qui permettra aux habitants de l’île d’élaborer ce plan essentiel pour leur avenir. Nous nous félicitons donc de cette volonté politique, soutenue par un processus démocratique. Nous avons la conviction que notre responsabilité aujourd’hui est de prolonger cette volonté et d’aller vite, pour que la Corse puisse, enfin, assumer son rôle dans l’élaboration de son propre plan de développement.
Nombre de communes de l’île n’étant régies par aucun document d’urbanisme local, comme M. le rapporteur l’a souligné tout à l'heure, nous savons que ce cadre juridique a jusque-là cruellement fait défaut aux Corses, ce qui a conduit à des situations de grande tension et, parfois, à un non-respect pur et simple de la loi.
L’un des grands enjeux de ce prochain PADDUC sera effectivement de ne plus laisser les élus locaux seuls face aux décisions d’urbanisme, seuls face à ces appétits immobiliers parfois capables de toutes les intimidations, comme l’ont montré, malheureusement, cet été encore, plusieurs faits divers, seuls aussi face à un État qui n’agit pas toujours pour faire respecter la loi.
Cette incapacité de l’État à faire respecter le droit est l’un des graves problèmes qui se posent aujourd’hui sur l’île.
Comment demander à un maire de refuser un permis de construire s’il sait que l’État ne cherchera pas, de son côté, à faire démolir la construction illégale ? En soutenant les élus corses pour trouver, par le dialogue, les clefs du développement durable de l’île, nous devons aussi affirmer la volonté de la représentation nationale de faire respecter le droit en Corse. Dans ce cadre, la cartographie choisie est un élément central – on l’a vu au cours de ce débat –, en ce qu’elle garantit le caractère directif du PADDUC, qui doit s’imposer à tout autre document d’urbanisme et sera opposable à des initiatives individuelles.
Toujours dans cette perspective, le respect des lois Littoral et Montagne est une question majeure, et nous devons rester très vigilants sur les dérogations pouvant être accordées à l’Assemblée de Corse pour leur application. C’est en ce sens que nous avons cosigné, avec nos partenaires du groupe socialiste et apparentés, menés par Thierry Repentin, un amendement visant à inclure cette question dans le débat préalable obligatoire.
Soyons ici très clairs : pour nous, écologistes, l’autonomie donnée à l’Assemblée de Corse pour l’élaboration du PADDUC doit obligatoirement aller dans le sens du renforcement, et non pas de la fragilisation, de la loi Littoral.
Monsieur le ministre, c’est un point sur lequel nous souhaitons obtenir toutes garanties. J’ai bien noté d'ailleurs vos propos selon lesquels « les lois Littoral et Montagne resteront strictement applicables à la Corse ».
J’insisterai également sur la préservation des terres agricoles. Quand on sait que la Corse est obligée d’importer les tomates qu’elle consomme, on se rend compte à quel point la question de l’autonomie alimentaire de cette région est aujourd'hui centrale. La protection de ses terres nourricières doit être, pour la Corse, l’occasion de développer une agriculture de qualité, créatrice d’emplois et de richesses et, par conséquent, économe en carbone.
Rappelons en effet, après M. le rapporteur, que le présent texte entend intégrer les dispositions de la loi Grenelle II au PADDUC, notamment l’exigence de réduction des émissions de gaz à effet de serre.
À cet égard, monsieur le ministre, puisque nous évoquons le Grenelle de l’environnement et la lutte contre le changement climatique, comment ne pas dire un mot du véritable scandale que constitue le projet de la centrale dite « au gaz », imposé par l’État contre l’avis des communes et contraire au PLU de la commune de Bastelicaccia ?
Ce dossier aberrant nécessiterait véritablement d’être remis à plat, sur la forme comme sur le fond.
Sur la forme, tout d’abord, car l’État, monsieur le ministre, ne peut à la fois inviter les Corses à prendre en main leur destin en matière d’urbanisme et imposer ses propres choix en termes d’infrastructures, au mépris des avis des élus locaux et des documents d’urbanisme, qui existent en l’occurrence.
Sur le fond, ensuite et surtout, car promouvoir le principe d’une centrale au gaz alors qu’il n’existe aucune garantie de connexion de cette installation au gazoduc GALSI est pour le moins cavalier et fait sérieusement craindre qu’il ne s’agisse au final d’une centrale au fioul lourd polluante, dont la mise en service serait une aberration en termes d’émissions de gaz à effet de serre.
L’Assemblée de Corse s’est clairement prononcée contre ce type de centrales, et le présent débat est aussi pour moi l’occasion de souligner que l’autonomie énergétique de la Corse, grâce aux énergies renouvelables, doit faire partie des objectifs du PADDUC.
Je souhaite par ailleurs relever que l’une des modifications demandées par l’Assemblée de Corse lorsqu’elle s’est prononcée sur l’avant-projet de loi en décembre 2010 n’a pas été intégrée par le Gouvernement au présent projet de loi : celle qui porte sur la prise en compte des risques sanitaires d’origine environnementale, s’agissant particulièrement des terres amiantifères, qui sont une particularité corse. Ce point reste un sujet de préoccupation pour nous, et le dossier devra être rouvert.
Toutefois, le développement durable ne se limite pas à la protection de l’environnement : ne confondons pas les deux termes ! Parler d’urbanisation de la Corse suppose aussi d’évoquer l’accès au logement pour tous, alors que nous savons combien il est difficile, pour la population locale, de se loger, du fait de l’augmentation des prix dans les régions touristiques et, tout particulièrement, insulaires.
Le PADDUC devra être accompagné d’une véritable stratégie pour le logement, d’un plan de développement urbain des grandes villes corses, notamment en matière de logements sociaux. M. le rapporteur a rappelé tout à l'heure que le taux de logements sociaux n’était en Corse que de 10 %.
En ce sens, le PADDUC devra être enrichi des conclusions des assises du foncier et du logement menées en Corse durant plusieurs mois, avec l’ambition affichée de constituer une démarche déterminante pour le développement durable de l’île et « un préalable à l’élaboration du futur PADDUC ».
Présentées à l’Assemblée de Corse, les conclusions de ces neuf mois de débats, qui ont mobilisé plus de cinq cents personnes, insistent justement sur les outils dont aura besoin demain la Corse, en lien avec son PADDUC : un établissement public foncier, un établissement public d’aménagement et de construction de logements sociaux, une agence d’urbanisme… Il ne s'agit nullement d’une énumération à la Prévert, comme j’ai pu l’entendre dire. L’ensemble de ces outils existent déjà dans toute collectivité importante, et il est donc temps que la Corse s’en dote également.
Les perspectives sont nombreuses, et au travers de ce débat nous voyons que le PADDUC s’inscrit aujourd'hui dans une véritable logique de mobilisation de la société corse. Pour reprendre les propos de Maria Guidicelli, conseillère territoriale chargée du foncier et du logement, « pour la première fois, la Corse se dotera d’une politique du foncier et du logement. Ce sera la colonne vertébrale de notre PADDUC. Nous avons la responsabilité de lancer un processus de régulation sociale et de lutte contre la spéculation. Rien n’est pire que le statu quo. Nous sommes face à l’absolue nécessité de répondre à une urgence sociale. »
L’enjeu social de l’habitat ne doit donc pas être oublié quand on évoque le PADDUC, qui ne se limite pas aux enjeux touristiques et de la protection des paysages. Nous soutenons l’amendement de Thierry Repentin visant à ce que les organismes d’HLM puissent aussi être entendus, à leur demande, lors de l’élaboration du plan.
La Corse ne peut pas être aménagée sans que cela fasse l’objet d’un consensus entre les Corses eux-mêmes. Dotée d’une assemblée territoriale aux pouvoirs élargis, la société insulaire peut dorénavant s’appuyer sur un lieu de débat politique qui l’éloigne des pratiques clientélistes et des dérives violentes. Le consensus qu’elle a réussi à trouver sur la définition de la méthode d’élaboration de ce second PADDUC témoigne d’une maturité politique qui rompt avec les images d’Épinal.
Comme le disait le président de l’Assemblée de Corse, Dominique Bucchini, il y a quelques jours, ce projet « est une véritable rupture par rapport à ce qui avait été fait auparavant. [Ce premier PADDUC] avait été élaboré sans concertation, il va falloir aller plus loin et poser les bases d’une nouvelle politique territoriale. » Notre responsabilité est donc d’accompagner ce processus par un vote de confiance et un soutien sans ambiguïté. Les écologistes voteront ce texte.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV.
Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?…
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion des articles.
L’article L. 4424-9 du code général des collectivités territoriales est ainsi rédigé :
« Art. L. 4424-9. – I. – La collectivité territoriale de Corse élabore le plan d’aménagement et de développement durable de Corse.
« Le plan définit une stratégie de développement durable du territoire en fixant les objectifs de la préservation de l’environnement de l’île et de son développement économique, social, culturel et touristique, qui garantit l’équilibre territorial et respecte les principes énoncés aux articles L. 110 et L. 121-1 du code de l’urbanisme.
« Il fixe les orientations fondamentales en matière de protection et de mise en valeur du territoire, de développement agricole, rural et forestier, de pêche et d'aquaculture, d’habitat, de transports, d’infrastructures et de réseaux de communication et de développement touristique.
« Il définit les principes de l’aménagement de l’espace qui en résultent et il détermine notamment les espaces naturels, agricoles et forestiers ainsi que les sites et paysages à protéger ou à préserver, l’implantation des grandes infrastructures de transport et des grands équipements, la localisation préférentielle ou les principes de localisation des extensions urbaines, des activités industrielles, artisanales, commerciales, agricoles, forestières, touristiques, culturelles et sportives.
« La destination générale des différentes parties du territoire de l’île fait l’objet d’une carte, dont le degré de précision ne peut excéder 1/100 000e, et que précisent, le cas échéant, les documents cartographiques prévus à l’article L. 4424-10 et au II de l’article L. 4424-11.
« Le plan d’aménagement et de développement durable comporte les informations prévues par l’article L. 121-11 du code de l’urbanisme.
« Il prévoit des critères, indicateurs et modalités permettant à la collectivité territoriale de suivre l’application de ses dispositions et leurs incidences.
« II. – Le plan d’aménagement et de développement durable de Corse prend en compte les projets d’intérêt général et les opérations d’intérêt national répondant aux conditions fixées par les articles L. 121-9 et L. 121-9-1 du code de l’urbanisme et comporte, le cas échéant, les dispositions nécessaires à leur réalisation.
« Le plan d’aménagement et de développement durable de Corse prend en compte les risques naturels, sanitaires et technologiques. Il doit être compatible avec les objectifs et les orientations fondamentales des plans de gestion des risques d’inondation prévus par l’article L. 566-7 du code de l’environnement, lorsqu'ils existent, ainsi qu’avec les dispositions définies par les 1° et 3° de cet article.
« III. – Les schémas de cohérence territoriale et, en l’absence de schéma de cohérence territoriale, les plans locaux d’urbanisme, les schémas de secteur, les cartes communales ou les documents en tenant lieu doivent être compatibles avec le plan d’aménagement et de développement durable de Corse, notamment dans la délimitation à laquelle ils procèdent des zones situées sur leur territoire et dans l’affectation qu’ils décident de leur donner, compte tenu respectivement de la localisation indiquée par la carte de destination générale des différentes parties du territoire de l’île et de la vocation qui leur est assignée par le plan. »
L'amendement n° 5, présenté par Mmes Didier et Schurch, MM. Le Cam, Vergès et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 6
Remplacer les mots :
, dont le degré de précision ne peut excéder 1/100 000e
par les mots :
, dont l’échelle est déterminée par délibération de l’Assemblée de Corse
La parole est à Mme Évelyne Didier.
Cet amendement vise à supprimer la mention d’un plafond de l’échelle de la carte relative à la destination générale des différentes parties du territoire corse. Ce plafond, fixé au 1/100 000e, nous semble en effet poser problème, pour les raisons que j’ai déjà évoquées.
J’ai rappelé que, à cette échelle, un centimètre sur la carte équivaut à un kilomètre sur le terrain. La seule épaisseur d’un trait, fût-il fin, représenterait donc plusieurs dizaines de mètres dans la réalité. Il n'y a donc pas d’inquiétude à avoir sur une délimitation des zones qui se ferait parcelle par parcelle.
Au fond, je ne suis pas convaincue qu’un tel plafond soit pertinent. Retenir une échelle un peu plus élevée ne mettra pas davantage les communes sous tutelle de l’Assemblée de Corse.
Au-delà des chiffres, d’autres raisons nous ont incités à présenter cet amendement. En effet, nous ne nous contentons pas de demander la suppression de cette clause, nous suggérons de la remplacer par une mention laissant à l’Assemblée de Corse le soin de délibérer sur cette question des échelles.
En effet, une telle disposition est prévue pour toutes les autres cartographies instituées par ce texte afin de préciser le PADDUC. En outre, cela faisait partie des demandes initiales des Corses. Le débat de décembre 2010 à l’Assemblée de Corse a permis de faire ressortir la volonté de cette collectivité de s’emparer de la question de la définition des échelles ; je pense que, en effet, un tel sujet relève de sa compétence.
Certes, j’entends bien les raisons constitutionnelles qui ont poussé à préciser ainsi le texte, mais croit-on vraiment que l’Assemblée de Corse prendrait le risque d’établir un PADDUC trop précis, qui serait immédiatement frappé d’inconstitutionnalité, alors même qu’il est si nécessaire d’en instaurer un rapidement ? Nos débats et les différents rapports parus sur le sujet véhiculent tous ce message clair : le PADDUC ne doit pas descendre à un degré de précision excessif, afin que les collectivités de rang inférieur ne soient pas mises sous tutelle. Tout le monde s’accorde sur ce point. La doctrine me semble donc limpide, et nous pensons que les élus de Corse sont des gens responsables.
Soyons dès lors à notre tour raisonnables : si nous croyons véritablement en la décentralisation, la définition de l’échelle de la carte associée au PADDUC doit être laissée à l’Assemblée de Corse.
À mon sens, cette précision ne relève pas du domaine législatif, et c'est pourquoi je vous propose, mes chers collègues, cette mise en cohérence. Ma commune est dotée d’un PPRI : pour l’élaborer, nous avons été obligés de descendre à l’échelle du 1/2 000e, voire du 1/500e. Fixer un plafond au 1/100 000e ne me semble pas pertinent.
Le dépôt de ce sous-amendement est motivé par plusieurs arguments déjà exposés par les intervenants précédents, dont Mme Didier, qui soulignait à l’instant une convergence de vues sur la nécessité de concilier les larges pouvoirs conférés à l’assemblée territoriale dans l’élaboration du PADDUC avec le respect du principe de libre administration des collectivités territoriales et de celui de non-tutelle d’une collectivité sur une autre.
Je propose donc que l’amendement n° 5 soit complété par un membre de phrase rappelant la nécessité de respecter ces deux principes.
S'agissant de l’amendement n° 5, la commission a jugé préférable de laisser à l’Assemblée de Corse la possibilité de fixer librement l’échelle de la carte générale, à charge pour elle de ne pas descendre à un degré de détail qui pourrait poser un problème de constitutionnalité. À titre personnel, je ne suis pas favorable à cet amendement, mais la commission a décidé d’y souscrire.
Concernant le sous-amendement n° 10, auquel je suis favorable à titre personnel, la commission, n’ayant pu l’étudier, s’en remet à la sagesse du Sénat.
Le Gouvernement émet un avis favorable sur cet amendement, sous réserve de l’adoption du sous-amendement n° 10.
La commission n’a pu analyser le sous-amendement déposé par le Gouvernement. Toutefois, considérant qu’il ne dénature nullement le texte – peut-être est-il même superfétatoire –, nous proposons au Sénat de l’adopter.
J’ai beaucoup apprécié, madame Didier, votre lucidité à l’égard des membres de l’Assemblée de Corse : il va de soi que leur sens des responsabilités, qui est particulièrement aiguisé, ne manquera pas de s’exercer…
Cependant, à titre d’information, sachez que, sur les sept groupes que compte l’Assemblée de Corse, trois seulement étaient représentés à une réunion de la commission sur la loi Littoral qui s’est tenue cet après-midi…
Un tel comportement donne la mesure de ce qu’il en est, en réalité, du sens des responsabilités de ceux qui seront appelés demain à définir l’échelle pertinente pour la cartographie. Les échelles risquent même de varier de façon très importante selon les communes, au gré de circonstances sur lesquelles je ne m’étendrai pas…
En outre, compte tenu du poids dans l’élaboration des documents d’urbanisme des agriculteurs dont les terrains sont limitrophes de zones constructibles, on verra des terres agricoles devenir à leur tour constructibles.
Je suis contre l’amendement.
Le groupe socialiste considère que la loi du 22 janvier 2002 relative à la Corse a conféré pleine et entière responsabilité à l’Assemblée de Corse pour élaborer le PADDUC. Nous serons donc favorables aux amendements présentés dès lors qu’ils confortent cette responsabilité et qu’ils renforcent la transparence de la procédure d’élaboration. De fait, il ne peut y avoir débat que dans la transparence : aucune décision ne doit être prise en catimini, sans que tous les acteurs ayant la légitimité nécessaire pour s’exprimer sur le contenu du PADDUC aient pu le faire. Tel est le principe qui dictera nos votes.
S'agissant de l'amendement n° 5, qui vise à donner à l’Assemblée de Corse la possibilité de définir l’échelle cartographique la plus pertinente, nous ne voyons aucun inconvénient à le voter. Nous voterons également le sous-amendement n° 10, qui tend en quelque sorte à écarter le risque d’inconstitutionnalité.
Cela étant, sur le continent, nous élaborons des documents opposables aux communes sous d’autres intitulés, par exemple les SCOT. Or le degré de précision de certains SCOT va jusqu’à l’hectare s’agissant de la destination des sols : agriculture, habitat, développement économique. Pourtant, à aucun moment, lors du débat sur le Grenelle de l’environnement, n’a été évoqué à ce propos un éventuel risque d’inconstitutionnalité au regard du principe de libre administration des communes, alors même qu’un PLU doit être totalement compatible avec un SCOT. Il apparaît donc que l’appréciation de la constitutionnalité d’une disposition peut varier selon les ministres…
Le sous-amendement présenté par le Gouvernement précise notre amendement afin de lever toute ambiguïté. Nous le voterons donc.
Pour information, j’indique que la première directive territoriale élaborée sur le territoire national, qui concerne les Alpes-Maritimes, est assortie d’une échelle cartographique au 1/100 000e pour la bande côtière et au 1/60 000e pour le littoral.
Le sous-amendement est adopté.
L'amendement est adopté.
L'article 1 er est adopté.
L’article L. 4424-12 du code général des collectivités territoriales est abrogé et l’article L. 4424-10 du même code devient l’article L. 4424-12. –
Adopté.
Après l’article L. 4424-9 du code général des collectivités territoriales, il est rétabli un article L. 4424-10 ainsi rédigé :
« Art. L. 4424-10. – I. – Le plan d'aménagement et de développement durable de Corse vaut schéma régional de cohérence écologique au sens de l’article L. 371-3 du code de l’environnement.
« À ce titre :
« - il recense les espaces protégés au titre du livre III et du titre Ier du livre IV du code de l’environnement, identifie les espaces naturels importants pour la préservation de la biodiversité et définit des espaces naturels ou semi-naturels et des formations végétales linéaires ou ponctuelles qui permettent de les relier en constituant des continuités écologiques ;
« - il recense les cours d’eau, parties de cours d’eau, canaux, ou plans d'eau, figurant sur les listes établies en application des articles L. 211-14 et L. 214-17 du code de l’environnement, identifie tout ou partie des zones humides dont la préservation ou la remise en bon état contribue à la réalisation des objectifs de qualité et de quantité des eaux fixés par les schémas directeurs d’aménagement et de gestion des eaux en application du IV de l’article L. 212-1 du même code, notamment les zones humides mentionnées à l’article L. 211-3 dudit code et définit les cours d’eau, parties de cours d’eau, canaux et zones humides importants pour la préservation de la biodiversité qui n’ont pas été ainsi recensés ou identifiés.
« Il prend en compte les orientations nationales pour la préservation et la remise en bon état des continuités écologiques mentionnées à l’article L. 371-2 du même code.
« II. – Le plan d’aménagement et de développement durable de Corse vaut schéma régional des infrastructures et des transports au sens de l’article L. 1213-1 du code des transports. À ce titre, il comprend tout ou partie des analyses, objectifs et actions prévus pour ce schéma par l'article L. 1213-3 du même code et par les dispositions réglementaires prises pour son application. Les dispositions du plan relatives aux services collectifs de transport s’imposent aux plans départementaux des transports.
« III. – Le plan d’aménagement et de développement durable de Corse vaut, pour les secteurs qu’il détermine, schéma de mise en valeur de la mer au sens de l’article 57 de la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 relative à la répartition de compétences entre les communes, les départements, les régions et l’État. À ce titre, il définit pour lesdits secteurs les orientations, vocations, principes, mesures et sujétions particulières prévus par cet article. Les schémas de cohérence territoriale ne peuvent alors inclure ces secteurs dans le chapitre individualisé valant schéma de mise en valeur de la mer que, le cas échéant, ils comportent.
« IV. – Les dispositions prévues par les I à III du présent article sont regroupées dans des chapitres individualisés au sein du plan et sont, le cas échéant, assorties de documents cartographiques. Lorsque ces documents cartographiques ont une portée normative, leur objet et leur échelle sont déterminés par délibération de l’Assemblée de Corse. »
L'amendement n° 3, présenté par Mmes Didier et Schurch, MM. Le Cam, Vergès et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 5
I. - Après le mot :
canaux
supprimer les mots :
, ou plans d’eau
II. - Remplacer les mots :
des articles L. 211-14 et L. 214-17
par les mots :
de l’article L. 214-17
La parole est à Mme Évelyne Didier.
Cet amendement vise à supprimer l’obligation de recensement des bandes de cinq mètres longeant les cours d’eau, les canaux et les plans d’eau.
Je comprends bien entendu qu’il est important de prendre en compte les continuités écologiques qui forment la trame verte et bleue, afin de les préserver. J’y suis tout à fait favorable, comme l’ont montré mes prises de position lors du Grenelle de l’environnement.
Toutefois, il convient de ne pas oublier d’étudier les conséquences d’un tel ajout au texte. Deux arguments s’affrontent : d’un côté, il est vrai que le dispositif de l’article 6 devrait permettre de disposer de cinq ans pour élaborer et adopter le volet relatif à la protection des continuités écologiques, ce qui laisse du temps pour entrer dans le détail ; de l’autre, si nous n’étions pas favorables à la fixation d’un plafond pour l’échelle de la carte, il ne nous semble pas sage de demander l’intégration dans des documents précisant le PADDUC, qui doit demeurer un texte d’orientation, de détails dont l’ordre de grandeur est inférieur à la dizaine de mètres.
C’est à mes yeux une question de bon sens : pourquoi vouloir en même temps imposer une échelle maximale et contraindre à élaborer des cartes relatives à la trame verte et bleue d’une telle précision ? Pour faire figurer la largeur d’une bande de cinq mètres dans l’épaisseur d’un trait, il faudrait adopter une échelle de l’ordre du 1/10 000e, voire moins. À l’évidence, l’exercice n’aurait plus guère de sens…
Cela étant, si certains de nos collègues font une autre analyse, je les écouterai volontiers.
Le PADDUC vaut schéma de cohérence territoriale ou écologique et, à ce titre, il doit lister les corridors. Il s’agit non pas de dessiner des surfaces sur une carte, mais de lister les cours d’eau. La commission émet un avis défavorable.
Le point de vue du Gouvernement rejoint celui de la commission, qui a fort opportunément remédié à un oubli dans la rédaction du texte. Il faut effectivement prévoir, conformément au code de l’environnement, la liste des cours d’eau. En revanche, cette liste n’a pas de traduction cartographique, ni donc de conséquence en termes d’échelle.
L'amendement n° 3 est retiré.
Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 8 rectifié bis, présenté par MM. Alfonsi, Barbier, Bertrand, Chevènement et Collin, Mme Laborde, M. Vall et Mme Escoffier, est ainsi libellé :
Alinéa 9
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Nicolas Alfonsi.
L’amendement n° 8 rectifié bis vise à supprimer la faculté accordée à l’Assemblée de Corse de fixer l’échelle des documents cartographiques ayant une portée normative.
L'amendement n° 9 rectifié bis, présenté par MM. Alfonsi, Barbier, Bertrand, Chevènement et Collin, Mme Laborde, M. Vall et Mme Escoffier, est ainsi libellé :
Alinéa 9, seconde phrase
Compléter cette phrase par les mots :
et selon les modalités prévues au cinquième alinéa du I de l'article L. 4424-9.
La parole est à M. Nicolas Alfonsi.
Il s’agit d’un amendement de repli par rapport au précédent, prévoyant que lorsque les documents cartographiques ont une portée normative, leur objet et leur échelle seront fixés selon les dispositions de l’alinéa visé de l’article 1er du projet de loi. En particulier, le degré de précision ne pourra excéder 1/100 000e.
L’amendement n° 8 rectifié bis vise à supprimer purement et simplement la possibilité, pour l’Assemblée de Corse, de prévoir pour certaines zones couvertes par le PADDUC une cartographie plus précise que la carte générale au 1/100 000e.
L’article 3 traite des zones correspondant aux trois types de schémas auxquels le PADDUC sera équivalent : le schéma régional de cohérence écologique, le schéma régional des infrastructures et des transports, le schéma de mise en valeur de la mer.
Je rappelle que, dans sa délibération sur l’avant-projet de loi, l’Assemblée de Corse avait demandé que lui soit accordée la possibilité de déterminer librement l’échelle de toute la cartographie associée au PADDUC. Cela lui a été refusé par le Gouvernement, qui a décidé, après avis du Conseil d'État, de prévoir une échelle minimale de 1/100 000e pour la carte générale. La commission a décidé de supprimer ce seuil minimal à l’article 1er. Elle ne peut donc être que défavorable à cet amendement.
Concernant l'amendement n° 9 rectifié bis, il n’est pas plus acceptable aux yeux de la commission. En effet, il vise à imposer l’échelle de 1/100 000e pour toute la cartographie annexée au PADDUC, ce qui empêcherait que des cartes particulières limitées à certaines zones précisent la carte générale. La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
Je l’ai indiqué d’emblée : le Gouvernement a souhaité donner satisfaction à l’Assemblée de Corse dans toute la mesure où cela est compatible avec le respect des libertés communales. Il lui semble légitime que, pour certaines portions du territoire, l’échelle cartographique puisse être différente, afin d’obtenir un degré plus élevé de précision. Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur ces deux amendements.
Il serait tout de même souhaitable, monsieur le ministre, que vous nous précisiez votre définition des « espaces géographiques limités » à caractère « stratégique » – la portée juridique de ces mots est extrêmement forte ! – visés dans le projet de loi. Il y a une cause à tout : quelle est celle qui justifie que, pour de tels espaces aussi mal définis, liberté soit donnée à l’Assemblée de Corse de déterminer l’échelle cartographique pertinente, alors que, à l’article 1er, il était initialement prévu que le degré de précision ne pourrait excéder 1/100 000e ?
La réponse, me dit mon petit doigt, est simple : il s’agissait de concilier la volonté exprimée par l’Assemblée de Corse de déterminer elle-même les échelles pertinentes et l’avis du Conseil d’État selon lequel il fallait retenir un degré de précision maximal de 1/100 000e.
Quant à votre sous-amendement, monsieur le ministre, il est évident que le principe de libre administration des communes doit être respecté ! Il est superflu de le préciser dans un texte de loi, sauf s’il y a une bonne raison à cela…
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'article 3 est adopté.
L’article L. 4424-11 du code général des collectivités territoriales est ainsi rédigé :
« Art. L. 4424-11. – I. – Le plan d’aménagement et de développement durable de Corse peut préciser les modalités d’application, adaptées aux particularités géographiques locales, des articles L. 145-1 et suivants du code de l’urbanisme sur les zones de montagne et des articles L. 146-1 et suivants du même code sur les zones littorales.
« Les dispositions du plan qui précisent ces modalités sont applicables aux personnes et opérations qui sont mentionnées respectivement aux articles L. 145-2 et L. 146-1 dudit code.
« II. – Le plan d'aménagement et de développement durable de Corse peut, compte tenu du caractère stratégique au regard des enjeux de préservation ou de développement présentés par certains espaces géographiques limités, définir leur périmètre, fixer leur vocation et comporter des dispositions relatives à l’occupation du sol propres auxdits espaces, assorties le cas échéant de documents cartographiques dont l’objet et l’échelle sont déterminés par délibération de l’Assemblée de Corse.
« En l’absence de schéma de cohérence territoriale, de plan local d'urbanisme, de schéma de secteur, de carte communale ou de document en tenant lieu, les dispositions du plan relatives à ces espaces sont opposables aux tiers dans le cadre des procédures de déclaration et de demande d’autorisation prévues par le code de l’urbanisme. »
L'amendement n° 4, présenté par Mmes Didier et Schurch, MM. Le Cam, Vergès et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Après les mots :
les modalités d’application
supprimer les mots :
, adaptées aux particularités géographiques locales,
La parole est à Mme Évelyne Didier.
Cet amendement vise à faire préciser par M. le ministre la signification exacte, s’agissant des modalités d’application des lois Montagne et Littoral, des mots : « adaptées aux particularités géographiques locales », introduits par M. le rapporteur en commission.
Le rapporteur nous avait alors dit que cette expression se comprenait d’elle-même et relevait du simple bon sens, mais ne s’agit-il pas d’ouvrir la porte à des dérogations à ces deux lois ?
À ce stade, il convient de revenir sur un débat qui s’est tenu au Parlement en 2001. Il s’agissait alors de savoir comment concilier le développement d’une île qui accusait un retard économique important par rapport au continent avec la préservation d’un environnement exceptionnel.
À l’époque, si les parlementaires verts et communistes avaient accepté le transfert d’un certain nombre de compétences et la possibilité d’adapter certaines dispositions réglementaires et législatives sous le contrôle étroit du Parlement, ils avaient tenté de restreindre autant que possible la capacité donnée à la collectivité corse d’adapter les lois Littoral et Montagne aux particularités locales.
Il est en effet indispensable de disposer de suffisamment de recul et d’être indépendant des contingences économiques locales pour prendre des décisions sages sur des questions qui intéressent le long terme, les générations futures et un patrimoine auquel sont attachés, au-delà des Corses, l’ensemble des Français.
Voici un exemple de particularité géographique locale corse devant être conservée : alors que plus de 60 % du littoral provençal est artificialisé, moins de 20 % du littoral corse est dans ce cas.
Il ne s’agit pas ici de mettre en doute la volonté des élus corses de protéger le patrimoine naturel de leur territoire, qui fait la force et l’attractivité de celui-ci, mais, comme je l’ai dit, ils sont aussi confrontés à une exigence de développement, qui constitue de fait une forme de pression à laquelle il leur est difficile de résister.
Le droit actuel autorise déjà des constructions légères destinées à l’accueil du public, par dérogation à la loi Littoral, alors que l’on sait quels problèmes cela peut poser : souvenons-nous de l’affaire de la paillote Chez Francis.
C’est peut-être un aveu, par l’État, de son incapacité à exercer un contrôle de légalité satisfaisant sur les permis de construire, due à un manque de moyens des services préfectoraux.
En définitive, si le littoral corse est encore, pour le moment, plutôt bien préservé en comparaison du littoral de la France continentale, c’est aussi parce que les lois Montagne et Littoral s’appliquent. Pour le coup, une application stricte de la loi permet de prendre en compte la particularité géographique locale essentielle de la Corse : celle d’être une montagne dans la mer. Cette configuration unique en France fait de ce territoire une perle dont le littoral ne doit pas connaître un traitement similaire à celui qu’a subi le littoral du continent.
Au fond, autoriser une adaptation de l’application des lois Montagne et Littoral en Corse aurait pour effet d’amener les élus de l’île à commettre les mêmes erreurs que sur le continent. Si pour l’heure la Corse est encore épargnée par le bétonnage, c’est aussi parce que la quasi-totalité des communes sont soumises soit à la loi Littoral, soit à la loi Montagne, soit à ces deux lois en même temps. Cela peut apparaître, aux yeux de certains, comme un carcan entravant le développement touristique, mais je pense qu’il convient de ne pas envisager le développement du tourisme en Corse comme on a longtemps pu le faire sur le littoral provençal ou languedocien.
L’opposition entre développement touristique et préservation de l’environnement ne date pas d’hier. On oublie qu’il y va aussi de la préservation d’un mode de vie corse qui se distingue du mode de vie sur le continent.
Bien entendu, les dispositions de la loi Littoral ne sont pas exemptes d’une certaine rigidité, mais cette nécessaire rigidité fait la force de ce texte, et il me semble qu’on lui a déjà apporté bien assez d’assouplissements.
Monsieur le ministre, j’attends d’entendre vos explications sur le sens exact à donner à l’alinéa 2 de l’article 4.
Cet amendement porte sur le texte adopté par la commission la semaine dernière, qui reprend la rédaction du premier alinéa de l’actuel article L. 4424-11 du code général des collectivités territoriales, lequel prévoit que « le plan d'aménagement et de développement durable peut préciser les modalités d'application, adaptées aux particularités géographiques locales, des articles L. 145-1 à L. 146-9 du même code relatifs aux dispositions particulières aux zones de montagne et au littoral ».
Il ne s’agit donc pas, madame la sénatrice, de donner à l’Assemblée de Corse le droit d’adapter les lois Littoral et Montagne ; ce sont les modalités d’application de ces lois qui peuvent être adaptées aux particularités géographiques locales, par exemple au relief.
La commission vous demande de bien vouloir retirer votre amendement.
L’avis du Gouvernement rejoint tout à fait celui de la commission : il s’agit bien d’adaptations des modalités d’application des lois Littoral et Montagne. Il n’est pas du tout question de donner à la collectivité territoriale de Corse la possibilité d’adapter ces lois elles-mêmes, et il n’y a donc aucun risque d’affaiblissement ou de dénaturation de leurs dispositifs protecteurs.
Au bénéfice de ces explications, je demande à Mme Didier de bien vouloir envisager le retrait de son amendement.
L'amendement n° 4 est retiré.
Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L'amendement n° 6 rectifié bis, présenté par MM. Alfonsi, Barbier, Bertrand, Chevènement et Collin, Mme Laborde, M. Vall et Mme Escoffier, est ainsi libellé :
Alinéas 4 et 5
Supprimer ces alinéas.
L'amendement n° 7 rectifié bis, présenté par MM. Alfonsi, Barbier, Bertrand, Chevènement et Collin, Mme Laborde, M. Vall et Mme Escoffier, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Compléter cet alinéa par les mots :
et selon les modalités prévues au cinquième alinéa du I de l'article L. 4424-9.
Par coordination avec les votes intervenus à l’article 3, je constate que ces amendements n’ont plus d’objet.
Je mets aux voix l'article 4.
L'article 4 est adopté.
Les articles L. 4424-13 et L. 4424-14 du code général des collectivités territoriales sont ainsi rédigés :
« Art. L. 4424-13. – I. – Le projet de plan d’aménagement et de développement durable de Corse est élaboré par le conseil exécutif.
« La stratégie et les orientations envisagées font l’objet d’un débat, préalable à cette élaboration, au sein de l’Assemblée de Corse.
« Sont associés à l’élaboration du projet de plan le représentant de l’État dans la collectivité territoriale de Corse, les départements, les communes ou leurs groupements compétents en matière d’urbanisme, les chambres d’agriculture, les chambres de commerce et d’industrie et les chambres de métiers et le centre régional de la propriété forestière. Des organisations professionnelles peuvent également être associées, dans les mêmes conditions, à son élaboration. L’Assemblée de Corse peut décider de consulter toute autre organisation sur le projet de plan.
« Le représentant de l’État porte à la connaissance du conseil exécutif les projets d’intérêt général et les opérations d’intérêt national répondant aux conditions fixées par les articles L. 121-9 et L. 121-9-1 du code de l’urbanisme, ainsi que les plans de prévention des risques.
« Le projet de plan arrêté par le conseil exécutif et, le cas échéant, les projets de délibérations prévues par l’article L. 4424-12 du présent code, sont soumis pour avis à l’autorité de l’État compétente en matière d’environnement, au conseil économique, social et culturel de Corse ainsi qu’au conseil des sites de Corse. Ces avis sont réputés émis et, en ce qui concerne les conseils, favorables s’ils n’ont pas été rendus dans un délai de trois mois. Éventuellement modifiés pour tenir compte des avis recueillis, ces projets sont délibérés par l’Assemblée de Corse puis, assortis desdits avis, soumis à enquête publique par le président du conseil exécutif dans les conditions prévues par le chapitre III du titre II du livre Ier du code de l’environnement.
« Après l’enquête publique, le plan d’aménagement et de développement durable, éventuellement modifié pour tenir compte des résultats de l’enquête publique, est à nouveau délibéré par l’Assemblée de Corse. Les dispositions du plan prises en application de l’article L. 4424-12 font l’objet de délibérations particulières et motivées de l’Assemblée de Corse.
« II. – Des délibérations de l’Assemblée de Corse précisent la procédure d’élaboration prévue par le présent article.
« Art. L. 4424-14. – I. – Le plan d’aménagement et de développement durable de Corse peut être modifié, sur proposition du conseil exécutif, lorsque les changements envisagés n’ont pas pour effet de porter atteinte à son économie générale. Les dispositions du III de l'article L. 121-10 du code de l’urbanisme sont applicables.
« Les modifications envisagées sont soumises pour avis aux personnes publiques, organismes et organisations dont l’association est prévue par l’article L. 4424-13 du présent code. Leur avis est réputé favorable s’il n’est pas intervenu dans un délai de trois mois.
« Après enquête publique, les modifications sont approuvées par l’Assemblée de Corse.
« II. – À l’expiration d’un délai de six ans à compter de la date d’approbation du plan d’aménagement et de développement durable, le conseil exécutif procède à une analyse globale des résultats de son application notamment du point de vue de l’environnement.
« Cette analyse est soumise à l’avis du conseil économique, social et culturel de Corse, communiquée au public et transmise à l’Assemblée de Corse. L’Assemblée délibère sur le maintien en vigueur du plan d'aménagement et de développement durable de Corse, sur sa modification, ou sur sa révision, complète ou partielle.
« Le plan d’aménagement et de développement durable est révisé selon les modalités prévues pour son élaboration par l'article L. 4424-13.
« III. – Des délibérations de l’Assemblée de Corse précisent les procédures de modification et de révision prévues par le présent article. »
L'amendement n° 1 rectifié, présenté par M. Repentin et les membres du groupe Socialiste, Apparentés et groupe Europe Écologie Les Verts rattaché, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Rédiger ainsi cet alinéa :
« La stratégie et les orientations envisagées, notamment en application de l’article L. 4424-11, font l'objet d'un débat, préalable à cette élaboration, au sein de l'Assemblée de Corse.
La parole est à Mme Renée Nicoux.
Cet amendement vise à intégrer dans le champ du débat public les dérogations accordées à l’Assemblée de Corse pour la mise en œuvre des lois Littoral et Montagne.
Sans revenir sur cette possibilité d’adaptation conférée à l’Assemblée de Corse, il s’agit d’en faire un des axes du débat préalable obligatoire dans le cadre de l’élaboration du projet.
Certes, ces dispositions ne sont pas nouvelles, mais elles touchent tout de même à des sujets sensibles.
De même, et bien que la commission ait encadré, par le biais de l’adoption d’un amendement, les conditions dans lesquelles l’Assemblée de Corse définira les « espaces géographiques limités » présentant un « caractère stratégique » au regard des enjeux de préservation ou de développement, nous tenons à ce que la définition de ces espaces et ces décisions soient réellement débattues, a fortiori si, comme le précise le texte, elles sont rendues opposables aux tiers dans toutes les communes soumises au règlement national d’urbanisme, ce qui est le cas de la majorité des communes du centre de l’île.
Nous souhaitons faire confiance aux élus corses, mais nous entendons aussi que le PADDUC soit un document légitime et juridiquement sûr. C’est la raison pour laquelle nous demandons que les modalités particulières d’application de cette « super-DTA » régionalisée fassent l’objet d’un débat public.
Cet amendement prévoit que le débat d’orientation préalable au sein de l’Assemblée de Corse devra aussi porter sur les décisions prises en application de l’article L. 4424-11 du code général des collectivités territoriales, c’est-à-dire, d’une part, sur les précisions apportées aux modalités d’application des lois Montagne et Littoral, et, d’autre part, sur la définition de certains espaces géographiques limités à caractère stratégique.
Cette précision est bienvenue, ces deux sujets sensibles devant en effet être expressément abordés lors du débat d’orientation préalable si l’on veut que celui-ci permette au conseil exécutif de bien baliser le terrain avant de s’engager dans l’élaboration du projet de PADDUC.
L’avis de la commission est donc favorable.
Il s’agit en effet d’une précaution utile et je voterai cet amendement, qui renforcera la sécurité juridique du PADDUC en élargissant le champ du débat d’orientation préalable.
J’attire cependant l’attention sur le fait que plus il y a de sujets à aborder, plus la tenue d’un tel débat prend du temps.
Par ailleurs, s’agissant de la faculté de procéder à des adaptations, elle existe depuis la réforme constitutionnelle de 2003, qui a introduit l’expérimentation législative. Cela étant, l’Assemblée de Corse se bornera à émettre des avis sur des projets du Gouvernement, jamais elle n’élaborera d’elle-même un texte définissant les adaptations souhaitables, car tout est trop complexe, trop relatif : que signifie, par exemple, la notion d’espace remarquable ? Le maquis est un espace remarquable au pôle Nord, mais pas en Corse !
L'amendement est adopté.
L'amendement n° 2 rectifié, présenté par M. Repentin et les membres du groupe Socialiste, Apparentés et groupe Europe Écologie Les Verts rattaché, est ainsi libellé :
1° Alinéa 4, première phrase
Remplacer les mots :
compétents en matière d’urbanisme,
par les mots :
à fiscalité propre, ainsi que les établissements publics mentionnés à l'article L. 122-4 du code de l'urbanisme,
2° Après l’alinéa 4
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Si un organisme mentionné à l'article L. 411-2 du code de la construction et de l'habitation en fait la demande, le président de l’Assemblée de Corse lui notifie le projet de plan afin de recueillir son avis. Cet avis est réputé favorable s'il n'a pas été rendu par écrit dans un délai de deux mois.
La parole est à M. Claude Bérit-Débat.
Cet amendement vise à associer à l’élaboration du projet de plan toutes les parties normalement prenantes à l’élaboration des directives territoriales d’aménagement et de développement durable, dans l’esprit de l’article L. 113-2 du code de l’urbanisme.
En particulier, la rédaction actuelle du texte n’inclut les intercommunalités que si elles exercent la compétence en matière d’urbanisme. Or, en Corse, ce n’est le cas d’aucune des vingt communautés de communes et des deux communautés d’agglomération ; seul un syndicat intercommunal à vocation unique exerce cette compétence.
Les intercommunalités exercent pourtant des compétences tout à fait significatives en matière d’aménagement, de développement économique ou de logement. Nous proposons donc d’associer à l’élaboration du projet de PADDUC les responsables de SCOT.
En outre, nous socialistes avions été à l’origine d’une avancée majeure s’agissant de l’élaboration des SCOT, qu’il nous paraît opportun de reprendre ici : nous souhaitons que les organismes d’HLM puissent être entendus, à leur demande, dans le cadre de l’élaboration du PADDUC.
En effet, les problèmes de logement ne sont pas moins importants en Corse qu’ailleurs, puisqu’il manquerait entre 6 000 et 8 000 logements sociaux sur l’île.
Nous souhaitons donc appeler l’attention de l’Assemblée de Corse et des collectivités sur l’urgence de construire des logements à prix abordables. À nos yeux, les acteurs les mieux à même d’aborder ce problème criant sont les organismes d’HLM.
La première partie de cet amendement vise à élargir la liste des organismes associés à l’élaboration du PADDUC à tous les groupements de communes à fiscalité propre, et non pas seulement aux groupements compétents en matière d’urbanisme, d’une part, aux établissements publics chargés d’élaborer un schéma de cohérence territoriale, d’autre part.
Deux SCOT sont actuellement en cours d’élaboration sur l’île, en Balagne et dans la région d’Ajaccio.
La seconde partie de l’amendement prévoit que les organismes d’HLM puissent, à leur demande, donner leur avis sur le projet de PADDUC. Une disposition analogue existe pour l’élaboration des SCOT. Elle se justifie particulièrement en Corse, où la question du logement locatif est devenue cruciale et où le manque de logements sociaux est patent.
La commission émet donc un avis favorable.
S’agissant des organismes d’HLM, le Gouvernement se rallie à l’amendement.
Il lui semble cependant que quelques problèmes de rédaction se posent par ailleurs. En effet, l’amendement vise les communes ou leurs groupements à fiscalité propre, ce qui signifie que seules les communes isolées seraient associées à l’élaboration du PADDUC, alors que cette catégorie est appelée à disparaître.
En outre, si le Gouvernement est favorable à l’adjonction de la mention des établissements publics chargés d’un SCOT, il considère que, sur le plan rédactionnel, il serait préférable d’indiquer que sont associés à l’élaboration du PADDUC les établissements publics ayant effectivement la compétence en matière de SCOT.
Au total, le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat.
Il nous semble que notre amendement peut être voté tel que nous l’avons présenté.
L'amendement est adopté.
La parole est à M. Marc Daunis, pour explication de vote sur l'article.
L’adoption de ces deux amendements est particulièrement importante, dans la mesure où elle permettra de renforcer la transparence dans l’élaboration du PADDUC. Cela me paraît fondamental.
M. Alfonsi s’est interrogé tout à l’heure sur la signification de la notion d’espaces géographiques limités présentant un caractère stratégique. Nous nous sommes posé exactement la même question, mon cher collègue, il y a plus de dix ans, lors de l’élaboration de la directive territoriale d’aménagement des Alpes-Maritimes. La réponse figure dans le document adopté en 2003 : pour les Alpes-Maritimes, ces espaces à caractère stratégique sont Sophia Antipolis et la plaine du Var, celle-ci faisant aujourd’hui l’objet d’une opération d’intérêt national.
Les zones littorales périurbaines encore peu construites présentent également un caractère stratégique au regard des enjeux de préservation et de développement. Or si on laisse faire, elles risquent de subir un « mitage » avant de finalement disparaître.
Un travail de concertation extrêmement intéressant a été réalisé dans notre département. Nous faisons confiance à cette démarche et aux élus. La Corse partage sans doute cette aspiration à maîtriser son destin, pour que son urbanisation, pour l’heure moins développée qu’ailleurs, puisse se dérouler dans de bonnes conditions.
L'article 5 est adopté.
I. – Le I de l'article L. 371-4 du code de l’environnement est abrogé.
II. – Si le plan d’aménagement et de développement durable de Corse est approuvé moins de deux ans après la première publication des orientations nationales pour la préservation et la remise en bon état des continuités écologiques mentionnées à l’article L. 371-2 du code de l’environnement, il peut l’être sans chapitre valant schéma régional de cohérence écologique. Il est modifié ou révisé dans un délai de cinq ans à compter de son approbation pour que ce chapitre y soit inséré.
III
– Si le plan d’aménagement et de développement durable de Corse est approuvé moins d’un an après la date à laquelle a été arrêté un plan de gestion des risques d’inondation prévu par l’article L. 566-7 du code de l’environnement, il est, si nécessaire, modifié ou révisé dans un délai de deux ans pour satisfaire à l'obligation de compatibilité fixée par le deuxième alinéa du II de l'article L. 4424-9 du code général des collectivités territoriales. –
Adopté.
Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. Nicolas Alfonsi, pour explication de vote.
Mes chers collègues, j’ai indiqué, lors de la discussion générale, que je n’avais pas l’esprit chagrin. Cependant, trente ans d’expérience me conduisent à être sceptique.
Je ne suis pas persuadé que le texte que nous allons voter ce soir comporte des dispositions géniales… S’il constituait ne serait-ce qu’un progrès, je le voterais volontiers. Quoi qu’il en soit, je ne voudrais pas, par mon abstention, troubler une belle unanimité, si rare dans cet hémicycle ! C’est une question de courtoisie…
Cela étant précisé, mon scepticisme tient au fait que, au lieu d’évoquer l’élaboration d’un schéma d’aménagement dans un désert, il eût peut-être été préférable, à mon sens, de s’intéresser à la réalisation, d’ici à 2040, de la route à deux voies de Bastia à Bonifacio… La collectivité territoriale de Corse a consacré en dix ans 700 millions d’euros à la mise à niveau de 500 kilomètres de route territoriale dite nationale !
Aujourd’hui, un automobiliste met quatre heures pour se rendre de Bastia à Bonifacio ; en été, cela représente une épreuve !
Je doute que le plan puisse être achevé à l’échéance prévue, compte tenu de la multitude des parties prenantes à son élaboration, d’autant qu’un nouveau front anti-PADDUC risque fort de se constituer.
Telle est ma conclusion et, ayant à peu près tout dit, je voterai néanmoins le texte.
M. Alfonsi vient en quelque sorte de nous appeler à voter ce texte à l’unanimité…
Sourires.
Un certain scepticisme régnait pourtant encore, voilà quelques jours, quant à la portée du projet de loi qui nous est soumis. Nous ne souhaitions pas, en particulier, que donner aux élus de l’Assemblée de Corse les outils nécessaires pour gérer au mieux l’avenir de leur territoire puisse éventuellement déboucher sur une altération de ces textes très importants que sont la loi Littoral et la loi Montagne. Le débat a permis de dissiper cette crainte que nous pouvions avoir.
Par ailleurs, ont été adoptés un certain nombre d’amendements visant à donner encore plus de latitude à l’Assemblée de Corse, notamment pour la définition de la cartographie accompagnant le PADDUC, ainsi que des amendements tendant à assurer une grande transparence dans la procédure d’élaboration et à ne laisser au bord du chemin aucun acteur ayant la légitimité pour s’exprimer sur le contenu de ce document.
Si un vote unanime intervient tout à l’heure sur ce texte, ce sera un message de confiance adressé non pas au Gouvernement, mais aux élus de l’Assemblée de Corse, qui seront responsables, devant la population de leur territoire, de l’utilisation des outils qui leur auront été confiés pour préparer l’avenir de l’île. À plus court terme, les électeurs corses auront l’occasion de se prononcer sur la mise en œuvre des dispositions législatives que nous allons voter.
Compte tenu de l’adoption de nos amendements, nous voterons ce texte. Goûtez, monsieur le ministre, ce rare plaisir, car une telle unanimité ne se reproduira pas de sitôt dans notre assemblée !
Sourires.
J’ai indiqué lors de la discussion générale que nous avions une double volonté : sécuriser l’urbanisme en Corse – c’était une demande forte des élus de l’île – et obtenir que soient préservées la loi Montagne et la loi Littoral.
Nous avons fait notre travail de législateur, la balle est maintenant dans le camp des Corses. Certains d’entre eux sont très sceptiques, mais, au plus près des réalités, on est plus sensible à toutes les querelles qui peuvent se développer. Quoi qu’il en soit, il revient maintenant à la Corse de prendre en main ses destinées.
Comme vient de le dire Mme Didier, il appartient désormais aux élus corses, et au-delà à l’ensemble de la population de l’île, de s’emparer des outils que leur offre ce texte afin de maîtriser leur destin.
Nous voterons ce texte sans réticence, en espérant que l’avenir démontrera non seulement qu’il était pertinent, mais qu’il répondait bien aux vœux de la population et des élus corses.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.
Le projet de loi est adopté.
Je constate que le projet de loi a été adopté à l’unanimité des présents.
Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, 19 octobre 2011 :
À quatorze heures trente :
1. Projet de loi relatif à l’Agence nationale des voies navigables (n° 783, 2010-2011).
Rapport de M. Francis Grignon, fait au nom de la commission de l’économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire (n° 21, 2011-2012).
Texte de la commission (n° 22, 2011-2012).
À vingt et une heures trente :
3. Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de finances rectificative pour 2011 (n° 30, 2011-2012).
Rapport de Mme Nicole Bricq, fait au nom de la commission des finances (n° 35, 2011 2012).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
La séance est levée le mercredi 19 octobre 2011, à zéro heure trente.