La commission examine les amendements au texte n° 565 (2009-2010) qu'elle a établi pour la proposition de loi n° 340 (2009-2010), adoptée par l'Assemblée nationale, renforçant la protection des victimes et la prévention et la répression des violences faites aux femmes.
Adoption d'amendements du rapporteur
Je vous propose tout d'abord de remplacer à l'alinéa 7 de l'article 1er le verbe « soupçonner », doté d'une connotation pénale comme l'a relevé Laurent Béteille, par les mots « considérer comme vraisemblables ». Je vous soumets en outre une correction rédactionnelle et un amendement de coordination.
Deux amendements rédactionnels aux articles 1er et 3, ainsi qu'un amendement de coordination à l'article 2 sont adoptés.
Examen des amendements extérieurs
L'amendement n° 43 du groupe communiste permet aux associations d'aide aux victimes de saisir le juge aux affaires familiales. Certes, les associations jouent un rôle essentiel, mais le dispositif de la partie civile, empruntée au droit pénal, n'est pas transposable à ce contentieux civil. En autorisant les associations à saisir le juge, on leur conférerait le statut de parties à l'instance en lieu et place des victimes.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 43.
L'amendement n° 59 du Gouvernement supprime toute référence aux conditions de saisine du juge et de convocation des parties. Or il importe de retenir le principe d'une convocation par le juge, afin que la victime n'ait pas à recourir à la procédure d'assignation. Ne réduisons pas la portée de la nouvelle ordonnance de protection ! Certes, la Chancellerie devra faire preuve d'imagination lors de la rédaction du décret.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 59.
L'amendement n° 8 me paraît inutile : la procédure de référé autorise d'ores et déjà le juge à statuer sans délai. Il faut d'ailleurs laisser au juge la possibilité d'ordonner un supplément d'information.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 8.
L'amendement n° 45 du groupe communiste prévoit que le juge aux affaires familiales peut statuer par ordonnance sur requête, ce qui supprimerait tout débat contradictoire. Ce serait peu conforme aux exigences d'un procès équitable : n'oublions pas que les mesures susceptibles d'être prononcées sont graves.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 45.
J'ajoute qu'il exigerait une très haute qualité de la preuve dès la procédure en référé.
La commission décide de demander le retrait de l'amendement n° 61.
Dans la mesure où elle est rendue à titre provisoire, au terme d'une procédure qui ne présente pas les mêmes garanties qu'une procédure pénale, l'ordonnance de protection ne peut attester des faits allégués ni du danger auquel la victime serait exposée, comme le voudraient les auteurs de l'amendement n° 46. Si elle devenait un élément de preuve dans une procédure civile ou pénale, les juges aux affaires familiales ne la délivreraient plus qu'en cas de certitude absolue. Il n'est pas nécessaire que l'ordonnance atteste des violences pour qu'elle produise tous ses effets de droit.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 46.
L'amendement n° 41 de Mme Dini, qui précise que le bénéficiaire de l'ordonnance de protection ne peut se voir attribuer contre son gré la jouissance du domicile conjugal, est largement satisfait : non seulement l'alinéa 10 prévoit expressément que la jouissance du logement peut ne pas être accordée à la victime si les circonstances le justifient, mais il découle de la nature civile de la procédure que le juge ne peut statuer qu'à la demande d'une des parties, et non ultra petita.
La commission émet une demande de retrait de l'amendement n° 41.
Il ne me paraît pas nécessaire que soit désignée, même avec l'accord de la victime, une personne morale habilitée chargée d'accompagner celle-ci pendant toute la durée de l'ordonnance de protection, comme le veut l'amendement n° 47 : la personne morale ne peut se substituer à la partie intéressée, et le fait que son rôle d'accompagnement soit consacré par le juge ne produirait aucun effet de droit. Cette disposition pourrait même se retourner contre l'association, si elle était poursuivie pour défaut d'accompagnement, ou contre la victime qui devrait obtenir du juge l'autorisation de changer d'accompagnant. Enfin, il ne me paraît pas opportun d'imiter ici les mesures applicables en matière de protection juridique des majeurs incapables ou d'assistance éducative.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 47.
L'amendement n° 7 tend à réserver aux seules associations qualifiées conventionnées avec le ministère de la Justice le droit d'accompagner les victimes bénéficiant d'une ordonnance de protection. Cela réduirait le spectre des associations susceptibles d'intervenir, alors que toutes n'ont pas vocation à passer une convention avec le ministère. Nous pourrions solliciter l'avis du Gouvernement sur cette mesure de nature réglementaire.
Cet amendement est bien trop limitatif : je propose plutôt d'émettre un avis défavorable. ( Mme Nicole Borvo Cohen-Seat approuve)
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 7.
J'insiste : il s'agit d'autoriser le juge à transmettre, avec son accord, les coordonnées de la victime à une association qualifiée. Toutes les victimes n'ont pas la force de demander elles-mêmes de l'aide ! Le parquet de Versailles a d'ailleurs passé une convention à ce sujet avec des associations.
Je vous propose un retrait, sous bénéfice d'engagements du Gouvernement.
La commission émet une demande de retrait de l'amendement n° 14.
L'amendement n° 30 du groupe socialiste vise à confier à une personne morale habilitée la charge de percevoir et d'administrer les allocations familiales versées au couple pour l'éducation des enfants, dans l'idée que les bénéficiaires de l'ordonnance de protection pourraient se voir attribuer l'exercice de l'autorité parentale sans répondre aux conditions nécessaires pour percevoir les allocations. Cet objectif est satisfait par le droit en vigueur : le juge compétent pour se prononcer sur les modalités d'exercice de l'autorité parentale et la contribution à l'entretien des enfants peut aussi désigner celui des deux parents qui percevra les allocations familiales ; l'article L. 521-2 du code de la sécurité sociale va dans le même sens, et il existe une mesure bien connue de tutelle aux prestations sociales.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 30.
L'amendement n° 15 du groupe socialiste prévoit de prolonger l'ordonnance de protection pour toute la durée des instances civiles ou pénales relatives aux faits de violence. C'est se méprendre sur le rôle de l'ordonnance de protection, mesure civile qui vise à répondre à l'urgence et s'applique pendant un temps déterminé. Une fois les membres du couple séparés, le juge aux affaires familiales est compétent pour prendre les mesures requises. Au cours de la procédure pénale, le juge a d'ailleurs des pouvoirs bien plus étendus.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 15.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 31.
L'amendement n° 48 vise à encadrer les pouvoirs dévolus au juge aux affaires familiales, qui ne pourrait modifier l'ordonnance de protection qu'au vu d'éléments nouveaux et seulement en ce qui concerne les obligations imposées à l'auteur des violences. Il remettrait en cause la procédure en deux temps voulue par la commission, ôterait aux parties le droit de saisir le juge pour obtenir une modification de l'ordonnance, et interdirait au juge d'ordonner une mesure complémentaire au bénéfice de la victime.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 48.
L'amendement n° 2 de Mme Payet autorise la personne intéressée à demander la levée de l'interdiction temporaire de sortie du territoire dont elle bénéficie : c'est inutile, puisque la personne qui a demandé au juge cette interdiction peut également en solliciter la levée, le juge n'ayant qu'à apprécier qu'elle agit de son plein gré.
En outre, l'amendement étend le bénéfice de l'ordonnance de protection aux personnes menacées de viol ou d'agression sexuelle. Or cette ordonnance est une mesure civile destinée à organiser la séparation des membres du couple afin de garantir la protection de l'un contre l'autre. Elle n'est pas adaptée aux cas où la victime n'a aucun lien civil avec son agresseur potentiel, qui relèvent de la compétence du procureur de la République ou du juge pénal, dont les pouvoirs sont bien supérieurs à ceux du juge civil. Ne fourvoyons pas les victimes vers une procédure mal adaptée à leur situation.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 2.
L'amendement n° 9 concerne quant à lui les personnes menacées de mutilation sexuelle : l'argument est le même. J'ajoute que l'excision se pratique plutôt sur des mineurs : le juge des enfants est donc compétent.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 9.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 44.
L'amendement n° 32 du groupe socialiste ajoute, parmi les cas où la mise en disponibilité d'un fonctionnaire est de droit, la délivrance d'une ordonnance de protection. J'attire votre attention sur le fait que les fonctionnaires en disponibilité ne sont pas rémunérés ! En outre cette mesure est de nature réglementaire.
Il conviendrait plutôt que l'administration affecte l'intéressé sur un poste éloigné.
Il n'y a pas de raison de traiter les fonctionnaires différemment des autres travailleurs : dans de telles situations les femmes sont toujours confrontées à des problèmes d'emploi.
La commission décide de solliciter l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 32.
L'amendement n° 33 du groupe socialiste vise à autoriser les centres de gestion et les employeurs des trois fonctions publiques à mettre en place des politiques de mutation, de détachement ou de mise à disposition des fonctionnaires afin que les agents bénéficiaires d'une ordonnance de protection puissent voir aboutir leurs demandes plus rapidement. Dans la mesure où il ne crée aucune obligation, cet amendement est satisfait par le droit positif qui prévoit d'ores et déjà que l'autorité compétente prend en compte la situation personnelle et familiale des intéressés, en particulier avant de se prononcer sur une mutation. En outre, si cette disposition était adoptée, il faudrait établir un ordre de priorité entre les demandes en fonction du motif familial qui les inspire.
La commission décide de solliciter l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 33.
Il est légitime que la victime soit informée des peines encourues par l'auteur des faits et des conditions dans lesquelles une éventuelle condamnation serait exécutée. Néanmoins, il n'est pas nécessaire de faire reposer cette obligation sur les officiers ou agents de police judiciaire, comme le propose l'amendement n° 49 : ces renseignements seront fournis à la victime par le juge, son avocat, les associations ou le Centre départemental de l'aide judiciaire.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 49.
L'amendement n° 50 vise d'abord à définir l'intérêt de l'enfant. Mais, d'après la jurisprudence, cette notion inclut déjà la garantie de sa protection et le respect de ses droits. Toute définition risquerait d'en réduire l'extension et de donner lieu à des raisonnements a contrario : si l'on retenait la définition proposée, le juge aux affaires familiales ne pourrait plus prendre en compte les besoins non fondamentaux de l'enfant.
En outre, l'amendement oblige le juge à priver du droit d'hébergement le parent condamné pour violences sur l'autre parent ou sur l'enfant et à organiser le droit de visite dans un espace de rencontre médiatisé et sous la surveillance d'une association habilitée. Il repose sur l'idée que, quel que soit le degré de gravité des violences, leur auteur ne peut être un bon parent et se servira du droit de visite pour nuire à l'autre parent. Or cette idée est loin de faire l'unanimité parmi les associations, les avocats et les magistrats. L'amendement remet en cause le principe cardinal selon lequel le juge, dans la mesure du possible, doit maintenir le lien entre les deux parents et l'enfant, ce qui implique une certaine latitude d'appréciation.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 50.
L'amendement n° 34, comme le n° 30, est satisfait par le droit en vigueur.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 34.
Le juge aux affaires familiales peut déjà être saisi pour statuer sur le refus d'un parent que son enfant reçoive des soins médio-psychologiques. L'amendement n° 51 est donc inutile.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 51.
L'amendement n° 17 prévoit que le conjoint étranger d'un ressortissant français, s'il est victime de violences conjugales, voit son titre de séjour automatiquement renouvelé. Je préfère ne pas toucher à l'équilibre atteint à l'Assemblée nationale, qui consiste à lier le renouvellement automatique de la carte de séjour au bénéfice d'une ordonnance de protection.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 17.
Je suggère au groupe socialiste de rectifier l'amendement n° 19 pour le rendre identique à l'amendement n° 1 de Mme Garriaud-Maylam, qui présente l'avantage d'être codifié. Il s'agit d'obliger les autorités consulaires françaises à délivrer un visa de retour aux femmes étrangères qui bénéficient d'un titre de séjour, lorsqu'elles se sont vu dérober leurs documents d'identité par leur mari à l'occasion d'un séjour à l'étranger.
L'amendement n° 20 rectifié ajoute une virgule. N'étant pas grammairien, je solliciterai l'avis du Gouvernement.
Il me semble que l'ajout est indispensable à la compréhension du texte.
La commission se propose de solliciter l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 20 rectifié.
L'amendement n° 21 concerne la prostitution et le racolage passif. Avant de légiférer à ce sujet, il faudrait avoir mené une réflexion approfondie et demandé au Gouvernement un bilan de l'introduction dans notre droit du délit de racolage passif. Cet amendement aurait mieux sa place dans la Loppsi.
En effet : c'est un cavalier, même si les proxénètes sont souvent violents.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 21.
L'amendement n° 10 est satisfait par le droit positif, puisque les plans départementaux d'action pour le logement ont précisément pour objet d'évaluer les besoins de logements sociaux. Sagesse.
La commission émet un avis de sagesse sur l'amendement n° 10.
L'amendement n° 37 tend à compléter la liste des personnes appelées à bénéficier d'une formation spécifique de sensibilisation aux violences faites aux femmes et commises au sein des couples, en y ajoutant les intervenants sociaux de proximité. La mention des travailleurs sociaux me paraît suffire.
Les premiers signataires de l'amendement sont tous des sénateurs de départements d'outre-mer. Peut-être rencontre-t-on là des problèmes particuliers ?
Il ne s'agit de toute manière que de définir le contenu d'un rapport du Gouvernement.
La commission émet un avis de sagesse sur l'amendement n° 37.
A l'amendement n° 60, je préfère le n° 24 de M. Courteau, qui fait de l'égalité entre les hommes et les femmes l'un des thèmes de l'enseignement de la santé et de la sexualité plutôt que de l'éducation civique : c'est tout à fait approprié, puisque l'éducation à la santé et à la sexualité doit aborder les questions liées à la mixité et à l'égalité des sexes. En outre, l'amendement complète la liste des intervenants extérieurs susceptibles d'être sollicités, en y ajoutant les membres d'associations contribuant à la prévention et à la répression des violences faites aux femmes et au sein des couples.
Je confirme que les intervenants ne sont pas les mêmes dans les cours d'éducation civique.
Le texte de la commission prévoit que la formation des enseignants comprendra des actions de sensibilisation à la lutte contre les violences faites aux femmes et au sein du couple. L'amendement n° 39 va plus loin : il prévoit d'exposer aux enseignants les démarches susceptibles d'être entreprises par les enfants témoins de violences dans leur famille. Je doute que cette précision soit utile dans la loi.
La commission émet une demande de retrait de l'amendement n° 39.
L'amendement n° 25 est du domaine réglementaire. Mais son examen en séance pourrait être l'occasion pour le Gouvernement de nous dire comment nos consulats informent de leurs droits nos ressortissants à l'étranger, lorsqu'ils sont victimes de violences.
La commission émet une demande de retrait de l'amendement n° 25.
L'amendement n° 52 prévoit la remise d'un rapport sur les violences faites aux femmes handicapées. Le sujet est important et pourrait faire l'objet d'une étude thématique dans le cadre du rapport annuel du conseil national consultatif des personnes handicapées, mais il faut éviter de multiplier les rapports. Retrait.
Nous sommes d'accord, mais nous souhaitons entendre le Gouvernement sur cette question.
La commission émet une demande de retrait de l'amendement n° 52.
L'amendement n° 23 du groupe socialiste tend à instaurer une journée nationale de sensibilisation de l'opinion publique aux violences faites aux femmes, dont la date coïnciderait avec celle de la journée internationale pour l'élimination de la violence à l'égard des femmes. Une recommandation de l'Assemblée générale des Nations Unies du 17 décembre 1999 invite les gouvernements à mener ce jour-là des actions de sensibilisation. Avis favorable.
La commission émet un avis favorable à l'amendement n° 23.
Les députés n'ont pas souhaité rendre obligatoire le suivi socio-judiciaire des auteurs de violences conjugales revêtant un caractère habituel, en raison du manque de médecins coordonnateurs. Il vaut mieux laisser le juge libre d'apprécier l'opportunité d'une telle mesure. Avis défavorable à l'amendement n° 26.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 26.
L'amendement n° 35 est largement satisfait par le droit positif : la jurisprudence considère que la notion de « personne ayant autorité » inclut les personnes détenant une autorité légale ou une autorité de fait sur la victime.
La commission émet une demande de retrait de l'amendement n° 35.
L'amendement n° 27 vise à porter de trois mois à un an le délai de prescription des faits de provocation à la discrimination, d'injure et de diffamation lorsqu'ils sont motivés par le sexe, l'orientation sexuelle ou le handicap de la personne. J'y suis personnellement favorable : le délai actuel est trop court. Il est déjà d'un an pour la provocation à la discrimination raciale.
Les violences commencent souvent par la provocation à la discrimination. L'école mène d'ailleurs à ce sujet des actions de prévention.
Ne touchons pas sans arrêt à l'équilibre de la loi de 1881 ! Certes, les nouvelles technologies et les possibilités de reproduction ont nécessité d'allonger dans certains cas les délais de prescription ; mais pour les publications sur papier, trois mois suffisent.
La société a changé depuis 1881 : nous portons désormais un regard différent sur les violences conjugales. L'allongement de la durée de prescription faciliterait la répression.
Si, après trois mois, personne n'a porté plainte, c'est que les faits sont passés inaperçus et n'ont pas eu d'incidence. Je suis personnellement défavorable à la révision des délais de prescription des délits de presse.
Je partage l'avis du président Hyest. Certes, les délais de prescription des délits de presse sont très courts, mais, dans ce domaine, il faut privilégier la stabilité des normes. A force de revoir les délais de prescription de délits particuliers, on finit par remettre en cause tout l'équilibre de la loi sur la presse.
Il est légitime d'allonger le délai lorsque les faits ne sont pas connus dès qu'ils sont commis : il en va ainsi des délits financiers, non des délits de presse. Dans ce domaine, trois mois suffisent pour réagir.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 27.
Les amendements n°s 55, 28 et 29 interdisent ou limitent le recours à la médiation pénale en cas de violences au sein du couple, alors que la proposition de loi ne l'interdit que lorsqu'une ordonnance de protection a été prise. Il me paraît dangereux de se priver de cette possibilité dans le cas de violences de faible gravité : les parquets opteraient alors pour un simple rappel à la loi, voire pour le classement sans suite. La médiation pénale donne d'excellents résultats si elle est exercée par des professionnels formés.
Les victimes n'ont pas la même force que leurs agresseurs, et elles acceptent parfois contre leur gré la médiation pénale, au risque de s'exposer de nouveau à la violence. On ne règle pas si facilement un tel problème.
Les parquets ne recourent que très parcimonieusement à la médiation pénale en cas de violences familiales. D'ailleurs, ils ont reçu la directive de ne pas autoriser de médiation pénale si une précédente médiation a été suivie de nouvelles violences. En revanche, nous demanderons au Gouvernement des engagements sur la formation des médiateurs : un conseiller conjugal ne suffit pas.
Lors de l'examen de la loi de 2006, j'avais la même position que Mme Borvo. A présent je suis perplexe. Les victimes pourront refuser la médiation, mais en auront-elles l'énergie ? Je crois, moi aussi, qu'il n'y a pas de violences anodines : elles sont toujours l'indice d'un rapport de couple malsain, et je doute qu'une médiation puisse y remédier. Toutefois si on l'interdit, il ne restera comme alternative aux poursuites que la maison de justice qui ne me paraît pas une bonne solution.
Un conflit peut être violent sans qu'une médiation soit exclue. Mais dans un couple, la violence s'accompagne souvent d'une relation d'emprise. Notre amendement n° 29 constitue une position de repli : elle n'interdit la médiation qu'en cas de réitération des faits. J'ai rencontré la semaine dernière une femme qui avait déjà été soumise à trois médiations pénales !
La loi doit l'interdire. Trois ans après son divorce, cette femme est toujours menacée par son mari, qui ne se soucie guère des rappels à la loi qui lui sont adressés ! Elle n'est pas en état de refuser une médiation.
Je connais d'autres exemples où la médiation, entreprise par des professionnels formés à la psychologie et à la psychosociologie, a fait prendre conscience de la portée de leurs actes à des hommes qui avaient commis des violences sans gravité excessive, et a restauré les liens des couples. Le médiateur peut d'ailleurs demander au procureur de reprendre les poursuites s'il l'estime nécessaire.
La commission s'est déjà prononcée contre de tels amendements. Nous reprendrons ce débat en séance.
L'amendement n° 40 tend à aligner le régime du harcèlement au sein du couple sur celui des violences « légères » sur un conjoint, en y incluant les faits n'ayant entraîné aucune incapacité temporaire de travail (ITT). Il pourrait avoir des effets pervers pour les victimes : au cours des auditions, beaucoup de magistrats et membres d'associations ont souligné le risque que ce nouveau délit de harcèlement moral au sein du couple ne soit utilisé par les auteurs de violences physiques pour justifier les coups portés à leur compagne. Je crois déjà les entendre dire : « Cela fait quinze jours qu'elle me menaçait de partir avec les enfants : j'ai craqué ! » J'ajoute qu'en cas de violences psychologiques graves, ayant entraîné une dépression ou des comportements autodestructeurs, l'ITT est très souvent supérieure à huit jours. D'ailleurs les violences n'ayant donné lieu à aucune ITT sont réprimées par le droit pénal : la Cour de cassation considère que la notion de « violences » comprend les violences psychologiques, et nous l'avons explicité dans ce texte.
M. le rapporteur me paraît plus soucieux de prémunir l'institution judiciaire contre les tromperies que les femmes contre la violence de leur conjoint. Je ne suis pas sûre que tous les médecins généralistes soient capables de déceler la violence psychologique subie par une femme ; il est d'ailleurs très difficile de se voir reconnaître une ITT dans ce cas. Les victimes sont plus nombreuses que les manipulateurs éventuels !
Si l'ITT n'est pas reconnue, il est très difficile de prouver la réalité des violences subies, et l'on s'achemine vers la relaxe. Encore une fois, le nouveau délit de harcèlement risquerait de donner lieu à une instrumentalisation.
La commission des lois s'est longtemps opposée à la mention dans la loi des violences psychologiques, considérant que la jurisprudence reconnaissait déjà leur inclusion dans la notion de violences.
Je suis moi aussi réservé sur la notion de violences psychologiques comme sur celle de harcèlement moral. Ne donnons pas de faux espoirs aux victimes : les auteurs des faits sont très souvent relaxés faute de preuve.
C'est parce que le harcèlement n'est pas correctement diagnostiqué. Les psychologues formés à ces questions savent le détecter en quelques minutes d'entretien dirigé, mais ils sont trop peu nombreux auprès des tribunaux.
Le procureur de la République auprès du TGI de Versailles a passé une convention avec des professionnels, afin de rendre l'expertise systématique.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 40.
L'amendement n° 56, qui tend à incriminer spécifiquement le fait de forcer une personne à dissimuler son visage, est superflu : c'est évidemment une forme de violence. Il ne vous a pas échappé qu'un projet de loi nous donnerait bientôt l'occasion de traiter de cette question.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 56.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 57.
La commission émet un avis favorable à l'amendement n° 58.
La commission émet une demande de retrait de l'amendement n° 36.
L'amendement n° 6 vise à imposer au juge de fixer la résidence de l'enfant au domicile d'un parent lorsqu'une procédure pénale a été engagée contre l'autre pour une infraction commise contre l'enfant ou le premier parent. La sanction interviendrait donc avant même que les faits soient avérés, dès le dépôt d'une plainte. Une telle disposition pourrait nuire aux enfants en permettant l'instrumentalisation de la plainte pénale ; en outre, elle poserait problème dans les cas fréquents où les deux parents déposent plainte en même temps. J'ajoute que la commission a renforcé la protection des enfants et des parents victimes de violences en prévoyant des conditions particulières de visite ou de remise de l'enfant.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 6.
Les amendements n°s 11, 12, 13 et 42 tendent à renommer la proposition de loi. Je suis personnellement favorable à l'amendement n° 13 de M. Courteau, sous réserve d'une rectification. L'intitulé serait donc : « Proposition de loi relative aux violences faites spécifiquement aux femmes, aux violences au sein des couples et aux incidences de ces dernières sur les enfants ».
La commission émet un avis favorable à l'amendement n° 13, sous réserve de rectification, et une demande de retrait des amendements n°s 11, 12 et 42.
Examen des amendements extérieurs
La commission adopte les avis suivants :