ECHANGE DE VUES
La Conférence des Présidents s'est réunie hier soir tard...
pour prendre acte des suites des conclusions de notre commission après l'adoption de la motion de renvoi en commission sur le projet de loi organique relatif à la transparence de la vie publique. Conformément au voeu de réfléchir à de nouvelles dispositions exprimé par plusieurs collègues, elle a reporté l'examen du texte aux vendredi 12 et lundi 15 juillet. Je pense que celles et ceux qui ont voté le renvoi en commission seront présents. J'en appelle aux responsables de groupes, à la disposition desquels je me tiens pour travailler à des améliorations de ce texte.
Nous ne sommes tout de même pas taillables et corvéables à merci ! Le Gouvernement nous manipule de telle sorte qu'il devient impossible d'organiser notre agenda. Si nous sommes absents, ce ne sera pas notre faute, mais la sienne.
Certes, mais ni M. Gélard ni moi-même ne sommes des perdreaux de l'année : nous avons déjà vécu de telles situations. La Constitution de 1958 est imparfaite, car elle donne tout le pouvoir à l'exécutif, mais M. Gélard l'a toujours défendue, et c'est elle qui nous commande d'être présents à ces réunions.
La Constitution de 1958 est en phase terminale : ayant produit tous ses fruits, elle n'a plus que des effets pervers. Tout le pouvoir politique est à l'Élysée et dans ses dépendances, dont le parlement n'est qu'un pseudopode. Aussi sommes-nous vassalisés, taillables et corvéables à merci. Mettons ce changement de calendrier à profit pour nous concerter sur les améliorations susceptibles de conduire à un vote positif. Reprendre dans deux jours le débat dans des termes identiques n'apporterait rien.
Au moins, nous pouvons découvrir toutes les facettes de notre règlement - une vraie formation continue ! Je n'ai jamais vu une session extraordinaire avec tant de textes, si importants, en procédure accélérée de surcroît...
Le texte dont nous parlons est extrêmement important, il réclame dialogue et réflexion. Ou le Sénat vote, malgré ses réserves, dans l'espoir d'un dialogue avec l'Assemblée, ou il ne vote pas et l'Assemblée nationale reprend son texte : il n'y a plus de Sénat. Il est vraiment dommage de faire passer en procédure accélérée des projets majeurs, car durant la navette, chaque assemblée découvre les positions de l'autre. Nous sommes tombés dans des excès jamais atteints auparavant en session extraordinaire.
Nous avons vécu des situations comparables à différentes époques et dans des configurations politiques diverses. Je me suis entretenu de l'ordre du jour de cette session extraordinaire avec les plus hautes autorités et je me suis exprimé en Conférence des Présidents. Il dépend, en session extraordinaire, du Gouvernement.
J'ajoute à titre personnel que le renvoi en commission a été voté par des sénateurs dont les avis sur le texte divergent. C'est pourquoi il est utile d'en parler. En pratique, cela signifie que l'emploi du temps fixé depuis quinze jours par la Conférence des Présidents est modifié, en une période qui est déjà chargée : nous aurons séance vendredi et lundi. L'on ne peut pas s'en plaindre après avoir demandé un report de l'examen du texte.
Nous n'avons pas à travailler à marche forcée ! Nous avons du temps, le travail législatif ne se bâcle pas en deux ou trois jours.
Le but d'une session extraordinaire est d'adopter de lois urgentes. Nous ne sommes pas dans ce cas. Il est intolérable de maintenir les parlementaires dans l'urgence.
Soyons honnêtes : depuis la révision constitutionnelle de 2008, la procédure accélérée supplée aux procédures précédemment entre les mains du Gouvernement, comme l'usage de l'article 49-3. Le précédent gouvernement ne s'en est pas privé, et cette utilisation va toujours croissant - j'en ai établi la courbe pour une revue. Le renvoi en commission est une motion de procédure, que nous utilisions quand nous étions dans la majorité pour repousser vos propositions de loi à une date extrêmement éloignée. Chacun est dans son rôle.
La Conférence des Présidents a prévu que les amendements pourront être déposés jusqu'à demain à dix heures. Nous nous réunirons à 14h30, et travaillerons sur le texte de l'Assemblée nationale. Nous entendrons ensuite les conclusions du rapporteur Jean-Pierre Michel sur le projet de loi relatif aux attributions du garde des sceaux et des magistrats du ministère public en matière de politique pénale et d'action publique, en deuxième lecture.
J'ai entendu les appels à la discussion et à la concertation : je suis disponible pour cela pendant les prochaines vingt-quatre heures. Comme l'a rappelé Pierre-Yves Collombat, nous avions accompli un gros travail sur le texte sur la décentralisation, que nous avions profondément modifié.
DÉSIGNATION DES CANDIDATS AUX ÉVENTUELLES COMMISSIONS MIXTES PARITAIRES
MM. Jean-Pierre Sueur, Alain Anziani, Jean-Pierre Michel, Mme Eliane Assassi, MM. Philippe Bas, Jean-Jacques Hyest et Michel Mercier sont désignés candidats titulaires ; Mme Hélène Lipietz, M. Patrice Gélard, Mmes Catherine Troendle et Catherine Tasca, MM. Alain Richard, Pierre-Yves Collombat et François Zocchetto sont désignés candidats suppléants pour faire partie des éventuelles commissions mixtes paritaires chargées de proposer un texte pour les dispositions restant en discussion du projet de loi organique et du projet de loi ordinaire relatifs à la transparence de la vie publique
La Chancellerie, le rapporteur de l'Assemblée nationale et moi-même sommes sur le point de nous mettre d'accord sur une définition pénale de l'esclavage et de la servitude. L'Assemblée nationale a la volonté d'arriver à un compromis, en échange d'un mouvement sur le délit d'offense au chef de l'État. J'adresserai à ce sujet une note aux membres de la CMP.
Il n'est pas sûr qu'elle puisse se tenir mardi.
MM. Jean-Pierre Sueur et Alain Richard, Mme Catherine Tasca, MM. Jean-Jacques Hyest, Hugues Portelli, Mme Cécile Cukierman et M. Yves Détraigne sont désignés comme candidats titulaires ; Mme Esther Benbassa, MM. Bernard Buffet, Patrice Gélard, Jean-Pierre Michel, Mme Virginie Klès, M. Pierre-Yves Collombat et Mme Jacqueline Gourault comme candidats suppléants pour faire partie de l'éventuelle commission mixte paritaire chargée de proposer un texte pour les dispositions restant en discussion du projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation dans le domaine de la justice en application du droit de l'Union européenne et des engagements internationaux de la France.
La commission examine ensuite le rapport de M. Alain Anziani et le texte qu'elle propose pour le projet de loi n° 690 (2012-2013), relatif à la lutte contre la fraude fiscale et la grande délinquance économique et financière (procédure accélérée), ainsi que le rapport de Mme Virginie Klès et le texte qu'elle propose pour le projet de loi organique n° 691 (2012-2013) relatif au procureur de la République financier (procédure accélérée).
EXAMEN DES RAPPORTS
Je salue le rapporteur général de la commission des finances, M. François Marc, qui va nous rendre compte de l'avis de la commission des finances sur ce projet de loi.
La commission des finances a fourni un gros travail sur le texte relatif à la fraude fiscale et à la grande délinquance économique et financière. Cet ambitieux et difficile projet suscite des débats. La discussion à l'Assemblée nationale a été fournie, et les députés ont triplé le nombre d'articles alors que le texte initial avait déjà été complété par une lettre rectificative.
La fraude fiscale est à l'origine chaque année, pour l'État, de pertes de recettes de trente à quatre-vingt milliards d'euros selon les estimations. Parce qu'elle introduit une inégalité profonde devant la loi fiscale, la réprimer est une exigence démocratique. Elle fait appel à des techniques particulières qui ont beaucoup évolué ces dernières années. Nous ne nous intéressons pas ici à la fraude à la TVA du cafetier du coin, mais à la grande fraude mondialisée et sophistiquée, qui utilise internet pour faire échapper en un clic des centaines de millions d'euros à l'impôt. Cette fraude consiste parfois non à ne pas payer, mais à encaisser, par exemple dans les cas de carrousels de TVA intracommunautaire ou de fraudes à la taxe carbone.
Ce texte touche à toutes les dimensions de la lutte contre la fraude fiscale. Il renforce les moyens d'enquête, en regroupant la brigade centrale de lutte contre la corruption et la brigade nationale de répression de la délinquance fiscale en un office central des investigations financière et fiscales et en créant un registre public des trusts, qui sont un des moyens d'échapper à l'impôt.
Il alourdit les peines, qui étaient à la fois faibles et faiblement appliquées, pour un grand nombre d'infractions d'atteintes à la probité. Comme Dominique Raimbourg l'a indiqué à l'Assemblée nationale, l'amende encourue est parfois ridicule au regard du bénéfice de l'infraction. Les députés ont donc décidé de la fixer à 10% du chiffre d'affaires moyen des trois dernières années en matière correctionnelle, et 20% en matière criminelle. Le texte crée un délit de fraude fiscale commise en bande organisée, et aggrave le délit de fraude lorsqu'un compte est ouvert à l'étranger ou qu'il y a des manoeuvres frauduleuses. Les peines d'amende en cas d'atteinte à la probité sont sensiblement alourdies : elles passeront de 30 000, 75 000 ou 150 000 euros à 200 000, 500 000 ou un million d'euros. Un délit d'abus de biens sociaux aggravé est aussi instauré.
Outre la création d'un procureur de la République financier, nous améliorons sensiblement le recouvrement, par des dispositions sur les saisies et les moyens de recouvrement ; en cas de condamnation d'une personne morale pour blanchiment, l'intégralité du patrimoine pourra être confisquée. D'importantes dispositions concernent les contrats d'assurance-vie, qui servent parfois à recycler le produit de l'infraction. Le montant estimé de la fraude pourra être recouvré en valeur dans le patrimoine du fraudeur.
Plusieurs points font débat. L'article 1er donne aux associations la possibilité d'intervenir dans la procédure pénale, en se constituant partie civile ou en se joignant à une action en cours. Il leur faudra disposer d'un agrément, ce qui déplaît à certaines associations, mais cette disposition protègera les associations les plus pertinentes et évitera des abus.
Une première modification aux règles de prescription a été introduite par l'Assemblée nationale : inscrivant dans la loi la jurisprudence de la Cour de cassation en matière d'infractions dissimulées, elle fixe comme début du délai de prescription la révélation du fait. Si nous retenons cette position de l'Assemblée nationale, et non celle de la Chancellerie, il faudra modifier sa rédaction, car les députés n'ont visé que les délits. Pourquoi ne pas inclure les crimes ? La corruption de magistrat en est un, et il n'y a pas de raison que les règles de prescription soient plus favorables pour un assassinat que pour un délit.
Je vous proposerai de supprimer un article introduit par l'Assemblée nationale pour renverser la charge de la preuve dans les affaires de blanchiment, car il porte une atteinte excessive aux droits de la défense : il n'incombe pas au justiciable de démontrer qu'il n'a pas blanchi d'argent.
Le texte étend à la fraude fiscale aggravée les techniques spéciales d'enquête déjà autorisées par la loi Perben 2 dans la lutte contre le crime organisé ou la grande délinquance : surveillances, infiltrations, et surtout extension à quatre jours de la garde à vue. Les auditions auxquelles nous avons procédé nous ont démontré, malgré des divergences de points de vue, qu'une telle extension - sous le contrôle du juge des libertés et de la détention - est souvent nécessaire : les perquisitions peuvent durer un ou deux jours, et il faut bien deux jours de plus pour que la confrontation ait vraiment lieu.
Les quatre jours ne sont pas forcément successifs, mais ils sont nécessaires dans certaines affaires complexes.
Le texte autorise l'utilisation des preuves illicites transmises par l'autorité judiciaire. Le principe de réalité conduit à dire qu'il serait dommage, par exemple, de se priver des preuves apportées par la liste issue de la banque HSBC.
On voit apparaître la notion de « repenti », lequel pourrait bénéficier d'un allègement de peine égal à la moitié de la peine encourue s'il dénonce ses complices. Un tel dispositif, dont toutes les auditions nous ont démontré la nécessité, fournira une monnaie d'échange incitant à fournir à la justice des informations sur l'infraction elle-même ou sur les complices.
Nous proposons de mieux encadrer les dispositions portant sur les lanceurs d'alerte, sur le modèle de l'article 40 du code de procédure pénale, afin qu'elles ne fonctionnent pas pour les personnes qui alertent la presse, par exemple.
Le texte réorganise les juridictions compétentes en matière économique et financière, qui fonctionnent actuellement sur quatre niveaux : tribunaux de grande instance ordinaires, pôles de l'instruction, 36 pôles économiques et financiers, et huit juridictions interrégionales spécialisées (JIRS). Il supprime les pôles économiques et financiers, même si Mme Taubira a précisé qu'elle maintiendrait des moyens spécifiques dans certains cas, comme à Bastia ; il renforce les JIRS ; il crée un procureur de la République financier, qui siègera aux côtés du procureur du TGI de Paris, sous l'autorité du procureur général près la cour d'appel de Paris. L'avantage principal sera sa visibilité ; sa création n'a toutefois de sens que s'il dispose d'une autonomie financière. Il sera l'interlocuteur privilégié des services d'enquête nationaux comme des autorités judiciaires étrangères. Le parquet européen aura une forte compétence sur les questions financières : le procureur de la République financier assurera la liaison.
Le critère de répartition des affaires entre les différents niveaux sera leur degré de complexité : nombre d'auteurs de l'infraction, étendue géographique... Je proposerai par amendement de confier au procureur général près la cour d'appel de Paris le soin de régler les conflits de compétence, car la garde des sceaux fait preuve de son optimisme habituel en estimant que tout se règlera facilement. Mieux vaut éviter que le règlement d'affaires urgentes soit retardé par ce type de problème.
Bernard Cazeneuve, dont je salue l'action et la compétence, n'aime guère l'expression de « verrou de Bercy ». Elle correspond pourtant à une réalité : depuis 1920, il y a en France des procédures fiscale et pénale parallèles. Le procureur de la République ne peut engager une procédure pénale sans y avoir été autorisé par la commission des infractions fiscales (CIF), créée pour protéger le contribuable, mais dépendante de l'administration fiscale. Cette dernière lui transmet, chaque année, un millier de dossiers de son choix, dont environ 900 sont ensuite soumis à la justice - des dossiers souvent mal faits et en limite de prescription, nous ont dit les magistrats que nous avons entendus, sauf ceux qui travaillent à Bercy... Si l'administration fiscale constate des faits de corruption, ou d'abus de confiance, elle ne saisit pas la justice. Le ministre défend cet état de choses avec un argument-massue : il fait rentrer de l'argent dans les caisses de l'Etat (14,3 milliards d'euros de droits, et 3,7 milliards d'euros de pénalités en 2012). Rien, pourtant, n'empêchera que les enquêtes fiscales et les redressements continuent...
Depuis 2008 et l'arrêt Talmon de la Cour de cassation, des poursuites judiciaires peuvent être engagées en cas de blanchiment. C'est l'origine des récentes affaires de fraude fiscale : y aurait-il eu une plainte contre M. Cahuzac si Bercy avait été seul en mesure de la déposer ? Il est tout de même paradoxal de pouvoir poursuivre le blanchiment mais pas l'infraction qui en est à l'origine. L'arrêt Talmon n'a d'ailleurs pas nui aux finances publiques.
Nous vous proposons donc d'autoriser la justice à poursuivre les infractions fiscales découvertes à l'occasion d'autres procédures, ou lorsque ces infractions ont été commises en bande organisée ou par le recours à diverses manoeuvres : ces expressions définissent la compétence du procureur de la République financier en matière de fraudes fiscales complexes. En outre, les transactions seraient soumises, pour ces fraudes complexes, à l'approbation du procureur de la République, comme cela se pratique dans la plupart des démocraties, et en matière douanière.
Bercy a l'impression qu'on lui arrache le foie. A tort : il pourra toujours poursuivre. Nous en avons eu récemment un exemple dans un domaine similaire : l'AMF vient d'infliger à LVMH une amende de huit millions d'euros, alors même que la procédure pénale sur plainte d'Hermès se poursuit au tribunal de grande instance de Paris
La délinquance en col blanc a évolué pour se rapprocher de la criminalité organisée, d'où la nécessité de faire bouger les lignes - au risque de bousculer un peu le respect des droits et libertés. Cette évolution justifie pleinement la création d'une juridiction nouvelle. Afin de garantir son indépendance, le mode de nomination du procureur financier sera calqué sur celui des procureurs ; de même, il ne pourra rester en fonctions plus de sept ans. L'article 2 du projet de loi organique, introduit à l'Assemblée nationale, encadre de manière un peu trop rigide la spécialisation des magistrats financiers ; le Gouvernement a déposé des amendements pour y remédier.
Je suis honoré d'être votre invité. Mes trois années comme membre de la commission des lois à mon arrivée au Sénat m'ont beaucoup marqué.
Le champ de notre avis s'est élargi avec l'adoption par l'Assemblée nationale d'un grand nombre d'articles additionnels, pour passer de quatre à 28 articles, de nature et de portée très diverses. Ces articles visent pour l'essentiel à accroître les moyens d'investigation de l'administration fiscale, à augmenter les obligations déclaratives et les contrôles pouvant être opérés, à élargir les preuves pouvant être utilisées à l'appui des procédures de redressement, à élargir le champ des infractions ou la prise en compte des circonstances aggravantes et, enfin, à augmenter le régime des sanctions.
Bref, ce projet de loi est une compilation de mesures, à l'image d'un collectif de fin d'année. Les lois de finances rectificatives de fin 2011 et de fin 2012 comportaient déjà de nombreuses mesures contre la fraude, preuve qu'il ne s'agit pas d'un sujet de clivage politique, malgré des nuances sur l'échelle des sanctions ou sur le retour des évadés fiscaux. En période de crise, au moment où les contribuables sont sollicités pour redresser les comptes publics, il est inacceptable de laisser des revenus échapper frauduleusement à l'impôt.
Le texte, qui renforce les instruments aux mains de l'administration, n'est qu'une étape. Le prochain projet de loi de finances comprendra des dispositions sur l'encadrement des prix de transfert, faisant suite au récent rapport de l'Inspection générale des finances. Les avancées de la coopération européenne et internationale en matière d'échange d'informations auront également des conséquences sur notre législation et notre dispositif conventionnel. La sous-imposition des multinationales, en particulier dans le secteur du commerce électronique, les fameuses GAFA, ne peut être traitée au niveau national, tant les acteurs économiques sont mobiles et habiles.
La commission des finances a adopté douze amendements qui facilitent l'accès à l'information des administrations fiscale et douanière et augmentent les sanctions, notamment en cas d'obstruction aux contrôles. Sur la recevabilité des preuves comme sur le monopole des poursuites de l'administration fiscale, nous avons une lecture différente de celle de votre rapporteur. Nous considérons en effet que l'objectif premier de la lutte contre la fraude est d'assurer le recouvrement rapide de l'impôt éludé et des pénalités qui l'accompagnent. Nul doute que la confrontation de ces approches enrichira notre débat.
Sachant qu'une loi pénale plus sévère ne peut s'appliquer aux situations en cours, nous pouvions nous donner un peu plus de temps et attendre au moins le rapport de la commission d'enquête sur le rôle des banques dans l'évasion fiscale, que je préside et dont Eric Bocquet est rapporteur. Disposant de pouvoirs d'investigation plus larges, nous recueillons chaque semaine des témoignages et des explications sur la fraude fiscale, les infractions économiques, les montages nouveaux, qui apparaissent quotidiennement. La précédente commission d'enquête sénatoriale sur l'évasion fiscale avait émis 61 propositions, adoptées à l'unanimité ; je ne doute pas que celle-ci parviendra à des conclusions tout aussi consensuelles.
Oui au renforcement de l'arsenal juridique contre la fraude fiscale ; encore faudrait-il que le texte s'y emploie véritablement. Nous devrions parvenir à un accord sur plusieurs points évoqués par le rapporteur, comme la prescription. Reste que si la fraude fiscale n'est pas suffisamment réprimée et sanctionnée, c'est que l'administration fiscale ne le veut pas : ne viennent devant le tribunal correctionnel que les dossiers que l'administration a envoyés pour examen à la commission des infractions fiscales, dont elle n'est toutefois pas obligée de suivre l'avis. Depuis sa création, cette commission est dénoncée quasi unanimement par la doctrine, les praticiens et les juges.
L'abus de droit, défini à l'article L. 64 du livre des procédures fiscales, réprime dans 99% des cas une fraude fiscale. Or vous ne trouverez pas un seul cas de poursuite devant un tribunal correctionnel sur cette base : l'administration fiscale règle seule les problèmes. C'est d'autant plus dommage que l'abus de droit ne se limite pas aux donations dissimulées, il recouvre aussi les montages financiers de grosses sociétés... Si l'on veut vraiment réprimer la fraude fiscale, il faut donner aux juges la possibilité de déclencher des poursuites. Votre amendement, s'il ne va pas jusqu'au bout de la logique, marque une avancée notable.
Curieuse innovation que le procureur de la République financier... Les conflits de compétence avec le procureur local ou la JIRS seront inévitables. Quel sera son ordre hiérarchique ? Va-t-on créer un procureur de la République spécialisé pour la traite des êtres humains ou le trafic de stupéfiants ? Ce procureur ad hoc, qui s'apparente d'ailleurs plus à une juridiction spécialisée, ne servira à rien s'il n'est pas doté de véritables pouvoirs. Or tous les gros dossiers de fraude fiscale relèvent de l'administration fiscale, qui ne les renvoie pas devant le tribunal : le procureur pourra poursuivre le petit commerçant local, mais pas traiter les grosses affaires. Cette mainmise de l'administration fiscale sur les poursuites n'est pas concevable quand l'on vise une totale transparence. Or ce texte lui transfère des pouvoirs qui sont du domaine de la justice. L'administration fiscale est pourtant le meilleur sapiteur pour le procureur, auquel elle transmet un dossier très complet justifiant une sanction pénale.
Je regrette l'absence de mesure spécifique concernant la fraude à la TVA, qui représente tout de même la moitié de la fraude fiscale.
Faire courir la prescription à compter de la connaissance des faits revient à rendre le délit imprescriptible, ce à quoi je ne saurais me résoudre. C'est une bévue que de prévoir un régime de prescription plus sévère pour les infractions financières que pour les atteintes aux personnes.
Sur la charge de la preuve, nous rejoignons le rapporteur. La question du lanceur d'alerte est délicate : si nous admettons un traitement particulier pour le repenti, la dénonciation doit être encadrée. La culture française n'apprécie guère les dénonciateurs, qui rappellent de vilains souvenirs... Nous devrions pouvoir dégager un consensus sur ce point.
En résumé : on aurait pu attendre ; il ne faut pas se réfugier derrière le pouvoir de l'administration ; nous pouvons trouver des points de consensus sur la procédure.
La volonté affichée de lutter contre la fraude fiscale est légitime. Je rejoins M. Pillet : les nouvelles dispositions pénales n'étant pas applicables aux procédures en cours, il n'y avait pas urgence, si ce n'est à communiquer... Dans une autre vie, j'ai plaidé pendant dix ans contre les fraudeurs pour le ministère des finances. Le rapporteur a rappelé la spécificité du système français en la matière : l'administration fiscale n'a pas besoin de la procédure pénale pour récupérer son argent. « Combien demandez-vous ? », m'interrogeait le président ; « La contrainte par corps au maximum » me suffisait, « le reste relève de l'administration ». La vraie difficulté réside dans la détermination très large de l'incrimination de fraude fiscale. L'article 1741 du code général des impôts vise « la dissimulation volontaire de sommes sujettes à l'impôt ». Une saisine systématique de la juridiction pénale sur cette base entraînerait des dizaines de milliers d'affaires. On voit bien que c'est impossible.
La commission des infractions fiscales a été créée en 1977 pour protéger contre l'arbitraire du ministère de l'économie et des finances. Sur son avis conforme, on envoie quelques centaines de dossiers devant le tribunal : chaque année, on fait un exemple avec quelques bouchers, quelques vétérinaires, quelques dentistes, quelques sociétés... Le risque d'être contrôlé est bien plus important dans la Creuse ou en Lozère que dans le sixième arrondissement de Paris, voilà la réalité ! Rien ne sert de multiplier les incriminations si vous ne donnez pas au contrôleur les moyens de travailler, or vous ne touchez ni à la composition ni au rôle de la commission des infractions fiscales.
L'amendement que je propose permettra au parquet de poursuivre les fraudes les plus graves.
C'est bien joli, mais vous imaginez bien comment l'absence d'avis conforme de la commission des infractions fiscales sera utilisée... Tant que l'article 1741 sera aussi large, Bercy préférera transiger et obtenir un paiement rapide.
La fraude à la TVA, qui s'apparente à de l'escroquerie, mérite des dispositions spécifiques.
Permettre aux associations de lutte contre la corruption de se constituer partie civile ? C'est très à la mode, mais quand on sait qui les finance... La partie civile n'a pas le droit de requérir une peine. Ces associations vont-elles demander des dommages et intérêts ? Ce serait pour le moins original.
Je suis très réservé sur les lanceurs d'alerte. L'administration fiscale reçoit déjà quantité de dénonciations, souvent anonymes, dont beaucoup sont injustifiées. Protéger les lanceurs d'alerte, c'est mettre le doigt dans un système pernicieux...
Je suis également très réservé sur le procureur de la République financier. Loin de simplifier, on risque de complexifier les choses...
Étant donné l'intitulé de ce projet de loi, je m'étonne qu'il se contente d'augmenter le quantum des peines et d'énumérer des procédures judiciaires. Où sont les mesures économiques, fiscales et financières ? Je m'attendais à un texte qui s'attaque à la grande délinquance économique et financière, nous en sommes loin.
La commission d'enquête sénatoriale sur l'évasion fiscale, présidée par M. Dominati, avait émis 61 propositions, votées à l'unanimité, il n'en reste rien dans ce texte. Un économiste particulièrement médiatique a rappelé récemment devant la commission d'enquête présidée par M. Pillet l'importance d'une approche économique et financière de la construction de la fraude fiscale. Où se situe la limite entre la fraude, pénalement répréhensible, et l'optimisation fiscale, qui, elle, est légale ? Voilà tout le problème.
Pourquoi le Gouvernement précipite-t-il les choses, sans attendre les conclusions de la commission d'enquête sénatoriale, pourtant transversale et représentant toutes les tendances politiques ? Il faut d'abord chercher à comprendre la grande délinquance économique et financière, la mettre à jour, chercher à la prévenir avant de la réprimer. Je suis circonspect devant ce texte, qui ne remplira pas son objectif. Et que dire des mesures sur les lanceurs d'alerte ou le renversement de la charge de la preuve ? Ce texte est une formidable occasion ratée. Je le regrette.
La commission des infractions fiscales, dont j'ai fait partie, a-t-elle été entendue ?
L'article 1741 du code général des impôts recouvre aussi bien le vol de poules que la délinquance organisée pour soustraire de grosses sommes à l'impôt. La fraude fiscale est le seul domaine où l'on ne respecte pas la présomption d'innocence : que ces dispositions soient susceptibles de s'appliquer à tout opérateur économique n'est pas sans conséquence sur l'environnement des affaires. Autant il est légitime de renforcer les outils pour lutter contre la grande fraude fiscale, autant on ne peut exiger de chaque petit opérateur qu'il connaisse par coeur le code général des impôts.
Il paraît plus efficace et plus légitime, dans bien des cas, d'infliger une amende que de renvoyer systématiquement devant le tribunal correctionnel. En revanche, l'élargissement des compétences des douanes justifie que les dossiers soient transmis à la justice, quand c'est légitime, pour assurer le respect des libertés. De même, n'est-il pas prématuré de créer dès maintenant le procureur financier ? La réforme de l'indépendance de la justice n'étant pas acquise, il y a un risque à terme pour les libertés...
La fraude à la TVA exige une réponse intégrée au niveau de l'Union européenne, car certains États membres ne pratiquent aucun contrôle. Une disposition purement nationale serait systématiquement contournée : il faut une initiative spécifique.
Alors qu'il y a toute une industrie de la fraude, les paradis fiscaux ou les cabinets spécialisés en optimisation sont les grands absents de ce texte. Nous examinons le texte en urgence, mais on reporte la question à 2016, préférant s'occuper des bouchers de Rodez ou d'Aurillac... Pour avoir suivi de près les débats sur la réforme bancaire, j'ai vu que les paradis fiscaux étaient traités avec bien plus d'égards que les élus : c'est là que se trouve le pouvoir ! Le texte mérite d'être renforcé, qu'il s'agisse des délais ou des officines spécialisées dans la fraude fiscale.
Sur le fond, je partage les observations de MM. Pillet et Mézard, même si je reconnais les efforts du rapporteur pour engager un dialogue constructif. Le procureur financier est une bizarrerie qui risque d'être contreproductive. Le plus souvent, les infractions sont complexes et ne se résument pas à la fraude fiscale : il y aura forcément des conflits de compétence. Mieux vaudrait, comme je le propose, désigner un procureur adjoint chargé de la fraude fiscale au sein du parquet de Paris plutôt que de désorganiser de la sorte le système judiciaire.
Ce texte va dans le bon sens, à l'opposé de la proposition de loi d'amnistie pour les évadés fiscaux déposée par les députés UMP.
Il peut toutefois être amélioré. Le rapporteur nous propose de desserrer le verrou de Bercy : il en va de la crédibilité du texte. On ne peut plus tolérer la délinquance économique et financière et le sentiment d'impunité de certains. À l'État de rappeler que chacun doit contribuer, selon ses revenus, au financement des politiques publiques.
Sur le renversement de la charge de la preuve, en matière de blanchiment, la rédaction de l'Assemblée ne nous semble pas si mauvaise. Enfin, personne ne s'en étonnera, notre groupe reste plus que réservé sur le procureur financier : étant donné le rejet de la réforme du CSM, les garanties que nous attendions en matière d'indépendance sont loin d'être confirmées. Nous nous prononcerons au vu du débat.
Je vous remercie pour ces contributions. La complexité des techniques utilisées par les délinquants financiers justifie l'instauration d'un procureur financier ad hoc ; il faudra toutefois creuser la question, sensible, de son indépendance. La fraude à la TVA peut déjà être poursuivie sur la base du délit d'escroquerie ; M. Marc défendra en outre un amendement sur le sujet. Quant aux officines qui organisent les transferts, elles pourront être poursuivies via la notion de bande organisée, outre celle, habituelle, de complicité.
Le parquet ne se verra pas transmettre tous les dossiers mais seulement les cas de fraude complexe, qui relèvent du procureur financier. Ce sont bien les gros dossiers qui donneront lieu à poursuites pénales. Le plus cohérent serait encore de supprimer la CIF, d'autant que ce n'est pas elle qui transmettra les dossiers au parquet... Mais à chaque jour suffit son projet de loi !
En outre, le procureur dispose de l'opportunité des poursuites : rien ne l'oblige à renvoyer devant le tribunal correctionnel tous les cas de fraude dont il aurait connaissance !
Les associations agréées et déclarées depuis au moins cinq ans pourront exercer les droits reconnus à la partie civile dans les affaires de corruption - et l'article 1er énumère les infractions qui s'y rattachent - mais pas de fraude fiscale.
Les dispositions applicables aux lanceurs d'alerte doivent être affinées, pour faire obstacle aux dénonciations abusives. Le texte actuel protège les auteurs de toutes sortes de dénonciations. Il faudrait limiter la protection à ceux qui s'adressent à l'administration ou à la justice, pour signaler un crime ou un délit.
Un mot sur la longueur des procédures : Bercy estime que les siennes sont plus courtes, et la justice qu'elles sont plus courtes lorsqu'elle s'en charge. J'ai connaissance d'entreprises dont le dossier est suivi par Bercy depuis plus de cinq ans. L'introduction du contradictoire dans les procédures de l'administration fiscale...
ne raccourcit pas les délais : ceux-ci restent fondamentalement fonction des affaires traitées.
Notre commission souhaite préserver le monopole de l'administration fiscale. D'abord, il est garant de la célérité du traitement des dossiers. Alors qu'il faut faire rentrer de l'argent dans les caisses de l'Etat le plus rapidement possible, les procédures judiciaires durent en moyenne six ans. Ensuite, les sanctions sont dérisoires. Ces dernières années, la seule peine d'emprisonnement prononcée a été d'un mois... Enfin, la transaction est efficace pour récupérer l'argent soustrait au fisc.
FRAUDE FISCALE ET GRANDE DÉLINQUANCE ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE - EXAMEN DU TEXTE DE LA COMMISSION
Division additionnelle après l'article 1er
L'amendement n° 44 voudrait soumettre aux obligations de transparence les associations habilitées à intervenir en justice. Avis défavorable : d'une part, cela relève du mode de financement des associations ; d'autre part, ces associations doivent obtenir un agrément en Conseil d'Etat, ce qui assure un minimum de contrôle.
L'amendement n° 44 est rejeté.
Article 1er bis
Mon amendement n° 18 précise les conditions dans lesquelles les personnes morales pourront encourir une peine d'amende proportionnelle à leur chiffre d'affaires : crime ou délit puni d'au moins cinq ans ayant procuré un profit direct ou indirect. A défaut, le principe constitutionnel de proportionnalité des peines serait méconnu. Je propose également de se référer au chiffre d'affaires connu à la date des faits.
L'amendement n° 18 est adopté.
Article additionnel après l'article 1er quater
L'amendement n° 63 exclut de la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC) les infractions relevant des questions de corruption ou réprimées par le code électoral. Ces infractions font rarement l'objet d'une publicité, pourtant indispensable pour ces délits. L'inclusion des délits de corruption dans le champ du « plaider coupable » était le principal reproche formulé contre cette procédure à sa création.
Avis défavorable. Lors des auditions, les magistrats ont témoigné de l'utilité de cette procédure : certaines personnes préfèrent abréger la procédure en payant une forte amende.
Il n'y a pas d'absence de publicité puisque la CRPC doit faire l'objet d'une homologation en audience publique.
L'amendement n° 63 est rejeté.
Article 2 bis
Article additionnel après l'article 2 bis
Cet amendement n° 20 lève partiellement le verrou de l'administration fiscale pour l'engagement de poursuites pénales en matière de fraude fiscale. D'abord, en permettant à la justice de poursuivre des faits de fraude fiscale dont elle a connaissance à l'occasion d'une enquête ou d'une instruction portant sur d'autres faits ; ensuite, lorsque les faits ont été commis en bande organisée ou par le recours à diverses manoeuvres - c'est la notion de fraude fiscale complexe ; enfin, les transactions portant sur ces fraudes complexes sont soumises à la validation du procureur de la République. Dans ce dernier cas, l'action publique est éteinte.
Ce dispositif nuit à l'efficacité de la répression. Lorsqu'une fraude est identifiée, le non engagement des poursuites est un élément de pression dans la négociation, grâce auquel on obtiendra davantage des fraudeurs. Les associations réclament la publicité car c'est leur fonds de commerce... Le rapporteur devrait plutôt réfléchir à clarifier les obligations de communication en fin de procédure fiscale. Il serait plus judicieux de travailler sur un « article 40 partiel et à déclenchement différé » plutôt que de faire intervenir la justice.
Pour la cohérence, nous devrions supprimer la CIF, le rapporteur l'a dit. Il nous propose une autre solution, en donnant des pouvoirs supplémentaires à la justice. Cela n'entraverait pas la procédure, car il suffit qu'une enquête soit ouverte pour que la prescription soit interrompue. L'administration peut parallèlement poursuivre son travail. On a dit les sanctions trop faibles : mais voir affichée sur sa porte et dans les journaux une décision fiscale a plus d'impact qu'un mois de prison avec sursis ! Enfin, le deuxième point de l'amendement introduit en matière fiscale ce qui existe pour les contributions indirectes : cela ne me choque donc pas. Je prends le pari que si l'on reste là avec la CIF, son volume d'affaires n'augmentera pas d'un iota.
Je voterai cet amendement. Les fraudeurs fiscaux sont des délinquants comme les autres. Pourquoi les soustraire à la publicité, qui est pour cette catégorie de délinquants la pire des sanctions ? Tuer sa femme porte-t-il plus atteinte à l'intérêt de la nation que soustraire des milliards d'euros au fisc ? S'il est possible de transiger, de laisser l'administration fiscale faire sa petite cuisine, on donne le sentiment de fermer les yeux sur les fraudes, les délinquants, les criminels. Je ne suis pas d'accord !
Le procureur financier sera là désormais pour corriger les décisions de la CIF. Je constate les efforts faits par le rapporteur. Mais le souci d'efficacité plaide pour conserver le système actuel. Je voterai donc contre cet amendement.
Considérer qu'il s'agit d'une sanction pénale sévère que de soumettre quelqu'un à une mesure de publicité est plaisant au regard d'autres textes en cours d'examen en ce moment...
La crainte de voir les transactions diminuer ne tient pas. D'une part les procédures fiscale et pénale ont leur autonomie. D'autre part, la crainte du gendarme peut être au contraire renforcée par la possibilité permanente de voir s'enclencher une procédure judiciaire, poussant à transiger. La transaction sera soumise, dans le cas des infractions complexes, à la validation du procureur. En outre, le procureur de la République conserve l'appréciation de l'opportunité des poursuites. Il peut décider de laisser l'administration faire son travail. Dans ce cas, l'amendement prévoit que la prescription de l'action publique est interrompue : car les magistrats nous ont dit recevoir les dossiers trop tard.
Lorsque les fraudeurs négocient avec Bercy, la peur du gendarme est la même. Cela ne modifiera pas fondamentalement la donne.
L'amendement n° 20 est adopté et devient l'article 2 ter.
Article 3
L'amendement n° 79 oblige les personnes physiques, associations et sociétés n'ayant pas la forme commerciale, à déclarer ne pas détenir d'avoirs à l'étranger. Cela méconnaît par trop la possible bonne foi des contribuables.
L'amendement n° 79 est rejeté.
L'amendement n° 80 est analogue, quoique plus complexe. Défavorable également.
L'amendement n° 80 est rejeté.
L'amendement n° 84 retient, dans l'hypothèse d'un détournement de fraude fiscale, les subventions et contributions publiques affectées à des paradis fiscaux. Or la liste de ceux-ci est établie par arrêté.
Certaines personnes, comme les fonctionnaires en poste à l'étranger, détiennent des comptes hors de France sans volonté de frauder. Lorsqu'ils font l'objet d'un redressement, ils ne comprennent pas ce qui leur arrive. Sans reprendre nécessairement la présente proposition, il y a là quelque chose à faire.
C'est une autre question. Cet amendement vise les paradis fiscaux. Le texte de l'article 3 les inclut déjà.
L'amendement n° 84 est rejeté.
Avis défavorable au n° 77 qui rend passibles de confiscation dite « élargie » les auteurs de toute fraude fiscale, simple ou complexe. C'est sans doute excessif ; en outre, la confiscation du produit de l'infraction est encourue de plein de droit pour les infractions punies d'au moins un an de prison.
Article 3 bis A
L'article 3 bis A a été inspiré aux députés par les conclusions de la commission d'enquête sénatoriale relative à l'évasion des capitaux. Il institue un contrôle des numéros de la TVA intracommunautaire, afin de lutter contre la fraude dite « carrousel ». L'amendement n° 91 propose une nouvelle rédaction du dispositif, pour sécuriser la délivrance du numéro de TVA et améliorer les contrôles. L'administration pourra désormais demander à l'opérateur de justifier de la réalité de ses activités économiques avant de lui attribuer son numéro et pourra effectuer des contrôles a posteriori.
Article 3 bis B
Article 3 bis C
Article 3 bis D
L'amendement n° 43 supprime l'article introduit à l'Assemblée nationale qui élargit la composition de la CIF. Avis défavorable : nous avons fait des progrès sur ce point, et il n'est pas temps de supprimer cette commission.
Cet amendement ne se comprend qu'avec le n° 45, qui supprime l'ensemble du monopole de l'administration sur les poursuites.
L'amendement n° 43 est rejeté, ainsi que le n° 45.
L'amendement n° 92 porte le nombre de membres de la CIF de 22 à 28. Le travail de celle-ci s'organisant en sections de nombre égal de membres, et sachant qu'il est nécessaire d'avoir un nombre impair de membres pour éviter le blocage lors de votes, la commission des finances propose de retenir une organisation de quatre sections de sept membres chacune.
Notre commission est attachée au rôle du juge pénal, comme au bon fonctionnement de la CIF.
L'amendement n° 92 est adopté.
Article 3 bis F
Article 3 ter
Article additionnel après l'article 3 quater
A l'instar des dispositions qui sanctionnent l'incitation au vol, aux extorsions ou aux destructions, l'amendement n° 64 sanctionne l'incitation à la fraude fiscale, même si elle n'est pas suivie d'effet.
Il est satisfait : la tentative et la complicité de fraude fiscale suffisent.
L'amendement n° 64 est rejeté.
Article additionnel après l'article 3 quinquies
Avis défavorable à l'amendement n° 83 concernant les manipulations de prix de transfert : l'article 11 bis D du projet de loi contraint déjà les entreprises à davantage de transparence.
C'est l'un des points sur lesquels la commission d'enquête que je préside se prononcera. Cet amendement ne fait qu'introduire de la confusion dans les obligations de communication existantes.
L'amendement n° 83 est rejeté.
Article 5
Les contrats d'assurance faisant l'objet de dispositions spécifiques, l'amendement n° 50 vise à ce que tous les bénéficiaires en soient informés individuellement. Si l'on procédait ainsi à chaque nouvelle loi, nous ne nous en sortirions pas. Au surplus, nul n'est censé ignorer la loi, comme le rappelait tout à l'heure Jean-Pierre Michel.
L'amendement n° 50 est rejeté.
Article additionnel après l'article 5
Article additionnel après l'article 9 bis
Article 9 quater
L'Assemblée nationale a inscrit dans la loi la jurisprudence de la Cour de cassation selon laquelle le délai de prescription des infractions dissimulées court à compter de leur révélation. La Chancellerie y est opposée : il y aura débat. Cependant la rédaction des députés ne couvre que les délits. L'amendement n° 24 étend la disposition aux crimes. L'amendement du Gouvernement n° 88 va en sens inverse et supprime l'article : défavorable.
La Cour de cassation ne fait pas la loi. On peut légiférer pour confirmer ses arrêts. On peut aussi légiférer dans le sens inverse. En outre, je suis farouchement opposé à la création de délits imprescriptibles. Je déposerai un amendement pour revenir sur le texte de l'Assemblée nationale.
Nous avons déjà examiné un rapport d'information sur la question des prescriptions : en droit civil, nous avions fait une loi ; en matière pénale, nous nous étions beaucoup interrogés. Il ne faut toucher aux prescriptions qu'avec précaution. Ouvrir de manière générale la prescription pour les délits dissimulés me semble dangereux.
Articles additionnels après l'article 9 sexies
En cas d'échec du « plaider coupable », le procureur n'a d'autre choix que de faire juger l'affaire par le tribunal correctionnel. L'amendement n° 13 répond à une demande des magistrats : pouvoir à ce stade approfondir l'enquête.
L'amendement n° 13 est adopté et devient l'article 9 septies A.
L'amendement n° 48 modifie le livre des procédures fiscales pour améliorer la traçabilité des produits du tabac, et ainsi diminuer la fraude fiscale. Je m'en remets à la sagesse de notre commission.
La fraude dans la commercialisation du tabac est un vrai problème. Je suggère que l'on adopte l'amendement pour que le Gouvernement nous donne son avis.
L'amendement n° 48 est adopté et devient l'article 9 septies B.
Article 9 septies
L'article 9 septies concerne la protection des lanceurs d'alerte. Mon amendement vise à la limiter aux seuls signalements des crimes et des délits, à l'exclusion des contraventions ; et aux signalements effectués auprès des autorités judiciaires ou des autorités administratives, non au-delà.
En vertu de l'article 40 du code de procédure pénale, les fonctionnaires ayant connaissance d'une infraction sont tenus de la signaler à la justice. Quel est l'intérêt de ce dispositif, pour eux ?
L'amendement n° 25 est adopté.
Article 9 octies
L'amendement rédactionnel n° 26 est adopté.
L'amendement n° 65 est rédactionnel : il remplace la notion de dénonciation par celle de signalement.
Article additionnel après l'article 9 octies
L'amendement n° 41 est retiré.
Article 10
Le texte autorise l'utilisation de preuves illicites pour justifier l'engagement de procédures de contrôle. Les députés ont élargi cette possibilité à tous les cas où l'administration fiscale jouit d'un droit de communication et ils ont ainsi supprimé la garantie d'un passage devant l'autorité judiciaire. L'amendement n° 6 revient à la rédaction initiale de l'article.
L'amendement n° 6 est adopté.
L'amendement n° 93 n'est pas compatible avec la position de votre rapporteur : celui-ci prévoit de revenir au texte du Gouvernement en écartant les documents transmis dans le cadre du droit de communication de l'administration, tandis que nous proposons d'élargir le dispositif à tout mode de preuve, y compris la transmission directe d'informations par des particuliers. Aucun instrument, dès lors qu'il est légal et proportionné, ne doit être écarté pour lutter contre la fraude fiscale, et l'affaire HSBC a révélé les limites posées à l'action de l'administration. Nous nous sommes inspirés de pratiques en vigueur au sein des pays d'Europe du Nord comme la Belgique ou l'Allemagne, mais allons toutefois moins loin que cette dernière puisque nous ne prévoyons aucune rémunération des sources, comme le pratiquent, soit dit en passant, les services douaniers. Je précise enfin que la commission des finances m'a autorisé à redéposer en séance publique les amendements qui ne seraient pas retenus dans le texte de la commission.
L'adoption de l'amendement n° 20 le fait tomber, mais cela n'éteint nullement le débat, comme vous l'avez indiqué.
Lorsqu'un document parvient à l'administration par un circuit irrégulier, cela entache le fond du dossier. Vous citez l'affaire HSBC mais on pourrait mentionner Clearstream. Qu'il y ait un filtre pour apprécier, avec force de vérité légale, si le contenu d'un document obtenu par infraction peut être utilisé légalement dans une procédure, cela fait partie des bases d'un Etat de droit.
L'amendement n° 93 est rejeté.
Article 10 bis
Cet article ouvre à titre exceptionnel à l'administration fiscale la possibilité de demander au juge des libertés et de la détention des perquisitions sur le fondement de preuves illicites. L'amendement n° 7 supprime la mention « à titre exceptionnel ». Ce n'est pas d'une grande clarté.
La jurisprudence sur ces questions est très importante. Quelle est la liberté d'appréciation du juge qui devra déterminer si l'utilisation des preuves illicites est proportionnée à l'objectif de recherche et de répression des infractions au code général des impôts, lorsqu'il ne lui est présenté que la lettre de la femme trompée ou du salarié licencié ? C'est la question qui se pose dans toutes les procédures de contributions indirectes.
L'amendement n° 7 est adopté.
Article 10 ter
Article 10 quater
Article 10 quinquies
Les amendements n° 70 et 1 sont analogues : ils suppriment l'article 10 quinquies prévoyant que les caisses des règlements pécuniaires des avocats (CARPA) sont soumises à l'obligation de déclaration de soupçon sur la provenance de fonds illicites. J'y suis défavorable, et il faudrait plutôt oeuvrer en sens contraire, car à ce jour un seul avocat a transmis une déclaration à Tracfin.
On sait la difficulté que les avocats ont eue à admettre de faire des déclarations de soupçon. Je ne voterai pas les amendements qui, en modifiant les règles actuelles, bouleversent l'équilibre que nous étions parvenus à trouver.
Les amendements n° 71 et 2 libèrent l'avocat de la déclaration de soupçon, lorsque l'obligation de celle-ci pèse sur les CARPA. J'y suis défavorable : ce n'est pas la même chose.
Les amendements n° 71 et 2 sont rejetés.
Avis favorable en revanche aux amendements n° 72 et 3, qui suspendent l'obligation de déclaration de soupçon des CARPA s'agissant de sommes rattachées à une procédure juridictionnelle. C'est déjà le cas aujourd'hui pour les avocats.
Les amendements n° 72 et 3 sont adoptés.
Les amendements n° 73 et 5 prévoient que lorsque la CARPA fait une déclaration de soupçon, l'avocat titulaire du compte CARPA en est informé. Avis favorable, sous réserve de la suppression de la première phrase.
Oui : l'avocat ne sera pas pour autant exonéré de son obligation de déclaration.
Article additionnel après l'article 11
Article 11 bis B
L'amendement rédactionnel n° 17 est adopté.
L'amendement n° 94 ouvre aux agents des douanes la possibilité de se faire assister par des experts dans le cadre de leurs attributions fiscales.
Article 11 bis C
Article 11 bis D
L'article 11 bis D prévoit que les grandes entreprises ont l'obligation de fournir à l'administration fiscale la documentation permettant de justifier leur politique de prix de transfert. L'amendement n° 95 va plus loin et crée une obligation déclarative à part entière, figurant dans le code général des impôts.
Attendons de connaître l'avis des grandes entreprises qui seront auditionnées par notre commission d'enquête sur l'évasion fiscale. Cette obligation doit être encadrée avec précision.
Veillons à ce que cette obligation frappe les entreprises françaises... et leurs concurrentes. Ne faudrait-il pas prévoir que celles qui ont une activité financière ou commerciale significative en France y seront soumises, plutôt que les seules personnes morales établies en France ? Les sociétés françaises qui ont transféré leur siège social à Amsterdam - c'est un exemple - doivent-elles faire cette déclaration ?
Bonne question ! Car certaines délocalisations ne sont pas liées aux coûts de production mais à des obligations jugées trop lourdes...
Le Gouvernement proposera dans le projet de loi de finances pour 2014 un dispositif amélioré concernant les prix de transfert. Cet amendement s'inspire des préconisations du rapport de la commission d'enquête sénatoriale, présidée par M. Dominati et dont M. Bocquet était le rapporteur.
Il améliore la curieuse rédaction de l'Assemblée nationale. Mais l'article est-il bien nécessaire ?
L'amendement n° 95 est rejeté.
Article 11 bis
L'amendement n° 96 crée une sanction en cas d'opposition à une saisie informatique par les douanes.
Article 11 quinquies
L'amendement n° 97 instaure un droit de communication de l'administration fiscale à l'égard de l'autorité des marchés financiers (AMF), pour établir une réciprocité des échanges entre les deux.
Article 11 sexies
Je ne suis pas favorable à l'extension du délai de prescription du délit de fraude fiscale de trois à six ans.
L'amendement n° 27 est adopté et l'article 11 sexies est supprimé.
Article additionnel après l'article 11 sexies
Article additionnel après l'article 11 septies
Imaginons qu'un fraudeur soit arrêté en possession d'une mallette remplie de billets. L'amendement n° 98 autorise les douanes à conserver des éléments de preuve telles que les numéros des comptes d'origine et de destination, la marque de la mallette, etc. Et ce, pour les besoins éventuels d'une enquête future.
Avis favorable.
L'amendement n° 98 est adopté et devient l'article 11 octies A.
Article additionnel après l'article 11 octies
L'amendement n° 68 vise à combler le retard de la France dans la mise en oeuvre d'une législation inspirée du FATCA américain.
Article 11 nonies
Articles additionnels après l'article 11 nonies
S'agissant des contribuables ayant omis de déclarer des comptes bancaires ou des contrats d'assurance-vie souscrits à l'étranger, l'amendement n° 99 donne à l'administration la possibilité d'examiner, en dehors d'un contrôle fiscal externe, non seulement les relevés de compte demandés auprès de tiers, mais aussi ceux produits spontanément par des tiers, comme l'autorité judiciaire.
Avis favorable.
L'amendement n° 99 est adopté et devient l'article 11 decies.
L'amendement n° 100 vise à repousser le délai de reprise lorsqu'une demande d'assistance administrative internationale a été formulée.
Certains pays sollicités répondent parfois trois ans après. Il convient de poser une limite au délai de reprise.
La rédaction précise que le délai peut être repoussé « jusqu'à la fin de l'année qui suit la réception de la réponse et, au plus tard, jusqu'au 31 décembre de l'année suivant celle au titre de laquelle le délai initial de reprise est écoulé ».
Avis favorable.
L'amendement n° 100 est adopté et devient l'article 11 undecies.
L'amendement n° 101 porte uniformément à 40 % la majoration applicable lorsque des actifs ont été dissimulés à l'étranger, que le contribuable soit déjà assujetti à l'ISF ou qu'il le devienne à la révélation de ces avoirs. Dans le second cas, la majoration est aujourd'hui de 10 %.
Avis favorable.
L'amendement n° 101 est adopté et devient l'article 11 duodecies.
L'amendement n° 102 prévoit une sanction de 10 % des droits rappelés, et au minimum 1 500 euros, en cas de manquement d'une entreprise à ses obligations déclaratives relatives, pour les informations relatives à ses actionnaires, ses filiales, ou ses participations. La majoration peut être portée à 40% ou 80% en cas de manquement concernant des documents relatifs aux sociétés étrangères contrôlées bénéficiant d'un régime fiscal privilégié.
Avis favorable.
L'amendement n° 102 est adopté et devient l'article 11 terdecies.
Article 13
La création d'un procureur financier est une erreur contreproductive. Nous proposons plutôt de confier les affaires de fraude fiscale et de délinquance financière à un procureur adjoint spécialisé, au sein de chaque juridiction interrégionale spécialisée (JIRS). Nous éviterons ainsi les conflits de compétence. Votre procureur financier rompt avec la tradition d'unicité du parquet en France. Tous les procureurs généraux y sont opposés. Consolidons les JIRS, efficaces, au lieu de créer une structure parallèle. Tel est l'objet de l'amendement n° 52 et de nos autres amendements.
Cet amendement est une source de complexité accrue et de rigidité. Défavorable.
Nous soutenons la création d'un procureur financier. Avis défavorable.
L'amendement n° 52 est rejeté.
L'amendement n° 89 est cohérent avec la demande de suppression de l'article 2 du projet de loi organique. Il constitue une solution alternative : la commission restreinte de l'assemblée des magistrats du siège sera consultée avant la désignation des magistrats du siège participant à l'activité des JIRS en matière économique et financière. Avis favorable.
L'amendement n° 89 est adopté.
Article 14
Article 15
L'amendement n° 14 substitue l'expression « procureur financier de la République » à l'expression « procureur de la République financier ».
Oui, il s'agit d'un procureur de la République « à compétence financière ».
Cette discussion montre à nouveau que la création du procureur financier est néfaste. Il s'agit d'un être hybride.
Puisque la Garde des sceaux entend ne plus donner d'instructions individuelles, l'amendement n° 11 confie au procureur général près la cour d'appel de Paris le soin de trancher les conflits de compétence.
Beau numéro d'équilibriste ! On voit les difficultés que la création du procureur financier va engendrer.
Le parquet financier et le parquet de Paris seront en concurrence, ainsi que les différents parquets et JIRS. Comment concevoir qu'un procureur général pourra imposer son arbitrage aux autres procureurs généraux ? Quel bazar ! Oui, cela fonctionne en matière de terrorisme, parce qu'à Bayonne ou ailleurs, on est bien content d'envoyer les dossiers à Paris, un peu loin... Il en va autrement en matière fiscale.
La création d'un parquet financier est-elle le prélude à d'autres démembrements du parquet ? Verra-t-on un jour un procureur spécialisé dans l'environnement ?
Je maintiens cet amendement. Sinon les affaires risquent de s'enliser. L'arbitrage du procureur général près la cour d'appel de Paris sera rendu après concertation. Soyons pragmatiques. D'autres mécanismes seraient possibles : en cas de conflit entre juges d'instruction, c'est la chambre criminelle de la Cour de cassation qui arbitre. Mais la Cour de cassation n'est pas compétente à l'égard des parquets.
Cet amendement est opportun, il faut un mécanisme de régulation. Mais la compétence, toutefois, est-elle d'ordre public ? Le texte ne le précise pas. Si ce n'est pas le cas, tout procureur pourra continuer à traiter une affaire financière.
L'amendement n° 11 est adopté.
Avis favorable à l'amendement n° 90 cohérent avec l'adoption de l'amendement n° 89.
L'amendement n° 90 est adopté.
Article additionnel après l'article 15
Les amendements n° 55 et 56 s'inscrivent dans la même logique que le n° 52.
Les amendements n° 55 et 56 sont rejetés.
Article 16
L'amendement du rapporteur n° 12 est adopté.
Les amendements n° 57 et 58 s'inscrivent dans la même logique que l'amendement n° 52. Défavorable.
L' amendement n° 57 est rejeté.
Article 17
L'amendement n° 58 est rejeté.
Article 19
L'amendement n° 15 est retiré.
Les amendements n° 59 et 69 sont rejetés.
Article 20
L'amendement n° 60 est rejeté.
Article 20 bis
L'amendement rédactionnel n° 16 est retiré.
L'amendement n° 61 est rejeté.
Article additionnel après l'article 21
Avis favorable à l'amendement n° 103 qui reporte la date d'entrée en vigueur des dispositions du texte relatives à l'organisation judiciaire.
L'amendement n° 103 est adopté et devient l'article 22
Le projet de loi est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
PROCUREUR DE LA RÉPUBLIQUE FINANCIER - EXAMEN DU TEXTE DE LA COMMISSION
Nous en venons aux amendements sur le projet de loi organique créant un procureur de la République financier.
Article additionnel avant l'article 1er
L'amendement n° 1 prévoit que le procureur de la République financier sera nommé par décret du président de la République après avis conforme du Conseil supérieur de la magistrature, le Garde des sceaux présentant trois noms. La nomination échappera aux marchandages.
Cette disposition est intéressante mais devrait figurer dans la Constitution. Avis défavorable pour ce motif.
L'amendement n° 1 est rejeté.
Article 1er
L'amendement n° 2 de M. Mercier s'inscrit dans la logique de ceux qu'il a présentés sur le projet de loi relatif à la lutte contre la fraude fiscale. Même logique, même vote ?
L'amendement n° 2 est rejeté.
Article 2
Avis favorable à l'amendement de cohérence n° 3 du Gouvernement, qui tend à supprimer l'article 2.
L'amendement n° 3 est rejeté.
Le projet de loi organique est adopté sans modification.
Le sort des amendements examinés par la commission est retracé dans le tableau suivant :
- Présidence de M. Jean-Pierre Michel, vice-président-
Enfin la commission examine le rapport de M. Hugues Portelli et le texte qu'il propose pour le projet de loi n° 664 (2012-2013), habilitant le Gouvernement à simplifier les relations entre l'administration et les citoyens (procédure accélérée).
Il s'agit d'un projet de loi d'habilitation qui autorise le Gouvernement à procéder par ordonnances pour rapprocher l'administration des citoyens. Il comprend trois articles. Le premier comprend des mesures de simplification administrative, concernant notamment les techniques de communication entre l'administration et les usagers. L'article 2 autorise la réunion dans un code de l'administration et du public, à destination de celui-ci, de tous les textes consacrés aux rapports entre l'administration et les usagers. L'article 3 vise à achever le code de l'expropriation publique, en chantier depuis longtemps.
Cette loi d'habilitation s'inscrit dans un processus déjà ancien, ponctué par la création du Médiateur de la République en 1973, de la Commission d'accès aux documents administratifs (Cada), la loi sur la motivation des actes administratifs, enfin la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations.
Je proposerai tout d'abord de préciser certains libellés. « Administration » désigne ici aussi bien les administrations de l'État que les collectivités territoriales, les autorités administratives indépendantes, les établissements publics à caractère administratif, les caisses de sécurité sociale, etc. La définition mérite d'être précisée.
Le texte vise à favoriser l'usage des nouvelles technologies, car toutes les administrations ne les utilisent pas avec la même dextérité. Il crée donc un droit des usagers à les saisir par voie électronique.
Traditionnellement, le silence de l'administration vaut rejet. Or le Président de la République a annoncé qu'il entendait changer la règle : désormais, le silence vaudrait approbation. En Conseil des ministres, ce matin, le Premier ministre a fait une communication sur ce sujet. Le Gouvernement entend déposer un amendement pour en expliciter les modalités d'application. J'avais pensé le faire moi-même, mais le Gouvernement a souhaité en conserver la paternité. Si la réforme est inscrite dans ce texte, je propose de porter le délai d'habilitation de 12 à 18 mois. Il me semble en effet préférable de n'avoir qu'une seule loi relative à ces questions et non deux.
L'ordonnance unifiera les règles, notamment de retrait, applicables aux actes administratifs unilatéraux, ainsi que celles relatives aux procédures non contentieuses.
L'expropriation, enfin : nous avons entendu le rapporteur général de la Commission supérieure de codification, il nous a indiqué que la rédaction du code était sur le point d'aboutir. Il reste seulement à tirer les enseignements des décisions récentes du Conseil d'État en réponse à deux QPC.
Enfin je proposerai d'élargir le champ de l'habilitation de l'article 1er à l'outre-mer.
L'article 1er mélange abusivement les dispositions d'ordre réglementaire et législatif. Selon moi, tout son contenu relève du domaine réglementaire, non de la loi. Je déplore la généralisation de ces empiètements.
Selon une tradition bien établie, la codification se fait à droit constant. Tel n'est pas le cas ici, notamment à l'article 3. Ce procédé aboutit à déposséder le Parlement de ses attributions. Enfin, que signifie « donner compétence en appel à la juridiction de droit commun » ? La cour administrative d'appel, ou la cour d'appel ?
Il s'agit de la cour d'appel car le juge de l'expropriation est le juge judiciaire.
L'absence de réponse de l'administration vaudra approbation : en toute matière ? Pour tous les contribuables ? Toutes les administrations ? Il faudra modifier un nombre incalculable de textes...
Tous les gouvernements ont poursuivi l'effort de codification. Nous devrions le soutenir sur tous les bancs. La proposition du Gouvernement est judicieuse. Je ne partage pas les préventions de M. Gélard.
La codification ne présente pas de risque de dérive juridique. Les ordonnances font l'objet d'une loi de ratification. L'enjeu est technique et la matière est difficile. Laissons le Gouvernement avancer !
Il faut en effet préciser que l'habilitation concerne les actes unilatéraux. Nous demanderons au Gouvernement ce qu'il en est des actes unilatéraux liés à des contrats, qu'ils en soient ou non détachables.
Enfin, l'annonce du Président de la République sur le silence de l'administration traduit surtout, me semble-t-il, un manque de préparation de son intervention par ses équipes. Ce n'est pas une bonne idée ! En réalité, le texte consistera à énumérer tous les cas d'exceptions. Pensez aux permis de construire tacites, exemple de la mauvaise administration. Mais je ne doute pas que le texte correspondant sera in fine une coquille vide.
Quant à l'expropriation, le précédent texte de codification semblait sur le point d'aboutir quand le délai d'habilitation a expiré. Il faut juste rouvrir le délai.
Monsieur Gélard, les lois d'habilitation en la matière s'empilent depuis 2004 : rien de nouveau sous le soleil ! Le partage entre la loi et le règlement n'a pas varié non plus. Pour ne citer qu'un exemple, la mise en oeuvre du droit du public à saisir l'administration par voie électronique relève bien de la loi.
Monsieur Richard, attendons le texte du Gouvernement sur le silence de l'administration. Je crois, moi aussi, qu'il contiendra une longue liste d'exceptions.
Article 1er
L'amendement n° 1 unifie la définition des autorités administratives et reprend celle qui figurait dans la loi de 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations.
L'amendement n° 1 est adopté.
L'amendement n° 2 précise les avis préalables qui deviendront communicables et rend leur motivation obligatoire lorsqu'ils sont défavorables.
L'amendement n° 2 est adopté.
L'amendement n° 3 impose le respect du principe de collégialité en cas de recours aux nouvelles technologies pour délibérer ou rendre des avis à distance.
Certains organismes ont déjà recours à la vidéo-conférence pour tenir leur conseil d'administration. La collégialité impose de pouvoir non seulement parler tour à tour mais également de se répondre. Le rôle du président est à cet égard central.
L'amendement n° 3 est adopté.
L'amendement n° 15 précise que les délibérations, les actes et les avis des administrations de l'État, des collectivités territoriales et de leurs établissements publics seront publiés sur un site Internet, sous format ouvert et utilisables gratuitement.
En vertu de l'article 38 de la Constitution, les parlementaires ne peuvent élargir le champ d'une habilitation. Retrait.
Je le présenterai à nouveau en séance afin que le Gouvernement entende cette demande.
L'amendement n° 15 est retiré.
L'amendement n° 7 est rédactionnel : il précise que les dispositions codifiées sont celles en vigueur ou déjà publiées au moment de la publication de l'ordonnance, non de sa signature.
Il y a un problème. Si une disposition modificative intervient entre la date de signature d'une ordonnance de codification et sa publication, cette ordonnance est déjà obsolète.
Depuis 1958, les ordonnances entrent en vigueur à la date de leur publication.
L'amendement n° 7 est adopté.
L'amendement n° 8 autorise le Gouvernement à simplifier les démarches des usagers et l'instruction des demandes pour tenir compte des évolutions technologiques.
L'amendement n° 8 est adopté.
L'amendement n° 9 précise l'intention du Gouvernement concernant le retrait des actes administratifs unilatéraux.
L'amendement n° 9 est adopté.
Je ne suis pas certain de l'utilité de mon amendement n° 14, mais le cabinet y tient. Il prévoit que le code précise si les règles posées valent uniquement pour les relations avec les usagers ou également entre administrations.
L'amendement n° 16 vise à prévoir les conséquences juridiques d'un avis défavorable ou d'une réserve du commissaire enquêteur ou de la commission, lors des enquêtes publiques.
Avis défavorable car cette mesure est dérogatoire aux règles des enquêtes publiques.
L'amendement n° 16 est rejeté.
Article 3
L'amendement rédactionnel n° 12 est adopté.
Le projet de loi est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Le sort des amendements examinés par la commission est retracé dans le tableau suivant :