La commission entend tout d'abord une communication de M. Philippe Marini, rapporteur général, sur les recommandations de la Commission européenne au Conseil européen sur le programme de stabilité actualisé de la France pour la période 2011-2014.
Pour la première fois, le 27 avril dernier, le Sénat s'est prononcé par un vote sur la déclaration du Gouvernement sur le projet de programme de stabilité, en application de l'article 50-1 de la Constitution. La recommandation de la Commission européenne au Conseil concernant le programme national de réforme de la France pour 2011 et portant avis du Conseil sur le programme de stabilité actualisé de la France pour la période 2011-2014, adoptée le 7 juin 2011, exprime des analyses très proches de celles de la commission.
La recommandation de la Commission européenne rejoint en effet pleinement les analyses de la commission des finances, telles qu'elles ont été en particulier exprimées dans mon récent rapport d'information (n° 456, 2010-2011) sur le projet de programme de stabilité.
Ainsi, selon la Commission européenne :
- « sur la base de l'évaluation du programme de stabilité effectuée conformément au règlement (CE) n° 1466/97 du Conseil, [il apparaît] que le scénario macroéconomique sur lequel se fondent les projections budgétaires est trop optimiste. Les taux de croissance prévus sont légèrement supérieurs aux projections les plus récentes des services de la Commission pour 2011 et 2012 et restent nettement supérieurs à la croissance potentielle dans les dernières années » ;
- « la trajectoire d'ajustement du déficit et de la dette est entourée de plusieurs risques liés notamment à la possibilité que le scénario macroéconomique soit moins favorable qu'escompté, au manque de précision de certaines mesures et au fait que les objectifs n'ont souvent pas été atteints par le passé. Par conséquent, en l'absence de mesures supplémentaires, il ne peut pas être garanti que le déficit excessif sera corrigé en 2013 au plus tard » ;
- « l'effort budgétaire annuel moyen sur la période 2010-2013, fondé sur la tendance du solde structurel (recalculé), est légèrement inférieur à l'effort (supérieur à 1 % du PIB) préconisé par le Conseil » ;
- « pour rétablir une position budgétaire viable, il est indispensable d'éviter le dérapage des dépenses en étayant le renforcement de l'effort budgétaire par des mesures clairement définies, notamment parce que l'objectif 2013 ne laisse aucune marge de sécurité par rapport au seuil de 3 % du PIB » ;
- enfin, « la Commission considère que la France doit préciser davantage sa stratégie d'assainissement budgétaire, notamment pour 2012 et les années suivantes, afin de corriger son déficit excessif en 2013 au plus tard et de ramener sa dette sur une trajectoire descendante. Toute recette exceptionnelle devrait être utilisée pour accélérer la réduction du déficit et de la dette ».
Lors de l'examen de ce qui est devenu la loi n° 2010-1645 du 28 décembre 2010 de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014, le Sénat a souhaité que le Gouvernement s'engage sur un certain effort structurel si, comme le juge probable la présente recommandation, la croissance était inférieure aux hypothèses retenues. Il est résulté de cette demande l'insertion dans le rapport annexé à cette loi de deux paragraphes, selon lesquels « dans un scénario alternatif où la croissance de l'activité n'atteindrait que 2 % par an sur 2012-2014 », il faudrait réaliser un effort supplémentaire « compris entre 4 milliards d'euros et 6 milliards d'euros chaque année », ce à quoi le Gouvernement « ferait face par des mesures d'économies supplémentaires sur les dépenses et les niches fiscales ou sociales pour assurer le respect de la trajectoire de déficit fixée dans la présente loi de programmation. »
La recommandation de la Commission européenne rejoint également les analyses de la commission des finances en matière fiscale. Elle souligne en particulier la nécessité du basculement du système fiscal vers ce qu'il est convenu d'appeler la « TVA sociale » : « La France - souligne-t-elle - est l'un des pays de l'Union européenne où les impôts et les charges sociales sur le travail sont les plus élevés, tandis que la consommation y est relativement peu taxée. De plus, la part des recettes des taxes environnementales dans le PIB est elle aussi nettement inférieure à la moyenne de l'Union européenne. Un rééquilibrage du système fiscal par le déplacement de la charge fiscale du travail vers la consommation et l'environnement aurait probablement des effets bénéfiques sur l'emploi et sur la réalisation des objectifs environnementaux ».
La Commission européenne souligne en outre la nécessité de réduire les allégements de prélèvements obligatoires. Selon elle, « les exonérations fiscales et sociales (notamment les « niches fiscales ») (...) font peser un risque sur l'assainissement des finances publiques. (...) Les dépenses fiscales sont utilisées pour mettre en oeuvre une politique économique précise, mais aucune évaluation systématique n'est réalisée pour déterminer si les objectifs visés ont été atteints. Enfin, la possibilité de les substituer aux dépenses publiques a permis aux autorités françaises de respecter officiellement les règles existantes en matière de dépenses ». Tout cela est dit assez élégamment.
Ainsi, la Commission européenne propose que le Conseil recommande que la France s'attache, au cours de la période 2011-2012, à « (...) accroître l'efficacité du système fiscal, notamment (...) en mettant en oeuvre la réduction prévue du nombre et du coût des exonérations fiscales et sociales (y compris les « niches fiscales ») ».
Nous devons nous féliciter des convergences des analyses de la commission et de celles de la Commission européenne. Cela peut tout à fait motiver le texte de la résolution que je vais vous soumettre.
L'alinéa 7 se réfère à une « recommandation de recommandation », ce qui est du « langage européen ». C'est pour le plaisir de parler une langue incompréhensible !
C'est la Commission européenne qui recommande au Conseil d'adopter une recommandation.
Selon le texte que je vous propose, le Sénat :
« - souligne que les programmes de stabilité doivent reposer sur des hypothèses de croissance correspondant à la croissance potentielle de l'économie, pour ne pas surestimer l'amélioration du solde public ; que le programme de stabilité 2011-2014, qui retient des hypothèses de 2,25 % en 2012 et 2,5 % en 2013 et en 2014, ne satisfait pas à cette exigence ;
« - observe que l'autre raison principale du non respect de la trajectoire de solde de la quasi-totalité des programmes de stabilité passés réside dans une hypothèse de croissance des dépenses publiques de l'ordre de 1 % en volume, contre une exécution en moyenne supérieure à 2 % ; qu'en conséquence, l'objectif de 0,6 % du programme de stabilité 2011-2014 devrait être mieux documenté ;
« - se félicite de ce que la recommandation au Conseil souligne la nécessité de déplacer la charge fiscale du travail vers l'environnement et la consommation, et de réduire les allégements de prélèvements obligatoires ;
« - constatant que la plupart des programmes de stabilité présentés en avril 2011 par les autres Etats membres de la zone euro comportent plusieurs scénarios de croissance, incite le Gouvernement à inclure dans ses prochains programmes de stabilité un scénario alternatif reposant sur une hypothèse de croissance de 2 % par an ;
« - demande au Gouvernement de confirmer au Conseil son engagement, résultant du rapport annexé à la loi n° 2010-1645 précitée, de prévoir dès l'automne 2011 des mesures supplémentaires pour respecter sa trajectoire de solde, s'il apparaissait que la croissance ou les dépenses publiques devaient être respectivement inférieure ou supérieures aux hypothèses retenues. »
On a l'impression que ce sont les travaux de la commission qui viennent de recevoir le « visa » de la Commission européenne !
Ne faudrait-il pas évoquer la « TVA sociale » et les allégements de prélèvements obligatoires dans deux alinéas distincts ?
Le texte du rapporteur montre bien toute la vanité de la révision constitutionnelle en cours. Si le Gouvernement voulait réellement réduire le déficit, il ne s'exposerait pas à de telles appréciations de la part de la Commission européenne.
Je ne vois pas l'intérêt d'une résolution. Le Sénat a voté favorablement, le 27 avril dernier, sur la déclaration du Gouvernement sur le projet de programme de stabilité. S'il désapprouvait ce projet, pourquoi avoir voté favorablement ? C'est une « procédure de complaisance ». Par ailleurs, je suis contre la TVA sociale. Je ne puis voter en faveur de ce texte.
Je suis un peu triste, et gêné que la commission se réjouisse de ce que la Commission européenne donne à la France une « mauvaise note » !
Nous ne nous réjouissons pas. Nous remarquons la proximité de nos analyses et de celles de la Commission européenne.
J'approuve ce qu'a dit Nicole Bricq. La volonté d'alourdir la TVA procède d'une tendance libérale, conservatrice, qui a pour objet d'alléger l'imposition du patrimoine.
Nous pouvons certes nous congratuler de la convergence de nos analyses avec celles de la Commission européenne. Mais nous sommes dans la position des sociétés savantes ! Nous ne sommes pas écoutés par le Gouvernement. Le « rabot » a en réalité été une « lime à ongles ». La commission des finances devrait exprimer son point de vue avec plus de force.
Je pense, comme Jean-Pierre Fourcade, qu'il faudrait évoquer la dette publique. Par ailleurs, les économistes ne sont pas d'accord sur l'estimation de la croissance potentielle.
Dans l'optique libérale qui est la mienne, je ne vois pas l'intérêt de la TVA sociale, ni, d'une façon générale, d'une augmentation des impôts.
Je suis d'accord sur le fait que la commission devrait exprimer son point de vue avec davantage de fermeté. Elle doit demander la suppression de tous les « comités Théodule » !
Je me félicite de l'ensemble des interventions. Je réponds à notre collègue Nicole Bricq qu'une fois que le Parlement a voté sur le projet de programme de stabilité, il ne lui reste d'autre moyen de s'exprimer que l'adoption d'une résolution. C'est une façon de dire : « Ecoutez-nous davantage ». Le passage du texte que je vous propose relatif à la TVA sociale est conforme aux positions précédemment exprimées par la commission des finances.
En réponse aux suggestions de nos collègues Jean-Pierre Fourcade et Joël Bourdin, je vous propose d'insérer un alinéa selon lequel le Sénat « rappelle que le respect de la trajectoire de solde conditionne la réduction du ratio d'endettement public à compter de 2013 ».
A l'issue de ce débat, la commission conclut au dépôt de la proposition de résolution présentée par M. Philippe Marini, rapporteur, ainsi modifiée, et décide de fixer au lundi 20 juin 2011 à 12 heures le délai-limite de dépôt, par tout sénateur, d'amendements éventuels à ce texte, dont l'examen interviendra lors de la réunion de la commission du mercredi 22 juin 2011 à 9 heures 30.
La commission procède ensuite à l'examen du rapport de M. Philippe Marini, rapporteur général, sur le projet de loi n° 612 (2010-2011), adopté par l'Assemblée nationale, de finances rectificative pour 2011.
EXAMEN DU RAPPORT
Ce projet de loi de finances rectificative traite de la fiscalité du patrimoine mais aussi de différents aspects budgétaires. C'est donc un collectif comme les autres.
Tout d'abord, quelques considérations sur la crise de la dette souveraine. L'actualité éclaire à nouveau de manière crue la situation de la Grèce. Les dépenses ont été supérieures aux prévisions en 2010. Les analyses de la Commission européenne mettent en évidence les problèmes de gouvernance propres à cet État (fraude fiscale et mauvaise collecte des impôts). Le nouveau plan de mesures annoncé le 3 juin comporte des projets de privatisations à hauteur de 50 milliards sur lesquelles il est impossible de se faire une opinion sérieuse. Il y a deux scenarii possibles : un rose et un noir. La dette grecque s'élève à 150 points de PIB. Dans le scénario rose, elle devra, dans un premier temps, se stabiliser en valeur absolue grâce à un solde budgétaire proche de l'équilibre, avant, dans un deuxième temps, de se réduire progressivement en points de PIB grâce à la croissance. Si les Etats de la zone euro continuent de lui prêter à un taux de l'ordre de 5 % aussi longtemps que nécessaire, il n'y a aucune raison qu'elle fasse défaut. C'est toute la logique du plan d'ajustement. Si nous craignons un défaut de la Grèce - ce qui correspond au scénario noir -, c'est parce que nous ne pouvons pas analyser rationnellement ce plan. La BCE estime que les conséquences psychologiques d'un défaut de ce pays seraient de nature à remettre en cause la solidité des banques. Même si les pertes de ces grands établissements financiers ne seraient pas de nature à remettre en cause leurs grands équilibres, un tel phénomène ferait fuir les investisseurs et les effets en seraient difficiles à prévoir. Les engagements des banques françaises sur les titres de dette publique représentent 11 milliards - et 17 milliards pour les banques allemandes. Si une fraction de ces créances devait être abandonnée, il ne se passerait de ce seul fait rien de grave pour ces banques, mais les appréciations portées sur les créances des autres pays pourraient devenir incontrôlables, et les banques risquent de cesser de se prêter entre elles, suscitant une crise analogue à celle de 2008-2009. Nous nous orientons probablement vers un scénario ni noir, ni rose : les États de la zone euro cherchent à gagner du temps pour atteindre 2013 et la mise en place du mécanisme européen de stabilité (MES). D'ici là, d'autres stress tests auront lieu. Lorsque le MES entrera en vigueur, il incorporera la possibilité de défaut d'un État puisque les créanciers pourront prendre leur décision à la majorité qualifiée.
J'en reviens à l'article 33 du projet de loi de finances rectificative, qui porte sur le Fonds européen de solidarité financière (FESF) : par amendement, l'Assemblée nationale a augmenté le plafond de la garantie de la France à ses émissions. Le Fonds ne peut bénéficier de la meilleure notation qu'à condition que ses prêts n'excèdent pas la garantie apportée par les seuls Etats bénéficiant du « triple A ». Cette réalité avait été négligée durant la première étape, de sorte qu'au lieu des 440 milliards prévus, la capacité de prêt du FESF n'aurait plus été que de 255 milliards, d'où la nécessité de relever les montants de garantie à l'article 33. A compter de la mi-2013, le MES devrait disposer d'une capacité de prêt de 500 milliards. Notre participation au capital, de 16,3 milliards, devra être versée en cinq ans, à un rythme susceptible d'être accéléré. Je tiens à faire remarquer que, même s'ils ne dégradent pas le solde public au sens de la comptabilité nationale, ces 16,3 milliards sont des dépenses budgétaires. Il faut donc être bien conscient que la solidarité européenne n'est pas une solidarité morale : elle dégrade nos finances publiques et sa mise en jeu va ralentir et compliquer la trajectoire de dette que nous nous sommes fixée. Je suis assez surpris que personne n'ait soulevé cette question dans le débat public. Pour l'instant, tout se passe comme si la solidarité était strictement morale.
Nous devrons tirer les conséquences budgétaires de ces dépenses d'investissement. Or, pour l'instant, elles ne figurent pas dans la loi de programmation des finances publiques, ce qui est une grave lacune.
Non ! Je parle de 2013, avec la mise en place du Mécanisme européen de stabilité.
Le MES prendra le relais du FESF, qui est un engagement hors bilan. Nous avons d'ailleurs trop souvent tendance à négliger ces engagements hors bilan qui font pourtant partie intégrante de notre situation patrimoniale. Si nous n'aidons pas la Grèce, nous devrons secourir les banques, comme après la faillite de Lehman Brothers.
C'est tout à fait exact, mais nous devrons intégrer les 16 milliards dans la programmation budgétaire, ce qui n'a pas été fait jusqu'à présent.
Je rappelle que nous devrons verser 16 milliards et garantir environ 125 milliards. La décision de mise en oeuvre de ce mécanisme sera prise, d'un commun accord, par le conseil des gouverneurs, c'est-à-dire les ministres des finances de la zone euro.
Non, sur cinq ans. En revanche, le conseil des gouverneurs pourra accélérer les versements et accroître la capacité de prêts. Le Gouvernement devra correctement informer le Parlement. Pourquoi s'intéresser à la refacturation du salaire d'un professeur d'université si nous ne sommes pas capables d'avoir une vision sur des engagements qui portent sur plusieurs milliards ?
J'en viens à la révision de l'équilibre budgétaire proposée dans ce collectif. Je note d'abord une petite diminution des recettes fiscales du budget général. Les recettes non fiscales attendues de la Caisse des dépôts vont se réduire de 262 millions - les membres de la commission de surveillance sont convaincus des chiffres de la Caisse.
Dans le projet de loi initial, les dépenses du budget général sont stabilisées : les ouvertures nettes sont gagées par des annulations à due concurrence. Certaines ouvertures sont légitimes, car non prévisibles. D'autres ouvertures de crédit renvoient à des sous-budgétisations, notamment par le ministère de la culture, mais aussi en ce qui concerne l'hébergement d'urgence des demandeurs d'asile et le fonds interministériel de prévention de la délinquance. Nous y reviendrons lors de l'examen des amendements. Pour les opérations extérieures (Opex), apparemment, tout va bien puisqu'aucune demande de crédits supplémentaires n'est indiquée. Heureuse constatation, quand notre pays intervient davantage dans plus d'opérations militaires, nous n'avons pas besoin d'augmenter les crédits.
Le Gouvernement relève les prévisions d'inflation de 1,5 % à 1,8 %. Dès lors que les enveloppes hors pensions sont stabilisées en valeur, cette remontée de l'inflation prévisionnelle, n'offre au Gouvernement aucune marge de manoeuvre supplémentaire.
Plusieurs mouvements importants affectent les comptes sociaux, mais ils sont globalement équilibrés. De même, le projet de loi de finances rectificative prévoit, Madame Bricq, une nouvelle tranche de prêt pour la Grèce pour un montant de 1,5 milliard, mais cette dépense est compensée par une amélioration de la situation d'autres comptes spéciaux.
Lorsque ce texte est arrivé à l'Assemblée nationale, son impact sur le solde budgétaire était négligeable : 10 millions. Mais le vote des députés a dégradé les recettes fiscales de 136 millions. En outre, l'État devra payer 460 millions dans la vieille affaire des frégates taïwanaises, qui vient de connaître son épilogue judiciaire. Cette dépense devra être gagée pour respecter la règle du « zéro valeur », ce qui n'a pas été fait dans le cadre de ce projet de loi de finances rectificative puisque la décision de justice a été rendue très récemment.
Nous aurons également à prendre en compte la prime de partage de la valeur ajoutée qui sera présentée dans le cadre d'un futur projet de loi de financement rectificative. Cette prime, certainement brillante, aura des conséquences en termes de prélèvements obligatoires puisqu'elle sera assujettie à la CSG et à la CRDS et qu'elle sera prise en compte pour le calcul de l'impôt sur le revenu. En revanche, elle sera déductible de l'impôt sur les sociétés. Il faut donc s'attendre à un surcroît de recettes pour la sécurité sociale de 375 millions d'euros et à une réduction du rendement de l'impôt sur les sociétés de 395 millions d'euros en 2011 et de 785 millions d'euros dès 2012. Le coût de cette initiative intéressante et imaginative sera donc de 20 millions d'euros en 2001 et de 305 millions dès 2012. A ce stade, je ne sais pas comment nous financerons les contreparties de cette prime.
La loi de programmation prévoit des mesures nouvelles pour améliorer les recettes : 11 milliards d'euros en 2011 et 3 milliards chaque année suivante. Les mesures déjà adoptées pour 2011 vont au-delà des 11 milliards prévus. Je note cependant une certaine dégradation en cours d'exercice. Je me suis demandé si ce projet de loi de finances rectificative et le projet de loi de financement rectificative respecteraient les normes constitutionnelles si, par miracle, la révision constitutionnelle était adoptée. Certes, ces deux lois rectificatives dégradent le solde pour 2011, mais elles permettent de demeurer au-dessus du seuil de 11 milliards d'euros de mesures nouvelles. Le Conseil constitutionnel n'y trouverait donc rien à redire.
J'en viens aux mesures qu'il faudra prendre à partir de 2012 pour respecter la trajectoire de solde. Même si la croissance s'établit à 2 % dès cette année, nous devrons faire des efforts supplémentaires pour accroître les recettes et diminuer les dépenses afin d'améliorer notre solde, à une hauteur que je continue d'évaluer entre 5 et 10 milliards d'euros, si l'on prend notamment en compte le fait que la réduction de la croissance des dépenses publiques en 2012 n'est pas encore pleinement documentée. Étant donnée la situation du premier trimestre de l'année, nous atteindrons sans doute les 2 % de croissance en 2011, ce qui nous permettra de respecter le plafond de déficit à 5,7 % du PIB.
J'en arrive à la réforme de la fiscalité du patrimoine. Je vous fais grâce de l'historique que vous connaissez tous. La fiscalité du patrimoine est complexe et pénalisante. L'ISF a de nombreux défauts et le bouclier fiscal encore plus. Le taux nominal de prélèvement sur l'épargne est de 31,3 %, mais des régimes spécifiques permettent de contourner ce taux apparent, si bien que les niches fiscales n'ont plus aucune cohérence - leurs contradictions autorisent à s'interroger sur l'efficacité de ces coûteuses mesures.
Le projet de loi de finances rectificative prévoit la suppression du bouclier fiscal à partir des restitutions dues au titre des impôts directs afférents aux revenus de l'année 2011, une auto liquidation obligatoire et le plafonnement de la taxe foncière pour tenir compte de la situation des redevables modestes propriétaires de leur logement. Cette dernière mesure n'aura pas d'incidence pour les finances locales car ce coût sera pris en charge par l'État. La suppression du bouclier devrait rapporter à l'État 300 millions d'euros en 2012, 420 en 2013 et 720 en 2014.
Réaménagé, l'ISF devient plus acceptable : la première tranche est supprimée, ce qui règle en grande partie la question de la résidence principale. La révision des taux correspond mieux au rendement des actifs financiers, les formalités déclaratives sont allégées pour les plus modestes et quelques rectifications permettent de mieux prendre en compte les pactes d'actionnaires et de donner des biens professionnels une définition plus adaptée à la réalité des PME.
Des recettes nouvelles devraient assurer l'équilibre de cette réforme : la fiscalité des donations et des successions est en effet réaménagée. Cette adaptation ne me paraît pas contredire la loi de 2007 qui avait exonéré les successions entre conjoints, ce qui est l'acquis principal de la loi Tepa. Il est donc prévu ici de relever de six à dix ans le délai de rappel des donations et de supprimer les réductions des droits de donation liées à l'âge du donateur. Enfin, les successions les plus importantes devront contribuer davantage. Tout cela est cohérent si l'on veut que cette réforme, qui va permettre à 300 000 foyers d'échapper à l'ISF, voie le jour.
Deux autres mesures permettront de la financer : une taxe sur les résidences en France des non-résidents, dont nous reparlerons, Monsieur Ferrand, et une exit tax, qui permet d'imposer les plus-values latentes lors du transfert par les contribuables de leur domicile hors de France. La réforme de la fiscalité du patrimoine va donc bénéficier à une partie des contribuables à l'ISF, mais se fera en défaveur des bénéficiaires actuels du bouclier fiscal. Les 176 millions d'euros que rapporterait la taxe sur les non-résidents semblent nécessaires à l'équilibre financier de la réforme.
Enfin, le projet de loi de finances rectificative prévoit de lutter contre l'évasion fiscale internationale. Mais il s'agit de recettes exceptionnelles, qu'on ne devrait mettre qu'en face de dépenses tout aussi exceptionnelles. A partir de 2013, ces recettes diminueront puis disparaîtront. En outre, elles auraient été acquises en tout état de cause, même si elles n'avaient pas été inscrites dans ce texte. Il s'agit donc d'un simple jeu d'écriture.
Ou alors simplement de façon optique. Une part du chemin a été faite, mais il faudra aller plus loin. J'aurai quelques propositions à formuler en ce sens en espérant que l'on ne creusera pas d'autres trous pendant que j'en reboucherai...
L'Assemblée nationale a proposé à juste titre de doubler le taux du droit de partage, c'est-à-dire le droit à acquitter en cas de partage d'actifs ou en cas de vente de biens immobiliers par licitation. Cette mesure devrait rapporter 116 millions d'euros en 2011 et 253 millions à partir de 2012. Mais les députés ont instauré un abattement partiel de 20 % par année sur la valeur des donations effectuées avant l'entrée en vigueur du nouveau délai de rapport fiscal de dix ans. Nos collègues ont pourtant fait un bon travail puisque si la balance est défavorable pour 2011, pour la suite, les recettes seront plus élevées que les dépenses créées. Il faudrait toujours faire de la sorte. Les autres modifications prévues par les députés n'ont pas une portée financière très importante. A l'issue des délibérations des députés, l'équilibre a évolué et sera mieux assuré à partir de 2012.
Ce projet de loi de finances rectificative traduit donc de bonnes orientations, mais n'épuise pas, loin de là, le débat fiscal. Réjouissons-nous donc à l'avance des séquences suivantes que nous aurons sur l'imposition des très hauts revenus, sur la fiscalité de l'épargne qui devra être davantage tournée vers le financement de l'économie, sur l'assurance-vie.
Nous voici donc éclairés. Au-delà de votre présentation pédagogique, je tiens à vous rendre hommage, car vous avez travaillé dans des conditions difficiles. Je note que le montant des Opex est stable et qu'il n'est pas prévu de primes pour l'agriculture.
Il n'y a en effet ni dépenses, ni financements prévus pour les mesures annoncées. Il y a encore certains imprévus.
Les deux milliards d'euros remboursés par l'industrie automobile permettent de verser 1,5 milliard à la Grèce.
Malgré ce qu'a dit le rapporteur général, on a bien débloqué des fonds pour la Grèce cette année.
Nous avions emprunté pour prêter 2 milliards à l'industrie automobile. Qu'elle nous rembourse ne nous donne pas des moyens supplémentaires.
Dans les lois de finances et de financement rectificatives, il y a des recettes fiscales et sociales supplémentaires et un alourdissement des niches. Je me demande à quoi rime le débat constitutionnel : norme ou pas norme, on continue comme avant.
Pouvez-vous nous dire à combien s'élèvera le plafonnement de la taxe foncière pour les redevables les plus modestes imposables à l'ISF ?
L'État prendra en charge les 7 millions d'euros que coûtera cette mesure.
En ce qui concerne l'évasion fiscale internationale, le projet de loi de finances rectificative prend-il en compte ce que l'État a récupéré au titre des établissements qui se trouvent dans des territoires non coopératifs ? Nous avions voté un amendement de transparence : le ministère devait fournir le détail de ce qui a été récupéré.
Je vérifierai ce point pour vous apporter une réponse précise, mais la question est excellente.
Je voudrais remercier notre rapporteur général pour la clarté de son exposé. La semaine dernière, j'ai interrogé le Gouvernement sur les incidences des prêts consentis à la Grèce, à l'Irlande et au Portugal alors que les autres membres de la zone euro vont supporter une charge qui ne sera sans doute pas remboursée de si tôt. A moins que ma structure mentale ne m'ait pas permis de saisir certains éléments, le Gouvernement m'a fait une réponse dilatoire. Quel sera l'impact sur nos finances publiques ?
Radical, donc partisan de l'impôt sur le revenu, je me félicite de la disparition du bouclier fiscal, mais fallait-il en même temps alléger l'ISF ? Quelles que soient ses raisons techniques, la mesure a une portée symbolique : nos concitoyens auront le sentiment qu'on favorise une fois de plus les plus aisés.
En Grèce, de nombreux observateurs, y compris à l'ambassade de France, estiment que l'évasion fiscale représente 80 % du potentiel fiscal. Ne pourrait-on demander à ce pays de se pencher sérieusement sur ce problème ?
L'article 17 prévoit de taxer les résidences françaises des non-résidents et donc les Français vivant à l'étranger. Monsieur le rapporteur général évoquait un débat : je confirme l'émotion des Français de l'étranger, qui s'estiment injustement traités. Pourquoi une deuxième taxe foncière alors qu'ils participent déjà financièrement à la vie de la cité ? Les sénateurs des Français de l'étranger vont déposer un amendement de suppression de l'article 17 : je demande le soutien de notre commission.
Pour l'hébergement d'urgence, nous avions affirmé que les crédits prévus étaient insuffisants. C'était bien le cas puisqu'il va falloir rajouter 50 millions. Pour le projet de la Philharmonie de Paris, je ne saurais me prononcer, ne connaissant pas le dossier. Ce qui est sûr, c'est que la partition a mal été exécutée et qu'il faudrait que la budgétisation initiale soit plus proche de la réalité. L'intégration d'études d'impact nous permettrait de mieux évaluer le budget.
La réforme de l'ISF est qualifiée d'ambitieuse et d'équilibrée. Équilibrée ? Notre rapporteur général se pose quelques questions... Ambitieuse ? Certainement pas ! Il s'agit surtout d'un correctif budgétaire à visée électoraliste.
Enfin, il serait utile d'être mieux informé sur la situation de la Grèce, car les rumeurs sont inquiétantes.
Le projet de loi de finances rectificative prévoit une indemnisation des victimes du Mediator. Si elles doivent bénéficier d'une réparation pour les préjudices subis, est-il raisonnable de prévoir 5 millions dans le programme 183 ? Les coûts de ce dossier ne sont pas encore quantifiés et les 5 millions ne suffiront sans doute pas. En outre, ne s'agit-il pas ici de modifier le code de la santé publique, ce qui n'a rien à voir avec ce projet de loi de finances rectificative ? Je me tourne vers le rapporteur général.
Je note avec satisfaction la suppression du bouclier fiscal, même s'il est dommage de le faire aussi tard. Je me félicite aussi de la remontée du plafond de l'ISF, qui permet de régler le problème des propriétaires dont le revenu est modeste - je pense aux zones frontalières comme aux régions côtières. Pour que la réforme soit plus équilibrée et plus lisible, il aurait fallu instaurer une nouvelle tranche d'impôt sur le revenu sur les contribuables les plus fortunés. Enfin, les chèques du bouclier vont-ils continuer à être versés cette année ?
Non, il n'y aura plus de chèques, mais une auto liquidation ; une tranche supplémentaire de l'impôt sur le revenu est hors champ du projet de loi de finances rectificative. Madame Des Esgaulx, les 5 millions d'euros pour le Mediator ne suffiront peut-être pas, et selon les hypothèses que l'on retient, 100 millions pourraient être nécessaires à terme. La commission des affaires sociales s'est saisie pour avis de ce projet de loi de finances rectificative : nous l'écouterons avec respect. De fait, certains découpages sont surprenants : ainsi, le Mediator se trouve dans ce collectif alors que la prime de partage de la valeur ajoutée sera dans le projet de loi de financement rectificative alors que ses conséquences sont plus fiscales que sociales. Comment voulez-vous que nous y retrouvions nos petits ?
Vous mettez le doigt sur la grande faiblesse de la révision constitutionnelle.
Monsieur Marc, chaque article du projet de loi de finances rectificative comporte une évaluation préalable. En revanche, vous avez raison sur la question de la sous-budgétisation. Je vous proposerai des suppressions indicatives de crédits pour souligner des prévisions insuffisantes.
S'agissant de nos amis établis hors de France, nous examinerons les amendements qui nous serons soumis en séance. Nous réagirons alors avec l'aide du Gouvernement.
M. Fortassin nous a posé une excellente question sur l'incidence budgétaire et financière des prêts à la Grèce. Nous avons versé 4,4 milliards en 2010 et déjà 4,5 milliards en 2011. Notre déficit budgétaire et donc notre dette augmentent. Mais tant que la Grèce nous verse un taux d'intérêt à 5 %, l'opération est positive puisque nous avons emprunté à 2 %. En revanche, nous ne sommes pas sûrs que la Grèce soit un excellent débiteur. En termes maastrichtiens, en ce qui concerne le solde public, cette opération est neutre, pour l'instant.
EXAMEN DES AMENDEMENTS DU RAPPORTEUR GÉNÉRAL
Article 4 bis
Cet article a vocation à inciter à une révélation plus précoce des dons manuels et à permettre l'évaluation de leur valeur au jour de leur déclaration.
Cet article a été introduit à l'initiative de l'Assemblée nationale. Je propose, dans mon amendement n° 1, d'instaurer un seuil de déclenchement de cette obligation déclarative supplémentaire, fixé à 30 000 euros.
Sans doute faut-il le réduire à 15 000 euros, mais on ne peut prévoir une telle obligation dès le premier euro. Les obligations déclaratives actuelles continueraient de s'appliquer pour les dons inférieurs ou égaux à ce seuil.
L'amendement n° 1 ainsi rectifié est adopté.
Article 4 quater
Cet article modifie la territorialité du prélèvement exigible sur les sommes versées au décès au titre d'un contrat d'assurance-vie et aménage les modalités de taxation au titre du prélèvement des contrats d'assurance-vie comportant une clause bénéficiaire démembrée.
L'amendement n° 2 propose d'améliorer la cohérence entre le barème des droits de succession tel qu'il résulte de ce collectif et le régime fiscal du prélèvement acquitté par le bénéficiaire d'un contrat d'assurance-vie au décès du souscripteur.
Afin de tirer les conséquences du relèvement de cinq points du taux des deux dernières tranches du barème d'imposition, soit 902 838 euros et 1,8 million d'euros, je propose de relever de cinq points également le taux de prélèvement sur l'assurance-vie au décès du souscripteur pour le porter à 25 %.
Cette disposition a été votée par la commission des finances de l'Assemblée nationale, mais repoussée en séance. Nous voulons lui témoigner notre solidarité. On nous dit que le rendement de cette mesure serait faible, de l'ordre de 5 à 8 millions d'euros. Mais est-ce exact ?
Je ne suis pas défavorable à cet amendement, d'autant que le modèle économique de l'assurance-vie ne profite pas à l'économie. On nous dit cependant qu'elle est en perte de vitesse ces derniers temps.
La Fédération française des sociétés d'assurances (FFSA) répète qu'il ne faut surtout pas toucher à quoi que ce soit.
Les fluctuations de la collecte des cotisations ne sont pas d'une ampleur telle qu'elles remettent en cause le bien-fondé de notre amendement.
Article 4 quinquies
L'article tend à supprimer les commissions chargées de donner un avis sur la valeur des oeuvres d'art en cas de dation.
C'est l'administration qui devrait alors faire les évaluations : est-elle compétente pour cela ? Ne faut-il pas maintenir ces commissions ?
C'est l'objet de l'amendement n° 3.
L'amendement de suppression n° 3 est adopté.
Article 4 sexies
L'article prolonge le délai de transformation des sociétés civiles de placement immobilier (SCPI) en organismes de placement collectif immobilier (OPCI) en franchise d'impôt.
La loi de finances rectificative pour 2005 avait fixé comme date limite le 18 avril 2012 pour une transformation en franchise d'impôt. Les professionnels veulent repousser cette échéance. Mais rien ne progressera d'ici là ! Je suis partisan d'assumer ce qui a été voté en 2005 au nom d'une meilleure sécurité. Tel est l'objet de mon amendement n° 4.
L'amendement de suppression n° 4 est adopté.
Article 5 bis
L'article 5 bis exclut le logement social outre-mer du « rabot » du plafonnement des niches fiscales spécifique à l'outre-mer.
Restons-en à ce que nous avons voté en loi de finances initiale. Une loi de finances rectificative ne doit pas être l'occasion pour ceux qu'une mesure fiscale a mécontentés de remettre le sujet sur le tapis ! Pourquoi compliquer encore un dispositif fiscal dérogatoire ?
L'amendement de suppression n° 5 est adopté.
Article 6
L'amendement n° 6 est-il d'appel ? Je ne sais pas encore. Il sera au moins un support de discussion avec le Gouvernement sur la reconnaissance, dans notre droit fiscal, de dispositions inspirées de droits étrangers. Les trusts sont utilisés par des sujets fiscaux français pour déléguer la détention de leurs biens, qui échappent ainsi à l'ISF. Le Gouvernement nous présente des dispositions complexes, qui ratissent large, créant des obligations aussi bien pour les constituants que pour les bénéficiaires. Parmi celles-ci figure la création d'un nouveau prélèvement, spécifique aux trusts, dont l'assiette est l'ensemble des droits et biens logés dans de telles structures. Le système est sévère, parce qu'il s'applique à des biens qui auraient eu vocation à être déclarés à l'ISF. Mais si le taux est le même dans les deux cas, 0,5%, où est l'incitation à déclarer à l'ISF ? Si le but est réellement de lutter contre les montages d'optimisation fiscale, il faut fixer un taux plus élevé, 0,7 % par exemple, ce qui correspond à une majoration de 40% - le même qu'en cas de dissimulation à l'ISF.
Je vous soutiens dans votre volonté d'en savoir plus sur ces montages opaques, véritable trou noir de la fiscalité française. Voyez le rapport établi par l'inspection générale des finances à l'occasion de l'affaire Bettencourt. Les raisons de recourir à un trust sont claires.
L'amendement n° 6 est adopté.
Article 7
L'amendement n° 7 a pour but d'engager la discussion avec le Gouvernement. Faut-il maintenir la provision pour hausse des prix pour les sociétés pétrolières ? Une ressource exceptionnelle est-elle la plus adaptée pour financer une revalorisation, pérenne, du barème kilométrique ?
Il serait intéressant de demander à M. de Margerie comment il gère cela. Que Total ne paye pas d'impôt en France est un scandale. Etre éclairé sur cette optimisation fiscale serait utile, à la veille d'une campagne électorale où il sera sans doute beaucoup question des montages fiscaux...
L'amendement n° 7 est adopté.
Article 7 bis
L'article abroge la taxe sur l'achat de services de publicité en ligne.
Par l'amendement de suppression n° 8, nous rétablissons virtuellement la taxe virtuelle sur la publicité en ligne... Lors de notre table ronde, la direction de la législation fiscale nous a dit qu'elle disposera des premiers éléments en avril 2012 : il n'y a donc pas urgence !
Nullement ! Nous souhaitons qu'au second semestre, on nous présente mieux qu'une suppression sans contrepartie, qui laisserait penser que sur internet tout est gratuit. Certes, la taxe est stupide ; elle a tout de même l'avantage d'exister en droit, même si concrètement elle n'est que virtuelle. Ne la lâchons pas avant d'obtenir une alternative ! Nous avons réussi à susciter un début de discussion avec le Conseil de l'économie numérique. Jusqu'à présent personne n'a cherché la bonne formule. L'administration traîne des pieds !
Les pouvoirs publics devraient négocier avec Google pour que celui-ci accepte de payer l'impôt sur les sociétés. La société réalise 11 milliards de dollars de chiffre d'affaires dans la zone Europe-Moyen-Orient et déclare 4,5 milliards aux Bermudes...
Ce n'est pas pour profiter d'un taux d'imposition sur les bénéfices plus faible, puisque les bénéfices sont logés aux Bermudes et non en Irlande... Les 4,5 milliards transitent aussi par les Pays-Bas pour d'autres avantages. Et nous n'en sommes qu'au début du début de l'optimisation... Nous nous ferons rouler dans la farine par les opérateurs si nous ne réagissons pas.
Quand l'un d'eux fait environ 500 millions d'euros de chiffre d'affaires dans notre pays, il est logique qu'il y acquitte de l'impôt sur les bénéfices. La taxe est stupide, car dans un système de B2B, il est aisé de déplacer un annonceur d'un pays à l'autre... Votre premier objectif a bien été atteint, Monsieur le rapporteur général. C'est le bazar !
La taxe est tout de même une arme de dissuasion ! Elle a créé l'émotion.
Elle a réussi à créer le débat au sein du Conseil national du numérique, lequel a une approche plutôt positive.
L'amendement de suppression n° 8 est adopté.
Article 10 et état B annexé
L'article procède, au titre du budget général, à des ouvertures et annulations de crédits de paiement et d'autorisations d'engagement conformément à la répartition fixée à l'état B.
L'amendement n° 9 propose une réduction indicative de crédits pour marquer notre mécontentement à propos des conditions de gestion du projet de grand auditorium de la Philharmonie de Paris.
Le projet est certes mal géré, mais nous avons besoin d'un grand auditorium qui nous place à l'égal des autres grandes capitales. Il est vrai que le ministre s'est défendu sans beaucoup d'arguments techniques...
Si nous entérinons cela, nous ne jouons pas notre rôle. L'amendement est pédagogique.
Une réduction indicative de crédits ne fait pas de mal.
L'amendement n° 9 est adopté.
L'amendement n° 10, relatif à la suppression de la majoration des crédits prévus pour l'hébergement d'urgence des demandeurs d'asile, est-il un prolongement du rapport de Pierre Bernard-Reymond et Philippe Dallier sur le même sujet ?
Oui, et il tend à une réduction indicative des crédits correspondants du ministère.
Je voterai contre l'amendement. Je le demande à la décharge du Gouvernement : qui pouvait prévoir ce qui s'est passé en Tunisie, en Libye, et partout ailleurs ?
C'est une pratique récurrente depuis au moins trois budgets : l'an dernier, la sous-évaluation a représenté un quart du budget, cette année il faut ajouter 50 millions d'euros. Soyons plus insistants !
Maintiendrez-vous votre amendement en séance ?
L'amendement n° 10 est adopté.
Article 14 quater
L'article propose de lisser l'augmentation de la redevance sur les bureaux perçue en Ile-de-France, et de procéder à divers aménagements.
Une réforme de la redevance sur les bureaux en Ile-de-France a été votée dans la loi de finances rectificative de décembre 2010. On nous présente quelques mois après un dispositif dans le dispositif, au profit des communes qui perdent la dotation de solidarité urbaine (DSU) ou l'accès au fonds de solidarité de la région Ile-de-France (FSRIF). L'accès aux dotations est par nature fluctuant. Ajouter ce mécanisme de garantie rend l'ensemble moins lisible pour les entreprises. Gardons-nous de faire une chose, puis son contraire pour atténuer les conséquences ! Mon amendement n° 11 tend à supprimer ce système complexe.
Le rapporteur général de l'Assemblée nationale a voulu traiter le cas des communes - elles sont tout de même cinquante-quatre - qui perdent le bénéfice des deux dotations. Et vous supprimez cela !
Le zonage de la redevance favorise les communes de l'ouest et défavorise celles de l'est, pourtant moins riches. Le dispositif comporte un double effet pervers et votre amendement ne résout rien.
Le Comité des finances locales (CFL) prévoit toujours une sortie en sifflet, sur trois ans, des mécanismes de péréquation. Je ne suis pas partisan de cet amendement.
Parce que nous n'en avons pas mesuré les conséquences !
L'amendement n° 11 est retiré.
Article 14 quinquies
L'article supprime l'affectation du tiers du produit de la TGAP « granulats » aux communes.
Avec mon amendement n° 12, il s'agit d'en rester au dispositif dans sa version adoptée en décembre dernier.
L'amendement de suppression n° 12 est adopté.
Article 15
L'article aménage la définition des biens professionnels dans le régime de l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF).
Nous revenons avec l'amendement n° 13 sur un élargissement de l'exonération d'ISF au titre des biens professionnels. La notion de directeur général délégué n'est pas suffisamment caractérisée en droit, certains directeurs généraux sont mandataires sociaux, d'autres non, et l'on pourrait voir fleurir les directeurs généraux délégués de pure opportunité fiscale... Il est préférable d'en rester au droit actuel, ce que propose cet amendement.
L'amendement n° 13 est adopté.
Article 17
L'article institue une taxe sur les résidences secondaires des non-résidents.
Je sollicite la réserve sur cet article.
Le vote sur l'article 17 est réservé.
Article 17 bis
L'article modifie les dispositifs d'imposition des prestations de retraite versées sous forme de capital.
L'imposition des retraites en capital n'en finit pas de résonner dans les vallées alpines. Nous avons voté en loi de finances initiale la taxation des prestations supplémentaires de retraite, versées en capital, de source étrangère ou française. Sont par là-même soumis à la fiscalité les versements effectués par des régimes de retraite suisses aux frontaliers français qui ont travaillé dans la Confédération.
Ces avantages échappaient jusqu'à présent à toute imposition au titre des revenus. Nous avons prévu, en loi de finances initiale, un étalement de la charge fiscale sur quinze ans. Il est ici proposé de supprimer le prélèvement libératoire de 7,5 %. Car nous avons dans la même loi voté un prélèvement de 14 % sur certaines retraites supplémentaires versées par les entreprises. Il faut le rappeler !
Pas moins que les bénéficiaires de prestations de retraite supplémentaire versées en France !
Mon amendement de suppression n° 14 vise à appeler l'attention sur cette disparité. Fallait-il la taire ?
Mais l'amendement n'est pas indispensable, il suffit d'une prise de parole ferme sur l'article.
Je peux le retirer. Sans doute le taux du prélèvement libératoire choisi initialement, 14 %, est-il trop élevé.
Cela ne serait pas très vertueux sur le plan budgétaire. Peut-être pourrions-nous réserver l'article 17 bis ?
L'amendement n° 14 est retiré.
Le vote sur l'article 17 bis est réservé.
Article 17 ter
L'article supprime la condition relative au nombre de salariés que doivent respecter les entreprises permettant à leurs investisseurs de bénéficier d'une réduction d'impôt sur le revenu ou d'impôt de solidarité sur la fortune.
Avec l'amendement n° 15, refusons de revenir sur une mesure dont nous avons amplement discuté en loi de finances initiale. Les entreprises dans lesquelles il est possible d'investir en bénéficiant d'une réduction d'impôt doivent compter au moins deux salariés.
L'amendement de suppression n°15 est adopté.
Article 17 quater
L'article crée un dispositif de réduction d'impôt sur le revenu en faveur des fonds d'investissement de proximité en outre-mer.
L'amendement n° 16 tend à supprimer une niche fiscale.
L'amendement de suppression n°16 est adopté.
Article 17 quinquies
L'article supprime la subordination au plafond communautaire d'investissements bénéficiant d'aides d'Etat pour les souscriptions au capital d'entreprises solidaires actives en matière de logement social.
L'amendement de suppression n° 17 tend à repousser une demande catégorielle qui s'apparente à une niche... et dont la compatibilité avec les lignes directrices de Bruxelles sur les aides d'Etat est loin d'être assurée !
Il n'est pas prouvé que le plafond communautaire de 2,5 milliards d'euros soit saturé ; il est parfaitement possible de segmenter les appels de fonds.
Je reconnais que votre amendement est orthodoxe.
L'amendement de suppression n° 17 est adopté.
Article 18
L'article 18 prévoit l'imposition des plus-values latentes lors du transfert par les contribuables de leur domicile fiscal hors de France. Mais les parts d'OPVCM sont exclues de l'assiette de l'exit tax. Pourquoi ? Ou bien l'on retient une approche globale et tout le patrimoine transféré est pris en compte, ou bien le dispositif s'applique exclusivement aux biens professionnels. Mais il faut être clair. Tel est le sens de mon amendement n° 18.
Il est excellent.
L'amendement n°18 est adopté, ainsi que l'amendement de précision n° 19.
Articles additionnels après l'article 18
Oui et il y en aura encore à supprimer ! Il faudra dix ans. On a oublié le cas des communes isolées qui ont rejoint un EPCI à fiscalité professionnelle unique au 1er janvier 2011 ainsi que la transformation d'un EPCI à fiscalité additionnelle en EPCI à fiscalité professionnelle unique. La transformation d'une communauté de communes en communauté d'agglomération tombe sous ce registre.
La commune bénéficie deux fois des compensations de la réforme de la taxe professionnelle - à travers l'attribution de compensation et en conservant le bénéfice du fonds national de garantie individuelle de ressources (FNGIR) et la dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle (DCRTP). L'amendement n°21 résout ce problème au nom de la cohérence.
L'amendement n° 21 est adopté.
Même chose pour l'amendement n° 22.
Tant mieux si elles ont pour effet de sensibiliser chacun aux préoccupations des conseils municipaux. Il y a trois ans, vous auriez pu y être sensible.
La compensation des pertes de recettes résultant de la suppression de la taxe professionnelle a été prévue pour les communes, mais non pour les syndicats de communes - qui ne sont pas des EPCI à fiscalité propre. Il en a résulté une rupture d'égalité entre les syndicats à contribution budgétaire et ceux à contribution fiscalisée, qui subissent aujourd'hui des distorsions fiscales et doivent financer leurs besoins sur une base fiscale fortement réduite. La charge pour les petites entreprises, les artisans, augmente.
Si les entreprises paient plus que prévu, la collectivité reçoit plus que prévu.
Non... Les entreprises pénalisées sont celles qui ont peu d'équipements et de biens mobiliers, certains artisans, certaines PME, du commerce rural.
Les « Bricomarchés », les artisans, les professionnels qui ont des surfaces de vente importantes et peu d'équipements, en particulier le commerce rural profond.
Il faudra affiner la rédaction de cet amendement - nous en discutons avec le Gouvernement.
L'amendement n° 22 est adopté.
Article 18 ter
Article 24
L'article crée un fonds finançant des prestations d'accompagnement social de certaines personnes attributaires de logements sociaux ou adaptés.
Je demande la réserve de l'article 24, faute d'une étude suffisante.
Le vote sur l'article 24 est réservé.
Article 28
L'article prévoit la saisine individuelle de la Cour des comptes pour un député ou un sénateur.
Je crains qu'une saisine individuelle de la Cour des comptes par chaque député et chaque sénateur - deux demandes par an pour chacun - soit illusoire. La Cour enverra des réponses formelles, tout cela n'est pas raisonnable. L'amendement n° 24 tend à supprimer cette disposition.
L'amendement n° 24 est adopté.
Article 29
L'article instaure un recrutement complémentaire sur concours de conseillers de chambre régionale des comptes (CRC).
L'amendement n° 25 tend à réduire la période pendant laquelle est prolongée la procédure dérogatoire de recrutement de magistrats des chambres régionales des comptes. En effet, on n'en a pas évalué toutes les conséquences et la prolonger si longtemps ne serait pas raisonnable. La réforme du code des juridictions financières n'a toujours pas été examinée.
Nous ne souhaitons pas tout rejeter, d'autant que les comptes de nos collectivités sont contrôlés par les chambres régionales. Ne laissons pas penser que nous serions assez contents de supprimer la procédure de recrutement.
Autorisons la prorogation de la procédure pendant un an.
L'amendement n° 25 est adopté.
Article 33
L'article tend à augmenter l'autorisation de garantie de la France en ce qui concerne les financements obtenus par le Fonds européen de stabilité financière (FESF).
L'article doit être précis et il est nécessaire de faire référence à la date avant laquelle doit intervenir la modification de l'accord-cadre du 7 juin 2010, soit la réunion du Conseil européen le 24 juin 2011. Tel est l'objet de mon amendement n° 26. Si le Conseil échoue, s'il n'y a pas de texte, sans cet amendement notre autorisation de garantie vaudrait tout de même, intemporelle. L'autorisation doit être limitée à ce qui sera décidé lors de la prochaine réunion européenne. Il faudra refaire le point avec le Gouvernement en séance publique.
L'amendement n° 26 est adopté.
L'amendement n° 27 supprime un anglicisme en remplaçant « facilité » par « fonds ».
L'amendement n° 27 est adopté.
Article 36
L'article instaure un plafond des autorisations d'emplois des autorités publiques indépendantes.
Comment répartir un plafond global entre les diverses autorités ? La rédaction n'est pas aboutie. Elle me fait penser au projet qui avait été imaginé à une époque : des négociations entre les jeunes qui sortaient de l'ENA et les administrations susceptibles de les accueillir... Mon amendement n° 28 corrige cela.
L'article 36 suscite une grande émotion. Nous recevons prochainement les dirigeants de l'AMF. Nous les interrogerons à ce sujet.
Je ne comprends pas la logique de l'amendement : les plafonds d'emplois ont sous votre impulsion, Monsieur Marini, été étendus aux opérateurs.
Les autorités publiques indépendantes (API) ne sont pas des opérateurs.
On en crée beaucoup et vous étiez défavorable à cette « agenciarisation ». Je ne comprends pas que vous proposiez cela !
Les opérateurs sont des démembrements de l'Etat et celui-ci a la maîtrise de leurs moyens. Les API sont indépendantes de l'exécutif et des administrations ! Imagine-t-on dire à l'AMF combien de personnes elle doit recruter ? Lui imposer une grille approuvée par le ministère des finances ?
L'AMF reçoit des financements parafiscaux, avec un plafond approuvé par la loi, afin de préserver ses moyens.
L'amendement n° 28 est adopté.
A l'issue de ce débat, la commission décide de proposer au Sénat d'adopter l'ensemble des articles du projet de loi de finances rectificative pour 2011 ainsi modifiés, à l'exception des articles 17, 17 bis et 24, sur lesquels sa position est réservée jusqu'à la réunion d'examen des amendements extérieurs.
La commission procède enfin à l'examen des rapports de M. Adrien Gouteyron, rapporteur, sur les projets de loi :
- n° 375 (2009-2010) autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de l'île de Man en vue d'éviter la double imposition des entreprises exploitant, en trafic international, des navires ou des aéronefs ;
- n° 450 (2010-2011) autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Région administrative spéciale de Hong Kong de la République populaire de Chine en vue d'éviter les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales ;
- n° 516 (2010-2011) autorisant l'approbation de l'accord sous forme d'échange de lettres entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement d'Anguilla relatif à l'échange de renseignements en matière fiscale ;
- n° 359 (2010-2011) autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume des Pays-Bas, au titre des Antilles néerlandaises, relatif à l'échange de renseignements en matière fiscale ;
- n° 514 (2010-2011) autorisant l'approbation de l'accord sous forme d'échange de lettres entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Belize relatif à l'échange de renseignements en matière fiscale ;
- n° 513 (2010-2011) autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de Sa majesté le Sultan et Yang Di-Pertuan de Brunei Darussalam relatif à l'échange de renseignements en matière fiscale ;
- n° 360 (2010-2011) autorisant l'approbation de l'accord sous forme d'échange de lettres entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement des îles Cook relatif à l'échange de renseignements en matière fiscale ;
- n° 511 (2010-2011) autorisant l'approbation de l'accord sous forme d'échange de lettres entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Costa Rica relatif à l'échange de renseignements en matière fiscale ;
- n° 515 (2010-2011) autorisant l'approbation de l'accord sous forme d'échange de lettres entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Commonwealth de la Dominique relatif à l'échange de renseignements en matière fiscale ;
- n° 512 (2010-2011) autorisant l'approbation de l'accord sous forme d'échange de lettres entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Libéria relatif à l'échange de renseignements en matière fiscale.
La commission des finances a examiné, ces deux dernières années, trente-cinq projets de loi visant à ratifier, soit des conventions relatives à la suppression des doubles impositions, soit des accords d'échange de renseignements en matière fiscale.
Nous examinons aujourd'hui dix accords supplémentaires :
- deux conventions fiscales de suppression des doubles impositions, signées respectivement avec l'île de Man et Hong Kong ;
- huit accords d'échange de renseignements signés avec Anguilla, les Antilles néerlandaises, Belize, Brunei, le Costa Rica, la Dominique, les îles Cook et le Libéria.
Vous me permettrez ensuite de faire un point sur l'état d'avancement de la politique de lutte contre les paradis fiscaux, tant sur le plan multilatéral que français.
Je fais ici référence :
- d'une part, à la mise à jour des listes, celle de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) mais aussi celle de la France ;
- et, d'autre part, aux conséquences qui s'attachent à ces listes, c'est-à-dire l'application automatique des sanctions fiscales françaises aux Etats qui demeurent inscrits sur notre liste et l'examen par les Pairs du Forum mondial de l'OCDE, qui s'est tenu aux Bermudes le 31 mai dernier.
S'agissant des accords de suppression des doubles impositions, celui conclu avec l'île de Man, signé le 26 mars 2009, a pour objet unique d'éviter la double imposition en matière de navigation maritime et aérienne.
Il prévoit, en effet, que les bénéfices qu'une entreprise tire du trafic maritime ou aérien international ne seront imposables que dans le pays où se trouve le siège de direction effective de celle-ci.
Cet accord technique doit, cependant, être conçu comme complétant le lien conventionnel déjà approuvé, en matière d'échange de renseignements, l'an dernier. Les deux conventions sont intrinsèquement liées car l'entrée en vigueur et la pérennité du présent accord sont subordonnées à celles de l'accord d'échange de renseignements.
Quant à l'accord fiscal conclu avec Hong Kong, je tiens à souligner qu'il est l'aboutissement d'un long processus de négociations. Celui-ci a débuté en 2003. Il a tout d'abord permis de négocier les dispositifs anti-abus prévus par la législation française.
La convention n'a pu, toutefois, être paraphée, principalement en raison de l'impossibilité pour Hong Kong de transmettre toutes les informations bancaires utiles ainsi que le prévoit le modèle de l'OCDE.
Cet obstacle à l'échange a été levé en 2009, à la suite de la dynamique initiée par les travaux du sommet du G 20. La législation hongkongaise a été modifiée en conséquence, en janvier 2010. Ces modifications sont entrées en vigueur en mars de l'année dernière. La convention a pu finalement être signée, le 21 octobre 2010.
Cet accord, vous n'en serez pas étonnés, est largement inspiré du modèle de convention fiscale de l'OCDE de 2008.
Il prévoit ainsi une répartition du droit d'imposition entre l'Etat, source des revenus, et celui de la résidence du bénéficiaire, en fonction des revenus.
En l'absence d'un droit exclusif de taxer un revenu, la double imposition qui en résulte est éliminée conformément à la pratique conventionnelle française du crédit d'impôt.
A titre d'illustration, s'agissant des personnes physiques, un résident français imputera, sur l'impôt français, un crédit d'impôt égal au montant de l'impôt hongkongais qu'il a payé, dans la limite du montant de l'impôt français.
Nous pouvons également nous féliciter d'un certain nombre de dérogations au modèle OCDE intégrées à l'accord à la demande de la France. En effet, non seulement l'accord tend à éliminer les doubles impositions, facteur de développement pour l'investissement de nos sociétés à Hong Kong, mais il vise également à supprimer les situations de double exonération grâce, notamment, à la taxation des bénéficiaires effectifs, et à la reconnaissance des dispositifs anti-abus de notre droit interne...
Enfin, l'accord contient un article permettant un échange de renseignements dans des conditions conformes aux standards les plus récents de l'OCDE, ce qui nous conduit à aborder les huit accords dont l'objet exclusif est cet échange.
Ces huit accords ont été conclus, je le rappelle, avec Anguilla, les Antilles néerlandaises, Belize, Brunei, le Costa Rica, la Dominique, les îles Cook et le Libéria. Ils offrent la possibilité à la France de demander aux autorités de ces Etats et territoires toute information utile à la bonne application de sa loi fiscale interne.
Pourront être sollicités tous renseignements vraisemblablement pertinents pour la détermination, l'établissement et la perception des impôts visés dans l'accord, pour le recouvrement et l'exécution des créances fiscales, ou pour les enquêtes en matière fiscale pénale.
Les demandes pourront concerner toute personne ou entité, y compris les trusts et les fondations. Ce dernier point dépend certes des obligations comptables et statutaires imposées à ces organismes fiscalement transparents.
S'agissant par exemple de Jersey, son premier ministre, Terry Le Sueur, a déclaré le 1er juin dernier, devant notre commission, que l'île pouvait répondre à de telles demandes relatives à la composition des trusts qui y sont établis.
En outre, ces territoires ne pourront pas opposer un éventuel secret bancaire.
Les accords prévoient que ces Etats et territoires doivent adapter leur législation interne afin de conférer un caractère effectif à l'échange d'informations, en rendant l'information accessible, disponible et en mettant en place des mécanismes d'échange d'informations.
L'examen de l'ensemble des dix accords m'a amené tout naturellement à m'interroger sur « l'après ratification » des accords conclus en termes de mise en oeuvre de la coopération fiscale internationale.
J'observe, tout d'abord que la politique conventionnelle française s'inscrit dans le cadre multilatéral de l'OCDE. La France a naturellement négocié avec les territoires qui n'avaient pas conclu les douze accords requis par le Forum mondial de la transparence fiscale pour ne plus figurer sur la liste grise ou noire de l'OCDE, établie le 2 avril 2009.
Ainsi, à cette date, la Dominique, Brunei, Anguilla et le Libéria figuraient sur la « liste grise », dans la mesure où ces pays avaient pris l'engagement auprès de l'OCDE de respecter les standards internationaux d'échange de renseignements, sans les avoir toutefois encore mis en oeuvre. Ils sont, depuis, passés sur la « liste blanche ».
Le Costa Rica, quant lui, était inscrit le 2 avril 2009, sur la « liste noire » dès lors qu'il n'avait pas formellement exprimé un tel engagement. S'il le formalisa dès le 7 avril 2009 afin d'intégrer la liste « grise », il y demeure encore aujourd'hui car des huit Etats et territoires examinés ce matin, il est le seul à n'avoir pas intégré la « liste blanche » de l'OCDE.
Cette observation nous alerte sur le risque d'inertie de certains pays à coopérer fiscalement. C'est pourquoi la France a souhaité élaborer des sanctions fiscales automatiques frappant les acteurs ainsi que les flux transitant par des pays « réticents à la coopération fiscale ».
A cette fin, elle a tout d'abord établi sa propre liste d'Etats et territoires non coopératifs, dans le cadre de la loi de finances rectificative pour 2009.
Un pays est qualifié de non coopératif s'il figure sur la dernière liste grise publiée par l'OCDE et s'il n'a pas signé avec la France une convention d'assistance administrative permettant l'échange de renseignements.
La première liste française de ces « paradis fiscaux » a été publiée le 12 février 2010, par arrêté des ministres chargés de l'économie. Elle comptait dix-huit pays dont Anguilla, Belize, Brunei, le Costa Rica, la Dominique, les îles Cook et le Libéria.
Cette liste a été mise à jour le 14 avril 2011. Ainsi Saint-Christophe et Niévès et Sainte-Lucie en ont été retirés alors que les îles Turques et Caïques et Oman y ont été ajoutés.
Pour ces deux pays nouvellement inscrits, les sanctions fiscales ne seront donc applicables qu'au 1er janvier 2012.
En revanche, en ce qui concerne les pays qui n'ont pas été retirés de la liste, tels qu'Anguilla, les sanctions entrent en application automatiquement dès 2011, alors même que nous examinons le projet de loi visant à ratifier l'accord signé avec ce territoire. Seules, l'entrée en vigueur et l'application de l'accord permettront la radiation de la liste française.
Craignant un éventuel effet négatif sur le commerce extérieur français, en raison du maintien d'un Etat sur la liste française, en dépit de ses efforts pour coopérer fiscalement, j'ai exprimé le souhait que la publication de cette liste soit accompagnée de précisions données par l'administration sur l'état d'avancement des actions entreprises par cet Etat, c'est-à-dire la signature, la ratification d'un accord, le changement de sa législation etc. En réponse à ma proposition, l'administration a déclaré réfléchir à l'élaboration d'une instruction fiscale sur ce point précis.
L'enjeu est donc d'importance. Les conséquences de l'inscription sur ces listes sont, en effet, de deux ordres :
- l'application automatique de sanctions fiscales pour la France ;
- la formulation de recommandations par le groupe des pairs du Forum mondial pour l'OCDE.
En ce qui concerne la France, les flux financiers transitant par les pays figurant sur la liste française des territoires non coopératifs sont frappés de diverses dispositions pénalisantes.
Je rappellerai pour mémoire que ces mesures visent, en premier lieu, les résidents de France qui réalisent des transactions avec de tels pays.
Elles se traduisent, notamment, par un renforcement des dispositifs de lutte contre la fraude, par un durcissement du régime d'imposition des plus-values mobilières et immobilières ou encore par le refus du bénéfice du régime mère-fille aux sociétés françaises.
Ces dispositions frappent, en second lieu, les résidents de ces paradis qui bénéficient de flux provenant de France. Elles entraînent l'application de taux majorés de retenue à la source sur les revenus immobiliers et plus-values ainsi que sur les intérêts, dividendes et redevances.
L'action française se conjugue parallèlement avec l'examen conduit par le groupe des pairs du Forum mondial de l'OCDE dont la mission depuis 2009 est d'évaluer l'engagement de se conformer aux standards internationaux de la transparence fiscale, au-delà de l'obligation formelle de signer douze accords pour ne plus figurer sur la liste grise ou noire de l'OCDE.
En effet, si l'établissement des listes a permis essentiellement de signer environ six cents accords permettant l'échange de renseignements, il convient désormais de se référer aux résultats des évaluations menées par le groupe des pairs du Forum mondial, présidé par la France en la personne de François d'Aubert.
Trente-quatre rapports ont été publiés à ce jour, depuis le début de cette évaluation. Les neuf derniers ont été adoptés lors de la réunion du Forum qui s'est tenue aux Bermudes les 31 mai et 1er juin derniers. Ils concernent l'Italie, l'île de Man, la Nouvelle Zélande, les Etats-Unis, La France, la Hongrie, les Philippines, Singapour et la Suisse.
Le rapport sur Jersey, quant à lui, n'a pas pu être adopté, en raison d'une objection mineure soulevée par la Norvège. Il sera à nouveau soumis à l'adoption à la prochaine réunion du Forum en juillet.
Il convient de se féliciter des conclusions du rapport sur la France. Celles-ci font valoir que nous disposons d'un des plus importants réseaux conventionnels. Le cadre légal est satisfaisant. Le rapport recommande néanmoins que les délais de réponse soient raccourcis.
Quant à la Suisse, tout en relevant les progrès réalisés, le groupe des pairs met en exergue les domaines dans lesquels l'engagement de se conformer aux standards internationaux n'est pas totalement satisfait.
Il s'agit notamment des mécanismes d'identification des porteurs de part. Il apparaît également que les autorités suisses n'ont pas totalement accès à l'information bancaire, s'agissant des demandes formulées dans le cadre d'accords entrés en vigueur avant le 1er octobre 2010, sous réserve des cas de fraude.
Enfin, en ce qui concerne l'île de Man, le rapport conclut que les éléments requis sont satisfaits. Il préconise, néanmoins, que soit améliorée la disponibilité des informations comptables des sociétés en commandite.
En conclusion, si les cent un pays membres du Forum mondial sont entrés dans un système de discipline collective, cette évaluation repose sur le consensus.
Il n'existe pas, en effet, d'ordre fiscal international. C'est pourquoi, le réseau d'accords bilatéraux que la France tisse est si important.
L'adoption des dix projets de loi de ratification soumis à votre approbation en constitue donc une toute première étape, absolument indispensable, mais qui devra être suivie d'une vigilance accrue.
En conséquence, je vous propose d'adopter, sans réserve, les présents projets visant à approuver les accords conclus avec Anguilla, les Antilles néerlandaises, Belize, Brunei, le Costa Rica, la Dominique, Hong Kong, l'île de Man, les îles Cook et le Libéria.
Je remercie le rapporteur d'exercer son droit de suite avec vigilance sur la politique conventionnelle française ainsi qu'en matière de lutte contre les paradis fiscaux. En l'absence éventuelle de débat en séance si aucun groupe n'en fait la demande, je souhaiterais évoquer les points suivants.
S'agissant de la Suisse, j'observe que le président de la République souhaite que la prochaine réunion du G 20, qui se tiendra à Cannes les 3 et 4 novembre 2011, prennent acte des recommandations formulées par le Forum mondial. Quelle sera la position de la France envers la Suisse qui ne respecte pas l'ensemble des standards internationaux de transparence ? Celle-ci figurera-t-elle dans la prochaine liste française des Etats et territoires non coopératifs ?
Par ailleurs, je souhaiterais une communication de votre part sur l'accord en cours de négociation entre la Suisse et l'Allemagne, d'une part, et la Grande Bretagne, d'autre part, dont l'impact sur la position française à Bruxelles pourrait être négatif.
En ce qui concerne les accords soumis à notre examen aujourd'hui, je constate qu'Anguilla, les îles Cook, Brunei et la Dominique demeurent inscrits sur la liste française des paradis fiscaux mise à jour en avril dernier. Il serait avisé de se procurer auprès du ministère de l'économie un bilan de l'application du dispositif de sanctions, voté en loi de finances rectificative en 2009. Il me paraît essentiel d'exercer notre vigilance sur le rendement des sanctions fiscales. Quant à la convention signée avec Hong Kong, celle-ci requiert une surveillance particulière car paradoxalement ce pays ne figure pas sur notre liste.
S'agissant des examens menés par le Forum mondial, je déplore que la méthodologie d'évaluation de la transparence adoptée par le Forum ne prenne pas en compte le nombre de demandes formulées et le montant de l'assiette recouvrée, contrairement à ce que la France a voté en 2009. Ces accords seront-ils examinés en séance ?
Ils devraient être inscrits en séance le 13 juillet et adoptés selon la procédure simplifiée, sauf demande de débat. Ce sont des sujets de première importance qui s'inscrivent, cependant, dans un calendrier législatif très chargé.
La commission des finances du Sénat est la seule à effectuer un travail de réflexion sur ce thème. Quel que soit le résultat des élections sénatoriales, il importe qu'elle poursuive son contrôle.
Le dernier point de mon intervention concerne une dépêche en date de ce matin faisant état d'une transmission de données bancaires en provenance de la Belgique concernant 250 000 comptes étrangers de résidents, à plus de vingt-six pays différents. 100 000 de ces comptes concerneraient des Français, 50 000 des Hollandais, 22 500 des Allemands, 15 000 des Anglais et autant d'Espagnols. Là encore, il serait intéressant d'en obtenir la liste.
Je n'aurai qu'une remarque pour constater que bien que les études d'impact jointes aux projets de loi soient le plus souvent intéressantes - on y apprend notamment que 85 % des activités de Saint-Martin sont constituées par des services -, leur valeur est très inégale.
Ce n'est pas la première fois que Nicole Bricq nous invite à examiner les liens conventionnels qui se tissent entre la Suisse, l'Allemagne et la Grande Bretagne. Cette question mérite, en effet, toute notre attention. S'agissant d'Anguilla, Brunei, les îles Cook et la Dominique, il est malheureusement top tôt pour obtenir des données sur la mise en oeuvre du dispositif voté en 2009 car les sanctions ne sont appliquées que depuis le 1er janvier 2011. Quant à la remarque de notre collègue Joël Bourdin, elle est judicieuse. Il est, en effet, pertinent d'exiger que les études d'impact répondent à un modèle de qualité.
Mes chers collègues, nous allons donc émettre un avis tendant à approuver ces dix accords fiscaux. Nous allons convenir que l'approbation puisse se faire sans débat. Je voudrais témoigner enfin toute notre reconnaissance et admiration à notre rapporteur pour son expertise alors que cet examen constitue sa dernière prestation en tant que rapporteur devant notre commission.
La commission adopte :
le projet de loi autorisant l'approbation de l'accord avec l'île de Man et le rapport du rapporteur ;
le projet de loi autorisant l'approbation de l'accord avec Hong Kong et le rapport du rapporteur ;
les huit projets de loi d'approbation d'accords d'échange de renseignements en matière fiscale et le rapport du rapporteur commun à ces huit textes.
La commission demande que les dix projets de loi fassent l'objet d'une procédure d'examen simplifié en séance publique, en application des dispositions de l'article 47 decies du Règlement du Sénat.