La séance, suspendue à dix-neuf heures quarante-cinq, est reprise à vingt et une heures quarante-cinq.
La séance est reprise.
Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de financement de la sécurité sociale pour 2015.
Dans la discussion des articles de la troisième partie, nous en sommes parvenus à l’article 8 bis.
I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° L’article L. 171-3, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2014-626 du 18 juin 2014 relative à l’artisanat, au commerce et aux très petites entreprises, est ainsi modifié :
a) Après le mot : « affiliées », la fin de la première phrase du premier alinéa est ainsi rédigée : «, dans des conditions fixées par décret, à un seul des régimes de sécurité sociale dont relèvent ces activités. » ;
b) Après le mot : « dans », la fin de la seconde phrase du même alinéa est ainsi rédigée : « ce seul régime. » ;
c) Les deuxième à avant-dernier alinéas sont supprimés ;
2° Après l’article L. 171-3, il est inséré un article L. 171-6 ainsi rédigé :
« Art. L. 171 -6. – Des règles de coordination sont instituées, par décret, entre régimes d’assurance maladie et maternité pour les personnes n’exerçant pas d’activité professionnelle les assujettissant à un régime de sécurité sociale qui :
« 1° Ont relevé, simultanément ou successivement, soit de régimes de travailleurs salariés, soit d’un régime de travailleurs salariés et d’un régime de travailleurs non salariés, soit de plusieurs régimes de travailleurs non salariés ;
« 2° Ou sont titulaires de plusieurs pensions servies soit par des régimes de travailleurs salariés, soit par des régimes de travailleurs salariés et non salariés, soit par des régimes de travailleurs non salariés. » ;
3° Le 4° de l’article L. 613-2, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2014-626 du 18 juin 2014 précitée, est abrogé ;
4° Le second alinéa de l’article L. 613-4, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2014-626 du 18 juin 2014 précitée, est ainsi rédigé :
« Le droit aux prestations en nature est ouvert dans l’un ou l’autre de ces régimes, selon des modalités définies par décret. » ;
5° Les articles L. 161-6, L. 613-5 et L. 613-6 sont abrogés ;
6° Le deuxième alinéa de l’article L. 613-7, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2014-626 du 18 juin 2014 précitée, est ainsi rédigé :
« Le droit aux prestations en nature est ouvert dans l’un ou l’autre de ces régimes, selon des modalités définies par décret. » ;
7° L’article L. 613-7-1, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2014-626 du 18 juin 2014 précitée, est ainsi modifié :
a) Au début des I et II, sont ajoutés les mots : « Sauf demande contraire de leur part effectuée dans des conditions fixées par décret, » ;
b) Au I, les mots : «, sauf demande contraire de leur part effectuée dans des conditions fixées par décret, » sont supprimés ;
8° L’article L. 622-10, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2014-626 du 18 juin 2014 précitée, est abrogé ;
9° La seconde phrase du dernier alinéa de l’article L. 161-1-1, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2014-626 du 18 juin 2014 précitée, est ainsi rédigée :
« Le cas échéant, les cotisations de sécurité sociale ayant fait l’objet de cette exonération et dues au titre de la période courant à compter de cette date font l’objet d’une régularisation, dans des conditions définies par décret. » ;
10° Au début du III de l’article L. 325-1, les mots : « Par dérogation aux dispositions de l’article L. 161-6, » sont supprimés.
II. – Le code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :
1° L’article L. 732-9 est ainsi modifié :
a) Le II est ainsi rédigé :
« II. – Pour les personnes mentionnées au 2° de l’article L. 722-12, le droit aux prestations en nature est ouvert dans l’un ou l’autre des régimes auxquels elles sont affiliées, selon des modalités définies par décret. » ;
b) Le III est abrogé ;
2° Au début du cinquième alinéa de l’article L. 761-3, les mots : « Par dérogation aux dispositions de l’article L. 161-6 du code de la sécurité sociale, » sont supprimés.
III. – A. – Le présent article s’applique aux cotisations et aux contributions de sécurité sociale dues au titre des périodes courant à compter du 1er janvier 2015.
B. – Par dérogation au A du présent III, les 7° et 9° du I s’appliquent aux cotisations et aux contributions de sécurité sociale dues au titre des périodes courant à compter d’une date fixée par décret, et au plus tard à compter du 1er janvier 2016.
L'amendement n° 31 rectifié bis, présenté par M. Vanlerenberghe, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
I. – Alinéas 10 et 19
Supprimer ces alinéas.
II. – Après l’alinéa 22
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
… – Le I de l’article 25 de la loi n° 2014-626 du 18 juin 2014 relative à l’artisanat, au commerce et aux très petites entreprises est ainsi modifié :
1° Le quatrième alinéa du 9° est supprimé ;
2° Le 12° est abrogé.
La parole est à M. le rapporteur général.
Il s’agit d’un amendement de coordination que je soumets à votre sagacité, mes chers collègues.
Favorable, monsieur le président.
L'amendement est adopté.
L'article 8 bis est adopté.
Le I bis de l’article L. 241-10 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :
« I bis. – Chaque heure de travail effectuée par les salariés mentionnés à l’article L. 7221-1 du code du travail ouvre droit à une déduction forfaitaire patronale :
« 1° De la cotisation due au titre des assurances maladie, maternité, invalidité et décès, à hauteur de 0, 75 € dans les cas autres que ceux mentionnés aux 2° et 3° ;
« 2° Des cotisations de sécurité sociale, à hauteur de 1, 50 €, pour les salariés à domicile employés pour des activités de garde d’enfants dont l’âge dépasse l’âge limite mentionné au IV de l’article L. 531-5 et n’excède pas celui mentionné au premier alinéa de l’article L. 521-3, dans la limite d’un nombre d’heures fixé par décret et sous réserve, pour l’employeur, de se conformer aux modalités de déclaration fixées par le décret mentionné au deuxième alinéa de l’article L. 531-8 ;
« 3° Des cotisations et contributions sociales d’origine légale et conventionnelle, à hauteur de 3, 70 €, dans les départements d’outre-mer ainsi que dans les collectivités de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin et de Saint-Pierre-et-Miquelon.
« Ces déductions ne sont cumulables avec aucune exonération de cotisations sociales, ni avec l’application de taux ou d’assiettes spécifiques ou de montants forfaitaires de cotisations. »
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, le régime applicable aux cotisations des particuliers employeurs a été réformé à plusieurs reprises : ont ainsi été supprimés, en 2011, l’abattement de quinze points sur les cotisations patronales et, en 2012, la possibilité de déclarer au forfait, ce qui a représenté une augmentation de 12 % pour les ménages concernés.
Cette seconde modification a eu toutefois l’avantage de rétablir les salariés dans leurs droits et elle a été compensée par une réduction des cotisations de 75 centimes d’euros par heure déclarée.
À plusieurs reprises, nous avons été alertés au sujet d’une dégradation du secteur, qui représente 3, 6 millions de particuliers employeurs et 1, 6 million de salariés. En 2013, les déclarations ont enregistré une diminution de plus de 29 millions d’heures, soit près de 16 500 emplois équivalents temps plein, après une première baisse de 12 000 emplois équivalents temps plein en 2012. Selon les derniers chiffres de l’ACOSS, la masse salariale versée par les particuliers employeurs recule de nouveau de 1, 7 % sur un an.
En juillet dernier, le Sénat avait adopté par deux fois à l’unanimité, en commission puis en séance, un amendement visant à porter de 75 centimes d’euro à 1, 50 euro le montant de la réduction de cotisations.
Victime, dans cette enceinte, d’une seconde délibération et d’un vote bloqué, relevé par l’Assemblée nationale mais sur un périmètre restreint aux publics dits fragiles, l’amendement est finalement tombé dans « l’entonnoir » du Conseil constitutionnel.
Nous y revenons, car ce qui était problème et a été entendu comme tel sur toutes les travées des deux assemblées reste, selon nous, problème aujourd’hui.
Ainsi, à l’occasion de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, l’amendement est représenté, identique sur plusieurs travées.
J’ai de surcroît repris pour ma part l’amendement visant le champ des publics fragiles, compte tenu des remarques faites par Mme la ministre en juillet dernier et de son engagement de préciser par circulaire les emplois éligibles, afin de bien les cibler.
Ce dernier dispositif pourrait de nouveau constituer une solution alternative raisonnable.
Je suis saisi de cinq amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 96 rectifié, présenté par M. Godefroy, Mme Meunier, MM. Dilain, Jeansannetas et Daudigny et Mmes Génisson, Claireaux et Emery-Dumas, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
I. – À la fin de la première phrase du I bis de l’article L. 241-10 du code de la sécurité sociale, les mots : « par décret » sont remplacés par les mots : « à 1, 50 euro ».
II. – Le I s’applique aux cotisations sociales dues au titre des rémunérations versées à compter du 1er janvier 2015.
III. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I et du II ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Yves Daudigny.
Cet amendement reprend les éléments exposés au cours de la discussion du mois de juillet dernier ici même. Je ne les rappelle pas, car ils sont bien connus de l’ensemble de nos collègues.
L'amendement n° 145 rectifié, présenté par MM. Barbier, Mézard, Collin, Esnol et Fortassin, Mme Laborde et M. Requier, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
I. – À la fin de la première phrase du I bis de l'article L. 241–10 du code de la sécurité sociale, les mots : « par décret » sont remplacés par les mots : « à 1, 50 euro ».
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Gilbert Barbier.
M. Daudigny a parfaitement rappelé l’impact de la suppression, en janvier 2013, du régime du forfait.
Certes, une réduction de cotisations de 75 centimes d’euro par heure travaillée a été instaurée, mais elle n’a pas modifié fondamentalement la situation de ce secteur d’emploi, qui a perdu de ce fait, cela a été dit, environ 16 000 emplois équivalents temps plein.
Il s’agit aujourd'hui de revenir sur ce problème. Je rappelle que le 16 juillet dernier le Sénat a voté à l’unanimité une disposition visant à porter à 1, 50 euro la réduction de cotisations, afin de redonner un peu d’espoir aux particuliers employeurs, qui, sinon, seront obligés soit de supprimer carrément des emplois, soit de recourir, on le sait très bien, à un marché parallèle, qui exclut toute déclaration des salariés.
L'amendement n° 211 rectifié bis, présenté par MM. Daudigny, Godefroy, Bérit-Débat et Dilain, Mme Génisson, M. Jeansannetas, Mme Meunier, M. Tourenne, Mmes Schillinger et Emery-Dumas et M. Vergoz, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
I. - Après la première phrase du I bis de l'article L. 241–10 du code de la sécurité sociale, est insérée une phrase ainsi rédigée :
« Cette déduction est fixée à 1, 50 euro pour les salariés mentionnés à l'article L. 7221–1 du code du travail employés pour des services destinés aux enfants, aux personnes âgées en perte d'autonomie et aux personnes handicapées. »
II. - Le I s'applique aux cotisations sociales dues au titre des rémunérations versées à compter du 1er janvier 2015.
III. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale des I et II ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Yves Daudigny.
Cet amendement tend également à doubler le montant de la réduction de cotisations pour la porter à 1, 50 euro au 1er janvier 2015. Il ne vise toutefois que le public pour lequel ces services ne sont pas de confort, à savoir la petite enfance, les personnes âgées dépendantes ou en voie de perte d'autonomie et les personnes handicapées.
Cette proposition ciblée ainsi est conforme aux recommandations formulées par la Cour des comptes dans son rapport sur le développement des services à la personne et le maintien à domicile des personnes âgées en perte d'autonomie.
Il est aujourd'hui soumis à votre approbation, mes chers collègues, dans l’hypothèse où les amendements précédents ne seraient pas adoptés.
Les deux amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 32 est présenté par M. Vanlerenberghe, au nom de la commission des affaires sociales.
L'amendement n° 100 est présenté par Mmes Doineau et Gatel, MM. Cadic, Gabouty et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I. – Alinéa 3
Après les mots :
à hauteur de
rédiger ainsi la fin de cet alinéa :
II. – Alinéa 4
Supprimer cet alinéa.
III. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale de l'augmentation de la réduction forfaitaire de cotisations par heure travaillée est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. le rapporteur général, pour présenter l’amendement n° 32.
Je ne rappellerai pas les motifs ayant présidé au dépôt de cet amendement, qui ont été parfaitement exprimés par MM. Daudigny et Barbier. Nous partageons selon moi les mêmes constats, ce qui nous conduit à proposer de porter de 0, 75 à 1, 50 euro la réduction forfaitaire.
Simplement, c’est la cible qui change. Ainsi cet amendement, sur lequel la commission a émis un avis favorable, concerne-t-il l’ensemble des emplois à domicile.
Reste évidemment au Gouvernement, au niveau réglementaire, à revoir la liste des emplois concernés, pour écarter de l’augmentation de la réduction forfaitaire ceux qui ne correspondent pas à l’esprit de ce que nous voulons faire.
La commission demande la priorité pour la mise aux voix de cet amendement de portée assez générale.
La parole est à Mme Elisabeth Doineau, pour présenter l’amendement n° 100.
L’objet de cet amendement, identique au précédent, est de porter de 0, 75 à 1, 50 euro la réduction forfaitaire de cotisations par heure travaillée pour les emplois à domicile.
Dans ce secteur, le nombre d’heures déclarées a diminué fortement, de 4, 9 % en 2011 et de 4, 5 % en 2012. Concrètement, cela a représenté en 2012 la destruction nette de 6 900 emplois équivalents temps plein, la perte de 70 millions d’euros de salaires nets, l’alourdissement de 12 % du coût de l’emploi à domicile, tandis que les déclarations enregistraient une baisse de 11 millions d’heures.
Le régime fiscal de l’aide à domicile a pourtant été encore durci, avec la suppression de la possibilité, pour l’employeur, de cotiser sur une assiette forfaitaire.
C’est pour contrebalancer cette dernière mesure que la réduction forfaitaire de 0, 75 euro, entrée en vigueur le 1er janvier 2013, a été mise en place.
Mais son montant est trop faible pour avoir eu l’impact escompté. Le volume des heures déclarées dans le secteur de l’emploi à domicile a reculé de 6 % en 2013, soit l’équivalent de 16 500 emplois détruits. Notre proposition vise donc à lutter contre le développement du travail au noir.
Si cet amendement n’était pas adopté, le Gouvernement se priverait, pour réaliser une économie de quelques millions d’euros, de dizaines voire de centaines de millions d’euros de recettes.
Quel est l’avis de la commission sur les amendements n° 96 rectifié, 145 rectifié et 211 rectifié bis ?
En présentant l’amendement de la commission, j’ai exprimé sa position, qui me semble très explicite : nous souhaitons que le doublement de la réduction forfaitaire s’applique à l’ensemble des emplois, et non pas à certains emplois ciblés d’une façon sans doute intéressante, mais imparfaite. Car toute cible est restrictive.
Selon moi, une telle mesure est de nature à favoriser l’emploi, à faire reculer l’emploi non déclaré, et donc à augmenter les cotisations versées à la sécurité sociale. Il y a tout avantage à voter l’amendement de la commission, ce qui ne veut pas dire que les autres soient sans intérêt. Tous se rejoignent, témoignant de notre volonté de traduire dans les faits ce que nous avions déjà voté ici à l’unanimité en juillet dernier.
Quel est l’avis du Gouvernement sur les amendements n° 96 rectifié, 145 rectifié et 211 rectifié bis, ainsi que sur les amendements identiques n° 32 et 100 ?
Je serai bref, car nous avons déjà eu de nombreux échanges sur ce sujet.
Monsieur le rapporteur général, selon vous, et je partage votre point de vue, ces amendements se distinguent par leur cible.
Je ne comprends donc pas que vous nous proposiez d’adopter celui qui, justement, n’est pas ciblé. Tous les autres, ou presque – je pense en particulier à celui de M. Daudigny – ont l’avantage de cerner le problème, de respecter, me semble-t-il, une recommandation de la Cour des comptes, et de rejoindre le point de vue du Gouvernement.
Le présent article prévoit de cibler le doublement de la réduction forfaitaire, laquelle trouve son origine dans une succession de décisions déjà retracées assez longuement dans cet hémicycle, sur la garde d’enfants.
Le Gouvernement souhaite donc s’en tenir au ciblage retenu par l’Assemblée nationale, après discussion. Nous estimons le coût de l’amendement de la commission des affaires sociales à 186 millions d’euros. Certes, on peut toujours penser que l’augmentation des heures travaillées permettra de couvrir cette charge, mais tel n’est pas notre sentiment profond. Je rappelle qu’il existe déjà de nombreuses mesures, fiscales et sociales, représentant au total une dépense de près de 6 milliards d’euros en faveur de ce secteur. Vous proposez de l’accroître encore de 186 millions d’euros, ce à quoi le Gouvernement n’est pas favorable. Les autres amendements étaient plus ciblés, même s’ils ne l’étaient pas toujours autant que nous l’aurions souhaité.
Par conséquent, le Gouvernement est défavorable à l’ensemble de ces amendements.
J’ai été saisi par la commission d’une demande de priorité de mise aux voix des amendements identiques n° 32 et 100.
Je rappelle que, aux termes de l’article 44, alinéa 6, du règlement du Sénat, lorsqu’elle est demandée par la commission saisie au fond, la priorité est de droit, sauf opposition du Gouvernement.
Quel est l’avis du Gouvernement sur la demande de priorité formulée par la commission ?
Monsieur le secrétaire d’État, il est exact que nous n’avons pas ciblé notre amendement, mais je vous renvoie à l’article D. 7231–1 du code du travail, qui établit en quelque sorte un classement préférentiel en visant à la fois « les activités de services à la personne soumises à agrément » et « les activités de services à la personne soumises à titre facultatif à la déclaration prévue à l’article L. 7232–1–1 ». De fait, vous avez la main, si j’ose dire, pour moduler en quelque sorte notre amendement et élargir au maximum la liste des activités ciblées par nos collègues. L’objectif est de favoriser l’emploi dans le secteur des services à la personne.
Monsieur le rapporteur général, l’article auquel vous faites référence dresse simplement la liste des activités éligibles aux déductions en vigueur, y compris les déductions fiscales.
Vous proposez de porter de 0, 75 euro à 1, 50 euro la réduction forfaitaire de cotisations par heure travaillée, quelle que soit la prestation fournie. Je le répète, votre amendement n’est pas ciblé et il ne pourra pas l’être par voie réglementaire, sauf à décider, ce qui n’est pas l’intention du Gouvernement, de sélectionner parmi les emplois à domicile ceux qui feraient l’objet de la mesure fiscale et des mesures de réduction des cotisations sociales.
Si cet amendement est voté, le Gouvernement n’aura pas la possibilité d’en cibler la portée par voie réglementaire.
La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote sur les amendements identiques n° 32 et 100.
La commission, en présentant l’amendement qu’a défendu le rapporteur général, était confiante dans la volonté du Gouvernement de revoir cette liste, qu’il n’y a pas lieu de reconduire éternellement si elle ne correspond plus à la réalité des choses, que ce soit sur le plan du service rendu ou sur le plan financier. §
Monsieur le secrétaire d’État, j’attire votre attention : la mesure que propose la commission est particulièrement importante. Pourquoi ? Parce qu’il est question d’emploi, aussi bien en ville qu’en milieu rural, il est question de rendre service à des personnes en menant en leur direction des actions préventives.
Nous examinerons prochainement le projet de loi relatif à l’adaptation de la société au vieillissement, qui vise notamment à prendre davantage en compte la prévention. Mais avec quels moyens ?
Grâce à l’emploi à domicile, nous avons la possibilité de faire de la prévention, de prévenir les risques notamment chez les personnes âgées. Nous le savons, il suffit parfois d’un accident domestique pour faire basculer une personne âgée d’un GIR 5 ou 6 à un GIR plus bas dans la grille. Le coût pour la société s’en trouve alors bien plus élevé compte tenu de la situation de dépendance ainsi créée.
Nous tenons là une piste extraordinaire pour créer davantage d’emplois et mieux prendre en compte nos concitoyens, notamment les personnes fragiles. La commission était déterminée à amener le Gouvernement à revoir cette liste par voie réglementaire et, de fait, votre réponse nous trouble, monsieur le secrétaire d'État. §
Monsieur le sénateur, je vous rappelle que les personnes fragiles sont déjà totalement exonérées de cotisations sociales.
Je mets aux voix les amendements identiques n° 32 et 100.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe de l'UDI-UC.
Je rappelle que l'avis du Gouvernement est défavorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
Le scrutin a lieu.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
Il est procédé au dépouillement du scrutin.
Voici le résultat du scrutin n° 22 :
Nombre de votants340Nombre de suffrages exprimés340Pour l’adoption328Contre 12Le Sénat a adopté.
Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC.
En conséquence, les amendements n° 96 rectifié, 145 rectifié et 211 rectifié bis n'ont plus d'objet.
Je mets aux voix l'article 8 ter, modifié.
L'article 8 ter est adopté.
Après le b du 3° du III de l’article L. 241-10 du code de la sécurité sociale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le bénéfice du présent III ne peut s’appliquer dans les établissements, centres et services mentionnés aux 2° et 3°, au b du 5° et aux 6°, 7°, 11° et 12° du I de l’article L. 312-1 du code de l’action sociale et des familles, au titre des prestations financées par les organismes de sécurité sociale en application de l’article L. 314-3 du même code. » –
Adopté.
Aux 1° et 2° de l’article L. 834-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2014–892 du 8 août 2014 de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014, après le mot : « taux », sont insérés les mots : « fixé par décret ». –
Adopté.
I. – Le code de la sécurité sociale, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2014-892 du 8 août 2014 précitée, est ainsi modifié :
1° La sous-section 1 de la section 1 du chapitre Ier du titre IV du livre II est complétée par un article L. 242-4-4 ainsi rédigé :
« Art. L. 242 -4 -4 . – Pour l’application des articles L. 241-2, L. 241-3, L. 241-5 et L. 241-6 du présent code ainsi que des articles L. 741-9 et L. 751-10 du code rural et de la pêche maritime, des cotisations forfaitaires peuvent être fixées par décret pour certaines catégories de travailleurs salariés ou assimilés auxquels ne s’applique pas le salaire minimum de croissance ou qui sont soumis à l’obligation d’affiliation prévue à l’article L. 311-3 du présent code, afin de préserver leurs droits aux assurances sociales. Ces cotisations ne peuvent excéder celles dues au niveau du salaire minimum de croissance à plein temps.
« Des cotisations forfaitaires peuvent également être fixées par décret pour certaines activités revêtant un caractère occasionnel ou saisonnier, sous réserve, pour les rémunérations égales ou supérieures à 1, 5 fois la valeur du plafond mentionné à l’article L. 241-3 correspondant à la durée du travail, que leur application ne conduise pas à une diminution de plus de 30 % du montant qui serait dû en l’absence de telles cotisations forfaitaires. » ;
2° §(nouveau) Le quatrième alinéa de l’article L. 241-2, le troisième alinéa de l’article L. 241-3 et le deuxième alinéa de l’article L. 241-5 sont supprimés ;
3° §(nouveau) La dernière phrase du 1° de l’article L. 241-6 est supprimée.
II §(nouveau) . – Le code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa de l’article L. 741-13 est supprimé ;
2° L’article L. 751-19 est abrogé.
III
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, le code de la sécurité sociale permet de fixer forfaitairement, par arrêté ministériel, l’assiette de cotisations sociales pour certaines activités.
Ces assiettes forfaitaires sont utilisées dans plusieurs cas, et de plusieurs manières.
Elles permettent de cotiser sur un montant supérieur au salaire brut quand ce dernier est particulièrement faible. C’est le cas pour les activités de réinsertion professionnelle ou le travail effectué par les personnes détenues.
Elles permettent de réduire le montant des cotisations, dans deux types de situation : pour les salariés exerçant dans un secteur où il est estimé que l’offre de travail est particulièrement sensible au coût du travail, comme l’animation, ou pour les salariés percevant des rémunérations élevées. Dans ce cas, non seulement l’assiette forfaitaire réduit de manière injuste les droits contributifs des salariés, mais elle permet également de diminuer purement et simplement les cotisations versées sur les rémunérations élevées, ce à quoi nous nous opposons.
Ainsi, dans le présent article, il est proposé de plafonner à 30 % l’abattement d’assiette auquel il est procédé pour les salariés dont la rémunération est supérieure à 1, 5 fois la valeur du plafond de la sécurité sociale – qui s’élèvera à 3 170 euros en 2015.
Cette mesure permet de dégager des recettes supplémentaires pour notre protection sociale, ce qui va dans le sens de ce que nous proposons au sein du groupe communiste, républicain et citoyen.
En effet, les entreprises tirant bénéfice de notre système de protection sociale, il est juste qu’elles participent à son financement.
Pour autant, le choix d’un plafond de 30 % et le fait que l’article ne concerne que les rémunérations supérieures à 1, 5 fois le plafond de la sécurité sociale restreignent fortement sa portée.
Ainsi, la mesure ne concerne, dans la pratique, que les formateurs occasionnels et les personnes rémunérées par des associations sportives.
Pour les premiers, le passage des taux d’abattement actuellement en vigueur à un taux d’abattement de 30 % permettra de dégager de l’ordre de 10 millions d’euros de cotisations sociales supplémentaires. Pour les secondes, 5 millions d’euros de cotisations sociales supplémentaires seront dégagés, soit un total de 15 millions d’euros de recettes supplémentaires pour la sécurité sociale.
L’étude d’impact nous indique que le taux de 30 % a été choisi car il correspond à celui qui est utilisé par ailleurs pour la déduction forfaitaire spécifique. Or cet argument nous paraît insuffisant pour justifier le taux retenu.
De même, nous nous opposons au choix de limiter la mesure aux rémunérations supérieures à 1, 5 fois le plafond de la sécurité sociale. Cela revient, en effet, à exclure du plafonnement les assiettes forfaitaires effectuées dans une optique de baisse du coût du travail. Or, rappelons qu’elles sont défavorables aux salariés puisqu’elles réduisent notamment leurs droits à la retraite ou à indemnités journalières, qui sont calculés à partir des cotisations réellement versées. De surcroît, le risque de trappe à bas salaire existe bel et bien, puisque le taux d’abattement restera élevé pour les plus petites rémunérations.
Dans cette optique, si nous saluons l’effort consenti pour réduire ce que nous considérons comme une niche sociale, nous estimons qu’il est nécessaire d’aller plus loin, notamment en étendant cette mesure à l’ensemble des rémunérations pour lesquelles l’assiette forfaitaire réduit de fait le taux de cotisation. Cela permettrait, d’une part, d’augmenter les droits sociaux des salariés concernés et, d’autre part, d’engendrer de nouvelles recettes pour la sécurité sociale.
Pour ces raisons, nous nous abstiendrons lors du vote sur cet article.
L’amendement n° 33, présenté par M. Vanlerenberghe, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 2
Remplacer la référence :
chapitre Ier
par la référence :
chapitre II
II. – Alinéa 4
Après le mot :
que
rédiger ainsi la fin de cet alinéa :
la base de calcul des cotisations soit au moins égale à 70 % de la rémunération. » ;
La parole est à M. le rapporteur général.
C’est un amendement de coordination et de précision.
Dans les cas où les cotisations sociales sont calculées sur une base forfaitaire, il s’agit de comparer l’assiette forfaitaire à la rémunération effective pour vérifier qu’elle ne dépasse pas 70 % de celle-ci. Ce dispositif est plus simple, il n'oblige pas à calculer les cotisations qui auraient été dues sur la rémunération effective.
Voilà ce que notre commission a adopté, monsieur le secrétaire d’État.
Cette coordination est bienvenue. Le Gouvernement est favorable à cet amendement.
L'amendement est adopté.
L’article 9 est adopté.
L’amendement n° 227, présenté par Mmes David et Cohen, M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 9
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Après le 5° bis de l’article L. 213-1, sont insérés un 5° ter et un 5° quater ainsi rédigés :
« 5° ... Le recouvrement de la contribution mentionnée à l’article L. 242-7-2 du présent code ;
« 5° ... Le contrôle et le contentieux du recouvrement prévu aux 1°, 2°, 3°, 5°, 5° bis et 5° ter ; »
2° Après la section 1 du chapitre 2 du titre 4 du livre 2, est rétablie une section 2 ainsi rédigée :
« Section 2
« Cotisations assises sur la masse salariale
« Art. L. 242 -7 -2 . – I. – Pour l’application du présent article :
« La répartition des richesses des sociétés à l’échelle nationale est définie annuellement par le calcul du ratio Rn de la masse salariale augmentée des dépenses de formation sur la valeur ajoutée augmentée des produits financiers au sens de l’article L. 245-16 de l’ensemble des sociétés ayant leur siège sur le territoire français ;
« La répartition des richesses des sociétés à l’échelle des sections du niveau 1 de la nomenclature des activités françaises de l’Institut national de la statistique et des études économiques en vigueur est définie annuellement par le calcul du ratio Rs, correspondant au ratio moyen Re de l’ensemble des sociétés qui composent la section ;
« La répartition des richesses d’une société est définie annuellement par le calcul du ratio Re de la masse salariale augmentée des dépenses de formation sur la valeur ajoutée augmentée des produits financiers au sens de l’article L. 245-16 de la société ;
« Les ratios Rn et Re de l’année précédant la promulgation de la loi n° 2014-529 du 26 mai 2014 du garantissant l’avenir et la justice du système de retraites servent de référence pour le calcul des taux de variation annuels de Rn, et Re exprimés en pourcentage.
« II. – Les sociétés immatriculées au registre du commerce et des sociétés conformément à l’article L. 123-1 du code de commerce s’acquittent annuellement, selon les modalités définies au présent article, d’une cotisation additionnelle d’assurance vieillesse calculée en fonction de l’écart entre le ratio Re et le ratio Rs d’une part, et d’une cotisation additionnelle d’assurance vieillesse calculée en fonction de l’écart entre les taux de variation de Re et de Rn d’autre part.
« Les sociétés dont le ratio Re est supérieur ou égal au ratio Rs de la section de laquelle elles relèvent, ou dont le taux de variation annuel du ratio Re est positif ou nul et supérieur au taux de variation annuel du ratio Rn, restent assujetties aux taux de cotisation d’assurance vieillesse de droit commun.
« Les sociétés dont le niveau annuel de Re est inférieur au niveau annuel de Rs de la section dont elles relèvent s’acquittent d’une cotisation additionnelle d’assurance vieillesse assise sur la totalité de leur masse salariale dont le taux est égal à l’écart entre Rs et Re.
« Les sociétés dont le taux de variation annuel du ratio Re est positif ou nul mais inférieur au taux de variation du ratio Rn, ou négatif, s’acquittent d’une cotisation additionnelle d’assurance vieillesse assise sur la totalité de sa masse salariale, dont le taux est égal à l’écart entre les taux de variation Rn et Re.
« Les cotisations additionnelles mentionnées au présent article sont cumulatives.
« Les cotisations prévues au présent article ne sont pas déductibles de l’assiette de l’impôt sur les sociétés.
« Un décret fixe les taux de répartition de ces ressources entre les différentes caisses d’assurance vieillesse. »
II. – Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application du présent article.
La parole est à Mme Christine Prunaud.
Cet amendement vise à insérer un article additionnel qui prévoit une modulation des cotisations patronales d’assurance vieillesse en fonction des choix des entreprises en matière de répartition des richesses : les entreprises privilégiant une répartition des richesses en faveur du capital et au détriment de l’emploi, des salaires et de la formation professionnelle sont soumises à deux cotisations sociales additionnelles permettant de financer la protection sociale.
Avec cet amendement, nous continuons à défendre au sein de cet hémicycle des propositions concrètes destinées à assurer l’avenir de notre système de protection sociale. Nous proposons d’instaurer une modulation, que l’on pourrait qualifier d’« intelligente », des cotisations sociales en fonction de la politique salariale des entreprises.
Nous avions déjà présenté un amendement similaire lors des précédents examens des projets de loi de financement de la sécurité sociale. Vous nous aviez répondu à l’époque que le Gouvernement n’était pas favorable à cet amendement non pas parce que la réflexion qu’il engageait sur le système de protection sociale n’était pas intéressante, mais parce qu’elle avait une dimension structurelle qui impliquait une expertise dont nous ne disposions pas. Depuis, notre collègue parlementaire Nicolas Sansu a donné des éléments d’expertise dans son rapport sur la proposition de loi relative à la modulation des contributions des entreprises à l’Assemblée nationale.
Le moment est donc venu, mes chers collègues, d’adopter cet amendement, dont les mécanismes sont fort simples derrière une apparente complexité : les entreprises qui augmenteraient la part des salaires et favoriseraient l’emploi et la formation verraient leurs cotisations allégées, alors que celles qui, à l’inverse, privilégieraient la rentabilité financière devraient supporter des cotisations alourdies.
Cette modulation contribuerait, je pense, à faire pression sur les logiques financières des entreprises. Dans le même temps, elle dégagerait des moyens nouveaux pour la protection sociale. Une telle disposition récompenserait, en quelque sorte, les entreprises vertueuses.
Notre amendement vise donc à créer de nouvelles recettes par une mise à contribution modulée des revenus financiers des entreprises.
Cet amendement prévoit la modulation des cotisations patronales d’assurance vieillesse en fonction du choix des entreprises en matière de répartition des richesses.
Je rappelle que les cotisations vieillesse ont une vocation assurantielle : elles permettent aux salariés de se constituer des droits à la retraite. À nos yeux, elles n’ont pas à être utilisées pour inciter les entreprises à mener telle ou telle politique en matière d’emploi, de salaire ou de formation professionnelle.
Du reste, l’extrême complexité du dispositif que vous proposez par le présent amendement le rendrait difficilement applicable et nuirait sans aucun doute à la santé économique des entreprises.
Aussi, l’avis de la commission est défavorable.
Si l’on peut entendre et comprendre la volonté des auteurs de l’amendement, un argument me laisse toutefois quelque peu pantois, c’est quand on qualifie ce dispositif de « simple ». Je vous invite à lire quelques paragraphes – je ne vais pas le faire ici car le temps nous est compté.
Reconnaissez avec moi que cet amendement est plutôt compliqué, par sa longueur, sa densité, son écriture et par les indices et les index qu’il pose.
Le Gouvernement ne peut donc pas donner un avis favorable à un amendement aussi structurel. D’ailleurs, quand on examine dans le détail son contenu et ses effets, car nous avons tenté de le faire, on se rend bien compte que si l’idée initiale peut être de favoriser les entreprises qui embauchent en tenant compte des dépenses de formation et d’apprentissage, par le calcul du ratio de la masse salariale augmentée des dépenses de formation sur la valeur ajoutée augmentée des résultats financiers, tout cela dépend en fait du secteur.
La situation des entreprises industrielles est, par exemple, complètement différente de celle que connaissent les entreprises de services et je crains que l’effet que vous recherchez ne soit pas atteint. Ce dispositif risque au contraire de pénaliser l’emploi dans certains secteurs et de créer des problèmes de compétitivité. Je pense notamment au secteur industriel pour lequel ce ratio est très différent de celui des services.
Cet amendement ne nous paraît pas recevable en l’état. En tout cas, il est tout sauf simple.
Donc, l’avis est défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 228, présenté par Mmes David et Cohen, M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 9
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Après le 5° bis de l’article L. 213-1, il est inséré un 5° ter ainsi rédigé :
« 5° ter Le recouvrement de la contribution mentionnée à l’article L. 245-17 ; »
2° Le chapitre 5 du titre 4 du livre 2 est complété par une section 6 ainsi rédigée :
« Section 6
« Contribution des revenus financiers des sociétés financières et non financières
« Art. L. 245 -17 . – Les revenus financiers des prestataires de service visés au livre V du code monétaire et financier entendus comme la somme des dividendes bruts et des intérêts nets reçus, sont assujettis à une contribution d’assurance vieillesse dont le taux est égal à la somme des taux de cotisation salariale et patronale d’assurance vieillesse assises sur les rémunérations ou gains perçus par les travailleurs salariés ou assimilés mentionnés à l’article L. 241-3 du présent code.
« Les revenus financiers des sociétés tenues à l’immatriculation au registre du commerce et des sociétés conformément à l’article L. 123-1 du code de commerce, à l’exclusion des prestataires visés au premier alinéa du présent article, entendus comme la somme des dividendes bruts et assimilés et des intérêts bruts perçus, sont assujettis à une contribution d’assurance vieillesse dont le taux est égal à la somme des taux de cotisations salariale et patronale d’assurance vieillesse assises sur les rémunérations ou gains perçus par les travailleurs salariés ou assimilés mentionnés à l’article L. 241-3 du présent code.
« Les contributions prévues au présent article ne sont pas déductibles de l’assiette de l’impôt sur les sociétés.
« Un décret fixe les taux de répartition de ces ressources entre les différentes caisses d’assurance vieillesse. »
II. – Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application du présent article.
La parole est à Mme Annie David.
Au travers de cet amendement, nous proposons d’assujettir les revenus financiers des sociétés financières et des sociétés non financières à une contribution d’assurance vieillesse dont le taux serait égal à la somme des taux de cotisation d’assurance vieillesse patronale et salariale du secteur privé.
Cette nouvelle contribution, qui apportera un surcroît de recettes estimé à plus de 30 milliards d’euros, poursuit un double objectif : un financement rapide des régimes obligatoires de retraite et une incitation forte pour les entreprises à privilégier le facteur travail. Vous le voyez, nous sommes toujours dans la même logique.
Soyons clairs, nous ne parlons en l’occurrence ni de l’épargne des particuliers ni des revenus des petites entreprises. Nous visons bien les revenus des grands groupes financiers et non financiers qui, en 2013, ont réalisé 50 milliards d’euros de bénéfices et reversé près de 40 milliards d’euros de dividendes !
C’est un fait, la répartition des richesses entre capital et travail n’a cessé d’évoluer au détriment de la rémunération des salariés, et donc, par un effet mécanique, au détriment du financement de notre système de protection sociale. Ainsi, la part de richesses qui a bénéficié au capital sous la forme de versement de dividendes, par exemple, a augmenté par rapport à celle qui a profité aux salaires. De fait, 10 % du PIB sont passés de l’un à l’autre – au détriment du travail, bien évidemment ! On continue à nous parler du coût du travail ; pour ma part, je parlerais plutôt du coût du capital ! Dans le même temps, les revenus financiers des grandes entreprises n’ont cessé de croître. Leur appliquer les taux des cotisations patronales rapporterait plus de 30 milliards d’euros au régime général.
Le Gouvernement ne peut plus nous répondre que la mesure serait trop brutale pour les entreprises. En effet, si le Premier ministre aime les entreprises autant qu’il les cajole avec le pacte de responsabilité, elles comprendront la nécessité de participer au financement de notre système de protection sociale.
Quoi qu’il en soit, nous reprenons cette proposition. Elle permettrait de rééquilibrer les efforts indispensables au financement de notre système de sécurité sociale en mettant à contribution les revenus financiers de ces grands groupes financiers et non financiers au même niveau que les salaires. Si une réforme du droit communautaire doit être conduite pour s’attaquer à la taxation des dividendes intragroupes, nous pourrons demander à M. Moscovici d’engager les discussions rapidement.
Tel est le sens de cet amendement, mes chers collègues.
Comme pour l’amendement précédent, il importe de rappeler que le système français de retraite par répartition est un système essentiellement assurantiel, dans lequel le salarié et son employeur versent des cotisations pour ouvrir au salarié des droits à une pension de retraite.
Or la contribution d’assurance vieillesse proposée dans le présent amendement est assise sur les revenus financiers des entreprises et est dépourvue de tout lien avec le salarié et son salaire.
En outre, une telle mesure nuirait à la compétitivité de nos entreprises – je reprends l’argumentation de l’amendement précédent – et pénaliserait sévèrement l’investissement et, partant, l’emploi.
L’avis de la commission est donc défavorable.
Même si j’apprécie la délicatesse de la présentation, cet amendement est contraire au droit communautaire. Les auteurs de l’amendement pourraient, à mon avis, chercher des inspirations au sein de leur propre groupe pour trouver les remèdes à ce qu’ils décrivent eux-mêmes comme des handicaps à leur amendement.
Aussi, l’avis est défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 226, présenté par Mmes David et Cohen, M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 9
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La section 3 du chapitre 2 du titre 4 du livre 2 du code de la sécurité sociale est complétée par un article L. 242-10-… ainsi rédigé :
« Art. L. 242 -10 – … – Les entreprises d’au moins vingt salariés dont le nombre de salariés à temps partiel est au moins égal à 20 % du nombre total de salariés de l’entreprise sont soumises à une majoration de 10 % des cotisations dues par l’employeur au titre des assurances sociales, des accidents du travail et des allocations familiales pour l’ensemble de leurs salariés à temps partiel. »
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Cet amendement vise à insérer un article additionnel prévoyant de majorer de 10 % les cotisations d’assurance sociale dues par l’employeur dans les entreprises de plus de vingt salariés comptant dans leurs effectifs au moins 20 % de salariés à temps partiel, afin de décourager le recours au temps partiel – bien évidemment, contraint – et d’inciter fortement à l’accroissement de la durée d’activité.
Avec cet amendement, nous entendons relancer un débat important que nous avons déjà eu dans cet hémicycle, mais auquel il faut sans cesse revenir : le débat sur la réduction du nombre de contrats à temps partiel.
En effet, le travail à temps partiel pose la question de la précarité du travail, qui touche majoritairement les femmes. En outre, ces contrats à temps partiel limitent les rentrées de cotisations sociales.
Comme nous avons eu l’occasion de le dire lors de l’examen du projet de loi pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes, « qui dit temps partiel dit salaire partiel et pensions de retraite partielles. La précarité, marquée notamment par la flexibilité, est source de grandes inégalités dont souffrent majoritairement les femmes ».
Vous le savez – je crois d’ailleurs qu’il y a convergence à gauche sur cette idée –, le temps partiel est un paramètre clef des inégalités salariales et professionnelles. Il explique un peu plus du tiers de l’écart d’environ 27 % qui existe entre les salaires des femmes et ceux des hommes. Qui plus est, les temps partiels ne sont pas sans incidence sur les comptes sociaux – c’est le sujet qui nous occupe aujourd’hui –, puisqu’ils entraînent l’application des cotisations sociales sur une base de salaires réduite.
Je tiens à rappeler que, théoriquement, en droit français, la norme doit être le contrat de travail à durée indéterminée à temps plein. Il faut rompre avec une logique qui encourage les employeurs à recruter des salariés en s’arrangeant pour qu’ils leur coûtent le moins cher possible, sans s’occuper des conséquences pour les salariés précarisés ou, par le biais des dépenses sociales et d’accompagnement, pour la collectivité. L’accroissement des marges des entreprises et l’augmentation de la rémunération des actionnaires ou titulaires de parts sociales se justifient encore moins s’ils sont réalisés au détriment de la collectivité.
J’ajoute que ce problème relève non pas de la négociation entre les partenaires sociaux, mais des prérogatives du Parlement.
Pour toutes ces raisons, nous vous invitons, mes chers collègues, à voter cet amendement précis et très simple, qui vise à majorer de 10 % la part patronale des cotisations sociales due par les entreprises employant plus de 20 % de leur effectif à temps partiel.
Je suis très étonnée que, dans cet hémicycle, il ne soit jamais question de conditionner les aides ou les exonérations offertes aux grandes entreprises. Pourtant, nous le faisons dans nos collectivités territoriales sans que cela pose problème.
Cet amendement vise à majorer les cotisations d’assurance sociale employeur des entreprises qui comptent au moins 20 % de salariés à temps partiel.
Ces cotisations d’assurance sociale ont vocation non à être utilisées pour inciter les entreprises à avoir plus ou moins recours au temps partiel, mais à ouvrir des droits aux salariés sur une base assurantielle.
Par conséquent, la commission a émis un avis défavorable.
Utiliser le taux de cotisation comme une pénalité ne correspond pas à l’esprit de nos lois. Je doute que le Conseil constitutionnel apprécierait l’adoption d’une telle mesure. Néanmoins, nul ne peut se substituer à lui…
Majorer le taux de cotisations sociales patronales de toutes les entreprises, quelle que soit la situation, ne me paraît ni équitable ni efficace.Le Gouvernement partage votre souci de protéger les salariés et de lutter contre le temps partiel imposé, mais cela passe par des mesures adaptées, comme celles qui ont été mises en œuvre par la loi relative à la sécurisation de l’emploi.
Je vous rappelle que la durée minimale des contrats de travail à temps partiel a ainsi été portée à 24 heures par semaine, contre 20 heures auparavant. De plus, la première heure complémentaire est désormais rémunérée et le salarié à temps partiel a maintenant droit à une meilleure organisation de son temps de travail, en particulier pour éviter les longues coupures dans la journée.
Je ne peux donc pas vous laisser dire que le Gouvernement est insensible aux éventuelles dérives de l’utilisation du travail à temps partiel.
Pour toutes ces raisons, j’émets un avis défavorable sur cet amendement.
Je vous rappelle, monsieur le secrétaire d’État, qu’il y a peu, ici même, après une discussion assez âpre, les 24 heures de temps partiel minimum ont été repoussées au mois de janvier de je ne sais quelle année. C’est donc une nouvelle fois ne pas prendre nos propositions au sérieux que de nous répondre de cette manière.
Ce dispositif avait été présenté par le Gouvernement comme un article phare de la loi relative à la sécurisation de l’emploi. C’était même nous disait-il l’une des raisons pour lesquelles il fallait adopter le projet de loi. Quelques mois après, avant même son application, vous avez repoussé – peut-être même abandonné – sa mise en œuvre. Puisque vous parliez de délicatesse, sachez que votre réponse n’est pas très délicate à notre égard.
Applaudissements sur les travées du groupe CRC.
Une entreprise de 20 salariés, c’est une petite entreprise. C’est le cas des entreprises d’aide à domicile dans certaines zones rurales. Si elles embauchent à temps partiel, c’est parce qu’elles ne peuvent pas faire autrement. La règle des 24 heures leur a d’ailleurs posé de gros problèmes, car, au départ, les salariés sont embauchés progressivement, en fonction des besoins. Pour embaucher, il faut qu’il y ait du travail !
Il faut aller vers des emplois à temps plein, mais il ne faut pas pénaliser, au travers de cet amendement, des entreprises d’aide à domicile qui fonctionnent en employant des salariés à temps partiel.
Madame la sénatrice, quand des dispositions qui sont nécessaires et utiles posent des difficultés d’application, il faut le dire. Dans mon département se trouve une association qui gère une trentaine d’établissements destinés à accueillir des enfants inadaptés mentaux. Certains professionnels de santé travaillent deux ou trois heures dans l’un de ces établissements avant d’en rejoindre un autre pour effectuer encore quelques heures, auxquelles il faut ajouter les temps de trajet. Cette association m’a fait savoir qu’elle ne pourrait pas respecter la règle des 24 heures sans engager d’énormes dépenses supplémentaires. C’est un exemple parmi d’autres ; nous en connaissons des dizaines.
Même si je reconnais avoir répondu un peu trop simplement à votre amendement, ce n’est faire injure ni au Gouvernement ni au Parlement que de dire qu’il y a des difficultés à appliquer certaines règles, dont celle des 24 heures. Nous nous en rendons bien compte au travers de nos multiples expériences de terrain. Cela ne veut pas dire pour autant que la disposition est abandonnée : nous avons juste besoin d’un peu plus de temps pour rendre le dispositif totalement efficient.
Mme Cohen a raison de dire que ce sont toujours les femmes – à 80 % ! – qui subissent le temps partiel. Il serait temps de transformer la société pour leur permettre de sortir de ce ghetto.
J’entends bien l’argument selon lequel il est difficile de respecter le plancher de 24 heures. À cet égard, l’exemple que vous avez cité, monsieur le secrétaire d’État, est intéressant, car les personnes handicapées ont précisément besoin d’un accompagnement important. Ce ne sont donc pas les heures de travail qui manquent dans le secteur de l’aide à domicile ou en direction des personnes handicapées, des personnes fragiles, des personnes âgées. Ce qui fait défaut, c’est le financement.
Si l’on multiplie les dérogations et les ajournements, on ne changera jamais rien, et ce seront toujours les femmes qui subiront le temps partiel, tôt le matin, tard le soir.
Mme Catherine Génisson. Après, il ne faudra pas s’étonner que ces femmes, qui sont souvent chefs de famille monoparentale, connaissent des difficultés pour éduquer leurs enfants. Si le cercle vicieux se poursuit, nous n’avancerons pas. Voilà pourquoi il faut vraiment que la loi s’applique.
Très bien ! sur plusieurs travées du groupe socialiste.
L'amendement n'est pas adopté.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 3 rectifié est présenté par Mme Lienemann, MM. Daunis et Labazée et Mme Claireaux.
L'amendement n° 186 est présenté par M. Desessard, Mme Archimbaud et les membres du groupe écologiste.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l'article 9
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – À compter de la promulgation de la présente loi et jusqu’au 31 décembre 2015, les employeurs visés aux 1°, 3°, 4°, 5° ou 6° de l’article L. 5134-111 du code du travail bénéficient d’une réduction du montant total des cotisations employeurs dues aux organismes de sécurité sociale pour l’ensemble de leurs salariés égale à 10 000 euros par an pendant trois ans pour l’embauche, dans des activités présentant un caractère d’utilité sociale ou environnementale ou ayant un fort potentiel de création d’emploi, de demandeurs d’emploi justifiant de plus de vingt-quatre mois de chômage au cours des trente-six derniers mois.
II. – Les « emplois d’avenir chômeur de longue durée » visés au I sont conclus sous la forme des contrats prévus par l’article L. 5134-112 du code du travail.
III. – La réduction prévue au I n’est pas cumulable avec l’aide mentionnée à l’article L. 5134-113 du code du travail.
IV. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale des I, II et III ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
L’amendement n° 3 rectifié n'est pas soutenu.
La parole est à Mme Aline Archimbaud, pour présenter l'amendement n° 186.
Cet amendement vise à ouvrir le dispositif des emplois d’avenir – aujourd’hui réservé aux jeunes – aux chômeurs de longue durée, et sous conditions.
Nous estimons qu’un système similaire pour toutes les personnes éloignées de l’emploi, quel que soit leur âge, pourrait être mis en place. L’ouverture du dispositif durerait jusqu’au mois de décembre 2015, date à laquelle les instituts de conjoncture prévoient une reprise de la création d’emplois dans le secteur privé.
Il s’agit ici de mobiliser un outil existant qui fait preuve d’une certaine efficacité pour lutter contre le chômage. C’est une mesure ciblée, limitée dans le temps, qui aurait un effet immédiat et bénéfique en termes d’emploi.
Le financement de ces emplois aidés serait assuré par un report de la suppression de la contribution sociale de solidarité des sociétés, la C3S, dont nous présenterons les détails dans un amendement ultérieur.
Cet amendement a pour objet de rendre les chômeurs de longue durée éligibles aux emplois d’avenir, dispositif qui, je le rappelle, est ciblé sur les jeunes peu qualifiés.
Certes, certains chômeurs âgés n’ont jamais travaillé, mais ce n’est pas le cas de la plupart d’entre eux. En tant que président d’un plan local pour l’insertion et l’emploi, un PLIE, ainsi que d’une mission locale, je suis bien placé pour savoir que les chômeurs de longue durée ont besoin de formation qualifiante, d’insertion en entreprise, et pas d’emploi d’avenir, surtout pas d’« emploi parking », pour les occuper. Cela, c’est terminé ! Évitons de recréer des dispositifs inadaptés !
La commission a donc émis un avis défavorable.
Madame la sénatrice, vous proposez de créer un dispositif pour les chômeurs ouvrant droit à une exonération forfaitaire de cotisations patronales de 10 000 euros par an pendant trois ans. Cette exonération serait réservée aux employeurs pouvant bénéficier de l’aide relative aux emplois d’avenir, à l’exception des collectivités territoriales.
Ce mécanisme me semble relativement complexe, d’autant que vous évoquez des activités présentant un caractère d’utilité sociale ou environnementale ou ayant un fort potentiel de création d’emplois. Cette référence me paraît floue et pourrait donner lieu à beaucoup d’interprétations et de contentieux.
Cet élément de forme ne doit pas masquer d’autres aspects de fond : il existe déjà de nombreux dispositifs que le Gouvernement vient de mettre en place ou de renforcer. Ainsi, 45 000 emplois aidés supplémentaires viennent d’être débloqués au titre du projet de loi de finances. Cette tranche complémentaire porte le nombre total de contrats aidés à 445 000, dont 65 000 emplois d’avenir, ce qui constitue un effort budgétaire important dans le contexte actuel.
Pour ces raisons de forme et de fond, le Gouvernement n’est pas favorable à votre amendement.
L'amendement n'est pas adopté.
Monsieur le président, en application de l’article 44, alinéa 6, du règlement du Sénat, le Gouvernement demande la réserve de l’examen des articles 10 et 11 jusqu’à la fin de la troisième partie.
I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° La section 1 du chapitre Ier du titre VII du livre Ier est complétée par des articles L. 171-4 et L. 171-5 ainsi rédigés :
« Art. L. 171 -4 . – La Caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés, la Caisse nationale du régime social des indépendants, la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole, la Caisse nationale d’assurance vieillesse, la Caisse nationale d’assurance vieillesse des professions libérales et la Caisse nationale des barreaux français peuvent conclure des conventions entre elles afin de confier à une ou plusieurs caisses de sécurité sociale l’exercice des recours subrogatoires prévus aux articles L. 376-1 et L. 454-1 du présent code et à l’article L. 752-23 du code rural et de la pêche maritime.
« Art. L. 171 -5 . – Pour l’exercice de l’action amiable mentionnée au sixième alinéa de l’article L. 376-1 et au quatrième alinéa de l’article L. 454-1, une convention signée par la Caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés, la Caisse nationale du régime social des indépendants, la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole et, le cas échéant, la Caisse nationale d’assurance vieillesse des professions libérales et la Caisse nationale des barreaux français avec les organisations représentatives des assureurs peut définir les modalités de mise en œuvre de cette procédure. » ;
2° La seconde phrase du sixième alinéa de l’article L. 376-1 et du quatrième alinéa de l’article L. 454-1 est supprimée ;
2° bis §(nouveau) Au septième alinéa de l’article L. 376-1 et au cinquième alinéa de l’article L. 454-1, après le mot : « caisse », sont insérés les mots : « et, le cas échéant, l’organisme d’assurance maladie complémentaire concerné » ;
3° À l’article L. 613-21, la référence : « L. 376-3 » est remplacée par la référence : « L. 376-4 » ;
4° La section 4 du chapitre III du titre IV du livre VI est complétée par un article L. 643-9 ainsi rétabli :
« Art. L. 643 -9 . – Le chapitre VI du titre VII du livre III est applicable aux prestations servies en application du présent chapitre. » ;
5° Le chapitre IV du même titre IV est complété par un article L. 644-4 ainsi rédigé :
« Art. L. 644 -4 . – Le chapitre VI du titre VII du livre III est applicable aux prestations servies en application du présent chapitre. » ;
6° La section 1 du chapitre V du même titre IV est complétée par un article L. 645-6 ainsi rétabli :
« Art. L. 645 -6 . – Le chapitre VI du titre VII du livre III est applicable aux prestations servies en application du présent chapitre. » ;
7° La sous-section 7 de la section 3 du chapitre III du titre II du livre VII est complétée par un article L. 723-13-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 723 -13 -1 . – Le chapitre VI du titre VII du livre III est applicable aux prestations servies en application de la présente section. » ;
8° La section 4 du même chapitre III est complétée par un article L. 723-21-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 723 -21 -1 . – Le chapitre VI du titre VII du livre III est applicable aux prestations servies en application de la présente section. »
II. – Le livre VII du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :
1° Le titre III est complété par un chapitre III ainsi rédigé :
« Chapitre III
« Recours des caisses contre les tiers payeurs
« Art. L. 733 -1 . – Le chapitre VI du titre VII du livre III du code de la sécurité sociale est applicable aux prestations servies en application du chapitre II du présent titre.
« Pour l’application ce même chapitre VI, les caisses de mutualité sociale agricole sont substituées aux caisses d’assurance maladie. » ;
2° Au premier alinéa de l’article L. 761-16, après la référence : « L. 454-1, », est insérée la référence : « L. 454-2, » ;
3° La seconde phrase de l’article L. 761-19 est complétée par les références : « ainsi que des articles L. 454-1 et L. 454-2 du même code » ;
4° Au premier alinéa de l’article L. 762-14, les références : «, L. 376-1 à L. 376-3 » sont remplacées par la référence : « et le chapitre VI du titre VII du livre III » ;
5° Au premier alinéa de l’article L. 762-26, après la référence : « chapitre II », est insérée la référence : « et du chapitre III ».
III. – Le présent article est applicable à compter du 1er juillet 2015.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 118 est présenté par Mmes Doineau et Gatel, MM. Cadic, Gabouty et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC.
L'amendement n° 210 rectifié est présenté par MM. Husson et Raison, Mme Lopez, M. Bouchet, Mme Mélot et M. Charon.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 6
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Françoise Gatel, pour présenter l’amendement n° 118.
La parole est à M. Jean-François Husson, pour présenter l'amendement n° 210 rectifié.
L’alinéa 6, que cet amendement tend à supprimer, a été introduit en séance publique à l’Assemblée nationale. À première vue, il pourrait sembler anodin. En vertu de cet alinéa, la personne victime, les établissements de santé, le tiers responsable et son assureur sont tenus d’informer la caisse et, le cas échéant, l’organisme d’assurance maladie complémentaire concerné de la survenue de lésions qui auraient été causées par un ou plusieurs tiers. Les conditions de cette information seraient fixées par décret.
Le but visé peut paraître louable. Toutefois, force est d’admettre qu’il est difficile à atteindre dans les délais prévus, à savoir trois mois. Cette disposition vise réellement 15 % des affaires corporelles – 85 % des cas sont d’ores et déjà traités lorsqu’il s’agit d’assurance automobile. La difficulté concerne plutôt l’assurance dite « de responsabilité civile ». En effet, dans ce cas, la procédure est plus longue pour identifier clairement le ou les responsables et, par conséquent, les organismes d’assurance complémentaire.
Dans un certain nombre de situations, on risque de se heurter à l’impossibilité matérielle d’établir une mise en cause. Plutôt que de créer un dispositif inopérant, mieux vaut ne pas l’instaurer. Au reste, rien n’empêche de réfléchir à la faculté de mettre en cause, dans un délai raisonnable, les assureurs complémentaires quels qu’ils soient, qu’il s’agisse d’assureurs mutualistes, d’institutions de prévoyance ou de compagnies d’assurance.
Ces deux amendements identiques tendent à supprimer l’obligation d’information des organismes d’assurance maladie complémentaire en cas d’accident causé par un tiers.
En la matière, une divergence d’appréciation se fait clairement jour entre, d’une part, les assureurs, qui ne veulent pas payer en responsabilité civile ce qu’ils recouvreraient en frais de santé et, de l’autre, les mutuelles. Cette opposition a déjà été maintes fois évoquée dans cet hémicycle.
Monsieur le secrétaire d’État, au nom de la commission, je sollicite l’avis du Gouvernement. Quelles sont la faisabilité et l’opportunité de cette obligation ? Les sommes en jeu en cas d’accident sont-elles très importantes ?
Monsieur Husson, j’entends vos arguments, et je sais que vous connaissez bien ces questions.
Entendons-nous bien : je ne suis pas opposé sur le principe à l’extension d’information votée par l’Assemblée nationale. Néanmoins, reconnaissons que cet alinéa, qui s’apparente à un cavalier législatif, risque fort d’être censuré. Aussi le Gouvernement préfère-t-il suivre votre proposition et émettre un avis favorable sur ces deux amendements identiques.
Les amendements sont adoptés.
L'article 12 est adopté.
Je suis saisi de deux amendements.
L'amendement n° 97, présenté par Mmes Doineau et Gatel, MM. Cadic, Gabouty et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, est ainsi libellé :
Après l’article 12
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° À la seconde phrase du 5° bis du II de l’article L. 136-2, le mot : « dix » est remplacé par le mot : « cinq » ;
2° À la deuxième phrase du dernier alinéa de l’article L. 242-1, le mot : « dix » est remplacé par le mot : « cinq ».
II. – Le 1° du I est applicable aux rentes versées à compter du 1er janvier 2015. Le 2° du I est applicable aux versements, comptabilisations ou mentions réalisés à compter des exercices ouverts après le 31 décembre 2014.
La parole est à Mme Françoise Gatel.
L’objet de cet amendement est d’assujettir à la contribution sociale généralisée et aux cotisations sociales dès le premier euro les indemnités de rupture du contrat de travail perçues par les mandataires sociaux et dirigeants dépassant cinq fois le plafond annuel de la sécurité sociale.
Depuis deux ans, ces indemnités sont assujetties lorsqu’elles dépassent un montant égal à dix fois le plafond actuel de la sécurité sociale, soit un peu plus de 375 000 euros. Auparavant, elles étaient assujetties lorsqu’elles dépassaient trente fois ce plafond. Par cet amendement, nous proposons d’aller plus loin. Cette mesure va dans le sens de la lutte contre les niches sociales injustifiées. Elle concourrait au rééquilibrage des comptes sociaux et relève, à nos yeux, de l’équité.
L'amendement n° 101, présenté par Mmes Doineau et Gatel, MM. Cadic, Gabouty et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC et ainsi libellé :
Après l'article 12
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le II bis de l’article L. 137-11 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :
« II bis. – S’ajoute à la contribution prévue au I, indépendamment de l’option exercée par l’employeur visée au même alinéa, une contribution additionnelle de 45 %, à la charge de l’employeur, sur les rentes excédant huit fois le plafond annuel défini par l’article L. 241-3. »
II. – Le I est applicable aux rentes versées à compter du 1er janvier 2015 et aux versements, comptabilisations ou mentions réalisés à compter des exercices ouverts après le 31 décembre 2015.
La parole est à Mme Françoise Gatel.
L'objet de cet amendement est de relever le taux de la contribution exceptionnelle des employeurs au financement de la solidarité sur les retraites chapeaux les plus élevées.
Il est clair que les indemnités de rupture bénéficient d’un régime de faveur sur les plans fiscal et social, à concurrence de dix fois le plafond annuel de la sécurité sociale, soit environ 380 000 euros. L’amendement n° 97 tend à réduire ce plafond de moitié, ce qui reviendrait à le porter à 190 000 euros, d’ici à 2015. La commission est favorable à l’aménagement de cette niche sociale.
L’amendement n° 101 tend à créer une contribution additionnelle de 45 % sur les retraites chapeaux les plus élevées. Il est vrai que ces retraites chapeaux excessives choquent profondément nos concitoyens et créent un sentiment d’injustice préjudiciable à l’ensemble de notre système de retraite.
Instituer une contribution additionnelle de 45 % à la charge de l’employeur au titre des rentes excédant huit fois le plafond annuel de la sécurité sociale permettrait d’apporter des financements supplémentaires au Fonds de solidarité vieillesse, lequel est chargé de financer les avantages non contributifs des régimes de retraite. Ainsi, il serait possible de répondre à ce sentiment d’injustice. Voilà pourquoi la commission a également émis un avis favorable sur cet amendement.
L’amendement n° 97 vise à assujettir aux cotisations et contributions sociales dès le premier euro les indemnités de rupture du contrat de travail versées aux mandataires sociaux ou aux dirigeants, lorsque leur montant dépasse cinq fois le plafond de la sécurité sociale, contre dix fois aujourd’hui.
Madame Gatel, j’appelle votre attention sur le fait que les indemnités versées aux mandataires sociaux et aux dirigeants à l’occasion de la cessation de leurs fonctions sont déjà intégralement soumises à cotisations. Seules dérogent à cette règle les indemnités versées en cas de cessation forcée. Aussi votre amendement est-il déjà pour partie satisfait.
De plus, je vous signale que votre amendement, tel qu’il est rédigé, aboutirait dans les faits à assujettir toutes les indemnités de licenciement et de mises à la retraite supérieures à cinq fois le montant du plafond annuel de la sécurité sociale.
Ses conséquences dépasseraient le seul cadre des indemnités des mandataires sociaux et des dirigeants, contrairement au but que vous visez.
Par ailleurs, je vous rappelle que de récentes évolutions ont permis de durcir le régime auquel sont soumises les indemnités de rupture. Ainsi, le seuil des réassujettissements dès le premier euro au droit commun a été porté de trente fois à dix fois le plafond considéré par la loi de finances rectificative d’août 2012. Parallèlement, l’exclusion de l’assiette sociale a été abaissée de cinq à trois plafonds par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2011, puis de trois à deux plafonds en 2012. Il ne me semble donc pas opportun de durcir encore ces restrictions.
L’amendement n° 101 a pour objet les retraites chapeaux. Il s’agit là d’un débat récurrent.
Mesdames, messieurs les sénateurs, avant tout, je tiens à rappeler qu’il existe différents types de retraites chapeaux. Dans un certain nombre d’entreprises historiques, comme celles de la sidérurgie – permettez-moi de parler de ce que je connais le moins mal –, il était d’usage de verser des retraites à capitalisation dites « chapeaux », y compris à des salariés modestes ou moyens.
Les termes « retraite chapeau » évoquent un certain nombre de cas, que vous connaissez bien et que l’on ne connaît parfois que trop, mais ils recouvrent de facto des situations bien plus diverses qu’il n’y paraît.
Par la loi de finances rectificative d’août 2012, le Gouvernement a déjà procédé à un doublement du taux de la contribution de l’employeur appliquée aux retraites chapeaux. Les taux d’imposition applicables à ces contributions excédant huit fois le plafond annuel de la sécurité sociale varient ainsi aujourd’hui entre 54 % et 78 %, selon les modalités de gestion et l’assiette choisies par l’entreprise. À nos yeux, on ne saurait aller plus loin sans s’exposer à la censure du Conseil constitutionnel, qui s’est déjà prononcé sur des cas similaires.
Au nom de la prudence, le Gouvernement demande le retrait de cet amendement. À défaut, il émettra un avis défavorable.
Nous ne souhaitons pas cautionner le caractère ad hominem de l’un des amendements, qui nous gêne beaucoup.
En revanche, nous soutenons la commission des affaires sociales. Ce qui est exagéré est exagéré ! Par les temps qui courent, la position de la commission mérite d’être publiquement défendue par la grande majorité du groupe UMP.
L'amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 12.
Je mets aux voix l'amendement n° 101.
L'amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 12.
L'amendement n° 233, présenté par Mmes David et Cohen, M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 12
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Aux cinquième et neuvième alinéas de l’article L. 137-11-1 du code de la sécurité sociale, le taux : « 21 % » est remplacé par le taux : « 34 % ».
La parole est à M. Michel Le Scouarnec.
Cet amendement, qui est proche de l’amendement n° 101 qui vient d’être adopté, a pour objet de renforcer la fiscalité sociale sur les retraites chapeaux, ces mécanismes de rémunération complémentaire profitant essentiellement à une minorité de cadres dirigeants et de salariés, qui sont déjà parmi les mieux payés. Cette mesure nous paraît d’autant plus nécessaire que l’actualité est lourde d’exemples qui choquent l’opinion.
Le Gouvernement doit prendre ses responsabilités et accepter les mesures qui s’imposent. En plus des bonus, stock-options et autres actions gratuites, la moitié des patrons du CAC 40 bénéficient d’une retraite chapeau. Un P-DG à la retraite profite, au total, d’une pension quarante et une fois supérieure à celle d’un retraité moyen. Est-ce à dire que les cadres dirigeants produisent quarante et une fois plus de richesses que les salariés ? Le groupe CRC est loin d’en être convaincu.
Rappelons, en guise d’illustration, la situation récente du P-DG de GDF-Suez, M. Gérard Mestrallet, qui a quitté la direction du groupe avec une retraite de 830 000 euros par an, soit 25 millions d’euros en vingt-cinq ans, en remerciement des résultats médiocres de l’entreprise ! Ce seul exemple suffit à nous assurer de l’utilité de la mesure que nous proposons : relever le taux de cette contribution afin de lui conférer un caractère véritablement dissuasif.
Cet amendement vous invite à vous engager dans une véritable politique de justice sociale et de progrès.
L’augmentation du taux de la contribution des bénéficiaires de retraites chapeaux proposée par le présent amendement apparaît excessive. Il est donc demandé à ses auteurs de le retirer au profit de l’amendement n° 101, qui vient d’être adopté.
Faites comme vous voulez, mais, à défaut, l’avis de la commission sera défavorable.
Non, je suis étonné. Le taux de 21 %, auquel il est fait référence, n’existe pas. Le taux actuel est de 14 %.
Le projet de loi de finances pour 2013 visait à faire passer le taux à 21 %, ce que le Parlement avait accepté, mais le Conseil constitutionnel avait censuré cette mesure. Aujourd’hui, il est proposé de passer de 14 % à 34 %. Si le Conseil constitutionnel a refusé de passer à 21 %, je doute fort qu’il accepte de passer à 34 %.
Cet amendement est certes sympathique et populaire, mais le Conseil constitutionnel avait considéré que, pour de tels revenus, il y avait lieu de prendre en compte le taux marginal d’impôt, c'est-à-dire 45 %, la contribution exceptionnelle de 4 % sur les revenus, la CSG de 6, 6 % sur les revenus de remplacement, que nous avons évoquée tout à l'heure, la CRDS de 0, 5 % et la CASA de 0, 3 %. Si l’on ajoutait à tout cela les 21 % prévus dans la loi de finances, le taux dépassait allègrement les 66 % d’imposition, ce que le Conseil constitutionnel a jugé comme confiscatoire.
On peut toujours se faire plaisir, mais j’ai dit la même chose à propos de l’amendement précédent, que le Sénat a adopté.
Sans me mettre à la place du Conseil constitutionnel, je ne vois pas comment, je le répète, il accepterait 34 % après avoir refusé 21 %.
Sourires.
M. Michel Le Scouarnec. Non, je retire mon chapeau, monsieur le président.
Nouveaux sourires.
L'amendement n° 233 est retiré.
L'amendement n° 232, présenté par Mmes David et Cohen, M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 12
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La section 5 du chapitre II du titre IV du livre II du code de la sécurité sociale est complétée par un article L. 242-11-... ainsi rédigé :
« Art. L. 242 -11-... – Les revenus financiers des sociétés tenues à l’immatriculation au registre du commerce et des sociétés conformément à l’article L. 123-1 du code de commerce, entendus comme la somme des dividendes bruts et assimilés et des intérêts bruts perçus, sont assujettis à une contribution dont le taux est égal à la somme des taux des cotisations patronales assises sur les rémunérations ou gains perçus par les travailleurs salariés ou assimilés. »
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Cet amendement tend à soumettre à cotisations sociales les revenus financiers des sociétés, qui sont peu, ou pas, mis à contribution pour le financement de la sécurité sociale. J’ai développé ce point en présentant la motion en début d’après-midi. Vous le voyez, nous ne sommes pas dogmatiques et uniquement acharnés à contrer tout ce qui ne nous agrée pas, nous présentons également des propositions alternatives.
Il nous semble important de faire contribuer l’ensemble des revenus financiers, afin d’offrir à notre système de sécurité sociale un dynamisme et des moyens à la hauteur des besoins des populations. Tel est l’esprit de l’amendement.
Si ces revenus financiers étaient mobilisés au niveau de ce qui est demandé aux employeurs pour les salaires, cela générerait des recettes très importantes, que j’ai évaluées cet après-midi à au moins 16 milliards d’euros. Il nous paraît vraiment important de faire un geste fort !
Durant nos discussions, des différends sont apparus, notamment dans l’échelle de valeurs, puisque nous n’avons pas les mêmes références pour évoquer le sort des petits retraités, ceux qui touchent 1 400 euros et moins. Nous vous proposons donc de faire preuve de plus d’ambition et de viser les revenus financiers. Il ne s’agit pas de petites sommes, mais de montants considérables, qui permettraient de mettre en place une autre politique, de faire d’autres choix, dans une autre dynamique, pour plus de justice sociale.
Cet amendement propose d’assujettir à cotisations sociales les revenus financiers des sociétés.
La contradiction avec la logique qui prévaut dans ce domaine apparaît clairement. L’avis de la commission est donc nettement défavorable.
Le versement de dividendes d’une société à une autre fait déjà l’objet de différentes taxations. Une contribution additionnelle de 3 % à l’impôt sur les sociétés sur le montant des dividendes distribués à leurs actionnaires a ainsi été créée en loi de finances rectificative pour 2012.
L’adoption de cet amendement reviendrait donc à taxer doublement les dividendes distribués, auprès de la société versante et auprès de la société bénéficiaire, qui devra, de plus, acquitter l’impôt sur les sociétés au titre des dividendes perçus.
En outre, dans sa rédaction actuelle, votre proposition est sans doute contraire au droit communautaire, car elle conduirait à taxer les dividendes intra-groupes.
En conséquence, je vous suggère de travailler avec les ressources humaines dont vous pouvez disposer afin de trouver une rédaction conforme au droit. Pour l’heure, le Gouvernement émet un avis défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 112, présenté par Mmes Doineau et Gatel, MM. Cadic, Gabouty et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, est ainsi libellé :
Après l’article 12
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le 1° bis de l’article L. 14-10-4 du code de l’action sociale et des familles, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« 1° ter Une contribution au taux de 0, 3 % due sur le revenu d’activité non salarié des travailleurs indépendants tel que défini à l’article L. 131-6 du code de la sécurité sociale. Cette contribution est recouvrée et contrôlée par les organismes chargés du recouvrement des cotisations du régime général de sécurité sociale selon les règles et sous les garanties et sanctions applicables au recouvrement des cotisations personnelles d’allocations familiales ;
« 1° quater Une contribution au taux de 0, 3 % due sur le revenu d’activité des personnes non salariées des professions agricoles tel que défini à l’article L. 731-14 du code rural et de la pêche maritime. Cette contribution est recouvrée et contrôlée par les caisses de mutualité sociale agricole et les organismes mentionnés à l’article L. 731-30 du même code selon les règles et sous les garanties et sanctions applicables au recouvrement des cotisations d’assurance maladie ; »
La parole est à M. Claude Kern.
Cet amendement a pour objet de créer une contribution additionnelle de solidarité pour l’autonomie assise sur le revenu d’activité non salarié des travailleurs indépendants et des professions agricoles.
Il s’agit en fait d’élargir à ces professions la contribution de solidarité pour l’autonomie, couplée à la journée de solidarité. C’est ce que proposait déjà la proposition de loi de notre collègue Gérard Roche, adoptée par le Sénat le 25 octobre 2012. À l’époque, le texte visait également à étendre cette contribution aux pensions de retraite. C’est aujourd’hui chose faite avec la création de la contribution additionnelle de solidarité pour l’autonomie, la CASA.
La moitié du travail étant accompli, nous entendons le terminer par cet amendement et ainsi apporter une ressource pérenne au financement de l’allocation personnalisée d’autonomie, afin d’alléger la charge croissante que fait peser aujourd’hui le financement de cette prestation sur les budgets départementaux. L’État remplirait ainsi son engagement de contribuer au financement de l’APA à hauteur de 50 %. Compte tenu de la forte montée en charge de cette prestation, c’est aujourd’hui bien loin d’être le cas.
Il s’agit d’étendre l’assiette de la contribution de solidarité pour l’autonomie aux travailleurs indépendants agricoles et non agricoles.
Ainsi que vient de le dire notre excellent collègue Claude Kern, cette proposition rejoint pleinement la voie tracée par notre collègue Gérard Roche dans la proposition de loi que nous avions adoptée en 2012. Je rappelle que, à cette époque, le régime social des indépendants, le RSI, s’était montré particulièrement ouvert et avait jugé légitime que les travailleurs indépendants participent, au même titre que les salariés et les retraités, à la prise en charge de la perte d’autonomie.
La commission a donc émis un avis favorable.
Le Gouvernement a proposé de baisser les prélèvements sur les travailleurs indépendants de près de 1 milliard d’euros. Vous, vous proposez de les taxer. Le Gouvernement n’est donc pas favorable à cet amendement, qui va l’encontre de ce qui a été fait en faveur de ces professions.
Je rappelle que le coût de votre dispositif pour les travailleurs indépendants qui seront assujettis à cette nouvelle contribution s’élèvera, selon notre estimation, à 150 millions d’euros.
Le financement de l’APA ou de la PCH, la prestation de compensation du handicap, est une préoccupation constante et aiguë dans tous les départements, particulièrement dans ceux qui disposent de moyens limités et dont les populations âgées sont importantes.
Le Gouvernement doit résoudre le problème en faisant des propositions globales. Taxer une catégorie ou une autre reviendrait à poser une rustine sur une jambe de bois : cela ne dégagera que des sommes dérisoires au regard des besoins, tout en nous privant d’une politique d’ensemble.
Je voterai contre l’amendement, parce qu’il est trop partiel et ne résout rien. Son adoption constituerait un alibi pour retarder d’autant la résolution de ce problème important.
Pour une fois que nous faisons porter l’effort sur la dépense et que le projet de loi de financement de la sécurité sociale tend à limiter au maximum l’augmentation des prélèvements obligatoires pour les stabiliser, l’actuelle majorité sénatoriale, qui nous a vertement reproché pendant deux ans de chercher à équilibrer les régimes de sécurité sociale par des accroissements de recettes, nous propose aujourd'hui une avalanche de taxes, dont certaines sont d’ailleurs inconstitutionnelles. C’est ainsi que l’on nous parle désormais d’une taxe sur les travailleurs indépendants et les professions agricoles…
Nous sommes à fronts renversés. À mon sens, la sagesse devrait conduire les auteurs de cet amendement à le retirer.
Nous ne soutiendrons pas cet amendement.
Je rappelle à M. Caffet que M. Cahuzac, alors ministre délégué au budget, s’est permis de déplafonner les cotisations d’assurance maladie pour les travailleurs indépendants, provoquant une ponction supplémentaire significative.
Nous avons des points de vue différents. Après tout, c’est la richesse de la démocratie.
Cela étant, je remercie M. Caffet et le groupe socialiste, qui ne veulent pas de hausse de la fiscalité, de leur ralliement aux positions de l’UMP !
Sourires sur les travées de l'UMP.
Cet amendement était avant tout un amendement d’appel. Il faut en effet essayer de résoudre le problème de l’APA.
Cela étant, ayant entendu tous les arguments qui ont été avancés, je le retire.
Marques de satisfaction sur diverses travées.
L'amendement n° 112 est retiré.
L'amendement n° 98, présenté par Mmes Doineau et Gatel, MM. Cadic, Gabouty et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, est ainsi libellé :
Après l’article 12
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le I de l’article 1586 du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« ...° Une fraction égale à 1, 2 % de la contribution sociale sur les revenus d’activité et sur les revenus de remplacement prévue à l’article L. 136-1 du code de la sécurité sociale. »
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Elisabeth Doineau.
Il s’agit d’aider les départements à faire face au financement de la perte d’autonomie ; M. Tourenne pourrait, me semble-t-il, y voir une solution au problème qu’il soulevait.
Cet amendement se situe dans la droite ligne de l’amendement précédent, mais le dispositif envisagé est plus global : nous proposons d’apporter une solution pérenne au financement de l’APA, afin d’alléger la charge croissante que cela fait aujourd'hui peser sur les budgets départementaux.
En 2001, lors de la création de l’APA, l’État s’était engagé à financer la moitié de cette prestation, aux côtés du département. La montée en charge de l’allocation a tôt eu raison d’un tel engagement. L’APA représente aujourd'hui 80 % de la dépense en faveur des personnes âgées.
Entre 2003 et 2009, les dépenses brutes d’APA ont augmenté en moyenne de 5, 9 %, tandis que la participation de l’État progressait seulement de 0, 9 %. Résultat, les dépenses restant à la charge des départements ont augmenté en moyenne de 8, 8 % par an sur cette période. Aujourd’hui, l’État n’assure plus que 30 % du financement de la prestation. D’ailleurs, l’Observatoire national de l’action sociale décentralisée a relevé dans sa lettre du mois de juin dernier que les départements étaient globalement dans l’impasse.
Comment remédier à cette situation ? Dans la perspective de l’adaptation de la société au vieillissement, nous proposons d’affecter une fraction de la CSG au financement de l’APA. Autrement dit, avant de créer de nouveaux dispositifs de prise en charge de la dépendance, il nous paraît urgent d’apurer le passif des dispositifs existants.
Cet amendement vise à ajouter aux produits perçus par les départements une fraction de 1, 2 % de la CSG sur les revenus d’activité et les revenus de remplacement, sans préciser à qui cette fraction sera retirée.
Je le rappelle, la CSG est une taxe entièrement affectée à la sécurité sociale. Une modification éventuelle de l’affectation serait effectivement du ressort du Parlement, mais il ne me semble pas pertinent d’attribuer une part du produit aux départements. La commission a donc émis un avis défavorable.
Le Gouvernement reconnaît le problème soulevé par les auteurs de l’amendement : l’augmentation du coût des allocations individuelles de solidarité pour les départements. Toutefois, le dispositif proposé, à savoir faire basculer une part du produit d’une imposition de toute nature – voilà qui nous renvoie à une discussion précédente ! – à caractère national au profit des collectivités locales, n’est pas la bonne solution. Cela ne s’est jamais fait en matière de CSG.
J’aimerais rappeler qu’un peu plus de 800 millions d’euros d’impôts dynamiques ont été transférés au profit des départements l’an dernier. En outre, la possibilité de majorer les droits de mutation à titre onéreux pour constituer un fonds a été ouverte. Les recettes des départements ont ainsi augmenté de 1, 5 milliard d’euros.
Ces dispositions avaient été prévues pour deux ans. Or M. le Premier ministre vient d’annoncer lors du congrès de l’Assemblée des départements de France qu’il souhaitait les pérenniser. Il a également évoqué une réflexion sur une recentralisation des allocations individuelles de solidarité.
Une telle évolution, qui représenterait des transferts importants, nécessitera un travail et une analyse approfondis. Cependant, je vous confirme la volonté du Gouvernement d’entrouvrir la porte à cette possibilité. C’est, me semble-t-il, une première.
Pour toutes ces raisons, je souhaite le retrait de cet amendement. À défaut, l’avis sera défavorable.
Mme Elisabeth Doineau. J’ai bien entendu les arguments de la commission et du Gouvernement. Mon amendement visait avant tout à lancer le débat.
Marques de déception sur les travées de l'UMP.
Comme cela a été souligné à de nombreuses reprises, les départements, qui doivent faire face à la montée des allocations de toutes sortes à leur charge, sont dans l’impasse.
Monsieur le secrétaire d’État, vous affirmez que nous n’avons pas la bonne solution. Mais vous, l’avez-vous ? Car il est grand temps d’agir ! Pour renforcer les départements, il faut consolider leurs moyens.
Mme Elisabeth Doineau. Je vous suggère d’y réfléchir très sérieusement, car le sujet sera certainement au cœur des prochaines élections départementales.
Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC.
L'amendement n° 98 est retiré.
L'amendement n° 83 rectifié quater, présenté par Mme Gatel, M. Bonnecarrère, Mme Doineau, M. V. Dubois, Mlle Joissains, M. Kern, Mmes Létard et Loisier et MM. Longeot, Médevielle, Roche, Tandonnet, Capo-Canellas et de Legge, est ainsi libellé :
Après l’article 12
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après le mot : « croissance », la fin du dernier alinéa du I de l'article 1613 ter du code général des impôts est ainsi rédigée : «, les produits de nutrition entérale pour les personnes malades et les boissons à base de soja avec au minimum 2, 9 % de protéines issues de la graine de soja ».
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Françoise Gatel.
À mon sens, cet amendement devrait vous convenir davantage, monsieur le secrétaire d’État, puisqu’il vise à exonérer de taxe des entreprises de l’agroalimentaire.
Nous proposons d’exclure du périmètre de la contribution perçue sur les boissons et préparations liquides pour les boissons destinées à la consommation humaine les boissons à base de soja contenant au minimum 2, 9 % de protéines issues de la graine de soja. Je vous rassure : ces boissons sont produites à partir de soja non OGM cultivé de manière quasi exclusive en France.
Les boissons à base de soja ne peuvent pas être confondues avec du Red Bull ou du Coca ; elles ont un objectif avant tout nutritionnel.
Pour des motifs variés, des considérations éthiques à la question de la tolérance, notamment au lait de vache, en passant par celle de la diversification alimentaire, ces boissons peuvent, et il est important de le prendre en compte, être utilisées comme compléments ou substituts aux produits laitiers d’origine animale.
Dans leur rapport d’information, remis au nom de la mission d’évaluation et de contrôle de la sécurité sociale de la commission des affaires sociales du Sénat au mois de février 2014, nos collègues Yves Daudigny et Catherine Deroche recommandent notamment de réexaminer la nécessité de maintenir les contributions de santé publique assises sur les produits dont l’innocuité est scientifiquement prouvée.
Il convient de le rappeler, le soja relève même de préconisations alimentaires contre les allergies.
Je vous renvoie également à la lecture du rapport, paru en 2013, de la commission Innovation 2030, présidée par Mme Lauvergeon : « De nouveaux produits alimentaires reposant sur des protéines végétales devront être conçus pour répondre à la croissance de la demande alimentaire mondiale que le secteur de l’élevage ne pourra seul satisfaire. Les forces conjuguées de son agriculture, de son industrie agroalimentaire et de sa tradition d’innovation culinaire devraient permettre à la France de disposer d’un important potentiel d’exportation. »
La suppression d’une telle contribution permettrait à la filière des boissons à base de soja, qui regroupe quatre grosses entreprises françaises, d’investir, de créer des emplois et d’exporter.
La commission s’en remet à la sagesse du Sénat.
Ainsi que nous l’avons expliqué en commission, à la lumière de la question prioritaire de constitutionnalité relative au Red Bull, il semble difficile d’exclure une boisson répondant aux critères fixés par la taxe sur le seul critère de sa composition. Le Conseil constitutionnel considère que le législateur doit établir une imposition fondée sur des critères objectifs et rationnels en rapport avec l’objectif visé.
Quand on a dit cela, on a tout dit... Mais je laisserai à M. le secrétaire d’État le soin de conclure.
Je vais répéter ce que j’ai déjà dit lors du débat à l’Assemblée nationale, où le sujet nous a occupés durant près d’une heure. Certes, c’était extrêmement sympathique, mais je ne suis pas convaincu que cela était réellement justifié...
D’abord, les montants concernés sont extrêmement faibles, de l’ordre du million ou du million et demi d’euros. Ce n’est donc pas un problème de rendement.
Ensuite, l’exonération envisagée permettrait-elle de redynamiser la filière ? Sur une bouteille d’un litre de boisson à base de soja, qui coûte en général autour de 2, 50 euros, la taxe représente 7, 5 centimes, soit 3 % du prix. Je laisse donc à votre appréciation le soin d’évaluer si une telle mesure est de nature à modifier l’équilibre du marché. À l’Assemblée nationale, où certains faisaient toute une histoire pour cette « filière d’avenir pénalisée par la taxe », une proposition similaire a finalement été repoussée.
Le Gouvernement est plutôt défavorable à la suppression de la taxe pour ces produits. En effet, une telle disposition n’est pas de nature à modifier la filière compte tenu de la faiblesse de la taxe par rapport aux prix de vente. En outre, ce serait introduire une complexité supplémentaire et créer encore une différence entre des types de boissons, même si je sais que les sucres ne sont pas de même nature selon qu’ils proviennent de lait de soja ou d’autres protéines. Je ne suis cependant pas un spécialiste de ces questions, qui sont en tout cas d’une complexité rare. Soyez certains que je ne demanderai pas une seconde délibération si votre assemblée adoptait cet amendement…
Monsieur le secrétaire d’État, je vous inviterai un jour à une dégustation, vous pourrez vérifier que les boissons au lait de soja n’ont rien à voir avec le Coca-Cola ou le Red Bull.
Je rappelle que le lait de vache, qui peut engendrer des allergies, n’est pas du tout soumis à cette taxe, que les marges dans l’agroalimentaire sont de 2 % et que cette taxe représente 5 % à 6 % du prix de vente.
On peut porter deux regards différents sur ma proposition. Le vôtre consiste à dire que, eu égard à la faiblesse de cette taxe, il ne sert à rien de la supprimer. Moi, j’ai appris que les petits ruisseaux faisaient les grandes rivières. Par rapport à l’enjeu que représente l’industrie agroalimentaire, au défi que constitue l’alimentation mondiale, pour laquelle, demain, nous manquerons de ressources, le développement des productions végétales est une nécessité.
Dans la lettre de mission adressée par le Gouvernement à Mme Lauvergeon est clairement mise en avant la nécessité pour notre industrie et nos entreprises d’innover. Tout ce qui peut permettre de financer l’innovation dans les entreprises doit donc être encouragé.
Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC.
Monsieur le secrétaire d'État, ce n’est pas une question de rendement, dites-vous. Donc, évacuons tout de suite la question financière et venons-en fond du dossier. Comme l’a excellemment dit ma collègue Françoise Gatel, cet amendement renvoie à la question de l’alimentation et de la santé publique. Par conséquent, c’est sous cet angle qu’il faut selon moi l’aborder.
Les produits issus du soja n’ont strictement rien à voir avec un certain nombre de produits importés, sur la qualité desquels je ne ferai pas de commentaire, mais qui, à l’évidence, ne participent pas du bon goût français.
Puisque ce n’est pas un problème financier, c’est donc un problème de santé publique. Je me réjouis pour ma part, et je vous en remercie, de constater une certaine évolution du discours sur le sujet. Il y a un an, on n’avait pas le droit d’en débattre ; c’était un sujet tabou. Aujourd'hui, en disant que vous ne demanderez pas une seconde délibération sur cet amendement, c’est, d’une certaine manière, avouer que vous commencez à être convaincu. Si vous ne voulez pas qu’on revienne, l’an prochain, sur ce sujet, donnez un avis de sagesse sur cet amendement. Nous gagnerons du temps, et la filière s’en portera mieux.
Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC.
Je soutiens cet amendement.
On vient de le dire, ce n’est pas une question d’argent. Classer les boissons contenant du soja avec les boissons sucrées et un certain nombre d’objets de gourmandise et de fantaisie, c’est faire preuve d’indifférence, voire de mépris à l’égard de ceux qui ont été pionniers en ce domaine, qui ont fait des recherches, qui ont innové en matière alimentaire, qui ont recherché des substituts naturels à l’alimentation traditionnelle. Le lait de soja, pour des nourrissons ou des adultes allergiques au lactose, est un produit de substitution qui leur permet de se nourrir et de vivre à peu près normalement puisqu’il est assimilable au lait de vache, le lactose et le calcium en moins.
Pour ceux qui seraient privés de la possibilité d’accéder aux produits laitiers, le soja remplace avantageusement le lait. M. de Legge vient de le dire, ce n’est pas la seule qualité de ce produit, qui a également des effets positifs en termes de prévention cardiovasculaire et de prévention de certains cancers. Par conséquent, il me semble que c’est faire injure aux chercheurs que de cataloguer ce produit dans les produits sucrés et autres sodas.
L'amendement est adopté.
Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 12.
L'amendement n° 311 rectifié, présenté par MM. Mézard, Collin, Castelli, Esnol et Fortassin, Mmes Laborde et Malherbe et M. Requier, est ainsi libellé :
Après l’article 12
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - À la première phrase du II de l’article 1613 ter du code général des impôts, le montant : « 7, 45 € » est remplacé par le montant : « 9 € ».
II. - À la première phrase du II de l’article 1613 quater du code général des impôts, le montant : « 7, 45 € » est remplacé par le montant : « 9 € ».
La parole est à Mme Hermeline Malherbe.
Cet amendement vise à relever – il ne s’agit donc pas d’un impôt supplémentaire – la contribution prévue aux articles 1613 ter et 1613 quater du code général des impôts et qui est acquittée par les entreprises produisant des boissons sucrées de type soda – on les a évoquées à l’instant d’une autre manière – et des boissons contenant des édulcorants.
Il s’agit de faire passer cette contribution de 7, 45 euros à 9 euros, soit 1, 55 euro supplémentaire par hectolitre, soit cent litres, sur ces boissons qui ont des effets néfastes pour la santé. Elles jouent en particulier un rôle dans l’obésité, notamment l’obésité infantile, ce qui est d’autant plus grave. On voit aujourd'hui des enfants de quatre, cinq ou six ans déjà obèses. Elles favorisent aussi les maladies cardiovasculaires. Une étude de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale, l’INSERM, a ainsi démontré qu’une consommation élevée de boissons light était associée à une forte augmentation du risque de diabète de type 2.
Dans ce contexte, monsieur le secrétaire d’État, il me paraît donc intéressant d’examiner avec beaucoup d’attention cet amendement, qui, par ailleurs, est gagé.
La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement, qui vise à augmenter la contribution sur les boissons sucrées et sur celles contenant des édulcorants. Il n’apparaît pas opportun de multiplier les hausses des contributions fiscales sur des produits dont l’assiette – ainsi que M. le secrétaire d’État l’a rappelé à propos du soja – est très limitée.
On voit les taxes fleurir au gré de certains amendements, comme précédemment à propos des travailleurs indépendants.
Actuellement, le montant de la taxe est fixé à 7, 45 euros. Le Gouvernement n’est pas favorable à ce qu’il passe à 9 euros par hectolitre.
Nous ne souhaitons pas que la taxe sur les boissons sucrées augmente encore.
De plus, je suis tout à fait opposée au fait de taxer de la même façon les boissons sucrées et les boissons contenant des édulcorants. Dans la mesure où la nocivité de l’aspartame n’est pas prouvée – on le verra dans un amendement ultérieur –, il n’est pas logique – le Conseil constitutionnel l’avait d'ailleurs souligné lors de l’instauration de la taxe sur les boissons sucrées – de taxer de la même façon les boissons sucrées et celles à base d’édulcorants, ces dernières n’ayant pas le même effet en matière d’obésité.
Nous voterons cet amendement.
Dans le cadre du PLFSS, nous nous intéressons aux questions de santé, et les conséquences sanitaires néfastes qu’a évoquées Mme Malherbe correspondent à une réalité préoccupante.
Quant aux études concernant l’aspartame, nous en reparlerons tout à l’heure…
L'amendement n'est pas adopté.
I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Le troisième alinéa de l’article L. 131-6 est remplacé par quatre alinéas ainsi rédigés :
« Sont également pris en compte, dans les conditions prévues au deuxième alinéa, pour leur montant excédant 10 % du capital social et des primes d’émission et des sommes versées en compte courant qu’ils détiennent en pleine propriété ou en usufruit :
« 1° Les revenus définis aux articles 108 à 115 du code général des impôts perçus par le travailleur indépendant non agricole, son conjoint ou le partenaire auquel il est lié par un pacte civil de solidarité ou ses enfants mineurs non émancipés ainsi que les revenus mentionnés au 4° de l’article 124 du même code perçus par ces mêmes personnes ;
« 2° En cas d’exercice de l’activité sous la forme d’une société passible de l’impôt sur le revenu, la part du revenu provenant de cette activité et soumis à l’impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux ou des bénéfices non commerciaux qui est perçue, lorsqu’ils sont associés de la société, par le conjoint ou le partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou par les enfants mineurs non émancipés du travailleur indépendant non agricole.
« Un décret en Conseil d’État précise la nature des apports retenus pour la détermination du capital social, ainsi que les modalités de prise en compte des sommes versées en compte courant mentionnées au troisième alinéa du présent article. » ;
2° La sous-section 1 de la section 1 du chapitre II du titre IV du livre II est complétée par un article L. 242-4-5 ainsi rédigé :
« Art. L. 242 -4 -5 . – I. – Sont considérés comme une rémunération, au sens de l’article L. 242-1, dans les conditions fixées aux troisième à sixième alinéas de l’article L. 131-6, les revenus définis au même article L. 131-6 qui sont perçus par les personnes mentionnées au II du présent article ou par leur conjoint ou le partenaire auquel ils sont liés par un pacte civil de solidarité ou par leurs enfants mineurs non émancipés.
« II. – Le I s’applique aux personnes mentionnées aux 12° ou 23° de l’article L. 311-3 qui possèdent ensemble plus de la moitié du capital social, étant entendu que les actions appartenant, en toute propriété ou en usufruit, à leur conjoint ou au partenaire auquel elles sont liées par un pacte civil de solidarité et à leurs enfants mineurs non émancipés sont considérées comme possédées par elles. »
II. – L’article L. 741-10 du code rural et de la pêche maritime est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Pour l’application de l’article L. 242-4-5 du code de la sécurité sociale au régime de protection sociale des salariés agricoles, les références aux troisième à sixième alinéas de l’article L. 131-6 du même code sont remplacées par les références aux cinquième à huitième alinéas de l’article L. 731-14 du présent code, les références aux 1° et 2° du même article L. 131-6 sont remplacées par les références aux a et b du 4° du même article L. 731-14 et les références aux 12° et 23° de l’article L. 311-3 du code de la sécurité sociale sont remplacées par les références aux 8° et 9° de l’article L. 722-20 du présent code. »
III. – Le présent article s’applique aux cotisations et contributions sociales dues au titre des revenus perçus à compter du 1er janvier 2015.
Cet article, introduit par voie d’amendement à l’Assemblée nationale, vise à appliquer aux dirigeants de sociétés anonymes, les SA, et de sociétés par actions simplifiées, les SAS, un mécanisme anti-abus sur les versements de dividendes aux dirigeants qui détiennent la majorité du capital. Concrètement, il s’agit de prévoir que les dirigeants de ces entreprises, lorsqu’ils détiennent la majorité du capital social, peuvent percevoir des dividendes dans la limite de 10 % du capital social. La part qui excède ce seuil de 10 % doit être réintégrée dans leur rémunération habituelle et soumise à cotisations sociales. L’objet de ces dispositifs, qui existent déjà depuis plusieurs années, est d’éviter que des dirigeants qui sont en même temps actionnaires majoritaires puissent transformer leur rémunération en dividende pour réduire fortement leurs cotisations.
J’ai entendu plusieurs prises de parole qui dénaturaient la portée réelle de l’amendement ayant permis l’insertion de cet article et qui accusaient la majorité de ne pas respecter la prise de risque. Il faut se garder des caricatures ! Il s’agit au contraire de faire respecter la différence entre la rémunération du dirigeant, d’une part, et celle de l’actionnaire, d’autre part, cette dernière devant être en rapport avec le capital investi et ne pas se substituer à la première.
Il est assez difficile d’estimer les effets financiers de ce plafonnement, qui dépendent du comportement du chef d’entreprise : s’il réintègre la part excédentaire dans sa rémunération habituelle, il paiera davantage de cotisations sociales mais réduira aussi le montant de son impôt sur les sociétés et il paiera aussi moins de prélèvements sur le capital.
Nous avons tous constaté que les chefs d’entreprise avaient vu dans cette mesure une forme de défiance à leur égard. En la regardant un peu rapidement peut-être, beaucoup de chefs d’entreprise ou de spécialistes du sujet ont cru qu’il s’agissait de soumettre tous les dividendes à cotisations.
Le Gouvernement a annoncé que, dans ces conditions, et dans la mesure où cette disposition n’a pas pour objectif d’augmenter significativement les recettes des régimes sociaux, il était préférable que cet article introduit par voie d’amendement soit retiré du projet de loi. Cela laissera le temps de travailler de manière plus approfondie sur les modalités d’arbitrages qui existent dans certains statuts entre rémunération personnelle et dividendes et de proposer une régulation adaptée.
Nos collègues de la commission des finances, qui proposent la suppression de l’article, ont d’ailleurs reconnu qu’il y avait là un véritable problème et que le principe d’une régulation n’était pas illégitime. Le sujet ne doit pas être abordé au travers de postures partisanes, et nous pouvons tous reconnaître la nécessité véritable que tous les chefs d’entreprise contribuent de manière juste et équilibrée au financement de la protection sociale, de façon équitable, quelle que soit la forme juridique de leur entreprise.
Je suis saisi de quatre amendements identiques.
L'amendement n° 1 rectifié quater est présenté par M. Cadic, Mmes Deromedi, Garriaud-Maylam et Procaccia et MM. Bonnecarrère, Charon, Dassault, Duvernois, Frassa et Pellevat.
L'amendement n° 10 est présenté par M. Delattre, au nom de la commission des finances.
L'amendement n° 36 est présenté par M. Vanlerenberghe, au nom de la commission des affaires sociales.
L'amendement n° 196 est présenté par M. Barbier.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Olivier Cadic, pour présenter l'amendement n° 1 rectifié quater.
Cet amendement vise à supprimer l'article 12 bis, introduit par l'Assemblée nationale, qui tend à assujettir aux charges sociales les dividendes versés aux dirigeants majoritaires de SA ou de SAS, dès lors que leur montant excède 10 % du capital social de l'entreprise.
Cet article, tel qu’il est rédigé, cherche à mettre fin à des supposés phénomènes d'optimisation, en limitant la possibilité pour les dirigeants de réduire l'assiette de leurs cotisations sociales en se rémunérant sous forme de dividendes, et non de salaires. Avec cette disposition, le Gouvernement et la majorité adressent un message de défiance aux entrepreneurs.
Les dividendes, qui rémunèrent la prise de risque, ne doivent pas être confondus avec un salaire. Par cet article, ce sont la création de valeur et l'esprit d'entreprendre qui sont de nouveau sanctionnés en France. Il s'agit là d'un énième signal négatif envoyé aux entreprises, en particulier aux PME et aux start-up, qui verront leurs prélèvements s'accroître. Les dividendes proviennent en effet des résultats des entreprises, qui sont eux-mêmes déjà soumis à l'impôt. Cet article impose une double taxation aux entrepreneurs, sans aucune étude d'impact ni concertation.
Par ailleurs, en retirant des fonds aux entreprises via l'assujettissement des dividendes aux cotisations sociales, ce sont leurs capacités d'investissements qui seront fortement réduites et, par voie de conséquence, leurs capacités à embaucher. Dans le contexte économique que nous connaissons, nous ne pouvons pas nous permettre de faire peser des charges supplémentaires sur les entreprises.
J’ajoute que cet article crée de nombreuses incertitudes sur le plan juridique pouvant conduire à des prélèvements totaux de 79 % de la richesse créée.
Pour toutes ces raisons, le présent amendement vise à supprimer l'assujettissement aux charges sociales des dividendes versés aux dirigeants de SA ou de SAS.
La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour présenter l’amendement n° 10.
La commission des finances a déposé, elle aussi, un amendement de suppression de l’article 12 bis, tout en reconnaissant la difficulté de la question. En réalité, lorsqu’il n’y a qu’une seule personne, on vit au plus près l’association capital-travail !
Un système dans lequel toute la rémunération ou l’essentiel de la rémunération serait assurée par la distribution de dividendes pose problème dès lors qu’il peut déboucher sur un abus de droit. Puisque l’abus de droit existe en droit fiscal, il peut aussi exister en droit social. Même si nous sommes tous des défenseurs des petites entreprises, nous ne sommes pas là pour assécher la ressource sociale.
Lors de la discussion générale, nous avions dit qu’il fallait trouver le bon curseur, qui doit certainement se situer au niveau du plafond de la sécurité sociale, soit environ 37 000 euros. Jusqu’à cette limite, la rémunération doit relever des cotisations sociales ; au-delà, il s’agit uniquement de la rémunération du risque et du capital investi. Cela nous semble être le système le plus juste.
Il est difficile pour nous d’aller plus loin faute d’une étude d’impact. Il faut savoir que ce dispositif a été introduit par M. Bapt à l’Assemblée nationale. Toutefois, comme cet article comprend douze alinéas d’une très grande technicité, qui tiennent presque de l’ingénierie financière, on se dit qu’il n’a pas été introduit là tout à fait spontanément…
Monsieur le secrétaire d’État, la question est de savoir comment trouver un système juste et équilibré. Dans la discussion générale, j’avais lancé un appel à la réflexion sur ce sujet, mais je n’ai pas pu entendre votre réponse parce que nous avions une réunion de la commission des finances.
Certes, nous ne trouverons pas de solution ce soir, mais un système juste et équilibré, cela signifie qu’une part incontestable de la rémunération correspond au travail, avec les charges sociales afférentes. Je crois que nous pourrions nous mettre d’accord sur le seuil de 37 000 euros ; au-delà, cela doit relever uniquement, je le répète, de la rémunération du risque et du capital. Ainsi, on aboutirait à un système à peu près équilibré.
Voilà la piste que je propose. En attendant, je confirme que notre commission souhaiterait disposer d’une étude d’impact en vue de travailler en ce sens. En tant que législateur, notre responsabilité est de légiférer si l’on constate un abus de droit comme on en connaît en droit fiscal. Pour cela, il faudrait que nous sachions quel est le nombre exact de travailleurs concernés. Dans nos circonscriptions, nous avons tous connaissance de quelques cas, mais il est difficile de savoir si cette tendance est généralisée.
Je le répète, pour légiférer sereinement, objectivement et justement, il faudrait que nous disposions au moins de cette étude d’impact.
La parole est à M. le rapporteur général, pour présenter l'amendement n° 36.
Cet amendement vise, comme les autres amendements identiques, à supprimer l’article 12 bis.
Je n’ajouterai pas grand-chose à ce qui vient d’être dit. La commission des affaires sociales souhaite mettre fin à l’effet d’aubaine que l’amendement de l’Assemblée nationale tendait à contrecarrer, mais sans avoir peut-être perçu l’impact négatif de sa proposition. Il suffit de voir la réaction du ministre des finances, Michel Sapin, qui a immédiatement annoncé qu’il ferait supprimer cette disposition. Monsieur le secrétaire d’État, j’imagine que vous allez vous aussi nous proposer la même chose.
La proposition de notre collègue Francis Delattre est intéressante : autant il me semble anormal de taxer socialement les dividendes alors qu’ils le sont fiscalement, autant il faut évidemment pouvoir continuer à financer la sécurité sociale. Il est tout à fait normal que les dirigeants et les gérants de ces entreprises cotisent, eux aussi, à la sécurité sociale.
Nous devons travailler à la solution de sagesse que propose la commission de finances. C'est la raison pour laquelle nous vous demandons, mes chers collègues, de voter cet amendement de suppression.
La parole est à M. Gilbert Barbier, pour présenter l'amendement n° 196.
Ce qui manque à cette proposition adoptée sur l’initiative du rapporteur de la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale Gérard Bapt, c'est évidemment une étude d’impact. On ne sait pas du tout où l’on va ! M. Delattre l’a souligné, la rédaction de l’article est excessivement compliquée, si bien qu’on ne voit pas quelles vont en être exactement les conséquences.
Il faudra étudier la manière de taxer les excès de dividendes qui pourraient être constatés dans certaines sociétés, mais, en attendant, il faut absolument supprimer l’article 12 bis et faire une étude d’impact précise, qui ne sera d’ailleurs pas facile à réaliser.
Mesdames, messieurs les sénateurs, vous commencez à me connaître suffisamment pour savoir que mes opinions sont tranchées et mes idées claires. Je prends le temps du dialogue, de l’écoute réciproque et de l’explication.
L’amendement déposé à l’Assemblée nationale, examiné tardivement parmi un millier d’autres, peut donner l’impression qu’il n’a pas été suffisamment travaillé, ce qui n’est pas le cas. Toutefois, je reconnais, après avoir relu les débats, qu’il a manqué d’explication. Quelquefois, on a tant le sujet en tête qu’on pense qu’il en va de même pour tout le monde et qu’il n’est pas nécessaire d’en débattre.
Cet amendement a donc provoqué des « sur-réactions », qui, je n’hésite pas à le dire, ne sont pas justifiées. Vos différentes interventions montrent que vous avez pris conscience de ces situations d’abus de droit ou, en tout cas, de situations « limites », qui ne sont saines ni pour nos recettes ni pour l’équité. D’autres solutions que celles qui sont prévues par cet amendement pourraient être proposées, mais je me félicite de cette prise de conscience collective, peut-être due aux explications ayant suivi l’adoption de ce dispositif.
Je voudrais retracer rapidement l’évolution de la législation sur ce point. En 2009, ont été visées les sociétés d’exercice libéral et ceux qui, au travers de ce type de sociétés, en « profitaient » pour convertir des salaires en dividendes, afin d’obtenir des réductions en matière de contributions sociales. Ce problème a été réglé à cette époque par qui vous savez… Le même dispositif a été adopté en 2013 pour les SARL, les sociétés à responsabilité limitée, c'est-à-dire essentiellement pour les commerçants et les artisans. En 2014, il a été étendu aux SARL agricoles.
Que s’est-il passé par la suite ? Je vais vous donner un chiffre qui va probablement vous faire réfléchir. Il restait à traiter le cas des sociétés par actions simplifiées et des sociétés anonymes. En 2010, on dénombrait dans notre pays 11 000 SAS à associé unique, lequel, par définition, est majoritaire, puisqu’il est seul, contre 36 000 en 2013 !
En analysant ces chiffres et en discutant avec les uns et les autres – monsieur Delattre, vous y avez fait allusion –, nous avons observé que de nombreux cabinets d’expertise comptable recommandaient à certains dirigeants de transformer leur SARL en SAS. On les comprend quand on sait que les dividendes sont assujettis à un taux de 15, 5 % de contribution sociale, alors que les salaires le sont à des taux bien supérieurs. C'est la raison pour laquelle a émergé l’idée de ce dispositif introduit par voie d’amendement à l’Assemblée nationale.
Vous demandez s’il y a eu une étude d’impact. M. Barbier l’a reconnu lui-même, elle est difficile à réaliser. Si l’on ne prend que les sociétés par actions simplifiées à associé unique, dont je vous ai rappelé le nombre, et qu’on relève le montant des dividendes versés au-delà du seuil de 10 % du capital social en 2013, on obtient des sommes de l’ordre de 300 millions à 400 millions d’euros. Il faudrait cependant faire un calcul plus fin, car les montants qui ont donné lieu à versement de dividendes ont parfois déjà été assujettis à l’impôt sur les sociétés.
Après calcul, et l’estimation a été faite il y a déjà plusieurs jours, cette mesure rapporterait de l’ordre de 50 millions à 100 millions d’euros au budget. On est loin du milliard d’euros évoqué dans la presse par certaines organisations ! J’aurais probablement dû le dire à l’Assemblée nationale, mais je ne suis pas sûr que j’aurais évité les débats qui ont eu lieu après.
Dans ces conditions, que faut-il faire aujourd'hui ? J’ai confirmé ce que d’autres avaient pu dire avant moi : le Gouvernement est prêt à revoir ce dispositif. Néanmoins, si le seuil de 10 % du capital social n’est peut-être pas le bon, je ne suis pas sûr non plus, monsieur Delattre, que votre proposition, qui consiste à prendre comme référence le plafond de la sécurité sociale, soit pertinente. En effet, si on l’appliquait à l’ensemble des sociétés, cela reviendrait à attribuer la même franchise à toutes les entreprises, sans considération pour leur taille ou pour leur capital social.
Il faut donc probablement travailler sur d’autres types de solutions. Nous avons quelques idées sur le sujet, mais nous ne sommes pas prêts aujourd'hui à vous proposer une solution de substitution.
Concernant les amendements de suppression de l’article 12 bis, le Gouvernement s’en remet à la sagesse de votre assemblée. Il prend acte de la bonne compréhension dont cette question fait désormais l’objet. Toutefois, il rappelle, pour ceux qui ne seraient pas spécialistes de la question, que le dispositif ne concerne pas tous les dividendes de toutes les sociétés, tant s’en faut : il ne concerne que les dirigeants qui possèdent, seuls ou avec leur famille, plus de 50 % des parts d’une société, ce qui n’est évidemment que très exceptionnellement le cas des très grandes sociétés – je ne sais même pas si le cas se rencontre –, et que n’est visée que la fraction de dividendes qui dépasse 10 % du capital social. Vous le voyez, les interprétations qui ont pu être faites du dispositif se sont parfois fortement éloignées de sa réalité.
Voilà, en toute transparence et en toute franchise, quelle est la situation. Au demeurant, le Gouvernement n’exclut pas, sur ce sujet, dont je vous remercie d’avoir constaté qu’il était, parfois, un vrai sujet, de vous proposer un autre dispositif ou d’approuver un dispositif qui serait proposé, dans le cadre du présent PLFSS ou dans un texte à venir.
Monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je vous propose de prolonger cette séance jusqu’à minuit trente, afin d’aller plus avant dans l’examen des amendements.
Il n’y a pas d’observation ?...
Il en est ainsi décidé.
La parole est à M. Jean-Marc Gabouty, pour explication de vote.
Ce dispositif nécessite effectivement une étude d’impact, ses implications étant multiples et la situation pouvant être très différente d’une société à l’autre.
Monsieur le secrétaire d’État, vous évoquez le succès de la société par actions simplifiée. Je ne suis pas sûr qu’il s’explique uniquement par des raisons d’opportunité liées à l’assujettissement aux cotisations sociales. En effet, la SAS est un très bon statut. Un certain nombre de SA se transforment ainsi en SAS pour avoir un fonctionnement beaucoup plus souple. De même, dans les petits groupes avec holding, la société mère à actionnariat multiple est généralement une SA, tandis que les filiales sont souvent des SAS, dont la société mère est l’unique actionnaire.
Je comprends tout à fait le souci d’éviter les abus auxquels pourrait conduire la recherche d’une optimisation sociale ou fiscale, mais n’oublions pas que la situation est très différente selon les dirigeants. C’est aussi en fonction de leurs revenus complémentaires que ceux-ci choisissent un type d’optimisation.
Éviter les dérives me paraît tout à fait naturel, mais je pense que cette question mérite davantage de réflexion. En effet, derrière le terme de « dirigeant » se trouvent aussi bien des salariés que de simples mandataires sociaux.
Faut-il que les mandataires sociaux, dont les revenus sont relativement limités, s’octroient des revenus plus importants, au détriment de l’autofinancement des entreprises et de la perception de l’impôt sur les sociétés, pour acquitter la contribution qui leur sera finalement demandée ? Sans une réflexion plus approfondie sur le sujet, on pourrait bien voir naître cet effet pervers.
Par conséquent, tout en comprenant l’intention de fond, qui est de limiter les abus, je pense qu’il faut faire très attention, considérer à la fois le droit des sociétés et la fiscalité et ne pas traiter les deux problèmes de manière séparée.
Bien entendu, je voterai les amendements de suppression, en attendant que soit trouvée une solution plus satisfaisante qui ne présente pas de risque pour le fonctionnement des entreprises.
Ces quatre amendements tendent à supprimer un article qui vise à assujettir à cotisations sociales les dividendes versés aux dirigeants de sociétés anonymes et de sociétés par actions simplifiées.
Ces demandes de suppression ainsi que la réponse que leur donne M. le secrétaire d’État me laissent perplexe. J’entends qu’il faut avoir une réflexion plus poussée. J’entends qu’il faut réaliser une étude d’impact pour analyser les conséquences d’une mesure qui ne serait pas sans gravité… Mais tout cela me met mal à l’aise. Le Gouvernement est quand même aux manettes depuis un certain temps ! Dès lors, pourquoi ces pistes de réflexion n’ont-elles pas été explorées ? Alors que les membres de la commission des affaires sociales constatent un manque criant de recettes pour notre système de protection sociale, je ne comprends pas pourquoi la logique reste essentiellement d’opérer des coupes budgétaires et non d’essayer de se doter de recettes nouvelles.
Quand les membres du groupe CRC proposent deux nouvelles recettes, avec lesquelles on peut, bien évidemment, être en désaccord – elles ne représentent pas la panacée, et c’est le jeu du débat démocratique –, que nous répond-on ? Quand nous proposons une modulation du taux de cotisation des employeurs suivant leur politique, plus ou moins vertueuse, de l’emploi, on nous dit que c’est beaucoup trop compliqué et que nous devons mobiliser nos énergies pour essayer d’affiner les choses. Il me semble que l’État a les moyens de pousser les réflexions plus loin qu’un groupe parlementaire ! Quand nous proposons, au nom de la justice sociale, de créer une cotisation sur les revenus financiers des entreprises et des banques au même taux que les cotisations des employeurs sur les salaires, c'est-à-dire 5, 4 %, on nous dit qu’il faut faire attention au droit communautaire… Autrement dit, on a l’impression d’être face à des choix absolument immuables et qu’il n'y a aucune possibilité de peser sur ces choix.
J’ai sans doute une oreille sélective, mais il est une chose que je suis sûre d’avoir entendue : l’engagement du candidat Hollande à renégocier certains traités européens. J’ai donc l’espoir que nous pourrons faire bouger les lignes, dans l’intérêt de nos concitoyens.
Je suis donc très étonnée de constater qu’appuyer encore et toujours sur les dépenses ne pose pas de problème – faire des économies ne nécessite pas d’étude d’impact… –, quand l’exploration de chemins nouveaux et, parfois, audacieux pour se doter de recettes nouvelles requiert toujours beaucoup de réflexion et d’analyse préalable…
Dans ces conditions, on reste vraiment sur une logique de petites mesures mises bout à bout, qui ne vont pas du tout dans l’intérêt des populations ni dans le sens d’un système de protection sociale digne du XXIe siècle.
Je voudrais rétablir un certain nombre de vérités et, sans avoir la prétention de vous faire un cours, vous expliquer quel est le statut d’un dirigeant majoritaire, mandataire social de société.
Premièrement, ces personnes investissent souvent des fonds personnels, parfois en vendant des biens immobiliers, pour constituer le capital de la société.
À cet égard, le taux de 10 % ne correspond à rien ! On se demande d’ailleurs d’où il sort. On sait très bien que, quand on investit beaucoup d’argent dans des sociétés à risque, dans des sociétés innovantes, le taux de perte du capital est extrêmement élevé. Je peux vous dire que, dans toutes les transactions que font les grands cabinets, les taux retenus – on appelle cela la « rente du goodwill » – sont de l’ordre de 15 %, 20 % ou 25 % ! Ce taux de 10 % n’a donc rien à voir avec la réalité financière des risques pris par ceux qui investissent dans des sociétés pour créer de l’activité et de l’emploi.
Deuxièmement, si l’on disposait d’une étude d’impact un peu plus aboutie, je pense que certains dirigeants majoritaires de sociétés hésiteraient entre percevoir leurs résultats sous forme de dividendes et les toucher sous forme de rémunération.
Rappelons que le statut d’un dirigeant de société mandataire social ne lui permet pas de bénéficier du chômage : si la société se casse la figure, il ne perçoit aucune indemnité ! Il est révocable ad nutum par ses actionnaires. Il ne bénéficie pas du droit du travail ni des procédures de licenciement. Si la société rencontre des difficultés de trésorerie empêchant que sa rémunération lui soit versée, bien qu’il ait acquitté les charges sociales correspondantes, il attend des jours meilleurs pour pouvoir se rémunérer, ce qui n’est quand même pas une situation très facile. Ajoutons que, s’il décide de ne pas soumettre une partie de sa rémunération à cotisations sociales, et c’est un calcul qu’il faut faire à terme, in fine, il sera aussi perdant ! En effet, il ne cotisera pas aux caisses de retraite ni, surtout, aux caisses de retraite complémentaire, ce qui le privera d’un certain nombre de ressources au moment où il liquidera sa retraite. Vous le voyez, la comparaison n’est pas facile.
Pour terminer, je reviens sur ce qu’a évoqué mon collègue Delattre au sujet de l’abus de droit : quand les rémunérations que se verse le dirigeant ne sont pas suffisamment élevées, la distribution de dividendes doit se déclencher. Mais, monsieur le secrétaire d'État, vous savez très bien que les vérificateurs fiscaux procèdent très fréquemment de manière inverse : quand ils se penchent sur une société dont le dirigeant se verse une rémunération sous forme de salaire – ce n’est pas un salaire, puisqu’il n’y a pas de contrat de travail ; c’est simplement un mandat social – et s’ils estiment que cette rémunération est trop élevée par rapport à ce qui se passe ailleurs, ils considèrent qu’une partie de cette rémunération est un bénéfice distribué et demandent à la société d’acquitter l’impôt sur les sociétés et l’impôt sur le revenu avec une pénalité importante. Bien entendu, dans cette hypothèse, le régime des dividendes ne s’applique pas !
Vous avez fait allusion aux sommes que le dispositif de l’article 12 bis pouvait rapporter au budget : ces sommes ne sont pas significatives. Pour ma part, je crois qu’il faut que l’on fiche enfin un peu la paix aux dirigeants d’entreprises qui prennent des risques, qui investissent des capitaux, qui peuvent perdre leur patrimoine, sans se rémunérer forcément, pour pouvoir rémunérer leurs salariés, quand la société va mal.
Arrêtez de leur chercher des poux dans la tête !
Certains vérificateurs fiscaux et sociaux utilisent une norme pour déclarer la rémunération de certains dirigeants comme excessive. Appliquons a contrario cette norme à ceux dont on considère que la rémunération n’est pas suffisante, vu leur volume de travail et le volume d’activité de leur société. Le Gouvernement doit réfléchir à des critères globaux qui pourraient être donnés, à titre indicatif, à ces vérificateurs.
Arrêtons de nous torturer l’esprit. Je pense qu’un dirigeant pour lequel un cabinet d’expertise comptable ferait une étude comparative sur l’opportunité de se rémunérer et sur celle de se distribuer des dividendes aurait, in fine, des difficultés à se décider entre ces deux options, puisque les arguments plaident tantôt pour l’une, tantôt pour l’autre.
Je mets aux voix les amendements identiques n° 1 rectifié quater, 10, 36 et 196.
Les amendements sont adoptés.
L'amendement n° 17 rectifié quater, présenté par M. Cadic, Mmes Deromedi, Garriaud-Maylam et Procaccia et MM. Bonnecarrère, Charon, Dassault, Duvernois, Frassa et Pellevat, est ainsi libellé :
Après l’article 12 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Les troisième et quatrième alinéas de l’article L. 131-6 du code de la sécurité sociale sont supprimés.
II. - La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Olivier Cadic.
Mes chers collègues, je tiens avant toute chose à vous remercier du vote qui vient d’avoir lieu. L’amendement n° 17 rectifié quater est précisément un amendement de cohérence avec la suppression de l’article 12 bis.
La loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 a élargi l'assiette des cotisations et contributions sociales des travailleurs indépendants, donc des gérants majoritaires de SARL soumis au régime des travailleurs non salariés.
En tant que revenus du capital, les dividendes étaient antérieurement imposés dans la catégorie des revenus mobiliers. De ce fait, ils étaient assujettis aux prélèvements sociaux – CSG et CRDS –, mais n'étaient pas soumis aux cotisations sociales. La loi a modifié cette approche, en prévoyant que les dividendes perçus par les gérants majoritaires de SARL seront assujettis aux cotisations sociales lorsqu’ils dépasseront 10 % du capital social, des primes d’émission et des sommes versées en compte courant.
Ainsi, jusqu’à 10 % du montant des capitaux propres, les dividendes et les sommes versées en compte courant supportent des prélèvements sociaux à hauteur de 15, 5 %. Au-delà, des cotisations sociales leur sont appliquées, en plus de ces prélèvements sociaux, au motif qu’ils sont considérés comme revenus d’activité.
Depuis le 1er janvier 2013, la fraction des revenus distribués et des intérêts payés qui excède 10 % du capital social, des primes d’émission et des sommes versées en compte courant doit être réintégrée dans l’assiette des cotisations sociales sur les revenus d’activité des gérants majoritaires dirigeant une société assujettie à l’impôt sur les sociétés. Cette mesure est d’autant plus préjudiciable aux travailleurs indépendants que la loi de finances pour 2013 avait également durci l’imposition des dividendes. Elle prévoyait la suppression de l’abattement de 1 525 euros pour les personnes seules – 3 050 euros pour les couples – et soumettait les dividendes au barème progressif de l’impôt sur le revenu, sans option possible au prélèvement libératoire de 21 %.
Avec de telles dispositions, et sous couvert de lutte contre l’optimisation sociale, le Gouvernement et la majorité en viennent à fixer dans la loi un montant maximal de dividendes et adressent ainsi un message de défiance aux entrepreneurs. Les dividendes, qui rémunèrent la prise de risque, ne doivent pas être confondus avec un salaire. Ils sont issus des résultats des entreprises, eux-mêmes déjà soumis à l’impôt.
Pour toutes ces raisons, le présent amendement tend à supprimer l’assujettissement aux charges sociales des dividendes versés aux dirigeants de SARL. Je crois que personne ne comprendrait que l’on puisse exonérer de cotisations sociales les dirigeants de grandes entreprises, sans faire de même pour les dirigeants de petites entreprises ou de SARL.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. M. Cadic considère qu’il s’agit d’un amendement de cohérence. J’ai craint un moment qu’il n’ajoute qu’il est également rédactionnel.
Sourires.
Les comportements d’optimisation sociale consistant à ne pas se verser de revenu mais des dividendes ont été dénoncés par les dirigeants du RSI. Je ne vais pas revenir sur le sujet, qui a déjà été évoqué, mais j’aimerais savoir, monsieur le secrétaire d’État, quel serait l’impact de la mesure proposée.
À l’époque où la mesure a été mise en œuvre, son impact a été évalué entre 75 millions et 100 millions d’euros.
Cela étant, le Gouvernement n’est pas favorable à un retour en arrière. Je m’en suis remis à la sagesse du Sénat sur une possible extension de cette mesure aux SA et SAS – j’insiste sur le fait que les cas de détention majoritaire par une seule famille doivent être extrêmement rares pour les SA, plus fréquents pour les SAS –, et je suis prêt à examiner des solutions susceptibles d’emporter une majorité au Parlement, mais il ne me semble pas opportun de revenir sur une évolution désormais intégrée par l’ensemble des acteurs.
Je veux profiter de cette intervention pour répondre à certains arguments que j’ai entendus lors de l’examen de l’article 12 bis.
C’est vrai qu’il n’est pas toujours avantageux pour un dirigeant d’entreprise de se verser des dividendes. Le but de cet article était aussi de clarifier les choses en la matière. La notion d’abus de droit n’est jamais évidente à mettre en œuvre et engendre, comme vous le savez, mesdames, messieurs les sénateurs, de très nombreux contentieux. Moins nous nous reposerons sur cette notion et mieux nos fonctionnaires pourront travailler, sinon ce seront les cabinets d’avocats et les juridictions qui auront à s’occuper de ces dossiers.
M. Gabouty a indiqué que la multiplication du nombre de SAS était aussi probablement due au fait que des SA de petite taille se transforment en SAS. Ce constat a effectivement été fait par mes services. Mes précédents propos doivent donc être relativisés : l’augmentation du nombre de SAS est due non seulement à des transformations de SARL en SAS, mais aussi à des transformations de SA en SAS. Comme vous le voyez, il y a un certain nombre de points sur lesquels nous pouvons nous retrouver.
M. Cardoux s’est interrogé sur l’origine du seuil de 10 %. Ce que je peux vous dire, monsieur le sénateur, c’est que le Conseil constitutionnel, saisi sur la question, a validé le chiffre. Cela ne vous apprendra rien sur la façon dont celui-ci a été fixé, mais vous pouvez considérer à tout le moins qu’il est conforme à nos dispositions constitutionnelles.
Tels sont les éléments que je souhaitais porter au débat, le Gouvernement étant, comme je l’ai indiqué, défavorable à cet amendement.
Permettez-moi tout d’abord une brève parenthèse, mes chers collègues, pour rebondir sur les propos de M. le secrétaire d’État. Le phénomène de transformation de SA en SAS peut avoir différentes causes. L’une d’entre elles me semble primordiale : en dessous de certains seuils, relativement élevés, les SAS ne sont pas tenues de désigner un commissaire aux comptes, ce qui limite les contraintes et les frais d’honoraires.
Cela dit, l’amendement n° 17 rectifié quater étant cohérent avec les propos que je viens de tenir sur le cheminement du statut de dirigeant, sur les questions de dividendes et de rémunération, je le voterai tout à fait logiquement.
À cette heure avancée, mes chers collègues, je tiens à souligner à quel point je trouve nos débats plaisants. Voilà en effet qu’à minuit vingt, ce matin, vous redonnez à la lutte des classes ses lettres de noblesse !
Quel plaisir d’assister, dans le cadre de l’examen de ces différents amendements, à une telle défense de la classe dirigeante ! Pour ma part, je suis fière d’appartenir à la classe laborieuse, à la classe ouvrière. C’est elle que je continuerai de défendre depuis les travées de cet hémicycle !
Certains ou certaines d’entre nous se vantent, à la tribune ou en commission, d’être des chefs d’entreprise. Tout le monde ne l’est pas ! Notre pays compte aussi des salariés, qui méritent tout autant estime et respect. Dans les mesures que nous adoptons, nous devons avoir toujours en tête de défendre le monde ouvrier. C’est en tout cas notre préoccupation, nous qui siégeons à la gauche de cet hémicycle !
Voilà un peu plus de trente ans, à l’âge de vingt ans, j’ai créé ma SARL avec mes 20 000 francs d’économies. Pendant sa première année d’existence, je ne me suis pas versé de salaire. Il ne s’agissait pas d’optimisation sociale. Il me fallait simplement dégager des fonds pour permettre à ma société de se développer et de survivre. Voilà, madame la sénatrice, ce que vous appelez la différence entre les classes laborieuses et les classes capitalistes ! Créer son entreprise, c’est prendre des risques et beaucoup travailler !
Monsieur le secrétaire d’État, je ne peux pas accepter vos propos. Nous ne pouvons pas renoncer à imposer des cotisations sociales au président majoritaire de SA et obliger le petit entrepreneur majoritaire, qui se bat au quotidien, qui a parfois investi toute sa richesse dans son entreprise, à en payer sur ses dividendes.
Cela vous semble normal… Ce n’est pas mon cas ! Honnêtement, je trouve même très étrange qu’un gouvernement comme le vôtre envisage de dispenser les grands entrepreneurs de cotisations sociales, tout en imposant cette même charge à de petits entrepreneurs. J’espère donc que cet amendement sera adopté.
Applaudissements sur certaines travées de l'UDI-UC et de l'UMP.
Apparemment, il faut faire attention à tout ce que l’on dit… Je vais donc mettre fin à une incompréhension, si tant est qu’elle existe : je n’ai pas opposé grandes entreprises, grands dirigeants et petits entrepreneurs.
Pour avoir fait des mathématiques pendant longtemps, je sais que ce qui est grand pour l’un sera petit pour l’autre, et inversement. Je connais la signification de « plus grand que » ou de « plus petit que », mais je ne sais pas dire ce qui est grand ou petit, car nous pouvons avoir des conceptions différentes de ces termes.
Mais trêve de cabotinage… J’ai expliqué – il est possible que je me trompe – que des sociétés anonymes de taille importante dont plus de 50 % du capital est détenu par une seule personne ou une personne et sa famille – c’est bien de cela dont il est question, non pas d’être ou pas le dirigeant, mais d’être l’actionnaire majoritaire – sont très peu nombreuses, voire inexistantes. Dès lors, ce n’est pas un sujet !
L’idée est simple : face à des situations pouvant être assimilées à des abus de droit – cela a été unanimement reconnu au début de la discussion –, nous avons considéré qu’il y avait probablement lieu de légiférer. Bien entendu, il n’est pas question d’empêcher le versement de dividendes.
À l’article 12 bis, il a été considéré que, jusqu’à 10 % du capital social, les dividendes versés à une même personne pouvaient être considérés comme tels et, donc, restés assujettis au taux de 15, 5 % de prélèvements sociaux, taux habituel pour les dividendes. Au-delà, toutefois, lorsqu’une personne possède plus de 50 % des parts et se verse plus de 10 % du capital social en dividendes, nous avons estimé – notre appréciation n’est, à l’évidence, pas partagée par tout le monde – que cela pouvait être considéré comme un salaire « déguisé », ce qui n’offre pas que des avantages, comme cela a été dit tout à l’heure.
Il faudra probablement revenir à d’autres critères et observer ce qui se passe sur plusieurs années, tant il est vrai que les conditions économiques peuvent varier d’une année sur l’autre. Tout cela méritera peut-être d’autres propositions. Apparemment, lorsque les dispositions ont été prises sur les sociétés que j’évoquais précédemment, il n’y a guère eu de remontées de la part du secteur. Je pense donc qu’il n’y a pas lieu de revenir sur ces dispositions.
Quant à dire que certains auraient le monopole de la défense de telle ou telle classe, dois-je rappeler que nous avons créé une tranche d’imposition sur le revenu à 45 %, restauré un ISF qui avait été vidé de sa substance, assujetti les revenus du capital au barème de l’impôt sur le revenu, ce qui n’était pas le cas auparavant. Entendre à maintes reprises ce soir que nous n’aurions rien fait en deux ans en termes de réforme de la fiscalité et de progressivité de l’impôt est légèrement contrariant.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.
Il m’est difficile de me prononcer au nom de la commission. J’ai sollicité l’avis du Gouvernement. Maintenant, chaque sénateur est libre de son vote.
J’ai entendu les arguments de M. le secrétaire d'État, qui a reconnu l’existence d’un véritable sujet. Cela, tout le monde l’a compris. Le problème, c’est de savoir si, comme le souhaite M. Cadic, en cohérence avec la suppression de l’article précédent, nous supprimons des dispositions qui rapportent 75 millions à 100 millions d'euros.
Néanmoins, je vous le dis, monsieur le secrétaire d’État, il va falloir résoudre le problème en bloc : nous ne pouvons pas traiter d’une certaine façon les dirigeants majoritaires de SA ou de SAS et laisser de côté ceux de SARL. Je connais des exemples similaires au cas personnel que M. Cadic nous a exposé. Les dirigeants de petites entreprises qui se lancent dans une aventure en investissant toutes leurs économies, sans se verser de salaire, tomberaient, à leur détriment, sous le coup de cette taxation des dividendes. Or ce ne sont pas les dividendes qui apportent une richesse, tout au moins au moment de la création et durant les deux ou trois premières années d’exercice.
J’ai mon opinion sur ce problème, mais je laisse à chacun le soin de voter en conscience.
L'amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 12 bis.
Mes chers collègues, je précise que nous avons examiné 58 amendements au cours de la journée ; il en reste 222 à examiner.
La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, jeudi 13 novembre 2014 :
À neuf heures trente :
1. Suite du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de financement de la sécurité sociale pour 2015 (n° 78, 2014-2015) ;
Rapports de MM. Jean-Marie Vanlerenberghe, René-Paul Savary, Mme Caroline Cayeux, MM. Gérard Roche et Gérard Dériot, faits au nom de la commission des affaires sociales (n° 83, 2014-2015) ;
Avis de M. Francis Delattre, fait au nom de la commission des finances (n° 84, 2014-2015).
À quinze heures :
2. Questions d’actualité au Gouvernement
À seize heures quinze et le soir :
3. Suite de l’ordre du jour du matin.
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
La séance est levée le jeudi 13 novembre 2014, à zéro heure trente.