La séance, suspendue à treize heures quarante, est reprise à quinze heures dix, sous la présidence de M. Pierre Laurent.
La séance est reprise.
L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, confortant le respect des principes de la République (projet n° 369, texte de la commission n° 455 rectifié, rapport n° 454, avis n° 448 et 450).
Dans la discussion du texte de la commission, nous en sommes parvenus à l’article 26.
TITRE II
GARANTIR LE LIBRE EXERCICE DU CULTE
Chapitre Ier
Renforcer la transparence des conditions de l’exercice du culte
Section 1
Associations cultuelles
L’article 19 de la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Églises et de l’État est ainsi rédigé :
« Art. 19. – Les associations cultuelles ont exclusivement pour objet l’exercice d’un culte. Elles ne doivent, ni par leur objet statutaire ni par leurs activités effectives, porter atteinte à l’ordre public. Elles sont composées de personnes majeures, au nombre de sept au moins, domiciliées ou résidant dans la circonscription religieuse définie par les statuts de l’association.
« Chacun des membres peut s’en retirer en tout temps, après paiement des cotisations échues et de celles de l’année courante, nonobstant toute clause contraire.
« Nonobstant toute clause contraire des statuts, les actes de gestion financière et d’administration légale des biens accomplis par les directeurs ou administrateurs sont, chaque année au moins, présentés au contrôle de l’assemblée générale des membres de l’association et soumis à son approbation.
« Les statuts de l’association prévoient l’existence d’un ou de plusieurs organes délibérants ayant notamment pour compétence de décider de l’adhésion de tout nouveau membre, de la modification des statuts, de la cession de tout bien immobilier appartenant à l’association et, lorsqu’elle y procède, du recrutement d’un ministre du culte.
« Les modalités d’application du présent article sont définies par décret en Conseil d’État. »
Monsieur le ministre de l’intérieur, avant d’aborder les dispositions relatives aux cultes, je souhaite vous faire part de notre désarroi à l’égard de ce texte.
Ce projet de loi aurait dû permettre, dans le cadre notamment de son étude d’impact, de dresser un bilan complet des différentes formes d’exercice du culte, car il existe aujourd’hui une réelle pluralité de formes juridiques d’associations cultuelles.
Ainsi, on trouve, en France métropolitaine, les associations diocésaines, les associations de la loi de 1901, les associations de la loi de 1905 et un statut spécifique pour l’Alsace et la Moselle. En Guyane, il y a les fabriques, qui continuent d’exercer un rôle, et l’on trouve, dans les autres territoires d’outre-mer, d’autres dispositifs encore.
Face à ce « fatras » – veuillez me pardonner cette expression –, il eût été souhaitable que ce projet de loi dégage de grandes idées, de grands principes, afin d’homogénéiser la pratique autour d’un principe fondateur : l’article 2 de la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Églises et de l’État, qui dispose que « La République ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte. »
Or vous nous proposez, au travers de ce texte, d’ajouter de la complexité à la complexité. Je vous en donne quelques exemples.
Vous introduisez dans le droit local en Alsace et en Moselle une nouvelle catégorie, inconnue jusqu’à présent, d’associations cultuelles. Pour ce qui concerne la loi de 1905, vous instaurez – le Conseil d’État le dit très justement – une barrière dans l’accès à la totalité des prérogatives octroyées par la loi au statut d’association cultuelle issu de cette loi.
Ainsi, vous organisez in fine deux régimes dans le cadre des associations cultuelles de 1905 : celui des associations qui auront obtenu le rescrit de l’État permettant de bénéficier des avantages fiscaux et celui des autres, qui auront un statut relativement vague, puisqu’elles seront des associations cultuelles sans en avoir les bénéfices fiscaux.
Puisqu’il s’agit de discuter des principes de la République, nous aurions aimé, très sincèrement, que l’on dresse un bilan de tout cela.
L’amendement n° 503, présenté par M. Ravier, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Stéphane Ravier.
Toutes les religions ont eu affaire à l’État : les protestants, en 1627, quand Richelieu n’hésita pas à mobiliser la puissance militaire pour mater toute velléité séparatiste ; les juifs, avec l’empereur Napoléon Ier ; les catholiques, en 1905, quand la République n’hésita pas à user de mesures violentes – la déportation de moines, par exemple – pour imposer à tous sa loi sur la laïcité.
Pourtant, en 2021, le gouvernement auquel vous appartenez, monsieur le ministre, refuse, par manque de courage, de nommer, donc d’éradiquer, l’islamisme, idéologie politique, véritable État dans l’État, porteuse d’un communautarisme de conquête.
Résultat, toutes les religions dont les relations avec l’État sont parfaitement apaisées et harmonisées se trouvent injustement visées par votre texte globaliste, devenu punition collective. Les croyants sont des parias et les cultes deviennent suspects.
Par ailleurs, il y a une réalité historique, celle de la place toute particulière qu’occupe, dans notre pays, l’Église. Si nous sommes des élus laïques, nous ne sommes pas obligés d’être amnésiques ; en tout cas, pour ma part, je ne le suis pas.
L’esprit de nos lois est ainsi pétri de notre héritage civilisationnel, culturel, esthétique, intellectuel et religieux. Il suffit, pour s’en convaincre, de lever les yeux, sinon vers le ciel, du moins vers tout ce qui nous entoure, ici, mes chers collègues.
En effet, le Sénat, pilier de notre République, légifère sous le regard bienveillant du roi Saint Louis ; le plafond de la salle des conférences, un véritable livre d’histoire de France, nous renvoie vers sainte Clotilde, vers saint Rémy, vers sainte Jeanne d’Arc et même vers Charles Martel ; l’ancienne chapelle des pairs de France, qui abrite aujourd’hui les travaux de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, offre à notre regard les Tables de la Loi et même le mariage de la Sainte Vierge. Bref, tout, ici, au Sénat, nous le rappelle, la France plonge ses racines dans seize siècles de chrétienté.
Des noms de mes « villages » marseillais – Saint-Joseph, Sainte-Marthe, Saint-Louis, Saint-Mitre… – jusqu’aux fêtes de notre calendrier grégorien, voulu et validé par le pape Grégoire XIII, en passant par l’union de tous les Français, croyants ou non, au chevet de Notre-Dame de Paris martyrisée, tout nous rappelle que la France reste la fille aînée de l’Église et que ce sont la sagesse de cette Église et le bras ferme de l’État qui permettent, encore aujourd’hui, à notre République de rendre « à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu », comme l’a dit, le premier, voilà un peu plus de deux mille ans, un célèbre fils de charpentier…
C’est pourquoi je souhaite, au travers de cet amendement, que la Haute Assemblée supprime l’article 26 du présent projet de loi, qui brise l’équilibre précieux tiré de la loi de 1905 concernant la séparation des Églises et de l’État.
Les associations mixtes et diocésaines n’ont rien demandé, elles ne sont à l’origine d’aucun mal justifiant que nous brisions leurs prérogatives spécifiques actuelles.
Pour empêcher le relativisme amnésique et le recul de la liberté des associations mixtes et diocésaines, il est nécessaire, juste et historiquement justifié d’adopter cet amendement.
Je veux vous rassurer, mon cher collègue, contrairement à l’exposé que vous venez de faire, cet article n’a absolument pas pour objet de soumettre tous les cultes à une seule organisation, celle des associations cultuelles. Il ne remet pas non plus en cause les associations diocésaines spécifiques au culte catholique, qui résultent d’un accord international.
Je le rappelle, cet article du projet de loi entend moderniser les règles de fonctionnement des associations cultuelles régies par la loi de 1905. Les règles de composition de celles-ci figuraient déjà dans cette loi ; il y était précisé que le nombre de ses membres était fonction du nombre d’habitants dans les communes. Cet article introduit une simplification : ce nombre doit être au minimum de sept, mais il peut être supérieur.
Cet article introduit en outre un dispositif dit « anti-putsch », qui nous semble intéressant et qui mérite d’être conservé ; ce dispositif impose que les statuts associatifs soumettent certains actes importants – nouvelles adhésions, modifications statutaires, cessions et, le cas échéant, recrutement de ministres du culte… – à la délibération d’un organe collégial.
Les représentants du culte protestant nous ont indiqué que ce dispositif était à peu près calé sur leur modèle d’organisation ; on ne révolutionne donc rien. En outre, lors de nos auditions, plusieurs représentants des cultes, confrontés à des difficultés locales et à des risques d’entrisme, s’y sont montrés favorables.
La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement
M. Pierre Ouzoulias. J’ai du mal à comprendre la référence aux « seize siècles d’histoire du christianisme »… Je suppose que cela renvoie au baptême de Clovis. Monsieur Ravier, j’ai du mal à comprendre votre fascination pour des barbares germains qui ont pénétré illégalement à l’intérieur des frontières de l’Empire romain…
Sourires.
Pour moi, la référence historique pertinente résiderait plutôt dans le martyre des chrétiens de Lyon, en 177, mais votre problème est que ces derniers venaient de Turquie et parlaient le grec ; ce n’étaient pas des Gaulois, ni des Romains. Quant à Irénée, qui les a suivis, il était né à Smyrne ; aujourd’hui, il serait donc un Turc.
Il faut le rappeler, l’introduction en Gaule du christianisme est la conséquence d’une « immigration massive et incontrôlée », comme vous le dites.
Nouveaux sourires.
Par ailleurs, le « fils de charpentier » que vous évoquez était juif, et, en Gaule, les premiers témoignages de la foi judéo-chrétienne – des synagogues – sont juifs ; Clovis arrive bien plus tard. Par conséquent, s’il faut rendre hommage à quelque chose, c’est à ces premières synagogues du Ier siècle après Jésus-Christ.
Mesdames, messieurs les sénateurs, puisque, incité par M. Ravier, votre collègue communiste nous invite aux références chrétiennes, je préférerais que l’on cite saint Augustin, qui est né en Algérie et dont la tradition de sagesse devrait vous inspirer, monsieur Ravier.
Vous devriez, me semble-t-il, vous parer de cette sagesse chrétienne, qui consiste à ne pas prendre l’Église seulement par le bout qui nous intéresse, si je puis me permettre cette expression dans cette enceinte laïque.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 562, présenté par Mmes Assassi et Cukierman, M. Bacchi, Mme Brulin, M. Ouzoulias, Mme Apourceau-Poly, M. Bocquet, Mme Cohen, M. Gay, Mme Gréaume, MM. Lahellec, P. Laurent et Savoldelli et Mme Varaillas, est ainsi libellé :
Alinéa 2, première phrase
Compléter cette phrase par les mots :
, considéré comme l’accomplissement de certains rites ou de certaines pratiques organisés par des personnes réunies par une même croyance ou une même spiritualité
La parole est à M. Pierre Ouzoulias.
De façon tout à fait paradoxale, la loi de 1905 ne définit pas exactement le culte.
Depuis l’adoption de ce texte, la jurisprudence a précisé ce que pouvait être le culte. Il existe notamment un avis d’assemblée important du Conseil d’État, daté du 24 octobre 1997, que nous vous proposons, au travers de cet amendement, de reprendre, afin de mieux définir dans la loi ce qu’est le culte.
J’ai quelque peu modifié cette définition du Conseil d’État, pour y intégrer une notion qui me paraît importante. Il s’agit de renvoyer non pas uniquement à la croyance, mais, plus généralement, à la spiritualité, parce que, dans certaines religions, la croyance est annexe par rapport à la pratique et à la spiritualité.
Ainsi, je vous propose de définir le culte comme « l’accomplissement de certains rites ou de certaines pratiques organisés par des personnes réunies par une même croyance ou une même spiritualité ».
Cette définition pourra ensuite rendre service à la juridiction administrative, quand celle-ci devra déterminer à quoi peut correspondre, pour une association, un objet cultuel.
Les deux amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 138 rectifié bis est présenté par Mme N. Delattre, MM. Artano, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Fialaire et Guérini, Mme Pantel, MM. Requier et Roux, Mme Guillotin et MM. Guiol, Gold et Corbisez.
L’amendement n° 357 rectifié est présenté par M. Meurant.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’alinéa 2
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Les associations formées pour l’exercice d’un culte, au sens de la présente loi, ont pour objet la célébration de cérémonies organisées en vue de l’accomplissement, par des personnes réunies par une même croyance religieuse, de certains rites ou pratiques. »
La parole est à Mme Nathalie Delattre, pour présenter l’amendement n° 138 rectifié bis.
À l’heure du radicalisme religieux, il est important de renforcer notre « arsenal définitionnel », en définissant notamment les associations cultuelles, leur création et leur fonctionnement.
Le respect, la tolérance, la neutralité et l’impartialité sont des notions de premier plan qu’il nous faut utiliser pour élaborer une définition des associations à vocation cultuelle, vocation dont seul le préfet appréciera la qualité.
Allons plus loin dans la clarification ; l’uniformité et l’application n’en seront que meilleures et la distinction avec les autres types d’associations, comme les associations mixtes, n’en sera que plus nette.
Soyons rigoureux dans nos termes : une association cultuelle ne doit viser que la célébration et l’accomplissement de cérémonies, rites et pratiques par des individus réunis dans la même croyance religieuse.
L’amendement n° 357 rectifié n’est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission ?
Ces amendements visent à définir les associations cultuelles et la notion de culte elle-même.
Après en avoir débattu, la commission n’a pas été convaincue qu’une telle inscription répondît à un besoin juridique réel et, d’ailleurs, celle-ci n’est demandée par aucun culte.
La notion de culte, élaborée au regard des travaux parlementaires de la loi de 1905, est désormais parfaitement stabilisée dans la jurisprudence : il s’agit de la « célébration de cérémonies organisées en vue de l’accomplissement, par des personnes réunies par une même croyance religieuse, de certains rites ou de certaines pratiques. »
En outre, l’introduction, au travers de l’amendement n° 562, présenté par M. Ouzoulias, de la notion de « spiritualité », différente de la notion de « croyance », susciterait au contraire de nouvelles incertitudes juridiques et relancerait des débats pourtant clos depuis des années.
La question de la définition des associations a été réglée depuis plus de cent ans, par une jurisprudence abondante. La précision n’apporterait rien au droit.
La définition proposée au travers des amendements identiques n° 138 rectifié bis de Mme Delattre et 357 rectifié de M. Meurant est centrée sur le seul exercice du culte et omettrait donc deux éléments importants des associations cultuelles : celles-ci doivent subvenir aux frais et à l’entretien du culte.
La définition proposée ne tiendrait en outre pas compte des associations diocésaines, dont nous avons parlé à propos de l’amendement précédent, qui ont justement la spécificité de ne pas avoir pour compétence d’exercer le culte. En effet, le culte catholique est encore organisé aujourd’hui sous la forme de réunions tenues sur initiative individuelle.
Ainsi, considérant le caractère historiquement sensible de ces sujets et la jurisprudence abondante et définissant bien les choses en la matière, la commission demande le retrait de ces amendements ; à défaut, elle émettrait un avis défavorable.
Vous soulevez, monsieur le sénateur Ouzoulias, madame la sénatrice Delattre, un point important, avec lequel je suis en désaccord, et je veux m’en expliquer, au moment où nous abordons le titre II de ce projet de loi.
Tout d’abord, ces définitions, notamment celle de l’amendement n° 562 du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, percuteraient, même si ce n’est pas l’objectif, l’équilibre des associations diocésaines.
Or – j’ai eu l’occasion de le dire à l’Assemblée nationale et je le répète –, même si ces associations sont postérieures à 1905, elles sont considérées, en vertu de la loi du 28 mars 1907 relative aux réunions publiques et de la reconnaissance des échanges épistolaires entre le pape, via le nonce apostolique, et la République, comme des associations cultuelles au sens de la loi de 1905. D’ailleurs, à ce titre, contrairement à ce qu’affirme M. Ravier, l’équilibre atteint depuis le début des discussions entre l’Église de France et la République n’est pas touché par ce projet de loi.
Je pense que ce n’est pas votre but, monsieur Ouzoulias, mais votre définition les contraindrait.
Ensuite, cette définition touche à quelque chose d’extrêmement important, qui suscite bien souvent des quiproquos et des difficultés, lesquels émergeront sans doute lors des débats politiques et juridiques que nous aurons tout au long de cette journée et, peut-être, lundi prochain. En effet, il n’a jamais été question pour la République de définir ce qu’est un culte, et il n’appartient pas, me semble-t-il, à la République – ni au législateur ni au pouvoir exécutif – de le faire.
En effet, des cultes, mesdames, messieurs les sénateurs, il peut s’en créer tous les jours ; si j’étais joueur, je dirais « tous les jours que Dieu fait »… Ce ne sont donc pas le ministère de l’intérieur, les préfets, les policiers et les gendarmes qui pourraient définir ce qui est ou non un culte.
Après tout, nous pourrions, ici, rendre un culte au dieu Larcher !
Sourires.
Chacun a ses croyances, monsieur le questeur Bas…
Or personne ne serait en mesure de savoir ce qui relèverait de la croyance, et il n’appartiendrait ni aux policiers ni à la préfecture de définir ce que serait ce culte, ce que seraient ses rites, ce que serait une prière ou un ministre du culte…
D’ailleurs, personne n’a jamais non plus défini exactement ce qu’était un ministre du culte ; d’où la grande difficulté que nous avons avec nos compatriotes musulmans, car nous calquons sur l’imam la notion de ministre du culte que nous connaissons, celle des cultes précédents, alors que l’imam ne correspond pas au ministre des cultes tel que l’imaginent les chrétiens ou les juifs.
Il est important de l’assumer, la liberté fondamentale qu’est la liberté religieuse implique que ce ne soit ni à l’État ni à la loi de définir ce qu’est un culte.
Nous serions du reste bien incapables de le faire, dans la mesure où l’innovation, en matière de croyance, est sans bornes…
Je le rappelle, pour l’État, pour la République et sans doute pour le législateur, la croyance est une opinion, comme l’édicte la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen.
C’est pour cela que cet article est ainsi rédigé et qu’il se trouve en conformité avec l’esprit de la loi de 1905. On peut exercer un culte sur une base juridique, ce qui est le cas des associations loi de 1901 et loi de 1905. Nous souhaitons généraliser le passage à cette dernière, mais le Conseil d’État nous a rappelé que nous ne pouvions en faire une obligation dans ce texte.
Il peut également s’agir d’un groupement de fait, l’association juridique n’étant pas obligatoire pour célébrer un culte.
Même si je comprends l’esprit qui a présidé à la rédaction de ces amendements, il me semble que définir ce qu’est un culte viendrait très fortement percuter la grande liberté de croyance qui caractérise notre pays. De même que l’arrêt Benjamin rendu par le Conseil d’État précise qu’une réunion publique politique n’a pas besoin d’une formation juridique pour exister, définir ce qu’est un culte viendrait contraindre cette liberté.
La disposition que nous discuterons tout à l’heure, prévoyant que le ministère de l’intérieur valide, tous les cinq ans, la qualité cultuelle d’une association, est dans le même esprit de confusion.
En effet, le ministère de l’intérieur n’est pas là pour vérifier s’il s’agit ou non d’un culte. Il est là pour contrôler si les conditions pour ceux qui ont créé une association juridique correspondant aux critères définis par le législateur pour être un culte, tels que la déduction fiscale ou l’exonération d’impôts, sont bien remplies. Le ministère ne porte pas de jugement sur ce qui est ou ce qui n’est pas un culte.
D’ailleurs, il y a évidemment, au sein du culte, des dérives dont vous savez qu’elles sont à la fois dangereuses et parfois nébuleuses, telles que les dérives sectaires. Or cela ne peut pas, me semble-t-il, être défini par la rédaction de l’article telle qu’elle est proposée.
Définir ce qu’est un culte et un ministre du culte peut être intéressant intellectuellement, mais ne correspond ni à l’esprit de libéralisme de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen ni à l’esprit du législateur libéral de 1905. Au contraire, cela viendrait extrêmement contraindre la liberté de croyance et la liberté de culte dans notre pays, pour les cultes passés, les cultes présents, mais aussi, peut-être, pour les cultes à venir. Après tout, vous connaissez sans doute cette citation, on dit que « le christianisme est une secte juive qui a réussi ».
Qui sommes-nous pour juger, d’un point de vue totalement laïque, de la réussite, de la vérité et de la reconnaissance de tel ou tel culte ? Je pense que la République doit se garder d’avoir de telles opinions, même lorsque celles-ci sont fondées sur de bonnes intentions, dont chacun sait que l’enfer est pavé.
J’ai donc compris le souci des parlementaires, mais je pense qu’il serait dangereux pour la République et pour la liberté de croyance d’adopter ces dispositions. Même si cela plonge parfois le ministre de l’intérieur et ses services dans un abîme de perplexité, …
… cela me semble nécessaire pour garantir une liberté fondamentale reconnue depuis longtemps par les lois de la République.
J’émets donc un avis défavorable sur ces amendements.
Je vous remercie, monsieur le ministre, de la qualité de votre argumentation, dont nous partageons totalement la première partie.
Tout d’abord, la loi de 1905 a été réalisée par référence aux quatre cultes statutaires du Concordat. Nous avons aujourd’hui une difficulté pour faire entrer dans cette définition un certain nombre de cultes extraorientaux, qui renvoient plutôt à la spiritualité.
Sur le fond, notre groupe partage totalement votre opinion : ce n’est pas à l’État de définir ce qui est ou n’est pas un culte, comment il est pratiqué et comment il doit l’être.
On pourrait d’ailleurs pousser le raisonnement en se demandant s’il y a encore un sens à séparer les associations loi de 1901, à objet culturel, des associations de 1905, à objet cultuel. Vous connaissez le contentieux à ce sujet et savez que la France a été condamnée à plusieurs reprises.
Permettez-moi de prendre l’exemple de l’Union des athées, qui a demandé à bénéficier du statut de la loi de 1905. Sa requête est montée jusqu’au niveau européen, la France a été condamnée et l’Union des athées est aujourd’hui reconnue comme une association loi de 1905. De la même manière, le préfet avait refusé de reconnaître le statut d’association cultuelle loi de 1905 aux Témoins de Jéhovah. Ces derniers l’ont emporté devant la juridiction européenne, qui a condamné la France.
Il nous semble sage d’en rester à la première partie de votre démonstration, c’est-à-dire à une stricte neutralité de l’État par rapport à la définition d’un culte et de la façon dont il est pratiqué.
J’entends votre argument, monsieur le sénateur. Il s’agit d’un point très important, sur lequel je veux m’attarder quelques instants, car il va commander la suite de nos discussions sur les polices administratives.
Le ministre de l’intérieur, qui est ministre des cultes, n’est pas là pour commenter les rituels, écrire les prières et expliquer comment il faudrait parler. Certains soutiennent l’obligation, qui est absurde et qui n’a aucun sens dans un débat démocratique libéral, de l’usage du français pour les ministres du culte. Même si chacun peut avoir une opinion à cet égard, on sait que ce n’est pas à l’État d’expliquer s’il faut parler latin ou arabe dans les lieux de culte ! Cela pose des questions importantes, mais qui ne relèvent pas de la police administrative.
La police des cultes désigne le fait que l’État ne reconnaît aucun culte, puisqu’il les reconnaît tous. Indépendamment du fait qu’il y a une qualité de culte et de liberté de réunion, il y a des avantages associatifs permis par la loi de la République. Ces derniers, qui sont importants, méritent, conformément aux principes que nous avons définis ensemble, notamment le non-subventionnement, d’entrer ou non dans tel ou tel critère.
Si je puis me permettre, monsieur le sénateur, je pense que vous faites une légère confusion. Ce n’est pas parce que l’Union des athées ou les Témoins de Jéhovah réclamaient la possibilité d’être une association loi de 1905 que l’État, par nature, refusait de prendre en compte une opinion religieuse, y compris celle qui consisterait à penser qu’il ne peut y avoir de religion.
Je comprends bien votre démonstration. Cependant, lorsqu’il refuse un certain nombre de qualités cultuelles, le ministère de l’intérieur veut éviter que l’on bénéficie, sous le statut de 1905, des avantages réservés au culte, que n’ont pas les autres associations.
Ainsi, une association loi de 1905 ne paie pas de taxe foncière, au contraire d’une association loi de 1901.
Il apparaît normal que, face à des avantages comme celui-là, l’exécutif s’attache à faire appliquer la loi de la République et à distinguer ce qui est cultuel et culturel.
Il est évident qu’il y a là un sujet européen et international, du fait de la définition de la laïcité française : dans nos discussions avec nos amis européens et anglo-saxons, ce n’est pas un mince sujet. Néanmoins, nous devons défendre notre modèle.
Bien sûr, cela ne change pas grand-chose que les Témoins de Jéhovah relèvent de la loi de 1905 – en l’occurrence, la question était de savoir s’il s’agissait d’une secte ou d’une religion, et le juge a tranché. En revanche, je le dis très clairement, il faut distinguer les associations qui relèvent de la loi de 1901 de celles qui relèvent de la loi de 1905.
Vous disiez, monsieur le sénateur, que nous sommes en contradiction avec votre propos. Bien au contraire ! Le grand mérite de cette loi, indépendamment de tous les débats que vous avez eus depuis deux semaines, mesdames, messieurs les sénateurs, est de consacrer la séparation entre ces deux types d’associations. Le législateur a précisément créé l’association loi de 1905 pour les cultes et l’association loi de 1091 pour les autres.
C’est la confusion du cultuel et du culturel qui mène à une déviation très profonde de l’esprit de la loi. Ainsi, une association loi de 1901 qui fait du cultuel – 92 % des associations musulmanes appartiennent à ce type d’association – peut toucher des subventions au nom de ses activités culturelles, comme une activité sportive ou périscolaire, et l’utiliser pour son activité cultuelle.
À M. Sueur qui s’interrogeait sur la distinction réelle de ces types d’association et de ce qui pourrait les obliger à aller de l’un vers l’autre, je réponds que ce projet de loi vise à tout faire pour les associations relevant de la loi de 1905. Surtout, il introduit des contraintes très fortes pour celles qui resteront des associations loi de 1901 – je rappelle que le Conseil d’État refuse que nous rendions obligatoire le passage à la loi de 1905.
Il est ainsi prévu l’existence de deux comptes bancaires, c’est-à-dire de deux états de compte séparés.
Ainsi, lors des contrôles – il devra y en avoir –, si la ville X verse 1 000 euros à l’association Y, qui est à la fois un club culturel d’accompagnement scolaire et un lieu de culte, cette association pourra toucher cette somme pour son activité culturelle, mais ne pourra pas l’utiliser de façon détournée pour son lieu cultuel. Cette mesure ne concerne naturellement pas les territoires qui ne connaissent pas un droit local ; elle ne touche donc pas l’Alsace-Moselle.
Monsieur le sénateur, je vous conjure d’autant plus de tenir à cette distinction que, historiquement, les communistes ont toujours été très favorables aux lois de séparation des Églises et de l’État. S’il n’y a pas de séparation entre les associations qui relèvent des lois de 1901 et celles qui relèvent de la loi de 1905, alors nous confondons le temporel et le spirituel, le culturel et le cultuel et le politique et le religieux. C’est précisément ce que, depuis quasiment plus d’un siècle, nous tentons de distinguer dans ce pays.
Il s’agit bien là de notre problème principal, et s’il y a deux religions qui ont souligné ce point, ce sont bien le protestantisme et le judaïsme. Dans leur quasi-intégralité, les adeptes de ces cultes sont désormais constitués en associations loi de 1905.
S’agissant des catholiques, certains discours sont parfois assez amusants, à l’instar de celui du sénateur Ravier : ils font comme si, dès le début, le monde catholique avait été favorable à la loi de 1905… Il a tout de même fallu quinze ans avant d’appliquer cette loi, puisque le Parlement s’est réuni en urgence en 1906 pour adopter la loi de 1907, précisément pour ne pas appliquer celle de 1905.
Aujourd’hui, tout le monde s’est rallié à la loi de séparation des Églises et de l’État, qui, comme vous l’avez dit, a mis fin au Concordat. Il a toutefois fallu quinze ans pour accepter l’idée d’associations distinctes pour le cultuel. Ce n’est d’ailleurs pas pour rien que la République, en 1901, a créé la loi d’association et, en 1905, la loi cultuelle.
Reconnaissons qu’il s’agit bien d’une richesse que nous envient en partie les territoires relevant du Concordat ; d’ailleurs, l’Alsace-Moselle a répliqué, dans son droit local, cette distinction entre le droit associatif et le droit associatif culturel.
Contrairement à ce que vous avez affirmé, nous voulons non pas les fusionner – ce serait l’inverse de ce que nous nous efforçons de faire –, mais les distinguer. Nous disons aux musulmans de France, comme à tous les cultes : « Tout aux croyants en tant que culte, mais rien aux croyants en tant que force politico-culturelle ».
Tel est l’objet exact de notre texte. Je reconnais qu’il est original dans le concert des nations, mais c’est ce qui fait, je crois, la grandeur de notre pays.
Les arguments de Mme la rapporteure et surtout l’énergie déployée par M. le ministre nous ayant convaincus, nous retirons notre amendement, monsieur le président.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L’amendement n° 331, présenté par Mme Benbassa, MM. Benarroche et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme Taillé-Polian, est ainsi libellé :
Alinéa 2, deuxième phrase
Supprimer cette phrase.
La parole est à Mme Esther Benbassa.
Si nous sommes tous ici favorables au maintien de l’ordre public, il nous est pour autant difficile de comprendre en quoi celui-ci concerne les associations. Ce dispositif issu des travaux de la commission des lois et dont les modalités sont juridiquement floues et imprécises inquiète les représentants des cultes eux-mêmes.
Prenons l’exemple d’une association cultuelle souhaitant venir en aide à une personne sans papiers au nom du devoir de fraternité. Pourrait-elle être considérée comme transgressant l’ordre public ? Est-ce la volonté de la Haute Assemblée ?
Prenons un autre exemple : en 1996, l’église Saint-Bernard, dans le XVIIIe arrondissement de Paris, avait accueilli dans ses lieux une centaine d’étrangers en situation irrégulière, afin de les protéger de l’expulsion. N’agissait-elle pas simplement, elle aussi, conformément au principe de fraternité, principe républicain par excellence ?
Ce dispositif constitue une nouvelle fois un empiètement du politique sur le religieux. Il porte le risque d’un renforcement global du contrôle social auquel s’oppose le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.
Pour l’ensemble de ces raisons, nous en demandons la suppression.
Cet amendement vise à supprimer l’interdiction pour les associations cultuelles de troubler l’ordre public par leur objet statutaire ou par leurs activités effectives. C’est sur l’initiative des rapporteures que la commission a ajouté cette précision, pensant qu’il était logique de lutter contre certaines formes de séparatisme religieux, en précisant bien qu’on ne devait pas troubler l’ordre public.
Cette précision s’inspirait de la jurisprudence du Conseil d’État sur les associations locales, précisément pour le culte des Témoins de Jéhovah.
La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.
Notre groupe votera cet amendement.
Depuis le début de la discussion de ce texte, nous défendons toujours la même logique. De nombreux éléments de ce texte n’ont pas de rapport avec le but défini par vous-même, monsieur le ministre.
En outre, il y a beaucoup de redondances. Mme Benbassa a raison dans la mesure où il est évident que tout citoyen doit respecter l’ordre public. De la même manière, toute association, cultuelle ou non, doit respecter l’ordre public. Cela découle tout simplement de la Constitution de la République française et de ses lois.
Un certain nombre de représentants des cultes et des Églises que nous avons reçus nous ont dit que ce genre de rédaction créait une sorte de suspicion. Il va de soi, monsieur le ministre, que l’ordre public doit être respecté ; ce n’est pas à vous que je vais le rappeler. Il va de soi que vous le feriez respecter partout où il ne le serait pas.
Nous ne voyons donc pas pourquoi il faudrait ajouter cette précision, qui va de soi.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L’amendement n° 563 rectifié, présenté par Mmes Assassi et Cukierman, M. Bacchi, Mme Brulin, M. Ouzoulias et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 2, troisième phrase
Remplacer les mots :
la circonscription religieuse définie
par les mots :
le département du siège social défini
La parole est à M. Pierre Ouzoulias.
Monsieur le ministre, vous arrivez aux limites de votre argumentation ; je vous le dis en toute bienveillance, parce que j’apprécie beaucoup la qualité de nos échanges.
Dans ce projet de loi, vous insérez l’expression « circonscription religieuse ». Or celle-ci se comprend par rapport à un certain type de culte, en renvoyant au diocèse, une institution que n’ont pas de nombreuses religions. Je vous propose donc plutôt celle de « département du siège social » de l’association, une expression complètement neutre.
S’agissant de la distinction entre les associations qui relèvent de la loi de 1901 et celles qui relèvent de la loi de 1905, je vous suis totalement, mais la pratique est autre.
Par exemple, au titre des mesures mises en place pour le chômage partiel, l’État a versé aux associations diocésaines, c’est-à-dire à des associations relevant de la loi de 1905, 14 431 695 euros au 17 janvier 2021, c’est-à-dire que les ministres du culte qui ne pouvaient pas entrer dans les édifices cultuels ont été mis au chômage partiel et que l’État a pris à sa charge 80 % de leur salaire. Cet avantage octroyé aux associations diocésaines n’a pas bénéficié aux associations juives et protestantes, parce qu’elles étaient des associations loi de 1905.
On touche à la limite de votre raisonnement. Je suis donc d’accord sur le fond, mais, malheureusement, la pratique est tout à fait autre. Je vous le dis, les associations relevant de la loi de 1901 resteront dans ce cadre, car il leur permet de percevoir des subventions qu’elles ne toucheraient pas dans le cadre de la loi de 1905.
C’est pourquoi nous voulons dresser un bilan complet des formes de subventionnement apportées, par tous les pouvoirs publics, aux différentes associations en fonction de leur statut.
Mon cher collègue, votre propos était assez éloigné de l’objet de l’amendement.
Cet amendement vise à remplacer l’expression « circonscription religieuse » par « département du siège social ».
Nous avons, dans l’Yonne, une communauté protestante qui a pour siège Auxerre, mais qui s’étend sur d’autres départements, touchant une partie du Loiret et de la Nièvre. On ne peut donc définir ces associations comme relevant uniquement du département.
C’est la raison pour laquelle la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
Tout d’abord, c’est non pas à l’État de définir une circonscription religieuse, mais aux cultes. De plus, certains départements ont plusieurs sièges ; c’est ainsi le cas, pour l’Église catholique, dans le département des Bouches-du-Rhône, à Marseille, Aix-en-Provence et Arles.
Nous ne pouvons donc définir nous-mêmes les circonscriptions religieuses. Ce serait très républicain, très révolutionnaire, en somme trop jacobin – dans ma bouche, cela n’est pas une insulte !
Par ailleurs, monsieur le sénateur, vous avez dit deux choses qui ne doivent pas être prises comme vérité d’Évangile par ceux qui écoutent ou qui lisent nos débats.
D’une part, aucun ministre du culte n’a bénéficié du chômage partiel dans les territoires non concordataires. Il s’agissait bien de laïcs, en ce qui concerne tant les associations qui relèvent de la loi de 1901 que celles qui relèvent de la loi de 1905. S’il s’agissait de ministres du culte, ils ne l’ont pas touché. Si jamais vous avez des contre-exemples, je suis prêt à intervenir pour réparer cette erreur, mais, ayant des échanges réguliers avec les représentants des cultes, cela me semble improbable.
D’autre part, s’agissant du subventionnement, je voudrais dire devant la Haute Assemblée que, n’en déplaise à l’opinion commune, le non-subventionnement des cultes n’est pas un principe constitutionnel. Ce n’est que la loi ordinaire, et vous pourriez, mesdames, messieurs les sénateurs, la changer à l’instant même.
Ce qui est reconnu constitutionnellement comme un principe, c’est la séparation, c’est-à-dire la non-reconnaissance. Méconnaître cette dernière, ce serait transgresser nos règles fondamentales. Mais le non-subventionnement ne relève que de la loi ordinaire. C’est tellement vrai que – je vous rejoins sur ce point, monsieur le sénateur –, il y a du subventionnement de culte, et pas simplement en Alsace-Moselle.
Ainsi, le fait d’être propriétaire de sites religieux est évidemment une forme de subventionnement lorsqu’il y a des travaux. Les collectivités font, à la place des catholiques, la plupart des travaux sur le retable, ce dont ne bénéficient pas, par exemple, nos compatriotes musulmans.
J’ai déjà eu l’occasion de dire que la vraie mesure républicaine eût été sans doute, dans la philosophie de la loi de 1905, la nationalisation de tous les biens religieux, comme on l’a fait pour l’Église catholique à l’époque. Mais je pense que nationaliser les mosquées aurait été politiquement plus compliqué et, d’ailleurs, sans doute mal accepté par la majorité sénatoriale.
Par ailleurs, monsieur le sénateur, les baux emphytéotiques, les garanties d’emprunt et même les reçus fiscaux pour toutes les religions sont une forme de subventionnement. Après avoir passé trois ans et demi à Bercy, je puis vous assurer que les crédits d’impôt coûtent plus cher que ce que rapporte l’impôt sur le revenu dans son ensemble.
Le principe de non-subventionnement n’est donc pas un principe fondamental reconnu par les lois de la République. Il se pourrait que le Conseil constitutionnel – je ne voudrais pas lui donner des idées, parce que, comme le dit la chanson, tout serait à recommencer pour le ministre de l’intérieur – considère que l’article 2 de la loi de séparation des Églises et de l’État est un principe fondamental et, à ce titre, empêche tout subventionnement des cultes. Vu les équilibres trouvés, je doute qu’il le fasse.
Pour résumer, premièrement, c’est non pas à nous, mais aux cultes eux-mêmes de définir la circonscription religieuse.
Deuxièmement, nous toilettons évidemment ce texte rédigé en 1905, à une époque où la population était différente de la nôtre, il faut bien le dire. Nous le simplifions, ce qui ne constitue pas une atteinte à la séparation des Églises et de l’État, bien au contraire. Et je voudrais souligner que tout le monde a touché le chômage partiel dans les cultes, sauf les ministres du culte, quelle que soit la vie associative.
Troisièmement, le principe de non-subventionnement est un principe législatif, mais non supralégislatif.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
Monsieur le ministre, votre explication est claire, mais s’agissant des presque 15 millions d’euros, il s’agit de la sous-classe 94.91, qui, dans la nomenclature de Bercy, s’appelle « Services fournis par des organisations religieuses ». Il s’agit des « activités des organisations religieuses ou des particuliers fournissant des services directement aux fidèles dans les églises, mosquées, temples, les synagogues et autres lieux. »
Or vous nous dites que Bercy fait une différence, dans cette catégorie générale, entre les ministres du culte spécifiquement et ceux qui participeraient à l’exercice du culte et qui seraient laïques. Je veux bien vous croire, mais nous avons demandé ces informations à Bercy et nous ne les avons pas obtenues.
Je considère donc que ces 14, 5 millions d’euros ont été versés directement pour la pratique du culte.
M. Gérald Darmanin, ministre. Je m’engage à obtenir de mes collègues de Bercy une lettre circonstanciée pour vous, monsieur le sénateur. La réponse intéressera également le ministre de l’intérieur !
Sourires.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 447 rectifié, présenté par M. Sueur, Mmes Harribey et de La Gontrie, M. Assouline, Mmes S. Robert, Monier et Meunier, MM. Marie et Magner, Mme Lepage, MM. Féraud, Leconte, Lozach, Kerrouche, Kanner, Bourgi, Durain, Redon-Sarrazy, Antiste et J. Bigot, Mmes Bonnefoy, Briquet et Conconne, M. P. Joly, Mme Jasmin, MM. Gillé, Raynal, Mérillou, Lurel, Temal et Tissot, Mme Conway-Mouret, MM. Jacquin, Montaugé et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 5
Supprimer cet alinéa.
II. – Alinéa 6
Remplacer les mots :
Les modalités d’application
par les mots :
Les procédures mentionnées au
La parole est à Mme Laurence Harribey.
Nous proposons la suppression de l’alinéa 5, qui introduit une disposition nouvelle à l’article 19 de la loi de 1905.
Cet alinéa précise que « les statuts de l’association prévoient l’existence d’un ou de plusieurs organes délibérants ayant notamment pour compétence de décider de l’adhésion de tout nouveau membre, de la modification des statuts, de la cession de tout bien immobilier appartenant à l’association et, lorsqu’elle y procède, du recrutement d’un ministre du culte. »
Monsieur le ministre, je pense que nous sommes tous d’accord avec vous quand vous affirmez que ce n’est pas le rôle de l’État de définir ce qu’est un culte. Le rôle de l’État est d’assurer la liberté de croyance.
Toutefois, il y a un équilibre difficile à maintenir, et s’ingérer dans la gouvernance de ces associations tend à le fragiliser. Vous parlez de « consacrer » la séparation. Non, vous qualifiez cette dernière. Cela pose problème, car selon nous il ne revient pas à l’État d’assurer l’organisation des cultes, alors que c’est ce que tend à faire ce texte.
Il y a donc un problème de proportionnalité. Les personnalités auditionnées par la commission des lois ont évoqué des mesures intrusives dans l’exercice du culte, alors même que le Conseil d’État a souligné que nous ne sommes pas dans un cas où s’applique le principe de proportionnalité.
L’amendement n° 330, présenté par Mme Benbassa, MM. Benarroche et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme Taillé-Polian, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Esther Benbassa.
L’article 26 de ce texte prévoit, à son alinéa 5, que toute nouvelle adhésion d’un membre d’une association cultuelle doit être soumise à une décision d’un organe délibérant.
En imposant ce fonctionnement aux associations, le présent article représente non seulement une véritable immixtion dans l’activité des cultes, mais aussi une contradiction au principe de liberté d’association. Il est ainsi contraire au principe de la séparation de l’Église et de l’État.
Il convient de laisser aux cultes la liberté d’organiser le choix des modalités de recrutement de leurs officiants.
Ce dispositif est totalement disproportionné au regard de l’objectif apparent de cette loi, qui entend lutter contre le séparatisme lié à l’islamisme radical. Jusqu’où ira ce gouvernement ? Sera-t-il prêt à s’enfoncer dans cette obsession que représente désormais l’islam ? Et combien de principes aura-t-il reniés, pour ce faire ?
Par conséquent, le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires demande la suppression de cette disposition.
L’amendement n° 46, présenté par Mme N. Goulet, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Après le mot :
prévoient
insérer les mots :
à peine de nullité
La parole est à Mme Nathalie Goulet.
S’agissant des amendements n° 447 rectifié et 330 visant à supprimer les nouvelles dispositions « anti-putsch », j’ai entendu dire que ces dernières seraient contraires à la liberté d’association.
Or le Conseil d’État a rendu un avis précisant que ces dispositions tendaient à protéger la liberté de conscience et ne portaient pas une atteinte disproportionnée aux libertés de culte et d’association.
Je rappelle que ces dispositions obéissent à un objectif d’intérêt général : protéger les associations contre d’éventuelles prises de contrôle par une minorité et assurer une meilleure information de leurs membres sur la gestion de leur patrimoine immobilier et sur le recrutement de leurs officiants.
La commission étant favorable à cet objectif, elle a naturellement émis un avis défavorable sur ces deux amendements visant à supprimer cet alinéa.
S’agissant de l’amendement n° 447 rectifié, qui, en plus de supprimer l’alinéa, vise à remplacer le renvoi au décret pour les modalités d’application par le renvoi au décret pour les procédures mentionnées, la commission a précisément veillé à ne renvoyer qu’à des modalités d’application. C’est en effet à la loi de définir les procédures ; le décret ne règle que des modalités d’application et ne décide pas de ce qui doit être fait ou non.
Enfin, l’amendement n° 46 vise à faire en sorte que soient frappés de nullité les statuts méconnaissant les nouvelles obligations « anti-putsch ». Cette demande est déjà satisfaite par le droit existant, auquel je propose de nous tenir.
En effet, l’article 23 de la loi de séparation des Églises et de l’État prévoit que les tribunaux pourront prononcer la dissolution d’une association cultuelle dont les directeurs ou administrateurs auront contrevenu à l’article 19 du texte adopté en 1905. Il s’agit, pour le coup, d’une véritable peine de nullité.
La commission émet donc un avis défavorable sur l’ensemble de ces amendements.
Tout d’abord, je trouve que la situation ne manque pas de sel : M. Sueur, qui s’inscrit – je le sais – dans la longue tradition socialiste, défend cent quinze ans plus tard un amendement totalement contraire à ce que les sénateurs socialistes prônaient en 1905.
Certes, madame la sénatrice. Toutefois, il eût peut-être été préférable – c’est, du moins, une opinion personnelle – que le parti socialiste n’évolue pas dans un sens contraire aux principes de laïcité de 1905… Mais il s’agit d’un autre sujet, qui intéressera sans doute dans d’autres cénacles.
L’article 19 de la loi de 1905 a été créé contre l’Église catholique, qui désignait un évêque de Rome sans discussion démocratique. En l’occurrence, il s’agissait d’avoir un cadre associatif conforme à ce qui avait été défini par le Sénat et la Chambre des députés quelques années plus tôt, lors de l’adoption de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association.
Au demeurant, c’est parce que la loi de 1905 a prévu l’élection des évêques et la collégialité des décisions qu’elle a été totalement insupportable aux yeux de l’Église catholique, celle-ci ne voulant pas – chacun le comprend bien – s’engager dans une telle voie. Rome a donc refusé ces nouvelles règles et a donné l’ordre à l’Église de France d’en faire autant, alors que, au sein de cette dernière, certains considéraient la loi de 1905 comme un pis-aller, permettant peut-être d’éviter de se trouver de nouveau en conflit avec l’État.
C’est parce que la collégialité et la vie associative électorale ont été imposées, sous l’influence notamment des socialistes et des radicaux-socialistes, qu’il y a eu césure. Il a fallu quinze ans pour accepter le compromis consistant à dispenser les catholiques de l’application des nouvelles règles. Ce sont d’ailleurs les seuls dans ce cas ; les protestants, les juifs, les orthodoxes, les bouddhistes et l’ensemble des autres croyants appliquent les dispositions cultuelles.
Ainsi que Mme la rapporteure l’a rappelé à juste titre, le Conseil d’État lui-même a expliqué en quoi les dispositions prévues par le Gouvernement étaient bien plus protectrices des libertés de culte que vos amendements de suppression, en vertu desquels les responsables associatifs seraient désignés par je ne sais quelle théocratie. Cela ne manque donc pas de sel que vous défendiez une telle mesure, monsieur Sueur !
Par ailleurs, Mme Benbassa explique sans cesse que nous avons une obsession. En psychanalyse, la névrose obsessionnelle est soit une obsession, soit une hystérie… À choisir, je préfère donc que vous me prêtiez une obsession ! Mais, à force de vous entendre répéter que l’autre est obsessionnel, on finit par penser que c’est vous qui l’êtes, madame la sénatrice !
Mme Esther Benbassa proteste.
Honnêtement, il faut n’avoir jamais géré de collectivité locale et avoir une vision extrêmement livresque des choses pour ne pas voir les coups d’État – il n’y a pas d’autre mot – que les salafistes commettent dans les associations musulmanes, privant ainsi la quasi-totalité des croyants, qui veulent vivre leur culte sans forcément s’intéresser – cela se comprend – à la vie associative, de leur liberté religieuse !
À la mosquée de Pantin – ce n’est pas un exemple très ancien –, 1 200 croyants musulmans qui vivaient leur religion, je le crois, parfaitement dans l’esprit de la République, ont été privés de l’exercice fondamental du culte.
En effet, le président de leur association avait accaparé le pouvoir et la parole, qu’il s’agisse du choix du responsable religieux, puisqu’il n’y a pas de ministre du culte en l’occurrence, ou de l’expression, allant même jusqu’à relayer ce qui a armé idéologiquement l’assassin de Samuel Paty !
Il a fallu fermer de longs mois ce lieu de culte et priver ainsi les croyants légitimes de leur exercice cultuel, car personne n’avait prévu les putschs salafistes en 1905 ; il est vrai qu’ils étaient peu nombreux sur le territoire de la République à l’époque…
Les dispositions que nous proposons sont conformes à l’esprit de 1905 et aux vues d’Aristide Briand – je l’indique à M. Sueur –, et elles protègent en premier lieu les libertés cultuelles des musulmans.
On peut dire ce que l’on veut de ce texte, mais il protège les croyants musulmans. Et c’est justement en dénonçant des obsessions qui, manifestement, existent seulement dans votre discours politique que vous placez ces fidèles dans une situation de fragilité, madame la sénatrice.
Monsieur le ministre, votre dernier discours est remarquable.
Quand on l’écoute bien, vous nous faites part d’une sorte d’idée qui est la vôtre. C’est peut-être votre inconscient qui parle, je ne sais pas, mais vous aimeriez organiser les cultes. Finement, cela vous plairait assez bien.
D’ailleurs, il plairait peut-être aussi à d’autres que l’Église catholique, apostolique et romaine fût une entité démocratique.
Pour ma part, à ce stade et en ce lieu, je n’aborderai pas un tel sujet comme vous venez de le faire. Simplement, nous avons posé dès le départ trois principes, sur lesquels seront fondées toutes les positions que nous allons prendre sur les différents amendements.
Ces trois principes, vous les connaissez.
Premièrement, la liberté du culte est intégrale. D’ailleurs, elle est garantie par l’État et par la laïcité.
Deuxièmement, il ne revient pas à l’État d’organiser les cultes. C’est pourquoi nous demandons la suppression de cet alinéa. La loi n’a pas pour mission d’organiser les cultes. Ceux-ci s’organisent librement.
Troisièmement, l’État veille à l’application de la loi, y compris dans la sphère religieuse. S’il y a des violences, s’il y a des coups d’État dans les religions, s’il y a des atteintes à l’ordre public, l’État doit intervenir. Et ce qui s’est passé à Pantin – vous venez de le rappeler –, c’est que l’on a privé un certain nombre de fidèles de la liberté d’exercer leur culte.
Une fois ces principes posés, on pourrait beaucoup raccourcir le projet de loi. Nous allons proposer, conformément d’ailleurs à ce qui nous a été dit par nombre de représentants des cultes durant les auditions, de supprimer tout ce qui a trait à l’organisation des cultes.
En revanche, nous sommes tout à fait scrupuleux sur ce point : la liberté, y compris celle de pratiquer ou de ne pas pratiquer un culte, doit être affirmée, et l’État en est le garant.
Monsieur le ministre, je vous respecte, mais faites votre métier et non pas de la psychanalyse de bazar, car vous n’êtes pas assez calé en cette matière !
M. Gérald Darmanin, ministre. Qu’avez-vous contre les bazars ?
Rires.
Quand vous parlez d’« obsession », vous avez lu cela dans Le Figaro ?
Je souscris à ce que M. Sueur a indiqué : ce n’est pas à l’État d’organiser le culte. Là, vous infantilisez les religions, vous intervenez dans la vie des associations cultuelles et vous vous éloignez de la loi de 1905 !
De deux choses l’une : soit vous représentez un État faible, et vous voulez entrer dans les méandres des associations pour donner le la ; soit la République est forte, responsable, et elle laisse le culte s’organiser ! Voilà ce que j’avais à vous dire.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
Monsieur le président, Mme la rapporteure m’ayant indiqué que mon amendement n° 46 était satisfait par le droit existant, je le retire !
L ’ article 26 est adopté.
I. – Après l’article 19 de la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Églises et de l’État, il est inséré un article 19-1 ainsi rédigé :
« Art. 19 -1. – Pour bénéficier des avantages propres à la catégorie des associations cultuelles prévus par les dispositions législatives et réglementaires, toute association constituée conformément aux articles 18 et 19 de la présente loi doit déclarer sa qualité cultuelle au représentant de l’État dans le département, sans préjudice de la déclaration prévue à l’article 5 de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association.
« Le représentant de l’État dans le département peut, dans les deux mois suivant la déclaration, s’opposer à ce que l’association bénéficie des avantages mentionnés au premier alinéa du présent article s’il constate que l’association ne remplit pas ou ne remplit plus les conditions prévues aux articles 18 et 19 ou pour un motif d’ordre public. Lorsqu’il envisage de faire usage de son droit d’opposition, il en informe l’association et l’invite à présenter ses observations dans un délai d’un mois.
« En l’absence d’opposition, l’association qui a déclaré sa qualité cultuelle bénéficie des avantages propres à la catégorie des associations cultuelles pendant une durée de cinq années.
« L’association qui souhaite continuer à bénéficier des effets de la déclaration mentionnée au premier alinéa à l’issue de cette durée en informe le préfet deux mois au moins avant son expiration. L’association bénéficie d’une reconduction tacite de la reconnaissance de sa qualité cultuelle pour une nouvelle durée de cinq années sauf si, dans les deux mois suivant cette information, le représentant de l’État dans le département invite l’association concernée à renouveler la procédure de déclaration dans les conditions mentionnées aux deux premiers alinéas du présent article.
« Le représentant de l’État dans le département peut, pour les mêmes motifs que ceux mentionnés au deuxième alinéa, retirer le bénéfice des avantages propres à la catégorie des associations cultuelles, après mise en œuvre d’une procédure contradictoire.
« Les modalités d’application du présent article, notamment les documents permettant à l’association de justifier de sa qualité cultuelle, les conditions dans lesquelles est renouvelée la déclaration et les conditions dans lesquelles s’exerce le droit d’opposition de l’administration, sont précisées par décret en Conseil d’État. »
II. –
Non modifié
L’amendement n° 333, présenté par Mme Benbassa, MM. Benarroche et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme Taillé-Polian, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Esther Benbassa.
Le présent article transforme la procédure actuelle de rescrit administratif en une obligation de déclaration auprès du préfet de la qualité cultuelle des associations concernées.
Si la commission des lois a tenté d’améliorer le dispositif, en introduisant plus de souplesse lors du renouvellement des demandes des associations dont la qualité cultuelle aura déjà été reconnue pour une première période de cinq ans, et cela en prévoyant une simple obligation d’information de l’administration au bout de ces cinq années, il reste qu’une telle mesure se fonde sur une suspicion injustifiée et généralisée à l’égard des associations cultuelles.
Il n’appartient pas à l’État d’organiser les cultes et d’opérer un contrôle permanent sur ceux-ci.
L’article 27 a pour effet d’alourdir les contraintes administratives des associations cultuelles. C’est aussi une manière d’entraver la liberté des cultes, qui n’ont pas toujours les moyens administratifs d’effectuer de telles démarches.
En outre, ce contrôle renforcé est contraire aux principes qui découlent de notre laïcité, et il constitue un dévoiement de la loi du 9 décembre 1905 relative à la séparation des Églises et de l’État.
Pour toutes ces raisons, le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires en demande la suppression.
À nos yeux, le fait qu’une association ait besoin de se déclarer pour pouvoir émettre des reçus fiscaux ou bénéficier d’avantages fiscaux, par exemple sur la taxe foncière ou la taxe d’habitation, justifie qu’il puisse y avoir une déclaration.
Madame Benbassa, nous n’avons pas « tenté » d’améliorer ce dispositif ; nous avons réellement assoupli ces déclarations, notamment s’agissant du renouvellement.
Les déclarations auront aussi l’avantage de permettre au préfet d’avoir une vision assez globale des cultes et des différentes associations présents dans son département.
Il nous paraît donc intéressant de prévoir que ces associations se déclarent et se renouvellent, quand bien même nous avons largement simplifié le renouvellement.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
Je suis saisi de neuf amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 445 rectifié, présenté par M. Sueur, Mmes Harribey et de La Gontrie, MM. Kanner, Assouline, Féraud, Magner et Marie, Mmes Meunier, Monier et S. Robert, MM. Durain, Kerrouche, Leconte et Antiste, Mme Lepage, MM. Lozach et Stanzione, Mme Van Heghe, MM. Bourgi, Montaugé et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 2
Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :
« Art. 19-1. – L’association cultuelle est déclarée au représentant de l’État dans le département dans lequel elle a son siège. Cette déclaration est assortie du dépôt de ses statuts qui précisent le caractère cultuel de l’association. Il sera donné récépissé de celle-ci dans le délai de deux mois.
« Le représentant de l’État dans le département refuse de délivrer le récépissé lorsqu’il constate que l’association ne remplit pas les conditions prévues aux articles 18 et 19.
II. – Alinéas 3 à 6
Supprimer ces alinéas.
III. – Alinéa 7
Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :
« Sans préjudice de l’article 111 V de la loi n° 2009-526 du 12 mai 2009 et de l’article L. 212-1 du code de la sécurité intérieure, lorsque le représentant de l’État dans le département constate que l’association ne remplit plus les conditions prévues aux articles 18 et 19, il en informe le ministère public compétent en application de l’article 7 de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association.
« Les modalités d’application du présent article sont précisées par décret en Conseil d’État. »
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.
L’article 27 prévoit une double déclaration. C’est une rupture par rapport au système de la loi de 1905.
Notre amendement a pour objet de rester dans un régime de déclaration unique, conformément à la loi de 1905, que nous connaissons un peu, monsieur le ministre, même si nous raisonnons par rapport à la France de 2021…
L’article pose de nombreux problèmes. Il prévoit l’obligation pour l’association cultuelle d’informer tous les cinq ans l’administration qu’elle souhaite continuer à bénéficier de la reconnaissance de sa qualité cultuelle. La logique de la loi de 1905 est que cela figure dans les statuts. Et puisque cela figure dans les statuts, cela s’applique !
La Défenseure des droits a déclaré : « Au-delà du lourd formalisme que cela représente, ce nouveau dispositif ferait apparaître une nouvelle catégorie d’associations de la loi de 1905 ne bénéficiant pas des avantages propres aux associations cultuelles – avantages dont les contours paraissent flous en l’état actuel du texte. »
La Commission nationale consultative des droits de l’homme a aussi noté cette grande difficulté : « Serait ainsi créée, à côté des associations à objet cultuel de la loi de 1901 et de la loi de 1905, une troisième catégorie, celle des associations de la loi de 1905 ne bénéficiant pas des avantages propres à ce cadre législatif, dont le régime juridique reste à préciser. »
J’ajoute que la Cour européenne des droits de l’homme a condamné la France pour avoir violé l’article 9, alinéa 2, de la Convention européenne des droits de l’homme, en appliquant à des groupes sectaires des dispositions fiscales dont la portée était insuffisamment précise.
Monsieur le ministre, chers collègues, nous vous mettons en garde : si le texte était voté en l’état, peut-être la France aurait-elle de nouveau quelques difficultés avec les positions que ne manquerait pas de prendre la Cour européenne des droits de l’homme.
M. le ministre s ’ exclame.
L’amendement n° 449 rectifié, présenté par M. Sueur, Mmes Harribey et de La Gontrie, M. Assouline, Mmes S. Robert, Monier et Meunier, MM. Marie et Magner, Mme Lepage, MM. Féraud, Leconte, Lozach, Kerrouche, Kanner, Bourgi, Durain, Redon-Sarrazy, Antiste et J. Bigot, Mmes Bonnefoy, Briquet et Conconne, M. P. Joly, Mme Jasmin, MM. Gillé, Raynal, Mérillou, Lurel, Temal et Tissot, Mme Conway-Mouret, MM. Jacquin, Montaugé et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Après la première occurrence du mot :
association
insérer les mots :
qui n’en bénéficie pas à la date d’entrée en vigueur de la loi n° … du … confortant le respect des principes de la République et est
La parole est à Mme Laurence Harribey.
Il s’agit d’un amendement de repli. Nous proposons d’alléger la procédure, qui serait très contraignante avec ce renouvellement, en excluant les associations cultuelles déclarées avant l’entrée en vigueur de la présente loi.
Certes, l’article 45 du projet de loi prévoit une entrée en vigueur progressive, mais cela ne concernera en réalité qu’une partie des associations ayant acquis la reconnaissance de qualité cultuelle.
L’amendement n° 47, présenté par Mme N. Goulet, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Compléter cet alinéa par les mots :
, qui précise dans son objet qu’elle a vocation à accomplir des actes en relation avec l’exercice public d’un culte
La parole est à Mme Nathalie Goulet.
Il s’agit d’un amendement de cohérence.
Nous voulons introduire dans le texte l’obligation, pour une association visée par le présent article, de préciser dans son objet qu’elle a « vocation à accomplir des actes en relation avec l’exercice public d’un culte ».
L’amendement n° 450 rectifié, présenté par M. Sueur, Mmes Harribey et de La Gontrie, M. Assouline, Mmes S. Robert, Monier et Meunier, MM. Marie et Magner, Mme Lepage, MM. Féraud, Leconte, Lozach, Kerrouche, Kanner, Bourgi, Durain, Redon-Sarrazy, Antiste et J. Bigot, Mmes Bonnefoy, Briquet et Conconne, M. P. Joly, Mme Jasmin, MM. Gillé, Raynal, Mérillou, Lurel, Temal et Tissot, Mme Conway-Mouret, MM. Jacquin, Montaugé et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 3, après la première phrase
Insérer une phrase ainsi rédigée :
La décision d’opposition doit être motivée.
La parole est à Mme Laurence Harribey.
Toujours dans le même esprit, nous proposons que, si le texte reste en l’état, l’acceptation de la déclaration vaille pour cinq ans et puisse être renouvelée pour la même durée sur demande des associations concernées.
Le préfet, qui dispose d’un délai de deux mois, peut éventuellement s’opposer au bénéfice des avantages découlant de la qualité d’associations cultuelles s’il constate que l’association n’entre pas dans cette catégorie.
Nous demandons que la décision préfectorale soit motivée, en vue d’une plus grande transparence de la procédure. Notre droit doit permettre aux associations cultuelles dont l’agrément est en jeu de se défendre dans les meilleures conditions.
L’amendement n° 358 n’est pas soutenu.
L’amendement n° 448 rectifié, présenté par M. Sueur, Mmes Harribey et de La Gontrie, M. Assouline, Mmes S. Robert, Monier et Meunier, MM. Marie et Magner, Mme Lepage, MM. Féraud, Leconte, Lozach, Kerrouche, Kanner, Bourgi, Durain, Redon-Sarrazy, Antiste et J. Bigot, Mmes Bonnefoy, Briquet et Conconne, M. P. Joly, Mme Jasmin, MM. Gillé, Raynal, Mérillou, Lurel, Temal et Tissot, Mme Conway-Mouret, MM. Jacquin, Montaugé et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 4 et alinéa 5, seconde phrase
Remplacer le mot :
cinq
par le mot :
huit
La parole est à Mme Laurence Harribey.
Par cet amendement complémentaire, nous proposons de porter la durée de l’agrément du préfet de cinq ans à huit ans, afin d’alléger les contraintes imposées aux associations et de désengorger les services préfectoraux.
L’amendement n° 651, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 4
Compléter cet alinéa par les mots :
, renouvelable par déclaration au représentant de l’État dans le département, dans les conditions mentionnées aux premier et deuxième alinéas
II. – Alinéa 5
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. le ministre.
L’article 27 fait partie de ceux qui peuvent susciter des discussions, notamment à propos des cultes. Il est très important de comprendre l’intérêt public d’une telle disposition.
Comme l’a très bien dit M. Sueur, quand une association cultuelle se crée, elle indique dans ses statuts qu’elle en est une. Cela lui procure des avantages : exemption d’impôts locaux, de taxe d’aménagement, de droits de mutation, etc. Et, comme nous le verrons bientôt, la loi lui offre encore plus d’avantages, notamment s’agissant des reçus fiscaux, entre autres.
Toutefois, dès lors que les statuts indiquent qu’il s’agit d’une association cultuelle déposée, il n’existe aucun moyen de vérifier la conformité entre l’activité et les statuts ; nous le savons, d’expérience, au ministère de l’intérieur. Certains d’entre vous prétendent que de tels contrôles seraient liberticides ou compliqués.
Or ce n’est pas à des femmes et à des hommes politiques que j’apprendrai que cela s’applique déjà pour les partis politiques ! Il ne suffit pas d’indiquer dans ses statuts que l’on est un parti politique pour bénéficier des avantages relatifs aux reçus fiscaux, le tout sans contrôle sur la comptabilité ou l’activité. Il n’est pas question d’utiliser les moyens des partis politiques pour faire autre chose que ce qui est prévu à l’article 4 de la Constitution. Vous savez bien que de telles pratiques seraient condamnées.
Or il n’y a pas d’équivalent de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques pour les cultes ; d’ailleurs, ce n’est pas ce que nous proposons.
Les cultes demandent simplement que, à l’instar de ce qui existe pour d’autres associations spécialisées bénéficiant d’avantages particuliers, comme les partis politiques, l’activité réelle soit bien conforme à l’objet indiqué dans les statuts. Or tel n’est pas toujours le cas ; je pourrais vous en donner d’innombrables exemples.
Pour répondre à ceux qui jugent de tels contrôles complexes, je lirai un extrait de la page 37 de l’avis du Conseil d’État, qui est pourtant très sourcilleux sur la liberté de culte et le fonctionnement du monde associatif : « Cette procédure sera moins contraignante pour les associations tout en permettant à l’administration d’atteindre le même objectif en se consacrant à l’examen des cas les plus litigieux. »
En effet, mesdames, messieurs les sénateurs, en présentant vos amendements, vous n’avez pas évoqué ce qui se passe en pratique. Aujourd’hui, l’association cultuelle demande un rescrit à l’administration.
La qualité cultuelle ne se décrète pas ex nihilo ; il faut faire une intervention auprès du ministère de l’intérieur, qui donne un rescrit administratif. Cela nous permet de vérifier non pas ce qui est ou non une association, ou ce qui relève ou non d’un culte, mais, tout simplement, s’il n’y a pas détournement – c’est sans doute cela que l’on attend de la part des agents publics –, c’est-à-dire si l’activité de l’association cultuelle est bien conforme à l’objet inscrit dans ses statuts.
C’est tellement vrai que l’on peut attaquer une association, souvent devant le juge judiciaire, lorsque son activité n’est pas conforme à ses statuts. Il existe des dispositions spécifiques en ce sens. À cet égard, le régime en vigueur en Alsace-Moselle est bien plus avancé que le droit national.
Cet article ne crée donc pas de complications. Le Conseil d’État lui-même considère qu’il simplifie le système.
Il y a une volonté extrêmement forte de l’État non pas de contrôler ce qui relève du culte, mais de vérifier l’utilisation des avantages donnés à l’association, car il y a beaucoup d’argent public à la clé.
Dans nos territoires, les exemples sont innombrables. Il est malheureusement très courant que des associations utilisent l’activité cultuelle pour faire autre chose que du cultuel, par exemple du scolaire, du sportif ou du culturel, dans les lieux qu’elles exploitent. Si le régime de la loi de 1901 est parfois détourné pour des activités relevant de la loi de 1905, l’inverse existe aussi.
C’est le point d’achoppement de notre discussion. Et cela me permet de répondre à l’interrogation qu’a soulevée un sénateur membre du groupe CRCE.
Pour des raisons que le Conseil d’État nous a expliquées et que nous avons bien voulu accepter, nous n’avons pas pu distinguer l’associatif type 1901 du cultuel type 1905. Il y a donc les « mixtes », qui, tout en étant des associations de type 1901, réclament la reconnaissance de leur qualité cultuelle.
Néanmoins, une telle confusion des genres ne sert ni l’esprit de la laïcité, ni le culte, qui se confond avec le culturel, ni les élus locaux, parfois enclins à croire sur parole ce qui figure dans les statuts sans vérifier qu’il s’agit bien d’associations cultuelles, ni, finalement, ce que nous voulons faire dans le cadre du présent projet de loi.
Certes, les oppositions peuvent s’exprimer, mais elles sont en contradiction avec l’esprit même de ce que nous souhaitons : distinguer réellement ce qui relève du cultuel et qui doit être aidé et ce qui relève du culturel et qui n’a rien de religieux.
L’amendement n° 332, présenté par Mme Benbassa, MM. Benarroche et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme Taillé-Polian, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Rédiger ainsi cet alinéa :
« L’association bénéficie d’une reconduction tacite de la reconnaissance de sa qualité cultuelle pour une nouvelle durée de cinq années.
La parole est à Mme Esther Benbassa.
L’article 27 instaure un renouvellement quinquennal tacite de la déclaration initiale de qualité cultuelle d’une association auprès du préfet, que celui-ci pourrait écarter selon son bon vouloir. Il constitue une nouvelle attaque contre la liberté de culte et vient compliquer une procédure préexistante, puisque les associations culturelles sont déjà soumises à une obligation de déclaration préfectorale.
Le présent amendement de repli a donc pour effet d’alléger la procédure, en demandant une reconduction tacite et sans condition de la reconnaissance de la qualité culturelle d’une association pour une durée de cinq années supplémentaires. Le renouvellement de la déclaration de la qualité culturelle d’une association se produira ainsi tous les dix ans. C’est le délai que nous proposons au travers de cet amendement.
Le dispositif visé à l’alinéa 5 constitue une nouvelle fois un empiètement du politique sur le religieux, une atteinte au principe de séparation des Églises et de l’État. Le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires en demande donc la suppression.
L’amendement n° 392 rectifié, présenté par M. Cuypers, Mmes Chain-Larché et Thomas, MM. Regnard et Cardoux, Mme V. Boyer, MM. Mandelli et Reichardt, Mme Gruny, MM. Brisson et Charon, Mmes Lopez et Lavarde, MM. Rapin, B. Fournier, Laménie et Belin, Mme Pluchet, M. Bonne, Mme Boulay-Espéronnier, MM. de Nicolaÿ, Houpert, Bas et de Legge, Mme Lassarade et MM. Longuet, Lefèvre et Mouiller, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigé :
Après quinze ans d’existence, la qualité cultuelle fait l’objet d’une reconduction tacite à chaque échéance de cinq ans sauf si deux mois auparavant, le représentant de l’État dans le département invite l’association concernée à renouveler la procédure de déclaration dans les conditions mentionnées aux deux premiers alinéas du présent article.
La parole est à Mme Anne Chain-Larché.
Cet amendement vise également à simplifier la procédure, mais de manière légèrement différente.
Après quinze ans d’existence, la qualité cultuelle fait l’objet d’une reconduction tacite à chaque échéance de cinq ans, sauf si, deux mois, auparavant, le représentant de l’État dans le département invite l’association concernée à renouveler la procédure de déclaration dans les conditions mentionnées aux deux premiers alinéas du présent article.
Il s’agit d’un compromis, mais qui a tout de même pour objet de simplifier le dispositif.
L’amendement n° 445 rectifié de M. Sueur vise à remplacer la nouvelle obligation de déclaration quinquennale au préfet par une simple mention dans les statuts de l’association de sa qualité cultuelle valable une fois pour toutes. C’est à cette mention que pourrait s’opposer le préfet lors de la déclaration de l’association de type 1905.
Or, vous l’avez compris, nous souhaitons que le préfet connaisse les cultes sur son territoire et nous approuvons le principe du renouvellement quinquennal. Nous émettons donc un avis défavorable sur cet amendement.
L’amendement n° 449 rectifié a pour objet d’exempter du nouveau régime de déclaration les associations cultuelles déjà constituées avant l’entrée en vigueur de la présente loi. Nous sommes pour le renouvellement de la déclaration d’existence sur le territoire. Notre avis est donc également défavorable.
L’amendement n° 47 tend à rendre obligatoire la mention dans l’objet d’une association cultuelle qu’elle a vocation à accomplir des actes en relation avec l’exercice public d’un culte. Cette demande nous semble déjà satisfaite, notamment, par les articles 18 et 19 de la loi de 1905. Nous sollicitons donc le retrait de cet amendement. À défaut, l’avis serait défavorable.
Les auteurs de l’amendement n° 450 rectifié souhaitent imposer la motivation des décisions d’opposition. Là encore, cela nous paraît déjà satisfait, puisque la disposition générale relative à la motivation des actes administratifs s’applique également dans ce cas. Notre avis est donc défavorable.
L’amendement n° 448 rectifié vise à porter de cinq à huit ans la périodicité de la déclaration. La commission a estimé que cinq ans était un bon délai pour une clause de rendez-vous. Notre avis est donc défavorable.
J’en viens à l’amendement n° 651 du Gouvernement.
En fait, nous sommes plutôt d’accord avec vous sur ces déclarations, monsieur le ministre. Nous avons seulement souhaité faire en sorte qu’une association, plutôt que de renvoyer l’intégralité de son dossier tous les cinq ans, puisse simplement se signaler en envoyant un courrier qui rappelle son existence à l’administration, le préfet pouvant à ce moment-là voir son attention attirée par des changements de gouvernance, de pratique – que sais-je encore ?
Il est bien évident que cela ne concernerait pas toutes les associations. Nous sommes bien d’accord, une association diocésaine n’aura pas bouleversé ses pratiques en cinq ans, et le préfet n’est pas obligé de lui redemander un dossier, qui serait d’ailleurs très probablement un copier-coller du dossier présenté cinq ans auparavant. Nous pensons qu’une nouvelle déclaration doit bien être faite, mais qu’il vaut mieux alléger la procédure.
Ainsi, le préfet, qui change un peu trop souvent à mon goût, sait que l’association existe et, s’il s’interroge, il demande un dossier plus complet, même si ce n’est pas obligatoire. Nous ne sommes pas si éloignés de vous, monsieur le ministre, et je regrette que vous vouliez revenir à votre rédaction, car la nôtre nous semble plus conforme à ce que l’on peut attendre des cultes ; sinon, vous vous en doutez bien, nous ne l’aurions pas retenue… Notre avis est donc défavorable.
L’amendement n° 332 de Mme Benbassa tend à prévoir un renouvellement quinquennal de droit par tacite reconduction.
Mes chers collègues, vous avez compris que nous y étions défavorables, tout comme au délai de quinze ans prévu par les auteurs de l’amendement n° 392 rectifié. Une reconduction au bout de cinq ans nous paraît être une clause de rendez-vous acceptable, surtout allégée comme elle l’a été par la commission, c’est-à-dire grâce à un simple courrier. Ce délai nous paraît tout à fait supportable.
L’avis de la commission est donc également défavorable.
M. Gérald Darmanin, ministre. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur l’ensemble des amendements en discussion, à l’exception, bien sûr, de l’amendement n° 651, qu’il soutient franchement !
Sourires.
Monsieur le ministre, vous avez cité l’avis du Conseil d’État. Or ce texte contient un paragraphe qui a attiré spécialement mon attention.
Je vous en donne lecture : « La procédure prévue par le projet s’apparente donc à une barrière à l’entrée du statut d’association cultuelle. Un tel régime porte une atteinte certaine au régime actuel, en vertu duquel les associations, y compris cultuelles, se constituent librement. » On sent qu’il y a là une interpellation du Conseil constitutionnel.
Le président Retailleau, à propos de l’instruction en famille, nous a dit : « Un régime d’exception est tout sauf un régime de liberté ». Vous me permettrez de reprendre ses propos pour vous dire que ce que vous organisez ici, c’est un régime d’exception, et ce n’est donc pas un régime de liberté.
J’ai lu attentivement votre étude d’impact. Il y a une phrase qui revient trois ou quatre fois. Elle est forte, et je pense qu’elle est de nature à justifier notre débat : « L’exercice du culte n’est pas une activité neutre. »
Je sais parfaitement distinguer une association diocésaine d’une association de joueurs de pétanque
Sourires.
Or, de ce point de vue, je suis désolé, mais l’athée que je suis n’imagine pas qu’il puisse y avoir ontologiquement dans l’exercice du culte quelque chose qui transgresse l’ordre public et le respect des cadres législatifs.
Ce qui m’inquiète dans cet article, c’est que vous jetez une suspicion de principe sur l’exercice du culte. Je crains que cela n’entraîne, dans une partie de la population, un rejet massif des faits religieux, quels qu’ils soient, ce qui est totalement contraire à l’esprit de la loi de séparation des Églises et de l’État de 1905.
À mon sens, la rédaction du projet de loi issue des travaux de l’Assemblée nationale imposait une contrainte bien plus proportionnée à l’objectif visé que la rédaction initiale. Il y a bien, non pas une autorisation, mais un contrôle a posteriori du préfet. C’est déjà une meilleure base et un signe de moindre défiance.
Je comprends l’objectif et la problématique du rescrit fiscal.
Cependant, je comprends moins, monsieur le ministre, que l’amendement du Gouvernement vise à supprimer l’alinéa 5, qui a été rédigé par la commission des lois du Sénat. Il est pourtant un signe d’apaisement ou de non-défiance à destination des associations cultuelles, puisqu’il prévoit tout simplement un renouvellement tacite à cinq ans. On ne les oblige pas à procéder à un certain nombre de formalités, mais le préfet, en application d’un certain parallélisme des formes par rapport au premier temps de la déclaration, dispose de deux mois pour réagir.
Je trouve que cette disposition, telle qu’elle a été rédigée par la commission des lois, ne change pas l’intention des auteurs du projet de loi, ne bouleverse pas les procédures et permet d’atteindre l’objectif de manière proportionnée, tout en adressant un message de sympathie et d’apaisement aux associations cultuelles. À mes yeux, la suppression de l’alinéa 5 que vous appelez de vos vœux n’est donc pas opportune.
Monsieur Ouzoulias, je ne me laisserai pas aller à la facétie de souligner que, en citant M. Retailleau, vous élargissez votre spectre idéologique…
Rires.
Attention à ne pas vous faire mal en forçant votre souplesse, tout de même !
Comment expliquer que, pour nous, se déclarer ne signifie pas être conforme ad vitam aeternam à son objet ? À cet égard, Mme la rapporteure a eu raison de souligner que l’amendement de M. Sueur était tout le contraire de ce que nous souhaitions faire.
Je pense que nous avons une divergence profonde. L’association n’a pas forcément toujours les mêmes activités.
Oui, mais on peut déclarer quelque chose et avoir une activité contraire à l’objet de ses statuts. Chacun peut le constater, sauf à vivre dans un monde merveilleux d’enfants qui pourraient encore avoir des rêves…
Je doute que toutes les associations, partout, respectent leurs statuts à la lettre. Au demeurant, monsieur le président Sueur, la loi prévoit la possibilité d’attaquer une association qui n’agirait pas selon ses statuts.
Vous avez parlé d’ordre public, et je n’ai pas voulu vous contrarier, mais le respect de l’ordre public s’apprécie au regard du caractère plus ou moins défini de l’objet du statut d’une association, selon plusieurs jurisprudences du Conseil d’État.
Monsieur Sueur, je crois franchement que vous étiez parti assez loin dans votre volonté de vous opposer au texte du Gouvernement. Il est évident qu’une association cultuelle créée voilà un siècle peut avoir désormais une activité qui n’est plus tout à fait conforme à son statut. Le principe du droit, c’est de rappeler à l’ordre quand les réalités peuvent diverger.
Nous sommes tous très attachés à ce terme de cinq ans, puisqu’il correspond au délai moyen de renouvellement des élus dans les grandes démocraties. Il nous semble raisonnable de faire en sorte que, périodiquement, les services de l’État puissent vérifier que les statuts sont conformes à l’activité et que l’association cultuelle fait bien du culte, et pas autre chose.
En effet, dans sa grande bonté, la République, qui aime tellement les cultes, au point d’en protéger scrupuleusement la liberté, a prévu des avantages pour les associations cultuelles, et pas pour les autres associations, ce que beaucoup ignorent.
Madame la rapporteure, monsieur de Belenet, je vous remercie d’avoir travaillé dans l’esprit de ce qu’a proposé le Gouvernement.
Cependant, je ne puis vous suivre sur la simple lettre ou sur la reconduction tacite, qui me paraît illusoire.
En effet, je sais comment fonctionnent les services de l’État, avec des préfets qui changent de poste avant cinq ans en moyenne. Certains élus peuvent le regretter, mais, parfois, ils demandent eux-mêmes le départ de leur préfet, ce qui ne veut pas dire d’ailleurs que le ministre de l’intérieur y fait droit…
Sourires.
Ce qui est certain, c’est que la déclaration tacite nous paraît illusoire, car le contrôle reposerait alors sur une dénonciation par une collectivité locale, par des membres de l’association, par le préfet lui-même ou par les services de renseignement.
Je le répète, tous les partis politiques s’y soumettent tous les ans, ce que nous ne demandons pas aux cultes. Vous le savez, tous les partis politiques, tous les ans, doivent montrer qu’ils respectent un certain nombre d’obligations, ce qui leur permet d’obtenir un agrément pour continuer à bénéficier des exceptions, notamment fiscales, que la loi leur octroie.
On pourrait aussi prendre l’exemple des fondations et de toutes ces associations exceptionnelles qui bénéficient d’avantages un peu particuliers. Il ne me semble pas que la reconduction tacite ou la simple lettre permette ce travail.
Mme la rapporteure m’objecte que ce type de mesure n’est pas adapté aux associations diocésaines. Bien sûr, mais nous ne reconnaissons, par définition, aucun culte. Que serait la loi de la République si elle distinguait les associations diocésaines, donc les catholiques, des autres ? Ce ne serait pas raisonnable dans l’esprit de nos textes.
Enfin, monsieur Ouzoulias, je salue votre travail attentif sur le texte, mais, si vous avez lu in extenso l’avis du Conseil d’État, qui exprimait une inquiétude, vous n’êtes pas sans savoir que ledit avis concernait le texte tel qu’il était avant la première lecture à l’Assemblée nationale, laquelle a justement corrigé la disposition en question.
Je me suis d’ailleurs engagé à ce que le décret d’application du texte soit conforme à l’esprit des travaux de l’Assemblée nationale, donc au vôtre, et non pas à l’esprit du texte tel qu’il avait été présenté par le Gouvernement au Conseil d’État. Monsieur le sénateur, si votre remarque était juste, elle est désormais sans objet, puisque ce point a été corrigé.
Pour résumer, madame la rapporteure, je reste attaché au texte du Gouvernement, mais nous aurons sans doute l’occasion dans le débat, et peut-être en CMP, de trouver une solution simple et respectueuse de l’ordre public.
Je veux juste préciser et notre travail et ma pensée.
Tout d’abord, l’association doit tout de même envoyer un courrier, c’est-à-dire que ce n’est pas vraiment une tacite reconduction, dans la mesure où elle doit malgré tout se signaler.
Une fois qu’elle s’est signalée, le préfet, qui, effectivement, a pu changer, éventuellement, même, à la demande des élus
Sourires.
Je citais les associations diocésaines comme un exemple d’associations qui, en général sont assez stables. Bien entendu, il peut tout aussi bien s’agir d’une association musulmane, protestante, bouddhiste – que sais-je encore ? –, pourvu qu’elle soit stable et qu’elle n’ait pas attiré l’attention des services de la préfecture dans les cinq précédentes années, a fortiori si son président est toujours le même et que son activité semble n’avoir pas changé.
Si c’est le cas, effectivement, les services de la préfecture n’ont pas à aller demander un nouveau dossier, car c’est lourd, autant pour l’association que pour eux. Il vaut mieux qu’ils se concentrent sur les associations qui, éventuellement, ont connu des changements substantiels dans les cinq ans.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote sur l’amendement n° 651.
Mme Nathalie Goulet. Mes chers collègues, je suis tout à fait favorable à cet amendement.
Exclamations agacées au banc des commissions.
Pour les gens qui travaillent sur ce sujet depuis très longtemps, cette proposition du Gouvernement constitue déjà une avancée considérable. C’était également le cas de l’article précédent sur les dispositifs « anti-OPA », au sujet duquel je ne me suis pas exprimée. Ce sont vraiment des dispositions que l’on attend depuis longtemps. Plus elles seront claires, plus elles seront déterminées et plus on arrivera à remettre de l’ordre dans la maison.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L ’ article 27 est adopté.
L’amendement n° 686, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l’article 27
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :
1° L’article L. 1311-2 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque le bail a pour objet l’affectation à une association cultuelle d’un édifice du culte ouvert au public, la collectivité territoriale informe le représentant de l’État dans le département de son intention de conclure un tel bail trois mois au moins avant sa conclusion. » ;
2° L’article L. 2252-4 est ainsi rédigé :
« Art. L. 2252 -4. – Une commune peut garantir les emprunts contractés pour financer la construction, par des associations cultuelles ou, dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, par des établissements publics du culte ou par des associations inscrites de droit local à objet cultuel, d’édifices répondant à des besoins collectifs de caractère religieux.
« La commune informe le représentant de l’État dans le département de son intention d’accorder une telle garantie trois mois au moins avant que celle-ci soit accordée. » ;
3° L’article L. 3231-5 est ainsi rédigé :
« Art. L. 3231 -5. – Les départements peuvent garantir les emprunts contractés pour financer la construction, par des associations cultuelles ou, dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, par des établissements publics du culte ou par des associations inscrites de droit local à objet cultuel, d’édifices répondant à des besoins collectifs de caractère religieux.
« Le département informe le représentant de l’État dans le département de son intention d’accorder une telle garantie trois mois au moins avant que celle-ci soit accordée. »
La parole est à M. le ministre.
Cet amendement a un double objet.
D’une part, il vise à étendre la possibilité d’accorder des garanties d’emprunt à toutes les collectivités locales, départements et communes. Il existe aujourd’hui des règles un peu complexes, sur lesquelles je passe, et je pense que cela permettra l’égalité de traitement de tous.
D’autre part, en contrepartie, si j’ose dire, il tend à instituer un dispositif d’information qui sera extrêmement important et efficace, surtout si l’on s’oriente vers une solution plus conforme à ce que veut la commission des lois du Sénat, c’est-à-dire la tacite reconduction ou, au moins, une lettre : il faudra que le préfet soit informé trois mois avant que les baux emphytéotiques ou les garanties d’emprunt ne deviennent effectifs, de sorte qu’il puisse intervenir pour vérifier la qualité cultuelle de l’association et, avec l’aide d’autres dispositifs, les éventuels financements étrangers et l’intérêt public local.
Bref, il faudra que les services de l’État soient en mesure de guider les collectivités locales souhaitant soutenir telle ou telle association cultuelle par un geste positif, à savoir un bail emphytéotique ou une garantie d’emprunt, ou s’opposer à de tels projets.
Je ne reviendrai pas sur des débats très récents, mais il me paraît important que la République puisse se protéger face à l’ignorance – ou face à autre chose…
Effectivement, cet amendement vise à assurer une meilleure information de l’administration sur les financements des nouveaux édifices du culte impliquant des collectivités territoriales et à assouplir légèrement l’octroi des garanties d’emprunt, désormais possible sur toutes les communes du territoire, et non plus seulement dans les agglomérations en développement.
Nous sommes favorables à cette disposition, car elle permettra un meilleur contrôle des constructions des nouveaux lieux de culte par les fidèles et par les pouvoirs publics.
L’assouplissement de certains financements par garantie d’emprunt semble également bienvenu. Une telle mesure était réclamée par certains représentants des cultes reçus en audition, notamment les évangéliques, et souhaitée par plusieurs de nos collègues. Il y a notamment eu un amendement en ce sens de notre collègue Hervé Maurey, qui a été frappé d’irrecevabilité sur le fondement de l’article 40 de la Constitution.
La commission émet donc un avis favorable.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, cet amendement est apparu voilà deux jours. C’est étonnant !
Monsieur le ministre, vous avez dit – je cite de mémoire –, « sans qu’il soit besoin de revenir sur des débats très récents ». Vous avez vraiment le sens de l’antiphrase. Je ne pense pas que ce soit le Saint-Esprit, s’il existe, qui vous ait inspiré, voilà quarante-huit heures, cet amendement…
Vous le savez très bien, cet amendement est dû à l’actualité. Or, monsieur le ministre, je ne suis pas sûr que l’on fasse de bonnes lois quand on les fait à partir de la revue de presse.
M. le ministre proteste.
Certes, il y a eu des événements la semaine dernière. Seulement, dans votre souci de répondre à l’actualité, ce qui, je le répète, n’est pas forcément toujours la bonne manière de légiférer, vous avez oublié que l’objet de votre amendement inopiné trouvait sa réponse dans l’article 27, tel qu’il vient d’être adopté dans la rédaction du Sénat, qui est proche de la vôtre, monsieur le ministre.
En effet, cet article 27 a justement pour objet d’insérer dans la loi de 1905 un article 19-1, visant à permettre aux représentants de l’État de vérifier la qualité cultuelle de l’association, au moyen de la déclaration préalable qui lui est imposée pour bénéficier des avantages que sont la possibilité de contracter des baux emphytéotiques ou le bénéfice d’emprunts garantis par les communes, départements, etc. Je ne vais pas répéter ce que vous avez très bien dit ; vous avez défendu votre position.
En outre, cette qualité est attribuée pour une durée de cinq ans, et l’article 27, tel qu’il a été voté à l’instant, assure un droit de suite de ce contrôle, car, avant le terme de cette échéance, l’association qui souhaite continuer à bénéficier des effets de la qualité cultuelle doit en informer le préfet deux mois avant l’expiration du délai susmentionné.
Enfin, le respect de l’ordre public étant une condition pour obtenir et conserver le statut d’association cultuelle, en application de ce qui vient d’être voté voilà quelques minutes, le préfet est toujours en mesure de s’opposer à la qualification cultuelle d’une association, si celle-ci trouble l’ordre public.
J’ai épuisé mon temps de parole et ne puis donc développer d’autres arguments, mais il va de soi, monsieur le ministre, que cet amendement est démonstratif. Il ne vous est pas interdit de faire de la politique, mais, tant qu’à faire, autant que ce soit nous qui le rappelions, puisque vous avez oublié de le dire.
Monsieur Sueur, je vous remercie, mais je ne suis pas sûr qu’il existe une déclaration tacite ou que j’aie besoin de votre autorisation pour faire de la politique !
Ce qui est certain, c’est que vous vous trompez lourdement sur le fond. Vous faites une grave confusion, si je puis me permettre, avec ce que dit l’article 27 proposé par la commission, d’après ce que j’en ai compris, car je n’en suis pas l’auteur. Il est vrai qu’il y a plusieurs demeures dans la maison du père, mais je crois que la rédaction est assez claire.
Mon amendement ne vise pas les pouvoirs du préfet de confirmer ou de contester la qualité cultuelle d’une association. Il s’agit de faire en sorte que le préfet puisse être informé du bail emphytéotique ou de la garantie d’emprunt qu’une collectivité locale s’apprête à accorder. Pardon de vous le dire, mais cela n’a rien à voir avec l’article 27.
Par ailleurs, monsieur Sueur, il est évident que l’actualité nous renseigne.
Je vous l’avoue, je n’aurais pu imaginer que, dans notre République, une collectivité locale passe outre, par deux fois, les avertissements d’une préfète et ne tienne pas compte des alertes du ministre de l’intérieur en personne, prévenu sur la base d’informations extrêmement claires et précises des services de renseignement français. Perseverare diabolicum, si vous me permettez l’expression. Je puis imaginer que l’on pèche par méconnaissance de telle ou telle association ou de tel ou tel mouvement, mais, en l’occurrence, toute naïveté doit être écartée.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je le dis sans arrière-pensée politique dans cet hémicycle, je ne pensais pas objectivement que nous serions un jour amenés à constater de tels actes quasiment antipatriotiques, qui reviennent à frapper la Nation dans le dos.
Monsieur Sueur, je n’imaginais pas que l’on en arriverait à ce niveau de contrainte politique.
J’en tire toutes les conclusions, et si vous voulez me faire dire qu’il s’agit d’un amendement visant à empêcher de faire du communautarisme, je le concède bien volontiers.
Quand un élu de la République, qui, en tant que maire, est agent de l’État, je le rappelle, n’écoute pas les services de renseignement lorsqu’ils l’avertissent qu’il va financer une ingérence étrangère sur le sol de la République, ou, pis, de l’islam politique, je pense en effet qu’il est sage que le Gouvernement prenne ses responsabilités.
Je vous propose donc cette disposition, et j’espère bien que le Parlement la votera, conformément à l’esprit patriotique qui doit tous, je le pense, nous rassembler. Monsieur Sueur, il ne s’agit pas ici de politique, ou alors c’est de la Politique avec un grand P.
J’ai bien fait de vous inciter à dire cela, monsieur le ministre ! Maintenant, c’est explicite.
Monsieur le ministre, disons les choses très clairement : les élus communistes à la mairie de Strasbourg ont voté contre cette subvention à l’association Millî Görüs, parce que nous considérons qu’elle est le faux-nez en France du gouvernement Erdogan, qui vise l’implantation d’une politique néo-ottomane, nationaliste et fasciste.
Vous le savez bien, notre groupe vous a saisi à plusieurs reprises pour dénoncer les agissements de la Turquie contre la communauté arménienne, contre la communauté kurde, etc. Sur ce point, nous sommes intransigeants ; nous le sommes en France, mais aussi à l’étranger. Le Président de la République s’est d’ailleurs interrogé pour savoir si la Turquie devait encore être considérée comme un de nos alliés au sein de l’OTAN. À un moment, il faudra tirer tout cela au clair.
Je termine sur un point juridique. J’ai proposé hier, sur une mesure d’une légèreté absolue, de modifier le droit local d’Alsace-Moselle. On m’a répondu que c’était un tabou, quelque chose qu’il ne fallait absolument pas toucher. Nous voterons bien entendu l’amendement du Gouvernement, mais je remarque que, en l’espèce, vous touchez au droit local d’Alsace-Moselle.
Monsieur le ministre, il faudra bien que, un jour, en conscience, tous ensemble, nous menions une analyse complète de ce droit local, analyse qui ne soit pas réservée uniquement aux élus d’Alsace-Moselle, même si, bien évidemment, ces derniers ont un point de vue déterminant à cet égard.
Je voterai moi aussi cet amendement. Finalement, ce texte constitue une bonne occasion de régler en partie un problème. Il faut s’en réjouir.
Je voudrais aborder la question des renseignements et de la transparence. Il m’a été répondu par les rapporteures, à la faveur d’un amendement que j’avais présenté, que l’information circulait entre les préfets et les maires.
Monsieur le ministre, permettez-moi de vous rappeler une affaire assez pathétique qui s’est déroulée à Rouen, où la mairie a loué une salle à une association très peu recommandable, à savoir l’Union des musulmans de Rouen, affiliée aux Frères musulmans, qui tenait un séminaire pour les parents et les enfants, avec un orateur tout à fait ciblé par vos services.
Lorsque j’en ai été informée, j’ai tout d’abord prévenu le préfet, lequel n’était pas au courant, puis j’ai saisi la mairie, qui, apparemment, n’était pas non plus au courant, mais qui avait tout de même accordé une salle. Plus on prévoira d’informations préalables, plus on mettra de contraintes, mieux ce sera.
Le grand rabbin de France, lors de son audition, nous a dit en substance : plus il y aura de contrôles, plus la République sera forte et plus nous serons tranquilles. Je fais mienne cette déclaration.
Monsieur le président, puisque l’on a parlé de l’attribution de ces 2, 5 millions d’euros à Millî Görüs pour la mosquée Eyyûb Sultan, je voudrais apporter quelques éléments au débat.
Cette association a plusieurs fois été en relation avec les services de l’État par le passé. Elle a obtenu des contrats et des subventions, comme l’a indiqué la préfecture du Bas-Rhin. Cela a été confirmé par le journal Libération.
Murmures sur les travées du groupe Les Républicains.
En mai 2020, la préfecture lui a accordé une subvention de 2 500 euros au titre de la solidarité aux actions associatives lors du premier confinement. Par ailleurs, dans le cadre d’un partenariat institutionnel, une convention pour lutter contre l’insécurité routière dans les quartiers prioritaires strasbourgeois a été signée en 2020 entre cette association et l’État.
En 2019, selon Le Canard enchaîné, l’État a versé une subvention de 22 400 euros à Millî Görüs, a priori pour la construction de la mosquée.
Il ne sert donc à rien de dire maintenant qu’on n’était pas au courant ! Un maire ne dispose évidemment pas des mêmes sources de renseignement qu’un préfet. En l’occurrence, il revenait donc à la préfète de tenir les élus au courant de ces questions, si elle souhaitait que la maire actuelle ne fasse pas ce que son prédécesseur a lui-même fait, à savoir verser de l’argent.
On a fait de cette affaire toute une histoire parce que la mode est à l’« écolo-bashing », en espérant ainsi affaiblir les écologistes. Vous feriez mieux d’examiner les choses de près et de ne pas lancer de rumeurs ou engager de polémiques de ce genre, comme vous l’avez fait.
D’ailleurs, j’ai vu une photo, sur laquelle le Président de la République, Emmanuel Macron, pose avec les membres du CFCM, dont M. Sarikir, qui en est toujours, me semble-t-il, le secrétaire général. La maire de Strasbourg n’avait donc pas de raison de se méfier de ce personnage.
Je le répète : il faut cesser de répandre ce type de rumeurs – elles ne servent personne. Après tout, les services de renseignement n’auront désormais qu’à avertir les maires et leur dire à qui attribuer ou non des subventions ! Les mairies, vous le savez, ne disposent pas de ce genre de services…
La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie, pour explication de vote.
Je pense que nous sommes tous d’accord pour dire que cet amendement trouve son origine dans l’actualité. Chacun appréciera cela à sa manière, mais il est vrai, monsieur le ministre, que vous avez utilisé la presse et les réseaux sociaux de manière assez virulente, ce qui a pu laisser penser, peut-être à tort, à une exploitation politique.
Cet amendement est important et nous avons besoin d’informations sur le dispositif que vous proposez pour déterminer notre vote.
Tout d’abord, quelle est son utilité pratique, dans la mesure où la préfète a d’ores et déjà engagé une procédure à l’encontre de la décision en question ? Concrètement, en quoi l’État est-il aujourd’hui démuni dans ce type de situation ?
Ensuite, je n’ai pas trouvé de réponse claire sur la conformité de votre proposition avec le principe constitutionnel de libre administration des collectivités territoriales. Ce n’est sans doute pas un obstacle, puisque seule une information est prévue, non une autorisation, mais cette démarche me gêne quand même. Ne s’agit-il pas d’une forme de contrôle de légalité a priori ? Si c’est le cas, qu’est-ce qui justifie votre proposition ?
Enfin, quelle sera la sanction en cas de non-respect ?
Nous avons besoin d’éclaircissements sur l’ensemble du dispositif que vous proposez afin que vous ne soyez pas suspecté de vouloir contrôler a priori les délibérations des collectivités territoriales. Je rappelle que les actes des collectivités ne font aujourd’hui l’objet que d’un contrôle a posteriori.
Le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain prendra position en fonction des informations que vous nous apporterez et indépendamment des arguments qui ont être avancés par les uns et les autres, que ce soit sur la nature de l’association concernée ou sur l’ancienneté du projet en question – j’ai d’ailleurs cru comprendre que beaucoup d’acteurs strasbourgeois y ont été associés au fil du temps.
En tout cas, faisons œuvre utile ! Dans cet objectif, je vous remercie par avance de vos réponses, monsieur le ministre.
Il me semble pourtant que c’est ce que vous avez dit tout à l’heure à l’endroit de M. le ministre.
Pour moi, « modifier » ou « porter atteinte » revient au même dans la mesure où je suis favorable au maintien du droit local en l’état, pour de multiples raisons que je vous expliquerai un jour. Comme j’ai déjà eu l’occasion de le dire, il forme un tout indivisible.
En tout cas, je vais vous expliquer pourquoi, à mon sens, cet amendement ne porte pas atteinte au droit local.
Que les choses soient claires : quoi qu’on dise dans la presse, ce n’est pas le Concordat qui a permis au maire ou au conseil municipal de Strasbourg de prendre cette décision. C’est le fait que la loi de 1905 ne s’applique pas en Alsace-Moselle. C’est pour cette raison qu’une collectivité territoriale d’Alsace ou de Moselle a le droit de subventionner un édifice cultuel. Il s’agit là naturellement seulement d’une possibilité, il n’y a pas de droit de tirage.
Une telle décision doit évidemment tenir compte de l’intérêt général et celui-ci commandait en l’occurrence au conseil municipal de s’interroger à tout le moins sur l’opportunité d’attribuer une subvention à ce projet, surtout pour un montant aussi élevé – c’est d’ailleurs ce que, personnellement, je conteste.
Cela dit, demander aux collectivités locales qui veulent garantir un emprunt destiné à financer la construction d’un édifice cultuel ou passer un bail emphytéotique, dont l’objet est l’affectation à une association cultuelle d’un édifice du culte, d’en informer le représentant de l’État, comme tend à le prévoir cet amendement, ne me choque pas du tout. Il ne s’agit aucunement d’une atteinte portée au droit local ou à la libre administration des collectivités territoriales.
Mes chers collègues, ne soyons pas naïfs ! Je sais que personne ici ne l’est et chacun sait la pression qui s’exerce parfois sur les élus locaux. Et en la matière, il y a ceux qui résistent, ceux qui ont des difficultés et ceux qui flirtent avec la ligne rouge…
Je n’incriminerai personne ! À partir de là, tout ce qui va dans le sens d’un meilleur contrôle, d’une meilleure coordination avec les services de l’État, est intéressant.
Mme de La Gontrie évoquait la question du contrôle : doit-il avoir lieu a priori ou a posteriori ? Je ne sais pas si la question se pose ainsi, ni même en termes de libre administration des collectivités locales, mais franchement, je suis totalement favorable aux dispositions qui permettent un contrôle en amont du respect des règles. Cela ne me choque absolument pas !
Vous savez, quand on sait ce qui se passe parfois sur le terrain dans un département comme le mien, la Seine-Saint-Denis, on préfère que des dispositifs soient mis en place pour s’assurer en amont que les règles sont bien respectées par tout le monde. En fait, de tels dispositifs peuvent éviter aux élus de se trouver dans des situations très inconfortables lorsqu’ils doivent décider d’attribuer une subvention importante à des gens qu’ils ne connaissent pas forcément très bien.
L’amendement du Gouvernement ne me gêne donc pas et je vais le voter.
Je voterai moi aussi l’amendement du Gouvernement, et ce pour une raison extrêmement pratique : les collectivités locales ont besoin d’être informées.
Il se trouve que la religion musulmane est très décentralisée, pour des raisons traditionnelles inhérentes à sa pratique. C’est d’ailleurs en partie la raison de son succès, de sa force et de sa pénétration dans des pays très divers. L’islam n’est pas simplement arabe : il est aussi malais, indonésien, etc. Il s’adapte et prospère en petites communautés, dont certaines, en particulier en France, sont liées à des organisations internationales ou à des États étrangers, ce que les collectivités locales ne peuvent évidemment pas savoir.
Les collectivités ne disposent pas de ces informations et ne peuvent pas toujours identifier qui soutient concrètement telle ou telle communauté. Prévoir l’information de l’État, qui, lui, a le devoir de tenir à jour ce type d’information, est une façon de protéger les élus quand ils doivent prendre de telles décisions.
Comme André Reichardt et Philippe Dallier, je considère que cet amendement est une sécurité pour les collectivités locales. C’est pourquoi je le voterai de bon cœur.
Je voterai bien évidemment cet amendement, pour toutes les raisons qui viennent d’être invoquées. Nous devons absolument protéger les maires lorsqu’ils sont confrontés à des demandes très insistantes, notamment de la part de certaines associations.
J’ajoute que voter des mesures sous le coup de l’actualité ne pose aucun problème, surtout lorsque celle-ci nous taraude ou nous bouscule. Parfois, l’actualité nous oblige même à agir.
C’est le cas aujourd’hui à double titre : il y a d’abord la question de l’attribution d’une subvention à l’association Millî Görüs par la mairie de Strasbourg, mais aussi la manière absolument scandaleuse dont Mme Ursula von der Leyen a été reçue mardi à Ankara. Cet événement, ce camouflet, révèle combien il est difficile pour les Européens de se faire respecter par certains pays, en particulier par le régime qui soutient justement la mosquée dont nous parlons. Ce qui est arrivé à Mme von der Leyen est absolument scandaleux et indigne dans le cadre de relations diplomatiques, sachant en outre que le pays dont nous parlons continue, malheureusement, de bénéficier de subventions extrêmement importantes de la part de l’Union européenne.
Cette actualité nous oblige à réagir et à dire stop à cet entrisme politique, culturel et religieux et à ces manifestations agressives. C’est la raison pour laquelle je voterai cet amendement, qui permet de répondre au besoin de protection des élus, en particulier des maires.
Je reprendrai les propos qu’a tenus Pierre Ouzoulias, car ils posent les termes d’un débat de fond. Accordez-nous au moins le fait que nous sommes pleinement cohérents : nous défendons avec force le respect de la loi de 1905, son utilité et sa modernité.
Or cet amendement pose en fait une question fondamentale : allons-nous institutionnaliser, voire généraliser, le droit local d’Alsace-Moselle, qui permet le financement des cultes ?
Abordons cette question avec franchise ! Nous ne voterons pas dans le même sens, ce n’est pas grave, l’essentiel est de faire preuve d’honnêteté intellectuelle – ce que tout le monde fait ici et j’apprécie les réponses de chacun, y compris celles du Gouvernement – et prendre position : peut-il y avoir, sur le territoire de la République, un droit local permettant le financement des cultes ? Voilà la question !
Sur les élus, Philippe Dallier, sachez qu’il m’arrive d’incriminer leur comportement, qu’ils soient de gauche ou de droite.
Je ne laisse pas tout passer, quelle que soit, je le répète, leur étiquette politique. Certains comportements sont délictueux, illégaux et nous condamnons de telles pratiques politiques. Nous ne nous laissons pas fourvoyer !
Le groupe communiste républicain citoyen et écologiste votera cet amendement pour une raison de principe : nous ne sommes pas favorables à un droit local permettant de financer un culte, quel qu’il soit, et nous sommes opposés à tout financement public à destination cultuelle, où que ce soit sur le territoire de la République.
Avant de répondre à Mme de La Gontrie, je dirai quelques mots en réponse à Mme Benbassa.
Je ne crois pas, madame Benbassa, que votre manière de défendre la mairie de Strasbourg était la bonne, parce que vous avez tout de même proféré trois contre-vérités.
Vous avez d’abord fait semblant de confondre financement de la construction d’un lieu de culte et aide de l’État pour assurer la vidéoprotection des lieux de culte. Il est vrai que le fonds interministériel de prévention de la délinquance (FIPD) permet d’attribuer des subventions pour financer la vidéoprotection des lieux de culte. Il faut savoir que 70 % de cette enveloppe est consacrée à la protection des écoles et lieux cultuels juifs en raison des grandes menaces qui pèsent sur eux. Il ne s’agit en aucun cas du financement direct d’un lieu de culte.
Vous semblez aussi avoir oublié un événement récent, madame la sénatrice : Millî Görüs a refusé de signer la charte des principes pour l’islam de France qui affirme la nécessité de respecter les valeurs de la République – l’égalité entre les femmes et les hommes, le droit de changer de religion, etc. En ce qui nous concerne, nous en avons tiré les conséquences !
Par ailleurs, vous évoquez une photo sur laquelle figurent ensemble le Président de la République et le responsable de Millî Görüs. Franchement, je ne vous ferai pas l’injure de vous expliquer qu’on ne peut évidemment pas mettre dans le même panier toutes les personnes figurant sur une même photo, a fortiori lorsqu’il s’agit de responsables politiques, lesquels sont régulièrement photographiés aux côtés de toutes sortes de personnes lors de manifestations. §Je ne pratique pas ce type de politique ; ne le faites pas pour le Président de la République.
En outre, comme cela a été dit, il est évident que chacun devrait être, si ce n’est scandalisé, du moins particulièrement interrogatif sur le positionnement de la Turquie.
Je rappelle que ce pays vient de se retirer de manière unilatérale de la convention du Conseil de l’Europe sur la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique, qui avait pourtant été signée à Istanbul.
Il ne faut pas réécrire l’histoire. Tout le monde sait, je le répète, que l’association Millî Görüs n’a pas voulu signer la charte des principes pour l’islam de France. Le Président de la République et d’autres fédérations musulmanes se sont exprimés sur ce sujet ; je l’ai fait moi-même. Il faut donc en tirer les conséquences.
Madame la sénatrice, vous avez avancé une autre contre-vérité flagrante : il est absolument faux de dire que la maire de Strasbourg n’a pas été informée directement. Je l’ai fait personnellement ! Les présidents de la Collectivité européenne d’Alsace et de la région Grand Est, qui ne sont pas des soutiens ostensibles du Gouvernement, ont témoigné que je l’avais informée. Par deux fois, la préfète a indiqué qu’elle en avait directement parlé avec la maire de Strasbourg.
Quand bien même ces témoignages seraient faux, quand bien même n’aurions-nous pas prévenu la maire de Strasbourg, le complexe en construction dans le quartier de la Meinau n’est pas seulement un lieu de culte, il comprend aussi un centre socioculturel et éducatif, des restaurants, un lieu de scolarisation… Et il se situe à 200 mètres du siège du parti politique Saadet qui est, pour ceux qui ne le savent pas, encore plus dur que l’AKP !
M. Dallier a été gentil en parlant de naïveté, mais il n’y a pas pire sourd que celui qui ne veut pas entendre.
Franchement ! Madame Benbassa, vous parlez d’écolo-bashing, mais nul besoin de faire de l’écolo-bashing, quand la réalité se suffit à elle-même !
La défense de la maire de Strasbourg est fort mauvaise et elle ferait mieux de revenir sur cette décision, comme le lui demande la quasi-unanimité des forces politiques, que ce soient les socialistes, les communistes, la droite républicaine ou la majorité présidentielle.
Je constate par ailleurs, de façon très étonnante, qu’à peu près au même moment, on a bien du mal à se mettre d’accord sur la définition de l’antisémitisme !
J’en reviens aux questions, importantes, de Mme la sénatrice de La Gontrie. Vous voulez savoir si, sous prétexte de l’intérêt public, nous ne cédons pas à la tyrannie de l’instant – pourquoi pas, d’ailleurs ? – et si la mesure que nous proposons n’est pas contraire à l’article 72 de la Constitution.
Je rappelle tout d’abord que, selon l’article 72 de la Constitution, les collectivités s’administrent librement dans les conditions prévues par la loi – on oublie souvent de citer cette partie de phrase…
À ces deux questions, la réponse est non.
En ce qui concerne le premier point, sachez que j’avais dans un premier temps envisagé d’insérer dans ce projet de loi une disposition ôtant aux maires le pouvoir de délivrer un permis de construire, lorsqu’il s’agit d’un édifice cultuel. Nous aurions pu prévoir que le préfet délivre lui-même le permis ou qu’un avis conforme de sa part soit nécessaire. Je m’appuyais sur les arguments développés par le sénateur Dallier sur les pressions que subissent les maires. Il existe sur notre territoire des particularités politiques que je ne veux pas ignorer et il s’agissait de soutenir le courage des uns et des autres.
Oui, mais dans votre amendement, le préfet donne simplement un avis.
Trois arguments m’ont fait, à regret, changer d’avis.
Le premier est un argument de fond : il n’existe pas de spécialisation du droit de l’urbanisme par type de bâtiment. Par conséquent, on peut penser que le Conseil constitutionnel aurait censuré une telle disposition. C’est un argument de droit et il n’aurait pas été raisonnable – on peut le regretter – de détricoter le droit de l’urbanisme au travers de ce texte. Il sera néanmoins intéressant d’approfondir cette question.
Le second argument est que l’Association des maires de France n’y était pas favorable. J’ai rencontré ses représentants, que ce soit François Baroin ou André Laignel. J’ai bien travaillé avec eux lors de la préparation de ce texte et nous avons finalement considéré qu’un avis simple du préfet permettrait déjà aux élus de partager leurs difficultés, sans pour autant remettre en cause le pouvoir du maire en matière d’urbanisme. Il est vrai que le maire doit pouvoir répondre devant sa population de ce type de décision. Je n’étais pas totalement convaincu par cet argument, mais ayant été maire moi-même, je ne le trouve pas non plus malavisé.
Troisième argument, on ne sait pas toujours que le bâtiment qui fait l’objet du permis de construire sera destiné à l’exercice d’un culte – sa destination peut changer à un moment ou à un autre. Nous aurions donc pu tromper les Français en prenant la disposition que j’envisageais.
Vous le voyez, j’avais pensé à insérer une disposition qui, comme dans une voiture d’auto-école, permettait de reprendre la main… Avec cet amendement, nous ne cédons donc pas à la tyrannie de l’instant, même si ce qui s’est passé à Strasbourg m’a beaucoup incité à vous proposer une mesure.
Ce qui est certain, c’est que le droit en vigueur ne nous permet pas de garantir à coup sûr l’intérêt général, qu’il soit local ou national. La préfète de Strasbourg a déféré la délibération du conseil municipal, lorsque celle-ci lui a été transmise au titre du contrôle de légalité. Nous verrons bien ce que dira le tribunal administratif, mais je me fais peu d’illusions, sauf à considérer que celui-ci prenne en compte des arguments patriotiques, ce qui peut évidemment arriver dans certaines situations où la question de l’intérêt général est très prégnante.
Je constate d’ailleurs que cet acte fait naître bien des discussions. Mme la maire dit même maintenant qu’il s’agit non pas d’une subvention, mais d’une autorisation éventuelle de subvention…
Cet amendement ne tend pas à prévoir un contrôle a priori. Il vise simplement à ce que la commune ou le département informe au préalable le préfet s’il souhaite garantir un emprunt ou conclure un bail emphytéotique destiné à un édifice cultuel.
Monsieur Savoldelli, j’entends votre position sur le fait que l’État ou les collectivités locales ne doivent pas aider les cultes et je la respecte, mais cela ne date pas d’hier ! D’ailleurs, certains baux emphytéotiques vont arriver à échéance dans quelques années, dans dix ou quinze ans peut-être, et nous devrons nous poser la question de leur prolongation éventuelle.
En tout cas, la procédure que nous proposons ne concerne pas, au fond, les collectivités locales, madame de La Gontrie. Nous ne prévoyons pas de réformer la décision de la collectivité, mais le préfet pourra, le cas échéant, retirer la qualité cultuelle à l’association en question. C’est pour cette raison que je m’interrogeais sur la compréhension de l’article 27 du projet de loi par le sénateur Jean-Pierre Sueur.
Je le répète, il ne s’agit pas d’actionner le droit des collectivités locales, même s’il est évidemment toujours possible de déférer une délibération devant le tribunal administratif – c’est une autre procédure –, il s’agit d’agir sur la qualité de l’association à s’inscrire dans le cadre de la loi de 1905. Si un maire qui envisage de signer un bail emphytéotique ou de garantir un emprunt doit le signaler au préfet, celui-ci pourra regarder la situation et utiliser les renseignements dont il dispose pour, éventuellement, retirer à l’association sa qualité cultuelle. L’association pourra alors saisir le juge pour contester cette décision.
Cette procédure empêchera une collectivité de signer un bail à vocation cultuelle avec une association n’ayant pas cette vocation. Pour autant, elle n’empêchera pas la collectivité de prendre telle ou telle décision ; c’est la qualité cultuelle de l’association qui se voit éventuellement remise en cause.
Il ne s’agit donc pas d’un contrôle a priori de la légalité d’un acte d’une collectivité locale.
C’est un amendement important qui permet certes de répondre à l’actualité, mais surtout, comme l’ont dit les sénateurs Longuet, Dallier et Boyer, non pas de donner aux collectivités une sorte de blanc-seing, mais de leur offrir un accompagnement clair et précis de la part de l’État. Il s’agit de faire travailler ensemble les élus et le préfet et, si l’une des parties ne fait pas son travail, ce sera sans doute l’État !
Monsieur le ministre, je suis sénateur du Bas-Rhin et j’habite près de Strasbourg. Mon souci, c’est que les choses s’apaisent et que nous évitions les instrumentalisations. Je souhaite surtout que l’on permette aux musulmans d’origine turcophone de Strasbourg et de son agglomération de disposer d’un lieu de culte satisfaisant.
Il est quand même curieux, vous en conviendrez, qu’il n’y ait aucune trace des avertissements préalables dont vous parlez. Je peux certes comprendre qu’il n’y en ait aucune manifestation publique, parce que certaines choses ne peuvent que se dire et ne peuvent pas s’écrire, encore moins dans des documents officiels consultables par la suite, mais il n’y en a vraiment aucune trace.
En outre, encore plus curieux, aucune force politique n’a demandé de débat public sur cette question avant la réunion du conseil municipal, alors que les élus se réunissent toujours avant les réunions plénières pour balayer l’ordre du jour et préparer les débats. Je le redis : aucune des forces politiques du conseil municipal n’a souhaité que ce point de l’ordre du jour fasse l’objet d’un débat public, ce qui montre bien qu’il ne posait pas, à ce moment-là, de problème.
Il n’y a pas eu de problème non plus au moment de l’acquisition foncière, du permis de construire ou de la mise en place des facilités qui ont rendu ce projet possible.
Je note aussi qu’en 2017, lors de la pose de la première pierre, Roland Ries, qui était alors le maire, Jean-Philippe Maurer, député, Jean-Luc Marx, préfet de l’époque, et bien d’autres étaient présents.
De même, avant le second tour des élections municipales, des représentants de toutes les listes en présence ont rencontré publiquement les promoteurs de ce projet de mosquée.
Il s’est donc passé quelque chose de surprenant qui a tendu d’un seul coup cette affaire de subvention et en a fait une question nationale…
Jusqu’en septembre dernier, j’étais professeur dans un lycée qui est contigu au site de la mosquée. Le culte musulman s’exerce à cet endroit depuis des années sous une grande tente.
Certes, vous avez raison, monsieur le ministre, il y a aussi, non loin, un local politique, toléré par les lois de la République. Nous avons d’ailleurs eu un souci, puisque le président Erdogan a organisé à Strasbourg un meeting lors de l’élection présidentielle turque ; je faisais d’ailleurs partie, avec mes camarades d’EELV et d’autres forces politiques, des manifestants qui se sont opposés à cette réunion saugrenue sur le territoire de la République.
En tout cas, les deux tiers du gros œuvre de cette mosquée sont réalisés.
Marques d ’ impatience sur les travées du groupe Les Républicains.
J’ajoute que l’adjoint de Roland Ries chargé de ce dossier a fait, en son temps, des démarches publiques et transparentes pour accompagner les promoteurs du projet de mosquée dans leur recherche de financement, par exemple au Qatar.
M. Jacques Fernique. Cela a été dit, le versement effectif de la subvention n’est pas acquis, il dépend de certaines précisions à venir
Nouvelles marques d ’ impatience sur les mêmes travées
… de l’adhésion aux valeurs de la République. Cette affaire doit se conclure dans le calme et la sérénité.
Calmement et sereinement, je veux remercier le ministre d’avoir ouvert ce débat, parce qu’il est très intéressant.
En fait, dans le droit actuel, les baux emphytéotiques et les garanties d’emprunt sont possibles, mais uniquement dans certains lieux, à savoir les agglomérations en voie de développement – on ne parle pas ici des pays en voie de développement… Pourquoi viser ces agglomérations ? Tout simplement, parce qu’elles voient leur population croître et que les lieux de culte existants risquent de ne pas suffire, malgré la baisse de la pratique religieuse.
C’est le sens général de la législation actuelle. Le Gouvernement nous propose d’assouplir ce régime, en l’étendant à tout le territoire. Par exemple, on pourra désormais, dans la commune de Saint-Pois dans la Manche, qui compte 500 habitants, financer par un bail emphytéotique ou une garantie d’emprunt l’extension d’un lieu de culte.
Monsieur le ministre, vous nous proposez donc d’étendre à tout le territoire national une pratique qui est aujourd’hui réservée aux agglomérations dites en voie de développement. Dont acte !
Ensuite, après avoir ainsi desserré le verrou territorial, vous le resserrez un peu – telle était, me semble-t-il, votre intention principale en déposant cet amendement –, en prévoyant que le préfet sera informé quand un département ou une commune prendra une telle décision.
Cela permettra tout simplement au préfet d’intervenir pour faire remarquer à ladite collectivité que l’association en question ne présente plus le caractère cultuel qui lui ouvre droit à un certain nombre d’avantages et pour s’opposer, dans ces conditions, au bénéfice réclamé d’un bail emphytéotique ou d’une garantie d’emprunt.
En revanche, ce qui ne figure pas dans cet amendement, ce sont les modalités de l’intervention du préfet. Cependant, je suis sûr que l’information ainsi donnée au représentant de l’État pourra lui être utile. C’est la raison pour laquelle je voterai en faveur de cet amendement.
Quoi qu’il en soit, grâce à ce débat, grâce à ce que M. le ministre nous a expliqué, mes chers collègues, mais aussi grâce à toutes les questions que vous avez soulevées et à toutes les expériences que vous avez rapportées, je m’estime plus instruit.
Sourires.
L ’ amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 27.
Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 386 rectifié bis, présenté par MM. Maurey et Cigolotti, Mmes Vermeillet, Pluchet et Billon, MM. Longeot, Louault, Delcros et Canevet, Mme Guidez, MM. de Belenet, Henno, Bonnecarrère et Capo-Canellas, Mme Morin-Desailly, MM. Folliot, Bonneau et Lefèvre, Mme Demas, MM. Mandelli, Vogel, Mizzon, D. Laurent et Bouchet, Mme Jacquemet, MM. Pellevat, Sautarel et Laménie, Mme Férat, M. A. Marc, Mmes Gruny, Herzog et de Cidrac, MM. Hingray et Duffourg, Mme Dumont, M. Le Nay, Mme Bonfanti-Dossat et M. Wattebled, est ainsi libellé :
Après l’article 27
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article L. 3112-1 du code général de la propriété des personnes publiques est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Ces biens peuvent également être cédés, sans déclassement préalable, à une association cultuelle, lorsqu’ils ont fait l’objet d’un bail emphytéotique arrivé à échéance, conclu en application des articles L. 1311-2 à L. 1311-4-1 du code général des collectivités territoriales, et qu’ils sont directement affectés à l’usage du culte. »
II. – L’article L. 1311-3 du code général des collectivités territoriales est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« …° À l’issue du bail, le bien peut réintégrer le patrimoine de la collectivité territoriale bailleresse ou être acquis par le preneur dans les conditions prévues à l’article L. 3112-1 du code général de la propriété des personnes publiques. L’avis prévu à l’article L. 2241-1 du présent code doit alors prendre explicitement en compte les coûts d’entretien ou de réparation prévisibles du bien, ainsi que l’impossibilité de son exploitation commerciale. »
III. – La perte de recettes résultant pour les collectivités territoriales du I est compensée, à due concurrence, par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.
IV. – La perte de recettes résultant pour l’État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Sylvie Vermeillet.
La législation en vigueur autorise les collectivités territoriales à conclure des baux emphytéotiques avec les associations cultuelles pour la construction d’édifices cultuels.
Le recours à cet outil est assez répandu parmi les communes, notamment dans les territoires caractérisés par un coût élevé du foncier. Ainsi, sachant que 1 800 églises paroissiales d’Île-de-France ont été édifiées après 1905, on a eu recours pour 450 d’entre elles à un tel bail emphytéotique. Au-delà du culte catholique, ce dispositif a permis l’édification de nombreux lieux de culte de toutes confessions.
À l’échéance du bail emphytéotique, l’édifice revient dans le patrimoine de la commune, ce qui peut constituer une contrainte pour celle-ci en raison des charges d’entretien et, parfois, de réparation du bâtiment qui résultent de ce retour.
Dans le rapport d’information d’Hervé Maurey intitulé Les collectivités territoriales et le financement des lieux de culte, que notre délégation aux collectivités territoriales a adopté à l’unanimité en 2015, il est estimé que cet outil pourrait de la sorte représenter une bombe à retardement pour les collectivités concernées. C’est pourquoi M. Maurey préconise, dans ce rapport, de faciliter la cession de l’édifice aux associations cultuelles à l’issue du bail, si la collectivité locale le souhaite. Celle-ci pourra naturellement en rester propriétaire, si telle est sa volonté.
Afin de faciliter cette cession à l’association cultuelle, nous proposons dans cet amendement que la commune puisse y procéder sans procédure de déclassement de l’édifice.
Nous proposons également que le service des domaines prenne en considération, dans le cadre de l’estimation qu’il fait de la valeur du bâtiment à céder, les coûts prévisibles d’entretien ou de réparation, ainsi que l’impossibilité de son exploitation commerciale. Cette disposition vise à sécuriser juridiquement la décision d’un conseil municipal qui modérerait le prix de vente compte tenu de ces éléments.
L’amendement n° 425 rectifié ter, présenté par M. Sueur, Mmes Harribey et de La Gontrie, M. Assouline, Mmes S. Robert, Monier et Meunier, MM. Marie et Magner, Mme Lepage, MM. Féraud, Leconte, Lozach, Kerrouche, Kanner, Bourgi, Durain, Redon-Sarrazy, Antiste et J. Bigot, Mmes Bonnefoy, Briquet, Conconne et Conway-Mouret, M. P. Joly, Mme Jasmin, MM. Gillé, Raynal, Mérillou, Lurel, Temal, Tissot, Jacquin, Montaugé et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 27
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article L. 3112-1 du code général de la propriété des personnes publiques est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Ces biens peuvent également être cédés, sans déclassement préalable, à une association cultuelle lorsqu’ils ont fait l’objet d’un bail emphytéotique arrivé à échéance, conclu en application des articles L. 1311-2 à L. 1311-4 du code général des collectivités territoriales, et qu’ils sont directement affectés à l’usage du culte. »
II. – La perte de recettes résultant pour les collectivités territoriales du I est compensée, à due concurrence, par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.
III. – La perte de recettes résultant pour l’État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Hélène Conway-Mouret.
Le financement des associations cultuelles est problématique, en raison de la baisse des dons des fidèles et de l’encadrement prévu des avantages, ressources et libéralités provenant de l’étranger, qui aura pour effet probable d’entraîner une baisse de recettes pour certaines associations.
Afin d’apporter une solution à ce problème, le présent projet de loi ouvre aux associations cultuelles la faculté de disposer d’immeubles de rapport. Dans le présent amendement, nous proposons un autre dispositif permettant de répondre à cette même problématique.
En vertu de la loi de 1905, les collectivités publiques ne peuvent pas financer la construction ou l’aménagement d’édifices cultuels. Cependant, l’article L. 1311-2 du code général des collectivités territoriales a prévu une exception à ce principe, en permettant à une collectivité territoriale de donner en location un terrain ou un bâtiment public à une association cultuelle, par un bail emphytéotique administratif (BEA), afin de permettre la construction ou l’aménagement d’un édifice cultuel. Un tel bail est conclu pour une longue durée et donne au locataire les prérogatives du propriétaire durant la durée du bail. Dans un tel cadre, le prix payé est souvent modique : à l’expiration du bail, l’édifice construit revient à la collectivité publique.
Il est donc parfaitement assumé que de tels contrats constituent une forme de subventionnement de la construction d’un édifice cultuel, en dérogation à la loi de 1905. Il s’agit cependant d’un outil bien identifié par le Conseil d’État, qui veille scrupuleusement à son application et appelle le plus souvent les parties à régulariser leur situation lorsqu’il constate des irrégularités dans les termes du contrat de bail. En outre, ce dispositif est efficace, surtout dans certaines parties du territoire où le coût du foncier est élevé : il a permis la construction de nombreux lieux de culte de toutes confessions.
Toutefois, le régime légal en vigueur n’est pas sans inconvénient, dès lors que les collectivités ayant eu recours à un BEA redeviennent propriétaires du bâtiment à l’échéance du bail et qu’elles doivent alors de nouveau en supporter la charge, ce qu’elles ne souhaitent pas si leurs moyens sont limités. De son côté, l’association cultuelle perd alors l’usage de l’édifice cultuel.
Dans le but de faire évoluer le cadre légal en vigueur, nous proposons donc d’inclure dans le contrat de BEA une option d’achat de l’édifice par l’association cultuelle à l’échéance du bail emphytéotique.
Chacun y trouverait son compte en matière de financement public, en particulier les associations cultuelles qui ne sont pas placées sur un pied d’égalité avec les religions dont la présence sur notre territoire est plus ancienne. Ainsi, le culte musulman peine encore aujourd’hui à disposer de lieux de culte, ce qui suscite des incompréhensions légitimes et ne favorise pas le développement d’un islam de France.
Le dispositif que nous proposons ici s’appuie sur un vecteur juridique déjà en vigueur. Ce serait un premier pas vers une grande réforme du régime légal actuel, qui permettrait d’inverser le contrat de BEA.
Telles sont les raisons pour lesquelles, mes chers collègues, nous vous invitons à adopter cet amendement.
Ces deux amendements portent sur une question délicate : le sort des édifices de culte construits à l’aide d’un bail emphytéotique à l’échéance de ce bail.
Certaines communes souhaiteraient alors céder l’édifice à l’association cultuelle dans des conditions facilitées, sans avoir à suivre la procédure de déclassement qui s’impose pour des biens relevant du domaine public communal ou départemental. Elles souhaiteraient également que le prix de vente de l’édifice puisse être fixé à la baisse, suivant des critères qui seraient pris en compte par le service des domaines, tels que la nécessité de procéder à des réparations, ou encore l’absence de vocation commerciale du bâtiment. Clairement, il est plus difficile de vendre une mosquée qu’une maison !
La commission comprend bien qu’il s’agit de répondre au problème historique qui va se poser lors de l’arrivée à échéance des baux conclus dans les années 1930 pour la construction d’un certain nombre d’églises ; si je ne m’abuse, elles sont au nombre de 450, dont une trentaine dans la seule ville de Paris.
Nous nous interrogeons néanmoins sur la portée réelle du dispositif proposé : quels obstacles concrets ces amendements visent-ils à lever, en réalité ? Il semble déjà possible pour une commune de déclasser et de céder de tels édifices. On sait que des églises ont pu être vendues et même transformées en habitations.
En outre, les auteurs de ces amendements vont moins loin que ce que souhaitaient les représentants de différents cultes. C’est un débat qu’il faudrait avoir avec eux.
Pour toutes ces raisons, nous souhaitons entendre l’avis du Gouvernement sur ces amendements.
M. Gérald Darmanin, ministre. Merci, madame la rapporteure, de me renvoyer la balle ainsi !
Sourires.
M. Gérald Darmanin, ministre. J’émettrai donc un avis de sagesse et je renverrai ainsi la balle à la commission !
Nouveaux sourires.
Ce sujet, de fait, est très important, parce que ces questions immobilières créent sans aucun doute une différence entre les cultes. En effet, il y a ceux qui étaient présents avant la nationalisation des biens du clergé et ceux qui ne sont arrivés qu’après.
Monsieur Savoldelli, je peux entendre l’idée selon laquelle la puissance publique, qu’il s’agisse de l’État ou des collectivités locales, ne doit pas aider les cultes par des espèces sonnantes et trébuchantes. Dans un esprit général, on pourrait ainsi dire : pas de reçus fiscaux, pas de garanties d’emprunt, pas de baux emphytéotiques !
Cela pourrait s’entendre, dans l’épure de la non-reconnaissance et du non-subventionnement des cultes, s’il n’y avait pas une inégalité de traitement de facto entre, d’une part, les édifices cultuels qui ont été rattachés au domaine public, le plus souvent à celui des collectivités locales, à la suite de la nationalisation des biens de l’Église – rappelons que cette nationalisation n’a pas été faite pour le bien de l’Église, mais pour lui confisquer sa puissance financière ! – et, d’autre part, les édifices des autres cultes, à commencer par le culte musulman.
Ce dernier subit en effet une différence flagrante de traitement sur le territoire métropolitain, où aucun de ses lieux de culte, hormis la grande mosquée de Paris, me semble-t-il, n’a été construit ni rénové avec de l’argent public.
Le maire de Tourcoing que j’ai été s’est trouvé face à cette énorme différence : il pouvait dire aux représentants du culte catholique que, les églises appartenant au patrimoine municipal, la commune pouvait financer la restauration de tel retable ou de telle partie à l’intérieur de l’une de ses églises ; en revanche, ledit maire ne pouvait pas intervenir sur les lieux de culte musulman de sa commune, puisqu’ils étaient postérieurs à 1905.
Cette inégalité subsiste donc, si j’ose dire, dans l’égalité que nous souhaitons assurer entre les cultes par le principe de non-reconnaissance.
Pour y remédier, le législateur de l’époque avait imaginé la possibilité de faire bénéficier du régime des baux emphytéotiques administratifs certains cultes, au premier rang desquels, évidemment, le culte musulman.
Arrivent le moment des échéances et les difficultés qu’évoquent les auteurs de ces amendements.
Une seule chose m’inquiète un peu dans ce que vous proposez, mesdames, messieurs les sénateurs : c’est que la cession envisagée se ferait au prix du marché, si j’ai bien lu vos amendements. J’ai certes compris qu’une soulte était envisagée, autour des charges de rénovation, mais il ne faudrait pas aboutir à ceci que, pour racheter un site qui peut être coûteux, qui l’est même tant qu’un bail emphytéotique a été nécessaire pour le financer en premier lieu, on aille emprunter de l’argent à l’étranger.
En effet, le dispositif que vous proposez pose une sorte d’échéance : si les associations cultuelles n’ont pas aujourd’hui les moyens de racheter leur lieu de culte, elles devront rassembler de l’argent rapidement pour être en mesure de le faire à l’expiration du bail. Il serait assez absurde d’en arriver là, alors que ce texte entier a pour objet de limiter les financements étrangers des cultes, de manière à éviter l’ingérence : comme chacun sait, qui paye décide !
Il ne faudrait pas pour autant violer la loi de 1905 : il n’est pas question d’aider directement les cultes. Beaucoup d’édifices cultuels sont concernés : plus d’une centaine dans la seule région Île-de-France dans les années à venir.
J’ai demandé à mes services de me fournir un récapitulatif, année par année, des échéances de ces baux emphytéotiques, mais je n’en dispose pas encore ; je le communiquerai bien volontiers à votre assemblée et à sa commission des lois.
Toujours est-il que j’aimerais que nous soyons d’accord sur ce point : il ne faudrait pas que la cession au prix du marché de ces lieux de culte aboutisse à un financement étranger généralisé du rachat de sites qui avaient été construits avec de l’argent français, fourni par les collectivités locales et singulièrement par les communes.
En même temps, mesdames, messieurs les sénateurs, si je vous proposais de rectifier votre amendement pour que cette cession se fasse à titre gratuit, vous crieriez au scandale, parce que ce serait un subventionnement direct des cultes.
J’estime donc que nous ne sommes pas encore tout à fait mûrs pour répondre à l’interrogation que vous soulevez, alors même qu’il faut vite y répondre. Ce sujet méritera d’être revu dans le prochain texte qui portera, non pas sur les cultes, puisqu’il doit y en avoir un, en moyenne, tous les quinze ou vingt ans et que je ne suis pas très pressé de recommencer le travail collectif qui s’impose toujours sur des questions aussi complexes, mais sur l’urbanisme. Ce travail pourra notamment être mené par votre commission, si vous me permettez cette invitation, mesdames les rapporteures. Je pense en effet qu’il faut résoudre cette équation sans aboutir à un financement par l’étranger du rachat des lieux cultuels qui avaient été financés par des baux emphytéotiques.
J’émettrai donc sur ces amendements un avis de sagesse si leurs auteurs veulent vraiment les maintenir. Il s’agit certes d’une question que se posent vraiment les collectivités locales, les cultes et l’État, mais il n’est nul besoin de se précipiter : il reste encore quelques années avant que l’on entre dans une période de déversement général de ces baux.
Je comprends votre préoccupation, mais je serais heureux que ces amendements puissent être retirés dans la perspective d’un travail à l’occasion d’un texte consacré à l’urbanisme ; je pense que nous ferions sinon de la mauvaise législation.
Merci, monsieur le ministre, de ces explications. Pour être sincère, si nous avons demandé l’avis du Gouvernement sur ces amendements, c’est bien parce que nous avions nous-mêmes un réel débat sur ce sujet.
Nous comprenions cette proposition, qui figurait dans le rapport de notre collègue Hervé Maurey sur les relations entre les collectivités territoriales et les cultes. Cependant, les cultes ne souhaitent pas forcément récupérer le lieu de culte en question. Il ne me semble pas que cette discussion ait eu lieu avec eux ; je suis donc d’accord avec vous, monsieur le ministre : la réflexion n’est pas encore aboutie.
Nous comprenons en revanche que les collectivités territoriales préféreraient ne pas avoir autant de nouveaux lieux de culte à entretenir, puisque les églises dont elles sont aujourd’hui dépositaires sont déjà suffisamment lourdes à porter. Une véritable question se pose.
Pour autant, Mme Eustache-Brinio, M. le président de la commission et moi-même sommes d’accord pour émettre, à la suite des explications de M. le ministre, un avis défavorable sur ces amendements, à moins qu’ils ne soient retirés.
Nous le faisons afin de pouvoir travailler de nouveau sur ce sujet, qui est une réelle préoccupation pour les collectivités territoriales : à l’échéance de ces baux, quelque chose de lourd risque de tomber dans leur escarcelle. Nous comprenons parfaitement également la volonté d’éviter les financements étrangers.
L’amendement n° 386 rectifié bis est issu d’un rapport sénatorial qui a tout de même six ans !
Vous n’y êtes pour rien, monsieur le ministre, et moi non plus ! La réalité est simplement que l’on fait ce type de propositions depuis six ans.
Vous avez indiqué avoir demandé à vos services un état des lieux des baux arrivant à expiration. Il serait bon de fixer à ce propos un rendez-vous avec notre délégation aux collectivités territoriales, ou une autre de nos instances, afin que nous disposions nous aussi d’un tel état des lieux, assez clair et proche du terrain, et que nous puissions nous faire une idée de la manière dont on pourrait, dans un texte ou dans un autre, trouver un prolongement à cet amendement. Franchement, six ans, c’est déjà long, et on a bien vu que ce sujet devait être réglé !
Je comprends bien l’avis défavorable émis sur cet amendement, mais le problème est toujours là et la solution est toujours en gestation : six ans de gestation, ce sont plusieurs éléphants !
Sourires.
Monsieur le ministre, dans votre esprit, l’amendement n° 686, que notre assemblée a adopté assez largement, pourrait-il s’appliquer dans la situation qui fait l’objet de l’amendement n° 386 rectifié bis, déposé par notre excellent collègue Hervé Maurey et plusieurs autres membres de son groupe ?
La situation pourrait en effet se révéler paradoxale si une commune cédait ainsi un lieu de culte à une association qui revendiquerait la jouissance de ce bâtiment, mais dont les personnes dont c’est le métier de s’informer sur ce type d’activités, notamment au ministère de l’intérieur, sauraient qu’elle ne présente plus de caractère cultuel et n’a plus droit aux avantages afférents. Ce serait le cas si cette association était devenue une organisation strictement politique, liée à des forces totalement extérieures à l’organisation du culte et à l’entretien de la foi.
Certes, ma chère collègue, mais je pense, comme Sylvie Vermeillet, qu’il sera sensible au fait que nous ne retirions pas son amendement.
Il me semble en effet que, sur le fond, cet amendement est intéressant, car il tend à ouvrir une voie médiane qui évite les deux écueils qu’a signalés M. le ministre : le subventionnement du culte, mais aussi l’écueil inverse. C’est le quatrième alinéa de l’article additionnel proposé qui ouvre cette voie médiane.
Il ne me semblerait donc pas inintéressant de l’adopter aujourd’hui et de se donner le temps, d’ici à la réunion de la commission mixte paritaire, de déterminer si ce dispositif peut évoluer et être encore amélioré. Ce serait lui donner une chance de prospérer, ce qui semble être notre objectif commun.
La problématique qui nous occupe ici est très lourde ; il faudrait, selon moi, élargir quelque peu notre approche du problème.
Vous avez très justement rappelé, monsieur le ministre, que le culte catholique profite historiquement – personne ne le conteste – du très grand nombre d’églises et de cathédrales qui sont entretenues par les pouvoirs publics, qu’elles appartiennent aux communes ou à l’État. Cela donne à l’Église catholique des avantages matériels que les autres religions n’ont pas.
Je me permettrai seulement cette petite remarque : l’Église jouit de ces avantages, ce qui est tout à fait normal, à la suite de la plus grande nationalisation de l’histoire de notre République, celle qui résulte du décret du 2 novembre 1789 ! Voyez-vous, mes chers collègues, de temps en temps, même l’Église catholique profite des nationalisations révolutionnaires !
Sourires.
Plus sérieusement, nous savons tous que la pratique religieuse n’augmente pas. Un certain nombre de ces édifices religieux ont encore aujourd’hui des affectataires, mais ils n’en auront plus demain. C’est un patrimoine énorme que les communes vont prochainement être amenées à gérer, parfois avec des budgets très limités, alors que ces édifices n’auront plus d’affectation.
Nous devrions réfléchir collectivement à ces édifices cultuels, à ces lieux qui ont très souvent une valeur historique et qui sont classés, mais qui n’auront plus d’affectataires dans les années à venir. Qu’en ferons-nous ? Les affecterons-nous à d’autres religions, à d’autres occupations ? Sincèrement, je pense qu’un débat de fond doit être mené sur ce point, car cette question va très vite se poser.
La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie, pour explication de vote.
En écoutant les interventions de chacun, je note combien ce sujet est complexe, mais il n’empêche que la question se pose et que l’échéance approche, y compris à Paris, où beaucoup d’édifices sont concernés.
Pour ma part, je ferai la suggestion suivante. Deux amendements ont été déposés, celui de M. Sueur est évidemment bien meilleur.
Sourires.
Précisons tout de même qu’il se pose un petit sujet de gage, puisque ces propositions requièrent un financement. Je veux attirer votre attention, mes chers collègues, et celle du Gouvernement sur le fait qu’il est prévu, dans ces deux amendements, une augmentation de la dotation globale de fonctionnement (DGF). Je le précise sans vouloir gâcher la réflexion de chacun !
Si je suggère d’adopter l’un de ces amendements, c’est parce que nous serons ainsi bien obligés d’aboutir à quelque chose avant la date butoir de la réunion de la commission mixte paritaire. Autrement, nous n’aurons pas souvent à examiner des textes de cet ordre, qui seraient l’occasion de trouver une solution. Or il faut la trouver !
Ce débat ne saurait être réglé en quelques minutes. Les conséquences juridiques, les analyses possibles, la façon même d’aborder cette problématique sont de fait très variées. On ne peut donc pas sérieusement, selon moi, accepter d’adopter ce soir un amendement de cette nature en pensant que, d’ici à la réunion de la commission mixte paritaire, on arrivera à trouver une solution ; à la vérité, nous n’y parviendrons pas !
En revanche, il me semble plus raisonnable que notre commission procède, dans un délai assez rapide, à une analyse juridique approfondie de cette question, de manière à pouvoir y revenir sérieusement. C’est l’engagement que je prends envers Mme Goulet et M. Maurey, …
… ainsi qu’envers vous, madame de La Gontrie, en m’excusant de vous avoir presque oubliée ! Ainsi, disposerons-nous d’une analyse assez précise et pourrons-nous légiférer dans de bonnes conditions.
C’est pourquoi je confirme l’avis défavorable émis par Mme la rapporteure ; la commission se mettra au travail rapidement.
Compte tenu des engagements qui viennent d’être pris, je le retire, monsieur le président.
L’amendement n° 386 rectifié bis est retiré.
La parole est à M. le ministre.
Je tiens à apporter la réponse la plus précise possible à la question de M. Longuet. Il ne me semble pas que la situation que ces amendements visent à traiter entre dans le champ de l’amendement n° 686, que vous avez bien voulu soutenir, monsieur le sénateur, dans la mesure où le dispositif de cet amendement gouvernemental vise ce qui relève d’avantages : les garanties d’emprunt et le bail emphytéotique sont des avantages octroyés à l’association cultuelle, octroi que cet amendement vise à conditionner, si je puis dire, à l’information du préfet, qui peut s’y opposer.
En revanche, si j’ai bien compris ces deux amendements-ci, il s’agit ici non pas d’avantages, mais de la vente d’un bien au prix du marché. J’avais voulu faire figurer dans l’amendement gouvernemental les ventes de terrains des collectivités locales, mais mon cabinet m’a fait comprendre à bon compte que ce n’était pas une bonne idée. En effet, quand une collectivité vend un terrain à une association cultuelle pour la construction d’un bâtiment religieux, il ne s’agit pas de l’octroi d’un avantage, puisque cette vente se fait au prix évalué par le service des domaines.
Il me semble, pour qu’un bon équilibre puisse être trouvé, pour que l’État de droit soit respecté et que le Conseil constitutionnel ne censure pas cette disposition, qu’il faut distinguer ce qui constitue un avantage de ce qui relève de la normalité ; or la vente au prix coûtant serait une normalité et non un avantage.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
M. François-Noël Buffet, président de la commission des lois . Permettez-moi de faire, à ce stade de notre discussion, un point sur l’organisation de nos travaux. Depuis la reprise, nous avons travaillé à un rythme de neuf euros de l’heure.
Rires et applaudissements.
Pardonnez-moi ce lapsus, mes chers collègues d’autant que ce ne serait pas cher payé ! Je voulais évidemment dire que nous avons travaillé à un rythme de neuf amendements de l’heure. À continuer tranquillement de la sorte, nous pourrions siéger jusqu’à l’heure du petit-déjeuner demain matin.
Dès lors, monsieur le ministre, mes chers collègues, je propose que nous siégions plutôt jusqu’à minuit ou minuit et demi ce soir, puis que nous interrompions ensuite nos travaux, à moins qu’ils ne soient presque achevés, jusqu’à lundi prochain, à dix-sept heures ; nous reprendrions alors l’examen de ce texte. Cela nous laisserait le temps de débattre convenablement des dispositions relatives à l’Alsace-Moselle, sans oublier que les explications de vote sur l’ensemble risquent également de prendre un certain temps.
M. le président de la commission, en accord avec le Gouvernement, propose que nous siégions ce soit sans aller au-delà de minuit ou minuit et demi ; si nous n’arrivions pas à achever la discussion du présent texte dans ce délai, nous siégerions lundi prochain, 12 avril, à partir de dix-sept heures et le soir.
Il n’y a pas d’observations ?…
Il en est ainsi décidé.
Monsieur le président, pardonnez-moi de retarder ainsi la marche du débat, mais j’ai besoin de recevoir un éclaircissement.
Nous avons adopté l’amendement n° 686 du Gouvernement portant article additionnel après l’article 27. Monsieur le ministre, je voudrais savoir quelle sera la conséquence exacte de l’information du préfet prévue dans cet amendement. Que peut faire le préfet, une fois qu’il est informé qu’une commune ou un département a l’intention de conclure un bail emphytéotique ou d’accorder une garantie d’emprunt ?
J’ai posé tout à l’heure la même question : elle est malheureusement restée sans réponse !
Je ne vois, dans le dispositif que vous nous avez fait adopter, aucune conséquence à l’information du préfet. J’ai recherché s’il y en aurait dans les dispositions qui figurent déjà dans le code général des collectivités territoriales sur les garanties d’emprunt et les baux emphytéotiques, mais je ne vois aucun moyen pour le préfet de s’opposer à l’octroi de ces avantages.
Vous avez certainement réfléchi à cette question, monsieur le ministre. Je voudrais donc savoir si les dispositions que nous avons adoptées ont ou non une portée réelle.
Je me suis sans doute mal exprimé lorsque j’ai répondu à Mme de La Gontrie : le préfet pourra retirer à l’association en question sa qualité cultuelle…
Mais c’est la réponse que je vous fais : vous ne pouvez pas faire les questions et les réponses, madame de La Gontrie, soyons raisonnables !
Le préfet ne pourra pas empêcher la décision communale, puisque le principe de libre administration des collectivités locales l’en empêche. En revanche, si la collectivité persiste à vouloir octroyer une garantie d’emprunt à l’association à laquelle le préfet a retiré la qualité cultuelle, celui-ci pourra déférer la délibération en question devant le tribunal administratif.
Aujourd’hui, quand une collectivité locale veut octroyer une garantie d’emprunt ou un bail emphytéotique dans les territoires que vous avez bien voulu évoquer, monsieur Bas, elle n’en informe pas l’autorité préfectorale ; simplement, elle reçoit l’association qui lui déclare avoir besoin d’une garantie d’emprunt pour un prêt bancaire, ou d’un bail emphytéotique. Si la collectivité accède à cette demande, il est extrêmement rare – ce n’est peut-être même jamais arrivé – que cet acte soit déféré devant le juge administratif. D’ailleurs, quand bien même le préfet le ferait parce qu’il aurait des doutes sur cette association cultuelle, avant l’adoption du présent texte, il est à peu près évident qu’on ne pourrait rien y faire.
À bon compte, votre trio des Républicains a considéré que la mesure était intéressante, car elle permettait au moins un dialogue entre la collectivité locale et le préfet.
Lorsque le ministre de l’intérieur, parce qu’il dispose à la fois de notes de Tracfin et de la DGSI, reçoit un maire et lui fait part dans le secret de son bureau d’un problème, documents à l’appui parfois, force est de reconnaître que ce maire est informé !
En outre, indépendamment de ce dialogue nécessaire et nourri, les oppositions pourront s’assurer, dans le cadre du débat démocratique local, que le préfet a bien été consulté et interroger le maire sur ce qu’il lui a été dit.
Grâce à l’amendement que vous avez voté, le préfet, surtout si la rédaction de la commission est adoptée, pourra vérifier, lorsqu’il sera consulté sur une association posant problème et demandant à bénéficier d’une garantie d’emprunt, que cette dernière remplit bien un certain nombre de critères : absence de condamnation des dirigeants, présentation des actes comptables, contrôle des financements étrangers. Je rappelle que le texte contient de nombreuses dispositions nouvelles qui permettront de vérifier la qualité cultuelle des associations.
Si le préfet constate que cette association ne respecte pas les obligations prévues dans la loi, il pourra lui retirer sa qualité cultuelle, ce qui aura, in fine, pour conséquence de la priver d’une garantie d’emprunt.
Concrètement, indépendamment du discours politique qu’il peut tenir au maire, le préfet a le pouvoir de retirer à l’association sa qualité cultuelle.
Aujourd’hui, le préfet n’est pas informé. Il ne découvre que lorsque les délibérations de la collectivité sont soumises au contrôle de légalité qu’une association a bénéficié d’une garantie d’emprunt. Or nous savons tous comment se passe le contrôle de légalité. On ne me fera pas croire que les délibérations des 36 000 communes sont toutes attentivement contrôlées !
Le maire aura donc un devoir d’alerte : il devra informer le préfet de son intention d’accorder dans un délai de trois mois une garantie d’emprunt à une association. Le préfet, et instruction lui sera donnée en ce sens, pourra alors vérifier la qualité cultuelle de cette association, examiner ses comptes, cribler ses dirigeants. À cet égard, j’espère que vous allez adopter dans quelques instants l’amendement tendant à prévoir qu’une personne condamnée pour terrorisme ne peut faire partie d’une association cultuelle.
Si le préfet, au titre de ce rescrit, ne retire pas à l’association sa qualité cultuelle, le maire pourra alors considérer qu’elle est totalement conforme à loi de la République. Si le préfet n’est pas informé, cette vérification ne peut être faite que lors du contrôle de légalité.
La collectivité locale n’est donc nullement empêchée de prendre des délibérations, lesquelles relèvent du contrôle de légalité a posteriori. Il est seulement prévu que le préfet puisse, le cas échéant, retirer à une association sa qualité cultuelle, au moment où elle demande une garantie d’emprunt ou un bail emphytéotique, où elle s’inscrit dans le paysage local.
J’espère ainsi avoir répondu à votre interrogation, monsieur le sénateur.
Mes chers collègues, avant de donner la parole à M. Jean-Pierre Sueur et d’entamer l’examen de l’article 28, je rappelle que nous discutons d’un amendement qui a été adopté ! Certes, ces explications seront probablement très utiles au travail de la commission mixte paritaire.
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.
Monsieur le président, je vous remercie de votre présidence ouverte, qui permet d’aller au fond des débats.
Je ne regrette pas d’avoir posé la question du rapport entre cet amendement et l’actualité. Elle a suscité un débat long, mais important. Je tiens également à remercier Philippe Bas de sa question, qui est essentielle, bien que je ne sois pas certain de comprendre quelle est son intention…
Nous convenons tous ici qu’il n’est pas normal que certaines associations reçoivent des financements étrangers, refusent les principes républicains et agissent comme elles le font.
Concrètement, monsieur le ministre, vous nous proposez, de manière inopinée, d’inscrire dans la loi une obligation d’information du préfet par le maire. §Si le maire ne le fait pas, aucune sanction n’est appliquée ; s’il le fait, il n’y aura aucune conséquence pour la collectivité locale. La seule chose, c’est que le préfet aura la faculté de déclarer qu’une association dite « cultuelle » ne le sera plus.
Tout cela est confus…
Je vous dis mon point de vue ! Telle est la raison pour laquelle nous nous sommes abstenus, monsieur le ministre – cela fait partie de notre liberté.
Il nous semblerait beaucoup plus simple d’appliquer des principes très clairs : seul le dévoiement de la liberté du culte, qui se traduit par un refus d’appliquer la loi et de respecter les principes républicains, justifie que le préfet doive agir.
Le dispositif dont nous discutons, je le redis, est confus. C’est pourquoi nous avons exprimé la position qui est la nôtre.
Je ne peux pas vous laisser dire cela, monsieur Sueur.
Premièrement, vous vous êtes abstenu lors du vote de l’amendement et vous n’avez pas manifesté d’opposition particulière lorsque j’ai apporté des explications à Mme de La Gontrie.
Deuxièmement, le maire est obligé, monsieur Sueur, d’informer qu’il a été saisi d’une demande de garantie d’emprunt.
Le non-respect de cette obligation est un motif d’illégalité et la délibération ne sera pas adoptée !
Je crains que la confusion ne soit pas de mon côté, monsieur Sueur…
Après l’article 19 de la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Églises et de l’État, il est inséré un article 19-2 ainsi rédigé :
« Art. 19 -2. – I. – Le financement des associations cultuelles est assuré librement dans les conditions prévues au présent article et à l’article 19-3.
« II. – Les associations cultuelles peuvent recevoir les cotisations prévues à l’article 6 de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association et le produit des quêtes et collectes pour les frais du culte. Elles peuvent percevoir des rétributions pour les cérémonies et services religieux même par fondation, pour la location des bancs et sièges, pour la fourniture des objets destinés au service du culte, au service des funérailles dans les édifices religieux ainsi qu’à la décoration de ces édifices.
« Elles peuvent recevoir, dans les conditions prévues au II de l’article 910 et à l’article 910-1 du code civil, les libéralités entre vifs ou par testament destinées à l’accomplissement de leur objet ou grevées de charges pieuses ou cultuelles.
« Elles peuvent posséder et administrer tous immeubles acquis à titre gratuit, sans préjudice des dispositions des 2° et 3° de l’article 6 de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association.
« Elles peuvent verser, sans donner lieu à perception de droits, le surplus de leurs recettes à d’autres associations constituées pour le même objet.
« III. – Elles ne peuvent, sous quelque forme que ce soit, recevoir des subventions de l’État ni des collectivités territoriales ou de leurs groupements. Ne sont pas considérées comme subventions les sommes allouées pour réparations aux édifices affectés au culte public, qu’ils soient ou non classés monuments historiques. »
L’amendement n° 549 rectifié, présenté par Mmes Assassi et Cukierman, MM. Bocquet, Savoldelli et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Pierre Ouzoulias.
Notre position politique est extrêmement claire : nous suggérons de nous en tenir à l’article 2 de loi du 9 décembre 1905 qui prévoit : « La République ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte. » Ce principe est latitudinaire en tant qu’il s’applique de manière peu uniforme sur le territoire national. Il connaît de nombreuses exceptions en fonction du statut des associations.
Nous défendons-là un amendement de suppression, car il nous semblerait de bonne politique de faire un bilan global des formes de subventionnement des différents cultes avant d’aller plus loin et de leur offrir de nouvelles libéralités.
Mme Dominique Vérien, rapporteure. Étant donné l’architecture nouvelle du texte, supprimer cet article reviendrait tout bonnement à supprimer tout financement des cultes. Peut-être est-ce là ce que vous souhaitez, cher collègue, mais ce serait un peu violent…
Rires sur les travées du groupe CRCE.
M. Gérald Darmanin, ministre. Je constate que le groupe communiste n’a pas exigé le remboursement de tout ce dont auraient bénéficié les cultes depuis un siècle. L’amendement est donc assez modéré en fin de compte !
Sourires.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
Je suis saisi de onze amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L’amendement n° 431 rectifié est présenté par Mme Conway-Mouret, M. Sueur, Mmes Harribey et de La Gontrie, M. Assouline, Mmes S. Robert, Monier et Meunier, MM. Marie et Magner, Mme Lepage, MM. Féraud, Leconte, Lozach, Kerrouche, Kanner, Bourgi, Durain, Redon-Sarrazy, Antiste et J. Bigot, Mmes Bonnefoy, Briquet et Conconne, M. P. Joly, Mme Jasmin, MM. Gillé, Raynal, Mérillou, Lurel, Temal, Tissot, Jacquin, Montaugé et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 473 est présenté par Mme Taillé-Polian, M. Benarroche, Mme Benbassa, M. Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge et M. Salmon.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéas 5 et 6
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Hélène Conway-Mouret, pour présenter l’amendement n° 431 rectifié.
Cet amendement vise à supprimer les alinéas 5 et 6, qui remettent en cause les principes de la République, dont le présent texte entend conforter le respect, en autorisant les associations cultuelles à conserver et à gérer les immeubles reçus par des dons et des legs, ce qui leur permet de se livrer à des activités commerciales et immobilières alors même que la loi de 1905 restreint strictement leur objet à l’exercice du culte.
Il s’agit là d’une rupture de l’équilibre posé par l’article 19 de ce texte fondateur de la laïcité.
Les nombreux avantages fiscaux dont bénéficient ces associations constituent des dérogations limitées au principe de séparation, liées à leur objet cultuel. Ces niches fiscales, qui font porter au contribuable une partie de la charge financière des cultes, ne sauraient être étendues à la gestion lucrative d’immeubles de rapport sans lien avec le culte.
Les ressources des cultes relèvent non pas de l’intérêt général, mais des intérêts particuliers des croyants, à qui il revient de les financer.
Compte tenu des protestations suscitées par cet article à l’Assemblée nationale, le Gouvernement a déposé à la dernière minute un amendement visant à plafonner par décret le montant du patrimoine dont la détention serait autorisée. Nous y voyons la reconnaissance par le Gouvernement du caractère anti-laïque de la mesure, dont il a tenté d’atténuer les effets, tout en le maintenant, malheureusement.
La parole est à Mme Esther Benbassa, pour présenter l’amendement n° 473.
Le présent amendement a pour objet de préserver la loi de 1905 de séparation des Églises et de l’État, en particulier son article 19 relatif au financement des associations cultuelles.
Celles-ci doivent continuer à cantonner leurs actions à l’exercice de leur culte. En aucun cas ces structures ne sauraient devenir des associations relevant du domaine immobilier. Leur donner la possibilité de posséder et d’administrer des immeubles à titre gratuit, comme le prévoient les alinéas 5 et 6 de l’article 28, constitue une atteinte significative au principe même de l’association cultuelle et à l’esprit de la loi de 1905, à laquelle nous sommes tous ici attachés.
En outre, nous ne voyons pas en quoi cette mesure serait efficace pour lutter contre les intégrismes religieux. Nous sommes convaincus qu’elle n’est pas justifiée au regard de l’objet même des associations cultuelles, dont la seule vocation est le culte, et non le domaine immobilier.
Par cet amendement, nous souhaitons empêcher les associations cultuelles de posséder et d’administrer des immeubles acquis à titre gratuit. Nous demandons par conséquent la suppression des alinéas 5 et 6.
L’amendement n° 139 rectifié bis, présenté par Mme N. Delattre, MM. Artano, Bilhac et Cabanel, Mmes M. Carrère et Pantel et MM. Requier, Roux, Gold, Fialaire et Guiol, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Henri Cabanel.
Cet amendement vise à supprimer l’alinéa 5 de l’article 28, qui me semble être une ineptie.
En effet, comment peut-on admettre que des associations cultuelles puissent tirer des revenus de la possession d’immeubles acquis à titre gratuit et qui ne seraient pas directement nécessaires à leur objet et à leur fonctionnement de base ? C’est une entorse à la loi originelle de 1905 !
Est-il nécessaire de rappeler que l’essence des associations cultuelles est de célébrer des cérémonies, d’accomplir des rites pour des personnes réunies et pratiquant la même religion ? Pourquoi, dès lors, permettre à ces associations de posséder et d’administrer des immeubles, même acquis à titre gratuit ? Voudrait-on transformer peu à peu les organes bénévoles dédiés au culte en sociétés immobilières ?
L’amendement n° 451 rectifié, présenté par M. Sueur, Mmes Harribey et de La Gontrie, M. Assouline, Mmes S. Robert, Monier et Meunier, MM. Marie et Magner, Mme Lepage, MM. Féraud, Leconte, Lozach, Kerrouche, Kanner, Bourgi, Durain, Redon-Sarrazy, Antiste et J. Bigot, Mmes Bonnefoy, Briquet et Conconne, M. P. Joly, Mme Jasmin, MM. Gillé, Raynal, Mérillou, Lurel, Temal et Tissot, Mme Conway-Mouret, MM. Jacquin, Montaugé et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Remplacer les mots :
et administrer
par les mots :
mettre à disposition ou louer
La parole est à M. Jean-Yves Leconte.
L’article 28 du projet de loi insère un nouvel article 19-2 au sein de la loi du 9 décembre 1905, relatif au financement des associations cultuelles. Il maintient les possibilités de financement qui sont actuellement en vigueur et ajoute la possibilité pour les associations cultuelles de posséder et d’administrer des immeubles de rapport acquis à titre gratuit.
Bien que cette disposition puisse être analysée comme un assouplissement notoire du financement des associations cultuelles, destiné à compenser la baisse constante des dons des fidèles, elle ne nous paraît pas pertinente dans sa rédaction actuelle.
En effet, il ne revient pas aux associations cultuelles d’administrer des biens immeubles acquis à titre gratuit. Ce n’est pas leur vocation que d’être des spécialistes du droit immobilier, de gérer des logements ou encore des locaux pour le compte d’autrui.
En revanche, il est tout à fait légitime de considérer que des associations cultuelles ayant à leur disposition de tels biens, notamment par la voie de dons ou de legs, puissent en tirer des revenus qui seront par la suite dédiés à leur activité cultuelle. En plus de favoriser leurs ressources propres, cela remédierait à une différence de traitement existant de longue date entre les associations cultuelles et les associations d’intérêt public, tout en préservant leurs attributions respectives.
En ce sens, cet amendement tend à ce que les associations cultuelles puissent désormais être libres de mettre à disposition des biens immeubles acquis à titre gratuit, ou d’en tirer un bénéfice foncier à destination de l’exercice de leur activité, sans toutefois leur laisser la possibilité de devenir des administrateurs de biens.
L’amendement n° 580 rectifié ter, présenté par MM. de Belenet, L. Hervé, Bonnecarrère, Duffourg, Marseille, P. Martin, Détraigne, Capo-Canellas, Kern, Henno et Levi, Mme Billon, M. Delahaye, Mme Saint-Pé, MM. S. Demilly et Laugier, Mmes Perrot et Morin-Desailly, MM. Chauvet, Le Nay, J.M. Arnaud et Folliot, Mme Gatel et M. Longeot, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Supprimer les mots :
acquis à titre gratuit
La parole est à M. Arnaud de Belenet.
Cet amendement vise à soutenir l’objectif de l’article 28, qui permet aux associations cultuelles de posséder et d’administrer des biens acquis à titre gratuit.
Il s’agit de rétablir un équilibre et une équité avec les associations constituées en vertu de la loi de 1901 qui, depuis 2014, peuvent, elles, administrer des biens acquis à titre gratuit.
Au moment où l’on s’interroge sur la pérennisation des recettes et sur l’indépendance des associations, particulièrement cultuelles, et alors que l’on cherche à éviter qu’elles ne reçoivent des financements en provenance de l’étranger, il faut bien leur donner les moyens de vivre durablement.
Cet amendement tend donc à permettre l’acquisition par les associations cultuelles d’immeubles de rapport à titre onéreux. Le temps où la puissance d’une association, fût-elle cultuelle, se mesurait à l’aune de son patrimoine immobilier est révolu – la puissance immobilière des associations ne peut plus inquiéter la République !
En droit, cet amendement vise à rendre plus transparente la réalité d’une pratique.
Les trois amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 265 rectifié est présenté par MM. Capus, Menonville, Guerriau et Decool, Mme Mélot, MM. Lagourgue, Wattebled, Verzelen et Chasseing, Mme Joseph, M. de Legge, Mmes Bonfanti-Dossat et de Cidrac et M. Chatillon.
L’amendement n° 402 rectifié ter est présenté par M. Cuypers, Mmes Chain-Larché et Thomas, MM. Regnard, Boré, Le Rudulier et Reichardt, Mme Gruny, MM. Brisson, Longuet et Lefèvre, Mme Lassarade, MM. Bas, Houpert et de Nicolaÿ, Mme Boulay-Espéronnier, M. Bonne, Mme Pluchet, MM. Belin, Laménie et B. Fournier, Mme Lopez et MM. Charon et Mouiller.
L’amendement n° 581 rectifié ter est présenté par MM. de Belenet, L. Hervé, Bonnecarrère, Duffourg, Marseille, P. Martin, Détraigne, Capo-Canellas, Kern, Henno et Levi, Mme Billon, M. Delahaye, Mme Saint-Pé, MM. S. Demilly et Laugier, Mmes Perrot et Morin-Desailly, MM. Chauvet, Le Nay, J.M. Arnaud et Folliot, Mme Gatel et M. Longeot.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 5
Après les mots :
à titre gratuit
insérer les mots :
et à titre onéreux
La parole est à M. Jean-Louis Lagourgue, pour présenter l’amendement n° 265 rectifié.
L’article 28 prive les associations cultuelles de la possibilité de posséder et d’administrer des biens immobiliers à titre onéreux. Cette restriction porte atteinte à leur liberté de gestion et risque de compromettre gravement l’équilibre financier de bon nombre d’entre elles.
Le présent amendement vise donc à corriger cette inégalité de traitement et cette atteinte à la liberté, en inscrivant dans la loi la possibilité pour les associations de posséder et d’administrer des biens immobiliers acquis à titre onéreux.
La parole est à Mme Anne Chain-Larché, pour présenter l’amendement n° 402 rectifié ter.
Nous proposons également de permettre aux associations cultuelles de gérer des immeubles acquis à titre onéreux, afin de faciliter les conditions d’exercice du culte, en élargissant les ressources propres des associations. Il s’agit de garantir réellement au culte tous les moyens de son exercice, comme le prévoit l’intitulé du titre II du projet de loi.
La parole est à M. Arnaud de Belenet, pour présenter l’amendement n° 581 rectifié ter.
Cet amendement vise à préciser explicitement que les associations peuvent posséder et administrer des immeubles acquis à titre à titre onéreux.
L’amendement n° 140 rectifié, présenté par Mme N. Delattre, MM. Artano, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Fialaire, Guérini et Guiol, Mme Pantel, MM. Requier, Roux, Corbisez et Gold et Mme Guillotin, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Ces immeubles ne peuvent bénéficier des exonérations fiscales prévues aux articles 1380 et 1407 du code général des impôts.
La parole est à Mme Nathalie Delattre.
Cet amendement vise à empêcher que les propriétaires d’immeubles de rapport soient exonérés de la taxe foncière et de la taxe d’habitation respectivement prévues aux articles 1380 et 1407 du code général des impôts.
Pour l’heure, sont imposables tous types de locaux meublés dédiés à l’habitation, à l’occupation à titre privatif de sociétés publiques ou d’organismes associatifs ou privés, ou à l’occupation d’organismes déconcentrés de collectivités territoriales.
Les immeubles de rapport entrent pleinement dans ces cases. Sont-ils souvent des bâtiments servant aux exploitants agricoles ? Non ! Sont-ils souvent dédiés aux écoliers de pensionnat ? Pas trop ! Sont-ils souvent des résidences universitaires ? Un peu plus…
C’est pourquoi il paraît juste et normal que les propriétaires d’immeubles de rapport ne puissent être exonérés ni de la taxe foncière ni de la taxe d’habitation.
L’amendement n° 52 n’est pas soutenu.
L’amendement n° 432 rectifié, présenté par Mme Conway-Mouret, M. Sueur, Mmes Harribey et de La Gontrie, M. Assouline, Mmes S. Robert, Monier et Meunier, MM. Marie et Magner, Mme Lepage, MM. Féraud, Leconte, Lozach, Kerrouche, Kanner, Bourgi, Durain, Redon-Sarrazy, Antiste et J. Bigot, Mmes Bonnefoy, Briquet et Conconne, M. P. Joly, Mme Jasmin, MM. Gillé, Raynal, Mérillou, Lurel, Temal, Tissot, Jacquin, Montaugé et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 6
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
« Sans préjudice de l’application aux édifices affectés à l’exercice public d’un culte du 10° de l’article 795 et du 4° de l’article 1382 du code général des impôts, les immeubles mentionnés au troisième alinéa du présent II sont soumis au droit commun des biens immobiliers. Les associations cultuelles les administrant établissent leurs comptes annuels de telle sorte que leurs activités en relation avec cette gestion constituent une unité fonctionnelle présentée séparément.
« Un décret en Conseil d’État détermine les modalités d’application du présent article.
La parole est à Mme Hélène Conway-Mouret.
L’article 28, alinéa 5, permet aux associations cultuelles de posséder et d’administrer des immeubles acquis à titre gratuit.
Or les biens immobiliers des associations cultuelles sont aujourd’hui exemptés de la fiscalité afférente, notamment de la taxe foncière, ce qui s’apparente déjà à une forme de subventionnement déguisé, bien que cela soit justifié, en l’état actuel des textes, par l’objet social étroitement défini.
Cette exemption se fonde sur le fait que ces associations ont pour objet exclusif l’exercice du culte. Il est donc indispensable que ce régime d’exemption ne soit pas étendu aux immeubles gérés en dehors de cet objet, sans quoi l’esprit de la loi de 1905 s’en trouverait violé.
Le Gouvernement justifie son projet par la nécessité d’accorder aux cultes une plus grande autonomie financière, alors que, comme cela est indiqué dans l’étude d’impact, d’une part, seuls sont concernés les immeubles acquis à titre gratuit et que, d’autre part, les revenus ainsi générés ne pourront servir qu’à financer des activités cultuelles, et ce dans un contexte où leurs financements seront plus étroitement contrôlés et où seront interdits ceux qui proviennent de l’étranger.
Si effort de rapprochement avec le droit commun il doit y avoir, alors il faut aller jusqu’au bout de la démarche. Si l’objectif d’assurer des ressources autonomes régulières aux associations cultuelles est légitime, ces dernières ne sauraient échapper au droit commun.
Afin de répondre à cette attente, le Gouvernement a retenu un amendement tendant à plafonner à 33 % la part des revenus locatifs que les associations cultuelles pourront générer dans le total de leurs ressources. Il a par ailleurs été précisé que les revenus locatifs des associations cultuelles seront assujettis à l’impôt, comme toute organisation qui possède des immeubles.
Dès lors, il nous paraît nécessaire de compléter ce dispositif dans deux directions : d’une part, en inscrivant expressément dans la loi que ces immeubles non consacrés à l’exercice du culte sont bien soumis au droit commun fiscal ; d’autre part, en dissociant dans les comptes des associations cultuelles concernées les activités en relation avec l’exercice du culte et celles qui sont relatives à la gestion des immeubles, à l’instar de la distinction faite, à l’article 30 du projet de loi, pour les associations relevant de l’article 4 de la loi du 2 janvier 1907.
Cet article permet notamment aux associations cultuelles d’administrer des immeubles acquis à titre gratuit.
Jusqu’à présent, lorsqu’une association cultuelle bénéficiait d’un immeuble grâce à un don ou un legs, elle n’était pas autorisée à l’administrer. Elle était tenue de le vendre, mais elle pouvait conserver le produit de la vente.
L’article 28 permet aux associations cultuelles de disposer d’une source de revenus plus réguliers que la vente d’un immeuble. L’Assemblée nationale avait réduit cette possibilité, en plafonnant ces revenus à 33 % de leurs ressources annuelles totales.
Pour plusieurs raisons, la commission du Sénat a supprimé ce plafond. Comment en effet le calculer ? Qu’adviendrait-il en cas de dépassement ? En outre, les recettes, notamment les dons, peuvent être fluctuantes, si bien que le plafond, d’une année sur l’autre, pourrait être inférieur ou supérieur à 33 % des ressources totales. Bref, le dispositif était assez complexe.
Certaines associations cultuelles, notamment celles des orthodoxes de France, ont de peu de recettes. Le jour où elles hériteraient d’un immeuble, voire d’un simple appartement qu’elles mettraient en location, le plafond de 33 % des recettes serait largement dépassé.
L’objectif étant que les associations cultuelles puissent se financer, indépendamment des ressources étrangères, la commission a supprimé le plafond de 33 %.
Pourquoi ne pas aller plus loin et autoriser les associations cultuelles à acquérir des immeubles à titre onéreux ?
Il s’est d’abord agi de préserver un certain équilibre. Certains amendements tendent à supprimer l’article, d’autres à étendre le dispositif proposé aux immeubles acquis à titre onéreux. L’acquisition à titre gratuit nous semblait être une solution médiane plus sage. Allons déjà dans ce sens et regardons ce que cela donnera.
Ensuite, sans craindre que des associations cultuelles se constituent un empire immobilier, nous avons considéré que le fait que certaines puissent acquérir progressivement de nombreux appartements dans un même quartier pouvait présenter un risque.
Il arrive que, dans le cadre d’une société civile immobilière (SCI), les gestionnaires d’une location soient une congrégation. Les associations cultuelles n’étant pas toujours vertueuses, on pourrait imaginer qu’elles soient tentées de consentir un loyer peu onéreux à des locataires à condition que ces derniers s’engagent à fréquenter le lieu de culte qu’elles gèrent dans le même quartier. Nous ne souhaitons pas que cela soit possible.
C’est pourquoi la commission a retenu une solution médiane : oui à l’administration d’immeubles acquis à titre gratuit, sans plafonnement des ressources à 33 %, ingérable en réalité ; non à l’administration d’immeubles acquis à titre onéreux. S’il était un jour nécessaire de développer cette possibilité, nous reconsidérerions alors les choses. Mais, en l’état, il ne nous paraît pas sage de permettre l’administration d’immeubles acquis à titre onéreux.
J’en viens maintenant, après vous avoir exposé la position de la commission, aux avis sur les amendements.
Les amendements n° 431 rectifié, 473 et 139 rectifié bis visent à supprimer la possibilité pour les associations cultuelles de posséder et d’administrer des immeubles acquis à titre gratuit. La commission y est défavorable.
L’amendement n° 140 rectifié tend à exclure les immeubles de rapport du bénéfice des exonérations fiscales de taxe foncière et de taxe d’habitation. Il est en réalité satisfait. C’est pourquoi la commission sollicite son retrait, à défaut elle émettra un avis défavorable.
L’amendement n° 432 rectifié vise à soumettre au droit commun fiscal les immeubles de rapport, mais aussi à imposer une présentation comptable séparée. La première partie de cet amendement est satisfaite, tandis que la seconde, à laquelle nous sommes défavorables, n’apparaît pas souhaitable – suffisamment d’efforts ont déjà été demandés aux cultes s’agissant de la présentation de leurs comptes !
Les amendements n° 580 rectifié ter, 265 rectifié, 402 rectifié ter et 581 rectifié ter ont pour objet d’autoriser les associations cultuelles à posséder des immeubles acquis à titre onéreux. La commission est défavorable à une telle proposition, peu importe d’ailleurs la rédaction choisie, monsieur de Belenet.
Quant à l’amendement n° 451 rectifié, il vise à apporter une correction terminologique en précisant que les associations cultuelles peuvent mettre à disposition ou louer des biens qu’elles ont acquis à titre gratuit, sans être pour autant autorisées à les administrer. La commission n’ayant pas tout à fait saisi la subtilité de cette proposition, elle émet un avis défavorable.
Le Gouvernement émet lui aussi un avis défavorable sur ces amendements, mais pour des raisons différentes.
L’intention initiale du Gouvernement était de permettre aux associations cultuelles de posséder et d’administrer des immeubles de rapport.
Le culte doit se financer ! Nous pouvons toujours rêver de vivre de paroles divines, d’eau fraîche et d’air pur, mais il nous faut rester réalistes et tirer les conclusions du monde mercantile dans lequel nous vivons. Les cultes ont besoin de financement, que ce soit pour embaucher les ministres du culte, disposer d’un bien immobilier ou exercer leurs activités cultuelles.
Nous nous sommes fixé deux règles, comme deux rails parallèles, qui, ensemble, doivent permettre d’encadrer et de garantir la liberté cultuelle.
Le premier rail, c’est la loi de 1905. L’article 2 pose le principe de non-subventionnement public des cultes. Il existe certaines exceptions de droit local en Alsace-Moselle et en outre-mer, en matière de baux emphytéotiques, de reçus fiscaux et de garanties d’emprunts, mais rien de tout cela ne constitue des subventionnements directs des cultes ou des ministres du culte.
Nous souhaitons conserver ce principe de non-subventionnement par l’État et les collectivités locales.
Le second rail, celui que nous imposons et qui, à mon avis, marque une avancée très importante dans la façon dont sont gérés les cultes dans notre pays, c’est le non-financement en provenance de l’étranger.
Je pense d’abord au financement étatique des imams détachés ; le Président de la République a indiqué qu’il y serait mis fin en 2023. Qu’est-ce qu’un imam détaché sinon une sorte de « ministre du culte » payé par un État étranger pour être fonctionnaire sur le territoire national ? Je précise d’ailleurs qu’il s’agit non pas d’interdire aux étrangers de professer sur notre sol, mais de faire en sorte qu’ils ne soient pas payés par un État étranger.
Je pense ensuite de manière générale à l’argent étranger – par exemple, des fondations dont l’objet serait détourné –, qui pourrait financer tel ou tel site cultuel. Si nous ne nous y opposons pas par principe, l’adoption d’articles ultérieurs nous permettra de connaître ces financements et de nous y opposer le cas échéant.
Une fois posés ces deux rails – pas de financement public quel qu’il soit, pas de financement en provenance de l’étranger –, il faut tout de même bien imaginer un financement national.
Les fidèles, me répondrez-vous ! En effet, les fidèles financent les cultes. Toutefois, cela suppose qu’ils veuillent donner l’obole ou verser une aide directe à leur association cultuelle. Ils y sont souvent incités par des dispositions fiscales, à condition qu’ils payent des impôts. Or 55 % des Français ne payent pas d’impôt sur le revenu et nous savons tous que, quelles que soient les religions, les fidèles sont en moyenne plus pauvres que les autres. Souvent, les reçus fiscaux ne leur sont donc d’aucune utilité.
Les Églises auraient pu demander la mise en place d’un crédit d’impôt, celui-ci permettant, chacun le sait, de contribuer au financement lorsque l’on ne paye pas d’impôts, par une sorte de crédit d’impôt négatif. Le Gouvernement n’est pas allé jusqu’à proposer le crédit d’impôt parfois demandé par les associations cultuelles.
Il a considéré que, en plus des dons des fidèles et sans recourir au crédit d’impôt, il était normal de trouver un financement national qui, je le répète, ne soit ni public ni étranger. Avant même la loi Hamon, vous l’avez indiqué, madame la rapporteure, il était déjà possible de donner un immeuble à son Église. C’est ce que l’on appelle un don à titre gratuit.
Il est surprenant que les associations cultuelles puissent détenir des actions, mais ne puissent pas posséder d’immeubles. Or un fidèle peut vouloir apporter un soutien particulier à son Église à son décès, sous la forme d’un héritage. Sous prétexte que cela ne serait pas directement lié au culte, on suppose que l’Église revendrait ce bien. Avouez que c’est assez hypocrite.
Il s’agit donc d’autoriser les associations cultuelles à posséder des immeubles de rapport afin que tout croyant puisse contribuer, sur le territoire national en tant que croyant national de ce culte, indépendamment de l’argent venant de l’étranger, à la construction de l’Église ou du culte en question par des immeubles dits de rapport. Pour le coup, ceux-ci portent mal leur nom, puisque, par définition, ils ne rapportent pas grand-chose, si ce n’est qu’il s’agit d’un don gratuit.
Il fallait fixer une limite, de façon à ne pas recréer des empires religieux, des puissances financières religieuses, voire des lieux communautaires, …
… puisque c’est ce que nous essayons par ailleurs de combattre.
C’est la raison pour laquelle, monsieur le sénateur Belenet, nous ne sommes pas allés jusqu’à autoriser la possession ou l’administration d’immeubles de rapport acquis à titre onéreux, même si je comprends la philosophie qui préside à cette idée. Ce faisant pourraient se créer non seulement une puissance financière, notamment par le biais de SCI, comme vous l’avez souligné, madame la rapporteure, mais aussi une géographie communautaire.
C’est d’ailleurs pour cela que nous nous opposons au regroupement par communautés religieuses et que nous essayons de faire de la mixité de manière générale.
L’Assemblée nationale a souhaité établir un taquet de 33 %. Cela a donné lieu à un débat très important : le rapporteur général a d’abord proposé une somme unitaire – on voit bien que cela dépend des associations cultuelles – ; finalement, c’est un pourcentage en recettes qui a été privilégié, sur lequel le Gouvernement a émis un avis de sagesse.
Prenons un exemple tout bête, que vous avez vous-même évoqué, madame la rapporteure, en citant les orthodoxes : avec la crise du covid, les recettes – dons ou activités caritatives – se sont écroulées, mais les recettes de l’immobilier sont demeurées solides. Par conséquent, ce dispositif serait assez absurde, sauf à prévoir des exceptions.
C’est pourquoi le Gouvernement suit la position de la commission dans son intention de faire sauter ce taquet. Pour autant, comme vous, madame la rapporteure, il ne va pas jusqu’à autoriser les acquisitions à titre onéreux pour éviter la constitution d’empires financiers.
Dans la philosophie du Gouvernement, ces immeubles de rapport ne sont pas contraires à l’esprit laïque, bien au contraire. Il n’a jamais été dans l’imaginaire des législateurs d’interdire le financement du culte par les croyants. Il s’agit d’interdire les subventions publiques, d’empêcher tout financement étranger, de garantir un financement national, qui passe notamment par le don gratuit, l’exploitation des immeubles de rapport, sans pour autant permettre la constitution d’empires puisque nous empêchons les acquisitions à titre onéreux. Tout cela contribue, me semble-t-il, à la responsabilisation du culte tout en l’empêchant de dépendre de l’argent de l’étranger.
J’en viens à la question fiscale. Il ne s’agit pas d’ouvrir d’exception fiscale aux cultes qui exploiteraient des immeubles de rapport. Les exceptions fiscales – taxe foncière, taxe d’aménagement, droits de mutation à titre onéreux – concernent uniquement le lieu de culte : tout lieu qui ne serait pas destiné au culte serait évidemment assujetti à la fiscalité que chacun doit. Il n’y a pas de doute sur ce point.
Les exonérations fiscales ne peuvent concerner que le lieu de culte. C’est pourquoi la loi de 1905 a déjà prévu une disposition en ce sens, très mal rédigée au demeurant, si je puis me permettre ce commentaire sur les pères fondateurs de la loi de 1905, et établi la liste exacte des immeubles à destination du culte.
Pour toutes ces raisons, il faut refuser l’ensemble de ces amendements, même si, je le comprends, ce débat est important. L’article 28, conformément à l’esprit laïque de la République et à la loi de 1905, permet de faire face à la réalité des choses et de lutter contre les ingérences étrangères et le financement étranger.
Madame la rapporteure, monsieur le ministre, même si l’on s’en tient à ce que vous nous avez expliqué et à la raison pour laquelle une association cultuelle doit rester une association cultuelle et ne pas devenir un gestionnaire de biens, il me semble que cela va mieux en le disant.
C’est la raison pour laquelle l’amendement n° 451 rectifié a pour objet de remplacer les termes : « et administrer » par les termes : « mettre à disposition ou louer ». On indique ainsi ce qui est autorisé et on comprend bien que ces activités ne constituent pas le cœur de métier de l’association cultuelle. Le verbe « administrer » ouvre la porte à des activités différentes, avec tous les risques, évoqués par M. le ministre, que cela peut représenter, notamment la construction d’un empire ou d’un système immobilier particulier.
La modification que nous proposons d’apporter est simple et facile : la gestion d’immeubles de rapport doit rester une activité annexe par rapport à l’activité cultuelle.
Je ne suis pas insensible à l’avis de la commission. Par ailleurs, la détermination de M. le ministre à lutter contre ce plafond de 33 %, qui n’a aucun sens et qui est impossible à mettre en pratique, me rassérène et me conforte dans l’idée qu’il convient de retirer les amendements n° 580 rectifié ter et 581 rectifié ter.
Les amendements n° 580 rectifié ter et 581 rectifié ter sont retirés.
La parole est à Mme Nathalie Delattre, pour explication de vote.
Convaincue par les arguments de Mme la rapporteure, je retire l’amendement n° 140 rectifié.
L’amendement n° 140 rectifié est retiré.
Je mets aux voix les amendements identiques n° 431 rectifié et 473.
Les amendements ne sont pas adoptés.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
Je mets aux voix les amendements identiques n° 265 rectifié et 402 rectifié ter.
Les amendements ne sont pas adoptés.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L’amendement n° 685, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 7, seconde phrase
Après le mot :
réparations
insérer les mots :
ainsi que pour travaux d’accessibilité
La parole est à M. le ministre.
Cet amendement est important et va sans doute faire hésiter les membres du groupe CRCE !
Sourires sur les travées du groupe SER.
Il s’agit en effet d’autoriser des subventions publiques aux lieux de culte pour permettre l’accessibilité de ces mêmes lieux aux handicapés.
Je rappelle que l’État, comme les collectivités, peut déjà accorder des subventions publiques aux lieux de culte pour leur sécurisation. Ainsi, le fonds interministériel de prévention de la délinquance (FIPD) prévoit une enveloppe dédiée pour les lieux de culte, notamment pour l’acquisition de caméras de vidéoprotection. Tous les cultes – juif, musulman, catholique… – peuvent obtenir ces financements et il ne s’agit pas là de subventions directes pour le lieu de culte – le Conseil constitutionnel et le Conseil d’État en ont jugé ainsi.
La difficulté première, c’est que les bâtiments cultuels sont souvent anciens – ils ont 70, 80, 90 ans. Par ailleurs, et le dire n’a rien d’injurieux, il est souvent difficile pour les croyants, en raison de leur âge, d’accéder à ces bâtiments. Gérer ces lieux de culte coûte donc cher aux collectivités locales. Par conséquent, il semble normal de favoriser l’accessibilité voulue par la grande loi pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées de 2005.
Mesdames, messieurs les sénateurs, j’appelle votre attention sur le fait que je n’ai pas accédé à la seconde demande d’une partie des associations cultuelles, qui était de permettre des subventions de l’Ademe, l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, pour des motifs énergétiques. En effet, ces aides concernent le bâti, qui appartient au culte, et il ne nous revient pas de le subventionner.
En revanche, j’ai été convaincu sur l’accessibilité. C’est pourquoi je souhaite que cet amendement soit adopté.
Monsieur le ministre, la commission a elle aussi été convaincue. C’est pourquoi elle émet un avis favorable sur cet amendement.
Cet amendement est déjà satisfait par les faits et vous le savez très bien. Il est très rare qu’une association cultuelle gère seule un édifice cultuel ; très souvent, on trouve à côté une association culturelle et c’est cette dernière qui est massivement subventionnée par les collectivités afin de mettre les bâtiments aux normes d’accessibilité pour les handicapés.
C’est la réalité, on peut le regretter : toutes les collectivités agissent de même. Dans la mienne, je vote toujours contre ces subventions, mais je me sens de plus en plus seul, y compris au sein de mon groupe.
Sourires.
Nouveaux sourires.
Je comprends l’idée et il est évidemment très difficile de s’opposer à un amendement de cette nature.
L ’ amendement est adopté.
La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote sur l’article.
Mme Nathalie Goulet . Monsieur le ministre, vous avez évoqué les SCI. Dans sa grande sagesse, le Sénat a adopté un excellentissime amendement n° 297 à l’article 12 bis tendant à inclure les parts des SCI dans les éléments devant faire l’objet d’une déclaration.
Sourires.
Cette précision devra également être intégrée dans des articles ultérieurs, mais je ne serai peut-être pas là pour présenter les amendements ayant cet objet. Je pense que le Gouvernement aura à cœur de veiller aux coordinations.
L ’ article 28 est adopté.
Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à dix-huit heures quarante-cinq, est reprise à dix-huit heures cinquante-cinq.
L’article 20 de la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Églises et de l’État est ainsi modifié :
1° Les mots : « l’article 7 du décret du 16 août 1901 » sont remplacés par les mots : « décret en Conseil d’État » et les mots : « par l’article 18 et par les cinq derniers paragraphes de l’article 19 » sont remplacés par les mots : « par l’article 18, le troisième alinéa de l’article 19 et les articles 19-1 à 19-3 » ;
2°
« Dans le cadre d’une administration centrale, les unions peuvent, en accord avec les associations cultuelles membres, concourir à l’application par leurs membres des obligations prévues aux articles 18, 19 à 19-3 et 21. » –
Adopté.
L’amendement n° 148 rectifié, présenté par Mme N. Delattre, MM. Artano et Bilhac, Mme M. Carrère, MM. Guérini et Guiol, Mme Pantel, MM. Requier, Roux, Cabanel et Gold et Mme Guillotin, est ainsi libellé :
Après l’article 29
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le quatrième alinéa de l’article L. 211-4 du code de l’urbanisme, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« …) À l’aliénation d’un bien en vue d’être cédé à une association cultuelle à un prix manifestement inférieur à celui du marché. »
La parole est à Mme Guylène Pantel.
Redisons-le, les relations entre collectivités territoriales et associations cultuelles doivent être très encadrées et neutres. Elles doivent également être prudentes : il faut empêcher toute possibilité d’accointances entre élus locaux et responsables d’associations vouées au culte.
Si le droit de préemption est une prérogative de la collectivité territoriale, il ne serait pas acceptable que ce droit soit utilisé pour l’achat d’un bien ou d’un terrain qui serait par la suite revendu à une association cultuelle à un prix moindre, inférieur à celui du marché.
Aussi cet amendement vise-t-il à ce que le droit de préemption ne puisse être exercé à ces fins.
La nécessité d’un tel amendement ne nous apparaît pas clairement.
En effet, l’exercice par une personne publique de son droit de préemption doit déjà répondre à des objectifs d’aménagement ou d’urbanisme et il ne saurait s’agir de favoriser l’implantation d’édifices cultuels.
Par ailleurs, l’exercice du droit de préemption que vous évoquez, ma chère collègue, serait selon toute vraisemblance déjà illégal et la délibération procédant à une cession à vil prix en faveur d’une association cultuelle pourrait déjà être sanctionnée et déférée devant le tribunal administratif comme détournement de pouvoir.
Par conséquent, cet amendement non seulement ne nous semble pas opportun, mais est déjà plus ou moins satisfait en réalité. C’est la raison pour laquelle la commission en demande le retrait ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
L’amendement n° 148 rectifié est retiré.
L’amendement n° 277 rectifié, présenté par MM. Roux, Artano, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, M. Guérini, Mme Pantel et M. Requier, est ainsi libellé :
Après l’article 29
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai de douze mois, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur le statut juridique de l’imam. Ce rapport détermine les solutions pouvant être apportées en vue de permettre aux imams de bénéficier d’un statut de ministre du culte ou équivalent.
La parole est à M. Henri Cabanel.
La question du statut de l’imam est source de difficultés et d’inégalités pour le culte musulman au regard des autres cultes. Rien ne justifie que la religion musulmane ne bénéficie pas en France d’un régime juridique comparable aux autres. Un tel statut permettrait une meilleure égalité cultuelle, tant du point de vue des obligations que des droits dont peuvent notamment bénéficier les ministres du culte des autres religions.
Il est donc nécessaire que la question ne soit pas éludée et fasse l’objet d’un travail de fond dans les années à venir, en vue de régler ce traitement différencié des cultes. Un rapport remis par le Gouvernement au Parlement pourrait servir de base à cette réflexion. Nous connaissons toutefois le sort réservé aux demandes de rapport…
Sourires.
J’imagine que c’est un amendement d’appel dans la mesure où il a pour objet la remise d’un rapport au Parlement.
Même si le sujet est intéressant, la commission émet bien sûr un avis défavorable sur cet amendement.
La loi du 2 janvier 1907 concernant l’exercice public des cultes est ainsi modifiée :
1° L’article 4 est ainsi rédigé :
« Art. 4. – Indépendamment des associations soumises aux dispositions du titre IV de la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Églises et de l’État, l’exercice public d’un culte peut être assuré par voie de réunions tenues sur initiatives individuelles en vertu de la loi du 30 juin 1881 sur la liberté de réunion et dans le respect des dispositions prévues aux articles 25, 34, 35, 35-1, 36 et 36-1 de la loi du 9 décembre 1905 précitée.
« L’exercice public d’un culte peut également être assuré au moyen d’associations régies par la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association.
« Sauf lorsque leurs activités liées à l’exercice public du culte revêtent un caractère strictement accessoire, ces associations sont soumises aux dispositions des articles 1er, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 9 bis et 17 de la loi du 1er juillet 1901 précitée ainsi que du troisième alinéa de l’article 19 et des articles 19-3, 25, 34, 35, 35-1, 36, 36-1 et 36-2 de la loi du 9 décembre 1905 précitée. » ;
2° Après le même article 4, sont insérés des articles 4-1 et 4-2 ainsi rédigés :
« Art. 4 -1. – Sauf lorsque leurs activités liées à l’exercice public du culte revêtent un caractère strictement accessoire, les associations mentionnées au deuxième alinéa de l’article 4 de la présente loi sont également soumises aux dispositions du premier alinéa de l’article 21 de la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Églises et de l’État relatives aux comptes annuels ainsi qu’aux dispositions des deuxième à cinquième alinéas du même article 21. Elles établissent leurs comptes annuels de sorte que leurs activités en relation avec l’exercice public d’un culte constituent une unité fonctionnelle présentée séparément. Elles sont tenues de consacrer un compte ouvert dans un établissement mentionné à l’article L. 521-1 du code monétaire et financier à l’exercice de l’ensemble des transactions financières liées à leur activité d’exercice public du culte.
« Elles assurent la certification de leurs comptes, sans préjudice de l’application de l’article 4-1 de la loi n° 87-571 du 23 juillet 1987 sur le développement du mécénat et du dernier alinéa du II de l’article 19-3 de la loi du 9 décembre 1905 précitée :
« 1° Lorsqu’elles délivrent des documents tels que certificats, reçus, états, factures ou attestations permettant à un contribuable d’obtenir une réduction d’impôt en application des articles 200 et 238 bis du code général des impôts ;
« 2° Lorsque le montant des subventions publiques reçues annuellement dépasse un seuil défini par décret en Conseil d’État ;
« 3° Lorsque leur budget annuel dépasse un seuil défini par décret en Conseil d’État.
« Les deux derniers alinéas de l’article 23 de la loi du 9 décembre 1905 précitée sont applicables en cas de non-respect des dispositions du présent article.
« Art. 4 -2. – Lorsqu’il constate qu’une association accomplit des actes en relation avec l’exercice public d’un culte, tels que l’acquisition, la location, la construction, l’aménagement et l’entretien des édifices servant au culte ainsi que l’entretien et la formation des ministres et autres personnes concourant à l’exercice du culte, sans que son objet le prévoie, et sauf dans le cas où ces activités revêtent un caractère strictement accessoire, le représentant de l’État dans le département met en demeure l’association, dans un délai qu’il fixe et ne pouvant être inférieur à un mois, de mettre en conformité son objet avec ses activités.
« À l’expiration du délai prévu au premier alinéa, le représentant de l’État dans le département peut, si l’association n’a pas satisfait à la mise en demeure, prononcer une astreinte d’un montant maximal de 100 € par jour de retard.
« Un décret en Conseil d’État précise les conditions d’application du présent article. »
L’amendement n° 334, présenté par Mme Benbassa, MM. Benarroche et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme Taillé-Polian, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Esther Benbassa.
Cet amendement tend à supprimer l’extension de la plupart des contraintes administratives et comptables imposées aux associations relevant de la loi de 1905 et aux associations de droit commun loi 1901 qui ont une activité en relation avec l’exercice public d’un culte. Selon l’étude d’impact, il s’agit d’inciter les acteurs du culte à s’organiser sous le régime des associations cultuelles et à séparer ainsi leurs activités cultuelles des autres.
Malgré les efforts de la commission des lois, qui a souhaité exclure de ce régime d’obligations renforcées les associations 1901 dans lesquelles l’activité cultuelle n’a qu’un caractère strictement accessoire, celles-ci seraient désormais soumises au contrôle de l’administration.
Les associations loi 1901, par exemple les organismes de gestion de l’enseignement catholique ou les mouvements de scouts, organisent des actes en relation avec l’exercice public d’un culte. Elles pourraient ainsi entrer dans le champ d’application de l’article 30 et se voir imposer des obligations très contraignantes.
En outre, les nombreuses associations loi 1901 sont inspirées par des convictions spirituelles : actions humanitaires, collectes alimentaires, aide aux personnes précaires… Comment feront-elles, lors de leurs opérations comptables, pour faire le départ entre leurs activités en relation avec l’exercice public d’un culte et celles qui n’en sont pas ?
Parce que ces mesures sont sans lien avec les réalités et les pratiques de l’exercice du culte en France, le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires demande la suppression de cet article.
Nous voici au cœur du réacteur de ce texte, de son objet véritable, qui est de faire en sorte que la partie cultuelle d’une association, quand bien même elle serait de type loi de 1901, soit bien déclarée en tant que telle, ou du moins soumise aux contraintes de la loi de 1905 comme si elle était une association cultuelle.
L’objectif est d’inciter les associations cultuelles à relever du régime de 1905. La liberté d’association empêchant de le leur imposer, le projet de loi prévoit que les comptes puissent être séparés et que la partie cultuelle soit soumise aux obligations de la loi de 1905, sans bénéficier pour autant de ses avantages puisqu’elles resteraient régies par la loi de 1901. Elles auront donc tout intérêt à se déclarer sous le régime de la loi de 1905, avec les avantages et les inconvénients qu’il comporte.
Pour la commission, c’est l’article essentiel du texte. Elle est donc évidemment contre sa suppression. Elle a pris en compte la situation des associations de scoutisme ou qui exerceraient le culte à titre accessoire en les sortant de ces obligations : une association de scoutisme s’apparente bien plus à une association loi de 1901, quand bien même elle pratiquerait de façon strictement accessoire le culte.
Comme le dit Mme la rapporteure, nous sommes dans le cœur du réacteur, mais la matière nucléaire est parfois complexe et mérite sans doute quelques explications de la part du Gouvernement.
Si nous partageons le même but, il subsiste sans doute un léger quiproquo dans les rédactions. Il existe aujourd’hui trois types d’associations : les associations uniquement culturelles, les associations uniquement cultuelles, et les associations mixtes, des associations de type 1901 qui doivent déclarer leur qualité cultuelle.
Les associations uniquement cultuelles ne posent pas de problème ; elles relèvent de la loi de 1905, avec ses avantages et ses inconvénients. Les associations mixtes soulèvent peu de problèmes ; elles sont à la fois culturelles et cultuelles. Nous le déplorons, mais ne revenons pas sur la liberté associative. Cependant, nous imposons par ce texte deux états de compte différents, afin que les subventions de l’une ne servent pas à financer l’activité cultuelle de l’autre. Il s’agit ainsi de séparer, comme on séparerait le temporel du spirituel, les États des associations.
Il y a enfin les associations culturelles qui, de façon strictement accessoire, logent des activités cultuelles. Les scouts sont ainsi des associations culturelles qui organisent de temps à autre, de manière non générale – ce n’est pas leur but –, une messe. Il ne s’agit pas d’interdire aux scouts de loger une messe, lorsqu’ils sont catholiques, ou un autre office religieux, puisqu’il existe des scouts de toutes les obédiences religieuses. Ce serait absurde et je ne crois pas que ce soit le sens du travail voulu par le Parlement.
La rédaction actuelle du Sénat conduit à requalifier en associations mixtes des associations culturelles qui logent des activités accessoirement cultuelles - la difficulté est de définir ce qui est accessoire - pour le bon fonctionnement de l’association.
Le deuxième inconvénient de votre rédaction, madame la sénatrice, c’est qu’elle exclut du champ d’intervention du ministère de l’intérieur les associations qui se déclarent culturelles, mais qui pratiquent des activités cultuelles. Les scouts disent qu’ils sont strictement accessoirement cultuels. Par exemple, l’Association interculturelle du Grand Nancy se présente dans son statut comme une association qui mène des activités culturelles, sociales, éducatives et sportives au sein de la communauté turque et française, propose des cours de langue, d’informatique, de folklore, de couture, d’enseignement religieux, de l’aide aux personnes défavorisées. Or nous savons par ailleurs qu’elle gère la mosquée Fathi à Laxou et qu’elle est affiliée à la Ditib, c’est-à-dire le ministère turc des affaires religieuses.
Avec l’article 30, tel qu’il résulte des travaux de la commission du Sénat, les scouts relèvent du cultuel en mixte, avec des obligations, ce qui n’est pas votre volonté, et vous faites sortir l’association Ditib, qui ne s’est pas déclarée comme étant un lieu cultuel. Reste la question de savoir ce qu’est un culte, qui peut nous mener assez loin, comme en témoigne notre discussion en début d’après-midi.
Je crois donc très sincèrement, sans désaccord avec la commission, que la rédaction du Gouvernement permet d’atteindre la cible. Il s’agit évidemment de permettre que se tienne de temps en temps un office religieux dans l’activité culturelle, cela concerne les scouts, mais également bien d’autres associations, sans que celle-ci soit qualifiée de cultuelle, et de viser tout de même celles qui se disent strictement culturelles, mais dont on sait qu’elles gèrent parfois des lieux cultuels.
Nous aurons sans doute l’occasion d’en débattre de nouveau, madame la rapporteure, mais je pense vraiment que la rédaction du Gouvernement permet de toucher cette cible de l’article 30, si j’ose dire, sans effets collatéraux.
J’émets donc un avis défavorable sur l’amendement n° 334 et je vous invite à adopter l’amendement n° 652, qui est ainsi défendu.
Vous indiquez, monsieur le ministre, que l’article 30 est le cœur du réacteur, mais cela fait des années que nous demandons l’inscription de telles dispositions dans la loi.
Le rapport du séminaire tenu par l’Union des mosquées de France les 17 et 18 mars 2018 l’expose clairement : les associations gestionnaires des mosquées doivent être sous le régime de 1905. Il convient le cas échéant de séparer les activités cultuelles des activités culturelles, gérées par deux associations distinctes. Une autre option serait d’imposer aux associations régies par la loi de 1901 les mêmes exigences en matière de gestion et de transparence.
C’est donc un sujet connu, qui ne devrait pas poser de problème. L’amendement n° 652 devrait apporter des solutions. J’y suis donc favorable. En revanche, je suis opposée à l’amendement n° 334.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L’amendement n° 652, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 5
Supprimer les mots :
Sauf lorsque leurs activités liées à l’exercice public du culte revêtent un caractère strictement accessoire,
II. – Alinéa 7
Supprimer les mots :
Sauf lorsque leurs activités liées à l’exercice public du culte revêtent un caractère strictement accessoire,
III. – Alinéa 13
Supprimer les mots :
, tels que l’acquisition, la location, la construction, l’aménagement et l’entretien des édifices servant au culte ainsi que l’entretien et la formation des ministres et autres personnes concourant à l’exercice du culte,
et les mots :
et sauf dans le cas où ces activités revêtent un caractère strictement accessoire,
Cet amendement est défendu.
Quel est l’avis de la commission ?
Monsieur le ministre, nous tenons vraiment à une rédaction qui permette d’exclure notamment les scouts. Le grand rabbin nous a également parlé des scouts israélites. Notre rédaction s’appuie sur une jurisprudence afin de bien préciser le caractère accessoire, justement pour ne pas confondre avec les associations mixtes.
Nous y reviendrons probablement ultérieurement, monsieur le ministre, mais nous sommes pour l’instant défavorables à votre amendement.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L’amendement n° 667, présenté par Mmes Eustache-Brinio et Vérien, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Remplacer les références :
, 36-1 et 36-2
par la référence :
et 36-1
La parole est à Mme la rapporteure.
L ’ amendement est adopté.
L’amendement n° 156 rectifié, présenté par Mme N. Delattre, MM. Artano, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Fialaire et Guérini, Mme Pantel, MM. Requier, Roux et Gold, Mme Guillotin et M. Guiol, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 7, deuxième phrase
1° Remplacer les mots :
de sorte que
par les mots :
en instaurant une comptabilité autonome pour
2° Supprimer les mots :
constituent une unité fonctionnelle présentée séparément
II. – Alinéa 11
Remplacer les mots :
leur budget annuel
par les mots :
l’ensemble de leurs ressources annuelles
La parole est à Mme Nathalie Delattre.
Ce qui distingue les associations mixtes des associations cultuelles, c’est que les premières sont déclarées comme ayant à la fois un objet cultuel et un objet non cultuel. Si leur classification est différente, il y a cependant entre ces deux divisions d’associations de très nombreux points de convergence.
Cet amendement vise donc à mieux encadrer les ressources financières des associations mixtes. Bien que ces structures ne soient pas exclusivement vouées au culte, il semble aujourd’hui nécessaire de leur imposer d’établir une comptabilité autonome permettant de distinguer les activités cultuelles, donc celles qui ont trait à l’exercice public d’un culte, et celles qui ne le sont pas.
L’article 30 du projet de loi impose spécifiquement aux associations loi 1901 à objet mixte de nouvelles obligations administratives et comptables. Elles doivent ainsi désormais faire apparaître séparément la comptabilité relative à leurs activités cultuelles.
L’amendement de notre collègue Delattre tend à proposer une amélioration rédactionnelle de cet article en prévoyant une comptabilité autonome. Nous souhaitons connaître l’avis du Gouvernement sur cette rédaction, qui semble apporter une clarification.
Nous sommes défavorables à l’amendement de Mme Delattre.
L’amendement nous semble satisfait par la présentation séparée des comptes annuels. La commission en demande donc le retrait ; à défaut, l’avis sera défavorable.
Je le maintiens, monsieur le président, car il apporte selon moi une clarification.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L’amendement n° 382 rectifié, présenté par MM. Maurey et Cigolotti, Mmes Vermeillet, Billon, Pluchet et Létard, MM. Canevet, Longeot, Louault, Moga, Delcros, Henno et Folliot, Mme Morin-Desailly, MM. Chasseing, Bonneau, Bonne et Lefèvre, Mme Demas, M. Mandelli, Mme Férat, M. Laménie, Mme Saint-Pé, MM. Sautarel et Pellevat, Mme Jacquemet, MM. Bouchet, D. Laurent, Mizzon et Vogel, Mmes Paoli-Gagin, Schalck, Herzog et Gruny, MM. A. Marc, Tabarot et Wattebled, Mme Bonfanti-Dossat, M. Le Nay, Mme Dumont, MM. Duffourg et Hingray et Mme de Cidrac, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 11
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Tout projet de construction, par les associations mentionnées au premier alinéa du présent article, d’édifices répondant à des besoins collectifs de caractère religieux fait l’objet d’un plan de financement prévisionnel mentionnant dans des conditions fixées par un décret en Conseil d’État, l’origine des fonds et certifié par un commissaire aux comptes. À l’issue de la réalisation du projet, un bilan financier est présenté dans les mêmes conditions.
La parole est à Mme Sylvie Vermeillet.
Cet amendement d’Hervé Maurey a pour objet de compléter les mesures de transparence financière prévues par le présent article en soumettant tout projet de construction d’un édifice du culte par une association à objet mixte relevant de la seule loi de 1901 à l’élaboration d’un plan de financement prévisionnel certifié par un commissaire aux comptes.
Cette mesure, issue du rapport d’information Les collectivités territoriales et le financement des lieux de culte, fait au nom de la délégation aux collectivités territoriales en 2015, a pour finalité d’accroître la traçabilité des flux financiers à l’origine des projets d’édifices du culte.
L’amendement tend à fixer les mêmes sanctions qu’en cas de non-publication d’un compte annuel par les associations cultuelles et les associations à objet mixte prévues par le présent projet de loi. Cette disposition a été adoptée par le Sénat dans le cadre du projet de loi pour un État au service d’une société de confiance (Essoc), puis supprimée par l’Assemblée nationale.
Il est complété par un amendement à l’article 33 qui tend à prévoir la même obligation de transparence en matière d’origine des fonds lorsqu’une association cultuelle est maître d’ouvrage d’un édifice cultuel.
Le sous-amendement n° 682 rectifié, présenté par MM. Dallier et Bascher, est ainsi libellé :
Amendement n° 382 rectifié, alinéa 3
Après la première phrase, insérer deux phrases ainsi rédigées :
Le plan de financement est transmis au représentant de l’État dans le département au plus tard lors du dépôt de la demande de permis de construire ou d’aménager. Il est rendu public selon des modalités fixées par le décret mentionné à la première phrase.
La parole est à M. Philippe Dallier.
Je n’ai déposé que deux amendements sur ce texte en commission. Le premier, vous l’avez évoqué, monsieur le ministre, visait à transférer au représentant de l’État la délivrance des permis de construire ou d’aménager pour les lieux de culte. Je me suis rangé à l’avis de la commission, qui avait les mêmes craintes que vous, et j’ai transformé ce transfert en avis simple du préfet.
Le second amendement tendait à assurer la transparence du financement des travaux au moment du dépôt du permis de construire ou d’aménager. La commission m’a demandé de transformer cet amendement en sous-amendement à celui de notre collègue Maurey – un autre viendra ultérieurement dans un autre cas de figure. L’idée ici est de communiquer le plan de financement au représentant de l’État dans le département.
La commission est favorable à l’amendement n° 382 rectifié, sous réserve de l’adoption du sous-amendement n° 682 rectifié de M. Dallier, permettant la communication du plan de financement de tout projet de construction d’un édifice du culte par une association loi de 1901 à objet mixte.
Il s’agit d’une mesure de transparence bienvenue. Un amendement très proche avait d’ailleurs été adopté voilà deux ans par notre assemblée lors de la discussion du projet de loi Essoc.
Le Gouvernement est favorable à cet amendement ainsi sous-amendé.
Mme Nathalie Goulet. Je me réjouis d’autant plus de voter cet amendement ainsi sous-amendé que celui que j’avais déposé, qui était moins bien rédigé, mais dans le même esprit, avait été retoqué par la commission. Ce qui compte, c’est le résultat !
Sourires.
Le sous-amendement est adopté.
L ’ amendement est adopté.
L’amendement n° 452 rectifié, présenté par M. Sueur, Mmes Harribey et de La Gontrie, M. Assouline, Mmes S. Robert, Monier et Meunier, MM. Marie et Magner, Mme Lepage, MM. Féraud, Leconte, Lozach, Kerrouche, Kanner, Bourgi, Durain, Redon-Sarrazy, Antiste et J. Bigot, Mmes Bonnefoy, Briquet et Conconne, M. P. Joly, Mme Jasmin, MM. Gillé, Raynal, Mérillou, Lurel, Temal et Tissot, Mme Conway-Mouret, MM. Jacquin, Montaugé et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 13
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Cette décision est susceptible de recours sur le fondement de l’article L. 521-2 du code de justice administrative.
La parole est à M. Jean-Yves Leconte.
L’article 30 du projet de loi a pour objectif de soumettre les associations mixtes, c’est-à-dire les associations de droit commun ayant un objet en partie cultuel, aux prescriptions d’ores et déjà applicables aux associations cultuelles telles qu’elles sont renforcées par ce projet de loi. L’échange que le ministre et la rapporteure ont eu sur l’amendement n° 652 du Gouvernement montre la complexité du sujet.
Or, en l’état, cette disposition ne met en œuvre aucune modalité permettant aux associations visées d’exercer leur droit à un recours juridictionnel. Cela est d’autant plus contestable qu’est ici en jeu l’effectivité de la liberté d’association, droit fondamental tant au titre du bloc de constitutionnalité que de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.
Pour remédier à cette insuffisance, nous proposons d’ouvrir au bénéfice des associations cultuelles un recours en référé contre l’astreinte qui leur est adressée lorsque le préfet juge qu’elles n’ont pas satisfait aux exigences imposées. Il s’agit d’octroyer aux associations concernées une contrepartie aux très nombreuses exigences et obligations nouvelles qui s’imposeront à elles à l’entrée en vigueur de ce texte.
L’amendement est déjà satisfait, le droit en vigueur garantissant évidemment le droit au recours, y compris en référé, contre toute décision administrative.
La commission en demande donc le retrait ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L’amendement n° 585 rectifié ter, présenté par MM. de Belenet, L. Hervé, Bonnecarrère, Duffourg, Détraigne, Capo-Canellas, Kern, Henno et Levi, Mmes Billon, Guidez et Saint-Pé, MM. S. Demilly et Laugier, Mme Morin-Desailly, MM. Chauvet, Le Nay, J.M. Arnaud et Folliot, Mme Gatel et M. Longeot, est ainsi libellé :
Alinéa 14
Rédiger ainsi cet alinéa :
« À la demande du représentant de l’État dans le département dans lequel est situé le siège social de l’association, le président du tribunal judiciaire, statuant en référé, peut, si l’association n’a pas satisfait à la mise en demeure à l’expiration du délai prévu au premier alinéa, enjoindre sous astreinte aux dirigeants de l’association de mettre en conformité son objet avec ses activités.
La parole est à M. Arnaud de Belenet.
Cet amendement a fait l’objet de discussions en commission, notamment sur le point de savoir à quel juge confier éventuellement cette mission.
Ses cosignataires sont soucieux de préserver la liberté d’association et la liberté d’exercice des cultes au moins autant que de lutter contre le séparatisme. Ils entendent donc confier au juge du contrat associatif, sur demande du préfet, le juge statuant en référé, le pouvoir d’enjoindre sous astreinte à une association de mettre en conformité son objet avec la réalité de ses activités, en l’occurrence cultuelles.
Nous étions partagés sur le sujet en commission, mais celle-ci a considéré qu’il ne fallait pas priver ces décisions de la rapidité et de l’efficacité de l’action du préfet. Rappelons que, de toute façon, ces décisions, comme je l’ai dit, sont susceptibles de recours.
Nous sommes donc défavorables à l’amendement, même si la commission en a effectivement longuement débattu.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L ’ article 30 est adopté.
L’amendement n° 396 rectifié n’est pas soutenu.
En conséquence, l’article 32 demeure supprimé.
Chapitre II
Renforcer la préservation de l’ordre public
Section 1
Contrôle du financement des cultes
L’amendement n° 48, présenté par Mme N. Goulet, est ainsi libellé :
Avant l’article 33
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le 21° de l’article 128 de la loi n° 2005-1720 du 30 décembre 2005 de finances rectificative pour 2005, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« …° Financement des associations régies par la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association, la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Églises et de l’État et la loi du 2 janvier 1907 concernant l’exercice public des cultes ; ».
La parole est à Mme Nathalie Goulet.
Plusieurs d’entre nous ont déposé des amendements concernant les dispositifs de contrôle des associations et des subventions prévus aux articles L. 12 et L. 14 du livre des procédures fiscales. Évidemment, notre livre de chevet est le jaune budgétaire sur l’effort financier de l’État en faveur des associations : le montant des dégrèvements accordés aux associations est tout de même assez spectaculaire.
Plutôt qu’un rapport, je propose par cet amendement que le Gouvernement institue un document de politique transversale, ou orange budgétaire, relatif aux financements des associations cultuelles. Nous disposerons ainsi de toutes les informations, ce qui nous permettra d’avoir une meilleure visibilité de l’ensemble des financements publics accordés aux associations.
Vous demandez un orange budgétaire, mais il existe déjà un jaune budgétaire consacré à l’effort financier de l’État en faveur des associations. L’amendement nous semble donc satisfait, même si le premier est un document de politique transversale et le second thématique.
Par ailleurs, faute de précision du caractère public des financements en question, le dispositif du présent amendement trouverait mal sa place au sein de tels documents budgétaires. La commission a donc émis un avis défavorable.
Non, je le retire, monsieur le président, même si le jaune budgétaire n’a strictement rien à voir avec ma demande.
L’amendement n° 48 est retiré.
L’amendement n° 574 rectifié bis, présenté par Mmes Assassi, Cukierman et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Avant l’article 33
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans les six mois suivant l’adoption du présent texte un rapport est remis au Parlement par le Gouvernement sur les relations diplomatiques et économiques avec les États finançant des cultes sur le territoire français.
La parole est à M. Pierre Ouzoulias.
Mes chers collègues, nous avons déjà eu ce débat à propos d’une affaire alsacienne. Il nous semble collectivement important d’évaluer exactement et en toute transparence les modalités, les formes et les volumes des ingérences étrangères dans l’organisation des cultes en France. Ces ingérences sont une réalité. Nous savons que certains pays mettent à profit leurs liens religieux et la relation avec leur diaspora pour intervenir dans la politique française, voire pour provoquer des actes et des propos violents contre certaines communautés.
J’exprime ici très solennellement toute ma solidarité avec la communauté arménienne, une nouvelle fois attaquée par Les Loups gris, qui continuent, malgré vos interventions, monsieur le ministre, à la prendre pour cible en maintenant un discours progénocidaire inadmissible dans notre République. Le Parlement, et c’est son honneur, a reconnu le génocide des Arméniens. Il est insupportable qu’une association, quelle qu’elle soit, dont on comprend bien qu’elle est le faux-nez du gouvernement Erdogan, continue à perpétrer des actes contre la communauté arménienne.
Des discussions sont en cours, à un haut niveau, entre la Turquie et l’Union européenne. Il nous semblerait normal, même si cela ne se fait pas au grand jour, que la question de l’ingérence d’États étrangers - la Turquie n’est pas la seule, bien sûr - soit un élément constitutif de notre politique diplomatique. On ne peut pas tout accepter d’États, même de soi-disant alliés au sein de l’OTAN !
S’agissant d’une demande de rapport, je le considère comme un amendement d’appel.
Le projet de loi visant justement à mieux connaître les financements étrangers des cultes, nous nous dirigeons vers une plus grande transparence, qui sera effectivement utile. Le Parlement pourra dès lors créer une mission d’information ou une commission d’enquête pour étudier les résultats obtenus grâce à ce projet de loi.
La commission, vous l’aurez compris, a émis un avis défavorable.
Même avis. J’aurais pu émettre un avis favorable, mais il ne serait sans doute pas possible au Gouvernement de remettre un tel rapport, faute de connaître les financements étrangers sur le sol de la République. C’est tout l’objet du projet de loi, Mme la rapporteure l’a dit, je l’en remercie, de savoir qui finance quoi sur notre sol. Nous avons quelques idées, mais les proportions ne sont pas évidentes à établir, surtout qu’il est parfois fait usage de faux-nez…
Ils passent par des fondations, des personnes individuelles, des entreprises, des associations, pas toujours des États, parfois même par des constructions en direct pour les rétrocéder ensuite. Ce n’est pas si facile à documenter, mais il est évident que, dans quelques années, monsieur le sénateur, le Gouvernement sera en mesure de fournir un rapport grâce à cette loi.
Inutile de vous dire combien j’ai été sensible à l’intervention de notre collègue Pierre Ouzoulias. Cet amendement d’appel, j’en comprends les motifs, j’en partage pleinement les objectifs. Il est aussi pour moi l’occasion de déplorer que Les Loups gris, malgré les injonctions qui leur sont adressées, continuent à prospérer, à menacer et à narguer la République.
Je regrette que nous n’allions pas plus loin à l’occasion de ce texte, comme l’a proposé l’un de mes collègues à l’Assemblée nationale, et que la reconnaissance par la France du génocide de 1915 n’emporte pas de dispositif de pénalisation du négationnisme.
Cette non-pénalisation empêche toute condamnation des propos négationnistes du génocide de 1915, ou de tout autre génocide reconnu par la loi française, des propos arménophobes ou des propos portant atteinte à la dignité, à la mémoire et à la justice proférés sur notre sol.
Il ne s’agit pas d’une revendication communautariste. Il s’agit de protéger des Français qui ont souffert dans leur histoire, dans leur mémoire. Cette revendication s’appuie sur un texte voté par le Parlement français.
Aujourd’hui, cette situation de concurrence des mémoires est totalement anormale entre un génocide reconnu par la loi française, qui emporte un système de pénalisation, et un autre génocide, également reconnu par le Parlement, qui n’en emporte pas.
Les provocations que nous subissons tant d’un point de vue diplomatique – je pense à l’incident lors de la visite en Turquie de Mme Von der Leyen, qui nous a tous touchés en tant que citoyens européens – que sur notre territoire – listes communautaires ou mosquée Millî Görüs, par exemple – montrent qu’il est absolument nécessaire d’aller plus loin.
Monsieur le ministre, je regrette vraiment que les amendements que j’ai proposés, sur ce texte ou sur d’autres, ne trouvent pas…
… un écho favorable auprès du Gouvernement, qui s’honorerait à faire en sorte que nous puissions pénaliser enfin les propos de ceux qui nient l’existence des génocides reconnus par la loi française.
Cette demande de rapport ne me semble pas illégitime – bien au contraire ! – dans la mesure où ce texte a vocation à introduire une plus grande transparence sur le financement des cultes par des États étrangers. Il y a un décalage entre vos arguments et l’objectif visé.
Il me semble logique de vouloir connaître le résultat des mesures de traçabilité que nous avons votées pour en tirer un certain nombre de conséquences sur nos relations diplomatiques et économiques – vous avez cité la Turquie, nous pourrions aussi évoquer l’Arabie saoudite ou d’autres pays.
Sur des sujets aussi majeurs, il n’est pas illégitime de demander un tel rapport.
Certes, le délai de six mois après promulgation de la loi est peut-être un peu court. Si l’amendement était rectifié pour le porter à un ou deux ans, cette disposition aurait un réel intérêt.
C’est un sujet que nous connaissons assez bien ici : André Reichardt et moi-même avons rédigé un rapport dans le cadre de la mission d’information sur l’organisation, la place et le financement de l’Islam en France et de ses lieux de culte, présidée par Corinne Féret.
Nous avons eu la curiosité, que d’autres n’ont pas eue, de demander à chacune des ambassades étrangères les chiffres des financements, directs et indirects, qu’ils ont octroyés. Bien évidemment, rien ne les obligeait à dire la vérité, mais notre rapport de 2016 dresse déjà un état assez précis des montants financés par l’Algérie, le Maroc, la Turquie et l’Arabie saoudite – le Qatar ne nous a pas répondu et les Émirats arabes unis nous ont fourni un document. Tout cela figure en annexe de notre rapport.
Comme je ne suis pas une femme de renoncement, et pour ne pas nourrir le fantasme d’une France envahie de pétrodollars, j’ai envoyé la même demande cette année. L’Arabie saoudite a fourni des chiffres extrêmement précis sur ses financements, entre 2016 et 2021, de mosquées à Nanterre, à Lyon, à Tours et d’un centre islamique. L’ambassade précise que les fonds ont été transférés directement de son compte aux entreprises qui ont effectué les travaux de construction, sur rapport de l’architecte du projet.
Monsieur le ministre, je vous propose une mesure qui n’est pas de nature législative : procédons à un tour de table des ambassades concernées et élaborons un guide de bonne pratique des financements, de façon à connaître très précisément les choses. Si vous demandez ces informations, vous les aurez ; c’est une évidence.
Par ailleurs, Tracfin suit ces financements de très près. Nous disposons donc déjà de premiers éléments. Le Parlement peut également être informé. C’est un sujet très important, qui ne doit pas susciter de fantasmes. Les ambassades ont tout intérêt à travailler avec nous pour leur propre réputation. Aujourd’hui, les sujets de terrorisme ou de blanchiment intéressent tout le monde. Les ambassades ont donc intérêt à la plus grande transparence, y compris quand elles salarient des ministres du culte ou des psalmodieurs.
Interrogeons les ambassades au lieu de leur faire un procès d’intention.
Je suis tellement habitué aux raisonnements de la commission des lois que je finis par avoir pour réflexe naturel de refuser les amendements qui tendent à demander des rapports.
Il faut savoir se remettre en cause.
Je partage les propos de M. Leconte. Il ne s’agit pas de profiter de cet amendement pour parler d’un sujet, certes très important, mais exclusif et extérieur à l’objet du débat. En revanche, nous parlons tellement des financements étrangers qu’il me semblerait très utile que le Gouvernement communique à la représentation nationale, en toute transparence, les informations dont il dispose sur tous les financements étrangers, sans aucune exclusive.
Dans cet esprit-là, nous voterons, à titre exceptionnel, cet amendement.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
(Non modifié)
L’article 21 de la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Églises et de l’État est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, les mots : « et dressent » sont remplacés par les mots : « comprenant un bilan, un compte de résultat et une annexe. Ces comptes sont établis conformément à un règlement de l’Autorité des normes comptables, qui prévoit notamment la tenue d’un état séparé des ressources provenant d’un État étranger, d’une personne morale étrangère ou d’une personne physique non résidente en France. Les associations et les unions dressent » ;
2° Après le même premier alinéa, sont insérés quatre alinéas ainsi rédigés :
« Elles dressent également une liste des lieux dans lesquels elles organisent habituellement l’exercice public du culte.
« Elles sont tenues de présenter les documents mentionnés aux deux premiers alinéas du présent article ainsi que le budget prévisionnel de l’exercice en cours sur demande du représentant de l’État dans le département.
« Lorsqu’elles ont bénéficié, au cours de l’exercice comptable considéré, d’avantages ou de ressources mentionnés au I de l’article 19-3 de la présente loi, elles assurent la certification de leurs comptes, sans préjudice de l’application de l’article 4-1 de la loi n° 87-571 du 23 juillet 1987 sur le développement du mécénat.
« Elles établissent un traité d’apport lorsqu’elles reçoivent un apport en nature en pleine propriété, en jouissance, en usufruit ou en nue-propriété. Ce traité, qui est annexé aux comptes de l’exercice en cours, comporte une description précise de l’apport, sa valeur estimée et ses conditions d’affectation. Le cas échéant, il précise également la contrepartie pour l’apporteur et les conditions de reprise du bien. » ;
3°
Supprimé
4° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Un décret en Conseil d’État détermine les modalités d’application du quatrième alinéa du présent article, y compris le montant des avantages et ressources à compter duquel s’applique l’obligation de certification. »
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 335 est présenté par Mme Benbassa, MM. Benarroche et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme Taillé-Polian.
L’amendement n° 454 rectifié est présenté par M. Sueur, Mmes Harribey et de La Gontrie, M. Assouline, Mmes S. Robert, Monier et Meunier, MM. Marie et Magner, Mme Lepage, MM. Féraud, Leconte, Lozach, Kerrouche, Kanner, Bourgi, Durain, Redon-Sarrazy, Antiste et J. Bigot, Mmes Bonnefoy, Briquet et Conconne, M. P. Joly, Mme Jasmin, MM. Gillé, Raynal, Mérillou, Lurel, Temal et Tissot, Mme Conway-Mouret, MM. Jacquin, Montaugé et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Esther Benbassa, pour présenter l’amendement n° 335.
Cet amendement vise à supprimer la nouvelle sanction de non-respect des obligations administratives et comptables imposées aux associations cultuelles dans cet article 33.
Ce dernier prévoit ainsi une astreinte pour les dirigeants de ces associations qui ne souhaitent pas produire leurs comptes annuels. Ces nouvelles contraintes nuisent gravement à la vitalité des petites et moyennes associations cultuelles.
Enfin, il est curieux de penser que cette mesure sera utile pour lutter contre l’islam radical, objectif apparent de ce projet de loi.
Dans la pratique, ce dispositif requiert une obligation de certification des comptes de la part des associations cultuelles. Or une telle opération est très lourde pour les petites associations. Les organisations confessionnelles parfaitement respectueuses des valeurs de la République seront ainsi soumises à de multiples complications bureaucratiques.
Ce dispositif constitue une nouvelle ingérence de l’État dans le libre exercice des cultes, raison pour laquelle le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires en demande la suppression.
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour présenter l’amendement n° 454 rectifié.
Nous nous inscrivons dans la droite ligne des propos de Mme Benbassa. La logique que nous avons exposée en discussion générale et en début d’après-midi reste inchangée : nous considérons que la liberté de culte doit être intégrale, garantie par l’État et par le principe de laïcité.
Il faut dire, redire et redire encore qu’il ne revient pas à l’État d’organiser les cultes, mais de veiller à ce que la loi républicaine s’applique, y compris dans les sphères de la religion.
C’est donc en suivant cette logique que nous demandons la suppression de l’article 33, qui va alourdir considérablement la tâche d’un certain nombre d’associations. Par ailleurs, comme je l’ai déjà souligné, cet article n’est pas de nature à inciter des associations loi 1901 à souscrire au statut de 1905, ce qui est pourtant l’objectif du texte.
L’État ne doit pas poursuivre dans cette volonté d’organiser les cultes.
Ces deux amendements tendent à supprimer un article qui doit nous permettre de mieux connaître les comptes des associations cultuelles, notamment leurs financements étrangers.
Vous venez de voter pour un amendement qui visait à demander un rapport sur ces financements. Je ne comprends donc pas que vous souhaitiez maintenant supprimer cet article, …
Protestations sur les travées du groupe SER.
Nous demandions des informations à l’État, mais nous ne sommes pas favorables au fait d’imposer cette contrainte aux associations !
… qui vise à mieux identifier et contrôler ces financements étrangers. Tout cela me semble un peu compliqué.
La commission est défavorable à ces deux amendements.
Les amendements ne sont pas adoptés.
Je suis saisi de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 405 rectifié, présenté par Mme N. Delattre, MM. Artano, Bilhac et Cabanel, Mmes M. Carrère et Guillotin, M. Guiol, Mme Pantel et MM. Requier et Roux, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 2, deuxième phrase
Remplacer les mots :
, qui prévoit notamment la tenue d’un état séparé des ressources provenant d’un État étranger, d’une personne morale étrangère ou d’une personne physique non résidente en France
par une phrase ainsi rédigée :
En outre, elles établissent un état séparé des avantages et ressources provenant d’un État étranger, d’une personne morale étrangère ou d’une personne physique non résidente en France.
II. – Alinéa 6
Remplacer les mots :
assurent la certification de leurs
par les mots :
font attester l’état séparé des avantages et ressources mentionné au premier alinéa par un commissaire aux
III. – Après l’alinéa 6
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Elles assurent également la certification de leurs comptes lorsque l’ensemble de leurs ressources annuelles dépasse un seuil défini par décret en Conseil d’État.
IV. – Alinéa 7, deuxième phrase
Remplacer les mots :
qui est annexé aux comptes de l’exercice en cours
par les mots :
qui est mentionné dans l’annexe des comptes de l’exercice
V. – Alinéa 10
1° Remplacer les mots :
du quatrième alinéa
par les mots :
des quatrième et cinquième alinéas
2° Après le mot :
obligation
insérer les mots :
d’attestation et le montant des ressources annuelles à compter duquel s’applique l’obligation
La parole est à Mme Nathalie Delattre.
Dans le prolongement des amendements n° 403 rectifié et 404 rectifié bis, déposés respectivement aux articles 12 bis et 31, et afin de faciliter le traitement des comptes annuels des associations cultuelles, cet amendement vise à ce que tout traité d’apport – document attestant le transfert d’un bien ou d’une propriété au profit d’une association cultuelle – soit mentionné dans l’annexe des comptes annuels, sans toutefois y figurer.
Le traité d’apport est bien souvent un document très volumineux : l’annexer risquerait à coup sûr de complexifier la lecture des comptes annuels que nous voulons simple, claire et intelligible.
Pour autant, ceux qui liront et traiteront les comptes annuels de ces associations cultuelles doivent avoir accès à toutes les informations et être en mesure de demander aux dirigeants, le cas échéant, les documents afférents.
L’amendement n° 455 rectifié, présenté par M. Sueur, Mmes Harribey et de La Gontrie, M. Assouline, Mmes S. Robert, Monier et Meunier, MM. Marie et Magner, Mme Lepage, MM. Féraud, Leconte, Lozach, Kerrouche, Kanner, Bourgi, Durain, Redon-Sarrazy, Antiste et J. Bigot, Mmes Bonnefoy, Briquet et Conconne, M. P. Joly, Mme Jasmin, MM. Gillé, Raynal, Mérillou, Lurel, Temal et Tissot, Mme Conway-Mouret, MM. Jacquin, Montaugé et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 6
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.
L’amendement n° 395 n’est pas soutenu.
L’amendement n° 679, présenté par Mmes Vérien et Eustache-Brinio, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Alinéas 9 et 10
Remplacer ces alinéas par cinq alinéas ainsi rédigés :
4° Sont ajoutés quatre alinéas ainsi rédigés :
« Un décret en Conseil d’État détermine les modalités d’application du quatrième alinéa du présent article, notamment :
« 1° Le montant des avantages et ressources en dessous duquel l’obligation de certification ne s’applique pas ;
« 2° Le montant des avantages et ressources en dessous duquel l’obligation de certification est remplie par la désignation d’un commissaire aux comptes nommé pour un mandat de trois exercices et dispensé de certaines diligences définies par décret en Conseil d’État. Une norme d’exercice professionnel homologuée par arrêté du ministre de la justice précise les modalités d’exécution des diligences à accomplir par le commissaire aux comptes et le formalisme qui s’attache à la réalisation de sa mission dans ce cadre ;
« 3° Le montant des avantages et ressources au-dessus duquel l’obligation de certification est remplie par la désignation d’un commissaire aux comptes dans les conditions prévues à l’article L. 612-4 du code de commerce. »
La parole est à Mme la rapporteure, pour présenter cet amendement et donner l’avis de la commission sur les autres amendements en discussion commune.
Cet article, qui permet un meilleur contrôle des comptes des associations cultuelles, et notamment des financements en provenance de l’étranger, impose une certification par des commissaires aux comptes au-delà d’un certain seuil.
Or les cultes nous ont alertés non seulement sur le coût d’une telle certification, mais aussi sur le fait qu’une mission de commissaire aux comptes se déroule en six ans – en deçà, il s’agit non pas d’une certification, mais d’une attestation, qui n’a pas la même valeur. Par ailleurs, la certification permet aux commissaires aux comptes de procéder à des déclarations à Tracfin s’ils soupçonnent quoi que ce soit de frauduleux dans les comptes.
La commission approuve la demande de certification, dont elle comprend et partage l’objectif. Toutefois, il lui paraît difficile d’imposer à ces associations une mission dont le coût peut s’élever à 2 000 ou 3 000 euros par an. Comme nous l’ont fait remarquer les représentants du culte protestant, un temple qui recevrait une donation ponctuelle de 15 000 euros d’une église américaine devrait s’acquitter de 2 000 à 3 000 euros de frais de certification par an pendant six ans, c’est-à-dire près de 18 000 euros, soit plus que le montant du don lui-même !
Cette situation nous ayant semblé assez injuste, nous avons essayé d’obtenir des commissaires aux comptes des missions spécifiques.
Nous proposons, par cet amendement, de fixer des seuils en deçà desquels l’obligation de certification des associations cultuelles n’ayant bénéficié que de dons ponctuels ou de faible montant soit ne s’appliquerait pas, soit ne courrait que sur trois exercices et inclurait des diligences allégées.
Le montant des avantages et ressources en deçà desquels l’obligation de certification ne s’appliquerait pas serait défini par décret en Conseil d’État. Au-dessus de ces seuils, l’obligation de certification standard pour les associations s’appliquerait.
Il s’agit de prendre en compte les situations spécifiques d’associations qui touchent très peu d’argent chaque année ou de manière très ponctuelle. Ces dons n’ont pas vocation à financer les commissaires aux comptes.
Je demande donc aux auteurs des amendements n° 405 rectifié et 455 rectifié de bien vouloir les retirer au profit de l’amendement n° 679 de la commission ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.
J’entends les arguments de Mme la rapporteure, auxquels je souscris d’autant plus volontiers que je me suis engagé à l’Assemblée nationale à fixer, par voie réglementaire, un seuil de 153 000 euros – qui permet déjà de distinguer la petite de la grosse association : en dessous de ce montant, l’obligation de certification par un commissaire aux comptes ne s’appliquera pas aux associations cultuelles régies par la loi de 1905.
Cette distinction doit nous permettre de forcer la migration vers la loi de 1905 : les associations loi de 1901 s’exposent en effet, dès le premier euro reçu, au contrôle comptable des commissaires aux comptes. Après tout, cette situation n’a rien d’extraordinaire : les partis politiques, même très petits, sont soumis à la certification. Une fois la sincérité de leurs comptes certifiée, ils peuvent délivrer des reçus fiscaux.
Les associations loi de 1901 et les associations cultuelles loi de 1905 peuvent émettre des reçus fiscaux et engager, à ce titre, l’argent des contribuables. Cela mérite un minimum de contrôle comptable, auquel vient s’ajouter la disposition concernant les financements extracommunautaires de plus de 10 000 euros.
J’entends bien la question de la petite association qui reçoit une subvention de plus de 10 000 euros et dont les frais de commissaires aux comptes risquent de lui coûter plus cher au final. S’il s’agit d’une association loi de 1905, tant que le seuil de 153 000 euros n’est pas dépassé, elle n’est pas obligée de faire appel à un commissaire aux comptes ; si elle est en loi de 1901, je souhaite qu’elle ait l’obligation d’y faire appel dès le premier euro perçu, comme je me suis engagé à le faire dans un décret que je porterai. Je ne souhaite pas faire d’exception dans ce dernier cas pour ne pas nous priver d’une arme de migration vers le régime de la loi de 1905.
J’entends bien vos arguments sur les ressources, monsieur le ministre, mais le seuil de 10 000 euros pour les dons étrangers est maintenu, y compris pour les associations loi de 1905, qui devront alors faire appel à un commissaire aux comptes. C’est essentiellement pour ces dernières que nous souhaitons intervenir.
Sauf erreur de ma part, si une association loi de 1905 touche 10 000 euros ou plus de l’étranger, même en plusieurs versements, elle n’aura pas à faire appel à un commissaire aux comptes tant que le montant perçu reste en deçà de 153 000 euros – ce seuil ne figure pas dans le texte, mais je m’engage à le fixer par décret.
Encore une fois, pour les associations cultuelles loi de 1905, le recours aux commissaires aux comptes n’est pas exigé en dessous du seuil de 153 000 euros, indépendamment des 10 000 euros venant de l’étranger.
En revanche, pour les associations loi de 1901 – je veux que les choses soient bien claires entre nous –, je demande le commissariat aux comptes afin de « forcer » la migration vers le régime de la loi de 1905.
Ai-je été clair, madame la rapporteure ?
Mme Dominique Vérien, rapporteure, se montre dubitative.
Ces mesures réglementaires figureront dans un décret en Conseil d’État. Ainsi, une association loi de 1905 qui dispose d’un budget de 152 000 euros et qui perçoit 10 000 euros de l’étranger n’aura pas à faire appel à un commissaire aux comptes. Il me semble que cela devrait répondre à votre préoccupation.
Ce n’était pas tout à fait notre lecture. Aussi nous maintenons notre amendement.
L’amendement de la commission des lois ne tend pas à prévoir l’inscription des traités d’apport dans les comptes. Est-il possible de le rectifier ou de le sous-amender pour les inclure ? À défaut, je maintiens mon amendement.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L ’ amendement est adopté.
L’amendement n° 383 rectifié bis, présenté par MM. Maurey et Cigolotti, Mme Vermeillet, M. Canevet, Mmes Pluchet et Billon, MM. Longeot, Louault, Moga, Delcros, Henno et Folliot, Mme Morin-Desailly, MM. Chasseing, Bonneau, Bonne et Lefèvre, Mme Demas, M. Mandelli, Mme Paoli-Gagin, MM. Vogel, Mizzon, D. Laurent et Bouchet, Mme Jacquemet, MM. Pellevat et Sautarel, Mme Saint-Pé, M. Laménie, Mmes Férat et Létard, M. A. Marc, Mme Gruny, MM. P. Martin, Tabarot et Wattebled, Mme Bonfanti-Dossat, M. Le Nay, Mme Dumont, MM. Duffourg et Hingray et Mmes de Cidrac, Schalck et Herzog, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 7
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Tout projet de construction, par les associations et les unions, d’édifices répondant à des besoins collectifs de caractère religieux fait l’objet d’un plan de financement prévisionnel mentionnant, dans des conditions fixées par un décret en Conseil d’État, l’origine des fonds et certifié par un commissaire aux comptes. À l’issue de la réalisation du projet, un bilan financier est présenté dans les mêmes conditions. »
La parole est à Mme Sylvie Vermeillet.
Cet amendement vise à compléter les mesures de transparence financière prévues par le présent article en soumettant tout projet de construction d’un édifice du culte par une association cultuelle à l’élaboration d’un plan de financement prévisionnel, certifié par un commissaire aux comptes.
Il tend ainsi à compléter les dispositions de l’amendement n° 382 rectifié que nous avons adopté à l’article 30.
Cette mesure viendrait utilement compléter les obligations de transparence qui pèsent sur ces associations en permettant de connaître, avec fiabilité, l’origine des fonds rendant possible la construction d’un édifice cultuel, dont le plan de financement devra être certifié par un commissaire aux comptes.
Cette disposition a déjà été adoptée par le Sénat dans le cadre de l’examen de la loi pour un État au service d’une société de confiance.
Le sous-amendement n° 683 rectifié, présenté par MM. Dallier et Bascher, est ainsi libellé :
Amendement n° 383 rectifié, alinéa 3
Après la première phrase, insérer deux phrases ainsi rédigées :
Le plan de financement est transmis au représentant de l’État dans le département au plus tard lors du dépôt de la demande de permis de construire ou d’aménager. Il est rendu public selon des modalités fixées par le décret mentionné à la première phrase.
La parole est à M. Philippe Dallier.
Ce sous-amendement suit la même logique que celle de mon sous-amendement n° 682 rectifié.
Pour les mêmes raisons, la commission est favorable à cet amendement et à ce sous-amendement.
Le sous-amendement est adopté.
L ’ amendement est adopté.
L ’ article 33 est adopté.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à vingt heures, est reprise à vingt-et-une heures trente, sous la présidence de Mme Valérie Létard.