La séance est ouverte à neuf heures trente-cinq.
Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
L’ordre du jour appelle l’examen de trois projets de loi tendant à autoriser la ratification ou l’approbation de conventions internationales.
Pour ces trois projets de loi, la conférence des présidents a retenu la procédure simplifiée.
Je vais donc les mettre successivement aux voix.
Est autorisée l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume des Pays-Bas relatif à la coopération insulaire en matière policière à Saint-Martin (ensemble deux annexes), signé à Paris le 7 octobre 2010, et dont le texte est annexé à la présente loi.
Je mets aux voix l’article unique constituant l’ensemble du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume des Pays-Bas relatif à la coopération insulaire en matière policière à Saint-Martin (projet n° 355, texte de la commission n° 385, rapport n° 384).
Le projet de loi est adopté définitivement.
Est autorisée l'approbation du protocole entre le Gouvernement de la République française et le conseil des ministres de la République d'Albanie portant sur l'application de l'accord entre la Communauté européenne et la République d'Albanie concernant la réadmission des personnes en séjour irrégulier signé le 14 avril 2005 à Luxembourg (ensemble deux annexes), signé à Tirana le 8 avril 2013, et dont le texte est annexé à la présente loi.
Je mets aux voix l’article unique constituant l’ensemble du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant l’approbation du protocole entre le Gouvernement de la République française et le conseil des ministres de la République d'Albanie portant sur l'application de l'accord entre la Communauté européenne et la République d'Albanie concernant la réadmission des personnes en séjour irrégulier (projet n° 354, texte de la commission n° 397, rapport n° 396).
Le projet de loi est adopté définitivement.
Est autorisée la ratification de la convention n° 188 de l'Organisation internationale du travail relative au travail dans la pêche, adoptée à Genève le 14 juin 2007, et dont le texte est annexé à la présente loi.
Je mets aux voix l’article unique constituant l’ensemble du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, autorisant la ratification de la convention n° 188 de l’Organisation internationale du travail relative au travail dans la pêche (projet n° 353, texte de la commission n° 399, rapport n° 398).
Le projet de loi est adopté définitivement.
L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, considéré comme adopté par l’Assemblée nationale en application de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution, après engagement de la procédure accélérée, pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques (projet n° 300, texte de la commission n° 371, rapport n° 370, tomes I, II et III).
Nous poursuivons la discussion du texte de la commission spéciale.
Titre II
Investir
Chapitre Ier
Investissement
Section 2
Améliorer le financement
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus, au sein de la section 2 du chapitre Ier du titre II, à l’article 35 bis A.
(Supprimé)
L'amendement n° 1097, présenté par Mme Assassi, MM. Bocquet et Foucaud, Mme Beaufils et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
I. – Au 1° du III de l’article L. 3332-17-1 du code du travail, le pourcentage : « 35 % » est remplacé par le pourcentage : « 50 % ».
II. – Les pertes éventuelles de recettes résultant pour l’État du I sont compensées, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Dominique Watrin.
Cet amendement vise à renforcer les conditions auxquelles certains organismes de financement peuvent être assimilés à des entreprises solidaires d’utilité sociale agréées en application de l’article L. 3332-17-1 du code du travail.
En l’état actuel du droit, pour qu’un organisme de financement soit assimilable à une entreprise solidaire d’utilité sociale agréée, son actif doit être composé pour au moins 35 % de titres émis par des entreprises de l’économie sociale et solidaire définies à l’article 1er de la loi du 31 juillet 2014 relative à l’économie sociale et solidaire, dont au moins cinq septièmes de titres émis par des entreprises solidaires d’utilité sociale. Nous proposons de porter le premier pourcentage à 50 %.
Lors de l’examen du projet de loi relatif à l’économie sociale et solidaire, nous avions insisté sur la nécessité de garantir le respect des principes fondateurs de ce secteur : la liberté d’adhésion, la gestion démocratique, la non-lucrativité individuelle, l’utilité collective ou sociale du projet et la mixité des ressources. Nous avions également mis en garde contre la démarche inclusive visant à intégrer les sociétés commerciales ou les organismes financiers dans l’économie sociale et solidaire. En particulier, nous avions dénoncé l’élargissement du champ de l’agrément d’entreprise solidaire d’utilité publique ; cet agrément ouvrant droit à des dispositifs de soutien fiscal, à des réductions d’impôt et à des aides publiques, il doit être irréprochable.
Le présent amendement procède de notre volonté de renforcer les moyens de développer les entreprises solidaires tout en instaurant des garde-fous à la démarche inclusive désormais entérinée dans la loi.
Les acteurs économiques, y compris ceux qui financent l’économie sociale et solidaire, ont besoin de stabilité. La loi du 31 juillet 2014 relative à l’économie sociale et solidaire n’ayant même pas un an, la commission spéciale a émis un avis défavorable sur cet amendement.
L’avis du Gouvernement est identique à celui de la commission spéciale, non seulement pour la raison importante que Mme la corapporteur vient d’exposer, mais aussi parce que l’adoption de cet amendement présente un risque.
Trois catégories d’organismes peuvent bénéficier de l’agrément ouvrant droit aux financements d’épargne salariale : les entreprises qui font la démonstration que leur modèle économique a un impact social, les entreprises agréées de droit du fait de leur statut et les organismes de financement et les établissements de crédit orientés vers l’économie sociale et solidaire. Ces derniers, pour être assimilés aux entreprises solidaires d’utilité sociale agréées, doivent détenir un actif composé pour au moins 35 % de titres émis par des entreprises de l’économie sociale et solidaire, dont au moins cinq septièmes émis par des entreprises agréées ; ils doivent donc satisfaire à un double critère.
Augmenter de 35 % à 50 % la part des actifs émis par des entreprises de l’économie sociale et solidaire qui doit être atteinte entraînerait selon moi une réduction de la liquidité des organismes de financement, et donc de leur nombre potentiel, ce qui serait contre-productif. C’est la raison pour laquelle, même si je souscris à l’intention des auteurs de l’amendement n° 1097, je leur demande de bien vouloir le retirer. S’il est maintenu, le Gouvernement ne pourra qu’y être défavorable, car il ne faudrait pas que, du fait du durcissement du double critère, moins d’entreprises de l’économie sociale et solidaire puissent se financer par cette voie.
À propos de l’économie sociale et solidaire, je souhaite apporter une précision au sujet du débat qui s’est tenu hier soir sur les moyens d’accroître le financement de ce secteur. Si les amendements présentés par le groupe socialiste, le groupe écologiste et le RDSE ont été rejetés, c’est parce qu’ils n’étaient pas techniquement satisfaisants. L’idée proposée n’en était pas moins bonne, ce que j’aurais dû mieux souligner. Je prends l’engagement qu’un travail sera mené dans cette direction en vue de la nouvelle lecture du projet de loi.
M. Jean Desessard s’en félicite.
Il est exact que le renforcement du critère pourrait présenter l’inconvénient décrit par M. le ministre. À nos yeux, toutefois, le plus important est de préserver l’éthique de l’économie sociale et solidaire. En somme, c’est une affaire de priorité : en ce qui nous concerne, nous donnons la priorité à l’éthique, raison pour laquelle nous maintenons notre amendement.
Je déplore que la commission spéciale ait supprimé l’article 35 bis A du projet de loi, qui comportait une mesure favorable aux incubateurs et aux pépinières de la région d’Île-de-France ; je rappelle que les membres du groupe socialiste se sont opposés à cette suppression, que je n’ai pas comprise. Monsieur le président de la commission spéciale, vous qui êtes aussi francilien, vous savez que l’attractivité de cette région bénéficie à l’ensemble du pays !
Le groupe CRC propose de rétablir cet article dans une rédaction modifiée, qui donne la priorité à l’économie sociale et solidaire. Je souscris à leur intention, même si je pense que l’argumentation juridique et technique de M. le ministre est justifiée. En tout cas, je trouve dommage qu’on ait fait passer à la trappe une mesure favorable à l’ensemble des entreprises de l’Île-de-France. On ne peut pas prétendre renforcer l’attractivité et la compétitivité tout en supprimant des mesures qui y concourent !
Cette suppression est d’autant plus regrettable que l’activité des entreprises franciliennes profite à tout le pays. Il suffit de considérer le poids des contribuables franciliens dans le produit de l’impôt sur le revenu pour mesurer que la richesse produite dans notre région est largement redistribuée sur l’ensemble du territoire.
Je suis d’accord avec Mme Bricq, car l’article 35 bis A du projet de loi comportait une mesure favorable aux incubateurs, mesure tout à fait positive pour l’attractivité parisienne.
Je ne pensais pas refaire ce débat. Certes, on avait considéré que le présent article proposait l’institution d’une nouvelle niche fiscale alors que l’effet désincitatif sur l’installation d’incubateurs en Île-de-France tant de la taxe annuelle sur les locaux à usage de bureaux, de commerce ou de stockage que de la redevance sur la création de bureaux, de locaux commerciaux et de stockage ne semblait pas clairement démontré.
Par ailleurs, la rédaction de l’article concernant la définition des incubateurs posait un problème. D'ailleurs, en séance publique, à l’Assemblée nationale, tant les députés que le Gouvernement avaient indiqué que la rédaction actuelle ne permettait pas de couvrir précisément l’objectif visé et pourrait conduire à des abus. C’est ce qui a été dit en commission spéciale, et c’est pourquoi cette dernière a supprimé l’article, aucun amendement n’ayant été déposé de nature à lever les objections et les incertitudes.
Mme Catherine Deroche, corapporteur. Bien sûr, mais j’y insiste, aucun amendement n’a été déposé permettant de lever les obstacles et les incertitudes.
Mme Éliane Assassi s'exclame.
Mme Bricq m'a interpellé, et je souhaite réagir rapidement. Si Mme la corapporteur a bien expliqué les raisons pour lesquelles la commission a supprimé l’article 35 bis A, Mme Bricq a abordé un problème de fond, celui des effets de la taxe précitée sur les locaux à usage de bureaux, de commerce ou de stockage en Ile-de-France.
Selon moi, le dispositif de 2010, aménagé en 2014, a un effet désincitatif extrêmement important en première et en deuxième couronne, à tel point qu’il faudrait être en charge foncière négative pour faire du bureau dans un certain nombre de sites – c'est le cas dans ma commune, mais bien d’autres sont concernées. Je crois que subsiste un problème de zonage ; de nombreux territoires qui pourraient muter avec l’émergence d’activités tertiaires et tout ce qu’elle impliquerait en termes d’emplois et d’entraînement économique, sont confrontés à ce problème.
Je pense qu’il faudrait réfléchir posément – peut-être avec M. le ministre et ses services, un peu plus tard – à une évolution de cette taxe sur les bureaux, dont les taux, à mon avis démesurés pour beaucoup de territoires, finissent par tuer certains marchés, notamment le marché du tertiaire.
L'amendement n'est pas adopté.
(Supprimé)
L'amendement n° 1098, présenté par Mme Assassi, MM. Bocquet et Foucaud, Mme Beaufils et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
I. – Après la première phrase du quatrième alinéa de l’article L. 221-5 du code monétaire et financier, est insérée une phrase ainsi rédigée :
« Le tiers de ce montant est destiné aux entreprises répondant aux critères de la loi n° 47-1775 du 10 septembre 1947 portant statut de la coopération ou aux entreprises faisant l’objet de la procédure de reprise d’entreprise par les salariés définie au chapitre X du titre III du livre II du code de commerce. »
II. – Les pertes de recettes éventuelles résultant pour l’État de l’application du I sont compensées à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits fixés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Dominique Watrin.
L’amendement que nous défendons vise à favoriser l’allocation des ressources tirées de l’épargne dite « réglementée non centralisée » en direction des sociétés coopératives et des projets de reprise d’entreprise par les salariés.
Dans un contexte de chômage de masse où les entreprises ferment, laissant trop souvent les salariés sans solution, il nous semble primordial d’aider au développement de projets réellement innovants que constituent ces modes d’organisation. En effet, ces projets sont le plus souvent la meilleure garantie du maintien de l’emploi et de l’activité dans les entreprises concernées.
En outre, les possibilités de financement existent. On estime aujourd’hui que le livret A et le livret de développement durable, en épargne non centralisée, représentent 100 milliards d’euros. Pourquoi, au lieu de laisser cet argent entre les mains de banques qui jouent parfois avec pour réaliser toujours plus de profits, ne pas l’utiliser pour soutenir notre économie nationale dans ce qu’elle sait faire de plus moderne et de plus durable ?
Si vous voulez être constructif, monsieur le ministre, misez sur les modèles de développement des entreprises vraiment innovants, comme ceux qui s’inscrivent dans le champ de l’économie sociale et solidaire, comme ceux que constituent les SCOP, les sociétés coopératives et participatives, comme ces projets qui rendent les salariés maîtres du devenir de leur entreprise. Monsieur le ministre, nous vous invitons donc, ainsi que nos collègues, à soutenir cet amendement !
Les sociétés coopératives et participatives représentent moins de 1 % des PME, et il ne nous semble pas raisonnable de leur réserver 30 % de la part non centralisée du livret A, qui est déjà fléchée vers les PME et les travaux d’économie d’énergie. L’avis de la commission spéciale est donc défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 457, présenté par M. Desessard et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 35 bis B
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le premier alinéa de l’article 238 A du code général des impôts est complété par les mots : «, notamment en indiquant la méthode de définition des prix concernant des actifs immatériels ».
La parole est à Mme Leila Aïchi.
Aujourd’hui, un tiers du commerce mondial est effectué entre les filiales d’un même groupe. Ces opérations, en particulier les échanges de capitaux et d’actifs incorporels, permettent aux grands groupes mondiaux de profiter des différences entre les systèmes fiscaux pour échapper à l’impôt.
Parmi ces techniques, figure en bonne place la méthode dite des « prix de transfert ». Le principe est simple : une filiale d’un groupe située dans un pays où les taxes sont très faibles achète à un prix modique des matières premières qu’elle revend ensuite à un prix élevé à une autre filiale du groupe située dans un pays où l’imposition est forte. Cette filiale réalise ensuite une faible marge dans le pays de vente, ce qui lui permet de réduire son imposition.
Si les prix de transferts sont légitimes dans de nombreux cas, il n’est pas rare que les filiales d’une même multinationale surfacturent leurs prestations à d’autres entités du même groupe pour diminuer l’imposition globale. C’est particulièrement vrai concernant les actifs immatériels, avec les transferts de licences et de technologies.
Un rapport de la commission d’enquête sénatoriale sur l’évasion des capitaux et actifs hors de France évalue le manque à gagner dû à ces mécanismes à 36 milliards d’euros. Il est donc urgent d’agir dans ce domaine.
Ainsi, la communication des méthodes de définition de ces prix est essentielle pour vérifier si les paiements réalisés par une entreprise installée en France à une entreprise installée dans un pays ayant une fiscalité moindre ne sont ni anormaux ni exagérés. Tel est le but de notre amendement.
La commission demande le retrait de cet amendement dont l’intention est louable, mais la portée juridique faible.
Il existe déjà, par ailleurs, une obligation d’information sur les prix des transferts en matière d’actifs immatériels.
Pour le calcul de leur impôt sur les sociétés, les entreprises peuvent déduire leurs charges de leur résultat. Parmi ces charges figurent les sommes versées à d’autres entreprises.
Afin de lutter contre l’évasion fiscale, l’article 238 A du code général des impôts subordonne la déductibilité des sommes versées à des entreprises établies dans un régime fiscal privilégié à la démonstration, par l’entreprise qui les verse, que les dépenses correspondent à des opérations réelles et qu’elles ne présentent pas un caractère anormal ou exagéré.
Vous proposez que les entreprises qui effectuent ces versements appuient en particulier leur démonstration sur leur méthode de définition des prix de transfert en matière d’actifs immatériels.
Cette préoccupation est compréhensible. Toutefois, elle est de faible portée juridique : il y a lieu de penser que les entreprises concernées devront de toute façon apporter des précisions sur le sujet à l’appui de leur démonstration. En outre, il existe déjà une obligation plus générale en la matière : depuis le 1er janvier 2010, l’article L. 13 AA du livre des procédures fiscales impose aux grands groupes de tenir à disposition de l’administration une documentation qui permet de justifier leur politique de prix de transfert, notamment en matière d’actifs incorporels.
Pour toutes ces raisons, je demande donc le retrait de cet amendement.
L'amendement n'est pas adopté.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 458 est présenté par M. Desessard et les membres du groupe écologiste.
L'amendement n° 1178 rectifié est présenté par Mme Assassi, M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l'article 35 bis B
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le titre V de la première partie du livre Ier du code général des impôts est complété par un chapitre II ainsi rédigé :
« Chapitre II
« Déclaration de certaines prestations de conseil afin de lutter contre l’évasion fiscale et de prévenir les abus de droit
« Art. 1378 - I. – Dans le but de lutter contre l’évasion fiscale et de prévenir les abus de droit tels qu’ils sont définis à l’article L. 64 du livre des procédures fiscales, les personnes domiciliées ou établies en France dont l’activité professionnelle consiste en tout ou partie à fournir des prestations de conseil à des personnes exploitant une entreprise en France au sens du I de l’article 209 du présent code, sont soumises à une obligation de déclaration dans les conditions définies au présent article.
« Doivent être déclarées à l’administration les prestations de conseil dont la mise en œuvre :
« 1° Implique une entité : personne morale, organisme, fiducie ou institution comparable, établie ou constituée soit dans un État ou territoire non coopératif, au sens de l’article 238-0 A, soit dans un État ou territoire dans lequel elle est soumise à un régime fiscal privilégié, au sens de l’article 238 A ;
« 2° A pour effet de faire naître ou de modifier dans leur sens ou leur montant un ou plusieurs des flux suivants, entre la personne exploitant une entreprise en France et l’entité mentionnée au 1°:
« a) Les redevances de concessions de produits de la propriété industrielle définis à l’article 39 terdecies ;
« b) Les produits des participations, au sens de l’article 145 ;
« c) Les intérêts afférents aux sommes laissées ou mises à disposition ;
« 3° Laisse espérer à la personne exploitant une entreprise en France une réduction d’au moins 1 million d’euros du montant d’impôt sur les bénéfices dont elle aurait été redevable sans cette mise en œuvre.
« La déclaration intervient dans les trente jours suivant la fourniture des prestations de conseil.
« Les personnes soumises à l’obligation de déclaration sont tenues de garantir l’anonymat des personnes exploitant une entreprise en France mentionnées au premier alinéa.
« II. – Le I s’applique à titre expérimental, pour une durée de deux ans à compter du 1er janvier 2016.
« III. – Les modalités d’application du présent article sont fixées par décret en Conseil d’État. »
La parole est à Mme Leila Aïchi, pour défendre l’amendement n° 458.
Cet amendement a pour objet d’instaurer une obligation de déclaration de certaines opérations à la charge des conseils d’entreprise. Son objectif est que l’administration n’ait plus à investir des ressources importantes pour découvrir où pourraient se situer les montages menant à l’évasion fiscale.
Il s’agit de demander aux cabinets de conseil, qui commercialisent des prestations de conseil en matière de fiscalité, de transmettre à l’administration fiscale les schémas commercialisés dès que ces derniers permettent une économie d’impôt sur les bénéfices d’au moins un million d’euros, et s’ils concernent des transactions avec une entité située dans un État non coopératif ou à fiscalité privilégiée.
Sa logique n’est pas répressive : il s’agit d’informer l’administration, en garantissant l’anonymat des entreprises bénéficiaires des prestations de conseil. L’amendement tend à ce que les prestations de conseil dont la mise en œuvre repose sur la création ou la modification de certains flux – redevances, dividendes, intérêts – soient déclarées dans le détail.
Pour l’administration fiscale, disposer de ces informations permettra de détecter les cas où ces pratiques donnent lieu à évasion fiscale. Elle pourra dans certains cas procéder à son évaluation ou à sa résolution en permettant des contrôles efficaces fondés sur les risques.
C’est donc un système gagnant-gagnant pour les entreprises que nous proposons : nous voulons diminuer le nombre des contrôles fiscaux de routine et accroître la culture de la discipline fiscale.
Ces informations pourraient d’ailleurs permettre à l’administration fiscale d’avoir une vision plus claire de certaines stratégies de réorganisation d’entreprise et, plus généralement, de montages transnationaux qui peuvent parfois s’apparenter à de l’évasion fiscale.
Il faut noter que le mécanisme que nous proposons a été préconisé dans de nombreux rapports parlementaires : rapport Migaud de 2009, rapport Bocquet de 2011 et rapport Muet de 2013. Par ailleurs, ce type de déclaration est déjà effectif dans huit pays : Royaume-Uni, Canada, États-Unis, Irlande, Portugal, Afrique du Sud, Israël, Corée du Sud.
La parole est à Mme Annie David, pour défendre l’amendement n° 1178 rectifié.
Cet amendement est en tout point identique au précédent. J’ajouterai simplement cet argument : il s'inscrit dans l’objectif de lutte contre l’évasion fiscale que le Conseil constitutionnel reconnaît comme faisant partie intégrante de l’objectif à valeur constitutionnelle de lutte contre la fraude fiscale.
La commission spéciale invite au retrait de ces deux amendements, qui prévoient un dispositif intéressant, mais peu praticable en l’état et à la constitutionnalité douteuse.
Les travaux de la DGFIP, la direction générale des finances publiques, et de l’OCDE sur le sujet devraient permettre d’avancer dans les prochains mois. En effet, d’importants travaux ont été lancés.
Ainsi, la DGFIP a publié début avril une liste de dix-sept schémas d’optimisation fiscale qu’elle considère comme les plus contestables, liste devant être progressivement étendue. L’OCDE, dans le cadre de son projet BEPS, base, erosion and profit shifting, soit érosion des bases d’imposition et transfert des bénéfices, fera connaître en octobre 2015 ses recommandations sur le sujet.
Dans l’attente de la conclusion de ces travaux, qui permettront d’élaborer un dispositif plus solide en vue d’une prochaine loi de finances, je demande donc le retrait de ces amendements.
Les amendements n° 457, 458 et 1178 rectifié traitent du même sujet : ils tendent à lutter contre les pratiques d’optimisation fiscale qui empiètent sur la ligne blanche censée les séparer de la fraude fiscale. Mais il est vrai que leur rédaction est floue et que les deux derniers amendements sont inconstitutionnels.
Il se trouve que cette lutte est menée à l’échelle des États. Dès le sommet du G20 de 2009, en pleine crise économique mondiale, a été exprimée une volonté de voir les États se doter d’armes pour rapatrier leurs recettes fiscales. Il est clair que, entre certains mécanismes d’optimisation et la fraude, la frontière n’est pas très étanche. Il est dommage de traiter la question ici. Un gros travail a été fait, et il doit se poursuivre pour que l’on se dote d’outils clarifiant cette pseudo-frontière aux niveaux national et européen.
M. Jean Desessard. J’apprécie les propos mesurés de Mme Bricq, mais je rappelle les références des rapports parlementaires : Migaud en 2009, Bocquet – c'est du sérieux !
Sourires.
Nous savons très bien que l’évasion fiscale est un grand problème pour la France. La perte de ressources qu’elle représente est considérable. On nous demande de développer les entreprises. Soit ! Mais si certaines jouent le jeu et font très correctement leur déclaration, ce n’est pas le cas pour d’autres. Que se donne-t-on, alors, comme moyen pour lutter contre l’évasion fiscale et contre ces entreprises qui, par des stratagèmes, par des montages, ne participent pas à l’éducation – hier, M. Valls s'est interrogé à ce propos –, aux frais de justice, à l’aménagement des routes, à la sécurité ? De grandes entreprises, qui bénéficient ainsi d’un ensemble de services, ne rendent pas la pareille parce qu'elles veulent échapper à l’impôt…
Il est du devoir du politique de se doter de moyens. On ne peut se contenter de déclarer tous les ans, en séance publique : « On va faire quelque chose, vous allez voir. » « Il faut se pencher sur le problème ! » « Nous y réfléchirons ! » « Dans quelques années, nous allons trouver une solution ! »
Le texte que nous examinons a un large spectre. Nous pouvons d’ailleurs nous en plaindre au regard de la longue nuit de débat qui nous attend... En matière d’évasion fiscale, il serait normal que nous élaborions une amorce de proposition de solution.
Je partage les propos que Jean Desessard vient de tenir. Hier soir, l’examen du fameux amendement du Gouvernement sur le plan d’investissement a donné lieu à une discussion très intéressante. De nouveau, des allégements fiscaux ont été accordés aux entreprises.
Là, nous demandons qu’un contrôle soit exercé. Vous l’avez vous-même affirmé hier soir, monsieur le ministre, il nous faut nous doter de moyens pour permettre à nos entreprises d’investir et de travailler correctement. L’adoption de ces amendements permettrait à l’État de récupérer des recettes légitimes.
Nous avons aussi évoqué la responsabilité sociale des entreprises. À quel moment le législateur pourra-t-il intervenir pour que la responsabilité sociale des entreprises voie le jour, monsieur le ministre ?
Quant à l’argument relatif à la constitutionnalité de cette disposition qu’a fait valoir Mme la rapporteur, il ne manque pas de m’étonner. Le Conseil constitutionnel a au contraire fait état du fait que cette mesure de contrôle aurait valeur constitutionnelle de lutte contre la fraude fiscale. C’est dans cet esprit que s’inscrit l’amendement n° 1178 rectifié. Je doute par conséquent que le Conseil constitutionnel invalide la disposition prévue par cet amendement.
J’avoue être un peu étonné par ce genre de débat. C’est une grande spécialité française que de toujours vouloir empiler des textes et de toujours vouloir légiférer, alors que l’arsenal existe pour lutter contre les excès auxquels vous faites allusion.
Vous êtes en train de dire que l’on va augmenter pour les conseils des entreprises – avocats, experts-comptables – l’« obligation de délation », …
… quand ils estimeront qu’une convention avec des sociétés situées dans d’autres pays que la France entraîne une optimisation fiscale exagérée et constitue donc une fraude.
Il existe déjà une profession réglementée qui a l’obligation légale de dénoncer ce type de pratique, sous peine de créer elle-même un délit, c’est celle de commissaire aux comptes. Dès que l’un de ses membres découvre dans l’exercice de son mandat une action, une décision de la société, tout acte qui constitue un délit ou une infraction à la législation financière, il est tenu de le révéler immédiatement au procureur de la République. Par conséquent, l’outil existe bel et bien !
Monsieur le ministre, au lieu d’empiler des textes, il serait plus judicieux de se réunir autour d’une table avec la Compagnie nationale des commissaires aux comptes pour rédiger une norme supplémentaire – c’est ainsi que fonctionne cette profession –, afin que les points particuliers qui sont débattus aujourd’hui soient parfaitement fléchés. Nous apporterions ainsi une précision à l’obligation de révélation qu’ont les commissaires aux comptes, sans pour autant faire intervenir d’autres professions libérales, tenues par le secret professionnel.
Ce faisant, nous obtiendrions des résultats. C’est en tout cas la suggestion que je vous soumets.
Derrière le dispositif qui est ici proposé, le risque juridique qui sourd, c’est le caractère disproportionné des moyens mis en œuvre. C’est là le véritable problème. Nous sommes d’accord sur l’objectif, mais, d’ordinaire, vos groupes ont plutôt des prises de position protectrices des libertés.
Là, vous demandez que tous les professionnels, en particulier les grands cabinets d’audit, qui sont en charge de gérer des affaires courantes de ces sociétés donnent toutes les informations qui permettent de déterminer les abus de droit. En d’autres termes, il faut tout donner, tout mettre sur la table. On va donc lancer de grands filets…
… pour rassembler éventuellement les informations susceptibles de caractériser les abus !
Cela soulève deux réserves.
D’une part, c’est totalement disproportionné par rapport à l’objectif recherché. C’est là le véritable risque juridique et c’est pourquoi ce dispositif, quand bien même il serait adopté, ne passerait pas le filtre de la Constitution.
D’autre part, en termes de culture politique même, par rapport aux propos que vous tenez sur d’autres sujets, on bascule là dans l’hypersurveillance !
Ne leur donnez pas d’idées ! La loi sur le renseignement n’est pas encore adoptée !
Certes, c’est anonyme, mais il n’est qu’à se référer au débat qui a lieu actuellement sur d’autres sujets…
Elle est déclaratoire, elle existe dans notre droit, notamment dans le droit fiscal. Le droit définit un cadre. Dans ce cadre, vous faites appel à des professionnels, en l’espèce du chiffre, auxquels vous demandez de fournir tous les documents qui sont à leur disposition.
Ces économies peuvent reposer sur la règle de droit de manière tout à fait légitime.
Ce qui relève de l’optimisation n’est pas forcément de l’abus ou de la fraude, ou alors vous faites potentiellement de la fraude tous les jours !
Si l’on poursuit cette logique, c’est de l’hypercontrôle social et fiscal.
J’appelle votre attention sur ce point précis : vos moyens sont disproportionnés. Bien plus, la culture politique qui sous-tend cette disposition ne me semble pas cohérente par rapport aux principes que vous défendez sur d’autres textes.
Monsieur le ministre, je tiens à vous répondre sur ce problème de cohérence.
Lorsque la transmission des conventions entre avocats jusqu’à la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, la DGCCRF, a été décidée, vous ne vous êtes pas plaint de cette absence de discrétion.
À mon tour de ne pas comprendre votre raisonnement, alors que nous visons en particulier l’évasion fiscale des grands groupes, ce qui constitue un sujet majeur dans notre pays. Il s’agit non pas de faire du grand flicage, si je puis dire, mais de faire preuve de cohérence.
Appliquez la logique de votre raisonnement à l’ensemble des acteurs économiques de notre pays !
En revanche, nous accordons le droit à cet organisme d’effectuer un contrôle, lorsque le problème est identifié.
Sauf à ce que quelque chose m’ait échappé, la DGFIP a les moyens de contrôler absolument tout, mais ce n’est pas la transmission de tous les documents, même dans un cadre défini, qui sont gérés par un avocat ou un expert-comptable pour le compte d’un client. Cela n’a rien à voir.
Je ne peux vous la donner, car vous êtes déjà intervenue pour explication de vote, ma chère collègue !
Je mets aux voix les amendements identiques n° 458 et 1178 rectifié.
Les amendements ne sont pas adoptés.
(Non modifié)
Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° À la troisième phrase du deuxième alinéa du IV de l’article 199 terdecies-0 A, le mot : « dixième » est remplacé par le mot : « septième » ;
2° Au dernier alinéa du 1 du II de l’article 885-0 V bis, le mot : « dixième » est remplacé par le mot : « septième ».
Cet article prévoit un intéressant outil législatif qui appelle plusieurs réflexions et montre, s’il en était besoin, les limites de la triangulation dont nous avons évoqué la teneur.
Cet article modifiant quelques éléments du code général des impôts a été introduit dans le texte par un amendement déposé par deux rapporteurs de la commission spéciale de l'Assemblée nationale. Je ne nourris strictement aucune animosité personnelle à l’encontre de ces deux éminents parlementaires, mais il me semble que, du côté de Châteaulin, de Carhaix-Plouguer, de Forcalquier ou de Seyne, les préoccupations immédiates de la population, en matière fiscale, sont assez éloignées de l’amélioration des dispositifs Madelin et ISF-PME prévue par cet article.
Les salariés de Doux ou de Gad, ceux d’Arkéma et de Sanofi Sisteron seront satisfaits de constater que leurs députés ont ainsi « sanctuarisé » deux niches fiscales qui ne profitent qu’à quelques dizaines de milliers de contribuables « initiés ». Voilà qui ne change pas grand-chose à leur quotidien, fait de licenciements collectifs pour les uns et d’incertitudes du lendemain pour les autres !
Cet article 35 bis rompt avec la règle posée depuis quelque temps dans le débat parlementaire, à savoir que les dispositions modifiant le droit fiscal ne pouvaient trouver place que dans une loi de finances. Or c’est bien de cela qu’il s’agit.
Il est donc étonnant, mes chers collègues, que, peu de jours après l’annonce d’une relative amélioration des comptes publics, avec des déficits ramenés à 4 % du PIB, le Gouvernement nous invite, une fois encore, avec cet article et quelques autres articles de l’« archipel » des mesures de ce titre II, à creuser quelques trous supplémentaires dans les caisses de l’État et de la sécurité sociale, sans garantie de la parfaite efficacité des mesures concernées. À quoi sert en effet l’ISF-PME dans un pays qui a connu, sous le quinquennat précédent, une croissance moyenne d’un dixième de point de PIB ?
Quant au dispositif Madelin, il a certes permis de financer la création d’un certain nombre d’entreprises, ce dont nous pouvons sans doute nous féliciter. Il se trouve cependant, de manière plutôt paradoxale, que la France n’a jamais compté, en temps de paix, autant de chômeurs que depuis qu’elle a un nombre record d’entreprises enregistrées dans les greffes de tribunaux de commerce ! Nous avons même l’impression que plus le nombre de créations d’entreprise est élevé, plus le nombre des personnes privées d’emploi progresse lui aussi !
Je ne vous infligerai pas l’exposé des chiffres qui le démontrent. Je me contenterai de préciser que l’ensemble des dispositifs Madelin et assimilés représente une déperdition de 161 millions d’euros pour les finances publiques, pour moins de 2 milliards d’euros d’engagements financiers. En d’autres termes, une bonne partie des versements ont excédé les plafonds et seront donc défiscalisés les années suivantes.
À ce stade de la discussion, rappelons que le livret A et le livret de développement durable centralisaient, à la fin de l’année 2013, 365 milliards d’euros de ressources disponibles pour une dépense fiscale associée de 650 millions d’euros.
Aussi avons-nous bien l’impression que, en termes d’effet levier, il serait sans doute plus pertinent, plutôt que de renforcer les dispositifs Madelin et ISF-PME, de mettre en œuvre le relèvement du plafond des deux livrets défiscalisés.
Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 1101 rectifié, présenté par Mme Assassi, M. Bocquet, Mme Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
L’article 199 terdecies 0-A du code général des impôts est abrogé.
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Monsieur le président, mon intervention sur l'article vaut défense de cet amendement. J’ajoute toutefois que cet article illustre l’absence d’intelligibilité de ce projet de loi, que j’ai d’ailleurs évoquée lorsque j’ai présenté au nom de mon groupe, au début de nos débats, la motion tendant à opposer l’exception d’irrecevabilité.
L'amendement n° 1099, présenté par Mme Assassi, MM. Bocquet et Foucaud, Mme Beaufils et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Remplacer le mot :
septième
par le mot :
douzième
La parole est à M. Dominique Watrin.
Cet amendement tend à s’opposer à la logique du Gouvernement, qui réduit le délai pour percevoir les avantages fiscaux à la suite de la cession des actions dans le cadre du dispositif dit « Madelin ». Nous proposons au contraire de l’augmenter.
Allonger ce délai aurait en effet deux conséquences positives. En premier lieu, cela favoriserait la constitution de « noyaux durs » et durables d’actionnaires privés dans les entreprises. En second lieu, ce serait de nature à favoriser la souscription de parts de sociétés et entreprises solidaires en ajustant les obligations des détenteurs de titres ordinaires.
L’idée que nous défendons est de ne pas inciter simplement les acteurs économiques à investir, récupérer leur « pactole » le plus rapidement possible, puis se retirer de l’entreprise.
Nous promouvons au contraire un modèle de développement des entreprises durables, qui ne soit pas uniquement focalisé sur la stricte question de la rentabilité financière. Nous pensons que c’est l’économie et la société dans leur ensemble qui gagneraient à voir se développer des entreprises s’établissant sur le temps long, des sociétés rejoignant le secteur de l’économie sociale et solidaire.
Par cet amendement qui nous semble constructif, nous vous invitons donc à considérer différemment le fonctionnement de notre économie et les dispositifs fiscaux existants.
L'amendement n° 1102 rectifié, présenté par Mme Assassi, M. Bocquet, Mme Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Rédiger ainsi cet alinéa :
2° L’article 885-0 V bis est abrogé.
La parole est à Mme Annie David.
Inventé par la loi en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat, dite loi TEPA, le dispositif ISF-PME n’a jamais rencontré, dans les faits, le succès que ses promoteurs pouvaient attendre. Leur préoccupation initiale était de permettre aux petites et moyennes entreprises de disposer de généreux donateurs en fonds propres sous forme de souscription de parts, d’actions, de titres, etc. Très vite s’est évidemment posée la question de la pertinence et de la consistance de la mesure.
En appliquant un taux particulièrement élevé d’abattement, l’affaire se rapprochait beaucoup plus de la niche fiscale très confortable que de l’incitation au financement des entreprises et à l’allocation de l’épargne des ménages au profit de l’économie.
Et le fait est que la mesure a rapidement montré ses limites et sa nature, coûtant fort cher, et de plus en plus cher, malgré un montant de fonds levés relativement faible.
Nous avions ainsi pu dénoncer, dans cette affaire, un coût exorbitant pour les finances publiques : plus de 700 millions d’euros pour une faible portée des sommes mises en jeu, à savoir tout au plus 1, 2 ou 1, 3 milliard d’euros.
Gardons en vue que les banques implantées en France gèrent un encours de crédits de près de 1 900 milliards d’euros, pour avoir une idée de ce que donne le dispositif ISF-PME…
Bien souvent, comme on pouvait le craindre dès l’origine, la niche fiscale et son optimisation ont pris le pas sur toute autre considération, notamment l’éventuel intérêt pour la gestion des PME ainsi financées.
Nombre des contribuables sollicitant le dispositif ISF-PME n’ont versé que la somme nécessaire pour leur permettre de ne pas payer l’ISF et ont ajusté leur concours aux PME à raison de cette contribution.
La baisse du montant de la réduction d’impôt, observée dès 2012, illustre d’ailleurs pleinement ce processus.
Lorsque les contribuables de l’ISF, en bénéficiant du tarif Hollande, se sont retrouvés avec un montant d’imposition moindre à acquitter, ils ont adapté leurs versements ISF-PME à la situation ainsi créée. De fait, le dispositif se trouve disqualifié et n’a plus grand-chose à voir avec l’aide aux entreprises et beaucoup plus avec une niche fiscale bien garnie.
Mettons donc un terme à un dispositif coûteux, aux objectifs dévoyés, et trouvons d’autres modes moins onéreux d’aide au financement des PME.
Tel est l’objet de cet amendement.
L'amendement n° 1100, présenté par Mme Assassi, MM. Bocquet et Foucaud, Mme Beaufils et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Remplacer le mot :
septième
par le mot :
douzième
La parole est à Mme Annie David.
Il est étonnant que la loi décide de favoriser la constitution d’un actionnariat de plus en plus nomade, au détriment d’une stabilité du « noyau dur » des actionnaires d’une entreprise.
En effet, l’article 35 bis tend à modifier les dispositifs dits « Madelin » afin de ramener de dix ans à sept ans le délai pendant lequel les apports à la PME ne doivent pas faire l’objet d’un retrait des capitaux investis, sauf à perdre les avantages fiscaux prévus par ces deux dispositifs.
Dans le cas de notre amendement, qui porte particulièrement sur le dispositif ISF-PME prévu à l’article 885-0 V bis du code général des impôts, cet avantage se traduit, entre autres, par le fait que 50 % des versements peuvent être imputés sur l’ISF du contribuable dans la limite de 50 000 euros par an.
Il est contradictoire de vouloir financer les PME de manière pérenne tout en permettant à ces contributeurs de partir aussi vite, surtout quand il s’agit de contribuables de l’ISF.
L’effort financier notable consenti par l’État impose d’assurer la meilleure efficacité économique des sommes investies par les redevables de l’ISF bénéficiant de la réduction d’impôt visée à l’article 885-0 V bis du code général des impôts. Selon nous, cette meilleure efficacité économique se traduit au contraire par un allongement de la durée d’engagement de ces contributeurs.
Pour reprendre les termes d’un ancien président de la République, « il s’agit de faire en sorte, non pas que ceux qui gagnent le plus paient moins – ce n’est pas la politique du Gouvernement –, mais que l’argent prélevé sur ceux de nos compatriotes qui gagnent le plus soit le plus utile possible à l’emploi et à la recherche. Il ne s’agit pas de faire payer moins, mais de mieux utiliser l’argent » ; nous ajoutons : « le plus longtemps possible ».
De plus, rappelons que ce dispositif que nous avions critiqué en 2009 permet d’obtenir un crédit d’impôt des plus importants comparativement à la somme investie. Rappelons aussi qu’il serait plus opportun de financer les PME grâce à l’épargne populaire.
La commission spéciale émet un avis défavorable sur les quatre amendements.
Les amendements n° 1101 rectifié et 1102 rectifié de suppression des dispositifs ISF-PME reviennent, selon nous, à nier les difficultés spécifiques rencontrées par les PME.
On sait depuis longtemps que l’intervention de l’État est nécessaire du fait de l’existence de défaillances de marché concernant les entreprises innovantes, les jeunes entreprises en phase d’amorçage et les entreprises en phase d’expansion, et qu’il est indispensable de mettre en place des dispositifs incitatifs visant à développer le capital-investissement.
Concernant les amendements n° 1099 et 1100, qui visent à allonger les durées au cours desquelles les remboursements d’apports donnent lieu à la reprise de l’avantage fiscal, les risques d’optimisation sont déjà limités par la nécessité de conserver les titres pendant cinq ans, ainsi que par l’obligation de réemploi en cas de sortie avant cette échéance.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
Je mets aux voix l'amendement n° 1102 rectifié.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
Le scrutin a lieu.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
Il est procédé au dépouillement du scrutin.
Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 150 :
Le Sénat n'a pas adopté.
Je mets aux voix l'amendement n° 1100.
L'amendement n'est pas adopté.
L'article 35 bis est adopté.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 753 rectifié ter est présenté par Mme Lamure, MM. Allizard, G. Bailly, Baroin, Bas, Béchu, Bignon, Bizet, Bouchet, Calvet et Cambon, Mme Canayer, M. Cardoux, Mme Cayeux, MM. Commeinhes, Cornu, Danesi et Dassault, Mme Debré, MM. Delattre et Dériot, Mmes Deromedi et Des Esgaulx, M. Doligé, Mme Duranton, MM. Duvernois, Emorine, Forissier, Fouché, Frassa et Genest, Mme Giudicelli, MM. Grand, Gremillet et Grosdidier, Mme Gruny, M. Houel, Mme Imbert, MM. Kennel, Laménie, Lefèvre, de Legge, Leleux, Lenoir, P. Leroy, Longuet, Magras, Malhuret, Mandelli et Mayet, Mmes Mélot et Micouleau, M. Milon, Mme Morhet-Richaud, MM. Morisset, Mouiller, Paul, Pellevat et Pointereau, Mmes Primas et Procaccia, MM. de Raincourt, Raison, Reichardt, Retailleau, Revet, Savary, Sido, Trillard, Courtois, Darnaud, P. Dominati, Savin et Vogel, Mme Billon et M. Joyandet.
Le sous-amendement n° 1763 rectifié est présenté par MM. Adnot et D. Laurent et Mme Deromedi.
L'amendement n° 878 rectifié bis est présenté par MM. Cadic, Canevet, Guerriau et Delahaye, Mme Loisier et M. Pozzo di Borgo.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I. – Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° Le deuxième alinéa du IV de l’article 199 terdecies-0 A est ainsi modifié :
a) À la première phrase, le mot : « cinquième » est remplacé par le mot : « troisième » ;
b) À la deuxième phrase, le mot : « cinq » est remplacé par le mot : « trois » ;
2° Le premier alinéa du 1 du II de l’article 885-0 V bis est complété par les mots : « ou, si la société est créée depuis moins de sept ans au moment de la souscription, jusqu’au 31 décembre de la troisième année suivant celle de la souscription »
II. – La perte de recettes pour l’État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Élisabeth Lamure, pour défendre l’amendement n° 753 rectifié ter.
Cet amendement, présenté par des membres du groupe UMP et de la délégation sénatoriale aux entreprises, vise à raccourcir de cinq ans à trois ans le délai de détention des titres requis pour bénéficier des dispositifs ISF-PME et IR-PME, dans le seul cas des investissements en direct, c’est-à-dire réalisés par des business angels, dans des entreprises de moins de sept ans.
En effet, ce type d’investissement peut connaître une sinistralité importante ou, en cas de succès, des cycles d’investissements, les « tours de table », très rapprochés dans le temps.
Le sous-amendement n° 1763 rectifié n’est pas soutenu.
La parole est à M. Olivier Cadic, pour présenter l'amendement n° 878 rectifié bis.
Cet amendement vise à faciliter le développement des fonds investis par les business angels. En tant que membre de la délégation sénatoriale aux entreprises, je ne peux que souscrire à cet objectif.
Même si elle comprend les arguments développés par les auteurs de ces amendements, la commission sollicite le retrait de ces derniers, car il ne semble pas opportun de soutenir l’aménagement proposé dans un souci de stabilisation de l’actionnariat des PME.
En effet, les investisseurs doivent représenter un pôle de stabilité dans l’actionnariat de ces entreprises, qui sont déjà tenues de participer régulièrement à des tours de financement pour répondre à leurs besoins de trésorerie.
Par ailleurs, cette condition de détention de cinq ans constitue un élément décisif – M. le ministre nous le confirmera sans doute – dans la négociation en cours entre le Gouvernement et la Commission européenne sur la refonte du dispositif ISF-PME afin de le rendre compatible avec les nouvelles règles européennes sur les aides d’État, sujet sur lequel la France est plutôt en retard.
Oui, je le maintiens, monsieur le président, ne serait-ce que par égard pour les quelque quatre-vingts collègues qui l’ont cosigné.
J’entends les arguments de la commission spéciale, mais je regrette cet avis, puisque ce dispositif permettrait justement d’accompagner les start-up en phase de croissance.
Le sous-amendement n° 1763 rectifié était intéressant, parce qu’il apportait un encadrement à cette mesure pour éviter de provoquer une bulle sur les produits à trois ans. Il n’a pas été soutenu.
Je veux revenir un instant sur ces deux amendements. Mme la corapporteur a excellemment donné le point de vue de la commission. Je voudrais simplement ajouter un éclairage global.
À ce stade, nous avons avancé sur différents dispositifs importants. Hier, nous avons voté la partie du texte relative à l’amortissement et à l’aide à l’investissement, et Mme la corapporteur nous a déjà proposé un certain nombre de mesures sur ces sujets.
Vous savez que nous nous sommes fixé comme objectif de ne pas alourdir la facture, car nous souhaitons rester dans une logique économique et financière globale, à savoir qu’il ne faut pas alourdir le poids des finances publiques, et que notre contribution à la croissance doit se faire, autant que possible, à dépense égale.
Aussi, c’est avec une très grande prudence que la commission s’est « autorisée » à faire un certain nombre d’incursions sur le terrain fiscal. Et nous avons bien conscience que, lors de l’examen d’une éventuelle loi de finances rectificative ou, en tout cas, lors de l’examen du prochain projet de loi de finances, nous pourrons proposer des mesures globales, mais avec le souci de présenter des économies en contrepartie.
Nous avons bien conscience aussi que l’exercice contraint auquel nous devons nous livrer en examinant ce projet de loi ne nous permet pas d’avoir l’équation globale, à savoir des mesures d’incitation fiscale et, en contrepartie, des économies pour financer le tout.
Même si elle a bien conscience qu’il faudra demain aller plus loin, c’est volontairement – je le précise – que la commission a restreint son horizon dans ce texte, qui peut difficilement contenir plus de mesures à caractère fiscal. Il s’agissait juste pour elle de se fixer un cadre. La commission a cependant d’ores et déjà présenté un certain nombre de mesures significatives depuis le début de l’examen de cette partie du projet de loi.
La commission spéciale a travaillé en concertation avec la commission des finances, avec M. le rapporteur général, afin de veiller à la crédibilité de ses propositions.
Mme Estrosi Sassone présentera tout à l’heure d’autres dispositions à caractère économique ; Mme Deroche présentera quant à elle des dispositions de nature sociale. Des évolutions majeures seront proposées, qu’elles portent sur les seuils, sur la pénibilité ou encore sur les accords de maintien de l’emploi. Ces propositions forment un tout. Si l’on y ajoute le dispositif d’amortissement en faveur des PME et les mesures qui ont déjà été votées, une architecture globale s’esquisse.
Afin de ne pas entamer la crédibilité financière de l’ensemble du projet de loi, nous suggérons de ne pas alourdir la facture. Je le répète : nous aurons l’occasion de revenir sur ces sujets dans d’autres textes. Sur ces questions, l’horizon ne s’arrêtera pas à ce projet de loi.
Comme l’a dit Mme la corapporteur dans la première partie de son intervention, les entreprises ont besoin de visibilité et de stabilité, quel que soit le sens des mesures adoptées. Il ne me paraît donc pas opportun de bricoler un dispositif dans ce projet de loi, qui contient déjà de nombreuses mesures fiscales, comme vient de le rappeler M. le président de la commission spéciale.
Madame Lamure, je rappelle que nous avons voté hier des dispositifs particulièrement encourageants en faveur des start-ups et des jeunes entreprises, qu’il s’agisse des allégements fiscaux applicables aux actions gratuites ou des BSPCE, les bons de souscription de parts de créateur d’entreprise, sans parler du dispositif sur le suramortissement.
Mon discours ne varie pas : on ne bricole pas des articles à portée fiscale en faveur des entreprises dans une loi telle que celle que nous examinons en ce moment. Il y a des lois de finances pour cela.
Je rappelle en outre que, l’année dernière, le Président de la République et le Premier ministre ont pris des engagements vis-à-vis des entreprises s’agissant de la stabilité de l’ISF-PME. Il est de toute façon très mauvais de modifier la fiscalité. De grâce, restons-en là !
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. La position de M. le président de la commission spéciale est cohérente, mais je tiens à dire que je trouve insultant de qualifier de « bricolage » la proposition formulée par des parlementaires !
Marques d’approbation sur les travées de l'UMP.
Je n’ai pas signé cet amendement – je l’aurais fait avec plaisir si on me l’avait soumis –, mais je le soutiens totalement, car il est véritablement nécessaire d’adresser des signaux positifs à nos entreprises, en particulier aux plus petites d’entre elles, qui sont l’élément moteur de la croissance attendue.
Je voterai donc cet amendement, et j’encourage mes collègues à en faire de même, bien que nous soyons peu nombreux en séance en ce vendredi matin.
On nous dit qu’il faut reporter l’adoption de cet amendement à un autre texte. Certes, mais combien de fois avons-nous été déçus, les promesses n’ayant pas été tenues ? Je le répète : notre devoir est d’encourager et de soutenir les PME.
Pour ma part, je suis l’un des cosignataires de cet amendement et je souscris évidemment aux arguments qu’a présentés ma collègue Élisabeth Lamure.
J’étais prêt à retirer cet amendement, comme nous y invitait Mme la corapporteur, mais je dois dire que j’ai été heurté par les propos de notre collègue Nicole Bricq.
Mme Nicole Bricq. Il vous en faut peu ! Je peux faire mieux, vous savez, je me suis limitée…
Sourires sur les travées du groupe socialiste.
Qualifier de « bricolage » une disposition qui ne vous satisfait pas, madame Bricq, franchement…
Vous avez été membre du Gouvernement, et vous savez qu’il y a des choses qui ne se disent pas ! Je vous demande de respecter le travail des parlementaires. Nous ne bricolons pas, nous travaillons, nous formulons des propositions, lesquelles sont adoptées ou non. Pour ma part, il ne me viendrait jamais à l’idée de qualifier une proposition de « bricolage ».
Nous avons donc raison de maintenir cet amendement.
Je remercie le président de la commission spéciale de nous avoir présenté le tableau d’ensemble de sa réflexion : la loi Macron contiendrait un certain nombre de dispositifs ; quant aux dispositions fiscales, elles seraient inscrites dans un projet de loi de finances rectificative. Pourquoi pas ? M. le ministre pourrait-il toutefois nous confirmer que tel est bien son plan d’ensemble ?
On nous dit aujourd'hui que ce texte est destiné à relancer la croissance. Or il ne sera pas possible de le faire si les investisseurs ne sont pas parties prenantes et s’ils ne sont pas incités à investir. C’est une nécessité. Pour que ce projet de loi puisse avoir un véritable effet sur la croissance, il faut libérer l’investissement.
Madame Bricq, je suis un investisseur.
À ce titre, je puis vous dire qu’il serait plus dynamique de favoriser les cessions tous les trois ans, car cela donnerait lieu au paiement d’impôts sur les plus-values, ce qui serait très bon pour nos finances publiques. En revanche, bloquer les investisseurs n’aurait pas un effet positif sur nos finances publiques, bien au contraire. Il n’y a pas besoin d’aller très loin d’ici pour constater que ce que je dis est vrai !
Mme Nicole Bricq. Il suffit d’aller de l’autre côté de la Manche, vous l’avez dit.
Sourires sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.
En effet, chère collègue ! J’étais encore hier soir de l’autre côté de la Manche, en compagnie de près de 200 entrepreneurs qui cherchent des solutions pour développer leur entreprise. Nous devons nous aussi réfléchir à des solutions permettant de développer la croissance en France, comme le fait la délégation sénatoriale aux entreprises, afin que nos entrepreneurs n’aient pas à aller la chercher ailleurs. Tel est notre rôle de parlementaire ! Il nous faut faire évoluer la législation.
Cet amendement vise donc à permettre aux business angels d’investir tout en sachant qu’ils pourront éventuellement céder leurs titres rapidement s’ils ont un acheteur et réinvestir dans d’autres sociétés. La disposition proposée serait bonne pour le développement de notre économie.
Je rappellerai simplement que le dispositif ISF-PME est actuellement en pleine refonte, qu’il doit être entièrement revu, y compris son ciblage. Le Gouvernement doit le faire, car notre droit n’est pas conforme à la réglementation européenne, contrairement à celui d’autres pays.
Telles sont les raisons pour lesquelles la commission spéciale n’a pas souhaité modifier le délai de détention, qui sera l’une des conditions de la négociation. En revanche, j’avais proposé à la commission spéciale, qui l’avait accepté, de doubler le plafond de l’ISF-PME pour un panel d’entreprises plus réduit, comme j’ai augmenté le plafond de l’ISF du dispositif Madelin. Ce serait un signal positif pour les entreprises concernées.
La commission spéciale a donc déjà accompli des efforts sur ce sujet.
M. Alain Gournac. Je regrette vivement de ne pas avoir signé cet amendement et je juge inacceptable l’usage du mot « bricolage » pour qualifier la disposition qu’il tend à prévoir, qui plus est à un moment où le débat se déroule de manière tout à fait cordiale.
Exclamations sur les travées du groupe socialiste.
Nous en avons assez des donneurs de leçons ! Les Français aussi, d’ailleurs…
On peut être pour ou contre une proposition, ou encore s’abstenir, mais on ne peut en aucun cas faire preuve de manque de respect. Nous ne faisons pas de bricolage ici ! Employer un tel terme, c’est dévaloriser le travail de l’une des deux chambres du Parlement.
Je ne puis qu’être en accord avec l’objet de cet amendement. Ceux qui veulent se lancer ou se développer doivent pouvoir dire qu’ils sont entendus par le Sénat. Nous devons donc faire un geste important dans leur direction, même si cela ne réglera pas toutes leurs difficultés.
Je suis surprise que l’on réfléchisse aux moyens pour les entreprises, en particulier les PME, de se développer, sans s’interroger sur les raisons pour lesquelles les banques françaises ne sont pas en mesure de leur apporter des réponses.
En toute logique, le rôle premier des banques est de financer les entreprises, me semble-t-il ! Nous avons déjà eu des discussions sur ce sujet, y compris sur le rôle de la BPI, au sein de la commission des finances. Nous avions alors considéré que les banques devaient faire tous les efforts nécessaires pour accompagner les entreprises.
Notre collègue vient d’expliquer qu’il souhaitait que les investisseurs effectuant le type de placements qu’il a décrits puissent bénéficier d’une meilleure rémunération. Pour ma part, je pense que ce n’est pas la meilleure solution pour favoriser le développement économique. Il serait plus efficace d’avoir recours à notre outil bancaire.
Nous sommes donc opposés à cet amendement.
Je mets aux voix les amendements identiques n° 753 rectifié ter et 878 rectifié bis.
Les amendements ne sont pas adoptés.
Le troisième alinéa du IV de l’article 199 terdecies-0 A du code général des impôts est complété par trois alinéas ainsi rédigés :
« En cas de non-respect de la condition de conservation prévue au deuxième alinéa du IV par suite d’une fusion ou d’une scission au sens de l’article 817 A, l’avantage fiscal mentionné au 1° du I du présent article accordé au titre de l’année en cours et de celles précédant ces opérations n’est pas remis en cause si les titres reçus en contrepartie sont conservés jusqu’au même terme. Cet avantage fiscal n’est pas non plus remis en cause lorsque la condition de conservation prévue au deuxième alinéa du IV n’est pas respectée par suite d’une annulation des titres pour cause de pertes.
« En cas de non-respect de la condition de conservation prévue au même deuxième alinéa du IV en cas de cession stipulée obligatoire par un pacte d’associés ou d’actionnaires, l’avantage fiscal mentionné au 1° du I accordé au titre de l’année en cours et de celles précédant ces opérations n’est pas non plus remis en cause si le prix de vente des titres cédés, diminué des impôts et taxes générés par cette cession, est intégralement réinvesti par un actionnaire minoritaire, dans un délai maximum de douze mois à compter de la cession, en souscription de titres de sociétés satisfaisant aux conditions mentionnées au 2° du même I, sous réserve que les titres ainsi souscrits soient conservés jusqu’au même terme. Cette souscription ne peut donner lieu au bénéfice de l’avantage fiscal prévu au 1° dudit I.
« En cas de non-respect de la condition de conservation prévue au deuxième alinéa du IV en cas d’offre publique d’échange de titres, l’avantage fiscal mentionné au 1° du I accordé au titre de l’année en cours et de celles précédant cette opération n’est pas remis en cause si les titres obtenus lors de l’échange sont des titres de sociétés satisfaisant aux conditions mentionnées au 2° du même I et si l’éventuelle soulte d’échange, diminuée le cas échéant des impôts et taxes générés par son versement, est intégralement réinvestie, dans un délai maximal de douze mois à compter de l’échange, en souscription de titres de sociétés satisfaisant aux conditions mentionnées au même 2° du I, sous réserve que les titres obtenus lors de l’échange et, le cas échéant, souscrits en remploi de la soulte soient conservés jusqu’au terme du délai applicable aux titres échangés. La souscription de titres au moyen de la soulte d’échange ne peut donner lieu au bénéfice de l’avantage fiscal prévu au 1° du même I. »
L’article 35 ter A, qui a été introduit dans le texte par la commission spéciale de l’Assemblée nationale, résulte d’une forme de coproduction accidentelle entre une députée socialiste, à l’origine de la proposition initiale, l’Assemblée nationale – celle-ci était favorable à une mesure accordant la priorité au financement des entreprises dites « solidaires », malgré les réserves et l’opposition du Gouvernement – et la majorité sénatoriale, qui, s’en étant émue, en tire profit pour procéder à un nouvel alignement législatif.
Mes chers collègues, pardonnez-moi l’expression, mais j’ai l’impression que l’on nous propose un véritable « machin » législatif.
Sourires.
Nouveaux sourires.
Celui-ci présente une particularité fort intéressante : il s’agit en fait d’une sorte de loterie permettant au joueur de gagner à tous les coups.
Prenons le cas d’un investisseur Madelin ayant placé 10 000 euros dans le capital d’une petite entreprise non cotée. La première année, il pourra bénéficier d’une réduction d’impôt de 2 500 euros, ce qui constituera un premier retour sur investissement. Toutefois, ce contribuable bénéficiant d’autres réductions d’impôt plafonnées, il ne pourra imputer que 1 500 euros au titre de ses versements Madelin et devra reporter 1 000 euros à l’année suivante.
Imaginons que l’entreprise enregistre des pertes et que la valeur du capital investi diminue de moitié, chutant à 5 000 euros – cela arrive – et que les actionnaires décident en assemblée générale de la poursuite de l’activité, malgré des pertes en capital supérieures à la moitié du capital social. C’est possible.
Si l’article 35 ter A était adopté, la réduction d’impôt serait maintenue au niveau antérieur, permettant l’imputation des 1 000 euros résiduels de la réduction d’origine, alors qu’elle aurait dû être limitée à 25 % de 5 000 euros, soit 1 250 euros.
La deuxième année, revenue à meilleure fortune, l’entreprise ainsi financée connaît son premier résultat positif et redresse son bilan, le niveau des fonds propres retrouvant sa quotité d’origine.
La troisième année, au grand bonheur des actionnaires, l’entreprise dégage un résultat net très positif, qui va permettre aux détenteurs de parts de commencer à percevoir des dividendes, lesquels vont constituer une nouvelle source de retour sur investissement, assortie, rappelons-le, d’un crédit d’impôt correspondant à 40 % de ces dividendes.
Enfin, au bout de cinq ans, le détenteur des titres d’origine pourra réaliser une intéressante plus-value de cession, qui sera, comme chacun le sait, largement défiscalisée, notamment s’il réemploie les sommes tirées de sa vente dans une opération de même nature.
Nous aurons donc remarqué qu’à aucun moment notre généreux donateur d’argent frais n’aura subi les conséquences des pertes temporairement constatées dans l’entreprise réceptrice des fonds et qu’il est fort possible qu’entre remise fiscale, dividendes et abattement sur la plus-value, le retour sur l’investissement de départ ait été parfaitement réalisé !
Du reste, il n’est pas rare que, dans nombre de sociétés non cotées, le niveau du dividende versé soit très proche de celui du capital social, en raison tant de la sous-capitalisation que de la non-incorporation des réserves.
Nous ne voulons pas, mes chers collègues, de cette logique de socialisation des pertes, aux termes de laquelle les profits, plus importants, ouvrent droit à de nouveaux allégements fiscaux.
C’est pourtant ce à quoi tend cet article que certains ici, en d’autres temps, auraient probablement combattu.
L'amendement n° 32 rectifié, présenté par Mme Assassi, M. Bocquet, Mme Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Assassi a très bien expliqué les raisons pour lesquelles nous demandons la suppression de cet article.
L’interdiction de remboursement des apports avant dix ans représente une contrainte supplémentaire qui ne semble pas justifiée.
La commission spéciale donc émet un avis défavorable sur cet amendement.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 851 rectifié bis, présenté par MM. Marseille, Guerriau et Pozzo di Borgo, Mme Morin-Desailly, MM. Bockel et Cadic et Mme Goy-Chavent, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
I. – Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° Le IV de l’article 199 terdecies-0 A est ainsi modifié :
a) À la dernière phrase du deuxième alinéa, les mots : « ou des sociétés de financement » sont supprimés ;
b) Sont ajoutés deux alinéas ainsi rédigés :
« En cas de non-respect de la condition de conservation prévue au deuxième alinéa du présent IV par suite d’une fusion ou d’une scission au sens de l’article 817 A, l’avantage fiscal mentionné au I du présent article accordé au titre de l’année en cours et de celles précédant ces opérations n’est pas remis en cause si les titres reçus en contrepartie sont conservés jusqu’au même terme. Cet avantage fiscal n’est pas non plus remis en cause lorsque la condition de conservation prévue au deuxième alinéa du présent IV n’est pas respectée par suite d’une annulation des titres pour cause de pertes ou de liquidation judiciaire.
« En cas de non-respect de la condition de conservation prévue au deuxième alinéa du présent IV, en cas de cession, pour quelque cause que ce soit, de titres souscrits à l’origine dans une société éligible créée depuis moins de sept ans, l’avantage fiscal mentionné au I accordé au titre de l’année en cours et de celles précédant ces opérations n’est pas non plus remis en cause si le montant initialement investi ou si le prix de vente, si ce prix de cession est inférieur au montant initialement investi, net d’impôt et de taxes, des titres cédés, est intégralement réinvesti, dans un délai maximal de douze mois à compter de la cession, en souscription de titres de sociétés satisfaisant aux conditions mentionnées au deuxième alinéa du présent IV, sous réserve que les titres ainsi souscrits soient conservés jusqu’au même terme. Cette souscription ne peut donner lieu au bénéfice de l’avantage fiscal prévu au même I. » ;
2° Les deuxième et troisième alinéas du 2 du II de l’article 885-0 V bis sont remplacés par un alinéa ainsi rédigé :
« En cas de non-respect de la condition de conservation prévue au premier alinéa du 1 du présent II par suite d’une cession, pour quelque cause que ce soit, de titres souscrits à l’origine dans une société éligible créée depuis moins de sept ans, l’avantage fiscal mentionné au I accordé au titre de l’année en cours et de celles précédant ces opérations n’est pas non plus remis en cause si le montant initialement investi ou si le prix de vente, s’il est inférieur au montant initialement investi, net d’impôt et de taxes, des titres cédés, est intégralement réinvesti, dans un délai maximal de douze mois à compter de la cession, en souscription de titres de sociétés satisfaisant aux conditions mentionnées au 1 du I, sous réserve que les titres ainsi souscrits soient conservés jusqu’au même terme. Cette souscription ne peut donner lieu au bénéfice de l’avantage fiscal prévu au même I. »
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Olivier Cadic.
Une réduction d’impôt au titre de l’impôt sur le revenu et de l’impôt de solidarité sur la fortune est accordée aux personnes physiques qui effectuent des versements au titre de la souscription au capital de certaines sociétés non cotées.
Cet avantage fiscal est subordonné à la conservation des titres reçus pendant cinq ans, à l’exception du cas de sorties forcées et avec obligation de remploi dans les douze mois qui suivent la sortie, et ce pour une durée égale au temps qui reste à courir par rapport à l’investissement initial.
Est considérée comme sortie forcée une cession stipulée obligatoire par un pacte d’associés ou d’actionnaires.
Or cette limitation de possibilité de sortie avec obligation de réemploi aux « sorties forcées » présente de nombreux effets pervers : certains investissements doivent être cédés avant le délai de cinq ans et l’application d’une clause de sortie forcée – rachat par les fondateurs, nécessités de restructuration financière de la participation – n’est pas toujours possible ; une cession avant cinq ans, et répondant aux conditions de non-remise en cause de l’avantage fiscal pour l’ISF, a déjà pour effet de susciter une double obligation : d’une part, réinvestir le prix de vente dans une PME éligible dans les douze mois ; d’autre part, payer l’impôt sur les plus-values correspondantes.
Qui plus est, les souscripteurs n’ont aucune garantie de retour en capital à l’échéance des cinq ans, le réinvestissement leur faisant prendre un nouveau risque total.
Aussi, cet amendement vise à maintenir le bénéfice de la réduction d’ISF ou d’IR sous condition de réemploi quelle que soit la cause de la cession et à exonérer de la contrainte de la sortie forcée les sorties concernant uniquement les sociétés de moins de sept ans d’âge. En effet, c’est dans ces entreprises que se pose ce problème fondamental de flexibilité du capital.
Nous avons débattu de cette question lors de l’examen des amendements identiques n° 753 et 878. De surcroît, et contrairement à ces deux derniers, la rédaction de cet amendement soulève quelques problèmes.
La commission spéciale sollicite donc le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
Il est toujours quelque peu désagréable de s’entendre dire que la rédaction de l’amendement que l’on vient de défendre soulève de nombreux problèmes.
C’est une manière de dire que le travail qui a été fait n’est pas tout à fait abouti. À l’école, on dit : « Peut mieux faire », …
… ce qui permet d’éviter tout commentaire sur le fond. Permettez-moi de dire les choses en toute franchise.
Le présent projet de loi, c’est ainsi que je l’ai compris, a pour objectif de libérer la croissance et d’ôter des carcans. Eh bien, voilà un exemple de blocage !
Comment comprendre qu’on puisse empêcher de réemployer ses fonds un investisseur qui a pris part à une aventure, qui a pris un risque financier et qui, quelle qu’en soit la raison, cède ses titres ?
Je retire donc cet amendement, monsieur le président, mais c’est à regret.
L'amendement n° 851 rectifié bis est retiré.
La parole est à M. le ministre.
Monsieur le sénateur, je vais m’employer à vous expliquer pourquoi le Gouvernement s’associait à la demande de retrait de la commission spéciale.
Vous avez défendu votre amendement avec enthousiasme et je salue votre volonté d’aider les entreprises. Vous proposez de modifier la loi pour tendre vers une plus grande flexibilité du capital. Or j’attire votre attention sur le fait que ces règles sont souvent source de contentieux et que leur modification est génératrice d’instabilité. De fait, le remède peut être pire que le mal.
C’est ce qui explique la prudence entourant le recours aux dispositifs du type ISF-PME, qui sont instables au regard du droit communautaire ; nous sommes d’ailleurs actuellement en discussion avec la Commission – cela aurait dû être fait depuis des années – à ce sujet.
Il ne m’appartient pas de juger de votre travail, monsieur le sénateur, et je crois pouvoir dire que tel n’était pas non plus le propos de Mme la corapporteur. Toutefois, compte tenu des risques potentiels, il convient de faire preuve d’une grande prudence, afin d’éviter des contentieux qui nuiraient aux entreprises.
Sur le fond, pourquoi étais-je réservé à l’égard de cet amendement ?
Tout d’abord, il était en partie satisfait. En effet, la loi et la doctrine administrative prévoient d’ores et déjà plusieurs cas de non-remise en cause de la réduction d’impôt, parmi lesquels les fusions, les scissions, les liquidations judiciaires. À cet égard, je vous confirme que, dans ces situations, lorsqu’elles se présentent, ni l’avantage Madelin ni l’avantage ISF-PME ne sont remis en cause. Des ambiguïtés ont pu subsister, qui expliquent que des entreprises ou des investisseurs vous aient saisi, mais, je le répète, celles-ci ont été levées à la fois par la jurisprudence et par la doctrine fiscale.
Ensuite, l’amendement adopté par la commission spéciale tend à légaliser plusieurs exceptions doctrinales et à étendre au dispositif Madelin l’absence de remise en cause en cas de cession forcée par un détenteur parti à un pacte d’actionnaires. C’est là une avancée importante, qui répond à votre préoccupation.
Enfin, vous proposiez d’étendre les cas dans lesquels le contribuable peut céder, sous condition de réemploi, les titres reçus à la suite de son investissement en ouvrant cette possibilité, quel que soit le motif de la cession.
Sur ce point, je suis plus réservé : l’actionnaire qui est parti à un pacte d’actionnaires, en vertu duquel il était obligé de céder ses titres, conserve le bénéfice des avantages fiscaux s’il réemploie dans des sociétés éligibles le prix de cession diminué des impositions dues sur la plus-value de cession. Cette mesure permet d’éviter la remise en cause d’un avantage fiscal dans des situations subies par le contribuable. La cession forcée peut être prévue par le pacte, notamment dans le cas d’une solidarité avec un autre actionnaire qui a décidé de vendre au même moment. C’est le principe du tag along right et du drag along right, que vous devez connaître, puisque vous fréquentez les investisseurs britanniques.
La possibilité que vous vouliez offrir au contribuable de céder ses titres pour n’importe quel motif aurait privé d’effet la condition de conservation des titres, qui est consubstantielle à l’avantage fiscal et en est la contrepartie.
Le risque inhérent à cette logique, c’est de remettre en cause en cascade tout le dispositif. Votre proposition, si elle avait été adoptée, aurait encouragé des arbitrages de court terme en fonction des performances ponctuelles de la société au capital de laquelle le contribuable souscrit, ce qui n’est pas toujours dans l’intérêt de l’entreprise soutenue.
L’aide publique, dans le cas tant de l’ISF-PME que de la réduction d’impôt Madelin, ne se justifie que pour soutenir des investisseurs qui prennent des risques sur le long terme. C’est ce qui a toujours sous-tendu ces deux dispositifs, qui s’inscrivent donc bien dans une logique productive. Par conséquent, il n’y a pas lieu de mobiliser ces aides pour soutenir des investissements de portefeuille de court terme. Or lever la condition de détention des titres pendant cinq ans ferait courir ce risque.
Pour conclure, je comprends ce qui a motivé le dépôt de cet amendement, mais je veux vous dire que nous avons amélioré la situation. Plus largement, ce dispositif est plutôt favorable aux détentions de moyen et de long terme.
Telles sont les raisons pour lesquelles le Gouvernement était lui aussi favorable au retrait de cet amendement, auquel je vous remercie d’avoir procédé.
Je souscris aux propos de M. le ministre.
Monsieur Cadic, quand j’ai dit que la rédaction de votre amendement soulevait des problèmes, je ne critiquais pas le fond de votre amendement ni votre travail ; je voulais simplement souligner que son adoption aurait pu faire naître des situations contentieuses.
Autant que faire se peut, et même si nous n’y parvenons pas toujours, faisons en sorte d’adopter des textes de loi exempts de difficultés rédactionnelles !
L'article 35 ter A est adopté.
I. – À la fin de la seconde phrase du premier alinéa du 1 du I de l’article 885-0 V bis du code général des impôts, le montant : « 45 000 € » est remplacé par le montant : « 90 000 € ».
II. – Le I s’applique à compter du 1er janvier 2016.
III. – La perte de recettes pour l’État résultant du I du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 33 est présenté par Mmes Assassi et Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 560 rectifié quater est présenté par M. Guillaume, Mme Bricq, MM. Lalande, Patient, Chiron, Yung, Botrel, Raynal, Vincent, Raoul, Boulard, F. Marc et les membres du groupe socialiste et apparentés et apparentés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Pierre Laurent, pour présenter l’amendement n° 33.
Au travers de cet amendement, nous entendons supprimer cet article, qui a pour objet de doubler le plafond de la réduction d’impôt ISF-PME, pour le porter à 90 000 euros. Cette mesure, selon nous, n’est absolument pas nécessaire et soulève de surcroît des problèmes d’équilibre et de justice fiscale. En outre, je rappelle que ce dispositif fiscal fait l’objet de discussions entre la France et les instances européennes.
Le rendement de l’impôt de solidarité sur la fortune est déjà bridé par un certain nombre de niches fiscales, dont le coût se révèle important et l’efficacité extrêmement limitée.
Nous connaissons les chiffres : 47 098 contribuables ont effectué des apports en direction de PME, pour un coût fiscal de 468 millions d’euros, soit près de 10 % du produit de l’ISF.
Parmi les contribuables assujettis à l’ISF de la première tranche du tarif, on trouve quelque 30 305 contribuables financeurs, qui ont apporté 330, 4 millions d’euros au capital des PME. Seulement 30 % d’entre eux, soit 9 155 personnes, ont réalisé un apport direct au capital d’une PME, d’un montant moyen de 14 225 euros. Pour ceux qui ont opté pour l’apport à une holding, le versement moyen est de 15 400 euros.
L’apport aux fonds d’investissement de proximité conduit à un versement moyen de 9 100 euros environ ; le versement moyen par le truchement des FCPI est de 8 850 euros.
Quel que soit le type de versement ou de véhicule utilisé, nous sommes fort loin du plafond de versement du dispositif ISF-PME. Il n’y a donc aucune raison de suivre la commission spéciale dans sa décision de doubler ce plafond.
En vérité, on se demande ce qui a pu motiver l’adoption de cet article additionnel. Peut-être offrir aux quelques centaines de contribuables concernés un rendement financier supplémentaire à travers une niche fiscale renforcée, même si cette mesure n’est d’aucune efficacité pour l’investissement réel dans les PME ?
En tout cas, nous demandons la suppression de cet article.
La parole est à M. Marc Daunis, pour présenter l'amendement n° 560 rectifié quater.
Cet article vise à doubler le plafond de la réduction d’impôt liée au dispositif dit « ISF-PME », en le passant à 90 000 euros, contre 45 000 euros actuellement, avec un coût pour les finances publiques de près de 100 millions d’euros.
Cette mesure ne nous paraît pas pertinente, a fortiori pour un dispositif qui donne aujourd’hui entière satisfaction. En doublant le plafond de l’avantage fiscal, nous risquerions de dévoyer son objet initial et de le transformer quasiment en un pur instrument d’optimisation fiscale.
L’encouragement au doublement de ce plafond par la commission spéciale m’étonne quelque peu, car celle-ci souhaitait, elle l’a encore rappelé tout à l’heure, que ce dispositif soit stabilisé.
En outre, s’agissant de l’enjeu principal, à savoir la restauration de l’attractivité économique du pays, les réductions d’impôts peuvent-elles constituer le seul moyen permettant de favoriser le financement en fonds propres des entreprises ?
Dans le présent texte, le choix d’une palette large, diversifiée, au service du développement et du renforcement de nos entreprises, notamment de nos PME et de nos entreprises de taille intermédiaire innovantes, s’accompagne des dispositifs appropriés.
En outre, nous avons décidé d’actionner toute une panoplie d’outils cohérents. À cet égard, M. le ministre a rappelé hier que Bpifrance fonctionne désormais à plein régime. Il a d’ailleurs annoncé le 8 avril dernier que le montant des prêts devrait passer, pour la période de 2015 à 2017, de 5, 9 milliards à 8 milliards d’euros.
Ce texte comporte également des instruments tels que les business angels, le crowdfunding et le capital-risque via la « société de libre partenariat », autant d’outils qui nous apparaissent bien plus cohérents.
Pour conclure, je formulerai deux remarques.
Sur le fond, et je m’adresse à mes collègues de l’UMP, augmenter le poids des niches fiscales ne peut pas tenir lieu de politique, surtout quand on ne cesse d’annoncer 100, 120 ou 130 milliards d’euros d’économies sur la dépense publique ! Cette incohérence, rappelée d’ailleurs par le Premier ministre lors de la séance de questions d’actualité au Gouvernement, est difficilement compréhensible.
De plus, permettez-moi de signaler, à propos de cette niche de l’ISF-PME, que c’est vous-mêmes qui, en 2011, avez ramené le plafond de l’avantage fiscal de 50 000 euros à 45 000 euros.
Pour toutes ces raisons, nous souhaitons la suppression de cet article.
Contrairement à ce que vous affirmez, chers collègues, le dispositif actuel n’est pas stabilisé, puisqu’il est en cours de refonte, je le redis, afin de le rendre compatible avec le nouveau règlement général d’exemption de la Commission européenne et les lignes directrices qui le complètent.
La principale difficulté aujourd’hui est que le nouveau régime prévoit un ciblage des sociétés beaucoup plus restrictif que le dispositif actuel. Notre volonté de doubler le plafond de l’avantage fiscal au travers de l’article 35 ter B vise à envoyer une sorte de signal. En effet, le ciblage plus restrictif que pourrait exiger la Commission européenne dans le cadre de la négociation en cours ne doit pas se traduire, dans la mesure où nous avons déjà pris du retard, par une baisse de l’investissement dans les PME.
Pour 2015, le coût de cette mesure est nul, puisque nous avons prévu son entrée en vigueur au 1er janvier 2016. Pour les années suivantes, le dispositif sera, je l’espère, refondu à cette date et le ciblage restreint.
Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur ces deux amendements identiques.
Ces objectifs sont aujourd’hui, je le répète, en voie de stabilisation, puisque nous avons trouvé un équilibre destiné à garantir leur efficacité en apportant des aménagements, ce qui a été fait dans les articles précédents.
Au demeurant, ces ajustements ne sauraient compenser la totalité de la politique de financement en fonds propres des entreprises. En tout cas, le doublement envisagé du plafond de l’avantage fiscal contreviendrait à l’engagement pris par le Gouvernement de ne pas revoir en profondeur ces dispositifs tant que la négociation avec la Commission européenne n’est pas stabilisée.
En outre, aujourd’hui, le financement en fonds propres de nos entreprises est un véritable enjeu, qui va bien au-delà de cette discussion.
Je pense à tous les dispositifs portés dans ce texte, mais aussi à la mobilisation des intermédiaires financiers, banques ou assureurs, car la réouverture d’une partie du système soumis à la régulation financière a pénalisé le financement de l’économie au niveau européen.
À cet égard, je citerai, parmi d’autres, le véhicule Novi conçu par la Caisse des dépôts et consignations afin de remobiliser les investisseurs institutionnels dans le financement en fonds propres de nos entreprises. Ce dernier ne dépasse pas les 20 % – n’oublions jamais ce chiffre – et vient s’ajouter au niveau encore trop bas et insuffisant de leurs marges.
Tous ces dispositifs sont importants, mais la réponse ne saurait être apportée par un doublement du plafond, tel qu’il est envisagé par la commission. C’est pourquoi le Gouvernement est favorable à ces deux amendements identiques.
Je ne dois pas être assez intelligente – mes collègues de l’UMP et de l’UDI-UC seront satisfaits ! –, car je ne comprends pas votre raisonnement, madame la corapporteur. Vous avez utilisé deux arguments pour vous opposer aux amendements du groupe CRC : la stabilité interne de nos dispositifs fiscaux et l’existence d’une procédure contentieuse européenne à l’encontre du dispositif.
Le premier argument ne tient pas, car l’augmentation du plafond créera de l’instabilité. Quant à l’amendement porté tout à l’heure par M. Cadic, il vise non pas à doubler le plafond, mais à le multiplier par dix !
Second argument, vous préjugez de la décision de la Commission européenne, en prévoyant, en contrepartie de l’obligation d’être plus restrictif, de doubler le plafond de la réduction d’impôt. Or, dans la mesure où une négociation est en cours avec le gouvernement français, il ne faut pas anticiper un résultat aussi négatif, alors que la décision n’est pas prise.
Je soutiens donc ces deux amendements identiques tendant à la suppression de cet article.
Nous aboutissons tous, sur l’ensemble de ces travées, au même constat : nos structures industrielles, principalement dans le secteur des ETI, et pas uniquement des PME, rencontrent des difficultés. Certes, la compétitivité des grandes entreprises du CAC 40 s’améliore, mais c’est l’arbre qui cache la forêt, car notre faiblesse se manifeste dans les entreprises intermédiaires, les grosses PME : leurs besoins de croissance sont importants, qui requièrent des capitaux relativement élevés.
Aujourd’hui, lorsque vous élaborez un plan de développement, vous vous appuyez sur la BPI et le secteur bancaire, bien sûr, mais lorsque vous empruntez des capitaux, ces organismes financiers exigent un certain équilibre entre fonds propres et fonds d’emprunts. À ce propos, il faut bien reconnaître que la faiblesse des fonds propres dans les entreprises, PME et ETI, a probablement représenté un frein au développement de ces structures.
Flécher l’ISF de manière un peu plus importante pour financer durablement le capital des entreprises me paraît judicieux. Il serait curieux que la Commission européenne porte une appréciation négative sur un dispositif relatif à un impôt inexistant dans certains pays européens. Cette position serait à mes yeux paradoxale et injuste. Il serait plus opportun d’encourager ce dispositif dans des proportions raisonnables.
Je vous le rappelle, dans le secteur industriel requérant des investissements lourds, une grosse PME dont le chiffre d’affaires avoisine les 10 à 15 millions d’euros et qui compte une centaine de salariés devrait disposer d’au moins 1 million d’euros de fonds propres. Sinon, elle ne pourra pas suivre ses plans d’investissements et injecter les milliers d’euros nécessaires pour atteindre 1, 2 million ou 1, 5 million d’euros.
Or c’est par dizaine de milliers d’euros que les capitaux doivent être placés dans les fonds propres de ces structures industrielles. Les dérives que l’on a pu constater se sont produites dans des sociétés où les besoins d’investissement sont moindres.
Par conséquent, cette disposition introduite par la commission est bénéfique pour renforcer les structures financières des entreprises désirant investir.
Je suis étonné de l’argumentation de Mme la corapporteur.
Pour anticiper le dispositif, on prend la voie prétendument la plus efficace. Nous contestons totalement cette assertion, car je ne vois pas en quoi le doublement du plafond de la réduction d’impôt représentera un réel encouragement pour la plupart des cas auxquels nous sommes confrontés. Nous ne disposons d’aucune preuve à ce sujet. Nous risquons uniquement, en contournant ainsi l’anticipation de la discussion avec la Commission européenne, de renforcer dans le dispositif la part de l’optimisation fiscale, au détriment du soutien réel à l’investissement.
Par conséquent, nous rejetons cet article.
Je mets aux voix les amendements identiques n° 33 et 560 rectifié quater.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission.
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable et que celui du Gouvernement est favorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
Le scrutin a lieu.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
Il est procédé au dépouillement du scrutin.
Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 151 :
Le Sénat n'a pas adopté.
Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 1721, présenté par Mme Deroche, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
I. – L’article 885-0 V bis du code général des impôts est ainsi modifié :
1° À la seconde phrase du premier alinéa du 1 du I le montant : « 45 000 euros » est remplacé par le montant : « 90 000 euros » ;
2° Au 2 du III, le montant : « 18 000 euros» et le montant : « 45 000 euros » sont remplacés par le montant : « 90 000 euros » ;
3° Au quatrième alinéa du V, le montant : « 45 000 euros » est remplacé par le montant : « 90 000 euros ».
II. – Le I s’applique à compter du 1er janvier 2016.
III. – La perte de recettes pour l’État résultant des I et II du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Catherine Deroche, corapporteur.
Sourires.
Mes chers collègues, cet amendement vise à étendre le doublement du dispositif ISF-PME, adopté par la commission spéciale, aux fonds d’investissement éligibles.
Cette réduction d’impôt, prévue à l’article 885-0 V bis du code général des impôts, s’applique, sous certaines conditions, aux versements effectués au titre de la souscription de parts des fonds d’investissement de proximité, les FIP, et des fonds communs de placement dans l’innovation, les FCPI.
Comme pour un investissement direct, l’avantage fiscal équivaut à 50 % des montants versés au titre de la souscription, à proportion des sommes investies dans le fonds au sein de PME éligibles. Toutefois, la réduction d’impôt est actuellement plafonnée à 18 000 euros, contre 45 000 euros pour les investissements indirects – nous venons d’évoquer ce second seuil.
Cette différence entre les souscriptions directes et indirectes s’explique historiquement par la volonté d’encourager les investisseurs indirects, dont le rôle ne se limite pas au strict financement de l’entreprise. Or, aujourd’hui, cette distinction ne semble plus justifiée. En effet, les souscriptions directes sont souvent réalisées via un mandat de gestion ou de conseil. En pareil cas, l’intermédiaire procède aux investissements pour le compte de l’investisseur, ou lui permet de bénéficier d’une sélection de PME.
Par conséquent, le présent amendement vise à étendre le nouveau plafond du dispositif ISF-PME aux souscriptions de parts de FIP et de FCPI, afin de garantir une neutralité fiscale entre les différents véhicules, fonds, holding et gestion sous mandat, permettant d’investir au sein de sociétés éligibles à cette aide. Conformément au plafond voté par la Haute Assemblée, la somme des différents avantages sera ainsi limitée à 90 000 euros.
L'amendement n° 920 rectifié bis, présenté par MM. Cadic, Canevet, Guerriau et Pozzo di Borgo, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Remplacer le montant :
90 000 euros
par le montant :
500 000 euros
La parole est à M. Olivier Cadic.
Ces dispositions vont dans le sens indiqué par la commission spéciale. À cet égard, je me félicite que l’on se montre enfin prêt à ouvrir un tant soit peu les vannes, en envisageant d’adopter une mesure fiscale !
Madame la corapporteur, vous l’avez compris, cet amendement tend à aller un peu plus loin que votre proposition de doublement du plafond.
Il s’agirait de multiplier le montant des aides considérées par dix environ, en portant ce plafond de 45 000 euros à 500 000 euros. Pourquoi ? Pour nous aligner sur le dispositif britannique baptisé EIS, Enterprise investment scheme, qui a fait ses preuves. Cet outil, qui encourage l’investissement dans de petites entreprises, offre un allégement fiscal de 30 % dans une limite annuelle d’investissement, pour les personnes physiques, de 1 million de livres sterling, soit 450 000 euros.
Mes chers collègues, permettez-moi d’insister : dans ce domaine, nous devons devenir fiscalement compétitifs vis-à-vis de la Grande-Bretagne. Cet ajustement le permet.
Bien entendu, je soutiens la commission spéciale dans sa démarche. Néanmoins, chacun doit prendre conscience des avantages dont disposent, en la matière, les investisseurs outre-Manche.
J’entends M. Daunis s’exclamer. Mais, je le répète, les enjeux sont de taille !
Voilà quelques mois, s’est achevé un concours destiné à récompenser les entreprises françaises qui se développent au Royaume-Uni. Une firme spécialisée du secteur de l’internet a remporté le premier prix. Que nous disaient ses représentants pas plus tard qu’hier au soir ? Voilà quatre mois que la maison-mère de cette société tente de lever des fonds en France, sans succès ! Outre-Manche, le principal concurrent britannique de cette firme a levé de l’argent en une semaine...
Que va-t-il se passer ? À terme, cette société française sera rachetée par son concurrent, qui se sera développé beaucoup plus vite qu’elle. Voilà la réalité !
Notre seul but, c’est de dynamiser notre économie pour assurer la compétitivité de nos entreprises. Tel est l’esprit de cet amendement.
Monsieur Cadic, j’entends tout à fait vos propos et je souscris à nombre des constats que vous dressez : les dispositions suggérées par la commission spéciale peuvent sembler un peu frileuses. Si la décision n’avait tenu qu’à moi, j’aurais poussé plus loin cette avancée.
Toutefois, la commission spéciale a privilégié un dispositif plus mesuré. Voilà pourquoi je vous demande de bien vouloir retirer cet amendement.
La proposition de Mme la corapporteur est en cohérence avec les dispositions votées par la commission spéciale : il s’agit d’étendre le dispositif ISF-PME, élaboré par ses soins, à d’autres outils d’investissement. J’étais favorable à la suppression du dispositif initial rehaussant le plafond de réduction d’impôt.
Par cohérence, je ne puis qu’être défavorable à l’amendement n° 1721. Et en toute logique, j’émets également un avis défavorable sur l’amendement n° 920 rectifié bis.
Monsieur Cadic, nous ne manquerons pas d’examiner de près le système dont disposent, à ce titre, nos voisins britanniques. Toutefois, j’émets d’emblée une réserve à ce sujet. Les deux dispositifs sont difficilement comparables, et ce pour une raison qui n’aura échappé à personne : à proprement parler, l’ISF n’existe pas outre-Manche. Le dispositif britannique se fonde sur l’imposition des revenus les plus élevés. Aussi, comment cet avantage fiscal, qui porte, en France, sur cet impôt, pourrait-il faire l’objet de telles comparaisons ?
Nous n’en devons pas moins continuer à concentrer nos efforts vers ce but : la mobilisation de l’épargne financière vers le capital productif.
À cet égard, plusieurs pistes existent, dont la Haute Assemblée a commencé à débattre hier. À mon sens, notre pays doit relancer avec beaucoup plus d’énergie l’actionnariat salarié et l’épargne sociale – nous reviendrons sur cette question dans quelques instants. C’est la mère des batailles !
Il est essentiel que le Sénat se saisisse de cette question, qui, au demeurant, est de nature à dépasser les clivages partisans : la mobilisation de l’épargne financière des Français et, au premier chef, de l’assurance vie, en faveur du capital productif. En effet, force est de l’admettre, nous avons collectivement laissé naître un monstre qui, aujourd’hui, pénalise notre économie.
Lorsqu’on observe l’épargne de nos concitoyens, on constate qu’elle est massivement investie dans l’immobilier. Quant à l’épargne financière, elle est placée à près de 80 % dans des assurances vie. C’est un produit que les Françaises et les Français apprécient particulièrement, notamment parce qu’il les rassure.
Historiquement, la France a constitué, par l’assurance vie, un « môle » dans nos grandes entreprises françaises. Il y a de cela vingt ans, les grands assureurs jouaient un rôle très actif en la matière.
Par suite des dernières crises financières, ces intermédiaires financiers ont fait l’objet d’une régulation très stricte, alors même qu’ils n’étaient pas au cœur de cette tourmente. Ces crises ont été provoquées, pour une très large part, par les opérateurs hors marché, les « opérateurs de l’ombre », qui procédaient à la titrisation.
Toujours est-il que l’activité des banques et des assurances a été extrêmement régulée. Je songe notamment à la règle dite « de Solvabilité II », qui, aujourd’hui, pousse les assureurs, en particulier les assureurs français, à investir dans des obligations d’État et à abandonner toutes les participations dont ils disposaient au capital des entreprises, cotées ou non cotées. Voilà l’aberration face à laquelle nous nous trouvons !
Le financement de notre économie nous impose de réexaminer collectivement cette régulation opérée par des professionnels du secteur. Les politiques se sont dépossédés de cette question. Or les actifs financiers dont il s’agit doivent être investis dans nos entreprises. C’est là une bataille vitale, qui exige d’exercer une pression politique.
Nous avons débattu hier du secteur du numérique, dans lequel, j’en suis persuadé, une telle attitude serait bénéfique. En l’espèce, nous devons faire pression collectivement pour canaliser l’argent des assureurs au profit de la sphère productive.
Ces précisions étant apportées, je réitère mon avis défavorable sur les amendements n° 1721 et 920 rectifié bis.
Les propositions que traduisent ces amendements s’inscrivent clairement dans une logique du « toujours plus ». On suggère de multiplier les avantages fiscaux par quatre, …
… puis par dix, et cela sur la base d’arguments qui ne nous convainquent pas.
Monsieur le ministre, je souscris pleinement au constat que vous dressez. Encore faudrait-il s’emparer de la question du rôle de ces institutions financières ! Votre projet de loi l’élude totalement… Or la loi bancaire, récemment votée par le Parlement, ne permet pas de la traiter, et, en dépit de ses qualités, la Banque publique d’investissement reste largement sous-dimensionnée face aux réalités financières auxquelles elle fait face.
J’ajoute que d’autres questions méritent d’être posées : comment sont contrôlées ces institutions financières ? Quel doit être le rôle des salariés qui y travaillent ?
Les moyens de mieux diriger l’épargne vers l’investissement productif constituent un véritable enjeu, et nous y sommes on ne peut plus sensibles. Toutefois, pour l’heure, je constate que l’on persiste à multiplier les niches fiscales sans traiter réellement le sujet.
Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse. J’ai bien noté, comme vous, que l’ISF n’existait pas au Royaume-Uni. Le problème de la compétitivité se pose bel et bien en termes distincts de part et d’autre de la Manche – nous aurons l’occasion d’y revenir en examinant d’autres amendements.
Je comprends l’orientation suivie par le présent texte, et j’observe que nous admettons tous la nécessité d’aller plus loin dans ce sens. Vous ne serez pas surpris que je fasse preuve de pragmatisme : en soutien à votre action, je retire mon amendement.
Je mets aux voix l'amendement n° 1721.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission spéciale.
Je rappelle que l’avis du Gouvernement est défavorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
Le scrutin a lieu.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
Il est procédé au dépouillement du scrutin.
Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 152 :
Le Sénat a adopté.
En conséquence, l'article 35 ter B est ainsi rédigé.
L'amendement n° 917 rectifié bis, présenté par MM. Cadic, Canevet, Guerriau, Delahaye et Pozzo di Borgo, est ainsi libellé :
Après l’article 35 ter B
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le 1° bis du I de l’article 156 du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Un investisseur personne physique ayant investi dans une société mentionnée à l’article 239 bis AB plus de 100 000 € est réputé exercer dans cette société une activité professionnelle et, dans la limite du montant de son investissement, les déficits éventuels sont, pour la part le concernant, des déficits professionnels. »
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Olivier Cadic.
Le législateur a voté l’article 30 de la loi de modernisation de l’économie, ou LME, du 4 août 2008, créant dans le code général des impôts, à l’article 239 bis AB, la société de capitaux transparente fiscalement, la SCT, inspirée de la forme sociale dite « Subchapter S », qui est une des sources de l’expansion économique américaine.
Cette SCT a permis la multiplication des investisseurs en création d’entreprise, grâce à la faculté qu’elle offre de déduire des pertes éventuelles du revenu pour le calcul de l’impôt. Pour résumer, en cas d’échec de l’entreprise créée, l’État prend en charge la moitié du risque.
C’est la condition pour que se multiplient les investisseurs dans les SCT, au moment où, dans la vie d’une entreprise, le risque est maximum. L’article 239 bis AB limite leur usage à des entreprises de moins de cinq ans, de moins de cinquante salariés et de moins de 10 millions d’euros de chiffre d’affaires ou de bilan.
Cette incitation manque toutefois son objectif en raison, principalement, d’une disposition du code général des impôts à l’article 156 qui provoque une « tunnellisation » des revenus en n’autorisant la déduction que des bénéfices de même nature.
La plupart des investisseurs potentiels se trouvent ainsi écartés, car les pertes relèvent le plus souvent des bénéfices industriels et commerciaux, ou BIC, alors que les revenus sont, le plus souvent, salariaux ou mobiliers.
L’article 156 prévoit bien que ne sont pas soumis à cette « tunnellisation » les investisseurs professionnels dont la participation est « personnelle, continue et directe ». Le rôle d’un business angel indépendant, qui investirait à lui seul entre 10 % et 30 % du capital social initial, soit au moins 100 000 euros, pour un capital situé en dessous d’un million d’euros – ce qui est le cas pour 95 % des créations d’entreprise – correspond, en pratique, à cette définition. Les contours en sont toutefois si imprécis qu’il ne pourrait être assuré d’échapper à un redressement.
Cette situation est extrêmement dommageable à notre économie. Le mécanisme en question a en effet conduit, aux États-Unis, à une explosion du nombre de créations d’entreprise. En outre, les bénéfices des entreprises « Subchapter S » qui en font sont environ trois fois supérieurs aux pertes encourues par celles qui sont déficitaires. Pour information, les résultats de la première année pour les entreprises créées en France présentent un ratio similaire.
Cet amendement vise donc à multiplier les investisseurs dans les SCT et à sécuriser les business angels.
La commission a demandé le retrait de cet amendement, qui est régulièrement rejeté par les commissions des finances des deux assemblées, car il tend à traiter de la même façon sur le plan fiscal un gestionnaire et un investisseur.
La possibilité offerte aux petites entreprises de moins de cinq ans d’opter pour le régime fiscal des sociétés de personnes aide les associés à passer le cap difficile des premières années en leur permettant d’imputer les déficits sur leur imposition personnelle de l’année sans attendre que la société devienne bénéficiaire.
En pratique, l’actionnaire actif – le gestionnaire – est distingué de l’actionnaire passif – l’investisseur. Seul le premier peut imputer les déficits sur son revenu global. Le public visé est celui des entrepreneurs qui prennent un risque maximal et dont le foyer fiscal dégage d’autres revenus professionnels, issus par exemple des activités du conjoint ou de celles des parents.
Le critère proposé par les auteurs de cet amendement, qui conduirait à qualifier de gestionnaire tout associé ayant investi plus de 100 000 euros, semble à cet égard beaucoup trop large et de nature à porter atteinte à un principe constant du droit fiscal français. Un actionnaire passif pourrait, par exemple, imputer les pertes d’une PME en phase d’amorçage sur ses loyers locatifs.
Le régime dont il est question concilie déjà, en outre, transparence fiscale et responsabilité limitée.
La commission demande donc le retrait de cet amendement, tout en souhaitant entendre l’avis du Gouvernement.
Monsieur le sénateur, vous abordez le sujet bien connu et très technique du direct et de l’indirect. Vous proposez, en somme, que les investisseurs dans les sociétés de capitaux qui optent pour le régime des sociétés de personnes soient réputés exercer une activité professionnelle dans ces sociétés lorsqu’ils investissent au moins 100 000 euros. De cette manière, la part du déficit catégoriel attribuée aux investisseurs passifs serait déductible de leur revenu global, soumis en particulier à l’impôt sur le revenu.
Le régime de l’article 239 bis AB permet une dérogation au régime applicable aux sociétés de capitaux relevant de l’impôt sur les sociétés. Si une société est constituée d’au moins 50 % d’associés personnes physiques, il lui est aujourd’hui possible d’opter, sur la durée de cinq exercices, pour l’application de l’impôt sur le revenu.
L’introduction, en 2008, de ce droit d’option avait précisément pour objectif de permettre aux associés professionnels personnellement impliqués dans le développement de l’entreprise d’imputer les déficits des premières années d’exercice sur leur revenu global.
Ce que vous cherchez à couvrir par votre proposition me semble donc l’être déjà pour les premières années de la vie de l’entreprise. La capacité à créer des entreprises par ce dispositif fiscal correspond à la disposition de l’article 239 bis AB que j’évoquais.
Les règles déterminant lesquels des associés sont considérés comme professionnels et peuvent donc imputer des déficits de leur activité n’ont, quant à elles, pas été modifiées par la loi de modernisation de l’économie. Aussi, seuls sont déductibles du revenu global les déficits revenant à des associés exerçant leurs activités dans la société.
Pour un investisseur purement financier, ou de type business angel, ce truchement n’est en effet pas le bon, parce qu’il ne permet pas, dans ce cas, de déduire les pertes des premières années. L’activité professionnelle se caractérisant fiscalement, je le rappelle, par la participation personnelle, directe et continue de l’associé à l’activité, la participation indirecte ne rend pas éligible à ce dispositif.
Vous proposez d’aller plus loin en faisant en sorte que l’option des sociétés de capitaux pour l’impôt sur le revenu permette à tout associé d’imputer sur son revenu imposable une quote-part des déficits de l’exercice correspondant à sa part dans le capital, à la seule condition qu’il ait investi plus de 100 000 euros. Cela permettrait, dites-vous, aux investisseurs professionnels de bénéficier du même traitement que les créateurs de l’entreprise qui exercent leur activité. C’est vrai !
Toutefois, en pratique, l’incitation à l’investissement que vous proposez ne me semble pas pleinement opérante au regard des critères légaux. Elle viendrait en quelque sorte à l’appui d’un deuxième objectif, qui est relatif aux business angels. Nous avons traité cette question à travers certaines dispositions relatives à l’impôt sur la fortune.
Le mécanisme que j’évoquais favorise plutôt un co-investissement avec la Banque publique d’investissement, qui permet un effet de levier.
Aujourd’hui – je vous en donne crédit –, pour des investisseurs qui ne prennent pas part à l’activité de l’entreprise, le dispositif français est moins attractif que son équivalent en Grande-Bretagne. Il est vrai également que, ce mode de financement étant moins développé, il est moins dirimant pour le financement de notre économie.
C’est pourquoi mon avis sur cet amendement est défavorable, bien que je ne considère pas que la totalité de son objet, en particulier la base de votre raisonnement, soit erronée.
J’ai le sentiment d’avoir été entendu et compris, ce qui est une première satisfaction.
Monsieur le ministre, vous avez bien saisi cette demande de sécurité, qui revient de façon récurrente dans les conversations avec nos entrepreneurs. Ceux-ci se sentent souvent fragilisés vis-à-vis de l’administration et du cadre légal, qu’ils trouvent très complexe. Vous avez compris cette attente, qui s’exprime depuis longtemps.
Pour un parlementaire récemment élu comme moi, la difficulté réside dans cette capacité très française à attendre – la prochaine fois, une nouvelle loi… Pendant ce temps, les autres avancent !
Puisque nous sommes conscients des attentes qui s’expriment et des progrès qu’il faut réaliser, puisque nous partageons la volonté que notre pays soit compétitif, nous devons travailler ensemble, pour ne pas laisser passer trop de temps et mettre en place, à court terme, ces dispositions.
Dans cette attente, je retire mon amendement, monsieur le président.
L'amendement n° 917 rectifié bis est retiré.
L'amendement n° 915 rectifié, présenté par MM. Cadic, Canevet, Guerriau et Pozzo di Borgo, est ainsi libellé :
Après l’article 35 ter B
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L’article 199 terdecies-0 A du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Après le e du 2° du I, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« … ) la société vérifie les conditions mentionnés au 2° du II de l’article 239 bis AB et aux f et g du 1 du I de l’article 885-0 V bis » ;
2° Les II, II bis et II ter sont ainsi rédigés :
« II. – Les versements ouvrant droit à la réduction d’impôt mentionnée au I sont ceux effectués jusqu’au 31 décembre 2016. Ils sont retenus dans la limite annuelle de 20 000 € pour les contribuables célibataires, veufs ou divorcés et de 40 000 € pour les contribuables mariés soumis à imposition commune.
« La fraction d’une année excédant, le cas échéant, les limites mentionnées au premier alinéa du présent II ouvre droit à la réduction d’impôt dans les mêmes conditions au titre des quatre années suivantes.
« II bis. - Le montant de la réduction d’impôt sur le revenu de 18 % mentionnée au 1° du I est portée à 30 % pour les souscriptions en numéraire au capital initial, aux augmentations de capital de sociétés et les limites mentionnées au premier alinéa du II sont portées respectivement à 250 000 € pour les contribuables célibataires, veufs ou divorcés et à 500 000 € pour les contribuables mariés soumis à imposition commune ouvrant droit à la réduction d’impôt mentionnée au 2° du I.
« La fraction d’une année excédant, le cas échéant, les limites mentionnées au premier alinéa du présent II bis ouvre droit à la réduction d’impôt dans les mêmes conditions au titre des quatre années suivantes.
« II ter. – La réduction d’impôt prévue au I est calculée sur le montant total des versements mentionnés aux II et II bis retenus dans leur limite annuelle respective. Le montant total ainsi déterminé ne peut excéder les limites mentionnées au premier alinéa du II bis. La fraction des versements pour laquelle le contribuable entend bénéficier de la réduction d’impôt dans la limite prévue au II ne peut ouvrir droit à la réduction d’impôt dans la limite prévue au II bis, et inversement. »
II. - Après l’article 150-0 D ter du même code, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. … - L’abattement prévu à l’article 150-0 D ter s’applique en totalité dès la première année de détention au-delà de la troisième année pour les cessions de titres acquis dans les conditions de l’article 199 terdecies- 0 A. Les conditions prévues à l’article 150-0 ter sont présumées remplies pour les investisseurs dans le cadre de l’article 199 terdecies- 0 A. »
III. - La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Olivier Cadic.
Cet amendement vise à mettre en place une véritable politique publique en faveur des petites entreprises communautaires qui commencent ou renforcent leurs activités.
La France accuse un retard de quelque cinq millions d’emplois marchands par rapport à l’Allemagne et à la Grande-Bretagne. Nous créons des entreprises, mais elles sont vides d’emplois marchands.
Cette carence est imputable, pour une bonne part, au « trou de financement » qui apparaît dès le démarrage de l’activité. Quelque 95 % des entreprises dont le potentiel de développement va au-delà de l’objectif d’employer leur créateur ont, tôt ou tard, des besoins en fonds propres situés entre 100 000 euros et 1 million d’euros. Les fonds d’investissement sont cependant peu actifs sur ce segment, où seuls les individus aisés, les investisseurs providentiels, ou business angels, peuvent être efficaces.
Les États-Unis et la Grande-Bretagne ne sont parvenus à combler ce trou de démarrage qu’en multipliant les business angels, à travers, respectivement, le Small Business Investment Act de 1958, et le Enterprise investment scheme. Ces dispositions visent essentiellement les gros investisseurs providentiels, qui engagent plus de 100 000 dollars.
Il est en effet essentiel que l’entrepreneur souhaitant créer ou développer une entreprise trouve avec deux ou trois actionnaires les 500 000 euros nécessaires, par exemple, de manière à faire l’économie du marathon éprouvant qui est nécessaire pour en réunir vingt ou cinquante.
Pour remédier partiellement à cette situation, une réduction d’impôt sur le revenu, dite « Madelin », a été instaurée dès 1994. Elle s’élevait à 18 % du montant de la souscription dans la limite de 20 000 euros pour un contribuable célibataire et de 40 000 euros pour les couples, sous condition de conservation des actions ou des parts pendant cinq ans. La fraction excédentaire des versements pouvait être reportée au titre des quatre années suivantes.
Ce dispositif a été amélioré en 2008 par l’adoption d’un amendement de Nicolas Forissier portant les investissements à 50 000 euros pour un célibataire et 100 000 euros pour un couple, à condition d’investir dans des entreprises de moins de cinquante salariés et de moins de dix millions d’euros de bilan total.
Le dispositif, tel qu’il existe aujourd’hui, cible donc à la fois les petites entreprises communautaires jusqu’à cinquante salariés et les PME jusqu’à deux cent cinquante salariés. Ces dernières peuvent trouver ces financements auprès du capital-risque ou des investisseurs institutionnels.
Cet amendement vise à mettre en place une véritable politique publique en faveur des petites entreprises communautaires qui démarrent ou renforcent leur activité. Cela nécessite une politique fiscale incitative permettant à chaque individu d’investir directement jusqu’à 250 000 euros – 500 000 euros pour un couple – déductibles à 30 %, avec exonération des plus-values au-delà de trois ans.
Telle est, selon moi, la condition indispensable pour créer une véritable culture de l’investisseur providentiel dans notre pays.
La commission spéciale a déjà fait un effort sur les dispositifs Madelin en faisant passer de 10 000 euros à 18 000 euros la possibilité de déduction. Vous proposez d’aller au-delà. Si l’on peut, en effet, le comprendre, au regard des arguments que vous développez, les contraintes budgétaires nous ont conduits à nous en tenir au dispositif proposé.
Je demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, l’avis de la commission serait défavorable.
Sourires.
Il me reste des amendements à présenter ; je vais poursuivre cette démarche. Un vrai débat est nécessaire. J’ai entendu tout à l'heure que les banques devaient prendre en charge ces investissements. Non, ce n’est pas leur rôle ! Comme épargnant, l’idée qu’il revienne aux banques d’investir dans le risque me met mal à l’aise. Nous avons déjà pu constater les dérives auxquelles cela donnait lieu.
J’ai une autre vision de l’économie, mais je ne suis pas surpris que vous ne la partagiez pas. Notre pays attend cette véritable évolution !
Je retire donc cet amendement, monsieur le président.
L'amendement n° 915 rectifié est retiré.
Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 914 rectifié bis, présenté par MM. Cadic, Canevet, Guerriau, Delahaye et Pozzo di Borgo, est ainsi libellé :
Après l’article 35 ter B
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Au début du premier alinéa de l’article 885 I du code général des impôts, sont insérés les mots : « Les parts ou actions d'une société ayant une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale, et ».
II. – Les articles 885 I ter, 885 quater et 885 0 bis du code général des impôts sont abrogés.
III. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Olivier Cadic.
Le redressement de notre pays passe par le développement des entreprises. Or pour rechercher, investir, innover et conquérir de nouveaux marchés, les entreprises doivent pouvoir se financer. L’alourdissement des règles prudentielles qui pèsent sur les acteurs classiques du financement et que le ministre évoquait encore tout à l'heure impose, au minimum, de permettre aux autres sources de financement, telles que l’autofinancement ou l’investissement de particuliers, de prendre le relai.
À ce titre, l’impact de l’ISF, l’impôt sur la fortune – on y vient ! – apparaît singulièrement négatif : il contraint les entreprises à verser des dividendes pour permettre aux actionnaires de payer l’impôt, diminuant ainsi leur capacité d’investissement ; il obère la rentabilité des actions, alors même qu’elles représentent un investissement risqué et de moyen ou de long terme ; enfin, il pousse les business angels et les créateurs d’entreprises innovantes et en forte croissance à s’expatrier, ce qui se traduit, in fine, par une perte de revenu fiscal pour notre pays.
Afin de favoriser le financement long et pérenne des entreprises, il est proposé d’exonérer d’impôt sur le revenu toutes les parts d’entreprises.
L'amendement n° 918 rectifié bis, présenté par MM. Cadic, Canevet, Guerriau, Delahaye et Pozzo di Borgo, est ainsi libellé :
Après l’article 35 ter B
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° Au dernier alinéa de l’article 885 A, après la référence : « 885 R », sont insérés les mots : « ainsi qu’à l’article 885 I bis » ;
2° L’article 885 I bis est ainsi modifié :
a) Le premier alinéa est ainsi rédigé :
« Les parts ou les actions d’une société ayant une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale sont considérées comme des biens professionnels si les conditions suivantes sont réunies : » ;
b) La seconde phrase du cinquième alinéa du b est ainsi rédigée :
« La valeur des titres de cette société bénéficie de l’exonération à proportion de la valeur réelle de son actif brut qui correspond à la participation ayant fait l’objet de l’engagement collectif de conservation. » ;
c) Aux septième et huitième alinéas du b, à la première phrase de l’avant-dernier alinéa et à la première phrase (deux fois) et à la seconde phrase du dernier alinéa du même b, le mot : « partielle » est supprimé ;
d) Au c, aux première et seconde phrase du d, aux premier et dernier alinéas du g et à la première phrase des h et i, le mot : « partielle » est supprimé.
II. – Le I s’applique à compter du 1er janvier 2015.
III. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Olivier Cadic.
Cet amendement vise à attribuer aux droits sociaux soumis à un engagement collectif de conservation la qualité de biens professionnels exonérés d’ISF. Une telle mesure permettrait d’encourager l’investissement de long terme, d’au moins six ans, dans les entreprises françaises et d’assurer la stabilité de leur actionnariat.
L'amendement n° 919 rectifié bis, présenté par MM. Cadic, Canevet, Guerriau, Delahaye et Pozzo di Borgo, est ainsi libellé :
Après l’article 35 ter B
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le premier alinéa du 1 du I de l’article 885 I ter du code général des impôts est ainsi rédigé :
« Sont exonérées les valeurs mobilières émises par des sociétés si les conditions suivantes sont réunies au 1er janvier de l’année d’imposition : »
II. - La perte de recettes résultant pour l'État du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Olivier Cadic.
Cet amendement tend à élargir le champ des biens exonérés d’ISF et à encourager l’investissement dans les entreprises, pour relancer la création d’emplois. Lorsque nous nous sommes rendus à Londres avec la délégation aux entreprises, nous avons observé les conséquences d’une telle mesure sur l’emploi.
Mon cher collègue, je comprends votre objectif, qui est de réduire les effets antiéconomiques de l’ISF, lesquels sont évidents : il n’est peut-être pas politiquement correct de le dire, mais il faut bien en être conscient.
Néanmoins, nous avons déjà fait un effort, même s’il semble minime, sur les dispositifs ISF-PME et Madelin. Par ailleurs, il me paraît indispensable de maintenir un traitement fiscal plus favorable pour les PME, dont les titres sont déjà totalement exonérés d’ISF en cas de souscription au capital initial ou à l’occasion d’une augmentation de capital.
Si ces amendements étaient adoptés, on peut craindre que les investisseurs ne prennent plus le risque d’accompagner une PME en phase d’amorçage. Il leur suffirait d’acheter des actions de grandes entreprises qui bénéficieraient, elles aussi, d’une exonération totale d’ISF.
En outre, les dispositifs proposés ne semblent pas comporter de clause anti-abus – les activités de gestion de patrimoine ne sont, par exemple, pas exclues –, ce qui pourrait conduire à une optimisation fiscale importante.
Je vous demande donc de bien vouloir retirer ces amendements.
Je formulerai la même demande de retrait que Mme la rapporteur.
Tout d’abord, on voit bien, au travers de nos discussions récurrentes sur la fragilité du dispositif ISF-PME, à la suite de la position adoptée par Bruxelles, que nous serons de toute façon collectivement conduits à mener une réflexion sur le traitement des entrepreneurs dans le cadre de l’ISF.
À quoi sert le dispositif ISF-PME aujourd’hui ? Même si on l’a encadré et flexibilisé, il vise à permettre à des entrepreneurs, c’est-à-dire à celles et ceux qui font courir des risques à leur capital, qui créent de la valeur par leur propre travail et celui de leurs salariés, de bénéficier de la règle d’abattement des 75 % à l’ISF. Nous avons préservé un équilibre au terme duquel un investisseur qui ne s’implique pas dans l’entreprise – telle était la réserve que j’ai formulée précédemment – ne peut en bénéficier.
Néanmoins, compte tenu du rapport entre la rémunération du capital et le taux de fiscalité, une révision en profondeur du dispositif ISF-PME, pour cette fameuse raison « bruxelloise », aurait des conséquences désincitatives pour celles et ceux qui entreprennent. Pour être parfaitement clair, je ne parle pas des investisseurs financiers. Il faudra donc revoir tout cela pour éviter d’en arriver, dans le cadre de ce dispositif, à des aberrations.
Monsieur Cadic, l’objet de votre premier amendement est trop large, puisqu’il vise en quelque sorte toutes les détentions d’actions. Ne resteraient soumis à l’ISF que les détenteurs de patrimoine immobilier. Il faut savoir proportion garder !
Il n’en reste pas moins qu’il faudra chercher à améliorer, au-delà du dispositif existant, la situation au regard de l’ISF de ceux qui détiennent un certain niveau de capital dans une entreprise qu’ils ont créée ou dans laquelle ils ont contribué à créer de la valeur.
Nous devons prendre cet engagement commun pour avancer et moderniser cet impôt. Sinon, il aura un effet contreproductif sur le financement de notre économie, qui est, si j’ai bien entendu nos débats depuis hier, un objectif pleinement partagé.
Nous devrons engager une réflexion sur ce sujet pour tirer les conséquences de la notification de Bruxelles quant au dispositif ISF-PME. Je veux le dire, je serai très vigilant pour que les entrepreneurs de notre pays ne soient pas pénalisés lors de la révision des modalités des dispositifs concernés.
C'est la raison pour laquelle, monsieur le sénateur, je vous demande de bien vouloir retirer vos amendements.
Monsieur Cadic, je suis d’accord avec vous sur le fond. Il faudra se poser non seulement la question de l’ISF pour les entrepreneurs – M. le ministre l’a dit implicitement –, mais aussi – j’irai plus loin –, celle de l’ISF tout court.
Cette question est déjà dans le débat public ; nous devrons la porter dans cet hémicycle, car, quand on fait des comparaisons internationales, on voit bien que l’ISF participe des problèmes rencontrés par notre pays en termes de compétitivité. Cette question devra être posée à l’évidence. Nous aurons l’occasion, dans les mois qui viennent et à l’occasion d’échéances majeures, de dire que ce sujet doit maintenant être pris à bras-le-corps, non seulement pour les entrepreneurs, mais de façon globale. En effet, l’ISF pousse un certain nombre de nos compatriotes à adopter des logiques d’évitement, voire de déménagement.
La difficulté que nous rencontrons est celle du coût des mesures envisagées, dans ce texte et en année budgétaire. Elles devraient être débattues dans le cadre d’une réforme fiscale globale, car il faut regarder comment équilibrer l’ensemble.
Le coût de la mesure figurant dans l'amendement n° 914 rectifié bis, qui est le plus lourd financièrement, est évalué à 1, 5 milliard d’euros. C'est une somme considérable, et qui vaut pour ce seul amendement, même si, je le répète, je souscris totalement à cette proposition sur le fond.
Par ailleurs, Mme la corapporteur l’a très bien dit, nous avons adopté un certain nombre de mesures. On peut toujours en débattre, mais les dispositifs ISF-PME et Madelin vont dans le bon sens, comme vous l’avez d’ailleurs souligné, monsieur Cadic, ce dont je vous remercie. Il paraît difficile d’aller plus loin aujourd’hui.
Ensuite, comme Mme la corapporteur l’a souligné, si votre amendement n° 914 rectifié bis était adopté, un investisseur prendrait plus difficilement le risque d’accompagner une PME, surtout en phase d’amorçage. Or tel n’est pas votre souhait, me semble-t-il. L’investisseur irait plus facilement vers les grandes entreprises. Il ne faut pas opposer les petites et les grandes entreprises, mais le risque d’un tel effet pervers doit être pris en compte.
La majorité sénatoriale aura l’occasion de soulever la question de l’ISF. Nous ne le ferons pas à l’occasion de la discussion de ce texte, car cela n’entre pas dans l’équation. L’ISF sera débattu dans un texte strictement budgétaire et financier.
Monsieur Cadic, les amendements n° 914 rectifié bis, 918 rectifié bis et 919 rectifié bis sont-ils maintenus ?
Monsieur le président de la commission, vous évoquez le coût de la mesure que je propose, en l’estimant à 1, 5 milliard d’euros. Aujourd'hui, si vous achetez une œuvre d’art, comme un tableau ou une statue, vous pourrez la déduire de votre ISF. En revanche, si vous décidez d’investir dans une entreprise qui va créer de l’emploi, vous ne pourrez pas profiter de cette déduction.
Je vous le dis comme je le pense, cela me heurte ! Notre fiscalité incite plus à acheter des œuvres d’art qu’à investir dans une entreprise qui crée de l’emploi : c'est tout de même quelque peu étrange quand on connaît les problèmes d’emploi de notre pays.
À un moment, il faut faire des choix et déterminer des priorités : mon amendement avait comme objectif de le rappeler. J’aimerais que nous nous posions certaines questions : ne sommes-nous pas finalement en train de créer nous-mêmes les conditions du chômage que nous connaissons ?
Je ferai preuve de pragmatisme et retirerai mes amendements pour ne pas faire durer le débat. Mais, honnêtement, comme beaucoup d’entrepreneurs, je ne comprends pas que des choses qui paraissent évidentes nécessitent des années de discussion, que l’on se réfugie derrière des arguments ou derrière la nécessité de faire valider toute décision par X ou Y. Voilà ce que je tenais à dire.
Comme vous, j’espère que nous allons enfin nous y mettre, mais, sincèrement, les Français ne sont plus patients : ils veulent des résultats maintenant. C’est ce qu’ils attendent de nous. Les textes que nous votons doivent avoir un impact en termes de développement des entreprises et de diminution du chômage.
Avec l’amendement n° 914 rectifié bis, jem’inscrivais dans cette perspective. Je regrette d’avoir à le retirer. Je retire également les deux autres amendements, monsieur le président.
Les amendements n° 914 rectifié bis, 918 rectifié bis et 919 rectifié bis sont retirés.
L'amendement n° 806, présenté par MM. Genest, Allizard, Baroin, Bignon, Bizet, Bouchet et Cambon, Mme Canayer, M. Cardoux, Mme Cayeux, MM. Chaize, Charon, Chasseing, Danesi et Dassault, Mme Debré, MM. Delattre et Dériot, Mmes Deromedi et Des Esgaulx, MM. Doligé et Dufaut, Mme Duranton, MM. Duvernois, Forissier, Fouché et Frassa, Mme Giudicelli, MM. Grand, Gremillet et Grosdidier, Mme Gruny, M. Houel, Mmes Hummel et Imbert, M. Laménie, Mme Lamure, MM. D. Laurent, Lefèvre, de Legge, Leleux, Lenoir, P. Leroy, Magras, Mandelli et Mayet, Mmes Mélot et Micouleau, M. Milon, Mme Morhet-Richaud, MM. Morisset, Mouiller, Pellevat et Pointereau, Mmes Primas et Procaccia, MM. de Raincourt, Raison, Reichardt, Retailleau, Revet, Savary, Sido et Trillard, Mme Troendlé et MM. Vasselle, Courtois, Darnaud, P. Dominati, Savin et Vogel, est ainsi libellé :
Après l’article 35 ter B
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le quatrième alinéa de l’article 885 I bis du code général des impôts est complété par une phrase ainsi rédigée :
« En cas de cession ou donation partielle à un associé de l’engagement collectif, l’exonération n’est pas remise en cause, sous réserve que le cessionnaire ou le donataire s’engage à conserver les titres qu’il a conservés pendant toute la durée de l’engagement collectif. »
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Élisabeth Lamure.
Cet amendement vise à mettre fin à une incertitude juridique, née de la réponse apportée le 13 août 2013 à la question du député Alain Moyne-Bressand, concernant les conséquences d’une cession partielle de titres intervenant entre les signataires d’un engagement collectif de conservation Dutreil-ISF en cours de validité.
Le député de l’Isère avait souhaité savoir si, en cas de cession partielle de titres placés sous engagement collectif réalisée par l’un des signataires au profit d’un autre signataire de l’engagement, le cédant conservait bien pour l’avenir l’exonération partielle d’ISF sur les titres conservés.
Le ministre de l’économie et des finances avait répondu que « dès lors qu’un signataire cède un seul de ses titres en cours d’engagement collectif, il perd le bénéfice de l’exonération partielle d’ISF, au titre de l’année en cours ainsi qu’au titre des années précédentes pour lesquelles l’exonération s’est appliquée, et cela pour la totalité des titres détenus inclus dans le pacte, y compris donc pour les titres qu’il a conservés ».
Ainsi, selon cette interprétation, toute cession partielle de titres entre signataires d’un engagement collectif de conservation ISF entraînerait pour le cédant une remise en cause du bénéfice de l’exonération partielle, tant pour les titres cédés que pour ceux qu’il a conservés.
La précision apportée paraît très contestable et directement contraire à la lettre de l’article du code général des impôts, qui autorise expressément les cessions entre signataires : « Les associés de l’engagement collectif de conservation peuvent effectuer entre eux des cessions ou donations des titres soumis à l’engagement ».
En effet, une cession expressément autorisée par les textes ne devrait pas être susceptible d’emporter la déchéance du bénéfice de l’exonération partielle d’ISF pour le cédant. Cette réponse apparaît également en totale contradiction avec la doctrine administrative actuelle, qui ne vise comme cause de déchéance que la cession à des tiers à l’engagement collectif.
La sécurité fiscale étant une condition sine qua non du développement économique et de la pérennité des entreprises familiales, le présent amendement vise à revenir sur cette interprétation en clarifiant les dispositions concernées du code général des impôts.
Mme Lamure a bien expliqué l’objet de cet amendement. La réponse ministérielle qu’elle a évoquée remet en cause un élément de souplesse qu’offre le dispositif Dutreil.
C’est pourquoi la commission a souhaité entendre l’avis du Gouvernement.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je vais clarifier cette position importante, qui est, cela a été dit, de nature doctrinale.
Aux termes de cet amendement, en cas de cession ou de donation partielle à un autre associé partie à l’engagement collectif, l’exonération d’ISF ne serait pas remise en cause pour l’associé qui cède ou donne une partie de ses titres, sous réserve que le cessionnaire ou le donataire s’engage à conserver les titres pendant toute la durée de l’engagement collectif.
On le voit bien, il est ici question de l’articulation entre l’engagement individuel et l’engagement collectif dans le cadre du dispositif Dutreil.
La réponse ministérielle dite « Moyne-Bressand » a précisé les conséquences d’une cession partielle de titres en cours d’engagement collectif. L’exonération d’ISF à hauteur de 75 % des titres placés dans le cadre du dispositif Dutreil est acquise au terme d’un délai de conservation de six ans. Cette mesure est logique, puisque le dispositif a pour objet de garantir la pérennité des entreprises et de permettre à des entrepreneurs, comme à leur succession, de conserver l’outil productif ; elle repose sur des critères de participation à la vie de l’entreprise et à sa direction.
C'est la loi qui a prévu ce long engagement de conservation, assorti d’un avantage d’assiette important, pour stabiliser le capital autour d’un noyau dur d’actionnaires.
Pendant cette période, on parle d’un avantage fiscal global, apprécié au regard du respect d’un engagement qui, lui aussi, est global. Au-delà de cette période, les critères du respect de l’engagement s’apprécient sur une base annuelle.
Il y a donc la période intangible des six ans, puis, chaque année, ce dispositif devenu continu. La période d’engagement de six ans se découpe, vous le savez, en une période d’engagement dit « collectif » d’au moins deux ans et une période d’engagement dit « individuel » de quatre ans a priori.
Ce n’est qu’à la lumière de ces éléments précis qu’il est possible de comprendre la réponse ministérielle que j'évoquais et qui est le sous-jacent de votre question.
En effet, cette réponse ministérielle prévoit que la cession des titres sous pacte par l’un des signataires à un autre signataire n’emporte pas de conséquence sur les autres signataires dudit pacte, ce qui me paraît tout à fait normal. En revanche, elle rappelle que, au niveau individuel, l’avantage tiré des 75 % d’assiette de l’ISF n’est quant à lui acquis qu’au bout de six ans, décomposés dans les deux périodes d’engagement que je viens d’évoquer : quatre ans pour l’engagement collectif et deux ans pour l’engagement individuel.
Dès lors, un contribuable qui céderait une partie de ses titres en cours d’engagement collectif, même à d’autres signataires du pacte, romprait pour lui-même l’engagement qu’il a pris initialement. Et c’est de cette manière, précisément, que sont articulées les deux périodes d’engagement du dispositif dit « Dutreil ».
Voilà pourquoi le Gouvernement ne peut qu’être défavorable à un amendement qui tend à remettre en cause l’équilibre garanti par le dispositif actuel, qui repose sur un engagement long en échange d’un avantage significatif.
Plus généralement, le débat sur l’ISF, qui s’est cristallisé dès l’année 2012, a conduit à une réforme profonde, avec des équilibres sur lesquels je ne reviendrai pas.
À mes yeux, le débat que nous avons tenu précédemment et que vos amendements ont permis d’éclairer ouvre une réflexion. Toutefois, la clarté du dispositif Dutreil, son caractère pérenne et la clarté apportée par la réponse ministérielle dont je viens, mesdames, messieurs les sénateurs, de rappeler devant vous les termes, doivent être confortés. Le sujet est à mon sens plus large et s’inscrit dans la ligne de la discussion que nous venons d’avoir.
J’estime qu’il n’y a pas lieu, à ce stade, de rouvrir cette question, car nous serions alors susceptibles de déstabiliser l’articulation entre l’engagement collectif et l’engagement individuel, tel qu’il existe dans le cadre du dispositif Dutreil. Partant, nous risquerions de créer alors de l’instabilité normative, voire du contentieux.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
Il est vrai que les éléments dont nous discutons sont très techniques.
Pour ma part, j’ai bien compris qu’il ne s’agissait pas de remettre en cause les éléments du pacte Dutreil. J’ai bien noté que l’exonération, dans ce cas, n’était pas discutée : tel était, précisément, le point qui m’importait.
Je retire donc mon amendement, monsieur le président.
L’amendement n° 806 est retiré.
L'amendement n° 1725, présenté par Mme Deroche, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Après l’article 35 ter B
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le I de l’article 885-0 V bis du code général des impôts est complété par un 4 ainsi rédigé :
« 4. Les frais et commissions imputés par les sociétés mentionnées au premier alinéa du 3 ou par les sociétés et les personnes physiques exerçant une activité de conseil ou de gestion au titre des versements mentionnés aux 1, 2 ou 3 ne peuvent être pris en charge, directement ou indirectement, par les sociétés bénéficiaires de ces versements.
« Les sociétés et les personnes physiques mentionnées au premier alinéa du présent 4 ne peuvent faire appel, pour la réalisation de prestations de service au profit des sociétés bénéficiaires des versements mentionnés aux 1, 2 ou 3, à des personnes physiques ou morales qui leur sont liées au sens des articles L. 233-3, L. 233-4 et L. 233-10 du code de commerce.
« Sans préjudice des sanctions que l’Autorité des marchés financiers peut prononcer, tout manquement à ces interdictions est passible d’une amende dont le montant ne peut excéder cinq fois les frais indûment perçus. »
II. - Le I s'applique aux versements effectués après le 1er juillet 2015.
La parole est à Mme Catherine Deroche, corapporteur.
Le présent amendement vise à mettre fin à un usage, pratiqué par certains intermédiaires, qui consiste à facturer des frais considérables aux PME éligibles à la réduction d’impôt prévue par le dispositif ISF-PME, afin de réduire artificiellement les frais directement imputés aux investisseurs.
Sous certaines conditions, les souscriptions peuvent être faites de manière indirecte via une société holding. Toutefois, même dans le cas des souscriptions directes, l’investissement mobilise souvent des intermédiaires par le biais d’un mandat de conseil ou de gestion. Or l’étude de l’offre commerciale de nombreux intermédiaires conduit à deux constats.
Premièrement, le niveau des frais de souscription, de gestion et de fonctionnement facturés par ces intermédiaires est particulièrement élevé. D’après le rapport de l’Inspection générale des finances, ces frais représentent en moyenne 38 % des montants investis !
Deuxièmement, une nouvelle pratique consistant à mettre une part substantielle des frais à la charge des PME se développe. Cette pratique concerne tant les sociétés de gestion et de conseil que les holdings, qui sont souvent liées par contrat à des sociétés de conseil. Une telle évolution conduit à un biais de sélection, qui est susceptible de réduire fortement l’efficacité de cette réduction d’impôt, puisque seules des PME en grande difficulté financière sont susceptibles de payer de tels frais : elles doivent tout simplement assurer leur survie.
Par ailleurs, ce mode de facturation vise à tromper les investisseurs, afin de masquer l’effet de captation de l’avantage fiscal. Les frais imputés au client sont artificiellement réduits. Néanmoins, à moyen terme, les frais imputés aux PME se traduiront de facto par une moindre rentabilité des investissements de leurs clients.
Par conséquent, le présent amendement vise à interdire aux sociétés exerçant une activité de conseil ou de gestion au titre des versements bénéficiant de l’avantage fiscal aménagé par le dispositif ISF-PME de mettre une partie de leurs frais à la charge des PME.
Le Gouvernement s'en remet à la sagesse de la Haute Assemblée.
L’examen de cet amendement me permet d’apporter quelques remarques relatives au dispositif dit « ISF-PME ». J’ai voulu prendre la parole, précédemment, à deux reprises, mais, par manque de chance, les amendements concernés ont été retirés et je n’ai pas pu intervenir.
Je suis globalement d’accord avec l’exposé général que M. le ministre vient de consacrer à cette grave question : la difficulté d’orienter l’épargne populaire vers l’économie et les entreprises.
Monsieur le ministre, je suis également d’accord avec vous au sujet de la modification du pacte Dutreil. En effet, au fond, lorsqu’une personne se retire, aucune raison ne justifie qu’elle continue à bénéficier des avantages prévus par ledit pacte.
Vous semblez très ouvert s'agissant de l’ISF-PME et du financement du haut de bilan de nos PME. À cet égard, permettez-moi d’attirer votre attention sur ce point, dans la perspective d’un travail éventuel consacré à la situation des PME familiales.
En effet, certaines PME sont administrées par plusieurs associés appartenant à une même famille. Il arrive que ces derniers soient tout à fait prêts, notamment lors de la succession et de la transmission de ladite entreprise, à conserver leurs parts de capital, sans pour autant souhaiter entrer dans le périmètre et dans la logique de dispositifs très contraignants.
Pour revenir au parallèle tracé tout à l’heure avec les œuvres d’art, je ne dis pas qu’il faille assujettir à nouveau les œuvres d’art à l’ISF : en effet, on ne fera pas le bonheur des uns en faisant le malheur des autres. Il convient plutôt d’apporter des solutions adaptées aux différentes situations.
Si nous pouvions permettre, pour les PME familiales, sans contrainte particulière, aux associés familiaux n’exerçant pas de mission de gestion, de bénéficier du dispositif ISF-PME, la situation serait meilleure. En effet, il s’agit de l’ISF, mais pour bénéficier de ce dispositif, la question du mandat se pose tout de même.
Imaginons que, au sein d’une entreprise donnée, une personne, sans détenir de mandat de gestion, est associée au capital à hauteur de 60 %, tandis que le gérant détient le reste du capital. Contrairement à ce dernier, elle va voir ses parts de capital assujetties à l’ISF dès lors qu’elle ne travaille pas au sein de la société considérée et qu’elle ne répond pas aux critères d’application du dispositif dit « Dutreil », car il ne s’agit plus d’un bien professionnel, mais d’un bien privé. Il serait bon, par conséquent et a minima, que la personne placée dans la situation que je viens de décrire bénéficie du même avantage que si elle investissait son argent dans des œuvres d’art.
Voilà un objectif qui me paraît logique et atteignable. En tout cas, je tenais à attirer votre attention sur ce point, parce que le financement de nos PME présente des difficultés. Lorsqu’il y a trois ou quatre frères et sœurs qui administrent une entreprise et que seulement l’un d’entre eux en est le gérant, il ou elle bénéficie de l’exonération prévue par le dispositif ISF-PME, mais ses frères et sœurs, qui maintiennent pourtant leurs parts de capitaux au sein de l’entreprise familiale, parce qu’ils en ont hérité au bout de trois générations, doivent s’acquitter du paiement de l’ISF.
En outre, dans les entreprises qui présentent un taux de rentabilité nul ou proche de zéro et dont l’activité ne donne par conséquent lieu à aucune distribution de dividendes à la fin de l’année, ces associés devront payer sur des capitaux dormants, qui financent le maintien des emplois.
Monsieur le ministre, je tenais donc à attirer vivement votre attention sur ce point, car vous m’avez semblé tout à l’heure très ouvert pour engager une telle démarche. Pour le reste, je suis assez d’accord avec les propos que vous avez tenus.
L'amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 35 ter B.
I. – Aux premier et second alinéas du 1 de l’article 200-0 A du code général des impôts, après la référence : « 199 undecies C », est insérée la référence : «, 199 terdecies-0 A ».
II. – Le I s’applique à compter du 1er janvier 2016.
III. – La perte de recettes pour l’État résultant du I du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 34 est présenté par Mme Assassi, M. Bocquet, Mme Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 561 rectifié quater est présenté par M. Guillaume, Mme Bricq, MM. Lalande, Patient, Chiron, Yung, Botrel, Raynal, Vincent, Raoul, Boulard, F. Marc et les membres du groupe socialiste et apparentés et apparentés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Pierre Laurent, pour présenter l’amendement n° 34.
Au fond, nous poursuivons la même discussion, puisque, à l’instar du dispositif ISF-PME, le dispositif dit « Madelin » se révèle à nos yeux largement surdimensionné au regard de son efficacité.
Les fonds levés sous l’empire des dispositifs concernés s’élèvent à près de 700 millions d’euros au titre de l’année 2013, auxquels s’ajoutent des investissements, à hauteur de plus de 800 millions d’euros, dont l’imputation a été reportée, le tout étant réalisé par un nombre de souscripteurs très faible.
Au cours de l’année 2012, d’après les données fournies par l’administration fiscale – la situation a peut-être quelque peu évolué depuis lors –, quelque 47 000 foyers fiscaux, soit un peu plus d’un millième des contribuables assujettis à l’impôt sur le revenu, ont versé un peu plus de 586 millions d’euros au capital de sociétés naissantes ou en expansion primaire, ce qui situe le montant moyen de versement à 12 475 euros par participant et l’avantage fiscal moyen à 2 245 euros. Autant dire que, de manière générale, le dispositif dit « Madelin » n’est pas d’une efficience optimale et qu’il est loin de répondre à l’attente des entreprises en matière d’apport de fonds propres.
Pour notre part – il s’agit d’un vieux débat –, nous sommes favorables à la disparition pure et simple du dispositif dit « Madelin ».
L’État, à plus forte raison dans un contexte de tension budgétaire affirmée, serait mieux inspiré s’il évitait de préserver un dispositif coûteux et dont l’évaluation est hasardeuse. Et ce n’est ni le changement de quotité de ce dispositif ni l’augmentation de son taux de remboursement qui changera fondamentalement la situation du financement des PME dans notre pays.
En revanche, ces mesures produiront un effet d’aubaine au bénéfice de quelques investisseurs fortunés. Ces derniers ne pourront que se féliciter de ce que des parlementaires pensent à eux et à leurs problèmes de fins de mois difficiles.
Sourires sur les travées du groupe CRC.
J’ajouterai, en complément à ce qui vient d’être dit, deux éléments au sujet de l’ISF.
J’entends de nouveau toutes les plaintes suscitées par cet impôt, dans un contexte général d’injustice fiscale, dont tous les chiffres montrent qu’il évolue de manière extrêmement préoccupante. J’entends bien que certains nous proposent tout à la fois de multiplier les niches fiscales, de supprimer des recettes fiscales, comme celles tirées de l’ISF, et de supprimer des dépenses publiques plus fortement encore qu’aujourd’hui. Si l’on suivait l’ensemble de ces propositions, nous aboutirions à un véritable désastre pour l’économie nationale, contrairement à ce qui nous est dit.
Par ailleurs, s’agissant de la façon d’assurer durablement le financement de l’investissement productif, j’ai entendu ce qui a été dit tout à l’heure à propos de notre désaccord au sujet du secteur bancaire.
Certains considèrent que le secteur bancaire n’a absolument pas à s’occuper de cette question. Or je ne vois pas très bien, au regard du fonctionnement général de l’économie, où nous mènera une telle position ! Ou alors il faut m’expliquer pourquoi, par exemple, la BCE réinjecte 1 140 milliards d’euros dans le financement de l’économie européenne. S’il n’est pas utilisé au service des économies européennes, où va cet argent ? Il s’agit d’ailleurs d’une question pertinente, que nous devrions par conséquent nous poser : où va l’argent actuellement réinjecté dans le système bancaire et financier par la Banque centrale européenne ?
La parole est à M. Marc Daunis, pour présenter l'amendement n° 561 rectifié quater.
Je formulerai des remarques similaires à celles qui ont été développées à l’occasion de l’examen de l’article 35 ter B, à propos du dispositif ISF-PME.
Nous assistons là à une modification de la niche fiscale dite « Madelin », qui est proposée, en l’occurrence, par la commission spéciale.
Premièrement, certes, nous tenons là un outil qui fonctionne et dont nous aménageons les dispositions, mais y a-t-il lieu d’augmenter la portée de cet avantage fiscal en risquant là encore de pousser à des comportements abusifs d’optimisation ?
Deuxièmement, je renvoie à la même interrogation que tout à l’heure, formulée à la droite de cet hémicycle, ainsi que par la commission spéciale : la question des niches fiscales est symptomatique. Chers collègues, vous tentez de faire passer un creusement des niches fiscales pour une politique de soutien à la croissance !
Il y a vraiment une contradiction. D’un côté, vous appelez à davantage de rigueur. De l’autre, vous affirmez qu’il convient de permettre un financement favorable à l’investissement productif, afin d’alimenter la croissance. Et en même temps, vous augmentez systématiquement tous les petits dispositifs, épars, de niches fiscales, qui, additionnés, représentent des sommes particulièrement importantes.
Troisièmement, la politique du Gouvernement et les engagements qu’il a pris en la matière consistaient à apporter un peu de justice dans les efforts qui sont demandés à notre pays pour son redressement. Il était assez symptomatique que ce plafond de réduction d’impôt soit ramené à 10 000 euros par an et par foyer, quand vous souhaitez aujourd’hui son rétablissement à 18 000 euros.
Je rappelle que cette part proportionnelle au revenu imposable permettait aux ménages les plus aisés de réduire fortement leur impôt. Ainsi, depuis 2013, un couple avec deux enfants ne peut pas être concerné par cette mesure s’il gagne moins de 95 000 euros par an.
Au moment où nous devons redresser les comptes publics, mobiliser le pays autour de l’objectif de justice sociale et répartir équitablement cet effort souhaité par tous, adopter un tel article serait contreproductif.
Enfin, je le répète, creuser les niches fiscales ne constitue pas une politique de soutien à l’activité. Nous avons vu ce qu’il en était de la croissance en 2012 ! Si les niches fiscales représentaient une véritable politique de soutien à l’activité, au vu de tout ce qui a été distribué lors du précédent quinquennat, nous aurions dû connaître alors une croissance d’un dynamisme étonnant !
Nous avons déjà eu ce débat sur l’avantage ISF-PME.
Pour ce qui concerne l’avantage Madelin, dont le plafond passe de 10 000 euros à 18 000 euros, les arguments sont les mêmes, et l’avis de la commission spéciale est tout aussi défavorable.
J’émettrai, par cohérence, un avis favorable sur ces amendements identiques.
S’agissant du plafond, l’objectif est de maintenir les dispositifs existants. J’ajouterai toutefois un élément, pour que nous soyons bien au clair.
Pour assurer la stabilité des dispositifs, je veux bien que l’on trouve des aménagements, qui peuvent exister, par ailleurs, dans d’autres dispositifs fiscaux en vigueur. Toutefois, nous devons avoir bien présente à l’esprit la distinction entre le financement par fonds propres et le financement par l’endettement.
La Banque centrale européenne mène actuellement une politique très volontariste, qui permet de fournir des liquidités aux banques. Par ailleurs, la régulation européenne pénalise les banques françaises – nous n’allons pas refaire le débat sur la loi bancaire ! – et restreint le crédit.
Les économies très intermédiées par les établissements bancaires, comme la nôtre, sont pénalisées par cette régulation, ce qui est mauvais pour leur financement par l’endettement. Quoi qu’il en soit, il faut toujours distinguer entre fonds propres et dette.
Ce dont il s’agit au travers des dispositifs dont nous parlons – je le dis pour la clarté du débat –, c’est du financement par fonds propres. Ces deux sujets sont complémentaires, mais différents.
La faiblesse du financement de notre économie par fonds propres peut être compensée par divers aménagements et l’introduction d’une certaine flexibilité, et cela a déjà été fait. Les aménagements apportés en 2013 sur l’avantage Madelin me semblent suffisants. Il est donc inutile de revenir sur son plafond. On ne peut pas imposer, en termes de financements bancaires, une logique relevant d’un autre mode de financement des entreprises : une logique ne peut se substituer à l’autre.
Le Gouvernement émet donc un avis favorable sur ces amendements identiques de suppression.
Jusqu’où faut-il aller ? Cette question, légitime, pouvait se poser, et nous avons eu ce débat. Nous nous sommes ainsi demandé si les propositions de Mme la corapporteur, suivies par la commission, allaient suffisamment loin.
En l’occurrence, je viens d’entendre que la commission allait trop loin… Celle-ci a essayé d’adopter des mesures efficaces, qui s’inscrivent dans une approche budgétaire acceptable. Au vu des amendements des groupes de l’opposition, je constate que nous avons touché la cible ! Il y a, dans la solution proposée par la commission, un équilibre entre dynamique et recherche d’efficacité.
Que signifie « toucher la cible » ? Celle-ci est atteinte au prix de vos contradictions : d’un côté, vous dites de façon récurrente que les mesures budgétaires de réduction des déficits sont insuffisantes, et, de l’autre – mais dans un même mouvement ! –, vous réclamez des niches fiscales toujours plus nombreuses, qui, de fait, continuent à creuser les déficits. C’est incohérent !
Le ministre a utilement rappelé que les entreprises devaient faire face à des problèmes de fonds propres. Il faut nous y atteler ! Nos propositions et les mesures qui ont été adoptées sur notre initiative, quant à elles, sont efficaces et pertinentes.
Par ailleurs, il nous faut aussi nous mettre à la place de nos concitoyens. Un effort a été consenti collectivement par la nation, et il se poursuit. Nombre de nos concitoyens, notamment les salariés, auront du mal à comprendre et à accepter que vous demandiez de relever le plafond de cet avantage de 10 000 à 18 000 euros, car cette mesure bénéficiera aux couches les plus aisées.
Je suis d’accord avec Pierre Laurent sur un point : cet avantage n’est pas assez efficace. Toutefois, nous ne le pensons pas pour les mêmes raisons !
Parce qu’il est inefficace, je considère, pour ma part, qu’il faut relever son plafond. Les personnes qui investissent en France et bénéficient à ce titre de dispositifs fiscaux, comme l’avantage Madelin, ne sont pas des privilégiés. Ils participent à l’effort d’investissement, ils sont des héros !
Marques d’ironie sur les travées du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du groupe socialiste.
Ils pourraient tout aussi bien, en effet, placer leur argent ailleurs et avoir de meilleurs revenus. Plutôt que de les stigmatiser, mieux vaudrait reconnaître l’impact positif de leurs investissements sur notre économie !
Par ailleurs, monsieur Laurent, je vous confirme qu’il n’appartient pas aux banques de financer le risque. Ce que l’on attend d’elles, c’est qu’elles investissent dans des projets lourds et à long terme, comme des infrastructures, dont la rentabilité ne sera pas forcément très forte, des projets pour lesquels il est difficile de trouver des investisseurs prêts à prendre des risques. Voilà pourquoi on fait appel à la finance !
Mes chers collègues socialistes, vous avez l’air d’être satisfaits et de considérer que la politique menée actuellement donne des résultats. Apparemment, les électeurs ne partagent pas votre avis.
Quant aux niches fiscales, celle qui fonctionne le mieux est le crédit d’impôt recherche.
M. Marc Daunis opine.
À propos de l’ISF dû au titre des actions et des parts sociales, je vous ai demandé précédemment si vous préfériez accorder un avantage fiscal à une personne qui achète un tableau plutôt qu’à une autre qui investit dans une entreprise. Cette question n’a pas eu l’air de vous émouvoir !
Il me semble, sans vouloir intenter de procès à quiconque, que la mesure proposée par la commission spéciale fait partie d’un ensemble de dispositifs – d’autres viendront sur le volet strictement social – que l’on pourrait qualifier de « marqueurs »...
Pour ma part, je ne les qualifierai pas ; après tout, chacun a les siens, de même que chacun a ses totems et tabous. Malheureusement, ce débat nous empêche d’avancer pour redresser notre pays.
En relevant ce plafond de 10 000 euros à 18 000 euros, vous en revenez à ce qui existait avant. Je vous rappelle le débat que nous avons eu sur le plafonnement global des niches fiscales : vous-mêmes, quand vous étiez dans la majorité nationale, aviez commencé à baisser le plafond. Nous avons poursuivi ce mouvement.
Ce n’est pas parce que des erreurs ont été faites qu’il faut les continuer !
Si vous n’aviez pas fixé le plafond à 18 000 euros, j’aurais pensé que vous étiez de bonne foi. Il est en effet légitime de s’interroger sur le plafond actuel. Toutefois, revenir à l’ancien système, c’est un marqueur. Il faut que vous l’assumiez comme tel, au lieu de vous réfugier derrière le discours selon lequel cette mesure permettra de retrouver la croissance !
Quant à la comparaison avec le crédit d’impôt recherche, elle n’est pas bienvenue : ils n’ont pas la même assiette. Le CIR est en effet assis sur l’impôt sur les sociétés.
On le sait, nos impôts ne sont pas toujours bien faits.
Sourires sur les travées de l'UMP.
L’ISF cumule beaucoup de défauts pour quelqu’un qui aime la fiscalité : il a, comme souvent chez nous, une petite assiette, puis son taux galope assez vite. Mais pas tout de suite, je tiens à le dire, car les premières tranches sont tout de même très faibles ! Votre proposition fait donc partie d’un paquet global.
Je vous invite à réfléchir, mes chers collègues. Pour notre part, nous ne souhaitons pas revenir en arrière.
On pourrait s’interroger sur le plafond de 10 000 euros, lequel, je le reconnais, est sévère. Néanmoins, vous voulez remettre ce choix en cause en rétablissant l’ancien plafond. Si vous aviez proposé 15 000 euros, on aurait pu discuter ; mais pas là !
Je ne recommencerai pas le débat sur l’ISF.
La réduction d’impôt sur le revenu, dite « Madelin », est égale à 18 % des versements effectués dans la limite annuelle de 100 000 euros pour les contribuables mariés. C’est la situation actuelle.
Or, dans le cas où un couple atteindrait cette limite de 100 000 euros, il bénéficierait non pas de cette réduction d’impôt de 18 %, mais de la niche des 10 000 euros. Il y a là une forme d’incohérence.
Nous n’avons donc rien augmenté de particulier, notamment en termes de taux. Nous avons simplement précisé que le dispositif Madelin pouvait, en théorie, faire bénéficier un couple d’une réduction d’impôt d’un montant maximum de 18 000 euros.
Il était en effet incohérent que, du fait du plafonnement des niches fiscales à 10 000 euros pour les sommes investies au-delà de 55 500 euros, et non plus de 100 000 euros, le foyer fiscal ne puisse plus bénéficier de la réduction d’impôt pour l’année correspondant au versement. Certes, la possibilité de report existe, mais elle est tout de même moins incitative et plus complexe.
Mes chers collègues, nous n’avons tout de même pas bouleversé le système !
Je voudrais appeler votre attention, mes chers collègues, sur la situation dans laquelle nous nous trouvons. Alors que nous demandons beaucoup d’efforts aux Français, est-il imaginable que le Sénat vote le relèvement du plafond de la niche dont nous parlons à 18 000 euros ? Ce plafond, mes chers collègues, doit rester à 10 000 euros.
À en croire plusieurs orateurs, le problème de croissance pourrait être réglé par la seule création de nouvelles niches fiscales. Je ne le pense pas du tout.
Penchons-nous sur la productivité française ; regardons de plus près le manque d’investissement dans notre pays ; et réfléchissons autrement. Considérez, mes chers collègues, que le crédit impôt recherche n’est affecté qu’à 22 % au bénéfice des PME. Le Sénat doit travailler sur cette question.
Ce n’est pas en nivelant par le bas la fiscalité, en l’alignant sur celle des pays anglo-saxons, que nous réglerons nos problèmes. Nous devons trouver un moyen de défiscaliser les investissements, ce que le Gouvernement vient d’ailleurs de proposer récemment. Nous allons dans le bon sens. Il faut penser aux Français, mes chers collègues ; il y aurait un côté indécent à ce que le Sénat se prononce pour la création de nouvelles niches.
Je ne partage pas non plus du tout l’idée selon laquelle les banques ne doivent pas prendre de risques. Ce n’est en tout cas pas à l’État de les prendre à leur place. C’est leur métier ! Incitons-les plutôt à les prendre avec nous. L’État, d’ailleurs, fait déjà beaucoup en ce sens. Les mesures prises pour renforcer la croissance sont très importantes ; n’en rajoutons pas dans ce domaine.
Nous parlions il y a un instant de nos différents marqueurs politiques. Il me semble, mes chers collègues, que ces marqueurs se rapprochent désormais.
Depuis des années, un débat fameux nous opposait : fallait-il relancer par la demande ou bien par l’offre ?
M. Alain Joyandet. J’ai l’impression que le Président de la République et le Gouvernement ont tranché : c’est sur nos positions, celles que nous défendons depuis de nombreuses années, qu’ils se rendent désormais.
Marques d’approbation sur les travées du groupe CRC. – Protestations sur les travées du groupe socialiste.
Nous sommes tous d’accord : pour relancer, il faut mener une politique de l’offre, c’est-à-dire remettre sur pied la compétitivité des entreprises. Sans compétitivité, il n’y a pas d’offre.
Pourquoi recourons-nous, pour ce faire, à la création de certaines niches fiscales ? C’est que, au fond, je ne crois pas au grand soir. Mener une vraie politique de l’offre sans avoir recours aux niches implique de baisser massivement, et d’un seul coup, les charges pesant sur les entreprises. Or, on le sait, c’est très difficile dans la situation actuelle.
Dès lors, chacun d’entre nous essaie, par voie d’amendement, de trouver des solutions alternatives, qui amélioreront la compétitivité des entreprises, ou bien encore l’afflux des capitaux vers elles, et notamment les PME et les PMI. J’ai d’ailleurs compris, monsieur le ministre, que vous partagiez notre souci d’améliorer le haut de bilan des entreprises.
À mon avis, apposer à la droite sénatoriale et à la commission spéciale un marqueur bleu, auquel s’opposerait un marqueur rose, …
Mme Nicole Bricq et M. Marc Daunis s’exclament.
Essayons plutôt de faire preuve de bonne volonté, de trouver des solutions sans nous caricaturer, afin de redresser la compétitivité de nos entreprises, de manière massive ou par le biais de certaines solutions ponctuelles, dans l’attente de l’amélioration du niveau des charges qui pèsent sur elles. Car c’est bien le problème de nos entreprises, en effet, quand on les compare aux entreprises allemandes ou anglaises, et non le niveau des salaires de leurs collaborateurs. Le problème ne vient pas de la concurrence chinoise ou africaine : nos concurrents directs sont en Europe, et ils sont beaucoup plus compétitifs que nous.
Tel est le sens de la démarche de la commission, que nous soutenons. Nous ne sommes pas dogmatiques, mes chers collègues ;…
À gauche, on n’a plus de couleurs dans les marqueurs : rouge, rose, vert…
Je partage les propos tenus à l’instant par Alain Joyandet. Notre objectif est bien de flécher des capitaux vers les fonds propres des entreprises.
La commission agit par souci de cohérence. Elle ne propose pas d’étendre une niche existante : le dispositif est déjà en vigueur ! Une réduction d’impôt de 18 %, dans la limite annuelle de 100 000 euros, cela représente un montant maximal de 18 000 euros. Or, on le voit, il y a une contradiction avec un autre dispositif existant, qui prévoit un plafonnement global des niches à 10 000 euros.
Nous sommes bien sûr d’accord sur le principe du plafonnement des niches. Il ne faut pas les multiplier, c’est évident. Néanmoins, le plafonnement a pour but d’éviter que les agents économiques n’aient recours à différentes niches pour faire de l’optimisation fiscale. On pourrait donc imaginer que la réduction des 18 % s’applique dans une limite inférieure à 100 000 euros. Il faut être cohérent, mes chers collègues !
Je veux également faire une remarque sur le système bancaire. M. le ministre a indiqué que deux types de financement existaient pour les entreprises : par les fonds propres, et par l’endettement. Or les banques n’interviennent aujourd’hui que par le levier de l’endettement. De plus, elles ne jouent pas – j’en conviens – totalement leur rôle. Lorsqu’une entreprise contracte un emprunt auprès d’une banque, le premier réflexe de cette dernière est de le garantir auprès de Bpifrance. §Il y a comme un dysfonctionnement sur lequel, mes chers collègues, nous devrions avoir un œil plus attentif. Les banques, en effet, se surgarantissent.
Il faut aussi reconnaître que nous avons mis en place, après la crise de 2008, des dispositifs prudentiels pour que les banques prennent moins de risques. Mais, avec les dispositifs Bâle II et Bâle III, nous sommes allés trop loin, mes chers collègues. Je vous en donne acte, monsieur Bourquin : les banques se servent désormais des contraintes qui leur ont été imposées pour prendre de moins en moins de risques. Dans le mécanisme du financement de l’endettement, il y a un élément qui ne tourne pas convenablement.
Heureusement, donc, que Bpifrance existe pour donner les garanties nécessaires ; sans quoi l’investissement serait complètement coincé.
Pour terminer, j’indique que je suis pour la taxation des œuvres d’art. Cela réglerait le problème que nous avons soulevé.
Je mets aux voix les amendements identiques n° 34 et 561 rectifié quater.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant de la commission.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable et que celui du Gouvernement est favorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
Le scrutin a lieu.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
Il est procédé au dépouillement du scrutin.
Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 153 :
Le Sénat n’a pas adopté.
L’amendement n° 749, présenté par Mme Lamure, M. Adnot, Mme Billon, MM. Bouchet, Cadic et Danesi, Mme Deromedi, MM. P. Dominati, Forissier, Joyandet et Kennel et Mme Primas, est ainsi libellé :
I. – Après l’alinéa 1
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
I bis. – Au 1° du I de l’article 199 terdecies-0 A du code général des impôts, le taux : « 18 % » est remplacé par le taux : « 30% ».
II. – Alinéa 2
Remplacer les mots :
Le I s’applique
par les mots :
Les I et I bis s’appliquent
III. – Alinéa 3
Après la référence :
I
insérer les mots :
et du I bis
IV. Pour compenser la perte de recettes résultant du I compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Élisabeth Lamure.
Dans le souci de favoriser l’investissement des particuliers dans les PME, et en réponse aux besoins des entreprises qu’elle a pu rencontrer sur le terrain, la délégation sénatoriale aux entreprises propose de revoir le dispositif actuel de réduction d’impôt sur le revenu pour investissement dans les PME, dite « réduction Madelin ».
Ce dispositif est aujourd’hui peu incitatif, en raison non seulement de son intégration dans le plafonnement des niches fiscales de 10 000 euros, ce qui le met en concurrence avec les déductions classiques, mais aussi du taux de la réduction d’impôt, égal à 18 % de l’investissement effectué dans les PME, taux qui n’est pas incitatif du fait du niveau important du risque et de la faible liquidité des participations.
La commission spéciale, en adoptant un nouvel article 35 ter C, entend faire sortir la « réduction Madelin » de la niche des 10 000 euros et l’intégrer au plafonnement global des avantages fiscaux de 18 000 euros ; cela répond bien à la première préoccupation de la délégation sénatoriale aux entreprises.
Néanmoins, nous pourrions pousser le débat plus loin et nous interroger sur le niveau de la réduction d’impôt sur le revenu accordée. L’amendement vise donc à porter le taux de déduction à 30 %, qui est, par comparaison, le taux minimal de réduction d’impôt dont jouit l’investissement dans les sociétés de financement de l’industrie cinématographique et de l’audiovisuel, les SOFICA. Le financement en fonds propres des PME n’est-il pas en effet aussi légitime que celui de l’industrie du cinéma, lequel n’est pas particulièrement lié au capital productif cher à M. le ministre ?
Le sous-amendement n° 1762 rectifié n’est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 749 ?
Même si l’on peut effectivement s’interroger sur la différence entre le taux de 30 % applicable aux investissements dans les SOFICA et celui de 18 % pour les investissements dans les entreprises, la commission estime avoir trouvé un équilibre satisfaisant dans le présent article. Elle demande donc aux auteurs de cet amendement de bien vouloir le retirer.
Dans notre pays, on protège à la fois le cinéma et les œuvres d’art ; j’y souscris d’ailleurs tout à fait. Je regrette seulement que les dispositifs de financement dans les PME ne soient pas aussi incitatifs.
Néanmoins, je retire cet amendement, monsieur le président.
L’article 35 ter C est adopté.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à douze heures quarante, est reprise à quatorze heures trente, sous la présidence de M. Hervé Marseille.