Séance en hémicycle du 7 février 2008 à 9h30

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

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  • sûreté

La séance

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La séance est ouverte à neuf heures trente.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n'y a pas d'observation ?...

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Je rappelle que la commission des affaires culturelles a proposé des candidatures pour plusieurs organismes extraparlementaires.

La présidence n'a reçu aucune opposition dans le délai d'une heure prévu par l'article 9 du règlement.

En conséquence, ces candidatures sont ratifiées et je proclame MM. Jean-Léonce Dupont et Philippe Adnot respectivement membre titulaire et membre suppléant du Comité de suivi de la loi relative aux libertés et responsabilités des universités, M. Ambroise Dupont membre de la Commission supérieure des sites, perspectives et paysages.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'ordre du jour appelle l'examen des conclusions de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à la rétention de sûreté et à la déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental (192).

Dans la discussion générale, la parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

Monsieur le président, madame le garde des sceaux, mes chers collègues, la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à la rétention de sûreté et à la déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental s'est réunie à l'Assemblée nationale, ce lundi 4 février.

Le texte adopté par le Sénat a été très largement repris, sous réserve de quelques modifications que je vais me permettre de vous présenter.

À l'article 1er, constatant que l'élargissement progressif du champ d'application de la rétention de sûreté à la suite des amendements adoptés à l'Assemblée nationale - victimes mineures âgées de quinze ans, de dix-huit ans, victimes majeures en cas de circonstances aggravantes - avait conduit à une formulation complexe n'échappant pas aux redondances, notre assemblée avait réécrit de manière beaucoup plus concise cet article.

Ainsi, dans la mesure où le code pénal prévoit déjà que l'âge de la victime peut être une circonstance aggravante, le Sénat avait jugé suffisant de faire référence dans la loi à la seule nature de l'infraction, sans qu'il soit nécessaire de mentionner explicitement le critère tenant à l'âge de la victime. Cette rédaction s'avérait cohérente avec le code pénal, qui ne distingue pas jusqu'à présent les victimes mineures de plus de quinze ans et les victimes majeures.

La commission mixte paritaire a souhaité rétablir cette distinction et rendre applicable la rétention de sûreté sans qu'aucune circonstance aggravante n'accompagne l'un des crimes visés dans toutes les hypothèses où la victime est mineure, y compris entre quinze et dix-huit ans.

En outre, le rapporteur de l'Assemblée nationale a proposé de préciser que les personnes concernées par la rétention de sûreté étaient celles qui présentaient une particulière dangerosité, caractérisée par une probabilité très élevée de récidive parce qu'elles souffrent d'un trouble grave de la personnalité.

Cette modification - « parce qu'elle souffre » - a été adoptée par la commission mixte paritaire après que je me fus interrogé sur son utilité, doutant - et c'est un euphémisme - que cette souffrance à laquelle on va donc tenter de porter remède permette de considérer la présente loi comme une loi pénale plus douce.

Toujours à l'article 1er, la « prise en charge médicale, éducative, sociale, psychologique et criminologique adaptée » qui devra être proposée à la personne placée en rétention de sûreté en centre socio-médico-judiciaire de sûreté a laissé place, de manière plus concise, à une « prise en charge médicale, sociale et psychologique ».

Enfin, dernière modification significative à l'article 1er, notre collègue député Georges Fenech, rapporteur pour l'Assemblée nationale, a proposé de modifier la rédaction de l'article 723-38 du code de procédure pénale afin de tirer la conséquence de l'introduction par le Sénat de la notion de « surveillance de sûreté » et de permettre que le placement sous surveillance électronique mobile puisse être prolongé dans le cadre non seulement de la surveillance judiciaire mais aussi de la surveillance de sûreté.

À l'article 6, qui comporte différentes modifications des dispositions du code de la santé publique relatives à la mise en oeuvre de l'injonction de soins, le Sénat a adopté, contre l'avis du Gouvernement, vous vous en souvenez, deux amendements revenant au droit en vigueur.

D'une part, il a estimé paradoxal, compte tenu des difficultés de recruter des médecins coordonateurs, de se passer d'autres sources de recrutement que les seuls psychiatres, dès lors qu'existent pour les médecins les garanties d'une formation appropriée.

D'autre part, il s'est opposé à la suppression de la faculté de recourir de manière encadrée à un psychologue à la place du médecin traitant, faculté qui constituait l'une des propositions de la mission d'information de la commission des lois de l'Assemblée nationale constituée en 2004 et consacrée au traitement de la récidive des infractions pénales, dont le président et le rapporteur étaient respectivement Pascal Clément et Gérard Léonard. Cette possibilité a été consacrée par la loi du 12 décembre 2005 qui précisait que les conditions de diplômes et les missions de ce psychologue traitant seraient précisées par décret.

Ce décret d'application n'ayant jamais été pris, la commission mixte paritaire propose de montrer la voie en ajoutant à l'article 6, dans la rédaction du Sénat, un alinéa précisant que les psychologues devront remplir une condition d'exercice de leur activité depuis au moins cinq ans.

Sur proposition du rapporteur pour l'Assemblée nationale et avec mon approbation, la commission mixte paritaire a disjoint de l'article 12, qui ne concerne que des dispositions transitoires, un paragraphe ajouté par le Sénat prévoyant que la libération conditionnelle d'une personne condamnée à la réclusion criminelle à perpétuité ne pourrait intervenir qu'après avis favorable de la commission pluridisciplinaire des mesures de sûreté. Cette disposition pourra donc s'appliquer sans limitation de durée.

Enfin, à l'article 12, relatif à l'entrée en vigueur des dispositions de la loi, et en dehors d'améliorations rédactionnelles, deux modifications ont été apportées. L'une permet au dispositif de la surveillance de sûreté d'être immédiatement applicable lorsqu'il fait suite non seulement à une surveillance judiciaire mais également à un suivi socio-judiciaire ; l'autre rend immédiatement applicable la disposition disjointe de l'article 12 relative aux conditions de libération conditionnelle des personnes condamnées à la réclusion criminelle à perpétuité, disposition que j'évoquais il y a un instant.

Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, les principaux apports du Sénat ont donc été intégralement respectés, qu'il s'agisse du caractère juridictionnel de l'instance dont relève la rétention de sûreté, de la définition d'un dispositif spécifique, la surveillance de sûreté, qui désignera les obligations susceptibles de prolonger une surveillance judiciaire, un suivi socio-judiciaire ou celles qui pourront être mises en oeuvre à l'issue d'une rétention de sûreté et, enfin et surtout, de la place éminente faite à l'évaluation.

Je suis convaincu, mes chers collègues, qu'en commençant à imposer une évaluation pluridisciplinaire d'au moins six semaines des personnes condamnées dans l'année qui suit leur condamnation définitive, en permettant au juge de l'application des peines de définir un parcours d'exécution de la peine individualisé, en se préoccupant des soins, de la dangerosité, de la formation, de la capacité à exercer un emploi dès l'entrée en détention, nous donnons à la réinsertion et donc à la lutte contre la récidive des atouts majeurs. De même, l'évaluation pluridisciplinaire en fin de peine, lorsque se posera le problème de l'éventuelle rétention de sûreté, permettra d'appréhender la dangerosité dans des conditions de fiabilité dignes de notre démocratie.

Nous avons ouvert une piste que je crois féconde et qu'il nous reviendra de défricher bien davantage encore lors du prochain examen du projet de loi pénitentiaire.

Enfin, si je n'ai pas abordé, mes chers collègues, la question de la rétroactivité, c'est simplement dans la mesure où, les deux assemblées ayant décidé l'application immédiate de la réforme, le problème ne se posait plus devant la commission mixte paritaire.

Il n'entre pas dans mes intentions, rassurez-vous, de reprendre le débat cent fois abordé de la distinction entre la peine et la mesure de sûreté, celui de la subtilité de la jurisprudence du Conseil constitutionnel qui semble assimiler, par exemple, le suivi socio-judiciaire à la première et la surveillance judiciaire à la seconde. Il n'en reste pas moins qu'une clarification s'impose en ce domaine et que nous ne pourrons qu'y être particulièrement attentifs.

Dans cette attente, je vous demande d'adopter le projet de loi relatif à la rétention de sûreté et à la déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental dans le texte qui vous est proposé par la commission mixte paritaire.

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.

Debut de section - Permalien
Rachida Dati, garde des sceaux, ministre de la justice

Monsieur le président, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens à saluer le travail accompli par le Sénat et l'Assemblée nationale au sein de la commission mixte paritaire.

Je voudrais en particulier remercier le président de la commission des lois, M. Jean-Jacques Hyest. Il a cerné tous les enjeux de ce texte. Il a su y sensibiliser ses collègues de la commission des lois.

Je tiens également à saluer le travail accompli par Jean-René Lecerf, votre rapporteur.

Le texte qui vous est proposé aujourd'hui est un texte équilibré et consensuel.

Les dispositions relatives à la nouvelle procédure de déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental n'ont pas fait l'objet de modifications substantielles.

De même, votre commission mixte paritaire a repris pour l'essentiel le texte que vous aviez adopté sur le volet sanitaire. Je n'y reviendrai donc pas.

Vous le savez, l'essentiel de nos débats a porté sur la rétention de sûreté. Cette mesure existe depuis de longues années dans d'autres démocraties, les Pays-Bas, l'Allemagne, la Belgique ou le Canada. Elle a été très longuement débattue dans cet hémicycle. Je crois que le texte issu de la commission mixte paritaire répond aux préoccupations qui ont été exprimées.

Le texte qui vous est soumis reprend la volonté de l'Assemblée nationale de bien préciser que les personnes visées sont les personnes qui présentent une grande dangerosité parce qu'elles souffrent d'un trouble grave de la personnalité. Les faits pour lesquels elles ont été condamnées démontrent leur dangerosité et la nécessité de suivre des soins.

Le texte reprend les nouvelles garanties que le Sénat a apportées afin que ce dispositif reste un dispositif d'exception.

Vous avez souhaité que les soins soient assurés dès le début de la détention. Le texte issu de la commission mixte paritaire reprend le principe d'un examen systématique dans le Centre national d'observation afin de définir un parcours adapté.

Vous avez souhaité que l'examen de dangerosité à la fin de la peine soit renforcé. C'est l'objet de l'examen de six semaines qui sera réalisé dans ce Centre national d'observation.

Sur toutes les travées de votre Haute Assemblée, on a exprimé la préoccupation que la rétention de sûreté ne soit pas un simple enfermement, une relégation sociale. Le texte issu de la commission mixte paritaire traduit parfaitement cette exigence.

Il reprend votre volonté qu'un suivi médical et psychologique adapté soit mis en place dans le centre socio-médico-judiciaire. II insiste sur la prise en charge des personnes retenues en matière de formation et d'éducation.

Le rôle des centres socio-médico-judiciaires de sûreté est de donner le plus de chances possible aux personnes concernées de remédier à leurs troubles, et donc de réduire leur dangerosité. Les personnes retenues bénéficieront d'offres de soins individualisées et adaptées à leur profil : prise en charge médico-sociale renforcée, traitement antihormonal avec le consentement de l'intéressé, psychothérapie individuelle ou de groupe, structuration sociale par le travail et la formation et accompagnement socio-éducatif.

M. Portelli a appelé de ses voeux la création d'un véritable centre Pinel en France, sur le modèle de ce centre qui existe au Canada. Le centre socio-médico-judiciaire qui sera installé dans l'hôpital de Fresnes doit nous permettre de mieux traiter cette dangerosité particulière des criminels dangereux qui souffrent de troubles graves de la personnalité.

Les garanties prévues par le Sénat pour l'application de la rétention de sûreté aux tueurs et aux violeurs en série qui sortiront de prison dans les années à venir ont été reprises.

Nous avons eu de longs débats sur ce sujet. Soyons clairs : les Français ne pourraient pas comprendre que l'on attende quinze ans avant que ce dispositif puisse s'appliquer à des psychopathes qui refusent de se soigner.

Nous l'avons dit, la rétention de sûreté est une mesure de sûreté, ce n'est pas une peine. Elle est donc immédiatement applicable. La Cour constitutionnelle allemande l'a expressément jugé dans une décision du 5 février 2004.

Vous avez souhaité renforcer le caractère exceptionnel et subsidiaire de ce dispositif transitoire en posant deux conditions : la première prévoit qu'une rétention de sûreté ne pourrait être envisagée que si une assignation à domicile sous surveillance électronique mobile était insuffisante ; la seconde condition est que les personnes incarcérées au moment de l'entrée en vigueur de la loi devront être averties par la chambre de l'instruction que la dangerosité révélée par leur condamnation pourra justifier un placement en rétention de sûreté à la fin de leur peine. Les personnes pourront ainsi s'engager dans une démarche de soins pendant leur détention en connaissant son enjeu.

Cet amendement a été repris par la commission mixte paritaire.

Après cet important travail préparatoire, nous sommes parvenus aujourd'hui, j'en ai la conviction, à un texte qui respecte nos principes constitutionnels fondamentaux et les exigences de la Convention européenne des droits de l'homme.

Le Gouvernement veillera avec une vigilance toute particulière à ce que la mise en oeuvre de ce dispositif respecte toutes les garanties que le Sénat a souhaité mettre en place.

Mesdames, messieurs les sénateurs, ce texte est un texte de protection. II vise à protéger nos concitoyens de criminels particulièrement dangereux. Il est attendu par tous. Je vous demande de l'adopter dans l'intérêt des Français.

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.

Debut de section - PermalienPhoto de Hugues Portelli

Monsieur le président, madame le garde des sceaux, mes chers collègues, la commission mixte paritaire qui s'est tenue ce lundi afin de s'accorder sur un texte commun aux deux chambres sur la rétention de sûreté et la déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental a fait du bon travail.

Nous pouvons encore une fois être très fiers du travail fourni par les sénateurs, la commission des lois et son rapporteur : les membres de la commission mixte paritaire ont retenu la quasi-totalité des modifications votées par le Sénat. Ce consensus montre également que la majorité est soudée derrière ce texte qu'elle juge équilibré, utile et conforme au droit, qu'il soit pénal ou constitutionnel.

Je remercie Mme le garde des sceaux du dialogue qu'elle a su instaurer avec nous lors de l'élaboration de ce texte, puis au cours des débats parlementaires, ainsi que de son ouverture d'esprit, puisqu'elle a suivi les amendements que nous lui proposions.

Ce projet de loi est nécessaire, car il vise à protéger d'éventuelles victimes contre des personnes dont la justice a dû reconnaître qu'ils sont inamendables.

Les sénateurs et les députés se sont accordés sur le principe d'application immédiate de la rétention, y compris pour les personnes déjà condamnées avant la promulgation de la loi. Je le répète encore une fois, mes chers collègues, cette disposition ne nous semble pas contraire à la jurisprudence récente du Conseil constitutionnel, qui reconnaît la constitutionnalité de la rétroactivité des mesures de sûreté dès lors qu'elles présentent, comme c'est le cas ici et comme nous y avons veillé, un caractère préventif.

Ils ont également approuvé le renforcement de la définition des centres socio-médico-judiciaires, qui auront pour mission d'assurer un suivi médical, éducatif et psychologique adapté. Pour cela, des groupes de parole seront mis en place, avec des thérapies comportementales et cognitives.

Les dispositions de ce projet de loi demeurent strictement encadrées sur le plan procédural, dans le respect du principe du contradictoire et des droits de la défense. La rétention de sûreté s'appliquera « à titre exceptionnel » après décision de la chambre d'instruction, qui devra constater « une probabilité très élevée » de la récidive de la part de la personne condamnée, celle-ci devant présenter « des troubles graves de la personnalité ». Les criminels pouvant être concernés seront tous ceux ayant été reconnus coupables d'infractions particulièrement graves commises sur tous mineurs, sans distinction d'âge, comme l'avait voté l'Assemblée nationale.

Seront aussi concernés les auteurs de crimes commis sur des victimes majeures avec des circonstances aggravantes.

En ce qui concerne la deuxième partie du texte, relative à l'instauration d'une nouvelle procédure liée à l'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental, la commission mixte paritaire n'a pas apporté de modifications substantielles. Ce deuxième axe du projet de loi est également utile, car il apporte une réponse humaine à des familles endeuillées, privées de la reconnaissance de leur statut de victime. Il permet aussi à la personne irresponsable de prendre conscience, quand son état mental le lui permet, de la gravité des faits qui lui sont reprochés afin qu'elle puisse éventuellement entrer dans une démarche thérapeutique.

Ce projet de loi sera adopté et entrera en vigueur. Pour nous, c'est le plus important. Sachez que, durant toute la phase des travaux préparatoires et au cours de la discussion au Parlement, nous nous sommes préoccupés des problèmes juridiques qu'il pourrait poser. Désormais, nous veillerons à sa mise en oeuvre concrète et à la réalité de l'encadrement médical, psychiatrique qui sera apporté. Il faut donc que le personnel nécessaire soit recruté, formé et que les institutions soient effectivement créées. C'est sur ces points, madame le garde des sceaux, que nous serons attendus.

Le texte élaboré par la commission mixte paritaire respecte le travail du Sénat et sera approuvé sans réserve par le groupe de l'UMP.

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Badinter

Monsieur le président, madame le garde des sceaux, mes chers collègues, nous voici parvenus au terme de la discussion de ce projet de loi. Je tiens à nouveau à saluer les efforts constructifs de notre excellent rapporteur pour tenter d'apporter quelque tempérament à un texte que je considère toujours comme désastreux.

Désastreux d'abord par la voie - c'est à mon sens l'essentiel - sur laquelle il engage notre justice.

Désastreux ensuite, parce qu'il apporte de mauvaises réponses à un problème réel, celui des criminels atteints de graves troubles de la personnalité de nature à provoquer la récidive.

Vous avez dit, madame la garde des sceaux, que ce projet de loi comblait une faille dans notre dispositif législatif. Pour ma part, il ouvre une brèche dans notre justice pénale qui ne peut que s'élargir dans la législation de fait divers qui prévaut aujourd'hui.

Il ouvre une brèche, parce que, jusqu'à présent, nous avons toujours connu une justice pénale qui sanctionnait la commission des infractions criminelles, parfois excessivement. À cet égard, je pense bien sûr à la peine de mort, aujourd'hui heureusement abolie non seulement en France, mais également dans toute l'Europe et la majorité des États des autres continents, ainsi qu'à la relégation des condamnés instaurée en 1885, qui a été exécutée en Guyane jusqu'en 1939 et qui a été supprimée en 1970, tout comme à son succédané très faible, mais lourd de dommages humains, la tutelle pénale, qui a été supprimée en 1981 par Alain Peyrefitte.

Sous réserve de la décision du Conseil constitutionnel que je me garderai bien d'anticiper, ne serait-ce que par déférence, vous allez introduire dans notre droit pénal la rétention de sûreté. Quoi qu'il en soit, après avoir présenté notre motion tendant à opposer l'exception d'irrecevabilité, je ne pense pas que ce soit le moment de revenir sur ces questions à ce stade de la discussion.

Les mots « rétention de sûreté », je l'ai dit, ne signifient rien d'autre qu'un enfermement décidé pour un an et reconductible indéfiniment. La rétention de sûreté peut donc être perpétuelle. Elle s'exécutera dans des établissements fermés, gardés par les personnels pénitentiaires - qui appartiennent à une administration à laquelle je tiens toujours à rendre hommage, car je sais ô combien sa mission difficile ! -, d'où le retenu ne pourra sortir que sous escorte policière.

Quelles que soient les modalités de cet établissement fermé et sa finalité proclamée de traitement psychologique, éducatif et social, il ne s'agira en fait pour le détenu, ou plutôt pour le retenu, que de la continuation de sa détention dans une autre prison, quelle qu'en soit la dénomination ou le régime proclamé.

Je rappelle qu'il ne s'agit pas là de malades mentaux souffrant de troubles de dangerosité psychiatriques. Il s'agit de condamnés qui n'ont pas été déclarés irresponsables par la justice et dont les expertises ultérieures viendraient déceler un état de dangerosité criminologique, dont, reconnaissons-le, les contours et le diagnostic demeurent incertains.

Dès lors, on demandera à des magistrats, gardiens constitutionnels de la liberté individuelle, de retenir en détention des personnes après qu'elles auront purgé leur peine, non plus pour les infractions qu'elles ont commises ou qu'elles sont suspectées avoir commises, mais au regard de crimes virtuels qu'elles seraient réputées susceptibles de commettre !

À la justice pénale fondée sur la preuve de la culpabilité, établie selon les règles du droit et en respectant la présomption d'innocence, fondement de toute justice pénale, au moins dans une démocratie, va succéder une justice de dangerosité, fondée sur des présomptions criminologiques établies par des experts, notamment des psychiatres, et pouvant prononcer, par décisions successives, une véritable détention à durée illimitée, en dehors de toute infraction constatée.

À la justice de liberté fondée sur la responsabilité prouvée de l'auteur d'une infraction va succéder une justice de sûreté - c'est un ordre nouveau de juridiction qui se sera amené à se prononcer -, fondée sur la dangerosité diagnostiquée de l'auteur potentiel d'un crime virtuel.

C'est là une véritable révolution pour notre justice pénale !

Cette brèche dans les principes de notre justice ne peut que s'élargir sous la force des émotions suscitées par les crimes les plus graves dans l'opinion publique.

Vous avez à l'origine présenté un projet né de la réaction bien naturelle à l'affaire Évrard. Je rappelle que, à notre connaissance, il s'agissait d'un cas unique depuis trente ans. J'avais dit que la préférence aurait dû être donnée à une commission d'enquête afin de savoir exactement ce qui s'était passé et d'en tirer les conclusions.

Il ne s'agissait, dans ce projet d'origine, cela a souvent été rappelé, que de mettre hors la cité des pédophiles prédateurs qui s'en prennent aux enfants de moins de quinze ans. Mais puisqu'il s'agit de la dangerosité de l'auteur de crimes les plus graves - tel est maintenant l'axe de cette justice que vous nous proposez - et qu'il ne peut s'agir, évidemment, de déterminer cette dangerosité au regard de la fragilité des victimes, toutes dignes d'intérêt et de compassion, nous avons vu s'élargir votre projet au cours du trajet législatif, sur l'initiative de l'Assemblée nationale, presque par la force des choses, à tous les auteurs des crimes les plus graves commis contre la personne physique.

J'affirme que l'on ne s'en tiendra pas là. L'extension de cette justice nouvelle, fondée sur la dangerosité, est inévitable. La dangerosité s'apprécie au regard non pas de la victime, mais de la personnalité de l'auteur. L'émotion du public est toujours liée à la nature du second crime, pas du premier.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Badinter

Chaque fois que survient un crime provoquant l'indignation du public - ces crimes sont malheureusement inévitables - le pire, c'est d'entretenir le public dans l'illusion de la récidive zéro.

Il y aura toujours des récidives, il y aura toujours des crimes atroces, sauf si l'homme change de nature, ce qui est impossible. Caïn fait partie de l'espèce humaine ! Chaque fois, vous serez amenés, pour prévenir le second crime par la détention de sûreté de l'auteur du premier crime, à étendre le champ de la mesure.

Prenons le cas le plus simple. Une personne est condamnée à une peine de cinq années de réclusion criminelle pour un premier crime. À sa sortie de prison, elle commet un crime terrible. L'opinion publique indignée se demandera pourquoi la rétention de sûreté n'a pas été appliquée. On lui répondra que la mesure ne s'applique qu'aux condamnés à quinze ans d'emprisonnement. Des amendements seront déposés, afin que la rétention de sûreté vise les condamnés à cinq ans d'emprisonnement.

De la même manière, prenons le cas d'un délinquant récidiviste, voire multirécidiviste, condamné à une peine d'emprisonnement de quatre ou de cinq ans pour violence sur les personnes, qui commettra à sa sortie de prison un acte plus grave, de nature criminelle. L'opinion publique se demandera pourquoi ce délinquant n'a pas subi une période de rétention de sûreté. On vous demandera, une fois de plus, d'étendre le dispositif de rétention de sûreté.

Ainsi, de fait divers en fait divers, d'émotion en émotion, d'amendement en amendement, vous ne pourrez vous opposer à cette demande, et nous aurons ainsi créé une nouvelle justice qui aura changé de fondement !

Après des siècles, nous voyons aujourd'hui l'avènement de la justice de mesures préventives contre l'homme dangereux.

Derrière toutes les précautions que vous prenez, au-delà de toutes les discussions juridiques, c'est le triomphe d'une école de pensée visant à l'élimination sociale des individus considérés comme dangereux.

C'est contraire au fondement de nos sociétés de liberté, car la responsabilité et la liberté ne peuvent être dissociées dans le domaine pénal.

Il faut penser à la condition de ceux qui sont retenus et dont on pense qu'ils vont récidiver. Vous connaissez comme moi les chiffres, madame la ministre. Le taux de récidive en matière de crimes sexuels est le plus bas de notre justice pénale, 1, 6 % contre 2, 2 % pour les homicides selon les dernières données.

Vous voulez, madame la garde des sceaux, prévenir la réitération. Mais au nom de quoi maintenez-vous tous ceux qui n'auraient pas réitéré en détention pour une durée illimitée ? Des magistrats se prononceront-ils au nom d'un diagnostic? Dans un tel système, que restera-t-il de la présomption d'innocence ?

Mais alors, me direz-vous, que proposez-vous ?

Il est évident que les quelques pas en avant, que nous avons salués et soutenus, proposés par M. le rapporteur vont dans le bon sens.

Cependant, la vérité est que tout le système doit être repensé.

Les dispositions du nouveau code pénal, auxquelles le président de la commission des lois, M. Jean-Jacques Hyest, a largement contribué en qualité de co-auteur, ne sont pas satisfaisantes.

Comme vous, monsieur le rapporteur, je pense que nous avons beaucoup d'enseignements à tirer des exemples hollandais et belges, ...

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Badinter

... à la condition de ne pas cumuler le système de sanction et le système de traitement de la dangerosité. Ce cumul est impossible.

Pour ces criminels, il faut commencer, au stade de l'instruction, qui est longue, par procéder à une mise en observation dans des centres spécialisés multidisciplinaires, comme il en existe aux Pays-Bas.

Ainsi, pendant huit semaines, cinquante spécialistes observent trente sujets et établissent dès le départ le diagnostic. À ce moment-là, si certains d'entre eux présentent des troubles graves, il faut choisir entre deux voies, celle qui convient le mieux à chacun.

Pour ceux qui sont atteints des troubles les plus graves de la personnalité susceptibles de mettre en danger la sécurité des autres et la leur, s'impose la voie du traitement et de l'enfermement, comme en Belgique, avec des médecins hospitaliers spécialisés et leurs assistants multidisciplinaires.

La durée ne peut pas en être fixée puisqu'il s'agit de la voie thérapeutique, avec ses exigences que l'on ne peut abolir, et non de la voie judiciaire, et qu'elle est fonction de l'évolution de la personnalité du sujet.

La deuxième voie qui s'ouvre pour tous les autres est la voie judiciaire, qui ne doit pas être un temps perdu de détention.

Le drame de notre justice pénale - ce n'est pas à vous, madame la ministre, que je l'imputerai, car vous êtes depuis peu garde des sceaux - c'est la situation pénitentiaire. La priorité absolue, c'est la loi pénitentiaire !

Il fallait commencer par là et ne pas mettre la charrue devant les boeufs, à la faveur de l'émotion du public.

Nous ne devons pas concevoir l'enfermement et l'établissement pénitentiaire comme un temps mort. La peine ne doit jamais être, comme elle l'est trop souvent, un temps mort.

Pour avoir visité plusieurs maisons centrales et centres de détention, madame la garde des sceaux, vous savez parfaitement que nous n'avons pas les moyens en personnels, ô combien dévoués, pour procéder à un traitement sélectif de malades mentaux, qui se comptent par milliers, dès le départ, après la mise en observation.

Le point le plus positif de ce triste débat est la disposition, adoptée par voie d'amendement, selon laquelle il convient de procéder dès le début de la peine à l'établissement du projet individualisé. Ce n'est pas à la dix-septième année que, soudainement, un homme comme Évrard s'en trouvera amélioré !

La responsabilité première est donc là. Il faut, à partir de la période de diagnostic à la hollandaise, avoir à disposition les deux voies : le traitement - dispositif d'ordre purement psychologique, social, psychiatrique, pour ceux auxquels on a diagnostiqué les troubles les plus graves de personnalité, avec les risques que cela comporte - et la solution judiciaire, qui n'est pas un temps perdu.

À l'issue de ce processus, si la surveillance demeure encore nécessaire, à quoi servent les dispositions que nous votons presque tous les ans ?

À quoi bon la surveillance qui suit, avec injonction de soins ? À quoi bon le prononcé de la peine dans le cadre du suivi socio-judiciaire, avec toutes les sanctions en cas de violation ? À quoi bon tous les dispositifs que nous avons adoptés à mesure qu'on nous présentait des textes pour combattre la récidive ? À quoi bon le fichier avec la présentation devant les instances de police ? À quoi bon la surveillance judiciaire et même, monsieur le rapporteur, la surveillance de sûreté si ces procédures ne bénéficient pas des moyens nécessaires ?

Nous ne manquons pas de textes. Je pense également au perfectionnement que vous avez apporté, par l'amendement sur la rétention à domicile, une sorte de mise aux arrêts de rigueur, chez soi. Mais ces pas n'ont de sens et ne peuvent répondre à la finalité qui leur est assignée que si les moyens nécessaires sont donnés. Sinon, ces textes ne sont que des cache-misère législatifs. Voilà ce que nous faisons !

Le moment, à mon sens, le plus saisissant de tout le débat - en dehors de l'invention remarquable de l'usine à gaz que nous devons à l'éminent talent créateur de M. Portelli, mais il appartiendra au Conseil constitutionnel de l'apprécier - fut celui où le président Nicolas About nous a rappelé en termes sensibles mais précis ce qu'est réellement la situation de détresse extrême de notre institution pénitentiaire.

Il a rappelé le terrible manque de psychiatres dans le secteur public, l'insuffisance de personnels compétents à tous les niveaux de ces instances pénitentiaires. Il a souligné que le suivi socio-judiciaire, pourtant voté depuis 1998, ne fonctionnait pas, faute de médecins coordinateurs ; je pourrais énumérer d'autres exemples cités par M. About.

En définitive, et ce sera ma conclusion, pour répondre à une violente émotion publique, née d'une affaire odieuse, vous avez à la hâte bâti un texte, déclaré l'urgence, sans que nous ayons eu le temps, dans le cadre de la commission parlementaire que nous aurions dû créer, d'examiner les causes précises du mal dans la circonstance et les réponses à apporter en profondeur.

Une législation conçue de cette façon entraîne - sans peut-être que vous en mesuriez toutes les conséquences - une profonde et dangereuse révolution de notre justice pénale. Je plains les magistrats qui auront à la mettre en oeuvre et ceux qui en seront l'objet.

Je demeure convaincu que c'est dans la voie qu'avait adoptée notre rapporteur, sans qu'il soit besoin de rétention de sûreté, qu'il fallait aller et peut-être même plus loin. Mais il faut toujours veiller, car là est la sauvegarde nécessaire, à ce que, dans notre justice de liberté, ce soit l'acte précis de celui qui viole la loi, ou une obligation juridictionnelle pesant sur lui, qui entraîne aussitôt et avec fermeté l'application des sanctions prévues.

Nous manquons à l'une des nombreuses obligations, si aisées à mettre en oeuvre pourvu qu'on en ait les moyens, qui sont déjà dans les lois, encore améliorées par les propositions du rapporteur ; cela permettait de faire face aux situations que nous avons évoquées. Je déplore la voie que vous avez choisie et je sais que nous n'avons pas fini d'en payer les conséquences.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Mes chers collègues, permettez-moi de saluer notre nouveau collègue M. François Pillet, qui succède à Serge Vinçon et, pour la première fois, siège dans notre Haute Assemblée.

Je lui adresse nos voeux de cordiale bienvenue en souhaitant qu'il trouve pleine satisfaction dans l'exercice de ses nouvelles responsabilités.

Applaudissements

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Dans la suite de la discussion générale, la parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, M. Badinter ayant tout dit, je vais peut-être reprendre, avec moins de talent, certains de ses propos.

De toute façon, il est toujours utile de dire ce que nous pensons, car, hélas, nous n'en avons pas fini avec les débats sur la dérive de notre système pénal.

La commission mixte paritaire a entériné le projet de loi. Notre rapporteur avait fait beaucoup d'efforts, ayant écouté, et entendu, de nombreuses personnes. Néanmoins, comme nous l'avons constaté en travaillant sur ce texte, la majorité des sénateurs de la majorité n'entend pas ou ne veut pas entendre, ou est sur une autre planète.

Ainsi, le texte - à quelques modifications près, essentiellement formelles - reste ce qu'il était ; pour la première fois, le Parlement s'apprête à voter une loi qui prévoit qu'une personne qui a été condamnée, qui a purgé sa peine, sera placée de nouveau en détention et pour une durée indéfiniment renouvelable.

Ce projet de loi est intervenu à la suite d'un fait divers, comme d'ailleurs les précédents, notamment ceux qui, justement destinés à lutter contre la récidive, ont été votés en 2005 et tout récemment en juillet 2007 sur les peines plancher.

Cette logique est sans fin. De fait divers en fait divers, évidemment, nous pouvons aller très loin. Est-ce une façon d'exorciser les démons de notre société ? Peut-être...Je ne sais pas.

Qui plus est, il est toujours des plus zélés que nous, ou que d'autres. Le champ du projet de loi a été considérablement élargi par rapport au texte initial, ce qui n'a fait l'objet d'aucune contestation de notre commission des lois. Donc les plus zélés sont écoutés.

La prochaine étape sera-t-elle de mettre en rétention de sûreté des personnes condamnées pour participation à des faits de terrorisme ou des criminels en bande organisée ? Ou bien encore consistera-t-elle, à la suite d'un fait divers n'entrant pas dans le champ d'application de la loi, comme l'a dit M. Badinter, à abaisser le seuil de la peine parce que la société, évidemment, craindra toujours que, quelle que soit la durée de la peine initiale, les personnes récidivent ? Si l'on considère que cette crainte n'est pas supportable, il faudra effectivement mettre en relégation de plus en plus de gens.

La France est, parmi les pays européens, celui qui a déjà les peines les plus longues en matière d'infractions sexuelles. Il faudrait donc s'interroger sur le rapport entre notre façon de traiter les crimes et les infractions de ce type et la récidive. Malgré cela, notre échelle des peines est constamment durcie.

Les lois s'empilent sans former de cadre cohérent. Pourtant, des outils législatifs destinés à lutter contre la récidive existent, nous l'avons dit, mais il faut y insister. Compte tenu de leur adoption récente pour certains, nous comprenons qu'il soit difficile de faire un bilan, une évaluation, mais le problème est que le Gouvernement - sans s'embarrasser de bilan ou d'évaluation - nous demande de légiférer de nouveau.

Comment, au regard des mesures qui ont été prises depuis quelques années, et même précédemment, ne pas opposer le fait que, par exemple, le suivi socio-judiciaire n'a pas les moyens d'être appliqué, que les aménagements de peines sont de plus en plus limités ? Or, dans la faible proportion où ces dispositifs sont utilisés, ils ont prouvé leur efficacité en matière de prévention de la récidive. Il y a donc une absurdité dans cette logique, qui est évidemment très regrettable, du point de vue, en tout cas, du législateur.

Avec la rétention de sûreté, il est question non plus de responsabilité pénale et de punition pour une infraction commise mais de dangerosité et de relégation, c'est très clair. Comme l'a dit, à titre personnel, le président du Comité consultatif national d'éthique, c'est un substitut à la peine de mort, que, dans notre pays, nous ne pouvons plus rétablir, malgré les demandes répétées d'un certain nombre de parlementaires depuis qu'elle a été abolie. Finalement, une minorité de parlementaires va devenir majorité pour substituer à la peine de mort la relégation à vie.

Ce texte est donc véritablement inquiétant parce qu'il rompt le lien fondamental entre le fait punissable et la peine qui sanctionne son auteur et prévoit l'exclusion définitive de la société d'une personne sur la seule base d'expertises.

La justice est confiée non plus aux tribunaux mais à des experts, desquels dépendra l'enfermement en centre de rétention de sûreté d'une personne considérée comme dangereuse.

On demande à des psychiatres de prédire si une personne commettra de nouveau un crime. L'énoncé de cette hypothèse devrait suffire à en illustrer le non-sens. On confond diagnostic et pronostic, alors que chacun sait que les psychiatres ont du mal à expertiser les troubles de la personnalité.

Même la notion de dangerosité ne fait pas l'objet d'une définition communément admise. Pourtant, toute l'architecture de ce texte repose sur les notions de dangerosité et de probabilité. La conséquence sera sans doute qu'aucun expert ne prendra la responsabilité de déclarer qu'une personne n'est pas dangereuse.

Le projet de loi est révélateur de l'incapacité dans laquelle se trouve le Gouvernement quand il est question de prise en charge des détenus.

Le Gouvernement propose le placement en rétention de sûreté après la peine. Mais attendre quinze ou vingt ans avant de prendre en charge une personne de surcroît considérée comme dangereuse est une absurdité.

D'une part, c'est reconnaître que la détention est inadaptée, et cela nous renvoie à la loi pénitentiaire qui aurait dû précéder, comme cela a été dit et répété, toute nouvelle loi pénale. Il est donc très regrettable qu'une réflexion ne soit pas envisagée sur les finalités de l'emprisonnement et sur les dispositifs d'insertion et de probation, dans le cadre d'une nouvelle loi pénitentiaire.

D'autre part, si les centres de rétention de sûreté sont, d'après vous, tout à fait appropriés pour les personnes présentant des troubles profonds de la personnalité - j'ai bien entendu M. Hugues Portelli nous vanter les mérites de ces futurs centres qui vont prendre en charge médicalement, psychiatriquement, socialement, les personnes en question - pourquoi ne pas prévoir le placement dans ces centres des personnes immédiatement après leur condamnation et pour la durée de leur peine ? Il y a là un hiatus qui n'est absolument pas compréhensible. J'ai déjà posé cette question, mais, dans la mesure où aucune réponse n'y est apportée, il faut bien la répéter ; ce sera pour des débats futurs.

Si, par la suite, dans le cas où elle aurait été immédiatement placée dans un centre de ce type, la personne condamnée s'avérait toujours potentiellement dangereuse et incapable de contrôler ses pulsions, il faudrait prononcer une mesure d'hospitalisation d'office en psychiatrie.

Le placement d'office permet de rester dans le cadre d'une mesure exceptionnelle et administrative, que la société peut toujours prendre. La rétention de sûreté, quoique vous en disiez les uns et les autres, n'est déjà plus une mesure exceptionnelle tant le nombre de personnes auxquelles elle est susceptible de s'appliquer s'est élargi depuis le moment où le Parlement a commencé à débattre de ce projet de loi.

Dans ce contexte, la proposition du rapporteur prévoyant une évaluation d'une durée de six semaines de la personne, dans l'année qui suit sa condamnation définitive, est une mesure positive, mais incohérente avec la philosophie de ce projet de loi.

Pourquoi les pays qui ont mis en place une rétention de sûreté, dans des conditions totalement différentes de la nôtre, parviennent-ils à des résultats positifs ?

D'abord, parce que celle-ci intervient le plus souvent en substitution de la peine. Parfois, c'est même une peine avec sursis qui est prononcée, comme en Belgique, par exemple.

Ensuite, parce que les évaluations interviennent très tôt dans la procédure pénale mise en oeuvre, pendant l'instruction puis après la condamnation, afin que le parcours d'exécution de la peine soit le plus individualisé possible pour obtenir les meilleurs résultats.

Enfin - et cette question est inhérente aux deux constats que je viens de faire -, parce que ces pays ont dégagé des moyens considérables en faveur de la prise en charge de ces personnes dites dangereuses. Aux Pays-Bas, l'observation prévue d'une personne dans le centre Pieter Baan coûte mille euros pas jour ! Ces pays n'ont pas hésité à mettre en oeuvre toute une série de mesures psychiatriques, psychologiques, sociales, éducatives. Ils ont donné le temps - les évaluations durent plusieurs semaines - à tous ces professionnels de travailler dans la sérénité.

Telle n'est pas l'optique adoptée par ce projet de loi ! La réflexion qui l'inspire s'inscrit dans le court terme : elle fait le choix de la facilité et de l'affichage. Malheureusement, sur le long terme, nous pouvons constater à quel point l'emprisonnement de longue durée conduit à la dégradation des conditions de détention et à l'apparition, chez certains détenus, de troubles psychiques ! Cette logique est donc totalement contreproductive.

Ce constat s'applique aussi aux personnes déclarées irresponsables pénalement. Le nombre d'accusés jugés « irresponsables au moment des faits » a considérablement diminué par rapport aux années quatre-vingt. Dans ces conditions, il n'est pas étonnant de constater que, dans nos prisons, 30 % environ des détenus souffriraient de troubles mentaux.

Ce qui pose problème, ce n'est donc pas tant l'application de l'article 122-1 du code pénal que la médiatisation des faits divers dans lesquels sont impliquées des personnes irresponsables pénalement. Vous instrumentalisez la souffrance des victimes afin de revenir sur le principe de la responsabilité pénale, en ne dispensant plus les malades mentaux d'un jugement devant une juridiction pénale.

De plus, il me semble difficile d'imaginer qu'une personne, dont on a reconnu qu'elle souffrait de troubles mentaux, sera en état psychique de respecter les obligations ordonnées par le juge. Par ailleurs, comment lui appliquer des sanctions pénales en cas de non-respect de ses obligations alors qu'elle a été déclarée irresponsable pénalement ? Nous vous avons déjà dit tout cela, mais vous ne voulez pas l'entendre !

Je terminerai mon intervention en évoquant la rétroactivité de l'article 1er du projet de loi, que le Gouvernement et la majorité souhaitent imposer coûte que coûte. Quels que soient les arguments utilisés, vous n'arrivez pas à nous convaincre et j'espère que vous n'arriverez pas à convaincre le Conseil constitutionnel. Celui-ci ne s'honorerait pas en acceptant que le principe de non-rétroactivité de la loi pénale soit bafoué, par exemple sous le motif fallacieux que la rétention de sûreté ne serait pas une peine, ce qui paraît impensable ! Si l'on écarte aujourd'hui le principe de non-rétroactivité, notre démocratie s'effacera devant le fait du prince, je suis désolé de vous le dire, madame la ministre.

Dans ces conditions, vous comprendrez que nous voterons résolument contre ce projet de loi qui, malheureusement, nous a été infligé selon la procédure d'urgence, comme les précédents !

Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Fauchon

Monsieur le président, madame le garde des sceaux, mes chers collègues, nous sommes de ceux qui admettent qu'il existe des « individus dangereux »...

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Fauchon

M. Pierre Fauchon. ..., au sens du projet de loi, bien entendu, et que ces individus doivent être mis « hors d'état de nuire », de nuire aux autres mais aussi de se nuire à eux-mêmes, ce qui, selon moi, a été constamment oublié dans nos débats.

Protestations sur les travées du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Fauchon

Ces individus ne peuvent être mis en liberté après l'exécution de la longue peine à laquelle ils ont été condamnés et il nous faut organiser pour eux une « rétention », qui est une mesure de sureté et non une peine, les conditions de vie quotidienne devant confirmer cette distinction fondamentale ; c'est un point essentiel que nous tenons à souligner. Moi qui n'aime pas dramatiser, par nature et par construction, je me permets de dire qu'il y va de l'honneur du Gouvernement ! En effet, si on devait s'apercevoir, au terme de quelques années, que la vie quotidienne de ces personnes, dans la réalité, est restée celle de détenus, alors nous aurions eu tort et nous serions un peu... embarrassés d'avoir soutenu ce projet de loi. Il ne faut pas que cela arrive !

Me tournant vers le côté gauche de l'hémicycle, je dis à mes amis qu'il faut une sérieuse dose d'aveuglement, d'angélisme et, disons-le, de passion d'avocat pour sous-estimer ces réalités et nous faire croire que l'homme dangereux n'est qu'un mythe, qu'il n'existe qu'un seul type d'homme, le fameux homme des Lumières, doué de raison et de conscience, qui peut commettre des fautes mais qui ne manquera pas de s'amender après avoir exécuté sa punition, autant dire le « bon sauvage » de Jean-Jacques ! ... Comme s'il n'y avait pas aussi quelques « mauvais sauvages », quelques irresponsables, que je ne me risquerai pas à condamner moralement, car je les tiens non pas pour responsables, mais pour premières victimes de leur propre mal !

Au demeurant, je suis de ceux qui pensent qu'il serait plus prudent de ne pas mêler la morale au droit pénal et de se fonder davantage sur des considérations objectives de sécurité que sur des concepts de culpabilité qui relèvent d'un autre ordre, supérieur sans doute, mais que les institutions humaines sont malhabiles à apprécier. Ne dit-on pas que la justice n'est pas de ce monde ? Mais c'est une restriction qui dépasse notre sujet, je le reconnais bien volontiers.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Si la justice n'est pas de ce monde, allons dans l'au-delà !

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Fauchon

Je suis surtout de ceux qui croient que la paix et la sécurité - aussi banal que cela paraisse, il faut sans cesse le rappeler - sont les premières raisons d'être de la société et donc son premier devoir, que nous ne devons pas oublier que la criminalité fait des victimes, et pas seulement des « faits divers », et que la souffrance des victimes vaut bien la souffrance des coupables, à tout le moins !

Il est assez significatif, à cet égard, que certains articles publiés sous des signatures qui font autorité - non sans raison - n'accordent aucune attention aux victimes et que ce terme même n'y figure même pas, ce qui montre assez le caractère unilatéral de ces plaidoyers, qui contiennent par ailleurs bien des observations justifiées ; j'en ai enregistré un certain nombre tout à l'heure, en les approuvant.

Nous voterons donc ce projet de loi auquel de récents et terribles drames ont conféré les caractères d'actualité et de nécessité que nous savons ; je refuse de qualifier ces drames de « faits divers » !

À titre personnel, je confirme cependant mon regret de voir ce texte non pas complété, mais alourdi, encombré par l'alinéa 4 de l'article 1er et l'ensemble de l'article 12, qui en est la conséquence.

Dan cet alinéa litigieux, après avoir clairement posé le principe de la rétention de sureté, on croit devoir ajouter que « la rétention de sûreté ne peut toutefois être prononcée qui si la cour d'assises a expressément prévu dans sa décision de condamnation que la personne pourra » - dans le texte originel, ce verbe était au conditionnel ; on a cru plus sage de passer au futur de l'indicatif, mais que signifie ce changement ? Il ne nous avance pas plus ! - « faire l'objet à la fin de sa peine d'un réexamen de sa situation en vue d'une éventuelle rétention de sûreté. »

Sans revenir sur une démonstration détaillée - elle risquerait de fatiguer mon auditoire - rappelons que c'est cette exigence qui semble encourager certains à considérer que ce texte n'est pas à l'abri d'une critique de rétroactivité ; Mme Nicole Borvo Cohen-Seat l'a encore rappelé à l'instant.

Je continue à penser que cette critique est totalement infondée et je maintiens - cela figurera dans le compte rendu de nos débats - que la cause de la décision de rétention réside dans le fait que les personnes concernées présentent un état de particulière dangerosité, constatée hic et nunc par une commission pluridisciplinaire. Cette commission se réunit non pas pour se prononcer sur des faits antérieurs, mais pour apprécier la situation présente de ces personnes. Ce n'est pas un fait, mais un état qui justifie la mise en rétention !

Encore une fois, la cause de la rétention est la constatation de cet état dangereux même si, bien sûr, s'y ajoute l'exigence d'une condamnation initiale prévoyant un tel examen. Mais il s'agit d'une condition préalable et non pas de la cause de la mise en rétention. La décision de mise en rétention résultant de l'appréciation portée par la commission, cette décision sera nécessairement postérieure au vote de la loi.

D'ailleurs, tout ceux qui ont évoqué la rétroactivité ont agité un épouvantail, mais sans démontrer qu'elle était clairement établie. On se contente de laisser planer la menace !

Les choses iraient encore mieux si l'on supprimait cet alinéa 4 et, par voie de conséquence, l'article 12 qui s'efforce laborieusement - mais avec un talent remarquable - de surmonter la difficulté au prix d'une rédaction dont le byzantinisme - Byzance n'est pas sans charme ! - l'emporte à l'évidence sur la clarté et la sobriété latines auxquelles j'ai la faiblesse de rester attaché. Sans doute suis-je de la vieille école !

On a bien voulu m'indiquer que la présence de cet alinéa s'expliquait par le souci de tenir compte des dispositions de l'article 5 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme qui stipule : « nul ne peut être privé de sa liberté », sauf dans un certain nombre de cas énumérés par ce texte, le premier correspondant à l'hypothèse de « la condamnation par un tribunal compétent ».

Puis-je faire observer que la rédaction même de cet alinéa la prive de toute portée et donc de véritable signification, puisque le fait de prévoir - même expressément - qu'un événement « pourra » se produire - si vous sortez dans la rue, vous « pourrez être écrasé », mais vous ne le serez peut-être pas ! - est totalement inopérant et relève de l'ornement mais non de la norme. Autant je suis amateur du baroque dans les beaux-arts, autant j'estime qu'il vaut mieux l'éviter en matière de législation !

Dès lors, une telle disposition ne saurait jouer un rôle dans l'appréciation de la rétroactivité. En outre, une lecture plus attentive du texte de la convention permet de soulever deux objections.

Premièrement, la « condamnation » mentionnée par la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme pourrait aussi bien être la décision de la « juridiction » - car, grâce à notre rapporteur, la décision de mise en rétention est bien une décision juridictionnelle et, donc, une « condamnation ».

Sans doute, cette décision ne sera-t-elle pas une condamnation au sens pénal le plus courant du terme, auquel nous sommes habitués, mais il suffit de se référer à un dictionnaire pour constater que le terme de « condamnation » peut avoir une signification beaucoup plus générale. Toute décision imposant le respect d'une obligation peut constituer une condamnation, même si elle n'intervient pas en matière pénale. Vous trouverez cette acception dans divers dictionnaires, y compris ceux qui sont spécialisés en droit !

Deuxièmement et, me semble-t-il, plus justement encore, l'une des justifications de la privation de liberté prévue expressément par la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, cette fois sans aucun préalable de condamnation, est le cas d'aliénation. L'aliénation est un terme qui ne recouvre pas un état très précisément et scientifiquement défini même si, dans le langage courant, un aliéné est un fou, au sens sommaire - celui du xixe siècle - du terme. La psychiatrie a fait des progrès depuis cette époque ! La Cour européenne des droits de l'homme a déjà eu l'occasion de relever, dans sa jurisprudence, que le sens du terme « aliéné » ne cessait d'évoluer avec les progrès de la recherche psychiatrique. Or, la convention, dans l'hypothèse de l'aliénation, n'exige pas de condamnation préalable.

Ces considérations me renforcent dans la conviction que cet alinéa 4 de l'article 1er, comme l'ensemble de l'article 12, dont j'ai déjà fait l'éloge tout à l'heure, sont une surcharge fâcheuse dans ce texte. La poursuite du débat aurait pu nous permettre d'en faire l'économie, évitant ainsi de prêter le flanc à la critique de rétroactivité, si mal justifiée soit-elle.

Cela dit, j'espère me tromper, madame la ministre, mais je n'en suis pas sûr... Quoi qu'il en soit, je m'en tiendrai à l'absence de signification de cet alinéa 4, qui ne pourra donc servir de support à aucun recours sérieux.

Ces réserves que j'ai cru devoir formuler à nouveau ne m'empêcheront pas, non plus que la plupart de mes amis excellemment représentés ici, de voter un projet de loi dont nous croyons, pour l'essentiel, qu'il est suffisamment justifié par des réalités que nul ne peut ignorer et qui ne se résument pas à de simples « faits divers » !

Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...

La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion du texte élaboré par la commission mixte paritaire.

Je rappelle que, en application de l'article 42, alinéa 12, du règlement, lorsqu'il examine après l'Assemblée nationale le texte élaboré par la commission mixte paritaire, le Sénat se prononce par un seul vote sur l'ensemble du texte.

Je donne lecture du texte adopté par la commission mixte paritaire.

TITRE IER

DISPOSITIONS MODIFIANT LE CODE DE PROCÉDURE PÉNALE

CHAPITRE IER

DISPOSITIONS RELATIVES À LA RÉTENTION DE SÛRETÉ ET À LA SURVEILLANCE DE SÛRETÉ

I. -- Après l'article 706-53-12 du code de procédure pénale, il est inséré un chapitre III ainsi rédigé :

« CHAPITRE III

« De la rétention de sûreté et de la surveillance de sûreté

« Art. 706-53-13. -- À titre exceptionnel, les personnes dont il est établi, à l'issue d'un réexamen de leur situation intervenant à la fin de l'exécution de leur peine, qu'elles présentent une particulière dangerosité caractérisée par une probabilité très élevée de récidive parce qu'elles souffrent d'un trouble grave de la personnalité, peuvent faire l'objet à l'issue de cette peine d'une rétention de sûreté selon les modalités prévues par le présent chapitre, à la condition qu'elles aient été condamnées à une peine de réclusion criminelle d'une durée égale ou supérieure à quinze ans pour les crimes, commis sur une victime mineure, d'assassinat ou de meurtre, de torture ou actes de barbarie, de viol, d'enlèvement ou de séquestration.

« Il en est de même pour les crimes, commis sur une victime majeure, d'assassinat ou de meurtre aggravé, de torture ou actes de barbarie aggravés, de viol aggravé, d'enlèvement ou de séquestration aggravé, prévus par les articles 221-2, 221-3, 221-4, 222-2, 222-3, 222-4, 222-5, 222-6, 222-24, 222-25, 222-26, 224-2, 224-3 et 224-5-2 du code pénal.

« La rétention de sûreté ne peut toutefois être prononcée que si la cour d'assises a expressément prévu dans sa décision de condamnation que la personne pourra faire l'objet à la fin de sa peine d'un réexamen de sa situation en vue d'une éventuelle rétention de sûreté.

« La rétention de sûreté consiste dans le placement de la personne intéressée en centre socio-médico-judiciaire de sûreté dans lequel lui est proposée, de façon permanente, une prise en charge médicale, sociale et psychologique destinée à permettre la fin de cette mesure.

« Art. 706-53-14. -- La situation des personnes mentionnées à l'article 706-53-13 est examinée, au moins un an avant la date prévue pour leur libération, par la commission pluridisciplinaire des mesures de sûreté prévue par l'article 763-10, afin d'évaluer leur dangerosité.

« À cette fin, la commission demande le placement de la personne, pour une durée d'au moins six semaines, dans un service spécialisé chargé de l'observation des personnes détenues aux fins d'une évaluation pluridisciplinaire de dangerosité assortie d'une expertise médicale réalisée par deux experts.

« Si la commission conclut à la particulière dangerosité du condamné, elle peut proposer, par un avis motivé, que celui-ci fasse l'objet d'une rétention de sûreté dans le cas où :

« 1° Les obligations résultant de l'inscription dans le fichier judiciaire national automatisé des auteurs d'infractions sexuelles ou violentes, ainsi que les obligations résultant d'une injonction de soins ou d'un placement sous surveillance électronique mobile, susceptibles d'être prononcés dans le cadre d'un suivi socio-judiciaire ou d'une surveillance judiciaire, apparaissent insuffisantes pour prévenir la commission des crimes mentionnés à l'article 706-53-13 ;

« 2° Et si cette rétention constitue ainsi l'unique moyen de prévenir la commission, dont la probabilité est très élevée, de ces infractions.

« Si la commission estime que les conditions de la rétention de sûreté ne sont pas remplies mais que le condamné paraît néanmoins dangereux, elle renvoie le dossier au juge de l'application des peines pour qu'il apprécie l'éventualité d'un placement sous surveillance judiciaire.

« Art. 706-53-15. -- La décision de rétention de sûreté est prise par la juridiction régionale de la rétention de sûreté territorialement compétente. Cette juridiction est composée d'un président de chambre et de deux conseillers de la cour d'appel, désignés par le premier président de cette cour pour une durée de trois ans.

« Cette juridiction est saisie à cette fin par le procureur général, sur proposition de la commission pluridisciplinaire des mesures de sûreté prévue par l'article 763-10, au moins trois mois avant la date prévue pour la libération du condamné. Elle statue après un débat contradictoire et, si le condamné le demande, public, au cours duquel le condamné est assisté par un avocat choisi ou commis d'office. La contre-expertise sollicitée par le condamné est de droit.

« La décision de rétention de sûreté doit être spécialement motivée au regard des dispositions de l'article 706-53-14.

« Cette décision est exécutoire immédiatement à l'issue de la peine du condamné.

« Elle peut faire l'objet d'un recours devant la Juridiction nationale de la rétention de sûreté, composée de trois conseillers à la Cour de cassation désignés pour une durée de trois ans par le premier président de cette cour.

« La juridiction nationale statue par une décision motivée, susceptible d'un pourvoi en cassation.

« Art. 706-53-16. -- La décision de rétention de sûreté est valable pour une durée d'un an.

« La rétention de sûreté peut être renouvelée, après avis favorable de la commission pluridisciplinaire des mesures de sûreté, selon les modalités prévues par l'article 706-53-15 et pour la même durée, dès lors que les conditions prévues par l'article 706-53-14 sont toujours remplies.

« Art. 706-53-17. -- Supprimé

« Art. 706-53-18. -- Après un délai de trois mois à compter de la décision définitive de rétention de sûreté, la personne placée en rétention de sûreté peut demander à la juridiction régionale de la rétention de sûreté qu'il soit mis fin à cette mesure. Il est mis fin d'office à la rétention si cette juridiction n'a pas statué dans un délai de trois mois à compter de la réception de la demande. En cas de rejet de la demande, aucune autre demande ne peut être déposée avant l'expiration d'un délai de trois mois.

« La décision de cette juridiction peut faire l'objet des recours prévus à l'article 706-53-15.

« Art. 706-53-19. -- La juridiction régionale de la rétention de sûreté ordonne d'office qu'il soit immédiatement mis fin à la rétention de sûreté dès lors que les conditions prévues par l'article 706-53-14 ne sont plus remplies.

« Art. 706-53-20. -- Si la rétention de sûreté n'est pas prolongée ou s'il y est mis fin en application des articles 706-53-18 ou 706-53-19 et si la personne présente des risques de commettre les infractions mentionnées à l'article 706-53-13, la juridiction régionale de la rétention de sûreté peut, par la même décision et après débat contradictoire au cours duquel la personne est assistée par un avocat choisi ou commis d'office, placer celle-ci sous surveillance de sûreté pendant une durée d'un an. La surveillance de sûreté comprend des obligations identiques à celles prévues dans le cadre de la surveillance judiciaire mentionnée à l'article 723-30, et en particulier une injonction de soins prévue par les articles L. 3711-1 à L. 3711-5 du code de la santé publique, et le placement sous surveillance électronique mobile dans les conditions prévues par les articles 763-12 et 763-13 du présent code. Le placement sous surveillance de sûreté peut faire l'objet des recours prévus à l'article 706-53-15 du même code.

« À l'issue de ce délai, la surveillance de sûreté peut être renouvelée dans les mêmes conditions et pour la même durée.

« Si la méconnaissance par la personne des obligations qui lui sont imposées fait apparaître que celle-ci présente à nouveau une particulière dangerosité caractérisée par une probabilité très élevée de commettre à nouveau l'une des infractions mentionnées à l'article 706-53-13, le président de la juridiction régionale peut ordonner en urgence son placement provisoire dans un centre socio-médico-judiciaire de sûreté. Ce placement doit être confirmé dans un délai maximal de trois mois par la juridiction régionale statuant conformément à l'article 706-53-15, après avis favorable de la commission pluridisciplinaire des mesures de sûreté, à défaut de quoi il est mis fin d'office à la rétention. La décision de confirmation peut faire l'objet des recours prévus par l'article 706-53-15.

« Art. 706-53-21. -- Les dispositions du présent chapitre ne sont pas applicables à la personne qui bénéficie d'une libération conditionnelle, sauf si cette mesure a fait l'objet d'une révocation.

« Lorsque la rétention de sûreté est ordonnée à l'égard d'une personne ayant été condamnée à un suivi socio-judiciaire, celui-ci s'applique, pour la durée fixée par la décision de condamnation, à compter du jour où la rétention prend fin.

« Art. 706-53-22. -- Un décret en Conseil d'État précise les conditions et les modalités d'application du présent chapitre.

« Ce décret précise les conditions dans lesquelles s'exercent les droits des personnes retenues dans un centre socio-médico-judiciaire de sûreté, y compris en matière d'emploi, d'éducation et de formation, de visites, de correspondances, d'exercice du culte et de permissions de sortie sous escorte ou sous surveillance électronique mobile. Il ne peut apporter à l'exercice de ces droits que les restrictions strictement nécessaires aux exigences de l'ordre public.

« La liste des cours d'appel dans lesquelles siègent les juridictions régionales prévues au premier alinéa de l'article 706-53-15 et le ressort de leur compétence territoriale sont fixés par arrêté du garde des sceaux. »

I bis. -- L'article 362 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Dans les cas prévus par l'article 706-53-13, elle délibère aussi pour déterminer s'il y a lieu de se prononcer sur le réexamen de la situation du condamné avant l'exécution de la totalité de sa peine en vue d'une éventuelle rétention de sûreté conformément à l'article 706-53-14. »

I ter. -- Avant l'article 717-1 du même code, il est inséré un article 717-1 A ainsi rédigé :

« Art. 717- 1 A. -- Dans l'année qui suit sa condamnation définitive, la personne condamnée à une peine de réclusion criminelle d'une durée égale ou supérieure à quinze ans pour l'une des infractions visées à l'article 706-53-13 est placée pour une durée d'au moins six semaines dans un service spécialisé permettant de déterminer les modalités de la prise en charge sociale et sanitaire au cours de l'exécution de sa peine. Au vu de cette évaluation, le juge de l'application des peines définit un parcours d'exécution de la peine individualisé. Si la personne souffre de troubles psychiatriques, sur indication médicale, elle fait l'objet d'une prise en charge adaptée à ses besoins, le cas échéant en hospitalisation. »

I quater. -- L'article 712-22 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Ce décret précise les conditions dans lesquelles l'expertise prévue par l'article 712-21 peut ne pas être ordonnée, avec l'accord du procureur de la République, soit en raison de l'existence dans le dossier du condamné d'une précédente expertise, soit, pour les personnes condamnées pour des infractions dont il fixe la liste, en cas de permission de sortir ou en raison de la personnalité de l'intéressé. »

II. -- L'article 717-1 du même code est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« Deux ans avant la date prévue pour la libération d'un condamné susceptible de relever des dispositions de l'article 706-53-13, celui-ci est convoqué par le juge de l'application des peines auprès duquel il justifie des suites données au suivi médical et psychologique adapté qui a pu lui être proposé en application des deuxième et troisième alinéas du présent article. Au vu de ce bilan, le juge de l'application des peines lui propose, le cas échéant, de suivre un traitement dans un établissement pénitentiaire spécialisé.

« Les agents et collaborateurs du service public pénitentiaire transmettent aux personnels de santé chargés de dispenser des soins aux détenus les informations utiles à la mise en oeuvre des mesures de protection des personnes. »

III. -- L'article 723-37 du même code devient l'article 723-39 et, après l'article 723-36 du même code, il est rétabli un article 723-37 et inséré un article 723-38 ainsi rédigés :

« Art. 723-37. -- Lorsque le placement sous surveillance judiciaire a été prononcé à l'encontre d'une personne condamnée à une réclusion criminelle d'une durée égale ou supérieure à quinze ans pour l'une des infractions visées à l'article 706-53-13, la juridiction régionale mentionnée à l'article 706-53-15 peut, selon les modalités prévues par cet article, décider de prolonger tout ou partie des obligations auxquelles est astreinte la personne, au-delà de la limite prévue à l'article 723-29, en la plaçant sous surveillance de sûreté pour une durée d'un an.

« La juridiction régionale de la rétention de sûreté est saisie par le juge de l'application des peines ou le procureur de la République six mois avant la fin de la mesure.

« Le placement sous surveillance de sûreté ne peut être ordonné, après expertise médicale constatant la persistance de la dangerosité, que dans le cas où :

« 1° Les obligations résultant de l'inscription dans le fichier judiciaire national automatisé des auteurs d'infractions sexuelles ou violentes apparaissent insuffisantes pour prévenir la commission des crimes mentionnés à l'article 706-53-13 ;

« 2° Et si cette mesure constitue l'unique moyen de prévenir la commission, dont la probabilité est très élevée, de ces infractions.

« La surveillance de sûreté peut être prolongée selon les mêmes modalités et pour la même durée si les conditions prévues par le présent article demeurent remplies.

« Les dispositions du dernier alinéa de l'article 706-53-20 sont applicables.

« Art. 723-38. -- Lorsque le placement sous surveillance électronique mobile a été prononcé dans le cadre d'une surveillance judiciaire à l'encontre d'une personne condamnée à une réclusion criminelle d'une durée égale ou supérieure à quinze ans pour l'une des infractions visées à l'article 706-53-13, il peut être renouvelé tant que la personne fait l'objet d'une surveillance judiciaire ou d'une surveillance de sûreté. »

IV. -- L'article 763-8 du même code est ainsi rétabli :

« Art. 763-8. -- Lorsqu'un suivi socio-judiciaire a été prononcé à l'encontre d'une personne condamnée à une réclusion criminelle d'une durée égale ou supérieure à quinze ans pour l'une des infractions visées à l'article 706-53-13, la juridiction régionale de la rétention de sûreté peut, selon les modalités prévues par l'article 706-53-15, décider de prolonger tout ou partie des obligations auxquelles est astreinte la personne, au-delà de la durée prononcée par la juridiction de jugement et des limites prévues à l'article 131-36-1 du code pénal, en la plaçant sous surveillance de sûreté pour une durée d'un an.

« Les dispositions des deuxième à cinquième alinéas de l'article 723-37 du présent code sont applicables, ainsi que celles de l'article 723-38. »

CHAPITRE II

DISPOSITIONS RELATIVES AUX RÉDUCTIONS DE PEINES

CHAPITRE III

DISPOSITIONS APPLICABLES EN CAS D'IRRESPONSABILITÉ PÉNALE EN RAISON D'UN TROUBLE MENTAL

Après l'article 706-118 du code de procédure pénale, il est inséré un titre XXVIII ainsi rédigé :

« TITRE XXVIII

« DE LA PROCÉDURE ET DES DÉCISIONS D'IRRESPONSABILITÉ PÉNALE POUR CAUSE DE TROUBLE MENTAL

« CHAPITRE I ER

« Dispositions applicables devant le juge d'instruction et la chambre de l'instruction

« Art. 706-119. -- Si le juge d'instruction estime, lorsque son information lui paraît terminée, qu'il est susceptible d'appliquer le premier alinéa de l'article 122-1 du code pénal relatif à l'irresponsabilité pénale d'une personne en raison d'un trouble mental, il en informe le procureur de la République lorsqu'il lui communique le dossier ainsi que les parties lorsqu'il les avise, en application du premier alinéa de l'article 175 du présent code.

« Le procureur de la République, dans ses réquisitions, et les parties, dans leurs observations, indiquent s'ils demandent la saisine de la chambre de l'instruction afin que celle-ci statue sur l'application du premier alinéa de l'article 122-1 du code pénal conformément aux articles 706-122 à 706-127 du présent code.

« Art. 706-120. -- Lorsqu'au moment du règlement de son information, le juge d'instruction estime, après avoir constaté qu'il existe contre la personne mise en examen des charges suffisantes d'avoir commis les faits reprochés, qu'il y a des raisons plausibles d'appliquer le premier alinéa de l'article 122-1 du code pénal, il ordonne, si le procureur de la République ou une partie en a formulé la demande, que le dossier de la procédure soit transmis par le procureur de la République au procureur général aux fins de saisine de la chambre de l'instruction. Il peut aussi ordonner d'office cette transmission.

« Dans les autres cas, il rend une ordonnance d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental qui précise qu'il existe des charges suffisantes établissant que l'intéressé a commis les faits qui lui sont reprochés.

« Art. 706-121. -- L'ordonnance d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental met fin à la détention provisoire ou au contrôle judiciaire.

« L'ordonnance de transmission de pièces rendue en application de l'article 706-120 ne met pas fin à la détention provisoire ou au contrôle judiciaire, qui se poursuit jusqu'à l'audience de la chambre de l'instruction, sans préjudice de la possibilité pour le juge d'instruction, par ordonnance distincte, d'ordonner la mise en liberté ou la levée du contrôle judiciaire. S'il n'a pas été mis fin à la détention provisoire, la chambre de l'instruction doit statuer dans un délai de six mois en matière criminelle ou quatre mois en matière correctionnelle à compter de la date de l'ordonnance de transmission de pièces, à défaut de quoi la personne mise en examen est remise en liberté si elle n'est pas détenue pour une autre cause.

« Art. 706-122. -- Lorsque la chambre de l'instruction est saisie en application de l'article 706-120, son président ordonne, soit d'office, soit à la demande de la partie civile, du ministère public ou de la personne mise en examen, la comparution personnelle de cette dernière si son état le permet. Si celle-ci n'est pas assistée d'un avocat, le bâtonnier en désigne un d'office à la demande du président de la juridiction. Cet avocat représente la personne même si celle-ci ne peut comparaître.

« Les débats se déroulent et l'arrêt est rendu en audience publique, hors les cas de huis clos prévus par l'article 306.

« Le président procède à l'interrogatoire de la personne mise en examen, si elle est présente, conformément à l'article 442.

« Les experts ayant examiné la personne mise en examen doivent être entendus par la chambre de l'instruction, conformément à l'article 168.

« Sur décision de son président, la juridiction peut également entendre au cours des débats, conformément aux articles 436 à 457, les témoins cités par les parties ou le ministère public si leur audition est nécessaire pour établir s'il existe des charges suffisantes contre la personne d'avoir commis les faits qui lui sont reprochés et déterminer si le premier alinéa de l'article 122-1 du code pénal est applicable.

« Le procureur général, l'avocat de la personne mise en examen et l'avocat de la partie civile peuvent poser des questions à la personne mise en examen, à la partie civile, aux témoins et aux experts, conformément à l'article 442-1 du présent code.

« La personne mise en examen, si elle est présente, et la partie civile peuvent également poser des questions par l'intermédiaire du président.

« Une fois l'instruction à l'audience terminée, l'avocat de la partie civile est entendu et le ministère public prend ses réquisitions.

« La personne mise en examen, si elle est présente, et son avocat présentent leurs observations.

« La réplique est permise à la partie civile et au ministère public, mais la personne mise en examen, si elle est présente, et son avocat auront la parole les derniers.

« Art. 706-123. -- Si elle estime qu'il n'existe pas de charges suffisantes contre la personne mise en examen d'avoir commis les faits qui lui sont reprochés, la chambre de l'instruction déclare qu'il n'y a lieu à suivre.

« Art. 706-124. -- Si elle estime qu'il existe des charges suffisantes contre la personne mise en examen d'avoir commis les faits qui lui sont reprochés et que le premier alinéa de l'article 122-1 du code pénal n'est pas applicable, la chambre de l'instruction ordonne le renvoi de la personne devant la juridiction de jugement compétente.

« Art. 706-125. -- Dans les autres cas, la chambre de l'instruction rend un arrêt de déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental par lequel :

« 1° Elle déclare qu'il existe des charges suffisantes contre la personne d'avoir commis les faits qui lui sont reprochés ;

« 2° Elle déclare la personne irresponsable pénalement en raison d'un trouble psychique ou neuropsychique ayant aboli son discernement ou le contrôle de ses actes au moment des faits ;

« 3° Si la partie civile le demande, elle renvoie l'affaire devant le tribunal correctionnel compétent pour qu'il se prononce sur la responsabilité civile de la personne, conformément à l'article 489-2 du code civil, et statue sur les demandes de dommages et intérêts ;

« 4° Elle prononce, s'il y a lieu, une ou plusieurs des mesures de sûreté prévues au chapitre III du présent titre.

« Art. 706-126. -- L'arrêt de déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental met fin à la détention provisoire ou au contrôle judiciaire.

« Il peut faire l'objet d'un pourvoi en cassation.

« Art. 706-127. -- Les articles 211 à 218 sont applicables aux décisions prévues aux articles 706-123 à 706-125.

« Art. 706-128. -- Les articles 706-122 à 706-127 sont applicables devant la chambre de l'instruction en cas d'appel d'une ordonnance d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental ou en cas d'appel d'une ordonnance de renvoi lorsque cet appel est formé par une personne mise en examen qui invoque l'application du premier alinéa de l'article 122-1 du code pénal.

« CHAPITRE II

« Dispositions applicables devant le tribunal correctionnel ou la cour d'assises

« Section 1

« Dispositions applicables devant la cour d'assises

« Art. 706-129. -- Lorsqu'en application des articles 349-1 et 361-1 la cour d'assises a, au cours du délibéré, répondu positivement à la première question relative à la commission des faits et positivement à la seconde question portant sur l'application du premier alinéa de l'article 122-1 du code pénal, elle déclare l'irresponsabilité pénale de l'accusé pour cause de trouble mental.

« Art. 706-130. -- Lorsque la cour d'assises rentre dans la salle d'audience en application de l'article 366, le président prononce un arrêt portant déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental.

« Cet arrêt met fin à la détention provisoire ou au contrôle judiciaire.

« Art. 706-131. -- En application de l'article 371 du présent code et conformément à l'article 489-2 du code civil, la cour, sans l'assistance du jury, statue alors sur les demandes de dommages et intérêts formées par la partie civile.

« Elle prononce s'il y a lieu une ou plusieurs des mesures de sûreté prévues au chapitre III du présent titre.

« Art. 706-132. -- Le procureur général peut faire appel des arrêts portant déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental. La cour d'assises statuant en appel est alors désignée conformément aux articles 380-14 et 380-15.

« L'accusé et la partie civile peuvent faire appel de la décision sur l'action civile. L'appel est alors porté devant la chambre des appels correctionnels, conformément à l'article 380-5.

« Section 2

« Dispositions applicables devant le tribunal correctionnel

« Art. 706-133. -- S'il estime que les dispositions du premier alinéa de l'article 122-1 du code pénal sont applicables, le tribunal correctionnel rend un jugement de déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental par lequel :

« 1° Il déclare que la personne a commis les faits qui lui étaient reprochés ;

« 2° Il déclare la personne irresponsable pénalement en raison d'un trouble psychique ou neuropsychique ayant aboli son discernement ou le contrôle de ses actes au moment des faits ;

« 3° Il se prononce sur la responsabilité civile de la personne auteur des faits, conformément à l'article 489-2 du code civil, et statue, s'il y a lieu, sur les demandes de dommages et intérêts formées par la partie civile ;

« 4° Il prononce, s'il y a lieu, une ou plusieurs des mesures de sûreté prévues au chapitre III du présent titre.

« Le jugement de déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental met fin à la détention provisoire ou au contrôle judiciaire.

« Art. 706-134. -- Les dispositions de l'article 706-133 sont applicables devant la chambre des appels correctionnels.

« Elles sont également applicables, à l'exception du 4°, devant le tribunal de police ou la juridiction de proximité.

« CHAPITRE III

« Mesures de sûreté pouvant être ordonnées en cas de déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental

« Art. 706- 135 A. -- Sans préjudice de l'application des articles L. 3213-1 et L. 3213-7 du code de la santé publique, lorsque la chambre de l'instruction ou une juridiction de jugement prononce un arrêt ou un jugement de déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental, elle peut ordonner, par décision motivée, l'hospitalisation d'office de la personne dans un établissement mentionné à l'article L. 3222-1 du même code s'il est établi par une expertise psychiatrique figurant au dossier de la procédure que les troubles mentaux de l'intéressé nécessitent des soins et compromettent la sûreté des personnes ou portent atteinte, de façon grave, à l'ordre public. Le représentant de l'État dans le département ou, à Paris, le préfet de police est immédiatement avisé de cette décision. Le régime de cette hospitalisation est celui prévu pour les hospitalisations ordonnées en application de l'article L. 3213-1 du même code, dont le deuxième alinéa est applicable. L'article L. 3213-8 du même code est également applicable.

« Art. 706-135. -- Lorsque la chambre de l'instruction ou une juridiction de jugement prononce un arrêt ou un jugement de déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental, elle peut ordonner à l'encontre de la personne les mesures de sûreté suivantes, pendant une durée qu'elle fixe et qui ne peut excéder dix ans en matière correctionnelle et vingt ans si les faits commis constituent un crime ou un délit puni de dix ans d'emprisonnement :

« 1° Interdiction d'entrer en relation avec la victime de l'infraction ou certaines personnes ou catégories de personnes, et notamment les mineurs, spécialement désignées ;

« 2° Interdiction de paraître dans tout lieu spécialement désigné ;

« 3° Interdiction de détenir ou de porter une arme ;

« 4° Interdiction d'exercer une activité professionnelle ou bénévole spécialement désignée, dans l'exercice de laquelle ou à l'occasion de laquelle l'infraction a été commise ou impliquant un contact habituel avec les mineurs, sans faire préalablement l'objet d'un examen psychiatrique déclarant la personne apte à exercer cette activité ;

« 5° Suspension du permis de conduire ;

« 6° Annulation du permis de conduire avec interdiction de solliciter la délivrance d'un nouveau permis.

« Ces interdictions, qui ne peuvent être prononcées qu'après une expertise psychiatrique, ne doivent pas constituer un obstacle aux soins dont la personne est susceptible de faire l'objet.

« Si la personne est hospitalisée en application des articles L. 3213-1 et L. 3213-7 du code de la santé publique, les interdictions dont elle fait l'objet sont applicables pendant la durée de l'hospitalisation et se poursuivent après la levée de cette hospitalisation, pendant la durée fixée par la décision.

« Art. 706-136. -- La personne qui fait l'objet d'une interdiction prononcée en application de l'article 706-135 peut demander au juge des libertés et de la détention du lieu de la situation de l'établissement hospitalier ou de son domicile d'ordonner sa modification ou sa levée. Celui-ci statue en chambre du conseil sur les conclusions du ministère public, le demandeur ou son avocat entendus ou dûment convoqués. Il peut solliciter l'avis préalable de la victime. La levée de la mesure ne peut être décidée qu'au vu du résultat d'une expertise psychiatrique. En cas de rejet de la demande, aucune demande ne peut être déposée avant l'expiration d'un délai de six mois.

« Art. 706-137. -- Lorsque l'interdiction prévue au 1° de l'article 706-135 est prononcée, la partie civile peut demander à être informée par le procureur de la République de la levée de l'hospitalisation d'office dont cette personne aura pu faire l'objet en application des articles L. 3213-1 et L. 3213-7 du code de la santé publique.

« La partie civile peut, à tout moment, indiquer au procureur de la République qu'elle renonce à cette demande.

« Art. 706-138. -- La méconnaissance par la personne qui en a fait l'objet des interdictions prévues par l'article 706-135 est punie, sous réserve des dispositions du premier alinéa de l'article 122-1 du code pénal, de deux ans d'emprisonnement et 30 000 € d'amende.

« Art. 706-139. -- Un décret précise les modalités d'application du présent titre. »

TITRE II

DISPOSITIONS MODIFIANT LE CODE DE LA SANTÉ PUBLIQUE

Le livre VII de la troisième partie du code de la santé publique est ainsi modifié :

1° L'article L. 3711-1 est ainsi modifié :

a) Le premier alinéa est ainsi rédigé :

« Pour la mise en oeuvre de l'injonction de soins prévue par les articles 131-36-4 et 132-45-1 du code pénal et les articles 723-30 et 731-1 du code de procédure pénale, le juge de l'application des peines désigne, sur une liste de psychiatres ou de médecins ayant suivi une formation appropriée établie par le procureur de la République, un médecin coordonnateur qui est chargé : » ;

a bis) Dans le 4°, les mots : « est arrivé à son terme, » sont remplacés par les mots : «, le sursis avec mise à l'épreuve ou la surveillance judiciaire est arrivé à son terme, ou le condamné qui a bénéficié d'une libération conditionnelle, » ;

b) Il est ajouté un 5° ainsi rédigé :

« 5° De coopérer à la réalisation d'évaluations périodiques du dispositif de l'injonction de soins ainsi qu'à des actions de formation et d'étude. » ;

c) Supprimé ;

2° Après le premier alinéa de l'article L. 3711-2, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Sans que leur soient opposables les dispositions de l'article 226-13 du code pénal, les praticiens chargés de dispenser des soins en milieu pénitentiaire communiquent les informations médicales qu'ils détiennent sur le condamné au médecin coordonnateur afin qu'il les transmette au médecin traitant. » ;

3° Le dernier alinéa de l'article L. 3711-3 est ainsi rédigé :

« Le médecin traitant est habilité à prescrire au condamné, avec le consentement écrit et renouvelé, au moins une fois par an, de ce dernier, un traitement utilisant des médicaments qui entraînent une diminution de la libido. » ;

4° Après les mots : « psychologue traitant », la fin du premier alinéa de l'article L. 3711-4-1 est ainsi rédigée : « ayant exercé pendant au moins cinq ans. »

TITRE III

DISPOSITIONS DIVERSES

Le dernier alinéa de l'article 729 du code de procédure pénale est complété par une phrase ainsi rédigée :

« La personne condamnée à la réclusion criminelle à perpétuité ne peut bénéficier d'une libération conditionnelle qu'après avis favorable de la commission pluridisciplinaire des mesures de sûreté dans les conditions prévues par le deuxième alinéa de l'article 706-53-14. »

I. -- Les personnes exécutant, à la date du 1er septembre 2008, une peine de réclusion criminelle d'une durée égale ou supérieure à quinze ans à la suite, soit de plusieurs condamnations, dont la dernière à une telle peine, pour les crimes mentionnés à l'article 706-53-13 du code de procédure pénale, soit d'une condamnation unique à une telle peine pour plusieurs de ces crimes commis sur des victimes différentes, peuvent être soumises, dans le cadre d'une surveillance judiciaire, d'un suivi socio-judiciaire ou d'une surveillance de sûreté, à une obligation d'assignation à domicile sous le régime du placement sous surveillance électronique mobile.

À titre exceptionnel, si cette obligation apparaît insuffisante pour prévenir la récidive, ces personnes peuvent être soumises à un placement en rétention de sûreté selon la procédure prévue par les articles 706-53-14 et suivants de ce code.

Dans ce cas, la mise en oeuvre de la procédure tendant au placement en rétention de sûreté doit être précédée d'une décision de la chambre de l'instruction avertissant la personne condamnée qu'elle pourra faire l'objet d'un réexamen de sa situation dans les conditions prévues par les quatre alinéas ci-après.

Le procureur général saisit, après avis du juge de l'application des peines du lieu de détention de la personne condamnée, la chambre de l'instruction de la cour d'appel dans le ressort de laquelle se trouve la cour d'assises ayant prononcé la condamnation.

La chambre de l'instruction statue en chambre du conseil après avoir fait comparaître la personne condamnée assistée par un avocat choisi ou commis d'office.

Si elle constate qu'il résulte de la ou des condamnations prononcées une particulière dangerosité de cette personne, caractérisée par une probabilité très élevée de récidive parce qu'elle souffre d'un trouble grave de la personnalité, susceptible de justifier, à l'issue de sa peine, un placement en rétention de sûreté, elle avertit celle-ci qu'elle pourra faire l'objet d'un examen de dangerosité pouvant entraîner son placement en rétention de sûreté.

La rétention de sûreté peut ensuite être décidée suivant la procédure prévue aux articles 706-53-14 et 706-53-15 du même code nonobstant, le cas échéant, les délais prévus par ces dispositions.

II. -- Les I et I bis de l'article 1er sont applicables aux personnes faisant l'objet d'une condamnation prononcée après la publication de la présente loi pour des faits commis avant cette publication.

III. -- La surveillance de sûreté instaurée par les III et IV de l'article 1er est immédiatement applicable après la publication de la présente loi. Si la méconnaissance par la personne des obligations qui lui sont imposées fait apparaître que celle-ci présente à nouveau une particulière dangerosité caractérisée par la probabilité très élevée de commettre à nouveau l'une des infractions mentionnées à l'article 706-53-13 du code de procédure pénale, la personne peut être placée jusqu'au 1er septembre 2008, dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article 706-53-20 du même code, dans un établissement mentionné au premier alinéa de l'article L. 6141-5 du code de la santé publique.

IV. -- L'évaluation prévue par le I ter de l'article 1er est également applicable aux personnes condamnées avant la publication de la présente loi à une peine de réclusion criminelle d'une durée égale ou supérieure à quinze ans pour l'une des infractions visées à l'article 706-53-13 du code de procédure pénale.

V. -- L'article 12 A est immédiatement applicable aux personnes exécutant une peine de réclusion criminelle à perpétuité.

VI. -- L'article 2 est applicable aux personnes exécutant une peine privative de liberté à la date de publication de la présente loi.

Le code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° Après le 3° de l'article 723-30, il est inséré un 4° ainsi rédigé :

« 4° Si la personne a été condamnée à une peine de réclusion criminelle d'une durée égale ou supérieure à quinze ans pour l'un des crimes mentionnés à l'article 706-53-13 du présent code, obligation d'assignation à domicile, emportant pour l'intéressé l'interdiction de s'absenter de son domicile ou de tout autre lieu désigné par le juge en dehors des périodes fixées par celui-ci. Les périodes et les lieux sont fixés en tenant compte : de l'exercice d'une activité professionnelle par le condamné ; du fait qu'il suit un enseignement ou une formation, effectue un stage ou occupe un emploi temporaire en vue de son insertion sociale ; de sa participation à la vie de famille ; de la prescription d'un traitement médical. » ;

2° L'article 763-3 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Si la personne a été condamnée à une peine de réclusion criminelle d'une durée égale ou supérieure à quinze ans pour l'un des crimes mentionnés à l'article 706-53-13, le juge de l'application des peines peut également prononcer une obligation d'assignation à domicile prévue par le 4° de l'article 723-30. Les dispositions des deux premiers alinéas du présent article sont applicables. »

L'article 706-53-7 du code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° Dans le 3°, les mots : « pour l'examen des demandes d'agrément » sont remplacés par les mots : « pour les décisions administratives de recrutement, d'affectation, d'autorisation, d'agrément ou d'habilitation » ;

2° À la fin de l'avant-dernier alinéa, les mots : « demande d'agrément » sont remplacés par les mots : « décision administrative » ;

3° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Les maires, les présidents de conseil général et les présidents de conseil régional sont également destinataires, par l'intermédiaire des préfets, des informations contenues dans le fichier, pour les décisions administratives mentionnées au 3° concernant des activités ou professions impliquant un contact avec des mineurs ainsi que pour le contrôle de l'exercice de ces activités ou professions. »

La présente loi fera l'objet d'un nouvel examen d'ensemble par le Parlement dans un délai maximum de cinq ans après son entrée en vigueur.

I. -- Les articles 1er à 4, 6, 9, 11, 12 A, 12 bis A et 12 bis de la présente loi sont applicables dans les îles Wallis et Futuna, en Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie.

II. -- Supprimé

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Sur les articles du texte élaboré par la commission mixte paritaire, je ne suis saisi d'aucun amendement.

Quelqu'un demande-t-il la parole sur l'un de ces articles ?...

Le vote est réservé.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire, je donne la parole à M. Louis Mermaz, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Louis Mermaz

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, au moment de nous prononcer sur le projet de loi tel qu'il ressort des travaux de la commission mixte paritaire, je veux m'élever contre la méthode, pratiquée depuis le sommet de l'État jusqu'au Gouvernement, consistant à faire voter, une fois de plus, un texte dans la précipitation, en s'appuyant sur l'émotion légitime de l'opinion, lorsqu'un drame est survenu.

En abusant de la douleur des victimes, douleur qui est partagée sur toutes les travées de cet hémicycle, les promoteurs de ce projet de loi, loin de leur rendre justice et de leur apporter réparation, provoqueront une extrême confusion. Ce texte va, ô paradoxe ! détourner l'attention de la nécessaire punition du criminel.

On tente ainsi de cacher l'insuffisance des moyens pour assurer l'exécution de la peine, l'insuffisance des moyens pour apporter au délinquant, pendant la durée de sa détention et dès le début de celle-ci, un traitement médical et psychiatrique approprié chaque fois que cela s'avère nécessaire, l'insuffisance des moyens pour préparer le condamné à la réinsertion une fois la peine accomplie, sans oublier, à la sortie, de le suivre sur les plans médical et social.

Mais comment expliquer que, dans leur immense majorité, les acteurs du monde judiciaire soient violemment hostiles à ce projet de loi, y compris ceux d'entre eux qui se sont toujours montrés le plus sévères dans la répression des crimes sexuels ?

En effet, malgré toutes les circonlocutions dont on veut l'entourer et l'insertion de quelques dispositions retenues par la commission mixte paritaire sur l'initiative du Sénat, comme l'a exposé M. le rapporteur, ce texte instaure, dans des conditions aléatoires, la peine après la peine.

Il ouvre ainsi, comme en a fait la démonstration notre collègue Robert Badinter, une brèche dangereuse dans le droit pénal français, puisqu'il entraîne, avec la rétention de sûreté, la sanction de faits n'ayant pas été commis, cela au nom de la « dangerosité » du condamné, c'est-à-dire d'un profil psycho-criminologique toujours évalué par des experts, même si l'on veut ici mettre l'accent sur un encadrement juridictionnel.

Comme si ce manquement grave aux principes posés par la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ne suffisait pas, ce texte instaure en outre, qu'on le veuille ou non, la peine rétroactive. Quelques subterfuges de procédure visant uniquement à offrir une justification éventuelle au Conseil constitutionnel pour refuser de le censurer ne changent rien au fait que la rétroactivité de la peine est instituée, ce qui va à l'encontre de toute la tradition juridique de notre pays.

Ainsi, le présent projet de loi, né de l'émotion de l'opinion, renvoie en fait à la décision d'experts qui seront à leur tour soumis au même processus émotionnel, aux mêmes peurs que le public, alors que le diagnostic et le traitement des criminels réclament que l'on agisse avec maîtrise, discernement et, bien sûr, sévérité, en se donnant, encore une fois, des moyens efficaces de prévenir la récidive.

Nous voterons donc contre un texte néfaste. Voilà quelques années, le rapport issu des travaux de la commission d'enquête du Sénat sur les conditions de détention dans les établissements pénitentiaires en France avait été intitulé : « Une humiliation pour la République ». La situation dans nos prisons s'est, depuis, lourdement aggravée, avec l'empilement de lois de plus en plus répressives, sans que l'on s'attaque aux vraies causes de la délinquance. Il aurait mieux valu éviter d'infliger, avec ce projet de loi, une nouvelle humiliation à la République, dans une période où le pouvoir se comporte avec de plus en plus d'incohérence et de fébrilité, et où ses insuffisances commencent à se révéler aux yeux des Français.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Personne ne demande plus la parole ?...

Conformément à l'article 42, alinéa 12, du règlement, je mets aux voix l'ensemble du projet de loi dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire.

Le projet de loi est adopté définitivement.

Debut de section - Permalien
Rachida Dati, garde des sceaux

Mesdames, messieurs les sénateurs, en adoptant aujourd'hui ce texte, vous avez donné à notre pays les moyens de mieux protéger ses citoyens. Nous pourrons assurer une meilleure prise en charge des criminels particulièrement dangereux en fin de peine, et c'est là une avancée inestimable.

Ce progrès a été rendu possible grâce à l'engagement des parlementaires. La navette entre les deux assemblées a permis d'enrichir le texte initialement déposé par le Gouvernement. C'est tout à l'honneur du Parlement.

À ce moment, mes pensées vont aux familles de victimes et à leurs proches, en particulier à la famille du jeune Enis, que j'ai reçue, ainsi qu'à Mme et M. Schmitt, les parents d'Anne-Lorraine. Cette loi n'apaisera pas leur souffrance, cette loi ne permettra pas de rattraper le temps perdu, cette loi n'empêchera pas la commission de nouveaux crimes, ce serait illusoire de le croire, mais ce qui est certain, c'est que le Gouvernement et votre assemblée auront tout fait pour prévenir de nouveaux drames. C'est une question d'honneur et de responsabilité, et je suis extrêmement fière d'avoir présenté ce texte devant vous.

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Je rappelle que la commission des affaires culturelles a proposé des candidatures pour plusieurs organismes extraparlementaires. La présidence n'a reçu aucune opposition dans le délai d'une heure prévu par l'article 9 du règlement.

En conséquence, ces candidatures sont ratifiées et je proclame :

- MM. Jean-Léonce Dupont et Philippe Adnot respectivement membre titulaire et membre suppléant du Comité de suivi de la loi relative aux libertés et responsabilités des universités ;

- M. Ambroise Dupont membre de la Commission supérieure des sites, perspectives et paysages.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi relatif aux organismes génétiquement modifiés (urgence déclarée) (nos 149, 181).

Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus, au sein de l'article 2, aux amendements tendant à insérer des articles additionnels après l'article L. 531-4 du code de l'environnement.

J'informe le Sénat que notre collègue Jean-François Le Grand a retiré les amendements qu'il avait déposés sur ce projet de loi. Le dérouleur qui vient de vous être distribué en tient compte.

Murmures sur les travées du groupe socialiste.

Les articles L. 531-3, L. 531-4 et L. 531-5 du code de l'environnement sont remplacés par les dispositions suivantes :

« Art. L. 531-3. - La Haute autorité sur les organismes génétiquement modifiés a pour missions d'éclairer le Gouvernement sur toutes questions intéressant les organismes génétiquement modifiés et de formuler les avis en matière d'évaluation du risque pour l'environnement et la santé publique en cas d'utilisation confinée ou de dissémination volontaire des organismes génétiquement modifiés ainsi qu'en matière de surveillance prévue à l'article L. 534-1.

« En vue de l'accomplissement de ses missions, la Haute autorité :

« 1° Peut se saisir d'office ou à la demande de toute personne concernée de toute question intéressant son domaine de compétence et proposer toutes mesures de nature à préserver l'environnement et la santé publique en cas de risque grave ;

« 2° Élabore des méthodes d'évaluation des risques environnementaux et sanitaires conformément aux dispositions communautaires en vigueur ;

« 3° Procède à toutes expertises et analyses et fait procéder à toute étude qu'elle juge nécessaire ;

« 4° Rend publics ses avis et recommandations ;

« 5° Peut mener des actions d'information se rapportant à ses missions ;

« 6° Établit un rapport annuel d'activité adressé au Gouvernement et au Parlement. Ce rapport est rendu public.

« Art. L. 531-4. - La Haute autorité sur les organismes génétiquement modifiés est composée d'un comité scientifique et d'un comité économique, éthique et social. Le collège de la Haute autorité sur les organismes génétiquement modifiés est constitué de son président et des présidents des deux comités.

« Le président de la Haute autorité sur les organismes génétiquement modifiés et les présidents des comités, ainsi que les membres des comités sont nommés par décret du Premier ministre.

« En cas d'utilisation confinée, le collège transmet les avis du comité scientifique à l'autorité administrative.

« En cas de dissémination volontaire, le collège rend l'avis de la Haute autorité sur les organismes génétiquement modifiés sur le fondement des recommandations des deux comités. Cet avis comporte, outre une évaluation des risques, une évaluation des bénéfices.

« Art. L. 531-5. - Un décret en Conseil d'État précise les conditions d'application des articles L. 531-3 et L. 531-4, notamment la composition, les attributions ainsi que les règles de fonctionnement, de saisine et de déontologie de la Haute autorité sur les organismes génétiquement modifiés. »

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° 13 rectifié, présenté par M. Bizet, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Après le texte proposé par cet article pour l'article L. 531-4 du code de l'environnement, insérer un article ainsi rédigé :

« Art. L. 531-4-1. - Le comité scientifique est composé de personnalités désignées en raison de leur compétence scientifique et technique reconnue par leurs pairs, dans les domaines se rapportant au génie génétique, à la protection de la santé publique, aux sciences agronomiques, aux sciences appliquées à l'environnement, au droit, à l'économie et à la sociologie.

« Le comité de la société civile est composé de représentants d'associations, de représentants d'organisations professionnelles, d'un membre du Comité consultatif national d'éthique pour les sciences de la vie et de la santé, d'un député et d'un sénateur membres de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, et de représentants des associations de collectivités territoriales. »

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

Cet amendement vise à préciser la composition respective des deux comités constituant la Haute autorité sur les organismes génétiquement modifiés.

Le comité scientifique serait composé d'experts reconnus dans leur domaine, qu'il s'agisse de biotechniques ou de sciences « molles », à savoir l'économie, le droit et la sociologie.

Le comité de la société civile serait, pour sa part, composé de représentants d'associations ou d'organismes professionnels et comporterait un membre du Comité consultatif national d'éthique pour les sciences de la vie et de la santé, un député et un sénateur membres de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques.

Je propose d'associer également à ce second comité des représentants des collectivités territoriales, comme le suggérait notre collègue Le Grand au travers du sous-amendement qu'il a retiré. Je tiens à saluer cette idée, tout à fait pertinente à mon avis. Je crois qu'il revient au Sénat de la reprendre.

Une telle composition permettrait de lever la confusion entre deux principes de légitimité distincts : d'un côté, la légitimité scientifique des chercheurs, qu'il est d'usage de sélectionner par appel à candidatures ; de l'autre, la légitimité élective de représentants désignés par le vote.

Ce schéma s'inspire de la distinction proposée dans le rapport Kourilsky-Viney de 1999 entre deux cercles de nature différente pour une mise en oeuvre efficace du principe de précaution.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Le sous-amendement n° 239, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. - Au deuxième alinéa de l'amendement n° 13, après les mots :

se rapportant

insérer le mot :

notamment

II. - Au troisième alinéa du même amendement, après le mot :

composé

insérer le mot :

notamment

La parole est à Mme la secrétaire d'État, pour présenter ce sous-amendement et pour donner l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 13 rectifié.

Debut de section - Permalien
Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État chargée de l'écologie

Le Gouvernement trouve tout à fait légitime la volonté de la commission de préciser quelles seront les compétences et les qualités des membres des deux comités devant composer la Haute autorité. Cependant, il souhaiterait que cette liste ne soit pas limitative.

C'est la raison pour laquelle nous présentons ce sous-amendement, qui vise à introduire le mot « notamment » dans la rédaction proposée, ce qui permettrait de garantir que les différentes disciplines ou institutions citées par M. le rapporteur seront représentées au sein des comités sans exclure une extension éventuelle de cette énumération.

Sous réserve de l'adoption de ce sous-amendement, le Gouvernement émet un avis favorable sur l'amendement n° 13 rectifié.

Je profite de cette occasion pour souligner que nous sommes favorables à la proposition d'inclure, au sein du comité de la société civile, des représentants des associations de collectivités territoriales, proposition qui avait été formulée par M. Le Grand pour faire suite, si ma mémoire est bonne, à une suggestion de M. Pierre Laffitte. Cette initiative me semble tout à fait judicieuse.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement ?

Le sous-amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote sur l'amendement n° 13 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Nous ne sommes pas opposés par principe à cet amendement, mais dans la mesure où nous contestons l'architecture générale du texte, nous nous abstiendrons.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° 108, présenté par MM. Muller et Desessard et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :

I. - Après le texte proposé par cet article pour l'article L. 531-4 du code de l'environnement, insérer un article ainsi rédigé :

« Art. L. ... - Le Parlement vote le budget alloué à la Haute autorité. Il est notamment financé par la taxe prévue à l'article L. 535-4.

II. - Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - Les pertes de recettes pour l'État résultant du financement de la Haute autorité par la taxe prévue à l'article L. 535-4 du code de l'environnement sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Jacques Muller.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Muller

Nous estimons que, pour que la Haute autorité sur les organismes génétiquement modifiés puisse travailler dans de bonnes conditions, il convient de lui allouer un budget suffisant, qui doit être financé en partie par les pétitionnaires des autorisations via la taxe prévue dans la rédaction présentée à l'article 9 du projet de loi pour l'article L. 535-4 du code de l'environnement, et qui ne doit pas être plafonnée.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

Le principe d'universalité budgétaire commande de ne pas affecter la taxe créée par le projet de loi au financement du Haut conseil.

Surtout, il convient d'éviter que la taxe acquittée par les demandeurs d'autorisation ne serve de variable d'ajustement au fonctionnement du Haut conseil, ce qui reviendrait à décourager le dépôt de dossiers de demande d'autorisation.

Je reviendrai à plusieurs reprises dans le débat sur le point suivant : nous ne pouvons pas, d'un côté, afficher que le Gouvernement affecte 45 millions d'euros supplémentaires à la recherche et, d'un autre, pénaliser les porteurs et les créateurs de richesses au travers du dépôt d'autorisation !

L'avis est donc défavorable.

Debut de section - Permalien
Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État

Cet amendement pose un problème de principe. Le Haut conseil ne disposant pas de la personnalité juridique, son budget doit être voté dans le cadre du projet de loi de finances et ajusté en fonction de ses besoins réels.

L'avis du Gouvernement est donc défavorable.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° 14 rectifié, présenté par M. Bizet, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Avant le texte proposé par cet article pour l'article L. 531-5 du code de l'environnement, insérer un article ainsi rédigé :

« Art. L. ... - Afin de garantir l'indépendance et la dignité de leurs fonctions, et pendant la durée de celles-ci, les membres du Haut conseil des biotechnologies ne prennent, à titre personnel, aucune position publique sur des questions ayant fait ou susceptibles de faire l'objet d'une décision de la part du Haut conseil sans en avoir préalablement informé son président.

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

Cet amendement vise à assurer l'indépendance et la dignité de la fonction de membre du Haut conseil des biotechnologies.

Sans interdire aux membres du Haut conseil toute expression publique - ce qui peut se justifier dans le cadre du Conseil constitutionnel ou d'une autorité de régulation chargée d'un pouvoir décisionnel -, l'amendement tend à prévoir que les membres informent le président avant toute prise de parole publique. Cette disposition présente, en outre, l'avantage d'asseoir le rôle de coordination du président du Haut conseil, et permettra à cette structure de tenir un langage clair vis-à-vis de nos concitoyens.

Depuis trop longtemps, nous souffrons du fait que des propos cacophoniques sont tenus sur ce dossier. Il est important d'établir une hiérarchie, et de permettre au président du Haut conseil de s'exprimer très clairement.

Debut de section - Permalien
Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État

Les dispositions que vous proposez d'introduire dans la loi ont un caractère exorbitant du droit commun et ne sont appliquées qu'aux membres du Conseil constitutionnel. Par ailleurs, pour l'objet qui nous intéresse aujourd'hui, elles relèvent clairement du domaine réglementaire.

Certes, nous partageons le souci de la commission que les prises de position publique des membres du Haut conseil ne puissent pas nuire au crédit de cette instance ou à la portée de ses avis. Mais les mesurer que vous suggérez ne doivent pas être de nature législative ; elles peuvent relever du domaine réglementaire, ou figurer dans le règlement intérieur du Haut conseil. C'est la raison pour laquelle nous demandons le retrait de cet amendement, sinon, le Gouvernement émettra un avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Monsieur le rapporteur, maintenez-vous votre amendement ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

Je suis absolument désolé : s'il est vrai que le Conseil constitutionnel interdit à ses membres de prendre la parole, il est bien précisé dans l'amendement que les membres du Haut conseil ne peuvent pas s'exprimer, sauf s'ils en ont préalablement informé le président.

Nous introduisons donc un élément de souplesse qui n'existe pas dans les règles applicables aux membres du Conseil constitutionnel, et pour cause ! Les deux structures sont tout de même de dimension et d'autorité totalement différentes.

Par conséquent, je ne retirerai pas mon amendement. J'insiste, il faut pouvoir - enfin ! - s'exprimer clairement sur ce sujet dans notre pays.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

Il n'est pas tout de même dramatique de demander aux membres du Haut conseil qui veulent s'exprimer d'en référer préalablement au président !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Nous sommes favorables au fait que les membres du Haut conseil puissent, dans un souci de transparence, s'exprimer, par exemple pour expliquer leur position sur telle ou telle question.

Il semble que M. le rapporteur ne souhaite pas leur interdire de s'exprimer publiquement

M. Jean Bizet le confirme.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Mais alors, comme l'a souligné Mme la secrétaire d'État, ce type de disposition relèverait plutôt du règlement intérieur du Haut conseil. Est-il vraiment utile de l'inscrire dans la loi ?

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° 109, présenté par MM. Muller et Desessard et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :

Compléter le texte proposé par cet article pour l'article L. 531-5 du code de l'environnement par les mots :

et du Comité de biovigilance

La parole est à M. Jacques Muller.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Muller

C'est un amendement de cohérence avec des mesures que nous avons adoptées précédemment.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

Nous n'avons pas la même appréciation de la cohérence que M. Muller !

L'avis est donc défavorable.

Debut de section - Permalien
Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État

Il est également défavorable.

Je ne vois pas en quoi cet amendement permet une mise en cohérence avec des dispositions adoptées précédemment...

L'amendement n'est pas adopté.

L'article 2 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° 80, présenté par MM. Le Cam, Billout et Danglot, Mmes Didier, Terrade et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le rapport d'évaluation transmis par l'État à la Commission européenne, lors de demande d'autorisation, contient les lignes directrices énumérées à l'annexe VI de la directive 2001/18/CE et est accessible au public.

La parole est à M. Gérard Le Cam.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Le Cam

Avant de défendre cet amendement quelque peu technique, je voudrais exprimer mon étonnement après avoir entendu ce matin, sur les antennes, M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État, indiquer que la discussion au Sénat sur le texte relatif aux OGM se passait bien.

Je constate que le sénateur Jean-François Le Grand vient de jeter l'éponge

M Jean Desessard approuve.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Le Cam

À l'instant même, le groupe majoritaire vient de désavouer, une fois de plus, le Gouvernement.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Le Cam

Je vous en prie, monsieur le président de la commission.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

La parole est à M. le président de la commission, avec l'autorisation de l'orateur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Emorine

Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, le Sénat est une assemblée indépendante. Je n'ai pas le sentiment que le groupe UMP ait mis en route un rouleau compresseur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Emorine

Il se prononce en toute liberté. Il arrive, d'ailleurs, que certains de nos collègues ne votent pas les amendements du rapporteur : c'est l'expression de la démocratie.

Il y a eu d'autres rouleaux compresseurs à d'autres époques et dans d'autres pays, mais pas en France !

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Le Cam

L'annexe VI de la directive 2001/18/CE précise les lignes directrices concernant les rapports d'évaluation prévus aux articles 13, 17, 19 et 20 de ladite directive.

Ainsi, les rapports transmis par l'État à la commission devraient contenir cinq types d'informations : l'identification des caractéristiques de l'organisme récepteur qui sont pertinentes pour l'évaluation du ou des OGM concernés et l'identification de tout risque connu que la dissémination dans l'environnement de l'organisme récepteur non modifié comporte pour la santé humaine et l'environnement ; une description du résultat de la modification génétique dans l'organisme modifié ; une évaluation indiquant si la modification génétique a été suffisamment caractérisée pour qu'il soit possible d'évaluer les risques qu'elle comporte pour la santé humaine et l'environnement ; l'identification, fondée sur l'évaluation des risques pour l'environnement menée conformément à l'annexe II, de tout nouveau risque pour la santé humaine et l'environnement qui peut résulter de la dissémination du ou des OGM en question par rapport à la dissémination du ou des organismes non modifiés correspondants ; enfin, une conclusion sur les questions suivantes : le ou les OGM concernés doivent-ils être mis sur le marché en tant que produits ou éléments de produits et dans quelles conditions? Le ou les OGM doivent-ils ne pas être mis sur le marché ? Convient-il de demander, sur des points spécifiques de l'évaluation du risque pour l'environnement, l'avis d'autres autorités compétentes et de la Commission ?

Ces points devraient être spécifiés. La conclusion devrait clairement rappeler l'utilisation proposée, la gestion des risques et le plan de surveillance préconisé.

En vertu du respect de la transparence des procédures, nous demandons que ces informations, qui conditionneront en grande partie la future autorisation, soient rendues accessibles au public.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

Il est certain que les rapports d'évaluation seront établis conformément aux lignes directrices contenues dans l'annexe VI de la directive.

En revanche, prévoir la publicité intégrale de ces rapports serait contraire à l'article 25 de cette directive, qui précise les motifs légitimes pour lesquels certaines informations de ces rapports peuvent - et doivent - rester confidentielles.

Je perçois, au travers de vos propos, votre crainte que ces dispositions ne masquent une volonté d'éviter toute transparence en la matière. Mais tel n'est pas le cas : il s'agit, à mon avis, d'une question de protection du secret industriel et de sécurité de l'État. Là encore, nous ne pouvons pas, d'un côté, afficher notre souhait de développer la recherche en France, y mettre les moyens que vous connaissez - c'est-à-dire 45 millions d'euros, et je profite de l'occasion pour saluer la volonté du Gouvernement d'inscrire une telle ligne budgétaire -, et, de l'autre, faire peur aux chercheurs, et surtout aux industriels, en livrant des informations qui relèveraient du secret industriel.

L'avis est donc très clairement défavorable.

Debut de section - Permalien
Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État

Les dispositions que prévoit cet amendement figurent déjà à l'article R. 533-30 du code de l'environnement relèvent, d'ailleurs, du domaine réglementaire.

Pour ces raisons, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Je me sens obligé d'intervenir, puisque M. le président de la commission des affaires économiques a évoqué, en conclusion de son intervention, le rouleau compresseur mis en place dans certains pays pour « renvoyer dans leurs cordes » mes camarades du groupe CRC.

Mais, monsieur Emorine, cela commence à dater ! Depuis combien d'années le mur de Berlin est-il tombé ? Il faudrait tout de même penser à lire les textes et positions communistes

Exclamations sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

En tout cas, je voudrais m'associer aux propos tenus par M. Le Cam : tout ne va pas si bien au Sénat.

Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

J'ai du mal à suivre M. le ministre d'État lorsqu'il que estime que tout va bien alors qu'il est désavoué par sa majorité, et que M. Le Grand est marginalisé, malgré le comportement très correct qui a été le sien à la suite du Grenelle de l'environnement. Mais le Gouvernement pense peut-être qu'il est positif de ne pas tenir compte du Grenelle !

La situation est grave ! Mais, mes chers collègues de la majorité, vous allez de toute façon vous en apercevoir très rapidement, lors des élections municipales...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Non ! Ce n'est quand même pas moi qui fais les votes ! Je vous décris simplement une situation.

Vous avez fait des promesses sur le pouvoir d'achat, que vous ne pouvez pas tenir ! Vous avez fait des promesses aux Français, que vous ne pourrez pas tenir ! Vous avez fait des promesses lors du Grenelle de l'environnement, que vous pourriez tenir mais que vous ne voulez pas tenir ! C'est bien dommage ! Je pourrais répondre à M. le ministre d'État que tout ne va pas si bien au Sénat !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

M. le président. Le Parlement s'exprime et prend des décisions dans le cadre de ses compétences. Nous sommes heureux d'avoir pu entendre l'explication de vote très ciblée de M. Desessard, qui va permettre à chacun de prendre position avec la plus grande clarté !

Sourires

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

CHAPITRE II

RESPONSABILITÉ

L'amendement n° 15, présenté par M. Bizet, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Compléter l'intitulé de ce chapitre par les mots :

et coexistence entre cultures

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

La modification du titre du chapitre II du projet de loi vise à améliorer la lisibilité du texte. Elle est, en outre, conforme aux choix que le Sénat avait effectués en 2006.

Depuis le début de nos débats, nous avons souvent abordé la question, très importante, de la coexistence des cultures. Il est logique qu'il en soit clairement question dans le projet de loi.

Debut de section - Permalien
Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État

Le chapitre II contient, en effet, des dispositions concernant la coexistence des cultures.

Cet amendement ne nous pose pas de problème et nous y sommes favorables.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

En conséquence, l'intitulé du chapitre II est ainsi modifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° 193, présenté par MM. Pastor, Raoul, Dussaut et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :

Avant l'article 3, insérer une division additionnelle ainsi rédigée :

Dispositions relatives aux plantes génétiquement modifiées (PGM)

La parole est à M. Daniel Raoul.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Raoul

Comme j'ai déjà eu l'occasion de le dire lors de la discussion générale, 80 % de ce texte ne concernent que les plantes génétiquement modifiées.

Parler de coexistence entre cultures est ambigu parce qu'il y a des cultures en laboratoire, des cultures pour les vaccins. Les articles 3, 4, 5 et 6 contenant des dispositions relatives aux plantes génétiquement modifiées, je propose d'introduire, avant l'article 3, une division additionnelle: intitulée : « Dispositions relatives aux plantes génétiquement modifiées ». Aucun de ces articles ne concerne, en fait, les cultures pratiquées dans les laboratoires pharmaceutiques. Ils visent la culture en plein champ de plantes génétiquement modifiées.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

La division additionnelle que cet amendement tend à introduire n'est pas du tout cohérente avec les deux autres divisions du projet de loi.

Je comprends bien l'esprit de cet amendement et je connais l'attachement de Daniel Raoul à la distinction, fort justifiée, entre plantes génétiquement modifiées et organismes génétiquement modifiés, mais introduire une division à cet endroit précis du texte n'apporterait pas la clarté qu'il souhaite.

À chaque fois que cela sera possible, nous essaierons de clarifier les choses, mais, dans ce cas précis, je ne peux malheureusement qu'émettre un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État

Nous nous rallions aux arguments de M. le rapporteur. Nous sommes défavorables à cet amendement.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 16, présenté par M. Bizet, au nom de la commission, est ainsi libellé :

I. Avant l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le chapitre II du titre VI du livre VI du code rural, il est inséré un chapitre ainsi rédigé :

« Chapitre II bis « La culture des plantes génétiquement modifiées

« Art. L. 662-4.- Est obligatoire l'étiquetage des semences dans lesquelles la présence d'organismes génétiquement modifiés est supérieure à un seuil défini par décret après avis du comité scientifique du Haut conseil institué par l'article L. 531-3 du code de l'environnement. »

II. En conséquence, remplacer respectivement dans l'ensemble du texte les références : L. 663-8, L. 663-9, L. 663-10 et L. 663-11

par les références :

L. 662-5, L. 662-6, L. 662-7 et L. 662-8.

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

Dans un souci de transparence, et pour faciliter la coexistence entre les cultures avec et sans plantes génétiquement modifiées, la commission vous propose de rendre obligatoire l'étiquetage des semences qui contiennent des OGM, au-delà d'un seuil qu'il reviendra aux services du Gouvernement de préciser.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° 127, présenté par MM. Muller et Desessard et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :

Après l'article 7, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le chapitre III du titre VI du livre VI du code rural est complété par un article ainsi rédigé :

« Art. - Pour les semences et plantes génétiquement modifiées, toute mention d'une variété génétiquement modifiée, quel que soit son support (catalogues, étiquettes, publicités, bons de commande, bons de livraison, factures, etc.), doit indiquer clairement que la variété est génétiquement modifiée. »

La parole est à M. Jacques Muller.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Muller

Cet amendement vise à apporter une clarification concernant les semences.

L'article 9-5 de la directive communautaire 2002/53/CE sur le catalogue commun des variétés, dont le maïs, exige que toute personne commercialisant une variété OGM indique clairement dans son catalogue qu'il s'agit d'un OGM. Cependant, aucun texte législatif ou réglementaire français n'a transposé cette disposition.

C'est ainsi que, aujourd'hui, les agriculteurs français reçoivent des catalogues vantant les mérites de semences sans pour autant indiquer que la variété est un OGM. Les agriculteurs achetant beaucoup sur catalogue, ils ne découvrent qu'à la réception de leur lot de semences, sur l'étiquette, qu'il s'agit d'une variété OGM.

Il est important de compléter le dispositif d'information des agriculteurs.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° 218 rectifié, présenté par MM. Pastor, Raoul, Dussaut et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :

Après l'article 7, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Pour les semences et plantes génétiquement modifiées, toute mention d'une variété génétiquement modifiée, quel que soit son support (catalogues, étiquettes, publicités, bons de commande, bons de livraison, factures) doit indiquer clairement que la variété est génétiquement modifiée.

La parole est à M. Jean-Marc Pastor.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Pastor

Cet amendement, qui vise à insérer un article additionnel après l'article 7, est similaire à celui que vient de présenter mon collègue.

Nous souhaitons que les semences soient correctement étiquetées afin que les agriculteurs puissent savoir exactement s'il s'agit ou non d'OGM. C'est un minimum en termes de traçabilité.

J'indique que la modification de notre amendement porte sur l'endroit du texte où nous souhaitons introduire cet article additionnel et non sur le fond.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

La commission a émis un avis défavorable sur l'amendement n° 127, car il vise à la fois les plantes génétiquement modifiées et les semences, sans faire aucune référence à un seuil, ce qui est contraire à la directive 2001/18/CE. En outre, cet amendement est satisfait par l'amendement n° 16 de la commission.

Je remercie nos collègues socialistes d'avoir accepté de rectifier l'amendement n° 218 afin qu'il puisse être discuté en même temps que l'amendement n° 127, auquel il est presque identique. Logiquement, la commission a émis un avis défavorable sur l'amendement n° 218 rectifié, pour les mêmes raisons que celles qui ont prévalu pour l'amendement n° 127.

Debut de section - Permalien
Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État

L'amendement n° 16 nous pose problème. Sur le fond, il nous semble intéressant, car nous souhaitons en effet progresser sur la question des seuils d'étiquetage, qui est essentielle. La demande des professionnels dans ce domaine est forte. Fixer un seuil est donc nécessaire, pour des questions de transparence et de sécurité juridique.

La directive prévoit que les seuils sont fixés à l'échelon communautaire, mais la Commission n'a toujours pas statué sur cette question. Dans cette attente, il nous faut fixer des seuils à l'échelon national afin de clarifier la situation. Il est possible de le faire par voie réglementaire, sans introduire une nouvelle disposition législative.

À ce stade, nous souhaitons donc que la commission retire l'amendement n° 16. Il faut attendre que toutes les réflexions nécessaires soient menées à leur terme pour définir le ou les seuils les plus pertinents.

Pour les mêmes motifs, nous sommes défavorables aux amendements n° 127 et 218 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

Sur le fond, je souscris à l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 16. Le but, à terme, est de parvenir à un étiquetage des semences, mais la Commission n'est pas encore assez mûre sur ce sujet.

À la demande de Mme la ministre, j'accepterai naturellement de retirer cet amendement. Toutefois, j'aimerais auparavant lui faire une autre proposition. Peut-être pourrions-nous rectifier l'amendement n° 16, qui viserait alors simplement à introduire un chapitre II bis, mais plus l'article L. 662-4 ? Cela permettrait une plus grande lisibilité.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Quel est l'avis du Gouvernement sur la proposition de M. le rapporteur ?

Debut de section - Permalien
Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État

Je préfère le retrait pur et simple de l'amendement n° 16.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

Dans ces conditions, je le retire, monsieur le président.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote sur l'amendement n° 218 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Raoul

Vous l'avez compris, l'amendement n° 16 ayant été retiré, l'amendement n° 218 rectifié n'est plus satisfait. L'argument de M. le rapporteur ne tient donc plus la route !

J'indique à Mme la secrétaire d'État que notre amendement devrait poser moins de problèmes que l'amendement n° 16 puisqu'il n'y est fait allusion à aucun seuil défini en France ou par la Commission. Pour une meilleure transparence entre les cultures avec et sans OGM, il convient donc de l'adopter !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

La parole est à M. Jean-Marc Pastor, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Pastor

J'ai bien entendu les propos de Mme la ministre sur l'amendement n° 218 rectifié et j'y souscris. La fixation des seuils doit faire l'objet d'un débat à l'échelon communautaire ; il faut donc éviter de fixer des seuils dans la loi française. Je suis tout à fait d'accord sur ce point, même s'il faudra bien, à un moment donné, placer le curseur quelque part.

Toutefois, ce débat ne nous empêche pas de définir plus précisément l'étiquetage dans la loi française et de dire ce que nous attendons en matière de transparence et de suivi des produits et des semences OGM.

Alors oui, les seuils doivent être fixés à l'échelon communautaire, mais on peut tout de même apporter dans la loi française un certain nombre de précisions afin de permettre la traçabilité. L'amendement n° 218 rectifié s'inscrit dans cette logique.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

La parole est à Mme Évelyne Didier, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Évelyne Didier

Je suis tout à fait favorable à cet amendement. C'est à travers des dispositions comme celle-là, qui traduit clairement une intention, que l'on pourra juger du véritable intérêt de ce projet de loi. Nos concitoyens attendent de la transparence ; ils attendent que les choses soient clairement dites.

Bien entendu, nous sommes d'accord pour patienter jusqu'à ce que des seuils soient définis à l'échelon communautaire, nous conformant ainsi au droit européen. Mais indiquer quand des produits contiennent des OGM serait faire un premier pas en direction de nos concitoyens, qui pourraient alors considérer qu'on ne se moque pas d'eux et que leur droit à l'information est véritablement pris en considération.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

Je rappelle à nos collègues que nous sommes dans un environnement législatif communautaire. La France ne peut pas faire semblant d'être seule ; nous sommes vingt-sept !

La proposition de Mme la secrétaire d'État me paraît être d'une grande cohérence. Nous cherchons tous à atteindre le même objectif. À terme, les semences devront être étiquetées, mais les seuils ne peuvent être fixés qu'à l'échelon communautaire. Il serait donc incohérent de s'avancer dans ce domaine. Il faut attendre que la Commission prenne une décision, ce qu'elle a « failli » faire voilà déjà quelques années, mais cette question n'étant pas facile, elle fait toujours l'objet d'une réflexion.

Soyons cohérents. Je partage l'analyse du Gouvernement et je souhaite que nous en tirions les conséquences.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Vous vous êtes déjà exprimé sur cet amendement, monsieur Pastor !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Pastor

Il y a du nouveau ! M. le rapporteur a donné une explication différente !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Monsieur Pastor, chaque orateur n'a la possibilité d'expliquer son vote qu'une seule fois. Vous ne pouvez donc plus le faire, même si M. le rapporteur est intervenu depuis ; lui peut prendre la parole chaque fois qu'il le désire.

Cela étant dit, s'agissant d'un dossier fondamental, je vais vous donner la parole de façon tout à fait exceptionnelle, afin que vous puissiez compléter votre explication de vote !

Exclamations sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Pastor

M. Jean-Marc Pastor. C'est formidable ! Je comprends mieux pourquoi M. Borloo a déclaré à la radio que les choses se passaient bien au Sénat : c'est vrai, je le reconnais, monsieur le président ! Merci de nous donner la parole, car si nous ne pouvons pas faire adopter de nombreux amendements, au moins pouvons-nous nous exprimer !

Rires

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Pastor

Je voudrais simplement formuler une remarque.

M. le rapporteur vient de tenir des propos totalement contraires à ce qu'il nous a expliqué voilà cinq minutes en présentant l'amendement n° 16, qui allait à l'encontre des règlements communautaires. En effet, il lui paraissait alors normal que la législation française mentionne l'existence d'un seuil, même si une telle disposition était contraire à la réglementation européenne. Or, lorsque nous proposons, nous, de mettre en place un étiquetage à des fins de traçabilité, M. le rapporteur nous répond que ces notions seraient anti-communautaires ! Je ne saisis pas très bien la cohérence...

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Raoul

M. Daniel Raoul. Je vous remercie de votre générosité, monsieur le président.

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Raoul

Je souhaite simplement émettre une suggestion.

Afin d'éviter toute ambiguïté entre la notion de « seuil » et la reconnaissance des organismes génétiquement modifiés, je vous propose de modifier l'amendement n° 218 rectifié, en insérant le terme « reconnues » entre les mots « pour les semences et plantes » et les mots « génétiquement modifiées ».

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Je suis donc saisi d'un amendement n° 218 rectifié bis, présenté par MM. Pastor, Raoul, Dussaut et les membres du groupe Socialiste et apparentés, et ainsi libellé :

Après l'article 7, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Pour les semences et plantes reconnues génétiquement modifiées, toute mention d'une variété génétiquement modifiée, quel que soit son support (catalogues, étiquettes, publicités, bons de commande, bons de livraison, factures) doit indiquer clairement que la variété est génétiquement modifiée.

Quel est l'avis de la commission ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

De notre point de vue, cela ne change rien. L'avis de la commission est toujours défavorable.

Debut de section - Permalien
Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État

Ainsi rédigée, une telle disposition nous pose beaucoup moins de problèmes, s'il est entendu que le terme « reconnues » fait bien référence aux critères de traçabilité fixés par l'Union européenne.

Debut de section - Permalien
Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État

Mais est-ce véritablement le cas ? Le mot « reconnues » ne signifie pas forcément cela. Qui « reconnaîtra » que ces semences et plantes sont génétiquement modifiées ? Et comment ?

Debut de section - Permalien
Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État

Il y a donc un problème d'ambiguïté juridique.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Raoul

Nous pouvons préciser « reconnues par l'Union européenne » !

Debut de section - Permalien
Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État

Le mot « reconnues » soulève effectivement un véritable problème juridique. Qui reconnaît ? Comment ? À quel titre ?

S'il était certain qu'une telle disposition soit compatible avec la réglementation européenne, elle ne nous poserait aucun problème. Mais la formulation actuelle n'est, me semble-t-il, pas suffisamment claire.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Raoul

Nous pouvons le rédiger ainsi : « qualifiées de ?génétiquement modifiées? par l'Union européenne »

Debut de section - Permalien
Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État

À mon sens, comme le sujet est actuellement en cours de discussion au sein de l'Union européenne, et compte tenu de sa fragilité, nous pouvons continuer d'y réfléchir. Il est peut-être préférable d'approfondir la question d'ici à la prochaine lecture.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

Effectivement, le sujet fait actuellement l'objet d'une réflexion au sein de la Commission européenne. Cela dure depuis quelques années déjà !

Pour ma part, je ne pense pas que nous clarifierons le débat en adoptant aujourd'hui une position dans le cadre national. Mieux vaut donc en rester là pour le moment, car nous sommes dans un environnement législatif communautaire.

Même si nous partageons un objectif identique s'agissant de l'étiquetage des semences, je crois sincèrement qu'adopter une mesure législative au niveau national, loin de rendre la question plus lisible, aurait pour seul effet de la complexifier encore plus.

C'est la raison pour laquelle la commission émet un avis défavorable sur l'amendement n° 218 rectifié bis, tout comme elle avait émis un avis défavorable sur l'amendement n° 218 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

La parole est à M. Jacques Muller, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Muller

Pour ma part, je propose de considérer cet amendement comme un amendement d'appel en vue de la suite de l'examen du texte.

Cela serait tout à fait constructif et nous permettrait d'avoir, enfin, le signal positif que nous attendons depuis le début de la discussion du projet de loi.

Debut de section - Permalien
Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État

Pour ma part, en vue de la deuxième lecture, je suis prête à travailler sur une nouvelle version de la disposition que cet amendement vise à instituer, notamment en reprenant la notion de « reconnaissance » du caractère génétiquement modifié de certaines plantes et semences, mais dans une rédaction qui aurait un véritable sens juridique.

En attendant, à ce stade, je préférerais que cet amendement soit retiré. Nous pourrons ensuite réfléchir sur le sujet dans la perspective de la deuxième lecture

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Il n'a aura pas de deuxième lecture, puisque l'urgence a été déclarée !

L'amendement n'est pas adopté.

Dans le chapitre III du titre VI du livre VI du code rural sont insérés les articles L. 663-8 et L. 663-9 ainsi rédigés :

« Art. L. 663-8. - La mise en culture des végétaux autorisés au titre de l'article L. 533-5 du code de l'environnement ou en vertu de la réglementation communautaire est soumise au respect de conditions techniques relatives aux distances entre cultures ou à leur isolement, visant à éviter la présence accidentelle d'organismes génétiquement modifiés dans d'autres productions.

« Ces conditions techniques sont fixées par l'autorité administrative, selon des modalités définies par décret.

« Art. L. 663-9. - Le respect des prescriptions prévues à l'article L. 663-8 est contrôlé par les agents mentionnés au I de l'article L. 251-18. Ces agents sont habilités à procéder ou ordonner, dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'agriculture, tous prélèvements et analyses nécessaires à l'exercice de cette mission.

« Les sanctions que l'autorité administrative peut prononcer comprennent la destruction totale ou partielle des cultures.

« Les frais entraînés par ces sanctions sont à la charge de l'exploitant. »

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Muller

Nous abordons à présent l'examen de l'article 3, qui concerne les périmètres d'isolement.

Même s'il n'appartient pas au législateur de fixer aujourd'hui ces fameux périmètres, il s'agit, me semble-t-il, d'un sujet essentiel. En effet, pour les semenciers, la question est stratégique du point de vue non seulement de la protection des cultures, mais également de la diffusion des OGM dans l'environnement.

À cet égard, je souhaite m'exprimer à la fois sur le fond et sur la méthode.

S'agissant d'abord du fond, en tant qu'ingénieur agronome, je reste perplexe quant aux fameux 50 mètres de périmètre d'isolement, qui sont systématiquement martelés par l'Association générale des producteurs de maïs, l'AGPM, et qui figurent dans les textes réglementaires adoptés en 2006.

Premièrement, un tel chiffre est contradictoire avec les pratiques en vigueur chez nos voisins européens, où les périmètres d'isolation atteignent 200 mètres ou 300 mètres. En optant pour un périmètre de 50 mètres, la France apparaîtrait comme l'un des pays les plus laxistes de l'Union européenne, après les Pays-Bas.

Deuxièmement, la réglementation relative aux essais en plein champ de nouvelles variétés de maïs OGM fixe les périmètres d'isolation à 400 mètres. Dans ces conditions, je m'interroge : alors qu'un maïs OGM à l'essai est isolé à 400 mètres d'un autre maïs, le périmètre d'isolation tomberait à 50 mètres pour les maïs OGM cultivés en plein champ. C'est totalement incohérent !

Troisièmement, je constate que les études internationales sur le sujet sont beaucoup plus prudentes. Ainsi, celle qui a été menée par l'unité de recherche de Worcester aboutissait aux conclusions suivantes : « Il est clair que le pollen de maïs se propage bien au-delà du périmètre de 200 mètres, cité dans quelques études comme susceptible de prévenir la pollinisation croisée. »

En d'autres termes, avec le chiffrage de 50 mètres qui circule actuellement, nous sommes totalement hors-sujet.

Quatrièmement, aujourd'hui, les producteurs de semences s'imposent des périmètres de 300 mètres à 400 mètres. Aussi, j'aimerais bien qu'il y ait un minimum de cohérence. Si le maïs hybride certifié exige des périmètres de protection de 300 mètres à 400 mètres, il est hors de question que les périmètres d'isolement d'OGM soient de 50 mètres.

J'en viens à présent à mes observations sur la méthode.

Étant de culture scientifique, lorsque je suis en présence de chiffres aussi hétérogènes que ceux que je viens d'évoquer, j'aime bien disposer d'un nouveau regard.

C'est pourquoi j'avais proposé l'audition par la commission des affaires économiques de trois chercheurs, en l'occurrence MM. Méssean et Brunet, de l'Institut national de la recherche agronomique, l'INRA, et Mme Jarosz, qui a travaillé avec ce dernier. Ces auditions ont été refusées.

Certes, il n'est pas dans les habitudes de la Haute Assemblée qu'un « sénateur lambda » organise le débat. Mais, compte tenu des incohérences que j'ai évoquées, le minimum serait tout de même que nous puissions avoir un débat serein sur le sujet, avec l'éclairage de scientifiques de l'INRA.

On m'a expliqué que cela n'était pas possible. Ainsi, M. le rapporteur a déclaré : « Il est hors de question d'envisager des périmètres d'isolement de plus de 50 mètres pour les cultures de maïs OGM, en raison des structures agricoles trop petites ».

Qu'est-ce que cela signifie ? Que des périmètres supérieurs à 50 mètres empêcheraient la diffusion souhaitée des OGM en France ? Mais, que je sache, les périmètres d'isolement ont pour objet non pas d'organiser la diffusion maximale des OGM en France, mais de protéger les structures qui ne souhaitent pas d'OGM dans leur produit.

En conclusion, je présenterai des amendements afin que la question des périmètres soit abordée de la manière la plus sérieuse possible par le futur Haut conseil. Il est hors de question que les périmètres soient définis par arrêté ministériel ou par décret, en catimini, comme ils l'ont été jusqu'à présent.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° 17, présenté par M. Bizet, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit le premier alinéa de cet article :

Dans le chapitre II bis du titre VI du livre VI du code rural sont insérés deux articles ainsi rédigés :

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

Monsieur le président, par cohérence avec le retrait de l'amendement n° 16, je retire l'amendement n° 17.

Nous reviendrons sur la notion de distance au cours de notre débat.

Simplement, je voudrais adresser plusieurs observations à M. Muller.

D'abord, au cours de la saison céréalière qui vient de s'achever en 2007 - cela concerne 22 000 hectares -, il n'a pas été fait état de problèmes particuliers. Ainsi, les périmètres d'isolement de 50 mètres, mis en place à la suite du texte réglementaire qui a été adopté sur l'initiative de M. Dominique Bussereau, se sont révélés suffisants. Au demeurant, le choix du seuil retenu a été fondé sur l'avis de scientifiques, qui avaient proposé une distance de 25 mètres. Par souci de sécurité, M. Dominique Bussereau a opté pour des périmètres de 50 mètres.

Ensuite, on peut faire dire ce que l'on veut aux études. Monsieur Muller, j'ai moi aussi une formation scientifique, mais je n'en ferai pas spécialement état dans cette enceinte.

Il faut établir une distinction entre la distance parcourue par le pollen et son pouvoir de germination, c'est-à-dire appréhender le problème dans une dimension spatio-temporelle. Comme vous le savez, la durée de vie d'un pollen de maïs, qui est le plus lourd qui soit, n'est que de deux heures.

Je le répète, des études contradictoires ont été menées sur le terrain, dans le Sud-Ouest. M. Daniel Soulage sait très bien à quel agriculteur je fais référence. Au-delà de douze rangs, c'est-à-dire au-delà de dix mètres, le taux de présence fortuite d'OGM est de 0, 3 %. Nous reviendrons peut-être en détail sur ce point, mais je tenais à le préciser.

En outre, je souhaite tout de même que l'on ne fasse pas d'amalgame avec les distances qui sont déterminées dans d'autres pays de l'Union européenne. Celles-ci vont de 25 mètres au Royaume-Uni jusqu'à 700 mètres ou 800 mètres dans certains pays d'Europe centrale et orientale. Cela tient à un parcellaire complètement différent. Je ne voudrais pas que l'on réserve une telle technologie novatrice aux seuls agriculteurs ayant de grandes surfaces. Il faut qu'elle puisse également être appréhendée, abordée et utilisée par les petits agriculteurs.

Enfin, s'agissant de l'audition de certains scientifiques auxquels notre collègue Jacques Muller a fait référence, je voudrais faire référence au colloque Biotechnologies et Agriculture durable, un post-Grenelle de l'environnement, que j'ai coprésidé le 17 janvier dernier en compagnie de notre collègue de l'Assemblée nationale Jean-Yves Le Déaut.

Monsieur Muller, vous y avez assisté et vous avez écouté, ce dont je vous félicite, l'ensemble des scientifiques qui étaient présents ce jour-là. Tous ont insisté sur la dimension spatio-temporelle du transport de pollen. Quand un pollen parcourt 50 kilomètres, 100 kilomètres ou 150 kilomètres, l'important est non pas la distance, mais le pouvoir germinatif.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° 17 est retiré.

Je suis saisi de sept amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 110, présenté par MM. Muller et Desessard et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :

Remplacer le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 663-8 du code rural par trois alinéas ainsi rédigés :

« La mise en culture des végétaux autorisés au titre de l'article L. 533-5 du code de l'environnement ou en vertu de la réglementation communautaire, ainsi que les opérations d'obtention des semences, d'importation, de récolte, de stockage, de transport, de conditionnement, de transformation et de distribution sont soumises au respect de conditions techniques, destinées à éviter la présence d'organismes génétiquement modifiés dans d'autres productions.

« Les personnes impliquées dans le processus de culture, d'importation, de transport, de stockage, de transformation et de distribution des organismes génétiquement modifiés doivent attester d'un certificat obtenu à l'issue d'une formation permettant d'obtenir les connaissances, les compétences et l'équipement nécessaire pour prendre les mesures adéquates destinées à prévenir les disséminations fortuites d'organismes génétiquement modifiés.

« Cette formation, dont les coûts sont pris en charge par les opérateurs concernés, est valable 5 ans.

La parole est à M. Jacques Muller.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Muller

Cet amendement vise à clarifier les vecteurs de dispersion des gènes dans l'environnement.

Le champ d'application des mesures destinées à éviter une contamination ne doit pas être limité aux contaminations issues de cultures. En effet, la contamination au champ par dissémination du pollen n'est pas la seule source de contamination possible : les négligences humaines dans le stockage, le transport, la transformation, le conditionnement ou la distribution sont des sources de contamination qui ne peuvent être occultées par ce projet de loi.

Cette mesure ne doit donc pas être proposée de manière exclusive.

La plupart des États européens mettent en place de telles dispositions en obligeant toute personne intervenant dans le processus des OGM à attester d'une formation et d'un certificat.

Il en va ainsi de l'Allemagne, en vertu de l'article 16 b de la loi sur les OGM ; de la Hongrie, aux termes de l'article 2 du décret de 2006 et de l'article 21 B de la loi sur les OGM ; du Danemark, en application de l'article 3 de la loi cadre.

Sur la prise en charge des coûts et la validité de la formation, il faut se référer à l'article 21/B (9) de la loi hongroise.

Nous souhaitons que ces dispositions soient précisées et que soit élargi le champ des vecteurs des risques de contamination.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° 53 rectifié, présenté par M. Soulage et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :

Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 663-8 du code rural, après les mots :

La mise en culture

insérer les mots :

, la récolte, le stockage, le transport, la transformation, le conditionnement et la distribution

La parole est à M. Daniel Soulage.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Soulage

Cet article tend à soumettre la mise en culture des plantes et plants génétiquement modifiés au respect de conditions techniques visant à éviter la présence accidentelle d'OGM dans d'autres productions.

En effet, la contamination au champ n'est pas la seule source de contamination possible : les négligences humaines dans le stockage, le transport, la transformation, le conditionnement ou la distribution sont des sources de contamination qui ne peuvent être occultées par ce projet de loi.

Pour de nombreuses espèces, les distances d'isolement sont totalement illusoires. Cette mesure ne doit donc pas être proposée de manière privilégiée.

L'objet de cet amendement est d'assurer la coexistence de cultures en encadrant plus strictement les opérations effectuées en aval, comme la récolte ou le stockage.

Une étude européenne à laquelle l'INRA a participé conclut que le nettoyage des machines de récoltes entre leur utilisation sur les champs de cultures transgéniques et leur utilisation sur des champs de cultures non transgéniques se révèle être une mesure efficace en faveur de la coexistence de ces deux types de cultures.

C'est le genre d'actions que cet amendement a pour objet de généraliser : il convient, en effet, d'accroître la vigilance quant aux risques de contamination autres que la pollinisation croisée, qui, selon les scientifiques, sont beaucoup plus élevés.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Le sous-amendement n° 241, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Dans le dernier alinéa de l'amendement n° 53 rectifié, supprimer les mots :

, la transformation, le conditionnement et la distribution

La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Debut de section - Permalien
Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État

Le Gouvernement est tout à fait favorable au principe d'un élargissement des compétences réglementaires pour les activités de l'amont de la filière, à savoir la manipulation et le transport des plantes. Toutefois, il souhaiterait que cette extension reste raisonnable et entend donc limiter le pouvoir réglementaire à certains secteurs.

Sous réserve de l'adoption de ce sous-amendement, il sera favorable à l'amendement n° 53 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° 194 rectifié, présenté par MM. Pastor, Raoul, Dussaut et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :

Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 663-8 du code rural, remplacer les mots :

est soumise

par les mots :

, ainsi que les opérations d'obtention des semences, d'importation, de récolte, de stockage, de transport, de conditionnement, de transformation et de distribution sont soumises

La parole est à M. Jean-Marc Pastor.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Pastor

Les risques de contamination ne concernent pas que la culture au champ. Toute une série d'opérations sont directement des vecteurs de contamination : les transports et les stockages, notamment, ainsi que l'arrivée de produits OGM importés dans les ports, aucune régulation des dispositifs n'y étant prévue, et ces produits devant, ensuite, être stockés et véhiculés sur tout le territoire national.

Ce n'est pas la réponse de l'OMC qui rassurera nos concitoyens.

Dans notre législation, ces oléagineux - le soja, en particulier - doivent être soumis au même régime que les produits français.

C'est à cette condition que notre législation sera cohérente et donc de nature à rassurer nos citoyens.

Monsieur le président, afin de gagner du temps et de faire écho à votre largesse, tout à l'heure, s'agissant des prises de parole, je présenterai dès maintenant l'amendement n° 192, qui s'inscrit dans la suite logique de celui-ci.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° 192, présenté par MM. Pastor, Raoul, Dussaut et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :

Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 663-8 du code rural, après les mots :

conditions techniques

insérer le mot :

notamment

Veuillez poursuivre, monsieur Pastor.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Pastor

Si ces deux amendements étaient adoptés, le premier alinéa du texte proposé par l'article 3 pour l'article L. 663-8 du code rural se lirait ainsi : « La mise en culture des végétaux autorisés au titre de l'article L. 533-5 du code de l'environnement ou en vertu de la réglementation communautaire, ainsi que les opérations d'obtention des semences, d'importation, de récolte, de stockage, de transport, de conditionnement, de transformation et de distribution sont soumises au respect de conditions techniques, notamment, relatives aux distances entre cultures ou à leur isolement, visant à éviter la présence accidentelle d'organismes génétiquement modifiés dans d'autres productions. »

Le champ des investigations serait ainsi élargi, afin que nos concitoyens soient mieux protégés et rassurés.

Je le répète : il est impératif de veiller à mettre sur un pied d'égalité les produits importés et les produits français, les premiers n'étant pas soumis à la même réglementation, s'agissant du transport et du stockage, que les seconds. Il serait, en effet, aberrant d'imposer aux agriculteurs français des contraintes que nous n'imposerions pas aux exportateurs étrangers.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° 76, présenté par MM. Le Cam, Billout et Danglot, Mmes Didier, Terrade et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

I. - Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 663-8 du code rural, supprimer les mots :

relatives aux distances entre cultures ou à leur isolement

II. - Compléter ce même alinéa par les mots :

et dans l'environnement en général

La parole est à M. Gérard Le Cam.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Le Cam

L'article 3 vise à modifier le code rural afin d'imposer le respect de certaines conditions techniques à toute culture d'OGM ayant fait l'objet d'une autorisation de mise sur le marché, ce afin d'éviter la présence fortuite d'OGM dans les cultures traditionnelles.

Cet amendement, qui est de repli, a pour objet de permettre l'élargissement des conditions techniques requises pour les cultures en plein champ à des critères autres que les seules distances entre les cultures ou leur isolement.

Cependant, nous réaffirmons ici notre grand scepticisme quant à l'efficacité des mesures techniques pour éviter la contamination des cultures traditionnelles par les OGM.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° 111, présenté par MM. Muller et Desessard et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :

Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 663-8 du code rural, supprimer le mot :

accidentelle

La parole est à M. Jacques Muller.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Muller

Cet amendement vise à ce que soit admis par la loi le caractère prévisible de la contamination des plantes conventionnelles ou biologiques par des végétaux génétiquement modifiés.

Ce caractère prévisible est reconnu de fait par le Gouvernement, puisque ce dernier propose au législateur de prendre, par ce projet de loi, des mesures adéquates de protection contre la contamination.

Par ailleurs, il est prévu, aux termes de l'article 26 bis de la directive européenne 2001/18, que les États membres « peuvent prendre les mesures nécessaires pour éviter la présence d'OGM dans d'autres produits », ce afin d'assurer la protection des cultures conventionnelles ou biologiques de toute contamination par des OGM.

La contamination n'est pas simplement « accidentelle » ou hypothétique, elle est inévitable : les recherches scientifiques font état de cette contamination sur des dizaines ou des centaines de mètres. Le législateur doit donc, dans la loi, la qualifier non pas d'« accidentelle », mais d'« inévitable ».

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° 59, présenté par MM. Le Cam, Billout et Danglot, Mmes Didier, Terrade et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Compléter le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 663-8 du code rural par deux phrases ainsi rédigées :

Le respect de la distance de recul incombe aux parcelles d'organismes génétiquement modifiés. Le respect de l'existant, ruchers, propriétés privées est toujours prioritaire.

La parole est à Mme Évelyne Didier.

Debut de section - PermalienPhoto de Évelyne Didier

Nous souhaiterions que ce soit celui qui cultive des OGM qui prenne toutes les précautions pour éviter la contamination, et non pas l'inverse.

Pourtant, il a été demandé à certains apiculteurs de reculer leurs ruches et d'aller les installer plus loin, à un endroit plus propice. Ce n'est pas correct.

Cet amendement tend à réduire le nombre de contentieux qui risquent de naître sur la question de savoir sur la propriété de qui doit être imputée la distance de sécurité.

Nous réaffirmons également que le respect de l'existant, en termes de faune et de flore, devrait être prioritaire.

Nous souhaitons donc qu'il ne puisse plus être répondu à quelqu'un qui craint une contamination par les OGM que ce sont les plus gênés qui doivent s'en aller.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

La commission est défavorable à l'amendement n° 110. Ses rédacteurs auront partiellement satisfaction si l'amendement n° 53 rectifié est adopté.

Elle est également défavorable à l'amendement n° 53 rectifié. En revanche, si le sous-amendement n° 241 est adopté, elle y sera favorable.

La commission est favorable au sous-amendement n° 241.

Elle est défavorable à l'amendement n° 194 rectifié, qui appelle les mêmes observations que l'amendement précédent.

Elle est favorable à l'amendement n° 192. Je ferai remarquer à M. Pastor que cela ne se passe pas si mal au Sénat pour l'opposition : quand ses amendements sont pertinents et constructifs, la majorité est ravie de les adopter !

La commission est défavorable à l'amendement n° 76.

Elle est également défavorable à l'amendement n° 111, car il est illogique : la contamination de cultures traditionnelles par des OGM est nécessairement fortuite. J'en veux pour preuve les stipulations de la directive 2001/18.

L'amendement n° 59 est satisfait. Il va de soi que la coexistence entre cultures traditionnelles et cultures d'OGM suppose le respect de la propriété privée. Je suis, d'ailleurs, ravi que M. Le Cam et les membres du groupe communiste républicain et citoyen soient soucieux du respect de la notion de propriété privée !

Sourires sur les travées de l'UMP.

Debut de section - Permalien
Un sénateur de l'Ump

C'est un progrès !

Debut de section - Permalien
Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État

Le Gouvernement est favorable au principe d'un élargissement des compétences réglementaires pour les activités de l'amont, principe qu'il propose d'instaurer par le sous-amendement n° 241, et est donc plutôt défavorable à l'amendement n° 110 : il lui préfère son sous-amendement, qui vise à une limitation de l'extension - mais à une extension tout de même - du champ du domaine réglementaire pour les activités de l'amont.

À l'amendement n° 194 rectifié il préfère également le sous-amendement n° 241, pour les raisons que je viens d'exposer.

Le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 192. Je précise que l'adoption de cet amendement entraînerait, de fait, un élargissement du champ des responsabilités en matière délictuelle. Il conviendrait donc de modifier la rédaction de l'article L. 671-14 du code rural, pour préciser exactement quelles sont les infractions constitutives d'un délit, faute de quoi nous nous heurterions à un risque d'inconstitutionnalité, risque auquel nous sommes tous sensibles. Le Gouvernement à déposé un amendement à l'article 4 visant à cette mise en cohérence.

Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 76. Il ne peut évidemment être favorable au paragraphe I, compte tenu de sa position sur l'amendement n° 192, non plus qu'au paragraphe II, la directive visant plutôt la présence accidentelle d'OGM dans d'autres produits.

J'en viens à l'amendement n° 111 : le terme « accidentelle » étant utilisé dans la directive européenne, il paraît difficile de le supprimer.

Enfin, l'amendement n° 59 ne semble pas utile au Gouvernement, même si, sur le principe, ce dernier y serait plutôt favorable et comprend les objectifs de ses auteurs. Évoquer les propriétés privées et les ruchers ne lui paraît guère pertinent.

De toute façon, il va sans dire que le respect de la distance de recul incombe aux propriétaires de parcelles sur lesquelles sont cultivés des OGM. La jurisprudence est sans équivoque. Apporter une telle précision n'est donc pas nécessaire d'un point de vue juridique.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

La parole est à M. Jean-Marc Pastor, pour explication de vote sur le sous-amendement n° 241.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Pastor

Madame la secrétaire d'État, sur ce sous-amendement qui nous renvoie aux différentes sources de contamination possibles, permettez-moi d'ouvrir une parenthèse. Si je ne suis certes pas producteur direct de maïs semence, je participe, en tant que maire, à l'organisation des îlots qui, implantés sur le territoire de ma commune, sont justement destinés à ce type de culture. Chaque année, en effet, nous discutons avec les agriculteurs concernés des distances minimales de séparation, lesquelles peuvent varier entre cinquante mètres et quatre cents mètres.

M. le rapporteur l'a dit tout à l'heure, dans le cas du maïs, la durée de vie du pollen est de deux heures. Étant donné que la phase de fécondation dure au maximum une heure et demie, il faut un coup de chance incroyable pour que la fécondation réussisse.

Par conséquent, lors des discussions sur l'implantation des îlots dont l'objet est d'éviter un certain nombre de contaminations, il convient de prendre en considération l'ensemble des critères, ce qui inclut la distance de séparation, la durée de vie du pollen et la phase de fécondation, mais aussi d'autres notions et, notamment, les vents dominants.

Or, madame la secrétaire d'État, par ce sous-amendement n° 241, vous proposez de supprimer trois éléments : le conditionnement, la transformation et la distribution. Ce n'est tout de même pas rien ! Vous êtes donc prête à accepter, par exemple, l'importation et l'entrée sur le territoire national d'un soja OGM, sans qu'il soit soumis aux conditions restrictives que vous entendez imposer aux agriculteurs français !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Pastor

Votre proposition est, à mes yeux, pour le moins gênante. Certes, je souscris à votre objectif de prudence, car il faut mettre de la distance et poser des barrières par rapport aux agriculteurs qui produiraient éventuellement des semences et des produits OGM. Mais, de grâce! faisons en sorte que tous les produits entrant sur le territoire français soient soumis aux mêmes règles !

Si le sous-amendement n° 241 est adopté, certaines contraintes seront levées. Ainsi, le conditionnement, la transformation et la distribution du soja OGM venant du Brésil ne seront plus contrôlés ni soumis aux mêmes règles de protection. C'est bien de cela qu'il s'agit, madame la secrétaire d'État !

Par conséquent, je vous demande, en toute honnêteté, de corriger votre sous-amendement, faute de quoi vous allez introduire une distorsion entre les agriculteurs-producteurs de cultures OGM français et les autres, en laissant entrer sur le territoire national des produits sans règles ni mesures.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Pastor

Absolument, ma chère collègue !

Ce faisant, chacun pourra faire ce qu'il voudra. À terme, l'introduction d'une telle distorsion dans les grilles d'analyse n'est pas de nature à aller dans le bon sens, en tout cas pas dans celui de l'équité que, les uns et les autres, nous souhaiterions tout de même pouvoir intégrer à ce texte de loi.

Le sous-amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Pastor

La République est ébranlée ! Il n'y a plus d'équité sur le fond !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

La parole est à M. Gérard Le Cam, pour explication de vote sur l'amendement n° 53 rectifié, tel qu'il vient d'être modifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Le Cam

L'adoption du sous-amendement n° 241 du Gouvernement introduit une différence de traitement selon les parties concernées. D'un côté, le monde agricole, y compris les coopératives, est soumis à toutes les règles et à toutes les exigences possibles. De l'autre, dès qu'il s'agit des industriels et des grands transporteurs, les contraintes s'allègent. Je l'ai dit hier, dans le port du Havre, la cargaison des navires entiers que l'on décharge comprend des produits OGM. Selon ce qu'ils transportent, les camions qui partent portent la mention « Avec OGM » ou « Sans OGM », alors même que les produits proviennent des mêmes cales !

Dans la mesure où une partie de la filière est donc, en quelque sorte, dédouanée, il y a tout de même de quoi être inquiets pour l'avenir. Comme par hasard, il s'agit, encore une fois, des industriels et des transformateurs. Ce n'est pas normal !

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

En conséquence, l'amendement n° 194 rectifié n'a plus d'objet.

Je mets aux voix l'amendement n° 192.

L'amendement est adopté à l'unanimité.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Le Cam

Mme la secrétaire d'État et M. le rapporteur considèrent que cet amendement est satisfait. Mais cela ne me « satisfait » pas totalement, loin s'en faut !

En effet, l'apiculteur auquel j'ai fait référence a été condamné par le tribunal de Marmande, et ce jugement a été confirmé en appel. Il lui a été demandé de reculer ses ruches ou de ne pas les installer à certaines périodes, ce qui est tout de même anormal ! J'espère donc que, dans les mois à venir, pareil cas ne se reproduira pas et que la justice voudra bien tenir compte de ce qui s'est dit ici même.

Je maintiens donc cet amendement, monsieur le président.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

Mes chers collègues, c'est à la majorité d'entre vous, convaincue des vertus des OGM, que je voudrais m'adresser. Cette conviction vous conduit finalement à vous éloigner de l'analyse que vous feriez dans d'autres domaines.

Pour appuyer ce que vient de dire M. Le Cam, je vais illustrer mon propos en prenant une situation similaire, mais dans une circonstance bien différente. Imaginez un lotissement de personnes âgées au côté duquel viendrait s'installer une boîte de nuit. Le bruit ainsi occasionné ne sera bien sûr pas mortel pour les pensionnaires, mais cette nuisance va indubitablement leur « pourrir » la vie. Vous qui êtes souvent aussi des élus locaux, il ne vous viendrait pas à l'idée d'aller dire à ces personnes âgées : si le bruit vous gêne, vous n'avez qu'à déménager !

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

Or, je le confirme, c'est bien ce qui se passe en matière d'OGM. Le tribunal de Marmande n'a pas retenu le bien-fondé de la plainte déposée par cet apiculteur, lequel - je simplifie - s'est vu ordonner d'aller mettre ses ruches ailleurs !

Mes chers collègues, placez-vous donc dans la problématique plus large des nuisances du même genre. Vous n'aurez alors peut-être pas le même regard sur cet amendement.

MM. Jacques Muller et Gérard Le Cam applaudissent.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

L'amendement n° 54 rectifié, présenté par MM. Soulage et Laffitte, est ainsi libellé :

Après le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 663-8 du code rural, insérer un alinéa ainsi rédigé :

« La culture d'organismes génétiquement modifiées est interdite dans les parcs naturels nationaux et dans les parcs naturels régionaux.

La parole est à M. Daniel Soulage.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Soulage

La table ronde n° 2 du Grenelle de l'environnement « Préserver et gérer la biodiversité et les milieux naturels » a conclu à la nécessité d'arrêter la perte de la biodiversité et de conforter la richesse du vivant, en affirmant notamment avec force : « La biodiversité est ainsi une réserve de réponses du vivant aux changements de l'environnement, qui ont été testées durant cette longue histoire. En amenuisant ce potentiel d'évolution, nous réduisons aussi notre capacité d'adaptation à la variabilité de l'environnement et, en particulier à celle du climat. C'est en ce sens que la biodiversité est notre assurance vie. »

Parallèlement, le projet de trame verte, maillant l'ensemble du territoire, a été affirmé, lui aussi avec force, à l'issue des travaux du Grenelle.

Les parcs naturels, qu'ils soient nationaux ou régionaux, ont pour objet de préserver un patrimoine naturel particulièrement remarquable. Ils forment la soupente de cette trame verte et, surtout, ils permettent de valoriser et de préserver la biodiversité de nos territoires. C'est pourquoi il nous semble indispensable de promouvoir une agriculture durable, sans OGM, dans ces zones particulièrement sensibles.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

La commission est défavorable à cet amendement. En la matière, il faut que les choses soient claires, car il n'y a qu'une alternative possible.

Soit on pense que les plantes génétiquement modifiées sont dangereuses. Dans ce cas, il faut les interdire partout, et non uniquement dans certaines zones, les autres étant alors en quelque sorte sacrifiées.

Soit on considère, comme moi, qu'elles ne sont pas dangereuses. Dès lors que le principe de précaution a été respecté, cela signifie que les produits ont fait l'objet d'un examen très attentif avant d'être autorisés dans un cadre précis. Ces plantes peuvent alors être cultivées. Dans ce cas, on ne voit pas pourquoi leur culture devrait être interdite dans certaines zones.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

Si nous nous engageons dans la voie qui nous est proposée par cet amendement, il est clair que c'est, en réalité, la majorité du territoire national qu'il faudra interdire aux plantes génétiquement modifiées. En outre, je ne suis pas sûr que les parcs nationaux soient des zones de grande culture agricole.

Par ailleurs, je le répète, il nous faut respecter la réglementation communautaire. Or l'adoption de cet amendement nous placerait précisément en porte-à-faux par rapport à ce cadre. Il importe également de préserver l'architecture présidant à nos débats sur ce projet de loi, en consacrant le droit de produire ou de consommer avec ou sans OGM. Pourquoi, alors, interdire aux agriculteurs qui le souhaitent de cultiver des produits OGM, quand bien même le périmètre de leur exploitation intégrerait des productions sous signes de qualité ou serait situé à proximité de telles cultures ?

Mes chers collègues, qu'il me soit permis en cet instant de remercier une nouvelle fois l'ancien Premier ministre, M. Jean-Pierre Raffarin, de m'avoir confié une mission de réflexion sur les produits sous signes de qualité. Ne l'oublions pas, ceux-ci représentent 20 % de l'ensemble des productions agricoles nationales. Ne négligeons donc pas les 80 % restants !

Ces produits jouissent d'une excellente image, à laquelle nous sommes très attachés. Il importe véritablement de ne pas la gâcher au travers d'un cahier des charges qui ne doit être qu'un engagement privé.

Je le répète, je suis défavorable à cet amendement. Nous avons déjà eu ce débat en 2006. Il ne faudrait pas que nous privions une partie de notre territoire de l'utilisation de cette technologie.

Debut de section - Permalien
Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État

Il s'agit d'un sujet extrêmement délicat, qui a déjà fait débat voilà presque deux ans, à l'occasion de l'examen d'un précédent projet de loi portant sur les OGM.

En effet, l'article 19 de la directive 2001/18/CE prévoit que, si un OGM a fait l'objet d'une autorisation de mise sur le marché, il peut être utilisé « sur tout le territoire de la Communauté pour autant que les conditions spécifiques d'utilisation et les environnements et/ou les zones géographiques précisés dans ces conditions soient strictement respectées. » Toute la question est de savoir si les parcs naturels nationaux et régionaux entrent dans ces catégories.

Dans la mesure où cet article 19 est ambigu dans sa deuxième partie, mais clair dans sa première partie, en précisant que l'OGM concerné peut être utilisé sur tout le territoire de la Communauté, nous sommes défavorables à cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

La parole est à M. Daniel Soulage, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Soulage

C'est justement parce qu'il n'y a pas d'agriculture intensive dans les parcs naturels qu'il me paraissait intéressant de les classer « Sans OGM ». Par ailleurs, je le redis, les conclusions du Grenelle de l'environnement préconisent, notamment, la mise en place d'une trame verte.

Puisque tout classement de ce type de zones n'est pas envisagé, une telle trame pourra-t-elle exister, s'intégrer à ces territoires en respectant les conditions fixées au niveau européen ? Madame la secrétaire d'État, il me tarde de connaître la réponse à ces questions !

Cela étant dit, monsieur le président, je retire mon amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Il s'agit donc de l'amendement n° 54 rectifié bis.

Vous avez la parole pour le défendre, madame Blandin.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

Le raisonnement de M. le rapporteur, selon lequel il existe, d'une part, des plantes génétiquement modifiées dangereuses, qu'il faut interdire partout, et, d'autre part, des plantes OGM dépourvues de dangerosité, dont la culture doit être autorisée dans les parcs, est quelque peu manichéen.

Tout d'abord, cette homogénéité trahit complètement la notion de territoire privilégié pour la biodiversité, et méconnaît les formes de développement que sont les parcs, ainsi que les chartes qui les portent et les définissent.

Ensuite, un impact de culture OGM ne se résume pas à sa dangerosité. Heureusement pour nous, d'ailleurs, car nous serions tous en train de faire nos valises ! Cet impact est aussi défini par la modification de la biodiversité qu'il entraîne. Ainsi, la commission nationale qui a en charge les parcs et qui valide les chartes promeut-elle un nombre croissant d'indicateurs, afin d'examiner si cette biodiversité est préservée ou, au contraire, si elle est altérée. Et nous savons que les cultures d'OGM vont les altérer.

Enfin, qui soumet les chartes des parcs pour validation au niveau national ? Ce sont les conseils régionaux ! Or, ils se sont manifestés lors des débats du Grenelle de l'environnement afin de porter haut et fort la revendication de création de territoires sans OGM.

Notre Constitution ne permet pas aujourd'hui, dans le cadre d'une décentralisation coûteuse mais chichement concédée, de réaliser cet objectif. Ce serait pourtant une belle opportunité, madame la ministre, monsieur le rapporteur, de montrer que la décentralisation ne se paie pas de mots et que, sur le territoire des parcs tout au moins, on en tient compte !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

En matière de préservation de la biodiversité, il faut être très clair ! Tous les avis de l'INRA, et nos dernières discussions avec sa directrice générale l'ont confirmé, indiquent clairement que la présence de plantes génétiquement modifiées ne menace pas la biodiversité.

Mais j'en viens au coeur du sujet. La mesure que vous proposez, madame Blandin, est anti-communautaire ! Il n'a d'ailleurs échappé à personne que la demande émanant de l'ensemble des régions, qui revendiquent le droit d'être des « territoires sans OGM », est en fait une posture.

Or si l'on observe ce qui se passe dans d'autres pays, on constate qu'une telle posture, lorsqu'elle est adoptée par les régions, n'a jamais beaucoup de résultats, ces collectivités étant alors sanctionnées par la Commission européenne.

J'ajoute, sans vouloir être désagréable, qu'une posture n'est jamais bien éloignée de l'imposture...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

Sur ce point précis, il est hors de question d'accéder à la demande formulée dans l'amendement n° 54 rectifié bis.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

La parole est à M. Pierre Laffitte, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laffitte

Sur le principe, cet amendement me paraît parfaitement raisonnable.

Mais, compte tenu des avis émis par le Gouvernement et par la commission, je pense qu'il est important de revenir à la proposition, approuvée par le ministère, tendant à faire participer les collectivités locales au comité de biovigilance, d'une part, et à la Haute autorité, d'autre part.

Ce point me paraît fondamental. Les acteurs de proximité doivent pouvoir s'exprimer sur ces sujets, au même titre que les diverses associations, et il est souhaitable qu'une telle disposition soit introduite dans le projet de loi.

Pour ma part, je m'abstiendrai sur l'amendement n° 54 rectifié bis.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

La demande de M. Laffitte a déjà été entendue, puisque nous avons rectifié préalablement un amendement en ce sens. Les représentants des collectivités locales font désormais partie du comité de la société civile du futur Haut conseil.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Effectivement !

La parole est à M. Gérard Longuet, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

Je remercie M. Soulage d'avoir retiré son amendement, même si celui-ci a été repris.

Pour ma part, j'aurais voté contre. En effet, pour avoir soutenu pendant douze ans un parc naturel régional, en tant que président de région, je tiens à vous dire que les parcs naturels régionaux sont d'abord des espaces ruraux vivants, au sein desquels travaillent des artisans, des salariés et des agriculteurs qui souhaitent bénéficier des meilleures chances de réussite.

Si nous voulons démotiver et démobiliser les élus ruraux, les agriculteurs, les artisans ruraux et les éloigner des parcs naturels, continuons à accumuler les contraintes ! D'ailleurs, nous recevons déjà des requêtes de conseils municipaux qui, pour manifester leur mauvaise humeur, demandent à quitter les parcs naturels régionaux. C'est exactement le contraire de ce que nous souhaitons faire !

C'est la raison pour laquelle nous devons repousser cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

La parole est à M. Jacques Gautier, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Gautier

M. Jacques Gautier. Je suivrai l'avis défavorable de M. le rapporteur. En effet, les mêmes régions qui ont fait ces effets d'annonce créent des terminaux pour importer les plants de soja OGM. Il faut savoir ce que l'on veut !

Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 227 rectifié, présenté par M. Soulage et les membres du groupe Union centriste-UDF, est ainsi libellé :

Après le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 663-8 du code rural, insérer quatre alinéas ainsi rédigés :

« Afin de prévenir la contamination des cultures non génétiquement modifiées par des essais en plein champ ou des mises en culture d'organismes génétiquement modifiés, des zones de protection peuvent être créées dans le périmètre desquelles l'autorité administrative interdit l'implantation de cultures d'organismes génétiquement modifiés.

« Les distances de protection s'entendent par nature de culture. Elles sont fixées par le ministère en charge de l'agriculture.

« Elles sont définies comme les distances à partir desquelles la dissémination entre les cultures est inférieure au seuil réglementaire. Ces distances prennent notamment en considération les distances de pollinisation, et pourront être pondérées par les tailles relatives des champs émetteurs et donneurs, les caractéristiques des vents dominants, la synchronisation des floraisons et l'hétérogénéité spatiales (haies, relief).

« Ces distances pourront être révisées tous les deux ans, sur la base de travaux scientifiques.

L'amendement n° 228 rectifié, présenté par M. Soulage et les membres du groupe Union centriste-UDF et M. Lafitte, est ainsi libellé :

Après le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 663- du code rural, insérer quatre alinéas ainsi rédigés :

« Afin de prévenir la contamination des cultures non génétiquement modifiées par des essais en plein champ ou des mises en culture d'organismes génétiquement modifiés, des zones de protection peuvent être créées dans le périmètre desquelles l'autorité administrative interdit l'implantation de cultures d'organismes génétiquement modifiés.

« Ces distances de protection sont de 100 mètres pour les cultures conventionnelles et de 300 mètres pour les cultures biologiques, pour les cultures allogames. Elles s'entendent par nature de culture.

« Elles peuvent cependant être réduites en tenant compte des tailles relatives des champs émetteurs et donneurs, des caractéristiques des vents dominants, de la synchronisation des floraisons et de l'hétérogénéité spatiales (haies, relief).

« Ces distances pourront être révisées tous les deux ans, sur la base de travaux scientifiques.

La parole est à M. Daniel Soulage.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Soulage

Monsieur le président, si vous n'y voyez pas d'inconvénient, je commencerai par présenter l'amendement n° 228 rectifié.

Les OGM suscitent des craintes, voire un rejet chez nos concitoyens et chez les agriculteurs biologiques, même s'ils représentent un atout pour notre agriculture. C'est pourquoi il est indispensable de permettre, dans un premier temps, une coexistence des cultures, en prévoyant une séparation physique stricte des cultures OGM, conventionnelles et biologiques par des zones de protection qui permettront de garantir une étanchéité entre les cultures transgéniques et les autres, afin de faciliter leur coexistence.

Je propose donc que l'autorité administrative fixe des intervalles obligatoires entre les champs de 100 à 300 mètres suivant le type d'agriculture pratiquée, ce qui est comparable aux distances fixées par le décret actuellement soumis au Bundesrat pour ratification. Ces espacements ont été fixés sur la base d'expertises scientifiques et devraient prévenir à peu près totalement la pollinisation et la contamination des cultures traditionnelles par les OGM : à une distance de 100 mètres, le risque de croisement entre espèces n'est plus que de 0, 5 %.

Actuellement, la France recommande 25 mètres de distance minimum entre production de maïs OGM et production conventionnelle. Or, à 50 mètres, on détecte encore 1 % de pollen OGM, ce qui est supérieur au seuil réglementaire d'étiquetage de 0, 9 %. Si l'on veut protéger efficacement les différentes filières, il est donc indispensable de prévoir un espacement suffisant entre les cultures concernées. Cet espacement doit être calculé de parcelle à parcelle, en prenant en compte l'exploitation dans son ensemble.

Enfin, il faudra prendre en compte l'historique des cultures sur les parcelles concernées, afin de s'assurer qu'un agriculteur ne se convertit pas au bio « par opportunisme » ou qu'il ne se lance pas dans la culture du maïs seulement pour éviter que son voisin ne puisse semer du maïs OGM.

La réglementation sur ces zones de protection devra, en outre, être régulièrement révisée à la lumière des nouvelles découvertes scientifiques.

Par ailleurs, le décret prévu par l'article 3 du projet de loi fixera les éventuels assouplissements à ces distances, liés au relief, au décalage des semis, à la séparation des récoltes, à la densité de cultures OGM, aux vents dominants, etc. On n'improvise rien : ce sont des méthodes que nous connaissons et que nous appliquons, en particulier pour les semences de maïs.

Enfin, ces zones de protection ne s'appliquent bien sûr qu'aux seules cultures allogames, comme le maïs.

J'en viens à l'amendement n° 227 rectifié. Il vise à mettre en oeuvre des distances de protection entre les cultures OGM et les autres types de cultures, propres à rassurer nos concitoyens ainsi que les agriculteurs biologiques, qui se sentent condamnés par les cultures d'OGM.

Au niveau européen, le projet SIGMEA, piloté en France par l'Institut national de la recherche agronomique, l'INRA, a été lancé en 2004 pour rassembler et analyser l'ensemble des données européennes sur le flux de gènes et les impacts environnementaux des principales espèces concernées par les OGM - maïs, colza, betterave, riz, blé -, analyser la faisabilité technique et la pertinence économique de la coexistence dans les principales régions européennes, proposer des outils d'aide à la décision publique et privée, et formuler des recommandations en termes de gestion et de gouvernance.

Les scientifiques ont ainsi déterminé toute une série de facteurs propres à limiter la dissémination des gènes modifiés, de façon à respecter le seuil réglementaire de 0, 9 %.

Je cite directement les conclusions d'Antoine Messéan, directeur de l'unité Impacts écologiques des innovations en production végétale de l'INRA, concernant cette étude : « Les différents résultats obtenus par SIGMEA montrent que les probabilités sont graduées suivant le contexte cultural et suivant les caractéristiques de l'OGM envisagé.

« Pour le maïs, dans certaines situations, il peut suffire d'organiser la récolte séparément (à condition d'un accord entre agriculteurs) pour satisfaire des seuils même inférieurs au seuil réglementaire de 0, 9 %. Sinon, des mesures comme des décalages de semis ou des distances d'isolement sont efficaces mais elles ne sont pas toujours faciles à appliquer. En cas de très grande densité de maïs ou pour des espèces comme le colza, la séparation géographique entre cultures OGM et cultures conventionnelles est la solution raisonnable.

« Enfin, pour les filières telles que l'agriculture biologique qui revendiquent une absence totale d'OGM dans leurs productions, la coexistence à l'échelle locale est en revanche techniquement impossible dans la plupart des cas ».

On peut trouver cette citation sur Internet. Ce n'est un secret pour personne !

Il est donc nécessaire de disposer de véritables zones de protection entre les différents types de cultures afin de permettre leur coexistence.

Les travaux de l'INRA ont mis en exergue que la taille relative des champs émetteurs et donneurs, la distance, la synchronisation des floraisons et les caractéristiques du vent sont les facteurs principaux expliquant les niveaux de pollinisation croisée entre champs de maïs. C'est pourquoi nous proposons que les ministres en charge de l'agriculture et de l'environnement définissent des distances de protection adaptées à chaque culture et à chaque zone de culture en fonction des différents critères énoncés.

Au moment où nous parlons, toutes les études d'opinion montrent qu'il existe un réel engouement pour les produits bios. Par ailleurs, le Grenelle de l'environnement a prévu que la production de l'agriculture biologique devait être multipliée par trois. Si nous voulons atteindre cet objectif, il faut que nos producteurs bios aient retrouvé la confiance.

La confiance, ils ne la retrouveront ni dans la lecture des articles publiés, ni en se référant à ce qui s'est passé ces dernières semaines ou ces derniers mois Si la science a avancé, il faut que les vérités soient démontrées à l'échelon local. J'invite donc à mettre en place, dans la transparence, une série d'essais dont les résultats seront publiés sous le contrôle de l'INRA.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Soulage

Je suis plutôt partisan d'une sévérité accrue à l'égard des faucheurs, car personne n'a le droit de mettre à mal le travail des scientifiques, mais il faut que la paix revienne. Par conséquent, gardons à l'esprit l'importance d'apaiser ceux qui se consacrent à une agriculture plus respectueuse de l'environnement. Ils ont d'autant plus besoin d'être rassurés sur la permanence de leurs activités que, à lire certains rapports, l'isolement ne pourrait être organisé que par région. Il ne reste donc plus à l'agriculteur biologique qu'à se préparer à la délocalisation !

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Le Cam

Pour un peu, on les enverrait à Guantanamo !

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Soulage

Le plus important, c'est de reconquérir la confiance perdue.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

l'amendement n° 227 rectifié et ce, pour trois raisons.

D'abord, parce qu'elle ne partage pas l'approche qui est celle de M. Soulage en termes de contamination.

Ensuite, parce que les prescriptions techniques doivent permettre la coexistence des cultures. Or ce qui est prévu ici, c'est l'exclusion des champs de plantes génétiquement modifiées, sans tenir aucun compte des recommandations des chercheurs qui ont mis en évidence la possibilité d'organiser la coexistence des cultures. C'est sur ce socle que repose l'architecture de l'ensemble du texte.

Enfin, parce que le droit communautaire ne permet pas de décréter des zones d'interdiction des OGM. Nous en revenons au principe posé par l'article 1er du projet de loi, la liberté de produire, avec ou sans OGM. Si cet amendement était adopté, cette liberté fondamentale serait compromise.

Avec une honnêteté intellectuelle à laquelle je rends hommage, l'auteur de cet amendement a souligné que, si certaines cultures non OGM étaient opportunément ou malicieusement localisées, cela empêcherait la culture de champs en OGM. Il a ainsi montré le danger de cet amendement, dont l'adoption rendrait impossible la culture OGM sur une certaine surface du territoire.

Je salue, à ce propos, les commentaires de notre collègue Gérard Longuet : si les parcs naturels régionaux méritent, plus que d'autres, une attention, ce ne sont pas des sanctuaires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

Nous devons veiller à ne pas en faire des ghettos, sauf à les voir peu à peu se désertifier, par le départ des acteurs et des créateurs de richesses eux-mêmes.

Daniel Soulage a appelé au retour à la confiance. Il a tout à fait raison ! Je peux regarder Michel Mercier droit dans les yeux et lui dire que la confiance, nous l'avons rétablie il y a quelques années en votant la Charte de l'environnement. Vous étiez présent, mon cher collègue, comme Mme la secrétaire d'État, alors rapporteur du texte à l'Assemblée nationale.

Ce principe de précaution est là pour restaurer la confiance. C'est aussi un principe d'action, un principe d'anticipation, non un principe de suspicion, comme il est malheureusement de plus en plus perçu par nos concitoyens.

Je rejoins donc notre collègue Daniel Soulage dans son acte de foi, que je ne veux pas croire sans lendemain. Mais, honnêtement, je ne peux, au nom de la commission, que donner un avis défavorable sur l'amendement n° 227 rectifié.

Sur l'amendement n° 228 rectifié, l'avis est également défavorable, en raison d'une connotation de nature réglementaire inappropriée.

Debut de section - Permalien
Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État

L'amendement n° 228 rectifié nous gêne dans la mesure où il revient à fixer dans la loi des distances révisables tous les deux ans. Or, ces distances doivent être fixées à l'échelon réglementaire, conformément à l'article L.663-8 du code rural.

Le Gouvernement est donc clairement défavorable à l'amendement n° 228 rectifié.

L'amendement n° 227 rectifié pose des problèmes différents. Le Gouvernement pourrait être favorable au premier et au quatrième paragraphe.

Il n'en va pas de même du troisième paragraphe, les précisions qu'il contient ne nous semblant pas relever de la loi.

Le deuxième paragraphe ne nous convient pas non plus : le Gouvernement a, en effet, déposé un sous-amendement - nous l'examinerons ultérieurement - pour que les distances soient fixées par le ministère en charge de l'agriculture, après avis du Haut conseil des biotechnologies et du ministère en charge de l'environnement.

Telles sont les raisons pour lesquelles, en l'état, nous ne pouvons pas être favorables à l'amendement n° 227 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Monsieur Daniel Soulage, maintenez-vous ces amendements ?

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Soulage

Je retire d'ores et déjà l'amendement n° 228 rectifié, car la fixation des distances est d'ordre réglementaire.

Je suis prêt à modifier une nouvelle fois la rédaction de l'amendement n° 227 rectifié, pour tenir compte des souhaits de Mme la ministre.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Mercier

Pour prendre en considération ce qu'a dit Mme la ministre et recueillir un avis favorable du Gouvernement, nous sommes prêts à supprimer le paragraphe 3 et à modifier le paragraphe 2 de l'amendement n° 227 rectifié

Nous pourrions prévoir que, pour la fixation des distances, le ministère de l'environnement sera associé au ministère de l'agriculture. A moins que nous ne nous contentions de mentionner « par l'autorité réglementaire », sans plus de précision !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Pour la clarté du débat, je vais faire le point.

Serait conservé le paragraphe 1. Le paragraphe 2 pourrait être ainsi rédigé : « Les distances de protection s'entendent par nature de culture. Elles sont fixées par les ministères en charge de l'agriculture et de l'environnement. » Le paragraphe 3 serait supprimé et le paragraphe 4, conservé.

La parole est à M. le vice-président de la commission.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard César

Pour clarifier le débat et nous permettre d'étudier en profondeur les rectifications proposées, je demande une suspension de séance.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Richert

Le Sénat va, bien sûr, accéder à votre demande.

Nous allons donc interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à douze heures quarante, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Christian Poncelet.