Séance en hémicycle du 16 juin 2011 à 9h30

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • consentement
  • d’hospitalisation
  • hospitalisation
  • malade
  • mentale
  • médecin
  • médical
  • psychiatre
  • psychiatrique

La séance

Source

La séance est ouverte à neuf heures trente-cinq.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

M. le président du Sénat a reçu de M. Christian Noyer, gouverneur de la Banque de France, le rapport pour 2010 sur les opérations de la Banque de France, la politique monétaire et ses perspectives, établies en application de l’article L. 143-1 du code monétaire et financier.

Acte est donné du dépôt de ce rapport.

Ce rapport sera transmis à la commission des finances.

Il sera disponible au bureau de la distribution.

(Texte de la commission)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

L’ordre du jour appelle l’examen, en procédure accélérée, du projet de loi autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République italienne relatif à la restauration du patrimoine architectural de la ville de L’Aquila (projet n° 534, texte de la commission n° 607, rapport n° 606).

Pour ce projet de loi, la conférence des présidents a retenu la procédure d’examen simplifié.

Je vais donc le mettre aux voix.

Est autorisée l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République italienne relatif à la restauration de l’église Sainte-Marie-du-Suffrage, dite des Ames Saintes, à L’Aquila, signé à Rome, le 26 octobre 2010, et dont le texte est annexé à la présente loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

Je mets aux voix l’article unique constituant l’ensemble du projet de loi autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République italienne relatif à la restauration du patrimoine architectural de la ville de L’Aquila.

Le projet de loi est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

L’ordre du jour appelle la discussion en deuxième lecture du projet de loi, adopté avec modifications par l’Assemblée nationale en deuxième lecture, relatif aux droits et à la protection des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge (projet n° 566, texte de la commission n° 590, rapport n° 589).

Dans la discussion générale, la parole est à Mme la secrétaire d’État.

Debut de section - Permalien
Nora Berra, secrétaire d'État auprès du ministre du travail, de l'emploi et de la santé, chargée de la santé

Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, le texte que vous examinez aujourd’hui en deuxième lecture vise, je le rappelle, à réformer la loi du 27 juin 1990 relative aux droits et à la protection des personnes hospitalisées en raison de troubles mentaux et à leurs conditions d’hospitalisation.

Les fondements de cette loi de 1990 ne sont pas controversés et nous tenons à les préserver. Ils prévoient en effet que les soins psychiatriques libres sont la règle et que, par exception, sont prévues des hospitalisations sous contrainte lorsque l’état du patient le justifie.

Le projet de loi permet que ces prises en charge comprennent des soins ambulatoires et pas seulement l’hospitalisation complète. Une telle mesure est favorable à l’alliance thérapeutique que le médecin recherche toujours avec son patient.

Le projet de loi permet aussi qu’une personne isolée puisse être soignée, en cas de péril imminent, même lorsqu’il n’est pas possible de recueillir la demande d’un proche.

Ces dispositions essentielles, qui renforcent les droits et les libertés des patients, vous les avez approuvées en première lecture et elles n’ont pas été modifiées par l’Assemblée nationale.

Je rappelle également que le texte apporte un soin particulier à la situation de certains patients atteints de troubles très spécifiques, pour lesquels les dangers liés à une rechute paraissent plus sérieux : il s’agit des patients qui sont hospitalisés d’office – ou qui l’ont été depuis moins de dix ans – soit pour irresponsabilité pénale, soit en unité pour malades difficiles.

Pour ces patients, dont le nombre est extrêmement limité, le projet de loi prévoit d’étayer la demande de sortie par un avis collégial et pluriprofessionnel. Là encore, il s’agit d’une disposition importante, qui fait l’objet d’un consensus entre les deux assemblées.

Vous avez souhaité supprimer le caractère explicite de la décision du préfet saisi d’une demande de sortie de courte durée de tels patients. Votre position a été confirmée par l’Assemblée nationale.

Enfin, l’Assemblée nationale a pris des positions identiques aux vôtres concernant la réponse à la question prioritaire de constitutionnalité de novembre dernier. Il s’agit, je vous le rappelle, de soumettre au contrôle systématique du juge des libertés et de la détention le bien-fondé des hospitalisations complètes sous contrainte dès lors que la durée de ces dernières excède quinze jours, puis six mois. Cette saisine automatique s’ajoute à la saisine facultative, exercée à tout moment par la personne soignée.

Il en est de même pour la question de l’unification du contentieux que M. René Lecerf, rapporteur de la commission des lois, a souhaité introduire, et dont l’Assemblée nationale a précisé la portée.

Désormais, le texte prévoit en effet que le juge des libertés et de la détention sera compétent pour statuer uniquement sur les irrégularités des décisions administratives de placement, de prolongation et de renouvellement. Pour leur part, les demandes d’indemnisation seront faites devant le tribunal de grande instance. Cette précision semble opportune, le tribunal de grande instance étant, en effet, naturellement compétent en cette matière.

Le Gouvernement ne peut que saluer cette ligne convergente entre vos deux assemblées et les améliorations que chacune d’entre elles a apportées à ce jour.

L’examen en deuxième lecture par le Sénat de ce texte permettra d’étudier la réponse à la question prioritaire de constitutionnalité rendue par le Conseil constitutionnel le 9 juin dernier.

Dans cette décision, le Conseil constitutionnel a indiqué tout d’abord que l’hospitalisation d’office ne pouvait être maintenue au-delà de quinze jours sans intervention d’une juridiction de l’ordre judiciaire. Il s’agit d’une décision similaire à celle qu’il avait prise en novembre dernier, qui concernait uniquement les personnes hospitalisées à la demande d’un tiers.

Le texte que vous avez examiné jusqu’à présent répond à cette demande du Conseil constitutionnel, puisque nous avons appliqué le principe de la saisine automatique aux deux types de mesures : mesure prise par le directeur et mesure prise par le préfet.

Dans sa décision du 9 juin, le Conseil constitutionnel a également relevé que, contrairement à l’hospitalisation sans consentement, si le certificat médical établi dans les vingt-quatre heures suivant l’admission ne confirme pas que l’intéressé doit faire l’objet de soins en hospitalisation, la législation en vigueur ne prévoit aucun réexamen de la situation de la personne hospitalisée de nature à assurer que l’hospitalisation d’office est nécessaire.

Le Conseil constitutionnel a jugé que, en l’absence d’une telle garantie, cette disposition de la loi de 1990 n’assure pas que l’hospitalisation d’office est réservée aux cas dans lesquels elle est adaptée, nécessaire et proportionnée à l’état du malade ainsi qu’à la sûreté des personnes ou à la préservation de l’ordre public.

Il a, en conséquence, déclaré contraire à la Constitution l’ensemble de l’article L. 3213-1 du code de la santé publique et a fixé au 1er août 2011 la prise d’effet de la déclaration d’inconstitutionnalité.

Le Gouvernement, entendant préciser ce point, a donc déposé un amendement à ce sujet. Il souhaite que le rappel de ce principe ait une portée générale et qu’ainsi, à tout moment au cours d’une hospitalisation complète d’office – et pas seulement à l’entrée –, le préfet mette fin à la mesure ou la transforme en forme alternative à l’hospitalisation complète dès lors qu’il en reçoit la demande par le psychiatre de l’établissement et que cette demande est confirmée par un deuxième avis.

Le Gouvernement souhaite également étendre ce principe aux personnes hospitalisées pour irresponsabilité pénale et aux personnes soignées en unité pour malades difficiles, dans le respect des procédures particulières de sortie prévues par le projet de loi.

De telles dispositions complètent le principe de saisine automatique du juge des libertés et de la détention, déjà prévu dans le texte, lorsque le psychiatre propose la fin de la mesure sous forme d’hospitalisation complète – ce que l’on a appelé une « sortie sèche » – et que le préfet ne suit pas cet avis.

L’articulation entre les deux principes aboutira à ceci : lorsque les deux avis médicaux sont concordants pour une sortie, celle-ci sera ordonnée par le préfet ; lorsqu’ils sont divergents, c’est-à-dire lorsque la proposition de sortie émise par le psychiatre n’est pas confirmée par son confrère, alors, si le préfet n’ordonne pas la sortie, le cas sera soumis au contrôle systématique du juge des libertés et de la détention.

La mise en œuvre concrète de ce nouveau dispositif fera l’objet de l’attention toute particulière du Gouvernement : elle sera suivie et évaluée en continu, notamment au travers des travaux des commissions départementales des soins psychiatriques, les CDSP.

Par ailleurs, et comme je l’ai dit à plusieurs reprises, la psychiatrie a besoin non pas seulement de mesures législatives et réglementaires, mais aussi de sens et de grandes orientations quant à son devenir, pour que les acteurs de terrain réfléchissent ensuite aux dispositifs les mieux adaptés aux spécificités locales. Notre pays doit rediscuter des grands objectifs de la psychiatrie et des axes nationaux d’amélioration prioritaires ; nombre d’entre eux ont d’ailleurs été abordés au cours des débats parlementaires.

Je veux que les personnes qui entrent dans la maladie soient aidées et soignées plus rapidement qu’aujourd’hui. Je veux que les ruptures de prise en charge diminuent et que les aidants soient mieux accompagnés. Je veux que les situations d’urgence psychiatrique trouvent, en tout endroit du territoire national, une réponse adaptée.

Debut de section - Permalien
Nora Berra, secrétaire d'État

Je veux aussi que nos concitoyens, quel que soit le lieu où ils habitent, y compris lorsque leur suivi est assuré par le secteur médico-social, bénéficient d’une qualité de soins d’un niveau équivalent.

Je veux que, à partir d’un diagnostic partagé, de telles orientations soient débattues et élaborées avec les représentants des usagers, des professionnels, des employeurs, des sociétés savantes.

C’est avant tout à ces sujets majeurs que je veux consacrer les prochains mois, et c’est à travers le plan Psychiatrie et santé mentale, pour lequel j’ai demandé votre appui, monsieur le rapporteur, que cette construction collective sera menée.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

On espère que ce ne sera pas une coquille vide, madame la secrétaire d'État !

Debut de section - Permalien
Nora Berra, secrétaire d'État

Mesdames, messieurs les sénateurs, les travaux intenses que vous avez conduits avec les députés ont permis d’aboutir à un texte accompli et nuancé, chacun étant mieux à même de jouer son rôle en faveur d’un profond respect des droits des patients.

Debut de section - Permalien
Nora Berra, secrétaire d'État

La psychiatrie pourra ainsi se tourner résolument vers la prise en charge ambulatoire de toutes les personnes qui en ont besoin.

Ce texte s’inscrit dans l’évolution majeure que les psychiatres ont eux-mêmes donnée à leurs pratiques. Il apporte des garanties supplémentaires à l’ensemble des acteurs concernés, en mettant au cœur du dispositif le psychiatre et l’équipe soignante, lesquels visent un seul objectif : l’accès aux soins, la continuité de ces soins, l’alliance thérapeutique, la protection des personnes et le respect des libertés.

La réponse à la question prioritaire de constitutionnalité du 9 juin dernier nous donne l’occasion de finaliser la transformation de la législation relative aux hospitalisations sous contrainte, en conservant la construction historique du dispositif et en confirmant le caractère sanitaire de telles mesures.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Lorrain

Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, le Sénat est appelé à examiner, en deuxième lecture, le projet de loi relatif aux droits et à la protection des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge.

Ce texte, attendu depuis longtemps, apporte des modifications essentielles aux règles actuelles de l’hospitalisation sous contrainte.

Il tend à dissocier l’obligation de soin et les modalités des soins, en prévoyant la possibilité pour des patients de faire l’objet de soins sans leur consentement sous une autre forme que l’hospitalisation complète. Après une période d’observation d’une durée maximale de soixante-douze heures, le directeur de l’établissement ou le préfet, selon le régime sous lequel la personne a été admise en soins sans consentement, décidera de la forme de la prise en charge.

Les soins sous une autre forme que l’hospitalisation complète incluront des soins ambulatoires et pourront comporter des soins à domicile et, le cas échéant, des séjours effectués dans un établissement habilité à recevoir des personnes hospitalisées sans leur consentement.

Le projet de loi, pour répondre aux exigences formulées par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 26 novembre 2010, introduit une saisine obligatoire du juge des libertés et de la détention sur toutes les mesures d’hospitalisation sans consentement. Celui-ci devra se prononcer dans les quinze jours de l’admission, puis tous les six mois.

Le texte prévoit, en outre, une procédure renforcée pour la levée des soins sans consentement lorsqu’elle concerne des personnes ayant séjourné en unité pour malades difficiles ou ayant fait l’objet d’une déclaration d’irresponsabilité pénale. Le préfet et le juge, lorsqu’ils statueront sur le sort de ces personnes, devront recueillir l’avis d’un collège composé de deux psychiatres et d’un membre de l’équipe pluridisciplinaire, ainsi que deux expertises psychiatriques.

Pour prendre en compte la situation des personnes isolées, le projet de loi crée une nouvelle procédure d’admission en soins sans consentement en cas de péril imminent. Cette procédure permettra une hospitalisation en l’absence de tiers demandeur sur la base d’un seul certificat médical.

Les travaux parlementaires ont permis de préciser de nombreux points et d’apporter des compléments utiles au projet de loi.

Ainsi, en première lecture, l’Assemblée nationale a prévu un « droit à l’oubli » pour les personnes ayant séjourné en unité pour malades difficiles ou ayant fait l’objet d’une déclaration d’irresponsabilité pénale, afin que la procédure renforcée ne leur soit plus applicable après une certaine durée. Elle a aussi prévu une saisine du juge des libertés et de la détention en cas de désaccord entre le médecin et le préfet sur la levée d’une mesure d’hospitalisation complète.

De son côté, le Sénat a apporté des précisions à la notion de soins hors de l’hôpital sans le consentement du patient. Il a notamment remplacé la notion de « protocole » de soins par celle de « programme » de soins. Il a en outre fait référence à des lieux de soins plutôt qu’à des formes de soins. Il a précisé les conditions d’élaboration et de modification du programme de soins, en instituant un entretien entre le psychiatre et le patient.

Par ailleurs, la Haute Assemblée a amélioré fortement les règles relatives à l’audience du juge des libertés et de la détention, en prévoyant la possibilité que celui-ci tienne l’audience au sein de l’établissement d’accueil, en encadrant le recours à la visioconférence et en permettant la tenue d’une audience non publique pour protéger le malade. Par ailleurs, en cas de levée d’une mesure d’hospitalisation complète, le juge pourra ordonner que cette mainlevée prenne effet dans un délai maximal de vingt-quatre heures, afin de mettre éventuellement en place l’élaboration d’un programme de soins.

Enfin, le Sénat a fixé à dix ans la durée de la période à l’issue de laquelle s’appliquera le « doit à l’oubli ».

En deuxième lecture, l’Assemblée nationale est revenue sur certaines modifications apportées par le Sénat sur les soins hors de l’hôpital, mais a conservé les précisions relatives au programme de soins et à son élaboration.

Elle a aussi prévu que les personnes susceptibles d’être admises en soins psychiatriques sans consentement et prises en charge en urgence doivent être transférées vers un établissement psychiatrique dans un délai maximal de quarante-huit heures, mais que la période initiale d’observation et de soins commence dès le début de la prise en charge.

Elle a enfin adopté un amendement tendant à réécrire l’article du code de la santé publique sur l’organisation territoriale de la mission de service public de prise en charge des personnes en soins psychiatriques sans consentement.

Compte tenu des progrès accomplis au cours des navettes pour améliorer et pour clarifier les dispositions de ce projet de loi qui doit impérativement entrer en vigueur dès le 1er août prochain et dont certaines dispositions, tel le contrôle du juge des libertés et de la détention sur les mesures d’hospitalisation, sont particulièrement attendues, la commission des affaires sociales n’a pas adopté d’amendement au texte voté par l’Assemblée nationale.

Toutefois, depuis lors, le Conseil constitutionnel a rendu une importante décision relative à l’hospitalisation d’office, qui a confirmé une précédente décision du 26 novembre 2010 s’agissant de l’intervention d’un juge pour vérifier le bien-fondé des mesures d’hospitalisation sous contrainte.

Cette décision a également apporté des précisions nouvelles sur le rôle du préfet. Ainsi, lorsqu’un psychiatre estime qu’une mesure d’hospitalisation complète n’est plus justifiée et que le préfet la maintient néanmoins, un second examen médical doit être réalisé. Pour le Conseil constitutionnel, si ce second examen aboutit à la même conclusion que le premier, le préfet doit lever la mesure d’hospitalisation.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Lorrain

Le Gouvernement a déposé un amendement tendant à insérer un article additionnel après l’article 3 pour répondre aux exigences du Conseil constitutionnel, en permettant un nouvel examen médical lorsqu’un certificat prévoit la levée d’une mesure d’hospitalisation et que le préfet décide de maintenir la mesure. Je vous propose, mes chers collègues, d’adopter cet amendement important.

Au cours des prochains mois, nous devrons être très vigilants sur la mise en œuvre de la loi, …

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Lorrain

… et devrons vérifier que celle-ci se passe dans de bonnes conditions sur le terrain.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Lorrain

Il faudra que les dispositions réglementaires soient particulièrement claires pour faciliter le travail des différents acteurs.

À cet égard, compte tenu du grand nombre de dispositions qui prévoient la transmission à différentes autorités d’informations confidentielles sur les patients, il paraît nécessaire que la mise en œuvre de ces mesures fasse l’objet d’un décret en Conseil d’État, dans le respect des règles posées par la loi relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés.

Par ailleurs, madame la secrétaire d'État, le plan de santé mentale que présentera le Gouvernement à l’automne prochain devra être véritablement ambitieux pour que les nouvelles procédures prévues par la loi puissent être applicables. Je réaffirme mon souhait que notre assemblée soit consultée sur le contenu de ce plan avant sa présentation à l’automne prochain.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Il faut que l’on puisse en discuter avec les professionnels !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Lorrain

En conclusion, ce projet de loi n’est sans doute pas parfait, …

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Lorrain

… mais il permettra des avancées considérables pour les patients. Les malades bénéficieront de droits plus étendus, …

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Lorrain

… leur situation sera régulièrement examinée par un juge, …

Nouveaux sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Lorrain

… et ils pourront être pris en charge dans d’autres lieux que l’hôpital psychiatrique.

Pour toutes ces raisons, je vous propose, mes chers collègues, de l’adopter. §

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Rétablissez la vérité, mon cher collègue !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacky Le Menn

Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, avec ce projet de loi qui nous est soumis en deuxième lecture, le Gouvernement persiste et signe, nonobstant tous les signaux forts qui lui ont été adressés tant à l’extérieur du Parlement, par l’ensemble des milieux professionnels concernés et les associations de malades, qu’à l’intérieur, au Sénat et à l’Assemblée nationale, non seulement par les parlementaires de l’opposition, mais également par certains de la majorité présidentielle qui l’ont averti des impasses vers lesquelles le conduisait ce projet de circonstance.

En effet, ce texte n’a absolument rien à voir avec la grande loi globale de santé mentale que nos concitoyens attendaient, contrairement à ce que nous a déclaré en commission, le 8 juin dernier, M. le rapporteur, ce que je lui ai du reste fait remarquer.

Madame la secrétaire d'État, le 31 mai dernier, lors de la deuxième lecture à l'Assemblée nationale, votre majorité a encore aggravé les choses par rapport au texte adopté en première lecture par le Sénat.

Ainsi, l’Assemblée nationale, sur l’initiative de son rapporteur, M. Lefrand, appelle à la rescousse la technique de la dissimulation s’agissant de la possibilité, en psychiatrie, de recourir légalement aux soins sans consentement. De ce fait, elle fait disparaître de l’ensemble du texte la référence aux soins sans consentement. Il est désormais proposé d’utiliser systématiquement une périphrase renvoyant aux nouvelles dispositions légales applicables.

Il s’agit là d’une modification que l’on peut aisément qualifier d’hypocrite, dès lors qu’elle consiste à ne plus écrire ce qui dérange, tout en ne changeant rien sur le fond.

En outre, et c’est plus grave, on peut noter que cette façon de faire est source d’ambiguïté pouvant être préjudiciable à l’ensemble des patients, y compris à ceux qui sont en soins « libres ». Tout cela est fort regrettable.

En première lecture, lors de mon intervention dans la discussion générale, j’ai déjà eu l’occasion de préciser en quoi ce projet de loi était pernicieux et même franchement dangereux.

J’ai expliqué qu’il ne respectait pas l’esprit de mesure qu’impose le juste équilibre entre trois dispositifs également prioritaires que je vous rappelle : tout d’abord, un dispositif sanitaire au service des malades, car le patient ne doit pas disparaître derrière sa pathologie ; par ailleurs, un dispositif judiciaire garantissant les libertés fondamentales de tous les citoyens, a fortiori lorsqu’ils sont en état de faiblesse ou malades ; enfin, un dispositif de sécurité garantissant l’ordre public, visant à la protection de la société dont doit également bénéficier le malade.

J’ai également déjà fait valoir que le cœur de ce projet ne pouvait faire consensus, tant il est paradoxal. En effet, comment parvenir à soigner quelqu’un sans son consentement, a fortiori à domicile et dans le champ de la psychiatrie ?

Décidément, cette innovation juridico-médicale que constitue la création de la notion de « soins sans consentement en ambulatoire » ne passe pas. En psychiatrie, outre le recours aux médicaments, même très performants, la relation ou l’alliance thérapeutique entre le malade et son thérapeute est essentielle ; elle repose sur la confiance. Il s’agit d’un contrat implicite et souvent explicite qui appelle le consentement du patient si l’on recherche effectivement des résultats thérapeutiques. En la matière, imposer des soins sans consentement en ambulatoire, comme le prévoit ce projet de loi, pose problème.

Permettez-moi maintenant, à titre de témoignage, de rappeler ce qu’a déclaré à la presse le 26 mai dernier la présidente de la Fédération nationale des associations d’usagers en psychiatrie, la FNAPSY, Mme Claude Finkelstein.

« La formulation “soins sans consentement en ambulatoire” au lieu d’hospitalisation sans consentement n’est pas anodine. Jusqu’à présent, on interdisait au patient d’aller et venir librement ; c’est une situation qui peut se justifier mais, tout en étant enfermée, la personne pouvait refuser des soins ».

« Avec les soins sans consentement, on va pouvoir donner des soins de force, donner des molécules de force, ce qui équivaut à violer le corps. » Le terme est fort ! « C’est intolérable pour nous, car on enlève toute liberté à la personne. »

Mme Finkelstein reconnaît qu’actuellement, dans la pratique, des médicaments sont « administrés de force » ; mais la différence est, dit-elle, que « cette pratique sera désormais autorisée par la loi ».

« Nous avions dit que nous voulions un véritable contrat entre le psychiatre et le malade, pour s’assurer que le malade était d’accord pour revenir à son domicile. Or il n’est question que d’un protocole ou d’un programme de soins ».

« Il faut se rendre compte que ramener quelqu’un à son domicile s’il n’est pas d’accord peut se transformer en horreur. Quand la voiture avec le logo de l’hôpital va se garer dans la rue et que l’infirmier va venir sonner à la porte, si la personne ne veut pas le laisser rentrer, elle peut se jeter par la fenêtre. C’est ça le risque, [...] et c’est ce que les gens qui décident ne comprennent pas ».

Pourquoi tant d’incompréhension de votre part, madame la secrétaire d'État, par rapport à la pertinence de ces propos ? Pourquoi persister à vouloir imposer des soins psychiatriques sans consentement en ambulatoire ? Il s’agit là d’une question essentielle, philosophique, voire éthique.

Madame la secrétaire d'État, votre proposition fait peur, non seulement parce que les soins sans consentement en psychiatrie risquent de devenir la règle, mais aussi parce que, comme l’affirment l’Association française des psychiatres d’exercice privé et le Syndicat national des psychiatres privés, l’AFPEP–SNPP, « nous considérons ce projet comme facteur d’exclusion et de stigmatisation de personnes qui auraient besoin bien au contraire de trouver place dans la cité ».

La Commission nationale consultative des droits de l’homme a également souligné ce point, comme on l’a déjà dit. C’est encore ce que ne cessent de vous dire les professionnels qui devront mettre en œuvre cette loi, ainsi que les associations de malades concernées au premier chef.

Comment comptez-vous arriver, en pratique, à faire vivre cette loi contre tant d’oppositions particulièrement fondées ? Comment allez-vous faire pour inculquer cette nouvelle culture médicale et soignante dans le champ de la santé mentale ? Quels moyens supplémentaires allez-vous mettre en place, notamment en personnels médicaux, soignants et de justice ?

Du reste, je relève que, lors d’un débat sur France Culture le 4 juin dernier, un député de votre majorité, M. André Flajolet, a lui-même déclaré d’une manière très lucide que, « effectivement, en l’absence de moyens, cette loi n’est pas applicable ».

Où se trouve le respect de la liberté des patients dans tout cela ?

Persévérer dans cette volonté – je dirai même « dans cette erreur » ! – de vouloir imposer des soins psychiatriques sans consentement à nos concitoyens fragilisés par la maladie mentale nous conduit à subodorer l’amalgame que font le Gouvernement et le Président de la République entre troubles psychiatriques, délinquance et dangerosité. Cet amalgame que nous pressentons, nous le dénonçons avec force et détermination. Il signe le penchant sécuritaire d’un texte que nous ne pouvons accepter.

Du reste, nous retrouvons ce penchant sécuritaire à bien d’autres niveaux dans ce projet. Par exemple, après avoir supprimé les sorties d’essai des malades hospitalisés sans leur consentement, vous introduisez dans le texte un ersatz de fichier psychiatrique des patients ; c’est le cas au douzième alinéa de l’article 3 concernant les sorties de courte durée.

Ainsi, pour les personnes dont les cas sont les plus lourds, celles qui sont passées dans une unité pour malades difficiles ou qui sont entrées en hôpital psychiatrique dans le cadre d’une procédure pénale, le droit à l’oubli est mis à mal et n’interviendra qu’au bout de dix ans. Vous aurez beau dire, madame la secrétaire d'État, ces malades qui ne sont pas les plus faciles – nous ne le réfutons pas – verront la trace de leur passé mise à la disposition des préfets.

En l’occurrence, cette information des préfets nous semble particulièrement critiquable. « Dans ces unités spécialisées [...] les traitements sont puissants ; [...] Après un séjour dans ce type d’établissement, de deux choses l’une : soit la personne est guérie et on ne voit pas la nécessité de garder une trace informatique de ce passage ; soit la personne n’est pas bien stabilisée, est sujette à des rechutes ou des résurgences pathologiques qui sont l’une des caractéristiques des maladies psychiatriques les plus lourdes, et on ne voit pas l’intérêt de la trace préfectorale. [...] Les préfets n’étant pas des médecins, cette information est-elle utile ? Je ne le pense pas. Elle paraît superflue, sauf à considérer, ce qui serait extrêmement grave, que toute personne ayant séjourné dans une unité pour malades difficiles doit être surveillée pendant dix ans après sa sortie. »

Madame la secrétaire d'État, cela vous a été dit par les députés de gauche à l’Assemblée nationale. Permettez-moi, de le répéter à nouveau avec force au nom de mon groupe au Sénat.

Une telle disposition appartient plus au volet sécuritaire, ...

Debut de section - PermalienPhoto de Jacky Le Menn

... que nous dénonçons, qu’au volet thérapeutique. Cela s’apparente à des mesures de sûreté n’ayant rien à voir avec la psychiatrie.

Il fallait un texte pour mieux répondre aux préoccupations des professionnels de santé, et surtout des patients et de leurs familles ; nous le reconnaissons. Mais les réserves que nous émettons sur ce projet de loi sont bien évidemment en rapport avec ce contexte sécuritaire que le Gouvernement entretient délibérément, dans ce texte comme dans d’autres textes qui sont tout aussi importants et dont nous avons eu à débattre récemment.

Le Gouvernement est obnubilé par ses préoccupations d’ordre public qui s’expriment maintenant de façon régulière dans notre pays. Mes chers collègues, vous comprendrez que nous ne puissions partager une telle phobie sécuritaire.

À défaut de voir ce texte retiré, ce qui serait le mieux, ou limité au strict nécessaire exigé par le Conseil constitutionnel concernant l’intervention du juge des libertés et de la détention dans les différentes étapes de la procédure, nous allons à nouveau essayer, par les amendements que nous avons déposés, d’infléchir ce projet de loi dans ce qu’il décline de plus négatif.

Certains de ces amendements prendront en compte les dernières préconisations du Conseil constitutionnel, qui, à la suite d’une question prioritaire de constitutionnalité en date du 9 juin dernier, a censuré deux articles du code de la santé publique : les articles L. 3213-1 et L. 3213-4. La portée de cette censure est très importante, puisqu’elle signifie que le renouvellement du contrôle de la mesure du maintien en hospitalisation d’office doit avoir lieu tous les quinze jours. Cela induit que tout le dispositif prévu par le Gouvernement au trente-troisième alinéa de l’article 3 du projet de loi devient caduc.

Nous gardons l’espoir que, lors de cette deuxième lecture au sein de la Haute Assemblée, la sagesse de nos débats saura prévaloir sur l’esprit partisan. Bien évidemment, il y va de l’intérêt des malades, de leurs familles et de nos concitoyens, alors que le Gouvernement s’ingénie – allez savoir pourquoi ! – à mobiliser systématiquement les réflexes de peur de l’autre et de peur de la différence.

Cela est particulièrement attentatoire à l’idée que nous nous faisons de la cohésion sociale dans une société développée, où la solidarité doit l’emporter sur la défiance, celle-ci étant le précurseur d’un état d’anomie sociale, au sens où l’entend le sociologue Émile Durkheim dans son étude intitulée Le suicide. C’est un état qui est toujours préjudiciable au plus grand nombre des citoyens d’une société qui finit par douter d’elle-même avant de s’effondrer. Ce n’est pas, vous l’admettrez, l’objectif collectif que nous entendons voir fixer pour notre société française.

Pour conclure, je reprendrai à mon compte ce que déclaraient dans un article récent du quotidien Le Monde, à propos de ce projet de loi, des membres du collectif d’animation et de recherche interdisciplinaire en santé mentale, le Carisme, composé de sociologues, d’historiens, de politistes, etc. : « En proposant la création d’une obligation de soin hors de tout contexte d’infraction [...] Faute de répondre aux exigences éthiques et thérapeutiques auxquelles une politique envers des personnes vulnérables doit être soumise, le projet actuel s’expose à l’inefficacité, voire aux dérives sécuritaires, et étouffe un débat qui commence tout juste à s’ouvrir », « un débat nécessaire sur les aménagements possibles du consentement aux soins et sur les obligations de protection. ».

Hélas, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, on ne saurait mieux dire !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Anne-Marie Escoffier

Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, les décisions du Conseil constitutionnel rythment de plus en plus l’ordre du jour de notre assemblée ; la dernière décision du 9 juin 2011 sur deux questions prioritaires de constitutionnalité relatives à la conformité aux droits et libertés constitutionnelles des articles L.3213-1 et L. 3213-4 du code de la santé publique en est encore l’illustration.

Un équilibre a-t-il vraiment été trouvé dans le contrôle de l’œuvre législative ? Il est pour le moins légitime de se poser la question compte tenu de la situation difficile dans laquelle nous sommes, ayant à réexaminer un texte moins de huit jours après une décision constitutionnelle !

En tout cas, sans la première décision du Conseil constitutionnel, il est clair que le texte « Droits et protection des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques » ne serait pas venu devant nous. Nous appelions de nos vœux une grande loi de santé mentale pour répondre aux difficultés, voire aux drames vécus par des centaines de milliers de familles, aux interrogations légitimes des praticiens hospitaliers, pour résoudre de manière plus équilibrée la difficile équation : maladie, soins, contrainte et liberté.

Plus de vingt ans se sont écoulés depuis la loi de 1990. Le temps du bilan, de la réflexion, de la proposition avait été largement donné ; malgré cela, nous voilà contraints de légiférer une nouvelle fois dans l’urgence, ce qui n’est jamais bon, surtout quand est pratiqué l’amalgame entre dangerosité et troubles psychiatriques, ce qu’avait justement déploré en 2008 la commission nationale consultative des droits de l’homme.

La seule finalité qui vaille est celle des malades et de ceux qui les soignent. Mais nous connaissons tous, ici, l’état catastrophique de ce secteur de santé et la raréfaction dramatique du nombre de médecins psychiatres hospitaliers, qui rendront quasiment impossible l’application pratique de cette loi.

Cette loi ne résout aucunement les vrais problèmes ; elle met en place une accumulation de procédures, dont l’enchevêtrement et la complexité sont contraires au titre même de ce projet de loi de « protection des personnes ».

La sagesse est de donner aux psychiatres hospitaliers les moyens de faire leur métier, c’est-à-dire de soigner les malades dans les meilleures conditions. Ce n’est pas la création d’un arsenal procédural, tant administratif que judiciaire, qui permettra d’atteindre cet objectif.

Nous sommes dans un domaine où la question de la préservation de la liberté individuelle est primordiale. À cette fin, comme vous l’avez dit, madame la secrétaire d'État, il convient de donner sens à la psychiatrie, de faciliter le travail au quotidien des praticiens hospitaliers et de simplifier les démarches et recours éventuels des patients contestant des mesures touchant à leur liberté.

La solution n’est certainement pas l’accroissement des pouvoirs des psychiatres, encore moins celui des directeurs d’hôpitaux et des préfets, et encore moins la jungle procédurale !

Le contrôle judiciaire est indispensable ; il n’a de sens que si les magistrats et leurs greffes sont en mesure de le réaliser. Or, nous le savons, les moyens ne leur en sont point donnés, ni en la forme ni au fond.

La solution raisonnable eut été, en l’état, de ne légiférer que sur la question du contrôle judiciaire imposé par les décisions du Conseil constitutionnel et de reprendre le travail sur la réforme au fond de la loi de 1990.

Certes, lors de la première lecture, le Sénat a permis d’infléchir le texte sur certains points.

Ainsi, nous nous étions longuement interrogés sur la notion de soins sans consentement sous une autre forme que l’hospitalisation complète. La suppression de cette modalité de soins, proposée par le rapporteur initialement désigné, Mme la présidente Muguette Dini, a tout d’abord été adoptée par la commission, avant de conduire au rejet du texte issu de ses travaux par la majorité.

Une rédaction de compromis a ensuite été adoptée en séance, sur l’initiative de notre excellent collègue Alain Milon et de M. le rapporteur Jean-Louis Lorrain. Elle met en exergue l’incapacité à consentir du malade et supprime la notion de formes de soins au profit de celle de lieux de soins. Les efforts déployés par nos collègues démontrent, s’il en est besoin, que, dans cet hémicycle, de nombreux élus sont mal à l’aise avec ce texte.

Quoi qu’il en soit, l’Assemblée nationale est revenue largement sur les avancées modestes que nous avions proposées, et nous sommes en droit, aujourd’hui, de nous inquiéter.

Chacun peut sans doute partager l’objectif de diversification des modes de prise en charge des personnes atteintes de troubles mentaux. Subsiste toutefois un trop grand nombre d’interrogations, à commencer par celle qui porte sur les moyens. Il est clair en effet que la mise en œuvre de ce nouveau dispositif exigera des besoins supplémentaires, puisque pas moins de six avis médicaux en une semaine, voire dix pour certains patients, seront nécessaires. Il faudra également désigner des référents et des accompagnants pour la gestion de la contrainte hors les murs. Sur le terrain, nous le savons tous, ce système est strictement irréaliste, la situation étant déjà extrêmement difficile dans certains établissements, en particulier dans le secteur psychiatrique.

L’extension de la notion de contrainte aux soins ambulatoires est, de surcroît, un contresens. Si la nécessité de l’hospitalisation sans consentement n’est pas contestable eu égard à la gravité de la maladie mentale, le soin lui-même passe par la parole et ne peut se concevoir sans le consentement des patients.

Nous attendions une grande loi sur la santé mentale, centrée sur la prise en charge du malade. Au lieu de cela, on nous apporte un texte qui n’est qu’assemblages de procédures complexes donnant prépondérance aux décisions administratives, un texte axé essentiellement sur l’aspect sécuritaire, alimentant l’exclusion et la stigmatisation de personnes qui auraient besoin, au contraire, de trouver leur place dans la cité, enfin un texte qui va freiner le processus de sortie des hospitalisations sous contrainte et compromettre la confiance des patients, qui fonde toute relation soignante.

Lisibilité, efficacité et applicabilité sont, de l’avis de nombre de membres de notre groupe – et cet avis me semble très largement partagé –, les trois vertus d’une loi. Or ces dernières sont absentes de ce texte. La meilleure preuve est que ce projet de loi est aujourd’hui rejeté tant par les praticiens et les associations de patients que par les magistrats eux-mêmes.

En conséquence, la très grande majorité de notre groupe votera contre ce projet de loi, certains d’entre nous s’abstenant.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG. – M. Jean Desessard applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

M. Guy Fischer. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la colère gronde !

MM. Jean Desessard et Alain Gournac s’exclament.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L’examen en deuxième lecture par notre assemblée du projet de loi relatif aux droits et à la protection des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge est l’occasion, pour le groupe CRC-SPG, de dénoncer une nouvelle fois l’idée que vous vous faites, madame la secrétaire d’État, mesdames, messieurs de la majorité, des maladies mentales, de ceux qui en sont atteints et de ce que devrait être, selon vous, la psychiatrie.

Nous avions voté contre ce texte en première lecture ; les quelques amendements adoptés lors de l’examen en deuxième lecture par l’Assemblée nationale n’ont pas permis d’en changer le fond, qui repose, ce que je regrette, sur un certain nombre de mystifications et constitue un leurre. C’est un texte d’affichage.

Tout d’abord, contrairement à ce que le Gouvernement tente de nous faire croire, ce projet de loi ne garantit ni la protection des personnes ni celle des libertés publiques. Certes, il intervient après la décision du Conseil constitutionnel, qui oblige l’État à prévoir, sous peine de sanctions, l’intervention du juge des libertés et de la détention. Or celui-ci n’interviendra qu’a posteriori, c’est-à-dire après qu’une personne aura été « gardée à vue psychiatriquement » soixante-douze heures durant, et ne pourra qu’invalider ou conforter une décision prise par une autorité qui ne dispose pas, en droit, des capacités juridiques à décider de l’application d’une mesure privative de liberté.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

De la même manière, vous avez conservé le caractère suspensif de l’appel initié par le procureur de la République à l’encontre de la décision de mainlevée de la mesure privative de liberté prononcée par le juge. Cela pourrait avoir pour conséquence de priver une personne de sa liberté pendant encore quatorze jours. On est loin, me semble-t-il, de la volonté exprimée par le juge constitutionnel.

Autre mystification, vous présentez ce projet de loi comme indispensable. Or tel n’est pas le cas. Il vous aurait suffi, madame la secrétaire d’État, pour satisfaire aux contraintes issues de la décision du Conseil constitutionnel, de limiter la portée de ce texte à la seule intervention du juge des libertés et de la détention, en renvoyant les autres mesures prévues à un autre projet de loi. Telle aurait été la sagesse !

Tout cela nous conduit à une troisième mystification, que je dénonce avec l’ensemble de mon groupe, Annie David et Nicole Borvo Cohen-Seat en tête : la dimension sanitaire est quasiment absente de ce projet de loi, et pour cause ! Vous ne vous êtes intéressée qu’à un aspect des maladies mentales, à savoir les troubles à l’ordre public qu’ils peuvent engendrer. Cela n’aura d’ailleurs échappé à personne, c’est après la survenue d’un fait divers à Saint-Égrève, dans l’Isère, le département d’Annie David, que le Président de la République a pris la décision de modifier dans un sens radicalement sécuritaire la loi du 27 juin 1990. Cette volonté se traduit par la limitation des sorties d’essai, qui ont pourtant une véritable vocation thérapeutique : comme nous l’ont bien expliqué les psychiatres, ces sorties permettent de créer des liens entre eux-mêmes et le malade. Vous créez également un nouveau mode d’hospitalisation sous contrainte ne relevant ni de la demande d’un tiers ni de l’hospitalisation d’office.

De la même manière, vous privilégiez systématiquement le sécuritaire au détriment du médical. J’en veux pour preuve la conception que vous vous faites du soin et des maladies mentales. Pour vous, ces dernières pourraient être soignées contre la volonté même des malades. Vous réduisez la psychiatrie au traitement de la crise, plus, d’ailleurs, par souci de l’ordre public que dans l’intérêt des patients. Les équipes médicales deviennent de fait des auxiliaires de police, ce qui fait peser sur elles une responsabilité particulière : elles doivent en effet apporter la garantie que jamais une personne malade ne commettra de crimes. On criminalise ainsi la psychiatrie.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Or le risque zéro n’existe pas, d’autant que vous confortez la disparition de la politique de psychiatrie de secteur, laquelle demeure pour nous la seule réponse pertinente qui ait fait ses preuves. Elle repose sur un postulat opposé à celui de votre projet de loi : les soins, pour être efficaces, doivent être consentis. La maladie mentale a cela de particulier qu’elle repose sur le déni du malade. Pour accompagner ce dernier sur le chemin de la guérison, il faut l’amener à prendre conscience de sa maladie et le conduire à accepter le traitement adéquat. Les soins sous contraintes nient cette spécificité ; vous faites comme si les maladies mentales étaient des maladies somatiques !

Tout cela nous conduit à penser que, si votre projet de loi devait être adopté, la priorité serait donnée aux seules périodes de crises, au travers de traitements imposés de courte durée et reposant de manière excessive sur le recours aux médicaments. Or ces derniers ne soignent pas. Ils apaisent temporairement le patient, rendent possible la cohabitation entre celui-ci et sa maladie, laquelle demeure. On en revient au traitement des seuls symptômes, quand notre société devrait se fixer pour objectif la guérison, non pas pour satisfaire à l’image que nous nous faisons d’un ordre social normé – la folie fait partie de la vie –, mais pour permettre à chacun – cela relève de notre responsabilité – de trouver sa place dans la société, conformément à la théorie des psychiatres désaliénistes.

Enfin, la dernière mystification repose sur la notion même de soins ambulatoires sans consentement. Avec cette extension jusqu’alors jamais vue du champ de la contrainte, vous préparez ce que Mathieu Bellahsen, psychiatre de secteur et membre du collectif des 39 contre la nuit sécuritaire nomme à raison « un grand renfermement... à domicile ». Alors que des psychiatres comme Lucien Bonnafé avaient pris le parti de libérer les fous, vous faites quand à vous le choix de les enfermer à résidence. Cette modalité de soins risque, demain, de se généraliser, tant la politique comptable que vous appliquez aux établissements publics de santé et, singulièrement, à la psychiatrie entraîne fermetures de lits et réductions de personnels.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Comme le souligne à raison la Ligue des droits de l’Homme, « compte tenu de l’absence de moyens alloués aux secteurs extra-hospitaliers, ces soins se limiteront la plupart du temps à injecter un neuroleptique retard, en attendant la géolocalisation, au plus grand bénéfice de l’industrie pharmaceutique et de l’ordre public réunis. Cette disposition d’une extrême gravité augure l’avènement d’une société de contrôle inédite où chacun sera tenu, au moindre écart de conduite, d’être enfermé et “traité” chez soi ! »

Au contraire, c’est de davantage de moyens que la psychiatrie publique a besoin, de davantage de confiance et d’indépendance, au service des populations en souffrance.

Pour tous ces motifs, et parce que nous ne pouvons que nous opposer à ce qui s’apparente à une déraison de l’État, nous voterons contre ce projet de loi. Nous disons « non » à un texte d’affichage et d’opportunité, qui criminalise les malades et dénature la psychiatrie, « non » à un texte liberticide, qui doit être retiré au profit d’une grande loi de santé mentale !

Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.– Mme Anne-Marie Escoffier applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

M. le président. La parole est à M. Jean-René Lecerf.

Très bien ! et applaudissements sur certaines travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la commission des lois, que j’ai eu l’honneur de représenter en qualité de rapporteur pour avis lors de la première lecture de ce texte, ne peut que se réjouir de la confirmation, par l’Assemblée nationale, du texte issu des amendements dont elle avait été à l’origine.

En premier lieu, rappelons que le Sénat avait adopté un amendement tendant à unifier le contentieux de l’hospitalisation sous contrainte à compter du 1er janvier 2013. L’Assemblée nationale a approuvé ce dispositif, sous réserve de certaines précisions, tendant en particulier à indiquer que le juge des libertés et de la détention, ou JLD, ne prononcerait la mainlevée de l’hospitalisation qu’en cas d’irrégularités qui portent atteinte aux droits du patient, c’est-à-dire d’irrégularités substantielles, conformément à la jurisprudence administrative.

J’insiste sur le fait qu’il s’agit d’une avancée, qui permettra de mettre un terme à ce que d’aucuns nomment le « désordre des deux ordres », d’autant plus insupportable qu’il porte préjudice à des personnes atteintes de troubles mentaux, donc particulièrement vulnérables.

Je profite d’ailleurs de l’occasion qui m’est donnée pour remercier mon collègue Christian Cointat, qui m’avait fort obligeamment suppléé lors de la première lecture.

En second lieu, le Sénat avait souhaité donner la possibilité au juge des libertés et de la détention, lorsqu’il prend une décision de mainlevée de l’hospitalisation complète, d’en différer l’effet pendant une durée maximale de vingt-quatre heures, afin de permettre à l’équipe soignante d’élaborer un programme de soins. L’Assemblée nationale a confirmé ce dispositif, qui répond largement à la préoccupation de la commission des lois de doter le juge des libertés et de la détention du pouvoir de transformer une mesure d’hospitalisation complète en soins ambulatoires.

Le juge des libertés et de la détention pourra donc ordonner la mainlevée de la mesure d’hospitalisation, soit avec effet immédiat, soit avec effet différé.

Dans cette dernière hypothèse, le patient restera au sein de l’hôpital psychiatrique pour permettre au corps médical, si celui-ci le souhaite, d’élaborer un programme de soins rendant possible sa prise en charge en dehors de l’hôpital ; le juge des libertés et de la détention enverra alors un signal clair au corps médical, signifiant en quelque sorte : « Au vu du dossier, j’estime que la personne doit sortir de l’hôpital, mais il me semble que vous devriez envisager des soins ambulatoires sous contrainte ; bien sûr, je vous laisse apprécier ».

Un tel dispositif permettra au juge des libertés et de la détention de moduler sa décision et d’éviter ainsi le « tout ou rien ».

En troisième lieu, le Sénat avait adopté un amendement prévoyant la remise au Parlement d’un rapport relatif à l’évolution du statut et des modalités de fonctionnement de l’infirmerie psychiatrique de la préfecture de police, ou IPPP. L’Assemblée nationale a confirmé ce dispositif.

À cet égard, je rappelle que la commission des lois avait appelé de ses vœux un dispositif plus ambitieux. Elle avait en effet adopté un amendement contraignant l’IPPP à évoluer, à terme, en un établissement hospitalier de droit commun, considérant que, sur le plan des principes, une situation pathologique, fût-elle d’urgence, ne devait pas être prise en charge par une structure relevant d’une institution de police, sauf à alimenter la confusion, toujours regrettable, entre troubles psychiatriques, délinquance et dangerosité.

J’ai bien noté, madame la secrétaire d’État, que, lors des débats au Sénat, vous aviez déclaré que l’infirmerie psychiatrique devait évoluer sur le plan statutaire et que l’Agence régionale de santé de l’Île-de-France y travaillait. En tout cas, sachez que la commission des lois sera attentive au contenu du rapport qui sera remis au Parlement.

Il me paraîtrait également important que les droits des patients soient clarifiés, afin que les mesures provisoires susceptibles d’être prises en urgence par les maires, et par les commissaires de police à Paris, soient bien considérées comme des mesures de soins sans consentement.

Cela emporte plusieurs conséquences : la période de soixante-douze heures devra commencer dès l’entrée en vigueur des mesures considérées, qu’elles prennent la forme d’un placement à l’IPPP, dans un hôpital de droit commun ou même dans un gymnase municipal ; les personnes doivent être informées de leurs droits, en particulier de celui de recourir aux services d’un avocat ou de saisir le juge des libertés et de la détention dès l’entrée en vigueur de ces mesures provisoires ; la durée des mesures provisoires doit être prise en compte dans le délai de quinze jours avant l’expiration duquel le juge des libertés et de la détention doit s’être prononcé.

En quatrième lieu, le Sénat avait adopté, sur l’initiative de la commission des lois, plusieurs amendements permettant au juge des libertés et de la détention de statuer dans des conditions qui garantissent la sérénité des débats. L’Assemblée nationale les a approuvés sans apporter de modification.

Que prévoyaient-ils ?

Le Sénat avait précisé que le juge des libertés et de la détention, lorsqu’il se prononce sur une mesure de soins psychiatriques sous contrainte, pourrait ne pas statuer publiquement. Cette précision paraît importante, dès lors que la publicité de l’audience pourrait avoir, dans certains cas, des conséquences dommageables pour les personnes concernées.

Le Sénat avait également prévu que, si une salle d’audience est spécialement aménagée sur l’emprise de l’hôpital pour assurer la clarté, la sécurité et la sincérité des débats ainsi que pour permettre au juge des libertés et de la détention de statuer publiquement, celui-ci pourrait statuer dans cette salle. Cet aménagement spécial, qui pourra d’ailleurs être sommaire, est destiné à garantir que la salle est clairement identifiée comme un lieu de justice.

Enfin, notre assemblée avait doublement encadré le recours à la visioconférence.

Elle avait tout d’abord précisé que le recours à cette technique ne serait possible que dans l’hypothèse où l’hôpital psychiatrique aurait spécialement aménagé en son sein une salle d’audience satisfaisant aux conditions que je viens d’indiquer. Autrement dit, que le juge des libertés et de la détention soit physiquement présent dans cette salle ou qu’il intervienne à distance depuis le palais de justice, les exigences portant sur l’aménagement des lieux doivent être identiques.

Elle avait ensuite prévu que le juge des libertés et de la détention pourrait seulement recourir à la visioconférence après qu’un avis médical aurait attesté que l’état mental de la personne ne fait pas obstacle à la mise en œuvre de ce procédé.

La commission des lois aurait certes préféré aller plus loin pour ce qui concerne la compétence du juge des libertés et de la détention ; je rappelle qu’elle avait souhaité que le juge des libertés et de la détention soit saisi automatiquement non seulement en cas d’hospitalisation partielle, mais aussi en cas de désaccord entre le préfet et le corps médical. Pour sa part, l’Assemblée nationale n’a prévu qu’un seul cas de saisine automatique, celui où le préfet n’ordonne pas la levée de l’hospitalisation complète, alors que le psychiatre la propose.

Je signale que cette solution, que notre assemblée n’avait pas retenue, est conforme au sens de la décision rendue le 9 juin dernier par le Conseil constitutionnel en réponse à une question prioritaire de constitutionnalité. En effet, cette décision marque l’affaiblissement du rôle du préfet en matière d’hospitalisation d’office. Par parenthèses, je vous signale, mes chers collègues, qu’il faudra nous faire à l’idée que, à l’instar des trains, une QPC peut en cacher une autre, le cas échéant entre la première et la deuxième lecture…

Faute que soit prévue l’intervention systématique du juge des libertés et de la détention en matière d’hospitalisation partielle, nous comptons sur le Gouvernement pour prévoir, dans les décrets d’application, que les patients devront être régulièrement informés de leur droit de saisir à tout moment le juge des libertés et de la détention ; l’exercice du recours facultatif sera ainsi facilité.

Bien entendu, il nous appartiendra d’évaluer précisément le dispositif en considération d’un certain nombre de critères : nombre d’hospitalisations partielles, fréquence de saisine du juge des libertés et de la détention postérieurement à cette hospitalisation, capacité des personnes hospitalisées ou de leurs proches, après qu’elles aient été informées, à exercer le recours facultatif, etc.

En dépit des réserves que je viens d’exposer, je ne peux que vous inviter, mes chers collègues, à voter le projet de loi, qui assure un équilibre entre la liberté individuelle, la sauvegarde de l’ordre public et la protection de la santé.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ Union centriste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, à l’occasion de cette deuxième lecture, je souhaite évoquer la situation de la psychiatrie dans notre pays.

Les moyens consacrés à la psychiatrie ne cessent de baisser depuis vingt ans. En France, le nombre de lits a ainsi diminué de 43 % entre 1989 et 2000, alors que les besoins, eux, s’accroissent.

Les fortes disparités démographiques de la répartition des psychiatres, le manque d’attrait de la profession de psychiatre des hôpitaux pour les étudiants en médecine et le recrutement insuffisant des infirmiers en psychiatrie concourent à aggraver les difficultés rencontrées dans la prévention et la prise en charge des malades. Les professionnels le répètent inlassablement : la psychiatrie est en crise !

J’ai d’ailleurs eu l’occasion de rencontrer ces professionnels, comme le docteur Halimi, président de la conférence des présidents de commission médicale d’établissement des centres hospitaliers spécialisés, ainsi que des usagers, comme Mme Claude Finkelstein, présidente de la FNAPSY ; j’ai également reçu le collectif Psychiatrie. Tous s’accordent à reconnaître la nécessité d’une réforme, mais pas n’importe laquelle. Ils ont d’ailleurs des propositions à faire.

Malheureusement, les engagements et les mesures d’urgence formulés lors des états généraux de la psychiatrie, en 2003, n’ont pas été retenus par le Gouvernement dans le présent projet de loi. Je pense en particulier au maintien du secret médical en dépit des pressions administratives, à la sauvegarde de l’indépendance professionnelle indispensable à la qualité des soins ou au soutien des intérêts des patients contre toute contrainte extérieure.

Quant aux mesures d’urgence qui avaient été demandées, comme la formation massive et urgente d’infirmiers afin de faire face aux besoins, l’augmentation du nombre de lits et le développement des structures extrahospitalières ou le fait de garantir des conditions d’accueil et d’hospitalisation décentes, elles n’ont aucunement été prises en compte.

Vos préoccupations semblent bien éloignées des attentes des professionnels et des usagers !

Pis, parce que la situation s’aggrave, l’hospitalisation sans consentement est détournée de sa fonction première afin de pallier des lacunes plus générales. C’est ainsi que des malades qui souhaitent se faire hospitaliser librement ont parfois recours à l’hospitalisation à la demande d’un tiers, car c’est pour eux le seul moyen d’obtenir une place à l’hôpital. Pendant ce temps, un malade qui pouvait encore avoir besoin de soins est prié de quitter l’établissement. On hospitalise également en psychiatrie des personnes pour cause de trouble à l’ordre public, car l’élu municipal est le seul à se mobiliser dans l’urgence, faute d’un médecin disponible pour signer un certificat.

Bref, la psychiatrie est forcée d’assumer des dysfonctionnements sociaux qui la dépassent largement.

Ces aspects sociaux ne doivent pas être niés. Franco Basaglia, psychologue italien de renom, avait pour habitude, avant de se préoccuper de leur vie psychique, de poser à ses patients les questions suivantes : « Avez-vous un logement ? » « Vos ressources sont-elles suffisantes ? » « Vos liens sociaux sont-ils solides ? ». Répondre aux troubles psychiques en délaissant les troubles sociaux serait sans effet ; c’est d’autant plus vrai que, comme le montrent les chiffres, les malades en hospitalisation sous contrainte sont généralement plus précaires et plus isolés socialement que les malades en hospitalisation libre.

Mais comment répondre aux besoins sociaux et psychiques quand les professionnels font face à un déficit de l’offre de soins, de prévention, de suivi et d’accessibilité des structures de soins ?

Le constat a été fait à de nombreuses reprises : c’est d’une loi globale de psychiatrie et de santé dont notre pays a besoin.

Vous l’aurez compris, mes chers collègues, cette situation générale m’interpelle davantage que les rares moments de violence que peuvent avoir certains malades qui traversent des périodes critiques dues à l’évolution de leur pathologie. Pour vous, au contraire, c’est le point central de votre projet de loi.

Venons-en d’ailleurs à ce projet.

Pourquoi élaborer un projet de loi sans concertation avec les acteurs du secteur ? Je dois dire, madame la secrétaire d’État, que vous avez réussi à faire l’unanimité contre vous. Comment et pourquoi obliger une personne à se soigner ? D’ailleurs, comment obliger les professionnels à prodiguer des soins dans de telles conditions ?

C’est l’objectif inverse qui devrait être recherché : alléger la contrainte et favoriser l’adhésion aux soins. Cette situation serait de loin la plus profitable, pour les soignés comme pour les soignants.

Pourquoi proposer une réforme dont le principal objectif consiste à réduire un risque de dangerosité que seul un petit nombre de malades présentent, qui plus est seulement à certains moments de leur vie, alors même qu’elle aura, au-delà de ceux-ci, des conséquences négatives sur un très grand nombre de personnes prises en charge ?

Enfin, pourquoi s’entêter à prendre des mesures toujours plus liberticides, alors que le Conseil constitutionnel a censuré deux articles relatifs à l’hospitalisation d’office, considérant qu’ils méconnaissaient le principe du respect de la liberté individuelle que l’article 66 de la Constitution garantit ?

Les besoins sanitaires sont immenses. Pourtant, vous n’avez qu’une idée fixe : toujours plus de mesures sécuritaires ! Aussi les sénatrices et le sénateur écologistes voteront-ils contre ce projet de loi.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...

La discussion générale est close.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

Je suis saisi, par M. Fischer, Mmes David et Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, d'une motion n° 26.

Cette motion est ainsi rédigée :

En application de l’article 44, alinéa 2, du règlement, le Sénat déclare irrecevable le projet de loi, adopté avec modifications par l’Assemblée nationale en deuxième lecture, relatif aux droits et à la protection des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge (590, 2010-2011).

Je rappelle que, en application de l’article 44, alinéa 8, du règlement du Sénat, ont seuls droit à la parole sur cette motion l’auteur de l’initiative ou son représentant, pour quinze minutes, un orateur d’opinion contraire, pour quinze minutes également, le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond et le Gouvernement.

En outre, la parole peut être accordée pour explication de vote, pour une durée n’excédant pas cinq minutes, à un représentant de chaque groupe.

La parole est à Mme Annie David, pour la motion.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, avant de défendre la motion tendant à opposer l’exception d’irrecevabilité, je souhaite faire part au Gouvernement du mécontentement de notre groupe au sujet de la manière dont nos travaux ont été organisés. Je pense en particulier à ceux de la commission des affaires sociales, un peu bousculée par la succession de textes que le Gouvernement a cru bon d’inscrire à l’ordre du jour.

Notre mécontentement porte aussi sur la forme : avant même que le projet de loi ne revienne en deuxième lecture au Sénat, il était tenu pour certain, dans la presse, qu’il ferait l’objet d’un vote conforme. Vous reconnaîtrez, mes chers collègues, que cela bride quelque peu nos travaux. Quid de notre indépendance ?

Après la camisole financière européenne que Guy Fischer a dénoncée hier au cours de l’examen du projet de loi constitutionnelle visant à instaurer la « règle d’or », nous voilà contraints à un vote conforme ! Reste que le Conseil constitutionnel en a décidé autrement.

J’en viens à la motion.

Le projet de loi que nous examinons aujourd’hui a cela de particulier que, avant même son adoption, nous savons tous qu’il est contraire à notre Constitution. Nous le savons d’autant mieux depuis la décision du Conseil constitutionnel du 9 juin 2011.

Ce n’est pas l’amendement n° 82 du Gouvernement qui changera cette situation. Ce n’est pas non plus parce que ce projet de loi trouve son origine dans une décision précédente du Conseil constitutionnel qu’il est, de ce seul fait, à l’abri de toute critique !

Le Conseil constitutionnel avait en effet affirmé que l’hospitalisation d’office d’une personne, en raison de son état de santé ou de troubles graves à l’ordre public, devait être validée par le juge des libertés et de la détention. D’ailleurs, les juges précisaient déjà que, dans le cas d’une hospitalisation d’office, la liberté individuelle ne pouvait être sauvegardée que par l’intervention du juge dans un délai aussi bref que possible.

Si nous sommes favorables à une telle disposition, nous considérons en revanche qu’elle aurait dû être la seule matière du projet de loi ; les autres questions, comme les modalités des soins, auraient dû être traitées dans le cadre d’un projet de loi consacré à la santé publique, et qui aurait inclus un chapitre portant sur la santé mentale et ses modes de traitement.

Nous considérons même, au sein du groupe communiste, républicain et citoyen et des sénateurs du parti de gauche, que, compte tenu du maintien dans le projet de loi du pouvoir du préfet de décider d’une mesure d’hospitalisation complète, il aurait été souhaitable que l’intervention du juge des libertés et de la détention se fasse en amont.

Récemment, le juge constitutionnel a décidé que cette intervention précoce ne relevait pas d’une exigence constitutionnelle et qu’il était tout à fait licite qu’une autorité non pourvue de pouvoirs judiciaires décide d’une mesure privative de liberté, à la condition expresse que celle-ci soit confirmée par le juge des libertés dans les plus brefs délais. Nous en prenons acte.

Or l’article 3 que vous vous apprêtez à voter, mes chers collègues de la majorité, ne répond encore pas à cette exigence constitutionnelle.

Si le Conseil constitutionnel a jugé que le pouvoir du préfet d’ordonner l’hospitalisation d’office ne méconnaissait pas la compétence que l’article 66 confie à l’autorité judiciaire, il est beaucoup plus critique sur les modalités d’exercice de ce pouvoir.

En effet, aujourd’hui comme demain, si votre projet de loi était adopté conforme, ainsi que le souhaitent le Gouvernement et la commission, la procédure d’hospitalisation complète à la demande du préfet ne reposerait que sur un seul certificat médical initial, même en l’absence d’urgence, ce qui est déjà contestable en soi. La procédure veut que ce certificat médical unique soit transmis au préfet, qui, et c’est très intéressant, peut n’en tirer aucune conséquence.

Quoi de plus cohérent avec votre politique dans la mesure où cette procédure repose non pas sur l’intérêt du patient médicalement constaté, mais sur la notion de trouble à l’ordre public, notion sécuritaire s’il en est et qui justifie que des mesures de police administrative soient prises !

Comme le souligne à raison le Conseil constitutionnel, « le certificat médical est transmis au préfet, mais, s’il ne confirme pas la nécessité de la privation de liberté, il n’en est tiré aucune conséquence obligatoire quant à la situation de la personne ». Avouez que nous sommes loin, ici, de la notion d’intérêt médical !

En première lecture, nous affirmions que le préfet n’avait pas les compétences pour décider d’imposer une mesure d’hospitalisation complète ; on sait aujourd’hui que la loi actuelle, comme celle à venir, lui octroie des prérogatives contraires à la Constitution.

Comme le précise le commentaire de la décision n° 2011–135/140 QPC, en date du 9 juin dernier publié, dans les Nouveaux cahiers du Conseil constitutionnel, « la possibilité que le préfet ordonne ou maintienne une mesure privative de liberté de nature médicale, alors que le psychiatre de l’établissement s’y oppose, soulève une difficulté constitutionnelle touchant à l’équilibre des principes constitutionnels en cause ».

C’est exactement ce que nous dénoncions. Or cette difficulté n’est pas levée par la rédaction de l’article 3 du projet de loi : « Dans un délai de trois jours francs suivant la réception du certificat médical mentionné au troisième alinéa de l’article L. 3211–2–2, le représentant de l’État dans le département décide de la forme de prise en charge prévue à l’article L. 3211–2–1, en tenant compte de la proposition établie, le cas échéant, par le psychiatre en application du dernier alinéa de l’article L. 3211–2–2 et des exigences liées à la sûreté des personnes et à l’ordre public ».

Il est bien écrit « en tenant compte », de même qu’il est précisé « le cas échéant ». Cela signifie que le préfet n’est pas tenu par la décision du médecin psychiatre ; il peut passer outre cette recommandation de ne pas maintenir une personne en hospitalisation complète. Nous revoilà dans la même situation que celle qu’avait dénoncée le Conseil constitutionnel dans sa décision de censure.

Le préfet peut d’autant mieux passer outre à cette recommandation que ce même alinéa précise expressément que celui-ci, pour prendre sa décision, tient compte des observations médicales délivrées par le psychiatre, mais les confronte aux « exigences liées à la sûreté des personnes et à l’ordre public ». Ainsi, le préfet peut décider de maintenir en hospitalisation complète, c’est-à-dire de priver de liberté, l’un de nos concitoyens, l’une de nos concitoyennes, contre l’avis médical, au seul motif que la sortie de celui-ci ou de celle-ci pourrait avoir des effets négatifs sur l’ordre public.

Mes chers collègues, ces dispositions ne sont pas conformes à la Constitution, et singulièrement à son article 66. Plutôt que de paraphraser le Conseil constitutionnel, je préfère citer un extrait de l’un de ses considérants : « […] ; que, dans l’hypothèse où ce certificat médical ne confirme pas que l’intéressé doit faire l’objet de soins en hospitalisation, les dispositions contestées conduisent, à défaut de levée de l’hospitalisation d’office par l’autorité administrative compétente, à la poursuite de cette mesure sans prévoir un réexamen à bref délai de la situation de la personne hospitalisée permettant d’assurer que son hospitalisation est nécessaire ; qu’un tel réexamen est seul de nature à permettre le maintien de la mesure […] ».

C’est pourquoi, mes chers collègues, nous considérons que, les mêmes causes produisant les mêmes effets, le maintien de l’article 3 fait courir le risque d’une nouvelle décision d’inconstitutionnalité. Cela a été confirmé par le juge constitutionnel.

Nous estimons que la procédure d’hospitalisation complète à la demande du préfet, c’est-à-dire l’ancienne hospitalisation d’office, doit reposer, comme l’ancienne hospitalisation à la demande d’un tiers, sur deux certificats médicaux et que, en cas de discordance entre ces deux certificats, la mesure de mainlevée doit être prononcée immédiatement.

Là encore, mes chers collègues, le Conseil constitutionnel est clair, et je vous renvoie aux documents qu’il a bien voulu communiquer à la presse : « Seul un réexamen, s’il confirmait la nécessité de soins en hospitalisation, serait de nature à permettre le maintien de la mesure, nonobstant le premier avis médical contraire. En revanche, si ce réexamen infirmait à nouveau la nécessité de soins en hospitalisation, la mesure ne pourrait qu’être levée. Le dispositif d’HO est en effet la résultante de deux exigences médicale et d’ordre public appréciées respectivement, par le psychiatre et par le préfet. C’est pourquoi, face à l’insuffisance des garanties présentées par l’article L. 3213–1 du CSP, le Conseil constitutionnel a censuré cette disposition ».

Ce ne sont pas les dispositions visées à l’amendement n° 82 qui permettront de répondre totalement aux objections formulées par le Conseil constitutionnel dans sa décision de censure.

De la même manière, nous nous interrogeons sur la faculté ouverte par le projet de loi de prolonger la décision de maintien en hospitalisation complète sans que le juge des libertés et de la détention intervienne.

En posant le principe d’une intervention du juge dans « le plus court délai possible », le Conseil constitutionnel a entendu réaffirmer le principe selon lequel nul ne peut être privé de liberté sans l’intervention d’une autorité judiciaire. Or le mécanisme de prolongation prévu dans le projet de loi, parce qu’il renvoie à des périodes très longues – six mois ! –, ne nous semble pas conforme à ce principe ni à celui de l’intervention du juge des libertés et de la détention à bref délai. En effet, nous ne partageons pas l’analyse selon laquelle la prolongation serait la simple poursuite de la mesure initiale. Il n’existe pas, en droit, de mesure privative de liberté qui pourrait être reconduite sans qu’aucun juge n’intervienne.

D’ailleurs, le régime de la rétention de sûreté lui-même n’obéit pas à ce mécanisme. Le code pénal prévoit que la rétention de sûreté peut être prononcée s’il est établi, à l’issue d’un réexamen de leur situation intervenant à la fin de l’exécution de leur peine – j’ai bien dit « un réexamen » –, que les personnes en cause présentent une particulière dangerosité, dangerosité se caractérisant par une probabilité très élevée de récidive du fait qu’elles souffrent d’un trouble grave de la personnalité.

Or, en l’espèce, il n’est prévu aucun mécanisme de réexamen par le juge des libertés ; pourtant, chaque décision de renouvellement doit s’apparenter, en droit, à une nouvelle décision, ce qui rend obligatoire la saisine de ce dernier.

Je formulerai une dernière observation, portant cette fois-ci sur le recueil du consentement des patients.

Aux termes de l’alinéa 31 de l’article 1er, « Avant chaque décision prononçant le maintien des soins en application des articles L. 3212–4, L. 3212–7, L. 3213–1 et L. 3213–4 ou définissant la forme de la prise en charge […], la personne faisant l’objet de soins psychiatriques est, dans la mesure où son état le permet, informée de ce projet de décision et mise à même de faire valoir ses observations, par tout moyen et de manière appropriée à cet état ».

Ainsi, les observations du patient ne constituent pas une exigence légale. On pourrait donc se retrouver dans une situation totalement absurde où seules les personnes hospitalisées en psychiatrie, mais dont l’état mental le permettrait, c’est-à-dire qui ne seraient en réalité pas malades, pourraient donner leur avis. Espérons pour elles et pour les libertés publiques que ces cas sont purement théoriques !

Or le Conseil d’État, dans une décision du 27 mai 2011, cassant un arrêt de la cour administrative d’appel de Versailles – laquelle opérait déjà un revirement de jurisprudence –, a affirmé que les décisions d’hospitalisation sans consentement prononcées sans que le patient ait pu faire part de ses observations méconnaissaient manifestement l’article 24 de la loi du 12 avril 2000.

Là encore, mes chers collègues, permettez-moi de citer cet arrêt : « Considérant qu’il ressort des pièces du dossier et n’est d’ailleurs pas contesté que les arrêtés des 20 février, 21 mai et 20 novembre 2004 renouvelant l’hospitalisation d’office de Mme A ont été pris sans que l’intéressée ait été mise en mesure de présenter des observations écrites ou, le cas échéant, des observations orales ; qu’il ne ressort du dossier aucune situation d’urgence ni aucune circonstance exceptionnelle de nature à exonérer, au cas d’espèce, l’administration de l’application des dispositions citées ci-dessus […] ; qu’il suit de là que ces arrêtés, pris en méconnaissance de ces dispositions, sont entachés d’illégalité ; ».

Prenez garde, mes chers collègues, en votant ce projet de loi, de reproduire les mêmes erreurs !

Pour conclure, outre ces observations de nature constitutionnelle, je voudrais dénoncer la méthode avec laquelle le Gouvernement a agi.

Pendant des semaines, il a tenté de nous faire croire que le projet de loi recevait l’assentiment des patients et de leurs familles. En réalité, il n’en est rien !

Dans un communiqué de presse du 26 mai, la présidente de la Fédération nationale des associations d’usagers en psychiatrie, Mme Claude Finkelstein, a exprimé son profond désaccord avec ce projet de loi sur les soins sans consentement en psychiatrie. Jacky Le Menn vient de le rappeler. Elle a déclaré : « Nous ne sommes pas d’accord sur la finalité du projet de loi, qui porte atteinte aux droits des personnes ». Elle a même précisé : « Je suis extrêmement choquée que la secrétaire d’État à la santé, Nora Berra, se prévale d’un soutien de la FNAPSY au projet de loi, notamment dans l’émission de France Culture Du grain à moudre du 9 mai. Nous avons dit au ministère de la santé que nous n’étions pas d’accord ; c’est une malhonnêteté intellectuelle de leur part de prétendre le contraire. »

Mes chers collègues, au-delà de la forme, c’est bien en raison des motifs d’inconstitutionnalité de ce projet de loi que je vous invite à voter notre motion tendant à opposer l’exception d’irrecevabilité.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Lorrain

Il est paradoxal de présenter une motion tendant à opposer l’exception d’irrecevabilité sur un texte qui tend précisément à supprimer une disposition ayant été jugée inconstitutionnelle.

Je reconnais que nous pouvons parfois prendre des initiatives qui se révèlent in fine inconstitutionnelles. Reste que les arguments avancés par notre collègue ne sont pas probants.

Le présent projet de loi vise à autoriser une intervention supplémentaire du juge des libertés et de la détention, ce qui permettra de régler au mieux la question des mesures d’hospitalisation sous contrainte. En fait, ce texte a pour objet de combler un vide. C’est donc notre responsabilité de le voter. Si nous décidions de ne pas apporter de réponse ou d’apporter une réponse partielle ou insuffisante, nous ne satisferions pas aux exigences posées par l’article 66 de la Constitution.

La commission considère que le projet de loi représente un progrès et il serait bon qu’il puisse entrer en vigueur dès le mois d’août. C’est pourquoi son adoption est nécessaire.

Debut de section - Permalien
Nora Berra, secrétaire d'État

Mme Nora Berra, secrétaire d'État. Le Gouvernement émet un avis défavorable.

Mme la secrétaire d’État regagne sa place au banc du Gouvernement.

Debut de section - Permalien
Nora Berra, secrétaire d'État

Madame la sénatrice, nous avons largement eu l’occasion de montrer combien il est pertinent de faire évoluer la loi de 1990. Adopter la motion que vous avez présentée contreviendrait à cet objectif.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Je n’ai pas totalement compris les explications qui nous ont été données.

Il me semble que le Conseil constitutionnel a confirmé l’inconstitutionnalité du texte en censurant une partie de l’article 3, notamment. Certes, par l’amendement n° 82, le Gouvernement va tenter de remédier à cette difficulté, mais cet amendement ne répondra pas à l’ensemble des objections qui ont été faites ni à la décision du Conseil constitutionnel puisque son objet est simplement de prévoir un réexamen psychiatrique. Il n’y est fait mention ni des délais ni de la non-intervention du juge des libertés et de la détention à l’issue d’une première hospitalisation de six mois, ce qui va à l’encontre de l’article 66 de la Constitution.

Comme je l’ai indiqué voilà un instant, en droit pénal, le juge des libertés et de la détention est conduit à se prononcer sur le maintien d’une personne en détention. Mais s’il s’agit d’une personne hospitalisée d’office, c’est-à-dire d’un malade qui est privé de sa liberté, le juge des libertés et de la détention n’intervient pas. Il y a donc là, me semble-t-il, une mesure inconstitutionnelle, car le droit de ces personnes n’est pas respecté.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

La parole est à M. René-Pierre Signé, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de René-Pierre Signé

Ce texte est supposé proposer une politique publique de santé mentale, mais, selon le collectif La Nuit sécuritaire, seul le trouble à l’ordre public y est pris en compte, au détriment des soins à apporter à des patients en souffrance psychique et souvent physique, et de leur accompagnement thérapeutique.

Le projet de loi instaure un changement paradigmatique sans précédent : l’institution de « soins » ambulatoires sans consentement sur décision d’un représentant de l’État. Or, rappelons-le, lorsque l’État se mêle de dire qui parmi les citoyens est malade ou ne l’est pas, on en arrive à faire séjourner les opposants politiques et les « déviants » en hôpital psychiatrique et à les y maintenir par la force et avec brutalité.

Le projet de loi n’identifie en effet plus seulement l’hospitalisation comme contraignante – ce qui pouvait être le cas auparavant –, mais aussi les soins eux-mêmes, à l’hôpital, ce qui est normal, ainsi qu’à l’extérieur, avec le risque majeur d’une surveillance sociale planifiée. Il s’agit, en insistant sur les prérogatives des préfets, de garantir la sûreté, non pas des malades, mais des non-malades, voire des malades qui s’ignorent. Car comme le disait Knock : « Tout homme bien portant est un malade qui s’ignore ».

Ce texte détourne la fonction des soignants vers une orientation de dénonciation, de rétention, de « soins » sous contrainte et de surveillance.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

Personne ne demande plus la parole ?...

Je mets aux voix la motion n° 26, tendant à opposer l'exception d'irrecevabilité.

Je rappelle que l'adoption de cette motion entraînerait le rejet du projet de loi.

La commission et le Gouvernement se sont prononcés contre.

La motion n'est pas adoptée.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

Je suis saisi, par Mme Demontès, MM. Le Menn, Michel, Desessard, Kerdraon et Cazeau, Mmes Le Texier et Schillinger, M. Jeannerot, Mmes Alquier et Campion, M. Daudigny, Mme Ghali, MM. Gillot et Godefroy, Mme Jarraud-Vergnolle, M. S. Larcher, Mmes Printz et San Vicente-Baudrin, M. Teulade et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, d'une motion n°33.

Cette motion est ainsi rédigée :

En application de l’article 44, alinéa 3, du règlement, le Sénat décide qu’il n’y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi, adopté avec modifications par l’Assemblée nationale en deuxième lecture, relatif aux droits et à la protection des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge (590, 2010-2011).

Je rappelle que, en application de l’article 44, alinéa 8, du règlement du Sénat, ont seuls droit à la parole sur cette motion l’auteur de l’initiative ou son représentant, pour quinze minutes, un orateur d’opinion contraire, pour quinze minutes également, le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond et le Gouvernement.

En outre, la parole peut être accordée pour explication de vote, pour une durée n’excédant pas cinq minutes, à un représentant de chaque groupe.

La parole est à M. Jacky Le Menn, pour la motion.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacky Le Menn

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, à en croire le Gouvernement, le texte que nous examinons en deuxième lecture a pour principal objet de réformer la loi du 27 juin 1990. Plus précisément, il entend simplifier et sécuriser le dispositif d’hospitalisation à la demande d’un tiers, améliorer la prise en charge des malades ainsi que le dispositif de sortie, garantir les droits des patients ; autant d’objectifs que personne ne saurait réfuter. Néanmoins entre les intentions affichées, les discours et la réalité de ce texte, il y a un monde !

Sur la forme, comment ne pas revenir sur le parcours pour le moins chaotique, voire sans précédent, de ce texte ?

Jamais nous n’avions connu pareil cheminement. Certains ont parlé d’un véritable « psychodrame » marqué dans un premier temps par le rejet par la commission des affaires sociales de la notion de « soins ambulatoires sans consentement », puis par la non-adoption par la commission de son propre texte, enfin par la démission du rapporteur et son remplacement de dernière minute.

Enfin, le fait que le Conseil constitutionnel ait, en date du 9 juin dernier, censuré le texte proposé par l’article 3 du projet de loi pour les articles L. 3213-1 et L. 3213-4 du code de la santé publique oblige le Gouvernement à modifier son texte. En l’occurrence, le raisonnement suivi par le Conseil constitutionnel est identique à celui qui a présidé à la décision du 26 novembre 2010. À l’avenir, en cas d’hospitalisation d’office, le préfet ne pourra maintenir le patient en hospitalisation au-delà de quinze jours sans l’intervention du juge des libertés et de la détention. Le renouvellement du contrôle par le magistrat devra avoir lieu chaque quinzaine.

De fait, le dispositif prévu par le Gouvernement à l’alinéa 33 de l’article 3 n’est plus de mise. Dès lors, on peut s’interroger sur la constitutionnalité de l’alinéa 34 de l’article 2, qui prévoit le maintien de la mesure de l’hospitalisation d’office pour une durée maximale d’un mois, sans contrôle du juge des libertés et de la détention.

Quant à l’article L. 3213-1, jusqu’alors, dans l’hypothèse où le second certificat médical établi dans les vingt-quatre heures suivant l’admission ne confirme pas que l’intéressé doit faire l’objet de soins en hospitalisation, le préfet pouvait maintenir cette mesure privative de liberté. Avec la décision du Conseil constitutionnel, et à défaut d’avoir prévu un mécanisme de réexamen à bref délai aux fins de justification du maintien en hospitalisation, tel n’est plus le cas, ce qui entraîne la révision indispensable du dispositif prévu aux alinéas 3 à 23 de l’article 2.

Comment ne pas voir dans cette difficile élaboration, pour ne pas dire gestation, à laquelle viennent de s’ajouter les conséquences des décisions du Conseil constitutionnel, les signes évidents d’un texte mal préparé ?

Madame la secrétaire d’État, vous avez déclaré que « le psychiatre se trouvait au centre de ce texte », ce qui devrait donner une prépondérance à l’approche et à la gestion sanitaires. Or il en va tout autrement, puisque la lettre et l’esprit de ce projet de loi en sont très éloignés. En outre, comment ne pas y voir le signe évident d’un exécutif sourd aux attentes, puis à l’opposition quasi unanime des professionnels de santé, comme des patients et de leur famille, qui sont les premiers concernés ? Comment et pourquoi le Gouvernement n’a-t-il pas eu à cœur de considérer les oppositions qui se sont fait jour, y compris au sein de sa propre majorité ?

Oui, le malaise est immense ! Mais, visiblement, rien n’y fait : vous demeurez arc-boutée sur une logique tout autre que l’impératif sanitaire. Alors que le bien des patients devrait être au centre de vos préoccupations, vous préférez faire écho à la démarche sécuritaire voulue par le Président de la République. Vous préférez au dialogue et à la concertation le passage en force. Cette méthode augure mal de l’avenir que vous voulez donner au secteur de la santé mentale. Tout comme le monde de la santé, nous en prenons acte et le déplorons.

Certes, quelques avancées ont permis de faire évoluer le texte initial. Je pense bien évidemment à l’intervention du juge des libertés et de la détention. Il est vrai que cette modification n’est pas de votre fait : l’avis rendu par le Conseil constitutionnel au mois de novembre dernier vous le commandait. Mais même dans ce registre, vous vous êtes empressée de limiter cette mise en application au strict minimum requis.

Un autre point positif tient à l’unification, d’ici à 2013, du contentieux en matière d’hospitalisation sous contrainte, lequel était initialement éclaté entre le juge judiciaire et le juge administratif. Il reviendra finalement au juge judiciaire. Il en va de même de la création d’un droit à l’oubli d’une durée de dix ans pour les personnes ayant fait l’objet d’une déclaration d’irresponsabilité pénale ou ayant séjourné en unité pour malades difficiles.

Néanmoins, ces avancées ne peuvent masquer les attentes des professionnels de la santé mentale, des patients et des familles, attentes demeurées vaines jusqu’à présent.

Nous le savons tous, et cela a été dit sur ces travées comme sur les bancs de l’Assemblée nationale, le monde psychiatrique est en attente d’une grande loi sur la santé mentale. La loi portant réforme de l’hôpital et relatives aux patients, à la santé et aux territoires avait exclu la psychiatrie de son domaine d’application. Nous l’avions alors vertement déploré, mais la ministre de la santé de l’époque nous avait promis qu’un grand texte serait débattu rapidement. Or, fidèle à sa méthode, le Gouvernement nous propose de débattre d’un important sujet sanitaire et social uniquement du point de vue sécuritaire. Nous sommes donc bien loin d’une grande loi sur la santé mentale, puisque ce texte ne concerne qu’une infime partie des 660 000 personnes en souffrance qui, chaque année, franchissent le seuil des établissements psychiatriques.

Le socle de votre projet de loi trouve ses origines dans le discours présidentiel d’Antony. Il se fait la traduction législative du détestable amalgame insinuant qu’un lien quasi organique existe entre malade et source de danger, source de troubles à l’ordre public. Par-là même, vous distillez dans la société cette dommageable équation, vous stigmatisez une partie de nos concitoyens en situation de fragilité parfois extrême.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacky Le Menn

À ce titre, le Contrôleur général des lieux de privation de liberté ne dit pas autre chose quand il déclare que cette crainte d’atteinte à l’ordre public entraîne d’ores et déjà « le maintien à l’hôpital de personnes dont l’état, attesté par des médecins, ne justifie pas qu’elles y soient maintenues contre leur gré ».

La présidente de la Fédération nationale des associations d’usagers en psychiatrie, Mme Claude Finkelstein, ne dit rien d’autre quand elle déclare : « Nous ne sommes pas d’accord sur la finalité du projet de loi, qui porte atteinte aux droits des personnes ».

Doit-on croire que la majorité présidentielle n’est capable d’aborder des sujets de société qu’à travers le prisme réducteur et déformant de la dimension sécuritaire ? Depuis 2002, et plus encore depuis 2007, tout porte à le croire.

L’aspect sécuritaire qui caractérise donc ce texte se retrouve notamment dans les dispositions qui donnent au préfet une place prépondérante. Il en est ainsi non seulement de la décision d’hospitaliser, du protocole de soins, du pouvoir de s’opposer à l’arrêt des soins sans consentement, mais aussi de la faculté de remplacer une hospitalisation par des soins en ambulatoire, et le contraire.

Mais, au-delà, la situation que vous créez prend place dans un cadre sanitaire et psychiatrique déprécié auquel vous n’avez, depuis plus de dix ans, apporté aucune réponse.

Le secteur psychiatrique fait face depuis des années à une crise pérenne. Pour s’en convaincre, il suffit de reprendre les conclusions des états généraux de la psychiatrie de 2003, de considérer les 800 postes de psychiatres en secteur public non pourvus, de voir dans quelle situation se trouvent les urgences, lesquelles ne font que très difficilement face aux besoins existants. Ainsi, les demandes d’hospitalisation libre ne peuvent généralement pas être satisfaites dans des délais convenables. Dès lors, comment imaginer que ces personnels débordés pourront faire face à la multiplication des démarches administratives, des certificats médicaux qu’exige ce texte ?

Quant aux structures extrahospitalières que vous entendez mettre à contribution, elles manquent cruellement de moyens.

Dans un tel contexte, comment peut-on raisonnablement penser que ces personnels compétents et dévoués pourront, demain, garantir aux patients faisant l’objet de soins sans consentement un suivi médical en ambulatoire si, dans leur propre structure, ils n’y parviennent que très difficilement ?

Quant à la notion même de « soins sans consentement », nous avions adopté en première lecture une rédaction sous forme de périphrase qui évoquait des soins auxquels le patient n’était pas à même de consentir du fait de ses troubles mentaux. Cette rédaction a été supprimée par l’Assemblée nationale. Elle laisse la place au renvoi systématique aux dispositions légales applicables, soit « en application des chapitres II et III du présent titre ou de l’article 706-735 du code de procédure pénale ». Cette modification évite donc d’expliciter le fait que ces hospitalisations s’effectuent sans l’aval du patient, ce qui, nous l’avons vu à diverses reprises, peut être considéré comme contraire à la logique même de soins. Au reste, je note que cette réécriture n’est pas dénuée d’ambiguïté, ce qui peut être préjudiciable à l’ensemble des patients, y compris à ceux qui sont en soins « libres ».

Debut de section - PermalienPhoto de Jacky Le Menn

Je pense notamment à l’alinéa 42 de l’article 1er, qui traite, je le rappelle, de personnes « faisant, en raison de troubles mentaux, l’objet de soins psychiatriques, prenant ou non la forme d’une hospitalisation complète ».

Dans cette rédaction, aucun distinguo n’est fait selon qu’il s’agit d’hospitalisation libre ou d’hospitalisation sans consentement. Or il est question de la conservation de la totalité des droits et devoirs de citoyen, rien de moins ! Nous voyons bien à travers cet exemple qu’il est impératif de parfaire la rédaction du texte.

Une autre dimension inquiétante du projet de loi concerne la sectorisation, qui semble être remise en question par le Gouvernement.

Depuis sa mise en œuvre dans les années soixante, la politique de secteur constitue un progrès indiscutable pour nos concitoyens en situation de souffrance. Souvenons-nous que, précédemment, ils demeuraient reclus dans les hôpitaux psychiatriques. J’ai moi-même dirigé l’une de ces structures.

La sectorisation repose sur un triptyque : la précocité, qui permet de stopper ou de diminuer une évolution psychopathologique ; la continuité, destinée à suivre les personnes au long cours ; la proximité, qui permet d’agir au sein ou au plus près du milieu de vie naturel du malade, afin d’éviter au maximum le rejet par l’entourage et la désinsertion sociale.

Elle rend possible et optimise la coordination, la mutualisation et la mise en cohérence des moyens et connaissances des soignants. Loin d’être une entité monolithique et figée, elle constitue une richesse mouvante et difficilement normalisable. C’est pourquoi toute remise en cause de cet élément déterminant dans la réussite d’une politique de santé mentale au service du patient nous apparaîtrait comme extrêmement dangereuse.

Enfin, que dire de la justice, partie prenante de ce projet ? Sera-t-elle en mesure de faire face au surcroît de travail que génère ce texte ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jacky Le Menn

Le juge des libertés et de la détention aura-t-il la possibilité de donner suite à toutes les saisines ?

Dans la perspective des 80 000 décisions devant être rendues cette année, les effectifs seront-ils suffisants alors que M. le garde des sceaux lui-même considérait que l’architecture que vous entendez mettre en place était trop complexe ? Ne va-t-on pas assister à un encombrement des tribunaux, …

Debut de section - PermalienPhoto de Jacky Le Menn

… à une augmentation des délais de réponse ? Autant de dimensions qui risquent de rendre l’intervention du juge obsolète au regard des besoins du patient, lequel s’en trouverait pénalisé.

Aussi, compte tenu de ces graves éléments d’incertitude, de la portée de la décision du Conseil constitutionnel du 9 juin dernier, de la quasi-unanimité des professionnels, comme des familles de patients, contre ce texte qui privilégie une gestion sécuritaire de la santé mentale à une essentielle prise en compte sanitaire, nous vous proposons, mes chers collègues, d’adopter cette motion tendant à opposer la question préalable.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Lorrain

Au-delà de l’avis de la commission sur cette motion, dont l’adoption entraînerait le rejet de tout le texte, je souhaite ajouter un commentaire.

Ce projet de loi a donné lieu à des excès, à des dérives verbales, à des simplifications, ce qui ne veut pas dire qu’il ne faut pas le soumettre à l’appréciation de tous les partenaires, extérieurs ou intérieurs. Mais tout ce qui est susceptible de provoquer son rejet marque, en quelque sorte, l’arrêt de toute progression et le refus d’améliorer la situation.

Par conséquent, l’adoption de cette motion tendant à opposer la question préalable reviendrait à rejeter l’ensemble du texte, y compris les avancées concernant le rôle du juge et les droits des malades ainsi que les progrès, même insuffisants, que nous avons proposés.

Cette motion n’est pas une bonne réponse aux interrogations qui peuvent légitimement résulter de l’examen de ce texte en deuxième lecture.

Debut de section - Permalien
Nora Berra, secrétaire d'État

Quel dommage d’être contre ce texte !

Debut de section - Permalien
Nora Berra, secrétaire d'État

Que prévoyait la loi de 1990 ? D’encadrer le droit des patients. Or il faut distinguer les patients qui relèvent du droit commun et ont leur lucidité pour décider de se faire soigner ou pas, et les autres, qui sont atteints de troubles altérant leur discernement afin de pouvoir décider de consentir à des soins.

Que propose-t-on à ces patients ? La loi de 1990 n’était pas une loi de santé mentale, j’insiste sur ce point ; elle réaffirmait les droits des patients qui ne relevaient pas du droit commun. Le présent projet de loi, quant à lui, tend à faire évoluer cette loi.

Ce dispositif nouveau n’a pas la prétention d’être une grande loi de santé mentale, nous en sommes tous d’accord. Il a juste pour objet de faire évoluer les dispositifs encadrant les patients qui, en raison de l’altération de leur discernement, ne sont pas en mesure de consentir ou non à des soins.

Si les soins libres ne sont pas abordés, monsieur Le Menn, c’est parce qu’ils relèvent du droit commun et permettent au patient de se faire soigner ou non ; le consentement est donné en toute lucidité.

En l’espèce, il s’agit bien des patients dont le discernement est altéré et qu’il faut protéger.

Par conséquent, ce texte de loi réaffirme les droits et la liberté des individus.

L’inconstitutionnalité qui a été soulevée – je m’adresse ici à Mme David, car je n’ai pas été très claire tout à l’heure – concerne la loi de 1990 et non le texte aujourd’hui en discussion, qui permet d’y répondre.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat s’exclame.

Debut de section - Permalien
Nora Berra, secrétaire d'État

Pour toutes ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

La parole est à M. René-Pierre Signé, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de René-Pierre Signé

Mon interprétation du projet de loi diffère de la vôtre, et je ne peux que soutenir la motion tendant à opposer la question préalable défendue par mon collègue et ami Jacky Le Menn.

Pour le trouble mental, la psychopathie, la maladie mentale, la sociopathie, le déni psychotique, les définitions sont légion, comme pour les maladies ou les troubles mentaux.

Schizophrénie, bouffées délirantes de l’adolescence, épilepsie, dépression nerveuse, psychose maniaco-dépressive, autant de détresses pour le malade et son entourage. On peut y ajouter la consommation de drogue ou d’alcool. Je connais un peu ces questions, non pas en tant que malade, mais parce que j’ai été interne dans des services psychiatriques.

Un grand nombre de troubles de toutes sortes, pour des individus de cultures différentes, peuvent être considérés comme anormaux suivant les croyances ou les normes d’appartenance.

Ceux qui peuvent être conduits à souffrir d’un trouble mental au cours de leur existence, dont les malades ou ceux qui sont considérés comme tels ou ceux qui s’ignorent – j’ai cité tout à l’heure Jules Romain –, représentent, selon l’OMS, 50 % de la population mondiale. Les troubles neurologiques ou comportementaux représentent 12, 3 % de la morbidité mondiale.

Le projet de loi, à forte connotation sécuritaire, que nous examinons ajoute à la contrainte de l’hospitalisation la contrainte des soins poursuivis au-delà de l’hospitalisation. Il évoque des mesures anciennes, presque moyenâgeuses, au temps où l’on isolait le malade sans le soigner, à l’époque des maladreries et autres lazarets maritimes.

Je le précise, rien de tel ne figure dans le texte, sinon d’aucuns diront que cette comparaison est caricaturale. Aujourd’hui, on soigne, mais l’isolement devient prioritaire. Les soins sont quelquefois durs et brutaux – des traitements par aversion, que je ne vous décrirai pas, étaient encore pratiqués voilà peu – et la compassion facultative. Cet univers psychologique s’apparente, hélas ! à l’univers carcéral, même si tout malade n’est pas un délinquant potentiel.

L’affaire de Grenoble et le discours éponyme – on ne doit pas légiférer dans l’émotion – procèdent d’une politique qui conduit à l’abandon des malades dans les hôpitaux, les prisons ou la rue.

Le projet de loi, trop dur, a été justement censuré par le Conseil constitutionnel sur certains points : seront exigés l’intervention d’un juge des libertés et de la détention et un second certificat médical pour prolonger une hospitalisation. Aucune de ces deux mesures censurées ne faisait l’objet de garanties juridiques suffisantes. C’était dénier le respect des droits fondamentaux !

Les soins sans consentement sont considérés comme sécuritaires ; ils le sont. Les psychiatres devraient s’y opposer ; ils le font. Ils savent que tout soin sans consentement est loin d’être efficace, d’autant que ces soins peuvent être reconduits ou souhaités, voire exigés par une autorité non médicale.

Il est donc admis que le nombre de malades potentiels est important. Il existe différentes catégories élargies de troubles mentaux, je l’ai dit, de différents aspects du comportement et de la personnalité, affectés à des degrés divers. Doivent-ils pour autant être isolés ou suivis ? C’est une condamnation à perpétuité que l’on prononce. Elle jette la suspicion sur l’individu, mal à l’aise dans sa famille, montré du doigt par le voisinage.

Qui doit bénéficier de ce suivi soupçonneux ? Ceux qui ont eu des troubles et qui sont traités pour des récidives à venir qui ne viendront sans doute jamais, non pas grâce au traitement, mais parce qu’elles ne doivent pas venir.

La vie d’une personne est gâchée. Pourquoi ? Pour une pulsion, une phobie, un fantasme, une bouffée délirante – surtout dans l’adolescence –, un tropisme passager pour l’alcool, une ivresse excito-motrice, une consommation de drogue, tout cela pour surmonter un trouble passager.

Ces troubles du comportement ne méritent qu’un traitement, une surveillance limités dans le temps. Mais un traitement sans consentement à vie peut entraîner, d’une part, une autre dépendance – ne l’oubliez pas ! – et, d’autre part, mal accepté, une aversion forte, un rejet de toute thérapeutique, bref, des effets néfastes.

Nous sommes donc opposés à ce projet de loi et je soutiens totalement la motion défendue par M. Le Menn, qui a résumé notre position sur le texte.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

La réponse que vous nous avez faite, madame la secrétaire d’État, justifie pleinement que nous soutenions cette motion, et ce pour plusieurs raisons.

La première est générale et tient à la dignité des êtres humains. Il faudrait la rappeler à chaque occasion, notamment lorsque l’on parle de la santé mentale. Chaque individu est sujet de droit, parce que sa dignité est égale à celle des autres.

Vous nous dites que ce texte n’est pas une loi de santé mentale, parce qu’il s’agit de mettre les dispositifs en vigueur en conformité avec les décisions du Conseil constitutionnel et de faire respecter les libertés, ce qui n’était pas le cas.

Tenez-vous en à la mise en conformité de la loi avec la Constitution, et restons-en là ! Or ce n’est pas le cas avec ce projet de loi, dicté par un credo présidentiel que d’aucuns parmi vous, mes chers collègues, j’en suis certaine, partagent – sinon ils ne le voteraient pas –, à savoir que les malades mentaux sont tous des criminels potentiels, que, quand on a commis un délit, on récidivera forcément et enfin que le risque zéro est possible. Voilà ce que l’on nous ressasse à chaque nouvelle loi pénale et lors de toute intervention sur la maladie mentale.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Évidemment, nous ne partageons pas ce credo. D’ailleurs, la réalité ne le vérifie pas.

Pour l’instant, restons-en à la mise en conformité avec la décision du Conseil constitutionnel. Par ailleurs, préparons rapidement une loi sur la santé mentale, car le problème est très grave : la psychiatrie est actuellement en danger, et il faut répondre aux besoins de tous les malades, qu’ils soient capables ou non de consentir aux soins, en augmentant les moyens des professionnels et en leur permettant de faire face à la situation.

J’ajoute que la motion tendant à opposer la question préalable se justifierait aussi de ce point de vue : encore une fois, vous faites la démonstration que vous voulez faire voter des lois sans prévoir les moyens de les mettre en application, qu’il s’agisse des soins ou de la justice. Nous le vérifions une fois de plus avec les dispositions du présent texte.

C’est de l’affichage, auquel vous nous permettrez de ne pas nous associer ; c’est pour cela que nous insistons autant, même si nous sommes en deuxième lecture.

Par conséquent, nous voterons la motion tendant à opposer la question préalable, comme nous avons voté la motion tendant à opposer l’exception d’irrecevabilité, parce que ce projet de loi est totalement à contre-emploi !

Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

Plus personne ne demande la parole ?...

Je mets aux voix la motion n° 33, tendant à opposer la question préalable.

Je rappelle que l'adoption de cette motion entraînerait le rejet du projet de loi.

La commission et le Gouvernement se sont prononcés contre.

La motion n'est pas adoptée.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

Nous passons donc à la discussion des articles.

Je rappelle que, en application de l’article 48, alinéa 5, du règlement, à partir de la deuxième lecture au Sénat des projets et propositions de loi, la discussion des articles est limitée à ceux pour lesquels les deux assemblées du Parlement n’ont pas encore adopté un texte identique.

En conséquence, conformément à la pratique dite « de l’entonnoir », sont irrecevables les amendements remettant en cause les « conformes » ou les articles additionnels sans relation directe avec les dispositions restant en discussion.

TITRE IER

DROITS DES PERSONNES FAISANT L’OBJET DE SOINS PSYCHIATRIQUES

(Non modifié)

I. – Le titre Ier du livre II de la troisième partie du code de la santé publique est ainsi modifié :

1° L’intitulé est ainsi rédigé : « Modalités de soins psychiatriques » ;

2° L’intitulé du chapitre Ier est ainsi rédigé : « Droits des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques » ;

3° L’article L. 3211-1 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, les mots : « être hospitalisée ou maintenue en hospitalisation dans un établissement accueillant des malades atteints de troubles mentaux » sont remplacés par les mots : « faire l’objet de soins psychiatriques » et les mots : « la loi et notamment par les chapitres II et III du présent titre » sont remplacés par les mots : « les chapitres II à IV du présent titre et ceux prévus à l’article 706-135 du code de procédure pénale » ;

b) Au second alinéa, le mot : « hospitalisée » est remplacé par les mots : « faisant l’objet de soins psychiatriques » ;

bis (Suppression maintenue)

4° L’article L. 3211-2 est ainsi modifié :

a) À la première phrase, le mot : « hospitalisée » est remplacé par les mots : « faisant l’objet de soins psychiatriques » et les mots : « hospitalisation libre » sont remplacés par les mots : « soins psychiatriques libres » ;

a bis) À la seconde phrase, le mot : « hospitalisés » est remplacé par le mot : « soignés » ;

b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Cette modalité de soins est privilégiée lorsque l’état de la personne le permet. » ;

5° Après le même article L. 3211-2, il est inséré un article L. 3211-2-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 3211 -2 -1. – Une personne faisant l’objet de soins psychiatriques en application des chapitres II et III du présent titre ou de l’article 706-135 du code de procédure pénale est prise en charge :

« 1° Sous la forme d’une hospitalisation complète dans un établissement mentionné à l’article L. 3222-1 du présent code ;

« 2° Sous une autre forme incluant des soins ambulatoires, pouvant comporter des soins à domicile, dispensés par un établissement mentionné au même article L. 3222-1 et, le cas échéant, des séjours effectués dans un établissement de ce type.

« Lorsque les soins prennent la forme prévue au 2°, un programme de soins est établi par un psychiatre de l’établissement d’accueil. Ce programme de soins ne peut être modifié que par un psychiatre qui participe à la prise en charge du patient, afin de tenir compte de l’évolution de son état de santé.

« L’avis du patient est recueilli préalablement à la définition du programme de soins et avant toute modification de celui-ci, à l’occasion d’un entretien avec un psychiatre de l’établissement d’accueil au cours duquel il reçoit l’information prévue à l’article L. 3211-3 et est avisé des dispositions de l’article L. 3211-11.

« Le programme de soins définit les types de soins, les lieux de leur réalisation et leur périodicité, dans des conditions déterminées par décret en Conseil d’État. » ;

6° Après le même article L. 3211-2, sont insérés des articles L. 3211-2-2 et L. 3211-2-3 ainsi rédigés :

« Art. L. 3211-2-2. – Lorsqu’une personne est admise en soins psychiatriques en application des chapitres II ou III du présent titre, elle fait l’objet d’une période d’observation et de soins initiale sous la forme d’une hospitalisation complète.

« Dans les vingt-quatre heures suivant l’admission, un médecin réalise un examen somatique complet de la personne et un psychiatre de l’établissement d’accueil établit un certificat médical constatant son état mental et confirmant ou non la nécessité de maintenir les soins psychiatriques au regard des conditions d’admission définies aux articles L. 3212-1 ou L. 3213-1. Ce psychiatre ne peut être l’auteur du certificat médical ou d’un des deux certificats médicaux sur la base desquels la décision d’admission a été prononcée.

« Dans les soixante-douze heures suivant l’admission, un nouveau certificat médical est établi dans les mêmes conditions que celles prévues au deuxième alinéa.

« Lorsque les deux certificats médicaux ont conclu à la nécessité de maintenir les soins psychiatriques, un psychiatre de l’établissement d’accueil propose dans un avis motivé, établi avant l’expiration du délai de soixante-douze heures mentionné au troisième alinéa du présent article, la forme de la prise en charge mentionnée aux 1° et 2° de l’article L. 3211-2-1 et, le cas échéant, le programme de soins.

« Art. L. 3211-2-3. – Lorsqu’une personne remplissant les conditions pour être admise en soins psychiatriques prévues aux chapitres II et III du présent titre est prise en charge en urgence par un établissement de santé qui n’exerce pas la mission de service public mentionnée au 11° de l’article L. 6112-1, son transfert vers un établissement exerçant cette mission est organisé, selon des modalités prévues par convention, dans des délais adaptés à son état de santé et au plus tard sous quarante-huit heures. La période d’observation et de soins initiale mentionnée à l’article L. 3211-2-2 prend effet dès le début de la prise en charge. » ;

7° L’article L. 3211-3 est ainsi modifié :

a) Le premier alinéa est ainsi modifié :

– à la première phrase, les mots : « est hospitalisée sans son consentement » sont remplacés par les mots : « fait l’objet de soins psychiatriques », les mots : « cette hospitalisation » sont remplacés par les mots : « ces soins » et les mots : « limitées à celles nécessitées par son état de santé et la mise en œuvre de son traitement » sont remplacés par les mots : « adaptées, nécessaires et proportionnées à son état mental et à la mise en œuvre du traitement requis » ;

– à la seconde phrase, le mot : « hospitalisée » est supprimé ;

b) Le deuxième alinéa est remplacé par cinq alinéas ainsi rédigés :

« Avant chaque décision prononçant le maintien des soins en application des articles L. 3212-4, L. 3212-7, L. 3213-1 et L. 3213-4 ou définissant la forme de la prise en charge en application des articles L. 3211-12-5, L. 3212-4, L. 3213-1 et L. 3213-3, la personne faisant l’objet de soins psychiatriques est, dans la mesure où son état le permet, informée de ce projet de décision et mise à même de faire valoir ses observations, par tout moyen et de manière appropriée à cet état.

« En outre, toute personne faisant l’objet de soins psychiatriques en application des chapitres II et III du présent titre ou de l’article 706-135 du code de procédure pénale est informée :

« a) Le plus rapidement possible et d’une manière appropriée à son état, de la décision d’admission et de chacune des décisions mentionnées au deuxième alinéa du présent article, ainsi que des raisons qui les motivent ;

« b) Dès l’admission ou aussitôt que son état le permet et, par la suite, à sa demande et après chacune des décisions mentionnées au même deuxième alinéa, de sa situation juridique, de ses droits, des voies de recours qui lui sont ouvertes et des garanties qui lui sont offertes en application de l’article L. 3211-12-1.

« L’avis de cette personne sur les modalités des soins doit être recherché et pris en considération dans toute la mesure du possible. » ;

c) Le 2° est complété par les mots : « et, lorsqu’elle est hospitalisée, la commission mentionnée à l’article L. 1112-3 » ;

d) Le 3° est ainsi rédigé :

« 3° De porter à la connaissance du Contrôleur général des lieux de privation de liberté des faits ou situations susceptibles de relever de sa compétence ; »

e) Les 3°, 4°, 5°, 6° et 7° deviennent respectivement les 4°, 5°, 6°, 7° et 8° ;

f) Au dernier alinéa, les références : « 4°, 6° et 7° » sont remplacées par les références : « 5°, 7° et 8° » ;

8° L’article L. 3211-5 est ainsi rédigé :

« Art. L. 3211-5. – Une personne faisant, en raison de troubles mentaux, l’objet de soins psychiatriques, prenant ou non la forme d’une hospitalisation complète, conserve à l’issue de ces soins la totalité de ses droits et devoirs de citoyen, sous réserve des dispositions relatives aux mesures de protection des majeurs prévues aux sections 1 à 4 du chapitre II du titre XI du livre Ier du code civil, sans que ses antécédents psychiatriques puissent lui être opposés. » ;

Suppression maintenue

10° L’article L. 3211-7 est ainsi modifié :

a) À la première phrase du premier alinéa, les mots : « sans son consentement » sont remplacés par les mots : « en application des chapitres II et III du présent code ou de l’article 706-135 du code de procédure pénale » ;

b) Les deux derniers alinéas sont supprimés ;

11° L’article L. 3211-8 est ainsi rédigé :

« Art. L. 3211-8. – La personne faisant l’objet de soins psychiatriques en application des chapitres II et III du présent titre ou de l’article 706-135 du code de procédure pénale peut être placée en curatelle ou en tutelle dans les conditions et selon les modalités prévues aux articles 425 et 440 du code civil. » ;

12° L’article L. 3211-9 est ainsi rédigé :

« Art. L. 3211-9. – Pour l’application du II des articles L. 3211-12 et L. 3211-12-1 et des articles L. 3212-7, L. 3213-1, L. 3213-3 et L. 3213-8, le directeur de l’établissement d’accueil du patient convoque un collège composé de trois membres appartenant au personnel de l’établissement :

« 1° Un psychiatre participant à la prise en charge du patient ;

« 2° Un psychiatre ne participant pas à la prise en charge du patient ;

« 3° Un représentant de l’équipe pluridisciplinaire participant à la prise en charge du patient.

« Les modalités de désignation des membres et les règles de fonctionnement du collège sont fixées par décret en Conseil d’État. » ;

13° La première phrase de l’article L. 3211-10 est ainsi rédigée :

« Hormis les cas prévus au chapitre III du présent titre, la décision d’admission en soins psychiatriques d’un mineur ou la levée de cette mesure sont demandées, selon les situations, par les personnes titulaires de l’exercice de l’autorité parentale ou par le tuteur. » ;

14° L’article L. 3211-11 est ainsi rédigé :

« Art. L. 3211-11. – Le psychiatre qui participe à la prise en charge du patient peut proposer à tout moment de modifier la forme de la prise en charge mentionnée à l’article L. 3211-2-1 pour tenir compte de l’évolution de l’état de la personne. Il établit en ce sens un certificat médical circonstancié.

« Le psychiatre qui participe à la prise en charge du patient transmet immédiatement au directeur de l’établissement d’accueil un certificat médical circonstancié proposant une hospitalisation complète lorsqu’il constate que la prise en charge de la personne décidée sous une autre forme ne permet plus, notamment du fait du comportement de la personne, de dispenser les soins nécessaires à son état. Lorsqu’il ne peut être procédé à l’examen du patient, il transmet un avis établi sur la base du dossier médical de la personne. » ;

15° L’article L. 3211-11-1 est ainsi modifié :

a) À la première phrase du premier alinéa, les mots : « hospitalisées sans leur consentement » sont remplacés par les mots : « faisant l’objet de soins psychiatriques en application des chapitres II et III du présent titre ou de l’article 706-135 du code de procédure pénale sous la forme d’une hospitalisation complète » ;

a bis) À la seconde phrase du premier alinéa, après le mot : « établissement », sont insérés les mots : «, par un membre de sa famille ou par la personne de confiance qu’elle a désignée en application de l’article L. 1111-6 » ;

b) Au deuxième alinéa, les mots : « d’absence » sont remplacés par les mots : « de sortie accompagnée » ;

c) À la première phrase du dernier alinéa, les mots : « d’une hospitalisation d’office » sont remplacés par les mots : « où la mesure a été prise en application du chapitre III du présent titre » et les mots : « du psychiatre » sont remplacés par les mots : « d’un psychiatre participant à la prise en charge du patient » ;

d)

Suppression maintenue

16° L’article L. 3211-12 est ainsi rédigé :

« Art. L. 3211-12. – I. – Le juge des libertés et de la détention dans le ressort duquel se situe l’établissement d’accueil peut être saisi, à tout moment, aux fins d’ordonner, à bref délai, la mainlevée immédiate d’une mesure de soins psychiatriques prononcée en application des chapitres II à IV du présent titre ou de l’article 706-135 du code de procédure pénale, quelle qu’en soit la forme.

« La saisine peut être formée par :

« 1° La personne faisant l’objet des soins ;

« 2° Les titulaires de l’autorité parentale ou le tuteur si la personne est mineure ;

« 3° La personne chargée de sa protection si, majeure, elle a été placée en tutelle ou en curatelle ;

« 4° Son conjoint, son concubin, la personne avec laquelle elle est liée par un pacte civil de solidarité ;

« 5° La personne qui a formulé la demande de soins ;

« 6° Un parent ou une personne susceptible d’agir dans l’intérêt de la personne faisant l’objet des soins ;

« 7° Le procureur de la République.

« Le juge des libertés et de la détention peut également se saisir d’office, à tout moment. À cette fin, toute personne intéressée peut porter à sa connaissance les informations qu’elle estime utiles sur la situation d’une personne faisant l’objet d’une telle mesure.

« II. – Le juge des libertés et de la détention ne peut statuer qu’après avoir recueilli l’avis du collège mentionné à l’article L. 3211-9 du présent code :

« 1° Lorsque la personne fait l’objet d’une mesure de soins ordonnée en application des articles L. 3213-7 du présent code ou 706-135 du code de procédure pénale ou qu’elle fait l’objet de soins en application de l’article L. 3213-1 du présent code et qu’elle a déjà fait l’objet d’une mesure de soins ordonnée en application des articles L. 3213-7 du présent code ou 706-135 du code de procédure pénale ;

« 2° Lorsque la personne fait l’objet de soins en application de l’article L. 3213-1 du présent code et qu’elle fait ou a déjà fait l’objet, pendant une durée fixée par décret en Conseil d’État, d’une hospitalisation dans une unité pour malades difficiles mentionnée à l’article L. 3222-3.

« Dans les cas mentionnés aux 1° et 2° du présent II, le juge ne peut en outre décider la mainlevée de la mesure qu’après avoir recueilli deux expertises établies par les psychiatres inscrits sur les listes mentionnées à l’article L. 3213-5-1.

« Le juge fixe les délais dans lesquels l’avis du collège et les deux expertises prévus au présent II doivent être produits, dans une limite maximale fixée par décret en Conseil d’État. Passés ces délais, il statue immédiatement.

« Le présent II n’est pas applicable lorsque les mesures de soins mentionnées aux 1° et 2° ont pris fin depuis au moins dix ans.

« III. – Le juge des libertés et de la détention ordonne, s’il y a lieu, la mainlevée de la mesure d’hospitalisation complète.

« Lorsqu’il ordonne cette mainlevée, il peut, au vu des éléments du dossier et par décision motivée, décider que la mainlevée prend effet dans un délai maximal de vingt-quatre heures afin qu’un programme de soins puisse, le cas échéant, être établi en application de l’article L. 3211-2-1. Dès l’établissement de ce programme ou à l’issue du délai mentionné à la phrase précédente, la mesure d’hospitalisation complète prend fin. » ;

17° Après le même article L. 3211-12, sont insérés des articles L. 3211-12-1 à L. 3211-12-6 ainsi rédigés :

« Art. L. 3211-12-1. – I. – L’hospitalisation complète d’un patient ne peut se poursuivre sans que le juge des libertés et de la détention, préalablement saisi par le directeur de l’établissement, lorsque l’hospitalisation a été prononcée en application du chapitre II, ou par le représentant de l’État dans le département, lorsqu’elle a été prononcée en application du chapitre III du présent titre, de l’article L. 3214-3 du présent code ou de l’article 706-135 du code de procédure pénale, n’ait statué sur cette mesure :

« 1° Avant l’expiration d’un délai de quinze jours à compter de l’admission prononcée en application des chapitres II ou III du présent titre ou de l’article L. 3214-3 ;

« 2° Avant l’expiration d’un délai de quinze jours à compter de la décision par laquelle le directeur de l’établissement ou le représentant de l’État a modifié la forme de la prise en charge du patient en procédant à son hospitalisation complète en application, respectivement, du dernier alinéa de l’article L. 3212-4 ou du III de l’article L. 3213-3 ;

« 3° Avant l’expiration d’un délai de six mois suivant soit toute décision judiciaire prononçant l’hospitalisation en application de l’article 706-135 du code de procédure pénale, soit toute décision prise par le juge des libertés et de la détention en application des articles L. 3211-12 ou L. 3213-5 du présent code ou du présent article, lorsque le patient a été maintenu en hospitalisation complète de manière continue depuis cette décision. Toute décision du juge des libertés et de la détention prise avant l’expiration de ce délai sur le fondement de l’un des mêmes articles 706-135, L. 3211-12 ou L. 3213-5 ou du présent article fait courir à nouveau ce délai.

« Toutefois, lorsque le juge des libertés et de la détention a ordonné, avant l’expiration de l’un des délais mentionnés aux 1° à 3° du présent I, une expertise en application du III du présent article ou, à titre exceptionnel, en considération de l’avis conjoint des deux psychiatres, ce délai est prolongé d’une durée qui ne peut excéder quatorze jours à compter de la date de cette ordonnance. L’hospitalisation complète du patient est alors maintenue jusqu’à la décision du juge, sauf s’il y est mis fin en application des chapitres II ou III du présent titre. L’ordonnance mentionnée au présent alinéa peut être prise sans audience préalable.

« Le juge fixe les délais dans lesquels l’expertise mentionnée au cinquième alinéa du présent I doit être produite, dans une limite maximale fixée par décret en Conseil d’État. Passés ces délais, il statue immédiatement.

« II. La saisine mentionnée au I du présent article est accompagnée d’un avis conjoint rendu par deux psychiatres de l’établissement d’accueil désignés par le directeur, dont un seul participe à la prise en charge du patient. Cet avis se prononce sur la nécessité de poursuivre l’hospitalisation complète.

« Lorsque le patient relève de l’un des cas mentionnés aux 1° et 2° du II de l’article L. 3211-12, l’avis prévu au premier alinéa du présent II est rendu par le collège mentionné à l’article L. 3211-9. Le présent alinéa n’est pas applicable lorsque les mesures de soins mentionnées aux 1° et 2° du II de l’article L. 3211-12 ont pris fin depuis au moins dix ans.

« III. – Le juge des libertés et de la détention ordonne, s’il y a lieu, la mainlevée de la mesure d’hospitalisation complète.

« Lorsqu’il ordonne cette mainlevée, il peut, au vu des éléments du dossier et par décision motivée, décider que la mainlevée prend effet dans un délai maximal de vingt-quatre heures afin qu’un programme de soins puisse, le cas échéant, être établi en application de l’article L. 3211-2-1. Dès l’établissement de ce programme ou à l’issue du délai mentionné à la phrase précédente, la mesure d’hospitalisation complète prend fin.

« Toutefois, lorsque le patient relève de l’un des cas mentionnés aux 1° et 2° du II de l’article L. 3211-12, le juge ne peut décider la mainlevée de la mesure qu’après avoir recueilli deux expertises établies par les psychiatres inscrits sur les listes mentionnées à l’article L. 3213-5-1. Le présent alinéa n’est pas applicable lorsque les mesures de soins mentionnées aux 1° et 2° du II de l’article L. 3211-12 ont pris fin depuis au moins dix ans.

« IV. – Lorsque le juge des libertés et de la détention n’a pas statué dans les délais mentionnés au I, la mainlevée est acquise à l’issue de chacun de ces délais.

« Si le juge des libertés et de la détention est saisi après l’expiration d’un délai fixé par décret en Conseil d’État, il constate sans débat que la mainlevée de l’hospitalisation complète est acquise, à moins qu’il ne soit justifié de circonstances exceptionnelles à l’origine de la saisine tardive et que le débat puisse avoir lieu dans le respect des droits de la défense.

« Art. L. 3211-12-2. – Lorsqu’il est saisi en application des articles L. 3211-12 ou L. 3211-12-1, le juge, après débat contradictoire, statue publiquement, sous réserve des dispositions prévues à l’article 11-1 de la loi n° 72-626 du 5 juillet 1972 instituant un juge de l’exécution et relative à la réforme de la procédure civile.

« À l’audience, la personne faisant l’objet de soins psychiatriques est entendue, le cas échéant assistée de son avocat, ou représentée par celui-ci. Si, au vu d’un avis médical, des motifs médicaux font obstacle, dans son intérêt, à son audition, la personne est représentée par un avocat choisi ou, à défaut, commis d’office.

« Le juge des libertés et de la détention statue au siège du tribunal de grande instance. Toutefois, si une salle d’audience a été spécialement aménagée sur l’emprise de l’établissement d’accueil pour assurer la clarté, la sécurité et la sincérité des débats et permettre au juge de statuer publiquement, celui-ci peut décider de statuer dans cette salle.

« Lorsque le juge des libertés et de la détention décide de statuer dans cette salle, le président du tribunal de grande instance peut, en cas de nécessité, autoriser qu’une seconde audience soit tenue le même jour au siège du tribunal de grande instance.

« Le juge des libertés et de la détention peut également décider que l’audience se déroule dans la salle d’audience mentionnée au troisième alinéa du présent article avec l’utilisation de moyens de télécommunication audiovisuelle dans les conditions prévues à l’article L. 111-12 du code de l’organisation judiciaire lorsque les conditions suivantes sont réunies :

« 1° Un avis médical a attesté que l’état mental de la personne ne fait pas obstacle à ce procédé ;

« 2° Le directeur de l’établissement d’accueil s’est assuré de l’absence d’opposition du patient.

« Il est alors dressé, dans chacune des deux salles d’audience ouvertes au public, un procès-verbal des opérations effectuées.

« Si le patient est assisté par un avocat, celui-ci peut se trouver auprès du magistrat ou auprès de l’intéressé. Dans le premier cas, l’avocat doit pouvoir s’entretenir avec le patient, de façon confidentielle, en utilisant le moyen de télécommunication audiovisuelle. Dans le second cas, une copie de l’intégralité du dossier doit être mise à sa disposition dans les locaux de l’établissement, sauf si elle lui a déjà été remise.

« Art. L. 3211-12-3. – Le juge des libertés et de la détention saisi en application de l’article L. 3211-12-1 peut, si un recours a été formé sur le fondement de l’article L. 3211-12, statuer par une même décision suivant la procédure prévue au même article L. 3211-12-1.

« Art. L. 3211-12-4. – L’ordonnance du juge des libertés et de la détention prise en application des articles L. 3211-12 ou L. 3211-12-1 est susceptible d’appel devant le premier président de la cour d’appel ou son délégué. Le débat est tenu selon les modalités prévues à l’article L. 3211-12-2.

« L’appel formé à l’encontre de l’ordonnance mentionnée au premier alinéa n’est pas suspensif. Le premier président de la cour d’appel ou son délégué statue alors à bref délai dans des conditions définies par décret en Conseil d’État.

« Toutefois, lorsque le juge des libertés et de la détention ordonne la mainlevée d’une mesure de soins psychiatriques sous la forme d’une hospitalisation complète ou constate la mainlevée de cette mesure, le procureur de la République peut demander au premier président de la cour d’appel ou à son délégué de déclarer le recours suspensif en cas de risque grave d’atteinte à l’intégrité du malade ou d’autrui. Dans ce cas, l’appel, accompagné de la demande faisant état du risque grave d’atteinte à l’intégrité du malade ou d’autrui, est formé dans un délai de six heures à compter de la notification de l’ordonnance à l’auteur de la saisine et transmis au premier président de la cour d’appel ou à son délégué. Celui-ci décide, sans délai, s’il y a lieu de donner à cet appel un effet suspensif, en fonction du risque grave d’atteinte à l’intégrité du malade ou d’autrui. Il statue par une ordonnance motivée qui n’est pas susceptible de recours. Le patient est maintenu en hospitalisation complète jusqu’à ce que cette ordonnance soit rendue et, si elle donne un effet suspensif à l’appel, jusqu’à ce qu’il soit statué sur le fond, sauf s’il est mis fin à l’hospitalisation complète en application des chapitres II ou III du présent titre.

« Lorsqu’il a été donné un effet suspensif à l’appel, le premier président de la cour d’appel ou son délégué se prononce sur la demande en appel dans un délai de trois jours à compter de la déclaration d’appel. Toutefois, par une ordonnance qui peut être prise sans audience préalable, il peut, avant l’expiration de ce délai, ordonner une expertise. Il se prononce alors dans un délai de quatorze jours à compter de la date de cette ordonnance. En l’absence de décision à l’issue de l’un ou l’autre de ces délais, la mainlevée est acquise.

« Art. L. 3211-12-5. – Lorsque la mainlevée d’une mesure d’hospitalisation complète est acquise en application du IV de l’article L. 3211-12-1, le patient peut, dès cette mainlevée, faire l’objet de soins psychiatriques sous la forme mentionnée au 2° de l’article L. 3211-2-1 si les conditions prévues au I des articles L. 3212-1 ou L. 3213-1 sont toujours réunies et selon les modalités prévues, respectivement, aux chapitres II ou III du présent titre.

« Dans ce cas, un programme de soins est établi en application de l’article L. 3211-2-1. La période d’observation et de soins initiale mentionnée à l’article L. 3211-2-2 n’est pas applicable.

« Art. L. 3211-12-6. – Lorsque la mesure de soins psychiatriques dont une personne fait l’objet est levée en application du présent chapitre ou des chapitres II ou III du présent titre, un psychiatre de l’établissement d’accueil l’informe, en tant que de besoin, de la nécessité de poursuivre son traitement en soins libres et lui indique les modalités de soins qu’il estime les plus appropriées à son état. »

II et III. –

Non modifiés

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

Je suis saisi de trente et un amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

L'amendement n° 66 rectifié, présenté par M. Mézard, Mme Escoffier, MM. Collin, Alfonsi, Baylet, Detcheverry et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

Le code de la santé publique est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa de l'article L. 3211-12, après le mot : « statuant », sont insérés les mots : « à bref délai » ;

2° Après l’article L. 3211-12, sont insérés des articles L. 3211-12-1 à L. 3211-12-4 ainsi rédigés :

« Art. L. 3211-12-1. - I. - L'hospitalisation d'un patient sans son consentement ne peut se poursuivre sans que le juge des libertés et de la détention, préalablement saisi par le directeur de l'établissement, lorsque l'hospitalisation a été prononcée en application du chapitre II, ou par le représentant de l'État dans le département, lorsqu'elle a été prononcée en application du chapitre III du présent titre, de l'article L. 3214-3 du présent code ou de l'article 706-135 du code de procédure pénale, n'ait statué sur cette mesure :

« 1° Avant l'expiration d'un délai de quinze jours à compter de l'admission prononcée en application des chapitres II ou III du présent titre ou de l'article L. 3214-3 ;

« 2° Avant l'expiration d'un délai de six mois suivant soit toute décision judiciaire prononçant l'hospitalisation en application de l'article 706-135 du code de procédure pénale, soit toute décision prise par le juge des libertés et de la détention en application des articles L. 3211-12 ou L. 3213-5 du présent code ou du présent article, lorsque le patient a été maintenu en hospitalisation depuis cette décision. Toute décision du juge des libertés et de la détention prise avant l'expiration de ce délai sur le fondement de l'un des mêmes articles 706-135, L. 3211-12 ou L. 3213-5 ou du présent article fait courir à nouveau ce délai.

« Toutefois, lorsque le juge des libertés et de la détention a ordonné, avant l'expiration de l'un des délais mentionnés aux 1° et 2° du présent I, une expertise, à titre exceptionnel, en considération de l'avis conjoint des deux psychiatres, ce délai est prolongé d'une durée qui ne peut excéder quatorze jours à compter de la date de cette ordonnance. L'hospitalisation complète du patient est alors maintenue jusqu'à la décision du juge, sauf s'il y est mis fin en application des chapitres II ou III du présent titre. L'ordonnance mentionnée au présent alinéa peut être prise sans audience préalable.

« Le juge fixe les délais dans lesquels l'expertise mentionnée au quatrième alinéa du présent I doit être produite, dans une limite maximale fixée par décret en Conseil d'État. Passés ces délais, il statue immédiatement.

« II. - La saisine mentionnée au I du présent article est accompagnée d'un avis conjoint rendu par deux psychiatres de l'établissement d'accueil désignés par le directeur, dont un seul participe à la prise en charge du patient. Cet avis se prononce sur la nécessité de poursuivre l'hospitalisation.

« III. - Le juge des libertés et de la détention ordonne, s'il y a lieu, la mainlevée de la mesure d'hospitalisation.

« IV. - Lorsque le juge des libertés et de la détention n'a pas statué dans les délais mentionnés au I, la mainlevée est acquise à l'issue de chacun de ces délais.

« Si le juge des libertés et de la détention est saisi après l'expiration d'un délai fixé par décret en Conseil d'État, il constate sans débat que la mainlevée de l'hospitalisation est acquise, à moins qu'il ne soit justifié de circonstances exceptionnelles à l'origine de la saisine tardive et que le débat puisse avoir lieu dans le respect des droits de la défense.

« Art. L. 3211-12-2. - Lorsqu'il est saisi en application des articles L. 3211-12 ou L. 3211-12-1, le juge, après débat contradictoire, statue publiquement, sous réserve des dispositions prévues à l'article 11-1 de la loi n° 72-626 du 5 juillet 1972 instituant un juge de l'exécution et relative à la réforme de la procédure civile.

« À l'audience, la personne hospitalisée sans son consentement est entendue, assistée de son avocat. Si, au vu d'un avis médical, des motifs médicaux font obstacle, dans son intérêt, à son audition, la personne est représentée par un avocat choisi ou, à défaut, commis d'office.

« Art. L. 3211-12-3. - Le juge des libertés et de la détention saisi en application de l'article L. 3211-12-1 peut, si un recours a été formé sur le fondement de l'article L. 3211-12, statuer par une même décision suivant la procédure prévue au même article L. 3211-12-1.

« Art. L. 3211-12-4. - L'ordonnance du juge des libertés et de la détention prise en application des articles L. 3211-12 ou L. 3211-12-1 est susceptible d'appel devant le premier président de la cour d'appel ou son délégué. Le débat est tenu selon les modalités prévues à l'article L. 3211-12-2.

« L'appel formé à l'encontre de l'ordonnance mentionnée au premier alinéa n'est pas suspensif. Le premier président de la cour d'appel ou son délégué statue alors à bref délai dans des conditions définies par décret en Conseil d'État. »

Cet amendement n'est pas soutenu.

Mes chers collègues, la rédaction de l’amendement n° 66 rectifié nous imposait ce « tunnel ». Dans la mesure où il n’est pas défendu, je vous propose de limiter la discussion commune à l’examen des amendements n° 1 à 18, puis d’appeler successivement les amendements n° 45 à 53.

Assentiment

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

Je suis donc saisi de seize amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L'amendement n° 1, présenté par M. Fischer, Mmes David et Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Alinéas 1 à 65

Supprimer ces alinéas.

La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

L’objet de cet amendement est de limiter la rédaction de l’article 1er au seul point positif qu’il contient. Imposé par le juge constitutionnel, celui-ci permettrait, s’il était véritablement encadré par un dispositif efficient, de garantir dans une certaine mesure les libertés individuelles et la dignité des patients.

De plus, les alinéas que nous proposons de supprimer mélangent plusieurs éléments qui ne devraient pas l’être.

On sait que, dans un premier temps, le Gouvernement envisageait, dans son plan de sécurisation des hôpitaux psychiatriques de 2008, des mesures bien plus sévères, et totalement inadaptées, comme le contrôle des patients par bracelet électronique ou la multiplication des chambres d’isolement. Devant l’injonction du juge constitutionnel, il a quand même revu sa copie et prévu l’examen par le juge judiciaire de la mesure d’internement sans consentement. Il en résulte un texte très imprécis, qui, en dépit d’une avancée pour le droit des malades, s’appuie surtout sur une conception dépassée de la maladie mentale.

Nous considérons que la réflexion sur la prise en charge des malades devrait se faire dans le cadre d’une loi de santé mentale qui serait dégagée du seul objectif sécuritaire. Vous pourriez alors écouter les arguments des patients, des familles, des médecins et des soignants : ils reconnaissent que des questions d’ordre public se posent, mais estiment que, dans ce texte, vous mélangez ce problème, prioritaire à vos yeux, et la question des soins. Une telle loi nous semble indispensable.

En attendant, nous vous proposons, mes chers collègues, de supprimer les alinéas de cet article relatifs à de pseudo-soins.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

L'amendement n° 2, présenté par M. Fischer, Mmes David et Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Alinéa 14

Compléter cet alinéa par les mots :

dans les centres médico-psychologiques, les centres d’accueil thérapeutique, les appartements thérapeutiques, et les hôpitaux de jour. Si son état ne le permet pas, cela peut être fait

La parole est à Mme Annie David.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

À l’occasion de l’examen par le Sénat de ce projet de loi en première lecture, nous avions déposé un amendement très proche de celui-ci visant à donner la priorité aux centres médico-psychologiques et aux hôpitaux de jour, à condition, bien entendu, que l’état de santé du patient le permette.

M. le rapporteur avait alors considéré que notre liste était trop limitative et qu’il convenait, à tout le moins, de tenir compte d’autres formes de structures telles que les centres d’accueil thérapeutique et les appartements thérapeutiques. Partageant son analyse, nous présentons donc cet amendement en espérant que dans cette nouvelle rédaction trouve grâce à ses yeux et recueille l’adhésion d’une majorité des membres de notre assemblée.

Derrière la question des structures, c’est bien celle de la logique de soins que nous entendons soulever. Comme vous le savez, mes chers collègues, c’est par une simple circulaire ministérielle qu’est officiellement née, en mars 1960, la psychiatrie de secteur, dont le principe fondamental, tant pour les soignants que pour les patients, est de « soigner hors des murs, dans la cité ». L’un des objectifs de la psychiatrie de secteur est en effet d’assurer, le plus souvent possible, le traitement des patients en dehors de l’hôpital psychiatrique, au plus près de leur milieu de vie habituel. Comme le souligne le docteur Guy Baillon, psychiatre des hôpitaux, « son souci est d’impliquer l’ensemble des Français en respectant la réalité de leurs liens lorsqu’ils ont comme objectif de construire une Cité, celle où ils vivent ». Il précise en outre que « ces liens sont essentiellement ceux d’une “citoyenneté” ».

Or ce projet de loi est totalement dédié à l’enfermement, lequel se réalise tantôt dans les établissements psychiatriques, tantôt au domicile des patients ou de leurs proches. Car il ne suffit pas que les soins soient réalisés hors les murs des hôpitaux pour qu’ils relèvent de la politique de secteur.

Quand on parle de secteur, on parle certes de visites ambulatoires, mais aussi d’une méthode de soins qui repose sur la volonté du patient, et non sur la contrainte, comme cela est le cas dans ce projet de loi.

En outre, si cet amendement nous paraît tellement important, c’est parce que la notion de contrainte a disparu de la nouvelle rédaction de l’intitulé du projet de loi et de son contenu, ce qui pourrait laisser accroire que les soins psychiatriques sont exclusivement ou prioritairement délivrés sans que le patient y consente.

Aussi, afin d’équilibrer ce projet de loi, il nous semble important que cet amendement soit adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

L'amendement n° 35, présenté par Mme Demontès, MM. Le Menn, Michel, Desessard, Kerdraon et Cazeau, Mmes Le Texier et Schillinger, M. Jeannerot, Mmes Alquier et Campion, M. Daudigny, Mme Ghali, MM. Gillot et Godefroy, Mme Jarraud-Vergnolle, M. S. Larcher, Mmes Printz et San Vicente-Baudrin, M. Teulade et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Alinéa 16

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

La prise en charge dans les centres médico-psychologiques et les hôpitaux de jour est privilégiée lorsque l’état du patient le permet.

La parole est à Mme Raymonde Le Texier.

Debut de section - PermalienPhoto de Raymonde Le Texier

L’intérêt du patient doit demeurer au centre de nos préoccupations. C’est au regard de cet impératif que nous devons considérer l’alinéa 16, qui a trait aux soins ambulatoires sans consentement, plus spécifiquement à ceux qui sont dispensés à domicile.

Avec la loi de 1990, la prise en charge d’une personne sans son consentement ne pouvait s’effectuer que par le biais d’une hospitalisation complète. Cela représente près du quart, plus précisément 22 %, des hospitalisations en établissement psychiatrique.

Un article du journal Le Monde daté du 15 juin 2011 rappelle l’inquiétante hausse des hospitalisations sous contrainte depuis dix ans et la disparité de leur répartition à l’échelle nationale. Or, dès 2005, l’Inspection générale des affaires sociales recommandait dans un rapport de mettre fin à cette solution univoque et estimait nécessaire de rechercher d’autres modalités de prise en charge sous contrainte.

Nous devons tout mettre en œuvre pour que des soins adéquats et indispensables soient prodigués à ces personnes en souffrance. C’est pourquoi nous pensons important de préciser que, si l’état de santé du patient le permet, les centres médico-psychologiques ainsi que les hospitalisations de jour doivent être privilégiés. Ces structures spécialisées peuvent faire bénéficier les patients d’une prise en charge de grande qualité, assurée par des professionnels rompus au travail en équipe.

Ces espaces de soins constituent le premier lieu de référence et d’implantation des équipes polyvalentes de secteur, lesquelles regroupent des médecins psychiatres, des psychologues cliniciens, des infirmières, des assistantes sociales, des psychomotriciens, des orthophonistes et des éducateurs spécialisés.

Unités de coordination et d’accueil en milieu ouvert, elles organisent les actions de prévention, de diagnostic, de soins et de suivi. Dès lors, nous pouvons affirmer objectivement que ce sont les structures pivot les plus à même d’élaborer les stratégies thérapeutiques permettant de réduire la durée d’hospitalisation et d’enclencher une réelle dynamique de réinsertion de la personne. Il s’agit donc d’une alternative aux soins ambulatoires d’office.

La rédaction que nous proposons ne vise pas à imposer des choix thérapeutiques aux psychiatres. Ces derniers demeurent au contraire maîtres du choix de l’outil thérapeutique qu’ils jugent le plus approprié au regard de l’état clinique du patient.

Aussi, et compte tenu de la situation existante, privilégier la prise en charge au sein des centres médico-psychologiques ou via une hospitalisation de jour nous apparaît comme un élément incontournable de la nécessaire recherche de l’amélioration de la santé du patient. Elle constitue également une reconnaissance du travail effectué par l’ensemble des professionnels de santé œuvrant au sein de ces structures

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

L'amendement n° 36, présenté par M. Le Menn, Mme Demontès, MM. Michel, Desessard, Kerdraon et Cazeau, Mmes Le Texier et Schillinger, M. Jeannerot, Mmes Alquier et Campion, M. Daudigny, Mme Ghali, MM. Gillot et Godefroy, Mme Jarraud-Vergnolle, M. S. Larcher, Mmes Printz et San Vicente-Baudrin, M. Teulade et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Alinéa 19

Compléter cet alinéa par les mots :

, après avis de la Haute autorité de santé

La parole est à M. Jacky Le Menn.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacky Le Menn

Le programme de soins est un élément clé du projet de loi. En tant que tel, il porte toutes les contradictions de ses inspirateurs. La démarche thérapeutique dans laquelle il s’inscrit devrait dépendre d’abord de l’expertise de la Haute Autorité de santé, afin que le décret en Conseil d’État prévu par ce texte n’alimente pas la confusion entre anormalité et illégalité.

L’avis préalable de la Haute Autorité de santé, que nous souhaitons, arrêtera les types de soins, leur périodicité et leur contenu en tenant compte des recommandations admises par la profession, et non des injonctions de la dernière circulaire du ministère de l’intérieur.

Le programme pourra, par exemple, chercher à préserver toutes les chances d’insertion du malade. L’épidémiologie psychiatrique et la sociologie ont pu démontrer que le gradient social jouait un rôle dans la distribution de la plupart des troubles mentaux, d’où l’intérêt de cet appel à la Haute Autorité de santé. C’est pourquoi il nous paraît préférable que le décret en Conseil d’État soit précédé de l’avis de celle-ci.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

L'amendement n° 37, présenté par M. Le Menn, Mme Demontès, MM. Michel, Desessard, Kerdraon et Cazeau, Mmes Le Texier et Schillinger, M. Jeannerot, Mmes Alquier et Campion, M. Daudigny, Mme Ghali, MM. Gillot et Godefroy, Mme Jarraud-Vergnolle, M. S. Larcher, Mmes Printz et San Vicente-Baudrin, M. Teulade et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'alinéa 19

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Le juge saisi des conditions de sa faisabilité est habilité à prononcer un retour en hospitalisation complète, ou la prise en charge du patient dans un centre médico-psychologique, si son état le permet. »

La parole est à M. Jacky Le Menn.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacky Le Menn

Cet amendement vise à ouvrir le contrôle par le juge des soins psychiatriques quand ils sont prescrits en ambulatoire, spécialement lorsqu’il s’agit de soins à domicile. Il est important que son examen porte sur le respect des droits, en général, et sur celui de la vie privée en particulier.

Il ne s’agit pas, comme d’aucuns ont pu le prétendre, de donner au juge le pouvoir de contrôler le contenu du programme de soins – le juge n’est pas médecin ! Mais le juge sera attentif aux dangers qui peuvent peser sur le patient, eu égard aux caractéristiques de son environnement social.

Cet amendement vise donc à lui permettre de s’assurer que l’application du programme sera possible, compte tenu de l’environnement social du malade, de sa personnalité et de la qualité des liens qui l’unissent à ses proches. Nous pensons ici particulièrement aux soins à domicile. Devant le cas de malades dont les difficultés déborderont sur leur voisinage, le maire pourra saisir le juge afin qu’il prenne les mesures correctrices nécessaires. Les bailleurs sociaux connaissent la complexité de ces situations et mesurent tous les jours qu’elles ne se résolvent pas ex abrupto. L’intervention du juge leur apportera l’équilibre nécessaire, en permettant le retour à des formes plus encadrées et plus outillées en compétences médicales.

Telles sont les raisons pour lesquelles nous proposons que le juge puisse contrôler l’application du programme de soins quand il est prescrit en ambulatoire.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

L'amendement n° 3, présenté par M. Fischer, Mmes David et Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Alinéa 21

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Si la personne admise en soins psychiatriques s’y oppose, aucun traitement médical autre que somatique ne peut lui être imposé, sauf si son état présente un risque pour elle-même.

La parole est à Mme Annie David.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

L’objet de cet amendement est de prévenir l’une des plus grandes atteintes à l’établissement d’un diagnostic sûr en matière de médecine psychiatrique.

Nous savons toutes et tous sur ces travées que nos hôpitaux psychiatriques sont aujourd’hui dans un état déplorable, en particulier à cause du manque de personnels et de moyens. Dans ces conditions, de plus en plus de « camisoles chimiques » sont mises en œuvre pour calmer les patients. Malheureusement – voilà pourquoi nous proposons cet amendement –, cette mise en œuvre intervient très souvent dès l’admission en hôpital psychiatrique. Or, vous en conviendrez, mes chers collègues, ce genre de prescriptions s’accommode mal avec un diagnostic éclairé.

Le rôle du médecin est pourtant d’établir un certificat médical dans les soixante-douze heures. Mais devant des patients léthargiques, assommés par des doses massives de sédatifs, incapables de répondre à des questions, parfois tout simplement endormis, le médecin ne peut établir ce diagnostic que sur la base de faits rapportés. Il est donc, à cet instant, totalement dépourvu d’une réelle vision de l’affection dont souffre le malade.

Cette situation n’est concevable dans aucune branche de la médecine et, à notre avis, parce que la psychiatrie est une branche de la médecine, elle ne devrait pas échapper à ces règles intangibles. La consultation, le diagnostic, l’examen, les bases de l’art médical telles que définies par Hippocrate, tout cela est bafoué avec la camisole chimique.

Par cet amendement, nous souhaitons mettre en lumière les problèmes auxquels les soignants sont confrontés.

Dans le même temps, nous devons admettre que certains patients nécessitent, pour eux-mêmes, ce genre de traitement. Mais nous devons entendre également ce qu’ont à nous dire les patients qui ont eu à subir ces expériences douloureuses.

Nous devons refuser des pratiques, qui, si elles sont injustifiées, sont tout à la fois dégradantes et inefficaces à long terme, et qui empêchent l’établissement d’un diagnostic réellement fiable.

Parce que le diagnostic est capital dans le maintien de la mesure d’hospitalisation, on ne peut accepter qu’il soit fait en dehors des normes de la médecine. C’est la raison pour laquelle la phase d’observation doit selon nous permettre aux patients d’émettre le refus de recevoir des traitements autres que somatiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

L'amendement n° 38, présenté par Mme Demontès, MM. Le Menn, Michel, Desessard, Kerdraon et Cazeau, Mmes Le Texier et Schillinger, M. Jeannerot, Mmes Alquier et Campion, M. Daudigny, Mme Ghali, MM. Gillot et Godefroy, Mme Jarraud-Vergnolle, M. S. Larcher, Mmes Printz et San Vicente-Baudrin, M. Teulade et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Alinéas 23 et 24

Remplacer le mot :

soixante-douze

par le mot :

quarante-huit

La parole est à Mme Raymonde Le Texier.

Debut de section - PermalienPhoto de Raymonde Le Texier

Les alinéas 21 à 24 de l'article 1er portent sur la période d’observation et de soins initiale nouvellement créée, que de nombreux praticiens assimilent à une « garde à vue psychiatrique ».

Durant cette phase, la personne admise en soins psychiatriques sans consentement est prise en charge sous la forme d’une hospitalisation complète.

Un premier certificat médical est établi au terme de vingt-quatre heures afin de confirmer ou d’infirmer la nécessité de maintenir ces soins.

Après soixante-douze heures, un nouveau certificat médical est édicté ; si les deux certificats médicaux ont conclu à la nécessité de maintenir les soins psychiatriques sans consentement, un psychiatre de l’établissement d’accueil propose la forme de la prise en charge prévue et rédige, le cas échéant, un programme de soins.

Ainsi, le délai d’une telle « garde à vue », qui comprend, certes, un volet sanitaire, mais qui consacre surtout l’orientation sécuritaire du projet de loi, est fixé à soixante-douze heures.

Au regard des atteintes portées aux libertés publiques, ce délai nous paraît excessivement long. Songeons que, durant cette période, qui doit être considérée comme un moyen de guérir la personne admise en soins sans consentement et non comme les prémices d’un traitement psychiatrique durable fondé sur la contrainte, le patient est enfermé, privé de sa liberté d’aller et venir. C’est pour cette raison que nous souhaitons réduire le délai de la phase initiale à quarante-huit heures ; plus protecteur des libertés fondamentales, en particulier de la liberté individuelle, ce délai ne serait, pour autant, aucunement un frein au traitement thérapeutique du patient.

À cet égard, rappelons-nous les propos de Guy Lefrand, rapporteur du texte à l’Assemblée nationale : « Nous avons en effet auditionné des psychiatres qui nous ont indiqué que, pendant ce délai, ils se borneront à observer le malade dans sa chambre sans le traiter ». Autrement dit, notre collègue député admet que fixer la durée de la période d’observation et de soins initiale à soixante-douze heures n’est même pas une garantie de son utilité ; son opportunité est conditionnée à son acceptation par les praticiens et les patients.

Si notre amendement était adopté, l’équilibre entre protection de la santé du patient, sauvegarde de ses libertés et préservation de l’ordre public serait bien entendu mieux respecté.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

L'amendement n° 4, présenté par M. Fischer, Mmes David et Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Alinéa 24

Remplacer le mot :

soixante-douze

par le mot :

quarante-huit

La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Nous considérons, nous aussi, que la mesure prévue s’apparente à une garde à vue psychiatrique.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Le délai ne saurait donc dépasser celui de la garde à vue, à savoir quarante-huit heures.

L’internement est une mesure privative de liberté, comme l’a rappelé le Conseil constitutionnel. À cet égard, et parce que ce qui nous pose problème dans ce projet de loi est bien la toute-puissance du préfet et la part minimale donnée aux médecins, nous estimons que la mesure d’internement doit être réévaluée au bout de quarante-huit heures et non de soixante-douze heures.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

L'amendement n° 39, présenté par Mme Demontès, MM. Le Menn, Michel, Desessard, Kerdraon et Cazeau, Mmes Le Texier et Schillinger, M. Jeannerot, Mmes Alquier et Campion, M. Daudigny, Mme Ghali, MM. Gillot et Godefroy, Mme Jarraud-Vergnolle, M. S. Larcher, Mmes Printz et San Vicente-Baudrin, M. Teulade et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Alinéa 31

Après les mots :

soins psychiatriques

rédiger ainsi la fin de l’alinéa :

et sa famille ou la personne de confiance désignée par le patient conformément à l’article L. 1111-6 sont informées de ce projet de décision et mises à même de faire valoir leurs observations, le cas échéant par tout moyen et de manière appropriée à l’état du patient.

La parole est à Mme Raymonde Le Texier.

Debut de section - PermalienPhoto de Raymonde Le Texier

Aux termes de l’alinéa 31, qui est relatif aux droits des malades, une information est dispensée à la personne faisant l’objet d’une mesure sans consentement si son état de santé le permet. Cette information a trait à la forme de la prise en charge prévue – hospitalisation complète ou soins ambulatoires – ainsi qu’à la reconduite ou à la levée de la mesure de soins.

Le fait que cette information soit dispensée au patient est fondamental. Néanmoins, il nous semble également important de la transmettre à la famille ou à la personne de confiance, ainsi que le prévoit l’article L. 1111-6 du code de la santé publique.

Sur la forme, nous n’ignorons pas que la notion de famille est difficile à identifier clairement. En cela, elle est une parfaite illustration des évolutions que connaît notre société. Nous ne méconnaissons pas non plus les situations de liens distendus entre membres d’une famille, qui amèneraient le patient à refuser que celle-ci soit tenue informée des décisions le concernant. Dès lors, nous proposons une rédaction construite sur l’alternative entre famille ou personne de confiance, respectant ainsi la lettre et l’esprit de ce même article L. 1111-6.

Notre proposition vise un objectif sanitaire. En informant la famille ou la personne de confiance, la transmission d’éléments qui pourraient être importants, voire essentiels, pour la prise de décision de l’équipe soignante est rendue possible. Cette dimension nous semble d’autant plus importante que nous parlons bien de personnes appelées à recevoir des soins sans consentement.

Il est légitime de présupposer que le patient peut être dans le déni de son état de santé. Dans ce cas, la possibilité, pour l’équipe médicale, d’avoir accès à certaines informations et, le cas échéant, de construire un vrai dialogue avec l’entourage du patient est de nature à fonder la prise de décision.

Nous ne doutons pas que la prise en considération de l’entourage demeure d’une grande importance dans une pareille situation, comme dans bien des cas de pathologies avérées. En l’espèce, informer participe de la nécessaire transparence et constitue précisément une réponse aux légitimes inquiétudes et angoisses de l’entourage. Qui plus est, notre proposition s’inscrit dans le respect de la liberté du médecin d’informer ou pas et elle ne s’oppose pas au respect du secret médical.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

L'amendement n° 40, présenté par M. Le Menn, Mme Demontès, MM. Michel, Desessard, Kerdraon et Cazeau, Mmes Le Texier et Schillinger, M. Jeannerot, Mmes Alquier et Campion, M. Daudigny, Mme Ghali, MM. Gillot et Godefroy, Mme Jarraud-Vergnolle, M. S. Larcher, Mmes Printz et San Vicente-Baudrin, M. Teulade et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Alinéa 31

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Elle peut être représentée par un avocat.

La parole est à M. Jacky Le Menn.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacky Le Menn

Puisqu’il semble que la personne souffrant de troubles psychiatriques tende à être assimilée à un délinquant, la présence d’un avocat est plus que jamais nécessaire, car propice à garantir le respect et l’effectivité des droits.

Dès lors qu’il y a judiciarisation de l’ensemble de la procédure d’admission en soins psychiatriques sans consentement, le conseil d’un avocat paraît opportun afin de garantir le principe d’égalité des armes et le droit au recours, droit garanti par l’article 8 de la Déclaration universelle des droits de l’homme et par l’article 13 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

Par ailleurs, dans la mesure où nous sommes dans le cadre d’une réforme parcellaire et sécuritaire, nous souhaitons renforcer les droits des patients pour les préserver de tout préjudice et de tout abus.

En d’autres termes, nous entendons, par cet amendement, entrer dans une logique plus globale visant à garantir à celles et à ceux qui sont dans des situations d’extrême fragilité, par essence précaires, le plein exercice de leurs droits.

Ainsi, nous demandons que le malade puisse être représenté par son avocat lors du prononcé de la décision relative au maintien des soins sans consentement. La capacité à faire valoir ses droits pouvant être limitée par l’état mental, l’assistance d’un avocat est une nécessité absolue pour le patient, d’autant que ce dernier peut être isolé de sa famille et de ses proches.

Rappelons que le Gouvernement n’a avancé aucun argument pour justifier son refus de voir inscrire une telle disposition dans le texte.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

L'amendement n° 41, présenté par M. Le Menn, Mme Demontès, MM. Michel, Desessard, Kerdraon et Cazeau, Mmes Le Texier et Schillinger, M. Jeannerot, Mmes Alquier et Campion, M. Daudigny, Mme Ghali, MM. Gillot et Godefroy, Mme Jarraud-Vergnolle, M. S. Larcher, Mmes Printz et San Vicente-Baudrin, M. Teulade et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Alinéa 35

Compléter cet alinéa par les mots :

, pour toutes les étapes de prise en charge

La parole est à M. Jacky Le Menn.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacky Le Menn

Cet amendement s’inscrit dans une double logique.

Du point de vue sanitaire, il s’agit de rechercher, autant que faire se peut, le consentement du patient. Chacun le sait, et cela a été souligné lors de la discussion générale, cette alliance entre soignant et soigné constitue un élément positif, si ce n’est fondamental, dans la mise en œuvre de soins appropriés.

En outre, une telle recherche participe du respect de la dignité du patient – sujet qui nous concerne tous –, et ce conformément à l’article L. 1110-2 du code de la santé publique et à la décision rendue par le Conseil constitutionnel le 27 juillet 1994.

La recherche du consentement dans le domaine psychiatrique présente un particularisme. En effet, par rapport aux autres secteurs de la médecine, les facteurs du consentement sont ici démultipliés. Le consentement d’un patient implique que ce dernier soit capable de comprendre ce qui lui est expliqué, de l’intégrer à sa situation personnelle, de mémoriser l’information reçue, de se projeter dans l’avenir, d’être capable de décider et de maintenir sa décision dans le temps.

L’ensemble de ces dimensions est évolutif. C’est pourquoi il nous semble nécessaire que, à chaque étape de la prise en charge, la recherche du consentement apparaisse comme indispensable. Dans cette optique, nous vous proposons, mes chers collègues, d’adopter cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

L'amendement n° 42, présenté par M. Le Menn, Mme Demontès, MM. Michel, Desessard, Kerdraon et Cazeau, Mmes Le Texier et Schillinger, M. Jeannerot, Mmes Alquier et Campion, M. Daudigny, Mme Ghali, MM. Gillot et Godefroy, Mme Jarraud-Vergnolle, M. S. Larcher, Mmes Printz et San Vicente-Baudrin, M. Teulade et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Alinéa 42

1° Après le mot :

conserve

insérer les mots :

pendant et

2° Après le mot :

relatives

insérer les mots :

aux modalités d’hospitalisation du présent titre Ier et

La parole est à M. Jacky Le Menn.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacky Le Menn

Tel que désormais rédigé, l’alinéa 42 de l’article 1er concerne toutes les personnes faisant l’objet de soins psychiatriques en raison de troubles mentaux, et non pas seulement de soins sans consentement.

Voilà la démonstration de l’ambiguïté – intentionnelle ou non –, évoquée par moi-même et certains de mes amis de gauche lors de la discussion générale, de certains de nos collègues de l’Assemblée nationale, qui, en toute hypocrisie, ont procédé à la suppression de la moindre référence aux soins sans consentement, mais sans rien changer sur le fond.

Dans sa rédaction actuelle, l’alinéa 42 signifie la perte des droits et des devoirs de citoyen pour toute personne consultant un psychiatre. Notre amendement vise donc à garantir le respect de ces droits et devoirs.

À cette fin, nous souhaitons préciser que la personne faisant l’objet de soins psychiatriques conserve pendant et à l’issue de ces soins la totalité de ses droits et devoirs de citoyen, sous réserve notamment des dispositions relatives aux modalités d’hospitalisation prévues au titre Ier.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

L'amendement n° 43, présenté par M. Le Menn, Mme Demontès, MM. Michel, Desessard, Kerdraon et Cazeau, Mmes Le Texier et Schillinger, M. Jeannerot, Mmes Alquier et Campion, M. Daudigny, Mme Ghali, MM. Gillot et Godefroy, Mme Jarraud-Vergnolle, M. S. Larcher, Mmes Printz et San Vicente-Baudrin, M. Teulade et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Alinéas 53 et 54

Rédiger ainsi ces alinéas :

« 3° Un médecin désigné conjointement par le directeur de l’établissement et le président de la commission médicale d’établissement ou de la conférence médicale d’établissement pour les établissements de santé privés d’intérêt collectif. Ce médecin peut être le président de ladite commission ou conférence, le cas échéant.

« Les modalités de désignation des membres et les règles de fonctionnement du collège sont fixées par décret en Conseil d’État, sachant que le collège peut recueillir tous les avis qu’il estime appropriés pour l’exercice de sa mission. » ;

La parole est à M. Jacky Le Menn.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacky Le Menn

En ce qui concerne la composition du collège de soignants, il est pour nous essentiel de tirer les leçons des diverses concertations effectuées avec les structures représentatives existantes. Or ces dernières sont unanimes pour estimer comme inopportune l’introduction d’un cadre paramédical en la matière.

En effet, comment ne pas percevoir le risque que ce cadre paramédical n’endosse le rôle d’arbitre entre deux médecins ? Une telle situation, qui plus est si elle se reproduit, porterait préjudice à l’unité et à la cohésion nécessaires à une telle structure et à celles des équipes concernées.

En outre, l’objet même de ce collège renvoie à la fois à l’expertise et à la responsabilité médicales. Rappelons que celui-ci aura pour mission d’éclairer le juge des libertés et de la détention ou le préfet avant toute décision concernant un patient ayant séjourné dans une unité pour malades difficiles ou ayant fait l’objet d’une décision de justice déclarant l’irresponsabilité pénale.

Nous ne pouvons exclure qu’une telle présence puisse en elle-même être source de réactions malvenues de la part de patients difficiles.

Parce que nous savons combien les cadres soignants peuvent être au fait d’autres réalités quotidiennes de la prise en charge du patient et que leur prise en compte est importante dans la dynamique de soins, nous estimons que les médecins du collège pourront recueillir tous les avis leur étant nécessaires.

Compte tenu de ces éléments, nous vous proposons, mes chers collègues, de modifier la composition dudit collège.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

L'amendement n° 5, présenté par M. Fischer, Mmes David et Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Alinéa 58, première phrase

Après les mots :

à tout moment

insérer les mots :

et après examen de la personne

La parole est à Mme Annie David.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

L’adoption de cet amendement, que nous avions déjà déposé en première lecture, nous apparaît plus que nécessaire.

La médecine moderne, qu’il s’agisse de la psychiatrie ou de la médecine somatique, est fondée sur le principe de l’observation d’un patient par un médecin.

Le médecin rencontre le patient, établit un diagnostic et prescrit des soins. Si l’on vous suit, madame la secrétaire d'État, ces soins prennent ici la forme d’une hospitalisation complète ou d’une hospitalisation en ambulatoire. Et l’on voudrait nous faire croire que tout cela serait possible sans que le patient soit vu par le médecin : avouez que c’est plutôt troublant !

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

En première lecture, voici ce que vous nous aviez répondu : « Que se passe-t-il en pratique ? Lorsqu’un patient est en rupture et qu’il présente un danger pour lui-même, le plus souvent, le psychiatre obtient des informations de la famille, de l’entourage. Pour venir en aide au malade, les décisions sont alors parfois prises sur simple avis du psychiatre, à la lumière des informations qui lui ont été communiquées ».

Autrement dit, le médecin psychiatre décide de l’hospitalisation non pas d’une personne, mais d’un dossier, dont le contenu est fondé sur les déclarations des proches, qui peuvent être à l’origine de l’angoisse du patient ou avoir intérêt à cette hospitalisation. Avouez également que cela n’est pas sans risque !

C’est, en tout cas, à la limite de la légalité, dans la mesure où le Conseil constitutionnel, dans l’une de ses dernières décisions, a souligné que la personne faisant l’objet de soins sans consentement prenant la forme d’une hospitalisation complète a le droit à un réexamen dans de brefs délais. Or celui-ci n’a aucun sens si l’examen réside dans la seule relecture d’un simple dossier administratif.

Notre objectif est donc clair : aucun soin psychiatrique ne peut être ordonné sans que le patient ait été rencontré par un psychiatre.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

L’amendement n° 44, présenté par Mme Demontès, MM. Le Menn, Michel, Desessard, Kerdraon et Cazeau, Mmes Le Texier et Schillinger, M. Jeannerot, Mmes Alquier et Campion, M. Daudigny, Mme Ghali, MM. Gillot et Godefroy, Mme Jarraud-Vergnolle, M. S. Larcher, Mmes Printz et San Vicente-Baudrin, M. Teulade et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Alinéa 58

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

La famille du patient ou la personne de confiance qu’il a désignée conformément à l’article L. 1111-6 est informée de cette décision.

La parole est à Mme Raymonde Le Texier.

Debut de section - PermalienPhoto de Raymonde Le Texier

Cet amendement participe de la logique sanitaire que nous souhaitons voir prédominer. Il s’agit, en l’espèce, de la situation dans laquelle l’état de santé du patient connaîtrait une aggravation, laquelle entraînerait une modification de son régime de prise en charge. En d’autres termes, avec la redéfinition du diagnostic, du pronostic, mais aussi des choix, notamment dans le domaine des traitements, c’est l’avenir du patient à court, voire à long terme qui est en jeu.

Si l’aggravation d’un état de santé est une situation spécifique, l’argumentation que nous avons développée au sujet de l’alinéa 31 reste valable. Nous considérons que le fait d’informer la famille ou la personne de confiance d’une décision de modification du régime de prise en charge du patient peut constituer un élément positif dans la recherche d’une amélioration de son état de santé.

Cette potentialité est renforcée par les résultats d’une enquête de l’Union nationale des amis et familles de malades psychiques, qui font apparaître que 42 % des malades psychiques vivent au sein de leur famille, 10 % à l’hôpital, 10 % dans des foyers et 20 % sont abandonnés ; seuls 20 % d’entre eux environ sont à peu près autonomes.

Au-delà de la relation médecin-malade, qui est primordiale et qui peut être perçue comme un partenariat, voire comme une alliance, le fait d’informer l’entourage s’inscrit bien dans la recherche d’une plus grande efficience de la stratégie thérapeutique que l’équipe soignante définit. En effet, ces informations peuvent être utiles au soutien du patient et participer, de fait, aux soins.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

L’amendement n° 18, présenté par M. Desessard et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :

Alinéa 59, seconde phrase

Supprimer cette phrase.

La parole est à M. Jean Desessard.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Il s’agit du premier d’une série d’amendements que j’avais déjà déposés en première lecture. J’y reviens, car, dans un souci de protection des malades, il me semble très important de supprimer de ce projet de loi toute référence à un « avis médical » et de ne garder que la formulation « certificat médical ».

Qu’est-ce qu’un certificat médical ? C’est un document officiel qui implique l’examen par le médecin de la personne concernée.

Le certificat médical a pour objet les résultats de l’examen d’un patient par le médecin, qui constate la matérialité des faits dont il déduit son diagnostic ; constat et diagnostic constituent l’objet exclusif du certificat.

J’insiste sur la notion d’examen, car c’est une obligation déontologique, comme le rappelle l’article 76 du code de déontologie des médecins : « Un médecin ne doit jamais délivrer un certificat sans avoir vu et examiné la personne dont il s’agit. L’établissement d’un certificat est en effet un acte à part entière de l’activité médicale.

« L’examen sera soigneux et attentif, et le certificat détaillé et précis ».

D’après le texte, c’est en fonction du certificat médical établi par un ou plusieurs psychiatres que seront prises des mesures d’hospitalisation complète, de soins sous contrainte en ambulatoire et leur éventuel renouvellement.

Qu’est-ce qu’un avis médical ? Rien, si ce n’est une impression que se fait le médecin à la lecture de documents concernant le patient !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Comment attribuer la même valeur à ces deux documents !

Le certificat médical est un document extrêmement important. La décision du Conseil constitutionnel rendue la semaine dernière parle même de « certificat médical circonstancié » dans le cas des décisions d’hospitalisation d’office prises par un préfet. En aucun cas, il n’est fait référence à un simple « avis » médical, établi sans même que le médecin ne rencontre le patient.

Substituer l’avis médical au certificat médical serait contraire à la déontologie des médecins, à la réalité de l’état du malade à un instant « T ». En effet, comment juger de l’état psychique d’une personne sans qu’une consultation ait eu lieu ?

En première lecture, M. le rapporteur avait fait remarquer que, parfois, le patient n’était pas joignable et ne pouvait être examiné. Quant à Mme la secrétaire d’État, elle avait argué que, « pour venir en aide aux malades en rupture », le psychiatre pouvait prendre des décisions simplement après avoir demandé des informations à la famille du malade.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

J’aimerais que l’on m’explique comment un médecin peut décider du maintien en hospitalisation d’un patient ou de la pertinence de tel ou tel traitement si le patient n’est pas là. Et quand j’entends que c’est sur la base de déclarations de la famille d’un patient en rupture que peuvent être prises des décisions aussi lourdes qu’un maintien en hospitalisation sous contrainte, je tombe des nues ! Si le patient est en rupture avec le corps médical, ne peut-il pas aussi l’être avec sa famille ? Ces justifications ne sont donc pas satisfaisantes.

Je le répète : cette disposition va à l’encontre de la déontologie médicale. C’est pourquoi je vous propose, mes chers collègues, de supprimer toute référence dans le projet de loi à ce simple « avis » médical.

Cela étant, je vous remercie, monsieur le président, de m’avoir laissé le temps de m’exprimer ; je vous en ferai gagner cet après-midi, car cette intervention vaudra pour tous les amendements qui découlent de cette disposition.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

J’en accepte l’augure ; nous aurons l’occasion de vérifier la réalité de ce propos.

Quel est l’avis de la commission sur ces seize amendements ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Lorrain

L’objet de l’amendement n° 1 étant la suppression partielle de l’article 1er, la commission ne peut émettre qu’un avis défavorable.

Les précisions proposées par les auteurs de l’amendement n° 2 ne paraissent pas utiles. Il revient au médecin de déterminer les lieux de soins les plus adaptés, dans le cadre d’un dialogue avec le patient. Si cette proposition peut paraître intéressante, comme nous l’avions dit en première lecture, le concept de « lieu de soins » relève essentiellement de la compétence médicale, et non de la loi. L’avis est donc défavorable.

Les précisions proposées par les auteurs de l’amendement n° 35 ne sont pas plus utiles, car le choix du lieu de soins relève, je le répète, de la relation médecin-patient. L’avis est donc également défavorable.

L’amendement n° 36, qui tend à prévoir un avis de la Haute Autorité de santé, avait été rejeté en première lecture. La commission reconnaît que la HAS est un organisme très important, mais, à titre personnel, je m’étonne que l’on puisse souhaiter que la vérité ne vienne que d’en haut et s’impose totalement aux soignants. Bien que les recommandations de cet organisme soient nécessaires, voire dans certains cas indispensables, elles n’entrent pas dans le cadre de l’application d’un protocole. L’avis est donc défavorable.

L’amendement n° 37 vise à étendre le contrôle du juge des libertés et de la détention aux soins sans consentement en ambulatoire. Un recours facultatif étant cependant toujours possible, j’émets un avis défavorable.

L’amendement n° 3 vise à limiter les traitements sans consentement aux seuls soins somatiques.

Même si mon avis personnel n’a pas beaucoup d’importance, je dois dire que j’ai été choqué par les termes de « camisoles chimiques » et de « garde à vue psychiatrique ». Ces violences verbales §desservent nos travaux et stigmatisent les soignants ainsi que les personnes qui ont exercé de lourdes responsabilités dans ce domaine pendant de nombreuses années. Par ailleurs, séparer le psychique du somatique n’est pas non plus la bonne solution. J’émets donc un avis défavorable.

L’amendement n° 38 tend à instaurer une durée de quarante-huit heures suivant l’admission en soins psychiatriques en hospitalisation complète pour l’établissement du deuxième certificat médical. Cette durée, trop brève, ne permettrait pas de prendre les décisions les plus favorables à l’intérêt du patient. L’avis est donc défavorable.

L’amendement n° 4 vise à ramener la durée de la période d’observation de soixante-douze à quarante-huit heures. Une fois encore, cette durée trop brève ne permettrait pas de prendre les meilleures décisions dans l’intérêt du patient. L’avis est donc défavorable.

L’information systématique de la famille sur les projets de décision concernant le malade, prévue à l’amendement n° 39, pourrait être contre-productive. Dans certains cas, le malade ne souhaite pas que sa famille soit informée et une telle information ne sert pas toujours ses intérêts. Par ailleurs, il paraît difficilement envisageable qu’un patient, dans un moment de crise, puisse désigner en toute conscience une personne de confiance. J’émets donc un avis défavorable.

L’amendement n° 40 tend à prévoir une substitution de l’avocat au patient lors de l’information sur les mesures de soins. Je rappelle que cette notification relève de la relation entre le patient et le psychiatre, que nous avons tenté de renforcer tout au long de nos travaux. L’avis est donc défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Vous ne pourriez pas être un peu plus positif ?

Debut de section - PermalienPhoto de Raymonde Le Texier

Dites que les amendements de la gauche devront systématiquement être rejetés ; nous gagnerons du temps !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Lorrain

L’amendement n° 41 tend à préciser que l’avis du patient est pris en considération à chaque étape de la prise en charge.

Cette proposition est recevable, mais elle ne paraît pas utile, dans la mesure où l’alinéa 35 dispose déjà que « l’avis de cette personne sur les modalités des soins doit être recherché et pris en considération dans toute la mesure du possible ». La commission n’a pu donc émettre qu’un avis défavorable.

La modification rédactionnelle proposée à l’amendement n° 42 n’apparaît pas comme un véritable progrès. On nous dit que le projet de loi, en la matière, est régressif et limitatif. Or il ne modifie pas le droit en vigueur sur ce point. L’avis est donc défavorable.

L’amendement n° 43 vise à intégrer un troisième médecin dans le collège, plutôt qu’un non-médecin. Les arguments invoqués à l’encontre de cette pluralité ne manquent pas de m’étonner. Les médecins, eux aussi, sont capables de dialoguer lorsqu’ils sont d’avis contraire ! En outre, nous ne devons pas discréditer les non-médecins, qui ont une compétence complémentaire au vu du concept actuel d’élargissement du soin. Ils ne doivent pas être perçus comme des concurrents.

Sans être discourtois vis-à-vis des auteurs de l’amendement, je tiens à indiquer que l’éthique est avant tout du domaine pluridisciplinaire. J’émets donc un avis défavorable.

S’agissant de l’amendement n° 5, il est évident que le psychiatre procédera à l’examen du patient avant de modifier, si nécessaire, la forme de prise en charge, sauf si cette personne ne peut être jointe ; je pense notamment aux personnes en situation de grande exclusion, dont la souffrance est considérable. Je n’imagine pas que des choix puissent être effectués à l’encontre des patients, en particulier en matière de soins. J’émets donc un avis défavorable.

L’amendement n° 44 tend à prévoir une obligation d’information de la famille sur les projets de décision concernant le malade.

Une telle disposition, là encore, pourrait être contre-productive. La famille n’est pas toujours un environnement idéal ; elle peut aussi être un lieu de conflit, de rupture et de violence. Dans ce type de circonstances, le malade peut ne pas souhaiter que sa famille soit informée et il n’est pas nécessairement de son intérêt qu’elle le soit obligatoirement, d’où l’avis défavorable de la commission.

S’agissant de l’amendement n°18, je dirai d’abord que j’apprécie le verbe haut, mais que ce n’est pas parce qu’une parole est bruyamment martelée qu’elle mérite d’être inscrite dans le marbre !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Lorrain

Le certificat médical, même avec ses limites, ses éventuels défauts de rédaction ou ses insuffisances, reste effectivement un document fondamental.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Lorrain

Mais lorsqu’il est impossible d’examiner physiquement la personne ou de lui parler, il est évident que la possibilité d’établir un avis médical constitue pour le moins une solution de repli.

Je souligne en outre qu’un avis médical n’est pas l’expression d’une impression subjective. Il ne s’agit pas du café du commerce ! Derrière un avis médical, il y a bien sûr une part de choix personnel, mais il y a aussi et surtout des connaissances, une technicité, un professionnalisme.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Lorrain

Qu’un avis médical soit sollicité quand une situation l’impose constitue déjà un engagement, et un engagement très fort puisqu’il engage la responsabilité de celui qui l’émet.

Donc, chers collègues de l’opposition, pas de leçon de déontologie !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Nous sommes bien là dans le cadre du code de déontologie médicale, monsieur le rapporteur !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Lorrain

Je ne crois pas que l’avis du Conseil de l’ordre sera éloigné du nôtre, qui est, vous l’aurez compris, défavorable !

Debut de section - PermalienPhoto de Raymonde Le Texier

Répondez en bloc, madame la secrétaire d’État !

Debut de section - Permalien
Nora Berra, secrétaire d'État

Si je réponds trop vite, vous me reprochez de ne pas avancer d’arguments !

Le Gouvernement est défavorable à l’amendement n° 1, qui tend à supprimer des modalités de prise en charge des soins ambulatoires à domicile.

Il l’est également aux amendements n° 2 et 35 : le CMP et l’hôpital de jour ne sont pas les seuls lieux de prise en charge. Il y a aussi les appartements thérapeutiques ou les CATTP.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

C’est précisément ce que prévoit l’amendement n° 2 !

Debut de section - Permalien
Nora Berra, secrétaire d'État

Madame David, la détermination du lieu de prise en charge relève de la prescription médicale ; c’est au médecin qu’il appartient d’apprécier quelle est la meilleure stratégie thérapeutique et notamment de décider du lieu de la prise en charge.

Je suis défavorable à l’amendement n° 36, qui prévoit l’intervention de la HAS, car le contenu des programmes de soins n’est pas de la compétence de celle-ci. Ces programmes, je le rappelle, sont élaborés par les médecins à l’issue de l’entretien, de l’examen, et l’on voit mal comment l’HAS pourrait exprimer un avis sur la pertinence des modalités de soins proposées.

Le décret prévu à l’alinéa 19 n’indiquera évidemment pas comment les malades doivent être soignés ; il précisera l’ensemble des mentions qui devront figurer dans le « protocole », même si le mot a été supprimé dans le projet de loi, qu’est le programme de soins et qui, lui, est défini par le médecin.

S’agissant de l'amendement n° 37, je ne crois pas qu’il entre dans les compétences du juge des libertés et de la détention saisi des conditions de faisabilité d’un programme de soins de donner un avis préalable au psychiatre. L’avis est donc défavorable.

J’avoue avoir été un peu heurtée par l'amendement n° 3, qui vise à interdire que tout traitement médical « autre que somatique » puisse être imposé à une personne admise en soins psychiatriques. On ne devrait donc rien faire lorsqu’un patient en observation délire et est en souffrance ?

Cette proposition me paraît contraire à la déontologie médicale. Ce qui est « dégradant » pour le malade, puisque le mot a été employé, c’est d’être abandonné au regard du public pendant un épisode délirant, épisode dont, souvent, il se souvient. Bien entendu, il y a aussi une prise en charge somatique, mais le malade qui a été admis dans un service en vue d’une hospitalisation l’a été avant tout pour recevoir des soins psychiatriques.

Debut de section - Permalien
Nora Berra, secrétaire d'État

L’avis sur l’amendement n° 3 est donc défavorable.

Je suis également défavorable aux amendements n° 38 et 4, qui visent l’un et l’autre à réduire de soixante-douze à quarante-huit heures le délai maximal d’établissement du certificat médical.

Madame Le Texier, la période d’observation est bien loin d’être une garde à vue ! Si cette période est prolongée, c’est, dans tous les cas, pour obtenir l’alliance thérapeutique avec le malade. Lorsque le psychiatre opte pour la « sortie sèche » du malade, il peut évidemment établir le certificat avant la fin des soixante-douze heures. En revanche, dans le cadre d’un programme de soins, la durée de ce délai me paraît nécessaire et conforme à l’intérêt du malade, car, je le rappelle, le moment où le patient parvient à un équilibre survient souvent entre la quarante-huitième et la soixante-douzième heure.

Je suis défavorable à l'amendement n° 39.

Sachez que la famille est informée chaque fois qu’il y a une transformation des modalités de soins. Pour autant, il n’est pas opportun de généraliser le principe de l’information dans le projet de loi ; comme l’a justement souligné M. le rapporteur, on ne peut pas préjuger de la qualité des relations de la personne avec sa famille.

De plus, il paraît indispensable de limiter autant que faire se peut, en particulier s’agissant de troubles mentaux, la circulation des informations sur l’état de santé du patient, lequel n’approuverait pas nécessairement que ces informations aient été diffusées hors de sa volonté.

S’agissant de l'amendement n° 40, l’information doit être délivrée au patient, et non pas à son avocat : avis défavorable.

L’amendement n° 41 est satisfait, puisque la rédaction actuelle prévoit que l’avis du patient sur les modalités de soins « doit être recherché et pris en considération », ce qui implique que le patient est consulté avant toute évolution des modalités de sa prise en charge.

L’amendement n°42 a trait aux droits et devoirs de citoyen de la personne faisant l’objet de soins psychiatriques en raison de troubles mentaux.

Je rappelle que la disposition sur laquelle porte cet amendement n’est pas nouvelle puisqu’elle figurait déjà dans la loi de 1990, où elle avait été introduite parce qu’existait la crainte que le patient relevant de soins psychiatriques soit déchu de ses droits ; l’affirmation selon laquelle il les conserve est reprise dans le présent projet de loi.

L'amendement n° 43 prévoit l’intervention d’un troisième médecin dans le collège, en lieu et place du représentant de l’équipe pluridisciplinaire participant à la prise en charge du patient.

J’y suis défavorable, car il y a déjà deux psychiatres au sein du collège et qu’il peut être intéressant de connaître aussi l’avis que l’équipe soignante porte sur l’état de santé du patient. La diversité de points de vue et de compétences permettra de parvenir à un avis aussi objectif que possible.

J’en viens à l'amendement n° 5.

Madame David, l’alinéa 58 prévoit que le psychiatre établit un certificat médical « circonstancié ». Cela suppose qu’il y ait un examen médical et, dès lors, votre amendement est satisfait.

L’amendement n° 44 est, de même, déjà satisfait. Le projet de loi prévoit déjà que le tiers demandeur de soins est informé. Par ailleurs, le préfet doit notifier à la famille ou à la personne chargée de la protection juridique du malade toute décision d’admission, de maintien ou de levées de mesures. Quant à la personne de confiance, elle est naturellement informée.

S’agissant de l’amendement n° 18, monsieur Desessard, je suis d’accord avec vous : idéalement, un certificat médical circonstancié devrait toujours être établi, ce qui supposerait, on vient de le voir, qu’il soit dans tous les cas précédé d’un examen clinique par le médecin. Cependant, il peut y avoir des situations d’urgence dans lesquelles des mesures doivent être prises pour protéger le malade. Si des tiers appellent au secours, parce qu’une personne est sur le point de se défenestrer, on ne peut pas attendre que l’examen médical ait lieu ! Il faut bien que le psychiatre puisse émettre un avis médical en fonction des données dont il dispose afin que les mesures qui s’imposent soient mises en œuvre.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote sur l'amendement n° 2.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Madame la secrétaire d'État, dans l’amendement n° 2, nous avons pris en compte ce qui avait été dit en première lecture et ajouté tous les lieux possibles d’hospitalisation. Vous nous dites qu’il n’y a pas que les centres médico-psychologiques ; en effet, et notre amendement est donc complet, puisqu’il fait aussi référence aux centres d’accueil thérapeutiques, aux appartements thérapeutiques et aux hôpitaux de jour, que vous avez vous-même évoqués dans votre avis.

Vous insistez sur le fait que la détermination du lieu de prise en charge relève de la prescription médicale. Soit, mais pourquoi ne pas inscrire dans la loi la liste de tous les lieux d’accueil ? Contrairement à M. le rapporteur, nous estimons qu’il s’agit d’une précision utile qui ne doit pas relever du seul domaine réglementaire.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

La parole est à Mme Raymonde Le Texier, pour explication de vote sur l’amendement n° 35.

Debut de section - PermalienPhoto de Raymonde Le Texier

Ce sera ma seule et unique explication de vote sur l’ensemble de nos amendements.

Debut de section - PermalienPhoto de Raymonde Le Texier

M. le rapporteur et Mme la secrétaire d'État se sont donné beaucoup de mal pour argumenter leur avis sur ces seize amendements et nous prouver qu’aucun d’eux n’était acceptable. Nous aurions gagné un bon quart d’heure s’ils avaient dit clairement que tous ces amendements devaient être rejetés parce qu’ils émanent de la gauche. En tout cas, sachez que, nous, nous les voterons !

Il reste soixante amendements à examiner. Tous ont été déposés par la gauche, nos collègues de la majorité n’en ayant présenté aucun. Si tout ce qui vient de nous ne vaut pas un clou, il semble que tout ce que propose le Gouvernement ne mérite pas d’être amendé tant ses textes sont parfaits. S’il s’agit de gagner du temps, autant voter tout de suite l’ensemble du projet de loi, monsieur le président !

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

Je vous comprends bien, ma chère collègue, mais le règlement m’interdit de vous donner satisfaction.

Je mets donc aux voix l'amendement n° 35.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote sur l'amendement n° 3.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Je souscris à l’argumentation que vient de développer Mme Le Texier. Nos travaux, tels qu’ils se déroulent en séance, sont assez frustrants, de même que l’ont été ceux qui ont eu lieu hier en commission. En effet, les quatre-vingts amendements qui ont alors été examinés en une vingtaine de minutes ont reçu un avis défavorable, hormis l’amendement n° 82, présenté par le Gouvernement, qui a fait l’objet d’un court débat. Il y avait lieu apparemment de s’y arrêter puisque c’est le seul qui va recevoir un avis favorable…

Je partage donc la colère que vient d’exprimer Mme Le Texier et j’estime que le débat, inexistant jusqu’à présent, doit avoir lieu. C’est pourquoi sur les amendements qui viennent d’être examinés, je formulerai, au nom de mon groupe, une explication différente de celle de M. le rapporteur et de Mme la secrétaire d’État.

M. le rapporteur aurait, paraît-il, été choqué par la violence des termes « camisole chimique » que j’ai employés. Mais, monsieur le rapporteur, les malades soumis à ce type de traitements qui, selon leurs propres propos, s’apparentent à une camisole chimique, subissent bien une violence !

S’ils se rappellent leur période de délire et si leur état justifie, selon vous, madame la secrétaire d’État, des traitements mettant fin au délire, ils se souviennent aussi des violences physiques que constituent, de notre point de vue, les camisoles chimiques.

Telles sont les raisons pour lesquelles l’amendement n° 3 mérite d’être adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Lorrain

Mes chers collègues, si nous nous contentions d’émettre globalement un avis défavorable sur tous les amendements, ce serait très certainement considéré comme une insulte au regard du travail que vous avez effectué.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Lorrain

Cela dit, les amendements qui nous sont soumis aujourd'hui ont déjà été examinés et repoussés en première lecture.

Madame Le Texier, vous dénoncez une approche politique de notre part, les avis défavorables ne concernant que les amendements émanant de la gauche. Pour ma part, j’ai siégé pendant plus de trente ans au conseil général du Haut-Rhin, dont j’étais président de la commission de la solidarité. Je ne suis donc pas tout à fait étranger aux concepts relatifs aux personnes âgées, aux personnes handicapées, que vous défendez. En l’occurrence, l’avis défavorable de la commission, émis dans un contexte difficile, n’est pas dogmatique et ne caractérise pas une opposition systématique.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour explication de vote sur l'amendement n° 4.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Le débat est faussé : vous repoussez tout amendement sans vouloir assumer le caractère sécuritaire de votre texte, qui ne traite absolument pas des problèmes réels de la santé mentale ni des exigences actuelles du secteur psychiatrique.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Assumez, les choses seront claires !

Monsieur le rapporteur, vous nous opposez des arguments qui peuvent avoir plusieurs interprétations, dans un sens ou dans un autre. Mais, quoi qu’il en soit, vous inversez les priorités : vous considérez au premier chef les malades mentaux comme étant une menace à l’ordre public et non comme des sujets de droit.

Cette conception, soutenue à maintes reprises, est celle du Président de la République. Ce dernier a d’ailleurs fait des émules, cette position étant souvent reprise dans les médias par tel ou tel intervenant. Mais, mes chers collègues, si vous partagez ce point de vue, assumez !

Or tel est bien le cas, puisque vous élaborez une loi qui, d’ores et déjà, recueille l’opposition de la majorité des personnes concernées, qu’il s’agisse des médecins, des soignants, des juges, etc…

Debut de section - PermalienPhoto de Raymonde Le Texier

Effectivement, l’opposition de tout le monde !

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

… et qui soulève de graves problèmes au regard de ce que nous appelons « l’égale dignité de chaque personne ».

Monsieur le rapporteur, lors d’un précédent débat, vous nous avez beaucoup parlé de la dignité et du mystère de la vie. Aujourd’hui, nous, nous allons évoquer le mystère du psychisme. Méfiez-vous, car la limite entre la normalité et la maladie mentale est ténue, elle est très fluctuante ! Un texte de cette nature menace donc les libertés de tous.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Monsieur le rapporteur, ayant siégé pendant trente ans dans un conseil général, vous êtes sensible aux sujets que nous évoquons ce jour, dites-vous. Fort bien !

Par ailleurs, vous ne souhaitez pas être insultant à notre égard et, au lieu de vous prononcer en bloc, si je puis dire, sur l’ensemble des amendements que nous vous présentons, vous préférez émettre un avis défavorable sur chacun d’entre eux. Bon !

Cela étant, je comprends fort bien que vous ne partagiez pas notre vision sur ce texte sécuritaire et que vous considériez ce projet de loi comme formidable.

En outre, ce texte ayant fait l’objet d’une première lecture et des arguments identiques, selon vous, ayant été exposés à ce moment-là, vous ne souhaitez pas répondre longuement en deuxième lecture. Bien !

Mais tel n’est pas le problème. En réalité, vous n’avez convaincu ni les professionnels, ni les familles des usagers, ni les associations, qui demeurent hostiles.

Vous pourriez profiter de cette deuxième lecture pour expliquer en quoi ce texte va améliorer la condition des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques et rassurer les professionnels, …

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

… qui estiment ce projet de loi non seulement sécuritaire, mais également inapplicable faute de moyens. En effet, les moyens diminuent alors que les professionnels sont de plus en plus sollicités.

Au lieu de rassurer, vous vous contentez d’exprimer votre opposition. Et que vous émettiez un avis défavorable sur chaque amendement au lieu d’un avis défavorable global n’y change rien.

Il est dommage que vous ne profitiez pas de ce débat pour expliquer que la future loi sera mise en œuvre avec des moyens adaptés, lesquels, d’ailleurs, n’ont jamais été évoqués. Les précisions que vous pourriez apporter seraient utiles non seulement à nous, parlementaires, mais également à l’ensemble de la nation, à tous ceux qui écoutent nos débats et lisent les comptes rendus.

Je le répète, malgré l’hostilité à ce projet de loi exprimée lors de conférences de presse, de manifestations diverses, vous ne prenez pas le temps de rassurer sur tel ou tel point, de démontrer à ses détracteurs qu’ils en font une mauvaise interprétation. C’est quand même dommage !

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote sur l'amendement n° 18.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Dans la mesure où, tout à l’heure, j’ai dépassé le temps qui m’était imparti, je serai bref.

J’ai apprécié que Mme la secrétaire d’État me fournisse une explication circonstanciée alors qu’elle aurait pu se contenter de répondre, puisque j’étais de gauche, que l’avis du Gouvernement ne pouvait être que défavorable. Elle a pris le temps d’expliquer pourquoi il lui semblait utile que, lorsqu’il n’était pas en mesure d’établir un certificat médical, le psychiatre qui participe à la prise en charge du patient susceptible d’être hospitalisé puisse transmettre un avis établi sur la base du dossier médical de cette personne.

Toutefois, madame la secrétaire d’État, il aurait fallu que le recours à l’avis médical soit assorti de conditions. Vous avez bien précisé, certes, que l’avis médical ne remplaçait pas le certificat médical et qu’il ne s’agissait que de faire au mieux lorsqu’il n’était pas possible d’établir un certificat. J’aurais cependant souhaité que cette précision figure dans le texte de façon à encadrer le recours à l’avis médical. En effet, le manque de moyens est tel, dans les hôpitaux, qu’on pourra être tenté, même lorsque l’établissement d’un certificat médical est possible, de choisir la solution de facilité que constitue l’avis médical. Il aurait donc fallu mentionner explicitement que le recours à l’avis médical est limité à des circonstances bien particulières.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

La parole est à Mme Bernadette Dupont, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernadette Dupont

Je partage l’opinion de M. Desessard : les conditions de recours à l’avis médical auraient besoin d’être explicitées. De fait, la simple consultation du dossier médical du patient n’offre pas les mêmes garanties que l’examen de ce dernier par le psychiatre qui participe à son hospitalisation – le dossier médical peut en effet être ancien ou incomplet – dans la mesure où il n’est pas, à ma connaissance, son médecin traitant.

Il me semblerait donc souhaitable que M. Desessard rectifie son amendement pour y mentionner par exemple la notion d’urgence, que vous avez vous-même évoquée, madame la secrétaire d’État. À ce moment-là, je le voterais.

Debut de section - Permalien
Nora Berra, secrétaire d'État

J’ai tenu à reprendre la parole afin de répondre à ceux d’entre vous qui estiment que la formulation de l’article n’est pas suffisamment claire. Je vais donc vous lire le texte même de l’alinéa 59 de l’article 1er, qui, à mon sens, contient déjà les précisions que vous souhaitez apporter :

« Le psychiatre qui participe à la prise en charge du patient transmet immédiatement au directeur de l’établissement d’accueil un certificat médical circonstancié proposant une hospitalisation complète lorsqu’il constate que la prise en charge de la personne décidée sous une autre forme ne permet plus, notamment du fait du comportement de la personne, de dispenser les soins nécessaires à son état. Lorsqu’il ne peut être procédé à l’examen du patient », quelle qu’en soit la raison, « il transmet un avis établi sur la base du dossier médical de la personne. »

Le psychiatre s’appuie donc, j’y insiste, sur des critères objectifs ; le texte est parfaitement clair. C'est pourquoi il ne me semble pas utile d’ajouter quoi que ce soit ; tout est dit.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures cinquante.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à douze heures cinquante, est reprise à quatorze heures cinquante.