La séance, suspendue à vingt heures cinq, est reprise à vingt et une heures trente-cinq, sous la présidence de M. Vincent Delahaye.
La séance est reprise.
Nous poursuivons, au sein de la seconde partie du projet de loi de finances, l’examen de la mission « Cohésion des territoires » (et articles 74, 74 bis, 74 ter, 74 quater, 74 quinquies et 74 sexies).
J’appelle en discussion les articles 74, 74 bis, 74 ter, 74 quater, 74 quinquies et 74 sexies, ainsi que les amendements portant article additionnel, qui sont rattachés pour leur examen aux crédits de la mission « Cohésion des territoires ».
Cohésion des territoires
Le sixième alinéa de l’article L. 452-1 du code de la construction et de l’habitation est ainsi modifié :
1° L’année : « 2014 » est remplacée par l’année : « 2019 », l’année : « 2024 » est remplacée par l’année : « 2031 » et le montant : « 30 millions d’euros » est remplacé par le montant : « 184 millions d’euros » ;
2° Est ajouté une phrase ainsi rédigée : « Ce versement est liquidé, ordonnancé et recouvré selon les modalités prévues pour les recettes des établissements publics administratifs de l’État. »
Je suis confuse de n’avoir pas pu défendre l’amendement n° II-190, même s’il n’avait pas forcément vocation à être adopté.
Il s’agissait plutôt d’un amendement d’appel, au détour duquel je souhaitais aborder un sujet qui peut paraître technique, à savoir la surcompensation en matière d’aides d’État. Vous savez que Bruxelles impose de vérifier que l’octroi des aides d’État est proportionné à l’intérêt social ou public des services qui en bénéficient, afin d’empêcher toute « sur-aide », en quelque sorte. C’est ce que l’on appelle le principe de surcompensation.
Il faut donc une estimation de la compensation, pour pouvoir justifier, par exemple, l’aide d’État versée lors de la construction de logements HLM. Jusqu’à présent, la surcompensation était calculée par opération, c’est-à-dire qu’on évaluait grosso modo, compte tenu des subventions, si l’opération était bien équilibrée et correcte. On en déduisait l’existence ou non d’une surcompensation.
Or l’Agence nationale de contrôle du logement social, l’ANCOLS, qui est la structure contrôlant les HLM, s’est d’une certaine façon autosaisie pour modifier les règles de référence permettant de vérifier l’absence de surcompensation. Autant elle est compétente pour définir les documents techniques et déterminer la méthode de calcul de la surcompensation, autant il me semble qu’il revient au ministre concerné, au pouvoir politique donc, de délibérer du cadre général permettant de calculer cette surcompensation.
Voilà pourquoi je proposais par mon amendement que les grandes lignes destinées à vérifier l’absence de surcompensation devaient être fixées, non plus par l’ANCOLS, mais par un arrêté du ministre du logement. L’ANCOLS doit se limiter à définir les modalités techniques de ce calcul. La distinction est très importante, parce qu’elle pourrait remettre en cause à terme nombre de modes de financement actuellement mis en œuvre par la puissance publique et les HLM.
La question que vous soulevez sur la surcompensation, madame Lienemann, est essentielle. Sachez que nous travaillons vraiment de très près avec l’ANCOLS et les bailleurs sociaux pour nous assurer que la méthodologie qui sera appliquée à terme soit la plus pertinente possible.
Je partage votre souci de définir un dispositif très précis, qui réponde aux exigences bruxelloises, tout en étant élaboré en très bonne intelligence. J’y veillerai personnellement.
L ’ article 74 est adopté.
L’amendement n° II-163 rectifié, présenté par MM. Dallier et Bascher, Mme L. Darcos, MM. Daubresse, de Legge et del Picchia, Mmes Deroche, Deromedi, Garriaud-Maylam et Gruny, M. Husson, Mme Imbert, MM. Karoutchi et Lefèvre, Mme M. Mercier et MM. Morisset, Mouiller, Sido, Sol, Genest, Gremillet, D. Laurent, Piednoir, Revet et Pierre, est ainsi libellé :
Après l’article 74
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – À la première phrase du premier alinéa de l’article L. 443-15-2-3 du code de la construction et de l’habitation, la référence : « et L. 443-14 » est remplacée par les références : «, L. 443-14 et L. 443-14-1 ».
II. – Le I s’applique aux exercices clos à compter du 31 décembre 2018.
III. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Philippe Dallier.
Cet amendement vise à faire en sorte que l’Association Foncière logement, l’AFL, ne soit pas taxée au moment où elle vendra les logements qu’elle a acquis, comme la loi le prévoit aujourd’hui. Je vous rappelle que le produit de ces ventes doit servir au bout du compte à financer nos caisses de retraite.
Il nous semble quelque peu aberrant de taxer l’AFL : celle-ci exerce en effet une mission très particulière et il serait souhaitable que les moyens dont elle dispose servent l’objectif qui lui a été assigné à l’origine.
M. Julien Denormandie, ministre. Le Gouvernement s’en remettra à la sagesse du Sénat.
Marques d ’ approbation sur les travées du groupe Les Républicains et au banc des commissions.
L ’ amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 74.
L’article 199 novovicies du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Le I est ainsi modifié :
a) Le B est complété par un 5° ainsi rédigé :
« 5° Au logement que le contribuable acquiert entre le 1er janvier 2019 et le 31 décembre 2021 et qui fait ou qui a fait l’objet de travaux d’amélioration définis par décret. Le montant des travaux, facturés par une entreprise, doit représenter au moins 25 % du coût total de l’opération. » ;
b) Aux deuxième et dernier alinéas du C, les références : « 2°, 3° et 4° » sont remplacées par les références : « 2° à 5° » ;
2° Le début du IV est ainsi rédigé : « Sous réserve des dispositions du IV bis, la réduction… (le reste sans changement). » ;
3° Après le même IV, il est inséré un IV bis ainsi rédigé :
« IV bis. – La réduction d’impôt mentionnée au 5° du B du I s’applique exclusivement aux logements situés dans des communes dont le besoin de réhabilitation de l’habitat en centre-ville est particulièrement marqué, dont la liste est fixée par arrêté des ministres chargés du logement et du budget et dans des communes signataires d’une convention d’opération de revitalisation du territoire prévue à l’article L. 303-2 du code de la construction et de l’habitation. » ;
4° Au second alinéa du A du V, la référence : « 4° » est remplacée par la référence : « 5° ».
Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L’amendement n° II-215 rectifié bis est présenté par Mme L. Darcos, MM. Bascher, Bonne et Brisson, Mme Bruguière, MM. Chaize, Charon, Cuypers, Hugonet et Darnaud, Mmes Deromedi et Di Folco, MM. B. Fournier et Frassa, Mme Garriaud-Maylam, MM. Genest, Gilles et Grosdidier, Mme Gruny, M. Houpert, Mme Imbert, MM. de Legge et Lefèvre, Mme M. Mercier, MM. Meurant et de Nicolaÿ, Mmes Micouleau et Noël et MM. Piednoir, Pierre, Schmitz, Sido et Vial.
L’amendement n° II-280 rectifié ter est présenté par Mmes Létard, Gatel, Loisier et Férat, MM. Détraigne et Moga, Mme Perrot, MM. Laugier, Louault et Prince, Mmes Vérien, de la Provôté, C. Fournier, Morin-Desailly, Guidez, Billon et Vullien, M. Vanlerenberghe et Mme Joissains.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I. – Alinéa 4, première phrase
Compléter cette phrase par les mots :
, ainsi qu’au local affecté à un usage autre que l’habitation que le contribuable acquiert entre le 1er janvier 2019 et le 31 décembre 2021 et qui fait ou qui a fait l’objet de travaux de transformation en logement
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Alain Houpert, pour présenter l’amendement n° II-215 rectifié bis.
Le présent amendement vise à compléter le dispositif voté par l’Assemblée nationale en première lecture sur proposition du Gouvernement, qui consiste à créer une mesure d’incitation fiscale pour les travaux de rénovation de logements situés dans nos cœurs de ville.
Nos centres-villes anciens comprennent en effet de nombreux immeubles qui ont été ou sont encore affectés à des activités tertiaires, comme des bureaux, des locaux d’associations ou d’administrations, et dont l’état ne permet plus aujourd’hui, ou dans de très mauvaises conditions, d’y exercer ces activités.
La transformation de ces bâtiments en logements doit contribuer à la revitalisation de nos centres-villes. Elle ne pourra être effective qu’à la condition de bénéficier de la réduction d’impôt mise en place par le Gouvernement.
La parole est à Mme Valérie Létard, pour présenter l’amendement n° II-280 rectifié ter.
Il est défendu, monsieur le président. Je me réserve la possibilité d’intervenir en explication de vote si jamais c’était nécessaire.
L’amendement n° II-247 rectifié bis, présenté par MM. Mézard, Artano, A. Bertrand et Collin, Mme N. Delattre, MM. Gabouty et Guérini, Mmes Guillotin, Jouve et Laborde et MM. Requier, Roux et Vall, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 8
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
La réduction d’impôt mentionnée au 4° du B du I s’applique également, dans les mêmes conditions, aux locaux transformés en logements situés dans ces communes.
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Jacques Mézard.
M. Jacques Mézard. D’abord, monsieur le ministre, quel plaisir de vous retrouver !
Sourires.
M. Julien Denormandie, ministre. Plaisir partagé, monsieur le ministre !
Nouveaux sourires.
Je vous en remercie.
Cet amendement résulte de notre volonté de fortifier grâce à des dispositions complémentaires les excellentes mesures qui ont été lancées depuis quelques mois.
En effet, dans le prolongement de la loi ÉLAN, cette excellente loi votée très majoritairement non seulement par l’Assemblée nationale, mais aussi par le Sénat de la République par 213 voix contre 123 si mes souvenirs sont exacts, le Gouvernement a fait adopter par l’Assemblée nationale, en première lecture, une extension du dispositif dit « Pinel » aux travaux de rénovation de logements anciens situés dans les villes ayant conclu des opérations de revitalisation des territoires.
Ces ORT doivent permettre de « booster » la rénovation, non seulement dans les 222 villes du programme « Action cœur de ville », mais aussi dans l’ensemble de ces villes petites et moyennes qui souhaitent conclure une ORT.
L’amendement vise à étendre cette incitation fiscale aux travaux destinés à convertir des locaux en logements. Nous savons en effet que, dans ces cœurs de ville, ce type de locaux à l’état dégradé, qu’il s’agisse de bureaux, d’anciennes administrations ou de commerces désaffectés, sont nombreux et inadaptés à la reprise de leur ancienne activité. Ils pourraient donc utilement être transformés en logements, ce qui contribuerait de manière très forte à la redynamisation de ces territoires.
Tel est l’objectif de cet amendement, qui va tout à fait dans le sens des dispositions votées par le Parlement.
sur un sujet, qui plus est, intéressant.
L’Assemblée nationale a fait le premier pas. Ces amendements prévoient certes une légère extension du dispositif, mais il s’agit de régler des problèmes certainement réels dans les villes concernées. La commission comptait demander le retrait des amendements, mais je pense qu’elle se laissera entraîner si jamais le Gouvernement émettait un avis favorable.
M. Julien Denormandie, ministre. Compte tenu des excellents arguments avancés par M. Mézard
Sourires.
Monsieur le ministre, acceptez-vous de lever le gage sur les amendements identiques n° II-215 rectifié bis et II-280 rectifié ter ?
Il s’agit donc des amendements identiques n° II-215 rectifié ter et II-280 rectifié quater.
Je les mets aux voix.
Les amendements sont adoptés.
En conséquence, l’amendement n° II-247 rectifié bis n’a plus d’objet.
Je suis saisi de cinq amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° II-286 rectifié bis, présenté par Mme Gatel et les membres du groupe Union Centriste, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 6
Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :
2° Le IV est ainsi rédigé :
« IV. – La réduction d’impôt s’applique exclusivement aux logements situés dans des communes caractérisées par des besoins particuliers en logement locatif, qui ont fait l’objet d’un agrément du représentant de l’État dans la région après avis conforme du comité régional de l’habitat et de l’hébergement. La population totale des communes concernées ne peut être supérieure, dans chaque région, à celle de la population des communes concernées par la même réduction d’impôt l’année précédant la prise de l’arrêté. »
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Nathalie Goulet.
Le projet de loi de finances pour 2018, tout en prolongeant le dispositif Pinel de quatre ans, supprime les aides à l’accession à la propriété dans de nombreux territoires qui pourraient en avoir autant besoin que certaines métropoles. En Bretagne, par exemple, comme notre collègue Françoise Gatel nous l’a indiqué, elles sont supprimées dans la quasi-totalité du territoire régional, hormis les zones B1, c’est-à-dire une partie de Rennes Métropole, de Belle-Île-en-Mer, de Dinard et de Saint-Malo. À noter que Brest est l’une des deux seules métropoles au niveau national avec Saint-Étienne à ne pas être classées en zone éligible au dispositif Pinel.
En conséquence, certaines communes rurales ou périurbaines se révèlent éligibles au dispositif Pinel, tandis que des villes moyennes ne le sont pas. Des métropoles se retrouvent également seules bénéficiaires du dispositif dans certaines régions, créant une distorsion fiscale qui n’augmente pas l’offre de logements accessibles sur le marché locatif, faute de foncier supplémentaire disponible notamment, mais qui augmente la tension sur les prix. À tel point que certains logements construits grâce au dispositif Pinel ont des loyers supérieurs à la moyenne, comme l’a montré la Cour des comptes dans un récent rapport.
L’amendement proposé par Françoise Gatel et l’ensemble du groupe Union Centriste prévoit un mécanisme anti-inflationniste, qui empêche le coût du dispositif de croître d’une année sur l’autre – il ne peut évoluer, le cas échéant, qu’à la baisse –, l’enjeu étant davantage de parvenir à limiter les distorsions fiscales injustifiées entre territoires que de grossir le nombre, le volume et le coût des niches fiscales existantes.
Les deux amendements suivants sont identiques
L’amendement n° II-230 rectifié, présenté par M. Canevet, n’est pas soutenu.
L’amendement n° II-392 rectifié bis, présenté par Mme Blondin et MM. Fichet, Tissot et Iacovelli, n’est pas soutenu.
L’amendement n° II-290 rectifié, présenté par Mmes Létard et Gatel, M. D. Dubois et les membres du groupe Union Centriste, est ainsi libellé :
I. – Après l’alinéa 6
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
…° Le IV est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Dans les zones géographiques autres que celles mentionnées au premier alinéa du présent IV, la réduction d’impôt s’applique aux logements situés dans des communes caractérisées par des besoins particuliers en logement locatif liés à une dynamique démographique ou économique particulière, qui ont fait l’objet, dans des conditions définies par décret, d’un agrément du représentant de l’État dans la région après avis conforme du comité régional de l’habitat et de l’hébergement mentionné à l’article L. 364-1 du code de la construction et de l’habitation. » ;
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Valérie Létard.
Cet amendement peut être considéré comme un amendement de repli par rapport au précédent, puisqu’il est complémentaire de l’application du zonage national prévu par le dispositif Pinel.
Sur le modèle de l’expérimentation adoptée dans la loi de finances pour 2017, il tend en effet à créer une enveloppe régionale, qui permettrait au préfet de choisir, après avis conforme du comité régional de l’habitat et de l’hébergement, les communes pouvant bénéficier du dispositif Pinel.
Cette mesure aurait le mérite d’établir un zonage suffisamment fin pour répondre aux réalités territoriales. Vous le savez, un tel dispositif a été expérimenté en Bretagne. Françoise Gatel a eu plusieurs fois l’occasion de le rappeler.
L’amendement présenté par Nathalie Goulet vise la mise en œuvre d’un dispositif qui regrouperait la totalité du dispositif Pinel sur l’ensemble d’une région, c’est-à-dire qu’il tend à le décentraliser, alors que mon amendement vient compléter le dispositif existant pour permettre justement de répondre à des territoires qui, aujourd’hui, en auraient bien besoin.
L’amendement n° II-46, présenté par M. Dallier, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
A. – Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
II – À titre expérimental, pour une période de trois ans à compter du 1er janvier 2019, la réduction d’impôt de l’article 199 novovicies du code général des impôts s’applique aux acquisitions de logements situés dans les communes classées dans une zone géographique se caractérisant par un déséquilibre entre l’offre et la demande de logements entraînant des difficultés d’accès au logement dans le parc résidentiel existant, dans lesquelles la moyenne du nombre de cessions de logements neufs, durant les années 2015, 2016 et 2017, est la plus élevée.
Les logements ainsi mentionnés s’entendent des logements mentionnés au A ou aux 1° à 4° du B du même article 199 novovicies.
Dans ces communes, chaque année, le représentant de l’État dans le département, après avis du comité régional de l’habitat et de l’hébergement mentionné à l’article L. 364-1 du code de la construction et de l’habitation, fixe le nombre de logements pouvant faire l’objet d’un agrément en vue du bénéfice de la réduction d’impôt mentionnée au premier alinéa.
Un décret fixe la liste des communes mentionnées au premier alinéa et précise les modalités de délivrance des agréments visés au troisième alinéa.
Le Gouvernement remet au Parlement, avant le 30 juin 2021, un rapport d’évaluation de cette expérimentation.
B. –… – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Les pertes de recettes résultant pour l’État de l’application à titre expérimental dans certaines communes de la réduction d’impôt de l’article 199 novovicies du code général des impôts prévue au II sont compensées, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. le rapporteur spécial, pour présenter cet amendement et donner l’avis de la commission sur les amendements II-286 rectifié bis et II-290 rectifié.
Il était inévitable que la question du dispositif Pinel revienne à l’occasion de cette discussion. L’année dernière, lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2018, ce dispositif fiscal avait en effet été assez sensiblement recentré et en avait été exclues les zones B2 et C.
D’abord, je rappelle que le zonage qui date de 2014 devait être revu. Monsieur le ministre, je pense toujours qu’il faut remettre cette affaire sur la table, parce que ces zones ne correspondent plus exactement aux besoins.
En attendant que ce « grand soir » arrive, le présent amendement tend à proposer une démarche un peu particulière, en l’occurrence d’ouvrir le bénéfice de la réduction d’impôt de manière contrôlée à certaines villes situées en zone B2, où des besoins particuliers sont constatés, et ce à titre expérimental et pour trois ans. La liste des communes concernées serait déterminée par décret, les préfets des départements concernés définissant chaque année un quantum de logements correspondant à l’évaluation des besoins.
L’idée est vraiment d’introduire de la souplesse. Nombreux sont les acteurs du secteur à nous avoir dit qu’il existait effectivement un certain nombre de communes de taille moyenne en zone B2 avec des besoins et dans lesquelles on devrait de nouveau autoriser à faire de l’investissement locatif.
Plutôt que de modifier le zonage ou d’essayer par différents moyens de donner de la souplesse, la commission propose à l’État, grâce à cette expérimentation, de regarder la situation de très près et d’essayer de corriger un peu le tir.
Je ne pense pas que l’adoption de cet amendement coûterait extrêmement cher, monsieur le ministre, mais tout dépend de la manière dont vous calibrerez le dispositif. En tout cas, vous auriez la main. Voilà pourquoi cette mesure me semble intéressante.
Je demanderai à nos collègues Nathalie Goulet et Valérie Létard de retirer leurs amendements au profit de celui de la commission, considérant que le vote de celui-ci pourrait probablement régler les problèmes qu’elles ont exposés.
J’ai déjà eu plusieurs fois l’occasion de m’exprimer sur le sujet.
Première remarque : je considère personnellement que la politique du logement doit être territorialisée au maximum. L’un des principaux calvaires pour un ministre du logement est d’être obligé de mener des politiques fondées sur une répartition de la France en six zones prétendument homogènes, alors qu’il est complètement faux d’estimer que toute la zone B2 est détendue, par exemple. Si vous allez du côté de Beauvais, vous vous apercevez que cette ville est une zone tendue, mais que de nombreux territoires aux alentours sont classés en zone B2.
Ma seconde remarque porte sur le dispositif d’incitation fiscale à l’investissement locatif dans l’ancien, introduit dans le présent projet de loi de finances. Comme je l’expliquais dans la discussion générale, nous avons associé ce dispositif non pas à un zonage, pour une fois, mais à un projet de territoire, en partant de ce qui a été fait avec le programme « Action cœur de ville » : toutes les villes retenues pour le programme, toutes les villes qui vont conclure une ORT, y sont éligibles. Cela vous montre à quel point je suis attaché à une sortie progressive de ces zonages.
Vous avez d’autant plus raison, monsieur le rapporteur spécial, que l’on est censé revoir le zonage tous les trois ans, ce qui n’est en réalité jamais fait, sans compter que, quand vous faites une revue du zonage, vous avez toujours des perdants et toujours cette même contrainte.
Aujourd’hui, j’émettrai un avis défavorable sur ces amendements pour la raison suivante : nous nous sommes engagés à lancer une expérimentation dans la région Bretagne. C’est d’ailleurs un engagement au plus haut niveau de l’État, puisque le Président de la République s’est lui-même engagé à la lancer prochainement dans le cadre du « pacte girondin » ou du « pacte breton », je ne sais exactement comment le nommer.
Deux conditions sont requises : le calibrage correct du dispositif, tout d’abord ; la réalisation, la discussion et la validation de l’expérimentation par le conseil régional de Bretagne, ensuite. Pour le moment, les discussions que nous menons n’ont pas encore permis de remplir cette seconde condition.
Je m’engage à ce que cette expérimentation figure dans le projet de loi de finances rectificative que le Gouvernement vous présentera au premier semestre de l’année prochaine, « collectif » budgétaire sur la fiscalité locale. Il s’agit d’un engagement très fort de ma part et de la part du Gouvernement dans son ensemble, puisque nous en avons déjà discuté, y compris au niveau interministériel.
Je partage vos arguments du début à la fin : il faut territorialiser la politique du logement en trouvant un système beaucoup plus fluide que le schéma actuel, tout en sachant que cet objectif est compliqué à atteindre pour des raisons à la fois juridiques et fiscales. En effet, on touche là, non pas à du budgétaire mais à de la fiscalité. Dès lors que vous déléguez des poches de fiscalité, vous entrez dans une complexité assez élevée.
Maryvonne Blondin, Jean-Luc Fichet, Jean-Claude Tissot et Xavier Iacovelli n’ayant malheureusement pas pu soutenir leur amendement, nous allons évidemment nous rallier à l’amendement n° II-46 de la commission.
Nos collègues voulaient attirer votre attention, monsieur le ministre, sur les villes de Brest et de Saint-Étienne, les deux seules métropoles sur les vingt-deux métropoles françaises à se trouver exclues du dispositif Pinel. Brest Métropole a déjà diligenté une expertise extérieure, afin d’exprimer ses arguments socio-économiques. Nos collègues auraient souhaité que ces deux métropoles ne soient pas exclues avant la remise du rapport.
Je peux être favorable à l’idée de repenser les zonages et à une conception beaucoup plus territorialisée des politiques du logement. Il s’agit même d’une évolution incontournable et souhaitable. Une expérimentation en Bretagne me paraît donc bienvenue.
En revanche, se pose toujours un problème d’arbitrage : en matière d’aides fiscales, il est plus urgent à mon sens aujourd’hui d’encourager le PTZ pour favoriser l’accession sociale à la propriété dans les zones B2 et C que d’y développer le dispositif Pinel.
Les élus pensent tous que le dispositif Pinel est efficace, parce qu’il vise à soutenir le logement locatif intermédiaire, disons « bas », alors que, à l’expérience, ce mécanisme tend à produire des logements dont les prix sont très proches de ceux des HLM existants – il y a simplement changement de logement –, ou ne profite pas aux catégories sociales qu’il vise. Personnellement, je suis donc assez réservée et préférerais que l’arbitrage se fasse en faveur du PTZ.
Cela étant, dans l’immédiat, et compte tenu des attentes des collectivités locales, je m’abstiendrai sur ces amendements.
Je soutiendrai ces amendements, parce qu’il faut effectivement territorialiser la politique du logement et y introduire de la souplesse, particulièrement en zone B2. Les besoins immobiliers existent partout, même dans ces zones dites « non tendues ».
Le levier fiscal reste un outil extrêmement intéressant, voire déterminant. À l’heure où la situation suscite des inquiétudes dans le secteur immobilier, à l’heure où l’APL accession est attaquée, il me semble important de permettre à nos concitoyens de continuer à investir dans la pierre, d’autant que cela crée des emplois dans nos territoires.
Monsieur le ministre, vous connaissez parfaitement ce dossier sur lequel vous travaillez depuis dix-huit mois.
D’abord, la France ne se limite pas à la Bretagne.
Je ne reviendrai pas sur l’écotaxe, mais la question soulevée par ces dispositifs se pose partout.
De plus, nous ne sommes pas confrontés à ces difficultés qu’en matière de logement : les problèmes sont de même nature quand on parle, par exemple, des zones de revitalisation rurale, les ZRR.
Il est vraiment temps d’avoir le courage de revoir au fond la question. Comme l’a très pertinemment rappelé Philippe Dallier, un certain nombre de villes, pas forcément d’ailleurs des petites villes ou des villes moyennes, n’entrent pas dans le cadre du dispositif dit « Pinel » et cela leur pose problème. Il a été question de Brest et de Saint-Étienne, encore que cela puisse se discuter, mais il y aussi Besançon et bien d’autres communes.
La première des difficultés, et je ne peux que le déplorer, c’est que nous ne connaissons pas l’efficacité de ces dispositifs. La question de fond est en effet de savoir s’il y a effet d’aubaine ou non. Il faudrait s’adresser à l’administration pour qu’elle exécute enfin des ordres !
La direction de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages, la DHUP, ferait bien de se pencher une bonne fois pour toutes sur ce point. Je rejoins en partie les propos de Marie-Noëlle Lienemann, il existe un véritable problème à cet égard.
Le problème qui se pose avec le zonage, c’est qu’il y a, d’un côté, des villes qui ne bénéficient pas des dispositifs et qui trouvent à juste titre que c’est injuste par rapport à d’autres, et, de l’autre, de telles pressions que l’on n’a pas envie de retirer de la liste les communes qui y figurent. On n’en sort plus ! Il est temps de revoir ces dispositifs au fond, car ils ne présentent pas forcément tous les avantages auxquels on pourrait s’attendre. Il est vraiment nécessaire de caler un délai pour revoir cette question sur le fond.
Ce qui est déjà acquis, c’est que nous partageons tous le même constat.
Une question se pose maintenant : dans quel délai serions-nous capables de corriger le tir ? Vous nous annoncez une expérimentation en Bretagne, monsieur le ministre. J’en suis heureux pour les Bretons. Mais combien de temps durera-t-elle ? Trois ans ? Devrons-nous nous donner rendez-vous dans trois ou quatre ans pour régler le problème ailleurs en France ?
Monsieur le ministre, l’amendement de la commission des finances, si le Sénat l’adoptait, vous donnerait de la souplesse et des moyens de corriger le tir à différents endroits, en attendant cette grande réforme que tout le monde appelle aujourd’hui de ses vœux. La commission maintient son amendement et confirme son souhait que nos collègues s’y rallient.
Je veux apporter mon éclairage sur l’opportunité ou non de lancer une expérimentation. J’entends tout à fait ce qu’ont dit M. Mézard et M. le rapporteur spécial à l’instant, mais le moment est venu de donner plus de lisibilité aux acteurs que j’évoquais.
Si, au moment présent, avec les difficultés du logement que nous connaissons, nous décidions que les préfets pourraient, demain, déterminer quels sont les territoires éligibles, nous instaurerions une grande imprévisibilité, alors même que le secteur a besoin d’être encore plus fortement soutenu.
L’extension doit être envisagée dans une phase de dynamique du logement, avec la lisibilité que j’indiquais précédemment.
Monsieur le président, je retire l’amendement n° II-286 rectifié bis, au profit de celui de la commission des finances.
L’amendement n° II-286 rectifié bis est retiré.
La parole est à Mme Valérie Létard, pour explication de vote.
Monsieur le président, je retire également mon amendement n° II-290 rectifié, au bénéfice de celui de la commission.
L ’ amendement est adopté.
L’amendement n° II-45, présenté par M. Dallier, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Alinéa 8
Remplacer les mots
revitalisation du
par les mots :
revitalisation de
La parole est à M. le rapporteur spécial.
L ’ amendement est adopté.
L’amendement n° II-265, présenté par MM. Tissot, Kanner et M. Bourquin, Mme Artigalas, M. Cabanel, Mme Conconne, MM. Courteau, Duran et Montaugé, Mme Guillemot, MM. Iacovelli et Daunis, Mme Taillé-Polian et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 8
Compléter cet alinéa par les mots :
ainsi que dans toutes les communes de moins de 3 500 habitants
La parole est à Mme Annie Guillemot.
Le Gouvernement propose d’instaurer une aide fiscale pour inciter les particuliers à acquérir et à rénover des logements en vue de les louer. L’objectif est d’intervenir sur la dégradation du parc privé des centres-villes.
Les travaux devront représenter au moins 25 % du coût total de l’opération. L’acquéreur doit s’engager à louer le logement ainsi rénové pour une durée comprise entre six et douze ans.
Il est proposé d’appliquer cette mesure dans des communes dont le besoin de réhabilitation de l’habitat en centre-ville est particulièrement marqué, la liste de ces communes étant fixée par arrêté, et dans les communes s’inscrivant dans un projet global de territoire ayant signé une convention dans le cadre des opérations de revitalisation du territoire, ou convention ORT.
Ces opérations ouvriraient droit à une réduction d’impôt, calculée selon les mêmes modalités et sous les mêmes conditions que le dispositif Pinel d’aide à l’investissement locatif.
Le champ de la mesure nous paraît trop restrictif. Celle-ci risque de ne pas s’appliquer aux communes rurales, qui ont pourtant besoin de dispositifs incitatifs pour redonner de l’attractivité à leur centre. Elles se retrouvent souvent privées de tout soutien public car elles ne sont couvertes ni par un projet du programme « Action cœur de ville » ni par une ORT.
Aussi proposons-nous d’appliquer d’office la mesure à toutes les communes dont la population est inférieure à 3 500 habitants.
Cette mesure, pour le coup, constituerait un réel retour en arrière. Nous rouvririons la porte partout, sur tous les territoires, quelle que soit la situation du marché locatif. Cela ne nous semble pas pertinent. La commission demande donc le retrait de l’amendement ; sans cela, l’avis sera défavorable.
Toute commune, y compris de moins de 3 500 habitants, peut mettre en place une ORT dès lors qu’elle a ce projet territorial et, de ce fait, devenir éligible au dispositif. L’avis est défavorable.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
Je suis saisi de trois amendements identiques.
L’amendement n° II-211 rectifié est présenté par Mme L. Darcos, MM. Bascher, Bonne et Brisson, Mme Bruguière, MM. Chaize, Charon, Cuypers, Hugonet et Darnaud, Mmes Deromedi et Di Folco, MM. B. Fournier et Frassa, Mme Garriaud-Maylam, MM. Genest, Gilles et Grosdidier, Mme Gruny, M. Houpert, Mme Imbert, MM. de Legge et Lefèvre, Mme M. Mercier, MM. Meurant et de Nicolaÿ, Mmes Micouleau et Noël et MM. Piednoir, Pierre, Schmitz, Sido et Vial.
L’amendement n° II-246 rectifié bis est présenté par MM. Mézard, Artano, A. Bertrand et Collin, Mme N. Delattre, MM. Gabouty et Guérini, Mmes Guillotin, Jouve et Laborde et MM. Requier, Roux et Vall.
L’amendement n° II-281 rectifié bis est présenté par Mme Létard, M. Marseille, Mmes Gatel et Loisier, MM. Prince, Louault et Moga, Mmes Morin-Desailly, Vérien, de la Provôté, C. Fournier et Perrot, M. Laugier, Mme Joissains, M. Détraigne, Mmes Guidez, Billon et Vullien et M. Vanlerenberghe.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
I. – Après l’alinéa 8
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° Le premier alinéa du A du V est complété par une phrase ainsi rédigée : « Pour les logements mentionnés au 5° du B du I, cette limite est portée à 400 000 €. »
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Jackie Pierre, pour présenter l’amendement n° II-211 rectifié.
Le présent amendement vise à adapter le dispositif voté par l’Assemblée nationale en première lecture, sur proposition du Gouvernement, consistant à créer une mesure d’incitation fiscale pour les travaux de rénovation de logements situés dans nos cœurs de ville.
Si l’on peut se féliciter de la mise en place d’un tel dispositif pour réhabiliter l’habitat ancien, la limitation du prix de revient à 300 000 euros pour le calcul de la réduction d’impôt mésestime le coût important des travaux à entreprendre pour réhabiliter l’habitat ancien dans les centres-villes. Cet habitat est souvent très dégradé – les chantiers coûtent extrêmement cher –, inadapté aux attentes actuelles de nos concitoyens et non respectueux des normes environnementales.
Par cet amendement, nous proposons de porter à 400 000 euros le seuil de défiscalisation de 300 000 euros proposé jusqu’à présent.
La parole est à M. Jacques Mézard, pour présenter l’amendement n° II-246 rectifié bis.
Je partage les observations tout juste formulées : les rénovations, qui sont souvent, d’ailleurs, des restructurations, réalisées dans des quartiers anciens de centres-villes représentent des coûts considérables, souvent supérieurs à ceux que l’on constate pour des constructions beaucoup plus récentes. S’ajoutent à cela de nouvelles contraintes techniques, tout à fait légitimes, en matière d’isolation et d’économies d’énergie.
Si l’on veut vraiment – et je crois que c’est la volonté du Gouvernement, monsieur le ministre – faciliter et accélérer le processus de réhabilitation, il faut accorder des moyens financiers.
On le sait très bien, si un particulier qui achète un immeuble dans ces quartiers anciens ne bénéficie pas de certains concours, l’opération sera, le plus souvent, irréalisable. Ceux d’entre nous qui, du temps où un parlementaire pouvait encore gérer une collectivité locale, ont porté des opérations programmées d’amélioration de l’habitat, des OPAH, savent d’expérience qu’il faut un certain nombre de dispositifs pour pouvoir les mener à bien.
Cette mesure, une fois encore, serait en totale adéquation avec la politique que vous avez menée avec grande sagesse jusqu’ici, monsieur le ministre !
Sourires.
La parole est à Mme Valérie Létard, pour présenter l’amendement n° II-281 rectifié bis.
Cet amendement, comme les deux précédents, vise à ce que les outils mis à disposition des opérations évoquées ici soient adaptés à une réalité bien connue.
Au vu de l’impact financier souvent considérable des réhabilitations en cœurs de ville anciens, il faut pouvoir proposer des solutions adaptées, afin que les projets puissent être menés, indépendamment de la nature de ces cœurs de ville, dans les meilleures conditions possible et sans obstacle.
M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. La commission est dubitative. Il faut voir de quoi on parle, mes chers collègues ! On parle de 400 000 euros, dans des zones où, a priori, le marché du logement n’est pas particulièrement tendu ! La somme commence à être relativement importante.
M. Jackie Pierre s ’ exclame.
On pourrait, aussi, la comparer à ce qui se fait dans les zones plus tendues.
En proposant de porter le seuil de défiscalisation de 300 000 euros à 400 000 euros, n’êtes-vous pas en train d’ouvrir trop largement la porte ? Les difficultés que vous décrivez ou supposez sont-elles si réelles ? Honnêtement, la commission des finances se pose la question et souhaite le retrait de ces amendements.
Effectivement, en dépit des brillants exposés qui viennent d’être faits, je suis partisan d’en rester à un seuil de 300 000 euros.
Comment ce montant a-t-il été calculé ? Le prix moyen pour une opération Pinel dans l’habitat neuf s’établit à 180 000 euros. Pour prendre en compte le coût des travaux – effectivement, une rénovation coûte beaucoup plus cher –, nous avons choisi de doubler, quasiment, cette somme, d’où ce seuil de 300 000 euros.
Il faut aussi veiller à limiter le montant, afin qu’il n’y ait pas d’effet d’aubaine pour des personnes possédant d’importants capitaux et cherchant à multiplier les opérations de défiscalisation.
Il nous a donc semblé, au regard du calcul que j’ai exposé, que la somme de 300 000 euros constituait un juste milieu.
J’ai moi aussi tendance à penser qu’il faut démarrer à 300 000 euros et voir, ensuite, si les surcoûts liés aux opérations sont à ce point insupportables qu’il convient de porter le seuil à 400 000 euros. Il s’agit, en effet, d’une somme importante.
En revanche, monsieur le ministre, je me permets d’insister sur la nécessité de prévoir de l’accession sociale à la propriété dans le cadre des réhabilitations de cœurs de ville.
Si l’on se limite à du locatif, on n’aura jamais la mixité souhaitée. On a bien vu, dans le cadre des OPAH, notamment, comment une trop grande homogénéité de catégories sociales, avec, en outre, des habitants dont les revenus étaient progressivement tirés vers le bas, engendrait des déséquilibres.
Je vous rappelle que vous vous étiez engagé – en tout cas, Jacques Mézard, alors ministre, l’avait fait et je l’en remercie – à travailler l’hypothèse d’un prêt social location-accession, ou PSLA, dans l’ancien, qui pourrait être mis en œuvre dans ces cœurs de ville, quitte à le faire, dans un premier temps, de façon expérimentale. Ce type d’accession pourrait correspondre aux attentes de jeunes couples, souhaitant un peu changer de « look ».
Il ne faut ni homogénéité sociale ni homogénéité générationnelle dans le cadre de ces réhabilitations de cœurs de ville. On a vu trop d’OPAH qui, après avoir été une réussite, finissaient, avec le temps, par avoir un effet ségrégatif.
C’est pourquoi, monsieur le ministre, je me permets d’insister auprès de vous et de vos services pour que soit enfin mis en place, au moins à titre expérimental, un dispositif d’accession sociale à la propriété. Il doit être possible, au travers du PSLA ou du PTZ, de procéder à des tests sur un certain nombre d’opérations significatives.
Madame Lienemann, il a été décidé à l’Assemblée nationale, je crois, que toutes les opérations montées via un PSLA donnaient droit au PTZ dans le neuf, et ce indépendamment du zonage. Par ailleurs, le PTZ est déjà ouvert dans l’ancien. Il a été reconduit sur quatre ans, avec la même quotité de 40 %.
Je vous propose d’en reparler. En tout état de cause, nous avons essayé de régler la question que vous soulevez.
M. Jacques Mézard. Dans ces centres-villes dits anciens, le montant des travaux sur des immeubles entiers est forcément très élevé – nous le savons d’expérience.
M. Jackie Pierre approuve.
En revanche, monsieur le ministre, je souhaiterais savoir où en est la demande visant à étendre le dispositif Malraux, dont l’impact, dans ces centres-villes anciens, est tout à fait intéressant.
M. Antoine Lefèvre le confirme.
Il faut savoir ce que l’on veut ! Si l’on veut, comme le Gouvernement, accroître le travail de restructuration des centres anciens – il s’agit bien de restructuration –, il convient de mettre en place des dispositifs particulièrement incitatifs.
D’où ma double question : où en est la demande d’extension du dispositif Malraux ? Bercy est-il sorti de sa surdité ?
La restauration du patrimoine immobilier dans nos centres-villes et centres-bourgs recouvre des enjeux très importants, auxquels vient s’ajouter le défi de la rénovation thermique de ces bâtiments, sources de nombreuses émissions.
Tout cela représente des travaux très lourds à porter. Compte tenu de ces travaux, notamment sur le plan énergétique, le niveau de 400 000 euros ne me semble pas exorbitant.
Pour répondre brièvement à la question de M. Mézard, je rappellerai que la décision de mettre en place ce nouveau dispositif d’investissement locatif dans le cadre du PLF pour 2019 représente déjà une avancée significative, et ce pour toute la politique de réhabilitation.
S’agissant du dispositif Malraux, il est reconduit en l’état. Nous attendons dans les tout prochains jours les conclusions d’un rapport du Conseil général de l’environnement et du développement durable et de l’Inspection générale des finances visant à établir un état des lieux du dispositif et des pistes d’amélioration. Je ne manquerai pas de vous le transmettre, monsieur Mézard.
Je mets aux voix les amendements identiques n° II-211 rectifié, II-246 rectifié bis et II-281 rectifié bis.
Les amendements sont adoptés.
Je suis saisi de trois amendements identiques.
L’amendement n° II-207 rectifié est présenté par Mme L. Darcos, MM. Bascher, Bonne et Brisson, Mme Bruguière, MM. Chaize, Charon, Cuypers, Hugonet et Darnaud, Mmes Deromedi et Di Folco, MM. B. Fournier et Frassa, Mme Garriaud-Maylam, MM. Genest, Gilles et Grosdidier, Mme Gruny, M. Houpert, Mme Imbert, MM. de Legge et Lefèvre, Mme M. Mercier, MM. Meurant et de Nicolaÿ, Mmes Micouleau et Noël et MM. Piednoir, Pierre, Schmitz, Sido et Vial.
L’amendement n° II-245 rectifié bis est présenté par MM. Mézard, Artano, A. Bertrand et Collin, Mme N. Delattre, MM. Gabouty et Guérini, Mmes Guillotin, Jouve et Laborde et MM. Requier, Roux et Vall.
L’amendement n° II-279 rectifié bis est présenté par Mme Létard, M. Marseille, Mmes Gatel et Vérien, M. Prince, Mmes Loisier, Morin-Desailly et de la Provôté, MM. Détraigne et Laugier, Mmes Perrot, Billon, Guidez, Férat et Joissains, MM. Moga et Louault, Mme Vullien, M. Vanlerenberghe et Mme C. Fournier.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
I. – Compléter cet article par trois alinéas ainsi rédigés :
…° Au début du premier alinéa du VI, sont ajoutés les mots : « Pour les logements mentionnés au A et aux 1° à 4° du B du I, » ;
…° Après le VII bis, il est inséré un paragraphe ainsi rédigé :
« VII… – Pour les logements mentionnés au 5° du B du I, le taux de la réduction d’impôt est fixé à 30 % lorsque l’engagement de location mentionnée au I est pris pour une durée de 12 ans. La réduction d’impôt est répartie sur la durée de l’engagement de location. Elle est accordée au titre de l’année d’achèvement des travaux du logement ou de son acquisition après réalisation des travaux si elle est postérieure, et imputée sur l’impôt dû au titre de cette même année, puis sur l’impôt dû au titre de chacune des onze années suivantes à raison d’un douzième de son montant total au titre de chacune de ces années. »
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Alain Houpert, pour présenter l’amendement n° II-207 rectifié.
Nous pouvons nous féliciter de la mise en place du dispositif d’incitation fiscale pour les travaux de rénovation de l’habitat ancien dans les centres-villes. Mais, comme nous l’avons mentionné à propos du dispositif Malraux, le coût de ces travaux de réhabilitation est toujours élevé, notamment du fait de la dégradation du bâti.
L’actualité est parlante, mes chers collègues. Le nombre de logements insalubres augmente. Voilà quelques jours, dans une ville du Sud, c’est un immeuble entier qui s’est écroulé, faisant plusieurs morts. Il importe d’agir !
Dans les zones détendues, le coût des travaux sera toujours supérieur au prix du marché, avec des risques locatifs élevés et des loyers faibles.
Cet amendement vise donc à augmenter l’effet du nouveau dispositif, en augmentant le taux d’aide de 21 % à 30 %, avec, pour contrepartie, une durée de location portée à douze années.
La parole est à M. Jacques Mézard, pour présenter l’amendement n° II-245 rectifié bis.
Je profite de la présentation de cet amendement pour féliciter M. le ministre d’avoir réussi, en première lecture à l’Assemblée nationale, à faire passer une disposition qu’il n’était pas forcément évident de faire accepter au regard du type d’opérations concerné.
La décision qui a été prise marque un progrès considérable et j’espère qu’elle sera tenue jusqu’au bout. Pour notre part, dans le même esprit qui a animé la défense de notre précédent amendement, nous souhaitons aller encore plus loin et mettre le maximum de moyens au service de la réussite de ces opérations de redynamisation territoriale, via ces travaux de restructuration.
La parole est à Mme Valérie Létard, pour présenter l’amendement n° II-279 rectifié bis.
Cet amendement, identique aux précédents, a été parfaitement défendu par mes collègues.
M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Toujours plus haut, toujours plus loin, je ne sais plus quoi dire, mes chers collègues !
Sourires.
Le dispositif voté à l’Assemblée nationale me semblait déjà intéressant ; voilà que, après avoir porté le seuil à 400 000 euros avec l’adoption des amendements précédents, vous proposez d’augmenter le taux d’aide jusqu’à 30 %. Je ne sais pas si tout cela est raisonnable ! En tout cas, cela démontre que, dès que l’on rouvre la porte de ces dispositifs – dispositifs tout de même coûteux pour l’État –, tout le monde s’y engouffre sans attendre, avec des propositions qui, peut-être, sont un peu excessives.
Comme précédemment, la commission demande le retrait de ces amendements ou, à défaut, émettra un avis défavorable. Mais, les signataires étant les mêmes, je ne me fais guère d’illusion.
Sourires.
Je mets aux voix les amendements identiques n° II-207 rectifié, II-245 rectifié bis et II-279 rectifié bis.
Les amendements sont adoptés.
L ’ article 74 bis est adopté.
Je suis saisi de trois amendements identiques.
L’amendement n° II-218 rectifié est présenté par Mme L. Darcos, MM. Bascher, Bonne et Brisson, Mme Bruguière, MM. Chaize, Charon, Cuypers, Hugonet et Darnaud, Mmes Deromedi et Di Folco, MM. B. Fournier et Frassa, Mme Garriaud-Maylam, MM. Genest, Gilles et Grosdidier, Mme Gruny, M. Houpert, Mme Imbert, MM. de Legge et Lefèvre, Mme M. Mercier, MM. Meurant et de Nicolaÿ, Mmes Micouleau et Noël et MM. Piednoir, Pierre, Schmitz, Sido et Vial.
L’amendement n° II-244 rectifié ter est présenté par MM. Mézard, Artano, A. Bertrand et Collin, Mme N. Delattre, MM. Gabouty et Guérini, Mmes Guillotin, Jouve et Laborde et MM. Requier, Roux et Vall.
L’amendement n° II-278 rectifié bis est présenté par Mmes Létard et Gatel, M. Marseille, Mmes Loisier, Férat, Vérien et Perrot, MM. Prince et Détraigne, Mmes de la Provôté, Billon et Guidez, MM. Moga, Laugier et Louault, Mmes Joissains, C. Fournier, Vullien et Morin-Desailly et M. Vanlerenberghe.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 74 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Aux premier et second alinéas du 1 de l’article 200-0 A du code général des impôts, après la référence : « 199 unvicies », est insérée la référence : «, au IV bis ».
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Jackie Pierre, pour présenter l’amendement n° II-218 rectifié.
Conscient de la situation d’urgence et de sa dégradation, le Gouvernement a fait voter à l’Assemblée nationale un amendement adaptant le dispositif Pinel pour l’habitat ancien à la rénovation des logements en zones d’opération de revitalisation du territoire.
Ce nouveau dispositif permettra à un investisseur prêt à s’engager sur douze ans de location de bénéficier, pendant toute cette durée, d’une réduction d’impôt de 21 % du programme, plafonnée à 300 000 euros, dont 2 % l’an pendant les neuf premières années, la réduction d’impôt maximale annuelle pouvant ainsi atteindre 6 000 euros.
Cette réduction d’impôt viendra, selon la règle commune, s’ajouter aux autres réductions d’impôt dont l’investisseur pourrait bénéficier – pour emploi à domicile ou au titre d’autres réductions récurrentes pour des opérations réalisées dans le passé – dans le calcul du plafond des réductions d’impôt de 10 000 euros.
Afin de donner au nouveau dispositif voulu par le Gouvernement son plein effet, nous proposons de porter ce plafond de 10 000 euros à 18 000 euros, à l’instar de ce qui est déjà prévu pour les sociétés de financement de l’industrie cinématographique et de l’audiovisuel, les SOFICA, ou pour l’investissement outre-mer et, en particulier, le dispositif Pinel outre-mer.
La parole est à M. Jacques Mézard, pour présenter l’amendement n° II-244 rectifié ter.
La parole est à Mme Valérie Létard, pour présenter l’amendement n° II-278 rectifié bis.
Sourires.
Nouveaux sourires.
Cette proposition me semble totalement déraisonnable. Je ne demande même pas le retrait de ces amendements. L’avis est défavorable ; absolument défavorable !
Il est également défavorable. On ne peut pas, ainsi, faire exploser un tel plafond.
J’ajouterai, de manière quelque peu ironique et provocatrice, que le Sénat, dans sa grande sagesse, ne saurait qu’être cohérent avec les deux premières séries d’amendements votés, qui, rappelons-le, n’ont pas reçu mon soutien.
Si vous me permettez l’expression, mesdames, messieurs les sénateurs, vous avez fait « péter » tous les plafonds : on est passé à un montant de 400 000 euros, avec une défiscalisation de 30 % sur douze ans. Faisons un rapide calcul : 400 000 euros par 30 % nous donnent 120 000 euros, soit, sur douze ans, 10 000 euros par an.
Vous n’avez même pas besoin de passer le seuil à 18 000 euros pour rester cohérents avec les amendements précédemment votés, que je ne partage pas !
Au vu de ce que nous avons déjà obtenu et des arguments avancés par le rapporteur spécial et le ministre, nous retirons notre amendement. Nous ne voudrions pas trop abuser non plus !
L’amendement n° II-278 rectifié bis est retiré.
La parole est à M. Jacques Mézard, pour explication de vote.
Du fait des excellentes observations de Philippe Dallier et de M. le ministre, retrait !
Sourires.
L’amendement n° II-244 rectifié ter est retiré.
La parole est à M. Jackie Pierre, pour explication de vote.
Pour confirmer toute la sagesse du Sénat, je retire également mon amendement, monsieur le président.
L’amendement n° II-218 rectifié est retiré.
L’amendement n° II-164 rectifié bis, présenté par MM. Dallier et Brisson, Mmes Bruguière et L. Darcos, MM. Daubresse, de Legge et del Picchia, Mmes Deroche, Deromedi, Di Folco, Estrosi Sassone et Gruny, M. Karoutchi, Mmes Lanfranchi Dorgal et Lavarde, MM. Lefèvre, Longuet et Mayet, Mme M. Mercier, MM. Morisset, de Nicolaÿ, Panunzi, Pellevat, Savin, Sido et Vaspart, Mme Bories, MM. Darnaud, Genest et Gremillet, Mme Imbert et MM. D. Laurent, Mandelli, Piednoir, Vogel et Pierre, est ainsi libellé :
Après l’article 74 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le premier alinéa du C du I de l’article 199 novovicies du code général des impôts est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« C. – L’achèvement du logement doit intervenir dans les trente mois qui suivent la date de la signature de l’acte authentique d’acquisition, dans le cas d’un logement acquis en l’état futur d’achèvement. Ce délai peut être prolongé pour une période maximale de dix-huit mois en cas de demande motivée par les caractéristiques particulières de la situation rencontrée et notamment l’importance et la nature du projet de construction.
« L’achèvement du logement doit intervenir dans les trente mois qui suivent la date de l’obtention du permis de construire, dans le cas d’un logement que le contribuable fait construire. »
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Philippe Dallier.
Cet amendement, que je présente à titre personnel, vise à permettre le prolongement de la date limite d’achèvement d’un logement entrant dans le cadre d’un projet avec réduction d’impôt Pinel, pour une durée maximale de dix-huit mois. Certaines opérations peuvent effectivement connaître des retards.
M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Le rapporteur spécial est évidemment favorable à cet amendement !
Sourires.
Le délai, sauf erreur de ma part, est déjà de trente mois. C’est relativement élevé. Certains promoteurs, je le sais, poussent pour que cette durée soit portée à quarante-huit mois, mais je n’ai pas l’impression que ce soit un point bloquant. Je demande le retrait de l’amendement. À défaut, l’avis sera défavorable.
Monsieur Dallier, l’amendement n° II-164 rectifié bis est-il maintenu ?
Je le maintiens, monsieur le président. Si son adoption pouvait permettre de régler ne serait-ce que quelques cas, ce serait une bonne chose dans le climat actuel, et cela ne va pas chercher bien loin !
Sourires.
L ’ amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 74 bis.
L’amendement n° II-174 rectifié bis, présenté par MM. Joyandet, Revet, Pierre, Sido, J.M. Boyer et Mayet, Mme Deromedi, M. Daubresse et Mme Micouleau, est ainsi libellé :
Après l’article 74 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le X bis de l’article 199 novovicies du code général des impôts est abrogé.
La parole est à M. Jackie Pierre.
Cet amendement tend à supprimer le dispositif introduit par la loi de finances pour 2018, sur l’initiative de la commission des finances, qui limite le montant des frais et commissions directes et indirectes ouvrant droit à la réduction d’impôt Pinel. Nous ne sommes pas favorables à cette suppression.
La commission des finances avait beaucoup travaillé sur ces sujets. Nous avions constaté, dans le passé, des abus, voire des excès, ce qui nous avait conduits à introduire une telle disposition. Cette dernière, qui a seulement un an d’existence, nous paraît toujours utile. Il n’y a pas de raison que certaines officines commercialisant ces logements se paient trop largement pour le simple fait de les commercialiser.
L’État apporte un financement par le biais d’avantages fiscaux, mais il faut respecter certaines limites. C’était le but du dispositif que nous avions mis en place et que nous souhaitons voir maintenu.
Je partage l’avis défavorable de M. le rapporteur spécial.
À la suite du vote de la Haute Assemblée voilà un an, un travail a été mené pour, à la fois, trouver les moyens de mettre en œuvre ce vote et prendre en compte les demandes et inquiétudes d’un certain nombre de personnes distribuant ces produits financiers. Les travaux sont en cours, ils ne sont pas évidents à mener et ont donné lieu à de nombreuses consultations.
I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Au 1° du I de l’article L. 542-2, après l’année : « 2018 », sont insérés les mots : « ou, par exception, à compter du 1er janvier 2020 lorsque le logement fait l’objet d’une décision favorable de financement, prise avant le 31 décembre 2018, du représentant de l’État en Guyane, en Martinique, en Guadeloupe et à La Réunion » ;
2° La dernière phrase du premier alinéa de l’article L. 831-1 est complétée par les mots : « ou, par exception, à compter du 1er janvier 2020 lorsque le logement fait l’objet d’une décision favorable de financement, prise avant le 31 décembre 2018, du représentant de l’État en Guyane, en Martinique, en Guadeloupe et à La Réunion ».
II. – L’article 10 de l’ordonnance n° 2002-149 du 7 février 2002 relative à l’extension et la généralisation des prestations familiales et à la protection sociale dans la collectivité départementale de Mayotte est ainsi modifié :
1° Au début du premier alinéa, est ajoutée la mention : « I. – » ;
2° Il est ajouté un II ainsi rédigé :
« II. – Pour l’application à Mayotte du 1° du I de l’article L. 542-2 du code de la sécurité sociale, les mots : « en Guyane, en Martinique, en Guadeloupe et à La Réunion » sont remplacés par les mots : « à Mayotte ».
III. – Après le a du 1° de l’article 42-1 de l’ordonnance n° 2002-411 du 27 mars 2002 relative à la protection sanitaire et sociale à Mayotte, il est inséré un a bis ainsi rédigé :
« a bis) Au même premier alinéa, les mots : “en Guyane, en Martinique, en Guadeloupe et à La Réunion” sont remplacés par les mots : “à Mayotte” ; ». –
Adopté.
I. – Après le titre VI bis de l’ordonnance n° 2002-411 du 27 mars 2002 relative à la protection sanitaire et sociale à Mayotte, il est inséré un titre VI ter ainsi rédigé :
« TITRE VI TER
« AIDES AUX COLLECTIVITÉS ET ORGANISMES LOGEANT À TITRE TEMPORAIRE DES PERSONNES DÉFAVORISÉES
« Art. 42 -5. – Le I de l’article L. 851-1, le premier alinéa de l’article L. 851-3 et l’article L. 851-4 du code de la sécurité sociale sont applicables à Mayotte. »
II. – Le I entre en vigueur le 1er janvier 2019. –
Adopté.
Avant le 1er septembre 2019, le Gouvernement remet au Parlement un rapport évaluant l’impact du dispositif de la réduction de loyer de solidarité, créé par l’article 126 de la loi n° 2017-1837 du 30 décembre 2017 de finances pour 2018, sur l’autofinancement et les capacités d’investissement des organismes de logement social, dans la perspective d’une hausse du montant de ce dispositif.
L’amendement n° II-58, présenté par Mme Estrosi Sassone, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Après la date :
Rédiger ainsi la fin de cet article :
et l’impact de l’augmentation de la TVA décidée à l’article 12 de la loi n° 2017-1837 du 30 décembre 2017 précitée, sur l’autofinancement et les capacités d’investissement des organismes de logement social à court, moyen et long termes.
La parole est à Mme la présidente de la commission des affaires économiques.
L’article 74 quinquies prévoit la remise d’un rapport au Parlement sur les conséquences de la réduction de loyer de solidarité, la RLS, sur l’autofinancement et les capacités d’investissement des bailleurs sociaux.
Même si nous n’aimons pas beaucoup les rapports, nous souhaitons – et c’est l’objet de cet amendement – que le champ dudit rapport soit quelque peu élargi, afin que l’évaluation de l’impact de l’augmentation du taux de TVA y figure également. Nous souhaitons aussi, pour les raisons évoquées précédemment par Philippe Dallier, que cette évaluation soit faite dans le temps, c’est-à-dire qu’elle tienne compte des conséquences à dix ans, quinze ans, etc.
En général, effectivement, nous n’aimons pas vraiment les rapports, mais celui sur l’impact de la RLS est attendu avec beaucoup d’impatience par tous les acteurs. L’idée qu’il englobe les questions liées à la TVA nous semble tout à fait pertinente, ne serait-ce que pour savoir exactement combien celle-ci aura rapporté en 2018.
Peut-être cela permettra-t-il aussi, monsieur le ministre, de voir si la solution reposant, pour moitié, sur la RLS et, pour moitié ou presque, sur la TVA pourrait être durable et éviter que l’on porte le prélèvement au titre de la RLS à 1, 5 milliard d’euros l’an prochain.
Le Parlement aura besoin d’un net éclairage sur la question, d’où un avis favorable de la commission.
Je ne suis pas non plus un grand fan des rapports. Mais, compte tenu de nos échanges et du point de revoyure que nous avons fixé, j’émettrai un avis de sagesse sur cette demande tout à fait légitime.
Nous soutenons aussi cette demande de rapport et, surtout, l’échéance fixée au 1er septembre 2019. La période budgétaire sera alors toute proche et il est important que nous puissions prendre en compte les conclusions de ce rapport.
À ce propos, monsieur le ministre, il me semble que vous avez évoqué, la semaine dernière, de nouvelles mesures sur les zones tendues. Je vous rappelle que nous attendons toujours un rapport à ce sujet et que nous aimerions l’avoir avant que le Gouvernement ne délivre ses préconisations.
Nous soutiendrons bien évidemment cette demande de rapport, à laquelle, me semble-t-il, l’ensemble du Sénat sera favorable.
Je voudrais, aussi, que nous disposions un jour d’un véritable rapport sur les effets du dispositif Pinel. J’approuve les propos de Jacques Mézard : nous n’avons toujours pas d’informations sur le fonctionnement précis ou l’impact sur les marchés locaux.
Nous n’avons jamais eu non plus de clarifications à propos de la vérification du respect, dans la durée, des plafonds de ressources initialement prévus pour les locataires des logements relevant du dispositif Pinel.
Tout le monde est pour le Pinel ! Tout le monde – enfin, pas ici – casse du sucre sur le dos les HLM ! Mais je vous rappelle, pour l’avoir observé à maintes reprises, qu’il ne faut souvent pas longtemps avant que les locataires d’un logement Pinel ne soient plus sous les plafonds de ressources fixés. Cette question mérite donc une évaluation.
Cet amendement, présenté par la présidente de la commission des affaires économiques, recouvre un réel enjeu. Il est tout de même important de pouvoir quantifier l’impact d’une telle mesure au regard de l’importance des investissements effectués par les bailleurs sociaux et des conséquences économiques à en attendre, tant pour ces derniers que pour les locataires et les professionnels du bâtiment et des travaux publics en général. Cela exige un état des lieux précis. C’est pourquoi je soutiendrai, moi aussi, cet amendement.
L ’ amendement est adopté.
L ’ article 74 quinquies est adopté.
Avant le 1er septembre 2019, le Gouvernement remet au Parlement un rapport analysant la pertinence du financement des centres d’hébergement et de réinsertion sociale (CHRS) via la seule mission budgétaire « Cohésion des territoires », compte tenu des enjeux relatifs à l’accompagnement social des personnes hébergées. Le rapport présente également les modalités envisageables de conclusion de partenariats financiers entre les centres d’hébergement et de réinsertion sociale et d’autres acteurs de l’action sociale.
L’amendement n° II-47, présenté par M. Dallier, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur spécial.
S’il y a effectivement de bons rapports, il y en a aussi de moins bons !
L’article 74 sexies prévoit la remise au Parlement par le Gouvernement d’un rapport analysant la pertinence du financement des centres d’hébergement et de réinsertion sociale, les CHRS, par la seule mission budgétaire « Cohésion des territoires ».
Certes, l’architecture des missions peut susciter nombre d’interrogations, mais là, honnêtement, j’ai un peu de mal à comprendre. Qu’est-ce qui est visé ici en particulier ? Si l’on envisage un éclatement du financement des CHRS au sein de différentes missions, je ne vois pas l’intérêt d’un rapport à cette seule fin.
L ’ amendement est adopté.
L’amendement n° II-260, présenté par M. Iacovelli, Mme Guillemot, MM. Daunis et Kanner, Mme Artigalas, MM. M. Bourquin et Cabanel, Mme Conconne, MM. Courteau, Duran, Montaugé et Tissot, Mme Taillé-Polian et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 74 sexies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet au Parlement, dans un délai de trois mois à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport sur les modalités d’ouverture de la garantie du prêt d’accession sociale aux preneurs de droits réels immobiliers dans le cadre d’un bail réel solidaire.
La parole est à Mme Annie Guillemot.
Le bail réel solidaire, ou BRS, permet de favoriser l’accession sociale à la propriété en dissociant le foncier et le bâti.
Pour « démultiplier » ce dispositif, il est proposé que les ménages bénéficiaires de ce type de montage puissent souscrire un prêt d’accession sociale garanti par l’État.
Cet amendement d’appel a pour objectif d’attirer l’attention du Gouvernement sur cette difficulté. Toujours est-il qu’il me semble que notre demande est satisfaite par un amendement que nous avons voté tout à l’heure.
Je renouvelle l’engagement que j’ai pris tout à l’heure : un article additionnel sera inséré parmi les articles non rattachés prévoyant que tout BRS puissent bénéficier d’un prêt social location-accession.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens à vous remercier de ces débats à la fois constructifs et passionnants que nous avons eus depuis cette après-midi sur la mission « Cohésion des territoires ».
Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Cohésion des territoires ».
Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l’État » (et article 71 quater).
La parole est à M. Philippe Dallier, au nom de la commission des finances.
Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des finances, mes chers collègues, Jacques Genest étant retenu dans son département, il m’a prié d’exposer devant vous les propos qu’il aurait tenus.
Au-delà des apparences, le budget de la mission « Administration générale et territoriale de l’État », ou AGTE, reconduit les moyens de cette mission sur la trajectoire qui était la sienne l’an dernier et qui, en réalité, est la sienne depuis bien des années.
Vous ne vous étonnerez donc pas que je sois amené à reconduire mes observations en en accentuant encore un peu la tonalité critique, non par plaisir de critiquer, mais parce que nous sentons bien que nous tutoyons de plus en plus une certaine ligne jaune, couleur décidément à la mode.
Sur les crédits de la mission consacrés au financement de la vie politique, le programme 232, l’enveloppe destinée aux partis politiques restera stabilisée en 2019. Il est cependant à noter qu’une somme de l’ordre de 2 millions d’euros ne sera pas dépensée, qui correspond à la pénalité pour défaut de parité. Je recommande au Gouvernement de consacrer cette somme à la politique en faveur des femmes.
Marques d ’ intérêt sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Je dirai un mot sur la Commission nationale des comptes de campagne.
Ses attributions et ses moyens ont été augmentés. Elle peut recourir à des experts pour apprécier les conditions dans lesquelles sont facturées des prestations de service aux candidats. Cet apport est utile si nous ne voulons pas que le contrôle des comptes par cette instance paraisse trop léger et laisse place finalement à des phases judiciaires plus systématiques encore qu’aujourd’hui.
Venons-en maintenant à nos territoires.
Une fois encore, le réseau préfectoral devra rendre des emplois, comme il l’a fait dans le cadre de la réforme de l’administration territoriale de l’État, ou RéATE, de la modernisation de l’État et du plan Préfectures nouvelle génération, mais cette fois en dehors de tout cadrage de ces économies d’effectifs, sinon celui qui est inscrit dans la loi de programmation pluriannuelle des finances publiques.
Mission non prioritaire, mission seconde sinon secondaire, année après année, le réseau d’administration générale de l’État se dévitalise aux dépens des territoires ruraux.
Le nombre des sous-préfectures réduites à l’état de simple apparence ne cesse de s’accroître. De 58 en 2017, le nombre de sous-préfectures disposant de moins de 10 emplois passe à 76 en 2018.
Cet étiolement, qui touche particulièrement le monde rural, conduit à s’interroger sur les évolutions qu’il pourrait préfigurer. Quels sont vos projets, monsieur le ministre, pour la représentation de l’État au niveau des arrondissements ?
Il est vrai que, désormais, les sous-préfectures n’offrent plus d’accès de proximité aux Français depuis la fermeture des guichets du réseau préfectoral. C’était la composante majeure du plan Préfectures nouvelle génération que de s’appuyer sur la numérisation d’un certain nombre de procédures pour supprimer 1 300 emplois et en redéployer 2 700 vers les missions retenues comme prioritaires : lutte contre la fraude aux titres sécurisés, contrôle de légalité, ingénierie territoriale et animation des politiques publiques gouvernementales.
Cette dématérialisation des procédures s’est traduite par une formidable restriction de l’accès aux services offerts, mais aussi par des difficultés très sérieuses pour obtenir la délivrance de certains titres.
Il y a, vous le savez, un problème majeur avec les cartes grises, qui handicape lourdement nos concitoyens. Je relève au passage que la plupart des cartes grises sont aujourd’hui délivrées en dehors de l’intervention de vos services, parfois pour un surcoût illégitime sur lequel il conviendrait d’être particulièrement vigilant.
Je rappelle d’ailleurs que le Défenseur des droits recommande d’offrir une solution de remplacement aux demandes dématérialisées pour les nombreux Français qui n’ont tout simplement pas accès à ce moyen.
Emplois supprimés, donc, mais, pour ce qui est des emplois redéployés, il faudra patienter.
S’agissant de l’animation des politiques publiques et de l’ingénierie territoriale, c’est à une crise que nous avons affaire. Le Gouvernement réfléchit à une réorganisation de l’État territorial : quels éléments pouvez-vous nous livrer sur la prise en compte des difficultés rencontrées par la coordination des services de l’État par les préfets et du nécessaire renforcement de la valeur ajoutée par ces services pour nos territoires ?
Envisagez-vous, monsieur le ministre, de créer une administration territoriale de l’État spécifique, comme vous y a engagé le rapport CAP 2022 ? Quelles améliorations de positionnement et de missions entendez-vous apporter à la déconcentration administrative ?
J’aurais souhaité finir sur une note plus positive en relevant l’effort réalisé en 2018 pour mettre à niveau certaines capacités d’accueil des étrangers en France. Il n’était que temps. Cependant, il reste encore à faire.
Monsieur le ministre, nous vous demandons de veiller à ce que les dépenses de contentieux soient enfin maîtrisées, tant pour celles qui résultent des responsabilités de l’État que pour celles qui résultent du fonctionnement de la commission du contentieux du stationnement payant, qui, au vu de certaines conditions d’accomplissement de la mission verbalisatrice, nous paraît comporter quelques risques de dérapage.
Moyennant ces observations, mes chers collègues, la commission des finances vous propose d’adopter les crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l’État ».
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, pour aller à l’essentiel, je limiterai mon intervention au programme 307, « Administration territoriale », programme qui rassemble, à l’exception du programme 333, cette année encore – ce sera modifié l’année prochaine –, les moyens des préfectures, sous-préfectures et représentations de l’État dans les collectivités d’outre-mer, des moyens de nouveau en baisse, comme on le sait.
Ainsi le schéma d’emploi pour 2019 prévoit-il la suppression de 200 équivalents temps plein, ou ETP. Pour l’administration territoriale, les années et les réformes « ambitieuses » se suivent, accompagnées du même refrain : faire plus et répondre à l’attente de proximité des citoyens usagers avec des moyens en personnels de plus en plus réduits, par la magie de la numérisation, de la mutualisation et de l’externalisation des tâches.
À se demander si la meilleure administration n’est pas celle qui se passe de fonctionnaires et d’agents publics…
Le plan Préfectures nouvelle génération, ou PPNG, était censé permettre de moderniser la délivrance des titres, tout en supprimant 1 300 emplois. Force est de constater que le manque de préparation de la réforme a engendré de très grandes difficultés dans la délivrance des certificats d’immatriculation et, dans une moindre mesure, des permis de conduire.
Pendant plusieurs mois, les démarches des usagers ont été fortement perturbées en raison de dysfonctionnements techniques des systèmes informatiques dédiés à ces titres.
À ces dysfonctionnements techniques sont venus s’ajouter les effets d’un manque de clairvoyance quant à la réception par les usagers des procédures de dématérialisation des démarches administratives. Les initiateurs du PPNG ont en effet pensé que le remplacement, du jour au lendemain, des guichets par un site internet ne poserait aucun problème : cela n’a pas été le cas, loin de là.
Si la dématérialisation des démarches administratives peut être un incontestable progrès, force est de constater que le numérique n’est pas immédiatement à la portée de tout le monde.
S’agissant d’un service public, il doit être conçu afin d’être adapté à tous les publics.
Il doit aussi prévoir plus de points d’accueil des personnes peu familières de la pratique informatique, au nombre de 310 actuellement sur l’ensemble du territoire, points animés par des médiateurs qui doivent non seulement être à l’aise avec l’informatique, mais également connaître les procédures administratives. La bonne volonté des volontaires du service civique, qui ont assuré l’essentiel du programme, n’a pas suffi : les gens se sont adressés au Défenseur des droits, dont, avouez-le, ce n’est pas la mission première.
Encore une fois, c’est l’engagement et la réactivité des agents de l’administration territoriale et de l’Agence nationale des titres sécurisés qui ont permis d’assurer la continuité de la présence de l’État et de ses missions. Jusqu’à quand ? Nous le saurons très bientôt avec la prochaine réforme de l’organisation territoriale des services de l’État, baptisée « Administration publique 2022 ». Elle doit notamment modifier l’organisation territoriale des services publics, qui prévoit une nouvelle suppression de 50 000 postes de fonctionnaires d’ici à 2022.
On comprend que l’avis de la commission des lois sur ces crédits et ces perspectives peu engageantes ait été négatif.
Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de dix minutes pour intervenir.
Dans la suite de la discussion, la parole est à Mme Nathalie Goulet.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, mon intervention portera essentiellement sur le programme 216, « Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur », et spécifiquement sur l’action n° 10, qui concerne la lutte contre la radicalisation.
Les occasions de faire un petit point sur ces programmes sont trop rares ; nous allons donc en profiter.
C’est depuis 2014 que je travaille sur toutes ces questions. Grâce au groupe Union centriste, nous avons obtenu en juin 2014 la constitution d’une commission d’enquête sur l’organisation et les moyens de la lutte contre les réseaux djihadistes en France et en Europe, soit, monsieur le ministre, six mois avant Charlie et l’Hypercacher.
Depuis lors, le nombre de radicalisés n’a fait qu’augmenter : un peu plus de 20 400 personnes sont inscrites au fichier de traitement des signalements pour la prévention de la radicalisation à caractère terroriste, ou FSPRT ; plus de 10 000 personnes sont considérées comme actives après avoir fait l’objet d’un signalement ; plus de 3 500 sont en veille, c’est-à-dire que, momentanément, leurs « signalements ne suscitent plus d’inquiétude et ne nécessitent plus de surveillance active ». On a vu ce à quoi a abouti, à plusieurs reprises, l’abandon de certaines mesures de surveillance active, même s’il est vrai qu’on ne peut surveiller tout le monde. Plus de 4 000 dossiers sont clos.
La Commission nationale de l’informatique et des libertés conserve les fiches des « inactifs » pendant cinq ans, mais la place Beauvau précise que « les signalements abusifs ou erronés d’individus qui n’ont jamais été radicalisés ne sont pas conservés dans le fichier ». Voilà une bonne nouvelle !
Ce qui est indéniable, c’est que la menace terroriste demeure. S’y ajoute le problème des « revenants ». On compte aujourd’hui 450 prisonniers jugés pour terrorisme qui seront libérés avant la fin de 2019 ; 351 revenants, dont 269 majeurs et 82 mineurs. Les institutions pénitentiaires, dont nous examinerons les crédits demain, sont confrontées à des difficultés. Au 13 novembre, les prisons françaises comptaient 1 704 détenus radicalisés.
Dans leur rapport rendu l’an dernier au nom de la mission d’information créée par la commission des lois du Sénat sur le modèle des « missions flash », Catherine Troendlé et Esther Benbassa avait souligné les défaillances de la politique de lutte contre la radicalisation.
Monsieur le ministre, ma question est la suivante : 70 millions d’euros, c’est bien, mais comment contrôlez-vous aujourd’hui les associations chargées de lutter contre la radicalisation ? Lors de l’examen de la loi du 30 octobre 2017 renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme, Catherine Troendlé et moi-même avions fait voter un amendement tendant à rendre obligatoire le contrôle des associations ou fondations ayant pour objet la prévention et la lutte contre la radicalisation, à la fois dans leurs compétences et dans leurs financements. Avez-vous pu mettre en place des politiques transversales d’évaluation de ces associations ? En connaissez-vous le nombre ? Les financements ? Avez-vous dressé un état des lieux ?
La mission d’information avait titré son rapport : Tâtonnements et impasses des politiques de « déradicalisation » - Bilan d ’ étape. Pourriez-vous faire un point rapide sur ce sujet, qui concerne la mission que nous examinons ce soir ?
Ce sujet est très important. Bernard Cazeneuve, à qui j’avais demandé de pouvoir réaliser un audit, m’avait dit qu’il ouvrirait ses bureaux et ses dossiers. Aussi, je vous pose la question, monsieur le ministre : serait-il possible de constituer un groupe de travail sur le suivi de la radicalisation, parce que je n’ai pas du tout le sentiment, malheureusement, que l’affaire soit totalement close ? Il faut que nous disposions de procédures de suivi fiables.
J’utiliserai la minute qui me reste pour vous parler de la fraude documentaire, sujet qui n’a rien à voir avec le précédent, mais qui relève de la présente mission.
Monsieur le ministre, on compte 1, 8 million de faux numéros INSEE, qui correspondent à autant de « Sésame, paie-moi ! » En 2010, une fraude massive à l’immatriculation a été découverte, les fraudeurs obtenant extrêmement facilement un numéro d’inscription au répertoire, le NIR – autrement dit, le numéro de sécurité sociale –, sur la base de faux documents. Si vous êtes né à l’étranger, que vous soyez français ou de nationalité étrangère, ce numéro de sécurité sociale vous est attribué manuellement, et il permet donc des fraudes massives sur la base, donc, de faux documents.
En 2016, à la suite d’une question d’actualité que j’avais posée, la secrétaire d’État qui m’avait répondu m’avait expliqué que 5 000 numéros avaient été radiés. Sur un total de 1, 8 million, le compte n’y est pas !
Monsieur le ministre, avez-vous pris des mesures pour faire en sorte que cette fraude massive à l’immatriculation soit enfin jugulée ? Cette fraude entraîne un manque à gagner de plusieurs milliards d’euros pour nos services, nos départements, milliards qui pourraient être utilisés ailleurs et beaucoup plus efficacement.
Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur spécial, mes chers collègues, j’aurais moi aussi un ensemble de sujets passionnants à évoquer avec vous, mais je m’en tiendrai au strict cadre de cette mission.
Dotée de 2, 8 milliards d’euros en crédits de paiement, la mission « Administration générale et territoriale de l’État » comprend trois programmes ayant des objectifs diversifiés et d’ampleur inégale : le programme 307, « Administration territoriale » ; le programme 232, « Vie politique, cultuelle et associative » ; le programme 216, « Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur », programme « réservoir » qui finance les moyens généraux du ministère de l’intérieur et certaines de ses interventions.
La dotation en crédits de cette mission connaît une hausse de 3 % par rapport à la loi de finances pour 2018, soit 83 millions d’euros.
Ce n’est pas surprenant. En effet, l’année dernière, les crédits ouverts s’étaient inscrits en forte baisse après le calendrier électoral très dense de l’année 2017 et les mesures de revalorisation salariale alors mises en œuvre.
Je souhaiterais m’attarder surtout sur le programme 307, « Administration territoriale », qui rassemble les moyens des préfectures, hauts-commissariats et sous-préfectures de métropole et d’outre-mer. C’est un programme crucial pour la vie quotidienne des citoyens et des collectivités.
Nos préfectures ont connu une réforme importante avec le plan Préfectures nouvelle génération.
Mise en œuvre en 2016, cette réforme a produit ses effets les plus significatifs en 2017 et en 2018. Elle consiste en une réorganisation des services de délivrance de titres – carte nationale d’identité, passeport, permis de conduire –, afin de moderniser et de simplifier les procédures pour, normalement, améliorer la qualité du service rendu à l’usager.
Fondée sur la dématérialisation des procédures, cette réforme a entraîné une réduction très forte des effectifs des préfectures. Celles-ci ont connu la suppression de 1 300 équivalents temps plein entre 2016 et 2018. Au total, le réseau préfectoral aura perdu plus de 11 % de ses effectifs en dix ans ; c’est important.
Certes, cela représente la contribution du réseau territorial de l’État à la maîtrise de la dépense publique. Mais nous espérons qu’une telle réforme ne conduira pas à « casser » l’institution préfectorale, mission régalienne de l’État par excellence et lien direct avec les territoires.
Je tiens d’ailleurs ici à saluer la qualité des membres du corps préfectoral. En particulier, je salue le courage du préfet Bernard Gonzalez, qui n’a pas hésité, la semaine dernière, à aller négocier en personne la reddition d’un forcené qui menaçait de se faire sauter avec une grenade et une ceinture d’explosifs. Cela démontre la variété des missions du préfet.
Nous espérons également que la baisse des effectifs ne dégradera pas la qualité et la proximité du service rendu en préfecture.
Certains territoires très ruraux ne sont pas équipés d’infrastructures d’accès à internet et se trouvent parfois pénalisés, d’abord en étant éloignés des sous-préfectures où l’on pouvait obtenir la délivrance des titres, puis maintenant en étant dénués de réseau de connexion de qualité pour procéder aux démarches en ligne. La mise en œuvre de téléprocédures est une bonne chose, mais nous devons veiller à ce qu’elle ne soit pas, pour nos territoires, synonyme d’exclusion.
Enfin, nous espérons que cette diminution ne réduira pas les fonctions de conseil et d’ingénierie territoriale auprès des collectivités. L’État, au travers des préfectures, nous le savons bien, est un partenaire crucial des collectivités territoriales. Il faut qu’il conserve les moyens d’accompagner les petites communes. Il est encore trop tôt pour tirer les conséquences de cette réforme du réseau préfectoral ; il faudra en dresser un bilan l’année prochaine avec les services concernés, les collectivités et les usagers.
Parmi les plus anciennes institutions de notre État moderne, l’institution préfectorale a toujours fait la preuve de ses capacités d’adaptation au service des Français. Nous vous faisons confiance, monsieur le ministre, pour ne pas la casser.
Le groupe Les Indépendants votera donc les crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l’État » en signe de cette confiance.
MM. Jacques Mézard et Jean-Claude Requier applaudissent.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, à l’occasion de l’examen des crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l’État », nous pouvons faire quelques variations sur le thème bien connu et éprouvé des réformes structurelles.
Les réformes structurelles, tout le monde est pour. Quand on ne porte pas le fardeau d’être dans la majorité et de soutenir le Gouvernement, on est d’autant plus enclin à réclamer, dans l’abstrait, des réformes structurelles !
Il se trouve que le plan Préfectures nouvelle génération, d’ailleurs engagé par un gouvernement précédent, est une réforme structurelle. Il vise à recentrer sur des objectifs essentiels les missions des préfectures, à réorganiser les services autour de ces missions et à mettre en œuvre les moyens numériques permettant de les assurer plus efficacement.
Évidemment, une telle réforme dérange, fait maugréer et entraîne des mécontentements, pour certains temporairement justifiés. Mais quelqu’un réclame-t-il le rétablissement des préfectures ancienne génération ?
Sourires.
En posant cette question, je n’osais imaginer une réponse autre de la part de notre collègue Pierre-Yves Collombat !
Il faut bien quelqu’un pour jouer le rôle du nain Grincheux ! (Nouveaux sourires.)
Reconnaissons, avec une certaine nostalgie, que le système ne fonctionnait pas si mal !
Sommes-nous d’accord sur la délimitation des missions des préfectures telle qu’elle a été retenue ? À ce sujet, d’ailleurs, je souligne, comme notre collègue Nathalie Goulet, que la composante lutte contre la fraude doit être réellement prise au sérieux, car les fraudes documentaires sont un fléau grandissant.
Je défends cette réforme et estime qu’elle a été globalement bien menée. Du reste, tous les préfets rendent hommage à l’effort qu’elle a demandé aux agents préfectoraux, tant les anciennes méthodes s’en sont trouvées bouleversées. Cependant, force est de constater que la procédure de délivrance des cartes grises n’est pas une totale réussite ; on peut même dire que cela ne marche pas encore au mieux. J’ose espérer, monsieur le ministre, que vous avez une ou deux bonnes nouvelles à nous annoncer pour remédier à ces dysfonctionnements. Si vous pouvez dresser devant nous un bilan des retards qu’on continue à enregistrer, de leur évolution et de ce que vous anticipez pour l’année 2019 pour en revenir à un fonctionnement satisfaisant de ce service public, vous aurez contribué vous aussi à la réussite de cette réforme.
La transformation numérique en cours va entraîner des difficultés de transition et poser le problème de l’accès à internet de certaines catégories de personnes et de certains territoires. Observons néanmoins que cet accès est en pleine phase de développement dans les territoires les moins bien desservis et que les deux réformes, en quelque sorte, se soutiennent l’une l’autre.
Cette transformation numérique, je la mets en rapport avec la prochaine phase de la réforme, à savoir la concentration autour de l’équipe préfectorale du pilotage et de l’organisation de l’ensemble des services déconcentrés de l’État, en lieu et place de cette distinction datant de la première phase de déconcentration entamée voilà cinquante ans, avec, d’un côté, le réseau « Intérieur », et, de l’autre, les réseaux ministériels en silo.
Évidemment, la mise en commun de toute une série de capacités de service et de systèmes d’information permettra à l’État de devenir plus performant dans sa relation avec les collectivités, mais aussi plus largement avec les citoyens.
Avant de conclure, monsieur le ministre, je voudrais évoquer devant vous, en me faisant sans doute l’écho de nombreux collègues, la question de l’évolution des conditions d’emploi et du sens des missions de beaucoup de fonctionnaires de l’État déconcentré.
Par comparaison avec les périodes antérieures, l’État est de moins en moins acteur et de plus en plus contrôleur, à tel point que, à bien des moments, il peut être perçu comme un État empêcheur.
Spécialement dans ses services extérieurs plutôt que dans ses services relevant de votre ministère, nombre d’agents ont quitté le service de l’État. Mais, globalement, puisque nous nous inscrivons dans une volonté de simplification et d’allégement normatifs, d’édification d’une société de confiance, il est important de rétablir dans la mission des services déconcentrés et des agents qui les animent une composante « conduite et accompagnement de projets », de soutien aux démarches territoriales. Ils ne doivent pas simplement s’en tenir à un rôle de gestion, de contrôle, de fixation de normes et de production de rapports généralement paralysants.
Moyennant quoi, les réformes en cours sont heureuses et les services font de leur mieux pour qu’elles réussissent. Il me revient, au nom de mon groupe, de faire preuve de la même sagesse que la commission des finances en préconisant l’adoption de ces crédits.
MM. Jacques Mézard, Jean-Claude Requier et Jean-Pierre Moga applaudissent.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la mission « Administration générale et territoriale de l’État » représente, cela a été dit, près de 3 milliards d’euros, soit une hausse de 3 % par rapport à 2018, et ce avant tout en raison des prochaines élections européennes. D’ailleurs, sans m’étendre davantage sur le sujet, je soulignerai que le contexte actuel des contrôles des comptes de campagne devrait inviter à interroger les prérogatives de la commission compétente en la matière.
Une fois neutralisée cette dépense du programme « Vie politique, cultuelle et associative », on observe une quasi-stabilité des crédits des autres missions : baisse de 2 % pour le programme « Administration territoriale » et hausse de 3, 9 % pour le programme « Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur », avec des transferts d’emplois d’un autre programme et des investissements comme la mise en œuvre du réseau radio du futur. On déplore de nouveau ici, malgré les explications qui avaient été fournies, la baisse des moyens du fonds interministériel de prévention de la délinquance.
Ces éléments confirment tout simplement le caractère non prioritaire de cette mission et, par conséquent, le choix d’une érosion inexorable des moyens consacrés à l’administration territoriale de l’État.
Ce mouvement de repli d’un État de proximité et progressivement « dématérialisé » interroge sur la doctrine territoriale de l’État et les missions du réseau des préfectures.
Sur cet État en peau de chagrin « dématérialisé », le plan Préfectures nouvelle génération, ou PPNG, avait repensé, je le rappelle, les modalités de délivrance des titres aux usagers en mettant en place une dématérialisation des procédures, avec comme bilan la suppression de 1 300 ETP entre 2016 et 2018 et de 200 autres à prévoir pour 2019.
Certes, la numérisation est nécessaire, je m’inscris dans la continuité de ce qui a déjà été dit, pour moderniser notre État, pour l’adapter à une transformation de l’environnement et sécuriser les titres. Cela étant, des difficultés techniques évidentes se sont manifestées dans la mise en œuvre de cette numérisation, peut-être en raison d’une phase d’expérimentation trop courte, ce qui a non seulement affecté la qualité du service rendu aux citoyens, mais a également terni l’image de l’État.
Les nombreux dysfonctionnements informatiques du système d’information des certificats d’immatriculation des véhicules et du site internet de l’Agence nationale des titres sécurisés, l’ANTS, ont conduit à une explosion du nombre d’appels à cette agence, des blocages de dossiers, avec des conséquences fâcheuses, notamment aux niveaux professionnel et personnel, et parfois, je le rappelle, la condamnation de l’État.
Des mesures d’adaptation ou correctives ont été apportées, comme le renfort de téléconseillers à l’ANTS, dont le nombre est passé de 48 en 2017 à 175 en 2018, avec l’effet réussi d’avoir impacté l’ambition de réduction budgétaire initiale.
La numérisation, c’est très bien ; faire l’impasse sur la fracture numérique, ça l’est légèrement moins.
S’il est nécessaire de prendre totalement en compte cette fracture et, pour rappeler ce joli terme d’« illectronisme », il faut néanmoins avoir conscience que la dématérialisation complète des services administratifs d’ici à 2022 posera des difficultés, notamment au regard du principe républicain d’égalité devant le service public.
Le Défenseur des droits, qui a fait l’objet de plusieurs milliers de saisines sur le sujet, a dénoncé « les nombreuses atteintes aux droits d’usagers insuffisamment informés en amont de la réforme, trop peu accompagnés une fois celle-ci généralisée et dont les difficultés particulières [d’accès et de maîtrise d’internet] n’ont pas été prises en compte. » Pour rappel, 27 % des Français sont toujours sans accès à internet et 33 % maîtrisent peu cet outil.
Nous partageons bien entendu les inquiétudes du Défenseur des droits sur ces points. Sa suggestion d’introduire une clause de protection des usagers serait une bonne chose. C’est pourquoi nous proposerons d’amender les crédits de la mission.
Par ailleurs, quelle est la doctrine territoriale de l’État ? N’assiste-t-on pas à une inadéquation entre moyens et ambitions ?
La délivrance des titres sécurisés, au cœur du plan Préfectures nouvelle génération, amène à porter un débat de fond sur les missions de l’État dans les territoires. Alors que le PPNG visait à redéployer des emplois sur quelques priorités, les difficultés rencontrées ne l’ont pas permis. La Cour des comptes souligne surtout le renforcement d’autres missions : la lutte contre le terrorisme, la prévention de la radicalisation et la réforme du droit d’asile.
Dans la foulée du rapport Action publique 2022, le Premier ministre a signé deux circulaires pour donner un nouvel élan à la déconcentration, qui soit marqué par une volonté de proximité avec les citoyens et par un exercice des missions prioritairement au niveau départemental, voire infradépartemental.
Si l’on ne peut s’opposer à cet objectif, l’érosion progressive des moyens de l’administration territoriale laisse songeur quant à sa concrétisation, à plus forte raison avec la suppression annoncée de 50 000 postes de fonctionnaires dans le cadre d’Action publique 2022.
En outre, cette affirmation d’une nouvelle déconcentration pose la question de l’adaptation de l’État à l’organisation territoriale et décentralisée de la République, essentiellement sur deux points.
Le premier concerne le contrôle de légalité et l’ingénierie territoriale.
Le Gouvernement a affirmé sa volonté en matière d’ingénierie territoriale. Je pense, par exemple, à l’Agence nationale de la cohésion des territoires. Dans le même temps, la Cour des comptes estime « souhaitable » la fin de ces missions.
En matière de contrôle de légalité, on constate un resserrement du nombre d’actes à transmettre et, surtout, une priorisation des actes à contrôler, inégale entre les préfectures. Dans son rapport de 2016, la Cour des comptes relevait comme facteur explicatif le manque de temps et d’expertise des agents, lié à une perte d’effectif.
Le second point, enfin, porte sur les doublons entre l’État et les collectivités locales.
Le Premier ministre a demandé aux administrations de « clarifier le rôle de chacun et d’aller au bout du partage des compétences ». Or, pour reprendre une remarque de nos collègues Marie-Françoise Perol-Dumont et Éric Doligé, il y a une tendance quasi naturelle de l’administration déconcentrée à pratiquer l’interventionnisme « touche-à-tout » alors qu’elle n’en a plus les moyens.
Cette « clarification des missions » devait reposer, dès la rentrée de septembre 2018, sur une concertation pour une prise de décision à la fin de l’année. Espérons que le climat entre les élus locaux et le Gouvernement se réchauffe et que le mouvement de recentralisation qui est à l’œuvre depuis quelque temps laisse la place à un recentrage de l’État sur ses missions essentielles.
Pour conclure, je rappellerai juste que, depuis la loi du 28 pluviôse an VIII, date de la fondation de l’institution préfectorale, les préfectures et les sous-préfectures étaient avant tout des cuisinières et des drapeaux. En l’état actuel des choses, les cuisinières sont parties, et les drapeaux disparaissent peu à peu de la vie de nos concitoyens, alors même que ceux-ci les réclament comme nous le montre l’actualité.
Monsieur le président, monsieur le ministre, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, d’un exercice à l’autre, les crédits de cette mission connaissent d’importantes variations conjoncturelles, rythmées notamment par le calendrier électoral. Ils retracent surtout des évolutions plus profondes, dont l’esprit semble partagé et perpétué par les gouvernements successifs.
Car, si les acronymes changent – RGPP, PMMS, RéATE et désormais PAP 2022 –, les mêmes logiques sont à l’œuvre. Les grandes orientations budgétaires ont été rappelées : les crédits totaux de la mission augmentent de 3 % pour atteindre 2, 84 milliards d’euros.
Je voudrais évoquer, tout d’abord, le programme 232, « Vie politique, cultuelle et associative », doté de 207 millions d’euros, en particulier les crédits de l’action n° 02, Organisation des élections. Ces crédits étant directement corrélés au cycle électoral, leur augmentation de 81 millions d’euros est liée à la perspective des élections européennes de mai prochain.
Je profite de cette tribune pour rappeler, comme nous le faisons régulièrement, l’insuffisance de la subvention versée aux communes pour compenser les frais engendrés par l’organisation des élections. Peut-être serons-nous entendus une prochaine fois.
Je tiens également à rappeler l’opposition des membres du groupe du RDSE au projet de ne distribuer la propagande électorale que sous sa seule forme dématérialisée. Nous aurons l’occasion d’en reparler dans le cadre de la réforme institutionnelle, étant entendu que « l’illettrisme numérique » devient une véritable question à l’heure du tout-numérique.
Les autres actions de ce programme demeurent quant à elles stables, à l’exception de celle qui est destinée à financer la Commission nationale des comptes de campagnes et des financements politiques, en légère diminution et dont les ETP sont gelés. Cette évolution étonne, alors même que les prérogatives et points de vigilance de cette commission ont été accrus dans le cadre de la loi pour la confiance dans la vie politique.
Je ne m’attarderai pas sur le programme 216, dont les crédits bénéficient d’une hausse de 3, 9 % et qui englobe l’administration centrale, la transformation numérique et les affaires immobilières.
J’en viens au principal programme de la mission, le programme 307, qui regroupe les moyens alloués au réseau préfectoral. Ses crédits sont en diminution de 2 %, à 1, 66 milliard d’euros. La programmation à moyen terme de cette mission confirme un fléchissement continu, bien que, comme l’a rappelé M. le rapporteur spécial, cette trajectoire n’ait pas été totalement respectée.
Il en ressort que l’administration territoriale de l’État sera amenée, dans les prochaines années, à se réduire, encore et encore. Vous comprendrez que cela nous interroge, d’autant que, j’y insiste, nous tenons au réseau des préfectures et des sous-préfectures. Quand un nouveau sous-préfet arrive dans mon arrondissement, je lui dis : « Le seul moyen de défendre les sous-préfectures, c’est de faire travailler les sous-préfets. »
Rires.
Sans surprise donc, si les crédits de personnels sur l’ensemble de la mission sont stables, ils sont en diminution de près de 32 millions d’euros dans le programme 307.
Ce projet de loi de finances marque ainsi l’aboutissement du plan Préfectures nouvelle génération, ou PPNG, engagé en 2016. Cette réforme d’envergure repose, en matière de délivrance des titres, sur deux piliers, à savoir la généralisation des procédures dématérialisées et une refonte des modalités de demande et d’instruction, via la création d’une cinquantaine de centres d’expertise, les CERT.
Dans son rapport pour avis, notre collègue Pierre-Yves Collombat met en lumière certains dysfonctionnements ayant occasionné d’importants délais de délivrance de titres – je pense bien sûr aux cartes grises. Ils ne sont pas nouveaux !
Il nous interroge aussi sur l’impact de ces réformes sur le service rendu à nos concitoyens et sur la nature même des relations entre le citoyen et l’administration.
Dissipons tout malentendu : oui, la dématérialisation des procédures constitue un outil privilégié de simplification des démarches pour la majorité des usagers. Elle est une véritable source d’optimisation du service public. Mais on peut s’inquiéter de l’accès équitable de tous les citoyens aux services de l’État ; je pense notamment aux populations fragiles, celles qui sont frappées par l’illettrisme numérique dont je parlais. Encore faut-il des réseaux pour que les ordinateurs fonctionnent.
À cet égard, le Défenseur des droits a relevé, dans sa décision de septembre, une série d’atteintes aux droits des usagers du service public. En attendant, le mouvement de réduction tendancielle des plafonds d’emplois se poursuit. Sur la période 2016-2018, le PPNG se traduit par la restitution de 1 300 ETP. Ces suppressions affectent principalement les échelons départemental et infradépartemental, accentuant le processus de lente dévitalisation de ce réseau et la régionalisation de l’administration.
Je conclus, monsieur le président, puisque mon temps est presque écoulé. En dépit des quelques réserves que je viens de présenter, les membres du groupe du RDSE voteront les crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l’État ».
Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, ainsi que sur des travées du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le plafond des crédits de paiement de la mission « Administration générale et territoriale de l’État » pour 2019, corrigé des mesures de périmètre, serait de 2, 84 milliards d’euros. Ces crédits affichent une hausse de 3 % par rapport à 2018, pour peu, toutefois, qu’ils soient correctement exécutés, leur exécution en 2017 ayant, par exemple, donné lieu à des reports de charges sur 2018. Avec des écarts non négligeables par rapport aux plafonds, la loi de programmation pluriannuelle n’est pas respectée.
Le programme 307, « Administration territoriale », couvre le principal vecteur de l’action directe de l’État dans les territoires avec le réseau préfectoral. Il n’empêche que ce programme, de loin le plus important de la mission, atteste du lent et durable désengagement de l’État des territoires, puisque, sur dix ans, l’administration préfectorale a perdu, en moyenne, plus de 11 % – parfois plus à certains endroits – de ses personnels.
Dans le cadre du plan Préfectures nouvelle génération du quinquennat précédent, le Gouvernement s’est efforcé depuis plusieurs années, selon la formule habituelle, de recentrer les missions du réseau préfectoral sur des tâches supposées stratégiques : contrôle de légalité, conseil aux collectivités locales, coordination des politiques. Force est de constater, en pratique, de moins en moins d’accompagnement et de plus en plus de contrôle.
D’autres structures devaient alors servir à accueillir les services publics dans les territoires, qu’il s’agisse des maisons de service au public pour les opérateurs du service public – CAF, CPAM, URSSAF, Pôle emploi – et des maisons de l’État pour les services de proximité de l’État – directions départementales des territoires, des finances publiques, agences régionales de santé. Or, malgré le développement de ces structures, le maintien d’un niveau équivalent de services est souvent incertain.
En 2019, une baisse de 200 équivalents temps plein est prévue sur l’ensemble de la mission, principalement concentrée sur le programme 307. Cette baisse est inférieure à celle de l’année précédente, mais intervient dans un contexte marqué par un désengagement des préfectures de leur mission de guichet, notamment de la délivrance de titres sécurisés, et par une charge importante liée à l’accueil des étrangers. Cela peut justifier ce que j’appellerai les « maugréements », sans être pour autant le seul fait de ronchons !
Une des conséquences de cette baisse est l’augmentation du nombre de sous-préfectures dotées de moins de 10 emplois, passant de 58 à 76. Il est vrai que le réseau des sous-préfectures s’étiole, étant presque à l’état de quasi-léthargie.
Le redéploiement prévu des activités des préfectures vers des tâches plus « stratégiques » s’est heurté à des difficultés, notamment en raison du poids pris par le traitement des demandes de cartes grises, sur lequel a porté, de façon fort opportune, le travail du rapporteur spécial Jacques Genest et qui a parfois conduit au recrutement exceptionnel d’agents non titulaires. Il en est résulté que les emplois redéployables ont été moins importants que prévu, et les futures réductions d’effectifs ne laissent pas présager d’amélioration. On peut donc, à juste titre, s’interroger sur la doctrine territoriale de l’État.
Le programme 116, « Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur », connaît une hausse globale de ses crédits, mais celle-ci est principalement liée à une augmentation des crédits de personnel de l’administration centrale. Il est notable que ce programme est largement un « réservoir » de crédits, qui peuvent être affectés à d’autres missions, ce qui peut engendrer des problèmes d’identification de leur destination finale. Le rapporteur spécial a relevé en commission qu’il s’agissait d’un cas d’information budgétaire « particulièrement défectueuse ».
Je note également que le fonds interministériel de prévention de la délinquance verra ses moyens diminuer par rapport à l’année précédente.
Enfin, les dépenses d’action sociale du ministère de l’intérieur s’élèvent à 40 millions d’euros environ dans le programme 216. Elles ont effectivement été critiquées par la Cour des comptes dans son rapport public de 2017, qui comprend une partie intitulée L ’ action sociale au ministère de l ’ intérieur : une organisation complexe, des risques avérés, une efficacité contestable. La Cour pointe une concentration anormale en région parisienne, ce qui n’étonnera pas la plupart de nos collègues.
M. François Bonhomme. Monsieur le président, mes chers collègues, la mission « Administration générale et territoriale de l’État », pour l’exercice, par les citoyens, de leurs droits, est une mission essentielle, dont nous allons voter les crédits. Elle présente néanmoins un certain nombre de limites, qui ne sont pas toujours pour nous rassurer.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.
Je réitère mes propos : je ne réclame pas de réforme structurelle, mais la renaissance d’une organisation territoriale qui a fait la France. L’ingénierie publique mise en pièces depuis vingt ans pour cause d’entrave à la concurrence y a joué un rôle essentiel.
Souvenez-vous de quelques étapes de cette mise en pièces, qui vient de loin : la loi du 11 décembre 2001 – je ne citerai pas les coupables – portant mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier, dite loi MURCEF ; la création, puis la suppression, de l’assistance technique fournie par l’État pour des raisons de solidarité et d’aménagement du territoire, l’ATESAT ; les réformes successives décimant les services préfectoraux – ainsi encore, entre 2008 et 2012, les effectifs des directions départementales des territoires, les DDT, et des directions départementales des territoires et de la mer, les DDTM, chargées de l’ATESAT, ont diminué de 30 %.
Cela est d’autant plus fâcheux, comme le souligne l’Association des maires de France, l’AMF, et plus encore l’Association des maires ruraux de France, l’AMRF, que, outre le coût financier de cette privatisation de l’ingénierie publique dans un domaine aussi stratégique, les cabinets privés censés suppléer l’absence de l’État sont eux-mêmes largement absents des territoires. Quand ils sont présents, ils manquent souvent du savoir-faire et de l’expérience des ingénieurs des Ponts ou du Génie rural d’antan.
Certes, les élus ont fait face, se sont organisés. Les départements et les intercommunalités ont créé des services spécialisés, des sociétés d’économie mixte, des sociétés publiques locales, etc. Mais c’est loin d’être le cas partout et les intercommunalités, comme les départements, n’ont aucune obligation en la matière, et toutes ne se sentent pas investies par cette nouvelle mission.
Ces solutions restent généralement le fruit d’initiatives locales dont rien ne garantit la pérennité. De plus, je ne parle pas des risques de tutelle occulte sur les communes que l’existence de tels organismes peut parfois faire courir.
Certes, il arrive, comme je l’ai constaté dans le Doubs que, faute d’alternative départementale ou intercommunale, des préfets maintiennent à la force du poignet un service minimum d’ingénierie en direction des communes rurales. Là encore, il s’agit d’initiatives locales sans garantie de pérennité et qui se limitent essentiellement à l’instruction des dossiers.
Ce qui inquiète le plus, c’est que ces initiatives ne sont pas vraiment dans l’air du temps libéral, comme se charge de le rappeler la Cour des comptes, qui, comme on le sait, se préoccupe uniquement de bonne gestion et n’assure la promotion d’aucune politique, même libérale. Ainsi, dans son rapport thématique de décembre 2017 relatif aux services déconcentrés de l’État, relève-t-elle : « Bien que la mission d’assistance technique fournie par l’État pour des raisons de solidarité et d’aménagement du territoire – ATESAT – ait été supprimée, l’État tend paradoxalement à réinventer des missions de même ordre ».
La Cour constate que, dans les DDT et les DDTM, il s’agit « d’“occuper” – oui, occuper – une partie des agents qui géraient précédemment l’ATESAT, soit environ 1400 ETP ». Voilà une dénonciation au nom de la bonne gestion, qui impose la réduction des services territoriaux de l’État et la chasse aux doublons, avec des missions prétendument à la charge, depuis la loi NOTRe, des départements et des intercommunalités.
À la fin du rapport, cependant, la Cour vend la mèche : « Enfin, la conformité de certaines missions de conseil et d’ingénierie territoriale avec le droit européen de la concurrence et des aides de l’État est dans certains cas douteuse, exposant l’État à des risques de contentieux. » Ça, c’est le crime suprême !
L’origine de cette charge, vous le savez, c’est la directive d’orientation de mars 2016, puis la circulaire de juillet 2018 par laquelle l’État annonçait qu’il allait enfin se préoccuper d’ingénierie territoriale. Le problème, c’est que, depuis, l’Arlésienne territoriale manque toujours à l’appel, les seules actions observées depuis 2016 étant l’affectation à cette mission prioritaire de 25 postes seulement et un inventaire inachevé des moyens en ingénierie actuellement mobilisables par les préfets.
Est-ce donc avoir mauvais esprit de penser que l’annonce de la naissance prochaine d’une agence nationale de la cohésion des territoires, …
… dont on ignore d’ailleurs comment les actions s’articuleront avec celle des préfectures et des organismes de soutien départementaux existants, est un leurre destiné à faire patienter les élus locaux, avant de devenir un moyen de leur faire payer l’addition ?
M. Pierre-Yves Collombat. Monsieur le ministre, mes chers collègues, je ne vous étonnerai pas en vous disant que le groupe CRCE, pour toutes ces raisons et toutes celles que je n’ai pas eu le temps de vous exposer, ne votera pas les crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l’État » dans sa version 2019.
Applaudissements sur des travées du groupe Les Indépendants – République et Territoires, du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la mission « Administration générale et territoriale de l’État » représente 2, 84 milliards d’euros, avec trois programmes, comme cela a été rappelé par notre rapporteur spécial : le programme 307, à hauteur de 1, 65 milliard d’euros pour l’administration territoriale, le programme 232, avec 207 millions d’euros inscrits pour la vie politique, cultuelle et associative, et le programme 216, fixé à 976 millions d’euros pour la conduite et le pilotage des politiques de l’intérieur.
Dans le programme 307, on notera une perte d’emploi à hauteur de 1 300 ETP entre 2016 et 2018, dans le cadre du programme Préfectures nouvelle génération. On notera néanmoins une complexité certaine de la lecture du budget réservé à l’administration territoriale.
On constatera également une nouvelle baisse des effectifs du réseau préfectoral, avec la perte de 3 357 ETP entre 2007 et 2017. Pour 2019, les suppressions d’emplois prévues touchent principalement l’échelon départemental.
La réforme régionale avec la mise en place des grandes régions suscite des inquiétudes, notamment le risque d’éloignement par rapport aux réalités locales. Nous assistons à des fusions, à des jumelages d’arrondissements depuis 2016. Les élus locaux, les habitants restent toutefois très attachés à nos préfectures et sous-préfectures. Le département que je représente, les Ardennes, est un département frontalier : sa préfecture est à Charleville-Mézières et il a encore la chance de conserver trois sous-préfectures, à Sedan, Rethel et Vouziers.
Les préfets et les sous-préfets restent nos interlocuteurs, comme l’ensemble des personnels et des acteurs de proximité que nous soutenons. Il faut donc les défendre en conservant les moyens humains et en garantissant l’accès à tous à un État de proximité. C’est l’une des recommandations du rapporteur spécial, Jacques Genest.
Les maisons de l’État et les maisons de services au public permettent de préserver toutefois des accueils de proximité pour le compte des opérateurs et entreprises de services publics : La Poste, SNCF, CAF, CPAM, CARSAT, MSA, URSSAF, EDF, GRDF, Pôle emploi, etc.
L’administration préfectorale doit faire face à des missions sensibles, notamment l’accueil des étrangers, missions liées également à la sécurité des personnes et des biens, en partenariat avec nos services de sécurité intérieure, ceux de la gendarmerie nationale, de la police, les sapeurs-pompiers, sans oublier l’administration des douanes dont le rôle est important pour un département frontalier comme le mien.
Par ailleurs, j’évoquerai brièvement la gestion des titres sécurisés. C’est un sujet compliqué que je connais un peu de par la proximité géographique d’une partie de l’ANTS, qui a son siège dans les Ardennes, à Charleville-Mézières. La gestion des titres est une mission importante, car elle a pour objet de répondre aux attentes des usagers, l’ANTS ayant le statut juridique d’établissement public administratif. L’ensemble des usagers expriment des demandes fortes qui sont autant de préoccupations ; il convient de les soutenir efficacement en leur apportant des réponses utiles. Enfin, il faut aussi lutter contre la fraude, cela a été rappelé.
Pour toutes ces raisons, le groupe Les Républicains apportera son soutien aux crédits de cette mission.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe Union Centriste.
Monsieur le président, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, le budget du ministère de l’intérieur compte parmi les premières priorités du Gouvernement. Ses crédits progressent, à périmètre constant, de 3, 4 % dans le projet de loi de finances pour 2019, soit une progression de 575 millions d’euros.
Les crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l’État » sont eux-mêmes en nette augmentation, de 5, 6 %, soit 121 millions d’euros, pour atteindre 2, 2 milliards d’euros.
Peut-être moins souvent commentée ou analysée que les autres crédits dont j’ai la charge, cette mission budgétaire est pourtant à mes yeux – et à vous écouter, à vos yeux aussi – tout à fait fondamentale, et ce pour trois raisons, comme cela a été indiqué.
Elle comprend les crédits de l’administration centrale du ministère, indispensables pour venir en soutien et à l’appui de l’activité opérationnelle de nos forces. Elle abrite les crédits destinés au financement de la vie politique et à l’organisation des élections, qui sont si importants pour la vitalité de notre démocratie. Enfin, elle inclut le budget du réseau des préfectures et sous-préfectures. Je sais, pour avoir été élu local, pendant seize ans, d’une sous-préfecture – c’est la plus grande de mon département, mais elle reste une petite sous-préfecture –, combien ces missions sont fondamentales.
C’est tout particulièrement vrai à l’heure où le Premier ministre a souhaité ouvrir le chantier de l’organisation de l’administration territoriale de l’État, dont les préfets sont le cœur. J’y reviendrai en concluant mon propos.
Pour les crédits de l’administration centrale du ministère de l’intérieur, ce budget est résolument celui de la modernisation au bénéfice de toutes les composantes du ministère, dans une logique de transversalité et de mutualisation des ressources. Ces crédits augmentent de manière significative, à hauteur de 9 %, soit d’un peu plus de 40 millions d’euros. Cette augmentation correspond à des projets d’importance, qui sont désormais mûrs pour entrer dans leur phase opérationnelle. Je n’en évoquerai que quelques-uns.
Le premier concerne la Direction générale de la sécurité intérieure, la DGSI. Tout d’abord, les travaux d’aménagement nécessaires à l’accueil de 400 postes de travail seront réalisés sur le site de Neuilly en 2019, pour un montant de 20 millions d’euros. Il s’agit d’accompagner la montée en puissance de ce service de renseignement essentiel et, au-delà – c’est l’un des premiers engagements que j’ai pu prendre en tant que ministre de l’intérieur –, la création, plus que jamais d’actualité, d’un site unique pour la DGSI. Au total, 450 millions d’euros y seront consacrés d’ici à 2022. Je souhaite que les premières études soient lancées dès 2019 ; le budget que je vous propose aujourd’hui le permet.
Le deuxième projet que je souhaite évoquer est celui du réseau Radio du futur, annoncé par le Président de la République dans son discours aux forces de sécurité du 18 octobre 2017. Un montant de 22, 5 millions d’euros sera mobilisé pour engager la phase opérationnelle de ce projet, dont la réalisation est essentielle pour permettre la sécurisation des grands événements à venir, tels que les jeux Olympiques de 2024. Il figurait d’ailleurs parmi les atouts du dossier de candidature de Paris.
Le troisième projet d’importance est la mise en place d’un plan de renforcement de la sécurité des applications et systèmes d’information du ministère de l’intérieur. La sensibilité des champs d’intervention de mon ministère implique que nous disposions d’un système de protection du meilleur niveau. Sur ce sujet comme sur d’autres, le ministère n’a pas le droit à l’erreur : il y va de la confiance de nos concitoyens dans notre capacité à les protéger. En l’occurrence, il s’agit de données essentielles qui touchent à leur liberté. Il est prévu de consacrer 9, 5 millions d’euros à ce plan en 2019.
J’en viens à l’administration territoriale de l’État, sujet que j’aborderai trop rapidement, hélas, car j’ai mesuré l’importance que, comme moi, vous lui accordez.
Ce budget se maintient à 1, 2 milliard d’euros – il est, pour être parfaitement précis, en baisse de 8 millions d’euros. Un schéma d’emploi prévoyant la suppression de 200 effectifs sera appliqué ; ce niveau de réduction des effectifs est historiquement bas, et sans commune mesure avec les objectifs affichés à l’époque de la révision générale des politiques publiques, la RGPP. Ce schéma inclut un renfort de 50 personnels au titre des missions nouvelles des préfectures dans le domaine de l’évaluation de la situation des personnes se déclarant mineurs isolés.
Pour les personnels de préfecture, 2019 sera la première année de mise en œuvre du protocole parcours professionnels, carrières et rémunérations. À ce titre, 2, 7 millions d’euros de crédits supplémentaires sont prévus. En complément, le projet de loi de finances assure le financement de mesures indemnitaires.
En termes de missions, deux priorités se dégagent, à mon sens, pour les préfectures en 2019 : la prise en charge de la problématique de l’asile et du séjour et l’approfondissement de la réforme de l’organisation territoriale de l’État.
Dans le contexte migratoire que nous connaissons, caractérisé par une hausse très soutenue du nombre des demandes d’asile – il est en progression de 18 % sur les six premiers mois de 2018 par rapport à 2017, après avoir déjà augmenté cette année-là de 32 % par rapport à 2016 –, l’activité des services chargés de l’asile et des étrangers est, pour moi, une préoccupation de premier plan.
Les préfectures et leurs personnels sont toujours en première ligne dans ce domaine, au même titre que les agents de la police aux frontières, la PAF, de l’Office français de l’immigration et de l’intégration, l’OFII, et de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides, l’OFPRA. Leur implication a été déterminante pour atteindre l’objectif de tenir le délai cible de trois jours ouvrés pour l’enregistrement des premières demandes d’asile par les guichets uniques pour demandeurs d’asile. De même, l’engagement des personnels de préfecture a contribué à l’augmentation de 26 %, en 2018, du taux de transferts « Dublin » réalisés. Enfin, les personnels de préfecture préparent et appuient la mise en œuvre tant des retours volontaires, dont le nombre a crû de 32 % au cours du premier semestre de 2018, que des éloignements forcés, en augmentation de 14, 6 % sur la même période.
En 2019, les priorités s’étendront encore à de nouvelles missions. D’une part, il faudra réussir la mise en place de la contribution de l’État à l’évaluation de la minorité des personnes se déclarant mineurs isolés. C’est un engagement que nous avons pris envers les départements, et nous devons le tenir. D’autre part, il faudra mettre en œuvre les décisions du comité interministériel à l’intégration, qui comportent un important volet de mesures dont l’application sera déconcentrée aux préfets et qui représentent un total de 17 millions d’euros.
Je souhaite vraiment que les missions relatives à l’asile, au séjour et à l’intégration des étrangers soient considérées comme prioritaires, à l’instar des autres missions ainsi qualifiées dans le cadre du plan Préfectures nouvelle génération.
Ces services ont été renforcés : 170 emplois supplémentaires de titulaire ont été affectés aux guichets uniques pour demandeurs d’asile et aux services des étrangers, et 1 200 mois de vacataires ont été mobilisés en 2017 comme en 2018. En complément, j’ai demandé la mise en œuvre d’un plan pour renforcer l’attractivité des services des étrangers des préfectures. J’y tiens beaucoup, parce que je sais la difficulté du travail au quotidien dans ces services. Il est nécessaire de tenir compte de ces spécificités et de se donner les moyens d’agir en conséquence.
En ce qui concerne l’approfondissement de la réforme de l’administration territoriale de l’État, vous le savez, le Premier ministre a ouvert ce chantier au cours de l’été dernier. À mon sens, c’est une chance à la fois pour les préfets, pour le réseau des préfectures et pour celui des sous-préfectures.
En tant que ministre de l’intérieur, je mesure, comme vous, l’importance de la proximité assurée par le réseau des préfectures et des sous-préfectures, dont les 26 000 agents travaillent avec beaucoup d’implication.
Dès ma prise de fonctions, j’ai indiqué que le ministère et le réseau des préfectures et des sous-préfectures étaient clairement candidats pour être le pivot de cette réorganisation. Je l’ai annoncé devant la commission : le Premier ministre a accepté que nous menions la fusion des programmes 307 et 333. Souvent évoquée, jamais décidée, cette fusion sera mise en œuvre en 2019. Sur le plan budgétaire, 310 millions d’euros de crédits et 2 000 emplois viendront s’adjoindre au milliard d’euros de crédits et aux plus de 25 000 emplois déjà dédiés à l’administration territoriale dans le budget du ministère.
Évidemment, cette fusion doit se faire en bonne intelligence avec les autres ministères concernés ; il s’agit non pas qu’un ministère prenne le pas sur les autres, mais qu’un chef de file se dégage pour avancer sur ces sujets avec l’ensemble des acteurs, en particulier les élus.
Nous assurerons désormais la gestion des moyens de l’ensemble des administrations déconcentrées de l’État, ainsi que celle de leurs cadres, directeurs départementaux interministériels et secrétaires généraux pour les affaires régionales.
Trois préoccupations majeures guident notre réflexion.
La première, c’est la proximité. Le choix de renforcer l’échelon territorial de la région s’est fait au détriment du niveau départemental. Dès lors, comme l’a dit M. Dallier, nous avons perdu en proximité : nous devons impérativement renforcer celle-ci.
La deuxième préoccupation, c’est l’unité, objectif fondamental qui doit nous rassembler.
La troisième préoccupation, c’est la modularité. En effet, l’unité n’exclut pas la diversité, et de la modularité doivent naître des réflexions sur notre propre organisation.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je considère avec sérénité les évolutions qui s’annoncent. Je sais qu’elles n’affaibliront en rien le réseau des sous-préfectures. §Elles traduisent, à mon sens, la grande confiance que Gouvernement place, comme vous, dans les préfets et les préfectures.
J’aborderai très rapidement trois sujets complémentaires qui, bien que périphériques, n’en sont pas moins essentiels au regard des politiques publiques que nous menons.
Madame Goulet, la lutte contre la radicalisation est, je le rappelle, financée par les crédits du Fonds interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation, le FIPDR, qui est doté de 72, 9 millions d’euros. Cette année, nous avons mis en place le plan national de prévention de la radicalisation. Il comporte neuf nouvelles mesures, pour un budget en hausse de 133 %. Évidemment, nous poursuivrons cet effort.
Au-delà de la dimension budgétaire, ce qui importe, c’est de parvenir à travailler en horizontalité sur ce sujet dans les quartiers prioritaires ciblés, notamment dans les quartiers de reconquête républicaine, en réunissant autour de la table l’ensemble des acteurs : ceux de la sécurité, certes, mais aussi les maires, les représentants du département, de l’école, des mondes du sport et de la culture.
Concernant la lutte contre la fraude documentaire, madame Goulet, monsieur Richard, nous avons créé des équipes dédiées dans les quarante-sept centres d’expertise de ressources et de titres. Pour pouvoir engager des procédures judiciaires, il est en effet nécessaire d’accomplir, au préalable, un vaste travail de caractérisation.
Mme Nathalie Goulet opine.
Enfin, monsieur Richard, vous avez évoqué la société de confiance, qui est une absolue nécessité. À cet égard, je crois profondément en l’action des préfets, qui va monter en puissance dans les mois qui viennent : ils porteront ce discours de confiance, afin que nous puissions passer de la logique du contrôle – certes nécessaire – à celle de l’appui et de la confiance. J’ai consacré à cette question une grande partie de mon premier discours aux préfets, qui doivent être vus avant tout comme des facilitateurs, des aidants. Il faut faire confiance à l’intelligence territoriale, aux territoires et, en particulier, aux élus qui les représentent.
Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche et du groupe Union Centriste, ainsi que sur des travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. – M. Emmanuel Capus applaudit également.
Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l’État », figurant à l’état B.
En euros
Mission
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Administration générale et territoriale de l’État
Administration territoriale
Dont titre 2
1 481 418 343
1 481 418 343
Vie politique, cultuelle et associative
Dont titre 2
18 191 202
18 191 202
Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur
Dont titre 2
519 106 568
519 106 568
L’amendement n° II-444, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
En euros
Programmes
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Administration territoriale
dont titre 2
Vie politique, cultuelle et associative
dont titre 2
Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur
dont titre 2
TOTAL
SOLDE
La parole est à M. le ministre.
Cet amendement technique de minoration des crédits du programme 307, « Administration territoriale », vise à tirer les conséquences de décisions déjà prises.
Cet amendement est parvenu tardivement à la commission. De ce fait, nous aurions plutôt tendance à émettre un avis défavorable… Toutefois, dès lors qu’il ne s’agit somme toute que d’une affaire de vases communicants, nous nous en remettons à la sagesse de la Haute Assemblée.
L ’ amendement est adopté.
L’amendement n° II-289 rectifié bis, présenté par MM. Kerrouche, Sueur et Kanner, Mmes de la Gontrie et Harribey, MM. Durain, Marie, Fichet, Sutour, J. Bigot, Leconte et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
En euros
Programmes
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Administration territoriale
dont titre 2
Vie politique, cultuelle et associative
dont titre 2
Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur
dont titre 2
TOTAL
SOLDE
La parole est à M. Éric Kerrouche.
Cet amendement vise à augmenter de 6 millions d’euros les crédits du programme « Administration territoriale » afin d’améliorer l’accompagnement du public confronté à la dématérialisation des demandes de titres.
Le 3 septembre 2018, le Défenseur des droits a rendu un avis dans lequel il fustige la mise en œuvre de cette réforme : « Ces derniers mois, le Défenseur des droits a traité plusieurs milliers de saisines relatant les difficultés rencontrées avec l’Agence nationale des titres sécurisés, l’ANTS, qui remplace l’accueil auparavant assuré en préfecture ou sous-préfecture par des démarches en ligne. »
Cette dématérialisation a permis à l’État d’économiser 24 millions d’euros en supprimant 400 équivalents temps plein, mais cela ne peut pas se faire au détriment de la qualité du service aux administrés. Il faut tenir compte de la rupture numérique.
Dans cette perspective, cet amendement vise à maintenir 100 équivalents temps plein afin d’assurer un meilleur accompagnement du public. À cette fin, nous proposons de flécher 6 millions d’euros au profit de l’action n° 02 du programme 307 et de compenser cette mesure en réduisant du même montant les crédits du programme 216.
Il s’agit là d’un sujet d’importance, que l’ensemble des orateurs ont d’ailleurs mentionné. Le Défenseur des droits a en effet attiré l’attention des autorités sur les problèmes posés par les démarches à effectuer en ligne. Il me semble que les économies dégagées à ce titre sont bien plus importantes encore que ne l’a dit notre collègue. La commission émet un avis favorable sur cet amendement.
Je comprends la philosophie qui sous-tend l’avis du Défenseur des droits, mais celui-ci porte non sur la décision politique prise en 2015, mais sur la phase de démarrage de la procédure. Or, pour la plupart, les difficultés survenues à compter de mars 2017 ont été résolues.
Le secrétaire général du ministère de l’intérieur a répondu de manière très précise aux observations du Défenseur des droits. Je vous communiquerai cette réponse si vous le souhaitez, monsieur Kerrouche. L’ensemble des remarques formulées ont été prises en compte et les modifications nécessaires ont été apportées.
Pour ce qui concerne les moyens, votre demande me paraît satisfaite : en 2018, 90 agents supplémentaires ont été affectés aux centres d’instruction des demandes d’usagers, situés à Amiens, à Charleville-Mézières et à la préfecture de police. En outre, les effectifs de l’ANTS dédiés à la prise en charge directe des usagers ont été triplés. Ils ont ainsi été portés à 180 personnes.
La préoccupation que vous exprimez est donc également celle du Gouvernement. Pour garantir l’accompagnement des usagers dans les procédures dématérialisées, nous avons déployé 310 points numériques dans les préfectures et sous-préfectures, y compris dans des sites où l’accueil du public n’était plus assuré. Certes, la rupture numérique concerne de moins en moins d’usagers, mais elle demeure une réalité, non seulement dans le monde rural, mais aussi dans les villes.
En termes tant d’analyses techniques que de moyens humains ou de proximité, il me semble que nous avons déjà répondu à la demande que vous exprimez. Aussi, je vous invite à retirer votre amendement. À défaut, l’avis sera défavorable.
Je comprends tout à fait l’esprit de cet amendement.
Monsieur le ministre, le Défenseur des droits a appelé votre attention sur ce problème par un récent avis, mais de nombreux usagers qui sollicitent la délivrance d’un permis de conduire ou d’un certificat d’immatriculation de véhicule manifestent depuis longtemps leur mécontentement, lié au délai excessif de traitement de leur demande, à la fréquence des pannes informatiques ou à la difficulté de joindre les services de l’ANTS.
Voilà des mois que les élus ont donné l’alerte ! Les usagers n’ont pas été suffisamment informés en amont de la réforme et ils ont été trop peu accompagnés après la généralisation de celle-ci. A-t-on vraiment besoin du Défenseur des droits pour découvrir ces problèmes ?
Marques d ’ approbation sur les travées du groupe Les Républicains.
Il avait bien été souligné qu’il ne fallait pas dématérialiser une procédure sans laisser la possibilité de recourir à une alternative « papier » ou à une intervention humaine, faute de quoi l’usager perdrait tout moyen d’échanger avec l’administration en cas de bug informatique ou de perte de dossier.
Pardonnez mon mauvais esprit, mais j’estime que le Défenseur des droits ferait mieux de se pencher sur des questions laissées dans l’ombre : je pense à la discrimination que subissent les femmes dans certains cafés ou certains quartiers. Ce phénomène lui est signalé depuis plusieurs années, mais, étrangement, il reste sans réaction !
MM. Laurent Duplomb et Jackie Pierre applaudissent.
J’approuve la proposition de notre collègue Éric Kerrouche.
Monsieur le ministre, vous nous avez livré la version pour enfants des faits…
Mme Sophie Primas rit.
En réalité, les choses ne se sont pas passées exactement comme ça ! Ce n’est pas le Gouvernement qui a réagi, mais l’ANTS, qui, en catastrophe et pour sauver les meubles, a embauché environ 700 personnes… Et elle a bien fait, car pour en être réduits à saisir le Défenseur des droits d’un tel problème, il fallait vraiment que les gens ne sachent plus vers qui se tourner !
Un certain nombre de bugs ont certes été réparés, des mesures ont été prises et le gros des problèmes est peut-être derrière nous, mais tout n’est pas réglé !
Si la dématérialisation de la procédure de délivrance pour certains titres, comme les cartes d’identité, a réussi, c’est parce que l’on n’a pas supprimé tout interlocuteur humain pour le public. Pour aider ceux qui ne parviennent pas à maîtriser l’outil numérique, il faut conserver des personnels à la fois compétents en informatique et capables, le cas échéant, de reformuler les demandes pour faire avancer les dossiers.
En effet, il n’y a pas que les illettrés en informatique à être confrontés à des difficultés : la complexité des procédures pose des problèmes aux usagers.
Que faut-il faire pour être entendu ? Endosser un gilet jaune ? Accroître le nombre des points de contact et améliorer la qualité du service rendu, cela relève du bon sens et ne coûtera pas très cher.
Dans un département très rural comme le mien, il faut également prendre en compte le cas des personnes âgées qui ne sont absolument pas en mesure de naviguer sur l’internet. Pour ce public, les secrétaires de mairie jouent un rôle essentiel : ils constituent une interface humaine entre l’usager et la nouvelle technologie.
À mon sens, il est encore nécessaire de mener un travail d’adaptation dans un certain nombre d’endroits et à l’égard de certaines personnes. Non seulement les réseaux ne fonctionnent pas toujours très bien…
… – la fracture numérique reste une réalité –, mais aussi, et surtout, une partie de la population est complètement démunie face aux procédures dématérialisées.
Un certain nombre de nos concitoyens ont encore besoin de temps : pour l’heure, ils ne sont pas en mesure d’utiliser les nouvelles technologies.
La dématérialisation des procédures de délivrance des titres s’est faite très rapidement.
Auparavant, un accueil du public était assuré dans les préfectures et les sous-préfectures et les cartes d’identité étaient délivrées par l’intermédiaire des mairies, y compris dans les petites communes.
Désormais, les procédures sont complètement dématérialisées et, dans leurs rapports avec l’ANTS, de nombreux usagers se heurtent à des difficultés. Il est essentiel de conserver des interlocuteurs de proximité, y compris pour répondre au téléphone, or il serait envisagé de délocaliser des plateformes téléphoniques de l’ANTS en dehors de nos frontières, alors même que nous souhaitons le maintien des emplois dans nos territoires !
Enfin, j’approuve ce qui a été dit sur l’intervention du Défenseur des droits.
Les problèmes soulevés méritent une particulière attention ; il faut mettre l’accent sur la proximité, l’écoute et le dialogue.
On a réduit au fil du temps le champ d’intervention du personnel des préfectures. Monsieur le ministre, vous nous dites accorder beaucoup d’importance à la proximité, mais le service rendu à l’échelon local est de moins en moins bon. Je pense, en particulier, à la délivrance des cartes grises : pour un véhicule d’occasion, on peut attendre des mois, voire des années !
À mon sens, nous sommes devant un véritable paradoxe : comment voulez-vous que les Français comprennent que, d’un côté, on supprime des services de proximité et que, de l’autre, on augmente les rémunérations dans les cabinets ministériels ?
Par exemple, pour celui de M. Griveaux, elles passent de 295 530 euros à 550 000 euros, soit une augmentation de 86 % ; pour celui de M. Lemoyne, elles sont portées de 406 000 euros à 585 000 euros, soit une hausse de 47 % !
Comment expliquer aux « culs terreux », comme disait mon collègue Jacques Genest, qu’on leur supprime tous les services de proximité parce qu’ils coûtent trop cher quand les dépenses des cabinets ministériels augmentent dans des proportions faramineuses ?
Monsieur Kerrouche, l’amendement n° II-289 rectifié bis est-il maintenu ?
Bien entendu, je maintiens cet amendement, monsieur le président.
Je ne ferai pas miens les propos tenus par M. Bonhomme sur le Défenseur des droits, car cette institution joue un rôle important, notamment pour traiter des difficultés que les usagers rencontrent dans leurs relations avec l’administration.
Monsieur le ministre, il ne faut pas confondre dématérialisation et virtualité. D’une manière ou d’une autre, les services, même dématérialisés, doivent rester accessibles. En un sens, vous avez vous-même justifié cet amendement. Vous nous avez indiqué que 310 points de contact seront déployés dans les sous-préfectures et préfectures pour apporter une aide technique aux usagers.
Mais il s’agit ici de l’accompagnement humain dont ont besoin les personnes peu familiarisées avec les outils numériques : c’est là qu’est la difficulté ! L’aiguillage des crédits proposé au travers de cet amendement doit précisément servir à assurer cet accompagnement.
L ’ amendement est adopté.
Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l’État », figurant à l’état B.
Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix ces crédits, modifiés.
Les crédits sont adoptés.
Le Gouvernement remet au Parlement, au plus tard le 1er octobre 2019, un rapport dressant le bilan de la mise en œuvre du plan « préfectures nouvelle génération ». Ce rapport comporte notamment une évaluation de l’impact de cette réforme sur l’accomplissement des missions prioritaires confiées aux préfectures, sur les conditions de délivrance des titres, sur les modalités d’accueil des usagers ainsi que sur les mesures prises pour la gestion des ressources humaines.
L’amendement n° II-73, présenté par M. Genest, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Philippe Dallier, au nom de la commission des finances.
Cet amendement tend à supprimer l’article 71 quater, introduit par l’Assemblée nationale, qui prescrit au Gouvernement la remise d’un rapport dressant le bilan du plan Préfectures nouvelle génération.
Le rapporteur spécial de la commission des finances, Jacques Genest, s’efforce d’accomplir ce travail chaque année. Il ne voit donc pas l’utilité de demander un tel rapport au Gouvernement.
Le député Jacques Savatier, qui a fait adopter l’amendement introduisant cet article par l’Assemblée nationale, ne doit pas avoir lu le rapport de M. Genest…
Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.
Ayant donné un avis favorable à son amendement, je ne voudrais pas me déjuger devant le Sénat… Par cohérence, j’émets donc un avis défavorable.
L ’ amendement est adopté.
En conséquence, l’article 71 quater est supprimé.
Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l’État ».
Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à demain, samedi 30 novembre 2018, à neuf heures trente, quatorze heures trente et le soir :
Suite du projet de loi de finances pour 2019, adopté par l’Assemblée nationale (n° 146, 2018-2019) ;
-Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation (+ article 73) ;
- Justice ;
- Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales ;
- Compte spécial : Développement agricole et rural ;
- Défense.
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
La séance est levée à minuit.