La séance est ouverte à neuf heures trente.
Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
Monsieur le président, à la suite d’une erreur matérielle intervenue lors des scrutins publics n° 90 et 91 du 23 janvier 2012, Mme Fabienne Keller figure parmi les sénateurs ayant voté contre les motions alors qu’elle ne souhaitait pas prendre part aux votes.
Acte vous est donné de cette mise au point, mon cher collègue. Elle sera publiée au Journal officiel et figurera dans l’analyse politique du scrutin.
La parole est à M. Gilbert Barbier, auteur de la question n° 1510, adressée à M. le ministre d’État, ministre des affaires étrangères et européennes.
Ma question, qui s’adresse à M. le ministre d’État, ministre des affaires étrangères et européennes, porte sur la politique transfrontalière et la compensation financière accordée par le canton de Genève à des communes situées en zone frontalière.
Au mois de juin 2010, la mission parlementaire sur la politique transfrontalière a rendu ses conclusions. Les parlementaires ont notamment mis l’accent sur la croissance continue du travail transfrontalier, le nombre de salariés concernés ayant plus que doublé en vingt ans, et sur la nécessité d’apporter une réponse aux stratégies de pays voisins qui, par des statuts juridiques et fiscaux particulièrement attractifs et par un démarchage offensif, réussissent à concentrer l’activité économique sur leur sol en externalisant sur le territoire français les charges liées au logement, à l’éducation et à la formation, ainsi qu’à l’accompagnement social de leurs salariés.
Un certain nombre de nos collègues parlementaires ont, à plusieurs reprises, attiré l’attention sur la situation du département du Jura, frontalier avec la Suisse, qui est confronté à cette évolution. Plusieurs communes ont vu le nombre de frontaliers exerçant leur activité dans le canton de Genève augmenter d’une manière significative ces dernières années.
Cette attractivité pèse sur le marché immobilier et sur les budgets de ces communes. Or ces dernières ne bénéficient pas de la compensation financière accordée par le canton de Genève à nombre de communes des départements de l’Ain et de la Haute-Savoie en raison des charges publiques qu’elles supportent.
C’est pourquoi il paraîtrait équitable de procéder à la révision des accords bilatéraux franco-suisses signés le 29 janvier 1973 en étendant cette disposition aux communes jurassiennes concernées.
Monsieur le secrétaire d’État, je souhaiterais connaître la position du Gouvernement sur ce problème qui a déjà été évoqué plusieurs fois. J’aimerais notamment savoir quelles suites ce dernier compte réserver aux différentes propositions émises par la mission parlementaire, et principalement s’il entend répondre à l’attente des communes jurassiennes.
Monsieur le sénateur, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser M. le ministre d’État, ministre des affaires étrangères et européennes, qui ne peut malheureusement être présent au Sénat ce matin.
En ce qui concerne les suites données à la mission parlementaire, j’ai le plaisir de vous confirmer que, à l’issue de la remise du rapport, en juin dernier, une réunion interministérielle a été organisée afin de décider des suites à donner à ce document. Il a également été demandé à la Délégation à l’aménagement du territoire et à l’action régionale, la DATAR, de procéder à une étude approfondie des propositions en liaison avec les départements ministériels concernés. Des groupes de travail ont par la suite été créés afin de dégager les modalités de leur application dans les domaines de la compétitivité économique, des services au quotidien et de la gouvernance de la politique transfrontalière. Différentes pistes sont encore à l’étude ou en cours de finalisation.
Par ailleurs, concernant la répartition de la compensation financière accordée par le canton de Genève à des communes françaises transfrontalières, la question de l’imposition des travailleurs frontaliers est régie, comme vous le savez, par deux accords, différents selon les cantons dans lesquels ces travailleurs exercent leur activité.
Le cas général est l’application de l’accord relatif à l’imposition des rémunérations des travailleurs frontaliers de 1983. Celui-ci prévoit que les revenus de l’activité des frontaliers qui résident en France et qui travaillent dans les cantons de Berne, Soleure, Bâle-Ville, Bâle-Campagne, Vaud, du Valais, de Neuchâtel et du Jura sont imposables en France sur la base du salaire suisse, moyennant une compensation au profit de la Suisse de 4, 5 % de la masse totale des rémunérations brutes des travailleurs salariés.
Le canton de Genève, quant à lui, impose à la source les revenus des travailleurs frontaliers et, conformément à l’accord de 1973, accorde une compensation financière au Trésor français, fixée à 3, 5 % de la masse salariale brute. L’accord prévoit le reversement de cette compensation aux départements de l’Ain et de la Haute-Savoie, directement affectés du fait de leur proximité avec le canton de Genève, et ces derniers créditent eux-mêmes les communes bénéficiaires.
L’extension de ce système à d’autres collectivités pourrait, en tout état de cause, être envisagée dans la mesure où un nombre important de travailleurs frontaliers y résideraient. Si les collectivités locales concernées pouvaient faire parvenir au Gouvernement des données précises en la matière, il serait alors possible à ce dernier de se pencher précisément sur cette question.
Monsieur le secrétaire d’État, je vous remercie de votre réponse.
Il est un peu curieux de demander à ces communes d’entreprendre une démarche, alors qu’elles ont déjà sollicité le Gouvernement à plusieurs reprises sur ce point. Si elles doivent fournir un état précis de leur situation, elles le feront, même si je ne vois pas précisément à qui chaque commune doit s’adresser. Ce problème devrait plutôt, à mon avis, être appréhendé de manière générale pour toutes les communes jurassiennes qui sont concernées.
La parole est à M. Jean-Jacques Lasserre, auteur de la question n° 1519, transmise à M. le ministre d'État, ministre des affaires étrangères et européennes.
Monsieur le secrétaire d’État, je souhaite attirer votre attention sur le processus de paix engagé au Pays basque.
Depuis de nombreuses années, le Pays basque sud – régions de Biscaye, d’Alava et de Guipúzcoa – connaît une situation politique empreinte de violence. Cette situation est la résultante d’une histoire douloureuse qui a marqué l’ensemble du Pays basque, de la péninsule ibérique et des pays voisins. Cette situation n’est pas sans conséquence pour le Pays basque nord, pour le département des Pyrénées-Atlantiques et, bien entendu, pour la France.
Ces derniers mois, des initiatives de caractère exceptionnel ont été prises pour engager un processus de paix.
Des événements de première importance se sont déroulés, comme la Conférence internationale de Saint-Sébastien en octobre dernier, en présence de grands témoins, notamment M. Kofi Annan. L’ETA a confirmé d’une façon solennelle sa volonté de déposer les armes.
Monsieur le secrétaire d’État, le Gouvernement ne peut laisser passer ce moment exceptionnel sans réagir, car ce conflit a ensanglanté le Pays basque.
On ne peut évidemment omettre les centaines de victimes, de vies anéanties. Ceux qui construiront la paix ne devront jamais les oublier.
De même, on ne peut laisser une partie de la jeunesse du Pays basque poursuivre des combats sans issue.
Depuis près de deux ans, des centaines d’élus et d’acteurs importants de la vie du Pays basque d’Espagne goûtent enfin à une vie libre sans garde du corps. Il faut que cesse la pratique de l’impôt révolutionnaire.
Ne commettons pas l’erreur de considérer que ces problèmes ne nous concernent qu’indirectement. La continuité géographique est une réalité.
Beaucoup plus importants, la réalité culturelle du Pays basque et le sentiment d’appartenance à une même communauté nous obligent à la solidarité.
Nous entrons ainsi dans une phase où les gouvernements français et espagnol doivent prendre leurs responsabilités et accompagner ce processus de paix. Souhaitant vivement que la France s’engage dans ce processus de paix, je vous demande donc, monsieur le secrétaire d’État, quelle posture le gouvernement français entend adopter face à ce sujet primordial pour l’avenir du Pays basque et de la France.
Monsieur le sénateur, je vous prie de bien vouloir excuser M. le ministre d’État, ministre des affaires étrangères et européennes, qui ne peut malheureusement être présent au Sénat ce matin.
L’ETA a annoncé, le 20 octobre 2011, « l’arrêt définitif de son activité armée ». Il s’agit là d’une étape importante qui doit mener à une disparition totale de la violence au pays basque.
Cette décision de mettre un terme à la violence est le résultat d’une coopération fructueuse des forces de sécurité françaises et espagnoles qui a permis d’obtenir des résultats sans précédent. Au cours de ces dix dernières années, de multiples arrestations ont en effet été réalisées de part et d’autre des Pyrénées. En 2010, 138 personnes liées à l’ETA ont été interpellées, dont 28 en France. En 2011, 48 personnes liées à l’ETA ont été interpellées, dont 27 en France.
Les autorités espagnoles nous sont très reconnaissantes de cette étroite coopération, comme en a témoigné la remise par le roi d’Espagne, le 16 janvier, du collier de la Toison d’or au Président de la République. L’attribution de cette distinction très prestigieuse visait très largement à remercier notre pays pour son aide dans la lutte contre le terrorisme.
Notre vigilance doit néanmoins rester intacte. Le groupe terroriste n’a en effet pas annoncé sa dissolution ni rendu ses armes. Il reste opérationnel, ainsi que l’a démontré l’arrestation dans l’Yonne, le 14 janvier 2012, de trois de ses membres qui étaient armés et disposaient de matériel susceptible de fabriquer des explosifs.
Je rappelle que ce groupe terroriste a assassiné 829 personnes, dont 750 après l’établissement de la démocratie en Espagne en 1978. La dernière victime de l’ETA se trouve être un policier français, le brigadier Jean-Serge Nérin, tué par des membres de l’ETA à Dammarie-les-Lys le 16 mars 2010. L’une des personnes arrêtées dans l’Yonne le 14 janvier dernier est fortement suspectée d’avoir participé à l’assassinat de Jean-Serge Nérin.
Le Président de la République, lors de son déplacement à Madrid, le 16 janvier dernier, a réaffirmé l’engagement solennel de la France à poursuivre, aux côtés de l’Espagne, « le combat contre la barbarie terroriste ».
Nous ne baisserons jamais la garde. Le gouvernement français continuera de soutenir sans relâche le gouvernement espagnol dans ses efforts pour aboutir à une fin définitive de la violence au Pays basque.
Monsieur le secrétaire d’État, j’ai écouté très attentivement votre réponse, qui, s’agissant de la lutte contre l’ETA, me satisfait bien entendu. Je partage en effet totalement la position du Gouvernement à cet égard, notamment s’agissant de sa collaboration avec le gouvernement espagnol.
Néanmoins, ma question de ce matin avait un autre objet : comment et avec quelle volonté le gouvernement français compte-t-il s’engager dans la construction du processus de paix au Pays basque ? La lutte contre l’ETA, c’est une chose, l’élaboration du processus de paix en est une autre…
Nous ne pourrons évidemment pas gommer les événements passés, mais nos responsables doivent être prêts à saisir la main tendue par des hommes de bonne volonté, afin de sortir enfin d’un conflit qui ne peut plus durer. J’attends donc une réponse de votre part sur le véritable objet de ma question, la participation du gouvernement français à l’élaboration du processus de paix.
La parole est à Mme Claudine Lepage, auteur de la question n° 1517, adressée à M. le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative.
La question orale que je souhaite poser à M. le ministre de l’éducation nationale porte sur l’avenir des sections internationales du lycée Honoré-de-Balzac.
Madame la secrétaire d’État, je vous prie tout d’abord de bien vouloir adresser mes très sincères condoléances à M. le ministre de l’éducation nationale, pour le drame personnel qui l’afflige.
La France compte plusieurs lycées au statut d’établissement international comme, par exemple, celui de Saint-Germain-en-Laye. Toutefois, sa capitale ne dispose que d’un lycée comportant six sections internationales : la cité scolaire Honoré-de-Balzac, qui bénéficie d’une riche mixité sociale. En effet, sur ses 2 000 élèves, 50 % sont inscrits en section internationale et 50 % des inscrits en section générale sont des enfants du secteur. Les sections internationales offrent une ouverture sur des civilisations différentes à des élèves qui sont imprégnés parfois d’une double, voire d’une triple culture, qu’ils soient d’origine étrangère, qu’ils aient vécu à l’étranger ou qu’ils soient issus de familles expatriées.
Dans ces sections internationales, les cours sont assurés par des enseignants français, recrutés sur profil, et par des enseignants étrangers, intervenant dans leur langue maternelle pour des enseignements spécifiques.
Ainsi, contrairement aux sections européennes, ces sections internationales présentent certes un enseignement renforcé en langues, mais surtout une pédagogie culturellement différenciée. C’est là que réside tout leur intérêt.
Or, malgré l’atout que représente cet enseignement spécifique, qui intègre une grande hétérogénéité sociale alliée à une ambiance multiculturelle, une lourde incertitude pèse sur son avenir. Du reste, de fortes tensions, concrétisées par des mouvements de grève des professeurs et des élèves, se font jour depuis plusieurs mois.
L’inquiétude est manifeste chez les parents d’’élèves, lesquels s’interrogent sur l’insuffisance des moyens dont dispose l’établissement qui, malgré sa localisation, ne bénéficie pas du programme des écoles, collèges et lycées pour l’ambition, l’innovation et la réussite, ou dispositif ECLAIR.. Ils s’alarment également des problèmes de personnel – manque de postes, non-remplacement de personnel, professeurs de sections internationales non recrutés sur un profil particulier propre à un enseignement pluriculturel, contrairement à ce que les textes commandent.
Au regard de l’absence de statut de lycée international de l’établissement, la pérennité même des sections internationales est en question, puisque, si elles étaient « diluées » dans les filières générales françaises, celles-ci perdraient de facto toute spécificité pédagogique et ne seraient plus que des sections à enseignement linguistique renforcé.
Madame la secrétaire d’État, dans ce contexte, qu’en est-il des assises sur l’avenir de la cité scolaire – s’agissant notamment de sa dimension internationale – demandées depuis longtemps par les parents d’élèves ?
Madame la sénatrice, je transmettrai naturellement vos condoléances à Luc Chatel et à sa famille, dans un moment qui, pour eux, n’est que douleur et souffrance.
À Paris, l’ouverture internationale et le développement des pratiques en langues étrangères sont une priorité du projet académique. À ce titre, la cité scolaire Honoré-de-Balzac fait l’objet d’une attention toute particulière de la part des autorités académiques.
Depuis leur création en 1988, les sections internationales au sein de la cité scolaire Honoré-de-Balzac ont vu leur nombre s’accroître : il en existe à présent six, en allemand, anglais, arabe, espagnol, italien et portugais.
Parallèlement, le nombre d’élèves relevant de ces sections a augmenté, passant de 418 en 2001-2002 à 842 en 2011-2012. Cette évolution a toujours été soutenue par l’académie de Paris, et il n’est nullement question de remettre en cause l’existence des sections internationales, dont l’efficacité est reconnue de longue date.
J’ajoute que tous les élèves des sections internationales préparent le diplôme national du brevet international et l’option internationale au baccalauréat.
Ainsi, le lycée Balzac constitue bien un pôle d’attractivité à vocation internationale au cœur même de notre capitale, et il a vocation à le demeurer.
Madame la sénatrice, vous avez évoqué le dispositif ECLAIR, qui a vocation à répondre aux situations spécifiques des établissements dont les résultats et le climat scolaire sont fortement dégradés. Ce n’est absolument pas le cas du lycée Balzac. Pour autant, soyez assurée que cette cité scolaire bénéficie de toute l’attention des autorités académiques, conscientes de ses spécificités.
Concernant les moyens accordés aux sections internationales de l’établissement, la dotation spécifique attribuée à ces sections pour l’année 2011-2012 n’a pas été modifiée. Ainsi, les moyens ont été maintenus pour les six sections internationales en collège et en lycée.
Concernant les questions de personnel, les professeurs des sections internationales sont bien recrutés sur un profil particulier pour chaque discipline spécifique et dans le respect des textes relatifs à l’organisation des sections internationales. Par ailleurs, les rares absences des enseignants ont été rapidement prises en compte et les remplacements ont été organisés.
Si l’établissement a traversé une période de tensions à l’automne dernier, notamment en raison de problèmes de communication interne, vous reconnaîtrez sans doute, avec Luc Chatel et le ministère tout entier, que les autorités académiques en ont pris conscience et ont adopté les mesures adaptées en conséquence : la nomination d’un nouveau proviseur par intérim en décembre dernier a notamment permis de rétablir la sérénité. De surcroît, un travail de concertation a été engagé avec les enseignants et les représentants des parents d’élèves pour réfléchir au futur projet d’établissement en veillant à tenir compte des aspirations des élèves des sections internationales comme de ceux des sections générales.
Vous le constatez, madame la sénatrice, les autorités académiques sont pleinement mobilisées afin de soutenir et de promouvoir les sections internationales du lycée Honoré-de-Balzac.
Madame la secrétaire d’État, je vous remercie de ces précisions. Toutefois, vous mesurez que l’inquiétude des parents reste grande. En effet, depuis plusieurs années, un assez grand nombre de proviseurs se sont succédé : quatre ou cinq, si ma mémoire est exacte. En outre, vous avez évoqué les absences des professeurs, les troubles, les grèves… Bref, le climat est loin d’être serein.
Vous affirmez que nous sommes actuellement entrés dans une phase de concertation et que tout va s’arranger : je ne demande qu’à vous croire. Les parents d’élèves n’en sollicitent pas moins de manière récurrente la tenue d’assises sur l’avenir de la cité Honoré-de-Balzac : sur ce point, vous n’avez pas plus répondu à ma question que M. le ministre de l’éducation nationale, lors du débat budgétaire. Je le regrette vivement.
La parole est à Mme Christiane Demontès, auteur de la question n° 1515, adressée à M. le garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés.
Madame la secrétaire d’État, ma question porte sur les établissements publics d’insertion de la défense, les EPIDE.
Créés par voie d’ordonnance le 2 août 2005, ces centres participent d’une dynamique d’insertion ou de réinsertion. Sur la base du volontariat, ces structures socialisent, orientent et forment des jeunes volontaires. J’observe qu’à l’origine le Gouvernement avait annoncé l’ouverture de 80 établissements : or, à ce jour, nous n’en dénombrons que 20.
L’EPIDE apporte une réponse originale et adaptée pour une partie des jeunes. J’en veux pour preuve le taux de reclassement, pouvant atteindre 50 % voire 65 % dans nombre d’établissements. Il est donc impératif de consolider ces résultats. Malheureusement, telle n’est pas la réalité.
Ainsi, lors des débats relatifs à la loi n° 2011-1940 visant à instaurer un service citoyen pour les mineurs délinquants, le groupe socialiste, par les voix de Mmes Klès et Tasca, avait mis en exergue que ce texte de pur affichage ne visait rien d’autre que permettre le placement de mineurs délinquants dans des centres relevant de l’EPIDE.
Certes, le volontariat est également de mise, mais il s’inscrit dans le cadre soit d’une composition pénale, soit d’un ajournement de peine, soit d’un sursis avec mise à l’épreuve.
Je citerai, pour illustration, l’exemple du nouvel établissement de Meyzieu, commune située dans mon département, le Rhône. Non seulement ce centre remplacera les trois EPIDE d’Annemasse en Haute-Savoie, de Saint-Clément-les-Places dans le Rhône et d’Autrans dans l’Isère, mais il accueillera plus de 240 jeunes, pour une capacité d’accueil raisonnable que les professionnels estiment entre 120 et 180 personnes.
Ce regroupement est donc à contre-courant des politiques d’insertion et de prévention. Vous le savez, il est reconnu que plus une structure est petite, plus son degré d’efficacité est élevé, surtout dans ce domaine. De plus, la dimension de proximité, qui permettait à des jeunes de zones rurales de pouvoir intégrer ces établissements, disparaît.
Au-delà des problématiques liées à cette surpopulation, se pose la question de l’encadrement que les professionnels pourront assurer de ces deux catégories de populations, à savoir les jeunes adultes volontaires âgés de 18 à 25 ans et les mineurs délinquants. Sauf à faire l’amalgame entre jeunes en difficultés d’insertion et jeunes ayant eu affaire à la justice, ces deux populations ne sont pas assimilables.
Ainsi, n’assistons-nous pas à un dévoiement de la mission première des EPIDE ? Malheureusement je le crains, et ce constat est d’autant plus déplorable que les EPIDE apportent une réponse pertinente pour nombre de jeunes.
Madame la secrétaire d’État, ma question est simple : quelles dispositions comptez-vous adopter afin de garantir le maintien des principes fondamentaux qui gouvernaient jusqu’alors les EPIDE ?
Madame la sénatrice, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser Michel Mercier, qui ne peut être présent aujourd’hui au Sénat.
Comme vous l’avez rappelé, l’EPIDE a été créé par l’ordonnance du 2 août 2005 et se voit confier une double mission d’insertion sociale et professionnelle et de prévention de la délinquance. Cette mission concerne autant un public majeur que mineur, puisque la loi du 24 novembre 2009 a étendu le bénéfice du contrat de volontariat pour l’insertion aux jeunes âgés de 16 à 18 ans. Vous l’avez souligné, cette mission a également été élargie aux mineurs délinquants, par la loi du 26 décembre dernier.
Il s’agit donc non pas d’un dévoiement des missions de l’EPIDE mais d’un prolongement de ses attributions originelles. En effet, l’accueil des mineurs délinquants s’appuie sur le partenariat engagé depuis janvier 2010 entre l’EPIDE et la protection judiciaire de la jeunesse, pour la réintégration des jeunes majeurs qui, ayant purgé leur peine, souhaitent s’engager dans un projet de réinsertion professionnelle.
Ainsi, le public accueilli en EPIDE compte déjà 30 % de personnes qui ont été condamnées et 15 % de personnes sous suivi judiciaire. En outre, l’EPIDE n’accueillera qu’un très petit nombre de mineurs délinquants dans chacun de ses centres.
L’ensemble du public pris en charge, majeurs comme mineurs, délinquants ou non, bénéficiera du même traitement pour les activités collectives, à la différence près que les mineurs effectueront, de surcroît, dans le cadre d’un programme individualisé, un travail sur l’acte de délinquance qu’ils ont commis.
Le service citoyen qu’instaure cette loi suppose, bien évidemment, de renforcer le dispositif existant de l’EPIDE et d’abonder ses moyens en conséquence afin de créer progressivement de nouvelles places dédiées.
Dès le mois de février 2012, douze centres EPIDE accueilleront les premiers mineurs concernés. À cet effet, les personnels d’encadrement bénéficieront d’une formation spécifique afin de garantir une prise en charge rapide et efficace de ce public. Ce faisant, d’ici à juin 2012, l’ensemble des quinze centres pourront accueillir des mineurs délinquants.
En ce qui concerne le financement de ce nouveau dispositif, chacun des ministères concernés – les ministères de la défense, de l’emploi, de la ville et de la justice – participera à hauteur de deux millions d’euros.
Madame la sénatrice, je suis convaincue que nous devons donner à ces mineurs la possibilité de bénéficier d’une réinsertion.
Madame la secrétaire d’État, j’ai bien entendu votre réponse, dont les arguments sont sensiblement les mêmes que ceux qu’avaient développés vos collègues lors de l’examen du projet de loi visant à instaurer un service citoyen pour les mineurs délinquants, à la fin de l’année 2011.
Toutefois, je vous rappelle que nous avions alors, comme aujourd’hui, émis un certain nombre de doutes quant à la capacité des centres EPIDE à accueillir à la fois des jeunes volontaires, disposant d’un projet d’insertion sociale et professionnelle, et, dans le cadre d’une politique de prévention de la délinquance, des mineurs placés sous le contrôle de la justice pour avoir commis des infractions pénales.
Par ailleurs, je souligne la difficulté qu’éprouvent ces professionnels à prendre en charge ces jeunes délinquants, dont le suivi exige un accompagnement rapproché, dans la durée. À mes yeux, le mélange de ces deux publics apparaît comme une source de risques pour la réussite du parcours de ces jeunes.
Je prends acte de la volonté du Gouvernement d’abonder les budgets alloués à ces centres.
Vous affirmez, madame la secrétaire d’État, que douze établissements de ce type vont prochainement ouvrir leurs portes et qu’ils pourront accueillir des jeunes d’ici à juin 2012. Je ne peux toutefois m’empêcher d’avoir quelques doutes à ce sujet. J’insiste surtout sur la formation des professionnels et je demande qu’un bilan soit effectué dès la fin de l’année 2012, afin que nous puissions le cas échéant apporter à ce dispositif les correctifs nécessaires.
La parole est à M. Jean-Marie Bockel, auteur de la question n° 1518, adressée à M. le garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés.
Madame la secrétaire d’État, je souhaite vous interroger sur un problème lancinant de mise en œuvre de la loi du 5 mars 2007 réformant la protection de l’enfance.
Le premier projet de décret d’application de cette loi concerne la fixation par le juge de l’exercice du droit de visite dans un espace de rencontre dédié au maintien des liens entre parents et enfants, inscrit aux articles 373-2-1 et 373-2-9 du code civil. Ces lieux permettent notamment aux parents incarcérés de rencontrer leurs enfants.
La non-publication de ce décret est particulièrement préjudiciable au financement de ces espaces, dont les gestionnaires connaissent souvent des difficultés.
En effet, aucune modalité de financement n’ayant été prévue depuis l’adoption de la loi, certains espaces de rencontre ont déjà fermé, quand d’autres ont réduit leur activité ou instauré une liste d’attente, ce qui est vraiment regrettable pour les enfants et les familles concernés. Un dossier famille représente une mesure ordonnée par un juge aux affaires familiales pour six mois, renouvelable une fois ; le cadre juridique est donc très précis.
Les frais de fonctionnement de chaque espace de rencontre devraient être pris en charge conjointement par différents organismes financeurs tels que le ministère de la justice, le ministère des solidarités et de la cohésion sociale, les organismes sociaux et les collectivités territoriales, qui, fort heureusement, sont souvent très impliquées. L’ensemble de ces partenaires sont compétents sous forme d’un « coût mesure » arrêté chaque année.
Sur la base de l’adhésion à son code de déontologie, la Fédération française des espaces de rencontre regroupe 109 des 130 espaces de rencontre existant actuellement en France, répartis sur 62 départements. Elle dispose donc d’une bonne représentativité. En 2008, selon les informations collectées par cette fédération auprès de ses adhérents, 76 des lieux étudiés avaient permis que se réalisent plus de 63 000 rencontres impliquant 12 000 enfants. Ce dispositif, loin d’être marginal, constitue donc un élément essentiel du suivi familial et de la réinsertion future des personnes incarcérées.
Selon une estimation de cette même fédération, le coût total d’une mesure pour un espace de rencontre parents-enfants avoisine les 1 200 euros.
Un second décret d’application de la même loi, relatif aux espaces de rencontre destinés au maintien des liens entre un enfant et ses parents ou un tiers, est également en attente de publication au sein du ministère des solidarités et de la cohésion sociale. Il permettra d’encadrer juridiquement cette activité.
Aussi, je souhaite connaître les mesures que le Gouvernement envisage d’adopter afin de publier et de mettre en œuvre ces décrets d’application, eu égard à la nécessité d’assurer la pérennité de ces espaces de rencontre parents-enfants, dont je peux témoigner qu’ils jouent, à Mulhouse, un rôle essentiel.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser mon collègue Michel Mercier, qui ne peut être présent aujourd’hui au Sénat.
Comme vous l’indiquez, monsieur Bockel, la loi n° 2007-293 du 5 mars 2007 réformant la protection de l’enfance reconnaît aux espaces de rencontre une existence juridique. L’article 373-2-9 du code civil a ainsi été complété par un alinéa qui prévoit que le droit de visite, lorsque l’intérêt de l’enfant le commande, peut être exercé dans un espace de rencontre désigné par le juge.
Les espaces de rencontre sont préconisés dans toute situation où une relation enfants-parents – et/ou l’exercice d’un droit de visite – est interrompue, difficile ou trop conflictuelle.
Ces espaces répondent ainsi à certaines situations de divorce ou de séparation conjugale ou familiale. Les juges aux affaires familiales peuvent être prescripteurs de cette mesure au travers d’une ordonnance ou d’un jugement ; les parents peuvent aussi en être à l’origine.
Ces dispositifs répondent également à des situations de prises en charge dans le cadre d’un placement, suivies par le service social ou le juge des enfants.
Si la plupart de ces services ont un statut associatif, d’autres sont gérés par les caisses d’allocations familiales.
Toutefois, comme vous l’avez précisé, monsieur Bockel, la loi doit être complétée par des textes réglementaires permettant de mieux encadrer le dispositif. Un décret relevant du ministère des solidarités et de la cohésion sociale mettra en place l’encadrement administratif de ces structures. Ce premier texte conditionne la prise d’un second décret relevant, cette fois, du ministère de la justice et des libertés, qui fixera les règles procédurales applicables lorsque le juge aux affaires familiales recourt à ces espaces de rencontre. Le bon fonctionnement du dispositif des espaces de rencontre nécessite que les textes soient publiés en même temps, les deux décrets étant complémentaires.
Les services du ministère des solidarités et de la cohésion sociale ont été sensibilisés quant à l’importance d’avancer rapidement. Nous espérons que ces deux décrets pourront être publiés très prochainement.
En ce qui concerne les difficultés de financement des associations qui gèrent les espaces de rencontre, vous savez qu’elles ne résultent pas d’un désengagement du ministère de la justice et des libertés, monsieur le sénateur. Au contraire, ces dernières années, celui-ci a doublé son effort budgétaire en direction des espaces de rencontre, les crédits étant passés de moins de 1 million d’euros en 2003 à plus de 2, 4 millions d’euros aujourd’hui.
Tels sont les éléments de réponse que M. le garde des sceaux m’a chargée de vous apporter, monsieur le sénateur.
Nous n’avons évidemment aucune divergence sur le fond, madame la secrétaire d’État. Au demeurant, nul ne conteste l’intérêt de ces centres.
Le décalage entre l’augmentation du budget du ministère de la justice et le fait que, sur le terrain, les capacités de financement se réduisent s’explique probablement pour partie par l’augmentation du nombre de lieux de rencontre. Ces espaces connaissent en effet un franc succès.
L’on constate également un désengagement de la part de certains organismes sociaux comme la Caisse d’allocations familiales, la CAF, qui est en train de recentrer ses financements – le même problème se pose d’ailleurs dans le domaine de la petite enfance ou dans d’autres secteurs, dans lesquels les collectivités territoriales sont obligées de prendre le relais.
Les départements, qui sont également confrontés à de sérieuses difficultés financières, notamment avec le versement de l’allocation personnalisée d’autonomie, l’APA, ont aussi parfois tendance à se désengager ou à stabiliser leurs subventions.
En raison de l’augmentation de la charge, et malgré la stabilité des budgets, certaines associations gestionnaires se trouvent en grande difficulté, dans mon département comme ailleurs. Certaines sont même obligées de supprimer des emplois pour éviter le dépôt de bilan. Quant aux collectivités territoriales, dont les budgets sont très contraints, il leur est souvent impossible d’augmenter massivement leur participation.
Les décrets doivent donc paraître. Vous avez affirmé qu’ils seraient bientôt publiés, madame la secrétaire d’État ; je veux bien en accepter l’augure.
Toutefois, les pouvoirs publics doivent également engager un dialogue avec la Fédération, qui dispose d’une bonne vision d’ensemble, sur la manière dont les différents partenaires, et pas seulement l’État, peuvent concrètement assurer le financement de ces espaces de rencontre.
Quoi qu’il en soit, je vous remercie de votre réponse, madame la secrétaire d’État, et j’espère qu’elle nous permettra d’avancer sur un sujet qui devient de plus en plus sensible. On ne peut indéfiniment régler ce genre de problèmes avec la réserve parlementaire ou d’autres moyens d’urgence.
Mes chers collègues, avant d’aborder la question suivante, nous allons interrompre nos travaux quelques instants.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à dix heures dix, est reprise à dix heures quinze.
La parole est à M. Jean-Pierre Vial, auteur de la question n° 1501, adressée à Mme la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la liaison Lyon-Turin aura franchi une étape décisive en 2011, conformément à l’engagement pris par le Président de la République lors de sa venue à Chambéry à l’occasion du cent cinquantième anniversaire du rattachement de la Savoie à la France et réitéré par courrier au mois de juillet 2011.
Monsieur le ministre, la première étape a été constituée par l’accord intervenu entre vous-même et votre collègue italien, le 27 septembre dernier, sur la répartition du financement du tunnel de base.
Dans le prolongement de cet engagement, la Commission européenne a confirmé la liaison Lyon-Turin dans le réseau central de l’Union européenne en s’engageant à rendre éligible le tunnel de base à des financements européens jusqu’à 40 %, soit une majoration par rapport aux engagements antérieurs.
Par ailleurs, conformément également aux engagements du Président de la République, le Gouvernement vient d’engager la procédure tendant à lancer l’enquête publique du tracé Lyon-Sillon alpin–Saint-Jean-de-Maurienne.
Les ouvrages d’accès au tunnel de base, à savoir les tunnels de Chartreuse, de Belledonne et du Glandon, constituent un ensemble indispensable à la liaison Lyon-Turin, permettant le franchissement des Alpes, et l’engagement concret d’une politique de report modal significative.
Ces ouvrages, qui doivent être considérés comme partie intégrante du tunnel de base sur le plan opérationnel, sont éligibles à des financements européens, qui pourraient être sollicités à la même hauteur que le financement du tunnel de base.
Or l’éligibilité de ces ouvrages d’accès aux financements européens nécessite leur intégration à la section internationale au titre de l’avenant au traité de 2001 ou du nouveau traité, qui aurait dû intervenir avant la fin de l’année 2011. Je souhaite donc que vous me confirmiez l’inscription effective de ces trois ouvrages dans la section internationale.
Il s’agit, monsieur le ministre, d’une question essentielle à deux titres.
Elle est tout d’abord essentielle au titre des financements européens. Vous conviendrez que nous avons eu raison, avec quelques-uns, de penser que la Commission européenne était disposée à contribuer fortement à ce projet majeur, et la participation financière, portée à 40 % pour le tunnel de base, le prouve. Il nous faut maintenant faire en sorte que cette participation soit étendue au financement des ouvrages d’accès.
Cette question est également essentielle dans la mesure où le tunnel sous Chartreuse constitue une priorité pour sortir le fret des bords du lac du Bourget et de l’agglomération de Chambéry-Aix-les-Bains et pour offrir à la liaison Lyon-Turin les capacités nécessaires au fret ferroviaire et à l’autoroute ferroviaire.
Or les éléments du dossier de l’enquête publique conduisent à une vraie interrogation, voire à une inquiétude s’agissant du fret ; les informations sont en effet difficilement compréhensibles et pour le moins partielles – elles ne donnent ni les capacités de fret des lignes concernées ni les trafics de fret attendus sur l’étoile chambérienne à l’ouverture du tunnel de base et avant la réalisation de Chartreuse-Belledonne –, quand elles ne sont pas contradictoires avec les positions antérieures de Réseau ferré de France, RFF, notamment celles de 2006.
Monsieur le ministre, je vous remercie des précisions que vous pourrez nous apporter sur ce dossier important.
Monsieur Vial, je vous remercie de cette question à laquelle je suis moi-même très attentif.
La parole est à M. le ministre.
Monsieur le sénateur, tout comme vous, je me réjouis des avancées décisives intervenues cet automne sur le projet de liaison ferroviaire Lyon-Turin avec, d’une part, l’accord intervenu le 27 septembre 2011 entre la France et l’Italie sur la répartition du financement du tunnel de base et, d’autre part, la confirmation de l’engagement de l’Union européenne en faveur de cette opération.
S’agissant des accès français, la décision qui a été prise le 10 novembre dernier par Nathalie Kosciusko-Morizet et moi-même confirme le phasage et la consistance des aménagements entre Lyon et le futur tunnel de base franco-italien. Nous avons demandé au préfet de Savoie, préfet coordonnateur de l’enquête publique, le lancement de celle-ci dans les meilleurs délais. Ce lancement est intervenu le 16 janvier dernier, ce dont je me réjouis.
Dans le cadre de la révision de sa politique des transports, la Commission européenne a par ailleurs souhaité donner un signal fort en faveur de la réalisation des projets transfrontaliers, nécessaires à la construction effective du réseau européen performant et structurant qu’elle appelle de ses vœux, en majorant son soutien aux projets transfrontaliers. La Commission européenne a ainsi proposé le projet de liaison ferroviaire entre Lyon et Turin comme projet devant figurer dans le futur réseau central des réseaux transeuropéens de transport, en cours de refonte, et confirmé son soutien à cette opération.
Je vous assure qu’une grande partie des accès français au tunnel de base, en particulier les tunnels de Chartreuse, de Belledonne et du Glandon, figurent bien parmi les ouvrages de la section internationale de la liaison Lyon-Turin définie dans le nouvel accord international, que je signerai d’ailleurs avec mon homologue italien lundi prochain, à Rome.
À ce titre, les États français et italiens chercheront à obtenir, le moment venu, les financements communautaires les plus élevés possible, compte tenu de la dimension internationale de cette opération majeure qui porte pour nous tous de grandes ambitions pour l’avenir du transport de marchandises dans les Alpes.
Enfin, nous sommes, vous l’avez compris, totalement sensibilisés à cette problématique du fret ferroviaire. La liaison Lyon-Turin est un projet emblématique du report modal que nous voulons opérer vers le fer. À cet égard, il convient de rappeler que le trafic routier qui emprunte aujourd’hui les grands tunnels entre la France et l’Italie effectue en majorité des trajets de plus de 500 kilomètres. Il entre donc pleinement dans le domaine de pertinence du mode ferré et de la liaison Lyon-Turin, dès lors que nous aurons réussi à offrir à ce mode un itinéraire performant, ce que nous nous employons avec conviction à faire avec nos partenaires italiens.
Monsieur le ministre, je note avec une grande satisfaction les avancées et les décisions prises ces derniers mois, particulièrement s’agissant de la section commune du tunnel de base.
Vous venez de rappeler que la liaison Lyon-Turin porte de grandes ambitions pour le fret ferroviaire. Il s’agit du cœur du projet. Maintenant que l’accord a abouti sur le tunnel de base, la principale question concerne les accès français : quelle solution de phasage retenir pour alimenter correctement et efficacement l’ouvrage international dès sa mise en service, en prenant en compte les enjeux des territoires ?
L’enquête publique qui vient d’être engagée sera décisive, en considérant les possibilités financières de l’Europe pour un accompagnement substantiel de ce projet, qui devra répondre aux critères du futur réseau central européen.
Monsieur le ministre, je vous remercie de vos propos s’agissant de ce volet de l’engagement et de l’ambition à laquelle devra répondre ce futur réseau en matière de fret : ils me satisfont pleinement.
Je vous remercie par avance de veiller à ce que les décisions d’échelonnement des différents ouvrages répondent aux priorités que sont les ambitions économiques et écologiques de la liaison Lyon-Turin. En revanche, tant les élus que les populations des territoires concernés s’interrogent aujourd'hui – je vous le dis du fond du cœur et en toute transparence –, l’enquête publique et l’ambition que vous affichez leur paraissant en légère contradiction avec les informations données actuellement par RFF.
Quoi qu’il en soit, je remercie le Gouvernement de sa détermination, et je compte beaucoup sur l’attention qu’il portera aux conclusions de l’enquête publique qui vient d’être engagée.
La question n° 1530, adressée par M. Thierry Foucaud à M. le ministre du travail, de l'emploi et de la santé, est retirée de l’ordre du jour.
La parole est à M. Ronan Kerdraon, auteur de la question n° 1571, adressée à M. le ministre du travail, de l'emploi et de la santé.
Monsieur le ministre, je souhaitais interroger M. le ministre de la santé sur les vives inquiétudes qui entourent l’avenir de l’hôpital Max-Querrien de Paimpol et sur la situation catastrophique de l’établissement, tant sur le plan social que sur le plan de l’offre de soins.
Après la fermeture de la maternité voilà quelques années, l’hôpital s’est vu contraint, le 1er janvier 2011, de stopper son activité de chirurgie par l’Agence régionale de santé, celle-ci estimant que les 1 200 actes assurés annuellement par l’établissement n’étaient pas suffisants pour maintenir son bloc opératoire. Trente-six lits d’hospitalisation ont ainsi été fermés, entraînant du même coup la disparition d’une partie substantielle des ressources de l’hôpital et un profond déséquilibre du budget de fonctionnement de ce dernier.
Depuis cette décision, les signaux et les bruits de couloir préoccupants se sont multipliés avec, notamment, la rumeur lancinante que le pôle radiologie du centre hospitalier pourrait être amené à fermer, faute d’équipement suffisant.
Cette rumeur a été démentie, mais nous venons d’apprendre la suppression de vingt-cinq emplois, dont douze postes d’aide-soignante accompagnés de départs à la retraite non remplacés, annonce qui a suscité localement une véritable levée de boucliers. C’est ainsi que, mercredi dernier, près de 400 personnes ont manifesté devant les portes de l’établissement.
Cette mobilisation n’est pas un épiphénomène. Elle s’inscrit dans la durée : tout au long de l’année 2011, les personnels, les syndicats et les élus locaux, en particulier ma collègue députée Corinne Erhel, se sont très largement investis en demandant des garanties sérieuses quant à la pérennité de l’établissement.
Une pétition, rassemblant 2 000 signatures et 18 conseils municipaux, a également été établie, prouvant, s’il en était besoin, le grand attachement de la population au maintien d’un établissement public de santé fort et actif dans ce secteur des Côtes d’Armor.
Plus globalement, c’est l’organisation du système hospitalier, découlant de la loi portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, la loi HPST, qui suscite ces nombreuses interrogations.
Les acteurs locaux craignent en effet que la coopération sanitaire développée entre les hôpitaux de Lannion, de Paimpol et de Saint-Brieuc, couplée aux objectifs de rentabilité et à la concurrence exacerbée avec les établissements privés, ne finisse par avoir raison de l’un des trois établissements. C’est une perspective qui s’avérerait particulièrement funeste et pénalisante pour les patients, compte tenu de l’éloignement géographique entre ces trois sites...
Engagé depuis plusieurs années dans sa restructuration, le centre hospitalier Max-Querrien a développé tous les efforts possibles pour assurer à la fois sa pérennité et son avenir. C’est ainsi qu’un redéploiement du projet hospitalier a été élaboré par les élus, la direction, la communauté médicale et les partenaires sociaux, au début de l’année 2011.
Aujourd’hui, il est primordial de conforter l’établissement en y investissant les moyens nécessaires pour assurer durablement son bon fonctionnement. C’est la question de l’égal accès aux soins de qualité qui est ici en jeu.
Monsieur le ministre, je souhaite donc connaître la position du Gouvernement quant à l’avenir de l’hôpital Max-Querrien de Paimpol.
Monsieur le sénateur, le centre hospitalier de Paimpol a fait évoluer son offre de soins en complémentarité avec les autres hôpitaux du territoire de santé, en particulier avec le centre hospitalier de Saint-Brieuc, afin de maintenir une offre de proximité reconnue et adaptée aux besoins de la population.
La cessation de l’activité chirurgicale a donné lieu à une réorganisation importante des activités de soins de l’établissement, notamment par la transformation des capacités de chirurgie en deux secteurs de prise en charge de soins de suite et de réadaptation, ou SSR, spécialisés – dix lits de SSR post-chirurgicaux et dix lits de SSR plaies chroniques –, permettant ainsi de mettre en place une prise en charge attendue et jusque-là insuffisante sur ce bassin.
Dans cette même logique et dans le cadre des orientations du projet médical du territoire n° 7 – territoire dans lequel est implanté le centre hospitalier de Paimpol –, vingt lits de SSR cardiovasculaires seront installés courant 2012, Paimpol étant le site de référence du territoire sur l’activité de SSR cardiovasculaire.
Contrairement à ce que vous indiquez, l’État, par le biais de l’Agence régionale de santé, l’ARS, accompagne fortement ces importantes recompositions depuis plus d’un an, au niveau tant du soutien financier et de l’appui à la gestion du dialogue social que de l’accompagnement au pilotage.
Ainsi, afin de répondre aux difficultés financières importantes du centre hospitalier de Paimpol, dues aux résultats antérieurs ainsi qu’à la période de transition entre, d’une part, la fermeture du bloc opératoire et la cessation de l’activité chirurgicale et, d’autre part, la montée en charge du nouveau projet médical, l’État a alloué un total de près de 3 millions d’euros au centre hospitalier, dont une partie de crédits pérennes – dotations affectées à l’activité des SSR – afin d’accompagner son développement d’activité. Un encadrement au moyen d’un contrat de retour à l’équilibre est également en cours.
Par ailleurs, il est important de rappeler que le centre hospitalier a bénéficié en 2011 d’un soutien des crédits du Fonds pour la modernisation des établissements de santé publics et privés, volet ressources humaines. Ainsi, l’ARS a attribué environ 100 000 euros afin de permettre à l’établissement de gérer au mieux les enjeux de reconversions liées aux évolutions du projet médical.
De même, l’ARS a enfin rencontré à plusieurs reprises les partenaires sociaux de l’établissement en 2011, afin de pouvoir échanger sur l’avancée de la mise en œuvre du projet médical et sur les incidences sur le climat social de l’établissement. Vous constaterez donc que, avec ces crédits supplémentaires, nous sommes bien loin du désengagement que vous tentez de dénoncer !
Monsieur le ministre, je ne suis que le porte-parole et le relais à la fois de la population, des élus et des professionnels qui constatent ce désengagement. Et ce n’est pas la réponse que vous venez de nous faire qui les rassurera !
En moins d’un an, je le rappelle, c’est la énième décision de restructuration qui a été prise sans garantie que ce soit la dernière.
Dès lors, quel crédit peut-on accorder à cette décision, qui pénalise également lourdement le personnel non médical ?
Quel crédit accorder également à l’ampleur du plan social, ampleur tenant tant à l’importance de la réduction des effectifs qu’à l’impact de ce plan, qui pénalise aujourd'hui toutes les catégories professionnelles ?
J’entends ce que vous dites, monsieur le ministre : l’État a, semble-t-il, investi ; mais allez-vous enfin entendre et respecter la décision du conseil de surveillance, qui avait clairement refusé toute direction commune entre les centres hospitaliers de Saint-Brieuc et de Paimpol ?
La parole est à M. Michel Doublet, auteur de la question n° 1502, adressée à M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l'aménagement du territoire.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je souhaite vous faire part de la situation ubuesque que connaît l’Association syndicale autorisée d’irrigation, l’ASAI, regroupant douze agriculteurs, qui se retrouve privée de l’utilisation de réserves de substitution d’eau à la suite de l’annulation de l’autorisation de création des réserves par la juridiction administrative.
Le projet de création de cinq réserves d’eau situées dans le nord-est du département de la Charente-Maritime, esquissé dès 1997, a nécessité, pour son aboutissement, d’importantes études hydrogéologiques, techniques et environnementales.
L’étude d’impact réalisée en novembre 2006 avait fait ressortir des effets positifs sur l’environnement : prélèvements en période de hautes eaux visant à diminuer la pression exercée en été sur la nappe phréatique et les rivières, amélioration de l’écoulement des eaux de surface avec des effets induits pour le milieu en aval, c'est-à-dire sur le marais poitevin, ainsi qu’une meilleure gestion des apports d’eau pour l’irrigation.
La réalisation de ces cinq réserves, dont le coût a été estimé à 5, 3 millions d’euros hors taxes, a bénéficié d’un cofinancement : à hauteur de 37 % pour les exploitants agricoles, de 25 % pour les agences de l’eau, de 17 % pour le conseil général et de 18 % pour l’État.
Ce projet a reçu les autorisations administratives nécessaires : arrêté préfectoral du 19 mars 2008, permis d’aménager en 2008 et permis modificatif en 2009.
À la suite d’une saisine contentieuse d’associations environnementales, l’arrêté d’autorisation de création de réserves d’eau a été annulé par le tribunal administratif en janvier 2010, au motif qu’il manquait un document dans l’étude d’impact, en l’occurrence l’inventaire de la faune.
Or, lorsque la juridiction administrative a rendu sa décision, les travaux étaient en cours d’achèvement. Malgré cette décision, la préfecture de la Charente-Maritime a enjoint l’ASAI d’achever les travaux et de mettre en eau le fond pour tenir la bâche, tout en n’autorisant pas le remplissage total des réserves, alors que les professionnels ayant réalisé lesdits travaux avaient conseillé aux propriétaires de remplir la réserve pour protéger la membrane et éviter tout dégât à la bâche, au risque de rendre le dispositif non opérationnel. L’ASAI a donc rempli les réserves pendant l’hiver, en informant les services de l’État.
Considérant la situation de déficit hydrique au printemps 2011, l’ASAI a demandé au préfet de la Charente-Maritime l’autorisation d’utiliser l’eau des réserves, demande qui a été refusée. Toutefois, pour sauver leurs exploitations, les agriculteurs ont décidé de passer outre à ce refus et ont utilisé l’eau. Les services du département de la Charente-Maritime n’ont donc pas eu d’autre choix que de verbaliser, même si d’aucuns reconnaissent la situation ubuesque. Les réserves contenant de l’eau, pourquoi ne pas autoriser l’irrigation à titre temporaire ?
Aujourd’hui, l’ASAI ne peut pas déposer de déclaration de fin de travaux, un document qui conditionne le versement des dernières subventions de l’agence de l’eau et du conseil général de la Charente-Maritime.
La part des douze agriculteurs concernés représente un emprunt de 1, 9 million d’euros, dont le remboursement doit intervenir en décembre 2012. Sans autorisation provisoire d’utilisation pour 2012, la situation financière des agriculteurs sera catastrophique.
Je tiens à préciser que les agriculteurs se sont engagés depuis plusieurs années dans une agriculture plus respectueuse de l’environnement et moins consommatrice en eau. Ils sont conscients que la sobriété dans l’utilisation de cette précieuse ressource sera de mise dans les années à venir.
Les futurs projets de réserves d’eau dans notre département seront plus modestes. Toutefois, le projet dont je parle aujourd’hui existe et il faut donc trouver une solution viable pour les agriculteurs qui ont lourdement investi.
Le plan d’adaptation de la gestion et des soutiens à la création de volumes va dans le bon sens, mais il faudrait qu’il soit rapidement mis en œuvre.
Je me félicite de la disposition introduite par l’Assemblée nationale dans le cadre de la proposition de loi relative à la simplification du droit et à l’allègement des démarches administratives, visant à permettre aux chambres d’agriculture de se porter maître d’ouvrage pour les projets de retenues d’eau ayant pour finalité l’irrigation agricole.
Aussi, monsieur le ministre, quelles mesures comptez-vous mettre en œuvre pour sécuriser juridiquement la réalisation des retenues d’eau, dont les montages sont particulièrement complexes, pour encadrer les délais d’instruction, pour limiter les délais de recours, pour permettre aux exploitants l’utilisation de l’eau en réserve au moins à titre provisoire et pour simplifier la complexité réglementaire, dont la rigidité empêche toute approche pragmatique des situations locales.
Monsieur le sénateur, je vous demande tout d’abord de bien vouloir excuser Bruno Le Maire, actuellement retenu, qui m’a chargé de vous répondre.
Vous avez interrogé le ministre de l’agriculture sur les mesures que le Gouvernement entend mettre en œuvre pour sécuriser juridiquement la réalisation des retenues d’eau, dont les montages sont particulièrement complexes, et limiter les délais de recours, sachant que les nuisances éventuelles ont été évaluées par les études préalables d’incidence.
Ces difficultés ont été clairement identifiées et ciblées dans le plan de création de retenues d’eau sur cinq ans, annoncé par le Président de la République, le 9 juin 2011, à l’occasion d’un déplacement en Charente. L’objectif est de mieux assurer l’équilibre entre besoins d’irrigation et ressources.
Ce plan prévoit de confier la maîtrise d’ouvrage de ces retenues aux chambres d’agriculture, dont les compétences seront étendues à cet effet, et de réexaminer les délais de recours, afin de sécuriser juridiquement les conditions de leur mise en place.
Parallèlement, dans les zones où des tensions fortes existent sur la ressource en eau, l’implantation de cultures plus économes en eau sera encouragée. Pour ces zones, le Président de la République a ainsi fixé un objectif de développement de 14 000 hectares d’ici à cinq ans.
Nathalie Kosciusko-Morizet et Bruno Le Maire ont décliné concrètement ce plan en novembre dernier à l’occasion d’une réunion du Comité national du développement durable et du Grenelle de l’Environnement.
Les modifications législatives requises pour faciliter la maîtrise d’ouvrage des retenues d’eau sont soumises à l’examen du Parlement. Sur un plan réglementaire, un décret portant sur la suppression des possibilités de recours une fois les retenues mises en service est en cours de signature. Une réflexion est parallèlement conduite pour clarifier le cadre réglementaire applicable à ces retenues.
Les préfets ont été localement sensibilisés pour activer la mise en œuvre du plan et le Gouvernement a engagé les agences de l’eau à accompagner le financement des retenues.
Monsieur le sénateur, l’ensemble de ces actions devraient permettre de lever les inquiétudes que vous avez exprimées et de simplifier le cadre applicable à la construction de tels ouvrages.
Je vous remercie, monsieur le ministre, de cette réponse.
Toutefois, je souligne que ces réserves d’eau sont actuellement toujours bloquées. Aussi souhaiterais-je que le plan que vous venez d’évoquer soit rapidement mis en place, afin de mettre un terme à la situation épouvantable que j’ai qualifiée d’« ubuesque » : les agriculteurs se retrouvent vraiment confrontés à de graves difficultés.
La parole est à M. Joël Guerriau, auteur de la question n° 1508, adressée à M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l'aménagement du territoire.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le département dont je suis l’élu compte une cinquantaine de producteurs de blé. Aussi, la chute des cours mondiaux du prix de la tonne de blé en dessous des coûts de production français met à mal les perspectives financières de ces entreprises agricoles.
Après s’être redressé pendant dix-huit mois jusqu’à l’été 2011, le cours des céréales a fortement chuté depuis l’automne. La cotation de référence est même retombée en octobre dernier en dessous de 180 euros par tonne, un niveau inacceptable pour les producteurs. Avec le transport et la marge de l’organisme collecteur à déduire, le producteur ne percevait plus que 150 à 160 euros par tonne. Il s’agit d’un niveau de prix équivalant à celui d’il y a trente ans, en monnaie courante, bien entendu.
Or l’observatoire Arvalis-Unigrains a estimé le coût moyen de production du blé à 221 euros la tonne pour la récolte 2011, un prix auquel il faut retirer en moyenne 40 euros par tonne au titre des aides pour obtenir le prix minimum de marché permettant au producteur de dégager un résultat positif, soit 180 euros la tonne.
Depuis quelques semaines, le marché mondial très volatil des cours des céréales renoue avec une très légère hausse, atteignant le cours fatidique des 195 euros la tonne, un niveau qui permet aux producteurs de percevoir le minimum nécessaire pour leur exploitation. Toutefois, les chiffres parlent d’eux-mêmes et l’inquiétude reste tangible.
La chute des prix qui a été causée hier par les énormes récoltes en Ukraine et Russie, exportables avec des bateaux qui viennent décharger leurs céréales dans les ports d’une Union européenne qui a démantelé tous ses instruments de gestion des marchés, sera suivie de nouvelles contraintes.
L’Union européenne est actuellement en discussion avec l’Ukraine pour signer un accord de libre-échange qui porterait sur un total de quelque 2 millions de tonnes de céréales – blé, orge et maïs –, au détriment des tarifs français.
La PAC 2014–2020 fait, certes, la part belle à de nombreuses mesures qualitatives, mais elle fait l’impasse sur un soutien au marché.
Le législateur français et le Gouvernement vont-ils fermer les yeux sur l’extinction d’une profession qui fournit la demande nationale et produit 35 millions de tonnes de blé ? Depuis vingt ans, avec le démantèlement des outils de gestion du marché, la France a perdu son marché naturel, le marché commun européen, et doit se reporter vers les pays d’Afrique du Nord et du Moyen-Orient.
En vingt-cinq ans, on a vu disparaître la culture des protéines végétales en France, alors que celles-ci ont d’excellentes vertus environnementales. Brisée par les lois du marché, nous l’avons remplacée par des productions d’importation américaines contestables tant par leur délocalisation que par le dramatique bilan carbone des cargos transatlantiques ou par les cultures intensives sous OGM qui nourrissent aujourd’hui 100 % de notre bétail.
De même, aujourd’hui, les nouveaux exportateurs de blé font du dumping économique et social et bradent les prix, ce qui réduit considérablement les parts de marché des céréaliers français. Par contrecoup, les éleveurs sont également défavorisés. Toute la chaîne ne cesse d’être dérégulée. Quel pays émergent fournira demain le blé à nos boulangers ?
Les amplitudes de variation des prix soumises aux aléas spéculatifs, énergétiques et climatiques rendent difficile toute prévision d’investissement et de lisibilité économique pour les producteurs français.
Pour conclure, je souhaite qu’il me soit confirmé que l’une des missions essentielles assignées par le traité de Lisbonne à la PAC d’« assurer ainsi un niveau de vie équitable à la population agricole, notamment par le relèvement du revenu individuel de ceux qui travaillent dans l’agriculture, de stabiliser les marchés et d’assurer des prix raisonnables dans les livraisons aux consommateurs » est toujours d’actualité et reste bien au cœur de nos négociations ?
Monsieur le ministre, que compte faire le Gouvernement pour protéger durablement la viabilité de nos céréaliers, leurs exportations vers les pays les plus proches, pour réguler la rentabilité des productions françaises et, éventuellement, pour soutenir nos prix de vente du blé ?
Monsieur le sénateur, je vous demande également de bien vouloir excuser l’absence de Bruno Le Maire, qui m’a demandé de répondre à sa place.
Vous avez interrogé le ministre de l’agriculture sur la chute des cours du blé et ses conséquences, notamment sur les exploitants indépendants particulièrement touchés. Cette situation constitue une preuve supplémentaire de la nécessité de préserver des instruments de régulation de nos marchés agricoles, au service, comme vous l’avez souligné, du revenu de nos agriculteurs.
Cette régulation constitue la pierre angulaire de la position défendue par la France dans la perspective de la réforme à venir de la PAC.
Depuis l’appel de Paris du 10 décembre 2009, nous avons su ramener ce thème au cœur du débat européen : la position commune franco-allemande sur l’avenir de la PAC de l’après-2013, tout comme le compromis trouvé sur le « paquet lait », le 7 décembre dernier, en témoigne.
Face aux mouvements erratiques que connaissent les cours des matières premières agricoles, notamment le blé, nous devons pouvoir nous appuyer sur des instruments d’intervention sur les marchés modernisés et plus réactifs. La proposition législative relative à la réforme de la PAC, présentée par la Commission européenne le 12 octobre dernier, fait droit à cette demande de la France, sur laquelle une majorité de nos partenaires nous ont d’ailleurs aujourd'hui rejoints.
C’est pourquoi le Président de la République a fait de la lutte contre la volatilité des marchés agricoles une priorité de la présidence française du G20 : elle est au cœur du plan d’action adopté à cette occasion.
Concernant la négociation en cours d’un accord de libre-échange avec l’Ukraine, je rappelle que le secteur des céréales a été identifié dès le lancement de la négociation, en 2009, comme étant particulièrement sensible à l’octroi de préférences commerciales à ce partenaire.
Cette négociation entre à présent dans sa phase finale. En l’état actuel des discussions, le blé, le maïs et l’orge devraient faire l’objet de contingents spécifiques d’importation à destination de l’Union européenne. Pour le blé, le contingent attribué est proche des flux observés pour la période 2005-2007. Les préférences octroyées à l’Ukraine ne sont donc pas a priori de nature à déstabiliser le marché européen.
Je vous remercie, monsieur le ministre, de cette réponse.
Tous les éléments de réglementation de nature à entraîner une plus forte régulation des marchés mondiaux sont évidemment essentiels, et le rôle de la France en la matière ne peut être que majeur eu égard à l’importance du marché du blé pour notre pays.
Mes chers collègues, nous avons pris un peu d’avance sur l’horaire prévu ; nous allons donc interrompre nos travaux quelques instants en attendant l’arrivée de M. le ministre chargé des collectivités territoriales.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à dix heures quarante-cinq, est reprise à dix heures cinquante-cinq.
La parole est à M. Christophe-André Frassa, auteur de la question n° 1511, adressée à Mme la ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État, porte-parole du Gouvernement.
Monsieur le ministre, avec cette question, je souhaitais rappeler à Mme le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l’État qu’un contentieux oppose depuis de nombreuses années les contribuables français de Monaco nés, travaillant et résidant en Principauté à l’administration fiscale française sur l’application qui leur est faite de l’article 7-1 de la convention fiscale franco-monégasque du 18 mai 1963.
Cet article dispose que « Les personnes physiques de nationalité française qui transporteront à Monaco leur domicile ou leur résidence – ou qui ne peuvent pas justifier de cinq ans de résidence habituelle à Monaco à la date du 13 octobre 1962 – seront assujetties en France à l’impôt sur le revenu des personnes physiques et à la taxe complémentaire dans les mêmes conditions que si elles avaient leur domicile ou leur résidence en France. »
Ce contentieux porte principalement sur l’interprétation de la notion de transfert du domicile ou de la résidence.
Un arrêt du 1er septembre 2009 de la cour administrative d’appel de Marseille a établi que les Français nés à Monaco et qui y ont toujours résidé n’ont jamais transféré leur domicile ou leur résidence à Monaco et ne peuvent donc pas être imposés sur le fondement de l’article 7-1.
Ainsi, la cour ne dissocie pas les deux membres d’une même phrase comme le fait l’administration fiscale, mais comprend l’article 7-1 globalement et subordonne donc l’exigence de cinq années de résidence à Monaco au 13 octobre 1962 à l’existence d’un transfert réel du domicile en Principauté.
Cette exigence ne peut par conséquent pas jouer pour les personnes qui, nées à Monaco, n’y ont jamais transféré leur domicile ou leur résidence.
L’arrêt n’est fondé que sur ce seul moyen, les autres moyens que le requérant avait fait valoir, notamment ceux qui sont tirés de sa double nationalité, n’ont pas été examinés par la cour ainsi qu’il est écrit dans l’arrêt : « Sans qu’il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête ».
Or, par la suite, l’administration fiscale, par une instruction du 6 avril 2010, a adopté une position inverse à celle de la cour administrative d’appel de Marseille, en ne conférant pas de caractère jurisprudentiel à cet arrêt.
Bien au contraire, l’administration fiscale arguait que l’espèce en cause présentait à juger la situation d’une personne qui, de père italien et de mère française, possédait depuis sa naissance la double nationalité française et italienne.
Depuis, des contribuables uniquement Français ont introduit des requêtes devant le tribunal administratif de Nice tendant à obtenir la décharge des cotisations de l’impôt sur le revenu sur le seul fondement que la naissance à Monaco n’équivaut pas à un transfert de domicile ou de résidence.
Ces requêtes, jusqu’à ce jour, ont toutes obtenu gain de cause.
Je vous précise que, pour autant, l’administration fiscale a fait appel de ces jugements du tribunal administratif de Nice et le contentieux est actuellement pendant devant la cour administrative d’appel de Marseille.
Sans préjuger les jugements à venir au sein de cette cour, on ne peut imaginer un instant qu’ils affirmeront une position contraire à celle qu’elle avait elle-même établie dans son arrêt du 1er septembre 2009.
Monsieur le ministre, je souhaiterais savoir si, une fois toutes les voies de recours épuisées et le Conseil d’État ayant statué en dernier ressort, l’administration fiscale modifiera enfin sa position et reconnaîtra que les Français nés, travaillant et résidant à Monaco n’entrent pas dans le champ d’application de l’article 7-1 de la convention fiscale franco-monégasque du 18 mai 1963.
Monsieur Christophe-André Frassa, je vous prie d’excuser l’absence ce matin de Valérie Pécresse, qui ne pouvait être présente pour vous répondre et qui m’a donc chargé de vous transmettre la réponse qu’elle avait prévu de vous apporter.
Tout d’abord, je tiens à vous rappeler la position qui a toujours été celle du Gouvernement sur l’interprétation de l’article 7-1 de la convention fiscale franco-monégasque du 18 mai 1963, qui assujettit à l’impôt sur le revenu en France, de la même manière que si elles y avaient leur domicile, les personnes de nationalité française résidant à Monaco depuis une date postérieure au 13 octobre 1957.
Ainsi, le gouvernement français a, depuis l’origine, considéré que cette stipulation vise toutes les personnes qui ne peuvent justifier de cinq ans de résidence habituelle à Monaco à la date du 13 octobre 1962, que l’événement générant cette situation soit le transport du domicile ou la naissance à Monaco postérieurement au 13 octobre 1957.
Du fait des ambiguïtés nées de la décision de la cour administrative d’appel de Marseille du 1er septembre 2009 que vous évoquez, des Français nés à Monaco après 1957 ont contesté cette lecture de la convention fiscale de 1963.
En réponse, l’administration a précisé la portée qu’elle conférait à l’arrêt de la cour d’appel de Marseille et confirmé son interprétation dans une instruction fiscale du 6 avril 2010, n° 14 B-1-10. Cette instruction a fait l’objet d’une quarantaine de recours en excès de pouvoir devant le Conseil d’État.
Par décision en date du 2 novembre 2011, le Conseil d’État a rejeté le premier de ces recours. D’autres arrêts dans le même sens ont été rendus à la suite de celui-ci.
Monsieur le sénateur, la Haute Assemblée a ainsi pleinement confirmé l’analyse de l’administration fiscale et la légalité de l’instruction attaquée. Elle a considéré « qu’il résulte des dispositions de l’article 7-1 de la convention fiscale franco-monégasque que les personnes physiques de nationalité française sont assujetties en France aux impositions qu’elles mentionnent dans les mêmes conditions que si ces personnes avaient leur domicile ou leur résidence en France, soit lorsqu’elles transportent à Monaco leur domicile ou leur résidence, soit lorsqu’elles ne peuvent justifier de cinq ans de résidence habituelle à Monaco à la date du 13 octobre 1962, ce qui est le cas si elles sont nées à Monaco, après la date marquant le point de départ de cette période de cinq ans ».
Ces décisions privent dès lors de tout fondement l’analyse développée par la cour administrative de Marseille dans son arrêt du 1er septembre 2009 et l’ensemble des réclamations contentieuses en cours.
Telle est, monsieur le sénateur, la réponse que souhaitait vous faire Mme la ministre Valérie Pécresse.
Je vous remercie, monsieur le ministre, des éléments de réponse que vous venez d’exposer devant notre assemblée.
Cependant, je le regrette une fois de plus, depuis quarante-neuf ans que la convention fiscale dont il est question, unique en son genre, lie la France à la principauté de Monaco, les différents gouvernements de la République française se sont toujours contentés d’être les porte-parole – veuillez excuser ce terme – de l’administration fiscale.
Cette dernière, il faut le reconnaître, n’a pas de vision politique des problèmes. Elle n’a qu’une vision comptable des enjeux. Or, et c’est là tout le problème, une présence française forte en principauté de Monaco nécessite une position politique et, donc, une solution politique.
Lorsque je suis né à Monaco, en 1968, la communauté française représentait 57 % de la population totale de Monaco. Aujourd’hui, elle en constitue moins du quart. C’est le seul pays d’Europe où la communauté française diminue, alors que nulle guerre, nulle crise économique ou autre événement majeur n’y est intervenu. Il y a donc bien là un problème d’ordre politique !
Il appartient aujourd’hui au politique, c'est-à-dire à nous-mêmes, de trouver la solution qui permettra de conserver une communauté française à Monaco, afin d’y assurer la présence de notre pays.
Comme le disait le général de Gaulle, les politiques décident, et les fonctionnaires fonctionnent. À nous de le démontrer !
La parole est à M. Vincent Eblé, auteur de la question n° 1523, adressée à M. le ministre auprès du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, chargé de l'industrie, de l'énergie et de l'économie numérique.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en cette période de crise, nos PME sont particulièrement exposées, notamment dans le secteur industriel, où l’interpénétration des circuits financiers et le resserrement des crédits ont des répercussions très graves sur l’économie française et singulièrement sur l’emploi.
L’Île-de-France et, en particulier, la Seine-et-Marne, dans le sud de son territoire, ont connu ces dernières années un phénomène de désindustrialisation très fort, accompagné d’immenses difficultés de reconversion, dont la conséquence a été la perte de plus de 1 000 emplois.
Face à cette situation préoccupante, les différents acteurs de l’emploi et de l’économie, et en premier lieu l’État, la région et le département, se sont regroupés, dès 2006, afin d’unir leurs moyens en créant un groupement d’intérêt public, le GIP Sud Seine-et-Marne, dénommé « Plateforme de revitalisation et de développement du sud Seine-et-Marne ».
Cette structure a permis des réalisations significatives, insufflant sur le sud de ce département un élan positif au regard de la pérennisation de certaines PME et des emplois qu’elles engendrent.
Néanmoins, le placement en redressement judiciaire, le 21 novembre 2011, de la société Prevent Glass, située à Bagneaux-sur-Loing, par le tribunal de commerce de Melun, ravive l’inquiétude, notamment sur l’avenir de ses 219 salariés.
Monsieur le ministre, je sollicite votre intervention, afin que l’État puisse flécher les fonds nécessaires à la survie de l’entreprise et à la préservation de tous les emplois de Prevent Glass, via notamment la mobilisation de fonds de revitalisation de l’ancien GIP Sud Seine-et-Marne, car l’État, semble-t-il, continue de les gérer, malgré la dissolution formelle de ce GIP.
La création d’un pacte pour l’emploi entre la région, le département et les collectivités locales est actuellement à l’étude. Il serait souhaitable que l’État y apporte son concours.
Enfin, il me paraît indispensable, dans l’intérêt de ces salariés du sud seine-et-marnais, que les services de l’État se mettent à la disposition de l’entreprise, pour lui permettre de s’inscrire dans tous les dispositifs existants, afin de sauvegarder son activité, et l’aider à retrouver des repreneurs potentiels.
Monsieur le sénateur, l’entreprise Prevent Glass, qui emploie, à Bagneaux-sur-Loing, 219 salariés, dont le savoir-faire est reconnu dans la production de verres automobiles, connaît des difficultés depuis plusieurs années.
Prevent Glass a enregistré des pertes, en dépit de réorganisations majeures et, notamment, de la conduite d’un important plan d’investissement et de formation, cofinancé en 2005 par le Fonds social européen, le FSE, et le Fonds national de l’emploi, le FNE, pour adapter l’outil de production. Face à ces pertes, le groupe a décidé, l’été dernier, de vendre l’entreprise.
En novembre 2011, Prevent Glass a été cédé au fonds d’investissement International corporation investissement, ICI, qui a engagé des négociations avec Volkswagen, principal client de l’entreprise, afin d’obtenir une hausse des prix des produits vendus. L’échec de ces négociations a conduit ICI à se retirer du projet et à ouvrir une procédure collective.
Nous ne pouvons que déplorer que le repreneur n’ait pas mieux construit son projet industriel, en s’assurant préalablement des marges de manœuvre de son principal client.
Depuis lors, l’État s’est mobilisé pour soutenir financièrement l’entreprise et rechercher un repreneur.
Un groupe verrier turc a déclaré son intérêt pour ce site. Des discussions sont actuellement en cours, sous l’égide de l’Agence française pour les investissements internationaux, l’AFII, qui a été spécialement mandatée pour trouver un repreneur.
Le préfet de Seine-et-Marne suit également de très près, à la demande du Gouvernement, la situation de cette entreprise. C’est pourquoi je vous confirme que l’État orientera, si besoin, tout repreneur vers les dispositifs d’aide à l’investissement, comme la prime d’aménagement du territoire ou le financement d’un plan de formation lié à l’adaptation des salariés à de nouvelles activités, dont, notamment, la production de verre pour le solaire, qui bénéficie d’un marché en pleine expansion.
Soyons clairs : notre but est de sauver l’activité et l’emploi à Bagneaux-sur-Loing. Croyez-le bien, monsieur le sénateur, conformément à vos souhaits, le Gouvernement est totalement mobilisé pour y parvenir.
Monsieur le ministre, j’entends bien la réponse circonstanciée que vous nous faites. Je prends acte de la mention relative à la mobilisation de la prime d’aménagement du territoire. Cette PME, dans un territoire francilien éloigné des dynamiques du cœur de métropole, doit absolument bénéficier de cette prime.
Finalement, la situation est assez particulière, dans la mesure où la taille encore modeste de cette entreprise ne lui permet pas forcément de bénéficier des dispositifs orientés vers les grands groupes internationaux. En matière de politique industrielle, nous ne devons surtout pas oublier les milliers de PME et TPE victimes de la baisse de l’activité industrielle. La situation de l’entreprise Prevent Glass en est la douloureuse illustration.
Force est de le constater, notre pays manque d’une politique industrielle forte, les actes ne suivant pas souvent les déclarations. En l’occurrence, il faut agir pour soutenir notre activité industrielle et nos salariés.
L’ensemble des acteurs de cette entreprise, les forces vives de ce territoire et les élus sont extrêmement attentifs, singulièrement à notre échange, monsieur le ministre, cette question orale étant bien évidemment très attendue. Nous espérons que la société que vous avez évoquée, la Sisecam, confirmera son intention de reprendre Prevent Glass, car rien n’est encore définitif aujourd’hui. Quoi qu’il en soit, nous restons très vigilants et comptons sur l’État pour accompagner cette reconversion.
La parole est à Mme Mireille Schurch, auteur de la question n° 1537, adressée à M. le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ma question orale reprend les questions orales posées par plus d’une dizaine de parlementaires depuis le mois d’octobre dernier et restées sans réponse à ce jour. Elle concerne en effet la validité du protocole d’accord relatif à la réforme de la filière des sapeurs-pompiers professionnels.
Ce protocole est l’aboutissement d’une réflexion qui a réuni, au cours de l’été dernier, d’une part, les services de l’État et, d’autre part, quelques organisations syndicales et une association regroupées sous le nom de « Dynamique des acteurs de la sécurité civile ». Le 23 septembre dernier, lors du congrès de la Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France, le protocole a été officiellement signé par le ministre de l’intérieur, les secrétaires de quatre organisations syndicales et le président de cette fédération.
Tout irait donc pour le mieux, les sapeurs-pompiers attendant depuis plusieurs années une réforme portant sur le déroulement de leur carrière et la promotion professionnelle. Ce serait oublier que les principaux représentants de personnels de la sécurité civile ont été écartés des négociations et de l’accord qui en a suivi : il s’agit des organisations syndicales CGT, CFDT et Autonomes, qui représentent près des deux tiers des personnels, d’après les résultats obtenus aux élections professionnelles de 2008.
Or la loi du 5 juillet 2010 relative à la rénovation du dialogue social, qui modifie la loi du 13 juillet 1983, repose sur le postulat suivant : les organisations syndicales représentatives ont qualité pour mener, avec le Gouvernement, des négociations. En effet, conformément aux termes de son article 8 bis, « les organisations syndicales disposant d’au moins un siège dans les organismes consultatifs au sein desquels s’exerce la participation des fonctionnaires et qui sont déterminées en fonction de l’objet et du niveau de la négociation » sont appelées à participer à ces négociations.
Par conséquent, la validité du protocole de niveau national dont il est question peut être remise en cause sur quatre points.
Premièrement, trois organisations syndicales majoritaires – CGT, CFDT et Autonomes – ont eu connaissance d’un texte négocié sans elles et qu’elles ne pouvaient pas amender, quatre jours seulement avant sa signature.
Deuxièmement, le texte a été approuvé seulement par trois organisations syndicales – CFTC, UNSA et FO – minoritaires puisqu’elles n’ont recueilli que 39 % des voix aux élections professionnelles.
Troisièmement, il est cosigné par une organisation syndicale – Avenir-secours-CGC – qui n’est plus représentative au Conseil supérieur de la fonction publique territoriale depuis 2008.
Quatrièmement, il est cosigné par la Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France, association régie par la loi de 1901, qui n’a pas compétence pour négocier, aux termes des accords de Bercy portant sur le renouveau du dialogue social.
Enfin, il convient de le souligner, l’Assemblée des départements de France n’a pas non plus été consultée, alors même que les départements sont les principaux employeurs et financeurs de cette filière. Son bureau a ainsi refusé de signer, le 11 octobre 2011, le protocole.
Constatant ces irrégularités et cette absence de consensus, je vous demande donc, monsieur le ministre, de revenir sur ce protocole.
Par ailleurs, pourriez-vous m’indiquer la manière dont vous entendez instaurer une négociation avec l’ensemble des organisations syndicales de salariés représentatives, dans le respect des dispositions réglementaires et statutaires en matière de dialogue social, afin de poursuivre la réflexion sur la modernisation de la filière des sapeurs-pompiers ?
Madame la sénatrice, vous avez appelé l’attention du ministre de l’intérieur sur la validité du protocole d’accord relatif à la réforme de la filière des sapeurs-pompiers professionnels et sur les modalités de négociations avec les organisations syndicales représentatives.
Une première réunion de négociation s’est tenue le 5 juillet 2011, au cours de laquelle toutes les organisations syndicales ont quitté la salle. Des réunions de travail ont ensuite été organisées pendant l’été, à la demande de plusieurs organisations syndicales, afin de formuler une nouvelle proposition, et la négociation a été rouverte le 20 septembre dernier.
La CGT, la CFDT et FA-FPT ont considéré que les propositions n’étaient pas acceptables et ont de nouveau quitté la salle.
Je précise que la CGC, qui n’est plus membre du CSFPT, le Conseil supérieur de la fonction publique territoriale, mais qui est largement majoritaire chez les cadres de cette profession, est par ailleurs représentée au sein de la Conférence nationale des services d’incendie et de secours, la CNSIS. Aussi a-t-elle participé aux réunions de travail, mais n’a siégé, aux séances de négociations du 5 juillet et du 20 septembre, qu’en qualité d’expert.
Le dialogue social sur la réforme de la filière des sapeurs-pompiers poursuit son cours normal, puisque les projets de décrets résultant du protocole signé le 23 septembre 2011 seront soumis, le 1er février prochain, à l’avis de la Conférence nationale des services d’incendie et de secours, puis, le 15 février, au Conseil supérieur de la fonction publique territoriale, et enfin, le 1er mars, à la Commission consultative d’évaluation des normes, la CCEN.
Ces instances sont les lieux du débat entre les différents acteurs de la sécurité civile dans le premier cas, entre les employeurs et les représentants des fonctionnaires territoriaux dans le deuxième cas, et avec les élus locaux, sur le plan financier, dans le troisième cas.
Le dialogue avec les organisations syndicales représentatives, qui a débuté en juillet 2011, se poursuivra donc dans le cadre du CSFPT et de sa préparation, notamment, ainsi que dans celui de la CNSIS.
Les textes présentés constitueront des avancées sociales majeures attendues par la profession et une modernisation de nature à garantir un meilleur service public d’incendie et de secours sur le territoire.
Madame la sénatrice, telles sont les précisions que souhaitait vous apporter le ministre de l’intérieur.
Monsieur le ministre, je ne manquerai pas de faire part de votre réponse aux sapeurs-pompiers professionnels, qui sont très attentifs à toutes ces questions.
Ce sont tout de même vos services qui, par la voix du directeur adjoint de la toute nouvelle direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises, ont reconnu que les négociations s’étaient déroulées avec « des » organisations syndicales et une association.
Chacun pourra donc apprécier le souci qu’a le Gouvernement de respecter la démocratie représentative, disqualifiant ou non ses interlocuteurs selon des critères qui lui sont propres.
Devant ce constat, les syndicats majoritaires ont d’ailleurs déposé une requête devant le Conseil d’État. Pourtant, le Président de la République avait souhaité être exemplaire dans le domaine du dialogue social.
Aujourd’hui, cependant, vous poursuivez votre marche forcée dans le mépris du consensus, souhaitant en finir au plus vite. Ainsi, vous nous avez confirmé que 21 projets de décrets préparés à partir de ce que vous nommez « protocole », lequel n’a donc pas été validé par l’ensemble des instances syndicales, seront présentés à la Conférence nationale des services d’incendie et de secours, le 15 février prochain.
J’en appelle donc à la vigilance des membres de la Conférence, maires, conseillers généraux, parlementaires, ainsi qu’à celle de son président, notre collègue Yves Rome.
Ce dernier a en effet déclaré, lorsqu’il a pris la présidence, qu’il veillerait à « associer dans une collaboration étroite, franche et respectueuse tous les acteurs du secteur ».
Il est nécessaire que toute réforme statutaire d’une telle importance soit le fruit d’une négociation respectueuse du nombre et de la représentativité des organisations syndicales.
Monsieur le ministre, il est indispensable de rétablir le dialogue avec l’ensemble des personnels de la sécurité civile, dont chacun loue régulièrement le courage, le dévouement et l’abnégation. Je vous encourage à agir en ce sens.
La parole est à M. Daniel Laurent, auteur de la question n° 1520, adressée à M. le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.
Ma question porte sur les délais de publication des décrets d’application de l’article 96 de la loi n° 2011–267 du 14 mars 2011 d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure, dite « LOPPSI 2 ».
Cet article a pour objet la fixation du montant du loyer au-dessus duquel tout projet de bail emphytéotique administratif présenté pour la réalisation d’une opération d’intérêt général liée aux besoins de la justice, de la police ou de la gendarmerie nationale est soumis à la réalisation d’une évaluation préalable dans les conditions fixées à l’article L. 1414–2 du code général des collectivités territoriales.
Le bail emphytéotique administratif « construction » lié aux besoins de la gendarmerie nationale est prévu par l’article L. 1311–2 du code général des collectivités territoriales, modifié par la loi du 14 mars 2011.
La possibilité d’utiliser ce montage est soumise à la publication de deux décrets en Conseil d’État.
Le premier concerne la réalisation d’une évaluation préalable en fonction d’un montant de loyer à définir ; le second doit fixer les modalités de mise en concurrence et de mesures de publicité.
À ce jour, ces deux décrets n’ont pas été publiés. Dans ce contexte, en matière de construction de locaux de gendarmerie, la direction générale de la gendarmerie nationale ne donne pas suite à cette possibilité de prise à bail.
De nombreux projets sont ainsi bloqués.
Par exemple, la construction d’une nouvelle gendarmerie à Pons, ville de cinq mille habitants située dans mon département de la Charente-Maritime, pour un montant d’environ 2 millions d’euros, est largement attendue par la collectivité, les administrés et les familles de gendarmes, dont les logements ne sont plus adaptés.
La collectivité ne peut supporter financièrement un tel coût. Le porteur du projet, filiale de la Caisse des dépôts et consignations, est actuellement dans l’attente de la publication dudit décret pour mener à terme la validation de la construction de la gendarmerie.
En conséquence, monsieur le ministre, pouvez-vous me préciser les contours de ces décrets et leurs dates de publication ?
Monsieur le sénateur, vous avez appelé l’attention du ministre de l’intérieur, de l’outre-mer, des collectivités territoriales et de l’immigration sur les délais de publication des décrets d’application de l’article 96 de la loi n° 2011–267 du 14 mars 2011 d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure.
Leur objet est de préciser les modalités des montages financiers qui permettent aux collectivités territoriales d’investir aux côtés du ministère de l’intérieur pour l’immobilier des forces de police et de gendarmerie.
J’ai le plaisir de vous informer que ces deux décrets d’application ont été regroupés en un seul texte qui a été publié au Journal officiel le 31 décembre 2011.
Les dispositions principales de ce décret n° 2011–2065 sont les suivantes.
D’une part, le montant du loyer annuel du bail emphytéotique administratif présenté pour la réalisation d’une opération d’intérêt général liée aux besoins de la justice, de la police et de la gendarmerie, au-delà duquel la réalisation d’une évaluation préalable est obligatoire, est fixé à 1 million d’euros hors taxes. Il est en outre prévu que les modalités de financement du coût de cette évaluation sont fixées par une convention conclue entre l’État et la collectivité propriétaire du bien faisant l’objet du bail emphytéotique administratif.
D’autre part, la conclusion des baux emphytéotiques administratifs, accompagnés d’une convention non détachable qui constitue un marché public, une délégation de service public, un contrat de partenariat ou une concession de travaux publics, est précédée d’une publicité et d’une mise en concurrence selon les règles applicables à ces contrats.
Telles sont les précisions que je souhaitais vous apporter, monsieur le sénateur.
Monsieur le ministre, je vous remercie de cette réponse. La publication du décret pris en application de l’article 96 est un acte important qui permettra de débloquer nombre de situations sur l’ensemble du territoire, pas uniquement en Charente-Maritime. De nombreux gendarmes attendent de nouveaux locaux, de qualité, afin de pouvoir s’acquitter de leur mission auprès de nos concitoyens.
La parole est à M. Yannick Vaugrenard, auteur de la question n° 1527, adressée à M. le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.
Chacun sait que, après la perte d’un être cher, il est délicat et particulièrement difficile d’avoir à négocier réellement les services proposés pour des obsèques.
La tristesse de ces moments rend les familles fragiles, désemparées et plus aptes à une attitude d’acceptation que d’éventuelle contestation.
C’est sûrement l’une des raisons qui ont présidé à la réforme de 2008. Celle-ci a renforcé l’information du consommateur et imposé la mise en place d’un modèle de devis obligatoire. Mais est-elle correctement appliquée et respectée ?
L’Union fédérale des consommateurs–Que Choisir de Nantes, en Loire-Atlantique, a rendu publics, à la fin de l’année dernière, les résultats d’une enquête qu’elle a menée dans quatorze magasins funéraires de l’agglomération.
L’objectif était de vérifier le respect de leurs obligations légales par les professionnels du secteur.
Malgré la nouvelle législation, l’enquête a montré que, malheureusement, les magasins funéraires ne se plient toujours pas aux règles de transparence. Aucun des devis recueillis ne respecte le modèle de devis obligatoire et seulement 43 % s’en rapprochent, sans y être conformes.
L’opacité créée par cette situation empêche la comparaison des prestations par les familles et favorise bien sûr la hausse des prix. Dans l’agglomération nantaise, le coût total pour des obsèques s’établit en moyenne à 2 280 euros contre 3 100 euros au niveau national, mais, d’un opérateur à l’autre, pour une demande similaire, la facture totale peut considérablement varier : de 2 300 euros à près de 4 000 euros pour le plus onéreux.
Ces différences sont liées à un grand nombre de prestations non obligatoires, mais aussi à des opérations surtaxées : par exemple, les formalités administratives ont un coût se situant dans une fourchette allant de 90 euros à 263 euros. Il s’agit pourtant d’opérations standardisées qui ne justifient pas de tels tarifs.
Au vu de ces pratiques, monsieur le ministre, il est urgent de mieux encadrer le marché.
Il conviendrait, par exemple, de prévoir des sanctions contre les professionnels qui n’utilisent pas le modèle de devis obligatoire et de demander à la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes de réaliser des contrôles afin de veiller à ce que des devis conformes à la loi soient systématiquement émis.
Par ailleurs, un livret d’information sur les obsèques rappelant les engagements consécutifs à la nouvelle législation pourrait également être élaboré par la direction générale des collectivités locales, après consultation du conseil national des opérations funéraires.
Ce livret serait donné obligatoirement aux familles par les prestataires funéraires et mis à disposition dans les mairies.
La loi, aujourd’hui, malheureusement, est mal appliquée, insuffisamment respectée, il est donc indispensable de remédier à cette situation.
Ces propositions sont ouvertes, monsieur le ministre. J’aimerais que vous me disiez ce que vous en pensez et ce que compte faire le Gouvernement pour pallier les dysfonctionnements constatés par nombre de nos concitoyens.
Monsieur le sénateur, vous avez appelé l’attention du ministre de l’intérieur sur les pratiques des prestataires funéraires.
La question que vous soulevez touche au sujet particulièrement sensible des funérailles. En effet, au cours de sa vie, chacun d’entre nous est amené à faire face au décès de l’un de ses proches et à ses conséquences. Outre la peine que constitue la perte d’un proche, les familles doivent, dans un bref délai, organiser les funérailles en respectant les dernières volontés de la personne disparue.
Les opérations consécutives au décès et leur réalisation sont confiées aux opérateurs de pompes funèbres, qui sont majoritairement des entreprises de droit privé évoluant dans un marché concurrentiel.
Comme les échanges réguliers entre les services du ministère de l’intérieur et leurs organisations représentatives l’attestent, la plupart de ces opérateurs exercent leur métier avec professionnalisme.
Les préfets n’hésitent pas à faire usage de leurs prérogatives reconnues par la loi pour retirer leur habilitation aux entreprises qui ne respecteraient pas le cadre légal.
Dans ce contexte, je crois utile de rappeler que la loi du 8 janvier 1993 relative à la législation dans le domaine funéraire a libéré les prix des opérations funéraires et que, de ce fait, des écarts de tarifs peuvent être constatés, d’un établissement à un autre, pour des prestations similaires.
Mais cette liberté des prix s’accompagne d’un certain nombre de règles, qui portent notamment sur l’établissement des documents commerciaux – les devis, les bons de commande et les factures.
En outre, les familles ont la liberté de choix de l’opérateur.
Au regard de la situation particulière des familles confrontées à un deuil, le Gouvernement est attentif au respect de cette réglementation. Sur ce point, l’adoption de la loi du 19 décembre 2008 relative à la législation funéraire, issue d’une proposition de loi de M. Jean-Pierre Sueur, actuellement président de la commission des lois, a constitué une étape importante dans la prise en compte, par le législateur, de l’évolution des pratiques funéraires constatée ces deux dernières décennies.
Cette loi a notamment cherché à renforcer les protections légitimes des familles.
Comme vous l’avez rappelé dans votre question, la loi a instauré un modèle de devis pour les prestations funéraires. Au terme d’une concertation approfondie avec les élus, les professionnels, les associations de consommateurs et les représentants des salariés, le Gouvernement a fait le choix de définir, par un arrêté du 23 août 2010, une terminologie commune de nature à faciliter les comparaisons des tarifs entre opérateurs de pompes funèbres.
Ce modèle de devis est en vigueur depuis le 1er janvier 2011.
Depuis cette date, certains préfets ont déjà engagé des sanctions administratives à l’encontre d’entreprises n’ayant pas respecté ce modèle. L’habilitation d’un opérateur funéraire a ainsi été suspendue par un préfet.
Le ministre de l’intérieur a demandé à ses services de dresser, dans les prochaines semaines, un état des lieux de l’application de cette réglementation.
Enfin, vous appelez de vos vœux un « encadrement des prix ». Une telle mesure, qui irait à l’encontre des objectifs de la loi de 1993 évoquée précédemment, risquerait de ne pas aller dans l’intérêt des consommateurs en raison des restrictions qu’elle apporterait à l’exercice de la libre concurrence entre opérateurs funéraires. Pour cette raison, le Gouvernement n’y est pas favorable.
Comme vous pouvez le constater, le Gouvernement est conscient des difficultés qui peuvent ponctuellement exister et dont vous vous faites l’écho. Dans ce cadre, en particulier sur la mise en œuvre de l’arrêté « modèle de devis », le ministre de l’intérieur est prêt à envisager, une fois établi l’état des lieux que je viens de mentionner, et lorsqu’il l’aura évoqué avec le ministre de l’économie, également compétent, de compléter les instructions déjà données aux préfets par une demande de renforcement des contrôles.
Voilà la réponse que je tenais à vous apporter au nom du ministre de l’intérieur. Nous souhaitons que l’encadrement et le contrôle accrus de ces pratiques contribuent à aider les familles confrontées à un deuil.
Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse et de votre compassion.
Je note que des initiatives ont été prises par le Gouvernement, par l’intermédiaire des préfets. Je souhaite connaître les résultats de l’évaluation qui en sera faite par l’administration dans les six mois ou dans l’année qui viennent. Et pourquoi ne pas donner aux sénateurs qui le souhaitent la possibilité de vérifier, avec les préfets ou les sous-préfets, si les choses se sont, ou non, améliorées ? Si tel devait être le cas, monsieur le ministre, je serai bien sûr satisfait de votre réponse.
Je n’ai pas parlé d’encadrement des prix. Néanmoins, certains excès ne sont pas acceptables. En effet, le prix pour une prestation identique peut varier de 90 à 263 euros. Or, vous l’avez rappelé, monsieur le ministre, les familles, dans ces circonstances particulières, ont bien d’autres préoccupations que de discutailler des prix qui leur sont proposés.
Les familles en deuil, quelles qu’elles soient, ont donc besoin de protection, et il appartient à l’État, à la puissance publique, aux préfets et aux sous-préfets d’intervenir dans ce domaine. Je souhaite, comme vous, monsieur le ministre, que cette protection soit renforcée et qu’elle soit véritablement effective.
La parole est à M. Dominique Watrin, auteur de la question n° 1525, adressée à M. le ministre de la ville.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’éducation est un investissement dans le devenir de nos sociétés.
Néanmoins, bien que ce soit une prérogative régalienne, à force de déléguer au niveau local tout en donnant toujours plus d’autonomie aux établissements à moyens constants, l’éducation nationale a progressivement abandonné l’ambition de réussite pour tous.
À la rentrée de 2011, mon département, le Pas-de-Calais, a subi la fermeture de 145 classes, et 37 postes de RASED, ou réseaux d’aide spécialisée aux élèves en difficulté, ont simultanément été supprimés. Pour 2012, on annonce la suppression de 1 020 postes supplémentaires dans le Nord – Pas-de-Calais.
L’arrêt progressif des financements des programmes de réussite éducative, les PRE, cœur de mon interpellation, couronne cette démarche.
Lorsque les programmes de réussite éducative ont été mis en place, ils visaient à « rendre effective l’égalité des chances pour les enfants et les adolescents des quartiers défavorisés ». Le sort que vous leur réservez semble condamner cet objectif.
En effet, la convention entre l’État et les services déconcentrés arrive bientôt à son terme. Les collectivités, qui reprennent déjà à leur compte nombre de projets, devront encore financer partiellement, puis totalement, les recrutements à durée indéterminée des postes de coordinateurs des PRE.
L’organisation de la précarité des contrats par l’État via le financement de contrats à durée déterminée fait porter aux collectivités locales le poids financier de leur qualification en contrats à durée indéterminée.
Cette situation est d’autant plus absurde qu’une commune peut ensuite être alertée par les services préfectoraux sur le risque de dépassement du ratio entre masse salariale et budget communal, et ce alors même qu’on lui impose de nouvelles charges salariales.
Ce désengagement de l’État à l’égard des projets menés dans un but de cohésion sociale est inacceptable, d’autant plus lorsqu’il vise des territoires – c’est le cas de celui que je représente – où seule une politique volontariste peut contribuer à une réduction des inégalités dans les domaines de la santé, de l’éducation, de la réussite scolaire et sociale.
Le travail mené par les équipes en charge des PRE a montré qu’il était possible de développer des coopérations efficaces pour la mise en œuvre d’actions personnalisées auprès des familles. Les personnels des services sociaux locaux collaborent au quotidien et étroitement avec les agents des programmes de réussite éducative dans l’intérêt des familles. Et cela marche ! J’en veux pour preuve le fait que certains PRE sont même cités comme modèle par les services préfectoraux. La réussite scolaire ne se divise pas ; elle nécessite un accompagnement global.
Aussi, outre la destruction du fruit de plusieurs années de travail, l’arrêt du financement des programmes de réussite éducative aura des conséquences néfastes pour l’avenir des enfants, des adolescents et de leurs familles, mais aussi des coordinateurs en place.
Dans ces conditions, monsieur le ministre, quelles mesures envisagez-vous pour dépasser cette situation de blocage, sans pénaliser les territoires où les besoins sont les plus importants. ?
Monsieur le sénateur, vous appelez mon attention sur l’avenir des programmes de réussite éducative, que vous soutenez, et je m’en réjouis.
Le soutien à l’éducation est en effet la priorité de mon ministère. Il représente le premier poste de dépense du budget d’intervention de l’Agence nationale pour la cohésion sociale et l’égalité des chances, l’ACSÉ.
Concrètement, j’ai deux objectifs : d’abord, éveiller l’ambition des plus méritants et favoriser leurs parcours vers l’excellence, avec les cordées de la réussite et les internats d’excellence ; ensuite, accompagner les jeunes qui connaissent des difficultés sociales ou scolaires. Les programmes de réussite éducative participent à cet objectif.
Vous le savez, les équipes pluridisciplinaires de réussite éducative prennent en charge 135 000 enfants pour l’année scolaire 2011-2012.
Depuis sa création en 2005, par Jean-Louis Borloo, 365 140 enfants ont bénéficié du programme de réussite éducative. Au total, 532 programmes de réussite éducative sont déployés dans toute la France sur 718 communes.
Ce programme fonctionne, c’est un succès et, je le constate sur le terrain, ce dispositif est plébiscité par tous, comme l’illustre votre intervention. C’est pourquoi, sur ma proposition, le Gouvernement a souhaité le pérenniser lors du dernier comité interministériel des villes du 18 février 2011, présidé par le Premier ministre François Fillon.
Dans le projet de budget pour 2012 que j’ai présenté devant le Parlement et qui a été voté, 83 millions d’euros sont prévus pour ce programme.
Malgré un contexte de contrainte budgétaire, j’ai tenu à ce que ce programme soit préservé et même consolidé. Ainsi, au niveau local, les préfets et les recteurs d’académie ont reçu l’instruction de poursuivre leur collaboration avec les collectivités locales pour soutenir les programmes de réussite éducative.
Nous avons donc les moyens budgétaires d’agir. Si vous voulez demander qu’il n’y ait pas de désengagement de l’État au niveau des collectivités locales, encore faut-il voter le budget de l’État. Et là, je vous laisse, sans volonté polémique, à votre contradiction, puisque vous avez salué, à juste raison et je vous en remercie, le programme de réussite éducative.
Monsieur le ministre, je vous ai écouté attentivement et je ne manquerai pas de communiquer votre réponse aux acteurs des 27 programmes de réussite éducative qui sont en cours dans mon département, le Pas-de-Calais.
Vous soulignez une contradiction. Elle est chez vous. Vous dites que l’objectif est de « pérenniser » les programmes de réussite éducative.
Vous affirmez que le budget prévu est suffisant. C’est là un discours de ministre. Sur le plan départemental, les responsables des programmes de réussite éducative, les maires qui sont engagés dans ce dispositif reçoivent d’autres informations de la part des préfets. Ainsi, une commune qui souhaite renouveler un contrat de coordinateur de programme de réussite éducative se voit proposé un financement dégressif de l’État, par exemple 50 % en 2012, 25 % en 2013, puis plus rien à partir de 2014, si elle veut pérenniser le poste et le transformer en contrat à durée indéterminée. Il se peut aussi qu’on lui propose tout simplement de mettre fin au contrat. Telle est la réalité dans les départements !
Les problèmes que rencontrent les territoires résultent du cumul d’échecs scolaires, de difficultés sociales et de problèmes de santé. Les communes qui y sont confrontées sont aussi celles qui sont les plus pauvres.
La politique de la ville avait précisément pour objectif de corriger ces inégalités. Or, force est de le constater, le nouveau désengagement de l’État, et c’est pour cela que nous n’avons pas voté les budgets que vous avez évoqués, conduit à un arrêt progressif, voire définitif, de certains de ces programmes, et je le regrette.
La parole est à Mme Patricia Schillinger, auteur de la question n° 1522, transmise à M. le ministre chargé de l’industrie, de l’énergie et de l’économie numérique.
Je souhaitais attirer l’attention de M. François Baroin sur les intentions du groupe Peugeot scooters de fermer son site de Dannemarie, dans le Haut-Rhin, et, plus particulièrement, sur les inquiétudes que cette annonce suscite auprès des salariés de l’usine, mais également auprès des élus et des habitants du Sundgau, qui craignent pour le dynamisme et l’avenir économique de leur territoire.
Au début du mois de décembre, la direction préférait parler de réorganisation, alors qu’elle avait confirmé son intention de fermer le site de Dannemarie lors de la présentation d’un plan de restructuration durant un comité central d’entreprise qui s’est tenu dans le Doubs, le 25 novembre 2011.
Depuis, la direction s’est voulue rassurante en promettant qu’aucun salarié ne serait laissé de côté. Elle a ainsi annoncé le reclassement de 100 salariés vers le site de Peugeot Mulhouse – en fait uniquement une vingtaine – et Sochaux, ainsi que le reclassement de 40 salariés vers le siège de l’entreprise à Mandeure, dans le Doubs.
Cette proposition traduit l’incompréhension des dirigeants de l’entreprise quant à l’impact d’une telle fermeture, sur les salariés eux-mêmes, sur leurs familles et, au-delà, sur l’ensemble de la zone située autour de Dannemarie.
En effet, Peugeot scooters est le poumon économique de la ville et la solution proposée par le P-DG de Peugeot ne répond pas aux conséquences que provoquera cette fermeture dans un bassin économique que l’entreprise contribue largement à irriguer.
Par ailleurs, les solutions de reclassement avancées par la direction ne satisfont en aucune façon les salariés qui ne souhaitent pas travailler sur un site géographiquement éloigné de leur lieu d’habitation, ou encore être contraints de déménager.
De plus, les salariés ne sont nullement rassurés quant à la pérennité de leurs emplois lorsqu’ils observent la situation du site de Mandeure, également en proie à des difficultés, avec la délocalisation annoncée d’une grande partie des moyens de recherche et de développement en Chine.
Ce nouveau coup dur porté à l’industrie alsacienne suscite indignation et incompréhension auprès des habitants du département et auprès des élus, surtout lorsqu’on sait ce que la collectivité a investi pour favoriser le développement de Peugeot scooters à Dannemarie.
En effet, alors que l’industrie haut-rhinoise comptait près de 72 300 salariés au troisième trimestre de 2001, on n’en dénombre plus que 53 900 au deuxième trimestre 2011, avec un taux de chômage qui a lui doublé sur la même période, passant de 4, 8 % en 2001 à 8, 7 % aujourd’hui.
L’incompréhension est d’autant plus grande au regard de certains choix stratégiques opérés, voir de l’absence observée de stratégie, notamment lorsque l’on considère l’acquisition récente par La Poste de 3 000 scooters d’origine asiatique.
Enfin, le manque de coopération des dirigeants de l’entreprise dans le cadre de l’expertise comptable commandée par les syndicats laisse penser que, si la branche « scooter » peut être déficitaire, le site de Dannemarie n’en demeure pas moins rentable du fait de la croissance de son activité de sous-traitance de la branche automobile.
Monsieur le ministre, quelle est la position du Gouvernement sur ce sujet ? Entendez-vous rappeler à Peugeot sa responsabilité d’employeur et l’encourager à maintenir une activité industrielle pérenne sur le site de Dannemarie et, dans l’affirmative, quels moyens êtes-vous prêt à mettre en œuvre ?
Madame la sénatrice, je vous demande tout d’abord de bien vouloir excuser l’absence de mon collègue Éric Besson, actuellement retenu.
Comme vous, le Gouvernement est très attentif à la situation de chacune et de chacun des 141 salariés du site Peugeot Scooters de Dannemarie.
Il est aussi très attentif à l’avenir industriel de ce territoire. Comme vous le savez – vous l’avez d'ailleurs rappelé –, l’activité scooters du groupe PSA est déficitaire depuis maintenant onze ans et les ventes ont baissé de 30 % ces quatre dernières années.
Cette évolution est imputable non pas tant à une concurrence acharnée qu’à des changements d’habitude et de préférence des consommateurs.
En réaction à ces évolutions, PSA a mis en œuvre un plan pour renforcer sa gamme de produits, son réseau de distribution et son modèle de production.
C’est dans ce contexte que, en décembre dernier, Peugeot Scooters a annoncé à ses salariés de Dannemarie un plan de réorganisation de la production de scooters vers les sites de Mandeure et de Mulhouse. Cette activité restera donc bien en France.
Par ailleurs, il faut le rappeler, la démarche initiée par Peugeot Scooters reste très clairement fondée sur le principe du volontariat.
Tous les salariés de Dannemarie se verront proposer une solution de mobilité en Franche-Comté. Bien entendu, les salariés qui préféreraient une mobilité externe bénéficieront d’un accompagnement spécifique, notamment en matière de formation. Il faudra voir combien de salariés souhaitent volontairement bénéficier de ces mesures de mobilité, mais il semble que nombre d'entre eux aient déjà fait part informellement de leur souhait de se saisir de ces opportunités de mobilité.
C’est pourquoi le Gouvernement a demandé expressément à PSA de veiller au maintien d’activités industrielles durables à Dannemarie. Vous le savez, deux réunions sur la revitalisation du site ont déjà eu lieu en décembre avec l’ensemble des parties prenantes, notamment les élus concernés et l’État.
Une nouvelle réunion a été programmée hier même à la sous-préfecture d’Altkirch. Nous serons extrêmement attentifs aux moyens mobilisés par PSA dans ce processus. Nous attendons de Peugeot Scooters un comportement exemplaire en la matière et une responsabilité citoyenne.
Madame la sénatrice, sachez enfin que l’État mobilisera si nécessaire les aides à la réindustrialisation des territoires pour accueillir de nouvelles activités industrielles sur le site de Dannemarie.
La Franche-Comté, qui, rappelons-le, est la première région industrielle de France, conservera ainsi toute son attractivité.
Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse. J’espère toutefois ne pas devoir l’interpréter comme un aveu d’impuissance de l’État.
Cette impuissance est d’autant moins acceptable que le Président de la République déclare ne pas être « l’homme d’un nouveau Vilvoorde ».
Pourtant, dans mon département du Haut-Rhin, vous le savez bien, la liste des faillites industrielles est longue. Aussi est-il urgent d’agir et de repenser notre politique économique.
Par respect pour les collectivités territoriales, qui ont investi des milliers d’euros, il est urgent de réagir face au désengagement des grands groupes. Les élus ne veulent pas d’une nouvelle friche industrielle. Or, d’après ce que j’ai entendu hier, les grands groupes ne souhaitent pas investir dans le site, lequel restera donc vide dans les années à venir, puisque l’on sait très bien par ailleurs qu’il n’y aura pas de repreneur.
Pour la ville de Dannemarie, c’est un véritable échec ; pour les foyers concernés et pour la zone industrielle, c’est une nouvelle terrible, surtout au regard des formations qui étaient liées à l’entreprise Peugeot Scooters.
J’attends donc vraiment que l’État s’engage pour que ce site ne devienne pas une friche industrielle.
La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, auteur de la question n° 1524, adressée à M. le ministre de la culture et de la communication.
Monsieur le ministre, la loi relative à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision, que nous avons définitivement adoptée le 4 février 2009, prévoyait, à l’article 75, la création par décret d’un comité de suivi chargé d’évaluer son application. Cette disposition, initialement introduite par un amendement de notre commission des affaires culturelles, devenue depuis la commission de la culture, de l’éducation et de la communication, avait pour objectif d’accompagner la mise en œuvre de la réforme, notamment sur les modalités de financement de l’audiovisuel public.
Le comité de suivi, composé de quatre députés et de quatre sénateurs, était censé vérifier l’adéquation des ressources attribuées à France Télévisions avec celles qui sont nécessaires à la mise en œuvre des missions de service public de cette société. Nous avions aussi prévu qu’il puisse proposer une adaptation des « taxes télécoms ». Enfin, il devait transmettre chaque année au Parlement un rapport sur ses travaux. Déjà conscients que l’évolution de l’économie du secteur conditionnerait partiellement celle du financement du service public audiovisuel, nous avions chargé ce comité de faciliter une application cohérente de la loi.
Or, depuis le vote de cette loi, le décret permettant la création du comité n’est jamais paru.
En revanche, chaque loi de finances adoptée depuis a été l’occasion de modifier différentes dispositions concernant le financement de France Télévisions, au regard, bien sûr, de la situation économique : je pense par exemple à la taxe sur les revenus publicitaires des chaînes privées ; je pense également au maintien de la publicité diurne sur les chaînes publiques jusqu’en 2016, à la suite du moratoire que j’avais proposé, ainsi qu’aux débats sur l’évolution de l’assiette de l’ancienne redevance audiovisuelle, aujourd'hui appelée « contribution à l’audiovisuel public ».
Concernant les « taxes télécoms », sur lesquelles j’ai toujours émis des réserves, la Commission européenne a décidé, le 14 mars 2011, de traduire la France devant la Cour de justice de l’Union européenne, à la suite de son refus de revenir sur le principe de la taxe appliquée aux fournisseurs d’accès à internet.
Monsieur le ministre, vous en conviendrez, ces différents éléments prouvent bien que le comité de suivi aurait été très utile à l’évolution des dispositions contenues dans la loi, compte tenu notamment de notre situation économique. Je considère pour ma part que ce comité est plus que jamais d’actualité.
Dès lors, pouvez-vous m’indiquer les mesures que le Gouvernement compte prendre pour que soit enfin publié le décret d’application et que le comité puisse entamer son travail de réflexion et proposition ?
Madame la sénatrice, je vous demande tout d’abord de bien vouloir excuser l’absence de mon collègue Frédéric Mitterrand, qui est actuellement retenu.
L’article 75 de la loi n° 2009–258 du 5 mars 2009 relative à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision – texte que vous connaissez bien puisque vous en avez été le rapporteur ici même – a effectivement instauré un comité de suivi, composé de parlementaires.
Vous l’avez rappelé, ce comité est chargé d’évaluer l’application de la loi qui l’a créé et de proposer des adaptations des modalités de financement de France Télévisions ainsi que des taxes prévues aux articles 302 bis KG et 302 bis KH du code général des impôts.
Madame le rapporteur de ce texte devant la Haute Assemblée, une ambiguïté rédactionnelle a toutefois retardé l’adoption du décret fixant les modalités de fonctionnement de ce comité : la rédaction actuelle de l’article 75 pourrait en effet laisser croire à l’existence d’un lien ente le produit de ces taxes et le financement de France Télévisions.
Or, comme vous le savez, tel n’est pas le cas, et telle n’était d'ailleurs pas la volonté des auteurs de l’amendement dont est issu l’article 75 : ces taxes abondent le budget de l’État, et leur produit n’est pas affecté à France Télévisions.
Ce faisant, par l’ajout de l’adverbe « notamment » – adverbe qui pose parfois beaucoup de difficultés au moment de la prise des décrets d’application –, cet article permet de ne pas limiter les compétences du comité de suivi en fonction de la seule évolution du produit de la contribution à l’audiovisuel public en lui offrant la possibilité de se fonder sur d’autres critères pour proposer des adaptations des taxes et des modalités de financement de France Télévisions.
C’est pourquoi le Gouvernement a souhaité supprimer cette ambiguïté rédactionnelle en déposant un amendement au premier projet de loi de finances rectificative pour 2011.
Cet amendement avait pour objet de clarifier le contrôle exercé par le Parlement en lui offrant la possibilité de se fonder sur d’autres critères que l’évolution du produit des recettes fiscales pour proposer des adaptations des taxes et des modalités de financement de France Télévisions.
Vous le savez : adopté par le Parlement, l’amendement a toutefois été censuré par le Conseil constitutionnel, lequel a considéré qu’il était étranger au domaine des lois de finances, dans sa décision du 28 juillet 2011.
Le Gouvernement étudie donc aujourd'hui les modalités permettant la publication du décret d’application de l’article 75 de la loi du 5 mars 2009 dans les meilleurs délais, afin que le comité de suivi puisse être constitué, comme vous l’avez souligné à raison dans votre intervention, madame la sénatrice.
Monsieur le ministre, je vous remercie des précisions que vous venez de m’apporter.
Je note que le Gouvernement a essayé de lever l’ambiguïté rédactionnelle qui caractérise la rédaction actuelle de l’article 75 de la loi de 2009.
J’insiste absolument sur la nécessité de trouver les voies et les moyens pour que le comité de suivi puisse enfin être installé et engager le travail nécessaire car la suite à donner au moratoire reportant à 2016 la suppression totale de la publicité donnera lieu à de nouvelles réflexions et à de nouveaux débats.
Je rappelle que Mme Albanel, alors ministre de la culture et de la communication, avait promis la création de ce comité parce que des parlementaires – dont mon collègue député Jean Dionis du Séjour, mais aussi moi-même – avaient à juste titre émis le souhait qu’une réflexion puisse être menée sur l’évolution de l’assiette de la contribution à l’audiovisuel public, ce qui avait été reconnu comme nécessaire.
Le comité de suivi aura donc au moins à travailler sur ce sujet important.
En outre, pour nos deux assemblées, ce serait une façon un peu cohérente, un peu structurée de suivre l’évolution d’une loi qui nous tient particulièrement à cœur : la loi sur le service public de la télévision au bénéfice de nos concitoyens.
Monsieur le ministre, je vous remercie donc de faire passer le message que le comité de suivi doit absolument pouvoir se réunir.
La parole est à M. Jean-Pierre Chauveau, auteur de la question n° 1486, adressée à M. le ministre de l’agriculture, de l’alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l’aménagement du territoire.
Monsieur le ministre, comme vous le savez, la filière betteravière française est à la croisée des chemins. Ainsi, elle vient de connaître une année record avec une campagne exceptionnelle qui récompense tous les efforts engagés par la profession : la combinaison de très bons rendements et de l’augmentation des surfaces fait que les betteraviers français produiront entre 37 et 38 millions de tonnes, niveau encore jamais atteint.
Pourtant, et paradoxalement, cette filière est extrêmement inquiète pour son avenir. En effet, l’attitude de la Commission européenne est fortement décriée par les producteurs de betteraves : ils estiment qu’aucune remarque des producteurs n’a été prise en compte lors des récentes négociations, alors que le principe de la reconduction du règlement « sucre » pour la campagne 2015–2016 serait abandonné.
L’Union européenne est déficitaire en sucre : la suppression des quotas et du prix minimum garanti risque de déstabiliser une filière pourtant reconnue pour la qualité de son organisation. La colère des planteurs est accentuée par le fait que la Commission européenne n’a transmis aucune explication aux représentants de la profession. Cette position est d’autant plus surprenante qu’elle s’oppose à celle du Parlement européen qui demande, quant à lui, la reconduction du règlement sucre jusqu’en 2020. La position du Parlement européen semble acceptable et devrait inspirer la Commission qui semble rester sourde à tous les appels.
Ce sujet revêt une importance majeure, puisque l’économie betteravière représente, en France, plus de 25 000 planteurs, pour un chiffre d’affaires de 800 millions d’euros. La France est d’ailleurs le premier producteur mondial de sucre de betterave.
Chaque année la betterave européenne améliore ses rendements et pourrait atteindre la compétitivité de la canne à sucre brésilienne à l’horizon de 2020. Il convient alors de ne pas briser cet élan. À cette fin, l’application de l’actuel règlement sucre pourrait être maintenue, afin de combler l’écart de 30 % entre les coûts de production.
Les planteurs souhaitent voir reconduits les dispositifs réglementaires jusqu’en 2020, mais aussi préservé et renforcé le cadre contractuel betteravier, y compris les accords interprofessionnels. Cette question est essentielle puisqu’il s’agit de garantir, à moyen terme, la sécurité d’approvisionnement de l’Union européenne, sans oublier l’importance de la valeur agronomique de la betterave qui est irremplaçable pour diversifier la rotation des cultures et dont l’abandon comporte des réelles menaces en termes de biodiversité. Cette valeur de la betterave doit également être examinée à l’aune de nos besoins en matière de biocarburants.
Dans ce contexte, je souhaiterais connaître, monsieur le ministre, la position que le gouvernement français entend adopter pour défendre la filière betteravière.
Monsieur le sénateur, je vous demande tout d’abord de bien vouloir excuser l’absence de Bruno Le Maire, que vous avez interrogé sur la disparition programmée des quotas dont bénéficie aujourd’hui le secteur betteravier.
Vous le savez, le ministre de l’agriculture, sous l’impulsion du Président de la République, a fait de la régulation des marchés agricoles la pierre angulaire de son action, au niveau européen comme au niveau international.
La France s’oppose résolument, je le dis clairement devant le Sénat, à une libéralisation des marchés agricoles dont les conséquences sur le revenu de nos producteurs sont d’ores et déjà connues. Quelles que soient les filières – car la filière betteravière n’est pas la seule en cause –, nous avons besoin de régulation et d’instruments d’intervention sur le marché.
Au niveau communautaire, le secteur sucrier bénéficie, vous l’avez rappelé, d’un encadrement du marché qui garantit aux producteurs une stabilité, grâce aux instruments de régulation que sont, essentiellement, le prix minimum garanti de la betterave, la limitation des possibilités de production nationale pour le sucre alimentaire et non alimentaire et la prise en compte des accords interprofessionnels. L’organisation commune du marché du sucre en vigueur prévoit le maintien de ce régime jusqu’au terme de la campagne de commercialisation 2014–2015.
Si la réforme de la politique agricole commune implique une réflexion sur le fonctionnement du marché agricole européen, cette réflexion ne doit pas, pour autant, remettre en cause les principes fondateurs de ce système, notamment les instruments de maîtrise de la production qui ont fait leurs preuves, comme les quotas sucriers.
Dans le cadre de la préparation de cette réforme, la Commission européenne a cependant proposé, le 13 octobre 2011, de ne pas reconduire le régime des quotas au-delà de 2015.
Cette proposition ne prend pas en compte les enjeux liés au maintien des quotas, qui ont permis de développer une filière dynamique et de stabiliser le marché sucrier. La France, comme vous, monsieur le sénateur, ne l’accepte pas.
C’est pourquoi le ministre de l’agriculture a rappelé, lors des réunions du Conseil des ministres de l’agriculture d’octobre et de novembre dernier, son attachement à la prolongation des quotas sucriers et du prix minimum de la betterave jusqu’en 2020. Soyez assuré de sa détermination, et de celle du Gouvernement, à défendre les quotas et le prix minimum de la betterave.
Je remercie très sincèrement M. le ministre de l’agriculture et le Gouvernement de leur action en faveur de l’agriculture, en général, et du maintien de l’encadrement des prix de la filière betteravière, en particulier, car ce secteur est probablement l’un des plus prometteurs de notre agriculture. La position du Gouvernement répond tout à fait aux attentes des betteraviers : je sais que le Gouvernement les soutiendra, comme les parlementaires, d’ailleurs.
Mes chers collègues, nous en avons terminé avec la séance des questions orales avec une demi-heure d’avance, grâce à la concision de vos questions et des réponses des différents ministres.
Monsieur le président, lors du scrutin n° 93 sur l’ensemble de la proposition de loi visant à réprimer la contestation de l’existence des génocides reconnus par la loi, M. Bernard Saugey a été déclaré comme s’étant abstenu, alors qu’il souhaitait voter pour.
Acte vous est donné de cette mise au point, mon cher collègue. Elle sera publiée au Journal officiel et figurera dans l’analyse politique du scrutin.
À la demande de la commission des affaires sociales et en accord avec le Gouvernement, il est proposé d’avancer à dix-neuf heures l’examen de la proposition de loi relative à l’exercice des professions de santé par les titulaires de diplômes étrangers.
Il n’y a pas d’opposition ?...
Il en est ainsi décidé.
L’ordre du jour de cet après-midi s’établit donc comme suit :
À 14 heures 30 :
- Hommage aux soldats français en Afghanistan.
- Projet de loi fixant au 11 novembre la commémoration de tous les morts pour la France.
À 19 heures :
- Proposition de loi relative à l’exercice des professions de santé par les titulaires de diplômes étrangers.
Mes chers collègues, l’ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à douze heures cinq, est reprise à quatorze heures trente, sous la présidence de M. Jean-Pierre Bel.