La commission examine le rapport et les textes de la commission sur la proposition de résolution européenne n° 112 (2012-2013) relative à la stratégie européenne pour les régions ultrapériphériques à l'horizon 2020 et sur la proposition de résolution européenne n° 113 (2012-2013) sur l'Union européenne et le financement des régions ultrapériphériques françaises.
J'ai l'honneur de vous présenter aujourd'hui mon rapport sur les deux propositions de résolution européenne dont nous avons débattu la semaine dernière avec la commission des affaires européennes et la délégation sénatoriale à l'outre-mer, à savoir la proposition de résolution européenne, initiée par la délégation sénatoriale à l'outre-mer et déposée par nos collègues Roland du Luart et Georges Patient, relative à la stratégie européenne pour les régions ultrapériphériques à l'horizon 2020 et la proposition de résolution européenne, déposée par notre collègue Georges Patient au nom de la commission des affaires européennes, portant sur l'Union européenne et le financement des régions ultrapériphériques françaises.
Je souhaite tout d'abord vous rappeler ce que sont les régions ultrapériphériques (RUP) : on compte cinq RUP françaises (les quatre départements d'outre-mer ainsi que la collectivité de Saint-Martin, deux RUP portugaises (les régions autonomes des Açores et de Madère) et une RUP espagnole (la communauté autonome des Canaries). Enfin, Mayotte deviendra une RUP le 1er janvier 2014.
Les RUP font partie intégrante du territoire de l'Union européenne et le droit communautaire s'applique donc à elles. Elles se différencient en cela des pays et territoires d'outre-mer (PTOM), comme Saint-Barthélemy, Saint-Pierre-et-Miquelon, la Polynésie française, Wallis-et-Futuna ou la Nouvelle-Calédonie, sur le territoire desquels le droit communautaire ne s'applique pas.
Pourquoi ces deux propositions de résolution européenne ont-elles été déposées ? La réponse est simple : la période actuelle est décisive pour l'avenir des RUP.
Tout d'abord, les négociations sur le cadre financier pluriannuel de l'Union sont d'une importance capitale pour les RUP.
Le 29 juin 2011, la Commission européenne a publié ses premières propositions sur le cadre financier pluriannuel pour 2014-2020, autrement dit le budget de l'Union européenne pour les sept années à venir. Les négociations sont en cours depuis lors et le Conseil européen des 22 et 23 novembre prochain pourrait constituer un tournant.
Le cadre financier fixera notamment le montant que l'Union consacrera à sa politique de cohésion : il s'agit d'une politique vitale pour les régions ultrapériphériques.
Les RUP françaises ont ainsi bénéficié sur la période 2007-2013 de près de 3,2 milliards d'euros, dont 1,8 milliard d'euros au titre de l'objectif « convergence », qui vise les régions de l'UE les moins favorisées, et 484 millions d'euros au titre de l'allocation de compensation spécifique aux RUP et aux régions septentrionales.
Vous comprenez aisément pourquoi les négociations en cours représentent un enjeu majeur pour les RUP.
Ensuite, la Commission européenne a publié en juin dernier une communication intitulée « les régions ultrapériphériques de l'Union européenne : vers un partenariat pour une croissance intelligente, durable et inclusive ». Dans ce document, la Commission a présenté la stratégie de l'Union pour les RUP : il s'agit du troisième document de ce type en moins de dix ans.
Enfin, dernier élément de contexte, le 1er juillet 2014 constitue une échéance décisive pour l'octroi de mer.
Ce dernier est une taxe spécifique aux départements d'outre-mer : il s'agit d'un impôt sur les marchandises, permettant de taxer les importations et les productions locales - ces dernières étant cependant moins taxées.
La spécificité de cet impôt est qu'il finance les collectivités territoriales, le montant total des recettes atteignant plus d'un milliard d'euros. L'octroi de mer représente par exemple près d'un tiers des recettes des communes des DOM.
Or, l'octroi de mer déroge au principe européen de libre circulation des marchandises. En 2004, le Conseil n'a autorisé son maintien que jusqu'en 2014. Au vu des montants en jeu, l'avenir de l'octroi de mer est un sujet d'inquiétude pour tous les élus locaux des DOM.
Au-delà de ce contexte, les deux propositions de résolution interviennent alors que les représentants des RUP ne cessent de souligner que les réalités de ces régions sont insuffisamment prises en compte au niveau européen.
Un outil juridique existe pourtant : l'article 349 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE) qui permet la mise en oeuvre de mesures spécifiques en faveur des RUP, ceci afin de tenir compte de leurs handicaps.
Cet article est cependant très insuffisamment utilisé, comme l'ont souligné tant le Parlement européen dans une résolution datant d'avril 2012 que l'excellent rapport d'octobre 2011 de l'ancien ministre et ancien commissaire espagnol, M. Pedro Solbes Mira.
Seul un dispositif de soutien existe réellement : il s'agit du programme d'option spécifique à l'éloignement et à l'insularité, le POSEI. Il a été conçu dans une logique plurisectorielle mais son champ a été restreint à l'agriculture.
Dans ces conditions, on ne peut que saluer l'initiative prise par le Gouvernement français en septembre dernier. Le ministre des outre-mer a lancé une initiative à l'occasion de la Conférence des présidents des RUP, afin de mettre en place, je cite, « un cadre global approprié pour les interventions communautaires dans les RUP ». Ce cadre se concrétiserait par la mise en place d'un programme de type POSEI d'aides aux entreprises dans les filières d'avenir. Cette initiative rejoint les préoccupations exprimées à maintes reprises par les représentants des RUP.
Je souhaite également rappeler que le Sénat s'est prononcé solennellement à deux reprises au cours des deux dernières années sur la prise en compte des spécificités des RUP : en mai 2011, il s'agissait de demander la compensation des effets, sur l'agriculture des DOM, des accords commerciaux conclus par l'Union européenne avec des pays sud-américains ; en juillet 2012, il s'agissait d'obtenir la prise en compte par l'Union européenne des réalités de la pêche des RUP françaises.
A l'occasion de ces deux résolutions, le Sénat a appelé à une plus grande utilisation de l'article 349 et a dénoncé l'incohérence de la politique commerciale de l'Union avec les autres politiques sectorielles.
L'action du Sénat n'a d'ailleurs pas été vaine : en matière de pêche, le Conseil des ministres du 24 octobre 2012 a adopté une orientation générale qui comprend plusieurs avancées allant dans le sens de la création d'un véritable « POSEI pêche », qui correspondent aux demandes formulées par le Sénat dans la résolution de juillet 2012.
Cependant, la communication de la Commission de juin 2012 et les propositions de la Commission s'agissant de la politique de cohésion constituent deux nouvelles illustrations du défaut de prise en compte des réalités des RUP par la Commission européenne.
S'agissant de la communication de la Commission, elle est en net décalage avec les attentes des RUP. En tant que rapporteur, j'ai sollicité les présidents des quatre conseils régionaux des DOM : ces derniers sont unanimes dans leur critique de ce document, jugé sans ambition et sans mesures concrètes en faveur des RUP.
Plus précisément, ce document illustre les contradictions de la stratégie de l'Union à l'égard des RUP : la Commission reconnaît que ces régions constituent un atout pour l'Europe. Elle fixe des objectifs stratégiques ambitieux, en termes de compétitivité ou d'innovation, mais parle bien peu des politiques de rattrapage dont ces régions ont besoin.
S'agissant de la politique de cohésion, la Commission européenne propose notamment une baisse de 43 % de l'allocation spécifique aux RUP et que 50 % du FEDER soient consacrés à trois objectifs : la recherche, la compétitivité des PME et la promotion d'une économie à faible teneur en carbone. Sous l'impulsion du Conseil, un quatrième objectif a été ajouté : l'amélioration de l'accès aux technologies de l'information et de la communication (TIC).
Ce fléchage, ou cette « concentration thématique » pour reprendre le vocabulaire communautaire, est inadapté aux réalités des RUP. Comme l'indiquaient nos collègues Yann Gaillard et Simon Sutour dans un rapport fait en 2011 au nom de la commission des affaires européennes, je cite, « l'investissement des fonds structurels dans ces territoires doit pouvoir s'orienter vers les besoins locaux prioritaires, notamment en infrastructures ».
Les deux propositions de résolution interviennent donc dans ce contexte.
La proposition de résolution initiée par la délégation sénatoriale à l'outre-mer constitue un texte de « réaction » suite à la communication de la Commission européenne : elle souligne notamment le décalage entre la communication de la Commission européenne et les attentes des RUP ; elle note les contradictions inhérentes à cette communication, notamment le fossé existant entre les objectifs stratégiques très ambitieux et les nécessaires politiques de rattrapage ; elle demande l'assouplissement de la concentration thématique ; elle salue l'initiative prise par le ministre des outre-mer ; elle réaffirme, enfin, la nécessité d'une véritable mise en cohérence des politiques communautaires, et notamment de la politique commerciale avec les autres politiques communautaires.
S'agissant de la proposition de résolution de la commission des affaires européennes, les éléments suivants me paraissent particulièrement importants : le cadre financier pluriannuel 2014-2020 doit illustrer concrètement la reconnaissance des RUP comme un atout pour l'Europe, en cohérence avec la communication de la Commission européenne ; la proposition de résolution demande le maintien du niveau de l'allocation spécifique pour les RUP, ainsi que l'assouplissement de la concentration thématique ; s'agissant de l'octroi de mer, le texte invite le Gouvernement à entamer dès à présent le dialogue avec la Commission sur ce dossier ;
Au terme de mes travaux, j'estime que ces deux propositions de résolution sont deux initiatives bienvenues et pleinement complémentaires : elles constituent à mes yeux un soutien utile au Gouvernement dans le cadre des négociations en cours au niveau européen et, pour ce qui concerne l'octroi de mer, un appel à la mobilisation du Gouvernement.
Comme je vous l'indiquais, j'ai sollicité les présidents des quatre conseils régionaux d'outre-mer : à la lecture de leurs contributions, je ne peux que souligner leur parfaite harmonie avec les deux propositions de résolution.
Je souhaite formuler quelques observations complémentaires.
Tout d'abord, à mes yeux, l'article 349 constitue le véritable « Graal » des RUP. Il reste cependant quelque peu virtuel : la priorité du Gouvernement français doit donc être la reconnaissance par la Commission européenne de la portée de cet article et son « utilisation adéquate et systématique », pour reprendre les termes figurant dans le rapport de M. Pedro Solbes Mira ;
S'agissant ensuite de la politique commerciale, la proposition de résolution européenne reprend la position exprimée à plusieurs reprises par notre Haute assemblée. Je ne peux que rappeler l'impact potentiellement dévastateur de la politique commerciale de l'Union sur les petites économies ultramarines.
S'agissant de la politique de cohésion, je souhaite souligner que les taux de consommation des fonds structurels sont, contrairement à une idée répandue - notamment à Bruxelles - du même ordre dans les DOM que dans l'Hexagone. La prétendue faible capacité des RUP à consommer les fonds européens n'est donc qu'un mirage.
Enfin, s'agissant de l'octroi de mer, la proposition de résolution de la commission des affaires européennes s'adresse davantage au Gouvernement français qu'aux institutions européennes. Je regrette d'ailleurs que, sous le précédent quinquennat, celui-là se soit désintéressé de cette question pourtant essentielle pour les collectivités territoriales d'outre-mer.
Le texte de la commission des affaires européennes semble en effet renoncer à la prolongation de l'octroi de mer au-delà du 1er juillet 2014, ce qui constitue pourtant la position du Gouvernement actuel et le souhait des élus locaux ultramarins, pour privilégier des pistes alternatives dont la faisabilité et l'impact sur les populations et les collectivités ultramarines n'a pas été expertisée. La proposition de résolution pourrait donc affaiblir le Gouvernement dans ses négociations avec la Commission européenne.
S'agissant de la piste de la TVA régionale comme solution de substitution à l'octroi de mer, je suis ainsi sceptique : l'octroi de mer ne pesant pas sur les services, un tel remplacement conduirait à taxer les services, ceci dans un contexte où la vie chère est un sujet de préoccupation quotidien pour nos concitoyens ultramarins ; par ailleurs, le remplacement de l'octroi de mer conduirait à plus que le doublement du taux actuel de la TVA dans les trois départements où elle est applicable...
Je vous proposerai donc un amendement visant réaffirmer le souhait du Sénat de voir l'octroi de mer prolongé au-delà du 1er juillet 2014. Quoiqu'il en soit, la balle est aujourd'hui dans le camp du Gouvernement : il doit présenter à la Commission européenne un dossier solide justifiant le dispositif.
En conclusion, vous comprendrez aisément que je vous propose d'adopter ces deux propositions de résolution européenne, sous réserve de quelques modifications pour ce qui concerne le texte de la Commission des affaires européennes.
L'objectif est clair : pour reprendre les termes de M. Rodolphe Alexandre, président du conseil régional de la Guyane, il s'agit de mettre en place, je cite, « une Europe plus pragmatique, plus efficace, davantage au fait des préoccupations réelles des populations de ses régions ultrapériphériques et soucieuse d'y apporter des réponses adaptées ».
Une petite remarque suite au débat de la semaine dernière avec la commission des affaires européennes : il me semble que l'octroi de mer est une « super-TVA ». Alors que cette recette est essentielle pour les collectivités territoriales, elle n'est pas neutre dans le contexte des débats sur la « vie chère ».
L'octroi de mer date de Colbert. Il pèse sur les produits importés mais aussi sur les produits locaux. Son produit finance les collectivités territoriales. Aux yeux de la Commission européenne, cette taxe peut apparaître comme un droit de douane : c'est pour cela que l'assiette a été élargie aux produits locaux.
L'octroi de mer ne pèse pas sur la valeur ajoutée. La TVA frappe à l'opposé tous les produits, y compris les services. Dans un contexte de vie chère, une éventuelle augmentation toucherait donc les services. Sachant que le produit de l'octroi de mer ne peut être obtenu que par plus qu'un doublement de la TVA, l'impact serait donc dévastateur sur l'économie et sur la population.
Il y a un autre problème : la TVA rentre dans les caisses de l'État. Comment s'assurer que cette recette sera reversée de façon pérenne aux collectivités territoriales ?
La Commission européenne n'est pas opposée au dispositif de l'octroi de mer. Un système équivalent existe d'ailleurs aux Canaries et les autorités nationales espagnoles ont pu démontrer l'utilité de ce dispositif. Le Gouvernement français, malgré la mobilisation des élus ultramarins, n'a produit en 2008 qu'un rapport lacunaire. La Commission est donc dans l'attente d'un rapport montrant que l'octroi de mer est utile. Nous sommes aujourd'hui dos au mur, alors même que plus du tiers des recettes des communes est financé par l'octroi de mer.
La proposition de résolution européenne de la commission des Affaires européennes s'adresse donc plus au Gouvernement qu'aux institutions européennes, pour ce qui concerne l'octroi de mer.
La commission passe ensuite à l'examen des deux propositions de résolution n° 112 (2012-2013) et n° 113 (2012-2013).
Je rappelle à nos collègues du groupe UMP que ces deux propositions de résolution européenne ont été adoptées, la semaine dernière, à l'unanimité de la commission des affaires européennes.
Puis la commission examine quatre amendements déposés par le rapporteur sur la proposition de résolution n° 113 (2012-2013).
Alinéa 16
L'amendement COM-2 est un amendement de précision.
L'amendement COM-2 est adopté.
Alinéa 20
L'amendement COM-1 vise à aligner les deux propositions de résolution européenne sur la question de la concentration thématique : il convient de demander la concentration exigée intègre d'un quatrième objectif prioritaire laissé au libre choix de chaque région et d'abaisser le taux de concentration à un niveau plus adapté aux réalités locales.
L'amendement COM-1 est adopté.
Alinéa 22
L'amendement COM-3 est un amendement de précision.
L'amendement COM-3 est adopté.
Alinéa 30
S'agissant de l'amendement COM-4, comme je l'ai dit précédemment, la proposition de résolution européenne déposée par la commission des affaires européennes porte notamment sur la problématique de l'octroi de mer. A mes yeux, il s'agit avant tout d'un sujet franco-français. Par ailleurs, la proposition de résolution semble renoncer à la prolongation de l'octroi de mer, pourtant souhaitée par les élus locaux ultramarins et qui avait été demandée par la mission sénatoriale de 2009 sur la situation des DOM. Le texte pourrait par ailleurs affaiblir la position du Gouvernement français face à la Commission européenne en suggérant la mise en place de dispositifs dérogatoires alternatifs dont la faisabilité technique et l'impact pour les populations et les collectivités ultramarines n'ont nullement été expertisés.
Cet amendement vise donc à réaffirmer qu'il convient que le Gouvernement obtienne la pérennisation de l'octroi de mer au-delà de 2014 ou, le cas échéant, la mise en place d'un régime fiscal dérogatoire alternatif permettant de soutenir le développement des DOM sans fragiliser les recettes fiscales des collectivités locales.
Il convient de supprimer ces alinéas qui semblent renoncer à la pérennisation de l'octroi de mer et évoquent la solution de la TVA locale.
La question de la mise en place de l'octroi de mer à Mayotte est un sujet franco-français. Mayotte deviendra une RUP en 2014. Il me semble inopportun d'indiquer dans une résolution que le Sénat s'interroge sur la mise en place de l'octroi de mer à Mayotte.
L'amendement COM-4 est adopté.
Pour rassurer nos collègues de l'opposition, je souhaite rappeler que Mme Marie-Luce Penchard, ministre de l'outre-mer, disait en septembre 2011 : « il importe désormais de concentrer nos efforts sur la pérennisation de ce régime de l'octroi de mer ». Il y a donc une certaine continuité politique sur ce sujet.
La proposition de résolution n° 113 sur l'Union européenne et le financement des régions ultrapériphériques françaises, ainsi modifiée, est adoptée.
La commission examine le rapport pour avis sur les crédits de la mission « Économie » du projet de loi de finances pour 2013.
La finalité de la mission « Économie » est de favoriser la mise en place d'un environnement propice à une croissance durable et équilibrée. À ce titre, elle retrace les moyens relatifs à la conception et au pilotage des politiques économiques nationales. Concrètement, il s'agit des moyens des directions du Trésor, de la Législation fiscale et de l'Institut national de la statistique et des études économiques, qui figurent sur les programmes 220 et 305. Ils représentent 53 % des crédits de la mission.
La mission retrace aussi les moyens nécessaires à la mise en oeuvre d'un ensemble de politiques assez disparates relatives à l'accompagnement des entreprises, l'appui aux exportations, l'attractivité touristique, la surveillance du cadre concurrentiel général ou sectoriel, ou à la protection des consommateurs. Ces diverses actions figurent dans le programme 134, désormais intitulé : « Développement des entreprises et du tourisme ».
Globalement, les crédits de la mission « Économie » affichent, pour 2013, une baisse de 184 millions d'euros par rapport à 2012. 80 % de cette baisse s'explique cependant par des modifications de périmètre au sein du programme 134 :
ce programme n'inclut plus, dans le projet de loi de finances 2013, la subvention à La Poste pour son rôle dans le transport de la presse, qui représentait plus de 150 millions d'euros en 2012 ;
il n'inclut plus, non plus, les moyens de la politique de l'emploi et de la formation professionnelle, soit 23 millions d'euros.
Si l'on tient compte de ces modifications de périmètre, le recul des crédits se limite en fait à 2 % par rapport à 2012, ce qui représente toutefois un effort important, d'autant qu'il intervient après trois années consécutives de recul des crédits de la mission. Toutes les actions de la mission sont mises à contribution. Toutefois, on note :
une stabilisation des moyens de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) qui avait été sévèrement touchée par les coupes budgétaires et les réductions d'effectifs au cours des années passées ;
une nouvelle baisse spectaculaire des crédits du Fonds d'intervention pour les services, l'artisanat et le commerce (Fisac), qui tombent à 32 millions d'euros, soit une division par deux en deux ans ;
Du côté des effectifs, on note que le plafond d'emplois de la mission est en hausse (+2,4 %). Cette hausse s'explique cependant par un changement de périmètre. Jusqu'en 2012, les 770 enquêteurs de l'INSEE n'étaient pas comptabilisés dans les effectifs du programme 220 alors même qu'ils travaillaient pour le compte de l'INSEE sous un statut de vacataire-pigiste. En 2013, ces enquêteurs seront intégrés dans le personnel de catégorie C du programme, dont les effectifs connaissent de ce fait une forte augmentation apparente (+13,5 %). À périmètre constant toutefois, les effectifs de la mission « Économie » connaissent une nouvelle baisse de 460 ETP, soit un recul de 3,6 %. Si tous les programmes de la mission sont mis à contribution, c'est cependant le programme 134 qui concentre l'essentiel des suppressions de postes. Après les 777 suppressions intervenues en 2011, les 319 décidées en 2012, on arrive à un total de 1556 suppressions en trois ans (-10 %).
Comme je l'avais annoncé lors de l'audition de la ministre du commerce, de l'artisanat et du tourisme, je souhaite vous proposer, comme nous l'avons fait les années précédentes, de modifier les crédits du Fisac, car celui-ci est un formidable levier de croissance et d'aménagement du territoire. Depuis sa création, il a apporté la preuve de son efficacité pour faire aboutir des initiatives commerciales et artisanales pérennes à un moindre coût pour les finances publiques. Le taux de survie à trois ans des entreprises aidées par le Fisac atteint en effet 95 % alors qu'il est seulement de 65 % en moyenne pour l'ensemble des entreprises nouvelles. Il est incompréhensible que les Économie s budgétaires les plus fortes opérées dans les crédits de la mission « Economie » touchent précisément ce dispositif, qui apporte, année après année, la preuve de sa capacité à concilier solidarité et efficacité.
C'est pourquoi je propose d'abord un amendement pour réformer le financement Fisac, amendement qui pourrait être examiné en première partie du budget. Cet amendement crée une taxe additionnelle à la taxe sur les surfaces commerciales et affecte ce supplément de produit au Fisac. Il vise à lui assurer un financement raisonnable et pérenne, à hauteur de 60 millions d'euros par an. Les collectivités territoriales, affectataires de la taxe de base sur les surfaces commerciales, ne seront pas impactées par cette disposition nouvelle qui établit une solidarité financière entre les grands commerces des zones les plus dynamiques et les petits commerces des territoires les plus fragiles. La taxe additionnelle sur les surfaces commerciales s'applique en effet uniquement sur les établissements de plus de 400 mètres carrés, dont le chiffre d'affaires au mètre carré est supérieur à 12 000 euros et dont le chiffre d'affaires annuel est supérieur à 460 000 euros. Cet amendement d'appel ouvre une voie pour le financement du Fisac. Il est clair que le paramétrage exact du dispositif que je propose ne pourra se faire qu'avec l'appui des services de Bercy. Mais l'important est de lancer le débat.
Je vous proposerai donc également un second amendement, semblable à ceux que nous avons adoptés en 2011 et en 2010. Cet amendement a vocation à être discuté dans la deuxième partie du budget : il modifie la répartition des crédits de la mission pour prendre 27,7 millions à l'action 1 du programme 305 et les affecter au Fisac. Le but n'est pas évidemment de déshabiller ce programme 305 au profit du Fisac, mais de forcer le Gouvernement à augmenter les crédits de la mission à due concurrence de la hausse des crédits du Fisac.
Pour finir, je vous inviterai à donner un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Économie ».
Nous sommes tous attachés au Fisac. Nos territoires en ont besoin et un recentrage de ses crédits sur des aides individuelles au détriment des actions collectives de réaménagement, comme l'a indiqué la ministre, me paraît inopportun. On ne peut pas redynamiser le petit commerce dans un cadre urbanistique inadapté. Je soutiens donc les amendements proposés par notre rapporteur.
J'ajoute qu'il existe aussi un problème concernant les pompes à essence. Toutes les pompes doivent faire l'objet d'une mise aux normes avant fin 2013. Les grands distributeurs l'ont fait depuis longtemps, mais pas les artisans des petits bourgs, car ils n'en ont pas les moyens. Ces points de distribution sont menacés de disparition, ce qui pourrait réduire encore l'attractivité de certains territoires et fragiliser les commerces qui s'y maintiennent encore. Pour subventionner ces mises aux normes, le comité professionnel des distributeurs de carburant dispose de crédits qui provenaient autrefois d'une taxe affectée. Depuis la suppression de celle-ci, en 2000, il est alimenté par des crédits du ministère du commerce et de l'artisanat, mais cette dotation se réduit année après année. Il faut donc revoir le financement de ce comité. Je déposerai un amendement en ce sens pendant les débats de la loi de finances.
Concernant les crédits de la mission « Économie », mon groupe votera contre leur adoption.
S'agissant du financement du Fisac, se posent deux questions : celle de l'attribution de crédits suffisants pour qu'il réalise ses missions en rythme de croisière et celle des moyens nécessaires à la résorption du stock de projets hérités des années précédentes. Ces projets éligibles mais bloqués en raison d'un important sous-financement représentent une somme qui atteint 100 millions d'euros. La proposition d'amendement de notre rapporteur est bonne. Je souhaiterais qu'il insiste, lors de son intervention dans les débats en séance publique, sur la situation de ces projets bloqués et menacés d'obsolescence et sur le fait qu'il s'agit bien d'une taxe additionnelle dont le produit est affecté au Fisac. Je me félicite par ailleurs que les groupes de l'opposition sénatoriale soutiennent cette initiative.
Nous sommes tous d'accord sur la nécessité d'appuyer les crédits du Fisac et d'apporter une réponse aux dossiers actuellement bloqués. Faut-il purger la liste d'attente ou en constituer une nouvelle ? Il y a là un vrai débat. Faisons attention de ne pas affaiblir un petit commerce qui contribue fortement à la vie dans les zones rurales !
Je soutiens les propos de Claude Bérit-Débat sur le stock de dossiers en attente non pas de réponse, mais de financement. Car il s'agit souvent de projets validés, pour lesquels les travaux ont commencé, mais dont les fonds attendus tardent à arriver depuis parfois dix-huit mois ou deux ans. C'est pourquoi je soutiens l'initiative de notre rapporteur pur avis. Je suis favorable aussi à la proposition de Jean-Claude Lenoir sur le financement de la mise aux normes des stations service en milieu rural.
Je reviens sur l'intervention de notre collègue concernant les crédits de la DGCCRF. Il a indiqué qu'ils étaient en baisse et je veux lui rappeler qu'ils avaient été fortement revus à la hausse au moment de la loi sur la modernisation de l'Économie, notamment avec la création des « brigades LME ». Par ailleurs, je voudrais savoir si l'amendement Fisac n'est pas aussi un appel pour rouvrir le dossier sur l'urbanisme commercial.
Il est vrai que la proposition de loi sur l'urbanisme commercial, votée par le Sénat, n'a pas encore été examinée par l'Assemblée nationale.
L'essentiel a été dit. On ne peut pas séparer l'urbanisme du soutien au commerce. Les actions collectives du Fisac sont donc utiles et légitimes. Je suis d'accord également sur le fait qu'il faut utiliser les crédits pour purger le stock de dossiers en attente mais sans pour autant renoncer aux perspectives pour l'avenir. Enfin, concernant la DGCCRF, je précise qu'il est prévu non pas une baisse de ses moyens, mais une stabilisation.
La commission adopte l'amendement à l'unanimité.
Au-delà de la présentation générale des crédits, mon rapport porte sur les politiques d'appui à la création d'entreprise, ce qui regroupe trois choses : les politiques de simplification des démarches de création, les politiques d'accompagnement des créateurs et les politiques d'appui financier à la création.
De nombreuses réformes ont été conduites dans ce domaine au cours des dix dernières années. Des réformes nouvelles sont également annoncées, notamment la création de la Banque publique d'investissement. Il est donc utile de faire un bilan d'étape sur ce sujet complexe. En raison de la pluralité des objectifs poursuivis, de la multiplicité des outils mis en place, de la diversité des acteurs et de l'éparpillement de l'information qui en résulte, la lisibilité de ces politiques est aujourd'hui assez faible. Les actions de l'État en la matière sont inscrites dans sept programmes budgétaires différents. Par ailleurs, l'État intervient souvent de façon indirecte, via des établissements publics qui disposent d'une large autonomie, qu'il s'agisse des réseaux consulaires, d'Oséo, de Pôle-emploi ou encore de la Caisse des dépôts et consignations. Il intervient aussi en coopération avec des acteurs privés, notamment des associations spécialisées dans l'accompagnement des entrepreneurs, comme l'Adie ou le Réseau entreprendre. Enfin, l'action de l'État s'articule de plus en plus avec celle des collectivités territoriales - principalement les régions. Avoir une vision d'ensemble est donc un vrai défi
Concernant les politiques de simplification des démarches administratives, ce fut l'un des axes majeurs de la politique conduite par les précédents gouvernements, qui ont fait adopter plusieurs textes importants, notamment la loi pour l'initiative économique du 1er août 2003, la loi en faveur des petites et moyennes entreprises du 2 août 2005 et la loi de modernisation de l'Économie du 4 août 2008.
Les lois Dutreil I et II ont permis d'apporter un certain nombre de réponses concrètes à des difficultés ciblées, par exemple, en mettant en place un récépissé de création d'entreprise qui permet d'accélérer les démarches nécessaires à l'installation ; en donnant la possibilité de domicilier son entreprise à son domicile ou en facilitant la transition entre le statut de salarié et celui d'entrepreneur.
Un travail a également été accompli pour mettre en place un régime fiscal et social simplifié pour les micro-entreprises, qui dispense les micro-entrepreneurs d'établir une déclaration au titre des BIC ou des BNC, leur accorde une franchise de TVA et leur offre la possibilité, pendant deux ans, de demander que l'ensemble de leurs cotisations et contributions de sécurité sociale soient calculées trimestriellement au réel et non pas sur une assiette forfaitaire.
La création du régime de l'auto-entreprise a tenté d'aller vers encore plus de simplicité en réduisant à leur plus simple expression les formalités de création, en dispensant les auto-entrepreneurs de la formalité et des frais d'immatriculation et en rendant permanent le régime social qui existait de manière temporaire pour les micro-entreprises.
Enfin, depuis janvier 2010, s'est mis en place un guichet unique électronique de la création d'entreprise qui permet de réaliser l'ensemble des démarches administratives nécessaires à la création par internet et qui devrait être étendu pour dématérialiser aussi les procédures d'autorisation des activités réglementées.
Ces diverses mesures se sont accompagnées d'une augmentation du nombre de créations d'entreprises. On est passé de 200 000 entreprises par an au début des années 2000 à 330 000 en 2008, soit une hausse de 50 % en quelques années. Cette tendance s'est sans doute poursuivie par la suite, même si, à partir de 2009, l'entrée en vigueur de la réforme sur l'auto-entreprise a rendu les données très difficiles à interpréter. Le nombre brut de créations d'entreprises, auto-entrepreneurs inclus, atteint en effet 620 000 en 2010, soit le double de ce qui est enregistré en Allemagne, au Royaume-Uni ou en Italie. Cependant la moitié des auto-entreprises sont des coquilles vides qui ne génèrent aucune activité. Par ailleurs, une partie des auto-entrepreneurs qui dégagent un chiffre d'affaires sont des pluriactifs qui cumulent de façon permanente activité salariée et activité indépendante, et pour qui les revenus de l'entreprise sont simplement un revenu d'appoint. Finalement, les auto-entrepreneurs qui développent une activité entrepreneuriale exclusive sont minoritaires (un quart du total) et les revenus qu'ils dégagent sont en moyenne trois fois plus faibles que ceux des entrepreneurs classiques. Malgré ce bilan contrasté de l'auto-entreprise, il reste que la France fait désormais aussi bien que les autres grands pays européens en matière de créations d'entreprises sur le plan quantitatif.
Le bilan qualitatif est lui moins satisfaisant, comme l'illustrent trois observations. Le taux de pérennité à cinq ans des entreprises française, de 52 %, reste encore faible. La France crée de nombreuses entreprises, mais ces entreprises ont, dès le départ, un potentiel de croissance très insuffisant. La grande majorité des créateurs d'entreprises mobilisent des ressources très limitées pour créer leur entreprise : 94 % des entreprises en France sont créées sans salarié ; une entreprise sur cinq est créée avec moins de 2 000 euros ; une sur deux avec moins de 10 000 euros. Il est donc temps désormais, sans perdre l'acquis des simplifications administratives déjà réalisées, de réorienter les politiques d'appui en les faisant porter moins sur l'acte administratif de création lui-même et davantage sur la stimulation de la croissance des entreprises nouvelles.
Concernant l'accompagnement des porteurs de projet et des nouveaux entrepreneurs, quelques données de cadrage sont utiles. Seulement 28 % des créateurs de 2010 ont reçu l'appui d'une structure dédiée à la création d'entreprises. C'est trop peu. C'est même moins qu'en 2006. Deux créateurs sur trois n'ont suivi aucune formation. Ces chiffres montrent que l'enjeu de l'accompagnement est encore trop négligé. Et pourtant, l'accompagnement fonctionne : les chances de survie d'une entreprise accompagnée sont supérieures d'un tiers à celle d'une entreprise qui ne l'est pas, avec un taux de survie à 5 ans de 66 % au lieu de 50 %.
Comment faire mieux dans ce domaine ? Faut-il davantage de moyens ? Ce n'est pas certain. La fonction d'accueil et de suivi des créateurs est d'ores-et-déjà remplie par de nombreux réseaux. J'en ai recensé neuf d'importance significative : celui des chambres de commerce et d'industrie et celui des chambres de métiers, qui sont les plus importants par la taille et le volume d'activité du fait de leur vocation généraliste d'accueil ; celui de Pôle emploi ; et enfin ceux des associations labellisées : le Réseau des boutiques de gestion, France initiative, Adie, France active, le Réseau Entreprendre et l'Union des couveuses. D'après les chiffres fournis par la Direction générale de la compétitivité, de l'industrie et des services (DGCIS), dans l'ensemble, les crédits publics mobilisés pour financer ces réseaux avoisinent 120 millions d'euros en 2011.
Si chaque réseau fournit des statistiques sur son activité, faute de référentiel normalisé de l'accompagnement et de système partagé des informations, il n'est pas possible d'agréger ces données. Un porteur de projet peut ainsi, au cours de son parcours de création, frapper à plusieurs portes, et être comptabilisé plusieurs fois dans les chiffres. Il n'est pas possible non plus de comparer l'activité et la performance des différents réseaux car la nature et l'intensité des actions d'accompagnement varie de l'un à l'autre. La priorité doit donc être de travailler sur l'organisation de l'offre d'accompagnement en mettant l'accent sur plusieurs éléments :
- produire des référentiels nationaux permettant d'harmoniser les normes d'accompagnement entre les réseaux et entre les régions, sans perdre le bénéfice d'un accompagnement personnalisé. C'est indispensable pour assurer une certaine équité entre les usagers. C'est nécessaire aussi pour piloter le système d'accompagnement et notamment pour identifier les dispositifs les plus efficaces ;
- améliorer la lisibilité de l'offre d'accompagnement. Il ne s'agit pas forcément de supprimer des réseaux, car une offre différenciée permet de répondre à des besoins eux-mêmes divers. En revanche, la mise en place de guichets d'orientation ou de plateformes de coordination des acteurs de l'accompagnement permettrait de mieux faire se rencontrer l'offre et la demande d'accompagnement. Je suis favorable a priori à ce que chaque région prenne en main la fonction de coordination des réseaux et que, dans le cadre de référentiels nationaux, elle sélectionne par appel à projet l'acteur le plus à même de remplir le rôle de guichet d'orientation ;
- développer l'accompagnement post-création dans les premiers mois ou les premières années de la création d'entreprise, notamment en direction des entreprises qui ont un fort potentiel de développement.
Concernant l'appui au financement des créations d'entreprise, on peut rappeler que les pouvoirs publics interviennent de façon substantielle, ce qui se justifie par la nécessité de pallier les insuffisances du système bancaire ou des marchés financiers, soit en prenant le relais des mécanismes de financement privés, soit le plus souvent en jouant un rôle d'impulsion destiné à impliquer les financeurs privés dans les tours de table. C'est alors un effet de levier qui est recherché à travers des mécanismes de cofinancement.
Cette intervention massive se fait à travers une gamme d'outils de financement très diversifiée, de manière à répondre à des besoins qui changent selon le profil du créateur, le secteur d'activité ou de la phase dans laquelle se trouve l'entreprise en cours de création. Cette grande diversité de l'offre devra sans doute conduire à une rationalisation de la gamme et surtout à la mise en place d'un guichet d'accueil destiné à mieux orienter les porteurs de projet vers les financements adaptés à leur profil spécifique. Ce sera assurément l'un des rôles de la future banque publique d'investissement.
Une première catégorie d'outils de financement est constituée de subventions ou d'exonérations fiscales ou sociales accordées directement aux créateurs d'entreprises. Les principales sont l'aide aux demandeurs d'emploi créant ou reprenant une entreprise (ACCRE), dont le coût de 245 millions d'euros est supporté par la sécurité sociale ; l'aide à la reprise ou à la création d'entreprise (ARCE), versée par Pôle emploi, qui représente un coût de 977 millions d'euros pour l'UNEDIC ; le maintien, sous certaines conditions, de l'allocation chômage pour les chômeurs créateurs d'entreprise, qui coûte à l'UNEDIC 227 millions d'euros ; les différentes exonérations sociales liées au régime de l'auto-entreprise, prises en charge par l'État à hauteur de 243 millions d'euros et, enfin, le dispositif Jeunes entreprises innovantes (JEI) qui coûte 107 millions d'euros, pris en charge également par l'État. Au total, ces aides directes aux créateurs ont représenté 1,865 milliards d'euros en 2011.
La deuxième grande catégorie d'outils du financement public de la création d'entreprise est constituée des financements donnant lieu à remboursement, qu'il s'agisse d'aides remboursables ou de prêts bonifiés, voire de prêts à taux zéro. Ces prêts ou avances sont le plus souvent utilisés conjointement avec des systèmes de garantie publique, ce qui permet de démultiplier l'effet de levier. Les principaux outils répondant à cette logique d'appui sont les Prêts à la création d'entreprise (PCE) accordés par Oséo (16 000 prêts en 2011 pour un montant de 92 millions d'euros) ; les subventions et avances remboursables octroyées dans le cadre du programme Aide à l'innovation d'Oséo, pour un coût annuel de 315 millions d'euros et les prêts à taux zéro Nacre qui sont financés par le ministère de l'Emploi pour un coût annuel de 78 millions d'euros.
Ces outils de co-financement et de garantie sont particulièrement intéressants. D'une part, grâce à leur effet de levier, ils limitent l'importance de l'engagement de fonds publics à un niveau raisonnable. Ainsi, les 170 millions d'euros de fonds publics consacrés au PCE et à Nacre ont permis de lever un financement total de 793 millions d'euros. D'autre part, ce ne sont pas des financements publics aveugles, comme peuvent l'être les dépenses fiscales, mais des dispositifs ciblés et contrôlés : les pouvoirs publics instruisent les dossiers et peuvent vérifier que leurs fonds sont investis conformément aux objectifs d'intérêt général recherchés. Pour rendre ces outils encore plus intéressants, il pourrait être utile de réfléchir à leur adaptation au soutien de projets de création plus ambitieux en s'inspirant du cas allemand. La banque publique KfW propose en effet trois grands types de crédits spécifiquement tournés vers la création d'entreprises : le Gru·nderkredit Universell (1,9 milliards d'euros de financements en 2011), le Startsgeld (249 millions) et l'aide à la formation d'un capital. Les deux premières formules concernent des prêts respectivement de 10 millions d'euros sur 20 ans et de 100 000 euros sur 10 ans. L'aide à la formation d'un capital consiste quant à elle en un prêt à taux réduit d'un montant maximal de 500 000 euros sur 15 ans. On est donc sur un ordre de grandeur très différent du cas français. Par comparaison, nos outils de financement paraissent davantage ciblés vers des projets de taille modeste ou moyenne.
La troisième catégorie d'outils d'appui financier aux créateurs d'entreprise comporte les outils de renforcement des fonds propres. Ils peuvent suivre deux logiques : la première consiste pour l'Etat, le plus souvent indirectement via la Caisse des dépôts et consignations ou Oséo, à renforcer le haut de bilan des sociétés ; la seconde consiste à inciter des financeurs privés, au moyen d'incitations fiscales, à orienter leur épargne vers le capital des PME.
Concernant le premier axe, plusieurs initiatives intéressantes ont été prises ces dernières années :
- le Programme des investissements d'avenir, partant du constat qu'il existait en France un vide dans la chaîne du capital-risque au niveau de l'amorçage, a créé un Fonds national d'amorçage, doté de 400 millions d'euros. Il vise des tours de table de l'ordre de 0,5 à 1,5 millions d'euros et est opérationnel depuis juin 2011 ;
- CDC Entreprises investit directement en fonds propres dans des PME ou des ETI ou bien investit dans des fonds d'investissement partenaires, dits fonds de fonds, qui souscrivent à leur tour au capital de PME. En 2011, elle a investi dans 257 fonds d'investissement, dont 138 fonds nationaux et 84 fonds régionaux ; elle a ainsi apporté 1,25 milliards d'euros dans 844 PME, dont 881 millions d'euros dans 422 entreprises nouvelles ;
- pour répondre au souci des créateurs d'entreprises d'attirer des capitaux sans perdre le contrôle de leur société, les pouvoirs publics ont également mis sur pied des outils de financement en quasi fonds propres. Il en existe une gamme assez large, mais le produit le plus connu est sans doute les prêts participatifs d'amorçage d'Oséo.
Les outils de renforcement des fonds propres sont efficaces et je lance un appel pour qu'ils soient renforcés, car la situation du capital-risque français s'est fortement détériorée au cours des dernières années : alors que 12,5 milliards d'euros avaient été investis par le capital-investissement français en 2007, on est tombé à 4,5 milliards en rythme annuel en 2012. Si on ne corrige pas cette situation, il y a un risque majeur pour la croissance française.
Enfin, le renforcement des fonds propres passe aussi par des dépenses fiscales :
- la déduction Madelin permet de réduire l'impôt sur le revenu au prorata des souscriptions effectuées auprès de sociétés non cotées. Cette niche a été progressivement réduite mais devrait coûter à l'Etat 150 millions d'euros en 2013 ;
- la déduction ISF-PME, créée par la loi TEPA du 21 août 2007, a été réformée de manière substantielle par la loi de finances pour 2011, en vue d'être recentrée sur les entreprises rencontrant des difficultés d'accès au financement en fonds propres et de mettre fin à certaines situations abusives. Le taux de déduction a été ramené de 75 % à 50 % et sont dorénavant exclues du dispositif, les entreprises exerçant des activités immobilières et financières, ou encore celles dont l'actif est constitué de façon prépondérante de métaux précieux, d'oeuvres d'art, d'objets de collection, d'antiquités, de chevaux de courses ou encore de vins. Même ainsi recentrée, cette niche fiscale devrait coûter 480 millions d'euros l'année prochaine.
La question des fonds propres des PME est essentielle et j'espère que la Banque publique d'investissement permettra d'avancer dans ce domaine.
J'insiste sur l'importance des prêts d'honneur aux créateurs d'entreprises, qui exercent un effet de levier important. Concernant l'encadrement des créateurs, le rôle de la pépinière d'entreprises, suivie quelquefois de l'hôtel d'entreprises, est tout à fait précieux, notamment parce que c'est une réponse au problème de l'investissement immobilier des entreprises qui constitue un problème de compétitivité majeur. Enfin, la garantie d'emprunt est indispensable pour les crédits de trésorerie.
Le nombre de créations d'entreprises est gonflé artificiellement par les auto-entreprises. Pour l'accompagnement, je rappellerai que c'est avant tout la vocation des chambres consulaires, y compris dans le domaine de l'appui à l'export. Enfin, la BPI sera sans doute un filtre utile pour mieux identifier et donc soutenir les entreprises à fort potentiel.
Je vais maintenant aborder le volet « commerce extérieur » du projet de loi de finances pour 2013 concerne deux actions du programme 134 pour un montant de 124 millions d'euros :
- 104 millions au titre de l'action 7 « Développement international des entreprises », qui couvre les dépenses de fonctionnement et d'intervention de l'Agence française pour le développement international des entreprises - Ubifrance ;
- et 20 millions d'euros pour la nouvelle action 20 « Financement des entreprises et de l'attractivité du territoire », qui comprend la subvention pour charges de service public de l'Agence française pour les investissements internationaux - AFII, ainsi qu'un modeste volant de dépenses d'intervention, avec essentiellement des bonifications à des prêts accordés par l'État à des PME.
En dépit de cette place modeste dans la nomenclature budgétaire, le commerce extérieur est pris en charge par un ministère de plein exercice, ce qui est en adéquation avec l'importance de l'enjeu.
Le déficit commercial de la France est un révélateur de notre perte de compétitivité. Je me contenterai de deux observations :
- nos parts de marché représentaient à peu près les deux tiers de celles de l'Allemagne en 2000 contre un tiers aujourd'hui. Selon les études économiques, il est difficile de trouver une corrélation évidente entre notre déficit et l'orientation sectorielle ou géographique de nos échanges : l'essentiel se situe dans une grandeur non mesurable qui correspond à l'attrait des produits ;
- d'autre part, la Commission européenne a estimé, en février 2012, que la France avait dépassé un seuil d'alerte qui nous place parmi les douze pays ayant fait l'objet d'une analyse approfondie de leurs déséquilibres économiques. Le diagnostic européen du 30 mai dernier indique que « la croissance des exportations est plus lente en France que dans l'ensemble de la zone euro » alors que le commerce mondial se développe et appelle la France à une correction de trajectoire.
J'ajoute que dans certains pays, comme les Etats-Unis, le déficit commercial est un indicateur fragile. Le directeur général de l'Organisation Mondiale du Commerce (OMC), estime qu'en valeur ajoutée, le déficit commercial américain est inférieur de 50 % à celui que mesurent les statistiques fondées sur la valeur des produits au moment de leur passage en douane. En Zone euro et en France notre déficit ne serait réduit que d'à peu près 20 % en valeur ajoutée. Le commerce mondial a profondément changé tandis que les indicateurs sont restés immobiles et il convient de les réaménager ou de les analyser plus finement. L'OMC commence à s'emparer du sujet.
Je salue au passage la capacité de la France à former et à exporter ses talents au niveau des organisations internationales, ce qui illustre peut-être aussi le fait que la « matière grise » de notre pays a, de façon générale, parfois un peu trop tendance à s'orienter vers l'administration plutôt que vers les filières industrielles internationalisées.
En ce qui concerne les remèdes à cette détérioration, il faut distinguer les mesures ponctuelles et les fondamentaux stratégiques.
Au titre des mesures utiles mais ponctuelles, je citerai tout d'abord le thème de la réciprocité. Comme je l'ai rappelé au cours de l'audition de la ministre du commerce extérieur, on a pu craindre, au tout début du quinquennat, que le Gouvernement place au centre de sa stratégie en matière de commerce extérieur l'application stricte du principe de réciprocité. Or le directeur général de l'OMC a opportunément rappelé des faits incontournables : les parts de marché de la France se réduisent là ou les règles de réciprocité sont respectées (ce qui concerne les deux tiers de notre commerce extérieur). Inversement nos exportations progressent plutôt vers les zones où la réciprocité est encore imparfaite.
La compétitivité est bien l'axe majeur du redressement de notre commerce. Je précise d'ailleurs qu'au sein de la zone euro, les Etats membres sont, par définition, privés de l'arme de la dévaluation : cependant, une hausse de la TVA a un effet équivalent, puisqu'elle frappe les importations mais pas les exportations, et la plupart de nos voisins l'ont utilisée au cours des dernières années.
Parmi les mesures utiles mais ponctuelles, l'accompagnement des PME à l'exportation mérite d'être soigneusement examiné. Le récent rapport de M. Louis Gallois préconise la concentration de l'effort de soutien sur les entreprises déjà exportatrices ou celles qui montrent leur capacité à exporter durablement, en tablant sur leur effet d'entraînement naturel sur les autres entreprises. « Il peut être à l'inverse dangereux et inefficace -je cite le rapport- de pousser artificiellement sur les marchés étrangers des PME qui n'y sont pas suffisamment préparées ». Le même rapport regrette le « dénigrement » des grands groupes français alors même qu'ils constituent un avantage décisif dans la compétition internationale : nos 200 premières entreprises emploient 28 % des salariés des secteurs marchands, réalisent 62 % de la recherche industrielle et 50 % des exportations.
Au cours des auditions, on m'a cependant fait valoir que, pour les PME, grandir, c'est souvent s'internationaliser. De plus, la confrontation avec la réalité internationale est parfois un excellent moyen, à la fois, de combattre une certaine « sinistrose » ambiante et de se rendre plus attentif aux caractéristiques de la demande étrangère pour enclencher une interaction vertueuse entre l'innovation et l'exportation.
Quoi qu'il en soit, il y a une nécessité de mieux coordonner les actions de soutien aux exportations avec la mise en place d'une structure permanente à la fois au niveau national, rassemblant, Ubifrance, les réseaux consulaires, les Douanes et les Conseillers du commerce extérieur, et au niveau régional. Lors de son audition du 23 octobre dernier, Mme Nicole Bricq, ministre du commerce extérieur, est convenu de la nécessité de lutter contre l'éparpillement des « pavillons » de promotion des produits français à l'étranger et a estimé souhaitable d'accroître la présence des représentants des régions au conseil d'administration d'Ubifrance pour contrôler le respect des engagements pris par cet établissement et pour favoriser la coordination des initiatives de soutien aux exportations.
Enfin, à l'intérieur de la question du financement des entreprises exportatrices, qui est absolument essentielle aujourd'hui - hors grands groupes, certains évoquent un assèchement du financement par crédit bancaire en 2012 des exportations - je vous propose de marquer notre soutien au principe de l'intégration d'un volet international à la nouvelle Banque publique d'investissement (BPI). Toutefois, la mise en place de la BPI n'aura qu'un impact limité et ne satisfera que partiellement la préconisation du rapport Gallois tendant, d'une part, à un alignement des conditions de crédit et des garanties export sur le meilleur niveau constaté dans les pays avancés et, d'autre part, à la création d'un « prêteur direct » public.
Au cours des auditions, j'ai relevé une piste intéressante qui consisterait à rechercher des financements à l'exportation en dehors du crédit bancaire, par le recours à des emprunts obligataires garantis par l'État, qui pourraient être souscrits par des investisseurs institutionnels. Là aussi, je suggère d'interroger le gouvernement sur ses intentions dans ce domaine.
Concernant les fondamentaux stratégiques, je ne reviens pas sur le rapport de M. Louis Gallois, ni sur le « virage » de l'approche économique du Gouvernement. Permettez-moi cependant de mentionner deux « non-dits » dans ce débat.
Tout d'abord, à propos de la question des 35 heures que j'ai soulevée lors de l'audition de Louis Gallois, je citerai un document. Il s'agit du premier rapport publié en 1997 par le Conseil d'analyse économique. Il concluait qu'une réduction de la durée du temps de travail de 39 à 35 heures payées 39 représente potentiellement un choc de coût du travail de 11,4 % supérieur à celui des années quatre-vingt. Ces chocs avaient été à l'époque suivis d'une perte de compétitivité, d'une augmentation massive du chômage et d'un recul industriel sans précédent. Les contraintes sont aujourd'hui plus grandes ; nous avons renoncé à l'arme défensive de la dévaluation et la concurrence mondialisée est plus intense qu'il y a quinze ans.
Très rapidement, je voudrais aussi évoquer la « compétitivité - temps » évoquée dans le rapport publié en juillet 2012 sous l'égide de Terra Nova « Investir dans l'avenir - Une politique globale de compétitivité pour la France ». Louis Schweitzer y rappelle qu'en France, les investisseurs perdent beaucoup plus de temps qu'ailleurs en autorisations, permis de construire, enquêtes publiques, concertation, lenteur des procédures de plans sociaux. Tout en approuvant ce propos, je le nuancerai parce que d'autres praticiens du commerce international, m'ont rappelé, pendant mes auditions, que le parcours de l'exportateur français était également semé d'embuches dans un certain nombre de pays émergents.
Je termine en rappelant qu'avec 56,2 % de dépenses publiques par rapport au PIB, c'est-à-dire un des plus forts ratios du monde, notre Économie et nos exportations ont avant tout besoin d'une amélioration de notre compétitivité fiscale. Sur ce point, le projet de loi de finances pour 2013 me semble aller à contre-courant.
Puisque le programme 134 que nous examinons concerne également le volet « Tourisme », permettez-moi d'en dire un mot. La France demeure la première destination touristique mondiale avec, en 2011, plus de 81 millions de visiteurs étrangers. L'enjeu est immense : il se chiffre à près de 40 milliards d'euros de recettes, un solde net de 7,5 milliards d'euros d'entrées de devises, un million d'emplois directs et autant d'emplois indirects sur l'ensemble de nos territoires. Pourtant, le tourisme ne fait plus l'objet d'un programme comme l'année dernière. Le projet de loi de finances pour 2013 les intègre en tant qu'action au sein du programme 134.
Au total, je souhaite émettre un avis défavorable à l'adoption des crédits de la mission Économie car :
- le volet tourisme y est traité avec trop de légèreté ;
- le commerce extérieur a besoin de moyens supplémentaires (accompagnement des PME, organisation des structures...), pour soutenir et développer nos exportations.
Je vais évoquer avec vous le volet « Poste et communications électroniques » de la mission « Economie ». Je le ferai en deux temps : tout d'abord, une analyse des évolutions budgétaires pour 2013, puis quelques développements sur la situation actuelle du secteur des communications électroniques.
L'analyse budgétaire, pour commencer, porte sur les actions n° s 4 et 13 du programme 134. Elles correspondent à des sommes faibles -33 millions d'euros- au regard du poids du secteur dans la richesse nationale.
L'action n 4 est consacrée au « développement des télécommunications, des postes et de la société d'information ».
1,5 million d'euros est affecté au remboursement de La Poste pour l'acheminement des correspondances ordinaires reçues par le Président de la République et pour des cécogrammes, qui se fait en franchise postale. Cette dotation était l'an passé de 158 millions d'euros. Cette baisse drastique s'explique essentiellement par le transfert à la mission « Médias » de la totalité de la compensation par l'Etat des surcoûts de la mission de service public de la presse par voie postale.
En outre, au sein de cette action n° 4, 8,6 millions d'euros - soit une hausse de 3 % -sont attribués par la France à divers organismes internationaux, dont l'Union postale universelle et la Conférence européenne des postes et télécommunications.
Signalons qu'il existe d'autres crédits consacrés à La Poste en-dehors de cette mission « Économie ».
D'une part, l'allègement de fiscalité dont bénéficie le groupe au titre de sa mission d'aménagement du territoire. Il a été fixé à 170 millions d'euros par an par le contrat de présence postale territoriale de 2011-2013, contre 135 millions dans le précédent.
D'autre part, les sommes versées à la Banque Postale pour la rémunération de 0,75 % du livret A ainsi qu'au titre de sa mission de service public d'accessibilité bancaire. Elles sont en baisse récurrente, passant de 280 millions d'euros en 2009 à 235 millions prévus pour 2013.
L'action n° 13 est consacrée à la « régulation des communications électroniques et des postes ». Outre la subvention à des organismes internationaux et des associations oeuvrant à la promotion de la société de l'information, qui augmente de 3 %, ces crédits financent deux autorités de régulation du secteur.
D'une part, l'Agence nationale des fréquences (ANFR). Avec 34,7 millions d'euros, son budget recule de 3 %. L'Agence a engagé un effort de réduction des coûts très important, allant jusqu'à fermer l'un de ses sites en région parisienne. Or, elle se trouve dans le même temps devoir faire face à la multiplication de ses missions. A ce titre, elle doit par exemple gérer la réception de la télévision numérique terrestre (TNT), qui se trouve brouillée par les fréquences 4G sur la bande des 800 MHz et nous l'avions d'ailleurs souligné au Sénat.
L'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP) est la seconde autorité indépendante également financée sur cette action. S'élevant à 22,9 millions d'euros, son budget est en baisse de 2,9 %. Hors dépenses de personnel, les crédits de l'Autorité ont diminué de 15 % au cours des quatre dernières années. En matière de personnel, elle se voit priver d'un emploi, avec 173 employés. Cela alors que ses missions ne cessent de s'étendre, du fait des lois que nous votons, notamment. Et que, paradoxalement, elle rapporte massivement des ressources à l'Etat : de par les systèmes d'enchères qu'elle a mis en place, les licences de téléphonie mobile ont été cédées pour 5,6 milliards d'euros depuis 2010 !
Pour faire face à ces restrictions budgétaires, l'ARCEP a « taillé dans le vif » : renégociation de son bail immobilier, réduction accélérée du parc de voitures, baisse des dépenses d'études ... Elle constitue à cet égard un « modèle de vertu budgétaire », dont devraient s'inspirer bon nombre d'autres administrations, et reste plus productive que ses homologues d'autres pays européens. Mais elle arrive aujourd'hui à la limite de ses possibilités : le risque est que ses fonctions de régulateur soient mises à mal, ce qui aurait un effet très négatif sur le bon fonctionnement du marché des télécoms. La question ne manquera pas de se reposer à l'occasion d'un rapprochement éventuel entre l'ARCEP, le CSA et l'ANFR.
Je voudrais à présent vous dire quelques mots de ce marché des télécommunications, justement, auquel je consacre des développements dans le rapport.
Si on le regarde du point de vue du consommateur, il ne s'est jamais aussi bien porté. Avec près de 23 millions d'abonnements haut débit, 760 000 abonnements très haut débit et 70,4 millions de clients mobiles, des records sont battus cette année. Signe d'un changement de modèle, le nombre d'abonnements téléphoniques passant par le réseau ADSL est supérieur pour la première fois au nombre d'abonnements téléphoniques classiques. Les prix ne cessent de baisser sur le mobile. Sur le fixe, ils ont légèrement remonté du fait de la hausse de la TVA sur le triple play, mais la qualité a été considérablement accrue, avec des offres fibre quasiment au même tarif que l'ADSL, et de nouveaux services.
Si l'on regarde maintenant le marché du côté de l'offre, la vision est un peu différente. L'ouverture à la concurrence, dans les années 90, a provoqué l'émergence de très nombreux opérateurs, avant un mouvement de concentration dans les années 2000 autour de quelques grands acteurs, disposant chacun d'un réseau d'infrastructures et proposant des offres fixe-mobile.
Or, comme cela a été le cas dans le fixe, l'arrivée d'un nouvel opérateur dans le mobile, Iliad-Free, en tout début d'année, a bouleversé l'équilibre du secteur. La simplicité de ses offres, leur grande compétitivité et le découplage entre abonnement et terminal ont provoqué une fuite massive des clients des autres opérateurs à son profit. Ces opérateurs historiques ont du s'adapter et réduire leurs tarifs, comprimant ainsi leurs marges et réduisant leurs profits.
Ce « tsunami » dans le paysage numérique intervient dans un contexte par ailleurs tendu pour les opérateurs nationaux. Leur parc d'abonnés mobiles était déjà en érosion au profit d'opérateurs virtuels, qui possèdent désormais 11 % du marché. La baisse des prix des terminaisons d'appel et d'itinérance leur a fait perdre 15 milliards d'euros. Ils paient chaque année 1,2 milliard d'euros de sur-fiscalité spécifique au secteur, quoique souvent déconnectée de celui-ci. La création de valeur est de plus en plus captée par des acteurs mondiaux quasiment non imposés en France, du fait de stratégies d'optimisation fiscale, tels que Google.
Ces contraintes se traduisent par une baisse des revenus des opérateurs, s'aggravant depuis cette année, et par un recul de leur rentabilité. Cette évolution les place en situation de fragilité à l'égard d'investisseurs hostiles, tels que l'opérateur mexicain America Movil, quatrième plus gros opérateur au monde. Elle fragilise toute la filière en aval, notamment nos équipementiers de réseau, tels que Alcatel-Lucent, en situation très difficile. Elle limite les investissements de nos opérateurs dans les réseaux de demain, fibre optique et 4G, pourtant essentiels à leur redressement futur.
Toutefois, des motifs d'espoir existent pour l'avenir, et je souhaite terminer sur cette note plus optimiste. Des relais de croissance apparaissent : montée en gamme avec les offres 4G, dont les tarifs devraient être plus élevés ; équipement des entreprises, au fort potentiel de croissance ; marché des cartes « machine to machine », qui équiperont toutes les voitures neuves dès 2015 et les compteurs intelligents ...
Le secteur devrait se consolider, comme le montrent les rumeurs de rapprochement entre SFR et Numericable ou SFR et Free. Il leur permettrait d'atteindre une véritable masse critique et les mettrait à l'abri d'un rachat agressif ;
La réflexion semble désormais bien lancée, y compris à l'échelle européenne, sur la façon d'« atteindre au portefeuille » les grands acteurs mondiaux de l'internet pour leur activité sur notre territoire. Notre collègue Philippe Marini est particulièrement impliqué sur ce point.
Enfin, le régulateur sera amené, si de grands déséquilibres persistent, à réorienter son intervention pour réunir à nouveau les conditions d'une concurrence saine et efficace.
Je conclurai, Monsieur le Président, mes chers collègues, en donnant un avis défavorable à l'adoption des crédits de la mission « Économie », en cohérence avec les développements budgétaires que je viens de vous exposer.
Avez-vous des éléments sur Phil@poste, l'institution française chargée de l'impression des timbres postaux et fiscaux?
Non, le sujet n'a pas été abordé lors de l'instruction de ce rapport pour avis.
Comme je l'ai indiqué, je préconise à la commission d'émettre un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission Économie. J'ajoute une remarque à propos de l'intervention de notre co-rapporteure, Mme Elisabeth Lamure. Je rappelle que le décrochage de notre commerce extérieur et de la compétitivité de notre Économie sont intervenus, comme le souligne le rapport de M. Louis Gallois, il y a dix ans, alors que la majorité actuelle ne gouvernait pas à cette époque. On ne peut accréditer l'idée que l'Économie française a perdu sa compétitivité uniquement à cause des 35 heures. L'échec de la montée en gamme de nos produits ainsi que la volonté insuffisante de faire de l'industrie une cause nationale, comme en Allemagne, ne peuvent pas être imputées à la nouvelle majorité. J'estime que l'approche du rapport Louis Gallois a l'immense avantage d'émaner d'un grand chef d'entreprise et, en même temps, d'un homme qui n'est pas marqué politiquement. Son diagnostic est consensuel - il rejoint d'ailleurs celui de la mission d'information sur la désindustrialisation - et le Gouvernement a manifesté sa volonté de mettre en oeuvre les axes qu'il propose. En second lieu, nous avons pu constater, lors de notre déplacement en Allemagne, l'importance de l'appui du secteur bancaire à l'industrie et c'est en s'inspirant de cette réussite que la nouvelle Banque publique d'investissement doit être mise en place.
Je souhaiterais que la question des 35 heures puisse être abordée sans déclencher des polémiques excessives et, dans mon exposé, je me suis contentée de citer un rapport du Conseil d'analyse stratégique. Si l'on veut argumenter à ce sujet, on peut rappeler que si l'ancienne majorité n'est pas revenue sur le principe des 35 heures, elle a cependant mis en place le dispositif des heures supplémentaires qui constituait une avancée pour le temps de travail et le pouvoir d'achat. Sur le terrain, je signale la multiplication des témoignages de salariés ou d'ouvrier qui déplorent les conséquences concrètes sur leur fiche de paye de la suppression de ce dispositif par le nouveau Gouvernement.
Tout en critiquant constamment les 35 heures, l'ancienne majorité n'a pas fait grand-chose pour les réformer au cours des dix dernières années. Le dispositif des heures supplémentaires ne me parait pas se situer sur le même plan. S'agissant du commerce extérieur, ce n'est tout de même pas le nouveau Gouvernement de gauche qui a pu creuser un déficit de 70 milliards d'euros en six mois...
J'émets un avis défavorable sur les crédits de la mission « Économie ».
Je souhaite brièvement saluer la qualité des exposés et vous présenter les motifs de mon abstention. Je perçois, dans notre pays, une très forte volonté d'aboutir à des simplifications administratives. Par ailleurs, je m'interroge sur la Banque publique d'investissement (BPI) qui apparait a priori comme une compilation des moyens existants, et je ne suis pas extrêmement favorable à la proposition d'une gestion régionale. J'ajoute également qu'il faut bien distinguer la situation générale des auto-entrepreneurs des initiatives ponctuelles de prêt d'honneur que nous avons évoquées. Dans mon département, nous avons aussi lancé de telles initiatives et en avons fait le bilan au terme de dix années : à cette occasion, j'ai été frappé par le faible taux de mortalité des entreprises soutenues par le prêt d'honneur.
Je partage l'inquiétude relative à la suppression du dispositif relatif aux heures supplémentaires : la situation de secteurs comme l'hôtellerie ainsi que les ressources de certains ménages vont en subir les conséquences. Je relève également des zones d'ombres, comme la diminution des crédits du tourisme, alors que ce dernier reste l'un des avantages fondamentaux de la France et de sa balance des biens et services.
L'amendement qui nous a été présenté par M. Martial Bourquin sur la partie recettes du Fisac appelle, en complément, un amendement sur la partie dépense de ce dernier. Quel est l'avis de la commission ? Cet amendement est adopté. Je soumets l'ensemble des crédits de la mission Économie au vote de la commission.
Je voudrais attirer votre attention sur un point particulier, sans revenir à la question des 35 heures, sinon pour témoigner, en tant que chef d'entreprise que cette mesure pose de sérieux problèmes lorsque l'entreprise doit faire fonctionner ses équipements de manière ininterrompue avec un rythme de travail basé sur les trois-huit. Je voudrais surtout souligner que le dispositif de crédit d'impôt annoncé à la suite de la publication du rapport de M. Louis Gallois, n'a pas du tout la même portée qu'une baisse des charges pour la capacité de financement et l'accès au crédit bancaire des entreprises. Je souligne que ce crédit d'impôt ne va pas avoir un impact direct sur le compte de résultats ; les banquiers ne vont pas le considérer comme une baisse de charge et cette mesure apparait donc comme une erreur sinon pour l'ensemble des entreprises, du moins pour les PME, les ETI et les micro-entreprises.
A mon sens, les baisses de charges et le crédit d'impôt ont, au bout du compte, les mêmes effets.
La commission examine le rapport pour avis sur les crédits du compte spécial « Participations financières de l'État » de la mission « Engagements financiers de l'État » du projet de loi de finances pour 2013.
C'est la première fois aujourd'hui que j'ai l'honneur de vous présenter les crédits du compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État », inscrits dans le projet de loi de finances pour 2013.
Tous mes prédécesseurs ont souligné que cette mission était une sorte de « boite noire budgétaire » et je constate que l'année 2013 n'apporte strictement aucune visibilité supplémentaire au Parlement à cet égard.
Néanmoins, la Cour des comptes, au fil de ses rapports annuels, hausse progressivement le ton de ses critiques : elle en est venue, en mai 2012, à demander au Gouvernement de respecter le principe de sincérité budgétaire :
- en faisant apparaitre les financements destinés à colmater la « défaisance » du Crédit Lyonnais - il s'agit de 4,5 milliards d'euros qui devront être remboursés avant le 31 décembre 2014 par l'établissement public de financement et de restructuration (EPFR);
- et en affichant de façon plus plausible le montant prévisionnel de cessions, presqu'invariablement fixé à 5 milliards d'euros chaque année, ainsi que celui des dépenses de désendettement prévues à hauteur de 4 milliards d'euros, quoiqu'il arrive par la suite.
Au-delà de ces développements traditionnels, je me suis efforcé, cette année, de placer mon approche sous le signe du pragmatisme ainsi que de l'urgence du redressement industriel.
La première partie de ma présentation se résume à une constatation : ce compte d'affectation spéciale n'affecte plus aucune somme au désendettement de l'État depuis 2008.
Nous examinons un compte qui, par définition, retrace les recettes tirées des participations de l'État et leur utilisation. Il comprend deux programmes distincts : le programme 731, consacré aux opérations en capital intéressant les participations financières de l'État, et le programme 732, relatif au désendettement de l'État et d'établissements publics de l'État.
J'illustrerai concrètement ces définitions juridiques en vous donnant quelques ordres de grandeur : les participations de l'État avoisinent 65 milliards d'euros. Or la dette publique représentait, fin 2011, 1 700 milliards d'euros. Cela situe mieux la portée de la fonction de désendettement du compte que nous examinons. A supposer que le « portefeuille » de titres géré par l'Agence des participations de l'État soit intégralement cédé, le produit ne couvriraient qu'environ 4 % de la dette publique. Autant dire que l'un des principaux objectifs de ce compte qui est le désendettement est désormais limité au moment précis où notre pays en a le plus besoin. Je m'empresse d'ajouter que cette hypothèse de cession massive est purement théorique puisque :
- d'une part, juridiquement, la loi oblige l'État à conserver un seuil minimal de participations (plus de 70 % pour EDF et plus de 33 % pour GDF-Suez, par exemple), ce qui rétrécit à environ 23 milliards d'euros le montant des cessions envisageable à droit constant ;
- et d'autre part, la faible valorisation boursière de ces titres n'incite pas à procéder à d'éventuelles cessions.
J'estime évidemment peu opportun de tirer de ce constat la recommandation de supprimer le programme 732 consacré au désendettement, mais il nous faut, à tout le moins, prendre conscience des limites de son potentiel.
Le deuxième axe de ma présentation s'interroge sur ce qui apparait comme une gestion peu active des participations de l'État.
Le portefeuille de titres de l'État est une résultante de notre histoire économique récente et des vagues successives de privatisations. C'est pourquoi vous trouverez, dans le rapport écrit, à la fois le détail des 58 entités aujourd'hui incluses dans le périmètre de l'État actionnaire et le bilan des principales opérations de cessions ou d'acquisitions conduites par l'Agence des participations de l'État depuis sa création en 2003.
A cet égard, j'observe que la gestion par l'APE de ses participations est beaucoup moins active que celle d'un fonds d'investissement ou de capital risque, et je me demande si, dans une optique de soutien des entreprises françaises innovantes, notre commission ne serait pas fondée à suggérer un peu plus de dynamisme.
On nous répondra sans doute que cet objectif relève plutôt de la mission du Fonds Stratégique d'Investissement (FSI), c'est-à-dire, selon toute vraisemblance, de la future Banque Publique d'Investissement (BPI) appelée à intégrer l'ensemble des organismes publics qui entrent dans le capital des entreprises de taille moyenne ou grande. Cependant, nos entreprises industrielles vivent une période particulièrement difficile et il me semble qu'une plus grande flexibilité de gestion pourrait favoriser l'internationalisation et la création d'emploi dans nos PME et nos entreprises de taille intermédiaire (ETI), et c'est aujourd'hui surtout sur celles-ci - quatre fois moins nombreuses en France qu'en Allemagne - qu'il faut mettre l'accent. Je signale au passage que l'Agence des participations de l'État détient 49 % du capital du FSI et la Caisse des Dépôts 51 %, ce qui montre que les investisseurs publics sont d'ores et déjà articulés entre eux.
Le troisième temps de mon exposé se résume à un souhait : que l'État puisse agir en « investisseur avisé » à la fois en préservant les intérêts patrimoniaux des français et en donnant un nouveau souffle à notre politique industrielle.
Les considérations précédentes amènent directement à approfondir le sujet qui me parait essentiel : comment l'État actionnaire peut-il contribuer de façon pertinente à la réindustrialisation et à la compétitivité de notre pays ?
J'ai pris connaissance du plaidoyer du rapporteur de l'Assemblée nationale sur cette mission, M. Guillaume Bachelay, en faveur de la réorientation de l'État actionnaire vers la compétitivité de l'industrie, qui s'accompagne d'une certaine défiance à l'égard d'une approche patrimoniale. Je me limiterai à trois remarques sur ce sujet.
Tout d'abord, dans son principe, la suggestion de Guillaume Bachelay me semble satisfaite par le droit en vigueur. En effet, le décret constitutif de l'Agence des participations de l'État du 9 septembre 2004 a été modifié le 31 janvier 2011 dans le sens d'une véritable stratégie industrielle globale de l'État. Ce texte prévoit explicitement que le commissaire aux participations de l'État, sous l'autorité du ministre chargé de l'économie, anime la politique actionnariale de l'État, sous ses aspects économiques, industriels et sociaux.
Ensuite, je me demande si nous ne devons pas redouter d'éventuels effets pervers dans la mise en oeuvre de ce très légitime objectif. De façon très précise j'attire l'attention sur un très récent arrêté du 29 juin 2012 qui organise une sorte de double tutelle de l'APE par les deux ministres en charge de l'économie et du redressement productif. Il me semble que ce texte comporte de très subtiles distinctions et je me demande s'il ne contient pas en germe quelques conflits de compétence. Son article 2 prévoit que les seules positions de l'APE « qui sont relatives à la stratégie industrielle de l'entreprise concernée ou qui soulèvent une question liée à la conduite de la politique industrielle sont arrêtées par le ministre de l'Économie et des Finances en association avec le ministre du Redressement productif. » et il précise aussitôt que ce dispositif ne s'applique pas aux entreprises relevant du secteur bancaire ou des assurances.
Très concrètement, on peut, par exemple, s'interroger sur les incidences de cette organisation sur la politique de dividendes de l'État actionnaire. Le ministre en charge du redressement productif a émis à plusieurs reprises, et en particulier lors de son audition par notre commission, des réserves dans ce domaine. En même temps, je rappelle que la distribution de dividendes fait partie des principaux indicateurs de performance de la mission budgétaire que nous examinons : 4,5 milliards de dividendes ont étés encaissés par l'État en 2011 au titre de ses participations et 4,4 milliards sont prévus pour 2012. L'enjeu est donc de taille - et je complète mon propos par deux observations.
- La première s'appuie sur une annonce ponctuelle : la presse a souligné la baisse du dividende de France télécom pour 2013 et ses conséquences : moins 430 millions d'euros pour l'État. De façon plus générale, il me semble légitime que le Parlement se demande si la « maximisation » des dividendes reste bien une préoccupation de l'État actionnaire.
- De façon plus technique, j'ai constaté que les dividendes versés à l'État actionnaire donnaient lieu à deux traitements budgétaires différents selon les cas : si le dividende est versé en espèces, il est affecté au budget général et non pas au compte d'affectation spéciale. En revanche le dividende versé en action vient alimenter le patrimoine de l'État actionnaire. Je pense qu'il y a là matière à réflexion : faut-il harmoniser les mécanismes et affecter l'intégralité des sommes au compte d'affectation spéciale ? J'aurai tendance à suggérer cette solution si et seulement si l'arbitrage entre le désendettement de l'État et le financement de projets industriels pouvait être éclairé par des personnalités incontestables du monde industriel.
Sur ces bases, je suggère à la commission d'appuyer mon intention d'interroger le Gouvernement sur le fonctionnement de la tutelle de l'APE, non pas dans un but polémique :
- mais pour souligner notre volonté de clarifier les orientations de l'État stratège industriel ainsi que la gouvernance de l'Agence des participations de l'État ;
- et parce que les représentants des élus locaux sont peut être les mieux placés pour souligner les risques et les complications de l'enchevêtrement des tutelles.
Par exemple, la presse vient d'évoquer, à propos d'EADS, la possibilité d'un désengagement de l'actionnaire industriel Lagardère et il est fondamental que l'État ait une vision stratégique dans ce secteur, alors même, je le souligne, que l'Allemagne étudie cette question depuis quatre ans avec Daimler.
En troisième lieu : à mon sens, j'y insiste, la meilleure manière de donner un souffle nouveau à l'État actionnaire est de faire appel à des talents reconnus du monde industriel. On l'a bien vu à l'occasion de la présentation du rapport de M. Louis Gallois : dès qu'une personnalité incontestable s'investit dans un sujet, l'intérêt du pays a tendance à prendre le dessus sur les clivages partisans ou les postures.
En tant que rapporteur pour avis de cette mission, plutôt que de me contenter de déplorer l'information insuffisante du Parlement sur les données chiffrées et sur les orientations de l'État actionnaire, j'ai employé le procédé d'investigation qui consiste à consulter les organigrammes de l'APE et des représentants de l'État dans les conseils d'administration. J'en retire la conviction qu'un élan nouveau pourrait être donné à la réindustrialisation en faisant appel à des personnalités reconnues du monde industriel. Plusieurs noms me viennent immédiatement à l'esprit : encore faut-il que les procédures de recrutement de l'APE qui ont été assouplies, nous dit-on, mais pas encore suffisamment, le permettent. L'occasion est propice à donner un contenu encore plus tangible au principe de « professionnalisation » du personnel de cette agence qui figure en bonne place dans ses divers rapports d'activité. Telle est la principale suggestion que je soumets à notre commission pour renforcer le volet industriel de la stratégie de l'État actionnaire.
Sur le plan financier, j'estime souhaitable, de réfléchir, non pas nécessairement à de nouvelles cessions ou privatisations, mais à une meilleure utilisation de la palette d'outils du droit français pour préserver l'influence de l'État dans les entreprises qu'il contrôle tout en permettant à ces dernières de s'alimenter en capitaux à long terme. Je rappelle tout d'abord que le vote double, prévu par notre droit des sociétés en faveur des actionnaires stables est un outil particulièrement astucieux de dissociation du capital et des droits de vote. C'est un atout déterminant pour préserver l'influence de l'actionnaire tout en libérant des capitaux pour les investir dans des ETI ou d'autres groupes industriels. Je rappelle, en faisant référence au groupe Danone, qu'on peut avec 8 % du capital exercer une influence déterminante sur une entreprise par le mécanisme du vote double et des apports financiers dans des holdings. Utilisé par plus de 80 % des sociétés familiales, le recours au vote double mérite d'être plus largement utilisé par l'État actionnaire. De façon complémentaire, il convient de réfléchir à un recours plus intensif aux émissions d'obligations convertibles, assorties d'une garantie de l'État, pour satisfaire les besoins de financement de nos entreprises au moment où le crédit bancaire se contracte. La création de sociétés holdings détenues par l'État et des entités du secteur public contribuerait à institutionnaliser un tel mécanisme. Aujourd'hui, l'épargne des français pourraient s'orienter de façon sécurisée vers des placements obligataires : pourquoi ne pas utiliser ce procédé - éventuellement sous forme d'obligations convertibles - pour démultiplier le potentiel de l'État actionnaire et intervenir dans le financement des ETI.
J'en termine en signalant que le compte d'affectation spéciale comporte, dans le PLF pour 2013, une nouvelle ligne d'un montant de 8,14 milliards d'euros, ce qui représente - si on écarte les 5 milliards d'euros correspondant à des cessions de titres fictives - la quasi-totalité du compte. La documentation budgétaire précise qu'il s'agit d'un versement du budget général destiné à couvrir :
- deux versements de 3,2 milliards d'euros au mécanisme européen de stabilité ;
- et 1,6 milliard pour l'augmentation de capital de la Banque européenne.
Il m'a semblé comprendre, au cours des auditions, qu'il s'agissait d'une sorte de « jeu d'écriture » plutôt que d'une opération conforme à la logique de l'État-actionnaire. Le personnel de l'Agence financière de l'État semble, en tous cas, avoir été sollicité pour accomplir les tâches de gestion comptables liées à ces opérations.
Sur le fondement de ces divers constats qui suscitent beaucoup d'interrogations, et tout en ayant pu apprécier, au cours des auditions, la compétence ainsi que le dévouement des représentants de l'APE confrontés à une conjoncture économique et politique difficile, je vous suggère d'émettre un avis défavorable aux crédits de la mission participations financières de l'État prévus par le PLF pour 2013, en attendant d'obtenir des réponses constructives sur ces dossiers auxquels il me parait essentiel de donner un nouveau souffle en réfléchissant à la démultiplication des opérations de l'État actionnaire.
Pour aller dans un sens similaire, je fais tout d'abord observer que certaines régions viennent d'émettre des emprunts en enregistrant de remarquables succès. Il y a un véritable engouement de la part des citoyens pour financer les entreprises de proximité. Je dois également reconnaitre que parfois, on peut s'interroger sur une certaine circonspection des représentants de l'État qui siègent dans les conseils d'administration.
Je fais avant tout observer que le projet de loi de finances pour 2013 est un budget de transition. Un certain nombre de pesanteurs s'exercent effectivement sur l'APE depuis quelques années. Même si j'aurai tendance à partager un certain nombre d'observations qui viennent d'être faites, je note qu'une divergence subsiste : nous estimons, en effet, possible de parvenir à atteindre les objectifs qui ont été évoqués de renforcement de l'influence de l'État actionnaire sans pour autant chambouler l'échafaudage actuel. Je regrette également que le diagnostic qui vient d'être fait n'ait pas été formulé au cours des années précédentes. En résumé, et par souci de cohérence avec les positions que j'ai défendues à plusieurs reprises, je réaffirme la nécessité d'un toilettage pour que l'État puisse peser de tout son poids sur les décisions industrielles et j'attends avec impatience les décisions qui pourront être prises dans le budget pour 2014.
Dans le cas précis de ce compte d'affectation spéciale, mon propos consiste à regretter la rigidité du périmètre de l'État actionnaire, ce qui se démarque de la problématique du budget de transition. Par ailleurs, je ne propose pas le recours à des « montages » particulièrement révolutionnaires. Prenons un exemple concret : dans le secteur des télécommunications, l'État pourrait théoriquement continuer à contrôler 15 % du capital d'une entreprise en détenant ses parts dans une structure qu'elle détiendrait à plus de 50 %, le reste étant ouvert à des souscriptions individuelles. On peut parvenir au même résultat en créant des filiales à 100 % du groupe, elles-mêmes ouvertes à 49,9 % à des souscriptions garanties par l'État, ce qui libérera des fonds pour améliorer les marges de désendettement de l'État et réinsufflera l'esprit industriel à l'épargnant individuel.
J'estime également que le discours qui vient d'être tenu par le rapporteur pour avis aurait pu s'appliquer à la gestion du gouvernement précédent. En tout état de cause, il serait aujourd'hui dommage de ne pas prendre en considération les suggestions qui ont été formulées pour utiliser les outils de l'État actionnaire avec plus de puissance. Une stratégie d'émission obligataire assortie, le cas échéant, d'un avantage fiscal me paraitrait à moi aussi souhaitable pour renforcer le lien entre nos concitoyens et leur appareil productif, sécuriser l'épargnant et relancer l'investissement.
Je me limiterai à deux remarques. Tout d'abord, je suis comme vous convaincu que le renforcement de la présence des personnalités du monde industriel en tant que représentants de l'État dans les conseils d'administration est une mesure frappée au coin du bon sens. Je souligne également que l'avenir de l'actionnariat d'EADS est un enjeu essentiel, l'État français détenant 15 %, l'Allemagne 22 % et le groupe Lagardère dont on annonce un possible désengagement, 7,5 % à l'heure actuelle.
Notre échange de vue consensuel et va tout à fait dans le sens des propos du rapporteur pour avis. Je vous suggère, dans ces conditions, d'approuver les préconisations du rapport même si vous ne suivez pas l'avis défavorable qu'il émet sur les crédits de la mission. En ce qui concerne les emprunts obligataires, je signale que la région Pays de la Loire a levé des fonds à deux reprises et les souscriptions ont été massives à chaque occasion.
La commission émet un avis favorable à l'adoption des crédits du compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État ».
La commission examine le rapport pour avis sur les crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur » du projet de loi de finances pour 2013.
Monsieur le Président, mes chers collègues, je vais vous présenter, pour la première fois, les crédits de la mission interministérielle « Recherche et enseignement supérieur » (MIRES). Je succède en cela à nos collègues Michel Houel et Marc Daunis et, en remontant un peu plus loin encore, à vous-même Monsieur le Président !
J'ai, pour préparer cet avis, procédé à une vingtaine d'auditions portant sur l'organisation générale de notre système de recherche. J'en ai retiré des éléments très intéressants, mais parfois inquiétants. Je vous les livrerai après vous avoir tout d'abord brièvement retracé l'évolution des crédits de la recherche dans projet de loi de finances pour 2013.
Le budget de la MIRES s'élève cette année à presque 25,6 milliards d'euros. C'est une enveloppe très importante, représentant la cinquième plus grosse dotation du budget de l'Etat. Dans le contexte très dégradé que l'on connaît, il faut reconnaître qu'elle est relativement préservée : elle augmente ainsi à la fois en autorisations d'engagement (+ 0,81 %) et en crédits de paiement (+ 2,16 %).
A bien y regarder toutefois, cette évolution n'est pas aussi favorable qu'elle n'y paraît. Tout d'abord, si l'on intègre l'inflation, aux alentours de 2 % cette année, l'enveloppe stagne en crédits de paiement, et régresse de plus de 1 % en autorisations d'engagement.
Ensuite, le programme « Recherche », qui nous intéresse particulièrement, bénéficie d'une moindre revalorisation (+ 1,2 %) que celle des programmes « Enseignement supérieur » (+ 2 %) et plus encore « Vie étudiante » (+ 7 %).
De plus, le sort des grands organismes de recherche est très variable. Certains, il est vrai, s'en sortent bien, tels que le Centre national de la recherche scientifique (CNRS), l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM), l'Institut national de recherche en informatique et en automatique (INRIA) ou l'Institut national de la recherche agronomique (INRA), dont les crédits augmentent de plus de 3 %. Mais pour d'autres, en revanche, les dotations publiques sont en baisse, ce qui les met en difficulté. C'est le cas du Centre national d'études spatiales (CNES), qui va perdre 64 millions d'euros sur trois ans, l'obligeant à réduire, reporter ou annuler des programmes pourtant stratégiques. C'est aussi le cas du Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) et de l'Institut français des sciences et technologies des transports, de l'aménagement et des réseaux (IFSTTAR). Quant à l'Institut français du pétrole - énergies nouvelles (IFP-EN), sa dotation est stabilisée mais comme ses ressources propres régressent, ses recettes totales baissent de 3 %.
Au-delà de ces évolutions annuelles, certaines tendances de fond sont inquiétantes.
Les financements issus de l'Europe, et plus précisément du 7ème programme-cadre de recherche et développement (PCRD), continuent de baisser : la France ne « récupère » plus que 11,2 % des crédits distribués, contre 18 % en 2000-2006, alors que nous finançons le programme à hauteur de 17 %. Nos équipes n'ont plus le temps ni les moyens de répondre à des appels à projets, européens et nationaux, qui se multiplient.
Par ailleurs, nous consacrons aujourd'hui 2,24 % de notre produit intérieur brut (PIB) à la recherche. Soit bien moins que l'objectif de 3 % fixé au sommet de Lisbonne en 2000. Et bien moins également que nos partenaires du Nord de l'Europe, dont la recherche privée atteint un tel niveau à elle toute seule.
J'en viens à présent à une analyse plus globale de l'organisation de notre recherche. Elle présente des faiblesses structurelles à corriger.
En premier lieu, elle fait intervenir une multitude d'acteurs, publics et privés, qui se sont accumulés au fil du temps : 82 universités, 9 établissements publics scientifiques et techniques (EPST), une quinzaine d'établissements publics industriels et commerciaux (EPIC), 67 établissements publics administratifs, de nombreuses fondations... Plus personne aujourd'hui ne s'y retrouve ; tout le monde a été d'accord sur ce point. Manquent une vision d'ensemble et un chef de file. Le ministère de la recherche semble en avoir conscience, mais ses projets de rationalisation sont encore flous.
Par ailleurs, avec la bureaucratisation de la recherche et la multiplication des appels à projets, nos chercheurs passent presque plus de temps à remplir des dossiers administratifs qu'à exercer leur vrai métier. Un récent rapport de l'Académie des sciences parle d'eux comme de « simples éléments au sein d'une technostructure complexe au service d'elle-même ! ».
Une autre limite d'ordre général réside dans la faiblesse de la recherche privée par rapport à la recherche publique. Sur les 2,24 % de PIB alloués à la recherche, 1,4 % provient des entreprises, ce qui s'explique par la faiblesse de notre secteur industriel. C'est bien moins que la moyenne des pays de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). Notre recherche est beaucoup trop « sous perfusion publique ». Le rapport Gallois, qui fait ce constat, propose d'orienter une partie de la commande publique vers des innovations ou des prototypes élaborés par des petites et moyennes entreprises (PME).
Par ailleurs, notre système hésite entre financements « récurrents », attribués directement à des équipes de recherche, et financements « sur projets ». Octroyés par l'Agence nationale de la recherche (ANR), ces derniers ont introduit une émulation entre chercheurs et permis d'orienter la recherche sur des thématiques stratégiques. C'est la logique des investissements d'avenir. Il semble toutefois que l'on soit arrivé au bout de l'exercice : « il n'existe pratiquement plus de moyens pour le financement des équipements collectifs, des infrastructures et des plateformes que l'ANR ne prend pas en charge », juge en effet l'Académie des sciences. Le projet de budget 2013 opère un rééquilibrage entre les deux types de financement, sans que l'on sache ce qu'il en sera à l'avenir ; or, il est nécessaire de maintenir des appels à projets structurants.
Enfin, dernière grande faiblesse, un transfert de technologie vers l'aval insuffisant. Nous cherchons beaucoup, mais nous innovons trop peu. Nos produits manquent donc de compétitivité par rapport à ceux d'autres pays, plus technologiques. Ils se vendent donc moins bien et moins cher, ce qu'a d'ailleurs très clairement souligné le rapport Gallois. Il nous faut donc réorienter une partie de notre effort de recherche et développement (R&D) vers le développement technologique, comme les Allemands. La ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche, Mme Geneviève Fioraso, a présenté une communication sur le sujet en conseil des ministres mercredi dernier ; elle a mis en place un groupe de travail dont les propositions, début 2013, devraient être reprises dans un projet de loi sur l'enseignement supérieur et la recherche attendu vers le mois de mars.
Malgré toutes ces faiblesses, nous avons de remarquables instruments, qu'il faut pérenniser. Le programme des investissements d'avenir (PIA) mobilise près de 22 milliards d'euros, soit 62,5 % du total des crédits du « grand emprunt », pour l'enseignement supérieur et la recherche. 574 projets ont été sélectionnés sur les 1 660 déposés, au cours de deux vagues d'appels à projets. Le bilan qui vient d'en être fait est encourageant, tout en pointant les limites.
Les jurys internationaux ont fait un travail de sélection apprécié. Le pilotage par le commissaire général à l'investissement, dirigé désormais par M. Louis Gallois, a été efficace. Surtout, des équipes se sont formées pour répondre aux appels à projet et ont appris à travailler ensemble ; des synergies sont apparues et ont permis à de petites structures bien organisées de remporter certains de ces appels.
Pour ce qui est de la recherche, les actions Equipex, Idex et Labex devraient dessiner « un paysage fortement structuré » autour de « thématiques chef de file ». Cela permettra de répondre pour partie à la critique d'éclatement du paysage de la recherche que j'ai évoquée. Les instituts de recherche technologiques (IRT) s'appuient sur des pôles de compétitivité ; ils rassemblent les compétences de l'industrie et de la recherche publique dans une logique de co-investissement public-privé.
Quant aux sociétés d'accélération du transfert de technologies (SATT), elles devraient pallier l'insuffisante valorisation de la recherche publique et le manque de prise en compte de l'aval. On peut toutefois se demander dans quelle mesure il ne vaudrait pas mieux, plutôt que de créer systématiquement de telles structures nouvelles, utiliser celles qui existent déjà ou sont attendues et prévoir leur articulation : certains technopoles aujourd'hui, et certains IRT demain, peuvent assurer ce transfert de technologie. Il faudrait examiner les situations territoire par territoire.
Les pôles de compétitivité constituent par ailleurs un autre instrument précieux, et d'ailleurs étroitement lié aux investissements d'avenir. Beaucoup de pôles ont instruit les projets du PIA, les ont labellisés et les portent aujourd'hui. Après la première phase (2005-2009), la deuxième phase s'achève cette année sur une évaluation globalement positive, concluant à la pertinence d'une troisième phase. Une véritable « dynamique collaborative » s'est fait sentir. Le label « pôle de compétitivité » est bien inscrit dans le paysage de l'innovation. L'impact macro-économique est indéniable : 2 500 innovations, un millier de brevets, un accroissement des dépenses de R&D, de nombreux emplois maintenus ou créés ...
Quelques limites toutefois sont apparues : une concentration excessive sur la R&D au détriment de l'innovation technologique, déjà évoquée ; une coopération entre pôles d'un même secteur insuffisante ; un pilotage à revoir, en intégrant davantage les collectivités, notamment les régions et agglomérations participantes, comme ce devrait être le cas pour les pôles de recherche et d'enseignement supérieur (PRES) ; et aussi, à terme, un déficit de financement. Les dotations du Fonds unique interministériel (FUI) baissent en effet depuis 2008 ; le rapport Gallois l'a souligné et appelé à corriger cette évolution. Dans le même temps, les ressources propres des pôles doivent impérativement augmenter, pour réduire leur dépendance aux subventions publiques.
Enfin, dernier instrument d'orientation de la recherche dont je veux dire un mot, le crédit d'impôt recherche (CIR). Avec une enveloppe de 3,35 milliards d'euros dans le projet de loi de finances, rattaché au programme 172 de la MIRES, il constitue la deuxième dépense fiscale de l'État. Laquelle dépasse même les 5 milliards d'euros si l'on prend en compte la créance fiscale des entreprises proprement dite. Il s'agit d'un outil central pour asseoir sur notre territoire et développer la R&D des entreprises, y compris des plus petites ; toutes les études vont en ce sens, et toutes les personnes rencontrées l'ont confirmé.
Le Gouvernement s'est engagé, suite au rapport Gallois, à pérenniser le CIR durant le quinquennat, ce qui est une bonne chose. Il a par ailleurs décidé de l'élargir à l'innovation, et ce pour les seules PME. Devrait ainsi être créé un nouveau compartiment réservé aux entreprises indépendantes de moins de 250 salariés, dont le taux de déduction de dépenses serait de 20 % et le plafond de dépenses de 400 000 euros. C'est une bonne initiative. Il faudra toutefois veiller à ce que ce l'administration fiscale n'en ait pas une interprétation biaisée, consistant à rattacher les dépenses systématiquement à ce crédit d'impôt innovation, et non au CIR, plus coûteux pour l'État. Un gros travail de précision règlementaire est donc à effectuer, qui sera crucial pour établir la portée réelle de la mesure.
Au-delà, reste à faciliter l'usage de cet instrument fiscal par les PME, pour lesquelles il est encore source de complexité et d'insécurité juridique. J'ai identifié plusieurs pistes :
- rétablir la tolérance de versement anticipé du CIR. En effet, les entreprises ne peuvent demander le remboursement de leur créance qu'au dépôt de leur liasse fiscale, ce qui entraîne un décalage de trésorerie de 3 à 9 mois. Il serait donc souhaitable de revenir au dispositif déployé dans le cadre du « plan de relance », qui permettait le remboursement du CIR à compter du 2 janvier. Le risque de se voir opposer l'article 40 de la Constitution m'empêche de vous proposer un amendement sur ce point ; j'espère que le Gouvernement en prendra l'initiative ;
- élargir le périmètre des dépenses d'innovation éligibles au crédit d'impôt innovation sur la base des critères proposés par le manuel d'Oslo, qui est la référence internationale. Il est en effet primordial de soutenir non seulement les phases avales aux projets d'innovation, mais aussi les phases indispensables à tous les stades de leur développement, telles que les activités de marketing technologique ou de design. J'ai un premier amendement à vous soumettre sur ce point ;
- sécuriser les garanties offertes en cas de contrôle. Les sociétés bénéficiant du CIR sont en effet soumises à une vérification de l'administration fiscale et une expertise scientifique du ministère en charge de la recherche dépourvue de contradictoire. Il faut corriger ce point, et donner la possibilité aux entreprises de demander une contre-expertise en cas de désaccord. Je vous propose un second amendement sur ce point ;
- travailler, en associant l'ensemble des acteurs concernés, à une réglementation, ou du moins à une labellisation des sociétés de conseil. Si beaucoup sont sérieuses, d'autres en effet « vendent » à des très petites entreprises (TPE) ou des PME des solutions de défiscalisation « clefs en mains » ; or, elles se retournent contre leurs bénéficiaires lorsqu'elles sont irrégulières et donnent lieu à un redressement fiscal.
Voilà, Monsieur le Président, mes chers collègues, les analyses et propositions que m'ont inspirées cet avis « Recherche ». Pour conclure, il me reste à donner mon avis sur les crédits de la MIRES pour 2013. A titre d'élément positif, figure la préservation des crédits de la mission, dans un contexte budgétaire difficile, ainsi que la pérennisation du CIR assorti de la création d'un volet « innovation ». Mais d'un autre côté, le transfert important de crédits de l'ANR pour soutenir des dépenses récurrentes interpelle quant à l'avenir du financement sur projet : est-ce un rééquilibrage ponctuel ou une orientation plus durable ? De plus, certains organismes de recherche se trouvent dans une situation budgétaire difficile du fait de la stagnation ou de la baisse de leurs dotations publiques. Dans ces conditions, je m'abstiendrai sur le vote des crédits de la MIRES.
Afin d'évaluer le budget global de la recherche, il faudrait inclure l'amortissement des investissements du PIA profitant à certains grands organismes de recherche tels que le CNRS, le CEA ou le CNES. Seraient à intégrer également dans cette consolidation les dotations du FUI finançant la recherche, dont il est effectivement regrettable que les crédits soit réduits cette année, comme l'a souligné le rapport Gallois ; une telle consolidation permettrait d'y voir plus clair. Je suis d'avis, comme vous Madame le rapporteur, que la création des pôles de compétitivité a entraîné une réelle dynamique collective et changé la culture des acteurs de façon positive. Par contre, je ne suis pas mécontent de la réduction des crédits de l'ANR au profit des EPST, car ces derniers ont été privés d'une partie de leurs moyens de fonctionnement au profit de l'Agence. Il faut que celle-ci se recentre sur sa mission de structuration des filières de recherche, qui ont été disséminées sur l'ensemble du territoire suite aux appels à projet du PIA, et qu'elle conserve des programmes blancs, constituant des alternatives aux programmes classiques des organismes de recherche dans des domaines originaux ou transversaux.
Je m'étonne de votre préconisation d'abstention, Madame le rapporteur : le précédent gouvernement, qui s'était engagé à accroître les moyens de l'enseignement supérieur pendant le quinquennat, n'avait augmenté que de 500 000 euros les crédits de fonctionnement des universités ; de plus, l'extension par le Gouvernement du dispositif du CIR à l'innovation, particulièrement au profit des PME, est un signal extrêmement fort et s'inscrit dans la droite ligne des préconisations que nous avions faites, avec notre collègue Michel Houel, et qu'avait également avancées notre collègue Martial Bourquin dans son rapport sur la désindustrialisation de la France.
Je présenterai néanmoins un amendement visant les entreprises qui, ayant bénéficié du CIR, procèdent ensuite à une diminution de leurs effectifs de R&D, voire au licenciement de tous leurs salariés, et délocalisent leurs services de recherche. Je propose une contractualisation sur le maintien de la masse salariale affectée à la R&D pendant au moins trois ans sur le territoire national, obligeant les entreprises ne respectant pas leurs engagements à restituer les sommes perçues au titre du CIR. Cela me paraît vital aujourd'hui si nous voulons que cet outil demeure efficace et soit pérenne.
Je partage entièrement votre préoccupation, Madame le rapporteur, sur les versements anticipés. Nous avions, l'an passé, préconisé un remboursement trimestriel pour les TPE. Peut-être pourrait-on avoir un système de créance plus souple ?
Je me félicite de la progression des crédits des EPST, et notamment la stabilisation de la dotation de l'IFP-EN, après une forte baisse les années précédentes. Comme notre président, je me félicite du rééquilibrage budgétaire opéré entre ces organismes et l'ANR.
Je n'ai pas entendu évoquer la création de mille postes universitaires pour la réussite des étudiants en premier cycle ...
Cela ne ressort pas de la partie de la MIRES consacrée à la recherche, pour laquelle la commission est compétente. Même s'il est vrai que la création de ces postes permet d'alimenter les laboratoires de recherche des universités.
Je vous félicite, Madame le rapporteur, pour votre travail. Lorsque nous avions instruit la mission d'information sur la désindustrialisation, nous nous étions interrogés sur les 3 % de CIR bénéficiant au secteur de la banque et de l'assurance, sans avoir de réponse précise sur ce point ; avez-vous des éléments à ce sujet ? Pour les grands groupes, nous avions proposé de cibler les crédits sur le siège social, afin d'éviter la multiplication des opérations sur les filiales, et d'en réaliser un inventaire pour connaître leur utilisation. Il sera difficile d'identifier cet usage et d'être coercitif ; en revanche, il est possible de localiser et globaliser ces crédits.
Le FUI et l'ANR sont des instruments importants permettant de financer la recherche, ce que faisait l'État auparavant. Les entreprises y pourvoyant désormais pour partie, l'État ne pourrait-il réaffecter les crédits au profit de ces structures, et en tout cas au FUI, qui est véritablement stratégique ? Étant président du premier pôle de compétitivité français sur l'agroalimentaire, réunissant Midi-Pyrénées et Aquitaine, je juge de façon très positive cette politique des pôles, qui a permis au monde de la recherche de s'imposer dans celui de l'économie.
Je suis entièrement d'accord, le FUI devrait relever de l'État stratège.
Nous avons un vrai problème avec de grands groupes qui, bénéficiant pour des sommes impressionnantes du CIR dans le secteur de l'industrie pharmaceutique, s'apprêtent à délocaliser. Il faudrait une disposition permettant d'obtenir la restitution des fonds ainsi versés.
Pour votre information, sachez que le rapporteur spécial pour avis de la commission des finances, M. Michel Berson, va déposer un certain nombre d'amendements, dont certains traiteront des problématiques évoquées. Je lui ai demandé notamment d'en rédiger un permettant d'empêcher la multiplication des filiales en vue d'optimiser le gain de CIR.
Il faudrait, Monsieur le Président, que nous fassions un bilan du CIR et des pôles de compétitivité à travers une mission d'information.
et même du PIA et du FUI !
A l'issue de ce débat, la commission émet un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur », les groupes UMP et UDI-UC s'abstenant. La commission adopte par ailleurs les deux amendements présentés par Mme Valérie Létard, rapporteur pour avis.
La commission examine le rapport pour avis sur les crédits du programme « Pêche et aquaculture » de la mission « Écologie, développement et aménagement durables » du projet de loi de finances pour 2013.
La discussion des crédits de la pêche s'inscrit cette année dans un cadre tout à fait nouveau par rapport à l'année dernière.
Sur le plan institutionnel, la pêche a été détachée du portefeuille du ministre de l'agriculture, où elle évoluait depuis plusieurs années, pour relever désormais du ministre délégué chargé des transports et de la mer, placé auprès de la ministre de l'Écologie du développement durable et de l'énergie. En conséquence, la direction des pêches maritimes et de l'aquaculture (DPMA), qui assure le pilotage de la politique nationale de la pêche, s'intègre désormais au sein du pôle écologique de l'exécutif.
Sur le plan budgétaire, les crédits de la pêche ne relèvent plus du programme 154 de la mission « Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales » mais ont été transférés au sein du programme 205 intitulé « Sécurité et affaires maritimes, pêche et aquaculture » de la mission « Écologie, développement et aménagement durables ». Ils restent gérés par la DPMA mais s'intègrent dans une enveloppe de programme plus réduite (environ 200 millions d'euros contre 2 milliards pour le programme 154 en 2012), ce qui laissera moins de marges de manoeuvre de ces crédits en court d'exécution.
Trois points sont abordés successivement dans mon rapport : d'abord, le contexte économique et réglementaire dans lequel évolue la pêche française, marquée par un train particulièrement rapide et préoccupant de réformes de la politique commune de la pêche au niveau européen. Même si le paysage s'éclaircit, toutes les incertitudes ne sont pas encore levées en la matière. Ensuite, sont analysés les crédits budgétaires eux-mêmes, qui sont modestes, et reviennent à leur niveau d'avant le plan pour une pêche durable et responsable (PPDR) de 2008 dit « plan Barnier ». Ces crédits sont loin de représenter l'essentiel des dispositifs en faveur de la pêche et de l'aquaculture mais n'en sont pas pour autant négligeables. Enfin, sont évoqués les défis auxquels la pêche et l'aquaculture devront faire face dans les années futures.
Le contexte dans lequel s'inscrit ce budget est marqué par un double phénomène de faiblesse structurelle de la filière pêche en France et de nouvelles réformes européennes en cours, susceptibles de menacer la pérennité de l'activité de certaines pêcheries.
La France compte plus de 5 500 km de côtes, sans compter les rivages ultramarins sur lesquels il existe un véritable potentiel de développement de la pêche et de l'aquaculture, comme l'a rappelé la résolution européenne sur la pêche ultramarine adoptée par le Sénat en juillet dernier, sur le rapport de notre collègue Serge Larcher. On pourrait penser que cette réalité géographique aurait pour conséquence une flotte de pêche puissante et une activité de pêche dynamique. Or il n'en est rien. La pêche décline inexorablement en France depuis une vingtaine d'années. Notre flotte en métropole est passée de 6 593 navires en 1995 à 4 675 en 2011. Le nombre des navires de taille intermédiaire - de 12 à 24 mètres - a été divisé par deux sur la période. La pêche en France n'emploie plus qu'un peu moins de 23 000 marins (dont moins de 20 000 en métropole). Ce déclin a nécessairement des répercutions à terre, car l'économie du littoral en est encore dépendante.
Nos pêcheurs n'ont pas réellement profité de la demande croissante de poissons et produits de la mer provenant des consommateurs. Nous importons aujourd'hui presque 80 % de ce que nous consommons. Notre balance des échanges de produits de la pêche et de l'aquaculture est déficitaire à hauteur de 3,5 milliards d'euros en 2011. Plus grave : les prix de vente au kilo de poisson débarqué en criée restent remarquablement stables sur longue période : ce ne sont donc pas les pêcheurs qui ont profité de la hausse des prix à la consommation.
Or dans le même temps, la pêche reste extrêmement dépendante d'un outil technique vieillissant. Les navires ont une moyenne d'âge de 25 ans. Le carburant pèse énormément dans les comptes des embarcations : l'Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer (IFREMER) estime la consommation moyenne des navires de pêche à 0,5 litres par kilo de poisson pêché. En moyenne, les navires consomment 50 000 litres par an.
Souffrant de faiblesses structurelles, la pêche française s'inscrit dans un cadre européen très contraignant, en pleine refonte aujourd'hui. Les propositions de règlements communautaires réformant la politique commune de la pêche (PCP) ont été présentées par la Commission européenne fin 2011. Le Sénat a d'ailleurs pris position sur ces textes dans une résolution européenne adoptée en juillet 2012, sur le rapport de notre collègue Bruno Retailleau, critiquant certaines des orientations choisies. Depuis, les négociations sur la future PCP évoluent favorablement à Bruxelles. La marchandisation des droits de pêche avec les concessions de pêches transférables (CPT) obligatoires est une voie abandonnée : chaque État devrait conserver la liberté de choisir son système de gestion des droits de pêche.
La réunion du Conseil des ministres chargés de la pêche de l'Union européenne du 15 juin 2012 a également permis d'assouplir le rythme d'atteinte du rendement maximum durable (RMD) à 2020 au plus tard lorsque 2015 n'est pas possible. L'interdiction des rejets a aussi été assouplie. Lors de la réunion du Conseil pêche du 23 octobre dernier, de nouvelles avancées ont été obtenues concernant le futur Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche (FEAMP), appelé à remplacer le Fonds européen pour la pêche (FEP) à partir de 2014. Alors que la première mouture de la Commission était très restrictive, les États-membres de l'Union se sont accordés pour utiliser le Fonds pour financer des opérations de modernisation de la flotte de pêche - à capacité constante - poursuivre le financement européen des plans de sortie de flotte et aider à l'installation de jeunes pêcheurs.
Il n'en reste pas moins que les pêcheurs sont la variable d'ajustement des arbitrages rendus sur la pêche en Europe et subissent des décisions annuelles de modification de quotas parfois difficiles à accepter - 32 % de baisse sur le merlu, 55 % pour l'églefin en mer celtique, 29 % pour la sole du Golfe de Gascogne pour 2013.
La pêche en eaux profondes sera-t-elle la prochaine victime d'une approche très sévère de la gestion de la ressource retenue à Bruxelles ? La proposition de règlement visant à interdire la pêche des espèces de grands fonds au moyen de chaluts, présentée durant l'été 2012, inquiète à juste titre les pêcheurs de Boulogne ou de Lorient.
Le budget 2013 pour la pêche s'inscrit donc dans ce contexte, qui n'est pas celui d'une crise comme on l'avait connue en 2008, mais qui correspond davantage à un certain marasme.
L'enveloppe de la pêche pour 2013 revient à son étiage d'avant la crise de 2008, avec 52,2 millions d'euros en crédits de paiement (CP) et autorisations d'engagement (AE) proposés cette année, contre respectivement 58,3 et 60,5 millions d'euros d'inscrits dans le projet de loi de finances pour 2012, soit une baisse de 10 % en CP et 14 % en AE.
Cette enveloppe, modeste, est destinée à servir les différentes priorités de la politique nationale de la pêche, qui, elles, ne changent pas.
Environ 6 millions d'euros sont destinés à renforcer les connaissances scientifiques sur l'état des stocks halieutiques et à établir des statistiques, répondant ainsi à des exigences communautaires - enquête annuelle sur l'aquaculture, programmes d'observations scientifiques en mer, subvention à l'IFREMER, au Muséum national d'histoire naturelle et à l'Institut de recherche et de développement.
Environ 6 millions d'euros sont consacrés au contrôle des pêches, qui constitue aussi une obligation européenne. L'enveloppe pour le contrôle est moins importante qu'en 2012, du fait de la fin du programme d'équipement des navires en livres de bord électroniques pour enregistrer leurs prises. Il faut cependant garder à l'esprit que les crédits de la pêche sont loin de retracer l'ensemble des moyens consacrés au contrôle puisque, par exemple, les crédits des centres régionaux opérationnels de surveillance et de sauvetage (CROSS) qui pilotent les moyens opérationnels de contrôle, relèvent d'un autre programme. Les insuffisances du contrôle des pêches ont par le passé conduit la France à être condamnée par la justice européenne pour non-respect des obligations communautaires, dans l'affaire dite des captures sous taille, pour un montant de plus de 70 millions d'euros. La Cour des Comptes a alerté le Gouvernement dans un référé au mois de juillet 2012 sur l'inadaptation du dispositif actuel de contrôle des pêches, qui souffrirait d'un défaut de pilotage et laisserait trop de place à des négociations avec la profession. Le Gouvernement ne partage pas les constatations de la Cour. Même si l'organisation du contrôle des pêches est perfectible, il insiste sur les progrès en la matière, qui amènent même la France à dépasser les objectifs fixés par les règlements européens.
La dotation à la caisse chômage avaries intempéries gérée par le Comité national des pêches est maintenue à 6,8 millions d'euros.
Enfin, plus de la moitié des crédits du budget pêche sont consacrés à des dépenses d'intervention économique, contreparties ou non des crédits européens : il s'agit des contrats bleus, qui sont soutenus à hauteur d'environ 10 millions d'euros, mais aussi des aides à la commercialisation ou encore à la modernisation de la flotte.
Parmi les crédits d'intervention, on note la baisse de ceux consacrés aux plans de sortie de flotte, qui passent de 11 millions en AE en 2012 à 7 millions en 2013 : il est probable que l'année 2013 verra la prolongation du plan de sortie de flotte pour les chalutiers en Méditerranée, compte tenu de l'état de la ressource halieutique, mais aussi l'ouverture d'un nouveau plan pour les navires de pêche à l'anguille en Méditerranée et pour la flotte de pêche du requin-taupe de l'Île d'Yeu.
Pour terminer le panorama des crédits proprement dits, on constate la relative faiblesse des crédits consacrés à l'aquaculture. Le programme de recherche sur la sélection génétique des huitres passe de 2 millions d'euros l'année dernière à 600 000 euros en 2013. Mais en matière d'aquaculture, le défi est moins budgétaire que physique : les schémas régionaux de développement de l'aquaculture marine (SRDAM) créés par la loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche (LMAP) de 2010 devraient être achevés d'ici la fin 2012 et identifier des sites propices à cette activité, qui est balbutiante en France.
Enfin, il faut garder à l'esprit que les crédits nationaux, ramenés cette année à un étiage bas, du fait de l'achèvement du plan Barnier de 2008, ne constituent qu'une petite fraction des soutiens au secteur de la pêche. L'Europe à travers le FEP est un acteur essentiel pour aider le secteur, avec une enveloppe de 216 millions d'euros sur la période 2007-2013 pour la France. Sont également maintenus en 2013 des dispositifs fiscaux favorables comme l'exonération totale de taxe intérieure de consommation pour les navires de pêche. Enfin, depuis un an, émerge un acteur interprofessionnel nouveau puissant : France filière pêche (FFP). Alimentée à partir d'une contribution volontaire des distributeurs, garantie pour les cinq ans à venir à hauteur de 30 millions d'euros par an, l'action de FFP pourrait avoir un impact majeur pour moderniser la filière et valoriser auprès du consommateur les produits de la pêche française.
En dernier lieu, j'évoque les quatre défis que la pêche française devra relever dans les années à venir. Le premier défi est économique : notre flotte doit être modernisée et nos moteurs doivent être moins gourmands. L'organisation économique de la filière doit aussi être renforcée pour permettre aux pêcheurs d'avoir des prix rémunérateurs. C'est là où l'action conjuguée de l'État, de l'Europe et de la profession à travers FFP, est essentielle.
Le deuxième défi est environnemental : la Commission européenne y veille, mais l'échelon national a aussi son rôle à jouer pour faire évoluer les mentalités et faire respecter les règles collectives. Mais l'application des règles de préservation de la ressource ne doit pas se faire au mépris des réalités économiques et sociales : il faut, avant de prendre toute décision définitive, en étudier l'impact économique et social.
Le troisième défi est territorial : il est indispensable de maintenir une activité de pêche sur le littoral, car celle-ci participe à l'aménagement harmonieux du territoire. Ce défi territorial doit aussi être porté outre-mer où le potentiel de développement de la pêche et de l'aquaculture est gigantesque.
Enfin, le dernier défi est social : améliorer les conditions de travail des marins, qui restent très exposés aux risques d'accidents du travail, former les générations futures de pêcheurs et aider à l'installation : voilà ce qui garantira un avenir à nos ports de pêche.
En conclusion, je propose donc d'émettre un avis favorable à l'adoption des crédits relatifs à la pêche du projet de loi de finances pour 2013.
Le montant du budget - 52 millions d'euros - peut apparaître dérisoire, mais sert un secteur de la pêche qui représente 90 000 emplois, directs ou indirects. Nous importons 80 % de notre consommation de poissons, alors que nous sommes le deuxième pays maritime du monde. La politique de la pêche dépend non de la France, mais essentiellement de l'Europe. Or certaines évolutions de la réglementation européenne inquiètent. La Commission a proposé, par la voix de la commissaire Maria Damanaki, de supprimer les subventions à la modernisation des bateaux de pêche et à la casse des navires sortis de la flotte. Le ministre Frédéric Cuvillier a demandé le maintien de ces subventions. Plusieurs États membres de l'Union européenne comme l'Espagne, la Pologne et la Slovénie, soutiennent cette position. Où en est le rapport de force européen sur ce point aujourd'hui ?
Les contrats bleus constituent un sujet d'inquiétude. En 2009, la Commission européenne a invalidé deux mesures incluses dans le dispositif des contrats bleus en 2008, demandant le remboursement des montants versés. Lorsque l'on met en place des aides, il est important de bien respecter la réglementation. En matière d'aides au carburant, il a fallu aussi rembourser les aides versées. Est-on bien certains que les contrats bleus actuels sont conformes à la réglementation européenne.
La création de l'association FFP permet la structuration de la filière pêche. Mais aujourd'hui, ce sont les grandes enseignes de distribution qui sont les financeurs. Les projets seront-ils sélectionnés en toute indépendance ?
Je m'interroge sur le développement de l'aquaculture : les SRDAM ont pris du retard et devraient être achevés d'ici la fin 2012. En est-on certain ? Il est dommage que le ministre compétent soit auditionné par la seule Commission du développement durable sur el volet transports de son portefuille, car il aurait pu répondre aussi à ces questions. C'est le résultat de la séparation de notre Commission.
Le Conseil européen d'octobre a permis des ouvertures sur la possibilité pour le FEAMP de financer la modernisation des navires, notamment au niveau de leur motorisation. L'ancienneté du parc de navires pose des problèmes, en particulier de sécurité. Si l'on veut installer de jeunes pêcheurs, il faut des navires plus modernes.
En ce qui concerne les contrats bleus, il faudra interroger le ministre. Les contrats bleus sont un dispositif vertueux. Entre 600 et 900 navires s'engagent dans des démarches de contrats bleus. Le dispositif est mieux géré aujourd'hui.
FFP dispose d'un financement pérenne pour cinq ans. C'est naturellement peu satisfaisant de faire une politique publique sur fonds privés, mais FFP présente l'avantage d'utiliser des crédits qui ne peuvent être qualifiés de subventions publiques et permettent donc de respecter la rigueur du droit européen en matière d'aides d'État.
Y a-t-il dans le budget de la pêche des crédits dédiés à la sauvegarde du poisson bleu en Méditerranée - sardine, anchois, maquereau. Je déplore que beaucoup de ces poissons soient destinés à l'alimentation dans les fermes aquacoles.
La France n'a pas pour objectif de développer une pêche minotière pour fournir l'aquaculture. Cette forme de pêche est catastrophique sur le plan environnemental. L'aquaculture reste faible en France alors qu'elle a un potentiel important et permet d'échapper à la rigueur des quotas de pêche.
Le rapport et les crédits relatifs à la pêche sont adoptés à l'unanimité.
La commission auditionne M. Guillaume Garot, ministre délégué auprès du ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, chargé de l'agroalimentaire.
Je suis heureux d'accueillir M. Guillaume Garot, ministre délégué chargé de l'agroalimentaire, pour nous parler des crédits affectés à l'agroalimentaire dans la loi de finances pour 2013 et, plus généralement, des forces et faiblesses de ce secteur qui, faut-il le rappeler, réalise 147 milliards de chiffre d'affaire et emploie 450 000 salariés. La part de la filière agroalimentaire dans le PIB est loin d'être négligeable, mais les exportations se sont dégradées depuis quelques années.
Comment entendez-vous, monsieur le ministre, renforcer la compétitivité des industries agroalimentaires (IAA) et assurer le respect de la loi de modernisation économique (LME), notamment pour tout ce qui touche aux relations entre producteurs, transformateurs et distributeurs ?
ministre délégué auprès du ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, chargé de l'agroalimentaire. - Pour avoir été parlementaire, je sais l'importance de ces rencontres. Stéphane Le Foll et moi-même étions d'ailleurs venus en juillet vous présenter la politique que nous entendions mettre en oeuvre. Le président de la République a voulu un ministère dédié à l'agroalimentaire...
reconnaissant ainsi l'importance de ce secteur et sa nécessaire contribution à l'effort de redressement économique.
Plus de 450 000 personnes sont employées dans ce secteur qui regroupe 12 000 entreprises. Sa contribution positive de plus de huit milliards à notre balance commerciale tient cependant à quelques fleurons, comme le vin, les spiritueux, les produits laitiers et les céréales. En revanche, d'autres secteurs sont en grande difficulté, notamment le poulet et le porc. Si l'on parle des forces des IAA, il faut aussi en évoquer les faiblesses. Depuis dix ans, la part de l'agroalimentaire dans notre balance commerciale a reculé et depuis cinq ans, nous avons perdu des parts de marché. En 2002, nous étions le deuxième exportateur mondial, après les Etats-Unis. Aujourd'hui, nous sommes le quatrième, derrière les Etats-Unis, l'Allemagne et les Pays-Bas. Nous devons nous attaquer à ces difficultés - j'ai d'ailleurs passé l'été sur le dossier Doux.
Le gouvernement a la responsabilité d'anticiper et de tracer l'avenir, non pas dans le secret des bureaux ministériels ou parlementaires, mais en associant le maximum d'acteurs à la définition d'orientations stratégiques apportant des réponses concrètes et opérationnelles. Nous avons donc lancé en septembre des rencontres régionales pour l'avenir de l'agroalimentaire et de la filière bois. Région après région, nous réunissons les acteurs locaux et nous leur demandons comment répondre à la faiblesse de l'attractivité du secteur, comment exporter plus, comment accroître la valeur ajoutée, comment pousser les feux de l'innovation ? Le gouvernement attend des réponses simples et efficaces. A la fin du printemps, nous déterminerons un plan d'action pour l'agroalimentaire afin de traduire les attentes des producteurs et des entreprises, notamment des PME.
Nous avons aussi dû réagir dans l'urgence : nous avons ainsi évité le précipice industriel et social et sauvé des entreprises promises à la liquidation, par exemple le site industriel de Blancafort dans la région Centre. Dans le dossier Doux, nous nous employons à sauver le plus de sites et d'emplois. Je me suis également battu pour mieux valoriser à l'international le foie gras : je me suis ainsi rendu en Russie pour obtenir l'agrément d'une grande coopérative française de foie gras ; elle y vendra ce magnifique produit, ce qui consolidera 1 800 emplois à Sarlat en Dordogne et à Maubourguet dans les Hautes-Pyrénées.
La filière foie-gras emploie 35 000 personnes, ce qui est loin d'être anecdotique !
Depuis juin, nous avons rouvert le dossier des relations commerciales entre les producteurs, les transformateurs et la grande distribution pour aboutir à une meilleure régulation de la chaîne alimentaire et de la filière agroalimentaire. Nous les réunirons le 21 novembre afin de parvenir à mieux partager la valeur ajoutée pour mieux en créer : les entreprises et surtout les PME ont besoin de marges pour investir, innover et exporter.
Je me suis également attaqué au dossier du gaspillage alimentaire qui nous touche en tant que citoyens mais aussi comme acteurs économiques : il nous reste à inventer un nouveau modèle de développement durable.
La semaine passée, le gouvernement a annoncé des mesures puissantes en faveur de la compétitivité des entreprises, y compris celles du secteur agroalimentaire. Pour soutenir la production et redresser l'ensemble de la filière, l'investissement et la modernisation de l'outil de production sont indispensables : la Banque publique d'investissement (BPI) destinera une partie de ses crédits aux PME de la filière agroalimentaire.
Le gouvernement veut accroître les exportations des IAA. Dans le cadre du pacte de compétitivité, nous allons définir une stratégie export en direction des marchés émergents : 2013 sera l'année de l'Asie ; priorité sera donnée au Japon, à la Chine et à la Corée. Cette stratégie sera déclinée par filières et par produits ; les entreprises, notamment les plus petites, seront accompagnées à l'export. D'ici la fin de l'année, nous aurons créé dans les régions des outils de formation : les entreprises intéressées seront conviées à des sessions avec des agents de l'Etat et des régions. C'est en créant une culture commune de l'exportation que nous serons efficaces. Ce parcours d'accompagnement sera formalisé par un contrat passé entre l'Etat et l'entreprise, en lien avec la collectivité ; il détaillera les actions de formations mais aussi le soutien sur place des entreprises pendant trois ans - les propositions pragmatiques de la mission sénatoriale de contrôle budgétaire sur la stratégie export sont très attendues. Notre diplomatie économique sera mobilisée pour favoriser notre stratégie Asie.
Nous mettons en place une plateforme numérique afin que les entreprises disposent d'une parfaite traçabilité de leurs produits du site de production jusqu'aux lieux de vente. Cela concerne en particulier les barrières sanitaires qui sont parfois très hautes et qu'il nous faut franchir dans les meilleures conditions possibles. L'information doit être la plus précise possible en temps réel. Nous allons mobiliser nos services pour améliorer notre site internet et faciliter la signature électronique. J'ai récemment rencontré à Besançon un chef d'entreprise qui est obligé de faire deux fois deux heures de voiture pour signer des papiers administratifs. Cela n'est pas acceptable.
Il n'y aura pas d'aide efficace et durable si nous ne soutenons pas la reconstruction de certaines filières, comme celles du porc ou du poulet. Nous avons entamé une série de réunions pour présenter au printemps des mesures fortes, ambitieuses et réalistes.
Nous devons inventer un nouveau modèle de production pour réconcilier performances économique et écologique. C'est ainsi que nous améliorerons la compétitivité des filières porc et poulet. La période de mutation actuelle est l'occasion d'inventer de nouveaux modèles économiques afin de produire plus, mieux et plus durable.
Ce nouveau modèle devra relever l'immense défi du siècle : nourrir 9 milliards d'individus en 2050. Selon l'organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), il faudra que la production agricole augmente de 70 %. Comment relever ce défi ? Notre modèle repose sur la qualité alimentaire et la sécurité sanitaire, et c'est sur ces deux piliers que j'entends développer notre filière agroalimentaire. C'est ainsi que nous aiderons chacun à manger à sa faim, tant dans notre pays que dans le monde. Ma volonté de lutte contre le gaspillage alimentaire s'inscrit également dans ce cadre. Je souhaite enfin une meilleure répartition de la valeur ajoutée afin que chacun puisse vivre dignement de son travail.
La politique menée par le gouvernement est parfaitement cohérente. Enjeu, dessein, objectif, tout fait sens parce que l'agroalimentaire est une filière stratégique. Vous pouvez compter sur ma détermination pour faire avancer ce secteur en privilégiant la concertation.
Voilà des années que j'attire l'attention des uns et des autres sur le défi alimentaire mondial. La démographie va probablement créer des tensions géopolitiques de même nature que celles que nous rencontrons sur l'énergie.
Vous n'avez pas traité des agro-carburants qui entrent en concurrence avec l'alimentation. En revanche, vous avez évoqué le bois, sans que je voie la relation avec l'agroalimentaire.
Votre présentation démontre votre enthousiasme. Pouvez-vous nous dire où en est le dossier Doux et quels sont les projets de reprise ?
La filière porcine souffre de la hausse du prix des aliments. Un plan stratégique est annoncé pour janvier : pouvez-vous nous le présenter ?
Comment renforcer la compétitivité des abattoirs ? Plutôt que de compétitivité, il faudrait peut-être évoquer des distorsions de concurrence dans l'agroalimentaire, car nos voisins, notamment Allemands, emploient des ouvriers étrangers à des tarifs horaires bien inférieurs aux nôtres. Y a-t-il des pistes à l'échelle européenne ?
Merci, monsieur le Ministre, pour la détermination dont vous faites preuve en lançant le plan de redressement stratégique de la filière agroalimentaire. Il y a deux ans, nous avons mené avec Renée Nicoux une mission sur l'avenir de la PAC. Aux Pays-Bas, on nous avait confirmé que notre pays était passé au quatrième rang des puissances exportatrices dans l'agroalimentaire et nos interlocuteurs s'étonnaient de l'absence de réaction des autorités françaises.
La marge des abattoirs est extrêmement réduite. Lorsque j'étais maire d'Egletons, les abattoirs Charal, qui emploient 300 personnes, menaçaient de fermeture. J'ai créé un environnement favorable grâce à un réseau de chaleur bois. L'entreprise a ainsi réduit ses coûts : une collectivité peut apporter une aide précieuse.
Comme vous l'avez dit, il faut lutter contre le gaspillage alimentaire - il en est de la nourriture comme pour l'énergie, la moins chère est celle que l'on ne gaspille pas. Les poubelles des cantines scolaires débordent de pain alors que les Restos du coeur ont de moins en moins de moyens. Dans les industries de transformation et de distribution, il est également possible de réduire les gaspillages. Où en est le programme européen d'aide aux plus démunis (PEAD) ? L'Allemagne ne va-t-elle pas s'opposer à sa reconduction ?
J'approuve votre stratégie en matière d'exportation. En octobre, le président de la République a visité à Brive une entreprise de tonnellerie qui est à peu près seule en France à fabriquer des tonneaux en chêne pour le vieillissement du vin. Or, elle ne parvient plus à s'approvisionner parce que les Chinois achètent le chêne à des tarifs prohibitifs. Nous devons protéger nos savoir-faire et nos productions de qualité face à la concurrence internationale.
Vous êtes dynamique et plein d'entrain, monsieur le Ministre, mais les difficultés des filières du poulet et du porc ne datent pas d'aujourd'hui et elles tiennent pour partie aux exigences environnementales que nous nous sommes imposées avec le Grenelle de l'environnement. Nous sommes terriblement handicapés par rapport à nos voisins allemands qui nous devancent désormais. Voilà deux ans qu'un atelier de mille truies peine à obtenir les autorisations nécessaires pour s'implanter près de chez moi, dans une plaine où il n'y a personne. On pourrait également formuler des craintes pour le foie gras quand d'aucuns, en Europe, dénoncent le gavage.
Vous connaissez les difficultés de la dinde : nos éleveurs ne peuvent utiliser certains aliments, contrairement aux Allemands. La crise du lapin frappe notre pays depuis longtemps. Aujourd'hui, les jeunes ne savent plus tuer un lapin ni le cuisiner. En revanche, des industriels sont capables de préparer des plats cuisinés.
Si vous pouviez demander aux ambassades d'aider les PME à vendre leurs produits à l'étranger, vous feriez oeuvre utile. L'assurance prospection est un très bon outil pour que des PME-TPE exportent pendant trois ans en toute sécurité, mais ce dispositif est encore trop confidentiel.
Si votre détermination est grande, votre budget est bien maigre : 48 % de moins pour l'aide à l'industrie agroalimentaire, 35 % de moins pour les aides à l'exportation et 32 % de moins pour les interventions de FranceAgriMer. Qu'allez-vous faire ?
Les industriels de l'agroalimentaire nous ont fait part des graves difficultés qu'ils rencontrent avec les groupements d'achats des grandes surfaces. La situation est des plus préoccupante : ils ne peuvent répercuter les hausses des coûts des matières premières sur les prix de vente. Si cette situation perdure, certaines de ces entreprises déposeront leur bilan. Il est urgent de contenir ces groupements d'achats, notamment ceux qui s'approvisionnent pour alimenter leurs rayons de marques distributeurs. La loi devrait être plus précise et il convient de les calmer : les Echos rappellent que la crise ne les touche pas, contrairement aux agriculteurs et aux entreprises de transformation. Il faut empêcher l'irréparable.
Faisons attention de ne pas faire dans l'agroalimentaire la même erreur que dans l'industrie automobile : la montée en gamme est nécessaire dans un marché mondialisé pour continuer à fixer nos prix. C'est grâce à la qualité et à la sécurité alimentaire que nous nous imposeront face aux productions de masse du Brésil comme de la Chine. La marque France en agroalimentaire est mondialement connue : développons-la.
Enfin, gardons le label restaurateur-transformateur : la restauration par réchauffage au micro-onde n'est pas l'avenir de la France. Les clients des restaurants doivent déguster des produits transformés par de vrais cuisiniers.
Nous sommes préoccupés par la filière porcine : avec Stéphane Le Foll, nous avons réuni le 30 octobre dernier, pour la première fois, l'ensemble des acteurs de cette filière pour travailler à la présentation d'une nouvelle stratégie pour le porc d'ici trois mois. Un compromis historique entre la performance économique et la performance écologique va devoir être trouvé : c'est la condition de l'avenir de la filière. Tant que les éleveurs de porcs seront tenus pour de méchants pollueurs, il ne sera pas possible d'avancer. Comment bâtir un consensus historique ? L'Allemagne se préoccupe de l'environnement : les élevages sont devenus des lieux de production énergétique avec la méthanisation. Pourquoi ne pas faire de même en France ? Nous pourrons nous interroger sur la taille des élevages quand nous aurons répondu à l'exigence écologique. Nous devrons simultanément résoudre trois autres problèmes : premièrement, les abattoirs, surtout en Bretagne, sont en grande difficulté et cette question doit être traitée au niveau national. Il ne faut d'ailleurs pas examiner la situation d'un seul groupe mais regarder globalement l'état de l'outil d'abattage en France. Deuxième point : il va falloir monter en gamme pour créer de la valeur ajoutée, comme l'a dit à juste titre Martial Bourquin. Dernier point : nous devrons améliorer les exportations de viande porcine, notamment dans les pays émergents. Une fois que nous serons d'accord sur ces points, nous pourrons déterminer quel est le volume de production porcine que nous devons viser en France : 23 ou 26 millions de têtes.
La justice s'est prononcée pour le pôle frais de l'entreprise Doux. Certains sites ont été repris et d'autres non. Nous avons sauvé, sur les sites placés en liquidation, 861 emplois sur un peu plus de 1 700. Malheureusement, 857 personnes n'ont pas retrouvé d'emploi. Cependant, nous n'avons laissé personne au bord du chemin : un dispositif d'accompagnement social très puissant a été mis en place avec un contrat de sécurisation professionnelle. Chaque salarié bénéficie pendant douze mois d'un accès facilité à la formation, d'un accompagnement pour la recherche d'un emploi et du versement de 100% de son salaire net pendant un an.
Pour ouvrir toutes les portes, nous avons financé une étude afin d'examiner la viabilité industrielle du site de Graincourt qui n'a pas été repris. Ses conclusions seront rendues publiques avant la fin de l'année.
Le 28 novembre prochain, le tribunal de Quimper se prononcera sur la part du groupe Doux qui relève des produits frais et élaborés : Charles Doux et ses actionnaires devraient présenter un plan de continuation. L'Etat sera vigilant car ce plan ne pourra pas être adossé ad vitam aeternam sur des restitutions aux exportations. Le plan de continuation devra ternir compte de l'arrêt prévisible des restitutions dans la future PAC et garantir les 2 000 emplois restants.
Vous m'avez interrogé sur les abattoirs et les contrats de prestation au sein de l'Union européenne. L'Allemagne en use beaucoup : le coût du travail horaire dans les abattoirs y est d'environ 7 euros contre 20 euros en France - et 30 euros au Danemark : ne prétendons pas que le coût du travail est l'unique raison du défaut de compétitivité de la filière française, les capacités d'exportation du Danemark sont supérieures aux nôtres ! D'autres difficultés expliquent donc cette situation. Le problème des contrats de prestation, cette forme de dumping social, est d'ores et déjà posé sur la table ; nous le traiterons au niveau européen. L'urgence reste malgré tout de mobiliser nos énergies pour défendre la nouvelle PAC qui fait l'objet de nombreuses attaques budgétaires. Stéphane Le Foll sera à pied d'oeuvre lors du prochain Conseil européen des 22 et 23 novembre, conformément à l'engagement du président de la République.
Pourquoi inclure le bois dans les rencontres régionales ? Les enjeux sont voisins en termes de calendrier. Aux rencontres régionales pour l'avenir de l'agro-alimentaire et du bois du premier trimestre 2013 succédera une rencontre nationale sur le bois. La balance commerciale du bois est déficitaire de 6 milliards d'euros, un chiffre considérable ! Le tableau n'est guère réjouissant : comme les pays en développement, nous exportons du bois rond et importons des meubles. Imaginez le travail qu'il faut mener pour construire une filière bois : il faut tout reprendre de A à Z. La réflexion est en cours, je ne détaillerai pas nos pistes, d'autant que les rencontres régionales seront l'occasion de trouver des premières réponses à des questions concrètes : quels lieux de production en France, quels débouchés, quelle place pour le bois-énergie ? La perspective sera globale pour des raisons évidentes : comment parler du tronc, en oubliant les branches ?
Le gaspillage alimentaire doit faire l'objet d'une grande politique nationale qui engage chaque citoyen. Il suppose d'abord une prise de conscience. Partons des chiffres : chaque année, les Français jettent 20 à 30 kg de nourriture. Si l'on considère l'ensemble du processus, de la production à l'assiette, la France jette 150 kg de nourriture par an et par habitant. Autrement dit, même si ce chiffre est inférieur à la moyenne européenne de 190 kg, nous gaspillons beaucoup tout au long de la chaîne. Comment faire ? Travailler avec tous les acteurs, notamment la grande distribution, en s'inspirant des Britanniques qui sont très en avance dans ce domaine. Prenons l'exemple des promotions différées. En faisant vos courses, vous découvrez que vous pouvez acheter trois paquets de yaourts pour le prix de deux. Vous rentrez chez vous et les rangez dans le réfrigérateur. Quelques jours après, on s'aperçoit que la date limite de consommation est dépassée. Ne peut-on pas conserver la promotion en gérant différemment le temps ? Si ! Il suffit de prendre les deux packs la première semaine et revenir la semaine suivante prendre le troisième. On y gagnera dans l'organisation de son réfrigérateur...
Autres mesures simples : nous travaillons avec le conseil général de Dordogne pour réduire le gaspillage alimentaire dans les cantines scolaires ; nous cherchons en liaison avec les associations humanitaires à mieux recycler les invendus dans les marchés d'intérêt national comme Rungis. C'est sur ces initiatives concrètes, à partir du terrain, que nous bâtirons le pacte national antigaspillage en juin. Nous avons lancé un site adossé à celui du ministère de l'agriculture, gaspillagealimentaire.fr, pour rendre accessible l'information et encourager l'échange des bonnes pratiques. Le gaspillage, c'est aussi un enjeu de pouvoir d'achat - 400 euros jetés à la poubelle par an dans chaque famille - et un enjeu éthique, puisqu'il s'agit de lutter contre les dérives de la société de surconsommation.
Sur le programme européen d'aide aux plus démunis, la partie ne sera pas facile à jouer non plus. La proposition avancée par le président du Conseil européen cette nuit ne nous satisfait pas. Le président de la République, très préoccupé, a chargé le ministre de l'Agriculture d'avancer sur ce dossier. Espérons que d'ici le prochain sommet européen, nous aurons réussi à faire bouger les lignes. Cela suppose de trouver des alliés en Europe. Passer d'un budget de 3,5 milliards à un fonds de 2,1 milliards, quel différentiel ! Nous sommes mobilisés, nous avons reçu les associations humanitaires au ministère. A charge, pour elles, de convaincre leurs homologues européennes de réagir également. La mobilisation citoyenne compte également.
Le mois dernier, j'étais à Bruxelles pour défendre la production française de foie gras avec quatre autres pays d'Europe producteurs. Je le fais sans état d'âme d'autant que les producteurs ont fourni un réel effort pour le bien-être animal, en particulier sur les cages. Cet effort sera poursuivi et l'État accompagnera la mise aux normes.
La dinde mérite une stratégie très ciblée. L'outil de production français est performant, je l'ai constaté en visitant le site de Blancafort que nous avons sauvé. Le problème est celui des débouchés ; cette viande présente la même qualité nutritionnelle que celle du poulet, mais à des prix sensiblement plus élevés. Comme vous, je crois beaucoup à l'avenir de cette filière dans l'élaboré, les plats préparés.
Les relations commerciales sont un dossier urgent, dit M. Bourquin ; les entreprises tiennent le même discours. Nous avons reçu hier un rapport de l'Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires. Fort bien ! Nous réunirons le 21 novembre prochain producteurs, transformateurs et distributeurs. Nous avons un cadre : la loi de modernisation de l'économie. Est-il bien appliqué ? Non ? Précisons sa mise en oeuvre ! Je pense en particulier à l'accord du 3 mai 2011 qui autorise à répercuter les tarifs des matières premières sur les prix pratiqués à la grande distribution : nous savons à peu près quand il s'enclenche, non quand il aboutit. Il faudra le rendre plus contraignant, plus lisible pour les acteurs. L'enjeu est de parvenir à une relation équilibrée entre les acteurs, de donner de la stabilité à nos PME, car Danone n'est pas dans la même position pour négocier avec la grande distribution.
Ce matin, Pierre Moscovici a présenté en conseil des ministres une communication sur les relations commerciales. Le cadre de la LME, a-t-il dit, doit être appliqué. Si des modifications sont nécessaires, qu'elles soient législatives, réglementaires ou conventionnelles, nous les envisagerons. Concernant l'agro-alimentaire, elles interviendront dans la loi d'avenir pour l'agriculture que je défendrai avec Stéphane Le Foll.
Oui à la marque France, oui à un meilleur travail entre Ubifrance et Sopexa en y associant l'Adepta. L'enjeu, a rappelé Nicole Bricq, est que nous puissions tous vendre sous la marque France.
A entendre Nicole Bricq, que nous avons auditionnée, nous avons des marges de progression pour mieux articuler les soutiens à l'export de l'État, des ministères et des régions.
A mon tour de saluer votre volontarisme et votre détermination ; j'y ajouterai votre sincérité, une qualité en politique, car elle crée la confiance. Je souscris à vos orientations : il faut évidemment réhabiliter le modèle français, fondé sur la qualité et la sécurité sanitaire, réconcilier l'économie et l'environnement sans oublier le social. Vous serez, je n'en doute pas, sensible à cette préoccupation : combien crée-t-on d'emplois, combien en conserve-t-on ?
L'alimentation mondiale est un point important : 1 milliard de personnes ne mangent pas à leur faim sur une population totale de 7 milliards. Mathématiquement, avez-vous dit, il faudrait augmenter la production de 70 % pour nourrir les 9 milliards d'habitants que comptera bientôt la planète. Attention à ce discours : il s'agit de la production mondiale, et non de celle de la France. Une telle hausse, de toute façon, est impossible dans notre pays. En revanche, la France doit lutter au niveau international contre une évolution dramatique : l'accaparement des terres pour les monocultures et les agro-carburants aux dépens des cultures vivrières.
Quelque 30 % des produits alimentaires sont gaspillés dans le monde. Autant d'efforts à fournir pour que cela cesse et, aussi, pour modifier notre mode d'alimentation occidentale. Consommer moins de viande, mais une viande de meilleure qualité, telle est l'équation qu'il est essentiel de résoudre.
Améliorer notre balance commerciale ? S'il faut exporter davantage, il faut aussi mieux répondre à la demande locale. L'histoire du groupe Doux est symptomatique de la faillite d'un système : un poulet sur trois consommé en France est importé.
Un peu plus : 40 % des poulets !
Je crois aux relocalisations : produisons chez nous ce que nous consommons.
Véritablement, la grande préoccupation des responsables de l'agro-alimentaire est la capacité d'approvisionnement en matières premières. Je redoute des manques. En cinq ans, le paysage de la production laitière a changé avec l'apparition de régions en sous-réalisation de leurs quotas laitiers. Idem pour la production porcine : dans nos régions du Sud-Ouest, la moyenne d'âge des éleveurs est de 55 ans. Le budget de l'agriculture doit refléter une volonté plus nette de soutenir le secteur qui approvisionne l'agro-alimentaire. Or depuis quelques années, l'agriculture a été, non marginalisée, mais très contestée dans son esprit, parfois sur ses déviances. Il y a là un travail à mener pour sauver cette production et la rendre compatible avec les préoccupations environnementales. Ce matin, l'Assemblée permanente des chambres d'agriculture a stigmatisé la baisse de 50 % de l'enveloppe des subventions aux bâtiments d'élevage. Ce n'est guère rassurant pour les éleveurs et l'agro-alimentaire ! Martial Bourquin a raison, l'agro-alimentaire peut être à la France ce que la voiture est à l'Allemagne.
Je m'étonne toujours de l'utilisation désordonnée des signes de qualité dans notre pays. Trop d'artifices ! Trop de possibilités d'user d'images abusives ! La communication remplace le fond... Il nous faut mener un travail considérable sur la certification de la qualité des produits français.
Dernier point : l'importance de la corrélation avec la PAC. Nous sommes inquiets des initiatives de découplage comme de leurs conséquences sur les volumes de production. Bref, tout repose sur la jonction avec le ministère de l'agriculture. J'aimerais que celui-ci relaie votre souci de l'outil de production.
Sans esprit de polémique, l'héritage pèse extrêmement lourd : entre 2005 et 2012, la France est passée derrière l'Allemagne pour l'agro-alimentaire. Cela est vrai dans ce domaine comme dans l'industrie. Il faudra du temps et de la détermination pour redresser la barre. Vous avez évoqué la question salariale, se pose aussi la question de la compétitivité mise en lumière par le rapport de M. Louis Gallois. Investir dans la recherche et l'innovation est déterminant pour la qualité des produits. N'oublions pas également le service après-vente et la communication.
Pour rétablir la balance commerciale, il y a deux solutions. D'abord, diminuer les importations. Avec la crise, les mentalités évoluent vers le patriotisme alimentaire ; nous pouvons accompagner ce mouvement en lien avec les associations de consommateurs. Ensuite, augmenter les exportations. Certaines collectivités, dont la région Pays-de-la-Loire, organisent des actions groupées d'entreprises, avec le concours des chambres de commerce et des chambres d'agriculture, pour conquérir des nouveaux marchés, une stratégie utilisée pour la Chine en particulier. Ce concept de chasse en meute, s'il vaut ce qu'il vaut, doit être accompagné et, mieux, impulsé par l'État. Enfin, comment soutenir les circuits courts ? Consommer des produits de proximité participe à la défense de l'environnement.
Un ajout sur la méthanisation. Les ateliers que nous avons vus dans l'Est de l'Allemagne sont inacceptables : le lait devient un sous-produit du gaz. Trouvez-vous normal que la PAC subventionne l'énergie ?
Tout en partageant l'inquiétude de Daniel Raoul, j'affirme que la méthanisation est une filière d'avenir. A nous de l'adapter au modèle français et d'inventer un outil de production compétitif, créateur d'emplois et qui rassure les citoyens. Du reste, avec la hausse du prix des céréales, le risque est plutôt celui d'une végétalisation de l'agriculture.
Les négociations sur la PAC sont cruciales pour la reconnaissance de la diversité des agricultures. Je dirai même plus : elles sont déterminantes. En particulier dans les régions d'élevage, où cette économie locale est mise en péril...
ce qui fragilise l'agro-alimentaire. Le président de la République et Stéphane Le Foll sont déterminés à agir.
Heureusement, une hausse de la production de 70 % pour relever le défi alimentaire est naturellement un calcul théorique pour l'ensemble de la planète. Nous ferons tout pour réduire ce besoin en luttant contre le gaspillage alimentaire et en soutenant la recherche agronomique. La France, j'en suis convaincu, a une carte à jouer pour aider les agricultures durables à développer leur volume de production. Nous y réussirons avec la recherche française, qui a de beaux jours devant elle, à condition d'adopter une démarche de coopération et d'égalité envers nos partenaires étrangers, en particulier Africains.
Les circuits courts ? Après les expériences formidables accompagnées par les régions, le temps est venu d'une politique nationale. La réflexion est en cours sur les contraintes juridiques et les impasses économiques. Parce que l'on peut être un bon producteur mais un mauvais commerçant, nous envisageons des actions de formation, du soutien technique, juridique et financier.
Qualité et sécurité sont les maîtres-mots du modèle français. Voilà pourquoi nous avons augmenté pour 2013 les crédits qui sont dévolus à cette politique, le coeur du réacteur. S'y ajouteront, car il importe d'avoir une vision transversale, les crédits déployés au sein de la BPI pour l'agriculture et l'agro-alimentaire.
Concernant le patriotisme alimentaire, Arnaud Montebourg discute avec la grande distribution de l'installation d'un rayon « produits français ». L'État, vous le voyez, accompagne le changement des mentalités et continuera à le faire. L'un des enjeux de mon ministère est de créer un nouveau lien entre les Français et leur assiette. Si les crises alimentaires ont été bien gérées, elles ont écorné la confiance dans l'alimentation. La question est lancinante : ce que je mange est-il sain ? Les professionnels de l'agro-alimentaire sont ouverts à la discussion. Stéphane Le Foll et moi-même les réunirons mi-décembre pour discuter des ingrédients alimentaires - le sel, le sucre, les huiles, les graisses - et trouver des réponses partagées. C'est ainsi que nous rétablirons la confiance, que nous servirons les intérêts économiques de l'agriculture et de l'agro-alimentaire.
Oui, l'État doit réguler, fédérer, entraîner. Depuis ma nomination, j'ai ouvert de nombreux chantiers : les relations commerciales, la lutte contre le gaspillage, les ingrédients alimentaires. Sur chacun, j'aurai besoin du soutien de tous, en particulier du vôtre ; je me tiens à votre disposition. Tenons ensemble ce bel objectif qu'est la réhabilitation du modèle français, un modèle dont nous pouvons être collectivement fiers.