Séance en hémicycle du 6 février 2014 à 10h00

Résumé de la séance

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  • DGF
  • DMTO

La séance

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La séance est ouverte à dix heures.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Courtois

Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Courtois

L’ordre du jour appelle le débat sur l’évolution des péréquations communale, intercommunale et départementale après l’entrée en vigueur de la loi de finances pour 2014, organisé à la demande du groupe RDSE.

La parole est à M. Jacques Mézard, président du groupe RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le groupe RDSE a proposé ce débat sur l’évolution de la péréquation dans le financement de nos collectivités locales. C’est un sujet sur lequel nous sommes beaucoup intervenus les uns et les autres et qu’il est naturel d’aborder au Sénat, assemblée qui a encore pour quelque temps, en application de l’article 24 de la Constitution, la mission d’assurer la représentation des collectivités territoriales.

Permettez-moi d’ailleurs de faire référence au rapport d’information de Rémy Pointereau et moi-même, paru au début de l’année 2010 et intitulé Vers une dotation globale de péréquation ? À la recherche d’une solidarité territoriale. Je crains qu’il n’ait subi le sort de nombre de rapports parlementaires !

Notre système de financement des collectivités territoriales est à bout de souffle, parce que tous les gouvernements ont reculé devant le risque d’impopularité de réformes profondes de la fiscalité, dont la fiscalité locale. Bien sûr, pour toute réforme fiscale, ceux qui bénéficient du système restent en général silencieux, même si quelques-uns, récemment, n’ont pu cacher leur jubilation dans leur département, tandis que ceux qui y perdent crient à la spoliation, encore plus lorsqu’ils ont l’habitude de hurler la bouche pleine. De fait, les réformes institutionnelles concernant les collectivités patinent voire échouent lorsqu’il n’y a point à la clef de dotations significatives ; la loi Chevènement sur l’intercommunalité doit son succès certes à sa pertinence, mais aussi à l’abondement des dotations de la dotation globale de fonctionnement, la DGF.

De la question de la révision des valeurs locatives à celle de la réforme des systèmes de dotations de l’État, chaque gouvernement étudie, consulte et, in fine, applique le principe de la transmission de la « patate chaude ». §Le résultat de plus de trente ans de tergiversation, de renoncement, pour tout dire de manque de courage politique est catastrophique. Aujourd’hui, mes chers collègues, gouverner, ce n’est plus prévoir, c’est le plus souvent renoncer : le dossier de la fiscalité locale des ménages est beaucoup plus lourd dans tous les sens du terme que celui de l’impôt sur le revenu ! Ce n’est pas un énième groupe de travail ou un nouveau haut conseil ou haute autorité qui résoudra le problème. Les éléments techniques sont connus, il faut arbitrer !

Aujourd’hui, sur ce plan, l’inégalité entre les territoires et entre les citoyens est considérable, profondément injuste, de plus en plus souvent insupportable. On constate en effet – c’est un exemple que je prends souvent – qu’à capital foncier égal le propriétaire d’un petit logement de 300 000 euros à Paris, à Levallois ou à Neuilly– c’est un beau logement dans nombre de villes moyennes…

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

… –, paie souvent dix fois moins d’impôt local que l’habitant de villes moyennes du Limousin, d’Auvergne, voire du Rouergue, madame la ministre. C’est la démonstration non seulement d’une injustice criante, mais de blocages structurels qui brisent toute politique forte d’aménagement du territoire. Le fossé continue de s’agrandir entre les territoires, les services aux citoyens ne sont pas comparables, les équipements publics pas davantage ni la politique de développement économique.

Cela a des conséquences dans tous les secteurs de la vie nationale, et la crise du logement en est un exemple frappant : mener une politique d’aménagement du territoire, c’est faciliter les transferts d’habitants des zones tendues vers les zones détendues au lieu de poursuivre la désertification de nombre de territoires ruraux.

Madame la ministre, le Gouvernement a annoncé que les concours aux collectivités locales devaient être réduits de 1, 5 milliard d’euros chaque année pour contribuer à la réduction des déficits publics. Nous l’entendons et, pour la plupart d’entre nous, nous le comprenons. Si cette décision n’a pas un lien direct, en tout cas de cause à effet, avec la péréquation, il est néanmoins évident que diminuer le montant des dotations de l’État aux collectivités peut avoir et aura des conséquences directes sur le fonctionnement des collectivités ; elles seront plus lourdes pour les plus pauvres d’entre elles, aux potentiels fiscaux et économiques les plus faibles.

Quand les budgets sont plus contraints, une politique de péréquation est d’autant plus nécessaire, mais aussi d’autant plus difficile à mettre en place.

En ce qui concerne la péréquation verticale de l’État vers les collectivités et l’évolution du système de la DGF, il serait fallacieux de prétendre – pour notre part, nous ne l’avons d’ailleurs jamais fait – que ce système n’est pas péréquateur. La seule question est la suivante : l’est-il suffisamment ?

Des modifications s’imposent en raison du trop grand nombre et de l’importance des dotations de compensation au sein de la DGF. En effet, ces dernières ont un faible effet péréquateur ; dans certains territoires, elles ont même accru les inégalités. De plus, la DGF, qui fut construite sur un modèle économique assis sur la croissance, devient contrainte avec la dégradation des conditions économiques ; la péréquation dans la DGF revêt dès lors un caractère par trop résiduel.

Madame la ministre, nos territoires, leurs élus, leurs citoyens, ont besoin de mesures lisibles et compréhensibles, ainsi que de choix transparents, surtout lorsqu’ils émanent de ceux qui se veulent et se proclament tous les jours les apôtres de la transparence. En matière de fiscalité locale comme ailleurs, les élus de nos territoires et nos concitoyens veulent des mesures de justice et non des arrangements entre amis ou des compromis entre grands élus.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Les dispositifs de péréquation, malgré les nombreuses révisions dont ils ont déjà fait l’objet, n’ont pas permis de corriger les inégalités territoriales existantes. Cela s’explique très certainement en grande partie par l’instabilité et la diversité des critères pris en compte pour définir les contributeurs et les bénéficiaires des fonds de péréquation. Ces critères ne cessent d’évoluer au fil de chaque loi de finances, pour renforcer encore la complexité et l’illisibilité de la péréquation. On aboutit à une multiplicité de dispositifs qui se contredisent, voire s’annulent.

On ne peut pas dire que les deux dernières lois de finances initiales aient contribué à pallier ce manque de cohérence. Bien au contraire ! Que s’est-il passé fin 2012, lors de la discussion du projet de loi de finances pour 2013 ? Je rappellerai l’adoption par l’Assemblée nationale, en deuxième lecture du projet de loi finances, d’un amendement « scélérat » modifiant profondément les critères de répartition des fonds de péréquation des droits de mutation à titre onéreux, les DMTO, et de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, la CVAE, au détriment de nombre de départements ruraux et en faveur de départements plus riches et plus peuplés, ce sans qu’aucune simulation soit communiquée !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

L’absence de simulations rendues publiques a toujours été l’une des principales faiblesses, dénoncée sur toutes les travées, dans tous les rapports, y compris dans celui que vous-même et notre collègue Charles Guéné présentiez en 2012 sur les conséquences de la suppression de la taxe professionnelle. C’est une excellente lecture, que je vous recommande, mes chers collègues.

À la suite à ce vote « en catimini » de l’Assemblée nationale intervenu fin 2012, dans un grand élan de solidarité – mais la solidarité n’est pas forcément durable –, mon ami Gérard Miquel et moi-même, avec plusieurs collègues des autres groupes, y compris le président du Sénat, avions interpellé le Premier ministre, qui s’était engagé à revoir ces critères au cours de l’année 2013. C’est une promesse qui n’a pas été véritablement tenue.

En août, nous apprenions la répartition de la « deuxième enveloppe » du fonds exceptionnel de soutien aux départements en difficulté, alimenté par un prélèvement de 170 millions d’euros sur la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie. Ce dispositif ponctuel, destiné à accorder un « ballon d’oxygène » aux départements qui ne pouvaient plus faire face à l’accélération de la montée en charge des dépenses sociales, fut partagé en deux enveloppes de 85 millions d’euros : la première fut répartie selon un indice synthétique défini dans la loi de finances pour 2013, la seconde bénéficiant à un nombre bien moins important de départements, selon des critères qui furent définis ultérieurement par le Gouvernement et qui ne sont pas sans poser question. Dois-je rappeler que le principal bénéficiaire ou l’un des principaux fut le département de la Corrèze, avec 13 millions d’euros ? Ce dispositif ponctuel n’apportait de toute façon aucune solution pérenne.

Par conséquent, la question de l’extrême fragilité financière des départements, qui n’a cessé de s’aggraver au cours de ces dernières années sous les gouvernements successifs, est revenue sur le devant de la scène tout au long de l’année 2013. Résultat : de nombreuses mesures de la loi de finances pour 2014 visent justement à permettre aux départements d’assumer la charge exponentielle que représentent les allocations individuelles de solidarité.

Je ne m’attarderai pas sur la mise en place d’un fonds pérenne de 100 millions d’euros par an destiné aux collectivités ayant souscrit des emprunts dits toxiques. Cela va à l’inverse de la péréquation. C’est une récompense aux mauvais gestionnaires, …

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

… qui sont parfois, voire souvent, ceux qui instrumentalisent en sous-main les réformes de la péréquation à leur profit.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

C’est une intégration de l’aléa moral dans la loi.

Concernant les dispositions de la loi de finances pour 2014 visant à « soulager » les départements, une nouvelle ressource fiscale leur est attribuée : il s’agit des frais de gestion perçus au titre du foncier bâti. Cette nouvelle recette fiscale est répartie selon des critères de ressources et de charges qui n’étaient pas définis dans le texte initial et qui l’ont été en première lecture par l’Assemblée nationale. Ces nouvelles ressources seront réparties entre les départements, en deux fractions : 70 % proportionnellement au reste à charge du département pour financer les allocations individuelles de solidarité et 30 % suivant une logique de péréquation, en fonction d’un indice synthétique inspiré de celui du fonds de secours de l’année précédente.

Par ailleurs, les départements sont autorisés à relever temporairement les DMTO de 3, 8 % à 4, 5 %, ce qui ne va pas sans soulever un certain nombre de difficultés. Lorsque cette mesure avait été annoncée dans le cadre du « pacte de confiance et de responsabilité » entre l’État et les collectivités territoriales de juillet 2013, certains présidents de conseil général, y compris socialistes, n’hésitaient d’ailleurs pas à déclarer, à l’instar de notre collègue Jean-Jacques Lozach dans La gazette des communes du 11 septembre 2013 : « Ce type de déplafonnement n’est pas une mesure de péréquation, c’est même contraire à la solidarité. » Dont acte !

Le rapporteur général de la commission des finances de l’Assemblée nationale, Christian Eckert, s’est lui-même montré très réservé, si l’on en croit son rapport : « En premier lieu, le ciblage de ce dispositif est incertain. Les départements les plus pauvres, notamment ruraux, se caractérisent par un volume réduit de transactions portant sur des biens dont la valeur moyenne est faible ; ils ne seraient donc pas en mesure de générer des recettes substantielles grâce au dispositif […]. »

Conscient des limites de cette mesure et des problèmes qu’elle pose, le Gouvernement, en corollaire de cette augmentation facultative et temporaire des DMTO – c’est là que la complexité et la perversité du dispositif se précisent –, a d’ailleurs fait adopter un amendement créant un nouveau mécanisme de péréquation de cette ressource. Ce nouveau « fonds de solidarité » sera alimenté par un prélèvement uniforme de 0, 35 % – il se superpose au fonds existant – sur le produit des DMTO perçus par les départements. Le dispositif a toutefois prévu que l’ensemble des prélèvements effectués au titre de la péréquation des DMTO seront plafonnés à 12 % du montant desdits DMTO de l’année précédente.

Quant au reversement des ressources de ce nouveau fonds de solidarité, madame la ministre, il s’effectuera en fonction d’un indice synthétique, défini seulement lors de la deuxième lecture de la loi de finances à l’Assemblée nationale, alors que le dispositif initial renvoyait à un décret en Conseil d’État ! Quel curieux cheminement !

Comme l’année précédente, les députés ont eu les mains libres en deuxième lecture pour fixer des critères de répartition d’un fonds de péréquation – mais c’est bien sûr de la responsabilité du Sénat –, alors que ceux-ci, compte tenu des déconvenues de l’année passée, auraient bien évidemment dû être intégrés dans le texte du Gouvernement dès le départ. Cela aura permis à certains départements, conduits en partie par l’Assemblée des départements de France, cher Bruno Sido, qui ne manque pas d’inventivité ces dernières années pour définir des indices synthétiques souvent abscons, de faire leurs « arrangements » avec le Gouvernement et de définir les critères qui leur sont le plus favorables. Les principes de justice, d’équité et de solidarité qui sous-tendent la péréquation ont donc été, en 2013 et en 2014, largement mis de côté.

Le système du reste à charge mis en place soudainement lors de la discussion du projet de loi de finances pour 2014 ne nous trompe pas. Son ingénieux promoteur a permis de satisfaire les appétits de ceux qui étaient bien servis en 2013 avec une partie de ceux qui l’étaient moins bien.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Divine surprise ou fausse surprise pour le Lot, la Corrèze, la Seine-Saint-Denis ! J’aurai la décence de ne pas citer d’autres bénéficiaires, dont certains, qui m’en ont parlé, ne s’y attendaient même pas – voir les Hautes-Pyrénées.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Bravo, mon cher collègue, « mais quelle image de notre belle République », ajouterai-je !

De fait, madame la ministre, pour faire ces cadeaux de Noël, vous avez fait davantage de la compensation que de la péréquation.

Je croyais qu’à Noël on récompensait surtout les enfants sages. Je me suis trompé : on récompense surtout les enfants dissipés, les départements endettés, à commencer par la Seine-Saint-Denis, le Nord, la Corrèze, les ultramarins.

Si j’en crois nombre de médias nationaux, le Président de la République lui-même est qualifié de « généreux Père Noël de Tulle ». Et le maire de Tulle a lui-même précisé ceci : « à Tulle, on n’est pas arrosés, nous sommes humidifiés. »

Rires sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Madame la ministre, permettez à ceux qui ont soif, souffrant d’une sécheresse pesante, de vous dire : « Donnez-nous un peu d’eau ! »

Il est fallacieux de présenter le critère du reste à charge sorti du chapeau au dernier moment comme le critère de l’équité. Tout d’abord, une fois qu’il aura été mis en place, vous n’aurez pas amené au même niveau de reste à charge par habitant tous les départements, bien loin de là, puisque, pour nombre d’entre eux, celui-ci demeure très inférieur à la moyenne, qui est d’environ 70 euros par habitant – pour les Hauts-de-Seine, c’est à peu près la moitié.

On ne peut pas, dans un système de péréquation équilibré, ne pas tenir compte de manière primordiale de la capacité structurelle de chaque département à financer le reste à charge. La question des ressources, du potentiel fiscal de chacun des départements est essentielle, c’est la question de l’indicateur de richesse.

Je rappelle que ce sont les départements les moins riches, les départements qui ont le moins de DMTO par exemple, qui doivent augmenter les taux quand ceux qui ont le plus de recettes voient leurs prélèvements écrêtés, ce qui réduit considérablement l’abondement du fonds.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Madame la ministre, il n’est ni juste ni raisonnable de procéder à des modifications du système de péréquation dans l’opacité de chaque loi de finances, après de discrètes négociations majoritairement arbitrées dans les conditions que nous savons.

Vous me ferez sans doute remarquer qu’il en était ainsi auparavant.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Doligé

M. Éric Doligé. Certainement pas ! Il n’y avait pas de péréquation !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

D’où ma question, à laquelle je vous demande de répondre clairement, dans cette transparence qui nous est si chère à tous : allez-vous revoir le dispositif contenu dans la loi de finances pour 2014 ? Si oui, quand et avec quels objectifs ?

De tout cela, il résulte quand même un sentiment d’injustice partagé par un grand nombre de collectivités. Nous nous éloignons un peu plus à chaque loi de finances de la transparence et de la justice.

Les critères très différents, basés tantôt sur des indices synthétiques de ressources et de charges, tantôt sur des recettes fiscales potentielles ou réelles ou sur certaines ressources uniquement, font bien ressortir les difficultés qui s’opposent à la définition d’une péréquation juste et efficace. Je ne parle même pas des montants !

Quels sont les bons critères ? Le Parlement, privé de moyens d’évaluer l’impact des dispositions, ne disposant d’aucun outil permettant d’établir des simulations, est malheureusement beaucoup trop dépendant de l’exécutif pour le dire avec certitude. Mais une chose est sûre : pour trouver les « bons critères » de répartition de la péréquation, il convient de s’accorder sur les objectifs de cette dernière.

Dans notre rapport de 2010 sur la péréquation, Rémy Pointereau et moi-même concluions ainsi : « Pour juger du caractère optimal d’un système de péréquation, il convient d’abord de définir des objectifs clairs et lisibles, acceptés par l’ensemble des acteurs, collectivités bénéficiaires et contributrices, accompagnés de moyens budgétaires suffisants, destinés à les atteindre. »

Un rapport rendu un an plus tard par le groupe de travail mis en place par la commission des finances concluait pour sa part très justement : « La transparence passe par la définition de règles simples et compréhensibles par tous, alors qu’aujourd’hui la multitude des paramètres, des conditions et des particularismes aboutit à ce que l’application de la loi contredit l’objectif fixé par le législateur. » Personnellement, j’ajouterai même qu’elle contredit l’objectif fixé par l’article 72-2 de la Constitution.

Même si les dispositifs ont évolué, ces commentaires restent d’une frappante actualité. Nous considérons – et il faut que chacun puisse exprimer ce qui ressort de ces territoires que nous représentons encore – que les territoires ruraux et hyper-ruraux font bien partie des plus défavorisés, pas uniquement en vertu de critères économiques de répartition des ressources, mais parce qu’ils souffrent d’inégalités dans tous les domaines : santé, transport, éducation.

Pour nous, la péréquation doit contribuer à corriger toutes ces inégalités. Pour une fois, peut-être serions-nous bien inspirés de méditer l’exemple suédois en la matière, qui prévoit que l’objectif de la péréquation est de résorber les disparités d’offre de services publics pour garantir une offre égale sur tout le territoire.

Telles sont les observations que nous voulions formuler, madame la ministre. Je sais que vous êtes attentive à tous ces problèmes, que vous avez travaillé avec beaucoup de courage et de conviction. S’il est un dossier difficile, c’est bien celui-ci. Le service de la République nécessite ce courage. §

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Bocquet

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, il n’est jamais inutile de remettre sur le métier le débat de la péréquation financière entre les différents niveaux de collectivités de notre pays, débat non abouti et très ancien si j’en juge la citation suivante de Tocqueville : « Chacun a remarqué que, de notre temps et spécialement en France, cette passion de l’égalité prenait chaque jour une place plus grande dans le cœur humain. »

Ces propos datent de 1835. Pourtant, presque deux fois centenaires, ils n’ont pas pris une ride.

L’égalité de traitement n’est toujours pas acquise, ne serait-ce qu’au niveau du montant de la dotation globale de fonctionnement, qui vous procurera 64 euros par habitant si votre commune en compte 1 000, et 128 euros si elle en compte 100 000.

La campagne pour les élections municipales est désormais largement engagée dans notre pays, par des centaines de milliers de candidats dans les 36 000 communes de France, engagement de citoyens ordinaires non pas avides de gloire et de pouvoir, mais soucieux de l’intérêt général et de faire vivre la démocratie dans la proximité.

Les questions financières pour faire face aux besoins de la population seront donc évidemment au cœur de la campagne, tout comme le sera celle de l’égalité de traitement entre territoires urbains et territoires ruraux, question centrale dont nous débattons ce matin au Sénat.

La proposition de nos collègues du groupe RDSE est donc tout à fait pertinente ; il faut sans cesse remettre l’ouvrage sur le métier.

La péréquation est devenue un passage obligé dans la définition, chaque année, des concours de l’État aux collectivités locales.

L’affaire prend un tour particulier cette année – et pour les années à venir –, puisque l’enveloppe globale des dotations a été soumise à une réduction sensible de 1, 5 milliard d’euros.

À l’injustice de la réduction de l’enveloppe globale, on ajoute donc dans les faits une discrimination dans le degré de punition imposée à chacun, selon les critères, au demeurant discutables parfois, qui continuent pour le moment de servir à définir une collectivité « pauvre ».

On oublie, par exemple, qu’une commune comme celle de Saint-Pierre-des-Corps, dont notre collègue Marie-France Beaufils est l’élue, est considérée comme riche d’un potentiel financier important, alors que les bases d’imposition présentes sur le territoire de la commune alimentent dorénavant les caisses de la communauté d’agglomération. Et ce alors même que la majorité de sa population n’acquitte pas d’impôt sur le revenu, de par la modicité des mêmes revenus.

À la vérité, ce débat sur la péréquation doit justement être l’occasion non pas de nous demander comment être juste dans un cadre de politique d’austérité – selon nous, on n’est jamais juste en appliquant une telle politique –, mais bien plutôt de constater à quel point le débat sur les finances locales appelle des modifications sensibles et des évolutions majeures.

Comment, en effet, parler de péréquation alors même que la logique de métropolisation qui va, dans les faits, dresser les collectivités territoriales et leurs groupements les uns contre les autres dans une guerre sans merci et dans une compétition sans fin entre les territoires, semble vouloir s’imposer et créer les conditions pour de nouvelles difficultés ?

Comment parler de péréquation encore alors même que le pouvoir de décision fiscale des régions est réduit à sa plus simple expression, que celui des départements n’est guère plus vaillant et que les communes sont invitées à se regrouper sous peine de voir leur dotation globale de fonctionnement descendre peu à peu aux enfers ?

Comment parler de péréquation, enfin, alors même que les politiques budgétaires mises en œuvre intègrent des logiques libérales qui créent, lentement mais sûrement, dans certaines régions de France, de véritables déserts du service public, la fermeture de La Poste ayant de peu précédé ou suivi celle de l’école, de la perception ou de la subdivision de l’équipement ?

Les communes de notre pays n’ont pas la même taille, la même sensibilité politique, et leurs populations sont fort disparates : deux résidents permanents à Majastres, dans les Alpes-de-Haute-Provence, contre plus de 2 millions à Paris.

De la même manière, les départements et les régions français ne sont pas logés à la même enseigne. Ou plutôt si : leur degré d’insertion dans la vie économique du pays, mais aussi plus largement dans les relations avec le « reste du monde », demeure assez variable, quand bien même nous plaçons au titre de la politique régionale de l’Union européenne neuf de nos vingt-deux régions de métropole parmi les vingt-neuf plus riches régions économiques de l’Europe.

Seulement voilà : même si l’Île-de-France se positionne comme la première région d’Europe en termes de richesses produites, elle demeure, sur un strict plan politique, un nain au regard des pouvoirs et des capacités financières des Länder allemands, des grandes régions italiennes et même des communautés autonomes espagnoles.

Et la péréquation, si elle ne part que des sommes que les régions ou les départements gèrent en direct, ne peut que demeurer limitée et, par certains côtés, contre-productive.

Si les élus de Seine-Saint-Denis, quelle que soit leur étiquette politique, se battent pour que ces blessures ouvertes par la crise des années soixante-dix et quatre-vingt que sont les friches industrielles soient peu à peu refermées et que de nouvelles activités économiques s’y implantent, est-il nécessairement juste que le produit de cette action, c’est-à-dire l’ensemble des transactions immobilières qui se trouvent ainsi réalisées, soit en partie confisqué aux habitants du département et que les finances départementales s’en trouvent de fait dépourvues ?

C’est pourtant ce qui se passe quand on décide de prélever une partie du produit des droits de mutation à titre onéreux, ou DMTO, sans considération aucune pour l’usage qui pourrait en être fait.

M. Bruno Sido s’exclame

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Bocquet

Il ne peut y avoir de péréquation sans recette fiscale nouvelle. Dans un schéma financier où le niveau des concours budgétaires de l’État aux collectivités locales connaît une réduction programmée, notamment par la loi de programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017, votée ici majoritairement, la péréquation est un peu comme un poison atténué.

La situation ne va d’ailleurs pas s’arranger, puisque la réforme du mode de scrutin cantonal emporte, entre autres conséquences, la perte de la qualité de « bourg-centre » pour plusieurs centaines de chefs-lieux de canton de notre beau pays. En conséquence, nous aurons toujours un bel outil de péréquation, à savoir la dotation de solidarité rurale, ou DSR, mais il est probable qu’une large part de cette dotation, à hauteur de 180 millions d’euros environ, sera perdue pour ces communes.

Mes chers collègues, non, décidément, non, il ne peut y avoir de péréquation sans recettes nouvelles ! J’en suis d’autant plus convaincu que nous avons un premier problème, toujours non résolu : la DGF, soit l’un des instruments de l’égalité des territoires, continue d’être inégalement attribuée à raison de la population de nos communes.

Il y a quelque temps, notre groupe avait fait discuter d’une proposition de loi défendue ici même par notre collègue Gérard Le Camsur le sujet, proposition rejetée par le Sénat, même si concession fut faite que le problème se posait bel et bien.

Il ne suffit pas de sacraliser la commune et ses élus locaux, comme il est souvent fait dans cette enceinte. Un acte de reconnaissance véritable de ces fantassins de la République consisterait à rendre à la DGF sa vertu péréquatrice. Une vertu qu’elle peut développer sans nuire à son caractère fondamental, comme cela s’est trop souvent vu, celui d’apporter une réponse aux besoins des collectivités.

Je ne parle pas des conséquences, en pertes de ressources, de la réforme de 1989, de celle de 1993, de la « création » de l’enveloppe normée, et, pour finir, de la DGF version Sarkozy, qui est restée gelée ou quasiment gelée pendant deux ans.

La péréquation de la misère, c’est la misère de la péréquation ! Une recette fiscale nouvelle mettant à contribution les revenus et actifs financiers des entreprises, par exemple, devrait donc être promue et constituer l’élément pivot d’une véritable péréquation des ressources entre collectivités.

Sortons de la nasse dans laquelle les élus locaux sont aujourd’hui empêtrés, entre des dépenses contraintes de plus en plus lourdes et des ressources financières de moins en moins maîtrisées, faute de pouvoir en fixer le rendement. Oui à l’intervention publique locale, avec des moyens financiers globalement renforcés !

Pour conclure, n’oublions jamais, madame la ministre, mes chers collègues, que si dette il y a dans nos collectivités, admirablement stable depuis trente ans et parfaitement maîtrisée, elle sert l’investissement, donc la croissance, contrairement à celle de l’État, qui ne fait que combler le déficit des finances publiques. Il faut choyer les collectivités, car elles sont non pas une charge, mais un levier pour notre pays en crise !

Mme Delphine Bataille applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Yannick Botrel

Éric Bocquet, voilà quelques semaines, sur l’initiative du groupe CRC, notre assemblée examinait une proposition de loi portant sur la revalorisation de la DGF attribuée aux communes rurales.

En l’occurrence, il s’agissait d’évoquer un aspect important, certes, mais parcellaire, des concours de l’État aux collectivités en général. En conclusion de ce débat, Mme la ministre déléguée à la décentralisation a exprimé tout l’intérêt qu’elle portait à la question posée par la répartition de la DGF, renvoyant l’organisation d’une réflexion approfondie avec les différentes parties à 2014. Nous y sommes.

Au cours de la discussion, la nécessité d’examiner désormais la question des finances des collectivités dans son aspect global a été notamment évoquée ; et il est vrai que la variété des situations exige cet examen. Cette question de la DGF est évidemment à mettre en lien avec celle qui est soulevée aujourd’hui de la péréquation, puisque cette dernière s’opère en son sein.

Au titre de la loi de finances pour 2014, les collectivités sont appelées dès cette année à participer à l’effort collectif de redressement des finances de la France par une réduction de l’enveloppe de la DGF qui leur est attribuée dans leur ensemble. Cette enveloppe sera diminuée de 1, 5 milliard d’euros, ramenée donc à 40, 1 milliards d’euros, et l’effort demandé sera poursuivi et renforcé en 2015.

Les collectivités – il est juste de le rappeler – ont déjà commencé à participer à cet effort, puisque le gel de l’enveloppe normée en valeur est effectif depuis 2011 et qu’à cet égard les collectivités, quelles qu’elles soient, ont déjà contribué du fait de l’érosion monétaire, qui a atteint, selon les experts, 4 milliards d’euros.

Mais il est juste de rappeler aussi que, dans la période récente, cette cristallisation ne s’est pas révélée incompatible avec la progression des dotations de péréquation. Dans les années écoulées, et cette année même, l’effort demandé sera modéré par des mesures appropriées, justifiées par la compensation des transferts de charge.

Les conseils généraux qui ont été cités pourront bénéficier, et ce à juste titre si l’on considère qu’ils portent les politiques de solidarité sociale à travers les trois prestations d’autonomie, de handicap et de solidarité active, d’une enveloppe supplémentaire de 827 millions d’euros au terme d’une négociation ouverte et positive entre l’ADF, l’Assemblée des départements de France, et le Gouvernement.

On peut bien évidemment porter tous les jugements que l’on veut sur le résultat de cette négociation, en fonction de certaines situations. Mais la méthode et le résultat sont à saluer particulièrement. Les deux contrastent avec la période précédente, durant laquelle les budgets des conseils généraux se trouvaient pris en tenaille entre une augmentation inexorable des charges liées aux compétences transférées et une réduction tout aussi inexorable de leurs recettes du fait de la crise et de la chute des DMTO, mais aussi, en définitive, du peu de cas que l’État faisait des conseils généraux et des revendications exprimées en ce temps.

Au titre de la péréquation verticale lors de l’année écoulée, la dotation de solidarité urbaine a connu une progression notable de 8, 75 %, soit une augmentation de 119 millions d’euros, et la dotation de solidarité rurale une progression de 78 millions d’euros. De même, la loi de finances initiale pour 2014 prévoit cette année encore une progression de 4 % du montant de ces deux dotations, nettement supérieure donc à l’inflation.

Si l’on examine la péréquation entre collectivités, la péréquation horizontale donc, sa montée en puissance se confirme avec une progression de 210 millions d’euros en 2014, soit autant qu’en 2013, et le montant du Fonds de péréquation intercommunal et communal, ou FPIC, s’élèvera à 570 millions d’euros en 2014, avec pour objectif d’atteindre 1 milliard d’euros en 2016.

Le constat que l’on peut faire est double. D’une part, la fraction de la DGF consacrée à la péréquation est en augmentation constante depuis dix ans et représente, en 2013, 18, 2 % de l’enveloppe totale, contre 12, 3 % voilà dix ans. D’autre part, la péréquation verticale dépendant strictement de l’État demeure à un niveau très élevé dans l’enveloppe globale, puisqu’elle pèse 90 % du total. On pourrait encore évoquer d’autres initiatives prises en 2014, que ce soit en faveur des départements par le fonds de péréquation des DMTO, ou des régions.

L’engagement du Gouvernement à travers le « pacte de confiance et de solidarité » entre l’État et les collectivités traduit concrètement son engagement très volontariste et significatif.

Cela étant, madame la ministre, plusieurs arguments plaident en faveur d’une réflexion globale portant sur la DGF en général et la péréquation en particulier.

Une stratification de mesures diverses s’est produite au fil des années qui réduit la lisibilité de cette politique. L’accroissement du nombre des dispositifs de péréquation apporte indéniablement de la complexité, puisque quatorze fonds et dotations concourent désormais à cet exercice. Elle introduit également une certaine confusion, car, selon les critères appliqués, une commune peut être considérée tantôt comme « riche » et contributrice au titre d’un dispositif, et tantôt comme « pauvre » et bénéficiaire au titre d’un autre dispositif. La variabilité d’un critère peut donc parfois faire basculer ces collectivités dans une catégorie ou dans une autre.

Il est donc à craindre que les modifications successives apportées dans la durée à la péréquation n’aient fini par faire perdre de vue l’architecture de l’ensemble. Bien des questions se posent, qui portent tout autant sur la lisibilité des dotations, sur leur sécurisation dans le contexte prévu de leur réduction en valeur, ainsi que sur l’équité des modes de calcul des attributions, qui est parfois mise en doute, comme cela a été le cas ce matin.

Au sein du comité des finances locales, le CFL, plusieurs ont évoqué la redéfinition du critère « potentiel financier », souvent pris en compte, et beaucoup sont sensibles à la prise en considération de la notion d’« effort fiscal », il est vrai très inégal d’une collectivité à une autre.

Quant au rapport remis en juin 2013 par l’Inspection générale de l’administration et l’Inspection générale des finances, il évoque « le manque d’évaluation de l’efficacité des nombreux dispositifs de péréquation en vigueur » et critique en particulier « le foisonnement des critères » qui « nuit à la crédibilité » du dispositif.

Une mise à plat devient donc nécessaire pour ne pas dire urgente, même si, à son terme, le jugement qui sera porté sur le résultat le sera en fonction de la situation particulière de chacun. Notre réflexion, mes chers collègues, est globale, mais notre appréciation est locale bien souvent.

La péréquation est depuis 2003 un objectif à valeur constitutionnelle et, à cet égard, les sénateurs socialistes qui y sont attachés se sont constamment mobilisés depuis lors en faveur de sa montée en puissance. Madame la ministre, nous portons donc un intérêt majeur à ce débat ainsi qu’aux réponses que vous nous apporterez sur les intentions du Gouvernement et les perspectives que vous envisagez.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, notre collègue Jacques Mézard ayant largement traité du cas des départements, je me limiterai à la question des communes et des intercommunalités.

Pour nous consoler d’une nouvelle réduction, inscrite dans la loi de finances de cette année, des dotations de l’État au bloc communal – moins 588 millions d’euros pour les communes et moins 252 millions d’euros pour les intercommunalités, soit une baisse de 840 millions d’euros en tout –, on nous demande de nous réjouir des progrès réalisés en matière de péréquation, c’est-à-dire, sous-entendu, en matière de justice.

Certes, en la matière, comme notre collègue Yannick Botrel l’a rappelé, le progrès est bien réel, qu’il s’agisse de la péréquation verticale – la DSR est accrue de 39 millions d’euros, la DSU de 60 millions d’euros, la DNP de 10 millions d’euros, soit une hausse de 109 millions d’euros – ou de la péréquation horizontale – le FPIC est porté à 570 millions d’euros, soit une augmentation de 360 millions d’euros, et le fonds de solidarité des communes de la région d’Ile-de-France, ou FSRIF, s’accroît de20 millions d’euros.

Tout cela est très bien, mais en quoi plus de péréquation compense-t-elle moins de ressources ? Les pauvres n’en continuent pas moins à s’appauvrir, et si c’est moins vite que les autres, le résultat est pire pour eux.

Du reste, qu’en est-il de cette fameuse péréquation ? Premier constat : le montant des sommes en jeu est faible. La montée en puissance du FPIC est prévue jusqu’en 2016, année au cours de laquelle il doit atteindre 1 milliard d’euros, représentant 2 % des ressources fiscales des collectivités, ce qui reste pour le moins modeste. En 2014, avec 570 millions d’euros, cela devrait représenter à peu près 1 % des ressources fiscales.

Je ferai deux constats.

Tout d’abord, au titre de la péréquation verticale, le montant total des trois dotations s’élève à 3, 3 milliards d’euros, c’est-à-dire 14, 4 % de la DGF du bloc communal et 13, 6 % des transferts de l’État si l’on y ajoute les crédits aux communes de la mission « Relations avec les collectivités territoriales ». Ces sommes ne sont pas négligeables, mais elles restent modestes.

Par ailleurs – c’est le second constat –, le mode de construction de la DGF défavorise structurellement les petites collectivités.

Au sein de la dotation forfaitaire, deux dotations, directement pour la dotation de base – 6, 776 milliards d’euros en 2013, du même niveau qu’en 2014 – et indirectement pour la dotation de garantie – 4, 796 milliards d’euros –, sont fonction de la population, soit au total 11, 572 milliards d’euros, à comparer à la dotation superficiaire, partie elle aussi de la dotation forfaitaire, censée favoriser les communes rurales – 225 millions d’euros. Cette dotation superficiaire est intéressante, décorative, mais elle ne change pas grand-chose.

Or – et c’est là le principal problème –, tous les habitants ne se valent pas dans le calcul de la dotation de base: ceux des communes de moins de 100 habitants pèsent 64, 46 euros et ceux des communes de 200 000 habitants et plus, 128, 93 euros, soit le double.

J’ai pris le risque de tenter d’évaluer, avec les chiffres de 2013, le montant de la perte pour les communes de 1 à 1 000 habitants par rapport à un système qui attribuerait une valeur uniforme aux habitants quelle que soit la taille des communes.

La population de ces communes représente près de 15 % de la population française, comme les communes de plus de 100 000 habitants. Si la même dotation leur avait été attribuée, elles auraient perçu autour de 1 milliard d’euros de dotation de base. Avec un coefficient moyen de 68, 2 euros, cela représente environ 650 millions d’euros, soit un manque à gagner de 350 millions d’euros.

Je suis persuadé qu’au final l’aide accordée aux communes de moins de 5 000 habitants au titre de la DSR – 969 millions d’euros en 2014 – est largement neutralisée par l’usage de ces coefficients logarithmiques.

La raison en est, nous dit-on, que les grandes collectivités ont des charges de centralité, comme si les petites communes n’avaient pas, elles, des charges de ruralité liées, d’une part, à l’entretien de l’espace – déneigement, entretien des routes et des forêts –, à l’extension des réseaux, à la nécessité de suppléer le désengagement du service public – télévision numérique terrestre, téléphone, agences postales –, et, d’autre part, à l’éloignement – coût des transports – et à la créativité ministérielle, comme l’aménagement du temps de l’enfant, l’accueil des élèves en cas de grève, etc.

La population de ces communes, largement d’origine urbaine, souvent peu argentée, demande pourtant les mêmes services que là d’où elles viennent sans pouvoir en payer le prix. Comment justifier que ces communes soient pénalisées ? En effet, au moment où la DGF a été créée, ces communes étaient soumises à des charges correspondant à des communautés agricoles qu’elles ne sont plus aujourd’hui. Cet élément me semble d’autant plus pertinent qu’un certain nombre de « charges de centralité » citadines ressemblent fort à des charges de vanité.

S’agissant de la dotation d’intercommunalité, on constate la même discrimination, car le poids des habitants varie en fonction de la catégorie d’EPCI auquel ils appartiennent, cette typologie étant fortement corrélée à la taille de la personne morale : 24, 48 euros par habitant pour les communautés de communes à contribution économique transférée, 34, 06 euros pour les communautés d’agglomérations, 60 euros pour les communautés urbaines et les métropoles, ces collectivités d’où ruisselle la richesse vers les territoires à charge. En l’occurrence, on a l’impression que c’est plutôt l’inverse.

Troisième constat, et cerise sur le gâteau : des dispositifs de péréquation sont soigneusement bridés pour éviter qu’ils ne soient trop efficaces.

Il en est ainsi du Fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales, le FPIC. Là encore, la magie du coefficient logarithmique est venue modérer l’ardeur péréquatrice du législateur.

Plutôt que de comparer les ressources par habitant des ensembles intercommunaux à une moyenne nationale pour la désignation des contributeurs et des bénéficiaires, on a pondéré la population en fonction de la taille des collectivités, selon un coefficient de 1 – 0 à 7 500 habitants – à 2 – plus de 500 000 habitants.

Ainsi, une collectivité de 95 000 habitants, par la magie d’un coefficient de 1, 6, se trouve dotée d’une population de 152 000 habitants, ce qui permet de minorer son PFIA, ou potentiel financier intercommunal agrégé, de 38%.

Le dispositif a été perfectionné par l’introduction plus tardive du critère de l’effort fiscal, généralement plus élevé dans les grandes collectivités que dans les petites, d’ailleurs en contradiction avec les appels à la modération fiscale du Gouvernement ! Mais la contradiction, on le sait, c’est la vie !

Les résultats qui en découlent sont étranges.

Je citerai un exemple. En 2013, le solde des prélèvements et reversions des intercommunalités du département des Alpes-de-Haute-Provence, l’un des départements les plus pauvres de France, a été négatif de 850 000 euros. Dans le même temps, la contribution de la métropole niçoise à la solidarité aura été de 689 512 euros !

Madame la ministre, personne ne nie la difficulté de partager les ressources – et c’est particulièrement vrai en période de disette –, mais que l’on s’abstienne au moins de fausser le débat par de telles manipulations ; surtout, que l’on évite d’aggraver les inégalités de traitement, inégalités flagrantes entre collectivités, notamment entre les petites et les grandes.

Puisque la richesse est dans les grandes collectivités, pourquoi leur réserver un tel traitement de faveur ? C’est peut-être parce que la réalité est sensiblement différente de ce qu’on entend nous laisser croire. En particulier – mais nous aurons le temps d’en rediscuter lorsque le texte viendra en discussion –, cette idée selon laquelle la France doit se rebâtir autour des métropoles posera plus de problèmes qu’elle n’en résoudra. §

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Vincent Placé

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, avec l’autonomie et la responsabilité, la solidarité constitue l’une des trois valeurs cardinales de l’écologie politique : solidarité entre les personnes, bien sûr, mais aussi solidarité entre les territoires. L’esprit de concurrence qui consiste à tenter de prospérer au détriment de son voisin, en accaparant les subventions publiques, les ressources naturelles ou l’activité économique, ne constitue pas un projet politique viable à long terme. Le creusement des inégalités ne peut être le fondement d’une société.

Les différents mécanismes de péréquation, objets de ce débat organisé sur l’initiative de nos collègues du RDSE, constituent des outils particulièrement adaptés pour mettre en œuvre cette solidarité territoriale que nous appelons de nos vœux. En la matière, beaucoup reste à faire. Il est difficilement acceptable qu’aujourd’hui une même région, en l’occurrence l’Île-de-France, abrite à la fois le département le plus pauvre et le département le plus riche de France.

Pour autant, nous ne pensons pas qu’il faille multiplier les mécanismes et les niveaux de péréquation, de la même manière que nous ne pensons pas qu’il faille multiplier les niveaux de collectivités. Depuis longtemps, les écologistes appellent à recentrer l’architecture territoriale autour des strates régionale et intercommunale, aujourd’hui les plus pertinentes pour mettre en œuvre la subsidiarité à l’échelle de l’Europe.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Vincent Placé

Partant de là, la mise en place, dans le projet de loi de finances pour 2014, d’un fonds de solidarité pour les départements de la région d’Île-de-France, le FSDRIF, ne nous semble pas de nature à contribuer à la clarification des échelons institutionnels, encore moins après les annonces du Président de la République laissant entrevoir à terme une fusion des départements de la petite couronne parisienne. Ce dispositif devrait d’ailleurs être étendu, à l’image de ce qui s’est produit dans la métropole lyonnaise. Si les conseils généraux ont toujours, bien évidemment, une pertinence dans les territoires ruraux, il en est autrement dans les territoires urbains et semi-urbains : leur intérêt, lorsqu’on ajoute les métropoles, devient de plus en plus modeste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Vincent Placé

C’est en ce sens que, dans les territoires ruraux, les pays et les conseils généraux peuvent subtilement se compléter.

Au-delà de ces questions institutionnelles, j’aimerais également aborder la philosophie qui sous-tend, d’un point de vue écologiste, la répartition actuelle des ressources entre les collectivités.

Puisque le titre de notre débat nous invite à nous concentrer sur les dispositions du projet de loi de finances pour 2014, j’aimerais évoquer en particulier un article de la seconde partie que nous n’avons pas pu examiner : il s’agit de l’article 59, qui ne relève pas directement des mécanismes de péréquation mais traite de la répartition de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, la CVAE.

Cet article modifie la clé de répartition de la CVAE, en favorisant les territoires qui accueillent des industries potentiellement polluantes ou dangereuses. Un tel avantage existait déjà dans un rapport de 2 à 1, et cet article le porte dans un rapport de 5 à 1. De plus, le produit de la CVAE n’étant modifié que très marginalement, cet avantage sera donc consenti aux territoires concernés au détriment des autres.

Ce dispositif, d’apparence technique, est lourd de sens sur le plan politique.

D’abord, il tend à considérer que nuisances, pollutions et risques industriels sont des fatalités. En ce sens, il témoigne donc d’une absence de volonté de les réduire en s’y attaquant par des normes, des réglementations ou des incitations à l’investissement ciblé.

Ensuite, la responsabilité des industries est ici totalement exonérée. De plus, aucune différence de traitement n’est établie en fonction de la nature ou de l’ampleur des nuisances ou des risques. Le principe « pollueur-payeur », qui suppose à la fois la responsabilité du pollueur et la proportionnalité entre le dégât et le dédommagement, est donc ici abandonné.

Enfin, non seulement ce dispositif aboutit à augmenter les ressources des territoires qui accueillent des entreprises polluantes, sans aucune contrainte sur le fait que ces ressources serviront précisément à remédier aux pollutions qu’elles sont censées compenser, mais encore cet avantage est consenti au détriment des territoires qui, eux, protègent leur environnement. Le payeur est donc non plus le pollueur, mais le voisin qui refuse d’être pollué. Curieuse philosophie !

Si un tel dispositif paraît nécessaire, il faudrait donc s’interroger sur les raisons pour lesquelles certaines industries ne trouvent aujourd’hui pas de territoire où s’implanter, plutôt que d’offrir aux élus locaux suffisamment d’argent, alors que, parallèlement, l’austérité conduit à baisser les dotations, pour qu’ils ne puissent plus refuser une dégradation de la qualité de leur territoire ou une mise en danger de leurs administrés. Je suis persuadé que, sur toutes les travées, toutes sensibilités confondues, cette interrogation doit être examinée très sincèrement, car ce sujet dépasse les clivages droite-gauche.

Plus généralement, au-delà de cet article, force est de constater que le système n’encourage pas les collectivités à préserver leur environnement. En effet, une politique environnementale locale profite à un territoire potentiellement très large, alors que le bénéfice économique de l’urbanisation ou de l’implantation d’activités polluantes se concentre pour l’essentiel sur la collectivité qui les développe.

Pour tenir compte de la contribution à l’intérêt général des collectivités qui préservent leur environnement, il pourrait être ajouté un critère de biodiversité au calcul de la dotation globale de fonctionnement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Vincent Placé

C’était déjà une proposition du Grenelle de l’environnement, souvent reprise, notamment dans l’excellent rapport de Guillaume Sainteny sur Les aides publiques dommageables à la biodiversité, mais jamais appliquée. Je forme donc le vœu, madame la ministre, que nous puissions rapidement avancer sur ce thème qui ne doit pas intéresser que les écologistes au sein de notre assemblée.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je voudrais tout d’abord remercier le groupe du RDSE d’avoir permis ce débat sur l’évolution des péréquations communale, intercommunale et départementale après l’entrée en vigueur de la loi de finances de 2014.

En effet, indépendamment du souvenir du combat que nous avons livré ensemble, notamment lors de l’examen des projets de loi de finances pour 2011 et 2012, je crois primordial que nous puissions évaluer les dernières évolutions du mécanisme en place, en en pointant les tendances et peut-être les défauts, ce que je ferai dans un premier temps, pour resituer ensuite ce dispositif dans la mutation profonde que vit notre système fiscal local.

Je me bornerai à évoquer ici la péréquation horizontale instituée par la loi de finances de 2011, bien que l’ensemble des dispositifs de péréquation actuels, y compris la traditionnelle péréquation verticale de la DGF, concourent, par l’existence d’une enveloppe normée désormais au mieux figée, à redistribuer les richesses entre les collectivités.

Je souligne que, dans une démocratie comme la nôtre, il serait utile que nous puissions disposer d’analyses chiffrées et d’outils de simulation, plusieurs années après la mise en œuvre du dispositif.

M. Jacques Mézard acquiesce.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

Je commencerai naturellement par le FPIC, qui intéresse le bloc communal. Le législateur a choisi de rétablir en 2014 la programmation de progression initiale, en vue d’atteindre 2 % des recettes fiscales, soit 1 milliard d’euros. L’enveloppe du FPIC croîtra ainsi de 360 millions à 570 millions d’euros en 2014. Nous dirons pudiquement que cet effort n’est pas neutre dans la période actuelle…

Pour ce dispositif, qui met à contribution les territoires intercommunaux dont le potentiel financier est supérieur à 0, 90 de la moyenne – après une tentative, infructueuse, de porter ce coefficient à 1 –, je rappelle que, depuis 2013, le revenu moyen par habitant est venu s’ajouter comme critère de prélèvement.

Pour déterminer le montant du prélèvement, la loi de finances pour 2014 a modifié l’indice synthétique, en portant le poids du revenu moyen par habitant de 20 % à 25 % et en abaissant celui du potentiel financier de 80 % à 75 %. Il va de soi que cette évolution favorise les territoires qui affichent un faible revenu par habitant.

Dans ce cadre, notons que, pour l’Île-de-France, où la contribution, ajoutée à celle du Fonds de solidarité des communes de la région d’Île-de-France de l’année antérieure, était jusqu’alors plafonnée à 11 % des recettes fiscales du territoire, la loi de finances pour 2014 relève ce plafond à 13 %.

Debut de section - Permalien
Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée

Exact !

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

Étant donné que nous agissons sur une enveloppe fermée, cette mesure allégera d’autant la contribution des non-plafonnés. Précisons toutefois que ce plafonnement joue sur les recettes fiscales, contrairement au prélèvement, qui se réfère au potentiel financier, ce qui favorise ceux qui appliquent des taux faibles.

J’en viens au reversement du FPIC.

Le seuil d’effort fiscal pour bénéficier de ce reversement a été fixé à 0, 8 % en 2014, contre 0, 75 % précédemment, et il sera relevé à 0, 9 % en 2015. Cette disposition écarte du bénéfice de ce reversement ceux qui font le moins d’efforts et renforce la dotation de ceux qui restent éligibles.

Nous pourrions en conclure que les dispositions arrêtées pour 2014 vont dans le sens d’une meilleure appréhension des inégalités et d’un durcissement du principe « aide-toi, le ciel t’aidera ». Toutefois, nous devons rester extrêmement vigilants face à la manipulation de ces critères. En effet, en « pinçant » le dispositif aux deux extrémités – c’est-à-dire en faisant contribuer un nombre restreint de territoires les plus riches, par le biais d’un relèvement du critère de prélèvement, tout en limitant le nombre des bénéficiaires du reversement en renforçant le poids du seuil d’effort fiscal comme critère d’éligibilité –, nous prenons le risque de l’asphyxier. Peu de contributeurs et peu de bénéficiaires, les uns très prélevés et les autres très dotés : cette orientation pourrait nuire à l’efficience générale du dispositif en le concentrant sur un petit segment, au risque de le tuer.

C’est d’autant plus vrai que les critères de potentiel fiscal et de potentiel financier reposent, pour l’heure, sur des valeurs locatives non révisées, partant approximatives. Au surplus, les critères de charges fondés sur le revenu par habitant ne font pas consensus. Je rappelle que certains pensent à prendre en compte le niveau des loyers et que l’idée d’introduire un « reste à charge » fait son chemin. Pour ma part, je souhaite verser au débat la notion d’« effort énergétique global », utilisée par ERDF et qui rajoute au loyer les dépenses d’énergie et de mobilité. Un tel critère pourrait permettre de rééquilibrer l’approche territoriale entre l’urbain et le rural.

Se pose également la question de l’ajout du prélèvement dit des « deux fois 1, 5 milliard d’euros » au titre de l’effort des collectivités, souvent vécu comme une double peine par les contributeurs. Le choix d’un prorata des ressources de fonctionnement n’est sans doute pas étranger à ce ressenti : les contributeurs dénoncent une double accentuation de la péréquation, mais on est en droit de se demander si un prélèvement au prorata de la DGF n’aurait pas eu, quant à lui, un effet contre-péréquateur !

Enfin, je tiens à dire un mot du FSRIF, même si je n’en suis pas, comme M. Dallier, un spécialiste patenté, et s’il s’agit d’un fonds de péréquation localisé. Le montant du FSRIF passe de 230 millions d’euros en 2013 à 250 millions d’euros en 2014, l’objectif étant de le porter à 270 millions d’euros en 2015. Les contributions d’éligibilité restent au même niveau que l’an passé, mais le calcul du prélèvement a été sérieusement modifié via la loi de finances. Du seul critère du potentiel financier, l’indice de prélèvement a évolué vers le composé d’un écart relatif au potentiel financier moyen, à hauteur de 80 %, et d’un écart relatif au revenu moyen par habitant –référence Île-de-France –, à hauteur de 20 %.

Si le FSRIF bénéficie de nombreux systèmes de lissage et de plafonnement des hausses d’une année sur l’autre, on comprend que cette modification allègera la charge pesant sur les territoires dont les habitants ont, en moyenne, les revenus les plus faibles. Les réserves précédemment exprimées par certains quant au choix de ce critère sont ici moins pertinentes, s’agissant de collectivités présentant une typologie de charges plus homogène.

Je voudrais à présent m’arrêter sur la péréquation départementale, qui a subi, plus encore, de substantielles modifications au travers de la loi de finances pour 2014.

Je crois utile de rappeler ici la sédimentation péréquative, avant d’aborder les dispositions pour 2014.

Outre la dotation de fonctionnement minimale, la DFM, et la dotation de péréquation urbaine, la DPU, qui sont aujourd’hui bien connues, nous avions institué, en 2011 et en 2012, un fonds de péréquation des DMTO et un fonds de péréquation de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, la CVAE. Comme chacun sait, ces dispositions n’ont pas donné entière satisfaction.

La loi de finances pour 2014 instaure, quant à elle, quatre systèmes de péréquation nouveaux pour les départements.

Le premier est « en creux », si j’ose dire, car il s’agit d’un prélèvement institué pour la participation à l’effort de 1, 5 milliard d’euros des collectivités. Portant sur 476 millions d’euros, il repose sur un indice synthétique fondé sur les écarts moyens entre le revenu par habitant et le taux d’imposition foncière comparé aux moyennes nationales.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

Deux autres fonds sont destinés à compenser le reste à charge au titre des trois allocations de solidarité.

L’un est un fonds de 830 millions d’euros de restitution des frais de gestion de la taxe sur les propriétés bâties perçus par l’État, assis, à hauteur de 70 %, sur le reste à charge au titre des allocations, et pour 30 % sur un indice de ressources et charges tenant compte du revenu moyen par habitant et des trois allocations de solidarité. Je ne détaillerai pas plus avant ce dispositif, me bornant à relever qu’un système de pondération vient réguler l’ensemble, sans tenir compte toutefois de la population, ce qui avantage indirectement les départements les moins peuplés.

Le troisième fonds, assis sur les DMTO, prélève 0, 35 % du produit des transactions immobilières perçu l’an passé, soit 570 millions d’euros. Il autorise une hausse de 3, 8 % jusqu’à 4, 5 % du taux des DMTO pour financer le prélèvement. Ce fonds agit donc également sur le premier fonds de DMTO, qu’il peut abonder en complément, jusqu’à un certain plafond.

Je vous fais grâce du détail de la redistribution…

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

Je dirai simplement que le potentiel fiscal servant à la déterminer est curieusement corrigé de l’effet de la réforme de la taxe professionnelle, ce qui ne manque pas d’interpeller. Cette précision suffit à souligner la complexité du système mis en place !

Je n’évoquerai que brièvement le quatrième fonds, le fonds de solidarité des départements de la région d’Île-de-France, ou FSDRIF. Il a été fixé à 60 millions d’euros et concerne les huit départements d’Île-de-France. Il est fondé sur le potentiel financier, le revenu par habitant, la proportion d’allocataires du RSA et celle de bénéficiaires des aides personnalisées au logement. Alimenté par les départements dont l’indice est supérieur à 95 % du niveau médian, le prélèvement ne peut dépasser 10 % des recettes de fonctionnement. En outre, un département ne peut pas contribuer à plus de 50 %. En pratique, ce plafond joue pour les Hauts-de-Seine et le fonds est essentiellement destiné à la Seine-Saint-Denis.

Rassurez-vous, mes chers collègues, j’ai achevé l’explication de cette belle mécanique péréquative. Encore ai-je volontairement omis quelques détails… §

Je terminerai par quelques considérations prospectives.

Malgré la complexité du dispositif, gardons-nous de « jeter le bébé avec l’eau du bain ». A contrario, il faut porter au crédit des dispositions mises en place le fait qu’elles répondent aujourd’hui, pour une large part, à une situation d’urgence due à la crise économique que nous subissons et aux mesures contributives imposées par l’effort d’économie demandé aux collectivités.

Penser que ces dispositions ne sont que la résultante de la réforme de la taxe professionnelle serait faire preuve de courte vue. En réalité, notre système fiscal local est à bout de souffle. §Il atteint aujourd’hui les limites du supportable, face à une mutation qui s’achève. Tous les chercheurs et les praticiens qui se penchent lucidement sur lui en conviennent, et les parlementaires que nous sommes seraient bien inspirés de prendre la mesure de la situation. Encore faut-il poser correctement les termes du débat.

Force est de constater que, depuis trente ans, nous avons évolué vers un système de dotations, alors que l’illusion d’une autonomie fiscale, issue d’une autre époque, s’est insinuée avec la libéralisation de l’emprunt local.

En réalité, nous sommes entrés progressivement dans un système opaque de globalisation des subventions. Conjuguée à la dette engendrée par un déficit budgétaire récurrent devenu insupportable, la crise économique a mis au jour la nécessité d’un premier choc, celui de la réforme constitutionnelle de 2003.

Le besoin de redéfinir l’autonomie financière est né de l’ambiguïté d’un système devenu la juxtaposition de ressources après que les « quatre vieilles » eurent été vidées de leur substance au fil des dégrèvements et des exonérations. La suppression de la part « salaires » est ensuite venue condamner définitivement la taxe professionnelle. Cette réforme a imposé la spécialisation fiscale par niveau.

Dès lors, nous voyons bien qu’il convient d’asseoir l’établissement d’une fiscalité partagée entre l’État et les collectivités en adoptant une gestion systémique. Les impôts locaux classiques doivent être, pour l’essentiel, remplacés par des impôts nationaux évoluant en fonction de la croissance réelle et corrigés, bien sûr, par la nécessaire péréquation entre des territoires qui ne maîtrisent plus ni leur destin ni les croissances asymétriques qui se sont fait jour. La recherche des bons critères sera la clef de voûte de cette entreprise.

Une telle révolution ne peut se concevoir qu’à deux conditions.

La première, c’est que les uns, abandonnant leur approche trop centralisatrice, cessent de considérer les collectivités comme une variable d’ajustement, que les autres, délaissant une autonomie béate relevant d’un Moyen Âge fiscal, prennent la mesure des défis internationaux qui nous attendent, et que tous enfin s’accordent sur une gouvernance systémique de concertation et de décision. Il s’agit de refonder la gestion financière publique locale et nationale, ce qui imposera d’approfondir la réflexion sur la qualité de la dépense.

La seconde condition, c’est qu’une telle réforme, qui devrait bien entendu conduire à asseoir pour chacun le préciput, qui serait affecté au remboursement de la dette, sur la part d’impôt qu’il recevrait, doit faire l’objet d’une disposition constitutionnelle, afin de garantir la pérennité du système, même si, comme le dit le professeur Hertzog « l’autonomie ne désigne pas un état, mais plutôt un moment transitoire, caractérisé par ses insuffisances et une imperfection dont le dépassement attendu fera basculer dans un état stable, aux traits mieux affirmés, et promis à la permanence, l’indépendance ou souveraineté par exemple ». Je partage cette idée avec d’autres. Pour l’heure, un tel objectif peut sembler contraignant, mais il est rassurant dans le temps !

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Jarlier

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, cette initiative parlementaire d’organiser un débat en séance publique sur l’évolution de la péréquation est bienvenue. En effet, le Sénat n’a pas eu l’occasion de se pencher sur cette question lors de l’examen des projets de loi de finances pour 2013 et pour 2014.

Avec la réforme de la taxe professionnelle, la crise qui se prolonge, le gel puis la baisse des dotations de l’État, nos finances locales ont subi des bouleversements répétés au cours des dernières années.

Dans ce contexte particulièrement tendu, la question de la réduction des écarts de richesse entre les collectivités devient incontournable. Une raison essentielle, à tout le moins, justifie cette priorité : les collectivités les plus fragiles subissent de plein fouet ces nouvelles contraintes et risquent d’être confrontées à de graves difficultés si la solidarité nationale ne joue pas en leur faveur.

Le chantier de la péréquation est donc capital, d’autant que la diminution des dotations inscrite dans la loi de finances pour 2014 est appelée à se poursuivre en 2015, sans parler des 50 milliards d’euros d’économies nouvelles qui s’annoncent et risquent de peser sur les budgets des collectivités…

Qu’en est-il aujourd’hui de la péréquation au sein du bloc communal ?

La part de la péréquation verticale dans la dotation globale de fonctionnement a fortement augmenté entre 2004 et 2013. Elle atteint aujourd’hui 25 %, ce qui est assez considérable. Néanmoins, l’efficacité de la péréquation verticale reste à prouver, car sa performance a reculé depuis 2001 pour les communes, ainsi d’ailleurs que pour les départements.

Plusieurs facteurs concourent à cette situation.

Tout d’abord, en l’absence d’augmentation de la DGF, les montants affectés à la péréquation dépendent désormais directement d’un prélèvement sur une partie des dotations. Autrement dit, le financement de la solidarité nationale en faveur des collectivités les plus fragiles est assuré par la baisse d’une partie des ressources de celles-ci ! La péréquation verticale n’est donc aujourd’hui rien d’autre qu’une redistribution interne d’une part de la DGF.

Concrètement, le renforcement de la péréquation verticale s’est traduit par la baisse du complément de garantie. Entre 2012 et 2013, le nombre de communes concernées par cette diminution est passé de plus de 3 800 à plus de 14 000, et cette tendance devrait au moins se maintenir en 2014.

Je rappelle que le complément de garantie peut constituer jusqu’à 50 % de la dotation de base d’une commune. En outre, il varie considérablement selon les communes, sans être réellement lié à leur niveau de richesse actuel, dans la mesure où il est assis sur des éléments historiques. Pour financer la péréquation verticale, l’État reprend donc d’une main ce qu’il a donné de l’autre.

Il existe une deuxième raison à ce manque d’efficacité de la péréquation verticale : la dilution des montants qui lui sont affectés et son ciblage insuffisant, malgré des évolutions positives à cet égard.

En ce qui concerne la dotation de solidarité rurale, la DSR, sa part issue de la péréquation a profité, en 2013, à 34 590 communes, à hauteur de 490 millions d’euros seulement, soit moins de 2, 15 % de la DGF communale. Son effet péréquateur reste donc à démontrer. Cela a d’ailleurs conduit le Sénat à créer en 2011, sur ma proposition et celle de François Marc, une part de la DSR ciblée sur les 10 000 communes les plus pauvres de France.

La loi de finances pour 2013 a considérablement amélioré les modalités d’attribution de la DSR, en introduisant parmi les conditions d’éligibilité un critère de revenu par habitant. Cette mesure, qui prend en compte la fragilité du territoire, associée à celle de la commune, a permis de renforcer le caractère péréquateur de la DSR.

J’ajoute – quand les choses vont dans le bon sens, il faut le dire – qu’en 2013, à l’issue du vote de la loi de finances et des choix du Comité des finances locales, la DSR « cible » a augmenté de près de 58 %, ce qui en fait déjà une dotation de péréquation efficace.

Concernant la DSR « bourg-centre », qui prend en compte les charges de centralité, 4 057 communes en ont bénéficié en 2013, pour un montant global de 361 millions d’euros. Les chefs-lieux de canton et les petites villes sont très attachés à la prise en compte de ces charges, parce qu’ils assurent très souvent des services de proximité qui profitent à l’ensemble de leur bassin de vie.

Sur ce point, madame la ministre, nous avons besoin d’être rassurés, même si le problème ne se posera pas avant 2017 : beaucoup d’élus nous ont interpellés au sujet du sort de la DSR « bourg-centre » lorsque leur commune, intégrant un nouveau canton plus vaste, ne sera plus considérée comme un chef-lieu de canton. Cette évolution pourrait provoquer la suppression pure et simple de cette dotation, alors même que les dépenses de centralité resteraient à leur charge. Sur ma proposition et celle de Jean Germain, la commission des finances du Sénat avait présenté une disposition permettant son maintien au-delà de 2015. L’occasion est propice, madame la ministre, pour vous interroger sur cette question, qui inquiète à juste titre de très nombreux élus.

J’en viens à la fameuse péréquation horizontale, qui a suscité de si nombreux commentaires et qui monte en charge au même rythme que le mécontentement de ses contributeurs.

Pour 2014, malgré la baisse annoncée des dotations, la montée en puissance de cette solidarité financière entre les collectivités a été maintenue.

Dans le même temps, une augmentation du poids du critère de revenu par habitant dans le calcul des prélèvements a permis une meilleure prise en compte de la fragilité de certains territoires, notamment en zones rurales. Cette mesure, qui se révèle donc efficace, correspondait à une proposition du Comité des finances locales, que j’avais défendue. Il faudra néanmoins s’interroger sur l’opportunité d’aller plus loin ou, à tout le moins, d’éviter les effets de seuil produits par le déclenchement du prélèvement à partir d’un potentiel financier agrégé supérieur à 0, 9 fois la moyenne nationale. La brutalité de ce processus pose problème et mérite, à mon sens, d’être corrigée.

De la même façon, une autre question essentielle se pose au regard des modalités de mise en œuvre du FPIC : celle de l’effort fiscal. Comment, en effet, prétendre bénéficier de la solidarité de son voisin si l’on ne fait pas déjà l’effort de mobiliser, ne serait-ce que modérément, la solidarité sur son propre territoire ? Il faudra donc veiller à maintenir la progression de l’effort fiscal déjà prévue pour 2015 dans la dernière loi de finances.

Enfin, la question de la répartition du FPIC au sein de l’intercommunalité et entre communes mérite d’être posée. En effet, le nouveau mode d’élection des conseillers communautaires va conduire à la représentation des minorités issues des conseils municipaux. S’il s’agit d’une excellente chose pour notre démocratie locale, les règles actuelles de répartition du FPIC, notamment celle de l’unanimité, devront sans doute évoluer afin d’éviter les blocages.

Je conclurai cette première partie de mon propos par une remarque et deux suggestions.

Tout d’abord, dans la perspective de la baisse des dotations de l’État aux collectivités, la montée en puissance de la péréquation horizontale sera de plus en plus incertaine, dans la mesure où le consensus nécessaire à son augmentation sera difficile à trouver. Dans ce contexte, ne faudrait-il pas à l’avenir moduler la baisse des dotations au regard de la capacité contributrice des collectivités ? Cette question mérite d’être posée, si nous voulons éviter que ne se creusent encore les écarts de richesse entre les communes.

En outre, c’est peut-être aussi au sein même des composantes de la DGF qu’il faut trouver les moyens de mieux prendre en compte les territoires et leurs spécificités.

Je pense à la dotation de base des communes, dont la méthode de calcul, qui fait intervenir un coefficient logarithmique, pourrait être utilement revue.

Je pense aussi à la dotation superficiaire, qui est restée très faible et n’est pas aujourd’hui en mesure de compenser équitablement les charges d’entretien de l’espace auxquelles ont à faire face les communes, particulièrement en montagne.

Je pense enfin à la dotation d’intercommunalité, qui pourrait également être revue tant les écarts entre communautés d’agglomération et communautés de communes ne correspondent nullement à la réalité des compétences exercées.

Je souhaiterais maintenant évoquer brièvement la péréquation départementale.

Madame la ministre, vous le savez, les changements des critères d’éligibilité au fonds national de péréquation des DMTO, qui ont amené l’introduction de la notion de « revenu par habitant pondéré par la population », ont profondément ému les élus.

Cette disposition, inadaptée à la prise en compte de la diversité des territoires, a fortement pénalisé les départements ruraux. Dans le même temps, les départements se sont trouvés confrontés à un effet de ciseaux, entre l’augmentation de leurs dépenses à caractère social et une tension sur leurs ressources, due notamment aux effets de la réforme de la taxe professionnelle. Devant la vive émotion des élus, le Gouvernement a mis en place des mécanismes compensatoires en prolongeant le fonds d’urgence, en créant un prélèvement de solidarité et en affectant une nouvelle recette de 827 millions d’euros dans le cadre de la loi de finances pour 2014.

Il faut toutefois reconnaître que, si certains départements s’y retrouvent, d’autres, au contraire, revendiquent encore une meilleure prise en compte de leur situation particulière. Le compte n’y est donc pas, si je puis dire.

Le prélèvement de solidarité issu du déplafonnement des DMTO pose à nouveau la question des inégalités de situation entre les territoires et fait peser sur le contribuable un risque de double peine pour les départements ruraux à faible base fiscale. Dans ces conditions, il serait plus équitable de ne pas soumettre au prélèvement ces départements, déjà pénalisés par leurs handicaps.

Par ailleurs, la question du changement des critères injustes retenus pour l’attribution du fonds « historique » de péréquation des DMTO reste d’actualité, tout comme celle de la simplification et de la clarification nécessaires de ces dispositifs de solidarité. Malgré toutes les explications fournies aux élus, ceux-ci ont en effet encore du mal à s’y retrouver !

Un nouveau potentiel fiscal a été défini pour le calcul du prélèvement de solidarité. Je salue cette avancée sur une question qui avait suscité la mobilisation de nombre d’entre nous. La définition de ce nouveau potentiel fiscal, issue de la réforme de la taxe professionnelle, avait engendré un bouleversement dans le classement des départements selon la richesse. Il est donc urgent de la revoir pour le calcul de l’ensemble des dotations de péréquation. J’avais déposé une proposition de loi en ce sens, cosignée par mes collègues du groupe UDI-UC. Il s’agit d’un élément essentiel pour répondre aux préoccupations des territoires les plus fragiles.

Concernant, enfin, la répartition des 827 millions d’euros, si le critère du reste à charge est sans doute légitime, il demeure insuffisant. En tout état de cause, l’évaluation des efforts consacrés par le département à la maîtrise de ses dépenses d’aide sociale devrait aussi être prise en compte pour la répartition du fonds. Avec les critères actuels, en effet, un département « vertueux » en matière de gestion de ses charges à caractère social se trouve pénalisé.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Jarlier

En outre, la fragilité de certains départements ruraux, notamment de moyenne montagne, devrait être mieux prise en compte, avec une augmentation du poids des critères reflétant la spécificité de leur situation, comme celui du revenu par habitant, par exemple.

Ce sont là autant de questions imposant, madame la ministre, la poursuite du travail collectif engagé l’an dernier, d’abord avec le CFL, puis, malheureusement, avec la seule Assemblée nationale. Même s’il est un peu tard pour les vœux, j’espère que le Sénat pourra y contribuer activement cette année ! §

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Miquel

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, depuis 2003, la péréquation est un objectif à valeur constitutionnelle. L’article 72-2 de la Constitution dispose en effet que « la loi prévoit des dispositifs de péréquation destinés à favoriser l’égalité entre les collectivités territoriales ».

Les sénateurs socialistes se sont toujours battus pour développer les mécanismes de péréquation verticale, par le biais de dotations de l’État, ou horizontale, c’est-à-dire entre collectivités. L’effort de péréquation atteint aujourd’hui 10 milliards d’euros et a connu une forte progression ces dernières années.

Au regard des marges de manœuvre fiscales et financières, qui devraient être durablement contraintes dans les prochaines années, la question du devenir de la péréquation sera stratégique pour les finances locales.

Le pacte de confiance et de responsabilité du 16 juillet 2013 a entériné la poursuite de la montée en puissance de la péréquation dans le cadre de la loi de finances pour 2014, malgré la baisse de 1, 5 milliard d’euros des dotations cette même année.

Les mécanismes de péréquation verticale – DSU, DSR – et de péréquation horizontale – FPIC et fonds départementaux – continueront de progresser en 2014.

Vous le savez, madame la ministre, dans le domaine de la péréquation comme dans de nombreux autres, notre imagination est sans limite ! Ainsi, il existe aujourd’hui seize fonds de péréquation, dont la complexité n’a d’égal que le manque de lisibilité.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Miquel

Alors que nous nous apprêtons à travailler à une réforme de la DGF, nous devons donc aller vers une simplification, qui offrira plus de lisibilité et permettra à tous les élus de comprendre des mécanismes qui, au fil du temps, sont devenus extrêmement complexes et profondément injustes.

Une part importante de la DGF devrait être attribuée de façon égale par habitant. Aujourd’hui, les collectivités rurales perçoivent beaucoup moins par habitant que les collectivités urbaines. Leur population est pourtant moins nombreuse, tandis que leurs charges de services sont très importantes. Certains départements, par exemple, doivent entretenir vingt-quatre kilomètres de routes par habitant. D’autres doivent payer la mise en place du haut débit, nécessaire pour assurer l’égalité entre citoyens, alors que, dans les départements à forte densité de population, les opérateurs prennent en charge les travaux, sans que les collectivités aient à intervenir. Il s’agit là d’un manquement au principe d’égalité.

Que dire des dotations aux intercommunalités ?

Nous avons constitué d’abord les intercommunalités rurales, car nous étions confrontés à la faiblesse des ressources de ces territoires. La mutualisation était donc une obligation.

Il a fallu la loi Chevènement pour entraîner les grandes agglomérations dans l’aventure de l’intercommunalité, avec une dotation par habitant particulièrement élevée, donc très incitative. Ainsi se sont formés les écarts très importants que nous observons aujourd’hui entre petites et grandes intercommunalités. Certaines de ces dernières redistribuent aux communes une très grande partie de ces dotations : est-ce bien conforme à l’esprit de l’intercommunalité ?

Une remise à plat est devenue indispensable, par souci de justice et pour satisfaire à l’esprit de l’article 72-2 de la Constitution, qui pose le principe d’égalité.

Les départements vous savent gré, madame la ministre, des mesures prises pour compenser les dépenses liées aux trois allocations individuelles de solidarité, au travers de deux enveloppes d’un montant global de 1, 4 milliard d’euros.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Miquel

Je vais m’expliquer, mon cher collègue !

Sur ce total, 827 millions d’euros proviennent des frais de recouvrement des impôts locaux et 568 millions d’euros d’un prélèvement de 0, 35 % au titre des DMTO. Ces sommes, je le répète, visent à compenser les dépenses liées aux trois allocations individuelles de solidarité et à leur reste à charge.

Votre volonté de réduire les écarts en matière de reste à charge par habitant est louable. Sur ce sujet, qui nous préoccupe depuis longtemps, c’est à mes yeux le seul critère qui vaille !

Les critères de répartition que vous avez retenus, mariant le reste à charge et des éléments de richesse, nous ont permis d’obtenir des résultats extrêmement intéressants. Il s’agit ici d’une compensation péréquée. Pour la répartition, il a été tenu compte à la fois du potentiel fiscal et des recettes issues des droits de mutation.

Si vous souhaitez améliorer la péréquation l’an prochain, madame la ministre, je vous suggère de prélever sur les DMTO non pas 0, 5 %, mais 0, 7 %, sans plafonnement, afin de diminuer à nouveau le reste à charge par habitant et de réduire encore les écarts en la matière, qui restent importants.

Compte tenu de la disparité des recettes issues des DMTO, il me semble indispensable de maintenir un système de péréquation en réunissant les deux fonds, avec un prélèvement général au même taux pour tous, sans plafonnement. La répartition devrait s’opérer en prenant en compte des critères objectifs de richesse, de charges et d’effort fiscal.

Si, dans quelques semaines, nous confortons les départements dans leur rôle de mise en œuvre des solidarités sociales et territoriales, il faudra tenir compte des écarts de richesse et instituer des fonds de péréquation adaptés, afin de permettre aux conseils généraux d’assurer le financement de ces compétences dans des conditions justes et égales pour tous les citoyens, qu’ils soient ruraux ou urbains.

Le critère de l’effort fiscal devra être pris en compte : croisé avec le potentiel fiscal, il constitue un bon indicateur.

La révision des bases est nécessaire ; repoussée par manque de courage politique, elle est aujourd’hui urgente, notamment pour les départements qui perçoivent la taxe foncière sur les propriétés bâties, dont le produit est aujourd'hui réparti de façon très injuste.

Je voudrais maintenant répondre à mon ami Jacques Mézard, qui m’a nommément cité tout à l’heure.

Oui, mon cher collègue, j’ai fait du lobbying auprès de l’Assemblée des départements de France, parce que la part respective dans les dépenses du RSA, de l’APA, l’allocation personnalisée d’autonomie, et de la PCH, la prestation de compensation du handicap, varie énormément d’un département à l’autre. Dans des départements comme les nôtres, cher Jacques Mézard, le poids de l’APA est très lourd, dans d’autres c’est celui du RSA.

Or nous étions partis de la répartition suivante : 60 % pour le RSA, 30 % pour l’APA et 10 % pour la PCH, ce qui ne répondait pas à la diversité des situations.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Miquel

Cela valait pour tous les départements : certains étaient très favorisés, tandis que d’autres étaient fortement pénalisés.

Pour plus de justice, nous avons donc proposé à l’ADF et au Gouvernement de prendre pour critère le reste à charge global par habitant, proposition qui a été retenue.

Ainsi, les écarts ont pu être considérablement réduits, sachant que nous étions partis, en matière de reste à charge par habitant, de 64 euros pour l’Essonne à plus de 159 euros pour la Guadeloupe, La Réunion ou l’Hérault.

Vous avez pris cette mesure, madame la ministre, dans une période où les difficultés financières sont particulièrement aiguës. Ces difficultés sont liées à la conjoncture économique, mais aussi à la dérive des financements de ces trois allocations individuelles de solidarité que nous constatons depuis des années.

Auparavant, on nous faisait l’aumône. Ainsi, en 2011, ce sont 160 millions d’euros qui ont été répartis…

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Miquel

Que je sache, la Corrèze n’était pas de la même couleur politique que le Premier ministre d’alors !

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Miquel

Je vais vous donner les chiffres : 160 millions d’euros en 2011, donc, rien en 2012, 170 millions d’euros en 2013 et 827 millions d’euros en 2014, auxquels s’ajoutent 568 millions d’euros par le biais du prélèvement sur les DMTO. Nous n’avions jamais reçu autant : je vous en remercie, madame la ministre.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Miquel

Cher Jacques Mézard, le reste à charge par habitant, pour les trois allocations individuelles de solidarité, est passé de 115 euros à 70 euros pour le Cantal, de 152 euros à 70 euros pour le Lot, de 135 euros à 74 euros pour la Corrèze, de 146 euros à 76 euros pour l’Aveyron, madame la ministre, de 126 euros à 71 euros pour les Ardennes, de 90 euros à 69 euros pour le Loiret…

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Miquel

Je n’ai pas les chiffres concernant votre département, monsieur Sido !

Vous le voyez, mes chers collègues, la fourchette s’est très nettement resserrée ! Les écarts ont été réduits dans une mesure considérable ; tel était bien l’objectif.

Debut de section - PermalienPhoto de René-Paul Savary

Mais le compte n’y est pas, il y a toujours des écarts ! Il manque toujours de l’argent !

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Miquel

Sans doute, mon cher collègue, mais si vous aviez pris des mesures analogues lorsque vous étiez au pouvoir, nous serions beaucoup plus avancés aujourd'hui dans la réduction des écarts ! Vous ne l’avez pas fait, alors ne critiquez pas un gouvernement qui a fait progresser de façon importante la compensation des trois allocations individuelles de solidarité !

Il nous reste du chemin à parcourir.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Miquel

C’est en augmentant le prélèvement sur les droits de mutation que nous parviendrons à établir la justice pour l’ensemble des départements de France et leurs habitants.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Sido

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, responsabiliser tous les acteurs et faire de l’économie une nouvelle « vertu publique », une condition d’indépendance et presque de souveraineté pour notre pays et l’Union européenne : voilà un défi à la hauteur d’un Parlement qui tient pleinement sa place.

Parce que les mots ont un sens, cessons enfin de parler de crise pour désigner une mutation profonde de notre modèle de société, bâti à crédit sur un État providence aujourd’hui acculé à la réforme, contraint à l’action – heureusement, serais-je presque tenté d’ajouter.

Les structures politique, administrative et territoriale ont longtemps paru déconnectées des réalités économiques et, année après année, décennie après décennie, par lâcheté, par conformisme, par insuffisance de culture économique, nous avons fait du déficit public la variable d’ajustement de l’immobilisme et donné à nos concitoyens l’illusion que, en ne changeant rien, notre situation resterait stable et que nos perspectives d’avenir seraient préservées. Or c’est tout le contraire qui s’est produit.

Au lieu de consentir des efforts raisonnés mais continus, nous avons d’abord opté pour une forme de déni de réalité avant de devoir, aujourd’hui, dans l’intérêt général, envisager des réformes sans doute plus dures et plus violentes aussi pour le corps social dans son ensemble, notamment pour les jeunes, qui peinent à trouver leur place dans notre société.

« Patience et longueur de temps font plus que force ni que rage », disait très justement La Fontaine. Mais ce luxe, nous ne pouvons plus nous l’offrir. « Il faut que tout change pour que rien ne change », écrit Tomasi di Lampedusa dans Le Guépard. Il faut réformer pour maintenir notre place dans le concert des nations.

Aujourd'hui, quel est le résultat ? On constate une phobie collective devant la moindre réforme, une défiance en l’avenir et une confiance insuffisante en nous-mêmes. Surtout, la culture du conservatisme et la résistance au changement sont propagées dans le corps social, quand l’ouverture au monde commande de faire preuve d’audace, d’aller de l’avant, presque de développer le goût du changement, de l’innovation et du renouveau.

Mais ce qui fige sans doute le plus notre société, c’est le sentiment d’injustice, ce poison qui nourrit les attitudes de repli. L’effort auquel la situation financière du pays nous appelle doit être partagé par tous pour être équitable, et donc accepté, mais aussi pour être efficace, et donc salutaire pour les finances publiques.

Plutôt que d’employer les termes savants de « péréquation horizontale » ou « de péréquation verticale », je préfère envisager le débat sous l’angle de l’équité et de l’efficacité.

Au final, de quoi parle-t-on ? De mécanismes de solidarité entre les collectivités, d’une part, entre l’État et les collectivités locales, d’autre part.

Le budget de 2014 associe les communes, les intercommunalités, les départements et les régions à l’effort de redressement des comptes publics ; c’est une bonne chose. Là encore, l’effort doit être partagé par tous. En 2014, les dotations de l’État reculent de 1, 5 milliard d’euros, et ce sera la même chose en 2015. Les conseils généraux ont naturellement pris leur part du fardeau, à hauteur de 476 millions d’euros.

Cet effort, le Gouvernement l’a rendu légitime, en instaurant davantage de péréquation, c’est-à-dire d’équité.

Pour aider les conseils généraux à faire face au coût des politiques sociales, qui représentent, rappelons-le, quelque 60 % de leurs dépenses courantes hors investissement, l’article 42 de la loi de finances de 2014 leur transfère une ressource nouvelle, à savoir les frais de gestion de la taxe foncière sur les propriétés bâties, soit 827 millions d’euros. Pourtant, cela ne va pas assez loin et, encore une fois, nous avons cédé à la facilité.

Ainsi, l’article 77 de la loi précitée permet le relèvement des droits de mutation à titre onéreux, appelés plus simplement « frais de notaire », de 0, 7 point du taux plafond applicable. Si les départements recourent pleinement à cette possibilité, leurs recettes fiscales progresseront de 930 millions d’euros en 2014.

Pour ma part, je le dis d’emblée, mes chers collègues, j’ai utilisé cette possibilité en tant que président du conseil général de la Haute-Marne. Rester vertueux quand on nous incite à commettre des entorses est, en ce domaine comme dans d’autres, d’ailleurs, presque surhumain ! §

Je forme le vœu que le Gouvernement et toutes les collectivités locales qui lèvent l’impôt décident un moratoire fiscal de plusieurs années pour conforter le pouvoir d’achat de nos concitoyens, pour nous contraindre à remettre à plat un modèle qui craque de toutes parts, pour enfin cesser de faire passer la France pour un « épouvantail fiscal » aux yeux des investisseurs internationaux. À cet égard, je rappelle que les investissements étrangers en France ont baissé de 77 % en 2013. Que nous faut-il de plus ? Le chiffre n’est-il pas suffisamment éloquent ?

Parce que la pression fiscale atteint des sommets, réduire la dépense publique suppose plus de péréquation pour plus de justice dans l’effort.

Pour ce qui concerne tant les communes et les EPCI que les départements, Mme la ministre a fait part de la volonté du Gouvernement d’accroître la péréquation horizontale, c’est-à-dire le soutien des communes riches aux communes pauvres, des départements riches aux départements pauvres.

Oui, mes chers collègues, mon propos manque sans doute quelque peu de nuances, mais l’idée est tout de même que nous soyons tous égaux devant la loi en matière de charges publiques. Dans ce domaine, le principe est le suivant : « À chacun selon ses besoins. »

En effet, lorsqu’il s’agit de mettre en œuvre, pour le compte de l’État, des politiques sociales, les départements où la population est plus âgée, plus en difficulté aussi du fait des mutations industrielles, font face à une demande de solidarité plus forte qu’en d’autres lieux, plus ensoleillés ou mieux dotés en sièges sociaux, par exemple. Ce constat vaut tout autant pour les communes et leurs groupements, d’ailleurs.

À l’heure où la situation du pays commande des choix courageux, je voudrais inviter le Gouvernement à l’audace réformatrice. §Pourquoi pas ? On peut toujours essayer…

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Sido

Plutôt que d’instiller telle ou telle légère évolution vers plus de péréquation, qu’elle soit horizontale ou verticale, interrogeons-nous sur le fondement même de l’édifice : si l’autonomie financière est essentielle aux collectivités, l’autonomie fiscale a-t-elle encore un sens ?

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Sido

Je n’ai pas peur de poser la question ! Disons-le franchement : ce qui fait la noblesse et le sens de l’action publique, c’est le service à nos concitoyens. Cela suppose d’avoir les moyens d’assumer ses responsabilités, certes, mais pas obligatoirement d’avoir le droit de lever l’impôt.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Sido

Chez nos voisins Allemands, qui ont un système fédéral, aucun des Länder – pas même la puissante Bavière ou la prospère Hesse – ne jouit d’une véritable autonomie budgétaire. Ce sont pourtant des États fédérés, qui disposent de certains attributs de souveraineté : gouvernement, pouvoir législatif, appareil judiciaire. Leurs compétences sont très vastes : police, culture, système scolaire, organisation des collectivités locales et même, en partage avec l’État fédéral, droit civil, droit fiscal, justice, gestion de la fonction publique ou encore transports.

L’exercice de ces compétences étendues s’accommode très bien d’une quasi-absence d’autonomie fiscale. Leurs recettes proviennent, pour l’essentiel, d’impôts communs partagés sur le plan fédéral.

Il existe un système de double péréquation : une péréquation horizontale entre Länder, dont l’objectif est de relever les ressources fiscales des Länder les moins riches à hauteur de 95 % de la moyenne, et une péréquation verticale, assurée par la fédération au bénéfice des Länder les plus pauvres, avec un dispositif complémentaire en faveur des territoires de l’ex-RDA.

En outre, lorsqu’un Land estime que sa contribution est excessive, un mécanisme constitutionnel lui permet de faire trancher le différend.

Personne, outre-Rhin, ne s’offusque de cette situation. Si un tel système fait l’unanimité dans un État fédéral, pourquoi serait-il si difficile de le mettre en place dans la République, certes décentralisée, mais néanmoins unitaire, qu’est désormais la France ? Si nous l’adoptions, l’effet des politiques de péréquation, c’est-à-dire de solidarité entre les territoires, serait grandement démultiplié, et l’effort d’économie demandé aux collectivités territoriales mieux accepté, car plus équitable.

J’entends déjà les critiques. Bien sûr, la France et l’Allemagne sont très différentes, très complémentaires. C’est très bien ainsi, mais l’exception française ne doit pas devenir synonyme de gaspillage, et encore moins de déclin en Europe.

À mon sens, l’État reste le garant des grands équilibres territoriaux : à lui de jouer pleinement son rôle !

Applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de André Vairetto

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, permettez-moi, tout d’abord, de remercier le groupe RDSE d’avoir pris l’initiative de ce débat sur l’évolution des péréquations communale, intercommunale et départementale après l’entrée en vigueur de la loi de finances pour 2014.

Chacun aura compris que l’objet de ce débat n’est pas de remettre en cause le principe de la péréquation, qu’elle soit verticale ou horizontale. L’égalité des territoires suppose que des accompagnements financiers soient mis en œuvre en faveur des collectivités territoriales dont les ressources sont le plus faibles, alors qu’elles ont des contraintes à assumer et que leur population doit bénéficier des mêmes services que les habitants des autres territoires. Aujourd’hui, la péréquation est une exigence constitutionnelle.

L’une des vraies questions soulevées par ce débat concerne la situation des collectivités territoriales soumises à la péréquation horizontale ; c’est sur ce sujet que je souhaite insister.

En réalité, le débat doit être élargi à l’évolution des recettes des collectivités territoriales, …

Debut de section - PermalienPhoto de André Vairetto

… dont certaines connaissent, depuis 2008, une mutation sans précédent de leurs ressources, liée à une réforme de la fiscalité directe locale sans cesse ajustée, marquée par la suppression de la taxe professionnelle, la baisse des dotations de l’État eu égard à l’objectif de retour à l’équilibre des comptes publics et la montée en puissance du FPIC dans le cadre du nouveau schéma de péréquation.

La suppression de la taxe professionnelle, en 2010, a conduit à la création, pour remplacer cette dernière, de nouvelles impositions sur les entreprises, ainsi que, dans le même temps, à une nouvelle répartition de la fiscalité entre les différents échelons de collectivités territoriales.

Le premier constat que l’on peut dresser est celui du moindre dynamisme des ressources qui remplacent la taxe professionnelle. Ainsi, selon les dernières prévisions, les produits de la CVAE devraient connaître une baisse globale de 4, 5 % cette année. En outre, ces produits présentent une grande instabilité, en fonction de la part de la valeur ajoutée dans le chiffre d’affaires des entreprises, ce qui rend la lisibilité budgétaire encore plus aléatoire.

Par ailleurs, les mécanismes de compensation destinés à assurer aux collectivités territoriales le maintien du niveau de leurs recettes après réforme, c’est-à-dire le Fonds national de garantie individuelle des ressources communales et intercommunales, le FNGIR, et la dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle, la DCRTP, portent sur des montants figés pour les années à venir.

Quant à la DGF des communes, qui représentait 16, 5 milliards d’euros en 2013, elle connaît une baisse significative.

L’enveloppe de dotation forfaitaire des communes est souvent caractérisée par un accroissement naturel de la dotation de base, liée à la population, et par une diminution des deux composantes utilisées pour assurer le financement interne de la DGF : le complément de garantie et, en tant que de besoin, la dotation correspondant à la compensation de la suppression de la part « salaires » de la taxe professionnelle. C’est ainsi que, en Savoie, la première de ces composantes a diminué de 4, 50 % l’année dernière, et la seconde de 2, 66 %.

Dans le cadre de la péréquation, l’État majore certaines dotations, comme la DSR et la DSU.

Cependant, certaines communes sont devenues inéligibles depuis la redéfinition, en 2011, des critères d’éligibilité. Cette situation résulte notamment du mode de calcul du potentiel financier communal, qui intègre une part des ressources de l’intercommunalité.

Cela a conduit l’État à mettre en place, au travers de la loi de finances pour 2012, un dispositif pour aider ces communes, assorti d’une garantie de sortie dégressive sur trois ans. J’observe que, dans le département de la Savoie, les collectivités territoriales apparaissent plus riches depuis cette redéfinition des critères d’éligibilité, alors même que leurs recettes ont fortement diminué.

Même si le nombre de communes éligibles diminue, certains considèrent que les critères d’éligibilité sont trop larges, de sorte que le nombre de communes bénéficiaires serait trop important.

Pour les communes, la contribution au redressement des finances publiques se traduit, sur le plan national, par une diminution moyenne de 4, 43 % de la dotation forfaitaire en 2013, et, pour les EPCI, par une diminution moyenne de 3, 47 % de la DGF la même année.

Le principal motif d’inquiétude réside dans la concomitance de la baisse des dotations et de la montée en puissance du FPIC pour les communes contributrices dans le cadre du nouveau schéma de péréquation. Instauré par l’article 144 de la loi de finances pour 2012, ce dispositif, qui vise à corriger les inégalités de ressources entre collectivités territoriales du bloc communal, n’est pas remis en cause, tant est unanime le constat de l’insuffisance des dispositifs de péréquation au sein de la DGF.

Conformément aux orientations du pacte de confiance et de responsabilité présenté le 16 juillet dernier par le Gouvernement, la progression du FPIC suivra les objectifs de ressources suivants : 360 millions d’euros en 2013, 570 millions d’euros en 2014, 780 millions d’euros en 2015 et, en 2016, 2 % des recettes fiscales du bloc communal, soit 1 milliard d’euros.

Le calcul se fonde sur le potentiel financier agrégé par habitant, auquel est appliqué un coefficient visant à prendre en compte le rapport entre la population d’une collectivité territoriale et la combinaison du montant des charges qu’elle supporte, pour 75 %, et du revenu par habitant de l’intercommunalité, pour 25 %.

C’est précisément cet indice synthétique de ressources et de charges qui pose problème ; il a fait l’objet de nombreux débats, notamment au sein du Comité des finances locales.

En effet, du fait de ce mode de calcul, des communes parmi les plus pauvres, dont certaines perçoivent même la dotation de solidarité rurale, se retrouvent contributrices au FPIC dès lors qu’elles font partie d’un EPCI dont le potentiel financier agrégé est important. Ce cas de figure illustre combien la diversité des critères rend la péréquation difficilement lisible. En tout cas, il convient de trouver un dispositif pour protéger les communes pauvres qui font partie d’un EPCI contributeur au titre du FPIC.

Par ailleurs, l’indice synthétique ne tient pas suffisamment compte des spécificités des territoires, alors qu’il existe de fortes disparités en termes de charges. En particulier, les collectivités des zones de montagne doivent faire face à des dépenses plus élevées, du fait de l’altitude.

À cet égard, permettez-moi, madame la ministre, de rappeler certains chiffres que j’ai déjà exposés en présentant une question orale : le coût annuel de la maintenance, de l’entretien et de l’exploitation du réseau routier est en moyenne de 10 000 euros par kilomètre en haute montagne, de 5 000 à 6 000 euros en moyenne montagne et de 3 000 à 4 000 euros en plaine ; les surcoûts liés à l’altitude sont comparables pour la construction, l’organisation des secours ou la prévention des risques naturels.

Afin de pondérer le prélèvement pour les communes de montagne, je propose d’intégrer dans le mode de calcul le critère de la charge de voirie par habitant. Du reste, la longueur de la voirie à la charge de la commune était l’un des critères initialement pris en compte pour le calcul de la dotation forfaitaire de la DGF.

Pour les territoires confrontés à une baisse de la DGF concomitante à un accroissement des prélèvements au titre de la péréquation par le biais du FPIC, les conséquences budgétaires sont particulièrement lourdes. Une mise en cohérence des divers dispositifs est nécessaire afin d’éviter que les collectivités territoriales contributrices ne se trouvent, en définitive, moins riches que la moyenne.

Il en va de même en ce qui concerne la péréquation entre les départements.

S’il est légitime que les départements les plus riches soient solidaires de ceux dont les ressources sont plus faibles, cette péréquation doit aussi tenir compte d’autres charges.

Par exemple, si le département de la Savoie va percevoir plus de 10 millions d’euros en exerçant la faculté qui lui est offerte de relever de 3, 8 % à 4, 5 % le taux des droits de mutation à titre onéreux et grâce au transfert des frais de gestion de la taxe sur les propriétés bâties, il doit reverser 8, 5 millions d’euros au titre de la péréquation, au moment où les dépenses de fonctionnement augmentent de 8 millions d’euros, malgré un effort de rigueur sans précédent, et où des investissements très importants sont nécessaires, notamment pour sécuriser des tunnels ou organiser les services de secours.

Pour les départements aussi, il importe de définir d’autres critères de charges.

Ainsi, la minoration des dotations, d’une part, et les ponctions sur leurs budgets, d’autre part, contraignent les collectivités territoriales à faire des choix. Elles devront soit diminuer leurs dépenses de fonctionnement, ce qui n’est pas simple à faire en un si bref délai, surtout dans un contexte de crise économique qui entraîne une accentuation des demandes sociales, soit réduire leurs investissements ou alourdir la fiscalité.

Madame la ministre, le tableau que je viens de brosser peut paraître apocalyptique, mais il est l’expression d’une réalité vécue au quotidien par les élus confrontés à la préparation de leur budget.

Que les collectivités territoriales doivent participer à l’effort national de redressement des comptes publics, nul ne le conteste. Personne non plus ne remet en cause le bien-fondé de la péréquation, mais encore faut-il raison garder et prendre en compte la spécificité des territoires, notamment celle des zones de montagne, où les collectivités territoriales font face à des charges spécifiques avec une population souvent peu nombreuse. Sinon, c’est le principe même de la péréquation qui, demain, sera remis en cause.

Le rythme de la montée en charge du FPIC doit ralentir et les critères doivent prendre en compte la diversité des charges supportées par les collectivités territoriales : c’est la condition de l’émergence de la péréquation juste et efficace que M. Mézard appelle de ses vœux !

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Doligé

Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, après Jacques Mézard qui a tout dit, et fort bien, je vais tenter d’apporter ma pierre à ce débat sur l’évolution de la péréquation après l’entrée en vigueur de la loi de finances pour 2014, en m’attachant uniquement à l’échelon départemental.

En général, nous naviguons dans le grand flou, dans l’improvisation, dans l’approximation, chacun établissant sa propre simulation en fonction de ses propres critères.

Qu’est-ce que cette fameuse péréquation ? Elle peut être verticale ou/et transversale.

La péréquation verticale est une répartition opérée par l’État, qui établit, selon certains critères, la manière dont il distribue ses dotations, d’ailleurs de plus en plus maigres.

La péréquation transversale s’effectue à l’échelon d’une strate de collectivités territoriales ; en général, les critères en sont également définis par l’État. Nous verrons que c’est la méthode que celui-ci vient d’utiliser pour faire croire, à grand renfort de communication, qu’il est fort généreux ; en réalité, il l’est avec les moyens des départements : il a pris aux uns pour donner aux autres !

Marques d’approbation sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Doligé

La péréquation créatrice d’équité, oui : personne ne pourrait aller contre ; la péréquation créatrice d’inégalité, reposant sur des choix partisans ou la démagogie, je dis clairement : non ! Or ce que j’ai pu constater sur le terrain ces derniers mois m’a convaincu que l’État privilégiait cette seconde forme de péréquation.

Quelle est la situation des départements après l’entrée en vigueur de la loi de finances pour 2014 ?

L’origine de cette nouvelle péréquation remonte au pacte de confiance et de responsabilité présenté le 16 juillet dernier par le Premier ministre. Contrairement aux engagements qui ont été pris, ce pacte ne reprend pratiquement aucune des propositions du groupe de travail de l’ADF sur les allocations individuelles de solidarité.

L’État devait formuler des propositions pour financer les restes à charge.

Chacun doit savoir que c’est le RSA qui pèse le plus lourdement sur les budgets sociaux des départements. Que le Gouvernement reprenne à sa charge le RSA, et il n’y aura plus de problème d’argent entre nous !

M. René-Paul Savary applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Doligé

Deux nouvelles ressources d’État sont censées remédier aux insuffisances du financement des allocations individuelles de solidarité. Or, après l’adoption de la loi de finances pour 2014, quel constat peut-on dresser ?

En premier lieu, les critères d’éligibilité au reversement du fonds de solidarité en faveur des départements créé par l’article 78 de la loi de finances n’ont rien à voir avec les restes à charge au titre des allocations individuelles de solidarité. En effet, il a été choisi de retenir comme critères le revenu par habitant, le potentiel fiscal et le taux des DMTO. Par ailleurs, le reversement de ce nouveau fonds de péréquation des DMTO est assorti d’un abattement qui dépend du niveau de ces derniers. Aucun de ces éléments n’a de rapport avec la réalité de la charge sociale que la péréquation est censée couvrir !

En second lieu, le reversement des frais de gestion de la taxe foncière sur les propriétés bâties, prévu à l’article 42 de la loi de finances et qui représente 830 millions d’euros, est le seul effort consenti par l’État, alors que celui-ci avait reconnu que le montant des compensations dues aux départements s’élevait à 4, 8 milliards d’euros. L’État a introduit un mécanisme de péréquation diluant la part du reste à charge au titre du RSA.

Après les quatre versions successives ayant fait suite à celle qui avait été présentée par l’ADF en octobre 2013 et le choc de complexification qui en résulte

M. Bruno Sido rit.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Doligé

Que s’est-il donc passé pour que l’on en arrive là ?

Le ministre, au terme d’une négociation très politique, a conclu avec M. le maire de Paris un pacte de non-agression et plafonné le prélèvement sur Paris-département. La perte qui en résulte a été compensée par d’autres.

Quel est le résultat de la péréquation issue du pacte de confiance et de responsabilité ?

Ce pacte ne répond que très partiellement à son objectif initial, à savoir compenser 4, 8 milliards d’euros aux départements.

Le 22 octobre dernier, j’ai eu le grand honneur d’être reçu, avec d’autres présidents de conseil général, par le Président de la République, entouré de treize membres du Gouvernement, dont le Premier ministre et vous-même, madame le ministre. Le chef de l’État nous a assuré qu’il comprenait d’autant mieux notre situation très difficile que, quelques mois plus tôt, il était encore l’un des nôtres, en tant que président du conseil général de la Corrèze.

En définitive, les 4, 8 milliards d’euros attendus sont devenus 2, 3 milliards, dont il faut retrancher 476 millions d’euros au titre de la participation des départements à l’effort national de redressement des finances publiques.

L’apport réel de l’État s’est résumé à 830 millions d’euros, pris sur ses frais de gestion. Le solde, soit environ 1, 3 milliard d’euros, résultait d’une autorisation « quasi forcée » donnée aux départements d’augmenter leurs DMTO de 18, 4 %, sur lesquels 50 % sont prélevés d’office, que le relèvement des DMTO soit décidé ou non, pour être reversés à un fonds de péréquation.

Dans mon département, par exemple, si je procède à cette augmentation, la recette sera de 6, 3 millions d’euros. Mais, quoi que je décide, 5 millions d’euros seront prélevés ! Le relèvement du taux des DMTO et la loi ALUR, c’est la mort de l’immobilier !

Quelle habileté ! À l’analyse, il apparaît que toutes ces manipulations ne sont qu’un stratagème maladroit pour masquer un plan de sauvetage de départements plutôt amis…

Je vais en apporter la preuve au travers de deux exemples.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Doligé

Le premier élément de preuve sera fourni par le cas du département du Loiret, qui représente 1 % de la population française et aurait dû recevoir, par simple calcul mathématique – incongru certainement – et hors péréquation, 23 millions d’euros.

La première version du pacte indiquait qu’il recevrait 19, 9 millions d’euros, censés compenser ses 58 millions d’euros de reste à charge. Le compte n’y était pas, mais c’était acceptable.

En définitive, selon les derniers chiffres disponibles, nous recevrons 8 millions d’euros, montant qui couvre seulement 14 % du reste à charge. Si l’on ajoute la baisse de la DGF, nous arrivons à 5 % du reste à charge.

Second élément de preuve de cette manipulation financière et de cette iniquité, si l’on ajoute aux recettes provenant des mécanismes de reversement du pacte le fonds d’urgence pour 2013, on s’aperçoit que les quarante et un départements gérés par l’opposition nationale ne perçoivent que 418 millions d’euros, soit 28 % du total, alors qu’ils représentent 40 % des départements, tandis que les soixante départements gérés par la majorité reçoivent 1 milliard d’euros, soit 72 % du total, avec des taux de couverture du reste à charge plus confortables.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Doligé

Peut-être sommes-nous moins bien armés en termes de lobbying et moins aimés du père Noël ?

Je relève au hasard que la couverture du reste à charge atteint 81 % pour la Corrèze, 65 % pour le Gers, 14 % pour le Loiret, 64 % pour le Lot, 14 % pour la Marne… Bravo pour le lobbying ! On voit bien où est allée la ressource !

Que faire si l’on veut instaurer un minimum d’équité ?

Je ne suis pas opposé à toute forme de solidarité entre départements, mais la péréquation ne doit pas être utilisée pour pallier la baisse des dotations de l’État ou pour soutenir ceux qui n’ont pas fait les efforts de gestion nécessaires.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Doligé

La péréquation doit être un outil de justice et de solidarité : nous en sommes très loin après l’entrée en vigueur de cette loi de finances.

Depuis un mois, je découvre jour après jour les dotations qui nous sont annoncées par l’État. Pour information, ce ne sont pas moins de 30 millions d’euros qui ont disparu pour mon département, soit 10 % de mon budget hors prestations sociales à verser.

La semaine prochaine, lors de l’examen de la proposition de loi de Jean Arthuis sur les mineurs isolés étrangers, je vous expliquerai comment le ministère de la justice ne respecte pas la péréquation en matière de répartition de ces jeunes étrangers. C’est édifiant !

Il ne suffit pas d’invoquer la péréquation ; encore faut-il utiliser ce mode de répartition avec équité et honnêteté. §

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Miquel

Pourquoi ne l’avez-vous pas fait quand vous étiez au pouvoir ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Vial

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je ne peux que souscrire aux présentations des grands principes qui ont été faites par les précédents orateurs.

Mon collègue de Savoie ayant évoqué la péréquation horizontale, j’exposerai la péréquation verticale pour ce même département.

Le débat de ce jour intervient fort opportunément après l’adoption, le 27 janvier 2014, de la loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles.

Au travers de la loi de finances pour 2014, le Gouvernement a décidé, pour faire participer les collectivités à l’effort de solidarité nationale, une très forte réduction de ses dotations à celles-ci, à hauteur de 1, 5 milliard d’euros. Je me souviens à cet égard, madame la ministre, de vos explications sur la diminution « soclée », qui nous avait fort intéressés.

Avec une nouvelle baisse programmée du même montant en 2015, les budgets des collectivités subiront donc, en cumulé, une réduction de 4, 5 milliards d’euros en deux ans.

Il reste à souhaiter que cet effort soit stabilisé. En effet, la presse spécialisée a fait récemment état d’un doublement possible de la réfaction prévue pour 2015, ce qui la porterait à 3 milliards d’euros. Cela étant, je ne doute pas que vous nous donnerez des assurances sur ce point, madame la ministre.

Si la nécessité de cette contribution à l’effort de solidarité national ne saurait être contestée, vous reconnaîtrez que nous sommes loin de la promesse du candidat à l’élection présidentielle François Hollande de maintenir, pour la durée du quinquennat, le montant des dotations à leur niveau de 2012.

Pour la Savoie, l’indice synthétique utilisé pour le calcul de la réfaction combine le revenu moyen, à concurrence de 70 %, et le taux moyen de la taxe foncière sur les propriétés bâties et le taux départemental, à concurrence de 30 %. Ainsi, le montant de la réfaction a été estimé à 4, 23 millions d’euros pour 2014, soit 8, 5 % de la dotation forfaitaire, et il devrait a minima doubler en 2015.

Un tel mode de calcul conduit à privilégier les départements dont l’effort fiscal est élevé, par rapport à ceux qui ont limité le recours à la pression fiscale pour financer leurs dépenses. En un mot, on pénalise les collectivités dont la gestion a été rigoureuse.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Vial

Certes, la répartition péréquée de la ressource nouvelle issue du transfert aux départements des frais de gestion permettra à la Savoie de percevoir 5, 1 millions d’euros. Cette nouvelle recette aurait dû compenser l’insuffisante compensation par l’État de la progression des dépenses sociales, mais elle se trouvera donc largement annihilée par la réfaction opérée sur la DGF.

Ainsi, en ajoutant la contribution du département, à hauteur de 3, 5 millions d’euros, au fonds de péréquation mis en place en 2011, le solde net des péréquations s’élève, pour le département, à 3, 88 millions d’euros, tandis que sa contribution à l’effort de solidarité atteint 9, 22 millions d’euros.

Je me bornerai à évoquer deux des nombreuses interrogations que suscite cette situation.

En premier lieu, favoriser les départements qui recourent massivement à la pression fiscale est une stratégie peu vertueuse. Mérite-t-elle d’être poursuivie ? Je ne le pense pas.

En second lieu, est-il opportun de concentrer la ressource sur des droits de mutation dont la volatilité et la fragilité doivent inciter à la prudence ?

Ce débat intervient alors que le Gouvernement vient d’annoncer son intention de regrouper les deux derniers volets de la réforme, ce qui devrait permettre d’adopter une approche globale qui, avouons-le, aura grandement fait défaut lors de l’examen des premiers textes. Or la clarification des compétences ne peut être dissociée de l’évolution des péréquations, objet du présent débat.

Qu’en sera-t-il demain, par exemple, en matière de politique sociale ? Pour un département comme la Savoie, le coût du transfert des établissements et services d’aide par le travail, les ESAT, s’élèverait à 10 millions d’euros.

Doit-on oublier la réforme des rythmes scolaires, dont le coût pour les collectivités est estimé aujourd’hui entre 100 et 500 euros par élève et par an, et ne sera plus compensé à compter du prochain exercice ?

Dans un tout autre domaine, prenant la parole après Éric Doligé, auteur d’un excellent rapport sur les normes et leur coût, je mettrai l’accent sur le dossier crucial et d’actualité de l’accessibilité des bâtiments publics et des transports aux handicapés. L’échéance est fixée à 2015, dans l’attente des mesures que le Gouvernement doit présenter lors des prochains mois.

L’Assemblée des départements de France, qui a réalisé un travail particulièrement important et minutieux, estime le coût de la mise aux normes des bâtiments publics et des transports à 20 milliards d’euros pour les seules collectivités départementales.

La loi de finances pour 2014 vise aussi à renforcer la péréquation horizontale, notamment par le biais du relèvement de 360 millions à 570 millions d’euros des moyens du Fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales mis en place par le gouvernement Fillon au travers de la loi de finances pour 2012.

Néanmoins, concernant la péréquation verticale, nous regrettons que l’effort consenti diminue par rapport à l’an passé, passant de 238 millions d’euros à 119 millions d’euros en 2014.

N’oublions pas que les collectivités locales, qui votent des budgets en équilibre, assurent près des trois quarts des investissements publics : la forte baisse de leurs capacités d’investissement risque d’entraîner des effets récessifs sur l’économie de notre pays.

Enfin, j’évoquerai le redécoupage des cantons. Les actuels chefs-lieux, qui disposent de subventions spécifiques, de même que les communes représentant au moins 15 % de la population du canton, s’interrogent sur la pérennité de leurs services et de leurs dotations. Nous serons très attentifs aux réponses que vous nous apporterez, madame la ministre, notamment sur le maintien de la DSR au-delà de 2014. §

Debut de section - PermalienPhoto de Anne-Marie Escoffier

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je me réjouis de ce débat, dont je savais qu’il serait fourni, critique, voire parfois caricatural, et non dénué d’humour… Je tiens à remercier de leurs interventions chacun des orateurs. Nombre des constats qui ont été dressés sont exacts ; d’autres auraient pu être formulés avec davantage de mesure.

De nombreux points mériteraient d’être développés. Vous avez évoqué la loi du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, que les débats de la Haute Assemblée ont contribué à améliorer grandement, la réforme des rythmes scolaires, le handicap, les normes, le devenir des départements, territoires de solidarité, le redécoupage des cantons, autant de réformes qui ont et auront une incidence sur les finances de nos collectivités territoriales.

À mon grand regret, je ne pourrai aborder tous ces points dans le détail. Vous ne serez pas étonnés que je défende ici avec détermination et conviction l’action du Gouvernement, qui ne s’est comporté ni en père Noël ni en père Fouettard. Il a travaillé avec une volonté sans faille de renforcer la justice et l’équité, afin d’instaurer pour tous nos territoires un équilibre qui, jusqu’à présent, n’a pas été tout à fait respecté ni atteint.

Je le dis très clairement, nous n’avons pas trouvé toutes les solutions opérantes, mais, j’y insiste, nous avons travaillé, les uns et les autres, dans un esprit de justice en vue de parfaire un dispositif qui mérite encore, j’en suis convaincue, d’être aménagé.

De grâce, ne parlons pas ici de perversité ou de manipulation ! Ces mots ne sont pas acceptables, et ils ne l’étaient pas davantage hier, d’ailleurs : chacun a essayé, je le crois, d’apporter en conscience une réponse, en accord avec la philosophie politique guidant son action.

Je tiens à dire aussi avec beaucoup de force que le devoir de transparence et la méthode de dialogue que nous nous sommes imposés ont été reconnus par tous. Certains ont dit qu’ils n’avaient pas pu disposer d’une simulation. Je m’élève vigoureusement contre de telles affirmations !

Les simulations ont été fournies aux membres des commissions des finances de l’Assemblée nationale et du Sénat, qui peuvent naturellement les communiquer librement à leurs collègues. Ne pas appartenir à la commission des finances n’empêche pas d’accéder à ce type d’informations. En tout cas, je puis vous assurer que Mme Lebranchu et moi-même nous sommes attachées à communiquer, systématiquement et en toute transparence, les informations qui nous ont été demandées par les membres du Comité des finances locales, les parlementaires, les rapporteurs des commissions des finances de l’Assemblée nationale ou du Sénat. Pardonnez-moi de le dire avec un peu de véhémence, mais je crois à ce que j’ai fait, à ce que nous avons fait ensemble.

Je remercie M. Mézard d’avoir exposé précisément, avec son humour habituel, les difficultés de cette péréquation que chacun appelle de ses vœux, tout en la critiquant dès lors qu’elle lui profite moins qu’à d’autres.

M. Bocquet a dit sa passion de l’égalité. Nous la partageons, mais nous préférons peut-être l’équité. Il s’agit de faire en sorte que, sur l’ensemble de nos territoires, chacun puisse bénéficier des moyens qui doivent lui revenir en fonction de ce qu’il est et de ce qu’il fait.

Je remercie M. Botrel de sa vision prospective. Plutôt que de dresser un bilan ou un constat, il a préféré ouvrir des pistes.

Comme je m’y attendais, M. Collombat a insisté sur la ruralité et sur l’opposition entre territoires ruraux et territoires urbains.

M. Placé a mis l’accent sur l’environnement. Je rappelle que les commissions départementales d’assistance aux entreprises ont été créées pour aider le monde industriel. Les problématiques environnementales seront prises en compte.

Je remercie M. Guené de son analyse experte, fondée sur une vision impartiale et prospective des voies que nous pourrions explorer. C’est en recherchant ensemble les meilleures solutions, guidés par un même objectif, que nous pourrons avancer.

M. Jarlier a appelé notre attention, dans un esprit positif, sur les interrogations qui demeurent, concernant notamment les bourgs-centres ; j’y reviendrai tout à l’heure.

Je remercie M. Miquel d’avoir tracé la voie dans laquelle nous devrons nous engager demain, sachant que le Gouvernement n’est, je le répète, ni le père Noël ni le père Fouettard.

Je ne peux qu’être d’accord avec vous, monsieur Sido, sur la recherche d’une plus grande efficience et de davantage d’équité. Vous nous avez appelés à faire preuve d’audace réformatrice : je souhaite que nous puissions travailler ensemble, pour parvenir à construire un système de péréquation harmonieux, semblable peut-être à celui qui existe aujourd’hui chez certains de nos voisins européens.

M. Vairetto a évoqué la situation particulière des zones de montagne, problématique que nous avions déjà abordée à l’occasion d’une question orale. La vraie difficulté est de bien prendre en compte la diversité de nos territoires, car, outre la montagne, il y a aussi le littoral, les villes thermales, etc. Trouver une règle qui s’applique à tous les territoires constitue une difficulté majeure, mais nous sommes très attentifs aux spécificités des différents territoires.

Monsieur Doligé, c’est avec une certaine tristesse que j’ai écouté votre intervention, marquée par une vaine exagération. Encore une fois, je suis tout à fait prête à examiner avec vous les chiffres, pour tenter de vous prouver que, contrairement à ce que vous prétendez, votre département ne perd pas 30 millions d’euros.

Je vous remercie, monsieur Vial, d’avoir reconnu avec beaucoup d’honnêteté que j’avais évoqué une diminution « soclée » des dotations. Contrairement à ce que l’on peut parfois lire dans la presse, je puis vous assurer que, à l’heure où je vous parle, aucun arbitrage n’est encore intervenu pour fixer à 3 milliards d’euros l’effort supplémentaire demandé aux collectivités territoriales l’an prochain. Je le dis très clairement.

Je voudrais maintenant revenir de façon plus complète sur ce que le Gouvernement a voulu faire au travers de la loi de finances pour 2014, qui a fait l’objet d’un large débat, tant au Parlement qu’au Comité des finances locales ou à l’Assemblée des départements de France, notamment. Vous avez tous cité le pacte de confiance et de responsabilité. Monsieur Collombat, la date du 16 juillet 2013 est importante.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

C’est un pacte avec qui ? Un pacte entre l’État et l’État ?

Debut de section - Permalien
Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée

Ce pacte, que nous respectons à la lettre, rassemble l’ensemble des collectivités territoriales.

Debut de section - Permalien
Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée

La loi de finances pour 2014 a nettement accentué l’effort, engagé en 2013, de renforcement de tous les dispositifs de péréquation. Personne aujourd’hui ne conteste l’absolue nécessité de ceux-ci, tant il est vrai que nous devons mettre en œuvre une solidarité effective entre les territoires.

Ce renforcement de la péréquation s’est essentiellement traduit, au sein du bloc communal, par la montée en puissance du FPIC et l’accroissement des dotations de péréquation au sein de la DGF. Pour les départements, il repose sur le fonds de compensation péréquée et sur le dispositif de solidarité alimenté par un prélèvement sur les DMTO.

Nous avons réussi là ensemble un exercice d’autant plus difficile que la dotation globale était réduite. Quand il y a moins à répartir, les choses sont plus compliquées. Malgré cela, nous sommes parvenus à tenir nos engagements, s’agissant notamment des péréquations intercommunale et communale, par le biais de la péréquation horizontale du FPIC.

Comme le Gouvernement s’y était engagé, nous sommes passés de 360 millions d’euros en 2013 à 570 millions d’euros en 2014, soit une hausse de plus de 58 %. En deux ans, le montant a tout de même quadruplé : on ne le dit pas assez. Chacun sait ici que cette péréquation horizontale a un effet beaucoup plus important que la péréquation verticale. Le FPIC permet véritablement de soutenir les intercommunalités et les communes de petite taille.

Par ailleurs, il ne faut pas s’y tromper, les villes et les agglomérations urbaines ne sont pas favorisées par rapport aux zones rurales. Il faut arrêter d’opposer le rural à l’urbain ! Je puis en témoigner, certaines zones urbaines souffrent elles aussi d’une véritable paupérisation.

Debut de section - Permalien
Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée

Aujourd’hui, il faut essayer de définir des critères aussi objectifs que possible, permettant de traiter sur un pied d’égalité le rural et l’urbain.

Debut de section - Permalien
Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée

J’insiste sur le fait que les communes urbaines défavorisées bénéficient tout autant que les autres du FPIC. Ainsi, d’après nos estimations, en 2014, la communauté d’agglomération Val de France devrait bénéficier de 2, 8 millions d’euros, la communauté d’agglomération Plaine Commune de 4, 9 millions d'euros, Marseille de 19, 2 millions d'euros, la communauté urbaine de Lille de 20, 9 millions d'euros. J’ai cité à dessein ces territoires urbains, dont personne ne peut nier qu’ils connaissent d’importantes difficultés sociales.

La loi de finances pour 2014 a ajusté, avec l’accord du Comité des finances locales, que nous avons toujours consulté, les critères du FPIC, afin de rendre le dispositif plus efficace : la prise en compte du critère du revenu par habitant dans le calcul du prélèvement a été renforcée, son poids passant de 20 % à 25 %, et les plafonds de prélèvement ont été relevés, pour faire davantage contribuer les territoires les plus aisés à la progression du FPIC. Peut-être nous faudra-t-il revenir sur la définition de ces critères, monsieur Guené. Nous y travaillerons ensemble.

Enfin, le Fonds de solidarité des communes de la région d’Île-de-France voit également son montant progresser, de 230 millions d’euros en 2013 à 250 millions d’euros en 2014.

Je ne reviens pas sur la péréquation verticale au sein de la dotation globale de fonctionnement. Je l’ai dit, ces dotations sont moins opérantes que la péréquation horizontale. Elles ont progressé conformément aux engagements qui avaient été pris : de 60 millions d’euros pour la DSU, de 39 millions d’euros pour la DSR, de 10 millions d’euros pour la dotation nationale de péréquation.

Les dotations de péréquation verticale versées aux départements progresseront également en 2014, à hauteur de 10 millions d’euros, au titre de la dotation de péréquation urbaine et de la dotation de fonctionnement minimale.

J’en viens aux départements.

Je ne rappellerai pas le travail long, difficile et fastidieux qui a été accompli pour répondre dans la plus grande impartialité aux besoins. Je ne rappellerai pas les conditions dans lesquelles un fonds spécial a été créé – d’aucuns l’ont appelé le « fonds Fillon » –, ni le fait que la Corrèze a bénéficié à l’époque de la dotation la plus forte, avec 14 millions d’euros. Je ferai juste observer que, au titre de la deuxième part de subventions du fonds exceptionnel, la Corrèze a touché 13 millions d’euros, car c’est le département français le plus endetté.

Exclamations ironiques sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Henri de Raincourt

Faut-il en déduire qu’il a été mal géré ?

Debut de section - Permalien
Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée

Je ne porte pas de jugement sur la situation financière de ce département et je ne cherche pas à connaître la période à laquelle il s’est endetté. Je livre simplement une information impartiale.

Debut de section - Permalien
Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée

Sur le plan départemental, les outils de péréquation horizontale existants ont été préservés, à savoir le fonds de péréquation des droits de mutation à titre onéreux et le fonds de péréquation de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, créé par le Gouvernement en 2013.

Reste que, tout le monde l’a souligné, le fonds de péréquation des DMTO est confronté à un problème de volatilité de ses ressources. Nous savons très bien que, l’année prochaine, celles-ci ne seront pas aussi importantes qu’en 2012 et en 2013. Nous espérons toutefois un retour à meilleure fortune.

Debut de section - Permalien
Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée

Le fonds de péréquation des DMTO a permis de répartir 459 millions d’euros en 2012 et 339 millions d’euros en 2013. En 2014, il devrait, si l’on ajoute la libération des 60 millions d’euros restant à ce jour en réserve, atteindre la somme de 255 millions d’euros.

Quant au fonds de péréquation de la CVAE, nous nous interrogeons tous. Nombre de départements s’aperçoivent en effet, non sans quelque inquiétude, que son montant sera inférieur aux prévisions. On peut aujourd’hui estimer que 56 millions d’euros environ seront à répartir en 2014, contre 59 millions d’euros l’année précédente.

La loi de finances pour 2014 a largement renforcé la péréquation entre les départements, au moyen de deux dispositifs qui ont déjà été cités, à savoir un fonds dit de « compensation péréquée », crédité de 827 millions d’euros en 2014, et un dispositif de solidarité alimenté par un prélèvement de 0, 35 % sur l’assiette des DMTO, qui affichera un solde de 570 millions d’euros.

J’ajoute, pour répondre à certaines observations, que les départements ne sont nullement obligés de porter le taux des DMTO de 3, 8 % à 4, 5 %. C’est une possibilité que leur offre la loi. Chacun prendra la décision qu’il juge la plus opportune pour son budget.

Debut de section - Permalien
Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée

Monsieur Guené, je vous remercie d’avoir explicité le volet technique du fonds de compensation péréquée. Ce fonds de 827 millions d’euros, qui favorise fortement la péréquation départementale, est réparti en deux enveloppes : 70 % de l’encours est attribué en fonction du reste à charge de chaque département au titre des allocations individuelles de solidarité ; les 30 % restant sont attribués en fonction d’un indice synthétique de ressources et de charges. En outre, l’ensemble de l’attribution ainsi calculée a été pondéré en fonction du revenu moyen par habitant de chaque département, ce qui répond au demeurant à une demande récurrente.

Par parenthèses, je constate que tout le monde ne parle pas des mêmes charges. Pour M. Doligé, le RSA est l’allocation qui pèse le plus sur le budget des départements. Je peux lui dire en toute connaissance de cause que ce n’est pas le cas partout. Dans l’Aveyron, c’est l’APA qui représente la part la plus importante. Dans ce domaine comme dans d’autres, veillons à ne pas formuler de jugement à l’emporte-pièce et examinons les situations au cas par cas.

Le dispositif de solidarité alimenté par un prélèvement de 0, 35 % sur l’assiette des DMTO a été conçu pour renforcer l’aide aux départements les plus en difficulté et pour contribuer à réduire leur reste à charge au titre des trois allocations individuelles de solidarité. Nous avons, me semble-t-il, suffisamment explicité les conditions dans lesquelles ce mécanisme a été instauré ; je n’insisterai donc pas.

Avant d’en venir à des propos plus prospectifs, je voudrais toutefois rappeler que le Conseil constitutionnel a estimé que les critères de redistribution retenus par le Gouvernement étaient objectifs et rationnels au regard de l’objectif du dispositif. Le Conseil considère que « le législateur a entendu que cette répartition s’opère non seulement en fonction des inégalités affectant le potentiel fiscal par habitant ainsi que le montant et la croissance des recettes des droits de mutation à titre onéreux, mais également en tenant compte des “restes à charge par habitant” de chaque département au titre des allocations individuelles de solidarité ; qu’il a poursuivi l’objectif de réduction des écarts entre départements en ce qui concerne ce “reste à charge par habitant” ; que les critères de détermination des départements bénéficiaires comme les critères de redistribution retenus sont objectifs et rationnels ; qu’ils sont en lien direct avec l’objectif poursuivi par le législateur de redistribuer une part des recettes provenant de la part départementale des droits de mutation à titre onéreux ; qu’il n’en résulte pas de rupture caractérisée de l’égalité des départements devant les charges publiques ».

Voilà, mesdames, messieurs les sénateurs, les quelques points techniques que je voulais vous livrer en réponse aux observations que vous avez formulées.

Je me suis efforcée d’illustrer quelques facettes du travail gouvernemental, qui n’est pas achevé. J’en ai d’ailleurs pleinement conscience, de même que Mme Lebranchu, ma ministre de tutelle, et l’ensemble des membres du Gouvernement. Nous savons pertinemment que nous devrons encore œuvrer non seulement dans le cadre du projet de loi de finances pour 2015, mais aussi dans le cadre des travaux que nous avons engagés, comme M. Botrel l’a souligné.

Cette remarque vaut d’abord pour la révision de la dotation globale de fonctionnement, qui me semble essentielle. Vous êtes du reste nombreux à avoir formulé des suggestions à propos de cette révision. Que vous soyez ou non membres de la commission des finances, je ne peux que vous inciter à continuer à faire entendre votre voix. Je crois même pouvoir dire que tous ceux qui sont venus nous livrer leur avis ont constamment bénéficié d’une écoute attentive. Je mets quiconque au défi de dire le contraire !

La révision de la DGF, que nous avons commencé à engager, est l’une de nos priorités. La révision des bases locatives en constitue incontestablement un élément essentiel, …

Debut de section - Permalien
Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée

… afin de favoriser un meilleur équilibre et plus de justice entre les collectivités.

Nous devrons également réfléchir ensemble sur le coefficient logarithmique, qu’il faudra assurément aménager.

Debut de section - Permalien
Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée

Nous sommes en outre prêts à travailler sur la CVAE-environnement ainsi que sur la péréquation entre les intercommunalités et entre les communes au sein des intercommunalités.

Sachez que nous agirons en toute transparence, en vous communiquant autant de simulations que vous le souhaiterez, sur la base de critères clairs et lisibles, dans le cadre d’un travail partagé.

Pour conclure, je voudrais une nouvelle fois vous rassurer : « Concernant les conséquences de la révision de la carte cantonale, je me suis engagé à ce qu’elle n’ait aucune incidence sur tous les éléments liés à la qualité de chef-lieu de canton, qu’il s’agisse de la fraction bourg-centre de la dotation de solidarité rurale ou du régime indemnitaire des élus. À compter de 2015, cette part de DSR sera ainsi garantie pour les communes qui la percevaient auparavant. »

Debut de section - Permalien
Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée

Ces propos, que je vous rapporte avec la plus grande fidélité et la plus grande loyauté, sont ceux que le Premier ministre a prononcés devant le Congrès des maires, qu’il a eu l’occasion d’écrire à certains élus et que des membres du Gouvernement ont rappelés lors de réponses à des questions orales. Je ne saurais mieux dire.

Mesdames, messieurs les sénateurs, je vous remercie de vos interventions et de votre écoute. Soyez assurés une nouvelle fois que, chaque fois que vous le souhaiterez, le ministère auquel j’ai la fierté d’appartenir sera là pour vous écouter et vous entendre.

Applaudissements.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Courtois

Nous en avons terminé avec le débat sur l’évolution des péréquations communale, intercommunale et départementale après l’entrée en vigueur de la loi de finances pour 2014.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Courtois

J’informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à la consommation est parvenue à l’adoption d’un texte commun.

Mes chers collègues, l'ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à douze heures quarante-cinq, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Jean-Pierre Bel.