Séance en hémicycle du 13 juin 2013 à 15h00

Résumé de la séance

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La séance

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La séance, suspendue à douze heures quarante-cinq, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Charles Guené.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

L’ordre du jour appelle les questions cribles thématiques sur l’avenir des retraites.

L’auteur de la question et le ministre, pour sa réponse, disposent chacun de deux minutes. Une réplique d’une durée d’une minute au maximum peut être présentée soit par l’auteur de la question, soit par l’un des membres de son groupe politique.

Ce débat est retransmis en direct sur la chaîne Public Sénat et sur France 3, et il importe que chacun des orateurs respecte son temps de parole.

La parole est à M. Dominique Watrin.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Watrin

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le rapport Moreau n’a pas été rendu public que ses principales propositions ont déjà « fuité » dans la presse… Comme s’il s’agissait de préparer l’opinion publique aux solutions les plus dures, pour faire adopter, finalement, des mesures en apparence moins rudes, mais en réalité tout aussi injustes.

Madame la ministre, l’allongement de l’espérance de vie que vous mettez en avant est la conséquence des conquêtes sociales et syndicales qui ont permis aux salariés de faire respecter leurs droits et d’en gagner de nouveaux. Pourtant, malgré une législation sociale protectrice, le nombre des victimes d’accidents du travail et de maladies professionnelles ne cesse de croître. L’espérance de vie d’un ouvrier demeure largement inférieure à celle d’un cadre. Quant à l’espérance de vie en bonne santé, elle tend à se réduire, en raison de la dégradation des conditions de travail liée au stress, ou encore aux cadences.

La précédente réforme des retraites a créé des inégalités insoutenables. Elle entraîne, avec les décotes, une baisse du niveau des pensions pour les salariés les plus âgés et les plus usés physiquement, dont nombre d’entreprises se séparent sans scrupule. Elle prolonge l’activité d’autres salariés, ce qui freine considérablement l’entrée des jeunes dans la vie professionnelle.

Si la situation des comptes sociaux exige réellement une réforme du financement des retraites, cette réforme ne peut se faire contre les salariés, car ces derniers ne sont pas le problème : ils sont la solution !

Madame la ministre, la réforme des retraites exige des mesures justes et solidaires, à l’opposé de celles proposées par l’UMP et le MEDEF. Vous semblez ne pas vouloir vous écarter des choix des gouvernements précédents, choix que vous rejetiez pourtant hier. Or ils sont lourds de conséquences pour le monde du travail.

Ne croyez-vous pas qu’il est temps que le capital et l’argent de la spéculation, qui, aujourd’hui, détruisent plus d’emplois qu’ils n’en créent soient enfin mis à contribution pour une réforme des retraites juste et viable, prenant l’argent là où il est et garantissant le droit à la retraite à 60 ans sans décote ni nouvel allongement de la durée de cotisation ?

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine

Monsieur Watrin, nous avons engagé la discussion sur l’avenir de nos régimes de retraite avec les organisations syndicales et patronales il y a un an, à l’occasion de la première grande conférence sociale, qui s’est tenue au mois de juillet 2012.

Lors de cette rencontre, un consensus s’est dégagé pour considérer qu’une réforme de notre système de retraite était nécessaire, ce qui supposait la définition d’une méthode et d’un calendrier.

En effet, j’ai la volonté explicite, comme l’ensemble du gouvernement de Jean-Marc Ayrault, de rompre clairement avec la démarche engagée par le précédent gouvernement, qui a fait du passage en force sa marque de fabrique et du relèvement de l’âge légal le seul enjeu de sa réforme. Le résultat est connu : inefficacité sur le plan financier et injustice sur le plan social.

Parce que nous sommes résolus à engager une réforme à la fois financièrement responsable et socialement juste, nous entamons maintenant des discussions. Je vous rappelle cependant que, dès notre arrivée aux responsabilités, nous avons pris un décret afin de permettre à celles et ceux qui ont commencé à travailler jeunes de partir à la retraite dès l’âge de 60 ans, sans attendre d’avoir atteint l’âge de 62 ans.

Après le diagnostic réalisé par le Conseil d’orientation des retraites, la commission présidée par Mme Yannick Moreau présentera des pistes de travail, à partir desquelles le Gouvernement engagera une concertation longue et approfondie avec l’ensemble des partenaires sociaux.

Monsieur le sénateur, nous n’avons pas la volonté de précipiter les décisions, car nous tenons à élaborer, à partir d’orientations sérieuses et crédibles, une réforme qui rassure les jeunes générations sur l’avenir du système de retraite.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

La parole est à M. Dominique Watrin, pour la réplique.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Watrin

Comme vous, madame la ministre, nous souhaitons naturellement que cette réforme soit construite de manière juste et solidaire. C’est possible, car des pistes alternatives à celles du rapport Moreau existent, si on a vraiment le courage de s’attaquer à la question de la répartition des richesses.

Par exemple, entre 1985 et 2007, la rémunération des actionnaires est passée de 3, 2 % à 8, 5 % du PIB, ce qui représente près de 100 milliards d’euros versés annuellement aux actionnaires. Dans le même temps, la part des salaires dans la valeur ajoutée n’a cessé de diminuer. En taxant le capital au même niveau que le travail, il est possible de dégager annuellement 20 milliards d’euros de recettes, rien que pour le financement des retraites.

Ce sont ces propositions que, fidèle aux positions qu’il a toujours soutenues, le groupe CRC défendra.

Je regrette, madame la ministre, que ces pistes économiquement viables et socialement justes ne soient pas plus sérieusement explorées par le Gouvernement.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

« Quand on vit plus longtemps, on peut travailler plus longtemps » : cette petite musique, qu’on entend de plus en plus régulièrement, s’installe dans les discours Cependant, pour qu’une telle solution soit seulement envisageable, encore faudrait-il qu’il y ait du travail !

Or « la France se distingue par un “ décrochage ” particulièrement marqué de la participation au marché du travail à partir de 55 ans ». Cette phrase est extraite d’un rapport de l’INSEE intitulé Emploi et salaires 2013, paru le 6 mars dernier. Avec un taux d’emploi de 39 % chez les seniors, la France se place derrière l’Espagne, le Portugal et même la Grèce.

Une première question se pose alors : les seniors peuvent-ils travailler plus longtemps alors que leur taux de chômage s’élève à 60 % ?

Chez les jeunes, le taux de chômage dépasse, quant à lui, 25 %. Pour quelles raisons les seniors trouveraient-ils un emploi plus facilement que les jeunes ? S’il n’y a pas assez de travail, faisons travailler en priorité les jeunes !

Allonger la durée de cotisation sans résoudre ce problème aura pour seul effet de réduire les pensions de retraite de gens qui n’arriveront pas à cotiser pendant suffisamment d’années pour financer leur retraite.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

L’augmentation de la durée de cotisation contribuera donc, dans l’état actuel du marché du travail, à faire baisser les cotisations de ceux qui n’ont plus d’emploi après 55 ans et à repousser le versement des allocations à ceux qui ont un emploi, permettant de réaliser une économie. Mais les jeunes auront-ils pour autant du travail ?

Madame la ministre, avec l’augmentation de la durée de cotisation, n’est-ce pas sur le marché du travail des jeunes que risque de se poser un problème ? En effet, si l’on demande aux salariés de continuer à travailler plus longtemps, on ne va pas réduire le chômage des jeunes !

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine

Monsieur le sénateur, l’espérance de vie est un élément que nous ne pouvons pas méconnaître. Comme l’a indiqué précédemment M. Watrin, nous ne devons pas négliger le fait que cette espérance de vie n’est pas la même selon les catégories socioprofessionnelles. À 35 ans, l’espérance de vie d’un ouvrier est inférieure de cinq à six ans à celle d’un cadre du même âge. Et au regard de l’espérance de vie en bonne santé, l’écart est encore plus important.

Nous devons donc veiller à ce que les conditions de travail, la pénibilité ou l’âge d’entrée dans la vie professionnelle soient pris en compte dans la manière dont nous concevons nos régimes de retraite.

Il reste que, dans l’ensemble de la population, nous vivons plus longtemps et que la question du temps de vie consacré au travail est posée. Dès lors que l’on vit plus longtemps, il paraît juste de travailler plus longtemps. Mais encore faut-il, comme vous l’avez dit, monsieur Desessard, que le travail soit possible : nous ne pouvons pas nous contenter d’un transfert de la charge financière vers l’UNEDIC et les allocations de chômage.

Permettez-moi de vous faire observer que le taux d’emploi des plus de 55 ans a augmenté significativement au cours des dernières années. Par ailleurs, il va de soi qu’une réforme des retraites doit être accompagnée de mesures fortes en faveur de l’emploi, plus particulièrement de l’emploi des seniors. Le Gouvernement a d’ores et déjà commencé à y travailler, indépendamment de la question des retraites, en mettant en place les contrats de génération, qui ont précisément pour objet de maintenir des seniors dans l’emploi.

Nous devons également nous inspirer des mesures prises dans les pays d’Europe du Nord pour renforcer le taux d’emploi des seniors. À l’évidence, la réforme des retraites et la politique de l’emploi sont indissociablement liées.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

La parole est à M. Jean Desessard, pour la réplique.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Je ne peux qu’approuver la conclusion de Mme la ministre : l’emploi et les retraites sont très liés puisque les cotisations de retraite sont assises sur les salaires. Si tout le monde a un emploi, il y a évidemment plus de cotisations !

Pour revenir sur la question de l’allongement de la durée de cotisation, madame la ministre, j’émets de vives réserves si cette mesure s’applique à tout le monde ! Vous avez d’ailleurs vous-même bien décrit le problème.

La concurrence effrénée entre les pays et l’application des recettes issues de la mondialisation n’aboutissent bien souvent qu’à une seule chose : la casse des acquis sociaux, obtenus après des combats menés par des générations de travailleurs, qu’il s’agisse du temps de travail hebdomadaire ou de l’âge légal de départ à la retraite. Ces mesures ont d’ailleurs été votées sous des gouvernements de gauche !

Les effets de cette casse peuvent être dramatiques : en 2008, une étude de l’Organisation mondiale de la santé sur les liens entre déterminants sociaux et espérance de vie a ainsi démontré que, dans une ville comme Glasgow, en Écosse, l’espérance de vie dans les quartiers les plus pauvres s’établit désormais à 54 ans, alors qu’elle s’élève à 82 ans dans les quartiers les plus riches. On voit donc bien l’aggravation des inégalités qui résulterait d’un allongement uniforme de la durée de cotisation…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

M. Jean Desessard. Madame la ministre, je vous donne rendez-vous à l’automne pour débattre de cette question de manière plus approfondie. Croyez bien que nous serons très attentifs aux mesures que vous prendrez en faveur de l’emploi, en particulier celui des jeunes.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilbert Barbier

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, avec un déficit évalué à plus de 20 milliards d’euros en 2020, le dossier des retraites est explosif, comme l’avait laissé entendre, il y a bien longtemps, Michel Rocard. Que ne l’avez-vous écouté à cette époque ?

Depuis, l’ancienne majorité a entrepris plusieurs réformes, mais force est d’admettre qu’elles ne suffiront pas, surtout dans la conjoncture économique actuelle.

Vous remettez aujourd’hui l’ouvrage sur le métier et je ne peux que saluer cette initiative, si tant est que vous traitiez les véritables causes de ce déficit chronique.

Le rapport que Mme Yannick Moreau s’apprête à vous remettre demain forme une « boîte à outils » dans laquelle le Gouvernement pourra piocher. Il propose notamment de rapprocher les règles de calcul des pensions de la fonction publique de celles du secteur privé. Aborde-t-il l’ensemble des régimes spéciaux ? Malgré les réformes des dix dernières années, qui ont opéré une certaine convergence entre les différents régimes, des disparités majeures subsistent, vous le savez, qui alimentent régulièrement la chronique, avec plus ou moins de vérités ou de fantasmes.

Nous devons aborder cette question dans un esprit de responsabilité. En disant cela, je m’adresse aussi bien à ceux qui cherchent à opposer les uns aux autres qu’à ceux qui s’accrochent à un « contrat » initial souvent dépassé. Vous l’avez dit, madame la ministre, les efforts devront être partagés par tous. Une réforme qui épargnerait certaines catégories de salariés ne serait pas comprise.

Il faut certes tenir compte des diverses situations, des contraintes liées au service public, aux conditions de travail, etc. Quoi qu’il en soit, je ne suis pas convaincu que les mesures proposées par le rapport Moreau suffisent à ouvrir des perspectives durables. Aujourd’hui, pouvons-nous faire l’économie d’une réflexion sur les fondements mêmes de notre système de retraite à la française ? Le lien exclusif entre travail, cotisations et prestations est-il toujours pertinent ? Il faut avoir l’audace d’ouvrir ce débat.

M. Gérard Larcher, Mme Isabelle Debré et M. René-Paul Savary applaudissent.

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine

Monsieur le sénateur, le financement de la protection sociale constitue un sujet de réflexion qui a évidemment vocation à nourrir les discussions que le Gouvernement peut avoir avec les partenaires sociaux.

Pour autant, nous sommes aujourd'hui confrontés, en matière de retraite, à une situation qui appelle des réponses rapides pour le court terme – nous savons que le déséquilibre financier de nos régimes sera important d'ici à 2020 –, mais aussi pour le long terme : si nous voulons redonner confiance aux jeunes générations dans un système de retraite solidaire, nous avons le devoir d'inscrire dès maintenant une réforme dans la durée.

Dans cette perspective, il serait dangereux – je souscris à vos propos – d'opposer les Français les uns aux autres ou certaines catégories les unes aux autres. On entend beaucoup, depuis quelques jours, une petite musique selon laquelle, pour résoudre le problème des retraites, il suffirait de s’en prendre à la situation des fonctionnaires, qui seraient des privilégiés.

D'ailleurs, certains – qui appartiennent à l'ancienne majorité – aspirent à un big bang et ne sont pas à une approximation près lorsqu’ils comparent le niveau des retraites des uns et des autres : la retraite complète des fonctionnaires d'un côté, et seulement une partie de celle des salariés de l'autre – la retraite de base –, oubliant de préciser qu’elle est évidemment complétée par une retraite complémentaire obligatoire.

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre

Il faut comparer des choses comparables !

Au-delà de ces considérations, la situation des fonctionnaires doit être replacée dans un ensemble plus vaste. Les règles de calcul des pensions ne sont assurément pas les mêmes, mais la comparaison de la fonction publique et du secteur privé ne tourne pas systématiquement ici à l'avantage de la première, contrairement à ce que l'on entend.

Si les fonctionnaires ne doivent évidemment pas rester à l'écart d'une réforme à venir, il n’est pas envisageable d'en faire les boucs émissaires de la situation de nos régimes de retraite. §

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

La parole est à M. Gilbert Barbier, pour la réplique.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilbert Barbier

Madame la ministre, j’entends ce que vous dites sur les fonctionnaires, mais vous ne m’avez pas répondu sur les régimes spéciaux. Leur cas devra être abordé et ce n’est pas, selon moi, en stigmatisant l'ancienne majorité – comme vous avez tout de même tendance à le faire souvent – que nous pourrons aborder sainement ce problème des retraites.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Madame la ministre, le système de retraite est l'un des indicateurs d'un modèle social. Celui que nous avons mis en place voilà déjà quelque temps dans notre pays est fondé sur la solidarité entre générations. Il connaît des difficultés, et cela depuis un certain nombre d’années.

Celles et ceux qui l'ont préservé et défendu se sont trouvés dans les gouvernements d'Édouard Balladur, de Jacques Chirac, de Jean-Pierre Raffarin puis, en 2003, sous l'autorité de Nicolas Sarkozy, de François Fillon.

Beaucoup a été fait, mais une certaine réalité, liée à notre taux d'activité, notre démographie et notre situation économique et sociale, nous oblige à poursuivre et à approfondir encore les réformes engagées.

Au fond, il faut inverser ce qui a été décidé sans étude prospective, en vertu d'un choix purement politique : la mise en œuvre de la proposition n° 82 de François Mitterrand, en 1981, c'est-à-dire la retraite à 60 ans. C'était sympathique et, pourtant, des élus aussi peu réactionnaires que Philippe Seguin et Jacques Chaban-Delmas avaient prévenu. Je cite ce dernier : « Par les coûts supplémentaires qui pèseront sur les régimes de retraite déjà en difficulté, le Gouvernement prend le risque de compromettre l'avenir. »

Il est aujourd'hui nécessaire, à contre-pied d'une attitude constante de la gauche depuis vingt ans, d'étudier l'augmentation de la durée de cotisation et de tendre à la contribution de tous…

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

… avec la convergence progressive des trente-cinq systèmes.

Pour être attaché à l'équité, j’aurai le courage de parler du report de l'âge – mais en prenant en compte la pénibilité et le taux d'activité des seniors, qui sont de vrais sujets –, de la convergence progressive des régimes publics, privés et spéciaux de retraite, sans oublier que certains fonctionnaires, notamment territoriaux, ont des retraites modestes.

Pour ma part, je refuse de considérer la désindexation comme un paramètre. Or nous voyons bien que ce sujet est entré subrepticement dans le cadre de la négociation AGIRC-ARRCO. Cela étant, sans doute une indexation sur la croissance s’imposera-t-elle.

Vous-même l'avez dit, madame la ministre : quand on vit plus longtemps, on peut travailler plus longtemps. Dès lors, ma question est double.

Appliquerez-vous le dispositif de la loi de 2010 – introduit ici – sur la réforme systémique, qui impose que nous mettions en place des groupes de travail cette année ? Certes, il faudra du temps pour y parvenir, mais je crois, comme la CFDT, qu’il y a là une voie qui répond à un souci à la fois de pérennité et d'équité.

Éviterez-vous de paupériser les retraités ?

Vous êtes au pied du mur, madame la ministre, et ce que vous n’avez pas fait en nous accompagnant depuis vingt ans, il va falloir, aujourd'hui, le faire sans faux-fuyants ! §

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine

Monsieur le sénateur, le Gouvernement n’a pas l'intention de prendre quelque chemin de traverse que ce soit. Il n’a pas, non plus, l’intention de se laisser dicter une réforme par ceux-là mêmes qui, il y a deux ans, prétendaient relever l'ensemble des défis rencontrés par nos régimes de retraite alors que nous nous trouvons aujourd'hui face au constat implacable d’un déficit qui s’accroît et d'une justice sociale battue en brèche !

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre

Le Gouvernement mettra en place la concertation nécessaire pour proposer une réforme globale qui ne soit pas qu’une réforme comptable – car une telle réforme ne permet pas de répondre aux grands enjeux liés à la question de la retraite –, mais qui inscrive dans la durée à la fois nos régimes de retraite par répartition et la solidarité entre les générations.

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre

À l'occasion de la réforme qui s’engage, le Gouvernement veut que soit garanti le financement de l'ensemble des régimes de retraite d'ici à 2020 et que la confiance dans l'avenir de nos systèmes de retraite soit donnée – ou rendue – aux jeunes générations en introduisant des mécanismes de financement des différents régimes à un horizon plus lointain et en envisageant des dispositifs qui permettent un examen régulier de leur situation financière.

Enfin, cette réforme doit intégrer des mesures de justice, car nous sommes aujourd'hui confrontés à des personnes qui ont de toutes petites retraites ; je pense en particulier à certains agriculteurs, ainsi qu’à ceux et surtout à celles qui ont eu des carrières hachées.

C'est cette vision globale que nous voulons porter pour le système de retraite par répartition. La réforme que nous engageons, monsieur le sénateur, entraîne évidemment une remise à plat des systèmes existants et de la réforme de 2010.

Voilà le travail que, avec les partenaires sociaux, nous avons lancé, afin que l'ensemble de nos concitoyens, en particulier celles et ceux qui s’interrogent aujourd'hui sur l'avenir de leur retraite, puissent compter sur des pensions d'un niveau satisfaisant, leur permettant d'envisager le futur avec sérénité. §

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

La parole est à M. Gérard Larcher, pour la réplique.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Madame la ministre, au-delà des mots, la nécessité de prendre des décisions va se faire jour. Et, pardonnez-moi, ces décisions ne pourront se réduire à un ensemble de paroles sympathiques et chaleureuses. Des réalités s’imposeront, parmi lesquelles se trouvera la convergence nécessaire des systèmes de retraite, de même que s’imposera la réflexion sur la contribution des uns et des autres.

La réalité, c’est aussi le fait que, à partir du moment où la compétitivité et l'emploi sont en jeu, on ne peut peser davantage ni sur les entreprises ni sur les salariés, et cette réalité-là, nous ne pourrons pas la contourner.

Aussi attaché que je sois au système de retraite par répartition, je pense que nous devons refonder progressivement le système. Cela ne se fera pas en un tour de main, mais si nous ne le faisons pas – alors que nous en avons collectivement décidé le principe en 2010 –, nous aurons manqué ce rendez-vous.

Quoi qu'il en soit, vous êtes au pied du mur : si vous prenez les bonnes décisions, nous les soutiendrons, mais si vous prenez des chemins de traverse, vous nous trouverez en travers de ces chemins-là !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Vanlerenberghe

Madame la ministre, selon le Conseil d'orientation des retraites, le besoin de financement des retraites se creusera régulièrement jusqu’en 2020, pour atteindre 20 milliards d’euros.

Ce déséquilibre est lié au vieillissement de la population, au chômage, mais aussi à l’iniquité persistante du système – des trente-cinq systèmes différents, devrais-je dire.

Avec des différences de taux de cotisation, d’âge d’ouverture des droits, de durée de cotisation ou de salaire de référence, le calcul des pensions demeure très variable, ce qui engendre, bien sûr, un profond sentiment d’injustice.

C’est particulièrement vrai lorsque l’on compare le régime général aux régimes de la fonction publique et aux régimes spéciaux, qui coûtent plusieurs milliards d’euros – de 6 à 9 milliards, selon les évaluations – par an aux contribuables et aux autres assurés sociaux.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Vanlerenberghe

C’est pourquoi les membres du groupe centriste demandent depuis plus de dix ans la réforme structurelle consistant à remplacer l’annuité par le point, seul moyen de rendre le système par répartition équitable, universel et juste. Par exemple, il permet de prendre en compte la pénibilité du travail et, pour les femmes, les congés de maternité.

Il en est résulté une certaine évolution dont, sous notre impulsion, il a été pris acte dans la loi de 2010 – M. Gérard Larcher vient de la rappeler –, dont l'article 16 dispose que, « à compter du premier semestre 2013, le Comité de pilotage des régimes de retraite organise une réflexion nationale » sur ce thème. Madame la ministre, qu’en est-il ?

La réforme qui se profile sera celle de l’équité et de la justice, annoncez-vous. Au vu des indiscrétions sur le contenu du rapport Moreau et des réactions qu’il a déjà suscitées, il vous faudra du courage, madame, pour affronter vos propres alliés sur ce point…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

Il y a aussi ceux qui souhaitent que la réforme échoue !

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine

Monsieur le sénateur, je reconnais que le groupe UDI-UC et vous-même défendez avec constance l'idée d'un système par points, ce qui n’est pas le cas de tous ceux qui, aujourd'hui, se saisissent de cette possibilité pour inventer une opposition au Gouvernement.

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre

Mme Marisol Touraine, ministre. Non ! Ce qui a été voté, ce n’est qu’une étude ! Je me souviens d’ailleurs des débats de 2010 : le groupe UMP avait marqué son opposition résolue à cette perspective. Sans quoi, d'ailleurs, la réforme de 2010 aurait pu s’engager tout simplement dans cette voie…

Protestations sur les travées de l'UMP et exclamations sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre

Monsieur le sénateur, je vous reconnais donc une grande constance et je suis en mesure de vous assurer qu’à l'occasion de la réforme, pour laquelle le Gouvernement engage des concertations, toutes les options que les partenaires sociaux souhaiteront présenter pourront faire l'objet de discussions.

Il reste que le système par points est parfois présenté – pas par vous, certes – comme une solution miracle, qui permettrait de dépasser les difficultés auxquelles nous sommes confrontés en matière de financement. Or l'exemple suédois, fréquemment cité, montre que les enjeux de financement ne se trouvent pas résolus par un simple changement d'organisation des systèmes de retraite…

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre

… et qu’il a fallu mettre en place certains dispositifs pour éviter la baisse drastique des pensions versées aux Suédois qu’allait engendrer la mise en place de ce système par points.

Un système par points présente éventuellement l'intérêt de la simplification, et il est certain que nous devons rechercher une simplification. Cependant, le Gouvernement veut proposer une réforme globale, alors que le simple passage à la retraite par points ne permet pas de résoudre les problèmes de financement. §

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe, pour la réplique.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Vanlerenberghe

Madame la ministre, il faudra donc nous présenter une réforme globale qui assure effectivement la pérennité des financements.

Je crois justement que le système par points le permet, car l'équilibre comptable est absolument nécessaire, …

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Avec le système par points, il est automatique !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Vanlerenberghe

… ce qui n’exclut pas de prendre en compte tous les cas particuliers, avec des bonifications, des décotes, des surcotes… Il me semble que la simplification que le Président de la République et le Gouvernement nous ont promise passe par là.

Cela intéresse une très grande majorité de Français, et je crois qu’une telle réforme ne pénaliserait pas les régimes des fonctionnaires. Naturellement, je le comprends, vous les défendez, mais nous ne les attaquons pas ! Nous souhaitons simplement qu’ils entrent dans un système universel où chacun trouverait son compte. §

Debut de section - PermalienPhoto de René Teulade

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, depuis plus d’un demi-siècle, le secteur agricole a connu de nombreuses mutations. L’agriculture traditionnelle et familiale, plus que séculaire en France, a été bouleversée par la mécanisation et la modernisation, qui ont engendré une diminution du besoin de main-d’œuvre.

Alors qu’auparavant les exploitants agricoles étaient certains de pouvoir compter sur leur patrimoine et leur descendance afin d’assurer leur subsistance quand les blessures du corps se rappelaient à leur bon souvenir, les exploitants retraités vivent aujourd’hui souvent seuls avec leur conjoint, leur pension constituant leur unique pécule.

Aussi, il n’est guère étonnant d’assister à une forme de paupérisation des retraités agricoles, entraînant une angoisse, un sentiment de déclassement et un mécontentement de plus en plus manifeste, comme en témoigne la récente manifestation organisée par l’association départementale des retraités agricoles du Lot-et-Garonne.

Pour mémoire, il convient de souligner que la retraite moyenne d’un agriculteur est de 800 euros, tandis que celle de sa conjointe est de 500 euros. Dans les deux cas, les pensions se situent sous le seuil de pauvreté, fixé à 964 euros.

Pour pallier cette situation affligeante, le candidat François Hollande, fidèle à son principe ordonnateur de justice sociale, avait présenté, pendant la campagne présidentielle, un plan quinquennal évalué à 650 millions d’euros.

Parmi les idées avancées, figurait tout d’abord la mise à niveau à 75 % du SMIC des retraites des carrières complètes des chefs d’exploitation prévue par la loi Peiro de 2002, que les gouvernements précédents n’ont pas su mettre en œuvre, serait de nature à améliorer les conditions de vie de plus de 1, 5 million de non-salariés agricoles retraités.

Il faudrait également envisager la suppression de la condition de durée d’activité minimale, soit 17, 5 années, pour bénéficier de la majoration de pension.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

Il peut bien bénéficier du même traitement que M. Gérard Larcher !

Debut de section - PermalienPhoto de René Teulade

Enfin, il convient de prévoir l’extension de la retraite complémentaire obligatoire aux conjoints et aux aides familiaux pour les retraités actuels. Dans la mesure où 98 % des conjoints des exploitants agricoles sont des femmes, l’introduction d’une telle disposition dans la loi serait à la fois une mesure salvatrice et une mesure de justice, qui profiterait à environ 450 000 personnes.

Par conséquent, nous aimerions connaître, madame la ministre, les éventuelles retombées de ce plan dédié aux exploitants agricoles, qui participent à hauteur de 3, 5 % à notre richesse nationale.

Dans le cadre de la future réforme des retraites, d’autres pistes de réflexion sont-elles explorées ?

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine

Monsieur Teulade, il est vrai que la situation des exploitants agricoles et de leur conjoint doit être posée à l’occasion de cette réforme des retraites, les retraités agricoles ayant été, depuis dix ans, les grands oubliés des politiques sociales. Nous devons donc renouer aujourd’hui avec ce qui avait été la ligne de conduite du gouvernement de Lionel Jospin, qui avait fait de la justice et de la dignité des retraités agricoles un des axes forts de sa politique.

Nous devons en particulier, et je vous remercie de l’avoir souligné, être attentifs à la situation des femmes d’exploitants agricoles, qui ont souvent beaucoup travaillé sans contrepartie financière…

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre

… et sans reconnaissance de la part des institutions et des organismes de la sécurité sociale.

Après avoir reçu différentes organisations représentant les exploitants et anciens exploitants agricoles, Stéphane Le Foll, ministre de l’agriculture, et moi-même avons engagé dès l’été dernier la mise en œuvre d’engagements pris par le Président de la République, François Hollande.

C’est ainsi qu’a été mise en œuvre, dès la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013, une mesure permettant aux exploitants agricoles ayant cessé leur activité en raison d’une maladie ou d’une infirmité grave de bénéficier d’une validation au titre de la retraite proportionnelle des agriculteurs, ainsi que de l’attribution d’un nombre minimal de points gratuits. Cette mesure s’applique depuis le 1er janvier dernier.

D’autres mesures devront être prises dans le cadre de la réforme globale qui s’engage, notamment en direction des femmes et des pensionnés les plus modestes. Là encore, nous devons faire en sorte qu’aucune catégorie sociale ne soit oubliée.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, malgré les réformes courageuses menées par les précédents gouvernements, réformes constamment critiquées par la gauche, notre système de retraite fera rapidement face à des déséquilibres financiers très importants, en partie dus à la dégradation considérable de la conjoncture économique.

Les besoins de financement de l’assurance vieillesse, qui s’élevaient à 14 milliards d’euros en 2011, seront de 20 milliards d’euros en 2020, selon le Conseil d’orientation des retraites.

L’heure n’est plus, mes chers collègues, aux tergiversations : il s’agit maintenant de réfléchir ensemble à un système juste et efficace, et en même temps moins complexe. Nous savons combien ce sujet est difficile ; il nécessite courage, concertation et détermination.

Vous avez combattu toutes les réformes des retraites que les précédents gouvernements ont voulu élaborer, alors que la question était posée depuis le gouvernement de Michel Rocard, au début des années quatre-vingt-dix, sans que la gauche, lorsqu’elle était au pouvoir, ait pris la moindre initiative en ce domaine.

Il n’est pas dans nos intentions de nous opposer systématiquement aux propositions qui seront débattues, car ce sujet est majeur pour notre pays, pour l’avenir de nos enfants.

À la lumière des nombreux rapports établis par des experts, auxquels s’ajoutera celui de la commission présidée par Mme Moreau, et dans le contexte actuel, marqué par un taux de chômage jamais atteint, un coût du travail trop élevé et une pression fiscale difficilement supportable, pouvez-vous, madame le ministre, nous exposer clairement les axes de réforme retenus par le Gouvernement ?

Pouvez-vous nous indiquer, en particulier, si vous envisagez l’unification des régimes de retraite du secteur public et du secteur privé – vous n’avez pas répondu tout à l’heure sur ce point –, l’intégration des régimes spéciaux dans le régime général – question qu’a soulevée notre collègue Gilbert Barbier –, la transition vers un système de retraite universel par points et, bien sûr, le report de l’âge légal de la retraite ? §

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine

Mme Marisol Touraine, ministre. Madame Debré, si j’entends bien ce que vous me dites, au fond, l’opposition d’aujourd’hui – majorité d’hier – serait prête à soutenir le Gouvernement dès lors qu’il s’engagerait dans une réforme que l’UMP jugerait courageuse. Et ce que l’UMP juge courageux, c’est ce que l’UMP n’a pas réalisé hier !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste . – Protestations sur les travées de l'UMP.

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre

Pour apprécier si notre réforme est adaptée, vous souhaitez savoir, premièrement, si nous comptons mettre en place un système par points. Or, en 2010, la question du système par points n’a pas été posée...

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre

En tout cas, elle a été écartée. C’est pourquoi un rendez-vous avait été fixé, de manière qu’il soit procédé, en 2013, à une évaluation de la situation, préalablement à la rédaction d’un simple rapport, monsieur Larcher.

Deuxièmement, madame Debré, vous m’expliquez qu’une réforme des retraites se limite à la question, somme toute assez sommaire, du secteur public, comme si le seul problème auquel nous étions confrontés était de savoir si les règles qui s’appliquent à la fonction publique doivent être ou non de même nature que celles qui s’appliquent au secteur privé !

Nous avons la volonté, madame la sénatrice, de prendre à bras-le-corps la situation que vous nous avez laissée. La réforme qui s’engage ne doit pas être purement comptable, car à vouloir simplement mettre en place des mesures de rééquilibrage financier à court terme, l’exemple de 2010 le prouve, on s’expose à de tristes déconvenues : nous nous retrouvons déjà, en 2013, avec un déficit des régimes de retraite de l’ordre de 14 milliards d’euros, alors que nous étions censés trouver des comptes à l’équilibre.

Nous voulons par conséquent engager une réforme qui s’inscrive dans la durée et qui permette de concilier exigence sociale et responsabilité financière. §

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

La parole est à Mme Isabelle Debré, pour la réplique.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Madame le ministre, je suis quelque peu surprise de cette caricature. Surtout, je vous ai posé quatre questions extrêmement précises auxquelles vous n’avez malheureusement par répondu.

Vous dites vouloir écouter, madame le ministre : écouterez-vous les Français qui sont 52 %, d’après un sondage paru ce matin, à préférer l’allongement de la durée de travail à l’augmentation des cotisations ? Écouterez-vous le Président de la République, qui a déclaré : « Dès lors que l’on vit plus longtemps, on devra travailler aussi un peu plus longtemps » ?

Debut de section - PermalienPhoto de Gisèle Printz

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la réforme des retraites de 2010, voulue par la droite, était brutale, injuste et inefficace.

Debut de section - PermalienPhoto de Gisèle Printz

La droite nous annonçait un rendez-vous pour 2013 et un retour à l’équilibre pour 2020. Or nous savons aujourd’hui que le déficit atteindra 20 milliards d’euros en 2020 et c’est pourquoi le rendez-vous de 2013 doit être l’occasion d’une nouvelle réforme.

Cette réforme indispensable, le Président de la République la veut guidée par des principes de justice, de responsabilité et de concertation. Madame la ministre, vous avez, quant à vous, précisé qu’elle viserait trois objectifs : l’équilibre financier à court terme, la pérennité du modèle par répartition à moyen terme et des mesures de justice.

Nous savons que la concertation fait partie intégrante de la méthodologie du Gouvernement. La conférence sociale du mois de juillet dernier, les accords nationaux interprofessionnels en sont des exemples. Sur les retraites, nous savons que le Gouvernement a appelé les partenaires sociaux à la table des négociations et que le Premier ministre les a tous reçus dès lundi dernier.

Nous savons aussi que les conclusions du rapport de Mme Moreau, qui sera remis demain au Premier ministre, ne sont que des « pistes » et qu’en aucun cas elles ne constituent le socle de la concertation à venir. A fortiori, elles ne sont « en aucun cas la préfiguration d’une réforme bouclée », comme vous l’avez précisé.

Madame la ministre, Pierre Mauroy disait que la retraite était une ligne de vie, une espérance de vie. Avec le décret du 2 juillet dernier, conformément à l’engagement du Président de la République, le Gouvernement a su redonner corps à cette ligne de vie pour des dizaines de milliers de nos concitoyens ayant commencé à travailler tôt, et je ne peux que m’en féliciter.

Compte tenu de la complexité que revêt le dossier des retraites, les sujets d’importance sont nombreux. Pour autant, je souhaiterais que, sans empiéter sur les conclusions du rapport de Mme Moreau ni sur les travaux à venir des partenaires sociaux, vous puissiez nous éclairer sur le degré de priorité qu’occupent des thèmes tels que la pénibilité, que la droite et le patronat ont toujours refusé de traiter, …

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine

Madame Printz, vous avez parfaitement raison de rappeler qu’une réforme, quelle qu’elle soit, notamment une réforme sociale – et en particulier une réforme des retraites –, ne peut se concevoir que dans la concertation.

Aussi, lorsque l’opposition demande que l’on apporte immédiatement des réponses précises, alors même que la concertation n’est pas engagée, on perçoit bien la différence de méthode entre ceux qui choisissent la précipitation et les réformes votées au milieu de l’été §et ceux qui s’engagent dans le dialogue et l’élaboration concertée de propositions pour l’avenir.

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre

Mme Marisol Touraine, ministre. C’est sans doute, mesdames, messieurs les sénateurs de l’opposition, parce que vous avez l’expérience de l’absence de concertation avec les partenaires sociaux …

Mêmes mouvements.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Procaccia

Comment pouvez-vous dire cela devant Gérard Larcher ?

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Vous faites preuve d’une agressivité bien inutile !

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre

… que vous imaginez que le Gouvernement est aujourd’hui en mesure d’apporter des réponses, alors que les discussions n’ont pas commencé !

Vous avez également raison de souligner, madame Printz, que la réforme que nous allons présenter au Parlement doit être une réforme de justice, permettant de répondre à des situations comme celles que connaissent les femmes, dont le niveau de pension reste très significativement inférieur à celui des hommes.

Nous devons aussi prendre en compte les carrières hachées et la pénibilité du travail, tout ce à quoi le Gouvernement précédent a refusé obstinément de s’atteler

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste – Nouvelles protestations sur les travées de l’UMP.

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre

Les questions de la pénibilité, de la retraite des femmes, des carrières hachées, de l’emploi des seniors seront donc posées, …

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre. …

ainsi que celle de l’entrée dans la vie active des jeunes qui doivent savoir comment construire leur carrière dans la perspective d’une retraite future.

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre

Mme Marisol Touraine, ministre. Nous voulons que toutes ces questions soient sur la table et trouvent des réponses positives, constructives et justes. C’est l’esprit dans lequel le Gouvernement a aujourd’hui engagé son travail.

Applaudissements

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

La parole est à Mme Gisèle Printz, pour la réplique.

Debut de section - PermalienPhoto de Gisèle Printz

Madame la ministre, je vous remercie de vos propos. Comme vous, je pense qu’il est primordial de débattre du système des retraites et des pensions en concertation avec l’ensemble des acteurs concernés

La pénibilité et les inégalités salariales entre hommes et femmes me tiennent particulièrement à cœur, et je pense que vous saurez promouvoir les bonnes solutions. §

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Louis Masson

C’est pourtant là que se trouve la situation la plus anormale, la plus disproportionnée, notamment en regard du régime général.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Louis Masson

Il faut reconnaître que les menaces de grève sont un puissant facteur de dissuasion…

Toutefois, madame le ministre, telle ou telle corporation, sous prétexte qu’elle peut bloquer la France entière en faisant grève, a-t-elle le droit, au moment où l’on demande des efforts à tout le monde, de bénéficier d’avantages tout à fait exorbitants vis-à-vis aussi bien des fonctionnaires que des ressortissants du régime général ?

J’aimerais, madame le ministre, que vous soyez un peu plus claire sur cette question des régimes spéciaux, que vous précisiez vos intentions en la matière.

La solution d’équité, d’autres l’ont dit avant moi, c’est le système de retraite par points. Or, là aussi, vous êtes pour le moins évasive. Pourtant, avec un tel système, il n’y a plus le régime du privé, celui des fonctionnaires et puis les régimes spéciaux : tout le monde se retrouve sur le même plan, c’est-à-dire qu’on parvient à une réelle situation d’équité.

Dès lors, madame le ministre, le problème pour vous n’est pas de parler d’équité mais de la faire. Et pour cela, au lieu de parler, il faudrait agir ! §

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Louis Masson

Je voudrais conclure en rendant hommage à la CFDT, qui est un des rares syndicats à avoir le courage de ses opinions…

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine

Que suis-je venue faire ici, monsieur le sénateur ? Je suis venue au Parlement, le lieu où l’on parle, pour utiliser les mots que nous poserons sur la réforme que nous préparons.

Après toutes ces paroles, monsieur Larcher, vous aurez à débattre d’un texte qui témoignera de notre volonté d’inscrire nos régimes de retraite dans la durée.

Vous avez posé beaucoup de questions, monsieur Masson, mais ce n’est pas nécessairement en appliquant les mêmes règles à des situations différentes que l’on aboutit à la plus grande équité.

Je prendrai l’exemple des droits familiaux : ils sont plus avantageux dans le secteur privé que dans la fonction publique et dans les régimes spéciaux.

De même, les fonctionnaires partent à la retraite avec une pension calculée à partir de leur salaire, indépendamment de toute prise en compte des primes, ce qui aboutit à des différences tout à fait significatives.

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre

L’objectif qui doit être le nôtre – c’est en tout cas celui du Gouvernement – est de faire en sorte que l’effort demandé à chacun soit le même, que l’effort demandé à l’ensemble des catégories soit de même nature et que, en contrepartie de cet effort, le niveau des pensions versées soit acceptable pour l’ensemble de nos concitoyens. Cet effort, nous allons le demander aux Français afin de pouvoir garantir la pérennité de nos systèmes de retraite.

Pour ce qui est du système par points, j’ai déjà eu l’occasion d’indiquer qu’il ne s’agissait pas de la recette qui nous permettrait de sortir des difficultés. Encore une fois, l’exemple le plus abouti, le plus intéressant et incontestablement le mieux structuré est celui qui a été mis en place en Suède, au bout d’une période de quinze ans.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Il ne s’agit pas d’un système par points, madame la ministre, mais d’un système par répartition selon les tranches d’âge !

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre

Ce système par points a pourtant abouti à une dégradation très forte des pensions des Suédois au cours des dernières années.

Vous le voyez, monsieur Masson, ce qui apparaît parfois comme une solution miracle se révèle, à l’arrivée, n’être qu’un miroir aux alouettes ! §

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

La parole est à M. Jean Louis Masson, pour la réplique.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Louis Masson

… et que j’allais obtenir une réponse, mais il n’en a rien été !

D’abord, vous n’avez pas répondu sur la question des régimes spéciaux, ce qui est tout de même affligeant et témoigne d’un manque de courage.

Vous avez ensuite rejeté le système des retraites par points en expliquant que tous les cas sont différents. Il faut quand même être honnête, madame le ministre ! En quoi la situation d’un chauffeur de poids lourd qui travaille dans le privé, qui n’est jamais chez lui, qui roule la nuit, le jour, est-elle si différente de la situation d’un conducteur de locomotive ? Un employé d’EDF qui plante en été quelques poteaux électriques est-il dans une situation si différente de celle de l’employé d’une entreprise de travaux publics qui creuse des tranchées, été comme hiver, et qui a des horaires beaucoup plus stricts ?

Je crois qu’il ne faut pas dire n’importe quoi !

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

Nous en avons terminé avec les questions cribles thématiques sur l’avenir des retraites.

Avant d’aborder le point suivant de l’ordre du jour, nous allons interrompre nos travaux quelques instants.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à quinze heures cinquante-cinq, est reprise à seize heures.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

M. le Premier ministre a demandé M. le président du Sénat de lui faire connaître le nom d’un sénateur titulaire et d’un sénateur suppléant désignés pour siéger au sein du conseil consultatif des Terres australes et antarctiques françaises, conformément à l’article 1er du décret n° 2013-452 du 31 mai 2013.

Conformément à l’article 9 du règlement du Sénat, la commission des lois a été saisie de cette désignation.

Les nominations au sein de cet organisme extraparlementaire auront lieu ultérieurement, dans les conditions prévues par l’article 9 du règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

L’ordre du jour appelle la suite de la discussion de la proposition de loi autorisant l’expérimentation des maisons de naissance, présentée par Mme Muguette Dini, à la demande du groupe UDI-UC (proposition de loi n° 548 [2010-2011], texte de la commission n° 369, rapport n° 368).

Je vous rappelle que nous avons entamé l’examen de cette proposition de loi le 28 février dernier et que la discussion générale a été close.

Nous passons à la discussion des articles du texte de la commission.

(Non modifié)

À titre expérimental, et pour une durée de deux ans après la promulgation de la présente loi, le Gouvernement peut autoriser la création de structures dénommées : « maisons de naissance », où des sages-femmes réalisent l’accouchement des femmes enceintes dont elles ont assuré le suivi de grossesse, dans les conditions prévues aux articles L. 4151-1 et L. 4151-3 du code de la santé publique. Ces autorisations portent sur une durée maximale de cinq ans.

La maison de naissance doit être attenante à une structure autorisée pour l’activité de gynécologie-obstétrique avec laquelle elle passe obligatoirement une convention. L’activité de la maison de naissance est comptabilisée avec celle de cette structure.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Cohen

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l’article 1er de cette proposition de loi est sans aucun doute le plus important puisqu’il pose les bases légales nécessaires à l’expérimentation des maisons de naissance.

Nous l’avons dit dans la discussion générale, nous sommes favorables à la possibilité pour les femmes de choisir un mode d’accouchement plutôt qu’un autre. Il n’appartient pas à la loi de faire primer une méthode sur une autre : cela relève d’un choix personnel, qu’il nous faut évidemment respecter.

De la même manière, nous sommes conscients que la reconnaissance de la formation de sage-femme au grade de master 2 ainsi que l’élargissement de leur champ de compétences nécessitent une revalorisation de la profession, ce que nous avons toujours soutenu.

Les sages-femmes doivent, y compris au sein des établissements publics, pouvoir bénéficier d’une autonomie d’action plus large et obtenir, dans leur exercice en tant que professionnels libéraux ou dans le cadre de structures, une revalorisation de la nomenclature des actes.

Or ces sujets si importants ne sont pas abordés dans cette proposition de loi. Il nous semble pourtant – et les rencontres que nous avons eues avec les professionnels concernés le prouvent – qu’il s’agit là d’une demande commune à toute la profession.

Toutefois, nous ne perdons pas de vue le contexte dans lequel se situe l’examen de ce texte. Dois-je rappeler ici que de nombreuses structures publiques ou privées non lucratives ferment, soit victimes d’un financement insuffisant, en raison de l’application de la tarification à l’activité – T2A –, soit sous un prétexte sécuritaire, par exemple le fait que la maternité ne réaliserait pas suffisamment d’actes ? Je pense aux menaces pesant sur les maternités des Bluets, des Lilas ou de Vire.

Cet argument est d’autant plus étonnant que le seuil de 300 actes est régulièrement mis en avant, les autorités sanitaires considérant qu’en dessous de ce nombre, les professionnels de santé souffriraient d’un manque de pratique mettant en danger la santé des femmes et des enfants à naître.

Est-ce à dire, madame la ministre, que les maisons de naissance créées à titre expérimental qui réaliseraient moins de 300 naissances annuelles, ce qui est fort probable, notamment les premières années, seraient immédiatement fermées pour le même motif ? La question se pose.

Pour notre part, si nous sommes favorables au libre choix des femmes d’opter ou non pour un accouchement plus naturel, nous sommes opposés à ce que les maternités de niveau 1, celles qui accueillent les futures mamans dont la grossesse et le déroulement de l’accouchement ne présentent a priori aucun risque, c’est-à-dire la majorité, se voient imposer des règles différentes de celles applicables aux maisons de naissance.

Comme d’autres, je regrette la surmédicalisation des accouchements, qui est surtout le fait des maternités de niveau 3. Celles-ci, sous l’impulsion de la loi HPST – loi portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires – et sous l’effet conjugué de la T2A et de la convergence tarifaire, sont devenues ce que certains osent appeler des « usines à bébés ».

Or il serait sans aucun doute opportun de s’interroger sur le mouvement qui a conduit à cet état de fait.

Comment ignorer que la fermeture massive des maternités de proximité, essentiellement de niveau 1, avec le transfert des patients vers des maternités plus importantes et plus médicalisées, contribue à cette surmédicalisation ?

Je regrette qu’aucune mesure ne soit prise pour garantir le maintien de ces maternités publiques, qui offrent aux femmes qui le souhaitent – et elles demeurent très largement majoritaires – un cadre médicalisé sans outrance ainsi qu’un accompagnement personnalisé et humain.

Tout cela nous conduit à formuler, au travers de nos amendements, une proposition alternative à celle de notre rapporteur. Si ce qui compte pour vous, mes chers collègues, est de garantir aux femmes un accompagnement moins médicalisé et plus proche des aspirations de certaines femmes qui revendiquent le droit à un accouchement plus naturel, je suis certaine que vous lui donnerez une suite favorable.

Il s’agit clairement pour nous de concilier ces aspirations, que l’on peut entendre, avec celle de l’immense majorité de nos concitoyennes, puisque 75 % d’entre elles font confiance au service public hospitalier, en proposant que ce nouveau mode d’accompagnement relève de ce dernier.

C’est la force et le devoir du service public de santé que de s’adapter, et je suis convaincue que les professionnels s’engageront volontiers dans ce nouveau challenge. La période d’expérimentation devrait d’ailleurs nous en apporter la preuve.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 1, présenté par Mmes Cohen, Pasquet et David, MM. Watrin, Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

1° Alinéa 1, première phrase

Remplacer les mots :

de structures dénommées

par les mots :

d’unités fonctionnelles ou services dénommés

2° Alinéa 2, première phrase

Remplacer les mots :

doit être attenante à

par les mots :

constitue une unité fonctionnelle ou un service d’

La parole est à Mme Laurence Cohen.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Cohen

Plutôt que d’expérimenter la création de maisons de naissance aux formes juridiques incertaines, qui pratiqueront des tarifs dont on ignore tout pour l’instant, dont on ne sait pas, par conséquent, quels publics seront susceptibles de vouloir y être accueillis, et alors qu’on ne connaît pas non plus la nature juridique des établissements auxquels elles seront adossées, nous préconisons que cette expérimentation ne puisse se dérouler que dans les établissements publics de santé et dans les maternités privées à but non lucratif.

En commission, cet amendement a reçu un avis défavorable au motif que les sages-femmes qui interviendraient alors dans ces services demeureraient sous l’autorité d’un médecin.

Je comprends la motivation des professionnels concernés, mais je me demande si cette expérimentation a pour but de répondre aux besoins d’une partie des parturientes ou aux demandes des professionnels de santé. Je suis pour ma part convaincue qu’il nous faut trouver une solution médicale conciliant ces deux aspirations.

Nos concitoyennes et nos concitoyens n’accepteraient pas que le désir légitime de reconnaissance professionnelle et financière des sages-femmes prenne le pas sur des principes fondamentaux comme celui du refus de l’utilisation de moyens publics au profitation de structures pratiquant une politique tarifaire de nature à induire une sélection des patients par l’argent.

Par ailleurs, avec l’adoption de cet amendement, la navette parlementaire pourrait être mise à profit pour trouver une solution permettant de faire en sorte que les services ou unités ainsi constitués puissent être dirigés par des sages-femmes.

Pourquoi ne pas se servir de l’exemple des centres de santé ? Depuis l’adoption de la loi HPST, les établissements publics de santé ont la possibilité d’ouvrir des centres de santé et ces derniers peuvent être dirigés par des professionnels non-médecins.

Dès lors, pourquoi ne pas adopter cet amendement, qui réglerait bien des questions – tarifs, sécurité, juste utilisation des crédits publics – et nous laisserait le temps de la navette pour parfaire le dispositif afin que la direction de cette unité soit confiée aux pratiquantes elles-mêmes ? Ce serait très constructif.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

L'amendement n° 8 rectifié, présenté par MM. Barbier, Mézard et Alfonsi, Mme Laborde et MM. Mazars, Requier et Tropeano, est ainsi libellé :

Alinéa 2, première phrase

Rédiger ainsi cette phrase :

La maison de naissance doit être attenante au service de gynécologie-obstétrique de l’établissement autorisé pour cette activité, avec lequel elle passe obligatoirement une convention après avoir recueilli l'avis favorable du chef de ce service.

La parole est à M. Gilbert Barbier.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilbert Barbier

Au regard de l’exigence de sécurité, il n’est pas possible d’installer les maisons de naissance n’importe où sur le territoire : chacune d’elles doit absolument être attenante ou en tout cas très proche – peu importe l’adjectif retenu – d’un service de gynécologie-obstétrique.

J’ajoute un élément qui a été repoussé en commission mais qui me semble fondamental : cette maison de naissance ne pourra fonctionner que si le chef de service de gynécologie-obstétrique voisin approuve le principe des relations étroites entre la maison de naissance et son service puisque celui-ci devra être en mesure de répondre immédiatement à un problème qui se poserait dans la maison de naissance.

J’ai rencontré des chefs de service de gynécologie-obstétrique qui sont hostiles au principe des maisons de naissance. Faut-il leur en imposer une ? Il y va du bon déroulement de cette expérimentation que d’obtenir l’accord exprès du chef de service de gynécologie-obstétrique.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

L'amendement n° 13 rectifié, présenté par Mmes Génisson, D. Gillot, Alquier, Campion, Claireaux et Demontès, MM. Godefroy, Jeannerot et Kerdraon, Mmes Duriez et Ghali, MM. Labazée, Le Menn, Cazeau et J.C. Leroy, Mmes Meunier, Printz, Emery-Dumas et Schillinger, MM. Teulade et Vergoz, Mme Lepage et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :

Alinéa 2, première phrase

Rédiger ainsi cette phrase :

La maison de naissance doit être contiguë à une structure autorisée pour l'activité de gynécologie-obstétrique avec laquelle elle passe obligatoirement une convention et avec laquelle un accès direct est aménagé, permettant notamment un transfert rapide des parturientes en cas de complication.

La parole est à M. Ronan Kerdraon.

Debut de section - PermalienPhoto de Ronan Kerdraon

Dans la création de ces maisons de naissance, la priorité absolue est la sécurité.

Des progrès importants ont été réalisés grâce à la médicalisation des naissances. Respecter le choix de certaines femmes pour un suivi moins médicalisé et plus personnalisé de leur accouchement doit s’accompagner de la mise en place de toutes les garanties de sécurité nécessaires vis-à-vis des parturientes et des enfants à naître dans ces maisons de naissance.

C’est pourquoi nous souhaitons préciser que ces maisons doivent être « contiguës » et non pas seulement « attenantes » à une maternité. Il s’agit ainsi de permettre, en cas de complication, un transfert rapide et facile des parturientes par un accès direct aménagé vers le service de gynécologie-obstétrique.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

L'amendement n° 2, présenté par Mmes Cohen, Pasquet et David, MM. Watrin, Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéa 2, première phrase

Remplacer les mots :

une structure autorisée

par les mots :

un établissement public de santé ou à un établissement de santé privé d'intérêt collectif autorisé

La parole est à M. Dominique Watrin.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Watrin

La logique de cet amendement est la même que celle de l’amendement n° 1 : l’argent public doit aller exclusivement à des structures publiques ou à visée clairement non lucrative.

Si l’amendement n° 13 rectifié, qui vient d’être présenté, est adopté, il est à craindre que, en cas de difficulté, des femmes ne soient transférées dans des structures commerciales où se pratiquent d’importants dépassements d’honoraires.

J’espère que, si notre amendement n° 2 n’est pas adopté, et si des maisons de naissance sont adossées à des cliniques commerciales, les députés sauront profiter de la navette parlementaire pour prévoir que, dans de telles situations, les cliniques commerciales recevant en urgence une patiente transférée d’une maison de naissance seront contraintes d’appliquer les tarifs pratiqués dans les établissements publics de santé, c’est-à-dire sans dépassement d’honoraires.

Debut de section - PermalienPhoto de Muguette Dini

Les amendements n° 1 et 2 du groupe CRC visent à restreindre l’expérimentation sur deux plans : d’une part, les maisons de naissance seraient des unités dites « fonctionnelles » à l’intérieur des maternités ; d’autre part, elles ne pourraient être créées que dans des établissements publics et privés à but non lucratif.

En commission, nous avons estimé que ces restrictions n’entraient pas du tout dans l’esprit de la proposition de loi que j’ai déposée. En effet, celle-ci entend justement donner aux maisons de naissance une certaine autonomie, qui est consubstantielle au projet même, mais aussi indispensable pour permettre un accompagnement global et autoriser les sages-femmes libérales à y participer.

En outre, la restriction aux établissements publics et privés à but non lucratif fait courir des risques de contentieux sur le fondement d’une rupture du principe d’égalité.

La commission a donc émis un avis défavorable sur les amendements n° 1 et 2.

Les amendements n° 8 rectifié et 13 rectifié visent à reformuler la phrase de la proposition de loi qui prévoit que « la maison de naissance doit être attenante à une structure […] de gynécologie-obstétrique avec laquelle elle passe obligatoirement une convention ».

L’amendement n° 13 rectifié tend à remplacer le mot « attenante » par le synonyme « contiguë » et ajoute qu’un accès direct doit être aménagé entre les deux structures pour permettre un transfert rapide des parturientes en cas de complication.

Au regard de cette précision utile, qui n’entame pas les chances de réussite de l’expérimentation, la commission a émis un avis favorable sur cet amendement.

Quant à l’amendement n° 8 rectifié, il prévoit également que la maison de naissance doit être attenante au service de gynécologie-obstétrique, mais il requiert en outre un avis favorable du chef de ce service avant que ne soit conclue la convention entre l’établissement et la maison de naissance. Or c’est la maternité, privée ou publique, qui s’engage et pas uniquement le chef de service, dont l’avis peut varier et qui peut, de toute façon, changer.

Considérant que l’amendement n° 8 rectifié introduit des rigidités supplémentaires et contient des dispositions qui relèvent, non de la loi, mais du cahier des charges ou du décret en Conseil d’État, la commission a émis un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, permettez-moi tout d’abord de vous dire mon plaisir de vous retrouver à l’occasion du débat au fond sur cette proposition de loi autorisant l’expérimentation des maisons de naissance.

Avec l’amendement n° 1, Mme Cohen défend en fait les filières d’accouchement physiologique dans les maternités, telles qu’elles existent aujourd’hui. Je suis, pour ma part, tout à fait favorable au développement de salles d’accouchement physiologique dans les maternités. Pour autant, ce développement ne me semble pas en contradiction avec l’expérimentation d’une autre démarche, qui est celle des maisons de naissance. Ces deux démarches se complètent plus qu’elles ne s’opposent.

Pour cette raison, je sollicite le retrait de cet amendement. À défaut, j’y serais défavorable.

Comme la commission, le Gouvernement est défavorable à l’amendement n° 8 rectifié, car les précisions qu’il tend à apporter quant à l’organisation des relations entre la maison de naissance et la maternité relèvent de l’organisation interne de celle-ci ou de dispositions réglementaires : elles n’ont donc pas vocation à se trouver dans un texte de loi.

L’amendement n° 13 rectifié introduit avant tout un débat sémantique. Nous sommes d’accord sur le fait que la maison de naissance doit être accolée à la maternité. Est-ce le mot « attenante » ou le mot « contiguë » qui est le plus propre à assurer cette absolue proximité ? Je m’en remets, sur ce point, à la sagesse de la Haute Assemblée.

J’en viens à l’amendement n° 2.

Tout d’abord, nous ne pouvons pas, en l’état actuel du droit, établir de différences entre les établissements auxquels pourraient être accolées des maisons de naissance. Il est donc impossible de réserver le principe d’expérimentation des maisons de naissances à un certain type d’établissements de santé. L’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 2 est donc défavorable.

Je souhaite néanmoins dire à Mme Cohen et à M. Watrin que je partage une des préoccupations qu’ils ont exprimées : il est effectivement nécessaire de mettre en place des dispositifs qui nous permettent de mieux contrôler les dépassements d’honoraires, et la question des accouchements ne peut pas rester en dehors de ce débat.

Cela étant, je tiens à préciser que, en cas d’urgence et de nécessité médicale d’accueillir dans une maternité privée une femme provenant d’une maison de naissance, il va de soi – c’est la loi ! – que, s’agissant d’une mission de service public, ce sont les tarifs opposables qui s’appliqueraient. Donc, dans le cas où une femme accoucherait dans une maison de naissance et devrait être reçue en urgence dans un établissement de santé, qu’il soit public ou privé, il ne pourrait pas lui être appliqué de dépassement d’honoraires.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

La parole est à M. Gilbert Barbier, pour explication de vote sur l'amendement n° 8 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilbert Barbier

Je m’étonne de la réponse faite quant à la nécessité d’obtenir préalablement l’accord du chef de service. On est dans une phase expérimentale, ce qui signifie qu’il est prévu de commencer à étudier quelques cas d’implantation de ces maisons de naissance.

Dans ce cadre, la responsabilité du chef de service de gynécologie-obstétrique de l’établissement qui se lie à une maison de naissance est évidente. Pour que cette phase expérimentale soit probante et couronnée de succès, il faut véritablement une symbiose entre le chef de service de gynécologie-obstétrique et ceux qui prennent l’initiative d’ouvrir une maison de naissance.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote sur l'amendement n° 13 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Cohen

Si j’ai bien compris l’objet de cet amendement, à savoir essayer de réduire un certain nombre de risques, il soulève de nombreuses questions.

Il pose tout d’abord celle du financement des travaux nécessaires pour qu’un accès direct soit aménagé entre un établissement de santé et une maison de naissance. Imaginons que l’établissement de santé en question soit public et que la maison de naissance soit créée sur l’initiative de professionnels qui décideraient de se regrouper ou par une entreprise qui fait de la santé son commerce, qui paiera ces aménagements ? Les travaux devront-ils être supportés par les sages-femmes, par le groupe de santé privé propriétaire ou actionnaire de l’établissement ou par l’hôpital public ?

À nos yeux, cette dernière option n’est évidemment pas acceptable. Les établissements publics de santé, qui connaissent déjà des difficultés financières majeures, ne doivent pas être amenés à financer des travaux qui bénéficient, directement ou indirectement, à des structures privées lucratives, quelle que soit leur forme.

Cet amendement pose aussi la question de la prise en charge des soins non programmés. Nous savons toutes et tous ici que ce sont les soins qui coûtent le plus cher à l’hôpital. Dès lors, pourrait-on imaginer que, en cas de difficulté, voire en cas de faute des professionnels intervenant dans la maison de santé, les dépenses supplémentaires supportées par l’établissement public en raison de ces soins urgents non programmés seraient compensées par la maison de santé ?

De plus, si aucun professionnel n’est disponible dans la maternité pour assurer l’urgence venue de la maison de santé, qui engagera sa responsabilité juridique ? Est-ce la maison de naissance ou la maternité ? C’est une responsabilité juridique dont il convient de rappeler qu’elle est à prouver.

Quant à notre préoccupation portant sur les dépassements d’honoraires, je ne remets évidemment pas en cause la réponse que vous nous avez faite, madame la ministre, mais il me semble que des précisions mériteraient d’être apportées.

En résumé, il ne nous paraît pas raisonnable d’adopter un amendement et un article pouvant exposer les femmes à de tels tarifs prohibitifs, alors que les maisons de naissance bénéficieront déjà de financements publics.

Cet amendement allant toutefois dans le sens d’un petit renforcement de la sécurité sanitaire, nous nous abstiendrons, même si, je le rappelle, il ne répond pas à l’ensemble des problèmes que j’ai évoqués et suscite plus d’interrogations qu’il ne fournit de réponses.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

En conséquence, l'amendement n° 2 n'a plus d'objet.

L'amendement n° 12 rectifié, présenté par MM. Barbier, Mézard et Alfonsi, Mme Laborde et MM. Mazars, Requier et Tropeano, est ainsi libellé :

Alinéa 1, première phrase

Après le mot :

sages-femmes

insérer les mots :

et des maïeuticiens

La parole est à M. Gilbert Barbier.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilbert Barbier

C’est un amendement d’appel.

On parle beaucoup de parité dans cette enceinte ; ce fut encore été le cas ce matin. Or, dans cette proposition de loi, on parle uniquement des sages-femmes et on laisse de côté les maïeuticiens. Ceux-ci sont de plus en plus nombreux, et j’aurais souhaité qu’ils puissent être mentionnés dans ce texte.

Debut de section - PermalienPhoto de Muguette Dini

Si je comprends la volonté légitime de ne pas exclure les hommes de l’exercice en maison de naissance, cet amendement n’est pas utile au regard du code de la santé publique. En effet, celui-ci définit la profession de sage-femme et précise qu’elle peut naturellement être exercée par un homme ou par une femme. Le terme de maïeuticien n’apparaît pas dans le code : il ne convient donc pas de l’utiliser ici.

Je vous demande par conséquent, monsieur Barbier, de bien vouloir retirer cet amendement.

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre

L’avis du Gouvernement rejoint celui de la commission.

Je suis toutefois sensible à votre démarche, monsieur le sénateur, et comprends donc que, chaque fois que sera exprimée la demande de féminiser des titres ou des fonctions, vous y souscrirez avec un enthousiasme qu’on ne vous connaissait pas jusqu’à présent.

Sourires.

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre

Cela dit, le code de la santé publique évoque la profession de sage-femme, sans distinction de sexe.

Votre amendement n’a donc pas lieu d’être au regard des termes de la loi, et il serait idéal que vous le retiriez.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

L'amendement n° 12 rectifié est retiré.

L'amendement n° 3, présenté par Mmes Cohen, Pasquet et David, MM. Watrin, Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéa 2, dernière phrase

Supprimer cette phrase.

Cet amendement n’a plus d’objet du fait de l’adoption de l’amendement n° 13 rectifié.

L'amendement n° 9 rectifié, présenté par MM. Barbier, Mézard et Alfonsi, Mme Laborde et MM. Mazars, Requier et Tropeano, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

Sont prises en charge en maison de naissance les femmes dont la grossesse ne présente pas de risque selon les critères définis par la Haute autorité de santé et qui sont volontaires, après avoir été informées par voie écrite des conditions de leur prise en charge, notamment de l’absence de péridurale, des modalités de transfert le cas échéant, de la gestion des complications de l’accouchement et du suivi post-partum.

La parole est à M. Gilbert Barbier.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilbert Barbier

Cet amendement vise à préciser les conditions de prise en charge en maison de naissance, qui ne me semblent pas suffisamment définies dans la proposition de loi.

Il convient en effet de s’assurer que la femme accueillie en maison de naissance a été informée correctement, que sa présence est bien volontaire. Il s’agit d’éviter toute pression à caractère idéologique ou toute orientation forcée par manque de place dans une maternité.

Tout le problème est bien de savoir comment, et sur la base de quels éléments, les femmes seront orientées vers ces maisons de naissance. Il convient de ne pas ouvrir la voie à d’éventuelles dérives qu’on pourrait regretter par la suite.

Debut de section - PermalienPhoto de Muguette Dini

Je crois avoir compris votre inquiétude, mon cher collègue. Toutefois, cet amendement vise à apporter des précisions qui relèvent du cahier des charges que la Haute Autorité de santé devra adopter, voire du décret en Conseil d’État.

Plus généralement, cet amendement révèle une défiance latente envers le travail de préparation à l’accouchement réalisé par les sages-femmes. Comment imaginer, en effet, que des femmes non volontaires et n’étant pas au courant de l’absence de péridurale seraient contraintes d’accoucher dans une maison de naissance ?

De plus, s’il existait vraiment des pressions à caractère idéologique, comme vous le laissez entendre, on peut se demander en quoi une information écrite serait une solution adéquate pour lutter contre celles-ci.

L’avis de la commission est donc défavorable.

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre

L’avis du Gouvernement est également défavorable.

Je comprends toutefois les préoccupations de M Barbier, s’agissant notamment de la nécessité de bien préciser que seules des femmes ne présentant pas une grossesse à risque pourront être accueillies dans des maisons de naissance.

Il reste que, d’une part, ces précisions ne relèvent pas de la loi et que, d’autre part, les dispositions actuelles du code de la santé publique ainsi que les termes mêmes de la proposition de loi permettent déjà cet encadrement.

Tout d’abord, ces précisions relèvent du domaine réglementaire. Elles devront donc être apportées dans les cahiers des charges qui seront signés avec les maisons de naissance expérimentales.

Par ailleurs, dans ces maisons de naissance, les femmes accoucheront sous la supervision de sages-femmes. Or les sages-femmes ne peuvent prendre en charge que des grossesses considérées comme n’étant pas à risque. Puisque l’article 1er de la présente proposition de loi précise que la prise en charge se fait par les sages-femmes, il exclut, de fait, les situations à risque.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

La parole est à M. Gilbert Barbier, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilbert Barbier

Vous avez dit, madame la ministre, que l’on sait dès le départ si la grossesse est sans risque. Cela m’étonne. Ce n’est pas à vous que je vais apprendre que les situations à risque peuvent apparaître juste avant, ou pendant, l’accouchement. Diriger les femmes qui vivent ces situations vers un service qui ne serait pas habilité à les accueillir ou ne serait pas considéré comme satisfaisant pose donc problème.

On ne peut pas dire que l’accouchement ne présente aucun risque, car des complications peuvent arriver à tout moment.

Si le problème soulevé par cet amendement pouvait être résolu par voie réglementaire, je serais disposé à le retirer. Cependant, je ne le ferai pas sur les fondements présentés par Mme la ministre.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

La parole est à M. Dominique Watrin, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Watrin

Contrairement à ce que semblent penser la commission et le Gouvernement, l’amendement présenté par M. Barbier va dans le bon sens, puisqu’il a pour objet de renforcer l’information des femmes qui opteraient pour un accouchement au sein d’une maison de naissance.

Personne ne peut s’opposer à ce que les couples et les femmes soient mieux informés, notamment sur les conditions précises de la prise en charge de l’accouchement.

Nous voterons donc en faveur de cet amendement, que nous souhaiterions toutefois sous-amender, afin de préciser que l’information porte également sur les tarifs pratiqués par la maison de naissance, ainsi que par ceux pratiqués par la maternité à laquelle elle est adossée. Nous proposons par conséquent, après le mot « notamment » de rédiger ainsi la fin de l’alinéa : « des tarifs pratiqués par la maison de naissance et par la structure autorisée pour l’activité de gynécologie-obstétrique avec laquelle elle a signé une convention ».

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

Je suis donc saisi d’un sous-amendement n° 15, présenté par M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, et ainsi libellé :

Alinéa 2

Après le mot :

notamment

Rédiger comme suit la fin de cet alinéa :

des tarifs pratiqués par la maison de naissance et par la structure autorisée pour l’activité de gynécologie-obstétrique avec laquelle elle a signé une convention.

Ce sous-amendement a déjà été défendu.

Quel est l’avis de la commission ?

Debut de section - PermalienPhoto de Muguette Dini

Bien que la commission ne se soit pas réunie pour l’étudier, j’émets un avis défavorable sur ce sous-amendement, qui est dans le droit fil de l’amendement n° 9 rectifié.

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre

Je comprends le sens de ce sous-amendement. Pourtant, il me semble que nous n’avons pas intérêt à multiplier, dans la loi, les éléments sur lesquels doit porter l’information des patientes.

De manière générale, plus les listes sont longues, plus on risque d’exclure d’éléments. Or il me paraît important, en l’espèce, d’informer les femmes sur un grand nombre de points.

En outre, il reviendra au cahier des charges de déterminer les conditions dans lesquelles les expérimentations seront faites. Nous aurons, je vous le dis, la volonté de privilégier des projets qui s’inscriront clairement dans une démarche de tarif opposable pour les patientes.

J’en viens aux propos tenus à l’instant par M. Barbier.

Monsieur le sénateur, vous avez tout à fait le droit de dire que vous êtes opposé aux maisons de naissance ; mais prétendre que l’incertitude sur le risque encouru par une femme enceinte rend compliqué le recours aux maisons de naissance, ce n’est pas un argument !

Il est vrai que l’on ne sait pas au début d’une grossesse si celle-ci est à risque. En revanche, on peut très bien transférer une femme censée accoucher dans une maternité de niveau 1, parce que sa grossesse n’a pas initialement été considérée comme à risque, vers une maternité de niveau 2 ou 3 si des aléas apparaissent. Cette situation existe et, fort heureusement, notre système de santé permet d’y faire face. Votre argument ne me paraît donc pas de nature à inverser la démarche entreprise au travers de cette proposition de loi, et plus particulièrement de son article 1er.

Le sous-amendement n’est pas adopté.

L’amendement n’est pas adopté.

L’article 1 er est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

L’amendement n° 14 rectifié, présenté par Mmes Génisson, D. Gillot, Alquier, Campion, Claireaux et Demontès, MM. Godefroy, Jeannerot et Kerdraon, Mmes Duriez et Ghali, MM. Labazée, Le Menn, Cazeau et J.C. Leroy, Mmes Meunier, Printz, Emery-Dumas et Schillinger, MM. Teulade et Vergoz, Mme Lepage et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :

Après l’article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’expérimentation des maisons de naissance ne doit pas obérer l’aménagement du territoire en matière d’égalité d’accès aux services de gynécologie-obstétrique. De même, l’égalité de traitement et de prise en charge des parturientes entre les établissements publics et privés doit demeurer un objectif incontournable de la politique de santé.

La parole est à M. Ronan Kerdraon.

Debut de section - PermalienPhoto de Ronan Kerdraon

En présentant cet amendement, le groupe socialiste avait pour intention de rappeler des principes fondamentaux en matière d’égalité d’accès aux soins sur le territoire. Il s’agissait ainsi de préciser que celle-ci ne saurait être contournée par la mise en place de l’expérimentation des maisons de naissance, telle qu’elle est prévue par la présente proposition de loi. Plusieurs d’entre nous s’étaient exprimés sur ce point lors de la discussion générale.

Sur la question délicate de la fermeture de maternités, vous avez insisté, madame la rapporteur, sur le fait que les maisons de naissance, contiguës à des maternités pour en garantir la sécurité, ne pourront en aucun cas se substituer à des maternités qui ferment.

Madame la ministre, vous avez clairement affirmé que les fermetures de maternité ne peuvent répondre qu’à une exigence de sécurité. Par ailleurs, vous avez insisté sur le respect de l’égalité d’accueil dans le secteur public comme dans le secteur privé.

Ce faisant, vous nous avez complètement rassurés. Nous retirons donc notre amendement.

(Non modifié)

Pour la mise en œuvre de l’expérimentation, il est dérogé aux articles L. 1434-2, L. 1434-7 et L. 6122-1 du code de la santé publique.

Les maisons de naissance ne sont pas des établissements de santé au sens de l’article L. 6111-1 du même code et ne sont pas soumises au chapitre II du titre II du livre III de la deuxième partie du même code.

Il peut être dérogé aux dispositions du code de la sécurité sociale relatives aux modalités d’application de la prise en charge de certains actes inscrits sur la liste prévue à l’article L. 162-1-7 de ce même code.

Par dérogation à l’article L. 162-22-13 du même code, les dépenses nécessaires au fonctionnement des maisons de naissance peuvent être prises en charge en tout ou partie par la dotation annuelle prévue à l’article L. 162-22-14 du même code.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Cohen

L’article 2 aborde la question, particulièrement importante pour le groupe CRC, du financement des maisons de naissance. Je ne reviendrai pas sur la situation dramatique des hôpitaux et des maternités de proximité, sur laquelle nous nous sommes déjà exprimés. Je remarque d’ailleurs que, visiblement, notre constat est partagé par le groupe socialiste.

Les établissements publics de santé se voient imposer des règles de direction, de gouvernance et de financement proches de celles qui sont pratiquées dans les structures lucratives, pour ne pas dire dans les entreprises, et sont de plus en plus nombreux à fermer.

Cet article prévoit d’assurer le financement des maisons de naissance, dont la forme juridique reste à définir, par la dotation annuelle prévue à l’article L. 162-22-14 du code de la sécurité sociale, qui est fonction des missions d’intérêt général. Ces sommes représentent tout de même plus de 20 % du financement des établissements publics de santé, lesquels s’en servent, on le sait, pour compenser l’insuffisance des tarifs de certains actes.

Or, en l’état actuel de la rédaction de ce texte, les maisons de naissance pourraient être tout à la fois des structures libérales au sein des établissements publics de santé, des sociétés d’exercice libéral, ou des structures détenues par des cliniques commerciales. Rien n’est précisé, et donc tout est possible.

Autrement dit, il s’agit de demander au législateur d’autoriser le versement de fonds publics initialement destinés à l’accomplissement de MIG, c’est-à-dire des missions répondant aux besoins du plus grand nombre, à des structures possiblement commerciales et lucratives, au détriment évident des maternités et hôpitaux existants.

À moins, madame la ministre, que vous ne vous engagiez lors de cette séance publique à augmenter le montant des dotations allouées en fonction des MIG à hauteur des besoins suscités par la création des maisons de naissance ? Ce serait Noël avant l’heure !

Cette annonce serait d’ailleurs un signe positif adressé à celles et ceux qui luttent en faveur d’un rehaussement des dotations allouées aux hôpitaux publics. À défaut, mes chers collègues, s’il fallait puiser dans les dotations, déjà insuffisantes au regard de leurs besoins, perçues par les établissements publics de santé, je ne vois pas comment nous pourrions nous enorgueillir d’avoir participé à la création de ces maisons.

La présente proposition de loi, comme d’ailleurs le rapport, manque cruellement d’informations sur le niveau des montants qui pourraient être puisés dans les dotations allouées en fonction des MIG.

Les expérimentations menées dans d’autres pays, par exemple au Québec, ont mis en évidence l’importante sous-estimation du coût des maisons de naissance lors de leur création. En mai 2011, le ministre de la santé du Québec, Yves Bolduc, a même constaté que le mode de financement des maisons de naissance constituait bel et bien un frein à leur développement, et a annoncé que le financement de ces dernières serait, à l’avenir, assumé à 100 % par le ministère. Tout cela nous conduit à penser qu’il pourrait en aller de même en France, ce qui réduirait sans aucun doute la part de financement dédiée aux hôpitaux et maternités publics.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

L’amendement n° 4, présenté par Mmes Cohen, Pasquet et David, MM. Watrin, Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Compléter cet alinéa par les mots :

, sans toutefois faire obstacle à l’application de l’article L. 331-2 du même code

La parole est à Mme Laurence Cohen.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Cohen

Comme l’indique l’objet de cet amendement, le troisième alinéa de l’article 2 autorise à déroger, pendant la période de l’expérimentation, à l’article L. 162-1-7 du code du code de la sécurité sociale.

Nous n’en doutons pas, Mme le rapporteur n’envisage pas de modifier les conditions de prise en charge des femmes enceintes par la sécurité sociale. Il nous semble cependant important de préciser, pour que la loi soit la plus compréhensible possible, que cette dérogation est sans effet sur les dispositions de l’article L. 331-2 du code de la sécurité sociale, qui détaillent les prestations en nature garanties aux femmes enceintes au titre de l’assurance maternité.

Debut de section - PermalienPhoto de Muguette Dini

Cet amendement vise à réaffirmer que la proposition de loi ne modifie pas les modalités de prise en charge par l’assurance maladie des frais médicaux liés à l’accouchement, engagés par les femmes enceintes.

Je tiens à le dire, s’il y a bien un point sur lequel une femme enceinte n’a pas le choix, c’est sur celui d’accoucher !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Muguette Dini

Or il me semble évident que tout accouchement, quelles qu’en soient les circonstances, doit être entièrement pris en charge par la sécurité sociale. J’ai d’ailleurs clairement détaillé dans mon rapport ce que l’assurance maladie prend en charge au titre du « parcours maternité ».

La commission s’en remet donc à la sagesse du Sénat.

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre

Ce qu’a dit Mme le rapporteur est évidemment exact. Si cette proposition de loi est adoptée, une femme accouchant dans une maison de naissance sera prise en charge au même titre que si elle accouchait au sein d’une autre structure.

Nous sommes dans le cadre d’une expérimentation, je le rappelle. Les dotations allouées au titre des MIG n’ont pas vocation, contrairement à ce que vous avez dit, madame la sénatrice, à compenser la faiblesse du niveau des tarifs. Elles ont pour objectif de rémunérer les missions spécifiques de service public accomplies par les établissements de santé.

Le financement pérenne des maisons de santé ne se fera donc pas au détriment de celui des MIG. C’est dans le cadre des expérimentations, qui porteront sur quelques unités seulement de maisons de naissance, que nous mettrons à contribution les dotations aux missions d’intérêt général, afin d’examiner si cette pratique doit être généralisée.

S’il apparaît au cours de l’expérimentation qu’une généralisation s’impose, auquel cas une loi sera nécessaire, il faudra mettre en place des mécanismes de financement identifiés et pérennes, à l’instar de ce qui existe pour l’ensemble des établissements de santé. Mais, j’insiste encore une fois sur ce point, ce sont les résultats de l’évaluation qui permettront de déterminer ce qu’il en est.

Je demande donc aux auteurs de cet amendement de bien vouloir le retirer. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

La parole est à M. Gilbert Barbier, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilbert Barbier

Je n’ai pas très bien compris quel serait le mode de financement, madame la ministre. Y aura-t-il un prélèvement sur les MIG ? Ce ne serait pas le meilleur moyen d’encourager les établissements publics à créer des maisons de naissance… Et si vous dégagez une enveloppe supplémentaire, quel en sera le montant ? Combien de structures seront-elles concernées ?

Il est nécessaire de nous apporter des précisions sur ces points ! L’amendement de Mme Cohen me paraît donc justifié.

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre

Je vous réponds sans ambiguïté, monsieur le sénateur. Un financement spécifique consacré aux expérimentations reviendra, en plus de la dotation affectée au titre des MIG, à l’établissement auquel la maison de santé sera attenante. Ce dernier ne sera donc pas pénalisé.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

La parole est à M. Philippe Bas, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Pour ma part, je voterai cet amendement.

Je comprends les objections d’ordre administratif émises par Mme la ministre, mais je ne vois pas en quoi l’adoption d’une telle disposition serait gênante.

Que la prise en charge des naissances dans ces nouvelles structures s’effectue dans des conditions de droit commun me paraît au contraire l’une des clés de la réussite de l’expérimentation. Et si celle-ci devait ne pas être prolongée, c’est de toute manière tout le dispositif qui s’effondrerait.

Nous ne créons donc pas de précédent dangereux. Je ne vois pas pourquoi nous refuserions d’ajouter une précision de bon sens dans le texte : la prise en charge se fait dans des conditions de droit commun.

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre

C’est une évidence !

Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, n'adopte pas l'amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

L’amendement n° 7, présenté par Mme Archimbaud, MM. Desessard et Placé, Mmes Aïchi, Ango Ela, Benbassa, Blandin et Bouchoux, MM. Dantec, Gattolin et Labbé et Mme Lipietz, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Les maisons de naissance ayant conclu une convention avec un établissement privé à but lucratif ne peuvent pas bénéficier de cette dotation.

La parole est à Mme Aline Archimbaud.

Debut de section - PermalienPhoto de Aline Archimbaud

Nous proposons que seules les maisons de naissance ayant conclu une convention avec un établissement public ou privé à but non lucratif puissent éventuellement bénéficier des MIGAC, que nous venons d’évoquer.

Une maison de naissance pourrait se conventionner avec une maternité privée commerciale, mais sans bénéficier du financement public pris sur l’enveloppe des MIG. Il s’agit, me semble-t-il, d’une proposition cohérente, qui, puisque nous parlons de fonds publics, présente l’avantage de concilier expérimentation, recherche d’innovation et utilisation rigoureuse des fonds publics.

Debut de section - PermalienPhoto de Muguette Dini

Mme la ministre s’est déjà exprimée, me semble-t-il, sur le sujet. La proposition de loi permet au Gouvernement, s’il l’estime utile, d’attribuer une dotation aux maisons de naissance à partir de l’enveloppe MIGAC.

Il nous est ici proposé d’exclure d’un tel financement les maisons de naissance ayant conclu une convention avec un établissement privé à but lucratif. Si je peux comprendre la volonté des auteurs de cet amendement, je ne suis pas certaine qu’une telle mesure ne constitue pas une rupture d’égalité.

La commission s’en remet à la sagesse du Sénat.

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre

Comme j’ai déjà eu l’occasion de le préciser, la loi ne nous permet pas d’établir de distinction entre les établissements de santé. Cet amendement est donc problématique d’un point de vue juridique.

Je veux vous assurer par ailleurs, madame la sénatrice, que nous aurons la volonté de privilégier des projets porteurs d’une certaine conception du service public de la naissance, du suivi des grossesses et de la santé.

Je demande à Mme Archimbaud de bien vouloir retirer son amendement. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Aline Archimbaud

Je prends bonne note des explications de Mme la ministre.

Je ne veux pas fragiliser juridiquement la proposition de loi, même si je maintiens les préoccupations de fond que j’ai exprimées. Aussi, compte tenu des engagements qui viennent d’être pris par le Gouvernement, je retire mon amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

L’amendement n° 7 est retiré.

Je mets aux voix l’article 2.

L'article 2 est adopté.

(Non modifié)

Les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale arrêtent, en conformité avec un cahier des charges adopté par la Haute Autorité de santé et après avis conforme de celle-ci, la liste des maisons de naissance autorisées à fonctionner à titre expérimental.

La suspension de fonctionnement d’une maison de naissance inscrite sur la liste peut être prononcée par le directeur général de l’agence régionale de santé pour les motifs et dans les conditions prévues par l’article L. 6122-13 du code de la santé publique. Le retrait d’inscription à la liste est prononcé par les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale en cas de manquement grave et immédiat à la sécurité ou lorsqu’il n’a pas été remédié aux manquements ayant motivé la suspension.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

L’amendement n° 5, présenté par Mmes Cohen, Pasquet et David, MM. Watrin, Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéa 1

Remplacer les mots :

maisons de naissance autorisées à fonctionner à titre expérimental

par les mots :

établissements autorisés à accueillir à titre expérimental un service ou une unité fonctionnelle dénommé maison de naissance

La parole est à Mme Laurence Cohen.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Cohen

Cet amendement de cohérence n’ayant plus d’objet, je le retire.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

L’amendement n° 5 est retiré.

Je suis sais de deux amendements.

L’amendement n° 10 rectifié, présenté par MM. Barbier, Mézard et Alfonsi, Mme Laborde et MM. Mazars, Requier et Tropeano, est ainsi libellé :

Alinéa 1

Compléter cet alinéa par les mots :

sous réserve que le service de gynécologie obstétrique auquel elles sont attenantes ait une activité supérieure à 1 000 accouchements par an

La parole est à M. Gilbert Barbier.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilbert Barbier

Cet amendement vise à fixer un seuil d’implantation : les maternités auxquelles les maisons de naissance seront attenantes devront avoir une activité supérieure à 1 000 accouchements par an.

Nous risquons en effet d’avoir un vrai problème. Dans les départements ruraux faiblement peuplés, l’ouverture de maisons de naissance pourrait conduire certaines maternités à rétrograder de catégorie, ce qui serait dramatique pour elles, compte tenu de leur éloignement à l’égard d’établissements plus sophistiqués, notamment les centres hospitaliers.

Nous proposons donc qu’aucune maison de naissance ne puisse être implantée si l’activité de l’établissement auquel elle est adossée est inférieure à 1 000 accouchements par an.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

L’amendement n° 11 rectifié, présenté par MM. Barbier, Mézard et Alfonsi, Mme Laborde et MM. Mazars, Requier et Tropeano, et ainsi libellé :

Alinéa 1

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Dans les départements où une maison de naissance est autorisée, aucune autorisation d’activité de gynécologie-obstétrique située dans un rayon de 50 kilomètres ne peut être suspendue ou retirée pour un motif lié au volume de l’activité pendant la durée de l’expérimentation.

La parole est à M. Gilbert Barbier.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilbert Barbier

Cet amendement tend également à répondre à une inquiétude que l’on rencontre en milieu rural : l’implantation d’une maison de naissance ne doit pas « siphonner » l’activité d’un service de gynécologie-obstétrique situé dans un rayon de 50 kilomètres.

Debut de section - PermalienPhoto de Muguette Dini

Je peux tout à fait comprendre l’inquiétude exprimée par M. Barbier au travers de l’amendement n° 10 rectifié. Toutefois, la précision demandée relève du niveau réglementaire et du cahier des charges de la HAS.

En outre, en l’état actuel des choses et eu égard à la proportion de femmes désireuses d’accoucher en maisons de naissance, je ne vois pas comment nous pourrions avoir une maison de naissance à côté d’une clinique ayant une activité inférieure à 1 000 accouchements par an.

En effet, comme de 4 % à 5 % des parturientes souhaitent accoucher dans une maison de naissance, il ne pourrait y avoir dans ces établissements qu’une quarantaine ou une cinquantaine d’accouchements par an, et donc une seule sage-femme. Du point de vue de la sécurité, ce n’est pas envisageable ! Il me paraît donc peu probable que la Haute autorité de santé autorise l’ouverture de maisons de naissance attenantes à des petites maternités.

Par ailleurs, pourquoi le législateur, qui fixe un cadre, devrait-il exclure a priori certains projets locaux ? Et pourquoi un seuil de 1 000 accouchements et non, par exemple, de 2 000 ?

Pour ma part, je préfère faire confiance à la Haute autorité de santé. La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

L’amendement n° 11 rectifié vise à geler pendant la durée de l’expérimentation la fermeture d’une maternité située dans un rayon de 50 kilomètres d’une maison de naissance, si cette fermeture est liée au volume d’activité.

Nous avons eu un long débat en commission sur cet amendement. Je comprends le souci de protéger certaines petites maternités dont l’équilibre, au regard du seuil des 300 accouchements, est précaire. Cependant, j’ai mis en avant certaines difficultés de rédaction, notamment pour les zones urbaines ou dans les métropoles. Par exemple, Pontoise est située à environ 28 kilomètres du centre de Paris : le dispositif proposé interdirait donc toute fermeture de maternité dans la région d’Île-de-France si la maison de naissance et celle du CALM étaient autorisées à fonctionner. Le problème serait le même à Lyon ou à Marseille.

En tout état de cause, la proposition de loi engage la voie d’une expérimentation – Mme la ministre l’a rappelé à plusieurs reprises –, et le nombre de maisons autorisées devrait rester faible durant cette période. De plus, ces structures sont par nature de petite taille, avec un nombre d’accouchements autour de 100 ou 200.

La commission, qui est sensible aux questions d’aménagement du territoire et de proximité de l’accès aux soins, a finalement émis un avis favorable sur cet amendement.

À titre personnel, je souhaite que le Gouvernement s’engage à ne pas autoriser l’ouverture d’une maison de naissance – ce sera la compétence propre des ministres de la santé et de la sécurité sociale – lorsque cela pourrait mettre en difficulté une petite maternité.

L’avis de la commission est donc favorable.

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre

Le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces deux amendements.

L’amendement n° 10 rectifié vise à empêcher qu’une maison de naissance ne puisse être rattachée à une maternité pratiquant moins de 1 000 accouchements par an.

Outre qu’il s’agit d’un seuil arbitraire – pourquoi 1 000 et pas 1 500, par exemple ? –, le nombre d’accouchements réalisés n’est pas le seul facteur de sécurité. L’enjeu réside non pas dans le nombre d’accouchements pratiqués par l’établissement de rattachement, mais dans les garanties de prise en charge offertes aux femmes confrontées à une situation difficile ou à un accouchement plus délicat. C’est le critère de sécurité, et non du nombre d’accouchements, qui doit être retenu.

L’amendement n° 11 rectifié pose un problème important. Le directeur général de l’Agence régionale de santé doit être en mesure de porter une appréciation en termes de sécurité sur tous les établissements de santé du territoire.

Écrire dans la loi qu’un établissement de santé, par principe, ne peut pas faire l’objet d’une mesure de fermeture, de suspension, d’adaptation ou de rééquilibrage parce qu’il se situe à moins de 50 kilomètres d’une maison de santé, cela reviendrait à interdire, pour des raisons uniquement d’ordre géographique, au directeur général de l’Agence régionale de santé d’avoir un droit de regard sur certains établissements. En cas de problème de sécurité dans un établissement, on se retrouverait dans une situation de conflit de normes et on ne pourrait pas, pour des motifs purement administratifs, prendre les décisions qui s’imposent.

J’attire votre attention sur le caractère très dangereux de cet amendement, au regard de l’appréciation qui doit accompagner chaque décision relative aux établissements de santé.

Nous ferons bien sûr en sorte, madame la rapporteur, que les expérimentations aient lieu dans des établissements ne posant aucune difficulté. Par ailleurs, si la généralisation est décidée, il faudra bien sûr veiller à assurer toutes les conditions de sécurité requises.

Lors de la discussion générale, nous avons eu l’occasion de souligner que les maisons de naissance devaient être considérées comme une alternative proposée aux femmes, soit pour améliorer la qualité de l’accouchement, soit pour promouvoir une vision plus naturelle de l’acte. Elles ne remplaceront en aucun cas les structures existantes, notamment les petites maternités. Cela n’aurait pas de sens : toutes les femmes qui vont dans des petites maternités n’ont pas forcément envie d’accoucher dans une maison de naissance. C’est un point très important pour le Gouvernement.

Nous accordons une attention particulière à la question de la répartition de l’offre de soins et des maternités. J’ai d’ailleurs eu l’occasion de maintenir pour des raisons d’isolement géographique une maternité dont on me demandait la fermeture. Si l’appréciation doit être, selon moi, portée au cas par cas, elle ne doit pas non plus se faire au détriment de la sécurité des patientes et ne tenir compte que des raisons de proximité. Les conséquences pourraient en effet être graves.

Je vous demande par conséquent de bien vouloir retirer cet amendement, monsieur le sénateur. À défaut, j’émettrai un avis très défavorable pour des raisons de sécurité.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement n'est pas adopté.

L'article 3 est adopté.

(Non modifié)

Un an avant le terme de la dernière autorisation attribuée à une maison de naissance, le Gouvernement adresse au Parlement une évaluation de l’expérimentation. –

Adopté.

(Non modifié)

Les conditions de l’expérimentation et notamment les conditions d’établissement de la liste des maisons de naissance autorisées à fonctionner, les conditions de prise en charge par l’assurance maladie de la rémunération des professionnels et les conditions spécifiques de fonctionnement des maisons de naissance sont fixées par décret en Conseil d’État.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

L’amendement n° 6, présenté par Mmes Cohen, Pasquet et David, MM. Watrin, Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Supprimer les mots :

, les conditions de prise en charge par l’assurance maladie de la rémunération des professionnels

La parole est à Mme Laurence Cohen.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

L’amendement n° 6 est retiré.

Je mets aux voix l’article 5.

L'article 5 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

Avant de mettre aux voix l’ensemble de la proposition de loi, je donne la parole à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Cohen

L’expérimentation des maisons de naissance est intéressante en ce qu’elle ouvre davantage de choix aux femmes et aux couples en termes de conditions d’accouchement.

Les amendements défendus par le groupe CRC visaient à clarifier les choses, car le législateur ne peut, lorsqu’il adopte une loi, faire abstraction du climat général. Or les structures publiques de proximité subissent malheureusement aujourd’hui trop d’atteintes, qu’il s’agisse des maternités ou des centres d’interruption volontaire de grossesse, même si le texte ne les concerne pas.

L’adoption de la proposition de loi autorisant l’expérimentation des maisons de naissance ne lèvera absolument pas les doutes et les interrogations qui se font jour sur le statut juridique de ces établissements et sur leur financement. Elle ne mettra pas non plus fin aux menaces qui continuent à peser sur les maternités de proximité. Il est regrettable que les réponses fournies, y compris par Mme la ministre, pour nous rassurer, n’aient pas été assorties d’engagements concrets.

De nombreuses questions sont aussi restées en suspens.

Prenant appui sur notre volonté de laisser derrière nous les lois passées, comme la loi HPST, ainsi que les questions de tarification, et forts de notre désir de favoriser les maternités, qui sont d’ailleurs nombreuses à se mobiliser actuellement contre des fermetures – je pense notamment à la maternité des Bluets et à celle des Lilas –, nous ne voterons pas cette proposition de loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Ronan Kerdraon

Nous voilà parvenus au terme d’un débat amorcé de longue date.

En 1998 – au siècle dernier ! –, les premières réflexions autour d’un cadre juridique avaient été amorcées, avec la création d’un groupe de travail national sur les maisons de naissance. À l’époque, M. Kouchner était secrétaire d’État à la santé.

En 2010, cette expérimentation avait été soumise au Parlement. On se souvient des débats vifs suscités par l’article 40 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2011. Il y était question de sécurité de la femme et de l’enfant, mais aussi d’accouchement moins médicalisé, plus naturel, répondant aux choix de certaines femmes. Le tout sur fond de restructuration hospitalière. L’article finalement adopté en commission mixte paritaire connaissait un nouveau rebondissement avec une censure, sur la forme, du Conseil constitutionnel.

Le Sénat est aujourd’hui de nouveau saisi de la question de l’expérimentation des maisons de naissance à l’occasion de l’examen de la proposition de loi déposée par Mme Dini et le groupe UDI-UC.

Ce texte, les précisions qui lui ont été apportées, ainsi que nos débats, ont été sous-tendus par une exigence de sécurité, par le désir de prendre en considération les choix de certaines femmes, mais aussi par la volonté de respecter une égalité d’accès aux soins sur notre territoire.

Des évolutions d’opinions intervenues dans la société en général, mais aussi chez les professionnels de santé, notamment les gynécologues-obstétriciens, sont aussi constatées.

Au vu de ces éléments, et dès lors que les garanties fondamentales sont assurées, une expérimentation paraît acceptable.

En conséquence, comme l’avait annoncé ma collègue Catherine Génisson à la fin de son intervention dans la discussion générale, le groupe socialiste accepte que les maisons de naissance expérimentales voient le jour.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Procaccia

Monsieur le président, madame la ministre, madame le rapporteur, mes chers collègues, le Sénat a déjà débattu de l’expérimentation des maisons de naissance dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2011. Notre assemblée avait alors rejeté cette proposition en raison de l’absence de garanties de nature à préserver le haut niveau de sécurité des soins prodigués aux parturientes.

Cette expérimentation des maisons de naissance répond au désir d’un petit nombre de femmes souhaitant un accouchement moins médicalisé, comme cela se pratiquait il n’y a pas si longtemps. La plupart des grossesses se présentent bien et ne sont pas pathologiques. Elles ne devraient donc pas poser de problème.

Ce texte a le mérite de laisser le choix à la femme de pouvoir accoucher comme elle l’entend, même si je suis persuadée que très peu d’entre elles opteront pour les maisons de naissance.

Le groupe UMP est favorable au texte présenté et rapporté, avec une grande force de conviction et de persuasion, par notre collègue Muguette Dini, dont je salue l’excellent travail. Le dispositif remplit deux conditions qui nous semblent indispensables : l’activité de la maison de naissance sera comptabilisée au titre de la maternité et la nouvelle structure sera adossée à celle-ci, comme nous l’avons décidé en votant un amendement à l’article 1er.

Si ce texte est adopté, comme je l’espère, il permettra de répondre à une attente qui s’exprime depuis de nombreuses années. §

Debut de section - PermalienPhoto de Gilbert Barbier

Je comprends parfaitement les intentions de l’auteur de cette proposition de loi, Mme Dini. Elle a cédé à la demande d’une corporation de sages-femmes qui, considérant que les maternités sont surmédicalisées – et cela pose problème à un certain nombre de femmes en termes d’autorité et de responsabilité –, souhaitent expérimenter les maisons de naissance.

Il faut replacer cette démarche dans son contexte philosophique.

Bien entendu, dans la mesure où la proposition de loi prévoit de rapprocher les maisons de naissance d’un service de gynécologie-obstétrique et de les placer pratiquement « sous son aile », cette expérimentation devrait être positive. Faudra-t-il la généraliser pour autant ?

Le véritable problème, selon moi, est le maintien de l’activité d’un certain nombre de maternités.

Madame le ministre, vous avez refusé l’amendement n° 11 rectifié. Pourtant, l’argument géographique a été essentiel dans votre décision de maintenir la maternité de Die !

La fermeture de maternités pour cause d’activité insuffisante inquiète le monde rural, même si vous ne prévoyez certainement pas d’aller dans ce sens.

En tout état de cause, l’ouverture de maisons de naissance, qui peut sembler au départ une idée intéressante, fragilisera nos maternités, qu’elles soient publiques ou privées.

C’est la raison pour laquelle le groupe du RDSE s’abstiendra sur ce texte.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Vanlerenberghe

Je salue l’initiative de Mme Dini, qui nous a présenté cette proposition de loi, et je me félicite de la qualité des débats. Je regrette qu’on ait attendu trop longtemps pour adopter cet excellent texte qui, je l’espère, sera repris et voté par l’Assemblée nationale.

Grâce aux amendements adoptés et au cahier des charges qui encadrera juridiquement la création des maisons de naissance, les risques auxquels certains ont fait allusion, à savoir que ces établissements se détournent de leur vocation, seront très réduits, voire exclus.

Les femmes ainsi que les sages-femmes qui le souhaitent pourront ainsi expérimenter un mode d’accouchement plus personnalisé, plus naturel et moins médicalisé.

Nos débats ont montré combien il est difficile de nous inscrire dans une perspective expérimentale. L’initiative de Muguette Dini présente aussi l’avantage de concrétiser le droit à l’expérimentation, dont nous faisons trop peu usage dans notre pays.

Pour toutes ces raisons, le groupe UDI-UC votera cette proposition de loi que nous devons à la persévérance de Muguette Dini. Qu’elle en soit remerciée ! §

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

Personne ne demande plus la parole ?...

Je mets aux voix l’ensemble de la proposition de loi dans le texte de la commission, modifié.

La proposition de loi est adoptée.

Debut de section - PermalienPhoto de Muguette Dini

Je me réjouis que nous ayons voté cette proposition de loi relative à l’expérimentation des maisons de naissance. Mme la ministre a beaucoup insisté sur leur caractère expérimental, très important, qui permettra d’étudier leur fonctionnement et, éventuellement, de l’améliorer.

Je tiens à vous remercier tout particulièrement, madame la ministre, du soutien que vous avez apporté à ce texte. Il ne m’a d’ailleurs pas étonnée puisque vous vous étiez déclarée favorable à cette création lors de l’examen de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2011. Je me réjouis aussi de son adoption en pensant aux personnes qui attendaient ce texte depuis si longtemps : les jeunes mamans, les couples et les sages-femmes désireuses de travailler dans une maison de naissance.

Réfléchissant à mon expérience personnelle, je me disais que j’avais vécu un cycle, qui s’est déroulé sur quelques décennies. Lors de la naissance de mes enfants, il n’y avait ni médicalisation ni péridurale. Nous avons connu, ensuite, une extrême médicalisation et la généralisation de la péridurale. Aujourd’hui, enfin, un certain nombre de femmes souhaitent en revenir à des méthodes plus simples et plus naturelles.

J’espère que cette proposition de loi suivra son chemin, qu’elle pourra être examinée et votée par l’Assemblée nationale à l’automne prochain, ce qui permettra de commencer les expérimentations.

Madame la ministre, mes chers collègues, encore une fois, merci. §

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

L’ordre du jour appelle la discussion, à la demande du groupe UDI-UC, de la proposition de loi visant à instituer une évaluation médicale à la conduite pour les conducteurs de 70 ans et plus, présentée par M. Yves Détraigne (proposition n° 605, résultat des travaux de la commission n° 638, rapport n° 637).

Dans la discussion générale, la parole est à M. Yves Détraigne, auteur de la proposition de loi et rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je me trouve aujourd’hui dans une situation inhabituelle. Outre le fait que je suis l’auteur de cette proposition de loi, et donc favorable a priori au dispositif qu’elle tend à instaurer, je me trouve être aussi son rapporteur, alors même que la commission des lois n’a adopté ni mon texte ni mes amendements que je lui proposais !

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

M. Yves Détraigne, rapporteur. … on pourrait m’accuser de conflits d’intérêts.

Rires

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

Je vais donc rappeler la situation de notre pays au regard du permis de conduire, l’évolution du contexte et l’objet de la présente proposition de loi, avant d’évoquer les questions que ce texte a soulevées en commission et la position adoptée par celle-ci.

Vous le savez, les permis A et B, qui nous permettent de conduire un véhicule automobile de moins de dix places ou une moto de cylindrée n’excédant pas 125 centimètres cubes, sont des permis délivrés à vie et sans visite médicale préalable. Si, depuis cette année, les permis de conduire sont désormais délivrés pour quinze ans en vertu d’une directive européenne de 2006, leur renouvellement en l’état sera purement administratif. Dans les faits, le permis sera toujours attribué à vie sauf s’il est utilisé à titre professionnel, une disposition qui existe d’ores et déjà. Je rappelle en effet que les chauffeurs routiers ou les chauffeurs de taxi, par exemple, doivent se soumettre à des contrôles réguliers destinés à vérifier leur capacité à exercer leur profession.

Je ne vous étonnerai pas en vous disant que la population vieillit et que le nombre de personnes âgées de 75 ans et plus a augmenté de 34 % entre 2000 et 2011, passant de 7 % à 9 % de la population avec, mécaniquement, une répercussion sur le nombre de conducteurs âgés. L’Observatoire national interministériel de la sécurité routière, l’ONISR, évoquant dans son rapport de 2011 les conducteurs du quatrième âge, notait que, si seuls 47 % des conducteurs âgés de 65 à 74 ans étaient responsables des accidents corporels dans lesquels ils sont impliqués, ce pourcentage s’élevait à plus de 60 % pour les conducteurs âgés de 75 ans et plus.

Ces conducteurs sont notamment surimpliqués dans les accidents liés à des traversées d’intersection pour lesquels les réflexes et la rapidité de décision sont des éléments décisifs. Ils sont aussi plus vulnérables et plus souvent victimes, lors des accidents de circulation, que les autres classes d’âge...

Face à cette situation, l’objet de cette proposition de loi est tout simplement d’instaurer, à partir de 70 ans, un examen médical d’aptitude à la conduite, auquel pourra s’ajouter un stage de remise à niveau en cas d’interdiction partielle de conduire.

Il ne s’agit évidemment pas, dans l’esprit de ses auteurs, de stigmatiser telle ou telle catégorie de la population, et ce d’autant plus que les deux principales causes de mortalité sur la route sont l’alcoolisation et la vitesse excessive, des infractions peu fréquemment commises par des personnes âgées de plus de 70 ou 75 ans. L’objectif est de nous rapprocher d’une tendance observée dans de nombreux pays de l’Union européenne, lesquels conditionnent le renouvellement du permis de conduire à certains âges de la vie à la vérification de l’aptitude à conduire de leurs détenteurs. Ce texte est d’autant plus d’actualité que notre pays commence à délivrer des permis de durée limitée, en application d’une directive communautaire.

Au sein de l’Union européenne, treize pays ont mis en place de longue date un contrôle médical préalable à l’obtention du permis de conduire, et dix pays des contrôles périodiques tout au long de la vie, quand d’autres limitaient la durée de validité du permis de conduire, dont le renouvellement est conditionné à un contrôle médical à partir d’un certain âge. L’Espagne cumule même ces trois systèmes.

Dans la dynamique d’harmonisation engagée à la suite de la directive de 2006, un rapprochement des règles de contrôle de l’aptitude physique des conducteurs est donc probable. Nous pouvons donc prévoir que la mesure proposée dans le présent texte, et qui avait déjà fait l’objet d’une recommandation du comité interministériel de sécurité routière en décembre 2002, trouvera sa place, un jour, dans notre droit positif.

Quoi qu’il en soit, cette proposition de loi, qui soulève des difficultés importantes, a fait l’objet d’un débat très animé – c’est le moins que l’on puisse dire ! – en commission des lois.

Il faut tout d’abord tenir compte du risque non négligeable d’accroissement de l’isolement de certaines personnes âgées en cas de retrait ou de limitation de leur permis de conduire, notamment en milieu rural où la voiture est parfois le seul moyen d’éviter cet isolement et de conserver une vie sociale.

Si ce risque est minime, voire inexistant, en milieu urbain, notamment en région parisienne où circulent des transports en commun réguliers, il pose dans les zones rurales un véritable problème de traitement inéquitable, selon le lieu de résidence des personnes concernées et les moyens dont elles disposent.

Il faut donc trouver le moyen de concilier les impératifs de sécurité routière et de protection des personnes avec la nécessité, pour celles-ci, de se déplacer en tant que de besoin.

Il convient également de prendre en considération le sentiment de « stigmatisation » que pourraient éprouver les personnes âgées, dans la mesure où le contrôle interviendrait au regard d’un critère d’âge, alors qu’il y a des conduites à risque à tous les âges, y compris chez les jeunes générations.

S’y ajoute également un problème d’ordre pratique, lié au caractère systématique du contrôle : le nombre insuffisant de médecins agréés qui pourraient contrôler l’aptitude à conduire des personnes âgées de plus de 70 ans. La solution du recours au médecin traitant, qui a été évoquée, est séduisante. Or l’expérience montre que cette formule est parfois peu efficace. Par ailleurs, le droit en vigueur exclut expressément que le médecin traitant de la personne fasse passer ce type de visite.

La commission des lois n’a toutefois pas l’intention de rejeter purement et simplement la proposition de loi au motif qu’elle suscite des interrogations. On ne peut en effet nier ni la réalité des observations formulées en commission ni l’intérêt de ce texte au regard de l’harmonisation européenne, qui va inévitablement intervenir dès lors que tous les Européens ont un permis du même type, et de la hausse du nombre de conducteurs âgés.

Tout en soulignant l’importance des actions de prévention en direction des personnes âgées, qui sont actuellement insuffisantes, la commission a donc considéré que la proposition de loi ne pouvait pas être adoptée en l’état.

Vous l’avez compris, mes chers collègues, au vu des questions importantes soulevées par ce texte, et de la nécessité d’appréhender l’ensemble des effets des mesures proposées avant de se prononcer en toute connaissance de cause sur les actions de prévention à mener, la commission a estimé préférable d’approfondir sa réflexion au sein d’un groupe de travail qu’elle se propose de constituer en son sein. Nous pourrons ainsi examiner les mesures les plus pertinentes pour faire face à la forte augmentation du nombre de conducteurs âgés.

Nous reviendrons sur la solution que vous propose la commission à l’issue de l’examen de la motion de renvoi présentée par Virginie Klès. §

Debut de section - Permalien
Michèle Delaunay

Monsieur le président, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, nous abordons un sujet qui intéresse tous nos concitoyens. Cette proposition de loi traite en effet du permis de conduire, et plus particulièrement des conditions de renouvellement du titre permettant la conduite des véhicules par les personnes âgées.

Je souhaite tout d’abord profiter de cette tribune pour adresser un message de vigilance et de prudence. La tendance baissière, constatée depuis le début de l’année en matière de mortalité routière, s’est accentuée au mois de mai dernier, avec une diminution de près de 30 % du nombre de tués sur nos routes. Ce sont 95 vies qui ont ainsi été épargnées en mai 2013. Ce fut, de tous les mois de mai, le moins meurtrier sur nos routes. Sur les cinq premiers mois de 2013, la mortalité routière a baissé de 16 % par rapport à la même période de l’année précédente, ce qui représente 222 vies sauvées.

Ces résultats encourageants ne doivent en aucun cas faire oublier que la sécurité routière se joue au quotidien, et que près de dix personnes décèdent encore chaque jour dans un accident de la circulation. L’entrée dans la période des beaux jours, qui offrent traditionnellement l’occasion de sorties, notamment pour les deux-roues, doit inciter chaque usager de la route à redoubler de prudence.

Ces quelques éléments rappelés, j’en reviens au cœur de la proposition de loi soumise à votre examen.

Contrairement à une idée reçue, les personnes âgées n’ont pas plus d’accidents que les autres. De manière générale, elles sont même sous-représentées dans les statistiques des accidents de la route : elles sont ainsi cinq fois moins victimes que les jeunes d’accidents de la circulation routière. En effet, bien souvent conscientes de leurs limites, elles privilégient fréquemment des modes de déplacement alternatifs à l’automobile ou aux deux-roues et, lorsqu’elles conduisent un véhicule motorisé, adoptent un comportement éminemment prudent, qui se traduit notamment par une vitesse peu élevée, une vigilance accrue et des trajets courts.

Ce constat a conforté le Gouvernement dans son souci de donner aux personnes âgées la possibilité de se déplacer le plus longtemps possible, car leur autonomie en dépend. À ce titre, la conduite automobile et la possession d’une voiture sont essentielles pour les personnes âgées.

La tentation d’instaurer une visite médicale obligatoire pour les conducteurs âgés est grande : plusieurs pays ont déjà mis en place une telle mesure. Pour autant, l’obligation de se soumettre à un examen en fonction de l’âge n’a jamais fait la preuve de son efficacité, comme l’atteste le rapport de l’OCDE sur le vieillissement et les transports publié en 2001.

En France, l’incitation au dialogue avec son médecin, voire avec des spécialistes pour faire vérifier sa vue ou son audition, a été privilégiée afin de définir les restrictions auxquelles la personne âgée doit se conformer. Une brochure a été réalisée par l’ordre des médecins et la délégation interministérielle à la sécurité routière à destination des médecins généralistes pour leur rappeler leur rôle de conseil auprès de leurs patients en fonction des pathologies. Une brochure équivalente à destination des conducteurs est en cours de réalisation avec l’ordre des pharmaciens et sera diffusée dès juillet.

Le faible taux d’accidents de la route impliquant des personnes âgées tend à montrer que cette stratégie fonctionne bien.

Fortement complémentaire de celui du médecin, le rôle de la famille est, nous le savons, important, car cette dernière peut entamer le dialogue avec la personne âgée, même si cela est bien souvent délicat. En dernier recours, elle peut faire appel, comme tout autre citoyen d’ailleurs, au préfet, qui pourra enjoindre au titulaire du permis de conduire de se soumettre à un contrôle médical. Cet examen sera réalisé par un médecin agréé consultant hors commission médicale.

Dans ce domaine, je tiens à préciser que le décret du 17 juillet 2012 a introduit deux mesures qui participent à la prévention des risques du conducteur. La première tient à l’extension du champ du contrôle, qui porte non seulement sur l’aptitude physique, comme c’était le cas auparavant, mais aussi sur l’aptitude cognitive et sensorielle du patient. La seconde permet aux médecins qui examinent l’usager de lui prescrire des examens complémentaires, notamment des tests psychotechniques d’aptitude à la conduite. Au vu de l’avis médical émis, le préfet pourra alors prononcer, s’il y a lieu, la restriction de validité, la suspension ou l’annulation du permis de conduire.

Par ailleurs, les assureurs, les collectivités locales, les caisses de retraites et les caisses d’assurance maladie organisent déjà, avec le soutien de l’État et le concours de bénévoles, des stages destinés aux conducteurs seniors, qui sont très positifs.

J’aimerais à ce titre saluer le travail de l’Association prévention routière qui permet annuellement à 30 000 personnes de suivre ce type de stage. Certes basés sur le volontariat, ils permettent aux personnes âgées de réactualiser leurs connaissances tant théoriques que pratiques et de prendre mieux conscience de leurs limites. La CARSAT, la Caisse d’assurance retraite et de la santé au travail, la MSA, la Mutualité sociale agricole, et l’Association Générations mouvement ont également monté un partenariat sur le territoire amiénois, que je crois exemplaire en la matière. Je souhaite que ce type de partenariats se développe sur l’ensemble du territoire. C’est l’un des objectifs que j’ai fixés à la mobilisation nationale contre l’isolement social des personnes âgées, lancée en décembre dernier, et dont le groupe de travail proposera le 12 juillet prochain une phase de déploiement.

Enfin – et je crois qu’il s’agit là d’un point majeur dont chacun de nous doit prendre conscience –, la conduite étant aussi une forme importante de prévention de la perte d’autonomie, il convient de favoriser l’accès aux technologies d’aide à la conduite, qui ne cessent de se développer et qui sont encore trop peu connues des personnes âgées et de leurs familles.

Un centre d’expertise national de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, le CEREMH, le Centre de ressources et d’innovation mobilité handicap, spécialisé dans les questions de mobilité, travaille à recenser et à faire connaître les innovations en matière d’aménagement et de nouveaux véhicules, pour garantir une conduite sécurisée et pallier efficacement les premières faiblesses que peut parfois engendrer l’âge.

En lien avec le pôle de compétitivité Mov’eo, avec les constructeurs automobiles, les prestataires de transport et divers laboratoires de recherche, la recherche s’amplifie ; ses développements sont prometteurs pour la silver economy, l’économie liée à l’âge, et donc pour la création d’emplois.

L’étape future est le développement territorial de ce type de centre.

C’est maintenant à chaque intervenant du domaine des transports, de la formation à l’utilisation, en passant par le conseil, le contrôle et la distribution, de s’en saisir pour que les technologies permettent de garantir une mobilité sûre des personnes âgées le plus longtemps possible, comme cela est le cas pour les personnes handicapées.

La concertation menée jusqu’à présent avec les professionnels nous a montré que l’inaptitude médicale dépend davantage de l’état de santé du conducteur et des médicaments qu’il prend que de son âge. L’évaluation médicale figurant dans la proposition de loi comporte donc un caractère discriminatoire d’autant plus injuste qu’il est infondé au regard des données d’accidentalité dont nous disposons. Elle comporte surtout le risque d’aboutir à une perte brutale d’autonomie et d’indépendance des personnes âgées.

Vous l’aurez donc compris, le Gouvernement n’est pas favorable à l’instauration d’une évaluation médicale à la conduite systématique pour tous les conducteurs âgés de 70 ans et plus. §

Debut de section - PermalienPhoto de Gilbert Barbier

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je tiens avant tout à remercier notre collègue Yves Détraigne de nous donner l’occasion de débattre d’un sujet particulièrement important : la sécurité routière.

Jusque dans les années soixante-dix, le nombre de tués sur les routes n’a cessé d’augmenter, pour atteindre un pic en 1972 avec près de 18 000 morts. Ce n’est qu’à cette époque que les pouvoirs publics se sont emparés du problème. Selon les estimations de l’Observatoire national interministériel de la sécurité routière, la mortalité routière serait ainsi progressivement tombée à 3 645 tués en 2012.

L’évolution de la réglementation et de la répression, l’amélioration des infrastructures et des véhicules, le changement de comportement de certains conducteurs expliquent pour beaucoup cette évolution.

Renforcer la prévention et la sécurité routière est un enjeu majeur pour nous tous. Pour autant, la proposition de loi de nos collègues constitue-t-elle une solution efficace pour diminuer le nombre de morts sur les routes ? Sincèrement, je ne le crois pas.

Chaque accident provoqué par une personne âgée relance le débat sur l’aptitude à conduire de cette catégorie de la population. Toutefois, cela a été dit, les conducteurs âgés n’ont pas, contrairement aux idées reçues, plus d’accidents que les autres et ne conduisent pas plus dangereusement, mais ils sont sans doute plus vulnérables et peuvent parfois être troublés par les nouvelles infrastructures ou l’évolution de la signalétique. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle, comme l’a souligné Mme la ministre, la prévention routière organise, depuis quelques années déjà, des stages de remise à niveau à l’attention de cette catégorie de conducteurs.

Alors pourquoi stigmatiser cette catégorie de conducteurs, pourtant plus responsable et plus prudente que les autres ? Pourquoi l’âge des conducteurs devrait-il être un critère, quand près d’un accident mortel sur quatre est dû à la consommation excessive d’alcool, et un tiers des accidents causé par la fatigue ou la somnolence, sans parler de la vitesse excessive, qui n’est pas l’apanage des personnes âgées ?

L’âge ne doit pas être un facteur discriminant, d’autant que la voiture constitue pour les personnes âgées, comme l’a souligné Mme la ministre, un symbole fort d’indépendance. À la campagne ou dans les périphéries des centres-villes, la voiture est souvent le seul moyen pour faire ses courses, se rendre chez le médecin, ou tout simplement maintenir un lien social avec la famille. Restreindre la conduite sur le seul critère de l’âge accélérerait le processus d’isolement, précipitant ces personnes vers la dépendance d’un tiers. Accessoirement, cela donnerait aussi un coup d’accélérateur aux ventes de voitures sans permis, lesquelles ne sont pas sans danger.

En réalité, la question de l’aptitude à conduire dépend plus de l’état de santé des conducteurs que de leur âge.

Certaines addictions, certaines pathologies ou certains traitements médicamenteux présentent en effet des risques, parfois très élevés, pour la conduite. De nombreux patients ignorent encore que certaines pathologies nécessitent un avis de la commission médicale des permis de conduire et qu’en prenant le volant, ils sont un danger potentiel pour eux-mêmes et pour les autres. De la même façon, ils n’ont pas toujours conscience des risques qu’ils encourent en absorbant certains médicaments utilisés couramment dans le traitement de la douleur ou de la toux, lesquels peuvent altérer leurs capacités.

Dans ces conditions, le médecin joue un rôle particulièrement important pour l’estimation du risque. Il doit informer son patient des conséquences de sa pathologie, des risques de l’alcool, des stupéfiants ou de certains médicaments sur la conduite. Il doit par ailleurs l’inciter à s’adresser à un médecin agréé ou à la commission médicale départementale du permis de conduire. Le médecin n’a cependant qu’une obligation de moyens et il ne peut en aucun cas contraindre son patient à arrêter de conduire.

Tenu au secret médical, il ne peut pas non plus signaler son patient à l’autorité préfectorale. Cela est plutôt étonnant quand on sait qu’il doit, en revanche, signaler aux autorités administratives tout sportif soupçonné de consommer des substances dopantes. Pourquoi ne pas l’envisager pour un conducteur souffrant d’une pathologie ou d’une addiction comportant des risques pour lui-même et les autres usagers de la route ? J’ai déposé, avec plusieurs de mes collègues, deux amendements en ce sens.

Aussi, madame la ministre, mes chers collègues, aucun des membres du RDSE n’apportera son soutien à la présente proposition de loi, qui nous semble inutilement discriminatoire.

Debut de section - PermalienPhoto de Esther Benbassa

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la proposition de loi que nous examinons aujourd’hui vise à instituer une évaluation médicale à la conduite pour les conducteurs âgés de 70 ans et plus, voire même de 75 ans si l’un des amendements du rapporteur était adopté.

À première vue, l’objectif semble utile puisque l’adoption de ce texte permettrait, selon nos collègues de l’UDI-UC, « de contribuer à l’abaissement de la mortalité routière ».

La mortalité sur les routes reste un fléau dans notre pays. Toute mesure permettant d’éviter des accidents et des morts inutiles doit donc être votée sans considération partisane.

Chacun a un parent, un ascendant, un oncle ou une tante qui continue de conduire alors qu’il est devenu, avec le temps, ce qu’il est convenu d’appeler « un véritable danger public ». Pourtant, ni les émotions ni les images sensationnelles des accidents commis par des personnes âgées ne doivent guider le législateur. La gauche, pendant la précédente mandature, s’est fréquemment élevée contre le mécanisme consistant à élaborer une loi à chaque fait divers, aussi terrible soit-il.

Debut de section - PermalienPhoto de Esther Benbassa

La proposition de loi dont nous débattons aujourd’hui n’est pas anodine et doit être envisagée sous tous ses aspects.

On ne peut le nier, certaines personnes continuent de conduire, alors qu’elles devraient s’arrêter parce que leur vue et leur ouïe baissent, parce que leurs réflexes diminuent.

Toutefois, si elles continuent à conduire, c’est bien souvent par nécessité. La voiture reste, en dehors des grandes villes, un moyen indispensable pour aller faire ses courses, se rendre chez le médecin ou, tout simplement, avoir une vie sociale.

Imposer un contrôle médical aux conducteurs vieillissants, pourquoi pas ? Encore faut-il faire remarquer que cela n’a pas de sens s’ils ne sont pas pris en charge pour leurs déplacements quotidiens !

On le sait, la population française vieillit. Cela rend la question de l’autonomie et de la mobilité cruciale dans une société qui manque cruellement d’infrastructures pour accueillir les plus âgés. De surcroît, rien ne permet de dire aujourd’hui, faute de disposer de travaux en nombre significatif sur la question, que les conducteurs âgés de plus de 70 ans seraient à l’origine d’un plus grand nombre d’accidents que les autres. Au contraire !

Comme l’a dit Mme la ministre, les seniors n’ont pas tendance à conduire ivres ou sous l’emprise de drogues. D’ailleurs, nombreux sont ceux qui, sentant leurs capacités diminuer, modifient leurs habitudes, arrêtent de conduire la nuit ou d’emprunter l’autoroute.

Les accidents graves impliquant des personnes âgées ne sont pas toujours liés à l’âge du conducteur. Ainsi, comme le relèvent les députés Armand Jung et Philippe Houillon dans un rapport d’information remis en 2012, « ce n’est pas un quelconque malaise du conducteur octogénaire qui est à l’origine du drame de Loriol qui a coûté la vie, le 29 novembre 2002, à cinq pompiers drômois, mais le très grand excès de vitesse dont il s’est rendu coupable au volant d’un véhicule très puissant, aux abords d’un accident signalé ».

Si la question de l’aptitude à conduire est légitime, elle doit se poser à tous et à tous âges. Il semble au groupe écologiste que la sanction, comme la stigmatisation du vieillissement, ne peuvent être des solutions. Selon nous, c’est l’entourage et, surtout, le médecin traitant qui sont les plus à même d’alerter une personne sur la diminution de ses capacités.

Aux termes du texte que nous examinons, un médecin agréé de la préfecture rédigerait le certificat médical d’aptitude. Celui-ci n’est toutefois pas forcément le mieux placé pour évaluer la capacité à conduire. En effet, il n’a jamais rencontré la personne auparavant. De surcroît, tout le monde n’habite pas dans une ville où se trouve une préfecture. Dans bien des territoires, il faudra donc s’y rendre en voiture.

C’est la raison pour laquelle le groupe écologiste a déposé un amendement tendant à proposer que le médecin traitant se charge de déterminer l’aptitude à conduire.

Parallèlement, et parce que nous croyons que c’est la prévention qui peut durablement changer les comportements, nous avons déposé un amendement pour que des campagnes de sensibilisation aux risques routiers liés au vieillissement soient menées par divers canaux.

Bien que la présente proposition de loi ait le mérite de susciter un débat de société utile et une réflexion salutaire, pour toutes les raisons que je viens d’évoquer, et notamment afin d’éviter d’inscrire dans la loi une discrimination liée à l’âge, le groupe écologiste ne votera pas ce texte. ()

Debut de section - PermalienPhoto de Joëlle Garriaud-Maylam

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, le texte déposé par notre collègue Yves Détraigne a pour objectif de rapprocher notre législation de celle qui est applicable dans d’autres pays de l’Union européenne s’agissant des contrôles d’aptitude à la conduite, notamment pour les personnes les plus âgées.

La conséquence serait, en fait, d’élargir les motifs et les contrôles pouvant aboutir au retrait du permis de conduire ou à sa suspension temporaire.

Cette proposition de réforme s’inscrit dans la continuité de ce qui avait été proposé, en décembre 2002, par le comité interministériel de sécurité routière. Je veux parler de l’instauration d’une évaluation médicale de l’aptitude à la conduite pour les personnes âgées de plus de 70 ans par un médecin de ville, avec possibilité d’appel devant la commission médicale départementale du permis de conduire.

Au terme de cet examen, il aurait alors été possible de restreindre à des horaires ou à des espaces donnés la conduite d’une personne devenue déficiente physiquement, mais apte à la conduite.

Pour mettre en place un meilleur contrôle de l’aptitude à conduire des personnes les plus âgées, il est envisagé que tout détenteur du permis de conduire de catégories A et B, âgé de 70 ans ou plus, ait en sa possession un certificat médical délivré par un médecin agréé auprès de la préfecture du département et attestant de sa capacité à conduire. Tous les cinq ans, il serait alors procédé à un nouveau contrôle médical d’aptitude à la conduite, accompagné d’un stage de remise à niveau. Puis, la commission médicale départementale du permis de conduire, chargée de vérifier l’aptitude à la conduite, pourrait prononcer une interdiction totale ou partielle.

Mes chers collègues, cette proposition de loi a l’intérêt d’avoir de nouveau suscité au sein de la commission des lois un débat dont j’ai su qu’il n’avait pas été inintéressant, chacun ayant pu faire valoir son opinion sur ce sujet.

Pour autant, force est de constater que la commission des lois n’a pas, dans sa grande sagesse, élaboré de texte de commission. C’est dire s’il existe des arguments contradictoires ! D’ailleurs, nous en avons déjà entendus.

Sur la forme, d’abord, je crois que le dispositif est mal calibré avec les réalités pratiques de la sécurité routière.

En effet, à l’instar de l’examen ophtalmologique, on imagine mal comment les médecins pourront faire face à un accroissement aussi important de visites médicales. Ce sujet n’est pas anodin, alors que l’on connaît tous la tendance au vieillissement de notre population. Imaginez le nombre des conducteurs de 70 ans qui se verraient dans l’obligation de procéder aux examens que vous proposez d’instaurer !

Mon sentiment se trouve renforcé, au surplus, par le fait que la plupart de personnes âgées qui conduisent se trouvent installées dans des zones rurales où les alternatives de transport ne sont que trop limitées. De fait, le présent texte aurait pour effet d’augmenter la dépendance des personnes âgées.

Il existe un autre exemple visant à dénoncer les conséquences pratiques d’un tel dispositif : en cas d’infraction, un excès de vitesse, par exemple, le préfet peut exiger que l’auteur passe une visite médicale. Dans ce cas, on fait venir la personne mise en cause au chef-lieu du département, l’obligeant ainsi, alors qu’on vient de suspendre son permis de conduire, à parcourir plus de 80 kilomètres ! Par ailleurs, le médecin de la préfecture rend seul sa décision, et il en résulte des aberrations…

Je conclurai mon propos en faisant remarquer qu’un certain nombre de questions pratiques restent sans réponse.

Les examens médicaux pourront-ils se faire à l’occasion d’une visite médicale de routine, alors que cela alourdira encore la charge de la consultation médicale ? Qu’en sera-t-il de la responsabilité des médecins qui n’auront pas détecté une incapacité à la conduite ? Quels seront les critères pris en compte par les médecins pour prononcer « à coup sûr » l’incapacité de conduire de la personne, alors même que l’examen n’aurait pas fait suite à un accident de la route ?

La périodicité des contrôles est-elle réellement pertinente au regard de l’évolution des maladies qui peuvent actuellement compromettre la bonne conduite de nos concitoyens ? Est-il, d’ailleurs, pertinent d’établir un lien entre les troubles visés précédemment et l’âge du conducteur ? Cette question ressort de la santé. Ce n’est pas l’âge qui est en cause !

Vous me permettrez d’ouvrir une parenthèse. La plupart des experts médicaux s’accordent à dire qu’il existe une baisse des capacités physiologiques et cognitives après 45 ans. Les rhumatismes, la baisse des réflexes qui peuvent survenir dés cet âge sont susceptibles d’avoir des effets sur la bonne conduite ! Sans parler des effets néfastes de certains médicaments prescrits à des personnes qui peuvent être très jeunes … Chateaubriand ne disait-il pas qu’ « il n’y a point d’âge légal pour le malheur » ? §

J’en viens désormais au fond du sujet. Comme l’ont fait remarquer plusieurs de mes collègues, de droite ou de gauche, les faits d’accident de la route ne concernent pas seulement les personnes âgées. Ils sont au contraire, la plupart du temps, le fait de jeunes conducteurs peu habitués à la conduite, alcoolisés, drogués, ou inconscients.

Encore faut-il admettre que de nombreux accidents résultent réellement d’un événement fortuit dont les effets sont plus ou moins dommageables pour les personnes ou pour les choses. Ils constituent alors des événements inattendus, non conformes à ce qu’on pouvait raisonnablement prévoir. Telle est, d’ailleurs, la définition du dictionnaire Larousse. Je la trouve importante !

Aussi malheureux que cela soit, on ne peut pas tout anticiper, tout prévoir, tout prévenir sans porter trop largement atteinte aux droits et libertés individuelles de chacun. Et c’est là tout le problème de la prévention. Or, si l’on veut prévoir ou essayer d’encadrer l’imprévisible, cela nous oblige à encadrer toujours plus les faits et les actions de nos concitoyens.

En effet, si l’on voulait parvenir à un tel but, vous imaginez bien qu’il faudrait alors imposer des contrôles d’alcoolémie à la sortie de toutes les boîtes de nuits de France ! Il nous faudrait mettre en place un contrôle médical régulier pour tous les jeunes déjà interpellés parce qu’ils sont en possession de substances hallucinogènes, parce qu’ils sont en état d’ivresse sur la voie publique ou parce qu’ils ont commis d’autres faits encore…

Si je force bien évidemment le trait de ma démonstration, je maintiens qu’une question mérite d’être posée : devrions-nous traiter avec autant de différence de tels facteurs d’insécurité routière ? Ou devrait-on en traiter un seul avec moins de force, alors même qu’il nous paraîtrait plus grave, sous prétexte que le contrôle des uns est plus facile à mettre en place que le contrôle des autres ? Eh bien, non !

Le caractère fortuit de l’accident est l’élément fondamental de la réflexion que nous devons poursuivre en la matière.

Je parlais tout à l’heure des contrôles d’aptitude à la conduite qui seraient consécutifs à un accident de la route. Bien qu’il existe, je le disais, des faiblesses inhérentes à ce dispositif, il paraît plus aisé à mettre en place.

En effet, à l’occasion d’un accident de la route, il est toujours complexe de savoir si cet événement résulte d’une pure imprudence de la part du conducteur ou d’un événement fortuit. Le contrôle qui fait suite à l’accident permet de répondre pour partie à cette question. Or, dans ce contexte, l’âge, les années d’expérience, sont des critères qui ont peu d’importance pour déterminer l’issue du contrôle a posteriori. Ce qui compte, c’est la capacité de chacun à prendre de nouveau le volant.

En revanche, si l’on mettait en place le dispositif que vous nous proposez, nous risquerions de stigmatiser a priori systématiquement les personnes les plus âgées qui ne sont pas forcément les plus inaptes à conduire. Il est évident qu’à la moindre inattention, au moindre accident, au moindre contrôle, l’attention de chacun se portera sur l’âge des conducteurs mis en cause. Or ce qui est en cause, je le répète, ce n’est pas l’âge mais la santé, au sens large, du conducteur.

Doit-on donc réellement instaurer une obligation perpétuelle de bonne conduite ?

Doit-on instaurer une obligation de conduite parfaite, sans droit à l’erreur pour les personnes les plus âgées ?

Pourtant, les accidents de la route sont pour l’essentiel le fait des 18-24 ans, et non pas des personnes de plus de 70 ans, qui conduisent peu ou sur de courtes distances ! Je rappelle les propos teintés d’humour d’un auteur américain : les personnes âgées sont les seules à avoir le temps de respecter les limitations de vitesse... §

Les statistiques qui nous sont donc trop souvent présentées, à tort, ne sont pas exploitables en tant que telles, car elles mélangent des catégories d’accidents dont les causes sont bien différentes. Dès lors, si l’on veut instaurer une visite médicale obligatoire à intervalles réguliers, il faudrait peut-être plutôt réfléchir à la prévoir pour l’ensemble des usagers de la route ! L’interdiction de conduire, quant à elle, doit être limitée à toutes les personnes qui, du fait d’une maladie ou de la consommation de certaines substances médicamenteuses ou hallucinogènes, sont inaptes à la conduite.

Pour autant, comme je le disais au début de mon intervention, j’ai la conviction que notre collègue Détraigne soulève une question très importante. Pour cette raison, nous ne devons pas nous en désintéresser.

Ainsi, le problème de la sécurité routière, en ce qu’il concerne plus particulièrement les personnes les plus âgées, pourrait nous inciter à approfondir la question, en privilégiant les campagnes de prévention. L’objectif de ces dernières serait double : d’une part, accroître la vigilance de chacun sur la capacité de conduire de notre entourage, d’autre part, inciter les médecins, dits « de famille », à rappeler à leurs patients la nécessité d’une plus grande vigilance, quand il est question de leur santé, de leur sécurité et de celle d’autrui.

Sans mettre en place un système trop rigide, le développement d’une telle vigilance des médecins permettrait de renforcer la détection de ces incapacités. J’utilise le terme « renforcer », car, heureusement, beaucoup de médecins se préoccupent déjà de ce type de diagnostic.

En définitive, je crois que ce texte n’est pas adapté au problème qu’il entend traiter. Néanmoins, je tiens à remercier notre collègue Yves Détraigne de nous alerter sur la nécessité de prendre en considération le phénomène toujours aussi préoccupant qu’est l’insécurité routière pour l’ensemble de la population.

La France a fait de grands progrès en matière de sécurité routière. Il est de notre responsabilité collective de poursuivre nos efforts et d’encourager toute démarche allant dans ce sens, ce qui nous permettrait également de nous rapprocher de nos voisins européens.

C’est pourquoi j’estime, avec l’ensemble du groupe UMP, qu’il faut renvoyer le texte en commission afin d’approfondir dans un cadre plus vaste ce sujet important. Nous soutiendrons donc la motion tendant au renvoi en commission qui nous sera présentée ultérieurement. §

Debut de section - PermalienPhoto de Muguette Dini

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, pour ma part, j’ai cosigné très spontanément la proposition de loi de notre collègue Yves Détraigne. L’idée d’instituer une évaluation médicale des conducteurs âgés m’a semblé intéressante, courageuse, et m’a paru répondre à une véritable question. Au-delà d’un certain âge, est-il raisonnable de laisser des conducteurs utiliser leur véhicule sans contrôler leur capacité à le faire ?

Après avoir pris connaissance des débats en commission et des oppositions formulées, je tiens à expliquer ma position.

De nombreuses études françaises et internationales ont été menées sur le thème « Vieillissement et conduite automobile ». Les plus anciennes datent des années quatre-vingt-dix. Elles portent sur les particularités des accidents de la route des personnes âgées, en se focalisant sur la manière dont ces accidents se produisent et en étudiant plus précisément la spécificité des erreurs et des difficultés auxquelles les conducteurs âgés sont sujets, ainsi que les conditions qui expliquent les défaillances identifiées.

Ces études s’appuient sur l’exploitation des données issues du recueil des études détaillées d’accidents, les EDA. Elles permettent la reconstitution et la description du déroulement des accidents afin de détecter et d’identifier les mécanismes générateurs.

Toutes ces études soulignent deux points.

En premier lieu, elles insistent sur le fait que des qualités plus ou moins liées à l’expérience de la vie sont attribuées au conducteur âgé, en particulier la prudence et le respect des règles élémentaires. Cela se traduit par un style de conduite caractérisé par la réduction de la vitesse, la réduction de la distance parcourue et une moindre prise de risques.

En second lieu, elles constatent que le vieillissement peut entraîner des altérations structurelles et fonctionnelles de l’organisme à l’origine de modifications dans le fonctionnement physiologique et psychologique, voire de pathologies, qui retentissent sur les capacités à conduire. Dans ces conditions, des informations mal détectées ou mal intégrées peuvent contribuer à la survenue de situations dangereuses, incompatibles avec une réaction motrice adaptée.

L’examen de différents types d’indicateurs montre une croissance de risques d’être tués ou impliqués dans un accident mortel chez les conducteurs âgés, comparés aux conducteurs d’âge moyen.

J’ai retenu deux études particulièrement significatives.

La première étude se situe dans le cadre d’une évaluation de l’impact sécuritaire des futurs systèmes d’aide à la conduite au sein des véhicules légers.

Une analyse des besoins en information et en assistance des usagers a été entreprise à partir de la lecture des procès-verbaux d’accidents. Un examen spécifique des accidents de conducteurs âgés de 65 ans et plus a permis d’étudier les difficultés qu’ils ont pu rencontrer et de mieux connaître leurs besoins en aide à la conduite.

En agglomération, les besoins des conducteurs âgés ne sont pas très différents de ceux de l’ensemble des conducteurs. En revanche, hors agglomération, leurs besoins en diffèrent significativement.

La différence la plus discriminante provient de la détection transversale. On retrouve la surimplication des accidentés âgés aux intersections. D’autres besoins, comme l’estimation du créneau nécessaire pour s’insérer ou dépasser, sont également surreprésentés dans la population âgée.

Les circonstances des accidents mettent en scène des usagers âgés au comportement lent ou hésitant, qui vont réaliser des manœuvres surprenantes sur la trajectoire d’un autre véhicule, voire des manœuvres aberrantes, telles que le fait de s’arrêter en pleine route ou au milieu d’une intersection pour lire un panneau de signalisation, ou prendre une route ou une autoroute à contresens à la suite d’une erreur de trajet inexplicable.

La seconde étude met l’accent sur les défaillances fonctionnelles et cognitives des conducteurs âgés.

Les auteurs observent un déclin marqué des performances sensorielles – vision périphérique, acuité – et du maintien de la trajectoire du véhicule. Le vieillissement affecte en effet les capacités sensorielles, dégrade la récupération de l’éblouissement, l’accommodation, la sensibilité au contraste, l’acuité...

Le vieillissement a aussi un impact sur la vitesse de traitement des informations, ce qui peut avoir des conséquences importantes sur l’ensemble des opérations motrices et cognitives.

Cette dégradation des fonctions sensorielles et cognitives avec l’âge est en relation avec celle des niveaux de vigilance et des processus attentionnels.

Cette constatation s’explique en grande partie par une modification du rythme circadien veille-sommeil et des altérations du sommeil. Les médecins ici présents apprécieront... §

Que concluent les auteurs de ces études et analyses ?

« La participation croissante des seniors aux différents trafics soulève de multiples interrogations en termes de sécurité routière, de contrôle des capacités des conducteurs âgés, d’adaptation des véhicules, de cohabitation sur la route des générations aux types de conduite différents.

« Les conducteurs âgés [...] doivent être pris en compte de manière spécifique en matière de mobilité de sécurité. »

Mes chers collègues, c’est l’objectif premier de cette proposition de loi.

Il n’est aucunement question de stigmatiser ou de discriminer les conducteurs âgés. Il s’agit de prendre en compte une réalité largement démontrée. Il n’est pas question non plus d’interdire purement et simplement à toute personne âgée de conduire.

Il s’agit d’un examen d’aptitude à la conduite à partir de 70 ans, réalisé par un médecin agréé par la préfecture et renouvelable tous les cinq ans. Ce dispositif souple et encadré devrait permettre d’éviter des accidents dus à des inaptitudes pas toujours discernées, ni par la personne concernée ni par sa famille.

Je sais que ce texte est contesté par certains d’entre nous.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Cohen

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le groupe CRC soutiendra la motion tendant au renvoi de ce texte en commission. Pour autant, cela ne signifie pas que la question de la prévention routière ne nous intéresse pas, loin s’en faut. Sans doute faudrait-il que cette question fasse l’objet d’une étude plus poussée avant de légiférer, et j’ai cru comprendre qu’un groupe de travail allait se constituer. Cela nous apparaît souhaitable, particulièrement dans un contexte marqué par une accélération du travail parlementaire et une progression continue du nombre de textes adoptés par le Parlement.

Qui plus est, permettez-moi de m’interroger, sans vouloir offenser quiconque, sur l’opportunité d’examiner une telle mesure, qui nous semble en décalage avec les attentes de nos concitoyens. En effet, ne croyez-vous pas que l’explosion du chômage et de la précarité, l’érosion des services publics, les bas salaires, les vagues de licenciements ou encore l’asphyxie de l’hôpital public, sont davantage au cœur des préoccupations de nos concitoyens ?

Cela étant dit, je n’entends nullement minorer l’importance de la prévention routière, qui revêt tout à la fois un aspect tant individuel, dans le drame qui touche les familles, que collectif, dès lors que l’on appréhende la question sous l’aspect de la santé publique. Toutefois, convenez-en : il n’y a pas urgence à légiférer sur cette question.

Je profiterai néanmoins de l’occasion qui m’est donnée pour aborder un certain nombre de questions.

Tout d’abord, personne ne peut l’ignorer, le vieillissement n’est pas sans effet sur les capacités motrices des conducteurs. Il peut diminuer leurs capacités de réaction, de la même manière que l’âge altère les capacités visuelles et auditives. Pour autant, aucune étude scientifique n’est aujourd’hui en mesure de démontrer que les personnes âgées sont impliquées dans un plus grand nombre d’accidents de la route que les actifs. Le site internet de l’Association prévention routière en fait état, comme l’ont rappelé Mme la ministre et certains orateurs à l’instant.

Sur ce site, on apprend également que 399 personnes de plus de 65 ans sont mortes au volant en 2011, et 254 en tant que piétons. En d’autres termes, elles sont presque aussi nombreuses à mourir du fait de conduire que du fait de ne pas conduire. C’est un peu cynique, mais c’est un fait. Aussi, en poussant à son paroxysme le principe de précaution qui sert de fondement à cette proposition de loi, on pourrait être tenté de légiférer pour encadrer les sorties piétonnes de nos concitoyennes et concitoyens les plus âgés !

Compte tenu du nombre important de jeunes qui décèdent chaque année des suites d’un accident de la route, l’application de ce même principe de précaution devrait nous inviter à interdire la conduite des jeunes âgés de 18 à 25 ans qui sont, et de loin, les publics les plus concernés par les accidents de la route. Les pouvoirs publics se sont naturellement mobilisés et saisis de cette question, non pas pour interdire la conduite – ce à quoi pourrait amener à terme cette proposition de loi –, mais pour responsabiliser les jeunes conducteurs, par un mélange subtil de contrôle, de sanction et de prévention.

Sans doute aurait-il été souhaitable que cette approche soit transposée aux publics visés par cette proposition de loi, ne serait-ce que pour une raison : l’application de cette mesure pourrait, en l’état, être profondément discriminante et lourde de conséquences pour ceux qu’il est convenu d’appeler les seniors.

Cette mesure est discriminante, car, à n’en pas douter, ce sont les plus modestes de nos concitoyens, ceux qui ne pourront ni faire face au coût de la visite médicale ni à celui, encore plus important, du stage qu’il est proposé d’instituer ici, qui se verront retirer le droit de conduire.

Cette mesure est lourde de conséquences. En effet, pour nos concitoyens, l’interdiction de conduire, si elle n’est accompagnée d’aucune mesure destinée à compenser cette décision, aura tendance à accroître non seulement leur isolement, qui constitue une source de souffrance psychique, mais aussi les difficultés qu’ils rencontrent déjà dans leur quotidien, que ce soit pour faire leurs courses, aller voir le médecin ou assurer des démarches administratives.

Malheureusement, ces aspects sont ignorés par cette proposition de loi, et j’espère que le groupe de travail qui sera constitué en tiendra compte.

Je dois dire qu’il y a d’ailleurs un certain paradoxe à défendre ce texte aujourd’hui, alors que vous votiez, voilà quelques semaines à peine, la proposition de loi permettant aux retraités les plus pauvres de reprendre une activité.

Le paradoxe est également frappant avec le rapport Moreau, destiné à nourrir la future réforme des retraites, qui préconise notamment un allongement de la durée de cotisations et un recul de l’âge légal du départ à la retraite.

Je vous pose la question, mes chers collègues : est-ce à dire que l’on peut être suffisamment en bonne santé pour travailler plus et en trop mauvais état physique pour conduire ?

La réalité est que, dans l’immense majorité des cas, les personnes concernées par cette proposition de loi font preuve de prudence et décident elles-mêmes de limiter la conduite aux actes indispensables.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Cohen

Mme Laurence Cohen. Pour toutes ces raisons, le groupe CRC votera contre cette proposition de loi et soutiendra la motion tendant au renvoi du texte en commission des lois, afin que cette question puisse faire l’objet d’un travail collectif plus large, davantage à même de répondre à toutes les questions, directes et indirectes, qui y sont associées.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Virginie Klès

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je tiens en premier lieu à remercier M. Yves Détraigne, auteur et rapporteur de cette proposition de loi, d’avoir ouvert le débat sur cette question cruciale de l’accidentologie routière des personnes âgées, mais aussi, et surtout, de l’aptitude physique à conduire, sujet autour duquel notre débat est en train de se recentrer.

Même si nous sommes assez peu nombreux dans l’hémicycle, il semblerait qu’un certain consensus soit en train de se dégager autour de ce thème.

Bien évidemment, chaque accident est un drame et chaque victime, qu’elle soit blessée ou tuée, est une victime de trop, pour les familles, les proches, mais aussi pour la société dans son entier.

Pour autant, tout texte de loi se doit d’avoir une portée générale, en l’occurrence en matière de sécurité routière publique. Or, si la proposition de loi était adoptée en l’état, ses effets en termes de sécurité routière seraient très limités.

Puisque je dois reprendre la parole ultérieurement pour défendre la motion tendant au renvoi en commission, je vais tâcher de scinder mon propos, afin d’éviter les répétitions.

Pour l’heure, dans cette discussion générale, je vais définitivement tenter de vous convaincre, mes chers collègues, des raisons pour lesquelles vous ne devriez pas voter cette proposition de loi en l’état. J’essaierai ensuite, dans ma présentation de la motion, de vous expliquer quel travail il nous reste à faire, et pourquoi il est important de renvoyer le texte en commission.

Tout à l’heure, monsieur le rapporteur, vous avez précisé ne pas avoir de conflit d’intérêts sur le sujet.

Pour ma part, le conflit est patent. Même si je n’ai pas encore plus de 70 ans – si tel était le cas, on me dirait sans doute que je suis extrêmement bien conservée !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Virginie Klès

Si je parle de conflit d’intérêts à mon propos, ce n’est pas parce que ma vue bouge, mais parce que je suis titulaire d’un permis E, qui impose une visite médicale tous les cinq ans. Je suis donc bien placée pour vous dire que, dans mon cas, une telle visite médicale n’apporte pas un suivi suffisant pour garantir une réelle aptitude à conduire. Je dois donc prendre la responsabilité de faire corriger ma vue en tant que de besoin, et pas seulement tous les cinq ans, sauf à devenir rapidement un danger public au volant !

En l’occurrence, une visite médicale tous les cinq ans, qui plus est à partir de l’âge de 70 ans, n’améliorerait nullement les choses en termes d’accidentologie.

Cette situation personnelle m’a sans doute incitée à réfléchir plus profondément sur les raisons de cette focalisation sur l’âge, alors même que j’étais initialement plutôt favorable à votre proposition, monsieur le rapporteur. Pourquoi les accidents impliquant des personnes âgées sont-ils à ce point médiatisés ?

Contrairement à toutes les autres causes d’accidents, l’âge est une condition qui nous est imposée. On n’a aucune prise sur lui, alors que les excès de vitesse, la conduite en état d’ivresse et la conduite sous l’effet de médicaments ou d’autres drogues dépendent de notre seule volonté et de notre seule responsabilité.

Le côté affectif joue également un rôle. On connaît tous des parents ou des grands-parents que l’on aimerait bien voir lâcher le volant, parce que l’on se fait un peu de souci pour eux, mais aussi pour nos enfants quand ils montent en voiture avec eux.

Cette dimension affective, et le fait que l’âge nous soit une condition imposée, entraînent une sorte de paralysie de la réflexion et de l’analyse.

Lorsqu’une personne âgée a un accident, ce serait donc forcément à cause de son âge. Sauf que c’est peut-être aussi à cause d’un excès de vitesse, d’un défaut d’attention, d’un endormissement, d’un panneau de signalisation mal lu ou encore d’un état d’ivresse ; on peut avoir 70 ans et boire un peu plus que de raison lors d’un repas.

L’âge nous apparaît donc comme la cause évidente de l’accident, alors qu’il ne l’est pas en tant que tel.

Cela a été dit et redit à cette tribune depuis le début de la discussion générale : à partir d’un certain âge, les causes physiques d’accidents peuvent certes être un peu plus fréquentes, parce qu’on fatigue plus vite, parce qu’on voit moins bien ou parce que nos réflexes sont moins rapides.

Mais ces problèmes ne surviennent pas seulement avec l’âge. Certaines maladies neurodégénératives peuvent ainsi entraîner dès l’âge de 20 ans des modifications physiques qui induisent un changement de l’état de santé et une moindre aptitude à conduire.

Certains diabètes, avant qu’ils ne soient stabilisés par un traitement médical, peuvent aussi être associés à des baisses d’attention, voire à des malaises qui rendent la conduite dangereuse.

Debut de section - PermalienPhoto de Virginie Klès

De même, la prise de neuroleptiques ou de psychotropes, ponctuellement ou au long cours, peut entraîner une baisse de la vigilance.

Vous allez me répondre que des mises en garde sont apposées sur les notices de médicaments. J’ai déjà eu l’occasion de démontrer à cette tribune que les notices ne sont généralement pas lues ou, si elles le sont, ne sont pas comprises, parce qu’elles sont rédigées dans un langage incompréhensible pour le commun des mortels.

La prise de médicaments et la maladie elle-même sont donc souvent à l’origine d’une diminution de l’aptitude physique à conduire, et l’âge n’est pas seul en cause.

Au-delà de ce constat, plusieurs questions se posent inévitablement : pourquoi fixer l’âge de l’évaluation à 70 ans ? Pourquoi ne pas plutôt établir une liste de maladies ou de médicaments auxquels serait associée une interdiction de conduire, à court ou à long terme ?

Dans ce cas, il ne serait plus question d’un texte de loi, mais d’un catalogue à la Prévert de mesures inapplicables.

Les risques d’aptitude physique à la conduite d’un véhicule ne sont donc pas spécifiquement ou exclusivement liés à l’âge. Prenons garde aux statistiques et aux corrélations trop rapidement établies entre le nombre d’accidents et leurs causes plus ou moins visibles.

Certains accidents ont une résonance médiatique plus grande que d’autres, notamment en raison de la dimension affective que j’ai précédemment évoquée. On se sent tous concernés parce que chacun d’entre nous connaît un grand-père, une grand-mère, un beau-parent ou un parent qui prend le volant dans des conditions où l’on préférerait qu’il ne le prenne pas. Mais il s’agit avant tout d’une responsabilité individuelle.

Nous-mêmes, quand nous prenons le volant après avoir bu deux ou trois verres de vin lors d’un repas, …

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Virginie Klès

… nous prenons la responsabilité de conduire quand même, de nous faire éventuellement contrôler et de perdre des points, sans penser que l’on peut causer un accident. Les personnes âgées, qui sentent leur vigilance, leur attention et leur capacité de résistance diminuer, savent aussi s’autolimiter et prendre des risques mesurés.

Si les conducteurs qui empruntent l’autoroute en sens inverse ou s’endorment au volant sont parfois des personnes âgées, ce n’est pas toujours le cas. Interrogeons-nous plutôt sur les raisons de ces endormissements : sont-ils dus à la fatigue, à la prise de médicaments, à une maladie, à un temps de conduite trop long ?

Et lorsqu’on s’engage en sens inverse sur une autoroute, est-ce parce qu’on a mal lu un panneau, ou parce qu’il faisait nuit et que l’on voit moins bien dans l’obscurité, entre autres causes possibles ?

Les causes des accidents sont multiples et l’arbre ne doit pas cacher la forêt.

Nous ne devons pas oublier non plus, il est vrai, que les personnes âgées sont beaucoup plus souvent victimes d’accidents, leur condition physique générale les rendant plus fragiles. Mais comme elles n’ont pas envie de se mettre en danger, elles ont tendance à se protéger en se responsabilisant et en limitant les prises de volant à de petits trajets, effectués de préférence en journée plutôt que le soir.

En conclusion : oui, nous devons nous préoccuper de la sécurité routière publique !

Oui, nous devons réduire encore le nombre de victimes, mais cela ne se fera pas seulement en imposant des visites médicales aux personnes âgées de plus de 70 ans, ou de tout autre âge que nous pourrions déterminer.

Oui, je défendrai tout à l’heure le renvoi de ce texte en commission, en vous expliquant dans quel sens nous pourrions travailler.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées de l'UDI-UC .

Debut de section - PermalienPhoto de Gisèle Printz

Mme Gisèle Printz . Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je profite du fait qu’il n’y a pas encore de loi interdisant aux personnes de 70 ans et plus de prendre la parole …

Sourires.

Debut de section - Permalien
Michèle Delaunay, ministre déléguée

Heureusement !

Debut de section - PermalienPhoto de Gisèle Printz

… pour vous exposer les motifs qui me feront voter contre cette proposition de loi présentée par nos collègues du groupe UDI-UC.

Tout d’abord, j’observe que cette proposition de loi est un nouveau coup porté aux seniors et, in fine, à l’unité de la nation. Depuis de longues années, l’ambiance est à la division des Français : les riches contre les pauvres, les citadins contre les ruraux, les clients contre les commerçants, etc. Je n’énumérerai pas l’ensemble des groupes sociaux que l’on ne cesse de monter les uns contre les autres. Cependant, de toutes les divisions, celle qui revient inlassablement, comme l’automne après l’été, c’est la confrontation générationnelle.

Ce texte vise les personnes âgées de 70 ans et plus, car vous pensez qu’elles sont des dangers publics. Mais l’argumentaire qui sous-tend cette proposition de loi n’est qu’une somme d’exposés chaque fois plus démagogiques.

Bien entendu, chacun de nous a eu vent d’histoires rapportant qu’un senior n’a pas eu le réflexe qu’il aurait dû avoir en conduisant.

Bien entendu, il existe une véritable mythologie de l’accidentologie des seniors. Comme tous les mythes, elle s’appuie sur des faits, mais aussi sur des fables et des légendes qui mettent en scène des conducteurs seniors chaque fois plus irresponsables et plus dangereux.

Depuis quand le Parlement vote-t-il des lois parce qu’un sujet serait en vogue ? Nous sommes réputés être la chambre des sages de la République !

Cette proposition de loi n’est pas bonne car, en plus de diviser les Français, elle rendrait les seniors de plus en plus dépendants. Ce type de loi viendrait anéantir tous les efforts engagés par les pouvoirs publics pour garantir l’autonomie des personnes âgées. Nous savons que le transport est un axe essentiel dans cette démarche, particulièrement pour la ruralité.

De plus, comment pourrait-on justifier le durcissement de l’octroi du permis de conduire auprès de seniors qui lisent et entendent à longueur de journée dans les journaux, à la radio ou sur les chaînes de télévision que « les gens doivent travailler plus longtemps pour sauvegarder le système de retraite » ? Il y a là un paradoxe insurmontable : travailler plus, mais se voir contraint dans ses déplacements…

Cette proposition de loi n’est pas bonne car, en plus de stigmatiser certaines catégories de conducteurs, elle dévoilerait le secret médical. C’est en ce sens que le Conseil national de l’ordre des médecins rappelait, en mai 2011, son opposition claire à tout dispositif qui conduirait le médecin à être le « valideur de l’aptitude à conduire ».

En outre, l’argument consistant à ériger en exemple les pays nordiques ne saurait tenir. Comme le soulignait justement l’Automobile club médical de France, « cet examen pratiqué dans les pays nordiques n’a pas conduit à une amélioration ».

Quant à l’âge retenu pour pratiquer cette visite médicale, on voit bien toutes les difficultés pour le définir. Un jour on parle de soixante-dix ans, le lendemain de soixante-quinze ans. Actuellement, aucune étude ne permet d’établir définitivement un âge auquel la conduite serait devenue impossible.

Plus généralement, nous pouvons nous réjouir du fait que nous vivons plus longtemps et en meilleur santé. Nous conviendrons tous que les seniors sont des personnes responsables. Ils payent leurs impôts, participent le plus souvent bénévolement à la vie de nos cités en s’engageant très fortement au sein d’associations. Ils s’impliquent même en politique en faisant part de leur expérience et en contribuant à la construction d’une société plus juste et plus fraternelle.

De surcroît, les seniors apportent de plus en plus souvent un soutien essentiel et quotidien aux familles, par exemple, en allant chercher les petits-enfants à la sortie de la crèche, de l’école ou du centre aéré.

Je le disais, les seniors sont des personnes responsables. Alors faisons confiance à leur intelligence. Ils vont régulièrement chez le médecin et s’inquiètent de leur état de santé. S’ils ne sont plus aptes à la conduite, vous pouvez être assurés qu’ils ne prendront plus leur véhicule. Ne les stigmatisons pas de façon générale, alors que les individus irresponsables qui prennent le volant sans le maîtriser ne constituent que quelques cas isolés.

Mes chers collègues, n’adoptons pas une loi qui pénaliserait une partie des Français en raison de leur âge ! Restons plutôt cette assemblée où la rigueur et la mesure sont de mise dans une recherche permanente de l’équilibre et de la concertation.

Pour toutes ces raisons, je soutiendrai la motion tendant au renvoi à la commission. §

Debut de section - Permalien
Michèle Delaunay

Mesdames, messieurs les sénateurs, j’ai beaucoup apprécié toutes vos prises de parole. J’aimerais apporter des réponses très rapides à quelques points particuliers que vous avez abordés.

Monsieur Barbier, madame Benbassa, il faut que vous sachiez que le médecin, dont la fonction est tout à fait décisive et qui s’appuie bien souvent sur la famille, doit jouer deux rôles auprès de son patient.

Premièrement, il peut prescrire des examens complémentaires, c’est-à-dire conseiller à son patient, qui ne s’y soustraira pas, de passer tel examen de la vue, de faire contrôler ses lunettes, de vérifier s’il ne doit pas être opéré de la cataracte, ou encore d’effectuer un champ visuel. Cet acte est une première réponse au problème soulevé.

Deuxièmement, et vous n’en avez peut-être pas conscience, s’il sent sa responsabilité engagée, il peut prescrire en négatif. On a l’habitude que le médecin prescrive des médicaments, des actes, mais il peut parfaitement prescrire de ne pas conduire la nuit, voire de ne pas conduire du tout. Ainsi, en cas de pathologie cérébrale en particulier, nous avons le devoir d’attirer l’attention de nos patients sur le risque de conduire une automobile, voire de conseiller l’interdiction.

Debut de section - Permalien
Michèle Delaunay, ministre déléguée

(Mme la ministre déléguée met ses lunettes.) Vous le constatez, mesdames, messieurs les sénateurs, je fais partie d’une tranche d’âge où le risque s’accroît : à défaut de porter mes lunettes, je n’arrive pas à décrypter mon horrible écriture de médecin !

Sourires.

Debut de section - Permalien
Michèle Delaunay, ministre déléguée

En effet, nous conseillons. Mais un conseil écrit sur une feuille d’ordonnance, laquelle peut être montrée à la famille, par un médecin qui a pensé que la parole ne suffisait pas a un poids considérable. Et je ne voudrais pas priver le praticien de ce beau rôle. §

Par ailleurs, – c’est Mme Garriaud-Maylam qui a souligné ce point – nous serions particulièrement injustes si nous adoptions une mesure systématique car nous punirions les moins coupables, c'est-à-dire les personnes vivant en zone rurale, qui, bien souvent, sont d’une immense prudence. Elles veulent seulement pouvoir se rendre à la réunion du maire ou au supermarché, qui est proche. Elles effectuent, en fait, des petits trajets pendant la journée. Si nous adoptions la disposition dont nous discutons, ces personnes, dont l’autonomie dépend de leur possibilité de se déplacer, seraient les plus punies, j’ose employer ce terme.

Madame Dini, si j’étais ciblée par cette mesure, je me tournerais vers la Cour européenne des droits de l’homme parce qu’il n’y a aucune raison de stigmatiser des personnes en raison de leur âge, et nous l’avons tous reconnu. S’il y a bien une catégorie de la population à laquelle nous devrions interdire la conduite, c’est celle qui est située dans la tranche d’âge comprise entre dix-huit et vingt-cinq ans. Mais qui le ferait ?

Si un utilisateur s’élevait contre le type de préconisation que vous souhaitez mettre en place, il serait susceptible d’obtenir gain de cause. En tout cas, s’il venait me trouver, moi, ministre chargée des personnes âgées, je l’encouragerais à faire un recours. Je le dis très clairement.

Loin de moi la volonté de retarder les débats, néanmoins je souhaite aborder quelques points supplémentaires.

Madame Printz, heureusement que le droit à la parole n’est pas interdit aux personnes âgées ! J’irai même plus loin, je voudrais qu’il soit obligatoire, car les personnes âgées ne s’expriment pas suffisamment et ne s’élèvent pas suffisamment. §

Debut de section - Permalien
Michèle Delaunay, ministre déléguée

Lorsque des représentants d’associations de retraités viennent me voir, ils me parlent principalement du montant des pensions de retraite. Or il faut bien quelqu’un pour défendre toutes les questions liées à l’âge. Heureusement que nous pouvons prendre la parole !

Vous l’avez dit, le rôle des personnes âgées dans la société est tout à fait majeur. Pour ma part, j’ai l’habitude de dire qu’elles sont la colonne vertébrale de notre cohésion sociale. Mesdames, messieurs les sénateurs, vous, acteurs de la représentation nationale, imaginez une grève des personnes âgées de plus de soixante-cinq ans. Notre pays serait entièrement paralysé ! Aucun d’entre vous ne pourrait plus faire la moindre campagne électorale, ce qui serait très fâcheux, car vous n’auriez plus personne pour tracter pour le compte des partis politiques. Et je ne parle ni des familles ni des associations… Ce sont toujours les personnes âgées qui interviennent. Et qui animent les stages de conduite, les cours de prévention ? Des retraités bénévoles ! Notre point de vue concorde sur ce point, me semble-t-il.

Ma dernière remarque rejoindra peut-être les propos que vous allez formuler, madame Klès. Il y a bel et bien un point sur lequel nous pourrions progresser : les examens de la vision. Les personnes âgées, même si elles ne sont pas les seules concernées, le sont le plus souvent, reconnaissons-le.

En effet, un examen de la vision pourrait permettre non pas de prévenir les accidents, mais de maintenir la faculté de conduire de la personne en cause en décelant que ses lunettes sont mal adaptées à sa vue, et, par voie de conséquence, lui permettre de conserver son autonomie. Rendez-vous compte : la moitié des personnes âgées ont des lunettes qu’elles n’ont pas fait contrôler suffisamment récemment et qui ne sont pas adaptées à leur vue ! Un examen de la vision pourrait aussi permettre de déceler que le patient doit se faire opérer de la cataracte et une fois l’opération effectuée, l’âge de la personne concernée n’entrera plus en ligne de compte puisqu’elle aura pratiquement recouvré intégralement sa vision.

Je le dis très simplement : il y a matière à travailler pour améliorer la situation, mais peut-être pas par le biais de la présente proposition de loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?…

La discussion générale est close.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

Je suis saisi, par Mme Klès et les membres du groupe socialiste et apparentés, d'une motion n° 12.

Cette motion est ainsi rédigée :

En application de l’article 44, alinéa 5, du règlement, le Sénat décide qu’il y a lieu de renvoyer à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale, la proposition de loi visant à instituer une évaluation médicale à la conduite pour les conducteurs de 70 ans et plus (605, 2011-2012).

Je rappelle que, en application de l’article 44, alinéa 8, du règlement du Sénat, ont seuls droit à la parole sur cette motion l’auteur de l’initiative ou son représentant, pour quinze minutes, un orateur d’opinion contraire, pour quinze minutes également, le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond et le Gouvernement.

La parole est à Mme Virginie Klès, pour la motion.

Debut de section - PermalienPhoto de Virginie Klès

Après vous avoir convaincu qu’il ne faut surtout pas voter la proposition de loi qui nous est soumise en l’état, je vous remercie, monsieur le rapporteur, de redonner du travail à la commission, et il y a de quoi faire me semble-t-il.

Lorsque l’on adopte une loi, il faut s’assurer qu’elle soit efficace et, en l’occurrence, que le présent texte le soit en matière de sécurité routière et d’ordre public. Autrement dit, il faut s’attaquer non pas uniquement à la question de l’âge des conducteurs, mais au problème de l’aptitude physique à la conduite des véhicules.

J’ai déjà évoqué tout à l’heure les problèmes liés à la santé, à la vue, à la prise de médicaments. Ils nécessitent que le médecin traitant soit remis au cœur du dispositif. Certes, comme l’a mentionné un orateur précédent, il existe le secret médical auquel sont astreints les médecins et qui les contraint à ne pas communiquer certaines informations. Mais il faut trouver un lien entre les praticiens et les commissions médicales préfectorales chargées de contrôler l’aptitude à la conduite, en concertation avec l’ordre des médecins, les pharmaciens, tous les professionnels du secteur médical et paramédical qui, au cours de l’exercice de leurs fonctions, auront connaissance d’éventuelles incidences de l’état de santé des personnes qui les consultent sur leur aptitude à conduire. Dans ce cadre, la famille, lorsqu’elle existe, doit aussi pouvoir intervenir §en tant que de besoin.

Parallèlement, le système qui sera mis en place devra être suffisamment convaincant à l’égard de la personne, quel que soit son âge, qui, en raison de sa santé, des médicaments qu’elle prend ou de son état physique, peut faire courir un danger si elle conduit. Il faut donc prévoir à un moment ou à un autre une forme de contrainte assortie, éventuellement, d’une sanction. Cela étant, la personne en cause doit néanmoins garder la responsabilité de la prise de décision.

Comme je l’indiquais précédemment, la conduite est interdite aux personnes ayant plus de 0, 5 gramme d’alcool dans le sang – ce sera peut-être zéro demain. Pour autant, nous, citoyens, n’avons pas sans arrêt un Big Brother sur le dos nous empêchant de boire avant de prendre le volant. Il est de notre responsabilité de prendre cette décision. De la même façon, il est de la responsabilité d’une personne âgée de décider de conduire, mais après avoir reçu une information très claire sur les dangers qu’elle fait courir ; une telle information est déjà délivrée sur les risques liés à la conduite en état d’ivresse ou aux excès de vitesse.

Si l’on veut instaurer une contrainte, il faut prévoir une possible sanction lors d’un contrôle. Imaginons une personne à laquelle le médecin, à l’occasion d’une consultation, a quasiment ordonné de réaliser un examen de la vue car elle ne voit plus assez bien pour conduire. Une telle « injonction » doit être indiquée quelque part afin que si, ultérieurement, la personne est contrôlée alors qu’elle n’a pas fait l’examen nécessaire, on puisse le lui faire remarquer. Il faut sans doute envisager un système de gradation des sanctions éventuelles. De plus, comment avoir une trace de cette injonction, de cette recommandation, de ce conseil, selon les cas, du médecin traitant ?

Comme je le disais voilà un instant, il faut remettre celui-ci au cœur du système, ce qui nécessite des concertations avec la profession médicale. Il faut voir jusqu’où les praticiens peuvent, veulent aller dans cette fonction de conseil, de recommandation ou d’injonction. À quelle fréquence les fera-t-on intervenir ?

Ainsi, les traitements de type psychotropes ou neuroleptiques suivis sur le long terme, voire contre le diabète, même si je ne veux pas stigmatiser les malades qui en souffrent, nécessitent des consultations fréquentes chez le médecin traitant pour des renouvellements d’ordonnance. À cette occasion, selon la maladie ou le traitement, le médecin peut refaire un point sur des critères importants dans le domaine de la conduite.

Tout un système est donc à construire §en concertation avec les médecins et les familles, lesquelles ne doivent pas être occultées. Un équilibre doit être trouvé entre responsabilité individuelle, contrainte et sanction éventuelle, le médecin traitant étant, je le répète, au cœur du système.

Il faut que les solidarités locales se mettent en place autour de la personne en fonction des contraintes qui vont lui être imposées, en fonction de la perte d’autonomie qu’elle va forcément subir quelles que soient les limites qui seront apportées à sa conduite : interdiction de conduire la nuit, interdiction de faire de longs trajets, voire interdiction complète de conduire. Il faut que la famille, les voisins et les amis puissent être pris en compte dans le dispositif, afin que la solidarité familiale et amicale puisse s’organiser. Il faut également aider la personne, par le biais d’une solidarité institutionnelle, à réorganiser sa vie différemment, pour qu’elle puisse continuer à vivre dans un confort matériel, moral, humain et amical suffisant, et ne connaisse pas une dépréciation trop importante de ses conditions de vie.

Il faut faire extrêmement attention à ce qu’il n’y ait pas de report massif et non réfléchi vers les tricycles et quadricycles à moteur, les voiturettes, qui sont souvent la solution envisagée de prime abord. En effet, leur conduite peut être tout aussi dangereuse que celle d’un véhicule normal, soit parce que ce sont les conditions physiques ou les médicaments qui sont responsables du danger, soit parce que la personne ne s’aperçoit pas que sa voiturette prend la même place qu’une voiture sur la route alors qu’elle roule à la vitesse d’un vélo ou d’un vélomoteur. Ce risque doit être anticipé. Il faut éviter qu’il y ait un report massif : la voiturette ne doit pas constituer un choix par défaut, on ne doit pas y recourir par crainte de ne plus pouvoir sortir de chez soi pour acheter son pain, aller chercher son lait, voir ses enfants et petits-enfants, aller à la bibliothèque, etc.

Je le répète, il faut vraiment éviter qu’il y ait un report massif et systématique. Il faut s’adapter aux conditions de vie de la personne, par exemple en tenant compte de ses possibilités d’accès aux transports en commun, qu’elle ignorait peut-être jusqu’alors. Quand on rencontre un problème de diminution physique, quelle qu’elle soit, et qu’on n’a jamais pris le métro ou le bus, il n’est pas facile de s’y mettre ; on peut se sentir perdu à cause de la maladie, de la fatigue ou tout simplement de l’âge. Il faut donc mettre en place un accompagnement personnalisé. Cela ne se construit pas en deux ou trois jours.

Il faut également réfléchir aux moyens d’améliorer la formation continue de tous les conducteurs. Les panneaux changent, les infrastructures changent et se complexifient. En regardant les examens de conduite de mes enfants, j’ai été effrayée de constater que les clignotants avaient changé de nom… Il faut insister sur la formation continue en matière de conduite, de panneaux de signalisation, de nouvelles infrastructures et même de priorité dans les carrefours giratoires. En Bretagne, on connaît bien les règles de priorité qui s’appliquent aux carrefours giratoires, parce que nous sommes les champions de France de ces carrefours, mais ce n’est pas le cas partout : dans certains territoires, les personnes qui ne conduisent pas beaucoup, qu’elles soient âgées ou pas, ont des difficultés dans les carrefours giratoires, car elles ont tendance à laisser la priorité à droite et non à gauche. Il y a un dispositif à construire pour que le permis de conduire soit régulièrement rafraîchi. Est-ce que cela doit prendre la forme de stages ou de formations, je l’ignore, mais il faut vraiment y réfléchir.

On sauvera également beaucoup de vies en généralisant les formations aux gestes de premier secours. En théorie, elles sont obligatoires dans tous les établissements d’enseignement : les élèves qui sortent du lycée sont tous censés avoir leur attestation de premier secours. Mais ce dispositif n’est pas mis en œuvre. Dans ce domaine aussi, il y a des choses à revoir. En s’attaquant, si j’ose dire, non seulement aux conducteurs mais également aux premiers témoins d’un accident, on pourra sauver de nombreuses vies.

Le dispositif doit faire l’objet d’une large concertation réunissant des personnes dotées de diverses compétences, c'est-à-dire exerçant des professions variées. Si on s’attaque à ce sujet sans se limiter aux personnes âgées mais en réfléchissant plus globalement sur l’aptitude physique à conduire et à agir quand on est le premier témoin d’un accident, on sauvera beaucoup de vies humaines et on aura vraiment fait œuvre utile. C'est pourquoi je vous propose de renvoyer ce texte à la commission et de retravailler d’arrache-pied sur le sujet. §

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

Comme je l’ai souligné lors de mon intervention, le débat en commission a été houleux, ou en tout cas musclé. Vous ne serez donc pas surpris que la commission ait émis un avis favorable sur la motion ; je partage moi-même cet avis. Nous avons mesuré la complexité de la question et ressenti la nécessité de l’approfondir.

J’ai écouté avec attention les propos des uns et des autres. Il ne s’agit pas de stigmatiser telle ou telle catégorie de la population. Ce qui m’a le plus surpris, dans les différentes interventions, c’est que personne, à l’exception de Virginie Klès, n’a ouvert de pistes, comme si aucun problème ne se posait. Cela m’étonne.

Madame la ministre, je ne partage pas votre opinion quant à la position de la Cour européenne des droits de l’homme, la CEDH. Au Danemark, il y a un examen médical à partir de 70 ans ; en Espagne, cet examen a lieu tous les cinq ans entre 45 et 70 ans, et tous les ans ensuite ; en Estonie, en Lettonie et en Italie, il a lieu tous les dix ans. Je m’arrête là, mais plus de dix pays prévoient un examen médical périodique. Vous ne ferez pas croire qu’aucun citoyen de ces pays n’est au courant de l’existence de la CEDH… Par conséquent, je ne pense pas que la CEDH trouverait quelque chose à redire à l’instauration d’une mesure de ce type en France. Sinon, il y aurait deux poids deux mesures.

Debut de section - Permalien
Michèle Delaunay, ministre déléguée

Le Gouvernement émet un avis favorable sur cette motion.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

Je rappelle qu’aucune explication de vote n’est admise.

Je mets aux voix la motion n° 12, tendant au renvoi à la commission.

La motion est adoptée.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

En conséquence, le renvoi à la commission de la proposition de loi est ordonné.

La parole est à Mme la vice-présidente de la commission.

Debut de section - PermalienPhoto de Virginie Klès

Je veux tout d’abord remercier l’ensemble des sénateurs qui ont voté cette motion.

Par ailleurs, je suis mandatée par M. le président de la commission des lois pour vous annoncer que la commission va très vite se retrousser les manches, sans doute en créant un groupe de travail sur le sujet.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

Madame la ministre, mes chers collègues, par lettre en date de ce jour et à la suite de la modification de l’ordre du jour de l’Assemblée nationale, le Gouvernement a demandé le retrait de l’ordre du jour du mercredi 26 juin du projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2012 ainsi que de la déclaration du Gouvernement, suivie d’un débat, sur l’orientation des finances publiques.

En conséquence, le Sénat ne siégera pas le lundi 24 juin 2013 et l’ordre du jour des mardi 25, mercredi 26 et jeudi 27 juin s’établit comme suit :

Mardi 25 juin

Jour supplémentaire de séance

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

Ordre du jour fixé par le Gouvernement :

À 14 heures 30 :

1°) Sept conventions internationales en forme simplifiée

2°) Deuxième lecture du projet de loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République

À 21 heures 30 :

3°) Débat sur le bilan annuel de l’application des lois

Mercredi 26 juin

Jour supplémentaire de séance

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

Ordre du jour fixé par le Gouvernement :

À 15 heures et le soir :

1°) Suite éventuelle de la deuxième lecture du projet de loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République

2°) Deuxième lecture du projet de loi de séparation et de régulation des activités bancaires

Jeudi 27 juin

Jour supplémentaire de séance

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

À 9 heures 30 :

Ordre du jour fixé par le Gouvernement :

1°) Suite de l’ordre du jour de la veille

2°) Conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans le domaine du développement durable

De 15 heures à 15 heures 45 :

3°) Questions cribles thématiques sur la situation des caisses d’allocations familiales

À 16 heures et le soir :

Ordre du jour fixé par le Gouvernement :

4°) Suite de l’ordre du jour du matin

5°) Sous réserve de sa transmission, nouvelle lecture du projet de loi relatif à la représentation des Français établis hors de France

Acte est donné de cette communication.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

M. le président du Conseil constitutionnel a communiqué au Sénat, par courrier en date du 13 juin 2013, le texte d’une décision du Conseil constitutionnel qui concerne la conformité à la Constitution de la loi relative à la sécurisation de l’emploi.

Acte est donné de cette communication.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au mardi 18 juin 2013 :

À neuf heures trente :

1. Questions orales.

Le texte des questions figure en annexe.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

À quatorze heures trente et le soir :

2. Suite du projet de loi relatif à l’élection des sénateurs (377, 2012-2013) ;

Rapport de M. Philippe Kaltenbach, fait au nom de la commission des lois (538, 2012–2013) ;

Résultat des travaux de la commission (n° 539, 2012–2013) ;

Rapport d’information de Mme Laurence Cohen, fait au nom de la délégation aux droits des femmes (533, 2012–2013).

3. Proposition de loi portant diverses dispositions relatives aux collectivités locales (554, 2012–2013) ;

Rapport de M. Alain Richard, fait au nom de la commission des lois (630, 2012–2013) ;

Texte de la commission (n° 631, 2012–2013).

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

La séance est levée à dix-huit heures cinquante-cinq.