Séance en hémicycle du 26 janvier 2017 à 15h00

Résumé de la séance

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La séance

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La séance, suspendue à treize heures vingt-cinq, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Gérard Larcher.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

L’ordre du jour appelle les réponses à des questions d’actualité au Gouvernement.

Je rappelle que la séance est retransmise en direct sur France 3, Public Sénat et sur le site internet du Sénat.

Mes chers collègues, j’appelle chacun de vous à observer, au cours de nos échanges, l’une des valeurs essentielles du Sénat : le respect des uns et des autres.

Je demande également à chaque intervenant de respecter le temps de parole qui lui est imparti.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à M. Martial Bourquin, pour le groupe socialiste et républicain.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.

Debut de section - PermalienPhoto de Martial Bourquin

Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.

Depuis son accession à la Maison-Blanche, le président Donald Trump semble déterminé à mettre en œuvre rapidement ses promesses de campagne : retrait des États-Unis du traité transpacifique, instauration de mesures protectionnistes fiscales et douanières, remise en cause des stratégies de défense européennes, du fait de sa position sur l’OTAN.

L’équilibre mondial, tel qu’instauré depuis 1945, fondé sur le libre-échange et la sécurité collective, va certainement devoir être réorganisé, et nos relations commerciales avec les États-Unis, en particulier, devront être repensées en les fondant sur un principe fondamental, celui de la réciprocité absolue. La France et l’Europe ne sont pas un supermarché à ciel ouvert ; M. Trump devra intégrer cette réalité.

Sur la base de ce constat, les bonnes questions doivent être posées. Nous devrons probablement reconfigurer l’Union européenne et sa défense.

La France doit réfléchir à l’avenir de son économie, tout en respectant ses engagements internationaux. Nous pensons que la COP 21 est une grande opportunité à saisir, et non un obstacle à notre développement économique : ses dispositions doivent constituer le fondement pour réindustrialiser notre pays et décarboner notre société.

La France et l’Europe seront confrontées à des défis nouveaux. Nous avons les moyens d’y faire face, à condition de prendre les bonnes décisions.

Je souhaiterais, monsieur le Premier ministre, connaître la position du Gouvernement sur les orientations géostratégiques à prendre par la France, ainsi que sur l’attitude que notre pays et l’Europe doivent adopter face aux États-Unis.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – Mme Corinne Bouchoux applaudit également.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, Premier ministre

Monsieur le sénateur, vous m’interrogez sur un sujet qui suscite une grande inquiétude au sein de la communauté internationale, et plus particulièrement de l’Union européenne.

Le président Trump, pendant sa campagne et depuis qu’il est entré en fonction, a multiplié les déclarations qui surprennent, inquiètent et appellent ceux qui sont attachés à un ordre du monde articulé autour des valeurs de liberté, de tolérance et de respect à porter haut ces valeurs dans le dialogue permanent qu’entretiennent les grandes nations. C’est la volonté de la France de le faire.

Tout d’abord, les Européens doivent prendre en main leur destin. C’est la politique constante de la France et, avec elle, de l’Allemagne.

Cela signifie que nous devons impérativement faire en sorte que l’Europe soit en situation de protéger son territoire. Face à la menace terroriste, nous devons être capables d’assurer le contrôle des frontières extérieures de l’Union européenne. FRONTEX, qui est désormais dotée d’un budget de 250 millions d’euros et de 1 700 gardes-côtes et gardes-frontières, doit monter en puissance. C’est la raison pour laquelle, lorsque j’étais ministre de l’intérieur, j’avais demandé, avec mon homologue allemand Thomas de Maizière, que nous menions des exercices grandeur nature, afin d’éprouver la fiabilité de ce dispositif de contrôle.

Nous devons non seulement contrôler les frontières extérieures de l’Union européenne, mais également mettre en œuvre la modification de l’article 7-2 du code frontières Schengen. Nous devons organiser aux frontières extérieures de l’Union européenne le contrôle de toutes les entrées, y compris – j’insiste sur ce point – celles de ressortissants de l’Union européenne qui reviennent de théâtres d’opérations djihadistes avec la volonté de nous frapper.

L’interconnexion des fichiers, la mise en œuvre du PNR, la directive sur les armes à feu sont autant de sujets essentiels sur lesquels nous devons agir vite. En effet, le temps de la décision des institutions de l’Union européenne n’est pas toujours le temps des urgences auxquelles nous sommes confrontées, du fait des menaces que l’on sait.

Nous devons ensuite défendre le modèle de société auquel nous sommes attachés. Vous évoquiez la défense de nos intérêts économiques. Ainsi, lorsque des traités sont soumis à la délibération de l’Union européenne, comme cela a été le cas pour le TAFTA, nous devons impérativement nous battre pour que nos intérêts économiques et industriels soient préservés. Si les États-Unis adoptent une approche consistant à se replier sur eux-mêmes pour défendre les intérêts de leurs filières – celles-ci ne manqueront d’ailleurs pas, je pense, de rappeler au président Trump tous les dangers du protectionnisme –, nous devrons apporter une réponse adéquate en sortant d’une forme de naïveté et d’angélisme et en étant capables de promouvoir nos filières d’excellence avec toute la force de l’Union européenne. De ce point de vue, la mise en place du plan Juncker de 300 milliards d’euros, destiné à conforter ces filières, sera un élément déterminant de notre politique.

En ce qui concerne le climat, les propos tenus par le président Trump au sujet de la COP 21 ne peuvent être acceptés. Compte tenu du rôle déterminant joué par la France au moment de la conclusion de l’accord de la COP 21, nous agirons, au sein de l’Union européenne, pour que l’ensemble des décisions prises à cette occasion soient rigoureusement appliquées.

Enfin, la défense européenne ne doit plus être un simple concept, mais une réalité. Ainsi, des pays ne doivent pas être conduits, parce qu’ils disposent d’une capacité de projection de leurs forces, à en assumer seuls la responsabilité pour la totalité du continent européen. Si les choses ont beaucoup progressé de ce point de vue sous l’impulsion du président français, nous devons aller plus loin et être capables, avec le Fonds européen de la défense, de faire des investissements et de réaliser des unions entre les industries de défense, pour être à la hauteur des défis auxquels nous sommes confrontés. Le Président de la République est déterminé à continuer à agir selon cet agenda extrêmement précis, avec la Chancelière et l’ensemble des chefs d’État concernés de l’Union européenne, comme il le fait déjà depuis quatre ans et demi. L’actualité à laquelle nous sommes confrontés doit nous amener à atteindre ces objectifs plus rapidement encore.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme Élisabeth Doineau, pour le groupe de l’UDI-UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Elisabeth Doineau

Mme Élisabeth Doineau. Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat.

Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Elisabeth Doineau

Mardi dernier, le magazine 60 millions de consommateurs révélait les résultats, surprenants et effrayants, de son enquête sur la composition des couches pour bébés. Les produits d’une douzaine de grandes marques ont été testés : ceux de deux d’entre elles seulement ne contiennent aucune molécule à la dangerosité suspectée ou avérée. Le plus incroyable est que certaines couches dites « écologiques », que l’on pourrait imaginer plus naturelles, contiennent des résidus toxiques.

Quelles sont les substances nocives trouvées, à une teneur certes résiduelle, mais dont la présence dans un produit en contact direct avec la peau fragile des bébés est néanmoins indésirable ? Il s’agit de pesticides, dont le glyphosate, principe actif de l’herbicide Roundup, retrouvé dans l’une des marques « écologiques », de dioxines, comme les furanes, polluants de l’environnement, de composés organiques volatils, pour neuf des produits testés, d’un hydrocarbure aromatique polycyclique, polluant industriel, pour une marque.

Avouons qu’il y a de quoi avoir peur ! Heureusement, l’article précise que les doses relevées sont infimes. Cela doit-il pour autant nous rassurer ?

Madame la ministre, vous avez saisi mercredi l’ANSES, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, afin de procéder à une analyse des risques. Cette contre-expertise permettra, je l’espère, d’apporter toutes les précisions nécessaires.

Mais nous devons aller plus loin. Nos concitoyens sont en droit de connaître la composition des produits qu’ils achètent. La transparence, obligatoire pour ce type de produits, doit conduire à une totale traçabilité, grâce à un étiquetage précis.

Par ailleurs, une réglementation doit être élaborée, avec des seuils prenant en compte la durée d’exposition. Enfin, il est urgent de faire appliquer par les fabricants un cahier des charges de nature à assurer le respect de l’environnement, certes, mais surtout à protéger la santé de nos enfants.

Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du groupe socialiste et républicain.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat.

Ah ! sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - Permalien
Ségolène Royal, ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat

Madame la sénatrice, vous avez raison d’être en colère. J’ai éprouvé le même sentiment en découvrant les résultats de cette enquête.

Voilà quelque temps, j’ai interdit le bisphénol A dans les biberons et les jouets destinés aux nourrissons et aux enfants. Jamais je n’aurais pu imaginer que des couches pour bébés puissent contenir des produits toxiques !

J’ai immédiatement saisi l’ANSES et écrit à la Commission européenne, mais il faudrait tout de même que les industriels fassent preuve d’un minimum d’éthique et que l’on ne soit pas toujours obligé de contrôler, de sanctionner et de réglementer. La santé des consommateurs, notamment celle des plus fragiles d’entre eux, à savoir les nourrissons, doit être respectée !

Les produits de dix marques, sur douze testées, contiennent des produits toxiques, notamment du glyphosate, substance active du Roundup, dont nous avons interdit la commercialisation directe et qui a été détecté dans les couches Carrefour Baby Eco Planet, marque prétendument respectueuse de l’environnement, et Pampers. Dans la quasi-totalité des couches testées, on trouve des composés organiques volatils entrant dans la formule de multiples produits industriels. Leur inhalation peut avoir des conséquences néfastes sur le système pulmonaire lorsqu’ils s’évaporent.

Ce matin, en présence d’Irène Frachon, le médecin ayant révélé l’affaire du Mediator, et de Sylvie Metzelard, rédactrice en chef de 60 millions de consommateurs, j’ai mis en place la Commission nationale de déontologie et des alertes en matière de santé publique, présidée par votre collègue Marie-Christine Blandin. J’ai demandé à cette instance d’établir la réglementation que vous venez d’évoquer, madame la sénatrice.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, du groupe CRC et du RDSE, ainsi que sur certaines travées du groupe écologiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Raffarin, pour le groupe Les Républicains.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

Ma question s’adresse à M. le Premier ministre. Elle concerne la dégradation de la situation internationale, qui nous préoccupe tous.

Les foyers de crise se multiplient, le terrorisme frappe partout, les États puissants sont de retour, le désordre international s’installe. Partout, le monde s’arme ; partout, la paix recule ; partout, la force prévaut. Dans ce contexte dangereux, le président des États-Unis s’attaque brutalement aux valeurs de la diplomatie française.

Trois offensives de M. Trump sont inacceptables.

Il s’agit, d’abord, du retour à l’extrême protectionnisme et à l’isolationnisme. Les tensions qui vont ainsi se développer entre les grandes puissances, entre les États-Unis et la Chine, entre la Chine et la Russie, n’annoncent rien de bon. La remise en cause du multilatéralisme va à l’encontre de notre attachement au rôle de l’ONU et de son conseil de sécurité. L’accord de Paris et l’accord sur le nucléaire iranien, victoires du multilatéralisme, sont aujourd'hui remis en question.

La mise en œuvre de la stratégie de déconstruction de l’Union européenne se poursuit : le soutien américain au Brexit, la fragilisation de l’OTAN et la campagne permanente contre l’euro sont inacceptables.

Monsieur le Premier ministre, quels changements comptez-vous apporter à notre orientation diplomatique à l’égard des États-Unis ? Quelles initiatives les autorités françaises comptent-elles prendre, et selon quel calendrier ?

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI -UC.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, Premier ministre

Monsieur Raffarin, je tiens tout d’abord à vous remercier de votre question, à la fois précise et large, comme celle de M. Bourquin.

Quels que soient les propos parfois excessifs tenus en début de mandat par un responsable politique à la tête d’une grande puissance, l’histoire des derniers siècles montre que l’on ne peut rien contre la force de l’histoire, des valeurs et des liens construits dans le temps long de l’histoire, pour reprendre une notion chère à Fernand Braudel.

Que nous indique ce temps long de l’histoire ? Que nous sommes unis aux États-Unis, de façon irréversible, par des valeurs qui ont conduit les Américains à prendre leurs responsabilités devant l’histoire et à venir fouler le sol de notre pays pour que l’ensemble de l’Europe puisse recouvrer sa liberté. En tant qu’élu de Normandie, je n’oublie pas cette histoire glorieuse, puissante, qui unit nos deux pays. Nous partagions alors une même aspiration à la liberté, à la lutte contre le totalitarisme, une même conception de la tolérance et, surtout, du respect que les grandes nations se doivent les unes aux autres, sans lequel il n’y a pas de stabilité du monde.

Je crois que cette histoire-là est plus forte que tout. La première chose que nous avons à faire, dans le calme et la maîtrise, c’est de rappeler, en France et en Europe, l’indestructibilité de ces liens.

Par ailleurs, il nous faut agir, et vite, d’abord au sein de l’Union européenne, pour que, sur les trois sujets que vous avez évoqués, notre réponse soit claire et ferme.

S’agissant de l’environnement et de la COP 21, nous avons obtenu, sous l’autorité du Président de la République, avec Laurent Fabius et Ségolène Royal, ce grand accord parce que nous sommes parvenus à emporter l’assentiment d’autres grandes nations, qui n’étaient pas nécessairement, au départ, acquises à ce que nous proposions. Nous avons réussi parce que la voix de la France a porté et que l’Union européenne s’est exprimée avec elle pour faire en sorte que cet accord soit signé. Nous mettrons la même énergie, monsieur Raffarin, à le faire appliquer. L’Europe, dans son unité et au travers de son dialogue avec d’autres continents, notamment l’Afrique, agira pour que cet accord soit scrupuleusement mis en œuvre, conformément à son texte et à son esprit.

Concernant la déstabilisation du monde par le terrorisme, nous avons, là aussi, une responsabilité commune. Au sein de l’Union européenne, nous avons à faire la démonstration de notre puissance. J’évoquais tout à l’heure les chantiers ouverts : la réforme du code frontières Schengen, la montée en puissance de FRONTEX, la nécessité de mettre en œuvre des décisions que nous avons mis onze ans à prendre –je pense notamment au PNR, désormais adopté, que nous devons mettre en place rapidement, à l’interconnexion des fichiers, à la nécessité d’engager, sur la question migratoire, un dialogue renforcé, au niveau de l’Union européenne, avec le continent africain, notamment les pays de la bande sahélienne, de manière à enrayer, par la coopération et le développement, l’immigration économique.

Quant à l’accord sur le nucléaire iranien, pour lequel la diplomatie française, sous l’autorité de Laurent Fabius, s’était très fortement mobilisée, nous devons le préserver.

Dans cet esprit, nous mettrons à profit tous les rendez-vous internationaux et européens, dans le cadre d’une alliance approfondie avec l’Allemagne. En effet, quand l’essentiel est en cause, c’est l’axe franco-allemand qui doit affirmer les ambitions et indiquer clairement la direction à suivre, pour faire en sorte que les intérêts de l’Europe soient préservés et défendus.

Sur le plan de la défense européenne, il convient, en prenant les dispositions que j’indiquais tout à l’heure en matière de renforcement des politiques de défense, de réaliser les investissements nécessaires, de rassembler nos industries, de renforcer nos capacités de projection.

Nous devrons également défendre nos intérêts économiques et commerciaux, par la mise en place d’une politique européenne dépourvue de toute naïveté, visant à protéger nos filières d’excellence.

Voilà ce que nous ferons, en profitant de toutes les occasions pour promouvoir les politiques utiles, en faisant en sorte, pour répondre à la déstabilisation du monde, que les logiques multilatérales que vous avez évoquées l’emportent sur toutes les formes d’excès et d’outrance, afin que l’ordre du monde soit un ordre de paix, de tolérance, de respect et de liberté.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, ainsi que sur certaines travées du RDSE, du groupe écologiste et de l’UDI-UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Jean-Pierre Raffarin, pour la réplique.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

Je vous remercie de votre réponse, monsieur le Premier ministre.

Notre diagnostic est plus grave que le vôtre. Nous pensons vraiment que nous devons renouer avec une politique étrangère de la France plus puissante, fondée sur une indépendance nationale s’appuyant elle-même sur une capacité militaire renforcée et sur la dissuasion. Il faut aussi une ambition européenne et la volonté de dialoguer avec tous.

J’ajoute que si, dans la situation troublée que nous connaissons, des efforts militaires sont nécessaires, c’est le développement, autant que la guerre, qui permettra de remédier aux malheurs du monde !

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur certaines travées de l'UDI -UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

À titre exceptionnel, je redonne la parole à M. le Premier ministre, pour quelques secondes. Le sujet est d’importance !

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, Premier ministre

Je vous remercie, monsieur le président.

Bien entendu, les déclarations de fermeté sont importantes, mais les actes comptent davantage. Lorsque nous décidons de mettre fin à la diminution des effectifs au sein de la défense nationale, lorsque nous mettons scrupuleusement en œuvre la loi de programmation militaire, ce qui n’a pas toujours été le cas dans le passé, pour assurer l’efficacité de notre dissuasion, nous répondons très précisément à votre demande.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, Premier ministre

M. Bernard Cazeneuve, Premier ministre. Lorsque le Président de la République prend les initiatives nécessaires pour que notre diplomatie fasse entendre sa voix sur les sujets que vous avez évoqués, il le fait non pas pour vous faire plaisir, monsieur le Premier ministre Raffarin, mais pour que la France soit à la hauteur du message qu’elle porte.

Applaudissementssur les travées du groupe socialiste et républicain.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

À droite, beaucoup avaient voté contre la loi de programmation militaire !

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Yvon Collin, pour le groupe du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Yvon Collin

Ma question s'adresse à M. le ministre de l'économie et des finances. Elle concerne la politique dite de l’« État actionnaire ».

La Cour des comptes a rendu public hier un rapport très critique, dans lequel elle prescrit un régime à l’État actionnaire et appelle le Gouvernement comme le Parlement à réformer l’actionnariat public et à mettre un terme à ce qu’elle nomme des « carences persistantes », dans l’intérêt des contribuables, mais aussi des entreprises concernées.

À l’heure actuelle, quelque 1 800 entreprises sont détenues à titre majoritaire ou minoritaire par l’État, par le biais de l’Agence des participations de l’État, de la Caisse des dépôts et des consignations ou de Bpifrance. Je citerai les plus connues d’entre elles : EDF, ENGIE, Renault, PSA, Air France ou encore Orange. La valeur comptable de ce patrimoine très hétérogène était estimée à 100 milliards d’euros à la fin de l’année 2015. Au sein de ce portefeuille, soixante-deux participations étaient cotées, pour une valorisation totale de 77, 4 milliards d’euros.

Selon la Cour des comptes, « l’État peine à être un bon actionnaire », étant « à la fois trop présent dans la gestion et trop peu vigilant comme actionnaire ». La Cour des comptes constate des « conflits d’objectifs et d’intérêts permanents » et regrette que l’État « confonde souvent tutelle et actionnariat », ajoutant que, « pour faire respecter une paix sociale dont il est le garant et le tributaire, il n’est pas rare que l’État sacrifie l’autonomie de gestion de ses entreprises ».

Enfin, la Cour des comptes propose plusieurs pistes de réformes, parmi lesquelles des cessions massives de participations de l’État, autrement dit des privatisations…

M. le Premier ministre a rejeté cette option extrême, au motif qu’elle emporterait un « risque majeur de déstabilisation ». Nous partageons cette position de principe, mais ne pourrait-on pas, pour autant, envisager une cure d’amaigrissement, même de portée réduite, de l’État actionnaire, et ainsi éliminer les « mauvaises graisses », si j’ose dire ?

Plus largement, quelle lecture le Gouvernement fait-il du diagnostic dressé par la Cour des comptes ? Y a-t-il, dans ce rapport, des propositions qui retiennent son attention ? Si oui, lesquelles ?

Applaudissements sur les travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. le secrétaire d'État chargé de l'industrie.

Debut de section - Permalien
Christophe Sirugue, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé de l'industrie

Monsieur le sénateur, je vous remercie de votre question, qui me permet d’évoquer le rapport de la Cour des comptes sur l’État actionnaire, rendu public hier.

Il est bien sûr important que les politiques publiques soient évaluées. Je profite de cette occasion pour saluer le rapport sur la politique de dividendes de l’État établi au nom de la commission des finances par votre collègue Maurice Vincent et celui du député Guillaume Bachelay portant sur le même sujet.

Ces trois rapports mettent en avant des points positifs.

Tout d’abord, l’État a élaboré une doctrine, présentée en conseil des ministres le 15 janvier 2014, qui fixe très clairement les axes stratégiques suivants : souveraineté, infrastructures vitales, accompagnement de la transition énergétique, évitement des risques systémiques. Il faut avoir en tête ces éléments stratégiques majeurs.

Ces rapports mettent aussi en exergue l’importance de la création de Bpifrance et de l’articulation de sa doctrine d’intervention, qui a été présentée au Parlement en mai 2013.

Ils soulignent également que l’ordonnance du 20 août 2014 clarifie les différents rôles de l’État dans les instances de gouvernance des entreprises. Cela participe de la politique de l’État actionnaire.

La Cour des comptes recommande de fixer des objectifs de détention en capital, mais cela pourrait rendre difficile de réagir rapidement, en fonction des enjeux économiques, dans un monde en constante mutation. Je tiens à appeler l’attention de la représentation nationale sur ce point.

Quant à la recommandation de la Cour des comptes de procéder à un désengagement massif, le Gouvernement considère que la mise en œuvre d’un tel programme constituerait un risque important de fragilisation d’entreprises stratégiques pour le pays.

Debut de section - Permalien
Christophe Sirugue, secrétaire d'État

M. Christophe Sirugue, secrétaire d'État. Pour autant, nous voulons limiter nos participations dans des entreprises, mais dans le cadre d’une démarche de bonne gestion, respectueuse du patrimoine et des orientations stratégiques de l’État, dont le rôle n’est pas de boursicoter.

Applaudissementssur les travées du groupe socialiste et républicain.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Jean Desessard, pour le groupe écologiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

M. Jean Desessard. Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat.

Exclamations amusées sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Mardi 24 janvier, le conseil d’administration d’EDF a adopté un mécanisme d’indemnisation, en contrepartie de l’arrêt de la centrale de Fessenheim.

Le groupe écologiste salue ce premier pas vers la fermeture de la centrale nucléaire la plus vieille, mais aussi la plus dangereuse de France

Murmures sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

M. Jean Desessard. … qui présente un risque plus grand que toutes les autres.

Mme Catherine Troendlé s’exclame.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

En effet, cette centrale est construite sur une faille sismique et à proximité immédiate du Rhin, en zone inondable. Les deux réacteurs de Fessenheim sont posés sur une dalle en béton armé d’une épaisseur d’un mètre, soit une épaisseur plus faible que pour tous les autres réacteurs français et jugée, depuis le drame de Fukushima, insuffisante pour maintenir la centrale en exploitation. De surcroît, la centrale surplombe la plus grosse nappe phréatique d’Europe, qui, de Bâle à Francfort, alimente 6 millions d’Européens en eau.

En contrepartie de la fermeture de Fessenheim, EDF recevra la somme importante de 490 millions d’euros, aura l’autorisation de poursuivre la construction du très contesté EPR de Flamanville et obtiendra une dérogation à la loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte pour relancer le deuxième réacteur de la centrale de Paluel, en Seine-Maritime, à l’arrêt depuis l’effondrement d’un générateur de vapeur de 465 tonnes…

Par ailleurs, la décision est suspendue à l’accord de la Commission européenne à une recapitalisation d’EDF par l’État à hauteur de 3 milliards d’euros.

Ces concessions ne sont pas minces. De telles mesures nécessitent un temps d’application long, ce qui risque de repousser au-delà de l’élection présidentielle l’apposition de la signature mettant fin à l’exploitation de la centrale.

Madame la ministre, comment le Gouvernement compte-t-il s’assurer que le processus engagé mardi ira à son terme, quel que soit le résultat de l’élection présidentielle ?

Applaudissements sur les travées du groupe écologiste. – Mme Patricia Schillinger applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme la ministre de l’environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat.

Debut de section - Permalien
Ségolène Royal, ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat

Monsieur le sénateur, la décision du conseil d’administration d’EDF à laquelle vous faites référence présente trois avantages.

D’abord, elle entérine la fermeture de la centrale de Fessenheim, qui fonctionne encore grâce à une dérogation et dont l’autorisation arrive de toute manière à échéance au mois de décembre 2022. Les centrales plus récentes n’ont plus l’autorisation de procéder à leur refroidissement en pompant directement l’eau d’un fleuve, en l’occurrence le Rhin. En outre, la centrale de Fessenheim est située sur une faille sismique, et l’un de ses réacteurs est actuellement à l’arrêt. EDF doit rationaliser ses investissements : un certain nombre de réacteurs arrivant au terme de leur durée de vie, il est très important de faire les choix les plus judicieux.

Ensuite, cette décision permettra de débloquer les stratégies d’investissement. Je pense notamment aux investissements franco-allemands. Cela fait longtemps que nous avions promis aux Allemands de fermer Fessenheim. Le processus est donc en cours. J’ai interpellé dès hier le ministre allemand de l’industrie, avec lequel nous avions commencé à poser les bases de la construction sur ce secteur d’une usine de voitures électriques du groupe Tesla : l’idée est de mettre en place une commission mixte franco-allemande pour défendre la candidature du territoire d’implantation de la centrale. Nous avons également, sur ce même territoire, un projet de production de batteries électriques de troisième génération avec des industriels allemands.

Enfin, il s’agit de faire en sorte que le démantèlement de Fessenheim soit exemplaire, afin de déboucher sur la création d’une filière industrielle de tout premier plan. En effet, il y a 400 centrales nucléaires à démanteler à travers le monde. C’est un marché planétaire rentable. Les ingénieurs et les techniciens d’EDF doivent être les meilleurs au monde dans ce domaine.

Applaudissements sur les travées du groupe écologiste et sur certaines travées du groupe socialiste et républicain.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour le groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Cécile Cukierman

Ma question s'adresse à Mme la ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.

Après les fleurons de notre industrie, c’est le premier groupe d’habillement français qui annonce la suppression de près de 2 000 emplois supplémentaires et la liquidation d’enseignes centenaires présentes sur l’ensemble du territoire. Pas une région, pas un département ne sera épargné par ce plan massif de destruction d’emplois, qui intervient après que près de 4 000 emplois ont déjà été supprimés en deux ans !

Cela fait plusieurs années que Vivarte est victime de fonds d’investissement vautours motivés par des objectifs de court terme, sous le regard indifférent de l’État, alors que le groupe a reçu près de 44 millions d’euros d’argent public, dont 14 millions d’euros en 2016 au titre du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, le CICE.

Devant l’attitude des actionnaires et des fonds de pension, notre pays a besoin de mesures fortes pour assurer la défense de ces entreprises et de leurs salariés, dont les intérêts doivent passer avant ceux des actionnaires.

Madame la ministre, qu’allez-vous faire ? Votre rhétorique n’est plus acceptable ! Comment pouvez-vous dire à ces milliers de salariés que rien ne sera fait ? Il vous reste quatre semaines pour inscrire à l’ordre du jour du Parlement la discussion d’un projet de loi permettant de sanctionner les plans sociaux fondés sur une démarche d’optimisation financière, quatre semaines pour protéger les entreprises et les salariés victimes de ce fléau ! Ce texte peut voir le jour ; cela dépend de la volonté gouvernementale.

À quelques semaines d’échéances électorales décisives, comptez-vous enfin répondre aux attentes des salariés de notre pays ? À défaut, votre inaction vous rendra encore une fois complice de fait de ces fonds prédateurs qui asphyxient notre économie !

Applaudissements sur les travées du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme la ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.

Debut de section - Permalien
Myriam El Khomri, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social

Madame la sénatrice, à la demande de l’intersyndicale et de Laurent Berger, nous avons reçu hier, avec Christophe Sirugue, l’ensemble des organisations syndicales du groupe Vivarte. Celles-ci ont exprimé leur très grande insatisfaction devant le comportement des dirigeants du groupe, souligné la difficulté du dialogue social au sein de ce dernier et relayé l’inquiétude des salariés, que nous partageons tous.

Tous les territoires sont effectivement concernés. Les emplois en cause sont à 80 % occupés par des femmes, dont beaucoup travaillent à temps partiel. Il s’agit bien souvent de mères qui élèvent seules leurs enfants.

Il semble acquis que la stratégie du groupe Vivarte vise exclusivement à protéger les intérêts financiers des actionnaires, aux dépens de la mise en œuvre d’un projet industriel de nature à dessiner un avenir pour l’ensemble du groupe.

La situation actuelle de Vivarte est la conséquence d’un leveraged buy-out, ou LBO, raté.

Debut de section - Permalien
Myriam El Khomri, ministre

Cette stratégie financière de court terme se traduit effectivement par des plans de restructuration successifs et la perte de nombreux emplois. C’est inacceptable !

Le recours au CICE est encadré : il doit figurer dans les comptes du groupe, et il est légitime de demander à ce dernier de justifier l’utilisation de cet argent public. C’est d’ailleurs ce que nous allons faire.

Debut de section - Permalien
Myriam El Khomri, ministre

Contrairement à ce que vous affirmez, nous avons assuré les organisations représentatives que l’État actionnera tous les leviers à sa disposition pour contraindre l’entreprise à assumer ses responsabilités économiques et ses responsabilités sociales.

Debut de section - Permalien
Myriam El Khomri, ministre

L’État jouera pleinement son rôle, en se portant garant du dialogue social et du respect par le groupe de ses obligations en matière de transparence, d’activité et d’emploi.

Debut de section - Permalien
Myriam El Khomri, ministre

Mme Myriam El Khomri, ministre. Que les choses soient claires : l’État n’homologuera pas un plan de sauvegarde de l’emploi qui ne respecterait pas les dispositions légales en matière tant de dialogue social que de mesures d’accompagnement. Christophe Sirugue et moi-même avons rendez-vous avec la direction le 31 janvier prochain. Nous lui demanderons alors des comptes.

Applaudissementssur certaines travées du groupe socialiste et républicain.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour la réplique.

Debut de section - PermalienPhoto de Cécile Cukierman

Mme Cécile Cukierman. Madame la ministre, j’aurais préféré vous entendre dire que ce plan de restructuration serait le dernier ! Notre pays a besoin d’une volonté politique et d’une législation permettant que nous ne vivions plus de tels désastres économiques, aux conséquences sociales et territoriales catastrophiques ! Vous auriez dû déposer un projet de loi contre les licenciements boursiers, afin de sécuriser la situation des salariés, plutôt que de casser le code du travail, au printemps dernier.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme Éliane Giraud, pour le groupe socialiste et républicain.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Giraud

Ma question s’adresse à Mme la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat.

Madame la ministre, pour la deuxième fois consécutive en moins de deux mois, la France et les Français subissent des niveaux de pollution très élevés. Il s’agit d’un pic de pollution exceptionnel, qui ne touche pas seulement les régions d’Île-de-France et Auvergne-Rhône-Alpes ; il atteint la façade ouest du territoire et affecte une grande partie de l’Europe.

La forte concentration de polluants et le taux particulièrement élevé de particules fines ont des conséquences très préoccupantes pour la santé de tous, notamment des plus fragiles : personnes âgées, enfants, femmes enceintes, personnes atteintes de maladies respiratoires.

Sont évidemment en cause le trafic routier et l’industrie, mais pas seulement : en ce début de mois de janvier, le froid accroît les besoins en chauffage, et les conditions anticycloniques sèches et froides entraînent une concentration des particules, que les vents trop faibles ne dispersent pas.

Face à cet épisode exceptionnel, les pouvoirs locaux et les services décentralisés de l’État ont mis en place des mesures spécifiques adaptées afin de réduire l’intensité de ces pics de pollution, en particulier la circulation alternée ou la circulation différenciée, mise en œuvre pour la première fois à Paris, à Lyon et à Grenoble.

Certaines régions et certains départements engagés dans cette démarche se retirent aujourd’hui des tours de table locaux alors qu’il est urgent d’agir. Les climatosceptiques ne sont pas tous aux États-Unis, hélas ! L’État doit donc coordonner l’ensemble des mesures pour éviter des disparités d’action sur l’ensemble du territoire et favoriser l’indispensable prise de conscience.

Madame la ministre, vous avez beaucoup œuvré. Je pense à la loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte, ainsi qu’à la COP 21, qui a abouti à l’accord de Paris.

Au-delà des mesures de restriction prises par arrêtés préfectoraux pour les secteurs des transports, de l’industrie, du logement et de l’agriculture, pouvez-vous récapituler le plan d’action mis en œuvre par le Gouvernement pour lutter durablement contre la pollution de l’air et préserver ainsi la santé de nos concitoyens ?

Applaudissements sur certaines travées du groupe socialiste et républicain.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme la ministre de l’environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat.

Debut de section - Permalien
Ségolène Royal, ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat

Madame la sénatrice, vous avez raison de souligner ce grave problème de santé publique. Vous avez très bien décrit les conditions météorologiques qui conduisent à la concentration de particules très nocives dans l’atmosphère. Ces particules fines, pas plus grosses que le dixième de l’épaisseur d’un cheveu, pénètrent dans le cerveau, dans le sang, dans le fœtus. Nous devons absolument agir.

Debut de section - Permalien
Ségolène Royal, ministre

Mme Ségolène Royal, ministre. Dans cette perspective, j’ai mis en place la circulation différenciée et créé le certificat « qualité de l’air », afin que seuls les véhicules propres puissent circuler. Il faut désormais accélérer la révolution du transport propre, du chauffage propre et de l’agriculture propre !

Mme Frédérique Espagnac et M. Jean Desessard applaudissent.

Debut de section - Permalien
Ségolène Royal, ministre

En matière de transports, il convient bien évidemment de favoriser la voiture électrique. Il existe aujourd'hui une prime de 10 000 euros pour l’achat d’une voiture électrique et de 1 000 euros pour celui d’un scooter électrique. Tous les constructeurs automobiles en Europe prennent désormais en compte cette nécessaire évolution énergétique.

Je rappelle l’existence d’un crédit d’impôt pour l’installation de bornes de recharge électrique chez les particuliers et d’un crédit d’impôt pour le remplacement d’équipements de chauffage polluants par des dispositifs plus propres. Je mentionnerai également les actions que nous menons pour réduire l’utilisation des produits phytosanitaires dans l’agriculture et renforcer les contrôles sur les industriels.

C’est grâce aux technologies innovantes et à une volonté partagée par tous – citoyens, entreprises, territoires, à l’instar de la ville de Grenoble et du département de l’Isère, très actifs en la matière et très concernés par ce problème – que nous parviendrons à changer les comportements et à rendre l’air le plus propre possible !

Applaudissements sur certaines travées du groupe socialiste et républicain et du groupe écologiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Jean-Claude Luche, pour le groupe de l’UDI-UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Luche

Ma question s'adresse à M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt. Elle concerne les groupements de défense sanitaire, les GDS, et porte plus particulièrement sur l’identification de la collectivité territoriale compétente en matière d’aide à ces derniers.

En effet, la question n’a pas été tranchée depuis l’entrée en vigueur de la loi NOTRe du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République. Les départements, les régions et les groupements de défense sanitaire sont aujourd’hui dans le flou.

D’un côté, les départements, ne bénéficiant plus de la clause de compétence générale, ne peuvent plus intervenir auprès de ces groupements. De l’autre, les régions, qui n’ont pas reçu la compétence en matière de santé publique et de santé animale, ne semblent donc pas être compétentes en matière d’aide aux GDS.

Des mesures transitoires prévues par la loi NOTRe avaient permis de maintenir la majeure partie des financements régionaux et départementaux en 2016, dans un contexte de crise de l’élevage. Mais elles doivent prendre fin en 2017, ce qui mettra les groupements de défense sanitaire en grande difficulté partout dans notre pays.

L’absence de clarification de la situation juridique met en péril les actions des GDS, pourtant essentielles pour les producteurs comme pour les consommateurs, comme le montre l’actualité avec la grippe aviaire. Cela est d’autant plus préoccupant que ces groupements jouent un rôle de premier plan pour la qualité et l’image des productions françaises, auprès des consommateurs nationaux comme à l’export.

Monsieur le ministre, quelles actions comptez-vous mettre en place pour aider les groupements de défense sanitaire ? Envisagez-vous de prolonger les mesures provisoires pour 2017 et, dans une perspective plus durable, de mettre en œuvre un cadre légal pour l’intervention des collectivités territoriales en matière de santé animale ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Luche

M. Jean-Claude Luche. Le statut particulier des aides aux GDS, qui relèvent à la fois du domaine sanitaire et du domaine économique, requiert une reconnaissance officielle et un traitement légal spécifique.

Applaudissements sur les travées de l'UDI -UC. – M. Michel Bouvard applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. le ministre de l’agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt.

Debut de section - Permalien
Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement

Monsieur le sénateur, vous évoquez un sujet bien connu des membres de la Haute Assemblée.

Les GDS sont organisés avec les associations d’éleveurs à l’échelon départemental. Jusqu’à présent, ces groupements, qui jouent un rôle très utile dans la gestion des crises sanitaires, au côté des vétérinaires et des services de l’État, étaient financés par les départements.

Comme vous l’avez rappelé, au terme d’une période transitoire d’un an, nous allons devoir appliquer en 2017 les dispositions inscrites dans la loi NOTRe. La perte de la clause de compétence générale empêchera les départements de continuer à financer les GDS.

Dès lors, comment ces structures très utiles et importantes seront-elles financées à l’avenir ? Nous avons engagé des discussions avec les fédérations régionales des groupements de défense sanitaire en vue de mettre en place une coordination à l’échelle régionale. Le financement devra être assuré par les régions à partir de 2017.

En tant que ministre de l’agriculture, je suis attaché au maintien du réseau des GDS, dont l’action est très utile pour surmonter les épisodes de crise sanitaire auxquelles nous pouvons être confrontés et assurer une bonne conduite de l’élevage en France.

Applaudissements sur certaines travées du groupe socialiste et républicain.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Daniel Gremillet, pour le groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Gremillet

Ma question s'adresse à M. le ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales.

Monsieur le ministre, je souhaiterais attirer votre attention sur les conséquences de la création des communes nouvelles sur la vie de nos entreprises et de nos concitoyens.

J’ai été alerté par une entreprise qui, à la suite de la fusion de sa commune d’implantation avec d’autres, a reçu le 15 novembre 2016 de la mairie un courrier l’informant du changement de son adresse postale – numéro et nom de rue – à compter du 1er janvier 2017.

A-t-on mesuré les conséquences d’une telle modification pour les acteurs économiques et les hommes et les femmes qui vivent dans nos territoires et se trouvent mis devant le fait accompli ?

Le coût induit est estimé à plusieurs milliers d’euros pour certaines entreprises, qui devront gérer des stocks d’emballages devenus périmés à cause du changement d’adresse ! Il y a aussi des coûts indirects, liés à l’atteinte portée à la crédibilité de l’entreprise qui doit expliquer à ses clients qu’elle est restée la même et n’a pas été rachetée, bien que son adresse ait changé.

Cette situation apparaît aberrante au regard de l’objectif de simplification administrative et de rationalisation des dépenses qui sous-tend la création de communes nouvelles. Mon propos est non pas de remettre en cause ces dernières, mais de souligner le décalage entre la fixation d’une date butoir au 1er janvier 2017 et les réalités de la vie quotidienne.

Monsieur le ministre, quels moyens le Gouvernement entend-il mettre en place pour accompagner les communes nouvelles, ainsi bien sûr que leurs entreprises et leurs habitants, dans leurs relations avec les administrations et les services publics ?

Applaudissements sur de nombreuses travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. le ministre de l’aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales.

Debut de section - Permalien
Jean-Michel Baylet, ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales

M. Jean-Michel Baylet, ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales. Monsieur le sénateur, comme vous le savez, la France compte à elle seule plus de communes que l’ensemble des autres pays européens réunis.

Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Revet

C’est ce qui fait la beauté de notre pays !

Debut de section - Permalien
Jean-Michel Baylet, ministre

Nous sommes très attachés à nos communes, mais la question de leur capacité à se développer et de leur pérennité se pose. Avec l’intercommunalité, nous avons trouvé une réponse à cette question.

Désormais, il est possible de créer des communes nouvelles, sur décision des conseils municipaux et des maires. Ainsi, 1 760 communes ont fusionné, sur la base du volontariat, pour créer 517 communes nouvelles. On ne saurait accuser l’État ou le Gouvernement d’avoir exercé quelque pression que ce soit sur les élus des communes concernées.

Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - Permalien
Jean-Michel Baylet, ministre

Bien entendu, cette évolution peut emporter certaines conséquences. Cela n’a pas échappé au Gouvernement. Un travail a été mené avec l’Association des maires de France pour recenser les difficultés et apporter des réponses. Le rapport de vos collègues Françoise Gatel et Christian Manable intitulé « Les communes nouvelles, histoire d’une révolution silencieuse : raisons et conditions d’une réussite » s’en est fait l’écho.

Il a été décidé que le nom de l’ancienne commune pourrait être conservé dans l’adresse postale. L’INSEE a surmonté les difficultés liées à l’attribution d’un code à une commune nouvelle. Les préfets ont instruction de ne pas brusquer les choses. Les communes nouvelles se mettent en place tranquillement, …

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. Il faut conclure tranquillement, monsieur le ministre.

Sourires.

Debut de section - Permalien
Jean-Michel Baylet, ministre

M. Jean-Michel Baylet, ministre. … sur l’initiative des élus et avec l’accompagnement de l’État, ce qui est bien la moindre des choses.

Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Daniel Gremillet, pour la réplique.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Gremillet

Monsieur le ministre, j’entends votre réponse, mais quand comprendra-t-on que le temps économique diffère du temps administratif et politique ? Quand comprendra-t-on que la vie des entreprises ne peut être soumise à une date butoir ?

Mon propos, je le répète, n’est pas de remettre en cause les communes nouvelles. Mais il faut donner le temps aux entreprises et aux habitants de s’adapter à l’évolution de leur territoire !

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Gremillet

M. Daniel Gremillet. Pensez au gaspillage économique et humain qui va résulter d’une transition mal négociée !

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Jean-Jacques Filleul, pour le groupe socialiste et républicain.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Filleul

Ma question s'adresse à M. le secrétaire d'État chargé des transports, de la mer et de la pêche.

Au mois de novembre 2014, monsieur le secrétaire d’État, vous avez lancé l’opération trains d’équilibre du territoire, ou TET. La commission que vous avez mise en place a établi, sous la conduite de notre collègue député Philippe Duron, un diagnostic complet et formulé des exigences multiples, l’objectif principal étant que les TET puissent devenir ou redevenir des liaisons utiles, avec une trajectoire financière soutenable.

Au fil du temps, les trains d’équilibre du territoire, au positionnement mal identifié entre TGV et TER, sont devenus les parents pauvres des liaisons ferroviaires. Ils sont aujourd’hui largement déficitaires, leur offre ne correspondant plus aux besoins de mobilité des voyageurs et des territoires.

Les recommandations de la commission ont eu pour objet de déterminer si ces liaisons répondent à un besoin national ou régional, de dessiner des perspectives de long terme, en vue de proposer au public et aux territoires des solutions de mobilité actualisées et de qualité.

La commission a également préconisé un renforcement du rôle de l’État stratège, en tant qu’autorité organisatrice, et le renouvellement du matériel roulant à l’horizon 2020-2025.

Monsieur le secrétaire d’État, pouvez-vous dresser le bilan de la feuille de route pour un nouvel avenir des trains d’équilibre du territoire, qui a fait l’objet d’une communication le 12 janvier dernier ?

Applaudissements sur certaines travées du groupe socialiste et républicain.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des transports, de la mer et de la pêche.

Debut de section - Permalien
Alain Vidalies, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, chargé des transports, de la mer et de la pêche

Monsieur le sénateur, le constat est partagé : il a longtemps été difficile de déterminer précisément ce que recouvrait la notion de trains d’équilibre du territoire, entre trains de nuit, grandes lignes nationales, lignes exclusivement locales… Le seul dénominateur commun était que ces trains étaient placés sous la responsabilité de l’État.

Les trains d’équilibre du territoire sont de plus en plus déficitaires : le déficit a atteint 400 millions d’euros en 2011. De surcroît, leur fréquentation a diminué de 20 %, le vieillissement du parc de matériels est préoccupant – la moyenne d’âge est de trente-cinq ans – et le service aux clients est particulièrement critiqué.

La commission pluraliste que j’ai mise en place a effectué un travail tout à fait remarquable, sous la présidence de Philippe Duron. Ses propositions ont été soumises à l’examen des commissions parlementaires compétentes et à la décision du Gouvernement.

À la suite du redécoupage régional, le tracé de certaines lignes, qui traversait auparavant le territoire de plusieurs régions, se trouve désormais inclus dans le périmètre d’une seule. Les négociations que j’ai engagées avec les présidents de région ont abouti au transfert aux régions de dix-huit lignes, accompagné par un effort considérable de la part de l’État, qui mettra à disposition 3, 5 milliards d’euros de matériels neufs.

Le travail effectué par la commission, le Parlement, le Gouvernement et les régions a permis de dessiner un nouvel avenir pour les trains d’équilibre du territoire. Nous avons ainsi démontré notre engagement en faveur de l’avenir du ferroviaire.

M. Jean-Jacques Filleul applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à Mme Sophie Primas, pour le groupe Les Républicains.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

Ma question s'adresse à M. le ministre de l'intérieur.

Dès le mois de décembre, un rapport alarmant du contre-terrorisme européen alertait l’Europe sur le risque d’une arrivée massive de djihadistes après les défaites subies par Daech en Irak et en Syrie.

Plus de 5 000 Européens, dont 700 Français, sont partis grossir les rangs de Daech et d’Al-Nosra : 1 750 combattants européens radicalisés, extrémistes violents, s’apprêteraient à revenir sur notre sol. Ces djihadistes sont devenus des experts en armement, en explosifs, en actes de guerre souvent aveugles et toujours barbares.

Un rapport d’Europol a montré qu’ils importent avec eux les modes opératoires terroristes ayant déjà été utilisés sur notre territoire. Les pays de l’Union européenne semblent affronter ce danger en ordre dispersé. Nous redoutons que la prise de décisions urgentes et nécessaires et leur mise en œuvre ne prennent autant de temps que pour le PNR.

Monsieur le ministre, comment comptez-vous traiter tous ces cas ? Quelles solutions proposez-vous en vue de parvenir, avec nos partenaires européens, à mettre hors d’état de nuire ces combattants ? Comment allez-vous procéder pour repérer ces criminels qui envisagent de revenir en Europe ? Quel sort entendez-vous réserver à ceux qui seraient capturés directement en Syrie ?

Applaudissements sur de nombreuses travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement.

Debut de section - Permalien
André Vallini, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement

Madame la sénatrice, je vous prie d’excuser Bruno Le Roux. Retenu à l’Assemblée nationale, il m’a chargé de vous communiquer les éléments de réponse suivants.

La question du traitement des personnes revenant du djihad est une priorité pour le Gouvernement et les autorités administratives et judiciaires. Dès leur arrivée sur le territoire, ces individus sont placés en garde à vue. Qu’ils aient été simples candidats au djihad ou qu’ils aient participé à des exactions sur zone, ils font l’objet d’un traitement judiciaire.

Pour faire face à la charge que représente désormais ce contentieux et à l’éventuel afflux de djihadistes qui partiront de Mossoul ou de Raqqa lorsque ces deux villes seront tombées et que nous aurons vaincu l’État islamique, le parquet antiterroriste de Paris a été renforcé. Il compte désormais treize magistrats. Surtout, il dispose d’une capacité de soutien de plus de soixante magistrats mobilisables en cas d’événements particuliers.

Vous le voyez, pour répondre à la hausse du nombre des procédures en matière de terrorisme, le Gouvernement a pris les décisions qui s’imposaient. Ainsi, au 1er janvier de cette année, de nouveaux personnels ont été affectés : un onzième juge d’instruction antiterroriste, un juge des enfants, quatre magistrats pour renforcer la capacité de jugement de la cour d’assises spécialement composée en cette matière, quatre magistrats nommés à la cour d’appel pour renforcer la chambre de l’application des peines et la chambre correctionnelle, un magistrat supplémentaire au parquet général, dix greffiers, dont huit affectés au tribunal de grande instance de Paris – six pour le siège, deux pour le parquet – et les deux autres à la cour d’appel.

De même, l’administration pénitentiaire est en mesure de prendre en charge les individus qui seraient placés en détention provisoire par les magistrats ou qui seraient incarcérés après jugement. Depuis 2012, nous avons financé la construction de plus de 4 000 nouvelles places de prison et créé plus de 4 000 emplois dans l’administration pénitentiaire.

Enfin, l’anticipation des retours, y compris de femmes ou de mineurs – à ce jour, 460 mineurs français sont en Irak ou en Syrie, dont la moitié ont moins de cinq ans, d’où la création d’un juge des enfants supplémentaire –, est l’objet de l’un des axes du plan « sécurité pénitentiaire et action contre la radicalisation violente » que le Gouvernement a présenté par la voix de Jean-Jacques Urvoas le 25 octobre dernier.

Debut de section - Permalien
André Vallini, secrétaire d'État

M. André Vallini, secrétaire d'État. Vous le voyez, madame la sénatrice, le Gouvernement prend toutes les mesures nécessaires pour faire face au retour des djihadistes sur notre territoire.

Applaudissementssur quelques travées du groupe socialiste et républicain.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

Je vous remercie de ces précisions, monsieur le secrétaire d'État. Votre réponse porte sur les moyens. Je suis ravie d’apprendre que les effectifs et les moyens ont été renforcés, y compris dans l’administration pénitentiaire, mais comment ces djihadistes seront-ils traités ? Quelles peines seront prononcées à leur encontre ? Dans quelles conditions seront-ils incarcérés ? Quelles sont les méthodes utilisées pour les repérer ? Comment allons-nous travailler avec nos partenaires européens ?

Je ne veux pas engager de polémique sur un sujet aussi sérieux, mais nos concitoyens ont besoin d’être rassurés.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme Anne Chain-Larché, pour le groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Anne Chain-Larché

Ma question s’adresse à Mme la ministre des familles, de l'enfance et des droits des femmes.

Aider et défendre la famille, c’était inscrit dans l’ADN de la France. L’État a toujours soutenu la natalité par des politiques familiales intelligentes et bienveillantes. Cette attention portée à la famille a produit des résultats positifs : la France a bénéficié d’un taux de fécondité supérieur à celui des pays voisins, en particulier l’Allemagne.

Au terme du présent quinquennat, rien n’est plus comme avant : vous avez détruit la politique familiale avec méthode

Protestations sur les travées du groupe socialiste et républicain.

Debut de section - PermalienPhoto de Anne Chain-Larché

Ces mesures, dont vous portez la responsabilité, ont eu des conséquences concrètes pour toutes les familles : selon l’Union nationale des associations familiales, l’UNAF, 160 000 familles vivant sous le seuil de pauvreté ont perdu du pouvoir d’achat en raison de la diminution de ces prestations.

Un sondage réalisé par l’IFOP révèle que 55 % des Français estiment que la politique familiale de ces dernières années est de nature à conduire les couples à renoncer à une nouvelle naissance ou à la différer.

Vous tentez d’expliquer que cette situation est imputable à d’autres facteurs. Aux coups portés par votre politique familiale s’ajoute une baisse générale du pouvoir d’achat de l’ordre de 500 euros par an et par Français depuis 2012.

Quand reconnaîtrez-vous que vos politiques familiale et économique ont trahi la société solidaire que vous-même appeliez de vos vœux, et qu’elles ont conduit à une paupérisation du pays et des familles ?

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement.

Debut de section - Permalien
André Vallini, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement

Madame la sénatrice, Mme Rossignol m’a demandé de vous communiquer les éléments de réponse suivants.

Notre politique familiale est audacieuse et juste. Elle vise à renforcer notre soutien aux familles les plus fragiles, notamment les familles monoparentales et les familles nombreuses.

Dès 2012, nous avons revalorisé l’allocation de rentrée scolaire de 25 %, l’allocation de soutien familial de 25 % en cinq ans et le complément familial de 50 % en cinq ans. Ce sont des chiffres qui démontrent la réalité du soutien que nous apportons aux familles !

M. Jean-Louis Carrère applaudit.

Debut de section - Permalien
André Vallini, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement

En outre, nous avons créé une garantie contre les impayés de pensions alimentaires et une agence de recouvrement des pensions alimentaires impayées.

Nous avons aussi rétabli l’équilibre financier de la branche famille de la sécurité sociale, dont le déficit atteignait 2, 5 milliards d’euros en 2012.

Debut de section - Permalien
André Vallini, secrétaire d'État

Pour y parvenir, dans un souci de justice, la réduction des allocations familiales a touché moins de 10 % des familles allocataires, celles dont les revenus dépassent 6 000 euros par mois. Quant à la baisse du plafond du quotient familial, elle n’a concerné que 5 % des foyers fiscaux, à savoir les plus favorisés d’entre eux.

Debut de section - Permalien
André Vallini, secrétaire d'État

Concernant la prime de naissance, elle est toujours versée et son montant n’a pas été diminué, les prestations dites « natalistes » n’ayant pas été modifiées du tout.

Quant à la baisse des naissances constatée par l’INSEE, elle est infime – on est passé de 1, 96 à 1, 93 enfant par femme entre 2015 et 2016 – et s’explique essentiellement par la diminution du nombre de femmes en âge de procréer et par le recul de l’âge auquel les femmes mettent au monde leur premier enfant. C’est une évolution qui touche la plupart des sociétés développées.

Pour aider mieux encore l’ensemble des familles, nous nous attachons à promouvoir l’égalité des tâches et des responsabilités familiales au sein du couple, à promouvoir l’égalité professionnelle et l’égalité salariale, à faciliter la conciliation entre vie professionnelle et vie familiale, par un ensemble de services collectifs que bien des pays nous envient. Je pense notamment aux modes d’accueil des jeunes enfants.

Voilà ce que nous avons fait pendant cinq ans, madame la sénatrice, pour rendre la politique familiale de notre pays plus efficace et plus juste.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme Anne Chain-Larché, pour la réplique.

Debut de section - PermalienPhoto de Anne Chain-Larché

Mme Anne Chain-Larché. Monsieur le secrétaire d'État, les statistiques ont une vertu : celle de montrer le résultat d’une politique. Ces deux dernières années, il y a eu, sur notre territoire, 34 000 naissances de moins que les années précédentes.

C’est terminé ! sur les travées du groupe socialiste et républicain.

Debut de section - PermalienPhoto de Anne Chain-Larché

Rendez-vous compte du message que vous envoyez, de l’effet qu’il a sur les jeunes, de la rupture que vous avez installée !

Debut de section - PermalienPhoto de Anne Chain-Larché

Mme Anne Chain-Larché. Je tiens à souligner la perte de confiance des jeunes Français !

Applaudissements sur de nombreuses travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Ce n’est terminé que maintenant, monsieur Carrère ! C’est moi qui préside cette séance !

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Nous en avons terminé avec les questions d’actualité au Gouvernement.

La prochaine séance de questions d’actualité au Gouvernement aura lieu le mardi 31 janvier 2017, à seize heures quarante-cinq.

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux quelques instants.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à seize heures cinq, est reprise à seize heures vingt, sous la présidence de M. Jean-Pierre Caffet.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Caffet

M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre le rapport 2016 sur la stratégie du commerce extérieur de la France et la politique commerciale européenne.

Acte est donné du dépôt de ce rapport.

Il a été transmis aux commissions compétentes.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Caffet

L’ordre du jour appelle la discussion, après engagement de la procédure accélérée, du projet de loi ratifiant les ordonnances n° 2016-1561 du 21 novembre 2016 complétant et précisant les règles budgétaires, financières, fiscales et comptables applicables à la collectivité de Corse, n° 2016-1562 du 21 novembre 2016 portant diverses mesures institutionnelles relatives à la collectivité de Corse et n° 2016-1563 du 21 novembre 2016 portant diverses mesures électorales applicables en Corse (projet n° 264, texte de la commission n° 312, rapport n° 311 et avis n° 306).

Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.

Debut de section - Permalien
Jean-Michel Baylet, ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales

Monsieur le président, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur Hugues Portelli, monsieur le rapporteur pour avis Charles Guené, mesdames, messieurs les sénateurs, c’est avec un grand plaisir que je me trouve aujourd’hui devant vous afin de présenter le projet de ratification des trois ordonnances corses, dernier acte législatif nécessaire à la mise en œuvre de la future collectivité unique de Corse.

Je tiens avant tout à remercier le sénateur Portelli, rapporteur du projet de loi, et le sénateur Guené, rapporteur pour avis, qui a pris en charge l’ordonnance financière. Vous avez accompli, messieurs les sénateurs, un remarquable et courageux travail d’exégèse sur ces ordonnances. Je suis bien placé pour savoir que la tâche était difficile !

Les trois ordonnances que le Gouvernement vous propose de ratifier déterminent les modalités pratiques de la création de la collectivité unique de Corse, collectivité à statut particulier au sens de l’article 72 de la Constitution.

Ces ordonnances ont été prises sur le fondement de l’article 30 de la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République, ou loi NOTRe.

Ainsi, à compter du 1er janvier 2018, la collectivité unique, dénommée « collectivité de Corse », se substituera à la collectivité territoriale de Corse et aux deux départements de Haute-Corse et de Corse-du-Sud.

Cette collectivité unique n’a été ni imposée ni même imaginée par le Gouvernement. Elle provient de la volonté des élus corses eux-mêmes qui en ont voté le principe à l’Assemblée de Corse le 12 décembre 2014, à une large majorité, toutes tendances confondues, avec quarante-deux voix pour et seulement huit voix contre. Ce rappel, compte tenu du contexte, me semble fondamental dans notre débat d’aujourd’hui, car il est important de savoir qui a pris cette initiative et de quelle manière la collectivité corse, dans l’ensemble de ses composantes – ou presque –, l’a appréhendée.

En préalable, je dirai quelques mots sur le calendrier.

Je tiens à rappeler que, conformément à l’article 38 de la Constitution, les ordonnances entrent en vigueur dès leur publication, mais deviennent caduques si le projet de loi de ratification n’est pas déposé devant le Parlement avant la date fixée par la loi d’habilitation.

Au cas particulier, le Gouvernement a bien évidemment respecté les délais impartis, ainsi que l’a souligné votre rapporteur.

L’habilitation législative a été accordée, dans la loi NOTRe du 7 août 2015, pour une période de dix-huit mois suivant la promulgation de la loi, soit jusqu’au 7 février 2017.

Les trois ordonnances relatives à la création de la collectivité unique de Corse ont été publiées au Journal officiel du 22 novembre 2016, soit largement dans les délais fixés par la loi. Le projet de ratification, qui est l’objet de notre débat d’aujourd’hui, a été déposé sur le bureau du Sénat le 21 décembre dernier, c'est-à-dire, lui aussi, largement dans les délais impartis. Mais il est bien évident que la fin de la session parlementaire, prévue le 24 février prochain, nous contraint à l’adoption du projet de loi d’ici à cette date, faute de quoi nous verrons l’édifice s’effondrer.

Mesdames, messieurs les sénateurs, …

Sourires.

Debut de section - Permalien
Jean-Michel Baylet, ministre

Certes, mais d’autres qui rêvent de voir cet édifice s’effondrer sont aussi là !

Je tiens à rappeler que, sur ces mêmes travées, le 29 mai 2015, votre assemblée avait approuvé la création de la collectivité unique de Corse.

L’expression des orateurs de l’ensemble des groupes avait été ce jour-là, comme devant la collectivité de Corse, consensuelle – je pense, par exemple, à M. Hyest pour le groupe Les Républicains ou à M. Favier pour le groupe CRC –, attestant le bien-fondé de la démarche engagée par le Gouvernement consécutivement à la volonté de création de la collectivité unique émanant des élus corses.

Pour connaître la cohérence du Sénat et son esprit de suite, sans parler de sa sagesse légendaire, j’imagine qu’il nous apportera un soutien tout aussi large alors que nous sommes sur le point de finaliser.

J’ajoute que j’ai respecté la promesse du Gouvernement qui, souhaitant parvenir à un accord en commission mixte paritaire sur le projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, avait remis à plus tard la discussion et, le cas échéant, l’intégration d’amendements déposés tant par les sénateurs que par les députés.

J’ai donc travaillé tout au long de l’année 2016 avec l’ensemble des élus corses, afin de coconstruire avec eux ces ordonnances. Je les ai rencontrés tous, à plusieurs reprises. À leur demande, j’ai jugé opportun de reprendre la quasi-totalité des amendements qui avaient été présentés, parce qu’ils me semblaient légitimes et propres à améliorer le fonctionnement de la future collectivité.

Remarquez que j’ai pris cette décision au risque d’outrepasser quelque peu le strict cadre de l’habilitation. La chose n’a évidemment échappé ni au Conseil d’État ni au rapporteur Portelli, qui n’a pas pour autant conclu à la remise en cause de la ratification des ordonnances.

Par l’article 30 de la loi NOTRe, le Gouvernement a reçu du Parlement une habilitation large, lui permettant, en résumé, de préciser l’ensemble des conséquences électorales, juridiques et financières de la création de la collectivité de Corse. Cette habilitation étendue a donné lieu à la rédaction des trois ordonnances, publiées au Journal officiel le 22 décembre dernier, dont la ratification est aujourd'hui soumise à votre assemblée.

Je dirai quelques mots sur chacune des trois ordonnances.

L’ordonnance institutionnelle organise la substitution de la collectivité unique aux actuels départements et à la collectivité territoriale de Corse, avec, pour conséquence, de rassembler leurs compétences au sein de la nouvelle collectivité : celle-ci exercera de plein droit les compétences de droit commun des départements et des régions et reprendra aussi celles de la collectivité territoriale de Corse.

La nouvelle collectivité sera redimensionnée, afin de tenir compte de l’élargissement de son champ d’action, par l’ajout de douze sièges supplémentaires au sein de l’Assemblée de Corse.

Par ailleurs, une chambre des territoires sera créée, en vue de mieux coordonner l’exercice des actions respectives des différentes collectivités territoriales et des intercommunalités en matière d’action publique et de solidarité financière.

Enfin, l’ordonnance comporte des dispositions transitoires importantes, notamment en matière de garanties de maintien des conditions de statut et d’emploi des personnels.

Telles sont les principales dispositions de l’ordonnance institutionnelle.

L’ordonnance financière suit la même logique : les financements des trois collectivités actuelles seront adaptés en un financement unique au profit de la nouvelle.

La substitution s’opérera à droit constant pour l’ensemble des biens, droits et obligations des collectivités territoriales appelées à fusionner.

Telles sont les principales dispositions de l’ordonnance financière.

Quant à l’ordonnance électorale, elle prévoit les modifications qu’il est nécessaire d’apporter, le cas échéant, à chaque scrutin, eu égard à la création de la collectivité unique.

La création de la collectivité de Corse n’entraînera aucune conséquence pour l’élection des députés. Pour celle des sénateurs, le mode de scrutin restera strictement inchangé, l’élection continuant de se tenir au sein de deux collèges électoraux, l’un pour la Haute-Corse, l’autre pour la Corse-du-Sud.

En ce qui concerne l’Assemblée de Corse appelée à siéger à compter du 1er janvier 2018, elle sera élue en décembre 2017. Exception faite de l’augmentation de cinquante et un à soixante-trois du nombre de conseillers de l’Assemblée et de celle, strictement proportionnelle, de la prime majoritaire, qui passera mécaniquement de neuf à onze sièges, le régime électoral restera le même qu’aujourd’hui.

Telles sont, mesdames, messieurs les sénateurs, les principales dispositions des trois ordonnances, dont la ratification parlementaire, à laquelle je vous demande, comme vos deux rapporteurs, de bien vouloir procéder, garantira la mise en œuvre de la collectivité unique dans de bonnes conditions juridiques.

L’article 1er du projet de loi ratifie l’ordonnance n° 2016-1561 du 21 novembre 2016 complétant et précisant les règles budgétaires, financières et comptables applicables à la collectivité de Corse.

L’article 2 ratifie l’ordonnance n° 2016-1562 du 21 novembre 2016 portant diverses mesures institutionnelles relatives à la collectivité de Corse.

L’article 3 ratifie l’ordonnance n° 2016-1563 du 21 novembre 2016 portant diverses mesures électorales applicables en Corse.

Je me félicite par ailleurs de l’adoption en commission des dispositions ajoutées aux ordonnances institutionnelle et financière par vos rapporteurs, dont je salue à nouveau la qualité du travail. Après la relecture attentive du Conseil d’État, ces ajouts améliorent encore la rédaction des ordonnances.

Je souhaite aborder aussi devant vous le sort du seul amendement déposé sur ce projet de loi de ratification. Présenté par le sénateur Castelli et les autres membres du groupe du RDSE, cet amendement a, hélas, été déclaré irrecevable par la commission des lois, laquelle a invoqué, commodément, l’article 45 de la Constitution.

Je ne vous cacherai pas que je m’interroge vraiment sur un tel rejet. Ou plutôt, j’ai peur d’en comprendre la raison, qui me semble mettre à mal l’intérêt collectif des Corses, sacrifié à quelques petites aventures politiciennes…

Debut de section - Permalien
Jean-Michel Baylet, ministre

Permettez-moi de rappeler brièvement le contexte qui justifiait le bien-fondé de cet amendement.

Depuis le 10 juin 1801, la Corse est dans une situation particulière au regard du droit de propriété. En effet, celui-ci ne peut s’y exercer pleinement comme sur le reste du territoire national à cause d’une absence massive de titres de propriété.

L’administrateur Miot, nommé par Napoléon, n’a pas, à la demande de l’Empereur lui-même, exonéré les citoyens corses du paiement de l’impôt, mais il a supprimé les sanctions applicables en cas de défaut de déclaration. Il en est résulté une absence de titres de propriété, notamment en zone rurale et montagneuse, qui a engendré l’incroyable désordre foncier actuel.

Depuis plusieurs années, les multiples groupes de travail qui se sont penchés sur le sujet constatent l’ampleur du problème et la nécessité de le résoudre progressivement au bénéfice des citoyens et de la collectivité. De fait, le foncier est souvent très dégradé en Corse, puisque de nombreux biens ne sont pas délimités, ou le sont mal, et appartiennent à ceux que les notaires appellent des « propriétaires apparents », nés avant 1910, c’est-à-dire, en réalité, à des centaines d’héritiers potentiels non connus.

Le retour au droit commun, dont personne ne conteste la légitimité, a été établi en 2002 selon un calendrier progressif, qui s’achèvera au 31 décembre 2017. Il repose essentiellement sur les travaux du groupement d’intérêt public pour la reconstitution des titres de propriété en Corse, le GIRTEC, qui, compte tenu de la difficulté de la tâche, n’a pu commencer réellement sa mission qu’en 2009. Actuellement, environ 34 % des parcelles du territoire corse, soit plus de 350 000 parcelles, sont toujours en indivision, car le GIRTEC est loin d’avoir achevé son difficile travail.

Le travail de recherche des propriétaires et de titrement des parcelles est, vous l’imaginez, colossal. Il est matériellement impossible de l’achever avant une dizaine d’années. Cette réalité a conduit les députés de Rocca Serra, Pupponi, Gandolfi-Scheit, Giacobbi et Marcangeli à présenter une proposition de loi destinée à résorber le désordre foncier. Ce texte a été adopté à l’unanimité par l’Assemblée nationale.

L’amendement du sénateur Castelli reprenait opportunément cette proposition de loi, l’améliorant de surcroît pour ce qui concerne le droit de propriété acquisitive, c’est-à-dire l’usucapion. Je remercie M. Castelli d’avoir voulu tirer la conséquence – il avait raison ! – de l’absence d’inscription de ce texte à l’ordre du jour des travaux de la Haute Assemblée, afin que les dispositions puissent y être examinées avant la fin de la session parlementaire. Dès lors que cet examen n’est plus possible, la commission des lois ayant déclaré l’amendement irrecevable, j’estime – et je ne suis pas le seul ! – que cette décision a de graves conséquences, pour les raisons que je viens d’expliquer.

Dans ces conditions, mesdames, messieurs les sénateurs, le Gouvernement a décidé de prendre ses responsabilités.

Debut de section - Permalien
Jean-Michel Baylet, ministre

Comme toujours ! En l’occurrence, ce n’est pas nous qui ne les avons pas prises…

Ainsi donc, pour répondre à l’attente des familles corses, et malgré les difficultés de calendrier en cette fin de session parlementaire, nous inscrirons cette proposition de loi à l’ordre du jour du Sénat réservé par priorité au Gouvernement. Chacun devra alors prendre toutes ses responsabilités !

Mesdames, messieurs les sénateurs, la ratification des ordonnances permettra la mise en œuvre d’une simplification institutionnelle et politique encore unique en France métropolitaine, mais déjà en cours dans certains territoires ultramarins, où elle a fait la preuve de son efficacité. La collectivité unique, élaborée, j’y insiste une fois encore, à la demande exclusive des élus corses, sera gage, je n’en doute pas, de services publics plus efficaces et plus accessibles pour l’ensemble des habitants de la Corse !

Applaudissements sur les travées du RDSE, du groupe écologiste et du groupe socialiste et républicain.

Debut de section - PermalienPhoto de Hugues Portelli

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des lois, mes chers collègues, le projet de loi soumis aujourd'hui à notre examen ratifie les trois ordonnances relatives à la Corse prises en vertu de l’habilitation prévue dans le cadre de la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République.

En 2015, lors des débats sur ce texte, le Gouvernement a déposé un amendement tendant à introduire dans le dispositif relatif à toute une série de collectivités territoriales, de différents niveaux, un dispositif spécifique à la Corse, lequel s’inscrit dans un long processus, commencé en 1982. Permettez que je retrace ce processus, pour souligner que la réforme prévue, loin d’arriver par hasard, est un continuum institutionnel, qui arrivera, peut-être, à son terme aujourd'hui.

Après avoir brièvement compté deux départements – pendant moins d’une dizaine d’années –, la Corse a formé un département unique de 1811 à 1975, de l’Empire à la Ve République. Avec la création de la région Corse, le législateur a estimé, pour des raisons tenant aux équilibres internes à l’île, qu’il convenait non seulement de maintenir le niveau départemental, mais, en outre, de recréer deux départements, chacun ayant son chef-lieu. Ce système perdure encore aujourd’hui.

Toutefois, depuis qu’elle est devenue collectivité territoriale en 1982, la région Corse, devenue en 1991 collectivité territoriale de Corse, présente des particularités. Elle a bénéficié, dès l’origine, d’un régime quasi dérogatoire, caractérisé par le transfert de compétences des départements vers la région, puis la collectivité territoriale de Corse, sans parler des transferts de compétences de l’État dans la même direction. C’est ainsi que, de 1982 à aujourd’hui, des compétences ont régulièrement été transférées, avec les moyens administratifs et financiers correspondants, des départements vers la région.

La réforme envisagée n’a donc rien de soudain ; elle participe d’un processus continu, dont elle marque la dernière étape, laquelle a une préhistoire. En effet, en 2003, un projet de loi présenté par Nicolas Sarkozy, alors ministre de l’intérieur, et instituant une collectivité unique de Corse par la suppression des départements a fait l’objet d’une consultation locale au cours de laquelle le « non » l’a emporté de 2 000 voix. Ce texte, nous le retrouvons en grande partie aujourd’hui, sous la forme d’un dispositif qui a fait l’objet d’une résolution de l’Assemblée de Corse en 2013, avant d’être intégré dans la loi NOTRe.

Votre commission des lois a examiné le projet de loi de ratification et les trois ordonnances. Elle a constaté que l’ensemble est en tout point conforme à l’habilitation prévue par la loi NOTRe. Elle n’a pas fait d’autre constat, ni sur le plan institutionnel ni sur le plan administratif. Pour ce qui est des aspects financiers, leur examen a été délégué à la commission des finances.

Le système qui a été conçu consiste à créer une collectivité unique, avec des institutions uniques. Si le niveau départemental disparaît, l’ossature même de la collectivité de Corse ne changera pas. Le dispositif institutionnel mis en place en 1991, de type quasiment parlementaire, sera conservé, de même que le système de représentation et l’organisation de l’Assemblée de Corse comme du conseil exécutif de Corse. Tout cela sera maintenu quasiment à l’identique.

Sur le plan des compétences et de l’administration, les ordonnances procèdent par addition : elles regroupent les compétences et prévoient la constitution progressive d’une administration unique, moyennant certaines exceptions nécessaires, comme les services départementaux d’incendie et de secours, qui conserveront une organisation départementale destinée à tenir compte des spécificités territoriales.

En somme, rien d’original n’est prévu par rapport au texte adopté par le Sénat en 2015. Ayant constaté l’identité entre le contenu de la loi d’habilitation et les dispositions des ordonnances, la commission des lois s’est prononcée en faveur de la ratification. Elle l’a fait d’autant plus volontiers que ce projet de loi, je le répète, s’inscrit dans un continuum institutionnel, lequel n’a jamais connu de retour en arrière depuis maintenant trente-quatre ans.

En ce qui concerne l’amendement déposé par M. Mézard, il faut bien se rendre compte, monsieur le ministre, que celui-ci présente deux difficultés.

D’abord, les dispositions fiscales qu’il comporte ont déjà été censurées à deux reprises en moins de deux ans par le Conseil constitutionnel. Même si je suis moins bien placé pour en parler que M. le rapporteur pour avis de la commission des finances, je puis vous assurer, pour connaître un peu le droit constitutionnel, que le même dispositif se heurtera à la même censure.

Ensuite, même avec la meilleure volonté du monde, il est difficile de considérer que le dispositif proposé a un lien direct ou indirect avec les ordonnances soumises à ratification. La commission des lois n’a pas à juger du bien-fondé de l’amendement : elle est au demeurant d’autant plus favorable au dispositif qu’elle a demandé l’inscription de la proposition de loi correspondante à l’ordre du jour des travaux de notre assemblée dans les meilleurs délais. Simplement, si l’existence d’un lien direct ou indirect avec les ordonnances relatives au statut, aux finances et à l’administration de la collectivité de Corse peut à la rigueur se plaider au sein d’une assemblée parlementaire, je mets au défi quiconque de prouver qu’on peut le faire devant le Conseil constitutionnel !

De notre point de vue, ce n’est pas un vrai sujet dans la mesure où ce dispositif sera examiné ultérieurement.

Pour l’heure, mieux vaut s’en tenir à la ratification des ordonnances, d’autant plus que, comme M. le ministre l’a souligné, nous sommes en fin de session, et qu’il importe de procéder à la ratification dans les meilleurs délais. Nous n’aurions pas le temps de nous engager dans une navette.

Pour toutes ces raisons, la commission des lois est favorable à ce projet de loi.

Applaudissements sur quelques travées du groupe Les Républicains, sur les travées du RDSE, du groupe écologiste et sur quelques travées du groupe socialiste et républicain.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des lois, mes chers collègues, l’article 30 de la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, promulguée en août 2015, prévoit la création, au 1er janvier 2018, d'une nouvelle collectivité à statut particulier : la collectivité de Corse, qui se substituera à la collectivité territoriale de Corse et aux départements de Corse-du-Sud et de Haute-Corse.

Cet article, adopté par le Sénat, autorise le Gouvernement à prendre par voie d'ordonnances les mesures relevant du domaine de la loi nécessaires à la mise en place de la nouvelle collectivité. Trois ordonnances ont été prises sur ce fondement, dont l’une concerne les règles budgétaires, financières, fiscales et comptables. L'article 1er du projet de loi soumis à notre examen ratifie cette ordonnance. C'est pourquoi son examen a été délégué par la commission des lois à la commission des finances.

Aux termes de la loi NOTRe, la création de la collectivité de Corse doit s'opérer dans une parfaite neutralité financière et fiscale. L'ordonnance que la commission des finances a examinée procède principalement à des modifications rédactionnelles et prévoit des mesures transitoires, comme il est habituel en cas de fusion de collectivités territoriales. Elle n'épuise pas pour autant les questions financières résultant de la création de la collectivité de Corse.

Je rappelle tout d'abord qu'elle s'est accompagnée de plusieurs mesures financières favorables à cette collectivité dans la loi de finances pour 2017 : la contribution au redressement des finances publiques de la Corse a été diminuée de 3, 2 millions d'euros, les possibilités d'emploi de la dotation de compensation territoriale ont été élargies et la dotation générale de décentralisation de la Corse a été remplacée par une part du produit de la taxe sur la valeur ajoutée, dont on connaît le dynamisme.

Par ailleurs, lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2018, nous aurons sans doute à nous pencher sur les conséquences de la création de cette collectivité sur les différents fonds de péréquation et sur la répartition des dotations de l'État.

Les deux départements corses étant dans une situation financière différente, leur fusion conduirait à lisser ces différences et, potentiellement, à diminuer le bénéfice de la péréquation pour l'un, les prélèvements pour l'autre. Dès lors, elle pourrait avoir des conséquences financières sur l'ensemble des départements.

Le champ de l'habilitation aurait permis de traiter ce sujet, mais il est préférable d'aborder les questions de péréquation de façon globale, dans la mesure où elles ont des conséquences sur l'ensemble des départements. Le projet de loi de finances pour 2018 permettra d’engager ce débat.

L'Assemblée de Corse a cependant déjà exprimé le souhait que les futures règles ne conduisent « ni à minorer les ressources » de la Corse « ni à mettre en place des mécanismes de calcul qui s’avéreraient défavorables dans la durée ».

S’il est légitime que la collectivité de Corse souhaite bénéficier de garanties, le choix de mettre en place une collectivité unique implique une solidarité territoriale. Dès lors, il serait difficilement justifiable de continuer à calculer les dotations et les dispositifs de péréquation sans tenir compte de la situation de la nouvelle collectivité ou en mettant en place des mécanismes de garantie. C'est la logique même de la péréquation et de la création d'une collectivité unique qui serait remise en cause. En tout état de cause, calculer ces montants sur la base des caractéristiques des anciens départements ne pourrait être un choix pérenne.

Sous réserve de ces remarques, la commission des finances s’est prononcée en faveur de l'adoption de l'article 1er du projet de loi, dans la rédaction modifiée par l’amendement qu’elle a déposé pour corriger une erreur de référence.

Applaudissements sur quelques travées du groupe Les Républicains et du RDSE.

Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Luche

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des lois, mes chers collègues, tous, dans cet hémicycle, nous sommes attachés à notre mission de représentation des territoires. À cet égard, nos expériences respectives d’élus locaux nous ont généralement appris que, çà et là, les spécificités territoriales pouvaient justifier des spécificités institutionnelles locales.

Reste que le sujet est longtemps resté tabou. En effet, le principe d’égalité, inscrit au fronton de nos mairies, se confondait avec une uniformité qui s’est révélée incompatible avec la poursuite d’une saine administration territoriale.

L’un des grands mérites de la loi NOTRe est qu’elle a au moins brisé ce tabou. Je rends hommage à notre collègue Jean-Pierre Raffarin, qui, dès janvier 2014, a consacré un rapport à ce sujet.

Le présent projet de loi porte sur l’application d’un point à la fois spécifique et délicat de la loi NOTRe : l’instauration d’une collectivité unique en Corse.

Le principe de la collectivité unique n’est pas neuf. C’est là l’une des principales mesures de simplification bienvenues que nous devons à la révision constitutionnelle de 2003. Cet outil est particulièrement adapté pour faire vivre les spécificités territoriales dans des collectivités ad hoc. La collectivité unique a ainsi été éprouvée en Guyane et en Martinique dès 2011.

En dépit de l’échec du projet d’instauration d’une collectivité alsacienne unique en 2013, je reste convaincu que c’est la formule institutionnelle la plus adaptée à certains territoires, notamment au fait insulaire. En effet, une collectivité unique présente, dans une île, des avantages indéniables en termes de simplification administrative.

En l’espèce, il s’agit de substituer une collectivité unique à l’Assemblée de Corse et aux deux départements. À l’heure des grandes intercommunalités et du redécoupage régional, il semble pertinent de s’orienter dans cette voie.

Néanmoins, monsieur le ministre, je reste quelque peu sceptique, à l’instar de la majorité des membres du groupe UDI-UC, quant à la méthode retenue.

En effet, la création d’une collectivité unique n’est pas un acte anodin dans la vie démocratique d’un territoire. Nos concitoyens sont attachés à leurs institutions locales, notamment aux départements. Si je comprends l’intérêt pratique que revêt le passage par ordonnances, combien d’inconvénients politiques cette démarche présente-t-elle ?

De nombreux élus corses s’offusquent qu’aucun référendum n’ait été organisé dans l’île pour acter la création de la collectivité unique.

Je me doute bien que, derrière le symbole, se cachent des jeux politiques et des combinaisons électorales assez subtiles.

Comment ne pas leur donner raison ? La Guyane et la Martinique avaient été consultées, tout comme nos concitoyens alsaciens, qui avaient d’ailleurs rejeté le projet de collectivité unique.

Dans le même temps, les nationalistes et les indépendantistes progressent dans les urnes, et l’esprit de service public s’effrite face à la pression souvent trop politicienne. Dans ces conditions, un geste électoral aurait été le bienvenu pour assurer d’emblée cette collectivité d’une légitimité politique incontestable.

Pour autant, faut-il remettre en cause la ratification de ces ordonnances ? Il y a actuellement en Corse des fonctionnaires et des agents dont les conditions quotidiennes de travail sont déterminées par l’exécution de ces textes. Ne pas les ratifier reviendrait à les laisser au rang de simples actes administratifs dans l’intermède, entretenant ainsi une insécurité juridique trop lourde de conséquences.

Au demeurant, ces ordonnances vont dans le bon sens, celui d’une administration plus performante, d’un meilleur service public et donc de l’intérêt général.

Faut-il alors sacrifier l’application de ce texte ? La véritable question est posée.

La commission des lois, par la voix de son rapporteur, le professeur Portelli, a fait le choix de la ratification de ces ordonnances. Ce choix a été confirmé par la commission des finances pour ce qui est de l’aspect financier de l’ordonnance, comme vient de le dire notre collègue Charles Guené.

Par conséquent, la Haute Assemblée ayant voté la loi NOTRe, on peut considérer qu’il est utile et souhaitable de ratifier ces ordonnances.

Nous entendons néanmoins la voix de ceux qui, ici, ne sont pas satisfaits de ces textes et les trouvent incomplets, notamment sur le plan économique et financier. D’aucuns parlent même de manœuvres électorales.

Toutefois, nous sommes liés dans cette affaire, même si nous ne pouvons pas, nous le savons, régler l’intégralité de la question corse au travers de la ratification d’une mesure d’exécution d’une disposition accessoire de la loi NOTRe.

Ce débat doit avoir lieu, mais pas dans le cadre de la discussion d’un tel véhicule législatif, sauf à remettre en cause des mois de travaux administratifs, un plan de fusion des collectivités et, donc, le cadre élémentaire de travail de nombreux agents publics.

Nous entendons ces préoccupations, mais, à notre sens, celles-ci pourront être résolues plus tard grâce à des textes plus adaptés et avec la solennité qu’un tel sujet requiert.

Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et du RDSE. – M. Philippe Kaltenbach applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Kaltenbach

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous sommes réunis aujourd’hui pour examiner le projet de loi de ratification de trois ordonnances relatives à la Corse, comme cela était prévu par l’article 30 de la loi NOTRe du 7 août 2015. C’est sur ce point-là que nous devons nous concentrer.

Voilà un an et demi, nous avons voté ce texte prévoyant la création d’une collectivité unique, et le Gouvernement a travaillé, en concertation, pour rédiger ces ordonnances, comme l’a rappelé M. le ministre : la question qui nous est posée aujourd’hui est de savoir si le travail réalisé est bien conforme à ce que nous avons voté en 2015.

L’article 30 précité visait à instituer une nouvelle collectivité territoriale à statut particulier pour la Corse afin de remplacer la collectivité territoriale de Corse et les deux départements de Corse, à savoir la Haute-Corse et la Corse-du-Sud. La nouvelle collectivité unique, appelée collectivité de Corse, doit être mise en place au 1er janvier 2018, après des élections organisées au cours du dernier trimestre 2017.

Nous sommes pris par les délais : le délai pour ratifier les ordonnances, mais également le délai qui nous contraint à aboutir à une mise en place de la collectivité au 1er janvier 2018. Il est donc impératif que nous adoptions cette loi de ratification avant la fin de la session.

En définitive, ce texte vise à achever un processus de simplification, tout en garantissant le respect des spécificités corses.

Je rappelle que cette réforme est fondée à l’origine sur une délibération de l’Assemblée de Corse, prise en décembre 2014, appelant à la création d’une collectivité unique. Elle est donc le fruit d’une concertation et d’une collaboration qui ont su dépasser les clivages partisans. Elle est ainsi largement consensuelle : 80 % des élus corses, droite et gauche confondues, l’ont approuvée. Je précise que les élus corses ont eux-mêmes souhaité qu’il n’y ait pas de consultation des électeurs corses. Peut-être ont-ils été échaudés par le référendum organisé par Nicolas Sarkozy en 2003. Quoi qu’il en soit, depuis de nombreuses années, ce débat sur la collectivité unique est sur la table : après avoir été largement discuté et débattu, un large consensus s’est dégagé en Corse. Par conséquent, nous pouvons faire confiance aux élus corses sur ce point.

Ont ainsi été promulguées les trois ordonnances nécessaires pour traiter l’ensemble des conséquences juridiques de cette fusion, qui sont nombreuses ; je n’y reviendrai pas, car elles ont déjà été rappelées. Un long travail de concertation a été mené avec les différentes collectivités.

L’une porte diverses mesures institutionnelles relatives à la collectivité de Corse ; l’autre concerne diverses mesures électorales ; la dernière précise les règles budgétaires, financières, fiscales et comptables applicables à la collectivité de Corse.

Rappelons que la spécificité de la Corse dans la République a été reconnue de longue date.

Aujourd’hui, pas moins de 179 articles du code général des collectivités territoriales sont consacrés à la collectivité territoriale de Corse, qui est reconnue comme une collectivité à statut particulier au sens de l’article 72 de la Constitution.

Cette singularité a été traduite dans plusieurs réformes statutaires – le statut Defferre de 1982, le statut Joxe de 1991 et le statut Vaillant de 2002 –, avec, à chaque fois, un double objectif : favoriser l’expression du débat politique dans le cadre d’une démocratie locale rénovée et permettre la recherche de solutions adaptées aux problèmes insulaires au travers de l’octroi de compétences étendues en matière d’identité culturelle et de développement.

Ainsi, on peut dire que la collectivité territoriale de Corse se situe à l’avant-garde de la « République décentralisée », avec des responsabilités accrues, mais aussi une organisation rationalisée et des moyens plus importants. Citons le statut fiscal particulier, auquel les Corses sont très attachés.

La fusion de ces différents échelons territoriaux s’inscrit pleinement dans le mouvement de décentralisation et de rationalisation de l’action publique qui a pour objet de rapprocher la décision des populations auxquelles elle s’adresse, tout en réalisant des économies d’échelle. L’objectif est aussi de garantir une gouvernance plus solidaire et plus cohérente à même de répondre efficacement aux attentes des habitants et aux déséquilibres des territoires. On a là l’exemple d’une collectivité unique ayant pour ambition de proposer une meilleure coordination des politiques publiques locales.

On aurait pu penser que le débat serait simple, que le Sénat voterait ce texte dans un bel élan. Tel était mon sentiment jusqu’à présent, tout le monde ayant acté le fait qu’il fallait une collectivité unique lors des débats sur la loi NOTRe, …

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Kaltenbach

… à l’exception des élus du groupe CRC en effet. Le consensus était quand même très large sur les travées de cette assemblée.

Cependant, j’ai cru comprendre, lors des débats en commission des lois, que le groupe Les Républicains avait fait évoluer sa position. Les membres de la commission des lois ont refusé de prendre part au vote en commission, et je crois comprendre qu’un grand nombre d’entre eux va voter contre ce texte aujourd’hui. J’avoue que je suis quelque peu surpris par cette décision politique.

Voilà un an et demi, ce groupe était favorable à un statut, qui avait quand même été imaginé par Nicolas Sarkozy en 2003 :…

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Kaltenbach

… il avait alors défendu la fusion des deux départements, le référendum ayant échoué à quelques voix près.

Par ailleurs, il y a eu un large consensus des élus corses, mais aussi au Sénat et à l’Assemblée nationale. Et nous arrivons dans la dernière ligne droite, à quelques mois de la mise en place de cette collectivité unique que tout le monde appelle de ses vœux et qui permettra de faire des économies, la Corse étant aujourd’hui suradministrée, …

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Pozzo di Borgo

M. Yves Pozzo di Borgo. Comme la Ville de Paris !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Kaltenbach

… comme de nombreux rapports parlementaires l’ont montré.

Une île de 300 000 habitants avec 360 communes, deux départements et une collectivité spécifique, cela commence à faire beaucoup ! Même les élus locaux en sont convenus et ont choisi eux-mêmes d’aller vers une rationalisation et une simplification de nature à permettre à la fois des économies et une gestion plus efficace.

Je le répète, je suis extrêmement surpris de cette décision du groupe Les Républicains. Je regrette de devoir parler avant l’orateur de ce groupe, car j’aurais aimé pouvoir lui répondre, mais je le fais un peu par anticipation. J’en suis d’autant plus surpris que notre ancien collègue, Jean-Jacques Hyest, qui siège maintenant au Conseil constitutionnel, corapporteur de la loi NOTRe, déclarait voilà quelques mois : « La création d’une collectivité de Corse a paru tout à fait souhaitable, y compris en termes d’organisation du territoire. On parle de la sous-administration des territoires, mais la suradministration n’est pas forcément une bonne solution, en particulier au regard des caractéristiques de la Corse. Le Sénat ne peut qu’être favorable à la fusion des deux départements avec une région pour en faire une collectivité unique. »

En quelques mois à peine, le groupe Les Républicains a beaucoup évolué. On me dit que certains élus locaux ont pesé dans la décision, arguant du fait que les élections annoncées pour la fin de l’année 2017 n’allaient pas forcément leur être très favorables. Mais si l’on commence à différer les réformes en matière d’architecture territoriale en fonction des prévisions électorales, on est forcément déçus.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

M. Jacques Mézard. Vous avez l’expérience en la matière !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Kaltenbach

Essayons de nous extirper de cette logique politicienne pour privilégier l’intérêt non seulement de la Corse et des Corses, mais aussi de la République. Mettons en place ce système que nous avons validé à de nombreuses reprises et laissons ensuite les électeurs corses choisir qui devra diriger cette collectivité unique. Nous devons être dans le droit fil de ce que nous avons voté en 2015, et que nous défendons depuis de nombreuses années. Privilégions avant tout les intérêts de la Corse et de la République et gardons-nous de nous arc-bouter sur des postures politiciennes.

Nous le savons, l’empilement des niveaux de responsabilité dilue la décision, la rend moins lisible pour les populations et crée des coûts supplémentaires. À l’arrivée, c’est la qualité du service public local qui en pâtit.

Je veux enfin insister sur la nécessité d’avoir une organisation territoriale qui s’adapte aux particularismes locaux. Je sais que le groupe CRC est opposé à tous les statuts particuliers ; notre collègue Christian Favier l’a indiqué en commission. Pour ma part, je considère que cette vision de la République est par trop jacobine. Nous vivons aujourd’hui dans un État décentralisé, et, s’il nous faut conserver cette vision unique de la République, nous devons également savoir adapter l’architecture territoriale aux spécificités des différents territoires. Nous l’avons fait pour les territoires ultramarins et pour la Corse, mais, au-delà, je crois qu’il faut de la souplesse dans nos organisations territoriales, de sorte qu’elles puissent s’adapter au mieux à des territoires très différents.

Peut-on aujourd’hui gérer de la même manière des territoires urbains et des zones de montagne ? Peut-on gérer de la même manière un territoire ultramarin et un département métropolitain ? Peut-on gérer de la même manière une grande collectivité et des petits territoires ? Non, bien sûr ! C’est d’ailleurs tout l’objet de la décentralisation : adapter les différentes règles de façon à être au plus proche du terrain. En d’autres termes, la République doit être capable d’adapter ses règles de fonctionnement à la réalité des territoires locaux. C’est ce choix qui nous est proposé pour la Corse aujourd’hui, un choix que nous avons déjà tranché en 2015.

Le groupe socialiste et républicain apportera un soutien total à ce projet de loi de ratification, en espérant que cette volonté de parachever ce processus en Corse sera partagée par le plus grand nombre de sénateurs.

Pour conclure, j’ajoute que cet exemple corse doit nous amener à réfléchir plus globalement. En effet, en tant qu’élu francilien, je ne peux que déplorer qu’il y ait aujourd’hui cinq niveaux de décision dans la petite couronne parisienne : la commune, les conseils de territoire, les départements, la métropole, la région. Il est bien évident qu’une telle architecture est de moins en moins efficace et qu’elle rend les décisions peu lisibles pour nos concitoyens. Je souhaite que la Corse, comme d’ailleurs la métropole de Lyon, serve d’exemple à d’autres collectivités. Il importe de réfléchir à des solutions au niveau local avant de les proposer au Parlement.

Nous avons là un bel exemple d’interaction entre les élus locaux, le Gouvernement et le Parlement pour aboutir à un nouveau statut pour la Corse, qui est attendu sur l’île, et qui permettra de mieux gérer cette collectivité.

Le groupe socialiste et républicain votera en faveur de ce projet de loi de ratification.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, du groupe écologiste et du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Ravier

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce texte illustre une nouvelle fois l’instabilité institutionnelle qui frappe la Corse depuis plusieurs décennies. Depuis 1982 et la loi portant statut particulier de la région de Corse, on peut compter un remaniement institutionnel tous les dix ans.

Cette instabilité est d’abord due au fait que les réformes – celle dont nous débattons aujourd’hui n’échappe pas à la règle – se font à marche forcée, au prix d’un véritable déni de démocratie, car la population corse n’est pas appelée à se prononcer sur un changement institutionnel qui conditionne pourtant durablement son avenir.

On relève cependant une exception en 2003, lorsque le ministre de l’intérieur de l’époque, Nicolas Sarkozy, proposa une réforme visant déjà à réunir les deux départements corses en une collectivité unique. Cette réforme fut d’ailleurs rejetée par référendum local. Cela explique sans doute que l’on soit passé du référendum à l’ordonnance, le coup de force étant devenu l’ADN politique du pouvoir, qu’il soit entre les mains des mondialistes de droite ou de gauche.

Nos compatriotes en général, et nos compatriotes corses en particulier, savent qu’il y a bien longtemps que les responsables politiques de notre pays font fi de ce que veut le peuple. Pour notre part, monsieur le ministre, nous croyons que toute modification de l’organisation territoriale doit être validée par le peuple, plutôt qu’imposée par les technocrates.

Rappelez-vous, la loi NOTRe a abordé la collectivité unique de Corse par le biais d’un amendement. C’est dire la préparation et la réflexion sur le sujet !

Je crois qu’il n’est pas inutile de vous rappeler que, en démocratie, c’est le peuple souverain qui détient le pouvoir. Alors, faisons en sorte qu’il puisse s’exprimer et demandons-lui son avis lorsque des décisions engagent son avenir, comme c’est le cas aujourd’hui, plutôt que de le museler, comme l’ont souhaité certains élus de l’île.

Sur le fond, cette réforme pose bien évidemment plusieurs problèmes.

La représentation démocratique et équilibrée des territoires essentiellement ruraux n’est plus assurée comme elle l’était par le scrutin « cantonal ». Or la spécificité de la Corse, outre son insularité, vient également de sa forte ruralité et de sa forte disparité géographique.

Autre problème : la chambre des territoires prévue au sein de la collectivité unique est une usine à gaz et un mauvais ersatz des conseils départementaux. Monsieur le rapporteur, vous soulignez vous-même son inutilité. Quand cesserons-nous de créer des instances dont on sait, dès le début, qu’elles ne serviront pas à grand-chose, à part, bien sûr, à accroître la dépense publique ?

Enfin, la concentration totale des pouvoirs dans les mains du président de l’Assemblée de Corse et du président de l’exécutif à travers cette collectivité unique est une bien mauvaise réponse au clientélisme dont on a accusé les conseils départementaux jusque-là.

Alors que faire ?

Il faut que la date du 1er janvier 2018 cesse de nous obliger. Nous devons prendre le temps de réfléchir à une organisation territoriale adéquate, définie une fois pour toutes avec l’ensemble des élus locaux. Cette organisation doit bien évidemment prendre en compte les spécificités géographiques de la Corse et ses traditions culturelles, éléments majeurs de son identité, et, surtout, le souhait de la population corse.

Ces ordonnances ne répondant pas à une réflexion de long terme sur l’organisation des pouvoirs publics en Corse, nous ne voterons pas ce texte.

M. Jean-Jacques Panunzi applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Favier

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de loi qui nous est soumis porte sur la ratification de trois ordonnances qui précisent les modalités de fusion des départements de la Corse-du-Sud et de la Haute-Corse avec la collectivité territoriale de Corse, en application de la loi NOTRe, que notre groupe avait unanimement rejeté. Avec ce nouvel OVNI institutionnel, c’est une nouvelle étape du démantèlement des institutions républicaines qui est franchie.

Faut-il rappeler que le 6 juillet 2003, voilà treize ans, les Corses s’étaient massivement mobilisés lors d’un référendum sur le statut de l’île ? Ils avaient majoritairement exprimé leur attachement à l’existence des trois collectivités qui composent cette région et rejeté la proposition de suppression de l’échelon départemental.

Dix ans plus tard, le projet de collectivité unique a été remis à l’ordre du jour des travaux de l’Assemblée de Corse. Il ne faut pas oublier que ce débat s’est déroulé dans un contexte national où, au plus fort des discussions concernant la loi MAPTAM, la loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, et la loi NOTRe, certains opéraient, ici à Paris, un véritable coup d’État contre l’existence des départements de France.

En Corse, comme dans l’ensemble du pays, les électeurs ont d’ailleurs sévèrement sanctionné les partisans de la suppression des départements, tant aux élections municipales de 2014 qu’aux élections départementales de 2015.

Et pourtant, au mépris du souhait des Corses, qui se sont exprimés à plusieurs reprises à l’encontre de la création d’une collectivité unique sur l’île, le projet a été glissé par un tour de passe-passe au sein de la loi NOTRe.

Nous dénonçons donc, aux côtés des élus communistes de l’Assemblée de Corse, ce passage en force en cours, qui relève d’un processus particulièrement antidémocratique. Nous réitérons leur demande d’un projet de loi spécifique avec ratification par référendum.

Sans nier les particularités de la Corse liées à son insularité, personne n’est dupe du caractère expérimental de ce changement, après celui de la métropole de Lyon, préalablement à une remise en cause plus large de l’échelon départemental. Certains n’en ont pas fait mystère en commission des lois, M. Kaltenbach indiquant même qu’il s’agissait « d’un très bon exemple de ce qui pourrait se développer sur le continent, en région parisienne par exemple. » Sans que les Corses aient été démocratiquement consultés, ils pourraient donc servir de cobayes aux liquidateurs de nos institutions républicaines.

Mais cette fusion recouvre d’autres enjeux. Adopter la collectivité unique en Corse, c’est adopter le modèle de l’Europe des régions, en concurrence avec les territoires voisins.

Est-ce que le modèle souhaité pour la Corse sous la pression des autonomistes est celui qui prévaut en Italie, avec des territoires autonomes comme le Mezzogiorno, où les habitants ont des revenus 50 % inférieurs à ceux du Nord ? Pour notre part, nous refusons une France à deux vitesses.

Comme l’ont exprimé les syndicats et les travailleurs de Corse, avec cette réforme, la République s’éloignerait un peu plus en Corse des problématiques qu’elle a pour tâche de résoudre.

C’est pourquoi il faut, avant toute chose, réduire les inégalités économiques de l’île, sachant que la Corse a, de très loin, le plus bas PIB régional de France métropolitaine.

C’est pourquoi il faut aussi en finir avec les inégalités éducatives, la population de Corse étant la moins diplômée de France métropolitaine.

C’est surtout pourquoi, enfin, il faut résoudre le problème de la cherté de la vie et des inégalités sociales en Corse, le revenu par habitant y étant le plus faible du pays, et 21 % de sa population vivant en dessous du seuil de pauvreté. N’oublions pas que 10 % des ménages concentrent 33 % des revenus déclarés en Corse et que les ménages les plus fortunés ont des revenus sept fois supérieurs aux moins aisés.

Dans ce contexte, la suppression des départements, qui jouent un rôle essentiel au service des personnes âgées, des personnes handicapées, des enfants en danger, des populations les plus fragilisées, est un risque majeur pour la cohésion sociale de la Corse.

Poursuivre ce modèle de l’Europe des régions, fondé sur la concurrence des territoires et des populations, est, à nos yeux, une profonde erreur. Il s’agit d’un modèle qui, à rebours des exigences sociales de la Corse, a pour objet de permettre, à terme, des dérogations au cadre national du droit du travail.

C’est enfin un modèle au service de l’oligarchie économique, qui souhaite faire main basse sur l’île, comme elle l’a fait avec l’ancienne société maritime nationale, désormais gérée sous la forme d’un consortium privé représentant 10 % du PIB de la Corse. Tout cela s’est fait au détriment des salariés, des agents du service public, des agriculteurs, des PME, notamment celles du tourisme et du BTP.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Favier

L’égalité entre les territoires et entre les individus est un fondement républicain sur lequel on ne peut transiger. La véritable priorité pour la Corse, c’est de prendre à bras-le-corps la question des inégalités. Or cette réforme, malheureusement, ne conduira qu’à les aggraver.

Enfin, nous refusons la démarche politique qui la sous-tend.

Certains soutiennent cette réforme, car elle est, à leurs yeux, le moyen de réduire le champ de l’action publique et un outil pour la réduction de l’emploi public. C’est la poursuite de la mise en œuvre du dogme libéral de suppression d’un fonctionnaire sur deux, dogme véhiculé successivement par les réformes Fillon et Lebranchu.

D’autres, du côté des nationalistes, y voient l’aboutissement d’un projet politique porteur de divisions, bien loin des 20 000 Corses qui, aux côtés du résistant Jean-Baptiste Ferracci, prêtèrent à Bastia, le 4 décembre 1938, un serment d’attachement aux valeurs progressistes de la République.

Et que dire de l’affaiblissement démocratique, avec une assemblée qui passerait de 104 élus départementaux et territoriaux à 63 élus dans la future collectivité unique, ce qui éloignera un peu plus les citoyens de leurs représentants ?

Mes chers collègues, sans République, il n’y a pas d’égalité, et sans égalité, il n’y a pas de République. Beaucoup de Corses ont raison d’être en colère à ce sujet.

Depuis près de 250 ans, les Corses ont tant apporté à la France que la République doit aujourd’hui leur rendre ce qu’ils lui ont donné, ce qui passe par un véritable projet d’égalité avec le reste du territoire national, ainsi que par un investissement massif dans un développement alliant progrès sociaux et réussites économiques.

Je terminerai mon propos en citant mon ami Dominique Bucchini, ancien président de l’Assemblée de Corse : « La seule voie pour la Corse, c’est la mobilisation populaire. Notre problème n’est pas identitaire, mais économique. »

Attachés au principe de la consultation par référendum des Corses, les sénateurs communistes, républicains et citoyens s’opposeront à ce projet de loi, tout comme l’ont fait les élus communistes de l’Assemblée de Corse.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Joseph Castelli

Monsieur le ministre, je reprendrai la phrase que vous avez adressée au président de l’exécutif de Corse : je vous félicite du « chemin que vous avez parcouru, en un an, avec tous les élus de la Corse ».

En effet, trente-cinq ans après l’attribution d’un statut particulier qui a placé la Corse à l’avant-garde de la décentralisation, la ratification de ces ordonnances permet de poursuivre la mise en place d’une collectivité unique en Corse, actée par la loi NOTRe, en cohérence avec la délibération du 27 septembre 2013 de l’Assemblée de la collectivité territoriale de Corse.

Alexis de Tocqueville, dans De la démocratie en Amérique, estime que « la décentralisation n’a pas seulement une valeur administrative. Elle a une portée civique, puisqu’elle multiplie les occasions pour les citoyens de s’intéresser aux affaires publiques. » « Elle les accoutume à user de la liberté. Et de l’agglomération des libertés locales, sourcilleuses, naît le plus efficace contrepoids aux prétentions du pouvoir central. »

Monsieur le ministre, avec ce projet de loi de ratification d’ordonnances, d’une part, vous permettez à la Corse de sortir de quarante ans d’incertitude, et, d’autre part, vous assurez la construction d’une véritable unité politique, administrative et gestionnaire à compter du 1er janvier 2018.

L’organisation actuelle de l’île est bien trop complexe, comme vous le savez. Elle est caractérisée par un émiettement des structures publiques locales, qui constitue un frein au développement de la Corse.

Ce texte permet d’y remédier en prévoyant la simplification de l’organisation territoriale, ainsi que de son fonctionnement, en mettant en synergie les compétences et les moyens des départements et de la collectivité territoriale de Corse, et, enfin, en assurant un juste équilibre institutionnel entre les pouvoirs délibérants et exécutifs.

Sachez, monsieur le ministre, que vous avez répondu au souhait d’une grande majorité non seulement de l’Assemblée de Corse, mais aussi de la population de la Corse.

Très concrètement, il reste peu de temps pour construire un processus permettant à la future collectivité d’être opérationnelle au 1er janvier 2018. La collectivité de Corse devra satisfaire à la fois à des impératifs d’unité de la décision politique, de rationalisation de la gestion administrative et de proximité avec les territoires et la population.

Il reste un an – à peine un an ! – pour s’accorder en matière financière, budgétaire, sur l’implantation territoriale des futurs services publics entre Bastia, Ajaccio et les autres territoires, et, enfin, pour anticiper les marchés publics de 2018.

Dans une logique de proximité avec les territoires, et compte tenu de la future disparition des départements de la Haute-Corse et de la Corse-du-Sud, l’équilibre territorial entre le niveau le plus proche, la commune, et le niveau le plus élevé, la collectivité de Corse, devra passer par un resserrement du maillage intercommunal, comme vous l’avez dit tout à l’heure, monsieur le ministre.

Je tiens d’ailleurs à vous remercier pour votre investissement sur la question. Après huit mois de négociations sur le périmètre des nouvelles intercommunalités, en Centre Corse notamment, un accord a finalement été trouvé dans le périmètre soumis par M. le préfet, qui s’est soldé par la conclusion de contrats de ruralité et la mise en place de pôles d’équilibres territoriaux et ruraux permettant d’évoluer vers la fusion en un seul EPCI, un établissement public de coopération intercommunale, à l’horizon de 2022.

Concernant les agents des deux départements, ainsi que ceux de la collectivité de Corse, les conditions de statut et d’emploi ainsi que leur régime indemnitaire seront préservés. Le cas échéant, une indemnité de mobilité leur sera versée.

Toutefois, il restera à prévoir un partenariat étroit entre les différentes collectivités fusionnées afin de garantir aux agents une mobilité davantage choisie que forcée.

Enfin, d’autres chantiers devront être mis en œuvre, au premier rang desquels figure la résorption du désordre de propriété, ainsi que vous l’avez évoqué, monsieur le ministre, mais je veux y revenir.

En Corse, le droit de propriété ne peut s’exercer normalement du fait de l’absence de titre opposable ou de l’existence de biens non délimités. Par conséquent, la revitalisation de l’espace rural est largement freinée.

Pour y remédier, j’avais proposé un amendement, qui reprenait les principales dispositions de la proposition de loi de Camille de Rocca Serra, visant à favoriser l’assainissement cadastral et la résorption du désordre de la propriété. Ce texte avait été cosigné par de nombreux députés parmi lesquels figurent, bien sûr, tous les députés de Corse, toutes tendances confondues. Il a d’ailleurs été adopté à l’unanimité par l’Assemblée nationale le 8 décembre 2016, comme vous l’avez rappelé précédemment, monsieur le ministre.

Je regrette, bien évidemment, que cet amendement ait été déclaré irrecevable par la commission des lois, car il est pourtant urgent – il est même très urgent ! – d’examiner ces dispositions, eu égard à la fin imminente de la présente session parlementaire.

Pour terminer, je formulerai une interrogation : en cas d’alternance politique peu favorable, me semble-t-il, à cette nouvelle institution, l’avenir de la future collectivité de Corse sera-t-il assuré ?

Vous l’avez compris, mes chers collègues, je voterai, bien sûr, ce projet de loi, une position partagée par tous mes collègues, sans exception, du groupe du RDSE !

Applaudissements sur les travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Panunzi

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’ordre du jour appelle aujourd’hui l’examen du projet de loi de ratification des ordonnances relatives à l’instauration d’une collectivité unique en Corse. Comme vous l’avez rappelé, monsieur le rapporteur, il s’agit bien de la déclinaison de l’article 30 de la loi NOTRe. C’est dire, monsieur le ministre, que le débat repose non pas sur le principe de la collectivité unique, mais sur les modalités de son instauration.

Mes chers collègues, que ce fût en 1982, en 1991 ou en 2002, les évolutions statutaires propres à la Corse ont été menées dans le cadre d’un projet de loi spécifiquement dédié. Celui de 2003 a même pu bénéficier d’une consultation référendaire, dont l’issue négative a repoussé la mise en œuvre de la loi pourtant validée par le Parlement. Cette issue négative s’expliquait principalement par la rupture du lien de proximité provoquée par la disparition des conseillers généraux et par le choix d’un mode de scrutin qui ne permettait de pérenniser ni ce lien ni l’incarnation, à la fois de représentation et opérationnelle, des différents territoires.

Or le principe de la réforme devait permettre la mise en place d’une organisation simple et d’un fonctionnement facile à assimiler par tous. Outre qu’elle devait assurer un partage clair des responsabilités, elle devait également renforcer le lien entre les différents niveaux de l’organisation territoriale et permettre le maintien de l’indispensable proximité entre la population et ses élus.

A contrario, cette fois-ci, c’est par un amendement à la loi NOTRe qu’a été actée la mise en place d’une collectivité unique en lieu et place des trois institutions actuelles : la collectivité territoriale de Corse, région à statut particulier, et les deux départements de Haute-Corse et de Corse-du-Sud, collectivités de droit commun.

L’amendement de principe dans la loi NOTRe, devenu article de la loi promulguée, se contente de substituer une entité nouvelle aux trois collectivités. Cela explique le renvoi à des ordonnances pour procéder au travail fastidieux de réécriture des codes en vue d’y remplacer les références aux trois collectivités par celles de la collectivité de Corse, sans que les sujets essentiels des compétences, des moyens et des équilibres politiques, comme territoriaux, soient débattus. Les ordonnances traduisent tout simplement un travail d’empilement.

Lors de la session du 6 septembre 2016, 20 élus sur les 51 que compte l’Assemblée de Corse ont voté contre les ordonnances relatives à la collectivité unique. Parmi les 31 membres ayant voté pour, 24 d’entre eux sont nationalistes et 7 sont des radicaux de gauche. Sur les 20 membres ayant voté contre, et ce, malgré le fait que tous sont favorables à la collectivité unique sur le principe, 11 sont des élus de droite, 2 ont l’étiquette « divers gauche », 3 sont communistes et 4 appartiennent au Front national. Leur opposition au projet du Gouvernement repose, de mon point de vue, sur deux raisons principales.

Première raison, l’absence d’équilibre des pouvoirs et des territoires au sein de la nouvelle collectivité unique. Aucune discussion n’a eu lieu sur le mode de scrutin ni sur la représentation des territoires, alors que c’est, on le sait, ce qui a manqué en 2003. Ce n’est pas avec une prétendue « chambre des territoires » dotée d’un rôle accessoire que l’on atteindra cet objectif ! Et l’on n’y parviendra pas davantage en changeant simplement la dénomination première de cet organe, appelé dans le premier projet « conférence de coordination des collectivités territoriales » ! On crée un président de plus dans la galaxie des présidents. On accorde une satisfaction fictive à la ville de Bastia – il fallait contenter les nordistes ! –, mais on crée surtout la confusion et de la complexité, et on aggrave les charges financières supportées par les contribuables.

Vous rendez-vous compte, mes chers amis, mes chers collègues, des risques liés à la concentration des pouvoirs en une seule main ?

Je reprendrai la formule de mon collègue et ami Dominique Bucchini, élu communiste, qui a présidé l’Assemblée de Corse entre 2010 et 2015. Lors de la session de décembre 2014, il avait alerté la représentation insulaire sur le fait que le président de l’exécutif à la tête de la future collectivité unique serait « le roi de Corse ». Il n’avait pas tout à fait tort, car, dans toute organisation démocratique, il faut des poids et des contrepoids.

Montesquieu a théorisé avant nous la nécessité de l’équilibre des pouvoirs. Selon lui, « la concentration des pouvoirs en politique est aussi perverse que l’abus de position dominante dans le monde des affaires ».

Une loi propre à la Corse aurait permis d’établir des champs de compétences précis, notamment celles que la collectivité de Corse pourrait partager avec les intercommunalités, lesquelles, de par la disparition des conseils généraux, sont appelées à assumer des compétences de proximité. Le choix de recourir aux ordonnances ne permet pas de procéder à cette réorganisation équilibrée des pouvoirs et nécessite impérativement le recours à la loi.

Seconde raison, l’inexistence de tout accompagnement économique, financier et fiscal, pourtant indispensable à la réussite de la collectivité unique et au développement de la Corse. Bien au contraire, le risque est de voir s’aggraver la pression fiscale territoriale.

Pour exemple, au moment où je vous parle, le budget de la nouvelle collectivité s’élèvera à environ 1 100 millions d'euros, avec un encours de la dette de 850 millions d'euros, sans compter les dettes accumulées dans les différents offices, qui s’élèvent à plusieurs millions d’euros pour celles qui sont connues. Vous le comprendrez bien, mes chers collègues, le remboursement des intérêts impactera fortement l’épargne brute de la future collectivité. Cette situation aura pour conséquence une diminution très nette de la capacité d’autofinancement et du niveau d’investissement. D’ailleurs, dans son rapport, le comité stratégique précise que le niveau des ressources propres de la collectivité de Corse ne suffira pas à assurer son autonomie financière.

Au moment où les fonds européens se raréfient, où le programme exceptionnel d’investissement s’achève, où les dotations de l’État s’amenuisent, la Corse a un besoin vital de ce soutien pour poursuivre sa modernisation et le rattrapage du retard historique de nos équipements collectifs. Quid de la prime à la bonne gestion d’une collectivité à l’autre ? De loin, depuis maintenant plus de dix ans, le département de la Corse-du-Sud, par opposition à la collectivité territoriale de Corse et au département de la Haute-Corse, affiche un niveau d’investissement routier de plus de 55 millions d'euros par an, avec un très faible recours à l’emprunt.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Panunzi

En effet, monsieur le président, et c’est pour cette raison que je tiens à le signaler !

Cette gestion, qui a d'ailleurs été saluée à plusieurs reprises au niveau national, risque aujourd’hui de se trouver diluée et utilisée pour combler les errements des autres collectivités.

Se pose à ce niveau un problème de justice que j’ai soulevé plusieurs fois. Il m’a été répondu que, dans les ordonnances, les marges de manœuvre étaient contraintes et ne permettaient pas de régler les questions budgétaires. Cette situation a pourtant été évoquée dans les différents rapports de l’Assemblée de Corse, qui ont avancé des pistes de réflexion quant à l’apurement du passif et à l’investissement dans les différents territoires, en tenant compte de la gestion et des politiques actuelles dans les deux départements.

Les ordonnances, contraintes et étriquées, ne permettent pas de donner une véritable opérationnalité à la future collectivité de Corse. Cette réforme – je vous le dis, mes chers collègues, comme j’ai déjà eu l’occasion de le relever lors de chaque réunion – est une coquille vide ! Et nous sommes privés de référendum, alors que la délibération du 13 décembre 2014, que certains citent en oubliant de l’indiquer, précise, dans son article 3 §qu’il faut un référendum ! C’est le peuple corse et ce sont les élus corses qui l’ont voté.

La délibération précitée était fondée sur des arguments allant dans le sens d’une simplification administrative par parallélisme des formes avec la simplification institutionnelle instaurée. Or on ne voit pas, dans ces ordonnances, comment se traduit cette simplification administrative, notamment, je dois le reconnaître, au niveau des services déconcentrés de l’État.

Marylise Lebranchu, qui était chargée du dossier lors du vote de la loi NOTRe, avait admis, à la suite de la non-adoption d’amendements de Camille de Rocca Serra et d’autres parlementaires corses à l’Assemblée nationale, qu’il faudrait certainement revenir avec un véhicule législatif devant le Parlement pour apporter des corrections nécessaires et des aménagements à l’article de la loi NOTRe instituant une collectivité unique en Corse. Ce ne sont pas mes propos, c’est Mme Lebranchu qui l’a dit !

À moins de trois mois d’échéances électorales majeures, qui déboucheront certainement – je l’espère, du moins – sur de nouvelles propositions de révision de l’architecture institutionnelle de notre pays, au sein desquelles une réflexion d’ensemble sur la Corse pourrait pleinement et sereinement s’intégrer, on nous demande de confier au Gouvernement une habilitation étriquée qui ne permet pas de donner une véritable opérationnalité à la future collectivité de Corse.

Nous voulons, pour notre part, refonder nos institutions territoriales et construire une Corse responsable avec des moyens adaptés à l’insularité.

On nous impose une réforme au rabais et à marche forcée. Le seul objectif clairement affiché par les nationalistes est de tuer les deux conseils départementaux, et de le faire le plus vite possible ! On est loin de la démarche de rassemblement et de fusion qui devrait tous nous animer.

Mes chers collègues, l’unité de la Corse doit se bâtir sur le respect du pluralisme. Notre famille politique souhaite une réforme en profondeur du statut de la Corse, une véritable refondation. D’où notre position de vote contre ces ordonnances, monsieur le ministre.

Ces ordonnances devaient entériner le processus de clarification, de simplification et de rationalisation de l’action publique, en refondant notre architecture institutionnelle et administrative. Pourtant, ordonnances ou pas, aujourd'hui, et demain, avec la future collectivité – à laquelle M. Kaltenbach est favorable –, nous en serons toujours à 360 communes, 19 intercommunalités, 2 départements…

Exclamations sur les travées du groupe socialiste et républicain.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Panunzi

Bien sûr, parce que les circonscriptions administratives départementales ne sont pas supprimées. On supprime les conseils départementaux, c’est tout.

Nous en serons toujours, disais-je, à 2 départements, 2 préfectures, 5 arrondissements, 3 sous-préfectures, 9 chambres consulaires, etc. Je pose la question : où est la simplification ? Est-ce ce modèle que vous voulez copier pour les autres régions dans quelques années ? Pour ma part, non, je ne suis pas d’accord.

À la suite de l’installation des futures majorités présidentielle et législative que nous appelons de nos vœux, …

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Panunzi

M. Jean-Jacques Panunzi. … nous proposerons l’élaboration et l’adoption d’une loi spécifique à la Corse, s’inscrivant dans une démarche globale, tant statutaire qu’économique, qui puisse constituer le cadre optimal d’exercice des compétences attribuées et, surtout, le cadre optimal d’épanouissement de la Corse au sein de la République.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur les travées du groupe CRC.

Debut de section - Permalien
Jean-Michel Baylet, ministre

Je veux, avant de passer à la discussion des articles, dire quelques mots pour remercier encore une fois le sénateur Portelli de la qualité de son rapport, mais aussi des propos qu’il a prononcés à la tribune, de son engagement et de son soutien sans faille quant à ces ordonnances et à la création de la collectivité unique. Il connaît bien ces sujets pour avoir, en d’autres temps, beaucoup œuvré sur la Corse. Il sait où est l’intérêt des Corses et de la Corse. Je tiens donc à le remercier et à rendre hommage au professeur de droit constitutionnel qu’il est, dont la parole est indiscutable quand il souligne que ce texte est un bon texte.

Je veux également remercier le sénateur Guené, rapporteur pour avis de la commission des finances, pour son implication dans l’examen de l’ordonnance financière. Je lui sais gré d’avoir souligné la qualité du travail accompli, et ce dans l’intérêt général des Corses et de la Corse.

Monsieur le sénateur Luche, je vous remercie de vos propos. J’ai bien entendu votre explication sur les avantages de la collectivité unique et votre engagement, au nom de votre groupe, à soutenir ce texte et donc, j’imagine, à le voter.

J’évoquerai le référendum, que vous-même, et d’autres, avez abordé. Je veux bien que, désormais, tout le monde en appelle en permanence au référendum. Mais il se passe des choses étranges. En effet, jusqu’à une période récente, la droite française n’avait quand même pas une préférence marquée pour le recours au référendum !

Debut de section - PermalienPhoto de André Gattolin

Par exemple, sur les institutions européennes !

Debut de section - Permalien
Jean-Michel Baylet, ministre

On l’évoque quand cela peut sembler utile, sans d’ailleurs, généralement, y recourir quand on est au pouvoir !

Pour ma part, je fais partie de ces radicaux républicains qui sont partisans de la démocratie représentative. Je connais – je réponds par là même au sénateur Ravier – tous les dangers du référendum, dont on a vu, à chaque fois, qu’il n’apporte pas de réponse à la question posée. En l’occurrence, dans le paysage politique actuel, un référendum en Corse ne me semble pas la meilleure des formules pour préparer sereinement l’avenir institutionnel de l’île.

Je veux aussi dire au sénateur Ravier que la ruralité n’est pas oubliée en Corse : nous venons de lui conférer le statut d’île-montagne, une vieille revendication. Je suis moi-même allé signer sur place des contrats de ruralité. Les élus de l’île et l’État se soucient d’un aménagement du territoire harmonieux en Corse, et j’y veille personnellement puisque cela fait partie de mon portefeuille ministériel.

Monsieur le sénateur Kaltenbach, je vous remercie de votre soutien et, surtout, d’en avoir appelé à la cohérence politique. Je veux bien tout entendre, mais c’est quand même bel et bien la collectivité de Corse qui a souhaité la collectivité unique et délibéré en 2014 pour demander sa création !

On peut toujours faire l’exégèse, protester et prêter aux uns et autres tel ou tel avis. Parmi les documents que j’ai sous les yeux, je viens de lire qui avait voté pour la création de la collectivité unique. Je trouve parmi eux certains qui sont aujourd'hui en train de mener une opposition frontale à la collectivité unique alors qu’ils ont voté pour sa création lorsque la collectivité de Corse a délibéré sur le sujet. C’est quand même une duplicité rare dans la vie politique ; mais je reviendrai sur le sujet tout à l’heure.

Vous avez également eu raison, monsieur le sénateur, de souligner l’hétérogénéité des territoires. La Corse, c’est la France, c’est incontestable. Elle est un territoire de la République française, mais elle est aussi la Corse, ce qui implique quand même quelques légères différences. On ne peut pas dire que la région parisienne, le Tarn-et-Garonne ou l’Aveyron soient totalement similaires à la Corse. Alors, oui, la République est belle de ses différences et de son hétérogénéité.

Debut de section - Permalien
Jean-Michel Baylet, ministre

Et elle s’enrichit de ses différences. Mais dès lors que l’on accepte cette idée – et j’entends que tout le monde est d’accord sur toutes les travées –, encore faut-il le reconnaître et mettre en accord ses actes avec ses idées. La Corse a besoin d’un certain nombre de statuts particuliers, et c’est ce que nous proposons.

Monsieur le sénateur Castelli, vous êtes un sénateur d’expérience, corse, de surcroît ; vous savez donc parfaitement de quoi vous parlez. Vous avez bien fait d’évoquer, dans un élan de sagesse, un juste équilibre institutionnel.

Vous avez également eu raison de penser aux agents. Vous êtes le seul à avoir évoqué leur sort, mais je connais votre engagement solidaire et social. Je puis vous dire que des dispositions ont été prévues à cet effet. Le président de la collectivité territoriale de Corse et les deux présidents des conseils départementaux se sont réunis et se sont mis d’accord. Je tiens à le préciser parce que certaines interventions laissent à penser que rien ne fonctionne en Corse et que tout a été oublié. Tel n’est pas le cas.

De même, vous avez bien fait d’aborder la question du désordre foncier. Comme vous, je regrette que l’amendement ait été déclaré irrecevable pour des raisons sur lesquelles je préfère ne pas revenir, mais qui sont bien loin de l’intérêt de la Corse : on a vu beaucoup de reniements et de pressions se conjuguer pour faire en sorte qu’il ne puisse pas venir en discussion.

Je ferai tout, au nom du Gouvernement, pour que nous puissions, sinon recoller la vaisselle cassée, du moins rattraper le temps perdu. Quoi qu’il en soit, il ne me semble pas très responsable ni très raisonnable d’avoir agi de la sorte. En tout cas, je sais que ce n’est pas l’intérêt des Corses et de la Corse, car le groupement d'intérêt public pour la reconstitution des titres de propriété en Corse n’aura pas fini son travail dans les délais impartis. D’ailleurs, si le projet de loi n’est pas adopté, je ne suis pas sûr que la future majorité, quelle qu’elle soit, ait le temps de légiférer sur le sujet avant le 1er janvier 2018.

Monsieur le sénateur Panunzi, vous m’étonnerez toujours ! Selon les lieux, je ne vous entends pas dire tout à fait les mêmes choses ni parler avec la même flamme. Si je vous ai bien – enfin ! – compris, vous êtes désormais contre la collectivité unique.

Debut de section - Permalien
Jean-Michel Baylet, ministre

Pourtant, vous avez participé à toutes les réunions de concertation que j’ai menées en Corse à trois ou quatre reprises.

Je vais répéter aujourd'hui, devant vous, ce que j’ai dit à la préfecture d’Ajaccio : quelqu’un de l’extérieur se demanderait pourquoi ce ministre venu de Paris voudrait imposer la collectivité à tous les Corses, alors qu’elle a été réclamée par les Corses eux-mêmes. Vous avez effectivement toujours expliqué, avec beaucoup de constance, que vous souhaitiez une loi spécifique, tout en sachant très bien que cela reviendrait à la renvoyer aux calendes grecques. Que ne l’avez-vous faite quand vous étiez dans la majorité ? Ce n’est pas si vieux ! À vous entendre, on a l’impression que nous gouvernons la France depuis vingt ans ! Malheureusement, ce n’est pas le cas, sinon elle se porterait mieux. Cette loi spécifique, vous ne l’avez pas faite !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Panunzi

C’est vous qui êtes ministre, pas nous ! Nous n’avons pas voulu supprimer les départements !

Debut de section - Permalien
Jean-Michel Baylet, ministre

Alors, maintenant, vous la proposez, vous la promettez, mais vous savez très bien que vous serez loin d’avoir une majorité pour la faire voter. Il n’est qu’à voir la position de vos collègues, les sénateurs du groupe Les Républicains, sur le sujet : la Corse, c’est la France, c’est ainsi, point barre, circulez, il n’y a rien à voir, il n’y a rien à dire ! Et tout cela, vous le savez très bien. Alors, ne vendez pas de chimères ou du rêve, même si, en politique, on a parfois tendance à le faire, et peut-être en Corse en particulier.

En tout cas, l’amendement sur la loi NOTRe procède bel et bien d’une demande de la collectivité territoriale de Corse en 2014. Et ces ordonnances – vous en êtes le témoin, vous avez participé à toutes les réunions –, elles ont été coconstruites avec les représentants de la collectivité territoriale de Corse et les présidents des conseils départementaux, qui ont assisté à toutes les réunions, qu’elles se soient tenues à Paris ou en Corse, où je me suis déplacé moi-même à plusieurs reprises. Les groupes de travail, le directeur général des collectivités locales, les collaborateurs de la collectivité territoriale de Corse et les représentants des deux départements se sont rencontrés plusieurs fois. Ils ont réalisé de nombreuses vidéoconférences. C’est un véritable travail de coconstruction qui a été réalisé, et les demandes des Corses ont été prises en compte.

Debut de section - Permalien
Jean-Michel Baylet, ministre

Quant aux amendements de Mme Marylise Lebranchu auxquels vous avez fait allusion, nous les avons repris dans leur intégralité, à l’exception d’un seul, qui était irrecevable pour des raisons constitutionnelles. N’écrivez pas une histoire différente ! Vous réécrivez d’ailleurs complètement l’histoire !

Fallait-il concentrer le pouvoir dans les mains d’une seule assemblée ? Vous parlez d’un « roi de Corse ». Tout cela est un peu dépassé, ce sont des temps plus anciens !

M. Jean-Jacques Panunzi fait un signe de protestation.

Debut de section - Permalien
Jean-Michel Baylet, ministre

Concernant les préfectures, je rappelle que la question de savoir s’il fallait garder, avec une collectivité unique, deux départements ou n’en prévoir qu’un seul a été posée. Tous les élus corses se sont prononcés pour conserver deux départements. Ne faites donc pas semblant de vous étonner maintenant qu’il y ait deux préfectures !

Quant à l’ensemble des institutions, combien de fois – et vous étiez là ! – ai-je interrogé les délégations pour savoir comment procéder pour un certain nombre d’institutions ? Devait-on les fusionner ? Fallait-il conserver deux SDIS, deux chambres de commerce, deux chambres de métiers et de l’artisanat, deux chambres d’agriculture ? Pour l’instant, je n’ai pas obtenu beaucoup de réponses, mais j’ai ouvert le débat, et la concertation a eu lieu. Manifestement, nous n’avons pas participé aux mêmes réunions. Pourtant, vous étiez présent, je puis en témoigner.

Monsieur le sénateur Favier, j’ai bien entendu vos propos concernant les départements. Vous me l’accorderez, s’il en est un auquel on ne peut pas reprocher de ne pas aimer les départements et de ne pas avoir lutté pour leur survie, c’est bien moi ! Nous avons au moins cela en commun.

Mais vous aussi, comme les sénateurs du groupe Les Républicains, vous êtes monté à la tribune pour démontrer pendant dix minutes combien serait nocive pour la Corse et pour ses habitants la collectivité unique de Corse. Pourtant, permettez-moi de citer les propos que vous avez tenus le 29 mai 2015 à propos de l’amendement à la loi NOTRe : « Même si chacun connaît notre attachement au département, notre groupe votera cet amendement. »

Debut de section - Permalien
Jean-Michel Baylet, ministre

« Nous considérons qu’il existe effectivement une spécificité de la Corse et qu’il est nécessaire de faire évoluer son statut. »

Debut de section - Permalien
Jean-Michel Baylet, ministre

Cette affaire me sidère donc quelque peu parce que je n’ai jamais vu autant de changements de pied, autant de reniements et autant de postures différentes !

Debut de section - PermalienPhoto de Cécile Cukierman

Ne tronquez pas la citation, c’est irrespectueux !

Debut de section - Permalien
Jean-Michel Baylet, ministre

On peut changer d’avis, on peut évoluer dans la vie, mais, à ce moment-là, il faut l’assumer et le dire franchement. Ce n’est pas le cas dans ce débat, qui me semble être un débat de dupes ! On oublie la seule chose essentielle, l’intérêt et l’avenir de la Corse et des Corses ! (Applaudissementssur les travées du RDSE et du groupe socialiste et républicain.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Caffet

La parole est à M. le président de la commission des lois.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Monsieur le ministre, je tiens avant tout à vous remercier d’avoir veillé à répondre à chacun des orateurs qui se sont succédé à la tribune pour exprimer leurs positions sur ce texte.

Je voudrais, pour ma part, vous faire part de deux observations.

La première concerne la collectivité unique. Oui, le Sénat a adopté la loi NOTRe, qui comporte les dispositions prévoyant la création de cette collectivité unique. Je vous rappellerai toutefois les conditions dans lesquelles cet amendement a été adopté.

Il s’agissait d’un amendement du Gouvernement, déposé à la toute dernière minute avant le débat. Nous ne l’avons adopté que pour deux raisons : d’une part, il nous a bien sûr semblé que la création d’une collectivité unique allait dans la bonne direction et, d’autre part, le Gouvernement avait alors fait état du consensus des partis politiques représentés dans les institutions départementales et territoriales de Corse. Cet élément a été, pour nous, absolument déterminant. En effet, nous ne prétendons pas, tous autant que nous sommes, être des spécialistes des questions institutionnelles relatives à la Corse. Mais je dois dire que ce consensus nous a rassurés.

Il n’en va pas de même aujourd’hui, puisque nous constatons que les responsables politiques corses ne sont pas tous en harmonie avec vos propositions quant au statut de l’Assemblée de Corse.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Un point, notamment, me paraît crucial – il revêt d’ailleurs une importance certaine pour l’ensemble du territoire national – : il s’agit du mode de scrutin.

Avec deux départements dont les conseillers départementaux sont élus au suffrage universel direct par canton, il s’opère une territorialisation des élus. En revanche, en supprimant les conseils départementaux au profit de l’Assemblée de Corse sans modifier le mode d’élection des conseillers territoriaux, on empêcherait toute territorialisation des élus de Corse.

MM. Yves Pozzo di Borgo et Jean-Jacques P anunzi approuvent .

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Kaltenbach

Enfin, 100 conseillers pour 300 000 habitants, cela fait beaucoup !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Or il nous semble que, dans les circonstances que connaît notre pays, et au vu du besoin ressenti par nos concitoyens d’avoir des élus référents qui puissent être accessibles de par leur proximité, un système politique reposant exclusivement, pour l’Assemblée de Corse, sur un mode de scrutin proportionnel avec prime majoritaire n’est pas satisfaisant. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle il n’y a pas de consensus sur ces ordonnances.

Par conséquent, nous pouvons fort bien avoir adopté le principe de la collectivité unique de Corse, tout en ayant un désaccord fondamental quant aux modalités de sa mise en œuvre, notamment le mode de scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Nous tenons à maintenir la cohérence que nous avons eue, et je tiens à souligner que cette préoccupation est partagée par nombre de collègues sur ces travées.

Ma deuxième observation porte sur la mise en ordre de la propriété en Corse. Sur ce sujet, nous n’avons pas de désaccord sur le fond, monsieur le ministre, sauf, naturellement, sur toute disposition qui pourrait avoir des impacts négatifs sur l’égalité devant l’impôt ou la sécurité du droit de propriété sur le continent. Des corrections peuvent être apportées au texte adopté par l’Assemblée nationale pour le rendre conforme à nos principes fondamentaux, ce que souhaitent d’ailleurs à juste titre tous les élus de Corse.

Pouvait-on, comme cela a été suggéré, intégrer ces dispositions, éventuellement amendées, au présent texte ? Monsieur le ministre, la réponse est non ! Vous êtes trop fin juriste et expert des procédures parlementaires, compte tenu de votre haute expérience, pour ne pas savoir que, lorsqu’un amendement est dépourvu de tout lien avec un texte en discussion, le Conseil constitutionnel, même lorsqu’il n’est pas saisi de cette difficulté, déclare d’office inconstitutionnelles les dispositions adoptées à la suite d’une telle procédure. Ce n’est pas moi qui l’ai inventé, c’est la jurisprudence même du Conseil constitutionnel ! Vous n’attendez tout de même pas de la commission des lois, gardienne du bon ordonnancement des textes constitutionnels, qu’elle aille violer une règle de procédure parlementaire aussi connue et aussi couramment pratiquée que celle-ci !

C’est la raison pour laquelle je ne peux pas accepter ce que je reçois comme un procès d’intention. Oui, nous voulons régler ce problème, mais c’est au Gouvernement, s’il en est convaincu, qu’il revient d’inscrire en temps utile à l’ordre du jour des travaux du Parlement la discussion d’un texte contenant ces dispositions. Vous verrez alors notre bonne foi, car nous les adopterons !

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Yves Pozzo di Borgo applaudit également.

Debut de section - Permalien
Jean-Michel Baylet, ministre

Monsieur le président de la commission, je le répète : la concertation la plus large a été menée pour l’élaboration de ces ordonnances, tant au ministère – trois réunions y ont été tenues – qu’en Corse, où je me suis rendu quatre fois. Nos services, à qui je veux rendre ici hommage, ont travaillé avec ceux de la collectivité territoriale de Corse, comme avec ceux des deux départements. J’avais demandé que des groupes de travail soient constitués ; ils l’ont été, et ils ont accompli un travail utile et digne d’éloges. Nous avons retenu certains points issus de ces travaux.

En outre, d’autres membres du Gouvernement – Mme Cosse, ministre du logement, et Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l’éducation nationale – ont aussi œuvré sur les dispositions relevant de leurs domaines respectifs. Je ne peux donc pas laisser dire que le travail de concertation n’a pas eu lieu : il s’agit d’une réelle coconstruction avec les spécialistes des départements et de la collectivité territoriale de Corse, qui sont excellents : il y a même parmi eux un conseiller d’État !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

M. Philippe Bas, président de la commission des lois. Il fallait me le dire plus tôt !

Sourires.

Debut de section - Permalien
Jean-Michel Baylet, ministre

Je voulais surtout vous dire que, au cours de ces nombreuses discussions, la question du mode de scrutin n’a été abordée à aucun moment. C’est seulement aujourd’hui que vous venez m’expliquer que vous vous opposerez à la ratification de ces ordonnances parce que le mode de scrutin ne serait pas le bon. Je veux bien tout entendre, mais je pèse mes mots, monsieur le président de la commission, car je vous sais attaché, de manière sourcilleuse sinon susceptible, aux bonnes relations entre le Parlement et le Gouvernement, ce en quoi vous avez raison – nous les partageons : il ne faut quand même pas pousser le bouchon trop loin !

Jamais, dans toutes ces réunions, la question du mode de scrutin n’a été évoquée : personne n’a signalé à mes collaborateurs ou à moi-même que la territorialisation constituerait un problème. §On aurait pu avoir ce débat ! Mais pourquoi avoir attendu aujourd’hui, le bout du bout de la discussion, pour soulever ce point ?

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Kaltenbach

Ils ont peur de perdre les élections, c’est tout !

Debut de section - Permalien
Jean-Michel Baylet, ministre

Au contraire, les rares fois où le mot « scrutin » a été prononcé, j’ai souligné que nous ne touchions à rien, pour qu’on ne puisse pas nous accuser de vouloir, par un chamboulement du mode de scrutin, influer sur les électeurs ou le scrutin lui-même.

Je crois donc que, quand bien même je le dis avec beaucoup de modération, ce procès que vous faites au Gouvernement est très exagéré, et ce d’autant plus que le mode de scrutin retenu est conforme aux dispositions présentes dans la loi NOTRe et qui ont été adoptées par le Parlement, y compris par le Sénat.

Concernant le désordre foncier, j’avais pris la précaution d’étudier si cette façon de faire était possible ; vous le savez mieux que quiconque. En effet, malheureusement, quoique certains m’aient affirmé qu’ils créeraient les conditions de nature à trouver une niche parlementaire dans les délais permettant l’adoption définitive de ce texte – j’avais cru comprendre que le groupe Les Républicains devait s’en charger –, cela n’a pas été fait. Quand je l’ai constaté, et après m’en être entretenu avec le président de ce groupe, qui m’a confirmé que la proposition de loi sur ce sujet ne serait pas inscrite à l’ordre du jour qui lui est réservé, j’ai cherché comment nous pouvions sauver ce texte d’intérêt général, attendu par tous les Corses. Je ne sais s’ils s’intéressent tous à notre débat sur les institutions et la collectivité unique – connaissant le goût des Corses pour la politique, je me doute néanmoins qu’ils sont nombreux ! –, mais, ce dont je suis certain, c’est que tous les Corses attendent avec impatience que nous créions les conditions nécessaires au règlement du problème des arrêtés Miot.

Cela mériterait mieux – permettez-moi de le dire tel que je le pense – que ces manœuvres misérables, qui se sont déroulées sous mes yeux : alors que j’avais trouvé une solution qui me semblait la bonne – et mes amis radicaux, Jacques Mézard et Joseph Castelli, que je remercie, avaient accepté d’y contribuer –, nous nous retrouvons – là encore, permettez-moi l’expression – cul par-dessus tête. Cela est bien dommage pour l’intérêt général, celui des Corses et celui de la Corse. Certes, nous essaierons de rattraper les choses, mais je vous rappelle que les travaux du Parlement seront suspendus à compter du 24 février prochain.

Très tranquillement, je tiens à mettre chacun d’entre vous devant ses responsabilités : si, comme je l’ai annoncé tout à l’heure, je parviens à faire inscrire cette proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale à l’unanimité, à l’ordre du jour du Sénat durant une semaine réservée au Gouvernement, ce dont je ne doute pas, il faudra que le vote du Sénat soit conforme. En effet, si tel n’est pas le cas, à trois semaines de la fin de la législature, le Parlement n’aura pas le temps d’adopter définitivement ce texte. Il faudra alors que vous vous en rendiez compte devant les Corses, car c’est bien leur intérêt qui est en jeu, au-delà de tout ce que j’ai pu évoquer et des manœuvres auxquelles nous avons assisté.

On ne pourra pas dire, monsieur le président de la commission, que je ne vous aurai pas prévenus ! Je vais créer les conditions nécessaires pour que ce texte puisse être examiné, puisqu’il est trop tard pour qu’un groupe le demande. Je le répète, je regrette que le groupe Les Républicains ne l’ait pas fait ; c’était à son initiative, à l’Assemblée nationale, que ce texte avait été examiné. La tradition comme la cohérence auraient voulu que le même groupe demande l’inscription de ce texte à l’ordre du jour des travaux du Sénat, mais il ne l’a pas fait – il faudra un jour qu’on nous dise pourquoi.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Kaltenbach

Des paroles, mais pas d’actes, comme d’habitude !

Debut de section - Permalien
Jean-Michel Baylet, ministre

M. Jean-Michel Baylet, ministre. Ce texte sera donc examiné sur le temps réservé par priorité au Gouvernement. Toutefois, son adoption sera impossible si le vote n’est pas conforme, j’y insiste, car nous avons perdu trop de temps dans cette affaire !

Applaudissementssur les travées du RDSE, du groupe écologiste et du groupe socialiste et républicain.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Caffet

La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion du texte de la commission.

I. – L’ordonnance n° 2016-1561 du 21 novembre 2016 complétant et précisant les règles budgétaires, financières, fiscales et comptables applicables à la collectivité de Corse est ratifiée.

II

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

M. Jacques Mézard. Je suis heureux d’assister à ce débat. Certes, nous ne sommes pas nombreux, mais tous sont passionnés. D’ailleurs, monsieur le ministre, j’aimerais que le Gouvernement – celui-ci ou le prochain, quel qu’il soit – consacre autant de temps au problème de l’insularité de l’intérieur !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

Mme Michèle André, présidente de la commission des finances. Le Cantal !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Cela dit, cette séance fut un magnifique concert de jésuitisme !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

M. Jacques Mézard. Venant de ma part, certainement, vous n’en doutez pas !

Nouveaux s ourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Qu’ai-je pu constater ?

Je suis de ceux qui n’ont pas voté en faveur de la loi NOTRe, mais notre groupe avait voté l’amendement relatif à la collectivité unique de Corse, parce que tous les élus de Corse, ainsi que M. Jean-Jacques Hyest, ancien président de la commission des lois, étaient d’accord. La loi NOTRe, en revanche, constituait, selon moi, un accord contre nature entre les deux groupes dominants de la Haute Assemblée ; c’est pourquoi nous avions voté contre.

Je n’ai jamais été très convaincu par la collectivité unique, mais vous l’avez tous voulue, chers collègues. Alors, venir nous dire aujourd’hui que vous n’en voulez plus ! Ma foi, il semblerait qu’un candidat à l’élection présidentielle ait donné pour consigne de bloquer ce texte, car, s’il gagne, tout sera changé ! Il faut le dire publiquement : c’est la stricte réalité. Voilà la vérité !

Marques d’approbation sur les travées du groupe socialiste et républicain. – Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Je ne vous ai pas interrompu, monsieur Panunzi ; octroyez-moi donc le bénéfice du même respect !

Dans notre assemblée, nous avons le droit de nous exprimer, d’être en désaccord et de dire ce que nous pensons. Eh bien, pour ma part, je trouve que la manière dont se déroule l’examen de ce texte n’est pas bonne.

Notre groupe a essayé d’intégrer à ce projet de loi les dispositions relatives au foncier et aux arrêtés Miot, véritable problème pour nos compatriotes corses, des dispositions issues de la proposition de loi de Camille de Rocca-Serra, député du groupe Les Républicains. Nous l’avons fait pour tenter de trouver une solution qui satisfasse tout le monde. Résultat : vous en avez fait des confettis ! Vous devrez en rendre compte devant vos compatriotes ! Voilà la réalité.

Je suis de ceux qui essaient, dans l’intérêt général, de trouver un consensus quand cela est possible ; je crois l’avoir prouvé. Cela implique également de dire honnêtement, y compris à mes amis politiques, quand je ne suis pas d’accord, et de voter contre certains textes.

De grâce, arrêtons ! Vous avez dit, cher collègue Panunzi, que, en Corse, les élus du Nord ne savent pas gérer, contrairement à ceux du Sud. C’est facile de faire ce genre de remarques.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

M. Jacques Mézard. La solution, c’est de trouver des modalités consensuelles pour faire avancer les choses dans l’intérêt général. Effectivement, nous sommes à trois mois de l’élection présidentielle. Voilà où l’on en est ! Ce n’est pas une bonne chose, et c’est précisément cela que nos concitoyens nous reprochent, à juste titre, et à longueur de temps !

Applaudissements sur les travées du RDSE, du groupe écologiste et du groupe socialiste et républicain.

Debut de section - PermalienPhoto de Cécile Cukierman

Nous voterons contre cet article.

Permettez-moi de revenir sur un point de l’intervention de M. le ministre. En effet, si l’on veut un débat sincère, il faut être sincère soi-même dans les propos que l’on fait tenir aux uns et aux autres. Chacun a aujourd’hui accès au compte rendu des séances du Sénat. Dès lors, on ne peut pas simplement extraire d’un discours l’extrait qui arrange.

Relisons donc avec attention le débat qui s’est tenu, lors de l’examen de la loi NOTRe, autour de ce fameux amendement. Comme vous l’avez cité, monsieur le ministre, M. Favier avait relevé, au nom de notre groupe, l’unanimisme presque total des élus corses : on ne pouvait pas en rester au statu quo, il fallait travailler et réfléchir à des évolutions. C’est bien dans cet objectif, et pour soutenir la réflexion sur une évolution des institutions corses, que notre groupe allait voter cet amendement. Christian Favier précisait néanmoins : « Je n’aurai qu’un regret : le fait que cette nouvelle organisation ne soit pas soumise à un référendum. On nous dit qu’une large majorité d’élus est favorable à cette évolution, mais la population pourrait, elle aussi, donner son avis. Je ne comprends pas pourquoi on ne lui fait pas confiance. L’opinion publique étant mieux préparée, nous obtiendrions sans doute un autre résultat que lors du référendum de 2003. »

Allons jusqu’au bout des citations, et acceptons les propos tenus ici à la tribune. Comme cela a été indiqué au cours de la discussion générale – j’y reviendrai lors des explications de vote sur l’ensemble –, nous ne voterons pas le texte qui nous est proposé parce que ces ordonnances qu’on nous demande de ratifier ne sont pas soumises au référendum. J’entends dire par certains qu’il serait tout de même plus simple que l’on dise aux Corses ce qu’ils doivent faire. Allons donc plus loin, et changeons le peuple : ce serait quand même beaucoup plus facile !

Pour ma part, comme je n’ai pas ce pouvoir, et que je n’ai reçu sur ce sujet aucune injonction d’un candidat à l’élection présidentielle, ni même d’un candidat non encore désigné, je voterai, ainsi que mon groupe, contre cet article, contre le suivant, et contre l’ensemble du texte.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Caffet

La parole est à M. Jean-Jacques Panunzi, sur l’article.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Panunzi

Je souhaite simplement apporter quelques clarifications, avec moins de passion et un peu plus de raison.

J’ai déclaré en préambule de mon intervention, monsieur Mézard, qu’il n’était pas question de revenir sur le principe de la collectivité unique. Je n’ai pas voté la loi NOTRe. Pour quelle raison ? Parce que les amendements que nous avions déposés n’ont pas été acceptés. On nous avait alors assuré qu’ils seraient repris dans les ordonnances.

Or, que constatons-nous ?

Dans les ordonnances dont on nous demande d’autoriser la ratification par cette loi, nous n’avons pas pu faire figurer nos observations, notamment sur le mode de scrutin. C’est pour cette simple raison que nous sommes aujourd’hui défavorables à la collectivité que l’on veut nous imposer, je le dis, à marche forcée !

Debut de section - Permalien
Jean-Michel Baylet, ministre

Je n’ai pas de raison de douter de la parole du sénateur Panunzi, mais les résultats du scrutin public sur l’ensemble du projet de loi NOTRe en deuxième lecture attestent qu’il a fait partie des 144 sénateurs du groupe Les Républicains ayant voté pour. Aussi, je pense qu’il faudra, même si c’est un peu tard, qu’il demande un rectificatif…

En tout cas, monsieur le sénateur, vous avez bel et bien voté la loi NOTRe !

L’article 1 er est adopté.

I. – L’ordonnance n° 2016-1562 du 21 novembre 2016 portant diverses mesures institutionnelles relatives à la collectivité de Corse est ratifiée.

II

III

1° Au début du premier alinéa, est ajoutée la mention : « I. – » ;

2° Après les mots : « l’Assemblée de Corse », la fin du seizième alinéa est ainsi rédigée : « selon les modalités prévues à l’article L. 1424-24-2. » ;

3° Le vingt-troisième alinéa est supprimé ;

4° Il est ajouté un II ainsi rédigé :

« II. – Les conseils d’administration des services d’incendie et de secours mentionnés à l’article L. 1424-77 du code général des collectivités territoriales sont renouvelés dans les conditions prévues aux articles L. 1424-24-3, L. 1424-79 et L. 1424-80 du même code, dans un délai de quatre mois à compter du 1er janvier 2018. »

IV

V

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Ce n’est pas pour en rajouter une couche, mais quand même !

Il ne s’agit pas pour moi d’un affrontement direct avec notre excellent collègue Jean-Jacques Panunzi ; là n’est pas la question. M. le ministre a rappelé qui avait voté la loi NOTRe. Nous sommes malheureusement dans une situation où il est particulièrement nécessaire, selon moi, que chacun assume ses responsabilités. Je peux parfaitement comprendre, parce que tel était plutôt mon sentiment, qu’on ne veuille pas de la collectivité unique. Je suis très jacobin, et je l’ai toujours affirmé ici.

En revanche, dès lors qu’il y a une unanimité, que les élus du territoire à la Haute Assemblée disent qu’on doit aller dans ce sens-là, il faut ensuite en assumer les conséquences. Que vous considériez aujourd’hui que ce n’était pas une bonne décision, et qu’il faut appuyer sur le frein, on peut l’entendre, mais pas ainsi. Ce ne sont pas les bonnes méthodes vis-à-vis de nos concitoyens. En outre, nos compatriotes corses, pour lesquels j’ai toujours eu infiniment d’estime et de respect, attendent, eux aussi, comme les autres sur le territoire national, autre chose.

L’article 2 n’est pas adopté.

(Non modifié)

L’ordonnance n° 2016-1563 du 21 novembre 2016 portant diverses mesures électorales applicables en Corse est ratifiée.

L’article 3 n’est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Caffet

Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Cécile Cukierman

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, comme nous l’avons déjà précisé, nous dénonçons le caractère antidémocratique du processus en cours, d’autant que les Corses s’y sont massivement opposés via la consultation locale. L’Assemblée de Corse avait demandé que le projet soit présenté dans un texte spécifique, avec ratification par référendum. Le Sénat, qui est l’assemblée des collectivités, ne peut pas en faire abstraction !

Les Corses vont, à leurs dépens, servir de cobayes aux liquidateurs de nos institutions républicaines et aux opposants à la priorité sociale des départements. A contrario des fondements de la solidarité républicaine, on impose aux Corses le modèle de l’Europe des régions, qui met en concurrence des territoires et qui affaiblira très certainement la Corse face à des terres aussi riches que la Catalogne ou la Toscane.

Pour la Corse, la priorité, c’est avant tout d’en finir avec les inégalités sociales et économiques de l’île, d’anéantir les dérives affairistes, de s’attaquer aux logiques spéculatives.

Pour la Corse, la priorité, c’est de mieux répondre aux besoins des territoires par des services publics performants. Je parle notamment des zones rurales de montagne, si remarquables, mais si difficiles d’accès. N’oublions pas que les déplacements se comptent non en kilomètres, mais en temps.

Voilà ce à quoi les élus communistes et citoyens de l’Assemblée de Corse travaillent, à travers un véritable projet d’égalité – et non d’uniformité – avec le reste du territoire. Cela passe par un investissement massif dans un développement qui allie progrès sociaux et réussites économiques ; cela passe aussi par un projet plus respectueux de la spécificité et de l’identité de cette unique région insulaire de métropole, qui reposerait sur la solidarité nationale.

Quand on sait que ce texte a pour objet l’affaiblissement de l’action et de l’emploi publics, il ne fait aucun doute qu’il ne répond à aucun des enjeux de développement de la Corse et de ses populations. C’est pourquoi, relayant les revendications d’élus locaux, de syndicalistes et de citoyens de Corse, nous ne voterons pas ce projet de loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Caffet

Personne ne demande plus la parole ?…

Je mets aux voix, dans le texte de la commission, modifié, l'ensemble du projet de loi ratifiant les ordonnances n° 2016-1561 du 21 novembre 2016 complétant et précisant les règles budgétaires, financières, fiscales et comptables applicables à la collectivité de Corse, n° 2016-1562 du 21 novembre 2016 portant diverses mesures institutionnelles relatives à la collectivité de Corse et n° 2016-1563 du 21 novembre 2016 portant diverses mesures électorales applicables en Corse.

J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Caffet

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

Il est procédé au dépouillement du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Caffet

Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 92 :

Le Sénat n'a pas adopté.

La parole est à M. le ministre.

Debut de section - Permalien
Jean-Michel Baylet, ministre

Nous venons d’assister à un mauvais moment de la vie parlementaire.

Debut de section - Permalien
Jean-Michel Baylet, ministre

Je ne suis pas né de la dernière pluie. C’est pourquoi j’avais mené des discussions utiles afin de m’assurer que la commission des lois était d’accord pour sauver les arrêtés Miot. La parole n’a pas été tenue.

Madame la sénatrice Cukierman, vous avez eu raison de rappeler que le sénateur Favier regrettait qu’il n’y ait pas de référendum. Pour autant, il ne disait pas que c’était une condition sine qua non et il approuvait bel et bien la création de la collectivité unique de Corse. Aujourd’hui, vous reniez cet engagement et prenez une position inverse.

Mme Cécile Cukierman s’exclame.

Debut de section - Permalien
Jean-Michel Baylet, ministre

J’ai bien entendu au cours de la discussion générale le sénateur Luche déclarer à la tribune, au nom du groupe de l’UDI-UC, – mais il a miraculeusement disparu ! –…

Debut de section - Permalien
Jean-Michel Baylet, ministre

M. Jean-Michel Baylet, ministre. … que son groupe était favorable à ce texte et qu’il le voterait. Le résultat du scrutin public montre qu’il n’en est rien. Tous les membres de son groupe ont d’ailleurs disparu. Ah non, il en reste un, dans l’entrebâillement de la porte

M. le ministre désigne M. Yves Pozzo di Borgo.

Debut de section - Permalien
Jean-Michel Baylet, ministre

, le rouge de la honte au front.

M. Philippe Dominati s’exclame.

Debut de section - Permalien
Jean-Michel Baylet, ministre

Il en est de même du groupe Les Républicains et en particulier de vous, monsieur le sénateur Panunzi, qui avez soutenu ici même des positions différentes de celles que vous avez souvent prises au cours des réunions que nous avons tenues pour coconstruire ces ordonnances. Vous avez même tenté de nous faire croire précédemment que vous aviez voté contre la loi NOTRe ! Comme numéro de faux-cul parlementaire, il est difficile de faire mieux !

Debut de section - Permalien
Jean-Michel Baylet, ministre

Et le tout, sous l’œil de Camille de Rocca Serra, qui a, lui aussi, quitté à l’instant la tribune publique, tel un commissaire politique venu contrôler que son œuvre de destruction était menée à bien. J’aurais préféré le voir au Sénat un peu plus tôt pour persuader le groupe Les Républicains de reprendre dans une niche parlementaire, comme c’est la tradition, ce texte important pour les Corses.

Les Corses vous tiendront rigueur de ce qui vient de se passer cet après-midi, et ils auront raison !

Je tiens à remercier le groupe socialiste et républicain de sa fidélité. Je remercie également Jacques Mézard, Joseph Castelli et les membres du RDSE de leur loyauté : je sais que ce texte a fait débat au sein de leur groupe, car tous n’étaient pas d’accord, mais nous avons su convaincre, et parole a été tenue.

Je remercie aussi le groupe écologiste qui, à l’unanimité, a soutenu ce projet de loi. Enfin, je remercie le rapporteur et le rapporteur pour avis, qui ont pris leurs responsabilités.

Je le répète, ce n’est pas un bon moment de la vie parlementaire. Il ne faut pas s’étonner, avec de tels comportements, que l’opinion publique ait une image de plus en plus calamiteuse de la classe politique.

Debut de section - Permalien
Jean-Michel Baylet, ministre

Vous verrez, les Corses jugeront durement.

Cela étant, le Sénat a pris cette décision tout à fait démocratiquement : les ordonnances sont rejetées. Quel mauvais coup pour la Corse !

Applaudissements sur les travées du RDSE, du groupe écologiste et du groupe socialiste et républicain.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Caffet

M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre l’avenant n° 2 à la convention entre l’État et Bpifrance relative à l’action « Financement des entreprises sobres : prêts verts », l’avenant n° 4 à la convention entre l’État et l’Agence nationale pour la rénovation urbaine relative aux actions « Internats d’excellence et égalité des chances » et la décision d’affectation des crédits de l’action « Innovation collaborative » à l’action « Projets structurants pour la compétitivité ».

Acte est donné du dépôt de ces documents.

Ils ont été transmis à la commission des finances.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Caffet

Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au mardi 31 janvier 2017 :

À quatorze heures trente :

Proposition de loi tendant à renforcer l’efficacité de la justice pénale (126, 2016-2017) ;

Rapport de M. François Pillet, fait au nom de la commission des lois (331, 2016-2017) ;

Texte de la commission (n° 332, 2016-2017).

À seize heures quarante-cinq : questions d’actualité au Gouvernement.

À dix-sept heures quarante-cinq et le soir : suite de la proposition de loi tendant à renforcer l’efficacité de la justice pénale (126, 2016-2017).

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

La séance est levée à dix-huit heures trente-cinq.