Séance en hémicycle du 28 novembre 2011 à 22h15

Résumé de la séance

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La séance

Source

La séance, suspendue à vingt heures quinze, est reprise à vingt-deux heures quinze.

Photo de Jean-Léonce Dupont

La séance est reprise.

Nous poursuivons la discussion du projet de loi de finances pour 2012, adopté par l’Assemblée nationale.

Dans la suite du débat, nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances », figurant à l’état B.

En euros

Mission

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Solidarité, insertion et égalité des chances

Lutte contre la pauvreté : revenu de solidarité active et expérimentations sociales

Actions en faveur des familles vulnérables

Handicap et dépendance

Égalité entre les hommes et les femmes

Conduite et soutien des politiques sanitaires, sociales, du sport, de la jeunesse et de la vie associative

Dont titre 2

732 252 670

732 252 670

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

L'amendement n° II-216, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Modifier comme suit les crédits des programmes :

En euros

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Lutte contre la pauvreté : revenu de solidarité active et expérimentations sociales

Actions en faveur des familles vulnérables

Handicap et dépendance

Égalité entre les hommes et les femmes

Conduite et soutien des politiques sanitaires, sociales, du sport, de la jeunesse et de la vie associative

Dont Titre 2

120 324

120 324

TOTAL

SOLDE

La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Debut de section - Permalien
Claude Greff, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la cohésion sociale, chargée de la famille

Le présent amendement vise à tirer les conséquences sur les crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » de l’ajustement des transferts de compétences et de services aux collectivités territoriales.

Ainsi, en application du décret n° 2008-791 du 20 août 2008, les crédits de titre 2 du programme « Conduite et soutien des politiques sanitaires, sociales, du sport, de la jeunesse et de la vie associative » sont minorés de 120 324 euros. Ces crédits correspondent à la rémunération de deux agents du ministère du travail, de l'emploi et de la santé participant à l’exercice de compétences transférées par la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales dans les domaines de la solidarité, de l’action sociale et de la santé.

Par coordination avec le présent amendement, le plafond des autorisations d'emplois du ministère du travail, de l’emploi et de la santé figurant à l’article 36 du présent projet de loi de finances fera l’objet d’une minoration de deux équivalents temps plein travaillé, par voie d’amendement distinct.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Bocquet

Il s’agit d’un amendement technique visant à tirer les conséquences sur le budget du transfert déjà effectif de deux agents du ministère à des collectivités territoriales.

La commission s’en remet à la sagesse du Sénat.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

La parole est à M. Roland Courteau, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Courteau

Je voudrais revenir sur un sujet qui me préoccupe tout particulièrement.

Nicole Bonnefoy a appelé, à juste raison, l’attention de Mme Bachelot-Narquin sur le problème de société que représentent les violences faites aux femmes en général et celles qui sont commises au sein des couples en particulier. Je veux rappeler que ces violences constituent une grave atteinte aux droits fondamentaux de la personne humaine. C’est même la plus répandue en France.

C’est pourquoi nous avions, voilà quelques années, déposé une proposition de loi, qui, avec celle du groupe CRC, fut à l’origine de la loi du 4 avril 2006 renforçant la prévention et la répression des violences au sein du couple ou commises contre les mineurs. À l’époque, nous ne disposions dans notre législation que de textes épars, preuve du peu d’importance que l’on accordait à un tel problème, certainement par ignorance, mais peut-être aussi parce que l’on considérait que le meilleur moyen de s’accommoder d’un mal qui dérange est de l’ignorer.

En réalité, c’est bien parce que la lutte contre les violences à l’égard des femmes et au sein des couples…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

Il ne s’agit pas d’une explication de vote, mon cher collègue.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Courteau

Monsieur le président, j’interviens dans le cadre du projet de loi de finances. Précédemment, il a été question de réduire les crédits alloués aux associations, et je tiens à dénoncer un certain nombre de faits, notamment la non-application de la loi du 4 avril 2006 et de certaines dispositions de la loi du 9 juillet 2010 !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

Nous en sommes parvenus aux explications de vote sur l’amendement du Gouvernement, monsieur Courteau.

Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, adopte l'amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

L'amendement n° II-173 rectifié ter, présenté par MM. Savary, Béchu, Karoutchi, Lorrain, Milon et de Montgolfier, est ainsi libellé :

Modifier comme suit les crédits des programmes :

En euros

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Lutte contre la pauvreté : revenu de solidarité active et expérimentations sociales

Actions en faveur des familles vulnérables

Handicap et dépendance

Égalité entre les hommes et les femmes

Conduite et soutien des politiques sanitaires, sociales, du sport, de la jeunesse et de la vie associativeDont Titre 2

TOTAL

SOLDE

La parole est à M. Jean-Louis Lorrain.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Lorrain

Je me permettrai, pour présenter cet amendement, de m’alimenter des réflexions de notre collègue René-Paul Savary.

Cet amendement vise à compenser les dépenses engagées par les départements pour l’accueil des mineurs isolés étrangers, afin de ne pas accentuer davantage les difficultés des départements liées à l’accroissement des dépenses sociales.

Cette proposition fait également suite au rapport de Mme Isabelle Debré paru en mai 2010.

Du fait de leur jeune âge, les mineurs isolés étrangers sont systématiquement accueillis en établissement, les familles d’accueil étant réservées à des enfants plus petits, aux problématiques éducatives complexes.

Les mineurs isolés étrangers ne sont pas autonomes. Ils relèvent d’abord de la politique de l’immigration, puis sont confiés aux conseils généraux, qui doivent en assurer la charge.

Ces mineurs étant isolés, ils sont accueillis 365 jours sur 365 dans nos départements. Le coût moyen journalier en établissement s’établit, pour un département comme la Marne, à 180 euros, ce qui représente un coût annuel de plus de 65 000 euros par mineur. Je vous laisse, mes chers collègues, le soin de calculer le coût imputé à chaque département en fonction du nombre de mineurs isolés accueillis. Il est considérable !

Devant l’accroissement du nombre de mineurs isolés étrangers, et dans le but de compenser aux départements les charges résiduelles induites par leur accueil, il convient que le Fonds national de financement de la protection de l’enfance soit abondé.

Il nous semble que cette somme peut être prélevée sur les crédits non utilisés du Fonds national des solidarités actives, ce qui nous évite ainsi de tomber sous le coup du principe d’irrecevabilité énoncé à l’article 40 de la Constitution !

Les ressources nécessaires seraient donc prélevées sur l’action n° 1, Revenu de solidarité active, du programme 304 « Lutte contre la pauvreté : revenu de solidarité active et expérimentations sociales », pour être redistribuées à l’action n° 3, Protection des enfants et des familles, du programme 106 « Actions en faveur des familles vulnérables ».

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Bocquet

Cet amendement vise à transférer 75 millions d’euros du programme « Lutte contre la pauvreté : revenu de solidarité active et expérimentations sociales » vers le programme « Actions en faveur des familles vulnérables », afin de renforcer la dotation du Fonds national de financement de la protection de l’enfance.

Les auteurs de cet amendement entendent ainsi compenser les charges résultant, pour les départements, de l’accueil des mineurs étrangers isolés.

En tant que tel, cet amendement ne serait toutefois pas pleinement opérant, la mission du FNPE se limitant à la compensation des charges résultant de la mise en œuvre de la loi du 5 mars 2007 reformant la protection de l’enfance et de la conduite d’expérimentations dans ce domaine.

Nous savons que la situation des mineurs étrangers isolés devient un sujet de plus en plus préoccupant pour les conseils généraux, notamment dans les territoires comprenant de grandes zones urbaines.

Quoi qu’il en soit, si je rejoins les préoccupations des auteurs de cet amendement, qui sont d’ailleurs partagées par nombre de nos collègues sur ces travées, je ne peux émettre un avis favorable. En effet, le programme destiné au financement du RSA ne comprend plus suffisamment de crédits pour opérer un tel transfert. Nous avons déjà évoqué ce problème lors de la discussion générale, et souligné qu’il manquait déjà près de 80 millions d’euros pour financer la prime de Noël 2012.

Je rappelle en outre que, si le Gouvernement n’avait pas refusé de doter le FNPE, les marges de manœuvre des départements en matière d’aide sociale à l’enfance seraient certainement plus grandes.

En conséquence, l'avis est défavorable.

Debut de section - Permalien
Claude Greff, secrétaire d'État

Monsieur Lorrain, votre proposition se fait l’écho des difficultés réelles rencontrées par certains départements pour accueillir des mineurs étrangers isolés. Je vous remercie, ainsi que les coauteurs de cet amendement, de donner l’occasion au Gouvernement de clarifier ses intentions sur ce dossier important.

Afin d’aider les départements les plus impactés par la prise en charge de ces mineurs, nous avons entrepris de répartir de façon plus équitable et plus homogène les placements ordonnés par le juge des enfants sur l’ensemble du territoire.

Nous avons également décidé d’octroyer un soutien budgétaire aux plateformes chargées de l’accueil et de l’orientation des mineurs étrangers.

Enfin, aujourd’hui même, nous avons constitué un groupe de travail regroupant des représentants des ministères de l’intérieur, de la justice et des solidarités, dont la mission sera de proposer des solutions concrètes et rapides au problème de l’accueil de ces mineurs. Ce groupe de travail pourra ainsi étudier la possibilité de consacrer une partie des disponibilités du Fonds national de financement de la protection de l’enfance, que nous avons estimées à environ 10 millions d’euros en 2012, pour aider les départements les plus en difficulté.

Telle qu’elle est rédigée, votre proposition impliquerait de prélever, en 2012, une grande partie des disponibilités du Fonds national des solidarités actives, au moment même où la situation sociale commande de sanctuariser au maximum ces moyens destinés à accompagner ceux de nos concitoyens qui sont les plus fragilisés.

De surcroît, compte tenu des pistes d’amélioration qui pourraient émerger de la conférence nationale d’évaluation du RSA, qui se tiendra dans moins de deux semaines, il me semble impératif de ne pas hypothéquer aujourd’hui d’éventuelles marges de manœuvre.

Je vous demande en conséquence de bien vouloir retirer cet amendement. À défaut, le Gouvernement sera contraint d’émettre un avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Lorrain

La situation dans laquelle nous nous trouvons est en fait le résultat d’absence de réponses. L’État, par son pouvoir régalien, joue un rôle sur les flux et le Gouvernement met en avant, comme Mme la ministre l’a fait dans sa réponse un peu précipitée tout à l'heure, …

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

Il n’a pas à prendre la parole : il doit dire simplement s’il retire ou non son amendement !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Lorrain

… la compétence des départements en matière d’aide sociale à l’enfance. Je le comprends parfaitement.

Mes collègues et moi-même n’avons pas le monopole de cette préoccupation ; les préfets se trouvent également mis en difficulté par l’absence de réponses.

Quand il s’agit de redistribution, vous savez très bien que nous sommes tous solidaires, mais, lorsqu’il s’agit de mettre la main à la poche, …

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Lorrain

… les choses ne sont pas aussi simples que l’on voudrait nous le faire croire.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Lorrain

Monsieur le président, j’ai pris acte des réponses de Mme la ministre. Elle m’a dit avoir constitué un groupe de travail important…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Lorrain

Vous permettez que je termine ma phrase, mon cher collègue !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Lorrain

Je vais retirer l’amendement, mais j’ai tout de même le droit d’expliquer pourquoi ! Je souhaite avoir un certain nombre d’assurances pour les départements car je ne me satisferai pas de la promesse d’une simple réunion.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

L’amendement n° II-173 rectifié ter est retiré.

Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances », figurant à l’état B.

J’ai été saisi, dans le délai limite, d’une demande d’explication de vote de la part de Mme Brigitte Gonthier-Maurin.

Vous avez la parole, ma chère collègue.

Debut de section - PermalienPhoto de Brigitte Gonthier-Maurin

L’égalité entre les femmes et les hommes est encore loin d’être une réalité et tout nous conduit à penser que, compte tenu de la politique gouvernementale, elle restera longtemps un vœu pieu.

Il y a quelques mois, en imposant le conseiller territorial, le Gouvernement et les parlementaires qui le soutiennent, ont porté un grand coup à la parité dans la mesure où, avec le mode de scrutin prévu, la proportion des femmes parmi les conseillers territoriaux ne devrait pas excéder 17 %.

Il y a de cela quelques jours, le Gouvernement et les députés UMP supprimaient l’amendement que nous avions déposé dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2012 et que le Sénat avait adopté, visant à conditionner les exonérations de cotisations sociales aux entreprises qui respectent l’égalité entre les femmes et les hommes. C’est à croire que le Gouvernement ignore le fait que, aujourd’hui, malgré les lois en vigueur, 27 % des femmes subissent, à qualifications et activités professionnelles égales, un salaire inférieur aux hommes.

Dès lors, nous n’avons pas la même lecture du budget que Mme laministre des solidarités et de la cohésion sociale, car tous les crédits consacrés au programme 137 sont en baisse et accusent bien une réduction de 27 000 euros de crédits alloués aux lieux d’accueil des femmes victimes de violences, notamment conjugales.

Debut de section - PermalienPhoto de Brigitte Gonthier-Maurin

Mme la ministre a évoqué le plan triennal de 31 millions d’euros, oubliant de préciser que seuls 11 millions d’euros relèvent du ministère de la cohésion sociale, le reste des efforts n’étant qu’une nouvelle ventilation des moyens.

Pourtant, les professionnels de terrain, les acteurs associatifs formulent tous un constat identique : le nécessaire renforcement de ces structures qui permettent aux femmes violentées de s’extraire du domicile, lieu de violence.

Vous diminuez également les subventions accordées à l’Association européenne contre les violences faites aux femmes au travail. Or celle-ci jour un rôle important qu’il ne faut pas limiter à une simple permanence téléphonique.

De même, la mission ne financera plus que 33 contrats d’égalité et de mixité des emplois, contre 165 en 2011. Ces contrats, bien que très imparfaits, prévoyaient une aide financière pour les contrats conclus entre l’entreprise, une femme nommément désignée et l’État. Le contrat pour la mixité des emplois a pour objectif l’embauche, la mutation ou la promotion d’une salariée sur un métier ou une qualification jusqu’à présent peu féminisée.

C’est un nouveau mauvais coup porté aux droits des femmes et une raison supplémentaire pour ne pas adopter les crédits de cette mission.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Bocquet

La commission est défavorable à l’adoption des crédits de la mission.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

Je mets aux voix, modifiés, les crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances ».

Ces crédits ne sont pas adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

J’appelle en discussion les articles 61 et 61 bis et les amendements qui sont rattachés pour leur examen aux crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances ».

Solidarité, insertion et égalité des chances

Pour l’année 2012, par exception aux dispositions de l’article L. 262-24 du code de l’action sociale et des familles, le fonds national des solidarités actives finance la totalité des sommes payées au titre de l’allocation de revenu de solidarité active versée aux personnes mentionnées à l’article L. 262-7-1 du même code. –

Adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

L'amendement n° II-161, présenté par Mmes Pasquet, Cohen et David, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Après l’article 61

Insérer un article ainsi rédigé :

Le Gouvernement remet au plus tard, le 31 janvier 2012, un rapport portant sur les coûts financiers et les avantages pour les bénéficiaires, de l’instauration d’une allocation d’autonomie jeunesse accordée à tous les jeunes de 18 à 24 ans.

La parole est à Mme Isabelle Pasquet.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Pasquet

Comme le soulignait la journaliste Anne Rodier, « depuis bientôt trente ans, le marché du travail est peu accueillant pour les jeunes. Derniers entrés, premiers sortis : en période de crise les moins de 25 ans sont les premiers à être “remerciés” par l’entreprise ». Les statistiques sont claires et, selon un rapport de l’Association pour l’emploi des cadres, l’APEC, en date de septembre 2010, huit mois après la sortie de l’école, le taux des jeunes diplômés en emploi est passé de 77 % pour la promotion 2007 à 64 % pour la promotion 2009.

On parle d’emplois, mais ce sont des emplois dont la règle voudrait qu’ils soient nécessairement précaires, limités dans leur durée et surtout dans le montant de leur rémunération, un peu comme s’il était normal que les jeunes parce qu’ils sont jeunes, soient exposés à la précarité.

Et ces jeunes devraient se sentir privilégiés si on les compare à l’immense majorité des jeunes d’une même classe d’âge qui ne connaissent que les stages peu ou pas rémunérés, ou qui ne vivent que des quelques heures effectuées dans les fastfood ou des quelques euros que leurs parents peuvent leur donner !

Comme le souligne fort à propos le Secours catholique dans son dernier rapport, « les jeunes subissent de plein fouet la crise économique et sociale ». Ce constat, unanimement partagé par les acteurs de terrain, ne vous a toutefois pas empêchés, à l’Assemblée nationale, de supprimer l’exonération de taxe sur les conventions d’assurance, ou TSCA, sur les contrats solidaires et responsables souscrits par les étudiants, comme s’ils n’étaient pas suffisamment précarisés. La réalité est bien plus dure et nous savons tous dans nos départements que le nombre de jeunes ayant recours aux aides alimentaires et aux structures d’urgences est de plus en plus important. À titre d’exemple, ils sont 36 % à habiter dans des substituts de logement de type centres d’hébergement, caravanes ou hôtels et 50 % font face à des impayés.

Dans ce contexte, il nous semble important de tout faire pour mettre progressivement en œuvre une allocation d’autonomie jeunesse, c’est-à-dire, comme le décrit l’Union nationale des étudiants de France, l’UNEF, de créer un véritable statut social pour les jeunes, nécessaire pour couvrir la période de formation initiale et d’insertion.

Nous souhaiterions que cette allocation soit délivrée à tous les jeunes de 18 à 24 ans, sur la base de leur propre situation, sans référence à la situation financière des parents. Ce serait une aide universelle, comme cela existe déjà pour d’autres allocations, comme les aides au logement ou les allocations familiales, permettant aux jeunes de mener à bien leur projet de formation et d’insertion.

Cette mesure, dont nous estimons qu’elle doit être évaluée, présenterait par ailleurs l’avantage de lutter contre le salariat contraint qui concerne bon nombre d’étudiants. Je pense en l'occurrence à la situation des jeunes qui travaillent au détriment de leurs études.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Bocquet

Par cet amendement, il est demandé la remise d’un rapport sur une allocation d’autonomie jeunesse accordée à tous les jeunes de 18 à 24 ans. La commission n’a pas examiné cet amendement. À titre personnel, j’y suis tout à fait favorable.

Je formulerai une suggestion : serait-il possible de reporter la date de remise du rapport du 31 janvier 2012 au 31 mars 2012 afin que le Gouvernement puisse travailler plus sereinement ?

Debut de section - Permalien
Claude Greff, secrétaire d'État

Le Gouvernement n’est pas favorable à cet amendement, tout simplement parce que nous avons vu comment Martin Hirsch a travaillé – vous en êtes évidemment, vous aussi, tous conscients – en respectant toujours les droits et devoirs de chacun.

Vous demandez un énième rapport, je vous rappelle simplement qu’il y en a déjà eu un.

La loi du 1er décembre 2008 généralisant le revenu de solidarité active et réformant les politiques d’insertion prévoyait, justement dans son article 5, la remise d’un rapport par le Gouvernement – rapport qui a été réalisé – sur la situation des jeunes non étudiants âgés de moins de 25 ans au regard de l’insertion sociale et professionnelle, de l’accès au service public de l’emploi et des sommes qu’ils perçoivent au titre de la prime pour l’emploi et du revenu de solidarité active.

Sans attendre ce rapport, le Président de la République a lancé un plan « Agir pour la jeunesse »…

Debut de section - Permalien
Claude Greff, secrétaire d'État

… le 29 septembre 2009 à Avignon, …

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Il y a 2 millions de jeunes en dessous du seuil de pauvreté !

Debut de section - Permalien
Claude Greff, secrétaire d'État

… et plusieurs dispositifs d’aide visant à renforcer l’autonomie financière des jeunes de moins de 25 ans ont été mis en place.

Ainsi, introduite par l’article 135 de la loi de finances pour 2010, l’ouverture du revenu de solidarité active – le fameux RSA – aux jeunes actifs de moins de 25 ans a été mis en œuvre par le décret du 25 août 2010 relatif à l’extension du RSA aux jeunes de moins de 25 ans.

Ce texte, sans instaurer une prestation nouvelle ou un régime juridique du RSA dérogatoire pour une population ciblée, permet depuis le 1er septembre 2010, d’accorder à un jeune inséré dans la vie active et âgé au moins de 25 ans, les mêmes droits que ceux dont jouit un travailleur de plus de 25 ans exerçant la même activité…

Debut de section - Permalien
Claude Greff, secrétaire d'État

… et percevant la même rémunération, …

Debut de section - Permalien
Claude Greff, secrétaire d'État

… sans distinction d’âge sous la seule réserve qu’il ait exercé une activité professionnelle antérieure équivalant à deux ans d’activité à temps plein sur une période de référence de trois ans précédant la date de la demande.

Debut de section - Permalien
Claude Greff, secrétaire d'État

Par ailleurs, a été autorisée également par la loi de finances de 2010 la création, à titre expérimental pour trois ans, d’un revenu contractualisé d’autonomie et d’une dotation d’autonomie financée par le Fonds d’appui aux expérimentations en faveur des jeunes.

Ces prestations sont attribuées à des jeunes volontaires de 18 ans à 25 ans répondant à des conditions de ressources, de difficultés d’insertion et de situation familiale, sélectionnés de manière aléatoire et résidant dans des territoires présentant un intérêt particulier au regard de l’objet des expérimentations et de la situation des jeunes qui y résident.

Compte tenu de tous ces éléments, la remise d’un rapport par le Gouvernement sur les coûts financiers et avantages pour les bénéficiaires de l’instauration de ces différentes mesures d’aides financières accordées aux jeunes de moins de 25 ans n’apparaît évidemment pas opportun.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

La parole est à Mme Aline Archimbaud, rapporteure pour avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Aline Archimbaud

Madame la secrétaire d’État, l’explosion de la pauvreté et de la précarité dans la jeunesse est suffisamment dramatique actuellement pour que l’on s’émeuve du fait – nous l’avons dit tout à l’heure – que le RSA jeunes fonctionne mal : ils ne sont que 10 000 sur l’ensemble des jeunes à en bénéficier actuellement. Il y a manifestement des difficultés et il faut réexaminer le problème.

Cette proposition d’un rapport permettrait au moins, me semble-t-il, d’analyser la situation.

Debut de section - PermalienPhoto de Aline Archimbaud

Il n’est pas possible d’accepter la situation actuelle, qui est dramatique.

Madame la secrétaire d’État, il s’agit simplement de réaliser un rapport ! La commission des affaires sociales pourrait en fixer le cadre et définir son objet d’une façon plus large de façon à répondre à la question suivante : comment faire aujourd’hui reculer la pauvreté dans la jeunesse ? On ne peut pas accepter la situation actuelle qui est extrêmement préoccupante.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

Madame Pasquet, acceptez-vous la rectification suggérée par M. le rapporteur spécial ?

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Pasquet

Oui, c’est une excellente idée.

Je le répète, madame la secrétaire d’État, il ne s’agit que d’une demande de rapport. Vous n’étiez pas présente lors de mon intervention générale, mais vous devez bien avoir conscience du fait que le chômage et la précarité des jeunes sont inquiétants pour l’avenir de notre société.

Ce rapport serait donc bienvenu, car il faut absolument procéder à une évaluation précise de la situation.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Pasquet

Le RSA n’est pas la bonne réponse : aujourd'hui, le RSA jeunes concerne 10 000 jeunes, alors que 25 % des jeunes âgés de dix-huit à vingt-cinq ans sont au chômage. On est donc très loin de la réponse à apporter aux jeunes qui vivent dans la précarité.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

Je suis donc saisi d’un amendement n° II-161 rectifié, présenté par Mmes Pasquet, Cohen et David, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, et ainsi libellé :

Après l’article 61

Insérer un article ainsi rédigé :

Le Gouvernement remet au plus tard, le 31 mars 2012, un rapport portant sur les coûts financiers et les avantages pour les bénéficiaires, de l’instauration d’une allocation d’autonomie jeunesse accordée à tous les jeunes de 18 à 24 ans.

La parole est à M. Alain Néri, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Madame la secrétaire d'État, vous nous refusez un rapport visant à analyser les causes d’un mal endémique qui frappe notre pays, à savoir le chômage des jeunes.

Pourtant, les derniers chiffres publiés par le ministère du travail devraient vous conduire à la prudence : la France compte ce mois-ci 37 000 chômeurs de plus !

Aujourd'hui, ce sont plus de 3 millions de jeunes qui vivent en dessous du seuil de pauvreté, avec moins de 954 euros par mois ; …

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

… ils ont des emplois précaires, des emplois à temps partiel subi et non pas voulu. En réalité, que leur offrez-vous, madame la secrétaire d'État ? Vous ne voulez pas d’un rapport plus détaillé, faisons donc une analyse rapide de la situation !

Le Président de la République a dit : « Il faut agir, agir… » Ce sont des mots, mais qu’en est-il de l’action ? Les chiffres du chômage que je viens d’annoncer le démontrent à l’évidence. Comment voulez-vous, madame la secrétaire d'État, que ces jeunes aient confiance en l’avenir ?

Que leur proposez-vous ? D’être chômeur ou, au mieux, d’être travailleur pauvre ?

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Comment voulez-vous qu’ils aient la possibilité de fonder une famille, de s’installer, en ayant un travail précaire, souvent à durée déterminée, ce qui ne leur permet même pas de contracter un prêt bancaire ?

Madame la secrétaire d'État, je veux attirer votre attention sur le fait suivant : dans notre pays, les parents sont convaincus que leurs enfants vivront moins bien qu’eux, et les jeunes en sont aussi persuadés.

Aujourd'hui, nous devons tous ensemble nous mobiliser pour leur apporter une solution. Mais encore faut-il procéder à une analyse précise de la situation ! Et c’est pour cette raison que nous demandons ce rapport !

Nous avons connu l’urgence sociale. Aujourd’hui, l’exaspération est dépassée ; je crains que nous ne soyons en situation de pré-explosion sociale à cause de la politique que conduit le Gouvernement depuis quatre ans, une politique qui ne prend pas en compte l’avenir de cette jeunesse. Pourtant, un pays n’est fort que s’il s’appuie sur une jeunesse qui a foi en l’avenir !

Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 61.

I. – Par dérogation aux dispositions de l’article L. 14-10-4 et aux dispositions du IV de l’article L. 14-10-5 du code de l’action sociale et des familles, une dotation de l’État de 50 millions d’euros est versée à la section définie au même IV. Cette dotation finance une restructuration exceptionnelle des services d’aide et d’accompagnement à domicile relevant des 1° et 2° de l’article L. 313-1-2 du même code. Elle est versée en deux tranches de 25 millions d’euros en 2012 et en 2013.

Le montant de cette dotation, les critères et les modalités de sa répartition entre les services mentionnés au premier alinéa sont définis par un arrêté conjoint des ministres chargés du budget, de la sécurité sociale et de la cohésion sociale.

Les agences régionales de santé sont chargées de la répartition des crédits à l’issue d’une instruction par la commission de coordination des politiques publiques de santé dans le domaine des prises en charge et des accompagnements médico-sociaux.

Ces crédits font l’objet :

1° Pour les services visés au 1° de l’article L. 313-1-2 du code de l’action sociale et des familles, de la signature d’une convention de financement entre le directeur général de l’agence régionale de santé, le président du conseil général du territoire sur lequel est situé le service, le cas échéant les organismes de sécurité sociale finançant le service, et la personne physique ou morale gestionnaire du service demandeur ou d’un contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens en application de l’article L. 313-11 du même code, financé par un forfait global et d’une durée n’excédant pas trois ans ;

2° Pour les services visés au 2° de l’article L. 313-1-2 du même code, de la signature d’une convention de financement entre le directeur général de l’agence régionale de santé, le président du conseil général et le préfet du territoire sur lequel est situé le service, le cas échéant les organismes de sécurité sociale finançant le service, et la personne physique et morale gestionnaire du service demandeur.

Les conventions de financement mentionnées aux 1° et 2° du présent I fixent les obligations respectives des parties signataires, notamment au regard des objectifs contractuels permettant de déterminer les conditions financières et organisationnelles de retour à l’équilibre financier.

Le contenu du contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens mentionné au 1° du présent I est défini par un arrêté conjoint des ministres chargés du budget et de la cohésion sociale.

II. – Des expérimentations relatives aux modalités de tarification des services d’aide et d’accompagnement à domicile mentionnés aux 6° et 7° du I de l’article L. 312-1 du code de l’action sociale et des familles, autorisés au titre de l’article L. 313-1 du même code, peuvent être menées à compter de la date de publication de la présente loi pour une durée n’excédant pas trois ans. Elles peuvent notamment associer les conseils généraux ayant signé un contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens dans le cadre de la mise en œuvre de la restructuration conformément au 1° du I du présent article.

Ces expérimentations peuvent inclure des modalités particulières de conventionnement entre les conseils généraux et les services visés au 2° de l’article L. 313-1-2 et, le cas échéant, les organismes de protection sociale.

Elles respectent un cahier des charges approuvé par arrêté des ministres chargés de la famille, des personnes âgées et des personnes handicapées, du budget et des collectivités territoriales.

Les conseils généraux ayant choisi de participer à l’expérimentation remettent, en fin d’expérimentation, un rapport d’évaluation aux ministres chargés de la famille, des personnes âgées et des personnes handicapées, du budget et des collectivités territoriales.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

L'amendement n° II-163, présenté par MM. Jeannerot, Cazeau, Daudigny, Labazée et Desessard, Mmes Campion, Alquier, Claireaux, Demontès, Duriez, Génisson, Ghali, Meunier, Printz et Schillinger, MM. Carvounas, Godefroy, Kerdraon, Le Menn, J.C. Leroy, Teulade, Vergoz et les membres du groupe Socialiste, Apparentés et groupe Europe Écologie Les Verts rattaché, est ainsi libellé :

Alinéa 1, dernière phrase

Supprimer cette phrase.

La parole est à M. Georges Labazée.

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Labazée

Le cumul de plusieurs mesures, notamment sur la TVA et d’autres mesures fiscales, ainsi que les difficultés de financement des conseils généraux accrues par le report de la réforme de la dépendance mettent à mal l’équilibre du secteur de l’aide à domicile. Il est donc nécessaire de prendre des mesures d’urgence.

C’est pourquoi cet amendement prévoit de concentrer l’action et les restructurations sur l’année 2012.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Bocquet

Par cet amendement, il est proposé que l’intégralité de l’enveloppe exceptionnelle destinée à la restructuration des services d’aide à domicile d’un montant de 50 millions d’euros soit entièrement consommée en 2012 et non pour moitié en 2012 et pour l’autre moitié en 2013.

La commission n’a pas examiné cet amendement, mais, à titre personnel, j’émets un avis de sagesse bienveillante.

Debut de section - Permalien
Claude Greff, secrétaire d'État

Le Fonds de restructuration est mis en œuvre par le biais de la convention de retour à l’équilibre signée par les financeurs et les services ayant accès à l’aide. Ces conventions ont une durée maximale de trois ans, monsieur le rapporteur spécial. La première année, les services d’aide à domicile recevront 50 % de l’aide prévue par la convention et les crédits supplémentaires prévus au contrat seront évidemment versés au fur et à mesure de la réalisation des objectifs.

Compte tenu du fait que l’aide est la contrepartie de la mise en œuvre d’un contrat pluriannuel, il n’est pas nécessaire de disposer de crédits de paiement à hauteur de 50 millions d’euros en 2012. Les contrats signés par les agences régionales de santé le seront sur la base de cette somme.

Voilà pourquoi le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

L'amendement n° II-164, présenté par MM. Daudigny, Jeannerot, Labazée, Cazeau et Desessard, Mmes Campion, Alquier, Claireaux, Demontès, Duriez, Génisson, Ghali, Meunier, Printz et Schillinger, MM. Carvounas, Godefroy, Kerdraon, Le Menn, J.C. Leroy, Teulade, Vergoz et les membres du groupe Socialiste, Apparentés et groupe Europe Écologie Les Verts rattaché, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 8

Supprimer cet alinéa.

II. – Alinéas 9 à 12

Remplacer ces alinéas par onze alinéas ainsi rédigés :

II. – La restructuration des services d’aide et d’accompagnement à domicile prestataires visés aux 1° et 2° de l’article L. 313-1-2 du code de l’action sociale et des familles, accompagnée, le cas échéant, par la dotation prévue au I du présent article peut notamment prendre la forme d’un contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens en application de l’article L. 313-11 du même code.

Ce contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens constitue un acte de mandatement au sens de la directive 2006/123/CE du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2006 relative aux services dans le marché intérieur. Il est conclu entre le président du conseil général du département d’implantation du service et l’organisme gestionnaire du service. Il peut être aussi signé par le directeur général de l’agence régionale de santé et le président de la caisse régionale d’assurance retraite, si ces derniers y contribuent financièrement dans le cadre notamment des missions visées aux 4° et 5° du présent II.

Ce contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens précise notamment :

1° le nombre annuel de personnes prises en charge, lequel prend en compte les facteurs sociaux et environnementaux et, pour les services d’aide et d’accompagnement à domicile relevant du 6° du I de l’article L. 312-1, la grille nationale mentionnée à l’article L. 232-2 ;

2° le plafonnement des heures effectuées en dehors des temps d’interventions directes au domicile des personnes prise en charge ;

3° les objectifs de qualification des personnels ;

4° les missions d’intérêt général, notamment en matière de prévention de la maltraitance, de prévention de la précarité énergétique, d’éducation et de prévention en matière de santé, de prévention des accidents domestiques, à assurer en lien avec les organismes compétents sur leur territoire d’intervention ;

5° la participation en tant qu’opérateur du schéma régional de prévention prévu aux articles L. 1434-5 et L. 1434-6 du code de la santé publique et par conventionnement avec les organismes de protection sociale complémentaire et les fonds d’action sociale facultative des caisses de sécurité sociale aux actions d’aide au retour et au maintien à domicile à la suite d’une hospitalisation.

Ce contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens est financé sous la forme d’un forfait globalisé déterminé au regard des objectifs fixés en application des 1° à 5° du présent II.

Les transformations de services agréés en services autorisés, les mutualisations de moyens et les extensions de capacités programmées dans le cadre du contrat pluriannuel d’objectifs ne sont pas soumises à la procédure d’appels à projets prévue à l’article L. 313-1-1 du code de l'action sociale et des familles.

III. – À l’issue d’une période de trois ans après la promulgation de la présente loi, ce mode d’organisation et de tarification des services prestataires visés au 2° de l’article L. 313-1-2 du code de l’action sociale et des familles est étendu à l’ensemble de ces services prestataires selon des modalités fixées par décret.

La parole est à M. Georges Labazée.

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Labazée

L’objet de cet amendement, qui est d’ailleurs soutenu par l’Assemblée des départements de France et les principales fédérations de l’aide à domicile, est de sécuriser juridiquement ce dispositif.

La rédaction de cet article introduit par amendement gouvernemental déposé à la dernière minute a eu pour conséquence une rédaction irréfléchie, qui est, nous semble-t-il, le fruit de la précipitation, et qui précarise juridiquement le dispositif.

Eu égard aux problèmes d’équilibre financier que connaissent bon nombre d’associations et de services prestataires, il est indispensable de mettre en œuvre ce dispositif dans des conditions juridiques sécurisées. Il pourra ensuite être corrigé et étendu. À l’issue de la période de trois ans, il faudra prévoir un dispositif de sortie, afin d’éviter de se retrouver dans un vide juridique.

Par ailleurs, le fonds d’urgence de 50 millions d’euros pour les services d’aide à domicile doit être mobilisé de manière optimale. Cela permettra d’accélérer les restructurations des services prestataires autorisés ou agréés, mais seulement sur le fondement d’une volonté partagée entre les conseils généraux et ces services.

Pour les services agréés commerciaux, il serait contraire au droit français et européen qu’une partie de ce fonds leur soit accordée, alors que les pouvoirs publics – principalement l’ARS – prendront le risque d’être accusés d’avoir favorisé une « distorsion de concurrence » et de pratiquer des « comblements abusifs de passif ».

L’ADF et les principales fédérations de l’aide à domicile ont mis au point une réforme de l’aide à domicile, qui a fait l’objet d’une convention signée par la majorité du mouvement et le réseau représentatif, à l’échelon national, de ces services.

Ce fonds doit donc permettre d’enclencher cette refondation de l’aide à domicile prestataire autorisée.

Les services agréés qui veulent aussi passer un contrat d’objectifs et de moyens doivent pouvoir le faire à condition d’accepter les mêmes contraintes, notamment pour ce qui concerne les missions d’intérêt général, et sans passer par la procédure d’appel à projet prévue à l’article L. 313-3-1 du code de l’action sociale et des familles.

Aujourd’hui, il n’y a aucune autre alternative acceptée par les acteurs du secteur aux propositions de refondation et de restructuration sur lesquelles l’ADF et les fédérations se sont accordées. Le dispositif proposé est donc parfaitement en adéquation avec les besoins du secteur et reconnu officiellement par la grande majorité des acteurs du secteur.

Ce contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens doit, compte tenu de son caractère novateur, voir son principe déterminé et encadré par la loi, mais il ne paraît pas de bonne administration de renvoyer la définition de celui-ci à un arrêté interministériel.

Il est préférable de laisser les parties – l’ARS, les conseils généraux, les services prestataires – en discuter, mais de manière encadrée.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Bocquet

L’amendement prévoit notamment le remplacement de la tarification horaire des services d’aide à domicile par un forfait global dans le cadre d’un contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens.

Lors de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale, la commission des affaires sociales avait émis un avis de sagesse très favorable sur un amendement quasiment identique. Je ne saurais mieux dire : sagesse du Sénat !

Debut de section - Permalien
Claude Greff, secrétaire d'État

J’entendais vos arguments, monsieur le sénateur. Il n’y a pas lieu de se précipiter pour retenir un modèle de tarification.

Il est vraiment nécessaire d’attendre les trois années d’expérimentation pour savoir si le meilleur modèle est celui du forfait global ou s’il faut en mettre un autre en place. Plusieurs solutions ont été envisagées, qui vont être évaluées, comparées. Et je crois très sincèrement que la meilleure solution sera retenue in fine.

Je vous rappelle que l’article 61 bis renvoie à un arrêté le contenu du contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens. Il n’est pas nécessaire de préciser de manière détaillée le contenu des contrats dans ce projet de loi de finances, qui autorise la signature des contrats et le financement au forfait global.

Je pense qu’il n’est pas nécessaire d’exclure les services agréés du Fonds de restructuration, sous peine de causer une rupture d’égalité selon le mode d’intervention.

Vous parlez des services agréés ; je vous rappelle que nombre d’entre eux sont des services agréés associatifs. Il importe de les aider parce qu’ils apportent une assistance nécessaire à nos concitoyens. Il faut vraiment sortir des combats idéologiques

Exclamations sur les travées du groupe socialiste-EELV.

Debut de section - Permalien
Claude Greff, secrétaire d'État

Telle est la raison pour laquelle le Gouvernement a émis un avis défavorable sur cet amendement.

L'amendement est adopté.

L'article 61 bis est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

L'amendement n° II-168, présenté par MM. Daudigny, Cazeau, Jeannerot, Labazée et Desessard, Mmes Campion, Alquier, Claireaux, Demontès, Duriez, Génisson, Ghali, Meunier, Printz et Schillinger, MM. Carvounas, Godefroy, Kerdraon, Le Menn, J.C. Leroy, Teulade, Vergoz et les membres du groupe Socialiste, Apparentés et groupe Europe Écologie Les Verts rattaché, est ainsi libellé :

Après l’article 61 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La première phrase du premier alinéa de l’article L. 314-6 du code de l’action sociale et des familles est complétée par les mots : «, et sous réserve de leur compatibilité avec les enveloppes limitatives de crédits mentionnées à l’article L. 313-8 et aux articles L. 314-3 à L. 314-5 ».

La parole est à M. Georges Labazée.

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Labazée

Bien que ces dispositions soient susceptibles de profiter à tous les établissements et services sociaux et médico-sociaux financés par le budget de l’État, les conseils généraux et la sécurité sociale, le poids des dépenses, sur le budget de l’État, de la masse salariale des établissements et services sociaux et médico-sociaux serait de 20 %.

Cela justifie qu’elles soient proposées dans le cadre de ce projet de loi de finances. L’article L. 314-6 du code de l’action sociale et des familles a d’ailleurs déjà été modifié à plusieurs reprises dans le cadre des précédents projets de loi de finances.

La masse salariale n’est pas connue et n’est pas maîtrisée, et c’est l’une des explications des dépassements des enveloppes limitatives de crédits, notamment celles de l’État dans des secteurs où les budgets sont tendus ; avant la suspension, on a parlé notamment des ESAT.

Cet amendement vise à accorder une primauté aux articles du code de l’action sociale et des familles relatifs aux crédits limitatifs des financeurs publics, l’État, l’assurance maladie et les conseils généraux.

Cela permettra de mettre fin « aux contrariétés » soulignées par les juridictions de la tarification entre ces derniers articles et l’article L. 314-6 sur la procédure d’agrément des conventions collectives, ce qui entraîne de coûteuses condamnations pour les financeurs.

Par ailleurs, les partenaires sociaux et les organismes gestionnaires seront responsabilisés et ne devraient donc plus proposer des évolutions non soutenables financièrement.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Bocquet

Cet amendement vise à mieux maîtriser l’évolution de la masse salariale dans les établissements médicosociaux. La commission y est favorable.

Debut de section - Permalien
Claude Greff, secrétaire d'État

Cet amendement étant satisfait, le Gouvernement est défavorable à son adoption.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 61 bis.

Mes chers collègues, nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances ».

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Défense » et du compte d’affectation spéciale « Gestion et valorisation des ressources tirées de l’utilisation du spectre hertzien ».

La parole est à M. Yves Krattinger, rapporteur spécial.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Krattinger

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des affaires étrangères, mes chers collègues, dans le présent projet de loi de finances, les crédits de la mission « Défense » s’élèvent à 38, 3 milliards d’euros en crédits de paiement et à 40, 2 milliards d’euros en autorisations d’engagement, pensions militaires comprises. Toutefois, comme l’avaient déjà craint les rapporteurs spéciaux de la commission des finances les années antérieures, nous nous éloignons progressivement des objectifs fixés par la loi de programmation militaire pour les années 2009 à 2014.

Selon le ministère de la défense lui-même, 2 milliards d’euros de crédits de paiement devraient manquer entre 2009 et 2013 par rapport à la loi de programmation militaire, sous l’effet notamment du plafonnement de l’évolution des crédits dans la loi de programmation des finances publiques.

La trajectoire des dépenses militaires n’est pas satisfaisante. Compte tenu de la dynamique inhérente aux crédits de fonctionnement, notamment de personnels, ce sont les grands équipements, hors dissuasion nucléaire, qui seront le plus durement touchés. Entre 2010 et 2013, ils devraient s’établir à un niveau inférieur de 2, 7 milliards d’euros par rapport à la loi de programmation militaire.

En cette fin d’année 2011, les dotations du budget de la défense seront pour la première fois complétées par des recettes exceptionnelles issues de la cession de fréquences hertziennes qui étaient utilisées par nos armées. Cette solution palliative ne constitue pas une politique viable. Comme l’avait déjà dit votre commission des finances lors de l’examen du projet de loi de programmation militaire, il existe un risque majeur qui est double.

Le premier est que ces fréquences ne soient pas ou pas totalement cédées, ou encore pas pour le montant espéré, créant ainsi un grave manque à gagner.

Le second est qu’elles soient effectivement cédées, mais qu’une partie de ces recettes soit, par obligation budgétaire, affectée au désendettement de l’État et non à l’atteinte des objectifs de la loi de programmation militaire.

En 2008, le Livre blanc avait fixé des objectifs à l’horizon 2020 établis sur la base d’une croissance en volume des dépenses de 1 % par an. Or la programmation révisée des finances publiques a retenu le principe d’un gel en volume des crédits de paiement de la mission « Défense », méconnaissant les coûts de la modernisation technologique des équipements.

Si l’on prend comme hypothèse une évolution des dépenses militaires sur une base zéro volume ou sur une base zéro valeur encore plus restrictive, il manquerait de 10 milliards à 30 milliards d’euros pour les dépenses cumulées de la défense jusqu’en 2020 par rapport aux objectifs du Livre blanc.

À cet égard, en première délibération, puis en deuxième délibération, l’Assemblée nationale a réduit de quelque 280 millions d’euros les crédits de la mission « Défense », dans le cadre des mesures d’économies annoncées par le Premier ministre le 24 août, puis le 7 novembre 2011. Ces sommes représentent près de 1 % des crédits de la mission, hors pensions.

En volume, aucune autre mission n’a vu ses crédits aussi fortement réduits. Non seulement les objectifs de la loi de programmation militaire ne sont pas atteints, mais l’examen des crédits à l’Assemblée nationale a conduit à aggraver encore un peu plus la situation budgétaire du ministère de la défense.

Dès aujourd’hui, le ministère de la défense avoue ne plus être en mesure d’assurer une pleine capacité de projection de nos troupes terrestres à hauteur de 30 000 combattants pendant un an, sans relève. L’indicateur de performance associé à cet objectif s’élevait à 100 % en 2009, avant de baisser à 95 % lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2010 et de diminuer encore, suivant la prévision pour 2012, à 82, 5 %.

Face à cette limitation des crédits budgétaires, les choix du Gouvernement ne sont pas satisfaisants. Selon des demandes de crédits complémentaires faisant actuellement l’objet d’un décret d’avance, les opérations extérieures ou OPEX doivent atteindre un montant record de 1, 17 milliard d’euros en 2011, dont 294 millions d’euros en crédits de paiement et 370 millions d’euros en autorisations d’engagement pour l’opération « Harmattan » en Libye. Au total, le surcoût des OPEX en 2011 aura été multiplié par deux et demi depuis les années 2000-2001.

Quelle est notre capacité réelle à mener à bien ces opérations ? Une question fait aujourd’hui débat : devons-nous adapter notre format à nos ambitions ou nos ambitions à nos capacités réelles ?

Par ailleurs, seize Rafale, et non plus treize comme prévu lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2011, doivent être commandés par l’État pour pallier le faible niveau d’exportation de cet avion. Au total, ces seize appareils représentent une dépense de plus de 1 milliard d’euros, qui s’impute sur les autres dépenses d’équipement. Pourrons-nous, devrons-nous tenir ce niveau de commande si le marché mondial nous reste fermé ?

Pourtant, certains programmes ne peuvent plus attendre si l’on veut maintenir les capacités opérationnelles de notre pays. Je pense en particulier à l’hélicoptère NH90, à la Frégate multimission ou FREEM et au sous-marin nucléaire d’attaque Barracuda. Ces programmes doivent être menés essentiellement après 2014. Tout indique que les menaces budgétaires, en l’absence probable de ressources exceptionnelles hertziennes après cette date, conduiront à de cruels réexamens.

Lors de la discussion des amendements, je reviendrai sur la nécessité pour notre pays de se doter d’un programme de production de drones, à l’instar de tous les autres grands pays industrialisés.

Dans ce contexte, j’estime que d’autres choix sont possibles. Que penser des externalisations conduites par le ministère de la défense et épinglées dans le rapport annuel 2011 de la Cour des comptes ? Certaines opérations d’externalisation présentent un rapport bénéfices/coûts négatif, d’autres touchent le cœur même de métier de notre armée.

Que penser du montage financier du regroupement sur un même site des fonctions d’état-major à Balard ? Conçu sur le modèle du Pentagone, ce projet donnera lieu à un investissement par le promoteur retenu à hauteur de 700 millions d’euros, tandis que l’État doit verser 4, 2 milliards d’euros dans le cadre d’un partenariat public-privé qui s’étalera sur vingt-sept ans. Or le regroupement des fonctions d’état-major aurait pu être moins ambitieux, s’inspirant de l’exemple britannique et non du Pentagone américain.

Je me veux, enfin, le relais des inquiétudes qui s’expriment, sur l’ensemble de notre territoire, face à de lourdes opérations de restructuration.

Le 21 juin 2011, le Gouvernement a annoncé la mise en place de cinquante et une bases de défense. Mais a-t-on mené la nécessaire concertation préalable avec nos soldats et les élus locaux ? Y a-t-il eu une étude d’impact sur les conséquences économiques, sociales et territoriales ? Comment le Gouvernement chiffre-t-il les économies attendues ? J’espère, monsieur le ministre, que le débat budgétaire sera l’occasion d’obtenir des réponses à ces questions.

Au regard de ces critiques, mais prenant en compte l’engagement de nos armées sur les théâtres d’opérations extérieures, vous comprendrez donc, mes chers collègues, pourquoi la majorité des sénateurs s’est abstenue en commission des finances sur le vote des crédits de la mission « Défense », ainsi que du compte d’affectation spéciale « Gestion et valorisation des ressources tirées de l’utilisation du spectre hertzien ».

Pour ma part, je m’abstiendrai à nouveau lors du vote en séance publique, en appelant de mes vœux une révision de certains choix effectués par l’actuelle majorité nationale, à l’occasion de la révision de la loi de programmation militaire prévue en 2012. Il convient, en effet, d’assurer une croissance des dépenses de la mission « Défense » d’au moins 1 % par an jusqu’à l’horizon 2020 fixé par le Livre blanc, pour seulement maintenir le niveau de personnels et d’équipements.

Je tiens à saluer l’effort de nos soldats à la défense de notre pays, mais il faut donner à notre sécurité nationale des moyens à la hauteur de nos ambitions. Si nous continuons à appliquer la règle de la croissance zéro volume, la part de la défense nationale dans le PIB va progressivement descendre à 1 % d’ici à 2020, c’est-à-dire le ratio des forces armées d’autodéfense japonaise, alors que le Japon a un PIB qui est plus de deux fois supérieur au nôtre !

Je souhaite, pour ma part, délivrer un message d’ambition et d’espoir, au regard de la place qu’occupe notre pays sur la scène internationale en tant que membre permanent du Conseil de sécurité, doté du droit de veto.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV.

Debut de section - PermalienPhoto de François Trucy

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission, mes chers collègues, lors de l’examen du budget de la défense en commission, j’ai beaucoup irrité la majorité par les critiques que j’ai portées contre elle et ses décisions concernant le budget. On me l’a fait connaître sans ménagements excessifs.

J’en suis vraiment désolé, mais, votre honneur, j’ai des circonstances atténuantes… En effet, monsieur Krattinger, une heure avant cette réunion, j’ignorais, faute d’information, quelle serait votre décision. J’en étais resté au fait que la majorité s’apprêtait à voter contre le budget.

Debut de section - PermalienPhoto de François Trucy

M. François Trucy, rapporteur spécial. Je règle un petit problème relationnel avec mon collègue Yves Krattinger, pas avec vous, monsieur Boulaud !

Exclamations sur les travées du groupe socialiste-EELV.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Monsieur le président, la parole est libre ici quand même !

Debut de section - PermalienPhoto de François Trucy

M. François Trucy, rapporteur spécial. Non, monsieur le président, car je ne vais pas parler dans ces conditions-là !

Exclamations. – L’orateur quitte la tribune et regagne sa place.

Debut de section - PermalienPhoto de François Trucy

Il faudra que vous vous habituiez à être la majorité et à avoir un peu plus de sérénité !

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Boulaud

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, globalement, les dotations du programme 144, « Environnement et prospective de la politique de défense », que j’ai l’honneur de vous présenter, ont été préservées.

Je pense, en particulier, aux crédits des services de renseignement, qui sont en progression, conformément aux priorités définies par le Livre blanc et la loi de programmation militaire.

Mon inquiétude porte davantage sur l’effort de recherche, notamment les études amont. Celles-ci plafonnent depuis quelques années à moins de 700 millions d’euros, loin de l’objectif de un milliard d’euros fixé par le Livre blanc pour maintenir l’ensemble de nos capacités technologiques et en acquérir de nouvelles, notamment en matière spatiale. Notre collègue Jeanny Lorgeoux y reviendra dans son intervention.

Je voudrais, pour ma part, concentrer mon propos sur le renseignement.

La direction générale de la sécurité extérieure voit ses crédits augmenter de 9 % en 2012. Elle devrait également bénéficier de 135 emplois supplémentaires, ce qui est conforme au plan de recrutement de près de 700 postes d’ici à 2014.

L’effort est d’autant plus significatif qu’il porte sur des personnels de haut niveau, en particulier des ingénieurs spécialisés dans le renseignement technique.

De plus, la réforme de l’encadrement supérieur devrait permettre de rendre les carrières plus attractives et de favoriser la mobilité avec les autres services et l’administration publique.

La création d’un corps d’administrateurs, en partie recrutés à la sortie de l’ENA, est un signe de la volonté de décloisonner et de revaloriser le renseignement.

Enfin, l’effort mis sur les moyens techniques et les infrastructures ne se relâche pas. Il devra être poursuivi, en accord avec l’augmentation des effectifs et les besoins croissants de traitement des flux de communication. L’accentuation des moyens humains et techniques de la DGSE engagée depuis trois ans est donc une réalité dont je me félicite.

Restons conscients, toutefois, qu’elle se chiffre en dizaines de millions d’euros, ce qui reste modeste par rapport à l’ensemble du budget de la défense. Il s’agit surtout, à mon sens, d’un rattrapage nécessaire qui devra être poursuivi dans la durée.

Il faut reconnaître que, par le passé, les moyens de la DGSE n’avaient pas vraiment suivi l’augmentation des besoins liés au nouveau contexte stratégique et aux nouvelles technologies de communication.

J’ajoute que la DGSE bénéficie également de moyens, comme les satellites de renseignement, qui ne relèvent pas de son budget.

Le programme MUSIS semble heureusement préservé. J’ai en revanche quelques inquiétudes sur le décalage que subit le satellite d’écoute CERES. En effet, une capacité d’écoute spatiale, en particulier des communications, me semble indispensable pour des zones d’intérêt, comme le Sahel. Peut-être pourriez-vous, monsieur le ministre, nous rassurer sur ce point ?

Toujours sur le renseignement, j’évoquerai brièvement la DPSD, la direction de la protection et de la sécurité de la défense, service moins connu que la DGSE et dont on parle peu, qui est en quelque sorte le service de sécurité interne du ministère de la défense.

À l’exact opposé de la DGSE, la DPSD doit perdre 15 % de ses effectifs en six ans, soit environ 200 agents. Cette diminution de son personnel ne devrait toutefois pas affecter la capacité du service, car elle est liée à la mise en place d’une procédure centralisée et entièrement numérisée de traitement des demandes d’habilitation, dite SOPHIA. Toutefois, ce projet semble connaître un certain retard, ce qui pourrait entraver la nécessaire modernisation du service.

Enfin, je souhaiterais connaître votre sentiment, monsieur le ministre, sur les conséquences de la récente décision du Conseil constitutionnel sur les lieux classifiés secret défense.

Le 10 novembre dernier, le Conseil constitutionnel a jugé contraire à la Constitution une partie des dispositions introduites par la loi de programmation militaire relatives aux perquisitions dans les lieux classifiés secret défense, tout en reportant les effets de sa décision au 1er décembre. À quelques jours de cette échéance, le Gouvernement a-t-il tiré toutes les conséquences de cette décision ?

La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a émis un avis favorable sur les crédits de la mission.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

La parole est à M. André Trillard, rapporteur pour avis.

Debut de section - PermalienPhoto de André Trillard

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, mon intervention portera sur les deux actions à vocation internationale du programme 144 : le soutien aux exportations d’armements et le réseau diplomatique de défense.

Sur le premier point, je rappelle que notre pays est aujourd’hui le quatrième exportateur mondial d’armement, derrière les États-Unis, le Royaume-Uni et la Russie, et devant Israël, les cinq pays se partageant 90 % du marché mondial.

La part de marché de la France est de l’ordre de 7 %, contre près du double pour le Royaume-Uni et plus de 50 % pour les États-Unis.

Par zones géographiques, le Proche-Orient et le Moyen-Orient représentent 27 % des commandes, devant l’Amérique du Sud, qui totalise 19 % des commandes, et l’Asie, qui représente 18 % de celles-ci.

Nos principaux clients sont le Brésil, l’Arabie Saoudite et l’Inde. L’Europe, en revanche, ne compte que pour 13 % de nos exportations, ce qui illustre les faiblesses du marché européen de défense.

Les contrats les plus importants concernent la vente de sous-marins Scorpène au Brésil, de bâtiments de projection et de commandement à la Russie, d’hélicoptères au Mexique et à la Malaisie et d’un système d’observation par satellite au Kazakhstan.

En revanche, la vente du Rafale se fait toujours attendre et vous pourriez peut-être, monsieur le ministre, faire le point sur ce dossier sensible.

Plus généralement, alors qu’il faut s’attendre à une concurrence accrue sur le marché mondial de l’armement, avec la forte diminution des budgets de la défense en Europe et aux États-Unis, en raison de la crise économique et financière, et l’arrivée de nouveaux concurrents issus des pays émergents, quelles sont les mesures que compte prendre le Gouvernement pour maintenir la place de notre pays ?

Le deuxième sujet que je souhaite évoquer concerne notre réseau d’attachés de défense. Depuis 2008, il a été profondément réorganisé. Cette rationalisation a conduit, sur trois ans, à une réduction des effectifs, qui sont passés de 422 à 286 postes permanents à l’étranger implantés dans 86 pays, soit une baisse de plus de 30 % pour un réseau de taille inchangée.

Cette diminution des effectifs a été rendue possible par la mutualisation des services de gestion au sein des ambassades. Ainsi, les fonctions de secrétariat, de comptabilité ou encore de chauffeur ont été mutualisées avec les autres services des postes diplomatiques.

En matière de gestion des personnels, diverses mesures ont été prises. Par exemple, des postes d’attachés de défense ne sont plus réservés comme auparavant aux officiers des armées, mais peuvent être ouverts à des ingénieurs de l’armement, en fonction de la situation locale.

Enfin, des procédures nouvelles ont été mises en place pour assurer la sélection des attachés de défense, sur des critères liés à leurs nouvelles fonctions, et veiller à une meilleure adéquation entre les profils des candidats et les postes à pourvoir.

En définitive, je crois qu’il faut saluer la réforme de notre diplomatie de défense, qui constitue une véritable réussite.

La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a émis un avis favorable sur les crédits de la mission « Défense », que je vous invite, mes chers collègues, à adopter. §

Debut de section - PermalienPhoto de Xavier Pintat

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, au sein du programme 146 « Équipement des forces », je suis plus particulièrement chargé des deux actions : Dissuasion et Commandement et maîtrise de l’information.

Pour ce qui concerne la dissuasion, les dotations qui lui sont consacrées en 2011 sont de 3, 1 milliards d’euros en autorisations d’engagement et de 2, 7 milliards d’euros en crédits de paiement. Une telle évolution des crédits traduit l’état d’avancement normal des programmes et les variations des besoins financiers d’une année sur l’autre ; elle n’appelle pas de commentaires particuliers.

C’est en 2012 notamment qu’est prévue la commande des deux dernières adaptations des SNLE Le Triomphant et Le Téméraire au missile balistique M 51.

Concernant la seconde action Commandement et maîtrise de l’information, je ferai trois observations.

Tout d’abord, comme les années précédentes, il est prévu de financer une partie des programmes concernés, à hauteur de 750 millions d’euros, par des ressources extrabudgétaires du compte d’affectation spéciale « Fréquences hertziennes ». Certes, le calendrier de vente n’a pas été respecté, mais cela a été sans conséquence sur le financement des programmes, puisque le budget de l’État a compensé par des crédits budgétaires le décalage temporel de ces recettes. Toutefois, il faut bien le dire, ces dernières ne serviront qu’une fois. Il faudra, pour les prochains exercices, soit augmenter les crédits budgétaires, soit accepter une diminution des dépenses.

Ma seconde observation porte sur les programmes spatiaux, qui constituent l’une des priorités du Livre blanc. Les crédits affectés à l’espace connaissent de grandes fluctuations, elles-mêmes liées en grande partie au lancement des programmes. Ainsi, l’écart constaté entre 2010 et 2011 résulte principalement de l’affectation en 2011 des autorisations d’engagement permettant de compléter les tranches de réalisation des programmes MUSIS et SYRACUSE III.

Il n’en reste pas moins que, sur une longue période, on constate une diminution constante des crédits de paiement liés à l’espace, ce qui pourrait être préoccupant.

Les crédits destinés aux satellites d’observation MUSIS ont été majorés, afin de pouvoir lancer le programme sur une base nationale, sans attendre le cofinancement par des partenaires européens. La commande de deux satellites doit intervenir d’ici à la fin de l’année, avec une mise en service prévue en 2016 pour le premier et 2017 pour le second. La continuité devrait ainsi être garantie avec Helios II. Plusieurs pays européens devraient à terme rejoindre ce programme et apporter une contribution financière.

En revanche, le lancement du programme de satellite de renseignement électromagnétique CERES est de nouveau décalé. La mise en orbite, initialement envisagée en 2016, a été reportée en 2020. L’écoute spatiale présente un double intérêt : détecter les signaux radars adverses en cas d’opération et intercepter les communications. Nous avons déjà effectué avec succès, sur ce plan, des réalisations expérimentales, avec des démonstrateurs. C’est le cas des quatre microsatellites Essaim, dédiés à l’interception des communications, qui ont été lancés fin 2004, mais dont l’exploitation se termine cette année. Fin 2011 sera lancé le démonstrateur Elisa, destiné à la détection des signaux radar. Le report du programme CERES va incontestablement créer un « trou » capacitaire entre ces démonstrateurs, très utiles, qui ont fourni du renseignement intéressant, et une future capacité opérationnelle pérenne.

Enfin, toujours dans le domaine spatial, la réalisation d’un satellite d’alerte avancée pour la détection des tirs de missiles balistiques a été reportée en 2020, tandis qu’a été décidé, dans le cadre du programme 144, de lancer les études amont permettant de construire un démonstrateur pour un radar de surveillance très longue portée. Le radar lui-même pourrait être lancé en 2015 pour une mise en service en 2018. Je rappelle que l’utilité optimale de ce radar nécessite qu’il se trouve à proximité de la menace potentielle. En l’occurrence, il serait judicieux de le placer dans un pays du Golfe ou en Turquie. À défaut d’utilisation dans une configuration antibalistique, mes collègues Daniel Reiner, Jacques Gautier et moi-même nous interrogeons sur son utilité.

J’évoquerai enfin les drones. C’est un domaine que le Sénat a suivi de près ces dernières années. Vous trouverez cette année dans notre rapport écrit tous les tenants et aboutissants qui ont conduit la commission à suggérer l’adoption d’un amendement. Je n’y reviens pas, mais je confirme que, en tant que rapporteur de la commission, mais aussi à titre personnel, je le soutiens.

En conclusion, monsieur le ministre, je porte une appréciation positive sur les actions qui relèvent de mon rapport : la dissuasion, avec un déroulement très satisfaisant des programmes et l’engagement d’une coopération franco-britannique, qui constitue un aspect très positif ; les programmes liés à la fonction connaissance et anticipation, en particulier les programmes spatiaux, qui, en dépit de quelques glissements, sont globalement maintenus dans la nouvelle programmation financière.

Sous le bénéfice de ces observations, il me revient de vous indiquer, en tant que rapporteur pour avis, que la majorité de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées du Sénat a émis un avis favorable sur ces crédits.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP. – M. Jean-Marie Bockel applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Reiner

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en vous conseillant naturellement de prendre connaissance du rapport écrit où vous trouverez tous les détails sur les programmes d’équipement en cours, je me contenterai ici de quelques considérations, d’une part, sur les caractéristiques financières du programme 146 « Équipement des forces », d’autre part, sur le contenu des programmes d’équipement.

S’agissant des caractéristiques financières du programme 146, ma première observation porte sur ses crédits, qui s’élèveront en 2012 à 11, 13 milliards d’euros en crédits de paiement, ce qui représente une augmentation de 3, 2 %, et à 11, 97 milliards d’euros en autorisations d’engagement, soit une diminution de près de 10 %.

Cette augmentation dans un budget sensiblement identique d’une année sur l’autre traduit une priorité marquée en faveur des équipements.

Au sein des crédits d’équipement, la production supplémentaire de Rafale pour pallier l’absence d’exportations de cet avion conduit à reporter de nouveau les programmes déjà reportés en 2009. C’est le cas en particulier, comme vient de le rappeler mon collègue Xavier Pintat, de la rénovation des Mirage 2000D, du programme d’avions ravitailleurs multirôle MRTT et du programme de satellite d’écoute CERES.

S’agissant du report du programme de rénovation des Mirage 2000, le Livre blanc prévoyait, je le rappelle, que les forces aériennes reposeraient sur deux piliers : le Rafale et le Mirage 2000D. Ce dernier est un excellent avion, qui pourrait, sous réserve de la rénovation de ses systèmes d’armes, être opérationnel jusqu’en 2024. Le report de sa rénovation, si elle était de nouveau confirmée l’an prochain, pourrait conduire à une obsolescence de ces appareils dès 2014 et réduire dans des proportions considérables le format de l’aviation de combat française. Or, nous le savons, la qualité est indispensable. Mais la quantité compte également si l’on veut pouvoir se défendre.

Le deuxième report concerne le programme MRTT, déjà reporté, comme je l’ai dit, l’an dernier. Cet avion, qui sera vraisemblablement l’A330 est destiné à pourvoir au remplacement de la flotte de ravitailleurs en vol, actuellement composée de Boeing KC-135. Une telle situation nous contraindra à trouver des solutions palliatives, toute rupture capacitaire étant de ce point de vue inacceptable, notamment pour les forces aériennes stratégiques.

Nous avons bien lu la déclaration du chef d’état-major de l’armée de l’air selon laquelle une quarantaine de millions d’euros seront consacrés en 2012 à la levée des risques de ce programme, ce qui devrait permettre une commande ferme en 2013 pour des premières livraisons en 2017 ; monsieur le ministre, vous nous le confirmerez. Mais, d’ici là, il faudra tenir ! Une fois de plus, nous payons la priorité accordée au Rafale…

Au total, le report de ces programmes menace la cohérence d’ensemble de nos forces armées aériennes.

Ma deuxième série de considérations porte sur la mise en œuvre des programmes.

Au titre des motifs de satisfaction, je veux citer, parmi d’autres, la remise sur pied du programme successeur au missile Milan : le programme missile moyenne portée, dit MPP, sur lequel le Sénat, depuis plusieurs années, a gardé un œil vigilant. Il fournira à l’armée de terre un missile performant et moderne susceptible d’être adapté sur des porteurs terrestres comme aériens – hélicoptères ou drones.

Vos rapporteurs, qui ont suivi de façon constante le développement de ce programme, seront naturellement satisfaits d’assister à son lancement en 2012.

Pour ce qui est des sujets d’inquiétude, je limiterai cette année mon propos aux drones MALE. Ce sujet complexe appelle un débat, qui ne doit pas être médiocre, sur les raisons ayant conduit à la situation dans laquelle nous nous trouvons.

Sur cette question, nous sommes entrés dans des considérations aussi fouillées qu’il était possible, compte tenu du temps dont nous disposions ; vous les trouverez dans notre rapport. Vous savez sans doute que nous ne partageons pas la position du Gouvernement. J’aurai tout à l’heure l’occasion d’en reparler, d’abord en tant qu’orateur du groupe socialiste, puis en tant que rapporteur pour avis chargé de défendre l’amendement n° II-104.

La semaine dernière, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées du Sénat a adopté cet amendement à une très large majorité : par 33 voix contre 3. Il a pour objet de vous proposer des solutions un petit peu différentes de celles du Gouvernement…

Compte tenu de ces observations et sous réserve de l’adoption de l’amendement n° II-104, je vous proposerai donc, mes chers collègues, de vous abstenir sur les crédits du programme 146 « Équipement des forces » en particulier et de la mission « Défense » en général.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV, ainsi que sur certaines travées du RDSE. – M. Jacques Gautier applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilbert Roger

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, notre collègue André Dulait vous exposera dans quelques instants la situation des personnels. Pour ma part, je vais vous présenter les crédits de fonctionnement du titre 3 du programme 178 « Préparation et emploi des forces ». Ceux-ci s’élèvent à 6, 087 milliards d’euros en crédits de paiement, ce qui correspond à une hausse de 5, 4 % par rapport à 2011.

Je rappelle que 20 millions d’euros ont été supprimés, lors de l’examen du projet de loi de finances à l’Assemblée nationale, sur le maintien en condition opérationnelle, le MCO. Selon M. le ministre de la défense, cette coupe sera compensée par « la perspective d’une nouvelle plus-value sur la cession des fréquences Félin de 800 MHz en 2012, voire de cessions de matériels ».

Or ces recettes exceptionnelles sont attendues en vain depuis des années ! Nous pouvons donc légitimement nous interroger sur le sort qui leur sera réservé en 2012…

J’aborde à présent les actions du titre 3, en vous rappelant que, au total, soixante bases de défense sont déployées depuis le 1er janvier 2011. La base de défense constitue, selon le ministère de la défense, « le principal levier de la mutualisation de l’administration générale et de soutien commun sur l’ensemble du territoire ».

Le déploiement de ces bases suppose une harmonisation des procédures, actuellement différentes selon les armées, en matière de systèmes d’information, de gestion du personnel et de paiement des soldes. Simple dans son principe, cette harmonisation est complexe à mettre en œuvre ; elle demande du temps pour être évaluée avec pertinence. Et je ne parle pas du déploiement du logiciel Chorus.

Je crains donc que le processus de mise en place des bases de défense n’ait été trop hâtif ; d’ailleurs, certains chefs d’état-major ne cachent pas leurs réserves à son sujet.

Je rappelle que, dans son référé du 7 mars 2011, la Cour des comptes a considéré que « la valeur ajoutée de la nouvelle organisation en termes de recentrage sur l’opérationnel et de gains de mutualisation n’a pas été démontrée. »

Il serait donc souhaitable, monsieur le ministre, que vos services établissent rapidement un bilan financier de la mise en place des bases de défense, ainsi qu’un chiffrage fiable des économies réalisées.

J’en viens aux difficultés financières et d’organisation soulevées par le maintien en condition opérationnelle, le MCO, de matériels de plus en plus vecteurs de technologies.

Je rappelle qu’un matériel en bonne condition opérationnelle constitue un élément déterminant de la capacité d’action des armées. La maintenance et son coût ne sont devenus des sujets de préoccupation qu’à partir des années 1990, du fait de la complexité croissante des matériels utilisés.

Ces réorganisations ont au moins permis une stabilisation des coûts. La globalisation, dans les contrats passés avec les industriels, des commandes d’équipements et des opérations de maintenance requiert une plus forte implication des industriels dans l’organisation de la maintenance ; elle constitue la piste la plus sérieuse pour atténuer le coût des MCO.

Je veux dire quelques mots, pour finir, de l’entraînement des forces armées.

Les temps d’entraînement réalisés, armée par armée, ont été meilleurs en 2010 qu’en 2009.

Mais le fort engagement opérationnel en Afghanistan et en Libye a altéré ces bons résultats, sauf pour l’armée de terre. La marine et, surtout, l’armée de l’air, très engagées sur le théâtre libyen, ont été pénalisées en matière d’entraînement : les plus jeunes pilotes de chasse n’ont ainsi bénéficié que de 120 heures de vol, alors que la loi relative à la programmation militaire pour les années 2009-2014 fixe un objectif de 180 heures.

En définitive, on peut se demander si la création de ces bases permettra vraiment l’harmonisation, aussi souhaitable que complexe à obtenir, des procédures entre les armées et quelles seront les économies effectivement réalisées.

Pour limiter les coûts du MCO, il faut poursuivre la passation de contrats globaux incluant fabrication et maintenance.

J’ajoute enfin que les armées sont touchées par l’application de la révision générale des politiques publiques, la trop mauvaise RGPP, qui entraîne déflation des effectifs et réductions budgétaires. Dans ces conditions, un niveau d’entraînement suffisant sera-t-il assuré à nos jeunes recrues ?

Pour conclure, je rappelle que la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées s’est déclarée favorable à l’adoption des crédits de la mission « Défense », dans la mesure où, il faut en tenir compte, une large majorité de ses membres se sont abstenus. Pour ma part, je m’abstiendrai également.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV.

Debut de section - PermalienPhoto de André Dulait

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je souhaite évoquer, pour ma part, les chances et les risques qui s’attachent à la réforme de notre outil de défense en matière de ressources humaines.

Le budget de la mission « Défense » pour 2012 s’inscrit dans le cadre fixé par la LPM. Comme vous le savez, celle-ci prévoit la suppression de 54 000 postes. Mais plus encore que la déflation des effectifs, c’est la réorganisation des méthodes qui constitue l’enjeu majeur de la réforme.

La mutualisation et la rationalisation du soutien commun, les restructurations territoriales, le déploiement des bases de défense et la poursuite des expérimentations d’externalisation – toutes réformes qui ont été menées de front – constituent autant de défis pour nos armées.

Les opportunités offertes par ces réformes sont réelles : une organisation rationalisée et mutualisée est une condition de la fiabilité de notre outil opérationnel.

Mais l’effort de transformation demandé à notre armée est considérable, surtout dans une année où elle a engagé en opérations, de manière permanente, plus de 12 000 hommes sur neuf théâtres d’opération.

Les économies de personnel doivent provenir des réorganisations et des mutualisations : tel est l’enjeu de la réforme. Réduire les effectifs sans réformer l’organisation en profondeur fragiliserait l’outil militaire dans sa globalité.

En 2011, le pilotage de la déflation a été satisfaisant. Pour l’instant, le seul volet de la manœuvre qui ne fonctionne pas est le reclassement des militaires vers la fonction publique. Ce n’est pas une surprise : les administrations, qui réduisent leurs effectifs, n’accueillent pas nos militaires à bras ouverts.

Comme le chef d’état-major des armées l’a souligné au cours de son audition par notre commission, la fin des déflations programmées sera sans doute plus difficile à réaliser. En effet, les réductions d’effectif doivent résulter non plus de la dissolution massive de structures, mais de rationalisations dans de multiples métiers : c’est un véritable défi.

Je veux parler maintenant des crédits du programme 178 « Préparation et emploi des forces ».

L’une des difficultés de la manœuvre réside manifestement dans la concordance entre le cadrage financier retenu pour l’évolution de la masse salariale et les objectifs en matière d’effectifs.

Plusieurs évolutions ont conduit, alors même que les effectifs ont diminué, à une augmentation de la masse salariale par rapport aux objectifs fixés par la LPM. Des engagements avaient été pris, en particulier, d’améliorer la situation des militaires.

Certaines dépenses supplémentaires ont été souhaitées : c’est le cas de celles liées à la réintégration de la France dans le commandement intégré de l’OTAN, qui s’est traduite par un surcoût de près de 26 millions d’euros en 2011, au doublement des effectifs de la base d’Abou Dhabi ou au maintien de certains effectifs en Côte-d’Ivoire.

D’autres dépenses, comme l’augmentation du coût de l’indemnisation chômage des militaires, ont été subies. Cette hausse a représenté plus de 100 millions d’euros depuis 2009. Le coût de l’indemnisation chômage atteint aujourd’hui des records, démontrant l’impérieuse nécessité de réussir la reconversion.

L’autre difficulté consiste à faire coïncider, dans le temps et selon les types d’emplois, les départs naturels avec les besoins de réductions de postes.

De ce point de vue, il faut prendre en compte l’incidence de la réforme des retraites sur la déflation des effectifs. Le prolongement des carrières, en effet, va à l’encontre de la réduction du format. Les premiers effets de la réforme des retraites se feront sentir en 2012, réduisant le nombre des départs spontanés d’environ 600 chaque année.

Quelles mesures envisagez-vous de prendre, monsieur le ministre, pour que cette réforme ne se traduise pas par une déformation de la pyramide des âges ?

Pour conclure, je veux souligner l’ampleur des réformes en cours : peu d’organisations publiques ou privées de cette taille se sont lancées dans une modification aussi profonde de leur mode de fonctionnement, de leurs implantations géographiques et de leur effectif.

Je tiens à saluer M. le ministre, à qui j’adresse nos vœux de complète réussite, mais également le personnel des armées, qui conduit cette réforme.

Sous le bénéfice de ces observations, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées recommande l’adoption des crédits de la mission « Défense ».

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP. – M. Jean-Marie Bockel applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

La parole est à Mme Michelle Demessine, rapporteure pour avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Michelle Demessine

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je ne sais pas si le 9 novembre 2011 fera date dans l’histoire sociale ou parlementaire, mais il me semble que c’est la première fois, à une petite exception près, que la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées du Sénat a entendu les représentants des syndicats des personnels civils de la défense à l’occasion de l’examen d’un projet de loi de finances.

Il est très important que cette expérience soit renouvelée plus souvent car les syndicats nous permettent d’entrevoir l’envers du décor de la réforme de la défense ; leur approche réaliste nous permet de lire avec un œil plus critique les six cent huit pages du « bleu » budgétaire consacré à la mission « Défense ».

Je vais vous exposer, monsieur le ministre, mes chers collègues, les quatre principales raisons, tirées de l’analyse du programme 212 « Soutien de la politique de défense », pour lesquelles j’ai exprimé devant la commission des affaires étrangères l’opposition de mon groupe à l’adoption des crédits de la mission « Défense ».

Sur le plan financier, ma principale inquiétude porte sur le projet Balard. Je me demande si la fascination excessive pour les grands projets n’a pas conduit à signer, avec ce contrat, une sorte de bombe à retardement financière…

D’abord, ce contrat engage l’État et les générations futures pour une durée de trente ans, au moment où les évolutions financières et politiques n’ont jamais été aussi rapides.

Ensuite, a-t-on tiré toutes les leçons de l’expérience du partenariat public-privé conclu pour la construction de l’hôpital sud-francilien ? Cette démarche, initialement présentée comme exemplaire, s’est révélée en pratique catastrophique, les travaux conduisant à des malfaçons et à des surcoûts inacceptables.

Enfin, on prétend que la redevance de 130 millions d’euros par an – hors taxes ! – sera financée par des économies de fonctionnement. Certains doutent de la pertinence des calculs qui conduisent à une telle affirmation. J’ajoute que, si l’hypothèse présentée par le Gouvernement se vérifie – souhaitons-le ! –, on pourra alors s’interroger rétrospectivement sur l’efficacité de la gestion des crédits de la défense. Je signale que la Cour des comptes vient de tenir un raisonnement analogue : elle conclut que la réduction du nombre d’applications informatiques est un révélateur des redondances auxquelles ont conduit la gestion et les cloisonnements antérieurs.

Plus généralement, je dénonce le décalage important entre l’affichage budgétaire et la réalité humaine et territoriale.

Les difficultés des collectivités territoriales confrontées aux restructurations sont souvent bien analysées et relayées par le Sénat. Je saisis l’occasion pour citer le cas du territoire du Cambrésis, qui doit aujourd’hui faire face aux bouleversements liés à la fermeture de la base aérienne de Cambrai-Épinoy. Dans cette partie de la France, les friches militaires succèdent aux friches industrielles. La seule perspective consiste en une hypothétique reconversion aidée par un État qui procède à des coupes budgétaires de plus en plus rigoureuses.

Je souhaiterais que le Sénat défende la cause des personnels aussi bien que celle des territoires. Les restructurations en effet portent en elles l’éclatement des communautés de travail au sein de la défense. Cet éclatement est amplifié par le transfert au secteur privé d’un certain nombre de fonctions de soutien. Certes, le Gouvernement semble aujourd’hui hésiter à intensifier sa politique d’externalisation, dont nous demandons solennellement un bilan précis. Ce dernier montrera vraisemblablement que les économies de fonctionnement ne sont pas systématiquement au rendez-vous. La notion de réorganisation semble véhiculer, pour le Gouvernement, une image de progrès, alors qu’elle est un facteur d’épuisement et de stress pour les agents. Par-dessus tout, la suppression des 54 000 emplois dans la défense s’accompagne d’une destruction de nos savoir-faire qui met en péril à la fois notre communauté de travail et notre indépendance nationale.

En ce qui me concerne, je suis très sensible au sort réservé aux personnels civils. Le Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale a posé un principe très clair : « Les personnels militaires devront se concentrer sur les missions opérationnelles, les personnels civils sur les tâches administratives et de soutien. » Dans ces conditions, pourquoi, monsieur le ministre, ne pas offrir de meilleures perspectives de carrière aux personnels civils ? Comme nous l’ont rappelé les syndicats que nous avons auditionnés, on trouve des militaires à des postes ne présentant aucun caractère opérationnel tandis que les postes d’encadrement sont rarement occupés par des personnels civils, qui en ont pourtant la capacité.

Je me demande enfin si la modernisation de notre défense est bien en phase avec celle de la société française. En effet, il faut constater que la féminisation de la défense n’est pas encore très développée. Ce n’est pas seulement une question de genre. Faut-il rappeler qu’un certain nombre d’études spécialisées montrent que la participation accrue des femmes aux fonctions de management d’une structure renforce son efficacité et sa rentabilité, tout en y réduisant les conflits ? C’est pourquoi, pour une meilleure visibilité, il serait nécessaire qu’au milieu de la grande profusion de chiffres et de données qui accompagnent la présentation du budget de la défense figurent aussi des indicateurs chiffrés sur la place des femmes dans la défense de notre pays.

Telles étaient, mes chers collègues, mes principales remarques concernant le programme 212.

À titre personnel, je ne voterai donc pas les crédits de la mission défense, mais je rappelle que la commission des affaires étrangères a suggéré au Sénat de les adopter.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

La parole est à M. Jean-Marie Bockel, rapporteur pour avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Bockel

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, j’interviendrai en complément de ma collègue Michelle Demessine sur la mission « Défense ».

Convaincu, en ce qui me concerne, de la nécessité des mutations en cours, je m’attacherai, au nom de la commission, à souligner les efforts destinés à limiter les inconvénients de ces transformations en analysant certains aspects du programme 212 « Soutien de la politique de défense ».

Nous avons entendu en commission, je tiens à le souligner, les propos rassurants du secrétaire général pour l’administration. Il a d’abord rappelé que l’État perfectionnerait sa démarche pragmatique en matière de cessions d’emprises aux collectivités territoriales, en tenant compte des difficultés rencontrées dans le passé. Il s’est également engagé sur la dimension humaine des restructurations.

Le programme 212 est le reflet budgétaire fidèle des mutations en cours. Ses deux piliers sont les crédits liés à la politique immobilière, qui représentent 47 % du total, et aux restructurations, qui totalisent 16 % des crédits du programme. Techniquement, il connaît un déséquilibre structurel entre les autorisations d’engagements et les crédits de paiement. Il ne faut d’ailleurs pas surinterpréter les brusques variations d’une année sur l’autre des autorisations de programmes, qui sont inhérentes à une politique immobilière active.

La commission m’a spécialement chargé d’interroger le Gouvernement sur le « rabot » adopté par l’Assemblée nationale, qui minore de plus de 1 % les crédits de ce programme. Nous nous demandons, monsieur le ministre, si le Gouvernement est en mesure de nous confirmer que le premier et le second « rabots » ne porteront pas atteinte au plan de financement économique des restructurations, dont les 213 millions d’euros financés par le Fonds pour les restructurations de la défense, le FRED.

J’en viens au volet spécifique des dépenses immobilières ou d’infrastructure et de leur financement. Au cours des années précédentes, la fragilité des prévisions de recettes issues des cessions immobilières a été soulignée par notre commission. Aujourd’hui, le bilan des cessions et les perspectives de recettes me paraissent comporter quelques éléments positifs d’évolution.

S’agissant notamment des ventes d’emprises régionales, je crois que nous sommes sur le bon chemin pour trouver le meilleur point d’équilibre entre l’intérêt de l’État et celui des collectivités territoriales. Je rappelle que la moitié des emprises est éligible au dispositif de cession à l’euro symbolique. C’est un progrès considérable par rapport à la situation qui prévalait dans le passé. Comme nombre de responsables de collectivités, je puis en témoigner. Responsable de territoires en difficulté, j’ai en effet souvent été confronté à des négociations bien compliquées en la matière. Cela constitue donc un vrai progrès, que l’on peut aussi porter au crédit de la RGPP. Le bilan détaillé de l’application de ce dispositif démontre que c’est un succès.

La première priorité, à la fois pour l’État et les collectivités territoriales, est d’éviter de laisser s’installer des zones de friches militaires. Je veux sur ce point aussi apporter mon témoignage. Il s’agit de problèmes auxquels nous avons été confrontés par le passé, notamment du fait de la dégradation très rapide des immeubles. Ainsi, les cessions rapides, réalisées dans les conditions que je viens de mentionner et comportant, pour chacune d’entre elles, la clause de retour à meilleure fortune, permettent à l’État de réaliser des économies en coûts d’entretien – des crédits sont d’ailleurs prévus sur ce poste, comme cela nous a été rappelé lors des auditions – et aux collectivités territoriales de s’engager dans la réalisation de projets susceptibles de générer de nouvelles recettes.

À Paris, le regroupement des administrations centrales à Balard doit permettre de libérer des immeubles de grande valeur. En 2013, le montant prévisionnel des cessions est évalué à 672 millions d’euros. On a beaucoup épilogué sur ce processus de cession : je mentionne simplement qu’il pourrait aboutir à vendre de l’immobilier parisien dans une conjoncture favorable. On ne s’en plaindra donc pas.

Je voudrais faire une autre remarque sur le projet Balard, qui a été critiqué par certains. Il s’agit d’une démarche à la fois importante, inédite et certainement fructueuse en termes de qualité de travail et d’efficacité, qui consiste en l’installation de 9 300 personnes en 2014 sur un site nouveau dont la construction, l’acquisition et le fonctionnement, dans toutes ses composantes, seront couverts par une redevance de 130 millions d’euros par an jusqu’en 2041. Je précise surtout que cette redevance sera versée à un opérateur qui a remporté le marché public sans que personne conteste la régularité de la procédure, ce qui constitue, à tout le moins, un indice du sérieux de cette opération. Cela méritait d’être dit.

Un mot, enfin, sur le sort réservé à l’hôtel de la Marine. La commission et le rapporteur pour avis que je suis saluent les perspectives d’affectation de ce monument exceptionnel – je pense notamment au rapport de la commission de l’hôtel de la Marine, présidée par Valéry Giscard d’Estaing, qui a fait un travail tout à fait intéressant et approfondi – qui semblent bénéfiques culturellement, touristiquement et symboliquement, puisque le lien avec la marine est soigneusement préservé.

Je voudrais finir mon intervention en posant quelques questions au Gouvernement. Elles portent sur les modalités juridiques du dispositif de préfiguration, sur la future gestion immobilière de l’hôtel de la Marine, et sur le financement des travaux puis du fonctionnement courant du nouvel ensemble. Il s’agit là de questions très concrètes dont les réponses seront déterminantes pour la réussite de ce projet. Monsieur le ministre, le diable se situe dans les détails, mais je suis sûr que vous nous apporterez les réponses susceptibles de nous rassurer !

Pour toutes ces raisons, je recommande, avec la commission, de voter ces crédits.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

La parole est à M. le président de la commission des affaires étrangères.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

M. Jean-Louis Carrère, président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. La majorité se doit d’être exemplaire. C’est pourquoi monsieur le président, je souhaiterais que vous demandiez à M. François Trucy, rapporteur spécial de la commission des finances, de présenter son rapport. Cela nous ferait à tous extrêmement plaisir.

Applaudissements

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

La parole est donc à M. François Trucy, rapporteur spécial.

Debut de section - PermalienPhoto de François Trucy

Je suis désolé d’avoir perturbé ainsi la séance, et je suis très sensible à la démarche du président de la commission des affaires étrangères, Jean-Louis Carrère, à qui il m’était difficile d’opposer un refus !

Je reprends donc mon exposé. Comme je le disais, à la conclusion près du rapporteur spécial de la commission des finances, que j’appelle le « rapporteur principal », M. Krattinger, qui recommandait de s’abstenir, j’aurais cosigné assez facilement l’ensemble du rapport. Je m’explique.

Je relève avec satisfaction, comme vous tous, la somme considérable de 38, 3 milliards d’euros de crédits de paiement figurant dans le présent budget, en hausse de 2, 3 % par rapport à 2011. Je relève en outre que les chapitres majeurs de cette mission sont pourvus et que les crédits affectés sont conformes, dans la plupart des cas, aux dispositions de la loi de programmation militaire pour la période 2009-2014 ; dans la plupart des cas seulement car, au final, cette année encore, la LPM ne sera pas respectée dans son intégralité. L’écart entre elle et la programmation budgétaire triennale pour 2011-2013 se monte à 1, 35 milliard d’euros selon mes recherches, même si les chiffres peuvent varier d’une source à l’autre. La faute en revient à cette « bulle programmatique » qu’il semble difficile de résorber totalement.

Ce décalage entre la programmation et la réalisation n’étonnera néanmoins que ceux qui prenaient pour argent comptant les données de la LPM, données qui, pour satisfaire les options du Livre blanc, se nourrissaient de bien trop d’espérances. Ainsi étions-nous sceptiques, en particulier lors du précédent vote, quant aux recettes provenant des cessions immobilières et des ventes de fréquences hertziennes, qui semblent maintenant arriver à échéance. Nous craignions que les unes et les autres nous réservent d’importantes déceptions, tant sur le calendrier des réalisations que sur le plan de leur rendement. La suite nous a partiellement donné raison.

J’éprouve personnellement le même scepticisme à l’égard de la réalisation du projet Balard, le « Pentagone à la française ». Compte tenu de son coût et des difficultés multiples qu’il rencontre, compte tenu, en outre, de la quasi-impossibilité de réaliser dans le même temps les cessions immobilières nécessaires au financement du projet et dont certaines – je pense à l’hôtel de la Marine dont M. Bockel vient de parler – sont déjà déprogrammées, je me permets de penser que ce projet était déraisonnable.

S’il y avait, à l’évidence, un intérêt de confort à regrouper en un seul lieu tous les services de la défense, était-ce cependant le moment d’y procéder ?

Je note que le génial promoteur de ce projet, quand il était ministre de la défense, est maintenant le premier à critiquer et attaquer ceux de ses amis à qui il a laissé le soin de payer l’addition…

Monsieur le ministre, les sénatrices et sénateurs qui soutiennent le Gouvernement dont vous faites partie sont inquiets de la situation actuelle du budget de la défense et des perspectives d’avenir. D’ores et déjà, ce budget est amené, alors qu’il n’est même pas encore voté, à contribuer aux efforts d’économies que réclame la conjoncture économique et financière de notre pays. La RGPP, depuis quelque temps, contredit la LPM. Un décret d’avances a déjà été octroyé et des gels de crédits assez conséquents ont été annoncés.

Dans ces conditions, quel sort sera réservé aux grands programmes de matériel ? Que deviendront les programmes du nouveau NH90, du Rafale, des frégates FREMM ou de l’A400M ?

Au fond, plus que des critiques, la minorité sénatoriale tient surtout à exprimer des inquiétudes. Cette année, monsieur le ministre, compte tenu des conditions de préparation de l’examen du budget au Sénat, il ne nous a pas été possible de faire le point, comme c’était habituellement le cas, sur les sujets essentiels que sont la condition militaire, les activités des forces, le maintien en condition opérationnelle de tous les matériels, au-delà du simple matériel engagé dans les opérations extérieures, les OPEX.

Si M. le rapporteur principal, Yves Krattinger, en est d’accord, voilà des points qu’il nous faudrait éclaircir durant l’année 2012, qui, comme chacun sait, va nous réserver beaucoup de temps libre.

Il faudrait aussi préciser dans quelles proportions le plafond des autorisations d’emplois est sous-exécuté.

En effet, en 2012, à une réduction programmée de 7 462 équivalents temps plein travaillé, ou ETPT, s’ajoute la notion persistante de la sous-exécution de la programmation elle-même. Est-elle vraiment de 4 000 ETPT ?

Si c’est le cas, comme les années précédentes, c’est que la programmation n’a pas été réaliste sur ce point et que les autorités militaires, confrontées à une sous-estimation de la masse salariale, ne peuvent que piloter à vue. Il serait important pour nous d’obtenir des informations sur ce point, car elles seront déterminantes lors du vote de la future loi de programmation militaire de 2012.

Je souhaite aussi vous dire, monsieur le ministre, à quel point nous avons été choqués, l’an passé, par le rapport qu’a publié la Cour des comptes sur le service de santé des armées. Nous sommes quelques-uns, ici, à considérer certaines des critiques comme injustes et déplacées dans la mesure où elles ne tiennent aucun compte des contraintes spécifiques de ce service – et Dieu sait qu’elles sont lourdes ! – ni de l’aide immense qu’il rend aux militaires, à leurs familles et aux populations des pays où nos forces sont engagées. Dans cette affaire, la Cour des comptes, pour laquelle nous avons le plus grand respect par ailleurs, nous semble être à côté de la plaque !

Dernier point : d’année en année, les OPEX sont un sujet permanent d’angoisse pour le ministre, qui ne sait jamais comment lui sera compensé le déficit considérable entre les crédits votés et la dépense réelle.

Elles sont également un sujet d’irritation tout aussi permanent pour le Parlement, qui n’apprécie guère ces impasses et encore moins les moyens que le Gouvernement utilise chaque année pour boucler le budget.

Cette année encore, faute de pouvoir estimer la dépense, ce qui est compréhensible, il faudra nous contenter d’une sorte de provision dont on reconnaîtra qu’elle a heureusement beaucoup augmenté en 2010 et en 2011.

Ce budget, particulièrement difficile à structurer et à exécuter, va à l’essentiel, c’est un fait, mais il est fortement impacté, comme tous les autres, par les difficultés financières que connaît notre pays. De plus, il s’écarte chaque année davantage de sa programmation, comme le rapporteur Krattinger l’a souligné d’entrée de jeu.

Je souhaite conclure sur des propos plus personnels et que je n’ai pas la prétention d’imposer à mes collègues de la minorité.

Monsieur le ministre, si la France n’a pas ou n’a plus, en matière de défense, la possibilité de tout faire, de tout construire, de tout acheter, si elle n’a pas les moyens de maintenir en condition opérationnelle tous les éléments du matériel de nos armées, si elle n’a plus la capacité de projection qui a été programmée, il vaudrait mieux le reconnaître et ajuster à nos ressources les efforts financiers que réclameront toujours les intérêts vitaux de notre pays, c'est-à-dire la défense de ses territoires et l’essentiel de sa présence et de son rôle dans le monde.

S’agissant des OPEX, par exemple, je constate qu’en 2010, sur 867 millions d’euros de dépenses, 231 millions d’euros, soit 27 % du total, ont été consommés pour le Kosovo – 59 millions d’euros –, pour la Côte d’Ivoire – 82 millions d’euros – et pour le Liban – 90 millions d’euros.

En 1993, après la mission parlementaire qui m’avait amené au Sud-Liban avec la Force intérimaire des Nations unies au Liban, la FINUL, je m’interrogeais déjà sur la justification de notre présence dans ce pays ami. Entre 1993 et 2011, il s’est écoulé dix-huit ans, monsieur le ministre ! Est-ce raisonnable ?

À ne pas savoir partir de certains pays, nous nous interdisons de participer à d’autres opérations majeures que l’ONU nous demandera de couvrir. À moins que l’abandon de notre droit de veto au Conseil de sécurité de l’ONU ne règle ce problème et ne nous dispense, demain, de toute intervention hors de nos sacro-saintes frontières.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, j’ai la charge de vous faire connaître que, sur ma proposition, la minorité de la commission des finances du Sénat vous recommande un vote favorable à l’adoption des crédits de la mission « Défense ».

Elle le fait non seulement à l’intention des sénateurs et sénatrices qui appartiennent à l’opposition dans cette assemblée, mais aussi à l’intention de tous les autres, puisque la recommandation de sagesse du rapporteur Krattinger les laisse libres de leur décision. Un tel vote exprimerait une solidarité légitime envers nos soldats. §

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.

Je vous rappelle aussi que, en application des décisions de la conférence des présidents, aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser dix minutes.

Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de trente minutes pour intervenir.

Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Jean-Pierre Chevènement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Chevènement

Il serait injuste, monsieur le ministre, de prétendre que vous n’avez pas cherché à préserver l’enveloppe de crédits de la défense, en principe garantie par la loi de programmation militaire.

Le budget que vous nous présentez se situe, cependant, sensiblement en dessous de ces enveloppes : abattements budgétaires, surcoûts des OPEX, opération Harmattan, qui se chiffre à 1, 308 milliard d’euros, financement de la taxation interministérielle à la suite de la condamnation de Thales, surcoûts de la transition liée à la transformation des armées, épuisement des reports de crédits, retard des recettes exceptionnelles.

Je suis d’abord conduit à vous poser la question de savoir si la clause de sauvegarde prévue par la loi de programmation militaire pour les OPEX va être activée et à quelle hauteur. À défaut, il serait temps de mettre un terme à la dérive expéditionnaire, mais c’est un vaste sujet.

Je m’inquiète, ensuite, des réductions de crédits qui affectent le maintien en condition opérationnelle des hommes, dont je tiens à saluer la valeur. Mais celle-ci ne saurait compenser le défaut d’entraînement. Comme l’a déclaré l’Amiral Guillaud dans une expression toute en litotes : « La nouvelle trajectoire financière […] en retrait par rapport à celle prévue par la loi de programmation militaire […] nous a conduits à accentuer la préparation opérationnelle différenciée, en nous efforçant d’éviter l’écueil d’une armée à deux vitesses. »

C’est la cohérence de l’outil qui est en jeu. Ainsi, le nombre de journées de préparation et d’activité opérationnelles dans l’armée de terre passe de 120 jours en 2010 à probablement 105 jours en 2013, selon les déclarations du chef d’état-major de l’armée de terre, s’éloignant ainsi de la cible des 120 jours.

S’agissant de l’équipement des forces, il y aurait beaucoup à dire. Il faut noter l’entrée en service de matériels majeurs. Je rappelle cependant que l’entretien programmé des matériels est une priorité et qu’il est préoccupant de voir retarder la rénovation à mi-vie du Mirage 2000-D, la livraison des A-400 M et l’étalement de la livraison des avions multiravitailleurs MRTT. Pour l’armée de terre, je vous donne acte de la commande du lance-roquettes unitaire, c’est un bon point.

S’agissant de la direction générale de l’armement, la DGA, je tiens à saluer la manière dont elle s’acquitte de sa mission de préparation de l’avenir.

Essayons de voir, justement, ce que nous réserve l’avenir.

Les États-Unis se désinvestiront de plus en plus de l’Europe. Ils s’engagent en Asie et dans le Pacifique. J’observe l’extension rapide des incertitudes et même des « trous noirs » en Asie de l’Ouest et en Afrique : Afghanistan, Pakistan, Iran, Syrie, Yémen. Les révolutions démocratiques dans les pays arabes démontrent la puissance des courants islamistes dans les sociétés. Ce qui se passe en Égypte, en Tunisie, au Maroc et au Sahel nous concerne directement.

L’évolution du contexte géostratégique doit nous conduire à redéfinir nos priorités en matière d’équipements. Plus que jamais, la fonction connaissance et anticipation est décisive. Il faut donc donner une claire priorité aux moyens de renseignement. À cet égard, l’éloignement dans le temps du lancement du satellite CERES, dont plusieurs rapporteurs se sont inquiétés, est fâcheux. Peut-être s’agit-il d’une question d’appellation ? §

S’agissant de la dissuasion, il serait irresponsable de ne pas continuer un effort dont la valeur tient à son inscription dans la durée. Enfin, il faut le dire, il est temps de mettre un terme aux réductions de format des armées. L’effort de défense de la France est très sensiblement inférieur à l’objectif de 2 % du PIB pris, en 2007, par Nicolas Sarkozy, alors candidat à l’élection présidentielle.

Le maintien nécessaire de notre effort de défense se télescope avec la crise qui secoue la monnaie unique, qu’on décrit de manière réductrice comme une crise de la dette alors que c’est d’abord une crise politique, une crise de conception. Mal pensée, la monnaie unique, loin d’unir les nations, les divise. Or, en Europe, la position de la France s’est détériorée. Le président du groupe CDU-CSU a déclaré récemment au Bundestag : « L’Europe s’est mise à parler allemand ! »

Un ministre de la défense, soucieux de l’avenir de son budget, ne peut pas ignorer ce que préparent, par ailleurs, Mme Merkel et M. Sarkozy. Chacun sait que celui-ci est engagé dans une négociation où l’Allemagne entend imposer aux autres États de la zone euro un strict contrôle de leur budget par les institutions européennes qu’elle influence fortement. On entend parler de noyau dur, avec une monnaie encore plus surévaluée. M. Sarkozy a proposé une « règle d’or », en fait d’airain, pour supprimer, les déficits. Des dispositions coercitives seraient mises en œuvre par la Commission européenne. M. Barroso vient de déposer des projets de règlement d’où il résulte que, désormais, les pays de l’Union monétaire devront soumettre leurs projets annuels de budget à la Commission et à l’Eurogroupe avant le 15 octobre de l’année précédant l’exécution du budget. Si un projet de budget ne respecte pas les exigences du pacte de stabilité et de croissance, qui interdit un déficit supérieur à 3 % du PIB, ce qui est aujourd’hui le cas de la France, la Commission aura le droit de donner son avis et de demander des changements.

Je passe sur les autres propositions, notamment sur l’institution de conseils budgétaires indépendants. C’est le début de ce qu’Hubert Védrine a appelé l’Europe post-démocratique. Des dirigeants politiques élus sont écartés au profit de véritables gouverneurs technocrates européens, non élus mais formatés dans le moule de dogmes obsolètes !

Revenons à la mission « Défense ». Tout cela est très inquiétant, monsieur le ministre, pour l’avenir de la programmation militaire. Comment le budget militaire ne serait-il pas impacté non seulement par la récession qui s’annonce et par les resserrements budgétaires que la pression des marchés financiers ne manquera pas de susciter, mais aussi par la contestation de l’arme nucléaire par l’Allemagne et par plusieurs autres pays européens, ralliés au pacifisme en même temps qu’à l’OTAN et à la garantie ultime des armes nucléaires américaines ? Mais vous savez très bien tout cela !

L’Allemagne, à laquelle les traités refusent l’accès aux armes nucléaires, voit dans la dissuasion française au mieux un anachronisme.

Les affaires de défense sont des choses trop sérieuses pour être laissées aux institutions européennes dont la logique, malgré les apparences, n’est pas technocratique, mais politique : c’est une logique d’empire et d’un empire où la France serait réduite à un rôle d’accompagnement. Je vous renvoie à un article, que je ne vous cite pas, car mon temps de parole s’épuise, de M. Westervelle paru dans Le Figaro du 20 novembre dernier.

Quel serait, dans cette perspective, l’avenir de notre dissuasion ? On ne l’imagine que trop bien.

La coopération franco-britannique, utile, ne dispensera jamais d’un effort propre très important, sanctuarisant les crédits de la dissuasion au sein d’un budget de la défense, lui-même protégé par une nouvelle loi de programmation.

Si l’Europe de la défense devait avoir un sens, il faudrait qu’il soit entendu que les dépenses militaires, en tout cas celles de la dissuasion, seront soustraites du calcul du déficit selon les règles du pacte de stabilité. De lourdes menaces se dessinent à l’horizon.

Je ne voterai pas contre les crédits de la mission « Défense », mais mon abstention, monsieur le ministre, traduira l’inquiétude que j’éprouve pour l’avenir de notre outil militaire dans le contexte des négociations européennes que M. Sarkozy a engagées avec Mme Merkel.

Applaudissements sur les travées du RDSE, ainsi que sur certaines travées du groupe socialiste-EELV.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Bockel

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des affaires étrangères, mes chers collègues, ce budget réaliste et sincère dans un contexte économique difficile, est marqué par une vision cohérente et pérenne de notre politique de défense nationale, mais également par son rayonnement européen et international.

Les bons résultats obtenus cette année, nous les devons aux compétences militaires, mais également à la qualité des équipements utilisés, qu’il s’agisse des aéronefs, des navires, des sous-marins nucléaires d’attaque, des missiles, de l’optronique embarquée, des techniques d’imagerie ou encore des chaînes de transmission de données à haut-débit. Un seul bémol toutefois : l’échec du drone européen.

La priorité accordée aux crédits d’équipement a donc été maintenue, tout en préparant l’avenir et en améliorant la condition du personnel, grâce au volet défense de la révision générale des politiques publiques, considéré comme exemplaire.

Le budget de la défense représente des masses financières importantes, qui sont investies dans le tissu industriel national. C’est un point essentiel par les temps qui courent. Les 20 milliards d’euros injectés chaque année dans notre économie font travailler quelque 5 000 entreprises à haute valeur ajoutée, qui emploient directement 250 000 personnes dans le secteur de la défense et indirectement près de 1 million de personnes.

La crise financière que nous vivons actuellement est un nouveau révélateur des interdépendances et des fragilités de chacun. Aucun pays dans le monde, aujourd’hui, n’est à l’abri des conséquences économiques de cette crise. Nul, désormais, ne peut penser que le monde de demain sera identique à celui d’hier.

Depuis un demi-siècle, les Européens sont conscients de la nécessité d’une coopération entre les États.

Nous avons su construire un système où nous avons privilégié le partenariat, l’interdépendance assumée, le respect de l’autre et la coopération entre les États, un système politique où l’état de droit prime sur le rapport de force, ce qui n’est déjà pas si mal.

La construction européenne et l’Alliance atlantique ont été, au cours du dernier demi-siècle, les deux piliers d’une ambition pour les Européens : établir un cadre de sécurité collective susceptible d’assurer la prospérité et la stabilité du continent.

Il y a dix ans ou presque, l’Europe de la défense était un concept purement intellectuel, et même un objet de méfiance pour ceux qui y voyaient une source de nuisance ou d’affaiblissement de l’Alliance atlantique ou encore d’atteinte à la souveraineté nationale.

Aujourd’hui, nous l’avons vu, la place de la France sur la scène internationale, particulièrement au sein de l’OTAN, est essentielle, j’en suis pour ma part convaincu. L’Europe de la défense, même si elle est encore balbutiante – soyons réalistes ! – se précise à bien des égards.

Dans un premier temps, nous avons donné à notre armée les moyens nécessaires pour que la France puisse prendre toutes ses responsabilités sur la scène internationale, comme on a pu le voir en Côte d’Ivoire, en Afghanistan ou, plus récemment, en Libye. Je tiens moi aussi à rendre hommage à tous nos soldats qui sont tombés sur ces théâtres d’opération, particulièrement en Afghanistan.

S’agissant de la Libye, dans l’espace aérien et naval libyen, les aviateurs de l’armée de l’air, les marins de l’aéronavale et les équipages de l’aviation légère de l’armée de terre ont mené ensemble une formidable opération, en coopération avec l’OTAN et sous mandat de l’ONU, avec le souci permanent de limiter au strict minimum les dommages collatéraux au sol. Cette opération a été menée à bien, nous en connaissons les résultats, sans perte humaine ni matérielle pour nos forces. Il faut tout de même le rappeler.

J’ai d’ailleurs eu le plaisir d’assister, le 10 novembre dernier, en votre compagnie, monsieur le ministre, et avec plusieurs députés et sénateurs, notamment le président Jean-Louis Carrère, sur la base aérienne de Mont-de-Marsan, au retour d’expérience des forces françaises engagées en Libye. Ce fut une occasion d’admirer l’excellence de leur performance, ainsi que la qualité des présentations, au travers desquelles, sans langue de bois, les soldats ont mis en évidence un certain nombre de manques ou d’attentes. Ce fut véritablement un moment très fort, révélateur du caractère démocratique de notre armée, qui, après avoir fait son devoir, s’exprime sans détour.

Cette intervention en Libye marque la naissance d’une identité européenne de défense au sein de l’OTAN, dont la France se veut le promoteur depuis soixante ans. C’est le signe que nous avons fait, au niveau du commandement intégré en tout cas – c’est là aussi ma conviction –, le bon choix.

Cette intervention illustre aussi toute la pertinence du renforcement de la coopération franco-britannique, opérée avec la conclusion, le 2 novembre 2010, des deux traités bilatéraux que nous connaissons.

Douze ans après le sommet de Saint-Malo, qui avait permis le lancement de cette dynamique, la France et le Royaume-Uni ont confirmé leur volonté de rester des acteurs majeurs en matière de défense.

À quelques jours du prochain sommet franco-britannique, prévu le 2 décembre prochain, peut-être pourrez-vous nous dire, monsieur le ministre, si l’on peut s’attendre à de nouvelles avancées.

II est important que les coopérations menées avec nos partenaires britanniques restent ouvertes à d’autres pays qui partagent les mêmes objectifs.

Je pense en particulier à nos amis allemands, qui disposent d’une industrie de défense importante et reconnue, d’une armée qui, elle-même, est en pleine restructuration et avec laquelle nous entretenons une relation forte et parfois compliquée pour différentes raisons, y compris politiques.

Avec l’Allemagne et la Pologne, qui a fait de ce sujet l’une des priorités de sa présidence de l’Union européenne, la France a formulé, dans le cadre du triangle de Weimar, des propositions concrètes sur l’Europe de la défense.

Je pense notamment au renforcement des capacités européennes de planification et de conduite des opérations, à l’augmentation des moyens de l’Agence européenne de défense – que j’ai d'ailleurs eu l’occasion de visiter avec plusieurs de mes collègues sénateurs il y a quelques jours –, au développement des groupements tactiques ou encore au lancement de nouvelles opérations.

Je sais que, sur ces questions, il y a souvent une grande distance entre les affirmations et la réalité pratique. Mais je ne crois pas faire preuve de naïveté en disant que ces propositions offrent de réelles perspectives et qu’elles constitueront des chantiers intéressants.

Peut-être pourrez-vous nous dire, monsieur le ministre, si l’on peut, sur ces questions de sécurité et de défense commune espérer des avancées, même dans le contexte géopolitique actuel.

Permettez-moi de vous interroger sur un sujet qui me tient à cœur pour m’y être beaucoup impliqué naguère : quid de la brigade franco-allemande ? On connaît sa force symbolique et réelle mais également les problèmes de doctrine d’emplois qui ont parfois pour conséquence qu’elle ne se voit pas confier toutes les missions qu’elle pourrait accomplir.

D’autres exemples plus spécifiques de cette coopération européenne sont à valoriser, comme cela a été dit tout à l’heure.

Je pense notamment au programme MUSIS, nouvelle génération de satellites d’information, qui sera un pilier de la future architecture ISR spatiale.

Je pense également à la continuation de la valorisation de l’Erasmus militaire, qui permet déjà de mettre progressivement en place ce qui sera – rêvons un instant ! – une culture militaire commune.

Je souhaite conclure mon propos par deux points qui me tiennent particulièrement à cœur.

Premièrement, j’ai constaté, je l’ai d’ailleurs dit à votre collègue secrétaire d’État Marc Laffineur, une réelle volonté d’améliorer la potentialité des réserves militaires. C’est un sujet sur lequel je m’étais beaucoup impliqué en 2009. J’avais, à l’époque, évoqué trois chantiers qui sont toujours d’actualité : la réorganisation et la clarification de la gouvernance de la réserve ; le renforcement du dialogue et de la concertation entre les réservistes et leurs employeurs ; enfin, l’amélioration du vecteur essentiel du lien armée-nation qu’est la réserve citoyenne.

N’ayant pas le temps de développer ce dernier point qui me paraît important, je ferai néanmoins une remarque, désormais habituelle de ma part : si la réserve opérationnelle disparaît, nos armées, du jour au lendemain, ne pourront plus fonctionner ; il ne faut jamais l’oublier. Nos collègues Jöelle Garriaud-Maylam et Michel Boutant ont effectué un travail très approfondi sur ce sujet, notamment sur le lien avec les autres réserves en cas de crise majeure.

Deuxièmement, je voudrais brièvement évoquer la cyberdéfense, sujet sur lequel la commission des affaires étrangères a bien voulu me confier un rapport. Ce sujet passionnant est toujours d’actualité, notamment depuis les attaques informatiques massives qui ont frappé l’Estonie en 2007. Notre ancien collègue M. Romani a d'ailleurs présenté entretemps, au nom de la commission des affaires étrangères, un rapport qui fait date sur ce sujet.

Nous savons aujourd’hui que la vulnérabilité des réseaux informatiques n’est pas seulement un problème technique mais une question de sécurité nationale. On imagine les conséquences pour notre pays d’une attaque informatique massive visant, par exemple, la distribution d’énergie, les transports, les hôpitaux, le système bancaire et qui conduirait à la paralysie de notre pays.

Avec la création de l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information et l’adoption d’une stratégie, la France a renforcé ses outils en matière de cyberdéfense. Est-ce suffisant pour autant ?

Notre défense doit s’adapter aux risques nouveaux, aux nouvelles technologies opérationnelles comme au développement et à la protection de son cyberespace, et je déplore la diminution de 20 millions d’euros des crédits de recherche en amont.

La cyberdéfense et la cyberstratégie sont les nouveaux sujets fondamentaux d’une politique de défense moderne et renouvelée. Nous devons être à la pointe dans ce domaine, car les découvertes peuvent se traduire dans les domaines privé ou industriel et inversement.

Nous devons valoriser ces passerelles entre les sphères militaires publiques et privées afin que l’information soit mise à jour rapidement, ce qui est une donnée essentielle, et surtout qu’elle soit protégée.

Pourrait-on, par exemple, envisager l’obligation d’une déclaration en cas d’attaque informatique, afin que l’État soit au moins informé d’un tel risque ?

Nous pourrions également établir des ponts entre les différents centres de recherche européens, et discuter la mise en place de protocoles internationaux.

Si ce domaine reste encore largement terra incognita, comme le disait récemment le professeur François Géré devant l’Institut des hautes études de défense nationale, l’IHEDN, il faut rapidement trouver des repères en matière de doctrine stratégique.

C’est pourquoi je vous demande, monsieur le ministre, de porter une attention particulière à la prise en compte des crédits alloués à la cyberstratégie, sachant que, dans ce domaine, comparaison n’est pas raison. Je connais les chiffres mais nous savons souvent en France faire mieux avec moins et, surtout, nous ne mettons pas dans les montants les mêmes éléments que certains de nos voisins ou autres pays de référence avec lesquels nous nous comparons. Néanmoins, cette question est importante.

Pour toutes ces raisons, le groupe UCR, en dépit de la situation budgétaire et dans l’attente de la prise en compte d’un certain nombre de propositions qui seront faites aujourd’hui, votera les crédits de la mission « Défense ».

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Reiner

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je limiterai mon propos à deux réflexions parmi celles que m’inspire ce budget.

La première tient naturellement au choix que vous avez fait en juillet dernier, en comité ministériel d’investissement, en faveur du drone Heron TP de Dassault, pour faire suite au système intérimaire actuellement en fonction. Vous connaissez mon sentiment sur votre décision, je l’ai exprimé en commission à maintes reprises, et il est aujourd'hui très partagé. Lorsque je tente de comprendre les principes qui ont guidé cette décision, j’en viens à penser qu’il s’agit d’un cas exemplaire de conflit entre les responsabilités industrielles de l’État et ses responsabilités de défense.

Pour exercer votre choix, vous avez dû arbitrer entre l’expression des forces armées d’un besoin opérationnel et des préoccupations économiques et industrielles. Comme je l’ai dit tout à l'heure, ce n’est pas un débat « intérieur » médiocre.

Vous avez choisi, de votre aveu même, la solution qui était financièrement la plus coûteuse …

Debut de section - Permalien
Gérard Longuet, ministre de la défense

Non, ce n’était pas la plus chère !

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Reiner

… et militairement la moins performante, et ce en connaissance des causes et des effets, à dessein, si j’ai bien compris, de permettre à un industriel national d’acquérir des compétences qu’il n’a pas, afin de forger plus tard le système d’armes dont notre pays aura besoin. Ce choix aurait eu toute sa justification il y a quinze ans. Mais, aujourd’hui, y a-t-il un marché en Europe pour ce type de drones ? Est-il sérieux de créer une filière industrielle pour sept exemplaires ?

La dotation aux armées des équipements dont elles ont besoin et qui est de votre responsabilité relève, selon le Livre blanc, de trois cercles d’appréciation : celui de la souveraineté nationale et, par là, de l’exclusivité industrielle nationale – c’est le prix de l’indépendance ; celui de la coopération avec d’autres pays ; enfin, celui de l’achat « sur étagère ».

Où se situent les drones MALE dans cette géométrie ? Certainement pas dans le premier cercle. La preuve, c’est que le Gouvernement a fait le choix de signer avec la Grande-Bretagne un accord qui comporte explicitement un partenariat dans ce domaine entre BAE et Dassault pour les années futures, et nous l’approuvons.

Cette décision n’était pas facile et je vous avais d’ailleurs indiqué à l’époque que, quelle qu’elle soit, elle prêterait à critique. Devant ce dilemme, je pense que vous avez fait prévaloir l’aspect industriel sur l’aspect opérationnel. Bref, vous vous êtes plus comporté en ministre de l’industrie – que vous avez été – qu’en ministre de la défense – que vous êtes.

Sur ce sujet des drones MALE, il faut reconnaître que, depuis un long moment, nous n’avons pas été bons : je pense à la DGA, à l’état-major, aux industriels, voire aux politiques. Mais aujourd’hui, l’urgence était de répondre au besoin opérationnel et de repousser les préoccupations industrielles à moyen terme. C’était tout à fait conciliable et financièrement avantageux, ce qui ne gâte rien en ces temps difficiles.

Lorsqu’on dispose en héritage d’une volonté historique, d’une base industrielle et technologique de défense qui est une des meilleures sinon la meilleure d’Europe, on peut et on doit y être attentif, et nous le sommes en général ; on nous le reproche parfois. Mais attention à ne pas en faire l’alpha et l’oméga d’une politique de défense, car cela peut être contraire à son intérêt !

Faut-il voir une application stricte de subsidiarité dans le choix de suppléer l’absence de commande des avions Rafale à l’export par une commande supplémentaire de l’État, ce qui est le cas cette année encore ? Cela a pour effet de désorganiser profondément la programmation d’ensemble du renouvellement des équipements. Je pense, entre autres, à la rénovation des Mirage 2000 D. Or il faut 10 millions d’euros pour rénover un Mirage 2000 D et dix fois plus pour acheter un Rafale. Cela est en contradiction avec la loi de programmation militaire, qui affichait la nécessité de ces deux avions pour l’armée de l’air. C’est encore un choix industriel, ce n’est pas un choix opérationnel.

Il arrive qu’on puisse atteindre les deux objectifs à la fois. Ce n’est pas simple et, si l’on y parvient, c’est évidemment satisfaisant pour tous. Nous pensons que, parfois, il faut dissocier les deux intérêts, et c’est le cas, à notre sens, pour le drone MALE, comme c’était le cas pour le missile successeur du Milan. Là, nous avons su traiter l’urgence opérationnelle – en achetant d'ailleurs du matériel américain – et préparer l’avenir industriel d’une nouvelle trame de missiles de courte et moyenne portée. Voilà pour la première réflexion.

La seconde tient à l’impression que l’actuel gouvernement serait tenté de réorganiser les entreprises industrielles de défense, avec pour objectif ultime d’aboutir à une organisation autour d’un producteur unique en matière d’équipements militaires.

Nous avons quelques exemples à l’esprit : lorsqu’il a fallu remplacer Alcatel-Lucent au capital de Thales et que l’État a fait opposition à l’entrée d’EADS ; nous avons de nouveau ce sentiment avec ce que l’on appelle pudiquement « la rectification de frontières » entre Thales et Safran, et ce n’est pas si simple, on le voit aujourd’hui.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Reiner

L’un étant dans l’autre et l’autre dans encore un autre, le schéma paraît se préciser. S’agirait-il de faire un BAE à la française ? Est-ce une bonne chose pour l’État que de se retrouver face à une entreprise en situation de monopole ? Je ne suis pas un libéral comme vous, monsieur le ministre, mais j’en doute !

L’histoire récente montre que les États se sont défaits peu ou prou de leurs arsenaux et qu’ils ont posé des règles afin de favoriser la mise en concurrence dans les marchés publics de défense ; je pense, en particulier, à la directive de 2009. S’agit-il de remettre en place des arsenaux confiés cette fois en gestion à des opérateurs privés ? Je ne suis pas sûr que nous y trouvions avantage, que ce soit sur le plan industriel ou sur le plan financier, a fortiori, évidemment, dans les temps qui viennent.

Donner vie et force à une base industrielle technologique de défense européenne aurait naturellement plus de sens, mais chacun s’étant fait à l’idée que c’est impossible, rien n’a été tenté.

Pourtant, ce gouvernement nous avait expliqué – et je reconnais qu’il avait été assez convaincant – qu’il fallait réintégrer le commandement militaire de l’OTAN afin, d’une part, d’y regagner une influence et, d’autre part, de construire plus vite une Europe de la défense et, par là, sa base industrielle.

Du traité de Lancaster House avec les Britanniques à l’accord avec Israël que vous êtes en train de négocier, nous n’arrivons plus à vous suivre. Monsieur le ministre, expliquez-nous votre politique industrielle et de défense ! Où allez-vous ? Nous aimerions comprendre ...

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV. – MM. François Trucy, rapporteur spécial, et Jacques Gautier applaudissent également.

Debut de section - PermalienPhoto de Michelle Demessine

Monsieur le président, monsieur le ministre, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, comme pour tout budget, les crédits de la mission « Défense » que nous examinons ce soir sont la traduction d’une politique.

Avec ces crédits, monsieur le ministre, vous voulez mettre en œuvre une politique de défense à laquelle mon groupe s’oppose vivement.

À l’intention des personnels militaires, je voudrais d’emblée préciser que, si nous ne votons pas ces crédits, c’est non par refus de donner à nos forces armées les moyens nécessaires pour remplir leur mission, mais en raison de nos profonds désaccords avec les orientations stratégiques définies par le Gouvernement, avec le format et le modèle d’armée qu’il choisit, ainsi qu’avec l’affectation des crédits qu’il propose.

Monsieur le ministre, vous nous proposez un budget « hors sol ». Dans votre projet initial, vous prétendiez scrupuleusement respecter la loi de programmation militaire, mais sans prendre véritablement en compte la crise financière internationale et les bouleversements géostratégiques survenus cette année, qui devraient pourtant nécessairement influer sur les choix concernant les équipements.

Je sais que ce sera le rôle de l’actualisation du Livre blanc en 2012, mais, d’ores et déjà, certaines modifications d’orientation budgétaire auraient dû être faites.

En réalité, vous vous éloignez des objectifs fixés par la LPM. Ce contexte fait que nous discutons ce soir au Sénat de crédits virtuels pour une mission, qui, comme l’ensemble du projet de loi de finances, repose sur des prévisions de croissance régulièrement revues à la baisse, et alors même qu’une nouvelle loi de finances rectificative a été présentée en conseil des ministres il y a près de quinze jours.

Ce projet de budget pour 2012 devrait permettre, selon vous, la poursuite de la réduction drastique du format de nos armées et la modernisation de nos forces en maintenant la priorité donnée aux équipements. Mais, dans le même temps, lorsque vous réalisez des économies, c’est au prix de réductions capacitaires.

Dans le contexte actuel de crise financière, je doute que vous puissiez conserver cet équilibre et faire réellement ce que vous annoncez.

En effet, la rentrée des recettes exceptionnelles se produira avec retard, les recettes immobilières attendues risquent de se déprécier, les reports de crédit ne sont pas inépuisables et les économies attendues de la création des bases de défense ne sont pas encore au rendez-vous en raison du surcoût, certes inévitable au début, des restructurations.

En outre, lors de la présentation de votre budget à l’Assemblée nationale, vous avez procédé à une diminution des crédits de 167 millions d’euros, imposée, semble-t-il, par la baisse des prévisions de croissance et par les dernières annonces d’économies budgétaires faites par le Premier ministre et destinées à réduire la dépense publique pour se conformer aux exigences des marchés financiers.

Ces mesures n’ont d’ailleurs eu aucun effet sur ces marchés, car les agences de notation continuent de menacer la France, actuellement titulaire d’un triple A, de déclassement, avec toutes les conséquences que cela pourrait emporter.

Les plus fortes réductions de crédits, avec 102 millions d’euros, portent notamment sur votre programme prioritaire d’équipement des forces. Vous nous assurez qu’elles seront partiellement compensées par la perception de recettes exceptionnelles supplémentaires au titre de la vente de fréquences hertziennes.

Une baisse de 30 millions d’euros portera sur le financement d’opérations d’infrastructures, sans, paraît-il, en modifier la programmation.

Enfin, les crédits du programme « Préparation et emploi des forces » seront, quant à eux, minorés de 25 millions d’euros, ce qui aura inévitablement des effets négatifs sur l’entraînement des forces et le maintien en condition opérationnelle des équipements.

On a aussi du mal à croire que ces diminutions de crédits n’entraîneront ni réduction ni retard de programmation des matériels et des infrastructures.

Il y a lieu d’être inquiet pour le maintien des capacités opérationnelles de notre pays si ces menaces budgétaires devaient affecter des programmes comme ceux des hélicoptères NH 90, des frégates multimissions ou bien encore du sous-marin d’attaque à propulsion nucléaire de type Barracuda.

De même, certains experts craignent pour la rénovation des Mirage 2000 et pensent que le programme CERES de renseignement militaire sur l’écoute des signaux électromagnétiques sera décalé.

En revanche, le coût total des opérations extérieures de nos armées, en Afghanistan, en Libye, en Côte d’Ivoire, a explosé : il s’élève à 1, 2 milliard d’euros, dont 350 millions pour la seule Libye, alors que 630 millions étaient inscrits en loi de finances initiale. Certes, la fin des opérations en Libye et le début de retrait de nos troupes d’Afghanistan peuvent raisonnablement nous faire espérer un allégement significatif des charges de nos OPEX.

À cet égard, je pense qu’il faut accélérer le retrait de nos troupes d’Afghanistan. Nous n’avons pas à calquer notre calendrier sur celui des États-Unis. En effet, puisque ce retrait est décidé, le demi-milliard d’euros annuels de cette opération s’effectue maintenant en pure perte. Et même s’il est financé par la réserve de précaution interministérielle, il faudra de toute façon payer cet énorme surcoût, qui aurait pu être utilisé à des fins plus pertinentes.

À ce propos, au-delà de la question de la légitimité et du bien-fondé de ces opérations extérieures, que je mets en cause, les difficultés de financement ne peuvent que nous conduire à nous interroger sur le modèle et le format d’armée que traduisent les choix budgétaires du Gouvernement.

Si toutes ces OPEX dépassent en fait nos capacités financières et humaines, c’est notamment parce que les crédits consacrés à la modernisation et au développement de l’arme nucléaire revêtent une trop grande importance. Cet argent est dépensé au détriment de nos équipements et de nos capacités conventionnelles.

Enfin, je voudrais souligner, après les avoir relevés dans le rapport sur le programme 212 « Soutien de la politique de défense », les risques de dérapage financier inhérents à l’opération Balard, les incertitudes de la politique d’externalisation, ainsi que les dégâts économiques et humains causés aux territoires et aux personnes par les restructurations.

Mais c’est avant tout pour des raisons de fond que je critique l’affectation de vos crédits pour les cinq missions stratégiques, les priorités au service desquelles vous réalisez des économies et le choix des secteurs dans lesquels vous les faites.

J’estime qu’il est inutile et dangereux de tant dépenser pour un modèle d’armée qui n’est plus adapté au monde d’aujourd’hui.

Vous prétendez dépenser mieux en réduisant de façon drastique le format de nos armées, mais cela vous permet surtout de payer fort cher des technologies qui ne sont pas efficaces pour le type de conflits ou d’opérations dans lesquels nos armées sont engagées.

C’est ainsi que, face à un appareil militaire qui rétrécit, la part de l’arme nucléaire grandit, au détriment des armements conventionnels. Les règles stratégiques ont pourtant changé depuis la fin de la guerre froide et il n’y a plus de menace nucléaire stratégique. Le coût et la puissance dévastatrice de cette arme ne se justifient donc plus. J’ajouterai même que, avec l’apparition de nouveaux acteurs stratégiques au comportement irrationnel, elle crée maintenant une source d’instabilité, menaçant l’ensemble de la planète.

Si l’on prend en compte les études, les opérations d’armement, l’entretien programmé du matériel et les infrastructures liées à la dissuasion, ce sont 3, 4 milliards d’euros par an, soit près de 10 millions d’euros par jour, qui seront consacrés à l’arme nucléaire. À elles seules, nos forces nucléaires consomment 21 % des crédits d’équipement.

Le renouvellement des deux composantes nucléaires, avec la mise en service d’un nouveau missile air-sol de moyenne portée et celle du M51 pour la force océanique stratégique, représente une modernisation et un renforcement de notre arsenal qui entrent en contradiction avec le traité sur la non-prolifération des armes nucléaires que notre pays a signé. Cette posture n’est plus conforme au principe de la « stricte suffisance » ni au seul maintien de la crédibilité technique de la dissuasion.

C’est pourquoi je proposerai un amendement supprimant les crédits de commande d’une tranche de production du missile balistique M51.2 pour les affecter à d’autres équipements de nos forces conventionnelles.

Cet aveuglement volontaire concernant l’arme nucléaire se retrouve dans le choix, politique autant que stratégique, du Président de la République, qui a accepté que notre pays participe au système de défense antimissile balistique. Ce système de haute technologie extrêmement coûteux, à la fiabilité et à la doctrine d’emploi incertaines, aux règles d’engagement qui laisseraient les Américains seuls maîtres des tirs, est de surcroît contradictoire avec notre doctrine de dissuasion nucléaire.

En outre, ce bouclier antimissile est de nature à relancer une course aux armements, comme vient de le démontrer la récente réaction de la Russie, qui a menacé de déployer ses missiles si l’OTAN et les États-Unis poursuivaient leur projet.

Dans ce domaine, la décision du Président de la République procède directement de son alignement atlantiste et de son souci de faire en sorte que nos industries de défense, grâce à leur savoir-faire, puissent recueillir quelques miettes de ce marché. Mais cette décision découle aussi directement de notre pleine réintégration dans le commandement militaire de l’OTAN qui a remis en cause notre autonomie stratégique en nous plaçant au service d’une alliance politico-militaire strictement offensive.

Parce que nous nous opposons aux choix politiques et aux grandes orientations stratégiques que traduit ce budget, le groupe communiste, républicain et citoyen votera contre les crédits de la mission « Défense ».

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Gautier

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’année qui s’achève aura été particulièrement dense pour nos forces armées, engagées dans plusieurs opérations de stabilisation ou de maintien de la paix sous mandat de l’ONU et trois interventions majeures en Afghanistan, en Côte d’Ivoire et en Libye, soit au total sur vingt théâtres d’opérations. Je veux rendre hommage à l’ensemble des hommes et des femmes qui, témoignant leur engagement envers la Nation, ont mis leur professionnalisme, leur courage et parfois leur vie au service de notre pays.

Nous devons insister sur les réformes et les défis que le ministère de la défense et ses personnels ont dû relever depuis quinze ans avec, rien que pour ces dernières années, la réduction du format de nos armées, la mutualisation des moyens, la création des bases de défense, la réorganisation de notre implantation nationale. Aujourd’hui, compte tenu de la place de la France dans le monde et de notre approche globale des problèmes internationaux, nous ne pouvons, au-delà de la LPM, poursuivre la réduction des effectifs sans mettre à mal notre ambition et l’efficacité de nos engagements.

Il n’y a pas d’armée sans hommes, mais il n’y a pas non plus d’armée sans équipements. De ce point de vue, les événements de 2011 ont prouvé la justesse des choix réalisés depuis des années.

Cela est vrai dans le domaine de l’aviation, notamment avec le sans-faute du couple Rafale-A2SM, l’intervention efficace de l’ensemble de la gamme des Mirage 2000, mais aussi le travail moins connu des Mirage F1 RC, pourtant en fin de vie, et des C160 Gabriel.

Cela est vrai pour la marine, avec l’apport indiscutable du porte-avions Charles-de-Gaulle, des frégates de type Horizon, des bâtiments déployés en protection autour des navires français et alliés, y compris les SNA, mais aussi les BPC, qui ont permis de mener en Libye des actions héliportées depuis la mer, avec le redoutable hélicoptère Tigre – celui-ci y a démontré, comme en Afghanistan, sa puissance de feu –, ainsi que la participation déterminante des hélicoptères Gazelle Hot armées en Libye comme en Côte d’Ivoire.

En Côte d’Ivoire, justement, l’armée de terre et les forces spéciales ont montré avec des matériels parfois anciens – je pense au blindé Sagaie – le bien-fondé des choix français.

Enfin, le théâtre afghan, avec le volet aérien – Rafale, Mirage, hélicoptères Tigre, Gazelle, Caracal, Cougar – et le volet terrestre – protection de nos soldats, VBCI, VAB, canon Caesar – démontre quotidiennement, dans un environnement difficile et toujours plus dur, la pertinence des choix effectués il y a des années.

L’Afghanistan et la Libye ont aussi, malheureusement, démontré nos faiblesses, notamment, et de façon globale, en matière d’ISR – intelligence, surveillance et reconnaissance –, avec le drone MALE, ainsi que dans le domaine du ravitaillement en vol.

Monsieur le ministre, il vous appartient d’apporter le plus rapidement possible des réponses adéquates à ces points négatifs.

En ce qui concerne la mission « Défense » du projet de loi de finances pour 2012, je veux tout d’abord vous remercier. En effet, dans le contexte actuel d’une crise financière européenne et mondiale d’une ampleur historique, vous avez su défendre votre budget et obtenu que les coupes budgétaires effectuées sur la mission « Défense » ne l’affectent que marginalement, sur un total de 31, 5 milliards d’euros. Ainsi, les crédits 2012 restent à un niveau quasi identique à ceux de 2011 ; c’est un point largement positif.

Toutefois, l’ampleur de la crise économique fait naître des incertitudes sur l’exécution budgétaire de 2012 et, plus encore, sur celles de 2013 et de 2014.

Les rapporteurs de la commission des affaires étrangères ont détaillé l’ensemble des programmes relevant de la mission budgétaire correspondant à l’activité de votre ministère : je salue leur travail et la qualité de leur contrôle.

Dans ces conditions, je me bornerai à évoquer rapidement quelques sujets non seulement de satisfaction, mais aussi de mécontentement.

Les crédits pour 2012 permettent de répondre aux grandes actions qui structurent le programme 146, « Équipement des forces ».

Il en est de même en ce qui concerne l’activité et les moyens de la DGA et des trois armées, en matière de préparation et de conduite des opérations d’armement.

Comme Daniel Reiner, je me félicite que les dernières opérations de levée de risque soient conduites dans les prochaines semaines, en vue du lancement, en 2012 – du moins l’espère-t-on –, du programme du missile de moyenne portée, véritable successeur du Milan, qui fournira à l’armée de terre un missile performant et moderne, Fire and Forget et « homme dans la boucle », adaptable sur les porteurs terrestres. Pour la partie aérienne, je pense à nos hélicoptères, ainsi qu’au futur drone MALE.

Les crédits permettent la poursuite de la modernisation de nos sous-marins nucléaires lanceurs d’engins de nouvelle génération, avec l’implantation du missile M51, ce qui explique que je voterai contre l’amendement de Mme Demessine. Ils permettent également la livraison du troisième BPC, la continuité de la fourniture de matériels à l’armée de terre, avec notamment le système FELIN et la montée en puissance dans nos forces aériennes du Rafale – dont on ne soulignera jamais assez la dimension « omnirôle » exceptionnelle, et dont on continue de regretter unanimement que les exportations ne démarrent pas, alors qu’il est aujourd’hui le meilleur appareil sur le marché. Cela a été dit : cette absence de ventes à l’exportation nous oblige à acquérir chaque année cinq Rafale supplémentaires pour assurer le maintien de la chaîne de montage.

Je veux aussi saluer la qualité du « programme RAPID » de la DGA en direction des PME : ce programme soutient la R&D et commence à produire des résultats visibles, comme nous avons pu le constater au salon Milipol.

S’agissant du lancement du démonstrateur du radar à très longue portée – TLP –, élément de lutte antiaérienne mais aussi antibalistique, il impose, comme le rappelait mon collègue Xavier Pintat, de trouver un pays partenaire pour sa réalisation future et son implantation.

Monsieur le ministre, je veux vous donner acte de cet effort global sensible et soutenu en matière d’équipements et de programmes.

Toutefois, ce budget ne prend pas en compte un certain nombre de points qui, pour moi, sont essentiels.

Tout d’abord, mes collègues l’ont évoqué, le Mirage 2000D, excellent appareil, deuxième pilier de nos forces aériennes, le Rafale étant le premier, pourrait, sous réserve d’une rénovation de ses systèmes d’armes, être opérationnel jusqu’en 2024, ce qui éviterait d’avoir à réduire le format de notre aviation de combat de 77 appareils d’ici à la fin de la décennie.

De la même façon, je regrette, comme mes collègues, le report du programme MRTT. Lors de la crise libyenne, on a bien vu la nécessité de disposer d’une véritable flotte de ravitailleurs. En effet, sans le soutien, dans 80 % des cas, des ravitailleurs américains, la faiblesse des appareils européens n’aurait pas permis d’intervenir en Libye ou aurait rendu les choses beaucoup plus difficiles. De surcroît, la nécessité de ces ravitailleurs est indispensable pour la composante aérienne de notre dissuasion. Or, dans l’attente du programme MRTT, il est nécessaire d’intervenir et d’investir dans une rénovation partielle des C135 et KR ; à cet égard, une meilleure anticipation aurait certainement permis d’éviter ces travaux sur des appareils vieillissants.

Je regrette, moi aussi, qu’aucun crédit ne soit alloué à la défense antimissile balistique, alors qu’au sommet de Lisbonne, il y a un an, la France s’est engagée dans cette voie avec l’OTAN. Dans un récent rapport d’information, Xavier Pintat, Daniel Reiner et moi-même avons montré que, s’il n’y a pas de menace militaire directe, des investissements dans le domaine de la R&D sont néanmoins indispensables pour sauvegarder notre savoir-faire ainsi que notre base industrielle technologique de défense, et pour faire évoluer notre outil de dissuasion. Il me semble qu’au moins la mise en place d’un « centre français antimissile », dont nous préconisons la création, aurait pu être prévue ; cela n’aurait quasiment rien coûté. Un tel centre permettrait de faire dialoguer nos chercheurs et nos experts, notamment sous l’autorité, côté État, de la DGA et de l’ONERA.

Je salue un début de rénovation de nos radars de défense aérienne, mais ce budget est insuffisant pour passer de la défense antiaérienne à la défense antimissile. Or, au sommet de Chicago, en mai 2012, nos amis américains pousseront l’OTAN vers un C2 qu’ils auront conçu et qui ne nous permettra pas de garder la souveraineté sur l’espace exo-atmosphérique européen.

Monsieur le ministre, s’agissant de l’indigence du drone MALE, je peux vous assurer que nous partageons votre volonté de donner à la France des compétences dans ce domaine pour aboutir, en 2020, à un drone de troisième génération, si possible franco-britannique, et préparer l’UCAV – c'est-à-dire un avion de combat non piloté – du futur.

Nous pensons que le choix du Heron TP, à cent pour cent israélien, ne profitera que marginalement à Dassault- Thales et, surtout, qu’il prive nos armées d’un outil opérationnel, performant, éprouvé, armé et interopérable avec nos alliés, dont nos troupes ont un urgent besoin.

Je reviendrai sur ce dossier tout à l'heure lors de la discussion de l’amendement de la commission des affaires étrangères.

Monsieur le ministre, ne voyez pas, dans ces quelques réflexions, une volonté de gêner votre action : il s’agit plutôt de faire avec vous les bons choix pour notre pays. Si le mot « délibérer » a bien un sens, c’est celui que nous lui donnons ce soir : peser le pour et le contre, au service d’une meilleure efficacité de la décision publique.

C'est la raison pour laquelle le groupe UMP votera les crédits de la mission « Défense ».

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Boulaud

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je voudrais à mon tour, au nom de mon groupe, rendre un hommage tout particulier à l’ensemble de nos soldats ; nous avons une pensée spéciale pour ceux d’entre eux qui, cette année, ont fait le sacrifice de leur vie en Afghanistan.

Monsieur le ministre, le temps est venu de jouer cartes sur table. Les temps qui viennent seront difficiles pour le budget de la défense, comme pour l’ensemble des budgets.

Par conséquent, le Gouvernement serait bien inspiré de cesser de nous cacher la vérité – à nous, mais surtout aux militaires, qui ne sont plus dupes – en nous présentant des chiffrages fictifs, des programmations en trompe-l’œil, et en projetant d’année en année des ressources exceptionnelles dont tout le monde a compris qu’elles sont comme les mirages : elles s’éloignent au fur et à mesure que l’on croit s’en approcher.

C’est en réalité depuis 2002 que la défense fait l’objet d’une véritable fiction budgétaire. Et force est de constater que, depuis 2007, la situation ne s’est pas arrangée.

Hélas, mon propos n’est pas seulement partisan, tant l’inquiétude perce non seulement chez tous les parlementaires qui s’intéressent à ces questions, mais aussi chez les experts qui ne cessent de tirer le signal d’alarme : l’insincérité budgétaire nuit à la crédibilité militaire.

En 2012, notre pays devra faire des choix, trop longtemps repoussés, retardés ou ajournés, concernant nos équipements, nos matériels. Toutefois, si la dégringolade financière devait se poursuivre, la France serait contrainte une fois de plus de retoucher les formats, de revoir la carte militaire et, ainsi, de tailler dans nos capacités, ce qui est tout aussi grave.

Voilà l’héritage des gouvernements qui, depuis 2002, se succèdent, soutenus par une majorité docile.

Bien entendu, nous sommes tous conscients des difficultés financières, de « l’état de faillite » qu’aime à déplorer M. Fillon.

Mais je tiens à l’affirmer solennellement, pour le regretter : vos successeurs issus des élections de 2012, quels qu’ils soient, auront à prendre les décisions que vous aurez esquivées pendant dix années. Ce ne sera pas facile ; ce sera même probablement très douloureux.

Certes, les difficultés budgétaires ne concernent pas seulement la France. Si la Chine augmente encore et encore son effort de défense, elle constitue une exception, ou presque. Nous le savons, pour la première fois depuis trente ans, les États-Unis diminuent leur budget militaire, et ils ne le font pas en aveugles : ils opèrent des choix et rendent de vrais arbitrages. Ils ont ainsi décidé d’augmenter leurs dépenses d’investissement et de recherche, pour maintenir et même accroître leur avancée technologique sur les autres puissances.

Le Président de la République, pourtant si prompt d’ordinaire à emboîter le pas aux États-Unis, serait bien inspiré, cette fois, de suivre leur exemple.

Car, c’est le moins que l’on puisse dire, la situation en Europe n’est guère brillante. Tous les budgets sont à la baisse. Le Royaume-Uni et l’Allemagne, se refusant aux maquillages budgétaires dans lesquels nous sommes passés maîtres, ont annoncé publiquement une diminution – de 15 % pour le premier et de 14 % pour la seconde – de leur budget militaire, d’ici à 2014.

Pourtant, la réponse à nos problèmes devrait être européenne. Plus personne ne le conteste : une politique de défense et de sécurité exclusivement nationale n’a pas d’avenir.

Vue d’Amérique, l’Alliance atlantique n’a déjà plus l’importance qui fut la sienne au XXe siècle. Le redéploiement de la puissance militaire américaine épouse déjà les nouvelles lignes de ses intérêts stratégiques et commerciaux, ses intérêts de puissance, qui la mènent vers le Pacifique.

Or la politique en matière de défense européenne du Gouvernement français ne semble pas prendre en compte cette nouvelle donne : il semble qu’en dehors de l’OTAN et de la coopération franco-britannique, saupoudrée d’une bonne dose de suivisme à l’égard des États-Unis, il n’y ait point de salut !

Pour ma part, je considère que la France pourrait faire preuve de souci dans la recherche de compromis, d’un peu moins de naïveté et de plus d’imagination ; elle pourrait aussi marquer davantage de détermination dans la recherche de la construction européenne en matière de défense, dont on nous disait pourtant il y a peu qu’elle était l’un des deux points incontournables pour opérer le retour de la France dans le commandement intégré de l’OTAN.

D’abord, la France doit faire preuve de plus de souci dans la recherche du compromis. Pour ce faire, n’aurait-il pas été judicieux, en matière de défense, d’avancer vers la réalisation d’un Livre blanc européen associant tous les partenaires, à tout le moins ceux qui le souhaitent, pour une meilleure coordination de la planification de la défense, de ses besoins et de ses moyens ?

Ensuite, la France doit faire preuve de plus d’imagination. En effet, nous ne saurions rester cantonnés à un mouvement binaire et alternatif, consistant à marcher tantôt avec les Allemands, tantôt avec les Britanniques ! Nous ne devons pas nous enfermer dans des coopérations bilatérales qui sont loin de faire progresser l’ensemble et cristallisent les rancœurs parmi les pays qui se sentent écartés.

Enfin, la France doit faire preuve de plus de détermination, d’une part, pour mener une politique européenne cohérente, capable d’articuler sécurité, défense et développement, en tirant le meilleur parti du traité de Lisbonne afin de faire avancer la politique de sécurité et de défense commune et, d’autre part, pour résoudre la question récurrente de la création d’un centre de planification et de commandement militaire pour les opérations de l’Union européenne.

Monsieur le ministre, vous êtes pleinement responsable du « faire » ou du « ne pas faire » de la France en la matière ; c'est la raison pour laquelle je vous pose les questions suivantes.

Premièrement, nous avons été informés des difficultés que rencontrait le commandant de l’opération Atalante à avoir suffisamment de bâtiments sur place dans la lutte antipiraterie ; nous connaissons également le manque d’effectifs des unités de police au Kosovo. Ces difficultés s’ajoutent à celles d’EUPOL en Afghanistan, qui ne datent pas d’hier. Quelles sont exactement ces difficultés, et que fait-on pour les résorber ?

Deuxièmement, le Parlement européen a pris acte, dans un rapport, des diminutions sans précédent opérées dans les budgets de la défense des États membres de l’Union européenne. Pour en compenser les effets, il propose une démarche comprenant une meilleure coordination de la planification de la défense, une harmonisation poussée des exigences militaires, la mise en commun et le partage de certaines fonctions et moyens, une coopération améliorée dans la recherche et le développement technologique, la collaboration et la consolidation industrielles, l’optimisation du processus de passation des marchés et la suppression des entraves au marché.

Vaste programme ! me direz-vous… Il n’empêche que je souhaiterais entendre vos suggestions d’action sur chacun de ces points.

Troisièmement, enfin, permettez-moi de vous poser une question liée à l’actualité.

Monsieur le ministre, je n’ai attendu ni les prises d’otages – qui, hélas, se multiplient – ni les retombées de la guerre en Libye : cela fait dix ans qu’en commission j’interroge et j’alerte les Gouvernements successifs sur la dégradation de la situation au Sahel. Pourtant, je n’ai jamais eu que peu de réponses ; je n’ai parfois même pas eu de réponse du tout, alors que tout le monde s’accorde désormais à dire que la situation au nord du Mali, aux confins de l’Algérie et du Niger, devient particulièrement préoccupante.

Dans l’édition du 23 novembre dernier d’un journal du soir, M. Éric Peters, conseiller du président de la Commission européenne, l’a affirmé avec force, tout en regrettant que les plans envisagés restent dans les cartons.

Monsieur le ministre, cela signifie-t-il que, tout en étant consciente des risques et périls pour la sécurité commune, l’Europe resterait l’arme au pied ? Ce ne serait ni sérieux ni responsable, car ces événements se passent aux portes de l’Europe !

Attendons-nous que la situation devienne totalement ingérable, socialement et politiquement, au point que seule une intervention militaire puisse être alors envisagée ? Que faisons-nous ? La France a-t-elle proposé à l’Union européenne de réagir enfin et de sortir ces plans des fameux cartons bruxellois ?

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de René Beaumont

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’examen des crédits de la mission « Défense » pour 2012 s’inscrit cette année dans un contexte des plus particuliers, et pas seulement parce que la majorité sénatoriale a changé…

Depuis 2008, notre pays est touché par l’une des crises économiques et financières les plus graves que nous ayons connues. En 2011, s’ajoute la crise de la dette, dont personne ne sait quand elle finira.

Que cela nous plaise ou non, nous touchons à la fin de l’ère où les États dépensaient sans compter, sans justifier leurs choix, quitte à hypothéquer l’avenir des générations futures.

Parallèlement, les bouleversements géopolitiques s’accélèrent et les menaces, qu’elles soient étatiques ou non, se multiplient. Aujourd’hui, les guerres sont asymétriques. Alors, mes chers collègues, permettez-moi de rester perplexe quand j’entends dire, comme on l’a fait cet été à La Rochelle, par exemple, que « le terrorisme n’est pas une menace militaire et qu’il ne peut être assimilé aux menaces d’invasion ou d’agression du passé ».

Reconnaître que, de la situation à Islamabad, à Kaboul, à Pyongyang ou à Téhéran dépend la sécurité des Français tant sur le sol national qu’à l’étranger, c’est voir le monde tel qu’il est. Ce sont précisément les orientations que le Livre blanc sur la défense et la sécurité nationalea mises en avant. Les enlèvements, les assassinats de nos concitoyens hors de nos frontières, et tout récemment encore, en sont, hélas ! de tragiques illustrations.

Même si le Livre blanc de 2008 a accordé une place trop importante, paraît-il, au terrorisme, il aura eu le mérite d’être élaboré en association avec les parlementaires des commissions des deux assemblées ; raison pour laquelle, sans doute, Mme Valter, secrétaire nationale à la défense rue de Solferino, l’a jugé « conservateur »...

Assurer la sécurité des Français et celle de nos intérêts vitaux, tel est le rôle de la défense. Mais la défense est aussi le bras armé de notre diplomatie : dans ce domaine, l’année 2011 marquera un tournant pour nos armées. Jamais la France n’a été présente sur autant de théâtres d’opérations. Que ce soit au Liban, en Afghanistan, en Côte d’Ivoire, en Libye, mais aussi aux confins de nos territoires d’outre-mer, les soldats français font l’honneur de notre pays. Leur courage, leur professionnalisme et leur dévouement sont à la hauteur des valeurs, des idéaux défendus par la France sur la scène internationale et du combat qu’elle mène pour la paix.

Alors, au moment où certains considèrent que les défilés militaires sont des réminiscences d’« une autre période » ou d’« une France guerrière », en tant qu’élu de la représentation nationale, je tiens à rendre un hommage solennel à tous ces hommes et à toutes ces femmes qui font la défense française. Nous sommes fiers d’eux, et pas seulement le 14 juillet ! Cela dit, n’en déplaise à certains, le défilé du 14 juillet demeure un rendez-vous incontournable des Français avec leur histoire et avec leurs soldats, pour qui, depuis Valmy, la patrie a encore un sens.

L’année 2011 et les crises qui l’auront ponctuée nous imposent d’être responsables et raisonnables, au sens propre du terme : c’est notre devoir d’élus.

Assumer ses responsabilités dans le domaine de la défense, c’est répondre à un triple défi : être visionnaire et établir des priorités stratégiques entre les missions, sans pour autant sacrifier tel ou tel programme ; éviter, malgré les difficultés budgétaires, que l’outil de défense ne soit, comme ce fut malheureusement le cas par le passé, une variable d’ajustement des finances publiques ; enfin, assurer à nos soldats les moyens de leurs missions, depuis la préparation sur le terrain et jusqu’à la reconnaissance de la Nation.

Je ne reviendrai pas sur le détail des chiffres : les différents rapporteurs se sont exprimés largement sur chacun des programmes de la mission « Défense », et avec beaucoup de pertinence, au point que leur expertise fait, paraît-il, pâlir les bureaux et les techniciens aguerris du ministère.

Mais la discussion budgétaire sur les crédits de la défense doit, selon moi, prendre aussi en compte la réalité et les évolutions des dispositifs de défense à l’étranger, sur tous les territoires.

Avant tout, n’oublions pas que le ministère de la défense a déjà entrepris, et à plusieurs reprises, une politique de réforme. Ces restructurations ont créé un cercle économiquement vertueux puisque les économies réalisées ont été directement réinvesties au bénéfice des armées.

Debut de section - Permalien
Gérard Longuet, ministre de la défense et des anciens combattants

Exact !

Debut de section - PermalienPhoto de René Beaumont

M. René Beaumont. Peu nombreux sont les ministères qui peuvent aujourd’hui se targuer d’une telle capacité ! Sur ce point, je me félicite de soutenir un gouvernement pour qui « gestion » ne rime pas systématiquement avec « création de postes ». Si certains crient encore haro sur la RGPP, en ce qui concerne le ministère de la défense, celle-ci aura néanmoins permis de mieux protéger et de mieux équiper nos soldats sur le terrain.

M. le ministre de la défense acquiesce.

Debut de section - PermalienPhoto de René Beaumont

Dans un deuxième temps, je souhaite attirer votre attention sur un point essentiel. En période de crise, il est « moralement correct » de dire que les dépenses de défense sont immorales. Qui d’entre nous n’a pas été interpellé par les associations antimilitaristes, rouges ou vertes, qui nous accusent d’être inféodés aux marchands de canons ? §

Or la défense, c’est une économie, un savoir-faire, une garantie de souveraineté et d’indépendance. Le secteur de la défense et les industries qui le composent sont des leviers fondamentaux pour la société civile et pour notre économie. La défense, en France, ce sont aussi des filières d’étude et d’apprentissage d’excellence. Ce sont des ingénieurs, mais aussi des artisans chevronnés, dont le savoir-faire est précieux.

Justement, au moment où les taux de chômage en Europe progressent de façon vertigineuse, il faut rappeler que la défense représente en France 165 000 emplois directs et autant d’emplois indirects, que près de 4 000 PME vivent de la sous-traitance des grands groupes, que les investissements en recherche et développement de ces groupes industriels constituent le meilleur rempart contre un décrochage technologique et capacitaire. Plus que jamais, il nous faut préserver les domaines de haute technologie, tels que l’aéronautique et le spatial !

À l’heure où les dépenses militaires chinoises devraient atteindre 91, 5 milliards de dollars, soit un budget en hausse de 13 % par rapport à 2010, il est primordial que la France et ses partenaires européens ne sacrifient pas ce qu’il reste de la défense européenne.

Je sais que, sur ces travées, nombre d’entre vous évoquent l’Arlésienne lorsqu’il est question de défense européenne ou de base industrielle technologique de défense européenne. Il est vrai que, en 2010, nos voisins européens ont procédé à de sévères coupes dans leur budget militaire. Toutefois, aux eurosceptiques qui pensent que la crise leur donnera raison on peut répondre que cette même crise oblige les États à mutualiser les efforts afin de mieux répartir les coûts.

Debut de section - PermalienPhoto de René Beaumont

J’en veux pour preuve le traité de Lancaster House, signé entre la France et le Royaume-Uni. Cet accord a, en outre, permis de créer une dynamique de coopération entre les parlements des deux pays, et je souhaite, à cet égard, rendre un hommage particulier à l’action déterminante de l’ancien et éminent président de notre commission des affaires étrangères Josselin de Rohan.

En fait, deux traités ont été signés : le premier fixe le cadre et les orientations de la coopération. Il porte création d’une force expéditionnaire interarmées commune de plusieurs milliers d’hommes, mobilisable pour des opérations extérieures bilatérales ou placées sous les drapeaux de l’OTAN, de l’ONU ou de l’Union européenne.

Le deuxième traité permettra aux deux pays de simuler, à partir de 2014, le fonctionnement de leur arsenal atomique dans un même laboratoire implanté en Bourgogne, sur le site de Valduc. Parallèlement, un centre de recherche, ouvert aux spécialistes des deux pays, sera implanté dans le sud-est de l’Angleterre.

Pour la France et le Royaume-Uni, qui sont deux puissances nucléaires européennes, cette coopération instaure une interdépendance qui respecte la souveraineté de chaque partie. Cette mutualisation des technologies n’altère pas nos capacités de dissuasion nucléaire respectives et renforce nos capacités communes.

Par ailleurs, nos deux pays ont adopté une position commune sur le nouveau concept stratégique de l’OTAN. Nos forces nucléaires participent pleinement à une dissuasion globale qui fonde le socle de défense collective. Je vous rappelle, mes chers collègues, que ces accords ne sont rendus possibles que par la réintégration de la France au sein du commandement intégré de l’OTAN.

Debut de section - PermalienPhoto de René Beaumont

Monsieur le ministre, vous rentrez d’Allemagne, où vous avez été auditionné par le Bundestag. Pouvez-vous nous éclairer sur les futures possibilités de collaboration et de mutualisation de moyens ou de programmes avec l’Allemagne ? Depuis votre passage à Berlin, disposez-vous de nouveaux éléments qui pourraient permettre d’élargir le sommet franco-britannique du 2 décembre prochain ?

Debut de section - PermalienPhoto de René Beaumont

Le très francophile secrétaire d’État à la défense allemand, M. Beemelmans, a formulé le vœu de faire « table rase du passé ». Quelles seront les grandes lignes du conseil franco-allemand de défense, prévu au début de l’année prochaine ?

Monsieur le ministre, il importe aux parlementaires que nous sommes de voter des politiques fondées sur des solutions équilibrées, surtout financièrement, qui puissent répondre aux défis nationaux et européens.

L’établissement d’une véritable base industrielle de défense européenne est indispensable. Les choix d’aujourd’hui engagent nos armées pour quinze ans, ainsi que notre outil de défense tout entier.

Si la France peut s’enorgueillir d’être l’une des premières puissances du monde, elle demeure l’un des rares pays, avec les États-Unis et le Royaume-Uni, à être présent militairement de manière permanente sur les cinq continents. Cela n’est possible que si notre pays reste un leader politique et technologique, notamment à l’heure où les transferts de technologies constituent le véritable enjeu de notre outil de défense.

Mes chers collègues, je vous invite à voter les crédits de la mission « Défense » tels qu’ils sont présentés par M. le ministre.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Richard

M. Alain Richard. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, comme aurait pu dire Magritte : ceci n’est pas une intervention budgétaire !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Richard

À raison des fonctions que j’ai occupées, je ne pense pas jouer un rôle utile dans le débat sénatorial, déjà très riche, en portant une appréciation publique sur la gestion du département par le ministre qui en a aujourd’hui la charge. De très bons rapports et d’excellentes interventions dans la discussion générale y ont largement pourvu.

En revanche, mes chers collègues, je voudrais vous livrer quelques réflexions, en dehors des clivages politiques, sur la condition sociale et professionnelle des personnels militaires. En effet, comme vous le savez, et c’est un des acquis de notre République, ces derniers ne détiennent pas de droit d’expression publique sur leur propre situation : il revient donc à d’autres instances, et tout particulièrement au Parlement, qui n’a pas tellement d’autres occasions de le faire, de relayer les préoccupations que cette situation peut susciter, de se pencher sur ses points de fragilité. Nous devons le faire dans un esprit d’équité et de justice sociale, mais aussi dans l’intérêt de la défense tant il est vrai que l’attractivité de la condition militaire est la clé d’une ressource humaine suffisante à l’avenir ; et cela reste vrai, en particulier, pendant la crise économique que nous vivons.

Je voudrais, de ce point de vue, évoquer trois sujets : la mobilité, le logement et la santé.

La mobilité s’est accélérée et intensifiée. Certes, elle fait partie des obligations des militaires, mais elle se fait plus contraignante et plus rapide en raison des restructurations ; c’est une situation que nous avons déjà connue. Ainsi, alors que la mobilité fait partie de la condition habituelle et assumée des officiers, en période de restructurations, elle s’étend très largement aux sous-officiers et aux militaires du rang.

Du fait de la prolongation et de l’intensité des réductions d’emplois que nous observons, on constate aussi des situations de double mobilité : certains personnels sont ainsi touchés deux fois de suite, en peu d’années, par des restructurations.

Je veux souligner, en quelques mots, les effets de cette obligation de mobilité intensifiée sur la situation des familles et sur l’emploi des conjoints.

Je crois que, comme l’a judicieusement observé le Haut Comité d’évaluation de la condition militaire, le Gouvernement et le commandement doivent veiller à ce que les délais de préavis des mobilités soient les plus longs et les plus fermes possible. Je souhaiterais donc que le Gouvernement indique s’il peut nous donner des assurances à ce sujet.

S’agissant du logement, les difficultés, réelles, sont issues de la spécificité du métier militaire.

Je voudrais insister sur les difficultés qui pèsent plus spécialement sur les jeunes sous-officiers et sur les militaires du rang, en raison à la fois de leurs ressources limitées, mais aussi en fonction du lieu de leur affectation : chacun sait quels problèmes cela pose dans les grandes zones urbaines comme l’Île-de-France. Des efforts sont réalisés pour les aider à se loger de manière adéquate, mais les situations difficiles sont loin d’être toutes éliminées.

Les questions de santé et le traitement des lésions physiques sont d’abord l’occasion de rappeler le nombre de décès et de blessés graves parmi les militaires, qui s’élève, chaque année, à plusieurs dizaines, pour l’essentiel lors d’opérations ou du fait d’accidents de service.

Des progrès restent à faire, me semble-t-il, sur le suivi des blessés en opération qui ne sont plus aptes à reprendre un service militaire. En effet, les droits des militaires en matière d’accompagnement à la reconversion civile ne sont pas reconnus aux blessés devenus inaptes. J’attire l’attention du Gouvernement sur ce point, qui me paraît devoir être revu.

L’action d’accompagnement menée par les associations est tout à fait estimable, témoignant d’une forte solidarité au sein du milieu militaire, mais elle ne doit pas conduire l’État à être négligent à l’égard de ces situations douloureuses.

Je reprendrai à mon compte les propos de François Trucy et de plusieurs collègues concernant le service de santé des armées : il faut soutenir son rôle essentiel et sa spécificité au sein des forces armées.

Les discussions engagées à la suite du rapport de la Cour des comptes sur le coût du service de santé des armées sont certes légitimes, mais celui-ci ne saurait être évalué financièrement comme un système de santé civil. L’échelle de mesure n’est pas la même. Ce service a d’abord une fonction essentielle de soutien en opération, tout en étant un moyen privilégié de sauvegarde des populations civiles. Il est donc un support majeur de nos responsabilités internationales et stratégiques.

Je conclurai, monsieur le président, en soulignant l’importance du dialogue social spécifique qui doit être maintenu au sein de la communauté militaire. Les syndicats du personnel civil peuvent d’ailleurs y jouer un rôle, en complétant l’appréhension des problèmes sociaux par l’autorité. Les instances de concertation à la fois dans les unités et à l’échelle nationale sont essentielles. Monsieur le ministre, je souhaiterais que les points principaux relevés dans leurs débats par les conseils de la fonction militaire soient transmis au Parlement, afin de nourrir le dialogue républicain.

Je rappelle de nouveau le rôle précieux que joue le nouveau Haut Comité d’évaluation de la condition militaire : le Gouvernement serait bien inspiré de répondre en temps utile à ses préconisations.

Les ressources humaines sont le fondement même du potentiel de défense de notre pays. La défense a gardé une bonne image d’employeur, qu’il convient de sauvegarder, de manière que nos armées restent attractives pour les jeunes.

Au terme de ces quelques observations, je crois exprimer le sentiment de tous en disant notre respect et le soutien de la représentation nationale à la collectivité militaire de notre pays.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV. – M. Jean-Marie Bockel applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Xavier Pintat

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je souhaiterais vous livrer plusieurs observations.

Premièrement, dans le contexte actuel marqué par une crise financière sans précédent et une contrainte budgétaire importante, l’effort de défense de notre pays reste significatif. On ne peut que s’en réjouir et je vous remercie, monsieur le ministre, d’y avoir veillé.

Par le passé, le budget d’équipement a trop souvent joué le rôle de variable d’ajustement. Or, on le sait, ce n’est pas de bonne pratique budgétaire.

Une réduction de la quantité d’unités commandées d’un programme se traduit mécaniquement par l’augmentation du coût unitaire des équipements, parfois dans des proportions excessives. Un avion de combat n’est pas un avion de ligne. Il y a des coûts non récurrents de recherche et développement qui ne peuvent être amortis que sur de longues séries, et réduire les quantités ne réduit pas les coûts. Cette pratique a été abandonnée ; c’est une bonne chose et j’espère qu’elle ne sera pas remise au goût du jour.

Deuxièmement, ne nous berçons pas d’illusions : le gouvernement au pouvoir l’année prochaine ne disposera plus de recettes exceptionnelles. Il devra donc faire le choix, soit d’augmenter les crédits budgétaires pour maintenir l’effort de défense français à son niveau actuel, soit de diminuer les dépenses, et donc très probablement les crédits d’équipement.

Nous sommes nombreux à avoir du mal à croire que, si la situation économique et budgétaire internationale ne s’améliore pas sensiblement, il nous soit possible de maintenir l’effort de défense au niveau auquel il se situe. Il faudra donc envisager des réductions. Autant nous y préparer tout de suite, quelle que soit notre appartenance politique, afin d’être prêts le moment venu et de ne pas opérer des choix au dernier moment, dans la précipitation.

Cela m’amène à ma troisième remarque. Quand on doit opérer des réductions de crédits en matière d’équipements de défense, il importe, d’une part, de faire des choix guidés par des principes et, d’autre part, de veiller à la cohérence d’ensemble du format des armées.

Pour ce qui est des principes de choix, le Livre blanc fournit une aide précieuse à la décision puisqu’il distingue trois cercles de souveraineté industrielle : les équipements dont il faut absolument conserver la maîtrise, c’est-à-dire être capables de les fabriquer entièrement, ceux que l’on peut réaliser en coopération et, enfin, ceux que l’on peut acheter sur étagères. La question est donc de savoir ce que l’on met dans chacun de ces cercles.

Or, de ce point de vue, monsieur le ministre, je suis étonné de constater que ce projet de loi de finances ne contient que très peu de chose concernant la défense antimissile balistique, sinon quelques crédits dans le programme 144 pour la réalisation d’un démonstrateur de radar à très longue portée, le TLP, pour 30 millions d’euros.

En revanche, 320 millions d’euros d’autorisations d’engagement sont consacrés à la constitution d’une filière franco-israélienne de drones MALE, et nous savons tous que le chiffre final sera certainement plus proche du double, ce qui mettrait le drone MALE au prix du Rafale ! Et tout cela parce que nous ambitionnons de le construire seuls, au lieu d’acheter sur étagères des drones MALE identiques à ceux de nos amis européens, avec qui nous pourrions faire de la mutualisation, autrement dit du pooling and sharing, qui donnerait de la consistance à l’Europe de la défense.

Je me pose donc la question : est-il plus important de veiller à ce que la crédibilité de notre dissuasion nucléaire reste intacte, à ce que les industriels français et européens – je pense à Astrium, à MBDA, à Thales – puissent disposer des crédits d’études pour acquérir des technologies de rupture, ou bien de savoir fabriquer des drones de deuxième génération ? Cela se discute, j’en conviens.

Car il faut bien reconnaître que la menace balistique iranienne sur l’Europe en général et sur la France, puissance nucléaire, en particulier, n’est que peu probable. Je ne dis pas que cette menace n’existe pas, mais elle nous concerne peu. Nous connaissons les ennemis stratégiques de l’Iran : ils se situent au Moyen-Orient.

En fait, la défense antimissile balistique, pour nous, est tout sauf un objet militaire : c’est une locomotive industrielle et technologique qui permet d’accéder à la maîtrise de son propre espace atmosphérique ; c’est un levier commercial qui permet de vendre d’autres équipements ; c’est un outil diplomatique qui permet de structurer les alliances ; in fine, c’est un instrument stratégique qui risque d’émousser la crédibilité des forces de dissuasion nucléaire de l’ensemble des États dotés, y compris le nôtre.

De ce point de vue, il serait important que le Gouvernement fasse connaître ses orientations sur la façon dont il entend se préparer au sommet de Chicago. Nous regrettons d’ailleurs que le rapport que nous avions rendu à la demande du président Josselin de Rohan n’ait pas été pris en compte et que, comme le rappelait Jacques Gautier, même la constitution, pourtant peu onéreuse, d’un centre national de la défense antimissile, véritable forum d’aide à la décision, n’ait pas été concrétisée.

Cette absence d’engagement sur un sujet mettant en cause la souveraineté nationale et sur lequel nous sommes seuls en Europe à avoir les moyens de notre indépendance peut surprendre.

En regard de cela, vous le savez bien, monsieur le ministre, votre argumentaire en faveur de l’achat des drones israéliens Heron TP n’a pas convaincu notre commission.

Je ne dis pas que les drones ne sont pas importants ; je dis qu’il faut faire des choix. Nous sommes nombreux à préférer acheter des drones de deuxième génération sur étagères et mettre l’argent public dont nous disposons sur des satellites d’écoute, comme CERES, ou d’alerte avancée, comme le successeur de Spirale. D’autant que nous sommes convenus, par ailleurs, de construire des drones de troisième génération, les drones du futur, en coopération avec nos amis britanniques.

Pour ce qui est maintenant de la cohérence, quel que soit le format d’une armée, il faut s’assurer qu’elle dispose de l’ensemble des armements nécessaires, avec des personnels ayant reçu la formation adéquate et les heures d’entraînement requises.

Or nous avons parfois le sentiment que nous nous lançons dans de grands programmes d’équipement pour des raisons sans doute fondées du point de vue industriel, mais dont la cohérence d’ensemble nous échappe. Tout le monde sait, et ce gouvernement n’en est pas responsable, que le fait de lancer un seul porte-avions n’avait pas grand sens et qu’il valait mieux en prévoir deux ou aucun. De la même façon, était-il nécessaire, en termes militaires, de lancer un troisième BPC, alors que nous avons des difficultés à en équiper un ?

Enfin, dans le domaine aéronautique, nous avons le Rafale, qui est un avion d’excellente qualité, mais il faut maintenant avoir les pods de désignation d’objectifs adéquats, des avions ravitailleurs, des moyens de renseignement suffisants et peut-être des drones MALE capables de traverser la Méditerranée.

C’est cela, la cohérence, et j’ai le sentiment que nos choix en matière d’équipement sont trop souvent guidés par des considérations industrielles – ce qui est au demeurant tout à fait louable – et pas assez souvent par des considérations militaires.

Revenons-en au domaine de la défense antimissile, que je connais bien. Vous avez choisi de reporter à 2020 la réalisation d’un satellite d’alerte avancée et de lancer les études amont permettant de construire un démonstrateur de radar de surveillance à très longue portée. Le radar lui-même pourrait être commandé en 2015 pour une mise en service en 2018. Or l’utilité optimale de ce radar nécessite qu’il soit placé à proximité de la menace. En l’occurrence, cela aurait du sens de le placer dans un pays du Golfe ou en Turquie.

À défaut d’utilisation dans une configuration antibalistique, quelle sera l’utilité de ce radar ? N’aurait-il pas mieux valu, pour la même somme, effectuer des coopérations avec nos alliés néerlandais sur le radar SMART-L qui équipe les frégates Horizon ? Nous aurions ainsi pu disposer de la même capacité, interopérable, non seulement avec les Néerlandais, mais éventuellement avec les Italiens, qui ont aussi des frégates Horizon, et avec les Anglais, qui ont le même type de frégates et le même système de défense antiaérien, le PAAMS.

Telles sont, en résumé, monsieur le ministre, mes observations et mes interrogations sur ce projet de budget. Les quelques critiques et interrogations que je viens de vous livrer ne doivent pas être l’arbre qui cache la forêt et masquer l’appréciation globalement positive que le groupe UMP, auquel j’appartiens, porte sur l’ensemble du budget.

Depuis cinq ans, les forces françaises ont subi une transformation sans précédent. Elles ont, dans le même temps, bénéficié d’équipements de grande qualité, à un niveau que je qualifierai dans l’ensemble d’adéquat.

Elles ont, par ailleurs, fait preuve d’un grand professionnalisme, quel que soit le théâtre sur lequel elles ont été déployées, en Afghanistan, en Côte d’Ivoire, en Libye ou ailleurs. C’est pourquoi les rapporteurs de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées du Sénat ont souhaité leur rendre un hommage appuyé.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP. – M. Jean-Marie Bockel applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Jeanny Lorgeoux

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, j’ai été associé cette année à l’étude des crédits du programme 144 « Environnement et prospective de la politique de défense » et plus particulièrement à l’action relative aux études amont. Vous trouverez nos observations dans le rapport écrit. Me consacrant également au renseignement, j’accorde une attention particulière, dans le programme 146, aux satellites et aux drones. Je souhaiterais donc soumettre trois observations à votre sagacité.

Je veux tout d’abord dire que personne, au Sénat, ne sous-estime l’importance de l’industrie de défense française : tout le monde est conscient, en particulier, de son poids dans l’économie nationale.

Ce qui fait la force de l’industrie de défense et la rend éminemment stratégique, c’est la valeur de sa recherche, qui est une recherche par rupture et non par incréments. C’est grâce à la recherche militaire, en particulier américaine, qu’ont été trouvées par effet de sérendipité certaines des innovations les plus structurantes des cinquante dernières années, telles que l’internet, le téléphone portable, les micro-ondes – mais vous savez tout cela aussi bien que moi !

Or nous avons la chance d’avoir en France une industrie de défense polyvalente et de compter plusieurs champions nationaux de grande valeur : EADS, Dassault, MBDA, DNCS, Thales, Safran-Sagem, Nexter, capables de fabriquer toutes sortes d’armements, de l’avion de combat au véhicule blindé. Nos amis allemands excellent dans la fabrication de voitures ; nous, dans la fabrication d’armements.

J’en viens à ma deuxième observation. Pour encourager l’industrie de défense, il est primordial d’avoir un flux d’études amont significatif et important.

Les études amont font travailler les bureaux d’études des différents industriels de la défense. Nous consacrons en France des crédits budgétaires d’un niveau significatif à ce secteur : de l’ordre de 750 millions d’euros par an. On pourrait penser que ce n’est pas assez et qu’il faudrait atteindre le montant symbolique d’un milliard d’euros, mais ne nous faisons pas d’illusions : nous n’avons pas les moyens d’aller au-delà. Du reste, le volume des crédits n’est pas tout. Il faut aussi se concentrer sur la cohérence des plans d’investissement.

Un exemple ? Nous nous interrogeons sur l’opportunité de la construction d’un démonstrateur de radar à très longue portée, dont le rapport d’information de nos excellents collègues Jacques Gautier, Daniel Reiner et Xavier Pintat du mois de juillet dernier montre qu’il n’a d’utilité militaire que s’il est placé près de la menace, en l’occurrence le golfe Persique.

Si ce démonstrateur s’avère concluant et que nous passons à l’étape suivante, monsieur le ministre, où comptez-vous faire installer un tel radar ? N’y avait-il pas des études plus rentables à mener, sur les radars transhorizon par exemple ? Pourquoi avoir reporté la construction du satellite d’alerte avancée et privilégié la construction du radar ? S’agit-il juste de faire travailler les bureaux d’études les uns après les autres, Thales après Astrium ?

Cela m’amène à ma troisième observation : encourager l’industrie de défense française, c’est bien ; favoriser les bureaux d’études c’est bien aussi, mais à condition que cela ne se fasse pas au prix de la « desquamation », fût-elle progressive, de l’équipement de nos forces.

Mon excellent collègue Daniel Reiner a montré tout à l’heure qu’il semblerait que vous agissiez davantage en ministre de l’industrie, préoccupé de remplir le plan de charges de ses industriels – ce qui, en soi, est très louable –, qu’en ministre de la défense, garant de l’équipement de ses forces.

Trois exemples illustrent la primauté accordée aux considérations industrielles par rapport à l’intérêt de nos forces armées.

Le premier est bien évidemment le retard pris concernant la rénovation des Mirage 2000D. Cette rénovation, déjà reportée l’an dernier, l’est de nouveau cette année. Nous avons compris que vous n’aviez plus l’intention de faire procéder à cette rénovation et que nous nous orientions désormais vers une aviation de combat française dont le format va encore décroître et qui sera exclusivement équipée d’avions Rafale. C’est bien pour l’industrie, mais est-ce bon pour la défense ? En matière d’armée, la qualité est certes cruciale, mais il faut aussi prendre en compte la quantité.

Le second exemple est celui du pod de désignation d’objectifs Damoclès. Ce pod, conçu naguère en coopération avec nos amis émiratis, permet la désignation de cibles terrestres d’un volume important et relativement peu mobiles : typiquement, des chars d’assaut ! Or l’expérience libyenne, mais aussi afghane, a montré qu’il faut disposer d’un pod de désignation plus performant, capable de désigner des cibles plus petites et plus mobiles. Un tel pod n’a pas été développé, car l’industriel refuse d’autofinancer le développement d’un pod de nouvelle génération. Mais nous n’avons pas l’intention d’en acheter sur étagères ! Nous continuons donc d’équiper nos avions d’armes avec un élément important du dispositif qui se trouve être inadapté.

Troisième et dernier exemple : les drones MALE. Vous demandez au Parlement, monsieur le ministre, les crédits nécessaires à l’achat de la solution la plus chère – elle coûte 30 % de plus, mais vous sembliez tout à l’heure contester ce chiffre – et la moins performante – 20 % de moins. Cet achat vise à permettre à Dassault, notre fleuron national, d’acquérir, aux frais du contribuable – cela me fait un peu penser au « veau sous la vache », et je vous demande de pardonner au sénateur rural que je suis la rudesse ou la crudité de cette métaphore agricole !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jeanny Lorgeoux

Nous nous sommes en effet engagés par traité à construire avec nos amis britanniques un drone de troisième génération. Ne parions pas sur l’échec de ce traité ! Comprenez, monsieur le ministre, que la perplexité soit grande dans les esprits.

Nos amis d’outre-Manche ont inventé en matière d’armement la théorie du best value for money. Vous ne méritez pas, monsieur le ministre, d’endosser la responsabilité ou la paternité, demain, du concept inverse, celui de worst value for money.

Ce sera la troisième fois que nous achetons des drones au même industriel : en 1997, nous avions acheté le drone Hunter ; en 2002, nous avons acheté le drone Heron ; en 2012 nous achèterons le drone Heron TP. Et je ne parle même pas du lancement du programme nEUROn en 2007 ! Certains esprits malins pourraient y voir plus que des coïncidences et parler, dans l’emballement, de « drone présidentiel », ce dernier adjectif renvoyant à l’élection, pas à la personne du Président.

Monsieur le ministre, balayez le doute, levez le soupçon, clarifiez le choix public ! Acceptez l’amendement « transpartisan » de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées et la voie de sortie honorable que vous propose le Sénat. Notre industrie s’y retrouvera. Souffrez donc que nous modifiions 80 millions d’euros sur les 31, 5 milliards des crédits de la mission. Sinon, autant faire l’économie de l’autorisation budgétaire !

Cela étant dit, monsieur le ministre, mutatis mutandis, s’agissant de l’essentiel national, et nos soldats étant engagés sur des théâtres de guerre extérieurs, je m’abstiendrai sur ces crédits, mais, croyez-le bien, il s’agira d’une abstention positive.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Josette Durrieu

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, à cette heure avancée, j’évoquerai assez brièvement la défense européenne.

Après les événements de Libye, qui ont vu l’engagement de la France et de la Grande-Bretagne, nous constatons avec amertume la faiblesse politique de l’Europe et le manque de capacités militaires communes : dans un cas comme dans l’autre, ce n’est pas une surprise !

En résumé, nous pourrions dire que l’Alliance atlantique restera longtemps encore la seule défense européenne.

Les opérations en Libye, qui semblent avoir coûté, selon les estimations de la France et de la Grande-Bretagne, entre 300 millions d’euros et 350 millions d’euros, ont montré l’efficacité, très largement reconnue, du dispositif militaire français ; il faut évidemment s’en féliciter.

Ces opérations ont également apporté la preuve de la performance des matériels utilisés et de la qualité de nos soldats, que nous saluons. Elles ont été l’occasion d’effectuer les premiers tirs opérationnels de missiles de croisière SCALP-EG et AASM-IR. Enfin, elles ont montré la polyvalence du Rafale et l’efficacité du Tigre.

Néanmoins, nous déplorons, cela a été dit, d’évidents points faibles : les drones de surveillance, les capacités, notamment satellitaires, en matière de renseignement, le ravitaillement en vol, assuré à 90 % par les États-Unis.

Tout cela traduit la faiblesse de la défense européenne face à des conflits qui se déroulent à nos portes. Or, Jean-Pierre Chevènement l’a indiqué tout à l’heure, les Américains se désengageront de plus en plus de l’Europe.

À cet égard, j’évoquerai maintenant les menaces qui sont trop souvent passées sous silence et qui tiennent aux fameux conflits gelés, c'est-à-dire non réglés. Il s’agit de reliquats de la période post-soviétique, figés sur un statu quo : ni guerre ni paix.

Je citerai le conflit de 1994 concernant la Transnistrie, à l’est de la Moldavie. Je citerai encore l’Abkhazie et le conflit de 1994, qui s’est lui déroulé en Géorgie. On connaît mieux le cas de l’Ossétie du Sud, où un conflit a eu lieu entre 2008 et 2009. Je citerai enfin le Haut-Karabagh, dans le Caucase du sud.

Je rappelle que tous ces États sont membres du Conseil de l’Europe et que tous sont situés aujourd'hui dans la zone dite du « voisinage proche » déterminée par l’Union européenne en 2003.

Je rappelle également que certaines opérations, comme l’opération EUBAM, sur le barreau Tiraspol-Odessa, entre la Transnitrie et l’Ukraine, font l’objet d’un accompagnement de l’Union européenne, dans cette zone où se déploient de grands trafics de toutes natures et qui, il faut aussi le souligner, reste sous l’influence de la Russie, dont elle constitue une chasse gardée.

L’Europe doit s’intéresser à ces conflits.

À cet égard, je vous poserai, monsieur le ministre, trois questions.

Quel pourrait être le format de la pacification ? Le Kosovo ne peut pas et ne doit pas être une référence !

Quels principes devons-nous faire prévaloir ? L’intégrité et la souveraineté des États, à coup sûr. Or je rappelle que ces principes-là n’ont pas été respectés en Géorgie, lorsque le président Sarkozy a fait cesser, et c’est heureux, le conflit, car il a aussi accepté l’occupation et la sécession. Le problème reste donc entier pour le futur.

Enfin, comment avoir des relations de bon voisinage avec la Russie, qui est toujours, directement ou indirectement, impliquée dans ces conflits ? Ce grand partenaire cherche sa place. Je pense qu’il doit la trouver et que nous devons l’y aider.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV.

Debut de section - PermalienPhoto de Rachel Mazuir

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je ne reviendrai pas sur les observations formulées par plusieurs de mes collègues. Je déplore tout de même que nous débattions de crédits qui pourraient être prochainement revus à la baisse, Didier Boulaud l’a dit, à l’occasion d’un énième plan de rigueur imposé par les marchés, les agences de notation ou Mme Merkel, voire par les trois !

Comme mes collègues l’ont rappelé, le cap fixé par la loi de programmation militaire n’est pas atteint, il s’en faut. À cet égard, je vous rappelle que, lors des débats du 16 juillet 2009, le groupe socialiste avait souligné l’absence de sincérité de ce texte, compte tenu de la surévaluation des recettes et de l’importance des frais entraînés par la politique du Gouvernement. Je pense, par exemple, aux conséquences du plan social résultant de la révision générale des politiques publiques.

De fait, les coûts engendrés sont aussi incertains que les gains attendus. Il n’est donc pas concevable de continuer de bâtir des prévisions budgétaires hypothétiques : il devient primordial d’ajuster les besoins aux moyens réellement accordés.

Permettez-moi maintenant, monsieur le ministre, de vous interroger sur deux points : le premier a trait aux ventes de matériels d’occasion et le second, aux disparitions répétées d’armes de grande puissance dans certains pays particulièrement instables.

Sur le premier point, j’observe que le sort des équipements militaires anciens reste mal identifié et soulève cette double interrogation : doivent-ils être usés jusqu’à la corde, puis démantelés, ou doivent-ils être revendus tant qu’ils sont encore utilisables ?

Il semble bien que, pour des raisons essentiellement budgétaires, ces équipements soient généralement utilisés jusqu’au bout – ce n’est d’ailleurs pas sans risque –, puis démantelés.

Deux études ont été réalisées sur ce sujet par deux députés de votre majorité, monsieur le ministre, dont je salue le travail : l’une par Mme Lamour, en 2007, l’autre par M. Grall, en mars 2011. Des propositions ont été faites, mais elles n’ont pas à ce jour reçu le soutien du Gouvernement.

Je ne m’attarderai pas sur le démantèlement de produits spécifiques issus du nucléaire, si ce n’est pour rappeler qu’une filière française excelle en la matière, grâce au soutien d’industries publiques et privées très en pointe. Je déplore cependant que l’État n’abonde pas le fonds dédié au soutien de cette filière, plébiscitée et utilisée même par les Américains. Elle est notamment spécialisée dans le recyclage du plutonium, lequel, comme vous le savez tous, est le composant essentiel du MOX.

Monsieur le ministre, le Gouvernement entend-il réellement contribuer au financement de ce fonds à hauteur de 1, 5 milliard d’euros, comme il s’y était engagé ?

Le stock constitué par les autres matériels à démanteler reste très important en France et son écoulement annuel est limité. Notre pays pourrait toutefois, là encore, accélérer ce processus si une réelle volonté politique se dessinait.

Je reconnais bien volontiers, monsieur le ministre, que le coût de ces travaux peut sembler démesuré au regard des retombées économiques immédiates. Pourtant, ce n’est pas lorsque nous serons confrontés à l’arrivée massive de matériels à la suite de l’application de directives rigoureuses concernant nos armées qu’il faudra trouver une solution. C’est une politique réfléchie, en partenariat avec les industries françaises compétentes, que nous devrions rapidement arrêter.

L’autre solution consiste donc à vendre ce matériel utilisé et encore exploitable à des pays demandeurs.

J’ai été surpris par la ressource financière que certains pays voisins pouvaient dégager de la revente de ces matériels d’occasion et je vous interroge donc, monsieur le ministre, sur la stratégie de la France en ce domaine.

Comme le souligne le rapport de la commission, alors que l’Allemagne, le Royaume-Uni et les États-Unis – il est vrai que le cas de ce dernier pays est un peu particulier – ont su développer une réelle capacité à exporter leurs matériels anciens. Ainsi, l’Allemagne, entre 2000 et 2009, aurait vendu pour 1, 4 milliard d’euros de matériels, le Royaume-Uni, sur une période un peu plus longue, pour 1 milliard d’euros. La France est à la traîne alors même qu’elle possède un réel potentiel.

Même si les règles juridiques communautaires et internationales, environnementales et comptables semblent être un frein au déploiement efficace de cette politique, elles pourraient être assouplies s’il y avait un pilote aux commandes de cette politique sans doute lucrative. Tout le monde a en mémoire les péripéties d’un de nos anciens porte-avions, qui a été finalement « désossé » l’an dernier, au bout de sept ans.

À l’heure où les recettes attendues peinent à arriver, pourquoi ne pas développer cette filière de revente de ces matériels à des pays intéressés ?

J’ai bien conscience qu’il faut déterminer à partir de quel âge un matériel est considéré comme dépassé, voire obsolète, et qu’une logique différente doit s’appliquer selon la nature même des équipements.

Il reste que ce marché de l’occasion risque d’être prochainement inondé par les équipements des armées américaines à la suite de leur prochain retrait d’Irak et d’Afghanistan. Il serait regrettable que la France passe à côté de cette opportunité.

Par ailleurs, nous avons, avec nos partenaires européens, déjà réalisé une grande avancée en ce domaine en transposant dans le droit français deux directives européennes qui portent sur le contrôle des importations et des exportations de matériels de guerre. Ces dispositions ont été soutenues par le groupe socialiste, sous réserve de la publication rapide des décrets. J’espère, monsieur le ministre, qu’ils paraîtront prochainement.

Cette loi de transposition tend, par une simplification des procédures, à favoriser les échanges entre les différents pays européens et porte à la fois sur des matériels de guerre neufs et sur des matériels d’occasion.

Debut de section - PermalienPhoto de Rachel Mazuir

Le second point sur lequel je souhaitais attirer votre attention a trait à la disparition inquiétante, en Libye, de matériel militaire, flambant neuf cette fois, plus particulièrement de missiles sol-air.

La situation au Sahel est préoccupante : y règnent la pauvreté et les injustices ; y sévit le terrorisme. Le conflit en Libye a eu et aura des conséquences directes sur cette région – détournements de matériels, risque de dissémination d’armes chimiques.

Une résolution du Conseil de sécurité datée du 31 octobre exprime la préoccupation de la communauté internationale devant la prolifération de ces armes et de ces matériels connexes.

Monsieur le ministre, comment la France peut-elle intervenir dans cette région, où nos intérêts sont nombreux, et en collaboration, notamment, avec l’Union européenne, pour faire cesser ce trafic ? Avez-vous les moyens en personnels et en matériels pour évaluer ces menaces et y faire face ? Quelle est la volonté du Gouvernement en la matière ?

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV.

Debut de section - Permalien
Gérard Longuet, ministre de la défense et des anciens combattants

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, au préalable, je remercie l’ensemble des orateurs de leur participation à ce débat, de l’intérêt qu’ils ont manifesté, et les félicite de leur compétence. Je tiens à cet égard à souligner la grande qualité de leurs interventions.

Alors que va s’achever cette année 2011, marquée par des interventions de nos armées sur des théâtres d’opérations extérieures, opérations à la fois spectaculaires, difficiles et, dans le cas de l’Afghanistan, cruelles sur le plan humain, je vous remercie, mesdames, messieurs les sénateurs, au nom de la communauté formée par nos trois armées, de la reconnaissance et de la gratitude que vous avez manifestées à nos militaires. Ceux-ci y seront sensibles.

Monsieur le rapporteur spécial Krattinger, vous avez exprimé une préoccupation commune à l'ensemble des orateurs : l’écart est-il supportable entre les objectifs fixés tant par le Livre blanc que par la loi de programmation et les contraintes résultant d’un environnement économique qui pèse sur nous comme il pèse sur toutes les grandes démocraties européennes ? Je le dis très clairement : cet écart est supportable.

En 2010, Hervé Morin a engagé une réduction en trois ans de 3, 6 milliards d’euros des crédits de la mission « Défense », sur un budget total de 93 milliards d'euros. Cette réduction a pu être obtenue en tenant compte des perspectives de cessions d'actifs, à hauteur de 2, 4 milliards d'euros.

Se sont ensuivis les deux coups de rabot supplémentaires sur lesquels je me suis expliqué devant la commission, qui conduiront à une diminution de 1, 2 milliard d'euros sur trois ans, soit 400 millions d'euros par an, des crédits de la mission « Défense », à savoir environ 1 % de leur montant total.

Je concède bien volontiers que cet écart s’est légèrement creusé en raison de l’effort supplémentaire de 280 millions d'euros demandé à mon ministère à la suite de l’annonce, par le Premier ministre, le 24 août, puis le 7 novembre de cette année, de deux plans de réduction des dépenses publiques – de 500 millions d'euros pour le dernier.

Cette réduction des crédits de la mission « Défense » remet-elle en cause les grands équipements prévus par le Livre blanc et inscrits en loi de programmation ? La réponse à cette question essentielle est négative, sur un plan tant quantitatif que qualitatif. L'essentiel des efforts, comme je l'ai expliqué en commission, repose sur les cessions d'actifs ou de matériels anciens.

Rachel Mazuir m’a interrogé à l’instant sur ce dernier point, et je l’informe d’ores et déjà que j’ai signé tout récemment la cession d'un transporteur de chalands de débarquement à la République du Chili pour un montant de 40 millions d'euros.

Nous vendons bon an mal an pour 50 millions d'euros de matériels : c'est insuffisant et nous pourrions faire mieux. Très souvent, nous cédons gratuitement des matériels anciens à des pays avec lesquels nous avons des accords de coopération. Désormais, nous nous efforçons de vendre au mieux ces matériels.

Grâce à ces cessions d’actifs, mais aussi grâce à des reports dans la consommation de crédits, à des renonciations de dépenses et à des économies de fonctionnement, nous sommes en mesure de faire face à ces décisions budgétaires.

Je reviens à ma réponse à M. Krattinger pour lui indiquer que nous n'avons remis en cause aucun grand projet. L'armée de l’air achète chaque année onze Rafale. Ce nombre pourrait être réduit si, comme je l'espère vivement, nous réussissions à vendre cet avion à l'exportation. Tel n'est malheureusement pas le cas pour le moment.

Vous vous êtes demandé, monsieur le rapporteur spécial, si la réforme était rentable ?

Pour avoir tenu six réunions régionales – j’en tiendrai bientôt deux autres – sur l'organisation territoriale des nouveaux dispositifs et la mise en œuvre, par zone de défense, des bases de défense, je peux vous dire que les chiffres parlent d'eux-mêmes. La réorganisation par bases de défense permet d’économiser immédiatement 10 000 emplois dans la fonction soutien, soit un gain de productivité sur cette fonction de 25 % environ en cinq ans. C'est spectaculaire !

Évidemment, les habitudes s'en trouvant modifiées, cette réorganisation n'est ni confortable ni facile et requiert un effort de pédagogie, ainsi que, parfois, il faut le reconnaître, des adaptations. Cela étant, on doit parler non pas d'une application de la RGPP, mais plutôt d'une réorganisation de la fonction soutien.

Dans le cadre du nouveau format des armées, nous tablons sur une diminution des effectifs de 54 000 personnels, dont 18 000 au titre des unités combattantes et 36 000 – soit deux fois plus – au titre des fonctions de soutien au sens large.

L’organisation en bases de défense, qui est l'un des éléments de la réorganisation, la mise en place de la chaîne interarmées de soutien et des centres de services partagés nous permettent de réaliser de véritables économies de fonctionnement. La moitié de celles-ci seront consacrées à l’amélioration de la condition du soldat.

À cet égard, Alain Richard m’a très légitimement interrogé sur les trois sujets suivants : la santé, le logement et la mobilité. Ces trois sujets majeurs sont très librement évoqués devant le Conseil supérieur de la fonction militaire et l'armée sait s’exprimer de manière à la fois parfaitement loyale et très claire, traduisant des demandes tout à fait sincères.

Je remercie François Trucy d’avoir accepté de reprendre son intervention, car elle était passionnante, même si je n'en partage pas toutes les conclusions. §

Je crois profondément que Balard 2015 est un bon projet. Je le dis d’autant plus aisément que ce n’est pas moi qui en ai pris l’initiative, me contentant de « prendre le train en marche ». L'organisation de nos armées, contrairement à celle qui prévaut dans le système britannique, implique que l'état-major des armées, l'état-major de chacune des trois armes et le centre de planification et de conduite des opérations – le CPCO – soient regroupés sur un même site. Il en va de même pour les grands services qui sont directement rattachés au ministre, le secrétariat général pour l'administration et les corps de contrôle des services nationaux.

Le futur site accueillera près de 9 000 personnes ; certes, ce n’est pas rien, mais c’est un gage de productivité.

Cette opération est financée non pas par des cessions d'actifs, mais par le redéploiement de dépenses de fonctionnement.

Pour toutes ces raisons, cher François Trucy je vous invite à porter sur ce projet un regard différent.

En revanche, vous avez raison de souligner l'écart entre l’effectif moyen réalisé et les plafonds budgétaires : il est de l'ordre de 1, 2 %. Cela étant, pour avoir été rapporteur, ici même, dans un passé lointain, du budget de l'enseignement scolaire, je puis vous dire qu’un tel écart n’est pas inhabituel s’agissant d’un très grand service public.

Didier Boulaud, avec d’autres orateurs, a exprimé ses inquiétudes sur les études amont. Les documents budgétaires indiquent que 683 millions d’euros leur seront consacrés. Toutefois, si l'on ajoute certaines études qui, pour des raisons d'organisation de la dépense, sont intégrées dans le budget de fonctionnement de la DGSE, ce sont bien 700 millions d'euros de crédits qui sont, en réalité, prévus pour ces études amont.

En tout cas, monsieur Boulaud, vous avez raison d’insister sur l’importance de ces études amont.

Vous avez d’ailleurs salué les efforts consentis pour la DGSE, tout en soulignant que la DPSD reste légèrement en retrait ; j’en conviens. Néanmoins, la mise en œuvre du projet SOPHIA devrait faciliter grandement l’intervention de ce service indispensable à notre sécurité.

Concernant le classement en secret défense, nous nous conformons non seulement à la législation en vigueur mais aussi aux conclusions du Conseil constitutionnel. À ce titre, nous n’avons aucun état d’âme : l’armée de la République est là pour agir dans le cadre de la loi. Les sites classés disparaîtront donc au profit d’emplacements destinés à la conservation de certains documents au sein des emprises militaires.

Je remercie André Trillard d’avoir salué les efforts de réorganisation des réseaux d’attachés de défense ; il s’agit en effet d’un volet parfaitement pertinent de la RGPP.

Par ailleurs, André Trillard a rappelé notre position de quatrième exportateur mondial en matière d’armement. Je tiens à souligner que les petits et moyens contrats en constituent une part très importante : leur caractère régulier, quasi récurrent, nous fait échapper à l’angoisse de ce qui va advenir lorsqu’un gros marché ne produit plus ses effets sur notre balance commerciale. De plus, le suivi des systèmes installés nous apporte aussi une certaine sécurité à cet égard et nous permet également de revendiquer ce rang de quatrième exportateur mondial.

Au demeurant, cette place n’a rien d’une prouesse puisque nous fournissons environ 7, 5 % du marché mondial, tandis qu’Israël, pays sensiblement moins peuplé, en représente près de 5 %.

Dans ses deux interventions, Xavier Pintat a fait preuve d’une même conviction.

Je salue tout d’abord sa conclusion : il faut voter ce budget ! Cependant je ne partage pas les conclusions qu’il a présentées avec ses collègues Daniel Reiner et Jacques Gautier concernant la solution intérimaire que nous avons adoptée au sujet des drones « moyenne altitude, longue endurance », ou MALE. Je reviendrai sur ce point lors de l’examen de l’amendement de la commission des affaires étrangères.

Xavier Pintat a rappelé l’importance de l’effort de dissuasion.

Il a relevé que les cessions d’actifs constituaient des fusils à un coup. Par définition !

Debut de section - Permalien
Gérard Longuet, ministre

Il reste que la gestion optimale d’un patrimoine nécessite de céder des actifs inutiles pour dégager des liquidités et créer ainsi un patrimoine utile qui, à son tour, pourra devenir un appui et un relais.

Je tiens à apporter toutes assurances concernant les programmes de satellites MUSIS et CERES. Jean-Pierre Chevènement a rappelé, avec beaucoup d’humour, qu’il était très attaché à CERES.

M. Jean-Pierre Chevènement sourit

Debut de section - Permalien
Gérard Longuet, ministre

Nous le savions depuis longtemps ! Les délais seront respectés. Vous avez d’ailleurs bien voulu reconnaître que le programme MUSIS était en bonne voie.

Concernant le radar à longue portée, je procéderai à une brève mise au point technique. En effet, il est inexact d’affirmer qu’en matière de trajectographie, ce dispositif doit être placé au plus près de la menace ; d’une portée de 2 000 à 3 000 kilomètres, il peut en effet déceler le point d’impact probable depuis le territoire français. Ce faisant, il permet d’anticiper et de préparer une réaction à distance.

J’ajoute qu’en suggérant de placer un tel radar au plus près du territoire menaçant on exprime une conception de la politique internationale que je manierais pour ma part avec la plus grande prudence…

Je remercie Daniel Reiner de souligner la priorité accordée aux crédits d’équipements ; je considère son intervention comme un hommage.

Le Rafale ne s’oppose pas au Mirage 2000D. La rénovation de ce dernier a été reportée en 2010, dans le cadre des mesures que j’évoquais il y a quelques instants, mais nous mobilisons d’importants fonds pour tracer le périmètre et définir les objectifs de la rénovation des Mirage 2000D, laquelle reste d’actualité.

Parallèlement, concernant le ravitailleur, nous n’avons subi qu’un seul retard, en 2010, auquel ne s’ajoute aucun autre contretemps ; ainsi, nous conservons la perspective de 2017.

Monsieur Gilbert Roger, les bases de défense constituent un système complexe qui bouleverse nos habitudes. De fait, si elles forment un système pertinent qui se traduit par une économie considérable de moyens humains, elles supposent également une culture différente : le chef de corps ne dispose plus, sous sa seule autorité, de l’ensemble des moyens, qu’il ne contrôlait d’ailleurs pas entièrement dans le cadre du précédent système.

Monsieur le sénateur, je vous invite volontiers à prendre part à l’une des prochaines rencontres territoriales de la réforme, au cours desquelles nous consacrons près de trois heures à un sujet précis en la matière. Je ne m’appesantirai pas sur ce point, ne souhaitant pas décourager vos collègues par une précision qui ne relève pas directement de notre débat de ce soir !

Concernant le maintien en condition opérationnelle, notre ligne est satisfaisante.

Les temps d’entraînement constituent certes une valeur d’ajustement, je ne le conteste pas. Toutefois, les données pluriannuelles témoignent d’un niveau acceptable en la matière, et les pourcentages restent similaires, à quelques points près. Ainsi, en 2011, la réduction des temps d’entraînement sera compensée par l’augmentation des temps d’opération, tout particulièrement pour ce qui concerne l’armée de l’air.

J’en conviens, ce système ne saurait être durable, sauf à risquer de creuser un fossé entre les soldats qui ont acquis une expérience au combat et ceux qui, du fait de la consommation des crédits, ont été privés d’une partie de leur temps d’entraînement.

André Dulait est intervenu au sujet des ressources humaines ; il a eu raison de noter que le reclassement des militaires dans la fonction publique s’opérait difficilement.

Il apparaît que, à l’échelle du ministère tout entier, la conjoncture a des effets sur la masse salariale. De fait, par exemple, le volet « reconversion » – c'est-à-dire celui qui, tout en étant juridiquement différent, correspond à l’indemnisation du chômage en termes de prise en compte d’une réalité économique et sociale – devient plus coûteux lorsque la situation de l’emploi se dégrade puisque plus nombreux sont les jeunes titulaires de contrats à courte durée que nous avons alors à prendre en charge.

Mme Michèle Demessine nous a parlé de l’« envers du décor » : mais ce décor est transparent ! Depuis que je suis en charge de ce ministère, je constate avec satisfaction que, dans notre pays, la défense fait l’objet d’une information très large, documentée et fidèle à la réalité. Il n’existe donc pas de système caché, y compris pour ce qui concerne le projet Balard.

Madame le sénateur, vous qualifiez ce projet de « bombe à retardement financière », mais c’est exactement le contraire ! Le partenariat public-privé a précisément pour intérêt de fixer des clauses définitives avant le début des travaux.

Si le contrat comporte une erreur, le commanditaire en assume l’entière conséquence, j’en conviens tout à fait. Néanmoins, le partenariat public-privé présente l’avantage d’éviter les mauvaises surprises, caractéristiques des projets conduits en maîtrise d’ouvrage publique directe : lorsque s’achèvent les très grands chantiers, on constate généralement des écarts spectaculaires entre le coût prévu et le coût réel des travaux ! Ces décalages sont bien souvent dus à l’indécision du maître d’ouvrage et aux modifications qu’il a introduites au cours des travaux.

À l’inverse, dans le cadre d’un partenariat public-privé, les clauses du contrat encadrent très strictement le chantier, en imposant au prestataire de lourdes obligations envers le donneur d’ordre, en l’occurrence le ministère de la défense. Je ne redoute donc aucun risque à cet égard.

Madame, vous avez attiré l’attention sur le sort des personnels civils. Je souligne que nous n’avons pas souhaité fixer un taux obligatoire de civils au sein des bases de défense. En effet, si les civils ont vocation à y jouer un rôle croissant, notamment dans le cadre des groupes de soutien, ils ne peuvent être projetés sur les théâtres d’opération. Du reste, les militaires ne sont pas éternellement jeunes, sportifs et performants ; et, l’âge venant, ils peuvent souhaiter poursuivre leur carrière au service de l’armée dans des conditions physiquement moins contraignantes.

C’est la raison pour laquelle les bases de défense, tout en assumant des fonctions de soutien, ont également vocation à accueillir des militaires. Forts de leur expérience, ces derniers sont d’autant plus à même de répondre aux demandes des formations soutenues qu’ils connaissent la vie de chaque corps.

De surcroît, si les bases de défense n’étaient composées que de civils, un fossé culturel se creuserait entre les troupes opérationnelles et une administration qui, sans constituer une « quatrième armée » comme l’affirment certains militaires, serait totalement séparée d’avec les militaires envoyés en opération.

Je remercie Jean-Marie Bockel de sa conclusion, à laquelle je souscris pleinement : il faut voter ce budget.

Monsieur le sénateur, vous appelez par ailleurs notre attention sur un sujet majeur : le lien entre l’armée et les collectivités locales.

Cette année, nous avons progressé de manière décisive vers la signature des contrats de plans locaux de redynamisation, les PLR, ou de redynamisation des sites de défense, les CRSD. Excepté quelques cas difficiles outre-mer, la quasi-totalité de ces contrats seront conclus au mois de mars prochain. Le budget du fonds pour les restructurations de la défense, le FRED, n’est pas remis en cause : en effet, chacun de ces contrats pourra être exécuté en partenariat avec les collectivités territoriales concernées, dans des conditions de loyauté et de prévisibilité absolues.

Monsieur Bockel, concernant l’hôtel de la Marine, je crains de ne pas être en mesure de répondre aux questions très concrètes et très précises que vous m’avez posées.

L’ancien Président de la République Valéry Giscard d’Estaing a remis un rapport sur ce sujet, et un consensus se dessine pour ériger ce monument en un lieu de culture ouvert au public, en transformant en bureaux tous les espaces ne pouvant accueillir de visiteurs. De fait, le quartier compte de nombreuses administrations d’État mal logées ou logées trop coûteusement – je songe à la Cour des comptes, au musée du Louvre... Toutefois, cette solution présenterait l’inconvénient de ne dégager aucune recette pour le ministère de la défense.

J’ignore encore quelle sera la fonction de l’hôtel de la Marine ; il convient cependant que cet édifice apporte quelques ressources au ministère, ce dont je n’ai pas encore la certitude.

Je ne suivrai pas Jean-Pierre Chevènement sur le terrain de l’euro et de l’avenir de la monnaie commune, qui commande l’unité européenne et dont les enjeux dépassent le cadre du débat de cette nuit.

En revanche, je répondrai indirectement à sa question relative à l’Europe de la défense.

Dans ce domaine, la France fait preuve de bonne volonté. Nous avons rejoint le commandement intégré de l’OTAN. En outre, l’expérience de la Libye prouve que nous pouvons mettre en application notre conception de la défense, non en pleine liberté – car il nous faut évidemment rester solidaires de nos partenaires –, mais en pleine responsabilité.

Cette expérience mériterait d’ailleurs de faire l’objet d’un débat parlementaire, le fonctionnement d’une telle coalition étant particulièrement intéressant.

M. Jean-Pierre Chevènement acquiesce.

Debut de section - Permalien
Gérard Longuet, ministre

D’autres États membres demandent à l’Union européenne de s’organiser, sans pour autant mobiliser les moindres moyens à cet effet.

Nous sommes, en quelque sorte, dans une situation de trait d’union : au-delà du triangle de Weimar, qui associe la Pologne, l’Allemagne et la France, M. le ministre d’État, ministre des affaires étrangères et européennes essaie de mobiliser d’autres pays européens, notamment l’Espagne et l’Italie, sur un projet de création d’une unité de planification et de programmation européenne. Les Anglais refusaient toute idée de commandement opérationnel ; en revanche, ils ne sont pas hostiles à une réflexion sur une planification qui permettrait de mobiliser des moyens européens existants mais jamais utilisés.

Cela dit, l’Europe intervient d’ores et déjà en tant que telle. Plusieurs orateurs ont évoqué l’opération Atalante, et celle-ci est bien une réalité. La France se montre d’ailleurs exemplaire dans sa participation à cette opération ; amis elle a aussi, parfois, le sentiment que l’effort est principalement porté par un tout petit noyau de pays européens.

Sans évoquer toutes les réalisations européennes, j’insiste sur le fait que nous sommes attentifs à ne gaspiller aucune chance de coopération réaliste.

Je redis à Jean-Pierre Chevènement ce que j’ai dit à Yves Krattinger : nous avons un besoin absolu du MRTT et le décalage que nous observons n’empêchera pas de tenir le calendrier 2017.

Lorsqu’il est intervenu à titre personnel, Jean-Marie Bockel a largement évoqué la coopération franco-allemande.

L’Allemagne modernise aujourd’hui son armée comme nous l’avons fait voilà une dizaine d’années. Thomas de Maizière et moi-même n’avons donc aucune difficulté pour nous comprendre parce que nous allons dans la même direction. Le seul vrai problème est d’ordre culturel : nous avons une armée nationale, tandis que les Allemands ont une « armée parlementaire » : je veux dire par là qu’elle s’engage dans la mesure où le Parlement lui permet de le faire. Ce fossé culturel explique que, sur un certain nombre des sujets abordés par Jean-Marie Bockel, nous ayons quelque mal à avancer. Les décisions doivent en effet être approuvées par la coalition au pouvoir, tandis que, en France, la chaîne de décision et de commandement est plus courte, le Président de la République étant constitutionnellement le chef des armées.

Je reviendrai sur le choix du drone lors de la discussion de l’amendement de la commission des affaires étrangères, mais je veux tout de même dire ceci : de grâce, n’opposons pas politique industrielle et politique de capacité ! Le devoir du ministre de la défense est d’avoir une vision à moyen et long terme. Dès lors, refuser de privilégier une capacité opérationnelle de court terme qui nous rendrait, à moyen et long terme, dépendants d’un fournisseur qui fixerait ses conditions, ce n’est pas faire de la politique industrielle, c’est avant tout se projeter dans l’avenir pour garantir notre indépendance de manière pérenne. Voilà essentiellement pourquoi je m’oppose à la commission sur ce point.

S’agissant de la défense antimissile balistique, la DAMB, évoquée par Xavier Pintat – et aussi par Mme Demessine –, les Français ne sont pas fortement demandeurs, car le choix national de la dissuasion nucléaire, que vous soutenez par ailleurs, ne nous rend pas dépendants d’un tel dispositif de défense, contrairement à la plupart des autres pays européens qui, Royaume-Uni mis à part, n’ont pas fait le choix de la dissuasion et ont effectivement besoin d’une protection par DAMB.

En revanche, vous avez raison – je réponds par la même occasion à Daniel Reiner –, nous ne pouvons pas nous désintéresser de la DAMB. En matière de détection satellitaire avancée, le démonstrateur Spirale ou l’AISR sont autant de briques que nous proposons à nos partenaires européens, là où les Américains se contentent d’envoyer aux pays membres de l’OTAN la facture de la mise à disposition d’un système qu’ils définissent eux-mêmes. Avec les Britanniques, nous essayons d’utiliser pour la défense antimissile des technologies que nous avons, à l’origine, développées en vue de défendre et gérer notre propre système de dissuasion.

Cela me permet également de répondre à Jacques Gautier : le Mirage 2000D est un bel outil, qui n’est pas abandonné, et dont le périmètre de rénovation va être rapidement défini.

Le missile Aster est également un élément important de la DAMB, sur lequel nous travaillons avec MBDA. Là encore, il s’agit d’apporter une brique à un projet d’ensemble.

Didier Boulaud a fort joliment évoqué une sorte de mouvement binaire et alternatif qui nous rapprocherait tantôt des Anglais, tantôt des Allemands. Notre objectif serait plutôt de rassembler autour de nous ces deux partenaires. Les Anglais ont une culture militaire proche de la nôtre et les Allemands des moyens financiers et industriels indispensables à la réussite de nos actions. J’ajoute qu’il serait fou de ne pas les associer à nos projets et de ne pas les aider à surmonter leur prudence culturelle en matière de défense, que l’on comprend aisément pour des raisons historiques.

Pour en revenir aux opérations européennes, je dirai que le Kosovo est effectivement une affaire assez compliquée. Au total, plus d’une vingtaine d’opérations européennes ont été engagées ces cinq dernières années, ce qui n’est pas négligeable, même s’il ne s’agit pas d’opérations de premier plan.

La diminution des budgets militaires au sein des pays membres de l’OTAN est certes une réalité, mais vous ne pouvez pas en faire le reproche à la France, mesdames, messieurs les sénateurs. Nous ne maîtrisons nullement les choix des autres pays.

Pour le Sahel, la France a proposé une initiative à l’Union européenne, sous forme d’aide, de développement et de partenariat. Toutefois, et même si une dizaine d’otages européens sont désormais retenus dans la région, nous ne devons pas oublier que ces pays restent souverains. Je participerai, le 10 décembre prochain, à Nouakchott, à une rencontre qui regroupera des représentants de cinq pays de la rive nord de la Méditerranée et de cinq pays de sa rive sud. Certains pays, comme le Mali ou l’Algérie, sont toutefois plus directement concernés par ce problème.

J’ai été très sensible à l’hommage que vous avez rendu à nos soldats, monsieur Beaumont. Et puisque vous êtes également intervenu sur la coopération franco-allemande, je vous informe que nous allons saisir l’occasion du prochain sommet semestriel, qui aura lieu début février, pour présenter, avec Thomas de Maizière, les conclusions d’un séminaire stratégique que nous avons organisé en septembre. Une vingtaine de mesures très concrètes associant les Français et les Allemands seront présentées, comme le développement de certifications communes sur certains matériels de défense ou d’autres initiatives techniques qui nous permettront de mieux travailler ensemble.

Monsieur Richard, je souscris totalement à votre analyse, notamment à propos du jugement porté par la Cour des comptes sur le service de santé des armées. La haute juridiction financière a oublié de valoriser les activités régaliennes de ce dernier, qui constituent pourtant sa principale légitimité.

Monsieur Lorgeoux, vous avez parlé du renseignement avec une passion et une compétence que je ne vous contesterai pas. En revanche, je ne partage pas votre point de vue sur le démonstrateur de radar : il ne me paraît pas indispensable qu’il soit installé près de la menace. Quant au retard sur la rénovation du Mirage 2000D, nous subissons en effet les conséquences d’une décision prise en 2010, mais, au risque de me répéter, je redis que nous avons bien l’intention de rénover ces appareils.

Madame Durrieu, vos observations sur les risques ouverts sont très pertinentes. Vous auriez pu également évoquer le cas de Chypre : voilà un pays membre de l’Union européenne dont la légitimité est contestée par un grand pays candidat à l’adhésion à l’Union européenne. Et l’on constate que l’exploitation de la Méditerranée autour de cette île reste conflictuelle. La réactualisation du Livre blanc permettra d’approfondir ces thèmes, que nous ne pouvons pas ignorer, car la vie n’est pas un long fleuve tranquille.

Monsieur Mazuir, le démantèlement des vieux matériels navals a bien progressé. Quant au démantèlement nucléaire, il est engagé pour les usines de Pierrelatte et Marcoule, grâce à la soulte qu’EDF a versée en contrepartie des transferts de technologies militaires dont cette entreprise a bénéficié.

Vous avez eu raison de souligner le bienfait de la transposition de la directive européenne, telle qu’elle a été amendée par le Sénat, qui nous permet de conserver une certaine liberté de choix.

Enfin, nous sommes, comme vous, très préoccupés du supermarché des armes à ciel ouvert que constitue la Libye après leur abandon sur le terrain par les troupes du colonel Kadhafi. Cela dit, les missiles sol-air portables exigent pour fonctionner un certain soutien technique, notamment des piles dont la durée de vie est relativement brève et il n’est pas certain que ces matériels puissent être utilisés ; c’est en tout cas ce que nous pouvons tous souhaiter.

Mesdames, messieurs les sénateurs, j’espère vous convaincre, dans quelques instants, du bien-fondé de ma position s’agissant des drones, et vous convaincre aussi de voter un budget traduisant la poursuite d’un effort maîtrisé au service d’une armée qui, sur le terrain, fait la preuve de son efficacité.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

La parole est à M. le président de la commission des affaires étrangères.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

Monsieur le ministre, des rumeurs de presse accréditent la thèse d’une annulation du sommet franco-britannique du 2 décembre prochain. Qu’en est-il au juste ?

Debut de section - Permalien
Gérard Longuet, ministre

Ce sommet n’est pas annulé, mais « concentré ». MM. Cameron et Sarkozy ont exprimé le vœu de pouvoir réfléchir au plus haut niveau sur ce qui rapproche et divise vraiment nos deux pays.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

M. Jean-Louis Carrère, président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Ce sera donc un super-sommet !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Défense », figurant à l’état B.

(En euros)

Mission

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Défense

Environnement et prospective de la politique de défense

Dont titre 2

596 825 496

596 825 496

Préparation et emploi des forces

Dont titre 2

15 533 878 811

15 533 878 811

Soutien de la politique de la défense

Dont titre 2

1 171 145 996

1 171 145 996

Équipement des forces

Dont titre 2

1 893 664 546

1 893 664 546

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

L'amendement n° II-158, présenté par Mme Demessine, MM. Hue, Billout et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Modifier comme suit les crédits des programmes :

en euros

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Environnement et prospective de la politique de défense Dont Titre 2

Préparation et emploi des forcesDont Titre 2

Soutien de la politique de la défenseDont Titre 2

Équipement des forcesDont Titre 2

TOTAL

SOLDE

La parole est à Mme Michelle Demessine.

Debut de section - PermalienPhoto de Michelle Demessine

Cet amendement va me permettre d’aborder le problème posé par l’importance et la disproportion des crédits affectés à la dissuasion nucléaire par rapport au reste de l’équipement de nos armées.

En effet, les quelque 21 % de crédits d’équipement consacrés à la dissuasion nucléaire correspondent à mon avis à un modèle et à un format d’armées qui n’est plus adapté au contexte stratégique, ni aux menaces, ni aux conflits du monde d’aujourd’hui.

La dissuasion nucléaire pouvait être efficace lors de la guerre froide, dans le cadre de l’affrontement potentiel entre deux blocs et face à un puissant pays dont on pouvait attendre un comportement idéologique et politique rationnel.

Dans ce cadre, la doctrine de la dissuasion du « faible au fort » se justifiait pour notre pays.

Mais aujourd’hui, le contexte stratégique a radicalement changé. Les rapports de forces et de puissance ne sont plus les mêmes, et la menace nucléaire proviendrait essentiellement d’États ou d’entités aux comportements qu’il est difficile d’anticiper ou même de comprendre.

J’estime, en outre, que nous ne sommes plus non plus dans la doctrine de « la stricte suffisance » de notre armement nucléaire.

Les sommes dépensées servent non pas simplement, selon la nomenclature officielle, à « assurer la crédibilité technique » de la dissuasion, mais procèdent à la modernisation et au développement de cette dernière, et ce en contradiction avec l’esprit des traités internationaux que nous avons signés.

L’amendement n° II-158 a donc pour objet de transférer au maintien en condition opérationnelle de nos forces les crédits prévus pour la commande d’une tranche de production du missile balistique M 51.2.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Krattinger

Nos collègues du groupe communiste républicain et citoyen nous proposent de supprimer les crédits prévus pour la commande d’une tranche de production du missile balistique M 51.2, et d’abonder en conséquence les crédits d’équipement des forces, afin de maintenir en condition opérationnelle les matériels de l’armée de terre.

Le vecteur M 51.2, qui doit être mis en service à partir de 2015, emportera la tête nucléaire TNO, ou tête nucléaire océanique. Il s’agit donc d’une des composantes de notre force de dissuasion nucléaire.

Le maintien en condition opérationnelle des matériels de l’armée de terre est une véritable inquiétude, que je partage pleinement : le non-respect des objectifs de la loi de programmation militaire conduit à une révision à la baisse des grands programmes d’équipement et, concurremment, à une dégradation de la capacité de projection de nos troupes terrestres.

Je comprends aussi la volonté de nos collègues de favoriser l’avènement d’un monde sans armes nucléaires. Mais pour atteindre cet idéal – idéal que nous partageons presque tous, je crois –, je préfère que la France s’engage dans des processus multilatéraux de désarmement et non qu’elle renonce unilatéralement à certaines des composantes de sa force de dissuasion nucléaire.

La doctrine nucléaire française en fait une arme de dissuasion, que nous ne voulons pas voir utilisée comme arme de guerre, mais qui constitue bien un instrument pour dissuader toute attaque contre notre pays.

Alors que les objectifs de dépenses de la loi de programmation militaire ne sont pas atteints et que tous les grands programmes d’équipement sont mis au régime sec, les dépenses relatives à notre force de dissuasion nucléaire sont globalement préservées. C’est un choix que je partage, car, dans un monde où les puissances nucléaires n’ont pas procédé à leur désarmement nucléaire militaire de manière complète et irréversible, la force de dissuasion nucléaire garantit l’indépendance de notre défense nationale, sans nous placer sous le « parapluie » d’une puissance étrangère.

Il faut que la France continue de s’engager sur la voie du désarmement nucléaire, dans un cadre multilatéral. Mais je crois qu’il faut aussi faire preuve de pragmatisme en maintenant notre indépendance et notre souveraineté militaires, qu’assure une force de dissuasion nucléaire complète et autonome.

C’est pourquoi, mes chers collègues, tout en me félicitant du débat que nous avons sur l’objectif, partagé, de voir advenir un monde sans armes nucléaires et, plus largement, un monde ayant renoncé aux armes de destruction massive, je vous invite à retirer votre amendement.

Debut de section - Permalien
Gérard Longuet, ministre

Le Gouvernement est hostile à cet amendement pour les excellentes raisons présentées par M. le rapporteur spécial.

L'amendement n’est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

L'amendement n° II-104, présenté par M. Reiner, au nom de la commission des affaires étrangères, est ainsi libellé :

Modifier comme suit les crédits des programmes :

en euros

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Environnement et prospective de la politique de défense Dont Titre 2

Préparation et emploi des forcesDont Titre 2

Soutien de la politique de la défenseDont Titre 2

Équipement des forcesDont Titre 2

TOTAL

SOLDE

La parole est à M. Daniel Reiner, rapporteur pour avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Reiner

Il s’agit là d’un amendement important.

Monsieur le ministre, le 20 juillet dernier, vous avez pris la décision d’entrer en négociations avec Dassault Aviation afin d’envisager à quelles conditions cette entreprise pourrait importer et franciser le drone Heron TP fabriqué par l’industriel israélien IAI.

Contrairement à ce qui a été écrit dans la presse, ces négociations n’étaient pas « exclusives », comme on nous l’a de nouveau précisé. Mais comme, en pratique, vous n’avez pas entamé de négociations similaires avec les seuls autres industriels capables de fournir une alternative à ce choix, à savoir l’industriel américain General Atomics, qui fabrique le drone Reaper, et EADS, qui aurait été susceptible de l’importer, cela revient de fait au même.

À la suite de cette décision, le Gouvernement a inscrit dans le projet de loi de finances pour 2012 318 millions d’euros d’autorisations d’engagement, qui correspondent d’ailleurs à l’offre de l’industriel israélien, sans francisation.

La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a à l’égard de cette double décision plus que des réserves : des objections. et des forces armées.

Premièrement, s’agissant de la procédure, alors que nous sommes face à l’offre de deux industriels non européens, vous écartez a priori toute compétition, ce qui ne peut que nuire aux intérêts financiers de l’État.

Deuxièmement, et précisément d’un point de vue financier, cette décision se traduira, d’après les offres que nous avons entre les mains, par un surcoût d’une centaine de millions d’euros – 109 millions d’euros pour être précis – sans francisation ! Nous n’avons pas une idée très claire de ce que coûterait la francisation du Heron TP, car cela fait l’objet de négociations entre Dassault et IAI et les chiffres donnés l’été dernier par les deux industriels, à savoir 50 millions d’euros, nous paraissent assez peu sérieux. Nous savons en revanche qu’EADS propose, sur la base d’une auto-estimation, la francisation du Reaper américain pour environ 88 millions d’euros, soit 40 % du coût de l’appareil, ce qui permettrait d’avoir une complète maîtrise de la chaîne mission.

Troisièmement, d’un point de vue militaire, le drone Heron TP est un drone de surveillance et d’écoute. Or ce qui paraît nécessaire, à la lumière de l’expérience libyenne, par exemple, c’est un drone dit de « maraudage », capable d’emporter un armement polyvalent et d’effectuer des frappes d’opportunité.

Rendre le Heron TP apte à emporter des armements sera sans doute possible. Mais ce ne sera pas simple et restera, compte tenu de la structure de l’avion, qui est un avion bi-dérive, un peu du bricolage. Des modifications importantes et onéreuses seront nécessaires, ce qui laisse penser que ce drone ne sera pas disponible à la fin de l’année 2013, ni même en 2014 : peut-être en 2015, si tout se déroule au mieux. Nous aurons donc une rupture capacitaire à la fin de l’année 2013, date à laquelle le contrat de maintien en conditions opérationnelles des drones Harfang par la société EADS viendra à échéance.

Enfin, même en se plaçant d’un point de vue industriel, dont nous avons bien compris qu’il était votre point de vue privilégié, votre décision est difficile à comprendre. Nous sommes en effet face à l’acquisition d’un drone MALE – moyenne altitude longue endurance – de deuxième génération dont l’unique objectif est de permettre à Dassault d’acquérir, sur fonds publics, une compétence d’architecture qu’il n’a pas pour l’instant et dont il n’aura pas à se servir dans les drones MALE de troisième génération, puisque c’est plutôt BAE qui fabriquera le drone franco-britannique. Tout cela nous échappe un peu, d’autant que, en vertu des accords qui ont été passés entre BAE et Dassault, celui-ci serait responsable de l’UCAV – Unmanned Combat Air Vehicle –, le drone de combat qui viendra après le MALE de troisième génération et dont les technologies n’ont que peu de chose à voir avec les technologies des drones MALE, alors que, à l’évidence, le démonstrateur nEUROn est parfaitement inscrit dans cette perspective.

Tout cela n’a guère de sens, sauf à considérer que la coopération franco-britannique pourrait échouer et qu’il n’y aura pas de drone MALE commun. Dans ce cas effectivement, nous nous retrouverions avec des drones MALE français – le Heron TP – en petit nombre et répondant assez peu au besoin opérationnel, de surcroît non interopérables avec nos alliés de l’OTAN. Mais nous aurions il est vrai, si tout cela marche, un industriel capable de fabriquer des drones de deuxième génération. Le problème est que, de toute façon, nous n’aurions pas les moyens de les financer. Et à supposer que nous en ayons les moyens, personne ne souhaiterait nous les acheter puisque seraient disponibles sur le marché des drones MALE américains, en particulier, de troisième génération !

En résumé, vous êtes en train de nous proposer d’autoriser l’achat – en dehors des règles des marchés publics – d’un équipement militaire extra-européen à un prix plus élevé que ce que l’on pourrait obtenir auprès de nos fournisseurs américains, pour un rendement militaire moins performant, tout cela dans l’espoir qu’une entreprise française acquière une compétence qui n’aurait d’utilité que si l’accord franco-britannique signé par le Gouvernement échouait !

Est-ce sérieux ?

La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées du Sénat place, quant à elle, le besoin opérationnel des forces au-dessus de toutes les préoccupations.

Ce qui compte, avant toute chose, c’est la capacité de nos forces à remplir la mission qui leur est confiée. Ce qui compte avant toute chose, c’est l’équipement de nos soldats quand ils iront au feu. C’est cela votre responsabilité, ainsi que notre responsabilité de parlementaires.

Bien sûr, si cet amendement est voté, vous aurez le pouvoir de donner le dernier mot à l’Assemblée nationale. Soit ! Mais ce sera sans nous, car nous refusons d’apposer notre signature au bas de cette décision.

Ce que nous vous proposons est raisonnable et tient en trois propositions.

Il s’agit, en premier lieu, de lancer une compétition et, si tel en est le résultat, d’acheter le drone Reaper sur étagères afin de satisfaire au plus vite le besoin opérationnel de nos forces.

Il s’agit, en deuxième lieu, de réserver nos moyens aux créneaux sur lesquels nos industriels sont les plus compétents, les UCAV ou drones de combat, dont il reviendra à Dassault d’assurer la maîtrise d’œuvre dans le cadre des accords franco-britanniques. Cela représente 80 millions d’euros en programme d’études amont, ce qui n’est pas rien, d’autant que le futur de nEUROn n’est pas assuré aujourd’hui.

Il s’agit enfin, en troisième lieu, de faire en sorte que les accords franco-britanniques sur les drones de troisième génération prospèrent et de se donner d’ici là les moyens de prolonger le drone Harfang car, à ce pas, personne ne sera prêt en 2013.

Mes chers collègues, tel est l’objet de l’amendement que j’ai l’honneur de vous inviter à adopter, au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées du Sénat.

Applaudissements

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Krattinger

La commission des finances ne s’étant pas réunie pour examiner cet amendement, je m’exprimerai à titre personnel, en tant que rapporteur spécial.

Notre collègue Daniel Reiner a bien expliqué le principe de cet amendement : économiser l’achat de drones en achetant le modèle américain Reaper plutôt que le modèle israélien Heron TP. L’économie ainsi réalisée, soit 109 millions d’euros, permettra, d’une part, d’assurer la maintenance d’autres drones de nos forces armées – à hauteur de 29 millions d’euros – et, d’autre part, de réaliser les études amont nécessaires pour que la France s’engage sur le programme de drone du futur, pour un coût estimé à 80 millions d’euros.

Dans son rapport spécial, la commission des finances a formulé les observations suivantes :

« Il serait logique que la France, à l’instar de tous les grands pays industrialisés, produise des drones. Les sommes en jeu, se chiffrant en centaines de millions d’euros, sont relativement modestes, au regard de l’efficacité opérationnelle de ces avions sans pilote.

« Un tel choix permettrait d’éviter, dès 2013, une rupture capacitaire, l’acquisition de nouveaux drones devant assurer la jonction avec les drones de la génération suivante, prévus à l’horizon 2020.

« Mais la France vient de faire le choix contestable, en juillet 2011, d’acheter des drones étrangers – en l’occurrence israéliens – à un prix semble-t-il supérieur à celui des drones américains ».

Pour ces différentes raisons, l’amendement n° II-104 va à notre avis dans le bon sens, d’autant que la France est engagée dans la production de drones en coopération avec ses partenaires européens – je pense notamment au Royaume-Uni.

Choisir le drone Heron TP remettrait en cause le traité signé avec les Britanniques. J’ajoute que ce drone que le Gouvernement français entend acquérir n’est pas arrivé à la maturité technologique de son concurrent américain et qu’il ne sera probablement pas disponible avant la fin de l’année 2013. Il est donc encore temps pour la France, semble-t-il, de modifier ses choix industriels et économiques concernant l’équipement en drones de ses forces armées.

La commission des affaires étrangères a adopté l’amendement qu’elle vient de nous présenter à une très large majorité, par-delà les clivages politiques. Vous comprendrez pourquoi, à titre personnel, je le voterai, et je vous invite, mes chers collègues, à faire de même.

Debut de section - Permalien
Gérard Longuet, ministre

Cher Daniel Reiner, le Gouvernement n’est pas favorable à l’amendement n° II-104. D’ailleurs, je pense que nos positions ne sont pas aux antipodes. Il n’y a pas de véritable opposition entre le point de vue que vous avez exprimé, de même que Jacques Gautier et Xavier Pintat, et la volonté du Gouvernement. C’est plutôt un malentendu, j’en suis désolé, qui existe entre nous, tenant tout simplement à la construction du raisonnement. Permettez-moi de vous exprimer le sentiment du Gouvernement.

Tout d’abord, un seul pays maîtrise la technologie des drones : les États-Unis d’Amérique. Israël, pour des raisons locales, a su développer un système, mais ce dernier est très incomplet, et sa mise en œuvre, notamment en Afghanistan, a montré ses limites, avec une communication impossible par satellite. De par la taille de son territoire, Israël n’a pas besoin de communication satellitaire, mais notre situation est différente.

Les États-Unis disposent d’une filière complète avec un volet aéronautique, qui n’est pas le plus important, et un volet communications, qui l’est beaucoup plus : pour commander l’avion, pour le maîtriser à partir du sol – il s’agit d’avions pilotés – et pour exercer toutes les missions d’identification. En effet, le drone appartient à ce que l’on appelle l’ISR, ou intelligence-surveillance-reconnaissance ; il contribue aux moyens d’observation, dont la gamme est très large puisqu’elle va des systèmes les plus élevés, avec les satellites, pour aller jusqu’aux plus modestes, avec le pod de reconnaissance placé sur l’avion traditionnel, en passant naturellement par tous les drones de très haute altitude pilotés à distance tels que le Global Hawk, de moyenne altitude, tel le MALE dont nous parlons, ou les drones tactiques de terrain, qui sont servis dans les unités.

Il s’agit d’un système complet, qui suppose une maîtrise totale de la communication, et cette complexité force notre admiration pour les entreprises qui sont capables de maîtriser ce type d’outil. Or il n’existe aujourd'hui qu’un seul acteur mondial susceptible de s’adosser à une industrie et à une commande publique suffisamment puissantes pour se développer et pour prospérer : je veux parler de General Atomics, entreprise évidemment soutenue par le gouvernement des États-Unis, ce qui, permettez-moi de le souligner, n’est pas rien.

Le drone Harfang moyenne altitude que nous avons aujourd'hui arrivera en fin de parcours en 2013. J’hérite de la nécessité absolue de prendre une décision. D’un côté, on peut peut-être prolonger l’existence de ce drone d’un an – pas beaucoup plus – et, de l’autre, nous avons passé un accord avec les Britanniques pour imaginer un drone de moyenne altitude longue endurance commun pour 2020.

Des deux côtés de la Manche, nous dépensons de l’argent et mobilisons nos compétences – des ingénieurs travaillent en effet sur ce dossier – pour définir cet objectif et avoir ce que l’on appelle « une levée de risques » au printemps prochain. Certes, le dossier avance, mais l’échéance est fixée à 2020.

Debut de section - Permalien
Gérard Longuet, ministre

Troisième génération ? La vérité, c’est que l’évolution est constante et continue. Si vous manquez le train, il vous sera d’autant plus difficile de le rattraper qu’il aura pris de la vitesse.

Nous avons décidé d’ouvrir une consultation en interne pour savoir ce que nous pouvions faire durant cette période transitoire : la DGA, la direction générale de l’armement, à qui ce dossier a été confié, nous a proposé trois pistes.

Tout d’abord, nous pouvions nous appuyer sur le drone Harfang, et EADS nous a assurés qu’il était possible de nous faire une proposition en la matière.

Ensuite, il est apparu, eu égard aux éléments d’information que EADS a fournis à la DGA, que le Heron TP proposé par Dassault coûtait 8 % de moins que le Harfang nouvelle génération d’EADS. Au demeurant, soyons honnêtes, notre expérience avec EADS n’a pas été concluante. Exit donc cette solution.

Enfin, il restait le drone Reaper, qui fait partie de la famille des drones Predator. Il s’agit assurément aujourd'hui du produit le plus performant qui soit pour le prix le plus accessible. On a dit qu’il était 20 % moins cher et 30 % meilleur, ou l’inverse…

Debut de section - Permalien
Gérard Longuet, ministre

Quoi qu’il en soit, il est meilleur et moins cher, sous réserve de sa francisation.

Monsieur Reiner, vous avez évalué le coût de cette francisation dans votre rapport, mais notre interlocuteur américain ne nous a à aucun moment fait part de cette offre francisée. Peut-être a-t-il considéré qu’il n’avait pas été saisi officiellement de cette question, à moins qu’il n’ait pas procédé à ce travail d’investigation, qui représente un investissement assez lourd ? Quoi qu’il en soit, cette offre est nécessairement plus élevée que l’offre standard, et notre objectif est d’intégrer ce drone dans un système ; c’est là où je veux en venir.

Peu importe qu’il s’agisse d’un drone de deuxième ou troisième génération. C’est toute une famille de systèmes d’observation et de frappe qui va se rencontrer, et nous sommes aux deux bouts de la chaîne. Les satellites : nous en avons ! Les drones tactiques : nous en avons ! Les pod de reconnaissance sur nos avions : nous en avons d’excellents !

Concernant la frappe à distance, les drones sont des avions pilotés du sol qui permettent de frapper à distance. Vous avez évoqué la question des drones de maraudage, qui nous fait revenir à l’actualité libyenne. Un drone de maraudage tire parfois avec malheur – en témoigne la tragédie du Pakistan –, parfois avec bonheur – comme ce fut le cas en Libye –, mais, dans tous les cas, il tire avec efficacité. Toutefois, il existe des dizaines de façons d’intervenir à distance.

Nos missiles de croisière SCALP tirés en Libye ont été parfaitement pertinents. D’une certaine façon, ce sont des drones. Je veux dire par là que ce sont des avions qui sont télécommandés et qui portent le feu à distance. Il y a donc une gamme complète.

Pouvions-nous prendre le risque de ne pas disposer d’un lien entre le système de reconnaissance qui s’intègre dans le système de maîtrise numérique du théâtre d’opérations souhaité par l’armée française, notamment par l’aviation, et les instruments terrestres, puisque l’on est au niveau interarmées ? Pouvions-nous prendre le risque de ne pas pouvoir réunir toutes ces compétences, au prétexte que nous ne maîtrisons pas un outil important ?

Nous disposons des autres technologies de communication – les communications par satellite, les communications entre l’avion et le sol, entre les avions, avec des systèmes de réactivité parfaits –, mais pouvons-nous nous interdire d’explorer un domaine parce que l’on préfère acheter immédiatement un produit qui existe, solution à laquelle l’état-major était plutôt favorable ?

Toutefois, en procédant ainsi, nous aurions introduit un élément extérieur qui n’était pas compatible avec l’ensemble du système cohérent que nous construisons en permanence avec, d’une part, le système ISR et, d’autre part, l’ensemble des modes de frappe à distance.

C'est la raison pour laquelle nous n’avons pas fait ce choix. « Mais que va-t-il se passer avec les constructeurs BAE et Dassault ? », allez-vous me demander.

Monsieur Reiner, vous avez évoqué dans votre rapport écrit le drone nEUROn, et vous avez eu raison, car il est la préfiguration de ce que pourrait être l’UCAV français. On commence à travailler sur ce dossier, mais il m’importe aujourd'hui d’avoir un produit qui puisse s’intégrer dans un système. Or je sais que l’entreprise General Atomics ne fera jamais l’effort de nous transmettre toute la technologie dont elle dispose ni celui d’adapter son produit pour que nous puissions l’intégrer à notre système. Nous serions alors dans la situation d’un ensemblier qui comprendrait, à l’intérieur d’un ensemble complet, un élément hétérogène. C'est la raison pour laquelle nous avons opté pour cette solution qui présente un écart financier.

Je souhaiterais vous convaincre, monsieur Reiner, et, si tel n’était pas le cas, j’en serais désolé. De toute façon, nous reprendrons cette conversation, je pense.

Il n’est pas simplement question ici de politique industrielle. Cette affaire comporte, je le reconnais, un volet sur la politique industrielle, mais elle a surtout trait à la cohérence du système dont nous discutons.

Nous avons besoin d’un trait d’union entre la fonction d’observation et la fonction de frappe à distance, avec toute la gamme d’engins qui contribuent à la maîtrise du théâtre d’opérations ou à la frappe à distance. Or, nous risquons d’avoir un élément extérieur, qui nous placera dans une situation quelque peu grotesque, semblable à ce qui arrive à un bricoleur essayant de brancher dans une prise à deux fiches une rallonge électrique avec une prise à trois fiches ! Par conséquent, si votre solution est choisie, nous perdrons des années.

C'est la raison pour laquelle nous avons opté pour l’intégration de ce drone. Certes, ce choix est légèrement plus coûteux, mais il a l’immense mérite de donner un sens à cette politique d’ensemble, alors que l’acquisition extérieure continuerait de rendre hétérogène un système qui a besoin d’être cohérent.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

La parole est à M. Jacques Gautier, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Gautier

Monsieur le ministre, si votre démonstration peut paraître convaincante, elle ne m’a pas convaincu. En effet, vous nous présentez une image superbe de quelque chose qui n’existe pas.

Depuis une quinzaine d’années, la France a fait le choix de travailler avec Israël malgré les faiblesses des matériels de ce pays, conçus par rapport à une superficie et à des menaces qui ne sont pas les nôtres. Nous n’avons pas les mêmes besoins opérationnels qu’Israël.

Nous avons déjà connu des échecs en matière de recherche industrielle avec la SAGEM, avec EADS et le Harfang. Or, aujourd'hui, vous nous proposez de nous marier une nouvelle fois avec un industriel qui, lui, va apporter 90 % de la technologie. Je vous rappelle que l’industriel israélien annonce que cela va lui rapporter 400 millions de dollars, soit 300 millions d’euros, sur un budget de 320 millions d’euros. Cela signifie, monsieur le ministre, que Thales et Dassault vont avoir une marge 20 millions d’euros pour franciser ce dossier. C’est le délégué général à l’armement israélien lui-même qui le dit !

Vous nous proposez d’acheter un drone dont nos armées ont besoin, mais qui – vous l’avez-vous-même reconnu – n’a pas les performances que nous espérons. J’irai même plus loin : les documents qu’on nous a fournis au niveau national sont de l’enfumage ! Nous, nous sommes allés à la source, et nous disposons donc des documents israéliens.

M. Jacques Gautier brandit les documents.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Gautier

On nous parle d’une altitude de 41 000 pieds, et pas au-delà, d’une endurance limitée à vingt heures, et les Israéliens sont fiers d’annoncer que le Heron TP est à 143 nœuds, alors que le Reaper est à 240 nœuds. Cela signifie que ce matériel dont la plateforme et la motorisation n’auront pas été prévues pour la vitesse ne pourra pas faire l’inter-théâtre dont nous aurons besoin dans les années à venir.

Monsieur le ministre, nous souhaitons bien sûr engager une coopération franco-britannique. Mais les Britanniques ont le Reaper et travaillent sur le drone de troisième génération. Pourquoi pourraient-ils avoir une complémentarité et pas nous ?

Aujourd’hui, compte tenu des performances du Reaper, de son endurance, de son tirage à des centaines d’exemplaires, du fait qu’il est armé et non pas armable, qu’il est, de plus, totalement interopérable et que nos alliés, américains ou européens, en disposent, il s’agit, me semble-t-il, d’une piste indispensable à ouvrir non seulement dans le travail en commun, de proposition et de préparation d’un drone moyenne altitude longue endurance de troisième génération, ou drone MALE, mais aussi dans le maintien en condition opérationnelle, ou MCO.

Monsieur le ministre, je vous comprends d’autant moins qu’il ne s’agit pas de s’équiper d’un drone transitoire qui dure ; il s’agit de se doter d’un équipement qui réponde aux besoins opérationnels de nos forces pendant les six prochaines années. Au-delà, la réponse n’est pas le Reaper ; c’est le drone de troisième génération sur lequel nous aurons travaillé avec les Britanniques, même si j’en doute.

Je rappelle que 55 % du chiffre d’affaires de BAE Systems, le partenaire de Dassault, est réalisé avec les États-Unis. Les Britanniques ont toujours dit qu’au moment de choisir ils mettraient en concurrence tous les produits existants sur étagère et chercheraient le produit le plus performant et le moins cher. Je connais par avance le résultat de leur choix en 2020 !

Par conséquent, nous nous égarons et, pendant les six ans qui viennent, nous aurons un engin dépassé, prétendument en réseau ! Pardonnez-moi, mais, alors que nous connaissons les faiblesses du Sperwer, actuellement opérationnel dans nos forces, on préparerait le successeur, qui n’est pas forcément celui auquel nous avions pensé ? En effet, on commence à parler d’un rapprochement avec les Britanniques sur le Watchkeeper.

Par conséquent, le réseau dont vous nous parlez n’existe pas encore ! Peut-être vaudrait-il mieux investir a minima sur une période de sept ans et, comme nous le suggérons dans cet amendement, reverser les 80 millions d’euros économisés – ce n’est pas rien ! – au bureau d’études de Dassault, afin de lui permettre d’acquérir les compétences et de travailler sur un programme d’un drone de troisième génération avec la liaison de données et les fonctions d’interopérabilité, que vous évoquiez, et d’évolution.

Enfin, au niveau satellitaire, nous avons constaté que Zodiac avait bien réussi avec la liaison SATCOM qui équipe le Harfang. Pourquoi recommencer avec Thales, que j’apprécie par ailleurs, ce que Zodiac a déjà fait avec EADS ? Pourquoi dépenser deux fois et perdre à nouveau trois années pour arriver au même résultat ?

Voilà pourquoi, monsieur le ministre, je voterai sans la moindre hésitation cet amendement, qui sauvegarde les intérêts français, qui permet de doter nos armées d’un drone efficace et opérationnel dans les années qui viennent, et qui permet de consacrer 29 millions d'euros à la prolongation du contrat de maintenance du Harfang avec EADS.

Applaudissements

Debut de section - Permalien
Gérard Longuet, ministre

Monsieur le sénateur et cher Jacques Gauthier, je crains que les mêmes raisons qui vous font aujourd’hui choisir le Reaper ne vous conduisent à choisir le Reaper de nouvelle génération en 2020. Cela signifie que vous renoncez, parce que ce drone, fabriqué à des centaines d’exemplaires, sera moins cher. Le F-16, également fabriqué à des milliers d’exemplaires, ...

Debut de section - Permalien
Gérard Longuet, ministre

... est moins cher que le matériel français.

Dites alors très clairement, tranquillement, que vous demanderez aux États-Unis de nous procurer durablement un élément important du système de reconnaissance.

Votre raisonnement peut être appliqué à d’autres produits, jusqu’au jour où, voulant librement choisir nos conditions d’intervention dans une opération, nous constaterons que le matériel choisi ne nous permet pas cette totale liberté !

C’est votre choix, mais ce n’est pas le mien, car je considère au contraire que nous avons aujourd’hui une chance historique, celle de donner à cet élan consacré aux avions télécommandés à terre une base non seulement française pour une fois rassemblée, alors qu’au départ elle était insuffisante, mais aussi rapidement franco-anglaise !

Or, si vous choisissez le Reaper aujourd’hui, vous le choisirez forcément demain. Je ne vois pas pour quelles raisons il en serait autrement, puisqu’il n’y aura eu ni expérience de faite, ni démonstration d’une maîtrise et d’un savoir-faire.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

Monsieur le ministre, à ce stade de la discussion – elle est certes très intéressante, mais nous la conduisons depuis plusieurs mois déjà –, je suis tenté de vous dire que les arguments que vous venez de développer, même si je les respecte, n’en sont pas ! Comment voulez-vous que nous les recevions ?

Nous n’avons pas produit certains matériels pourtant utilisés par l’armée française – je pense, par exemple, aux AWACS, Airborne Warning and Control System, qui sont des matériels américains –, et cela ne nous a pas empêchés d’acheter des matériels français, tels que les avions Dassault ! Par conséquent, cet argument-là ne tient pas, d’autant que nous avons la volonté politique de consacrer une partie des crédits à la recherche, afin de produire le matériel dont nous avons besoin.

C’est donc l’inverse que nous sommes en train de vous expliquer ce soir ! C’est vous qui tentez de nous faire franchir la ligne d’abandon, d’une part, de notre souveraineté et, d’autre part, de la recherche au niveau national !

Non, l’esprit qui sous-tend cet amendement n’est pas celui que vous pensez. Bien que mes connaissances sur ce sujet soient moins pertinentes que celles de mes collègues, même si je débute ma thèse en l’espèce

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

Si nous ne sommes pas persuadés que notre choix est extraordinaire, nous sommes en revanche sûrs qu’il est meilleur que le vôtre. Aussi nous conseillons-vous de nous suivre dans cette voie-là. Pour ce qui nous concerne, monsieur le ministre, nous voterons cet amendement, car nous sommes convaincus en notre âme et conscience qu’il correspond aux attentes de l’armée française.

M. Jacques Gautier applaudit.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Défense », figurant à l’état B.

Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.

Je mets aux voix ces crédits, modifiés.

Ces crédits sont adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

Nous allons procéder au vote des crédits du compte d’affectation spéciale « Gestion et valorisation des ressources tirées de l’utilisation du spectre hertzien », figurant à l’état D.

(En euros)

Mission

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Gestion et valorisation des ressources tirées de l’utilisation du spectre hertzien

Désendettement de l’État

Optimisation de l’usage du spectre hertzien

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.

Je mets aux voix ces crédits.

Ces crédits sont adoptés.

Debut de section - Permalien
Gérard Longuet, ministre

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens en cet instant à remercier les sénateurs présents de leur assiduité, de leur engagement, de leur intérêt pour les choses de la défense. Même si le ministre n’a pas eu toutes les satisfactions qu’il espérait obtenir, un débat de qualité est ouvert.

Personnellement, ayant siégé pendant trente-trois ans au Parlement français, je suis très attaché à la vie parlementaire. J’y trouve là une raison d’espérer dans la solidité de notre démocratie. Et je vous convaincrai !

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Défense » et du compte d’affectation spéciale « Gestion et valorisation des ressources tirées de l’utilisation du spectre hertzien ».

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, mardi 29 novembre 2011, à quatorze heures trente et le soir :

- Suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2012, adopté par l’Assemblée nationale (106, 2011-2012).

Examen des missions :

- Santé (+ articles 60, 60 bis et 60 ter)

M. Jean-Pierre Caffet, rapporteur spécial (rapport n° 107, annexe n° 25) ;

M. Dominique Watrin, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales (avis n° 109, tome V).

- Action extérieure de l’État

MM. Richard Yung et Roland du Luart, rapporteurs spéciaux (rapport n° 107, annexe n° 1) ;

MM. Jean Besson et René Beaumont, rapporteurs pour avis de la commission des affaires étrangères et de la défense (avis n° 108, tome I) ;

Mme Hélène Conway Mouret et M. Robert del Picchia, rapporteurs pour avis de la commission des affaires étrangères et de la défense (avis n° 108, tome II) ;

Mme Leila Aichi et M. Pierre Bernard-Reymond, rapporteurs pour avis de la commission des affaires étrangères et de la défense (avis n° 108, tome III) ;

M. Louis Duvernois, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication (avis n° 110, tome I)

- Ville et logement (+ articles 64 et 64 bis)

M. Jean Germain, rapporteur spécial (rapport n° 107, annexe n° 31) ;

M. Luc Carvounas, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales (avis n° 109, tome VIII) ;

MM. Thierry Repentin et Claude Dilain, rapporteurs pour avis de la commission de l’économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire (avis n° 111, tome VII).

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

La séance est levée le mardi 29 novembre 2011, à trois heures dix.