La séance est ouverte à neuf heures trente.
Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
Monsieur le président, lors du scrutin public n° 104 sur l’amendement n° 102 rectifié ter, Mme Annick Billon a été enregistrée comme ayant voté contre, alors qu’elle souhaitait s’abstenir.
Acte vous est donné de cette mise au point, mon cher collègue. Elle sera publiée au Journal officiel et figurera dans l’analyse politique du scrutin.
L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, pour une école de la confiance (projet n° 323, texte de la commission n° 474, rapport n° 473).
Dans la discussion du texte de la commission, nous en sommes parvenus, au sein du chapitre Ier du titre II, aux amendements tendant à insérer un article additionnel après l’article 6 bis.
TITRE II
INNOVER POUR S’ADAPTER AUX BESOINS DES TERRITOIRES
Chapitre Ier
L’enrichissement de l’offre de formation et l’adaptation des structures administratives aux réalités locales
Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 16 rectifié bis, présenté par Mme Blondin, M. Fichet, Mmes S. Robert et G. Jourda, MM. Courteau, Botrel, Tourenne, Bérit-Débat et Montaugé et Mme Espagnac, est ainsi libellé :
Après l’article 6 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 212-8 du code de l’éducation est ainsi modifié :
1° Le cinquième alinéa est supprimé ;
2° Après le 3°, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« …° À l’inscription dans un établissement scolaire proposant un enseignement de la langue régionale. »
La parole est à Mme Maryvonne Blondin.
Cet amendement a pour objet d’introduire à l’article L. 212-8 du code de l’éducation une disposition autorisant le versement du forfait scolaire pour un enfant scolarisé dans une autre commune que sa commune de résidence, dans le cas où cette dernière ne proposerait aucune offre d’enseignement bilingue public.
Trois cas dérogatoires déjà prévus dans la loi NOTRe : celui où les parents travaillent dans une autre commune, celui d’un regroupement de fratrie et, enfin, celui où l’enfant doit suivre un traitement médical.
Même si la loi NOTRe a permis une avancée dans ce domaine, les maires des communes de résidence ne sont pas strictement tenus de participer financièrement. Ils sont invités à trouver un accord avec les maires des communes d’accueil. À défaut, le préfet peut aussi être sollicité dans l’intérêt de l’enfant, mais il arrive parfois qu’aucun accord ne soit trouvé. La création de ce quatrième cas dérogatoire permettrait de sécuriser l’inscription des élèves et d’apaiser les relations.
La loi de notre ancien collègue Jean-Claude Carle précise que les trois dérogations que j’évoquais à l’instant figurent aussi bien à l’article L. 212-8 du code de l’éducation qu’à l’article L. 442-5-1 du même code, qui concerne l’enseignement privé. La loi Carle impose en effet que tout ce qui relève d’une obligation s’agissant de la scolarité des enfants s’applique de la même manière aux établissements publics et aux établissements privés : il doit y avoir parité de traitement. Si le quatrième cas dérogatoire était créé pour le public, il s’appliquerait de facto pour le privé.
Les deux amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 68 rectifié bis est présenté par MM. A. Marc, Bignon, Chasseing, Wattebled et Decool.
L’amendement n° 373 rectifié est présenté par MM. Dantec, Artano, A. Bertrand, Cabanel, Gabouty et Gold, Mme Guillotin et MM. Labbé et Roux.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 6 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 212-8 du code de l’éducation est ainsi modifié :
1° Le cinquième alinéa est supprimé ;
2° Après le 3°, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« …° À l’inscription dans un établissement scolaire proposant un enseignement de la langue régionale en l’absence d’enseignement équivalent dans la commune de résidence de l’élève. »
L’amendement n° 68 rectifié bis n’est pas soutenu.
La parole est à M. Ronan Dantec, pour présenter l’amendement n° 373 rectifié.
En raison de sa lourdeur, le dispositif mis en place par la loi NOTRe ne fonctionne pas de manière satisfaisante sur le terrain. En conséquence, les moyens pour le développement de l’enseignement bilingue ne sont pas assurés et la loi, telle qu’elle est rédigée aujourd’hui, créé beaucoup de tensions et de frustration. La mesure de simplification que nous proposons semble de bon sens
Nous n’en sommes plus aux débats d’arrière-garde où il s’agit de savoir si l’on est pour ou contre l’enseignement bilingue. Nous cherchons à mettre en place un système rationnel, fonctionnant de manière apaisée. Nos échanges d’hier soir m’ont laissé un peu sur ma faim, monsieur le ministre. Je partage votre analyse selon laquelle le rôle de l’école dans l’enseignement des langues régionales a changé. Aujourd’hui, en effet, l’école de la République ne s’oppose plus aux langues parlées dans la famille, alors que, sous la IIIe République, on stigmatisait les élèves surpris à parler breton. Une telle politique a surtout été appliquée en Afrique : beaucoup d’Africains de nos âges pourraient évoquer le combat mené par l’école contre le wolof ou le fon. Le ministre de l’éducation nationale doit désormais assumer le fait que l’école de la République est devenue un puissant outil de préservation et de reconquête de la diversité linguistique dans notre pays.
Cet amendement de simplification va tout à fait dans le sens de l’histoire et correspond pleinement à la volonté qui s’exprime sur le terrain, en particulier parmi les maires confrontés à des situations souvent très difficiles à gérer.
Je propose d’en rester à une approche technique. Hier soir, nous avons tous manifesté notre attachement aux langues régionales. Nous avons évoqué les difficultés qui subsistent et le cadre juridique et constitutionnel, que l’on peut souhaiter changer.
Aujourd’hui, un élève qui s’inscrit dans une école publique d’une autre commune que la sienne pour suivre un enseignement bilingue peut tout à fait le faire. Cependant, le maire de la commune de résidence n’est pas tenu de verser le forfait scolaire. La loi NOTRe a mis en place un dispositif incitatif, qui passe par la médiation du préfet. En l’état actuel des choses, sachant que je connais bien les territoires concernés – la France n’est pas la Bretagne –, je préfère que l’on en reste aux dispositions de cette loi. Il est rare que je dise du bien de la loi NOTRe
M. Philippe Dallier rit.
Mes chers collègues, avec ces amendements, vous risquez de dresser les maires les uns contre les autres, …
… ce qui serait contre-productif pour l’enseignement des langues régionales. Étant un élu du Béarn, je peux vous dire que, dans les vastes territoires où l’on parle l’occitan, certains maires se crisperont, non seulement parce que l’école de leur commune perdra des enfants, ce qui peut menacer l’existence de classes, voire de l’école, mais aussi parce qu’ils devront en plus verser le forfait scolaire.
Votre intention est louable, madame Blondin, je respecte et je peux partager votre combat pour les langues régionales, mais je pense vraiment qu’adopter votre amendement serait contre-productif.
L’équilibre trouvé par la loi NOTRe, sous le quinquennat de François Hollande, me semble juste. J’émets donc un avis défavorable sur les amendements n° 16 rectifié bis et 373 rectifié.
Je suis heureux de reprendre ce débat extrêmement important, dans l’esprit que vous avez rappelé, monsieur Dantec. La Constitution consacre le français comme langue de la République, mais la pratique des langues régionales est encouragée. Nous n’y voyons pas de contradiction ; c’est au contraire un facteur de vitalité linguistique. Il s’agit de notre histoire, de notre patrimoine, et nous devons en tenir compte pour fonder nos décisions.
Lors de son récent déplacement en Bretagne, le Premier ministre a pris des engagements importants, qui ne sauraient être sous-estimés. Voici ce qu’il a déclaré à cette occasion :
« J’ai bien compris votre souhait de conforter le modèle de développement des écoles sous contrat bilingues, avec l’idée de permettre à ces écoles de bénéficier du versement du forfait communal par les communes. Vous comprendrez que ce n’est pas une décision complètement évidente à mettre en œuvre et qu’elle ne peut se prendre indépendamment des maires.
« C’est pourquoi nous nous sommes mis d’accord, avec Loïg Chesnais-Girard, pour laisser aux communes de Bretagne, représentées au sein de la conférence territoriale de l’action publique, et à la CTAP plus globalement, le soin de se prononcer sur la possibilité d’élargir le forfait scolaire aux écoles bilingues sous contrat. Si les maires sont d’accord et que la CTAP émet un avis favorable, alors le Gouvernement en tiendra compte pour proposer les modifications législatives nécessaires. »
Cet engagement est essentiel. Lorsqu’un pas de cette importance est accompli, j’aimerais que les acteurs concernés, y compris les plus fervents promoteurs des langues régionales, le reconnaissent. Le texte qui vous est soumis traduit cette avancée, voulue par le Gouvernement. Le rapporteur a très bien résumé la situation : aujourd’hui, la conférence territoriale de l’action publique, la CTAP, permet une forme de régulation. Prenons garde à ne pas ouvrir des vannes sans bien mesurer les conséquences que cela pourrait entraîner, de n’encourager qu’une certaine forme d’enseignement privé, au détriment de l’enseignement public et des autres établissements privés. En l’occurrence, le breton a aussi toute sa place dans l’école publique, sous diverses formes. Quand on défend l’école, il faut être attentif à éviter d’éventuels effets pervers. Nous entendons avoir une position à la fois de progrès et de raison : nous ne refusons pas le développement des langues régionales, mais le texte, dans sa rédaction actuelle, comporte déjà des avancées considérables pour les écoles privées pratiquant le bilinguisme. J’aurais aimé que l’on nous en donne acte de manière assez consensuelle, plutôt que de toujours vouloir franchir une étape supplémentaire en faisant comme si le progrès accompli n’était pas important.
Je salue le pas important qui a effectivement été réalisé. Mon amendement s’inscrit dans un cadre général, qui dépasse celui de la région Bretagne. Je reconnais l’attachement de notre rapporteur aux langues régionales. Elles sont nos racines, mais aussi nos ailes, car elles nous permettent de nous ouvrir aux autres, à l’international, et favorisent l’apprentissage d’autres langues. On citait hier Claude Hagège et Mona Ozouf.
Je présenterai tout à l’heure un amendement sur la CTAP. Compte tenu de ce qui vient d’être dit, j’ose espérer qu’il recevra un avis favorable.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 375 rectifié bis, présenté par MM. Dantec, Arnell, Artano et A. Bertrand, Mme M. Carrère et MM. Castelli, Collin, Gold, Labbé, Roux et Vall, est ainsi libellé :
Après l’article 6 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le 1° du II de l’article L. 121-3 du code de l’éducation est complété par les mots : « en particulier dans le cadre de l’enseignement bilingue en français et en langue régionale ou étrangère ».
La parole est à M. Ronan Dantec.
Cet amendement vise à une reconnaissance plus explicite de l’enseignement bilingue en français et en langue régionale lors des examens et pour les thèses ou les mémoires. Aujourd’hui, la situation est très variable à cet égard selon les académies. Il me semble important de procéder à une harmonisation.
Monsieur le rapporteur, sur ce sujet, la technique et la politique restent étroitement mêlées ! Si vraiment il n’y a plus de débat de fond sur la nécessité de développer l’enseignement bilingue de manière homogène sur tout le territoire, et ce avant tout dans le public, alors nous devons avoir une discussion exclusivement technique, centrée sur les points de blocage. Hier, nous avons ainsi défendu un amendement, dont je reconnais qu’il était mal rédigé, portant sur les risques de concurrence entre l’enseignement des langues régionales et celui des langues étrangères. Ce matin encore, nos amendements, qui n’ont rien d’idéologique, portent sur des points précis : nous ne lançons pas des débats généraux sur les bénéfices de l’enseignement immersif pour les élèves, estimant, peut-être à tort, qu’il existe aujourd’hui un consensus dans notre pays sur le sujet.
En l’espèce, par le présent amendement, nous demandons une meilleure reconnaissance du cursus des élèves de l’enseignement bilingue lors de certains examens. Il s’agit de remédier à des difficultés rencontrées sur le terrain.
L’amendement n° 196 rectifié bis, présenté par MM. Canevet, Longeot et Kern, Mme Loisier, M. Delcros, Mmes Vermeillet et Saint-Pé, M. Capo-Canellas, Mmes Gatel et N. Goulet, M. Moga, Mme Perrot et MM. Bockel et Laurey, est ainsi libellé :
Après l’article 6 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le 1° du II de l’article L. 121-3 du code de l’éducation, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« …° Dans le cadre de l’enseignement bilingue en français et en langue régionale ; ».
La parole est à M. Jean-François Longeot.
Une reconnaissance plus explicite de l’enseignement bilingue en français et en langue régionale lors des examens ou à l’occasion des thèses et des mémoires permettrait la valorisation des parcours bilingues. Elle aurait également l’avantage de prendre en compte les aspirations des jeunes bilingues passant des examens comme le baccalauréat ou le brevet des collèges.
Ma réponse sera technique et politique…
Sur le plan technique d’abord, l’objectif, y compris pour les écoles immersives, étant d’aller vers le bilinguisme, il y a des épreuves en français et des épreuves en langue régionale lors des examens nationaux. Vouloir que l’ensemble des épreuves se déroulent en langue régionale ne me paraît donc pas correspondre aux vœux des fédérations d’écoles immersives.
Sur le plan politique, j’estime qu’il faut veiller à ne pas aller trop vite. Pour ma part, je mène ce combat en faveur des langues régionales en gardant toujours à l’esprit qu’il faut que la société dans son ensemble, et les élus en particulier, suive. Faisons attention à ne pas susciter des crispations en voulant aller trop loin : ce serait contre-productif. Monsieur Dantec, je travaille sur ces sujets depuis suffisamment longtemps pour pouvoir m’exprimer ainsi.
Ce que je souhaite, c’est que les dérogations existantes pour le passage des examens en langue régionale dans certaines disciplines soient clairement confortées et ne dépendent pas exclusivement du bon vouloir du représentant du ministre dans l’académie. J’aimerais obtenir de votre part des assurances sur ce point, monsieur le ministre. Il y a un subtil équilibre à trouver pour promouvoir les langues régionales tout en maintenant le cadre national des examens, auquel je crois la Haute Assemblée attachée.
Je demande aux auteurs de ces amendements de bien vouloir les retirer. À défaut, j’y serai défavorable.
Je reconnais volontiers les efforts du rapporteur et son habileté pour essayer de trouver un équilibre, mais nous sommes devant un paradoxe, voire une contradiction, sur cette question.
D’un côté, on défend l’école de la République, ce qui suppose que les règles soient à peu près les mêmes partout ; de l’autre, pour ce qui concerne les langues régionales, on va de plus en plus vers des situations disparates. Cela vaut d’ailleurs pour l’engagement pris par M. Édouard Philippe, qui ne concerne que la Bretagne.
Nous ne souhaitons nullement, monsieur le rapporteur, que tous les examens puissent être présentés en langue régionale, mais, aujourd’hui, on peut passer des épreuves de mathématiques en langue basque, mais pas en langue bretonne : la décision est laissée à la discrétion des rectorats. Dans un pays républicain comme la France, on ne peut pas accepter une telle disparité ! Mon amendement tend précisément à rétablir de l’uniformité sur le territoire national. Pour l’heure, le ministre ne nous a pas donné les assurances que vous lui avez demandées, monsieur le rapporteur.
Monsieur Dantec, vous êtes un adepte du droit à la différenciation. Or, sur cette question, l’appétence diffère selon les territoires où sont enseignées les langues régionales. Pour un territoire comme celui dont je suis élu, l’établissement d’un cadre national pourrait constituer une régression, en particulier pour ce qui concerne la langue basque. Il faut tenir compte de la diversité des situations.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
Après le cinquième alinéa de l’article L. 442-5-1 du code de l’éducation, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« En outre, après accord de la conférence territoriale de l’action publique, la participation financière à la scolarisation des enfants dans les établissements privés du premier degré sous contrat d’association dispensant un enseignement de langue régionale situés sur le territoire régional, fait l’objet d’un accord entre la commune d’accueil et la commune de résidence, à la condition que cette dernière ne dispose pas d’école dispensant un enseignement de langue régionale. À défaut d’accord, le représentant de l’État dans le département réunit les maires de ces communes afin de permettre la résolution du différend en matière de participation financière, dans l’intérêt de la scolarisation des enfants concernés. »
Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 389 rectifié bis, présenté par Mme L. Darcos, MM. Cambon et Bazin, Mmes A.M. Bertrand et Bories, M. Charon, Mme Deromedi, MM. Dufaut et Gremillet, Mme Gruny, M. Laménie, Mme Lamure, MM. Lefèvre, H. Leroy et Mandelli, Mme M. Mercier, MM. Mouiller et Pierre, Mme Procaccia et MM. Revet, Segouin et Sido, est ainsi libellé :
Alinéa 2, première phrase
1° Supprimer les mots :
dispensant un enseignement de langue régionale situés sur le territoire régional,
2° Après les mots :
commune de résidence
supprimer la fin de cette phrase.
La parole est à Mme Laure Darcos.
Il s’agit avant tout d’un amendement d’appel, visant à attirer l’attention du Sénat et du Gouvernement sur la rupture d’égalité qu’engendrerait la mise en œuvre du dispositif de cet article.
En effet, il ne me paraîtrait pas juste qu’une école privée sous contrat touche des forfaits scolaires bien supérieurs à ceux dont bénéficie une autre école privée située dans la même commune, du seul fait qu’elle proposerait un enseignement de langue régionale. Il y a un vrai risque de rupture d’égalité.
Monsieur le ministre, j’aimerais que vous développiez davantage les propos que vous avez tenus en rappelant l’engagement du Premier ministre. C’est une Bretonne qui vous le demande !
L’amendement n° 18 rectifié bis, présenté par Mmes Blondin et S. Robert et MM. Fichet, Botrel et Tourenne, est ainsi libellé :
Alinéa 2, première phrase
Après chaque occurrence du mot :
enseignement
insérer le mot :
bilingue
La parole est à Mme Maryvonne Blondin.
L’article 6 ter A a été adopté en commission après la réunion de la CTAP de Bretagne, qui a émis un avis favorable sur la possibilité de faire bénéficier les écoles bilingues en français et en langue régionale du forfait scolaire communal. Il s’inscrit donc bien dans le respect du pacte signé entre l’État et le conseil régional.
Mon amendement rédactionnel vise à bien distinguer l’initiation à la langue régionale dans les écoles maternelles ou primaires de l’enseignement bilingue à proprement parler.
L’amendement n° 389 rectifié bis a pour objet de supprimer la distinction entre écoles privées selon qu’elles dispensent ou non un enseignement de langue régionale. Il a le mérite de mettre en lumière l’un des défauts de l’article 6 ter A, à savoir la création d’une rupture d’égalité entre écoles privées.
Je regrette que le Gouvernement n’ait pas proposé de nouvelle rédaction pour cet article. Nous nous trouvons de ce fait tenus d’adopter un dispositif qui, outre le problème d’égalité que je viens d’évoquer, est inopérant à plusieurs titres.
Premièrement, il repose sur une décision de la conférence territoriale de l’action publique. Or la CTAP n’est pas une instance décisionnaire et les petites communes, qui sont les plus concernées par ce dispositif, y sont sous-représentées.
Deuxièmement, le forfait scolaire étant, le cas échéant, versé directement par la commune de résidence à l’établissement privé sous contrat, l’accord entre la commune d’accueil et la commune de résidence n’a pas lieu d’être.
Troisièmement, sa rédaction est tellement alambiquée que le dispositif de cet article ne constitue pas une obligation de contribuer. Si tel était le cas, cela représenterait une charge considérable pour les communes, particulièrement les plus petites, qui ne ferait l’objet d’aucune compensation.
L’article 6 ter A devra faire l’objet d’une réécriture. C’est pourquoi je regrette l’absence d’initiative du Gouvernement. S’agissant de la transcription d’un engagement pris par lui, la commission s’en remet à l’avis du Gouvernement sur les amendements n° 389 rectifié bis et 18 rectifié bis.
La critique est aisée, mais l’art est difficile… Après vous avoir tous écoutés, mesdames, messieurs les sénateurs, m’est également venu à l’esprit un autre adage, latin cette fois : in medio stat virtus – virtus pouvant aussi signifier « courage ».
L’engagement pris par le Premier ministre que j’ai rappelé était souhaité par bon nombre d’entre vous. Cet engagement, nous le mettons en œuvre. Le rapporteur vient d’indiquer que la rédaction de l’article est imparfaite. C’est possible, mais on ne m’a pas présenté d’autre proposition.
Quant à l’amendement de Mme la sénatrice Darcos, il me semble satisfait, parce que nous n’avons évidemment aucunement l’intention d’introduire des disparités financières entre écoles.
Si le dispositif de l’article est insuffisamment précis, je suis tout à fait disposé à poursuivre la discussion après la promulgation de la loi de façon à garantir l’équité. Il y aura d’ailleurs un dialogue continu avec la CTAP. En tout état de cause, comme je l’ai déjà indiqué, on ne doit pas créer d’inégalités entre les différentes formes d’enseignement privé sous contrat, et encore moins, évidemment, entre l’enseignement privé sous contrat et l’école publique. J’en profite pour rappeler que nous encouragerons fortement l’enseignement des langues régionales dans l’enseignement public, au travers notamment de la réforme du lycée.
J’entends les critiques du rapporteur sur la rédaction de l’article 6 ter A, même si je ne les partage pas. Si elle comportait une ambiguïté, il pourrait aisément y être remédié lors de la mise en œuvre, sachant que le principe d’équité est clairement posé.
En conclusion, je demande le retrait de ces amendements, faute de quoi j’y serai défavorable.
J’ai en tout cas bien senti une certaine gêne dans sa réponse.
Le Gouvernement a pris de grands engagements, qu’il n’est pas capable de traduire correctement dans le présent projet de loi. C’est en quelque sorte une méthode de gouvernement… La commission s’en remet à la sagesse du Sénat.
Je ne peux laisser sans réponse ces propos exagérément sévères du rapporteur, avec lesquels je suis en profond désaccord. Nous pourrions faire des comparaisons avec d’autres périodes législatives, monsieur le rapporteur ; c’est un exercice auquel je me prêterais volontiers…
Concernant l’article 6 ter A, peut-être n’ai-je pas été clair, mais, pardonnez-moi de vous le dire, monsieur le rapporteur, si vous ne comprenez ni sa teneur ni ce que je dis, il faut aussi s’interroger sur le récepteur ! En l’occurrence, un article a été élaboré ; nos appréciations sur sa rédaction divergent, mais je pense avoir été très clair sur les grands principes : aucune discrimination ne doit être faite entre différentes catégories d’établissements. Cette position explique ma demande de retrait de ces amendements.
Les discours un peu complexes des uns et des autres ne doivent pas masquer ce fait très simple : le Premier ministre a pris un engagement très fort, inédit, qui trouve sa mise en œuvre au travers de l’article 6 ter A. Sur ce sujet comme sur d’autres, mille discours viennent brouiller les choses, et l’on finit par oublier l’essentiel : cet article représente un progrès énorme pour le développement du bilinguisme et nous sommes déterminés à le mettre en œuvre dans le respect des grands principes. Si cela n’est pas clair, qu’on me le dise !
Le Premier ministre a effectivement pris des engagements en Bretagne, mais la loi fait-elle qu’ils valent pour l’ensemble du territoire national ? Demandera-t-on demain aux régions de financer le bilinguisme ? Je pense que nous n’en sommes plus très loin, mais c’est sur ce point que nous restons dans le flou, d’où notre incapacité à trouver une rédaction pleinement satisfaisante. Nous avons essayé d’élaborer, dans un esprit constructif et en nous appuyant sur les propos tenus par le Premier ministre en Bretagne, une stratégie claire en vue d’aboutir à un dispositif applicable sur l’ensemble du territoire national et doté d’un financement bien défini, pour promouvoir le bilinguisme, comme le demandent les sociétés bretonne, alsacienne et basque. Cette demande doit être entendue et il revient à l’État d’y répondre, mais nous sommes restés au milieu du gué, monsieur le ministre !
Je ne partage pas les propos qui viennent d’être tenus.
On peut toujours préjuger de tout, mais, en l’espèce, la démarche est engagée. Il faut savoir le reconnaître, et nous verrons ce qu’il en sera à l’avenir. En tout cas, nous prendrons nos responsabilités, afin que l’on puisse aller plus loin.
Je voudrais souligner que le Gouvernement a respecté sa parole. Ce « pacte girondin » breton, préfigurant cette différenciation territoriale à laquelle, en tant que Bretonne, je suis forcément très attachée, montre déjà que l’on peut poser un cadre et progresser sur ces sujets. J’espère que nous aurons un débat sur la notion de différenciation territoriale à l’occasion de la discussion de la réforme constitutionnelle, car c’est un vrai sujet, en recoupant d’autres, comme celui de l’expérimentation.
Je m’étonne de la position de notre rapporteur. La précision rédactionnelle apportée au travers de l’amendement présenté par Mme Blondin était importante pour « muscler » encore plus cet article 6 ter A que nous avons introduit en commission.
En tout état de cause, sur ce sujet, comme sur d’autres, nous avons fait un pas dans la bonne direction. Je remercie le Gouvernement d’être fidèle à sa parole et de mettre en œuvre les engagements pris en Bretagne.
Pour ma part, je m’étonne de la méthode employée ! Le discours du Premier ministre a été tenu au mois de septembre. Cet article a été introduit dans le texte en commission sur l’initiative de votre groupe, madame Robert, qui, me semble-t-il, n’appartient pas à la majorité présidentielle… Si j’ai accepté l’amendement introduisant cet article, c’est parce que je savais que la CTAP aurait lieu après. Il s’agissait donc d’ouvrir la voie, en inscrivant un dispositif dans le projet de loi, dans l’attente de l’élaboration par le Gouvernement, après la tenue de la CTAP, d’une rédaction traduisant son engagement.
Si cette démarche peut permettre un progrès pour le développement des langues régionales, je m’en réjouirai, mais avouez tout de même que la méthode utilisée et cet axe très breton qui s’est mis en place entre le Gouvernement et le groupe socialiste sont assez surprenants !
Je remercie Mme la sénatrice Sylvie Robert de ses propos, auxquels je souscris totalement. Cela fait du bien d’entendre qu’il est pris acte de certaines avancées !
Monsieur le sénateur Dantec, un équilibre a été trouvé, je crois, entre un cadre national, dont nous avons en effet bien besoin et qui traduit une vision d’ensemble de la place des langues régionales en France, et des adaptations visant à tenir compte des spécificités locales. En ce sens, l’institution des CTAP est très positive.
Que les régions soient amenées à participer à cette dynamique me paraît tout à fait cohérent. Cela ne signifie pas que l’État se désengage : un partenariat s’établit entre lui et les régions, dans le cadre d’une vision partagée et d’un esprit de coopération, les modalités d’application pouvant varier d’une région à l’autre.
Il est toujours facile de dépeindre l’État comme étant de mauvaise volonté, tandis que les autorités locales feraient toujours preuve de dynamisme et de bienveillance. C’est un peu la même chose à l’échelon européen : quand ça va mal, c’est toujours la faute de Bruxelles. Ce manichéisme est malheureusement trop fréquent dans le débat public. Ce n’est pas du tout en ces termes qu’il faut poser le débat ; il importe que chacun prenne ses responsabilités. La réussite résultera d’une bonne coopération entre les autorités locales et l’éducation nationale, que nous travaillons précisément à instaurer. Il est tout à fait normal que les régions se responsabilisent au côté de l’État, qui, encore une fois, ne se désengage pas pour autant.
C’est la démarche qui a été enclenchée d’abord par le discours du Président de la République, puis par celui du Premier ministre. Il n’est dans l’intérêt de personne de brouiller les choses en faisant comme s’il n’y avait pas d’avancée. Cette avancée est dialectique, dynamique, certainement imparfaite – la perfection est rare en ce monde –, mais nous devons travailler à sa mise en œuvre de façon constructive.
Mon amendement était d’appel. Je vous remercie, monsieur le ministre, des précisions apportées. J’entends que vous allez poursuivre le dialogue, notamment avec l’enseignement catholique. Il faut faire très attention aux ruptures d’égalité. Je retire mon amendement.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L ’ article 6 ter A est adopté.
La première phrase de l’article L. 411-1 du code de l’éducation est complétée par les mots : « qui sont placés sous son autorité ; en lien avec l’inspecteur de l’éducation nationale, il participe à leur évaluation ».
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 261 est présenté par MM. Karam, Patriat et les membres du groupe La République En Marche.
L’amendement n° 296 rectifié est présenté par Mmes Blondin, Monier et Lepage, M. Antiste, Mme S. Robert, M. Assouline, Mme Ghali, MM. Lozach, Magner, Manable, Kanner, Bérit-Débat, Durain, Féraud et Fichet, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Marie, Mme Meunier, M. Montaugé, Mme Taillé-Polian, M. Tourenne, Mme Van Heghe, M. Kerrouche, Mme Préville, MM. Courteau, Tissot, Temal, Daunis et les membres du groupe socialiste et républicain.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Antoine Karam, pour présenter l’amendement n° 261.
Il est indéniable que les directeurs d’école jouent un rôle essentiel pour le bon déroulement de la scolarisation de nos enfants. Toutefois, il n’est pas opportun de les placer en position d’autorité à l’égard des enseignants, et encore moins de les faire participer à leur évaluation aux côtés des inspecteurs de l’éducation nationale, d’autant que les consultations avec les syndicats ne sont pas encore terminées.
Cet article est en complète contradiction avec l’esprit même de ce projet de loi : au lieu d’instaurer la confiance, il risque fort d’inspirer de la défiance au personnel enseignant.
Les directeurs d’école constituent l’un des piliers majeurs de l’école. Il apparaît aujourd’hui nécessaire de dessiner les contours d’un statut qui leur soit propre, mais cette question doit être traitée spécifiquement. Pour l’heure, nous demandons la suppression de l’article 6 ter.
La parole est à Mme Marie-Pierre Monier, pour présenter l’amendement n° 296 rectifié.
Je partage les propos qui viennent d’être tenus.
Cet article, dans sa rédaction introduite lors de l’examen du texte par notre commission, procède à un changement qui est loin d’être anodin. Il introduit une disposition lourde de conséquences pour les enseignants, sans avoir fait l’objet d’aucune concertation avec les personnels concernés.
Ainsi, au détour de l’adoption d’un amendement, les « maîtres d’école », pour reprendre l’appellation maintenue dans l’article L. 411-1 du code de l’éducation, vont se retrouver placés sous l’autorité du directeur d’école, qui, de surcroît, participera à leur évaluation, en lien avec l’inspecteur de l’éducation nationale – une formulation par ailleurs assez imprécise.
Nous avons tous conscience que les directeurs d’école se trouvent dans une situation juridique hybride, mais il n’est pas sérieux de vouloir régler la question sans avoir au préalable réuni autour de la table leurs représentants et ceux des enseignants concernés. On déplore souvent l’absence de statut pour les directeurs d’école, mais il serait vain d’imaginer que cette lacune puisse être comblée par le biais d’un amendement.
Quid des conditions matérielles d’exercice des fonctions de directeur ? Quid des décharges quand les écoles comptent moins de quatre classes – notre amendement portant sur ce point a été déclaré irrecevable ? Quid de l’organisation des activités périscolaires et des responsabilités partagées ? Toutes ces questions laissées en suspens sont pourtant tout aussi importantes, sinon plus, que celle des liens hiérarchiques et de l’autorité du directeur. Autant de questions qu’il faudrait régler de préférence conjointement, et surtout après une concertation.
M. Max Brisson, rapporteur. On a toujours de bons arguments pour ne rien faire, comme aime à le dire le ministre !
M. le ministre sourit.
On ne cesse d’affirmer que les directeurs sont le pivot de notre école primaire, de louer l’importance de leur rôle. La plupart des parents d’élèves ne savent même pas qu’ils ne sont pas les supérieurs hiérarchiques des enseignants ; cela leur paraît aller de soi.
Jacques Grosperrin a eu raison de déposer son amendement, et la majorité de la commission a eu raison de le suivre. Les rapports se multiplient ; tous montrent les problèmes posés par l’absence d’autorité hiérarchique des directeurs d’école. Le dispositif proposé ne remet nullement en cause la liberté pédagogique des enseignants, qui est un principe fondamental.
Au collège, le principal est le supérieur hiérarchique des professeurs et il participe à leur notation : cela ne pose aucun problème. À l’école primaire, ce serait une affaire d’État ? Je rappelle que les professeurs des écoles et ceux des collèges ont, aujourd’hui, le même niveau de formation.
Il y a, sur ce sujet, des crispations syndicales sur lesquelles je ne m’étendrai pas. La majorité de la commission a émis un avis résolument défavorable sur les amendements n° 261 et 296 rectifié : on ne peut considérer comme positif le fait que les directeurs d’école n’aient pas d’autorité hiérarchique !
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. Nous n’avons pas de petits débats ce matin, mesdames, messieurs les sénateurs !
Sourires.
Je vous invite, madame la sénatrice, à le comparer aux quatre ou cinq précédentes lois sur l’éducation : il ne me semble pas s’en distinguer par son caractère hétéroclite ! Par ailleurs, si ce texte ne traitait que de sujets mineurs, vous ne manifesteriez pas, mesdames, messieurs les sénateurs, une telle motivation pour en débattre.
Pour des raisons que j’ai déjà développées, il existe une hiérarchie des normes spécifique à l’éducation nationale. On peut ne pas l’apprécier ou la critiquer, mais elle est ce qu’elle est. Certains sujets relevant du domaine législatif, d’autres du domaine réglementaire, toutes les questions ne sont pas abordées à l’occasion de l’élaboration des lois relatives à l’école.
Le sujet des directeurs d’école mérite évidemment une attention particulière, et même la passion dont vient de faire preuve M. le rapporteur. Voilà des décennies que les gouvernements précédents auraient pu prendre ce dossier en main. Cela n’a pas été le cas et, là encore, il revient au présent gouvernement de traiter la question.
Sur des sujets voisins, j’ai observé que l’adoption par voie d’amendements parlementaires de mesures entraînant des évolutions structurelles souhaitées depuis longtemps était très critiquée, y compris par vous-même, monsieur le rapporteur, au motif que la concertation n’avait pas été suffisante, que les choses n’étaient pas mûres, etc. Nous sommes ici à front renversé, sauf à considérer qu’un amendement du Sénat est forcément plus pertinent qu’un amendement de l’Assemblée nationale…
Exclamations amusées.
L’expérience montre qu’aborder ces sujets nécessite d’avoir une vision d’ensemble. Cela vaut, par exemple, pour le débat sur les établissements publics des savoirs fondamentaux.
Instaurer un pilotage des écoles primaires marquerait un progrès pour nos élèves. Je ne le conteste évidemment pas, mais il faut entendre tous les points de vue. Je l’ai affirmé solennellement, je l’ai écrit aux directeurs d’école et aux professeurs des écoles, la fonction de direction d’école est essentielle et je la soutiens très fortement. Elle devra être valorisée davantage dans le futur. Il est possible que cela implique des évolutions structurelles profondes ; il faut en discuter.
Le sujet important de la direction d’école doit être traité avec sérénité, dans le cadre d’une vision systémique et en donnant toute sa place au dialogue social. C’est pourquoi j’émets un avis favorable sur les amendements de suppression de l’article 6 ter.
Pour ce qui nous concerne, nous serons cohérents. Ce sujet de la direction d’école a émergé, me semble-t-il, à la faveur du débat sur la création des établissements publics locaux des savoirs fondamentaux, c’est-à-dire sur la mise en place d’une nouvelle organisation scolaire. Nous avons alors considéré que l’on ne pouvait pas s’exonérer d’un débat de fond, que ne permet pas la discussion d’un amendement.
Nous soutiendrons donc les amendements de suppression présentés par nos collègues Karam et Monier. Réglons les problèmes qui sont aujourd’hui sur la table avant d’en créer de nouveaux ! Il ne me semble pas que l’absence de lien hiérarchique entre le directeur d’école et l’équipe enseignante soit apparue avec force, dans le débat public, comme un problème. Nous avons déjà suffisamment de sujets à traiter pour rétablir la confiance pour ne pas en rajouter !
Si nous voulons mener une réflexion approfondie, il faudrait également s’interroger sur notre modèle d’écoles primaire et maternelle, qui aujourd’hui diffère complètement de celui des collèges et des lycées : ces écoles n’ont ni budget ni conseil d’administration. Si certains jugent que ce modèle particulier n’est plus pertinent et qu’il faut le revoir, débattons-en ! Creusons la question, mais nous ne la réglerons pas simplement en créant un lien hiérarchique entre le directeur et l’équipe enseignante. Qui plus est, j’imagine mal que des personnels, quels qu’ils soient, puissent accepter d’endosser des responsabilités supplémentaires sans que soit évoquée, à aucun moment, la question du traitement…
Enfin, il y a peut-être, sûrement même, une réflexion à conduire sur l’autorité des équipes enseignantes et des directeurs d’école dans certains territoires. Cependant, ce n’est pas en divisant l’équipe éducative que l’on renforcera son autorité à l’égard des partenaires de l’école. Cela pourrait même se révéler contre-productif.
Le groupe du RDSE votera ces amendements de suppression.
Il est important de doter d’un véritable statut les directeurs d’école. Nous en avons tous rêvé ! Lorsque j’étais directrice d’école, j’aurais bien aimé, parfois, pouvoir m’appuyer sur un tel statut, pouvoir simplement dire à mes collègues : « Ça suffit, c’est moi la cheffe ! »
Sourires.
Mme Françoise Laborde. Je l’assume ! Si mes anciens collègues m’entendent, ils se diront que c’est bien du Laborde !
Rires.
Plus sérieusement, l’évolution projetée ne peut se restreindre à faire participer le directeur d’école aux évaluations : ce n’est pas possible, ou alors les candidats aux fonctions de directeur seront encore moins nombreux qu’aujourd’hui.
Le rapporteur, me semble-t-il, nous a fourni l’argument décisif en évoquant une autorité naturelle du directeur d’école, reconnue par tous. Selon lui, les parents sont même intimement persuadés, à tort, que cette autorité naturelle repose sur l’existence d’un lien hiérarchique. En somme, cela fonctionne : l’école est une sorte de petite république, celui ou celle qui assure la direction étant primus ou prima inter pares.
Par conséquent, pourquoi changer les choses ? Pourquoi déséquilibrer une organisation qui fonctionne ? Comme l’a souligné ma collègue Céline Brulin, les problèmes lourds à traiter sont déjà suffisamment nombreux pour que l’on n’en crée pas de toutes pièces. Nous voterons ces amendements de suppression.
Si nous avons voté en commission l’amendement de Jacques Grosperrin, ce n’est pas pour agiter un chiffon rouge : le milieu de l’éducation nationale a souvent tendance à surréagir. Nous savons bien que la question du statut du directeur d’école est, aux yeux de certains, une sorte de totem. Je crois pour ma part qu’il est bon de l’aborder, notamment dans le cadre d’un débat parlementaire.
Il apparaît tout de même paradoxal de donner le titre de directeur à une personne qui n’en a aucune des qualifications et ne dispose d’aucun moyen pour remplir une fonction de direction. Il ne possède pas toujours l’autorité naturelle évoquée par mon collègue ; quand ce n’est pas le cas, cela pose des difficultés. Êtes-vous sûr, monsieur Ouzoulias, que l’organisation actuelle fonctionne si bien que cela ?
Les nombreux enseignants et directeurs d’école que mes fonctions d’élu m’amènent à rencontrer me font plutôt part, de manière assez générale, d’un sentiment de malaise, notamment dans les écoles maternelles et primaires.
Nous ne prétendons évidemment pas que créer un statut de directeur de l’école réglera tout, mais c’est un des éléments à intégrer dans la vision systémique à laquelle M. le ministre faisait allusion à l’instant. C’est pourquoi nous voterons contre les amendements de suppression de l’article.
L’article 6 ter, introduit en commission par voie d’amendement, n’est pas anodin : il touche aux fondamentaux de l’organisation de l’éducation nationale, en prévoyant tout simplement la création d’un statut de directeur d’école, et ce sans concertation !
Il est bien sûr tout à fait légitime d’envisager un certain nombre d’évolutions en la matière, mais la première des choses à faire dans ce cas, c’est d’engager une concertation avec les personnes concernées au premier chef.
Monsieur le rapporteur, les professeurs des écoles et les professeurs des établissements du second degré ont certes le même niveau de formation, mais les chefs d’établissement du second degré sont recrutés via un concours spécifique. Les fonctions et les responsabilités ne sont pas non plus les mêmes. Conférer un pouvoir hiérarchique fonctionnel aux directeurs d’école, dont la mission consiste aujourd’hui à coordonner l’action des professeurs des écoles, sans lien hiérarchique, nécessite, je le répète, une véritable concertation, peut-être une expérimentation, même si, à titre personnel, j’y serais opposée. Je voterai bien évidemment ces amendements de suppression.
J’avais déposé un amendement, de portée plus modeste que celui ayant introduit cet article, dont l’adoption aurait facilité la tâche des directeurs d’école élémentaire de moins de trois classes. Malheureusement, il a été déclaré irrecevable.
Le dispositif de l’article représente une réforme structurelle. Je vous invite à consulter les enseignants concernés, comme je l’ai fait : ils vivent mal cette situation. Il est nécessaire de mener une concertation.
En 2015 et en 2016, des rencontres ont été organisées avec tous les personnels de l’éducation nationale pour réfléchir à leurs fiches métiers et à leur statut. À cette occasion, les directeurs d’école ont travaillé sur leur mission et proposé des avancées.
Monsieur le ministre, vous avez parfaitement raison : lors de l’examen de l’article 6 quater, nous allons vous reprocher son introduction dans le projet de loi par voie d’un amendement parlementaire à l’Assemblée nationale ; à l’évidence, compte tenu de l’importance du sujet, c’est le Gouvernement qui aurait dû prendre l’initiative, après une concertation préalable !
Cela étant, le parallèle avec le présent article ne vaut pas. Nous savons quel sort sera probablement réservé aux dispositions qui auront été introduites par le Sénat, mais elles ont au moins le mérite de remettre sur la table un sujet dont nous parlons depuis vingt ans, si ce n’est plus…
Y a-t-il un problème à régler ? La réponse est oui ! Quand allons-nous nous y attaquer, monsieur le ministre ? C’est la question que nous posons. Nous avons tous conscience que le sujet est sensible, délicat, mais la majorité sénatoriale ne considère pas que la situation actuelle soit satisfaisante.
Quand j’étais maire, j’ai eu à connaître d’une école où un projet pédagogique était partagé depuis un certain nombre d’années par l’ensemble de l’équipe enseignante. Tout à coup, une enseignante a refusé de s’y inscrire, simplement en raison de bisbilles internes… Une telle situation n’est pas acceptable. À un moment donné, il faudra bien confier un statut particulier à ces directeurs d’école pour que les choses fonctionnent mieux. Des progrès sont à faire dans ce domaine, sans tomber dans l’autoritarisme. Je pense que l’Assemblée nationale supprimera les dispositions introduites par le Sénat, mais nous souhaitons que le sujet du statut du directeur d’école puisse enfin être abordé, avec la concertation nécessaire.
La fonction de directeur d’école, son rôle hiérarchique à l’égard des enseignants sont compris par les parents d’élèves.
Oui, mais une hiérarchie souple et fonctionnelle, qui s’exerce avec pédagogie et sur la base d’une autorité naturelle ! Il n’est pas besoin de créer une autorité hiérarchique.
Aujourd’hui, on veut mettre des patrons partout ! Quand un système fonctionne bien, il faut le maintenir ! Les directeurs d’école ne demandent pas qu’on leur confère un pouvoir surdimensionné ; ce qu’ils veulent, c’est qu’on leur donne des moyens, des décharges, du personnel pour les aider dans les tâches administratives. Voilà ce que me disent les directeurs d’école ! Ils ne souhaitent pas devenir les super-patrons de leur école, ils exercent l’autorité de fait.
Un directeur d’école intervient aussi dans le domaine pédagogique, au travers du conseil d’école, dans lequel les parents jouent un rôle important.
Bien sûr que si, monsieur Dallier, mais il ne faut pas chercher des problèmes là où il n’y en a pas !
Le directeur d’école travaille avec les enseignants dans la concertation et en bonne intelligence précisément parce qu’il n’y a pas de hiérarchie officielle. Je voterai ces amendements de suppression.
Applaudissements sur des travées du groupe socialiste et républicain.
Je mets aux voix les amendements identiques n° 261 et 296 rectifié.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant de la commission.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable et que celui du Gouvernement est favorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
Le scrutin a lieu.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
Il est procédé au dépouillement du scrutin.
Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 108 :
Le Sénat n’a pas adopté.
Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 297 rectifié, présenté par Mmes Blondin, Monier et Lepage, M. Antiste, Mme S. Robert, M. Assouline, Mme Ghali, MM. Lozach, Magner, Manable, Kanner, Bérit-Débat, Durain, Féraud et Fichet, Mme G. Jourda, M. Marie, Mme Meunier, M. Montaugé, Mme Taillé-Polian, M. Tourenne, Mme Van Heghe, MM. Kerrouche, Courteau et Daunis, Mme Préville, MM. Temal, Tissot et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après le mot :
mots
rédiger ainsi la fin de cet alinéa :
et une phrase ainsi rédigée : « et le personnel de l’école. Il est l’interlocuteur de la commune notamment pour la coordination avec les activités périscolaires. »
La parole est à Mme Marie-Pierre Monier.
Notre amendement vise à maintenir le rôle de simple coordination du directeur d’école entre les maîtres et à l’étendre aux autres personnels de l’école.
Nous proposons de compléter le dispositif afin de prévoir une concertation entre le directeur et la commune pour l’organisation des activités périscolaires. Sa responsabilité étant de fait engagée, il est normal que le directeur soit au minimum consulté par la commune pour l’organisation de ces activités.
L’amendement n° 93 n’est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 297 rectifié ?
Avis défavorable, pour les raisons que j’ai indiquées.
Nous venons d’avoir un débat intéressant et digne, qui a permis de poser les problèmes. Je ferai simplement remarquer que le Sénat n’avait guère d’autre possibilité que d’adopter une telle rédaction pour l’article 6 ter. En effet, le statut relève du domaine réglementaire et la revalorisation des rémunérations des directeurs d’école, à laquelle je suis tout à fait favorable, ne pouvait pas non plus être décidée au travers de ce projet de loi.
Je suis d’accord avec une grande partie des propos qui ont été tenus, mais on ne peut pas dire que tout va très bien et que l’on peut laisser les choses en l’état.
Affirmer cela, c’est ne pas tenir compte du fait que les écoles mettent en œuvre des projets qui nécessitent un pilotage pédagogique et que les directeurs doivent donc être en mesure de remplir ce rôle.
Je mets aux voix l’amendement n° 297 rectifié.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant de la commission.
Protestations sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste et du groupe socialiste et républicain.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
Le scrutin a lieu.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
Il est procédé au dépouillement du scrutin.
Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 109 :
Le Sénat n’a pas adopté.
Je mets aux voix l’article 6 ter.
L ’ article 6 ter est adopté.
L’amendement n° 51 rectifié ter, présenté par Mme de la Provôté, MM. Henno, Longeot, Détraigne et Lafon, Mme Perrot, M. Delcros, Mme Vullien, M. Kern, Mme Billon, MM. Bonnecarrère, Canevet, Cazabonne et Cigolotti, Mmes Doineau, C. Fournier, Goy-Chavent et Guidez, M. Janssens, Mme Kauffmann, M. Laugier, Mme Loisier, MM. Médevielle, Prince et Vanlerenberghe, Mme Vérien, M. Capo-Canellas, Mme Gatel, MM. L. Hervé, Maurey et les membres du groupe Union Centriste, est ainsi libellé :
Après l’article 6 ter
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 321-2 du code de l’éducation, il est inséré un article L. 321-2-… ainsi rédigé :
« Art. L. 321 -2 -…. – I. – Le directeur d’école maternelle, primaire et élémentaire dispose d’un statut.
« II. – Un décret en Conseil d’État précise le contenu du statut de directeur d’école maternelle primaire et élémentaire. »
La parole est à Mme Sonia de la Provôté.
Au risque d’être redondante, monsieur le rapporteur – mais il faut parfois savoir enfoncer le clou pour avoir l’assurance qu’un sujet soit effectivement traité –, je vais donner lecture d’un passage de l’article L. 411-1 du code de l’éducation, qui précise le rôle du directeur d’école maternelle ou élémentaire : « Un directeur veille à la bonne marche de chaque école maternelle ou élémentaire ; il assure la coordination nécessaire entre les maîtres […]. »
Le rôle du directeur ou de la directrice est donc primordial pour instaurer un climat de confiance dans l’école. C’est important pour la réussite et l’épanouissement de tous les élèves. Les directeurs d’école assument toutes les responsabilités, ils sont les interlocuteurs de leur propre autorité hiérarchique, des enseignants, de l’équipe éducative, de la mairie, des enfants, des parents. Bref, ils sont les « couteaux suisses » de l’école de la République et, ne serait-ce qu’à ce titre, ils mériteraient que la question de leur statut soit réglée définitivement.
Lorsque le sujet du directeur d’école a été soulevé, nous pressentions qu’il fallait un organisateur, un ordonnateur, un référent pour l’école. En réalité, le directeur d’école est devenu bien plus que cela, parce que l’école, la communauté éducative, les parents, les enfants, les rapports avec l’autorité hiérarchique de l’éducation nationale ont changé. Il a besoin que son autorité soit assise. Il est à la fois pilote, coordonnateur et responsable dans une multitude de situations, par exemple pour l’organisation des sorties scolaires, évoquée hier.
La question de son statut mérite donc, je le redis, d’être réglée. À cet égard, la France fait figure d’exception au sein de l’OCDE. Il est grand temps que la fonction de directeur ne s’apparente plus simplement une tâche supplémentaire, de façon que l’avancement de grade se traduise par une bonification indiciaire et que sa reconnaissance juridique et statutaire soit prise en compte dans la hiérarchie de l’éducation nationale. Cela permettra certainement au directeur de mieux faire entendre un certain nombre de considérations et de propositions au sujet de son établissement et de l’éducation en général.
Sur le fond, je suis pleinement d’accord avec tout ce que vient de dire Sonia de la Provôté ; nous en avons débattu très largement. Cependant, comme je l’ai indiqué à l’instant, la voie législative, en l’espèce, n’est pas la plus adaptée. Le ministre a dit que le chantier était ouvert et nous sommes tous convenus que créer un statut du directeur d’école était nécessaire. Je demande le retrait de cet amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.
Madame de la Provôté, l’amendement n° 51 rectifié ter est-il maintenu ?
Je ne le retire pas. Traiter du statut ne signifie pas définir son contenu et inscrire dans la loi les prérogatives que le directeur d’école exerce aujourd’hui de fait. Adopter cet amendement permettrait de rassurer les directeurs et les directrices d’école. Si on peine à en trouver dans certaines académies, ce n’est pas un hasard ! Cette question du statut doit être réglée.
Sur cet amendement, nous nous abstiendrons, en cohérence avec nos précédents propos. Quant à vous, chers collègues du groupe Les Républicains, vous devriez le voter, par cohérence avec la position que vous avez défendue auparavant !
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 146 rectifié bis, présenté par Mme Brulin, M. Ouzoulias et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 6 ter
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le deuxième alinéa de l’article L. 421-2 du code de l’éducation est complété par les mots : « et dans les collèges, les délégués départementaux de l’éducation nationale ».
La parole est à Mme Céline Brulin.
Cet amendement vise à conforter la place des délégués départementaux de l’éducation nationale, les DDEN, au sein de l’école et à l’élargir au collège. Nous ambitionnions même d’inclure le lycée dans le champ de notre amendement, mais, pour des raisons que j’ai encore du mal à comprendre, cela n’a pas été possible !
Chacun connaît leur rôle actuel de coordination entre les écoles et les communes. Ce sont des défenseurs de l’égalité, de la gratuité et de la laïcité, des valeurs qui ont évidemment toute leur place au sein de l’école.
L’amendement n° 286 rectifié ter, présenté par M. Kanner, Mmes Monier, Blondin et Lepage, M. Antiste, Mme S. Robert, M. Assouline, Mme Ghali, MM. Lozach, Magner, Manable, Bérit-Débat, Durain, Féraud et Fichet, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Marie, Mme Meunier, M. Montaugé, Mme Taillé-Polian, M. Tourenne, Mme Van Heghe, MM. Kerrouche, Courteau et Daunis, Mme Préville, MM. Temal, Tissot et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 6 ter
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 111-4 du code de l’éducation, il est inséré un article L. 111-4-… ainsi rédigé :
« Art. L. 111 -4 -…. – Les délégués départementaux de l’éducation nationale siègent, sans voix délibérative, aux conseils mentionnés aux articles L. 411-1 et L. 421-2, dans des conditions fixées par décret. »
La parole est à Mme Corinne Féret.
Monsieur le président, je souhaite rectifier cet amendement pour supprimer la référence à l’article L. 421-2, relatif aux conseils d’administration des collèges et des lycées, et ne viser ainsi que le premier degré.
Je suis donc saisi d’un amendement n° 286 rectifié quater, présenté par M. Kanner, Mmes Monier, Blondin et Lepage, M. Antiste, Mme S. Robert, M. Assouline, Mme Ghali, MM. Lozach, Magner, Manable, Bérit-Débat, Durain, Féraud et Fichet, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Marie, Mme Meunier, M. Montaugé, Mme Taillé-Polian, M. Tourenne, Mme Van Heghe, MM. Kerrouche, Courteau et Daunis, Mme Préville, MM. Temal, Tissot et les membres du groupe socialiste et républicain, et ainsi libellé :
Après l’article 6 ter
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 111-4 du code de l’éducation, il est inséré un article L. 111-4-… ainsi rédigé :
« Art. L. 111 -4 -…. – Les délégués départementaux de l’éducation nationale siègent, sans voix délibérative, aux conseils mentionnés à l’article L. 411-1, dans des conditions fixées par décret. »
Veuillez poursuivre, ma chère collègue.
Cet amendement tend à donner une base légale à la présence des délégués départementaux de l’éducation nationale au sein des conseils d’école, où ils siègent déjà parfois, mais sans leur octroyer de voix délibérative.
Ces personnes bénévoles effectuent un travail de médiation nécessaire entre les élèves et leurs parents, d’une part, et l’administration, d’autre part, sur l’ensemble des questions relatives à la vie scolaire. Ce sont le plus souvent des retraités, fréquemment d’anciens personnels de l’éducation nationale. Leur mission, initialement circonscrite à la surveillance des bâtiments scolaires, s’est peu à peu étendue à un rôle d’incitateur, de coordonnateur, voire de médiateur. Il nous semble donc opportun de donner aujourd’hui une base légale à la présence des DDEN au sein des conseils d’école. Pour l’heure, leur reconnaissance est seulement réglementaire.
Madame Brulin, je me félicite que vous ayez rectifié votre amendement avant la séance, pour ne plus viser que les seuls collèges s’agissant du second degré.
Comme je l’ai dit en commission, les DDEN sont très liés, par leur histoire, à l’école primaire. De mon point de vue, en faire des membres de droit du conseil d’administration du collège, avec voix délibérative, serait méconnaître la nature de celui-ci, qui, à la différence du conseil d’école, est une instance décisionnaire de gouvernance d’un établissement public. La commission a émis un avis défavorable.
Sur le fond, je trouve la proposition vraiment très intéressante. Elle a un premier mérite, celui de valoriser le rôle très important des DDEN, dont il faut saluer l’engagement bénévole, dans notre système scolaire.
Cela étant, j’ai toujours quelque hésitation à inscrire dans la loi ce qui est satisfait dans la pratique. La voie réglementaire serait, le cas échéant, plus pertinente. Pour cette raison, je m’en remets à la sagesse du Sénat.
À titre personnel, je voterai cet amendement. C’est là une très bonne initiative. Comme l’a dit M. le ministre, les DDEN jouent bien souvent un rôle majeur de liaison entre les enseignants et les élus communaux. Ils apaisent certaines situations.
On n’a de cesse de parler de ce fameux continuum entre école élémentaire et collège, avec un cycle 3 regroupant le CM1, le CM2 et la sixième. J’estime donc que les DDEN auraient tout à fait leur place au sein du conseil d’administration du collège.
Monsieur le ministre, je vous remercie de votre avis de sagesse. Il est essentiel de réaffirmer le rôle des DDEN. Hier, nous avons insisté sur la nécessité de resserrer le lien entre l’école, la Nation et les individus : les DDEN sont à l’interface.
Dans les Hauts-de-Seine, en pratique, ils siègent tout naturellement dans une grande partie des conseils d’administration. Il conviendrait de conforter cette situation par la loi. Une telle reconnaissance nationale du rôle de ces personnes, qui sont très souvent des enseignants à la retraite, serait un signe fort de la part de votre ministère, sachant que se pose aujourd’hui un problème de relève. Les DDEN sont, dans nos établissements, les premiers défenseurs de la laïcité. Chers collègues du groupe Les Républicains, compte tenu des discours que vous avez tenus hier sur la laïcité, je vous invite à nous aider à réaffirmer l’importance du rôle des DDEN. Merci d’avance !
Sourires.
Je me félicite que l’amendement n° 146 rectifié bis ait été rectifié, à la demande de la commission, afin d’exclure les lycées de son champ. Monsieur le rapporteur, compte tenu de cette avancée positive, des arguments présentés et de la position du ministre, peut-être la commission pourrait-elle s’en remettre à la sagesse du Sénat ?
Par ailleurs, les DDEN ne sont pas toujours des enseignants à la retraite : dans mon département, un maire s’implique fortement dans cette fonction.
M. Max Brisson, rapporteur. Tous ces propos apaisants montrent qu’un consensus peut se nouer autour des symboles de l’école de la République. Je m’en remets à la sagesse du Sénat.
Marques de satisfaction sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste et du groupe socialiste et républicain.
L ’ amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 6 ter.
Est-ce le même vote sur l’amendement n° 286 rectifié quater ?
La parole est à M. le rapporteur.
Je précise que, sur l’amendement n° 286 rectifié quater, l’avis de la commission est défavorable. Cet amendement ne prévoit que de donner une voix consultative aux DDEN au sein des conseils d’école.
Mme Marie-Pierre Monier. Il me semble que cet amendement a déjà été voté !
Mme Maryvonne Blondin approuve.
M. le président. Je n’ai mis aux voix que l’amendement n° 146 rectifié bis.
Protestations sur des travées du groupe socialiste et républicain.
Monsieur le ministre, pourriez-vous préciser l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 286 rectifié quater ?
C’était le même avis que sur l’amendement n° 146 rectifié bis !
Monsieur le président, hier soir, M. Longeot a présenté conjointement les amendements n° 393 rectifié, 394 rectifié et 395 rectifié. Le dernier, au contraire des deux autres, avait reçu un avis favorable, mais il a subi le même sort, le président de séance ayant dit « même vote »… Pourquoi en irait-il autrement ici ?
Ma chère collègue, je n’ai fait que demander si le vote sur l’amendement n° 286 rectifié quater était le même que sur l’amendement n° 146 rectifié bis. C’était une simple question, et il m’a semblé que tel n’était pas le cas.
La parole est à M. le rapporteur.
Je me permets de reprendre la parole, pour que les choses soient bien claires.
Sur le fond, l’amendement n° 286 rectifié quater n’accorde pas de voix délibérative au DDEN au sein du conseil d’école. Ce serait un recul par rapport à la situation actuelle.
Exclamations sur des travées du groupe Les Républicains.
(Supprimé)
Je suis saisi de deux amendements et de six sous-amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 264 rectifié quater, présenté par MM. Grosperrin et Bazin, Mme Bonfanti-Dossat, M. Bonhomme, Mmes Boulay-Espéronnier, Bruguière, Canayer et Chauvin, M. Danesi, Mme Di Folco, M. Husson, Mme Imbert, MM. Joyandet et Kennel, Mmes Lavarde, Lopez et M. Mercier, MM. Panunzi et Perrin, Mmes Puissat et Troendlé et M. Rapin, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Après la section 3 bis du chapitre Ier du titre II du livre IV du code de l’éducation, est insérée une section 3 ter ainsi rédigée :
« Section 3 ter
« L’établissement public local d’enseignement du socle commun
« Art. L. 421 -19 -17. – L’établissement public local d’enseignement du socle commun associe les classes d’un collège et d’une ou plusieurs écoles situées dans son secteur de recrutement. Ces classes peuvent être implantées sur plusieurs sites. Le collège et chaque école constituent une composante de l’établissement public local d’enseignement du socle commun.
« Les collectivités territoriales compétentes peuvent, après conclusion d’une convention, proposer la création d’un établissement public local d’enseignement du socle commun. L’établissement est créé par arrêté du représentant de l’État dans le département, quand le conseil d’administration du collège et chacun des conseils d’école se sont exprimés en faveur de cette création.
« Lorsque la compétence relative au fonctionnement de l’école a été confiée à un établissement public de coopération intercommunale, l’accord préalable du conseil municipal de chaque commune siège d’une école est requis.
« Sous réserve des dispositions prévues à la présente section, cet établissement est régi par les titres préliminaire à II du présent livre.
« Art. L. 421 -19 -18. – La convention mentionnée à l’article L. 421-19-17 détermine le siège de l’établissement et l’implantation de ses écoles. Aucune modification de l’implantation des classes de l’établissement ne peut avoir lieu sans l’accord de la collectivité compétente et, lorsque la compétence relative au fonctionnement de l’école a été confiée à un établissement public de coopération intercommunale, de la commune sur le territoire de laquelle sont implantées ces classes.
« La convention peut désigner une collectivité de rattachement qui assure les grosses réparations, l’équipement et le fonctionnement de l’ensemble de l’établissement ainsi que le recrutement et la gestion des personnels autres que ceux mentionnés à l’article L. 211-8 qui exercent leurs missions dans l’établissement.
« La convention fixe la durée pour laquelle elle est conclue et les conditions dans lesquelles, lorsqu’elle prend fin, les biens de l’établissement sont répartis entre les collectivités et les établissements publics de coopération intercommunale signataires. Elle détermine également le délai minimal, qui ne peut être inférieur à une année scolaire, au terme duquel peut prendre effet la décision de l’une des parties de se retirer de la convention.
« La convention détermine la répartition entre les parties des charges leur incombant en vertu des chapitres II à IV du titre Ier du livre II au titre de la gestion des écoles et des collèges. Elle définit notamment la répartition entre les parties des charges liées à la construction, la reconstruction, l’extension, les grosses réparations, l’équipement et le fonctionnement de l’ensemble de l’établissement et des dépenses de personnels, autres que ceux mentionnés à l’article L. 211-8, qui exercent leurs missions dans l’établissement.
« En l’absence d’accord entre les signataires sur le contenu de la convention, soit lors de son renouvellement, soit à l’occasion d’une demande de l’un d’entre eux tendant à sa modification, le représentant de l’État fixe la répartition des charges entre les signataires en prenant en compte les effectifs scolarisés dans les classes du premier et du second degrés au sein de l’établissement public local d’enseignement du socle commun et désigne la collectivité de rattachement qui assure, jusqu’à l’intervention d’une nouvelle convention, les missions énoncées au premier alinéa du présent article.
« Art. L. 421 -19 -19. – L’établissement public local d’enseignement du socle commun est dirigé par un chef d’établissement qui exerce les compétences attribuées par l’article L. 421-3.
« Chaque école de l’établissement est dirigée par un directeur, qui exerce par délégation du chef d’établissement les compétences attribuées par l’article L. 411-1.
« Art. L. 421 -19 -20. – L’établissement est administré par un conseil d’administration qui exerce les compétences définies à l’article L. 421-4. La composition de ce conseil d’administration est fixée par décret en Conseil d’État et permet notamment la représentation des personnels du premier degré et de chaque commune siège d’une école, et le cas échéant, de l’établissement public de coopération intercommunale compétent.
« Art. L. 421 -19 -21. – Outre les membres mentionnés à l’article L. 421-5, le conseil pédagogique comprend au moins un enseignant de chaque niveau de classe du premier degré. Le conseil pédagogique peut être réuni en formation restreinte aux enseignants des composantes, niveaux, degrés ou cycles concernés par l’objet de la séance.
« Art. L. 421 -19 -22. – Les élèves des classes maternelles et élémentaires bénéficient du service d’accueil prévu aux articles L. 133-1 à L. 133-10. Pour l’application de l’article L. 133-4, le taux de personnes ayant déclaré leur intention de participer à la grève s’apprécie au regard de l’ensemble des enseignants qui interviennent dans les classes du premier degré.
« Art. L. 421 -19 -23. – Les dispositions des titres Ier à V du livre V applicables aux élèves inscrits dans les écoles et à leurs familles sont applicables aux élèves inscrits dans les classes du premier degré des établissements publics locaux d’enseignement du socle commun et à leurs familles. Les dispositions des titres Ier à V du livre V applicables aux élèves inscrits dans les collèges et à leurs familles sont applicables aux élèves des classes des niveaux correspondant et à leurs familles.
« Art. L. 421 -19 -24. – Un décret en Conseil d’État fixe les conditions d’application de la présente section. »
La parole est à M. Jacques Grosperrin.
Cet amendement propose une nouvelle rédaction pour l’article 6 quater, que la commission a supprimé à l’unanimité parce qu’il n’apportait pas de garanties suffisantes à nos yeux.
Cette nouvelle rédaction permet la création, sur la base du volontariat – j’insiste sur ce point – des collectivités territoriales et de la communauté éducative, d’un établissement public correspondant à l’école du socle et dénommé établissement public local d’enseignement du socle commun, ou EPLESC.
Je rappelle que l’école du socle existe depuis 2005. Ce n’est donc pas un OVNI. Sa création a été soutenue par de nombreux parlementaires, aussi bien à l’Assemblée nationale qu’au Sénat. Je citerai notamment Frédéric Reiss, Alain Marc, Jean-Claude Carle, Yves Durand, qui fut rapporteur de la loi Peillon, Colette Langlade…
Le présent amendement permet d’aller plus loin et d’offrir un cadre juridique à ceux qui font déjà fonctionner efficacement cette école du socle. Il prévoit de faire reposer la création des EPLESC sur une convention conclue entre les collectivités parties – elle devra faire l’objet d’une délibération expresse de leur organe délibérant – et sur l’accord du conseil d’administration du collège et de chacun des conseils d’école concernés. Rien ne pourra se faire sans cette unanimité.
Par ailleurs, il est rappelé que le collège et les écoles composant l’EPLESC pourront être implantés sur plusieurs sites. Il n’est aucunement question de regrouper les écoles au sein du collège ou d’en supprimer : je le dis pour faire taire certaines rumeurs. Il s’agit simplement de mettre en place un cadre juridique.
Pour apaiser d’éventuelles craintes, j’ajoute que l’accord unanime des collectivités territoriales concernées sera nécessaire pour toute modification de l’implantation des classes. Le dispositif garantit également l’association des communes sièges d’école à chaque étape du processus –création, modification de l’implantation des classes, représentation au conseil d’administration – lorsque la compétence scolaire a été transférée à un EPCI.
Enfin, il est prévu de maintenir un directeur dans chaque école, car il existe un lien fort entre le directeur d’école et le maire.
Michel Raison a déposé un sous-amendement visant à éviter que l’autorité hiérarchique soit conférée au chef d’établissement, au détriment du directeur d’école. Laure Darcos en présentera un autre.
Adopter cet amendement marquerait un engagement fort en faveur de l’école du socle commun.
Le sous-amendement n° 485 rectifié, présenté par M. Lafon et les membres du groupe Union Centriste, est ainsi libellé :
Amendement n° 264, alinéa 5, première phrase
Compléter cette phrase par les mots :
, conformément à l’organisation territoriale décidée par les collectivités territoriales
La parole est à M. Laurent Lafon.
Si vous le permettez, monsieur le président, je présenterai en même temps les deux sous-amendements suivants.
Je salue l’effort de Jacques Grosperrin pour essayer de trouver une solution dans le contexte que l’on sait – nous aurons peut-être l’occasion d’y revenir lors des explications de vote. Cet amendement contient des propositions intéressantes. Il faut, me semble-t-il, insister sur deux points qui posent problème.
Concernant l’objectif, je crois qu’il y a une confusion depuis le début entre la notion d’école du socle, dispositif assez général visant à décloisonner l’école élémentaire et le collège qui relève d’une réflexion systémique sur l’organisation des cycles, et une préoccupation d’aménagement du territoire conduisant à proposer aux collectivités territoriales une structuration de leur réseau scolaire à travers ce nouvel établissement public.
Il convient à notre sens d’écrire clairement dans le dispositif que ce qui est proposé répond uniquement à cette préoccupation d’aménagement du territoire, à travers une appropriation, par les élus, de l’organisation scolaire.
Toutefois, cela n’est pas suffisant, parce que, dans cette organisation qui est proposée aux élus, il manque un acteur, l’État.
L’associer me semble essentiel, au regard notamment des fermetures de classes et d’écoles qui ont pu intervenir ces dernières années en zones rurales. On ne peut pas demander aux collectivités de s’engager politiquement et financièrement au travers d’une convention sans que l’État s’engage lui aussi. Il faut que les collectivités, au moment où elles présentent leur projet, que ce soit au conseil d’école ou aux parents et à nos concitoyens de manière plus générale, sachent quel engagement prend l’État, en particulier en termes de moyens.
C’est pourquoi nous avons déposé ces trois sous-amendements visant à bien inscrire la création de cet établissement public dans une perspective d’aménagement du territoire et à garantir que, quand les collectivités s’engagent, l’État soit lui aussi au rendez-vous.
Le sous-amendement n° 484 rectifié bis, présenté par MM. Lafon, D. Dubois et les membres du groupe Union Centriste, est ainsi libellé :
Amendement n° 264, alinéa 5
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Ce sous-amendement a été défendu.
Le sous-amendement n° 506 rectifié, présenté par M. Lafon et les membres du groupe Union Centriste, est ainsi libellé :
Amendement n° 264 rectifié ter, après l’alinéa 9
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« La convention mentionnée au même article L. 421-19-17 s’accompagne d’une information par l’autorité de l’État compétente en matière d’éducation sur les moyens qu’elle entend allouer à l’établissement pendant la durée de la convention.
Ce sous-amendement a été défendu.
Le sous-amendement n° 487 rectifié ter, présenté par M. Raison, Mme Goy-Chavent, MM. del Picchia, D. Laurent et Pointereau, Mmes Lassarade, Morhet-Richaud et Garriaud-Maylam, MM. Segouin, Saury, Laménie et D. Dubois, Mme Lanfranchi Dorgal, MM. Kern, Pellevat, Mayet, Grand et Revet, Mme Gruny et MM. de Nicolaÿ et Cuypers, est ainsi libellé :
Amendement n° 264
Alinéa 15
Remplacer les mots :
, qui exerce par délégation du chef d’établissement
par les mots :
qui exerce
Ce sous-amendement n’est pas soutenu.
Le sous-amendement n° 488 rectifié, présenté par Mme L. Darcos, est ainsi libellé :
Amendement n° 264, alinéa 16
Remplacer cet alinéa par sept alinéas ainsi rédigés :
« Art. L. 421-19-20. – L’établissement public local d’enseignement du socle commun est administré par un conseil d’administration qui exerce les compétences du conseil d’administration mentionné à l’article L. 421-4.
« Il comprend, outre le chef d’établissement et deux à quatre représentants de l’administration de l’établissement qu’il désigne, de vingt-quatre à trente membres, dont :
« 1° Un tiers de représentants des collectivités territoriales et des établissements publics de coopération intercommunale parties à la convention mentionnée à l’article L. 421-19-17 et une ou plusieurs personnalités qualifiées ;
« 2° Un tiers de représentants élus du personnel de l’établissement, comportant notamment des représentants élus du personnel des écoles de l’établissement ;
« 3° Un tiers de représentants élus des parents d’élèves et élèves, comportant notamment des représentants élus des parents d’élèves et élèves des écoles de l’établissement ;
« La convention mentionnée à l’article L. 421-19-17 fixe le nombre de membres du conseil d’administration qui comprend au moins un représentant par collectivité territoriale ou établissement public de coopération intercommunale partie à la convention.
« Lorsqu’une des parties à la convention dispose de plus d’un siège au conseil d’administration, l’un au moins de ses représentants est membre de son assemblée délibérante.
La parole est à Mme Laure Darcos.
Sans revenir sur l’émoi qu’avait suscité l’article 6 quater à l’Assemblée nationale, je voudrais remercier mon collègue Jacques Grosperrin et notre rapporteur d’avoir travaillé à cette nouvelle rédaction. Nous aurions pu nous en tenir à la suppression de l’article en commission, mais je pense qu’il était important que le Sénat essaie de le récrire. Cette nouvelle rédaction présente à tout le moins le mérite de sécuriser les choses : le veto d’une seule collectivité, d’un seul établissement scolaire suffira à empêcher que l’EPLESC soit créé.
Dans le même temps, je salue la volonté du Gouvernement de renforcer les passerelles entre primaire et secondaire. La classe de sixième aurait pu tout aussi bien être appelée le CM3.
Mon sous-amendement vise à rééquilibrer la composition du conseil d’administration, qui comprendrait un tiers de représentants des collectivités territoriales et des EPCI, un tiers de représentants élus du personnel de l’EPLESC et un tiers d’élus des parents d’élèves, y compris du premier degré, afin que tout le monde soit représenté.
Le sous-amendement n° 491 rectifié, présenté par MM. Grand et D. Dubois, est ainsi libellé :
Amendement n° 264, alinéa 16
Après le mot :
degré
insérer les mots :
, des parents d’élèves
Ce sous-amendement n’est pas soutenu.
L’amendement n° 265, présenté par Mme Cartron, MM. Karam, Patriat et les membres du groupe La République En Marche, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Après la section 3 bis du chapitre Ier du titre II du livre IV du code de l’éducation, est insérée une section 3 ter ainsi rédigée :
« Section 3 ter
« Les établissements publics locaux d’enseignement des savoirs fondamentaux
« Art. L. 421 -19 -17. – Les établissements publics locaux d’enseignement des savoirs fondamentaux sont constitués de classes du premier degré et du premier cycle du second degré. Ils associent les classes d’un collège et d’une ou de plusieurs écoles situées dans son secteur de recrutement.
« Après avis de l’autorité de l’État compétente en matière d’éducation et après votes du ou des conseils d’écoles et du conseil d’administration du collège impliqués, ces établissements sont créés par arrêté du représentant de l’État dans le département sur proposition conjointe des collectivités territoriales ou établissements publics de coopération intercommunale de rattachement du collège et des écoles concernés, après conclusion d’une convention entre ces collectivités. L’accord du conseil d’administration et des conseils des écoles impliquées sont nécessaires.
« Sous réserve des dispositions prévues à la présente section, ces établissements sont régis par les titres préliminaire à II du présent livre.
« Art. L. 421 -19 -18. – La convention mentionnée à l’article L. 421-19-17 fixe la durée pour laquelle elle est conclue et les conditions dans lesquelles, lorsqu’elle prend fin, les biens de l’établissement sont répartis entre les collectivités et les établissements publics de coopération intercommunale signataires. Elle détermine également le délai minimal, qui ne peut être inférieur à une année scolaire, au terme duquel peut prendre effet la décision de l’une des parties de se retirer de la convention.
« La convention détermine la répartition entre les parties des charges leur incombant en vertu des chapitres II à IV du titre Ier du livre II au titre de la gestion des écoles et des collèges. Elle définit notamment la répartition entre les parties des charges liées à la construction, la reconstruction, l’extension, les grosses réparations, l’équipement et le fonctionnement de l’ensemble de l’établissement et des dépenses de personnels, autres que ceux mentionnés à l’article L. 211-8, qui exercent leurs missions dans l’établissement.
« La convention détermine la collectivité de rattachement de l’établissement et le siège de celui-ci. La collectivité de rattachement assure les grosses réparations, l’équipement et le fonctionnement de l’ensemble de l’établissement ainsi que le recrutement et la gestion des personnels autres que ceux mentionnés au même article L. 211-8 qui exercent leurs missions dans l’établissement.
« En l’absence d’accord entre les signataires sur le contenu de la convention, soit lors de son renouvellement, soit à l’occasion d’une demande de l’un d’entre eux tendant à sa modification, le représentant de l’État fixe la répartition des charges entre les signataires en prenant en compte les effectifs scolarisés dans les classes du premier et du second degrés au sein de l’établissement public local d’enseignement des savoirs fondamentaux et désigne la collectivité de rattachement qui assure, jusqu’à l’intervention d’une nouvelle convention, les missions énoncées au troisième alinéa du présent article.
« Art. L. 421 -19 -19. – Les établissements publics locaux d’enseignement des savoirs fondamentaux sont dirigés par un chef d’établissement qui exerce simultanément les compétences attribuées au directeur d’école par l’article L. 411-1 et les compétences attribuées au chef d’établissement par l’article L. 421-3. Un ou plusieurs chefs d’établissement adjoints, dont un au moins est chargé des classes du premier degré, exercent aux côtés du chef d’établissement. Ce chef d’établissement adjoint, chargé du premier degré, est issu du premier degré. Les modalités de son recrutement sont fixées par décret.
« Art. L. 421 -19 -20. – L’établissement est administré par un conseil d’administration qui exerce les compétences définies à l’article L. 421-4. La composition de ce conseil d’administration est fixée par décret et permet notamment la représentation des personnels du premier degré et des communes ou établissements publics de coopération intercommunale parties à la convention.
« Art. L. 421 -19 -21. – Outre les membres mentionnés à l’article L. 421-5, le conseil pédagogique comprend au moins un enseignant de chaque niveau de classe du premier degré. Le conseil pédagogique peut être réuni en formation restreinte aux enseignants des niveaux, degrés ou cycles concernés par l’objet de la séance.
« Art. L. 421 -19 -22. – L’établissement comprend un conseil école-collège tel que défini à l’article L. 401-4 ainsi qu’un conseil des maîtres du premier degré.
« Art. L. 421 -19 -23. – Les élèves des classes maternelles et élémentaires bénéficient du service d’accueil prévu aux articles L. 133-1 à L. 133-10. Pour l’application de l’article L. 133-4, le taux de personnes ayant déclaré leur intention de participer à la grève s’apprécie au regard de l’ensemble des enseignants qui interviennent dans les classes du premier degré.
« Art. L. 421 -19 -24. – Les dispositions des titres Ier à V du livre V applicables aux élèves inscrits dans les écoles et à leurs familles sont applicables aux élèves inscrits dans les classes du premier degré des établissements publics locaux d’enseignement des savoirs fondamentaux et à leurs familles. Les dispositions des titres Ier à V du livre V applicables aux élèves inscrits dans les collèges et à leurs familles sont applicables aux élèves des classes des niveaux correspondant et à leurs familles.
« Art. L. 421 -19 -25. – Un décret en Conseil d’État fixe les conditions d’application de la présente section.
La parole est à M. Antoine Karam.
L’article supprimé en commission prévoyait la mise en place d’une logique d’association entre les écoles et le collège, afin de mettre à disposition un outil permettant de mieux accompagner les enfants lors du passage de l’école élémentaire au collège. Cet article a fait beaucoup parler de lui, suscitant de nombreuses craintes qui ont souvent débouché sur la diffusion de fausses informations.
Monsieur le rapporteur, en commission, vous avez admis que les établissements publics des savoirs fondamentaux peuvent présenter un intérêt dans les zones les moins peuplées. Nous comprenons les inquiétudes qu’a suscitées cet article : il s’agit d’une disposition importante, introduite sans avoir fait l’objet d’une étude d’impact. De plus, ce projet n’a pas fait l’objet de concertations suffisantes.
Cependant, loin de signer l’arrêt de mort des écoles ou des directeurs, la mise en œuvre de ce dispositif permettrait de créer un vrai continuum entre le primaire et le collège, au bénéfice des élèves. Il convient donc de rétablir l’article dans une nouvelle rédaction, plus précise, en y intégrant certains gages de sécurité, comme la consultation des conseils de l’école et du conseil d’administration du collège, sachant que ce nouveau dispositif n’a pas vocation à être obligatoire. Il convient de donner toutes les chances à nos enfants et de leur offrir une école véritablement inclusive.
J’espère que nous aurons un débat de qualité sur ce sujet important et que la passion ne l’emportera pas. Je reconnais d’ailleurs qu’il peut m’arriver d’être passionné !
Nous avons d’abord envoyé un signal au Gouvernement en supprimant l’article 6 quater en commission. En effet, cet article avait suscité beaucoup de crispations, d’inquiétudes, en particulier parmi les élus. Or le Sénat est la voix des élus. Que ces inquiétudes, ces crispations n’aient pas toujours reposé sur une lecture attentive du texte, je peux en convenir, mais nous ne pouvions pas ne pas en prendre acte.
Mme Françoise Gatel et M. Philippe Dallier approuvent.
Nous l’avons fait de manière sereine.
Jacques Grosperrin propose un texte sur lequel je me permettrai de donner mon avis personnel, avant d’exprimer celui de la commission.
Cette rédaction, qui a été concertée, diffère de celle de l’Assemblée nationale, d’abord en ce qu’elle fixe un objectif. Elle pose que le dispositif est un outil d’aménagement éducatif à la main des élus locaux, en particulier de ceux qui sont confrontés à la déprise démographique de leur territoire. On parle souvent des écoles menacées, mais il y a aussi des collèges menacés et des territoires où l’offre pédagogique, extrêmement fragile, a besoin d’être confortée par la création de synergies. C’est un objectif qui me semble devoir trouver un écho au sein de la Haute Assemblée.
Par ailleurs, se pose la question, sur laquelle nous avons travaillé avec Françoise Laborde, du manque d’attractivité de certains territoires pour les enseignants, du fait de conditions de travail trop difficiles, de services partagés en collège.
De même que l’on parle aujourd’hui de désertification médicale, il y a un vrai risque que, demain, l’on parle de désertification enseignante. Il faut donc essayer de rendre les conditions d’exercice de la profession d’enseignant plus attractives dans les territoires concernés.
L’autre objectif, rappelé par Jacques Grosperrin, est de renforcer l’école du socle. D’ailleurs, la députée qui a introduit l’article par voie d’amendement aurait pu utiliser cette expression : son objet se serait ainsi inscrit dans des choix politiques qui ont été posés par la loi d’orientation de François Fillon de 2005 et n’ont été remis en cause par aucune alternance.
Le présent texte répond à celles des inquiétudes exprimées qui méritaient d’être prises en compte. Le renforcement de la capacité d’initiative des collectivités y est nettement affirmé. L’organisation initiale et toute évolution ultérieure de celle-ci seront à la main des collectivités territoriales. Enfin, il est clairement spécifié qu’un directeur sera maintenu sur chaque site. Je ne doute pas que telle était votre intention, monsieur le ministre, mais il vaut mieux l’écrire : cela permettra de prévenir les problèmes.
Ce texte a été concerté avec les associations d’élus, notamment l’Association des maires ruraux de France. Si nos collègues de l’Assemblée nationale en avaient fait autant, peut-être aurions-nous évité tous ces psychodrames ! Au Sénat, quand on élabore la loi, on pense à d’abord consulter les élus.
À titre personnel, je soutiens avec force l’amendement de notre collègue Jacques Grosperrin. Au nom de la commission, compte tenu des positions diverses des uns et des autres, j’émets, sur cet amendement, un avis de sagesse.
Par ailleurs, la commission demande le retrait du sous-amendement n° 485 rectifié ; à défaut, l’avis sera défavorable. C’est notre seul point de désaccord avec M. Lafon : d’une part, le secteur du collège, auquel il est fait référence, demeure déterminé par le seul conseil départemental ; d’autre part, la participation ou non des écoles relève de la seule décision des collectivités volontaires.
Le sous-amendement n° 484 rectifié bis rappelle utilement la finalité des EPLE et complète parfaitement l’amendement de Jacques Grosperrin, en insistant sur la continuité des parcours scolaires des élèves et en permettant l’adaptation de l’offre scolaire aux besoins des territoires. La commission émet un avis favorable.
La commission émet également un avis favorable sur le sous-amendement n° 506 rectifié, dans la mesure où l’engagement des collectivités territoriales doit s’accompagner d’un engagement de l’État, ainsi que sur le sous-amendement n° 488 rectifié, qui précise la composition du conseil d’administration de l’établissement public local de l’école du socle commun des connaissances et des compétences.
Quant à l’amendement n° 265, qui rétablit quasiment la rédaction initiale de l’article 6 quater, par cohérence avec tout ce que je viens de dire, la commission y est bien sûr défavorable.
Mesdames, messieurs les sénateurs, la discussion de cet article, qui a fait couler beaucoup d’encre depuis deux mois, constitue un bel exercice démocratique. Je remercie M. Grosperrin de son engagement, de sa motivation et de la qualité du travail accompli.
L’amendement déposé par la députée Cécile Rilhac faisait suite à un rapport sur la direction d’école qu’elle avait établi avec Mme Bazin, députée de l’Aube, qui appartient à la même famille politique que vous, monsieur le rapporteur. Ces deux députées avaient donc accompli tout un travail préparatoire sur la direction d’école, sujet qui n’est évidemment pas sans rapport avec celui qui nous occupe ici. Quel que soit le jugement que l’on porte sur le fond et la forme de cet amendement, son mérite est d’avoir suscité dans la société française un débat sur un sujet que les spécialistes connaissent bien, qu’ils étudient depuis des décennies, sur lequel on affiche beaucoup de volontarisme, mais qu’aucun des gouvernements précédents n’a traité…
Du plan Langevin-Wallon, cité par M. le sénateur Ouzoulias au début de nos débats, jusqu’au rapport de 2011 du député Reiss, en passant par nombre de rapports, et même quelques lois, toute une série de réflexions approfondies ont été menées sur ce sujet depuis 1945. L’idée d’instaurer un continuum entre l’école élémentaire et le collège n’a donc rien de diabolique ni d’inédit, elle n’est pas sortie de nulle part ; depuis des décennies, on travaille sur cette question dans certains milieux syndicaux, à droite comme à gauche. C’est pourquoi j’ai pu être surpris du caractère parfois manichéen des débats de ces dernières semaines. Il est néanmoins intéressant que cette idée, jusqu’à présent confinée au cercle des spécialistes de l’éducation, pénètre la société française, fût-ce au prix de polémiques excessives. Quelle que soit l’issue du débat, cela restera de toute façon un progrès.
Quel est l’objectif ? Cela a déjà été largement dit par plusieurs d’entre vous, à commencer par M. le sénateur Grosperrin, mais je voudrais tout de même souligner qu’il comporte en réalité plusieurs aspects. Le premier d’entre eux, redisons-le fortement, c’est l’aspect pédagogique et éducatif. Il est essentiel.
On peut considérer que le parcours scolaire d’un jeune se divise en deux parties. La première commence avec l’école maternelle, que ce texte installe au cœur du paysage, et s’achève en classe de troisième : c’est la phase d’acquisition du socle commun de connaissances, de compétences, de culture, consacré par plusieurs gouvernements successifs. Nous voulons en effet assurer à tous les enfants de France des acquis scolaires de nature pédagogique et éducative leur permettant de bien démarrer dans la vie. Cette idée simple et forte, éminemment républicaine, est évidemment à l’arrière-plan du projet d’instaurer un continuum.
Ce grand principe pédagogique et éducatif s’accompagne d’un certain nombre d’autres considérations. La première d’entre elles, c’est que l’on observe des formes de décrochage en classe de sixième parce que le continuum entre le CM2 et la sixième, même s’il a connu des progrès depuis un certain nombre d’années, est encore largement insuffisant aujourd’hui : pour une partie des enfants, notamment les plus défavorisés, les différences entre le collège et l’école primaire restent déroutantes. À l’école primaire, le parcours de l’élève est plus personnalisé, il est bien connu de son maître ou de sa maîtresse ; cela change radicalement au collège, où il existe un plus grand cloisonnement entre les disciplines et, parfois, un certain anonymat de l’enfant, ce qui est évidemment regrettable. Nous avons à renforcer ce continuum, non seulement par des coopérations entre l’école primaire et le collège, mais aussi par une vision partagée du parcours de l’enfant, notamment sur un plan pédagogique. Telle est, d’abord et avant tout, la vocation des rapprochements envisagés entre écoles et collèges.
Outre l’aspect pédagogique, il faut aussi envisager les choses sous l’angle éducatif, et même sous l’angle social au sens large. Par exemple, les enjeux de santé seront bien mieux pris en compte s’il existe un continuum, un lien plus organique entre l’école et le collège. Il en va de même pour l’accompagnement de l’élève handicapé, l’éducation physique et sportive, bref toute une série de sujets extrêmement concrets.
C’est cela qui est en arrière-plan et qu’il faut rappeler, d’abord et avant tout. Cette seule raison suffirait largement à justifier la mise en place d’un tel projet, qui d’ailleurs ne part pas de zéro puisque ce continuum existe déjà aujourd’hui, par exemple dans les lycées français à l’étranger ou dans certains établissements privés, qui n’ont pas à s’en plaindre.
Il est paradoxal que, du fait de l’inertie sur ce sujet, ce soient surtout, le plus souvent, les enfants des classes sociales les plus favorisées qui bénéficient du continuum.
La raison d’être d’un tel dispositif est donc à la fois pédagogique, éducative et sociale. Il y a aussi des enjeux importants en termes d’organisation territoriale et institutionnelle. Vous avez eu raison de le souligner, monsieur le sénateur Lafon, mais, pour ma part, je ne les mets pas au premier plan. Effectivement, la mise en œuvre de ce dispositif peut venir en soutien des écoles rurales et des collèges ruraux, dont nous savons bien qu’ils peuvent connaître un problème de masse critique, particulièrement les collèges. M. Grosperrin l’a souligné, cela n’implique pas nécessairement un regroupement physique de l’école et du collège. Il s’agit de créer des effets de réseau pour atteindre une masse critique. Cela peut aussi induire des innovations extrêmement intéressantes. En répondant dans cet hémicycle à une question orale, j’ai eu à aborder la question des collèges ruraux de moins de 100 élèves, pour lesquels le salut est dans l’innovation, dans la capacité de s’allier avec les écoles primaires, d’enseigner autrement.
On peut débattre de chacun des éléments que je viens d’exposer, mais on ne peut pas faire comme s’ils n’existaient pas. Je déplore vivement qu’un climat de soupçon particulièrement prégnant se soit instauré sur ce sujet depuis quelques semaines. J’invite chacun, parlementaire, commentateur ou acteur de terrain, à prendre ses responsabilités, c’est-à-dire d’abord à être attentif à ce qui se dit. Lors des débats à l’Assemblée nationale, j’avais déjà explicité les garanties évoquées par le rapporteur, en ce qui concerne par exemple l’importance du rôle des directeurs d’école, le soutien très fort que nous allons apporter à l’école primaire ou la valorisation de l’école maternelle. Le Président de la République s’est également exprimé très nettement en ce sens. On peut tout à fait ne pas être d’accord avec nos projets ou les modalités de mise en œuvre envisagées, mais il est malsain, et même dangereux en démocratie, de toujours soupçonner des intentions cachées. Nos intentions sont telles que je les expose, il n’y en a pas d’autres !
J’ajoute qu’il me semble positif que le pouvoir exécutif accepte des amendements parlementaires, a fortiori sur des thèmes déjà largement travaillés au travers de plusieurs rapports. Il serait paradoxal qu’on lui en fasse reproche dans l’une ou l’autre des assemblées.
Tout cela étant dit, …
Sourires.
… je ne peux que constater les malentendus qui se sont installés. À l’évidence, le sujet a encore besoin d’un temps de maturation et d’une meilleure articulation avec la question de la direction d’école…
Bref, nous devons avoir une vision systémique.
J’entends parfaitement ceux qui jugent ce projet prématuré, même si l’on pourrait leur répondre que le sujet est débattu depuis plusieurs décennies… Il existe une tension entre deux points de vue respectables, mais, in fine, il faut aboutir.
J’en ai acquis la conviction au fil des dernières semaines, les discussions doivent être poursuivies. Le présent texte peut-il, d’ores et déjà, consacrer certains principes : la question n’est pas tranchée ; plus largement, le débat est ouvert. Au-delà de la discussion de ce projet de loi, le sujet devra être travaillé au cours des prochains mois et faire l’objet de la plus vaste concertation, avec les associations d’élus…
… et les syndicats. Nous devons agir en notre âme et conscience ; je le ferai à la lumière des principes que j’ai énoncés.
La rédaction proposée par M. Grosperrin présente des avantages et des inconvénients. Elle apporte des garanties, ce qui constitue un progrès que je salue, mais elle a ses limites et ses lacunes et, si elle était adoptée, bien des voix les dénonceraient. En tout état de cause, sur l’amendement n° 264 rectifié quater et les sous-amendements, je m’en remets à la sagesse du Sénat.
Dans nos territoires ruraux et hyper-ruraux, les classes vont se vider, notamment celles de CM1 et de CM2 : à terme, elles fermeront, puis ce seront les écoles.
Cette mesure est proposée sans évaluation, sans avis du Conseil d’État, sans étude d’impact. Or, nous sommes tous d’accord pour le dire, il s’agit d’un sujet essentiel. Il faut prendre le temps de la réflexion et, avant tout, confirmer la suppression de ces dispositions, qui ne figuraient pas dans le projet de loi initial.
Hier, nous avons consacré une heure de débat aux trajets des élèves : imaginez le temps que les enfants de CM1 et de CM2 vont passer dans les transports si cette concentration scolaire est mise en place, au détriment d’un maillage territorial équilibré. On va, une fois de plus, éloigner un service public essentiel !
Le rapporteur a dit qu’il fallait rendre les écoles plus attractives pour les enseignants, mais, au-delà, le problème de fond, c’est l’attractivité de nos territoires ruraux et hyper-ruraux. Pourquoi nos jeunes ne veulent-ils plus y vivre ? Pourquoi nos agriculteurs ne peuvent-ils plus vivre de leur travail ? Voilà le fond du problème !
J’en appelle à la sagesse du Sénat, à la sagesse de chacune et chacun d’entre nous : ne soyons pas les fossoyeurs de nos écoles rurales ! Je vous invite à voter contre l’amendement de M. Grosperrin.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – Mme Laurence Cohen applaudit également.
Nous aussi, nous nous sommes réjouis que la commission unanime supprime l’article 6 quater, faisant ainsi écho aux inquiétudes exprimées dans le pays, tout particulièrement par les élus locaux. Au-delà du texte, il y a le contexte : dans les territoires ruraux et dans certains de nos quartiers urbains, les services de l’éducation nationale enjoignent aux élus locaux de trouver des formules pour faire reculer le service public, au risque de rompre le lien historique, qui demeure très fort et très fécond au regard des enjeux actuels, entre la commune et l’école.
À la lumière de ces inquiétudes, certains de nos collègues ont jugé bon de retravailler cet article. Mais, au cours des auditions auxquelles nous avons procédé, nous n’avons entendu qu’un seul avis qui ne soit pas défavorable à la création des établissements publics des savoirs fondamentaux. L’auteur de cet unique avis invoquait cependant la nécessité d’expérimenter des synergies entre l’école et le collège. Or les dispositions ici proposées sont si précises qu’elles excluent les expérimentations, celles-ci réclamant de la souplesse.
Plusieurs orateurs l’ont dit : une modification aussi profonde de l’organisation scolaire ne peut pas être décidée au détour d’un débat comme celui que nous menons aujourd’hui. Elle exige véritablement des études approfondies. On peut d’ailleurs se féliciter que le Sénat ait créé une mission d’information sur les nouveaux territoires de l’éducation.
Enfin, on a beaucoup insisté que le dispositif ne serait mis en œuvre que sur la base du volontariat. Or, on le sait, le rapport de force entre les élus locaux et les services de l’État n’est pas toujours équilibré…
M. Philippe Dallier. Nous sommes, si je puis dire, devant un cas d’école !
Sourires.
Monsieur le ministre, j’approuve presque tout ce que vous avez dit à propos de ces amendements. Il s’agit là d’un vrai sujet, qui est sur la table depuis longtemps déjà. Ce qui est incompréhensible, c’est la manière dont il a été abordé.
Un tel dossier doit nécessairement être porté par le Gouvernement, …
M. Philippe Dallier. … après la concertation la plus large possible. Il ne peut en aucun cas être traité par voie d’amendement, que ce soit à l’Assemblée nationale ou au Sénat. Ce n’est pas possible !
Marques d ’ approbation sur les travées du groupe socialiste et républicain.
Je salue les efforts de notre collègue Grosperrin, mais, pour l’heure, j’estime que nous devrions nous en tenir à la suppression de cet article. D’ailleurs, monsieur le ministre, j’ai cru discerner dans votre propos la volonté de mettre de nouveau le sujet sur la table, en reprenant les choses dans l’ordre. Dès lors, la question est de savoir dans quel délai : il ne faudrait pas que ce coup manqué nous fasse encore perdre dix ou quinze ans…
Vous ne vouliez pas de loi Blanquer, monsieur le ministre, mais vous aurez une loi Blanquer I, et je vous invite à déposer rapidement un projet de loi Blanquer II…
Sourires.
M. Philippe Dallier. Je le dis très sérieusement ! Il faut, conjointement avec ce sujet, traiter la question du statut des directeurs d’école.
Marques d ’ approbation sur les travées du groupe socialiste et républicain.
M. Philippe Dallier. Revenez donc avec un second texte, et traitons enfin, après avoir procédé à la plus vaste concertation possible, notamment avec les élus locaux, tous ces sujets qui, jusqu’à présent, étaient presque considérés comme des tabous. À plusieurs reprises, j’ai évoqué devant vous ma rencontre avec des directeurs d’école, des parents d’élèves et des enseignants : ce moment fut assez difficile à vivre, même pour moi qui n’ai pas la responsabilité de ce texte. À l’évidence, il faut rouvrir ce débat, le conduire à son terme et prendre des décisions, mais, en tout état de cause, pas de cette manière-là !
Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste, ainsi que sur les travées du groupe socialiste et républicain. – M. Pierre Ouzoulias applaudit également.
Monsieur le ministre, le débat est ouvert, avez-vous dit, mais ces dispositions, introduites en commission à l’Assemblée nationale, posent des problèmes de méthode. Elles n’ont pas fait l’objet d’une étude d’impact, ce qui est d’autant plus regrettable que leur adoption entraînerait un véritable bouleversement. S’agissant de la présence du service public de l’éducation dans nos territoires, il aurait également été préférable de recueillir, en amont, non seulement l’avis du Conseil d’État, mais aussi celui des élus, en particulier des maires de nos petites communes, ainsi que d’entendre la communauté éducative.
Sur le fond, j’ai demandé aux maires de mon département, le Calvados, ce qu’ils pensaient de votre projet de loi. Or, au sujet des établissements publics des savoirs fondamentaux, leur réponse est sans appel. Certes, il s’agirait de regroupements facultatifs, menés sur l’initiative des collectivités territoriales, mais de nombreux maires m’ont fait part de leur légitime inquiétude. Dans la pratique, les mutualisations se sont trop souvent traduites par une mise en commun de moyens et, à terme, par la disparition progressive de la présence de la puissance publique et de ses services.
À l’heure où la reconquête des territoires ruraux est affichée comme une priorité, il convient d’être particulièrement vigilants. En effet, cette mesure modifierait en profondeur l’organisation du système éducatif dans notre pays et, potentiellement, le maillage scolaire, notamment dans les zones rurales et périurbaines, où les services publics sont en régression permanente : toujours moins de services publics, toujours moins de bureaux de poste, toujours moins de services de santé ! Allons-nous maintenant organiser la suppression de classes et d’écoles, quand on nous demande précisément l’inverse : maintenir un maillage très dense de nos écoles dans l’ensemble du territoire, garantir les postes et les emplois ?
Monsieur le ministre, trop d’incertitudes entourent cette réforme, qui inquiète les élus et, plus largement, tous les acteurs de terrain. La préservation et le renforcement du maillage scolaire sont des conditions essentielles du maintien de l’attractivité de nos campagnes. Ne portez pas un nouveau mauvais coup à la ruralité !
Par-delà nos divergences, nous approuvons tous la position de la commission. Or l’amendement n° 264 rectifié quater réintroduit par la fenêtre, en définitive, ce que la commission a fait sortir par la porte ! Nous devons en avoir pleinement conscience.
Monsieur le ministre, la création des établissements publics des savoirs fondamentaux, destinés à regrouper plusieurs écoles de niveaux très différents, allant de la petite section à la troisième, revient, à mon sens, à mettre en place des monstres scolaires. Cela m’évoque, à moi qui siège à la commission des affaires sociales, d’autres monstres : les regroupements hospitaliers territoriaux. Au prétexte de mutualiser, on risque de désorganiser tout à la fois l’école et les territoires. C’est pourquoi je suis sensible aux propos de M. Dallier : avant de proposer de telles mesures, il faut mener une très large concertation avec le milieu scolaire et les élus locaux.
Ces regroupements ne présentent aucun intérêt pédagogique pour les élèves. Vous affirmez, monsieur le ministre, qu’ils vont favoriser les synergies entre l’école primaire et le collège, y compris dans le domaine de la santé. Pas plus tard qu’hier, vous avez balayé d’un revers de main notre amendement tendant à garantir une visite médicale pour les collégiens… Votre argumentation est parfois à géométrie variable.
Mes chers collègues, ne réintroduisons pas des dispositions qui ont été supprimées à juste titre par la commission !
Monsieur Grosperrin, je tiens à vous remercier : en commission, nous avions émis un signal très fort en supprimant cet article et, en proposant de le rétablir, vous nous permettez d’avoir ce débat en séance publique.
Monsieur le ministre, le péché originel, c’est d’avoir accepté d’introduire cet article par voie d’amendement à l’Assemblée nationale, …
… sans avis du Conseil d’État, sans étude d’impact, sans que la concertation soit achevée. J’ajoute que les dispositions créant ces nouveaux établissements publics étaient écrites de manière extrêmement imprécise ! À cet égard, je salue la nouvelle rédaction proposée : les savoirs fondamentaux sont une chose, le socle commun de connaissances en est une autre. La sémantique est importante !
Surtout, il avait été omis de faire référence à l’intérêt supérieur de l’enfant, au lien avec la communauté éducative, au rôle du maire. Peut-être avait-on également sous-estimé les conséquences d’une telle réforme du service public de l’éducation nationale : elle touchera nécessairement au cœur même de ce qui constitue le rôle, les missions, les fonctions de l’école et, par voie de conséquence, des directeurs.
Nous devons faire preuve de constance et de cohérence. Monsieur Dallier, à propos du statut des directeurs d’école, j’ai bien compris que vous aviez voulu ouvrir le débat en présentant un amendement d’appel.
Sur ce sujet, je vous rejoins : le Gouvernement aurait dû prendre lui-même en main ce dossier et inclure la question du statut du directeur d’école dans la réflexion.
En réalité, le dispositif présenté reprend des expérimentations déjà en cours dans beaucoup de territoires.
Bien sûr, nous soutenons l’école du socle, la continuité éducative entre le cycle 3 et le collège. Mais pourquoi ne pas avoir commencé par évaluer ces expérimentations ? Il existe des facteurs de réussite. Vous l’avez dit vous-même, monsieur le ministre, il faut travailler le projet pédagogique, l’adapter aux spécificités territoriales. On peut rapprocher les écoles : on n’est pas obligé de les regrouper.
Tous ces sujets exigent de prendre le temps de la concertation. Les inquiétudes sont nées de la précipitation avec laquelle vous avez procédé, en faisant fi du rôle des maires, de l’autorité compétente de l’État et de la communauté éducative.
Pour conclure, …
… nous devons prendre le temps d’approfondir ce travail. Pour l’heure, nous devons renouveler dans l’hémicycle le signal que nous avons donné en commission. Ce sera tout à notre honneur !
J’ai souri en entendant notre rapporteur nous appeler à moins de passion : il est lui-même incapable d’observer cette injonction quand il s’agit de l’éducation nationale !
Je tiens à saluer le travail de fond accompli en commission, sous l’égide de notre rapporteur et la bienveillante présidence de Catherine Morin-Desailly.
Monsieur le ministre, je salue l’action que vous menez depuis votre entrée en fonction. Je me réjouis que notre pays possède enfin un vrai ministre de l’éducation nationale ! Personne ici ne peut sincèrement douter de votre honnêteté intellectuelle.
Exclamations amusées sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste et du groupe socialiste et républicain.
Hier, notre collègue Sophie Taillé-Polian l’a dit à juste titre : c’est la troisième fois que l’on nous fait le coup de la confiance ! Je pense, notamment, à cette baudruche qu’a été la loi pour un État au service d’une société de confiance. Or la confiance, c’est comme la confiture : moins on en a, plus on l’étale.
Monsieur le ministre, vous l’avez souligné : voilà plus de dix ans que nous débattons de ces sujets, qui ne sont pas mineurs. Aujourd’hui, un consensus semble possible, même s’il sera difficile à trouver. Mais, en l’occurrence, nous sommes face à un problème de méthode : comment concevoir qu’une réforme si importante soit introduite piteusement…
… par la voie d’un amendement déposé à l’Assemblée nationale non par vous, mais par une députée ? À présent, nous devrions en somme aller à la pêche avec une épuisette pour trouver des solutions ! Je salue néanmoins l’excellent travail de Jacques Grosperrin…
Monsieur le président, laissez-moi quelques secondes de plus : tous les orateurs dépassent leur temps de parole !
Je souscris à la proposition de bon sens de notre collègue Dallier : oui à une loi Blanquer II qui traitera également du statut des directeurs d’école !
J’ai l’impression que certains d’entre nous tiennent un double, voire un triple discours.
Pas encore, monsieur Dallier, mais nous n’en sommes peut-être pas loin !
Chers collègues de la majorité sénatoriale, vous reprochez au Gouvernement de mettre à mal les territoires, mais, quand nous les défendons, vous refusez de nous soutenir.
Monsieur le ministre, aujourd’hui, pour survivre, beaucoup de communes ne peuvent plus compter que sur leur école.
Il y a un lien : les familles veulent habiter à proximité d’une école. S’il n’y a pas d’école dans une commune, elles ne s’y installent pas.
Pourquoi sert-on des petits-déjeuners dans les écoles – c’est une démarche que j’approuve pour l’avoir pratiquée dans les centres aérés lorsque j’étais maire ? Parce que tous les enfants n’ont pas la chance de faire, chez eux, trois repas par jour, mais aussi parce que certains parents qui travaillent n’ont pas le temps de préparer le petit-déjeuner des enfants. Or, on va imposer à ces enfants des trajets supplémentaires ! Dans cette affaire, on pense aux adultes, on cherche à faire des économies, mais on oublie l’essentiel : l’enfant. Dans notre pays, les enfants sont systématiquement négligés, car ils ne peuvent pas faire entendre leur voix. Mais, si tel était le cas, je vous assure qu’ils demanderaient à pouvoir dormir un peu plus, se rendre à l’école à pied, sans subir tout le stress qu’on leur inflige dès le plus jeune âge.
Cet amendement est à mes yeux catastrophique, déconnecté du réel. Faute d’être capables d’assumer vos divergences, vous présentez un amendement traduisant peut-être des accords négociés en catimini. Mais n’ayez crainte, les Français vous regardent !
En tant que tel, ce dispositif, même facultatif, s’inscrit dans une logique de concentration des établissements scolaires. Personnellement, j’y suis totalement opposé.
Je salue le travail de M. Grosperrin. Avec l’énergie qu’on lui connaît, il a essayé d’élaborer une rédaction plus acceptable, mais le texte d’origine était une erreur, pour ne pas dire une connerie ! Même récrit, cela reste une connerie…
Le meilleur moyen de vendre une réforme, c’est, dans un premier temps, de rendre sa mise en œuvre facultative : la coopération intercommunale a commencé ainsi. Elle était d’abord facultative, puis, chemin faisant, on a créé des incitations et, in fine, elle est devenue obligatoire.
Il ne faudrait pas aboutir à une caporalisation, à une vassalisation progressive des écoles par les collèges. Les maires ruraux se battent pour garder des écoles vivantes : c’est pourquoi ils s’opposent à ce dispositif.
Mme Laurence Cohen applaudit.
En tant qu’élue d’un département rural et peu dense, le Lot, je le dis tout de go : je ne voterai pas ces amendements.
Un maire me parlait il y a peu de sa commune natale, où il était écolier dans les années cinquante. À l’époque, l’école était neuve et pimpante. Il a voulu la revoir. Le constat fut amer : l’école n’existe plus, le local est envahi par la végétation, le village est mort. « La ruralité est en train de mourir », m’a-t-il dit d’une voix brisée.
Monsieur le ministre, vous ne pouvez pas ne pas voir une réalité criante qui nous saute aux yeux, à nous qui vivons au cœur des terroirs. Anticiper l’avenir, c’est faire en sorte que notre pays reste partout vivant. Or, les écoles, c’est la vie ! Il est vital que des habitants restent présents sur tout le territoire. Pour l’heure, l’hémorragie continue, lentement mais sûrement : nombreux sont les départements qui perdent encore des habitants tous les ans. Que voulez-vous ? Que la forêt et les broussailles recouvrent tout, au point qu’un jour, en passant sur une autoroute, vous aperceviez, de loin, au milieu d’une mer de verdure, le clocher écroulé d’un village où il n’y a plus personne ?
Gouverner, c’est avoir une vision pour le temps long. C’est se laisser traverser par tout ce que le pays murmure. C’est ne pas se contenter d’une vision comptable, à court terme. En définitive, que voulons-nous pour notre pays ?
En demandant une étude d’impact, à défaut d’un rapport, nous sommes dans notre rôle : c’est pourquoi cet article avait été supprimé en commission à l’unanimité.
À ce titre, madame la présidente de la commission, je vous remercie d’avoir permis la création d’une mission sur les nouveaux territoires de l’éducation : ainsi, il sera possible de mieux connaître les nombreuses expérimentations menées en France, en pointant leurs réussites et leurs faiblesses.
Le groupe du RDSE reconnaît tout à fait que certains points du texte sont positifs, s’agissant en particulier de l’école du socle et du continuum. Celui-ci existe déjà entre la grande section et le CP, même s’il n’est pas toujours bien appliqué sur tous les territoires. Il est normal de le mettre en place entre le CM2 et la sixième, d’autant que cela peut contribuer efficacement à la lutte contre le décrochage. Rappelons néanmoins que l’intérêt pédagogique de l’enfant doit être mis au premier plan. L’expérimentation existe, il faut la valoriser du point de vue pédagogique.
Je ne renie pas les conclusions du rapport que j’ai rendu avec Max Brisson sur l’attractivité du métier d’enseignant. Il est important de permettre à certains enseignants de compléter leur temps de travail sur un territoire, mais seulement sur la base du volontariat et si c’est enrichissant sur le plan pédagogique.
Certains sujets concrets sont importants. Nous avons rencontré des écoles qui pratiquent cette pédagogie et dont les équipes enseignantes affirment qu’elle est efficace.
À mon sens, nous devons confirmer en séance publique la suppression de l’article votée à l’unanimité en commission. J’approuve la demande par Philippe Dallier d’une loi « Blanquer II ». Avec une touche d’humour, nous avions indiqué que l’on aurait pu faire l’économie d’une loi « Blanquer I », trop large, et se contenter, comme en 2004, d’un texte à l’objet restreint, portant en l’occurrence sur la seule scolarisation à 3 ans et, éventuellement, l’obligation de formation ou d’activité pour les jeunes de 16 à 18 ans. Monsieur le ministre, je vous remercie par avance de préparer une loi « Blanquer II » !
Sourires.
Monsieur le ministre, nous avons écouté avec beaucoup d’attention vos propos ce matin, et nous avons noté une évolution significative par rapport à ceux que vous avez pu tenir ces dernières semaines. Je vous remercie d’ailleurs d’avoir prononcé ces paroles ici au Sénat : cela marque, me semble-t-il, un souci de dialoguer avec notre assemblée. Les arguments que nous avions préparés, les uns et les autres, au sujet de l’article 6 quater s’en trouvent quelque peu périmés.
Je voudrais faire un point sur l’état de la procédure législative. La commission a supprimé l’article 6 quater. Jacques Grosperrin, désireux d’avancer dans un esprit constructif et de faire en sorte que la voix du Sénat soit entendue par l’Assemblée nationale, a déposé un amendement de réécriture de cet article. Compte tenu de vos déclarations, monsieur le ministre, il ne me semble toutefois pas opportun de proposer une nouvelle rédaction de l’article 6 quater. Vous l’avez dit, pour mener une véritable concertation, il faudra certainement plus de temps que les quelques semaines qui nous séparent de l’adoption définitive de ce projet de loi. Je forme donc le vœu que l’amendement de Jacques Grosperrin soit retiré.
S’agissant des territoires et des écoles rurales, les débats de ces dernières semaines indiquent, à mon sens, qu’il n’existe pas de solution unique : il faut mettre en place une boîte à outils. La prise en compte de la diversité des situations impose en effet une diversité des solutions. Ces dernières semaines, un malentendu s’est fait jour, selon lequel la réponse découlerait uniquement du dispositif de l’article 6 quater.
Votre temps de parole est écoulé, mon cher collègue.
La parole est à Mme Françoise Cartron, pour explication de vote.
Monsieur le rapporteur, notre amendement n° 265 ne constitue nullement une proposition de réécriture in extenso du texte qui avait été adopté à l’Assemblée nationale. J’avais en effet souligné la faille que présentait ce dernier : il omettait la nécessaire adhésion à ce qui est pour moi un projet pédagogique des communautés éducatives, tant à l’école primaire qu’au collège. Il ne s’agit pas d’une restructuration, d’un regroupement entraînant des fermetures pour faire des économies ou pour répondre au désir éventuel de tel ou tel élu local : c’est bien un projet pédagogique, construit autour de la liaison nécessaire entre école primaire et collège, prônée depuis des années par nombre d’acteurs, et l’amplification des interactions entre les enseignants. Dans ce domaine, les expérimentations qui réussissent sont toujours le fruit d’une réflexion pédagogique concertée visant à rendre l’enseignement plus efficace, au bénéfice des élèves.
L’amendement n° 265 avait donc pour objet de reprendre la teneur de ces expérimentations, en posant comme condition sine qua non l’accord des conseils d’école et du conseil d’administration du collège. Nous savons tous dans cet hémicycle qu’aucune loi sur l’éducation ne peut être efficace si les enseignants ne la soutiennent pas et ne se l’approprient pas.
C’est dans cet esprit que j’avais déposé cet amendement. J’entends que certains demandent du temps pour poser le problème de manière plus globale, en traitant la question du statut et du rôle du directeur d’école.
Dans cette perspective, j’accepte de retirer mon amendement, si cet approfondissement de la réflexion doit permettre de construire une réponse pertinente, non pas unique, mais adaptée à chaque territoire.
L’amendement n° 265 est retiré.
La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.
M. David Assouline. Monsieur le ministre, en prenant vos fonctions, vous affirmiez qu’il n’y aurait pas de loi portant votre nom. Aujourd’hui, le Parlement vous en réclame une deuxième : c’est le succès !
Sourires.
M. Dallier a bien résumé les choses. Le débat de fond sur l’organisation de l’école est intéressant, légitime, et il se poursuivra. Cependant, ce n’est pas au détour d’un amendement de l’Assemblée nationale que l’on peut aborder un sujet aussi fondamental. Une telle façon de procéder relève d’une forme d’amateurisme.
Cela étant, les efforts accomplis par M. Grosperrin montrent qu’il est possible de construire un compromis, même s’il a voulu le faire de façon un peu précipitée. On ne peut que saluer sa tentative, mais j’espère qu’il entendra les appels à retirer son amendement, afin que le Sénat puisse en rester à un consensus qui renforcera sa position face à l’Assemblée nationale.
Le Gouvernement doit avoir une vision stratégique sur la question des écoles rurales. Quand il ne reste que cinq élèves dans un village, on ferme l’école, mais la fermeture de l’école entraîne le départ des familles, et c’est alors le village qui ferme ! C’est l’histoire de la poule et de l’œuf… Il faut sortir de cette spirale du déclin. Le Président de la République a déclaré avec force qu’aucune école ne fermera en milieu rural sans l’accord du maire : cela impose de redoubler les moyens pour maintenir les écoles dans les communes, plutôt que de maquiller des fermetures d’écoles par le biais d’un regroupement avec un collège.
Une dernière fois, monsieur Grosperrin, retirez votre amendement !
Mon intervention sera en quelque sorte en miroir de celle de ma collègue Laurence Cohen, qui s’exprimait à travers le prisme de son expérience de membre de la commission des affaires sociales. Pour ma part, en tant que commissaire aux finances, je ne puis m’empêcher de replacer ce débat dans le cadre de la situation financière globale de notre pays.
Monsieur le ministre, vous déplorez des procès d’intention et affirmez que vous n’avez pas d’autres objectifs que ceux que vous affichez, notamment la mise en place du continuum éducatif, sur lequel nous nous rejoignons tous. Certes, mais la pratique quotidienne du Gouvernement, c’est l’application cohérente et constante d’une sorte de dogme de la mutualisation : il faut faire plus gros pour faire moins cher. Dans ce contexte, on ne peut pas nous reprocher de nourrir des craintes : trop d’engagements pris ne sont pas financés. Il n’est donc pas illégitime, pour les citoyens comme pour les parlementaires, de s’interroger sur certaines annonces non accompagnées de moyens.
Instaurer la confiance demande du temps, monsieur le ministre. Que vous vous en soyez remis à la sagesse du Sénat sur l’amendement n° 264 rectifié quater ne peut qu’inquiéter : sur un tel sujet, que vous qualifiez vous-même d’essentiel, on aurait pu attendre de votre part soit une adhésion franche à cette proposition de réécriture de l’article, soit la présentation d’une autre rédaction, fût-ce par le biais de sous-amendements. Prenez le temps d’une véritable concertation, en partant de principes qui font l’unanimité, notamment la nécessité d’un continuum entre le CM2 et la sixième.
Confirmons la suppression de l’article 6 quater et prenons le temps nécessaire à un débat en profondeur, pour parvenir à une solution satisfaisante, dans l’intérêt des enfants.
Monsieur le ministre, je suis d’accord avec vous : il est important de construire le lien entre l’école élémentaire et le collège. Je vous suis encore lorsque vous dites qu’il faut sauver des collèges ; un collège est menacé dans ma commune. Regrouper des classes et travailler de manière innovante : pourquoi pas, si cela concerne les classes de CM1 et de CM2, mais le projet d’EPLSF inclut aussi les classes de maternelle. Or, certains élèves doivent faire près d’une heure de trajet pour se rendre au collège : on ne saurait imposer cela à des enfants de maternelle !
Un tel dispositif ne peut donc être mis en place que dans la concertation et en prenant l’avis des élus. En cela, l’amendement de Jacques Grosperrin améliore grandement le texte issu de l’Assemblée nationale. Je serais même tentée de le voter, pour éviter que le texte de l’Assemblée nationale ne soit rétabli ultérieurement, mais l’article 6 quater tel que rédigé par les députés a fait tellement de dégâts que l’on ne comprendrait même pas que nous en proposions une nouvelle rédaction. Dans l’Yonne, autour de Tonnerre, les professeurs et les parents d’élèves sont en train de bloquer des écoles, annoncent une grève des examens, à cause de cet article. Si nous le récrivions, ils entendraient que nous amendons simplement un texte qu’ils rejettent et qui n’a pas été suffisamment négocié avec eux.
Je vais donc me rallier à l’avis de notre collègue Philippe Dallier, qui demande du temps. Faut-il une loi « Blanquer II » ? Sans doute, au vu du travail qu’il reste à faire sur le statut du directeur d’école. Monsieur le ministre, il ne faudrait pas, en tout cas, que l’article soit rétabli dans sa version issue de l’Assemblée nationale : cela aurait vraiment des effets délétères dans nos territoires.
Monsieur le ministre, cette semaine, le rectorat de la Guadeloupe a été bloqué, pour des raisons que vous connaissez sans doute, très liées à ce débat. Les syndicats d’enseignants sont unanimes et la grève continue. À Anse-Bertrand, dans le nord de la Grande-Terre, des écoles ont également été bloquées cette semaine, précisément en raison d’un projet de fermeture de classes. Ce n’est pas possible ! Le mouvement pourrait s’étendre à de nombreux territoires, notamment les plus démunis ! Je forme le vœu que nous soyons unanimes pour maintenir la suppression de cet article.
Il me semble inutile de prolonger cette discussion, puisqu’il apparaît clairement que tout le monde s’accorde sur sa conclusion : nous allons en rester à la suppression de l’article 6 quater.
Je remercie néanmoins Jacques Grosperrin du patient travail qu’il a mené pour tenter de trouver une solution de compromis. Ce travail ne sera pas inutile, car il contribuera à la poursuite du débat dans les semaines et les mois qui viennent. Je vous remercie, monsieur le ministre, d’avoir dit que vous y étiez prêt. Cette discussion permettra d’apaiser les passions et d’approfondir la réflexion.
Notre groupe s’associe au consensus qui est en train de se dégager autour de la suppression pure et simple de l’article 6 quater.
Monsieur le ministre, on ne peut que regretter l’introduction de ce dispositif dans le texte par voie d’amendement à l’Assemblée nationale, sans étude d’impact.
Cet article a fait couler beaucoup d’encre et a suscité une forte mobilisation. Nos échanges avec la communauté éducative indiquaient bien qu’il posait problème, au point, parfois, de masquer d’autres éléments de votre réforme.
Beaucoup de nos collègues ont évoqué le monde rural, qui tient également une place importante dans mon département du Val-d’Oise, mais les maires de la partie très urbaine du département avec lesquels j’ai échangé ont attiré mon attention sur les problèmes qu’ils rencontraient avec des établissements XXL, en matière tant de proximité que de lien avec les parents d’élèves.
Je salue la création d’une mission d’information qui travaillera sur ces questions ; j’en remercie la présidente de la commission. J’espère que notre collègue Jacques Grosperrin va retirer son amendement ou que la sagesse qui caractérise la Haute Assemblée s’exprimera une fois encore en confirmant la suppression de cet article, afin que nous puissions poursuivre sereinement nos travaux.
Je souscris pleinement aux propos de ma collègue Françoise Cartron concernant la dimension pédagogique : elle constitue vraiment la priorité.
Il faudrait fixer un cadre juridique permettant de conforter le cycle 3, en consolidant les relations entre les professeurs du premier, ceux du second degré, les directeurs d’école et les principaux de collège. J’aurais même souhaité qu’un directeur d’école, et non pas nécessairement le principal, puisse prendre la tête du conseil d’administration, les directeurs d’école craignant d’être placés sous la coupe d’un principal.
Monsieur le ministre, j’imagine que le dialogue va se poursuivre. Certaines expérimentations, comme à Besançon, donnent des résultats formidables. Il importe, à mon sens, de consolider ces initiatives pédagogiques sur le plan juridique et de garder à l’esprit qu’il s’agit avant tout d’un projet pédagogique pour le cycle 3, visant à ce que nos enfants arrivent au collège mieux armés, pourvus des acquis fondamentaux.
Mes chers collègues, la teneur de ce débat est tout à l’honneur du Sénat.
Monsieur le ministre, vous avez indiqué à quel point vous avez été blessé par des soupçons, que vous avez qualifiés d’injustifiés, sur ce dispositif et sur vos intentions. Je vous crois sincère, mais le soupçon fleurit souvent sur le terrain de l’incompréhension et, parfois, d’une forme de désespérance.
Cela a été dit, ce qui doit primer, c’est la pédagogie et l’éducatif, l’intérêt de l’enfant, autour duquel nous devons tous nous retrouver. Il existe cependant d’autres enjeux, comme l’aménagement du territoire, qui est lié à la qualité de vie et à l’attractivité. Cela nous conduit à réfléchir sur la pérennité de l’école en milieu rural ; nous devons le faire avec lucidité et honnêteté intellectuelle, en concertation avec les élus.
J’ai parlé de désespérance ; il faut replacer ce débat dans le contexte des années très difficiles que les élus ont vécues, avec des baisses de dotations, des réformes territoriales à marche forcée, la fermeture de certains services publics. Pour eux, l’école est le dernier rempart de la République : ils y sont attachés et nous font part de leurs inquiétudes. Pour autant, ils ne sont pas hostiles aux évolutions. J’ai interrogé les maires de mon département au mois de janvier : ils veulent que l’école soit de nouveau considérée comme un projet de société.
Le grand débat a donné l’occasion au Président de la République de renouer le dialogue avec les maires sur ces sujets. À Grand Bourgtheroulde, les premières questions qui lui ont été posées concernaient précisément l’école. Cela nous incite à prolonger la réflexion. Le ministère de l’éducation nationale a engagé des travaux, avec la mission confiée à Pierre Mathiot et à Ariane Azéma, de même que le Sénat. J’ai en effet souhaité, avec le bureau du Sénat, que soit lancée une mission sur les nouveaux territoires de l’éducation. Cette mission travaille depuis six mois sous l’égide de nos collègues Jean-Yves Roux et Laurent Lafon et elle remettra ses conclusions avant l’été.
Le dispositif qui nous occupe ici serait sans doute mieux compris s’il était inscrit dans un contexte plus large, prenant en compte le maintien des classes à vingt-quatre élèves annoncé par le Président de la République.
Il faut remettre les enjeux en perspective et en cohérence, accomplir ensemble un travail très approfondi aux fins de fédérer les acteurs de la communauté éducative autour de l’intérêt de l’enfant et de garantir un aménagement du territoire équilibré et respectueux de la ruralité.
Je m’en remets à notre rapporteur et à l’auteur de l’amendement. Sans doute nos échanges auront-ils fait évoluer leur réflexion !
Je me réjouis de la sérénité des débats. Ce matin, nous avons fait tomber la température.
Sur quelles pistes pourrait s’engager la concertation que le ministre a appelée de ses vœux ? Je retiens de nos échanges qu’une véritable réflexion pédagogique sur l’école du socle est nécessaire. Nous devons définir en quoi elle correspond à la réalité de ce que sont les jeunes à l’école primaire et au collège. Comme l’a fort bien dit la présidente de la commission, c’est en fonction d’eux que nous devons construire l’organisation pédagogique de notre école. C’est dans cet esprit que nous devons examiner comment mettre en place cette école du socle dans la continuité des orientations pédagogiques définies depuis 2005.
Ensuite, nous devons réfléchir à l’organisation qui découle du choix pédagogique, à la gouvernance de l’école du socle, afin de l’adapter au continuum de ce cycle 3 dont parlait fort bien Laure Darcos.
Enfin, nous devons réfléchir à l’équité territoriale, cette promesse républicaine ancienne sur laquelle est fondée l’école. On mesure bien, à travers les cris de détresse des maires ruraux, qu’elle leur apparaît comme menacée. Nous avons besoin d’apaisement et de concertation.
À la différence de beaucoup d’entre vous, je ne demande pas une loi « Blanquer II ». J’appelle en revanche le ministre à construire du consensus autour de l’école du socle, aussi bien dans ses orientations pédagogiques que dans son organisation et sa gouvernance, et de rétablir la confiance quant à la volonté du Gouvernement de tenir cette promesse républicaine d’équité territoriale.
Je tiens à remercier Jacques Grosperrin, dont le remarquable travail a permis de recentrer le débat. Par respect pour ce travail, je ne lui demanderai pas de retirer son amendement, mais j’en appelle à sa sagesse, que je sais aussi grande que son attachement à l’école !
Sourires.
Je me félicite, à mon tour, de la tenue – dans tous les sens du terme – de ce débat important, qui traduit la nécessité d’aller au fond des choses quand on aborde une telle question. C’est ce que nous avons fait ce matin, je crois, même si d’autres discussions seront bien sûr nécessaires.
Je ne suis pas certain de vouloir une loi « Blanquer II ». Non que je ne prenne pas du plaisir à être parmi vous, mais le processus législatif est dense…
Sourires.
Encore une fois, je supplie les uns et les autres, dans cette enceinte mais surtout au-delà, de cesser d’introduire dans ce débat des questions qui n’ont pas de rapport avec son sujet : il n’y a, derrière cette proposition, aucun calcul économique ni aucun calcul politique.
C’est d’ailleurs très facile à comprendre.
Le calcul politique, s’il y en avait un, serait vraiment très mauvais : reconnaissez qu’il faut un certain masochisme pour mettre ce sujet sur la table… §Peut-être aurait-on pu mieux s’y prendre, mais nous recherchons l’intérêt général pour faire progresser le système scolaire ; je ne vois pas comment on pourrait prétendre le contraire.
Le calcul économique n’existe pas davantage, ni pour la direction d’école ni pour l’école du socle. En effet, toute évolution du statut des directeurs d’école entraînera des coûts supplémentaires. Du point de vue de la gestion, le système actuel est très économique ! Si j’avais les yeux rivés sur les économies à réaliser, je ne bougerais surtout pas d’un cil sur l’ensemble de ces sujets… Au contraire, je suis le premier à dire que la France dépense moins que la moyenne des pays de l’OCDE pour son école primaire, et qu’il y a donc un véritable investissement à faire pour l’école primaire. En plus de le dire, je le fais, puisque, rentrée après rentrée, nous consacrons plus de moyens à l’école primaire. C’est ainsi que, dans chaque département de France, nous aurons amélioré le taux d’encadrement à chaque rentrée entre 2017 et 2022. Le Président de la République l’a dit encore plus fortement, lorsque, dans sa conférence de presse, il a annoncé qu’il n’y aurait plus de fermetures d’école primaire rurale.
N’introduisons donc pas dans ce débat des sujets qui n’y ont pas leur place ! Cela ne fait que susciter des angoisses contre-productives. C’est une des douleurs de ce gouvernement d’avoir à assumer des angoisses dont les racines sont bien antérieures aux deux dernières années… Les fermetures d’école rurale en sont un bon exemple, madame Ghali, madame Préville, puisqu’elles ont été beaucoup plus nombreuses au cours du précédent quinquennat que depuis deux ans. Il faut être juste : nous fermons moins de classes, et encore moins d’écoles, qu’on en a fermées lors des deux quinquennats précédents, et nous avons l’intention d’en fermer moins encore à l’avenir.
La question première, une fois encore, c’est la démographie : moins d’enfants naissent, notamment dans les territoires ruraux. Je le répète aussi : je suis tout à fait disposé à mener une politique scolaire qui puisse contribuer à la renaissance démographique rurale. Territoire par territoire, il faut des projets en ce sens, l’école étant au cœur de cet enjeu.
Ainsi, il n’y a aucune volonté de fermer des écoles primaires. Le Président de la République l’a dit avec une netteté qui ne souffre pas de contestation. Nous mettons en œuvre ce qu’a dit le chef de l’État et que je dis moi-même depuis plusieurs mois. Cet engagement est très important, parce qu’il nous permet de considérer le sujet comme sanctuarisé : nous pouvons donc aborder les autres avec la sérénité qui convient, sans y introduire d’inquiétudes inutiles.
Je suis toujours un peu attristé quand, après avoir rappelé cent fois les garanties prévues, je vois les mêmes craintes revenir dans le débat. Non, l’école maternelle ne sera pas supprimée : vous avez voté voilà deux jours avant-hier l’instruction obligatoire à 3 ans. Non, il n’y a aucune volonté de fermer des écoles primaires, …
… ni d’économiser sur l’école primaire, à travers aucun projet, présent ou à venir : notre objectif est au contraire de renforcer l’école primaire au cours des prochaines années. Non, il n’y aura pas de remise en cause de la fonction de directeur d’école, ni de diminution du nombre de directeurs d’école ; je suis le premier à penser qu’ils sont extrêmement utiles, que leur fonction est fondamentale et que nous avons besoin de les renforcer.
Sur ces trois sujets, non seulement nous apportons des garanties en réponse aux inquiétudes, mais nous sommes volontaristes pour aller plus loin. Il serait sain que nous partions de ce socle pour mener toutes les autres discussions, d’un très grand intérêt, qui sont d’abord pédagogiques et éducatives, éventuellement organisationnelles.
En aucun cas le projet n’aboutissait à regrouper nécessairement écoles et collège sur un même site, ni même à obliger qui que ce soit à faire usage de l’outil proposé. Nous vivons malheureusement dans une société de défiance, depuis un grand nombre d’années, et il faut savoir en tenir compte dans la décision politique ; mais il faut savoir aussi mettre dans le débat public des thèmes importants et élargir au-delà du cercle des spécialistes des sujets d’intérêt général touchant à l’éducation.
Le travail très intéressant accompli par le sénateur Grosperrin nous a permis d’avancer d’un cran et de tenir ce débat ce matin. De même, je salue le travail des députées Cécile Rilhac et Valérie Bazin-Malgras. Toutes ces réflexions faisaient fond sur des travaux et des concertations assez importants. Que cela soit insuffisant pour habituer l’ensemble de la société française au thème, j’en ai conscience et le reconnais bien volontiers ; je souscris à la plupart des propos du sénateur Assouline à cet égard. Le sujet n’est pas pleinement mûr. Ce qui se passe depuis deux mois contribue-t-il à le faire mûrir ? À mes yeux, oui : nous devons nous réjouir que ce thème soit débattu, parce qu’ainsi certains entendent parler pour la première fois de l’école du socle et des enjeux qui lui sont liés. Devons-nous discuter davantage pour éventuellement aller plus loin ? Une grande partie d’entre vous répond oui. Je serais tenté de faire de même.
Cela étant, sur l’amendement, je maintiens mon avis de sagesse
Exclamations sur des travées du groupe socialiste et républicain.
… d’autant que les orateurs ont précisément fait preuve d’une grande sagesse dans leurs propos.
Il y a matière à un progrès pour l’éducation. Nous sentons bien dans nos débats, sur ce sujet comme sur d’autres, la possibilité d’un consensus sur l’éducation. Ainsi, on doit vous être reconnaissant d’avoir voté à l’unanimité pour l’instruction obligatoire à 3 ans : cela montre que les clivages peuvent être dépassés sur les sujets essentiels. Je vous prie de croire que mon désir le plus profond est d’aboutir à de tels consensus sur ces grands sujets d’intérêt général. Cela passe par le débat, qui est la marque d’une grande démocratie comme la nôtre !
Ah ! sur les travées du groupe socialiste et républicain.
Tout l’intérêt de proposer une nouvelle rédaction pour cet article était que le ministre s’engage. Tout l’intérêt de supprimer en commission le texte introduit par nos collègues députées était de marquer notre opposition à cette forme d’école des savoirs fondamentaux.
Je vous remercie, monsieur le ministre, mes chers collègues, d’avoir fait vivre ce débat important et rendu hommage à mon travail, qui l’a rendu possible.
Je ne ferai pas durer le suspense : je retire mon amendement. §Le consensus nécessaire pour le faire adopter – comme M. le ministre l’a souligné, l’école doit être transpartisane – n’est à ce jour pas réuni.
Je le regrette toutefois, car nous avions l’occasion d’inscrire dans la loi une mesure dont on parle depuis fort longtemps, un cadre juridique attendu par les établissements, comme celui de Jussey, en cours d’expérimentation. En dépit de quelques crispations corporatistes de la part d’enseignants du premier degré, l’école du socle reste à construire dans les mentalités.
M. Julien Bargeton opine.
Certains élus aussi se sont inquiétés. Avec ce projet de loi pour une école de la confiance, monsieur le ministre, vous contribuez véritablement à renouer la confiance avec les élus que nous sommes.
Je reste fidèle à mes convictions : un établissement de l’école du socle devra être envisagé à l’avenir. Sa création aurait permis de donner du corps à l’école du socle par la fusion de budgets, par la possibilité de travailler plus facilement ensemble pour les professeurs des écoles et ceux de collège et par l’amélioration des liaisons entre CE2 et CM1, d’une part, et CM2 et sixième, d’autre part. Elle aurait constitué une solution pour les élus locaux, qui vont devoir adapter l’offre scolaire aux territoires ruraux, notamment pour tenir compte de la baisse démographique. Elle aurait pu sauver nos petits collèges et nos écoles.
Il faudra bien y réfléchir. Pour ma part, je suis convaincu que nous y reviendrons un jour. Reste que, à l’heure actuelle, les conditions ne sont pas réunies. Il nous faut évaluer les expérimentations en cours et en tirer tous les enseignements avant l’élargissement de l’application de la mesure. Il nous faut l’avis du Conseil d’État. Il vous faut aussi, monsieur le ministre, comme vous l’avez souligné, organiser une véritable concertation avec les élus, les enseignants, les parents, les organisations syndicales, les organisations d’élus et les chefs d’établissement ; sur toutes les travées, nous y tenons.
Je vous remercie, monsieur le ministre, d’avoir entendu la parole du Sénat. Cet amendement nous a offert l’occasion d’échanger et vous a permis d’être clair et précis devant la représentation nationale pour dissiper les rumeurs. Je vous remercie d’avoir précisé que le calendrier de la concertation n’est pas celui de la loi.
Je forme le vœu que la disposition adoptée par l’Assemblée nationale ne soit pas rétablie en commission mixte paritaire ou en nouvelle lecture !
Applaudissements.
L’amendement n° 264 rectifié quater est retiré.
En conséquence, les sous-amendements n° 485 rectifié, 484 rectifié bis, 506 rectifié et 488 rectifié n’ont plus d’objet, et l’article 6 quater demeure supprimé.
L’amendement n° 208 rectifié quinquies, présenté par Mmes Berthet, A.M. Bertrand, Garriaud-Maylam et Gruny, MM. Laménie, H. Leroy et Pierre, Mmes Lamure, Lassarade, Morhet-Richaud, Puissat et Giudicelli, MM. Husson, Bonhomme, Bascher, Babary et Charon, Mmes Deromedi et Delmont-Koropoulis et MM. B. Fournier, Gremillet, Pellevat, Rapin et Bonne, est ainsi libellé :
Après l’article 6 quater
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La détermination du maillage scolaire, qui associe étroitement les élus locaux, s’inscrit dans une politique globale d’aménagement équilibré du territoire.
De plus, elle prend en compte le temps de transport maximum des élèves du premier degré depuis leur lieu d’habitation jusqu’à leurs établissements scolaires sans jamais dépasser trente minutes de trajet.
Dans les territoires de montagne, une attention particulière est apportée à conserver un aménagement scolaire adapté aux spécificités du territoire.
La parole est à Mme Joëlle Garriaud-Maylam.
Nous avons déjà débattu de cette question hier, à la faveur de la discussion de l’amendement n° 255 rectifié bis de M. Luche, qui l’avait d’ailleurs retiré. Je souhaite que cet amendement soit également retiré, faute de quoi j’y serai défavorable.
L’amendement n° 208 rectifié quinquies est retiré.
L’amendement n° 105 rectifié bis, présenté par MM. Temal, Iacovelli, P. Joly, Antiste, Daudigny, Tourenne et Tissot, Mme Taillé-Polian, M. Kerrouche, Mme Lubin et MM. Dagbert, J. Bigot et Manable, est ainsi libellé :
Après l’article 6 quater
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Toute modification de la carte scolaire à compter de l’entrée en vigueur de la présente loi doit intégrer un critère de mixité sociale reposant sur le revenu médian des foyers fiscaux auxquels sont rattachés les élèves de l’établissement.
La parole est à M. Rachid Temal.
Un rapport du Conseil national d’évaluation du système scolaire, fruit de deux années de travail, a démontré que, loin de résorber les inégalités de naissance, l’école les exacerbe. Cet organisme conclut que toute politique restera peu efficace en l’absence d’une action volontariste en faveur de la mixité sociale.
C’est pourquoi notre amendement tend à intégrer la mixité sociale comme critère contraignant dans toute modification de la carte scolaire.
Je rappelle que la carte scolaire relève, pour les écoles et les collèges, des communes et des départements. La mixité sociale est, bien sûr, un facteur pris en compte dans son élaboration. Je ne souhaite pas que l’on crée une contrainte supplémentaire pour les collectivités territoriales, d’autant que le critère proposé est réducteur par rapport à l’indice de position sociale élaboré par la direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance du ministère. Avis défavorable.
L ’ amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 6 quater.
Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 149 rectifié bis, présenté par Mme Brulin, M. Ouzoulias et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 6 quater
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 2121-30 du code général des collectivités territoriales est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Avant toute révision de la carte des établissements du premier degré, les services compétents de l’État engagent une concertation avec les représentants de la commune d’accueil des établissements susceptibles d’être modifiés. Le conseil municipal délibère des projets de fermetures de classes ou d’établissements. »
La parole est à Mme Céline Brulin.
Nous proposons que la concertation entre les services de l’éducation nationale et les communes aille jusqu’à ce qu’on sollicite la délibération du conseil municipal sur les mesures de retrait ou de maintien de postes au moment de l’élaboration de la carte scolaire.
Nous pensons, monsieur le ministre, que cette mesure serait de nature à redonner du crédit à l’annonce du Président de la République selon laquelle plus une école, notamment en milieu rural, ne sera fermée sans l’accord du maire. Or, en réalité, l’accord du conseil municipal est déjà obligatoire, et cela n’empêche malheureusement pas les fermetures. Nous avions échangé sur le fait que votre ministère est parfois allé en justice contre certaines communes, et nous étions convenus qu’il y avait de meilleures manières de se concerter…
Il s’agit de se départir d’une vision purement comptable en matière de mesures de fermeture ou de maintien de classes. Nous connaissons tous des cas où une classe a été fermée parce qu’il manquait seulement un enfant ou deux pour la maintenir.
Il convient aussi, même si c’est extrêmement difficile, de tenter d’adopter une vision pluriannuelle : certaines communes peuvent connaître un creux démographique seulement passager, avant un rebond prévisible. Permettre aux conseils municipaux de délibérer sur les maintiens ou retraits de postes favoriserait une vision un peu plus pluriannuelle et un peu moins comptable.
L’amendement n° 192 rectifié bis, présenté par M. Courtial, Mme Bonfanti-Dossat, M. Bascher, Mme Berthet, MM. Bizet et Bonhomme, Mmes Bories et Bruguière, M. Calvet, Mme Chain-Larché, MM. Charon, Chatillon, Cuypers et Danesi, Mme L. Darcos, MM. Darnaud et Daubresse, Mmes Deromedi, Deseyne et Duranton, M. B. Fournier, Mme Garriaud-Maylam, MM. Genest, Gilles, Grand, Joyandet, Karoutchi, Laménie, D. Laurent et H. Leroy, Mmes Lherbier et Micouleau, MM. Morisset, Mouiller, Panunzi, Pellevat, Perrin, Pierre, Poniatowski, Raison, Saury, Savary et Schmitz, Mme Thomas, MM. Vogel, Bazin, Lefèvre et de Nicolaÿ et Mmes Troendlé, Morhet-Richaud, Imbert et Renaud-Garabedian, est ainsi libellé :
Après l’article 6 quater
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 211-8 du code de l’éducation, il est inséré un article L. 211-8-… ainsi rédigé :
« Art. L. 211 -8-…. – Toute modification de la carte scolaire du premier degré dans des communes pouvant bénéficier de la dotation prévue à l’article L. 2334-32 du code général des collectivités territoriales est précédée d’une consultation à laquelle prennent part le représentant de l’État dans le département, les parlementaires élus dans le département, les conseillers départementaux, l’association départementale des maires et les associations de parents d’élèves. Elle est soumise à autorisation préalable du représentant de l’État dans le département. »
La parole est à M. Roger Karoutchi.
Dans le même esprit que l’amendement qui vient d’être défendu, celui-ci vise à faire précéder toute modification de la carte scolaire d’une discussion entre le représentant de l’État dans le département et l’ensemble des associations de maires, des conseillers départementaux et des associations de parents d’élèves.
L’amendement n° 149 rectifié bis vise à soumettre toute révision de la carte scolaire à une concertation préalable avec les conseils municipaux des communes concernées. L’établissement de la carte scolaire recouvre davantage la sectorisation des écoles, du ressort de la seule commune, que l’ouverture ou la fermeture de classes. Par ailleurs, cette concertation a souvent lieu. Quant à une délibération du conseil municipal, elle serait sans portée juridique. Avis défavorable.
L’amendement défendu par M. Karoutchi tend à soumettre toute proposition de modification de la carte scolaire dans les communes éligibles à la dotation d’équipement des territoires ruraux à l’autorisation préalable du préfet. Instaurer cette règle créerait une confusion des rôles, la gestion des moyens de l’éducation nationale relevant du recteur et du directeur académique des services de l’éducation nationale. Si l’amendement n’est pas retiré, j’y serai défavorable.
Je mets aux voix l’amendement n° 149 rectifié bis.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant de la commission.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
Le scrutin a lieu.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
Il est procédé au dépouillement du scrutin.
Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 110 :
Le Sénat n’a pas adopté.
Monsieur Karoutchi, l’amendement n° 192 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Roger Karoutchi. J’ai cosigné cet amendement par amitié pour Édouard Courtial, mais, à la réflexion, placer l’éducation nationale sous l’autorité des préfets me gênerait quelque peu. Je retire donc l’amendement avec bonheur !
Sourires.
L’amendement n° 192 rectifié bis est retiré.
L’amendement n° 424 rectifié bis, présenté par MM. Menonville, Artano, A. Bertrand et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Castelli, Collin, Corbisez, Dantec, Gabouty, Gold et Guérini, Mmes Guillotin et Jouve et MM. Labbé, Léonhardt, Requier, Roux et Vall, est ainsi libellé :
Après l’article 6 quater
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 212-3 du code de l’éducation, il est inséré un article L. 212-3-… ainsi rédigé :
« Art. 212 -3-…. – Dans les départements dont le territoire comprend des zones de revitalisation rurale délimitées conformément à l’article 1465 A du code général des impôts, la mise en œuvre de la carte scolaire permet l’identification des écoles publiques ou des réseaux d’écoles publiques qui justifient l’application de modalités spécifiques d’organisation scolaire, notamment en termes de seuils d’ouverture et de fermeture de classe, au regard de leurs caractéristiques rurales, de la démographie scolaire, de l’isolement, des conditions d’accès et des temps de transports scolaires.
« Sont considérées jusqu’au 31 décembre 2022 comme classées, au sens du premier alinéa, en zone de revitalisation rurale l’ensemble des communes mentionnées par l’arrêté du 16 mars 2017 constatant le classement de communes en zone de revitalisation rurale modifié par l’arrêté du 22 février 2018. »
La parole est à Mme Mireille Jouve.
Nous proposons de puiser dans le bon exemple sectoriel de la montagne un dispositif utile spécifique, afin de l’appliquer aux zones particulièrement rurales.
L’article 15 de la loi du 28 décembre 2016 de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne a intégré dans le code de l’éducation une logique de différenciation salutaire pour les écoles en espace montagneux.
Dans cet esprit, le présent amendement vise à conditionner davantage les fermetures de classes et à faciliter les ouvertures en milieu particulièrement rural.
En les étendant à l’ensemble des communes classées en zone de revitalisation rurale, qui sont au nombre de 15 000, la mesure proposée diluerait les dispositions particulières aux communes de montagne, justifiées par les spécificités de celles-ci. Je demande donc le retrait de l’amendement ; s’il est maintenu, l’avis sera défavorable.
L’amendement n° 424 rectifié bis est retiré.
L’amendement n° 27 rectifié bis n’est pas soutenu.
Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 460 rectifié bis, présenté par MM. A. Bertrand, Arnell, Artano et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Castelli, Collin et Corbisez, Mme Costes, MM. Dantec et Gabouty, Mme Jouve, M. Labbé, Mme Laborde et MM. Léonhardt, Menonville, Requier, Roux et Vall, est ainsi libellé :
Après l’article 6 quater
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 211-2 du code de l’éducation est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« L’État s’engage à ne fermer aucune école primaire ou maternelle sur l’ensemble du territoire national d’ici au 1er juin 2022, sauf à avoir obtenu un consensus entre les services locaux de l’Éducation nationale, le maire de la commune sur laquelle est implanté l’établissement scolaire, l’équipe pédagogique et l’intégralité du conseil d’école. »
La parole est à Mme Françoise Laborde.
lors de sa conférence de presse du 25 avril dernier : il souhaite qu’il n’y ait pas, d’ici à la fin du quinquennat, de nouvelles fermetures d’école sans l’accord du maire.
Cet amendement vise à concrétiser le souhait présidentiel en précisant les contours de la consultation à mener au cas où une fermeture d’école serait envisagée d’ici au 1er juin 2022.
L’amendement n° 17 rectifié bis, présenté par Mme Bonfanti-Dossat, MM. Grosperrin et Grosdidier, Mme Eustache-Brinio, MM. Vaspart, Danesi et Sol, Mmes Troendlé et de Cidrac, M. Mayet, Mmes Lanfranchi Dorgal, Noël et Lherbier, M. Courtial, Mme Delmont-Koropoulis, MM. Mandelli et Darnaud, Mme Gruny, MM. Vogel et de Nicolaÿ, Mme Bories, MM. Genest et Rapin, Mmes Lamure et Giudicelli, MM. Pierre, Bascher et Meurant, Mme Imbert, MM. Bonhomme et Karoutchi, Mme Garriaud-Maylam, M. Perrin et Mme A.M. Bertrand, est ainsi libellé :
Après l’article 6 quater
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article L. 212-1 du code de l’éducation est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« “Aucune suppression de classe ne saurait intervenir avant le 31 décembre 2021, si cette suppression est de nature à entraîner la fermeture de l’école concernée, sauf en cas d’accord exprès du maire.” »
II. – L’article L. 2121-30 du code général des collectivités territoriales est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Aucune suppression de classe ne saurait intervenir avant le 31 décembre 2021, si cette suppression est de nature à entraîner la fermeture de l’école concernée, sauf en cas d’accord exprès du maire. »
La parole est à M. Jacques Grosperrin.
M. Jacques Grosperrin. Le Président de la République, sans autre qualificatif
Sourires.
Il est en effet important qu’aucune suppression de classe n’intervienne avant le 31 décembre 2021 si elle est de nature à entraîner la fermeture de l’école concernée, sauf accord exprès du maire.
La fermeture d’une école est un moment difficile pour les habitants, qui voient s’éloigner la promesse d’une école de proximité. C’est particulièrement le cas dans les zones rurales, où les maires se battent pour maintenir ces lieux de vie républicains, dont dépend fortement la vitalité de la commune.
Ces amendements visent à traduire l’engagement formulé par le Président de la République de ne plus fermer d’école, sauf accord du maire, d’ici à 2022 – ou au 31 décembre 2021 pour l’amendement de Mme Bonfanti-Dossat.
L’inscription de cette disposition dans la loi, a fortiori dans le code de l’éducation, ne me paraît pas nécessaire. En outre, le dispositif prévu par l’amendement n° 17 rectifié bis reste en deçà de l’engagement présidentiel, puisque sa mise en œuvre permettrait la suppression d’une classe entraînant la fermeture d’une école entre le 1er janvier et la rentrée de 2022.
Je sollicite donc le retrait des deux amendements. S’ils sont maintenus, j’y serai défavorable.
Madame Laborde, monsieur Grosperrin, je vous remercie de l’hommage que vous avez rendu, chacun à votre façon, à l’engagement du Président de la République…
À l’occasion de cette conférence de presse, des propos essentiels ont été tenus sur l’éducation – et pas seulement sur les questions dont nous parlons. L’engagement de ne pas fermer d’école primaire, notamment rurale, sans l’avis du maire est très important. Il sera bien évidemment tenu. Nous avons commencé à prendre les dispositions nécessaires à son respect, puisque, en ce moment même, département par département, nous dialoguons avec les maires, parfois pour empêcher des fermetures d’école qui étaient programmées pour la rentrée prochaine. Au demeurant, nous étions sur le point de battre le record du plus faible nombre d’écoles fermées sur les dix dernières années.
Comme le rapporteur l’a expliqué, cet engagement ne relève pas du domaine législatif ; c’est l’unique raison pour laquelle j’émets un avis défavorable sur les amendements. Sur le fond, ils seront satisfaits, puisque cet engagement présidentiel sera évidemment tenu, tout comme les autres, également très importants.
(Supprimé)
I. – L’article L. 421-10 du code de l’éducation est ainsi modifié :
1° Au début du premier alinéa, est ajoutée la mention : « I. – » ;
2° Après le même premier alinéa, il est inséré un II ainsi rédigé :
« II. – Les établissements, avec l’accord de la collectivité territoriale de rattachement, peuvent mettre en œuvre en faveur des élèves du premier degré des actions, notamment sociales ou éducatives, financées par l’État et auxquelles les collectivités territoriales peuvent également apporter leur concours sous forme de subvention ou de ressources humaines et matérielles. L’accord préalable de la commune qui en a la charge est requis lorsque les actions mises en œuvre se déroulent dans une école. » ;
3° Au début du second alinéa, est ajoutée la mention : « III. – ».
II
– À la seconde phrase de l’article L. 5134-121 du code du travail, la référence : « second alinéa » est remplacée par la référence : « III ». –
Adopté.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à treize heures, est reprise à quatorze heures trente, sous la présidence de M. Philippe Dallier.