Séance en hémicycle du 29 novembre 2017 à 10h30

Résumé de la séance

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La séance

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La séance est ouverte à dix heures trente.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

En application du cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution, ainsi que de la loi organique n° 2010-837 et de la loi n° 2010-838 du 23 juillet 2010 prises pour son application, la commission des finances a émis un avis favorable – 20 voix pour, 1 voix contre et 4 bulletins blancs – à la nomination de M. Éric Lombard aux fonctions de directeur général de la Caisse des dépôts et consignations.

Debut de section - PermalienPhoto de Loïc Hervé

Monsieur le président, hier, mardi 28 novembre 2017, lors du scrutin n° 33 portant sur l’ensemble de la première partie du projet de loi de finances pour 2018, Mme Sophie Joissains souhaitait s’abstenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

Acte est donné de cette mise au point, mon cher collègue. Elle sera publiée au Journal officiel et figurera dans l’analyse politique du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2018, adopté par l’Assemblée nationale (projet n° 107, rapport général n° 108, avis n° 109 à 114).

Nous en sommes parvenus aux dispositions de la seconde partie du projet de loi de finances.

SECONDE PARTIE

MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES

Nous allons maintenant entamer l’examen des différentes missions.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » (et articles 58 à 62 bis) et du compte de concours financiers « Avances aux collectivités territoriales ».

La parole est à M. le rapporteur spécial.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, bien que nous examinions ce matin les crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » et du compte de concours financiers « Avances aux collectivités territoriales », il me semble indispensable de replacer cette discussion dans le contexte plus global des finances locales.

Tout d’abord, en ce qui concerne la loi de programmation des finances publiques, le Sénat a considéré que la trajectoire de réduction des dépenses proposée par le Gouvernement revenait à demander aux collectivités territoriales de réaliser 21 milliards d’euros d’économies, et non 13 milliards d’euros, comme il l’indiquait.

La relation de confiance entre l’État et les collectivités territoriales prônée par le Gouvernement a ainsi été écornée d’entrée de jeu.

En première partie du présent projet de loi de finances, le Gouvernement a proposé de supprimer, sur trois ans, la taxe d’habitation pour 80 % des Français. Le Sénat a considéré que cette réforme, qui ne répond qu’imparfaitement à la question des inégalités liées à l’obsolescence des valeurs locatives, n’était pas mûre et qu’il convenait de la reporter.

En effet, les valeurs locatives obsolètes et injustes continueront à être utilisées pour établir la taxe d’habitation de 20 % des contribuables, mais aussi la taxe foncière ou la taxe d’enlèvement des ordures ménagères. Outre les injustices entre contribuables, qui soulèvent d’ailleurs un risque contentieux, l’absence de révision entraîne des injustices entre collectivités territoriales, puisque les valeurs locatives sont utilisées dans les dispositifs de péréquation, par le biais du potentiel fiscal qui mesure leur richesse relative.

Il nous appartiendra, collectivement, de définir un nouveau cadre des finances locales, en nous attaquant à la fois à la réforme de la fiscalité, des dotations et de la péréquation. Dans cette perspective, nous envisageons de vous proposer, lors de l’examen des articles non rattachés, un amendement visant à élargir à l’ensemble des départements l’expérimentation sur la révision des bases locatives menée par la direction générale des finances publiques, la DGFiP, dont les conclusions ont été présentées au Parlement au début de l’année 2017. Ce préalable indispensable à la révision permettrait au législateur de décider, le cas échéant, des dispositifs à mettre en œuvre pour atténuer les transferts de charges entre contribuables.

Sur un plan plus général, nous pensons que, au-delà des dispositions purement techniques de ce projet de loi de finances, qui ont un côté un peu frustrant, nous sommes à la croisée des chemins. Il convient effectivement, ainsi que le propose le Président de la République, de préparer une réforme globale de la fiscalité locale à l’horizon 2020. En effet, après la suppression de la taxe professionnelle, hier, et avant celle de la taxe d’habitation, demain, le système imaginé voilà un demi-siècle et sur les mécanismes duquel nous vivons perd ses deux assises, ses deux pieds, et doit être totalement reconsidéré.

Pour ce faire, il faut, avant toute chose, repenser les fondamentaux des finances locales et publiques, à l’aune des modifications profondes intervenues dans notre pays et au plan mondial, lesquelles en ont radicalement modifié l’écosystème.

La territorialisation de l’impôt n’est plus compatible avec la cristallisation géographique de l’économie et l’urbanisation de la population.

L’appréhension des charges au niveau communal, à l’aide d’indices synthétiques assis sur l’habitat, ne répond plus au défi du retrait des services et des acteurs publics de la ruralité. Une nouvelle prise en compte de la centralité s’impose ; celle des standards italiens que nous avons étudiés, avec Claude Raynal, nous apparaît innovante et intéressante.

Une nouvelle gouvernance systémique des finances publiques doit également être mise en place, permettant à la fois à nos métropoles d’assurer leur compétitivité internationale et aux territoires d’être servis équitablement, afin de réduire la fracture qui s’est ouverte et, le cas échéant, de contribuer au financement de la dette nationale.

Il est urgent de faire partager au plus vite les fondamentaux d’une telle réforme, avant d’en décliner les mécanismes en toute lisibilité, dans une approche de la décentralisation et de la libre administration des collectivités plus contemporaine.

Les sénateurs, dont c’est le corps de métier, sont prêts à apporter leur part dans cette réflexion, puis leur technicité, dans la mise en œuvre de ce défi.

Une coproduction de la réforme participerait de la confiance réclamée et des prémices de cette nécessaire gouvernance partagée.

Voilà pour le cadre global.

En ce qui concerne les crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales », en 2018, les autorisations d’engagement prévues diminuent de 12 %, soit 524 millions d’euros, essentiellement en raison de la non-reconduction du fonds exceptionnel destiné aux régions et de la suppression de la réserve parlementaire.

Madame la ministre, lors de votre présentation du projet de loi de finances pour 2018 devant notre commission des finances, vous avez indiqué que les subventions d’investissement aux collectivités territoriales « atteindront, en 2018, 1, 8 milliard d’euros, soit une augmentation de 5, 5 % à structure constante ».

Nous contestons cette présentation consistant à comparer la nouvelle dotation de soutien à l’investissement local, la DSIL, laquelle comprend les contrats de ruralité et l’enveloppe venue se « substituer » à la réserve parlementaire, avec l’ancienne DSIL, qui ne comprenait ni la réserve parlementaire ni les contrats de ruralité !

Nous notons au contraire une diminution de ces subventions d’investissement de 211 millions d’euros, soit une réduction de plus de 10 % par rapport à l’année dernière.

Afin de soutenir les collectivités territoriales, le Sénat a adopté lundi, lors de l’examen de la première partie du projet de loi de finances, l’amendement que j’ai cosigné avec Claude Raynal, rétablissant les crédits « manquants » de la réserve parlementaire destinés aux collectivités territoriales, soit 36 millions d’euros, grâce à la création d’un prélèvement sur recettes spécifique.

Hormis les subventions d’investissement – dotation d’équipement des territoires ruraux, ou DETR, dotation politique de la ville, ou DPV, DSIL –, la plupart des crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » correspondent à des compensations de transferts de compétences.

La commission des finances a donc décidé de donner un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales ».

Par ailleurs, c’est par le compte de concours financiers « Avances aux collectivités territoriales » que transitent les impositions locales versées mensuellement par l’État aux collectivités territoriales : 107, 1 milliards d’euros sont prévus à ce titre pour 2018.

La commission des finances a donc décidé de donner un avis favorable à l’adoption des crédits de ce compte de concours financiers.

Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste, ainsi que sur des travées du groupe La République En Marche.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Raynal

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je voudrais revenir d’un mot sur les propos de mon collègue Charles Guené s’agissant du dégrèvement, en 2018, d’un tiers de la taxe d’habitation.

Si la commission des finances a effectivement souhaité reporter d’un an cette réforme, je considère pour ma part que les conditions de sa mise en œuvre en 2018 permettent d’y être favorable, sous réserve qu’elle soit entièrement neutre pour les collectivités locales et que l’année 2018 soit mise à profit pour rechercher les termes d’une remise à plat du financement des collectivités locales, tant du point de vue fiscal que du point de vue des dotations ou des nécessaires péréquations.

Par ailleurs, je souhaiterais compléter le cadre général présenté par mon collègue Charles Guené en soulignant que si, comme le répète le Gouvernement, la dotation globale de fonctionnement, la DGF, ne diminue pas en 2018, c’est un drôle de « pacte » qui est toutefois proposé aux collectivités territoriales.

La première lecture au Sénat du projet de loi de programmation des finances publiques a permis de clarifier et de corriger le texte. Néanmoins, de nombreuses zones d’ombre demeurent : nous ne savons toujours pas quelle sera la marge réelle de négociation qu’auront les préfets dans leurs discussions avec les collectivités territoriales, ou si l’effort sera en fait réparti selon des critères précis. Nous ne savons pas non plus quels critères seraient alors utilisés. Nous avons lu quelques propositions, finalement assez générales à ce stade, de la mission conduite par Alain Richard et Dominique Bur sur le sujet.

Se pose également la question du périmètre des collectivités territoriales concernées par la contractualisation : les plus peuplées, comme le prévoit le projet de loi de programmation, ou les plus importantes financièrement, comme semble le suggérer la mission « Richard-Bur » ?

Par ailleurs, nous ne savons pas quand les collectivités connaîtront l’objectif qui leur sera assigné pour 2018, le temps que les différents organes de réflexion et de concertation aient achevé leurs travaux. Le risque est qu’on leur assigne, à l’été seulement, des objectifs sur leurs dépenses 2018, sur le respect desquels elles pourraient être sanctionnées quelques mois plus tard…

Enfin, la pente de croissance des dépenses pour l’instant retenue de 1, 2 % en valeur et en moyenne, soit quelque chose de l’ordre de l’inflation au mieux, n’augure rien de bon pour les collectivités qui y seront soumises. Je vous rappelle que nous avions étudié en 2015, avec mon collègue Charles Guené, les modalités d’association des collectivités territoriales à la maîtrise des finances publiques en Autriche et en Italie.

Ce travail pourrait aujourd’hui se révéler fort utile. En particulier, la pertinence et l’objectivité des critères de ressources et de charges utilisés pour répartir les concours financiers de l’État et la péréquation sont fondamentales, si l’on souhaite que cette répartition soit véritablement juste. Nous vous proposerons un amendement visant à étudier la mise en place d’un système inspiré des « besoins de financement standard » italiens.

Je voudrais également aborder la minoration de la dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle, la DCRTP, prévue par le projet de loi de finances : elle est le symptôme d’un système à bout de souffle ! Le Gouvernement se réjouit que les minorations « historiques » voient désormais leur taux de compensation gelé : madame le ministre, vous n’aviez plus le choix, car il ne reste quasiment plus rien !

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Raynal

Elles représentent au total 57 millions d’euros, après avoir été minorées de près de 800 millions d’euros l’an dernier, et de 100 à 300 millions d’euros chacune des années précédentes.

Vous avez donc été « contraints » de vous « rabattre » sur la DCRTP, une dotation destinée à compenser « à l’euro près » les perdants de la réforme de la taxe professionnelle de 2010, auxquels on avait bien entendu juré qu’il s’agissait d’une compensation pérenne.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Raynal

Ce faisant, vous vous attaquez à des territoires qui sont souvent déjà en perte de vitesse, à d’anciens territoires industriels. Et vous préservez totalement des collectivités parmi les plus riches. Mais en même temps je corrige mon propos, puisque nous est arrivé ce matin en commission un amendement du Gouvernement qui pourrait modifier cette vision.

Sur ce sujet également, je vous invite à vous plonger dans le rapport de 2016 que nous avions commis, avec mon collègue Charles Guené, sur la réforme de la DGF. Nous proposions un système qui a pu apparaître quelque peu complexe, mais qui permettait de repartir sur des bases beaucoup plus saines.

Nous proposions dans ce même rapport de modifier le fonctionnement de l’écrêtement de la dotation forfaitaire. Nous pouvons nous réjouir que les dispositions adoptées l’an dernier, qui reprenaient cette idée, aient permis de faire passer la part des communes écrêtées de 60 % à 13 %, alors même que le montant de l’écrêtement augmentait de plus de 40 %. Ainsi, la participation au financement de la hausse de la péréquation est répartie d’une façon beaucoup plus juste.

En tout état de cause, cette réforme est encore devant nous, et je souhaiterais que la ministre nous dise comment le Gouvernement envisage de lancer les travaux concrets de la réforme de la fiscalité locale à la suite des travaux de la mission Richard-Bur.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Raynal

En l’attente, un moratoire sur l’ensemble des éléments constitutifs, notamment de péréquation, serait souhaitable à nos yeux.

Enfin, s’agissant des crédits de la mission et du compte de concours financiers, j’invite à mon tour le Sénat à les adopter ; les rejeter conduirait tout simplement à priver les collectivités territoriales de 3, 8 milliards d’euros de dotations versées par l’État, ce que je ne vous suggère pas…

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et sur des travées du groupe La République En Marche.

Debut de section - PermalienPhoto de Loïc Hervé

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, messieurs les rapporteurs spéciaux, mes chers collègues, la commission des lois comprend les raisons qui conduisent nos collègues des finances à demander l’adoption des crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales ».

Mais, si la commission des lois a fait un choix inverse, ce n’est évidemment pas pour couper les vivres aux collectivités ; c’est pour exprimer vigoureusement sa préoccupation sur l’évolution de leurs ressources et sur le principe de leur autonomie financière, à la lumière de ce projet de loi de finances comme du projet de loi de programmation des finances publiques.

Exprimer notre préoccupation, c’est d’ailleurs à peu près tout ce que nous pouvons faire, étant donné les règles de la discussion budgétaire qui corsètent le pouvoir d’initiative du Parlement.

La mission « Relations avec les collectivités territoriales » elle-même est marquée par des évolutions contrastées.

Les dotations de décentralisation, destinées à compenser des charges transférées aux collectivités, sont gelées depuis 2009, et leur lente érosion due à l’inflation se poursuivra l’an prochain. En dix ans, elles auront perdu près de 9 % de leur valeur réelle.

S’agissant des dotations d’investissement, le Gouvernement assume les engagements passés, mais il réduit la voilure pour les années à venir, puisque les autorisations d’engagement diminuent, elles, de près de 13 %. Si l’on peut saluer la pérennisation de la dotation de soutien à l’investissement local, la DSIL, sa hausse affichée masque d’importants changements de périmètre.

En outre, les dotations d’investissement librement distribuées par les préfets viennent peu à peu se substituer aux ressources dont les collectivités disposent en propre pour investir. Les nouvelles règles prévues par le projet de loi de programmation ne feront qu’aggraver cette tendance, contraire au principe de libre administration des collectivités territoriales. Les élus locaux, au travers de leurs associations représentatives, nous l’ont dit : la DSIL est un outil de recentralisation ! C’est pourquoi la commission des lois a déposé plusieurs amendements destinés à renforcer le rôle des parlementaires et des élus locaux dans l’attribution de ces subventions.

D’une manière plus générale, la commission des lois s’inquiète pour l’autonomie financière des collectivités territoriales, qui est l’un des piliers de notre droit de la décentralisation. La réforme de la taxe d’habitation fait planer de lourdes incertitudes sur les communes et intercommunalités : si le mécanisme du dégrèvement préserve leurs ressources et leur pouvoir de taux, le Gouvernement envisage expressément de supprimer ou de limiter ce pouvoir de taux à l’avenir. J’espère d’ailleurs, madame la ministre, que vous pourrez nous apporter des éclaircissements sur ce sujet précis.

Plus largement, l’autonomie financière des collectivités territoriales est mise à mal par la disparition progressive des impôts locaux et leur remplacement par des impôts nationaux transférés, sur lesquels nos collectivités n’exercent en général plus aucun pouvoir de taux ou d’assiette. La différence entre fiscalité transférée et dotations est largement surestimée, ce qui n’est pas le cas dans d’autres pays européens. Tout cela tient au fait que la notion de « ressources propres » des collectivités a été définie de manière très large, trop large, peut-être, par la loi organique du 29 juillet 2004. Il faudra un jour réfléchir à sa modification.

Sous le bénéfice de ces observations, votre commission des lois a donné un avis défavorable à l’adoption des crédits de cette mission.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque unité de discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.

Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de vingt minutes pour intervenir.

Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Alain Marc.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, ce projet de loi de budget, joint au projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022, témoigne d’une grande défiance vis-à-vis des élus locaux, alors même qu’il faudrait à l’évidence essayer de rétablir la confiance !

Les concours financiers de l’État aux collectivités territoriales subissent une nouvelle baisse en volume, qui atteindra 5 % au terme de la programmation quinquennale.

Les dotations d’investissement relevant de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » connaîtront, dès l’année prochaine, une diminution importante en autorisations d’engagement, masquée dans le projet de loi par des effets de périmètre : cette baisse atteint 29 % en volume pour la seule dotation de soutien à l’investissement local.

Oui, l’État est dans une situation de défiance à l’égard des collectivités !

Il y a aussi des comportements insidieux, comme la ponction de près de 200 millions d’euros sur les agences de l’eau. Ces dernières accompagnent les communes qui, conformément à la loi sur l’eau, souhaitent rendre au milieu naturel une eau assainie. Or les programmes d’aides aux communes risquent de ce fait d’être retardés ou d’être moins importants, diminuant d’autant la capacité d’autofinancement des communes.

Le projet de loi de programmation des finances publiques pour la période 2018-2022 prévoit un effort de réduction des dépenses publiques des collectivités de 13 milliards d’euros en cinq ans, effort extrêmement important, alors qu’elles ont déjà réalisé les économies qui leur étaient fixées lors du mandat précédent. Je précise que les collectivités locales sont les seules à respecter les contraintes budgétaires ! Dès lors, pourquoi les étouffer ?

Leur dette ne représente que 10 % des 2 200 milliards d’euros de dette nationale, et nous savons qu’elle sera forcément remboursée, puisque les budgets sont votés en équilibre.

On entretient l’idée que les maires seraient de mauvais gestionnaires. On les prive de leur autonomie. On les infantilise, même. Pour ma part, je fais confiance aux élus locaux qui ont tracé des trajectoires vertueuses en réduisant leurs dépenses de fonctionnement pour se ménager des possibilités d’investissement. Que se passera-t-il pour eux ?

En Aveyron, le conseil départemental a réduit notoirement son personnel pour continuer d’investir 40 millions d’euros par an dans les routes. Ce n’est pas rien, d’autant que, dans le secteur du bâtiment et des travaux publics, 60 % de l’investissement est public.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

Et j’en suis très heureux !

Cette mission budgétaire, précisément, ignore ostensiblement les départements. Or les départements assurent, pour le compte de l’État, sur leurs propres deniers, trois allocations individuelles de solidarité – la prestation de compensation du handicap, la PCH, l’allocation personnalisée d’autonomie, l’APA, et le revenu de solidarité active, le RSA – tout en faisant face à la division par deux du fonds d’urgence doté de 200 millions d’euros.

Chacun s’accorde à reconnaître que la situation financière d’une grande majorité de départements est critique. Toutefois, aucune solution n’est esquissée, et nous nous dirigeons vers l’accentuation de la fracture territoriale entre la France périphérique et celle des métropoles.

Pour revenir à l’échelon communal, l’attribution de la DETR dépend du bon vouloir des préfets. C’est la raison pour laquelle je souhaite, comme nombre d’entre nous, que l’ensemble des députés et sénateurs participent aux commissions départementales et que l’avis de celles-ci s’impose aux préfets.

Concernant le seuil à partir duquel la commission donne un avis sur les projets proposés, il serait pertinent de l’abaisser à 20 000 euros – 100 000 ou 150 000 euros, c’est beaucoup trop, car, dans nos petites communes ou villes moyennes, nous avons souvent des projets aidés pour 40 000 ou 50 000 euros. J’ai déposé des amendements en ce sens.

Il est en effet particulièrement important de renforcer le rôle des élus nationaux sur le territoire, d’autant plus que la disparition de la réserve parlementaire les a privés d’un moyen de soutenir des petits projets locaux qui n’auraient pas bénéficié par ailleurs de subventions suffisantes de l’État.

Je citerai un exemple : lors de la campagne électorale en vue des élections sénatoriales de 2014, nous sommes passés dans une commune dont le maire n’avait même pas de quoi se payer une tondeuse à 2 000 euros ! Qu’on ne parle pas de mutualisation entre les communes : il s’agit d’agir concrètement. Nous, élus locaux, sommes des gens concrets, et nous savons un tout petit peu de quoi ont besoin les communes !

Il apparaît également nécessaire d’abaisser le seuil d’éligibilité à la DETR, dotation qui est d’un grand secours pour nos petites communes.

Pour conclure, je voudrais profiter de cette tribune pour rendre un hommage appuyé à tous les maires, notamment ceux des petites communes rurales, ces élus exemplaires qui ne comptent pas leur temps pour rendre service à leurs administrés, qui s’engagent au quotidien pour dynamiser leur territoire, pour créer du lien, avec bien souvent, hélas ! peu de moyens.

Je veux ici saluer leur engagement au service de l’intérêt général.

Madame la ministre, mes chers collègues, les élus locaux, les maires n’ont que faire des déclarations d’amour à leur égard.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

M. Alain Marc. Ce qu’ils veulent désormais, ce sont des preuves d’amour !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

Ce projet de budget ne répond ni aux besoins ni aux attentes de nos collectivités territoriales.

Bien au contraire, il dessine des perspectives très préoccupantes non seulement pour leurs ressources et leur autonomie financière, mais également pour l’investissement local.

Aussi le groupe Les Indépendants-République et Territoires ne votera pas les crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » du projet de loi de finances pour 2018.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Indépendants – République et Territoires et sur des travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Gold

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, lorsque l’on aborde l’examen de la mission « Relations avec les collectivités », on sait pertinemment que l’on n’a, ce faisant, qu’une vision partielle de ces rapports, qui ne sont pas, du point de vue des élus, marqués par une confiance régulière et aveugle.

Les 3, 78 milliards d’euros inscrits en autorisations d’engagement dans cette mission – en diminution de 12 % – doivent être mis en regard avec les plus de 48 milliards d’euros de concours de l’État, qui eux-mêmes, ne représentent qu’une partie des près de 105 milliards d’euros de transferts financiers de l’État aux collectivités.

Mais, derrière ces chiffres, les nombreux élus locaux que nous rencontrons dans nos départements nous disent leur malaise, leur inquiétude et leur lassitude.

Inquiétude, disais-je, alors que les collectivités ont subi, ces dernières années, des baisses significatives de dotations, alors qu’elles ont dû digérer d’importantes lois portant réforme territoriale qui ont grandement modifié le paysage institutionnel français. Nos territoires aspirent à un peu de répit.

Dans ce contexte, certaines annonces de l’été dernier – annulations de crédits, diminution des emplois aidés, etc. – ont suscité au mieux de l’inquiétude, mais le plus souvent de l’abattement ou de la colère. Ces inquiétudes sont accrues par certains articles de la loi de programmation et de la première partie de ce projet de loi de finances : règle d’or renforcée et contractualisation aux contours flous avec les collectivités les plus importantes.

Si l’on peut se réjouir de l’abandon d’une logique de baisse mécanique des dotations pour une approche plus partenariale, les modalités de la contractualisation censée s’y substituer interrogent, même si le Président de la République a un peu rassuré, jeudi dernier, en précisant, devant les maires de France, que plus de 99 % des communes n’étaient pas visées.

Dans la même veine, je dirai un mot de la disparition progressive de la taxe d’habitation pour quatre Français sur cinq, disparition qui, n’en doutons pas, sera rétablie par l’Assemblée nationale.

Engagement de campagne du Président de la République, cette mesure satisfait les contribuables qui n’auront plus à s’acquitter de cet impôt inique du fait, notamment, de l’obsolescence des valeurs locatives et d’injustifiables disparités.

Elle a aussi suscité une crainte légitime dans nos territoires, malgré la promesse d’une compensation intégrale, sous la forme d’un dégrèvement. Pour avoir, comme nombre d’entre nous, une expérience d’élu local, je me souviens de précédents où l’État est progressivement passé d’un dégrèvement à une compensation, avant de rogner patiemment et régulièrement cette dernière… Je songe en particulier à la baisse de la dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle, notamment pour les communes, à rebours des engagements pris par l’État.

Reste que le Président de la République, s’il a lui-même reconnu devant les maires réunis en congrès que « l’été n’a pas été à la hauteur de ces engagements », a tracé une voie ambitieuse en matière de finances locales. Dans ce cadre, le projet de loi de finances pour 2018 ne serait que la première étape d’une refonte globale de la fiscalité locale.

Mettons au crédit du chef de l’État le fait de s’attaquer à une réforme d’ampleur, trop souvent reportée. Il trouvera chez les membres du RDSE des parlementaires exigeants, vigilants et soucieux de renforcer la justice ainsi que l’autonomie financière et fiscale des collectivités territoriales.

Mme Françoise Laborde acquiesce.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Gold

En attendant cette réforme d’envergure, il nous revient d’examiner les crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales ».

Soulignons, tout d’abord, la progression de 95 millions d’euros de la dotation globale de fonctionnement, la DGF, qui permet d’augmenter les dotations de péréquation verticale. La dotation de solidarité urbaine, la DSU, et la dotation de solidarité rurale, la DSR, s’accroissent ainsi de 90 millions d’euros chacune, auxquels il faut ajouter 10 millions d’euros d’augmentation au titre de la dotation de péréquation des départements.

Les incitations, qui sont l’un des facteurs du succès des communes nouvelles, ont été prorogées et même renforcées par l’Assemblée nationale. Notre groupe proposera d’aller encore plus loin pour encourager les communes qui se lancent volontairement dans ces fusions.

Les principaux mécanismes de péréquation horizontale, le Fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales, le FPIC, et le Fonds de solidarité des communes de la région d’Île-de-France, le FSRIF, sont, quant à eux, maintenus à leur niveau de 2017.

Au nombre des motifs de satisfaction, évoquons l’automatisation du Fonds de compensation pour la TVA, le FCTVA, prévue à l’article 58, tant il est vrai que sa gestion actuelle est à la fois complexe, illisible et archaïque.

Parmi les concours financiers retracés dans le programme 119, la dotation d’équipement des territoires ruraux, la DETR, est gelée en autorisations d’engagement dans le projet de loi de finances initial, mais progresse après l’adjonction, à hauteur de 50 millions d’euros, d’une part de l’ancienne réserve parlementaire. À cet égard, notre groupe proposera d’améliorer le fonctionnement de la commission départementale chargée de donner un avis sur certains projets retenus par le préfet.

Les autres dotations sont également gelées ; c’est le cas de la dotation Politique de la ville, la DPV, pour laquelle la liste des communes éligibles s’élargit, mais aussi de la dotation générale de décentralisation, la DGD, des communes, des départements et des régions, maintenue au même niveau depuis 2009.

Quant à la dotation de soutien à l’investissement public local, la DSIL, si l’on peut se réjouir de son inscription dans le code général des collectivités territoriales, sa pérennisation à son niveau de 2017 dans le programme 119 ne doit pas occulter une diminution des crédits, tous programmes confondus, entre 2017 et 2018. Cette évolution aura des répercussions, notamment sur le financement des contrats de ruralité. Madame la ministre, vous pourrez sans doute nous apporter des précisions sur le financement de ces contrats l’année prochaine.

En conclusion, les sénateurs du groupe du RDSE seront particulièrement attentifs à nos débats et au sort réservé à leurs amendements. Attachés au principe de libre administration et d’autonomie des collectivités territoriales, nous serons évidemment réceptifs aux gages de confiance et à la nécessité d’avoir une ligne directrice claire à moyen terme. Les élus locaux et nationaux ont besoin de cohérence et de lisibilité. Nous prendrons notre décision en conséquence !

Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Richard

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, ce projet de loi de finances présente une façade de stabilité globale en ce qui concerne les ressources de fonctionnement de nos collectivités territoriales.

On peut, certes, affiner la discussion sur les chiffres après la virgule ; reste que l’engagement pris par le Président de la République, dès le début de sa campagne, de ne pas agir sur le montant des dotations pour conduire les collectivités territoriales à une politique de dépense retenue est respecté. Même sur les points qui donnent lieu à discussion, la publication, dans dix-huit mois, des comptes administratifs des collectivités territoriales fera justice des débats.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Richard

Cette stabilité affichée n’est toutefois, nous le savons tous, que l’avant-propos d’un projet de transformation.

Mes chers collègues, si j’essaie de me remémorer l’ensemble des propos qui sont tenus, de longue date, dans cette assemblée, quant au caractère abîmé, dégradé, trop complexe et illisible du schéma financier des collectivités territoriales, il me semble que cette transformation est jugée souhaitable sur pratiquement toutes nos travées…

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Richard

Savoir comment s’y prendre, c’est tout de suite un peu plus difficile.

Le choix opéré, et que notre groupe approuve, consiste à préserver les dotations, ce qui pose la question suivante : jusqu’à quel point pourront-elles soutenir un effort de solidarité, ce qui est leur mission ? En effet, si l’on conserve la masse en procédant à une redistribution interne, l’objectif de stabilité et de sécurisation des ressources est tout de suite touché.

Dès lors, au-delà des proclamations un peu sonores, nous serons conduits, me semble-t-il, à adopter un schéma d’évolution de la dotation globale de fonctionnement très progressif et allant vers la simplicité, en tirant les leçons de la précédente tentative de réforme, qui a avorté. Nous sommes convenus, nous tous qui participions à la discussion, que la redéfinition globale des bases de la DGF se heurtait à des obstacles très difficilement franchissables – je suis modeste.

Le deuxième élément de la transformation à venir sera la tentative de gérer de manière concertée et responsable la dépense locale de fonctionnement. C’est là une nouveauté pour la France, mais une généralité dans l’Union européenne, dont la monnaie commune s’accompagne d’obligations auxquelles la France souscrit de longue date, tout en montrant une difficulté persistante à respecter ses engagements.

La modération observée sur la période 2014-2016, et qui sera très probablement vérifiée aussi pour 2017 lorsque les comptes seront disponibles, prouve que cette gestion responsable est à la portée des gestionnaires locaux, qui, de toute façon, font très attention à leurs dépenses et adoptent de plus en plus une vision prospective.

J’ajoute que, si nous sommes capables de continuer à contenir l’évolution de nos dépenses locales autour du niveau de l’inflation, pour peu que les recettes présentent un minimum de dynamique, ce qui est plus facile en période de croissance, la marge d’autofinancement de nos collectivités territoriales aurait vocation à augmenter, ce qui, me semble-t-il, est souhaitable pour tout le monde.

Le dispositif de contractualisation, que je n’ai pas ici le temps de détailler, va faire l’objet de nouvelles concertations à l’occasion de la Conférence nationale des territoires, puis surtout d’un débat législatif au cours de la première quinzaine du mois de décembre. La mission que j’ai l’honneur d’animer avec le préfet Dominique Bur recommandera qu’il s’agisse d’une première phase, avant que, à l’horizon de 2020, lorsqu’on disposera d’une année complète d’observation, on ne procède à quelques affinements pour améliorer le dispositif de gestion partagée et concertée.

Mais le sujet qui ouvre le plus de perspectives, c’est évidemment la transformation de la fiscalité locale, demandée par l’exécutif à partir, là aussi, d’une prise de position claire du Président de la République.

Très vite, la disparition de cette recette d’une vingtaine de milliards d’euros – tout compris, 23 milliards, avec la taxe d’habitation – va nous placer devant une bifurcation.

La première voie consiste à créer une nouvelle imposition locale remplissant mieux les objectifs d’équité et de partage de la contribution que la taxe d’habitation, cette imposition locale autonome s’accompagnant d’un pouvoir de taux. Toutefois, pour la grande majorité de nos concitoyens, l’opération aura consisté – petit inconvénient ! – à supprimer un impôt pour le remplacer par un autre.

La seconde option vise à garantir aux collectivités territoriales une part d’imposition nationale, ayant une dynamique. Ce choix va se présenter au cours des six mois qui viennent.

Inutile de dire que les propositions de tous, pourvu qu’elles soient réfléchies et un peu chiffrées, sont les bienvenues…

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Richard

Si le moment des récriminations et des protestations a toute sa légitimité, l’ouverture vers un avenir équilibré et équitable de partage des charges de fonctionnement des collectivités territoriales est un débat que personne n’est fondé à esquiver.

Comme M. le rapporteur pour avis de la commission des lois l’a fait observer, cette réflexion nous amènera nécessairement à engager un débat, bienvenu et intense, sur la conception de l’autonomie financière des collectivités territoriales.

Or, dans le paysage d’inégalité de ressources et de pente économique, non seulement entre les territoires ruraux et certains territoires urbains, mais entre les territoires urbains eux-mêmes, nous rencontrerons rapidement cette vérité inconfortable : l’autonomie et la diversité des ressources locales les plus grandes conduisent forcément à l’inégalité et à la différence de chances les plus grandes.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Richard

J’y viens, monsieur le président : ce choix, personne ne pourra l’éluder ! (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche. – M. le président de la commission des finances applaudit également.)

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, les crédits pour 2018 de la mission « Relations avec les collectivités territoriales », avec 3, 866 milliards d’euros au titre des autorisations d’engagement hors crédits de la direction générale des collectivités locales, sont en baisse de 8 % par rapport à cette année.

Ces crédits ne représentent toutefois que 3, 8 % du total des transferts de l’État aux collectivités territoriales, pour reprendre le langage convenu de la LOLF, la loi organique relative aux lois de finances, lesquels transferts augmentent de 1, 2 %, soit 1, 162 milliard d’euros sur un total de 101, 398 milliards d’euros. Finalement, le millésime n’est pas trop mauvais pour les collectivités territoriales, serait-on tenté de dire, ce que le Gouvernement ne se prive pas de faire.

Mais il s’agit d’euros courants, dont l’essentiel sera rogné par une inflation de l’ordre de 1 %, qui absorbera 1 milliard d’euros sur l’exercice prochain. Comme l’a fait remarquer en commission notre rapporteur pour avis, il s’agit là d’une technique de camouflage efficace de la baisse des concours financiers réels de l’État derrière une apparente stabilité ; l’écart lié à l’inflation dépasse 3 milliards d’euros et 5 % d’ici à la fin du quinquennat.

Sans compter que, les aides financières provenant traditionnellement d’autres ministères ou organismes baissant, le résultat final risque d’être encore moins brillant.

Du côté du ministère de l’intérieur, c’est la dotation d’action parlementaire qui est supprimée ; du côté du ministère du travail, 1 milliard d’euros en moins sur les contrats aidés, dont une bonne partie concerne les collectivités territoriales ; quant aux agences de l’eau, elles devraient subir l’année prochaine une ponction de 400 millions d’euros. La liste n’est pas exhaustive. D’ailleurs, comme le dit sobrement l’annexe du projet de loi de finances consacrée à cette question, « l’évolution des subventions des ministères en faveur des collectivités territoriales est difficilement prévisible ».

Mais, je l’avoue, le principal sujet d’émerveillement pour moi, c’est que l’on puisse continuer de présenter à l’opinion comme des transferts financiers, donc des aides, de l’État aux collectivités des compensations, d’ailleurs incomplètes, de transferts de compétences et de charges, opérés notamment à l’occasion des vagues de décentralisation, des atténuations des effets pervers de décisions fiscales favorables à telle ou telle catégorie de contribuables, mais pénalisantes pour les collectivités, la contrepartie, âprement discutée, de services rendus – dernier en date : les titres sécurisés – et bien d’autres choses du même acabit.

Qui se souvient aujourd’hui que la DGF, fossilisée depuis longtemps, a pour origine des taxes locales sur les échanges commerciaux, remplacées par le transfert de la taxe sur les salaires, elle-même remplacée, certains s’en souviennent, par le versement représentatif de la taxe sur les salaires, devenu finalement DGF ?

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

Qu’est-ce que le FCTVA, sinon le remboursement, partiel et souvent tardif, de la TVA qui grève l’investissement des collectivités territoriales ?

On pourrait aussi évoquer le caractère dérisoire de la contribution de l’État au financement des services départementaux d’incendie et de secours, les SDIS, dont la direction opérationnelle appartient pourtant au préfet. Drôle de « compétence partagée » entre ceux qui dirigent et ceux qui paient !

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

Quand on fait l’addition, on constate que les transferts financiers de l’État aux collectivités, si l’on entend par là des aides réelles, sont plus proches de 30 que de 100 milliards d’euros. Je suis preneur, madame la ministre, de chiffres qui seraient officiels ! Mais on ne nous les a jamais fournis. Ils confirmeraient encore l’écart entre les apparences et la réalité dans ce domaine…

Si j’insiste sur ce qui pourrait passer pour une simple affaire de convention, c’est que ce camouflage permet de justifier aux yeux des Français – les médias ne s’en privent pas ! – l’embrigadement des collectivités territoriales dans la croisade contre des déficits publics dont elles ne sont en rien responsables. Quoi de plus légitime, si elles bénéficiaient réellement de 100 milliards d’euros au titre des aides de l’État ?

La créativité du Gouvernement n’étant jamais prise en défaut, cela permet aujourd’hui de justifier qu’on encadre leurs dépenses de fonctionnement : 1, 2 % dans la version initiale du Gouvernement, 1, 9 % dans celle du Sénat, si j’ai bien lu.

J’avoue avoir un peu de mal à comprendre comment on pourra ainsi réduire significativement l’endettement public, étant donné que les sections de fonctionnement représentent quelque 80 % des budgets des collectivités territoriales et que la dette de ces mêmes collectivités ne représente pas plus de 10 % de la dette publique…

Le seul résultat auquel on parviendra sera une nouvelle baisse de l’investissement des collectivités, …

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

… qui représente 70 % de l’investissement public, ce qui aggravera la stagnation économique et le chômage.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

Pas du tout, nous rétorque le Premier ministre : réduire les dépenses de fonctionnement permettra d’augmenter l’autofinancement, tout en préservant l’investissement. Sur le papier, ce n’est pas impossible ; mais, dans la réalité, avec des collectivités ponctionnées depuis dix ans, cela me paraît hautement improbable.

Le plus piquant de l’affaire, c’est que l’on demande aux collectivités territoriales de se désendetter de 67 milliards d’euros d’ici à la fin du quinquennat, alors que l’État, lui, s’endettera de 223 milliards d’euros !

À s’en tenir aux chiffres fournis par le Gouvernement, le résultat sera une baisse de l’endettement public de cinq points de PIB en six ans. La dette publique actuelle représentant 96, 8 % du PIB, il faudra donc plus de trente-six ans pour atteindre la barre des 60 % maastrichtiens ! Et un peu plus, si, entre-temps, les collectivités territoriales mettent la clé sous la porte…

Mes chers collègues, vous l’aurez compris : notre groupe ne votera pas les crédits de cette mission !

Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste. – Mme Mireille Jouve applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

M. le président. La parole est à Mme Françoise Gatel.

Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste. – M. le rapporteur pour avis applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Gatel

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, les collectivités territoriales sortent épuisées du traitement que l’État leur a infligé de manière autoritaire au cours de ces trois dernières années.

En effet, elles ont subi un chamboule-tout institutionnel un peu brouillon, une baisse continue et non négociée de leurs dotations, alors même que l’État était incapable de s’imposer à lui-même la frugalité qu’il exigeait d’elles, un transfert de charges non ou mal compensées et une augmentation des dépenses obligatoires : je veux parler du jour de carence, des rythmes scolaires, des dépenses sociales pour le département et de la voracité normative.

Aussi doit-on souligner avec satisfaction certains éléments contenus dans ce projet de loi de finances, en particulier le maintien du niveau de la DGF pour 2018, la diminution de certaines dépenses obligatoires – jour de carence –, le maintien du Fonds de soutien aux communes à la suite de la liberté donnée en matière de rythmes scolaires et, même si elle a suscité quelques questions, la TVA des régions, prémices, du moins je le souhaite, d’une réforme de la fiscalité locale.

Citons aussi le renforcement du soutien à la création de communes nouvelles avec le principe de stabilité de la DGF, la hausse du plafond et la majoration de 5 % de la dotation forfaitaire. Une majoration toutefois très minime, madame la ministre, quand on sait que la création de communes nouvelles s’achèvera au 1er janvier 2019, en raison des échéances municipales de 2020.

Je regrette la faiblesse de l’encouragement, alors que les communes nouvelles sont une dépense d’investissement pour l’avenir répondant au double besoin de proximité et d’efficacité, ainsi qu’à la consolidation de centralités.

Mes chers collègues, peut-on continuer de donner plus à des communes qui fusionnent, au détriment des autres, puisqu’il s’agit d’une enveloppe fermée ?

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Gatel

C’est pourquoi je proposerai, afin de ne pas pénaliser l’enveloppe de la DGF des communes et des intercommunalités, particulièrement contrainte, de créer un fonds dédié aux communes nouvelles, comme on l’a fait pour les métropoles et les communautés d’agglomération.

Le coût des communes nouvelles est très faible : 10 millions d’euros cette année, contre 70 millions pour les communautés d’agglomération.

La DSIL aurait pu constituer un motif de grande satisfaction, madame la ministre, compte tenu de la hausse importante affichée en autorisations d’engagement, si cette hausse n’était pas le fruit d’une habileté de présentation : il faut en convenir, elle est liée avant tout à un changement de périmètre, puisque, si l’on neutralise les effets de périmètre, les autorisations d’engagement diminuent de 257 millions d’euros, soit 29 % en volume.

Je note avec satisfaction que, en compensation de feu la réserve parlementaire, nos collègues députés ont souhaité réaffecter une enveloppe de 50 millions d’euros aux communes et intercommunalités engagées dans un projet de modernisation.

Je félicite notre rapporteur pour avis pour la création de la commission départementale des investissements locaux, qui permettra aux élus locaux et nationaux d’être partie prenante dans l’attribution de la DSIL et de la DETR.

Je souhaite à présent aborder, en prenant quelques exemples, la question de la compensation du transfert de charges, en particulier l’augmentation de la dotation forfaitaire relative à la délivrance des titres sécurisés, passeports et cartes nationales d’identité.

La hausse inscrite dans le budget n’est, hélas !, pas liée à une revalorisation de la compensation pour les communes déjà équipées ; elle est liée à la seule augmentation du nombre de communes accueillant un dispositif de recueil.

Quid du PACS, le pacte civil de solidarité ? Les maires se sont vu attribuer des compétences en matière d’état civil précédemment exercées par les tribunaux d’instance. Exercées par les maires en leur qualité d’agents de l’État, les compétences transférées n’ouvrent, selon la jurisprudence du Conseil d’État et du Conseil constitutionnel, aucun droit à compensation.

Or l’article 31 du projet de décret prévoit le transfert des données numériques et des dossiers papier détenus par les greffes des tribunaux d’instance aux officiers d’état civil des communes sièges desdits tribunaux. Dès lors, ces communes devront traiter les PACS pour l’ensemble des communes. Ne croyez-vous pas, madame la ministre, que cette charge supplémentaire mérite une indemnisation ? Un amendement sénatorial vise à instaurer une telle indemnisation.

Madame la ministre, la mission « Relations avec les collectivités territoriales » ne correspond qu’à 3, 6 % des transferts financiers de l’État aux collectivités territoriales. Vous comprendrez donc la nécessité d’élargir mon propos. À cet égard, je veux parler de la réforme de la taxe d’habitation.

Si l’argument sur l’injustice de cette taxe est exact, pourquoi ne l’évoque-t-on pas au sujet de la taxe sur le foncier bâti ?

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Gatel

Vous le comprendrez, madame la ministre, le Sénat, représentant des territoires, peut difficilement accepter en l’état la disparition de cette ressource majeure, sans aucune information ni précision préalable sur la refonte nécessaire de la fiscalité locale, que le Président de la République a également appelée de ses vœux.

Les élus ont un besoin impérieux de stabilité et de prévisibilité ; ils doivent connaître l’issue du chemin pour définir le meilleur trajet à emprunter. Madame la ministre, ne croyez-vous pas que cette absence de visibilité présente le risque de ralentir la politique d’investissement des collectivités territoriales, si nécessaire à l’économie locale ?

Enfin, vous en conviendrez, la suppression de la taxe d’habitation conforte l’inégalité entre les communes, puisque ce sont les communes les plus pauvres qui seront les plus lésées.

On peut préférer, comme vous le proposez de manière en soi pertinente, la contractualisation financière entre l’État et les collectivités à une baisse universelle et autoritaire des dotations. Reconnaissez toutefois qu’il est difficile à ce stade d’apprécier le mécanisme de contractualisation. Il convient d’en savoir plus sur les conclusions de la mission préparatoire confiée à notre éminent collègue Alain Richard et à Dominique Bur, ainsi que sur les suites qui y seront données.

Pour ma part, je m’interroge sur l’intégration des dépenses obligatoires dans l’objectif de diminution des dépenses de fonctionnement, dans la mesure où, par nature, les dépenses obligatoires échappent à l’initiative des collectivités. Je veux parler de la revalorisation du point d’indice ou du RSA, le revenu de solidarité active.

Enfin, un contrat est un pacte défini et négocié entre deux partenaires. Sera-t-il un pacte forcé avec une règle d’or renforcée si un partenaire refuse de signer ?

Madame la ministre, le groupe centriste salue les éléments positifs de ce projet de budget, ainsi que la fin d’une politique autoritaire de rabot budgétaire et de transferts de charges non compensés. En même temps, comme on le dit beaucoup aujourd’hui – mais là je le dis sciemment, madame la ministre ! –, avec les collectivités territoriales que le Sénat représente, nous aspirons à voir engagée, avant toute suppression de la taxe d’habitation, une vraie réforme des finances locales : une réforme fondée sur l’adéquation des ressources aux charges transférées, le lien entre les compétences et les ressources, celui entre le contribuable local et le financement des services publics et la garantie de la libre administration des collectivités territoriales.

(M. Pierre-Yves Collombat rit.) Nous serons très vigilants sur la mise en œuvre du discours du Président de la République et sur les exigences de nos territoires. Aussi le groupe centriste, dans sa majorité, s’abstiendra-t-il sur les crédits de cette mission.

Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste et sur des travées du groupe Les Républicains. – M. le président de la commission des finances et Mme Mireille Jouve applaudissent également.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Gatel

Vous l’avez compris, madame la ministre, la position de notre groupe est donc à la fois un encouragement et un avertissement. §

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Marie

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, nous examinons ce matin, dans le cadre de la mission « Relations avec les collectivités territoriales », l’affectation d’une enveloppe de 3, 8 milliards d’euros, soit 3, 6 % des 104, 6 milliards d’euros de concours de l’État aux collectivités territoriales. C’est peu, mais c’est un zoom qui permet d’appréhender cette relation en la replaçant dans son contexte.

De 2014 à 2017, les collectivités, appelées à participer à l’indispensable effort de redressement des comptes publics, ont été au rendez-vous. En 2014, 2015 et 2016, leurs dépenses ont diminué de 0, 1 %, 1 % et 0, 8 %, alors que l’objectif d’évolution de la dépense publique locale, l'ODEDEL, prévoyait respectivement des augmentations de 1, 2 %, 0, 5 % et 1, 9 %. Bilan : 21 milliards d’euros d’économies, 12 milliards d’euros de plus que prévu par la précédente loi de programmation des finances publiques.

Ainsi, la réduction du déficit public a été supportée à hauteur de 60 % par les administrations publiques locales, alors que celles-ci ne représentaient que 20 % des dépenses. Cet effort, mené de manière responsable, a atteint ses limites et pèse aujourd’hui sur les dépenses d’investissement, qui ont baissé de 3 % en 2016.

Alors que la croissance repart, que les comptes publics s’améliorent et que le déficit ne devrait plus dépasser 3 %, c’est encore aux collectivités que le Gouvernement demande de faire des efforts. C’est à la fois injuste et inefficace.

Injuste, car elles ont tenu leurs engagements. Bon nombre d’entre elles, pour continuer de maîtriser, voire de baisser leurs dépenses, devront remettre en cause non plus des dépenses superfétatoires, mais des services rendus à la population. La plupart des collectivités territoriales ont atteint l’os, si je puis utiliser cette expression : il n’y a plus rien à gratter.

Inefficace, car, au bout du compte, la variable d’ajustement sera leur capacité d’autofinancement, et donc d’investissement. Cela ne sera pas sans effet sur l’économie, en particulier sur le secteur du BTP, et donc sur l’emploi.

Si l’on peut souscrire à la fixation d’un objectif d’évolution des dépenses des collectivités, une progression en valeur et par an de 1, 2 %, inflation comprise, est intenable.

À ce sujet, le rapporteur général de la commission des finances a démontré que l’évolution tendancielle des dépenses retenue était largement sous-estimée, excluant les efforts déjà réalisés et ne prenant pas en compte la non-indexation sur l’inflation des rémunérations des fonctionnaires territoriaux. Ainsi, l’objectif est d’atteindre non pas 13 milliards d’euros d’économies, mais 21 milliards d’euros, ce qui équivaut, soyons-en assurés, à une baisse nette des dépenses de fonctionnement des collectivités territoriales.

De même, le plafonnement des ratios d’endettement, dit « règle d’or renforcée », pénalisera les investissements. Prenons l’exemple d’un département peu endetté en 2017 qui décide d’investir massivement dans le déploiement de la fibre optique en 2018 et en 2019, en prévoyant d’amortir cet investissement par l’intermédiaire d’une redevance sur trente ans. Ce département verrait son ratio exploser et pourrait être pénalisé, alors même que son investissement est utile et amorti.

Concernant ce que le Gouvernement appelle pudiquement « le mécanisme de correction en cas d’écart entre les objectifs fixés et la réalisation », les élus locaux le vivent comme un dispositif particulièrement déplaisant et infantilisant. Ils sont responsables, et il ne semble pas judicieux de brandir la règle pour leur taper sur les doigts, d’autant que, en l’espèce, le maître, c’est-à-dire l’État, est loin d’être irréprochable.

Madame la ministre, les élus sont inquiets face à votre volonté d’aller trop loin dans l’obligation que vous leur faites de réaliser toujours plus d’économies et de renoncer aux politiques publiques qu’ils ont mises en place au bénéfice de leur population.

Ils sont inquiets, car une part des économies se fera sur le dos des agents de la fonction publique territoriale, qui verront leur point d’indice gelé et le jour de carence rétabli.

Ils sont inquiets parce qu’ils ne partagent pas le pari du Gouvernement sur la baisse des dépenses sociales, en particulier celles qu’engagent les départements pour le RSA, qui pourrait bien être démentie par les chiffres du chômage, toujours à la hausse.

Ils sont inquiets, madame la ministre, de cette suppression progressive de la taxe d’habitation, bienvenue pour les contribuables, mais qui ne résout en aucune façon les inégalités entre ces derniers ni entre les communes. En revanche, elle distend un peu plus le lien civique entre l’impôt et le citoyen.

Le Président de la République nous promet une grande réforme de la fiscalité locale en 2020. Soit. Mais qui peut croire que l’on reviendra sur l’effacement de la contribution des ménages, sous quelque forme que ce soit ? La remise en cause de la taxe d’habitation, certes injuste et inefficace, aurait mérité une véritable réforme de la fiscalité.

J’en viens maintenant aux quelques articles de la mission que nous examinons.

On ne peut que constater, pour le regretter, madame la ministre, que les dotations de décentralisation versées à la suite de transferts ou de maintien de compétences, qui sont gelées depuis 2009, poursuivent leur lente érosion.

Si la pérennisation de la dotation de soutien à l’investissement public local, la DSIL, est une bonne décision, il convient tout de même d’en relativiser la portée, en relevant que l’ensemble des dotations d’investissement subissent une coupe sévère en autorisations d’engagement, due, pour l’essentiel, à la non-reconduction des fonds de soutien aux régions et à la suppression de la réserve parlementaire.

Je regrette, par ailleurs, l’intégration de la dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle du bloc communal – elle baisse de 8 % – aux variables d’ajustement, ce qui va pénaliser les territoires anciennement industrialisés. Cette décision suit l’intégration, en 2017, du fonds départemental de péréquation de la taxe professionnelle aux mêmes variables d’ajustement. Celui-ci baisse de 17 % cette année, ce qui n’est pas acceptable pour les communes défavorisées qui en bénéficient.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Marie

Dans mon département, la Seine-Maritime, où vous vous rendrez samedi prochain, madame la ministre, à l’occasion de l’assemblée générale des maires, ce fonds est une composante essentielle des ressources de bon nombre de communes rurales défavorisées. Cette baisse met en danger leur équilibre budgétaire, car ce dernier peut représenter jusqu’à 20 % de leurs recettes de fonctionnement. Vous ne manquerez pas, j’en suis sûr, d’être interrogée à ce sujet.

La DETR, quant à elle, après avoir progressé en 2015, en 2016 et en 2017, ne poursuit pas le même rythme, tout comme les contrats de ruralité, dotés seulement de 45 millions d’euros, un montant bien inférieur aux besoins.

Au total, les crédits de la DETR, de la DPV et de la DSIL, s’ils progressent de 9 % en crédits de paiement en raison des engagements antérieurs, baissent de 10 % en crédits d’engagement, confirmant le retrait du soutien du Gouvernement aux investissements locaux.

Ainsi, madame la ministre, la défiance l’emporte sur le pacte de confiance. La liberté d’administration des collectivités est progressivement remise en cause au bénéfice d’une recentralisation, illustrée par la distribution, à la main des préfets, des dotations d’investissement à nos collectivités.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Marie

Nous apporterons dans la discussion des propositions d’amélioration, comme la constitution d’une commission unique pour les investissements locaux, la gestion au niveau départemental, en présence de parlementaires, ainsi que l’abaissement du seuil de l’examen de ces projets à 50 000 euros.

Sur le fond, nous ne pouvons souscrire à vos propositions, qui relèvent en définitive d’un affaiblissement des collectivités territoriales et de leurs capacités d’investissement.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et sur des travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dallier

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission des finances, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, tous les maires, et plus généralement tous les élus, attendaient beaucoup du discours de M. le Président de la République devant le centième congrès de l’Association des maires de France. Ces élus ont-ils été rassurés ? Je crains que la réponse ne soit généralement : « Non ! »

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dallier

Pourquoi ? Tout simplement parce qu’ils n’y voient pas beaucoup plus clair aujourd'hui.

Certes, le Président de la République a tenté de déminer le terrain du projet d’exonération de la taxe d’habitation pour 80 % des Français et de l’encadrement de la hausse des dépenses des plus grandes collectivités territoriales, afin de trouver les 13 milliards d’euros d’économies retenus comme objectif par le Gouvernement. Pour autant, les décisions et le détail de ces mesures sont renvoyés à plus tard.

Ainsi, au moment d’examiner les crédits de cette mission, nous devons nous contenter de la promesse de stabilisation de la DGF jusqu’en 2022 et de celle d’un big-bang de la fiscalité locale en 2020, afin de sortir de l’épineuse question de la taxe d’habitation.

Concernant la DGF, après quatre années de baisse très importante qui ont conduit beaucoup de nos collectivités aux limites du supportable, l’engagement du Gouvernement ne rassure pas complètement. Rappelons d’abord que cette promesse ne se traduira pas par une stabilité des dotations de l’État pour toutes les collectivités, puisque, dès 2018, certaines d’entre elles continueront à voir leur dotation baisser. En effet, la progression de la DGF pour les collectivités dont la population augmente, par exemple, ou les bonifications accordées en cas de création de communes nouvelles se font au sein d’une enveloppe fermée.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dallier

Cette progression pour les uns entraînera donc une baisse pour les autres.

Évoquons également la progression des dotations de péréquation – ce sera le cas en 2018 de la DSR, la dotation de solidarité rurale, et de la DSU, la dotation de solidarité urbaine et de cohésion nationale –, qui jouera sur les variables d’ajustement. Ainsi, la dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle, la DCRTP ou les compensations d’exonérations de taxe foncière continueront à baisser pour les communes et les EPCI.

S’agissant de la DCRTP, je rappelle qu’elle est l’archétype des dotations censées, à leur création, compenser une perte de recettes pour nos collectivités et qui, au fil du temps, s’étiolent, rompant la promesse de l’État.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dallier

C’est d’autant plus injuste que cette dotation bénéficiait principalement aux collectivités ayant subi une perte de base d’imposition, et donc de produit, au moment de la réforme de la taxe professionnelle. Il s’agit, en général, de collectivités au passé industriel et aux populations souvent socialement modestes.

Dans la première partie de ce projet de loi de finances, le secrétaire d’État alors au banc, M. Olivier Dussopt, a laissé entendre que le Gouvernement réfléchissait à une modification des règles de calcul de la baisse de cette variable d’ajustement, afin de moins pénaliser ces collectivités. Ainsi, ce calcul pourrait donc bientôt tenir compte d’une forme de péréquation. Cela me semble extrêmement compliqué.

Il y a aussi les changements fréquents des règles de calcul des dotations de péréquation ; c’est le cas cette année pour la DSU, après la décristallisation de l’année dernière. Cette année encore, je constate que beaucoup de nos collègues ont déposé des amendements visant à changer de nouveau les règles de calcul du Fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales, le FPIC, chacun essayant, disons-le très clairement, de tirer la couverture à soi au détriment, forcément, de tous les autres.

Mes chers collègues, nous ne pouvons pas continuer ainsi. Nombre d’élus locaux ne verront pas se concrétiser la promesse de stabilité de la DGF en raison non seulement des décisions du Gouvernement, mais aussi de notre propre responsabilité.

Je rejoins mon collègue Claude Raynal : il aurait été plus sage de décréter un moratoire sur les règles de calcul ainsi que sur les montants de chacune des dotations, dans l’attente d’une véritable réforme de la DGF et de l’ensemble de ces dotations de péréquation. Chacun voit bien que notre système est à bout de souffle ! Le bateau prend l’eau de toutes parts et, en voulant combler une brèche, on finit toujours par en ouvrir une autre.

Madame la ministre, je sais bien que ce chantier est compliqué, mais vous devez l’ouvrir. La commission des finances du Sénat a déjà beaucoup travaillé, même avec l’Assemblée nationale l’an dernier. Que deviendra ce travail ? Telle est la question ! Madame la ministre, nous avons besoin d’une réponse.

L’autre chantier, c’est celui de la fiscalité locale.

Là encore, il est regrettable que ne n’allions pas plus vite dans ce domaine. Nous connaissons la promesse électorale du candidat Emmanuel Macron de supprimer en trois ans la taxe d’habitation pour 80 % des Français. Mais nous savons tous – lui aussi ! – que, pour des raisons constitutionnelles, cela se terminera par la suppression complète de cette taxe. Il l’a d’ailleurs laissé entendre lors du congrès des maires.

Dès lors, par quoi la remplacer ? Par l’attribution de la totalité de la taxe foncière aux communes ? Cela couperait le lien entre une grande partie des habitants – ceux qui ne sont pas propriétaires – et le financement des services publics locaux. Surtout, cette taxe sera-t-elle toujours assise sur des valeurs locatives obsolètes que nous n’aurions pas eu le courage de réviser ? Madame la ministre, cela ne me semble pas possible.

Une autre solution serait de remplacer la taxe d’habitation par un autre impôt, qui préserverait le lien avec les habitants. Pourquoi pas une part d’impôt sur le revenu ? Mais cela présente un inconvénient politique : en 2020, certains contribuables qui auraient été exonérés complètement de la taxe d’habitation pourraient se retrouver éligibles à cette autre taxe. Voilà un autre problème politique. Vous voyez, je suis prévenant à l’égard du Gouvernement ! C’est pourquoi je vous dis, madame la ministre, que vous ne pouvez pas attendre trois ans. Il faut aller vers cette grande réforme fiscale.

Pour terminer, je dirai simplement, comme l’un de nos collègues, que nos communes, nos départements, nos régions, nos intercommunalités ont besoin de visibilité. Or ils n’en ont pas. Il est donc fort à craindre que l’investissement public local ne s’en trouve ralenti. L’économie du pays n’a vraiment pas besoin de cela !

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe Union Centriste.

Debut de section - PermalienPhoto de Édouard Courtial

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, il n’est pas anodin de trouver dans le titre de cette mission dédiée aux collectivités territoriales le terme « relation ».

Une relation, cela suppose deux parties qui, si elles peuvent ne pas toujours s’apprécier, sont tenues en revanche de se respecter et de s’entendre. Cela exclut donc toute velléité de domination de l’une sur l’autre ; en un mot, cela nécessite de la confiance réciproque.

Or force est de constater que, entre l’État et les collectivités, le courant ne passe plus. La défiance règne en maître de chaque côté. J’ai été maire, je sais que ces élus, dans une large majorité, bénévoles, qui ne comptent pas leurs heures, sont chaque jour confrontés à des choix impossibles, enserrés entre le marteau et l’enclume, entre nos concitoyens, qui attendent beaucoup de ceux qu’ils considèrent comme le premier représentant de l’autorité ou la dernière protection, et l’État, qui leur demande toujours plus, en leur accordant toujours moins de moyens.

J’ai été président de conseil départemental, je sais les défis auxquels cette collectivité est confrontée : baisse des dotations ; explosion des dépenses sociales, dont le RSA, qui ne sont pas compensées par l’État, alors qu’il est, paradoxalement, chargé de la lutte contre le chômage ; prise en charge exponentielle des mineurs étrangers isolés, alors que le sujet des flux migratoires relève de l’État seul. Ainsi, les départements assument les défis que l’État veut ignorer.

Pour avoir longtemps été député avant d’être sénateur, je sais l’exercice convenu et l’outil de communication politique que le budget représente pour tout nouveau gouvernement, mais je vous invite ici à en sortir.

Ce premier budget doit être pour vous l’occasion d’envoyer un message fort à tous les élus qui se battent sur le terrain avec les moyens limités dont ils disposent pour pallier, budget après budget, les manquements de l’État, aux abonnés absents lorsqu’il s’agit de mettre la main au portefeuille.

Car, à l’inverse, pour imposer des contraintes, transférer des compétences ou créer de nouvelles charges, l’inventivité de certains comptables à Paris atteint des sommets, bien loin des réalités et de l’implication concrète de ces mesures sur la vie quotidienne de nos compatriotes.

Ce premier budget doit être l’occasion de revenir sur des signaux particulièrement hostiles à l’égard des collectivités. Que dire de la suppression brutale des contrats aidés ? Que dire de la suppression de la réserve parlementaire et de sa transformation en un dispositif recentralisé et inégalitaire ? Que dire de la baisse des aides personnalisées au logement, les APL, dont l’impact est très important pour les collectivités ? Que dire de la baisse de 300 millions d’euros de crédits, concernant notamment la DETR, décidée dès juillet dernier, avant même d’avoir rencontré les élus locaux ?

Une relation, cela ne veut pas dire : décider et imposer. Pourtant, à s’y méprendre, ce premier budget ressemble à cela, pour trois raisons.

Premièrement, les objectifs d’économie assignés aux collectivités locales ne tiennent en aucune manière compte des efforts déjà consentis et réalisés, qui ont permis à la France de respecter ses engagements européens. Vous promettez le bâton aux collectivités qui ne respecteraient pas une augmentation inférieure à 1, 2 % en valeur des dépenses de fonctionnement, sans, pour autant, proposer la moindre carotte.

À titre d’exemple, le conseil départemental de l’Oise, que j’ai eu l’honneur de présider jusqu’en septembre dernier, a réalisé plus de 80 millions d’euros d’économies en deux ans, sur 250 millions d’euros de budget de fonctionnement hors dépenses contraintes, et ce sans augmenter ni les impôts ni la dette et en préservant l’investissement.

Ce n’était pas mon choix, c’était une obligation au regard de la situation financière de la collectivité. Il est tellement plus facile de dire que tout va bien et de cacher les problèmes sous le matelas ! Il s’agit d’un effort sans précédent, qui implique des choix clairs et assumés en termes de réduction de la masse salariale, notamment. Demain, demanderez-vous de nouveaux efforts à cette collectivité ?

Deuxièmement, la stabilité des engagements financiers de l’État ressemble à un trompe-l’œil, car, s’il faut saluer la quasi-stabilité des crédits, notamment le maintien de la DGF au même niveau que l’année précédente, certaines inquiétudes demeurent. Je pense à votre volonté d’inclure dans le périmètre des variables d’ajustement la DCRTP du bloc communal. Ce choix est très contestable, car l’État revient ainsi sur l’engagement pris en 2009 de compenser intégralement les pertes de recettes subies par les collectivités territoriales en raison de la suppression de la taxe professionnelle.

Troisièmement, j’aborderai la réforme de la taxe d’habitation. Si une réforme de la fiscalité locale paraît opportune et souhaitable, pourquoi ne pas prendre le temps de la considérer dans son ensemble ? Pourquoi l’envisager par le petit bout de la lorgnette ? Même en mettant de côté le risque constitutionnel important et les gains économiques contrastés pour les particuliers, le mécanisme proposé conduit à une perte d’autonomie financière pour les communes et menace leur survie. D’un côté, vous leur refusez une recette dynamique et, de l’autre, vous la compenserez à l’image de ce qui a été fait pour la taxe professionnelle. Mais nous savons tous ici ce que signifie « compensation par l’État », madame la ministre !

Pire encore, cette décision distend toujours davantage le lien entre les Français et l’utilisation de leurs impôts, brouille leur lisibilité et alimente le ras-le-bol fiscal.

En réalité, vous demandez à d’autres les efforts que vous refusez de faire pour vous-même. Madame la ministre, ayant été maire d’une métropole, on ne saurait vous taxer d’être ignorante sur cette question.

Debut de section - Permalien
Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur

Ah non, pas d’une métropole !

Debut de section - PermalienPhoto de Édouard Courtial

Certes, mais prenez garde à ne pas confondre pacte de confiance et mise sous tutelle. Les collectivités locales ne sont pas une variable d’ajustement que l’État peut à loisir ponctionner et remodeler.

Une relation exige des partenaires : traitez les collectivités territoriales comme tels !

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe Union Centriste.

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Leroy

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je souhaite attirer votre attention sur la pente dangereuse vers laquelle le Gouvernement tend à nous emmener avec cette réforme inavouée de la fiscalité locale.

La combinaison du projet de loi de finances pour 2018 et du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 promet un avenir plus qu’incertain à la décentralisation des décisions des collectivités locales et à leur autonomie financière, principe de droit constitutionnel.

Les responsables locaux s’inquiètent de la diminution de leur marge de manœuvre en termes d’investissements, déjà mise à mal par une baisse persistante depuis plusieurs années, durant le prochain quinquennat. De 2011 à 2016, l’épargne brute des trois échelons des collectivités locales a diminué considérablement, du fait du désengagement financier de l’État.

Afin de respecter leur mission de service public, les collectivités locales ont dû recourir à l’emprunt de façon irrémédiable, mais responsable, pour continuer à investir. Mais, alors même que des exigences drastiques de maîtrise des dépenses de fonctionnement sont imposées aux collectivités territoriales par les dispositions du projet de loi de finances pour 2018, le projet de loi de programmation des finances publiques achève ce processus d’affaiblissement en les incitant à affecter le montant total des économies si difficilement réalisées à la réduction de l’emprunt.

S’il est parfaitement concevable que les collectivités territoriales et leurs groupements participent au redressement des finances publiques afin que la France respecte ses engagements européens, cela ne doit se faire qu’à juste proportion de leur part de déficit.

Dans ces conditions, comment ne pas s’émouvoir des dispositions de la loi de programmation visant à encadrer davantage le recours à l’emprunt par le principe de la règle d’or renforcée, laquelle, par un mécanisme de raccourcissement du remboursement de l’emprunt, neutralise toute possibilité d’investissement ? L’intégralité des économies exigées des collectivités locales en matière de dépenses de fonctionnement devra être affectée à la réduction de leur emprunt.

Certes, l’objectif de ce dispositif imposé aux collectivités est de réduire leurs besoins de financement, mais il est aussi, et surtout, restrictif de leur libre administration. Si ces deux projets de loi mettent fin à la baisse brutale des concours financiers de l’État, nous nous devons néanmoins de déplorer une augmentation masquée des dotations d’investissement, les autorisations d’engagement étant susceptibles de diminuer si l’on neutralise les effets de périmètre, sans parler de la suppression de la taxe d’habitation pour 80 % des foyers.

Que dire des dotations de soutien à l’investissement public local, attribuées arbitrairement par les préfets, selon les projets locaux, sans aucune concertation avec les élus concernés ? Je rejoins tous mes collègues qui voient dans ces pratiques centralisatrices un manque de transparence et, incidemment, fort peu de considération pour les élus de terrain que nous sommes.

Nous pourrions également évoquer la perte sèche que constitue la suppression de la réserve parlementaire pour bon nombre de petits projets qui ne verront plus le jour.

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Leroy

C’est pourquoi j’apporte un soutien appuyé et sans réserve à notre rapporteur pour avis, Loïc Hervé, qui propose de créer une commission départementale des investissements locaux, dont la compétence porterait tant sur la DSIL que sur la DETR. Cette commission aurait pour avantage d’intégrer tous les échelons locaux, car le rapport pour avis met parfaitement en évidence « une reprise en main par l’État que ni les élus locaux ni le Sénat ne peuvent accepter ». Le Gouvernement consent moins généreusement qu’il n’y paraît à leur accorder des dotations d’investissement.

L’amendement n° II-85 de la commission des lois visant à instituer cette commission départementale d’élus locaux, s’il ne permet pas de tout résoudre, tend à apporter un début de réponse. Il participe de l’impérieuse nécessité de calmer et de soigner l’exaspération, le sentiment d’abandon et de déconsidération que ressentent aujourd’hui bon nombre d’élus de terrain. Nous revendiquons la liberté d’entreprendre et nous avons besoin de perspectives, par le biais des finances locales.

Madame la ministre, vous étiez vous-même une élue il n’y a pas si longtemps !

Debut de section - Permalien
Jacqueline Gourault, ministre

Je le suis toujours !

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Leroy

M. Henri Leroy. Vous devez faire confiance aux élus locaux, qui le méritent, vous le savez bien. Alors, redonnez-leur espoir !

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - Permalien
Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, la mission « Relations avec les collectivités territoriales » porte sur 3, 8 milliards d’euros.

Bien entendu, la discussion a été beaucoup plus large ; elle a concerné l’ensemble de la politique financière du Gouvernement et les réformes en cours.

Pour répondre d’abord aux interrogations relatives à la mission « Relations avec les collectivités territoriales », j’ai noté consciencieusement les baisses que vous avez, les uns et les autres, annoncées : 8 %, 12 %, 5 %, 13 % et, enfin, 10 % ! Ces pourcentages sont très variables selon les modes de calcul retenus, si bien que je me contenterai de vous dire ceci : depuis 2014, les dotations d’investissement sont passées de 716 millions d’euros à 1, 716 milliard d’euros. Il s’agit de chiffres bruts, qui vous montrent l’évolution. Nous atteignons même 1, 8 milliard d’euros cette année.

On peut avancer différents pourcentages, mais cela représente tout de même une augmentation assez significative depuis 2014. Il n’y a donc pas de baisse de ces dotations.

Dans les crédits de la mission, figurent également les dotations liées à des transferts de compétences, qui sont dues et dont le montant est figé à environ 2 milliards d’euros. Voilà pour les chiffres bruts de la mission.

Je vous remercie tous d’être intervenus, avec plus ou moins de confiance – ou plus ou moins de défiance – envers la politique du Gouvernement. Je ne répondrai pas à toutes les interrogations, car nous aurons l’occasion d’y revenir lors de la discussion des amendements. Toutefois, permettez-moi de mentionner quelques points, souvent évoqués.

S’agissant de la taxe d’habitation, je sais que le Sénat a pris une position, mais je rappelle simplement que la suppression de cette taxe était un engagement de campagne du Président de la République.

Debut de section - Permalien
Jacqueline Gourault, ministre

Il le met donc en œuvre. Ce n’est finalement pas si mal de faire ce que l’on dit. Cela n’a pas toujours été le cas !

Debut de section - Permalien
Jacqueline Gourault, ministre

Il est vrai que les valeurs locatives cadastrales n’ont pas été réévaluées, mais on ne peut pas en porter rigueur au Gouvernement, qui n’est en place que depuis six mois.

Un certain nombre d’entre vous l’ont rappelé, depuis des années et des années – j’ai été maire pendant vingt-cinq ans, je suis encore conseillère municipale et conseillère communautaire, comme la loi le permet –, plusieurs tentatives de réforme ont eu lieu, nous le savons tous, mais elles n’ont pas abouti. Il faut avoir l’honnêteté d’en partager la responsabilité, tant les gouvernements successifs que les parlementaires et les élus locaux. Ces derniers, en voyant les évaluations de l’évolution des valeurs cadastrales et les répercussions sur la taxe d’habitation, demandaient qu’il soit mis fin à la réforme. C’est la réalité ! Il faut toujours dire les choses telles qu’elles sont.

Par ailleurs, je rappelle que la volonté du Président de la République est de redonner du pouvoir d’achat.

J’ai bien entendu tous vos propos, mais il s’agit d’un dégrèvement sur trois années, avec, donc, une réelle garantie de ressources durant cette période. La dynamique de la taxe d’habitation est évidemment respectée, puisque les services fiscaux fournissent chaque année des bases qui évoluent avec le nombre de constructions nouvelles. Par ailleurs, la liberté de taux est respectée.

Chacun le sait, il ne peut y avoir d’inquiétude sur le produit attendu voté dans les communes, et cette réforme peut s’appliquer dès l’année prochaine.

Naturellement, cette évolution doit évidemment se situer dans une perspective de réforme de la fiscalité locale, que vous avez tous évoquée. À cet égard, je remercie tous ceux qui l’ont proposée et qui y réfléchissent déjà.

La réforme de la fiscalité locale est l’une des missions confiées au préfet Dominique Bur et à Alain Richard, et, comme ce dernier l’a relevé lui-même, toute idée susceptible de faire vivre le débat est la bienvenue.

Charles Guené et Claude Raynal l’ont souligné précédemment, plusieurs rapports très intéressants sur cette question ont établi des comparaisons avec d’autres pays, comme l’Italie ou l’Autriche. Toutes ces contributions doivent venir enrichir le débat dans le cadre de la Conférence nationale des territoires. Bien sûr, tout le monde doit participer à cette réflexion.

En outre, comme l’ont relevé Alain Richard et M. le rapporteur pour avis de la commission des lois, on ne peut pas concevoir cette réforme de la fiscalité locale sans se pencher sur la définition de l’autonomie fiscale des collectivités territoriales. Il s’agit là d’un enjeu très important.

Debut de section - Permalien
Jacqueline Gourault, ministre

À ce titre, je rappelle que, parmi les mesures réclamées par les régions, figurait l’obtention d’une part d’un impôt national, à savoir la TVA. À ma connaissance, aucune région n’a dit avoir perdu son autonomie fiscale ; je crois même que ces dernières sont heureuses de recevoir une part de la TVA, …

Debut de section - Permalien
Jacqueline Gourault, ministre

… qui est un impôt dynamique. Cette ressource permettra aux régions d’exercer les nouvelles compétences qui leur ont été attribuées.

Mesdames, messieurs les sénateurs, il s’agit là d’un vrai débat. Cela ne sert à rien de se jeter des arguments à la figure. Il faut réfléchir à la question de savoir s’il faut faire la même chose à chaque niveau de collectivités locales. Faut-il conserver un impôt avec un lien local, avec un taux spécifique ? La question est posée. Nous devons essayer de construire un nouveau système, un nouvel écosystème, comme l’a dit Charles Guené, qui doit tenir compte de l’évolution de nos collectivités locales, de l’environnement ambiant et des contraintes européennes.

Alain Richard l’a rappelé de manière très concrète et pédagogique, nous avons une monnaie commune, et, pour cette raison, nous devons être coresponsables, qu’il s’agisse de l’État, de la sécurité sociale ou des collectivités territoriales, en lien avec les autres pays concernés, en vue de respecter les engagements qui sont les nôtres quant au fait d’avoir un déficit public inférieur à 3 % du PIB.

Je le répète, il s’agit là de chantiers très importants et, dans ce cadre, toute participation est la bienvenue.

Au cours de la discussion générale, un troisième sujet a été évoqué à plusieurs reprises : au fond, l’État ne ferait pas confiance aux élus locaux. C’est là un leitmotiv que l’on a entendu tout l’été.

Le Président de la République a lui-même reconnu que certaines décisions prises l’été dernier s’étaient peut-être révélées un peu maladroites, malheureuses ou avaient été mal expliquées : peut-être n’a-t-on pas présenté ces mesures de manière assez pédagogique. Soit !

Debut de section - Permalien
Jacqueline Gourault, ministre

Toutefois, à vous entendre, je pose, en tant qu’élue locale, comme chacun l’a rappelé, la question suivante : au cours des dernières années, en réduisant arbitrairement la DGF, a-t-on donné une marque de confiance aux collectivités ? Les conséquences de ce prélèvement, vous l’avez dit, étaient, au fond, très dures, très rudes, sans discernement. C’était une mesure très importante.

Désormais, la DGF ne fait plus l’objet de prélèvements ; le montant des dotations d’investissement est globalement maintenu ; et l’État va contractualiser avec les 319 plus grandes collectivités, lesquelles représentent à peu près 60 % de la dépense publique locale en France. Concernant les autres collectivités, on leur fait confiance, précisément, pour limiter à 1, 2 % la progression de leurs dépenses.

Pour répondre à plusieurs orateurs, j’indique, de surcroît, que ces contrats seront individualisés. Ainsi, je veux dire à l’ancien président du conseil départemental de l’Oise que les efforts réalisés par sa collectivité au cours des dernières années seront pris en compte ; c’est évident. De même, le critère démographique entrera en considération.

Alain Richard et Dominique Bur ont déjà remis leur rapport, qui sera rendu public lors de la Conférence nationale des territoires du 14 décembre prochain.

Debut de section - Permalien
Jacqueline Gourault, ministre

Fort bien ! Ce document fournira davantage de détails sur les contrats à venir et sur la manière dont on établira le bilan. On construit en même temps, si je puis dire, cette contractualisation : c’est là une preuve de souplesse que manifeste le Gouvernement et du dialogue qu’il mène avec l’ensemble des élus ; je tiens à le dire de cette manière.

À mon sens, on ne peut donc pas parler de défiance envers les collectivités territoriales, d’autant que la période précédente me semble avoir été beaucoup plus rude.

Bien sûr, ce travail n’est pas facile ; d’ailleurs, il ne l’est jamais, pour quelque gouvernement que ce soit ; si une autre majorité avait été au pouvoir, le chantier aurait, me semble-t-il, été tout aussi difficile. Il faut cesser de penser qu’il existerait des solutions évidentes. Au contraire, il faut essayer de construire, ensemble, pour apporter des réponses à la situation de notre pays.

Je répondrai à un certain nombre d’autres points lors de l’examen des amendements. Mais permettez-moi de dire à Philippe Dallier, que je remercie pour son intervention très claire et très précise, que nous n’attendrons pas trois ans pour faire la réforme de la fiscalité locale.

Debut de section - Permalien
Jacqueline Gourault, ministre

Il faut profiter de la période qui s’annonce pour mener à bien ce changement.

Enfin, s’il a beaucoup été question des communes et des intercommunalités, les départements n’ont été évoqués qu’à la fin du débat.

Personnellement, je suis très sensible à la situation difficile que connaissent actuellement les conseils départementaux. Le troisième chantier confié à la mission Richard-Bur est justement celui des allocations individuelles de solidarité.

Nous le savons, les départements font face à des situations difficiles. Aussi, une enveloppe de 100 millions d’euros supplémentaires a été accordée dans le cadre du projet de loi de finances rectificative. Bien évidemment, ce n’est jamais évident, mais ces crédits permettront de donner une bouffée d’oxygène aux vingt-cinq départements les plus durement touchés.

Nous restons très attentifs à cette situation. À mon sens, dans le cadre de la réforme de la fiscalité locale, il faudra également trouver de nouvelles ressources pour les départements.

Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales », figurant à l’état B.

En euros

Mission

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Relations avec les collectivités territoriales

Concours financiers aux collectivités territoriales et à leurs groupements

Concours spécifiques et administration

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

L'amendement n° II-80 rectifié, présenté par Mme S. Robert, M. Assouline, Mmes Blondin, Ghali et Lepage, MM. Roux et Magner, Mme Monier et M. Manable, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

en euros

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Concours financiers aux collectivités territoriales et à leurs groupements

Concours spécifiques et administration

TOTAL

SOLDE

La parole est à Mme Sylvie Robert.

Debut de section - PermalienPhoto de Sylvie Robert

Mes chers collègues, vous l’avez entendu, le Président de la République a fait de l’extension des horaires d’ouverture des bibliothèques l’une de ses priorités en matière culturelle.

On le sait, les bibliothèques forment un maillage très important sur notre territoire. Aujourd’hui, elles sont même le premier équipement culturel public de notre pays.

Pour traduire l’ambition du Président de la République, Mme la ministre de la culture a même chargé Érik Orsenna de jouer le rôle d’ambassadeur auprès des collectivités territoriales : il accomplit en ce moment un tour de France en vue d’encourager les maires et les présidents de conseil départemental, compétents notamment au titre des dépenses de bâtiments et travaux publics, à étendre les horaires d’ouverture des bibliothèques. C’est une très bonne chose.

Reste la question du financement. Nous le savons en tant qu’élus locaux, depuis plusieurs années, pour favoriser l’investissement en faveur des bibliothèques, nous bénéficions d’une aide de l’État au titre de la dotation générale de décentralisation, la DGD. Il s’agit là d’un concours particulier relevant du ministère de l’intérieur.

Depuis peu de temps, cette dotation peut être fractionnée pour dégager des crédits de fonctionnement : on le sait, l’extension des horaires d’ouverture des bibliothèques engendre un surcroît de masse salariale, donc de nouveaux frais de fonctionnement.

Aussi, afin d’élargir les horaires d’ouverture des bibliothèques, je propose d’augmenter la DGD – cela n’a pas été fait depuis plusieurs années ; elle a même sensiblement diminué ces derniers temps – de 5 millions d’euros, non seulement pour traduire l’ambition du Président de la République, mais également pour aider et encourager les maires à élargir les horaires d’ouverture des bibliothèques sans pénaliser l’investissement, qui reste l’intervention publique la plus significative.

Voilà pourquoi je vous invite à porter le concours particulier de la DGD de 80 à 85 millions d’euros.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

Madame Robert, vous proposez d’augmenter de 5 millions d’euros les crédits en faveur des bibliothèques municipales et départementales.

Vous l’avez indiqué, l’article 168 de la loi de finances pour 2016 a permis de financer l’extension ou l’évolution des horaires d’ouverture des bibliothèques municipales et départementales de prêt via un concours particulier. Le montant de ce fonds à hauteur de 80, 4 millions d’euros est stable en 2018.

La majoration de crédits prévue au travers de cet amendement nous semble prématurée : la réflexion lancée par Mme la ministre de la culture sur ce sujet n’a pas encore abouti.

De plus, le coût d’une éventuelle extension des horaires d’ouverture des bibliothèques n’est pas chiffré.

Par ailleurs, vous proposez de gager cette augmentation par une diminution des crédits consacrés aux aides exceptionnelles aux collectivités territoriales, ce qui nous gêne un peu.

Enfin, l’extension des horaires d’ouverture reste une possibilité : elle ne revêt aucun caractère obligatoire et relève de la seule décision des collectivités territoriales concernées.

Voilà pourquoi la commission est défavorable à cet amendement.

Debut de section - Permalien
Jacqueline Gourault, ministre

Madame la sénatrice, je sais que vous êtes l’auteur d’un rapport sur l’adaptation et l’extension des horaires d’ouverture des bibliothèques publiques. En outre, vous l’avez rappelé, M. Érik Orsenna est chargé d’une mission sur ce sujet.

Nous avons eu connaissance d’un arbitrage du Président de la République tendant à augmenter de 8 millions d’euros le concours de la DGD relatif aux bibliothèques. Ces crédits permettront d’accompagner les communes pour mettre en œuvre l’extension des horaires d’ouverture. Le montant de ce concours particulier sera donc porté de 80 à 88 millions d’euros.

Toutefois, comme M. le rapporteur spécial vient de le rappeler, cette augmentation ne peut pas être financée avec les crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » : vous avez suffisamment entendu vos collègues pour en être vous-même convaincue. Cette augmentation sera financée par le budget général.

Aussi, je vous remercie de bien vouloir retirer votre amendement.

M. Julien Bargeton applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Sylvie Robert

Mme Sylvie Robert. Madame la ministre, je n’en attendais pas tant !

Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Sylvie Robert

Cet arbitrage favorable est une bonne nouvelle, qui satisfera les maires et les présidents des conseils départementaux pour ce qui concerne les horaires d’ouverture de leurs bibliothèques. Bien évidemment, je vais retirer mon amendement.

Certes, j’avais gagé cet amendement en vertu des règles qui s’imposent à nous, mais je l’ai fait au bénéfice des collectivités territoriales. Je me réjouis d’apprendre la décision prise par le Président de la République. Désormais, ce chantier est bien engagé.

Debut de section - PermalienPhoto de Sylvie Robert

Mme Sylvie Robert. En conséquence, je retire mon amendement.

Applaudissements sur des travées du groupe socialiste et républicain et du groupe La République En Marche.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

L’amendement n° II-80 rectifié est retiré.

L'amendement n° II-99 rectifié, présenté par Mmes Gatel et Vullien, M. Longeot, Mme Doineau, MM. Maurey, Louault et Delcros, Mme Férat, MM. Médevielle, Cigolotti, L. Hervé, Vanlerenberghe, Marseille et les membres du groupe Union Centriste, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

en euros

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Concours financiers aux collectivités territoriales et à leurs groupements

Concours spécifiques et administration

TOTAL

SOLDE

La parole est à Mme Françoise Gatel.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Gatel

Au cours de l’été dernier, en examinant le projet de loi pour la confiance dans la vie politique, nous avons beaucoup débattu de la réserve parlementaire, avant que l’Assemblée nationale ne supprime ce dispositif au nom de la transparence et du non-clientélisme.

À cette occasion, nous avons, ici, au Sénat, évoqué l’incongruité du maintien de la réserve ministérielle, laquelle donne lieu à une distribution pour le moins extrêmement discrète. Sa suppression a été adoptée. Toutefois, cette disposition a été déclarée inconstitutionnelle au nom de la séparation des pouvoirs.

Aujourd’hui, nous souhaitons offrir au Gouvernement l’occasion de pratiquer la vertu qu’il nous recommande et de concrétiser son attachement aux collectivités territoriales : le présent amendement vise à affecter les fonds de la réserve ministérielle du ministère de l’intérieur aux crédits en faveur de nos collectivités.

Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Raynal

Ma chère collègue, vous l’avez rappelé, la loi pour la confiance dans la vie politique a supprimé la réserve ministérielle, mais le Conseil constitutionnel a estimé que cette mesure était contraire à la Constitution.

Juridiquement, la réserve ministérielle existe toujours. Toutefois, elle n’a pas été abondée dans le présent projet de loi de finances : un reliquat des décisions passées demeure, mais il n’y a pas de crédits nouveaux.

En conséquence, cet amendement est satisfait. Aussi, je vous demande de bien vouloir le retirer ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Jacqueline Gourault, ministre

Madame la sénatrice, chère Françoise Gatel, je précise que c’est l’interdiction de la réserve ministérielle, et non son existence même, qui a été jugée inconstitutionnelle ; je tiens à le préciser.

Néanmoins, les crédits de la réserve ministérielle sont déjà supprimés : seuls figurent, au titre du présent projet de loi de finances, les crédits de paiement nécessaires aux subventions déjà accordées au cours des années passées, pour les opérations dont l’exécution se poursuit en 2018. Il en est d’ailleurs de même pour la réserve parlementaire. Aucune autorisation d’engagement n’est inscrite.

En conséquence, il n’est plus possible d’attribuer de nouvelles subventions, au titre de la réserve ministérielle comme de la réserve parlementaire. C’est une décision du Gouvernement.

M. Arnaud de Belenet applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Gatel

Madame la ministre, chers collègues rapporteurs, je vous remercie de vos explications. Je suis heureuse d’avoir déposé cet amendement, car il a le mérite de clarifier la situation. En effet, nous n’avions pas forcément eu connaissance des derniers épisodes de cette longue série pour la mise en place d’un esprit vertueux…

Madame la ministre, je vous félicite de cet esprit vertueux, qui est devenu très contagieux ! §Compte tenu de ces explications, je suis heureuse de vous faire plaisir en retirant mon amendement : nous devons tous être heureux, me semble-t-il, de la situation.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Richard

M. Alain Richard. Ce n’est plus une assemblée parlementaire, c’est une sacristie !

Nouveaux sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

L’amendement n° II-99 rectifié est retiré.

Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales », figurant à l’état B.

Mes chers collègues, je ne peux accorder d’explications de vote, les temps de parole ayant été épuisés au cours de la discussion. En revanche, la commission peut intervenir, ainsi que le Gouvernement.

La parole est à M. le rapporteur spécial.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

Mes chers collègues, avant que nous ne procédions au vote des crédits de la mission, je tiens à rappeler les raisons qui ont conduit la commission des finances à vous proposer de les adopter.

Cette session budgétaire a été l’occasion d’examiner plusieurs dispositions qui suscitent des inquiétudes quant aux finances des collectivités territoriales. Je pense à la trajectoire des dépenses ; à la contractualisation ; au mécanisme de correction ; à la nouvelle règle d’or ; à la suppression progressive de la taxe d’habitation ; à la minoration de la DCRTP et des fonds départementaux de péréquation de la taxe professionnelle, les FDPTP ; ou encore à la suppression d’une part des crédits de la dotation d’action parlementaire destinés aux collectivités locales, etc.

Sur l’ensemble de ces points, le Sénat a corrigé le texte du Gouvernement. La trajectoire des dépenses a été modifiée dans un sens plus réaliste et plus favorable aux collectivités. Le mécanisme de contractualisation et de correction a été encadré et complété par un bonus. La nouvelle règle d’or a été supprimée. La réforme de la taxe d’habitation a été reportée en attendant qu’aboutisse une réflexion plus large sur l’avenir de la fiscalité locale. La minoration de la DCRTP du bloc communal et des FDPTP a également été supprimée. Enfin, nous avons rétabli les crédits manquants de la dotation d’action parlementaire.

C’est pourquoi la commission des finances vous invite à adopter les crédits de la mission, qui comprennent essentiellement des compensations de transferts de compétences et des dotations d’investissement.

L’examen des amendements déposés au titre des articles 59 et 59 bis serait d’ailleurs quelque peu surréaliste si la dotation de soutien à l’investissement public local, la DSIL, et la dotation d’équipement des territoires ruraux, la DETR, n’existaient plus…

C es crédits sont adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à douze heures vingt-cinq, est reprise à quatorze heures, sous la présidence de M. Thani Mohamed Soilihi.