Séance en hémicycle du 7 février 2019 à 10h30

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • actionnaires
  • dividendes

La séance

Source

La séance est ouverte à dix heures trente-cinq.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

L’ordre du jour appelle le dépôt du rapport public annuel de la Cour des comptes.

Huissiers, veuillez faire entrer M. le Premier président et Mme la rapporteure générale de la Cour des comptes.

M. le Premier président et Mme la rapporteure générale de la Cour des comptes sont introduits dans l ’ hémicycle selon le cérémonial d ’ usage.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Monsieur le Premier président, madame la rapporteure générale, à qui je souhaite le meilleur dans l’exercice de ses nouvelles fonctions, c’est avec un grand plaisir que nous vous accueillons ce matin au Sénat à l’occasion du dépôt du rapport public annuel de la Cour des comptes. Je vous remercie de votre présence dans notre hémicycle pour nous en présenter les conclusions.

Cette séance ne constitue pas seulement une tradition bien établie. Elle traduit le lien étroit entre les missions dévolues à la Cour des comptes et celles du Parlement. C’est d’ailleurs un thème qui pourrait revenir en débat au cours de l’année dans le cadre d’une éventuelle révision constitutionnelle qui se poursuivrait. Il figure en effet parmi les sujets examinés par notre groupe de travail – M. le Premier président le sait bien, puisque nous avons eu des échanges à ce propos l’année dernière. Ce lien entre la Cour des comptes et le Parlement a reçu en 2008 une consécration explicite dans notre Constitution.

Au cours de l’année passée, monsieur le Premier président, vous vous êtes personnellement rendu à plusieurs reprises devant nos commissions des finances et des affaires sociales pour présenter les travaux de la Cour, qui jalonnent la préparation et l’exécution des lois financières. Vous avez également remis à ces deux commissions plusieurs enquêtes qu’elles avaient demandées au titre de leurs prérogatives en matière de contrôle budgétaire.

Tel a été le cas sur les douze derniers mois, pour la commission des finances, sur des sujets aussi variés que les politiques publiques de soutien à l’amélioration de l’habitat ou aux énergies renouvelables, le recours aux contractuels dans l’éducation nationale, les équipements de la police et de la gendarmerie, les conditions de versement des aides agricoles ou, tout récemment, la prise en charge des victimes du terrorisme.

Pour la commission des affaires sociales, la Cour a réalisé une enquête approfondie sur un sujet très aigu : le rôle des centres hospitaliers universitaires dans notre système de santé. Le second volet de cette enquête, centré sur l’organisation territoriale des soins hospitaliers, a été remis voilà quelques semaines.

À l’heure où l’on débat beaucoup dans ce pays, je n’ai pas à rappeler que la santé est l’un des sujets les plus largement traités, bien plus que d’autres, qui sont actuellement évoqués au quotidien, de manière variée et variable suivant le jour de la semaine… Je m’en suis encore rendu compte hier matin, à l’occasion d’un échange avec des élus de Vendée, la santé est une question centrale !

De manière plus générale, la Cour est régulièrement sollicitée par les commissions et délégations de notre assemblée, et je crois pouvoir dire – ce n’est pas simplement un propos de courtoisie – que ses travaux constituent un apport précieux dans l’exercice de notre fonction de contrôle comme de notre fonction législative.

Par l’attention qu’il porte au suivi des recommandations des années antérieures et l’écho qu’il reçoit dans l’opinion, le rapport public annuel occupe, à nos yeux, une place éminente. Il intervient cette année dans un contexte encore incertain pour les finances publiques, comme nous avons pu le constater dans les derniers jours de la discussion budgétaire – nous l’évoquions ensemble avant cette séance solennelle. Cela renforce d’autant l’attention que nous devons porter aux observations de la Cour en matière de gestion des administrations et organismes publics.

Monsieur le Premier président, nous allons à présent vous écouter présenter le rapport annuel de la Cour des comptes, puis nous entendrons le président de la commission des finances et le président de la commission des affaires sociales. Je vous laisse donc rejoindre la tribune pour me remettre la lecture de mon week-end.

Sourires et applaudissements.

M. le Premier président remet à M. le président du Sénat un exemplaire du rapport public annuel de la Cour des comptes.

Debut de section - Permalien
Didier Migaud

Monsieur le président du Sénat, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le président de la commission des affaires sociales, monsieur le rapporteur général de la commission des finances, mesdames, messieurs les sénateurs, la parution de notre rapport public annuel est devenue, pour les juridictions financières, un rendez-vous phare avec les Français. En complément des travaux publiés tout au long de l’année, elle nous conduit à réaliser à leur intention un exercice d’explication et de pédagogie sur une grande variété de sujets, conformément à la mission d’information que nous a confiée le constituant, en leur fournissant des éléments objectifs, étayés, contredits, vérifiés et s’appuyant sur des comparaisons internationales toujours utiles, même si elles ne sont pas systématiquement reproductibles.

La publication de ce rapport annuel est aussi un temps fort, vous l’avez rappelé, monsieur le président, dans les relations déjà très denses que nous entretenons avec la représentation nationale. En plus de celui-ci, le Parlement est en effet destinataire d’un grand nombre de nos travaux tout au long de l’année.

Certains viennent spécifiquement alimenter la procédure d’examen des textes financiers, en application des dispositions de la loi organique relative aux lois de finances et de la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale. Ils font ainsi pleinement vivre la mission d’assistance confiée par l’article 47-2 de la Constitution à la Cour des comptes, au bénéfice, notamment, du Parlement dans son activité de contrôle du Gouvernement.

L’Assemblée nationale et le Sénat ont aussi la possibilité d’adresser à la Cour des demandes d’enquêtes ou d’évaluations sur des sujets spécifiques. Vous usez chaque année de cette faculté, complétant ainsi, de façon concertée, la programmation de leurs travaux que les juridictions financières établissent en toute indépendance.

Les rapports réalisés dans ce cadre portent sur des politiques publiques stratégiques, à forts enjeux. En 2018, la commission des finances de votre assemblée a reçu, par exemple, communication d’enquêtes portant sur le soutien aux énergies renouvelables, l’indemnisation des victimes du terrorisme ou les matériels d’équipement dans la police et la gendarmerie.

En tout, ce sont ainsi douze enquêtes qui ont été réalisées à la demande des assemblées parlementaires. Elles s’ajoutent aux très nombreux travaux effectués par les juridictions financières qui vous sont transmis chaque année : rapports publics thématiques, notes d’exécution budgétaire, actes de certification, référés, rapport sur les finances locales… Le total, pour 2018, s’élève à 190 travaux qui vous ont été adressés. Le troisième tome de notre rapport public annuel vous en donnera un détail plus complet. J’ajoute que, au cours de cette même année, la Cour a été auditionnée à 80 reprises par le Parlement.

Je me réjouis évidemment de ces chiffres. Surtout, je souhaite que la quantité très importante d’informations qui vous est transmise de notre part soit aussi utile que possible à l’exercice de votre mandat.

J’en viens à présent aux trois principaux messages que notre rapport public annuel formule.

Le premier porte sur la situation de nos comptes publics.

La Cour constate, d’une part, la fragilité du redressement opéré ces dernières années ; elle relève, d’autre part, les incertitudes qui pèsent sur la trajectoire des finances publiques pour les mois à venir.

Dans un cadre budgétaire contraint par l’état de nos comptes, notre pays doit amplifier et systématiser la modernisation de ses services publics pour les rendre plus efficaces et plus efficients. En la matière, des possibilités existent ; elles sont même nombreuses. C’est le deuxième message de ce rapport. Il n’est en rien nouveau – je l’ai d’ailleurs formulé devant vous à de nombreuses reprises –, mais il est, je crois, essentiel de le réitérer dans le contexte que connaît notre pays et qui pousse, parfois, à la résignation.

Pour redonner du souffle à nos comptes et pour alléger le poids de notre dette, notre rapport identifie, comme l’ont fait ses précédentes éditions, des marges d’économies et de ressources nouvelles. Certaines de ces marges sont déjà connues ; elles rejoignent d’ailleurs parfois des propositions que vous formulez dans vos travaux d’évaluation et de contrôle. Mais les actions tardent souvent à venir ou à porter pleinement leurs fruits. Aussi notre rapport esquisse-t-il, au travers d’exemples de transformations réussies comme, à l’inverse, de situations d’immobilisme, quelques conditions à remplir pour se saisir des opportunités de modernisation de l’action publique s’offrant aux décideurs. Ce sera mon dernier message.

Je dirai quelques mots, à présent, sur chacun de ces messages.

Chaque année, la parution du rapport public annuel est l’occasion de porter une appréciation sur l’état de nos finances publiques.

S’agissant de 2018, la Cour constate d’abord que le redressement de nos comptes publics semble marquer le pas. Après huit années ininterrompues de baisse, le déficit public s’établirait à un niveau proche de celui de 2017, soit à 2, 7 points de produit intérieur brut, selon la dernière prévision fournie par le Gouvernement. Cette prévision semble réaliste, voire prudente, compte tenu des données actuellement disponibles. Elle ne pourra toutefois être confirmée que par les résultats complets de l’exécution budgétaire pour l’année 2018, qui, comme vous le savez, ne seront disponibles qu’à la fin du mois de mars.

Nous aurons l’occasion d’approfondir ces premières analyses lors de la remise des rapports sur l’exécution du budget de l’État et sur la situation et les perspectives des finances publiques. Nous le ferons cette année en expérimentant un calendrier renouvelé, qui vous permettra de disposer avant l’été de l’ensemble des analyses des juridictions financières sur l’exécution budgétaire portant sur l’année passée, comptes sociaux et locaux désormais inclus.

Toujours pour l’exercice 2018, le diagnostic de la Cour est le même si l’on raisonne indépendamment de la conjoncture économique, c’est-à-dire en analysant le solde structurel de nos comptes. Le déficit structurel pour 2018 devrait se maintenir au niveau atteint en 2017, soit autour de 2, 3 points de PIB, selon le Gouvernement. Mécaniquement, cette situation devrait accroître notre dette publique, dont le montant approcherait 98, 7 % du PIB.

Derrière les chiffres, ce que je veux souligner devant vous, c’est le décalage qui continue de se creuser entre la France et la majorité de ses partenaires européens. La plupart d’entre eux font en effet beaucoup mieux. En moyenne, la dette publique des pays de la zone euro pour 2018 est ainsi inférieure, de plus de 10 points de PIB, à celle de la France. La dette publique allemande, pour sa part, n’a cessé de se réduire depuis 2012 et approche désormais le seuil de 60 % du produit intérieur brut. Ce pays va ainsi quasiment revenir au niveau de dette qui était le sien – et qui était aussi le nôtre ! – en 2007.

Debut de section - Permalien
Didier Migaud

Dans ce premier chapitre, la Cour formule également une appréciation sur l’évolution des finances publiques nationales pour 2019. Cette dernière apparaît, à bien des égards, très incertaine.

Permettez-moi un bref rappel des circonstances que vous connaissez.

La trajectoire inscrite en septembre 2018 dans le projet de loi de finances qui vous a été présenté a été substantiellement modifiée par les mesures d’urgence annoncées en décembre, en réponse au mouvement des « gilets jaunes ».

Le projet de loi de finances initiale pour 2019 anticipait une dégradation du déficit public, le fixant à 2, 8 points de PIB. Vous le savez, cette dégradation aurait été temporaire et exceptionnelle, résultant en grande partie de la transformation du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, le CICE, en baisses de cotisations sociales, ce qui représente de l’ordre de 0, 9 point de PIB.

Après le dépôt du projet de loi de finances, des dispositions fiscales et sociales nouvelles de soutien au pouvoir d’achat ont été annoncées. Constituées principalement de baisses de prélèvements, elles représentent un montant proche de 11 milliards d’euros. Le Gouvernement a alors annoncé des mesures de compensation, qui contiendraient, selon lui, la hausse du déficit à 3, 2 points de PIB. Dans ce scénario, la dette publique française augmenterait toutefois, contrairement à ce que prévoit la loi de programmation des finances publiques que vous avez adoptée en décembre 2017.

Voilà pour les faits.

La Cour constate que la prévision de déficit public du Gouvernement, ainsi contenue à 3, 2 points de PIB, est soumise à plusieurs incertitudes. J’en citerai trois.

La première tient au fait que le scénario macroéconomique défini en septembre 2018 en loi de finances initiale présente désormais un risque sérieux de ne pas se réaliser. Il table sur une prévision de croissance à 1, 7 % pour 2019. Or, depuis le moment où cette prévision a été élaborée, l’environnement macroéconomique s’est dégradé en Europe et dans le monde. Les dernières prévisions de l’INSEE en témoignent ; elles anticipent en effet pour 2018 une croissance de 1, 5 %, moins élevée que la prévision initiale de 1, 7 %.

Deuxième incertitude : si une partie des mesures de soutien au pouvoir d’achat annoncées en fin d’année a été votée en loi de finances, la prévision de déficit du Gouvernement n’intègre pas l’impact des dispositions figurant dans la loi portant mesures d’urgence économiques et sociales, estimé à 3, 7 milliards d’euros. Le Gouvernement s’est engagé à le compenser en intégralité ultérieurement ; cela reste à documenter et à concrétiser.

Enfin, pour que la hausse du déficit ne dépasse pas la cible de 3, 2 points de PIB, les objectifs de dépense des administrations publiques votés dans les lois de finances pour 2019 devront être parfaitement tenus, dans un contexte de ralentissement économique.

Que retenir au-delà de ces chiffres ? Les efforts de redressement engagés par la France ces dernières années semblent s’essouffler. S’agissant de la situation de ses comptes publics, l’écart se creuse entre notre pays et ses partenaires européens, ce qui peut mettre en jeu sa crédibilité au sein de l’Union européenne. Avec des niveaux d’endettement élevés, nous nous exposons aussi aux conséquences d’une remontée des taux d’intérêt, que nous savons inéluctable, même si elle sera vraisemblablement progressive. Surtout, la Cour constate que, faute d’avoir complètement rétabli la situation de nos finances publiques par le passé, les pouvoirs publics disposent aujourd’hui de moins de marges de manœuvre pour soutenir l’activité du pays et protéger nos concitoyens les plus fragiles.

À court terme, la Cour estime donc indispensable que le Gouvernement vous présente, dès que possible, des projets de lois financières rectificatives pour l’État et la sécurité sociale. Ces textes devraient intégrer, de manière sincère et exhaustive, l’ensemble des mesures annoncées par l’exécutif en décembre et les conséquences de l’évolution défavorable de la situation macroéconomique que nous observons depuis l’automne.

Au-delà, le Gouvernement devra aussi actualiser la trajectoire des finances publiques figurant dans la loi de programmation pour 2018 à 2022, promulguée en janvier 2018. Certaines de ses dispositions ont en effet été rendues caduques par les décisions budgétaires prises en fin d’année 2018 et l’évolution de la conjoncture.

À plus long terme, pour retrouver des marges de manœuvre budgétaires, pour faire baisser les prélèvements obligatoires et pour réduire sa dette publique, notre pays doit accélérer sa transformation. C’est mon deuxième message.

Malgré les constats que je viens de formuler, le propos des juridictions financières aujourd’hui ne se veut pas résigné ; il est au contraire volontairement optimiste.

Au travers de nos contrôles, nous avons la conviction que la situation dans laquelle se trouve notre pays n’a rien d’inéluctable. J’en veux pour preuve que certains de nos voisins – j’ai cité à titre d’exemple le cas de l’Allemagne – parviennent, eux, à redresser en profondeur leurs comptes publics.

Nous savons aussi, et c’est le cœur de nos travaux, que des marges importantes existent en repensant l’utilité de chaque euro dépensé. Or, selon nous, ces marges sont insuffisamment exploitées. Le rapport public annuel présente justement un certain nombre d’exemples à l’appui de cette observation.

Côté dépenses, le rapport explore différentes pistes.

S’agissant des pistes de réduction des dépenses, il identifie des possibilités importantes résultant de l’amélioration de la gestion des charges de personnel dans les collectivités publiques.

En 2016, la masse salariale par habitant de la commune de Bobigny était, par exemple, supérieure de 34 % à celle des villes de taille comparable. De manière générale, la gestion des ressources humaines de cette collectivité est marquée par des irrégularités, signalées à plusieurs reprises par la chambre régionale des comptes d’Île-de-France.

Autre exemple cité dans le rapport : dans douze communes défavorisées d’Île-de-France, la durée annuelle légale du temps de travail n’est que rarement respectée, exposant les collectivités concernées à des charges non justifiées qui grèvent les budgets communaux, même si, bien évidemment, pour répondre aux besoins spécifiques des populations de ces communes défavorisées, il peut y avoir d’autres moyens à mettre en œuvre.

Mieux dépenser aujourd’hui permet aussi parfois de réduire les charges de demain. C’est le sens du chapitre consacré à la politique de prévention des infections associées aux soins, appelées maladies nosocomiales. Des progrès indéniables ont été progressivement réalisés pour limiter les contagions, mais, à l’hôpital, un patient sur vingt est encore infecté chaque année.

Cette situation, outre ses conséquences parfois très graves sur la santé des patients – on oublie que ces infections entraînent 4 000 morts par an, soit un nombre plus important encore que celui des morts sur la route, dont on parle beaucoup –, a aussi des effets financiers, estimés à plusieurs milliards d’euros. Aussi la Cour formule-t-elle des recommandations visant à réorganiser l’action publique dans ce domaine et à responsabiliser davantage les acteurs concernés.

Il revient aussi aux décideurs d’orienter le mieux possible les moyens publics pour maximiser leur efficacité. La politique des lanceurs spatiaux en est une illustration. Cette politique revêt un caractère stratégique pour la France et pour l’Europe. Elle s’appuie sur le lanceur Ariane 6, développé dans le cadre de l’Agence spatiale européenne, sur l’initiative de la France. Aujourd’hui, toutefois, ce lanceur ne constitue pas une réponse suffisante aux défis de la concurrence américaine. La Cour recommande donc, d’une part, que les pouvoirs publics français mobilisent davantage leurs partenaires européens pour rendre Ariane 6 plus compétitive et, d’autre part, que cette mobilisation serve à financer prioritairement l’innovation technologique au profit des lanceurs, et non leur fonctionnement courant.

Dans ce rapport, la Cour met aussi en évidence que, dans certains domaines, les dépenses n’ont pas toutes vocation à relever du seul secteur public. C’est l’un des messages que porte notre chapitre consacré au contrôle de la sécurité sanitaire de l’alimentation. La Cour y recommande notamment une plus grande participation des professionnels du secteur au financement des contrôles effectués par l’administration. En effet, alors que, en France, leur contribution représente environ 10 % des sources de financement de cette politique, au Danemark, cette proportion atteint près de 47 %.

Lorsque les acteurs de la dépense sont multiples, il revient aussi aux pouvoirs publics de les fédérer autour d’un modèle économique clair et solide. C’est la recommandation que nous portons s’agissant de la filière thermale développée dans la région Occitanie.

Dans certains cas, ce sont les conditions d’exécution des dépenses publiques qui conduisent à en interroger le principe même. C’est l’interrogation que formule la Cour à l’égard du Mobilier national et des manufactures nationales des Gobelins, de Beauvais et de la Savonnerie. Dans le chapitre qui leur est consacré, la Cour met également en évidence des défaillances de gestion inacceptables au sein de ces structures. On peut parfois s’étonner que cela n’émeuve pas, tout particulièrement les responsables de ce service.

L’Agence nationale pour la formation professionnelle des adultes, l’AFPA, fait l’objet de critiques du même ordre, elle qui a accumulé, entre 2013 et 2017, près de 508 millions d’euros de pertes d’exploitation. Les pouvoirs publics gagneraient, dans cette situation, soit à accompagner une réorganisation de grande ampleur de l’Agence, soit à envisager la reprise de ses activités par d’autres entités.

Côté recettes, la Cour identifie également des marges de progrès. L’une d’entre elles concerne la lutte contre toutes les formes de fraudes sociales et fiscales. La fraude au travail détaché fait, par exemple, l’objet d’un chapitre spécifique. Celui-ci révèle que, si l’arsenal juridique français est aujourd’hui suffisant, notre pays a tardé à le mettre en place pour faire face aux différents types de fraudes, parfois très sophistiqués. Nous recommandons également qu’une meilleure utilisation soit faite des outils existants, tant sur le volet des contrôles – ils peuvent encore être améliorés – que sur celui des sanctions.

Enfin, faire le meilleur usage des fonds dont bénéficient les projets publics, c’est le sens des recommandations formulées à l’encontre de la gestion des fonds européens structurels et d’investissement en outre-mer. La Cour chiffre à 4, 8 milliards d’euros le montant reçu de l’Union européenne par la France, entre 2014 et 2020, soit une somme très élevée. En contrôlant les plus gros projets financés, elle a constaté de belles réussites, qu’elle mentionne, mais elle déplore aussi des difficultés de gestion ayant conduit au gaspillage d’une partie de cette ressource.

Voilà pour quelques exemples et pistes de réflexion ouvertes par ce rapport. Ils s’ajoutent aux recommandations formulées chaque année par les juridictions financières dans leurs travaux.

Nous en avons conscience, vous comme nous, aucune de ces recommandations ne constitue évidemment, à elle seule, une recette miracle, susceptible de dégager des milliards d’euros d’économies. Mais les petits ruisseaux forment les grandes rivières… Pour parvenir à ces grandes rivières, il faut aussi que le courant soit bien canalisé, c’est-à-dire que les réformes soient correctement et durablement engagées. C’est le troisième et dernier message que je souhaite formuler devant vous.

Nous en sommes les témoins privilégiés lors de nos contrôles, nombre d’organismes publics engagent des processus courageux de transformation. Toutefois, la Cour constate trop souvent leur caractère incomplet. Pour que ces démarches portent pleinement leurs fruits, il faut en effet s’attaquer aux causes des déséquilibres financiers ou des inefficiences de la dépense. Notre rapport public offre notamment trois exemples à l’appui de ce message.

Le premier porte sur le réseau des trains Intercités.

Pour enrayer le déclin de ce réseau, l’État a engagé une réforme profonde qui conduira, d’ici à 2020, au transfert de dix-huit lignes aux régions. La Cour note que cette réforme n’a pas traité tous les enjeux auxquels est confronté le réseau : des incertitudes demeurent quant à l’avenir de son modèle économique, atypique au plan européen, en particulier face à l’ouverture à la concurrence du secteur qui interviendra à partir de 2023. Très hétérogène, le réseau offre, en outre, une qualité de service inégale. Enfin, les modalités de gouvernance entre l’État, l’exploitant et les régions demeurent, elles aussi, fragiles.

Radio France, qui a fait l’objet de nombreux contrôles de la Cour des comptes, constitue un autre exemple développé dans ce rapport. Notre juridiction y souligne les progrès accomplis par l’entreprise, dont témoignent ses bons résultats d’audience. Toutefois, la transformation engagée n’est pas allée suffisamment loin pour assainir pleinement la situation de l’entreprise et lui permettre d’affronter les mutations majeures de son activité. Des évolutions de structure restent à opérer, notamment pour réduire ses charges de personnel ou pour moderniser ses relations sociales. Alors que le chantier de réhabilitation de la Maison de la radio entre dans sa treizième année, la situation financière de Radio France demeure fragile.

Accompagner la transformation publique en remettant à plat l’activité des services : c’est l’enjeu, enfin, du chapitre dédié aux urgences hospitalières, qui réitère des messages récurrents de la Cour des comptes.

Alors que la demande ne cesse de croître, notre institution constate que de 10 % à 20 % des recours aux urgences auraient pu être traités en médecine générale. En bout de chaîne, les services des urgences apparaissent ainsi comme le réceptacle des dysfonctionnements de l’articulation du milieu hospitalier avec la médecine de ville.

Bien sûr, les différents exemples cités tendent à donner le sentiment que les actes tardent à venir, quand bien même les causes des difficultés sont depuis longtemps identifiées. Pourtant, notre rapport public annuel est aussi l’occasion d’adresser des « coups de chapeau » à des transformations réussies. Nous le faisons cette année à propos de deux sujets, celui de la réforme des avoirs bancaires et des contrats d’assurance vie en déshérence et celui du service militaire adapté en outre-mer.

Le suivi annuel de nos recommandations est aussi pour nous une source de satisfaction ; j’aimerais m’y arrêter un bref instant.

Le suivi statistique que nous réalisons chaque année montre que 72 % des recommandations formulées entre 2015 et 2017 par la Cour des comptes ont été totalement ou partiellement mises en œuvre par les administrations. Cette proportion est encore supérieure pour les chambres régionales et territoriales des comptes, où elle s’élève à 79 %.

Ces chiffres incluent le pourcentage de recommandations totalement mises en œuvre, qui atteint 24 % pour la Cour des comptes et 4 % pour les chambres régionales. Vous trouverez à la fin du deuxième tome de notre rapport public annuel de nombreuses illustrations de ce suivi.

Nous y constatons par exemple, au titre des recommandations que nous avons formulées par le passé, les progrès réalisés pour renforcer la lutte contre la fraude dans les transports urbains en Île-de-France.

Nous nous réjouissons aussi du recentrage du dispositif des contrats aidés.

Nous saluons, enfin, le transfert aux unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales, les Urssaf, de tâches que le régime social des indépendants n’arrivait plus à assumer.

Je pourrais multiplier les exemples, mais je vous renvoie à la lecture du tome II de notre rapport.

Toutes les recommandations qui figurent dans cette édition 2019 feront l’objet du même suivi : nous retournerons donc, dans quelques années, constater, dans les organismes et les administrations qui ont été cités ce matin, les progrès qu’ils auront réalisés ou non.

Monsieur le président, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le président de la commission des affaires sociales, mesdames, messieurs les sénateurs, malgré les progrès accomplis, en ce début d’année, la situation des finances publiques de notre pays demeure fragile, marquée par de fortes incertitudes. Les rapports que nous publions année après année peuvent donner le sentiment que rien ne change. Ce n’est pas notre message ni notre conviction. Au fil des contrôles que nous effectuons, il nous appartient évidemment de souligner ce qui ne fonctionne pas et de formuler des recommandations utiles pour remédier aux dérives de gestion que nous constatons, mais notre activité nous conduit aussi à relever des progrès, à identifier des voies nombreuses de transformation et à observer le professionnalisme, l’engagement et le sens du service des agents qui concourent à la modernisation de l’action publique.

Notre mission d’information et d’explication, nous l’accomplirons cette année encore dans un contexte de plus en plus exigeant, à une époque où la parole publique, quel qu’en soit l’auteur, est mise en doute et où la production d’une information objective est menacée par la propagation de fausses nouvelles. Cette exigence nous invite à un effort permanent de transparence, d’explication, d’écoute, donc d’adaptation de nos pratiques.

Comme celles qui l’ont précédée, l’année 2019 offre aux juridictions financières de nouveaux chantiers de transformation. Ils visent, pour beaucoup d’entre eux, à favoriser l’appropriation de nos travaux par leurs différents destinataires, en particulier par le Parlement. J’ai mentionné à ce titre la modification de notre calendrier de publication.

Nous ambitionnons aussi d’améliorer notre politique de publication, en continuant d’offrir aux citoyens des supports de communication plus diversifiés, plus pédagogiques, plus innovants. Le rapport public annuel qui sera publié l’année prochaine devrait par exemple évoluer par rapport à la version que nous vous remettons aujourd’hui. Il devrait nous permettre de traiter notamment un thème dominant, en l’espèce celui du numérique au service de la transformation de l’action publique.

Je l’ai dit, notre but, au travers de ces évolutions, est de vous être toujours plus utiles, afin que nous contribuions ensemble, chacun dans nos missions, dans notre positionnement institutionnel, à la transformation du service public pour rendre l’action publique plus efficace, plus efficiente. Nous constatons chaque jour l’existence de marges de progrès en la matière.

Soyez certains que, cette année encore, la Cour des comptes sera à votre écoute et s’efforcera de remplir toujours plus efficacement son rôle d’assistance aux pouvoirs publics, notamment au Parlement, monsieur le président, et d’information du citoyen.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, du groupe La République En Marche, du groupe Union Centriste, du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, du groupe Les Indépendants – République et Territoires et du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Monsieur le Premier président, le Sénat vous donne acte du dépôt du rapport annuel de la Cour des comptes.

La parole est à M. le président de la commission des finances.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Eblé

Monsieur le président, monsieur le Premier président de la Cour des comptes, monsieur le président de la commission des affaires sociales, monsieur le rapporteur général de la commission des finances, mes chers collègues, comme chaque année, M. le Premier président de la Cour des comptes présente au Parlement le rapport public annuel de celle-ci. C’est un moment solennel pour notre assemblée, qui symbolise, davantage qu’il ne résume, la richesse de nos relations avec la Cour des comptes.

En effet, il est désormais loin le temps où le rapport public annuel constituait l’unique synthèse des travaux de la Cour des comptes dont les parlementaires pouvaient s’inspirer pour réformer l’action publique. Comme le lui prescrit notre Constitution, la Cour des comptes assiste tout au long de l’année le Parlement, ainsi que le Gouvernement, dans le contrôle de l’exécution des lois de finances et de l’application des lois de financement de la sécurité sociale, ainsi que, de façon plus générale, dans l’évaluation des politiques publiques.

En application de l’article 58-2 de la loi du 1er août 2001 relative aux lois de finances, notre commission des finances commande régulièrement à la Cour des comptes des enquêtes susceptibles d’éclairer l’ensemble des sénateurs sur des sujets d’intérêt général. C’est une contribution utile à l’information des citoyens.

Comme vous l’évoquiez dans votre propos introductif, monsieur le président, nous avons ainsi, il y a huit jours seulement, entendu les magistrats de la Cour des comptes sur l’indemnisation des victimes du terrorisme. Nous les entendrons de nouveau dans quelques jours sur l’important sujet de la dette des entités publiques ou encore, au début du mois de mars, sur la Caisse de garantie du logement locatif social. Leur expertise alimente les travaux et réflexions de nos rapporteurs spéciaux, tout comme la Cour des comptes s’inspire aussi des nombreuses informations et pistes de travail contenues dans les rapports du Sénat.

À cet égard, je voudrais souligner ce qui, dans ce rapport annuel, attire plus particulièrement l’attention de la commission des finances.

En premier lieu, il s’agit bien évidemment du chapitre relatif à la situation d’ensemble de nos finances publiques, qui confirme ce que nous ne savons que trop, à savoir que la loi de finances pour 2019 ne prend que très partiellement en compte l’incidence budgétaire des mesures en faveur du pouvoir d’achat des ménages adoptées, dans les conditions que l’on sait, en fin d’année. Pour être précis, leur coût est de l’ordre de 11 milliards d’euros tout de même, mais seulement 4, 1 milliards d’euros de mesures de compensation ont été annoncées, sans avoir encore été prises à hauteur de 3, 7 milliards d’euros ! Il s’agit notamment de la restriction de la baisse du taux de l’impôt sur les sociétés, de la nouvelle taxe sur les grands acteurs de l’internet, ou encore, soyons clairs, des mesures d’économie sur les dépenses de l’État qui restent à concrétiser.

Le Gouvernement passe sous silence les fragilités de nos perspectives macroéconomiques dans un contexte de ralentissement européen et mondial. La Cour des comptes mentionne un scénario des finances publiques « préoccupant » et « estime indispensable que le Gouvernement présente, dès que possible, des projets de lois financières rectificatives, pour l’État et pour la sécurité sociale, intégrant de manière exhaustive et sincère l’ensemble des mesures annoncées ainsi que les conséquences de l’évolution de la situation macroéconomique ».

Dans sa réponse, le Gouvernement temporise en renvoyant au programme de stabilité d’avril, qui sera présenté à la Commission européenne mais qui ne remplace pas un texte budgétaire soumis au Parlement ! L’existence d’un grand débat fiscal ne saurait masquer la responsabilité du Gouvernement de revenir devant les parlementaires le plus rapidement possible pour préciser le cadrage de nos finances publiques, et ce avant toute présentation de la trajectoire de nos finances publiques devant la Commission européenne.

Si l’on se penche sur les performances du Gouvernement en matière d’équilibre de nos finances publiques, notre constat est plus sévère que ne l’est le rapport annuel. La Cour des comptes note que le déficit structurel pour 2019 sera « au mieux stable », au rebours des efforts de la majorité de nos partenaires européens, et que la dette publique rapportée au produit intérieur brut devrait encore augmenter en 2019. Le niveau relativement élevé de la croissance – de 1, 5 % à 1, 7 % en 2018, selon les estimations – n’a pas été mis à profit pour commencer à réduire le poids de la dette publique.

Lors de son arrivée en juin 2017, le nouveau gouvernement avait demandé à la Cour des comptes un « audit » des finances publiques, dans lequel celle-ci s’alarmait du fait que « sans mesures nouvelles de redressement, le déficit public dépasserait de 0, 4 point de PIB l’objectif, pour atteindre 3, 2 points de PIB ». Aujourd’hui la Cour des comptes note sobrement que « le Gouvernement a annoncé vouloir adopter courant 2019 des mesures de hausse de prélèvements obligatoires et de baisse des dépenses de l’État […] afin de maintenir à 3, 2 points de PIB le déficit prévu ». L’objectif semble être non plus de réduire le déficit en dessous de 3 % du PIB, mais de ne pas l’augmenter davantage ! Monsieur le Premier président, la Cour frôle la complaisance ; c’est inhabituel !

Exclamations amusées sur les travées du groupe La République En Marche et du groupe Les Républicains.

Debut de section - Permalien
Didier Migaud

Ah non ! Je ne peux pas vous laisser dire cela ! Vous oubliez l’impact du CICE : 0, 9 point de PIB !

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Eblé

J’en viens maintenant à d’autres assertions du rapport public annuel qui font écho aux observations formulées par nos rapporteurs spéciaux sénatoriaux. Elles figurent principalement dans le suivi des recommandations, deux chapitres seulement constatant des progrès, six insistant sur les réformes à poursuivre et deux alertant.

Parmi les points positifs, la Cour des comptes dresse le bilan de l’application de la loi du 13 juin 2014 relative aux comptes bancaires inactifs et aux contrats d’assurance vie en déshérence. Concernant ces derniers, le rapport fait état du maintien d’un stock de contrats en déshérence à un niveau élevé, en dépit des efforts réalisés par les assureurs. Je tiens à souligner que notre assemblée s’est saisie de ces sujets depuis de nombreuses années : notre rapporteur général, Albéric de Montgolfier, avait ainsi pointé le problème des contrats de retraite complémentaire, tenant en particulier au fait qu’ils ne prévoient pas d’échéance, en introduisant dans la loi dite « Sapin II » une disposition à ce sujet. De nouveaux amendements ont également été adoptés sur l’initiative de plusieurs sénateurs à l’occasion de l’examen du projet de loi PACTE pour inciter davantage les assureurs à rechercher les bénéficiaires des contrats d’assurance vie.

Autre motif de satisfaction, la Cour des comptes constate les bons résultats du service militaire adapté en matière d’insertion socioprofessionnelle des jeunes dans tous les territoires d’outre-mer, et ce en dépit de l’augmentation importante des effectifs qu’il a connue depuis 2010. Elle relève toutefois la nécessité d’améliorer le taux d’encadrement, d’axer davantage ce dispositif sur les formations longues et d’en renforcer la gouvernance. Nos collègues Nuihau Laurey et Georges Patient ne manqueront pas d’être attentifs à ces conclusions, puisqu’ils rendront compte dans quelques jours devant la commission des finances de leur contrôle sur le service militaire adapté, qui les a amenés à Mayotte.

Parmi les sujets sur lesquels la Cour des comptes insiste figure le contrôle de la sécurité sanitaire de l’alimentation –sujet sensible et d’actualité s’il en est –, dont la Cour des comptes estime que les progrès sont à consolider, faisant notamment référence à l’excellent rapport d’Alain Houpert et de Yannick Botrel sur ce sujet.

La commission des finances du Sénat, mais aussi nos collègues de la commission des affaires économiques et de la commission des affaires sociales, se sont emparés depuis plusieurs mois de cette question, avant puis au moment de l’affaire dite « Lactalis », et nous poursuivrons, avec l’appui des analyses de la Cour des comptes, cet engagement vigilant quant aux moyens donnés à la protection de la santé des consommateurs.

Dans le suivi des recommandations, la Cour des comptes souligne que le chantier de réhabilitation de la Maison de la radio a connu de nouveaux retards et que ses coûts ont encore augmenté. Elle pointe les risques et les incertitudes persistantes concernant ce chantier et recommande une clarification des conditions de financement de la fin des travaux. Dans son rapport spécial pour 2019, notre collègue Roger Karoutchi avait concentré ses observations sur ces mêmes risques et incertitudes. Ces conclusions rejoignent donc largement celles de notre rapporteur spécial.

Enfin, nous ne manquerons pas d’utiliser les travaux que nous livre la Cour des comptes en vue de nos prochaines auditions de responsables publics. Tout comme le rapport sur la Banque de France avait fourni l’occasion d’interroger le gouverneur sur les missions confiées à l’institution qu’il dirige, nul doute que les recommandations de la Cour des comptes concernant la nécessité pour l’Agence française de développement, l’AFD, de concilier l’extension de son champ d’intervention avec une amélioration de son pilotage financier alimenteront la réflexion de nos collègues rapporteurs spéciaux Yvon Collin et Jean-Claude Requier et les débats devant notre commission à l’occasion de l’audition prochaine du directeur général de l’AFD.

En conclusion, je ne peux que souhaiter, monsieur le Premier président, que nos relations de travail avec la Cour des comptes se poursuivent selon les modalités qui ont été définies ces dernières années, la Cour aidant le Parlement à contrôler l’action du Gouvernement et répondant aux demandes d’enquêtes formulées par les sénateurs, ceux-ci, dans leurs fonctions législatives et de contrôle, décidant des suites qu’ils entendent y apporter.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, du groupe Union Centriste, du groupe Les Indépendants – République et Territoires et du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Milon

Monsieur le président, monsieur le Premier président de la Cour des comptes, monsieur le président de la commission des finances, mes chers collègues, chaque année, les termes de l’article 47, alinéa 2, de la Constitution trouvent une traduction dans la présentation du rapport public annuel de la Cour des comptes, traduction qui est bien loin d’être la seule.

Je saisis l’occasion qui m’est ici donnée pour saluer de nouveau, à la suite du président Larcher, la qualité de l’enquête récemment remise à la commission des affaires sociales sur les centres hospitaliers universitaires. Il s’agit, monsieur le Premier président, d’une contribution tout à fait remarquable au débat qui s’est ouvert sur la transformation du système de santé, mais surtout d’un appel à une cohérence dans les choix publics qui se fait plus rare encore dans les temps que nous connaissons.

Je ne doute pas que les enquêtes à venir, qui porteront sur l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, l’ANSM, et sur la politique en matière de lutte contre le VIH-sida seront tout aussi passionnantes.

Dans le rapport public annuel qui nous est aujourd’hui présenté, la Cour des comptes évoque de nombreux sujets sociaux, qu’il s’agisse du travail détaché, des infections associées aux soins, de l’action sociale de l’Agirc-Arrco, voire du thermalisme… J’y vois la marque d’un intérêt justifié, notamment, par leur enjeu pour les finances publiques.

S’agissant de la situation d’ensemble des finances publiques, la Cour des comptes évoque des « prévisions particulièrement fragiles ». Elle souligne qu’au-delà de l’effet ponctuel du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, le CICE, la dégradation de la conjoncture internationale et les mesures d’urgence sociale adoptées avant Noël introduisent de fortes incertitudes sur la trajectoire budgétaire.

Alors certes, dans ce paysage d’ensemble plutôt inquiétant, les comptes sociaux peuvent sembler un peu plus « brillants » que les autres comptes publics. Néanmoins, là aussi, de fortes incertitudes demeurent.

Tout d’abord, les comptes sociaux sont, plus encore que les autres, sensibles à la conjoncture économique.

Ensuite, comme l’a souligné le rapporteur général de la commission des affaires sociales, Jean-Marie Vanlerenberghe, en cas de non-compensation des mesures d’urgence de l’automne, le solde de la sécurité sociale s’établirait, en négatif, à 2, 8 milliards d’euros, loin du retour à l’équilibre annoncé en octobre dernier.

Une partie au moins des économies envisagées par le Gouvernement en 2020 reste hypothétique. Je pense aux quelque 3 milliards d’euros que devait rapporter une nouvelle année de gel de nombreuses prestations sociales, en particulier les pensions de retraite et les allocations familiales. Après la censure du Conseil constitutionnel, le Gouvernement inscrira-t-il, dans le contexte social actuel, de telles mesures dans le prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale ? Le cas échéant, le Parlement votera-t-il ces dispositions ? Il est difficile, à ce stade, d’avoir des certitudes.

Dans ce contexte, la Cour des comptes appelle le Gouvernement à présenter au Parlement des projets de lois financières rectificatives, ainsi qu’à réviser la trajectoire budgétaire de la France dans le cadre d’une nouvelle loi de programmation des finances publiques.

La commission des affaires sociales adhère à cette logique. Elle souhaite que ces futurs projets de loi appliquent le principe de compensation : les mesures de l’automne étaient des réponses de l’État à une crise politique et sociale, et non des mesures concernant la sécurité sociale.

Elle souhaite également que ces futurs projets de loi révisent d’ores et déjà les coupes programmées de TVA en direction de la sécurité sociale, dont nous avons dénoncé le caractère irréaliste dès l’automne dernier, afin de ne pas compromettre les perspectives d’apurement complet de la dette de la sécurité sociale à l’horizon 2024. Nous avons le devoir de ne pas léguer le « trou de la sécu » à nos enfants. De plus, si la Caisse d’amortissement de la dette sociale, la CADES, doit disparaître, l’Agence France Trésor, elle, demeure…

Je voudrais ensuite évoquer brièvement les différents sujets abordés par la Cour des comptes relevant de la commission des affaires sociales, sans pouvoir bien sûr rendre totalement justice à leur intérêt.

La Cour des comptes attire de nouveau l’attention sur la situation financière extrêmement préoccupante de l’Agence pour la formation professionnelle des adultes, l’AFPA. Malgré sa transformation en établissement public, celle-ci s’est révélée incapable de s’adapter à l’ouverture à la concurrence du marché de la formation professionnelle. En raison notamment de coûts de structure trop importants et de la perte de marchés publics, l’agence enregistre des pertes colossales. Selon la Cour des comptes, les subventions exceptionnelles versées chaque année à l’AFPA posent, outre la question de leur conformité au droit de la concurrence, celle de la bonne gestion d’une structure qui a jusqu’à présent échoué à se réformer de manière efficace.

Sous l’égide d’une nouvelle équipe de direction, l’AFPA a lancé un plan de transformation qui apparaît comme un plan de la dernière chance, ainsi que l’avait souligné notre collègue Michel Forissier dans son rapport pour avis sur le projet de loi de finances pour 2019. Comme le souligne la Cour des comptes, la réussite de ce plan sera tributaire d’un recentrage de l’AFPA sur son cœur de métier et de la fixation par l’État d’objectifs clairs conditionnant l’octroi de toute nouvelle aide.

La Cour des comptes s’attarde également sur la lutte contre la fraude au travail détaché, dont la commission des affaires sociales a eu à traiter à l’occasion de chaque texte visant à la renforcer, c’est-à-dire presque chaque année depuis 2014. Si l’arsenal juridique s’est ainsi renforcé, la Cour des comptes souligne que les sanctions administratives et pénales créées par le législateur ne sont pas suffisamment appliquées.

Enfin, il est impératif de renforcer la coopération européenne en la matière. On notera toutefois avec intérêt que, si la France figure parmi les pays qui reçoivent le moins de demandes, ses délais de réponse sont parmi les plus longs. Charité bien ordonnée commençant par soi-même, la Cour des comptes recommande au ministère du travail d’accélérer les délais de réponse aux demandes d’informations émanant de nos partenaires européens.

Le modèle économique de l’Établissement français du sang se trouve aujourd’hui fragilisé par les mutations profondes de la filière du sang, à l’heure où la concurrence s’intensifie dans le secteur des médicaments dérivés du sang.

Le marché mondial du plasma, en pleine expansion et régulièrement en situation de pénurie, est désormais dominé à 85 % par les dons américains, rémunérés, qui n’offrent pas les mêmes garanties éthiques et de sécurité.

Vous appelez à conforter notre modèle de don, gratuit, bénévole et anonyme, non seulement en réduisant les coûts de la collecte du plasma, mais également en indemnisant mieux et de façon éthique le don du sang en France. Il est temps, à mon sens, que nous évoluions sur cette question, afin de ne plus nous retrouver contraints d’importer des produits américains dont les conditions de collecte s’éloignent de nos standards éthiques.

En matière de lutte contre les infections associées aux soins, le chapitre dresse un constat préoccupant sur la menace de l’antibiorésistance en France. Notre pays se classe au troisième rang européen en termes de prescription d’antibiotiques, alors que, dans le même temps, le nombre d’antibiotiques mobilisables continue de diminuer. Notre arsenal thérapeutique contre les infections nosocomiales s’en trouve lourdement fragilisé. Or 93 % de la consommation d’antibiotiques résulte de prescriptions faites en ville. Ne nous leurrons pas, des médecins continuent de prescrire des antibiotiques pour le traitement d’infections virales des voies aériennes, notamment pendant les épisodes grippaux !

Comme le proposent nos collègues Yves Daudigny et Michel Amiel, qui ont interpellé le Gouvernement sur ce sujet, œuvrons résolument pour la juste prescription. Je veux insister à cet égard sur l’intérêt du recours aux tests rapides d’orientation diagnostique, les TROD, dans la lutte contre l’antibiorésistance, puisqu’ils permettent au médecin d’écarter la piste d’une infection bactérienne et de convaincre les patients, résultat à l’appui, de l’inutilité d’une antibiothérapie.

S’agissant des urgences hospitalières, notre commission, qui a travaillé sur ce sujet en 2017, partage les constats établis par la Cour des comptes. Toujours plus sollicités, soumis dans certains établissements à des tensions devenues insupportables, les services des urgences accueillent une large part de soins non programmés qui pourraient tout aussi bien – et probablement même mieux – être pris en charge en ville. Il importe de recentrer chacun des acteurs du système de soins sur le cœur de sa compétence, ce qui permettra de renforcer la qualité des soins comme la satisfaction des professionnels. Force est cependant de constater que, si ces éléments sont largement connus et documentés, la situation n’évolue pas. L’actualité récente nous a fourni plusieurs exemples tragiques des difficultés rencontrées par les établissements les plus exposés.

C’est que, comme bien souvent, les constats sont mieux partagés que les remèdes. Je mets en garde contre toutes les solutions de « bricolage » qui viendraient réformer les urgences sans vision d’ensemble, à l’image du forfait de réorientation de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2019. §C’est aujourd’hui à une refondation globale des urgences que nous devons nous atteler, et plus généralement à une réflexion approfondie sur le partage des tâches entre la médecine de ville et la médecine hospitalière, assorti, bien entendu, des moyens adaptés de part et d’autre. Il ne peut pas être procédé à ces modifications par le biais d’ordonnances, comme cela semble être envisagé.

Pour conclure, ces différents sujets montrent combien les travaux de la Cour des comptes s’inscrivent pleinement dans les préoccupations du Parlement, les éclairent et les complètent, pour un meilleur contrôle de l’action du Gouvernement.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, du groupe Union Centriste, du groupe Les Indépendants – République et Territoires, du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, du groupe La République En Marche et du groupe socialiste et républicain.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Monsieur le Premier président, madame la rapporteure générale, nous en avons terminé avec la présentation de ce rapport, qui augure de la suite des travaux que nous pourrons conduire avec votre institution.

Huissiers, veuillez reconduire M. le président et Mme la rapporteure générale de la Cour des comptes.

M. le Premier président et Mme la rapporteure générale de la Cour des comptes sont reconduits selon le cérémonial d ’ usage.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à onze heures vingt-cinq, est reprise à onze heures trente, sous la présidence de Mme Catherine Troendlé.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

L’ordre du jour appelle l’examen de deux projets de loi tendant à autoriser la ratification ou l’approbation de conventions internationales.

Pour ces projets de loi, la conférence des présidents a retenu la procédure d’examen simplifié.

Je vais donc les mettre successivement aux voix.

Est autorisée la ratification de l’accord de partenariat sur les relations et la coopération entre l’Union européenne et ses États membres, d’une part, et la Nouvelle-Zélande, d’autre part, signé à Bruxelles le 5 octobre 2016, et dont le texte est annexé à la présente loi

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

Je mets aux voix le texte adopté par la commission sur le projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant la ratification de l’accord de partenariat sur les relations et la coopération entre l’Union européenne et ses États membres, d’une part, et la Nouvelle-Zélande, d’autre part (projet n° 646 [2017-2018], texte de la commission n° 265, rapport n° 264).

La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées est favorable à l’adoption de ce texte.

Le projet de loi est adopté définitivement.

Est autorisée la ratification de l’accord de dialogue politique et de coopération entre l’Union européenne et ses États membres, d’une part, et la République de Cuba, d’autre part, signé à Bruxelles le 12 décembre 2016, et dont le texte est annexé à la présente loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

Je mets aux voix le texte adopté par la commission sur le projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant la ratification de l’accord de dialogue politique et de coopération entre l’Union européenne et ses États membres, d’une part, et la République de Cuba, d’autre part (projet n° 738 [2017 2018], texte de la commission n° 267, rapport n° 266).

La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées est favorable à l’adoption de ce texte.

Le projet de loi est adopté définitivement.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à la croissance et la transformation des entreprises (projet n° 28, texte de la commission spéciale n° 255, rapport n° 254, rapport d’information de la commission des affaires européennes n° 207).

Dans la discussion du texte de la commission spéciale, nous en sommes parvenus, au sein de la section 2 du chapitre III, à l’article 61 ter A.

chapitre III

Des entreprises plus justes

Section 2

Repenser la place des entreprises dans la société

I. – La normalisation est une activité d’intérêt général qui a pour objet de fournir des documents de référence élaborés de manière consensuelle par toutes les parties intéressées, portant sur des règles, des caractéristiques, des recommandations ou des exemples de bonnes pratiques, relatives à des produits, à des services, à des méthodes, à des processus ou à des organisations. Elle vise à encourager le développement économique et l’innovation tout en prenant en compte des objectifs de développement durable.

II. – Les normes élaborées dans le cadre de l’activité mentionnée au I sont d’application volontaire.

Toutefois, ces normes peuvent être rendues d’application obligatoire, dans des conditions définies par voie réglementaire, pour des motifs de protection des personnes et des biens, de santé publique ou de protection de l’environnement, sous réserve qu’elles fassent l’objet d’un accès gratuit en ligne.

III. – Le ou les organismes chargés d’organiser ou de participer à l’élaboration des normes françaises, européennes ou internationales, leurs missions et obligations, ainsi que les modalités de fonctionnement de l’activité de normalisation, d’élaboration et de publication des normes en France sont définis par voie réglementaire.

IV. – Un ou plusieurs organismes mentionnés au III peuvent être chargés, par le ministre compétent, d’élaborer des normes d’application volontaire dont il définit l’objet et qui sont destinées à assurer la mise en œuvre de certaines politiques publiques ou de dispositions législatives ou réglementaires particulières.

V. – Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application du présent article.

VI. – La loi n° 41-1987 du 24 mai 1941 relative à la normalisation est abrogée.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

L’amendement n° 791, présenté par MM. Lévrier, Yung, Patient, Patriat, Amiel, Bargeton et Buis, Mme Cartron, MM. Cazeau, de Belenet, Dennemont, Gattolin, Hassani, Haut, Karam, Marchand, Mohamed Soilihi, Navarro et Rambaud, Mme Rauscent, M. Richard, Mme Schillinger, M. Théophile et les membres du groupe La République En Marche, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Rédiger ainsi cet alinéa :

Toutefois, à compter de la promulgation de la présente loi, ces normes peuvent être rendues d’application obligatoire, dans des conditions définies par voie réglementaire, pour des motifs de protection des personnes, des données personnelles, des biens, de la santé publique ou de l’environnement, sous réserve qu’elles fassent l’objet d’un accès gratuit en ligne.

La parole est à M. Richard Yung.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

Sur l’initiative de Mme la rapporteur, la commission spéciale a adopté un amendement tendant à insérer un article additionnel relatif à l’activité de normalisation, c’est-à-dire à l’édiction de normes d’application volontaire à destination des entreprises. Cet article est issu du travail de la commission des affaires économiques sur ce sujet. Le Sénat propose ainsi un ajout utile au droit existant.

Le présent amendement tend à apporter une précision quasiment rédactionnelle quant aux motifs rendant l’application de certaines normes obligatoires, en prévoyant que la limitation de ces motifs est valable à compter de la promulgation de la loi. La rédaction actuelle de l’article 61 ter A ne contient pas cette précision.

Par ailleurs, cet amendement vise à ajouter un nouveau motif, celui de la protection des données personnelles.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Canevet

Ajouter la protection des données personnelles parmi les motifs permettant de rendre d’application obligatoire une norme d’application volontaire apparaît pertinent. C’est pourquoi j’émets un avis favorable sur cet amendement.

Debut de section - Permalien
Agnès Pannier-Runacher

Avis favorable.

L ’ amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

L’amendement n° 156 rectifié bis, présenté par M. Cadic, Mme Billon et MM. Janssens, Guerriau et Longeot, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Rédiger ainsi cet alinéa :

III. – L’organisme, membre des organisations de normalisation européennes ou internationales, chargé d’organiser et de participer à l’élaboration des normes françaises, européennes et internationales, ses missions et obligations, ainsi que les modalités de fonctionnement de l’activité de normalisation, d’élaboration et de publication des normes en France sont définis par voie réglementaire. Les conditions dans lesquelles cet organisme délègue l’élaboration des projets de norme à des bureaux de normalisation sectoriels agréés sont définies par voie réglementaire.

La parole est à M. Olivier Cadic.

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Cadic

Cet amendement vise à conserver la place de la France dans la compétition d’influence à la fois européenne et internationale dans laquelle elle est engagée.

Pour prendre une image, l’« équipe de France » de la normalisation comprend un numéro 10, l’AFNOR, qui est la plaque tournante, et de bureaux de normalisation sectoriels agréés. Chacun doit tenir son rôle. Le présent amendement vise à rendre plus lisible la composition de cette équipe de France et à faciliter des coopérations avec les organisations européennes ou internationales de normalisation.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

L’amendement n° 155 rectifié ter, présenté par M. Cadic, Mme Billon et MM. Janssens, Guerriau et Longeot, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 5

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

… – Les normes qui ne sont pas rendues d’application obligatoire en application du second alinéa du II du présent article et les documents produits ou reçus dans le cadre de l’activité de normalisation ou en résultant ne constituent pas des documents administratifs au sens de l’article L. 300-2 du code des relations entre le public et l’administration.

La parole est à M. Olivier Cadic.

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Cadic

L’amendement n °155 rectifié ter a pour objet de préciser que les normes qui ne sont pas rendues d’application obligatoire ne sont pas des documents administratifs soumis en tant que tels au droit de réutilisation institué par l’article L. 321-1 du code des relations entre le public et l’administration.

Cet amendement a pour objet d’éviter que, par le biais du droit à la réutilisation, permettant à n’importe acteur d’utiliser un contenu normatif d’origine européenne dans des conditions non contrôlées, l’Association française de normalisation, l’AFNOR, organisme national de normalisation, ne devienne le maillon faible en Europe.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

L’amendement n° 157 rectifié quater, présenté par M. Cadic, Mme Billon et MM. Janssens, Guerriau et Longeot, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 5

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

… – Les normes sont mises à disposition en français, sauf exceptions définies par voie réglementaire.

La parole est à M. Olivier Cadic.

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Cadic

Cet amendement a pour objet d’éviter que l’on alourdisse inutilement les coûts de traduction à la charge de l’AFNOR en lui imposant la traduction systématique de toutes les normes qu’elle publie, y compris celles qui ne seront pas utilisées en version française, du fait des pratiques d’une filière industrielle ou de services très internationalisés. Dans ce dernier cas, on lui permettrait de n’en traduire qu’un résumé, conformément aux dispositions de l’article 7 de la loi n° 94-665 du 4 août 1994 relative à l’emploi de la langue française.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

Quel est l’avis de la commission spéciale sur les trois amendements ?

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Canevet

Le texte de l’article 61 ter A paraît suffisant pour permettre au décret d’application de définir les rôles respectifs de l’organisme chargé d’organiser le système de normalisation – actuellement l’AFNOR – et de ceux qui participent au processus de normalisation.

Monsieur Cadic, je vous suggère de retirer l’amendement n° 156 rectifié bis ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.

L’amendement n° 155 rectifié ter a trait à la qualification des normes d’application volontaire. La commission spéciale y est favorable.

Quant à l’amendement n °157 rectifié quater, qui a été rectifié depuis son examen en commission, j’émets, à titre personnel un avis de sagesse.

Debut de section - Permalien
Agnès Pannier-Runacher

Sur les amendements n° 155 rectifié ter et 157 rectifié quater, le Gouvernement émet un avis favorable.

Pour ce qui est de l’amendement n° 156 rectifié bis, j’aurais été tentée d’émettre un avis de sagesse, mais je me rallie à la position de la commission et j’en sollicite le retrait.

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Cadic

L’objet de cet amendement est de faire en sorte qu’un organisme étranger de normalisation ne vienne pas se substituer à l’AFNOR. Il s’agit d’éviter une difficulté potentielle.

Dans la mesure où le Gouvernement avait d’abord envisagé d’émettre un avis de sagesse sur cet amendement qui solidifie notre système de normalisation, j’estime que la commission pourrait nous faire confiance sur ce sujet. Je maintiens l’amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

Monsieur le rapporteur, confirmez-vous la position de la commission spéciale sur l’amendement n° 156 rectifié bis ?

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

L ’ amendement est adopté.

L ’ amendement est adopté.

L ’ article 61 ter A est adopté.

(Supprimé)

À la première phrase du neuvième alinéa de l’article 53 de la loi n° 2009-967 du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en œuvre du Grenelle de l’environnement, le mot : « attestant » est remplacé par les mots : «, attribués sur la base de référentiels pouvant présenter un caractère sectoriel et territorial, élaborés, le cas échéant, par les fédérations professionnelles, qui attestent ». –

Adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

Je suis saisie de quatre amendements identiques.

L’amendement n° 2 rectifié ter est présenté par Mme Deroche, MM. Piednoir et Perrin, Mmes Puissat, Noël et Chauvin, MM. D. Laurent et Panunzi, Mmes Di Folco et Thomas, M. Lefèvre, Mmes Deromedi et Bonfanti-Dossat, M. Pillet, Mmes Micouleau, Gruny et Ramond, MM. Kennel, Paccaud et Regnard, Mme Bruguière, M. Revet, Mmes Eustache-Brinio, Imbert et Canayer, M. Magras, Mme Deseyne, MM. Bonne, Milon et B. Fournier, Mme Bories, MM. Bazin, Vogel et Chevrollier, Mme Lanfranchi Dorgal, MM. Brisson, Cuypers, Mandelli et Mayet, Mmes Lassarade et M. Mercier, MM. Danesi, de Nicolaÿ et Raison, Mme Garriaud-Maylam, MM. Charon, Paul et Bonhomme, Mme A.M. Bertrand, MM. Le Gleut et Savin, Mme L. Darcos, M. Gilles, Mme Giudicelli, MM. Sido, Vaspart, Bizet, Babary, Laménie, Genest, Darnaud et Gremillet, Mme de Cidrac et M. Pierre.

L’amendement n° 137 rectifié quater est présenté par M. Lalande, Mme Espagnac, MM. M. Bourquin, Tourenne et Kanner, Mme Artigalas, MM. Durain et Lurel, Mme Tocqueville, MM. Antiste et J. Bigot, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Courteau, Duran et Fichet, Mme Monier et les membres du groupe socialiste et républicain.

L’amendement n° 652 rectifié bis est présenté par Mmes Lienemann et Cukierman, M. Gay, Mme Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

L’amendement n° 828 rectifié ter est présenté par MM. Vall, Artano et A. Bertrand, Mme M. Carrère, MM. Collin et Dantec, Mme N. Delattre, MM. Gabouty, Gold et Guérini, Mme Jouve, M. Labbé, Mme Laborde et MM. Menonville, Mézard, Requier et Roux.

Ces quatre amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 61 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le II de l’article 60 de la loi n° 2005-882 du 2 août 2005 en faveur des petites et moyennes entreprises, il est inséré un paragraphe ainsi rédigé :

« … - Seuls les produits satisfaisant aux conditions définies au II peuvent comporter le terme “équitable” dans leur dénomination de vente. »

La parole est à Mme Jacky Deromedi, pour présenter l’amendement n° 2 rectifié ter.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacky Deromedi

Le commerce équitable garantit une meilleure répartition de la valeur au sein des filières économiques, grâce à un dispositif de contractualisation pluriannuel établi sur la base de prix rémunérateurs qui couvrent les coûts de production, assorti d’un engagement social et environnemental et d’une obligation de transparence et de traçabilité. Le commerce équitable bénéficie d’une définition légale précise qui encadre les démarches des opérateurs économiques se référant à cette pratique.

Aujourd’hui, de plus en plus de produits mis sur le marché sont estampillés « équitables » – lait équitable, fruits équitables, etc. –, mais ils recouvrent une diversité de pratiques et d’engagements pas toujours conformes aux principes du commerce équitable énoncés à l’article 94 de la loi du 31 juillet 2014 relative à l’économie sociale et solidaire.

L’utilisation du terme « équitable », lorsqu’elle est abusive, est au détriment de la croissance des entreprises qui appliquent la loi, car les consommateurs ne sont pas en mesure de faire la différence, le cas échéant, entre les mentions « équitable » et « commerce équitable ». Valoriser des caractéristiques « équitables » présente indéniablement, pour une entreprise commerciale, un avantage en termes de marché. En témoigne un taux de croissance de 121 % du secteur du commerce équitable entre 2013 et 2016.

Comme pour les produits dits « bio », qui doivent respecter la réglementation sur l’agriculture « biologique », nous souhaiterions que seuls les produits conformes à la définition du commerce équitable inscrite à l’article 94 de la loi ESS de 2014 puissent comporter le terme « équitable » dans leur dénomination de vente.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

La parole est à M. Jean-Louis Tourenne, pour présenter l’amendement n° 137 rectifié quater.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Tourenne

Cet amendement a été parfaitement présenté par Mme Deromedi ; je ne saurais dire mieux.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

La parole est à M. Raymond Vall, pour présenter l’amendement n° 828 rectifié ter.

Debut de section - PermalienPhoto de Raymond Vall

Cet amendement a été parfaitement défendu. Élu d’un territoire rural, je soulignerai que les entreprises du secteur du commerce équitable ont notamment développé, sur la base de la définition qui a été rappelée et dont j’étais l’auteur, la marque « Paysans d’ici ». Aujourd’hui, des centaines de paysans attendent la réaffirmation de cette définition. Sinon, le travail qui a été accompli n’aura servi à rien. J’insiste lourdement pour que ces amendements soient pris en considération !

Debut de section - Permalien
Agnès Pannier-Runacher

Le règlement relatif à l’information des consommateurs sur les denrées alimentaires contient des dispositions qui permettent aux professionnels d’utiliser des informations facultatives sur les denrées alimentaires, dans la mesure où ces informations sont vraies et loyales – c’est l’article 36 de ce règlement. En outre, des dispositions générales du code de la consommation prohibent les pratiques commerciales déloyales : les articles L. 121-1 et suivants sanctionnent les pratiques commerciales trompeuses de deux ans d’emprisonnement et d’une amende de 300 000 euros, montant qui peut être porté à 10 % du chiffre d’affaires selon le profit illicite réalisé.

Il nous semble que la précision que les auteurs des amendements souhaitent apporter est plutôt de nature à compliquer les choses, y compris à l’égard de la Commission européenne, puisqu’elle pourrait être interprétée comme une façon d’entraver la libre circulation des marchandises, alors que nous disposons déjà d’un arsenal juridique que nous essayons de mettre en œuvre par des contrôles de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, la DGCCRF, sur ces allégations.

Le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

Je mets aux voix les amendements identiques n° 2 rectifié ter, 137 rectifié quater, 652 rectifié bis et 828 rectifié ter.

Les amendements sont adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 61 quater.

[Article examiné dans le cadre de la législation partielle en commission]

(Supprimé)

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

L’amendement n° 327 rectifié, présenté par MM. Tourenne et M. Bourquin, Mme Espagnac, MM. Lalande et Kanner, Mme Tocqueville, MM. Lurel et Durain, Mme Artigalas, M. Antiste, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Courteau, Duran et Fichet, Mme Monier et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 61 quinquies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À la première phrase du dernier alinéa de l’article L. 225-37 du code du commerce, les mots : « présente à » sont remplacés par les mots : « soumet à validation de ».

La parole est à M. Jean-Louis Tourenne.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Tourenne

Après un premier amendement prévoyant une fiscalité équilibrée et progressive pour les rémunérations différées, rejeté par la majorité sénatoriale, le groupe socialiste et républicain va présenter une série d’amendements qui forment un dispositif global de développement de la démocratie et de la justice sociale dans l’entreprise.

Notre groupe a considéré, en effet, que l’objectif pompeusement affiché par le Gouvernement de « mieux partager la valeur » n’était pas au rendez-vous de ce projet de loi – j’ai déjà eu l’occasion de le dire hier soir.

Fonder ce meilleur partage de la valeur sur la seule épargne salariale omet les sujets centraux que sont le partage entre dividendes et salaires, les écarts de salaires et la participation des salariés à la vie et aux décisions de l’entreprise.

La réduction des écarts de richesse et la lutte contre les inégalités participent de la cohésion nationale, comme sont venus nous le rappeler le mouvement dit des « gilets jaunes » et sa revendication principale de justice sociale. Celle-ci passe, notamment, par la réduction des écarts de salaires, dont l’ampleur n’est plus admissible ni socialement admise.

Dans cette perspective, nous proposons de renforcer la démocratie dans les grandes entreprises en matière de contrôle des rémunérations. Celui-ci doit être double : par les actionnaires et par les salariés.

Dans un premier temps, nous proposons de remplacer par une approbation la simple présentation à l’assemblée générale des actionnaires du rapport sur les rémunérations des dirigeants.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Canevet

Cet amendement prévoit que le rapport sur le gouvernement d’entreprise qui est établi par le conseil d’administration soit soumis pour validation à l’assemblée générale des actionnaires.

Une telle proposition reflète une méconnaissance de la finalité de ce rapport, qui vise à fournir aux actionnaires un certain nombre d’informations sur le gouvernement d’entreprise relatives au conseil d’administration et à ses membres, aux conventions réglementées, etc. Il ne s’agit pas d’un rapport sur la direction ou la stratégie de l’entreprise, devant être soumis à l’approbation des actionnaires.

La commission spéciale émet un avis défavorable sur cet amendement.

Debut de section - Permalien
Agnès Pannier-Runacher

Si je comprends bien, l’amendement vise à prévoir un vote des actionnaires sur la rémunération des dirigeants. Or il en est déjà ainsi. Cet amendement est donc inutile, et j’émets un avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

La parole est à M. Jean-Louis Tourenne, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Tourenne

Comme précédemment à propos du commerce équitable, vous affirmez, madame la secrétaire d’État, qu’il en est déjà ainsi d’une façon très péremptoire, …

Debut de section - Permalien
Agnès Pannier-Runacher

C’est la loi !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Tourenne

… mais pour ma part je n’en suis pas du tout convaincu. Les actionnaires peuvent certes être consultés sur la rémunération des dirigeants, mais nous demandons quant à nous une approbation de l’assemblée générale des actionnaires, ce qui est tout de même très différent.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

L’amendement n° 326 rectifié, présenté par MM. Tourenne et M. Bourquin, Mme Espagnac, MM. Lalande et Kanner, Mme Tocqueville, MM. Lurel et Durain, Mme Artigalas, M. Antiste, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Courteau, Duran et Fichet, Mme Monier et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 61 quinquies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le premier alinéa de l’article L. 225-37-2 du code du commerce est complété par les mots : « après avis conforme du comité social et économique ».

La parole est à M. Jean-Louis Tourenne.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Tourenne

Cet amendement constitue le deuxième volet du double contrôle – on va me dire que cela existe déjà… – des rémunérations des hauts dirigeants des grandes entreprises. Il porte sur le contrôle de celles-ci par les salariés, à travers leurs institutions représentatives.

Cet amendement vise en effet à instaurer un avis conforme du comité social et économique préalable, avant l’approbation de la résolution annuelle sur les rémunérations par l’assemblée générale des actionnaires.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Canevet

On ne peut pas proposer que le comité social et économique statue sur la rémunération des dirigeants de l’entreprise. Cela ne me paraît pas très sérieux ! L’avis est donc bien sûr défavorable.

Debut de section - Permalien
Agnès Pannier-Runacher

Je vous confirme que cela n’existe pas déjà, monsieur le sénateur ! J’émets également un avis défavorable, pour les raisons mentionnées par M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

La parole est à M. Jean-Louis Tourenne, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Tourenne

Je ne suis pas très susceptible, mais les adjectifs employés me semblent tout de même parfois assez difficiles à accepter…

C’est sérieux, mon cher collègue rapporteur ! Proposer que les salariés, qui contribuent largement à la richesse de l’entreprise, aient un droit de regard – il s’agit là non pas d’une approbation, mais d’un avis conforme – sur la rémunération des hauts dirigeants me semble très sérieux et digne d’être débattu.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Canevet

Il me semblerait légitime que les actionnaires salariés puissent disposer d’un tel droit de regard, mais pas l’ensemble des salariés.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

La parole est à M. Martial Bourquin, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Martial Bourquin

On touche là à un vrai problème, mis au jour par l’affaire Carlos Ghosn, celui des salaires indécents dans certaines entreprises, et certainement à l’une des grosses lacunes de ce projet de loi.

Il existe dans certains pays une volonté de limiter les très hauts salaires. Nous l’avons fait pour le secteur public. Cette question doit être abordée, car il s’agit d’un véritable scandale. Il y a une vingtaine d’années, les écarts de rémunérations étaient de 1 à 12 ou 20, ils sont aujourd’hui de 1 à 200 ou 300, et la représentation nationale laisse faire !

L’amendement présenté par mon collègue Jean-Louis Tourenne est profondément juste. Ce projet de loi n’aborde pas ce qui est une vraie question dans les entreprises.

Debut de section - PermalienPhoto de Fabien Gay

Je partage les propos de mon collègue Martial Bourquin. Ce n’est d’ailleurs pas le seul problème que pose ce texte.

Nous avions, dans le même esprit, déposé une série d’amendements, notamment un qui, à mon avis, aurait intéressé Mme la secrétaire d’État : il visait à garantir que les dirigeants d’entreprises détenues en tout ou partie par l’État paient bien leurs impôts en France. M. Darmanin lui-même a dit qu’il faudrait regarder cette question de près !

Je le redis avec force, je regrette que la commission spéciale ait frappé d’irrecevabilité un certain nombre d’amendements émanant de l’ensemble des groupes, car le débat se trouve de ce fait tronqué, alors que beaucoup, beaucoup de questions auraient mérité d’être soulevées. Par chance, quelques-uns de nos amendements sont passés sous la rafale des balles… Nous pourrons ainsi avoir un débat sur la limitation des écarts de rémunérations tout à l’heure. J’espère que nous serons alors majoritairement d’accord pour voter l’encadrement des hautes rémunérations.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

La parole est à Mme la présidente de la commission spéciale.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Fournier

Mon cher collègue, nous avons effectivement décidé de déclarer irrecevables certains amendements. Je tiens à rappeler une fois encore, en la matière, les dispositions de la Constitution et la doctrine du président du Sénat. Si nous avons agi ainsi, ce n’est nullement pour empêcher le débat, mais pour le cadrer, sachant que 123 articles ont déjà été ajoutés à un texte très hétéroclite qui en comportait à l’origine 73. Une telle évolution du volume d’un projet de loi est assez exceptionnelle.

Comme vous l’avez dit, des amendements de tous les groupes politiques ont été frappés d’irrecevabilité. Dans la logique de la commission spéciale, il était tout à fait normal de procéder ainsi, pour structurer le débat et limiter son champ.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

La parole est à M. Olivier Cadic, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Cadic

Il faut rappeler que ce texte vise à rendre nos entreprises plus fortes, plus solides, plus agiles pour se confronter à la compétition internationale. Cet amendement sort complètement du cadre et son dispositif est totalement irréaliste.

Par ailleurs, monsieur Bourquin, vous invoquez la transparence pour les hauts salaires dans les entreprises, mais où est la transparence en ce qui concerne les revenus des hauts fonctionnaires ? Les contribuables aimeraient bien connaître les rémunérations d’un grand nombre de personnes que leurs impôts servent à payer.

En outre, je suis frappé de voir comment vous jetez en pâture à l’opinion M. Carlos Ghosn, qui a sauvé Renault, qui sauvé Nissan, qui était en train de constituer un grand groupe automobile international, peut-être le premier.

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Cadic

D’une petite phrase, vous donnez à penser que ce grand monsieur serait un délinquant…

Debut de section - PermalienPhoto de Martial Bourquin

En plus, il était résident fiscal aux Pays-Bas ! Vous défendez cela ?

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Cadic

Il serait peut-être bon de défendre ces valeurs-là, monsieur Bourquin, cela ferait honneur à la France !

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

La parole est à M. Jean-Raymond Hugonet, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Raymond Hugonet

Je ne voudrais pas prolonger la polémique, mais ce débat est à l’image de ce que vit notre pays aujourd’hui.

Fustiger les salaires indécents de grands capitaines d’industries, de stars du sport ou des médias est très facile.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Raymond Hugonet

Chacun jugera selon sa sensibilité. On pourrait discuter du niveau d’imposition des hauts salaires, mais quand une telle personnalité paie ses impôts dans notre pays, cela a le mérite d’être conséquent. Ce qui est scandaleux, c’est que M. Carlos Ghosn, qui est certainement un grand capitaine d’industrie, ne soit pas fiscalisé en France.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Raymond Hugonet

M. Jean-Raymond Hugonet. C’est une honte absolue !

Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste et sur des travées du groupe socialiste et républicain.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Raymond Hugonet

Je respecte l’avis de notre collègue Cadic, mais, sincèrement, dans la situation sociale actuelle de notre pays, on ne peut même plus entendre un tel propos. Pourquoi choisit-on d’établir sa résidence fiscale aux Pays-Bas ? Pour s’en mettre plein les poches ! C’est un libéral qui vous dit cela.

M. Senard, ancien PDG de Michelin, est devenu PDG de Renault – il n’y a pas de hasard. Il a exprimé des idées très belles. Certains le prennent pour un utopiste, mais, à mon sens, il a parfaitement raison : le jour où un capitaine d’industrie ou une star ne montre plus l’exemple, il n’est plus légitime qu’il reçoive de tels salaires. C’est impossible !

Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains et du groupe La République En Marche, ainsi que sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

Je suis saisie de deux amendements identiques.

L’amendement n° 334 rectifié est présenté par MM. Tourenne et M. Bourquin, Mme Espagnac, MM. Lalande et Kanner, Mme Tocqueville, MM. Lurel et Durain, Mme Artigalas, M. Antiste, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Courteau, Duran et Fichet, Mme Monier et les membres du groupe socialiste et républicain.

L’amendement n° 576 rectifié est présenté par M. Gay, Mme Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 61 quinquies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le premier alinéa de l’article L. 232-12 du code de commerce, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Le montant des dividendes versés ne peut être supérieur au résultat net indiqué dans les comptes annuels approuvés. »

La parole est à M. Jean-Louis Tourenne, pour présenter l’amendement n° 334 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Tourenne

Madame la présidente, avec votre permission, je présenterai en même temps l’amendement n° 335 rectifié, car il s’agit d’un diptyque.

Ces deux amendements visent à protéger les entreprises des dérives de la financiarisation de l’économie en faisant primer l’emploi et le long terme sur le cours de la bourse.

L’amendement n° 334 rectifié tend à interdire aux entreprises de s’endetter pour verser des dividendes aux actionnaires, pratique malheureusement trop courante. Ainsi, GRDF a versé, en 2017, 1 milliard d’euros de dividendes, pour un résultat de 150 millions d’euros…

Quant à l’amendement n° 335 rectifié, il vise à interdire aux entreprises de verser des dividendes en cas de licenciements. À ce titre, je citerai également l’exemple de GRDF : alors même que cette entreprise trouvait des milliards à distribuer à ses actionnaires, elle a supprimé 10 000 emplois en trois ans.

Selon le rapport qu’Oxfam a consacré aux entreprises du CAC 40, « si l’on ramène le montant des dividendes versés au montant des bénéfices réalisés, la France est alors la championne mondiale : entre 2005 et 2015, ce sont les entreprises du CAC 40 qui ont reversé la plus grande part de leurs bénéfices aux actionnaires sous forme de dividendes ». Ces entreprises françaises sont ainsi et « de loin les plus gros payeurs de dividendes en Europe continentale » ; les dividendes qu’elles versent sont d’un tiers supérieurs à ceux que distribuent leurs voisines allemandes.

Mes chers collègues, nous vous proposons donc de rééquilibrer le rapport entre dividendes et salaires, pour plus de justice sociale et dans l’intérêt même de la pérennité des entreprises. J’ajoute que c’est l’investissement qui fait l’innovation, qui construit l’avenir, qui nous permet d’être compétitifs : quand on distribue l’argent d’abord sous forme de dividendes, on prend à coup sûr du retard sur les pays où d’autres pratiques ont cours.

Debut de section - PermalienPhoto de Fabien Gay

M. Fabien Gay. Avant tout, je veux remercier M. Hugonet de son intervention. Avoir des débats de qualité, argument contre argument, et parfois pouvoir nous rejoindre au-delà des clivages : c’est aussi cela, le Sénat !

M. Jean-Raymond Hugonet acquiesce.

Debut de section - PermalienPhoto de Fabien Gay

Selon l’excellent rapport d’Oxfam, entre 2009 et 2016, les entreprises du CAC 40 ont consacré 67 % de leurs bénéfices aux dividendes, 27 % aux investissements et seulement 5 % au versement de primes d’intéressement et de participation.

Ce récent rapport relève en outre que certains groupes, « comme Airbus ou Accor en 2009, ou encore Arcelor sur la période 2009-2016 », ont versé des dividendes alors qu’ils étaient en déficit. De son côté, Veolia a versé 3, 6 milliards d’euros de dividendes pour 3, 2 milliards d’euros de bénéfices ! Quant à Engie, dont nous avons parlé hier dans cet hémicycle, elle a versé, en 2016, « quinze fois plus de dividendes à ses actionnaires que ce que l’entreprise a fait de bénéfices ».

La priorité donnée à la distribution de dividendes est également au détriment de l’investissement, favorisant une logique de court terme. Entre 2012 et 2014, les entreprises du CAC 40 ont ainsi augmenté les dividendes de 44 %, tout en diminuant leur capacité d’investissement de 34 %.

En 2014, alors qu’il était ministre de l’économie, Emmanuel Macron regrettait lui aussi ce choix, en soulignant que les entreprises françaises avaient « préféré servir des dividendes à l’investissement », quand les entreprises allemandes avaient « une préférence continue pour l’emploi et l’investissement ».

Au regard des défis qui sont devant nous, qu’il s’agisse de l’énergie, notamment du développement des énergies renouvelables et du mix énergétique, ou encore des nouvelles technologies de transports et d’infrastructures, l’investissement est pourtant crucial. La limitation des pratiques en termes de versement de dividendes visées par cet amendement permettrait de promouvoir une gestion de long terme de l’entreprise et contribuerait à « rendre les entreprises plus justes », pour reprendre l’exposé des motifs de ce projet de loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

Les deux amendements suivants sont également identiques.

L’amendement n° 335 rectifié est présenté par MM. Tourenne et M. Bourquin, Mme Espagnac, MM. Lalande et Kanner, Mme Tocqueville, MM. Lurel et Durain, Mme Artigalas, M. Antiste, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Courteau, Duran et Fichet, Mme Monier et les membres du groupe socialiste et républicain.

L’amendement n° 577 rectifié est présenté par M. Gay, Mme Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 61 quinquies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le premier alinéa de l’article L. 232-12 du code de commerce, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Des dividendes ne peuvent pas être versés si l’entreprise a procédé à des licenciements économiques lors de l’exercice comptable écoulé. »

La parole est à M. Jean-Louis Tourenne, pour présenter l’amendement n° 335 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Bocquet

Dans le prolongement de l’amendement que Fabien Gay vient de présenter, nous proposons d’interdire le versement de dividendes aux actionnaires si l’entreprise a procédé, la même année, à des licenciements pour motif économique.

Notre groupe est en phase avec les doléances actuellement exprimées par les « gilets jaunes » : dès 2012, nos collègues Annie David et Dominique Watrin avaient déposé une proposition de loi tendant à interdire ce que nous appelions les licenciements boursiers. Nos concitoyens ne supportent plus de telles pratiques, dont nous connaissons de nombreux exemples.

En l’occurrence, cet amendement vise à encadrer le versement de dividendes en cas de licenciements pour motif économique.

Dans son récent rapport sur l’évasion fiscale des entreprises du CAC 40, que Fabien Gay vient de citer, Oxfam constate que les dividendes versés aux actionnaires ont explosé – leur montant a augmenté de 44 % –, alors que, dans la même période, les effectifs de ces entreprises ont diminué de 20 %. Certaines entreprises qui avaient accumulé des bénéfices ont donc procédé à des licenciements.

Dans ce capitalisme financier qui se développe, ce sont de plus en plus les actionnaires, et de moins en moins ceux qui ont un projet industriel, qui sont aux manettes. Les actionnaires sont donc servis en premier. Une grande partie des profits leur revient, sous forme de dividendes, de rachats d’actions, de « golden parachutes » quand les affaires vont mal, de retraites chapeau… Tout cela devient absolument insupportable !

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

Quel est l’avis de la commission spéciale sur les quatre amendements ?

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Canevet

Je comprends bien l’intention des auteurs de ces amendements, mais je rappelle que les décisions des assemblées générales sont tout à fait libres : ces dernières ont notamment le choix de l’affectation des ressources. Ainsi, il est possible par exemple que l’assemblée générale prélève sur les réserves libres pour alimenter la distribution de dividendes, sans que l’entreprise ait à s’endetter.

Monsieur Gay, vous citez de nouveau le rapport d’Oxfam ; excusez-moi, mais nous n’avons pas le même évangile !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Julien Bargeton

M. Julien Bargeton. Il y a l’Ancien et le Nouveau Testaments !

Nouveaux sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Canevet

Tout à fait !

La commission spéciale émet un avis défavorable sur les amendements n° 334 rectifié et 576 rectifié.

Quant aux amendements n° 335 rectifié et 577 rectifié, lier l’attribution de dividendes à la question des licenciements ne me semble pas de bon aloi. Une entreprise a besoin de s’adapter. Parfois, elle doit faire face à des circonstances difficiles, mais cela ne doit pas l’empêcher de décider la distribution de dividendes si les résultats sont positifs. L’avis est donc également défavorable.

Debut de section - Permalien
Agnès Pannier-Runacher

Comme on l’a indiqué hier, le partage de la valeur ajoutée entre le travail et le capital est stable en France depuis vingt ans. M. Gay s’est référé à un rapport de l’OCDE : les informations citées sont parfaitement exactes, mais ce rapport souligne également la stabilité de cette répartition.

Certains rapports relèvent que les dividendes ont beaucoup augmenté depuis 2009, mais, cette année-là, les dividendes avaient été amputés du fait de la crise ! §Quand on part de zéro, l’augmentation paraît forcément considérable…

Debut de section - Permalien
Agnès Pannier-Runacher

Par ailleurs, je rappelle le taux de rendement des dividendes rapportés à l’investissement des actionnaires s’établit, pour ces dernières années, à environ 3, 5 %. Certes, il faut également tenir compte de l’éventuelle augmentation des cours de la bourse ; mais je vous renvoie à l’évolution du CAC 40 depuis quelques mois…

Il faut ramener les chiffres à leur juste mesure économique. Pour ce qui concerne ces mêmes sociétés, les banquiers perçoivent, sur le marché obligataire, une rémunération de l’ordre de 2 % à 2, 5 %. Compte tenu des risques assumés par les actionnaires, une rémunération de 3, 5 % n’est pas complètement indécente.

Debut de section - Permalien
Agnès Pannier-Runacher

De plus, lorsque l’on considère la répartition de la valeur ajoutée entre le capital et le travail, il ne faut pas oublier la masse salariale, qui constitue le gros morceau – plus de 95 % – de la rémunération : la participation ne représente que 17 milliards d’euros sur un total de 500 milliards d’euros.

Concernant plus particulièrement le versement de dividendes par les sociétés dont le résultat net est négatif, je précise que la loi interdit aux entreprises de s’endetter pour distribuer des dividendes : il s’agit alors d’un délit de distribution de dividendes fictifs. Pour répartir des dividendes, il faut qu’il y ait un bénéfice distribuable. En fait, ce bénéfice distribuable est mis en réserve chaque année.

Debut de section - Permalien
Agnès Pannier-Runacher

Ainsi, l’adoption de ces amendements risquerait de conduire les entreprises à distribuer immédiatement l’intégralité de leur résultat, faute de savoir si elles pourront le faire l’année suivante. En conséquence, paradoxalement, le taux de distribution des résultats risquerait d’augmenter.

À mes yeux, mieux vaut que la distribution des résultats par les entreprises soit relativement stable dans le temps et soit adaptée aux à-coups de l’activité. C’est d’ailleurs ce que font les entreprises la plupart du temps : évitons de caricaturer, à partir d’un exemple choisi à dessein, le comportement des deux millions d’entreprises de notre pays. Il y a toujours des excès, dans tous les secteurs, mais beaucoup d’entreprises agissent de manière responsable.

Les dispositions présentées ne me paraissent donc pas appropriées. Voilà pourquoi j’émets un avis défavorable sur les amendements n° 334 rectifié, 576 rectifié, 335 rectifié et 577 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

La parole est à M. Martial Bourquin, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Martial Bourquin

Madame la secrétaire d’État, en somme, selon vous, tout va bien… Mais, lorsque la crise du pouvoir d’achat est telle que des salariés, des artisans, des commerçants manifestent sur les ronds-points, avec le soutien, parfois, de membres des professions libérales, comment voulez-vous que l’on entende un tel discours ? C’est impossible !

Debut de section - PermalienPhoto de Martial Bourquin

On ne peut pas ne pas établir de lien entre la faiblesse du pouvoir d’achat d’une grande partie des salariés et les dividendes versés aux actionnaires !

En 1981, dans notre pays, seulement 30 % des bénéfices étaient reversés aux actionnaires ; aujourd’hui, on en est à 80 % ! Or – nous faisons ce constat à l’unanimité, tous groupes politiques confondus – notre industrie souffre d’un manque d’investissements. Nous avons besoin que ces dividendes soient, en grande partie, consacrés à l’investissement. Savez-vous qu’en Allemagne de très grands groupes préfèrent ne pas être cotés en bourse afin de pouvoir mieux investir ?

Le Gouvernement propose la création d’un fonds d’investissement pour les innovations de rupture. Mais si, en même temps que la puissance publique déploie des moyens à ce titre, les bénéfices sont affectés au versement de dividendes plutôt qu’à l’investissement, cela ne peut pas marcher !

À force de refuser de voir la réalité des choses, vous finirez dans le mur. Les gens ne comprennent plus, et cela aboutit au mouvement des « gilets jaunes » ! Je vous le dis franchement : si l’on veut un sursaut en matière d’emploi, de lutte contre le chômage, de réindustrialisation du pays, il faut mener une véritable politique d’investissement. On ne s’en sortira pas en versant des dividendes très importants !

Debut de section - PermalienPhoto de Fabien Gay

Oui, encore, monsieur Karoutchi, mais ce débat est fondamental !

Madame la secrétaire d’État, vous parlez de l’intéressement et de la participation, qui représentent 17 milliards d’euros, sans dire un mot du reste : il y a de quoi rire ! Nous ne cessons de faire des propositions pour une autre répartition de la richesse dans ce pays, pour l’ouverture de négociations dans toutes les branches professionnelles en vue d’augmenter les salaires, mais vous les refusez toutes ! Nous avions déposé des amendements similaires en décembre dernier, lorsque le Gouvernement nous a soumis les mesures d’urgence économique et sociale : vous les aviez rejetés également. Pourtant, la question est fondamentale.

M. Hugonet peut en témoigner, j’ai indiqué en commission spéciale être prêt à ce que l’on reprenne le débat ouvert en 2008 par Nicolas Sarkozy. C’est pour vous faire plaisir, monsieur Karoutchi, que je me réfère à lui une nouvelle fois !

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

M. Roger Karoutchi. Continuez, vous êtes sur la bonne voie !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Fabien Gay

Il préconisait alors de répartir les bénéfices en trois tiers : un tiers pour le capital, un tiers pour le travail, un tiers pour les actionnaires. Même si je ne suis pas d’accord avec cette répartition, je suis prêt à avoir ce débat. Aujourd’hui, les salariés ne reçoivent que 5 % des bénéfices !

Madame la secrétaire d’État, votre discours est inaudible aujourd’hui. Je prendrai un exemple précis, que je connais bien, celui de l’entreprise Saft, dont ma mère a été ouvrière pendant trente-huit ans, à Bordeaux, et qui est aujourd’hui une filiale de Total. L’an dernier, le personnel de cette société s’est mis en grève pour exiger une augmentation de 2 % des salaires, lesquels étaient bloqués depuis plusieurs années. La grève a duré douze jours, et les salariés n’ont rien obtenu. Ils m’ont dit : « Fabien, nous, on regarde les chiffres. Depuis sept ans, Total a distribué 43 milliards d’euros de dividendes, et l’on vient nous expliquer qu’il n’y a pas d’argent pour augmenter les salaires de 2 % ! »

Cette situation est de plus en plus insupportable. Si vous ne le comprenez pas, c’est qu’il y a un sérieux problème !

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

La parole est à M. Éric Bocquet, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Bocquet

Pour appuyer les propos de mon collègue, je citerai deux personnes de qualité.

La première, c’est M. Bruno Le Maire, qui, ouvrant il y a quelques semaines le deuxième rendez-vous de Bercy, rappelait que l’objectif de ces journées était que le ministère de l’économie et des finances réfléchisse. C’est plutôt rassurant… Il parlait évidemment du capitalisme. Il n’y a rien de choquant à cela, même s’il n’est pas inintéressant de noter que, dans son discours long de trois pages, ce mot figurait cinq fois. M. Le Maire a notamment dit ceci : « Nous devons être capables […] de réfléchir à l’avenir du capitalisme. […] Nous avons un rejet croissant des inégalités par nos compatriotes et une demande de justice, de protection des peuples. » Apparemment, si l’inquiétude qui monte est ignorée d’une partie de cet hémicycle, elle est ressentie au plus haut niveau de l’État.

La seconde personne de qualité que je citerai est Mme Christine Lagarde, présidente du FMI. Bruno Le Maire parlait comme Che Guevara ; avec elle, c’est presque du Louise Michel

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

La parole est à M. Jean-Louis Tourenne, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Tourenne

Madame la secrétaire d’État, vous nous dites en substance, après plusieurs jours de débat : « C’est bien comme c’est. On ne change rien ! »

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Tourenne

Nous sommes les champions du monde de la distribution des dividendes ; parmi les pays industrialisés, nous sommes sans doute le dernier pour l’investissement : bref, ce « nouveau monde » est d’un conservatisme rarement égalé !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Tourenne

Je pensais tout de même que l’intention déclarée de mieux partager les richesses produites vous conduirait à nous proposer un certain nombre d’évolutions. Il y en aura bien une, mais elle marquera une régression pour les salariés : ils devront attendre cinq ans, une fois que l’effectif de leur entreprise aura dépassé le seuil des 50 salariés, avant de bénéficier de la participation. La majorité sénatoriale a même aggravé les choses en décidant que, demain, le seuil serait fixé à 100 salariés. Dès lors, nombre de salariés qui en profitaient jusqu’à présent perdront même le bénéfice de la participation.

À vous entendre, toute votre politique vise à ce que l’intéressement et la participation viennent financer l’économie : on peut bien sûr approuver cet objectif, qui est parfaitement louable, mais, parallèlement, vous acceptez que 70 % des bénéfices soient distribués en dividendes, au lieu d’être consacrés à l’investissement. C’est sans doute sur ce point que vous auriez dû mettre l’accent, mais vous préférez priver les salariés d’un certain nombre de droits.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

La parole est à M. Roger Karoutchi, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

M. Roger Karoutchi. Je remercie nos collègues du groupe CRCE de faire régulièrement référence à Nicolas Sarkozy ; comme quoi, tout est possible !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

De leur côté, nos collègues du groupe socialiste et républicain semblent oublier la période 2012-2017, …

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

M. Roger Karoutchi. … durant laquelle les dividendes ont explosé, sans que le gouvernement socialiste, ou désigné comme tel, prenne la moindre mesure de contrôle… En 2019, ils entendent faire la révolution qu’ils n’ont pas faite auparavant !

Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Oui, il y a un problème de pouvoir d’achat. D’ailleurs, j’ai eu l’occasion de dire que, pour sortir de la crise des « gilets jaunes », j’étais favorable à la tenue d’un Grenelle social, l’enjeu me paraissant autrement plus important que celui de la réduction du nombre de parlementaires.

Cela étant, le discours sur le pouvoir d’achat ne doit pas polluer le discours sur l’entreprise. Au Sénat ou ailleurs, il ne faudrait pas que les entrepreneurs soient considérés par principe comme des truqueurs ou des profiteurs. Quelques patrons sont pointés du doigt pour leurs excès, mais ne jetons pas pour autant l’opprobre sur l’ensemble des entrepreneurs : s’il n’y a pas d’investissements étrangers, de gens qui prennent des risques – considérables dans la période que nous vivons –, il n’y aura pas davantage de pouvoir d’achat, car il n’y aura pas de création d’emplois.

J’entends bien que l’on veuille remettre les choses à plat, mais j’attire l’attention de MM. Gay et Bocquet sur le fait que les entreprises ne sauraient dépendre d’un nouveau Gosplan…

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

La parole est à M. Jean-Raymond Hugonet, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Raymond Hugonet

Plusieurs personnalités ont été mentionnées. Permettez-moi d’évoquer pour ma part celui qui, dans cet hémicycle, a défendu pendant de nombreuses années la répartition en trois tiers, à savoir Serge Dassault, à qui j’ai eu l’honneur de succéder. J’ai le sentiment que, là où il est, il écoute notre débat… Avant même de préconiser la généralisation de cette formule, il l’avait appliquée dans son entreprise. Gardons-le à l’esprit !

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

La parole est à M. Olivier Cadic, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Cadic

Pour participer, à mon tour, à cette œuvre de mémoire, je rappellerai que c’est moi qui, au Sénat, ai présenté l’amendement tendant à supprimer la règle des trois tiers, instaurée précédemment par la Haute Assemblée, avec le soutien du gouvernement de François Hollande. En effet, depuis que ce système était entré en vigueur, l’intéressement ne fonctionnait plus : tout était entièrement bloqué.

Monsieur Hugonet, précédemment, au sujet des grands patrons dont la résidence fiscale est à l’étranger, vous avez adopté une position très moraliste. C’est votre droit ; d’autres pensent comme vous. Mais pourquoi vous arrêter aux salaires des patrons ? Regardons pourquoi les entreprises françaises investissent-elles de plus en plus à partir de leurs filiales situées aux Pays-Bas. Pourquoi la moitié des entreprises françaises investissant en Roumanie le font-elles, aujourd’hui, depuis les Pays-Bas ?

Augmentez la fiscalité, créez de nouvelles contraintes : continuez, allez-y ! Mais la nature a horreur du vide, et la liberté trouve toujours son chemin… Vous vous définissez comme un libéral : le plus grand libéral que je connaisse en France, c’est le consommateur qui pousse son caddie au supermarché. Lui ne fait pas de cadeaux : il compare les prix des produits et il prend le moins cher, …

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Ça, ce n’est pas une question de liberté…

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Cadic

… sans choisir forcément celui qui est fabriqué tout près de chez lui. Pour lui apporter des produits de qualité, au bon prix, il faut préserver la liberté d’entreprendre et les entreprises privées.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

La parole est à M. Richard Yung, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

Depuis une dizaine d’années, la France connaît une évolution qui la rapproche des États-Unis, avec une toute-puissance des actionnaires, dont le poids se fait particulièrement sentir dans les assemblées générales et dans la répartition de la valeur ajoutée, ce qui peut parfois entraîner des abus.

Or, nous le savons tous, au-delà du problème – réel – du pouvoir d’achat, ce qui manque en France, c’est l’investissement, à l’échelon non pas tant des entreprises du CAC 40 que des PME.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

Les deux modèles vers lesquels on peut se tourner sont, d’un côté, l’Allemagne, et, de l’autre, l’Italie, qui garde un fort niveau d’investissement, en particulier dans l’industrie. Les entreprises de ce pays sont souvent des structures familiales. Leurs propriétaires préfèrent investir plutôt que de s’octroyer des dividendes.

Comment faire ? Les modèles allemand et italien, pour autant qu’il s’agisse de modèles, relèvent au fond d’une culture, d’une tradition, pas d’une législation imposant une certaine répartition des bénéfices. C’est une question de pratiques, de valeurs, et nous ne pouvons pas légiférer sur ces matières.

Dès lors, comment encadrer le partage de la valeur ? La répartition des bénéfices en trois tiers était une idée sympathique, mais quelque peu simpliste et au fond inapplicable. Je vous le dis franchement : je ne sais pas très bien comment résoudre ce problème, pourtant réel.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Canevet

Il s’agit d’un débat passionné, et pour cause, ce sujet intéressant tous les sénateurs et, plus largement, l’ensemble de la population.

Chacun l’a compris, la philosophie de ce texte est, d’une part, d’orienter un peu plus l’épargne vers le financement des entreprises, et, d’autre part, de sensibiliser nos compatriotes aux questions économiques. L’enjeu est d’accroître l’esprit d’entreprise : notre pays ne s’en portera que mieux.

Quoi qu’en dise M. Tourenne, les mesures proposées au travers de ce texte vont développer l’intéressement et la participation des salariés : ces derniers bénéficieront davantage des fruits de la croissance des entreprises. Ce n’est pas par la coercition que l’on parviendra à ce résultat : il faut laisser beaucoup de liberté et de marge d’initiative à l’ensemble des acteurs.

Le relèvement des seuils me paraît aller dans le bon sens. Si certains de nos collègues en soulignent les aspects négatifs, j’en vois, moi, les aspects positifs : les seuils sont des freins à l’embauche, ainsi qu’a pu le constater la délégation sénatoriale aux entreprises au cours de ses nombreux déplacements sur le terrain.

Si les entreprises sont plus enclines à embaucher, la situation de l’emploi s’en trouvera améliorée dans notre pays, pour le plus grand bien de tout le monde, y compris de la sécurité sociale, monsieur Gay, dont les ressources augmenteront.

Mes chers collègues, soyons positifs et évitons une trop grande coercition, car notre droit prévoit la liberté d’organisation pour les propriétaires d’entreprise. La vindicte populaire permet d’éviter les abus, en sorte que tout se régule petit à petit, sans l’intervention coercitive de la loi.

Debut de section - Permalien
Agnès Pannier-Runacher

Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d ’ État. Monsieur Bocquet, je ne retirerai rien, pas une virgule, aux propos que vous avez cités de M. Le Maire et de Mme Lagarde, mais je voudrais que l’on évite de sombrer dans la caricature.

Murmures sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste et du groupe socialiste et républicain.

Debut de section - Permalien
Agnès Pannier-Runacher

Puisque j’aime les chiffres – c’est mon côté un peu techno… –, en voici qui concernent les dividendes et la masse salariale. De 476 milliards d’euros en 2007, cette dernière est passée à 588 milliards d’euros en 2017. Quant aux dividendes versés par les entreprises, qui s’élevaient à 167 milliards d’euros en 2007, ils se sont établis à 147 milliards d’euros en 2017. Les faits sont têtus, les chiffres aussi…

Cela signifie-t-il qu’il ne faut rien changer ? Je ne le crois pas, d’où ce projet de loi.

Le problème du pouvoir d’achat ne concerne-t-il que les salariés ? Ce n’est pas ce que j’entends quand j’écoute les « gilets jaunes ». Il me semble que les agriculteurs, dont 30 % vivent avec 350 euros par mois, les travailleurs indépendants, les commerçants, les artisans ont beaucoup à dire sur le sujet.

Essayons de poser les problèmes aussi précisément que possible et d’y répondre aussi efficacement que possible. Les entreprises font les emplois et la richesse du pays : mon rôle est de lutter pour qu’elles suppriment le moins possible d’emplois et qu’elles en créent le plus possible. C’est ainsi que je conçois ma mission !

M. Pierre Louault applaudit.

Les amendements ne sont pas adoptés.

Les amendements ne sont pas adoptés.

I. –

Non modifié

II –

Le présent article s’applique aux rapports afférents aux exercices clos à compter de la publication de la présente loi. –

Adopté.

I. – Le titre Ier du livre II du code de commerce est complété par des articles L. 210-10 et L. 210-11 ainsi rédigés :

« Art. L. 210 -10. – Une société peut faire publiquement état de la qualité de société à mission lorsque ses statuts précisent :

« 1° La raison d’être, au sens de l’article 1836-1 du code civil, dont elle s’est dotée ;

« 2° Des objectifs sociaux et environnementaux que la société se donne pour mission de poursuivre ;

« 3° Les modalités du suivi de l’exécution des objectifs sociaux et environnementaux mentionnés au 2° du présent article, pouvant prévoir un comité ou un référent de mission. Ce suivi doit donner lieu à un rapport joint au rapport de gestion mentionné à l’article L. 225-100, présenté à l’assemblée chargée de l’approbation des comptes de la société.

« Un décret en Conseil d’État précise les modalités de vérification annuelle de la mise en œuvre des objectifs énoncés au 2° du présent article par un organisme tiers indépendant, ainsi que la publicité dont cette vérification doit faire l’objet.

« Art. L. 210 -11. – Lorsque l’une des dispositions mentionnées à l’article L. 210-10 n’est pas respectée, ou lorsque le rapport de l’organisme tiers indépendant conclut que la société ne met pas en œuvre les objectifs qu’elle s’est assignée en application du 2° du même article L. 210-10, le ministère public ou toute personne intéressée peut saisir le président du tribunal statuant en référé aux fins d’enjoindre, le cas échéant sous astreinte, au représentant légal de la société de supprimer la mention “société à mission” de tous les actes, documents ou supports électroniques émanant de la société. »

II. – Après l’article L. 322-26-4 du code des assurances, il est inséré un article L. 322-26-4-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 322 -26 -4 -1. – Les articles L. 210-10 et L. 210-11 du code de commerce sont applicables aux sociétés d’assurance mutuelles. »

III. –

Non modifié

« Art. L. 110 -1 -1. – L’article L. 210-10 du code de commerce est applicable aux mutuelles et aux unions. »

IV. – L’article 7 de la loi n° 47-1775 du 10 septembre 1947 portant statut de la coopération est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les articles L. 210-10 et L. 210-11 du même code sont applicables aux coopératives régies par la présente loi. »

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

L’amendement n° 372, présenté par M. Tourenne, Mme Espagnac, MM. M. Bourquin et Lalande, Mme Artigalas, MM. Durain et Lurel, Mme Tocqueville, MM. Kanner et Antiste, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Courteau, Duran, Fichet et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 4

Compléter cet alinéa par les mots :

et qui ont été définis en conformité avec l’accord d’entreprise mentionné aux articles L. 2232-11 et suivants du code du travail

II. – Alinéa 5, première phrase

Rédiger ainsi cette phrase :

Les modalités du suivi de l’exécution des objectifs sociaux et environnementaux mentionnés au 2° du présent article, prévoyant un comité comportant au moins deux cinquièmes de membres désignés directement ou indirectement par les salariés.

La parole est à M. Jean-Louis Tourenne.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Tourenne

Excusez-moi, mes chers collègues, mais telle est mon impression !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Tourenne

Toutes les études montrent qu’une entreprise fonctionne bien lorsque l’ensemble des acteurs sont mobilisés et que les salariés y trouvent leur compte. Ce n’est donc pas en les pénalisant, en remontant le seuil et en privant ainsi un certain nombre d’entre eux du bénéfice de la participation, madame la secrétaire d’État, que vous relancerez l’économie ! Vous nous tenez des discours sur ce qui se passera demain comme vous l’entendez, vous, mais la réalité de l’emploi de demain sera sans doute différente : on devrait le voir dès la fin de l’année.

J’en viens à l’amendement n° 372.

Les entreprises qui répondent à certaines conditions en termes d’objectifs sociaux et environnementaux et d’existence d’un organe social chargé de suivre le respect de ces conditions pourront revendiquer la qualité d’entreprise à mission. La mission peut prendre plusieurs formes, comme le réinvestissement des profits.

Le groupe socialiste et républicain considère que le texte actuel ne va pas assez loin : il faut donner plus d’envergure à cette nouvelle approche de l’entreprise, préconisée par le rapport Senard-Notat. Elle est intéressante, mais il ne doit pas s’agir d’un simple argument de façade, destiné à montrer qu’on est plus « vert » que les autres. Il faut un véritable contenu et un suivi, ce qui suppose une codétermination. Les salariés, que l’on veut parties prenantes au développement économique, doivent être associés à l’élaboration du projet d’entreprise à mission.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Canevet

La commission spéciale a souhaité simplifier le dispositif relatif aux sociétés à mission, élaboré à l’Assemblée nationale avec un certain nombre de contraintes. Si nous voulons que ce dispositif réussisse, il faut qu’il soit simple et surtout que chaque entreprise puisse s’organiser comme elle l’entend, pour une mise en œuvre du projet adaptée à ses besoins. Les contraintes qu’il est proposé d’instaurer vont à l’encontre de cette philosophie. Avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Agnès Pannier-Runacher

Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d ’ État. Il est également défavorable. Pour qu’il y ait de plus en plus de sociétés à mission, il faut faciliter leur création et leur mise en œuvre. Il est parfaitement légitime que les salariés soient représentés dans le comité de suivi, mais, en voulant trop bien faire, on risque de tuer l’intérêt du dispositif.

M. Jean-Louis Tourenne s ’ exclame.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

L’amendement n° 1000, présenté par M. Canevet, au nom de la commission spéciale, est ainsi libellé :

Alinéas 10 et 11

Remplacer ces alinéas par un paragraphe ainsi rédigé :

III. – Après l’article L. 110-1-1 du code de la mutualité, sont insérés des articles L. 110-1-2 et L. 110-1-3 ainsi rédigés :

« Art. L. 110 -1 -2. – Une mutuelle ou une union peut faire publiquement état de la qualité de mutuelle à mission ou d’union à mission lorsque ses statuts précisent :

« 1° La raison d’être, au sens de l’article L. 110-1-1 du présent code, dont elle s’est dotée ;

« 2° Des objectifs sociaux et environnementaux que la mutuelle ou l’union se donne pour mission de poursuivre ;

« 3° Les modalités du suivi de l’exécution des objectifs sociaux et environnementaux mentionnés au 2° du présent article, pouvant prévoir un comité ou un référent de mission. Ce suivi doit donner lieu à un rapport joint au rapport de gestion mentionné à l’article L. 114-17 du présent code, présenté à l’assemblée chargée de l’approbation des comptes de la mutuelle ou de l’union ;

« 4° Un décret en Conseil d’État précise les modalités de vérification annuelle de la mise en œuvre des objectifs énoncés au 2° du présent article par un organisme tiers indépendant, ainsi que la publicité dont cette vérification doit faire l’objet.

« Art. L. 110 -1 -3. – Lorsque l’une des dispositions mentionnées à l’article L. 110-1-2 n’est pas respectée, ou lorsque le rapport de l’organisme tiers indépendant conclut que la mutuelle ou l’union ne met pas en œuvre les objectifs qu’elle s’est assignée en application du 2° du même article, le ministère public ou toute personne intéressée peut saisir le président du tribunal statuant en référé aux fins d’enjoindre, le cas échéant sous astreinte, au représentant légal de la mutuelle ou de l’union de supprimer la mention : “mutuelle à mission” ou “union à mission” de tous les actes, documents ou supports électroniques émanant de la mutuelle ou de l’union. »

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Canevet

Cet amendement vise à répliquer dans le code de la mutualité les dispositions introduites par l’Assemblée nationale dans le code de commerce en ce qui concerne les sociétés à mission. En effet, les organismes relevant du code de la mutualité souhaitent légitimement pouvoir recourir à ce dispositif en tant que de besoin.

Debut de section - Permalien
Agnès Pannier-Runacher

Avis favorable.

L ’ amendement est adopté.

L ’ article 61 septies est adopté.

I. – Le fonds de pérennité est constitué par l’apport gratuit et irrévocable des titres de capital ou de parts sociales d’une ou de plusieurs sociétés exerçant une activité industrielle, commerciale, artisanale ou agricole ou détenant directement ou indirectement des participations dans une ou plusieurs sociétés exerçant une telle activité, réalisé par un ou plusieurs fondateurs afin que ce fonds les gère, exerce les droits qui y sont attachés et utilise ses ressources dans le but de contribuer à la pérennité économique de cette ou de ces sociétés.

II. – Les statuts doivent être établis par écrit. Ils déterminent notamment la dénomination, l’objet, le siège et les modalités de fonctionnement du fonds de pérennité ainsi que la composition, les conditions de nomination et de renouvellement du conseil d’administration et du comité de gestion mentionné au VII.

L’objet comprend l’indication des principes et objectifs appliqués à la gestion des titres ou parts de la ou des sociétés mentionnées au I, à l’exercice des droits qui y sont attachés et à l’utilisation des ressources du fonds, ainsi que l’indication des actions envisagées dans ce cadre.

Les statuts définissent les modalités selon lesquelles ils peuvent être modifiés. Toutefois, la modification de l’objet ne peut être décidée qu’après deux délibérations du conseil d’administration, réunissant au moins les deux tiers des membres. Pour le calcul du quorum, ne sont pas pris en compte les membres représentés. Ces délibérations doivent être prises à deux mois au moins et six mois au plus d’intervalle et à la majorité des deux tiers des membres en exercice présents ou représentés.

III. –

Non modifié

Le fonds de pérennité jouit de la personnalité morale à compter de la date de publication au Journal officiel de la déclaration faite en préfecture.

Les modifications des statuts du fonds de pérennité et de leur annexe sont déclarées et rendues publiques selon les mêmes modalités ; elles ne sont opposables aux tiers qu’à compter de leur publication.

IV. –

Non modifié

Les titres de capital ou parts sociales de la ou des sociétés mentionnées au I du présent article sont inaliénables. Toutefois, lorsque le fonds de pérennité contrôle, au sens de l’article L. 233-3 du code de commerce, par l’effet de la libéralité ou d’une acquisition ou de la situation antérieure à ces dernières, l’une ou plusieurs de ces sociétés, l’apporteur ou le testateur, lors de la libéralité, ou le conseil d’administration, lors d’une acquisition, peut décider que cette inaliénabilité ne frappe pas tout ou partie des titres ou parts, dans la limite de la fraction du capital social qui n’est pas nécessaire à l’exercice de ce contrôle.

Dans les conditions du deuxième alinéa de l’article 900-4 du code civil, le fonds de pérennité peut être judiciairement autorisé à disposer des titres ou parts frappés d’inaliénabilité s’il advient que la pérennité économique de la ou des sociétés l’exige.

Aucun fonds public, de quelque nature qu’il soit, ne peut être versé à un fonds de pérennité.

Les ressources du fonds de pérennité sont constituées des revenus et produits de sa dotation, des produits des activités autorisées par les statuts et des produits des rétributions pour service rendu.

Le fonds de pérennité dispose librement de ses ressources dans la limite de son objet.

Sous réserve des dispositions des deuxième et troisième alinéas du présent IV, les statuts fixent les conditions dans lesquelles la dotation en capital peut être consommée.

V. –

Non modifié

Pour l’accomplissement des formalités de constitution du fonds de pérennité, les personnes chargées de cette mission ont la saisine sur les titres, meubles et immeubles légués. Ils disposent à leur égard d’un pouvoir d’administration, à moins que le testateur ne leur ait conféré des pouvoirs plus étendus.

VI. –

Non modifié

Le conseil d’administration est investi des pouvoirs les plus étendus pour agir en toute circonstance au nom du fonds de pérennité, dans la limite de son objet. Les clauses statutaires limitant les pouvoirs du conseil d’administration qui résultent du présent alinéa sont inopposables aux tiers.

Dans les rapports avec les tiers, le conseil d’administration engage le fonds de pérennité par les actes entrant dans son objet. Les actes réalisés en dehors de cet objet sont nuls, sans que cette nullité ne soit opposable aux tiers de bonne foi.

VII. –

Non modifié

VIII. –

Non modifié

Les peines prévues à l’article L. 242-8 du même code sont applicables aux membres du conseil d’administration du fonds de pérennité en cas de défaut d’établissement des comptes.

Lorsque le commissaire aux comptes relève, à l’occasion de l’exercice de sa mission, des faits de nature à compromettre la continuité de l’activité du fonds, il informe le conseil d’administration et recueille ses explications. Le conseil d’administration est tenu de lui répondre dans un délai fixé par décret. À défaut de réponse ou si les mesures prises lui apparaissent insuffisantes, il établit un rapport spécial qu’il remet au conseil d’administration et dont la copie est communiquée au comité de gestion et à l’autorité administrative, et invite le conseil à délibérer sur les faits relevés, dans des conditions et délais fixés par décret.

IX. –

Non modifié

Le fonds de pérennité adresse chaque année à l’autorité administrative un rapport d’activité auquel sont joints le rapport du commissaire aux comptes et les comptes annuels.

Si l’autorité administrative constate des dysfonctionnements graves affectant la réalisation de l’objet du fonds de pérennité, elle peut, après mise en demeure non suivie d’effet, décider, par un acte motivé qui fait l’objet d’une publication au Journal officiel, de saisir l’autorité judiciaire aux fins de sa dissolution.

Les modalités d’application du présent IX sont fixées par décret.

X. –

Non modifié

La dissolution du fonds entraîne sa liquidation dans les conditions prévues par les statuts ou, à défaut, à l’initiative du liquidateur désigné par l’autorité judiciaire.

À l’issue des opérations de liquidation, l’actif net du fonds est transféré à un bénéficiaire désigné par les statuts ou à un autre fonds de pérennité, une fondation reconnue d’utilité publique ou un fonds de dotation.

XI. –

Supprimé

XII. –

Non modifié

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

L’amendement n° 1036, présenté par M. Canevet, au nom de la commission spéciale, est ainsi libellé :

A. – Au début

Insérer trois alinéas ainsi rédigés :

I. – Le livre II du code de commerce est complété par un titre VI ainsi rédigé :

« Titre VI :

« Des fonds de pérennité

B. – Alinéa 1

Remplacer la mention :

I. -

par la mention :

« Art. L. 260-1. -

C. – Alinéa 2

1° Remplacer la mention :

II. –

par la mention :

« Art. L. 260-2. -

2° Remplacer la référence :

au VII

par la référence :

à l’article L. 260-7

D. – Alinéa 3

Remplacer la référence :

au I

par la référence :

à l’article L. 260-1

E. – Alinéa 5

1° Remplacer la mention :

III. -

par la mention :

« Art. L. 260-3. –

2° Remplacer la référence :

du IV

par la référence :

de l’article L. 260-4

F. – Alinéa 8

Remplacer la mention :

IV. -

par la mention :

« Art. L. 260-4. –

G. – Alinéa 14

Remplacer la référence :

IV

par le mot :

article

H. – Alinéa 15

Remplacer la mention :

V. -

par la mention :

« Art. L. 260-5. –

I. – Alinéa 17

1° Remplacer la mention :

VI. –

par la mention :

« Art. L. 260-6. -

2° Remplacer la référence :

au V

par la référence :

à l’article L. 260-5

J. – Alinéa 20

1° Remplacer la mention :

VII. -

par la mention :

« Art. L. 260-7. –

2° Remplacer la référence :

au I

par la référence :

à l’article L. 260-1

K. – Alinéa 21

Remplacer la mention :

VIII. –

par la mention :

« Art. L. 260-8. –

L. – Alinéa 24

Remplacer la mention :

IX. –

par la mention :

« Art. L. 260-9. -

M. – Alinéa 27

Remplacer la référence :

IX

par le mot :

article

N. – Alinéa 28

1° Remplacer la mention :

X. -

par la mention :

« Art. L. 260-10. –

2° Remplacer la référence :

du IX

par la référence :

de l’article L. 260-9

O. – Après l’alinéa 30

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Art. L. 260-11. – Les dispositions du présent livre ne sont pas applicables pas aux fonds de pérennité. »

P. – Après l’alinéa 31

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

II. – L’intitulé du livre II du code de commerce est ainsi rédigé : « Des sociétés commerciales, des groupements d’intérêt économique et des fonds de pérennité ».

Q. – Alinéa 32

1° Remplacer la mention :

XII. –

par la mention :

III. -

2° Après le mot :

mentionné

rédiger ainsi la fin de cet alinéa :

aux articles L. 260-1 à L. 260-11 du code de commerce ».

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Canevet

Cet amendement tend à codifier le fonds de pérennité pour permettre la mise en œuvre de celui-ci.

Debut de section - Permalien
Agnès Pannier-Runacher

La codification du fonds de pérennité dans le code de commerce ne paraît pas opportune.

Bien que son principal objet soit de pérenniser une société, le fonds de pérennité appartient à la grande famille des fondations et des fonds. Il n’est donc pas approprié de codifier les articles qui s’y rapportent dans le code de commerce. Le cadre applicable au fonds de pérennité est beaucoup plus proche de celui des fonds de dotation ou des fondations reconnues d’utilité publique, dont les régimes juridiques ne sont pas codifiés, que de celui des sociétés commerciales.

Les efforts de codification devraient plutôt porter sur la création d’un code des associations et des fondations, qui rassemblerait ces différentes structures. Plus ambitieux, ce travail n’a pas été réalisé dans le cadre du présent projet de loi, mais ce serait plus logique et plus juste sur le plan juridique.

Si l’amendement n’est pas retiré, l’avis sera défavorable.

L ’ amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

L’amendement n° 793, présenté par MM. Lévrier, Yung, Patient, Patriat, Amiel, Bargeton et Buis, Mme Cartron, MM. Cazeau, de Belenet, Dennemont, Gattolin, Hassani, Haut, Karam, Marchand, Mohamed Soilihi, Navarro et Rambaud, Mme Rauscent, M. Richard, Mme Schillinger, M. Théophile et les membres du groupe La République En Marche, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 1

Compléter cet alinéa par les mots :

et puisse réaliser ou financer des œuvres ou des missions d’intérêt général

II. – Après l’alinéa 3

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

Il comprend également, le cas échéant, l’indication des œuvres ou des missions d’intérêt général qu’il entend réaliser ou financer.

La parole est à M. Martin Lévrier.

Debut de section - PermalienPhoto de Martin Lévrier

De nombreux entrepreneurs souhaitent non seulement transmettre les titres de leur entreprise à une structure qui pérennise les valeurs morales et économiques qu’ils ont développées, mais aussi financer directement des missions philanthropiques, grâce aux bénéfices engendrés. Le modèle danois nous a inspiré le fonds de pérennité, qui permet d’inscrire de manière efficace le développement économique de l’entreprise au cœur de son environnement social et environnemental.

Le caractère hybride du fonds de pérennité est au cœur du projet : c’est dans la réalisation de cette double mission que réside toute la valeur ajoutée de cette structure. C’est pourquoi la rédaction adoptée par l’Assemblée nationale prévoyait d’autoriser le fonds de pérennité à réaliser ou à financer des œuvres ou des missions d’intérêt général.

Malheureusement, les modifications adoptées par la commission spéciale ont fait perdre cette dimension : les entrepreneurs intéressés seraient inutilement contraints de créer deux structures entièrement séparées et ne pourraient pas utiliser directement les fruits de leur société à des fins d’intérêt général.

Dans un souci de simplification, nous proposons donc de rétablir la rédaction adoptée par nos collègues députés.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Canevet

Je crois plutôt que c’est le caractère hybride du dispositif qui crée la confusion. Nous avons voulu le simplifier.

Devant l’Assemblée nationale, le ministre Bruno Le Maire s’est exprimé sur le sujet en ces termes : « Il faut bien distinguer cette nouvelle structure des fondations reconnues d’utilité publique ou des fonds de dotation, qui ont une finalité philanthropique. Elle aura en premier lieu une vocation économique et de garantir la stabilité des entreprises sur le long terme. » Je souscris totalement à cette analyse.

Rien n’empêchera des entreprises dont ce n’est pas l’objet social de financer des missions d’intérêt général en appliquant le droit en vigueur, comme elles sont déjà nombreuses à le faire aujourd’hui.

Ainsi, AXA a apporté 56 millions d’euros pour financer des opérations de sauvegarde du patrimoine culturel français et le groupe Bolloré soutient la recherche médicale via l’Institut du cerveau et de la moelle épinière. Il y a également du mécénat indirect, avec des sociétés qui créent des fondations distinctes : c’est ainsi que la fondation Michelin contribue à hauteur de 13 millions d’euros au financement de projets et que la fondation Monoprix soutient une association d’aide aux femmes sans domicile fixe.

Le droit en vigueur permet déjà de réaliser toutes ces actions philanthropiques. Ne nous trompons pas d’objectif : celui du fonds de pérennité est d’assurer la transmission et la pérennité des entreprises, notamment familiales. Il faut s’en tenir à cela.

Debut de section - Permalien
Agnès Pannier-Runacher

Le Gouvernement est favorable à l’amendement. La faculté proposée offrira une plus grande liberté en permettant à un fonds de pérennité de viser un objectif d’intérêt général.

Il semble que de nombreux entrepreneurs souhaitent non seulement transmettre les titres de leur entreprise à une structure qui pérennise les valeurs morales et économiques qu’ils ont développées, mais également financer des missions philanthropiques de manière directe, grâce aux bénéfices produits.

La valeur ajoutée du fonds de pérennité réside précisément dans la poursuite de cette double mission. Cette structure, qui s’inspire des meilleurs exemples européens, notamment de l’exemple danois, permet d’inscrire de manière efficace le développement économique d’une entreprise au cœur de son environnement social et environnemental.

Supprimer cette dimension contraindrait inutilement les entrepreneurs intéressés à créer deux structures entièrement séparées et les empêcherait d’utiliser directement les fruits de leur société pour le développement d’activités nouvelles.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

L’amendement n° 826, présenté par M. Patriat et les membres du groupe La République En Marche, est ainsi libellé :

Alinéa 30

Après le mot :

statuts

rédiger ainsi la fin de cette phrase :

, fonds de pérennité, fondation reconnue d’utilité publique ou fonds de dotation.

La parole est à M. Julien Bargeton.

Debut de section - PermalienPhoto de Julien Bargeton

L’article 61 octies, issu d’un excellent travail des rapporteurs de l’Assemblée nationale, s’inspire des fondations d’actionnaires des pays d’Europe du Nord. Il répond résolument au souci, que nous partageons tous, d’assurer la stabilité et la pérennité du capital français.

Avec cet amendement, notre groupe se fait l’écho de préoccupations dont nous ont fait part des professeurs de droit s’agissant des conditions de dissolution du fonds de pérennité.

À l’issue des opérations de liquidation, l’actif subsistant, lequel peut comprendre les titres initialement apportés, sera transféré soit à un bénéficiaire désigné par les statuts, soit à un autre fonds de pérennité, une fondation reconnue d’utilité publique ou un fonds de dotation. La difficulté naît du cas de dévolution de l’actif à une personne qui n’est pas un organisme d’intérêt général.

En l’état actuel des textes, il semble que la possibilité de transférer l’actif net à un bénéficiaire désigné dans les statuts, par exemple un descendant du fondateur, non seulement soit en contradiction avec l’idée d’affectation irrévocable des titres, mais en outre permette que les titres fassent l’objet, à plus ou moins brève échéance, d’une transmission à titre gratuit à une personne physique.

Sur le plan fiscal, plusieurs questions sont en suspens et méritent d’être débattues avec vous, madame la secrétaire d’État.

En particulier, quel sera le régime fiscal applicable au transfert des actifs à un bénéficiaire désigné dans les statuts autre qu’un organisme d’intérêt général, notamment une personne physique ? Au regard de l’argument selon lequel l’application des droits de mutation à titre gratuit serait dissuasive, il semble que cette seconde donation, selon la rédaction des statuts, puisse correspondre à la qualification de dotation graduelle, ou résiduelle, ce qui autoriserait la déduction des droits acquittés lors de la première donation.

Par ailleurs, quid de la taxation à l’IFI, l’impôt sur la fortune immobilière, des titres transférés représentatifs d’actifs immobiliers ?

L’objet de cet amendement est de répondre à toutes les préoccupations liées à la possibilité de transmettre l’actif net à un bénéficiaire autre qu’un fonds de pérennité ou une fondation reconnue d’utilité publique. Nous proposons de restreindre à trois cas la possibilité de ces transferts.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

Le sous-amendement n° 1025, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Amendement n° 826

I. – Alinéa 3

Remplacer le mot :

statuts

par le mot :

transféré

II. – Alinéa 5

Remplacer les mots :

, fonds de pérennité, fondation reconnue d’utilité publique ou fonds de dotation

par les mots :

à une fondation reconnue d’utilité publique ou un fonds de dotation qui relèvent de l’article 795 du code général des impôts ou à un autre fonds de pérennité, désignés par les statuts.

La parole est à Mme la secrétaire d’État, pour présenter ce sous-amendement et donner l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 826.

Debut de section - Permalien
Agnès Pannier-Runacher

Ce sous-amendement technique vise à compléter l’amendement n° 826, qui comporte une erreur rédactionnelle, pour en satisfaire l’objectif : interdire le transfert de l’actif net d’un fonds de pérennité liquidé à une personne autre qu’un fonds de pérennité ou un fonds de dotation.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Canevet

Il est défavorable sur l’amendement et le sous-amendement.

Dès lors que le bénéficiaire est désigné par les statuts, je ne vois pas quel problème poserait le transfert de l’actif net du fonds. Imaginons qu’une entreprise de taille intermédiaire familiale tente l’aventure du fonds de pérennité, avant de se rendre compte que ce nouveau cadre est trop rigide et ne lui permet pas de s’adapter aux aléas économiques et de pérenniser des emplois. Il me semble que les statuts pourraient prévoir, pour ce cas de figure, une dissolution du fonds. En pareil cas, quoi de plus normal que de transférer l’actif à un membre de la famille qui a créé l’entreprise et ses éventuelles filiales ?

Le sous-amendement n ’ est pas adopté.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

L’amendement n° 1028, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 30

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Cette transmission est soumise aux droits de mutation à titre gratuit dans les conditions de droit commun, au tarif prévu au tableau III de l’article 777 du code général des impôts entre personnes non-parentes.

La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Debut de section - Permalien
Agnès Pannier-Runacher

Cet amendement vise à répondre aux questions que M. le sénateur Bargeton vient de soulever. Nous proposons de confirmer que l’éventuelle transmission de l’actif net du fonds de pérennité à la suite de la liquidation de celui-ci est, comme toute libéralité consentie par une personne morale, assujettie aux droits de mutation à titre gratuit dans les conditions de droit commun. Le tarif applicable est également précisé.

La faculté de transmettre l’actif net à une personne physique sera ainsi conservée, mais en évitant les abus fiscaux qui pourraient consister à recourir à une telle structure pour réaliser une transmission sans fiscalité.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Canevet

Il ne s’agit finalement que de rappeler des règles fiscales de droit commun. Toutefois, ce rappel me paraît problématique dans le cas d’un fonds de pérennité, composé exclusivement de titres ou de parts sociales d’une société ou d’un groupe familial. Si, lors de la liquidation, le transfert de l’actif net s’opère au profit d’un membre de la famille, il me paraîtrait anormal que le tarif entre personnes non parentes s’applique. Il faudrait prévoir un tarif différent, voire une dérogation pure et simple. Avis défavorable.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

L ’ article 61 octies est adopté.

I. – L’article 18-3 de la loi n° 87-571 du 23 juillet 1987 sur le développement du mécénat est ainsi rédigé :

« Art. 18 -3. – Une fondation reconnue d’utilité publique peut recevoir et détenir des parts sociales ou des actions d’une société ayant une activité industrielle ou commerciale, sans limitation de seuil de capital ou de droits de vote.

« Lorsque ces parts ou ces actions confèrent à la fondation le contrôle de la société au sens de l’article L. 233-3 du code de commerce, les statuts de la fondation indiquent comment, en application du principe de spécialité, cette dernière assure la gestion de ces parts ou actions sans s’immiscer dans la gestion de la société. »

II

– Le second alinéa de l’article 18.3 de la loi n° 87-571 du 23 juillet 1987 sur le développement du mécénat entre en vigueur le 1er janvier 2022. –

Adopté.

(Non modifié)

La section 9 du chapitre V du titre II du livre II du code de commerce est ainsi modifiée :

1° L’article L. 225-261 est ainsi modifié :

a) À la première phase du premier alinéa, les mots : « (ouvriers et employés) » sont supprimés ;

b) À la première phase du troisième alinéa, les mots : « ouvriers et employés » sont remplacés par le mot : « salariés » ;

c) Après le troisième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Le commissaire aux comptes de la société anonyme atteste, dans un rapport établi dans un délai de six mois à compter de la date de l’assemblée générale ordinaire prévue à l’article L. 225-100, que les dividendes attribués aux salariés faisant partie de la société coopérative de main-d’œuvre l’ont été en conformité avec les règles fixées par les statuts de cette dernière et les décisions de son assemblée générale. » ;

2° Aux première et dernière phrases de l’article L. 225-268, après les mots : « d’administration », sont insérés les mots : « ou de surveillance ». –

Adopté.

(Supprimés)

I. – A. – La section 2 du chapitre V du titre II du livre II du code de commerce est ainsi modifiée :

1° AA Après le premier alinéa des articles L. 225-23 et L. 225-71, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Les dispositions du premier alinéa du présent article s’appliquent également aux sociétés dont les titres ne sont pas admis aux négociations sur un marché réglementé et qui emploient à la clôture de deux exercices consécutifs au moins mille salariés permanents dans la société et ses filiales, directes ou indirectes, dont le siège social est fixé sur le territoire français, ou au moins cinq mille salariés permanents dans la société et ses filiales, directes ou indirectes, dont le siège social est fixé sur le territoire français et à l’étranger. » ;

1° A

Supprimé

1° L’article L. 225-27-1 est ainsi modifié :

a) Le deuxième alinéa du I est remplacé par quatre alinéas ainsi rédigés :

« Une société dont l’activité principale est d’acquérir et de gérer des filiales et des participations peut ne pas mettre en œuvre l’obligation prévue au premier alinéa du présent I si elle remplit chacune des conditions suivantes :

« 1° Elle n’est pas soumise à l’obligation de mettre en place un comité social et économique en application de l’article L. 2311-2 du code du travail ;

« 2° Elle détient une ou plusieurs filiales, directes ou indirectes, soumises à l’obligation prévue au premier alinéa du présent I ;

« 3° Ses actions ne sont pas admises aux négociations sur un marché réglementé ou au moins quatre cinquièmes de ses actions sont détenues, directement ou indirectement, par une personne physique ou morale agissant seule ou de concert. » ;

b) Au premier alinéa du II, les deux occurrences du mot : « douze » sont remplacées par le mot : « huit » ;

c)

Supprimé

2° L’article L. 225-79-2 est ainsi modifié :

a) Le deuxième alinéa du I est remplacé par quatre alinéas ainsi rédigés :

« Une société dont l’activité principale est d’acquérir et de gérer des filiales et des participations peut ne pas mettre en œuvre l’obligation prévue au premier alinéa du présent I si elle remplit chacune des conditions suivantes :

« 1° Elle n’est pas soumise à l’obligation de mettre en place un comité social et économique en application de l’article L. 2311-2 du code du travail ;

« 2° Elle détient une ou plusieurs filiales, directes ou indirectes, soumises à l’obligation prévue au premier alinéa du présent I ;

« 3° Ses actions ne sont pas admises aux négociations sur un marché réglementé ou au moins quatre cinquièmes de ses actions sont détenues, directement ou indirectement, par une personne physique ou morale agissant seule ou de concert. » ;

b) Au premier alinéa du II, les deux occurrences du mot : « douze » sont remplacées par le mot : « huit » ;

c)

Supprimé

B. – Pour l’application du A, l’entrée en fonction des administrateurs et des membres du conseil de surveillance représentant les salariés intervient au plus tard six mois après l’assemblée générale portant les modifications statutaires nécessaires à leur élection ou à leur désignation. Ces modifications statutaires sont proposées lors de l’assemblée générale ordinaire organisée en 2020.

C. –

Supprimé

II. – La section 4 du chapitre IV du livre Ier du code de la mutualité est ainsi modifiée :

1° Le dernier alinéa de l’article L. 114-16 est supprimé ;

2° Après le même article L. 114-16, il est inséré un article L. 114-16-2 ainsi rédigé :

« Art. L. 114 -16 -2. – I. – Dans les mutuelles, unions et fédérations employant entre cinquante et neuf cent quatre-vingt-dix-neuf salariés, deux représentants de ceux-ci, élus dans les conditions fixées par les statuts, assistent avec voix consultative aux séances du conseil d’administration.

« Toutefois, leurs statuts peuvent prévoir que ces deux représentants assistent avec voix délibérative aux séances du conseil d’administration.

« II. – Dans les mutuelles, unions et fédérations employant, à la clôture de deux exercices consécutifs, au moins mille salariés permanents, les statuts prévoient que le conseil d’administration comprend, outre les administrateurs prévus à l’article L. 114-16, des représentants des salariés, qui assistent avec voix délibérative aux séances du conseil d’administration. Le nombre de ces représentants est au moins égal à deux.

« Les statuts sont modifiés dans les douze mois suivant la clôture du second des deux exercices mentionnés au premier alinéa du présent II. L’élection des représentants des salariés intervient dans les neuf mois suivant la modification des statuts.

« Par dérogation au deuxième alinéa du présent II, dans les mutuelles, unions ou fédérations ayant mis en œuvre le second alinéa du I, l’entrée en fonction des représentants des salariés mentionnés au premier alinéa du présent II intervient au plus tard à la date du terme des mandats exercés par les représentants mentionnés au même premier alinéa.

« III. – Pour l’application des I et II, tous les salariés de la mutuelle, de l’union ou de la fédération dont le contrat de travail est antérieur de trois mois à la date de l’élection sont électeurs. Le vote est secret.

« L’élection a lieu au scrutin de liste à la représentation proportionnelle au plus fort reste et sans panachage. Chaque liste comporte un nombre de candidats double de celui des sièges à pourvoir et être composée alternativement d’un candidat de chaque sexe. Sur chacune des listes, l’écart entre le nombre des candidats de chaque sexe ne peut être supérieur à un.

« En cas d’égalité des voix, les candidats dont le contrat de travail est le plus ancien sont déclarés élus.

« Les autres modalités de l’élection, notamment les modalités selon lesquelles les sièges peuvent être pourvus, en dehors d’une assemblée générale, en cas de vacance d’un poste par décès, démission, révocation, rupture du contrat de travail ou pour toute autre cause que ce soit, ainsi que la durée de leur mandat qui ne peut être supérieure à six ans, sont fixées par les statuts.

« Les représentants élus par les salariés doivent être titulaires d’un contrat de travail avec la mutuelle, l’union ou la fédération antérieur d’une année au moins à leur nomination et correspondant à un emploi effectif. Toutefois, la condition d’ancienneté n’est pas requise lorsqu’au jour de la nomination, la mutuelle, l’union ou la fédération est constituée depuis moins d’un an.

« Les représentants élus par les salariés ne sont pas pris en compte pour la détermination du nombre minimal d’administrateurs prévus à l’article L. 114-16 ni pour l’application des dispositions prévues à l’article L. 114-22.

« Le mandat de représentant élu par les salariés est incompatible avec tout mandat de délégué syndical ou de membre du comité social et économique de la mutuelle, union ou fédération. Il est également incompatible avec l’exercice de fonctions clés ou de dirigeant opérationnel.

« Le représentant élu par les salariés qui, lors de son élection, est titulaire d’un ou de plusieurs de ces mandats doit s’en démettre dans les huit jours. À défaut, il est réputé démissionnaire de son mandat de représentant élu par les salariés.

« Les représentants élus par les salariés disposent du temps nécessaire pour exercer utilement leur mandat, dans les mêmes conditions que celles définies à l’article L. 225-30-1 du code de commerce pour les administrateurs salariés.

« Ils bénéficient à leur demande, lors de leur première année d’exercice, d’une formation à la gestion adaptée à l’exercice de leur mandat, à la charge de la mutuelle, de l’union ou de la fédération. Ce temps de formation, dont la durée ne peut être inférieure à vingt heures par an, n’est pas imputable sur le crédit d’heures prévu au neuvième alinéa du présent III.

« Les représentants élus par les salariés ne perdent pas le bénéfice de leur contrat de travail. Leur rémunération en tant que salariés ne peut être réduite du fait de l’exercice de leur mandat.

« La rupture du contrat de travail met fin au mandat de représentant élu par les salariés.

« Les représentants élus par les salariés ne peuvent être révoqués que pour faute dans l’exercice de leur mandat, par décision du président du tribunal de grande instance, rendue en la forme des référés, à la demande de la majorité des membres du conseil d’administration. La décision est exécutoire par provision.

« Toute élection ou nomination intervenue en violation du présent article est nulle. Cette nullité n’entraîne pas celle des délibérations auxquelles a pris part le représentant élu irrégulièrement nommé. »

II bis. –

Non modifié

« Dans les sociétés d’assurance mutuelle employant, à la clôture de deux exercices consécutifs, au moins mille salariés permanents, les statuts prévoient qu’au moins deux administrateurs ou membres du conseil de surveillance sont élus par les salariés. »

III. –

Non modifié

La modification des statuts mentionnée au II du même article L. 114-16-2 et au cinquième alinéa de l’article L. 322-26-2 du code des assurances, dans leur rédaction résultant de la présente loi, a lieu au plus tard dans les douze mois suivant la clôture de l’exercice 2022 pour les sociétés d’assurance mutuelle, mutuelles, unions et fédérations qui emploient, à la clôture des deux exercices consécutifs précédents, plus de mille salariés permanents. Jusqu’à cette modification des statuts, les mutuelles, unions et fédérations concernées restent régies par le dernier alinéa de l’article L. 114-16 du code de la mutualité et les sociétés d’assurance mutuelle par l’article L. 322-26-2 du code des assurances, dans leur rédaction antérieure à la présente loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

L’amendement n° 1001, présenté par M. Canevet, au nom de la commission spéciale, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 1

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

…° L’avant-dernière phrase du premier alinéa de l’article L. 225-23 est complétée par les mots : «, ni pour l’application du premier alinéa de l’article L. 225-18-1 » ;

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Canevet

Il s’agit d’étendre aux représentants des salariés actionnaires l’exception prévue pour les représentants des salariés en matière de règles de parité.

Debut de section - Permalien
Agnès Pannier-Runacher

Avis favorable.

L ’ amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

L’amendement n° 1002, présenté par M. Canevet, au nom de la commission spéciale, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 2

Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :

1° AA Les articles L. 225-23 et L. 225-71 sont ainsi modifiés :

…) Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

II. – Après l’alinéa 3

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

…) Au deuxième alinéa, les mots : « à l’alinéa précédent » sont remplacés par les mots : « au premier alinéa » ;

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Canevet

Il s’agit d’un amendement de coordination.

Debut de section - Permalien
Agnès Pannier-Runacher

Avis favorable.

L ’ amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

L’amendement n° 688 rectifié, présenté par M. Gay, Mmes Apourceau-Poly, Cohen, Gréaume, Lienemann et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 4

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

…° À la deuxième phrase du premier alinéa de l’article L. 225-27, les mots : « supérieur à quatre ou, dans les sociétés dont les actions sont admises aux négociations sur un marché réglementé, cinq, ni excéder le » sont remplacés par les mots : « inférieur au » ;

La parole est à M. Éric Bocquet.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Bocquet

M. Éric Bocquet. Cette intervention vaudra aussi défense de l’amendement n° 689 rectifié, qui, comme l’amendement n° 688 rectifié, porte sur la représentation des salariés dans les entreprises. Vous voyez, mes chers collègues, que nous apprécions, nous aussi, la compétitivité et l’efficacité !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Bocquet

Le renforcement du dialogue social en France passe par un saut qualitatif en termes de représentation des salariés au sein des organes de direction des entreprises.

Deux lois récentes ont étendu et renforcé les obligations en matière d’administrateurs salariés pour les entreprises privées : le seuil, fixé à 5 000 salariés par la loi de 2013 relative à la sécurisation de l’emploi, a été ramené à 1 000 par la loi de 2015 relative au dialogue social et à l’emploi. Depuis le 1er janvier 2017, le conseil d’administration doit comporter un administrateur salarié s’il comprend jusqu’à douze membres, deux si son effectif est supérieur.

L’article 62 du présent projet de loi augmente le nombre des représentants des salariés dans les conseils d’administration et de surveillance : il fixe ce nombre à deux à partir de huit administrateurs, au lieu de douze actuellement. Certes, cela va dans le sens d’une plus forte représentation des salariés dans les conseils d’administration, mais il faut selon nous aller plus loin.

C’est la raison pour laquelle nous proposons d’assurer une présence minimale de deux administrateurs salariés dans tous les conseils d’administration, à l’exception, bien sûr, de ceux qui n’en comprennent que trois.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Canevet

L’équilibre trouvé dans le texte me paraît satisfaisant. Avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Agnès Pannier-Runacher

Avis défavorable, pour la même raison.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 114, présenté par M. Tourenne, Mme Espagnac, MM. M. Bourquin, Lalande et Kanner, Mme Artigalas, MM. Durain et Lurel, Mme Tocqueville, M. Antiste, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Courteau, Duran, Fichet et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 11

Rédiger ainsi cet alinéa :

b) Au premier alinéa du II, les mots : « au moins égal à deux dans les sociétés dont le nombre d’administrateurs mentionnés aux articles L. 225-17 et L. 225-18 est supérieur à douze et au moins à un s’il est égal ou inférieur à douze » sont remplacés par les mots : « égal à la moitié du nombre d’administrateurs mentionnés aux articles L. 225-17 et L. 225-18. Si celui-ci est impair, le nombre d’administrateurs salariés est égal à l’unité inférieure par rapport à la moitié du premier. L’un des sièges d’administrateur salarié est réservé aux salariés cadres. Les autres sièges ne sont pas réservés à une catégorie particulière de salarié » ;

II. – Alinéa 19

Rédiger ainsi cet alinéa :

b) Au premier alinéa du II, les mots : « au moins égal à deux dans les sociétés dont le nombre de membres désignés selon les modalités mentionnées à l’article L. 225-75 est supérieur à douze et au moins à un s’il est égal ou inférieur à douze » sont remplacés par les mots : « égal à la moitié du nombre des membres du conseil de surveillance désignés selon les modalités mentionnées à l’article L. 225-75. Si celui-ci est impair, le nombre de membres représentant les salariés est égal à l’unité inférieure par rapport à la moitié du premier. L’un des sièges d’administrateur salarié est réservé aux salariés en statut cadre. Les autres sièges ne sont pas réservés à une catégorie particulière de salarié » ;

III. – Après l’alinéa 20

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

…° Après la première phrase du troisième alinéa de l’article L. 227-1, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Les articles L. 225-17 à L. 225-95-1 sont applicables aux sociétés par actions simplifiées qui emploient, à la clôture de deux exercices consécutifs, au moins cinq mille salariés permanents. » ;

La parole est à M. Jean-Louis Tourenne.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Tourenne

Le dispositif de l’article 62 du projet de loi, qui augmente le nombre d’administrateurs salariés dans les conseils d’administration ou de surveillance, est très insuffisant. Comme il vient d’être indiqué, le seuil à partir duquel le conseil d’administration comptera deux administrateurs salariés est abaissé de douze à huit administrateurs non salariés.

À l’instar de nombre des dispositions de ce projet de loi, cet article est symptomatique de la politique du Gouvernement, qui présente comme des réformes majeures ce qui constitue en réalité des avancées médiocres. Même le rapport Notat-Senard se trouve ainsi « ratiboisé » par le Gouvernement, qui le juge sans doute trop audacieux…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Tourenne

Certes, le Gouvernement propose l’abaissement du seuil de douze administrateurs à huit, mais il renonce sans raison valable à la hausse du nombre d’administrateurs salariés dans les entreprises comptant plus de douze administrateurs non salariés. Or celles-ci étant les plus nombreuses, l’effet de la mesure sera limité. À l’évidence, elle ne permettra pas d’infléchir la gouvernance d’entreprise vers une prise en compte accrue du long terme. Nous proposons donc, sur la base des comparaisons européennes, de fixer un principe clair et ambitieux, sans s’en tenir à une valeur absolue ne tenant pas compte des proportions au sein du conseil d’administration : un tiers d’administrateurs salariés dans les conseils d’administration, quel que soit le nombre d’administrateurs non salariés.

Les administrateurs salariés sont la voix de l’intérieur : ils connaissent certaines réalités industrielles, économiques et sociales de l’entreprise que les autres administrateurs n’ont pas toujours à l’esprit au moment de prendre des décisions qui engagent l’avenir de celle-ci. Ils sont les gardiens d’une bonne gouvernance, soucieuse du long terme, dépassant l’horizon de la seule performance financière de court terme.

Il est donc essentiel, à l’heure où les entreprises sont de plus en plus enfermées dans la spirale du court-termisme et alors que des enjeux comme la question environnementale sont cruciaux, d’augmenter de façon nette le nombre d’administrateurs salariés dans les conseils, à l’instar de ce qui se pratique en Allemagne et dans la plupart des autres pays de l’Union européenne. Je rappelle que, en Allemagne, au-delà de 2 000 salariés, il y a 50 % d’administrateurs salariés. On me dira qu’il s’agit, en l’occurrence, des conseils de surveillance –j’anticipe la réponse qui va m’être faite… –, mais il reste que nous sommes largement en deçà de ce qui se pratique ailleurs, avec les conséquences que cela implique.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

L’amendement n° 689 rectifié, présenté par M. Gay, Mmes Apourceau-Poly, Cohen, Gréaume, Lienemann et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 11

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

…) Après les mots : « est au moins », la fin du même premier alinéa du II est ainsi rédigée : « ne peut être inférieur à deux, sauf dans l’hypothèse où le nombre des administrateurs mentionnés aux articles L. 225-17 et L. 225-18 est de trois. » ;

Cet amendement a déjà été défendu.

Quel est l’avis de la commission spéciale ?

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Canevet

M. Michel Canevet, rapporteur. Avis défavorable. Toute médiocre qu’elle vous paraisse, monsieur Tourenne, l’évolution proposée me semble importante, en tout cas suffisante. Si vous souhaitez que tous les salariés fassent partie du conseil d’administration, cela existe déjà : cela s’appelle une SCOP !

M. Fabien Gay s ’ esclaffe.

Debut de section - Permalien
Agnès Pannier-Runacher

L’évolution est sensible, en effet, et elle fait suite à celle intervenue en 2015, sur laquelle nous n’avons pas beaucoup de recul. Laissons les conseils d’administration intégrer ces deux évolutions. Au reste, je tiens à le rappeler, on peut être administrateur non salarié et avoir néanmoins une vision de long terme… Avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Fabien Gay

M. Fabien Gay. Mon explication de vote sera rapide, madame la présidente, car je ne voudrais pas ralentir le rythme effréné que nous prenons en ce moment…

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Fabien Gay

Hier, nous avons eu un débat sur les moyens d’intéresser les salariés à leur entreprise : l’actionnariat, l’épargne salariale, etc. L’un d’entre eux est de leur permettre de décider avec la direction.

Vous avez raison, monsieur le rapporteur, il s’agit d’une évolution sensible, mais nous pensons qu’il existe encore une marge de progrès. Cette question se posera de nouveau avec force. Nous avions déposé un certain nombre d’amendements relatifs à la démocratie sociale, qui est une revendication au même titre que la démocratie citoyenne. Vous citez souvent l’Allemagne : cette référence est ici intéressante, même si, M. Tourenne l’a dit, c’est un autre modèle, caractérisé par la cogestion et l’existence de conseils de surveillance.

Nous voterons la mesure proposée car elle constitue un progrès, mais on aurait pu aller beaucoup loin, je le répète. Je me félicite que vous ayez cité les SCOP, monsieur le rapporteur. Peut-être aurions-nous pu les soutenir plus massivement au travers de ce projet de loi, …

Debut de section - PermalienPhoto de Fabien Gay

… qui comporte 200 articles, même si l’on ne peut pas tout faire ! Nous reviendrons sur ce sujet par le biais d’une proposition de loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

Mme la présidente. Monsieur Gay, il me semble que nous avons encore une marge de progression pour en arriver à un rythme effréné !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Fabien Gay

Ma remarque n’était pas dirigée contre vous, madame la présidente !

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

L’amendement n° 1003, présenté par M. Canevet, au nom de la commission spéciale, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 21

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

… – Pour les sociétés soumises au V des articles L. 225-27-1 et L. 225-79-2 du code de commerce, le deuxième alinéa de ce même V n’est applicable qu’à l’expiration du mandat suivant le mandat en cours, lorsque celui-ci expire dans les six mois à compter de la promulgation de la présente loi.

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Canevet

Cet amendement vise à octroyer aux entreprises un délai supplémentaire pour mettre en place la nouvelle gouvernance en matière de représentation des salariés.

Debut de section - Permalien
Agnès Pannier-Runacher

La loi permet aux sociétés de ne réunir leur assemblée générale nommant les représentants des salariés qu’en 2020, ce qui, de notre point de vue, leur laisse un temps suffisant pour s’organiser. Les premières assemblées générales auront probablement lieu au mois de mai 2020. L’avis est défavorable.

L ’ amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

L’amendement n° 796, présenté par MM. Yung, Patient, Patriat, Amiel, Bargeton et Buis, Mme Cartron, MM. Cazeau, de Belenet, Dennemont, Gattolin, Hassani, Haut, Karam, Lévrier, Marchand, Mohamed Soilihi, Navarro et Rambaud, Mme Rauscent, M. Richard, Mme Schillinger, M. Théophile et les membres du groupe La République En Marche, est ainsi libellé :

Alinéa 22

Rétablir le C dans la rédaction suivante :

C. – Au plus tard trois ans après la publication de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport évaluant les effets économiques et managériaux de la présence d’administrateurs représentant les salariés au sein des conseils d’administration ou de surveillance des sociétés concernées, l’opportunité d’une extension de cette disposition à trois administrateurs lorsque ces conseils comportent plus de douze membres et la pertinence d’intégrer dans ce panel un administrateur représentant les salariés des filiales situées en dehors du territoire national, lorsque la société réalise une part significative de son activité à l’international.

La parole est à M. Martin Lévrier.

Debut de section - PermalienPhoto de Martin Lévrier

Je ne me fais pas beaucoup d’illusions sur le sort qui sera réservé à cet amendement…

En effet, nous proposons que le Gouvernement remette au Parlement un rapport

Exclamations amusées sur les travées du groupe Les Républicains.

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Martin Lévrier

… sur l’introduction d’administrateurs salariés au sein des conseils d’administration des entreprises.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Ça suffit, c’est le dixième rapport depuis le début !

Debut de section - PermalienPhoto de Martin Lévrier

Ce rapport nous permettrait d’évaluer l’opportunité de prolonger cette dynamique en portant à trois le nombre d’administrateurs salariés dans les conseils d’administration comptant plus de douze membres. Je ne doute pas que le Gouvernement serait très heureux d’établir un tel rapport…

Debut de section - Permalien
Agnès Pannier-Runacher

Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d ’ État. Avis favorable.

Exclamations amusées.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

L ’ article 62 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à treize heures, est reprise à quatorze heures trente, sous la présidence de M. Thani Mohamed Soilihi.