Séance en hémicycle du 30 novembre 2011 à 10h30

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

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La séance

Source

La séance est ouverte à dix heures trente-cinq.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

M. le Premier ministre a transmis au Sénat :

- le rapport 2010 retraçant l’évolution des missions de surveillance et de financement du cantonnement exercées par l’Établissement public de financement et de restructuration, établi en application de l’article 4 du décret n° 95-1316 du 22 décembre 1995 ;

- le rapport sur la situation des polypensionnés, établi en application de l’article 14 de la loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites.

Acte est donné du dépôt de ces rapports.

Le premier a été transmis à la commission des finances, le second à la commission des affaires sociales. Ils sont disponibles au bureau de la distribution.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2012, adopté par l’Assemblée nationale (projet n° 106, rapport n° 107).

SECONDE PARTIE

MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES

Nous poursuivons l’examen, au sein de la seconde partie du projet de loi de finances, des différentes missions.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » (et articles 53, 54, 55, 56, 56 bis, 57, 58 et 59) et du compte de concours financiers « Avances aux collectivités territoriales ».

La parole est à M. François Marc, rapporteur spécial.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la mission « Relations avec les collectivités territoriales » regroupe les concours financiers de l’État aux collectivités territoriales qui sont inscrits en dotations budgétaires, et les moyens de la Direction générale des collectivités locales, ou DGCL.

Comme le compte de concours financiers « Avances aux collectivités territoriales », que vous présentera Pierre Jarlier, cette mission de l’État n’est, pour l’essentiel, que la résultante budgétaire des décisions qui figurent dans des textes législatifs. Ni le Gouvernement ni, encore moins, les parlementaires ne disposent de réelles marges de manœuvre sur la mission et sur le compte de concours financiers.

La mission n’est en définitive que le reflet et la traduction budgétaire des grandes orientations dont nous avons débattu en première partie du projet de loi de finances. On le sait, ses axes majeurs sont au nombre de deux : d’une part, l’application du gel de l’enveloppe normée des concours de l’État – principe inhérent à la programmation pluriannuelle – que nous avons accepté tout en refusant le durcissement que voulait imposer le Gouvernement à travers un plan d’économies supplémentaires se montant à 200 millions d’euros ; d’autre part, le maintien d’un effort spécifique en faveur des collectivités les plus défavorisées, qui utilise les deux vecteurs que sont la péréquation verticale et la péréquation horizontale ; l’examen des articles nous permettra d’aborder la question de cette dernière.

S’agissant de la péréquation verticale, à laquelle je suis très attaché, j’ai proposé au Sénat, en première partie de la loi de finances, un effort exceptionnel pour 2012 à hauteur de 250 millions d’euros, soit très exactement le montant prévu la première année du dispositif pour les ressources du Fonds de péréquation des ressources intercommunales et communales, le FPIC.

Je pense en effet qu’on ne peut pas demander aux collectivités un effort de solidarité à travers la péréquation horizontale si l’État n’assume pas lui-même son rôle de réducteur des inégalités territoriales.

La mission « Relations avec les collectivités territoriales » ne représente au total que 2, 5 milliards d’euros, soit une part très modeste du total des concours financiers de l’État en direction des collectivités territoriales, qui est de 60, 3 milliards d’euros, hors fiscalité transférée, dégrèvements, subventions pour travaux d’intérêt local et subventions des autres ministères.

Elle est constituée de quatre programmes : le programme 119, « Concours financiers aux communes et groupements de communes », le programme 120, « Concours financiers aux départements », le programme 121, « Concours financiers aux régions », et le programme 122, « Concours spécifiques et administration », qui regroupe les aides exceptionnelles aux collectivités territoriales, les crédits destinés à plusieurs niveaux de collectivités, les dotations outre-mer et les moyens de la DGCL.

Les crédits inscrits à cette mission correspondent à des dotations de fonctionnement – essentiellement la dotation générale de décentralisation – et des dotations d’investissement, comme la dotation de développement urbain, la dotation d’équipement des territoires ruraux, la dotation globale d’équipement des départements notamment.

Le projet de budget 2012 de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » ressemble beaucoup au budget 2011. Il applique en effet le principe du gel en valeur des concours de l’État aux collectivités territoriales, retenu par la loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014, qui conduit à suspendre les règles d’indexation des dotations sur l’évolution de la dotation globale de fonctionnement, la DGF, ou sur celle de la formation brute de capital fixe, le FBCF.

On note cependant que presque toutes les dotations outre-mer qui obéissent à des règles d’indexation spécifiques échappent, encore cette année, à la règle du gel en valeur, à l’exception de la dotation globale de compensation versée à la Nouvelle-Calédonie.

Au total, donc, très peu de modifications sont prévues pour 2012. Tout au plus peut-on observer cette année, dans le cadre des concours exceptionnels, une dotation nouvelle de 700 000 euros pour la participation de l’État à la lutte contre la pollution provoquée par les algues vertes.

J’en terminerai par un point particulier, qui me semble essentiel. Je veux parler, monsieur le ministre, de l’absence de simulations et d’informations qui nous permettraient pourtant de faire des propositions, d’amender et de légiférer en pouvant mesurer les effets de nos votes par catégorie de collectivités. C’est l’un des points importants relevés par la commission des finances, qui estime que, pour pouvoir adopter un dispositif portant sur une somme d’un milliard d’euros à horizon de quatre ou cinq ans, il importe de connaître précisément les bases sur lesquelles on délibère. Cet élément a justifié le dépôt de certains amendements qui vous seront présentés tout à l’heure et qui concernent la mise en œuvre de ces dispositifs. Nous aurons l’occasion de revenir plus en détail, à l’occasion de la présentation des articles rattachés, sur les différents amendements que nous allons vous soumettre.

Les rapporteurs spéciaux que nous sommes ont demandé des chiffres non pas exhaustifs mais représentatifs, portant sur les modifications des définitions de potentiel, les prélèvements et les reversements. Nous pensions que nous disposerions de ces éléments sur quelques exemples de collectivités, sur la base de la version initiale du projet de loi de finances, de la version adoptée par l’Assemblée nationale et – pourquoi pas ? – des amendements proposés par la commission des finances.

Or, monsieur le ministre, nous n’avons reçu d’éléments de réponse à ces sollicitations que samedi dernier, et ce pour une seule des simulations, laquelle, pour utile qu’elle soit, ne renseigne pas sur la totalité des dispositifs. À cet égard, il ne nous semble pas possible de renvoyer aux informations du comité des finances locales. Ce ne sont pas les sénateurs membres dudit comité qui sont chargés d’informer le Parlement sur les projets de loi : c’est bien le Gouvernement lui-même qui doit le faire !

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

M. François Marc, rapporteur spécial. J’appelle donc de mes vœux, à la suite de la commission des finances qui s’est exprimée sur ce sujet à maintes reprises ces derniers temps, la création, dans un avenir le plus rapproché possible, d’un organisme indépendant d’expertise, comme il en existe déjà chez plusieurs de nos voisins européens.

Mme la rapporteure générale applaudit

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

L’Allemagne et les Pays-Bas, par exemple, disposent d’un organisme d’évaluation, de simulation et de calcul auquel à la fois les ministères et les parlementaires peuvent se référer. Cet organisme fournit de manière indépendante à tout interlocuteur, en particulier aux parlementaires, tous les éléments de simulation nécessaires, sur des bases objectives. C’est vers la création d’un tel organisme que la France doit tendre, et cela appelle sans doute des réformes en matière d’organisation administrative.

Tels sont, monsieur le ministre, mes chers collègues, les éléments que je voulais porter à votre connaissance, dans cette première moitié de présentation de la mission.

Compte tenu des observations qui ont été déjà formulées à l’occasion de la présentation de la première partie du projet de loi de finances et des éléments que je viens de vous préciser à l’instant, la commission des finances vous demande de rejeter les crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales ».

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

La parole est à M. Pierre Jarlier, rapporteur spécial.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Jarlier

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je vous présenterai en quelques mots, à la suite de François Marc qui s’est exprimé sur la mission « Relations avec les collectivités territoriales », le compte de concours financiers « Avances aux collectivités territoriales ».

Je soulignerai au préalable que je partage l’avis exprimé à l’instant par François Marc : il est nécessaire de pouvoir bénéficier de simulations fiables, indispensables à l’analyse de nos propositions et à une parfaite information du Sénat.

Ma présentation sera brève. Il s’agit pourtant du principal compte d’avances du budget de l’État, dont les crédits s’élèvent à plus de 90 milliards d’euros en 2012. Ces derniers, pour 99, 99 % d’entre eux, correspondent aux avances effectuées sur les recettes fiscales des collectivités territoriales et de certains organismes comme les chambres consulaires ainsi qu’à la part de taxe intérieure sur les produits pétroliers, la TIPP, affectée à chaque département au titre de la compensation financière du RMI et du RSA.

Après avoir fortement baissé en 2010 en raison de la suppression de la taxe professionnelle, la seconde section du compte d’avances a retrouvé depuis deux ans son niveau de montants antérieur.

La seconde section du compte d’avances retrace les avances de l’État à des collectivités territoriales et à des établissements publics connaissant des difficultés de trésorerie ou ayant besoin d’emprunter.

Elle est très peu active, aucune collectivité n’ayant recours actuellement aux procédures d’avances. En conséquence, seule une action du programme correspondant est provisionnée à hauteur de 6 millions d’euros.

S’agissant de la dette de 289 millions d’euros dont la Nouvelle-Calédonie est débitrice depuis 1990 et dont nous parlons régulièrement, nous avons noté une avancée positive : il semble en effet qu’une mission commune de l’Inspection générale des finances et de l’Inspection générale de l’administration sera mandatée pour définir un échéancier de remboursement, compatible avec les capacités financières de la Nouvelle-Calédonie. Monsieur le ministre, pourriez-vous nous apporter des éléments d’information à ce sujet ?

Le principal enjeu de notre discussion d’aujourd’hui tient aux dispositifs de péréquation horizontale et aux nouvelles définitions des potentiels financiers et fiscaux qui sont prévus dans les articles rattachés à la mission.

Je souhaite vous présenter un rapide bilan de la péréquation.

La péréquation est un objectif à valeur constitutionnelle depuis la loi constitutionnelle du 28 mars 2003. Pour chaque niveau de collectivité, les dotations de péréquation versées par l’État, au titre de la péréquation dite « verticale », sont en augmentation continue au sein de la dotation globale de fonctionnement, la DGF : près de 50 % de plus pour la dotation de solidarité rurale, ou DSR, et la dotation de solidarité urbaine, ou DSU, depuis 2006.

Toutefois, en raison de la stabilisation de la DGF puis de son gel, cette progression n’a été obtenue qu’au prix d’une compression des autres composantes, notamment du complément de garantie de la dotation forfaitaire de la DGF et des dotations de compensation. Cette compression est encore d’actualité cette année.

La péréquation verticale se finance donc par un prélèvement direct sur les dotations des collectivités, ce qui revient à mettre en place une péréquation horizontale entre ces dernières au sein même de la DGF.

En 2011, le poids de ces dotations de péréquation est très différent selon les collectivités : 2 918, 4 millions d’euros pour les communes, soit 23, 26 % de la DGF ; 1 383 millions d’euros pour les départements, soit 11, 3 % de la DGF ; 183 millions d’euros pour les régions, soit 3, 5 % de la DGF.

Contrairement à ce que l’on pourrait croire au premier abord en observant les montants affectés à la péréquation, les études menées sur les effets péréquateurs de ces dotations ont conclu à un bilan contrasté de l’efficacité des dispositifs mis en place.

Les écarts de richesse se sont accentués en ce qui concerne les communes et les départements alors que ceux des régions se sont réduits.

Depuis 1991, une autre forme de péréquation s’est mise en place, à savoir la répartition des ressources entre collectivités, soit la péréquation « horizontale ». Elle ne comprenait, jusqu’à présent, que deux instruments : les fonds départementaux de péréquation de la taxe professionnelle, les FDPTP, et le fonds de solidarité des communes de la région d’Île-de-France, le FSRIF.

La réforme des finances locales et la suppression de la taxe professionnelle en 2010 ont rendu le fonctionnement de ces fonds impossible dans la mesure où ils étaient principalement assis sur les bases de cet impôt.

C’est ce qui a justifié la mise en place de nouveaux instruments de péréquation horizontale visant à contrebalancer la territorialisation des nouvelles impositions économiques : les fonds régionaux et départementaux de péréquation sur la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, qui entreront en vigueur en 2013 ; le Fonds national de péréquation des droits de mutation à titre onéreux perçus par les départements, qui, en vigueur depuis l’année dernière, a permis de redistribuer 440 millions d’euros entre les départements.

C’est dans le projet de loi de finances pour 2012 que se trouvent les dispositifs concernant le bloc communal devant entrer en vigueur dès le 1er janvier : le nouveau Fonds national de péréquation intercommunal et communal, FPIC, et le Fonds de solidarité des communes de la région d’Île-de-France rénové.

L’année 2011 a été mise à profit à la fois par le comité des finances locales, par les associations d’élus, par le Parlement et par le Gouvernement pour élaborer les propositions soumises à notre examen aujourd’hui.

Globalement, le principe proposé relève d’un véritable travail de coproduction, le Gouvernement ayant repris la majorité des préconisations formulées par l’ensemble des groupes de travail : un fonds national unique dont les ressources augmentent progressivement pour atteindre 2 % des recettes fiscales, soit environ 1 milliard d’euros en 2016, ainsi que l’a souhaité l’Assemblée nationale ; un fonds intercommunal prélevé sur les communes et les établissements publics de coopération intercommunale, les EPCI, qui bénéficiera aux communes et aux EPCI, chacun pouvant être à la fois contributeur et bénéficiaire ; une nouvelle approche territoriale des indicateurs de richesse fondée sur une définition à l’échelle intercommunale du potentiel financier, à savoir le potentiel financier agrégé.

Si je crois pouvoir dire que le consensus existe sur ces trois axes, plusieurs points essentiels suscitent de nombreuses interrogations et méritent d’être mis en débat ici.

Je pense au calendrier de mise en œuvre de la réforme ainsi qu’à la prise en compte ou non de strates démographiques pour apprécier les collectivités contributrices, notamment au regard des effets de seuils induits, parfois importants. Je pense également à la situation des communes bénéficiaires de la DSU ou de la DSR dans ce dispositif, ou au poids des critères de charge synthétique dans les modalités de redistribution du fonds pour mieux prendre en compte la fragilité de certains territoires. Je pense, enfin, au traitement de certaines particularités parmi lesquelles le cas des communes pauvres au sein d’une intercommunalité riche, et inversement.

Pour terminer, j’évoquerai très rapidement la nouvelle définition du potentiel fiscal issu de la réforme de la taxe professionnelle.

La prise en compte dans le calcul du fonds de péréquation de ce nouvel indicateur, qui intègre notamment le Fonds national de garantie individuelle des ressources, le FNGIR, et la dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle, la DCRTP, provoque une variation considérable de la richesse théorique des collectivités au regard de ces nouveaux critères. On en a déjà observé les conséquences pour les départements et tiré les conclusions pour les régions. En effet, sont pris en compte dans le FNGIR et la DCRTP non plus des potentiels fiscaux, mais des produits.

De ce fait, s’agissant des communes et des EPCI, si leurs taux de taxe professionnelle étaient élevés, souvent en raison de la faiblesse de leurs bases, ils seront pénalisés. À l’inverse, ceux dont les taux étaient bas, souvent associés à des bases fortes, seront favorisés. En particulier, les bénéficiaires d’un FNGIR élevé, comme les bassins industriels ou les zones rurales à bases faibles, seront soumis à une double peine : ils subiront à la fois une baisse très forte de la dynamique de leurs ressources et une augmentation que je qualifierai d’« optique » – ils ne bénéficieront en effet pas de nouvelles recettes – de leur potentiel financier. Cela aura deux conséquences : d’une part, une plus forte contribution au fonds de péréquation horizontale ; d’autre part, une perte éventuelle d’éligibilité à la DSU et à la DSR, et ce dès 2012.

Autrement dit, en l’état actuel, les pauvres seront plus pauvres et les riches plus riches, ce qui est contraire à l’objectif fixé et réduit considérablement l’efficacité du dispositif proposé, à la base même du calcul.

Le Gouvernement a d’ailleurs prévu plusieurs filets de sécurité dans le projet de loi de finances pour 2012 afin d’atténuer les effets de la perte d’éligibilité à ces dotations.

Ce sont autant de sujets qui justifient le nombre important d’amendements que nous aurons à examiner, ce qui nous conduira sans doute à faire évoluer le texte issu des travaux de l’Assemblée nationale.

Les élus, monsieur le ministre, sont en attente d’une vraie solidarité entre collectivités, assise sur des mécanismes de péréquation efficaces et équitables.

Applaudissements sur les travées de l ’ UCR et de l ’ UMP, ainsi que sur certaines travées du RDSE et du groupe socialiste-EELV.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Saugey

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, dans le bref laps de temps qui m’est imparti pour évoquer devant vous les relations financières entre l’État et les collectivités territoriales, je développerai quatre thèmes qui ont retenu l’attention de la commission des lois.

Tout d’abord, pour l’année 2012, les collectivités territoriales continueront d’être associées, d’un point de vue budgétaire et financier, à l’effort de réduction des déficits publics de l’État.

Cette association des acteurs locaux, qui n’est ni acceptée ni comprise par la commission des lois, a suscité quelques remarques.

En effet, les collectivités sont loin d’être les premières responsables de la dégradation des finances publiques : au 31 décembre 2010, la dette locale ne représentait que 10 % de la dette publique.

Les collectivités territoriales sont soumises à des règles strictes d’élaboration du budget, qui limitent leur endettement. Dès lors, l’idée selon laquelle le gel des concours budgétaires de l’État serait une garantie de non-baisse et, in fine, un facteur de protection des finances locales nous semble pour le moins contestable.

Par ailleurs, la composition de l’effort global de l’État en faveur des collectivités mériterait un travail de clarification. Aux concours budgétaires inscrits dans la mission « Relations avec les collectivités territoriales » s’ajoutent les autres concours inclus dans l’enveloppe normée, ceux qui ne le sont pas, les dégrèvements et compensations, ainsi que les transferts de fiscalité. Une réflexion mériterait d’être conduite afin de rendre cette répartition plus lisible ; nous le demandons pratiquement chaque année.

Ma deuxième observation porte sur les difficultés, déjà perceptibles, de financement bancaire rencontrées par les collectivités.

Ce constat trouverait son origine principale dans l’anticipation, par les établissements bancaires, des nouvelles règles prudentielles définies dans le cadre du comité Bâle 3, qui imposent aux banques de relever progressivement, entre 2013 et 2019, leur ratio minimum de liquidités de 2 % à 7 %. C’est pourquoi les banques, pour pouvoir respecter ces nouvelles règles, privilégieraient les emprunteurs à financements courts disposant d’épargne bancaire, ce qui n’est pas le cas des collectivités territoriales.

Aux difficultés engendrées par ces nouvelles règles prudentielles, s’ajoute le récent démantèlement de Dexia, première banque de financement des collectivités.

Les difficultés de financement des collectivités territoriales pourraient être néfastes pour notre économie si elles venaient à perdurer. C’est pourquoi la commission des lois salue l’initiative des associations nationales d’élus visant à créer une nouvelle agence de financement des collectivités locales, qui devrait être opérationnelle dès 2012. Celle-ci aura pour objet de diversifier l’offre de financement des collectivités territoriales.

La mise en place d’une enveloppe de 3 milliards d’euros, cogérée par la Caisse des dépôts et consignations et par les établissements bancaires, selon les déclarations récentes du Premier ministre, devrait être alimentée à hauteur de 5 milliards d’euros. Mais cela n’apporte pas de solution pérenne au problème, même si je me félicite, à titre personnel, de cette initiative.

Ma troisième observation porte sur la problématique des emprunts toxiques et sur leur poids dans l’encours de la dette publique locale. Force est de constater que nombreux sont les élus qui, face à leurs difficultés budgétaires actuelles, ont pu naïvement préférer des produits leur permettant de bénéficier, pendant quelques années, de taux d’intérêt bonifié. Toutefois, les taux d’intérêt se sont ensuite envolés, généralement au bout de trois ou quatre années, en raison de leur indexation sur des facteurs extrêmement volatiles.

La Cour des comptes estime, dans un rapport thématique publié en juillet dernier, que les emprunts toxiques ne représenteraient pas un risque systémique pour les collectivités dans leur ensemble. Pourtant, tous les effets des produits structurés ne sont pas encore connus, la période des taux d’intérêt bonifié n’étant pas arrivée à son terme pour l’ensemble des emprunts contractés.

Les risques liés aux emprunts toxiques montrent la nécessité de sécuriser les collectivités dans leurs relations avec les établissements de crédit. La signature d’une charte de bonne conduite et la mise en place d’un médiateur des emprunts toxiques, sur l’activité duquel nous disposons de peu d’informations, ne semblent pas adaptées à la résolution des difficultés rencontrées par les collectivités. C’est pourquoi monsieur le ministre, nous souhaiterions connaître les solutions que le Gouvernement entend mettre en œuvre, ainsi que leur éventuel calendrier d’application.

Enfin, le dernier point sur lequel je souhaiterais attirer votre attention concerne la problématique des normes et de leur poids au sein de notre activité quotidienne.

Je tiens à rendre hommage au bilan très positif de la commission consultative d’évaluation des normes, la CCEN, présidée par notre ancien collègue Alain Lambert. Ce bilan témoigne de la nécessité de toute démarche visant à mieux associer les collectivités territoriales aux décisions qui les concernent. Il reflète également la nécessité d’un dialogue apaisé et serein entre l’État et les collectivités territoriales.

C’est pourquoi la commission des lois estime que le champ de compétences de la CCEN mériterait d’être élargi aujourd’hui au stock de normes afin de poursuivre les initiatives engagées par le Gouvernement et par l’ancien président du Sénat, Gérard Larcher, visant à recenser les normes existantes qui mériteraient une révision urgente.

Au terme de ce bref tour d’horizon, j’indique que je voterai à titre personnel les crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales ». Je souligne néanmoins que la commission des lois a émis un avis défavorable sur les crédits de cette mission.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ UCR, ainsi que sur certaines travées du RDSE et du groupe socialiste-EELV.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.

Je vous rappelle aussi que, en application des décisions de la conférence des présidents, aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser dix minutes.

Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de quinze minutes pour intervenir.

Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Christian Favier.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Favier

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la mission que nous examinons aujourd’hui ne recouvre qu’une infime partie des transferts aux collectivités territoriales, mais son examen va nous permettre de débattre de l’ensemble de cette problématique. Les articles rattachés nous offriront l’occasion d’étudier la mise en œuvre d’une des principales mesures contenues dans ce projet de budget, c'est-à-dire la création d’un nouveau fonds de péréquation.

Avec le projet de budget de cette mission, nous sommes d’abord confrontés aux conséquences de la décision prise l’an passé de geler les dotations aux collectivités locales, un gel qui frappera une nouvelle fois en 2012 les ressources de nos communes, départements et régions. En y regardant de plus près, cette mission subit non pas un simple gel des dépenses, mais bien une baisse très sensible des interventions touchant le programme des concours spécifiques. Cette restriction spectaculaire de plus de 80 % concerne les aides aux collectivités locales fragilisées par des circonstances exceptionnelles. En cette période de calamités naturelles, d’inondations et de sécheresse, les élus locaux et les populations concernées apprécieront le mépris qui leur est réservé.

Derrière le discours global sur le gel des dotations se cachent donc, en fait, des baisses drastiques. La mise en œuvre du gel des dotations depuis l’an dernier ne doit pas être passée sous silence, même si nous devons aussi dénoncer l’une des mesures phare de ce projet de budget pour 2012 : la diminution de 200 millions d’euros des dotations, qui va aggraver un peu plus encore la situation.

Les mesures de réduction des ressources des collectivités locales s’appliqueront en 2012 et sans doute l’année suivante si rien ne change. Elles fragiliseront une nouvelle fois la capacité d’action des collectivités territoriales en faveur de leurs populations qui sont frappées par la crise et tariront leurs capacités d’investissements. Elles s’ajoutent aux mesures prises depuis des décennies qui n’ont fait que contraindre toujours plus les ressources financières de nos collectivités.

En effet, ce n’est pas d’aujourd’hui que des départements et des communes sont en difficulté, et les diverses mesures prises depuis dix ans ont plongé de nouvelles collectivités dans la tourmente. Des transferts de compétences insuffisamment compensés, des obligations nouvelles qui leur ont été imposées, une réduction de leur capacité fiscale avec la disparition de la taxe professionnelle, une hausse des taux, des emprunts toxiques et maintenant des difficultés à obtenir un prêt : la tâche des élus n’a jamais été aussi difficile. L’immense majorité de nos collectivités locales rencontre des difficultés croissantes à mettre en œuvre leurs missions dans un contexte de situation économique et sociale dégradée.

Le chômage et la précarité, doublés du ralentissement économique et de la désindustrialisation de nos territoires, ont particulièrement affecté les capacités d’interventions de nos institutions locales, en réduisant leurs ressources, alors qu’augmentait partout la demande sociale. Dans le même temps, les diverses mesures de restriction des politiques publiques prises par le Gouvernement se sont partout soldées par des réductions ou des disparitions de services publics.

Nos territoires ont dû faire face, ces dernières années, à de véritables saignées, avec les nombreuses fermetures de tribunaux d’instance, de casernes, d’hôpitaux et de cliniques de proximité, en raison de la réorganisation des schémas d’organisation sanitaire, auxquelles il faut ajouter les fermetures d’écoles, de classes, de bureaux de postes et de cabinets médicaux ! Au total, un grand nombre de communes ont subi de véritables plans sociaux de perte d’emploi local, de réduction des services à la population et d’affaiblissement de leur vitalité économique.

Monsieur le ministre, passer sous silence ces mesures reviendrait à oublier la forte responsabilité du Gouvernement dans les dégradations subies par nos collectivités. C’est aussi cela le bilan du Gouvernement ! Dans ce paysage dégradé, les élus locaux font ce qu’ils peuvent pour tenter de répondre malgré tout aux attentes de leur population et aux besoins de leur territoire.

Et c’est ce moment que le Gouvernement choisit pour dénigrer leur gestion ! Ainsi, il ne cesse de critiquer l’action des collectivités locales et de leurs élus qui dépenseraient sans compter. Maintenant, il s’agirait, comme le fait remarquer notre collègue Bernard Saugey dans son rapport écrit, de responsabiliser les élus locaux en leur attribuant des ressources budgétaires toujours plus contraintes, afin de les obliger à réduire la dépense publique. Aujourd'hui, ces élus sont désignés comme des coresponsables de la crise que traversent notre pays, l’Europe et même le monde. Dire cela, c’est laisser entendre d’abord qu’ils seraient pour partie des « irresponsables », ce qui n’est pas acceptable, mais aussi que leurs dépenses locales seraient d’une certaine façon contraires à l’intérêt général, alors que chacun sait que c’est tout le contraire.

Réduire les interventions des collectivités locales, c’est prendre le risque d’une récession économique, puisque chacun sait ici que ces dernières jouent un rôle primordial d’amortisseurs sociaux et d’investisseurs de premier plan, avec 73 % des investissements publics. Ce sont alors leurs deux principaux secteurs d’interventions, l’action sociale et l’aménagement, qui seront touchés. Cela se soldera donc, en termes macro-économiques, par une baisse de la demande, alors que c’est justement cette demande qui, de l’avis de tous les économistes, est à la base de notre croissance.

Cette politique de restriction des financements publics sera un frein à la croissance, et donc à la reprise tant attendue. Vous comprendrez que, dans ces conditions, nous ne pouvons qu’exprimer notre désaccord total avec cette perspective et avec l’ensemble des mesures de restriction des ressources des collectivités locales contenues dans ce budget.

Nous sommes d’autant plus confortés dans notre prise de position que les débats sur la première partie du projet de budget ont permis au Sénat, à sa nouvelle majorité de gauche, de faire la démonstration que d’autres chemins étaient envisageables, en dégageant des ressources nouvelles qui permettraient de réduire les déficits et de relancer notre économie dans le cadre d’une fiscalité plus juste. Dans le domaine qui nous concerne aujourd’hui, il serait possible de « dégeler » les dotations de fonctionnement et de ne pas les amputer de 200 millions d’euros supplémentaires.

Pour terminer, je voudrais dire les préoccupations qui nous animent à propos du FPIC, le Fonds national de péréquation des recettes fiscales intercommunales et communales.

Ce fonds soulève d’abord une question de principe : est-il normal que le Gouvernement impose les conditions de cette péréquation à moyens constants entre les communes et les intercommunalités, quand il se refuse à mettre en place la péréquation verticale de l’État vers les collectivités que nous réclamons ? Les départements, par exemple, se sont vu confier, sans compensation, la charge d’allocations nationales de solidarité, pour lesquelles il manque, semble-t-il, 6 milliards d’euros.

Si nous sommes sensibles au partage, il faut tout de même noter que, au moment où la péréquation va se développer, l’État fait régresser la solidarité nationale en réduisant la contribution des entreprises. Après avoir vu leur fiscalité locale réduite de 4 milliards d’euros avec la réforme de la taxe professionnelle, le Gouvernement exonère une nouvelle fois les entreprises de la nécessaire solidarité nationale en faveur de nos territoires.

Pour notre part, nous proposons au contraire que les entreprises, sur la base de leurs actifs financiers, soient mises à contribution. Avec une taxation de 0, 5 %, le fonds de péréquation disposerait de 30 milliards d’euros au profit de nos territoires et des populations qui y vivent. Voilà une ressource mobilisable !

Par ailleurs, les prélèvements liés à la nouvelle péréquation auront une base si large qu’ils frapperont de façon indirecte des communes percevant des dotations de solidarité, qu’elles soient situées en milieu urbain ou en milieu rural. Ainsi, des communes parmi les plus défavorisées de France seront contributrices par l’intermédiaire de leur intercommunalité.

Enfin, cette nouvelle contribution éclaire d’un jour particulier la réforme de la carte intercommunale qui est actuellement en cours d’achèvement et de rationalisation. En effet, les commissions départementales, les CDCI, ne disposent déjà pas des études financières sur les conséquences des périmètres proposés. Comment pourront-elles émettre un avis sans mesurer les conséquences communales et intercommunales de cette nouvelle péréquation ? Après la réforme de la taxe professionnelle, après les incidences financières de la future carte intercommunale, cette nouvelle péréquation est un motif d’inquiétude supplémentaire pour les communes.

Compte tenu des remarques que je viens de faire sur la nouvelle péréquation, vous comprendrez que nous soyons satisfaits de la sage décision prise hier soir par la commission des finances de repousser, par le biais d’un amendement, la mise en place de ce fonds à 2013. Cette mesure nous permettra de disposer du temps et des études nécessaires pour élaborer un projet plus équitable.

En attendant, pour toutes les raisons que j’ai soulevées, nous condamnons le désengagement renforcé de l’État au détriment des collectivités locales : notre groupe votera donc contre le projet de budget de cette mission. §

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je consacrerai mon propos à la seule péréquation horizontale du bloc communal, celles des autres collectivités devant attendre 2013.

Il s’agit d’une réforme majeure qui vient compléter la première phase de la réforme fiscale réalisée à l’occasion de la suppression de la taxe professionnelle. Elle constitue un acte déterminant pour l’équité entre les territoires dans l’accès à la ressource, dans lequel le Sénat a pris toute sa part en modifiant au départ les équilibres du partage de la valeur ajoutée, puis en travaillant sur le dispositif lui-même au sein du groupe de travail auquel j’ai eu l’honneur de participer avec mes collègues Pierre Jarlier, Philippe Dallier et Albéric de Montgolfier. Le Sénat ne devrait donc pas manquer d’apposer sa marque et son expertise aujourd’hui.

Le texte qui nous est parvenu à l’issue des travaux de la commission reprenait l’essentiel des préconisations de notre groupe de travail. Le consensus entre François Marc et Pierre Jarlier adopté par la commission des finances en améliore sensiblement l’architecture. Mais chacun sait que le diable se cache dans les détails, et peut-être dans les nouveaux amendements que nous allons examiner.

Il me paraît donc utile de vous rappeler le dispositif proposé à l’origine, pour faire ensuite le point sur le texte résultant des travaux de la commission, de manière à vous faire mieux mesurer la portée et les enjeux des amendements sur lesquels les élus de France attendent toute notre vigilance.

Le principe de la péréquation horizontale repose sur la mise en œuvre progressive en quatre ans d’un partage de la richesse entre collectivités d’un même niveau. Son innovation essentielle tient à l’évaluation de la richesse au niveau des 4 200 territoires constitués par les intercommunalités et les communes isolées, en appréhendant leurs ressources de manière agrégée, sans que le mode d’organisation ou d’intégration fiscale ait une influence.

Le prélèvement s’opère sur l’écart entre le potentiel financier du territoire et les 90 % du potentiel moyen de sa strate de population, le potentiel financier intégrant le maximum de ressources, à l’exclusion de celles qui sont affectées.

La répartition du prélèvement au sein du territoire s’effectue alors sur la base du prorata des ressources entre commune et intercommunalité, puis entre les communes grâce à des règles fixées par le législateur, sauf si le territoire en décide autrement.

Le FSRIF, le Fonds de solidarité des communes de la région d’Île-de-France qui est un système de péréquation propre à l’Île-de-France, intervient avant la péréquation nationale de façon à intégrer les corrections locales déjà effectuées, comme nous l’avions voulu lors du projet de loi de finances pour 2010.

Enfin, les attributions du FPIC sont réparties à raison d’un indice synthétique intégrant le potentiel financier agrégé et le revenu par territoire, la redistribution entre EPCI et commune s’effectuant à l’identique du schéma utilisé pour le prélèvement.

L’Assemblée nationale a apporté un certain nombre de modifications que, avec la commission des finances et en accord avec la plupart des préconisations de François Marc et Pierre Jarlier, nous récusons ; nous souhaitons à cet égard revenir au texte du Gouvernement et aux conclusions de notre mission.

Il s’agit du retour à une montée en puissance du fonds en quatre ans au lieu de cinq et de la fixation du montant du fonds en valeur absolue – soit 1 milliard d’euros à terme – et non en pourcentage de recettes, ce qui risque d’être une source de contestations ultérieures. L’Assemblée nationale a également tenté de réduire le plafond de contribution à 10 % : il convient de le relever à son montant initial de 15 % du potentiel fiscal.

À cet égard, si j’approuve le principe d’un objectif de réduction des inégalités par la fixation d’un niveau minimal de ressources au terme de dix années, il est dommage que, à l’instar de nos voisins d’outre-Rhin, nous n’ayons pas fixé de maximum à cette occasion. En outre, nous déterminons de manière paradoxale et coupable un plafond de prélèvement, de plus sans limitation dans le temps, ce qui conduira inéluctablement les collectivités « classes moyennes » à cotiser en lieu et place des collectivités plus aisées.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

Ce « bouclier fiscal » sans justification est, à mon avis, le vice introduit dans le système. Il ne manquera pas de conduire à l’essoufflement du prélèvement et, ce qui est plus grave, de son effet d’équité. Cela devra impérativement être corrigé dans les années à venir.

De la même manière, il ne me paraît pas judicieux, en l’état actuel des critères de redistribution, de porter le seuil de prélèvement de 0, 9 à 1, ainsi que le propose la commission des finances : une telle mesure reviendrait à pincer à nouveau le spectre du prélèvement, cette fois par le bas, et conduirait à concentrer la charge sur la tranche moyenne. Cependant, nous ne nous y opposerons pas violemment, car on peut y voir la légitime contrepartie du plafonnement.

Enfin, bien que n’étant pas un adepte forcené des strates, pour des raisons d’équité, je rappelle qu’elles sont la garantie d’acceptabilité consensuelle du dispositif. En effet, leur suppression conduirait à l’échec programmé de la réforme ou à la nécessité d’une plus grande prise en compte des charges. À cet égard, la solution logarithmique proposée par MM. Marc et Jarlier présente l’avantage d’éviter les effets de seuils, tout en majorant le facteur population dans les mêmes proportions que les strates, c’est-à-dire de un à deux.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

Je veux cependant être certain de la faisabilité du dispositif proposé ; sur ce sujet, j’écouterai avec attention le Gouvernement.

Pour compléter l’amélioration du dispositif, je présenterai plusieurs amendements.

Tout d’abord, je proposerai, pour le principe, la réintroduction dans le potentiel financier de l’ensemble des dotations comme base de prélèvement. Cette option me paraît, de loin, beaucoup plus équitable dans la mesure de la richesse comparée. Je regrette que MM. Jarlier et Marc n’aient conservé cette approche que dans le cadre prospectif à dix ans, et non dans les calculs opérationnels effectifs.

Dans un autre amendement – l’amendement n° II-232 –, je proposerai que le potentiel financier, plutôt que le produit fiscal, soit utilisé pour le prélèvement et la distribution de la péréquation. Mais, à défaut, je préférerais un retour aux produits fiscaux, ce qui me semble un meilleur choix tant que les valeurs locatives ne sont pas révisées et, surtout, alors que le potentiel fiscal n’a plus qu’un lointain rapport avec la ressource réelle.

Par ailleurs, il est important que soit mis fin à la pierre d’achoppement que constitue l’objection des communes pauvres au sein d’un territoire riche. Pour ce faire, je propose de préciser que ces communes ne seront pas prélevées si leur potentiel financier est inférieur à 80 % du potentiel financier moyen de leur strate démographique. Dans ce cas, les autres communes, riches par définition et ayant bénéficié d’un moindre prélèvement du fait de la présence des communes pauvres, pourront légitimement prendre en charge la part de ces dernières.

Enfin, pour satisfaire les territoires urbains les plus défavorisés, il conviendrait de réintroduire des critères de redistribution plus fins, en prenant en compte plus largement le revenu et l’effort fiscal ainsi que les critères de charges en général. À cet égard, je souhaite que la direction générale des collectivités locales puisse, d’ici à l’examen de cette mesure par l’Assemblée nationale, produire des simulations ; je crains en effet que, faute d’avoir anticipé les effets d’une telle mesure, nous ne puissions parvenir à un consensus aujourd’hui.

Mes chers collègues, en dépit du temps de parole très court qui m’était imposé et que j’ai dépassé

Rires sur les travées de l’UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

M. Charles Guené. … j’espère vous avoir suffisamment éclairés afin que nous puissions faire ensemble les bons choix pour ce dispositif tant attendu par les territoires, en l’inclinant vers plus de lisibilité et, surtout, vers plus d’équité au sein du bloc communal. En effet, il est important, pour le cas où nous n’aboutirions pas aujourd’hui, que le Sénat balise le terrain en vue d’une autre étape, ou pour éclairer l’Assemblée nationale.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la mission « Relations avec les collectivités territoriales », avec 2, 5 milliards d’euros, ne représente que 5 % de l’enveloppe normée des concours de l’État, mais elle flèche des crédits dont l’affectation est particulièrement sensible sur le terrain ; les débats sur les questions de péréquation en sont d’ailleurs l’illustration.

Le gel en valeur des principales dotations de l’État est acté. Nous pouvons comprendre cette mesure, mais nous déplorons son application trop uniforme.

Ma première observation concerne les conséquences de la suppression de la taxe professionnelle, qui n’avaient pas été réellement anticipées, la mesure ayant été imposée brutalement sans simulations financières crédibles.

Certaines de ces simulations manquent d'ailleurs toujours à l’appel !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

À cet égard, je suis heureux que la mission sénatoriale sur les conséquences de la suppression de la taxe professionnelle, dont j’avais demandé la création, soit au travail. En effet, nous voyons bien, grâce au rapport de nos deux collègues, que les difficultés que nous avions présagées hier se posent effectivement aujourd'hui.

Ma deuxième remarque a trait à la complexité chaque année croissante des mécanismes de la fiscalité locale, dont ceux du calcul des dotations de l’État. Ces mécanismes sont devenus illisibles et incompréhensibles pour l’immense majorité non seulement de nos concitoyens, mais aussi de nos collègues élus.

Je prendrai pour seul exemple l’inclusion, dans la détermination du potentiel fiscal d’un établissement public de coopération intercommunale, d’un « indicateur de ressources élargi », que proposent les rapporteurs spéciaux : s’il s’agit là d’une bonne idée, et je vous laisse imaginer notre bonheur quand nous aurons à expliquer, en réunion publique, en conseil communautaire ou en conseil municipal, les mécanismes de péréquation !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Une telle complexité est très néfaste pour le fonctionnement de la démocratie.

Monsieur le ministre, que dire sinon des incertitudes inacceptables auxquelles nos collectivités doivent faire face, s’agissant des recettes de cotisation foncière des entreprises ? En fait, vous multipliez – ou nous multiplions, si l’on considère qu’il s’agit d’une œuvre collective – les usines à gaz qui fabriquent de moins en moins de gaz !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Ma troisième remarque concerne les conséquences du gel des dotations de l’État sur les mécanismes de péréquation. Pour avoir, voilà deux ans, cosigné avec notre collègue Rémy Pointereau un rapport sur la péréquation, j’en connais, comme vous, toutes les difficultés.

Au premier chef, si tout le monde est d’accord sur le principe de la péréquation, chacun veut y contribuer le moins possible...

Debut de section - Permalien
Philippe Richert, ministre chargé des collectivités territoriales

Très bien ! C’est le cœur du débat !

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Je vous expliquerai tout à l'heure les raisons d’une telle attitude !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Mon cher collègue, vous êtes en effet un spécialiste de la question !

Il est clair que, moins l’État dégagera de fonds pour la péréquation verticale, plus il conviendra de développer la péréquation horizontale, c’est-à-dire le concours des territoires les plus riches au profit des plus pauvres, sans oublier toutefois que la dotation globale de fonctionnement est encore le premier levier de péréquation.

Debut de section - Permalien
Philippe Richert, ministre

Tout à fait !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Il est bon que les rapporteurs spéciaux aient écrit, dans un sous-titre figurant en page 21 de leur rapport, que l’obligation constitutionnelle de péréquation prévue par l’article 72-2 de la Constitution était « contredite par les faits » et, en premier lieu, au détriment du bloc communal et des communes.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Monsieur le ministre, c’est ce qu’ils ont écrit !

Plusieurs difficultés se posent : la résistance des territoires riches à devenir plus solidaires ; celle de l’État à déterminer de nouvelles orientations dans sa politique de péréquation verticale ; la détermination d’indicateurs plus fiables et compréhensibles, en particulier sur les potentiels fiscal et financier.

Par exemple, le bouleversement, dans la version du texte issue de l’Assemblée nationale, des indicateurs de richesse des départements, à la suite de la prise en compte de la réforme de la taxe professionnelle, met en évidence les errements, que l’on aggrave au lieu de les réduire. À cet égard, le double exemple de la Creuse, passée, en termes de potentiel financier, de la quatre-vingt-seizième à la trente-quatrième place, et du Cantal, passé de la quatre-vingt-sixième à la cinquante-deuxième place, est révélateur. Ou comment finir de tuer les départements en perte démographique, enclavés et sans industrie…

M. Francis Delattre s’exclame.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Je salue la sagesse de la commission des lois sur la question de l’accroissement des garanties, permettant d’éviter un bouleversement incontrôlé des mécanismes de péréquation. Il est également sage que la commission n’ait pas pris en compte le nouveau potentiel financier pour la péréquation des droits de mutation pour 2012.

Cependant, eu égard à l’ensemble des évolutions négatives que nous avons majoritairement constatées, nous voterons contre les crédits de cette mission.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE. – M. Roger Karoutchi s’exclame.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ma collègue Jacqueline Gourault, à la suite d’un empêchement de dernière minute, m’a chargé de la remplacer au pied levé. Je m’efforcerai de le faire du mieux que je peux…

Tout d’abord, je veux bien sûr souligner l’importance des collectivités locales dans l’action publique. Un certain nombre d’orateurs l’ont déjà dit : les trois quarts de l’investissement public sont réalisés au niveau local, alors que les collectivités ne représentent que 10 % de l’endettement global en France.

Ce résultat est obtenu grâce à la « règle d’or », que beaucoup, dont moi-même, voudraient voir instituer au niveau national et dont je pense qu’elle existe déjà dans nos collectivités locales. Cette règle est très stricte : les collectivités locales doivent dégager un autofinancement suffisant pour rembourser le capital de leur dette, ce qui leur permet de ne pas avoir de déficit.

En effet, contrairement à ce que je lis parfois ici ou là, les collectivités locales ne sont pas en déficit.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

Il est vrai que de tels propos ne vont pas dans le sens des critiques que l’on entend à l’égard des collectivités locales. Or ces dernières sont dans l’ensemble bien gérées. Certes, ce n’est pas une règle générale : il existe des cas particuliers dans lesquels certaines dépenses pourraient encore être rognées.

L’effort financier de l’État, qui s’élève à 51 milliards d’euros, est important. Mais, monsieur le ministre, pourriez-vous nous communiquer des informations concernant la TVA versée par les collectivités locales sur leurs dépenses de fonctionnement ? Il y va, me semble-t-il, d’un montant compris entre 10 milliards d’euros et 20 milliards d’euros.

Autrement dit, en ne récupérant pas la TVA sur leurs dépenses de fonctionnement, les collectivités locales financent une recette de l’État. Mettre fin à un tel système permettrait à mon avis d’amoindrir l’effort financier global de l’État au regard des 200 milliards d’euros de budget des collectivités locales.

Nous sortons d’une réforme sur les collectivités locales dont il sera impératif de revoir un certain nombre de points. De façon conjoncturelle, je rappelle que le Gouvernement s’est engagé à inscrire à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale, avant la fin de la session, les propositions de loi relatives à l’intercommunalité, déposées respectivement par notre collègue Jean-Pierre Sueur et par le député Jacques Pélissard.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Absolument ! On attend cette inscription chaque jour !

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

Selon certains, l’existence de ces différents niveaux ne coûterait pas grand-chose.

Monsieur le ministre, j’aimerais que vous puissiez, sur ce plan, nous communiquer le bilan, en termes à la fois de dotation et d’effectifs, de la mise en place des intercommunalités. En effet, je suis sûr que, dans l’augmentation globale des effectifs des collectivités locales depuis dix ans, les intercommunalités ne sont pas pour rien.

Pour ma part, je pense que plus on crée d’échelons, plus on crée de dépenses. Il serait temps de revenir à un système qui soit un peu plus économe des deniers publics !

Je veux bien sûr évoquer également la péréquation, élément fort de ce projet de loi de finances. Je la juge pour ma part indispensable. Bien sûr, certains l’ont dit, il faudrait des crédits supplémentaires ; mais on sait bien que l’État n’en a plus. Pour que la péréquation soit bien acceptée, il faut trouver un système juste et équitable. À cet égard, je crois sage de prévoir une année supplémentaire pour la mise en œuvre de la péréquation horizontale. Tel est l’objet de l’amendement adopté hier soir à l’unanimité par la commission des finances.

Gardons-nous de toute précipitation, car un système imparfait – il sera toujours imparfait, mais on peut sans doute l’améliorer – risquerait de tuer dans l’œuf cette idée de péréquation horizontale, ce qui serait vraiment dommage pour l’ensemble des collectivités.

J’appelle également de mes vœux une bonne articulation entre la péréquation nationale et la péréquation régionale.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

Le Fonds de solidarité pour la région d’Île-de-France doit être pris en compte dans la péréquation nationale ; je ne suis pas sûr toutefois qu’une telle adaptation soit à ce stade bien anticipée.

Debut de section - Permalien
Philippe Richert, ministre

Elle l’est !

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

Je voudrais aussi insister sur l’effort national de redressement de nos comptes publics. Je le dis souvent en commission des finances, et je l’ai déjà dit en séance publique : comme tout le monde, je pense que cet effort représente la priorité des priorités.

Les collectivités locales ne peuvent donc pas s’exonérer de leur participation à cet effort national, car nos compatriotes ne comprendraient pas qu’elles ne soient pas capables d’économiser un millième de leur budget, le Gouvernement leur ayant demandé un effort de 200 millions d’euros sur 200 milliards d’euros. Cet effort me paraît tout à fait supportable.

Le groupe de l’Union centriste et républicaine est d’accord pour que les collectivités locales apportent leur pierre à l’édifice du redressement des comptes de l’État, mais il souhaite que cette contribution fasse l’objet d’un contrat clair et transparent avec l’État.

Valérie Pécresse a évoqué hier la nécessité d’une révision générale des politiques locales. Pourquoi pas ? Mais prenons le temps de bien réfléchir, travaillons sur la définition des différents niveaux de collectivités et sur la nature de leurs dépenses. Sur cette base, nous pourrions établir un bon accord, afin que les collectivités locales soient partenaires du redressement des comptes de l’État.

Je ne serai pas plus long, mes chers collègues. Certains orateurs ont dépassé de plus de 60 % leur temps de parole ; quant à moi, je fais une économie de plus de 30 % : ce sera ma contribution au bon déroulement du débat !

Sourires. –Applaudissements sur les travées de l ’ UCR et de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Collomb

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le problème des inégalités de richesse entre les communes est réel. Mettre en place des mécanismes de péréquation pour y faire face est évidemment un objectif auquel nous souscrivons tous, qui participe de l’essence même du pouvoir de l’État, car la correction des inégalités entre territoires, dans un pays, relève effectivement du rôle de l’État.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Collomb

C’est pourquoi, depuis des années, l’État remplit ce rôle avec la mise en place de mécanismes de péréquation verticale.

Alors que les ressources sont aujourd’hui plus difficiles à trouver, le Gouvernement nous demande d’ajouter – ou, peut-être, de substituer – une péréquation horizontale à la péréquation verticale. Sur le principe, nous sommes prêts à examiner la mise en œuvre de nouveaux mécanismes de solidarité entre territoires et à ajouter cette péréquation horizontale au dispositif existant.

Cependant, monsieur le ministre, au vu de vos propositions, nous pensons que vous ratez votre cible. Voilà quelques semaines, lorsque vous avez présenté vos projets devant l’Assemblée des communautés de France, Jacques Pélissard, au nom de l’Association des maires de France, l’AMF, Michel Destot au nom de l’Association des maires des grandes villes de France, l’AMGVF, et moi-même, pour ce qui concerne l’Association des communautés urbaines de France, avons eu l’occasion de vous le dire.

Aujourd’hui, ce sont essentiellement les grandes villes, mais aussi les villes moyennes, qui vont être mises à contribution.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Collomb

Or, monsieur le ministre, je crois que vous négligez deux réalités essentielles.

Tout d’abord, c’est dans ces villes que se développe aujourd’hui l’économie française, pour la plus grande part, surtout dans les domaines de l’innovation et de la recherche ; c’est dans ces villes que nous pourrons mener, demain, une politique de réindustrialisation de notre pays. Dès aujourd’hui, ces collectivités locales jouent un rôle actif en ce sens : réduire les moyens qu’elles y consacrent serait déjà une première erreur.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Collomb

Ensuite, si l’on examine la question du point de vue non plus de l’économie, mais de la justice sociale, quelles seront les grandes villes touchées, celles qui seront le plus fortement mises à contribution ?

Sur cette liste, je vois par exemple Dunkerque, dont l’agglomération a déjà été l’une des plus affectées par la réforme de la taxe professionnelle. J’y vois également Grenoble, qui compte des quartiers guère privilégiés, tels que la Villeneuve, dont on a beaucoup parlé, Mistral ou Teisseire, les communes d’Échirolles ou de Saint-Martin-d’Hères, dans l’agglomération, ne l’étant pas davantage.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Collomb

Mes chers collègues, je crains qu’on ne demande, au nom de cette péréquation, à celles et à ceux qui connaissent déjà les conditions les plus difficiles de payer pour des territoires sous-fiscalisés, mais dont la population serait beaucoup plus aisée.

Debut de section - Permalien
Philippe Richert, ministre

Mais ces situations sont prises en compte !

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Collomb

Pour prendre l’exemple de mon agglomération, peut-on penser que les habitants de Vénissieux, de Vaulx-en-Velin, de Pierre-Bénite, de Saint-Fons ou de Rillieux-la-Pape qui, demain, vont être appelés à payer des impôts supplémentaires au nom de la solidarité, à la fois au titre du Grand Lyon et de leur commune, sont des privilégiés, devant être davantage mis à contribution ? Eh bien non !

Debut de section - PermalienPhoto de Sylvie Goy-Chavent

Les habitants des communes rurales ne sont pas non plus des privilégiés !

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Collomb

–, elle paierait dès la première année 5, 5 millions d’euros, puis 22 millions d’euros quelques années plus tard.

Pis encore, les habitants de Vaulx-en-Velin, de Vénissieux, de Rillieux-la-Pape, de Givors, de Saint-Fons seraient amenés à payer, eux aussi : ces communes seraient en effet mises à contribution à hauteur, respectivement, de 140 000 euros, de 200 000 euros, de 70 000 euros, de 60 000 euros et de 8 000 euros.

Debut de section - Permalien
Philippe Richert, ministre

Mais non, c’est global !

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Collomb

Mes chers collègues, ces communes ne sont pas riches : elles font même l’objet, à l’échelon intercommunal, de politiques visant à les tirer de la paupérisation, de la ghettoïsation ! La solidarité horizontale existe déjà dans nos intercommunalités…

Debut de section - Permalien
Philippe Richert, ministre

Heureusement !

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Collomb

La dotation de solidarité communautaire s’élève à 20 millions d’euros à Lyon. En même temps, nous consacrons 80 millions d’euros à la politique du logement social, 200 millions d’euros à la rénovation urbaine, et nous dépensons chaque année 120 millions d’euros pour que les transports en commun desservent les quartiers défavorisés !

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Collomb

Alors oui, il faut reprendre la question de la péréquation, pour la penser à la bonne échelle.

Debut de section - Permalien
Philippe Richert, ministre

C’est prévu !

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Collomb

À cet égard, monsieur Dilain, je reconnais que l’Île-de-France pose un vrai problème. La péréquation doit aussi prendre en compte la dimension de nos territoires.

Aujourd’hui, dans l’agglomération lyonnaise, si nous pouvons mener une politique de création de logements sociaux au cœur de la ville-centre, Lyon-Villeurbanne, ou dans les quartiers aisés de l’ouest lyonnais, c’est parce que notre intercommunalité est suffisamment vaste et qu’elle comprend des communes riches et des communes pauvres ! En revanche, très souvent, en Île-de-France, des intercommunalités pauvres côtoient des intercommunalités riches : la véritable réforme consisterait donc à délimiter un territoire pertinent pour qu’une solidarité et des politiques de péréquation puissent être mises en place sur toute l’Île-de-France.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Collomb

Dans mon agglomération, la commune de Vénissieux n’aurait jamais pu se sortir seule de ses difficultés !

Oui à la péréquation, mes chers collègues, mais il faut la redéfinir : si l’amendement de la commission des finances est adopté, nous disposerons d’un an pour le faire, en procédant à des simulations. Mais surtout, il faut redéfinir les intercommunalités au bon niveau, afin de pouvoir aborder les problèmes de manière globale, et non pas de manière parcellaire. Si nous continuons dans la voie où nous sommes engagés, jamais nous ne réussirons à surmonter les difficultés !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste -EELV.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Hélène Des Esgaulx

Laissons faire les élus ! Il n’est pas besoin de légiférer !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dallier

M. Philippe Dallier. On a appelé le Grand Paris, me voici !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dallier

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, voilà bien longtemps que j’espérais pouvoir monter à cette tribune afin non plus seulement de défendre l’idée d’une plus juste et plus efficace péréquation financière entre collectivités locales, mais de voter enfin des dispositions refondant cette péréquation. Malheureusement, je crains que ce 30 novembre ne soit pas encore tout à fait le bon jour pour cela !

Certes, nous savions que la tâche ne serait pas facile, d’abord parce que le contexte budgétaire est très tendu : il est encore plus compliqué de réformer quand il y a moins de grain à moudre ! Cependant, la réforme de la taxe professionnelle offrait – et offre encore – l’occasion d’une refonte globale de ces mécanismes ; il ne s’agit d’ailleurs pas seulement de profiter d’une occasion, mais de répondre à une nécessité absolue.

Les transferts de bases d’imposition, conséquences de la réforme de la taxe professionnelle, sont tels que si personne ne peut s’estimer appauvri, parce que le Fonds national de garantie individuelle des ressources, le FNGIR, est là pour compenser les effets de la réforme, …

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dallier

… certains ont vu les perspectives de développement de leurs bases fiscales s’amoindrir. Je vous invite cependant à la réflexion, mes chers collègues : si la conjoncture s’aggrave, les collectivités territoriales dont les bases d’imposition de la valeur ajoutée sont importantes verront leurs ressources baisser, alors que le versement du FNGIR est garanti.

S’agissant de collectivités locales déjà pauvres ou peu riches, il faut, grâce à de meilleurs mécanismes de péréquation, leur redonner des capacités qu’elles ne peuvent plus trouver par elles-mêmes, fût-ce en consentant d’importants efforts pour le développement économique.

Surtout, indépendamment des effets de la réforme de la taxe professionnelle, bien que des dispositifs de péréquation existent déjà, les écarts de richesse entre collectivités locales de même nature sont encore considérables et, pour tout dire, inacceptables par nos concitoyens, au regard du principe d’égalité.

Oui, il y a des collectivités locales qui sont bien gérées et d’autres qui ne le sont pas, mais cela ne suffit pas, loin de là, à expliquer la situation que nous connaissons. Il existe aussi des territoires structurellement pauvres et des populations pauvres : refuser l’idée même de péréquation, c’est nier cette réalité !

L’an dernier, nous avons enfin décidé d’inscrire dans la loi l’obligation, pour 2012, de refonder nos mécanismes de péréquation.

Il s’agit tout d’abord de refonder le Fonds de solidarité des communes de la région Île-de-France, le FSRIF, seul mécanisme de péréquation horizontale existant au niveau du bloc communal. Sa refondation est une nécessité, car il a tout simplement disparu, dans son ancienne forme, avec la suppression de la taxe professionnelle. C’est sur mon initiative que le Parlement a décidé, l’an dernier, d’en augmenter le montant de 50 % d’ici à 2015.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dallier

Nous avons également admis, pour le bloc communal, le principe de la mise en place d’un fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales, le FPIC, auquel l’ensemble des communes, y compris celles d’Île-de-France, pourraient contribuer, l’ensemble des communes, y compris celles d’Île-de-France, pouvant être bénéficiaires de ce fonds.

Cela dit, pour réaliser cette ambitieuse réforme de la péréquation, plusieurs méthodes étaient envisageables.

Une approche « par le haut » aurait consisté à engager une réforme de la DGF, qui est censée avoir des effets péréquateurs. On sait bien que, dans la réalité, ces effets théoriques se sont perdus dans les sables des réformes successives qui ont empilé les mesures, figé les situations acquises et, au bout du compte, privé la DGF de tout véritable rôle péréquateur.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dallier

C’est d’ailleurs pour cette raison que des mécanismes de péréquation spécifiques ont été mis en place : la DSU pour les villes ayant à faire face à des difficultés sociales particulières au regard de la faiblesse de leurs ressources, la DSR pour les communes rurales, le fameux FSRIF en Île-de-France, qui avait vocation à corriger les inégalités de ressources considérables que connaît la région-capitale. La province regarde toujours l’Île-de-France comme une poule aux œufs d’or, mais cette région, j’y insiste, est marquée par des disparités énormes.

Nous n’avons pas retenu cette approche « par le haut », parce que c’était trop compliqué, nous disait-on. On a donc pris les choses « par le bas », en décidant, à l’instar du FSRIF, de créer un FPIC. Pourquoi pas ?

Cela étant, on voyait bien le risque : comment, en y soumettant toutes les communes, de la plus petite à la plus grande, construire un mécanisme qui soit juste et efficace ? Comment mesurer la richesse réelle d’une commune ou d’un EPCI ? Comment prendre en compte – et c’est bien là tout le débat – les charges auxquelles ces différentes catégories de communes ou d’EPCI ont à faire face ?

S’il y avait eu des réponses simples à ces questions, la DSU et la DSR n’existeraient pas : il n’y aurait qu’une seule dotation ; s’il y en a deux, assorties de critères distincts, c’est à l’évidence que le problème est très compliqué ! Si le FSRIF existe, c’est aussi parce que la région d’Île-de-France est un cas particulier.

Dans ces conditions, vouloir inventer un nouveau fonds de péréquation qui serait la voiture-balai de tous les autres dispositifs et qui traiterait sur un même pied Paris et la plus petite de nos communes, est-ce là une bonne idée ?

Nous venons, monsieur le ministre, de démontrer que non, grâce aux simulations que vous avez bien voulu nous transmettre. Ces simulations arrivent très tard, mais elles sont là, heureusement, pour nous empêcher de faire une énorme bêtise !

Le FPIC, tel qu’il a été imaginé par le Gouvernement ou amendé par l’Assemblée nationale, est en fait, dans les simulations que vous nous communiquez, l’anti-DSU. C’est absolument inacceptable ! Même si cette dotation doit être réformée, on ne peut pas demander à des communes qui sont attributaires de la DSU parce qu’elles connaissent des difficultés sociales importantes au regard de leurs ressources de contribuer au FPIC ! Or vos simulations montrent que la totalité des collectivités de Seine-Saint-Denis, hormis Clichy-sous-Bois, Montfermeil et quelques autres communes, devront contribuer au FPIC, ce qui annulera les effets de la DSU et du FSRIF. C’est une aberration qu’il faut ici dénoncer !

À l’évidence, ce n’est pas en touchant aux seuls critères qui nous sont proposés que nous réglerons le problème. Il faut prendre en considération les critères de charges, non pas seulement pour le reversement, mais également pour le prélèvement. Je ne crois pas, contrairement à M. Dilain, que nous puissions le faire dans le délai qui nous est imparti et sans simulations.

C’est pourquoi j’approuve la proposition de la commission des finances de nous donner une année supplémentaire pour travailler sur la prise en compte des critères de charges pour le calcul à la fois du prélèvement et du reversement, en nous fondant sur des simulations, afin que nous puissions enfin construire un mécanisme de péréquation juste, efficace et surtout pérenne. Si c’est pour recommencer tous les ans, cela n’en vaut pas la peine !

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et sur certaines travées de l ’ UCR.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Richard

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous sommes tous confrontés à un exercice difficile, et je voudrais souligner, en essayant de garder un peu de distance et de capacité d’analyse, que cette difficulté sera durable.

Le premier enjeu, c’est celui des ressources disponibles. Nous sommes passés – les plus anciens d’entre nous ont assisté au changement – d’une situation de ressources croissantes à répartir à une situation de ressources stables.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Richard

Ce n’est pas une abstraction administrative ; c’est simplement la contrepartie d’une réalité dans laquelle nous sommes entrés depuis une décennie, celle de la faible croissance.

Nous savons tous que, au cours des deux ou trois décennies écoulées, nos systèmes de péréquation, de répartition de ressources entre collectivités avaient du grain à moudre, parce que les recettes collectives, qu’il s’agisse de celles de l’État ou de celles des collectivités, étaient en croissance ; elles accompagnaient la croissance du PIB.

Quand le PIB croît de 1 % par an, au lieu de 2 % ou de 3 %, cela change durablement le paysage. Je voudrais souligner que, malheureusement, cette situation est partie pour durer. En dix ans, la compétitivité de notre pays et son potentiel de croissance, quelles que soient les politiques économiques qui ont été menées, ont baissé.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Richard

Si nous ne sommes pas capables, comme d’autres pays européens riches l’ont été, de surmonter cette contrainte, nos exercices de péréquation seront toujours plus difficiles et forcément plus conflictuels.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Richard

M. Alain Richard. Ajoutons que la réforme de la taxe professionnelle, qui relève d’un choix politique, a apporté une complication supplémentaire, en rendant plus complexes et plus difficiles les prévisions, et par conséquent les exercices.

Marques d’approbation sur les travées du groupe socialiste -EELV.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Richard

En même temps, l’honnêteté intellectuelle oblige à dire que personne ne la recréera. Nous sommes entrés dans un système de répartition de la ressource économique des collectivités locales qui n’est pas encore stabilisé, mais qui fonctionnera forcément sous contrainte, si l’on reconnaît que nous avons un problème de compétitivité – et il me semble difficile de le nier.

Nous vivons donc dans un contexte dans lequel la DGF par habitant est durablement en baisse. Si on veut en faire un outil de péréquation, cela signifie qu’il s’agira essentiellement de répartir la baisse de la principale dotation des collectivités territoriales, de manière à assurer un minimum de croissance à celles qui sont le plus en difficulté.

Cela signifie en outre que les mécanismes de péréquation n’ont aucune ressource nouvelle à répartir. Heureusement, la majorité de la commission des finances a fait des propositions visant, à un niveau modeste, à procurer des ressources supplémentaires afin de faciliter un peu la péréquation. Cependant, quand nous regardons l’horizon, nous savons que le contexte sera celui d’une péréquation à somme nulle ou quasiment nulle.

Nous ne sommes pas devant un dossier vide, puisque le Parlement a déjà voté le principe d’une péréquation horizontale, dont je rappelle le caractère peu euphorisant : elle consiste à répartir les ressources au sein des collectivités territoriales, c'est-à-dire à prendre aux unes pour alimenter les autres, exercice extrêmement peu gratifiant.

La vraie question est de savoir si quelqu’un a une recette réellement créative pour y échapper.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Richard

Pour ma part, je ne suis pas sûr de l’avoir détectée…

Le Parlement a donc adopté le principe, largement partagé, d’une péréquation horizontale consistant à répartir entre les collectivités une enveloppe d’un montant fixe. Nous allons tous rencontrer la tentation, à un moment ou à un autre, de rompre cette contrainte en cherchant à prendre l’argent, suivant une formule célèbre, « là où il est ». Je préfère ne pas m’engager dans ce que je crois être une facilité.

Nous avons trois ou quatre sujets intéressants de débat.

Il s’agit, tout d’abord, de la définition de la richesse de la collectivité, en sachant que l’on compare 4 000 entités de nature extrêmement diverse. Il me semble, même si je reste très prudent, que l’on s’approche de ce qui doit être la bonne unité de mesure. Une partie des dotations doivent être prises en compte, mais de préférence pas celles qui relèvent de la redistribution. Il se trouve que j’ai eu à constituer, par le passé, une sorte de DGF locale, le type d’intercommunalité où j’exerçais des responsabilités ayant inauguré la taxe professionnelle unique vingt ans avant les autres. Nous savons bien que la recherche d’un indicateur de richesse pour des collectivités différentes est toujours un exercice compliqué.

À cet égard, je voudrais signaler un point de détail qui peut avoir son importance. Il me semble que l’on n’a pas encore inclus dans la définition du potentiel financier les droits de mutation ou la taxe sur l’électricité, par exemple, parce que l’on considère ne pas être en mesure de les transformer en potentiel financier. Méthodologiquement, s’il s’agit de recettes réelles non affectées, on doit pouvoir les intégrer.

En revanche, la redevance et la taxe d’enlèvement des ordures ménagères, dont on connaît le poids financier, ne peuvent selon moi pas y figurer rationnellement, puisqu’elles sont affectées à une mission spécifique.

Alors, comment prélever ? Il faut prendre comme base le potentiel financier, mais en se rappelant que l’on est en train de prélever sur la ressource vive et que l’on va donc se heurter à des obstacles politiques majeurs.

Je voudrais, à cet égard, mettre en garde contre la multiplication des initiatives « sectorielles » suggérant qu’il ne soit pas tenu compte de certaines ressources. Pour faire une comparaison loyale et opérationnelle entre 4 000 collectivités différentes, il faut compter toutes les ressources, y compris les compensations d’anciennes recettes fiscales.

En revanche, nous sommes maintenant tous convaincus qu’il faudra, y compris dans l’opération de prélèvement, tenir compte des charges à caractère social.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Richard

Comme l’atteste la comparaison des contributions, beaucoup de collectivités confrontées à des problèmes sociaux sur leur sol ont aussi des ressources. On ne peut pas ne pas en tenir compte.

Debut de section - Permalien
Philippe Richert, ministre

Évidemment !

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Richard

Simplement, il faudra que la répartition tienne compte, dès le prélèvement, des charges à caractère social, en n’oubliant pas que ce qui ne sera pas prélevé sur ceux qui disposent de ressources et assurent de telles charges le sera sur d’autres. En prenant sur la ressource existante, nous allons forcément nous heurter à des résistances, qui ont d’ailleurs commencé à s’exprimer ici avec une belle éloquence.

Il faut en particulier tenir compte de l’attribution de la DSU. Cette dotation peut être attribuée à des collectivités assez fortunées, mais il faut lui reconnaître le mérite – même si les barèmes peuvent évoluer – de fonctionner selon des coefficients et donc d’éviter les seuils et les discontinuités. C’est un système qui permet de comparer des centaines de collectivités entre elles, en plaçant le curseur où on veut, sans produire d’effets de seuil.

Nous serons obligés de tomber d’accord sur la prise en compte de l’effort fiscal. Il me semble toutefois que cela n’est pas applicable au niveau de la contribution. L’effort fiscal doit être pris en compte, et ce substantiellement, au stade de la répartition.

Debut de section - Permalien
Philippe Richert, ministre

Tout à fait !

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Richard

Si nous prenons une année de plus, il faut en profiter pour élargir l’éventail de la comparaison du potentiel fiscal. Ne pas faire de différence entre les collectivités qui sont à 90 % de l’effort fiscal moyen et celles qui sont à 120 % ou à 130 % n’est ni équitable ni efficace.

Il faudra également prévoir un curseur bas. Il n’est guère justifiable de ne marquer qu’une différence proportionnelle entre 70 % et 50 % de l’effort fiscal moyen. La différence doit être dissuasive, afin d’éviter de gaspiller l’argent de la péréquation au bénéfice de collectivités qui ne sont qu’à la moitié de l’effort fiscal national.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Richard

Mon temps de parole étant épuisé, je m’abstiens de m’exprimer sur la redistribution.

Je souligne simplement que, comme le savent ceux qui ont essayé de manipuler les différents indicateurs sociaux, plus leur éventail est élargi pour affiner la réalité, plus ils se neutralisent entre eux.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Richard

Les indicateurs pour lesquels nous disposons déjà de données, que nous savons utiliser, c'est-à-dire le revenu par habitant, la proportion de logements sociaux et le nombre de bénéficiaires de l’APL, me semblent suffisants pour établir une différenciation équitable entre les collectivités.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Richard

Si nous décidons de reporter d’un an le débat, ce qui n’est pas une bonne nouvelle pour ceux qui attendaient légitimement quelque chose, …

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Richard

… nous devons mettre ce délai à profit pour ne pas nous retrouver l’année prochaine dans le même état de déficit d’information. Le Gouvernement et les différentes administrations devront donc fournir un effort.

Pour conclure, permettez-moi d’indiquer, mes chers collègues, que cela demandera aussi un effort aux parlementaires. Il est de notre responsabilité de travailler en amont, afin de ne pas découvrir, comme c’est le cas aujourd'hui, en lisant la note d’un collaborateur, des réalités sur lesquelles nous aurions pu réfléchir voilà six mois, et non la veille du débat budgétaire.

Nous devons prendre le temps de la réflexion et du dialogue, afin de proposer des solutions consensuelles, que le Gouvernement sera prêt, je l’espère, à écouter.

Très bien ! et applaudissements sur la plupart des travées.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Michel Baylet

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, plus de deux mois après le renouvellement historique du Sénat, je m’attendais à ce que le Gouvernement entende enfin le mécontentement des élus.

Or les crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » s’inscrivent dans la continuité de votre politique, monsieur le ministre, laquelle n’a jamais pris en considération le rôle primordial des collectivités dans la vie des territoires, dans le fonctionnement des services publics et dans l’action sociale.

Vous n’avez eu de cesse de porter des coups de boutoir au principe de l’autonomie financière des collectivités territoriales, pourtant inscrit à l’article 72-2 de la Constitution !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Michel Baylet

Je constate aujourd’hui que, malgré nos avertissements pressants, la suppression de la taxe professionnelle est un échec complet.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Michel Baylet

Loin d’être la recette miracle présentée par certains, la contribution économique territoriale qui l’a remplacée a, au contraire, fait fondre les ressources de la majorité des collectivités, sans pour autant satisfaire, contrairement à ce que vous espériez, les entrepreneurs, lesquels continuent de se plaindre de payer trop.

En tout cas, les radicaux de gauche souhaitent rendre aux collectivités territoriales la capacité d’action que vous leur avez retirée, monsieur le ministre, en leur octroyant une fraction de la TVA proportionnelle à leur population.

Par ailleurs, compte tenu du tarissement du crédit bancaire, nombre de collectivités ne pourront mener à bien des investissements qu’elles avaient pourtant inscrits dans leur budget pour 2011. Les investissements des collectivités territoriales représentant près de 75 % de l’investissement public, des conséquences néfastes pour l’ensemble de l’économie française sont à redouter !

La situation n’évoluera pas favorablement au cours de l’année 2012. L’augmentation de 3 milliards à 5 milliards d’euros de l’aide de la Caisse des dépôts et consignations annoncée avec fracas par le Premier ministre ne permettra pas aux collectivités de mener à bien l’ensemble de leurs projets, l’enveloppe initiale de 3 milliards d’euros étant déjà épuisée pour de nombreuses régions.

Monsieur le ministre, la création d’une agence de financement des investissements locaux permettrait de rendre aux collectivités une réelle capacité financière. Mais ce projet, pourtant lancé en 2009, n’est toujours pas d’actualité.

De plus, vous avez fait le choix calamiteux de poursuivre le gel en valeur des dotations de l’État. Pis, compte tenu de l’inflation, qui devrait atteindre 2, 1 % en 2012, c’est à une véritable diminution des concours de l’État que nous assistons. Fort heureusement, la commission des finances a su réagir avec pertinence pour neutraliser cette décision inique du Gouvernement.

Déjà étouffées financièrement par la disparition du contrat de stabilité, les collectivités, nous le savons, n’auraient pu supporter une baisse injuste des dotations de l’État de 200 millions d’euros supplémentaires.

Monsieur le ministre, le Gouvernement se fourvoie pour deux raisons au travers de ce projet de budget.

En premier lieu, il justifie ce gel par la volonté « d’associer les collectivités territoriales à l’effort de maîtrise des finances publiques », alors même que la part du déficit des administrations publiques locales est à peine supérieure à 10 % du déficit global.

Je le répète, les élus locaux ont toujours fait preuve de sens des responsabilités. Certes, en cette période de troubles économiques, ils peuvent comprendre que des efforts leur soient demandés. Pour autant, le triste record détenu par l’État en matière de déficit public, alors qu’il se présente comme un parangon de vertu budgétaire, ne fait qu’accroître la défiance des élus envers un gouvernement qui ne leur donne pas les moyens d’assurer l’ensemble de leurs missions.

En second lieu, il n’est pas acceptable que l’on veuille faire croire que les collectivités territoriales peuvent diminuer leurs dépenses comme par miracle, alors même que pèsent sur elles un nombre croissant de dépenses obligatoires et de transferts, toujours plus difficiles à financer.

Je citerai un seul exemple à cet égard : l’État ne compense que les deux tiers des dépenses sociales…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Michel Baylet

… prises en charges par les départements, qui sont donc asphyxiés par un effet de ciseaux, entre des charges toujours croissantes, dans la période terrible que nous vivons, et des recettes en berne.

Monsieur le ministre, mes chers collègues, pour toutes les raisons que je viens d’évoquer, et comme l’a déjà dit M. Mézard, les sénateurs radicaux de gauche et la majorité de mes collègues du RDSE ne voteront pas les crédits de cette mission.

Applaudissements sur certaines travées du RDSE et sur les travées du groupe socialiste -EELV.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique de Legge

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, il est certain que la réforme de la taxe professionnelle et le remplacement de celle-ci par la contribution économique territoriale ont bouleversé en profondeur l’économie générale de la fiscalité locale.

Pour autant, rendre cette réforme responsable de tous nos maux, ce serait oublier que la taxe professionnelle a fait l’objet de soixante-huit réformes en trente-cinq ans d’existence et perdre de vue qu’elle frappait plus lourdement l’industrie que les services, constituant ainsi un handicap pour notre compétitivité ; elle aurait, à terme, fragilisé nos finances locales, puisque la part de l’industrie dans le PIB est passée de 21 % en 1998 à 14 % en 2007.

Sachant que 2 millions d’entreprises environ gagnent à cette réforme et que 850 000 y perdent, étant donné en outre que celles qui contribuent le plus ne sont pas forcément installées dans les territoires les plus pauvres et inversement, on voit bien que la création de la CET est porteuse en elle-même d’une exigence renforcée de péréquation.

Cette exigence, que, je pense, nous partageons tous, conduit à poser la question de la mesure de la richesse et de la pauvreté. Reconnaissons, mes chers collègues, que nous sommes souvent plus prompts à nous comparer aux plus riches de nos voisins, en espérant bénéficier de la solidarité collective, qu’aux plus pauvres d’entre eux, tant nous rechignons à contribuer à un effort de redistribution.

Je me réjouis donc de la création d’un fonds de péréquation, car cela constitue une innovation et une avancée. Toutefois, comme nombre d’entre nous, je constate que les simulations fondées sur le texte adopté par l’Assemblée nationale qui viennent de nous être communiquées ne sont pas cohérentes avec les objectifs affichés. En effet, il apparaît que des territoires réputés défavorisés contribueront alors que des territoires n’ayant pas, a priori, de difficultés particulières seront bénéficiaires.

Avant même d’avoir eu connaissance de ces simulations, la commission des finances du Sénat a abandonné le principe des strates de population, qui permettrait de comparer des territoires d’importance semblable pour le calcul de la péréquation. Cette évolution du texte n’a pas fait l’objet d’une évaluation.

Les études d’impact qui devraient précéder toute évolution législative n’étant pas au rendez-vous, il devient difficile de légiférer. Devant tant d’imprécisions, le report de la mise en place effective du fonds peut apparaître comme une mesure de sagesse. Toutefois, je ne voudrais pas, mes chers collègues, que le Sénat semble en retrait sur ce sujet, sur lequel nous sommes attendus dans nos collectivités.

Quels que soient les développements futurs, je rappelle qu’il ne peut y avoir de péréquation sans que soient effectués, à un moment ou à un autre, des prélèvements, dont le niveau et les modalités ne donneront pas, par hypothèse, satisfaction à ceux qui devront contribuer.

Debut de section - Permalien
Philippe Richert, ministre

Tout à fait !

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique de Legge

En outre, les bénéficiaires trouveront au mieux que le reversement est un dû, et plus généralement sans doute qu’il est insuffisant !

Il nous faudra bien, mes chers collègues, accepter de donner un contenu à la solidarité, ce qui nécessite de faire preuve de courage. Il est paradoxal que nous soyons si prompts à mettre en place des mécanismes de solidarité entre citoyens, et si frileux ou hésitants lorsqu’il s’agit de nos collectivités.

Les critères de redistribution, à savoir le potentiel financier, le revenu moyen par habitant et le taux d’effort fiscal, font consensus, mais il me semble que la notion de charges doit apparaître à un moment ou à un autre. Ne sous-estimons pas, pour autant, la difficulté de l’exercice, car si certaines dépenses sont quasiment incontournables, d’autres peuvent paraître plus discutables. Comme tout se tient, je regrette que la réforme des collectivités territoriales n’ait pas permis d’aller plus loin dans la clarification des compétences. Cela nous aurait sans doute été utile dans le débat actuel sur le calcul des charges.

Il est clair que plus nous progressons sur la voie de la décentralisation, plus se pose la question de l’adéquation entre richesses locales et dépenses obligatoires liées aux transferts de compétences.

Je m’étonne toujours de la contradiction, illustrée à l’instant par M. Baylet, consistant à réclamer plus de dotations de l’État pour faire face aux dépenses – leur versement constitue bien une péréquation entre territoires – et, dans le même temps, le maintien d’une autonomie fiscale, laquelle est antinomique du principe de solidarité.

Protestations sur les travées du groupe socialiste -EELV.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique de Legge

M. Dominique de Legge. Je forme le vœu que, sur l’ensemble de nos travées, nous ayons le courage de tenir un langage de vérité sur ce point et que nous cessions de feindre de confondre autonomie fiscale et autonomie de gestion.

Nouvelles protestations sur les mêmes travées.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique de Legge

Enfin, je ne voudrais pas que la distinction que nous établissons entre péréquation horizontale et péréquation verticale offre une nouvelle occasion d’opposer l’État aux collectivités en rejetant sur lui les responsabilités.

Exclamations sur les travées du groupe socialiste -EELV.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique de Legge

J’aimerais au contraire que nous en profitions pour affirmer que ces deux formes de péréquation participent de l’action publique et de la nécessaire solidarité entre territoires.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Dilain

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous abordons, dans le cadre de l’examen des crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales », le difficile problème de la péréquation, enjeu d’un conflit d’intérêts légitimes.

En effet, chacun défend ses intérêts en les jugeant légitimes, …

Debut de section - Permalien
Philippe Richert, ministre

Merci de le dire !

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Dilain

… à tort ou, le plus souvent, à raison, et tous ces intérêts sont malheureusement en contradiction les uns avec les autres.

Pour essayer de sortir de ce débat toujours difficile, je propose que nous ne nous éloignions pas des fondamentaux.

Si la péréquation suscite des débats passionnés, c’est parce que les inégalités territoriales sont extrêmement importantes en France. Nous détenons au moins un titre européen, mes chers collègues : celui de champion des inégalités territoriales !

M. Jean-Pierre Sueur applaudit

Debut de section - Permalien
Philippe Richert, ministre

Tout à fait !

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Dilain

Il existe même un Observatoire des inégalités, qui permet de comparer les situations.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

Et pour la qualité de la vie, il y a un observatoire ?

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Dilain

De nombreuses études réalisées par des universitaires, par le Commissariat général du Plan en son temps, par le Centre d’analyse stratégique aujourd’hui démontrent que les inégalités territoriales sont très importantes dans notre pays.

À cet égard, je me bornerai à citer un exemple, qui me tient à cœur, tiré d’un rapport du Commissariat général du Plan. Il date un peu, mais je crains que la situation ne se soit encore aggravée.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Dilain

En Île-de-France, les inégalités structurelles vont de un à dix. Ainsi, le maire d’une ville ayant des ressources dépense dix fois moins pour entretenir une école, par exemple, que le maire de Clichy-sous-Bois. Mes chers collègues, pensez-vous sincèrement que le résultat sera le même ? Ce n’est pas possible !

Ces inégalités territoriales ont de graves conséquences. Il semble difficile de continuer sur la voie de la décentralisation sans avoir réglé en amont ce problème. Je veux bien que l’on mette les territoires en compétition, mais à la condition qu’ils soient tous placés sur la même ligne de départ !

Par ailleurs, d’autres études, nombreuses et extrêmement inquiétantes, hélas ! de sociologues, d’économistes, de journalistes tirent la sonnette d’alarme et nous avertissent que la France est en train de partir en morceaux. Le tissu social se désagrège dangereusement. Je vous renvoie aux travaux d’Éric Maurin, de Didier Lapeyronnie, de Luc Bronner, de Gilles Kepel, auteur d’un rapport sur ce sujet au nom de l’Institut Montaigne, ou du géographe Jérémy Robine, dont le livre Les Ghettos de la nation est éclairant.

Il y a là une menace grave pour notre pays, qui rend la péréquation absolument nécessaire. La péréquation verticale a été mise en place, et je me réjouis, monsieur le ministre, qu’elle soit maintenue pour 2012. Il appartient en effet à l’État de garantir l’égalité entre les citoyens, en donnant plus à ceux qui ont moins.

M. le ministre approuve.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Dilain

Toutefois, cette péréquation verticale ne suffisant pas à résorber les inégalités, il me paraît nécessaire d’instaurer une péréquation horizontale. Elle est d’ailleurs déjà pratiquée dans la région d’Île-de-France, où a été finalement mis en œuvre le FSRIF, au terme d’une longue lutte et après bien des débats. Il ne s’agit donc pas d’une simple vue de l’esprit : quand on a le courage de tenir bon, on y arrive ! Je me réjouis que Paris métropole ait, à l’unanimité de son bureau, décidé d’augmenter les ressources du FSRIF.

Debut de section - Permalien
Philippe Richert, ministre

Nous l’avons intégré !

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Dilain

Aujourd’hui, j’espérais, comme Philippe Dallier, vivre un jour historique, celui de la création du fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales. Certes, disons-le franchement, il doit être amélioré, en particulier sur le plan de l’effort fiscal.

Debut de section - Permalien
Philippe Richert, ministre

Nous sommes prêts !

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Dilain

Les communes attributaires de la DSU « cible » ou de la DSR « cible » ne doivent pas être contributrices.

Il convient en outre de prendre en compte non seulement les ressources, mais aussi les charges, sinon il n’y a pas de péréquation possible.

Tout cela est amendable. Malheureusement, les simulations manquent ou nous ont été transmises trop tard. Je crains donc fort que nous ne soyons obligés de remettre à plus tard la création de ce fonds national de péréquation. Je déplore profondément cette absence de simulations !

Je suis d’autant plus inquiet que je vois se répéter un scénario que je connais par cœur : tout le monde est d’accord pour mettre en place la péréquation, jusqu’à la communication des résultats des simulations ; alors là, c’est fini !

Debut de section - Permalien
Philippe Richert, ministre

Et voilà !

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Dilain

Il en va de même aujourd’hui, et il en ira de même dans un an.

Debut de section - Permalien
Philippe Richert, ministre

Tout à fait !

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Dilain

Je crains que l’absence de simulations ne soit qu’un prétexte pour remettre à un an, voire aux calendes grecques, des décisions difficiles.

Debut de section - Permalien
Philippe Richert, ministre

Tout à fait !

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Dilain

Mes chers collègues, je vous donne rendez-vous dans un an : nous verrons alors si ceux qui se sont opposés à la péréquation horizontale pour des raisons techniques maintiendront leur position.

Ce serait l’honneur du Sénat tout entier, représentant des collectivités territoriales, d’être à l’initiative d’un dispositif de péréquation qui ne laisse aucune collectivité territoriale au bord de la route. Ce serait l’honneur d’un Sénat à majorité de gauche d’être le moteur de la solidarité !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste -EELV, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Benoît Huré

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’examen des crédits de la mission « Relations avec des collectivités territoriales » est un temps fort de la discussion budgétaire au Sénat.

Pour la deuxième année consécutive, alors qu’une crise économique et financière sans précédent accable le monde, l’Europe et la France, le Gouvernement soutient les collectivités territoriales. En effet, les reversements de l’État au titre des compensations d’exonérations et de dégrèvements législatifs, des dotations ou des transferts de fiscalité dépasseront les 100 milliards d’euros en 2012, soit 1 milliard d’euros de plus que l’année passée, et ce malgré une contribution de 200 millions d’euros demandée aux collectivités au titre du plan Fillon d’août 2011. Cette dernière somme est à mettre en regard des 200 milliards d’euros de budget cumulé des différentes collectivités territoriales françaises, auquel l’État contribue, je le répète, à hauteur de 100 milliards d’euros.

Je me félicite du maintien de ce soutien de l’État et de la volonté manifestée par le Gouvernement en la matière.

La péréquation suscite de vifs débats : quoi de plus logique au sein de notre assemblée, qui représente les territoires ? Elle fait l’objet des articles 57 et 58 du projet de loi de finances, au travers de la création du fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales et de la prise en compte des conséquences de la réforme de la taxe professionnelle pour les régions. La péréquation ne peut plus attendre ! Quitte à modifier le dispositif l’année prochaine ou les suivantes, il faut maintenant la mettre en place !

Debut de section - PermalienPhoto de Benoît Huré

Je le dis à mes collègues de droite comme de gauche, c’est ce qu’attendent de nous nos territoires !

Tant la péréquation horizontale que la péréquation verticale sont nécessaires. En effet, une meilleure répartition des richesses et des moyens doit être assurée par une péréquation juste, tenant compte des situations et des efforts des uns et des autres. Aujourd’hui, les écarts de richesse entre territoires vont de 1 à 500, voire plus. De telles situations ne sont plus acceptables, elles sont même devenues insoutenables !

En matière de péréquation des moyens publics, ce que l’on appelle la péréquation verticale, les dotations de l’État aux collectivités doivent être rééquilibrées. Il faut procéder à un toilettage de toutes ces dotations qui se sont superposées. Par exemple, la DGF par habitant était l’année dernière de 18 euros dans les zones rurales et de 78 euros dans les zones urbaines, soit un rapport de un à quatre : de telles différences sont-elles acceptables ? Non !

La péréquation, tant horizontale que verticale, doit prendre en compte de nouveaux critères de calcul. Aux critères classiques que sont l’endettement, le potentiel fiscal, l’effort fiscal et le potentiel financier, il faut en ajouter d’autres pour obtenir un meilleur ciblage.

Le revenu par habitant, par exemple, est un indicateur de la capacité contributive. En la matière, l’écart est de un à quatre, l’imposition locale par habitant variant de 258 euros à 1 042 euros en 2011 : les marges de manœuvre ne sont pas les mêmes !

Un autre paramètre à prendre en compte est le pourcentage de personnes âgées ou handicapées dans la population totale d’un territoire. En effet, depuis quelques années, la solidarité de la nation à leur égard a considérablement augmenté. Plus ce pourcentage est important, plus la charge des allocations à verser au titre de l’allocation personnalisée d’autonomie, l’APA, et de la prestation de compensation du handicap, la PCH, est élevée.

Il faut également tenir compte du pourcentage de personnes relevant des minima sociaux, du taux de chômage, du nombre d’habitants au kilomètre carré, de la longueur de voirie et de réseaux divers par habitant.

Je fais confiance à l’ancien sénateur et au président de conseil général que vous êtes, monsieur le ministre, pour mener à bien tout ce travail d’amélioration du partage de la richesse, notamment par une plus grande équité dans la répartition des dotations de l’État aux territoires. Plus largement, nous comptons sur vous pour mettre en place une politique d’aménagement du territoire qui permette de réduire la fracture territoriale progressivement apparue depuis plus de trente ans.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, c’est avec une certaine amertume que je m’exprime à cette tribune, car je partage entièrement les propos de Claude Dilain. Je comprends les raisons pour lesquelles la commission des finances s’est prononcée unanimement pour un report de la création du fonds national de péréquation. Outre les effets négatifs de la suppression de la taxe professionnelle, nous n’avons pas, ou pas assez, de simulations.

Toutefois, on ne peut pas dire que ce constat soit positif pour nous tous. En effet, cela revient à reporter d’un an l’effort qui s’impose pour mettre en œuvre la nécessaire solidarité entre nos collectivités. Il est tout à fait vrai que, comme l’a dit Alain Richard, les marges de croissance seront demain ce qu’elles sont aujourd’hui, même si l’on peut espérer que cela changera.

La péréquation horizontale est donc nécessaire ; la péréquation verticale ne suffira pas. Par conséquent, il faut la bâtir, la fonder. À cet égard, je voudrais simplement faire quelques observations de méthode.

Il y a beaucoup d’impasses sur la voie de la péréquation. Je m’exprime depuis assez longtemps sur ce sujet à cette tribune, et à d’autres, pour pouvoir affirmer que la première impasse, c’est la complexité.

Il suffit de relire l’histoire de la DGF pour constater qu’elle reposait, au départ, sur un nombre de critères limité : le nombre d’habitants, le potentiel fiscal et l’effort fiscal.

Puis, de nombreux bons esprits – pour des raisons toujours bonnes, excellentes même ! – ont estimé qu’il fallait prendre en compte le nombre d’élèves dans les écoles, le nombre de logements sociaux, le nombre de kilomètres de routes, puis ce même kilométrage rapporté à la surface. Ensuite, certains ont voulu ajouter un coefficient pour les routes de montagne. D’autres ont eu l’idée de créer une dotation touristique, et par la suite on en a ajouté une seconde, plutôt que de corriger les défauts de la première !

Il est arrivé un moment où soixante-dix critères étaient pris en considération. Seuls nos amis de la Direction générale des collectivités locales et quelques autres, à Bercy, étaient en mesure de comprendre le dispositif ! Il fallait prendre une décision. C’est Daniel Hoeffel qui l’a fait : on a décidé de tout cristalliser.

Ainsi est née la dotation forfaitaire, qui, en fait, « coagule » un grand nombre d’inégalités, d’effets de circonstance et d’opportunité. La seule logique claire de la dotation forfaitaire, c’est de garantir, pour une année donnée, un versement au moins équivalent à celui de l’année précédente.

La complexité, toujours croissante, est l’ennemie de la péréquation. Une bonne péréquation, qu’elle soit verticale ou horizontale, doit reposer sur un petit nombre de critères incontestables.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Le nombre d’habitants, l’effort fiscal, le potentiel fiscal, les charges ! Cela a été dit remarquablement par Claude Dilain, et il n’y a rien à ajouter.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Le deuxième ennemi de la péréquation, c’est l’empilement.

Depuis vingt ans, pour résoudre les problèmes, on ajoute à chaque fois de nouveaux dispositifs aux anciens.

Les exemples sont nombreux. Quelle est, d’après vous, l’origine de la dotation nationale de péréquation, la DNP ? C’est très simple : voilà quelques années, à l’occasion d’une loi de finances, on a pris un reste de DCTP et un reste de FNPTP pour créer le FNP, qui est ensuite devenu la DNP. Tout le monde suit ?

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Avec une telle logique, on aboutit à un empilement totalement abstrait.

Rappelez-vous le moment où l’on a voulu améliorer la dotation de solidarité rurale. Celle-ci comprenait deux parties, dont l’une est toujours versée à 32 000 communes. J’attends encore que l’on m’explique en quoi cette partie de la DSR est péréquatrice ! On a donc décidé de créer une troisième partie pour les communes cibles, c’est-à-dire les plus pauvres, sans rien changer aux deux autres.

On crée toujours de nouveaux dispositifs, mais sans corriger les inégalités qui continuent à l’évidence à exister dans les dispositifs qu’on ne corrige pas. À force d’agir ainsi, on aboutit à des absurdités.

Le troisième ennemi de la péréquation est l’amour excessif du statu quo, que produit naturellement le zèle, tout à fait compréhensible, des associations d’élus locaux. Je prends des risques, je le sais, en disant cela dans cet hémicycle, mais puisque nous pouvons parler librement, profitons-en !

Les petites communes se défendent. Qui osera dire qu’elles ont tort ?

Les grandes communes invoquent quant à elles, à l’instar de M. Collomb qui s’est exprimé avec beaucoup de conviction, les charges de centralité et leur apport incontestable au développement du pays.

M. Roger Karoutchi acquiesce.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Les communes moyennes ne veulent pas être en reste, ni les départements ni les intercommunalités.

Il ressort de tous ces discours que chacune de ces collectivités a de bonnes raisons de vouloir recevoir la même dotation que l’année précédente. Or il faut avoir le courage politique, et c’est le rôle de l’État républicain, de dire qu’il faut aider fortement les communes qui en ont le plus besoin. À cet égard, il est vrai que la DSU n’est pas assez sélective : parmi les communes qui la touchent, certaines ont nettement plus de ressources que d’autres. L’écart va parfois de un à dix ! On pourrait d’ailleurs faire la même remarque au sujet de la DSR.

La dotation d’intercommunalité, que j’ai contribué à mettre en place, était simplement destinée, à l’origine, à inciter les élus à créer des intercommunalités. Or, aujourd’hui, est-il raisonnable de considérer qu’il suffit d’être une intercommunalité pour bénéficier de la péréquation, car certaines intercommunalités sont plus aisées et d’autres plus pauvres ?

Mes chers collègues, nous sommes contraints de faire preuve de courage politique.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

M. Jean-Pierre Sueur. Je souhaite que nous y parvenions le plus vite possible. Nous nous accordons un délai d’un an ; ce ne doit pas être une manœuvre dilatoire. Je le répète, cette année de report doit nous permettre de faire preuve de courage.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, mon temps de parole étant de cinq minutes, mon intervention sera télégraphique.

D’abord, merci, monsieur le ministre. Comme l’ont dit plusieurs de mes collègues, ce coup de rabot de 200 millions d’euros ne devrait ni provoquer pareille ire – même si certains font parfois semblant de se battre... – ni même faire débat si l’on pense aux 200 milliards d’euros de budget cumulé de nos collectivités et aux 100 milliards d’euros apportés par l’État, surtout en cette période si difficile pour notre pays et nos compatriotes.

J’ai un léger problème : je suis d’accord avec beaucoup d’intervenants de gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Moi aussi !

Vous conviendrez, mes chers collègues, que leurs propos s’apparentent à ceux des élus de droite.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Je ne sais pas qui influence qui. En tout cas, je partage nombre d’arguments de nos collègues Alain Richard, Claude Dilain, Gérard Collomb. Mais, rassurez-vous, je suis également d’accord avec Philippe Dallier, Benoît Huré et les autres intervenants de mon groupe.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Le problème qui se pose, et sur lequel vous reviendrez sans doute, monsieur le ministre, est le suivant : les collectivités plus aisées – ne disons pas « riches » ! – acceptent mal de contribuer à l’effort, tandis que les collectivités bénéficiaires considèrent toujours qu’elles ne reçoivent pas assez.

Cela étant, je veux vous expliquer pourquoi j’ai voté, hier, l’amendement de la commission des finances cosigné par François Marc et Pierre Jarlier.

En tant que président de la commission des finances d’une région, l’Île-de-France, qui est cataloguée comme riche, alors qu’elle connaît des inégalités territoriales aussi fortes, sinon plus, que d’autres régions, …

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

… je peux vous dire que nous sommes favorables à la péréquation et que nous sommes d’accord pour payer notre part.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Nous sommes même prêts à faire un effort supplémentaire, à condition que les critères retenus soient justes et que les charges soient prises en compte.

Pensez que, au terme des critères retenus dans le projet de loi de finances initiale pour 2011, la région de l’Île-de-France occupait le dernier rang. Puis, les critères ayant été modifiés, elle s’est retrouvée au huitième rang. Dans d’autres cas, elle se retrouve classée première. Selon les critères retenus, sa contribution diffère donc de manière considérable.

Oui à la péréquation ! Oui, à la solidarité des collectivités, pourvu que nous nous mettions d’accord sur des critères durables, acceptés et acceptables par tous ! Voilà ce qui pourrait être l’objet essentiel du groupe de travail qu’a prévu de mettre en place la commission des finances.

À cause de l’empilement, personne n’y comprend plus rien. Les plus savants de nos financiers dans les régions, les communes ou les départements ne sont pas capables de dire combien nous devrons payer l’année suivante. Ce n’est pas normal ! Pour boucler nos budgets, nous avons besoin de savoir ce qui sera prélevé au titre de la péréquation.

Pour ma part, je fais confiance à la solidarité de l’État. Mais je sais que c’est un sujet qui fait débat en permanence entre nous. M. Fortassin a d’ailleurs rappelé hier, en commission de finances, que la péréquation et l’autonomie fiscale et financière étaient deux notions foncièrement différentes. C’est vrai ! Lorsque les collectivités bénéficient d’une autonomie complète, pourquoi mettre en place une péréquation ?

M. Baylet l’a dit clairement : donnez-moi l’autonomie fiscale et je n’aurai plus besoin de la DGF. Qu’il ait raison ou tort, force est de constater que nos territoires ne disposent ni des mêmes ressources ni des mêmes compétences.

Accorder une autonomie fiscale complète aux collectivités et supprimer la DGF ainsi que la péréquation horizontale aurait pour conséquence de privilégier les collectivités les plus « riches ». C’est pourquoi la péréquation est nécessaire. En l’occurrence, sachez que la DGF représente déjà un effort considérable.

Si la France est une, si l’ensemble des territoires participent d’une seule nation et d’une seule République, c’est à l’État d’assurer la solidarité entre les collectivités et entre les citoyens sur l’ensemble du territoire.

Monsieur le ministre, je le répète, nous sommes prêts à payer et à participer à la péréquation. Nous demandons seulement que soient retenus des critères de charges.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

Alors que nous débattons de ce projet de budget, nos collectivités locales, représentées par les maires et par les présidents de conseils généraux et régionaux, élaborent leur budget sous la contrainte, dans une conjoncture difficile, et sans aucune visibilité.

C’est dans ce contexte que vous avez choisi, monsieur le ministre, de mettre les collectivités au pain sec et à l’eau.

Exclamations sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

Dans mon conseil général, pour la première fois, la dotation de l’État est inférieure de moitié aux dépenses sociales prises en charge par le département.

Mes chers collègues, je ne connais pas un seul maire, un seul président de conseil général, un seul président de conseil régional, qui augmente les impôts pour le plaisir, qui dépense à tort et à travers.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La plupart des responsables d’exécutifs locaux gèrent correctement leur collectivité. Cette qualité n’est l’apanage ni de la droite ni de la gauche.

Reste que ces élus locaux naviguent à vue.

Selon notre éminent collègue Roger Karoutchi, le coup de rabot de 200 millions d’euros ne mérite même pas un débat. Effectivement, si l’État payait ses dettes, on n’en parlerait pas ! Or j’entends aujourd’hui des élus, de droite comme de gauche, se plaindre que le compte n’y est pas. Il y a donc bien un problème !

La réforme de la taxe professionnelle a été conduite avec vitesse et précipitation, et elle est totalement illisible. Les chiffres sont tellement imprécis qu’aucune collectivité locale ne sait plus où elle va. Même les chefs d’entreprises se plaignent !

Si nous pouvions être d’accord sur le principe d’une telle réforme, nous constatons que le résultat est loin d’être satisfaisant pour nos collectivités locales.

Et que dire de l’autonomie fiscale, qu’a évoquée Jean-Michel Baylet ! Dans les départements, voilà quelques années, elle était de 50 % ; elle est aujourd’hui de 21 %, de 19 %, voire de 17 %.

Mes chers collègues, comment pouvons-nous appliquer des politiques locales sans autonomie fiscale ?

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

Les maires, les présidents d’exécutif réclament non pas des dotations aléatoires, mais des recettes pérennes.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

De ce point de vue, il n’y a pas de fatalité. Si nous sommes des élus responsables, nous devons tout mettre en œuvre pour changer la vie de nos concitoyens.

Pour ma part, je ne peux pas embrayer sur le discours qui consiste à dire que demain sera comme aujourd'hui. Je ne peux pas cautionner l’idée qu’on n’y arrivera pas parce que l’État est pauvre. Non, les femmes et les hommes politiques doivent justement avoir la volonté de se battre contre la fatalité, de changer les choses ; ils doivent aussi considérer que les budgets des collectivités locales ne doivent pas être la variable d’ajustement du budget de l’État.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

J’en viens à la péréquation.

Loin de moi l’idée de faire un mauvais jeu de mots, mais j’oserai une comparaison : alors que Robin des Bois prenait aux riches pour donner aux pauvres, ce gouvernement prend aux pauvres pour donner aux plus pauvres !

Quelles que soient les travées sur lesquelles nous siégeons, nous reconnaissons tous la nécessité de disposer de plus de temps. Certaines collectivités locales sont très riches tandis que d’autres sont très pauvres. La péréquation que nous souhaitons doit être équitable et conjuguer verticalité et horizontalité. Ce n’est que dans ce cadre-là que l’on introduira justice et équité financière en matière de ressources des collectivités territoriales. Et cette équité devra évidemment prendre en compte le potentiel financier, voire le potentiel financier élargi, et l’effort fiscal !

Certaines collectivités locales sont sous-imposées. Pourquoi d’autres devraient-elles payer à leur place ?

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

Mes chers collègues, n’oublions pas non plus de prendre en considération les charges des collectivités locales, faute de quoi l’iniquité demeurera le maître mot.

Ce point a été abordé à plusieurs reprises, notamment par notre excellent collègue Gérard Collomb ou encore lors de nos récents débats relatifs à l’intercommunalité, les territoires eux-mêmes doivent se prendre en main.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

À quoi sert de constituer une communauté de communes ou une communauté d’agglomération composée de cantons et de communes pauvres ? Ce n’est pas en associant deux pauvres que l’on obtiendra un riche !

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

Si nous voulons vraiment rééquilibrer la situation dans nos départements et nos régions, nous devons construire des intercommunalités tenant compte de l’ensemble des structures financières des communes.

Je le répète, il n’y a aucune fatalité. Alors que chaque jour les collectivités locales sont stigmatisées – elles dépenseraient trop, les élus seraient trop nombreux –, je reste persuadé qu’elles sont non pas un problème, mais une chance pour la France.

Si la commune de Clichy-sous-Bois ou les collectivités locales de Lozère ont les moyens d’investir, elles le feront ; des fonds seront alors injectés dans l’économie locale, dans le tissu des PME et des PMI, qui, elles, contribueront à la création de richesses et d’activités. C’est absolument indispensable !

Pour notre pays, l’une des façons de retrouver la croissance est de donner aux collectivités locales les moyens d’investir, non pas pour le maire ou le président de l’exécutif, mais pour mettre en place en tout point du territoire des services publics forts. Pour ce faire, il faut non pas détricoter telle ou telle politique, tirer je ne sais quel petit bout de ficelle, …

Debut de section - Permalien
Philippe Richert, ministre

Il faut plus de moyens, enfin !

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

… mais élaborer une grande réforme fiscale, prenant en compte la péréquation, l’autonomie fiscale et financière, les dotations.

L’Allemagne, où la situation est différente, a été citée. La France, elle, est une et indivisible, mais elle est aussi diverse. On ne gère pas la région Rhône-Alpes comme l’Auvergne, la Basse-Normandie ou la Haute-Normandie.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

M. Didier Guillaume. C'est la raison pour laquelle cette grande réforme fiscale, que nous appelons de nos vœux, sera la réponse globale à toutes les petites modifications qui nous sont proposées.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Fournier

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, s’il y a un sujet qui nous concerne tous en tant qu’élus locaux dans les régions, les départements et les communes, c’est bien celui des crédits relatifs aux relations avec les collectivités territoriales. C’est une question sensible mais ô combien difficile, car rien n’est plus important que les relations entre l’État et les collectivités. Or, chacun le sait, le rôle de nos collectivités territoriales est primordial en période de crise économique.

Comme la plupart des intervenants, j’élargirai mon propos puisque la mission que nous examinons ne porte que sur une petite partie – seulement 2, 5% – de l’effort financier de l’État en faveur des collectivités territoriales.

Au préalable, il est nécessaire de rappeler que la crise des finances publiques que traverse notre pays nous oblige à consentir un effort de discipline budgétaire sans précédent, et ce à tous les échelons. Cet effort, qui sera nécessairement collectif, est indispensable si nous voulons atteindre l’objectif que nous nous sommes fixé de remettre nos finances publiques sur la voie de l’équilibre et respecter, dans les années à venir, les critères du pacte de stabilité.

Dans ces conditions, il apparaît essentiel que les collectivités territoriales participent à cet effort. À cette fin, le Gouvernement leur a demandé une contribution de 200 millions d’euros, contribution qui est proportionnelle à la part des concours de l’État aux collectivités locales dans le budget général.

En dépit de ce contexte, la majorité de gauche au Sénat a souhaité, voilà quelques jours, revenir sur ces mesures d’économie et les a supprimées. Bien évidemment, chacun devra prendre ses responsabilités. Après le vote qui va intervenir, la dotation globale de fonctionnement devrait à nouveau croître de 0, 2 %, soit 77 millions d’euros ; 64 millions d’euros et 13 millions d’euros financeront la péréquation au profit respectivement des départements et des régions.

Tout à fait conscient de la part extrêmement importante que prennent les collectivités locales dans l’investissement public – plus de 70 % –, le Gouvernement avait trouvé une position mesurée, qui permettait de limiter au maximum les conséquences financières sur les collectivités. Dans le projet de loi de finances initial pour 2012, le gel des concours budgétaires, atteignant un niveau équivalent à celui de cette année, devait permettre de sanctuariser certaines dotations, tout en réalisant des économies.

En matière de péréquation verticale, je note avec satisfaction une progression de la dotation de solidarité urbaine et de la dotation de solidarité rurale de 4, 6 %, alors que les mécanismes de péréquation horizontale sont renforcés avec la mise en place du Fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales, dont les critères d’attribution devraient favoriser les zones rurales.

Pour terminer, je voudrais saluer l’intervention du Premier ministre, le 22 novembre dernier, lors du quatre-vingt-quatorzième congrès de l’Association des maires de France.

La crise, les nouvelles règles prudentielles des banques sur les fonds propres et la faillite de la banque Dexia ont entraîné un durcissement des crédits accordés aux collectivités. Le groupe BPCE a estimé qu’il manquerait 5 milliards d’euros aux collectivités en 2011 pour boucler leur programme de financement. Afin d’y remédier, le Gouvernement a débloqué 3 milliards d’euros via la Caisse des dépôts et consignations. François Fillon, ayant pris note de l’inquiétude des élus, a annoncé que l’enveloppe de 3 milliards d’euros de prêts sur fonds d’épargne mise à disposition des collectivités par la Caisse des dépôts et consignations jusqu’au 31 mars 2012 pourrait être portée à 5 milliards d’euros.

Enfin, s’agissant de la création d’une agence de financement des collectivités, que l’ensemble des associations d’élus réclament, et qui est, selon moi, une très bonne initiative, le Premier ministre ne s’est pas dit opposé à cette création et a demandé au Gouvernement de préparer un rapport sur le sujet pour la mi-février.

La diversification de l’offre de financement des collectivités territoriales apparaît aujourd’hui essentielle.

Monsieur le ministre, je voterai le projet de budget, car, au regard de la situation économique sans précédent depuis des dizaines d’années à laquelle notre pays est confronté, il est indispensable d’adopter les mesures que propose le Gouvernement.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Doublet

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la mission budgétaire « Relations avec les collectivités territoriales », qui représente à peine 5 % des concours de l’État, s’inscrit dans un contexte de rigueur et de maîtrise des déficits publics sans précédent. En son sein, les dotations font l’objet d’une répartition par catégorie de collectivités territoriales. Les trois premiers programmes concernent les communes, les départements et les régions ; le dernier regroupe les concours spécifiques versés à certaines collectivités et les coûts de fonctionnement de la Direction générale des collectivités locales.

Aujourd’hui, notre objectif commun est de remettre nos finances publiques sur la voie de l’équilibre et du désendettement pour garantir la souveraineté de la Nation, préserver notre potentiel de croissance et la compétitivité de nos entreprises. Aussi, à l’heure où des efforts sont demandés à tous nos compatriotes afin de participer au redressement de nos finances publiques, les collectivités territoriales se doivent également de prendre part à ce redressement.

Le gel triennal sur la période 2011-2013 des transferts de l’État, hors fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée et compensation de la réforme de la taxe professionnelle, prévu par la loi de programmation des finances publiques s’applique non seulement aux 2, 56 milliards que représentent les crédits de cette mission, mais également aux autres concours financiers de l’État.

Cet effort, les collectivités territoriales n’ont pas d’autre choix que d’y souscrire au vu de la situation économique, tout en obtenant l’assurance que l’État honorera ses engagements, autrement dit renforcera la solidarité, compensera les effets des différentes réformes fiscales et assurera une péréquation équitable entre les territoires.

Gageons que le dispositif de mise en application de la péréquation horizontale ne sera pas techniquement ingérable sur le terrain. La dotation d’équipement des territoires ruraux, mise en œuvre en 2011, avait pour objet de simplifier les critères d’éligibilité et de calcul des enveloppes départementales ainsi que les modalités de gestion.

Or, outre une enveloppe insuffisante pour faire face aux demandes des communes, la mise en place de cette dotation cette année a posé des difficultés du fait des pertes d’éligibilité de communes et d’établissements publics de coopération intercommunale consécutives à la modification des critères.

Force est de le reconnaître, ces dernières années, les collectivités territoriales et les services déconcentrés de l’État ont dû assimiler des réformes fiscales complexes à instaurer in situ.

Dans une période budgétaire tendue, l’inflation normative est vécue d’autant plus difficilement par les élus qu’elle s’applique parfois avec rigidité sans tenir compte des contextes locaux. Au lieu de protéger et d’assurer une sécurité juridique, l’excès de normes devient source d’instabilité, crée des charges nouvelles et obère la dynamique territoriale.

J’espère donc que la proposition de loi de simplification des normes applicables aux collectivités locales, déposée par notre collègue Éric Doligé, sera rapidement examinée par la Haute Assemblée.

Les collectivités territoriales jouent un rôle essentiel dans la cohésion sociale et territoriale. Ainsi, les élus des communes rurales de mon département, par exemple, doivent, malgré des budgets restreints, investir pour l’avenir, assurer les services publics de proximité et de solidarité, tout en veillant à ne pas alourdir leur fiscalité et à ne pas endetter les générations futures.

Le gel en valeur des concours financiers de l’État aura des incidences sur l’investissement public local, qui représente, rappelons-le, 70 % de l’investissement public. Dans les périodes de ralentissement de l’activité, la commande publique est, nous le savons, indispensable pour soutenir le volume d’investissement des entreprises. Lors d’une séance de questions orales, j’appelais déjà l’attention du Gouvernement sur les difficultés d’accès au crédit pour les collectivités locales. Mes inquiétudes sont confirmées aujourd’hui.

Pour répondre aux besoins de financement des collectivités territoriales d’ici à la fin de l’année, l’État a mis à leur disposition, via la Caisse des dépôts et consignations, 3 milliards d’euros. Je prends acte avec satisfaction, tout comme mon ami Bernard Fournier, de l’annonce faite par le Premier ministre lors du Congrès des maires de France selon laquelle ce montant serait porté à 5 milliards d’euros.

Dans le même temps, le Gouvernement a décidé la création, au début de l’année prochaine, d’une banque publique des collectivités territoriales, filiale de la CDC et de la Banque postale. Parallèlement, l’Association des maires de France a un projet d’agence de financement des investissements locaux.

Au regard de la situation de la zone euro, il nous est désormais très difficile d’avoir une visibilité quant aux perspectives à moyen et à long terme en matière d’investissement et d’évolution de la fiscalité.

Dans ce contexte de rigueur budgétaire, la stabilité du présent projet de budget doit être saluée. Gageons que nous pourrons très rapidement donner des signes d’encouragement positifs aux élus. C’est pourquoi je voterai les crédits de cette mission.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à treize heures, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Jean-Pierre Raffarin.