La réunion

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Pierre-Yves Collombat est nommé rapporteur sur la proposition de loi organique n° 381 (2012-2013), présentée par M. Jacques Mézard et plusieurs de ses collègues, tendant à prohiber le cumul, par les parlementaires, de leurs indemnités de fonction avec toute autre indemnité liée à un mandat.

Alain Richard est nommé rapporteur sur la proposition de loi n° 386 (2012-2013), présentée par M. Alain Bertrand et plusieurs de ses collègues, tendant à assurer une représentation juste et équilibrée des territoires au sein des conseils régionaux

René Vandierendonck est nommé rapporteur sur le projet de loi n° 495 (2012-2013) de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Ce point ne figurait pas à notre ordre du jour. Notre rapporteur pour avis a souhaité nous présenter quelques amendements complémentaires, avant l'examen du texte en séance publique.

Debut de section - PermalienPhoto de Gaëtan Gorce

En effet, la quasi-totalité de nos amendements ont été adoptés par la commission des affaires sociales. Outre les trois amendements non adoptés par la commission des affaires sociales, quelques amendements complémentaires, de coordination essentiellement, me sont apparus nécessaires.

Article 5

Debut de section - PermalienPhoto de Gaëtan Gorce

L'article 5 exclut de la représentation des salariés au sein des conseils d'administration et des conseils de surveillance des entreprises de plus de 5 000 salariés en France ou 10 000 dans le monde, les sociétés holdings qui ne comptent que quelques salariés. La commission des affaires sociales, comme le Gouvernement, ont été réticents à modifier cette disposition, pour ne pas viser des entreprises familiales peu enclines à l'ouverture de leurs conseils aux salariés. Je souhaiterais toutefois présenter en séance l'amendement n° 641, identique à celui que vous avez adopté la semaine dernière, afin d'entendre les explications du Gouvernement.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

La phrase finale de l'exposé des motifs me trouble : « ce critère, qui ne figure pas dans l'accord, doit donc être supprimé ». Mais au fond, pourquoi légiférer, sinon pour modifier l'accord ? Il est troublant de dire ainsi que la loi est précédée par l'accord.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

L'objet ne dit pas qu'il faut supprimer cette disposition car elle ne figure pas dans l'accord, mais l'incise que vous venez de citer n'est effectivement pas utile à la phrase.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Nous examinerons prochainement un projet de loi constitutionnel sur le dialogue social et sa place dans l'élaboration des lois. Le Gouvernement a conféré beaucoup d'importance à cet accord, que je considère comme positif, et souhaité que nous en respections l'esprit. Cela n'empêche en rien le Parlement d'assumer son office. La plupart des amendements proposés par M. Gorce ont été acceptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

Ce n'est pas la première fois qu'un accord sert de base à la loi et je n'y vois rien de choquant. Il n'en est pas moins surprenant que l'on se croie obligé de s'en tenir strictement à la lettre de l'accord. Qui fait la loi ? Le Gouvernement, le Conseil d'Etat, le Conseil constitutionnel, la Cour des comptes et maintenant les partenaires sociaux : cela fait beaucoup !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Le dialogue social peut déboucher sur un accord qui ne se traduit pas forcément en termes législatifs. Il s'agit ici de transcrire un accord, parfois imprécis, dans le code du travail. Votre surprise m'étonne... Le législateur ne légifère pas tout seul, il s'appuie, notamment, sur les partenaires sociaux.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

Je ne dis pas autre chose : je déplore que nous soyons de moins en moins législateurs...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Que l'on étende l'accord des partenaires sociaux à l'ensemble des entreprises me paraît plutôt positif. C'est tellement rare ! Le Gouvernement avait d'ailleurs menacé d'une loi en l'absence d'accord. Il est normal en l'occurrence que les parlementaires ne modifient pas trop l'accord, sinon ils nieraient le dialogue social. Qu'on l'adapte, qu'on le précise, c'est ce que fait, excellemment, notre rapporteur pour avis. Cette adaptation aux sociétés holdings qui emploient très peu de salariés est bienvenue et fidèle à l'esprit de l'accord.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

L'adoption de cet amendement emportera donc la suppression de la dernière phrase de son exposé des motifs.

L'amendement n° 641 est adopté.

L'amendement de coordination n° 642 est adopté, ainsi que l'amendement n° 643.

Debut de section - PermalienPhoto de Gaëtan Gorce

L'amendement n° 644 est de coordination et de simplification. Il concerne l'obligation de représentation paritaire des salariés au sein des conseils et vise à éviter une redondance.

L'amendement n° 644 est adopté.

L'amendement de coordination n° 645 est adopté, ainsi que l'amendement de coordination n° 646.

L'amendement de coordination n° 647 confirme la possibilité pour un salarié de saisir le tribunal, afin d'enjoindre au gérant de société en commandite par actions de modifier ses statuts, pour que les salariés soient représentés au conseil de surveillance.

L'amendement n° 647 est adopté, ainsi que les amendements n° 648 et 649 rectifié.

Article 13

L'amendement de coordination n° 650 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Gaëtan Gorce

L'amendement n° 651 tend à empêcher que la nouvelle procédure de validation du plan de sauvegarde de l'emploi, qui implique de nouveaux délais de négociation pour l'administration, fragilise la couverture des salariés par le régime de garantie des salaires dans une entreprise placée en redressement ou liquidation judiciaires, mais aussi en sauvegarde. Il nous faut trouver une solution satisfaisante.

Nous reviendrons en séance sur cette question technique.

L'amendement n° 651 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Nous avions signalé notre préoccupation sur la prescription lors de notre séance de commission de la semaine dernière.

Debut de section - PermalienPhoto de Gaëtan Gorce

Je n'ai rien proposé, afin de respecter l'accord, mais je me proposais d'intervenir sur l'article pour entendre le Gouvernement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Mme Gourault m'interroge sur le calendrier d'examen des projets de loi relatifs à la décentralisation. Je n'ai qu'une certitude : le gouvernement envisage d'inscrire le projet sur les métropoles le 30 mai ; je n'ai pas d'information sur les deux autres.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

Nous regrettons que le texte sur la décentralisation, qui forme un tout, ait été « saucissonné » en trois parties, sans vision d'ensemble du calendrier.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrice Gélard

Nous ne disposons pas d'un agenda parlementaire digne de ce nom. Nous avons siégé lundi après-midi mais pas mardi. L'ordre du jour est sans cesse modifié. Cela traduit une insuffisance du Secrétariat général du Gouvernement ou du ministre chargé des relations avec le Parlement. L'on ne peut continuer à donner du Parlement une image déplorable qui témoigne d'un mépris du Gouvernement envers lui. Sous le gouvernement de Lionel Jospin, nous disposions d'un calendrier établi pour six mois. Nous marchons aujourd'hui dans le brouillard ou, ainsi qu'on l'a lu dans la presse, comme un canard sans tête.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Je vous donne acte de votre déclaration. Je suis très sensible à l'hommage appuyé que vous avez rendu au Gouvernement de Lionel Jospin. Je communiquerai votre appréciation à M. Vidalies, ainsi que votre demande, légitime, d'une organisation plus lisible de nos travaux. Il est vrai que nous devons, dans cette commission, accomplir un travail énorme, en raison du nombre de projets et de propositions de loi dont nous sommes saisis. Une Conférence des Présidents se tient ce soir. C'est le lieu idoine pour faire part de vos remarques. Nous disposons désormais d'un rapporteur pour le texte sur les métropoles. Compte tenu de sa date d'examen en séance publique et de l'interruption de nos travaux pour deux semaines, nous ne pourrons pas nous réunir sur le rapport avant le 15 mai, et nous procéderons aux auditions publiques dès la semaine prochaine...

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Joissains

L'Union des maires des Bouches-du-Rhône demande à être entendue...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Nous essayons de prendre en compte les réalités politiques. J'ai bien compris leur hostilité...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Si nous organisons une table ronde, nous nous efforcerons de rassembler la diversité des points de vue. Il faut que chacun soit représenté. Nous vous enverrons demain un programme d'auditions prévisionnel, n'hésitez pas à nous signaler ses imperfections éventuelles. Nous pourrons peut-être procéder à des auditions complémentaires après le 14 mai, car les 13 et 14 mai.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Ce dernier texte sera-t-il examiné selon la procédure accéléré ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

A cet instant, les éléments portés à ma connaissance ne me permettent pas de vous l'affirmer. Quant au « saucissonnage » évoqué par Mme Troendle, j'ai préconisé, et je n'étais pas le seul, eu égard à la complexité et à la longueur du projet initial, qu'il soit présenté sous la forme de trois textes courts. Nous avons trois textes, qui ont chacun un objet. Je pense que ce n'est pas mal. Nous pourrons les amender, en tout cas celui qui nous est soumis.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

Le projet de loi sur l'élection des sénateurs est inscrit les 13 et 14 mai, semaine d'initiative parlementaire...

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

Je m'interroge sur l'inscription de ce texte dans ces conditions, d'autant que j'ai entendu, comme M. Mézard, qu'il serait soumis à la procédure accélérée...

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

Pour un texte de cette importance pour le Sénat, ce serait difficilement compréhensible et pas très correct...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Je crois comprendre que la commission ne devrait pas y être favorable...

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

Il serait bon que la commission se prononce officiellement contre la procédure accélérée.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Anziani

En ce cas, je m'abstiendrai, car nous sommes très près des élections sénatoriales.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Il ya donc des positions divergentes, mais je note les demandes de Mme Troendle et de M. Mézard...

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Je n'ai fait que poser une question, sans aucune arrière-pensée...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Je constate un fort mouvement contre la procédure accélérée, et une position exprimée par M. Anziani, que partagent plusieurs collègues. Il est en effet de tradition de régler les questions électorales au moins un an avant les élections.

La commission entend une communication de M. François-Noël Buffet sur la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil portant création d'un système d'entrée/sortie pour l'enregistrement des entrées et sorties des ressortissants de pays tiers franchissant les frontières extérieures des États membres de l'Union européenne (E 8134), sur la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) n° 562/2006 en ce qui concerne l'utilisation du système d'entrée/sortie (EES) et le programme d'enregistrement des voyageurs (RTP) (E 8135) et sur la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil portant création d'un programme d'enregistrement des voyageurs (E 8136), dont la commission s'est saisie en application de l'article 73 quinquies, al. 2, du Règlement du Sénat.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

La Commission européenne a présenté le 13 février 2008 une communication sur les possibilités offertes par les nouvelles technologies pour améliorer la sécurité et faciliter les déplacements par l'automatisation des contrôles aux frontières.

Sa proposition a été entérinée dans le programme de Stockholm, adopté au mois de décembre 2009 par le Conseil européen. Puis la Commission européenne a déposé, le 28 février dernier, trois propositions de règlement qui constituent le paquet « Frontières intelligentes », dont notre commission s'est saisie le 20 mars. Abordé lors du dernier Conseil « Justice et affaires intérieures » le 7 mars dernier, il semble avoir reçu un accueil favorable de la majorité des délégations.

La Commission européenne entend créer un système d'enregistrement des entrées et sorties des ressortissants de pays tiers admis pour un court séjour, qu'ils soient ou non soumis à visa (EES). Ce système serait centralisé et géré par l'Agence européenne pour la gestion opérationnelle des systèmes d'information à grande échelle, en charge des systèmes d'information Schengen de deuxième génération (SIS II), sur les visas (VIS) et EURODAC pour la comparaison des empreintes digitales des demandeurs d'asile.

Le système EES substituerait à l'apposition de cachets sur les documents de voyage l'enregistrement automatique des dates d'entrée et de sortie. Lors du premier franchissement d'une frontière extérieure de l'Union, serait créé, pour chaque ressortissant de pays tiers admis pour un court séjour, un dossier individuel contenant des données alphanumériques relatives à l'état civil de la personne et à ses documents de voyages, ainsi que des données biométriques. Lors de chaque entrée sur le territoire de l'espace Schengen, serait également créée une fiche d'entrée-sortie associée au dossier, comportant la date et le point d'entrée ; à la sortie, y seraient introduits la date et le point de sortie.

La Commission européenne propose, en second lieu, un programme d'enregistrement des voyageurs (RTP), présenté comme le pendant de l'EES et destiné à améliorer la gestion des flux croissants de voyageurs. Conçu pour les ressortissants de pays tiers voyageant fréquemment, ce programme accélérerait le passage des frontières. Outre le paiement d'un droit, la contrepartie en serait un contrôle documentaire et un contrôle de sûreté préalables. La demande en serait faite auprès du consulat de n'importe quel État membre ou à n'importe quel point de passage des frontières extérieures et les critères seraient les mêmes que ceux appliqués pour les visas à entrées multiples. La Commission européenne encourage les États à se doter de systèmes automatisés de contrôle, à l'instar des sas PARAFE (Passage automatisé rapide aux frontières extérieures).

Dès lors qu'il n'est que facultatif, le programme RTP n'appelle que peu d'observations quant à son principe. En revanche, ses modalités de mise en oeuvre soulèvent plusieurs interrogations. Parlons d'argent : la Commission européenne prévoit un budget d'1,1 milliard d'euros pour le développement des systèmes EES et RTP, mais cela ne couvrirait que les dépenses pour les composantes centrales, les composantes nationales n'étant prises en charge que dans les limites des ressources disponibles.

La solution technique retenue par la Commission européenne nous préoccupe. Lors du passage de la frontière, le processus d'identification du voyageur ferait intervenir, en sus de la lecture du document de voyage et des empreintes digitales, celle d'un jeton d'authentification prenant la forme d'une carte lisible par l'automate. Or avec PARAFE, on franchit la frontière après lecture de la bande MRZ du passeport et des empreintes digitales.

Si l'adhésion au programme était facultative, elle serait subordonnée à l'accord des autorités habilitées à instruire les demandes. Il serait nécessaire de s'assurer de l'égalité de traitement des ressortissants des pays tiers en fondant les restrictions sur les seuls impératifs de sécurité.

Si l'on peut espérer, à terme, un gain de temps lors du passage des frontières, dans un premier temps, l'adhésion au RTP et la création du dossier EES pour les voyageurs non enregistrés impliquent le recueil d'empreintes digitales, ainsi que le déplacement en amont des procédures de contrôle. Dans les consulats ou aux frontières, il sera nécessaire de s'équiper en bornes digitales et de revoir l'organisation des services. Une étude d'impact est en cours.

Obligatoire et concernant tous les ressortissants de pays tiers admis dans l'espace Schengen pour un court séjour, le système EES pose des questions significatives au regard des principes de finalité et de proportionnalité des traitements de données à caractère personnel. Ayant pour objectif d'améliorer la gestion des frontières extérieures et de renforcer la lutte contre l'immigration clandestine, lors des contrôles aux frontières extérieures comme à l'intérieur de l'espace Schengen, le système EES contiendrait une calculatrice automatique : sitôt enregistrée la date d'entrée sur le territoire, elle décompterait le nombre de jours restant sur les quatre-vingt-dix autorisés sur la période de cent quatre-vingt jours définissant le court séjour. Les autorités compétentes vérifieraient ainsi le respect de la durée du séjour autorisée.

Cette calculatrice serait couplée à un mécanisme d'information repérant les voyageurs dont la durée de séjour autorisée aurait expiré avant l'enregistrement de leur sortie. L'EES produirait ainsi une liste de données relatives à ces personnes, mise à disposition des autorités nationales compétentes. Selon la direction centrale de la police aux frontières, cette information, afin d'être exploitable, devrait déclencher une alerte dans le système d'information Schengen, voire alimenter le fichier des personnes recherchées car ce n'est qu'à l'occasion d'un contrôle d'identité que l'on pourrait interpeler l'étranger en situation irrégulière.

L'analyse des données d'entrées et sorties des ressortissants de pays tiers fournies par l'EES serait une source précieuse d'information. En améliorant notre connaissance des flux, elle contribuerait à affiner la politique de visas de l'Union européenne et à mieux évaluer le risque que les ressortissants d'un pays demeurent illégalement sur le territoire une fois admis. Cette approche factuelle étayerait les négociations de l'Union européenne avec des pays tiers et encouragerait davantage de cohésion au sein de l'espace Schengen.

La proposition de règlement prévoit d'ouvrir, en un second temps et après évaluation, l'accès à l'EES à des fins répressives pour « lutter contre les infractions terroristes et les autres infractions pénales graves ». D'après nos auditions, seraient concernés notamment la traite des personnes et le trafic de stupéfiants.

Une telle modification doit s'analyser à la lumière de la jurisprudence du Conseil constitutionnel sur la loi relative à la protection de l'identité, fondée sur quatre éléments : la taille du fichier, la nature biométrique des données, les caractéristiques techniques permettant non seulement l'authentification, mais également l'identification des personnes, enfin, la pluralité des finalités d'un fichier à l'origine administratif et conçu pour lutter contre les usurpations d'identité mais transformé par des amendements successifs en un fichier de police. Le Conseil constitutionnel a censuré la création d'un fichier central biométrique des cartes nationales d'identité et des passeports, au motif qu'il portait « au droit au respect de la vie privée une atteinte qui ne peut être regardée comme proportionnée au but poursuivi. »

La modification de la finalité du fichier est d'autant plus problématique que l'EES comporterait des données biométriques que ne requiert pas un système d'enregistrement des entrées-sorties stricto sensu. L'exposé des motifs de la proposition de règlement signale que treize États membres exploitent d'ores et déjà des systèmes similaires ne recueillant que des données alphanumériques.

Cependant, l'introduction des données biométriques se justifierait pour l'identification des étrangers en situation irrégulière ayant détruit leurs documents de voyage et qui ne figureraient pas dans la base VIS, car ressortissant de pays exemptés de visa. Cela aiderait à mieux contrôler l'immigration clandestine.

L'EES devrait contenir les données relatives à tous les ressortissants de pays tiers admis pour un court séjour, soit près de 200 millions de personnes par an. Cela conduit à examiner de près les garanties de sécurité du système. La durée normale de conservation des données serait de six mois, soit la durée de séjour autorisée. En l'absence d'enregistrement d'une date de sortie cependant, les données seraient conservées cinq ans à compter du dernier jour du séjour autorisé. En cas d'accès à des fins répressives, la Commission européenne prévoit de porter la durée à cinq ans pour tous les voyageurs qu'ils soient ou non en règle. Or, l'accès à des fins répressives ne serait ouvert qu'à titre secondaire. Aussi votre rapporteur est-il en accord avec la recommandation formulée par le G 29 d'une durée de conservation des données fixée en fonction d'une finalité administrative.

Pour le reste, les droits et garanties en matière de protection des données semblent être assurés de manière satisfaisante, notamment en ce qui concerne la communication des données contenues dans l'EES à des pays tiers qui serait strictement encadrée, contrairement aux propositions de règlement et de directive relatifs à la protection des données, ce que le Sénat avait dénoncé.

L'éventuelle modification de finalité de l'EES, qui semble avalisée par le G 29, soulève une objection de principe. Les difficultés soulevées par la nature biométrique des données recueillies doivent inciter à la plus grande vigilance au regard de la protection des données. La nécessité de ce changement de finalité devra être établie en tenant compte des besoins exprimés par les services et après une évaluation rigoureuse des dispositifs existants.

En dépit des garanties apportées par la proposition de règlement, il me paraîtrait souhaitable de rappeler au Gouvernement l'attachement du Sénat à un cadre juridique garantissant un haut niveau de protection des données. Je l'invite tout particulièrement à garder à l'esprit, au cours des négociations relatives à l'EES comme lors de celles relatives aux nombreux autres traitements de données européens, qu'il lui appartient de continuer de promouvoir au niveau européen le haut niveau de protection des données garanti par le droit français.

Un dernier point : j'ai entendu la plupart des services susceptibles d'être intéressés par ces systèmes, les amenant même parfois à s'y intéresser eux-mêmes.

Un regret, toutefois, la chancellerie n'a voulu, ou pu, être auditionnée. Elle aurait certainement eu des choses intéressantes à dire.

Debut de section - PermalienPhoto de François Pillet

En qualité de rapporteur du texte qui a conduit à la décision du Conseil constitutionnel, je salue cet excellent travail du rapporteur et ne peux qu'abonder dans le sens de ce que j'ai toujours défendu.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

D'autres Etats membres partagent-ils votre analyse, ainsi que l'attachement aux principes que nous défendons ?

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

Nous sommes parmi les premiers à nous prononcer, mais les gouvernements semblent d'accord sur l'utilité du fichier ; le fait qu'il contienne immédiatement des données biométriques fait consensus. Ils sont plus prudents pour ce qui est d'aller plus loin, notamment sur le plan répressif ; la commissaire européenne est très vigilante à cet égard.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

Une initiative législative en termes de protection d'identité serait des plus opportunes. La proposition de loi telle que censurée par le Conseil constitutionnel préserve certes les libertés publiques et la vie privée, mais les usurpations d'identité galopent sereinement...

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

L'Europe se soucie avant tout d'avoir un vrai contrôle sur les entrées et les sorties, notamment dans le but d'harmoniser les dispositions en matière d'immigration irrégulière. Aller plus loin ne correspond pas à l'état d'esprit général.

La proposition de résolution européenne est adoptée.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

M. le Président du Sénat me fait parvenir la lettre qu'il reçoit du Premier ministre, l'informant du recours à la procédure accélérée pour l'examen du projet de loi relatif à l'élection des sénateurs. M. Collombat a fait preuve de prescience...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

M. Anziani, de sa sagesse coutumière, et Mme Troendle, de sa perspicacité sans faille. Quoique nous puissions en penser, cette procédure fait partie des prérogatives du gouvernement. Conformément à la Constitution, la seule alternative consisterait à ce que les Conférences des Présidents des deux Assemblées s'y opposent conjointement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Non seulement la procédure accélérée nous prive de deux lectures, mais elle peut encore raccourcir considérablement les délais. Des textes ont été examinés en huit jours...

La commission examine ensuite le rapport et le texte qu'elle propose pour la proposition de loi n° 546 rectifié bis (2011-2012), présentée par M. Bruno Retailleau et plusieurs de ses collègues, visant à inscrire la notion de préjudice écologique dans le code civil.

EXAMEN DU RAPPORT

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Anziani

En décembre 1999, aux larges des côtes bretonnes, l'Erika, un pétrolier chargé de fioul lourd affrété par la société Total faisait naufrage, souillant 400 kilomètres de côtes, tuant 150 000 oiseaux, répandant dans l'océan 18 tonnes de fioul et huit tonnes de produits cancérigènes. À la suite d'un procès qui a duré onze ans, dont les conséquences environnementales ont dépassé celles du naufrage de l'Amoco Cadiz en 1978, la Cour de cassation a, le 25 septembre 2012, rendu contre l'avis de l'avocat général un arrêt, publié dans toutes les gazettes de France et du monde. Confirmant les décisions antérieures, elle condamnait Total à l'amende maximale, 375 000 euros, et à 200 millions d'euros de dommages et intérêts à payer à l'État, aux collectivités territoriales et à des associations agrées de protection de l'environnement.

Toute la procédure a été traversée par une question juridique et à certains égards, politique. Qu'est-il possible d'indemniser au juste ? La Cour de cassation a indemnisé le préjudice porté à l'image des collectivités territoriales, de même que la perte d'intérêt matériel que constitue une diminution du tourisme. Au-delà du préjudice matériel et moral, n'y avait-il pas un préjudice causé directement à l'environnement lui-même ?

L'ourse Cannelle abattue par un chasseur dans les Pyrénées était la dernière représentante de son espèce : la disparition d'une espèce ne constitue-t-elle pas un pur préjudice environnemental ?

La proposition de loi mérite-t-elle d'exister ou bien le droit positif règle-t-il déjà les questions dont elle traite ? Certes, la Charte de l'environnement de 2004 a désormais valeur constitutionnelle et la protection de l'environnement figure à l'article 34 de la Constitution. Cependant, la loi du 1er aout 2008 relative à la responsabilité environnementale, qui transpose la directive du 21 avril 2004, est inapplicable, parce qu'en énumérant certains dommages seulement, le législateur en a écarté d'autres et ignoré l'obsolescence des techniques. Les préfets, chargés de son application, n'ont jamais utilisé cette procédure, jugée trop complexe.

Autre objection, pourquoi ajouter ces dispositions à un code civil déjà trop épais ? L'article 1382 prévoit que celui qui cause un dommage à autrui doit le réparer. L'article 1383 dispose que chacun est responsable du dommage qu'il a causé par sa négligence ou par son imprudence. Enfin, l'article 1384 rend responsable des personnes ou des choses qu'on a sous sa garde.

Cependant, l'étude de la jurisprudence met en évidence le malaise des tribunaux. Afin de donner un fondement à la réparation du préjudice écologique, la Cour de cassation s'appuie sur la notion de préjudice moral pour indemniser les associations agréés qui n'ont pas subi de préjudice matériel. En outre, les juridictions du fond ne sont pas toutes des lectrices attentives des arrêts de la Haute juridiction, et il faudra un certain temps pour écarter le risque de divergences. Le plus simple est donc d'éclaircir la question. C'est également l'avis de la chancellerie, qui a mis en place un groupe de travail sur le sujet, et se montre favorable à l'évolution du code civil.

Si je suis favorable au texte, je pense qu'il faut le faire évoluer sur certains points. Ses auteurs ont renoncé à toucher à ce monument du droit qu'est l'article 1382. Pour rassurer les juristes, ils ont créé un article 1386-19, distinct de la responsabilité délictuelle et quasi-délictuelle, et de la responsabilité du fait des produits défectueux, et instauré une nouvelle responsabilité au titre IV ter, consacré à la responsabilité du fait des dommages causés à l'environnement : conformément à l'article 1382 qui l'inspire, il s'agit d'une responsabilité pour faute. Malgré les craintes des milieux économiques, j'aurais opté pour une responsabilité sans faute, plus conforme au mouvement de la jurisprudence, de même qu'au principe « pollueur-payeur », inclus dans la Charte de l'environnement, et je vous proposerai un amendement à cette fin.

La proposition de loi prévoit prioritairement une réparation en nature : si la plage est polluée, le pollueur devra la remettre en l'état. Si la réparation en nature est impossible, j'ai déposé un amendement permettant au juge d'ordonner une compensation en dommages et intérêts, avec une affectation à une cause environnementale.

Malgré son caractère réglementaire, un point de procédure mérite d'être soulevé, celui de l'intérêt à agir : au-delà de l'Etat et des collectivités territoriales, les associations agrées, ou dont l'objet statutaire est la protection de l'environnement, doivent-elles être concernées ? Pour ma part, j'y suis favorable, l'Etat ne faisant pas toujours preuve de la plus grande réactivité.

Enfin, se pose la question de la prescription : fixée à 30 ans par l'article L. 152-1 du code de l'environnement, elle court à compter du fait générateur. Or, une pollution souterraine de nappes fluviales peut se révéler cinquante ans plus tard... Je suggère donc de faire courir le délai à compter de la connaissance du dommage.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Richard

Rendons hommage à la pondération du rapporteur comme à son esprit d'équilibre. Si nous instituons une nouvelle responsabilité, il faut en examiner toute la chaîne, de l'évaluation, ardue, du préjudice à l'identité du titulaire du droit à la réparation. J'ai eu l'occasion de m'impliquer récemment dans mon département dans un cas concernant les conséquences de quatre-vingt dix ans d'épandage d'eaux usées sur des terres agricoles. J'essaye d'en convaincre les parties, l'activité n'était pas illicite à l'époque des faits, et le droit à réparation, s'il est reconnu, ne peut viser que les anciens propriétaires des terres : en aucun cas, la collectivité n'a subi un préjudice. D'où ma question : une collectivité sera-t-elle bénéficiaire de l'indemnisation, une compétition de victimisation opposera-t-elle des associations, éventuellement crées pour l'occasion ?

Le droit français est clair : toute responsabilité implique une indemnisation. Le tribunal, armé d'expertises toutes plus savantes les unes que les autres, devra définir un montant : comment indemniser la perte écologique que représente la mort de la malheureuse ourse Cannelle ? En d'autres termes, peut-on légiférer sans avoir préalablement réfléchi aux conséquences du texte ?

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

Je serai également fort prudent sur ce texte qui pose un principe sans l'encadrer. Qu'adviendra-t-il quand un agriculteur accusera son voisin d'avoir grillé deux rayons de betteraves ?

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

Des associations se créeront contre l'aménagement d'une crique ou d'un petit port de plaisance que tout le monde réclame. Plus qu'un grand progrès pour le territoire, je crains que le texte n'annonce la paralysie de l'aménagement territorial.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

La proposition initiale portant sur l'article 1382 n'était pas raisonnable, d'autant que les articles 1382, 1383 et 1384 forment un bloc. La responsabilité du fait des choses est plus développée en matière environnementale que la responsabilité pour faute. Si un pipe-line fuit, le propriétaire est responsable, même quand il n'est pas fautif.

Les articles 1386 et suivants sur les produits défectueux seront- ils appliqués en plus des articles 1382 à 1384 ? Les différentes responsabilités ne sont pas exclusives, mais cumulatives. Malgré les efforts de clarification du rapporteur, il faut border davantage le texte.

Enfin, je suis très réservé sur la prescription. Si la prescription de trente ans à compter du fait générateur ne convient pas, il faut retenir le délai de droit commun, plus court, mais dont le point de départ est la découverte du dommage. Quand les faits sont connus, pourquoi attendre dix ans pour agir ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Vial

Le rapporteur a accompli un excellent travail. Je ne peux d'ailleurs que convier mes collègues à se reporter à la remarquable synthèse qui a été établie en amont.

L'affaire de l'Erika a cumulé un très grand nombre de problématiques juridiques : droit maritime, identification des responsables, puis présentation trop rapide de l'arrêt de la Cour de cassation sous l'angle du dommage écologique. Constatons d'abord un échec de notre droit de l'environnement et félicitons-nous que la Cour de cassation en soit venue à reconnaître le dommage écologique. Les juristes se félicitent de cet arrêt et s'interrogent sur l'utilité de faire évoluer l'article 1382 du code civil. En effet, pourquoi ébranler un principe dont la Cour de cassation a montré la pertinence en le faisant évoluer ? En revanche, l'article 1386-19 créé par le texte que nous examinons, s'en démarque, et devrait s'inscrire dans la logique des articles 1383 et 1384.

Enfin, la réparation des dommages en nature me gêne. Après l'affaire Arcelor-Mittal en 2012, nous risquons de connaître en 2013 l'affaire Rio Tinto Alcan, l'ex-Péchiney. Mon département héberge un des deux sites d'aluminium dont l'avenir va se jouer dans les prochaines semaines. Péchiney représentait hier 80 000 emplois, plus de 100 sites en France ; Rio Tinto Alcan emploie 3 500 emplois dont Dunkerque et Saint-Jean-de-Maurienne.

Le Gouvernement se bat pour sauver ces deux sites, notamment celui de Savoie, menacé à court terme, et nous avons plus de cent sites pollués en France. J'ai contacté les maires concernés pour voir comment engager une action contraignante envers cet industriel, l'évaluation de la dépollution étant fixée à deux ou trois milliards d'euros. Or, à ma grande surprise, certains me répondent que la société leur propose de mettre gratuitement à leur disposition les sites, pour en faire des terrains de sport ou autre, ce qui lui évitera de débourser des milliards pour les remettre en état. Voilà les conséquences perverses de la réparation en nature.

De ce fait, je suis favorable à l'article 1386-19, à condition de le réécrire autrement que par référence à l'article 1382. Sur l'article 1386-20, je suis sceptique, car les effets pervers peuvent l'emporter sur l'apparente satisfaction d'une réparation.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

Je ne me fais pas beaucoup d'illusion sur le sort des propositions de loi : elles sont l'occasion pour le parlement de parlementer ... Le coût des catastrophes écologiques atteint des niveaux ahurissants. Fukushima devrait coûter entre 2 000 et 6 000 milliards d'euros. À côté, l'Erika fait pâle figure... La véritable protection réside dans la prévention. Or, les crédits destinés à la sécurité civile et aux associations chargées de la prévention et de la gestion de crise ont gravement chuté. La proposition de loi est une bonne façon d'attirer l'attention.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

Je suis très dubitatif. M. Anziani évoque les grandes catastrophes. Les paraboles installées sur les immeubles des cités constituent-elles un dommage à l'environnement ? Parlons des petites choses. Avec le texte actuel, un procès sera possible... En quoi le dommage à l'environnement est-il différent d'un dommage économique et comment le définir ? Tout cela est éminemment subjectif. Si en outre on enlève la responsabilité sans faute, on fera plaisir aux avocats...

Je ne suis pas favorable à ce texte. La Cour de cassation a rendu un arrêt très positif : laissons la jurisprudence prospérer. L'environnement, je ne sais pas ce que c'est. L'automobiliste qui roule avec un pot d'échappement défectueux pourra aussi être attaqué pour dommage à l'environnement...

L'émotion suscitée par l'Erika et les tempêtes justifie-t-elle de modifier les règles sur la responsabilité ? En tout état de cause, je ne pourrai pas voter ce texte.

Debut de section - PermalienPhoto de Thani Mohamed Soilihi

Les gaz émis par certains animaux de ferme ont également un impact nocif sur l'environnement.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Lipietz

Etant commise d'office pour défendre la parole écologiste, je plaiderai l'effet psychologique de la loi : elle obligera les entreprises polluantes à provisionner des fonds pour l'indemnisation. Une catastrophe à Nogent-sur-Seine, par exemple, aurait des répercussions sur toute la région parisienne.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Dans un texte que j'ai publié jadis, « L'économie est-elle un humanisme ? », je définissais l'environnement comme ce qui est autour de l'espèce humaine. Ainsi, l'être humain n'en ferait pas partie, et sans espèce humaine, il n'y aurait pas d'environnement. Le sujet est à la fois philosophique, éthique et législatif.

Debut de section - PermalienPhoto de Virginie Klès

Plutôt que d'escompter d'hypothétiques provisions des entreprises, il faudrait revoir la législation des entreprises sur les installations classées, même si l'on a toujours du mal, en France, à imaginer que les choses puissent ne pas fonctionner. Je partage l'analyse de M. Lecerf sur les associations de prévention.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Anziani

Je ne sens pas un enthousiasme débordant... Ce texte n'est pourtant pas une parfaite nouveauté !

Nous ne sommes pas démunis face à la notion d'environnement et de dommage : nous avons des années de jurisprudence derrière nous, une Charte, une Constitution...

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Anziani

L'environnement n'est pas uniquement ce qui entoure l'homme : on se réfère souvent à la notion plus précise d'habitat de l'homme, à sa façon d'habiter le monde. J'entends bien M. Michel, mais depuis longtemps, les tribunaux différencient le dommage minime du dommage significatif, pour ne retenir que ce dernier.

L'évaluation peut en effet poser problème, mais dans le cas de la plage polluée, elle n'est pas nécessaire à sa remise en l'état. C'est justement tout l'intérêt d'une réparation en nature. Nos éminents universitaires, travaillent depuis des années à établir sur le préjudice écologique une nomenclature comparable à celle que nous avons pour le préjudice corporel, la nomenclature « Dintilhac ».

M. Hyest voit juste concernant la prescription. Nous avons rencontré cette difficulté lors de la loi du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription. Nous nous heurtons à la directive du 21 avril 2004 qui impose une prescription de trente ans. Si l'on veut retenir comme point de départ la connaissance des faits, je suis d'accord avec vous, il serait assez naturel de réduire le délai de prescription, mais comment aller contre une directive ?

Monsieur Détraigne, un conflit au sujet de pieds de vigne constitue un préjudice personnel et non un préjudice écologique pur. Votre crainte d'une paralysie est infondée : les tribunaux sont déjà saisis de telles demandes : c'est la façon de les traiter qui est en cause. M. Hyest, une chose n'est pas toujours à l'origine d'un dommage. L'ourse Cannelle...

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Anziani

La loi du 1er août 2008 qui crée un régime de police administrative ne fonctionne pas, et les articles 1382 et suivants qui ne traitent que des préjudices subis par les personnes sont insuffisants. Bien sûr, il faut agir sur la prévention et l'un de mes amendements donne au juge un rôle préventif.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

La production esthétique peut-t-elle constituer un dommage à l'environnement ?

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Anziani

C'est au juge du fond qu'il revient d'apprécier l'existence d'un préjudice.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrice Gélard

Un amendement du rapporteur instaure une responsabilité sans faute, qui existe déjà en Allemagne.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrice Gélard

Quelles conséquences cette responsabilité générale sans faute a-t-elle en Allemagne ? J'aimerais savoir où nous allons...

Debut de section - PermalienPhoto de Christophe Béchu

Dans ce cas, un ouvrage peut être considéré comme une atteinte à l'environnement. Un projet légal comme l'aéroport de Notre-Dame des Landes, qui aura franchi tous les obstacles juridiques, pourra néanmoins engager une responsabilité sans faute de son auteur. La responsabilité pour faute limite le pouvoir des associations ; la responsabilité sans faute nous fait basculer dans l'inconnu.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Anziani

Ne désespérez pas des juges ! A vous entendre, on dirait que la justice n'a jamais eu affaire à cette question. Monsieur Michel, il est d'ores et déjà possible d'agir : c'est au juge d'évaluer le préjudice. Monsieur Béchu, ce texte n'est pas révolutionnaire, il y a déjà une responsabilité sans faute.

EXAMEN DES AMENDEMENTS

Article unique

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Anziani

L'amendement rédactionnel n° 1 substitue au terme « dommages », qui sont une conséquence, le terme d'« atteintes ».

L'amendement n° 1 est adopté.

L'amendement n° 2 dont nous avons débattu institue une responsabilité sans faute.

L'amendement n° 2 est adopté.

Le texte de l'amendement n° 3 est assez explicite. Lorsque la réparation en nature est impossible, il convient de prévoir une compensation pécuniaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

L'expression « réparation en nature » n'est pas très claire. Il s'agit plutôt d'une remise en l'état, quand elle est possible. Sinon, on peut offrir un poulet au maire et considérer qu'on a réparé en nature...

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Anziani

J'ai repris l'expression de la loi du 1er août 2008 et la notion de réparation en nature est déjà appliquée en droit positif.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

Précisons qu'il s'agit d'une remise en l'état.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Il ne s'agit pas forcément d'une remise en l'état. Si une pollution provoque la disparition des grenouilles sur un lieu, on peut très bien en faire revenir, éventuellement sur un autre site. C'est également de la réparation en nature.

Debut de section - PermalienPhoto de Virginie Klès

Pourquoi ne pas écrire « remise en état similaire ou équivalent » ?

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Richard

Peut-on se prononcer sur des questions d'une telle importance sans la moindre étude d'impact ? Cet article est inamendable.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Anziani

Mieux vaut s'en tenir à la formulation de la directive du 21 avril 2004, transposée dans la loi du 1er août 2008. Dans une zone de turbulence, nous avons intérêt à nous caler sur l'existant. Un travail est en cours à la chancellerie. Ces questions y seront évoquées et le texte qui en résultera sera accompagné d'une étude d'impact.

L'amendement n° 3 est adopté.

L'amendement n° 4 organise la prévention en autorisant le juge à prescrire des mesures propres à empêcher ou faire cesser une atteinte illicite à l'environnement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Le juge ne pouvant s'autosaisir, cela serait judicieux. Etes- vous prêt à modifier l'amendement en ce sens ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Si quelqu'un se plaint d'une atteinte à l'environnement qui est en train de se produire, et a qualité pour agir, le juge peut se prononcer. Cet amendement est superflu.

Debut de section - PermalienPhoto de François Zocchetto

Il est effectivement possible pour un juge d'intervenir, dès lors qu'il a été saisi.

L'amendement n° 4 est retiré.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Anziani

Avec l'amendement n° 5, une personne qui a engagé des frais pour éviter un dommage à l'environnement pourra en obtenir le remboursement, si ces dépenses ont été utiles.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrice Gélard

Cela risque de poser problème à l'Etat. Sa politique est de laisser le littoral progresser ou régresser naturellement, alors que certains particuliers ou collectivités interviennent pour prévenir son érosion, comme c'est le cas dans ma commune, avec des écroulements de falaises. Vais-je demander un remboursement à l'Etat ?

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Anziani

La notion de catastrophe naturelle existe, elle se distingue du préjudice écologique...

Debut de section - PermalienPhoto de Patrice Gélard

Elle ne s'applique pas ici, s'agissant d'un phénomène habituel.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Anziani

L'engagement de la responsabilité prévu par le texte que nous examinons suppose que le juge identifie un auteur du dommage et reconnaisse préalablement l'existence d'un préjudice...

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Richard

Je croyais qu'il y avait une large majorité dans les deux Assemblées pour contenir la hausse des dépenses publiques. L'exemple du doyen Gélard illustre comment cet article pourrait conduire des communes à inverser la politique de l'Etat, aux frais du contribuable...

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Anziani

Prendre un avocat est une chose, gagner un procès en est une autre. Il appartient au juge d'apprécier s'il y a eu préjudice. Faut-il limiter sa faculté d'octroyer des dommages et intérêts en cas de faute de l'Etat ? Je ne le crois pas, quel que soit l'état des finances publiques.

L'amendement n° 5 est adopté.

Article additionnel après l'article unique

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Anziani

L'amendement n° 6 porte sur les délais de prescription. Compte tenu de ce qui a été dit précédemment, je préfère le retirer, pour permettre qu'une réflexion plus approfondie soit menée sur ce sujet.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Lipietz

La loi étant d'application immédiate, vaudra-t-elle pour des pollutions intervenues auparavant ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

L'amendement est retiré, mais voilà qui nourrira la réflexion du rapporteur.

L'amendement n° 6 est retiré.

Intitulé de la proposition de loi

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Anziani

L'amendement n° 7 substitue la notion de « dommage causé à l'environnement » à celle de « préjudice écologique » dans l'intitulé. Si la notion que je propose est techniquement et juridiquement la plus appropriée et permet de mettre en cohérence le titre avec le contenu du texte, les termes « préjudice écologique » sont passés dans le langage courant et utilisés par la jurisprudence. Je m'en remets donc sur ce point à la sagesse de la commission.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

Pourquoi donner à la proposition de loi un titre qui diffère de l'objet même de son article unique ? Je suis favorable à l'amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Anziani

Dans le corps du texte en effet, nous avons tout intérêt à la précision juridique. C'est bien la notion de dommage causé à l'environnement qui restera dans le code civil, mais pour le tire de la proposition de loi, l'impératif n'est pas le même.

L'amendement n° 7 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Je voterai ce texte qui va dans le bon sens. Je me demande si nous pourrions un jour adopter une proposition de loi sur le droit de créer des entreprises et même des usines. J'ai pu constater dans mon département, comment des gens, qui ont pour seul projet de créer une entreprise, sont couverts de procès au motif qu'ils porteraient atteinte à l'environnement. L'emploi n'est pas une préoccupation secondaire, par rapport à celle, tout à fait légitime, qui anime ce texte.

La proposition de loi est adoptée dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrice Gélard

Les propositions de loi se multiplient, dans le sillage de la révision constitutionnelle de 2008. Ce n'est pas une bonne formule, dans la plupart des cas. Certaines n'ont d'autre objet que de soulever un problème en attirant l'attention sur leur auteur. L'on pourrait y substituer avantageusement des questions orales avec débat ou des questions cribles thématiques. A l'inverse d'autres propositions de loi, tout à fait utiles et très courtes, elles ne sont jamais inscrites à notre ordre du jour. Les groupes devraient y réfléchir : on préfère les lois à impact médiatique. Cette réflexion pourrait avoir lieu au sein du bureau. En outre, l'immense majorité des propositions de loi que nous adoptons restent en rade au Sénat et ne sont jamais examinées par l'Assemblée nationale.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Je m'en suis entretenu plusieurs fois avec M. le président du Sénat. Il est anormal qu'une proposition de loi, adoptée à l'unanimité par le Sénat, ou par l'Assemblée nationale, ne réussisse pas à se frayer un chemin jusqu'à l'autre assemblée : c'est du temps perdu pour tout le monde. Il fut un temps où les propositions de loi remplissaient une fonction déclaratoire. Tout le monde voit l'utilité des deux propositions de loi de Mme Jacqueline Gourault à l'issue des états généraux...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Le Premier ministre a dit qu'elles seraient examinées par l'Assemblée nationale ; elles ne sont toujours pas inscrites à son ordre du jour. Une autre proposition de loi de M. Hugues Portelli sur les sondages a été unanimement adoptée il y a deux ans...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Elle est encore en attente devant l'Assemblée nationale. Tous les groupes peuvent en parler au président du Sénat mais il faut un accord entre l'Assemblée nationale et le Sénat, pour que ces textes aboutissent.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

Il ne s'agit pas tant des relations entre les deux assemblées, que de l'économie du temps de travail au sein du Sénat. Les propositions de loi sont très consommatrices de temps. Je souscris pleinement à la remarque de M. Gélard. La règle des quatre heures oblige souvent à reporter la suite de l'examen des propositions de loi, ce qui bouscule notre calendrier.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Lipietz

Ce n'est pas qu'un problème d'organisation du Sénat et de l'Assemblée nationale, mais un problème d'organisation interne des partis. Nous avons réussi, en six mois, à faire passer notre loi sur les lanceurs d'alerte, parce que nous avons choisi de présenter ce texte, en accord avec l'Assemblée nationale.

Le sort des amendements examinés par la commission est retracé dans le tableau suivant :

M. Jean-Pierre Sueur est nommé rapporteur pour avis sur la proposition de résolution n° 486 (2012-2013), présentée M. Éric Bocquet et plusieurs de ses collègues, tendant à la création d'une commission d'enquête sur le rôle des banques et acteurs financiers dans l'évasion des ressources financières en ses conséquences fiscales et sur les équilibres économiques ainsi que sur l'efficacité du dispositif législatif, juridique et administratif destiné à la combattre.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Le 9 avril 2013, Éric Bocquet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen ont demandé la création d'une commission d'enquête sur le rôle des banques et acteurs financiers dans l'évasion des ressources financières, ses conséquences en matière fiscale et sur les équilibres économiques, ainsi que sur l'efficacité du dispositif législatif, juridique et administratif destiné à la combattre. Cette proposition de résolution a été envoyée au fond à la commission des finances et, pour avis, à notre commission.

Le groupe communiste républicain et citoyen demande la création de cette commission d'enquête au titre du droit de tirage. Il en a saisi la conférence des présidents, qui doit se réunir ce soir. Conformément à la décision du Conseil constitutionnel du 25 juin 2009 et à notre règlement, il nous appartient de nous prononcer sur la recevabilité de cette proposition, au regard de l'article 6 de l'ordonnance du 17 novembre 1958.

Dans la mesure où il s'agit d'enquêter sur la gestion de services publics, et non sur des faits déterminés, il n'y a pas lieu d'interroger le garde des sceaux, par le truchement du président du Sénat, sur l'existence éventuelle de poursuites judiciaires en cours.

La commission d'enquête sur l'évasion des capitaux et des actifs hors de France et ses incidences fiscales, déjà créée à l'initiative du groupe communiste républicain et citoyen, a adopté son rapport le 17 juillet 2012, soit depuis moins de douze mois. Il est patent que l'objet n'en est cependant pas le même, puisqu'il s'agit maintenant d'enquêter sur le rôle des banques et acteurs financiers dans l'évasion des ressources financières. Dans ces conditions, il ne me semble pas que nous nous trouvions dans le cas prohibé par l'ordonnance de 1958 de reconstitution d'une commission d'enquête dans un délai de douze mois.

Les autres conditions de recevabilité étant remplies, je vous propose de considérer que la proposition de résolution est recevable.

La commission déclare recevable la proposition de résolution.

Enfin, la commission entend une communication du président Jean-Pierre Sueur sur l'application des lois.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Comme le faisait avant moi Jean-Jacques Hyest, il me revient de vous présenter une communication sur l'application des lois au 31 mars 2013. La mise en application des lois promulguées entre le 14 juillet 2011 et le 30 septembre 2012 concerne deux gouvernements, entre lesquels nos critiques seront également partagées... Le contrôle de la mise en application des lois opéré par les assemblées a été considérablement renforcé ces dernières années. Le Sénat a créé en 2011 la commission sénatoriale pour le contrôle de l'application des lois. Un comité de suivi de l'application des lois a été mis en place par le Gouvernement en mars de la même année. Le contrôle de l'application des lois au sein du Secrétariat général du Gouvernement (SGG) relève d'une cellule de programmation de l'activité normative. La coopération entre les services des assemblées et le SGG s'est accrue puisque les services de ce dernier sont systématiquement saisis sur chacune des mesures en attente de parution. Pour autant, la situation est loin d'être satisfaisante.

Jusqu'en 2010, les commissions permanentes du Sénat examinaient au 30 septembre les mesures réglementaires relatives à toutes les lois adoptées lors de la session qui s'achevait à la même date. Il a été décidé de décaler la période de référence des mesures réglementaires prises en compte : sont maintenant intégrées dans les statistiques toutes celles qui ont été prises dans les six mois suivant la dernière promulgation d'une loi comptabilisée dans la période.

Mécaniquement, une période de référence plus courte pour les lois, conjuguée à une période d'adoption des mesures réglementaires plus longue aurait dû entraîner un taux d'application supérieur. Or, deux mesures d'application sur trois ne sont toujours pas prises, pour les textes examinés par notre commission entre le 14 juillet 2011 et le 30 septembre 2012.

C'est d'autant moins acceptable que notre activité a été particulièrement chargée ; 21 lois ont été promulguées au cours de la période de référence, dont neuf d'origine parlementaire, mais la commission a également adopté sept propositions de loi qui sont actuellement en navette, une proposition de loi qui est toujours en instance d'examen en séance publique, une proposition de loi qui n'a pas été adoptée en séance publique, deux qui ont fait l'objet d'un renvoi en commission et une qui a fait l'objet d'une censure totale par le Conseil constitutionnel. Ainsi, en un an, notre commission a examiné 33 textes législatifs. Elle a publié neuf rapports d'information, rendu 21 avis budgétaires et trois avis sur des textes examinés au fond par d'autres commissions.

Les conditions d'examen de ces textes ont été difficiles. En témoigne l'usage de la procédure accélérée qui constitue la donnée statistique la plus inquiétante : 100 % des projets de lois et deux propositions de lois sur trois y ont été soumis. Son usage suspend le délai minimal d'examen des textes prévus à l'article 42 de la constitution. Il réduit considérablement le temps que les parlementaires consacrent à l'examen d'un texte. Couplé à un nombre de textes toujours plus important, le recours accentué à cette procédure ne facilite pas le travail du Parlement. Si l'objet de certains textes la justifie parfois, elle ne peut être systématique. Il faudra suivre avec attention cette évolution.

Je m'en tiendrai ici à quelques exemples significatifs. Le premier concerne la loi de programmation relative à l'exécution des peines qui prévoit qu'un décret fixera les conditions dans lesquelles des personnels hospitaliers peuvent consacrer une partie de leur temps de service à la réalisation d'expertises ordonnées par l'autorité judiciaire. C'est la seule disposition de cette loi à avoir été introduite par le Sénat et approuvée par la précédente majorité de l'Assemblée nationale. À ce jour, la mesure nécessaire n'a pas été publiée.

Le deuxième exemple concerne une loi pour laquelle des mesures ont été prises mais n'ont pas été mises en oeuvre en raison de l'alternance politique. Un décret d'octobre 2011 relatif à la participation des citoyens au fonctionnement de la justice pénale a édicté les mesures réglementaires prévues par la loi. A la suite du rapport de deux avocats généraux de la Cour de cassation, la garde des sceaux a annoncé son intention de mettre un terme à l'expérimentation. Un arrêté en date du 18 mars 2013 en a tiré les conséquences. De fait, les dispositions relatives aux citoyens assesseurs sont privées d'application, et sauf nouvelle intervention du législateur, deviendront caduques au 1er janvier 2014. Il s'agit ici de l'effet naturel d'une alternance politique.

La troisième loi illustre un problème de codification. La loi de février 2007 relative à l'outre-mer prévoyait des dispositions relatives à Saint-Pierre-et-Miquelon. Au sein du code général des collectivités territoriales (CGCT), ont été insérées des dispositions législatives qui n'ont pas entraîné l'édiction de mesures règlementaires spécifiques postérieurement à la promulgation de la loi. L'article LO 6413-1 du CGCT a rendu applicable, à compter du 1er janvier 2008, les lois et règlements déjà intervenus dans les matières qui ne sont pas exclues du régime de l'application de plein droit. Des dispositions antérieures à la loi, non contredites par une disposition spécifique à Saint-Pierre-et-Miquelon, garantissent l'application de la loi. Il aurait été plus clair cependant de procéder par des renvois explicites au sein de la partie règlementaire du CGCT, comme pour les collectivités de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy.

La loi du 12 mars 2012 relative aux procédures de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire a fait l'objet d'un décret d'application, tout à fait nécessaire, bien que non prévu par la loi. Il apporte des garanties supplémentaires en matière de protection du droit constitutionnel de propriété. Pour une fois, le pouvoir réglementaire a publié rapidement un texte non explicitement demandé par la loi. Hélas, il s'agissait de traiter la situation de Petroplus, dont les offres rachat viennent d'être déclarées irrecevables.

Si l'on attend encore une grande partie des mesures d'application de la loi relative à la simplification du droit, due à M. Warsmann, l'arrêté du 22 novembre 2012 a simplifié les formalités de l'obligation de dépôt des journaux et périodiques auprès des autorités publiques prévue par la loi sur la liberté de la presse. La loi a simplifié ces dispositions obsolètes, en centralisant le dépôt auprès du ministre chargé de la communication, et les modalités de dépôt ont été précisées par l'arrêté. Cette simplification constitue un premier pas, et j'encourage le Gouvernement à publier les innombrables décrets et textes d'application sans lesquels la simplification du droit reste un voeu pieux.

La commission s'est acquittée de sa tâche dans des conditions souvent tendues ; le Gouvernement a encore des efforts à accomplir pour prendre conscience qu'il est nécessaire de limiter le recours à la procédure accélérée, et publier les textes d'application.

Debut de section - PermalienPhoto de René Vandierendonck

Le rapport d'information de nos collègues Gourault insiste à bon droit sur les textes que nous avons examinés, qu'il s'agisse de la Commission consultative d'évaluation des normes ou du travail engagé sur le statut de élus. Je veux exprimer la déception d'un jeune sénateur devant la lenteur des procédures législatives. La commission des lois doit exprimer haut et fort ses attentes.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

La présentation du rapport sur l'application des lois fait partie des exercices rituels. Avons-nous des données sur le délai d'attente des textes d'application, sur le nombre de lois votées qui ne seront jamais appliquées ? Si la situation ne va pas en s'améliorant, une réflexion menée par notre commission ne serait-elle pas opportune ? Pourquoi ne pas instaurer un service après-vote ? On pourrait demander aux rapporteurs d'interroger les services de l'exécutif chargés de rédiger les textes d'application, de vérifier notamment que ceux-ci ne compliquent pas la loi. Réfléchissons à la manière de rendre efficace un travail bien fait.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrice Gélard

Je vous félicite pour ce rapport annuel. Une fois de plus, je m'interroge sur la raison d'être de la commission ad hoc de l'application des lois. Elle fait double emploi avec la nôtre ; les moyens mis à sa disposition devraient être redistribués aux commissions permanentes, qui sont souvent saturées. Nous pourrions ainsi travailler sur l'application des lois, dans le respect de la Constitution, telle qu'elle a été révisée en 2008.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Je partage les analyses de MM. Vandierendonck et Détraigne. Cependant, il existe une commission de contrôle de l'application des lois...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Certains considèrent qu'il y a une certaine redondance. En tous les cas, elle comprend des représentants de chaque commission et organise des débats : ce sera bientôt le cas au sujet de la loi pénitentiaire.