Séance en hémicycle du 2 avril 2021 à 9h30

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

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La séance

Source

La séance est ouverte à neuf heures trente.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, confortant le respect des principes de la République (projet n° 369, texte de la commission n° 455 rectifié, rapport n° 454, avis n° 448 et 450).

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie, pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Pierre de La Gontrie

Ce rappel au règlement porte sur l’organisation de nos débats.

Hier, à la reprise de la séance en fin d’après-midi, le président de la commission des lois a demandé – cela a été accepté – la réserve des articles délégués à la commission de la culture, de l’éducation et de la communication jusqu’à mardi prochain, quatorze heures trente.

Dans un élan positif – c’est toujours mon état d’esprit ! –, j’avais indiqué, quelques secondes auparavant, que nous n’y voyions pas d’inconvénient. Après quelques brefs instants de réflexion, j’ai compris que, en réalité, cette demande de report avait pour unique vocation de permettre au président Retailleau d’être présent au moment du débat sur l’instruction en famille (IEF).

Hier, le président Bas, avec la cruauté délicieuse que nous lui connaissons, avait qualifié l’un des articles et ce texte en général de « tigre de papier ». Il est vrai que la droite essaye ici de donner quelques couleurs à ce tigre… Mais, là où le président Retailleau parlait de lutte contre le salafisme en indiquant qu’« on allait voir ce qu’on allait voir », le bilan est, pour l’instant, assez maigre, et même consternant.

Votre évolution sur ce texte, mes chers collègues de droite, a consisté à instaurer des règles concernant le burkini et les accompagnateurs scolaires. Maigre butin ! Évidemment, j’imagine que l’instruction en famille permettra au groupe Les Républicains de faire feu de tout bois et de rattraper, en fin d’examen de ce texte, ce que vous espériez obtenir sur l’ensemble.

Je suggère donc, madame Di Folco que, désormais, la conférence des présidents prenne l’attache du président Retailleau aux fins de consulter son agenda, et ce dans le but de ne pas désorganiser nos débats.

Nous avons déjà mesuré quelle était l’influence du président Retailleau sur la commission des lois, lequel a fait en sorte que l’article 45 ne soit finalement pas opposé à certains amendements, précisément pour permettre à celui qu’il comptait déposer de prospérer ! Et ces manifestations d’influence sont régulières.

Très bien ! Nous débattrons donc mardi à quatorze heures trente de ces articles, ce dont nous avons d’ailleurs informé nos collègues.

Néanmoins, je le répète, je suggère à la commission des lois et, surtout, à la conférence des présidents de vérifier préalablement si les convenances du président Retailleau permettent le déroulé de l’ordre du jour sans désorganiser nos travaux.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je veux bien que chacun ait sa liberté de parole et puisse dire tout ce qu’il souhaite, mais j’aime autant que les choses correspondent à la vérité.

La vérité est celle que j’ai exprimée hier après-midi devant vous, à savoir que c’est sur mon initiative que j’ai proposé au président du Sénat ainsi qu’aux collègues de siéger ce matin, cet après-midi, mais pas ce soir. La raison en est simple : nous avons encore du temps, la semaine prochaine, pour continuer de discuter ce texte.

À cela s’ajoute une raison de fond.

Le président Lafon et moi-même ne souhaitions pas entamer, éventuellement aujourd’hui en toute fin d’après-midi, l’examen de la partie du texte déléguée à la commission de la culture. Cette partie est importante et nous souhaitons avoir un débat cohérent qui ne soit pas coupé. C’est la seule et unique raison.

Je me permets, mes chers collègues, de vous dire que, lorsque je vous ai avertis de cela, vous m’avez dit que j’avais raison. Nous nous sommes donc organisés en conséquence, et pour cette raison-là, et, me semble-t-il, à la satisfaction de tout le monde. Sans autre forme d’arrière-pensées.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

Acte vous est donné de votre rappel au règlement, ma chère collègue.

Dans la discussion du texte de la commission, nous en sommes parvenus, au sein du chapitre Ier du titre Ier, à un amendement tendant à insérer un article additionnel après l’article 12.

TITRE Ier

GARANTIR LE RESPECT DES PRINCIPES DE LA RÉPUBLIQUE ET DES EXIGENCES MINIMALES DE LA VIE EN SOCIÉTÉ

Chapitre Ier

Dispositions relatives au service public

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 296, présenté par Mme N. Goulet, est ainsi libellé :

Après l’article 12

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans les six mois à compter de la publication de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport faisant état de l’application des dispositions de l’article L. 14-A du livre des procédures fiscales.

La parole est à Mme Nathalie Goulet.

Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Goulet

Madame la ministre, vous avez dit en substance : « Pas un euro pour les ennemis de la République ! » Il y a différentes façons d’éviter de leur donner un euro, en particulier en ayant les moyens de contrôler les euros qui ont été donnés !

Or, sur toutes les travées, nous avons demandé, hier, un rapport sur la procédure spécifique de contrôle sur place des organismes délivrant des reçus prévue à l’article L. 14 du livre des procédures fiscales. Je sais que le Sénat est défavorable à cette demande de rapport, mais je voudrais tout de même vous rappeler les éléments de langage du rapporteur général du budget dans son avis.

Il explique très clairement que, d’une part, nous sommes un des seuls pays au monde – cela fait partie de notre singularité – à ne pas demander un accord préalable à toute déduction fiscale, d’autre part, que le nombre de contrôles est très insuffisant, voire inexistant. Le rapporteur général avait d’ailleurs porté le même jugement pour le budget de 2017.

Nous sommes donc en train de voter un certain nombre de dispositifs qui marcheront ou non, et dont on ne connaît absolument pas l’effectivité.

Comme c’est le premier amendement du matin, je rappelle pour ceux qui n’étaient pas là hier que, dans une annexe au projet de loi de finances pour 2021 – c’est-à-dire le « jaune budgétaire » concernant les associations – figurent en pages 11, 12 et 13 les déductions fiscales qui leur sont accordées. On y trouve la liste des dégrèvements, mon cher collègue Gay, ainsi que les dépenses fiscales que représentent les dons faits aux associations par les entreprises et les particuliers.

L’addition est tout de même salée, puisqu’elle se monte à 3 000 783 000 euros pour 2017, 2 000 729 000 euros pour 2020 et 2, 713 milliards d’euros pour 2021.

Le minimum, vis-à-vis du Parlement, est de lui permettre de savoir combien de contrôles ont été effectués. Je ne crois pas que ce soit excessif ni que ce soit insignifiant, bien au contraire.

Madame la ministre, voter des dispositifs sans qu’on puisse les contrôler, c’est donner de l’argent aux ennemis de la République.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Vérien

Avis défavorable, pas uniquement parce qu’il s’agit d’une demande de rapport, mais parce que vous le demandez six mois après le vote de la loi. Or nous avons décalé d’un an la mise en place du système, ce qui fait que nous n’aurions rien à contrôler dans six mois.

Pour autant, on ne va pas refaire le débat d’hier soir ; nous sommes bien d’accord : il faudra nécessairement disposer de moyens pour rendre cette loi applicable.

Debut de section - Permalien
Marlène Schiappa

C’est un avis défavorable, d’une part, parce qu’il s’agit d’une demande de rapport, d’autre part, pour toutes les raisons que nous avons indiquées hier.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Goulet

Au lieu de six mois, indiquons vingt-quatre mois, ce qui réglera la question du report de l’application de cet amendement. Quoi qu’il en soit, je maintiens celui-ci, car il n’y a aucune raison que le Parlement ne soit pas informé du nombre de contrôles effectués sur ces dispositifs.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

I. – Le 1° de l’article 706-160 du code de procédure pénale est complété par une phrase ainsi rédigée : « Dans ce cadre, l’agence peut mettre à disposition, au bénéfice d’associations régies par la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association ou inscrites au registre des associations en application du code civil local applicable dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, déclarées depuis trois ans au moins et dont l’ensemble des activités entre dans le champ du b du 1 de l’article 200 du code général des impôts ainsi que d’associations et de fondations reconnues d’utilité publique et d’organismes mentionnés à l’article L. 365-2 du code de la construction et de l’habitation, le cas échéant à titre gratuit, un bien immobilier dont la propriété a été transférée à l’État, dans les conditions et selon des modalités définies par décret ; ».

II. – La perte de recettes pour l’État est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 599, présenté par MM. Mohamed Soilihi, Richard, Patriat, Bargeton, Buis et Dennemont, Mmes Duranton et Evrard, MM. Gattolin et Hassani, Mme Havet, MM. Haye, Iacovelli, Kulimoetoke, Lévrier, Marchand et Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud et Rohfritsch, Mme Schillinger, MM. Théophile, Yung et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Abdallah Hassani.

Debut de section - PermalienPhoto de Abdallah Hassani

Cet amendement de suppression n’est pas un amendement de désapprobation sur le fond. En effet, la disposition visée par l’article 12 bis A, reprise d’une proposition de loi visant à améliorer la trésorerie des associations dont la navette n’a pas encore abouti, est très bienvenue et attendue par le secteur associatif.

Elle est si bienvenue et attendue que notre groupe l’a justement introduite, il y a quelques semaines, sur amendement de notre collègue Alain Richard au sein de la proposition de loi Justice de proximité et réponse pénale, que le Sénat a adoptée définitivement, hier matin, dans une rédaction simplifiée à la marge.

Il apparaît donc que l’article 12 bis A est satisfait et introduirait, qui plus est, une ambiguïté au regard des différences de forme qui peuvent exister entre les deux rédactions. Nous proposons donc de supprimer l’article 12 bis A.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Vérien

C’est un avis favorable. Nous avions effectivement introduit cette disposition dans ce texte pour le cas où elle ne serait pas adoptée dans l’autre proposition de loi. Or la commission mixte paritaire a été conclusive.

Debut de section - Permalien
Marlène Schiappa

L’avis est également favorable.

L ’ amendement est adopté.

I. – Après l’article 6 de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association, il est inséré un article 6 bis ainsi rédigé :

« Art. 6 bis. – I. – Toute association mentionnée au second alinéa de l’article 4-1 de la loi n° 87-571 du 23 juillet 1987 sur le développement du mécénat bénéficiant directement ou indirectement d’avantages ou de ressources versés en numéraire ou consentis en nature par un État étranger, par une personne morale étrangère, par tout dispositif juridique de droit étranger comparable à une fiducie ou par une personne physique non résidente en France est tenue d’établir ses comptes conformément à un règlement de l’Autorité des normes comptables, qui prévoit notamment la tenue d’un état séparé de ces avantages et ressources.

« Les avantages et ressources soumis à l’obligation prévue au premier alinéa du présent I sont notamment les apports en fonds propres, les prêts, les subventions, les dons manuels, les mécénats de compétences, les prêts de main-d’œuvre, les dépôts, les titres de créance, les échanges, cessions ou transferts de créances et les contributions volontaires, qu’ils soient réalisés par ou sans l’intermédiaire d’un établissement de crédit, d’un établissement de monnaie électronique, d’un établissement de paiement ou d’un organisme ou service mentionné à l’article L. 518-1 du code monétaire et financier.

« II. – Les avantages et ressources soumis à l’obligation mentionnée au I du présent article sont les suivants :

« 1° Les avantages et ressources apportés directement à l’association bénéficiaire ;

« 2° Les avantages et ressources apportés à toute association ou à toute société sous contrôle exclusif, sous contrôle conjoint ou sous influence notable de l’association bénéficiaire, au sens des II et III de l’article L. 233-16 et de l’article L. 233-17-2 du code de commerce ;

« 3° Les avantages et ressources apportés à toute entité structurée ou organisée de telle manière que son activité est en fait exercée pour le compte de l’association bénéficiaire ou de toute association ou société mentionnée au 2° du présent II ;

« 4° Les avantages et ressources apportés aux associations, sociétés ou entités mentionnées aux 1° à 3° par l’intermédiaire d’une personne morale ou d’une fiducie, sous contrôle exclusif, sous contrôle conjoint ou sous influence notable d’un État étranger ou d’une personne morale étrangère ou de tout dispositif juridique de droit étranger comparable à une fiducie ;

« 5° Les avantages et ressources apportés aux associations, sociétés ou entités mentionnées aux mêmes 1° à 3° par l’intermédiaire d’une personne morale, d’une fiducie ou d’une personne physique de telle manière qu’ils le sont en fait pour le compte d’un État étranger, d’une personne morale étrangère, de tout dispositif juridique de droit étranger comparable à une fiducie ou d’une personne physique non résidente en France.

« Les fiducies et personnes morales de droit français mentionnées aux 2° à 5° assurent la certification de leurs comptes dans des conditions déterminées par décret en Conseil d’État, sans préjudice de l’application de l’article 4-1 de la loi n° 87-571 du 23 juillet 1987 précitée.

« III. – Le non-respect des obligations prévues au présent article est puni d’une amende de 3 750 €, dont le montant peut être porté au quart de la somme sur laquelle a porté l’infraction. Les personnes physiques ou morales coupables de cette infraction encourent également, dans les conditions prévues à l’article 131-21 du code pénal, la peine complémentaire de confiscation de la valeur des avantages et ressources concernés.

« Le fait, pour un dirigeant, un administrateur ou un fiduciaire, de ne pas respecter l’obligation mentionnée au dernier alinéa du II du présent article est puni de 9 000 € d’amende.

« IV. – Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application du présent article, en particulier les conditions dans lesquelles les organismes, entités, personnes et dispositifs mentionnés au II doivent assurer la certification de leurs comptes, notamment le montant des avantages et ressources à compter duquel s’applique l’obligation de certification. »

II. –

Non modifié

III

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 614 rectifié, présenté par MM. Mohamed Soilihi et Richard, Mme Havet, MM. Patriat, Bargeton, Buis et Dennemont, Mmes Duranton et Evrard, MM. Gattolin, Hassani, Haye, Iacovelli, Kulimoetoke, Lévrier, Marchand et Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud et Rohfritsch, Mme Schillinger, MM. Théophile, Yung et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, est ainsi libellé :

I. – Alinéas 1 et 2

Remplacer ces alinéas par deux alinéas ainsi rédigés :

« I. – Après l’article 4-1 de la loi n° 87-571 du 23 juillet 1987 sur le développement du mécénat, il est inséré un article 4-… ainsi rédigé :

« Art. 4 -…. – I. – À l’exception des associations mentionnées aux articles 18 et 19 de la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Églises et de l’État et à l’article 4 de la loi du 2 janvier 1907 concernant l’exercice public des cultes, les associations mentionnées au second alinéa de l’article 4-1 de la présente loi bénéficiant directement ou indirectement d’avantages ou de ressources versés en numéraire ou consentis en nature par un État étranger, par une personne morale étrangère, par tout dispositif juridique de droit étranger comparable à une fiducie ou par une personne physique non résidente en France tiennent un état séparé de ces avantages et ressources. Cet état séparé, dont les modalités sont précisées par un règlement de l’Autorité des normes comptables, est intégré à l’annexe des comptes annuels.

II. – Alinéa 3

Remplacer les mots :

titres de créance, les échanges, cessions ou transferts de créances

par le mot :

libéralités

III. – Alinéa 10

Remplacer les mots :

loi n° 87-571 du 23 juillet 1987 précitée

par les mots :

présente loi

IV. – Alinéa 11

Après les mots :

au quart de la somme

rédiger ainsi la fin de cet alinéa :

des avantages et ressources non inscrits dans l’état séparé mentionné au premier alinéa du I du présent article.

V. – Alinéa 13

Remplacer les mots :

organismes, entités, personnes et dispositifs mentionnés au

par les mots :

fiducies ou personnes morales mentionnées au dernier alinéa du

VI. – Alinéa 14

Rédiger ainsi cet alinéa :

II. – L’article L. 612-4 du code de commerce est ainsi modifié :

VII. – Alinéa 15, au début

1° Remplacer la mention :

III

par la mention :

2° Supprimer les mots :

de l’article L. 612-4 du code de commerce

VIII. – Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

2° À la première phrase du dernier alinéa, après le mot : « intéressé », sont insérés les mots : « ou du représentant de l’État dans le département du siège de l’association ».

La parole est à M. Abdallah Hassani.

Debut de section - PermalienPhoto de Abdallah Hassani

Le présent amendement s’inscrit en cohérence avec les modifications opérées en commission. Outre des précisions rédactionnelles, il a pour objet de renforcer l’effectivité du contrôle des financements étrangers prévus pour les associations au-delà d’un certain seuil, en permettant au préfet de saisir le juge afin qu’il puisse, si nécessaire, enjoindre aux associations de publier leurs comptes.

Par ailleurs, il vise à intégrer la disposition créée à la loi du 23 juillet 1987 sur le développement du mécénat plutôt qu’au sein de la loi de 1901, afin de ne pas créer de confusion sur le champ d’application du contrôle.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 403 rectifié, présenté par Mme N. Delattre, MM. Artano, Bilhac et Cabanel, Mmes M. Carrère et Guillotin, M. Guiol, Mme Pantel et MM. Requier et Roux, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 2

Remplacer les mots :

qui prévoit notamment la tenue d’un état séparé de ces avantages et ressources

par une phrase ainsi rédigée :

En outre, elles établissent un état séparé de ces avantages et ressources qui fait l’objet d’une attestation par un commissaire aux comptes

II. – Alinéa 13

1° Après le mot :

particulier

insérer les mots :

le montant des avantages et ressources à compter duquel s’applique l’obligation d’attestation mentionnée au I, ainsi que

2° Supprimer les mots :

avantages et

La parole est à M. Stéphane Artano.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Artano

Il est heureux que les associations existent en si grand nombre dans notre pays. Cependant, nous ne devons jamais détourner le regard des ressources financières qui les alimentent. Les possibilités de contrôle des finances des associations doivent être étendues et améliorées, avec un focus tout particulier sur les ressources provenant des pays étrangers.

Pour ce faire, l’état de ces fonds étrangers devrait faire l’objet d’un document à bien distinguer des comptes annuels des associations. À partir de ce document, le commissaire aux comptes effectuerait des attestations de type « ressources provenant de l’étranger » ou bien « avantages fournis par une personne étrangère », qu’il s’agisse d’une mission de certification légale ou d’une mission ponctuelle auprès d’une association. Cela permettrait de faire la lumière sur l’origine des fonds, vertueux ou suspects, des associations.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Vérien

L’amendement n° 614 rectifié vise à permettre au préfet de saisir le juge afin qu’il enjoigne aux associations soumises à cette obligation et ne s’y étant pas conformées de publier leurs comptes. Il nous paraît effectivement judicieux de prévoir, légalement, cette possibilité. L’avis est donc favorable.

S’agissant de l’amendement n° 403 rectifié qui tend à remplacer la certification des comptes par une simple attestation, je rappelle qu’un tel document n’induit pas les mêmes obligations vis-à-vis de Tracfin, l’objectif étant de contrôler les fonds étrangers. L’avis est donc défavorable sur ce deuxième amendement.

Nous avons bien compris que le sujet des commissaires aux comptes était un sujet délicat. Nous l’aborderons un peu plus tard, la commission ayant exprimé sa préférence pour des missions ad hoc dans le but de mieux circonscrire le champ, notamment en cas de don unique, pour ne pas plomber les associations.

Debut de section - Permalien
Marlène Schiappa

Le Gouvernement a émis un avis favorable sur l’amendement n° 614 rectifié. Nous pensons que son apport est essentiel et, comme M. le sénateur l’a rappelé, la commission des lois a voulu renforcer l’effectivité de cet article en sanctionnant d’une amende de 9 000 euros le non-respect de l’obligation de publication des comptes.

Renforcer cette obligation en permettant au préfet de saisir le juge nous paraît une mesure très opérante.

S’agissant de l’amendement n° 403 rectifié, nous le considérons comme satisfait. Mme Delattre propose en effet d’assujettir l’état séparé des avantages et ressources à une obligation d’attestation par le commissaire aux comptes. Le dispositif prévu à l’article 12 bis va, d’ores et déjà, bien au-delà dans les exigences. En conséquence, le Gouvernement demande le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.

L ’ amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 297, présenté par Mme N. Goulet, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Après les mots :

transferts de créances

insérer les mots :

, les parts de société civile immobilière

La parole est à Mme Nathalie Goulet.

Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Goulet

Nous sommes dans le chapitre des avantages et ressources soumis aux obligations parmi lesquels je voudrais insérer les parts de société civile immobilière (SCI).

Un transfert d’immeuble, on voit bien de quoi il s’agit. En revanche, un transfert de parts de SCI est beaucoup plus discret. Je propose donc d’assujettir ces opérations au même type de contrôle.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Vérien

L’avis de la commission est favorable. Il nous semble effectivement qu’il s’agit d’un complément utile à l’énumération des différents avantages concernés par cette déclaration.

Debut de section - Permalien
Marlène Schiappa

Madame la sénatrice, nous considérons que cet amendement est déjà satisfait.

En effet, l’énumération visée à cet article porte sur les opérations juridiques constituant un avantage ou une ressource et justifiant, ainsi, une obligation de déclaration à l’autorité administrative. De fait, il ne s’agit pas de viser tous les types de biens – meubles, immeubles, sommes d’argent, parts sociales ou prêts de main-d’œuvre – sur lesquels peut porter l’opération juridique qui constituerait un avantage ou une ressource.

Par ailleurs, nous souhaitons indiquer que les parts sociales ne constituent pas, en tant que telles, un avantage, puisque le don de parts sociales l’est et que les dons sont déjà bien mentionnés dans la liste. C’est donc une demande de retrait.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Goulet

Je maintiens mon amendement. Ce qui va sans le dire va encore mieux en le disant !

Sourires.

L ’ amendement est adopté.

L ’ article 12 bis est adopté.

Le VI de l’article 140 de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l’économie est ainsi modifié :

1° Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Le fonds de dotation qui reçoit directement ou indirectement des avantages ou ressources mentionnés au second alinéa du I et au II de l’article 6 bis de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association, versés en numéraire ou consentis en nature par un État étranger, par une personne morale étrangère, par tout dispositif juridique de droit étranger comparable à une fiducie ou par une personne physique non résidente en France est tenu d’établir ses comptes conformément à un règlement de l’Autorité des normes comptables, qui prévoit notamment la tenue d’un état séparé de ces avantages et ressources. » ;

a) À la première phrase, la référence : « au premier alinéa » est remplacée par la référence : « aux deux premiers alinéas » ;

b) Sont ajoutées deux phrases ainsi rédigées : « Le non-respect des obligations prévues au deuxième alinéa du présent VI est puni d’une amende de 3 750 euros, dont le montant peut être porté au quart de la somme sur laquelle a porté l’infraction. Les personnes physiques ou morales coupables de cette infraction encourent également, dans les conditions prévues à l’article 131-21 du code pénal, la peine complémentaire de confiscation de la valeur des avantages et ressources concernés. »

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 615 rectifié, présenté par MM. Mohamed Soilihi et Richard, Mme Havet, MM. Patriat, Bargeton, Buis et Dennemont, Mmes Duranton et Evrard, MM. Gattolin, Hassani, Haye, Iacovelli, Kulimoetoke, Lévrier, Marchand et Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud et Rohfritsch, Mme Schillinger, MM. Théophile, Yung et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, est ainsi libellé :

I. - Alinéa 3

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Les dispositions de l’article 4-2 de la loi n° 87-571 du 23 juillet 1987 sur le développement du mécénat sont applicables aux fonds de dotation bénéficiant directement ou indirectement d’avantages ou de ressources versés en numéraire ou consentis en nature par une personne morale étrangère, par tout dispositif juridique de droit étranger comparable à une fiducie ou par une personne physique non résidente en France. » ;

II. – Alinéa 6

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. Abdallah Hassani.

Debut de section - PermalienPhoto de Abdallah Hassani

La commission des lois a utilement aligné le régime de contrôle des financements étrangers des fonds de dotation sur celui qui est prévu par le projet de loi pour les associations loi 1901 bénéficiant de plus de 153 000 euros de dons.

En continuité, ainsi que dans un souci de cohérence et de lisibilité, nous proposons d’opérer, au sein de l’article 12 ter relatif aux fonds de dotation, un renvoi aux dispositions de la loi de 1987 sur le mécénat, dans laquelle notre précédent amendement à l’article 12 bis visait à introduire des dispositions relatives au contrôle des financements étrangers des associations.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Vérien

L’avis est favorable sur cet amendement, qui s’inscrit dans la continuité de l’action de la commission. Je rappelle que l’Assemblée nationale avait voulu imposer aux fonds de dotation les obligations incombant aux associations cultuelles ; nous les avons alignées sur celles qui s’appliquent aux obligations des associations loi 1901.

Debut de section - Permalien
Marlène Schiappa

Favorable également.

L ’ amendement est adopté.

L ’ article 12 ter est adopté.

I. – Le troisième alinéa de l’article 21 du code civil local applicable dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle est ainsi rédigé :

« Les registres des associations et les registres des associations coopératives de droit local sont tenus sous forme électronique, dans les conditions définies aux articles 1366 et 1367 du code civil. »

II

III

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 295 rectifié ter, présenté par MM. Kern et Haye, Mme Muller-Bronn, MM. Fernique et Masson, Mme Herzog, MM. Klinger et Reichardt et Mmes Drexler, Schalck et Schillinger, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Compléter cet alinéa par les mots :

, et sont rendus accessibles sous cette forme dans un standard ouvert, aisément réutilisable et exploitable par un système de traitement automatisé

La parole est à Mme Sabine Drexler.

Debut de section - PermalienPhoto de Sabine Drexler

Cet article, s’il fixe la tenue obligatoire sous forme électronique du registre des associations régies par le code civil applicable dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, n’en prévoit pas clairement l’accès en ligne. Cet amendement le précise.

Debut de section - Permalien
Marlène Schiappa

L’avis est défavorable. Le déploiement d’un registre numérisé des associations inscrites en Alsace-Moselle appelle des travaux sur ses contours.

En revanche, il nous semble qu’une telle accessibilité en ligne de ces registres mériterait une expertise complémentaire à mener à la fois en lien avec les instances locales, mais aussi en interministériel. En effet, un registre des associations contient des données personnelles de ses membres. Il est, par conséquent, indispensable que nous puissions analyser la portée des données à rendre accessibles pour garantir le respect de la vie privée et du secret professionnel et bancaire, compte tenu des activités exercées par certaines associations de droit local.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Goulet

Mme Nathalie Goulet. Je ne connais pas grand-chose au droit local, néanmoins tous nos collègues mosellans et alsaciens ont signé cet amendement. Je pense qu’on peut leur faire confiance.

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Vérien

En l’occurrence, ce dispositif s’applique déjà, dans la « vieille France », aux associations loi 1901. C’est donc parce que cela va dans le sens d’une uniformisation du droit national que la commission a émis un avis favorable.

L ’ amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 588 rectifié quater, présenté par MM. Kern et Haye, Mme Muller-Bronn, MM. Fernique et Masson, Mme Herzog, MM. Klinger et Reichardt et Mmes Drexler, Schalck et Schillinger, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Après le mot :

arrêté

insérer les mots :

qui prévoit également la dématérialisation des formalités incombant aux associations

La parole est à Mme Sabine Drexler.

Debut de section - PermalienPhoto de Sabine Drexler

La modernisation du registre des associations et associations coopératives d’Alsace et de Moselle, dont la tenue systématique sous forme électronique est prévue par cet article, ne prévoit pas la dématérialisation des formalités leur incombant.

Pour le moment, toutes les démarches liées à la vie statutaire d’une association de droit local se font encore par courrier postal, ce qui crée une certaine iniquité entre les associations de droit local et les associations loi 1901.

Or ces fonctionnalités étant particulièrement importantes pour les associations de droit local, cet amendement vise à leur mise en œuvre effective.

L ’ amendement est adopté.

L ’ article 12 quater est adopté.

(Supprimé)

Chapitre III

Dispositions relatives au respect des droits des personnes et à l’égalité entre les femmes et les hommes

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

Nous abordons le chapitre III, qui porte sur le respect des droits des personnes et l’égalité entre les femmes et les hommes. Permettez-moi d’indiquer, de manière générale, la position de la commission en la matière.

La commission n’a pas adopté l’article 13, qui tend à rétablir un droit de prélèvement compensatoire sur les biens situés en France au profit d’enfants qui ne bénéficieraient pas d’une réserve successorale en application d’une loi étrangère.

À ses yeux, cet article ne présente qu’une faible plus-value au regard du droit existant, qui permet déjà de protéger les femmes contre des droits étrangers discriminants, ainsi qu’en raison du faible nombre de situations auxquelles il pourrait trouver à s’appliquer. Il aurait, en revanche, des effets évidents dans le cadre des successions internationales soumises au droit anglo-saxon, alors que ces droits ne sont pas connus pour être discriminants envers les femmes.

Toutefois, la commission a approuvé les articles 14 et 15, qui visent à renforcer la lutte contre la polygamie, comportement qui, naturellement, n’a pas sa place sur notre territoire.

Nous affirmons clairement que vivre en état de polygamie en France doit faire obstacle au séjour.

Dans le même esprit, nous proposons d’adopter un amendement de M. Roger Karoutchi, qui permettrait, en totale cohérence avec l’objet du projet de loi, de faire obstacle à la délivrance d’un document de séjour lorsqu’un étranger a manifesté « un rejet des principes de la République ».

Notre commission s’est prononcée en faveur de l’interdiction et de la pénalisation de l’établissement, par les professionnels de santé, de certificat de virginité, objet de l’article 16. La commission a précisé dans le texte que les professionnels de santé devraient expressément informer leurs patientes de l’interdiction de cette pratique.

Elle a également adopté l’article 16 ter relatif au délit d’incitation et de contrainte à se soumettre à un examen de virginité, voté par les députés, pour poursuivre les « commanditaires » appartenant à l’entourage de la jeune fille – parents, futur mari, future belle-fille.

Pour compléter le dispositif de lutte contre les tests de virginité, la commission a créé un délit spécifique visant toute personne qui procéderait à ces tests, et non pas les seuls professionnels de santé, étant précisé que les poursuites pour viol ou agression sexuelle devaient être privilégiées si les éléments constitutifs de ces infractions devaient être réunis.

La commission a également conforté le dispositif de lutte contre l’excision en prévoyant une meilleure proportionnalité de la peine en cas d’incitation et de contrainte exercée sur une mineure pour qu’elle se soumette à ces mutilations sexuelles.

Enfin, elle a renforcé le dispositif de signalement des mariages forcés ou frauduleux en prévoyant la constitution d’une base de données nationale recensant l’ensemble des décisions d’opposition et de sursis prononcées par le parquet, afin d’éviter que les futurs époux n’ayant pu se marier dans une commune ne « tentent leur chance » dans une autre commune ou à l’étranger.

Voilà de quelle façon la commission des lois a abordé ce chapitre III.

(Supprimé)

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 548 rectifié, présenté par Mmes Assassi et Cukierman, MM. Bocquet, Savoldelli et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

I. – Le chapitre III du titre II du livre III du code civil est ainsi modifié :

1° L’article 913 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque le défunt ou au moins l’un de ses enfants est, au moment du décès, ressortissant d’un État membre de l’Union européenne ou y réside habituellement et lorsque la loi étrangère applicable à la succession ne connaît aucun mécanisme réservataire protecteur des enfants, chaque enfant ou ses héritiers ou ses ayants cause peuvent effectuer un prélèvement compensatoire sur les biens existants, situés en France au jour du décès, de façon à être rétablis dans les droits réservataires que leur octroie la loi française, dans la limite de ceux-ci. » ;

2° L’article 921 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque le notaire constate, lors du règlement de la succession, que les droits réservataires d’un héritier sont susceptibles d’être atteints par les libéralités effectuées par le défunt, il informe chaque héritier concerné et connu, individuellement et, le cas échéant, avant tout partage, de son droit de demander la réduction des libéralités qui excèdent la quotité disponible. »

II. – Les dispositions du présent article entrent en vigueur le premier jour du troisième mois suivant la publication de la présente loi. Elles s’appliquent aux successions ouvertes à compter de leur entrée en vigueur, y compris si des libéralités ont été consenties par le défunt avant cette entrée en vigueur.

La parole est à Mme Michelle Gréaume.

Debut de section - PermalienPhoto de Michelle Gréaume

Il apparaît très clairement, à la lecture du rapport, que la commission des lois s’en est prise non pas au dispositif proposé par le Gouvernement, mais au concept même de mécanisme réservataire.

Les rapporteures y indiquent qu’elle porterait atteinte à la liberté individuelle et à la propriété privée, serait une entrave à la circulation de capital ou au développement de la philanthropie, ne prendrait pas en compte des familles recomposées. La cible serait manquée du fait de l’exonération de ce qu’elles appellent « les pays de droit musulman » et de l’application au détriment des pays anglo-saxons – États-Unis, Angleterre, Canada ou Australie.

Sur ce dernier point, et sur le fait que les pays occidentaux ne connaîtraient pas d’inégalités entre les sexes lors des successions, il est heureux que les inégalités sociales entre les enfants puissent être résorbées par ce mécanisme.

Sur l’égale protection entre les héritiers sur une partie de la succession, vous connaissez la position du groupe CRCE. Nous soutenons ces dispositions, qui constituent, certes, une entrave à la libre circulation du capital, mais, surtout, l’une des garanties possibles du respect de l’égalité entre les sexes.

Le droit français ne vient pas s’immiscer de manière impudique dans la vie des familles. Au contraire, c’est parce que l’on connaît rarement l’intention d’un légataire, parce que « le testateur habile sait taire ou travestir la cause de sa préférence coupable » que la réserve héréditaire permet de ne pas s’encombrer de telle ou telle interprétation. L’égalité est proclamée sans interprétation. Elle est de droit et effective.

En 2020, la Banque mondiale a mis à disposition un jeu de données qui met au jour que, dans 43 pays, les fils et les filles n’ont pas les mêmes droits de succession quand il s’agit d’hériter des biens de leurs parents. Dans 44 pays, les conjoints survivants n’ont pas les mêmes droits pour hériter des biens de leur époux décédé.

Même si nous regrettons que cet article s’applique uniquement lorsque la loi étrangère ne prévoit aucun mécanisme réservataire, il constitue une avancée. Il faut le rétablir.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 637, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

I. – Le chapitre III du titre II du livre III du code civil est ainsi modifié :

1° L’article 913 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque le défunt ou au moins l’un de ses enfants est, au moment du décès, ressortissant d’un État membre de l’Union européenne ou y réside habituellement et lorsque la loi étrangère applicable à la succession ne permet aucun mécanisme réservataire protecteur des enfants, chaque enfant ou ses héritiers ou ses ayants cause peuvent effectuer un prélèvement compensatoire sur les biens existants, situés en France au jour du décès, de façon à être rétablis dans les droits réservataires que leur octroie la loi française, dans la limite de ceux-ci. » ;

2° L’article 921 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque le notaire constate, lors du règlement de la succession, que les droits réservataires d’un héritier sont susceptibles d’être atteints par les libéralités effectuées par le défunt, il informe chaque héritier concerné et connu, individuellement et, le cas échéant, avant tout partage, de son droit de demander la réduction des libéralités qui excèdent la quotité disponible. »

II. – Les dispositions du présent article entrent en vigueur le premier jour du troisième mois suivant la publication de la présente loi. Elles s’appliquent aux successions ouvertes à compter de leur entrée en vigueur, y compris si des libéralités ont été consenties par le défunt avant cette entrée en vigueur.

La parole est à Mme la ministre déléguée.

Debut de section - Permalien
Marlène Schiappa

La commission des lois a supprimé l’article 13 du présent projet de loi, qui avait été voté en l’état par l’Assemblée nationale. Elle estime, en effet, que le texte n’apporte pas de réelle plus-value par rapport à l’état du droit actuel.

Permettez-moi de vous dire, mesdames, messieurs les sénateurs, que nous ne partageons pas son point de vue.

Par exemple, un père ou une mère de famille peut actuellement décider de déshériter ses enfants si la loi étrangère applicable à sa succession le permet. Il ou elle peut, par exemple, décider de tout laisser à son fils, et rien à sa fille, déshériter des enfants nés d’une précédente union ou des enfants dits « adultérins », etc. Ces enfants ne sont pas protégés.

Le présent amendement vise non seulement à combler ce vide juridique, qui permet des discriminations potentielles, mais aussi à rendre la protection tout à fait concrète et effective.

Grâce à cette disposition, l’enfant déshérité pourra récupérer sa part de réserve sur les biens situés en France directement devant le notaire, à l’occasion du partage, sans avoir à recourir au juge – je me permets d’insister sur ce point, qui est important.

Je ne vous apprendrai évidemment pas que, dans de nombreux pays du monde, les femmes et les enfants dits « naturels » ou « illégitimes » ne sont pas protégés par la réserve héréditaire : ils sont souvent déshérités sur le fondement de pratiques coutumières.

Mesdames les rapporteures, je sais que vous craignez que la disposition ne s’applique aussi aux lois anglo-saxonnes, qui ne connaissent pas non plus la réserve héréditaire. Très sincèrement, je ne vois pas de raison de les en exclure si des discriminations entre enfants sont aussi faites par les testateurs dans ces pays.

Je veux néanmoins préciser que les pays anglo-saxons connaissent eux aussi, dans une certaine mesure, des mécanismes protecteurs des enfants. Les Anglais ont, par exemple, les Family Provisions, quipermettent à l’enfant mineur ou à l’enfant dans le besoin de réclamer une part de la succession. Ainsi, si l’enfant est déjà protégé dans les faits par le droit étranger, le droit de prélèvement ne jouera pas en France.

Notre amendement tend en effet à préciser, contrairement à la rédaction initiale, que la loi étrangère ne doit permettre aucun mécanisme réservataire. Il autorise ainsi une appréciation concrète et factuelle de la loi étrangère, qui permet de vérifier si l’enfant est protégé ou non dans les cas d’espèce.

Enfin, votre commission a supprimé l’obligation d’information renforcée des héritiers réservataires qui avait été mise à la charge du notaire.

Le Gouvernement propose également de la rétablir, afin que les enfants puissent exercer leur droit en pleine connaissance de cause et à l’abri des pressions familiales. Nous considérons qu’il est inadmissible qu’en 2021, en France, des filles soient déshéritées parce qu’elles sont des filles et que certains veuillent appliquer des lois coutumières au mépris des lois de la République.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Eustache-Brinio

Je veux préciser avant toute chose que la commission, contrairement à ce qui est soutenu par les auteurs de l’amendement n° 548 rectifié, n’a pas critiqué la réserve héréditaire en affirmant, en particulier, qu’elle nuisait à la circulation des capitaux ou au développement de la philanthropie. Nous avons tout simplement rappelé, dans notre rapport, les termes du débat et les critiques qui sont régulièrement faites à la réserve héréditaire.

Nous nous sommes également appuyés sur les conclusions du groupe de travail qui avait été missionné par l’ancien garde des sceaux, Nicole Belloubet, lequel a conclu à la nécessité de préserver la réserve héréditaire des enfants.

Pourquoi avons-nous supprimé cet article ? Pas parce que nous contestons le bien-fondé de la réserve héréditaire, mais parce que nous avons estimé que les femmes étaient déjà protégées contre les discriminations les plus flagrantes imposées, par exemple, par la règle de tafadol, applicable dans la plupart des pays musulmans, tels que le Maroc, l’Algérie et l’Égypte.

Au reste, à bien regarder cet article, nous sommes sûrs qu’il va s’appliquer dans des pays de droit anglo-saxon, comme cela a été rappelé. Nous sommes moins certains qu’il s’appliquera véritablement dans les successions soumises aux lois de pays de droit musulman, qui sont évidemment ceux qui sont visés par le texte, car, dans ces pays, la liberté successorale est très encadrée : c’est généralement la loi qui règle les successions.

Dans ces conditions, nous avons estimé que cet article n’avait pas sa place dans le texte en discussion. De fait, selon nous, il manque sa cible.

C’est la raison pour laquelle j’émets un avis défavorable sur les deux amendements, qui visent au rétablissement de l’article 13 dans ce texte de loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Pierre de La Gontrie

Comme nous l’avons exprimé en commission, nous sommes totalement favorables au rétablissement de l’article 13, qui est très important.

Madame la rapporteure, j’ai bien entendu vos explications sur la réserve héréditaire, mais je ne vous ai pas entendu parler des enfants.

Il est vrai que la suppression de cet article nous donne le sentiment que c’est le principe même de la réserve héréditaire qui vous pose problème. Cela nous inquiète, parce que, je le répète, s’il faut protéger les femmes, il faut aussi protéger les enfants. C’est cette avancée considérable de notre droit que nous voulons préserver, raison pour laquelle nous soutiendrons ces deux amendements, dont j’ai l’impression, d’ailleurs, qu’ils sont identiques – je n’ai pas réussi à trouver ce qui les différenciait.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

I. – Le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, dans sa rédaction résultant de l’ordonnance n° 2020-1733 du 16 décembre 2020 portant partie législative du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, est ainsi modifié :

1° La section 2 du chapitre II du titre Ier du livre IV est ainsi modifiée :

a) L’intitulé est ainsi rédigé : « Réserves liées à l’ordre public et à la polygamie » ;

b) Il est ajouté un article L. 412-6 ainsi rédigé :

« Art. L. 412 -6. – Aucun document de séjour ne peut être délivré à un étranger qui vit en France en état de polygamie. Tout document de séjour détenu par un étranger dans une telle situation est retiré. » ;

2° Au premier alinéa de l’article L. 423-1, à la première phrase de l’article L. 423-2, à l’article L. 423-7 et au premier alinéa des articles L. 423-10 et L. 423-23, les mots : « ne vivant pas en état de polygamie, » sont supprimés ;

3° À la fin du premier alinéa de l’article L. 432-3, les mots : « à un étranger qui vit en état de polygamie ni aux conjoints d’un tel étranger » sont remplacés par les mots : « aux conjoints d’un étranger qui vit en France en état de polygamie » ;

4° Au premier alinéa des articles L. 435-1 et L. 435-2, les mots : « ne vivant pas en état de polygamie » sont supprimés ;

5° L’article L. 611-3 est ainsi modifié :

a) Au 5°, les mots : « ne vivant pas en état de polygamie » sont supprimés ;

b) Au 7°, les mots : «, ne vivant pas en état de polygamie, » sont supprimés ;

c) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Par dérogation au présent article, l’étranger mentionné aux 2° à 8° peut faire l’objet d’une décision portant obligation de quitter le territoire français en application de l’article L. 611-1 s’il vit en France en état de polygamie. » ;

6° L’article L. 631-2 est ainsi modifié :

a) Au 1°, les mots : «, ne vivant pas en état de polygamie, » sont supprimés ;

b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Par dérogation au présent article, l’étranger mentionné aux 1° à 4° peut faire l’objet d’une décision d’expulsion s’il vit en France en état de polygamie. » ;

7° L’article L. 631-3 est ainsi modifié :

a) Aux 3° et 4°, les mots : «, ne vivant pas en état de polygamie, » sont supprimés ;

b) Après le 5°, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Par dérogation au présent article, l’étranger mentionné aux 1° à 5° peut faire l’objet d’une décision d’expulsion s’il vit en France en état de polygamie. »

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 354 n’est pas soutenu.

Je suis saisi de deux amendements identiques.

L’amendement n° 69 rectifié est présenté par M. Leconte, Mme de La Gontrie, M. Sueur, Mme Harribey, M. Marie, Mme S. Robert, M. Magner, Mme Lepage, M. Féraud, Mmes Meunier et Monier, MM. Assouline, Lozach, Kanner, Bourgi, Durain, Kerrouche, Antiste et J. Bigot, Mmes Bonnefoy, Briquet, Conconne et Conway-Mouret, MM. Fichet, Gillé et Jacquin, Mme Jasmin, MM. P. Joly, Lurel, Mérillou, Raynal, Redon-Sarrazy, Temal, Montaugé et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

L’amendement n° 605 est présenté par MM. Mohamed Soilihi et Richard, Mme Havet, MM. Patriat, Bargeton, Buis et Dennemont, Mmes Duranton et Evrard, MM. Gattolin, Hassani, Haye, Iacovelli, Kulimoetoke, Lévrier, Marchand et Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud et Rohfritsch, Mme Schillinger, MM. Théophile, Yung et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’alinéa 5

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« La situation du conjoint d’un étranger mentionné au premier alinéa du présent article fait l’objet d’un examen individuel. Pour statuer sur son droit au séjour, l’autorité administrative tient compte du caractère non consenti de la situation de polygamie. » ;

La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie, pour présenter l’amendement n° 69 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Pierre de La Gontrie

Les dispositions de l’article 14 portent sur la polygamie.

Bien évidemment, il ne fait aucun doute que l’ensemble des membres de l’hémicycle condamnent la polygamie. Nous souhaitons évidemment en protéger les victimes.

C’est pourquoi nous proposons de rétablir la précision de l’article 14 qui a été supprimée. Cette garantie est essentielle pour la protection des femmes victimes de polygamie.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à M. Abdallah Hassani, pour présenter l’amendement n° 605.

Debut de section - PermalienPhoto de Abdallah Hassani

L’amendement est défendu, monsieur le président.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Eustache-Brinio

Ces deux amendements tendent à rétablir une précision supprimée par la commission.

La mention expresse de l’examen individuel de la situation du conjoint étranger polygame est parfaitement inutile, puisqu’il est d’ores et déjà prévu que tout étranger a droit à l’examen individuel de sa situation. Cette règle est un principe général du droit.

Elle vaut quelle que soit la situation de la personne et quel que soit l’objet, y compris donc, la polygamie, qui n’est pas toujours consentie, mais qui peut parfois l’être.

En tout cas, la commission ne souhaite pas rétablir ce qu’elle a supprimé, raison pour laquelle nous émettons un avis défavorable sur ces deux amendements.

Les amendements ne sont pas adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 412 rectifié bis, présenté par MM. Menonville, Chasseing et Médevielle, Mme Mélot, MM. Guerriau, Lagourgue et A. Marc, Mme Paoli-Gagin et MM. Wattebled, Verzelen et Capus, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 6

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

…° Après l’article L. 423-23, il est inséré un article L. 423-… ainsi rédigé :

« Art. L. 423 -…. - Le titre de séjour en cours de validité des étrangers condamnés à une peine d’emprisonnement supérieure ou égale à trois ans est systématiquement retiré par l’autorité administrative, sauf décision contraire spécialement motivée. » ;

La parole est à M. Pierre-Jean Verzelen.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Jean Verzelen

Cet amendement, qui a été déposé par notre collègue Franck Menonville, tend à prévoir que le titre de séjour d’un étranger ayant été condamné à une peine d’emprisonnement supérieure ou égale à trois ans sera systématiquement retiré par l’autorité administrative, sauf décision contraire dûment motivée.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Eustache-Brinio

Cet amendement tend à prévoir le retrait systématique du titre de séjour pour l’étranger condamné à trois ans de prison, sauf décision contraire de l’administration.

Je veux simplement rappeler qu’un certain nombre de dispositions du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (Ceseda) permettent déjà de retirer un titre de séjour lorsqu’un étranger présente une menace pour l’ordre public ou a été condamné pour certains crimes et délits.

La commission sollicite donc le retrait de l’amendement. À défaut, elle émettra un avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Jean Verzelen

Je retire l’amendement, monsieur le président !

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 412 rectifié bis est retiré.

L’amendement n° 497, présenté par M. Ravier, est ainsi libellé :

Alinéas 13, 17 et 21

Remplacer les mots :

peut faire

par le mot :

fait

La parole est à M. Stéphane Ravier.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Ravier

L’article 147 du code civil dispose : « On ne peut contracter un second mariage avant la dissolution du premier » Cela me semble assez normal !

Le présent amendement a pour objet de rendre automatique l’expulsion du territoire français d’un étranger qui ne respecterait pas cette disposition. Sinon s’installera une situation anarchique, en plus d’être immorale, favorisant un engrenage séparatiste.

La polygamie est un état de vie contraire à notre droit. Elle occasionne par ailleurs de nombreuses situations de fraude aux prestations sociales. Il faudra réformer les organismes de la Caisse nationale d’allocations familiales pour que les contrôles des situations puissent être plus efficaces lorsque l’on soupçonne que des droits ont été indûment versés pour cause de polygamie.

Difficile à constater tant la frontière avec la vie privée est ténue, la polygamie, dès qu’elle est avérée, doit faire l’objet d’un rejet sans concession. Il convient donc de prendre à bras-le-corps des décisions pour l’éradiquer.

En ce bicentenaire de la mort de l’empereur, rendons un premier hommage à Napoléon Ier en combattant ceux qui piétinent sans vergogne son code civil !

Je vous invite donc, mes chers collègues, à voter cet amendement visant à l’expulsion des étrangers en situation de polygamie. Je suis certain et convaincu que les sénatrices qui ont manifesté encore hier soir leur attachement aux droits des femmes, notamment sur les travées de gauche, apporteront leur soutien à cet amendement !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Eustache-Brinio

Bien évidemment, monsieur le sénateur, nous combattons tous la polygamie.

Toutefois, il est parfois assez compliqué de lutter contre ce phénomène, d’abord parce que nous ne disposons pas de chiffres à son sujet : on ne connaît pas le nombre de familles polygames en France. C’est un vrai sujet.

Vous rappelez qu’un mariage doit être annulé pour en permettre un autre. Cette règle paraît évidente, sauf que, dans la réalité, on ne connaît pas les situations de polygamie : on ne sait pas si le mari n’a pas déjà deux ou trois autres femmes. C’est compliqué.

Nous avons émis un avis défavorable sur votre amendement, non que, sur le fond, nous soyons favorables à la polygamie, mais parce qu’il faut laisser à l’autorité administrative le soin d’apprécier toutes les situations lors de la délivrance ou du renouvellement des titres de séjour : c’est aujourd’hui le seul moyen de vérifier un certain nombre de choses. Prévoir l’éloignement automatique du territoire français pour les étrangers vivant en France est tout simplement inapplicable.

Debut de section - Permalien
Marlène Schiappa

Même avis, pour les mêmes raisons.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à M. Stéphane Ravier, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Ravier

Pardonnez-moi, mais, si l’on ne s’attaque pas à des situations au prétexte qu’elles sont compliquées, que faisons-nous ici ? Nous siégeons dans cet hémicycle pour prendre des mesures, faire la loi, la modifier, l’inventer, la créer pour répondre à des situations nouvelles, même complexes !

En l’occurrence, il s’agit d’éradiquer une situation qui nous a été imposée par une politique d’immigration. Nous avons importé des problèmes, notamment celui de la polygamie, qui n’existaient pas chez nous.

Il est vrai que ce problème nouveau est compliqué, mais, si nous ne prenons pas aujourd’hui les mesures légales pour nous en débarrasser un jour, nous n’en verrons jamais la fin.

Debut de section - Permalien
Marlène Schiappa

Je sais que de nombreux citoyens suivent le débat qui a lieu au Sénat en ce moment, et je me dis que quelqu’un qui n’aurait pas suivi les débats précédents et qui entendrait M. le sénateur Ravier se dirait qu’il a raison, que l’on ne fait rien contre la polygamie et se demanderait pourquoi.

Je veux donc rappeler que nous sommes en train de débattre d’un projet de loi du Gouvernement et que c’est celui-ci qui a proposé de légiférer davantage pour mieux protéger les femmes face aux situations de polygamie. Comme Mme la rapporteure l’a très bien rappelé à M. Ravier, lorsque l’on fait la loi, il faut prévoir des dispositifs opérants et efficaces.

Oui, je suis la première personne à vouloir lutter contre la polygamie, puisque c’est moi qui ai proposé que l’on améliore la loi sur ce sujet.

Au reste, je crois que nous sommes tous d’accord ici pour dire qu’il faut lutter contre la polygamie, mais il faut le faire de manière opérante, efficace et dans le respect des règles, notamment constitutionnelles, et non pas simplement en lançant des anathèmes.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

L ’ article 14 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 293 rectifié bis, présenté par MM. Karoutchi, Allizard, Anglars, Babary, Bacci, Bas, Bascher et Bazin, Mmes Bellurot, Belrhiti et Berthet, MM. E. Blanc et J.B. Blanc, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Bonne et Bonnus, Mme Borchio Fontimp, MM. Boré et Bouchet, Mme Boulay-Espéronnier, MM. Bouloux et J.M. Boyer, Mme V. Boyer, MM. Brisson, Burgoa, Cadec, Calvet et Cambon, Mme Canayer, M. Cardoux, Mme Chain-Larché, MM. Chaize et Charon, Mme Chauvin, M. Chevrollier, Mme de Cidrac, MM. Courtial, Cuypers, Dallier, Darnaud et del Picchia, Mmes Demas, Deroche, Deromedi, Deseyne, Drexler, Dumas et Dumont, M. Duplomb, Mme Estrosi Sassone, MM. Favreau, B. Fournier et Frassa, Mme Garnier, M. Genet, Mmes F. Gerbaud, Gosselin et Goy-Chavent, M. Grand, Mme Gruny, MM. Guené, Gueret, Houpert et Hugonet, Mmes Imbert et Joseph, M. Klinger, Mme Lassarade, M. D. Laurent, Mme Lavarde, MM. Lefèvre, de Legge, Le Gleut, H. Leroy et Le Rudulier, Mmes Lherbier, Lopez et Malet, M. Meurant, Mme Micouleau, MM. Milon et Mouiller, Mme Muller-Bronn, M. de Nicolaÿ, Mme Noël, MM. Paccaud, Panunzi, Paul, Pellevat, Pemezec et Piednoir, Mme Pluchet, M. Pointereau, Mmes Procaccia, Puissat et Raimond-Pavero, MM. Regnard et Retailleau, Mme Richer, MM. Rojouan, Saury, Sautarel et Savary, Mme Schalck, MM. Sido, Sol, Somon et Tabarot, Mmes Thomas et Ventalon, MM. C. Vial et Vogel, Mmes Bourrat et L. Darcos, M. Daubresse, Mme Di Folco, M. Husson, Mme Primas et MM. Segouin, Bonhomme et Rapin, est ainsi libellé :

Après l’article 14

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, dans sa rédaction résultant de l’ordonnance n° 2020-1733 du 16 décembre 2020 portant partie législative du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, est ainsi modifié :

1° À l’article L. 412-5, après les mots : « ordre public », sont insérés les mots : « ou qu’il est établi qu’il a manifesté un rejet des principes de la République » ;

2° Les articles L. 432-1 et L. 432-4 sont complétés par les mots : « ou s’il est établi qu’il a manifesté un rejet des principes de la République ».

La parole est à Mme Agnès Canayer.

Debut de section - PermalienPhoto de Agnès Canayer

Cet amendement de Roger Karoutchi, qui a été cosigné par nombre de nos collègues, est plein de bon sens, ce qui ne nous surprend pas de sa part.

Il vise à renforcer la lutte contre le séparatisme en faisant obstacle à la délivrance et au renouvellement des titres de séjour des individus dont il est établi qu’ils ont manifestement exprimé un rejet des valeurs de la République, ces principes mêmes que le titre du projet de loi dont nous débattons aujourd’hui appelle à protéger et qui justifient un renforcement des efforts dans la lutte contre la polygamie.

Le Ceseda comprend déjà à divers endroits une réserve à la délivrance des titres de séjour, relative aux menaces pour l’ordre public.

Les auteurs de cet amendement proposent très simplement de prolonger celle-ci en l’étendant aux situations des personnes ayant exprimé de manière indéniable leur rejet des principes républicains. Cela donnera aux autorités préfectorales et au juge les outils nécessaires pour agir dans les cas où une personne a, par ses actions ou par ses paroles, manifestement choisi de se désolidariser radicalement des valeurs de notre République.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Eustache-Brinio

Cet amendement tend à permettre que le rejet des principes de la République fasse obstacle à la délivrance d’un titre de séjour ou d’une carte de résident.

Nous sommes en plein dans le sujet dont nous débattons depuis mardi, puisque ce texte a comme objectif essentiel de faire en sorte que les principes de la République puissent être respectés là où il n’est pas vérifié qu’ils le sont.

Dans cet état d’esprit, nous avons émis un avis favorable sur cet amendement, qui est totalement cohérent avec cet objectif.

Debut de section - Permalien
Marlène Schiappa

Nous souscrivons complètement aux objectifs proposés.

Nous partageons notamment l’absolue nécessité de défendre les principes et les valeurs de la République – c’est comme vous l’avez rappelé, madame la sénatrice, l’objet du présent projet de loi.

Vous proposez d’introduire dans le Ceseda une disposition qui permette, au même titre que les menaces d’ordre public, une réserve à la délivrance du titre de séjour aux personnes qui ont exprimé leur rejet des principes républicains.

Je veux d’abord dire que c’est ce que le ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, et moi-même essayons de mettre en œuvre de manière systématique.

En ce qui concerne le texte de loi, ce n’est pas, à notre humble avis, la question de la caractérisation des valeurs de la République qui se pose. Je ne fais pas partie des gens qui disent que les valeurs de la République ne veulent rien dire. On sait les caractériser. En revanche, caractériser le degré de rejet des valeurs de la République nous semble difficile.

Le vote de cet amendement pourrait nous exposer à un risque constitutionnel, sur lequel je souhaite attirer votre attention. Cependant, je répète que, sur le fond, nous sommes en phase avec votre proposition.

Par conséquent, le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à M. Arnaud de Belenet, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Arnaud de Belenet

Je n’ai pas cosigné cet amendement, mais je partage son objectif et je le voterai. J’espère que la commission mixte paritaire trouvera un accord à son sujet.

Je veux simplement attirer votre attention, pour la suite des échanges, sur une ou deux questions qui se posent. Qui établit que la personne concernée a manifesté un rejet des principes de la République ? Dans quel cadre ? Ces points méritent à mon avis d’être clarifiés pour que la mesure soit incontestable.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à M. Philippe Bas, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Il n’y a pas, dans le droit relatif à l’entrée et au séjour des étrangers en France, de droit au renouvellement d’un titre de séjour. Le renouvellement est un acte discrétionnaire : il ne peut pas être pris pour des motifs étrangers à l’intérêt général, mais personne ne peut se prévaloir d’un droit à rester en France à l’expiration de son titre de séjour.

Il s’agit ici de prévoir que, comme un motif d’ordre public, un rejet expressément formulé des principes de la République justifie le non-renouvellement d’un titre de séjour. C’est tout de même bien le moins.

À cet égard, je regrette la tiédeur du Gouvernement, qui se borne à s’en remettre à la sagesse du Sénat.

La mesure proposée est simple. Pour ma part, je voterai avec enthousiasme cet amendement, que j’ai d’ailleurs cosigné.

Sourires.

Mêmes mouvements.

Debut de section - Permalien
Marlène Schiappa

Monsieur le sénateur, je ne peux pas ne pas réagir à vos propos, car c’est la première fois que, sur ce sujet, on qualifie de « tiède » un propos ou un avis du Gouvernement, singulièrement de ma part.

Au contraire, sur la défense des valeurs de la République, le reproche qui nous est adressé par une majorité de personnes est que nous allons loin, que nous sommes durs et volontaristes. Que l’on soit ou non d’accord avec nous, je crois que personne ne nous dénie cela.

Notre avis de sagesse n’est pas inspiré par une raison de fond. On n’est pas à moitié ou de façon tiède pour ou contre les valeurs de la République. Nous le réaffirmons de façon très claire, dans la poursuite du discours tenu par le Président de la République aux Mureaux.

Je répète que je veux simplement attirer votre attention sur la constitutionnalité du dispositif. Je déplore d’avoir à être celle qui rappelle le cadre et les règles de droit, notamment constitutionnelles, mais leur respect nous importe également – je sais à quel point il en est de même pour vous.

C’est ce qui justifie notre réserve et c’est pour cela que nous nous en remettons à la sagesse des sénateurs et des sénatrices. C’est à vous qu’il appartient de prendre la décision, avec tout ce qu’elle implique !

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à M. Jérôme Bascher, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Bascher

M. Jérôme Bascher. Une chose est claire dans cet excellent amendement, dont la simple mention du nom de l’auteur aurait pu suffire à ce qu’il fût adopté

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Pierre de La Gontrie

Il est intéressant de voir comment l’objectif et le cadre juridique peuvent se télescoper sur ce sujet.

Comme l’a rappelé Mme la ministre, le droit des étrangers est extraordinairement complexe et sophistiqué.

Contrairement à ce qu’affirme Philippe Bas, il existe bien une possibilité de renouvellement « de plein droit » d’un titre de séjour – en l’occurrence la carte de résident de dix ans –, même si des exceptions sont possibles.

Si l’on comprend l’objectif de cet amendement, auquel on peut éventuellement souscrire, son contour juridique est totalement imprécis. Or l’imprécision peut conduire à l’arbitraire. On peut être favorable à la libre appréciation de l’administration, mais se pose un problème de constitutionnalité qui est très embêtant.

Pour notre part, nous sommes partagés. Je ne dis pas que nous sommes divisés. Au demeurant, nos effectifs d’aujourd’hui rendraient cette situation improbable… §Cela dit, si je suis partisane de l’autodérision, être présent dans l’hémicycle quand on siège dans l’opposition est quasiment…

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Pierre de La Gontrie

Un sacerdoce, en effet !

Je pense que nous allons nous abstenir sur cet amendement. En effet, nous souscrivons à l’objectif, mais le dispositif nous paraît juridiquement instable et ne nous semble pas de nature à fonctionner. J’ignore ce qu’il en adviendrait en cas de saisine du Conseil constitutionnel.

L ’ amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 14.

Le premier alinéa de l’article 433-20 du code pénal est ainsi modifié :

1° La seconde occurrence du mot : « un » est remplacée par le mot : « deux » ;

2° Le nombre : « 45 000 » est remplacé par le nombre : « 75 000 ».

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 661, présenté par Mmes Eustache-Brinio et Vérien, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Rédiger ainsi cet alinéa :

1° Les mots : « d’un an » sont remplacés par les mots : « de deux ans »

La parole est à Mme la rapporteure.

L ’ amendement est adopté.

L ’ article 14 bis A est adopté.

(Supprimé)

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

Je suis saisi de trois amendements identiques.

L’amendement n° 66 rectifié est présenté par M. Leconte, Mme de La Gontrie, M. Sueur, Mme Harribey, M. Marie, Mme S. Robert, M. Magner, Mme Lepage, M. Féraud, Mmes Meunier et Monier, MM. Assouline, Lozach, Kanner, Bourgi, Durain, Kerrouche, Antiste et J. Bigot, Mmes Bonnefoy, Briquet, Conconne et Conway-Mouret, MM. Fichet, Gillé et Jacquin, Mme Jasmin, MM. P. Joly, Lurel, Mérillou, Raynal, Redon-Sarrazy, Temal, Montaugé et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

L’amendement n° 313 est présenté par Mme Benbassa, MM. Benarroche et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme Taillé-Polian.

L’amendement n° 539 rectifié est présenté par Mmes Assassi, Cukierman et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

À la deuxième phrase du deuxième alinéa de l’article L. 313-12 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, après le mot : « conjugales », sont insérés les mots : « ou a été victime de pratiques de polygamie ».

La parole est à M. Patrick Kanner, pour présenter l’amendement n° 66 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Kanner

Je présente cet amendement au nom de notre collègue Jean-Yves Leconte, qui est confiné.

Nous considérons que les femmes faisant l’objet d’un mariage polygame sont d’abord et avant tout des victimes. Nous pensons donc que l’Assemblée nationale a eu raison d’étendre le bénéfice du renouvellement automatique du titre de séjour, déjà prévu pour les personnes victimes de violences conjugales et familiales, aux victimes de la polygamie si cette pratique est objectivement constatée. L’automaticité serait liée au constat de la polygamie.

Il nous semble inopportun que la commission ait balayé d’un revers de main cette disposition, qui vise, dans l’immense majorité des cas, à protéger les femmes. Ne pas renouveler le titre de séjour dans ce cadre constituerait, pour elles, une double peine.

C’est pourquoi nous souhaitons le rétablissement de l’article 14 bis.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l’amendement n° 313.

Debut de section - PermalienPhoto de Raymonde Poncet Monge

Il existerait entre 16 000 et 20 000 familles en situation de polygamie, selon les chiffres de l’ONG GAMS, le Groupe pour l’abolition des mutilations sexuelles féminines, des mariages forcés et autres pratiques traditionnelles néfastes à la santé des femmes et des enfants, soit un chiffre identique à celui qui avait été avancé par un rapport de la CNCDH, la Commission nationale consultative des droits de l’homme, publié en 2006.

Ce chiffre peut paraître important. Mais comparons-le au nombre de mariages célébrés en France ces dernières années : 234 000 en 2018, 224 000 en 2019 et 148 000 en 2020, cette diminution étant bien évidemment due à la crise sanitaire.

Par cette comparaison, il s’agit de montrer à quel point la pratique de la polygamie est minime. Si nous comprenons l’opposition qu’elle soulève à juste titre, nous ne saurions accepter que ce soit les femmes, principales victimes de cette pratique, qui en payent le prix.

Cet article tend en effet à revenir, et c’est là le problème, sur le renouvellement automatique de la carte de séjour temporaire « vie privée et familiale » délivrée à l’étrangère conjointe d’un Français polygame.

Les auteurs de cet amendement estiment qu’il est utile de préserver la protection que constitue le titre de séjour des femmes soumises, parfois à leur insu, à la polygamie, dans la mesure où elles en sont les principales victimes. Il ne convient donc pas de leur faire subir les conséquences de l’action illégale de leur conjoint.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à M. Jérémy Bacchi, pour présenter l’amendement n° 539 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérémy Bacchi

Cet amendement vise à rétablir l’article 14 bis, introduit par voie d’amendement par notre collègue députée communiste Marie-George Buffet.

Cet article tend à modifier l’article du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, afin de reconnaître la polygamie comme une pratique subie par les femmes étrangères mariées de force et de leur accorder le renouvellement automatique de leur titre de séjour.

La droite sénatoriale a supprimé en commission cet article au prétexte que le renouvellement automatique de la carte de séjour « vie privée et familiale » pour les personnes victimes de pratiques de polygamie serait inopportun.

En réalité, ce qui est inopportun, c’est le sort des femmes étrangères victimes de mariages forcés, qui perdent actuellement leur carte de résident lorsque leur mari est condamné pour polygamie. Cette double peine des femmes est inopportune.

Nous refusons l’automaticité de la perte des titres de séjour. La polygamie constitue une oppression des femmes que nous jugeons intolérable dans la République. Dès lors, nous devons accueillir les victimes et les protéger plutôt que de les expulser. Tel était le sens de l’amendement de notre collègue Marie- George Buffet, que nous défendons ici, au Sénat.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Eustache-Brinio

Je ne reviendrai pas sur le fait que nous nous rejoignons pour condamner la polygamie. Nous sommes tous dans une opposition forte à ce système moyenâgeux et archaïque et à la conception qu’il implique s’agissant des femmes.

Partant de là, il convient simplement d’examiner à quoi servent un certain nombre d’articles prévus dans ce texte de loi.

Je le rappelle, cet article, introduit par l’Assemblée nationale, concerne le renouvellement de la carte de séjour temporaire « vie privée et familiale » délivrée à l’étranger conjoint de Français. Déjà, quand on est français, on respecte la loi : la polygamie n’est pas autorisée sur notre territoire, en particulier, j’y insiste, quand on est français.

Comme cela existe déjà pour les victimes de violences conjugales, cet article vise à neutraliser la condition tenant au maintien de la vie commune pour le conjoint d’un Français, lorsque l’étranger a été victime de pratiques de polygamie. Dans ce cas, l’autorité administrative ne pourrait procéder au retrait du titre et devrait en accorder le renouvellement. C’est ce principe de renouvellement automatique que la commission des lois n’a pas souhaité maintenir.

À nos yeux, ce dispositif n’est pas opérationnel, car il vise des femmes étrangères qui vivent avec un conjoint français. Or, comme je l’ai rappelé, il y a des règles qui s’appliquent à tous, et en particulier aux Français. Aujourd’hui, chaque situation est étudiée par les services des préfectures dans le cadre du renouvellement du titre de séjour.

Nous ne sommes donc pas favorables à un renouvellement automatique de ces titres de séjour. C’est la raison pour laquelle la commission est défavorable à ces trois amendements identiques.

Les amendements ne sont pas adoptés.

(Non modifié)

I. – Le paragraphe 4 de la sous-section 4 de la section 1 du chapitre Ier du titre VI du livre Ier du code de la sécurité sociale est complété par un article L. 161-23-1 A ainsi rédigé :

« Art. L. 161 -23 -1 A. – Sous réserve des engagements internationaux de la France, une pension de réversion au titre de tout régime de retraite de base et complémentaire, légal ou rendu légalement obligatoire, ne peut être versée qu’à un seul conjoint survivant. En cas de pluralité de conjoints survivants, la pension de réversion est versée au conjoint survivant de l’assuré décédé dont le mariage a été contracté, dans le respect des dispositions de l’article 147 du code civil, à la date la plus ancienne.

« Le conjoint divorcé n’est susceptible de bénéficier d’un droit à pension de réversion, sous réserve qu’il remplisse les conditions prévues par le régime dont il relève, que si le mariage a été contracté dans le respect des dispositions du même article 147 à la date la plus ancienne ou au titre de la durée du mariage au cours de laquelle il était le seul conjoint de l’assuré décédé et en proportion de cette durée, selon des modalités définies par décret en Conseil d’État.

« Le présent article n’est pas applicable aux mariages déclarés nuls mentionnés à l’article 201 du code civil. Dans ce cas, la pension de réversion est partagée entre les conjoints survivants, selon des modalités définies par décret en Conseil d’État. »

II. – Les dispositions du présent article s’appliquent aux pensions de réversion prenant effet à compter de la publication de la présente loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 540, présenté par Mmes Assassi, Cukierman et Apourceau-Poly, MM. Bacchi et Bocquet, Mmes Brulin et Cohen, M. Gay, Mme Gréaume, MM. Lahellec, P. Laurent, Ouzoulias et Savoldelli et Mme Varaillas, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Jérémy Bacchi.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérémy Bacchi

Madame la ministre, devant la commission des lois du Sénat, vous avez affirmé : « Nous considérons donc que les pratiques dites “coutumières” telles que les mariages forcés, la polygamie, la discrimination en matière d’héritage et les certificats ou tests de virginité n’ont pas leur place en France. »

Nous sommes également opposés à ces pratiques, car nous estimons qu’elles remettent en cause l’égalité entre les femmes et les hommes, notamment le droit à disposer de son corps.

Vous avez fait état, madame la ministre, de 200 000 femmes mariées de force sur le territoire national en 2020. Il convient donc non pas de sanctionner les femmes victimes de polygamie en les privant de la pension de réversion de leur mari, mais au contraire de s’attaquer véritablement au problème et de lutter contre la polygamie.

Le texte ne prévoit aucune protection pour les femmes ayant épousé sous la contrainte un mari qui s’est avéré, par la suite, polygame.

Pour ces raisons, nous demandons la suppression de cet article.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Eustache-Brinio

Cet amendement vise à supprimer l’article 15, qui tend à limiter de droit la réversion à un seul conjoint non divorcé.

Ce dispositif est destiné à assurer l’égalité entre les femmes et les hommes et à faire prévaloir l’ordre public français. Il prévoit des garanties, il prend en compte les conjoints de bonne foi qui auront droit, dans tous les cas, à la pension. Par ailleurs, les conjoints qui n’auront plus droit à la pension de réversion auront accès, comme tout un chacun, aux prestations sociales universelles.

Telles sont les raisons pour lesquelles la commission est défavorable à cet amendement.

Debut de section - Permalien
Marlène Schiappa

Le Gouvernement est défavorable à cet amendement, car il ne souhaite pas supprimer l’article 15.

Il considère en effet que cet article est réellement protecteur pour les femmes, puisqu’il tend à protéger les femmes victimes de la polygamie. Il vise à préserver les droits de la première conjointe survivante en lui épargnant le partage de sa pension de réversion avec une autre femme mariée dans une situation de polygamie.

Pour ce qui concerne les femmes ayant subi une situation de polygamie qu’elles ignoraient, l’adoption de cet article permettra de faire annuler le mariage, en faisant reconnaître par le juge son caractère putatif.

À cet égard, j’évoquerai une situation tout à fait concrète, rapportée par de nombreuses associations, notamment le GAMS et Regards de femmes. On fait venir une jeune femme, qui pense qu’elle va se marier et vivre un conte de fées. À l’aéroport, elle rencontre monsieur, mais aussi sa première, voire sa deuxième femme. Elle comprend alors que sa vie ne sera pas conforme à celle qu’on lui avait promise.

Il est important d’avoir connaissance de cette réalité concrète et de mieux protéger ces femmes. L’adoption de cet article leur donnera un droit à pension de réversion, sans remettre en cause les effets du mariage antérieurs à son annulation.

Cet amendement alerte à juste titre sur le cas des mariages contraints ou forcés contre lesquels ce projet de loi prévoit de lutter et que nous évoquerons tout à l’heure. Des dispositions contre ces mariages sont prévues à l’article 17 du texte.

Selon moi, l’adoption de l’article 15 permettra de mieux protéger les femmes. Le Gouvernement est donc défavorable à sa suppression.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

L ’ article 15 est adopté.

Après l’article L. 513-1 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 513-2 ainsi rédigé :

« Art. L. 513 -2. – Les organismes débiteurs des prestations familiales avisent le procureur de la République des situations susceptibles de relever du délit mentionné à l’article 433-20 du code pénal. »

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à M. Stéphane Le Rudulier, sur l’article.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Le Rudulier

Je me fais le porte-parole de ma collègue Valérie Boyer, qui souhaitait exprimer solennellement toute sa satisfaction concernant l’article 15 bis.

En effet, à ses yeux, la polygamie est une situation matrimoniale qui n’est pas conforme à la législation française. La polygamie donne aux hommes tous les droits et aux femmes, tous les devoirs. La représentation nationale ne pouvait rester insensible à cet abus de vulnérabilité que constitue la polygamie de fait s’exerçant sur notre territoire.

Malgré son interdiction, la polygamie continue d’exister dans notre pays, et il semble que les autorités et les pouvoirs publics français soient quelque peu impuissants à l’évaluer, à la contrôler, voire à la maîtriser. Les services de préfecture, qui sont en première ligne, sont bien en peine de fournir un chiffre quelconque quand on les interroge sur un phénomène qui leur échappe.

Aussi Mme Boyer tient-elle à remercier la commission des lois d’avoir voté son amendement visant à introduire cet article 15 bis, lequel prévoit expressément que les caisses d’allocations familiales avisent le procureur de la République de situations susceptibles de relever de cette infraction pénale.

Les caisses d’allocations familiales ont alloué, en 2019, à plus de deux millions de foyers la prestation d’accueil du jeune enfant et à près de cinq millions de foyers les allocations familiales. Il était donc important qu’elles aient l’obligation d’aviser le procureur des situations de polygamie.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 314, présenté par Mme Benbassa, MM. Benarroche et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme Taillé-Polian, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.

Debut de section - PermalienPhoto de Raymonde Poncet Monge

Le présent article a pour objet d’attribuer un nouveau rôle aux organismes débiteurs des prestations familiales : il s’agit d’aviser les procureurs de la République des situations familiales susceptibles de relever de la polygamie. Ils sortiraient ainsi de leur rôle !

Je le répète, la polygamie, aussi condamnable soit-elle, est une pratique très peu répandue en France. Comment revenir, au prétexte de lutter contre ce phénomène, à quelque chose qui s’apparenterait à de la délation ?

Les caisses d’allocations familiales (CAF) ne sont aucunement investies du rôle d’enquêter dans la vie intime et sexuelle des couples. Leur mission première est le versement de revenus, telles les prestations familiales ou les prestations sociales pour le compte de collectivités publiques, et la mise en œuvre d’une action sociale destinée aux allocataires.

Une telle intrusion dans la vie intime des familles par un organisme comme la caisse d’allocations familiales est liberticide. Elle porterait une atteinte manifeste aux principes de notre République que ce projet de loi prétend renforcer.

La France, comme toutes les sociétés démocratiques en Europe, est tenue au respect de la vie privée et familiale des individus, comme le prévoient les dispositions de l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme.

Dans ces conditions, le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires demande la suppression de cet article inadmissible.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Eustache-Brinio

L’article 15 bis a été introduit par la commission. Il vise à prévoir expressément que les caisses d’allocations familiales avisent le procureur de la République des situations susceptibles de relever du délit de polygamie.

Il faut savoir ce qu’on veut ! Si l’on veut lutter contre la polygamie, qui est quelque chose de monstrueux, il faut prendre des outils pour le faire ! Le fait de dénoncer des situations de polygamie n’est pas liberticide ! Il s’agit simplement de protéger les femmes qui subissent de telles situations.

Je suis étonnée d’une attaque aussi violente contre une mesure qui vise simplement à faire disparaître ce phénomène. Cela n’a rien à voir avec le fait d’enquêter sur la vie privée des gens. Simplement, à un moment donné, lorsque les organismes qui allouent les prestations sociales ont des doutes sur la situation des familles, il paraît important de ne pas se contenter d’avoir des doutes et d’adopter des mesures efficaces.

La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.

Debut de section - Permalien
Marlène Schiappa

Madame la sénatrice, initialement, après les discussions interministérielles, j’avais prévu d’émettre un avis de sagesse sur cet amendement. Toutefois, au vu de l’exposé des motifs, j’y suis défavorable.

Tout d’abord, je suis très choquée d’entendre le mot « délation », alors que nous parlons de protection. Une telle attitude est tout à fait contre-productive. Je vous le rappelle, nous incitons tout un chacun, en période de confinement, à appeler le 119 pour protéger les enfants qui subissent des violences ou des négligences. Il s’agit non pas de délation, mais de protection, qui sauve parfois la vie des enfants.

On dit aux témoins de violences conjugales qu’il faut appeler le 3919 ou le 17. Si on leur parle de délation, personne n’entendra ni ne dira plus rien. Et on laissera les femmes et les enfants dans des situations difficiles, voire dramatiques.

Je ne peux donc accepter de tels propos !

Par ailleurs, je suis étonnée d’entendre dire dans cet hémicycle qu’il serait liberticide de faire respecter la loi ! Je ne crois pas qu’il soit liberticide de vouloir que les femmes ne soient plus brimées ; je ne crois pas qu’il soit liberticide de demander le respect des lois de la République. L’ensemble de ce projet de loi va d’ailleurs en ce sens. Je ne crois pas qu’il soit liberticide de demander le respect des droits des femmes.

S’agissant du signalement, sortons du manichéisme ! Comme s’il y avait les gentils polygames et les méchants et liberticides services sociaux et procureurs ! La situation est tout de même un peu plus subtile ! Les signalements de la CAF et l’action du procureur permettent souvent de rediriger les femmes vers des associations, de mettre en place des accompagnements sociaux et psychologiques et, parfois, de sauver les femmes de situations de polygamie auxquelles elles n’ont pas consenti.

Mon avis de sagesse est donc devenu très défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Goulet

Je soutiens l’article introduit par Valérie Boyer et ses collègues. Je suis donc hostile à cet amendement de suppression.

Je suis heureuse qu’à cette occasion nous puissions évoquer les enfants. J’ai failli intervenir sur les amendements identiques tendant à rétablir l’article 14 bis. En effet, si le père est français et que la mère a été expulsée, que faisons-nous des enfants ? Pour de telles situations, je ne suis pas sûre que nous ayons réglé le problème.

De ce point de vue, ces amendements, qui semblaient pertinents, me posaient problème.

Je souhaite donc que l’article 15 bis soit maintenu. À la suite de la ministre, qui a fait une réponse tout à fait pertinente, je souhaite également que le signalement puisse être fait par les services de l’éducation nationale. Ce sont eux qui sont confrontés à ces cas de polygamie. Quand plusieurs enfants portent le même nom, habitent au même endroit et ont un mois ou deux de différence d’âge, c’est forcément qu’il y a eu plusieurs ventres pour les porter.

Madame la ministre, vous avez très justement parlé de signalement et non pas de délation. Vous avez très subtilement expliqué votre position, que je partage complètement. Toutefois, il convient sans doute de sensibiliser les services de l’éducation nationale, qui feront remonter les cas. Cela nous donnera une idée statistique de la situation. Quoi qu’il en soit, qu’il y ait un cas ou cent, ils sont parfaitement intolérables.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à M. Jérôme Bascher, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Bascher

Je ne vois pas bien la différence entre un inspecteur de la CAF contrôlant un parent isolé, dans le cadre de l’allocation pour parent isolé, intégrée dans la loi créant le RSA (revenu de solidarité active), et un inspecteur de la CAF contrôlant une situation de polygamie.

Les inspecteurs de la CAF contrôleront et saisiront, en tant que de besoin, les tribunaux administratifs des affaires de sécurité sociale et le procureur de la République.

Pour autant, excusez mon ignorance, je ne vois pas ce que ces dispositions apportent par rapport à l’article 40 du code de procédure pénale.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

L ’ article 15 bis est adopté.

Le titre Ier du livre Ier de la première partie du code de la santé publique est ainsi modifié :

1° Après l’article L. 1110-2, il est inséré un article L. 1110-2-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 1110 -2 -1. – Un professionnel de santé ne peut établir de certificat aux fins d’attester la virginité d’une personne.

« Le professionnel de santé sollicité pour établir un certificat aux fins d’attester la virginité d’une personne doit informer la patiente concernée de l’interdiction de cette pratique. » ;

2° Le chapitre V est complété par des articles L. 1115-3 et L. 1115-4 ainsi rédigés :

« Art. L. 1115 -3. – L’établissement d’un certificat en méconnaissance de l’article L. 1110-2-1 est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende.

« Art. L. 1115 -4. –

Supprimé

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Cohen

Pour ce qui concerne les certificats de virginité, je crois que nous sommes toutes et tous d’accord, ce qui n’est pas si fréquent en matière de défense des droits des femmes.

Ces certificats symbolisent à eux seuls la domination masculine sur le corps des femmes, la sacralisation d’une prétendue pureté à réserver à l’homme promis. Cette injonction faite à certaines jeunes filles est une véritable violence que nous ne pouvons que dénoncer. C’est bien de violence qu’on parle : une violence psychologique, une pression insupportable, qui alimente la peur chez de nombreuses jeunes filles, y compris de représailles.

Les témoignages de professionnels, dont celui de Ghada Hatem, gynécologue et fondatrice de la Maison des femmes de Saint-Denis, sont très éclairants. Elle explique très bien que délivrer ces certificats, sans bien évidemment pratiquer de tests, peut sauver la vie de jeunes femmes. En outre, les médecins peuvent s’appuyer sur l’Ordre des médecins, qui interdit déjà cette pratique, pour entamer un dialogue.

Prévoir dans la loi l’interdiction de ces certificats, avec pénalisation des praticiennes et des praticiens, risque d’avoir plusieurs effets pervers. Cela pourra mettre à mal un lien qui se crée entre la jeune fille et le professionnel, permettant d’évoquer d’autres problèmes plus larges : l’intimité, la prévention et la santé sexuelle. Cela reviendra à fermer la porte de ces cabinets et à ouvrir celle d’individus non médecins qui réaliseront ces certificats.

En effet, ne soyons pas naïfs ! Il y aura des contournements de cette interdiction, même si j’ai bien noté que l’article 16 ter vise à pénaliser la réalisation d’examens. Je crains le développement de filières clandestines sur lesquelles nous aurons du mal à avoir une visibilité ou une maîtrise.

Sur des sujets aussi sensibles, il nous faut écouter les professionnels. Personne ne réclame l’inscription dans la loi d’une pratique déjà interdite par ailleurs. Surtout, tout le monde dénonce la pénalisation des médecins.

Debut de section - Permalien
Marlène Schiappa

Madame la sénatrice, je suis en profond désaccord avec votre argumentaire. Permettez-moi de vous expliquer les raisons pour lesquelles le Gouvernement veut agir contre les certificats de virginité.

Tout d’abord, je suis très attaché à un principe assez peu courant dans la vie politique, ce que je déplore, celui des accords toltèques, selon lesquels il convient de parler non pas de façon générale et empirique, mais de façon personnelle. Je suis donc toujours très étonnée quand j’entends dire « tout le monde » ou « personne ».

Je ne crois pas que personne ne demande l’interdiction des certificats de virginité, comme vous venez de le dire, madame la sénatrice. Au contraire ! Nous écoutons les professionnels. Considérez les prises de position, depuis des mois, de l’ordre des médecins ou, depuis des années, de l’OMS, qui demande que le monde entier adopte des lois pénalisant cette pratique barbare, antique et indigne des certificats et des tests de virginité.

Certes, une gynécologue, sans aucun doute éminente, n’est pas d’accord. Si sa parole doit être entendue, celle de la présidente de l’Ordre des gynécologues, de la présidente du Syndicat des gynécologues, des centaines de gynécologues et de sages-femmes qui ont signé des pétitions, et des associations de femmes et de jeunes filles vivant dans des quartiers difficiles, qui sont aux prises avec la contrainte sociale, la norme, du certificat de virginité, doit également l’être.

Comme la France a dit « non » à l’excision voilà des années, elle doit dire non au certificat de virginité. À l’époque, certains disaient qu’il ne fallait pas interdire l’excision, au risque de voir se développer la pratique d’exciseuses hors des cabinets médicaux.

Fort heureusement, le gouvernement de l’époque, que je félicite – il me semble que cela se passait sous la présidence de Jacques Chirac –, a tenu bon. Sinon, c’était la porte ouverte à tous les relativismes ! On aurait réfléchi à des excisions propres, effectuées dans des cabinets ! C’est la même chose pour ce qui concerne le certificat de virginité.

Je suis en profond désaccord avec l’argument de Mme Ghada Hatem, que je respecte en tant que personne. Elle nous dit qu’elle veut pouvoir donner des certificats de virginité pour sauver la vie des filles. Quelle inversion des valeurs ! Que se produira-t-il quand la jeune fille rentrera chez elle avec sa petite enveloppe et son petit certificat de virginité à l’intérieur ? Elle épousera une personne qui a choisi comme acte fondateur du mariage, une institution dans laquelle on est censé s’engager en termes de respect, de secours et d’assistance mutuelle, la vérification de la virginité de la femme, dans le cadre d’un examen invasif. Et cette vérification donne lieu à un certificat, comme on le ferait pour un cheval dont on examinerait les dents. Si elle est bien vierge, on daignera l’épouser !

Je trouve tout cela scandaleux. Je pense que la jeune fille qui rentre chez elle avec son certificat de virginité n’a pas la vie sauve. Elle n’entre pas dans un mariage respectueux et elle n’est pas protégée par son certificat de virginité, bien au contraire ! Car on l’envoie épouser une personne qui a exigé un tel certificat. Elle sera donc aux prises avec des pressions terribles. On peut gager que sa dignité de femme ne sera pas particulièrement respectée le reste de sa vie, s’il a fallu ce petit papier, ce certificat de virginité.

Je préfère que la République soit courageuse et qu’elle dise clairement ce qui est permis et ce qui ne l’est pas. Dans la République française, je souhaite donc que les certificats de virginité ne soient pas permis.

Applaudissements sur les travées des groupes RDPI, INDEP, RDSE, UC et Les Républicains. – M. David Assouline applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 662, présenté par Mmes Eustache-Brinio et Vérien, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Remplacer les mots :

certificat aux fins d’attester la virginité d’une personne doit informer

par :

tel certificat informe

et le mot :

patiente

par le mot :

personne

La parole est à Mme la rapporteure.

L ’ amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 483 rectifié bis, présenté par Mmes Meunier, Monier et de La Gontrie, M. Assouline, Mme S. Robert, MM. Sueur et Marie, Mme Lepage, MM. Féraud et Leconte, Mme Harribey, MM. Lozach, Kerrouche, Kanner, Bourgi, Durain, Redon-Sarrazy, Antiste et J. Bigot, Mmes Bonnefoy, Briquet, Conconne et Conway-Mouret, M. P. Joly, Mme Jasmin, MM. Gillé, Raynal, Mérillou, Lurel, Temal, Tissot, Jacquin, Montaugé et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Compléter cet alinéa par les mots :

et la renseigne sur les organismes judiciaires et associatifs qu’elle peut contacter

La parole est à Mme Marie-Pierre Monier.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Pierre Monier

En commission des lois, les socialistes ont soutenu l’interdiction d’établir un certificat de virginité. Un amendement visant à renforcer l’information de la jeune fille ou femme a été en partie adopté. Ces mesures obligent le professionnel de santé à informer la patiente concernée de l’interdiction de cette pratique.

Nous souhaitons néanmoins compléter la protection que notre société doit à ces femmes contraintes par leur entourage de se soumettre à ces pratiques visant à établir leur virginité. Selon nous, l’accompagnement doit inclure également l’orientation de la femme vers les organismes judiciaires et associatifs spécialisés.

Le seul rappel de l’interdiction n’est pas de nature à protéger suffisamment la jeune femme des risques qu’elle encourt. L’approche complémentaire des organismes associatifs ou judiciaires permet de déconstruire l’exigence de virginité et les présupposés patriarcaux que nous combattons.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 544 rectifié, présenté par Mmes Assassi, Cukierman et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Compléter cet alinéa par deux phrases ainsi rédigées :

Il lui remet à cet effet un document expliquant que la loi de la République interdit cette pratique. Le professionnel de santé a également pour obligation d’informer cette même personne des organismes spécialisés dans la défense des droits des femmes qu’elle peut contacter.

La parole est à Mme Céline Brulin.

Debut de section - PermalienPhoto de Céline Brulin

Cet amendement, bien qu’il soit rédigé différemment de celui qui vient d’être défendu par notre collègue Marie-Pierre Monier, va dans le même sens.

Si je peux rejoindre, madame la ministre, votre vigueur et votre rigueur sur les certificats de virginité, il ne suffira pas, me semble-t-il, d’inscrire leur interdiction dans la loi, en « se lavant les mains », pour utiliser des termes un peu crus, de ce qui peut se passer ensuite.

L’article prévoit l’interdiction de ces certificats, le professionnel de santé étant tenu d’informer la personne de cette interdiction. Selon nous, il convient également d’orienter les femmes vers des associations qui peuvent les accompagner.

Des expériences sont menées, notamment en Île-de-France, et peuvent être considérées avec intérêt. Car un certain nombre de femmes peuvent être fragilisées, voire en danger, si un certificat de virginité leur est refusé. Nous ne pouvons donc pas inscrire cette interdiction dans la loi sans nous préoccuper de ce qui se passe ensuite. Des mesures d’accompagnement doivent être prévues. Tel est le sens de cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Eustache-Brinio

Informer une jeune femme ou une jeune fille quant à l’existence d’associations fait partie du lien logique entre un médecin et sa patiente, lequel veut que ce professionnel oriente celle-ci s’il y a des démarches à faire. Cela me paraît naturel et il n’est pas besoin de l’inscrire dans la loi.

Si le médecin pense qu’il y a un risque de violences physiques ou psychologiques à l’encontre d’une jeune femme mineure, il peut tout à fait – et les médecins le font – alerter la cellule du recueil des informations préoccupantes (CRIP) du département. C’est inscrit à l’article 226-14 du code pénal.

Pour les jeunes femmes majeures, il y a une nuance : il faut recueillir son accord. Si celle-ci a peur, par exemple, elle peut tout à fait donner son accord pour que le médecin fasse un signalement auprès du procureur de la République. À titre personnel, je connais de tels cas dans ma ville : les médecins ne laissent pas repartir les jeunes filles avec des sentiments de crainte ou de peur.

Ces amendements, en mentionnant la seule information à transmettre, pourraient laisser penser a contrario qu’il s’agit de la seule initiative à prendre.

Par ailleurs, comme l’a rappelé Mme la ministre, les ordres de professionnels de santé ont déjà pris de telles initiatives.

Compte tenu des dispositifs existants, il faut faire confiance aux médecins, et faire en sorte que se construise un lien entre une jeune femme et son médecin.

L’avis est donc défavorable sur les deux amendements.

Debut de section - Permalien
Marlène Schiappa

Nous sommes d’accord sur le fond, c’est-à-dire sur le fait que le médecin doit informer la jeune femme et ne pas la laisser repartir simplement sur un refus. Au demeurant, il me semble que de nombreux médecins font déjà cela.

Nous avons commencé à travailler avec différentes organisations, notamment avec la Fédération nationale GAMS, qui fédère des associations luttant contre les mutilations sexuelles féminines et les mariages forcés, pour éditer des guides à la destination des élus, pour les aider sur la question des mariages forcés, mais aussi pour les médecins afin que ceux-ci soient mieux outillés en la matière.

Cela étant dit, nous ne pensons pas qu’il soit nécessaire d’aller autant dans le détail en inscrivant dans la loi l’obligation pour le médecin d’informer la patiente au cours de la consultation.

L’avis est défavorable, car nous pensons que la loi n’est pas ici le bon vecteur. Mais, encore une fois, nous sommes d’accord sur le fond.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Cohen

Ces amendements nous donnent l’occasion d’approfondir davantage ce questionnement.

Je me réjouis, sans en être étonnée, de la défense par Mme la ministre des droits des femmes et de l’intégrité de leur corps. Nous avons déjà eu des débats avec elle sur ce sujet et il n’y a aucune ambiguïté à cet égard : soyons clairs, je n’ai pas dit lors de ma dernière intervention que je soutenais les certificats de virginité ; je voulais simplement attirer l’attention sur la pénalisation prévue des praticiens et sur ses conséquences.

Je suis d’accord pour que nous ne raisonnions pas tout en blanc, tout en noir ou tout en gris, et je me réjouis, là aussi, que Mme la ministre soit plus dialecticienne que cela. Pour autant, j’ai entendu l’argument selon lequel il faudrait s’appuyer sur le Syndicat national des gynécologues et obstétriciens de France (Syngof), dont le moins que l’on puisse dire est qu’il ne défend pas toujours des positions progressistes. Les choses sont effectivement plus nuancées…

Ce qui m’importe, c’est d’accompagner ces jeunes femmes qui sont en détresse. Il me semble important non pas de restaurer, mais d’approfondir le lien qu’elles peuvent avoir avec leur médecin.

L’objet des amendements qui ont été présentés est justement de dire qu’elles doivent être accompagnées et guidées vers des associations qui prendront la relève et jugeront du degré de danger qui pèse sur elles. Je pense que nous devons, ensemble, y réfléchir.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à Mme Marie-Pierre Monier, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Pierre Monier

Je soutiens, outre celui que j’ai présenté, l’amendement n° 544 rectifié de Mme Assassi.

Il a été question de Mme Ghada Hatem : lorsque nous l’avons auditionnée, elle a précisé qu’on lui adressait davantage de demandes pour réparer des hymens que pour établir des certificats de virginité.

Il est vrai que nous sommes tous d’accord pour poser un interdit clair, qui soit écrit : non au certificat de virginité !

Il faut, bien sûr, accompagner ces jeunes femmes. Mais, si l’on y réfléchit bien, que fait-on pour les prévenir ?

Je ne suis pas intervenue dans le débat précédent sur la polygamie, mais c’est le même sujet. Que fait-on vraiment dans notre société, quels textes et quelle prévention envisage-t-on à cet égard ?

En essayant de réparer un mal, je le dis souvent, on ne fait que mettre un pansement, alors qu’il faudrait vraiment travailler sur ce mal. Cela signifie qu’il faut donner des moyens à l’école, par exemple pour organiser des cours d’éducation à la sexualité. Vous me direz que j’y reviens encore. Oui, car ces formations ne sont pas efficientes dans nos écoles !

Nous sommes donc d’accord sur le fond, mais ce qu’il faudrait faire avant tout, c’est donner des moyens efficaces pour la prévention et la déconstruction des stéréotypes de genre.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à Mme Esther Benbassa, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Esther Benbassa

Mme Ghada Hatem, obstétricienne et fondatrice de la Maison des femmes de Saint-Denis, a une position que je n’approuve pas, certes, mais il y a un autre volet dans ce qu’elle dit. Elle assume pleinement le fait de délivrer des certificats de virginité, ce qu’elle fait rarement et dans des circonstances très particulières. Elle explique : « Quand je vois que la femme qui est en face de moi a des ressources, qu’elle peut s’en sortir sans cela, je refuse de délivrer ce certificat. Je lui fais de la pédagogie, je lui parle des droits des femmes, des combats des générations précédentes pour que les femmes puissent disposer de leur corps. Mais dans certains cas, pour les très jeunes femmes notamment, ma priorité est d’abord de les protéger. Et si la délivrance d’un certificat de virginité est le seul moyen, je le fais et je l’assume. »

Elle évoque aussi les dangers qui pèsent sur ces jeunes femmes, qui peuvent être renvoyées au bled si le mariage est rompu à cause de l’absence de certificat de virginité.

On ne peut pas demander à l’école de tout faire ! Quand rien ne va, c’est toujours l’école qui doit pallier… Or il faudrait quatorze heures d’enseignement sur ces sujets. Il existe d’autres moyens : je considère, pour ma part, que l’on peut afficher un document dans les mairies, organiser des réunions, d’autant que le nombre de filles qui demandent un certificat de virginité est tout de même très réduit.

Peut-être pourrait-on prévoir, par voie d’amendement, d’inscrire dans cet article que ces jeunes femmes doivent bénéficier d’une formation, de même que leurs parents, puisque ce sont eux qui les poussent à faire cette demande afin de pouvoir les marier et se débarrasser d’une bouche à nourrir. Lorsqu’on est pauvre, on a d’autres stratégies sociales…

Cette question des certificats de virginité n’est pas anodine. Nous, femmes modernes et féministes, nous sommes contre ce certificat. Mais réfléchissons aux différents aspects avant de prendre une décision !

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Pierre de La Gontrie

Tout d’abord, je veux dire que nous partageons totalement le plaidoyer de la ministre sur ce sujet absolument majeur. De ce fait, nous avons déposé, à l’instar du groupe CRCE, des amendements qui visent à compléter le texte. Mais j’ai entendu que la rapporteure n’y était pas favorable.

Il faut bien concevoir les circonstances. On dit que les médecins peuvent d’ores et déjà, aujourd’hui, orienter les jeunes femmes. Peut-être. Il nous a cependant semblé utile de prévoir une quasi-obligation d’orienter celles-ci vers les organismes qui peuvent les aider.

Il nous a également semblé important – j’évoque en l’occurrence l’amendement présenté par Mme Assassi – qu’il leur soit remis un document précisant que la loi interdit cette pratique, car faire cela c’est les protéger.

Que se passe-t-il lorsqu’une jeune femme demande à un médecin de procéder à ce type d’examen et de lui délivrer un certificat de virginité ? Plaçons-nous dans l’hypothèse où le médecin oppose un refus, en expliquant ou pas ses raisons selon qu’il a le temps ou non. Quid du retour à la maison ?

Il nous semble absolument fondamental qu’un document soit remis afin que cette jeune femme soit protégée si elle ne revient pas avec le certificat attendu par sa famille. Car, très souvent, ce n’est pas elle qui demande ce document, mais son futur conjoint, son père, etc.

Encore une fois, et j’en appelle à Mme la ministre, qui est très engagée sur ces sujets, je pense qu’il est important de prévoir un dispositif complet. Ce n’est pas du bavardage. Puisque la France décide d’inscrire dans son droit l’interdiction de cette pratique, il faut que la jeune femme puisse vraiment s’en prévaloir, y compris auprès de ceux qui, dans sa famille, lui demandent un certificat de virginité.

Debut de section - Permalien
Marlène Schiappa

Madame la sénatrice Benbassa, je ne répondrai pas à votre explication de vote. Vos propos ont en effet été déjà tenus précédemment, sous une autre forme, par une autre sénatrice, à laquelle j’ai répondu longuement et qui vient de me répondre à son tour. Cet échange a donc déjà eu lieu, et je ne redévelopperai pas mon argumentaire par respect pour les personnes qui étaient présentes.

Je suis choquée d’entendre une personne telle que vous, féministe et engagée, dire que nous sommes des femmes modernes et féministes, et donc opposées aux certificats de virginité, mais qu’il existe des jeunes filles, moins modernes ou moins féministes que nous, qu’il ne faudrait pas protéger. §C’est ce que vous avez dit, madame la sénatrice, ou en tout cas ce que j’ai compris de votre intervention ! Ces propos, vous les avez d’ailleurs exprimés dans le passé sur le même sujet. Je serais ravie d’être démentie…

Tout ce que vous venez d’expliquer revient à faire du relativisme. Vous relativisez les droits des femmes ! Vous considérez qu’il y a des droits pour des femmes modernes, non exposées à la question des certificats de virginité, et pas pour d’autres, au nom d’une forme de relativisme culturel, de l’existence d’une tradition qu’il faudrait comprendre : ces femmes ne seraient pas prêtes à entrer dans cette modernité féministeet il ne faudrait pas les protéger de ladite tradition. §C’est exactement ce que vous avez dit !

Par ailleurs, au sujet du Syngof, je tiens à dire que l’on ne peut pas disqualifier des personnes qui émettent un avis en fonction de la position qu’elles ont prise sur d’autres sujets.

Je rappelle que Mme Ghada Hatem, pour laquelle j’ai beaucoup de respect, n’était pas favorable au fait que nous légiférions contre le harcèlement de rue, et elle n’était pas la seule. Et quand j’ai dit que je voulais agir contre les violences gynécologiques et obstétricales, elle a appelé, à la radio, à ma démission. Rien de moins ! C’était il y a trois ans et demi.

Depuis lors, de nombreux collectifs se sont montés pour agir contre les violences gynécologiques et obstétricales. Maintenant que ce sujet est devenu davantage « grand public », Mme Ghada Hatem est revenue sur sa position en disant qu’il fallait effectivement mieux protéger les jeunes femmes. Je souhaite qu’elle change également d’avis sur le certificat de virginité !

Je comprends qu’il puisse exister une volonté de s’opposer, par nature, au Gouvernement lorsqu’on fait de la politique. Mais je crois qu’il faut aussi rassembler les synergies.

Lorsque les associations de terrain, mais aussi l’Organisation mondiale de la santé, que l’on ne peut pas soupçonner de n’être pas en phase avec les droits des femmes, le Syngof et l’Ordre des gynécologues, qui sont deux organisations différentes, et l’Ordre des médecins appellent à légiférer partout dans le monde sur les certificats de virginité, il est opportun de les écouter, à défaut d’écouter les jeunes femmes.

Enfin, je rappelle que la France a une responsabilité dans le monde : lorsqu’elle légifère, d’autres pays la regardent et s’en inspirent.

C’est le cas de la diplomatie féministe portée par notre pays. À l’occasion du Forum Génération Égalité organisé par ONU Femmes et coprésidé par la France et le Mexique, et lors du G7, la France a décidé qu’un conseil consultatif remettrait la liste des meilleures lois, susceptibles d’inspirer d’autres lois partout dans le monde. Plusieurs pays se sont prononcés à cet égard, disant qu’ils considéraient avec beaucoup d’intérêt le travail mené par la France.

Pour ce qui concerne la remise d’un document par le médecin, permettez-moi de vous faire part de mon étonnement. On nous disait hier, au sujet du contrat d’engagement républicain, que celui-ci ne changerait rien. Et, en l’occurrence, ce document-ci aurait une grande importance ?

À mon humble avis, une telle mesure ne relève pas de la loi. Il est évidemment salutaire qu’un médecin remette un tel document ; voilà pourquoi nous élaborons avec la Fédération nationale GAMS, que nous avons missionnée à cette fin, un guide que ces professionnels pourront donner aux jeunes femmes. Mais détailler dans la loi ce qui doit être expliqué lors de la consultation, par le médecin à sa patiente, ce n’est pas forcément opérant.

Je ne vous apprendrai rien, madame la sénatrice, en vous disant que la discussion, l’échange et la consultation sont plus efficaces que la simple remise d’un document, laquelle peut donner le sentiment que l’on se dédouane, sans aborder les sujets.

Mme Esther Benbassa s ’ exclame.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Noëlle Lienemann

Madame la ministre, comme beaucoup d’entre nous ici, je suis totalement favorable à l’interdiction des certificats de virginité.

Ma boussole sur ce dossier, c’est le professeur Israël Nisand. Celui-ci a très clairement expliqué que ces certificats devaient être interdits, et que les médecins devaient encourir une sanction en cas de non-respect de cette interdiction, mais aussi expliquer à leurs patientes qu’ils ne pouvaient pas y déroger.

Par ailleurs, je plaide pour la remise d’un document par le médecin à la patiente. Non, madame la ministre, ce n’est pas superfétatoire ! J’en veux pour preuve que la loi oblige à informer les victimes des endroits où elles peuvent obtenir des informations, notamment les associations d’aide aux victimes.

Bien sûr, toutes les femmes qui demandent un certificat de virginité ne sont pas forcément des victimes, mais il y a des moments où l’information est fondamentale.

Je reprendrai l’argumentaire de Marie-Pierre de La Gontrie : pour que la jeune fille puisse expliquer à sa famille que le fait de revenir sans ce certificat n’est pas lié à sa mauvaise volonté, elle doit pouvoir disposer d’un document clair. Cela n’empêche pas le dialogue avec le médecin ! La remise d’un document ne veut pas dire : « Circulez, il n’y a rien à voir ! » L’un et l’autre vont de pair.

À l’étape où nous en sommes parvenus, c’est-à-dire la généralisation effective de l’interdit sur le territoire national, ces dispositions, dans leur ensemble, paraissent indispensables.

Debut de section - PermalienPhoto de Esther Benbassa

Je demande la parole, monsieur le président. Je ne peux laisser Mme Schiappa déformer mes propos !

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

Je suis désolée, ma chère collègue, mais vous avez déjà expliqué votre vote. C’est la même règle pour tous et je n’ai pas le pouvoir de la modifier.

Je mets aux voix l’amendement n° 483 rectifié bis.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

Je mets aux voix l’amendement n° 544 rectifié.

Les personnes qui étaient en séance l’ont adopté : 16 voix pour, 15 voix contre.

L’amendement n° 462 rectifié bis, présenté par M. Bourgi, Mme de La Gontrie, M. Assouline, Mme S. Robert, M. Sueur, Mmes Monier et Meunier, M. Marie, Mme Lepage, MM. Féraud et Leconte, Mme Harribey, MM. Lozach, Kerrouche, Kanner, Durain, Redon-Sarrazy, Antiste et J. Bigot, Mmes Bonnefoy, Briquet, Conconne et Conway-Mouret, M. P. Joly, Mme Jasmin, MM. Gillé, Raynal, Mérillou, Lurel, Temal, Tissot, Jacquin, Montaugé et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 4

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Art. L. 1110-2- … . – Un professionnel de santé alerte le procureur de la République lorsqu’une demande lui est faite afin d’établir une attestation aux fins d’attester la virginité d’une personne.

La parole est à Mme Marie-Pierre Monier.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Pierre Monier

L’article 226-14 du code pénal dispose que le secret professionnel n’est pas applicable « au médecin ou à tout autre professionnel de santé qui, avec l’accord de la victime, porte à la connaissance du procureur de la République […] les sévices ou privations qu’il a constatés, sur le plan physique ou psychique, dans l’exercice de sa profession et qui lui permettent de présumer que des violences physiques, sexuelles ou psychiques de toute nature ont été commises ».

Il dispose également : « Lorsque la victime est un mineur ou une personne qui n’est pas en mesure de se protéger en raison de son âge ou de son incapacité physique ou psychique, son accord n’est pas nécessaire […]. »

Cette disposition, introduite par la loi n° 2020-936 du 30 juillet 2020 visant à protéger les victimes de violences conjugales, est à saluer. Elle est cependant insuffisante, notamment pour protéger les femmes majeures.

Dans une étude du Quotidien du médecin réalisée en 2019 auprès de 431 participants, 29 % des médecins interrogés ont affirmé avoir déjà été sollicités pour délivrer un certificat de virginité. Ces professionnels de santé ont rapporté que, dans bien des cas, cette demande n’émanait aucunement de la patiente, mais de son futur conjoint, de la famille de la patiente ou de la future belle-famille de celle-ci.

Les phénomènes d’emprise et de pression sociale dans ces situations ne sauraient être négligés. Étant sous influence, la patiente n’est souvent pas en mesure de consentir à ce que son médecin alerte le procureur de la République, sans pour autant qu’elle soit considérée en « incapacité physique ou psychique », comme cela est prévu à l’article 226-14 du code pénal.

Conscient de l’ascendant que peut avoir l’entourage de sa patiente sur celle-ci, le professionnel de santé doit pouvoir lui porter secours en toute circonstance. Le présent amendement vise donc à faire des professionnels de santé des lanceurs d’alerte, en leur permettant de saisir le procureur de la République lorsqu’il leur est demandé de réaliser un certificat aux fins d’attester la virginité d’une femme.

Par ce biais, le procureur de la République en sera informé et pourra prendre des mesures de protection au bénéfice de la femme, mener une enquête et diligenter d’éventuelles poursuites à l’encontre de ceux qui ont été à l’initiative de la demande du certificat de virginité.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Eustache-Brinio

Cet amendement a pour objectif d’obliger le médecin sollicité pour établir un certificat de virginité à alerter le procureur de la République, même sans l’accord de sa patiente.

Très sincèrement, une telle disposition ne pourrait que fragiliser le lien entre un médecin et sa patiente, c’est-à-dire une jeune femme ou une jeune fille qui vient lui parler d’un sujet qui n’est pas simple. Dès lors que celle-ci saura qu’un signalement peut être fait auprès du procureur de la République sans son accord, le risque est qu’elle s’oriente vers un professionnel de santé qui n’est pas médecin et dont l’approche de la situation sera différente.

La commission a émis un avis totalement défavorable sur cet amendement, qui est de nature à fragiliser grandement le lien entre le médecin et ces jeunes femmes.

Debut de section - Permalien
Marlène Schiappa

Nous considérons que les débats sur la levée du secret professionnel ont eu lieu dans le cadre de la loi qui a suivi le Grenelle des violences conjugales.

Vous le savez, ces débats ont été nourris, intenses et accompagnés d’une grande consultation avec les professionnels de santé. Ils ont permis d’aboutir à la rédaction suivante, que vous avez adoptée : lorsqu’il y a un danger imminent pour la vie de la patiente, il peut être procédé à un signalement. C’est une très bonne chose.

Le signalement auprès du procureur de la République d’un certain nombre de faits mettant en péril la situation des femmes est une possibilité. Il est important de nous en tenir là, car l’équilibre qui a été trouvé est, à mon sens, suffisamment efficace.

L’avis est donc défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à Mme Esther Benbassa, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Esther Benbassa

Je souhaite répondre à Mme la ministre.

Madame, vous êtes simpliste : pour vous, le monde, c’est oui ou non ! Cela ne marche pas comme ça… Les choses sont bien plus compliquées ; il existe, entre autres, des traditions culturelles, mais je n’entrerai pas dans les détails…

Je n’ai pas dit que j’étais moderne et féministe et que les autres femmes ne l’étaient pas ! Votre façon d’expliquer les choses consiste à attaquer les autres ; c’est votre façon de faire, très bien.

Je vous respecte, mais vous devez aussi respecter ma parole parce que je n’ai absolument pas tenu les propos que vous m’avez prêtés. Dont acte, madame la ministre.

Debut de section - Permalien
Marlène Schiappa

C’est une mise en cause personnelle !

Je vous renvoie à ce que je disais précédemment à propos des accords toltèques et de la parole impeccable. Vous dites : « toujours », « jamais », « personne », « vous attaquez tout le temps les autres »… Cette mise en en cause personnelle n’apporte rien à la qualité des débats, je me permets de vous le dire, madame la sénatrice.

Mme Esther Benbassa s ’ exclame.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 498, présenté par M. Ravier, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 4

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Art. L. 1110-2-…. – Une personne physique ou morale non professionnel de santé ayant établi un certificat aux fins d’attester la virginité d’une personne, est coupable des crimes et délits prévus à l’article 441-7 du code pénal. » ;

La parole est à M. Stéphane Ravier.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Ravier

L’article 16, quelque peu naïf, que nous examinons, ne prend en compte que les professionnels de santé qui rédigeraient des certificats de virginité, c’est-à-dire des personnes bénéficiant d’un titre officiel.

Cependant, lesdits certificats de virginité ne sont pas, pour la plupart, délivrés par des professionnels de santé. La réalité de notre pays tiers-mondisé oblige à élargir le dispositif prévu par ce projet de loi.

Aujourd’hui, en France, des pseudo-médecins, des usurpateurs de titres officiels ou des référents communautaires, comme des figures cultuelles, sont sollicités pour attester de la virginité d’une personne avec ou contre son gré. On entend peu les pseudo-féministes autoproclamées, adeptes des combats idéologiques, comme l’écriture inclusive, sur ces sujets qui sont une réalité dans notre pays ! La dignité des femmes est pourtant bafouée par l’établissement de tels certificats, que l’on n’exige jamais des hommes.

C’est la culture exogène de l’islamisme importé par l’immigration sur notre sol, contraire à nos modes de vie, qui fait des femmes des suspectes. Il est loin l’amour courtois de notre belle culture française !

Le présent amendement prévoit que la simple délivrance des certificats constitue un acte de faux, par lequel un individu, même non professionnel, commet un double délit consistant, d’une part, à établir une attestation ou un certificat faisant état de faits matériellement inexacts, et, d’autre part, à faire usage d’une attestation ou d’un certificat inexact ou falsifié. Or ces délits sont répréhensibles, aux termes de l’article 441-7 du code pénal.

Il faut mettre un terme à ces pratiques communautaristes étrangères en inscrivant, par la voie de cet amendement que je vous invite à adopter, un interdit clair, pour un professionnel ou un non-professionnel, de délivrer un certificat de virginité.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 464 rectifié bis, présenté par Mmes Meunier, Monier et de La Gontrie, M. Assouline, Mme S. Robert, MM. Sueur et Marie, Mme Lepage, MM. Féraud et Leconte, Mme Harribey, MM. Lozach, Kerrouche, Kanner, Bourgi, Durain, Redon-Sarrazy, Antiste et J. Bigot, Mmes Bonnefoy, Briquet, Conconne et Conway-Mouret, M. P. Joly, Mme Jasmin, MM. Gillé, Raynal, Mérillou, Lurel, Temal, Tissot, Jacquin, Montaugé et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Compléter cet article par trois alinéas ainsi rédigés :

« Art. L. 1115-…. – Toute personne, non membre du corps médical, réalisant un examen avec pénétration visant à établir la virginité de la victime se rend coupable de viol et encourt la peine prévue à l’article 222-23 du code pénal.

« Toute personne, non membre du corps médical, réalisant un examen sans pénétration visant à établir la virginité de la victime se rend coupable d’agression sexuelle et encourt la peine prévue à l’article 222-22 du même code et, si l’agression est commise sur un mineur de quinze ans ou une personne vulnérable, la peine prévue à l’article 222-29 dudit code.

« Toute personne informée de la réalisation d’un tel acte en vue d’établir un certificat de virginité et qui ne dénonce pas sa réalisation aux autorités encourt la peine pour non-dénonciation de crime ou de délit prévue aux articles 434-1 à 434-4 du même code. »

La parole est à Mme Marie-Pierre Monier.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Pierre Monier

L’Assemblée nationale a créé un nouvel article L. 1115-4 du code de la santé publique, qui pénalise l’examen visant à établir la virginité. Il assimile cet examen à un viol s’il a donné lieu à pénétration ou à agression sexuelle.

Les rapporteures de la commission des lois ont écarté cette qualification pénale pour des motivations qui nous posent problème. Il a notamment été rappelé que l’élément constitutif de l’acte par violence, contrainte, menace ou surprise, ne pouvait être établi, du fait du consentement de la jeune fille ou de la femme.

Selon nous, il n’est pas envisageable d’interroger le consentement d’une personne qui a grandi, qui a été éduquée, et dont l’avenir dépend de la soumission à des pratiques culturelles et à des normes sociales familiales.

La jeune femme se trouvant dans cette situation est dans une position d’emprise telle qu’elle ne peut que consentir à ces rites. Parfois même, il arrive que certaines femmes consentent à un mariage forcé pour quitter le carcan familial, et pour retrouver un nouveau carcan conjugal guère plus permissif.

Nous souhaitons que l’on cesse d’interroger le libre arbitre de ces jeunes femmes. L’assimilation de l’examen de virginité à un viol ou à une agression sexuelle revient à formaliser l’interdit clair de cette pratique rétrograde.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Eustache-Brinio

La commission a fait un choix différent de celui qu’a présenté M. Ravier dans son amendement n° 498. Elle a créé à l’article 16 ter un délit spécifique sur lequel nous reviendrons.

L’avis est donc défavorable.

Les auteurs de l’amendement n° 464 rectifié bis souhaitent revenir sur le texte de la commission et rétablir celui qui est issu des travaux de l’Assemblée nationale. Il semble que nous ayons les mêmes intentions, mais que nous y parvenions différemment.

La solution proposée par la commission est juridiquement plus robuste et plus large puisque seraient concernés les professionnels comme les non-professionnels.

En effet, si l’examen de virginité est considéré comme illégitime – et même moyenâgeux, selon moi –, alors la différence de traitement entre les professionnels et les non-professionnels n’est pas fondée et constitue une rupture d’égalité.

Une lecture a contrario pourrait même conduire à ne pas pouvoir poursuivre pour viol ou agression sexuelle un médecin qui procéderait à des examens d’ordre gynécologique sans aucun motif médical. Cela n’empêcherait pas les médecins de vérifier si l’hymen d’une victime d’agression sexuelle a été rompu, l’examen visant alors à attester des violences subies.

La solution que la commission propose est la suivante. Un médecin ou un non-médecin qui pratique un test de virginité sur une jeune fille obligée de s’y soumettre par son entourage commet un viol ou une agression sexuelle, selon qu’il y a ou non pénétration, en application du droit existant – il n’y a pas besoin de changer la loi. Un médecin ou non-médecin qui pratique un examen de virginité sur une jeune fille qui s’y soumet sans pression de son entourage ni menace ni violence est coupable du nouveau délit créé à l’article 16 ter, que j’ai déjà évoqué, et encourt des peines fortes de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende, la peine étant aggravée si c’est une mineure.

À aucun moment, nous n’avons soutenu que « la victime à qui l’on somme d’attester de sa virginité pourrait consentir à un tel examen ». Si elle est contrainte, alors c’est un viol ou une agression sexuelle et les dispositions du code pénal qui existent déjà s’appliquent.

Mais il faut aussi prendre en compte les jeunes filles qui ont tellement intégré la valorisation de la virginité qu’elles sont demandeuses de ces examens, parfois pour faire taire des rumeurs ou pour se soumettre à des pressions. Ces situations existent, des associations et des médecins nous l’ont dit !

Sur la base de l’ensemble de ces arguments et des réflexions que nous avons entendues lors de nos auditions, nous émettons un avis défavorable sur cet amendement.

Debut de section - Permalien
Marlène Schiappa

En ce qui concerne l’amendement de M. Ravier, l’avis est défavorable.

Nous partageons évidemment la préoccupation de pénaliser toute personne qui délivrera un certificat de virginité, y compris les non-professionnels de santé, mais les situations évoquées par M. Ravier relèvent déjà de l’exercice illégal de la médecine, voire d’ailleurs dans certains cas de l’escroquerie ou de l’usurpation de titres qui sont déjà punies par la loi.

J’ai fait, par exemple, cette semaine un signalement au président du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) à la suite d’une émission qui présentait les certificats et les tests de virginité comme normaux, comme une sorte d’obligation avant le mariage quand on appartient à certains « groupes communautaires ».

Sur le fond, nous souhaitons bien sûr interdire la délivrance de tout certificat de virginité. Mais, en droit, nous considérons que l’inscription de cette interdiction dans la loi est superfétatoire, la situation étant d’ores et déjà répréhensible dans les conditions fixées à l’article 441-7 du code pénal.

Pour ce qui concerne l’amendement de Mme Meunier, qui tend à assimiler à une agression sexuelle ou à un viol le fait d’obliger une personne à subir un examen pour attester de sa virginité, nous estimons que tout examen de virginité qui est fait par une pénétration – pardonnez-moi d’entrer dans des détails techniques – peut déjà être considéré comme un viol. En effet, en droit, le viol est défini une pénétration obtenue sous la menace, les violences, la contrainte, la surprise, etc. La disposition proposée nous semble donc, là aussi, superfétatoire.

Par ailleurs, nous craignons qu’en faisant figurer dans la loi un tel niveau de détail, cet amendement ne conduise à fragiliser la qualification juridique d’autres situations pouvant être considérées comme des viols. En effet, certains pourraient arguer du fait que la situation est explicitement détaillée dans le cas que nous évoquons, alors que, dans d’autres cas, il n’y a pas de liste exhaustive des faits pouvant être caractérisés comme des viols.

L’avis est donc défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Pierre de La Gontrie

Madame la ministre, j’ai entendu votre avis sur l’amendement de Mme Meunier, et je comprends que nous sommes d’accord sur le fond mais pas sur les modalités qui ont été proposées.

Contrairement à vous, j’estime que les critères constitutifs du viol peuvent être interrogés. Nous avons eu ce débat cent fois dans l’hémicycle, lorsque nous avons discuté des violences conjugales, des violences sexuelles sur mineurs, etc. Je veux parler de la question du consentement. Si nous avons proposé cette disposition à cet endroit du texte, c’est justement pour fermer la porte à l’interprétation juridique qui préside à la constitution de l’infraction de viol. En effet, la contrainte doit être caractérisée – on voit bien qu’il n’y a là ni surprise ni violence… –, tout comme le consentement de la victime.

La question est donc plus importante qu’elle n’en a l’air. Cet amendement n’est pas symbolique : il permet de nommer les choses. Je le redis, nous avons déjà débattu de ce sujet lorsque nous avons évoqué ici de manière très engagée des violences faites aux femmes ou des violences sur mineurs.

Je vous encourage, mes chers collègues, à voter cet amendement.

Debut de section - Permalien
Marlène Schiappa

Je ne suis pas certaine d’avoir bien compris votre propos, madame la sénatrice, aussi voulais-je rappeler rapidement que la définition du viol dans le code pénal inclut bien la pénétration obtenue sous la contrainte, sous la menace, ou sous la surprise.

S’il y a donc contrainte, menace ou surprise – la demande de certificat de virginité est faite sous la contrainte –, le viol est caractérisé.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 517, présenté par Mmes Assassi et Apourceau-Poly, MM. Bacchi et Bocquet, Mmes Brulin, Cohen et Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume, MM. Lahellec, P. Laurent, Ouzoulias et Savoldelli et Mme Varaillas, est ainsi libellé :

Alinéas 5 et 6

Supprimer ces alinéas.

La parole est à Mme Laurence Cohen.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Cohen

Je serai rapide car cet amendement ne fait que concrétiser la position de notre groupe sur la discussion que nous venons d’avoir. Nous sommes opposés aux certificats de virginité ; en revanche, nous ne souhaitons pas de pénalisation des médecins et des professionnels.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Eustache-Brinio

Nous avons effectivement, ma chère collègue, déjà commencé à débattre de cet amendement qui tend à supprimer la pénalisation des certificats de virginité.

La commission est favorable à la pénalisation, car elle permet de conforter le principe d’interdiction. Mme la ministre a rappelé la situation que nous avons connue s’agissant de l’excision : ce fut la même chose, chacun a dû prendre sa part. Les médecins, quels qu’ils soient et quels que soient les territoires dans lesquels ils travaillent, doivent aujourd’hui participer à la lutte contre la délivrance de ces certificats. Je peux vous dire que, pour des femmes, comme moi, qui ont assisté à un certain nombre d’évolutions de la société, il paraît nécessaire qu’en France, au XXIe siècle, nous nous opposions sans relâche à de telles pratiques.

Nous sommes donc totalement défavorables à l’amendement. Quand la loi sera claire, quand elle établira ce qui est interdit, elle ne pourra qu’aider ces jeunes filles, qui vont comprendre, et faire comprendre à leur entourage, que la France les protège de pratiques d’un autre monde. Cela permettra aussi à des médecins qui se font parfois une clientèle sur ces questions de se remettre dans la droite ligne de la loi.

Dans la lutte contre les déviances, contre tout ce qui ne cadre pas avec la République, chacun à sa place doit y prendre part, y compris les médecins.

Debut de section - Permalien
Marlène Schiappa

Je n’ai rien de plus à ajouter, monsieur le président !

L’avis est le même.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote sur l’article.

Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Goulet

Cet article est très important, et nous avons eu un débat courageux sur un sujet qui a l’air moyenâgeux, comme l’a dit Mme la rapporteure, ou d’un autre temps, sauf peut-être à la cour d’Angleterre si l’on en croit les gazettes.

En tout cas, une chose est sûre : il va falloir, madame la ministre – c’est la raison pour laquelle j’ai voté l’amendement n° 544 rectifié, comme je l’avais déjà fait en commission –, que l’information circule de façon très large, dans le milieu médical comme dans celui des associations, et pas seulement les associations de femmes.

Remettre un document à une patiente en lui expliquant que la France ne délivre pas de certificat de virginité permet aussi d’éviter le nomadisme médical, qui pousse une femme, si un médecin a refusé de lui établir ce certificat, à aller consulter ailleurs. Le principe doit être tout à fait clair et lisible.

Mme la rapporteure a qualifié le sujet de moyenâgeux, mais il est tout de même invraisemblable qu’en 2021 en France on soit obligé de passer une matinée à régler ce problème qui aurait dû l’être depuis longtemps. C’est donc une bonne chose que cela figure dans le texte.

L ’ article 16 est adopté.

Le premier alinéa de l’article 227-24-1 du code pénal est ainsi modifié :

1° Le mot : « cinq » est remplacé par le mot : « sept » ;

2° Le nombre : « 75 000 » est remplacé par le nombre : « 100 000 ». –

Adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 170 rectifié, présenté par Mme V. Boyer, MM. Le Rudulier et Boré, Mme Goy-Chavent, MM. Bascher, Meurant, Charon, Longuet et Bouchet, Mme Drexler, MM. Genet, Savary et H. Leroy, Mme de Cidrac et MM. Segouin et Tabarot, est ainsi libellé :

Après l’article 16 bis A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le chapitre Ier du titre IX du livre Ier du code civil est complété par un article 371-… ainsi rédigé :

« Art. 371 -…. – Une mineure faisant face à un risque de mutilation sexuelle et quittant le territoire national sans être accompagnée d’un titulaire de l’autorité parentale est munie d’un certificat de non excision.

« Un décret en Conseil d’État détermine les conditions d’application du présent article. »

La parole est à M. Stéphane Le Rudulier.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Le Rudulier

Il s’agit d’un amendement de ma collègue Valérie Boyer. En France, des petites filles et des adolescentes risquent d’être excisées lors de séjours dans des pays où la pratique se perpétue et dont leurs familles sont originaires.

Depuis le 15 janvier 2017, les mineurs souhaitant quitter le territoire national seuls ou n’étant pas accompagnés du titulaire de l’autorité parentale doivent disposer d’une autorisation.

L’objet de cet amendement est d’adjoindre à cette autorisation un certificat de non-excision pour tout enfant qui quitte le territoire sans être accompagné d’un titulaire de l’autorité parentale. Un décret du Conseil d’État pourrait déterminer les conditions d’application de cette disposition.

Il conviendrait également d’envisager un examen médical avant le départ et dès le retour de l’enfant mineur sur le territoire français. Ainsi, si le médecin ne constate aucune mutilation, le certificat pourrait être remis aux représentants légaux de la mineure ; si, a contrario, le médecin constate une mutilation, le certificat sera directement transmis pour signalement au procureur de la République.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Eustache-Brinio

Nous sommes ici tous d’accord pour dire que l’excision est une monstruosité. Je voudrais d’ailleurs rappeler que Marta de Cidrac et Maryvonne Blondin avaient rendu, pour la délégation aux droits des femmes, un rapport sur ce sujet important à la suite d’un extraordinaire travail. Vous avez dû, madame la ministre, le recevoir. Ce rapport très riche comportait un certain nombre de recommandations, apportait des précisions et fixait des objectifs. Le sujet nous tient à cœur.

Néanmoins, l’amendement pose quelques problèmes, raison pour laquelle, même s’il est important d’attirer l’attention de notre commission et du Sénat sur ce sujet, nous y serons défavorables.

D’abord, en pratique, je ne vois pas comment le dispositif proposé pourrait être mis en place. Car il faudrait vérifier, à la fois, que les petites filles qui quittent notre pays ne sont pas excisées et si elles ne l’ont pas été à leur retour en France.

Par ailleurs, quels pays viser ? Je suppose que notre collègue qui a déposé cet amendement pensait plutôt aux pays d’Afrique subsaharienne. Mais, malheureusement, l’excision ne concerne pas seulement ces pays.

Je le redis, nous sommes tous d’accord pour dire qu’il faut protéger les petites filles, que l’excision est une monstruosité, mais, sincèrement, cet amendement n’est absolument pas opérationnel. Je vous proposerai donc, mon cher collègue, de le retirer, même si vous avez bien fait de soulever le problème de l’excision des petites filles.

Pour compléter mon propos, et parce que nous en avons débattu au sein de la commission, je veux évoquer l’extraordinaire travail fait par les ONG dans les pays d’origine pour que ceux-ci interdisent l’excision. On constate que des pays ont avancé sur la question : depuis quelques années, certains l’ont interdit. Cela ne règle pas tout, car nous savons que ces traditions moyenâgeuses ne s’arrêtent pas du jour au lendemain.

Nous devons faire en sorte de régler le problème partout, avec toutes les bonnes volontés.

Je propose donc le retrait de cet amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.

Debut de section - Permalien
Marlène Schiappa

Même avis que Mme la rapporteure.

Un important travail de coopération est mené par le ministre de l’Europe et des affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, en ce moment notamment avec le Forum Génération Égalité. Avec le Président de la République, nous nous sommes rendus au Tchad, au Burkina Faso et dans plusieurs pays qui travaillent avec la France pour éradiquer l’excision et ce qu’ils appellent les « pratiques néfastes ».

Nous partageons donc votre combat.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Le Rudulier

Non, au vu des arguments avancés par Mme la rapporteure et Mme la ministre, je le retire, monsieur le président.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 170 rectifié est retiré.

L’amendement n° 171 rectifié, présenté par Mme V. Boyer, MM. Le Rudulier et Boré, Mme Goy-Chavent, MM. Bascher, Meurant, Charon, Longuet et Bouchet, Mme Drexler, MM. Genet, Savary et H. Leroy, Mme Bourrat et MM. Segouin et Tabarot, est ainsi libellé :

Après l’article 16 bis A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le titre II du livre Ier de la deuxième partie du code de la santé publique est complété par un chapitre ainsi rédigé :

« Chapitre …

« Prévention des actes contraires à la dignité de la femme

« Art. L. 2123 -…. – Lorsqu’un médecin ou une sage-femme constate à l’occasion d’un examen médical qu’une femme enceinte a subi une mutilation de nature sexuelle, il remet à celle-ci un document intitulé “Charte de protection de l’intégrité génitale de la femme”.

« Ce document présente le droit applicable en matière de protection du corps humain, notamment l’interdiction de toute forme de mutilation prévue à l’article 222-9 du code pénal, ainsi que les risques sanitaires encourus à l’occasion d’une mutilation génitale.

« Le contenu de ce document et les modalités de sa remise à la personne intéressée sont précisés par arrêté du ministre chargé de la santé. »

La parole est à M. Stéphane Le Rudulier.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Le Rudulier

Dans certaines maternités, des équipes médico-chirurgicales se sont mises en place pour prendre en charge les femmes victimes de mutilations comme l’excision.

Ces initiatives permettent d’accompagner et de sensibiliser les patientes en abordant tous les aspects de prévention, de conseil, de soutien et d’information, avec un rappel du cadre législatif français.

Lorsqu’un médecin ou une sage-femme constate à l’occasion d’un examen médical qu’une parturiente a subi une mutilation de nature sexuelle, le praticien de santé devrait pouvoir remettre à celle-ci une « charte de protection de l’intégrité génitale de la femme ».

Ce document présenterait le droit applicable en matière de protection du corps humain, notamment l’interdiction de toute forme de mutilation prévue par le code pénal, ainsi que les risques sanitaires encourus à l’occasion d’une mutilation génitale.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Eustache-Brinio

Il s’agit d’une question importante. Notre collègue Valérie Boyer signale d’ailleurs qu’il existe déjà à Marseille des initiatives de ce type, ce qui est une bonne chose. Des réponses différentes peuvent être apportées selon l’endroit où nous vivons dans notre pays.

Je précise, mon cher collègue, que les informations que vous souhaitez voir communiquées ne relèvent pas du domaine législatif. Il faut laisser les sages-femmes, les médecins et les associations qui luttent contre cette monstruosité qu’est l’excision prendre des initiatives comme elles le font déjà, pour faire de la pédagogie, notamment via la remise de documents.

Il était important d’aborder cette question et de dire qu’il est nécessaire de faire partout de la pédagogie – ce n’est pas moi qui vais contredire le fait que la pédagogie est essentielle ! Néanmoins, je vous demande de retirer votre amendement ; à défaut, j’y serai défavorable car, je le redis, il ne relève pas du domaine législatif.

Debut de section - Permalien
Marlène Schiappa

Même avis, monsieur le président.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Le Rudulier

Non, au vu des arguments exposés par Mme la rapporteure, je le retire, monsieur le président.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 171 rectifié est retiré.

L’amendement n° 172 rectifié, présenté par Mme V. Boyer, MM. Le Rudulier et Boré, Mme Goy-Chavent, MM. Bascher, Meurant, B. Fournier, Charon, Longuet et Bouchet, Mme Drexler, MM. Genet, Savary, H. Leroy, Segouin, Tabarot et Husson et Mme Berthet, est ainsi libellé :

Après l’article 16 bis A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le deuxième alinéa de l’article L. 2132-1 du code de la santé publique est ainsi modifié :

1° La référence : « L. 2132-2-1 » est remplacée par la référence : « L. 2132-2-2 » ;

2° Sont ajoutés les mots : «, notamment celles qui concernent d’éventuelles mutilations sexuelles ».

La parole est à M. Stéphane Le Rudulier.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Le Rudulier

Le carnet de santé est un document qui contient les éléments d’information médicale nécessaires au suivi de la santé de l’enfant jusqu’à ses 18 ans. Son utilisation est réservée aux professionnels de santé et sa consultation soumise à l’accord des parents.

En tant que document officiel soumis au secret professionnel, il est un outil de liaison entre les différents agents du milieu médical.

Le carnet de santé contient également des informations visant à préserver le bien-être de l’enfant. Il serait donc opportun d’y faire figurer un message de prévention sur les mutilations génitales féminines qui n’existe pas aujourd’hui, contrairement à ce qui a pu être indiqué précédemment. Ce message rappellerait, dans un premier temps, les risques de ces pratiques sur l’intégrité physique et psychique de l’enfant et, dans un second temps, la sanction prévue par le code pénal.

Ainsi, le service de protection maternelle infantile du département de la Seine-Saint-Denis prévoit déjà que, dans le cadre de la mission de protection infantile, les familles sont systématiquement informées de manière individuelle ou collective de la gravité des mutilations, de leurs conséquences sur la santé et de leur caractère illégal.

J’invite mes collègues à voter cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Eustache-Brinio

Cet amendement de Valérie Boyer relève du même esprit que les deux précédents. Il vise à nous alerter sur le sujet des mutilations sexuelles, ce qui est important.

Je me suis repenchée sur la question du carnet de santé, sachant que notre collègue est très attachée à cet amendement. Je veux lui dire que son amendement est satisfait, d’abord parce que cette question relève non pas de la loi, mais du règlement. Par ailleurs, les mutilations sexuelles font bien partie des constatations que peuvent et doivent inscrire aujourd’hui les médecins dans le carnet de santé, comme tous les événements liés à la santé d’un enfant jusqu’à sa majorité. Il est donc déjà possible et normal de faire ces constatations.

Si Valérie Boyer voulait préciser les choses à ce sujet, je le redis, cela relève non pas de la loi, mais du règlement. Je comprends qu’elle insiste sur le fait que ces constatations soient inscrites dans le carnet de santé, mais il appartient déjà aux professionnels de santé de le faire.

Monsieur Le Rudulier, je vous demande donc de retirer l’amendement ; sinon, je serai obligée d’émettre un avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Le Rudulier

Au vu des arguments exposés, je le retire, monsieur le président.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 172 rectifié est retiré.

L’amendement n° 174 rectifié, présenté par Mme V. Boyer, MM. Le Rudulier et Boré, Mme Goy-Chavent, MM. Bascher, Meurant, B. Fournier, Charon, Longuet et Bouchet, Mme Drexler, MM. Genet et H. Leroy, Mmes Bourrat et de Cidrac et MM. Segouin et Tabarot, est ainsi libellé :

Après l’article 16 bis A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Chaque année, le Gouvernement dépose devant le Parlement un rapport sur les mutilations génitales féminines.

Ce rapport indique et commente :

a) Le nombre de Françaises et de personnes résidant habituellement sur le territoire français victimes de mutilations génitales en France ou à l’étranger ;

b) L’activité judiciaire concernant les infractions prévues aux articles 222-9, 222-10 et 227-24-1 du code pénal : nombre d’affaires enregistrées et d’affaires poursuivables, taux de poursuites engagées et taux de réponse pénale, nombre de condamnations et quantum des peines prononcées, ainsi que les nationalités des auteurs de ces infractions ;

c) Les moyens, ainsi que leur coût, mis en œuvre pour lutter contre les mutilations génitales féminines ;

d) Les actions entreprises avec les pays pratiquant les mutilations génitales féminines pour mettre en œuvre une politique ferme contre ces pratiques.

La parole est à M. Stéphane Le Rudulier.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Le Rudulier

Il s’agit d’un amendement d’appel.

Dans un avis, la Commission nationale consultative des droits de l’homme a rappelé que la France est le pays de l’Union européenne dans lequel il y a eu le plus grand nombre de poursuites pénales pour des faits de mutilations sexuelles : environ 29 procès depuis 1979.

Cet amendement tend à demander la remise d’un rapport annuel qui retracerait l’activité judiciaire concernant les mutilations génitales féminines, les moyens mis en œuvre pour lutter contre ces mutilations ainsi que leur coût.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Eustache-Brinio

Au sein de cette assemblée, chacun sait que la commission des lois n’est pas favorable aux demandes de rapport. Nous en avons d’ailleurs déjà « évincé » quelques-uns !

Je rappelle qu’un rapport a été récemment fait par Maryvonne Blondin et Marta de Cidrac dans le cadre de la délégation aux droits des femmes. Diverses structures produisent déjà des rapports pour suivre ce phénomène contre lequel nous devons lutter.

On trouve d’ailleurs dans une étude de Santé publique France publiée en 2019 des chiffres sur la pratique des mutilations.

Je voudrais rendre hommage à une avocate que je connais, Linda Weil-Curiel : elle a permis la construction de la législation actuelle, puisque c’est elle qui a fait condamner la première femme pratiquant des excisions dans notre pays. C’est bien grâce à elle que nous avons une législation sur cette question. Je ne sais pas si elle suit nos travaux, mais j’ai une pensée pour elle car elle a été une combattante : même si cela n’a pas été facile, elle a permis que l’excision soit une infraction lourdement condamnée dans notre pays.

Mon cher collègue, là encore – je suis désolée de vous contredire et de vous taquiner ce matin ! –, je vous demanderai de retirer votre amendement, car votre demande de rapport semble parfaitement satisfaite.

Debut de section - Permalien
Marlène Schiappa

J’associe le Gouvernement, si Mme la rapporteure me le permet, à l’hommage qu’elle vient de rendre à celles qui se sont battues pour interdire l’excision et les mutilations génitales.

Je voudrais vous rappeler que le Gouvernement a lancé, avec le Premier ministre d’alors, Édouard Philippe, il y a un an et demi de cela, un grand plan contre l’excision, doté de moyens. Nous avons, par exemple, multiplié par trois la subvention de l’association Excision, parlons-en ! et avons décidé de financer davantage la Fédération GAMS que j’évoquais précédemment.

Par ailleurs, nous avons également lancé une étude de prévalence pour mieux quantifier le nombre de femmes qui vivent en France avec des mutilations génitales. Le chiffre sont nous disposions précédemment était de 90 000 femmes ; les études que nous avons diligentées nous laissent penser que ce sont plutôt 160 000 femmes et filles qui seraient concernées. Ce travail est fondamental, et il doit être mené en lien avec l’éducation nationale. C’est pourquoi nous avons, dans le cadre du plan contre l’excision, mobilisé cette dernière, y compris pour le repérage et la prévention de l’excision.

Cela étant, vous savez, monsieur le sénateur, que le Gouvernement n’est par principe pas favorable aux rapports. Néanmoins, si le Parlement demandait un nouveau rapport, nous le ferons bien évidemment.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Goulet

Je suis désolée de revenir toujours sur ce sujet, mais la réponse à la question posée pourrait très bien se trouver dans les documents de politique transversale appelés « oranges budgétaires », par exemple dans celui sur la politique de la jeunesse ou sur la politique de la santé.

Bref, les documents qui complètent le projet de loi de finances devraient permettre de répondre à la demande qui a été faite.

(Supprimé)

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 556 rectifié, présenté par Mmes Assassi, Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

À la dernière phrase de l’article L. 121-1 du code de l’éducation, après le mot : « sexuelles », sont insérés les mots : « ainsi qu’aux mutilations sexuelles féminines ».

La parole est à Mme Laurence Cohen.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Cohen

La commission des lois a supprimé l’article 16 ter A adopté par l’Assemblée nationale, considérant qu’il était superfétatoire et relevant du domaine réglementaire. Nos discussions depuis ce matin nous montrent la différence entre préciser et être redondant…

Pour notre groupe, la sensibilisation des enseignants à l’excision et aux mutilations sexuelles féminines est extrêmement importante. Ce problème, même s’il est spécifique, relève du même mécanisme du patriarcat que les autres violences sexuelles et sexistes : nous estimons qu’il nécessite une attention particulière et, à tout le moins, une formation adaptée des enseignants qui peuvent aider à la détection et, donc, à la protection des jeunes filles, et faire en quelque sorte de la prévention.

En France, plus de 60 000 jeunes filles sont concernées par des mutilations sexuelles génitales. Notre Haute Assemblée a adopté à l’unanimité une résolution sur ce sujet en mars 2019. Avec mon groupe communiste républicain citoyen et écologiste, nous sommes à l’origine d’une rencontre avec Hadja Idrissa Bah, qui était alors présidente du Parlement des enfants de Guinée, et Annick Billon, présidente de la délégation sénatoriale aux droits des femmes.

Ne pas vouloir ajouter ces précisions dans la loi nous semble contradictoire avec la volonté affichée par le Sénat de s’engager sur cette question. Ne pas nommer les choses revient à les nier. Pour nous, il s’agit de rendre la loi non pas bavarde mais plus précise.

Je profite de cette intervention pour saluer le travail, à la fois, des associations, qui a été souligné depuis ce matin, et des professionnels, particulièrement des docteurs Pierre Foldès et Denis Mukwege qui font un travail remarquable en direction des femmes.

Madame la ministre, j’aimerais que vous précisiez les informations que vous avez pu nous apporter lors de la discussion de ce matin, notamment en faisant un point d’étape rapide sur le plan de lutte contre l’excision afin que nous puissions disposer de toutes les données.

Je vous en remercie par avance.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Eustache-Brinio

Ma chère collègue, si la commission a émis un avis défavorable, ce n’est évidemment pas parce qu’elle pense qu’il est inutile de parler de ces sujets de manière préventive, large et surtout régulière.

Mais la précision que vous souhaitez apporter figure déjà dans le programme de sensibilisation aux violences sexuelles et sexistes des personnels enseignants, prévu dans le cadre de l’article L. 121-1 du code de l’éducation.

Notre attention a donc déjà été attirée sur ce sujet. Il n’est nullement question de minimiser la nécessité de parler et de reparler de ce sujet.

Debut de section - Permalien
Marlène Schiappa

Cette question a suscité, à l’Assemblée nationale, un débat long et argumenté.

Certains vous diraient qu’il n’est pas nécessaire d’entrer dans le détail de tout ce que les séances d’éducation à la vie affective et sexuelle doivent aborder. Mais, pour ma part, je crois au contraire qu’il peut être positif de détailler cela, particulièrement sur ces questions ; en effet, passer par l’école est un bon moyen de toucher toute une classe d’âge.

Cela dit, pour être tout à fait sincère, je vais émettre un léger bémol. Il est, en théorie, obligatoire d’organiser trois séances de ce cours par an ; c’est prévu par loi, depuis 2014. Jean-Michel Blanquer et moi avons donc agi, l’année dernière, pour assurer l’effectivité de ces séances, mais je ne suis pas en mesure de vous assurer que, dans toutes les classes et pour toutes les tranches d’âge, ces trois séances ont véritablement lieu, en particulier – mais c’était déjà vrai auparavant – avec les mesures sanitaires que nous connaissons.

Ainsi, je vous le dis en toute honnêteté, il serait peut-être opportun de mener un audit pour faire un bilan de l’application réelle de ces séances.

En tout cas, le Gouvernement émet un avis favorable sur cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à Mme Marie-Pierre Monier, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Pierre Monier

Nous soutiendrons évidemment cet amendement de Mme Assassi.

Je suis heureuse de vous entendre reconnaître, madame la ministre, qu’il y a peut-être un problème d’efficacité, indépendamment de la crise sanitaire. Il faut vous atteler à la résolution de ce problème. J’avais interpellé, sur ce sujet, M. le ministre Jean-Michel Blanquer, qui m’a tenu un discours totalement différent de celui qui m’est tenu localement, dans les établissements…

Ainsi, il serait bon que l’on avance en ce sens, et, je suis d’accord avec vous, madame la ministre, mes chers collègues, il faut préciser ce point dans la loi : ce ne sera pas « trop bavard »…

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Cohen

Je veux remercier Mme la ministre de la sincérité de ses propos et préciser certains éléments pour Mme la rapporteure.

Madame la rapporteure, il y a la loi et il y a l’application de la loi. Le Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes a pointé, dans sa dernière enquête, un certain nombre de failles : 25 % des écoles élémentaires, 11 % des lycées et 4 % des collèges déclarent « n’avoir mis en place aucune action ou séance en matière d’éducation à la sexualité ».

Ainsi, vous le voyez, il est parfois important de préciser les choses et de suivre l’application des lois.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Eustache-Brinio

Les chiffres que vous nous avez communiqués sont inquiétants, ma chère collègue, mais ils en disent surtout long sur les pressions qui s’exercent dans les collèges et dans les lycées pour que les cours consacrés à ces sujets n’aient pas lieu. Il n’est pas simple de parler de ces questions dans certains endroits…

Il faut donc aider les enseignants à s’approprier certaines choses, afin qu’ils puissent les transmettre. C’est un véritable problème, personne ne peut le nier.

Le code de l’éducation prévoit déjà des choses à ce sujet, d’où l’avis défavorable de la commission. Ce qui est prévu par la loi doit être appliqué et appliqué partout ! Je pense que l’on peut être d’accord là-dessus.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à M. Hussein Bourgi, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Hussein Bourgi

Il s’agit moins de pressions exercées sur les établissements scolaires que d’un déficit de volontaires pour assurer ces cours d’éducation sexuelle et d’information sur la sexualité.

Mon témoignage est celui d’un élu local, qui siège au conseil d’administration d’une dizaine de collèges et de lycées. Quand des associations existent – on en trouve souvent dans les grandes villes et dans les métropoles –, elles peuvent être une ressource pour ces interventions, mais, en milieu rural, il devient beaucoup plus difficile de trouver des bénévoles d’associations pour intervenir sur ces thèmes.

Dans ce cas, il faut se tourner vers l’équipe pédagogique et scruter les profils. Est-ce le professeur de sciences de la vie et de la terre, ou SVT, qui fera l’intervention ? Est-ce l’infirmière scolaire, à condition qu’il y en ait une, car, vous le savez, certaines infirmières scolaires assurent des temps partiels sur deux ou trois établissements ?

En outre, les enseignants et l’équipe pédagogique se trouvent souvent aux avant-postes pour détecter, ici ou là, des risques de mariage forcé ou de mutilation sexuelle.

Or si, dans certains cas, les adolescentes discutent entre elles et alertent le conseiller principal d’éducation, le CPE, l’assistante sociale, l’infirmière scolaire ou le professeur principal pour témoigner de ces réalités, parfois, c’est à l’issue d’un cours d’éducation et d’information sur la sexualité que des adolescentes témoignent de ces risques et de ces réalités, au travers des questionnaires anonymes d’évaluation.

Pour toutes ces raisons, fondées sur mon expérience de terrain dans le département dont je suis élu, à savoir l’Hérault, où j’ai vécu cette situation non pas une, mais plusieurs fois, je vous demande avec beaucoup de solennité, mes chers collègues, de voter cet amendement.

L ’ amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

En conséquence, l’article 16 ter A est rétabli dans cette rédaction.

(Supprimé)

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

Je suis saisi de deux amendements identiques.

L’amendement n° 482 rectifié bis est présenté par Mmes Monier, Meunier et de La Gontrie, M. Assouline, Mme S. Robert, MM. Sueur et Marie, Mme Lepage, MM. Féraud et Leconte, Mme Harribey, MM. Lozach, Kerrouche, Kanner, Bourgi, Durain, Redon-Sarrazy, Antiste et J. Bigot, Mmes Bonnefoy, Briquet, Conconne et Conway-Mouret, M. P. Joly, Mme Jasmin, MM. Gillé, Raynal, Mérillou, Lurel, Temal, Tissot, Jacquin, Montaugé et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

L’amendement n° 557 rectifié est présenté par Mmes Assassi, Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

La troisième phrase du premier alinéa de l’article L. 312-16 du code de l’éducation est complétée par les mots : « et sensibilisent aux violences sexistes ou sexuelles ainsi qu’aux mutilations sexuelles féminines ».

La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour présenter l’amendement n° 482 rectifié bis.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

Cet amendement est le corollaire du précédent. Alors que celui-ci visait la formation sur les mutilations sexuelles génitales, celui-là tend à inclure, dans le programme de sensibilisation des élèves, la question de ces mutilations.

Pour nous qui travaillons sur ces sujets, il est évident que la violence infligée aux femmes et aux jeunes filles doit être traitée dans le cadre de ces cours, mais cette évidence n’est pas forcément partagée par tous. En outre, quand bien même elle le serait, elle nécessite des formations.

À ce propos, je souhaite dire un mot des fameux cours d’éducation à la vie affective et sexuelle et corroborer les propos que Mme la ministre vient de tenir.

Le Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes a publié, en 2016, un rapport sur la réalité de ces cours ; les choses n’ont probablement pas beaucoup changé depuis lors, si j’en juge par les informations qui me remontent du terrain, et, si cela a changé, la pratique n’est pas stabilisée et la pérennité de ces cours n’est pas assurée.

Je vous le rappelle, pour assurer ces interventions, on fait appel à des associations. Et, en l’occurrence, les pressions ne sont pas forcément liées à ce dont on parle aujourd’hui dans l’hémicycle ; elles peuvent provenir de différentes structures idéologiques. En effet, toutes les associations auxquelles on fait appel n’enseignent pas la contraception, le droit à l’interruption volontaire de grossesse, IVG, ou l’existence de la pilule du lendemain.

Cet amendement est donc important, parce qu’il a pour objet, d’une part, de préciser – cela ne va pas de soi – que l’existence des mutations génitales et sexuelles fait partie de l’éducation à la vie affective et sexuelle, et, d’autre part, d’inciter à faire appel à des associations spécialisées ; je pense en particulier à l’association Excision, parlons-en !, dont l’administratrice est Moïra Sauvage, qui vient en appui d’autres associations.

Ces sujets sont suffisamment subtils et difficiles à aborder avec les élèves pour être spécifiquement prévus et confiés à des spécialistes, lesquels formeront d’autres intervenants.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à Mme Laurence Cohen, pour présenter l’amendement n° 557 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Cohen

J’ai exposé mon point de vue sur le sujet en défendant l’amendement précédent ; en outre, Mme Rossignol a bien exposé l’objet de son amendement, qui est identique.

Je considère donc mon amendement comme défendu, monsieur le président.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Eustache-Brinio

Bien évidemment, la commission est favorable au fait que tous ces sujets soient abordés dans les collèges et les lycées.

Néanmoins, elle a supprimé l’article que vous souhaitez rétablir au travers de ces amendements, mes chères collègues, parce que tout cela est déjà prévu à l’article L. 312-17-1 du code de l’éducation, qui précise : « Une information consacrée à l’égalité entre les hommes et les femmes, à la lutte contre les préjugés sexistes et à la lutte contre les violences faites aux femmes et les violences commises au sein du couple est dispensée à tous les stades de la scolarité. » Ce point donc déjà précisé dans la loi.

C’est vrai, cela ne se fait pas partout, pour des raisons diverses et variées, notamment quand le contexte est très particulier, mais c’est à nous de réarmer le cadre de l’éducation nationale afin d’y remédier.

Pourquoi la commission a-t-elle supprimé cet article ? Non pas parce qu’elle serait opposée à cette mesure, mais parce que celle-ci figure déjà dans le code de l’éducation. En revanche, je le répète, il appartient à l’éducation nationale de faire en sorte que cela s’applique partout.

La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.

Debut de section - Permalien
Marlène Schiappa

Tout d’abord, je tiens à le préciser, j’ai obtenu les mêmes informations du terrain.

Nous sommes tous d’accord, je crois, pour affirmer que, à l’heure actuelle, ces interventions reposent trop sur la bonne volonté, qu’il s’agisse des moyens, des volontaires ou de la résistance aux pressions exercées de toutes parts ; nous faisons tous le même constat.

Ensuite, en ce qui concerne le fait d’entrer dans le détail dans la loi, je vais émettre, par souci de cohérence, un avis favorable sur cet amendement comme sur les précédents, mais j’entends aussi ce que dit Mme la rapporteure. Il est vrai que, si l’on a une lecture stricte du code de l’éducation, on peut arguer que cette mesure est déjà prévue par la loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

Je mets aux voix les amendements identiques n° 482 rectifié bis et 557 rectifié.

Les amendements ne sont pas adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

En conséquence, l’article 16 ter B demeure supprimé.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 481 rectifié bis, présenté par Mmes Monier, Meunier et de La Gontrie, M. Assouline, Mme S. Robert, MM. Sueur et Marie, Mme Lepage, MM. Féraud et Leconte, Mme Harribey, MM. Lozach, Kerrouche, Kanner, Bourgi, Durain, Redon-Sarrazy, Antiste et J. Bigot, Mmes Bonnefoy, Briquet, Conconne et Conway-Mouret, M. P. Joly, Mme Jasmin, MM. Gillé, Raynal, Mérillou, Lurel, Temal, Tissot, Jacquin, Montaugé et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 16 ter B

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La première phrase du premier alinéa de l’article L. 312-16 du code de l’éducation est complétée par les mots : « : la mise en place effective de ces séances fait l’objet d’un contrôle ».

La parole est à Mme Marie-Pierre Monier.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Pierre Monier

Cet amendement vise à compléter les dispositions du code de l’éducation relatives aux séances d’éducation à la sexualité, afin de préciser que « la mise en place effective de ces séances fait l’objet d’un contrôle ».

On vient de le dire, en pratique, ces séances ne sont pas toujours organisées. Certes, le code de l’éducation dispose déjà que ces cours doivent avoir lieu dans les écoles, les collèges et les lycées, à raison d’au moins trois séances annuelles, mais, je le répète, cette organisation n’est pas assurée dans un certain nombre d’établissements.

Au reste, le constat de cette lacune avait fait l’objet d’un large consensus sur les travées du Sénat, lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2021.

Ainsi, il nous paraît essentiel de réaffirmer que ces séances annuelles d’éducation à la sexualité doivent bien avoir lieu, car ces cours présentent une vision égalitaire des relations entre les femmes et les hommes, contribuent à l’apprentissage du respect dû au corps humain et constituent, de ce fait, un outil pédagogique et préventif précieux pour faire vivre ces principes de la République que sont le respect de la dignité humaine et l’égalité entre les femmes et les hommes.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Eustache-Brinio

L’organisation de ces séances est prévue par le code de l’éducation et elle doit avoir lieu ; l’éducation à la sexualité fait partie des programmes de l’éducation et, à ce titre, elle est déjà soumise au contrôle des corps d’inspection dédiés.

On peut inscrire ce que l’on veut dans la loi, mais, quand les choses sont déjà prévues par les textes, c’est inutile !

Cet amendement étant satisfait, la commission en demande le retrait ; à défaut, elle émettrait un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Marlène Schiappa

Je représente le Gouvernement et, à ce titre, j’émets un avis défavorable.

Néanmoins, je tiens à dire – je conçois que cela puisse étonner – que je suis, à titre personnel, favorable à cet amendement.

Mon collègue Jean-Michel Blanquer, qui a la responsabilité de ces séances d’éducation à la vie affective et sexuelle, fait valoir que l’éducation peut être abordée en SVT, mais qu’elle peut également se déployer lors d’échanges ayant lieu en dehors des temps d’apprentissage, notamment à l’occasion de discussions entre les élèves et le personnel, singulièrement les infirmiers et infirmières de l’éducation nationale.

Nous ne pouvons pas, dans le cadre de l’examen de ce projet de loi, décider d’un tel contrôle sans nous concerter avec le ministre de l’éducation nationale et sans évoquer ses modalités.

Toutefois, je le répète, à titre personnel, je partage pleinement cet objectif. Le ministre de l’éducation nationale et moi avions justement lancé un audit, afin d’étudier précisément à quels endroits ces séances d’éducation à la vie affective et sexuelle étaient organisées – nous avions adressé une circulaire en ce sens –, mais tout cela a été arrêté par la pandémie et par les mesures sanitaires.

Pour ma part, je partage votre volonté de contrôler l’effectivité et – j’ose le dire – la qualité de ces séances d’éducation à la vie affective et sexuelle, car si certaines associations ont des agréments, le choix de l’intervenant peut aussi se faire de gré à gré, dans des conditions qui ne sont pas toujours idéales, d’après ce que nous ont indiqué certaines organisations de parents d’élèves.

L’avis du Gouvernement est donc défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Pierre de La Gontrie

Mes chers collègues, je souhaite vous faire part de ma perplexité.

Évidemment, le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain partage le point de vue de Mme la ministre, mais cet amendement fait l’objet de deux avis du Gouvernement, qui sont opposés… Ce n’est pas simple, d’autant qu’il s’agit d’un ajout de l’Assemblée et qu’il faudra donc trancher, le moment venu.

Nous maintenons bien sûr notre amendement, mais cette position du Gouvernement me paraît complexe. J’espère donc que le travail qui sera réalisé préalablement à la réunion de la commission mixte paritaire avec la majorité de l’Assemblée nationale, conduira à retenir la position de Mme Schiappa plutôt que celle de M. Blanquer.

Debut de section - Permalien
Marlène Schiappa

Je prie Mme la sénatrice de La Gontrie de bien vouloir m’excuser, car je conçois tout à fait que cela soit déconcertant ou manque de clarté.

Je le reformule ainsi : le Gouvernement a émis un avis défavorable sur cet amendement, mais j’ai émis une opinion personnelle sur cette question.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Pierre de La Gontrie

Pour un ministre, malheureusement, une opinion personnelle, cela n’existe pas !

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Après la section 1 ter du chapitre V du titre II du livre II du code pénal, est insérée une section 1 quater ainsi rédigée :

« Section 1 quater

« Des examens en vue dattester la virginité

« Art. 225 -4 -11. – Le fait de faire à une personne des offres ou des promesses, de lui proposer des dons, présents ou avantages quelconques ou d’user contre elle de pressions ou de contraintes de toute nature afin qu’elle se soumette à un examen visant à attester sa virginité est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 € d’amende.

« Lorsque la personne est mineure, les peines sont portées à deux ans d’emprisonnement et à 30 000 € d’amende.

« Art. 225 -4 -12. – Sans préjudice des cas dans lesquels ces faits constituent un viol, une agression sexuelle ou une atteinte sexuelle, le fait de procéder à un examen visant à attester la virginité d’une personne est puni de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 € d’amende.

« Lorsque la personne est mineure, les peines sont portées à trois ans d’emprisonnement et 45 000 € d’amende. »

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 465 rectifié bis, présenté par Mmes Meunier, Monier et de La Gontrie, M. Assouline, Mme S. Robert, MM. Sueur et Marie, Mme Lepage, MM. Féraud et Leconte, Mme Harribey, MM. Lozach, Kerrouche, Kanner, Bourgi, Durain, Redon-Sarrazy, Antiste et J. Bigot, Mmes Bonnefoy, Briquet, Conconne et Conway-Mouret, M. P. Joly, Mme Jasmin, MM. Gillé, Raynal, Mérillou, Lurel, Temal, Tissot, Jacquin, Montaugé et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéas 6 et 7

Supprimer ces alinéas.

La parole est à Mme Marie-Pierre Monier.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Pierre Monier

L’article 16 ter du projet de loi fixe les peines associées à la nouvelle infraction de réalisation d’un examen destiné à attester de la virginité d’une personne.

Comme ils l’ont précédemment indiqué en défense de l’amendement n° 464 rectifié bis, les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain estiment que cet examen doit être assimilé à un viol ou à une agression sexuelle, selon qui il y a eu ou non pénétration. Nous nous refusons à envisager que la jeune fille ou la femme puisse consentir à cet examen, en raison du poids du carcan familial ou de l’emprise de l’entourage, qui la place en situation de grande vulnérabilité.

En conséquence, cet amendement tend à supprimer les alinéas relatifs à l’infraction lorsque la victime est d’accord pour subir un tel examen.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Eustache-Brinio

La commission soutient la même argumentation que pour l’amendement n° 464 rectifié bis : elle est totalement opposée à la suppression de l’infraction spécifique visant les examens de virginité en dehors des cas de viol ou d’agression sexuelle. J’ai exposé précédemment les arguments à l’appui de cette position ; je ne les développerai pas de nouveau.

Par cohérence, la commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.

Debut de section - Permalien
Marlène Schiappa

Avis défavorable, monsieur le président.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

L ’ article 16 ter est adopté.

Le code civil est ainsi modifié :

1° Le 2° de l’article 63 est ainsi modifié :

a) Le deuxième alinéa est supprimé ;

b)

« L’officier de l’état civil demande à s’entretenir individuellement avec chacun des futurs époux lorsqu’il a des raisons de craindre, au vu des pièces fournies par ceux-ci, des éléments recueillis au cours de leur audition commune ou des éléments circonstanciés extérieurs reçus, dès lors qu’ils ne sont pas anonymes, que le mariage envisagé soit susceptible d’être annulé au titre des articles 146 ou 180. » ;

c)

2° L’article 175-2 est ainsi modifié :

a)

b)

« Les décisions d’opposition et de sursis font l’objet d’un traitement automatisé dans les conditions fixées par la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés, aux fins d’être consultées par l’officier de l’état civil avant toute célébration de mariage ou transcription sur les registres de l’état civil français. Un décret en Conseil d’État, pris après avis publié et motivé de la Commission nationale de l’informatique et des libertés, précise la durée de conservation des données enregistrées et les conditions de leur mise à jour, les catégories de personnes pouvant y accéder ou en être destinataires, ainsi que les modalités d’exercice des droits des personnes concernées.

« Lorsque l’officier de l’état civil constate que le mariage a déjà fait l’objet d’une décision de sursis ou d’opposition dans une autre commune ou à l’étranger, il ne peut célébrer le mariage ou transcrire l’acte de mariage étranger sur les registres de l’état civil français pendant la durée du sursis ou tant que l’opposition produit effet, sous peine de 3 000 euros d’amende et de tous dommages-intérêts. » ;

a) À la première phrase du premier alinéa, les mots : « l’audition des époux, ensemble ou séparément, » sont remplacés par les mots : « l’audition commune des époux et le cas échéant d’entretiens individuels » ;

b) À la première phrase du deuxième alinéa, les mots : « est réalisée » sont remplacés par les mots : « commune et les entretiens individuels sont réalisés » ;

c) À la dernière phrase du même deuxième alinéa, après le mot : « audition », sont insérés les mots : « commune et des entretiens individuels » ;

a) Au deuxième alinéa, les mots : « l’audition des époux, ensemble ou séparément, » sont remplacés par les mots : « l’audition commune des époux et le cas échéant aux entretiens individuels » ;

b) À la première phrase du troisième alinéa, les mots : « est réalisée » sont remplacés par les mots : « commune et les entretiens individuels sont réalisés » ;

c) À la dernière phrase du troisième alinéa, après le mot : « audition », sont insérés les mots : « et des entretiens individuels » ;

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 499, présenté par M. Ravier, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 5

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

…) Après le quatrième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Le quatrième alinéa du présent 2° s’applique avant toute transcription sur les registres d’état civil français d’un mariage célébré par une autorité étrangère. » ;

La parole est à M. Stéphane Ravier.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Ravier

Cet amendement a pour objet d’étendre la mesure visant à lutter contre les mariages forcés aux mariages célébrés à l’étranger, par une autorité étrangère, puis enregistrés à l’état civil français par la représentation diplomatique ou consulaire française territorialement compétente.

En effet, la transcription, en droit français, du mariage d’une personne française avec une personne étrangère, célébré par une autorité étrangère légitime pour le faire, produit des effets civils en France, pour les enfants et les époux, en permettant notamment d’obtenir la nationalité française.

Étant donné que la demande de transcription est faite auprès de l’autorité consulaire ou diplomatique compétente, en fonction du lieu de célébration du mariage, il revient à cette même autorité de prendre des mesures de prévention nécessaires pour empêcher, au maximum, la transcription de mariages dont l’objet serait d’obtenir la nationalité française sans reposer sur le consentement réel, sérieux et intègre qu’exige l’article 146 du code civil.

Ces fraudes, qui permettent la célébration de mariages simulés, que les deux conjoints soient au courant ou non, ouvrent la porte à une immigration clandestine légalisée et sont la cause de l’explosion des statistiques d’annulations de mariage.

L’obtention de la nationalité par le mariage est la première cause de l’immigration en France ; il faut la contrôler. Notre droit doit prendre les mesures de prévention nécessaires pour empêcher les nombreuses fraudes. La nationalité française s’hérite ou se mérite ; elle n’est pas une coquille vide et ne doit pas se laisser violer.

L’officier de l’état civil doit donc faire réaliser une audition commune ou des entretiens individuels avant la transcription du mariage célébré par une autorité étrangère, afin d’éviter toute tentative de fraude à la nationalité française.

Tel est le sens de cet amendement, que je vous propose, mes chers collègues, de voter.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Eustache-Brinio

Mon cher collègue, cet amendement est satisfait par le texte de la commission, qui, pour lever toute ambiguïté sur ce sujet, a procédé à la coordination de tous les articles relatifs aux mariages célébrés à l’étranger. Vous pouvez vous en assurer en consultant les alinéas 12 à 21 de l’article 17.

La commission vous demande donc de bien vouloir retirer cet amendement ; à défaut, elle émettrait un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Marlène Schiappa

Même avis, pour les mêmes motifs.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 499 est retiré.

L’amendement n° 177 rectifié, présenté par Mme V. Boyer, MM. Le Rudulier et Boré, Mme Goy-Chavent, MM. Bascher, Meurant, Charon, Longuet et Bouchet, Mme Drexler et MM. Savary, H. Leroy, Segouin et Tabarot, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 6

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

…° Au dernier alinéa de l’article 63, les mots : « 3 à 30 euros » sont remplacés par le montant : « 750 euros » ;

La parole est à M. Stéphane Le Rudulier.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Le Rudulier

Les officiers d’état civil doivent obligatoirement procéder à l’audition des futurs époux, préalablement à la publication des bans, afin de détecter le défaut d’intention matrimoniale réelle et libre des candidats au mariage.

L’objet de cet amendement est de faire passer l’amende encourue par l’officier d’état civil ne se conformant pas à cette obligation d’un montant compris, selon l’article 63 du code civil, entre 3 et 30 euros, ce qui n’est pas assez dissuasif, à 750 euros, soit le montant prévu pour les contraventions de quatrième classe.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Eustache-Brinio

Je souhaite préciser deux points.

D’une part, Mme Boyer indique, à l’appui de son amendement, qu’il existe une obligation d’audition préalable à la publication des bans ; cela n’est pas vrai, cette audition n’est absolument pas obligatoire.

Ces auditions, qui sont encadrées, sont prévues lorsque l’officier ou les services de l’état civil ont des soupçons sur un mariage. En effet, l’article 63 du code civil prévoit que l’audition commune des futurs époux est conduite « sauf en cas d’impossibilité ou s’il apparaît, au vu des pièces fournies, que cette audition n’est pas nécessaire au regard des articles 146 et 180 » du même code.

D’autre part, je ne crois pas que l’augmentation d’une amende encourue pour non-respect des prescriptions de l’article 63 changerait quoi que ce soit à ces mariages compliqués, à propos desquels il faut effectivement faire quelque chose.

Il a semblé plus pertinent à la commission d’inciter à la formation et à la sensibilisation à ce sujet des élus et des fonctionnaires chargés de l’état civil. Là, il y a un véritable enjeu. Tous les élus locaux ici présents le savent, il n’est pas si simple que cela, lorsqu’un dossier de mariage est déposé, de détecter les points qui posent problème.

La commission demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettrait un avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Le Rudulier

Je suis d’accord avec Mme la rapporteure, l’audition n’est pas une obligation. Néanmoins, l’amendement a pour objet de rendre le montant de l’amende réellement dissuasif.

Je maintiens donc mon amendement, monsieur le président.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 255 rectifié, présenté par MM. Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Gold, Guiol, Requier, Roux et Artano et Mme Pantel, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 8

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

…) Au deuxième alinéa, les mots : « dans les quinze jours de sa saisine » sont remplacés par les mots : « dans un délai de quarante-huit heures et par une décision motivée par écrit » ;

La parole est à M. Jean-Claude Requier.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Requier

L’article 17 du projet de loi clarifie les conditions dans lesquelles un officier d’état civil est amené à conduire un entretien individuel avec chaque futur époux, afin de vérifier que le mariage envisagé n’est ni forcé ni frauduleux.

Dans les cas où il existe des doutes sérieux quant à la sincérité d’un mariage, cet officier doit saisir le procureur de la République. Il est nécessaire que la décision de ce dernier intervienne dans un délai rapide, au regard de l’urgence de la situation, afin que l’on puisse s’opposer au mariage ou suspendre la célébration de celui-ci.

Il est également nécessaire que cette décision fasse l’objet d’une motivation écrite susceptible d’informer, dans les meilleurs délais, les agents de l’état civil, ainsi que les futurs époux, du sens de la procédure qui suivra.

Cet amendement vise à satisfaire ces deux objectifs, en réduisant le délai dans lequel le procureur doit fournir sa réponse aux signalements qui lui sont faits et en imposant une motivation écrite de sa décision.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Eustache-Brinio

Nous connaissons le principe et l’organisation du signalement au procureur, par les maires, de ces mariages douteux, à la suite d’entretiens.

Les procureurs réagissent en fonction du temps dont ils disposent pour faire tout ce qu’ils ont à faire et, selon nous, un délai de quarante-huit heures serait matériellement impossible à respecter pour eux.

La commission comprend le sens de votre amendement, qui vise à prévoir des délais rapides, mais elle sait qu’il sera impossible de répondre en quarante-huit heures aux signalements.

Vous avez raison, mon cher collègue, de souligner l’importance de ce sujet ; les procureurs ne peuvent ou ne veulent pas traiter ces dossiers de manière prioritaire.

Nous l’avons compris lors des auditions que nous avons organisées, c’est un véritable problème pour les maires, qui signalent leurs doutes sur des mariages leur paraissant soit forcés soit frauduleux et pour lesquels ils n’obtiennent pas de réponse dans les délais requis. Vous avez raison, ce problème est réel, mais le délai de quarante-huit heures est impossible à respecter.

La commission demande donc le retrait de cet amendement.

Debut de section - Permalien
Marlène Schiappa

Avis défavorable, monsieur le président.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à M. Arnaud de Belenet, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Arnaud de Belenet

Je ne voterai pas cet amendement, mais ses dispositions posent la question de l’application de la loi et de l’effectivité des textes que nous adoptons.

Le projet de loi instaurait un questionnaire unique pour tous les maires ; c’est très bien, mais cela soulève la question de l’adaptation de ceux qui sont interrogés lors des entretiens individuels, donc cela suppose que le questionnaire change très régulièrement.

De la même manière, il s’agit ici d’une question de mise en œuvre. Je serai plus insistant que Mme la rapporteure, qui a dit les choses en termes très mesurés : les communes, surtout les petites, qui sont plus souvent ciblées, ont un problème lorsqu’elles signalent leurs soupçons au procureur. Elles font même parfois l’objet d’une intervention orale du bureau du procureur, qui les dissuade de procéder au signalement et encore plus aux entretiens !

Il faut donc alerter le Gouvernement à ce sujet. Les dispositions législatives existent ; nul besoin de les améliorer, encore moins de raccourcir les délais – cela donnerait un prétexte supplémentaire au procureur pour ne pas intervenir et pour laisser célébrer les mariages. Simplement, il faut que la Chancellerie remobilise les procureurs, pour que les textes soient réellement appliqués.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Pierre de La Gontrie

Mon intervention sera de la même veine que celle de notre collègue de Belenet. Elle se fonde sur ce que Philippe Bas a appelé, plus tôt, des « tigres de papier ».

Ce texte prévoit toute une série de normes, d’injonctions et de contrôles. Or nous n’avons eu de cesse, depuis le début de l’examen du projet de loi, de constater que les administrations n’auront de toute façon pas la possibilité d’exercer ces contrôles – elles n’en demandent d’ailleurs pas tant !

C’est quelquefois très préjudiciable ; nous l’avons dit hier en matière fiscale et parlons aujourd’hui des mariages. Les motifs de l’opposition du Gouvernement sont intéressants : de toute évidence, les procureurs sont débordés. Mais que veut-on ?

Je crains que ce texte ne nous donne le sentiment de n’avoir pas fait œuvre utile. Ses dispositions, en grande partie, se révéleront totalement stériles, au sens où elles ne produiront aucun effet.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Eustache-Brinio

Monsieur de Belenet, le questionnaire existe déjà. De toute façon, un questionnaire ne suffirait pas à prévoir tous les échanges d’un officier d’état civil avec l’un des mariés. Un questionnaire ne peut être qu’un document qui oriente une discussion ; il est conduit à évoluer en fonction des réponses qui sont formulées.

Telle est la nuance que je tenais à apporter. Un questionnaire, par définition, donne des axes d’échange, mais il ne peut suffire à prévoir toutes les questions.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Requier

M. Jean-Claude Requier. Monsieur le président, je souhaiterais modifier l’amendement n° 255 rectifié, afin de porter le délai de quarante-huit heures à huit jours et de prévoir que les décisions motivées seront adressées par courriel – ce sera plus rapide !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

Il s’agit donc de l’amendement n° 255 rectifié bis, présenté par MM. Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Gold, Guiol, Requier, Roux et Artano et Mme Pantel, et ainsi libellé :

Après l’alinéa 8

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

…) Au deuxième alinéa, les mots : « dans les quinze jours de sa saisine » sont remplacés par les mots : « dans un délai de huit jours et par une décision motivée par courriel » ;

Quel est l’avis de la commission ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Eustache-Brinio

La proposition paraît nettement plus raisonnable. La commission émet donc un avis favorable sur cet amendement rectifié.

Debut de section - Permalien
Marlène Schiappa

Il y a un vrai doute sur le temps qui est laissé pour réaliser l’enquête. Le garde des sceaux prendra de toute façon une circulaire d’application.

Le Gouvernement maintient donc son avis défavorable sur cet amendement.

L ’ amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 175 rectifié, présenté par Mme V. Boyer, MM. Boré et Le Rudulier, Mme Goy-Chavent, MM. Bascher, Meurant, Houpert, B. Fournier, Charon, Longuet, Bouchet, Genet, Savary et H. Leroy, Mmes Bourrat et Schalck et MM. Segouin et Tabarot, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 8

Insérer trois alinéas ainsi rédigés :

…) Après le deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsqu’il apparaît que le mariage envisagé a pour finalité de tenter de commettre l’une des infractions mentionnées à l’article L. 623-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, le procureur de la République, saisi sans délai par l’officier d’état civil, est tenu dans les quinze jours de sa saisine de surseoir à la célébration du mariage et de faire procéder à une enquête sur cette tentative de commission d’infraction. » ;

…) Au troisième alinéa, les mots : « un mois renouvelable » sont remplacés par les mots : « deux mois renouvelables » ;

La parole est à M. Stéphane Le Rudulier.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Le Rudulier

Toujours dans le souci d’empêcher qu’un mariage puisse être contracté aux fins d’obtenir ou de faire obtenir un titre de séjour ou la nationalité française, il convient d’obliger le ministère public, saisi par le maire, à surseoir automatiquement à la célébration d’une union en cas de suspicion de mariage de complaisance.

Actuellement, le délai de sursis est d’un mois renouvelable.

Nous proposons de porter ce délai à deux mois renouvelables, afin de prendre en considération les recommandations de la commission des lois et de laisser au procureur de la République davantage de temps pour diligenter une enquête, afin d’établir la tentative de commission des infractions décrites à l’article L. 632-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, le Ceseda, et, le cas échéant, d’engager des poursuites.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 176 rectifié, présenté par Mme V. Boyer, MM. Le Rudulier et Boré, Mme Goy-Chavent, MM. Bascher, de Legge, Meurant, Houpert, B. Fournier, Charon, Longuet et Bouchet, Mme Drexler, MM. Genet et Savary, Mme Boulay-Espéronnier, M. H. Leroy, Mmes Bourrat et Schalck, MM. Segouin et Tabarot et Mme Berthet, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 8

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

…) Au troisième alinéa, les mots : « un mois renouvelable » sont remplacés par les mots : « deux mois renouvelables » ;

La parole est à M. Stéphane Le Rudulier.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Le Rudulier

Il s’agit d’un amendement de repli.

Actuellement, le procureur de la République est tenu, dans un délai de quinze jours à compter de sa saisine, soit de laisser procéder au mariage, soit de faire opposition à celui-ci, soit de décider qu’il sera sursis à sa célébration dans l’attente des résultats de l’enquête à laquelle il fait procéder. Il fait connaître sa décision motivée à l’officier d’état civil et aux intéressés.

La durée du sursis décidé par le procureur de la République ne peut excéder un mois, renouvelable une fois par décision spécialement motivée. Nous suggérons de porter ce délai à deux mois renouvelables, afin de prendre en considération les recommandations de la commission des lois et de laisser au procureur de la République davantage de temps pour diligenter une enquête.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Eustache-Brinio

Les dispositions de l’amendement n° 175 rectifié posent problème, car le procureur, lorsqu’il sursoit à la célébration d’une union, doit disposer d’éléments.

Conformément à votre proposition, le procureur devrait prononcer automatiquement un sursis dès lors qu’un signalement est effectué. Mais sur la base de quels éléments peut-il alors prononcer un tel sursis ? Le maire peut certes avoir des doutes et les signaler au procureur, mais ce dernier doit disposer d’éléments pour diligenter une enquête.

Nous sommes donc défavorables à cet amendement.

Quant à l’amendement n° 176 rectifié, la commission s’en remet à l’avis du Gouvernement.

Debut de section - Permalien
Marlène Schiappa

L’article 175-2 du code civil a déjà vocation à s’appliquer aux mariages frauduleux, dans la mesure où il renvoie à l’article 146 du même code, relatif à l’absence d’intention matrimoniale, sur lequel se fonde habituellement la jurisprudence pour sanctionner les mariages blancs ou gris.

La rédaction ici proposée laisse entendre que la preuve de la commission d’une infraction paraît établie, lorsque le procureur de la République est saisi par l’officier d’état civil.

Or toutes les auditions que nous avons menées, notamment avec l’Association des maires de France, nous montrent à quel point il est difficile d’établir l’infraction – un présupposé ne correspond pas toujours à la réalité !

Le procureur de la République est saisi sur le fondement d’indices qui laissent penser que le mariage serait conclu à des fins étrangères à la création d’une union matrimoniale. Il lui appartient ensuite de déterminer si ces indices sont suffisamment sérieux pour surseoir à la célébration d’un mariage.

Enfin, le pouvoir d’appréciation du procureur de la République est une condition de la constitutionnalité du dispositif de contrôle préalable de la validité des mariages. Il nous semble impossible de le supprimer.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur ces deux amendements.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Le Rudulier

Oui, je les maintiens, monsieur le président. Néanmoins, je rejoins l’avis de Mme la rapporteure et préférerais que le second amendement soit adopté.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote sur l’amendement n° 176 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Goulet

La modification du délai n’est pas une mauvaise idée.

En effet, il existe un réel problème de nomadisme en la matière. Si un couple s’aperçoit que telle mairie est suspicieuse des fins pour lesquelles la célébration d’un mariage est demandée et saisit le procureur pour qu’il prononce un sursis, il risque de se rendre dans une autre commune, voire dans une autre région.

Comment éviter ce nomadisme, madame la ministre ? Il n’est pas possible de tenir un registre des couples dont les mairies ont refusé de célébrer l’union. Nous avons déjà évoqué ce problème en commission ; il devrait y être remédié plus tard, m’a-t-on dit. En tout cas, il y a là un vrai sujet.

Par ailleurs, compte tenu de toutes les dispositions que nous votons, je me demande comment les procureurs, qui sont déjà submergés de travail, vont s’en sortir…

Je voterai donc en faveur de cet amendement.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 663, présenté par Mmes Eustache-Brinio et Vérien, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :

Alinéa 10, première phrase

1° Remplacer les mots :

par l’officier de l’état civil avant toute

par les mots :

avant une

2° Après le mot :

ou

insérer le mot :

une

La parole est à Mme la rapporteure.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Eustache-Brinio

Pour répondre à Mme Goulet, lors de nos travaux en commission, nous avons ajouté à l’article 17 un alinéa 10, qui prévoit la mise en place d’une base de données spécifique dédiée au traitement informatisé des décisions d’opposition et de sursis, afin de remédier en partie aux problèmes de nomadisme.

Cet amendement vise à donner plus de souplesse au ministère de la justice pour organiser la consultation de cette base de données. Cette consultation pourrait être faite directement par l’officier d’état civil, ou indirectement par l’intermédiaire du procureur de la République.

L’objectif est que l’officier d’état civil, avant de célébrer un mariage ou de transcrire un mariage célébré à l’étranger, puisse prendre connaissance d’une éventuelle décision d’opposition ou de sursis déjà prononcée.

Afin que les choses soient déterminées d’un point de vue réglementaire, le décret d’application déterminerait les catégories de personnes pouvant accéder à la base de données ou être destinataires des informations qu’elle contient. Cela donnerait des clés aux officiers d’état civil et aux procureurs pour contenir le nomadisme des dossiers.

Tel est l’objet de cet amendement.

Debut de section - Permalien
Marlène Schiappa

Madame, la rapporteure, vos échanges ont été nombreux avec le ministre de l’intérieur ; vous connaissez la position du Gouvernement sur la création de cette base de données, qui recenserait, au niveau national, l’ensemble des décisions d’opposition et de sursis à la célébration d’un mariage ou à sa transcription sur les registres de l’état civil.

Nous y sommes défavorables, car, en pratique, il paraît complexe et coûteux de la mettre en place, compte tenu du nombre de communes concernées.

Il faudrait, au préalable, dématérialiser et interconnecter la totalité des registres de l’état civil des communes portant sur les mariages. Le coût suscité par cette opération serait lourd à porter, en particulier pour les plus petites communes, qui devraient réaliser des investissements très importants.

Nous invitons le Sénat à prendre en considération les difficultés que les communes rencontreraient pour supporter les contraintes qu’impliquerait une telle réforme.

Nous relevons que cet amendement vise à apporter une certaine souplesse au dispositif de consultation, en ce que celle-ci pourrait également être effectuée par les procureurs de la République. Toutefois, dans les faits, ces dispositions ne pourraient pas être appliquées avant plusieurs années au moins, faute pour les procureurs de la République de disposer eux-mêmes d’une base nationale des sursis et des oppositions à mariage.

Cette base de données pourrait être créée dans le cadre de la refonte des applications civiles des juridictions, par exemple, à laquelle le garde des sceaux travaille actuellement.

Aussi, le Gouvernement sollicite le retrait de cet amendement, faute de quoi il émettrait un avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Eustache-Brinio

Cette mesure n’aurait aucune incidence ni ne susciterait aucun coût pour les collectivités locales, puisque la base de données serait centralisée au niveau des procureurs. Les collectivités sont plutôt en demande de ces informations.

L’alinéa que nous avons ajouté précise bien le contexte dans lequel les informations sont traitées. La création de la base de données ne surcharge en rien les collectivités locales, en termes tant de moyens humains que de ressources financières.

L ’ amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 315, présenté par Mme Benbassa, MM. Benarroche et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme Taillé-Polian, est ainsi libellé :

Compléter cet article par deux alinéas ainsi rédigés :

…° L’article 180 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les qualités essentielles mentionnées à l’alinéa précédent ne peuvent concerner la virginité des époux. »

La parole est à Mme Esther Benbassa.

Debut de section - PermalienPhoto de Esther Benbassa

Si ce projet de loi entend réellement réaffirmer les principes de la République, au premier rang desquels le principe de laïcité, il ne saurait être uniquement le symbole de la stigmatisation gratuite d’une certaine partie de la population française, notamment des musulmans. Au contraire, il devrait être vecteur de progrès sociétaux, en l’occurrence en matière de droit des femmes.

Souvenons-nous de quelques errements de la jurisprudence, à l’image d’un arrêt rendu par le tribunal de grande instance de Lille en 2008, qui a prononcé la nullité d’un mariage au motif de la non-virginité de la future épouse. Vous conviendrez qu’il s’agit là d’une vision passéiste et surtout religieuse du mariage, qui, pourtant, constitue une institution républicaine.

Il reste bien des progrès à accomplir en matière de droits des femmes et de liberté des individus à disposer de leur corps et à vivre librement leur sexualité.

Pour tenter d’abréger ce long chemin, le présent à amendement vise à exclure la virginité des époux du champ des qualités essentielles pouvant justifier une annulation du mariage au sens de l’article 180 du code civil.

Cette précision n’est aucunement superfétatoire, comme le montre l’arrêt du tribunal de grande instance de Lille. Il nous apparaît utile de réaffirmer un principe tel que la libre disposition de soi, qui est tout aussi fondamental que la laïcité.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Eustache-Brinio

Cet amendement vise à inscrire expressément dans le code civil que l’erreur sur la virginité n’est pas une erreur sur une qualité essentielle.

L’erreur sur la virginité a certes reçu l’accueil favorable du tribunal de grande instance de Lille, le 1er avril 2008, mais la cour d’appel de Douai a infirmé ce jugement la même année.

Cette précision nous semble donc inutile. Je ne pense pas, madame Benbassa, que vous vouliez conférer une valeur à la virginité dans le code civil, en l’y inscrivant en des termes exprès ! Ce serait assez curieux au XXIe siècle…

La commission émet donc évidemment un avis défavorable sur cet amendement.

Debut de section - Permalien
Marlène Schiappa

Pour les mêmes raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 168 rectifié, présenté par Mme V. Boyer, MM. Le Rudulier et Boré, Mme Goy-Chavent, MM. Bascher, de Legge, Meurant, Houpert, Charon, Longuet et Bouchet, Mme Drexler, MM. Genet, Savary et H. Leroy, Mme de Cidrac, MM. Segouin et Tabarot et Mme Berthet, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

…. – Après l’article 143 du code civil, il est inséré un article 143-… ainsi rédigé :

« Art. 143 -…. – Le mariage ne peut être contracté si l’un des futurs époux séjourne irrégulièrement sur le territoire français. »

La parole est à M. Stéphane Le Rudulier.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Le Rudulier

Le nombre d’étrangers en situation irrégulière ne cesse de croître en France, notamment en raison du maintien de la quasi-totalité des demandeurs d’asile déboutés sur le territoire. Il y aurait ainsi, selon les experts, entre 600 000 et 900 000 clandestins.

Un étranger peut obtenir la nationalité française après quatre années de mariage avec un citoyen français, même lorsqu’il était en situation irrégulière au jour de la célébration du mariage.

Il ne s’agit pas, au travers de cet amendement, de considérer que tous les mariages avec des étrangers sont frauduleux, mais notre droit est, de toute évidence, un peu trop complaisant. La législation en vigueur est une brèche, tant dans la lutte contre les mariages blancs ou gris que dans la lutte contre l’immigration illégale. Il est donc essentiel d’y remédier.

Le droit fondamental au mariage et reconnu par l’article 12 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

Pour autant, il existe déjà des conditions au mariage : des conditions de fond – âge minimum, autorisation à mariage, consentement des époux – et des conditions de forme, comme l’accomplissement de formalités préalables, l’opposition au mariage et la mention du lieu et de la date de la célébration de l’union dans l’acte de mariage.

Plusieurs causes d’empêchement sont également prévues par la loi. Je vous propose seulement d’ajouter comme condition la régularité de séjour, mes chers collègues. En tout cas, nous devrions empêcher l’accès à la nationalité française par le mariage ou la limiter davantage.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Eustache-Brinio

Nous avons souvent eu ce débat, notamment au sein de notre groupe.

L’objectif visé par cet amendement est certes compréhensible : de nombreux maires se trouvent confrontés à des mariages liés à des demandes de titre de séjour. Au-delà de tous les problèmes que cela pose, une fois ces mariages célébrés, la plupart des jeunes femmes concernées, qui souvent ont été soumises à de fortes pressions, se retrouvent seules quelques années plus tard.

Il est toujours possible de présenter des amendements visant à soulever ce problème, mon cher collègue, et de tenter de faire évoluer la loi. Toutefois, en l’état actuel et malgré toutes les volontés, cet amendement n’est tout simplement pas applicable.

Bien que nous partagions beaucoup de choses sur sujet, je n’ai d’autre choix que de vous demander de retirer cet amendement, mon cher collègue, faute de quoi l’avis de la commission serait défavorable.

Debut de section - Permalien
Marlène Schiappa

Le Gouvernement émet un avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à M. Jérôme Bascher, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Bascher

Je n’ai pas bien saisi votre argument, madame la rapporteure. En quoi notre proposition n’est-elle pas applicable ?

S’il s’agit de dire qu’il y a un droit supérieur, en vertu duquel la mesure ne peut être envisagée, autant l’affirmer clairement.

En pratique, notre proposition paraît tout à fait applicable ; mieux encore, elle est souhaitable, sauf à ce que la jurisprudence en ait décidé autrement, mais les choses ne sont pas très claires de ce point de vue.

Exercer le droit de se marier sans disposer d’un titre de séjour régulier sur le territoire national, c’est faire fi des lois de la République française !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Eustache-Brinio

Une fois encore, nous pouvons partager l’objectif visé par votre amendement, mais, aujourd’hui, tout un argumentaire juridique s’oppose à ce que nous l’adoptions. Bien des choses devraient être modifiées pour satisfaire votre proposition.

Cela fait quinze ans que des élus de tous bords soulèvent ce problème. S’ils ne sont pas parvenus à faire adopter les mesures qu’ils suggèrent, c’est parce qu’il n’existe pas d’outils adaptés.

La commission des lois est extrêmement attentive à ce qu’il est possible de faire, ou non, sous l’empire du droit. Si nous disposions ne serait-ce que d’un étroit chemin pour satisfaire cet amendement, nous l’aurions emprunté très clairement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Bascher

Ce que je propose n’est pas anticonstitutionnel !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Eustache-Brinio

On peut toujours définir certains objectifs et avoir des postures intellectuelles à ce sujet, mais votre proposition n’est pas recevable.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Eustache-Brinio

Si, la Constitution et la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme s’y opposent ! Plusieurs condamnations ont été prononcées à ce sujet, en vertu de bases juridiques clairement établies.

Résignez-vous, mon cher collègue, à entendre que ce n’est pas possible.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à M. Arnaud de Belenet, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Arnaud de Belenet

Je décèle un biais dans le raisonnement des auteurs de l’amendement, qui soutiennent que le droit absolu au mariage est déjà conditionné. Toutefois, les conditions déjà existantes et celle qui est ici proposée ne sont pas du tout de même nature.

Pour consentir à se marier, il faut être majeur ; mais cette condition d’âge ne met pas en cause fondamentalement le droit de se marier. La condition de résidence, qui a été considérablement assouplie, relève d’une question d’organisation ; elle n’empêche en rien le mariage sur le territoire national. L’absence de lien de parenté vise les cas de consanguinité ; c’est une question évidente, sur laquelle il n’est pas utile de s’étendre.

La condition du séjour légal sur le territoire, quant à elle, est d’une tout autre nature ; elle constituerait une entrave au droit de se marier. Les conditions déjà existantes et celle que nos collègues veulent introduire dans la loi ne sont pas de même nature juridique et n’ont pas du tout la même portée.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à M. le président de la commission des lois.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

Nous avons eu ce débat sur tous les textes migratoires dont la Haute Assemblée a eu à connaître.

Chaque fois, nous avons formulé la même réponse ; le Conseil constitutionnel s’est prononcé très clairement, en indiquant que le caractère irrégulier du séjour ne permettait pas de s’opposer au mariage, car ce dernier constitue une liberté fondamentale. La Cour européenne des droits de l’homme l’a confirmé, au titre, me semble-t-il, de son article 13. Cette jurisprudence s’impose à nous.

En revanche, chaque fois qu’il existe une suspicion ou une difficulté dans ce type de situation, le maire saisit le procureur de la République, lequel peut surseoir à célébrer le mariage. Mais on ne peut en aucun cas empêcher que le mariage soit célébré.

Debut de section - Permalien
Marlène Schiappa

La liberté matrimoniale a valeur constitutionnelle. Nous devons nous en remettre à la diligence des préfets et des procureurs de la République.

Manifestement, le risque d’inconstitutionnalité de cet amendement est avéré.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à M. Stéphane Le Rudulier, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Le Rudulier

Que je sache, aucun droit fondamental n’est absolu ; la règle qui prévaut est celle de la conciliation des droits fondamentaux entre eux.

Qu’un individu qui ne possède pas de lieu de résidence officielle sur le territoire français puisse se marier me choque quelque peu, surtout si c’est sujet à caution pour une régularisation.

Adopter cet amendement, ce serait aussi saisir officiellement le Conseil constitutionnel pour qu’il se positionne de manière très claire, au-delà de la jurisprudence, sur les cas d’espèce qu’il a pu rencontrer.

Pour ces raisons, je maintiens cet amendement.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 166 rectifié, présenté par Mme V. Boyer, MM. Le Rudulier et Boré, Mme Goy-Chavent, MM. Bascher, Meurant, B. Fournier, Charon, Longuet et Bouchet, Mme Drexler, MM. Genet et Savary, Mme Boulay-Espéronnier, M. H. Leroy, Mme Bourrat et MM. Segouin, Tabarot et Husson, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

…. – Après la première phrase du troisième alinéa de l’article L. 2123-12 du code général des collectivités territoriales, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Il prévoit une formation à la détection des mariages envisagés dans un but autre que l’union matrimoniale pour ceux de ses membres qui remplissent les fonctions d’officier de l’état civil. »

La parole est à M. Stéphane Le Rudulier.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Le Rudulier

Selon l’article L. 2122-32 du code général des collectivités territoriales, le maire et ses adjoints sont les seuls officiers d’état civil.

Toutefois, l’article R. 2122-10 du même code laisse la possibilité au maire de déléguer à un ou plusieurs fonctionnaires titulaires de la commune certaines fonctions qu’il exerce en tant qu’officier d’état civil. Aux termes de l’article L. 2123-12 du code général des collectivités territoriales, les membres d’un conseil municipal ont droit à une formation adaptée à leurs fonctions.

Cet amendement vise à renforcer ce droit, en proposant aux officiers d’état civil des formations relatives à la détection des mariages frauduleux.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Eustache-Brinio

Cet amendement paraît satisfait. En effet, d’après le code général des collectivités territoriales, les membres d’un conseil municipal ont droit à une formation adaptée à leurs fonctions, notamment s’agissant de celles qui sont exercées au nom de l’État, et y compris au titre de l’état civil.

La commission sollicite donc le retrait de cet amendement, faute de quoi elle émettrait un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Marlène Schiappa

Une fois ce projet de loi voté, le garde des sceaux prendra une circulaire pour mettre en œuvre ces interdictions.

De mon côté, j’ai demandé à la Fédération nationale GAMS, le Groupe pour l’abolition des mutilations sexuelles, des mariages forcés et autres pratiques traditionnelles néfastes à la santé des femmes et des enfants, de travailler à la réalisation d’un guide destiné aux élus. L’Association des maires de France a en effet demandé que les autorités locales soient davantage outillées, afin qu’elles puissent mieux comprendre et repérer ces phénomènes.

Nous sommes en train de travailler à ce guide, qui est quasiment finalisé. Si ce projet de loi est adopté, nous le diffuserons à l’ensemble des élus, dès que la loi sera promulguée, afin d’appuyer la circulaire du garde des sceaux.

Le Gouvernement demande donc le retrait de cet amendement, faute de quoi il émettrait un avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Le Rudulier

Non, compte tenu de ces arguments, je le retire, monsieur le président.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 166 rectifié est retiré.

L’amendement n° 167 rectifié, présenté par Mme V. Boyer, MM. Le Rudulier et Boré, Mme Goy-Chavent, MM. Bascher, Meurant, Charon, Longuet et Bouchet, Mme Drexler, MM. Genet et Savary, Mme Boulay-Espéronnier et MM. H. Leroy, Segouin et Tabarot, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

…. – Le code général des collectivités est ainsi modifié :

1° L’article L. 2122-32 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Le maire désigne parmi ses adjoints officiers d’état civil un ou plusieurs référents en matière de détection des mariages envisagés dans un but autre que l’union matrimoniale chargé de les conseiller, en particulier dans la conduite des auditions prévues au 2° de l’article 63 du code civil. » ;

2° Le deuxième alinéa de l’article L. 2511-26 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Le maire d’arrondissement désigne parmi ses adjoints officiers d’état civil un référent en matière de détection des mariages envisagés dans un but autre que l’union matrimoniale chargé de les conseiller, en particulier dans la conduite des auditions prévues au 2° de l’article 63 du code civil. »

La parole est à M. Stéphane Le Rudulier.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Le Rudulier

Dans chaque commune et dans chaque arrondissement ou secteur, le maire doit pouvoir désigner un ou plusieurs élus officiers d’état civil référents en matière de mariages frauduleux.

Ces référents seraient chargés de conseiller les autres officiers d’état civil dans la conduite des auditions obligatoires et dans la détection des mariages envisagés dans un but autre que l’union matrimoniale.

Cela permettrait d’accroître l’expertise requise en cas de doute, notamment lors de la conduite des auditions des futurs mariés, sans toutefois augmenter les dépenses de la collectivité.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Eustache-Brinio

Tout d’abord, je pense que chaque maire est libre de déléguer un certain nombre de compétences à ses adjoints ou à ses conseillers municipaux. Obliger le maire à désigner un référent en matière de détection de mariages frauduleux conduirait à rigidifier la loi. En outre, entre nous, je ne suis pas sûre qu’il soit efficace d’avoir un spécialiste du sujet.

Il appartient peut-être au maire d’attirer l’attention des élus sur ce sujet, mais nous ne pouvons pas nous immiscer ainsi dans la gestion au quotidien des collectivités locales. Il me semble qu’il faut laisser les maires et les élus s’organiser en fonction de leur territoire, ces problèmes ne se posant pas partout.

La commission demande donc le retrait de cet amendement, faute de quoi elle émettrait un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Marlène Schiappa

Même avis, monsieur le président.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 167 rectifié est retiré.

Je mets aux voix l’article 17, modifié.

L ’ article 17 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L’amendement n° 484 rectifié bis, présenté par Mmes Monier, Meunier et de La Gontrie, M. Assouline, Mme S. Robert, MM. Sueur et Marie, Mme Lepage, MM. Féraud et Leconte, Mme Harribey, MM. Lozach, Kerrouche, Kanner, Bourgi, Durain, Redon-Sarrazy, Antiste et J. Bigot, Mmes Bonnefoy, Briquet, Conconne et Conway-Mouret, M. P. Joly, Mme Jasmin, MM. Gillé, Raynal, Mérillou, Lurel, Temal, Tissot, Jacquin, Montaugé et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 17

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le troisième alinéa de l’article L. 2121-7 du code général des collectivités territoriales est complété par une phrase ainsi rédigée : « Il est désigné au sein du conseil municipal un correspondant pour les questions relatives à l’égalité femmes-hommes. »

La parole est à Mme Marie-Pierre Monier.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Pierre Monier

Cet amendement vise à instaurer un correspondant pour les questions relatives à l’égalité femmes-hommes au sein de chaque conseil municipal.

Nous avons eu l’occasion de l’affirmer à plusieurs reprises au cours de nos débats sur ce texte : oui, l’égalité entre les femmes et les hommes est un principe républicain. Il est essentiel de le faire vivre dans l’ensemble de nos territoires et de le décliner au premier échelon démocratique, celui des 35 000 communes.

C’est pourquoi nous appelons de nos vœux la création de ces conseillers municipaux dédiés, qui constitueront des interlocuteurs privilégiés sur l’ensemble des questions relatives à l’égalité entre les femmes et les hommes, à la lutte contre les violences sexistes et sexuelles, au sein de chaque commune.

Si les mariages forcés ont constitué le point de départ de notre réflexion, les officiers d’état civil ayant fait état d’un manque de formation et de sensibilisation rendant plus difficile la détection de ces mariages, il nous est très vite apparu évident qu’il fallait étendre les compétences des élus à l’ensemble des sujets relatifs à l’égalité entre les femmes et les hommes.

En effet, les élus se trouvent souvent démunis lorsqu’ils sont sollicités sur ces questions, notamment sur les violences sexistes et sexuelles, ainsi que sur les violences intrafamiliales. C’est particulièrement le cas en milieu rural.

Dans ces territoires où sont commis la moitié des féminicides – 50 % des féminicides ont lieu en milieu rural ! –, les élus constituent parfois le premier maillon de la chaîne de prise en charge, faute d’autres structures vers lesquelles se tourner. Ils pourraient dans ce contexte trouver l’appui nécessaire auprès d’un tel correspondant, désigné à l’échelon de la collectivité.

Soutenus dans leur action par le réseau des directions régionales et les délégués départementaux aux droits des femmes et à l’égalité, ces correspondants contribueraient à faire de l’égalité entre les femmes et les hommes une réalité dans l’ensemble de nos territoires en centralisant et en relayant activement l’ensemble des informations liées à ces thématiques, ainsi que les initiatives locales auprès du conseil municipal et des habitants de leur commune.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Eustache-Brinio

Mon argumentaire sera le même que pour l’amendement précédent. Ce projet de loi n’a pas pour objet d’indiquer aux maires quelles délégations ils doivent donner à leurs adjoints ou conseillers municipaux…

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Eustache-Brinio

Ma chère collègue, l’amendement précédent visait à instaurer un référent « mariages frauduleux », le vôtre tend à instituer un correspondant à l’égalité hommes-femmes, sujet essentiel, mais tout cela est déjà possible : les maires qui souhaitent créer de telles délégations le peuvent.

Adopter cet amendement, ce serait porter atteinte au principe de libre administration des collectivités locales. Il appartient au maire de décider des délégations qu’il donne à ses élus et de l’image qu’il souhaite offrir. Cela lui appartient. On ne peut pas rigidifier les choses à ce point.

Je demande donc le retrait de cet amendement. À défaut, mon avis serait défavorable.

Debut de section - Permalien
Marlène Schiappa

En vertu du principe de libre administration des collectivités territoriales, il est important de laisser les maires décider librement de l’intitulé des délégations qu’ils souhaitent proposer.

Sur le fond, je pense que le principe de libre administration des collectivités est important et que la responsabilité de l’élu peut varier en fonction de la taille des communes et de son niveau d’avancement sur ces questions.

Néanmoins, comme je ne veux pas donner l’impression d’être opposée à l’existence de conseillers municipaux ou d’adjoints au maire dédiés à l’égalité entre les femmes et les hommes, je m’en remettrai à la sagesse du Sénat, par principe.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

La parole est à Mme Marie-Pierre Monier, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Pierre Monier

Je tiens à préciser que cet amendement ne vise pas du tout à prévoir une délégation !

Je propose, sur le modèle du référent défense désigné au sein du conseil municipal, qui n’a pas de délégation, la création d’un correspondant. Cela permettrait à chaque commune de se saisir des sujets relatifs à l’égalité entre les femmes et les hommes.

Il faudrait également prévoir une formation ou l’intervention d’associations. Ce serait une manière de clamer haut et fort que l’égalité entre les femmes et les hommes est l’un des principes de notre République.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures quarante.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à treize heures dix, est reprise à quatorze heures quarante, sous la présidence de Mme Laurence Rossignol.