Séance en hémicycle du 23 mars 2006 à 9h30

Résumé de la séance

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La séance

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La séance est ouverte à neuf heures trente-cinq.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n'y a pas d'observation ?...

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'ordre du jour appelle la discussion en troisième lecture du projet de loi, modifié par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, relatif aux offres publiques d'acquisition (nos 262, 268).

Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.

Debut de section - Permalien
Thierry Breton, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, nous sommes réunis ce matin pour la dernière lecture d'un projet de loi dont l'actualité de ces dernières semaines est venue illustrer l'importance.

Les règles que nous avons élaborées ensemble contribuent à l'équilibre de la vie économique de notre pays sur au moins deux terrains. D'abord, elles sont le moyen de promouvoir à la fois l'intérêt des actionnaires, et j'y suis très sensible - ce droit est du reste destiné à les protéger -, et les intérêts industriels et sociaux des entreprises concernées, point également très important pour le Gouvernement. Ensuite, elles sont l'un des outils qui permettent à nos entreprises de voir clair sur leur actionnariat à long terme. J'ai souvent eu l'occasion de m'exprimer sur ce sujet. J'estime qu'il est important de donner à nos entreprises la possibilité d'avoir des actionnaires qui les accompagnent sur le long terme, qui soient associés à leur projet et qui le soutiennent, à condition, bien sûr, qu'ils l'estiment créateur de valeur.

Le débat de ce matin marque une étape dans la politique que nous menons en faveur de la stabilisation de l'actionnariat des groupes français. Mon objectif est de mettre tous les atouts du côté du dynamisme de nos entreprises et de permettre à celles-ci de développer une base actionnariale à la fois large et stable. C'est là, me semble-t-il, le meilleur moyen de s'assurer qu'elles investissent et croissent, et que leurs centres de décision restent indépendants et, évidemment, demeurent implantés sur le territoire national.

Dans cet esprit, le Premier ministre m'a demandé d'examiner avec la Caisse des dépôts et consignations comment augmenter les placements en actions de cette institution. Elle doit veiller aux intérêts de long terme dont elle a la charge : je pense ici à sa mission de financement du logement social et à son rôle de garant de la liquidité de l'épargne réglementée. Cependant, compte tenu de l'horizon de long terme de ses placements, il nous semble également possible qu'elle aille plus loin qu'aujourd'hui dans les placements en actions.

De même, nous sommes déterminés à prendre des mesures en faveur de la participation et de l'actionnariat salarié. Je me suis souvent exprimé devant vous, mesdames, messieurs les sénateurs : la participation est une idée que le Gouvernement estime éminemment moderne et parfaitement adaptée à une économie plongée dans la mondialisation. Plus spécifiquement, la participation et l'actionnariat salarié présentent un triple mérite : ils orientent vers le patrimoine des Français les bénéfices de la « mondialisation » ; ils impliquent encore davantage les salariés dans la vie de l'entreprise, ce qui oeuvre en faveur du dynamisme de nos industries ; ils renforcent le capital des entreprises françaises et son ancrage.

Nous partons d'une tradition bien établie en la matière, puisqu'elle fut lancée sous l'impulsion du général de Gaulle. Notre capacité de progrès est néanmoins réelle. En effet, seuls 1, 2 % des Français déclarent détenir des actions de leur entreprise, et pas plus de 8 sociétés du CAC 40 comptent plus de 5 % d'actionnaires salariés dans leur capital : c'est bien, certes, mais cela ne me semble pas assez.

Comme le Premier ministre l'a indiqué la semaine passée lors de la séance du Conseil supérieur de la participation, Gérard Larcher et moi-même avons préparé un projet de loi de relance de l'actionnariat salarié et de la participation. Ce texte va faire l'objet d'un examen par le Conseil supérieur de la participation avant d'être soumis à la concertation. Il sera ensuite adressé au Conseil d'État avant d'être présenté au Parlement. C'est là, je crois, une politique efficace et équitable en faveur du développement de l'actionnariat dans notre pays.

Le projet de loi dont la discussion nous réunit aujourd'hui, qui vise à la transposition de la directive « OPA », s'inscrit dans cette même perspective.

La deuxième lecture nous avait permis de donner au texte son impulsion finale. Je rappelle que vous aviez retenu le principe d'une transposition ouverte de la directive, suivant en cela les propositions du rapport Lepetit. Nous avons beaucoup travaillé en collaboration avec la commission des finances et, en particulier, avec son rapporteur, que je remercie.

Nous avions ainsi permis aux entreprises françaises de jouer « à armes égales » et de ne pas être pénalisées par nos règles de droit pour leur développement à l'étranger. Nous leur avions aussi offert la possibilité de bénéficier de la clause de réciprocité, qui autorise à choisir les options les plus attractives pour les actionnaires tout en retenant un principe de défense dans le cas où l'attaquant est lui-même protégé.

Enfin, nous avions traité de la « substance de la réciprocité », qui nous a beaucoup occupés, et nous avions choisi de permettre aux entreprises faisant l'objet d'une offre hostile d'émettre des bons de souscription d'actions spécifiques pour se défendre.

Très concrètement, il s'agit de prévoir que les assemblées générales puissent autoriser l'émission, en période d'offre, de bons de souscription d'actions, ces « BSA » donnant aux actionnaires le droit d'acquérir des actions nouvelles à un prix préférentiel.

La question s'est posée au cours du débat au Sénat, puis à l'Assemblée nationale, de savoir si ces bons devraient être adoptés par l'assemblée générale extraordinaire ou par l'assemblée générale ordinaire, et à quelle majorité.

Comme je vous l'avais indiqué, mon objectif est de rendre le dispositif efficace et crédible, donc de faire en sorte qu'il puisse être adopté par les entreprises selon des modalités assez simples. Dans ce cadre, il m'a semblé nécessaire que les conditions de quorum et de majorité soient celles de l'assemblée générale ordinaire, tout en respectant le bon ordre juridique. Pour cette dernière raison, je m'en étais remis à la sagesse du Sénat sur l'amendement que vous aviez proposé, monsieur le rapporteur - en indiquant au demeurant que je considérais que votre initiative allait dans le bon sens -, et que la Haute Assemblée avait adopté.

L'Assemblée nationale a perfectionné le texte et a retenu un dispositif, que je crois équilibré, précisant les intentions qui ont guidé le vote du Sénat sans les dénaturer.

C'est donc une assemblée générale extraordinaire qui sera convoquée pour décider ou déléguer des BSA : nous sommes bien là, et c'était important, dans le droit commun des augmentations de capital, ce qui permet de respecter la cohérence du droit. Néanmoins, et pour aller dans le sens du Sénat, la décision de décider ou déléguer des BSA sera prise aux conditions de quorum et de majorité de l'assemblée générale ordinaire, c'est-à-dire à la majorité simple. L'ensemble me paraît constituer un bon compromis entre la cohérence du droit et les intentions qu'avait exprimées le Sénat.

Je souhaite, mesdames, messieurs les sénateurs, que vous puissiez aujourd'hui valider ce dispositif, ainsi que les autres ajustements, d'ordre essentiellement juridique, qu'a adoptés l'Assemblée nationale en deuxième lecture.

Vous le constatez, j'ai choisi de mettre tous les atouts du côté du dynamisme de nos entreprises et de permettre à celles-ci de développer une base actionnariale large et stable qui soit en mesure de servir leurs projets, que nous voulons ambitieux pour elles et pour la France.

Avec ce projet de loi, qui est d'une très grande technicité, nous sommes parvenus à trouver des voies de progrès réelles, concrètes et, surtout, opérationnelles.

Applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous abordons aujourd'hui la troisième lecture de ce projet de loi. Je ne dirai pas que tout a été dit sur le texte, mais son examen a déjà été très approfondi.

Cette nouvelle lecture est d'abord l'occasion, monsieur le ministre, de rappeler plusieurs aspects importants de la situation actuelle de nos marchés.

Nous sommes dans une période où bien des épisodes nous rappellent la fragilité du contrôle d'entreprises, de groupes industriels ou de groupes de services. Certes, nous vivons dans un monde ouvert, qui peut être créateur de richesses, pour autant que l'on sache garder et développer dans notre pays des centres de décision économique en nombre significatif.

Un pays comme le nôtre peut faire face aux impératifs, aux règles de la division internationale du travail, à condition de disposer de la capacité d'anticipation - en d'autres termes de la matière grise - et des centres de décision économique qui permettent, dans le monde d'aujourd'hui, d'être non pas spectateurs, mais acteurs. C'est bien, monsieur le ministre, ce que demandent nos concitoyens à leurs élus qui exercent du mieux qu'ils le peuvent des mandats de représentation.

C'est donc sous ce signe de l'attractivité que nous devons examiner ce texte, qui est utile et nécessaire pour assurer un fonctionnement plus clair, plus transparent, mieux régulé du marché financier européen, dans un contexte souvent très tendu, très concurrentiel, s'agissant du contrôle d'un nombre significatif d'entreprises et de grandes entreprises.

Monsieur le ministre, dans cette situation, il ne doit pas, il ne peut pas y avoir d'opposition entre champions nationaux et champions européens.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Plus nos champions nationaux seront forts, plus ils seront européens. Plus ils seront aptes à se regrouper d'abord sur leur marché de base, plus ils pourront s'ouvrir à l'extérieur et devenir dans le monde d'aujourd'hui de réels champions européens.

En d'autres termes, il ne faut pas mettre la charrue avant les boeufs ; il faut regrouper les forces pour être plus efficaces et plus puissants dans la compétition mondiale.

De ce point de vue, monsieur le ministre, j'ai entendu avec plaisir vos propos sur l'évolution du rôle de la Caisse des dépôts et consignations.

Je suis en plein accord avec l'orientation que vous avez tracée. Il est nécessaire que la Caisse réévalue la stratégie d'allocation de ses fonds propres, de même que de ceux dont elle a la charge pour le compte de tiers. Ils doivent être gérés, me semble-t-il, à l'aune de deux instruments de mesure.

Tout d'abord, la Caisse des dépôts et consignations est un investisseur avisé. Elle n'est pas là pour perturber les marchés ou pour exercer des interventions qui seraient autant de distorsions par rapport à d'autres acteurs. Elle doit pleinement respecter, de ce point de vue, le droit communautaire.

Ensuite, elle est un outil de l'État et sa légitimité est là. En tant qu'investisseur avisé, elle ne peut défendre d'autres intérêts que ceux de l'État, qui est non seulement le possesseur de la Caisse, mais aussi le régulateur et le garant du bon fonctionnement des marchés.

Ainsi, avec ces deux rôles qu'il est possible avec une grande déontologie de concilier, celui d'investisseur avisé et celui d'investisseur à long terme soucieux des intérêts structurels des entreprises et de la place financière de Paris, la Caisse des dépôts et consignations est un outil extrêmement important. D'où l'impérieuse nécessité pour elle de bien réfléchir à l'allocation de ses fonds propres et de ne pas hésiter à sortir de partenariats qui ne seraient plus pleinement nécessaires, ni pour les entreprises au sein desquelles la CDC serait partenaire, ni pour la place financière de Paris et les structures financières des groupes qui jouent un rôle important dans la vie financière de notre pays.

Il faut inciter la Caisse des dépôts et consignations à aller plus loin, à ne pas hésiter à sortir de certains partenariats pour mieux investir ailleurs et pour exercer à la fois ce rôle de garant du long terme et d'investisseur avisé que j'évoquais il y a quelques instants.

Monsieur le ministre, c'est avec un grand intérêt que la commission des finances prendra sa part de l'examen du futur projet de loi concernant l'actionnariat salarié et le développement de l'épargne salariale. Il faut prendre des mesures pour mieux structurer le capital patient au sein de nos entreprises et pour assurer une implication plus forte des salariés dans l'évolution du capital de ces entreprises. Beaucoup d'instruments sont perfectibles à cet égard. Un juste équilibre doit être trouvé entre le rythme de déblocage des fonds et la nature de l'implication qui doit être longue dans les structures d'actionnariat.

Par ailleurs, en vue de l'examen de ce projet de loi, la commission des finances se préoccupe actuellement de réaliser un état des lieux de l'épargne retraite. C'est un sujet essentiel, mais fort complexe, car il faut examiner les outils qui relèvent tantôt du code de la sécurité sociale, ces outils étant des institutions de prévoyance sociale, tantôt du code de la mutualité ou du code des assurances.

Le fractionnement de notre marché de l'épargne retraite n'est d'ailleurs pas toujours perçu comme tel. Certains produits sont considérés comme des produits de retraite sans être classés en épargne retraite. D'autres sont classés en épargne retraite, mais leur organisation technique permet, par exemple, de sortir en capital, ce qui conduit à s'interroger sur leur vraie finalité.

Par conséquent, cette étude, qui est tout à fait horizontale et qui porte sur tous les instruments disponibles, nous permettra, je l'espère, d'apprécier la dynamique de l'épargne retraite en France, en particulier l'impact concret de la loi Fillon de 2003 et les conditions de montée en puissance des plans d'épargne retraite populaire, les PERP, des plans d'épargne pour la retraite collectifs, les PERCO, et des plans d'épargne retraite d'entreprise, les PERE, car ce sont les trois outils spécifiques qui ont été créés par la loi Fillon.

La montée en puissance se fait-elle à un rythme suffisant ?

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Ce n'est pas si négligeable, mon cher collègue. Les accords d'entreprises se multiplient actuellement dans les grands groupes. Mais ces outils doivent être mis en perspective avec d'autres, pour arriver à une appréciation macroéconomique de tout ce paysage, en particulier en termes d'allocation des actifs.

Ce sera le second objectif de notre étude, probablement le plus intéressant : nous nous interrogerons sur les caractéristiques techniques des produits et la manière dont elles déterminent l'allocation des actifs. En d'autres termes, si la proportion des actions est aussi faible dans un grand nombre de ces produits, c'est à mon sens parce qu'on les a construits de manière à ne pas maximiser la proportion des actions dans la répartition des placements.

Dès lors, quel dispositif peut-on imaginer pour optimiser cette situation tout en demeurant très scrupuleux en termes de sécurité des épargnants, monsieur le ministre ? C'est dans cette direction que nous nous efforcerons d'apporter des réponses aux préoccupations de nos collègues et de nos concitoyens.

J'en reviens maintenant à l'examen du projet de loi qui nous est soumis aujourd'hui, je serai très bref et je souscrirai, mes chers collègues, à l'approche qui nous est proposée par le Gouvernement.

Nous avons déjà plusieurs fois remis cet ouvrage sur le métier et il nous arrive dans une version à laquelle nous pouvons et nous devons nous rallier. Il ne reste plus que deux articles sur lesquels nous sommes en désaccord. Le premier concerne la mise en place à froid des bons de souscription d'actions. Nous souhaitions que la barre ne soit pas placée trop haut et que l'assemblée générale se détermine à la majorité simple. L'Assemblée nationale y a, en définitive, souscrit en qualifiant cette assemblée générale d' « extraordinaire ». Nous pouvons considérer que ce compromis est facteur de sécurité juridique et de réalisme économique et nous pouvons donc, mes chers collègues, l'entériner.

La seconde disposition restant en discussion concerne l'une des acceptions du principe de réciprocité, s'agissant du cas où c'est l'entreprise qui, de sa propre volonté, suspend les défenses dont elle peut disposer de par ses statuts ou de par les pactes d'actionnaires.

Le Sénat avait estimé qu'il était utile qu'une entreprise se plaçant volontairement dans cette situation puisse, si elle est attaquée par l'initiateur d'une offre, lui-même protégé, se prévaloir du principe de réciprocité. L'Assemblée nationale, soutenue d'ailleurs par vous-même, monsieur le ministre, a fait une analyse différente en disant qu'une entreprise qui se place volontairement sous ce régime peut tout aussi volontairement y renoncer et que la renonciation à l'option serait d'effet équivalent à la mise en oeuvre du principe de réciprocité.

Vous avez développé cette analyse ici même et vous ne nous aviez pas complètement convaincus. Nos collègues députés, eux, ont souscrit à votre analyse.

Sur le fond, les deux assemblées ont défendu les mêmes préoccupations et fait les mêmes analyses. Sur la technique, nos positions diffèrent, mais ce n'est que de la technique, et dans le souci d'en finir avec l'examen de ce texte, monsieur le ministre, je proposerai au Sénat de ne pas revenir à notre vote de deuxième lecture et de souscrire au texte de l'Assemblée nationale.

Dès lors, mes chers collègues, nous pourrons par un vote conforme faire en sorte que ce texte soit rapidement promulgué, qu'il devienne loi de la République et qu'il soit un facteur de clarification, de transparence et d'efficience sur nos marchés financiers.

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Vera

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous débattons aujourd'hui, pour la troisième fois, du projet de loi de transposition dans notre droit national de la directive concernant les offres publiques d'acquisition.

Une bonne partie du débat a déjà eu lieu et les quelques points restant en discussion sont, sans surprise, ceux qui ont constitué, dès l'origine, les points les plus critiquables de ce projet de loi d'inspiration profondément libérale.

Le texte sur les offres publiques d'acquisition, adopté par le Parlement européen au terme d'une fort longue procédure, est un texte de caractère consensuel.

Âprement débattu, amendé, corrigé, modifié, pour parvenir à ce qui constitue l'essence même d'un texte européen, c'est-à-dire un compromis entre des attentes et des points de vue divergents, il constitue un socle minimal a priori acceptable par tous les pays de l'Union.

L'adoption de la directive concernant les OPA a une fois encore montré une contradiction majeure : comment faire accepter une nouvelle concession à la logique libérale de l'organisation économique dans une société où monte l'exigence de droits nouveaux et renforcés pour les salariés, incluant la possibilité d'intervenir sur le devenir de leur entreprise. Car c'est bien à ces questions que nous sommes confrontés.

L'implication des salariés dans les choix de gestion des entreprises est encore aujourd'hui particulièrement limitée. Le miroir aux alouettes d'une participation « assouplie » ne résoudra pas le problème posé par le fait que l'entreprise privée ne reconnaît de pouvoir qu'aux détenteurs d'actions, en particulier à ceux dont la part de capital détenue est suffisante pour influer sur la gestion, la stratégie et le développement de l'entreprise.

Rendre plus « transparentes » les OPA est sans doute louable, mais l'essentiel demeure : la démocratie sociale et la capacité d'intervention des salariés dans la gestion des entreprises restent limitées ou, le plus souvent, à l'état de voeu pieux.

Qu'au fil des trois lectures de ce projet de loi, la majorité n'ait pas cru devoir ajouter au texte qui nous était soumis le moindre amendement tendant à donner des droits nouveaux aux salariés et à leurs représentants s'agissant de la mise en oeuvre et du suivi des OPA, des compétences des représentants du personnel ou de celles des comités d'entreprise, illustre assez bien la conception que le Gouvernement s'est faite de cette transposition.

Un jour, pourtant, il faudra bien choisir entre les « inquiétudes » des 6 millions d'actionnaires de notre pays dont la moitié sont les salariés d'entreprises placées sous le signe de la participation et dont la majorité ne participe que de très loin à la gestion des entreprises, et les inquiétudes, autrement plus légitimes et essentielles, des 15 millions de salariés du secteur dit concurrentiel.

Les questions soulevées par les OPA ne touchent pas seulement aux règles qui sont posées par le code de commerce, par le code monétaire et financier, ou à celles qui sont définies par le règlement de l'Autorité des marchés financiers. Des questions d'une autre nature se posent : en quoi ces opérations mettent-elles en cause l'équilibre économique même des entreprises visées, quelles incidences sont-elles susceptibles d'avoir sur l'emploi et sur la situation de milliers de familles et de bassins d'emploi entiers ?

Il n'y a pas très longtemps, la presse économique se faisait l'écho des nombreuses opérations d'acquisition pilotées par les groupes industriels et commerciaux originaires de notre pays. Pour certains aspects, la France se plaçait même en chef de file de la course aux acquisitions, produit de la mondialisation telle que comprise par la plupart des dirigeants d'entreprise.

Cette conception est connue. Il s'agit de tirer les plus grands profits possible de l'appareil de production existant pour dégager des marges financières permettant d'acquérir des entreprises, au motif que ces acquisitions produiront des profits encore plus significatifs.

Cela ne fonctionne pas toujours. Nous avons quelques témoignages, avec France Télécom ou EDF, mais aussi avec des groupes comme Carrefour ou Vivendi, d'opérations finalement peu profitables dont le coût d'amortissement a consommé sur la durée une part importante des marges d'exploitation.

L'autre aspect est que la dernière période a été marquée par une « vulnérabilisation » de la plupart de nos grandes entreprises.

La soudaine inscription du présent projet de loi à l'ordre du jour des travaux du Parlement a suivi de peu l'annonce de l'OPA « virtuelle » de Pepsico sur le groupe Danone et a été marquée par l'offre de Mittal sur Arcelor, sur laquelle nous ne pouvons manquer de revenir.

En effet, au fil des jours, plusieurs éléments essentiels de cette affaire ont été découverts.

Tout d'abord, le groupe Arcelor n'est plus une entreprise de droit français, bien que près de la moitié de ses salariés travaille sur le territoire français.

À l'occasion de son regroupement avec le Luxembourgeois Arbed et l'espagnol Aceralia, Usinor Sacilor a transféré son siège social au Grand-duché de Luxembourg.

Par ailleurs, le parlement luxembourgeois, largement dominé par les partis démocrates chrétiens et libéraux, vient de refuser à l'État luxembourgeois toute implication dans le processus en cours entre Arcelor et Mittal, alors même que cet État dispose d'un peu plus de 5 % du capital d'Arcelor.

En clair, les entreprises de notre pays auront, c'est à craindre, de moins en moins de moyens de défense contre les OPA hostiles qui ne manqueront sans doute pas de se produire dans les mois et années à venir.

Le présent projet de loi n'aura donc probablement aucune incidence sur le déroulement de l'OPA de Mittal sur Arcelor, d'autant que nous sommes en présence de deux sociétés de droit européen.

Il ne semble pas qu'il en aura beaucoup plus pour une autre affaire qui anime l'actualité économique depuis quelques semaines : l'OPA de l'opérateur électrique italien Enel sur le groupe Suez.

Quelques points doivent être relevés sur cette nouvelle opération.

Tout d'abord, le groupe Suez représente un ensemble d'activités d'une tout autre portée.

La nébuleuse Suez comprend des entités comme l'ex-banque d'Indochine, qui, s'étant rapprochée de Suez pour constituer la banque Indosuez, réalisa de multiples placements fonciers, immobiliers et patrimoniaux.

Elle comprend aussi l'ensemble considérable des activités, allant des travaux publics à la gestion de parkings souterrains, que représentait le groupe de la Lyonnaise des eaux associé à la société Dumez.

Ce sont donc des dizaines de milliers d'emplois qui sont en jeu et dont nombre d'entre eux concernent la collectivité nationale puisque les activités portent singulièrement sur les marchés publics de travaux, de construction de logements et d'infrastructures, sur la réalisation de réseaux d'adduction d'eau, sur l'exploitation de services de transmission de données ou de services publics affermés.

Par ailleurs, ces dernières années, le groupe Suez a d'ailleurs mené des opérations particulièrement significatives d'acquisition d'entreprises.

Aujourd'hui, c'est donc un opérateur italien qui se lance à l'assaut de Suez, pour mener une guerre commerciale sur le marché français de la fourniture d'électricité, guerre rendue possible par les textes européens.

Face à cette situation, le Gouvernement avait la possibilité de constituer un véritable pôle public de l'énergie. Le « patriotisme économique » commandait d'organiser ce regroupement avec la coopération des capacités énergétiques françaises. Vous avez préféré opter pour une fusion entre Suez et Gaz de France, dont le capital vient d'être ouvert et le statut modifié. Vous avez ainsi choisi de privatiser de fait GDF en le noyant dans le groupe privé Suez et en mettant ces deux sociétés en concurrence avec EDF.

Tant pis si l'article 24 de la loi du 9 août 2004, relative au service public de l'électricité et du gaz et aux entreprises électriques et gazières, dispose que « Électricité de France et Gaz de France sont transformés en sociétés dont l'État détient plus de 70 % du capital. Sauf dispositions législatives contraires, elles sont régies par les lois applicables aux sociétés anonymes. »

En tout état de cause, cette situation illustre le peu de sens et de portée qu'il convient de donner au contenu du projet de loi dont nous débattons encore aujourd'hui.

L'affaire Suez-Gaz de France a au moins le mérite de montrer à quel point le concept de « patriotisme économique » est vide de sens dès lors qu'il n'existe plus, de longue date, de maîtrise publique sur des pans essentiels de l'activité économique du pays.

L'offre de Mittal sur Arcelor n'a pas consacré le « retour des États » dans la gestion de l'économie. Elle démontre en revanche qu'un libéralisme sans rivages et sans retenue constitue un obstacle à tout développement cohérent des activités économiques et que la seule recherche de la rentabilité financière nuit gravement à l'emploi et au maintien de ces activités.

Depuis plus de vingt ans, une véritable bataille idéologique, largement relayée au plus haut niveau institutionnel, tant à la Commission européenne qu'à l'échelon des États ou des parlements nationaux, s'est déroulée pour faire accepter l'idée que toute maîtrise publique d'un quelconque outil de production, du moindre établissement de crédit ou de la plus discrète des compagnies d'assurance, constituait un mauvais choix et qu'il convenait de procéder à la dissolution de ce pan du secteur public.

L'État français ne dispose plus aujourd'hui d'outils capables de mener une politique industrielle digne de ce nom.

La large privatisation du secteur financier a conduit à réduire quasiment à la seule Caisse des dépôts et consignations l'outil d'intervention dont dispose encore l'État.

À notre sens, la lutte contre les OPA hostiles a besoin d'autres moyens que ceux qui nous sont proposés par le présent texte.

À la prévention par la transparence des opérations, nous préférons, et de loin, l'application d'un principe de précaution qui tendrait, notamment dans un certain nombre de secteurs d'activité essentiels en termes de services rendus à la population, à assurer la maîtrise d'une part croissante du capital de nos entreprises les plus importantes par des personnes morales de droit public.

De la même manière, de nouveaux droits et pouvoirs des salariés doivent s'étendre à toutes les décisions essentielles concernant la gestion des entreprises, les choix industriels et d'investissements, les opérations stratégiques de rachat, de fusion ou de cession d'activité.

Sans ce principe de précaution, sans cette politique déterminée de maîtrise publique renforcée de notre appareil productif et sans extension des droits d'intervention des salariés dans la gestion de leur entreprise, la notion de « patriotisme économique » n'est qu'un simple affichage.

De fait, le contenu du projet de loi nous semble très éloigné de ce qu'il conviendrait de faire. Il n'est qu'une manifestation de plus de la soumission du politique à la seule loi du marché.

Quand le devenir de milliers de salariés de notre pays ne dépend plus que du contenu du règlement de l'Autorité des marchés financiers, comment pourrait-il en être autrement ?

Pour toutes ces raisons, le groupe CRC ne votera pas le texte qui nous est soumis.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le capitalisme financier connaît depuis quelques années des dérives qui sont dénoncées ici et là. Les auteurs de nombreux ouvrages récents en font état, qu'il s'agisse du prix Nobel de l'économie ou d'observateurs plus spécialisés dans les questions financières.

Je pense, avec M. le rapporteur général, que les autorités publiques doivent être acteurs et non seulement spectateurs de la lutte contre ces dérives. Mais chacun sait que, derrière les jeux d'acteurs, se cachent parfois des philosophies, sur lesquelles nos appréciations sont parfois divergentes.

Monsieur le ministre, vous avez évoqué certaines mesures, sur lesquelles nous aurons sans doute à débattre dans les semaines qui viennent, concernant d'autres adaptations nécessaires.

Pour l'instant, je me limiterai à l'opportunité que nous offre le présent projet de loi d'apporter une réglementation et les meilleures réponses possible aux dérives que nous constatons.

De ce point de vue, l'affichage par le Gouvernement, depuis quelques mois, d'un slogan sur le patriotisme économique ne nous a pas convaincus dans la mesure où il ne répond pas vraiment à la question principale que posent les récentes OPA du type de celle de Mittal sur Arcelor.

Cette question, qui sera au coeur des enjeux politiques et économiques de demain et qui relève d'une crainte largement répandue chez nos concitoyens, est de savoir que faire quand une entreprise inscrivant sa stratégie dans une démarche hautement spéculative rachète une autre entreprise sans prendre en considération l'outil industriel, l'emploi et les équilibres des territoires ? L'omnipotence des marchés, qui s'expriment au mépris des réalités humaines et sociales, est-elle véritablement inéluctable ?

Avec le présent projet de loi, la réponse du Gouvernement et de sa majorité, dans un remarquable exercice de communication insincère, tient, me semble-t-il, du double langage : d'un côté, le patriotisme économique et, de l'autre, un projet de loi tourné exclusivement vers la valorisation de la logique actionnariale et spéculative.

Ainsi, alors que la directive laissait aux États membres la possibilité de ne pas transposer l'article 9, selon lequel, « en période d'offre publique, toute mesure de défense doit être approuvée par les actionnaires de la société cible », le projet de loi a opté pour une transposition qui consacre l'obligation de passivité des dirigeants.

Cet article impose une consultation formelle et lourde qui handicape la société et entrave sa capacité de se défendre contre les OPA hostiles.

Le projet de loi, dans la rédaction qui nous est soumise en troisième lecture, place donc les sociétés françaises en mauvaise posture pour faire face aux attaques des prédateurs mondiaux.

Lors de la deuxième lecture, cédant à la pression médiatique et à l'émoi suscité par l'affaire Mittal-Arcelor, le Gouvernement a déposé un amendement dans le but affiché de renforcer les moyens de lutte contre les OPA hostiles.

Cet amendement gouvernemental, qui érige l'émission de bons de souscription d'actions en mode de défense contre les OPA hostiles, est pourtant inefficace à nos yeux. Inspiré de dispositions du droit américain introduites il y a quelques années, ce dispositif peut jouer un rôle dans la négociation des prix des titres au profit de la logique purement spéculative et ne constitue presque jamais un mode de dissuasion efficace pour éviter les OPA. Les sociétés américaines, monsieur le ministre, ont d'ailleurs aujourd'hui largement renoncé à l'utilisation de cet instrument juridique jugé peu opérant.

Par ailleurs, la logique du capitalisme financiarisé prévaut avec ce nouveau dispositif, sans aucune prise en compte de l'intérêt général et de l'emploi. En effet, qui décidera in fine de la suite à réserver au projet d'OPA, si ce projet de loi est adopté ? Les actionnaires, et eux seulement ! Ce sont eux qui pourront ou non décider de l'émission des bons de souscription d'actions, en fonction de l'intérêt strictement financier de l'opération.

Ils sont donc les seuls à pouvoir décider de l'opportunité de l'OPA quand, pour ce type d'entreprises, d'autres critères doivent jouer. Réserver le pouvoir de décision aux seuls actionnaires exclut la prise en compte de l'intérêt général, de l'intérêt social et de l'intérêt des salariés.

Cette conception s'oppose résolument à la logique que nous défendons : un marché mieux encadré au service de l'intérêt général.

Monsieur le ministre, mes chers collègues, tout au long de ce débat et au terme de trois lectures, le groupe socialiste n'a pas véritablement obtenu les améliorations qu'il aurait souhaitées pour ce projet de loi sur les OPA. Le Gouvernement et sa majorité n'ont pas su répondre, me semble-t-il, aux problèmes posés par ce capitalisme financiarisé et mondialisé.

Nous ne pouvons donc que mettre en cause les arbitrages gouvernementaux qui placent la logique de la rentabilité financière au coeur des processus de décision, favorisant ainsi les dérives du capitalisme financier au lieu d'introduire des contraintes et une meilleure régulation. Nous voterons donc contre ce texte.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je me réjouis de l'aboutissement de la discussion de ce projet de loi transcrivant la directive sur les offres publiques d'acquisition. Ce texte, dans sa rédaction finale, aura l'équilibre requis et il constituera sans doute un bon instrument pour mieux protéger les intérêts vitaux de notre économie.

Je voudrais saluer la contribution de notre rapporteur général et le remercier pour les analyses très pertinentes qu'il a développées devant la commission et devant le Sénat. Nul doute que ce texte portera sa marque.

Monsieur le ministre, la discussion de ce projet de loi intervient dans un contexte marqué par des OPA qui ont beaucoup alimenté la chronique. J'ai encore à l'esprit les principes que vous développiez en deuxième lecture sur la bonne gouvernance des entreprises. Quelques jours après, la théâtralisation du projet de fusion entre Suez et Gaz de France m'est apparue à la limite des principes que nous avions posés.

Je pense que le rôle prêté au groupe Enel ne doit pas dissimuler son statut très particulier qui, au regard des règles de droit commun du capitalisme et des marchés, le place entièrement dans les mains de l'État italien. Sans doute la participation de l'État y est-elle moins importante que celle que détient l'État français dans le capital de Gaz de France, mais le gouvernement italien contrôle complètement l'opération. Il ne s'agit donc pas d'une société totalement comme les autres. C'est pourquoi les États doivent en discuter.

C'est le rôle de l'État qui est en cause dans cette affaire. Je me suis étonné, monsieur le ministre, du silence assourdissant de l'Agence des participations de l'État. Il me semblait que sa création répondait à une exigence de bonne gouvernance pour tenter de gommer l'intervention du politique dans la définition des stratégies. Si j'avais un souhait à formuler, ce serait que cette agence puisse jouer un rôle visible et compréhensible, ne serait-ce que pour moins exposer le Gouvernement dans ces opérations et couper court à certains développements sur le patriotisme économique ou sur les querelles qui pourraient opposer les États membres de l'Union européenne.

Outre le rôle et la place de l'Agence des participations de l'État, il me faut également évoquer ceux de la Caisse des dépôts et consignations ; Philippe Marini a rappelé quelle pourrait être son implication. Elle pourrait contribuer à éviter toute délocalisation des entreprises du CAC 40. Il est vital que la France garde sur son territoire le plus grand nombre possible de sièges de décision. Je ne suis pas sûr que les moyens de la Caisse des dépôts et consignations soient à la mesure des batailles boursières qui pourraient se présenter. Elle doit d'abord préserver ses intérêts patrimoniaux.

Permettez-moi aussi d'insister, monsieur le ministre, sur la nécessité de conforter les fonds des PME, parce que c'est sur ce terrain-là que vous pourrez gagner la bataille de la croissance et de l'emploi. Les entreprises du CAC 40 appartiennent totalement à l'économie globalisée, elles sont largement sorties de l'économie nationale. Nous nous réjouissons des records de profits atteints. Tout cela est excellent pour conforter les fonds propres de ces entreprises, la fidélité des actionnaires, si subsiste encore par hasard un lien entre l'actionnaire et l'entreprise, sans intermédiation d'un fonds de placement. Mais les entreprises du CAC 40 ne contribuent plus à l'activation de notre économie et de l'emploi.

La reconstitution d'un tissu de PME est donc une urgence. Force est de constater qu'à l'heure de la globalisation les banquiers ne se précipitent pas pour répondre à l'attente de fonds propres des PME. On observe une sorte d'abandon : personne ne s'engage plus aux côtés des PME !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Si l'État a encore un rôle à jouer - et sans doute la Caisse des dépôts et consignations -, c'est au chevet de ces PME. Sur l'ensemble du territoire, nombre d'entre elles peuvent encore être sauvées, à condition que nous ayons le courage de leur donner l'impulsion nécessaire, de les rénover, de les transformer, de les aider, de les accompagner et de mettre à leur disposition les fonds propres dont elles ont besoin.

Nous savons aussi que, pour gagner la bataille de l'emploi et de la croissance, il faut redonner du sens à l'engagement et à la prise de risque, en France, dans ces PME. Qui peut encore être tenté aujourd'hui par des activités de production ? Il y a quelques semaines, M. Carlos Ghosn, président-directeur général de Renault annonçait les défis qu'il entendait relever - sans doute réussira-t-il - mais il plaçait la barre assez haut, ou plutôt assez bas, pour ses fournisseurs et sous-traitants, en affirmant que Renault gagnerait son pari à condition de faire baisser de 14 % les prix de ses fournisseurs et de ses sous-traitants en trois ans. Autrement dit, le sous-traitant qui hésitait encore à déménager son entreprise en Roumanie ou ailleurs a compris qu'il lui fallait peut-être passer à l'acte.

J'insiste, monsieur le ministre, mais il reste des réformes à réaliser pour financer autrement la protection sociale et rendre compétitif le travail en France. C'est à ce prix, mes chers collègues, que nous pourrons gagner la bataille de la croissance et de l'emploi.

Nous avons évoqué incidemment votre projet de loi sur la participation ; Philippe Marini l'a commenté, je souscris à tout ce qu'il a dit. La seule perplexité que m'inspire votre texte tient à la difficulté que nous éprouvons depuis un certain nombre d'années à faire la part entre ce qui revient à l'investissement et ce qui revient à la consommation. Que survienne une conjoncture atone, et le Gouvernement résiste mal à la tentation de débloquer les fonds d'intéressement et de participation. On est capable une année de légiférer sur la réforme des retraites, de créer des fonds d'épargne retraite et, l'année suivante, de débloquer l'épargne salariale pour des motifs conjoncturels.

Si nous voulons lutter efficacement contre les offres publiques d'achat hostiles, encore faut-il qu'il y ait une épargne en France. Je souhaite donc, monsieur le ministre, que l'on résiste à la tentation de raccourcir la durée de blocage de ces fonds d'épargne et que l'on cesse de nous soumettre à la tentation d'un déblocage au gré des conjonctures.

Car vient un moment où prévaut le sentiment que la participation et l'intéressement ne sont que des subterfuges pour échapper au poids des cotisations sociales. Ainsi, on verse une partie du salaire sous forme d'intéressement et de participation, parce que nos cotisations salariales sont devenues tout à fait excessives. Le dialogue étant engagé sur ce point, j'exprime le souhait que l'on puisse convenir d'un engagement de blocage de ces fonds d'épargne, pendant un certain nombre d'années, afin de doter la France des fonds de retraite dont elle a besoin pour gager le capital des entreprises.

Voilà les observations que je tenais à faire à l'occasion de l'ultime discussion de ce texte transcrivant la directive sur les offres publiques d'acquisition.

Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...

La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion des articles.

Je rappelle que, aux termes de l'article 42, alinéa 10, du règlement, à partir de la deuxième lecture au Sénat des projets ou propositions de loi, la discussion des articles est limitée à ceux pour lesquels les deux assemblées du Parlement n'ont pas encore adopté un texte identique.

Il est inséré, dans la section 5 du chapitre III du titre III du livre II du code de commerce, un article L. 233-32 ainsi rédigé :

« Art. L. 233-32. - I. - Pendant la période d'offre publique visant une société dont des actions sont admises aux négociations sur un marché réglementé, le conseil d'administration, le conseil de surveillance, à l'exception de leur pouvoir de nomination, le directoire, le directeur général ou l'un des directeurs généraux délégués de la société visée doivent obtenir l'approbation préalable de l'assemblée générale pour prendre toute mesure dont la mise en oeuvre est susceptible de faire échouer l'offre, hormis la recherche d'autres offres.

« II. - Sans préjudice des autres mesures permises par la loi, l'assemblée générale extraordinaire de la société visée, statuant dans les conditions de quorum et de majorité prévues à l'article L. 225-98, peut décider l'émission de bons permettant de souscrire, à des conditions préférentielles, à des actions de ladite société, et leur attribution gratuite à tous les actionnaires de cette société ayant cette qualité avant l'expiration de la période d'offre publique.

« L'assemblée générale peut déléguer cette compétence au conseil d'administration ou au directoire. Elle fixe le montant maximum de l'augmentation de capital pouvant résulter de l'exercice de ces bons ainsi que le nombre maximum de bons pouvant être émis.

« La délégation peut également prévoir la fixation de conditions relatives à l'obligation ou à l'interdiction, pour le conseil d'administration ou le directoire, de procéder à l'émission et à l'attribution gratuite de ces bons, d'y surseoir ou d'y renoncer. La société visée porte à la connaissance du public, avant la clôture de l'offre, son intention d'émettre ces bons.

« Les conditions d'exercice de ces bons, qui doivent être relatives aux termes de l'offre ou de toute offre concurrente éventuelle, ainsi que les autres caractéristiques de ces bons, dont le prix d'exercice ou les modalités de détermination de ce prix, sont fixées par l'assemblée générale ou, sur délégation de celle-ci, par le conseil d'administration ou le directoire. Ces bons deviennent caducs de plein droit dès que l'offre et toute offre concurrente éventuelle échouent, deviennent caduques ou sont retirées.

« III. - Toute délégation d'une mesure dont la mise en oeuvre est susceptible de faire échouer l'offre, hormis la recherche d'autres offres, accordée par l'assemblée générale avant la période d'offres, est suspendue en période d'offre publique.

« Toute décision du conseil d'administration, du conseil de surveillance, du directoire, du directeur général ou de l'un des directeurs généraux délégués, prise avant la période d'offre, qui n'est pas totalement ou partiellement mise en oeuvre, qui ne s'inscrit pas dans le cours normal des activités de la société et dont la mise en oeuvre est susceptible de faire échouer l'offre doit faire l'objet d'une approbation ou d'une confirmation par l'assemblée générale. »

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 1, présenté par MM. Marc et Yung, Mme Bricq, MM. Massion, Angels, Auban, Charasse, Demerliat, Frécon, Haut, Masseret, Miquel, Moreigne et Sergent, Mme M. André, M. Badinter, Mme Boumediene-Thiery, MM. Collombat, Courrière, Dreyfus-Schmidt, Frimat, C. Gautier, Mahéas, Peyronnet, Sueur, Sutour et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Dans le premier alinéa du I du texte proposé par cet article pour l'article L. 233-32 du code de commerce, remplacer les mots :

doivent obtenir l'approbation préalable de

par les mots :

peut consulter

La parole est à M. François Marc.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

La question abordée par cet amendement se trouve au coeur de la discussion depuis les deux lectures précédentes.

Je rappelle très brièvement la situation : la directive européenne a été élaborée à l'issue d'un processus très long et très compliqué ; les instances européennes ont eu beaucoup de mal à trouver un accord et ont finalement adopté un texte « mi-chèvre mi-chou », qui autorise les États à transposer dans des conditions différentes, notamment en choisissant de transposer ou non deux articles.

Le débat porte sur la transposition de l'article 9 de la directive, sur lequel deux conceptions s'opposent : une conception libérale, selon laquelle les actionnaires doivent être la référence obligée et permanente, et une conception plus globalisante de l'entreprise, qui consiste à prendre en considération l'ensemble des intérêts de l'entreprise face à une OPA et à donner à la gouvernance les moyens de réagir rapidement.

Or la France a choisi de retenir l'option libérale ! Nous n'étions pas obligés de transposer cet article 9. Mais, en choisissant de le faire, le Gouvernement a préféré donner la primauté à l'actionnaire, et ainsi consacrer l'obligation de passivité des entreprises.

J'insiste une dernière fois sur cet amendement à la lumière de l'offre publique d'achat hostile de Mittal Steel sur Arcelor, qui a récemment défrayé la chronique et qui occupe encore le devant de la scène financière. C'est précisément la disposition que nous vous proposons d'adopter par voie d'amendement qui va permettre au groupe Arcelor de se défendre dans les meilleures conditions. En effet, à la différence de notre pays, le Luxembourg a décidé de ne pas transposer cet article 9. Il n'y a donc pas d'obligation de passivité des entreprises.

Nous regrettons le choix fait par la France. Il s'inscrit dans une approche libérale qui retire aux entreprises toute capacité de réaction instantanée. Ces dernières devront en effet attendre que les actionnaires se soient déterminés, c'est-à-dire plusieurs semaines, avant de pouvoir développer des actions anti-OPA.

La démarche du Gouvernement s'avère finalement contraire au discours sur le patriotisme économique qui nous a été servi depuis l'été dernier, et relève d'une philosophie libérale que nous ne partageons pas.

L'amendement n° 1, répondant à une autre logique que nous souhaitons affirmer, conserve donc tout son sens. C'est pourquoi nous le présentons à nouveau à l'occasion de cette troisième lecture.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Nous avons déjà eu l'occasion, au cours des précédentes lectures, de nous exprimer amplement sur le sujet.

Le patriotisme économique n'est pas nécessairement défensif. Il peut également être offensif.

Or, les signaux que délivre l'amendement n° 1 s'inscrivent clairement dans une optique purement défensive. La posture défensive est, certes, importante. Mais elle ne doit pas être exclusive.

Les entreprises à capitaux français, à centre de décision français, ne doivent, à l'évidence, pas être bridées par le marché dans leurs initiatives de croissance externe. Or la vision étroite préconisée par M. Marc aurait précisément pour conséquence de les handicaper dans ces opérations de croissance externe.

Cela n'a rien de théorique, comme nous avons pu le constater par le passé. Je ne prendrai qu'un seul exemple pour illustrer mes propos : si nous avions été, au moment de l'opération menée par Sanofi-Synthélabo sur Aventis, sous l'empire de la législation que vous préconisez, monsieur Marc, cette opération aurait été impossible ou, à tout le moins, beaucoup plus complexe.

Il s'agissait en effet d'une opération offensive qu'a posteriori je me permets de mettre à l'actif du patriotisme économique.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

M. Philippe Marini, rapporteur. Au moment des faits, je ne me serais pas permis de faire une telle interprétation.

M. Yann Gaillard s'exclame.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Nous devons donc faire très attention lorsque nous adoptons une législation comme celle-ci. En effet, nous ne saurions prévoir tous les cas de figure.

La directive européenne, parce qu'elle propose un système à options multiples, est d'une grande complexité. Les concepts qu'elle énonce sont eux-mêmes difficiles à interpréter.

Au cours des deux lectures précédentes, nous avons fait de notre mieux pour tâcher de bien faire comprendre le cheminement intellectuel qui, à partir du rapport Lepetit et des choix opérés par le Gouvernement, nous a conduits au texte dont nous délibérons ce matin. Mais c'est un cheminement complexe !

Rétrospectivement, nous aurions pu espérer être saisis d'une meilleure directive. Si cette dernière avait été plus claire, les problèmes d'interprétation que nous avons aujourd'hui, ou ceux que nous pourrons avoir demain, ne se poseraient pas.

Très sincèrement, monsieur le ministre, ce texte ne me paraît pas parfait.

Son élaboration au sein de la mécanique communautaire s'est faite par tâtonnements successifs, et a donc été très longue. Nous faisons de notre mieux pour adapter ce texte, dans l'intérêt de notre marché financier et de nos entreprises, mais je pense que, à terme, avec l'expérience, nous porterons sur lui un regard critique.

Bien entendu, nous serons extrêmement vigilants sur l'évolution des choses et la chronique des événements.

Enfin, monsieur le ministre, nous raisonnons ici en fonction des intérêts de la place financière de Paris. Or, nombre d'entre nous sont préoccupés par les positions que prennent des arbitragistes à court terme sur le capital des plates-formes boursières.

Il s'agit d'un grave souci. En effet, que deviendraient les raisonnements que nous faisons dans l'intérêt de la place financière de Paris si, sous la pression de ces arbitragistes à court terme, nous nous retrouvions prisonniers d'une sorte de « silo » global, d'intégration verticale européenne, de monopole européen situé ailleurs, en particulier sur un territoire où les choix de transposition de la directive sont différents des nôtres ?

Je me permets, monsieur le ministre, de rappeler cette grave préoccupation stratégique, que vous partagez également, je le sais.

Il importe donc, sur le plan communautaire, de veiller à l'adoption d'une directive sur le règlement livraison et sur la compensation, pour éviter cette logique d'intégration verticale ou de « silo » qui, selon moi, n'est pas conforme au principe européen de la concurrence.

A l'heure où, dans ce domaine de la concurrence, beaucoup sont tentés de donner des leçons à la France, il faut rappeler combien l'enjeu est à cet égard essentiel. C'est notre responsabilité collective de bien expliciter les enjeux et de faire en sorte qu'il y ait une régulation européenne conforme à nos principes.

Debut de section - Permalien
Thierry Breton, ministre

Tout a déjà été dit sur le principe qui a conduit le Gouvernement à proposer la transposition de l'article 9. Nous avons déjà procédé à un large débat sur ce point. À travers cette transposition, nous recherchons un équilibre entre l'attractivité de la place de Paris et la démocratie actionnariale.

S'agissant de la place de Paris, tout d'abord, je rappellerai que la France est le pays d'Europe continentale qui accueille le plus grand nombre d'investisseurs étrangers : un Français sur sept travaille dans une entreprise venue s'installer en France. Il faut donc préserver, et même accroître, cette attractivité.

Quant à la démocratie actionnariale, c'est effectivement ce principe que le Gouvernement a retenu pour donner aux actionnaires le pouvoir de décider des mesures à prendre en cas d'OPA non sollicitée.

Enfin, le principe de réciprocité a guidé les travaux de la commission Lepetit, et nous l'avons retenu.

Nous avons déjà longuement débattu de ce point, et le Gouvernement, ne souhaitant pas rouvrir la discussion, émet donc un avis défavorable sur l'amendement n° 1.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 2, présenté par MM. Marc et Yung, Mme Bricq, MM. Massion, Angels, Auban, Charasse, Demerliat, Frécon, Haut, Masseret, Miquel, Moreigne et Sergent, Mme M. André, M. Badinter, Mme Boumediene-Thiery, MM. Collombat, Courrière, Dreyfus-Schmidt, Frimat, C. Gautier, Mahéas, Peyronnet, Sueur, Sutour et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Supprimer le II du texte proposé par cet article pour l'article L. 233-32 du code de commerce.

La parole est à M. François Marc.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Monsieur le rapporteur, vous avez indiqué qu'il fallait se placer dans une logique offensive, et pas seulement défensive. La meilleure défense étant l'attaque, je souscris pleinement à vos propos.

Mais c'est bien dans une stratégie de défense que l'amendement gouvernemental, introduit en deuxième lecture, s'inscrit.

Il s'appuie sur l'idée que l'émission de bons de souscription d'actions constitue une panacée pour protéger les entreprises françaises des OPA hostiles. Nous considérons au contraire que cette disposition n'est pas adaptée à l'objectif visé, et nous redoutons surtout les effets pervers qu'elle pourrait engendrer. Le présent amendement vise donc à la supprimer.

Il importe de revenir sur le mécanisme des bons de souscription d'actions : si la menace d'OPA hostile conduit le management de l'entreprise à émettre des bons de souscription d'actions attribués gratuitement à leurs actionnaires, il va s'ensuivre une surenchère du prix à la charge de l'initiateur de l'offre. Or cette surenchère ne peut qu'inciter les actionnaires à vendre leurs titres, dont le prix de cession aura été augmenté. Le résultat obtenu sera donc tout à fait inverse à ce qui était escompté.

Dans la plupart des cas, l'initiateur d'une OPA hostile est fortement motivé par l'opération, qu'il a anticipée en termes de coût. Il a même, souvent, provisionné des frais supplémentaires pour le cas où il y aurait surenchère.

En conséquence, pour que l'émission de bons de souscription d'actions soit dissuasive, son coût doit être très supérieur au prix initialement offert pour la première offre, ce qui est rarement le cas.

Ainsi, l'émission de bons de souscription d'actions aboutira à faire monter les enchères, sans pour autant écarter le risque d'OPA.

On peut même craindre un risque supplémentaire : celui de voir un certain nombre d'actionnaires tirer parti de ce gonflement artificiel du prix et se désengager un peu plus que ce qui était prévu à l'origine.

En réalité, l'objectif de cet amendement gouvernemental, comme l'a dit très clairement Thierry Breton lors de la deuxième lecture au Sénat, est de préserver le pouvoir exclusif de décision des actionnaires et de faire en sorte que ces derniers obtiennent le meilleur prix possible.

Nous ne pouvons y souscrire, car il s'agit bien d'une mesure destinée à valoriser un peu plus encore la situation des actionnaires.

D'ailleurs, les Etats-Unis, qui avaient adopté ce dispositif, l'abandonnent aujourd'hui progressivement compte tenu de son inefficacité et de ses effets pervers.

Il est inhabituel, dans cette enceinte, de dire vouloir s'inspirer des Etats-Unis. Mais, en l'occurrence, les résultats de l'expérimentation de cette mesure dans la sphère financière américaine ont été à ce point pervers que cette expérience menée outre-Atlantique doit nous donner à réfléchir.

C'est pourquoi nous suggérons d'abandonner ce dispositif et de nous intéresser de manière plus approfondie aux mesures relatives à l'action de la Caisse des dépôts et à l'actionnariat salarié, qui seront débattues durant les prochaines semaines.

Ces sujets peuvent offrir des mesures de défense autrement plus intéressantes et plus efficaces que ces bons de souscription d'actions qui, à nos yeux, devraient être supprimés.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Il s'agit toujours de la même chose ! J'avoue que je ne comprends pas. Les bons de souscription d'actions ne sont qu'un élément dans une panoplie, et nous n'avons jamais dit que c'était la panacée, qu'ils serviraient dans tous les cas de figure et seraient toujours utilisables !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Ce n'est pas autre chose qu'un outil sur une étagère, ...

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

...et il est utile d'avoir accès à un maximum d'outils sur les étagères !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Les interventions en seconde lecture ont été très claires à ce sujet : si la mise en circulation d'actions nouvelles en période d'offre conduit à une dilution excessive du capital, donc à un écrasement des cours, on n'aura rien fait d'utile, c'est évident. Il faut donc trouver les conjonctures et les conjonctions dans lesquelles cet instrument est utile.

En tant qu'outil de procédure, il ne peut qu'être mis au service d'une stratégie, industrielle et financière, et une bonne défense repose sur une bonne procédure, mais surtout sur de bons projets. Il faut faire saliver ! Il faut des anticipations portant sur des revenus futurs. On n'interrompt pas une opération qui a une logique économique avec de la procédure. On la décale seulement.

Monsieur le ministre, voilà les raisons pour lesquelles nous sommes favorables à ces bons de souscription d'actions que vous avez proposé d'instituer, à la faculté de décider et à la mise en oeuvre de leur émission à la majorité simple de l'assemblée générale.

Debut de section - Permalien
Thierry Breton, ministre

Je vais essayer, en troisième lecture, de convaincre M. Marc du bien-fondé de cette solution !

M. le rapporteur a excellemment expliqué que les bons de souscription d'actions n'étaient qu'un élément d'une boîte à outils et que ce n'était certes pas la panacée. Je n'ajouterai qu'un élément.

Prenons le cas d'une entreprise américaine, puisque ce type d'instrument existe aux États-unis. Imaginez qu'elle décide une OPA hostile, non sollicitée, sur une entreprise française. Cela peut arriver.

L'entreprise française attaquée de façon inamicale va, comme c'est souvent le cas, indiquer à l'entreprise américaine qu'elle entend, pour se défendre, faire une contre OPA, par exemple, sur l'assaillant. Si ce dernier dispose de bons de souscription d'actions, il menacera alors d'émettre ces bons afin que l'entreprise française ne puisse le faire.

Nous ne souhaitons qu'une chose : que l'entreprise cible soit en mesure de se défendre à armes égales et, dans l'exemple que j'ai donné, que l'entreprise française ait donc la possibilité de répondre qu'en cas d'émission de bons elle peut aussi émettre les bons obtenus dans le cas de l'attaque initiale.

Dès lors, soit les entreprises cessent cette dialectique, soit elles trouvent des moyens de s'entendre dans l'intérêt de leurs actionnaires et des parties prenantes qui ne sont pas actionnaires : les salariés, les collectivités locales et les États. Nous aurons donné à nos entreprises les moyens de se défendre.

C'est la raison pour laquelle, monsieur Marc, le Gouvernement émet un avis défavorable sur l'amendement n° 2.

L'amendement n'est pas adopté.

L'article 10 est adopté.

Il est inséré, dans la section 5 du chapitre III du titre III du livre II du code de commerce, un article L. 233-33 ainsi rédigé :

« Art. L. 233-33. - Les dispositions prévues à l'article L. 233-32 ne sont pas applicables lorsque la société fait l'objet d'une ou plusieurs offres publiques engagées par des entités, agissant seules ou de concert au sens de l'article L. 233-10, dont l'une au moins n'applique pas ces dispositions ou des mesures équivalentes ou qui sont respectivement contrôlées, au sens du II ou du III de l'article L. 233-16, par des entités dont l'une au moins n'applique pas ces dispositions ou des mesures équivalentes. Toutefois, les dispositions prévues à l'article L. 233-32 s'appliquent si les seules entités qui n'appliquent pas les dispositions de cet article ou des mesures équivalentes ou qui sont contrôlées, au sens du II ou du III de l'article L. 233-16, par des entités qui n'appliquent pas ces dispositions ou des mesures équivalentes, agissent de concert, au sens de l'article L. 233-10, avec la société faisant l'objet de l'offre. Toute contestation portant sur l'équivalence des mesures fait l'objet d'une décision de l'Autorité des marchés financiers.

« Dans le cas où le premier alinéa s'applique, toute mesure prise par le conseil d'administration, le conseil de surveillance, le directoire, le directeur général ou l'un des directeurs généraux délégués de la société visée doit avoir été expressément autorisée pour l'hypothèse d'une offre publique par l'assemblée générale dans les dix-huit mois précédant le jour du dépôt de l'offre. L'autorisation peut notamment porter sur l'émission par le conseil d'administration ou le directoire des bons visés au II de l'article L. 233-32 ; dans ce cas, l'assemblée générale extraordinaire des actionnaires statue dans les conditions de quorum et de majorité prévues à l'article L. 225-98. »

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Monsieur le ministre, je voudrais évoquer brièvement la notion de « réciprocité », dont l'articulation juridique est complexe. Mais je ne reviendrai pas sur les analyses juridiques ; elles vont désormais appartenir à la doctrine, voire à la jurisprudence.

Je voudrais, en termes politiques, insister sur un point qui me semble important : une entreprise dont le contrôle est protégé et qui lance une offre hostile sur une entreprise dont le contrôle est à prendre ne joue pas à armes égales !

Je ne prendrai que deux exemples : une entreprise dont l'État d'origine a le vrai pouvoir de décision, comme Enel, et une entreprise dont le capital est détenu très majoritairement par une famille opaque - ainsi que le sont d'ailleurs toutes les familles, très légitimement -, comme Mittal.

Monsieur le ministre, je rappellerai avec force que le marché, c'est bien, à condition que les acteurs jouent à armes égales. Il ne serait pas politiquement acceptable à nos yeux - j'espère en effet parler au nom de tous - que l'assemblée générale d'une société française se désarme ou soit contrainte de le faire à l'égard d'un agresseur protégé par son État d'origine ou par la structure de capital assurant un contrôle sans conteste à des forces qui ne sont pas des forces du marché.

Je souhaitais réaffirmer cela au-delà de toutes les analyses juridiques, car, si notre pays a consenti à la directive, c'est bien, j'en suis convaincu, en vertu de cette conception politique de la réciprocité. Nous devons être à armes égales sur les marchés. Alors « oui » à l'ouverture, si cela suppose que chaque intervenant est en conformité avec les mêmes règles du jeu.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 3, présenté par MM. Marc et Yung, Mme Bricq, MM. Massion, Angels, Auban, Charasse, Demerliat, Frécon, Haut, Masseret, Miquel, Moreigne et Sergent, Mme M. André, M. Badinter, Mme Boumediene-Thiery, MM. Collombat, Courrière, Dreyfus-Schmidt, Frimat, C. Gautier, Mahéas, Peyronnet, Sueur, Sutour et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. François Marc.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Cet amendement est fondamental.

Comme il est indiqué dans l'excellent rapport de M. Marini, le projet de loi repose sur l'effectivité de la clause de réciprocité. En effet, « le recours obligatoire à l'article 9 de la directive, c'est-à-dire à l'approbation ou à la confirmation des mesures de défense par les actionnaires, apparaît acceptable, dès lors que les sociétés ont l'assurance de pouvoir invoquer la réciprocité en cas d'offre initiée par une entité non vertueuse ». Mais les sociétés ont-elles l'assurance de pouvoir invoquer la réciprocité ? Non, je ne le crois pas.

Nous avions évoqué cette question lors de l'examen en deuxième lecture. Pour les spécialistes de droit boursier européen, la transposition de l'obligation de passivité de l'article 9, que vous avez adopté, exclut l'applicabilité de la clause de réciprocité. La réciprocité ne se justifie que dans un cas : lorsque les entreprises, plus vertueuses que les États, ont choisi d'appliquer le droit communautaire en l'absence de transposition nationale. Ce n'est que si vous n'aviez pas choisi l'option de transposition de l'article 9 que cette réciprocité pouvait avoir sa pleine et entière efficacité.

Quoi qu'il en soit, et quelle que soit l'issue des débats de doctrine en cours sur ce sujet, une chose est sûre : l'incertitude règne en la matière. Les sociétés savent aujourd'hui qu'elles ne peuvent s'appuyer sur la réciprocité sans risque de contentieux communautaire. Et ce n'est pas parce qu'au cours d'une réunion la Commission n'a pas remis en cause les choix de transposition des pays qui ont prévu une application obligatoire de l'article 9 et/ou de l'article 11 et une mise en oeuvre de la clause de réciprocité que ces choix sont juridiquement pertinents ! Seule la Cour de justice des Communautés européennes pourrait, en cas de recours, formuler un avis qui ait une valeur juridique et qui soit opposable !

Si je vais jusqu'au bout de ma démonstration, je tiens à vous préciser, en reprenant les termes du rapport, que, pour les sociétés n'ayant pas l'assurance de pouvoir invoquer la clause de réciprocité, le recours à l'article 9 de la directive est inacceptable.

Le même raisonnement peut être tenu à propos des bons de souscription d'actions. Vous présentez l'article 11 du projet de loi comme un recours en cas d'OPA hostile. Sauf que l'efficacité de l'article 11 est subordonnée à la clause de réciprocité. Pour mettre en oeuvre l'article 11 sans avoir à convoquer une assemblée générale extraordinaire statuant - c'est une nouvelle bizarrerie juridique qui ne manquera pas de créer des contentieux juteux - dans les conditions d'une assemblée générale ordinaire, les sociétés cibles doivent démontrer que l'attaquant n'est pas vertueux.

Ainsi, les sociétés cibles ne pourront pas utiliser la pilule empoisonnée prévue, les bons de souscription d'action, en s'appuyant sur la clause de réciprocité sans prendre un risque certain en termes de contentieux communautaire.

Voilà, mes chers collègues, les arguments juridiques quelque peu complexes qui nous semblent devoir être retenus pour l'adoption de cet amendement. Il clair qu'à nos yeux, et aux yeux de beaucoup de juristes spécialistes du droit européen aujourd'hui, cette réciprocité ne pourra pas être invoquée avec une très grande assurance des initiateurs ou des chargés de défense, car il y a véritablement des désaccords profonds, une controverse, une incertitude. Dans ces conditions, il est clair que, pour la sphère financière, cette incertitude est source d'inaction. Par conséquent, il est préférable que cet amendement soit adopté et que l'article 11 soit supprimé.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Sur ce dernier point, je voudrais redire à M. François Marc que la controverse juridique a déjà eu lieu ; nous nous en sommes expliqué.

Il a bien voulu faire référence à mon rapport écrit. Je rappelle que celui-ci reprenait sa propre argumentation et celle des juristes qui l'ont partagée, mettant en regard des arguments qui me paraissaient déterminants. En particulier, la Commission européenne, gardienne du texte, en quelque sorte, me semble avoir plutôt conforté l'interprétation faite par le Gouvernement et, jusqu'ici, par le Sénat.

Par conséquent, cher collègue, je ne crois pas que nous puissions vous suivre.

Sur la notion de « réciprocité », je me suis exprimé en prenant la parole sur l'article, et je n'y reviens donc pas. Nous pourrons nous retrouver, je pense, sur cette présentation générale des choses et, surtout, sur cette expression forte de la volonté du législateur français.

Enfin, monsieur le ministre, permettez-moi de faire un rappel par souci de précision et pour la clarté des travaux préparatoires. Lorsqu'il est fait état de mesures dont la mise en oeuvre est susceptible de faire échouer l'offre, le texte vise, à notre sens, toute mesure statutaire ou conventionnelle, ou toute initiative portant sur la mise en oeuvre de dispositifs statutaires ou conventionnels.

En revanche, une action judiciaire qui serait, par exemple, dirigée contre une décision de l'autorité des marchés financiers ne doit pas être considérée, n'étant à la base ni de nature conventionnelle ni de nature statutaire, comme une mesure dont la mise en oeuvre est susceptible de faire échouer l'offre. Cela me semble assez évident, mais je voulais le préciser pour la clarté de la terminologie.

Monsieur le ministre, la commission maintient par conséquent son avis défavorable à l'encontre de l'amendement présenté par M. François Marc.

Debut de section - Permalien
Thierry Breton, ministre

Pour les mêmes raisons que celles qui ont été brillamment et très clairement rappelées par M. le rapporteur général, nous avons effectivement pris les précautions nécessaires, à l'occasion tant du groupe de travail présidé par M. Lepetit que de la consultation du Conseil d'État. C'est pourquoi, estimant que l'amendement n° 3 n'a pas lieu d'être, le Gouvernement émet un avis défavorable.

L'amendement n'est pas adopté.

L'article 11 est adopté.

Il est inséré, dans la section 5 du chapitre III du titre III du livre II du code de commerce, un article L. 233-40 ainsi rédigé :

« Art. L. 233-40. - Lorsqu'une société décide d'appliquer ou de mettre fin à l'application des dispositions prévues aux articles L. 233-35 à L. 233-39, elle en informe l'Autorité des marchés financiers, qui rend cette décision publique. Les conditions et modalités d'application du présent article sont fixées par le règlement général de l'Autorité des marchés financiers. » -

Adopté.

Dans le I de l'article 48 de la loi n° 2005-842 du 26 juillet 2005 pour la confiance et la modernisation de l'économie, après le mot : « actes », sont insérés les mots : « passés par ces personnes publiques, à la prise en location et à la gestion des biens ». -

Adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Les autres dispositions du projet de loi ne font pas l´objet de la troisième lecture.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. François Trucy, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de François Trucy

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous arrivons au terme de l'examen du projet de loi relatif aux offres publiques d'acquisition.

Le texte qui résulte des travaux du Sénat et de l'Assemblée nationale est, aux yeux du groupe de l'UMP, à la fois équilibré et novateur.

Il est équilibré parce qu'il définit, en cas d'OPA, des règles du jeu équitables pour les entreprises et donne une vraie portée à la notion de « réciprocité », en application de la directive européenne du 21 avril 2004 et dans le respect des droits des actionnaires.

Dans un contexte troublé par la multiplication d'OPA ou de rumeurs d'OPA visant de grandes entreprises françaises - ce point a été souligné à plusieurs reprises au cours du débat -, le Parlement a su éviter les écueils d'un formalisme juridique excessif et de la tentation du repli sur le sol national.

Sur le plan juridique, pour ce qui concerne la mise en oeuvre des mesures de défense prévues par l'article 9 de la directive européenne, l'Assemblée nationale s'est ralliée à la conception plus large de la clause de réciprocité défendue par le Sénat.

Le Sénat a lui aussi fait un pas en direction de l'Assemblée nationale pour ce qui concerne l'application des mécanismes de suspension de certaines clauses statutaires ou conventionnelles prévues par l'article 11 de la directive.

À cet égard, nous tenons tous à vous rendre hommage, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, pour le dialogue efficace et de qualité que vous avez su instaurer.

Grâce à ce texte, les entreprises françaises vont pouvoir se battre à armes égales avec leurs concurrentes étrangères et vont également disposer de meilleures protections en cas d'offre publique d'achat inamicale. C'est en ce sens que ce projet de loi est non seulement équilibré, mais également novateur.

En effet, l'obligation faite à l'éventuel initiateur de déclarer ses intentions à l'Autorité des marchés financiers et la possibilité pour la société cible d'émettre des bons de souscription d'actions vont dans ce sens.

L'initiateur d'une OPA sera notamment incité à rechercher un terrain d'entente avec la société cible, et ce dans le respect des principes de bonne gouvernance et d'égalité entre les actionnaires.

Au total, le Gouvernement et le Parlement sont parvenus à un bon équilibre entre la nécessité de donner aux entreprises françaises les moyens de développer leur dimension internationale et le besoin de disposer de mesures pour se défendre équitablement face à d'éventuelles offres inamicales, et ce dans le respect des droits des actionnaires.

Au-delà des règles juridiques, il appartient maintenant, d'une part, à nos entreprises de faire preuve de dynamisme et d'utiliser toutes leurs capacités et, d'autre part, à notre pays de leur donner les moyens de se développer.

Comme l'a très bien souligné le rapporteur, la meilleure défense d'une économie contre la prise de contrôle étrangère des grandes entreprises passe par le renforcement de l'attractivité de son territoire. À ce titre, la localisation en France des centres de décision économique est un enjeu essentiel, et nous devons porter une attention toute particulière à ses implications juridiques et fiscales.

Par ailleurs, le développement de la participation, le renforcement et la stabilisation de l'actionnariat salarié des entreprises vont également dans le bons sens. Le groupe de l'UMP tient d'ailleurs à saluer l'initiative qu'a prise le Gouvernement, le 16 mars dernier, dans ce domaine essentiel.

L'enjeu de ce projet de loi ne peut se réduire à ses seuls aspects juridiques ; il est aussi politique, économique et fiscal. C'est tout le sens de la politique engagée depuis 2002 par le Gouvernement, et c'est dans cet esprit que le groupe de l'UMP votera le texte qui nous est aujourd'hui soumis.

Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Chacun en convient aujourd'hui, le capitalisme financier est emporté dans une sorte de tourbillon. À cet égard, je citerai trois titres d'ouvrages récents : Quand le capitalisme perd la tête, du prix Nobel d'économie Joseph E. Stiglitz, Le capitalisme est en train de s'autodétruire, de Patrick Artus et Marie-Paule Virard, et Dérives du capitalisme financier, de Michel Aglietta et Antoine Rebérioux.

Ces références nous conduisent à penser qu'il faut accentuer l'effort de régulation, faute de quoi nos compatriotes risquent de se retrouver dans un système qui va connaître des dérives aux effets incommensurables.

Dans ces conditions, l'examen de tout texte relatif à ce sujet nous permet de voir comment nous pouvons améliorer la régulation. En l'espèce, avec le projet de loi relatif aux offres publiques d'acquisition, il nous a semblé qu'il nous fallait être vigilants et que nous devions affirmer un certain nombre de principes.

À la lumière des arguments échangés, il est clair qu'il existe deux façons d'aborder les choses, et la transposition de la directive européenne a été l'occasion de faire apparaître cette dualité.

La ligne libérale adoptée ne correspond pas à notre philosophie politique, et nous ne pouvons donc souscrire à la transposition de cette directive. Je regrette que nos amendements n'aient pas trouvé grâce aux yeux de la majorité. Pourtant, ils me semblaient pertinents et de nature à améliorer la régulation.

Dans ces conditions, nous voterons contre ce texte.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Je tiens à remercier tant nos collaborateurs de la commission des finances que ceux du Gouvernement, car l'examen de ce texte a été particulièrement long et complexe. Les exercices de transposition sont toujours semés d'embûches. Ils sont certes passionnants, mais présentent jusqu'à la fin des difficultés. Nous avons, me semble-t-il, cheminé au mieux et sommes parvenus à élaborer un texte équilibré et propice au développement tant de nos entreprises que du marché.

Je tiens également à remercier les nombreuses personnes que la commission des finances a auditionnées, car elles nous ont permis d'être bien informés des réalités économiques et financières.

Enfin, je veux vous remercier, mes chers collègues de la majorité comme de l'opposition, de votre présence active. Je crois que nous nous sommes efforcés, au cours de ce débat, de jouer notre rôle d'explicitation. Nous avons posé publiquement les arguments, comme il convenait de le faire. Nous avons fait au mieux pour que les spécialistes ou juristes qui se reporteront à nos travaux aient des repères précis et pour que nos travaux préparatoires permettent à ceux-ci de fonder, demain ou après-demain, leurs argumentations.

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Personne ne demande plus la parole ?...

Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.

Le projet de loi est adopté définitivement.

Debut de section - Permalien
Thierry Breton, ministre

Je tiens à remercier tout d'abord la Haute Assemblée d'avoir adopté ce projet de loi, et plus particulièrement le rapporteur qui a réalisé un travail remarquable.

Debut de section - Permalien
Thierry Breton, ministre

Le rapporteur général, bien sûr ! En effet, il est tout à la fois rapporteur sur ce texte et rapporteur général, et c'est en cette double qualité que je tiens à le remercier.

Si vous le permettez, je remercierai mes collaborateurs qui ont beaucoup travaillé avec les vôtres, monsieur le rapporteur, car ils ont tous largement contribué à améliorer ce texte.

Je tiens également à remercier tant les sénateurs de la majorité, qui ont en permanence soutenu les avancées que le Gouvernement a proposées, que ceux de l'opposition, qui ont contribué à ce que nous ayons un débat républicain, que j'estime de qualité, et qui montre, du reste, l'intérêt et l'importance du sujet. Même si nous n'avons pas toujours été d'accord, j'ai observé des convergences de vues sur le fond.

En conclusion, permettez-moi de revenir sur une remarque tout à fait pertinente - ce n'est pas une surprise ! -formulée tout à l'heure par M. le rapporteur général.

S'agissant de la libre circulation des capitaux dans le marché intérieur, vous avez noté avec une grande justesse, monsieur le rapporteur général, le fait que, dans le cadre d'OPA inamicales, ce sont in fine, ne l'oublions jamais, les actionnaires qui décident d'apporter ou non leurs titres. Si l'entreprise attaquée estime que l'offre faite à ses actionnaires ne va pas dans l'intérêt global de l'entreprise, de ses parties prenantes et de ses actionnaires, elle a souvent, il est vrai, envie de faire des contre-propositions pour présenter son projet et essayer de convaincre les actionnaires de l'assaillant. Vous avez raison, monsieur le rapporteur général, la non-réciprocité pose un problème de bonne circulation dans le marché intérieur. J'espère que la Commission va se pencher sur ce problème.

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi relatif aux organismes génétiquement modifiés (n°s 200, 258.).

Dans la suite de la discussion, nous en sommes parvenus à l'article 15.

Au premier alinéa de l'article L. 533-6, après le mot : « autorisations » sont ajoutés les mots : « de mise sur le marché ». La référence à : « la directive n° 90-220 (CEE) du 23 avril 1990 » est remplacée par la référence à : « la directive n° 2001-18 (CE) du 12 mars 2001 ».

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 30, présenté par M. Bizet, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit cet article:

Au premier alinéa de l'article L. 533-6:

1° après le mot : « autorisations » sont ajoutés les mots : « de mise sur le marché »;

2° les mots : « ou des autres États parties » sont remplacés par les mots: « ou d'autres États parties » ;

3° La référence à : » la directive n° 90-220 (CEE) du 23 avril 1990 » est remplacée par la référence à : » la directive n° 2001-18 (CE) du 12 mars 2001 ».

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - Permalien
François Goulard, ministre délégué à l'enseignement supérieur et à la recherche

Favorable.

L'amendement est adopté.

Après l'article L. 533-7 sont insérés les articles L. 533-8 à L. 533-12 ainsi rédigés :

« Art. L. 533-8. - Toute demande d'autorisation de dissémination volontaire est assortie du versement d'une taxe à la charge du demandeur. Le montant de cette taxe est fixé par arrêté du ministre chargé de l'agriculture en fonction de la nature de la demande et de la destination lucrative ou non, de la dissémination, dans la limite de 15 000€.

« Le recouvrement et le contentieux du versement institué au présent article sont suivis par les comptables du Trésor selon les modalités fixées aux articles 81 à 95 du décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique.

« Art. L. 533-9. - Le titulaire d'une autorisation de mise sur le marché établit périodiquement des rapports de surveillance, dans les conditions fixées par l'autorisation. Il transmet ces rapports à l'autorité administrative qui peut modifier les prescriptions du plan initial de surveillance.

« Art. L. 533-10. - En cas de modification, même non intentionnelle, des conditions de la dissémination volontaire, le titulaire de l'autorisation mentionnée à l'article L. 533-3 est tenu de prendre les mesures de nature à protéger la santé publique et l'environnement et d'informer l'autorité administrative.

« Art. L. 533-11. - Si le demandeur ou le titulaire de l'autorisation mentionnée à l'article L. 533-3 et à l'article L. 533-4 a connaissance d'éléments d'information nouveaux relatifs aux risques pour la santé publique ou l'environnement, il est tenu de prendre les mesures nécessaires à la protection de la santé publique et de l'environnement et d'informer l'autorité administrative.

« Art. L. 533-12. - Lorsque des informations complémentaires ou des connaissances scientifiques nouvelles font apparaître que la présence d'organismes génétiquement modifiés dont la dissémination volontaire a été autorisée fait courir un risque pour la santé publique ou l'environnement, l'autorité administrative peut :

« 1° Modifier les prescriptions initiales des autorisations prévues aux articles L. 533-3 et L. 533-4 ou en imposer de nouvelles ;

« 2° Suspendre les autorisations prévues aux articles L. 533-3 et L. 533-4 pendant le délai nécessaire à la mise en oeuvre des mesures propres à faire disparaître tout danger ou inconvénient. Pendant ce délai, l'autorité administrative peut, dans le cas d'organismes mis sur le marché, ordonner leur retrait de la vente ou en interdire l'utilisation ;

« 3° Retirer l'autorisation prévue à l'article L. 533-3 ; après accord des autres États membres de la Communauté européenne ou de l'autorité communautaire compétente, retirer l'autorisation prévue à l'article L. 533-4 ;

« 4° Ordonner la destruction des organismes et, en cas de carence du titulaire de l'autorisation ou du détenteur, y faire procéder d'office aux frais de l'intéressé. »

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 143, présenté par M. Le Cam, Mme Didier, MM. Billout et Coquelle, Mme Demessine et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi la seconde phrase du premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 533-8 du code de l'environnement :

Le montant de cette taxe est fixé par arrêté du ministre chargé de l'agriculture en fonction de la nature de la demande, de la destination lucrative ou non de la dissémination et du coût des mesures de surveillance agronomique et écologique de ces parcelles de cultures transgéniques, dans la limite de 50 000 €.

La parole est à Mme Évelyne Didier.

Debut de section - PermalienPhoto de Évelyne Didier

La dissémination d'OGM dans la nature nécessite, au vu des risques qu'elle présente, une surveillance constante de la part de scientifiques. Celle-ci est nécessaire pour s'assurer de l'impact réel de ces OGM sur la nature.

Cette biovigilance constitue une réelle exigence scientifique. Aussi proposons-nous que les demandeurs d'autorisation de dissémination volontaire d'OGM financent ces mesures au moyen du relèvement du montant de la taxe qu'ils doivent acquitter.

Debut de section - Permalien
François Goulard, ministre délégué

Le Gouvernement y est également défavorable.

Je rappelle qu'il s'agit essentiellement, dans notre pays, d'une demande d'expérimentation. C'est donc le monde de la recherche qui est largement concerné.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 173, présenté par M. Desessard, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit le texte proposé par cet article pour l'article L. 533-9 du code de l'environnement :

« Art. L. 533 -9 - I. Après la mise sur le marché d'un ou de plusieurs produits composés en tout ou partie d'organismes génétiquement modifiés, l'autorité administrative compétente procède à leur surveillance.

« Le titulaire de l'autorisation établit des rapports de surveillance conformément aux prescriptions fixées par l'autorisation. Ces rapports sont adressés à l'autorité administrative, qui peut modifier les prescriptions du plan initial de surveillance, et au conseil des biotechnologies.

« II. De façon à en garantir la transparence, les résultats des mesures de surveillance du titulaire ou du demandeur de l'autorisation, ainsi que ceux de l'autorité administrative sont rendus publics. L'autorité administrative rend également public l'ensemble des mesures prises dans le cadre du présent chapitre.

La parole est à M. Jean Desessard.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Cet amendement a pour objet de rappeler que la surveillance des OGM ne doit pas être du ressort exclusif du titulaire de l'autorisation, lequel est tenu d'établir un rapport de surveillance.

En effet, l'autorité administrative doit être compétente non seulement pour examiner le rapport du titulaire, mais également pour procéder elle-même à la surveillance, dont les résultats seront rendus publics. L'intervention de l'autorité administrative permet de garantir une meilleure prise en compte de l'intérêt général.

Conformément à l'article 20 de la directive 2001/18/CE, cet amendement prévoit l'obligation de transmettre les résultats de surveillance à l'autorité administrative compétente, la possibilité pour l'autorité administrative de modifier les prescriptions initiales du plan de surveillance ou encore la publication des résultats de la surveillance.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 134, présenté par M. Le Cam, Mme Didier, MM. Billout et Coquelle, Mme Demessine et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Au début de la première phrase du texte proposé par cet article pour l'article L. 533-9 du code de l'environnement, remplacer les mots :

le titulaire d'une autorisation de mise sur le marché

par les mots :

l'autorité administrative

La parole est à Mme Évelyne Didier.

Debut de section - PermalienPhoto de Évelyne Didier

Le principe de neutralité pendant la surveillance et les contrôles ne peut être correctement respecté si l'organisme de contrôle est aussi l'exploitant.

À défaut d'un moratoire, nous ne pouvons qu'approuver la décision du Gouvernement de publier périodiquement des rapports, à la condition que ceux-ci ne soient pas rédigés par le titulaire de l'autorisation. Auquel cas, ils risqueraient d'être entachés d'une certaine partialité. Notre souci est d'éviter que quelqu'un soit à la fois juge et partie.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 31, présenté par M. Bizet, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Compléter le texte proposé par cet article pour l'article L. 533-9 du code de l'environnement par un alinéa ainsi rédigé :

« L'autorité administrative adresse ces rapports au haut conseil des biotechnologies.

La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 31 et pour donner l'avis de la commission sur les amendements n° 173 et 134.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

L'amendement n° 31 vise à compléter l'information du haut conseil des biotechnologies en le rendant destinataire des rapports de surveillance. Ce retour d'information est de nature à renforcer la qualité d'expertise du conseil.

Par ailleurs, la commission émet un avis défavorable tant sur l'amendement n° 173 que sur l'amendement n° 134, ce dernier étant contraire à la directive 2001/18.

Debut de section - Permalien
François Goulard, ministre délégué

Le Gouvernement émet, comme la commission, un avis défavorable sur les amendements n° 173 et 134. En revanche, il est favorable à l'amendement n° 31, qui apporte une réponse aux questions soulevées par les auteurs des deux premiers amendements, puisque qu'il tend à placer, de manière très claire, l'ensemble de ces mesures de surveillance sous le contrôle de l'autorité administrative, avec le concours du conseil des biotechnologies. Par conséquent, les amendements n° 173 et 134 sont inutiles.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Pastor

Je tiens à rappeler que le groupe socialiste a décidé de ne pas prendre part au vote sur les articles 13 à 17, pour les raisons que j'ai déjà évoquées hier.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Charasse

M. Michel Charasse. C'était un communiqué de Ponce Pilate !

Rires.

Debut de section - Permalien
François Goulard, ministre délégué

Si Michel Charasse n'existait pas, il faudrait l'inventer !

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 174, présenté par M. Desessard, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :

I. - Dans le texte proposé par cet article pour l'article L. 533-10 du code de l'environnement, après les mots :

est tenu de prendre

insérer le mot :

immédiatement

II. - Dans le même texte, après les mots :

d'informer

insérer le mot :

immédiatement

La parole est à M. Jean Desessard.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Cet amendement a pour objet de préciser que l'autorité administrative doit être informée immédiatement de toute modification des conditions de dissémination volontaire, et non une fois que le titulaire de l'autorisation a pris des mesures. Il permet de rendre conforme le projet de loi à l'article 8 de la directive 2001/18.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 32, présenté par M. Bizet, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Dans le texte proposé par cet article pour l'article L. 533-10 du code de l'environnement, après les mots :

d'informer

insérer le mot :

immédiatement

La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 32 et pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 174.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

L'amendement n° 32 tend à préciser que l'information de l'autorité administrative doit être immédiate en cas de modification des conditions d'un essai en champ. Cette précision est du reste conforme aux exigences de la directive 2001/18.

De ce fait, la commission, considérant que son amendement est plus précis et plus conforme à la directive, demande le retrait de l'amendement n° 174. À défaut, elle émettra un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
François Goulard, ministre délégué

Le Gouvernement émet un avis défavorable - quoique favorable à son esprit - sur l'amendement n° 174 et un avis favorable sur l'amendement n° 32.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 33, présenté par M. Bizet, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit le texte proposé par cet article pour l'article L. 533-11 du code de l'environnement :

« Art. L. 533 -11.- Si le demandeur ou le titulaire des autorisations mentionnées aux articles L. 533-3 et L. 533-4 a connaissance d'éléments d'information nouveaux relatifs aux risques pour la santé publique ou l'environnement, il est tenu de prendre les mesures nécessaires à la protection de la santé publique et de l'environnement et d'informer immédiatement l'autorité administrative. »

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

Cet amendement est dans le même esprit que l'amendement n° 32. Il a pour objet une modification rédactionnelle et vise à préciser que l'information de l'autorité administrative doit être immédiate, conformément aux dispositions de la directive.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 175, présenté par M. Desessard, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :

I. Dans le texte proposé par cet article pour l'article L. 533-11 du code de l'environnement, après les mots :

est tenu de prendre

insérer le mot :

immédiatement

II. Dans le même texte, après les mots :

d'informer

insérer le mot :

immédiatement

La parole est à M. Jean Desessard.

Debut de section - Permalien
François Goulard, ministre délégué

Le Gouvernement émet un avis favorable sur l'amendement n° 33 et un avis défavorable sur l'amendement n° 175.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à M. Michel Charasse, pour explication de vote sur l'amendement n° 33.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Charasse

M. le rapporteur indique dans son amendement n° 33 que le demandeur ou le titulaire des autorisations « est tenu de prendre les mesures nécessaires à la protection de la santé publique et de l'environnement ». Et s'il ne peut pas ? S'agissant de mesures techniques, il peut ne pas les connaître. Que se passe-t-il alors ? Que fait-il si lesdites mesures relèvent de techniques qui n'ont pas encore été inventées ou qui sont à l'étude ?

En outre, je voudrais vous suggérer, monsieur le rapporteur, de rédiger comme suit la fin de l'amendement : « d'en informer immédiatement l'autorité administrative. » On peut en effet supposer que les mesures dont il est ici question sont celles que le demandeur ou le titulaire des autorisations aura prises pour la protection de la santé publique et de l'environnement. C'est purement rédactionnel.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

Ce dernier point ne porte guère à conséquence.

En revanche, pour répondre à la question de fond soulevée par M. Charasse, dont la réflexion est pertinente, je dirai qu'à l'impossible nul n'est tenu. En l'occurrence, on peut estimer que seront prises toutes les « mesures nécessaires à la protection de la santé publique et de l'environnement. »

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

En conséquence, l'amendement n° 175 n'a plus d'objet.

L'amendement n° 135, présenté par M. Le Cam, Mme Didier, MM. Billout et Coquelle, Mme Demessine et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

À la fin du premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 533-12 du code de l'environnement, remplacer le mot :

peut

par le mot :

doit

La parole est à Mme Évelyne Didier.

Debut de section - PermalienPhoto de Évelyne Didier

Lorsque des informations clairement établies font apparaître la présence de risques, l'autorité administrative doit prendre des précautions.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

La commission émet un avis défavorable, car cet amendement est incohérent.

Debut de section - Permalien
François Goulard, ministre délégué

Il émet un avis défavorable. En effet, l'article prévoit toutes les mesures de précaution possibles et imaginables.

L'amendement n'est pas adopté.

L'article 16 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

Les deux premiers sont identiques.

L'amendement n° 62 rectifié est présenté par MM. Beaumont, Courtois, Emorine et J. Blanc, Mme Bout, MM. Doublet, Goulet, Lardeux, Revol, Saugey et Trucy.

L'amendement n° 176 est présenté par M. Desessard, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l'article 16, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans l'aire géographique d'une appellation d'origine contrôlée, il est interdit de mettre en culture des variétés génétiquement modifiées pour la fabrication du produit bénéficiant de cette appellation.

La parole est à M. René Beaumont, pour défendre l'amendement n° 62 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de René Beaumont

À première vue, cet amendement pourrait apparaître comme contraire à la philosophie générale de ce texte, puisqu'il semble préjuger la dangerosité des OGM sur un plan sanitaire.

Aussi, je voudrais le resituer dans son contexte. Ayant quelque expérience avec les OGM en milieu rural, et compte tenu de ma formation en biologie, je crois pouvoir dire de façon certaine que, dans l'état actuel des connaissances, les précautions que vise à mettre en place le présent texte sont non seulement suffisantes, mais encore de nature à rassurer les populations. C'est d'ailleurs bien ce à quoi il vise.

Il est vrai que mon amendement aurait plutôt tendance à les inquiéter.

Debut de section - PermalienPhoto de René Beaumont

Il n'en demeure pas moins que nous devons prendre quelques précautions, en premier lieu en matière sanitaire. Le texte s'y emploie largement. En revanche, un certain nombre de gens, dans ce pays, ont depuis des années la phobie des OGM - ce n'est pas notre faute, à tout le moins pas la mienne ni celle de ceux qui siègent à la droite de cet hémicycle. Ces personnes ont décrété que les OGM étaient dangereux et que la présence même à côté de chez soi d'un champ de plantes génétiquement modifiées pouvait représenter un danger. J'ai même lu dans certaines publications qu'on pouvait, en mangeant des produits OGM, modifier son propre patrimoine génétique. C'est n'importe quoi !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Charasse

M. Michel Charasse. Diafoirus a pignon sur rue !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de René Beaumont

Ce sont des vérités scientifiques dignes d'un journal du soir, comme l'a dit M. le ministre l'autre jour ! (M. le ministre délégué sourit.) Il n'en demeure pas moins que nous devons prendre en considération cette phobie, que ce texte contribuera d'ailleurs progressivement à réduire. En l'occurrence, nous devons faire preuve de prudence en matière économique.

Certes, nous souhaitons que les choses évoluent. Les citoyens français, comme d'autres, se familiariseront prudemment avec les OGM. Ils y sont bien obligés dans la mesure où l'on en trouve dans le monde entier. Nous ne pouvons pas être les seuls à les refuser. Cela ne serait pas défendable, ne serait-ce que sur un plan strictement sanitaire. Mais, dans cette attente, je vous invite à être prudents pour des raisons économiques. Si un journaliste mal intentionné...

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Pasqua

M. Charles Pasqua. C'est difficile à trouver !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de René Beaumont

...s'aperçoit un jour que, dans une zone d'appellation d'origine contrôlée quelle qu'elle soit, un organisme végétal ou animal génétiquement modifié entre dans le processus de fabrication d'un produit, alors vous pouvez être certain que ce dernier sera condamné à tout jamais. Je rappelle que l'appellation d'origine contrôlée représente dans notre pays ce qu'il y a de mieux en matière de qualité. Tous les autres pays européens nous l'envient, puisque l'AOC n'existe qu'en France. Le public ne comprendrait absolument pas qu'un organisme génétiquement modifié - et présumé dangereux - entre dans le processus de fabrication d'un produit AOC, pour lequel il paie d'ailleurs un certain prix. Nos AOC seraient alors dans une situation très dangereuse.

Debut de section - PermalienPhoto de René Beaumont

Le risque serait colossal. Je suis élu du département de Saône-et-Loire, qui est très riche en AOC diverses.

Debut de section - PermalienPhoto de René Beaumont

Merci de le reconnaître !

M. le rapporteur m'a dit en commission que j'allais peut-être créer des sanctuaires anti-OGM sur l'ensemble du territoire national et que, en raison du nombre des AOC, de nombreuses zones leur seraient interdites.

Il ne s'agit pas de cela ! Il faut bien situer les choses. Mon amendement porte simplement interdiction de produire des OGM pouvant intéresser le seul produit fabriqué, à l'exclusion de tout autre. Je m'explique : dans mon département, dans le secteur de l'appellation d'origine « volailles de Bresse », l'adoption de mon amendement aurait pour conséquence d'interdire l'alimentation des volailles par des OGM. En clair, les volailles ne pourraient être alimentées, dans cette zone, par du maïs génétiquement modifié au motif qu'on pourrait considérer qu'il les contamine.

S'il serait impossible que des cépages de vigne à organismes génétiquement modifiés existent dans les vignobles situés en zone d'appellation contrôlée vignobles, c'est-à-dire dans le Chalonnais, le Mâconnais ou les Côtes de Beaune, en revanche, on pourrait très bien en trouver au coeur de la zone de Bresse, de l'autre côté de la Saône.

Il ne s'agit donc pas d'instaurer une sanctuarisation ; il convient simplement d'opérer une prescription sélective sur les organismes, animaux et végétaux génétiquement modifiés entrant ou pouvant entrer dans la production d'un produit d'AOC.

Cette prudence serait à mon avis utile aujourd'hui. Comme je l'ai dit tout à l'heure, ce texte relatif aux OGM est très important, voire fondateur, puisqu'il favorisera l'évolution de la conception des OGM dans notre société.

Bien sûr, dans quelques années, l'amendement que je vous propose aujourd'hui ne sera sans doute plus nécessaire. Mais pour l'instant, il me semble très utile. En matière viticole, par exemple, le danger vient du fait que les décrets d'application des AOC sont très anciens. Aucun d'entre eux ne fait mention aujourd'hui, dans la viticulture, d'organisme génétiquement modifié, et pour cause ! Les crus sont bien antérieurs à la découverte même des OGM.

Nous n'aurions donc aucun moyen de nous prémunir contre un risque commercial - et uniquement contre un tel risque, j'insiste sur ce point.

Or en France, je le sais, il existe actuellement des cépages génétiquement modifiés. D'ailleurs, je le dis avec force, cette technique devrait nous être fort utile demain pour lutter contre les viroses nombreuses et diverses ...

Debut de section - Permalien
François Goulard, ministre délégué

Absolument !

Debut de section - PermalienPhoto de René Beaumont

... qui peuvent affecter la vigne, certaines étant considérées par les spécialistes comme particulièrement graves et pouvant être équivalentes au phylloxéra.

Debut de section - Permalien
François Goulard, ministre délégué

Absolument !

Debut de section - PermalienPhoto de René Beaumont

Ces OGM pourraient donc constituer un vrai remède contre ces viroses.

Debut de section - PermalienPhoto de René Beaumont

Mais si, en dépit des progrès de la science, l'opinion publique entend que le vin français, quelque part dans le monde ou même en France, est produit avec des cépages OGM, nous pourrons tirer un gros trait rouge sur les productions françaises !

Mon amendement est donc inspiré par la prudence dont nous devons faire preuve en matière commerciale, étant entendu que les bienfaits du projet de loi sur le plan sanitaire me semblent indéniables.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à M. Jean Desessard, pour présenter l'amendement n° 176.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Si mon amendement est identique à celui que M. Beaumont vient de présenter, je ne partage pas son argumentation, puisque je suis opposé aux OGM. Je pense en effet que ces derniers porteront atteinte à la qualité de l'agriculture française, aux labels, et qu'ils ne seront pas rentables économiquement.

Cet amendement a pour objet d'interdire, dans une zone bénéficiant d'une appellation d'origine contrôlée, la culture de variétés OGM qui entreraient dans la fabrication du produit bénéficiant de ladite appellation.

Il est vraisemblable que, si une trace d'OGM était trouvée dans un produit labellisé AOC, celui-ci perdrait le bénéfice de son appellation.

Je suis contre la commercialisation des OGM. Et si le projet de loi est adopté, il faudra mettre en place un maximum de sanctuaires pour protéger l'agriculture de qualité.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Charasse

M. Michel Charasse. C'est la Bernadette Soubirous des OGM !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 198 rectifié ter, présenté par MM. Amoudry, Soulage, Zocchetto et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :

Après l'article 21, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. A l'intérieur du périmètre des productions bénéficiant d'une appellation d'origine contrôlée, d'une appellation d'origine protégée ou d'une indication géographique protégée, l'autorité administrative compétente peut, sur propositions des organisations professionnelles et interprofessionnelles concernées, interdire totalement ou sur des périmètres délimités la mise en culture de variétés génétiquement modifiées.

II. Un décret en Conseil d'État précise les modalités d'application de la présente disposition, et notamment la liste des organisations professionnelles et interprofessionnelles habilitées à proposer les zones de protection et leur périmètre.

La parole est à M. Jean-Paul Amoudry.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Amoudry

Les productions bénéficiant de signes de qualité - AOC, indications géographiques protégées, ou IGP, etc. - obéissent à des cahiers des charges très stricts, visant à garantir au consommateur un niveau élevé de qualité et d'authenticité, et au producteur une valeur ajoutée en rapport avec les soins apportés à l'élaboration du produit et avec les exigences qui lui sont imposées.

Parmi ces exigences, figurent en particulier dans les cahiers des charges l'interdiction de certains aliments du bétail - par exemple, l'ensilage - et l'obligation de l'emploi exclusif d'herbages et de fourrages de terroir.

La dissémination de plantes génétiquement modifiées à l'intérieur de territoires s'étant dotés de telles politiques de labellisation serait, à mes yeux, en totale contradiction avec les règles professionnelles et pratiques en vigueur, fondées sur l'attachement des producteurs comme des consommateurs à la traçabilité et au respect de l'authenticité.

Je voudrais enfin mettre en garde contre le danger que ferait courir aux produits sous signes de qualité - AOC en tête - le doute qui pourrait s'installer dans l'esprit du consommateur dès lors que la pratique des cultures d'OGM en plein champ pourrait être admise à l'intérieur des périmètres de productions labellisées.

Mon amendement a donc pour objet d'assurer la pérennité de cette agriculture de terroir dynamique, diversifiée et de qualité, que le monde rural français a su construire avec beaucoup d'intelligence et de persévérance, souvent au prix d'innombrables efforts.

C'est pourquoi je souhaiterais que le Sénat mette le présent projet de loi en cohérence avec les prescriptions figurant dans les cahiers des charges des interprofessions et filières, en donnant à celles qui le souhaiteraient la faculté de demander l'interdiction des cultures OGM en plein ciel sur tout ou partie de l'aire de l'AOC, l'AOP ou de l'IGP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

Ces trois amendements traitent du même thème. Nous comprenons la préoccupation de nos collègues concernant les labels AOC. Je rappelle que l'ensemble de la commission des affaires économiques est naturellement très attentive à la défense des AOC, comme l'ont illustré les débats qui ont eu lieu en son sein.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Blanc

Vous avez été un remarquable rapporteur sur les AOC !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

Je vous remercie de le souligner, monsieur Blanc.

Il me semble toutefois que la préoccupation légitime des auteurs de ces trois amendements n° 62 rectifié, 176 et 198 rectifié ter est satisfaite par le droit en vigueur.

En effet, l'article L. 251-1 du code rural prévoit explicitement la possibilité, pour l'Institut national des appellations d'origine, l'INAO, de proposer des mesures d'interdiction ou de prescriptions particulières en matière de cultures d'OGM et d'AOC.

Cet article dispose en effet ceci : « Dans l'intérêt de la santé publique et de l'environnement, l'autorité administrative peut, par arrêté, prendre [...] des mesures d'interdiction, de restriction ou de prescriptions particulières concernant la mise sur le marché, la délivrance et l'utilisation des produits mentionnés au présent article ».

J'ajoute que les membres du groupe d'étude sénatorial « Vigne et vin », présidé par Gérard César, auditionneront la semaine prochaine Mme Sophie Villers, directrice de l'INAO, qui pourra leur apporter des précisions à cet égard.

Je comprends l'émotion de nos collègues sur ce point précis, parce que les différents produits sous signes de qualité - AOC, indication géographique de provenance - concernent de 20 % à 22 % des agriculteurs de ce pays. Mais l'image attachée aux signes de qualité dépasse très largement les agriculteurs qui s'y consacrent.

Comme l'a souligné notre collègue Jacques Blanc, que je remercie, je suis très attentif à cette question. J'ai d'ailleurs remis un rapport sur ce point précis au Premier ministre. Dans le débat qui a régulièrement cours au sein de l'Organisation mondiale du commerce, l'Europe, la France en particulier, protège et privilégie les indications géographiques de provenance. Et nous avons bon espoir, lors d'un prochain round, de pouvoir faire valoir cette exception culturelle et agricole française, que des pays comme les États-Unis commencent à trouver pertinente.

Je salue l'honnêteté intellectuelle de notre collègue René Beaumont, qui repose sur une réelle compétence scientifique. Mais je pense que c'est à l'INAO seul, qui est l'organisme présidant à la politique de qualité dans ce pays, de prendre les mesures nécessaires sur ce point.

Sans aller jusque là - René Beaumont n'a pas franchi cette limite -, je profite de cette occasion pour dire aux dix-huit présidents de régions françaises qui ont cru bon d'annoncer qu'il n'y aurait pas d'OGM sur leur territoire...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

Effectivement, monsieur Charasse. Vous avez bien perçu quel était l'effet d'annonce de ces présidents de régions !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Charasse

Seuls les imbéciles peuvent se laisser prendre !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

Eh bien, cela ne va pas nous arriver, parce qu'une telle mesure serait en opposition totale avec les décisions de la Commission européenne et avec l'avis qu'a rendu la Cour de justice des Communautés européennes à l'Autriche, qui a voulu se déclarer - pardonnez-moi l'expression - « OGM free » !

À cet égard, Mme Voynet avait accepté la directive 2001/18/CE sous le gouvernement Jospin. N'allons pas jusque-là. Il n'est pas possible que les régions, les départements, voire éventuellement quelques communes, soient « OGM free ». Ce n'est qu'une politique d'affichage !

Par conséquent, je demanderai à MM. Beaumont, Desessard et Amoudry de bien vouloir retirer leurs amendements. À défaut, la commission sera contrainte d'émettre un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
François Goulard, ministre délégué

À la suite de M. le rapporteur, je voudrais apporter un certain nombre de précisions.

Mais je dirai au préalable que la question posée par les auteurs des amendements est particulièrement pertinente. Les exposés que MM. René Beaumont et Amoudry ont fait voilà quelques instants - pardonnez-moi, monsieur Desessard -, posent très clairement le problème.

Il ne s'agit pas d'une inquiétude relative aux risques pesant sur le secteur sanitaire ou environnemental. Le cadre de la loi permet, de ce point de vue, de donner toutes garanties.

Il s'agit très précisément de la réputation de nos producteurs vis-à-vis de l'opinion publique, pas seulement nationale, mais également mondiale. Leurs productions sont exportées, respectées, et valorisées dans le monde entier. Il s'agit de faire en sorte que leur image ne soit pas atteinte, à tort, par une suspicion liée à la proximité d'organismes génétiquement modifiés. Mais, chacun le sait, une réputation se forge quelquefois sur des considérations parfaitement irrationnelles.

Nous le savons, il s'agit d'un enjeu majeur pour nombres de nos territoires, dont la production est essentielle à leur équilibre économique.

Nous devons donc considérer cette question avec le plus grand sérieux, comme nous abordons l'ensemble des sujets qui concernent les OGM, c'est-à-dire l'envisager sous l'angle économique, sanitaire et environnemental. Ainsi, le débat est bien posé.

M. le rapporteur a eu raison de dire qu'une mesure d'interdiction générale touchant une large partie de notre territoire - cette partie n'est pas figée, puisque de nouvelles AOC, AOP ou IGP sont reconnues - enfreindrait certainement la législation européenne.

Nous serions en délicatesse évidente avec le texte et l'esprit des directives, et par conséquent exposés à un recours qui nous mettrait évidemment dans la pire des situations, puisque nous serions alors démunis de tout moyen d'action et empêchés de protéger nos appellations d'origine.

C'est donc une question délicate, et il faut trouver la solution juridique adaptée au problème que vous avez très justement posé. Nous l'avons trouvée tout simplement en lisant la législation existante. Cela prouve, s'il en était besoin, que nos textes sont plutôt satisfaisants.

En l'occurrence, M. le rapporteur vous l'a énoncé, la loi actuelle permet de prendre, en matière d'OGM, des mesures d'interdiction, de restriction ou de prescriptions particulières. Et un alinéa de l'article L. 251-1 du code rural prévoit que, « dans l'intérêt de la protection des appellations d'origine contrôlée, l'Institut national des appellations d'origine peut proposer à l'autorité administrative les mesures prévues à l'alinéa précédent ».

J'attire votre attention, mesdames, messieurs les sénateurs, sur un point très spécifique. D'une façon générale, les mesures de restriction peuvent être prises pour des motifs touchant soit à la santé humaine, soit à la protection de l'environnement.

Mais, en l'espèce, on parle non pas d'intérêt sanitaire et de protection de l'environnement, mais de « l'intérêt de la protection des appellations d'origine contrôlée ». Il s'agit donc bien de la question que vous posez, à savoir la protection de l'image, et donc des intérêts économiques des producteurs et des régions concernées, ...

Debut de section - Permalien
François Goulard, ministre délégué

...ainsi que leur réputation. Nous pouvons prendre des mesures restrictives particulières sur proposition de l'INAO.

J'ajoute, monsieur Amoudry, que cette disposition est applicable aux AOP et aux IGP dans les mêmes conditions, selon l'analyse effectuée par les services de nos ministères.

Nous avons là une riposte adaptée, qui constitue un moyen nous permettant, sans encourir les foudres de Bruxelles, de défendre totalement l'intérêt de nos appellations d'origine contrôlée.

Mesdames, messieurs les sénateurs, le Gouvernement est conscient de l'importance de ce problème, que vous avez soulevé à juste titre et qui a fait l'objet de nombreux échanges. Il est résolu - et je m'en suis entretenu avec mon collègue ministre de l'agriculture et de la pêche, également sensible à ce problème - à mettre en oeuvre sur une large échelle toutes les mesures nécessaires afin d'atteindre l'objectif que nous avons tous d'assurer cette protection essentielle de nos appellations d'origine contrôlée, et il fera preuve de la plus grande vigilance à cet égard.

Je tiens à vous donner toutes les garanties en ce sens, en soulignant combien la discussion de ce matin est utile.

Debut de section - PermalienPhoto de René Beaumont

Je suis sensible aux propos tenus par M. le rapporteur et, surtout, aux engagements pris par M. le ministre.

Je comprends bien qu'une mesure législative de simplification, que nous appelions de nos voeux pour régler le problème, serait en contradiction avec les normes européennes.

J'indique d'ailleurs au passage que cela ne m'étonne pas, parce que je n'ai jamais perçu de la part des instances européennes une affection particulière pour les AOC françaises !

Debut de section - PermalienPhoto de René Beaumont

M. René Beaumont. Cela étant, je me range bien évidemment à vos propositions, monsieur le ministre, avec néanmoins une petite supplique : pourriez-vous attirer l'attention de vos interlocuteurs au sein de l'INAO - et nous ne manquerons pas de le souligner nous-mêmes à l'occasion de l'audition de la directrice de cet organisme - sur le débat que nous avons aujourd'hui au Sénat et ses conclusions, de façon qu'ils soient bien conscients des responsabilités qui sont désormais les leurs dans la défense de leurs AOC.

M. le ministre délégué fait un signe d'assentiment.

Debut de section - PermalienPhoto de René Beaumont

Je retire cet amendement, monsieur le président.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 62 rectifié est retiré.

Monsieur Desessard, l'amendement n° 176 est-il maintenu ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Après avoir souligné que cet amendement était excellent, formidable, et félicité au passage M. Beaumont pour son honnêteté intellectuelle, M. le rapporteur et M. le ministre délégué ont dit que la disposition proposée posait néanmoins un problème...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

... dans la mesure où elle risquait de faire l'objet d'un recours de la part de la Commission européenne.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Vous avez alors indiqué, monsieur le ministre, que le Gouvernement - parce que ses membres sont intelligents - avait trouvé une astuce pour apporter une solution au problème. Comme nous n'avons pas le droit de protéger les appellations d'origine contrôlée, ou un type d'agriculture - vous ne pouvez en effet vous appuyer que sur des arguments liés à la santé ou à la défense de l'environnement -, vous entendez demander à l'INAO d'intervenir afin d'obtenir l'interdiction souhaitée.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Mais si l'INAO interdit la culture d'OGM dans 20 % des territoires - pourcentage indiqué par M. le rapporteur -, pensez-vous vraiment qu'il n'y aura pas de recours, monsieur le ministre ?

Je préfère que la question soit tranchée tout de suite afin de préserver la qualité des AOC, sans quoi cet objectif ne sera pas atteint, malgré toute votre vigilance.

Je maintiens donc mon amendement, monsieur le président, ce qui permettra à M. Jacques Blanc, qui semble souhaiter intervenir, de le faire. Il arrive trop souvent qu'il retire ses amendements avant que je puisse moi-même intervenir !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Amoudry

Tout d'abord, malgré la précision et la pertinence des déclarations de M. le ministre et de M. le rapporteur, que j'ai écoutées très attentivement, leur commentaire de l'article L. 251-1 du code rural me laisse un peu sur ma faim, si j'ose dire.

En effet, le deuxième alinéa du V dispose ceci : « Dans l'intérêt de la protection des appellations d'origine contrôlée, l'Institut national des appellations d'origine peut proposer à l'autorité administrative les mesures prévues à l'alinéa précédent ». Or, ce dernier alinéa prévoit, notamment, « la mise sur le marché, la délivrance et l'utilisation des produits », mais aucunement l'implantation en plein ciel.

Pour ma part, je ne vois pas comment le dispositif légal existant peut assurer la protection économique souhaitée dans la région d'élevage où je vis. Ainsi que notre collègue M. Beaumont l'a souligné, il ne s'agit pas du tout de santé. Je veux bien admettre que toutes les mesures figurant dans ce projet de loi sont extrêmement solides.

Ensuite, vous avez précisé, monsieur le ministre, que l'expression « appellations d'origine contrôlée » implique aussi les IGP et les AOP. Toutefois, je souligne, sur un plan strictement formel, que ces dernières ne figurent pas dans le texte.

Enfin, si l'Institut national des appellations d'origine a toute qualité pour intervenir au nom de toutes les AOC et autres instances soutenant les labels, il me paraîtrait judicieux, en vertu du principe de subsidiarité, que les filières et interprofessions qui suivent ces questions localement, sur le terrain, puissent également s'exprimer.

Debut de section - Permalien
François Goulard, ministre délégué

Elles sont représentées à l'INAO !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Amoudry

Il serait dommage d'exclure du texte la mention de ce rôle tout à fait fondamental des interprofessions, puisque ce sont bien elles qui sont à l'origine de la construction de nos AOC, et personne d'autre. Il importe de le reconnaître.

Je préfère donc retenir ce principe de subsidiarité que l'Europe nous a enseigné, plutôt que le risque de la voir censurer nos dispositions. C'est la raison pour laquelle je souhaite que le Sénat se prononce sur cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à M. Jacques Blanc, pour explication de vote sur l'amendement n° 176.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Blanc

Monsieur le ministre, vous avez éclairé le débat.

Tout d'abord, il faut se débarrasser de la culture des phobies ou des anxiétés par rapport aux dangers sanitaires. MM Beaumont et Amoudry l'ont dit clairement.

Il s'agit de respecter l'esprit même des AOC. C'est la France, d'ailleurs, qui les a installées et a mis près d'un siècle pour les faire admettre par la Commission européenne. Un rapport très intéressant a été présenté par notre collègue Jean Bizet et, la semaine dernière, le Conseil des ministres de l'environnement, à Bruxelles, a conforté les AOP, symboles européens équivalents aux AOC et associés aux IGP.

Dans le cadre des systèmes de qualité, je regrette que la France n'ait pas davantage utilisé la mention, qui est différente, de Spécialité traditionnelle garantie, ou STG.

L'AOP et l'IGP constituent un lien direct entre la qualité du produit et le terroir où les hommes le cultivent. Elles correspondent à des règles relatives aux techniques de production et de transformation que s'imposent les producteurs dans l'aire d'origine du produit définie par ces labels.

Nous sommes donc en face d'une réalité que nous voulons défendre, celle de la signature de qualité liée au terroir et aux modalités de production. Il est en effet important d'y associer les interprofessions, mais il appartient à ces dernières, à travers l'INAO, de s'imposer des règles interdisant l'utilisation de telle ou telle pratique et donc de telle ou telle manipulation génétique.

Il ne s'agit pas d'entrer dans le faux débat selon lequel « on ne veut pas de ces produits parce qu'ils sont dangereux ». Il s'agit de dire : « on veut respecter les règles qui président à la réalité même des AOC ». Cela a été indiqué, mais j'insiste sur ce point pour éviter de nouvelles tentatives pour entacher le débat et cultiver l'obscurantisme.

Nous sommes là face à une volonté politique de défense des AOC.

Par conséquent, si j'ai bien compris - et je demande à M. le ministre et à M. le rapporteur de nous le confirmer -, nos amendements n'ont plus d'utilité parce que le présent projet de loi est compatible avec le code rural.

Ce texte ne met pas en cause la capacité de l'INAO, en liaison avec les interprofessions, d'interdire telle ou telle méthode ou telle ou telle catégorie de production dans une aire reconnue à l'origine de l'AOC ou de l'AOP.

C'est là un point capital. Si vous nous confirmez qu'il n'y a pas d'opposabilité entre ces deux textes, l'amendement n° 62 rectifié que j'avais cosigné et l'amendement n° 198 rectifié que j'aurais pu cosigner n'ont plus de raison d'être. En effet, vous nous garantissez que l'objectif recherché sera atteint.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Blanc

Je le répète, n'entachons pas le débat avec des interprétations risquant d'être fausses, dans un sens ou dans l'autre.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Blanc

C'est tout le mérite de ce texte de sortir de l'obscurantisme...

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Blanc

... pour faire place à des analyses objectives, scientifiques, et défendre les signes de qualité de notre agriculture. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

C'était bien long pour dire : « je le retire » ! (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à Mme Évelyne Didier, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Évelyne Didier

Ce débat est vraiment très intéressant à plusieurs égards.

Mais je constate qu'il est plein de contorsions. En effet, nous devrions tous voter cet amendement. Ce que nous essayons de défendre, au-delà des problèmes de technique ou de politique, c'est la qualité. Or, les AOC, en général, traduisent cette volonté.

Il s'agit du respect du terroir, de certaines techniques, mais aussi de la qualité en matière de goût ou au regard de la santé, donc de la mise en valeur de produits vraiment très intéressants à tous points de vue.

On essaie de nous faire croire qu'il faut éviter la présence d'OGM dans les produits pour des raisons diverses, notamment pour faire plaisir à Bruxelles ! Non ! Nous avons la volonté de préserver la qualité des produits dans leur entier.

C'est pourquoi je ne comprends vraiment pas toutes ces contorsions éludant le fond véritable du débat.

Bien entendu, nous voterons cet amendement pour protéger le travail de nos agriculteurs, car il ne faut pas oublier cet aspect du problème. Sinon, comment pourrons-nous développer d'autres AOC ? Je pose la question.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Raoul

Je me permets d'entrer dans cette discussion, car l'un de ces amendements vise, en fait, à insérer un article additionnel après l'article 21 ; mais cela ne change en rien notre décision de ne pas prendre part au vote, car il s'agit bien, dans les deux amendements examinés, d'une mise en culture ; or nous ne sommes pas dans ce schéma.

Je ne résiste pas au plaisir de relever les contradictions de nos collègues René Beaumont et Jacques Blanc.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Raoul

M. Daniel Raoul. Ils risquent, si vous me permettez une comparaison d'ordre médical, « un claquage des adducteurs »

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Raoul

C'est pourquoi, pour notre part, nous demandons une évaluation des essais, et que des prescriptions interviennent avant la mise en culture.

Mon cher René Beaumont, je vous remercie de la démonstration que vous avez faite : nous n'aurions pas fait mieux !

Debut de section - PermalienPhoto de Évelyne Didier

Les pollens s'arrêtent bien sûr aux frontières départementales !

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à M. Jean-Marc Pastor, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Pastor

Je n'avais pas prévu de prendre la parole, mais l'occasion est trop belle !

Vous voulez protéger des OGM les parcelles de notre territoire produisant des produits de qualité : ce n'est pas avec une telle démarche que vous allez assurer la promotion desdits OGM ! Une fois de plus, le doute est permis sur cette question.

C'est pourquoi, comme vient de le rappeler à l'instant Daniel Raoul, nous avons besoin, avant la mise en culture, d'une étape d'évaluation par rapport aux produits de terroir, aux appellations d'origine et aux indications géographiques protégées, qui constituent l'identité même de l'agriculture et de l'agro-alimentaire français. Vous ne pourrez pas assurer la promotion des OGM en prévoyant de les exclure de ce qui doit être le fleuron de la France !

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à M. Michel Charasse, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Charasse

M. Michel Charasse. Je suis, comme mes amis, sensible à la protection des AOC, mais il faut bien sûr veiller à n'être excessif ni dans un sens ni dans l'autre, et garder un certain équilibre. En effet, si l'on va au bout du raisonnement, on ne peut rien planter ailleurs qu'à Mayotte, à Saint-Pierre-et-Miquelon et à Wallis-et-Futuna, où il n'y a pas d'AOC !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Charasse

Je vous ai écouté avec attention, monsieur le ministre, ainsi que notre collègue Jean-Paul Amoudry, concernant les organisations professionnelles et interprofessionnelles.

Je suppose tout de même que, en dehors des instructions que vous allez communiquer à l'INAO, les organisations professionnelles et interprofessionnelles pourront participer aux consultations nationales évoquées hier soir. Je suppose également que vous prévoirez dans le règlement du Haut Conseil la possibilité pour certaines organisations ou personnalités d'être entendues.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Charasse

Certes, mais il vaut mieux que cela figure dans le règlement.

Il convient donc de prévoir tout un dispositif pour que ceux qui ont des craintes - et non pas des fantasmes -, s'agissant de la réputation des productions en AOC, notamment, puissent les faire valoir et que les décisions administratives d'autorisations soient prises en toute connaissance de cause.

Dernier point, je voulais dire à Jean Desessard que j'ai eu beaucoup de plaisir à l'écouter. Lors de l'examen de la loi relative au développement des territoires ruraux, il avait présenté un amendement visant à supprimer le foie gras à cause de la torture infligée aux oies et aux canards pour fabriquer ce succulent produit typiquement français ! Or, comme le foie gras fait partie des appellations d'origine, l'amendement qu'il présente aujourd'hui permet de défendre le foie gras...

Je suis content de cette évolution et je l'en remercie : il y a plus de joies dans le ciel pour un pécheur qui se convertit que pour quatre-vingt-dix-neuf justes qui persévèrent ! §

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à M. Dominique Mortemousque, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Mortemousque

Nous sommes au coeur du débat, comme le disait tout à l'heure notre collègue du groupe CRC, et je suis d'accord avec le propos tenu par Michel Charasse, car il vient de mettre le doigt sur plusieurs points extrêmement importants de ce dossier.

Lors de la discussion générale, à part le groupe communiste républicain et citoyen, au nom duquel un seul orateur est intervenu, tous les groupes politiques ont présenté un duo. Notre collègue Jean Desessard était accompagné de sa collègue Verte, qui est d'ailleurs repartie après nous avoir fait son cours. M. Desessard a au moins le mérite de suivre les travaux, et c'est certainement en nous écoutant qu'il a évolué, comme Michel Charasse l'a relevé ! Si vous incitiez votre collègue à venir plus souvent, monsieur Desessard, peut-être évoluerait-elle également...

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Mortemousque

J'ai donc écouté les autres intervenants et, qu'ils appartiennent au RDSE, à l'UC-UDF, à l'UMP ou au groupe socialiste, un vecteur commun est apparu : le progrès est dans les OGM.

En tant que paysan du Périgord, terre de la qualité par excellence, il était important pour moi, en conscience, de me faire un jugement.

Tout d'abord, il me paraît essentiel de savoir quels objectifs nous visons. Sommes-nous là pour empoisonner le monde avec les OGM ? Pouvons-nous les balayer d'un revers de main et ne pas nous y intéresser ?

Il ne faut pas oublier que, à l'heure actuelle, une partie importante de l'humanité ne mange pas à sa faim. Nous nous accordions d'ailleurs à reconnaître que 850 000 habitants étaient concernés aujourd'hui ; dans les cinquante années à venir, ils seront quelque 2, 5 millions de plus, pour lesquels il faudrait trouver une solution.

S'agissant de l'eau, les débats ne font que commencer et nous recherchons tous des solutions plus économiques d'utilisation de cette ressource. Or les OGM, en la matière, apportent un certain nombre de réponses.

En termes de pesticides, il y a également beaucoup à dire. En tant qu'arboriculteur, je suis intéressé par une moindre utilisation de pesticides.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Mortemousque

En cette matière aussi, il existe des pistes de recherche intéressantes avec les OGM.

Compte tenu de ces objectifs, il est important d'appréhender l'intérêt des OGM dans le risque calculé.

Notre pays s'est distingué en adoptant le principe de précaution. Pour ma part, je l'ai voté, non sans inquiétude, mais en considérant que nous vivions une époque complexe et qu'il était important d'informer.

Mais, ce que je veux bannir, c'est le principe du risque zéro, au nom duquel on ne fait plus rien ! En revanche, il me paraît intéressant de rechercher le risque calculé, au plus bas.

Des représentants de mon département m'avaient interpellé sur cette question. Je leur avais répondu, non pas sur le risque zéro, mais sur la façon de faire coexister les différents principes.

À l'échelon de mon département, j'ai demandé quelles étaient les attentes en matière d'OGM. Un document de l'APCA m'a été transmis à ce sujet, et j'ai d'ailleurs cosigné avec Gérard César plusieurs amendements qui s'en inspirent.

J'ai en outre un document dans lequel la FNSEA souligne que le projet de loi crée un cadre réglementaire dont nous avions besoin pour clarifier les choses : donner les moyens aux agriculteurs de faire coexister des cultures biologiques, conventionnelles et OGM.

Nous nous sommes donc engagés dans cette voie.

La France se distingue dans le monde par le nombre d'outils dont elle dispose. Tous les jours, j'entends dire qu'il y a de moins en moins de paysans, de plus en plus d'outils et de techniciens. Ne pouvons-nous pas utiliser ces outils comme des garanties, afin de ne pas faire n'importe quoi ?

Je n'ai pas le sentiment qu'il faut interdire systématiquement toute forme d'OGM pour continuer à faire de la culture biologique ou des AOC.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Mortemousque

Il faut l'envisager dans un processus, que notre débat est là pour expliquer. Pour le reste, il ne faut pas se cacher les réalités !

J'ai également un document de la Confédération paysanne illustrant la question des OGM par un croquemort. Le même petit dessin illustrait, voilà vingt-cinq ans, la question de l'énergie nucléaire, nous enjoignant de ne surtout pas nous engager dans cette voie. Dans quelle situation la France serait-elle aujourd'hui si les défenseurs de cette thèse avaient été écoutés ?

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Mortemousque

Grâce à des gens courageux, qui ont su prendre des risques calculés, ...

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Mortemousque

... notre système économique se distingue aujourd'hui de nombreux autres pays en matière d'écologie et de protection de l'environnement.

Dans la poursuite de nos travaux, j'aimerais que l'on fasse confiance aux outils qui sont à notre disposition en France.

Il est donc important que nous soyons les premiers vecteurs d'explications claires sur l'avancement des travaux sur les OGM. C'est quand on est convaincu que l'on convainc le mieux les autres !

Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

Ce débat était nécessaire, mais je voudrais le recadrer et rebondir sur les propos de Mme Didier, qui a fait un amalgame.

Nous sommes dans un débat non pas sur l'aspect scientifique ou sanitaire, mais sur l'image et la signature des produits de qualité, même si ces questions sont éminemment importantes, puisqu'elles concernent 20 % de l'activité des agriculteurs.

Je ne peux pas non plus vous laisser dire, compte tenu de l'avis de l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments et des différentes académies, que les produits sous signe de qualité, de type IGP, sont synonymes de santé. Ces produits sont différents sur le plan organoleptique - le goût, les saveurs, les couleurs -, chacun le reconnaît, mais pas en matière de santé.

Je voudrais également souligner, s'agissant des OGM, une ambiguïté. Certains refusent d'admettre que le transgène est un élément naturel, et non pas une structure artificielle ou une molécule de synthèse. C'est la technologie qui est innovante. La nature nous permet de « faire notre marché » en matière de biologie, de prendre un gène d'intérêt et de l'inclure, par une technologie innovante, dans un nouveau produit.

Je voudrais rappeler que les produits sous signe de qualité qui proviennent de territoires, s'ils s'adressent à un substrat spécifique, sont dus en grande partie au savoir-faire des hommes et des femmes de ces territoires.

Dans ce débat, il me semble que nous nous fourvoyons quelque peu. La loi d'orientation agricole a donné une nouvelle dimension à l'Institut national des appellations d'origine. Le paragraphe V de l'article L 251-1 du code rural stipule clairement que l'autorité administrative peut, par arrêté, prendre toutes mesures d'interdiction, de restriction ou de prescriptions particulières.

Nous disposons de l'établissement public idéal, au-delà des règles classiques de coexistence à l'égard de l'agriculture conventionnelle, pour déterminer des distances supplémentaires pour l'agriculture biologique ou les agricultures sous signe de qualité.

Il y a donc là beaucoup de transparence et de rationalité. N'allons pas plus loin et ne compliquons pas les choses, car ce serait précisément rendre un mauvais service aux produits que nous avons les uns et les autres la volonté de mettre en valeur, un mauvais service à l'agriculture française et à ce qui fait sa spécificité, car, à l'échelon européen, notre pays est le chef de file pour la défense des produits sous signe de qualité.

Debut de section - Permalien
François Goulard, ministre délégué

J'ai entendu des réflexions d'ordre général. M. le rapporteur vient d'y répondre avec beaucoup de pertinence, et j'ai apprécié un certain nombre d'interventions qui ont permis de recadrer les choses.

Sur un plan très technique, je veux dire, notamment à M. Amoudry, que ses craintes au sujet de l'interprétation du texte me paraissent non fondées.

Premièrement, ce qui est possible concernant des cultures bénéficiant d'autorisation de mise sur le marché est possible en matière d'expérimentation en plein champ. De ce point de vue, je vous rassure donc : l'autorité administrative peut prendre des mesures restrictives dans tous les cas de figure, et plus facilement lorsqu'il s'agit d'expérimentations.

Deuxièmement, même si le texte que vous avez sous les yeux vise exclusivement les AOC, le même dispositif est applicable sur proposition de l'INAO aux AOP et aux IGP. Ce point est clair, il a été expertisé par nos services.

Enfin, il va de soi que les organisations professionnelles et interprofessionnelles seront entendues. M. Charasse a dit qu'elles pourraient participer à la consultation nationale. Naturellement, l'autorité administrative les consultera avant que toute mesure dont nous parlons actuellement soit prise.

De plus, pour illustrer le fait que le Gouvernement n'en restera pas seulement au stade des déclarations d'intention, je veux dire à René Beaumont et à Jacques Blanc que des instructions très précises seront données à l'INAO.

J'indiquerai simplement que certains décrets concernant des fromages AOC prévoient déjà des mesures restrictives pour l'utilisation d'organismes génétiquement modifiés dans l'alimentation des animaux producteurs de lait.

C'est donc la preuve que nous avons non seulement la possibilité, mais également la volonté d'utiliser ce dispositif pour protéger nos appellations d'origine contrôlées.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à M. Jacques Pelletier, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Pelletier

Mon collègue Gérard Delfau, qui ne peut pas être présent ce matin, m'a chargé de faire connaître sa position. Il estime que cet article du projet de loi risque, tout de même, de porter un mauvais coup aux appellations d'origine contrôlées.

Je ne sais pas ce qu'il aurait pensé des explications très positives de M. le ministre, mais, avec bon nombre de ses collègues, il souhaitait voter en faveur de ces amendements de prudence.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 201 rectifié bis, présenté par MM. Soulage, Zocchetto et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :

Après l'article 16, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. Afin de prévenir la contamination des cultures non génétiquement modifiées, par des essais en plein champ ou des mises en culture d'organismes génétiquement modifiés, des zones de protections peuvent être créées dans le périmètre desquelles l'autorité administrative peut interdire l'implantation de cultures d'organismes génétiquement modifiés.

II. Chaque zone de protection est créée par arrêté de l'autorité administrative au vue des résultats d'une enquête publique.

III. Un décret en Conseil d'État précise les modalités d'application du présent article.

La parole est à M. Daniel Soulage.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Soulage

Initialement, cet amendement avait été déposé après l'article 21, mais j'ai demandé qu'il soit inscrit à cet endroit du texte dans la mesure où il recoupe, à certains égards, mais pas à tous, une partie des sujets dont nous venons de traiter.

Cet amendement a pour objet de permettre, grâce à la création de zones protégées, une coexistence réelle et durable entre les différentes cultures, en empêchant les cultures d'OGM de s'imposer aux autres types d'agriculture - traditionnelle et biologique - en raison des risques d'une possible dissémination.

L'adoption de ce projet de loi dans sa rédaction actuelle ouvre l'ensemble de notre territoire aux essais et à la mise en culture d'OGM.

Pour ma part, je ne suis pas opposé, sur le fond, à cette possibilité, mais je veux être plus exigeant et plus prudent. Rien ne nous oblige à prévoir la délimitation de zones indemnes de cultures d'OGM, mais rien ne nous en empêche non plus !

La Commission européenne affirme dans un rapport publié le 10 mars dernier qu'aucune mesure communautaire ne se justifie pour le moment en ce qui concerne la coexistence des cultures.

Selon ce rapport, la Commission doit impérativement demeurer flexible pour permettre aux vingt-cinq États membres de développer leurs propres mesures sur une telle coexistence. La balle est dans notre camp ; à nous de définir quel niveau de protection nous souhaitons mettre en oeuvre.

Pour ma part, je souhaite que les isolements prévus correspondent bien aux risques encourus. Je n'insiste pas davantage sur ce point puisqu'il relève du domaine réglementaire. Néanmoins, j'ai eu l'occasion de le dire dans la discussion générale, je souhaite que les distances retenues soient comparables à celles qui sont fixées pour les essais.

L'amendement n° 201 rectifié bis reprend le dispositif d'une loi adoptée en 1972 pour la production de maïs semence. Il vise à proposer un cadre général : sur une partie de territoire, à la demande de toute personne physique ou morale, et après autorisation des pouvoirs publics, une zone où la culture d'OGM n'est pas autorisée peut être créée. Il appartient au Gouvernement de fixer les modalités d'instruction et d'application de cette mesure.

Dans mon département, des zones existent déjà pour la production de maïs semence, de betterave porte-grains ou de tournesol. C'est un système que le ministère de l'agriculture sait très bien gérer.

Monsieur le ministre, j'ai confiance en la science et dans les progrès qu'elle peut nous apporter. Toutefois, s'agissant des OGM, les voix autorisées ne sont pas unanimes, et la population reste très réservée.

La loi prévoit de passer brutalement d'une expérimentation toujours très contestée à du « tout OGM ».

Debut de section - Permalien
François Goulard, ministre délégué

Non !

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Soulage

Je demande que soit pris le minimum de précautions utiles pour protéger notre patrimoine le plus précieux, c'est-à-dire les signes de qualité, l'agriculture bio, Natura 2000. Ces zones pourraient également être instaurées partout où leur création serait justifiée. J'insiste sur le fait que le ministère déterminerait les conditions d'instruction du dossier.

La création de telles zones non seulement rend acceptable les essais et la mise en culture d'OGM, mais également permet de prendre des précautions pour se prémunir contre l'apparition d'effets encore méconnus à ce jour.

Je tiens à souligner que rien ne nous empêchera, dans quelques années, d'évaluer la pertinence de ces zones au regard des résultats des essais et des connaissances. Nous pouvons même d'ores et déjà nous fixer un rendez-vous.

À ceux qui souhaitent que la loi soit immédiatement appliquée, sans restriction, à l'ensemble du territoire parce qu'ils sont sûrs que cela n'aura aucun effet négatif, je veux simplement rappeler que ce texte pourra, d'ici à quelques années, être modifié si leurs certitudes sont confirmées.

Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, la progressivité que permet cet amendement en matière de culture d'OGM rendra certainement beaucoup plus facile l'acceptation de ces cultures, auprès tant des agriculteurs concernés que de nos concitoyens.

Je souhaite très vivement, monsieur le ministre, que cet amendement puisse être pris en compte.

Mon collègue Dominique Mortemousque s'est exprimé en tant que paysan, ancré dans la terre du Périgord. Je veux lui dire que j'interviens moi aussi aujourd'hui plus en paysan de la terre lot-et-garonnaise que comme sénateur !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Charasse

M. Michel Charasse. Paysan, c'est une appellation contrôlée !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

Nous nous sommes déjà largement exprimés sur ce point.

M. le ministre a donné des assurances et a recentré l'Institut national des appellations d'origine sur sa mission, qui est d'édicter des mesures supplémentaires.

Je dirai tout simplement, monsieur le sénateur, que votre amendement est totalement incompatible avec la directive 2001/18/CE. Je vous renvoie, sur ce point, à l'avis rendu par la Cour de justice des Communautés européennes au sujet de l'Autriche.

La lecture de mes anciens livres d'histoire m'a toujours appris que les centristes étaient des pro-européens convaincus. Je ne comprends donc pas votre attitude, qui nous mettrait complètement en porte-à-faux avec la Commission sur ce point.

En conséquence, monsieur Soulage, je vous invite à retirer cet amendement À défaut, la commission émettra un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
François Goulard, ministre délégué

J'ai écouté M. Soulage avec des sentiments contrastés.

Je sais, monsieur le sénateur, que vous êtes un défenseur convaincu de l'agriculture de nos départements et de nos régions, où la qualité est une valeur respectée. Elle est en effet garante de l'économie agricole dans son ensemble, comme cela a été largement dit par les uns et les autres dans le débat précédent. Sur ce plan, je suis tout à fait prêt à vous rejoindre.

Néanmoins, certains de vos développements ne peuvent pas me laisser indifférent, monsieur le sénateur. Vous avez affirmé, notamment, que ce projet de loi nous faisait passer d'un système encadré, contrôlé, à un système où les OGM seraient largement autorisés. Je me permets de vous dire que ce n'est pas exact.

Au contraire - j'insiste sur ce point -, nous renforçons les contrôles, pour une raison d'ailleurs extrêmement simple : la législation dont nous débattons actuellement s'élabore sous la forte influence d'un élément constitutionnel nouveau, à savoir l'adoption de la Charte de l'environnement, donc du principe de précaution, ce qui n'était pas le cas pour les législations précédentes.

Nous sommes donc tenus par la Constitution d'être plus protecteurs que nous ne l'étions. Ce texte comporte des mesures qui garantissent que tous les contrôles, tous les suivis, toutes les mesures de surveillance seront effectués.

Par ailleurs, l'argument juridique avancé par M. le rapporteur est parfaitement exact : de telles mesures de protection absolue tomberaient sous le coup d'un jugement de la Cour de justice des Communautés européennes. C'est une certitude en l'état actuel du droit, et l'exemple autrichien est parfaitement éloquent de ce point de vue !

En revanche, en s'appuyant sur ce texte, il sera possible à l'autorité administrative, après avis du conseil des biotechnologies, de décider de mettre en oeuvre des mesures particulières adaptées aux circonstances, tenant compte des essais ou des cultures, afin d'assurer toutes les protections utiles.

Ce texte sera donc efficace, à condition qu'il ne soit pas d'une portée trop catégorique, ce qui viendrait contredire la directive.

Nous avons les moyens d'assurer des protections. Nous l'avons dit très clairement à propos des AOC. Nous pourrons le faire très largement pour aller à l'encontre de toutes les craintes que vous avez exprimées.

Mais, de grâce, ne courons pas le risque d'une condamnation de la Cour de justice des Communautés européennes : nous serions alors dans une situation évidemment bien pire que celle que vous redoutez, monsieur le sénateur, puisque nous nous trouverions démunis de tout moyen d'action !

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à M. Rémy Pointereau, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Rémy Pointereau

Nous avons évoqué largement, hier soir, cette problématique de la dissémination des OGM, lesquels peuvent s'étendre sur des cultures traditionnelles.

Je comprends l'inquiétude suscitée par la coexistence des cultures biologiques et des cultures d'OGM. Il faut éviter tout contentieux.

Pour ce faire, nous devons, me semble-t-il, nous inspirer de dispositifs qui existent déjà pour les cultures traditionnelles, notamment pour la filière semence ; ainsi, une certaine distance doit être respectée entre deux cultures.

Grâce à l'interprofession, en collaboration avec la DDA de chaque département, des solutions sont trouvées. Pour le maïs, la distance est de 300 mètres, pour le blé, elle est d'au maximum 100 mètres et pour des cultures de betteraves, elle est à peu près de 1 000 mètres ou de 1 500 mètres.

Nous devons donc pouvoir trouver des solutions en nous inspirant de ce qui se fait déjà.

Je comprends qu'un agriculteur cultivant des produits biologiques et voyant s'installer à vingt mètres de sa parcelle une culture d'OGM se pose des questions.

Pour résoudre ce problème, il conviendrait que l'amendement n° 201 rectifié bis envisage des périmètres de protection s'inspirant des règles établies pour la filière semencière en collaboration avec l'INAO, les DDA et l'interprofession. Cet ajout pourrait rassurer les exploitants de produits biologiques ou traditionnels et permettrait la coexistence.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à M. Josselin de Rohan, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Josselin de Rohan

J'ai entendu avec beaucoup d'intérêt M. le rapporteur et M. le ministre rappeler le droit européen. Il nous faut avoir dans cette enceinte un comportement responsable.

La directive européenne que nous cherchons à transposer dans notre droit positif n'a d'existence que parce que le gouvernement français a été parmi ceux qui ont opté pour son adoption. Le projet de loi dont nous débattons est le strict calque de la décision communautaire. Je suis donc très étonné qu'une formation politique ayant dirigé le gouvernement précédent ...

Debut de section - PermalienPhoto de Josselin de Rohan

... se trouve aujourd'hui en position de ne pas voter en faveur de la transposition d'une directive portant la signature du chef du gouvernement de l'époque, M. Lionel Jospin, qui s'est engagé dans cette affaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Josselin de Rohan

Je me tourne également vers ceux de nos collègues qui, par leurs amendements, essaient de nous faire adopter des dispositions qui sont totalement contraires à la loi et à l'esprit de la directive. Je tiens à leur dire que nous ne pouvons pas l'accepter ; sinon, cela reviendrait à renier la signature de la France.

C'est pourquoi l'amendement de notre sympathique et excellent collègue M. Soulage, qui est en totale contradiction avec la directive, est moralement inacceptable.

Debut de section - PermalienPhoto de Josselin de Rohan

M. Josselin de Rohan. Par conséquent, nous voterons contre.

Applaudissements sur plusieurs travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à M. Dominique Mortemousque, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Mortemousque

L'amendement de notre collègue Daniel Soulage m'interpelle d'une double façon. D'un côté, son message m'agrée et, de l'autre, moins. Quoi qu'il en soit, il faut apporter une réponse au problème qu'il soulève.

Afin que les agriculteurs pratiquant un certain nombre d'activités sur leur territoire puissent continuer à le faire à l'avenir, M. Soulage dit qu'ils doivent obtenir des garanties de bonne fin. Notre collègue Rémy Pointereau reprend cette idée sous l'angle des semenciers. J'appartiens à ceux qui sont d'accord.

Mais, dans le même temps, j'entends M. le ministre et M. le rapporteur affirmer que toutes les garanties juridiques nécessaires existent.

Je vous crois donc, messieurs ! Sinon, nous serions tous des pantins !

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Mortemousque

Je pense donc sincèrement que nous disposons des outils juridiques nécessaires pour répondre au problème évoqué par Daniel Soulage.

En revanche, je perçois beaucoup moins bien le second message. Notre collègue Daniel Soulage me fait penser à François Fortassin, qui, dernièrement, disait à peu près ceci : « Votre truc, c'est pas mal, mais il ne passe pas très bien dans la rue. Alors, pour l'instant, ce serait bien de riper un peu, car vous avez déjà le CPE sur les bras ; n'y ajoutez pas les OGM ! ».

Moi, quand je suis convaincu de quelque chose, je le défends. Et s'il le faut, j'irai affronter la rue !

Mme Janine Rozier applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Mortemousque

Le problème de fond, c'est de pouvoir offrir les garanties de bonne fin. Je suis intimement convaincu que, pour la ferme du Lot-et-Garonne comme pour celle du Périgord, on pourra le faire.

Autrement, comme l'a dit Michel Charasse, on risque de s'embarquer dans un système dans lequel plus de 80 % du territoire en France ne pourra pas cultiver d'OGM. Dans ces conditions, il ne resterait plus qu'à plier bagage, à renvoyer à plus tard le problème des OGM et à continuer à payer les amendes, avant de revenir devant le Parlement dans dix ans pour régler cette question !

En agissant ainsi, on accumulerait un retard, qui nous a déjà coûté cher. Aujourd'hui, l'important, pour la France, c'est de ne pas prendre davantage de retard. C'est la raison pour laquelle je défends les OGM et l'application immédiate du texte.

Applaudissements sur plusieurs travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à M. Jean-Marc Pastor, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Pastor

L'examen de l'amendement de M. Soulage était initialement prévu après l'article 21, puisque cela coïncidait avec la logique du débat. Désormais, il vient en discussion après l'article 16.

Si je me permets d'intervenir, c'est parce que cet amendement apporte un élément supplémentaire au débat. Il concerne, notamment, l'un des points auxquels nous sommes très attachés, à savoir l'application par étapes du principe de précaution.

La première étape consiste à continuer les expérimentations en milieu confiné ou en milieu naturel. L'amendement n° 201 rectifié bis apporte justement à cet égard des précisions supplémentaires qui permettent à la société d'en savoir un peu plus avant de se prononcer définitivement sur un texte qui est somme toute majeur. Il y a donc là un apport important.

J'ai bien entendu les propos qui se réfèrent à la directive européenne : tantôt on nous l'oppose, tantôt on met en avant la marge de manoeuvre du législateur français. Une fois, c'est l'un, une fois, c'est l'autre !

M. Josselin de Rohan fait un signe de dénégation.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Pastor

Nous comprenons parfaitement, monsieur de Rohan, qu'il y a une directive et que vous la mettiez en avant. Mais la première directive remonte à 1998, alors que nous sommes en 2006 ! Elle prévoyait des étapes nécessaires, liées à une meilleure connaissance par la société de ces questions de fond. Il s'agissait d'étapes importantes en matière de recherche publique et de recherche fondamentale.

Je regrette que vous n'ayez pas pu participer à la totalité du débat, car ces questions ont été largement évoquées. On a d'ailleurs unanimement regretté que la recherche publique apporte peu de réponses, car, ne l'oublions pas, cette dernière reçoit peu si ce n'est aucune commande.

M. le ministre délégué proteste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Pastor

J'en veux pour preuve que l'INRA n'a aujourd'hui reçu aucune commande publique pour permettre d'apporter une réponse à la société sur cette question de fond. C'est un vrai problème !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Pastor

J'en reviens à l'amendement n° 201 rectifié bis.

Avec Daniel Soulage, nous sommes tous les deux d'une région qui a une vieille pratique de culture semencière, notamment du maïs. Qu'est-ce que cela signifie ?

Localement, des débats ont lieu en permanence entre agriculteurs, entre syndicats agricoles. Quand ce ne sont pas les syndicats agricoles, ce sont les maires de la région qui veulent essayer de créer des îlots. Lorsque ce n'est pas l'élu local, c'est l'administration qui provoque des rencontres locales.

Tout cela me rappelle - je suis obligé de vous le dire, monsieur le ministre - la notion de commission locale d'information et de suivi. Sans le savoir, cela se pratique en partenariat dans nos régions depuis longtemps afin de pouvoir isoler des espaces qui permettront la culture semencière sans pour autant provoquer des dysfonctionnements avec des productions similaires.

L'amendement n° 201 rectifié bis vise à mettre en place des espaces réservés pour les OGM. Cette disposition permettra non seulement d'avoir localement un débat afin de ne pas perturber l'agriculture traditionnelle, mais aussi d'assurer un prolongement à la recherche, car nous en avons bien besoin.

Nous adhérons pleinement à cette démarche. C'est la raison pour laquelle, s'agissant d'un amendement tendant à insérer un article additionnel, nous participerons au vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Mes chers collègues, vous connaissez ma position : je suis opposé à la coexistence des différentes cultures. Malgré tout, je voterai cet amendement, même si j'aurais préféré qu'il y soit écrit « grandes zones de protection » ou « périmètres qui intègrent toutes les zones AOC », afin que le maximum de territoires soient préservés de la culture d'OGM.

Des sénateurs d'un bord opposé au mien ont défendu des amendements pour protéger les zones AOC. Ils sont intervenus sur ce point en commission et, aujourd'hui, ils ont argumenté longuement, brillamment, car ils savent qu'ils doivent défendre les intérêts des agriculteurs de leur région, lesquels font des efforts pour avoir une agriculture de qualité, reconnue.

Mais il a été demandé à nos collègues de retirer leurs amendements, la raison invoquée étant que ce serait trop grave de les adopter et que l'INAO leur donnera de tout façon satisfaction.

Or, avec cet amendement n° 201 rectifié bis, on s'aperçoit que l'Europe refusera la création de zones protégées. C'est grave ! Dans ces conditions, il n'y a plus aucun pouvoir, plus aucune solution ! Si vous croyez que l'INAO pourra ensuite étendre les zones protégées alors que nous ne l'aurions pas inscrit dans la loi, vous vous faites des illusions !

Monsieur Mortemousque, vous avez choisi l'agriculture. Partant de là, vous foncez : en homme d'action, vous décidez qu'elle doit exporter, être moderne, et peu importe si votre choix crée des difficultés !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Vous avez tort. Cette politique d'exportation ne nous amènera rien. Et vous en verrez un jour les résultats, avec des épidémies à répétition !

Il vaudrait mieux créer une agriculture de proximité, reconnue, et préserver des zones. Ainsi, nous aurions la possibilité d'avoir une agriculture vivrière de proximité. Je ne suis donc pas sûr que cette fuite en avant soit utile à l'agriculture.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à M. Gérard Le Cam, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Le Cam

Avec l'amendement n° 201 rectifié bis, nous sommes au coeur même de la principale problématique du projet de loi.

Le fait de créer des îlots s'oppose à une autre conception, celle d'une présence, que l'on pourrait qualifier de « disséminée », de cultures et de parcelles d'OGM un peu partout dans l'hexagone.

Cela montre bien le caractère irréversible des grandes cultures d'OGM. Ce danger est susceptible de se concrétiser. Or ces cultures ne sont pas suffisamment connues sur le plan scientifique ni suffisamment maîtrisées, comme nous l'avons souligné à maintes reprises dans ce débat.

En adoptant le projet de loi visant à transposer la directive européenne, nous allons porter un coup mortel aux actuels labels et AOC et, pis encore, à ceux qui auraient éventuellement pu être attribués.

Notre position est donc tout à fait en cohérence avec l'opposition que nous avons montrée à la prétendue nécessité de culture de masse d'OGM. Nous pensons que les orientations qui doivent être réservées aux OGM de demain ne sont pas celles-là. Nous n'en avons pas besoin. Il existe d'autres moyens, plus traditionnels, pour améliorer la rentabilité et pour augmenter les quantités produites.

Commençons d'abord par supprimer les 10 % de terres en jachère, ce sera un premier progrès. Ensuite, on pourrait travailler, puisque nous sommes particulièrement déficitaires dans ce domaine, à l'amélioration en protéines de ce que nous produisons. Ce sont ces priorités, et non la situation prévue par la directive, qui devraient être mises en avant.

Nous voterons donc cet amendement. Même s'il n'est pas totalement satisfaisant, il a au moins l'intérêt de mettre le doigt sur toute la problématique de ce texte.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

La commission et le Gouvernement ont été très clairs : les espaces réservés, c'est non ! Cette mesure est contraire à la directive et, si nous l'adoptions, nous serions irrémédiablement condamnés par la Cour de justice des Communautés européennes. Il suffit de relire les textes !

Et nous n'allons pas entériner la dérive de dix-huit présidents de conseil régional, dont Mme Royal, consistant à déterminer des régions carrément « OGM free ». Notre collègue Michel Charasse l'a clairement dit, cela ne trompe personne !

M. Michel Moreigne s'exclame.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

En ce qui concerne l'hypothèse d'une distance supplémentaire, évoquée par notre collègue Rémy Pointereau, je suis d'accord sur l'esprit d'une telle disposition. Mais cette dernière relève du domaine réglementaire.

Quand il s'agira de produits placés sous le signe de la qualité, cela relèvera donc de la compétence de l'INAO. Concernant les produits conventionnels comme les semences, rien n'empêche les DDA d'opérer des contractualisations entre les acteurs privés que sont les agriculteurs.

Mais cette mesure ne peut être inscrite dans la loi parce que, là encore, nous ne serions pas dans l'esprit qui doit guider la transposition de la directive.

Enfin, je voudrais m'adresser à notre collègue Jean-Marc Pastor, qui m'avait habitué jusqu'à maintenant à une forme d'honnêteté intellectuelle plus structurée. Je l'entends dire qu'il faut encore donner du temps au temps et qu'il faut encore des étapes.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

Cela fait dix ans que l'on travaille là-dessus et que la France avance à petits pas. Pendant ce temps, d'autres pays avancent vraiment.

Il y a 90 millions d'hectares de cultures d'OGM de par le monde, et simplement quelques dizaines d'hectares en France.

Vous déplorez l'insuffisance des cultures et des évaluations. Mais 50 % d'entre elles sont détruites, année après année, par des faucheurs volontaires ! Comment voulez-vous avoir des évaluations supplémentaires si elles sont détruites ?

M. Jean-Marc Pastor acquiesce.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

Arrêtons tout cela ! Nous sommes sur ce type de sujet depuis une heure. Le Gouvernement a apporté toutes les assurances nécessaires. Je n'irai pas plus loin. La commission émet donc un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
François Goulard, ministre délégué

M. François Goulard, ministre délégué. Comme M. de Rohan l'a rappelé, quand il y a des obligations et des engagements européens, il appartient aux assemblées parlementaires de les respecter. Mesdames et messieurs les sénateurs, la France est liée par des engagements internationaux et, singulièrement, par ses engagements européens.

Mme Marie-Thérèse Hermange applaudit.

Debut de section - Permalien
François Goulard, ministre délégué

Nous savons, parce qu'il y a une jurisprudence en la matière, que l'Autriche a été condamnée pour avoir voulu créer des zones délimitées dans lesquelles les cultures d'OGM sont strictement interdites.

Voulez-vous que nous subissions une condamnation de cet ordre ? La réponse est évidente.

En revanche, monsieur Soulage, il sera tout à fait possible de mettre en place les mesures de protection nécessaires pour assurer la coexistence à laquelle nous sommes parfaitement attachés s'il s'agit de mesures particulières, adaptées à tel ou tel type de culture et mises en oeuvre département par département. C'est l'esprit même de ce texte.

Monsieur Pastor, je vous ai entendu à l'instant oser dire qu'aucun effort de recherche n'était entrepris sur des sujets tels que ceux qui nous intéressent aujourd'hui. Vous ne seriez pas au courant de ces réalités, je pourrais mettre cela sur le compte de l'ignorance ; mais je sais que tel n'est pas le cas, car vous avez beaucoup travaillé et vous connaissez les organismes de recherche qui s'en occupent.

L'INRA est très occupé par tous ces sujets dont nous débattons aujourd'hui. Cet institut est chef de file européen dans un grand programme sur la coexistence des types de cultures.

L'agence nationale de la recherche a, en 2006, décidé de consacrer 16 millions d'euros pour les développements en biotechnologie, 18 millions d'euros sur le thème de l'agriculture et du développement durable et 15 millions d'euros sur le thème de l'alimentation et de la nutrition, thèmes dont nous discutons en ce moment. Il y a donc un effort de recherche considérable.

Tout cela est indissociable. Le dispositif proposé nous permet d'expérimenter et de commercialiser des OGM avec toutes les garanties de sécurité en termes d'innocuité pour la santé et de protection de l'environnement. Notre appareil de recherche est le premier au niveau européen dans ces matières, et il nous permet d'avoir l'éclairage scientifique nécessaire pour prendre des décisions en connaissance de cause. Il ne s'agit que de cela.

Sachons adopter des dispositifs solides, fiables et durables qui résisteront à d'éventuelles procédures contentieuses. Ces mesures nous permettront - c'est l'intention de la plupart d'entre vous, je crois - d'avoir une démarche raisonnée et scientifiquement éclairée pour ne pas fermer la porte au progrès et, en même temps, pour donner toutes les garanties à nos concitoyens.

Applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à M. Daniel Soulage, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Soulage

Je n'ai pas été rassuré par les propos tenus tant par M. le rapporteur que par M. le ministre, car je ne partage pas la même analyse, s'agissant de la protection par l'INAO.

Monsieur le ministre, en ce qui concerne les problèmes de transposition de la directive, je remarque que certaines dispositions sont transposées et que d'autres, comme la coexistence des cultures, sont au contraire laissées à l'appréciation des États membres ; cela a encore été réaffirmé ces jours-ci.

Monsieur le rapporteur, la comparaison avec l'Autriche n'est pas appropriée.

Si l'on considère les termes de la loi régissant les semences, on peut estimer que c'est l'État qui fera l'instruction du dossier et l'application de ces mesures. Il ne faut donc pas faire d'amalgames.

Les ministres de l'agriculture se réuniront début avril pour discuter des problèmes de coexistence des cultures. Pouvoir montrer que la France défend tous ses joyaux en matière d'agriculture et de territoires de qualité serait à mon avis un formidable appui.

Cette démarche prudente correspond parfaitement, pour moi, au principe de précaution.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Soulage

Sinon, je ne comprends vraiment pas ce que recouvre ce principe !

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Je mets aux voix l'amendement n° 201 rectifié bis.

Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe UC-UDF.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Personne ne demande plus à voter ?...

Le scrutin est clos.

Il est procédé au comptage des votes.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 156 :

Le Sénat n'a pas adopté.

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à douze heures cinquante-cinq, est reprise à quinze heures, sous la présidence de Mme Michèle André.