La séance est ouverte à neuf heures trente.
Le compte rendu intégral de la séance du mercredi 17 octobre 2018 a été publié sur le site internet du Sénat.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté.
La parole est à M. Loïc Hervé, auteur de la question n° 472, adressée à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.
Madame la ministre, j’appelle votre attention sur l’accueil des mineurs non accompagnés, les MNA, ou « mineurs étrangers isolés » selon l’ancien vocable, en particulier en Haute-Savoie. Le nombre de mineurs non accompagnés confiés à ce département a augmenté de plus de 240 % entre 2015 et 2018. Ils représentent désormais plus de 25 % des mineurs placés sous sa responsabilité. Sur 305 mineurs placés, plus de la moitié sont de grands adolescents et 90 %, des garçons.
Au regard de ces chiffres inégalés, en constante progression, le département de la Haute-Savoie a développé des offres d’hébergement, fait appel au réseau hôtelier et, ponctuellement, aux familles de parrainage. Malgré cela, les hébergements sont saturés par l’afflux continu de mineurs isolés – je rappelle que la Haute-Savoie est un département frontalier. Le personnel, majoritairement féminin, est épuisé et demeure en difficulté face à un public ayant parfois atteint la majorité depuis longtemps.
Aussi, je souhaite savoir si le Gouvernement envisage un véritable plan d’urgence pour répondre à l’arrivée massive de migrants mineurs.
Malgré l’inscription d’un budget de 10 millions d’euros en 2018, le département de la Haute-Savoie n’a plus les moyens suffisants pour assumer sa responsabilité dans des conditions dignes. Quelle compensation financière le Gouvernement envisage-t-il pour faire face aux surcoûts entraînés par cet accueil ?
Cette problématique demande une action forte et efficace du Gouvernement, tant sur les plans social, économique et judiciaire que dans le domaine de l’éducation nationale, pour répondre aux failles de notre dispositif actuel. L’avenir de ces enfants mérite une politique migratoire juste et réalisable.
Madame la ministre, je vous interroge au nom des élus du département, notamment du président du conseil départemental, qui a récemment interpellé M. le Premier ministre sur cette même question.
Monsieur le sénateur Loïc Hervé, vous abordez un sujet extrêmement difficile, tant pour les départements qui doivent assumer la prise en charge de ces mineurs non accompagnés que pour l’État, qui est très sensible aux problèmes que vous soulevez.
Le nombre de MNA est aujourd’hui plus important et plus élevé que l’an dernier à la même époque. Pour vous donner quelques chiffres, entre le 1er janvier et le 5 octobre 2018, 12 200 MNA ont été confiés aux conseils départementaux sur l’ensemble du territoire métropolitain, contre 10 162 en 2017.
Évidemment, l’État est conscient des difficultés financières que cela entraîne. C’est pourquoi il a souhaité se mobiliser.
Par communiqué de presse en date du 17 mai 2018, l’Assemblée des départements de France a accepté les propositions du Gouvernement, lesquelles confirment une aide financière accrue, concentrée sur la phase d’accueil et d’évaluation de la minorité et de l’isolement, à compter du 1er janvier 2019. Chaque évaluation sera financée à hauteur de 500 euros et chaque mise à l’abri à hauteur de 90 euros par jour pendant quatorze jours, puis de 20 euros du quinzième au vingt-troisième jour. C’est donc un financement accru pour la phase d’évaluation.
Par ailleurs, le Gouvernement a accordé un financement exceptionnel aux départements à hauteur de 30 % du coût des frais de prise en charge du nombre de MNA supplémentaires accueillis au 31 décembre 2017 par rapport au 31 décembre 2016. Le montant de ce financement exceptionnel de l’État a été fixé par un arrêté du 23 juillet 2018, qui prévoit que le département de la Haute-Savoie sera indemnisé à hauteur de 900 000 euros. L’ensemble représente un financement à hauteur de 132 millions d’euros.
Pour renforcer les outils à disposition des départements dans la phase d’évaluation de la minorité et de l’isolement, et afin de limiter les situations de réévaluation, qui sont coûteuses pour les départements et qui sont nocives pour les mineurs, l’article 51 de la loi du 10 décembre 2018 pour une immigration maîtrisée, un droit d’asile effectif et une intégration réussie prévoit la possibilité d’un relevé d’empreintes digitales qui feront l’objet d’un traitement automatisé.
Enfin, un travail interministériel sur un référentiel d’évaluation est en cours afin de permettre une harmonisation des pratiques et de consolider, à l’égard de tous, la légitimité des évaluations.
Voilà ce qui est proposé actuellement.
La parole est à M. Loïc Hervé, pour répondre à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, en trente-six secondes.
Madame la ministre, je vous remercie de vos réponses ; je sais l’attention que vous portez à la question des mineurs non accompagnés et, particulièrement, à la situation de la Haute-Savoie. Je salue les décisions ponctuelles qui ont été prises et qui sont importantes. Je les transmettrai aux élus de la Haute-Savoie.
Je profite de cette intervention pour attirer votre attention sur la coopération avec la Police aux frontières. Je rappelle que la Haute-Savoie est un département frontalier : lorsque des jeunes arrivent à des postes-frontières, notamment le poste-frontière du tunnel du Mont-Blanc, des contrôles de majorité, mais aussi des contrôles liés aux visas biométriques sont réalisés. Je n’irai pas plus loin ce matin, mais je vous transmettrai les éléments, madame la garde des sceaux, car il faut une harmonisation à l’échelon national afin d’améliorer la situation et la coopération entre la Police aux frontières et le conseil départemental.
La parole est à Mme Corinne Imbert, auteur de la question n° 475, adressée à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.
Madame la ministre, l’arrivée massive de jeunes étrangers cherchant à être reconnus comme mineurs non accompagnés est devenue une problématique importante dans nos départements. Dans le département de la Charente-Maritime, on note une multiplication par 25 du nombre de demandeurs en quatre ans. Nous assistons à des phénomènes de changement d’identité et de nomadisme, le seul but étant pour ces jeunes de trouver un département qui leur accordera le statut de mineur non accompagné.
Une initiative sénatoriale a permis, dans le cadre du projet de loi Asile et immigration, de répondre aux attentes des services départementaux chargés de l’évaluation des jeunes, en autorisant la création d’un fichier biométrique qui permettra de lutter contre le nomadisme et évitera à d’autres services départementaux de nouvelles évaluations. Vous venez de l’évoquer dans votre réponse à Loïc Hervé.
Madame la ministre, je souhaite connaître le calendrier de la mise en place de ce fichier biométrique, en particulier la date d’élaboration du décret en Conseil d’État visant à définir les modalités d’application de l’article 51 de la loi pour une immigration maîtrisée, un droit d’asile effectif et une intégration réussie.
Madame la sénatrice Corinne Imbert, vous le soulignez à juste titre, la question de l’évaluation de la minorité est essentielle. Les services de l’État sont aujourd’hui confrontés à deux types de phénomènes s’agissant du nomadisme des mineurs non accompagnés, les MNA.
D’une part, il y a le cas de MNA qui ont déjà été évalués comme tels par un département d’arrivée et qui sont orientés vers un autre département, en application de la clef de répartition que nous avons mise en place. Il peut alors arriver que le département d’accueil souhaite procéder à une nouvelle évaluation, parce qu’il estime la première incomplète ou bien parce qu’il prend en compte de nouveaux éléments qui sont portés à sa connaissance et qui peuvent remettre en cause la première évaluation – par exemple, si le MNA accueilli est plus précis sur sa propre situation en révélant des éléments qu’il n’avait pas communiqués préalablement.
D’autre part, il y a le cas de personnes qui ont été évaluées majeures dans un département et qui se présentent dans d’autres départements, voire dans le même, en modifiant leur identité, espérant passer cette fois pour des mineurs.
Ces deux situations, qui nécessitent une nouvelle évaluation, entraînent des coûts financiers extrêmement importants – des coûts humains, aussi - et saturent les services d’accueil, comme vous l’avez relevé. Par ailleurs, cela peut créer pour les jeunes, mineurs dans un premier temps puis majeurs, de faux espoirs de mise à l’abri et une remise en cause des prises en charge déjà accordées.
C’est la raison pour laquelle nous avons souhaité créer un fichier biométrique, qui permettra de fiabiliser les évaluations et d’orienter de façon définitive les personnes qui se présenteront. Ce fichier sera consultable par les préfectures, à la demande des conseils départementaux. Sa mise en place est prévue pour le 2 janvier 2019.
Le calendrier que je viens d’indiquer sera tenu, bien sûr sous réserve des délais d’élaboration technique de l’outil biométrique. Ce fichier devra par ailleurs être précédé d’un décret en Conseil d’État portant application de l’article 51 de la loi du 10 septembre 2018 déjà citée ; ce décret est lui-même en cours de finalisation.
C’est en tout cas l’une de nos priorités, puisque nous savons que cet outil conditionnera à la fois le temps et les efforts financiers consentis par l’État et par les départements sur ce dossier.
La parole est à Mme Corinne Imbert, pour répondre à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.
Madame la ministre, je sais bien que vous avez pleinement conscience des difficultés auxquelles sont confrontés les départements.
Aujourd’hui, dans le département de la Charente-Maritime, nous voyons arriver ces jeunes d’Espagne – ce n’était pas le cas l’année dernière – avec une facilité déconcertante. Je me permets d’insister sur l’urgence de la situation et je vous remercie de votre réponse très précise, puisque le fichier biométrique pourra être utilisé dès le début de l’année prochaine. Les services d’évaluation des conseils départementaux sont surchargés, ils n’en peuvent plus !
Et que dire quand la Cour de cassation casse l’arrêt rendu par une cour d’appel aux motifs que celle-ci ne pouvait fonder sa décision sur l’évaluation sociale des services du département pour fonder sa décision ? Les services départementaux sont désabusés !
En Charente-Maritime, je dois dire que nous travaillons très bien avec les services de l’État : un protocole sur les MNA a été signé hier entre le président du conseil départemental et le préfet. C’est une excellente chose.
Madame la ministre, nous prenons acte de ce calendrier. Nous savons tous que le sujet est sensible, car il touche à l’humain, mais il faut en même temps réaliser un véritable travail de fond sur les filières qui, elles, sont loin d’avoir une approche humanitaire ! J’espère que le Gouvernement en a bien conscience.
Mes chers collègues, j’aimerais vous rappeler que, comme le Gouvernement pour répondre, vous disposez désormais de deux minutes trente pour poser votre question. Vous pouvez répondre au Gouvernement s’il vous reste du temps, mais pas au-delà.
La parole est à M. Michel Vaspart, auteur de la question n° 420, transmise à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.
Madame la garde des sceaux, ma question s’adresse à vous, en l’absence de M. le ministre de l’économie, et porte sur la possibilité de réaliser des ventes aux enchères publiques judiciaires par voie électronique.
Les ventes aux enchères publiques volontaires peuvent, aux termes des articles L. 321-3 et suivants du code de commerce, être réalisées uniquement par voie électronique. Pour les ventes aux enchères publiques judiciaires, les lieux dans lesquels les commissaires-priseurs ou huissiers de justice sont habilités à les organiser sont limitativement énumérés, pour chaque type de vente, par la loi ou le règlement, et la voie électronique n’en fait pas partie. Cela bloque totalement les ventes aux enchères des navires et bateaux de plaisance abandonnés chez des professionnels.
En effet, depuis la loi n° 2016-816 du 20 juin 2016 pour l’économie bleue, aux termes de l’article 54, une vente aux enchères publiques peut être ordonnée par un juge, à l’issue d’un délai d’un an d’abandon.
Ce dispositif n’est malheureusement pas mis en œuvre à ce jour, car la logistique et les coûts d’organisation de ventes publiques physiques sont beaucoup trop importants par rapport à la valeur des navires concernés. Seules des ventes en ligne sont possibles pour ces biens à la taille exceptionnelle. Une ordonnance du tribunal d’instance de Saint-Nazaire du 3 mai 2017 avait ainsi habilité un commissaire-priseur à réaliser par voie électronique la vente aux enchères d’un bateau abandonné, mais celui-ci a refusé d’y procéder, estimant qu’il n’y était pas autorisé par la loi.
Madame la ministre, vous voyez que le flou juridique régnant est préjudiciable, car il paralyse les transactions. Je souhaite que vous puissiez m’indiquer de façon claire et non contestable si les ventes aux enchères judiciaires peuvent être réalisées par voie électronique, ce qui permettrait aux dispositifs d’entrer en vigueur immédiatement. Si tel n’est pas le cas, il me semble urgent d’envisager une évolution législative. Le Gouvernement en a-t-il l’intention ?
Monsieur le sénateur Michel Vaspart, je ne vous réponds pas en l’absence de M. le ministre de l’économie, car la profession de commissaire-priseur est placée sous ma responsabilité. Cela relève donc pleinement de ma compétence, et c’est à ce titre que je vous réponds.
Vous appelez mon attention sur la vente d’objets mobiliers et de véhicules abandonnés et sur son application aux navires et bateaux de plaisance.
La vente judiciaire aux enchères publiques des engins flottants a été rendue possible par l’article 54 de la loi du 20 juin 2016 pour l’économie bleue, qui vise notamment, vous le rappeliez, à renforcer l’attractivité des ports de commerce et des ports de plaisance.
Vous indiquez que le transport de navires ou de bateaux de plaisance abandonnés, en vue de les vendre aux enchères publiques, est coûteux et dissuade de l’organisation de leurs ventes. Les transactions seraient dès lors facilitées par la possibilité de mettre en vente ces biens via des enchères judiciaires électroniques.
L’article 2 de la loi du 31 décembre 1903 relative à la vente de certains objets abandonnés – cela date évidemment un peu ! – dispose que l’ordonnance du juge qui autorise la vente fixe le jour, l’heure et le lieu de la vente et désigne l’officier public qui procédera à cette vente.
Les ventes judiciaires de meubles aux enchères publiques ne peuvent en l’état aujourd’hui être pratiquées de manière totalement dématérialisée. Ma réponse est claire : ce n’est pas possible aujourd’hui.
Toutefois, j’apporterai deux inflexions à cette réflexion.
D’une part, les officiers publics et ministériels qui sont autorisés à pratiquer ces ventes peuvent avoir recours à des plateformes dématérialisées, soit pour faire la publicité de leurs ventes, soit pour procéder à des ventes filmées, qui seront diffusées en direct via ces plateformes.
D’autre part, une réflexion sur la dématérialisation totale des ventes de meubles aux enchères judiciaires est actuellement engagée au sein de mon ministère, avec l’ensemble des parties prenantes. J’ai en effet confié à Henriette Chaubon et à Édouard de Lamaze un rapport qu’ils doivent me remettre dans une quinzaine de jours sur le sujet des ventes volontaires ; la question que vous posez y sera notamment traitée. J’espère pouvoir être ensuite en mesure de prendre les décisions qui s’imposeront, car la question que vous posez me semble particulièrement judicieuse.
La parole est à M. Michel Vaspart, pour répondre à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, en vingt-six secondes.
Sourires.
Madame la ministre, je souhaite vous remercier de votre réponse. Je suis satisfait de constater que, sur ce sujet, un travail est en cours au ministère.
La parole est à M. Éric Bocquet, auteur de la question n° 444, adressée à M. le ministre de l’intérieur.
Monsieur le secrétaire d’État, je souhaite vous interroger sur le problème de la crémation des citoyens français décédés à l’étranger, laquelle crée une situation très particulière.
Le rapatriement des corps des ressortissants français décédés à l’étranger se fait en effet dans un cercueil en zinc hermétiquement clos, pour des raisons d’hygiène, de santé publique et de prévention des trafics illicites. Cela découle de l’application de l’arrangement de Berlin et de l’accord de Strasbourg sur le rapatriement des corps.
Or ces cercueils en zinc ne peuvent pas être incinérés, car ils risqueraient d’endommager les équipements des crématoriums. Une incinération impliquerait un changement de cercueil, donc l’ouverture du premier cercueil en zinc. Or, selon le code général des collectivités territoriales, la fermeture du cercueil est définitive, le code pénal prévoyant de lourdes sanctions en cas de changement de cercueil, ce qui constituerait une violation de sépulture.
Les familles se voient ainsi contraintes d’inhumer leur proche décédé, ne pouvant respecter les dernières volontés du défunt, ce qui va à l’encontre d’un droit fondamental, celui du libre choix pour chacun d’organiser ses funérailles.
Seul le procureur de la République peut autoriser une dérogation à cette règle, à titre exceptionnel, en permettant l’ouverture du cercueil.
Cette difficulté juridique a été étudiée par la doctrine, qui préconise de donner la compétence au juge d’instance, qui pourra rendre une décision rapide sur le changement de cercueil et ainsi permettre de procéder aux funérailles du défunt dans les six jours suivant le retour du corps sur le sol français.
Dans le département du Nord, frontalier sur toute sa longueur avec la Belgique, comme pour tous les départements frontaliers, cette situation a d’autant plus de probabilités de se présenter que le flux de travailleurs transfrontaliers est important.
Toutefois, outre les accords bilatéraux qui pourraient être conclus avec les pays frontaliers, la question concerne l’ensemble des Français résidant à l’étranger, dont le nombre, on le sait, est en constante augmentation, sans compter les déplacements touristiques et professionnels de nos concitoyens.
Parallèlement, le développement de la crémation, que les Français sont de plus en plus nombreux à choisir pour leurs obsèques, mériterait qu’une réponse légale soit apportée à cette problématique.
C’est pourquoi, monsieur le secrétaire d’État, je souhaite vous interroger sur les solutions législatives qui pourraient être apportées pour faire évoluer la réglementation en la matière et, plus précisément, sur l’attribution de la compétence pour le changement de cercueil.
La parole est à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de l’intérieur.
Monsieur le sénateur Éric Bocquet, comme vous l’avez rappelé, les prescriptions techniques applicables aux cercueils utilisés pour le rapatriement des corps des ressortissants français décédés à l’étranger sont issues de l’article 3 de l’arrangement de Berlin de 1937 et de l’article 6 de l’accord de Strasbourg de 1973. Ces deux conventions internationales prévoient l’utilisation d’un cercueil hermétique métallique, plus spécifiquement en zinc.
Vous l’avez souligné, de tels cercueils sont incompatibles avec la plupart des appareils de crémation utilisés en France, alors que l’article R. 2213-20 du code général des collectivités territoriales considère la fermeture d’un cercueil comme définitive après que les formalités légales et réglementaires ont été accomplies. Ainsi, une fois sur le territoire français, la translation d’un cercueil en zinc à un cercueil en bois qui permettrait la crémation n’est pas autorisée, sauf à constituer une violation de sépulture, infraction lourdement sanctionnée par le code pénal.
Si l’attention des services du ministère de l’intérieur est régulièrement appelée sur cette difficulté relative aux cercueils en provenance de l’étranger, ni la compétence du préfet ni celle du maire n’est fondée pour autoriser la réouverture d’un cercueil. Seul le procureur de la République, dans le cadre d’une procédure judiciaire, voire, dans certains cas exceptionnels, le juge d’instance, peut autoriser la réouverture d’un cercueil.
Dans le cas de transports transfrontaliers, les pays signataires de conventions sont libres d’accorder des facilités plus grandes par application d’accords bilatéraux. C’est sur ce fondement que la France et l’Espagne ont, en 2017, signé une convention relative au transport de corps par voie terrestre n’obligeant plus à recourir à un cercueil hermétique métallique.
En collaboration avec le ministère des affaires étrangères et le ministère de la santé, une convention bilatérale est également en cours de finalisation avec la Belgique. L’enjeu principal de la signature de l’accord franco-belge est également le transport de corps par voie terrestre n’obligeant plus à recourir à un cercueil hermétique métallique.
Cela représente une grande avancée, puisque ces accords permettront de satisfaire les dernières volontés des défunts et, pour les familles, de réduire les coûts associés aux funérailles.
Par ailleurs, le Conseil national des opérations funéraires a été saisi de ce sujet et des études juridiques ont été engagées quant à l’évolution possible des textes en la matière.
La parole est à M. Éric Bocquet, pour répondre à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de l’intérieur, en dix secondes !
Monsieur le secrétaire d’État, je prends acte des éléments de réponse que vous m’avez apportés et vous en remercie.
La parole est à M. Cédric Perrin, auteur de la question n° 449, adressée à M. le ministre de l’intérieur.
Ma question s’adresse effectivement au ministre de l’intérieur…
Monsieur le secrétaire d’État, le 29 septembre dernier, à Bourg-en-Bresse, un engagement de Gérard Collomb était salué par les applaudissements nourris des sapeurs-pompiers réunis pour leur congrès annuel. Le ministre de l’intérieur d’alors venait de confirmer le changement urgent de la directive de 2003, dite DETT. Il voulait « assurer la pérennité du statut de sapeur-pompier volontaire ».
Quelques jours plus tôt, mes collègues Catherine Troendlé et Olivier Cigolotti adressaient au président de la Commission européenne une motion appelant à préserver l’engagement volontaire des sapeurs-pompiers et à rejeter par conséquent la reconnaissance des volontaires en tant que « travailleurs » au sens de cette fameuse directive.
Nous sommes 252 sénateurs à avoir cosigné cette motion. L’ampleur de la mobilisation témoigne de la gravité des risques courus. Assimiler le sapeur-pompier volontaire à un travailleur, c’est remettre en cause la pérennité de notre système de secours dans son ensemble.
C’est pourquoi je vous demande quelles solutions concrètes le Gouvernement entend mettre en œuvre pour traduire la promesse du précédent ministre de l’intérieur et préserver ainsi le volontariat du sapeur-pompier.
Conformément à la demande formulée par notre assemblée, le nouveau ministre de l’intérieur plaidera-t-il auprès des instances européennes en faveur d’une directive spécifique aux forces de sécurité et de secours d’urgence ? Où en êtes-vous des négociations ? Quel calendrier est prévu ?
La parole est à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de l’intérieur.
Monsieur le sénateur Cédric Perrin, la sécurité civile française repose sur un modèle qui montre chaque jour sa pertinence et sa robustesse, je vous remercie de l’avoir rappelé. Par son organisation et son implantation territoriale cohérente, notre modèle permet aussi bien de faire face aux accidents du quotidien que d’affronter les crises exceptionnelles. Ce modèle, garant de la pérennité de la mission des sapeurs-pompiers volontaires et professionnels, doit être conforté.
Dans son arrêt du 21 février 2018, la Cour de justice de l’Union européenne souligne que les États membres ne peuvent déroger, à l’égard de certaines catégories de sapeurs-pompiers recrutés par les services publics d’incendie, aux obligations découlant de la directive du 4 novembre 2003. Pour rappel, cette dernière concerne certains aspects de l’aménagement du temps de travail et des périodes de repos.
La CJUE ajoute que le temps de garde qu’un travailleur est contraint de passer à domicile avec l’obligation de répondre aux appels de son employeur dans un délai de huit minutes doit être considéré comme du temps de travail. Elle rappelle que le facteur déterminant pour la qualification de temps de travail, au sens de la directive, est le fait que le travailleur est contraint d’être physiquement présent sur le lieu déterminé par l’employeur et de s’y tenir à la disposition de ce dernier.
Je suis très attentif aux conséquences potentielles de l’application en France de cette jurisprudence, s’agissant notamment du risque de désorganisation et du surcoût potentiel induit pour les services d’incendie et de secours. C’est pourquoi l’étude des impacts réels pour les services d’incendie et de secours est en cours par les services compétents du ministère de l’intérieur, en lien avec le secrétariat général aux affaires européennes.
Le rapport de la mission Volontariat, remis le 23 mai dernier, suggère d’exempter le volontariat de toute application de la directive du 4 novembre 2003.
En effet, je ne peux accepter une remise en cause de notre modèle, qui repose sur l’engagement de femmes et d’hommes, sapeurs-pompiers volontaires. Afin de pérenniser et de sécuriser juridiquement les principes à la base de l’organisation nationale du volontariat, nous allons dans les prochaines semaines proposer une initiative européenne de nature à garantir que les volontaires puissent continuer à concilier librement leur engagement et leur activité professionnelle.
C’est avec détermination que le Président de la République et le Gouvernement continueront à valoriser notre modèle de sécurité civile et, avec lui, le volontariat, et à en faire une vitrine et une référence dans les coopérations européenne et internationale conduites par la France.
La parole est à M. Cédric Perrin, pour répondre à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de l’intérieur, en une minute et dix secondes.
Monsieur le secrétaire d’État, votre réponse me satisfait évidemment. Je crois que nous devons tous aller dans le même sens. L’application de cette directive serait absolument catastrophique pour notre système de sécurité civile dans son ensemble.
Aujourd’hui, le courage et le dévouement des pompiers volontaires sur l’ensemble du territoire national font de ce modèle de sécurité un modèle exemplaire. Vous avez évoqué la difficulté à recruter des volontaires ; c’est en effet un sujet majeur que l’on rencontre dans la plupart des centres de secours aujourd’hui.
Il faut également évoquer le volet financier. Il a à un moment donné été question, si la directive devait être appliquée, de devoir recruter plus de 20 000 pompiers professionnels. Ce serait absolument impossible à mettre en œuvre pour les collectivités qui, depuis 1996, je crois, sont dépendantes des conseils départementaux en matière de service départemental d’incendie et de secours.
C’est la raison pour laquelle j’insiste avec force. Monsieur le secrétaire d’État, j’ai bien compris votre engagement et votre volonté de faire en sorte que cette directive ne soit pas appliquée aux sapeurs-pompiers volontaires. Cela me semble un point absolument essentiel pour que les secours continuent de connaître un aussi bon maillage sur l’ensemble de notre territoire.
Je vous remercie de votre réponse.
La parole est à M. Jean Louis Masson, auteur de la question n° 470, transmise à Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.
Monsieur le secrétaire d’État, la région Grand Est est démesurément étendue : elle est plus grande que toute la Belgique et que le total des trois Länder allemands voisins. Elle est éloignée du terrain et ne correspond à aucune réelle solidarité locale.
À l’exception d’élus qui profitent du système pour des raisons politiques ou par intérêt personnel, le consensus est général pour regretter l’absence de toute gestion de proximité.
De plus, les Alsaciens sont très attachés à leur spécificité et réclament une région Alsace de plein exercice.
Le président Macron est conscient de cette réalité, mais il joue le statu quo. En effet, s’il veut bien discuter, il refuse a priori toute possibilité de revenir sur le découpage des régions, ce qui revient à opposer une fin de non-recevoir à ses interlocuteurs.
C’est très regrettable, car ce que propose M. Macron n’est qu’un mirage visant à gagner du temps. Ainsi, même si un département Alsace fusionné récupérait quelques miettes de compétences, son maintien dans la région Grand Est ne réglerait absolument pas la démesure territoriale de celle-ci.
Par ailleurs, et à juste titre, les huit autres départements de la région Grand Est ne peuvent pas accepter que l’Alsace bénéficie d’un régime préférentiel tout en restant dans le Grand Est.
Un sondage récent a montré que 83 % des Alsaciens veulent le rétablissement d’une région de plein exercice ou même, à l’instar de la Corse, la création d’une région à statut dérogatoire. Le Gouvernement s’obstine, hélas, à faire semblant de ne rien comprendre et de ne pas mesurer l’aberration que constitue une région aussi étendue que le Grand Est.
Le Président de la République multiplie les prises de position pour donner des leçons de démocratie à d’autres États de l’Union européenne tels que la Hongrie, la Pologne ou l’Italie. Peut-être faudrait-il qu’il commence par se montrer lui-même exemplaire en matière de démocratie en acceptant un référendum par lequel les Alsaciens se prononceraient sur le rétablissement d’une région de plein exercice qui pourrait sortir de la région Grand Est.
La parole est à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de l’intérieur.
Monsieur le sénateur, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser ma collègue Jacqueline Gourault, qui, ne pouvant être présente, m’a chargé de vous répondre.
Vous appelez mon attention sur la région Grand Est, issue de la fusion en 2016 des régions Alsace, Lorraine et Champagne-Ardenne. La taille de cette région entraînerait, selon vous, une absence de gestion de proximité. Vous évoquez les aspirations de certains Alsaciens au rétablissement d’une région Alsace séparée du reste de la région Grand Est, et demandez au Gouvernement d’accepter l’organisation d’un référendum sur ce sujet.
Le Gouvernement a démontré toute l’attention qu’il porte aux aspirations des Alsaciens. Le Premier ministre a ainsi adressé en janvier une lettre de mission au préfet de la région Grand Est lui demandant d’évaluer dans un rapport différentes hypothèses institutionnelles pour l’avenir des deux départements alsaciens au sein de la région Grand Est. Parmi ces hypothèses, on trouve celle de la fusion des deux départements existants. Ce rapport a été publié le 7 août dernier et a permis d’engager des travaux de concertation qui sont en cours.
Une réflexion est donc actuellement menée sur une éventuelle fusion des départements du Bas-Rhin et du Haut-Rhin recouvrant les limites territoriales de l’ancienne région Alsace. Cette fusion pourrait s’accompagner de l’octroi de compétences spécifiques et supplémentaires qui pourraient être confiées à la nouvelle collectivité, notamment dans le cadre de la différenciation prévue dans le projet de loi constitutionnelle.
En tout état de cause, je vous informe que le Gouvernement n’envisage pas d’organiser un référendum sur la recréation de la région Alsace. En effet, les limites territoriales de la présente région ont été fixées il y a tout juste deux ans et demi, et le Président de la République s’est engagé à maintenir la stabilité pour les collectivités locales.
Si des élus alsaciens soulignent la réalité du « désir d’Alsace » exprimé par la population, il est à noter que certains d’entre eux ne souhaitent pas un affaiblissement de la région Grand Est, qui a fait la preuve de son efficacité.
De plus, les compétences confiées aux régions portent de manière générale sur la planification et la gestion de grandes infrastructures, plutôt que sur des sujets nécessitant une gestion de proximité proprement dite, qui relève davantage des compétences des départements ou du bloc communal.
Telles sont les informations, monsieur le sénateur, que je suis en mesure de vous apporter.
La parole est à M. Jean Louis Masson, pour répondre à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de l’intérieur. En dix secondes !
Monsieur le secrétaire d’État, vous n’avez absolument pas répondu à ma question. C’est de l’enfumage !
Avant d’être élu président de la région Grand Est, Jean Rottner avait rédigé une pétition et réuni 50 000 signatures en faveur du rétablissement de la région Alsace. Maintenant qu’il en est président, il se comporte comme un rat dans un fromage, et déclare que la région Grand Est est absolument merveilleuse !
La parole est à M. Hervé Maurey, auteur de la question n° 342, adressée à M. le ministre de l’intérieur.
Monsieur le secrétaire d’État, en 2011 a été engagée la réforme de la défense extérieure contre l’incendie avec l’adoption de la loi de simplification et d’amélioration de la qualité du droit. Cette loi a modifié le niveau de fixation des règles – autrefois national, aujourd’hui départemental –, afin qu’elles soient au plus près des réalités locales. Cette réforme allait donc dans le bon sens.
Malheureusement, dans un certain nombre de départements, le règlement adopté et surtout son application ne sont pas adaptés à la réalité des communes rurales.
Dans l’Eure, par exemple, la distance requise entre les bouches à incendie et les habitations est de 200 mètres pour les zones peu denses. Cette règle est de surcroît appliquée avec une rigueur particulièrement grande, puisque des certificats d’urbanisme sont refusés pour des distances à peine supérieures à 200 mètres, parfois pour de simples extensions ou pour des constructions de piscines.
Cette situation conduit à ce que dans de nombreuses communes rurales toutes les demandes de certificat d’urbanisme soient refusées, interdisant de fait toute nouvelle construction.
Cette règle est d’autant plus préjudiciable que son respect strict par les communes nécessite des investissements très onéreux, parfois même techniquement impossibles.
Ainsi, l’installation de bouches à incendie se heurte souvent à une insuffisance des débits de réseaux d’eau. Or, dans la plupart des cas, ceux-ci sont gérés non pas par les communes, mais par des syndicats peu enclins à ce type d’investissements, d’autant que l’augmentation du diamètre des tuyaux qui permet d’améliorer les débits est de nature à créer des phénomènes de turbidité affectant la qualité de l’eau.
Quant à l’installation de réserves d’eau, généralement très coûteuse pour une petite commune, elle n’est pas toujours possible pour des motifs d’emprises foncières.
Ma question est donc très simple, monsieur le secrétaire d’État : quelles mesures le Gouvernement envisage-t-il de prendre pour remédier à cette situation très préoccupante et très pénalisante pour de très nombreux maires ruraux ?
La parole est à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de l’intérieur.
Monsieur le sénateur, l’efficacité des opérations de lutte contre les incendies dépend notamment de l’adéquation entre les besoins en eau et les ressources disponibles.
La défense extérieure contre l’incendie, ou DECI, placée sous l’autorité du maire ou du président de l’établissement public de coopération intercommunale, a pour objet d’assurer, en fonction des besoins résultant des risques à couvrir, l’alimentation en eau des moyens des services d’incendie et de secours. Il s’agit d’un appui indispensable pour permettre aux sapeurs-pompiers d’intervenir rapidement, efficacement et dans des conditions optimales de sécurité.
La réforme de la DECI, conduite en 2015, instaure une approche novatrice. En effet, la DECI ne répond plus à une norme nationale, mais relève d’un règlement départemental élaboré par le préfet. Cette réforme a un double objectif : une concertation renforcée avec les collectivités et une plus grande souplesse dans la définition et dans l’application des mesures au plus près de la réalité du terrain – zones très urbanisées, zones rurales ou zones soumises aux feux de forêt.
La distance maximale qui sépare les points d’eau et les risques à défendre est déterminée au regard des enjeux à protéger et des techniques opérationnelles des sapeurs-pompiers.
Dans le département de l’Eure, le règlement départemental, arrêté en mars 2017 après concertation avec les élus au sein d’un comité des partenaires, a fixé à 200 mètres la distance séparant un point d’eau d’un bâtiment classé en risque d’incendie faible.
J’ai parfaitement conscience que cette réglementation, nécessaire pour garantir la lutte efficace et rapide contre les incendies, peut parfois être contraignante dans certaines communes, notamment rurales.
Si vous estimez qu’une disposition essentielle de ce règlement n’est pas raisonnablement applicable et qu’elle peut emporter des conséquences négatives pour les communes – vous avez cité le cas de refus de certificats d’urbanisme –, ce règlement peut aussi évoluer par le biais de nouveaux échanges avec les partenaires et selon les procédures qui sont applicables.
J’ajoute enfin que la DECI ne doit pas altérer la qualité sanitaire de l’eau distribuée ni conduire à des dépenses excessives, au regard, notamment, du dimensionnement des canalisations. Si le réseau d’eau potable ne permet pas d’obtenir le débit nécessaire à la DECI, d’autres ressources sont utilisables.
Je rappelle que la DECI repose sur un équilibre entre les impératifs que sont la sécurité des populations, la constante amélioration de la DECI et un coût financier supportable, notamment pour les communes rurales.
La parole est à M. Hervé Maurey pour répondre à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de l’intérieur. Vous disposez de trente-six secondes, mon cher collègue.
Monsieur le secrétaire d’État, vous avez parlé de souplesse, mais, dans les faits, on observe malheureusement tout le contraire : le règlement est très strict, et son application est d’une rigueur tout à fait excessive. C’est sur ce dernier point que j’aurais souhaité que vous puissiez nous donner des éléments de réponse permettant d’envisager un certain nombre d’assouplissements.
Le Président de la République a déclaré récemment que les maires « sont les premiers porteurs de la République du quotidien ». Il me semble qu’il faudrait commencer par alléger leur quotidien, car ils n’en peuvent plus de toutes ces contraintes qui pèsent sur eux. C’est d’ailleurs ce qui explique le nombre de démissions record et la détermination de certains maires que nous rencontrons à ne pas se représenter en 2020. Nous n’avions jamais connu une telle situation.
La parole est à Mme Annick Billon, auteur de la question n° 385, adressée à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de l’intérieur.
Monsieur le secrétaire d’État, par la loi du 13 avril 2016 visant à renforcer la lutte contre le système prostitutionnel et à accompagner les personnes prostituées, la France a pris un engagement fort en affichant sa position abolitionniste et en reconnaissant la prostitution comme une violence.
Près de deux ans après sa promulgation, les effets de cette loi sont d’ores et déjà visibles. Les personnes prostituées ne sont plus poursuivies, plusieurs centaines de clients ont fait l’objet de poursuites pénales et des commissions départementales de lutte contre la prostitution, le proxénétisme et la traite des êtres humains aux fins d’exploitation sexuelle ont été mises en place sur une partie du territoire.
Ces commissions départementales, prévues par la loi précitée, constituent aujourd’hui un levier de coordination entre les différents acteurs concernés et favorisent la mise en œuvre à l’échelon local d’une politique d’accompagnement des victimes vers un parcours de sortie du système prostitutionnel.
Leur instauration constitue donc l’application d’un nouveau volet fondamental de la loi. Un pas vers l’objectif d’une société plus égalitaire est ainsi franchi.
Depuis 2017, une douzaine de départements ont commencé à travailler sur l’installation de ces commissions. Toutefois, les freins sont encore nombreux et l’état d’avancement de la mise en œuvre de la loi n’est pas le même partout. En effet, l’implémentation de ces commissions subit des reports et des retards. Nombre d’entre elles attendent encore le feu vert des préfets, dont le rôle est déterminant.
Par ailleurs, les associations, en première ligne dans l’accompagnement des personnes prostituées, regrettent une baisse de leurs subventions et font état d’un manque de moyens financiers pour mener à bien leurs opérations.
La lutte contre le système prostitutionnel ne sera effective qu’avec une volonté forte de l’exécutif et le concours de tous les ministères. La lutte contre le système prostitutionnel ne pourra se faire qu’avec la dotation des moyens humains et financiers associés.
Aussi, pourriez-vous nous indiquer, monsieur le secrétaire d’État, sous quels délais chaque département sera doté d’une commission départementale de lutte contre la prostitution, et quels crédits vous prévoyez d’allouer aux associations agréées qui accompagnent les victimes dans leur parcours de sortie ?
La parole est à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de l’intérieur.
Madame la sénatrice, la France s’est dotée depuis de nombreuses années d’un arsenal juridique particulièrement sévère et dissuasif pour lutter contre le proxénétisme et la traite des êtres humains à des fins d’exploitation sexuelle et contre les réseaux criminels qui organisent ces pratiques.
Les forces de l’ordre sont impliquées pour lutter contre ces phénomènes sous toutes leurs formes. Leur action a permis le démantèlement par les services de police et de gendarmerie de cinquante réseaux de proxénétisme aggravé depuis le début de l’année, et la mise en cause de près de 650 personnes. Je rappelle que les forces de l’ordre interviennent – vous le savez – sur des réseaux de plus en plus variés, implantés notamment dans certains quartiers sensibles de notre territoire.
Cette action doit nécessairement s’accompagner, vous l’avez rappelé, d’un volet social et préventif. Les pouvoirs publics s’investissent activement aux côtés des associations concernées dans la prévention et l’assistance à l’égard des personnes en danger de prostitution ou se livrant à la prostitution.
La loi du 13 avril 2016 visant à renforcer la lutte contre le système prostitutionnel et à accompagner les personnes prostituées a introduit sur ce point d’importantes avancées, en créant notamment un parcours de sortie de la prostitution et d’insertion sociale et professionnelle.
À cette fin, elle prévoit, ainsi que vous l’évoquiez, madame la sénatrice, la création dans chaque département d’une commission départementale de lutte contre la prostitution, le proxénétisme et la traite des êtres humains aux fins d’exploitation sexuelle.
Ces commissions ont deux missions principales : mettre en œuvre la politique départementale de protection et d’assistance en faveur des personnes victimes de la prostitution, du proxénétisme et de la traite des êtres humains aux fins d’exploitation sexuelle, et formuler des avis sur les demandes d’ouverture et de renouvellement des parcours de sortie de la prostitution et de réinsertion proposés avec les associations agréées en lien avec les victimes volontaires.
À la fin du mois de juin dernier, trente-trois commissions départementales ont ainsi été installées sous l’autorité des préfets, dont seules dix-huit ont examiné des demandes de parcours de sortie de la prostitution. Vingt-trois commissions supplémentaires devraient être mises en place dès cette année.
J’ajoute que quatre-vingts associations ont été agréées pour la mise en œuvre du parcours de sortie de la prostitution sur soixante-quatre départements, et que soixante-dix-sept parcours de sortie de la prostitution ont été autorisés par décision préfectorale dans dix-sept départements.
Je vous confirme que l’État est pleinement engagé pour la mise en œuvre de la loi visant à renforcer la lutte contre le système prostitutionnel et à accompagner les personnes prostituées, et si je ne suis pas en mesure de vous communiquer de calendrier de déploiement des commissions départementales, soyez assurée, madame la sénatrice, que toutes les dispositions seront prises à l’égard des préfets pour relancer ce dispositif et permettre, comme vous le souhaitez, son déploiement dans des délais les plus rapides possible.
La parole est à Mme Annick Billon pour répondre au secrétaire d’État auprès du ministre de l’intérieur. En neuf secondes !
Je vous remercie de ces chiffres, monsieur le secrétaire d’État. Permettez-moi toutefois de souligner que, si de nombreuses annonces sont faites concernant les personnes lesbiennes, gays, bisexuelles et transgenres, ou LGBT, et la lutte contre les violences faites aux femmes, dans les territoires, les associations et les premiers acteurs qui sont confrontés aux victimes subissent des baisses drastiques de leurs moyens. J’ai par exemple pu constater hier matin, en Vendée, le manque de moyens du centre d’information sur les droits des femmes et des familles, ou CIDFF.
La parole est à M. Max Brisson, auteur de la question n° 486, transmise à M. le ministre de l’intérieur.
Monsieur le secrétaire d’État, je suis particulièrement heureux de poser cette question à celui qui, au-delà d’une brillante carrière au service de l’État, fut un excellent sous-préfet de Bayonne.
Au moment où les communes commencent leur campagne de recrutement de sauveteurs pour l’été prochain, la question du maintien de la surveillance des plages par les maîtres-nageurs sauveteurs des compagnies républicaines de sécurité, les MNS-CRS, se pose avec acuité.
Outre leurs fonctions de sauvetage et de surveillance des bains, les MNS-CRS, lorsqu’ils sont déployés, utilisent leurs pouvoirs de police pour faire de la plage, qui n’est pas exempte de la montée de l’insécurité, un lieu sécurisé.
Ainsi, en 2017, ils ont réalisé plus de 1 600 sauvetages, constaté plus de 600 infractions maritimes, dressé 800 contraventions et mis à disposition de la justice 231 personnes. C’est dire combien leur tâche dépasse la seule surveillance ! Ils exercent un travail de police de proximité sur nos plages.
De plus, chacun sait que les plages très fréquentées pendant la saison estivale constituent malheureusement de potentielles et réelles cibles pour les attentats terroristes. Armés depuis 2016, les MNS-CRS sont considérés comme primo intervenant en cas d’attaque terroriste.
À double titre, ils exercent donc une mission régalienne, et pas seulement une mission de surveillance et de sauvetage dont on peut convenir qu’elle est de la responsabilité des maires et des collectivités locales.
Or si 605 MNS-CRS étaient déployés sur 101 communes il y a dix ans, ils n’étaient plus que 297, répartis sur seulement 62 communes cette année. Leur maintien, voire leur renfort, est pourtant indispensable.
Pour la saison dernière, ce n’est qu’au mois de décembre 2017 que les préfets ont eu confirmation du maintien des effectifs pour l’été 2018.
Monsieur le secrétaire d’État, je vous demande donc, premièrement, de confirmer le plus tôt possible que les MNS-CRS seront bien déployés en 2019, au minimum sur la base des effectifs de 2018, et deuxièmement, de vous engager dans une logique pluriannuelle conventionnelle avec les collectivités locales, afin de leur donner une vision à long terme de la présence nécessaire et bénéfique des CRS sur nos plages.
La parole est à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de l’intérieur.
Monsieur le sénateur, je vous remercie de votre compliment, qui me touche.
Soyez assuré que le ministère de l’intérieur est extrêmement attentif à la sécurité dans les lieux de vacances qui connaissent une forte affluence saisonnière – le Pays basque n’y fait naturellement pas exception.
Sur le plan sécuritaire, des mesures spécifiques visent en particulier à sécuriser les déplacements sur l’ensemble des réseaux de transport, ou encore à accompagner les grands événements festifs, sportifs ou culturels de l’été en lien étroit avec les organisateurs et les collectivités concernées.
Sur le plan de la lutte contre la délinquance, vous le savez, chaque année des renforts saisonniers de gendarmes et de policiers sont déployés dans les secteurs les plus touristiques.
Il n’est évidemment pas question de revenir sur le principe de ces renforts, extrêmement importants pour les communes touristiques. Compte tenu du poids économique du tourisme sur le territoire national, la sécurité de nos lieux touristiques est un enjeu majeur pour le Gouvernement.
La surveillance des plages et le secours aux personnes en difficulté dans le cadre des activités de baignade relèvent d’un cadre incontestablement distinct de la mission de sécurité des biens et des personnes qui incombe aux forces de sécurité de l’État. C’est le maire qui exerce la police des baignades et des activités nautiques.
Les missions de surveillance des plages et de secours aux personnes, vous le savez, sont d’ailleurs déjà principalement dévolues à des personnels qui n’appartiennent pas aux forces de l’ordre. Si des maîtres-nageurs sauveteurs des compagnies républicaines de sécurité participent historiquement à ce dispositif, il ne s’agit pas d’une mission propre des CRS ni d’une obligation légale de l’État.
Je souhaite également clarifier un point : les maîtres-nageurs sauveteurs des CRS n’assurent pas le maintien de l’ordre. Les conditions matérielles de leur présence sur les plages ne se prêtent d’ailleurs guère à une action répressive significative, puisqu’en moyenne moins de deux infractions sont relevées par chacun de ces agents au cours de la saison estivale.
C’est pour toutes ces raisons que le nombre de CRS affectés à la surveillance des plages a progressivement été diminué depuis 2008. Il s’agit donc d’une évolution engagée de longue date.
Pour autant – j’y insiste –, toute réflexion concernant la sécurisation des sites touristiques n’est absolument pas interdite par principe et doit avoir pour seuls objectifs de maximiser la présence des policiers et des gendarmes là où ils sont nécessaires et de les recentrer sur leur cœur de métier.
Cette réflexion sera conduite le moment venu et fera l’objet d’échanges avec l’ensemble des acteurs concernés, je puis vous rassurer sur ce point.
L’objectif du Gouvernement est de se doter d’un dispositif global de sécurité, dont on ne peut mesurer la pertinence à l’aune du déploiement de tel ou tel type d’effectif. Vous pouvez compter sur l’association des élus à la réflexion qui sera menée sur la sécurisation des sites touristiques.
La parole est à M. Max Brisson pour répondre à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de l’intérieur. En sept secondes !
Monsieur le secrétaire d’État, permettez-moi d’insister sur le fait que certaines grandes plages de grandes stations sont des lieux de rassemblement d’un nombre très important de personnes qui nécessitent des mesures de sécurité dans lesquelles l’État doit prendre sa place.
La parole est à Mme Josiane Costes, auteur de la question n° 262, adressée à M. le ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire.
Madame la secrétaire d’État, le département du Cantal produit une quantité importante d’électricité d’origine hydraulique du fait de son réseau hydrographique et de son relief, soit deux fois et demie l’électricité qu’il consomme.
L’arrivée à échéance en 2012 de six de ses concessions aurait dû conduire l’État à engager une procédure de renouvellement par ouverture à la concurrence ou de prolongation de ces contrats de concession, et ainsi ouvrir droit au versement d’une partie de la redevance par le concessionnaire aux collectivités locales. Mais aucune de ces démarches n’a été finalisée, et le manque à gagner pour le département du Cantal s’élève tout de même à 2 millions d’euros par an, soit depuis 2013 environ 10 millions d’euros, auxquels il convient d’ajouter 5 millions d’euros non perçus par les communautés de communes ou les communes riveraines.
De plus, cette situation affecte négativement l’engagement des programmes d’investissement des concessionnaires en place. Ces programmes amélioreraient encore la production de cette énergie renouvelable, qui, rappelons-le, est la deuxième source de production électrique en France derrière le nucléaire et la première source d’électricité renouvelable.
En outre, ce manque de visibilité dans la durée ne permet pas de trouver des solutions satisfaisantes à des problèmes environnementaux insuffisamment pris en compte dans les cahiers des charges initiaux, par exemple des éclusées et des débits réservés.
Madame la secrétaire d’État, pourriez-vous me préciser les raisons de cette absence regrettable de décision et les intentions du Gouvernement dans ce domaine ?
La parole est à Mme la secrétaire d’État auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire.
Madame la sénatrice, vous avez interrogé François de Rugy, ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire, lequel, ne pouvant être présent, m’a chargée de vous répondre.
François de Rugy et moi-même sommes particulièrement attachés à la production d’hydroélectricité qui, comme vous l’avez rappelé, est la première source de production d’électricité renouvelable, importante à la fois pour le système électrique national et pour le développement économique local.
En octobre 2015, la Commission européenne a adressé une mise en demeure aux autorités françaises au sujet des concessions hydroélectriques. En effet, elle considère que les mesures par lesquelles les autorités françaises ont attribué à EDF et maintenu à son bénéfice l’essentiel des concessions hydroélectriques en France sont incompatibles avec le droit européen en ce qu’elles permettraient à l’entreprise de maintenir ou de renforcer sa position dominante en France sur les marchés de fourniture d’électricité au détail.
Le Gouvernement ne se satisfait pas de cette situation, et continue à contester le raisonnement selon lequel la possession de moyens de production hydroélectrique entraînerait mécaniquement une rupture d’égalité sur le marché de la fourniture d’électricité au détail et le fait qu’il aurait accordé un quelconque avantage discriminatoire à EDF. Nous mettons également en avant les enjeux sociaux, économiques et écologiques majeurs liés à l’hydroélectricité, en particulier à la gestion de l’eau et à la sécurité des ouvrages.
Dans le cadre de ses échanges avec la Commission, le Gouvernement défend une application équilibrée de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte qui a consolidé le système des concessions et qui garantit le respect des enjeux de service public de l’hydroélectricité française grâce à différents outils.
À la différence d’autres pays où les installations hydroélectriques appartiennent aux exploitants privés, le régime concessif permet de garantir que les ouvrages restent durablement la propriété de l’État, avec un contrôle fort au travers de la réglementation et du contrat signé entre l’État et le concessionnaire, garantissant ainsi le respect de l’intérêt public.
Le principe de mise en concurrence des concessions échues découle du droit européen et national. Le Gouvernement s’y prépare tout en défendant certains principes essentiels, en particulier en s’opposant à toute interdiction de candidater pour EDF et à la remise en concurrence des concessions non échues.
Dans l’attente, les concessions concernées continuent effectivement à s’acquitter de la fiscalité prévue par les contrats actuels.
Dans le cadre du projet de loi de finances en discussion, le Gouvernement est tout à fait ouvert à des propositions de mise en place d’une redevance supplémentaire concernant les concessions arrivées à leur terme et n’ayant pas encore été renouvelées, ce qui permettrait aux collectivités concernées d’en bénéficier pendant cette période transitoire précédant le renouvellement.
Un travail conjoint du Gouvernement avec un sénateur pourrait ainsi permettre le dépôt d’un amendement sur le sujet.
La parole est à Mme Josiane Costes, pour répondre à Mme la secrétaire d’État auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire. Il vous reste cinquante et une secondes, ma chère collègue.
Madame la secrétaire d’État, les collectivités locales concernées sont impatientes, et elles ne peuvent pas se satisfaire de cette situation très floue. Si l’État est toujours prompt à percevoir son dû auprès d’elles, les collectivités locales souhaiteraient que l’inverse soit également vrai.
La situation traîne et se détériore au lieu de s’arranger. Nous attendons maintenant une réponse précise et rapide.
La parole est à M. Arnaud de Belenet, auteur de la question n° 415, adressée à Mme la ministre auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports.
Madame la secrétaire d’État, ma question est double.
Elle concerne tout d’abord l’électrification de la ligne P sur la branche Paris-Troyes, qui a fait l’objet d’une contractualisation entre l’État, les conseils généraux et les conseils régionaux concernés. Alors que l’on nous dit que l’État ne tiendra pas ses engagements, le préfet de région affirme que l’État paiera la quote-part de 40 millions d’euros qu’il s’est engagé à acquitter.
Madame la secrétaire d’État, j’ai donc besoin que de manière très formelle, par votre voix, le Gouvernement nous confirme qu’il tiendra ses engagements et qu’il paiera cette somme en 2020 conformément à la convention qui est en cours de finalisation avec les collectivités territoriales, afin de ne pas retarder les travaux d’électrification tant attendus de cette ligne.
J’ai besoin que vous nous le disiez très formellement dans cet hémicycle, tant les débats politiciens éloignent de la réalité et inquiètent les Seine-et-Marnais et leurs voisins de la région Grand Est.
La seconde partie de ma question concerne la seconde branche de la ligne P, qui relie Paris à La Ferté-Milon. Cette branche moins connue est complètement oubliée de tous et ne fait l’objet d’aucune polémique, ni dans la région d’Île-de-France ni dans la région Grand Est ni dans le département de l’Aisne. La situation est pourtant catastrophique, et le service totalement dégradé : quand il fait chaud, les voies sont dilatées et les trains ne roulent plus ; quand il fait froid, les moteurs sont grippés et les trains ne roulent plus ; et quand l’automne arrive et que les feuilles tombent, les rames sont bloquées.
Ce sont ainsi pas moins de trente rames qui sont arrêtées chaque mois, nous dit-on, soit une par jour, ce qui est absolument considérable, d’autant que si cette ligne vers La Ferté-Milon compte peu de voyageurs – ils sont 120 000 aujourd’hui –, elle voit son taux de fréquentation augmenter de 10 % chaque année du fait de la migration et de l’attractivité immobilière. Il y a donc un véritable enjeu.
Madame la secrétaire d’État, à la différence d’autres acteurs, l’État s’intéresse-t-il à la ligne reliant Paris à La Ferté-Milon ?
La parole est à Mme la secrétaire d’État auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire.
Monsieur le sénateur, vous avez appelé l’attention de Mme Borne, ministre chargée des transports, sur le projet d’électrification de la ligne Paris-Troyes. Ne pouvant être présente, ma collègue m’a chargée de vous répondre. Je vais m’efforcer d’apporter les précisions que vous demandez.
Comme vous l’avez rappelé, le projet d’électrification de la ligne Paris-Troyes a fait l’objet d’un protocole de financement conclu en 2016, par lequel l’État s’est engagé à financer cette opération à hauteur de 40 %, ce qui traduit sa forte mobilisation en faveur de l’opération.
Par ailleurs, ce protocole a été l’occasion de définir deux phases de réalisation. L’inscription de la première phase d’électrification entre Gretz et Nogent-sur-Seine dans les contrats de plan des régions d’Île-de-France et Grand Est 2015-2020 a confirmé l’engagement de l’État sur cette opération.
Compte tenu du contexte budgétaire très contraint sur l’exercice en cours et des besoins de modernisation du réseau ferroviaire recensés à l’échelle nationale, combinés à la volonté des partenaires d’accélérer la réalisation de la première phase, des difficultés sont effectivement apparues pour programmer la participation de l’État de 43 millions d’euros attendue en conséquence en 2018, sans que cela remette en cause les engagements de l’État – je tiens à vous rassurer sur ce point.
Cette situation ne devant pas compromettre le bon avancement de l’opération, un accord a été trouvé avec les cofinanceurs : ils assureront le portage des autorisations d’engagement nécessaires à la bonne tenue du calendrier, ce qui permettra le commencement des travaux principaux dès le mois d’octobre prochain.
La ministre chargée des transports et moi-même nous sommes engagées à ce qu’un tel portage soit transitoire, et ce jusqu’en 2020.
La mise en place de cette solution pragmatique permettra de mener à bien cet important chantier dans les meilleures conditions possible, au bénéfice de l’ensemble des usagers de la ligne Paris-Troyes, ainsi que de ceux de la ligne P du Transilien.
La parole est à Mme Martine Berthet, auteur de la question n° 429, adressée à Mme la ministre auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports.
Madame la secrétaire d’État, j’appelle votre attention sur le cadencement des trains à grande vitesse en Auvergne-Rhône-Alpes, notamment sur la ligne Chambéry-Paris.
En effet, des changements et des suppressions de desserte de plusieurs communes de la région seront effectifs dès la fin de cette année. Outre des diminutions de cadence sur les liaisons Paris-Saint-Exupéry et Paris-Grenoble, l’offre reliant Paris à Chambéry et Annecy comptera deux allers-retours quotidiens en moins. Malgré la mise en place de rames à deux niveaux, cette suppression réduira la capacité de 10 %, alors que de nombreux trajets sont déjà souvent complets.
Située au cœur d’un département au dynamisme économique, démographique et touristique, la ville de Chambéry – et, à travers elle, toute la Savoie – pâtirait plus particulièrement de la suppression des trains du matin à destination de Paris et des trains pour le retour de 16 heures 45 et de 18 heures 45. Cette suppression affecterait fortement les travailleurs et réduirait inévitablement l’activité et l’attractivité du département. Les déplacements professionnels réguliers entre Chambéry et Paris sont en effet extrêmement nombreux. Ces TGV correspondent aux besoins des actifs, notamment parce qu’ils leur permettent d’arriver à Paris en tout début de matinée par le train de 6 heures 25, le train suivant, celui de 8 heures 25, étant lui-même très souvent complet et correspondant moins aux besoins des déplacements d’affaires. La suppression de l’un et l’autre serait difficilement compréhensible, au regard des recettes de TVA et de l’emploi induits par l’activité économique du département savoyard.
Je vous demande, madame la secrétaire d’État, de bien vouloir lever tout doute sur la pérennité des TGV du matin permettant de relier Chambéry à Paris sans correspondance et des trains pour le retour. Si tel n’était pas le cas, ces bouleversements ne contrediraient-ils pas l’engagement de la SNCF en faveur du désenclavement des zones éloignées des centres décisionnels ?
La parole est à Mme la secrétaire d’État auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire.
Madame la sénatrice, vous avez appelé l’attention de Mme Borne, ministre chargée des transports, sur la mise en service de la liaison TGV Paris-Chambéry-Annecy au service annuel 2019.
À compter de 2019, et au moins jusqu’en 2023, le pôle d’échanges multimodal de Lyon-Part-Dieu va connaître des travaux importants. Ce projet d’ampleur va se traduire par la fermeture temporaire durant la période de deux voies sur onze qui va limiter d’autant la capacité d’accueil de cette gare.
Cette contrainte a une incidence sur les liaisons dans l’ensemble du Sud-Est, même lorsque celles-ci ne desservent pas Lyon. C’est la raison pour laquelle SNCF Mobilités a mené une réorganisation de l’ensemble de l’offre à grande vitesse entre la région Sud-Est et Paris. Effectivement, la liaison Paris-Annecy passant par Chambéry comptera au service annuel 2019 cinq allers-retours quotidiens contre sept actuellement.
La SNCF a rencontré les élus locaux pour leur présenter les modifications de dessertes et trouver avec eux les solutions de substitution possibles.
Aussi, pour compenser la baisse de la fréquence sur la liaison Paris-Annecy, SNCF Mobilités propose de remplacer l’ensemble des rames actuellement en service sur cette liaison par de nouvelles rames à deux niveaux, lesquelles sont non seulement plus confortables et plus fiables, mais surtout en mesure d’accueillir plus de voyageurs. Au total, la suppression de deux allers-retours sur sept ne se traduirait donc que par une réduction de 10 % du nombre de places.
Pour répondre précisément à votre question concernant l’horaire de départ du premier TGV en direction de Paris, je vous indique, madame la sénatrice, que les échanges avec les élus ont permis d’aboutir au maintien de l’horaire du service annuel 2018, à savoir un départ à 6 heures 25 de Chambéry pour une arrivée à Paris à 9 heures 15. SNCF Mobilités a en conséquence intégré cette décision dans son nouveau plan de transport pour 2019 et confirmé l’information aux élus.
La parole est à Mme Martine Berthet, pour répondre à Mme la secrétaire d’État auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire. Vous avez trente et une secondes, ma chère collègue.
Madame la secrétaire d’État, je vous remercie de votre réponse.
Si je salue le remplacement des rames vétustes par de nouvelles rames de plus grande capacité, je crains néanmoins, malgré ces nouveaux matériels, une diminution de la capacité globale. Ce remplacement ne justifie en rien la réduction de cadencement des trains en Savoie. Je n’ose imaginer que la mise en fabrication de nouvelles rames n’ait pas été prévue en quantité suffisante !
Par ailleurs, il n’est pas concevable d’envoyer les usagers prendre leur train à Lyon-Saint-Exupéry ou à Lyon-Part-Dieu, faute d’un cadencement suffisant, à un moment où les taux de pollution de l’air et les dérèglements climatiques sont tels qu’ils nous imposent une politique de déplacement la plus verte possible.
La parole est à M. Didier Marie, auteur de la question n° 484, adressée à Mme la ministre auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères, chargée des affaires européennes.
Madame la secrétaire d’État, dans le cadre de la préparation du Brexit, la Commission européenne prévoit de redessiner les routes maritimes européennes, afin de créer de nouvelles liaisons entre l’Irlande et le continent européen et d’éviter ainsi l’isolement de l’île. La Commission a adopté le 1er août une proposition de règlement visant à adapter le corridor maritime mer du Nord-Méditerranée en reliant l’Irlande aux ports néerlandais et belges de Rotterdam, d’Anvers et de Zeebrugge.
Ce projet omet totalement les ports français, pourtant plus proches et en capacité d’accueillir les flux irlandais ; leur efficacité est même parfois supérieure à celle des ports du Benelux. Le port du Havre traite ainsi vingt-trois conteneurs à l’heure, quand celui de Rotterdam n’en traite que seize.
Sans tenir compte de la géographie et du savoir-faire des ports maritimes français, la Commission a invoqué la plus grande simplicité d’une solution belgo-néerlandaise, des services maritimes internationaux réguliers existant déjà entre Dublin et Cork vers Rotterdam, Anvers et Zeebrugge, ainsi que des craintes de congestion douanière.
Or elle se doit de fournir un cadre propice à la libre concurrence et un accès équitable aux différents marchés. Les flux commerciaux entre l’Irlande et l’Europe continentale représentent actuellement plus de 80 milliards d’euros. En privilégiant les ports de Rotterdam, d’Anvers et de Zeebrugge, la Commission européenne risque de priver nos ports de trafics importants, mais aussi de fonds européens essentiels à leur développement.
Le Gouvernement a annoncé le 2 octobre dernier avoir défendu l’inscription de l’ensemble des ports français concernés dans ces nouveaux tracés. Les négociations seraient en bonne voie pour ceux de Calais et de Dunkerque. Qu’en est-il, madame la secrétaire d’État, pour les ports du Havre, de Rouen et de Dieppe ?
Le port du Havre est relié à Portsmouth par une ligne de ferry exploitée par la compagnie Brittany Ferries. Le port de Dieppe est relié à New Haven grâce à trois rotations quotidiennes, effectuées par la compagnie DFDS Seaways. Cette dernière ligne de ferry est fortement soutenue par le conseil départemental de Seine-Maritime dans le cadre d’une délégation de service public. C’est pourquoi une reconnexion de ces ports au nouveau corridor mer du Nord-Méditerranée est impérative.
Par ailleurs, à l’instar de la Commission européenne, le gouvernement français a commencé à envisager l’hypothèse d’un retrait sans accord du Royaume-Uni de l’Union européenne. C’est dans cette optique qu’a été présenté en conseil des ministres, le 3 octobre dernier, un projet de loi d’habilitation visant à autoriser le Gouvernement à adopter par ordonnances les mesures nécessaires, lequel sera examiné au Sénat le 6 novembre prochain. Près de 200 mesures sont d’ores et déjà identifiées.
Je souhaiterais savoir, madame la secrétaire d’État, ce que prévoit le Gouvernement pour armer les services administratifs au Havre et à Dieppe en cas de Brexit « dur » et ainsi leur permettre d’être en mesure de contrôler les flux en provenance de Grande-Bretagne en termes de douane et de contrôles phytosanitaires.
Compte tenu des modifications de trafic, des aménagements portuaires vont par ailleurs être nécessaires.
Les flux de marchandises en provenance de Grande-Bretagne et ceux qui proviennent d’Irlande vont en effet devoir être séparés. Quels moyens le Gouvernement a-t-il prévu d’investir pour accompagner les ports dans ces aménagements ?
La parole est à Mme la secrétaire d’État auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire.
Monsieur le sénateur, le maintien de la fluidité du trafic transmanche est évidemment une priorité. Il importe de permettre aux ports à la fois de faire face aux difficultés liées au Brexit et de pleinement saisir l’opportunité d’une redirection des flux de marchandises irlandais.
En conséquence, la France s’est opposée au projet de modification de tracé du corridor maritime mer du Nord-Méditerranée proposé par la Commission le 1er août, précisément parce que ce projet ne faisait pas explicitement référence aux ports français, alors même qu’ils ont, par leur expertise et leur positionnement géographique, un rôle fondamental à jouer.
À l’issue d’échanges intensifs avec la Commission européenne, nous espérons qu’un lien explicite entre l’Irlande et deux ports français appartenant au corridor mer du Nord-Méditerranée – Calais et Dunkerque – pourra être rapidement rétabli.
Nous plaidons également auprès de la Commission pour que les autres ports français, qui n’appartiennent pas à ce corridor, puissent aussi bénéficier à la fois de fonds européens leur permettant de faire face au Brexit et de meilleures opportunités. Le Gouvernement, sous l’égide de Nathalie Loiseau, continue de travailler avec la Commission pour que cette extension soit possible rapidement, sans attendre 2023.
Le Gouvernement prévoit par ailleurs des mesures pour faire face à un renforcement des contrôles, tel le recrutement de 700 douaniers d’ici à 2020 – 250 recrutements ont été effectués cette année, 350 sont prévus dans le projet de loi de finances pour 2019. De même, nous envisageons le recrutement dans le projet de loi de finances de 40 personnels du ministère de l’agriculture en 2019.
Par ailleurs, le projet de loi d’habilitation vise, à son article 3, à nous permettre de réaliser dans les meilleurs délais les aménagements nécessaires en cas de rétablissement des contrôles. La nature exacte de ces aménagements – locaux, parkings et zones d’attente sécurisés – reste à déterminer et dépendra de la conclusion d’un accord de retrait ou pas, et, en cas d’accord, du type de contrôles qui seront nécessaires.
Un échange est en cours avec chacun des ports concernés, en liaison avec les autorités locales et l’État. Le Premier ministre a nommé un coordonnateur interministériel national, M. Vincent de Pourquery de Boisserin, dont le rôle est d’être au contact de tous les acteurs – administrations centrales, préfectures, collectivités territoriales, structures portuaires – et de les aider à définir leurs besoins.
Enfin, nous plaidons à Bruxelles, comme d’autres États membres, en faveur de la mise en place d’un « fonds Brexit » pour venir en aide aux territoires les plus touchés par ces surcoûts.
La parole est à M. Éric Kerrouche, auteur de la question n° 404, adressée à M. le ministre de l’Europe et des affaires étrangères.
Madame la secrétaire d’État, vous le savez, dans l’Union européenne, 120 millions de personnes sont touchées par la pauvreté, soit un quart de la population. Dans ce cadre, le Fonds européen d’aide aux plus démunis, le FEAD, est indispensable, afin de lutter contre la précarité et d’amorcer un accompagnement plus durable vers l’accès aux droits, comme l’illustrent assez simplement les chiffres. En 2015, un peu moins de 5 millions de personnes en France ont pu être aidées grâce à ce fonds.
Au-delà de ce chiffre, les effets indirects du FEAD sont nombreux : évitement des coûts en termes de prévention des situations d’urgence ; fort effet de levier pour l’ensemble des politiques publiques européennes ; soutien à l’engagement de millions de bénévoles et de volontaires dans toute l’Europe.
Parmi les différents types de soutien mis en œuvre au moyen du FEAD, l’aide alimentaire revêt, vous le savez, une importance toute particulière, car elle répond à une double exigence : d’une part, elle constitue une aide d’urgence inconditionnelle pour des dizaines de millions d’Européens ; d’autre part, elle permet un accompagnement de ces publics à plus long terme.
Dans ce cadre, le FEAD permet de construire une stratégie d’aide alimentaire diversifiée, fondée sur les besoins des personnes, leur liberté de choix et leur équilibre nutritionnel. Il offre aux associations une visibilité pluriannuelle et garantit la stabilité de leurs approvisionnements. C’est également un dispositif de lutte contre le gaspillage alimentaire, car il facilite la récupération d’invendus et permet un véritable effet multiplicateur.
Il convient donc de réaffirmer la véritable complémentarité des sources d’approvisionnement entre les denrées issues du FEAD et les dons en nature de manière générale.
Vous l’avez compris, le FEAD est absolument indispensable à la lutte contre la pauvreté et l’exclusion en Europe.
Pour cela, ce fonds doit être ambitieux, universaliste et autonome. Il ne peut être réduit à une politique globale uniquement liée à la notion d’employabilité. Il doit subsister une véritable logique de complémentarité entre le FEAD, d’une part, et le FSE, le Fonds social européen, d’autre part.
Madame la secrétaire d’État, où en sont les discussions sur la pérennisation du FEAD et son autonomie ? Enfin, quelle est la position défendue par le Gouvernement en la matière ?
La parole est à Mme la secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées.
Monsieur le sénateur, le Fonds européen d’aide aux plus démunis est un programme fondamental pour l’Europe sociale. Il représente une source majeure de financement pour les associations de distribution alimentaire. Vous l’avez très bien souligné.
Aujourd’hui, le FEAD est doté de 3, 8 milliards d’euros à l’échelle de l’Union européenne sur la période 2014-2020. C’est un enjeu considérable pour la France puisqu’un repas sur quatre fourni pendant la campagne d’hiver par les Restos du cœur est financé par ce biais.
Demain, sur la période 2021-2027, la forme de l’intervention européenne en matière d’aide alimentaire va changer, car la Commission a proposé la création d’un fonds social européen renforcé et rénové, le FSE+, qui serait doté de 101 milliards d’euros et qui intégrerait ce qui est aujourd’hui le FEAD. Celui-ci ne constituerait donc plus un fonds distinct, mais l’aide aux plus démunis, notamment l’aide alimentaire, ferait l’objet d’une programmation spécifique à l’intérieur du FSE+.
Si les grandes lignes de cette proposition sont rassurantes, puisque l’aide alimentaire continuera à être un objectif de l’Union européenne, il conviendra que nous y apportions des clarifications, sur les montants disponibles comme sur les modalités de gestion.
Nous devrons aussi – ce n’est pas le moindre défi – convaincre de la valeur ajoutée d’un tel programme les États membres qui considèrent que l’aide alimentaire relève d’enjeux locaux et non de la solidarité européenne.
Je tiens à vous assurer que le ministre aura à cœur de défendre la pérennisation dans le budget européen de la lutte contre l’insécurité alimentaire, car c’est l’expression concrète et indispensable de la solidarité européenne à l’endroit des plus démunis. C’est aussi cela, l’Europe qui protège !
La parole est à M. Éric Kerrouche, pour répondre à Mme la secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées. En quinze secondes !
Merci beaucoup, madame la secrétaire d’État, de votre réponse.
Ce fonds est essentiel, car, vous l’avez dit, il bénéficie aux plus démunis. Nous espérons bien entendu que la lutte contre la pauvreté ne sera pas menée uniquement à l’échelon européen et qu’elle prendra forme également dans les politiques nationales.
La parole est à Mme Jocelyne Guidez, auteur de la question n° 450, adressée à Mme la secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées.
Madame la secrétaire d’État, depuis la mise en œuvre de la carte mobilité inclusion, la CMI, de nombreuses familles ont fait part des difficultés qu’elles rencontraient avec la sous-mention « besoin d’accompagnement ». Celle-ci atteste de la nécessité pour la personne handicapée d’être accompagnée dans ses déplacements. J’ai d’ailleurs été saisie à ce sujet par l’Association française du syndrome de Rett, laquelle vous a également interrogée par écrit le 12 décembre dernier, sans avoir d’ailleurs obtenu la moindre réponse à ce jour.
Ainsi, pour bénéficier sur cette carte de la mention « invalidité », il faut justifier d’un taux d’incapacité permanente d’au moins 80 %. En revanche, l’attribution de la sous-mention « besoin d’accompagnement », qui est strictement encadrée par l’article R. 241-12-1 du code de l’action sociale et des familles, ne répond pas aux mêmes critères. Pour des raisons de temps, je vous épargnerai la lecture de cet article.
Concrètement, les enfants ouvrant droit au premier ou au deuxième complément de l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé et les enfants dont les parents ont choisi de bénéficier de l’élément « aides humaines » de la prestation de compensation du handicap ne peuvent pas se voir attribuer cette sous-mention, alors même qu’ils ont droit à la mention « invalidité ».
Madame la secrétaire d’État, c’est à ne plus rien y comprendre !
Comment un enfant polyhandicapé, détenteur de ladite carte et ayant besoin d’être accompagné dans ses déplacements, peut-il se voir refuser cette sous-mention au seul motif que sa situation ne correspondrait pas à la bonne case ?
Afin d’illustrer mes propos, permettez-moi d’évoquer la notification de refus adressée aux parents de Marine, dont le taux d’incapacité a été reconnu supérieur ou égal à 80 %. Si leur fille bénéficie de la CMI invalidité, l’attribution de la sous-mention « besoin d’accompagnement » lui a été refusée, pour les raisons que je viens d’évoquer. Malheureusement, il s’agit là non pas d’une comédie de boulevard, mais bien d’une triste réalité.
En outre, il semble inconcevable que l’attribution d’une aide financière soit liée à la reconnaissance d’une aide humaine. Un taux d’invalidité supérieur ou égal à 80 % devrait être l’unique critère d’attribution.
Comme l’indiquait un auteur français, dans le mot « injustice » figure le terme « justice ». Madame la secrétaire d’État, nous devons tendre vers plus de justice. Aujourd’hui, je veux croire que les choses ne sont pas figées dans le marbre. Avec de la volonté, nous pouvons aider ces familles.
C’est pourquoi je vous invite à prendre en compte cette demande en revoyant tout simplement les dispositions du décret du 23 décembre 2016.
Madame la secrétaire d’État, que comptez-vous faire ?
La parole est à Mme la secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées.
Madame la sénatrice, depuis le 1er janvier 2017, la carte mobilité inclusion se substitue progressivement aux cartes d’invalidité, de priorité et de stationnement pour les personnes handicapées. La CMI comprend donc trois mentions possibles : invalidité, priorité et stationnement.
Cette substitution, engagée par le précédent gouvernement, s’est faite strictement à droit constant.
D’une part, l’ensemble des critères d’attribution et des droits attachés aux anciennes cartes ont été maintenus dans le cadre de cette réforme. Ainsi, s’agissant des enfants handicapés, et à l’instar de la carte d’invalidité, la CMI invalidité est attribuée à tout enfant dont le taux d’incapacité permanente est au moins de 80 %, comme vous l’avez rappelé.
D’autre part, tout comme la carte d’invalidité qu’elle remplace, la CMI invalidité peut comporter une sous-mention « besoin d’accompagnement », qui atteste de la nécessité pour la personne handicapée, enfant ou adulte, d’être accompagnée dans ses déplacements. Là encore, cette sous-mention est accordée dans les mêmes conditions que la carte d’invalidité qu’elle remplace, c’est-à-dire aux enfants ouvrant droit au troisième, quatrième, cinquième ou sixième complément de l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé, l’AEEH.
Dans ce contexte, les enfants qui bénéficient de la prestation de compensation, la PCH, ou du complément 1 ou 2 de l’AEEH ne peuvent pas bénéficier de la mention « besoin d’accompagnement » sur leur éventuelle CMI, pas plus que dans la situation précédente.
Je reconnais que cette mention et les termes utilisés peuvent prêter à confusion parce que tout enfant, handicapé ou non, doit souvent être accompagné lorsqu’il se déplace. La mention permet simplement de bénéficier de facilités pour l’accompagnant.
Il est clair que le dispositif d’aide existant en faveur des enfants handicapés, fondé sur l’AEEH et ses compléments et sur la PCH, ne répond pas de manière totalement satisfaisante aux besoins des enfants et de leurs familles, comme cela est notamment souligné dans le rapport intitulé Plus simple la vie d’Adrien Taquet, remis au Gouvernement le 28 mai dernier.
Trois constats forts se dégagent de ce rapport : la complexité, insupportable pour les parents, du droit d’option existant entre la PCH et les compléments à l’AEEH ; l’inadéquation d’une PCH enfant, dont la logique repose sur le système de compensation construit d’abord pour les adultes ; la confusion des rôles et les objectifs des réponses apportées par ces deux prestations.
Le Gouvernement partage l’objectif de mener une réflexion globale sur ce système de compensation et souhaite engager des travaux de simplification et d’amélioration de la compensation du handicap à destination des enfants et de leurs familles dans le cadre de la prochaine conférence nationale du handicap 2018-2019. J’en préciserai les modalités à l’occasion du prochain comité interministériel du handicap, qui doit se tenir jeudi, sous la présidence du Premier ministre.
C’est dans le cadre de ces travaux que la question du bénéfice de la mention « besoin d’accompagnement » sur la CMI invalidité pour les enfants bénéficiant de la PCH ou de l’AEEH rénovées sera réexaminée. Madame la sénatrice, vous pouvez compter sur moi.
La parole est à Mme Jocelyne Guidez, pour répondre à Mme la secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées. Vous avez seulement quatre secondes, ma chère collègue !
Je vous remercie de ces précisions, madame la secrétaire d’État. J’attends un véritable changement, car les parents sont inquiets.
La parole est à M. Michel Raison, auteur de la question n° 473, transmise à Mme la secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées.
Madame la secrétaire d’État, j’appelle votre attention sur la situation des personnes handicapées qui sont dans l’incapacité de financer du matériel adapté coûteux.
Pour illustrer mon propos, j’évoquerai la situation des enfants handicapés, dont les familles doivent souvent faire face à des dépenses très élevées. Dans mon département, une famille a ainsi dû acquérir pour son fils de huit ans un fauteuil électrique verticalisateur, indispensable au quotidien pour des raisons sanitaires. Alors que le coût de ce fauteuil était de 37 000 euros, le reste à charge s’est élevé à plus de 8 000 euros !
L’inertie de l’État en est la cause ! L’article L. 146-5 du code de l’action sociale et des familles, créé par la loi de 2005, prévoit en effet : « Chaque maison départementale des personnes handicapées gère un fonds départemental de compensation du handicap chargé d’accorder des aides financières destinées à permettre aux personnes handicapées de faire face aux frais de compensation restant à leur charge ». Il prévoit également que ce reste à charge ne peut excéder 10 % des ressources personnelles du bénéficiaire, « dans des conditions définies par décret ». Or, et c’est l’objet de ma question, ce décret d’application n’a jamais été publié.
Le Conseil d’État, dans un arrêt du 24 février 2016, a condamné l’État à publier ce décret d’application dans un délai de neuf mois, sous astreinte de 100 euros par jour au-delà de cette échéance, soit en novembre 2016. Mais nous n’avons toujours rien !
Pourtant, un arrêt plus récent du Conseil d’État a permis de débloquer rapidement le processus de publication d’un autre décret relatif, cette fois, à la protection des biotopes et des habitats naturels. C’est assurément là un enjeu majeur, mais l’amélioration de la vie quotidienne de nos concitoyens handicapés est, à mon avis, une obligation morale plus impérieuse.
Je souhaite tout simplement connaître l’état d’avancement de la rédaction du décret en cause et surtout savoir dans quel délai celui-ci sera publié. Je vous remercie de votre réponse.
La parole est à Mme la secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées.
Monsieur le sénateur, dans une décision rendue le 24 février 2016, le Conseil d’État a effectivement enjoint le Gouvernement, alors dirigé par Manuel Valls, de prendre le décret d’application prévu à l’article L.146-5 du code de l’action sociale et des familles, issu de la loi du 11 février 2005, restée inappliquée depuis onze ans. Toutefois, si ce texte réglementaire n’a pas été pris, c’est qu’il pose de grandes difficultés.
La loi comprend en effet une double contradiction juridique.
En premier lieu, elle garantit un plafonnement du reste à charge à 10 % tout en précisant que l’aide complémentaire apportée par le fonds « ne peut dépasser les montants de la PCH ». L’interprétation stricte d’un reste à charge dans la limite « des tarifs et montants » de la PCH réduit ainsi considérablement le champ des bénéficiaires, puisque la plupart perçoivent 100 % des tarifs de la PCH.
En second lieu, la loi prévoit que ce fonds est alimenté sur une base volontaire de la part de ses contributeurs. Il est dès lors compliqué de faire peser une dépense obligatoire sur un fonds recueillant des recettes aléatoires.
Postérieurement à la décision susvisée, un rapport d’évaluation confié à l’Inspection générale des affaires sociales sur la prestation de compensation du handicap, remis en août 2017, a conclu à l’impossibilité de publier un décret d’application et a proposé de modifier la rédaction de la loi.
Plus près de nous, le député Philippe Berta a déposé une proposition de loi relative à l’amélioration de la PCH qui, dans son article 2, prévoit une solution pragmatique pour mettre fin à cette difficulté. Philippe Berta propose d’organiser une expérimentation sur trois ans dans des départements volontaires, afin d’évaluer la faisabilité d’un dispositif garantissant un niveau de reste à charge maximum, tant pour les maisons départementales des personnes handicapées, ou MDPH, qui instruisent les dossiers que pour les principaux financeurs de ce fonds.
L’évaluation en continu de l’expérimentation devra permettre de mesurer l’incidence en termes de gestion de ce dispositif pour les MDPH, ainsi que l’impact financier d’une éventuelle généralisation, au regard de l’objectivation des besoins. Les données de l’expérimentation permettront également d’harmoniser le fonctionnement des fonds et de répondre à l’injonction du Conseil d’État.
J’ai soutenu cette proposition de loi, au nom du Gouvernement, car je pense que cette expérimentation nous permettra de sortir de l’impasse, de trouver une solution opérationnelle et d’atteindre l’objectif initial de la loi de 2005, qui était de réduire le reste à charge pour les personnes handicapées.
Je m’engage, bien davantage qu’à définir de nouveaux droits formels, à permettre aux personnes handicapées et, avec elles, à leurs aidants, de bénéficier de droits réels.
La proposition de loi de Philippe Berta a été adoptée en première lecture le 17 mai dernier à l’Assemblée nationale et déposée le 18 mai au Sénat. Je profite donc de votre question, monsieur le sénateur, pour solliciter l’inscription au plus vite de ce texte à l’ordre du jour du Sénat !
La parole est à M. Michel Raison, pour répondre à Mme la secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées. Mon cher collègue, il vous reste huit secondes !
Madame la secrétaire d’État, j’allais vous proposer de déposer une proposition de loi. J’étudierai donc avec attention celle que vous venez d’évoquer. Nous travaillerons avec vous, afin de l’amender si nécessaire. Pour ma part, je ferai le maximum, dans la mesure où elle répond à nos attentes, pour qu’elle soit adoptée au Sénat, car la question du reste à charge est très importante.
La parole est à Mme Nathalie Delattre, auteur de la question n° 442, adressée à M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation.
Madame la présidente, monsieur le ministre – cher Didier Guillaume –, mes chers collègues, je souhaite vous parler aujourd’hui de l’avenir du dispositif d’exonération pour l’emploi des travailleurs occasionnels agricoles, le désormais fameux TODE.
Il y a quelques jours, monsieur le ministre, ici même, dans l’hémicycle du Sénat et au nom du groupe du RDSE, vous interpelliez très justement le Gouvernement, lui rappelant qu’en supprimant l’exonération des charges patronales sur les emplois saisonniers il signait la fin de l’agriculture, en particulier de la petite agriculture, ainsi que, ajouterai-je même, de la viticulture.
Vous souteniez que cette mesure était inacceptable, qu’elle constituait une erreur monumentale pour les 900 000 personnes concernées, qu’elle représenterait une augmentation de 1, 40 euro par heure et par salarié au SMIC. Pour les agriculteurs, cette mesure entraînerait une chute de revenus d’environ 15 000 euros par an, soit, souvent, la totalité de leur rémunération.
Face à cela, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019, préparé par l’équipe qui vous a précédé, a été présenté devant l’Assemblée nationale sans modification, sans que les engagements entendus çà et là lors de visites de terrain de ministres soient traduits concrètement par la présentation d’une nouvelle exonération permettant de réparer pareille injustice.
Devant cette promesse non tenue, une majorité de nos collègues députés ont adopté un amendement visant à rétablir le TODE, contre l’avis du Gouvernement.
Ma question est la suivante : quelle sortie de crise allez-vous proposer à la représentation nationale dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019 ? Souhaitez-vous conserver le dispositif existant, l’adapter, ou bien en inventer un nouveau ?
Monsieur le ministre, les agriculteurs et les viticulteurs connaissent votre combat à leurs côtés depuis vingt-six ans que vous êtes élu. Ils espèrent beaucoup de vous ; ils espèrent que vous remporterez encore de nombreux combats pour eux, à commencer par celui-ci.
Madame la présidente, permettez-moi d’abord de souligner combien je suis heureux que ma première intervention au Parlement en tant que membre du Gouvernement ait lieu, ce matin, au Sénat.
Madame la sénatrice Delattre, vous évoquez un sujet très important, celui du TODE, rappelant mon intervention effectuée voilà quelque temps sur ces mêmes travées.
La suppression du TODE s’inscrit dans une ligne politique et économique générale voulue par le Président de la République, celle de la baisse des charges, notamment dans l’agriculture, celle d’une meilleure rémunération et celle de la fin du CICE, le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, qui sera compensée par des baisses de charges permanentes. Dans ce cadre, le milieu agricole est gagnant dans son ensemble : c’est une réalité.
De telles mesures sont en effet favorables au secteur agricole. Notamment, la réforme de la fiscalité agricole vise à mieux appréhender la variabilité des revenus. Les dispositions figurant dans la loi pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous, loi dite ÉGALIM, issue des travaux des états généraux de l’agriculture et qui sera très prochainement promulguée, permettront d’aller dans ce sens. C’est également le cas de la non-augmentation de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques, la TICPE, et des modalités de remboursement qui en découlent.
Dans ce cadre, avec un paquet agricole que je qualifierai de positif, un bilan économique pour l’agriculture qui l’est tout autant, il reste un sujet, celui du TODE. C’est ce que j’avais exprimé, ici même, à l’occasion d’une question au Gouvernement : le Premier ministre a entendu ce qu’ont dit les agriculteurs, leurs représentants, ainsi que les parlementaires.
En effet, si, sur l’ensemble du dispositif, je soutiens totalement l’action de ce gouvernement en faveur d’une baisse des charges, d’une meilleure rémunération et d’une hausse des revenus, il reste que, pour les employeurs agricoles de travailleurs saisonniers, le compte n’y était pas. C’est la raison pour laquelle, après avoir entendu les uns et les autres, le Premier ministre m’a chargé de faire une proposition de compromis, pour sortir de cette situation.
J’ai donc déposé, au nom du Gouvernement, un amendement, dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019, qui sera étudié demain à l’Assemblée nationale. Il s’agit bien évidemment d’une proposition de compromis, car le Gouvernement ne peut accepter le rétablissement intégral du TODE. Par cet amendement, nous proposons une aide aux agriculteurs jusqu’à 1, 1 SMIC, ce qui permettra de garantir une meilleure rémunération tout en mettant fin aux difficultés économiques que rencontrent en la matière un certain nombre d’exploitations.
La parole est à Mme Nathalie Delattre, pour répondre à M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation, en trente et une secondes.
Monsieur le ministre, nous allons suivre avec grand intérêt le débat qui aura lieu demain à l’Assemblée nationale et que nous ne manquerons pas d’avoir ici, au Sénat. Même avec un seuil fixé à 1, 1 SMIC, il manque encore un peu d’argent. Vous savez à quel point la situation est aujourd’hui tendue dans les exploitations, d’où la nécessité de parvenir à un compromis raisonnable.
La parole est à M. Jean-Yves Roux, auteur de la question n° 400, adressée à M. le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse.
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, notre pays compte 197 000 sapeurs-pompiers volontaires, soit près de 79 % des effectifs totaux de pompiers. Malgré un recours croissant à leurs services, l’attractivité de la fonction de sapeurs-pompiers volontaires tend à s’émousser, certains territoires étant plus touchés que d’autres par cette tendance, il faut le constater.
Vous-même, madame la présidente, en tant que sénatrice du Haut-Rhin, vous avez récemment contribué à l’élaboration d’un rapport remis en juin dernier au ministre de l’intérieur, comportant quarante-trois mesures opérationnelles destinées à favoriser le recrutement des sapeurs-pompiers volontaires. Ce rapport préconise « de porter une nouvelle ambition », au travers de mesures concrètes en faveur de la diversification des viviers de recrutement.
Cette ambition, monsieur le ministre, se heurte parfois à l’épreuve des faits. Aujourd’hui, les sections de jeunes sapeurs-pompiers volontaires ne peuvent en effet accueillir tous les candidats souhaitant s’engager. De bons éléments, motivés, ne trouvent pas à proximité de leur domicile de formations adaptées pour leur permettre de devenir sapeurs-pompiers volontaires, alors que les besoins sont bien présents.
Parmi les pistes envisagées pour soutenir le recrutement, la formation et, surtout, la valorisation de tels parcours, des sections d’études pour jeunes sapeurs-pompiers ont été créées dans des collèges, pour la plupart ruraux. Il s’agit d’une option de trois heures proposée aux collégiens, garçons et filles, en sus du temps scolaire, comprenant une heure de pratique sportive et deux heures d’enseignement théorique et pratique. Cette option accessible dès la classe de cinquième permet également de passer dans de bonnes conditions le brevet national de jeune sapeur-pompier.
Monsieur le ministre, dans un contexte de difficultés de recrutement de sapeurs-pompiers volontaires, il semblerait aujourd’hui intéressant de favoriser et de généraliser ces sections d’études, au moins dans chaque département. Il me paraît de plus utile de développer, par territoire, des spécialisations compte tenu de l’émergence de nouveaux métiers ou de nouvelles filières professionnelles, qui n’en est qu’à ses prémices. Les Alpes-de-Haute-Provence pourraient ainsi accueillir des sections d’études spécialisées dans la prévention et la lutte contre les feux de forêt.
Je suis enfin favorable à ce que l’on puisse proposer à ces jeunes de continuer cette formation par le biais de filières professionnelles de qualité, spécialisées dans la prévention des risques, la sécurité civile, et ainsi récompenser cet engagement au service de tous.
Monsieur le ministre, ma question est la suivante : entendez-vous encourager la généralisation et la valorisation de ces sections d’études et, au-delà, le recrutement diversifié en milieu scolaire de jeunes sapeurs-pompiers volontaires ?
La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse.
Monsieur le sénateur Jean-Yves Roux, les jeunes sapeurs-pompiers volontaires constituent un élément clé du maillage du territoire et je souscris donc pleinement à l’esprit de votre question. Ils permettent d’assurer des secours en tout point de l’Hexagone et à tout moment. Vous l’avez dit, cet engagement entre pleinement dans le cadre de la transmission aux élèves de l’ensemble des valeurs républicaines, de l’engagement, de la solidarité.
Un décret du 4 mai 2012 a valorisé « l’engagement des élèves en tant que jeune sapeur-pompier ou sapeur-pompier volontaire ». Les modalités de cette valorisation sont définies, par convention, par l’établissement d’enseignement, en liaison, selon les cas, avec l’union départementale des sapeurs-pompiers, avec les associations de jeunes sapeurs-pompiers, ou encore avec les services départementaux d’incendie et de secours auprès desquels les élèves effectuent leur engagement.
En 2015, le ministère de l’éducation nationale et le ministère de l’intérieur ont signé deux conventions-cadres. La première, relative au partenariat des deux ministères, vise à favoriser l’engagement citoyen non seulement des jeunes, mais aussi des agents de l’État pour les rendre acteurs de leur propre sécurité. La seconde a pour objet, notamment, de développer l’engagement citoyen en qualité de jeune sapeur-pompier, ou JSP, et de valoriser ainsi le parcours de ces jeunes au sein des établissements scolaires. Ces deux conventions-cadres ont été conclues pour une durée de trois ans renouvelable par tacite reconduction.
Les sections de jeunes sapeurs-pompiers constituent un vivier important pour les engagements de sapeurs-pompiers volontaires, les SPV. Elles ont pour but premier de regrouper des jeunes en vue de développer leur esprit de solidarité, de leur proposer toute activité concourant à leur plein épanouissement et de les initier aux techniques opérationnelles propres aux sapeurs-pompiers, afin de susciter des vocations.
L’engagement des jeunes sapeurs-pompiers constitue donc une démarche citoyenne participant à la pérennisation du modèle français des secours.
Afin de valoriser un tel engagement, sujet auquel, vous le savez, je suis extrêmement sensible, a fortiori en tant que ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse, ces jeunes peuvent, lors de la soutenance de l’épreuve orale du diplôme national du brevet, présenter leur projet de jeunes sapeurs-pompiers volontaires. Il s’agit donc d’une valorisation, dès la fin de la classe de troisième, d’un engagement qui peut avoir lieu dès le collège, comme vous-même l’avez indiqué.
Concernant la formation initiale, le ministère s’est engagé à poursuivre le développement de filières spécialisées dans le domaine de la sécurité civile, telles que le bac pro « métiers de la sécurité » ou le CAP « agent de prévention ». C’est un élément très important dans le contexte de l’évolution de l’enseignement professionnel.
Enfin, au sein de l’enseignement supérieur, de nombreuses universités ont déjà mis en place des dispositifs de reconnaissance de l’engagement étudiant. Très divers, ces dispositifs peuvent prendre la forme d’unités d’enseignement spécifiques et attribuer parfois des crédits ECTS ou des bonus.
Monsieur le sénateur, la sensibilisation aux problématiques de sécurité civile contribue à l’apprentissage de la citoyenneté de nos jeunes.
Dans ce contexte, la mise en place du service national universel, le SNU, va constituer un élément favorable de nature à répondre à vos souhaits, notamment le développement autant que possible, dans chaque département, de ces unités.
La parole est à M. Joël Bigot, auteur de la question n° 419, adressée à M. le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse.
Monsieur le ministre, je souhaite attirer votre attention sur le devenir des centres d’information et d’orientation, les CIO. Ceux-ci sont en effet des centres d’accompagnement professionnel et personnalisé gratuits, qui offrent un service et une information de qualité reconnus tant par les futurs actifs que par leur famille.
Leur suppression prochaine constituerait une aubaine pour les officines de coaching scolaire privées. Il serait dommageable de voir de nouveau un service public supprimé d’un trait de plume par la seule volonté du Gouvernement. Ce serait une très mauvaise nouvelle pour nos territoires et nos communes, qui ont souvent beaucoup investi sur leur CIO et réussi à en faire un lieu ressource attractif et apprécié des habitants.
Les animateurs de ces centres, les conseillers d’orientation scolaire, les psychologues de l’éducation nationale, les rédacteurs et agents techniques administratifs y réalisent un travail remarquable.
C’est le cas notamment à Saumur, sous-préfecture de Maine-et-Loire, dont le conseil municipal a formulé à l’unanimité le vœu de voir la fermeture du centre annulée. Situé au sein du jardin des plantes de la ville, le CIO représente un outil adapté non seulement pour l’ensemble de la communauté d’agglomération, mais aussi pour des communes rurales plus éloignées qui y ont accès. Ce CIO a effectué sur cette année scolaire des centaines d’entretiens personnalisés, a répondu à des milliers de demandes de renseignements. L’efficience de ce service public ne peut être niée.
Les CIO sont des lieux neutres par rapport à l’école, des sites ressources pour l’information et l’orientation. Ils accueillent non seulement des élèves du public comme du privé, de la sixième à la terminale, mais aussi des adultes et des élèves allophones nouvellement arrivés. Une fermeture sèche annihilerait des années de travail pour faire du CIO un service public – j’insiste sur le mot « public » – ouvert sur la jeunesse de France.
Devant la bronca provoquée par le transfert aux régions de l’organisation des actions d’information sur les métiers et les formations, le Parlement a tout de même voté l’article 23 du projet de loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel, qui prévoit la rédaction d’un rapport sur les perspectives d’évolution des CIO.
Monsieur le ministre, pouvez-vous nous préciser à ce stade les projets du Gouvernement à l’égard des CIO et rassurer les personnels concernés ? Il est très important de permettre à ces structures d’être pérennisées, car elles ont fait la preuve de leur efficacité sur le territoire.
La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse.
Monsieur le sénateur Joël Bigot, face au constat des difficultés récurrentes de notre système d’orientation, qui se traduit souvent par l’angoisse des parents et des élèves eux-mêmes, par l’orientation par l’échec ou par défaut, par la dispersion de l’information et par des responsabilités diffuses, nous avons décidé de mettre en œuvre une véritable réforme de l’orientation.
Nous pouvons être d’accord sur le diagnostic : si l’orientation fonctionnait bien aujourd’hui, cela se saurait ; les difficultés sont très grandes, et il est bien normal de passer à une autre étape.
Cette nouvelle étape ne consiste nullement à supprimer la fonction d’orientation dans notre système. Il s’agit d’avoir une vision plus systémique, plus globale, en instaurant un continuum dans le suivi de l’élève, et ce dès le collège jusqu’à la terminale et au-delà. C’est d’ailleurs aussi dans ce sens que s’inscrit la réforme du baccalauréat.
Il s’agit également de prendre en compte des évolutions qui ont eu lieu sous le quinquennat précédent. Je pense notamment aux réformes en matière de compétences des régions. Au contact du tissu tant économique qu’académique, ces dernières sont chargées de l’information sur les métiers et les formations. Nous tirons les conséquences de ce qui a été exprimé sur ces questions au moment des réformes territoriales. Les établissements scolaires sont des lieux où le processus d’orientation se réalise. Il est donc normal de placer les professionnels de l’orientation au plus près des élèves.
Bien entendu, l’éducation nationale conserve des compétences en matière d’affectation des élèves. Dans ce contexte, nous voulons concentrer son action d’orientation dans les établissements scolaires, pour renforcer l’accompagnement de proximité des élèves par les équipes pédagogiques et, donc, parvenir à un maillage territorial plus fin. C’est pourquoi les professeurs, notamment les professeurs principaux, ainsi que les psychologues de l’éducation nationale voient leur rôle en matière d’accompagnement et d’orientation renforcé.
Compte tenu, d’une part, du transfert de l’information sur les formations et les métiers aux régions, et, d’autre part, de l’engagement des personnels au plus près des élèves, il est normal d’envisager une évolution du maillage territorial des CIO.
Tout en respectant l’obligation légale de maintenir au moins un centre public d’orientation dans chaque département, une réflexion sur l’évolution de la carte des CIO est menée avec les régions, de façon pragmatique, sans brusquerie. Il faut rappeler que la loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel ne concerne pas directement les CIO ; les dispositions qu’elle prévoit n’impliquent pas la fermeture de ces services.
Le mouvement ainsi enclenché d’évolution progressive ne débouchera pas forcément sur des fermetures, privilégiant une vision au cas par cas. S’agissant précisément du département de Maine-et-Loire, à la suite du désengagement financier en 2015 du conseil départemental, l’État a repris à sa charge, depuis 2016, les trois CIO de Cholet, de Saumur et d’Angers, jusqu’alors financés par les collectivités locales. Seul le CIO d’État de Segré, où exerçaient trois psychologues de l’éducation nationale, a été fermé. Bien entendu, ces personnels continuent à assurer leurs fonctions au plus près des élèves.
Cet exemple, monsieur le sénateur, qui vous concerne directement, témoigne de la volonté du Gouvernement de conserver un maillage territorial équilibré, répondant aux enjeux pédagogiques et tenant compte du contexte local pour assurer un service public de qualité.
La parole est à M. Olivier Paccaud, auteur de la question n° 432, adressée à M. le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse.
Monsieur le ministre, l’enseignement est une vocation pour la plupart de ceux qui s’investissent auprès des enfants afin de leur transmettre le savoir, leur offrir ce bien inestimable qui ne s’achète pas et constitue autant d’acquis fondamentaux qu’ils enrichiront tout au long de leur vie.
Ce travail est, certes, un trésor, comme l’écrivait La Fontaine, mais la satisfaction d’encourager et d’élever intellectuellement, au sens propre, les nouvelles générations ne constitue pas une récompense suffisante pour les enseignants. Encore faut-il que ceux-ci soient rémunérés à la juste valeur de leur mission.
Aujourd’hui, l’éducation nationale manque de professeurs. Le recrutement se heurte parfois au faible nombre de candidats, sans oublier le chiffre non négligeable de démissions. La faiblesse de la reconnaissance du métier d’enseignant explique, en partie, cette désaffection, mais pas seulement. L’aspect salarial ne doit ainsi pas être minoré. Il suffit de comparer les grilles salariales des enseignants français avec celles de leurs collègues des pays voisins.
En moyenne, un enseignant français gagne évidemment plus qu’un Croate, un Roumain ou un Italien, mais il perçoit trois fois moins qu’un Luxembourgeois, presque moitié moins qu’un Allemand, 25 % de moins qu’un Finlandais ou un Hollandais, encore moins qu’un Irlandais, un Espagnol ou un Britannique.
Depuis quelques années, des efforts de revalorisation ont été faits, notamment en début de carrière. Votre annonce d’augmenter les nouvelles recrues jusqu’à 1 000 euros par an est une excellente nouvelle. Mais il est certain que les perspectives de progression ne sont guère engageantes pour les futurs enseignants. Quand on sait qu’un professeur des écoles avec vingt ans d’ancienneté et un niveau bac+5 ne touche que 2 200 euros par mois, on comprend mieux la désaffection pour la carrière d’enseignant.
Si des efforts ont été réalisés en début de carrière, comptez-vous, monsieur le ministre, mettre en place un véritable plan, une véritable politique de rattrapage salarial, indispensable pour rendre ce noble métier de nouveau attractif ?
La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse.
Monsieur le sénateur Olivier Paccaud, vous posez une question évidemment très importante, au cœur des politiques que j’ai à mener. La revalorisation du métier d’enseignant et son attractivité, qui englobent la question salariale, mais ne s’y résument pas, constituent deux chantiers prioritaires que je me suis fixés.
Cela se traduit par la rénovation et la revalorisation de l’ensemble des grilles indiciaires des professeurs engagées depuis septembre 2017, dans le cadre de la mise en œuvre, d’une part, de ce que l’on appelle le PPCR, parcours professionnels, carrières et rémunérations, ainsi que, d’autre part, de façon plus générale, d’une politique de pouvoir d’achat au service de nos professeurs.
Les stagiaires entrent ainsi dans la carrière avec un salaire progressivement revalorisé. Je vous remercie d’avoir noté l’engagement pris d’une augmentation de plus de 1 000 euros par an de leur rémunération. C’est évidemment un progrès important, parce que ce sont notamment les débuts de carrière qui sont faiblement rémunérés aujourd’hui, comme le montrent les comparaisons internationales.
De même, un professeur des écoles pourra terminer sa carrière hors échelle A, soit avec une rémunération de base comprise entre 50 000 euros et 54 600 euros bruts par an. Sur l’ensemble d’une carrière terminée à ce niveau, un enseignant aura perçu entre 45 000 euros et 60 000 euros bruts de plus qu’auparavant. Il y a donc très clairement une augmentation programmée du pouvoir d’achat.
C’est aussi le sens de nos choix budgétaires. Vous le savez, la hausse de notre budget, non corrélée à une augmentation de postes, nous permet justement de mener une telle politique de pouvoir d’achat.
Renforcer l’attractivité des métiers, c’est aussi offrir de nouvelles perspectives de carrière. La création d’un troisième grade, la classe exceptionnelle, participe de cette évolution.
En outre, s’agissant des professeurs des écoles, le nombre des promotions dans cette hors classe augmente progressivement dans un objectif de convergence avec les professeurs du second degré, alors que la différence est actuellement de 17 %. Ainsi, le taux de promotion est fixé à 13, 2 % au titre de l’année 2018 et sera établi à 15, 1 % au titre de l’année 2019. Dans le contexte de priorité accordée à l’école primaire, cet effort de convergence entre le premier et le second degré contribue à réduire les écarts de rémunération et à accroître l’attractivité du corps.
En réalité, les premiers effets se mesurent déjà, comme l’indiquent les données du concours de recrutement des professeurs des écoles : le nombre d’inscrits est en effet en augmentation de près de 7 % entre 2016 et 2018. Nous devons nous féliciter de la progression de tels indices d’attractivité.
Renforcer l’attractivité du métier de professeur, c’est également, au-delà de la reconnaissance financière, œuvrer en amont pour susciter de nouvelles vocations. C’est tout le sens du dispositif de préprofessionnalisation en vue de prérecruter, que je présenterai dans le cadre du projet de loi pour une école de la confiance, qui sera examiné au début de l’année prochaine.
Votre question, monsieur le sénateur, est aussi l’occasion pour moi de souligner l’esprit de confiance dans lequel je travaille avec l’ensemble des personnels de l’éducation nationale. C’est ce message qu’il faut leur adresser, dans ces jours où l’actualité soulève d’autres problèmes. Il est important de le répéter, sérénité et confiance sont les deux maîtres mots que je prononce depuis que je suis arrivé au ministère.
La parole est à M. Olivier Paccaud, pour répondre à M. le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse. En vingt-deux secondes !
Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse. J’ai notamment bien noté que vous étiez conscient de la problématique de la divergence entre les professeurs des écoles et ceux du second degré. Les premiers ne bénéficient pas de la possibilité d’effectuer des heures supplémentaires. Pour toutes les réunions qu’ils ont en plus, ils n’ont pas les mêmes avantages. Je donnerai un exemple très précis : les évaluations qu’ils ont dû organiser ces derniers jours leur ont pris énormément de temps, particulièrement pour entrer les données dans les logiciels dédiés, mais ne seront pas rémunérées, ce qui est un réel problème.
La parole est à Mme Françoise Férat, auteur de la question n° 440, adressée à M. le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse.
Monsieur le ministre, quelques semaines après la rentrée scolaire, ma question porte sur les substances indésirables que l’on retrouve dans tout un panel de fournitures scolaires.
Interpellée par plusieurs habitants de mon département et m’appuyant sur l’enquête menée par une association de consommateurs, je tiens à mettre en lumière ces révélations, qui sont alarmantes. En effet, nous notons la présence de perturbateurs endocriniens, de composés cancérogènes, toxiques ou allergisants dans cinquante-deux articles de fournitures scolaires couramment trouvés dans le cartable des écoliers : stylos à bille, cartouches d’encre, crayons de papier et de couleur, marqueurs effaçables, colles en stick et à paillettes, stylos et feutres parfumés. De ce point de vue, monsieur le ministre, le bulletin de notes n’est pas très brillant. Ce test, réalisé en 2016, a été remis en exergue lors de la dernière rentrée scolaire, d’où le dépôt de ma question.
Sur ces cinquante-deux produits testés, dix-neuf, soit plus du tiers de l’échantillon, contiennent des composés inquiétants : des phtalates perturbateurs endocriniens dans des crayons à papier et de couleur, du formaldéhyde irritant dans un stick de colle, des impuretés cancérogènes, des conservateurs ou des parfums allergisants dans des encres. Voilà autant de substances nocives susceptibles de se retrouver dans l’estomac des enfants, qui mordillent, pour utiliser un terme familier, leur matériel, ou de traverser la peau à leur contact.
Monsieur le ministre, les parents sont inquiets. La situation réglementaire relative aux fournitures scolaires est assez vague, en l’absence de textes spécifiques, comme il en existe pour les jouets ou les tétines.
Face à ces constats, l’association de consommateurs susvisée avait demandé au Gouvernement ainsi qu’à la Commission européenne de renforcer la réglementation communautaire, en définissant des obligations applicables aux fournitures scolaires, prenant en compte la sensibilité des jeunes consommateurs.
Je vous demande de bien vouloir me préciser les intentions du Gouvernement dans ce dossier. Existe-t-il, à ce jour, des démarches européennes engagées en la matière ?
La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse.
Madame la sénatrice Françoise Férat, je vous remercie de cette question portant sur un sujet de santé très important. Dans le cadre de la promotion de la santé, le ministère de l’éducation nationale et de la jeunesse a en effet pris en compte la problématique de l’impact de la dégradation de l’environnement sur la santé humaine et applique notamment le plan national santé-environnement, le PNSE, dont la quatrième édition est en cours d’élaboration pour 2019 et pour lequel nous pouvons prendre en considération les éléments figurant dans votre question. Ce plan est articulé avec les autres démarches structurantes des politiques en faveur de la santé et de l’environnement.
En la matière, la réponse publique a pour objectif de réduire les expositions de la population aux substances suspectées d’avoir un effet nocif sur la santé humaine, comme les perturbateurs endocriniens.
Le ministère suit ainsi, avec les différents partenaires institutionnels et associatifs, les expérimentations menées dans les territoires, afin de mettre à la disposition de toute la communauté éducative, des parents en particulier, les informations qui auront été étayées par des expertises scientifiques conduites avec rigueur. À cette fin, une page dédiée a été créée sur le site Éduscol pour tous les professionnels de l’éducation et fait l’objet de mises à jour régulières.
Avec notamment l’appui de l’Observatoire de la qualité de l’air intérieur, l’OQAI, le ministère est particulièrement vigilant au sujet des fournitures scolaires et suit, de façon globale, les actions menées dans les territoires sur ces problématiques.
C’est pour cela que, à cette rentrée, le site internet Éduscol du ministère renvoie vers les informations établies par l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, l’ADEME, qui travaille avec des associations proposant des conseils pour un achat raisonné et maîtrisé de fournitures scolaires respectueuses de l’environnement et de la santé des élèves.
À titre d’exemple, le site Mon cartable sain et durable est un mécanisme de sensibilisation et d’information proposé par l’ADEME et le conseil départemental de la Gironde. Il permet aux parents, enseignants et collectivités de faire leurs achats de manière éclairée. Il s’inscrit plus largement dans un dispositif que nous animons avec le ministère de la transition écologique et solidaire depuis 2005 : l’inter-réseaux national Commande publique et développement durable, qui appuie les acheteurs publics dans l’intégration des enjeux de développement durable à leurs achats.
Ces conseils complètent la fiche publiée le 3 juillet dernier sur le site du ministère, afin de donner le cadre d’une liste de fournitures scolaires raisonnable, en quantité d’articles et en coût. Je tiens en effet à relier les enjeux de qualité, que vous venez d’indiquer, monsieur le sénateur, avec les préoccupations en termes de pouvoir d’achat relatives à l’achat de telles fournitures.
Le ministère de l’éducation nationale et de la jeunesse participe à différents groupes de travail interministériel, afin d’avoir une vision d’ensemble de ces problématiques multiformes. Ainsi, il contribue à la nouvelle stratégie nationale sur les perturbateurs endocriniens, ou SNPE2, qui a défini, comme l’une de ses priorités, d’harmoniser la réglementation européenne s’appliquant aux objets du quotidien, comme les manuels ou les fournitures scolaires.
La parole est à Mme Françoise Férat, pour répondre à M. le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse. Vous disposez de vingt-cinq secondes, ma chère collègue !
Je vous remercie, monsieur le ministre, de cette réponse. Vous l’avez compris, ce sujet fait partie de ceux qui nous conduisent au quotidien à nous interroger, mais qui sont encore plus sensibles lorsqu’ils touchent aux enfants. S’il convient de ne pas être trop alarmiste, il faut tout de même y apporter des réponses vraies, concrètes et rapides. Or vous ne me communiquez que des éléments d’information, certes intéressants, auxquels de nombreuses familles sont particulièrement sensibilisées, par le biais notamment d’internet. Nous devrons continuer, ensemble, à être vigilants sur les résultats attendus.
La parole est à M. Henri Cabanel, auteur de la question n° 394, adressée à M. le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse.
Ma question porte sur les procédures de décision de fermeture, de maintien ou d’ouverture de classes en milieu rural.
Concernant les fermetures de classes, les informations faites en amont suscitent très souvent une légitime inquiétude. Les conséquences de telles fermetures sont souvent lourdes. En milieu rural en particulier, elles peuvent conduire les parents à envisager des temps de parcours beaucoup plus longs pour leurs enfants.
Les parents, les élus et les personnels sont rarement sans se mobiliser lorsqu’une fermeture est envisagée. Parfois, il s’agit de faire évoluer les critères, quelquefois de contester le fait qu’ils s’appliquent bien à la situation en cause. Dans ce dernier cas, il arrive que la décision finale infirme les informations initiales, pour le plus grand bonheur de tous.
Pour autant, des angoisses ont été vécues. Le soulagement n’efface pas toujours le sentiment d’avoir une épée de Damoclès suspendue au-dessus de la classe ou de l’école. Ce sentiment alimente également celui de la défiance contre l’État, que les démagogues ne manquent jamais d’attiser.
J’ai donc une proposition à formuler. Il serait beaucoup plus productif que les services de l’État sollicitent les mairies en amont, c’est-à-dire sur une échéance de plusieurs années, pour connaître leur appréciation, circonstanciée, des évolutions démographiques à venir et discuter de la crédibilité de cette appréciation avec elles avant de parler de fermeture de classe. Envisagez-vous d’aller dans ce sens, monsieur le ministre ?
La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse.
Monsieur le sénateur Henri Cabanel, je suis en profond accord avec ce que vous venez de dire. La méthode que nous utilisons depuis de nombreuses années, en réalité des décennies, est perfectible, notamment du fait de son annualité et de sa conception même. Elle aboutit à tous les phénomènes que vous avez parfaitement décrits et son processus est parfois totalement inutile, puisque, vous l’avez dit, il arrive que de fausses mauvaises nouvelles soient annoncées avant d’être infirmées, ce qui excite les esprits inutilement.
Pour autant, la méthode actuelle est très sérieuse : elle repose sur les données de l’INSEE, et les inspecteurs d’académie font un travail extrêmement rigoureux, qui aboutit à des décisions à chaque fois très justifiées et rationnelles.
Depuis mon entrée en fonction, j’ai donné comme consigne d’allier esprits de géométrie et de finesse, notamment lorsqu’il s’agit de fermer une école. Je fais d’ailleurs une distinction entre la fermeture d’une classe et celle d’une école : la première obéit à des logiques démographiques assez nettes et transparentes, tandis que la seconde renvoie à des réalités beaucoup plus complexes.
En tout état de cause, nous disposons maintenant d’outils qui nous permettent de faire évoluer les choses.
Je pense notamment aux conventions ruralité, qui ont été enclenchées en deux temps par le sénateur Alain Duran sous le précédent quinquennat. J’ai confirmé sa mission, qui arrive maintenant à son terme et qui va être renouvelée sous une autre forme. Nous avons déjà signé de telles conventions avec cinquante départements et notre objectif est de le faire avec l’ensemble des soixante-six départements ruraux.
Au-delà de cette signature, nous voulons construire une véritable stratégie, en approfondissant les conventions sur le plan qualitatif. C’est dans ce cadre que nous souhaitons développer une vision pluriannuelle, comme vous le réclamez. Il ne s’agit pas seulement de se poser la question de la fermeture ou de l’ouverture de classes ou d’écoles, mais de mettre en marche des méthodes permettant de rendre le territoire attractif. Cela peut passer ou non par des regroupements, mais en tout cas, seules la discussion et l’élaboration d’une vision stratégique partagée peuvent aboutir à ce résultat.
En outre, j’ai lancé, il y a trois semaines, une mission intitulée Inégalités et territoires, qui est placée sous la responsabilité de Mme Azéma et M. Mathiot. Cette mission, qui doit rendre ses conclusions dans quelques mois, nous permettra d’avoir une vision renouvelée de l’éducation prioritaire pour tous les territoires, qu’ils soient urbains ou ruraux. Elle s’attachera à travailler sur les enjeux liés aux écoles rurales, de façon à prendre en compte, là aussi, les particularités du monde rural et à contribuer au renouveau démographique dont nous avons besoin dans ces territoires.
La parole est à M. Henri Cabanel, pour répondre à M. le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse, en une minute.
Monsieur le ministre, le milieu rural est hétérogène, certaines communes sont très paupérisées – c’est le cas dans mon département, l’Hérault. Dans ces situations, l’école constitue un service public essentiel. Il faudrait donc faire davantage de cas par cas, comme vous l’avez indiqué. Je salue d’ailleurs l’excellent travail réalisé par mon collègue Alain Duran sur ce sujet.
Votre gouvernement a fait voter une loi intitulée pour un État au service d’une société de confiance, qui devait nous permettre de nous appuyer plus sur le dialogue que sur le contrôle. C’est ce que j’avais compris en tout cas… Il faut se servir de cette loi pour discuter davantage avec les maires ruraux et les élus locaux, qui sont parfois démunis face à une population très en colère.
Je discutais récemment avec la maire d’une commune rurale et elle me disait que les élus de ces communes sont un amortisseur social, ce qui est tout à fait juste. Il faut en prendre conscience et, au-delà de critères comptables, il est essentiel de regarder la situation réelle des territoires, afin que l’ensemble des parties prenantes – administration, élus locaux, parents – prenne la bonne décision dans l’intérêt général.
La parole est à M. Jean-Pierre Vial, auteur de la question n° 426, transmise à Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.
Depuis bientôt quinze ans, la couverture numérique du territoire est un enjeu de tous les gouvernements pour mettre la France à la hauteur des infrastructures nécessaires à la société numérique et éviter un décrochage et un handicap de plus en plus fort des territoires ruraux.
Une fois encore, la réalité met à l’épreuve les ambitions affichées ! Alors que la France s’est battue pendant des années à Bruxelles pour faire reconnaître le principe de l’exception française dite du timbre-poste, qui permet de mutualiser le coût d’un service par la contribution de tous, elle a décidé d’y déroger elle-même, sous la sollicitation – il est vrai – des opérateurs.
Ainsi, les opérateurs et fournisseurs de services numériques ont préempté les zones urbaines les plus densément peuplées, constituant les zones dites AMII, qui sont tout simplement les principales agglomérations, soit, pour la Savoie, Chambéry, Aix-les-Bains et Albertville.
Force est de constater que les collectivités, malgré la complexité, la lourdeur et les difficultés politiques et administratives, se réforment plus vite que la prétendue révolution numérique.
Aujourd’hui, des communes rurales ont été contraintes ou se sont vu imposer de se regrouper avec des agglomérations, en perdant de ce fait les avantages consentis aux territoires ruraux.
Depuis, lors de la conférence des territoires, le Gouvernement a annoncé la création du dispositif AMEL, qui vise à accélérer la couverture en fibre optique des territoires ruraux.
La moindre des cohérences est d’éviter, quel que soit l’opérateur ou la zone – AMII ou AMEL –, une fracture supplémentaire au sein d’une même collectivité, en l’espèce pour la Savoie les territoires de Chautagne, de l’Albanais, des Bauges, du Beaufortain et du Val d’Arly, au regard de leur collectivité de rattachement : Grand Lac, Grand Chambéry et Arlysère.
Dans son rôle de garant de l’aménagement du territoire et de gardien de l’égalité de tous devant les services et politiques publics, l’État se doit d’agir pour qu’il y ait une identité dans les services effectivement rendus et dans le calendrier, afin d’assurer une réelle cohésion territoriale en matière d’infrastructure numérique, en imposant aux opérateurs une desserte cohérente des zones AMII, dans le respect des limites territoriales des collectivités.
Je souhaite connaître les engagements du Gouvernement pour mettre en œuvre ces objectifs.
La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse.
Monsieur le sénateur Jean-Pierre Vial, la couverture numérique de l’ensemble de nos territoires constitue une priorité du Gouvernement. Avoir accès au très haut débit ou à une couverture mobile de qualité est un enjeu majeur pour l’attractivité des territoires et pour la lutte contre les fractures territoriales. C’est pourquoi nous cherchons à accélérer le déploiement du très haut débit, en nous appuyant sur l’initiative privée comme sur l’initiative publique.
Concernant les zones d’initiative privée, les opérateurs Orange et SFR avaient pris des engagements volontaires de déploiement de la fibre optique jusqu’à l’abonné sur environ 3 600 communes, comportant environ treize millions de locaux.
Dans votre département, monsieur le sénateur, ce sont 42 communes qui bénéficieront d’ici à 2020 d’un déploiement par l’opérateur Orange d’un réseau de fibre à l’abonné, entièrement mutualisé, permettant à tous les foyers et entreprises savoyards d’avoir accès au très haut débit.
Concernant les zones d’initiative publique, l’État confirme son soutien aux collectivités territoriales et a sécurisé une enveloppe de 3, 3 milliards d’euros. Cette enveloppe a notamment permis de soutenir les projets portés par les collectivités territoriales pour le déploiement de plus de onze millions de prises en fibre optique.
En complément, pour les zones où les projets publics ne couvraient pas l’ensemble des locaux, certaines collectivités ont fait le choix de chercher des investissements privés complémentaires – c’est le dispositif dit AMEL.
Le cas de la Savoie est à cet égard unique, car le département a choisi de résilier sa première délégation de service public pour bénéficier de meilleures conditions de déploiement et de faire appel au secteur privé en dehors des zones d’initiative privée. Les discussions entre les opérateurs et le département sont en cours et concernent notamment 63 communes des trois établissements publics de coopération intercommunale que vous avez mentionnés.
Par souci de cohérence avec la zone d’initiative privée, le Gouvernement n’acceptera pas d’engagements des opérateurs privés en dehors du cadre légal.
Avec le dispositif AMEL, nous avons ainsi enrichi la boîte à outils des collectivités territoriales, afin de leur permettre d’accélérer la couverture numérique de leur territoire, en cherchant la meilleure équation économique entre investissements publics et privés et en veillant à garantir une cohérence entre les territoires en matière d’offres et de technologie.
La parole est à M. Jean-Pierre Vial, pour répondre à M. le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse. Vous disposez de trente secondes, mon cher collègue.
Monsieur le ministre, je constate que vous êtes quelqu’un de pluridisciplinaire…
En tout cas, je ne peux évidemment pas vous faire le reproche d’une réponse qui ne correspond pas tout à fait à la réalité : le département de la Savoie n’a pas choisi de mettre un terme à la délégation de service public, il y a été contraint.
J’entends bien les grands discours, qui s’appuient sur des considérations très générales, certes louables, mais en pratique, la question est simple : certains territoires ruraux sont pénalisés, quand ils doivent se regrouper avec de grandes agglomérations. Dans ces cas-là, la moindre des choses est d’obtenir la même qualité de service que les autres collectivités. J’espère que le Gouvernement veillera effectivement, dans le cadre de ses relations avec les opérateurs, à ce nécessaire respect de l’égalité des territoires.
La parole est à M. Alain Marc, auteur de la question n° 370, transmise à Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.
La suppression de la taxe d’habitation impose une compensation nécessaire s’élevant à plus de 26 milliards d’euros à l’horizon 2020, dont 10 milliards ne sont pas encore financés à ce jour.
Nombreux sont les élus qui s’inquiètent des conséquences prévisibles de cette mesure sur la capacité des petites communes rurales de continuer à assurer leurs missions de service public de proximité, missions pourtant essentielles à la population – je pense notamment aux écoles. Ces territoires ruraux souffrent déjà d’une baisse importante des dotations de l’État depuis de nombreuses années, ainsi que du déséquilibre des mécanismes de dotations, puisque la dotation globale de fonctionnement, DGF, des communes rurales est, par habitant, deux fois inférieure à celle des communes urbaines.
Face aux contraintes financières et budgétaires qui se renforcent, les petites communes éprouvent sans cesse davantage de difficultés à soutenir le tissu économique local, lui aussi fortement affaibli et durement affecté par la désertification croissante des territoires ruraux. Couvrant les deux tiers de notre territoire et représentant 22 millions d’habitants, les communes rurales ne peuvent pas être abandonnées.
Dans ce contexte, la campagne de stigmatisation lancée contre les maires par des groupes se réclamant du parti majoritaire autour du #BalanceTonMaire est vécue par tous les élus comme une insulte que rien ne peut justifier. En effet, 85 % des communes n’ont pas augmenté leur taux de taxe d’habitation ; celles qui l’ont fait n’ont été motivées que par la recherche des financements nécessaires à l’accomplissement de leurs missions dans un contexte de baisse de leurs moyens. Elles l’ont fait dans le cadre des responsabilités qui leur sont confiées par la loi et qui participent de la libre administration des collectivités locales garantie par la Constitution.
Je regrette que l’État vienne aggraver la crise de confiance avec les territoires et s’isole un peu plus des acteurs publics locaux, dont il a pourtant besoin pour porter les politiques publiques.
Monsieur le ministre, je vous demande donc de m’indiquer les mesures que le Gouvernement envisage de prendre, afin de soutenir les communes rurales et de préserver leurs capacités d’investissement.
La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse.
Monsieur le sénateur Alain Marc, j’entends votre inquiétude et le Gouvernement est entièrement convaincu de la nécessité d’accompagner les territoires ruraux, qui sont confrontés à de grands défis, mais sont avant tout une chance pour notre pays.
Le Gouvernement soutient d’ores et déjà les communes rurales et continue à le faire dans le projet de loi de finances pour 2019.
Les dotations, tout d’abord. Les montants répartis pour la DGF, 27 milliards d’euros, connaissent une stabilité globale, qui s’accompagne d’une hausse sensible de la péréquation pour les territoires ruraux les plus pauvres : 90 millions d’euros supplémentaires en 2019 pour ce qui concerne la dotation de solidarité rurale, soit une progression identique à celle de 2018.
Le soutien à l’investissement, ensuite. Le Gouvernement a stabilisé et pérennisé la dotation d’équipement des territoires ruraux, DETR, et celle de soutien à l’investissement local, DSIL, à un niveau historiquement élevé. La DETR, destinée aux communes et intercommunalités rurales, s’élève désormais à plus d’un milliard d’euros par an contre 600 millions il y a seulement quatre ans.
Aucun seuil, en montant ou taille de commune, n’est inscrit dans le droit et nous avons donné aux préfets des indications claires sur la nécessité de financer des projets de toute envergure. Le projet de loi de finances élargira encore les possibilités de financer du fonctionnement et de l’ingénierie pour accompagner les plus petites collectivités.
Sur les écarts de DGF par habitant entre zones urbaines et rurales, il s’agit de la prise en compte des charges de centralité, dont le poids financier est avéré. Tout comme pour les zones de montagne, la voirie compte double dans les calculs de dotation. Il ne faut pas jouer les territoires les uns contre les autres ! Nous prenons réellement en compte les spécificités rurales.
De manière plus générale, les efforts demandés aux collectivités pour maîtriser la dépense locale ne concernent directement que les 322 collectivités les plus grandes. Il s’agit d’une mesure protectrice pour les communes rurales et pour leur libre administration. Le Gouvernement a fait le choix de la confiance, sans contribution au redressement des finances publiques ni contrôle individuel des petites communes.
Enfin, sur la refonte de la fiscalité locale, je veux vous rassurer : à l’instar du dégrèvement actuel pour la taxe d’habitation qui compense intégralement chaque commune, aucune collectivité ne perdra de ressources. La concertation est en cours sur ce sujet et nous n’oublierons pas la ruralité et ses spécificités.
La parole est à M. Alain Marc, pour répondre à M. le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse. Il vous reste trente-sept secondes, mon cher collègue.
En tant qu’ancien enseignant et conseiller pédagogique, je veux dire à M. le ministre que le chemin sur lequel il engage l’éducation nationale me convient, mais nous parlons en l’espèce des collectivités territoriales et de leurs dotations…
À ce sujet, il est important de prendre en compte le fait que la dette des collectivités locales ne représente que 10 % de l’ensemble de la dette publique en France et qu’elle sert uniquement à financer des investissements, contrairement à celle de l’État…
En tout cas, j’espère que les besoins, considérables aujourd’hui, des territoires ruraux seront correctement pris en compte par le Gouvernement.
La parole est à Mme Laurence Harribey, auteur de la question n° 398, adressée à M. le ministre de l’action et des comptes publics.
Cette question, qui reprend une question écrite posée à deux reprises, mais restée sans réponse, est relative à la désignation des délégués à la protection des données, qui est aujourd’hui imposée à toutes les collectivités locales à la suite de l’entrée en vigueur, en mai dernier, du règlement général sur la protection des données, le RGPD. Les collectivités doivent aussi faire connaître à la Commission nationale de l’informatique et des libertés, la CNIL, le nom et la qualité du délégué en question. Si aucun diplôme particulier n’est exigé pour remplir cette fonction, force est de constater qu’une telle mission requiert des connaissances en technologies de l’information, en protection de données et dans le domaine juridique.
La question se pose de savoir comment les petites communes vont pouvoir répondre à cette obligation, sachant que la population d’une commune sur deux est inférieure à 500 habitants. Si le règlement prend en compte la possibilité de mutualisation, il apparaît aujourd’hui, avec le recul, que seules les plus grandes collectivités se sont organisées ainsi.
Dans ce contexte, comment le Gouvernement entend-il soutenir spécifiquement les communes dont la population est faible pour les aider à trouver à proximité de leur territoire les personnes susceptibles d’assumer la mission de délégué à la protection des données personnelles ?
La parole est à Mme la secrétaire d’État auprès de la ministre des solidarités et de la santé.
Madame la sénatrice, le Gouvernement est très attentif à la maîtrise des normes et des charges pesant sur les collectivités territoriales. Mme la garde des sceaux a rappelé que ces dernières étaient déjà soumises, en tant que responsables de traitements, à des obligations de protection des données, bien avant l’entrée en vigueur du règlement général sur la protection des données, le RGPD.
Si le RGPD énonce bien de nouvelles obligations, comme la désignation d’un délégué à la protection des données, il entraîne également des simplifications permettant d’alléger les charges des collectivités qui traitent chaque jour de nombreuses données à caractère personnel.
Dans le cadre de la mise en conformité de la loi informatique et libertés avec le RGPD et sur l’initiative de la Haute Assemblée, le législateur a prévu plusieurs dispositions en faveur des collectivités.
Ainsi, la loi du 20 juin 2018 a confié de nouvelles missions à la CNIL pour mieux accompagner les collectivités. Il est prévu désormais que cette commission « apporte une information adaptée aux collectivités territoriales » quant à leurs droits et obligations en tant que responsables de traitements. Elle doit également encourager l’élaboration de codes de conduite qui définissent les obligations des responsables de traitements. Ces codes de conduite peuvent être fixés par des associations telles que l’Association des maires de France, l’AMF, ou l’Assemblée des départements de France, l’ADF.
Si le RGPD impose effectivement aux collectivités, comme à toutes les autorités publiques, de désigner un délégué à la protection des données, il prévoit que ce délégué peut faire l’objet d’une mutualisation par plusieurs collectivités. Comme il s’y était engagé auprès du Conseil national d’évaluation des normes, le CNEN, le Gouvernement a rappelé ce principe dans le décret.
Plus largement, les collectivités et leurs groupements peuvent se doter d’un service unifié ayant pour objet d’assumer en commun les charges et obligations liées au traitement de données. L’article 31 de la loi du 20 juin 2018 prévoit que des conventions peuvent être conclues entre les collectivités et leurs groupements ayant pour objet la réalisation de prestations de services liées au traitement de données.
La CNIL a publié des exemples de mutualisation qui montrent que les solutions juridiques retenues par les collectivités sont variées, et a mis à leur disposition un guide pratique très complet. Le Gouvernement demeurera attentif à ce travail d’accompagnement.
La parole est à Mme Laurence Harribey, pour répondre à Mme la secrétaire d’État auprès de la ministre des solidarités et de la santé. Il vous reste une minute, ma chère collègue.
Je veux rappeler qu’une très large majorité des communes ne s’est pas saisie de ce sujet, alors même que le règlement prévoit des sanctions pouvant atteindre 20 millions d’euros pour les infractions les plus graves. Les délégués à la protection des données assument donc une grande responsabilité.
En outre, je peux vous dire d’expérience, venant comme vous du milieu rural, madame la secrétaire d’État, que nombre de communes rurales sont harcelées par des cabinets prétendument spécialisés. Il a fallu que je sollicite pour ma part le département de la Gironde pour mettre en place une solution de mutualisation pour les communes concernées. Pour autant, tous les départements n’effectuent pas la même démarche.
C’est pourquoi je demande au Gouvernement – vous l’avez évoqué à la fin de votre propos, madame la secrétaire d’État – d’être très vigilant sur cette question. Indépendamment du problème financier et humain, c’est tout l’esprit du règlement général sur la protection des données qui est en cause. Or, nous le savons tous, la protection des données est aujourd’hui un problème fondamental.
La parole est à Mme Christine Bonfanti-Dossat, auteur de la question n° 403, adressée à M. le ministre de l’économie et des finances.
Le centre de formation d’apprentis de La Palme à Agen, créé en 1964, est le plus ancien de la région Nouvelle-Aquitaine. Depuis plus de cinquante ans, il a formé des générations d’apprentis, incarnant le savoir-faire français, dont nous sommes si fiers. En Lot-et-Garonne, la moitié des apprentis y sont formés chaque année et 70 % des chefs d’entreprise artisanale en sont d’anciens élèves. Tous les ans, sur dix apprentis formés, sept deviennent des chefs d’entreprise, et par conséquent des créateurs d’emplois.
Malgré la hausse des effectifs – 750 à la rentrée 2018 contre 700 en 2017 –, la vétusté des bâtiments met en danger l’existence du CFA. Déjà en avril 2017, la commission de sécurité avait émis un avis défavorable à la poursuite de l’ouverture au public de certains bâtiments.
Refusant la fatalité qui appauvrirait davantage un territoire rural comme le nôtre, les acteurs locaux se sont réunis pour soutenir un projet de rénovation indispensable à la lutte contre la vétusté et la dangerosité des locaux. Ce projet est estimé à 15 millions d’euros.
La région Nouvelle-Aquitaine, consciente de l’impérieux besoin de maintenir le CFA, s’est engagée à hauteur de 7, 3 millions d’euros. Le montant de ce soutien démontre, s’il en était besoin, qu’il y a urgence à réaliser ces travaux et que ceux-ci sont prioritaires à l’échelon régional.
Le département du Lot-et-Garonne et l’agglomération agenaise participent également au financement de ce projet, essentiel pour la survie du site. Le CFA, quant à lui, mobilise un million d’euros.
Hélas, il manque encore 4 millions d’euros. Le soutien de l’État est donc indispensable.
Je me suis rendue sur le site à plusieurs reprises et je peux témoigner qu’il ne s’agit nullement de travaux superflus. Le CFA est le dernier établissement de toute la région à ne jamais avoir bénéficié d’un plan de modernisation. Sans cette intervention, 750 apprentis n’auraient plus de lieu de formation et de nombreux emplois seraient menacés.
Madame la secrétaire d’État, vous connaissez la région Nouvelle-Aquitaine, puisque vous y avez été élue. Pouvez-vous vous engager à soutenir financièrement le projet de rénovation du CFA La Palme d’Agen ?
La parole est à Mme la secrétaire d’État auprès de la ministre des solidarités et de la santé.
Madame la sénatrice, je vous remercie de votre question. Chacun sait que la compétence de droit commun sur l’apprentissage appartient, à ce stade, aux conseils régionaux.
En matière d’investissement, l’État confie chaque année aux régions une fraction de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques, la TICPE.
Cette compétence et cette dotation seront maintenues en 2019 et les années suivantes dans le cadre de la réforme de l’apprentissage en cours, issue de la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel, pour un montant global de 180 millions d’euros – montant supérieur aux dépenses constatées –, sous réserve que les régions aient maintenu leur action en la matière durant les années 2017, 2018 et 2019.
S’agissant du fonctionnement, les conseils régionaux auront une responsabilité pleine et entière en 2019 et perçoivent à ce titre une fraction de la taxe d’apprentissage via le compte d’affectation spéciale « Financement du développement et de la modernisation de l’apprentissage ». La réforme ne prendra pleinement effet, sur ce point, qu’en 2020.
Connaissant l’intérêt que porte le président de la région Nouvelle-Aquitaine, Alain Rousset, à la question de la formation professionnelle, je ne doute pas de son écoute et de son soutien total au projet que vous mentionnez, madame la sénatrice.
La parole est à M. Guillaume Chevrollier, auteur de la question n° 374, adressée à Mme la ministre des solidarités et de la santé.
Le maintien à domicile des personnes âgées est un enjeu de société et constitue une mutation qui va s’accélérer.
Deux éléments en témoignent. Il y a, d’un côté, les conséquences de la transition démographique et du vieillissement de la population. On estime qu’en 2030 il y aura près de 1, 6 million de personnes dépendantes. Il y a, de l’autre, le souhait, tout à fait légitime et compréhensible, des personnes dépendantes de vivre le plus longtemps possible chez elles.
Madame la secrétaire d’État, les aides à domicile font un travail véritablement remarquable au quotidien. Elles créent un lien de proximité, un lien social, précieux, auprès de personnes qui se sentent parfois isolées. C’est le cas notamment dans les territoires ruraux, et il faut saluer les interventions des centres communaux d’action sociale, les CCAS, et des associations d’aide à domicile en milieu rural, les ADMR.
Pourtant, le maintien à domicile est confronté à des problèmes chroniques : financement déficitaire ; plans d’aide de l’allocation personnalisée d’autonomie, APA, de plus en plus réduits sur les durées d’intervention ; difficultés à recruter du personnel et à le fidéliser ; emplois majoritairement à temps partiel. Je rappelle aussi que le salaire moyen n’est pas suffisamment attractif, même après des années d’ancienneté.
Les ADMR de mon département, la Mayenne, et le CCAS de la ville de Mayenne m’ont fait part de pistes de réflexion sur le plan national : par exemple, la rénovation du mode de financement des services d’aide à domicile, la meilleure reconnaissance des diplômes dans la rémunération ou la revalorisation du montant de l’indemnité kilométrique. J’insiste particulièrement sur ce dernier point : ce montant stagne à 0, 35 euro depuis 2010, alors que les prix des carburants ne cessent de grimper, ce qui constitue un grave problème de mobilité pour les personnes qui vivent en milieu rural.
Madame la secrétaire d’État, comment entendez-vous revaloriser le statut des aides à domicile et améliorer leurs conditions de travail ? Quelles politiques publiques viables comptez-vous mettre en place ?
Prendre soin des professionnels du maintien à domicile et du service à la personne en général, c’est prendre soin, par ricochet, des personnes dont ils ont la charge, à savoir les personnes dépendantes. Cet enjeu nous invite à nous poser la question de la place que nous voulons donner aux plus fragiles dans notre société.
La parole est à Mme la secrétaire d’État auprès de la ministre des solidarités et de la santé.
Monsieur le sénateur Guillaume Chevrollier, je vous remercie de votre question qui me donne l’occasion de présenter la concertation « Grand âge et autonomie », que le Gouvernement a lancée le 1er octobre et dont l’un des axes est justement le maintien à domicile.
Rester à domicile est le souhait de la majorité des personnes âgées ou handicapées, qui y parviennent souvent grâce au soutien de leurs aidants naturels ou professionnels. Aujourd’hui, 760 000 personnes âgées bénéficient d’un service d’aide et d’accompagnement à domicile.
La concertation doit permettre de définir les modalités de financement des prises en charge à domicile comme en établissement, afin d’en garantir l’accessibilité pour toutes les familles. L’un des dix ateliers traite particulièrement de la question des paniers de biens et services et du reste à charge.
Il nous faudra définir différents scénarios pour proposer des droits et prestations, qui soient universels, simples, lisibles et modulés en fonction des ressources des personnes.
Par ailleurs, nous savons ce que nous devons aux accompagnants du quotidien. C’est pourquoi nous nous sommes engagés à améliorer les conditions d’exercice des professionnels du secteur médico-social et des aidants.
Dès 2019, nous allons définir une stratégie concernant la qualité de vie au travail dans les services d’aide et d’accompagnement à domicile en concertation avec les acteurs du secteur.
Comme vous nous invitez à le faire et comme cela a été adopté dans la loi du 10 août 2018 pour un État au service d’une société de confiance, nous entendons faciliter le répit des aidants, en expérimentant, dès la fin de l’année, les relayages de l’aidant ou des séjours de répit aidants-aidés pour permettre aux aidants de s’absenter plusieurs jours, en confiant leur proche à un professionnel.
Enfin, l’un des axes de la concertation vise également à renforcer la reconnaissance et l’accompagnement des aidants et à accroître leur capacité à se saisir de leurs droits.
Les aidants sont des maillons essentiels de la vie des personnes âgées en perte d’autonomie et des personnes handicapées. Notre stratégie devra permettre de préserver leur implication dans la durée.
La parole est à M. Guillaume Chevrollier, pour répondre à Mme la secrétaire d’État auprès de la ministre des solidarités et de la santé. Vous disposez de quatorze secondes, mon cher collègue.
Madame la secrétaire d’État, je vous remercie de votre écoute et de votre intervention. Sous le précédent quinquennat a déjà été adoptée la loi relative à l’adaptation de la société au vieillissement. Il avait été souligné tout au long du débat que, au-delà d’un cadre juridique, il fallait des moyens. Là, vous lancez une concertation, car vous êtes consciente des enjeux liés au vieillissement de la population. Le Parlement, et le Sénat en particulier, sera vigilant sur les moyens que vous voudrez bien mettre à la disposition des aidants dans nos territoires.
La parole est à M. Philippe Bas, auteur de la question n° 412, adressée à Mme la ministre des solidarités et de la santé.
Madame la secrétaire d’État, un certain nombre de personnes handicapées m’ont alerté sur leurs difficultés matérielles d’accès à l’hôpital public, là où les places de stationnement donnent désormais lieu à paiement. Nombre d’hôpitaux ont été obligés, en effet, de demander un paiement pour le stationnement des visiteurs ou des patients qui viennent en consultation extérieure à l’hôpital.
Vous le savez, voilà quelques années, nous nous sommes battus et avons obtenu gain de cause pour que les communes acceptent que les personnes handicapées n’aient pas à payer leur stationnement, les bornes pouvant être parfois assez éloignées de l’endroit où la personne a garé son véhicule. Le même problème se pose à l’hôpital, où les personnes handicapées qui doivent aller payer pour leur stationnement peuvent se trouver en difficulté. Cette partie de la population est fragile et a parfois besoin de soins, or elle rencontre des difficultés dans l’accès aux soins imputables à cette exigence du paiement. Aussi, madame la secrétaire d’État, des instructions pourraient-elles être données pour que les personnes handicapées n’aient pas à payer leur stationnement lorsqu’elles se rendent pour des soins à l’hôpital ?
La parole est à Mme la secrétaire d’État auprès de la ministre des solidarités et de la santé.
Monsieur le président Philippe Bas, je vous remercie de votre question, qui fait écho à des situations très concrètes vécues par beaucoup de personnes handicapées, lorsqu’elles doivent stationner dans les parcs des hôpitaux publics, afin de recevoir les soins, souvent quotidiens, que leur état de santé exige.
Comme vous le mentionnez, la loi du 18 mars 2015 visant à faciliter le stationnement des personnes en situation de handicap titulaires de la carte de stationnement dispose que les personnes handicapées munies d’une carte de stationnement ou les personnes les accompagnant peuvent utiliser gratuitement et sans limitation de durée toutes les places de stationnement ouvertes au public, et non plus seulement les places réservées matérialisées par une signalétique spécifique.
Néanmoins, la loi précise que les titulaires de la carte de stationnement peuvent être soumis au paiement d’une redevance pour se garer dans les parcs de stationnement munis de bornes d’entrée et de sortie accessibles aux personnes handicapées depuis leur véhicule. Monsieur le sénateur, vous avez raison, les hôpitaux dotés de parkings payants, souvent concédés à un opérateur privé, entrent dans cette catégorie.
À ce jour, il n’est pas prévu de faire évoluer cette disposition et de modifier la loi, ce sujet n’ayant pas été identifié lors des différentes réunions qui se tiennent régulièrement au ministère avec les associations de personnes en situation de handicap, mais votre question a le mérite d’ouvrir le débat.
Le dispositif que vous préconisez vise à exonérer de la redevance de parking les personnes en situation de handicap titulaires de la carte de stationnement lorsqu’elles sont dans l’obligation de recevoir des soins réguliers. Or on pourrait considérer que cette règle est susceptible de s’appliquer à une plus large majorité de patients qui se rendent à l’hôpital. Je pense, par exemple, aux patients atteints de pathologies cardio-vasculaires ou d’insuffisance respiratoire, qui viennent également de manière récurrente en consultation.
Néanmoins, je ne manquerai pas de soumettre votre interrogation lors des prochains échanges qui auront lieu avec les associations concernées. Aujourd’hui, nous devons reconnaître que nous ne disposons pas suffisamment d’éléments objectifs concernant les pratiques des établissements de santé. Certains d’entre eux valident le ticket de parking à l’occasion d’une consultation, tandis que d’autres exonèrent certains publics.
La parole est à M. Philippe Bas, pour répondre à Mme la secrétaire d’État auprès de la ministre des solidarités et de la santé. Vous disposez d’une minute, monsieur le président.
Madame la secrétaire d’État, je vous remercie de votre réponse, même si elle me déçoit un peu. Certes, d’autres personnes que celles qui disposent d’une carte « handicapé » rencontrent aussi des problèmes pour se rendre à l’hôpital qui pourraient justifier qu’on leur accorde le même avantage. Cette question mérite d’être soulevée.
J’ai entendu dans votre réponse, d’une part, que vous admettiez l’existence d’un problème, mais, d’autre part, que vous n’en étiez pas saisie. Tel est justement l’objet de ma question. Il faut savoir que beaucoup d’éléments dans la vie quotidienne empêchent les personnes handicapées de prendre pleinement part à la vie collective. Quand il s’agit de l’accès aux soins, nous devons, les uns et les autres, être particulièrement attentifs à leur simplifier la vie. Peut-être cela n’a-t-il pas été énoncé dans les discussions qui portent sur de nombreuses matières avec les associations de personnes handicapées, mais je suis certain que c’est un besoin très important pour nombre de nos compatriotes en difficulté.
La parole est à Mme Christine Lavarde, auteur de la question n° 438, adressée à Mme la ministre des solidarités et de la santé.
Madame la secrétaire d’État, dans les Hauts-de-Seine, le maire de Boulogne-Billancourt a appris par un courrier, en plein cœur de l’été, que l’agence locale de la caisse nationale d’assurance vieillesse, la CNAV, qui desservait six autres communes, allait être fermée. Les usagers sont désormais invités à aller dans l’agence la plus proche, localisée au Plessis-Robinson, soit à cinquante minutes de transports en commun de la mairie de Boulogne-Billancourt, à une heure de celle de Suresnes ou à une heure dix de celle de Garches.
Si les objectifs de rationalisation des activités de la CNAV sont compréhensibles, dans un souci d’économie des fonds publics, il semble cependant nécessaire, voire indispensable de maintenir des agences ou, a minima, des points d’accueil dans chaque établissement public territorial du département. Or, dans les Hauts-de-Seine, avant même la réorganisation d’octobre dernier, il ne restait plus que quatre agences de la CNAV. Alors que cet organisme connaît de fortes tensions en Île-de-France, avec l’augmentation importante et constante du nombre de demandes d’ouverture de dossier, alors que plus de 20 000 dossiers sont en suspens et que le délai de traitement dépasse les six mois pour obtenir l’ouverture de ses droits à la retraite, la fermeture d’agence est un coup dur pour les usagers.
Certes, les démarches peuvent être effectuées en ligne. Cependant, le rapport national d’activité 2017 de la CNAV indique que seuls 32 % des usagers ont fait leur démarche via le site internet. Par ailleurs, le standard téléphonique semble saturé, avec plus de 9 000 appels par jour.
Dès 2016, en Île-de-France, la CNAV s’est engagée dans le déploiement des maisons de services au public. Au-delà de ce dispositif, quasi inexistant dans les Hauts-de-Seine, si la CNAV ne peut assurer les frais de fonctionnement de locaux, les villes, notamment la commune de Boulogne-Billancourt, sont disposées à mettre à disposition des bureaux pour la tenue de permanences au plus près des habitants à un rythme hebdomadaire, ou a minima bimensuel. Ce n’est pas aux équipes des centres communaux d’action sociale de se substituer à la CNAV pour aider les usagers à constituer des dossiers de retraite, ce qui exige une technicité et une expertise qu’ils n’ont pas. Madame la secrétaire d’État, quelle réponse êtes-vous disposée à apporter à cette demande de proximité qui concerne plus de 250 000 habitants ?
La parole est à Mme la secrétaire d’État auprès de la ministre des solidarités et de la santé.
Madame la sénatrice Christine Lavarde, je vous remercie de votre question. L’offre de service apportée aux usagers, et, plus particulièrement, le dimensionnement du maillage territorial, est l’un des sujets majeurs de la convention d’objectifs et de gestion conclue entre l’État et la CNAV pour les années 2018 à 2022. Le but est de renforcer la cohérence territoriale du réseau d’accueil de l’assurance retraite, constitué d’agences, de points d’accueil retraite et, le cas échéant, de maisons de services au public. À la fin de l’année 2020, chaque assuré disposera d’un point d’accueil retraite propre à l’assurance retraite ou mis en place via un partenariat, situé à moins de trente minutes de son domicile.
Concernant la situation que vous évoquez, je vous confirme que la CNAV d’Île-de-France revoit actuellement son implantation dans le sud du département des Hauts-de-Seine. Très concrètement, à l’été 2017, le propriétaire des locaux de l’agence de Bourg-la-Reine a notifié à la CNAV la fin proche de son contrat de location. Il n’a pas paru envisageable de transférer l’ensemble des activités de cette agence, notamment l’accueil des assurés, vers celle de Boulogne-Billancourt. C’est pourquoi la branche retraite a choisi de mener un projet de regroupement de ces points d’accueil pour créer l’agence Sud-92. Ce site, dit de La Boursidière, sera implanté sur la commune du Plessis- Robinson, avec une accessibilité depuis le RER B et le tramway T6. Une campagne d’information, avec la mise à jour du site internet et le relais de la presse locale, doit accompagner l’ouverture du site. La CNAV dispose également en Île-de-France d’agences dans les villes de Nanterre et d’Asnières. En outre, elle noue des partenariats avec le réseau des maisons de services au public, les MSAP, pour assurer l’accueil et l’information des usagers sur la retraite. Ainsi, à ce jour, les MSAP des villes d’Antony et de Colombes prennent en charge des assurés.
Enfin, la CNAV d’Île-de-France est disposée à accueillir de manière favorable de nouveaux projets de coopération qui lui seront proposés par des porteurs de projets locaux dans le département des Hauts-de-Seine.
La parole est à Mme Christine Lavarde, pour répondre à Mme la secrétaire d’État auprès de la ministre des solidarités et de la santé. En seize secondes !
Madame la secrétaire d’État, il me semble que vous connaissez mal la carte des Hauts-de-Seine, puisque vous m’avez parlé de réorganisation du sud du département, alors que je vous interrogeais sur le centre du département. De même, vous m’avez parlé de points d’accueil à Nanterre et Asnières, deux villes qui sont situées dans le nord du département. Je comprends en tout cas qu’il revient aux villes de trouver des locaux si elles veulent continuer à disposer de points CNAV. En 2020, nous serons très loin du compte pour ce qui est des trente minutes : il faut plus d’une heure de transport pour aller au Plessis-Robinson.
La parole est à M. Michel Canevet, auteur de la question n° 441, adressée à Mme la ministre des solidarités et de la santé.
Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, j’ai souhaité appeler l’attention du Gouvernement sur la situation de la démographie médicale dans notre pays, singulièrement en Bretagne. L’Agence régionale de santé, l’ARS, de Bretagne a établi assez récemment une cartographie de la situation, d’où il ressort que de très nombreux territoires, de très nombreux bassins de vie en Bretagne sont particulièrement mal desservis. Certains sont même dépourvus de médecins, ce qui provoque l’angoisse de la population et pousse les élus à réfléchir à des solutions.
Parmi les propositions que j’avais formulées pour aboutir à une amélioration de la situation figurait la suppression du numerus clausus, car c’est effectivement le contingentement du nombre de médecins qui a abouti à une situation aussi dégradée sur certaines parties de notre territoire. Depuis que j’ai eu l’occasion de vous adresser ma question, j’ai, bien entendu, pris connaissance du plan Santé lancé par le Gouvernement, constatant avec satisfaction que le numerus clausus allait être réformé, voire supprimé en 2020. Je souhaite pour ma part qu’il puisse l’être le plus tôt possible, car il y a urgence à agir pour former de plus en plus de médecins.
La parole est à Mme la secrétaire d’État auprès de la ministre des solidarités et de la santé.
Monsieur le sénateur Michel Canevet, je vous remercie de votre question, qui s’inscrit tout à fait dans le cadre du plan Ma santé 2022 présenté par le Président de la République le 18 septembre dernier.
En effet, l’adaptation des formations aux enjeux de la santé de demain a été identifiée comme un axe prioritaire de travail. Chacun le reconnaît dans cette enceinte, le numerus clausus, s’il est utilisé seul, est un outil inadapté pour assurer une couverture suffisante en professionnels de santé sur l’ensemble du territoire national.
Chacun a aussi pu en faire l’expérience, la sélection opérée via le numerus clausus sur des critères peu pertinents par rapport à l’exercice que l’on attend de la pratique médicale est un gâchis humain. En le supprimant à l’issue de la première année, la réforme que nous engageons est pragmatique. Elle permettra de recruter des étudiants de profils divers qui pourront s’orienter progressivement vers un métier au cours du premier cycle.
S’agissant de la deuxième partie de votre question portant sur l’accès aux soins, plusieurs leviers ont déjà été actionnés pour agir dès à présent.
La régulation des étudiants de troisième cycle s’adapte aux besoins démographiques des régions et à leurs capacités de formation. Ainsi, 474 postes d’interne ont été ouverts en Bretagne à l’issue des épreuves classantes nationales, les ECN, en 2018, soit 6 % de plus que l’an passé. C’est une augmentation supérieure à la moyenne nationale, qui est de 4 %.
Nous encourageons également la conclusion de contrats d’engagement de service public, ces bourses versées aux étudiants en médecine en contrepartie d’une installation dans un territoire manquant de professionnels. Environ 80 étudiants en médecine bretons ont signé un tel contrat depuis la mise en place du dispositif, dont 43 ces trois dernières années.
Enfin, je veux saluer le travail de l’agence régionale de santé de Bretagne, qui anime depuis 2013 une convention régionale pour favoriser l’installation des médecins, et soutient dans ce cadre des initiatives variées et parfois innovantes.
Je pense à l’opération généraliste dating, qui met en relation les futurs médecins généralistes et les professionnels de santé déjà installés, et qui a déjà débouché sur douze installations. Je pense aussi au développement de 90 maisons de santé pluriprofessionnelles situées, pour les trois quarts, dans des territoires en difficulté. Je pense enfin aux 35 projets de télémédecine opérationnels dans des domaines variés – plaies chroniques, dermatologie, gériatrie, psychiatrie, AVC, cardiologie, insuffisance rénale.
Monsieur le sénateur, vous l’aurez compris, nous sommes pleinement engagés aux côtés de tous les acteurs pour garantir le meilleur accès aux soins et offrir une meilleure formation aux étudiants qui se dirigent vers la médecine.
La parole est à M. Michel Canevet, pour répondre à Mme la secrétaire d’État auprès de la ministre des solidarités et de la santé. Il vous reste cinquante-quatre secondes, mon cher collègue.
Je remercie bien entendu Mme la secrétaire d’État de ces précisions extrêmement utiles et exhaustives sur les actions qui ont été conduites. Effectivement, l’ARS s’est déjà emparée de cette question, mais il importe de poursuivre les efforts, en particulier en ce qui concerne les maisons de santé. Celles-ci sont subordonnées à des conditions parfois un peu trop restrictives, ce qui empêche le financement d’un certain nombre de projets. Or il faut que l’ensemble des initiatives de terrain visant à pallier le manque de médecins puisse être accompagné.
Je veux aussi appeler l’attention du Gouvernement sur d’autres disciplines manquant de praticiens – orthophonistes, masseurs-kinésithérapeutes – qui doivent aussi être l’objet d’une action résolue.
La parole est à M. Jean-Louis Tourenne, auteur de la question n° 457, adressée à Mme la ministre des solidarités et de la santé.
Madame la secrétaire d’État, depuis de nombreuses années, près de cinquante ans, la dépakine et les anticonvulsivants contenant du valproate de sodium sont considérés comme médicaments tératogènes responsables pour les enfants de troubles neurocomportementaux, voire de malformations physiques. Ce n’est que depuis 2015 que l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé enjoint aux praticiens de ne plus prescrire de valproate aux femmes en âge de procréer. Pourtant, des constats récents laissent entendre que seuls 46 % des praticiens suivent les procédures, rendues obligatoires, d’information et de recueil des accords.
Par ailleurs, une étude récente réalisée par cette même agence montre que les enfants de parents traités par le valproate courent quatre à cinq fois plus de risques de présenter des troubles neurologiques et comportementaux que les autres enfants. Elle estime entre 13 200 et 26 500 le nombre d’enfants victimes dont les mères sont des patientes épileptiques, et entre 3 200 et 3 900 le nombre d’enfants de patients bipolaires victimes. Elle considère en outre que, depuis l’interdiction totale aux praticiens, le nombre de femmes en âge de procréer traitées par le valproate a diminué de 15 %. C’est dire l’efficacité de l’intervention des pouvoirs publics, mais 56 % d’entre elles continuent à être victimes de la méconnaissance des praticiens.
Il convient de noter que ce n’est que le 12 juin dernier, après cinquante ans de profits, que Sanofi a éveillé l’attention des praticiens et interdit l’usage du valproate chez les sujets concernés.
Aussi le caractère gravissime de la situation impose-t-il de la part du Gouvernement, madame la secrétaire d’État, un certain nombre de mesures radicales. D’abord, il faut procéder à l’information la plus large, afin que nul n’y échappe, de la population féminine en âge de procréer, de même qu’à la sensibilisation des hommes sur les conséquences liées à l’appauvrissement du sperme.
Ensuite, vous devez sensibiliser tous les praticiens sur les risques qu’ils font courir lorsqu’ils prescrivent le valproate, tout en prévoyant, le cas échéant, des sanctions s’ils n’en tiennent pas compte.
En outre devrait être menée une étude épidémiologique approfondie sur les effets éventuels sur les petits enfants de patientes traitées, c’est-à-dire la troisième génération, afin de déterminer un dispositif de prévention.
Enfin, il convient d’engager l’indemnisation des victimes en obtenant de l’entreprise Sanofi qu’elle apporte une contribution pour compenser les frais induits et les contraintes particulières. Il faut savoir que Sanofi, dont la responsabilité est entière, vient de distribuer 6, 6 milliards d’euros de dividendes !
Êtes-vous prête, madame la secrétaire d’État, à vous engager dans ces actions volontaristes pour que ce scandale sanitaire cesse enfin ?
La parole est à Mme la secrétaire d’État auprès de la ministre des solidarités et de la santé.
Monsieur le sénateur Jean Louis Tourenne, je vous remercie de votre question, qui me permet de revenir sur les conditions de prescription de la dépakine et sur l’information des professionnels de santé et du public.
Tout d’abord, je tiens à souligner que le nombre de femmes en âge de procréer exposées à l’acide valproïque a diminué de 45 % entre 2013 et 2017.
Cette baisse a été obtenue grâce aux mesures de réduction de l’exposition mises en œuvre par le ministère chargé de la santé et l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, ainsi qu’à la mobilisation de tous les acteurs, notamment des associations, dont chacun, ici, peut saluer l’action au quotidien.
Aucun anti-épileptique ne doit être prescrit sans être accompagné d’une information transparente. Les femmes traitées par un anti-épileptique quel qu’il soit, notamment celles qui sont en âge de procréer ou qui font preuve d’un désir de grossesse, doivent consulter leur médecin avant toute décision thérapeutique.
S’agissant des actions conduites par le Gouvernement plus généralement en matière d’information des patients, la ministre des solidarités et de la santé, Agnès Buzyn, a reçu début septembre le rapport de la mission Information et médicament, mise en place le 1er décembre 2017. À cette occasion, elle a pu réaffirmer sa volonté d’améliorer la qualité et l’efficacité de l’information sur le médicament. Nous allons installer une source unique d’information publique sur le médicament, en nous appuyant sur le site sante.fr, et en y intégrant la base de données publique des médicaments.
Il nous faut aussi optimiser et faciliter la coordination des soins entre les prescripteurs et les pharmaciens d’officine. À ce titre, le dossier médical partagé généralisé par l’assurance maladie dans quelques jours sera un outil d’information essentiel.
Enfin, s’agissant du suivi et de l’indemnisation des enfants exposés et des victimes du valproate de sodium, nous souhaitons que soit mis en place un dispositif de suivi de la prise en charge des enfants exposés in utero, afin que soit organisée une filière de soins permettant de simplifier leur parcours et d’assurer des soins adaptés à chacune des situations.
Le dispositif d’indemnisation est ouvert à toute personne s’estimant victime d’un préjudice en raison d’une ou de plusieurs malformations ou de troubles du neuro-développement imputables à la prescription, avant le 31 décembre 2015, de valproate de sodium ou de l’un de ses dérivés.
Le comité d’indemnisation, au vu de l’avis du collège d’experts, se prononce alors sur les circonstances, les causes, la nature et l’étendue des dommages, ainsi que sur la responsabilité.
C’est dans ce cadre que la responsabilité respective de l’exploitant du médicament, des prescripteurs et, enfin, de l’État, au titre de ses pouvoirs de sécurité sanitaire, peut alors être recherchée.
La parole est à Mme Christine Prunaud, auteur de la question n° 365, adressée à Mme la ministre des solidarités et de la santé.
Madame la secrétaire d’État, dans le cadre de la réorganisation de l’offre de soins, la fermeture de la maternité de Guingamp, puis sa suspension, ou plutôt sa mise sous tutelle pendant deux ans, a été annoncée par l’agence régionale de santé de Bretagne cet été. Cette décision a suscité une légitime vague d’indignation du personnel médical, de la population, des élus. D’ores et déjà, certaines patientes n’osent plus prendre de rendez-vous, de peur que leur suivi ne puisse pas être effectué jusqu’au terme de leur grossesse.
Les conséquences d’une fermeture d’un service de maternité sont connues : allongement des déplacements, augmentation des risques pour les femmes et les bébés, ainsi que beaucoup de stress.
À l’heure actuelle, tout le monde est suspendu à la décision de l’ARS. Les personnels, dont le professionnalisme et les compétences ne sont plus à démontrer, ne savent pas quel avenir leur est promis.
Cette maternité remplit pleinement une fonction de proximité au service de la population. Je vous en prie, madame la secrétaire d’État, n’avancez pas l’argument, déjà maintes fois utilisé, du nombre insuffisant de naissances – ce nombre se situe dans les critères – ni celui d’une meilleure efficience des soins grâce à des fusions d’unités ou de services, qui deviendraient ce que l’on appelle en Bretagne des mastodontes de la santé.
Madame la secrétaire d’État, ma question est donc simple : quelles sont vos intentions pour la maternité de Guingamp ?
La parole est à Mme la secrétaire d’État auprès de la ministre des solidarités et de la santé.
Madame la sénatrice Christine Prunaud, je vous remercie de votre question, qui me permet de faire le point sur la maternité du centre hospitalier de Guingamp.
Vous le savez, la décision de l’agence régionale de santé de Bretagne de ne pas renouveler l’autorisation de l’activité de gynécologie relevait du constat suivant : une démographie médicale fragile dans deux spécialités indispensables au bon fonctionnement d’une maternité, à savoir la pédiatrie et l’anesthésie.
Malgré les efforts importants du centre hospitalier de Guingamp et du groupement hospitalier de territoire pour recruter des médecins, la couverture médicale de la maternité de Guingamp sur ces deux spécialités est, en effet, très fragile. Elle nécessite, pour l’anesthésie, un recours fréquent à l’intérim médical, qui n’a pas vocation à constituer une solution pérenne, compte tenu des enjeux de qualité et de sécurité qui s’attachent à la naissance.
Ces difficultés fragilisent la prise en charge et la capacité de l’établissement à assurer à l’avenir la sécurité des futures mamans et des nouveau-nés à toute heure du jour et de la nuit, et ce malgré la compétence et l’engagement reconnus des personnels hospitaliers de cet établissement et l’appui des autres hôpitaux du territoire.
Le Président de la République a demandé qu’un délai supplémentaire de deux ans soit accordé au titre de l’autorisation pour permettre au centre hospitalier de renforcer sa couverture médicale et prendre en considération l’évolution du nombre de naissances dans cet établissement.
Depuis le 25 juillet, l’ensemble des acteurs du groupement hospitalier de territoire ont été impliqués dans la recherche active pour renforcer l’offre médicale, avec l’appui de l’agence régionale de santé.
Plus généralement, le travail sur l’organisation de l’offre de soins sur le territoire est une priorité du Gouvernement, comme en témoignent les dispositifs inclus dans le plan Ma santé 2022, présenté par le Président de la République le 18 septembre dernier, et dont les premières mesures trouveront leur traduction législative dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019.
Dans l’immédiat, nous savons pouvoir compter sur la forte implication des personnels hospitaliers du territoire, en en particulier ceux de la maternité de Guingamp, pour conforter cette activité et participer à cette réflexion.
La parole est à Mme Christine Prunaud, pour répondre à Mme la secrétaire d’État auprès de la ministre des solidarités et de la santé. Vous disposez de quarante-six secondes, ma chère collègue.
Madame la secrétaire d’État, je ne m’attendais pas à une autre réponse de votre part.
Je reviens sur la fusion de la maternité de Guingamp avec l’hôpital de Saint-Brieuc, qui nous paraît financièrement illogique. À cet égard, je vous rappelle la démission, voilà une dizaine de jours, de 120 médecins de la commission médicale d’établissement de cet hôpital. Oui, 120 médecins, madame la secrétaire d’État ! À ma connaissance, cette décision est unique en France. Cela montre bien que la situation est très grave.
Vous avez raison, il manque des anesthésistes, mais sur tout le territoire, et pas seulement à Guingamp. Ainsi, à l’hôpital de Saint-Brieuc, il y a seulement 11 temps plein pour 23 postes.
Madame la secrétaire d’État, nous vous demandons de revoir votre décision et d’accepter la réouverture pérenne de la maternité.
La parole est à M. Guy-Dominique Kennel, auteur de la question n° 401, adressée à Mme la ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation.
Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, un décret du 25 juin 1965 avait autorisé la création d’un réacteur nucléaire de recherche au sein de l’université de Strasbourg. Après trente et un ans de fonctionnement, ce dernier a fait l’objet d’une cessation définitive d’exploitation en 1997. Son arrêt définitif et son démantèlement ont été constatés par décret, le 15 février 2006.
Malgré cela, depuis l’année 2004, l’université de Strasbourg est soumise par l’Autorité de sûreté nucléaire, l’ASN, à la taxe sur les installations nucléaires de base pour la période comprise entre 2000 et 2012. L’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire, l’IRSN, a également mis à sa charge en 2011 et 2012 la contribution annuelle à son profit.
Ces deux taxes, qui sont donc imputées à l’université de Strasbourg, représentent une dette significative de 15, 6 millions d’euros pour la première et de 319 000 euros pour la seconde, alors que ces sommes correspondent à une période à laquelle le réacteur avait cessé toute activité – 1997, je le rappelle.
Compte tenu de l’obsolescence de ces charges, de la pénalisation financière qu’elles représentent pour l’université de Strasbourg, qui, comme la plupart de nos universités en France, ne dispose pas de ressources suffisantes pour servir ses projets, il serait plus que nécessaire, madame la secrétaire d’État, de procéder à une remise gracieuse de ces taxes.
J’attire votre attention sur le fait que cette demande de remise a été formulée depuis 2004, qu’elle a obtenu des réponses de principe favorables à chaque nouvelle sollicitation, mais qu’aucune suite ne lui a jamais été donnée. Aujourd’hui, nous attendons mieux qu’une nouvelle réponse favorable de principe sans suite.
La parole est à Mme la secrétaire d’État auprès de la ministre des solidarités et de la santé.
Monsieur le sénateur Kennel, vous l’avez rappelé, le réacteur universitaire de Strasbourg a été mis en place à des fins de recherche et d’expérimentation dans les années soixante.
Il n’a plus produit de neutrons depuis son arrêt fonctionnel en décembre 1997 et a été mis définitivement à l’arrêt par voie réglementaire le 15 février 2006.
Enfin, il a été démantelé sans délai entre août 2006 et décembre 2008, puis déclassé par un arrêté du 31 octobre 2012.
S’agissant du volet fiscal de ce dossier, la situation est figée depuis plus de neuf ans. Le fond du problème réside dans le fait que la taxe sur les installations nucléaires de base s’applique sur toutes les installations jusqu’à la date de leur déclassement.
À ce jour, s’ajoutent deux autres séries d’imposition qui ont été instituées pendant cette phase intermédiaire : des taxes additionnelles, conformément à la loi du 28 juin 2006, et la contribution annuelle au profit de l’IRSN, créée par la loi de finances pour 2011 du 19 décembre 2010.
Or, comme chacun peut le voir, il s’est écoulé près de quinze ans entre la cessation d’activité de fait de cette installation et son déclassement dûment validé par l’Autorité de sûreté nucléaire. Cela a conduit l’université de Strasbourg à produire plusieurs demandes de remise gracieuse dont la réalisation et l’instruction ont rencontré d’importantes difficultés ces dernières années du fait d’une incertitude s’agissant de l’autorité compétente en la matière.
Ces difficultés ont exposé l’université à des majorations annuelles des montants dus, ce qui a conduit à la situation que vous décrivez, monsieur le sénateur, celle d’un blocage autour de sommes importantes, qui, pour l’instant, ne servent ni au financement des activités universitaires ni au financement de la sûreté nucléaire.
À ce jour, une action devant le tribunal administratif est engagée opposant l’université de Strasbourg et l’IRSN, après que cette dernière ait demandé au rectorat de Strasbourg de procéder au recouvrement des sommes dues. Ce recouvrement est, à ce stade, suspendu dans le cadre de la procédure en cours devant le juge administratif.
Frédérique Vidal, ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation, bien consciente de l’enjeu que représente ce sujet pour l’université de Strasbourg, m’a ainsi chargée de vous répondre.
S’agissant de l’incertitude concernant l’autorité compétente en la matière, il apparaît, conformément au décret dit CBCM de 2012, que les demandes de remises gracieuses supérieures à 150 000 euros sont désormais du ressort du ministre de l’action et des comptes publics. Ce dossier est donc en cours d’instruction par les services de Bercy, qui sont attentifs à la demande de l’université, mais également à l’action pendante devant le juge administratif.
La ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation vous tiendra ainsi informé, le moment venu, des suites qui seront apportées aux différentes requêtes de l’université de Strasbourg.
La parole est à M. Guy-Dominique Kennel, pour répondre à Mme la secrétaire d’État auprès de la ministre des solidarités et de la santé. En vingt et une secondes !
Madame la secrétaire d’État, je vous remercie des précisions que vous avez bien voulu me donner. Je rappelle seulement qu’il ne reste plus beaucoup de choix à l’université : soit elle se met en cessation de paiement, soit elle provisionne ces sommes, mais ce sera au détriment d’autres investissements, y compris pédagogiques et destinés à l’ensemble des étudiants de ce territoire.
Il est donc important que le ministre de l’action et des comptes publics donne une réponse rapide à l’université. Ce message, je vous remercie de bien vouloir lui transmettre !
La parole est à M. Marc Laménie, auteur de la question n° 462, adressée à Mme la ministre du travail.
Madame la ministre, ma question concerne le devenir des services de santé au travail interentreprises, les SSTI.
La parution, en août dernier, du rapport de Mme Charlotte Lecocq, députée du Nord, intitulé Santé au travail : vers un système simplifié pour une prévention renforcée, suscite beaucoup d’inquiétudes de la part du réseau Présanse, prévention et santé au travail, association à but non lucratif qui a la qualité d’organisme représentatif des services de santé au travail interentreprises.
Actuellement, ce sont près de 240 associations, employant près de 16 000 collaborateurs, dont 5 000 médecins du travail, qui accompagnent toutes les entreprises et leurs 15 millions de salariés dans leurs démarches de prévention et d’accompagnement en matière de santé. À titre d’exemple, pour le département des Ardennes, l’association Ardennes Santé Travail assure le suivi de plus de 56 000 salariés au travers de ses missions légales.
La création d’un guichet unique, préconisée dans le rapport précité et regroupant les compétences de différents organismes de prévention, augure, de l’avis général, une simplification d’accès et une meilleure lisibilité des services offerts aux usagers.
En revanche, le transfert à un échelon régional du pilotage des plans Santé fait craindre aux équipes locales une diminution et une dilution de leurs moyens d’action. En effet, selon ce schéma, les missions de prévention et de conseil, ainsi que l’intervention en entreprise, risquent, à terme, de ne plus faire partie du champ de compétences des SSTI, alors qu’elles sont considérées par les intervenants de terrain comme partie essentielle de leur action.
En outre, la proximité géographique entre les employeurs qui assument la responsabilité juridique de la prévention des risques dans leur entreprise et ceux qui sont chargés de mettre en œuvre cette prévention reste une donnée majeure de sa réussite.
En conséquence, madame la ministre, je sollicite que le futur plan de prévention santé maintienne en l’état le dispositif local actuel, afin d’en garantir l’efficacité.
Monsieur le sénateur Laménie, je vous remercie de cette question. Vous m’interrogez sur la santé au travail, un sujet très important pour lequel la France dispose d’atouts, mais a encore des progrès à faire.
Vous l’avez rappelé, les services de santé au travail sont, aux côtés des entreprises, le premier acteur de la prévention des risques professionnels, ce qui mérite que nous travaillions sur le sujet.
Si les réformes de 2011 et de 2016 ont déjà abordé la question, notamment en renforçant la pluridisciplinarité de ces services et en ciblant leurs actions sur les publics prioritaires, nous avons encore besoin de progresser.
D’abord, parce qu’en termes de prévention notre pays n’est pas le mieux placé – c’est en matière de réparation que nous obtenons les meilleurs résultats. Ainsi, on a déploré, en 2017, plus de 600 000 accidents du travail, tandis que, cette même année, plus de 48 000 personnes ont été reconnues atteintes de maladies professionnelles. La complexité de nos systèmes de prévention est établie.
C’est la raison pour laquelle le Premier ministre a demandé à la députée Charlotte Lecocq, au syndicaliste Henri Forest et à la personnalité qualifiée Bruno Dupuis de produire le rapport que vous avez mentionné. Édouard Philippe, Agnès Buzyn et moi-même avons examiné attentivement ce document, qui contient des pistes d’évolution destinées à rendre le système plus performant.
Aujourd’hui, la prévention figure parmi les priorités affirmées, sans pour autant éviter les lacunes. Je note, par exemple, une coordination défaillante entre 300 organismes de prévention. Ce rapport préconise donc une évolution structurelle qui constituera une base pour la discussion à venir avec les partenaires sociaux. L’un des déficits auxquels nous devons remédier concerne la couverture des TPE-PME. Les petites et moyennes entreprises cotisent, comme les autres, pour chacun de leurs salariés, ce qui ne garantit pas pour autant que toutes ont accès aux services de santé.
Le réseau des services de santé au travail est bien identifié par les auteurs du rapport comme l’acteur central et le levier principal de toute réforme.
J’insisterai aussi sur la médecine du travail : chaque année, en France, 30 % des postes médecins du travail ne sont pas pourvus ; notre pays ne compte plus que 4 700 médecins du travail contre 6 000 voilà dix ans. Il y a donc un déficit qui s’aggravera si nous ne traitons pas le sujet. Nous devons d’autant plus y travailler que la profession n’attire pas les jeunes médecins.
Quelle que soit l’architecture retenue, l’objectif que nous nous assignons avec les partenaires sociaux dans les prochains mois est d’améliorer la prévention et de renforcer la capacité du médecin du travail et de ses équipes. Il faut en effet des équipes pluridisciplinaires pour répondre aux besoins des entreprises et des salariés. Nous aurons l’occasion d’y revenir lors de l’examen d’un projet de loi qui viendra en discussion dans le courant de 2019.
La parole est à Mme Agnès Canayer, auteur de la question n° 485, adressée à Mme la ministre du travail.
Madame la présidente, madame la ministre, chers collègues, ma question porte sur le rapprochement entre Pôle emploi et les missions locales.
La stratégie nationale de prévention et de lutte contre la pauvreté, dévoilée par le Président de la République le 13 septembre dernier, a conforté le rôle central des missions locales dans l’accompagnement et l’insertion vers l’emploi des jeunes en leur confiant le développement de la garantie jeunes, qui est une modalité forte de l’accompagnement qu’elles mettent en œuvre.
Cependant, les inquiétudes demeurent quant à l’évolution du service public de l’emploi. Les expérimentations de rapprochement des missions locales avec Pôle emploi, envisagées dans le cadre de la réduction de la dépense publique Cap 2022, suscitent de nombreuses réactions au sein des missions locales.
Si ces dernières ne sont pas opposées, par principe, à toute réforme qui améliorerait, cela va de soi, l’accompagnement des jeunes dans leur recherche d’emploi, elles sont très inquiètes quant aux modalités de mise en œuvre concrète de ces expérimentations.
En effet, les expérimentations peuvent être de bonnes solutions. Et elles le seront d’autant plus si elles sont décidées par les acteurs locaux. Car les élus locaux, auxquels est confié le pilotage des missions locales, ont une bonne connaissance tant du tissu local, qu’il soit social ou économique, que des jeunes implantés sur leur territoire.
Il est clair que toute expérimentation visant à une fusion entre les missions locales et Pôle emploi, sous le pilotage unique de Pôle emploi, ferait inévitablement perdre la qualité de l’accompagnement aujourd’hui mis en place par les missions locales.
Or il semble, au regard des éléments dont nous disposons, que les expérimentations envisagées conduiraient à une fusion-absorption des missions locales par Pôle emploi, lequel piloterait dorénavant entièrement, entre autres, les dialogues en termes de gestion et l’accompagnement des jeunes dans leur recherche d’emploi.
Il est évident que de telles expérimentations n’emportant pas un partage de compétences, l’élaboration d’un véritable projet conjoint, travaillé à la fois par les missions locales et par Pôle emploi n’aboutiraient pas et décourageraient un maximum de volontaires.
Aujourd’hui, il nous paraît donc essentiel que ce projet laisse une place réelle aux missions locales, leur permettant de travailler conjointement avec les acteurs de Pôle emploi pour mettre en place le rapprochement considéré
Par conséquent, nous aimerions connaître la véritable intention du Gouvernement quant à ce rapprochement entre les missions locales et Pôle emploi.
Madame la sénatrice Agnès Canayer, en tant que présidente des missions locales en région Normandie, vous connaissez bien le sujet. Dès leur création par Bertrand Schwartz, ces missions locales, maillon très important du service public de l’emploi, ont été chargées, en outre, de fournir un accompagnement global en termes d’emploi, de formation, de santé, de logement, de mobilité. C’est dire qu’elles ont une vocation importante.
C’est d’ailleurs la raison pour laquelle, dans le cadre du plan d’investissement pour les compétences, nous consacrons 15 milliards d’euros pour former 1 million de jeunes en demande d’emploi. Les missions locales sont en première ligne pour ces jeunes, notamment pour le développement de la garantie jeunes qui a très bien démarré et a vocation à s’élargir.
Il est un aspect que nous pouvons améliorer au profit des jeunes : l’efficacité des relations entre Pôle emploi, les missions locales et Cap emploi, organisme qui s’occupe des jeunes ou des moins jeunes en situation de handicap. Aujourd’hui, ces différents organismes se parlent. Ils participent ensemble à des réunions, mais il reste un certain nombre de points trop peu travaillés pour pouvoir construire des parcours d’inclusion efficaces.
Le premier sujet est celui du patrimoine commun. Certaines missions locales n’ont pas accès aux offres d’emplois de Pôle emploi. Toutefois, le but des uns et des autres, c’est bien d’aider les jeunes à trouver un emploi. Il faut aussi que ces structures partagent des systèmes d’information pour pouvoir être plus efficaces collectivement. Il existe, dans certains cas, des antennes permettant aux missions locales d’assurer un service de proximité. En effet, il ne suffit pas d’attendre que les demandeurs d’emploi ou les jeunes viennent. Il faut aussi aller au-devant d’eux, et c’est un autre aspect que nous pouvons améliorer.
De façon générale, je soutiens toutes les démarches qui visent à coordonner les offres de services, à partager les informations et à rechercher les synergies.
Dans ce cadre-là, la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel a également prévu la possibilité d’expérimenter des rapprochements plus forts entre les missions locales et Pôle emploi dans certains contextes de bassins d’emploi.
Je vous rejoins complètement pour considérer que cela ne peut être fait, dans mon esprit, qu’à la demande des élus. Certains, pour des raisons de couverture géographique ou de complémentarité, expriment une telle demande et souhaiteraient un rapprochement plus important entre les missions locales et Pôle emploi.
Madame la sénatrice, nous partageons le même but. Il faut que les missions locales continuent et amplifient leur rôle auprès des jeunes, qu’elles soient bien connectées avec les problématiques d’apprentissage d’emploi pour permettre à ces jeunes d’accéder à un avenir. Si vous souhaitez faire des expérimentations en région Normandie, je suis à votre disposition pour en discuter.
La parole est à M. Jean-Luc Fichet, auteur de la question n° 430, adressée à Mme la ministre du travail.
Madame la ministre, vous le savez, certaines incompréhensions existent entre les interprétations des services de l’URSSAF et celles des entrepreneurs.
Je veux appeler singulièrement votre attention sur la doctrine retenue en matière de contrôle des déjeuners dans les restaurants ouvriers et évoquer le cas particulier de la Bretagne.
Si un décret de 2003 existe bien, l’interprétation qui en est faite semble varier d’un département à l’autre.
Dans mon département, elle a donné lieu à des sanctions lourdes pour les très petites entreprises, les TPE, une TPE de plomberie ayant subi un redressement de 21 000 euros et une TPE du bâtiment ayant été condamnée à une amende 6 000 euros. Il faut savoir que dans le département voisin, à situation identique, les conséquences n’ont pas été les mêmes.
Vous l’avez compris, compte tenu du flou entourant l’application de cette disposition, la peur s’est installée chez les chefs d’entreprise. Afin d’être en conformité avec la règle, les distances à parcourir pour le déjeuner du midi deviennent importantes et le temps de la coupure méridienne est compté. De ce fait, le repas de midi est le plus souvent pris « sur le pouce ». Il ne permet pas la consommation d’un plat chaud quotidien et dégrade les conditions de travail des ouvriers de ces mêmes TPE.
Cette situation contribue à détériorer sensiblement le développement économique des territoires ruraux par la baisse d’activité des restaurants ouvriers, dont la perte de chiffre d’affaires peut excéder 30 % dans certains cas. Madame la ministre, pouvez-vous nous indiquer la règle précise qui s’applique en matière d’exonération de cotisation des repas pris dans les restaurants ouvriers et quelles sont vos intentions pour la rendre lisible auprès des TPE, des contrôleurs de l’URSSAF et des propriétaires de restaurants ouvriers ?
Monsieur le sénateur Fichet, oui, les employeurs bénéficient de plusieurs possibilités de prise en charge des frais de repas de leurs salariés assorties d’un régime social favorable, qui relève de la réglementation applicable aux frais professionnels et aux avantages en nature.
Mon propos sera un peu technique, car votre question s’y prête, et il me paraît important d’être très précise sur ce sujet.
Lorsque le salarié se déplace hors des locaux de l’entreprise et ne peut regagner son domicile ou son lieu de travail habituel pour prendre son repas, la réglementation est très claire et ne supporte pas d’interprétation : l’indemnisation par son employeur au titre des frais professionnels est exclue de l’assiette des cotisations et contributions sociales dans les limites fixées par la réglementation sociale pour une indemnisation forfaitaire – 9, 10 euros par repas ou 18, 60 euros par repas lorsque le salarié est contraint de prendre son repas au restaurant – ou sur justificatifs lorsqu’il s’agit d’une indemnisation des dépenses réellement engagées.
Ce régime social favorable permet à l’employeur de compenser la dépense supplémentaire de nourriture occasionnée par le déplacement du salarié. De même, dans cette situation, lorsque l’employeur paie le repas directement au restaurateur, l’avantage en nature résultant de cette prise en charge n’est pas réintégré dans l’assiette des cotisations et contributions sociales. Je pense que c’est clair.
La situation de déplacement ainsi que la contrainte empêchant le salarié de regagner son lieu de travail habituel ou son domicile doivent être avérées – il faut fournir des preuves –, mais aucune condition de distance n’est exigée. Le cas que vous mentionnez trouve donc une solution simple et ne donne normalement pas lieu à contestation.
Par ailleurs, les employeurs du secteur du bâtiment – avec la notion de travail de chantier – peuvent opter pour la déduction forfaitaire spécifique de 10 % pour frais professionnels applicable à certaines professions et cumuler cet avantage avec la prise en charge directe des frais de repas payés au restaurateur, sans que celle-ci soit intégrée dans l’assiette des cotisations et contributions sociales. Il s’agit donc très clairement d’un régime tout à fait avantageux.
Enfin, les entreprises qui souhaitent prendre en charge financièrement les frais de repas de leurs salariés peuvent participer à l’acquisition de titres-restaurant et voir leur contribution exonérée de cotisations et d’impôt sur le revenu dans la limite de 5, 43 euros en 2018.
Votre question concerne peut-être moins la réglementation sociale en vigueur, en principe claire, comme je viens de l’exposer, que la nécessité de refaire une communication sur le sujet auprès des employeurs et des URSSAF. L’objet est de diffuser auprès de tous les publics cette réglementation qui concerne plusieurs cas de figure. Nous allons examiner comment faire en sorte qu’elle soit bien comprise de tous et qu’elle soit interprétée partout de la même façon.
La parole est à M. Jean-Luc Fichet, pour répondre à Mme la ministre du travail. Vous disposez de quarante-cinq secondes, mon cher collègue.
Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse. Cependant, vous ne répondez pas totalement à ma question.
En effet, certaines URSSAF, dont celle du Finistère, évoquent des questions de distance : si le siège de l’entreprise est situé sur la commune du restaurant, voire à moins de cinq kilomètres, on ne peut bénéficier d’aucun avantage.
C’est sur la base d’une telle interprétation qu’une entreprise de plomberie implantée dans mon département a vu un contrôle se solder par 21 000 euros d’amende ! J’avais pourtant pris l’initiative d’organiser une réunion avec l’URSSAF locale, au cours de laquelle nous étions convenus que ce genre de chose ne se passerait pas !
L’incompréhension est d’autant plus grande que les faits se sont déroulés à la limite d’un autre département où l’on a – cela se joue à cinq ou six kilomètres près ! – une interprétation très différente. Je souhaite donc vivement que le décret comporte des indications beaucoup plus précises en direction des URSSAF. En effet, le flou actuel provoque de vraies difficultés pour les entreprises. Quant aux restaurateurs, ils sont réellement très pénalisés dans cette affaire.
Mes chers collègues, l’ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à douze heures cinquante, est reprise à quatorze heures trente-cinq, sous la présidence de M. Gérard Larcher.