La séance est ouverte à neuf heures trente.
Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
À la suite d’un problème de vote électronique au sein des sénateurs non inscrits, deux d’entre nous, dont moi-même, avons constaté que, lors du scrutin public n° 34 du mercredi 25 novembre dernier sur la proposition de résolution portant sur la nécessité de reconnaître la République du Haut-Karabagh, notre vote n’avait pas été comptabilisé. Nous entendions voter pour ce texte.
Cette rectification me tient d’autant plus à cœur que la présentation de cette proposition de résolution a fait l’objet d’une concertation entre les groupes politiques, qui ont pris soin de ne pas y associer les sénateurs non inscrits. Ayant été exclu de cette concertation puis victime d’un problème de vote électronique, je ne voudrais pas qu’on puisse croire que ma collègue et moi-même voulions nous abstenir ou nous opposer, alors que nous sommes particulièrement favorables à ce texte.
C’est la raison pour laquelle je tenais à ce que cette mise au point figure au compte rendu.
Acte vous est donné de cette mise au point. Elle sera publiée au Journal officiel et figurera dans l’analyse politique du scrutin.
La parole est à M. Pierre Cuypers, auteur de la question n° 1236, adressée à M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation.
Monsieur le ministre, j’attire de nouveau votre attention sur la crise sanitaire qui a frappé très durement la filière betterave cette année, en raison de conditions climatiques particulièrement douces qui ont provoqué l’infestation précoce de pucerons verts, vecteurs de la jaunisse virale.
Cette situation a affecté considérablement la filière, provoquant des pertes allant de 30 % à 70 %. Les agriculteurs sont bien sûr inquiets, car le manque à gagner, considérable, entraîne des faillites, notamment parmi les petits producteurs, mais aussi parmi les autres.
Monsieur le ministre, bien que vous-même et tout le Gouvernement ayez compris la nécessité de réautoriser les produits pharmaceutiques pour une durée de trois ans – une décision dont je vous remercie –, le dossier de l’indemnisation n’est en rien réglé. Il est urgent de trouver des solutions robustes pour indemniser les betteraviers les plus touchés.
Alors que les pertes financières sur la récolte 2020 sont estimées à 285 millions d’euros, le Gouvernement propose, selon la règle de minimis, une indemnité soumise à un plafond de 20 000 euros par exploitation. Il est certain que cette offre ne répondra pas aux besoins criants des professionnels, auxquels il est urgent de venir en aide.
Monsieur le ministre, pouvez-vous m’éclairer sur le plan financier et le calendrier que vous devez proposer sans tarder aux agriculteurs ?
Monsieur le sénateur Cuypers, je vous remercie pour vos propos sur le dossier betterave.
En matière d’indemnisations, il y a des mesures que je peux prendre et d’autres que je ne peux pas prendre.
Au moment du lancement du plan d’action, l’été dernier, nous sommes convenus avec la filière d’activer les de minimis. En effet, la filière ne cotisait pas au fonds national agricole de mutualisation du risque sanitaire et environnemental (FMSE) et n’avait pas mis en place de système assurantiel.
Comme vous le savez fort bien, l’indemnisation des risques dits sanitaires est extrêmement encadrée. Aujourd’hui, la filière ayant choisi par le passé de ne pas entrer dans d’autres dispositifs, le seul applicable est le de minimis. Nous en avons beaucoup parlé avec la filière, et tout le monde en convient : il n’est pas possible de couvrir a posteriori un risque qui s’est avéré, dès lors qu’un système assurantiel n’a pas été mis en place et que les membres n’ont pas cotisé.
Au-delà du volet assurantiel et des systèmes d’aide européens, un régime de catastrophes agricoles existe, mais il ne couvre pas les risques dits sanitaires, c’est-à-dire liés à des maladies telles que celles qui viennent des insectes.
Un grand travail a été accompli sur ce sujet – vous le savez bien, monsieur le sénateur. Reste que le seul dispositif existant est le de minimis : quelle que soit la volonté politique, c’est le seul moyen d’action pour cette année.
Cette situation soulève la question de la manière dont la filière doit s’organiser en ce qui concerne la couverture de ce type de risques : doit-elle faire le choix d’intégrer le FMSE, doit-on étudier, dans le cadre des débats en cours sur le volet assurantiel, comment étendre ce volet aux risques sanitaires ?
En tout cas, je le répète, un risque non couvert initialement ne peut pas être couvert a posteriori. Le système « de minimis » est donc le seul qui existe aujourd’hui.
Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse, que je connaissais par avance.
À situation exceptionnelle, il faut des mesures exceptionnelles. De fait, la filière est en grand danger, parce que, au-delà de la première mesure prise, sur laquelle j’espère une décision favorable du Conseil constitutionnel, il faut que les agriculteurs puissent payer les semences pour semer au printemps.
Or les pertes sont aujourd’hui abyssales, de l’ordre de 1 000 à 1 800 euros par hectare, en sorte qu’il n’y a plus de trésorerie. Les exploitations agricoles betteravières sont toutes dans le rouge ! Elles n’ont tout simplement pas la trésorerie pour boucler la fin d’année.
Monsieur le ministre, je sais que vous travaillez sur ces sujets avec la filière, avec laquelle je suis régulièrement en contact. Il ne faut pas lâcher le morceau, et envoyer tout de suite un signal qui permette aux agriculteurs de garder confiance !
La parole est à M. Serge Mérillou, auteur de la question n° 1341, adressée à M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation.
Monsieur le ministre, le 17 novembre dernier, j’ai attiré votre attention sur la nécessité de soutenir nos abattoirs de proximité, mentionnant plus particulièrement la situation préoccupante de l’abattoir de Ribérac, en Dordogne.
Cette structure, qui emploie dix-huit personnes, est aujourd’hui au bord du gouffre, à la suite du départ de la société Arcadie et de la diminution drastique du nombre d’animaux abattus. Elle cumule 700 000 euros de dettes, dont 200 000 euros de redevances dues à la municipalité.
Monsieur le ministre, élus et éleveurs se battent sur le terrain pour conserver cette structure de proximité, qui permet la mise en place de circuits courts, préserve au mieux le bien-être animal et assure la sauvegarde du label « veau élevé sous la mère ».
Lors de notre dernier échange, vous avez affirmé votre volonté d’accompagner les abattoirs locaux sur le plan financier, notamment pour soutenir la modernisation et accroître la rentabilité de ces outils. Forte de cette logique, la municipalité de Ribérac a déposé ces derniers jours, dans le cadre du plan de relance, un projet ambitieux de création d’une salle de découpe et de transformation sur le site, de nature à sauver la structure tout en conservant l’abattoir. Cette installation bénéficierait à l’ensemble des éleveurs du grand territoire, au-delà même de cette région. Elle permettrait de continuer à développer les circuits courts – et de sauver les dix-huit emplois.
Pour l’heure, la municipalité est à la manœuvre : elle est d’ores et déjà en contact avec des investisseurs et des coopératives d’éleveurs. Néanmoins, monsieur le ministre, il y a urgence : ce projet ne verra jamais le jour s’il n’est pas soutenu par l’État le plus rapidement possible !
Pourriez-vous préciser les modalités de mise en œuvre des mesures de soutien aux abattoirs et nous assurer que l’engagement de l’État interviendra rapidement, si possible dans les trois mois ? Enfin, envisagez-vous des dispositifs spécifiques pour encourager l’investissement privé dans des structures comme Ribérac ?
J’associe à cette question ma collègue sénatrice Marie-Claude Varaillas.
Monsieur le sénateur, je vous remercie de votre soutien aux abattoirs territoriaux. Nous ne sommes pas toujours d’accord sur tout, mais nous nous retrouvons vraiment sur la nécessité de les développer – je fais miens les propos que vous avez tenus à cet égard. Comme vous l’avez expliqué, l’indication géographique du territoire dépend parfois de l’abattoir, et inversement.
Vous avez suivi comme moi l’affaire d’Arcadie Sud-Ouest. Dans le cas de l’abattoir de Ribérac, la reprise a été assurée, je crois, par le groupe Carnivor. J’espère qu’il en résultera pour l’abattoir une nouvelle dynamique, car avec Arcadie la dynamique s’était arrêtée.
Vous connaissez mon dynamisme en matière d’investissements dans les abattoirs. Nous allons investir plus de 130 millions d’euros dans les abattoirs territoriaux, et celui de Ribérac est en plein dans la cible visée. Je prends bonne note du projet de salle de découpe : il peut tout à fait s’intégrer dans le plan de relance, qui vise la modernisation des abattoirs. Restons en contact pour voir comment appuyer ce projet, aujourd’hui piloté par la municipalité.
Concrètement, les fonds, qui sont en train d’être votés, seront disponibles à partir de janvier 2021, mais les projets sont en cours d’instruction. Nous travaillons en étroite relation avec les collectivités territoriales, qui sont souvent un appui décisif pour permettre aux abattoirs territoriaux de continuer à fonctionner et à investir ; notre intention est de coconstruire les projets avec elles.
Monsieur le sénateur, je le répète, je soutiendrai volontiers le projet de Ribérac.
La parole est à M. Laurent Burgoa, auteur de la question n° 1349, adressée à M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation.
Monsieur le ministre, compte tenu de son raccourcissement consécutif au confinement, je souhaiterais que le Gouvernement puisse, exceptionnellement, prolonger la période de chasse.
Si, pour beaucoup, cette activité est une passion, je tiens à rappeler que la chasse permet de réguler la prolifération de certaines espèces, et ainsi de protéger les futures récoltes. Il va de soi que cette régulation ne peut intervenir que durant une certaine période, prenant en compte le cycle de reproduction des espèces. En d’autres termes, il ne sera pas possible d’y revenir ultérieurement.
Je précise que le département du Gard est, comme d’autres, concerné par le risque de grippe aviaire. Une telle prolongation permettrait de diminuer ce risque chez les éleveurs ; elle leur permettrait aussi de vendre une partie de leur élevage.
Monsieur le ministre, quelle est votre position sur ce sujet ?
Oui, monsieur le sénateur, contrairement à ce que d’aucuns prétendent, la chasse peut avoir aussi une utilité sur le plan sanitaire ; il faut la reconnaître comme telle.
Le risque d’influenza aviaire est élevé partout sur le territoire hexagonal. À ce jour, deux sites ont été contaminés : le premier en Haute-Corse, le second dans les Yvelines. Ces contaminations sont liées à tout autre chose que la migration des oiseaux, mais celle-ci reste le principal vecteur de la maladie. Un suivi des oiseaux assuré par les chasseurs est donc très important d’un point de vue sanitaire.
Le Premier ministre a annoncé la réautorisation de la chasse il y a quelques jours – dans la limite, bien entendu, des trois heures et des vingt kilomètres.
Nous avons mené avec les chasseurs un important travail pour déterminer les contraintes, mais aussi les dérogations, liées à l’influenza aviaire. Schématiquement, il s’agit de limiter les contacts entre oiseaux à plumes, moyennant les dérogations convenues avec les fédérations, que je salue, ainsi que le président Schraen et ses équipes, pour le travail réalisé ensemble.
S’agissant de la fin de la période de chasse, il s’agit d’une décision compliquée – et législative. Elle doit être prise en fonction des différentes espèces. Surtout, elle relève du ministère de la transition écologique.
Nous avons montré que nous savons déroger à de nombreuses règles. Il est donc tout à fait pertinent de débattre, a minima, de la question que vous soulevez.
Dans la période récente, j’ai été particulièrement attentif à la situation des élevages de gibiers, affectés par l’arrêt de la chasse. La reprise de la chasse apporte une solution à ces élevages que vous connaissez bien et que vous défendez.
Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse. Je regrette que vous ne soyez pas le ministre de la chasse, parce que je constate que vous connaissez bien le sujet. Malheureusement, ce domaine dépend de l’écologie, où, quelquefois, il est maltraité…
En tout cas, nous comptons sur vous en ce qui concerne l’élevage de gibiers. J’espère que vous saurez influencer vos collègues chargés de l’écologie pour que les périodes de chasse soient prolongées.
Lors des deux confinements, les chasseurs n’ont pas pu pratiquer leur passion. Je tiens à souligner que la plupart sont ouvriers ou employés : la chasse, c’est une activité populaire ! La prolongation serait un geste fort du Gouvernement envers les 1, 9 million de Français qui pratiquent cette passion – et qui sont, avant tout, des aménageurs du territoire.
La parole est à M. Georges Patient, auteur de la question n° 1385, adressée à M. le ministre des outre-mer.
Monsieur le ministre des outre-mer, ma question porte sur le plan de relance et sa déclinaison guyanaise.
Sur les 100 milliards d’euros engagés d’ici à 2022, 1, 5 milliard sont destinés aux outre-mer. Cette part est trois fois inférieure au poids démographique de ces territoires dans l’ensemble national. C’est d’autant plus inéquitable compte tenu du besoin de rattrapage des outre-mer par rapport à l’Hexagone. Une première question s’impose donc : tous les outre-mer seront-ils correctement pris en considération dans ce plan ?
S’agissant de la Guyane en particulier, le plan de relance se substituera-t-il au plan d’urgence issu des accords de Guyane, aux programmes européens et aux contrats de convergence qui existent déjà ? Ou s’y ajoutera-t-il ?
Par ailleurs, ce plan repose en grande partie sur des investissements publics réalisés par les collectivités territoriales. Monsieur le ministre, pensez-vous qu’elles disposent des ressources de fonctionnement suffisantes et de l’ingénierie nécessaire pour les réaliser dans le délai imparti, soit avant 2022, étant donné l’ampleur actuelle de la sous-consommation ou de la sous-exécution des crédits dévolus aux outre-mer ? Des fonds leur seront-ils alloués pour leur donner les moyens et la possibilité d’intervenir ? Je pense en particulier à la collectivité territoriale de Guyane, dont le rebasage tarde : elle est un acteur incontournable pour ce plan de relance !
Monsieur le sénateur Patient, vous m’interrogez sur la territorialisation du plan de relance en Guyane.
Les mesures d’urgence continuent évidemment de s’appliquer. À ce titre, quelque 300 millions d’euros ont été mobilisés en Guyane : 168 millions d’euros de prêts garantis par l’État, 55 millions d’euros au titre du fonds social européen, 40 millions d’euros pour l’activité partielle et 43 millions d’euros de reports de charges. Lors du dernier déplacement du Premier ministre sur place, en juillet dernier, le plafond du fonds de solidarité a été porté à 3 000 euros.
Dans le cadre de la relance, nous allons flécher vers le territoire de la Guyane 125 millions d’euros sur les 16 milliards d’euros de crédits territorialisés, dont : 8 millions d’euros pour l’agriculture, 10 millions d’euros dans le cadre du Ségur de la santé, 25 millions d’euros pour les jeunes, 30 millions d’euros pour accélérer les travaux sur les routes – une attente forte sur place, notamment des maires – et 40 millions d’euros dans le cadre de la transition écologique.
Par rapport à la population, le ratio est deux fois supérieur à celui de l’Hexagone. Mais ce qu’il faut surtout considérer, c’est la capacité à bâtir des projets. Si les projets sont mûrs, nous pourrons peut-être aller plus vite et plus loin.
Oui, ces fonds s’ajoutent à ceux qui étaient déjà prévus, notamment dans le cadre des accords de Guyane. Mais, cela va sans dire, ils serviront parfois à l’accélération de projets déjà lancés.
Sur le plan de la méthode, nous avons souhaité une vraie territorialisation, notamment avec le président Rodolphe Alexandre et l’ensemble des maires de la Guyane. Un premier comité régional a été installé ; il va continuer à travailler et à nous soumettre des projets.
Je précise que certains crédits seront automatiques, comme ceux qui sont liés à la baisse des impôts de production, à la compensation des recettes des collectivités territoriales et au soutien à la filière spatiale. Par ailleurs, les appels à projets vont continuer d’être déclinés.
S’agissant enfin de l’ingénierie, le plan de relance comprend 30 millions d’euros pour permettre aux collectivités territoriales d’outre-mer d’être accompagnées par l’Agence française de développement. Plus largement, les contrats Patient-Cazeneuve nous donneront l’occasion de débattre de cette question après-demain, à l’occasion de l’examen des crédits de la mission « Outre-mer » du projet de loi de finances pour 2021.
Monsieur le ministre, si je salue toutes les mesures que vous venez d’annoncer pour la Guyane – elles sont nombreuses –, je demeure persuadé qu’il faut à ce territoire, davantage qu’un plan de relance, un grand plan de décollage.
Pour être relancée, il faudrait déjà que la Guyane ait atteint un certain niveau de développement. Ce n’est pas le cas, en dépit de son potentiel important dans bon nombre de secteurs : elle ne fait actuellement que vivoter, sous perfusion de transferts publics.
Cessons de la mettre sous cloche, libérons l’exploitation de ses ressources de façon raisonnable et rationnelle et profitons du mouvement de différenciation qui s’annonce pour faire tomber toutes les entraves à son développement, avec des méthodes et des objectifs qui lui soient propres !
La parole est à Mme Patricia Schillinger, auteur de la question n° 1383, adressée à Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.
J’attire l’attention de Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales sur les difficultés rencontrées par certaines intercommunalités dans l’élaboration de leur plan local d’urbanisme intercommunal (PLUI), en particulier sur les craintes des communes membres quant à la validité de leur plan d’occupation des sols (POS) au 1er janvier prochain.
Les communes appartenant à une intercommunalité qui s’est lancée avant le 31 décembre 2015 dans l’élaboration d’un PLUI ont pu bénéficier, à la suite de l’adoption de la loi Engagement et proximité (loi du 27 décembre 2019 relative à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique), d’une prolongation de la validité de leur plan d’occupation des sols jusqu’au 31 décembre 2020. Faute de l’adoption d’un PLUI à cette date, les POS, opposables jusque-là, seront déclarés caducs ; c’est alors le règlement national d’urbanisme (RNU) qui s’appliquera dans ces communes, jusqu’à l’approbation d’un PLUI par l’établissement public de coopération intercommunale (EPCI) d’appartenance.
Si le report à la fin de 2020 de la caducité des POS a octroyé aux collectivités territoriales un délai supplémentaire, il s’avère insuffisant pour les EPCI qui, au début de 2020, n’avaient pas encore achevé leurs travaux. Pour ceux-là, de nouvelles délibérations étaient nécessaires, mais la crise sanitaire intervenue dès le mois de mars a considérablement retardé les travaux des intercommunalités.
Les mesures de confinement liées à la crise sanitaire, le report des élections municipales et le retard consécutif pour le renouvellement et l’installation des exécutifs intercommunaux ont perturbé la réalisation d’étapes essentielles à l’élaboration de ces PLUI. Dans ces conditions, il sera compliqué, voire impossible, aux intercommunalités concernées de faire approuver leur projet de PLUI avant la fin de l’année.
La caducité qui frappera les POS sera préjudiciable aux communes membres de ces ensembles intercommunaux : l’application du RNU limitera considérablement leurs prérogatives en matière d’urbanisme et ne leur permettra plus d’assurer la gestion pragmatique de l’urbanisme de leur territoire.
Dès lors, le Gouvernement est-il prêt à envisager un nouveau report de la caducité des POS, éventuellement au 31 décembre 2021 ?
Madame la sénatrice Schillinger, permettez-moi tout d’abord d’excuser l’absence de la ministre Jacqueline Gourault, qui m’a confié le soin de vous donner lecture de la réponse qu’elle a préparée à votre attention.
Vous avez rappelé qu’il y a près de vingt ans la loi SRU (loi du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains) posait le principe de la caducité des plans d’occupation des sols, les POS, et de leur remplacement progressif par des plans locaux d’urbanisme, les PLU.
Par la suite, la loi ALUR (loi du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové) a fixé ce délai de caducité au 31 décembre 2015. Elle prévoit toutefois que les collectivités ayant entamé une démarche d’élaboration d’un PLUI au 31 décembre 2015 bénéficient d’un délai supplémentaire de quatre ans, soit au plus tard jusqu’au 31 décembre 2019.
La loi Engagement et proximité, que j’ai eu l’honneur de défendre dans cet hémicycle, reporte ce délai d’une année supplémentaire pour terminer les procédures en cours – je vous remercie de l’avoir rappelé –, soit jusqu’au 31 décembre 2020.
Au total, un délai de six années a ainsi été accordé pour achever l’élaboration de ces PLUI, le délai moyen d’élaboration de ces derniers étant de trois ans et demi.
Ces délais supplémentaires ont permis de réduire considérablement le nombre de POS concernés par la caducité : en 2014, 7 500 POS étaient toujours actifs ; ils n’étaient plus que 546 au 1er septembre 2020.
Plus de 90 % des POS en vigueur ont donc été convertis en PLUI. Ainsi le nombre de communes qui reviendraient au règlement national d’urbanisme, le RNU, faute d’avoir approuvé leur PLUI s’en trouve nettement diminué.
Par ailleurs, l’ordonnance du 27 mars 2020, prise en application de la loi du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19, a permis aux EPCI compétents pour l’élaboration des PLUI d’avoir recours à des procédures dématérialisées afin de juguler le ralentissement de l’activité de ces instances dans un contexte sanitaire inédit – nous en avions d’ailleurs débattu au sein de cet hémicycle.
Pour ces raisons, un nouveau report n’est pas envisagé par le Gouvernement. La caducité des POS ne bloque pas les projets des collectivités. Dans l’attente de l’entrée en vigueur du PLUI, le RNU permet à une collectivité d’autoriser des projets lorsque l’intérêt général le justifie et que cela ne porte pas atteinte aux espaces naturels et aux paysages en dehors de l’aire urbaine existante.
C’est dommage pour les communes rurales, qui sont toujours les plus pénalisées et qui devront appliquer le RNU, ce qui n’est pas souhaitable. Je vous remercie de votre réponse, monsieur le ministre, mais celle-ci n’est pas satisfaisante.
La parole est à Mme Denise Saint-Pé, auteur de la question n° 1356, adressée à Mme la ministre de la transition écologique.
Madame la secrétaire d’État, permettez-moi d’attirer votre attention sur un sujet important ayant trait aux énergies renouvelables.
À l’instar d’autres départements, les Pyrénées-Atlantiques sont concernées par la question du renouvellement des concessions hydroélectriques. Il s’agit en l’occurrence de trois concessions situées dans la vallée d’Ossau, en Béarn, près de Pau, et qui sont actuellement attribuées à la Société hydroélectrique du Midi (SHEM), filiale d’Engie. Or ces délégations de service public (DSP) de l’État sont arrivées à leur terme le 31 décembre 2012 et n’ont pas été renouvelées depuis, prorogeant de fait les concessions aux conditions antérieures.
Il y a un peu moins d’un an, j’avais alerté la précédente ministre de la transition écologique sur cette situation juridiquement instable de nature à porter préjudice aux collectivités du département, notamment aux communes traversées par les cours d’eau utilisés. En effet, conformément au code de l’énergie, celles-ci percevraient une redevance annuelle en cas de renouvellement de la concession notamment.
Mme Borne m’avait répondu qu’attache avait été prise avec la Commission européenne pour sortir de ce statu quo à la suite des mises en demeure de cette dernière en 2015 et en 2019. Ainsi, Gouvernement et Commission exploraient, à côté de l’option de mise en concurrence, l’hypothèse d’une quasi-régie, dispositif permettant d’octroyer sans mise en concurrence des concessions à une structure publique dédiée.
Madame la secrétaire d’État, pourriez-vous nous indiquer où en sont ces discussions avec la Commission ? Quelles seraient les solutions proposées aux opérateurs alternatifs tels que la SHEM ? Concessionnaires et collectivités doivent coconstruire d’urgence de vrais projets de territoire qui n’existent pas aujourd’hui.
Madame la sénatrice Saint-Pé, je tiens tout d’abord à rappeler que le Gouvernement travaille activement pour résoudre ce contentieux engagé par la Commission européenne, contentieux qui porte notamment sur l’absence de renouvellement des concessions hydroélectriques par mise en concurrence. Je conviens que cette situation de statu quo, qui nuit aux investissements dans le secteur, est également source d’incertitude pour les entreprises et les salariés ainsi que pour les collectivités.
Par ailleurs, une réflexion sur la réorganisation du groupe EDF est en cours : le projet dit Hercule prévoit une réorganisation beaucoup plus large que le seul volet hydroélectrique d’EDF.
Dans ce contexte de contentieux européen et de réflexion sur l’organisation du groupe, le Gouvernement explore la possibilité, prévue par le droit des concessions, de renouveler ces concessions sans mise en concurrence à une structure dédiée. Voilà la piste à l’étude.
Le renouvellement de ces concessions, que ce soit par mise en concurrence ou via une structure dédiée, s’inscrit dans une politique nationale qui vise à optimiser l’investissement dans le secteur tout en redistribuant des ressources financières aux territoires par de nouvelles redevances. Une attention particulière doit être portée au personnel de ces structures.
Quelle que soit la solution retenue pour la gestion de ces concessions, soyez assurée, madame la sénatrice, que le potentiel énergétique, technique et humain de la SHEM et des concessions qu’elle exploite ne sera absolument pas négligé ; nous y serons très vigilants.
Je vous remercie, madame la secrétaire d’État. Il y a urgence à régler cette question : le concessionnaire a besoin de disposer d’une visibilité à long terme, le personnel a besoin d’être rassuré et les collectivités locales ont besoin de projets de territoire coconstruits avec le concessionnaire.
La parole est à M. Gérard Longuet, auteur de la question n° 1358, adressée à Mme la ministre de la transition écologique.
Madame la secrétaire d’État, vous connaissez parfaitement la question que je m’apprête à vous poser : elle porte sur Cigéo, un projet qui mûrit depuis vingt-trois ans ; après une première étape de recherches en laboratoire, le projet industriel est aujourd’hui en préparation.
Ce projet a connu quatre Présidents de la République, dix Premiers ministres, et avec tout le respect que je vous dois, madame la secrétaire d’État, plus d’une vingtaine de ministres compétents, qui l’ont tous poursuivi.
Ce projet est une nécessité absolue pour la population française. Aujourd’hui, la production électronucléaire assure 70 % de notre production électrique. Même si ce pourcentage doit diminuer, nous devons gérer les déchets de haute activité à vie longue. Pour ce faire, le stockage en couche géologique profonde est sans doute le plus pertinent.
Personne n’aime les déchets nucléaires, a fortiori lorsqu’ils sont à haute activité et à vie longue. C’est la raison pour laquelle, comme vous le savez, votre prédécesseure, Mme Emmanuelle Wargon, a permis l’adoption d’un contrat de développement territorial associant les 380 000 Haut-Marnais et Meusiens à ce projet dont ils espèrent qu’il permettra une réindustrialisation de leurs territoires et un soutien à leurs investissements.
Or, la condition de cette confiance est le dialogue. Depuis seize ans, un comité de haut niveau réunit des représentants des exploitants du nucléaire – EDF, Orano, Framatome –, des représentants du Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) et de l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra), des parlementaires, ainsi que des élus régionaux, départementaux et locaux de ces deux territoires.
Ce comité de haut niveau ne s’est plus réuni depuis octobre 2019, ce qui instille le doute quant à la volonté actuelle du Gouvernement d’entretenir ce climat de confiance. Madame la secrétaire d’État, le comité de haut niveau sera-t-il réuni au plus vite ?
Monsieur le sénateur Longuet, le débat public qui s’est tenu depuis 2019 sur la gestion des déchets radioactifs a confirmé la nécessité de poursuivre à la fois le projet de stockage géologique des déchets de haute activité en couche géologique profonde, dit Cigéo, dans sa conception et dans sa réalisation, et les recherches sur des alternatives à cette option d’enfouissement des déchets.
Dans ce contexte, le Gouvernement a souhaité que l’Andra dépose une demande de déclaration d’utilité publique. Cette dernière permettra d’engager l’instruction de l’étude d’impact du projet par les services compétents de l’État, mais également par les parties prenantes, notamment les collectivités locales. En particulier, l’Autorité environnementale aura à se prononcer sur la qualité et la complétude de cette étude.
En tant que Haut-Marnaise, je n’ai que trop conscience de l’importance de ce comité de haut niveau pour les élus locaux et pour tous les acteurs et parties prenantes de ce territoire ; ce comité est un outil de concertation et de pilotage des enjeux stratégiques.
Si lasituation sanitaire ne nous a malheureusement pas permis de réunir ce comité de haut niveau, nous disposerons dans le cadre du plan de relance des moyens nécessaires pour poursuivre la recherche d’alternatives au stockage des déchets, notamment ultimes. Par ailleurs, afin de nous retrouver pour débattre de ces questions, nous explorons la possibilité de tenir ce comité de haut niveau de manière dématérialisée.
Madame la secrétaire d’État, par respect pour les habitants concernés et pour entretenir la confiance à l’égard de l’État qui ne s’est jamais démentie sous les majorités successives, je souhaite que ce comité de haut niveau puisse se tenir au plus tôt et reprendre son rythme de réunion semestriel sous quelque forme que ce soit.
La parole est à Mme Christine Herzog, auteure de la question n° 1359, adressée à Mme la ministre de la transition écologique.
Le classement établi par le bureau de recherches géologiques et minières, ou BRGM, concerne les aléas des communes en matière de mouvements de terrain, plus précisément quant au phénomène de retrait-gonflement hydrique des sols argileux.
Alors que la commune de Metzing, en Moselle, a toujours été classée en zone d’aléa faible, elle est, depuis 2019, classée en zone d’aléa moyen sans que les élus sachent pourquoi.
Ils ne disposent donc d’aucun argument pour répondre aux plaintes de leurs concitoyens, notamment depuis l’entrée en vigueur de l’arrêté du 22 juillet 2020, qui définit le contenu des études géotechniques obligatoires à réaliser dans les zones exposées au phénomène de retrait-gonflement hydrique lors des ventes et achats de terrains et bâtis. Le classement étant réalisé à l’échelon de la commune et non de zones précises, l’ensemble des zones de la commune sont concernées.
Depuis l’entrée en vigueur de l’arrêté le 1er octobre 2020, les vendeurs doivent financer une étude géotechnique de conception de type G2, dont le coût est de l’ordre de 1 400 euros pour un particulier et de 900 euros pour les mairies dans le cadre d’un lotissement et par unité, et ce en sus des diagnostics de performance énergétique (DPE). Je m’interroge sur ces prix car deux intervenants – le BRGM et Eneris – ont déjà fait le même travail au nom de l’État.
Je souhaite donc connaître les critères qui ont justifié la modification par le BRGM de la qualification de l’aléa, de faible à moyen, de la commune de Metzing mais également des autres communes de Moselle concernées par le même changement.
Par ailleurs, y a-t-il un lien entre le refus de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle pour les communes classées en zone d’aléa faible et la reconnaissance de ce même état pour celles qui sont classées en zone d’aléa moyen ou fort ? Compte tenu du caractère aléatoire des phénomènes climatiques visés, d’après quelles dispositions réglementaires les critères et les seuils ont-ils été retenus par la commission interministérielle chargée de la reconnaissance des catastrophes naturelles ?
Enfin, madame la secrétaire d’État, le fonds Barnier peut-il, dans le cadre de sa mission, financer par voie de subvention le surplus financier que représente l’étude géothermique pour les communes ?
Madame la sénatrice Herzog, le retrait-gonflement des argiles est un phénomène à l’origine de nombreux sinistres touchant les maisons individuelles et plaçant certaines familles concernées en très grande difficulté financière. La réglementation en vigueur depuis le 1er octobre vise à garantir, à l’avenir, que les nouvelles maisons seront construites avec des techniques adaptées pour éviter ces sinistres.
La nouvelle carte nationale de l’exposition au retrait-gonflement des sols argileux a été mise à disposition sur le site www.georisques.gouv.fr dans le courant de l’année 2019 et sert de support à cette nouvelle réglementation.
L’ancienne carte d’aléa était obsolète, car elle n’était plus conforme à la sinistralité observée : 41 % des sinistres se situaient dans des zones identifiées par la carte comme relevant de l’aléa faible ou comme non argileuses, entraînant une sous-estimation de l’aléa.
C’était notamment le cas de la commune de Metzing, quiétait classée en zone d’aléa faible alors qu’elle a fait l’objet de deux arrêtés CatNat pour les sécheresses de 2003 et 2018.
Une actualisation de la carte d’aléa était nécessaire. Elle a été menée sur la base d’une évolution des connaissances scientifiques. Le nouveau dispositif s’applique uniquement dans les zones d’exposition moyenne et forte, dans un esprit de proportionnalité et d’efficience de la réglementation.
Depuis le 1er octobre 2020, une étude géotechnique est effectivement exigée lors de la vente d’un terrain, mais uniquement pour les terrains non bâtis et constructibles. Il s’agit d’une étude géotechnique de type G1, dont le coût est estimé à 500 euros, et non d’une étude de type G2. Cette étude permet à l’acquéreur d’être informé de la nature du terrain, et, le cas échéant, d’intégrer un éventuel surcoût et les suggestions techniques liées à la présence d’argile sur le terrain.
Enfin, concernant la procédure CatNat, une commune peut être reconnue même si elle est cartographiée en zone d’aléa faible dès lors que les critères géotechniques et météorologiques sont réunis.
La parole est à Mme Viviane Malet, auteure de la question n° 1361, adressée à Mme la ministre de la transition écologique.
Madame la secrétaire d’État, comme vous le savez, la question du traitement des déchets est une question cruciale à La Réunion, en raison du rattrapage structurel important auquel le territoire doit faire face.
Le syndicat mixte de traitement des déchets, Ileva, situé sur le territoire de trois communautés d’agglomération, a engagé toutes les procédures pour créer un outil multifilières de traitement des déchets adapté au contexte local. Ce projet d’envergure doit assurer la continuité du service en 2023 pour 528 000 habitants.
Le financement lié à l’emprunt est en cours de contractualisation avec les banques. L’Agence française de développement (AFD) demande comme condition une garantie d’emprunt des EPCI membres du syndicat mixte. Cette condition devrait s’appliquer pour les autres banques dans le cadre de la clause du pari passu.
Pouvez-vous nous indiquer quel est le fondement juridique de cette garantie, la compétence de gestion des déchets étant une compétence obligatoire exercée par les EPCI et financée par la taxe d’enlèvement des ordures ménagères (TEOM) ? Cette garantie est d’ailleurs absente des statuts du syndicat mixte.
Les EPCI ont créé le syndicat mixte pour la partie traitement et agissent dans le cadre d’un transfert de compétences, les dépenses étant financées par les contributions de ses membres.
Ils subventionnent également le projet à hauteur de 40 millions d’euros, contributions d’équipements autorisées par les statuts d’Ileva. Les équipements sont réalisés dans le cadre d’une compétence obligatoire que les communautés d’agglomération continuent à exercer par le biais du syndicat mixte. En cas de dissolution du syndicat mixte, les droits et obligations sont obligatoirement transférés aux EPCI.
Interrogée sur la base juridique de sa demande, l’AFD fait état d’une réponse ministérielle à une question écrite, mais celle-ci n’évoque aucun élément juridique applicable en l’état au syndicat mixte.
Le principe de l’interdiction des prêts entre collectivités locales ainsi que des communes vers des groupements de communes a été réaffirmé dans une autre réponse ministérielle. Cette interdiction s’applique également du syndicat mixte vers les personnes morales qui en sont membres.
Madame la secrétaire d’État, pouvez-vous nous indiquer votre position quant à la possibilité pour un EPCI d’accorder une garantie d’emprunt à un syndicat mixte dont il est membre sur une compétence obligatoire transférée partiellement ?
Madame la sénatrice Malet, le code général des collectivités territoriales ne prévoit pas d’encadrement particulier pour l’octroi de garanties d’emprunt par les communes et leurs groupements à d’autres personnes publiques.
En effet, si l’article L. 2252-4 prévoit des conditions pour l’octroi de telles garanties à des personnes privées, il ne mentionne pas les personnes publiques. Par construction, il découle de cette absence de condition que les communes ont la possibilité d’octroyer des garanties d’emprunt à des personnes publiques. L’article L. 5111-4 du code susvisé prévoit que les mêmes dispositions sont applicables aux établissements publics de coopération intercommunale. Cette analyse est validée par le Comité national relatif à la fiabilité des comptes publics locaux.
Le syndicat mixte de traitement des déchets Ileva a été créé par la communauté d’agglomération du Sud de La Réunion, la communauté intercommunale des villes solidaires et la communauté d’agglomération du territoire de la côte Ouest, qui lui ont confié, dans l’intérêt général, la mission d’assurer le traitement et la valorisation des déchets non dangereux produits sur leur territoire. Il s’agit d’un établissement public régi par le code général des collectivités locales.
En tant que personne morale de droit public, le syndicat mixte de traitement des déchets Ileva peut bénéficier des garanties d’emprunt octroyées par les établissements publics de coopération intercommunale qui en sont membres pour faciliter la réalisation d’une opération d’intérêt public.
J’ajoute que l’octroi de cette garantie par les EPCI n’emporte pas d’obligation supplémentaire par rapport au droit commun. Les contributions budgétaires au syndicat constituent en effet des dépenses obligatoires susceptibles de mandatement d’office et ont vocation à couvrir les charges du syndicat, notamment le remboursement d’éventuels emprunts. Même en cas de retrait d’un membre, l’encours de cette dette devrait donc être en partie repris par l’entité qui quitterait le syndicat.
La parole est à Mme Céline Brulin, auteure de la question n° 1321, adressée à M. le ministre délégué auprès de la ministre de la transition écologique, chargé des transports.
Madame la secrétaire d’État, crise sanitaire, quatorzaine imposée unilatéralement par la Grande-Bretagne, Brexit : la filière transmanche subit une baisse de trafic considérable. Quelque 5 000 salariés et, plus largement, 12 500 emplois indirects sont en jeu.
Le Premier ministre, interpellé par une cinquantaine de parlementaires, a accepté que le bénéfice de l’activité partielle soit ouvert à cette filière et que les cotisations sociales pour 2021 soient remboursées aux compagnies, mais hélas pas à toutes. Les compagnies qui opèrent en délégation de service public, sur la ligne Dieppe-Newhaven par exemple, en sont exclues. Cela crée une inexplicable distorsion de concurrence.
Je rappelle que les deux ferries de Dieppe enregistrent une baisse de deux tiers du trafic de passagers. L’opérateur évoque des suppressions d’emplois via des départs volontaires. Le directeur de la ligne et l’ensemble des élus locaux demandent l’appui de tous.
L’avenir du trafic transmanche est important pour les régions concernées, en premier lieu la Normandie. La ligne Dieppe-Newhaven est empruntée chaque année par 400 000 passagers ; l’ensemble des lignes normandes le sont par 2 millions de passagers. Le trafic transmanche a des retombées très importantes en matière de fret, mais également en matière de tourisme, et ce dans toute la France. La moitié des dépenses effectuées en France par les Britanniques est liée aux passages transmanche.
Il est donc nécessaire de mettre en œuvre un plan « ferry » qui aille au-delà des premières mesures évoquées. L’État doit s’engager davantage, y compris en obtenant des fonds européens, en travaillant au développement des rotations, en faisant la promotion de ces liaisons maritimes et, bien sûr, en accompagnant les collectivités locales dans le financement de ce service.
Madame la secrétaire d’État, le Gouvernement sera-t-il au rendez-vous ?
Madame la sénatrice Brulin, si les entreprises de transport maritime ont été touchées par cette crise, et cela de manière hétérogène, le transport maritime sur la Manche a été fortement affecté, notamment celui qui est opéré sous pavillon français par Brittany Ferries et DFDS.
Au printemps dernier, ces lignes de ferry ont connu des baisses de fréquentation pouvant aller jusqu’à 80 % et des pertes de chiffre d’affaires de l’ordre de 75 % – ce qui est absolument colossal – par rapport à 2019.
En outre, comme vous l’avez souligné, la décision britannique d’instaurer une quatorzaine en plein mois d’août à toute personne entrant au Royaume-Uni n’a pas permis à ces armateurs de réaliser une saison estivale satisfaisante.
Le Gouvernement a porté dès le début de la crise une attention toute particulière aux compagnies de transport de passagers, notamment en mettant en place puis en prolongeant des aides d’urgence en faveur de certains secteurs comme le transmanche. Certains armateurs ont bénéficié de prêts de trésorerie garantis par l’État, les PGE. De plus, nous sommes intervenus auprès des gouvernements britannique et irlandais pour qu’ils facilitent également de leur côté la mise en place de soutiens financiers à ces compagnies.
Par ailleurs, depuis le printemps, un dispositif d’activité partielle de longue durée a été mis en place afin d’assurer le maintien de l’emploi dans les entreprises confrontées à une réduction d’activité durable ; mais il n’est pas de nature à compromettre leur pérennité. Des échanges avec les organisations syndicalessont nécessaires, mais cette mesure pourrait trouver à s’appliquer aux ferries en fonction de la tendance de reprise.
Enfin, à la suite de nombreux échanges avec les armateurs, le Premier ministre a annoncé en septembre dernier le principe du remboursement pour une durée d’un an des cotisations sociales des salariés. Cet effort, d’un montant estimé entre 24 millions et 30 millions d’euros pour l’ensemble des compagnies de ferry actives sur les liaisons internationales hors délégation de service public, a été inscrit dans le quatrième projet de loi de finances rectificative.
Ce soutien en subventions s’ajoute au soutien sous la forme d’avances remboursables de la part des régions Bretagne et Normandie – dont nous saluons l’engagement –, qui interviennent en tant qu’actionnaires des sociétés d’économie mixte.
Comme vous pouvez le constater, madame la sénatrice, s’il n’en porte pas le nom, l’ensemble de ces dispositifs constitue bel et bien un plan de soutien inédit en faveur des acteurs du ferry. Soyez assurée que nous soutenons pleinement ces opérateurs transmanche.
Nous dressons le même constat, madame la secrétaire d’État, mais maintenant il faut aller au-delà de ce constat et des premières mesures, dont nous ne contestons pas l’existence, mais qui s’avèrent insuffisantes pour répondre à la crise de trafic très importante que vous avez vous-même évoquée.
Par ailleurs, vous n’avez pas répondu à ma question relative aux lignes faisant l’objet d’une délégation de service public, qui ne sont absolument pas soutenues. Il faut venir en aide aux collectivités locales qui en assurent le financement pour garantir l’avenir de ces lignes.
L’avenir d’un modèle exceptionnel, celui du pavillon français, est en jeu. Il ne faudrait pas qu’il disparaisse !
La parole est à M. Didier Mandelli, auteur de la question n° 1368, adressée à M. le ministre délégué auprès de la ministre de la transition écologique, chargé des transports.
Madame la secrétaire d’État, j’interpelle une fois de plus le Gouvernement dans cet hémicycle sur le projet d’autoroute A831.
Ce projet, engagé sous le quinquennat précédent, prévoyait la création d’une autoroute de soixante-quatre kilomètres entre Fontenay-le-Comte et Rochefort afin de désengorger les routes entre la Vendée et la Charente-Maritime, notamment pendant la période estivale.
L’État s’est engagé à proposer des solutions alternatives dans le cadre du contrat d’avenir. Après deux réunions au ministère, trois scénarios, dont un autoroutier, ont été présentés.
Dans un courrier datant du 2 octobre dernier, le président du conseil départemental de Vendée a fait savoir au ministre que les deux solutions alternatives proposées ne pouvaient être retenues, à la fois en raison de leur impact environnemental et de leur coût, mais également au regard de l’itinéraire, qui prévoit la coupure en deux fois deux voies de la commune de L’Île-d’Elle et des conditions de passage à proximité des zones urbanisées de la commune de Vix. Le projet d’autoroute est celui qui s’impose naturellement en complément du réseau existant.
La Vendée et la Charente-Maritime attendent ce projet, qui fait d’ailleurs l’objet d’un très large consensus historique, indispensable pour doter le territoire d’une infrastructure de transport à la hauteur de son dynamisme.
Ma question est donc simple, madame la secrétaire d’État : le Gouvernement est-il prêt à relancer le projet autoroutier ?
Monsieur le sénateur Mandelli, nous menons effectivement une réflexion au long cours sur ce projet d’autoroute de soixante-quatre kilomètres entre Fontenay-le-Comte et Rochefort. Malheureusement, comme vous l’avez indiqué, de nombreuses études ont démontré son impact environnemental élevé, et ce malgré d’importantes dispositions envisagées en matière d’insertion environnementale, d’évitement, de réduction et de compensation des impacts.
Vous le savez, la déclaration d’utilité publique est désormais caduque. Compte tenu de la nécessité d’apporter des réponses aux besoins de déplacements de la Vendée et de la Charente-Maritime, y compris au droit de la commune de Marans, l’État a proposé d’accompagner les collectivités dans un projet alternatif, moins consommateur d’espace et avec un impact environnemental moindre.
Comme convenu lors d’un rendez-vous en juillet dernier entre le ministre délégué chargé des transports et les élus locaux, l’État a transmisles études réalisées en ce sens par ses services.
Comme vous l’avez souligné, le président du conseil départemental de Vendée a jugé que les alternatives proposées ne pouvaient pas être retenues, sans toutefois proposer de solution alternative qui répondrait aux difficultés rencontrées sur le plan environnemental.
Le ministre chargé des transports est par ailleurs à l’écoute des retours des autres collectivités également parties prenantes au projet. Alors que le dialogue social n’a pas été poussé jusqu’au bout et que nous devons encore explorer certaines options, il n’apparaît pas possible à ce stade de conclure que la seule issue soit le tracé A831 initial.
Les services de l’État restent donc disponibles pour échanger sur les pistes et solutions alternatives, y compris sur la possibilité d’une réalisation partielle au droit de Marans ou de part et d’autre de la RN11, où les trafics attendus sont plus élevés.
J’entends bien votre réponse, madame la secrétaire d’État. Lors des différentes réunions qui ont eu lieu au ministère, j’ai eu l’occasion d’examiner ces études avec les représentants des départements de Vendée et Charente-Maritime, mais également avec ceux des régions Nouvelle-Aquitaine et Pays de la Loire.
Le constat qui s’imposait à l’issue de chacune de ces réunions était que le projet autoroutier était le mieux-disant, non seulement sur le plan économique – avec presque 200 millions d’euros d’écart –, mais aussi sur le plan environnemental, car ce projet était celui qui « marquait » le moins. Je rappelle que, selon les études conduites par la Ligue pour la protection des animaux (LPO), le projet initial aurait entraîné des compensations à hauteur de 172 millions d’euros.
Je ne dis pas qu’il faut revenir au projet initial ; des voies alternatives sont sans doute possibles. Mais, dans ces zones de marais, les deux projets alternatifs de deux fois deux voies avec des giratoires surdimensionnés ne conviennent pas.
J’espère que nous pourrons poursuivre le dialogue afin de trouver des solutions qui satisfassent les deux départements, les deux régions et l’ensemble des acteurs, car un très large consensus se dégage sur la nécessité absolue de concrétiser ce projet.
La parole est à Mme Frédérique Puissat, auteur de la question n° 1237, adressée à Mme la ministre déléguée auprès de la ministre de la transition écologique, chargée du logement.
Madame la secrétaire d’État, le fonds de solidarité pour le logement, le FSL, accorde des aides financières à des personnes en difficulté d’accès à un logement locatif, ou qui se trouvent dans l’impossibilité d’assumer leurs obligations relatives au paiement du loyer, des fournitures d’eau, d’énergie ou de services de télécommunication.
Tous les départements sont désormais confrontés à la multiplication du nombre de fournisseurs d’énergie. En Isère, par exemple, un client a le choix entre trente-quatre fournisseurs d’électricité et vingt fournisseurs de gaz, différents. Parmi eux, seuls trois financent historiquement le FSL.
Or ils peuvent avoir légitimement l’impression de payer pour les autres, dans la mesure où tous les ménages qui sollicitent le fonds obtiennent des aides, que leur fournisseur le finance ou pas.
La loi du 31 mai 1990, visant à la mise en œuvre du droit au logement indique qu’une convention est passée entre, d’une part, le département, et, d’autre part, les représentants des fournisseurs qui livrent les consommateurs domestiques en énergie, eau, services téléphoniques ou accès à internet : il s’agit de définir le montant et les modalités de leur concours financier au fonds de solidarité pour le logement.
En réalité, le montant de la contribution financière de ces fournisseurs au FSL n’est pas encadré par la loi et dépend du bon vouloir de chacun, alors même que l’État compense financièrement la contribution au FSL des fournisseurs d’électricité, selon des montants et dans des limites fixées par arrêté.
Envisagez-vous de clarifier et d’encadrer la contribution financière au FSL de tous les fournisseurs d’énergie, d’eau ou de services de télécommunication ?
Madame la sénatrice Puissat, comme vous l’avez dit, le Fonds de solidarité pour le logement accorde des aides financières à des personnes qui ont des difficultés pour accéder à un logement locatif, ou qui se trouvent dans l’impossibilité d’assumer leurs obligations pour payer leur loyer, leurs fournitures d’eau, d’énergie ou de services de communication.
Son financement est assuré non seulement par les départements, mais aussi par des contributeurs volontaires, tels que la caisse d’allocations familiales, ou les bailleurs sociaux.
Parmi les principaux contributeurs volontaires figurent les fournisseurs d’énergie, qui contribuent pour un montant d’environ 30 millions d’euros par an. Ces contributions sont en partie compensées par l’État, à hauteur d’un euro par client résidentiel d’électricité et dans la limite de 90 % des sommes versées ; cette compensation est ouverte à tous les fournisseurs.
Dans la mesure où les contributions des fournisseurs s’effectuent sur la base du volontariat, il n’est pas envisagé de les encadrer.
À l’échelle départementale, cette situation pose des difficultés d’autant plus importantes qu’il faut parfois faire appel au médiateur national de l’énergie pour obtenir les adresses des fournisseurs. Les conseillers départementaux sont ainsi contraints de multiplier les démarches.
Le médiateur national de l’énergie a formulé dix propositions pour réformer le FSL et faire en sorte, notamment, qu’il ne transite plus par les fournisseurs d’énergie.
Peut-être faudra-t-il examiner cette question dans le cadre d’un texte de loi approprié ? En améliorant le fonctionnement des départements, on faciliterait la possibilité pour les ménages les plus précaires d’obtenir des aides.
La parole est à M. Laurent Lafon, auteur de la question n° 1371, adressée à Mme la ministre déléguée auprès de la ministre de la transition écologique, chargée du logement.
Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, ma question concerne l’implantation de logements modulaires sur les emprises de la voie de desserte orientale, situées dans la commune de Chennevières-sur-Marne.
L’État a décidé, de manière unilatérale et sans aucune concertation avec les élus municipaux, d’installer dans cette zone un centre d’accueil temporaire de 150 places.
Une telle décision entre en contradiction avec l’ambitieux projet d’aménagement, de développement et de revalorisation d’entrée de ville, que la municipalité et son maire, M. Jean-Pierre Barnaud, ont étudié dans le cadre de l’arrivée du transport en commun en site propre Altival, et dans lequel l’État est partie prenante au travers d’un contrat d’intérêt national.
Ce projet prévoit notamment un quartier mixte composé de logements, d’activités économiques, et d’équipements publics, dont un groupe scolaire. Il envisage aussi, à terme, la réhabilitation et l’ouverture au public du parc du Fort, la construction d’un nouvel équipement sportif, la requalification de la route départementale D4, et la création d’une trame verte et bleue.
En 2018, l’État a souhaité signer avec la collectivité un contrat d’intérêt national pour soutenir cet objectif commun d’un urbanisme innovant et durable, associant transports, mixité fonctionnelle et qualité environnementale.
Les élus sont conscients que ceux de nos concitoyens qui souffrent de problèmes de logement ont besoin de solutions pour s’installer durablement. Dans cet esprit, ils défendent un projet global intégrant habitat, commerces, artisanat et équipements publics.
Madame la secrétaire d’État, ils vous proposent une solution pérenne, là où vous souhaitez installer des logements modulaires déplaçables. Êtes-vous prête à revenir sur cette implantation de logements modulaires ? Êtes-vous en mesure de préciser les prochaines modalités d’un dialogue constructif entre l’État, les Canavérois et leurs élus locaux, afin de permettre la réalisation de ce projet d’aménagement durable tant attendu par la population et encore récemment souhaité par l’État ?
Monsieur le Sénateur Lafon, le Gouvernement est très mobilisé depuis le début de la crise sanitaire pour proposer une solution de logement à tous ceux qui en ont besoin.
L’État finance plus de 80 000 places d’hébergement, chaque nuit, en Île-de-France, pour venir en aide aux publics les plus fragiles. Parmi ces places, 10 000 ont été créées pendant le premier confinement et déjà plus de 5 000 depuis le 17 octobre, pour faire face à la croissance des besoins.
Dans le contexte de la crise sanitaire, le Gouvernement a ouvert plus de 190 000 places d’hébergement d’urgence, dont 14 000 places depuis le 17 octobre dernier et 28 000 ouvertes lors du confinement du mois de mars et qui sont actuellement maintenues.
Au-delà de l’hébergement d’urgence, nous portons une politique volontariste dans le cadre du plan quinquennal pour le logement d’abord, afin de développer des solutions pérennes pour ceux de nos concitoyens qui en ont besoin.
C’est la raison pour laquelle le prédécesseur d’Emmanuelle Wargon avait validé la mise en œuvre d’une expérimentation qui visait à créer 550 logements modulaires et déplaçables en Île-de-France, en ayant recours aux conditions économiques du logement social.
Pour appliquer cette décision, le préfet de la région d’Île-de-France a lancé, en juillet dernier, un appel à manifestation d’intérêt sur trois terrains préalablement identifiés dans le patrimoine de l’État.
Vous avez très bien décrit l’urgence du besoin de logement : c’est précisément pour y répondre de manière réactive que l’État a choisi de mobiliser des terrains qui lui appartiennent. Il s’agit, en l’occurrence, des emprises de la voie de desserte orientale sur les communes de Chennevières-sur-Marne dans le Val-de-Marne, d’Antony dans les Hauts-de-Seine et d’Éragny-sur-Oise dans le Val-d’Oise.
Le Gouvernement est attaché à la concertation, et les services de l’État veillent à maintenir le dialogue avec les maires de ces trois communes. L’urgence est là, mais les solutions existent : l’appel à manifestation d’intérêt a reçu dix-huit réponses, qui montrent qu’il est possible de développer à la fois une solution technique innovante, une trajectoire économique équilibrée et un projet social adapté à la réalité de ces trois communes.
Je réaffirme la volonté du Gouvernement de mettre en œuvre rapidement cette expérimentation, en s’appuyant sur les solutions présentées dans le cadre de l’appel à manifestation d’intérêt.
Madame la secrétaire d’État, j’ai bien entendu votre argument sur l’urgence sociale qui justifie la décision du Gouvernement.
Une question demeure toutefois sans réponse : comment faire en sorte que le projet que vous portez ne remette pas en cause l’objectif d’aménagement durable du territoire que défend la ville ?
La parole est à M. Yannick Vaugrenard, auteur de la question n° 1060, adressée à M. le ministre de l’économie, des finances et de la relance.
Monsieur le secrétaire d’État, lorsqu’un assuré titulaire d’une assurance vie opte pour une sortie de son contrat sous la forme d’une rente, on parle alors de rente viagère.
La fiscalité de ces rentes a été conçue à l’avantage de ceux qui les détiennent. En effet, le souscripteur n’est imposable que sur une fraction de la rente qu’il perçoit en contrepartie du versement d’un capital, par le biais de l’impôt sur le revenu.
La part imposable varie avec l’âge du bénéficiaire : à titre d’exemple, la fraction imposable est de 40 %, si le crédirentier est âgé de 60 à 69 ans, lors de l’entrée en jouissance de la rente.
L’administration fiscale a confirmé la volonté du législateur de prévoir un allégement de fiscalité pour les personnes qui ont souscrit un contrat d’assurance vie. Le Bulletin officiel des Finances publiques du 11 juillet 2017 précise en ce sens que le dispositif a « […] pour seul objet d’alléger la charge fiscale des bénéficiaires de rentes viagères, constituées à titre onéreux […] ».
La base de calcul qui a servi à établir la part imposable des rentes viagères se fonde sur le taux d’intérêt technique, c’est-à-dire le taux que l’assureur prend en compte dans la modélisation du risque qu’il s’apprête à couvrir, en vue d’établir la tarification du contrat.
Cependant, le taux d’intérêt retenu pour la fiscalité des rentes viagères, à 3, 50 %, n’est plus adapté à la réalité. En effet, la forte chute des taux, que le législateur ne pouvait pas prévoir, conduit désormais à taxer, non plus seulement les intérêts compris dans le montant de la rente, mais aussi, et surtout, le capital, ce qui est contraire à l’esprit qui préside à la fixation de ces taux.
Face à cette situation injuste, il est indispensable de réformer la fiscalité des rentes viagères, afin de calculer l’impôt en fonction du revenu réellement imposable.
Les personnes qui ont choisi la formule de la rente viagère souhaitent s’assurer des revenus réguliers, tout en bénéficiant d’une garantie de sécurité. Le rôle social du dispositif est donc aussi à prendre en considération.
Quand le Gouvernement examinera-t-il cet enjeu important pour les revenus d’un certain nombre de nos concitoyens ?
Monsieur le sénateur Yannick Vaugrenard, les rentes viagères constituées à titre onéreux, ou RVTO, résultent d’un contrat librement conclu par le crédirentier qui accepte de se dessaisir d’un élément de son patrimoine, immobilier ou mobilier, en contrepartie de versements effectués à son profit sa vie durant.
Ces versements, appelés « arrérages », correspondent pour partie au remboursement du capital aliéné et pour partie à la rémunération de ce capital.
Conformément au 6 de l’article 158 du code général des impôts, les RVTO ne sont imposables que pour une fraction de leur montant décroissante en fonction de l’âge du crédirentier lors de l’entrée en jouissance de la rente.
Comme vous l’avez rappelé, la fraction taxable est fixée à 70 %, 50 %, 40 % ou 30 %, selon que le crédirentier est alors âgé respectivement de moins de 50 ans, de 50 à 59 ans, de 60 à 69 ans ou d’au moins 70 ans. Cette fraction taxable correspond aux arrérages représentatifs des seuls intérêts produits par le capital aliéné.
Ainsi, le système actuel de taxation des RVTO est économiquement justifié. Il permet d’exclure du champ de l’impôt sur le revenu la part de la rente réputée couvrir le remboursement du capital.
Le fait que la fraction imposable de la rente soit déterminée de manière forfaitaire peut certes conduire à s’écarter de la répartition effective entre remboursement du capital aliéné et rémunération de ce capital, à un moment donné au cours de la période de versement de la rente.
Toutefois, l’écart peut aussi apparaître, à l’inverse, au profit du crédirentier, et l’équilibre doit s’apprécier sur la durée, potentiellement longue, de versement de la rente.
En outre, ce barème forfaitaire présente l’avantage d’être simple à appliquer et équitable dans la mesure où plus l’assuré est âgé lors de l’aliénation de son capital, moins la fraction imposée de la rente est élevée, dès lors que, en moyenne, la part des intérêts dans la rente est inférieure.
Au demeurant, une réforme du régime d’imposition des RVTO motivée par l’évolution des taux d’intérêt, par nature conjoncturelle, risquerait de conduire à sa révision permanente et de compromettre sa lisibilité et sa prévisibilité pour les épargnants, à rebours de l’intention du législateur d’en favoriser l’usage.
Pour ces motifs, le Gouvernement n’envisage pas de modifier la fiscalité des RVTO.
La parole est à M. Gilbert Roger, auteur de la question n° 1217, adressée à M. le ministre de l’économie, des finances et de la relance.
Monsieur le secrétaire d’État, je souhaiterais attirer votre attention sur la situation financière difficile dans laquelle se trouvent de nombreuses femmes célibataires, qui ont la garde de leurs enfants à la suite d’une séparation.
La monoparentalité pose des difficultés d’organisation et entraîne une baisse notable du niveau de vie. Près de quatre familles monoparentales sur dix vivent sous le seuil de pauvreté et plus de 2, 8 millions d’enfants sont en situation de pauvreté ; 85 % des familles monoparentales ont à leur tête une femme.
La pension alimentaire, versée en cas de divorce ou de séparation de corps, en vertu de l’article 373-2-2 du code civil, ainsi que le complément sous forme de pension alimentaire prévu à l’article 373-2-4 du code civil, sont déductibles du revenu global de la personne qui verse la pension, mais constituent un revenu imposable entre les mains de la bénéficiaire.
Afin de lutter contre la pauvreté des familles monoparentales, je souhaiterais savoir – si possible, avant ma retraite !
Sourires.
Monsieur le sénateur Gilbert Roger, la contribution à l’entretien et à l’éducation des enfants, la CEEE, prévue par L’article 373-2-2 du code civil ainsi que son complément prévu à l’article 373-2-4 du code civil prennent la forme, dans les faits, d’une pension alimentaire.
En application du 2° du II de l’article 156 du code général des impôts, le débiteur de la pension peut la déduire de son revenu imposable dès lors qu’elle est effectivement versée.
Il importe toutefois que le ou les enfants mineurs pour lesquels la pension alimentaire est versée ne soient pas pris en compte pour la détermination de son quotient familial, afin de ne pas octroyer un double avantage pour le parent qui verse la pension : majoration du quotient familial et réduction du revenu imposable. En application des articles 12 et 79 du CGI, les pensions alimentaires sont corrélativement imposables chez le parent bénéficiaire, à condition qu’il les ait effectivement perçues.
Dans le cas particulier de la garde alternée, la charge d’entretien des enfants est présumée partagée entre les parents. Les avantages fiscaux auxquels les enfants ouvrent droit – majorations du quotient, réductions et crédits d’impôt, abattements en matière d’impôts locaux – sont en conséquence répartis par moitié entre les ex-conjoints.
Les contribuables ne peuvent alors opérer aucune déduction au titre des pensions alimentaires versées pour leurs enfants mineurs, dès lors que ceux-ci sont pris en compte pour la détermination de leur quotient familial. Corrélativement, les pensions alimentaires ainsi versées ne sont, dans ce cas, pas imposables au nom de leur bénéficiaire.
Toutefois, s’il apparaît que l’un des deux parents assume à titre principal la charge des enfants, celle-ci s’appréciant sans tenir compte des pensions alimentaires versées par ailleurs, les parents peuvent prévoir d’un commun accord que l’intégralité des avantages fiscaux sera attribuée à l’un d’eux. Dans cette situation, l’autre parent peut alors déduire la pension alimentaire qu’il verse éventuellement, cette pension étant alors imposable chez celui qui la reçoit.
En outre, l’impôt sur le revenu prend en compte d’une autre manière la situation particulière des familles monoparentales : les contribuables qui vivent seuls et supportent effectivement la charge principale ou exclusive de leurs enfants bénéficient ainsi d’une part entière de quotient familial pour le premier d’entre eux, l’avantage maximal en impôt procuré par cette part étant fixé, pour 2019, à 3 697 euros.
Enfin, la fiscalité n’est pas le seul moyen de venir en aide aux familles monoparentales. Il existe plusieurs aides sociales qui participent de cet objectif, notamment les allocations familiales, le complément familial versé sous condition de ressources aux parents isolés ayant au moins trois enfants, ou encore l’allocation de soutien familial, l’ASF, qui est versée aux personnes qui élèvent seules leur enfant privé de l’aide de l’un de ses parents, ou bien pour compléter une pension alimentaire dont le montant est faible. Ces prestations familiales ne sont pas imposables.
Dès lors, le Gouvernement n’est pas favorable à une modification du régime d’imposition des pensions alimentaires.
La parole est à Mme Michelle Gréaume, auteure de la question n° 1346, adressée à M. le ministre de l’économie, des finances et de la relance.
Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, Vallourec a confirmé un plan de 1 000 nouvelles suppressions d’emplois dont 350 en France, 190 à Déville-lès-Rouen dont le site sera fermé, 30 au siège social et 130 dans le département du Nord, où l’avenir des sites de Valenciennes, Aulnoye-Aymeries et Saint-Saulve est des plus sombres.
Les syndicats salariés alertent depuis longtemps sur les risques d’un nouveau plan social, et sollicitent l’intervention urgente de l’État, actionnaire de référence de Vallourec, à hauteur de 15 %, afin que d’autres solutions émergent. En vain !
Monsieur le secrétaire d’État, qu’avez-vous fait pour empêcher ce nouveau coup porté à l’emploi et pour préserver, malgré les difficultés, un groupe et un savoir-faire essentiels à notre souveraineté et à la transition écologique ?
J’entends bien les arguments que l’on nous oppose, la dette et les intérêts qui plombent l’entreprise, le ralentissement du marché aggravé par la crise de la covid-19.
Cependant, n’est-il pas temps de remettre en cause la stratégie industrielle et financière du groupe ? Choix obstiné du tout-pétrole, désinvestissement sur le territoire national, délocalisations, razzia sur les fonds publics, recherche du profit maximal, la recette est toujours la même !
Les conséquences ne varient pas non plus. Des milliers d’emplois directs et indirects sont détruits. La filière est en sous-capacité de production, ce qui place la France en position de vulnérabilité inquiétante.
C’est pourtant cette voie que l’entreprise continue de poursuivre en imposant, avec l’assentiment du Gouvernement, un plan de sauvegarde de l’emploi, ou PSE, dont les conditions sont inacceptables pour les salariés.
La dette, dont les intérêts sont supérieurs au montant des investissements productifs, a été contractée auprès de créanciers français tels que BNP Paribas et Natixis, ou de fonds d’investissement étrangers.
La conversion de leurs créances en capital va permettre à ces groupes de faire main basse sur Vallourec et d’imposer encore plus facilement leurs conditions et leurs exigences de rentabilité. Comment peut-on les laisser faire ? Il est urgent de sortir Vallourec des griffes de la finance.
Pour cela, j’avance deux propositions.
Premièrement, il faut exiger des établissements financiers français qu’ils renoncent aux intérêts prélevés sur les résultats du groupe Vallourec.
Deuxièmement, il faut imposer une participation plus élevée de Bpifrance, afin de garantir la protection des emplois et de mobiliser des investissements suffisants pour assurer la reprise de l’activité après la pandémie.
Vallourec a un avenir possible dans le développement de la filière hydrogène, de l’éolien offshore ou encore de la géothermie. Aussi, l’État va-t-il enfin assumer ses responsabilités ?
Madame la sénatrice Michelle Gréaume, vous m’interpellez au sujet des annonces du groupe Vallourec sur lesquelles Bruno Le Maire a eu l’occasion de s’exprimer, récemment, à l’Assemblée nationale.
L’entreprise cumule à ce jour une dette massive de 3, 5 milliards d’euros. Elle a subi une très forte baisse de son activité pétrolière, son principal débouché, qui pèse plus de 70 % de son chiffre d’affaires, dans un contexte mondial de contraction de l’activité d’exploration et de production.
Les efforts de reconquête de la performance industrielle de Vallourec, mis en place depuis 2015, se rapprochaient des objectifs escomptés pour restaurer la compétitivité de l’activité, avant d’être percutés de plein fouet par la crise.
L’ensemble de l’activité du groupe, à l’échelle mondiale, est désormais touché. L’entreprise a donc décidé d’entreprendre une restructuration de son outil industriel, au niveau mondial, dont les conséquences sont lourdes.
Un tiers des emplois, soit 900 d’entre eux, ont été supprimés aux États-Unis, en avril dernier. En Allemagne, 1 000 emplois auront été supprimés depuis 2018. Au Brésil, 500 emplois vont être supprimés. En France, où l’entreprise annonce une réduction de 350 emplois, le site de Déville-lès-Rouen sera le plus touché, avec 190 emplois menacés.
Nous menons des discussions avec les représentants syndicaux et les élus du territoire, car c’est ensemble que nous trouverons les solutions.
Ma collègue Élisabeth Borne est également très mobilisée pour permettre aux salariés de bénéficier des conditions les plus protectrices possible, dans le cadre du PSE, sur l’ensemble des sites de Vallourec.
Le préfet de Seine-Maritime a immédiatement réactivé le comité industriel territorial pour réfléchir aux solutions d’avenir du site. Nous savons pouvoir compter sur la mobilisation des présidents de la région Normandie et de la métropole de Rouen pour œuvrer, ensemble, à l’implantation de nouvelles activités sur le site.
Dans le Valenciennois, où 1 222 salariés travaillent sur les différents sites, ce sont 137 emplois qui sont menacés. Les efforts menés par Vallourec en lien avec l’État permettent d’envisager des solutions pour 77 personnes, notamment par reclassement. C’est une première avancée notable, mais insuffisante. Il reste 60 salariés pour lesquels nous devons trouver une solution.
Là encore, je sais pouvoir compter sur la mobilisation d’Élisabeth Borne, en liaison étroite avec le président de région, Xavier Bertrand, et les élus locaux.
Soyez-en assurés, mesdames, messieurs les sénateurs, nous sommes mobilisés avec la même énergie, et notre action, aussi bien dans le Nord qu’en Seine-Maritime est guidée par la même boussole : celle de l’emploi et l’activité industrielle.
La parole est à M. Henri Cabanel, auteur de la question n° 1380, transmise à M. le ministre de l’économie, des finances et de la relance.
Monsieur le secrétaire d’État, les collectivités rencontrent des difficultés pour mettre en place la généralisation de l’offre de paiement en ligne.
Le décret n° 2018-689 du 1er août 2018 prévoit une obligation de mise à disposition à titre gratuit par les administrations publiques d’un service de paiement en ligne à destination de leurs usagers, qu’ils soient particuliers ou entreprises. La mise en œuvre du décret doit intervenir le 1er avril 2021.
En cette période de crise sanitaire, de nombreuses collectivités ont indiqué qu’elles ne pourront constituer un comité de pilotage en y associant les parents d’élèves. Il en va de même pour le comité technique dont la formation reste difficile, car il se révèle impossible de réunir le personnel administratif et comptable en y associant le personnel des services concernés, animateurs et agents territoriaux spécialisés des écoles.
Dès lors, n’est-il pas opportun de reporter à une date ultérieure cette généralisation de l’offre de paiement en ligne, tout comme le Gouvernement a reporté, par exemple, la réforme de l’aide personnalisée au logement, en raison de l’épidémie du coronavirus ?
Face à l’ampleur de la tâche, les équipes municipales ont besoin d’un contexte plus serein. Par ailleurs, tous les citoyens n’ont pas les moyens de payer en ligne. Certaines familles, en proie à des difficultés majeures, préfèrent payer directement les services de la collectivité.
Dans la mesure où la France projette de développer une administration 100 % numérique d’ici à 2022, il convient de faciliter, pour tous, le recours aux outils informatiques. Comment envisagez-vous cette évolution pour les populations précarisées ? Quels moyens prévoyez-vous pour les intégrer à cette réforme de l’administration ?
L’obligation d’offre de paiement en ligne, prévue par l’article 75 de la loi de finances rectificative pour 2017 et le décret que vous citez, répond aux attentes des usagers, dont beaucoup plébiscitent le recours à des moyens de paiement dématérialisés, diversifiés et accessibles à toute heure et à distance.
Le paiement par internet aux collectivités locales est à la fois un enjeu de modernisation et une ouverture vers la dématérialisation.
La crise sanitaire actuelle a démontré la nécessité d’offrir aux usagers des moyens de paiement â distance, pour ceux qui ont un accès à internet. Il est donc important de poursuivre, voire d’accélérer, les actions permettant de satisfaire à cette obligation et, par là même, aux besoins des usagers.
Il s’agit d’un intérêt partagé par les ménages comme par les collectivités, qui voient ainsi leurs recettes rentrer mieux et plus vite. Le Conseil national de l’évaluation des normes, composé de représentants des associations d’élus, ne s’y est pas trompé en donnant un avis favorable au décret.
La direction générale des finances publiques, la DGFiP, est pleinement mobilisée pour accompagner les collectivités dans la mise en place d’une offre de paiement en ligne et pour aider celles qui sont en retard par rapport aux échéances du décret.
Grâce à l’outil PayFiP, le paiement des sommes dues pour l’usage des services publics d’une collectivité est facilité. Le dispositif permet un paiement simple, rapide et accessible, par carte bancaire, mais aussi par prélèvement unique. Il est accessible vingt-quatre heures sur vingt-quatre et sept jours sur sept. Les modalités de règlement sont simples à utiliser.
L’administration des finances publiques lutte contre la fracture numérique en offrant à ses usagers plusieurs canaux d’accès à ses services. Elle s’inscrit, bien entendu, dans une logique de compréhension à l’égard des collectivités locales dont le contexte actuel entrave les projets de modernisation.
Il importe cependant que les collectivités restent mobilisées sur l’objectif de généralisation du paiement en ligne qui, comme je l’ai indiqué, répond à un réel besoin des usagers et participe dans le même temps à la promotion de l’administration numérique.
Monsieur le secrétaire d’État, je vous entends, et de nombreuses collectivités souhaitent évoluer dans ce sens.
Cependant, certaines communes rurales, de très petite taille, ont peu d’agents administratifs pour mettre en place le paiement en ligne. C’est la raison pour laquelle elles souhaitent repousser la date fatidique du 1er avril 2021.
À cet égard, M. Raymond Vall, notre collègue du groupe du RDSE, avait formulé des propositions dans le rapport de la mission d’information sur la lutte contre l’illectronisme et pour l’inclusion numérique. Je ne doute pas que vous les ayez lues. Peut-être serait-il temps de concrétiser certaines d’entre elles ?
La parole est à M. Jean-Marie Mizzon, auteur de la question n° 1328, adressée à M. le ministre de l’économie, des finances et de la relance.
Monsieur le secrétaire d’État, la France, hier encore quatrième puissance mondiale, se voit désormais rétrogradée à la sixième place ! Contre toute attente, son économie donne toutes les apparences d’un déclin que rien ne semble pouvoir enrayer.
Comment est-ce possible ? Comment en est-on arrivé là ? Qui sont les responsables d’une telle situation ? Est-il juste d’incriminer les politiques pour des choix, il est vrai, parfois bien hasardeux ? Telles sont les questions que tous les Français se posent.
Notre pays dispose de nombreux atouts grâce à son économie diversifiée : construction d’avions, de trains à grande vitesse, de voitures, mais aussi richesse de son agriculture, qualité de son secteur agroalimentaire, ou encore puissance de son armement…
La liste est longue, et le maillage industriel de la France témoigne de cette vitalité économique dans des domaines très variés. Cette diversification nous permet d’affronter les crises qui secouent de façon récurrente l’économie mondiale.
Pourtant, les chiffres de la paupérisation de notre pays sont effrayants ! Le salaire moyen – le SMIC – tend à devenir la norme en France. Comment payer un loyer, se soigner, s’alimenter, se vêtir, autrement dit comment vivre décemment dans ces conditions ? D’ailleurs, sur un plan davantage sémantique, ne devrait-on pas plutôt parler de « survie » ?
Le ministre de l’économie, de par ses fonctions, est le plus au fait de la situation. Les élus, de par leurs mandats, y sont directement confrontés. La pauvreté est leur lot quotidien avec des permanences remplies d’hommes et de femmes qui demandent de l’aide pour trouver un emploi, une place dans un établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes, ou Ehpad, ou, parfois, plus prosaïquement, un secours d’urgence pour échapper à une expulsion.
À en croire Bercy, la psychologie est partie prenante de l’économie. Mais comment redonner espoir et confiance dans la vie à des êtres brisés par les épreuves ? Le message répété à l’envi, qui encourage la consommation et non l’épargne, car, dites-vous, « la consommation, ce sont des emplois », est-il seulement audible ? Que peut bien consommer un smicard avec le peu qu’il a, sinon des produits à bas coût ?
Votre rhétorique, il faut le reconnaître, est de grande qualité. Hélas, un discours, si bon soit-il, ne se mange pas : « je vis de bonne soupe, et non de beau langage » disait en son temps Molière. Combien avait-il raison !
Toutefois, pour l’heure, oublions la forme et venons-en au fond : aujourd’hui, concrètement, quelles sont, au-delà du plan de relance, les perspectives de redémarrage de l’économie française ?
Monsieur le sénateur Jean-Marie Mizzon, nous sommes d’accord sur un point : le tissu productif français est de qualité, et la France a tous les atouts pour réussir.
Elle l’a prouvé, car, avant la crise, nous étions déjà en train de réussir. Je rappelle que, en 2019, notre pays était le plus attractif d’Europe pour les investissements étrangers, que la croissance française était plus forte que celle de la zone euro, que le chômage, en baisse, s’était établi à 8, 1 % de la population active et que, pour la première fois depuis dix ans, l’industrie recréait des milliers d’emplois.
Elle l’a aussi prouvé, car, dès le mois de mai de cette année, elle a redémarré rapidement, connaissant le plus fort rebond en Europe au troisième trimestre de 2020.
Avant la crise, la pauvreté reculait : en 2019, 210 000 personnes sont sorties de la pauvreté, et les inégalités de revenus se sont réduites. Le revenu médian des Français a augmenté plus vite que la croissance, notamment grâce à la prime exceptionnelle de pouvoir d’achat et à l’exonération de charges sur les heures supplémentaires. En outre, le revenu des personnes pauvres a davantage augmenté que pour le reste de la population ; c’est le constat de l’Institut national de la statistique et des études économiques, l’Insee.
Nous devons cette baisse de la pauvreté avant tout à la revalorisation de la prime d’activité et à la baisse du chômage, mais aussi aux politiques qui s’attaquent à la pauvreté et aux conditions de vie, comme la hausse du chèque énergie, la meilleure couverture des frais de soins grâce à la complémentaire de santé solidaire, ou la limitation des frais bancaires pour les personnes précaires.
Aujourd’hui, ces précaires sont les premières victimes de la crise sanitaire et sociale. Le Gouvernement a répondu présent avec une préoccupation constante : ne laisser personne au bord du chemin.
Nous avons donc pris un ensemble de mesures sociales d’urgence, afin de les aider et de prévenir l’entrée dans la pauvreté, dans des proportions jamais connues dans l’histoire de notre pays : au total, plus de 3, 5 milliards d’euros d’aides directes ont été versés depuis le début de la crise. Nous prévenons aussi le basculement dans la pauvreté en sauvegardant l’emploi : ce sont 34 milliards d’euros qui sont consacrés à l’activité partielle en 2020.
En outre, pour combler les quelques trous restant dans la raquette, et ainsi répondre aux difficultés rencontrées par les jeunes précaires et les travailleurs intermittents, le Premier ministre a annoncé des réponses fortes, le 26 novembre dernier.
S’agissant enfin des jeunes, le plan « Un jeune, une solution », qui est partie intégrante du plan de relance, a été annoncé en juillet dernier pour soutenir l’insertion, l’apprentissage et l’emploi des jeunes dès cet été et la rentrée. Trois mois après son lancement, nous avons déjà de premiers résultats encourageants.
Pour terminer, je veux évoquer plus spécifiquement mon domaine de compétence. Vous savez que le numérique est l’un des secteurs les plus importants pour le redémarrage de l’économie mondiale.
Je rappelle que tout n’est pas noir en France : l’économie numérique française continuera à se développer en 2020, plus qu’en 2019. Le numérique est déjà le secteur qui crée le plus d’emplois en France. Pour la première fois cette année, notre pays dépassera l’Allemagne en ce qui concerne la croissance de son écosystème numérique. C’est la meilleure manière de préparer l’avenir et, dans le cadre du plan de relance, cela mobilise tous nos efforts.
La parole est à Mme Sabine Van Heghe, auteure de la question n° 1285, adressée à Mme la secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées.
Je souhaite attirer votre attention, madame la secrétaire d’État, sur les difficultés récurrentes des entreprises adaptées, en particulier dans mon département du Pas-de-Calais.
Il y a un an, les entreprises adaptées ont déposé une action collective pour protester contre les réformes découlant de la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel de 2018, qui ont bouleversé leur fragile équilibre.
Ainsi, les subventions octroyées à ces structures ont considérablement baissé, pour inciter les travailleurs en situation de handicap à rejoindre les entreprises dites « ordinaires ». Or ces personnes, qui ont parfois des difficultés psychiques ou intellectuelles, peinent à trouver un emploi en milieu ordinaire, phénomène considérablement accentué par la crise que nous vivons.
Les professionnels du secteur des entreprises adaptées souhaitent enfin être entendus par le Gouvernement. Ils veulent que les réformes prévues soient revues pour tenir compte du nouveau contexte économique, mais aussi des souhaits des premiers concernés, les travailleurs handicapés, dont certains ne veulent pas être employés en milieu ordinaire et souhaitent rester au sein des entreprises adaptées.
Les membres de l’association Action collective en faveur des entreprises adaptées insistent aussi sur la nécessité de revenir sur la disposition qui prévoit, à l’horizon de 2022, de limiter à 75 % le pourcentage de salariés handicapés dans les entreprises adaptées. Ces dernières jouent un rôle primordial auprès des personnes en situation de handicap, en particulier dans cette période très difficile.
Il faut donc les soutenir et les renforcer, ce qui passe, entre autres, par des aides à l’investissement et des mesures facilitant l’accès à de nouvelles expérimentations, comme le CDD dit « tremplin », par exemple.
Madame la secrétaire d’État, entendez-vous enfin soutenir les actions si précieuses des entreprises adaptées, en particulier dans ce contexte de crise sanitaire, sociale et économique ?
Madame la sénatrice, permettez-moi tout d’abord de préciser que les entreprises adaptées sont le milieu ordinaire. Il est très important de le rappeler : le régime de droit commun, c’est que les salariés des entreprises adaptées travaillent en milieu ordinaire.
La loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel a renforcé le cadre de l’entreprise adaptée, en prévoyant les moyens nécessaires au changement d’échelle de 800 entreprises adaptées, tout en développant leur dimension inclusive.
Cette évolution est une nécessité si l’on veut renforcer la capacité des entreprises adaptées à proposer des parcours dynamiques d’accès à l’emploi des personnes en situation de handicap, à répondre aux besoins de sourcing des entreprises dites « classiques », pour respecter l’obligation d’emploi de 6 % de travailleurs handicapés, à développer leur chiffre d’affaires, via des partenariats avec les entreprises ordinaires, et à accroître leur dynamique inclusive.
Venons-en au point que vous soulevez. Vous avez évoqué la limitation à 75 % des bénéficiaires des aides aux postes dites « socles », qui seront versées par l’État à partir de 2022. Permettez-moi de rappeler que la moyenne nationale au sein des entreprises adaptées atteint déjà 65 %.
La question de fond est plutôt celle de l’évolution du positionnement des entreprises adaptées. L’emploi en milieu classique doit être recherché : nul n’est inemployable, dès lors qu’un accompagnement adapté du salarié et de l’employeur est prévu pour sécuriser et pérenniser l’emploi. Je tiens, à cet égard, à rappeler qu’une enveloppe de 15 millions d’euros est allouée à l’emploi accompagné dans le cadre du plan de relance.
L’État soutient les entreprises adaptées dans cette période. Le projet de loi de finances pour 2021 prévoit 2 500 aides aux postes dites « CDD tremplins » supplémentaires – vous l’avez mentionné – et 1 000 aides aux postes dites « socles » supplémentaires, en plus du plan exceptionnel de 300 millions d’euros pour soutenir les entreprises adaptées dans la crise et leurs besoins d’investissement.
Un appel d’offres de 868 millions d’euros a déjà été lancé, et beaucoup d’entreprises adaptées y ont répondu. Le comité scientifique d’évaluation de la réforme prévue par la loi de 2009 sera lancé d’ici la fin de l’année : il permettra d’évaluer l’impact de cette évolution, à laquelle adhère pleinement l’Union nationale des entreprises adaptées, l’UNEA, qui compte 580 adhérents, soit près de 80 % des entreprises adaptées en France.
Vous le voyez, madame la sénatrice, l’État est aux côtés des entreprises adaptées, lesquelles ont été extrêmement dynamiques pendant ce confinement, ne serait-ce qu’au travers du consortium Résilience, auquel elles ont très largement participé. Nous sommes à leurs côtés, et nous le resterons.
Mme Sabine Van Heghe. Madame la secrétaire d’État, jouer sur les mots en assimilant « milieu ordinaire » et « milieu classique » relève de la sémantique…
Mme la secrétaire d ’ État proteste.
Ce n’est pas la première fois que je vous interpelle sur ce sujet : persévérer à ne pas être assez à l’écoute du terrain reviendrait, à cet égard, à tenir à l’écart toute une partie de la population salariée, particulièrement les publics déjà les plus fragilisés et en difficulté.
La parole est à M. André Reichardt, auteur de la question n° 1343, adressée à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.
Madame la présidente, comme vous l’indiquez, ma question s’adresse à M. le garde des sceaux, ministre de la justice, et concerne l’absence de renouvellement des membres de la commission du droit local d’Alsace-Moselle.
Cette commission a succédé en 2014 à l’ancienne commission d’harmonisation du droit local, qui avait elle-même été instituée en 1985, mais qui n’avait déjà fait que succéder à plusieurs commissions, la première ayant été créée – tenez-vous bien, mes chers collègues ! – en 1915, c’est-à-dire pendant le premier conflit mondial, alors que l’Alsace était encore allemande ! À ce moment-là, le gouvernement français réfléchissait déjà au droit local en Alsace-Moselle.
Chaque fois, l’objectif était de répondre à la très forte attente des Alsaciens de voir leurs spécificités locales prises en compte.
Chargée d’étudier et de proposer toute mesure « relative au droit particulier applicable dans les trois départements de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin », cette commission mérite incontestablement de continuer à œuvrer, car, comme vous le savez peut-être, selon les sondages, 80 % à 90 % des Alsaciens se disent attachés à leur droit local.
Or, faute de nomination, le mandat de ses membres ayant pris fin il y a près d’un an et demi maintenant, la commission du droit local d’Alsace-Moselle n’est plus autorisée statutairement à se réunir.
Aussi, j’aimerais savoir quand – je dis bien « quand » – le Gouvernement entend procéder au renouvellement des membres de cette commission. En effet, on entend dire ici et là que le Gouvernement envisagerait de ne pas procéder à ce renouvellement…
À quatre semaines de la mise en place de la collectivité européenne d’Alsace, les Alsaciens ne comprendraient pas que cette instance n’existe pas. Ce serait naturellement un coup très dur porté à l’Alsace naissante. Je vous remercie des précisions que vous voudrez bien apporter sur le sujet, madame la secrétaire d’État.
Monsieur le sénateur André Reichardt, je vous prie de bien vouloir excuser l’absence de mon collègue ministre de la justice, que vous interrogez sur la commission du droit local d’Alsace-Moselle.
Le garde des sceaux a fait examiner, à la suite de votre demande, les modalités du renouvellement des membres de cette commission, qui, comme vous le savez, a été créée par le décret du 23 janvier 2014 et n’a plus d’existence juridique depuis le mois de janvier 2019.
Il résulte en effet des dispositions de l’article R. 133-2 du code des relations entre le public et l’administration que les commissions administratives consultatives créées par décret le sont pour une durée maximale de cinq ans. L’absence d’existence légale de la commission fait donc obstacle à la nomination de nouveaux membres.
Conformément à la circulaire du 12 septembre 2018 du Premier ministre Édouard Philippe relative à la réduction du nombre des commissions consultatives, une reprise d’activité de la commission, qui serait en réalité analysée comme la création d’une nouvelle commission, devrait normalement être précédée de la suppression de deux autres commissions consultatives.
Le Gouvernement étant cependant particulièrement sensible aux spécificités et à la richesse du droit local d’Alsace-Moselle, qui bénéficie par ailleurs de l’expertise de l’Institut du droit local alsacien-mosellan, le ministre de la justice est tout disposé à travailler à la meilleure façon de les prendre en compte, en étroite concertation avec les élus et les représentants des trois départements concernés, et ce dans un cadre qui reste à définir.
Madame la secrétaire d’État, si vous voulez la révolution en Alsace, continuez comme ça !
Quoi qu’il en soit, je vous fais part de notre pleine disponibilité pour mettre en place le plus rapidement possible un organisme qui succéderait à cette commission, …
… afin de répondre à l’attente et de satisfaire des Alsaciens, qui étaient particulièrement satisfaits de disposer d’une telle structure.
La parole est à Mme Martine Filleul, auteure de la question n° 1363, adressée à Mme la ministre déléguée auprès du Premier ministre, chargée de l’égalité entre les femmes et les hommes, de la diversité et de l’égalité des chances.
Madame la ministre, procéder à une interruption volontaire de grossesse, ou IVG, est un droit accordé à toutes les femmes de notre pays depuis plusieurs décennies. Même si, en 2019, la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques du ministère des solidarités et de la santé, la Drees, fait état de 23 000 IVG, soit un chiffre en légère hausse, ce droit n’est toujours ni effectif ni garanti pour toutes.
Non seulement des professionnels de santé refusent toujours de pratiquer des IVG, en invoquant la clause de conscience, mais le manque de médecins et de sages-femmes dans certains territoires, qui sont de véritables déserts médicaux, et les fermetures de services éloignent de toute solution les femmes souhaitant y avoir recours.
Ce problème est avéré et aggravé dans mon département, le Nord, par une situation économique et sociale fortement dégradée, qui place les femmes au premier rang des personnes les plus en difficulté.
Plus que d’autres, ces femmes ont besoin d’un accompagnement, particulièrement dans ces moments difficiles où elles ont un choix à faire. Pourtant, les déserts médicaux subsistent, et l’accompagnement sur les questions liées à la vie sexuelle et contraceptive est encore limité ou peu accessible.
Or toutes les femmes, quels que soient leurs ressources ou leur lieu d’habitation, doivent pouvoir recourir à une IVG et bénéficier d’un accompagnement si elles le veulent. Il s’agit là d’une question de justice et d’égalité.
C’est pourquoi je souhaite connaître les mesures et initiatives que le Gouvernement compte mettre en œuvre pour favoriser un égal accès à l’information et aux moyens de contraception, qui ne sont toujours ni accessibles ni gratuits, et pour garantir un réel égal accès à ce droit fondamental que constitue, pour une femme, le recours à une IVG.
Madame la sénatrice, oui, le contexte européen et international, marqué par le recul que certains pays tentent d’imposer en matière d’IVG, suscite des inquiétudes.
Par conséquent, la France reste vigilante. À cet égard, le ministère chargé de l’égalité entre les femmes et les hommes collabore de façon étroite avec le ministère des solidarités et de la santé, qui pilote cette politique publique.
Le Gouvernement a mis en place de nombreuses dispositions pendant la crise sanitaire, pour maintenir l’accès des femmes à l’IVG et favoriser les IVG en ville, comme la promotion de la téléconsultation et l’allongement de deux semaines du délai des IVG médicamenteuses en ville, ce qui a bénéficié aux territoires en tension, comme les Hauts-de-France.
Au-delà de ces mesures, le Gouvernement a annoncé à la fin de 2019 un ensemble de dispositifs qui sont en cours de déploiement : l’inscription de l’IVG comme action prioritaire de la formation continue des médecins et des sages-femmes, la mise en place d’un annuaire exhaustif et actualisé de l’offre d’IVG dans chaque région, la mise en œuvre de plans d’actions ciblés par les agences régionales de santé, les ARS, et ce de façon systématique lorsque des territoires en tension sont identifiés.
Les taux de recours à l’IVG connaissent de fortes variations selon les territoires. Ils sont plus élevés dans les territoires d’outre-mer, en Île-de-France et dans le Sud-Est. Il n’est toutefois pas possible d’établir un lien direct entre le faible recours à ces interventions et les difficultés rencontrées au niveau de l’offre médicale, compte tenu de la diversité des facteurs entrant en ligne de compte dans la décision finale de recourir à une IVG.
Concernant la situation particulière des Hauts-de-France, le délai d’accès à l’IVG montre que cette région se situe parmi les huit qui déclarent des délais moyens supérieurs à huit jours.
L’ARS a été alertée d’une difficulté ponctuelle d’accès à l’IVG dans les établissements de santé de deux territoires. Cette difficulté serait liée à des congés maternité ou des arrêts de travail des personnels. L’ARS constate un nombre limité de praticiens participant à des IVG dans ces territoires, situation due notamment au départ à la retraite de médecins ayant contribué à la structuration de cette activité.
Face à ce constat, l’ARS travaille avec les établissements identifiés comme étant sous tension, afin de mieux impliquer les sages-femmes dans la pratique des IVG.
Je vous remercie de votre réponse, madame la secrétaire d’État, même si je ne peux me satisfaire de la comparaison avec les autres pays européens. En effet, la France se doit de rester exemplaire – j’allais dire moteur » – dans ce domaine.
Par ailleurs, j’attends de vous et de vos collègues, en particulier de Mme Elisabeth Moreno, que vous vérifiez que ce maillage territorial, sur lequel je vous interrogeais, soit vraiment susceptible d’apporter des réponses à toutes les femmes et dans tous les territoires, car je me permets d’insister : ce n’est pas le cas dans les Hauts-de-France.
Dans certaines zones de mon département, il y a encore beaucoup de travail à faire pour que le droit à l’IVG soit effectif pour toutes. Je compte donc sur vous, madame la secrétaire d’État, ainsi que sur vos collègues.
La parole est à Mme Catherine Deroche, auteure de la question n° 1267, adressée à M. le ministre des solidarités et de la santé.
Madame la ministre, j’appelle votre attention sur l’enjeu lié au diagnostic et à la prise en charge précoce du sepsis, autrement dit d’une septicémie, complication la plus grave des infections.
Le sepsis touche chaque année environ 30 millions de personnes et entraîne 6 millions de décès dans le monde, selon les chiffres de l’Organisation mondiale de la santé.
On compte en France au moins 180 000 personnes, de tout âge, victimes d’un sepsis chaque année. La mortalité est de 27 % et peut atteindre 50 % dans sa forme la plus sévère, que l’on appelle le choc septique. Il s’agit de la première cause de mortalité en service de réanimation et de l’une des premières causes de mortalité intrahospitalière.
Face à ces chiffres, les autorités, les spécialistes et les sociétés concernés se sont mobilisés. Reconnu comme l’un des meilleurs experts mondiaux du sujet et missionné par le Gouvernement, le professeur Djillali Annane a rendu ses préconisations dans un rapport intitulé Sepsis : tous unis contre un fléau méconnu, présenté en septembre 2019. La gravité est souvent liée à un diagnostic tardif et à une hétérogénéité dans la prise en charge des patients.
La précocité du diagnostic et un protocole de soins adapté sont donc au cœur des travaux. La délocalisation du diagnostic au plus près du patient, au sein des services d’urgence notamment, ainsi que l’élaboration d’un protocole national de prise en charge, adaptée du référentiel international de la Surviving Sepsis Campaign, apparaissent dès lors comme des pistes à considérer.
En tout état de cause, une véritable prise de conscience doit s’opérer, et des actions fortes doivent être mises en place. Je souhaiterais donc connaître, madame la ministre, les suites que le Gouvernement entend donner au rapport demandé au professeur Annane.
Madame la présidente Catherine Deroche, j’ai le plaisir de vous informer que les travaux visant à mettre en place les préconisations du rapport Sepsis : tous unis contre un fléau méconnu du professeur Djillali Annane et des sociétés savantes sont bien avancés.
Les recommandations relatives à l’amélioration du parcours de soins que vous évoquez sont en cours de rédaction par les sociétés savantes. Elles seront labellisées par la Haute Autorité de santé, la HAS, dès l’an prochain, et serviront de socle pour la formation initiale et continue, ainsi que la communication auprès des professionnels de santé.
En ce qui concerne la sensibilisation du grand public aux signes précurseurs du sepsis, notamment, les éléments issus de la Global Sepsis Alliance sont en cours d’adaptation. Elles seront relayées par l’association France Sepsis Association, créée en juillet dernier.
Si certains travaux ont pu connaître du retard en raison de la crise sanitaire actuelle, la recherche sur le sepsis a, quant à elle, bénéficié d’un intérêt approfondi, puisque, comme vous le savez, cette maladie est l’une des complications majeures de la covid-19.
De nombreux essais cliniques sur des molécules immuno-modulatrices sont en cours, et des appels à projets de Bpifrance pour l’amélioration du diagnostic du sepsis ont été lancés. La France avance donc à grands pas, madame la sénatrice.
Toujours en termes de recherche, le projet Sepsis porté par Djillali Annane figure parmi les vingt et un nouveaux lauréats de l’appel à projets Fédérations hospitalo-universitaires, ou FHU, qui a été annoncé en décembre 2019 et que vous évoquiez. Une plateforme épidémiologique nationale a par ailleurs été mise en place, ce qui permettra d’améliorer les connaissances sur les incidences du sepsis, ses caractéristiques et le suivi de son évolution.
Concomitamment, l’Agence technique de l’information sur l’hospitalisation, en lien avec la direction générale de la santé et les sociétés savantes, vient de finaliser la révision du fascicule de codage des pathologies infectieuses pour le programme de médicalisation des systèmes d’information. Ce document comporte de nouvelles consignes de codage du sepsis et sera diffusé auprès des professionnels de santé dès le début de l’année prochaine.
Ainsi, comme l’a souligné l’European Sepsis Alliance le 9 octobre dernier, le plan d’action que la France a engagé devrait être un modèle pour de nombreux pays. C’est un motif de satisfaction, qui nous oblige à poursuivre et à amplifier nos efforts en la matière.
Je vous remercie de toutes ces informations, madame la ministre. En effet, le rapport date de septembre 2019, mais ce travail a été amplifié, et il est d’autant plus d’actualité à cause de l’épidémie que nous avons connue et que nous vivons encore.
Je souhaite en effet que ces préconisations puissent trouver très rapidement une issue pour traiter cette maladie, qui touche de nombreux patients et qui a des conséquences souvent dramatiques.
La parole est à M. Olivier Cigolotti, auteur de la question n° 1292, adressée à M. le ministre des solidarités et de la santé.
Madame la ministre, ma question s’adresse à M. le ministre des solidarités et de la santé et porte sur les difficultés rencontrées par les établissements de santé privés d’intérêt collectif, tout particulièrement le centre hospitalier Sainte-Marie en Haute-Loire.
En effet, cet établissement fait partie d’une association à but non lucratif, qui est la seule structure du département à assurer des missions de service public en psychiatrie pour les enfants et les adultes.
La pénurie de professionnels de santé met en péril l’activité et la capacité de cet établissement à exercer ses missions. Les principales inquiétudes concernent bien sûr les praticiens en poste, mais également les recrutements. La pyramide des âges de cette structure devient inquiétante, avec au moins deux tiers de médecins âgés de plus de 50 ans : c’est un signal d’alerte fort.
Les écarts de rémunération, qui se creusent entre les grilles de la convention collective du 31 octobre 1951 et celle des praticiens hospitaliers, constituent en outre un obstacle à l’embauche. La suppression des trois premiers échelons de la grille des salaires des praticiens hospitaliers, décidée récemment, ne fait que renforcer cette inégalité.
C’est pourquoi le recours à l’intérim devient aujourd’hui inévitable : il permet de garantir la continuité des soins, mais cette option n’est absolument pas une solution durable, en raison de son coût élevé et de compétences parfois peu conformes à celles qui sont attendues.
D’autres obstacles propres au statut des établissements privés viennent s’ajouter à ceux que je viens de mentionner : la non-reconnaissance de l’exercice en établissement de santé privé pour le concours de praticien hospitalier, la quasi-impossibilité d’obtenir le détachement d’un centre hospitalier public vers ces établissements et, enfin, la faible attractivité du territoire.
Enfin, les établissements de santé privés, tels que le centre Sainte-Marie, souffrent du bien trop faible nombre d’internes dans leurs équipes, qui s’explique par leur mauvaise répartition sur le territoire, mais également par un défaut d’information délivré aux internes sur les activités des différentes filières.
À l’image du Ségur de la santé ou de l’attribution des primes exceptionnelles dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire, cette situation montre une nouvelle fois une distinction clivante entre les établissements sous statut public et les établissements sous statut privé.
Madame la ministre, je souhaiterais connaître votre position sur la place qui est réellement accordée aux établissements de santé privés d’intérêt collectif. Pourquoi ces derniers ne peuvent-ils pas bénéficier des mêmes autorisations en termes de recrutement que les établissements publics ?
Monsieur le sénateur Olivier Cigolotti, vous m’interrogez sur la place des établissements de santé privés d’intérêt collectif, les Espic, dans notre système de santé, ainsi que sur leur attractivité.
Comme vous le savez, notre système hospitalier repose sur plusieurs modèles d’établissement : le public, le privé, le non lucratif et le privé lucratif. L’action du Gouvernement vise à favoriser la coopération et la complémentarité des acteurs : il ne s’agit jamais de les mettre en concurrence. Cette coopération s’est du reste révélée particulièrement précieuse dans cette période de forte tension. Nous le voyons encore aujourd’hui avec la crise sanitaire.
À travers vous, je remercie d’ailleurs une fois de plus tous les établissements de leur mobilisation constante. Je saisis également cette occasion pour rappeler que les Espic bénéficieront très largement du Ségur de la santé, que ce soit la revalorisation des sages-femmes et des personnels non médicaux, le plan d’investissement ou encore la réforme du troisième cycle des études de médecine, qui ouvre la possibilité de réaliser des stages dans ces établissements, et accroît en conséquence leur attractivité.
Par ailleurs, comme vous le savez, les Espic bénéficient d’une certaine souplesse en matière d’embauche et de rémunération des médecins dans le cadre de leur convention collective, liberté que le statut n’offre pas aux établissements publics, dans lesquels des grilles encadrent les rémunérations des praticiens hospitaliers. Cette souplesse constitue un réel atout pour l’attractivité des Espic.
En outre, la loi du 24 juillet 2019 relative à l’organisation et à la transformation du système de santé favorise le développement de l’exercice mixte des praticiens entre secteur public et secteur privé. Les textes d’application de cette mesure seront prochainement publiés et auront un effet sur l’attractivité des carrières, tant dans le secteur public que dans le secteur privé.
Soyez assuré que le Gouvernement est attentif à la situation, à l’attractivité des Espic et à la reconnaissance de leur légitime place au cœur du système de santé français.
Loin du clivage que vous évoquez, nous entretenons avec les représentants de ces établissements des relations étroites et constructives. Ils ont d’ailleurs engagé des discussions avec les fédérations représentatives des établissements de santé privés, afin d’objectiver un éventuel différentiel d’attractivité entre secteur public et secteur privé, en tenant compte, bien sûr, de l’impact du Ségur de la santé.
Je vous remercie de votre réponse, madame la ministre.
Je pense effectivement qu’il y a urgence à faciliter le recrutement de professionnels de santé dans les Espic, car ils assurent dans certains territoires – c’est le cas en Haute-Loire – une réelle qualité de soins, aussi bien pour les adultes que pour les enfants.
La parole est à Mme Laure Darcos, auteure de la question n° 1299, adressée à M. le ministre des solidarités et de la santé.
Les départements assument près de 20 milliards d’euros de dépenses au titre des allocations individuelles de solidarité.
À lui seul, le revenu de solidarité active, ou RSA, représente 57 % du total de ces dépenses, soit plus de 11 milliards d’euros. C’est une charge qui ne cesse de s’alourdir, compte tenu de la revalorisation du montant de l’allocation décidée par l’État entre 2013 et 2017, et de l’augmentation constante du nombre de bénéficiaires depuis 2010.
J’ajoute que la crise économique est en train de jeter dans la pauvreté un nombre considérable de ménages et que les départements seront naturellement en première ligne pour assurer la solidarité nécessaire.
Plus que l’augmentation du nombre d’allocataires du RSA, c’est la compensation très insuffisante de l’État qui fragilise la situation financière des départements.
Dans ce contexte très incertain, l’accentuation de la lutte contre la fraude s’avère indispensable.
À titre d’exemple, dans mon département, l’Essonne, plusieurs actions pour détecter et sanctionner les actes délibérés d’omission de déclaration ou de fausse déclaration ont été mises en œuvre. Le conseil départemental a notamment instauré des amendes administratives et créé un service de contrôle des données. Le partage d’informations avec la caisse d’allocations familiales et Pôle emploi contribue également à rendre plus efficace la lutte contre la fraude.
Néanmoins, il faut aller plus loin… Le Gouvernement est-il prêt à donner aux départements la possibilité d’accéder au Fichier national des comptes bancaires et assimilés, le Ficoba, afin d’obtenir la liste des comptes des allocataires faisant l’objet d’un contrôle – il me semble important de souligner que le RSA est la seule allocation susceptible d’être versée sur le compte d’un tiers ?
Est-il prêt à leur octroyer la faculté de mener des contrôles a priori des ouvertures de droit au RSA ?
Est-il prêt, enfin, à leur permettre d’accéder à certaines informations du répertoire national commun de la protection sociale, le RNCPS ?
Toutes ces mesures sont indispensables pour améliorer la gestion de l’allocation et lutter contre la fraude. Une réponse favorable de votre part, madame la ministre, serait la bienvenue.
Le soutien à nos concitoyens les plus humbles est l’honneur de notre pays. Je crois que nous partageons tous cette préoccupation et que nous pouvons en être fiers, particulièrement en ces temps de crise.
Pour autant, la complexité des dispositifs d’aide sociale suscite autant de situations de non-recours que de situations de recours abusifs aux aides sociales.
C’est pourquoi, depuis le début des années 2010, les branches de régime général de la sécurité sociale et Pôle emploi détectent et sanctionnent les cas de fraude, parfois pour des montants élevés – pour un nombre croissant d’entre elles, d’ailleurs, l’intentionnalité de l’auteur de l’irrégularité n’est pas démontrée.
La branche famille, compétente en matière de contrôle s’agissant du RSA, a détecté 323, 7 millions d’euros de préjudices subis au titre des fraudes en 2019, soit 3, 6 fois plus qu’en 2010.
À lui seul, le RSA a représenté à peu près 46 % des fautes qualifiées en 2019. L’omission et les fausses déclarations de ressources constituent le premier mode opératoire des fraudes et fautes détectées. Les organismes sociaux mènent des actions de contrôle ex post, mais peuvent également prévenir la fraude en agissant ex ante.
Pour autant, la Cour des comptes, dans son rapport sur la lutte contre les fraudes, a relevé que les erreurs déclaratives des allocataires des caisses d’allocations familiales étaient la principale origine des trop-perçus de prestations. Le RSA et la prime d’activité figurent parmi les principales prestations affectées par ces erreurs.
La mise en place du dispositif de ressources mensuelles, regroupant la très grande majorité des données relatives aux ressources – revenus d’activité, prestations sociales, revenus du capital – permet de limiter les erreurs, volontaires ou non, par l’échange d’informations entre les sphères sociale et fiscale, à la suite de la réforme du prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu.
De nombreuses mesures sont d’ores et déjà mises en œuvre, pour agir efficacement contre la fraude au RSA. Les caisses d’allocations familiales ont déjà accès au Ficoba et au RNCPS.
Enfin, face aux difficultés exceptionnelles auxquelles sont confrontés les départements, leur baisse de recettes et l’augmentation des demandes, l’État leur proposera une expérimentation de recentralisation du financement du RSA. Le président du conseil départemental de Seine-Saint-Denis, notamment, a d’ores et déjà fait part de sa volonté que son département s’engage dans cette expérimentation.
Je vous remercie infiniment, madame la ministre, pour cette réponse extrêmement précise.
Je suis bien évidemment fière, en tant que conseillère départementale, de pouvoir défendre cette cause sociale, en particulier en ces temps difficiles – nous sommes tous d’accord sur ce point. Mais il y a aussi une question de justice à pouvoir allouer les prestations aux bonnes personnes.
Je pense que mon département sera également tout à fait partant pour intégrer la démarche d’expérimentation.
Le plus simple aurait été que, au-delà des caisses d’allocations familiales, les départements puissent également avoir accès au Ficoba.
La parole est à M. Michel Savin, auteur de la question n° 1315, adressée à M. le ministre des solidarités et de la santé.
L’article 59 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2020 a mis en place un parcours de soins global après le traitement d’un cancer.
Ce parcours de soins vise à améliorer la prise en charge des personnes malades, en leur proposant un accès systématique à des soins de support, notamment à des activités physiques et sportives. Il comprend spécifiquement la prise en charge d’un bilan d’activité physique pouvant, par la suite, déboucher sur une prescription d’activité physique, comme le prévoit l’article 144 de la loi du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé.
À ce jour, aucun décret d’application n’a été publié, ce qui ne permet pas de mettre en place ces parcours et de déployer la prescription d’activité physique, dont les effets sont pourtant indéniables sur la santé. C’est regrettable. Les effets de l’activité physique thérapeutique sont largement prouvés ; il est urgent que notre système de santé y ait recours. Les bénéfices, tant en termes médicaux qu’en termes économiques, ne sont plus à démontrer.
Aussi, pourriez-vous m’indiquer, madame la ministre, à quelle date le décret sera pris ? Par ailleurs, quel sera le montant précis de l’enveloppe budgétaire dédiée ? Pour quels bénéficiaires ?
Enfin, une fois ces bilans réalisés, les patients atteints du cancer devront être orientés. C’est pourquoi il faut encourager largement ces pratiques et renforcer la formation et l’information des professionnels. Il est urgent d’accompagner les patients, mais également les professionnels de santé.
Aussi, pourriez-vous m’indiquer votre calendrier sur ce dispositif, mais également vos intentions pour soutenir et développer le sport sur ordonnance en France ?
Sachez, monsieur le sénateur Savin, que, sur ce sujet, vous prêchez une convaincue ! Je fais partie des parlementaires qui avaient voté pour la première fois la prescription du sport sur ordonnance, lors de l’examen d’une loi sur la santé voilà quelques années.
Plus de 3 millions de personnes vivent aujourd’hui en France avec un cancer. Si le nombre de nouveaux cas diagnostiqués chaque année augmente, les progrès réalisés dans le diagnostic et les traitements ont permis de faire reculer la mortalité. Être atteint d’un cancer demeure une épreuve, bien sûr, pour les patients et ceux qui leur sont chers.
L’intérêt des soins de support en post-traitement sur la qualité de vie, notamment l’activité physique dont vous parlez, n’est plus à démontrer.
C’est pourquoi le Gouvernement a souhaité mettre en place un parcours d’accompagnement vers l’après-cancer, introduit à l’article 59 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2020.
Ce dispositif vise à améliorer la prise en charge des personnes malades, en proposant sur prescription, en fonction des besoins du patient, jusqu’à une année après le traitement et pendant un an, différentes consultations visant à dresser un bilan d’activité physique, psychologique nutritionnel, voire des consultations sur plusieurs de ces plans, notamment psychologiques.
Si la pandémie de la covid-19 a retardé la publication des textes réglementaires évoqués par vos soins, notamment en raison d’un retard accumulé dans les échanges avec les agences régionales de santé, les ARS, par ailleurs mobilisées dans la gestion de la crise, je vous informe néanmoins qu’un décret a été validé par le Conseil d’État le mardi 24 novembre. Il devrait donc être publié prochainement ; j’y veillerai. La publication des textes réglementaires et des instructions associées se fera pratiquement en simultané, soit avant la fin de l’année.
En conséquence, la mise en œuvre du parcours pourrait se faire entre la fin d’année et le début d’année prochaine. Les ARS seront chargées de sélectionner les structures qui proposeront ces parcours et devront établir une convention avec elles, afin de permettre leur financement.
Ce parcours post-cancer illustre notre volonté de développer le sport sur ordonnance, en permettant une prise en charge à 100 % des bilans d’activité physique adaptée et des soins de support. Ce dispositif devrait faciliter la transition entre hôpital et ville, tout en améliorant la qualité de vie des patients. La Gouvernement y est donc particulièrement sensible.
Je vous remercie, madame la ministre, de votre réponse concernant la publication de ce décret, qui était attendue. En revanche, on ne peut que regretter d’avoir perdu un an. Il est urgent que les dispositifs adoptés par le Gouvernement soient mis en œuvre plus rapidement par l’État.
Par ailleurs, le projet de loi de financement de la sécurité sociale prévoit une expérimentation similaire pour les personnes atteintes de diabète et d’hypertension artérielle. Espérons que la mise en œuvre sera beaucoup plus rapide pour ces pathologies que pour le cancer.
Enfin, il est désormais nécessaire de réfléchir – vous l’avez brièvement évoqué – au financement de ces séances d’activité physique thérapeutique et à une possible prise en charge des coûts, au moins partiellement, par la sécurité sociale et les mutuelles.
Ayant visité certaines structures, j’ai effectivement pu constater que certains malades ne peuvent pas prendre en charge le coût de ces séances, ce qui est bien sûr regrettable.
La parole est à M. Michel Canevet, auteur de la question n° 1387, adressée à M. le ministre des solidarités et de la santé.
Le Gouvernement a décidé de revaloriser la carrière d’un certain nombre de personnels des établissements de santé dans le cadre des accords du Ségur de la santé. Nous nous en réjouissons, car il était nécessaire de prendre en compte les conditions de travail et de proposer des rémunérations qui soient à la hauteur des missions effectivement accomplies.
Néanmoins, des mécontentements s’expriment aujourd’hui. En effet, certains professionnels intervenant également dans le domaine des soins ne comprennent pas pourquoi ils seraient exclus du bénéfice de la prime.
Je pense, en particulier, aux services de soins infirmiers à domicile, qu’ils dépendent des collectivités territoriales – j’en ai présidé un au sein de la communauté de communes du Haut Pays bigouden –, des mutuelles, voire des hôpitaux.
Je lisais ce matin dans la presse que les personnels du service de soins infirmiers à domicile rattaché au centre hospitalier de Douarnenez se plaignaient de cet état de fait. Il y a également des services d’addictologie, comme, par exemple, celui qui dépend de l’hôpital de Quimperlé. Tous ces exemples sont tirés de mon département du Finistère.
Ces personnels, donc, ne comprennent pas pourquoi ils ne pourraient bénéficier de la prime de 183 euros négociée dans le cadre des accords du Ségur de la santé.
Je souhaite vous interroger à ce sujet, madame la ministre, car il me paraît légitime – de nombreux autres sénateurs et l’ensemble des responsables sur le terrain me rejoignent sur ce point – de faire en sorte que toutes les personnes réalisant les mêmes missions puissent bénéficier des mêmes conditions salariales.
Permettez-moi tout d’abord de vous remercier pour cette question, monsieur le sénateur Canevet. Elle me permet, une nouvelle fois, de saluer l’engagement des professionnels de santé que vous évoquez ce matin, face à une crise sanitaire sévissant depuis de nombreux mois. Ils nous ont bien sûr tous interpellés.
Pour répondre à une demande ancienne et légitime, l’État a conclu les accords du Ségur de la santé, qui, comme vous le savez, se sont traduits par un investissement massif en faveur de revalorisations salariales dans les hôpitaux et les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes, ou Ehpad, ainsi que par une série de réformes structurelles.
Si les partenaires du Ségur de la santé ont souhaité une mise en œuvre prioritaire pour les établissements de santé et pour les Ehpad, la question des établissements sociaux et médico-sociaux a également été abordée.
S’agissant des revalorisations salariales d’ores et déjà souhaitées, un temps d’expertise complémentaire a été jugé nécessaire pour faire la lumière sur des situations qui – vous le dites vous-même – sont extrêmement diverses en termes de conditions de travail ou d’attractivité selon les différents métiers.
Par ailleurs, vous le savez également, le paysage des établissements sociaux et médico-sociaux est très éclaté, relevant de différents financeurs. Ne faisons pas semblant de croire que le sujet est simple à aborder et à régler !
Ce travail, qui était prévu par les accords du Ségur de la santé, a commencé. Après une première rencontre avec les partenaires sociaux de la fonction publique hospitalière, une organisation est en train d’être posée pour aboutir rapidement. Le Gouvernement a demandé à Michel Laforcade, qui a une complète légitimité dans ce domaine, en tant qu’ancien directeur général d’ARS, de réaliser l’expertise nécessaire à une prise de décision éclairée.
Je précise tout de suite que nous ne passerons pas par l’établissement d’un rapport ; nous irons directement à la solution. Encore faut-il trouver la bonne solution, le bon dispositif… M. Laforcade doit conduire, dans les semaines à venir, une négociation avec les acteurs que vous évoquez, afin de présenter des propositions au Gouvernement au premier trimestre 2021.
J’apprécie vos propositions pragmatiques, madame la ministre.
Il est important que l’on puisse évoluer sur le sujet, car, pour nous, le libre choix du lieu de résidence – en établissement ou à domicile – doit être particulièrement respecté. Il serait préjudiciable que les personnels intervenant auprès de ceux qui ont fait le choix de rester à domicile soient pénalisés financièrement par rapport à ceux qui travaillent en institution. Vous comprenez bien que la situation n’est pas tenable.
C’est aussi une question d’attractivité des métiers. On voit bien que les responsables d’établissements et de services rencontrent des difficultés pour recruter, alors même que la population de demandeurs d’emploi reste assez élevée.
Il faut donc réunir les conditions pour garantir l’attractivité de ces métiers, et nous comptons sur une évolution rapide de ce dossier.
La parole est à Mme Monique de Marco, auteure de la question n° 1342, transmise à Mme la ministre des armées.
Ma question s’adresse également au ministre de la santé.
Le service de santé des armées a vu, ces dernières années, une politique de réduction de ses coûts, avec, notamment, la fermeture de l’hôpital militaire du Val-de-Grâce à Paris. En Gironde, c’est l’hôpital Robert-Picqué, situé à Villenave-d’Ornon, dont la fermeture est programmée pour 2021.
L’hôpital d’instruction des armées Robert-Picqué accueille 80 % de civils. Il est reconnu pour la compétence de son personnel et la qualité des soins. Il dispose d’une situation privilégiée, d’un accès facile et dessert toute la zone sud de la métropole bordelaise, soit un bassin de vie de près de 200 000 personnes. Il traite 28 000 urgences par an et possède 242 lits d’hospitalisation.
Cet hôpital, rénové en 2001, dispose des différentes certifications et accréditations de qualité pour continuer à fonctionner. Il est également l’un des rares établissements ayant encore une structure pavillonnaire pour prendre en charge, dans de bonnes conditions, les patients infectés. Il est en outre doté d’un héliport, qui ne pourrait être transféré nulle part ailleurs.
L’hôpital Robert-Picqué a rendu de grands services lors de la première vague de l’épidémie. En augmentant sa capacité d’accueil de 10 à 15 lits en réanimation, il a pu accueillir une dizaine de patients du Grand Est. L’hôpital est plus que jamais actif lors de cette deuxième vague, avec ses services de soins, notamment les urgences, et la réanimation.
Je vous demande donc, madame la ministre, que soit réétudié le transfert de ses activités pour répondre à la crise sanitaire actuelle, ainsi qu’aux futures pandémies, malheureusement prévisibles.
Renoncer à la fermeture de l’hôpital Robert-Picqué donnerait un sens à la lutte pour préserver la qualité de la santé publique et serait également un signal fort à destination de tous les personnels de santé qui luttent au quotidien pour sauver des vies.
Madame la sénatrice de Marco, je vous remercie tout d’abord des paroles que vous avez eues pour les médecins et personnels de l’hôpital Robert-Picqué, qui, effectivement, ont réalisé un important travail dans cette crise sanitaire.
L’évolution de l’hôpital Robert-Picqué entre dans le cadre du projet du service de santé des armées dit « SSA 2020 ».
Ce projet a un objectif : faire en sorte que le service de santé des armées soit essentiellement tourné vers le soutien aux forces armées, ce qui est sa mission prioritaire, pour répondre aux contrats opérationnels de nos armées et, bien sûr, poursuivre la montée en compétences de ses médecins, de ses infirmiers et de tous ses personnels, afin que ceux-ci puissent également répondre à ces objectifs opérationnels.
Le rapprochement des hôpitaux, notamment l’hôpital Robert-Picqué, avec la santé publique vise, lui aussi, des objectifs très précis.
Il s’agit d’améliorer l’offre de soins sur le territoire mentionné – le territoire sud de la métropole bordelaise, qui est en plein développement – et, pour le ministère des armées, de répondre aux besoins des armées ; je le répète, c’est garder la compétence des médecins, notamment la compétence des aptitudes des militaires, et garder des lieux de soins et de consultation pour les militaires et les blessés militaires.
Le projet Bahia, construit avec l’hôpital Bagatelle, qui est tout proche, comprend plusieurs phases.
La première a été réalisée : c’est un espace de consultation pour 240 000 consultations externes, avec des plateaux réservés aux besoins des militaires.
La deuxième, qui va démarrer, concerne une extension des plateaux techniques sur pratiquement 20 000 mètres carrés. Elle concerne les urgences, dont vous parliez, madame la sénatrice, qui sont conçues pour accueillir 12 000 patients et en accueillent aujourd’hui 28 000 – dans le projet nouveau, ce chiffre sera porté à 40 000. Elle concerne aussi le service de réanimation, qui passera de 19 à 30 lits, un service d’imagerie beaucoup plus important, 14 blocs opératoires modernes et des services ambulatoires.
Comme vous pouvez le constater, il s’agit, non pas d’une régression, mais bien d’une augmentation de l’offre de soins sur la métropole bordelaise, avec ce projet d’ensemble civilo-militaire Bahia, qui a connu un démarrage vigoureux. Nous ne faisons pas disparaître un hôpital militaire ; c’est une offre de soins beaucoup plus étayée qui est proposée sur ce territoire.
Je vous remercie de votre réponse, madame la ministre.
Toutefois, au vu de la pandémie actuelle et d’autres qui, malheureusement, pourraient survenir dans le futur, nous avons besoin d’un vrai service public de la santé. Il faut donc anticiper les structures d’accueil, et c’est pourquoi je ne puis pas me satisfaire de cette réponse.
La fusion avec la maison de santé protestante de Bordeaux-Bagatelle se fait sur un site restreint de 7 hectares, alors que l’hôpital Robert-Picqué en couvre 25, et, selon les calculs, 600 emplois seraient perdus – c’est un nombre très élevé !
En outre, à ma connaissance, l’hôpital Robert-Picqué est le seul centre de traitement des blessés radio-contaminés, en convention avec les centres nucléaires de Blaye et de Golfech.
La parole est à Mme Hélène Conway-Mouret, auteure de la question n° 1360, adressée à M. le ministre de l’Europe et des affaires étrangères.
Ma question porte sur la diminution, voire la suppression de certaines missions de notre service public dans nos postes consulaires à l’étranger.
Ces évolutions sont le résultat des coupes annuelles dans les effectifs, au nom d’une certaine rationalisation ou modernisation – un euphémisme, en fait, pour cacher la triste réalité de suppressions de postes visant à réaliser les économies demandées, chaque année, par Bercy.
Ainsi, 231 postes ont été supprimés entre 2018 et 2020. Le Gouvernement a annoncé l’arrêt de l’hémorragie pour 2021 ; espérons que cet arrêt se pérennise.
Madame la ministre, j’aimerais, à partir de quelques exemples concrets, vous démontrer l’impact que la diminution de ces missions peut avoir sur les services offerts à la personne.
Je commencerai par la suppression de la compétence de signature des certificats de vie par les consulats. Les Français sont désormais invités à faire signer ces documents par les autorités locales, qui, souvent, refusent parce que le formulaire n’est pas dans la langue locale ou que cet acte ne leur semble pas relever de leur compétence. Sans ce document, la Caisse nationale d’assurance vieillesse, la CNAV, ne procède pas au versement des pensions.
Autre exemple, à Los Angeles, le consulat de France a sous-traité la délivrance des visas à une société privée. Or, au cours de la crise sanitaire, cette société n’a pas été reconnue pendant plusieurs semaines comme étant une activité économique essentielle. Les ressortissants français ou étrangers ne pouvaient donc plus obtenir de visas en Californie et devaient s’adresser à l’ambassade de France, située à Washington…
La suppression de l’accueil téléphonique dans les postes consulaires pose aussi de sérieux problèmes pour les prises de rendez-vous ou d’information, qui ne peuvent se faire que par internet, de nos compatriotes n’ayant pas la faculté de le faire par ce biais.
Les exemples sont nombreux, mais je n’ai pas le temps, ici, de tous les énumérer.
Madame la ministre, je souhaiterais que vous nous indiquiez si de nouvelles missions de service public exercées par les postes consulaires sont appelées à se réduire ou disparaître dans les prochains mois.
Vous m’interrogez, madame la sénatrice Conway-Mouret, sur les services consulaires, qui sont particulièrement importants et indispensables à nos compatriotes établis ou de passage à l’étranger, et qui assurent, effectivement, une très grande diversité de missions.
D’ailleurs, cela fait de la France une exception au sein des pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques, l’OCDE, et de l’Union européenne.
Je vais essayer d’apporter une réponse sur plusieurs situations précises que vous avez évoquées.
S’agissant des certificats de vie, la Caisse nationale d’assurance vieillesse prévoit effectivement que les pensionnés doivent se présenter auprès des autorités locales pour faire compléter un certificat de vie. Dans le cas où les autorités locales ne seraient pas fiables ou à même de livrer ces documents, les consulats restent bien sûr compétents pour le faire.
S’agissant de l’établissement d’actes notariés – vous n’en avez pas parlé, mais c’est important –, il y a eu une grande concertation avec le Conseil supérieur du notariat et la compétence notariale des postes consulaires a été restreinte partout où des alternatives locales par des experts compétents s’offraient à nos compatriotes pour un meilleur service.
Un décret a même été publié, le 20 novembre, qui pérennise au-delà de l’état d’urgence la procuration notariée à distance. C’est, je crois, une évolution très positive pour les Français à l’étranger.
S’agissant des visas, leur nombre a doublé en dix ans, pour atteindre, aujourd’hui, un volume de 4, 3 millions de visas en 2019, alors que le nombre d’agents travaillant dans ces services est resté stable. La solution a donc été d’externaliser la collecte des demandes de visas auprès d’un prestataire, comme le fait, d’ailleurs, l’ensemble de nos grands partenaires.
Cette externalisation permet de concentrer le travail de nos agents sur l’instruction des demandes et la délivrance des visas, soit les étapes à plus forte valeur ajoutée, si je puis m’exprimer ainsi, dans ce traitement des dossiers.
S’agissant de la possibilité de joindre les consulats par téléphone, plus de 100 000 appels ont été gérés de la mi-mars à la mi-juin par le consulat général de France à Madrid. Ce n’est qu’un exemple, mais il montre tout de même que les permanences téléphoniques existent bien dans nos consulats.
Les projets de modernisation sont nombreux, à l’image de la plateforme de réponses téléphoniques et e-mails France consulaire, qui sera joignable par les usagers vingt-quatre heures sur vingt-quatre, partout dans le monde.
Le temps me manque pour citer tous les grands projets de simplification, mais je vous ferai passer, madame la sénatrice Conway-Mouret, une réponse plus détaillée.
Nous observons depuis longtemps que nos postes consulaires opèrent à flux tendu, et la crise sanitaire a vraiment révélé les difficultés auxquelles nos équipes trop réduites en personnel sont confrontées. À cette occasion, elles ont fait des miracles, mais on ne peut pas compter simplement sur cela !
L’annonce de l’arrêt des suppressions de postes est une excellente nouvelle, mais nous devons, me semble-t-il, saisir cette occasion pour remettre à plat les missions et, surtout, revoir nos ambitions de dématérialisation. Vous avez cité Madrid, madame la ministre : c’est un poste encore ouvert. Je pense, moi, à tous ceux qui ont fermé !
Je voudrais donc inviter le Gouvernement à associer, à la fois, les parlementaires et les conseillers des Français de l’étranger, qui sont tout de même les mieux informés de ce qui se passe sur le terrain, à une réflexion visant à anticiper et, surtout, éviter les désagréments – j’en ai cité quelques-uns – rencontrés par nos compatriotes dans leurs relations avec l’administration.
La parole est à Mme Corinne Imbert, auteure de la question n° 1296, adressée à Mme la ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation.
Madame la ministre, la bourse au mérite pour les lycéens et l’aide au mérite pour les étudiants sont des aides accordées aux élèves les plus méritants.
La première est attribuée après l’obtention d’une mention « bien » ou « très bien » au diplôme national du brevet, et avec l’engagement de poursuivre avec assiduité une scolarité jusqu’au baccalauréat, tandis que la seconde est attribuée après l’obtention d’une mention « très bien » au baccalauréat et l’inscription dans un établissement supérieur.
La principale contradiction actuelle réside dans le fait qu’il est nécessaire de bénéficier de la bourse de lycée ou d’une bourse sur critères sociaux pour pouvoir prétendre à la bourse au mérite ou à l’aide au mérite.
Pour poursuivre dans les définitions, je vous donnerai, mes chers collègues, celle du terme « mérite », ainsi rédigée dans le dictionnaire Larousse : « ce qui rend quelqu’un (ou sa conduite) digne d’estime, de récompense, eu égard aux difficultés surmontées ».
Madame la ministre, la difficulté pour un jeune ou une jeune réside-t-elle nécessairement dans le statut social de ses parents ? Le mérite ne peut-il pas s’illustrer dans le fait, pour un jeune ou une jeune, de surmonter un deuil, le divorce de ses parents, de se diriger vers une voie qui n’était pas souhaitée par son cercle familial ?
Plus généralement, le mérite ne consiste-t-il pas, tout simplement, à réussir là où beaucoup échouent, et cela même sans poser la question de l’origine sociale du collégien ou du lycéen, qui, à force de travail, obtient une mention ?
À une époque où la classe moyenne éprouve un sentiment grandissant d’injustice en matière de fiscalité, il serait peut-être opportun d’envoyer un signal fort, en permettant à de nombreux élèves et étudiants issus de cette classe sociale de bénéficier de ce dispositif d’aide. En effet, bon nombre de familles sont ostracisées de toutes les aides sociales, alors même qu’elles ne respirent pas l’opulence.
Pour toutes ces raisons, madame la ministre, j’aimerais connaître votre position sur une possible modification des règles d’attribution de la bourse et de l’aide au mérite, afin que la notion même de mérite retrouve son sens originel.
Madame la sénatrice, vous interrogez la ministre de l’enseignement supérieur sur les critères d’attribution des bourses au mérite.
Je rappelle tout d’abord que l’accompagnement social des étudiants figure parmi les priorités du Gouvernement, tout particulièrement en cette période de crise. Cette année, 2, 3 milliards d’euros y sont consacrés, dont 2, 2 milliards d’euros dédiés au versement des bourses sur critères sociaux, qui sont autant de garanties de la réussite étudiante et de la lutte contre la précarité.
Vous mentionnez plus précisément les bourses au mérite. Elles existent depuis 2015 et concernent, pour la rentrée 2020, 38 000 jeunes pour un budget total de 34, 4 millions d’euros. En s’adressant aux boursiers, elles répondent aux dispositions législatives en vigueur. En effet, l’article L. 821-1 du code de l’éducation indique qu’il convient de privilégier « l’aide servie à l’étudiant sous condition de ressources afin de réduire les inégalités sociales ».
Nous assumons cette priorité donnée à la réduction des inégalités et aux jeunes les plus précaires. Toutefois – vous l’avez dit vous-même –, elle n’exclut pas l’engagement envers les autres familles, qui est indispensable. Je pense notamment aux classes moyennes aux revenus les plus modestes, qui doivent elles aussi bénéficier de ces dispositifs.
Plusieurs mesures réformant le système des bourses ont permis d’aider davantage les étudiants issus de ces familles. Ainsi, grâce à la création d’un échelon 0 bis, des dizaines de milliers de jeunes ont pu en bénéficier.
Les résultats sont indéniables : le nombre de bénéficiaires d’une bourse sur critère social s’est fortement accru. Il est passé de 471 000 étudiants en 2007-2008 à 718 000 étudiants en 2019-2020, soit une hausse de 52 %. Cette croissance est supérieure à celle de la population étudiante, où le taux de boursiers est passé de 21 % à 37 %. En 2007, 1, 3 milliard d’euros étaient consacrés aux bourses sur critères sociaux : ce montant a été porté à 2, 2 milliards d’euros en 2019, soit une augmentation de 62 %.
Madame la sénatrice, le double effet de l’élargissement du champ des boursiers et de l’augmentation du nombre de bacheliers obtenant une mention – le taux est passé de 3, 2 % à 10, 9 % pour la session 2020 – répond à ces objectifs.
Vous avez raison : le mérite de chacun doit être récompensé. Les cérémonies en préfectures permettent d’ailleurs d’honorer tous les jeunes qui ont obtenu d’excellents résultats !
Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse.
Je ne nie pas les efforts budgétaires accomplis pour récompenser les lycéens les plus méritants. Je redoute simplement que la forte augmentation du nombre de boursiers ne soit le signe d’une paupérisation : j’espère que cette hausse résulte uniquement de l’élargissement des critères.
Le Président de la République déclarait voilà quelques semaines qu’il n’était pas facile d’avoir 20 ans en 2020. Je sais qu’il s’exprimera dans deux jours face à la jeunesse. La notion de mérite doit être remise au goût du jour : ce n’est pas une valeur de l’ancien monde. C’est grâce au mérite que notre jeunesse pourra reprendre espoir en l’avenir !
La parole est à M. Jean-Pierre Decool, auteur de la question n° 1325, adressée à M. le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports.
Madame la secrétaire d’État, en 2007, l’enseignement du flamand occidental a donné lieu à une expérimentation saluée, en 2010, par un rapport d’inspection favorable à son ajout dans la circulaire Lang et à l’extension de son enseignement.
Ce rapport fut aussi élogieux qu’ignoré. La poursuite de cet enseignement est tolérée, mais la continuité pédagogique au collège n’est pas assurée, malgré l’adhésion de 80 % des familles concernées.
Au mois de septembre 2019, nous n’avons pu que constater le non-remplacement du seul enseignant de flamand occidental à la suite de son départ à la retraite. À ce jour, aucun enseignant n’a été nommé pour le remplacer.
Une délégation menée par le président de l’institut de la langue régionale flamande a été reçue par la rectrice le 11 octobre dernier, dans un climat compréhensif.
La reprise d’une expérimentation au lycée et, par voie de conséquence, au collège et à l’école primaire semble en bonne voie. Néanmoins, la non-inscription du flamand occidental dans la circulaire relative aux langues régionales bloque toutes les évolutions de ce dossier, malgré un terreau très favorable : la région des Hauts-de-France soutient la création d’un office public du flamand.
Je précise que l’assimilation du flamand occidental au néerlandais n’a pas lieu d’être. Cette conception inique a donné lieu à de nombreux cas de diglossie chez nos amis belges transfrontaliers, apprenant le néerlandais à l’école et parlant le flamand occidental dans leur vie sociale.
Dans le Nord, les élèves sont impatients de renouer avec leur héritage culturel et les parents d’élèves sont pressés que l’école de la République accepte les langues régionales comme des réalités.
Nous sommes en mesure de proposer des enseignants. Ma question est donc la suivante : allez-vous ajouter le flamand occidental à la liste des langues régionales reprise dans la circulaire 2017-072 du 12 avril 2017 ?
Monsieur le sénateur, je vous remercie de votre question, qui me donne l’occasion de rappeler combien le ministère de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports est attaché à la préservation et à la transmission des diverses formes du patrimoine linguistique et culturel des régions françaises.
La situation de l’enseignement des langues régionales fait l’objet de la plus grande attention dans les académies et dans les territoires concernés.
Nous reconnaissons et assurons l’enseignement de nombreuses langues régionales, dans le cadre de programmes précis. Actuellement – vous venez de le dire –, le flamand occidental ne figure pas sur la liste établie par le ministère. C’est pourquoi il n’existe pas de programme relatif à l’enseignement de cette langue, pour le premier ou le second degré, ni de ressources nationales.
Cela étant, le ministère étudie attentivement la possibilité de le développer au regard de nombreux critères : l’étendue géographique de la zone dans laquelle la langue est pratiquée, la proximité entre le flamand et le néerlandais, reconnue par de nombreux spécialistes de la langue, ainsi que le nombre d’élèves concernés.
L’expérimentation menée depuis 2007 dans l’académie de Lille concernait, pour l’année scolaire 2018-2019, un ensemble de 92 élèves volontaires répartis entre trois écoles et trois niveaux de classe, CE2, CM1 et CM2. L’heure hebdomadaire de flamand occidental était incluse dans le volume horaire standard d’enseignement.
Les élèves et les familles n’ont pas souhaité poursuivre cet apprentissage au-delà de l’école élémentaire. Parvenu à son terme, ce cycle d’expérimentation n’a donc pas débouché sur une dynamique de développement permettant la poursuite de l’action. Il est du reste à noter qu’aucune réclamation de parent d’élève ne nous a été communiquée par l’inspecteur de la circonscription.
Toutefois, le flamand occidental peut être valorisé par le biais d’autres dispositifs existants. Je pense notamment aux activités éducatives et culturelles complémentaires conduites dans le temps périscolaire, lesquelles peuvent être confiées à des acteurs extérieurs.
Enfin, nous restons très attentifs aux moyens permettant aux élèves volontaires de poursuivre cet apprentissage.
Madame la secrétaire d’État, dois-je vous rappeler que vous vous adressez à un élu de terrain ? Vous dites que les parents n’ont pas souhaité la poursuite de cet enseignement : forcément ! L’encadrement et l’accompagnement se sont réduits comme peau de chagrin. Comment voulez-vous qu’ils adhèrent à un dispositif dont ils savent à l’avance qu’il ne sera pas soutenu ?
En Flandre, les noms des rues et des villages sont écrits en flamand. Ne privez pas nos jeunes de leur histoire, de leurs racines et de leur patrimoine !
La parole est à M. Pierre Louault, auteur de la question n° 1339, adressée à M. le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports.
Madame la secrétaire d’État, je me permets de vous interpeller après avoir appris par les maires que les inspections académiques avaient pour consigne de ne plus prendre en charge les accompagnants des élèves en situation de handicap (AESH) sur le temps périscolaire.
En 2013, les parlementaires votaient la loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République, où figurait le principe d’inclusion scolaire de tous les enfants, sans aucune distinction.
Ce principe est essentiel à notre système éducatif : il évite de reléguer les élèves en situation de handicap. Ces derniers sont trop souvent mis de côté et leurs parents sont, dès lors, placés dans de grandes difficultés, étant tenus de s’adapter à un système administratif complexe.
Aujourd’hui, avec cette nouvelle consigne, l’État revient sur ses promesses et renonce à exercer son rôle : il se désengage en refusant de prendre en charge le temps périscolaire des AESH. Pourtant, ces accompagnants doivent rester au côté des élèves en difficulté, même lors de la pause déjeuner.
L’État va donc demander aux communes, qui reçoivent de moins en moins de dotations, de prendre en charge cette dépense supplémentaire. Or, dans les territoires ruraux, où les regroupements pédagogiques sont nombreux, les élèves concernés ne sont majoritairement pas originaires de la commune où ils sont scolarisés.
C’est à l’État et, plus particulièrement, à l’éducation nationale, et non aux communes, de prendre en charge les AESH. Ce débat a d’ailleurs déjà eu lieu au Conseil d’État, au sein des tribunaux et devant le Défenseur des droits. Je vous renvoie à la décision du Conseil d’État du 20 avril 2011 et à l’arrêt de la cour administrative d’appel de Rennes du 25 juin 2018.
Pourquoi une telle consigne a-t-elle été donnée aux inspections académiques ? Comment votre ministère va-t-il prendre en charge le temps périscolaire des AESH si les inspections académiques ne le font plus ?
Monsieur le sénateur, je vous remercie de votre question, qui me permet de lever un malentendu et de clarifier la situation.
Tout d’abord, ni le ministre ni ses services n’ont demandé de suspendre la prise en charge financière des AESH pendant la pause méridienne ou le temps périscolaire. Je pense que ce malentendu résulte de la décision rendue par le Conseil d’État le 20 novembre dernier sur ce sujet précis.
Jean-Michel Blanquer avait eu l’occasion de le rappeler devant la représentation nationale, notamment à la suite d’une question de Mme Françoise Gatel : la répartition des compétences entre l’État et les collectivités territoriales devait être clarifiée et les décisions du Conseil d’État de 2011, que vous citez dans votre question, ne pouvaient faire jurisprudence, dès lors qu’elles avaient été rendues dans le cadre de référés.
Plusieurs pourvois en cassation ont été introduits par les services du ministère de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports, afin d’obtenir du Conseil d’État qu’il tranche définitivement cette question.
C’est chose faite depuis le 20 novembre dernier. Le Conseil d’État a ainsi clairement jugé, par une décision de section – cette procédure témoigne de l’importance que la plus haute juridiction administrative a accordée à cette question –, qu’il appartenait aux collectivités territoriales de prendre en charge l’accompagnement des enfants en situation de handicap dans le cadre des activités périscolaires ou de restauration scolaire qu’elles organisaient.
Cette décision n’est pas vraiment une surprise. Elle correspond à la lecture que le ministère de l’éducation nationale a toujours faite des dispositions législatives applicables.
Toutefois, je tiens à apporter une précision. Aux rectorats qui se heurtaient à des refus récurrents des maires d’assumer la prise en charge de ces enfants sur les périodes relevant de leurs compétences, le ministre avait demandé d’accepter de prendre en charge le coût de l’accompagnement dans l’attente de la décision du Conseil d’État. En prenant cette décision, son seul but était de garantir le meilleur accueil de ces élèves.
Monsieur le sénateur, je vous l’assure : il n’est pas question de remettre brutalement en question ces prises en charge. Au contraire, le ministre a demandé à ses services de se mettre en rapport avec les services de Sophie Cluzel et Jacqueline Gourault afin de trouver les solutions concrètes et opérationnelles permettant de garantir les meilleures conditions de prise en charge de ces enfants dans nos écoles.
Madame la secrétaire d’État, à vous entendre, les inspections académiques devraient maintenir la prise en charge de ces enfants jusqu’à nouvel ordre. Je m’en réjouis, mais ce n’est pas vraiment ce que les maires ont compris !
La parole est à Mme Brigitte Lherbier, auteur de la question n° 1367, adressée à Mme la ministre déléguée auprès du ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports, chargée des sports.
Madame la secrétaire d’État, depuis le confinement, les activités physiques et sportives sont interdites dans les salles de sport. Au mois de septembre dernier, de nombreux sportifs amateurs ont pourtant pris une licence, souvent onéreuse, afin de pratiquer leur discipline.
Nombre d’entre eux sont inquiets. La dernière saison s’est terminée prématurément au mois de mars dernier et cette nouvelle saison semble d’ores et déjà compromise.
Les sportifs subissent une double injustice : non seulement ils ont payé une licence pour pratiquer un sport qui leur est désormais interdit, mais ils sont dans l’impossibilité de s’entraîner efficacement.
Assimilées aux sportifs amateurs, les équipes réserves des clubs professionnels sont privées de championnat et d’entraînement. Leurs joueurs sont pourtant de jeunes espoirs du sport français. Alors que la France accueillera les jeux Olympiques en 2024, la formation de ces talents sportifs en devenir est compromise.
Par ailleurs, la distinction opérée entre mineurs et majeurs semble peu pertinente. Elle place les associations sportives dans la difficulté. Ces dernières font également face à des demandes, légitimes, de remboursement des licences qu’elles sont malheureusement dans l’impossibilité d’honorer. En effet, le produit de la licence est versé, non pas à l’association, mais à la fédération à laquelle elle appartient.
Je tiens à saluer le plan d’action en faveur du sport, qui apporte un soutien financier nécessaire aux fédérations. Toutefois, les présidents d’association m’ont alertée sur le fait que, pour la plupart des clubs, le chiffre d’affaires affecté ne se matérialiserait que lors de la saison suivante. Souvent, le budget de cette année a été bouclé au mois de mars dernier avec les nombreux partenaires publics et privés, mais la crise frappera durement les budgets de la saison prochaine. De nouvelles aides seront alors certainement nécessaires.
Madame la secrétaire d’État, nos associations sportives, si riches de leurs bénévoles, sont désormais au bord de l’asphyxie.
Humainement, elles assistent à un désengagement de leurs forces vives. Financièrement – vous le savez –, elles sont exsangues. Sportivement, à la veille des jeux Olympiques de 2024, elles craignent un abaissement particulièrement marqué du niveau de nos athlètes, qui ne sont pas tous professionnels.
Pouvez-vous nous indiquer les mesures que vous allez prendre pour desserrer l’étau dans lequel se trouvent les associations sportives ?
Madame la sénatrice, je vous remercie de votre question tout à fait pertinente, au cœur de notre actualité.
Le sport fait bel et bien partie des secteurs les plus touchés par la covid, sur le plan tant sanitaire qu’économique. On le mesure d’ailleurs à la diminution significative du nombre de licenciés. C’est pourquoi nous agissons pour l’avenir du sport, qu’il soit amateur ou professionnel.
Le Président de la République a annoncé, il y a deux semaines, un certain nombre de mesures concrètes en ce sens.
D’abord, c’est le retour depuis samedi dernier des mineurs dans les clubs et les associations pour les pratiques de plein air. En outre, puisque ces structures font face à d’importantes difficultés économiques – vous l’avez très justement souligné –, un certain nombre de dispositifs ont été déployés et devraient être reconduits l’année prochaine. Je pense notamment au fonds de solidarité et à l’activité partielle, dont bénéficient les associations sportives employeuses. Je pense aussi au fonds d’urgence de l’Agence nationale du sport, créé l’été dernier pour soutenir les petites associations sportives. Pour répondre à votre question, ce fonds sera maintenu en 2021, à hauteur de 15 millions d’euros.
Pour le monde sportif amateur, le Pass’Sport sera mis en œuvre dès 2021. Par cette mesure, évaluée à 100 millions d’euros, nous voulons faciliter le retour des Françaises et des Français dans les clubs sportifs. Les critères très précis de ce dispositif – il s’agit notamment de savoir qui en bénéficiera – sont à l’étude : ils seront arrêtés très rapidement.
De plus, dès le début de l’année 2021, une aide de 20 millions d’euros issue du plan de relance sera dirigée vers les fédérations sportives pour compenser les pertes de licence.
Madame la sénatrice, vous le savez : la pratique du sport par les enfants et les adolescents est au cœur des préoccupations du ministère de l’éducation nationale. Je le répète, l’activité sportive en plein air des mineurs a repris. Pour les pratiquants adultes, si les conditions sanitaires le permettent, les activités devraient reprendre le 20 janvier prochain, avec des protocoles sanitaires adaptés et renforcés.
Enfin, le Président de la République a annoncé que 5 000 postes de service civique seraient fléchés vers le sport et que des emplois seraient créés pour accompagner les clubs sportifs, en particulier les petits clubs.
La parole est à Mme Agnès Canayer, auteur de la question n° 1378, adressée à Mme la ministre du travail, de l’emploi et de l’insertion.
Madame la ministre, à la crise sanitaire de la covid s’ajoute une crise économique et sociale dont nous ne percevons pas encore tous les contours. Une chose est sûre toutefois : les jeunes en sont les premières victimes, plus particulièrement les jeunes en difficulté, ceux qui cumulent les freins à l’emploi ou à la formation.
Ce sont ces jeunes que les missions locales accompagnent, afin de les aider à trouver une formation ou un emploi.
En tant que présidente de missions locales, je me félicite des dernières annonces du Gouvernement, notamment du plan « 1 jeune, 1 solution », qui a pris en compte cette situation en doublant le nombre de garanties jeunes. Ce dernier sera porté de 100 000 à 200 000.
La garantie jeunes est un excellent dispositif, qui assure une allocation identique à celle du revenu de solidarité active (RSA) et surtout – c’est sa grande qualité – impose un accompagnement renforcé pour aider les jeunes à s’insérer. C’est du gagnant-gagnant.
Cela étant, la question du financement des missions locales pour la mise en œuvre des 100 000 garanties jeunes supplémentaires reste à régler définitivement. En effet, il existe un delta entre le montant de la subvention du ministère du travail, à savoir 1 600 euros par jeune, et celle du plan de relance, qui n’est que de 940 euros.
J’espère que mon amendement visant à aligner ces deux sources de financement, voté par le Sénat, sera soutenu par le Gouvernement. Alors que les difficultés s’amoncèlent pour les jeunes, on ne peut pas brader la qualité de l’accompagnement.
Par ailleurs, pour que la garantie jeunes bénéficie au plus grand nombre, il conviendrait d’élargir les critères d’éligibilité et de considérer l’accès à certaines formations comme une sortie positive, donc valorisante pour les jeunes.
Enfin, les missions locales sont majoritairement des associations et leur trésorerie est limitée à trois mois. Le premier versement du financement de l’État a lieu chaque année au mois d’avril, soit bien trop tardivement, et le reste arrive au mois de septembre. Cette situation met à mal la trésorerie des missions locales, particulièrement aujourd’hui, alors qu’elles doivent agir au plus vite face à la crise sanitaire et économique.
Madame la ministre, ma question est simple : entendez-vous soutenir les missions locales, qui sont mobilisées pour répondre aux attentes du Gouvernement, mais qui ont besoin de visibilité et de moyens pour assurer un accompagnement à la hauteur des besoins des jeunes, lesquels sont particulièrement touchés par la crise de la covid ?
Madame la sénatrice Agnès Canayer, je connais votre engagement sans faille auprès des missions locales et je tiens à le saluer.
Les missions locales sont un maillon essentiel du service public de l’emploi pour repérer, accueillir et accompagner les jeunes les plus en difficulté. Face à la crise, elles sont pleinement mobilisées pour atteindre l’objectif ambitieux du plan « 1 jeune, 1 solution ».
Cet objectif, que vous avez décrit avec justesse, est d’accueillir 50 000 jeunes supplémentaires en parcours garantie jeunes et 80 000 jeunes supplémentaires en parcours contractualisé d’accompagnement vers l’emploi et l’autonomie (Pacea).
À cette fin, nous avons augmenté la dotation des missions locales de 100 millions d’euros, pour atteindre un total de 472 millions d’euros en 2021. C’est un effort sans précédent. Soyez assurée que je veille, avec Élisabeth Borne, à ce que ces crédits soient versés dans les meilleurs délais.
Vous le savez, la subvention accordée aux missions locales est globalisée depuis deux ans. Elle n’est plus spécifiquement affectée au financement de l’un ou l’autre de leurs dispositifs. C’était une demande du réseau, qui a été satisfaite par Muriel Pénicaud pour apporter de la visibilité et simplifier les circuits de financement. Nous n’avons évidemment aucune intention de revenir sur cette mesure.
Toutefois, pour des raisons de comptabilité budgétaire, nous avons dû artificiellement séparer cette subvention en deux lignes distinctes. Ce fléchage technique est totalement transparent pour les missions locales et nous l’avons partagé avec l’Union nationale des missions locales (UNML).
Enfin, nous devons nous adapter à la nouvelle situation sanitaire et économique.
Compte tenu du récent rebond de l’épidémie et afin de ne laisser personne sur le bord de la route, le Gouvernement a décidé, le 26 novembre dernier, de relever son objectif de 50 000 entrées supplémentaires en garantie jeunes. Nous proposerons au moins 200 000 parcours en garantie jeunes en 2021. De nouveaux crédits seront rapidement attribués aux missions locales, qui disposeront ainsi de tous les moyens financiers nécessaires à leur mobilisation.
Madame la sénatrice, je sais que nous avons tous à cœur d’œuvrer en faveur de l’emploi des jeunes. Le Gouvernement est à votre disposition pour que nous travaillions ensemble sur ce sujet qui nous mobilise tous.
Madame la ministre, vous le savez comme moi : les missions locales sont un atout formidable pour l’accompagnement des jeunes. Cet outil territorialisé permet de mettre en connexion les besoins des territoires et les compétences de notre jeunesse.
Je compte sur vous pour que les missions locales aient véritablement les moyens d’accompagner les jeunes. Un accompagnement a minima serait désespérant pour tous !
La parole est à M. Jean-Raymond Hugonet, auteur de la question n° 1295, adressée à M. le ministre de l’intérieur.
Madame la ministre, la lutte contre la violence est une priorité majeure. Cette violence détériore les conditions de vie et le lien social dans notre société, a fortiori dans certains quartiers. Policiers et gendarmes, à qui je rends hommage, en sont souvent les premières cibles. Ils sont, par surcroît, davantage sollicités.
C’est dans ce contexte que vous avez décidé de restructurer les commissariats dans le département de l’Essonne, dont je suis l’élu, alors que tous les chiffres de la délinquance sont en train de passer au rouge.
Ainsi, en s’abritant derrière des démonstrations administratives fumeuses, on a décidé de transférer une part significative des effectifs du commissariat d’Arpajon à celui de Sainte-Geneviève-des-Bois. Ces commissariats deviennent de simples « antennes de police » et la présence des forces de l’ordre s’en trouve dégradée dans de vastes territoires.
Cette réorganisation aura des conséquences néfastes pour la proximité des forces de l’ordre et leur capacité d’intervention au sein de territoires à la démographie dynamique.
Vous centralisez les effectifs des brigades anticriminalité (BAC) et vous réduisez la présence de policiers sur le terrain. Les élus et la population ne peuvent que s’inquiéter du temps d’intervention et de l’accessibilité des fonctionnaires chargés des procédures d’aide aux victimes – nous pensons tout particulièrement aux plus vulnérables.
Que compte entreprendre le Gouvernement pour assurer efficacement la sécurité des Essonniens, plus particulièrement celle des habitants du centre du département ?
Monsieur le sénateur Jean-Raymond Hugonet, je vous réponds au nom du ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin.
Depuis 2017, le budget des forces de sécurité a augmenté de 1, 7 milliard d’euros et 10 000 policiers et gendarmes supplémentaires auront été recrutés d’ici à la fin du quinquennat.
Pour répondre plus précisément à votre question, les services territoriaux de la direction centrale de la sécurité publique se réforment – vous l’avez dit – depuis des années, dans une logique de police d’agglomération et de déconcentration, en application de la nouvelle doctrine d’emploi et d’organisation.
Il nous est apparu nécessaire de rationaliser les structures et les moyens pour améliorer l’efficacité de l’organisation et mieux répondre aux nécessités opérationnelles. Notre objectif est d’accroître la pertinence de l’architecture territoriale et de dégager du potentiel opérationnel pour une meilleure couverture policière et des capacités d’investigation judiciaire accrues.
En Essonne comme dans d’autres départements, par exemple les Yvelines ou le Val-d’Oise, le dispositif de la sécurité publique évolue au terme d’une réflexion engagée au mois de mai 2019, à laquelle les élus locaux ont bien entendu été associés.
Un arrêté du 11 septembre 2020 constitue la base de la réorganisation de la sécurité publique dans le département. Cette réforme se fonde sur des principes et des objectifs opérationnels clairs : premièrement, adapter l’organisation territoriale de la police nationale à la réalité des bassins de vie et de la délinquance en Essonne ; deuxièmement, renforcer la professionnalisation et la capacité d’action de la police nationale sur la voie publique et dans l’investigation tout en maintenant une prestation de proximité.
En conséquence, le nombre de policiers de voie publique est adapté pour agir et réagir en sécurité dans l’ensemble des territoires. Des brigades anticriminalité sont donc déployées par projection depuis le commissariat d’agglomération. Elles sont renforcées en nombre par rapport à la situation antérieure, que vous évoquez. S’y ajoute l’intervention des policiers implantés dans l’ensemble des commissariats, y compris dans les secteurs qui conservent des unités de police secours, vingt-quatre heures sur vingt-quatre, pour répondre aux appels du 17.
Cette réforme signifie également des policiers chargés d’enquêtes judiciaires en nombre adapté et disposant de spécialisations. Je pense notamment à la création d’une unité spécialisée dans le traitement des trafics de stupéfiants. Cette cellule de lutte contre la délinquance aurait été impossible à créer du temps de l’ancienne organisation, fondée sur des microstructures judiciaires.
Enfin, il s’agit de conforter et de renforcer la relation de confiance et de proximité entre les services territoriaux de la police et les élus locaux, sur la base des engagements de service pris par la direction départementale de la sécurité publique (DDSP) envers les élus de l’Essonne.
Monsieur le sénateur, vous pourrez le constater : nous réformons afin d’être plus efficaces et plus présents sur le terrain. Notre but est d’offrir à nos concitoyens une police toujours plus disponible et plus présente.
M. Jean-Raymond Hugonet. Il est rare que des ministres daignent venir jusqu’au Sénat pour les séances de question orales et je vous remercie infiniment de vous être déplacée ce matin, madame la ministre, et de m’avoir donné cette réponse précise, bien qu’un peu technique, voire techno, ce que je vous pardonne.
Sourires.
Le département de l’Essonne rassemble 1, 3 million d’habitants en région Île-de-France, en grande partie dans la deuxième couronne. Il est vraisemblablement sous-doté en police et en gendarmerie, nous le vérifions tous les jours sur le terrain.
Je ne veux pas critiquer la direction départementale de la sécurité publique (DDSP), qui réalise un travail remarquable, mais je tiens à vous dire qu’il faut prêter une grande attention à ce département, comme aux autres départements de la grande couronne, dans une période qui s’annonce très compliquée. Sur le terrain, les gens ont peur.
La parole est à M. Jean Louis Masson, auteur de la question n° 1329, adressée à M. le ministre de l’intérieur.
Madame le ministre, quelles sont les communes dont le maire est en fonction de manière continue depuis au moins 1965 ?
Ces maires ne sont qu’en très petit nombre et leur continuité dans ces fonctions traduit, à l’évidence, leur grand dévouement au service de la vie publique ainsi que la qualité exceptionnelle de leur travail, puisque les électeurs leur ont fait constamment confiance.
Or si certains d’entre eux ont reçu une distinction honorifique importante, au moins l’ordre national du mérite, ce n’est pas le cas de tous. Quelques-uns ont été oubliés, sans que cette lacune ait aucune justification. Ne faudrait-il pas remédier à cette différence de traitement ?
Il ne s’agit pas d’accorder une distinction à l’ancienneté, c’est là le rôle de la médaille d’honneur régionale, départementale et communale. Il s’agit plutôt de souligner des mérites et un dévouement sur une durée exceptionnellement longue, qui ont été constamment confirmés et reconnus par le corps électoral.
Monsieur le sénateur Jean-Louis Masson, je vous réponds au nom de M. le ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, retenu.
Je partage, sur un plan philosophique, votre désir de justice et de reconnaissance envers les maires qui exercent cette difficile fonction de longue date.
Sur le plan opérationnel, le décret du 30 août 2001 portant création au ministère de l’intérieur d’un fichier des élus et des candidats aux élections au suffrage universel a permis la création du répertoire national des élus (RNE). Cette base de données, dont la finalité est le suivi des titulaires d’un mandat électoral, est renseignée et tenue à jour par les préfectures et par les services du ministère de l’intérieur, notamment sur la base des éléments fournis lors de la phase d’enregistrement des candidatures.
Le renseignement du RNE n’a toutefois été systématisé que récemment. Auparavant, les mandats étaient entrés manuellement dans l’application. La base de données est donc incomplète, notamment s’agissant des mandats historiques. Si certaines préfectures ont fait le choix d’indiquer les anciens mandats des élus, c’est de leur propre initiative. Aussi, le ministère de l’intérieur ne dispose pas de la liste des communes dont le maire est en fonction de manière continue au moins depuis 1965.
S’ils respectent les conditions de mérite requises pour se voir décerner la Légion d’honneur ou l’ordre national du mérite, ces dossiers peuvent être transmis aux préfets pour examen. Ces derniers les transmettront ensuite aux différents ministères concernés, afin que soit récompensé ce dévouement au service de la vie publique. Gérald Darmanin et moi-même ne manquerons pas de le leur rappeler dans le cadre des propositions relevant du ministère de l’intérieur.
Toutefois, il est à noter que le nombre important et la qualité des candidatures à un ordre national, comme l’obligation de respecter la parité dans les propositions, conduisent à opérer une sélection rigoureuse au regard du contingent limité de décorations dont le ministère de l’intérieur dispose. Ce cadre contraint ne permet donc pas de répondre favorablement à la totalité des nombreuses sollicitations.
Néanmoins, monsieur le sénateur, je partage votre objectif et nous sommes à votre disposition, au ministère de l’intérieur, pour trouver les voies et moyens d’y apporter une suite favorable.
Madame la ministre, je vous remercie de cette réponse très complète.
Juste avant les élections municipales, le journal Le Figaro a dressé la liste des maires élus de manière continue depuis 1965. Il n’y en avait pas beaucoup : onze, me semble-t-il. Après les élections, ce nombre n’a mathématiquement pu que diminuer.
À mon sens, les services du ministère de l’intérieur pourraient se mettre en rapport avec ce journal pour établir cette liste. Ces maires sont maintenant certainement moins de dix : j’en ai compté six ou sept, dont un ancien ministre.
Vous m’indiquez que les demandes sont nombreuses. Certes, j’imagine qu’elles arrivent tous azimuts et qu’il ne doit pas être facile de faire le tri, mais le cas que j’évoque concerne très peu de maires, d’autant moins que la plupart d’entre eux ont déjà été décorés.
En Moselle, nous en avions deux, l’un a été décoré, mais pas l’autre. Cela me choque. Je trouve que ce n’est pas bien !
Madame la présidente, lors du scrutin n° 34 sur l’ensemble de la proposition de résolution portant sur la nécessité de reconnaître la République du Haut-Karabagh, j’ai été enregistrée comme n’ayant pas pris part au vote, alors que j’avais donné procuration à mon collègue Stéphane Ravier pour voter pour.
Acte vous est donné de cette mise au point, ma chère collègue. Elle sera publiée au Journal officiel et figurera dans l’analyse politique du scrutin.
Madame la présidente, je tiens à faire une mise au point en tant que délégué de la réunion administrative des sénateurs ne figurant sur la liste d’aucun groupe.
Je rappelle que la loi organique et le règlement du Sénat prévoient que, lors des scrutins publics, chaque sénateur ne peut disposer que d’une procuration et d’une seule. Or le Sénat a mis en place un système de vote électronique qui ne respecte ni la loi organique, ni l’esprit de l’article 27 de la Constitution, ni son propre règlement dans la mesure où un sénateur peut voter pour plus de cent ou de cent cinquante de ses collègues.
C’est là l’origine du problème que nous avons rencontré comme sénateurs non inscrits, car nous ne sommes que trois.
Je l’ai déjà relevé il y a quelques années : ce système qui viole délibérément les obligations de la loi organique est indigne du Sénat. Nous sommes là pour voter la loi et a priori pour la respecter. Or nous ne la respectons pas, personne ne peut prétendre le contraire !
Tous les textes indiquent que les procurations au Parlement doivent fonctionner ainsi. C’est d’ailleurs maintenant le cas à l’Assemblée nationale : chaque votant ne dispose que d’une procuration et ne peut pas voter pour l’ensemble des membres de son groupe, et tout se passe bien.
Nous avons été victimes de ce système. C’est la raison pour laquelle j’ai été contraint de faire une mise au point ce matin et Mme Herzog vient d’en présenter une également.
Je souhaite très vivement que le Sénat se décide à sortir de cet entre-soi dans lequel on s’entend entre copains et où, l’air de rien, on fait mine de ne pas voir que certains collègues votent pour cent autres sénateurs. Ce n’est pas normal et ce n’est pas digne d’une assemblée parlementaire !
J’informe le Sénat que des candidatures pour siéger au sein de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, de la commission des finances et de la commission des affaires européennes ont été publiées. Ces candidatures seront ratifiées si la présidence n’a pas reçu d’opposition dans le délai d’une heure prévu par notre règlement.
Mes chers collègues, l’ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à douze heures quarante, est reprise à quatorze heures trente-cinq, sous la présidence de M. Gérard Larcher.