La séance, suspendue à douze heures trente-cinq, est reprise à quatorze heures trente, sous la présidence de M. Gérard Larcher.
La séance est reprise.
L’ordre du jour appelle les explications de vote des groupes et le vote par scrutin public solennel sur le projet de loi relatif à l’accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes (projet n° 100, texte de la commission n° 237, rapport n° 236, avis n° 233).
La procédure accélérée a été engagée sur ce texte.
Mes chers collègues, je vous rappelle que ce scrutin s’effectuera depuis les terminaux de vote. Je vous invite donc à vous assurer que vous disposez bien de votre carte de vote et à vérifier que celle-ci fonctionne correctement en l’insérant dans votre terminal de vote. En cas de difficulté, vous pouvez demander de l’aide aux huissiers.
Avant de passer au vote, je vais donner la parole à ceux de nos collègues qui ont été inscrits pour expliquer leur vote. Le temps de parole imparti est de sept minutes pour chaque groupe et de trois minutes pour un sénateur n’appartenant à aucun groupe.
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.
Applaudissements sur les travées du groupe RDSE, ainsi que sur des travées du groupe RDPI.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la France a attendu que les effets du réchauffement climatique se fassent ressentir avec plus de force et, surtout, que la sécurité d’approvisionnement en énergie se fragilise pour relancer enfin le nucléaire et les énergies renouvelables. Que de temps perdu ! Cela nous impose désormais de légiférer dans l’urgence pour nous mettre au pas et rattraper plus de vingt ans d’inertie afin de préserver notre souveraineté électrique.
Comme le disait si bien John Fitzgerald Kennedy : « La victoire a cent pères, mais la défaite est orpheline. » Ne faisons pas davantage le procès du passé, car les débats ont révélé un oubli des responsabilités collectives et un rabâchage des mêmes excuses et de postures idéologiques. Mais les revirements ne constituent pas une spécificité nationale : l’Allemagne et la Belgique ont repoussé la sortie du nucléaire, la Suède et les Pays-Bas procèdent à sa relance, quand d’autres pays, comme la Pologne, se lancent dans la construction de réacteurs.
Mes chers collèges, le mix énergétique doit être diversifié. Je regrette que le Sénat ait remplacé cet objectif par celui de décarbonation. Les études prospectives réalisées ces dernières années le démontrent : plus la diversification est poussée, plus on maîtrise les incertitudes dans l’accès aux matières critiques, les technologies ou les coûts. Toutes les énergies décarbonées ont leurs avantages et leurs inconvénients. C’est un pari que nous faisons, car l’équation est complexe.
Atteindre un mix 100 % renouvelable d’ici à 2050 ne serait pas réaliste. Ce serait non seulement coûteux, mais irréalisable, puisque nous ne disposons pas des moyens de stockage d’électricité nécessaires pour pallier les intermittences – même si les investissements dans l’hydrogène connaissent un coup d’accélérateur en raison du nouveau contexte géopolitique.
Il nous faut préserver une certaine souplesse pour adapter nos objectifs de politique énergétique à ce contexte, aux freins sociaux, économiques et financiers, ainsi qu’au rythme des avancées en matière d’innovation, qui ne peuvent se décréter.
Les choix du passé s’imposent pour l’avenir. On ne peut faire table rase d’une réalité qui, elle aussi, s’impose à nous : le mix électrique français repose à 70 % sur l’énergie nucléaire.
Par ailleurs, les efforts de sobriété doivent également être poursuivis en parallèle si nous ne voulons pas sombrer dans la décroissance. En effet, les premiers réacteurs EPR 2 ne seront pas disponibles avant 2035, voire 2037, au mieux.
Pour revenir au cœur du débat, ce projet de loi contribuera à accélérer la procédure administrative en matière de construction de nouveaux réacteurs et à prévenir les contentieux en limitant les occasions de former des recours dilatoires, sans pour autant modifier les règles de fond des autorisations environnementales et des autorisations de création.
Le choix d’implanter des projets sur les sites existants, ou à leur proximité immédiate, renforcera leur acceptabilité, mais aussi leur réussite, les territoires étant déjà prédisposés pour les accueillir. C’est le cas de la centrale du Blayais, chère à notre collègue Nathalie Delattre.
À l’issue de nos travaux, le texte a été complété, notamment par l’intégration de petits réacteurs modulaires, l’extension de la durée d’application des mesures de quinze à vingt-sept ans et la prise en compte des observations des collectivités. Les améliorations portées à la consultation du public sont bienvenues.
En revanche, la question de la fermeture du cycle du combustible est loin d’être réglée. Je regrette l’abandon du projet Astrid, réacteur de quatrième génération, qui remet en cause la stratégie de la France en la matière.
Enfin, si nous saluons une meilleure prise en compte du dérèglement climatique et des cyberattaques, nous regrettons que le périmètre des plans particuliers d’intervention n’ait pas été élargi, comme le proposait notre collègue Véronique Guillotin.
Restons lucides : ce projet de loi ne règle en rien les retards accumulés par notre pays, qui n’a plus construit un seul réacteur depuis vingt ans. Les déboires du chantier de Flamanville doivent servir d’épouvantail. Ce texte demeure symbolique dans son contenu. Des obstacles, qui ne relèvent pas des procédures, persisteront.
Outre les difficultés de recrutement à résoudre, il faudra préciser rapidement le volet relatif au montage financier.
Par ailleurs, quelle régulation du marché de l’électricité sera appliquée en France et en Europe ? Le mécanisme d’accès régulé à l’électricité nucléaire historique (Arenh), qui doit prendre fin en 2025, ne protège ni les consommateurs français ni EDF, lourdement endettée à la veille de sa nationalisation.
Le marché de l’énergie doit être réformé. On ne peut continuer à subventionner les fournisseurs alternatifs et à favoriser la concurrence pour la concurrence, sans aucune incitation à l’investissement. Oui à la souveraineté, mais oui aussi à la solidarité au niveau européen et à plus d’équité !
En ce qui concerne le calendrier, la concertation publique arrive soit trop tôt, soit trop tard : trop tard, car elle aurait dû avoir lieu il y a quelques années ; trop tôt, car nous ne disposons pas des études de faisabilité et de la liste des sites d’implantation non plus que du coût total du programme de relance du nucléaire et de ses modalités de financement. S’il est facile d’acter des objectifs dans la loi, ceux-ci doivent être réalistes.
Le débat public se poursuit actuellement et la représentation nationale aura l’occasion de s’en saisir. Que l’on y soit favorable ou non, les amendements du rapporteur visant à supprimer le plafonnement de la part du nucléaire à 50 % en 2035 ont quelque peu préempté ce débat.
Cela étant, cet ajout ne constitue pas une ligne rouge pour notre groupe. Gageons que l’architecture générale des choix énergétiques de la France disposera de ses murs porteurs d’ici à la fin de cette année. Ainsi, le groupe RDSE votera en faveur du projet de loi.
Applaudissements sur les travées du groupe RDSE, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.
M. le président. La parole est à M. Gérard Longuet, pour le groupe Les Républicains.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe UC.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je remercie, pour commencer, la conférence des présidents du Sénat d’avoir prévu pour l’adoption de ce projet de loi – que je souhaite profondément – la procédure du scrutin public solennel. Cela permet, sur un texte majeur comme celui-ci, de focaliser l’attention de l’immense majorité de notre assemblée.
Je remercie par ailleurs le groupe Les Républicains de m’avoir confié la responsabilité de défendre ce texte.
Il est pourtant technique en apparence, madame la ministre, avec trois types de mesures différentes pour accélérer les procédures, toujours trop longues dans notre pays. Son adoption, nous dit-on, ferait gagner cinquante-six mois sur la construction d’un réacteur nucléaire.
Notre excellent rapporteur Daniel Gremillet a parfaitement souligné son objectif : accroître la sécurité, en matière juridique, mais aussi en ce qui concerne les attaques informatiques ou les risques climatiques. Représentants des élus, nous nous sommes efforcés de mieux associer les collectivités locales et de faire en sorte que des dispositions d’urbanisme comme le zéro artificialisation nette ne soient pas prises sans que celles-ci en soient parties prenantes. C’est donc un véritable enrichissement de ce texte que notre rapporteur a défendu, et que nous avons adopté.
Par un ensemble d’amendements, nous avons également apporté une sécurité juridique indispensable aux projets en évitant qu’ils ne soient paralysés par des procédures administratives contradictoires, en étendant la durée d’application des mesures de quinze à vingt-sept ans, comme l’a souligné notre collègue Jean-Claude Requier.
En somme, le texte du Gouvernement, enrichi par la commission et adopté par notre assemblée, consolidera les projets, y associera les élus et les populations, ce qui permettra l’adaptation de nos anciens réacteurs.
J’en viens au point qui pourrait non pas nous opposer, mais nous distinguer.
Notre excellente ancienne collègue Mme Jouanno, aujourd’hui présidente de la Commission nationale du débat public, déclare dans la presse que le Sénat n’est pas dans son rôle, qu’il préempte la discussion nationale sur la stratégie nucléaire : elle aurait souhaité que nous nous taisions ! Mme Jouanno est en dehors des réalités…
Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et INDEP. – M. Alain Cazabonne applaudit également.
Dès novembre 2017, le Président de la République a remis en cause la loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte, sous l’empire de laquelle nous vivons encore aujourd’hui – ce qui est profondément absurde. Il a décidé, avec raison, de reporter à 2035 le délai fixé par ce texte pour réduire à 50 % la proportion d’électricité d’origine nucléaire.
Le débat était ouvert, donc. Pour être honnête, il est fort lent. La déclaration faite à Belfort en novembre 2021 n’était pas mauvaise, et m’avait fait espérer que le nucléaire serait enfin à l’ordre du jour. Le 10 février 2022, le Président de la République nous présente un programme complet, avec cet art oratoire si particulier qui consiste à parler interminablement sur des sujets qu’il est censé connaître parfaitement.
Or cela n’est pas vrai, parce qu’il aurait dû poser la question principale en matière d’énergie à ce jour : s’agit-il de décarboner ou bien de verdir ? S’il s’agit de verdir, la majorité sénatoriale considère que ce n’est plus la priorité.
L’urgence climatique exige de décarboner notre société grâce aux mesures prises dans les secteurs du logement, de la mobilité, de l’industrie. En outre, pour décarboner, il faut électrifier. La proposition du Président de la République de diminuer de 40 % la consommation énergétique est alors simplement irréaliste.
En revanche, son idée d’augmenter de 60 % la production d’électricité est pertinente, bien qu’il ne s’en donne pas les moyens. En effet, pour cela, ce ne sont pas six réacteurs de nouvelle génération EPR 2, plus éventuellement huit autres, et la certitude de maintenir 100 % des capacités existantes jusqu’en 2050 – excusez-moi du peu ! –, ce qui n’apparaît pas vraisemblable à ce jour, qui seront nécessaires.
Comme ministre de l’industrie, j’ai signé le lancement du dernier réacteur, celui de Civaux, en 1994. Ces réacteurs, qui sont de « bonnes bêtes » et qui travaillent bien, fatigueront tout de même. Si nous voulions remplacer ne serait-ce que la moitié des réacteurs existants d’ici à 2050, il faudrait sans doute, non pas six plus huit réacteurs, comme c’est prévu, soit quatorze réacteurs, mais entre vingt et vingt-cinq réacteurs de type EPR 1 650 mégawatts pour parvenir à ce résultat.
Par conséquent, le Sénat a eu raison d’ouvrir ce débat et je remercie notre collègue Daniel Gremillet, ainsi que Sophie Primas, d’avoir amorcé cette ouverture.
Puisque nous allons quitter le domaine du réglementaire pour examiner une sorte de programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) législative, nous attendons donc avec impatience ce projet de loi afin de connaître la stratégie en la matière.
Je rappellerai une vieille histoire. En 1975, alors que je n’étais pas encore sénateur, mais commissaire du gouvernement, un débat identique à celui-ci se déroulait au Sénat.
Le 14 mai 1975, le ministre, Michel d’Ornano, …
Sourires.
… qui mettait en œuvre, sous l’autorité du président Giscard d’Estaing, la politique de Pierre Messmer – ce qui souligne la continuité de la politique française dans ce domaine –, expliquait que la stratégie appartenait au Parlement et que sa mise en œuvre revenait au gouvernement. Nous revendiquons la stratégie ! (Applaudissements sur les travées d u groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées des groupes UC, INDEP et RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Pierre Médevielle, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires.
Applaudissements sur les travées du groupe INDEP. - M. Alain Cazabonne et Mme Denise Saint-Pé applaudissent également.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, en 1963, le général de Gaulle qualifiait déjà l’énergie atomique comme « le fond de l’activité de demain ». Que de chemin parcouru depuis le prix Nobel attribué à Pierre et Marie Curie, associés à Henri Becquerel, pour la découverte de la radioactivité naturelle !
Le nucléaire, c’est l’histoire de la France, de ses physiciens visionnaires et innovants. C’est une aventure industrielle, une aventure d’excellence et d’indépendance énergétique.
Énergie respectueuse du climat, le nucléaire fournit en outre de l’électricité de façon continue et est capable de s’adapter aux variations de la demande électrique. En raison de la stabilité de son réseau et de son caractère pilotable, il contribue largement à sécuriser l’acheminement de l’électricité à destination des hôpitaux, des entreprises et de chaque foyer.
De notre force historique, il ne reste – hélas ! – que l’absolue nécessité de reconstruire une filière largement malmenée ces dernières années.
Entre hésitations coupables et accidents spectaculaires, nous avons considérablement revu à la baisse nos ambitions dans ce secteur.
Si Ségolène Royal et ses « acolytes » ont manqué de réalisme et de vision
Mme Marie-Pierre de La Gontrie proteste.
N’oublions pas que nos centrales nucléaires sont la principale source d’électricité décarbonée.
Malgré nos 87 % d’électricité d’origine nucléaire en 2010, nous nous sommes reposés sur nos lauriers en négligeant coupablement les autres modes de production.
Nous discutons abondamment de bouquet, de mix, mais les leçons des deux chocs pétroliers de 1973 et de 1979 n’ont pas été retenues et nous sommes toujours dépendants – à 70 % – des énergies fossiles. Le déclenchement de la guerre en Ukraine nous l’a cruellement rappelé.
L’équation à résoudre est limpide : si nous voulons décarboner nos transports et nos habitudes de vie au quotidien, il nous faut davantage de nucléaire et d’énergies renouvelables.
Je profite de cette intervention pour souligner l’important travail réalisé par Mme la ministre et son cabinet, ainsi que par les sénateurs impliqués, lors de l’examen du projet de loi relatif à l’accélération de la production d’énergies renouvelables.
À cette occasion, nous avons entendu la principale critique derrière laquelle un certain nombre de parlementaires de tous bords se sont abrités pour ne pas voter ce texte, notamment à l’Assemblée nationale.
Leur argument est purement chronologique : ils auraient préféré que la loi de programmation pluriannuelle de l’énergie ait été discutée en amont.
Nous sommes tous d’accord, mais l’invasion de l’Ukraine nous a conduits à une situation d’urgence énergétique absolue, qui a exigé des réponses efficaces et rapides.
Oui, ces projets de loi dits « d’accélération » ne sont peut-être pas complètement suffisants, mais ils sont essentiels pour redéfinir un cap pertinent.
En ce qui concerne le nucléaire, ce texte, en l’état, comporte des avancées notoires en matière de simplification des procédures et de réduction des délais. Gagner du temps, ou en perdre moins, voilà l’enjeu !
Tout d’abord, nous sommes très nombreux, sur les travées de cet hémicycle, à nous réjouir de la suppression, au sein du code de l’énergie, de l’objectif de réduction à 50 % de la part du nucléaire dans notre bouquet énergétique à l’horizon 2035.
Cet objectif relève du fantasme, comme le précédent qui était fixé à 2025 sous le mandat de François Hollande. Notre groupe a démontré son attachement à cette abrogation, dès l’examen du projet de loi en commission.
En outre, la recherche et l’innovation dans le domaine de l’hydrogène bas-carbone font partie de nos objectifs à long terme.
Enfin, plusieurs garanties sont ajoutées concernant la sûreté et la sécurité des installations face aux aléas du dérèglement climatique. Être toujours plus transparents et prévoyants doit rester notre préoccupation essentielle.
Si l’opinion publique a très favorablement évolué dans ce domaine, la pleine acceptation des Français n’est pas au rendez-vous ; c’est la raison pour laquelle la sécurité et la sûreté nucléaire doivent rester, plus que jamais, notre priorité.
En matière de prévention, la France a placé la barre beaucoup plus haut que les autres pays.
Grâce aux nouvelles évolutions technologiques, comme les réacteurs moyen-module ou le projet International Thermonuclear Experimental Reactor (Iter) ayant trait à la fusion, toutes les conditions sont réunies pour donner un véritable second souffle à cette filière qui, associée à l’énergie solaire, doit nous permettre d’atteindre, dans quelques dizaines d’années, ce graal qu’est l’indépendance énergétique.
Toutefois, ce défi ne pourra être relevé que si nous faisons de la question de l’enseignement et de la formation des personnels ingénieurs une priorité absolue.
Le Gouvernement s’est engagé en la matière, grâce à l’investissement de 200 millions d’euros dans la formation depuis 2019. Poursuivons dans ce sens !
Le manque flagrant d’équipes compétentes dans le domaine de la maintenance a considérablement ralenti la remise en service de nombreux réacteurs depuis le début de la crise énergétique.
Dans ce secteur, le meilleur de l’innovation reste encore à inventer et les récents succès des Américains dans le domaine de la fusion nous autorisent tous les espoirs.
Enfin, le redressement de notre économie et de nos comptes publics sera directement lié à nos ambitions en matière d’indépendance énergétique. Le nucléaire est l’une des sources d’électricité décarbonée peu coûteuse à produire, permettant à la France d’avoir un prix de l’électricité parmi les plus bas d’Europe.
N’écoutons pas les « Khmers verts » et les « prédicateurs de la lampe à huile », dont le discours irréaliste ne peut que nous conduire dans des impasses mortifères pour les générations futures.
Le groupe Les Indépendants – République et Territoires sera sans ambiguïté et votera ce texte, symbole fort d’un cap à tracer et à poursuivre.
Applaudissements sur les travées du groupe INDEP, ainsi que sur des travées des groupes RDSE et UC.
M. le président. La parole est à M. Daniel Salmon, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.
Vifs applaudissements sur les travées du groupe GEST.
Un programme qu’ils auraient dû lancer lorsqu’ils étaient au pouvoir pour disposer de nouveaux réacteurs opérationnels aujourd’hui ! Si tant est que l’EPR démarre un jour…
« Ce projet de loi n’est pas une loi de programmation », avez-vous insisté madame la ministre, tout au long du parcours de ce texte au Sénat. Il n’était pas censé préempter les décisions qui seraient prises sur l’avenir du mix énergétique français.
Pourtant, au détour d’un amendement, dont l’objet très vague tendait à la diversification du mix électrique en visant un meilleur équilibre entre le nucléaire et les énergies renouvelables (EnR), vous avez acté, in fine, le renoncement à l’objectif de réduction à 50 % de la part du nucléaire dans la production d’électricité.
Nous regrettons profondément ce recul conséquent et grave pour l’avenir énergétique de notre pays.
Le nucléaire demande une stabilité à toute épreuve, alors que le monde vit, et vivra, des décennies de grandes turbulences, climatiques et géopolitiques.
Ce choix dogmatique nous engage de manière irréversible pour le siècle à venir, au mépris du processus démocratique et des concertations en cours, alors qu’il est crucial que les citoyens décident eux-mêmes de leur avenir s’agissant de cet enjeu majeur.
D’ailleurs, le président de la commission particulière en charge de l’animation du débat public sur le projet de construction de deux réacteurs nucléaires EPR 2 sur le site de Penly, Michel Badré, et la présidente de la Commission nationale du débat public, Chantal Jouanno – une démocrate –, se désolent également de ce procédé complètement antidémocratique, qui revient à « considérer comme sans intérêt […] les interrogations, les remarques et les propositions faites » par nos concitoyens. Cela a l’air de contenter certains…
La suppression de l’objectif de 50 %, remplacé par la définition d’une part de nucléaire dans la production électrique fixée à plus de 50 % à l’horizon 2050, a modifié le code de l’énergie. Nous passons ainsi du principe d’un plafond à celui d’un plancher, ce qui change tout !
Ce changement de paradigme nous engage dans un avenir particulièrement incertain.
Cette mesure s’accompagne d’une palette de dispositifs en faveur d’une relance maximaliste du nucléaire, sans la moindre nuance : suppression du plafond de 63, 2 gigawatts de capacité nucléaire installée ; révision du décret prévoyant la fermeture de douze réacteurs, en plus de celui de Fessenheim ; prolongation de la durée d’application du texte, initialement prévue jusqu’à 2038, jusqu’à 2050 ; qualification de projets d’intérêt général, par un décret en Conseil d’État, des projets d’installations d’entreposage de combustibles nucléaires ; ou encore, durcissement des peines sanctionnant les intrusions au sein de centrales nucléaires.
Plutôt que de renforcer la sécurité des centrales, on préfère s’en prendre aux lanceurs d’alerte ! Les militants de Greenpeace, à travers ces actions, dénoncent justement les problèmes de sécurité des sites nucléaires.
Casser le thermomètre n’a jamais fait tomber la fièvre du malade !
En résumé, des mesures situées strictement à l’opposé de nos recommandations. Rappelons les objectifs de ce texte : un projet de loi visant à gagner du temps en simplifiant les procédures administratives – jusqu’à cinquante-six mois, dites-vous –, même si le Conseil d’État, lui-même, n’est pas véritablement d’accord.
Or, encore une fois, ce ne sont pas les procédures environnementales qui ont fait prendre du retard à la filière. Le problème du nucléaire est bien plus profond et relève notamment d’un problème de compétences, mis en évidence par le fiasco de l’EPR de Flamanville.
Clairement, nous ne cernons toujours pas l’intérêt de ce texte face à l’urgence climatique. En effet, avec de premiers réacteurs opérationnels en 2040, il sera déjà bien trop tard ! Prendre des mesures pour gagner quelques mois ne sert absolument à rien.
Le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) ne cesse de marteler que les principaux investissements dans la transition énergétique doivent être réalisés dans les dix ans.
Pourquoi n’entendez-vous toujours pas cet argument rationnel et scientifique ?
Nous avançons à l’aveugle s’agissant de ce choix de construire plusieurs EPR, qui représentent plusieurs dizaines de milliards d’euros d’investissements. Cet argent, nous en avons besoin, maintenant, pour développer les installations d’énergies renouvelables et pour atteindre les objectifs d’efficacité énergétique, afin d’agir concrètement pour la planète et pour améliorer le portefeuille des Français.
Les énergies renouvelables deviennent très compétitives, et cela en incluant le coût des capacités de flexibilité et de stockage. Chaque année, elles deviennent moins chères. À l’inverse, le nucléaire devient, quant à lui, de plus en plus coûteux, sans parler des dettes laissées aux générations futures, en termes de déchets et de démantèlement. L’avenir n’est pas dans les paris technologiques qui risquent de mettre gravement à mal notre économie.
Si quelques apports positifs sont adoptés, ils demeurent très à la marge. Nous notons, tout de même, à l’article 9 bis, l’ajout du rapporteur en faveur d’une meilleure intégration de la cybersécurité dans la sécurité nucléaire et d’une meilleure prise en compte de la résilience des réacteurs au changement climatique, lors de la demande d’autorisation de création et du réexamen décennal.
Cependant, le risque de l’étude de vulnérabilité ainsi prévue est qu’elle ne porte que sur un temps très court et ne prend pas en compte l’échelle de vie du réacteur.
L’Autorité de sûreté nucléaire (ASN), elle-même, estime que le pas décennal n’est pas adapté à l’anticipation des effets du réchauffement climatique. Il faut se projeter jusqu’à la fin du siècle.
Seul réel motif de satisfaction : l’unique amendement du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires adopté, tendant à renforcer notre sécurité collective, en empêchant la construction de nouvelles centrales nucléaires sur des zones littorales vulnérables aux inondations. Cette mesure de bon sens doit être absolument maintenue !
La problématique de l’eau a des effets aussi bien sur les anciennes centrales que sur le nouveau nucléaire. Le risque d’inondation ou de submersion marine comme la baisse d’étiage des fleuves dans les années à venir, largement démontrés par plusieurs rapports, sont des sujets centraux pour la sûreté et pour la protection des milieux naturels. Ce texte n’anticipe pas suffisamment ces problèmes qui se poseront de plus en plus. Nous constaterons alors que le nucléaire est de plus en plus intermittent.
Pour conclure, le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires s’oppose tant à l’objectif qu’aux modalités de ce texte, largement aggravé par son passage au Sénat : la modification de notre mix énergétique, et donc de notre PPE, s’ajoute au détricotage du code de l’urbanisme et du droit de l’environnement, pour de nouveaux réacteurs dont le Parlement n’a pas même encore validé le principe.
Nous sommes clairement en Absurdie et sommes atterrés par tant de dogmatisme et d’aveuglement.
En conséquence, le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires votera contre ce texte, qui reléguera encore davantage au second plan l’indispensable déploiement des énergies renouvelables et les investissements dans la rénovation thermique, seuls capables de répondre aux enjeux climatiques et de souveraineté.
Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe GEST.
M. le président. La parole est à M. Bernard Buis, pour le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.
Mme Patricia Schillinger applaudit.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le 18 janvier, dans la nuit de mardi à mercredi, après un peu plus de sept heures de débats, nous avons achevé l’examen du projet de loi relatif à l’accélération des procédures liées à la construction de nouvelles centrales nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes.
Certains collègues ont considéré que ces débats n’étaient pas assez nourris. Pourtant, ces échanges ont surtout révélé une certaine convergence de vues entre nous sur ce texte, première pierre d’un immense chantier pour la relance du nucléaire en France.
Cependant, ce projet de loi de simplification des procédures est technique – très technique – ce qui a limité l’inflation d’amendements et ce qui devait, a priori, éviter de longs débats de fond portant sur ce que nous voulons en matière de mix énergétique ; débats que nous aurions dû avoir et que nous aurons l’été prochain lors de l’examen du projet de loi de programmation sur l’énergie et le climat. J’y reviendrai.
Alors, que retenir du projet de loi à la suite de son examen par le Sénat ? Quelques désaccords sur le fond, qui risquent d’amoindrir la portée des articles, et une véritable divergence s’agissant de l’angle programmatique ajouté.
C’est donc sans sourciller que la majorité sénatoriale supprime l’objectif de réduction à 50 % de la part du nucléaire dans la production d’électricité d’ici à 2035, tout en imposant la révision du décret prévoyant la fermeture de douze réacteurs.
C’est sans trembler que la majorité sénatoriale supprime le plafond autorisé d’électricité nucléaire, fixé à 63, 2 gigawatts, dans le code de l’énergie.
Mes chers collègues, la question n’est pas de savoir si nous sommes pour ou contre la relance du nucléaire. À titre personnel, j’y suis très favorable. Au fond, il me semble qu’il s’agit plutôt de comprendre pourquoi vouloir balayer d’un revers de main les consultations en cours. Peut-être par impatience, afin de marquer un positionnement assumé, profitant ainsi de ce véhicule législatif pour envoyer un signal fort.
Reconnaissons que, soucieux d’écouter la majorité sénatoriale, le Gouvernement a fait un geste en défendant un amendement visant à un meilleur équilibre entre le nucléaire et les énergies renouvelables ; un amendement d’appel qui ne précise en rien le rapport de cet équilibre.
En effet, une fois encore, ce projet de loi n’est pas un texte programmatique ; l’équilibre de ce mix énergétique n’est pas – et ne sera pas – l’objet de ce texte d’accélération des procédures.
Deux consultations publiques sont en cours. L’une, menée par le Gouvernement, dans le cadre d’une vaste consultation publique, s’est achevée le 18 janvier et compte, à ce jour, 31 355 contributions.
Cette concertation s’est poursuivie sous la forme d’un forum des jeunesses à Paris, réunissant 200 jeunes, âgés de 18 à 35 ans, sélectionnés par tirage au sort dans toute la France.
L’autre consultation, animée par la Commission nationale du débat public, doit débattre de l’avenir du nucléaire de demain. Elle a débuté le 27 octobre et doit se poursuivre jusqu’au 27 février prochain.
Ne pas attendre la fin de ces consultations n’est respectueux ni des contributions ni des citoyens, qui ont légitimement cru que leurs paroles pouvaient être prises en compte avant la tenue du débat parlementaire.
D’ailleurs, sur ce point, la CNDP a été très claire, en considérant que cette anticipation de la programmation pluriannuelle de l’énergie revenait « à considérer comme sans intérêt les interrogations, les remarques et les propositions faites lors du débat public en cours pour définir la stratégie énergétique ».
Nous attendons de la navette parlementaire qu’elle revienne sur ces dispositions, afin de respecter ce temps démocratique nécessaire à l’acceptation de notre nouvelle stratégie énergétique.
Aussi regrettons-nous que le Sénat ait mis un peu de plomb dans l’aile aux objectifs de simplification du texte.
Je pense, par exemple, à l’article 3 concernant la dispense d’autorisation d’urbanisme. Les précisions apportées au décret en Conseil d’État créent désormais quasiment un nouveau régime d’autorisation contre-productif.
Je pense à l’avis de l’Autorité de sûreté nucléaire, dans le cadre de la délivrance de l’autorisation environnementale, dont l’apport semble peu pertinent pour les aspects préparatoires au chantier.
Je pense aux dispositions visant à soumettre à autorisation les ouvrages de raccordement. Ces procédures retarderaient l’autorisation de nouvelles installations électronucléaires.
Finalement, ce sont dix points d’alerte, susceptibles d’être contraires aux objectifs de simplification de la loi, que nous avons signalés à la majorité sénatoriale, avec pour résultat, le rejet de dix amendements. Nous en prenons acte. Nous espérons, là encore, que l’Assemblée nationale sera plus réceptive à nos contributions.
Ces remarques étant faites, nous voterons toutefois, en responsabilité, le texte émanant du Sénat, car nous partageons plus d’objectifs que nous n’avons de divergences. Notre groupe souhaite reprendre la grande aventure du nucléaire civil, objectif partagé par beaucoup d’entre vous.
Ce sera d’abord Penly en Seine-Maritime, pour une première mise en service envisagée entre 2035 et 2037, puis Gravelines, et ensuite, dans la vallée du Rhône. À ce sujet, je réaffirme mon souhait d’accueillir de nouveaux EPR à Tricastin, où tout un bassin d’emploi est prêt à se retrousser les manches pour participer à cette nouvelle aventure nucléaire.
Nous en prenons conscience, les besoins en main-d’œuvre qualifiée sont immenses pour rénover le parc existant comme pour mener à bien les projets de nouveaux réacteurs. Il est question de recruter, de 2023 à 2030, 10 000 à 15 000 personnes minimum par an, au lieu des 5 000 personnes embauchées chaque année entre 2019 et 2022.
S’agissant des ressources humaines, l’enjeu est considérable. Depuis 2020, 200 millions d’euros ont été consacrés à la formation dans cette filière.
Dans notre région, nous anticipons aussi ces bouleversements. Un centre de formation aux métiers du nucléaire ouvrira ses portes en septembre 2023 à la Voulte-sur-Rhône, en Ardèche, en bordure de la Drôme. Je fais ici un clin d’œil à mes collègues ardéchois, Mathieu Darnaud et Anne Ventalon.
Ce centre devrait accueillir quatre-vingts élèves chaque année. Il leur permettra de se former aux différents métiers dont a besoin l’industrie nucléaire, comme la chaudronnerie, la soudure, l’usinage ou encore l’électricité. Un centre de formation d’autant plus nécessaire que ces métiers de techniciens et d’opérateurs ne sont pas suffisamment pourvus dans la filière, contrairement aux postes d’ingénieurs.
Pour conclure mes chers collègues, en attendant de nous exprimer sur notre trajectoire énergétique, ce projet de loi sera essentiel pour accélérer, actualiser et dépoussiérer des procédures qui, pour certaines d’entre elles, datent de cinquante ans.
Alors, mes chers collègues, votons ce projet de loi, rien que ce projet de loi, tout ce projet de loi !
Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi que sur des travées du groupe UC.
M. le président. La parole est à M. Franck Montaugé, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Applaudissements sur les travées du groupe SER. – Mme Marie-Noëlle Lienemann et M. Fabien Gay applaudissent également.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, au nom du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, je voudrais ici rappeler le contexte et les objectifs qui étaient les nôtres lors de la discussion de ce texte visant à accélérer la construction d’installations nucléaires sur des sites existants ou à leur proximité.
Le contexte, c’est celui de cinq années de désintérêt, de tergiversations au plus haut niveau de l’État, débouchant en février 2022 sur une décision de commande ferme de six EPR 2 et de mise à l’étude de huit unités supplémentaires, avec l’espoir d’une hypothétique mise en service, dans le meilleur des cas, en 2035, et sans avoir lancé de débat ou de consultation, un tant soit peu démocratiques, avec les premiers concernés : nos compatriotes.
Pendant des années, nous avons sollicité, sans cesse, les gouvernements, les uns après les autres, afin d’engager ce débat avec les Français et, au Parlement, avec vous.
Nous vous avons interpellée, madame la ministre, au sujet de la nécessité de prendre le temps d’avoir un débat approfondi sur le mix énergétique, qui doit évoluer au regard de l’indispensable sortie des énergies fossiles.
Sans cesse, nous avons rappelé la situation alarmante d’EDF et attiré l’attention sur la crise de l’énergie que nous voyions se développer bien avant la crise géopolitique européenne actuelle.
S’agissant des objectifs, quelle organisation adoptée pour l’énergéticien français, qui sera bientôt, peut-être, 100 % public ? Après le projet Hercule rebaptisé Grand EDF, nous n’avons toujours aucun échange, sur le fond, avec vous, qui représentez l’État.
Dans le cadre de quelle stratégie sommes-nous ? Avec quels moyens financiers ? Pour servir quels objectifs de souveraineté industrielle, dans l’intérêt premier des consommateurs aussi bien particuliers, professionnels qu’industriels ? Sur la base de quelles propositions françaises de réforme du marché européen ? Un marché qui a démontré son inadéquation avec les intérêts stratégiques des États membres et de l’Union européenne.
Lors de la discussion générale, j’indiquais que nous ne voulions pas que ce projet de loi soit le prétexte à la tenue d’un pseudo-débat d’affichage sur une partie, fût-elle importante, du mix énergétique dont la France a besoin, de toute urgence, pour répondre aux enjeux climatiques.
Sans débat de fond entre nous, portant sur ce que pourrait ou devrait être le mix énergétique, la majorité sénatoriale a élargi le périmètre du projet de loi initialement consacré à la simplification des procédures de délivrance des autorisations.
Nous nous sommes opposés à ce changement de périmètre. Pourquoi ? Parce que ce débat ne peut pas être traité à la légère, au Parlement, au détour – et en quelques heures de discussion – d’un texte qui ne lui est pas entièrement consacré et qui n’a pas été préparé dans ce but.
À tout le moins, convenez-en, une solide étude d’impact, s’appuyant notamment sur les études robustes de Réseau de transport d’électricité (RTE) ou de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe), est nécessaire.
Or s’agissant du seuil des 50 % comme de celui des 63, 2 gigawatts, nous n’avons rien ! Nous ne sommes plus dans les années 1960 ou 1970 ; ce débat intéresse et concerne l’ensemble des Français !
En outre, comme le prévoit la Charte de l’environnement, qui a valeur constitutionnelle, les Français ont à connaître et doivent pouvoir discuter des politiques énergétiques comme climatiques qui conditionneront la durabilité, si ce n’est la viabilité, du monde de demain.
A contrario du trop peu de considération – c’est un euphémisme – accordée à la Convention citoyenne pour le climat, nous devons respecter les débats en cours, animés par la CNDP, portant sur l’avenir énergétique du pays et sur la composition de notre futur mix énergétique, ainsi que les consultations sur les nouveaux EPR 2.
Respecter la dimension consultative ou participative de notre démocratie ne nous permet pas d’anticiper le contenu de la future loi quinquennale, examinée par le Parlement en 2023.
Le mix devra résulter d’un optimum combinant les différents modes de production disponibles, tout en tenant compte de leurs divers effets spécifiques. Nous n’écartons a priori aucun moyen de production décarboné.
Dans une perspective d’emplois et de souveraineté nationale, nous devrons nous donner l’objectif de disposer de filières industrielles implantées dans nos territoires. La formation et la reconnaissance des métiers devront être notre priorité ; cela pour chaque mode de production.
Sur le plan technique, les possibilités de prolongation des réacteurs pèseront lourdement sur le mix retenu. Elles ne sont actuellement pas connues ; l’ASN ne les a pas encore instruites.
Au moment où nous parlons, de nombreuses incertitudes technologiques restent aussi à lever.
En considérant ces différents aspects, soyons réalistes et rationnels afin d’adopter une position politique éclairée, dont les effets seront majeurs à long terme. C’est la position de principe du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Quant au débat, l’ensemble de nos amendements tendant au rétablissement du périmètre initial ont été rejetés.
Nous avons aussi voulu porter le débat sur des points de vigilance qui méritent l’attention. Il s’agit de ceux qui sont relatifs à la nécessaire prise en compte des aléas climatiques extrêmes – ressource en eau, trait de côte, inondations, etc. –, autant de sujets qui, avec d’autres, conditionneront la performance et la sécurité du parc de production nucléaire dans les décennies à venir.
Sur ce point, notre groupe a obtenu que soient confortés les moyens humains de l’ASN et de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), pour maîtriser à la fois l’emploi du nucléaire et les nouvelles contraintes liées aux changements climatiques, nécessitant des expertises supplémentaires.
Enfin, à propos des conséquences des procédures dérogatoires instaurées par ce texte, je soulignerai deux avancées issues de nos propositions.
La première, c’est le renforcement du dialogue avec les exécutifs locaux en amont de la mise en œuvre des procédures dérogatoires de mise en compatibilité des documents d’urbanisme.
La deuxième, c’est la possibilité de s’assurer que la consultation du public se déroulera dans les meilleures conditions possible pour tous les citoyens, notamment en offrant la possibilité de consulter à la mairie un dossier imprimé.
En définitive, le texte soumis à notre vote est hybride : d’un côté, il détaille diverses procédures ; de l’autre, il aborde, sans la traiter correctement – il s’en faut ! –, la question centrale du mix énergétique.
Enfin, sa portée, pour être réelle et utile, est à relativiser. Ce texte permettra de gagner une année, deux au mieux, alors que le pays en a perdu cinq pour des installations industrielles dont la durée de vie pourrait être de soixante ans ou plus.
En conséquence, le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain s’abstiendra.
Madame la ministre, nous vous demandons d’engager sans tarder le processus de révision du mix énergétique national, en travaillant dès maintenant de façon approfondie avec le Parlement.
Applaudissements sur les travées du groupe SER. – M. Pierre Ouzoulias applaudit également.
La parole est à M. Fabien Gay, pour le groupe communiste républicain citoyen et écologiste. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE.)
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, dès l’ouverture de la discussion générale sur ce texte, nous avons émis un certain nombre de réserves.
Nos réserves sont d’abord de forme : nous regrettons, madame la ministre, que rien ne change dans votre méthode.
Le constat est clair : nous vivons une crise sans précédent, qui exige une réponse globale.
Aujourd’hui, c’est le système concurrentiel qui s’effondre. Il n’a d’ailleurs jamais tenu par lui-même, puisqu’il a toujours fallu intervenir pour faire émerger un semblant de concurrence.
Et quelle concurrence ! Les fournisseurs alternatifs sont dopés aux aides d’État indirectes et propulsés par l’assèchement organisé de l’opérateur historique, EDF. Au sein du marché européen de l’électricité, les traders et la spéculation se sont invités, la fraude est massive. Les valeurs marchandes n’ont pas de réalité concrète, les échanges sont sans stock et les factures sans lien avec les mix électriques nationaux.
C’est un fiasco pour les usagers, pour l’innovation, pour l’investissement et pour le développement des énergies décarbonées !
Cette situation, personne ne peut l’ignorer tant la crise l’a rendue visible ; les collectivités, les entreprises, les artisans, les commerçants, les particuliers, nul n’est épargné.
Mais un choc n’est jamais une fatalité. Lorsque l’on prend la mesure de ce qui se produit et que l’on accepte qu’il faille changer de logiciel, alors il est possible de rebâtir quelque chose, pour régler le problème efficacement et durablement.
Ce n’est toutefois pas l’approche que vous avez retenue, madame la ministre.
Vous continuez de penser qu’il est possible de traiter partiellement les enjeux relatifs au secteur de l’énergie, texte après texte, projet de loi après projet de loi, sans remettre en question le cadre global.
Ce n’est pas possible ! L’ensemble des groupes de notre assemblée vous l’a dit, du reste ; les sensibilités politiques sont loin d’être les mêmes, mais tous vous ont reproché la méthode avec laquelle vous avez abordé le sujet.
Près de six mois avant la nouvelle programmation pluriannuelle de l’énergie, vous nous présentez un texte visant à réduire les délais administratifs propres au nucléaire. C’est en réalité symptomatique du rôle du Parlement aux yeux de votre gouvernement. Selon vous, c’est une chambre d’enregistrement où vous faites voter des textes parce que la Constitution vous y oblige. Le débat, cela ne vous intéresse pas ! D’ailleurs, pour vous, le mieux serait de ne pas amender.
Madame la ministre, la filière nucléaire a souffert non pas des délais administratifs, mais des atermoiements des gouvernements successifs et de la volonté de mettre fin à cette filière.
Applaudissements sur les travées du groupe CRCE, ainsi que sur des travées des groupes SER, UC et Les Républicains. – M. Franck Menonville applaudit également.
Quant à nous, communistes, nous soutenons le développement du nucléaire comme celui des énergies renouvelables, mais à deux conditions : démocratie et sécurité.
Faire voter un texte alors que le débat public sur le nucléaire n’est pas fini, ce n’est pas sérieux !
Pis, la réduction des délais administratifs risque de provoquer colère et incompréhension, alors que ces projets de réacteurs vont s’étendre sur un siècle. Il faut prendre le temps de la concertation et de l’acceptabilité.
Vous pourriez rencontrer un autre problème, madame la ministre, dans l’hypothèse où le Parlement déciderait de retenir dans la PPE le scénario du mix 100 % renouvelable établi par RTE. Tel n’est pas notre souhait, mais imaginons… Nous aurions passé du temps à bavarder pour rien !
D’ailleurs, vous avez passé huit des onze minutes de votre intervention générale, au début de l’examen du texte, à nous expliquer ce dont il ne fallait pas parler, à savoir l’essentiel et l’important. À vous en croire, pour ce projet de loi, il aurait fallu s’en tenir au secondaire et au superficiel.
Madame la ministre, si l’on ose amender, ou si votre gouvernement se trouve minoritaire au Parlement, alors il répond par la procédure accélérée, par le « 49.3 » à l’Assemblée nationale ou, comme c’est actuellement le cas pour la réforme des retraites, par l’article 47-1 de la Constitution.
Venons-en maintenant au fond. Le financement du nucléaire ? Il est interdit d’en parler ! Pourtant, c’est une chose de modifier un article du code de l’urbanisme, c’en est une autre de savoir comment financer huit nouveaux EPR, qui coûtent plusieurs dizaines de milliards d’euros.
Applaudissements sur les travées du groupe CRCE.
Avec EDF, nous aurions une maîtrise publique via un groupe renationalisé, mais nous voulons d’abord savoir quelle sera la nouvelle architecture du groupe. Là aussi, il est interdit d’en parler ; cela ne serait pas à l’ordre du jour !
Madame la ministre, permettez-moi de vous dire que les parlementaires, sur toutes ces travées, sont en droit de s’interroger sur les capacités d’investissement d’un groupe qui a déjà 60 milliards d’euros de dettes, dont une large part est due à l’Arenh. Mais non : passez votre chemin, le Gouvernement s’occupe de tout…
Et quelle sera la régulation de ce nouveau nucléaire après 2025, avec l’Arenh 2.0 ? Là encore, il est interdit d’en parler ! Vous nous objectez que les négociations ont commencé, mais nous ne savons même pas avec qui !
Pourtant, c’est un sujet sur lequel il est impensable de faire l’économie d’une réflexion, tant ce système est absurde et insupportable.
Aussi, je poserai trois questions. D’abord, allez-vous continuer de ruiner EDF avec un système comme l’Arenh ?
Très bien ! sur des travées du groupe Les Républicains.
Comptez-vous nous faire voter pour la construction d’installations nucléaires qu’EDF n’aura pas les moyens d’entretenir ? Le service public va-t-il continuellement être racketté au profit d’acteurs alternatifs privés ?
Applaudissements sur les travées du groupe CRCE et sur des travées des groupes UC et Les Républicains.
Ensuite, la question fondamentale porte sur les tarifs réglementés de vente de l’électricité (TRVE). Pourtant, vous n’avez pas prononcé un mot à ce sujet ! Là encore, interdit d’en parler !
Madame la ministre, souhaitez-vous maintenir ces tarifs réglementés ou y mettre un terme, à l’instar de ceux du gaz à compter de juin 2023 ? Ces questions ne sont pas annexes, elles sont au cœur même du sujet.
Enfin, concernant les enjeux de sécurité et d’emploi, vous n’avez pas eu un mot pour les travailleurs de la filière, ni même pour ceux qui font les frais de la sous-traitance en cascade.
Nous vous avons interrogée sur ce point, et vous nous avez répondu qu’ils ne rêvent pas tous du statut du personnel des industries électriques et gazières (IEG). Je le redis et je l’assume : nous ne devons pas rencontrer les mêmes travailleurs !
Nous exigeons, à leurs côtés, que ce statut soit sanctuarisé et élargi à l’ensemble des sous-traitants. Il y va de la sécurité de ces travailleurs et de la nôtre, ainsi que de l’attractivité de la filière ; il y va également de la reconnaissance de leur travail et de leurs qualifications.
Soyons clairs : la décennie de retard de l’EPR de Flamanville provient moins des lenteurs administratives que de la casse des métiers, des savoir-faire et des compétences !
Tout cela a été précipité par le recours abusif aux sous-traitants.
À l’instar de ce que nous défendons pour les énergies renouvelables, nous demandons que le nucléaire soit de haut niveau et non pas low cost.
Nous voulons construire notre indépendance sur ces deux piliers : la maîtrise publique et un appui sur nos propres savoir-faire, compétences et filières.
En effet, pour nous, l’énergie est un bien commun de l’humanité, qui doit être sorti des griffes du marché.
Oui à un nucléaire de haut niveau, non à votre méthode !
Pour toutes ces raisons, nous nous abstiendrons.
Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe CRCE et sur des travées des groupes SER et UC.
M. le président. La parole est à Mme Amel Gacquerre, pour le groupe Union Centriste.
Applaudissements sur les travées du groupe UC.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la situation du mix énergétique français est désormais bien connue : à près de 62 %, notre consommation d’énergie repose encore sur les énergies fossiles, qui sont massivement importées.
Le conflit russo-ukrainien, au travers de ses conséquences sur l’approvisionnement en hydrocarbures, a mis en lumière notre dépendance et l’impérieuse nécessité de produire notre énergie de façon autonome.
La question de l’énergie n’est pas nouvelle ; elle est vitale. Sans approvisionnement énergétique, point de transport, point de développement industriel, point d’agriculture ! Au reste, peu d’activités humaines demeureraient possibles…
Pourtant, pour que le sujet soit enfin abordé, il a fallu subir une crise géopolitique en Europe et voir le coût de l’énergie exploser, ce qui a eu des conséquences sur les dépenses des ménages et a placé dans une situation économique délicate, voire catastrophique, nombre de nos artisans et de nos entreprises. Et ce sujet est abordé dans l’urgence, bien sûr…
Face aux multiples enjeux qui s’imposent à nous – la souveraineté énergétique, la baisse programmée de la consommation d’énergies fossiles, la nécessité de développer une énergie bas-carbone et, bien sûr, une plus grande efficacité énergétique –, le nucléaire doit être le fer de lance de la politique énergétique française pour les trente années à venir.
Nous n’avons pas le choix : ce n’est qu’en construisant un mix énergétique alliant un nucléaire pilotable à des énergies renouvelables diversifiées et compétitives que nous pourrons envisager un avenir plus serein pour nos concitoyens, pour nos entreprises et pour notre planète.
Exclusivement technique, ce projet de loi relatif à l’accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes est naturellement bienvenu. Son examen est l’occasion de mettre en lumière un sujet primordial, mais il reste de regrettables zones d’ombre.
Je ne m’attarderai pas trop longuement sur le joyeux désordre qui règne dans le calendrier parlementaire de la politique énergétique.
Désormais, à chaque saison son projet de loi énergétique : l’automne nous a offert les énergies renouvelables ; l’hiver, le nucléaire ; le début de l’été nous verra examiner une loi de programmation aux contours complètement inconnus.
Cette saisonnalité regrettable conduit notre politique énergétique à être au mieux illisible, au pire incohérente.
Je ne reviendrai pas non plus dans le détail sur les actes manqués de ce texte, d’une technicité rare et au caractère politique limité, voire inexistant. Des questions centrales ne sont pas abordées, notamment le financement des futurs investissements colossaux – je rejoins sur ce point les propos des orateurs précédents.
Quel modèle souhaitez-vous choisir, madame la ministre, sachant que l’un des enjeux est de garantir un coût maîtrisé de l’électricité ?
Quid des réacteurs existants, qui ne pourront pas tourner indéfiniment ? Qu’en est-il de la question des compétences et de la formation du personnel, sans lesquels la relance sera impossible ?
Enfin, je ne m’arrêterai pas non plus longuement sur les questions soulevées quant à l’avenir de notre capacité de production électronucléaire.
Selon RTE, notre mix énergétique devra être composé à 55 % d’électricité, contre 25 % actuellement. L’électricité étant produite à hauteur de 70 % par nos centrales nucléaires, il nous faudra augmenter notre capacité de production. Les quatorze réacteurs annoncés par le Président de la République nous permettraient de le faire légèrement, mais inévitablement les réacteurs construits dans les années 1970 et 1980 fermeront.
Mes chers collègues, vous l’avez compris, le compte n’y est pas. Nous devons donc être bien plus ambitieux afin de relever ce défi.
Je souhaite néanmoins revenir sur le travail sénatorial de fond et de qualité mené à partir du projet de loi initial, travail qui a permis de consolider l’assise juridique du nucléaire existant, ainsi que le cadre des projets à venir.
Je salue également l’excellent travail de nos rapporteurs, Daniel Gremillet et Pascal Martin, ainsi que des commissions des affaires économiques et de l’aménagement du territoire ; ce travail a été effectué, j’y insiste, en un temps record.
Je souhaite relever quelques apports essentiels issus de leurs travaux, notamment la suppression par le Sénat de l’objectif de réduction à 50 % de la part du nucléaire dans la production d’électricité d’ici à 2035.
La suppression du plafonnement de la capacité de production d’électricité nucléaire, qui avait été introduit dans la loi du 17 août 2015, doit également être soulignée. Ce plafonnement, qui ne laissait que peu de marge de manœuvre pour développer le nucléaire en France, était un non-sens face aux défis qui s’imposent à nous : la hausse de consommation d’électricité et la réindustrialisation.
Une autre avancée est l’extension à l’horizon 2050 de la durée d’application des mesures contenues dans ce texte. Cette disposition permettra de doter le nucléaire d’une vision stratégique plus claire et de long terme, et concourra à l’attractivité de la filière, qui est essentielle pour donner envie à nos jeunes de suivre les formations nécessaires à la relance du nucléaire.
Autre point positif : la meilleure prise en compte de l’avis des collectivités territoriales dans la mise en compatibilité des documents d’urbanisme lorsqu’un projet de réacteur est à l’étude. Cette demande venait de nos territoires, c’est désormais chose faite et cela constitue un véritable pas en avant. Nous devons bâtir notre stratégie énergétique avec l’ensemble des acteurs concernés ; cela commence à l’échelon local.
Enfin, la consolidation de la procédure de réexamen des réacteurs nucléaires au-delà de leur trente-cinquième année de fonctionnement est inévitable, afin de garantir un bon entretien du parc existant. C’est un enjeu crucial au regard des polémiques récentes sur l’état de ce parc. D’ailleurs, les risques de délestage évoqués cet hiver sont toujours d’actualité.
Mes chers collègues, sous l’impulsion de nos rapporteurs, nous avons fait évoluer ce texte technique afin de faciliter concrètement la construction de futurs réacteurs.
L’année 2023 doit être celle de la relance du nucléaire et, en parallèle, du développement des énergies renouvelables.
Mes collègues du groupe Union Centriste et moi-même serons particulièrement vigilants sur ces points lors de l’examen de la prochaine programmation pluriannuelle de l’énergie, qui est prévue pour l’été prochain, afin que le Gouvernement passe des paroles aux actes, sans éluder, bien sûr, les questions essentielles d’approvisionnement en uranium, de gestion des déchets, de sûreté et de recherche et développement.
Madame la ministre, nous voterons ce projet de loi amendé, car il a pour objet de participer à la relance de la filière nucléaire en France, mais vous l’avez compris, ce vote n’est ni une carte blanche ni un blanc-seing.
Applaudissements sur les travées des groupes UC et INDEP, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.
La parole est à M. Jean Louis Masson, pour la réunion administrative des sénateurs ne figurant sur la liste d’aucun groupe.
Mes chers collègues, si nous sommes actuellement confrontés à une crise économique importante et à une inflation galopante, c’est en grande partie parce qu’un certain nombre de responsables politiques ont torpillé le programme nucléaire français.
Il faut dire la vérité : la grande cause de la crise économique actuelle, c’est l’explosion du coût de l’énergie. Or celle-ci résulte de décisions prises par des irresponsables, qui ont voulu faire croire que l’énergie nucléaire était plus dangereuse que les autres.
Exclamations sur les travées du groupe GEST.
Par le passé, j’ai été ingénieur des mines ; à ce titre, j’ai contrôlé les mines de charbon. J’ai également été inspecteur national des installations nucléaires.
Aussi, je peux vous dire que, à quantité égale d’énergie produite, une mine de charbon est à l’origine de cinquante fois plus de morts qu’une centrale nucléaire.
M. Jean Louis Masson. Mais on a fait de la démagogie ! Nos collègues écologistes ont transformé le nucléaire en un fonds de commerce politicien !
Protestations sur les travées des groupes GEST et SER. – M. Bruno Sido applaudit.
Les écologistes savent très bien que la meilleure solution pour lutter contre le gaz carbonique, c’est d’installer non pas des moulins à vent (, mais des structures qui produisent de l’énergie en quantité, à bas coût.
On veut maintenant nous faire croire que les éoliennes sont rentables… Mais c’est le cas uniquement parce que le prix de l’électricité a doublé ; sinon, elles ne le seraient pas !
(Exclamations sur les travées des groupes GEST et SER. – Rires et applaudissements sur les travées d es groupe s Les Républicains et INDEP.) Ils pourrissent la vie de nos concitoyens, notamment avec les zones à faibles émissions, qui visent à lutter contre les prétendues pollutions des automobiles.
Rires et exclamations sur les travées des groupes GEST, SER et Les Républicains.
Les écologistes portent une responsabilité colossale. Ils sont sympathiques lorsqu’ils sont des hommes de base, mais lorsque ce sont des politiciens, ce sont des catastrophes ! §
Mes chers collègues, il faut relancer la construction de centrales et la production d’électricité nucléaire. À ce titre, ce projet de loi est excellent, le Sénat a très bien travaillé dessus, et je le voterai.
Je terminerai sur ce point important : ce qu’il faut, c’est tourner au maximum la molette des centrales nucléaires !
Applaudissements sur des travées des groupes Les Républicains et INDEP. – M. Stéphane Ravier et Mme Christine Herzog applaudissent également.
Je mets aux voix, dans le texte de la commission, modifié, l’ensemble du projet de loi relatif à l’accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
Le scrutin a lieu.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.
Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 110 :
Nombre de votants333Nombre de suffrages exprimés255Pour l’adoption239Contre 16Le Sénat a adopté.
Applaudissements sur des travées des groupes Les Républicains et UC.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens à vous remercier de votre travail sur ce texte.
Je salue plus particulièrement les rapporteurs Daniel Gremillet et Pascal Martin, Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques, et Jean-François Longeot, président de la commission de l’aménagement du territoire, ainsi que l’ensemble des membres de ces deux commissions.
Vous l’avez dit, ce projet de loi est le deuxième texte énergétique à être examiné au cours de ces trois derniers mois, au Sénat et à l’Assemblée nationale.
Cela reflète notre détermination à préparer collectivement l’avenir énergétique de notre pays, à sortir de notre dépendance aux énergies fossiles et à des puissances étrangères parfois hostiles, en nous dotant des moyens de produire des énergies décarbonées dans notre territoire. À ce sujet, je rappelle que nous dépendons aux deux tiers des énergies fossiles – il n’y a là rien de nouveau sous le soleil, puisque cette situation dure depuis cinquante ans !
Cela témoigne également de notre détermination à répondre aux enjeux relatifs au pouvoir d’achat des Français et à la compétitivité de nos entreprises. C’est en produisant de l’énergie à bas coût que nous résoudrons le problème du prix de l’électricité, quel que soit le type de marché.
Cela témoigne enfin de notre détermination à faire de la France un grand pays de l’énergie, souverain d’un point de vue technologique et en mesure d’exporter – il me semble que nombre d’entre vous sont sensibles à cet objectif.
Mesdames, messieurs les sénateurs, vous examinerez dans quelques mois le projet de loi de programmation sur l’énergie et le climat, que vous attendez avec beaucoup d’impatience.
Il nous faut respecter le temps du débat public – nombre d’entre vous l’ont rappelé dans cet hémicycle –, qui vise à interroger les Français sur le système énergétique de demain, conformément à votre volonté de législateur. La Commission nationale du débat public vous adressera une synthèse des résultats, qui vous permettra de choisir les bons réglages en parfaite connaissance de cause.
Il n’appartient donc pas au Gouvernement de défendre aujourd’hui une vision de la future programmation pluriannuelle de l’énergie, puisqu’elle viendra dans un second temps.
J’insiste toutefois sur notre souhait de construire notre mix énergétique sur deux piliers : d’abord, la baisse de la consommation d’énergie, au moyen de l’efficacité et de la sobriété énergétique, conformément aux analyses du Giec, le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat, selon lequel c’est la première façon de garantir notre indépendance énergétique ; ensuite, la production d’électricité et de chaleur par le biais des énergies renouvelables et des réacteurs nucléaires.
Notre ligne est très claire et nous aurons l’occasion de travailler très prochainement à ce sujet, en amont de la prochaine programmation, car je suis consciente que chacun doit être partie prenante de ce débat essentiel et stratégique, ainsi que vous l’avez tous dit au cours de vos explications de vote.
Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à quinze heures quarante-cinq, est reprise à quinze heures cinquante, sous la présidence de Mme Laurence Rossignol.
Lors du scrutin n° 110, sur l’ensemble du projet de loi relatif à l’accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes, je souhaitais m’abstenir.
Acte vous est donné de cette mise au point, mon cher collègue. Elle sera publiée au Journal officiel et figurera dans l’analyse politique du scrutin.
Mes chers collègues, par courrier en date du 19 janvier, M. Guillaume Gontard, président du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires, s’oppose à l’examen selon la procédure de législation en commission de la proposition de loi visant à régulariser le plan local d’urbanisme intercommunal (PLUi) de la communauté de communes du Bas-Chablais, inscrite à l’ordre du jour du mardi 31 janvier.
Acte est donné de cette demande.
Pour l’examen de ce texte, nous pourrions prévoir une discussion générale de 45 minutes.
Par ailleurs, le délai limite de dépôt des amendements de séance serait fixé au lundi 30 janvier à 12 heures.
Y a-t-il des observations ?…
Il en est ainsi décidé.
L’ordre du jour appelle la désignation des dix-neuf membres de la commission d’enquête sur la pénurie de médicaments et les choix de l’industrie pharmaceutique française, ainsi que des vingt et un membres de la mission d’information sur l’avenir de la commune et du maire en France.
En application des articles 8 et 8 ter, alinéa 5, du règlement du Sénat, les listes de candidats remises par les groupes politiques ont été publiées.
Ces candidatures seront ratifiées si la présidence ne reçoit pas d’opposition dans le délai d’une heure prévu par notre règlement.
L’ordre du jour appelle, en application de l’article 16 bis, alinéa 2, du règlement, la proposition de création d’une commission spéciale chargée d’examiner la proposition de loi visant à faciliter la mise en œuvre des objectifs de « zéro artificialisation nette » au cœur des territoires.
Je soumets cette proposition au Sénat.
Il n’y a pas d’opposition ?…
Il en est ainsi décidé.
Conformément à la décision de la conférence des présidents, la désignation des 37 membres de cette commission spéciale aura lieu en séance publique mercredi 1er février.
Madame la présidente, en accord avec la commission des lois, la commission des affaires sociales et la commission de la culture, le Gouvernement demande que les articles 17, 4 et 5, ainsi que l’amendement portant article additionnel après l’article 4, soient examinés en priorité avant l’article 3 ; que les articles 9 à 11, ainsi que les amendements portant articles additionnels s’y rapportant, soient examinés avant l’article 8 ; enfin, que l’article 18 soit examiné avant l’article 12.
Je suis donc saisie par le Gouvernement, en application de l’article 44, alinéa 6, du règlement, d’une demande de priorité tendant à ce que les articles 17, 4 et 5, ainsi que l’amendement portant article additionnel après l’article 4, soient examinés avant l’article 3 ; à ce que les articles 9 à 11, ainsi que les amendements portant articles additionnels s’y rapportant, soient examinés avant l’article 8 ; enfin, à ce que l’article 18 soit examiné avant l’article 12.
Quel est l’avis de la commission sur cette demande de priorité ?
Madame la présidente, madame le rapporteur, madame, monsieur les rapporteurs pour avis, mesdames, messieurs les sénateurs, l’accueil du monde entier, autour des valeurs de l’olympisme : l’excellence, l’amitié, le respect ; des performances qui ont inspiré les générations futures et les ont poussées à aller, à leur tour, plus vite, plus haut, plus fort ; des infrastructures durablement améliorées et une première reconnaissance du sport féminin ; voilà ce que les Jeux de 1924 avaient légué à la France. C’était il y a presque cent ans.
Chacun le sait, en réinventant les Jeux de l’ère moderne, Pierre de Coubertin portait le rêve d’un événement capable d’une influence positive sur le cours du monde ; ces compétitions ont su s’affirmer au fil du temps comme d’exceptionnels moments de rapprochement entre les peuples.
Les Jeux ont été à l’origine d’exploits sportifs fascinants, d’émotions collectives à nulle autre pareille. Pour les pays hôtes, organiser et réussir les Jeux est donc un honneur conquis de haute lutte, une formidable opportunité, mais aussi, chacun le mesure, un immense défi.
Aujourd’hui, la France retrouve les jeux Olympiques pour la première fois depuis un siècle et accueille les jeux Paralympiques pour la première fois de son histoire.
C’est à Lausanne, il y a cinq ans, sous l’égide du Président de la République, que le rêve olympique et paralympique français est devenu vraisemblable ; c’est à Lima qu’il a pris réalité. La délégation française a forgé alors cet « esprit de Lima », un esprit d’unité qui a permis de poser les fondations des Jeux de Paris 2024 ; un esprit que nous ferons vivre.
Depuis lors, le travail acharné de l’ensemble des acteurs nous a permis d’entamer la dernière phase de notre préparation avec confiance. C’est sur ce socle que j’inscris, depuis huit mois, mon action à la tête du ministère des sports et des jeux Olympiques et Paralympiques, sous l’autorité de la Première ministre.
Avec beaucoup de gratitude, je tiens à remercier ceux qui ont été les pionniers de cette conquête olympique collective. Je me tourne notamment vers vous, cher Patrick Kanner, mais je salue également les sénateurs qui contribuent à cette aventure collective et ceux qui, plus largement, portent, parfois depuis longtemps, la volonté de voir le sport mieux installé au cœur de notre société.
À ce titre, je tiens tout particulièrement à remercier la commission de la culture, de l’éducation et de la communication, ainsi que son président, Laurent Lafon, pour sa vision et pour nos échanges, aussi exigeants que constructifs.
Notre équipe est au travail, autour du comité d’organisation et de la Société de livraison des ouvrages olympiques (Solideo), avec Paris, la ville hôte, la région Île-de-France, le département de la Seine-Saint-Denis et la ville de Saint-Denis, ainsi que les 70 autres collectivités hôtes impliquées, de Lille à Marseille, de Châteauroux à Teahupo’o. S’y ajoute l’ensemble des ministères concernés, tous mobilisés et coordonnés par la délégation interministérielle aux jeux Olympiques et Paralympiques, dirigée par le préfet Michel Cadot.
Nous devons rendre toujours plus efficace le pilotage de ce projet, comme nous y appelle, à juste titre, le rapport récent de la Cour des comptes. Il nous faut, en effet, être à la hauteur de cet événement d’une immense envergure sportive, avec 15 000 athlètes, médiatique, avec plus de quatre milliards de téléspectateurs, et organisationnelle, avec l’équivalent de quarante-trois championnats du monde simultanés, avec 800 000 personnes à acheminer chaque jour, enfin avec le déploiement quotidien d’environ 50 000 membres des forces de sécurité publiques et privées.
J’ai l’habitude de dire que réussir les Jeux, c’est réunir un quatuor d’exigences : l’organisation la plus irréprochable possible ; des athlètes au meilleur de leur performance ; une vraie fête populaire pour tous les Français et dans tous les territoires ; enfin, un héritage utile et durable pour le pays.
Il doit en aller ainsi, notamment en Seine-Saint-Denis, département qui concentre plus de 80 % des investissements publics du projet, mais aussi dans toute la France, dont nous devons faire une nation sportive. C’est la raison pour laquelle le Président de la République a d’ores et déjà choisi de faire de l’activité physique et sportive une grande cause nationale en 2024.
Cet événement doit refléter ce que nous sommes, ce que nous savons faire de meilleur, à travers plusieurs grands marqueurs.
La parité, d’abord : pour la première fois, à Paris, seront engagés dans les épreuves olympiques exactement le même nombre d’athlètes femmes et hommes.
La compacité, ensuite : 95 % des équipements prévus seront éphémères ou existent déjà, pour en finir avec le phénomène des éléphants blancs qui hantent encore certaines rues d’Athènes et de Rio.
L’exemplarité écologique : elle s’exprimera notamment au travers d’une division par deux des émissions de gaz à effet de serre par rapport aux éditions précédentes.
La maîtrise des budgets : en dépit du contexte d’inflation que chacun connaît, elle demeure une condition clé de l’acceptabilité sociale des Jeux.
L’exigence sociale, enfin : 25 % des marchés sont réservés aux très petites entreprises (TPE) et aux petites et moyennes entreprises (PME) ; nous avons aussi pour objectif de proposer au total 2 millions d’heures d’insertion bénéficiant aux publics les plus éloignés de l’emploi.
Quant aux jeux Paralympiques de Paris, ils seront les plus grands de l’histoire et constituent, à ce titre, une occasion unique de changer le regard porté par notre société sur le handicap.
Pour nous permettre de finaliser ces Jeux et leur préparation, avec l’exigence, la précision et la fiabilité que vous attendez de nous, votre travail de législateur est un soubassement et même, parfois, un préalable indispensable.
C’est dans cet esprit que vous avez déjà adopté la loi du 26 mars 2018 relative à l’organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024, afin de tenir les engagements de la candidature française, du Comité international olympique (CIO) et du contrat de ville hôte.
Aujourd’hui, à 549 jours d’une cérémonie d’ouverture inédite sur la Seine, nous sommes face à un compte à rebours implacable.
Avec l’ensemble des ministères et des partenaires impliqués, nous avons identifié les ajustements incontournables qu’il nous reste à adopter afin d’aller au bout de nos engagements et de nos besoins opérationnels pour la livraison et le bon déroulement des Jeux.
C’est tout l’objet du projet de loi que j’ai aujourd’hui l’honneur de défendre devant vous.
Permettez-moi d’en exposer les principaux objectifs.
Il s’agit, d’abord, de soigner et de porter secours. Il nous revient de créer, le temps des Jeux, un centre de santé au sein du village olympique et paralympique pour les athlètes et les personnes accréditées. Ce centre sera géré, dans un cadre simplifié, par l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP), sous le contrôle de l’agence régionale de santé (ARS) d’Île-de-France. Grâce à un tel instrument, on évitera de peser sur les capacités de notre système de santé.
Dans le cadre d’une dérogation temporaire, nous allons autoriser les médecins étrangers accompagnant les fédérations internationales et les délégations olympiques à exercer en France, dans cette polyclinique. Nous comptons aussi étendre la liste des organismes habilités à former aux premiers secours, au-delà des associations agréées de sécurité civile.
Il nous faut ensuite – deuxième objectif de ce texte – promouvoir un sport sans dopage. Par ce texte, nous entendons maintenir la France à l’avant-garde de la lutte contre le dopage, où, en leur temps, mes prédécesseurs Marie-Georges Buffet, Jean-François Lamour et Valérie Fourneyron ont su la placer.
Il nous faut rester à ce niveau d’excellence et continuer de répondre à nos obligations internationales en la matière, édictées par l’Agence mondiale antidopage et découlant de la convention de l’Unesco, ratifiée par le Parlement.
Pour cela, nous devons non seulement étendre à la Polynésie française, où se dérouleront les épreuves de surf, les mesures essentielles de lutte contre le dopage en matière pénale, mais aussi ouvrir la possibilité de réaliser des analyses génétiques, comme cela a été fait à Pékin et à Tokyo, afin de déceler les fraudes qui ne peuvent l’être d’aucune autre façon et, ainsi, éviter qu’une faille, un point de fuite, dans notre édifice ne vienne en ruiner la crédibilité tout entière.
J’ai entendu vos inquiétudes sur ce sujet et nous en avons pris la mesure, en entourant ce dispositif de toutes les garanties nécessaires : information expresse des personnes concernées ; usage seulement en tout dernier recours, pour des situations et des finalités limitativement énumérées ; mise en œuvre au moyen d’échantillons anonymisés et promptement détruits, ne permettant ni identification, ni sélection, ni profilage des sportifs concernés.
Nous avons ainsi veillé à concilier au mieux les impératifs de l’éthique et de l’intégrité sportives, dans le respect de nos obligations internationales.
Notre troisième objectif au travers de ce texte est de protéger toutes les populations.
Le ministre de l’intérieur et des outre-mer, Gérald Darmanin, et moi-même sommes parfaitement lucides quant au fait que la réussite des Jeux est conditionnée à l’impérieuse nécessité d’en sécuriser chaque dimension. Cela concerne la protection des enceintes sportives, avec quatre cérémonies d’ouverture et de clôture, le relais de la flamme, mais également la préservation de l’ordre public et la prévention de la délinquance aux abords de tous nos sites, la cybersécurité, ou encore la gestion efficace des flux de personnes, depuis l’arrivée sur le territoire national jusqu’à nos métros, nos bus et nos RER.
Par le biais de ce projet de loi, nous entendons donc nous doter de moyens renforcés pour détecter plus rapidement et plus facilement, par la vidéoprotection, les risques graves – mouvements de foule, colis suspects, goulets d’étranglement dans les transports… –, mais aussi améliorer et fluidifier le contrôle à l’entrée des sites de compétition et de célébration.
Il importe de mieux coordonner les équipes mobilisées pour la sécurité dans les transports et d’assurer une unité de commandement des forces de sécurité pendant la période des Jeux.
Là aussi, nous avons entendu les questions posées sur la nature de certains dispositifs, comme le traitement par algorithme des images de vidéoprotection, qui continue de susciter des interrogations sur certaines travées de cet hémicycle.
Pour autant, nous souhaitons souligner que les très nombreuses garanties mises en place dans le cadre de cette expérimentation nous aideront à être au rendez-vous de la sécurité des Jeux tout en préservant les droits et les libertés de nos concitoyens, en parfaite conformité avec le droit européen de la protection des données.
Dans ce cadre, en suivant à la lettre les recommandations de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil), nous avons défini une ligne claire : nous ne voulons pas de la reconnaissance faciale. Cette dernière ne nous paraît pas nécessaire en termes opérationnels et les autres dispositifs prévus dans ce chapitre du texte offriront un saut qualitatif dans la prévention et la lutte contre les troubles à l’ordre public.
En matière de sécurité, nous entendons enfin tirer tous les enseignements des événements survenus au Stade de France le 28 mai dernier et au stade Geoffroy-Guichard le lendemain.
Je salue, à cet égard, le travail réalisé par les deux commissions du Sénat qui ont analysé ces incidents, puis recommandé un ensemble d’améliorations dont nous avons tenu compte dans ce projet de loi.
Ainsi, nous souhaitons renforcer les sanctions individuelles prononcées par le juge judiciaire en cas d’entrée par force ou par fraude dans les enceintes, ou d’intrusion sans motif légitime sur l’aire de compétition.
De même, il vous est proposé de rendre systématiques les interdictions judiciaires de stade pour les infractions pénales les plus graves, par exemple l’introduction d’objets susceptibles de constituer une arme, les jets de projectiles, la provocation à la haine ou à la violence, ou encore l’incitation à la discrimination.
Vous connaissez et vous partagez ma détermination à lutter contre ces débordements détestables dans nos stades afin de garantir, en héritage de ces Jeux, un monde sportif sûr et des enceintes dans lesquelles la violence n’a plus sa place.
Le quatrième objectif de ce texte est de favoriser l’accessibilité des transports. Avec mon collègue Clément Beaune, nous avons jugé que, pour être au rendez-vous de l’exigence d’accessibilité des transports franciliens durant ces Jeux, il était nécessaire de passer de moins de 250 taxis adaptés aux personnes à mobilité réduite (PMR) à plus de 1 000. Pour cela, nous souhaitons permettre à titre expérimental au préfet de police de délivrer de nouvelles licences de taxi PMR dans des conditions simplifiées.
Notre cinquième objectif est de favoriser le potentiel économique dans les territoires. À ce titre, ce projet de loi doit d’abord nous permettre de respecter les engagements du contrat de ville hôte en matière publicitaire vis-à-vis des partenaires des Jeux, lors du relais de la flamme et du compte à rebours, tout en les conciliant avec l’exigence de protection de l’environnement.
L’activité commerçante doit aussi être en mesure de répondre à l’afflux de touristes, de spectateurs et de travailleurs. À cette fin, il vous est proposé de permettre aux préfets d’autoriser le commerce dominical entre le 1er juin et le 30 septembre 2024, sous réserve de l’accord des salariés concernés et de contreparties légales, après consultation des élus locaux, ainsi que des chambres consulaires.
Enfin, sixième et dernier objectif du texte, nous sommes attachés à conserver nos talents jusqu’aux Jeux. Il nous a paru indispensable de permettre aux équipes engagées depuis de nombreuses années dans cette aventure d’être mobilisées jusqu’au bout, via deux mesures relatives, pour l’une, à la limite d’âge et, pour l’autre, à l’avenir de la Solideo, appelée à se rapprocher de Grand Paris Aménagement.
Voilà, mesdames, messieurs les sénateurs, l’essentiel des dispositions que nous vous soumettons.
Nous avons veillé à définir, de manière claire et transparente, celles qui sont limitées au temps des Jeux ou qui ont un caractère expérimental – soit environ la moitié d’entre elles – et celles qui ont vocation à s’inscrire de façon pérenne dans l’héritage de l’événement et à bénéficier à d’autres manifestations culturelles ou festives, après les Jeux.
Au regard des échanges que nous avons eus ces dernières semaines et de l’esprit qui préside traditionnellement aux travaux de la chambre haute, je suis convaincue que vous partagerez notre vision d’un texte équilibré, utile, centré sur l’essentiel et protecteur des droits et des libertés, sans passer à côté des exigences d’innovation et de modernisation auxquelles nous sommes ponctuellement appelés.
Je veux en conclusion remercier vos rapporteurs, Mmes Agnès Canayer et Florence Lassarade, M. Claude Kern, pour la qualité de leurs analyses, de nos échanges et de leurs propositions sur ce texte.
Je veux aussi saluer les apports des travaux en commission : j’ai en particulier à l’esprit l’amélioration du cadre envisagé pour les analyses génétiques antidopage, le déploiement d’une billetterie nominative, dématérialisée et infalsifiable pour certaines compétitions sportives, ou encore l’ajustement le plus proportionné possible à la gravité des faits des mesures de lutte contre les violences dans les stades.
Tout au long de nos débats, je serai à votre écoute, avec la volonté d’améliorer ce projet de loi autant que cela sera nécessaire.
C’est la France qui, à la fin du XIXe siècle, a redonné naissance aux Jeux ; c’est elle qui, avec Alice Milliat, a inventé les Jeux féminins, mais aussi les jeux Olympiques d’hiver, ou encore le village des athlètes.
C’est donc dans la fidélité à cet esprit d’innovation que les Jeux de Paris 2024 vont dessiner une nouvelle référence olympique. Ils offriront une occasion unique de faire rayonner la France, une France ouverte sur le monde, audacieuse et responsable, assumant ses idéaux universels et son amour pour le sport.
Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et RDSE, ainsi que sur des travées du groupe UC. – M. Bruno Belin applaudit également.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, dans 548 jours, les jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 s’ouvriront à Paris, cent ans après les Jeux de 1924.
Les Olympiades sont plus qu’un simple rendez-vous sportif : il s’agit d’un moment de cohésion nationale et de fraternité humaine. C’est également une vitrine pour le pays hôte : la France exposera aux yeux du monde le savoir-faire français et une certaine façon de célébrer l’esprit olympique, par le mérite, la maîtrise de soi, le dépassement.
Ce sera surtout un événement d’une ampleur exceptionnelle.
D’un point de vue sportif, d’abord : 10 500 athlètes de 32 disciplines différentes se mesureront lors de 549 épreuves.
En matière d’organisation, ensuite : les compétitions se dérouleront dans 37 sites olympiques, jusqu’en Polynésie pour le surf, et mobiliseront 63 collectivités hôtes et plus de 40 000 bénévoles.
Enfin, d’un point de vue événementiel, cette fête réunira 13, 5 millions de spectateurs, 20 000 journalistes accrédités et quatre milliards de téléspectateurs dans le monde entier.
Fait inédit, la cérémonie d’ouverture prendra place le long de la Seine, sur six kilomètres, du pont d’Austerlitz au pont d’Iéna, où se dérouleront les spectacles et les cérémonies protocolaires. Ce sera la première fois qu’un tel événement se tient en dehors d’un stade fermé. Cette innovation, qui devrait réunir 600 000 spectateurs, représente aussi un défi en termes de sécurité.
Cette grande fête populaire et sportive focalisera l’attention du monde entier ; elle impose une organisation exemplaire.
Livrer les équipements dans les temps, faire monter en puissance les capacités de transport, coordonner les différents acteurs et prévoir une organisation de la sécurité à la hauteur de l’événement constituent autant de défis qui devront être relevés d’ici à juillet 2024 ; s’y ajoute, évidemment, la préparation de nos athlètes de manière à récolter le plus de médailles possible !
Afin de favoriser la préparation de l’événement, une première loi relative aux jeux Olympiques et Paralympiques a été promulguée le 26 mars 2018. Comme le souligne la Cour des comptes dans son rapport rendu il y a quelques jours, « la phase de planification stratégique des Jeux de Paris 2024 s’est globalement bien déroulée ». Il convient, désormais, de passer à la phase de déclinaison opérationnelle.
Tel est l’objet de ce nouveau projet de loi soumis à notre examen.
Ce texte, intitulé sobrement « projet de loi relatif aux jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 », regroupe diverses mesures d’ampleur inégale ; la plupart d’entre elles ont une portée plus étendue, qui dépasse la simple organisation des Jeux.
Ainsi, seuls huit des dix-neuf articles du texte du Gouvernement ciblent spécifiquement les Jeux de 2024. C’est le cas des articles consacrés à l’installation d’un centre de santé, à l’extension des prérogatives du préfet de police de Paris, à la dérogation à l’interdiction de publicité sur le parcours de la flamme, à l’ouverture des commerces le dimanche le temps des Jeux, ou encore au devenir de la Solideo.
Huit articles accomplissent des mises en conformité avec des dispositions existantes ou créent de nouveaux dispositifs pérennes.
Deux articles, enfin, instituent des expérimentations pour lesquelles les jeux Olympiques auront un rôle d’accélérateur, mais qui ont vocation à perdurer : l’une concerne la vidéoprotection intelligente ; l’autre, l’augmentation du nombre de taxis accessibles aux personnes à mobilité réduite.
Si toutes ces dispositions, souvent techniques, sont nécessaires à la réussite des jeux Olympiques, deux dispositifs nouveaux soulèvent cependant l’épineuse question du juste équilibre entre la recherche d’efficacité et la garantie des droits et libertés individuelles, que ce soit en matière de lutte contre le dopage ou de sécurisation des jeux.
La France s’est engagée avec force, depuis les années 1990, dans la lutte contre le dopage, essentielle pour assurer l’équité entre les sportifs et garantir leur santé. Afin d’obtenir l’organisation des Jeux de 2024, la France a promis de compléter son arsenal de mesures antidopage par l’introduction des tests génétiques, conformément aux engagements internationaux qu’elle avait pris en 2007.
Paradoxalement, alors que l’introduction du recours aux tests génétiques assure la mise en conformité du droit français avec le code mondial antidopage, l’article 4 du projet de loi, dans sa version initiale, ne devait s’appliquer que jusqu’au 31 décembre 2024. Mais comment accepter que les sportifs français ne puissent pas être soumis aux tests génétiques en France alors qu’ils y sont soumis partout ailleurs ?
En effet, ces tests sont aujourd’hui les seuls à permettre de confirmer la manipulation d’échantillons, d’écarter une suspicion de transfusion de sang homologue, de vérifier l’inexistence d’une mutation génétique rare conduisant à un taux d’érythropoïétine (EPO) supérieur à la moyenne, ou de détecter les manipulations génétiques qui permettent d’augmenter la performance.
C’est pourquoi la commission des lois a adopté un amendement tendant à réécrire l’article 4 de manière à inscrire dans le code du sport la possibilité de recourir aux tests génétiques pour les deux premières finalités précitées, en assortissant cette possibilité de garanties fortes, relatives notamment au caractère subsidiaire des tests, à l’anonymat des échantillons, à l’interdiction de connaître le patrimoine génétique entier de la personne testée, ainsi qu’au recours à l’identification ou au profilage du sportif.
Pour la vérification des manipulations génétiques qui font appel à la recherche d’ADN codant, la commission avait en revanche choisi la voie de l’expérimentation. Depuis lors, nous avons poursuivi nos échanges, notamment avec l’Agence française de lutte contre le dopage (AFLD) et l’International Testing Agency (ITA), qui nous ont affirmé que cette distinction posait des difficultés techniques et n’assortissait pas l’ensemble des tests des mêmes garanties.
C’est pourquoi je vous proposerai de pérenniser l’ensemble de ces tests tout en renforçant les garanties afférentes.
L’adoption des règles de lutte antidopage en Polynésie française fait l’objet de l’article 5, dont les dispositions, chère Lana Tetuanui, ont été enrichies par nos discussions avec la collectivité de Polynésie.
Surtout, l’ampleur des jeux Olympiques et Paralympiques impose de se doter d’une organisation irréprochable en matière de sécurité, d’autant que la menace terroriste est toujours élevée en France. À cela s’ajoutent deux risques majeurs : le risque cyber et le risque sanitaire. Par ailleurs, la sécurisation de la cérémonie d’ouverture en plein air complexifie la tâche.
Les premières estimations indiquent que les Jeux nécessitent la mobilisation de moyens quotidiens humains et matériels substantiels : entre 22 000 et 33 000 agents de sécurité privés, dont le recrutement pose d’ailleurs quelques difficultés, et 45 000 agents publics – forces de sécurité intérieure et armée.
L’acceptabilité des Jeux implique en outre qu’un équilibre soit trouvé entre les missions de sécurité liées aux Jeux et la permanence des autres mesures sur le reste du territoire.
L’utilisation des images prises par les caméras de vidéoprotection ou les drones doit être renforcée pour aider les forces de l’ordre à sécuriser les espaces publics ; trois articles y concourent.
La mise en conformité, prévue à l’article 6, des dispositions relatives à la vidéoprotection avec le règlement général sur la protection des données (RGPD) renforce les garanties liées au traitement de données à caractère personnel ; la Cnil avait exprimé ce souhait.
L’expérimentation de l’utilisation de la vidéoprotection « intelligente » ou « augmentée », inscrite à l’article 7, est une innovation majeure, mais elle soulève de nombreuses interrogations en matière de libertés publiques, qu’il convient de mettre en balance avec les avancées opérationnelles permises par un tel dispositif, notamment pour les Jeux.
Le traitement par des algorithmes des images captées permettra de détecter et de signaler des événements prédéterminés susceptibles de menacer la sécurité des personnes. Il constituera un outil d’aide à la décision pour les forces de sécurité, qui pourront ainsi se concentrer sur l’action.
Cette innovation est d’ailleurs l’une des recommandations formulées par nos collègues Marc-Philippe Daubresse, Arnaud de Belenet et Jérôme Durain dans leur rapport La reconnaissance biométrique dans l ’ espace public : 30 propositions pour écarter le risque d ’ une société de surveillance, adopté par la commission des lois le 10 mai dernier.
Réécrit après les avis du Conseil d’État et de la Cnil, l’article 7 instaure de nombreuses garanties à chaque étape de la mise en œuvre de ce dispositif.
La commission des lois du Sénat a considéré que ces garanties assuraient un équilibre satisfaisant entre la protection des droits et libertés et la plus grande opérationnalité en matière de sécurité. Elle a d’ailleurs souhaité sécuriser cette procédure en renforçant le contrôle assuré par la Cnil, tant dans la mise en œuvre du traitement que dans le suivi et l’évaluation de l’expérimentation.
Enfin, le criblage des fan zones et de tous les participants, ainsi que l’autorisation du recours aux scanners corporels à ondes millimétriques pour les gestionnaires d’enceintes sportives qui le souhaitent, assureront eux aussi une meilleure sécurisation des grands événements accueillis par la France.
Mes chers collègues, les jeux Olympiques et Paralympiques sont, tous les quatre ans, des événements sportifs singuliers dont la préservation du caractère festif justifie la mobilisation de moyens exceptionnels. Il faut que la France soit prête !
Les mesures contenues dans ce projet de loi, enrichi par le Sénat, nous dotent d’outils supplémentaires pour que la France réussisse cette épreuve unique et hors norme.
Le Sénat sera évidemment au rendez-vous pour s’assurer de l’application de la loi et du respect de son esprit.
Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, la commission des affaires sociales s’est vu déléguer l’examen des dispositions du présent texte qui concernent la santé et le travail.
L’article 1er prévoit la création de la polyclinique olympique et paralympique, sous la forme d’un centre de santé au statut aménagé. La structure, qui sera gérée par l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris, vise à mettre à la disposition des seuls athlètes et personnes accréditées une offre de soins de premier recours.
Outre un encadrement composé de salariés de l’AP-HP, le fonctionnement du centre reposera sur des praticiens volontaires olympiques et paralympiques. Au pic d’activité, ceux-ci devraient être au nombre de 193, dont 36 médecins, 28 masseurs-kinésithérapeutes et 14 infirmiers.
Trois principales dérogations ont été identifiées comme nécessaires au fonctionnement de ce centre de santé, afin de clarifier le public spécifique restreint auquel la polyclinique s’adresse et de prévoir la gratuité des prestations réalisées ainsi que la présence d’une pharmacie hospitalière.
Le même article 1er simplifie également différentes procédures relatives au projet de santé, ou encore à l’installation d’équipements d’imagerie.
La commission des affaires sociales a soutenu le dispositif proposé et a veillé à préciser le statut dérogatoire de la polyclinique.
L’article 2 complète l’article 1er quant à l’organisation d’une offre de soins spécifique aux Jeux, en autorisant l’exercice de leur profession à trois grandes catégories de professionnels de santé qui seraient mobilisés pour l’événement, mais ne justifieraient pas des conditions requises pour exercer leur profession en France.
Ainsi, les médecins des fédérations accréditées seront autorisés à exercer auprès des seuls athlètes concernés. Les professionnels de santé accompagnant les délégations de sportifs pourront quant à eux exercer auprès du personnel et des membres de la délégation qu’ils accompagnent. Enfin, l’article 2 autorise l’exercice de leur profession aux professionnels de santé étrangers qui pourraient participer à l’activité de la polyclinique en tant que volontaires, selon une procédure qui reste toutefois à établir avec le Conseil national de l’ordre des médecins.
La commission des affaires sociales a approuvé ces dispositions.
Elle a également approuvé la création, à l’article 17, d’une dérogation au repos dominical pour les commerces de détail situés dans les communes où auront lieu les compétitions, ainsi que dans les communes limitrophes et à proximité.
Les très nombreux visiteurs attendus pendant les Jeux doivent être accueillis dans les meilleures conditions, d’autant que les besoins du public seront source de développement économique.
Cette dérogation est assortie de garanties pour les salariés : parmi eux, seuls les volontaires travailleront le dimanche ; ils bénéficieront d’une rémunération doublée et de repos compensateurs.
Elle s’ajoutera aux dérogations déjà existantes, comme les dimanches du maire ou les ouvertures en zone touristique, afin de s’adapter aux besoins exceptionnels liés aux jeux Olympiques et Paralympiques.
Compte tenu des nombreuses demandes de dérogations attendues, des besoins du public déjà prévisibles et du caractère bien circonscrit de la mesure, notre commission a simplifié la procédure d’autorisation préfectorale, afin que le préfet puisse d’emblée autoriser un ou plusieurs établissements à déroger au repos dominical, au lieu de procéder par autorisation individuelle, puis par arrêté d’extension.
Je veux enfin dire un mot de l’article 4, dont la commission des affaires sociales s’est saisie pour avis.
Cet article complète l’arsenal de la lutte antidopage en autorisant l’examen des caractéristiques génétiques afin de rechercher quatre méthodes possibles d’amélioration des performances. Il prévoit également l’orientation du sportif vers une consultation adaptée lorsqu’un tel examen entraîne la découverte incidente d’une caractéristique responsable d’une possible affection.
Cet article est utile pour adapter la lutte antidopage à l’innovation en matière de triche. Il nous est, de plus, imposé par les règles mondiales antidopage.
En conclusion, la commission des affaires sociales est favorable à l’adoption de ces différents articles dans la rédaction issue de ses travaux.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe UC.
Applaudissements sur les travées du groupe UC. – Mme Elsa Schalck applaudit également.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, comme cela a été rappelé, ce projet de loi relatif aux jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024 constitue probablement la dernière occasion d’adapter notre droit de manière à assurer la bonne tenue de cet événement.
Il constitue également une première opportunité de tirer les conséquences des événements survenus au Stade de France le 28 mai 2022, qui ont vu de très nombreux délinquants forcer l’entrée du stade et plusieurs milliers de fraudeurs tenter de s’introduire avec des billets falsifiés.
Ces événements, qui ont gravement entaché la réputation de notre pays et mis en doute sa capacité à organiser de grandes manifestations, s’inscrivent dans un contexte de recrudescence des violences dans les stades et de multiplication des vols avec violence dans la capitale, au moment où plusieurs centaines de milliers de spectateurs s’apprêtent à nous rendre visite, en 2023 et en 2024, pour assister à la Coupe du monde de rugby et aux Jeux.
La commission de la culture, qui s’est vue déléguer au fond l’examen des articles 12, 13 et 14, a souhaité tirer toutes les conséquences de ces événements en modifiant le texte selon deux axes.
Le premier est l’application de la recommandation n° 1 du rapport remis par les présidents François-Noël Buffet et Laurent Lafon le 13 juillet dernier, qui proposait de rendre obligatoire le recours à une billetterie infalsifiable pour les grands événements sportifs. Je vous remercie pour votre écoute sur ce sujet, madame la ministre ; la rédaction que le Sénat examine aujourd’hui porte la marque de nos échanges.
Le second axe a consisté à compléter notre arsenal juridique afin de sanctionner plus sévèrement les primo-délinquants isolés qui tentent de s’introduire dans les enceintes sportives ou sur les aires de compétition.
Notre commission a créé à cette fin une nouvelle amende délictuelle, de manière à renforcer l’effet dissuasif de ces dispositions tout en respectant le principe de proportionnalité des peines.
Notre commission a émis un avis défavorable sur plusieurs amendements visant à réduire les peines encourues par les délinquants qui cherchent à entrer de force dans les stades, à ne pas condamner les activistes qui interrompent les retransmissions sportives pour imposer leur message politique, ou encore à rendre inopérant le dispositif des interdictions de stade.
Je constate que la volonté de lutter contre les violences de toute nature qui prolifèrent dans nos stades ne fait pas consensus. Je le regrette d’autant plus que nous avons observé, ces derniers mois, une augmentation des violences dans le sport au sens large ; il ne me semble pas envisageable de baisser la garde à quelques mois du début des jeux Olympiques et Paralympiques.
Je veux enfin rappeler la nécessité, pour chacun d’entre nous, de concourir le mieux possible au succès de ces jeux Olympiques et Paralympiques. Pour le Parlement, cela signifie au moins deux choses.
En premier lieu, il convient de mener à bien l’examen de ce texte afin de clarifier le droit applicable. Madame la ministre, je salue l’écoute que vous avez eue pour nos propositions, ainsi que les réponses que vous avez apportées à nos interrogations.
En second lieu, il nous revient de veiller aux équilibres budgétaires de cet événement. Tel est le sens de notre amendement visant à faire remettre au Parlement par la Cour des comptes un rapport d’étape dressant un bilan des Jeux avant le 1er octobre 2025.
Nos échanges avec la Cour ont permis d’établir le caractère indispensable de ce rendez-vous qui, bien entendu, n’obérera en rien les travaux que celle-ci mènera d’ici à 2026 pour réaliser un bilan financier définitif de cet événement. Il me paraît toutefois essentiel que les Français sachent que leurs élus veillent au respect du budget des Jeux, compte tenu de la garantie financière apportée par l’État.
Je terminerai en remerciant Mme la rapporteure Agnès Canayer, ainsi que mon homologue Florence Lassarade, rapporteure pour avis de la commission des affaires sociales, pour notre excellente collaboration et nos échanges fructueux.
Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains. – M. Jean-Noël Guérini applaudit également.
Je suis saisie, par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, d’une motion n° 6.
Cette motion est ainsi rédigée :
En application de l’article 44, alinéa 2, du Règlement, le Sénat déclare irrecevable le projet de loi, examiné en procédure accélérée, relatif aux jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 (n° 220, 2022-2023).
La parole est à Mme Éliane Assassi, pour la motion.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, aux termes de la Charte olympique, « le but de l’Olympisme est de mettre le sport au service du développement harmonieux de l’humanité en vue de promouvoir une société pacifique, soucieuse de préserver la dignité humaine ».
Dans notre monde globalisé, le sport a ce pouvoir unique de rassembler les peuples. Le groupe communiste républicain citoyen et écologiste ne peut que souscrire à l’esprit des jeux Olympiques.
Mes chers collègues, mon groupe émettra des critiques, mais en aucun cas nous ne dévaluerons l’importance du sport, qui est l’un des quelques domaines universels de l’activité humaine.
Des règles, mais également des valeurs, universelles l’encadrent – celles du fair-play, du respect et de l’amitié –, qui sont reconnues dans le monde entier. Notre groupe reconnaît et soutient le pouvoir rassembleur, le pouvoir d’intégration du sport.
Néanmoins, nous ne pouvons que regretter et dénoncer un texte hautement sécuritaire qui porte mal son nom, puisqu’il nous parle, hélas ! moins de sport que de sécurité.
Le groupe CRCE considère que la devise olympique « Plus vite, plus haut, plus fort » est ici détournée pour un « plus vite, plus haut, plus fort » de sécurité et d’atteinte au droit à la vie privée, protégée par l’article 2 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, ainsi qu’à la liberté d’aller et venir, protégée par les articles 2 et 4 de cette même déclaration.
Ce projet de loi – j’ai déjà eu l’occasion de le dire – est un cheval de Troie, tant les dispositions attentatoires aux libertés et aux droits fondamentaux qu’il comporte seront susceptibles d’être pérennisées – c’est déjà le cas pour onze d’entre elles.
Nous dénonçons un projet de loi porteur de graves atteintes à des libertés constitutionnellement garanties. Dans ces conditions, mon groupe se doit de tirer la sonnette d’alarme. Nous ne laisserons pas passer de telles atteintes, qui gâcheraient la fête.
Nous constatons avec tristesse que les jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 seront un accélérateur de surveillance.
Certes, nous ne nions pas l’enjeu que constitue la sécurité. Oui, les Jeux de 2024 nécessitent un niveau exceptionnel d’organisation et de sécurité.
À titre d’exemple, la Seine-Saint-Denis accueillera le village olympique en 2024. En tant que sénatrice de ce département, je suis inquiète. Le fiasco de l’organisation de la finale de la Ligue des champions, en mai 2022, a mis en lumière les carences de la France pour assurer la sécurité d’un événement sportif majeur.
Pourtant, face à cet enjeu dont vous reconnaissez l’importance, vous nous proposez de recourir à des entreprises privées. Nous dénonçons cette réponse, qui n’est pas à la hauteur de l’ambition nécessaire.
Oui, mes chers collègues, le recours aux 22 000 à 33 000 agents de sécurité privée demandés par le comité d’organisation des jeux Olympiques et Paralympiques pour encadrer les Jeux confirme la tendance à l’intégration de la sécurité privée en tant que force de police institutionnalisée et bras armé de l’État.
Encore une fois, tout comme nous l’avions indiqué lors de l’examen de la loi d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur (Lopmi), nous estimons que la sécurité privée ne doit pas être confondue avec la sécurité étatique. Le cuisant échec essuyé en 2012 lors des Jeux de Londres l’atteste.
Nous ne pouvons que rappeler que cette montée en puissance de la sécurité privée dissimule également la marchandisation de la sécurité publique et la délégation de missions de service public à des entreprises qui ont pour unique finalité la recherche de la rente, une finalité bien éloignée des fonctions régaliennes de l’État.
Cela révèle un manque de cohérence en matière de politique publique que nous avions déjà pointé du doigt en mai 2021, lors de l’examen de la loi pour une sécurité globale préservant les libertés, puis lors de l’examen de la Lopmi.
Nous regrettons que la gestion sécuritaire des Jeux se traduise également par les opérations antidélinquance menées depuis novembre 2022 et qui continueront jusqu’aux Jeux.
Aujourd’hui, deux opérations antidélinquance d’envergure sont menées chaque jour à Paris et en Seine-Saint-Denis, auxquelles s’ajoutent deux opérations dans les Hauts-de-Seine et le Val-de-Marne, sans compter les initiatives de moindre ampleur pluriquotidiennes. Entre le 7 et le 27 novembre, 235 de ces opérations ont été conduites, pour une cinquantaine de gardes à vue. Est-ce bien nécessaire ?
La Lopmi nous l’annonçait déjà : les Jeux seront l’occasion d’illustrer la doctrine de maintien de l’ordre répressive et sécuritaire du ministère de l’intérieur, une doctrine à laquelle mon groupe s’oppose fermement, lui préférant le triptyque « prévention, dissuasion, répression ».
Mon groupe s’oppose tout aussi fermement à la légalisation de la vidéosurveillance algorithmique portée par ce projet de loi. La détection par logiciel d’événements et de comportements dits « suspects » portera, une nouvelle fois, une atteinte disproportionnée au droit à la vie privée et à la liberté d’aller et venir des participants.
Cette légalisation sera l’occasion, pour les entreprises françaises, de montrer leur savoir-faire en matière de répression et, pour le Gouvernement, de déployer une technologie encore illégale, mais dont l’offre commerciale est pourtant déjà bien disponible.
Nous dénonçons l’utilisation des Jeux pour faire franchir une nouvelle étape à l’acceptation par la population de telles technologies. L’état d’exception créé à cette occasion permet de faire passer des lois sécuritaires qui subsisteront ensuite ; ne nous leurrons pas !
J’en viens à un autre aspect de ce texte, tout aussi important. Alors que l’Assemblée nationale s’apprête à entamer l’examen de la réforme des retraites, le présent projet de loi prévoit un recul scandaleux de la limite d’âge des fonctionnaires occupant des emplois participant directement à l’organisation des Jeux, « au nom de l’intérêt du service », et ce jusqu’au 31 décembre 2024.
Dans la même veine, l’ouverture le dimanche des commerces de vente dans les communes des sites de compétition et à proximité remet en cause le principe du repos dominical et porte atteinte au droit fondamental à la vie privée et familiale.
Par ailleurs, un seul aspect de ce projet de loi a un lien concret avec le sport : le contrôle antidopage. Je vous remercie à ce propos, madame la ministre, d’avoir cité parmi vos prédécesseurs mon amie Marie-George Buffet, qui a beaucoup travaillé sur le sujet.
Le texte autorise donc, pour le temps des Jeux, l’examen des caractéristiques génétiques d’une personne ou son identification par ses empreintes génétiques afin d’améliorer les contrôles antidopage.
Si cette transposition d’une norme internationale encadrant le contrôle antidopage est nécessaire au déroulement des Jeux, mais aussi de la Coupe du monde de rugby, la Cnil et la Ligue des droits de l’homme dénoncent en revanche « des tests particulièrement intrusifs, qui dérogent de façon importante aux principes encadrant actuellement les analyses génétiques dans le code civil ».
Mon groupe dénonce le caractère paradoxalement temporaire de cette mesure qui sera appelée à se pérenniser, et ce alors même qu’elle déroge de manière disproportionnée à des dispositions du code civil.
Enfin, alors que la tenue des jeux Olympiques et Paralympiques pouvait représenter une formidable opportunité de modernisation et d’amélioration de la qualité du service du réseau francilien, se pose aujourd’hui la question de la capacité d’Île-de-France Mobilités à répondre au défi de la saturation.
Alors que de nouvelles lignes de métro auraient dû être prêtes pour relier les différents sites olympiques et permettre le transport de 10 millions de personnes, seul le prolongement de la ligne 14 sera livré à temps. Les promesses de réponse aux besoins de mobilité générés par les Jeux au moyen de solutions décarbonées peineront à être tenues, et ce n’est pas la privatisation voulue par certains qui améliorerait la situation !
Toujours au sujet des transports, nous considérons que l’élargissement de l’accès aux images de vidéoprotection aux agents des services internes de sécurité de la SNCF et de la RATP ne procède pas d’une conciliation équilibrée entre l’objectif de valeur constitutionnelle de prévention des atteintes à l’ordre public qui serait ainsi poursuivi et le droit au respect de la vie privée des usagers.
En conclusion, mon groupe considère que ce projet de loi libéral et sécuritaire ne respecte pas le juste équilibre entre sécurité et protection des libertés et droits fondamentaux. Il n’honore pas les jeux Olympiques, mais porte de graves atteintes aux libertés publiques. En ce sens, nous considérons qu’il est contraire au bloc de constitutionnalité.
Mon dernier mot sera pour celles et ceux qui seront exclus des enceintes des jeux Olympiques du fait du prix exorbitant des billets, et qui ne verront de ce fait les Jeux que de loin. Tout compte fait, et cela est bien dommage, les Jeux de 2024, qui devraient être une énorme fête populaire, seront un mirage de convivialité.
Je vous appelle ainsi à voter notre motion d’irrecevabilité. Vous l’aurez compris, mes chers collègues, celle-ci se justifie amplement.
Applaudissements sur les travées du groupe CRCE, ainsi que sur des travées du groupe GEST . – Mme Michelle Meunier applaudit également.
Nos collègues communistes souhaitent que l’examen de ce texte s’achève avant même d’avoir réellement débuté, jugeant qu’un certain nombre de ses dispositions sont attentatoires aux libertés publiques. Telle n’est pas la position du groupe Les Républicains.
Tout d’abord, la tenue des jeux Olympiques est imminente ; des délais supplémentaires ne feraient que compliquer, voire rendre impossible, la tâche des organisateurs, qui attendent avec impatience le vote de ce texte final, complétant celui de 2018.
Ensuite, nous devons tirer les conséquences des événements survenus au Stade de France le 28 mai dernier, qui ont révélé les risques pesant sur les grands événements sportifs. Un certain nombre des propositions formulées à la suite de ces incidents par nos commissions des lois et de la culture figurent dans le texte défendu par nos rapporteurs. Soyons donc cohérents et efforçons-nous de conserver le fruit de ces travaux de fond.
Enfin et surtout, nous considérons que les dispositifs prévus dans le texte, tels qu’amendés et encadrés par nos commissions, grâce à l’excellent travail des rapporteurs, ne sont pas contraires à la Constitution.
Nous estimons que la conciliation entre les exigences de protection des personnes durant les événements sportifs et de protection des libertés publiques, qui sont chères à notre assemblée tout entière, est assurée.
La protection des données est suffisante et les différents dispositifs de sécurité instaurés sont encadrés dans leur champ comme dans leurs usages.
En tout état de cause, si un doute sérieux sur la constitutionnalité de ces dispositions devait perdurer une fois achevés les travaux de nos collègues députés et le texte définitif adopté, le Conseil constitutionnel serait évidemment saisi afin de dissiper toute difficulté.
Pour toutes ces raisons, mon groupe votera contre cette motion.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.
La commission a émis un avis défavorable sur cette motion tendant à opposer l’exception d’irrecevabilité.
En effet, il y a urgence à adopter ces dispositions opérationnelles, qui sont très attendues. Je rappelle que les Jeux auront lieu dans dix-huit mois et la Coupe du monde de rugby dans huit mois.
Par ailleurs, nous avons veillé à ce que ces dispositions, qu’elles aient trait à la sécurité, comme la vidéoprotection intelligente ou augmentée, ou à la lutte contre le dopage, telles que l’introduction des tests génétiques, respectent un juste équilibre – nous avons sur ce point une divergence d’interprétation avec Mme Assassi – entre l’objectif de sécurisation de l’ordre public et la garantie des droits de l’homme et des libertés.
Nous pensons notamment qu’en matière de vidéoprotection intelligente cet équilibre a été atteint grâce à la réécriture du texte après son examen par le Conseil d’État et la Cnil. De nombreuses garanties ont en effet été introduites et le rôle de la Cnil a été conforté tout au long de la procédure.
Pour ce qui est de la lutte contre le dopage, si nous avons considéré qu’il était important de pérenniser les tests génétiques, nous avons en revanche assorti cette disposition de nombreuses garanties, telles que l’interdiction de l’identification des personnes ou la mise en place d’obligations d’information fortes, tout cela sous le contrôle du Comité consultatif national d’éthique (CCNE).
Pour les mêmes raisons relatives à l’urgence, à la nécessité et à l’équilibre de ce texte, il est défavorable.
Je mets aux voix la motion n° 6, tendant à opposer l’exception d’irrecevabilité.
Je rappelle que l’adoption de cette motion entraînerait le rejet du projet de loi.
La motion n ’ est pas adoptée.
Je suis saisie, par MM. Dossus, Benarroche, Breuiller, Dantec, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco, M. Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel, d’une motion n° 1.
Cette motion est ainsi rédigée :
En application de l’article 44, alinéa 3, du Règlement, le Sénat décide qu’il n’y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi relatif aux jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 (n° 220, 2022-2023)
La parole est à M. Thomas Dossus, pour la motion.
Applaudissements sur les travées du groupe GEST.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, nous aurions vraiment aimé légiférer sur le sport – c’est suffisamment rare !
Nous aurions aimé légiférer pour que les jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 se déroulent dans les meilleures conditions et qu’ils laissent un héritage à la hauteur des ambitions environnementales fixées à l’origine.
Nous aurions adoré jouer notre rôle de législateur pour vous accompagner, madame la ministre, dans l’organisation d’un événement auquel nous sommes attachés et dont nous partageons les valeurs, celles de l’olympisme.
Nous aurions aussi aimé débattre sérieusement des conséquences de cet événement sur notre tissu de festivals et d’événements culturels. Nous aurions pu rassurer les milliers de professionnels qui voient leur saison de festivals menacée par des annonces verticales et autoritaires prises sans concertation.
De tout cela, il n’y a rien, ou très peu, dans ce projet de loi.
En revanche, au cœur de ce texte se sont glissées des innovations législatives hasardeuses qui n’ont rien à y faire.
Par une manœuvre d’opportunisme législatif, ce projet de loi s’est éloigné de son ambition initiale pour faire des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 un laboratoire d’expériences sécuritaires. Le public, national ou international, devient, grâce à ce texte, le cobaye d’une fuite en avant expérimentale dans la technologie de surveillance.
Comment en sommes-nous arrivés là ? Par quel cheminement politique est-on parvenu à la conclusion que l’événement sportif mondial le plus fédérateur ne pourrait être organisé sans le déploiement de technologies d’intelligence artificielle et d’algorithmes de surveillance ?
Certes, il y a bien eu un rapport sénatorial sur ces technologies, mais des rapports du Sénat, on en connaît des dizaines qui n’ont pas eu pour destin d’être transformés en loi d’exception ou d’urgence.
Non, il y a eu un événement déclencheur, un événement traumatisant : il faut au moins cela pour aboutir à la réussite d’un bon cavalier législatif.
Cet événement, on le connaît ; le monde entier le connaît, puisqu’il s’est déroulé en mondovision devant des centaines de millions de téléspectateurs, le 28 mai 2022, le soir de la finale de la Ligue des champions. La capacité de la France à organiser un grand événement sportif international a été, ce soir-là, sérieusement mise en doute.
Les mensonges, manquements et approximations du ministre de l’intérieur comme du préfet de police ont été mis au jour, notamment par notre Haute Assemblée, lors de nombreuses auditions.
Les causes de cet épisode fâcheux se trouvent principalement dans un enchaînement de défaillances organisationnelles, mais aussi dans une mauvaise préparation, l’approche du renseignement adoptée vis-à-vis des supporters anglais se combinant notamment avec une doctrine de maintien de l’ordre inadaptée.
Plusieurs recommandations ont été formulées dans le rapport sénatorial sur cet événement. Peu d’entre elles ont réellement retenu l’intérêt du ministère de l’intérieur ou du ministère des sports, mais il en est une qui a été reprise avec une certaine gourmandise, tant elle était jusqu’alors restée bloquée à cause de son aspect sulfureux : celle qui consiste à adapter en urgence notre cadre législatif, de façon totalement expérimentale, pour mettre en œuvre des traitements d’images par l’intelligence artificielle.
Rappelons tout d’abord que, dans notre rapport sur la finale de la Ligue des champions au Stade de France, cette technologie ne devait concerner que le comptage et la détection des mouvements de foule.
En outre, lors de la remise des conclusions de ce rapport, j’avais déjà signalé les dangers qu’il y avait à utiliser nos grands événements sportifs comme des showrooms sécuritaires.
Disons-le clairement, voir émerger cette recommandation dans ce rapport avait déjà un caractère saugrenu. En effet, l’intelligence artificielle aurait-elle permis d’éviter la défaillance dans l’orientation des supporters anglais ? L’intelligence artificielle aurait-elle déconseillé l’usage immodéré des gaz lacrymogènes sur des supporters pacifiques ? L’intelligence artificielle aurait-elle tiré, en amont, les conclusions d’une grève touchant l’une des deux lignes de RER qui menaient au Stade de France ? En d’autres termes, l’intelligence artificielle aurait-elle fait mieux que les intelligences combinées du ministre Darmanin et du préfet Lallement ? Aussi surprenant que cela puisse paraître, je ne le pense pas.
Quand on parle d’intelligence artificielle pour la vidéosurveillance, il convient de bien comprendre la technologie dont il s’agit et de mesurer le grand saut qu’elle nous ferait faire dans une société de la surveillance.
Les technologies de vidéo dite « augmentée » désignent des dispositifs vidéo auxquels sont associés des traitements algorithmiques permettant une analyse automatique et en temps réel, deux caractéristiques qui nous font changer de monde.
La Cnil se positionne de manière plus que prudente sur ces technologies, en indiquant qu’elles sont susceptibles d’affecter les garanties fondamentales apportées aux citoyens pour l’exercice des libertés publiques et qu’il serait donc nécessaire de changer la loi : changer la loi, et non expérimenter une nouvelle technologie au mépris de nos libertés publiques.
Non, nos libertés publiques ne peuvent être sujettes à une approche expérimentale ! Non, nos libertés publiques n’ont pas à être le terrain de jeu des start-ups de la sécurité ! Non, nos libertés publiques comme nos données ne doivent pas être marchandées à la légère avec des apprentis sorciers sécuritaires !
Oui, nous avons besoin d’un débat approfondi et éclairé sur ce changement radical dans notre approche de l’espace public. Il a d’ailleurs lieu au niveau européen, mais n’a toujours pas abouti.
Le fait même d’expérimenter cette technologie est une menace pour nos libertés publiques, pour notre organisation sociale et pour nos débats démocratiques.
Certes, la promesse de cette technologie est simple : elle faciliterait la détection de situations permettant de présumer la commission d’infractions ou encore la survenue d’événements suspects ou potentiellement dangereux.
Pour cela, elle traite en temps réel des milliers d’images de vidéosurveillance. Par « traiter », il faut comprendre qu’elle les confronte avec un certain nombre de critères préétablis.
Afin que ce traitement soit pertinent, l’algorithme a besoin d’apprendre. « Apprendre », pour un algorithme d’intelligence artificielle, c’est se nourrir de millions d’images et de situations différentes, afin de codifier et de compartimenter l’espace public et la façon dont nous l’occupons, de manière à pouvoir distinguer des situations perçues comme déviantes, à risque ou menaçantes.
On commence ici à percevoir ce que cela implique ; on commence à pressentir la manière dont on bascule dans une société de la surveillance, celle où le citoyen se suspecte lui-même d’avoir un comportement inadapté, puisqu’il sait qu’un système de surveillance de son comportement existe, mais qu’il n’en connaît pas les règles, car elles ne sont, par essence, pas transparentes.
On va confier à des sociétés privées la codification et l’organisation de notre espace public commun, de ce que l’on peut considérer comme normal ou anormal, avec tous les biais que cela implique.
Il est donc facile de comprendre l’aubaine que les grands événements sportifs, comme les jeux Olympiques et Paralympiques, offrent à ces sociétés : les Jeux deviennent l’occasion rêvée de nourrir la bête.
L’enjeu réel est là. Il n’est pas dans l’assistance supposée de ces outils au moment de l’événement, madame la ministre ; il est dans l’incroyable masse de données que les start-ups qui auront décroché le marché pourront collecter lors de l’événement.
Ne vous faites pas d’illusion sur les garde-fous qui ont été introduits dans cette loi. L’ensemble des données sont utiles à l’algorithme : croire qu’il sera possible d’effacer les données non pertinentes n’a pas de sens quand on parle d’« apprentissage machine ». Les moments durant lesquels il ne se passe rien sont tout aussi utiles que ceux où se déroulent les événements problématiques, ne serait-ce que pour apprendre à la machine à les distinguer.
L’expérimentation qui est proposée n’offre donc aucune garantie sur les droits et libertés des personnes pour plusieurs raisons, mais d’abord parce que ces algorithmes ne sont ni contrôlables ni transparents.
Aussi, nous aurons beau demander dans ce texte que le traitement des données soit « loyal, objectif et de nature à identifier et prévenir l’occurrence de biais et d’erreurs », nous n’en aurons aucune garantie. Tel est le cœur du problème lorsqu’on légifère sur des algorithmes fermés et opaques.
Le ministre de l’intérieur s’est montré très respectueux du cadre législatif, puisqu’il s’est engagé à ne pas utiliser de technologies qui n’auraient pas été légalisées au préalable. Cela paraît logique, mais M. Darmanin a tout de même tenu à le préciser lors de son audition, le 25 octobre 2022. S’il a tenu à le faire, c’est aussi parce que, de son aveu même, un certain nombre de municipalités avaient déjà recours à ces technologies.
Oui, le ministre de l’intérieur, celui-là même qui nous demande aujourd’hui de déployer ces technologies dans un cadre de confiance, s’est montré incapable de faire respecter la loi qui les encadre déjà très strictement ! Tout en ayant visiblement connaissance d’usages illégaux de technologies de surveillance, il n’agit pas pour faire respecter nos libertés !
Quelles garanties avons-nous que toutes les données collectées lors des Jeux ne serviront pas à nourrir des algorithmes de surveillance, vendus par les sociétés qui les exploiteront pendant les Jeux à des régimes moins précautionneux en matière de libertés publiques ?
Acceptez-vous, chers collègues, que la grande fête des jeux Olympiques serve à nourrir les équipements de répression des mouvements de révolte contre les tyrannies à l’autre bout du monde ?
Mes chers collègues, comme vous, je suis attaché au bon déroulement des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024. Comme vous, je souhaite que la centaine de milliers de spectateurs attendus passe un moment extraordinaire à vibrer à l’unisson des valeurs de l’olympisme. Mais nous devons nous garder de tout opportunisme sécuritaire. Les jeux Olympiques ne doivent pas nous laisser en héritage une société de la surveillance globale.
C’est pourquoi je vous propose de rejeter ce texte, afin que la ministre des sports puisse en expurger les dispositions qui n’ont rien à voir avec l’événement et que nous puissions revenir rapidement à une réelle discussion sur les enjeux réels de l’organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024.
Vifs applaudissements sur les travées du groupe GEST. – Mme Éliane Assassi applaudit également.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, les arguments censés justifier la motion que vous présentez, cher Thomas Dossus, sont à mon sens tout à fait contestables et je m’efforcerai de le démontrer, point par point.
Premièrement, vous contestez l’expérimentation portant sur l’utilisation de l’intelligence artificielle. Selon vous, la création d’un cadre juridique nouveau autorisant l’usage de l’intelligence artificielle pour le traitement d’images de vidéosurveillance traduirait une volonté indéniable du Gouvernement de pérenniser ces expérimentations, au motif que cela s’appliquerait au-delà des seuls sites olympiques et pour une durée dépassant largement celle des Jeux.
Permettez-moi de rappeler que le dispositif envisagé, qui s’inspire de celui qui est prévu dans la proposition de règlement européen sur les systèmes d’intelligence artificielle en cours d’élaboration, est assorti de nombreuses garanties.
S’agissant de la temporalité, la proposition du Gouvernement d’expérimenter le dispositif jusqu’au 30 juin 2025 ne cache aucune volonté de pérennisation.
D’abord, les traitements en question n’utiliseront aucun système d’identification biométrique ; ils ne traiteront aucune donnée biométrique et ne mettront en œuvre aucune technique de reconnaissance faciale.
Ensuite, la Cnil devra être régulièrement informée des conditions de mise en œuvre de l’expérimentation, qui fera l’objet d’une évaluation au plus tard six mois avant son terme, fixé au 30 juin 2025.
Par conséquent, si la durée de l’expérimentation excède la date de la fin des Jeux, à savoir le 8 septembre 2024, rien ne permet d’affirmer à ce jour que les dispositifs seront reconduits et encore moins sous quelles modalités.
S’agissant des lieux concernés par l’expérimentation, il semble justifié de ne pas limiter le périmètre aux seuls sites olympiques : au vu de l’ampleur de l’événement et du nombre de visiteurs, sécuriser les Jeux n’a rien d’évident.
Le dispositif concernerait les abords immédiats, ce qui inclut notamment le périmètre des sites d’interconnexion où les agents des services internes de sécurité de la SNCF et de la RATP affectés au centre de la préfecture de police de Paris pourraient intervenir ponctuellement.
Le Conseil d’État l’a souligné : l’expérimentation est destinée à rendre plus efficace le maintien de l’ordre pour un événement d’une telle ampleur et elle sera bel et bien limitée dans le temps et dans l’espace.
Deuxièmement, vous évoquez un renforcement injustifié des interdictions de stade et des sanctions en cas de pénétration dans une enceinte sportive, disposition qui viserait tout particulièrement les militants écologistes.
M. Didier Rambaud. Cher Thomas Dossus, rassurez-vous : aucune mesure contenue dans ce projet de loi ne vise les militants écologistes !
On en doute sur les travées du groupe GEST.
Vous n’êtes pas sans savoir que, le 28 mai 2022, date de la finale de la Ligue des champions, des incidents se sont produits au Stade de France, notamment parce que des personnes ont pénétré ou ont tenté de pénétrer dans le stade par force ou par fraude. L’article 12 de ce texte, créant les deux nouveaux délits, vise précisément à sanctionner ces personnes qui s’introduisent dans une enceinte sportive sans détenir de billet d’entrée.
À ce jour, ne peut faire l’objet d’une incrimination que l’entrée dans une enceinte sportive en état d’ivresse ou la tentative d’y entrer en état d’ivresse et en situation avérée de fraude ou d’usage de la force. Une telle situation juridique ne peut subsister et nous devons renforcer la dissuasion afin d’éviter ce type d’incident nuisible au public, aux athlètes et à la France en tant que pays organisateur.
Enfin, pour ce qui est de la pénétration ou du maintien sans motif légitime d’une personne dans l’aire de compétition d’une enceinte sportive, je rappelle que le but recherché est de sanctionner les personnes qui troublent la tranquillité de la manifestation sportive, par une amende de 7 500 euros, lorsque l’acte est commis en réunion ou en récidive. En dehors de ces deux cas, la sanction sera celle d’une contravention de cinquième classe, à savoir une amende maximale de 1 500 euros.
Actuellement, l’entrée sur l’aire de jeu d’un stade ne peut être incriminée que dans deux situations : lorsqu’elle trouble le déroulement de la compétition ou lorsqu’elle porte atteinte à la sécurité des personnes ou des biens. Encore une fois, il s’agit de prévenir, autant que faire se peut, des incidents de ce genre, qui troubleraient la fête, le bien-être des sportifs et la tranquillité du public, sans occulter le principe de proportionnalité des peines.
Troisièmement, vous contestez l’extension de l’usage des scanners à ondes millimétriques, y compris dans des lieux qui seraient sans lien avec les jeux Olympiques et Paralympiques.
En réalité, l’article 11 du projet de loi s’inspire des dispositions applicables aux aéroports. Le recours aux scanners corporels est une mesure intrusive, il est vrai. C’est la raison pour laquelle le projet de loi prévoit, bien évidemment, des garanties qui répondent aux exigences européennes : le consentement, voire l’obligation de recueillir le consentement exprès de la personne contrôlée, comme l’a proposé mon collègue Dominique Théophile dans un amendement adopté en commission ; la possibilité d’opposer un refus et d’avoir accès à un autre dispositif de contrôle ; l’impossibilité pour l’agent d’identifier la personne contrôlée, puisque les images produites par les scanners correspondent à des représentations banalisées du corps humain ; le brouillage de la visualisation du visage ; enfin, l’interdiction du stockage ou de l’enregistrement des images. Autant de garanties grâce auxquelles nous nous assurons que toutes les précautions seront prises afin d’éviter les dérives alarmantes que vous craignez tout autant que nous.
Je précise également que cet article 11 permettrait de mettre un terme à une situation juridiquement alarmante, puisque d’autres portiques de ce type ont pu être installés par le passé sans faire l’objet de dispositions législatives autorisant ou encadrant leur usage.
Quatrièmement, vous regrettez le recours toujours plus largement autorisé à une publicité visuelle envahissante, qui dénature selon vous les lieux comme les valeurs de l’olympisme.
Certes, on peut regretter l’omniprésence quotidienne de la publicité sur les écrans. Mais considérer qu’autoriser un peu plus de publicité, pendant une période limitée, pour un événement tel que les Jeux, ce serait dénaturer les valeurs de l’olympisme, mes chers collègues, je crois que c’est un tantinet radical.
Exclamations sur les travées du groupe GEST.
Je rappelle que seuls les partenaires de marketing olympique, au sens du contrat de ville hôte, pourront bénéficier des nouvelles dérogations. Cela permettra notamment de limiter le financement public des Jeux en attirant et en conservant des partenaires privés, dans un contexte où la France souhaite organiser des Jeux raisonnables, y compris d’un point de vue financier.
Cinquièmement, vous condamnez les dérogations au repos dominical dans une zone élargie qui serait sans justification ni lien avec la nature de l’événement sportif.
Une fois encore, vos craintes sont injustifiées. En effet, la mise en œuvre de la dérogation au repos dominical sera conditionnée au respect du volontariat des salariés, ainsi qu’à l’octroi des contreparties légales inscrites dans le code du travail.
De plus, si les communes situées à proximité des sites de compétition ont été intégrées, c’est afin d’éviter un risque de rupture d’égalité entre les entreprises pour les communes qui, sans être limitrophes, auraient pu connaître une affluence de touristes.
Enfin, vous justifiez le dépôt de votre motion par l’absence de questionnement ou de mesures portant sur l’héritage des Jeux, sur la manière dont les équipements sportifs seront rendus accessibles à la population et sur celle dont les Jeux pourraient redynamiser nos politiques sportives.
Mon cher collègue, je vous informe qu’un plan Héritage et Durabilité des jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024 a été présenté en juin 2022. Je vous invite à le lire, car il témoigne du travail mené, qui est considérable et inédit en la matière. Ce travail se poursuivra afin de donner corps à des ambitions clairement définies en matière environnementale et sociale.
Tony Estanguet le dit très bien : « Le nouveau modèle que nous construisons ensemble, ce sont des Jeux qui maîtrisent leur impact sur le territoire et sur la planète, des Jeux inclusifs et fédérateurs, des Jeux sobres et durables. »
En conclusion, mes chers collègues, j’espère vous avoir convaincus que la copie du Gouvernement n’a rien de néolibéral ou de techno-sécuritaire. Les mesures du projet de loi sont justifiées et proportionnées compte tenu de l’ampleur de l’événement.
Parce que sécurité et liberté ne doivent pas être opposées et parce que les valeurs de l’olympisme doivent être préservées, je voterai contre cette motion et je vous invite, mes chers collègues, à en faire de même.
Applaudissements sur les travées des groupes RDPI, INDEP et RDSE, ainsi que sur des travées des groupes UC et Les Républicains.
L’avis de la commission est défavorable, et ce pour trois raisons.
La première est que ce texte est attendu et nécessaire. Il comporte des mesures qui doivent entrer en vigueur le plus rapidement possible pour que nous soyons au rendez-vous des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024.
La deuxième raison tient au fait que ces Jeux correspondent à un engagement de la France et sont un enjeu pour nous tous. Il est donc normal que le débat puisse avoir lieu ici, au sein de la représentation nationale.
Cela est d’autant plus vrai – troisième raison de notre avis défavorable – qu’un certain nombre de questions se posent, comme nous avons eu l’occasion de le dire, quant à l’équilibre entre l’objectif de sécurisation des Jeux et la garantie des droits et des libertés. Par conséquent, il convient d’avoir un débat démocratique.
Voilà pourquoi nous sommes défavorables à cette motion, qui tend à écourter un débat dont nous souhaitons qu’il ait lieu au sein de notre assemblée.
Même avis, pour les raisons exposées avec précision par M. Rambaud et celles exprimées par votre rapporteur.
Je mets aux voix la motion n° 1, tendant à opposer la question préalable.
Je rappelle que l’adoption de cette motion entraînerait le rejet du projet de loi.
La motion n ’ est pas adoptée.
Mme la présidente. Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Marc-Philippe Daubresse.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi qu ’ au banc des commissions.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, parmi les vingt articles de ce projet de loi, trois enjeux se détachent particulièrement : la santé, la lutte contre le dopage et, surtout, la sécurité.
Le défi est de taille : c’est un événement d’une ampleur sans précédent pour notre pays, d’autant que – notre rapporteur l’a souligné précédemment – le comité d’organisation des Jeux a fait le pari un peu fou de poursuivre une idée ambitieuse, celle d’organiser une parade sur des embarcations qui parcourront au total six kilomètres sur la Seine, d’est en ouest, pour aboutir au Trocadéro, où se terminera la cérémonie.
Ce pari implique que l’on relève un défi, celui de garantir la sécurisation de cette cérémonie en plein air, qui pourrait réunir jusqu’à 600 000 spectateurs. Tel est bien le nœud du débat, comme on vient de l’entendre dire à l’instant.
Pour rappel, jusqu’à 45 000 membres des forces de l’ordre pourraient être mobilisés. Notre responsabilité est de leur donner tous les moyens pour lutter efficacement contre la menace terroriste dans le respect des libertés publiques.
Les articles 6 à 13 du projet de loi déploient les outils nécessaires sur ce sujet qui, à l’évidence, nécessite des moyens exceptionnels. En particulier, l’article 7 prévoit une innovation majeure pour le dispositif du maintien de l’ordre assisté par intelligence artificielle : il introduit dans le droit la possibilité d’avoir recours de manière expérimentale à ce que l’on qualifie de vidéosurveillance « intelligente » ou « augmentée », dispositif utilisant des algorithmes qui n’ont rien d’opaque afin d’identifier des situations potentiellement dangereuses, comme des mouvements de foule, l’objectif étant de gagner de précieuses minutes pour intervenir avant qu’un drame se produise.
Je tiens à affirmer tout le soutien de mon groupe à ce nouveau moyen mis à disposition de nos forces de sécurité, qui a obtenu l’aval de la Cnil et du Conseil d’État. Je veux ici saluer le ministère de l’intérieur et ses services, mais surtout le remarquable travail de notre rapporteur Agnès Canayer, qui a su renforcer les garanties apportées pour atteindre le bon équilibre, en précisant le contenu du dispositif par des amendements adoptés en commission.
Nous soutenons également la réécriture de l’article 4 en matière de tests génétiques, que notre rapporteur a exposée dans le détail.
Je souhaite que, au cours du débat, nous puissions également mieux prendre en compte les enjeux en matière de transport, notamment grâce aux propositions de notre collègue Philippe Tabarot, qui devraient se concrétiser dans une proposition de loi.
Cependant, comme ancien rapporteur de la loi relative à la prévention d’actes de terrorisme et au renseignement, qui a pérennisé certaines mesures de la loi renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme, dite loi Silt, il est de mon devoir d’attirer de nouveau l’attention sur le risque d’attentat qui plane sur cet événement.
En effet, d’ici au mois de juillet 2024, quelque 240 individus condamnés pour des faits de terrorisme seront sortis des prisons françaises. De l’aveu même du procureur national antiterroriste, un quart de ces personnes risque de récidiver dans les mois qui viennent : compte tenu de l’ampleur de l’événement, on peut nourrir de solides craintes.
Mes collègues Arnaud de Belenet et Jérôme Durain, rapporteurs de la mission d’information de la commission des lois sur la reconnaissance biométrique dans l’espace public, et moi-même nous sommes déplacés à Nice et à Londres afin d’évaluer les innovations réalisées avant les Jeux de Londres et de définir les conditions dans lesquelles nous pourrions développer, à titre exceptionnel, un système utilisant la reconnaissance biométrique en temps réel et garantissant une protection maximale tout en écartant, bien évidemment, tout risque de développement d’une société de la surveillance à la chinoise.
Madame la ministre, vous nous avez dit tout à l’heure que vous ne jugiez pas nécessaire de recourir à la reconnaissance faciale, même dans un cadre proportionné et uniquement pour cet événement exceptionnel. Ayant moi-même exercé des fonctions gouvernementales, je mesure le poids de votre responsabilité ; mais j’ai aussi été rapporteur de la loi pour une sécurité globale préservant les libertés, ainsi que de la loi pérennisant certains dispositifs antiterroristes, et corapporteur de la mission d’information que je viens de mentionner. Or, après avoir auditionné tous les acteurs concernés et les défenseurs des libertés publiques, auxquelles je suis comme vous très attaché, après avoir entendu les représentants du ministère de l’intérieur britannique et avoir évalué leur retour d’expérience après les JO de Londres, permettez-moi de vous dire que je suis convaincu pour ma part du contraire.
De fait, à l’issue de cette mission d’information, dont les conclusions ont été largement adoptées par notre commission des lois, nous avons formulé trente propositions déclinées selon trois axes principaux. Nous préconisions notamment, en matière de reconnaissance faciale, de définir collectivement un cadre comprenant des lignes rouges pour écarter tout risque d’atteintes aux libertés publiques, une méthodologie claire, par la voie expérimentale, et un régime exigeant et indépendant de contrôle renforçant singulièrement les pouvoirs de la Cnil.
Bien évidemment, nous rejetons en bloc l’idée selon laquelle l’État pourrait avoir recours de manière usuelle à ce dispositif ou pourrait le pérenniser pour contrôler la population. Notre idéal français de liberté et d’égalité et les sociétés du Big Brother qui se développent en Asie sont évidemment antinomiques. Toutefois, nous reconnaissons l’intérêt d’une telle technologie si elle est utilisée dans un cadre proportionné et exceptionnel, de manière très encadrée et très évaluée, et pour des événements hors du commun.
C’est en ce sens que, dans la proposition 22 du rapport de ladite mission d’information, nous ouvrions la voie à la possibilité d’expérimenter cette reconnaissance biométrique pour les besoins du renseignement dans le cadre d’événements exceptionnels comme ceux dont il est question aujourd’hui.
Nous proposions de créer un cadre juridique expérimental permettant, par exception et de manière strictement subsidiaire, le recours ciblé et limité dans le temps à des systèmes de reconnaissance biométrique sur la voie publique, en temps réel, sur la base d’une menace préalablement identifiée et à des fins de sécurisation de grands événements. Le dispositif aurait un caractère strictement subsidiaire, son déploiement serait autorisé a priori et contrôlé a posteriori par une autorité dont nous proposons qu’elle soit la Cnil, le nombre de caméras serait proportionné et l’on prévoirait la minimisation des données utilisées et leur sécurisation, une supervision humaine systématique, une traçabilité des usages et bien d’autres garanties que je ne développerai pas ici.
En effet, ce n’est pas au détour d’un simple amendement sur ce projet de loi, dont l’écriture doit être techniquement affûtée pour rester dans le cadre constitutionnel et respecter les prescriptions de la Cnil et des instances européennes, que nous pourrons avoir un débat serein et argumenté. Je l’avais dit au ministre de l’intérieur Gérald Darmanin : ce débat aurait plutôt dû se tenir dans le cadre de l’élaboration de la Lopmi, ce qui nous aurait permis de procéder à toutes les auditions et de recueillir tous les avis nécessaires.
Je vous annonce donc que, avec mon collègue Arnaud de Belenet, nous déposerons une proposition de loi sur ce sujet
Exclamations sur les travées du groupe GEST.
Nous aurons ainsi l’occasion d’auditionner les principaux acteurs concernés et d’élaborer un dispositif juste et équilibré. Je rappelle d’ailleurs que, depuis quinze ans, le président du Sénat peut saisir le Conseil d’État sur une proposition de loi et que le président de la commission des lois peut saisir la Cnil, s’il l’estime nécessaire – il l’a déjà fait – sur des sujets de cette importance.
Voilà, mes chers collègues, ce que je souhaitais vous dire. Au moment des attentats de novembre 2015 – je vous le dis avec une certaine solennité –, j’étais maire. J’ai dû annoncer aux parents d’un jeune homme de 27 ans son assassinat par des terroristes au Bataclan. Je ne souhaite plus jamais revivre cela.
J’ai en mémoire l’attentat contre Charlie Hebdo. J’ai en mémoire l’intervention bouleversée et bouleversante de Dominique Estrosi Sassone après l’attentat sur la promenade des Anglais.
C’est pourquoi j’ai confiance en la sagesse du Sénat pour nous aider à mettre en place un tel dispositif, avec toutes les garanties nécessaires.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, nous entrons aujourd’hui dans la dernière ligne droite.
Selon Montesquieu, « les desseins qui ont besoin de beaucoup de temps pour être exécutés ne réussissent presque jamais ». Bien au contraire, à dix-huit mois seulement du début des jeux Olympiques et Paralympiques, nous sommes dans d’excellentes dispositions pour faire de ces Jeux une belle réussite !
Au-delà de la boutade, je salue votre engagement, madame la ministre, car vous ne ménagez pas vos efforts pour préparer ce grand événement.
Ce projet de loi procède à de nombreux ajustements visant notamment à accorder notre droit national au contrat conclu avec le CIO pour accueillir les Jeux en France. Nous attendons collectivement cette échéance avec impatience.
Ce texte contient tout d’abord des mesures concrètes et novatrices en matière de lutte contre le dopage. On ne peut que s’en féliciter. Malheureusement, les auteurs de pratiques dopantes ont bien souvent une longueur d’avance sur le législateur.
Ce texte autorise notamment les tests génétiques. La période qui suivra la fin des Jeux permettra de tirer tous les enseignements de cette pratique nouvelle.
Je salue tout particulièrement l’ajout en commission de dispositions visant à rendre obligatoire la vente de billets d’accès infalsifiables pour les épreuves. Il s’agit précisément de l’une des propositions phares du rapport des présidents de la commission de la culture et de la commission des lois dévoilé en juillet 2022.
Les débordements que l’on a déplorés à la marge de la récente manifestation sportive organisée au Stade de France nous ont démontré toute la pertinence de cette mesure. Madame la ministre, cet ajout permettra – nous l’espérons – de sécuriser l’accès aux Jeux et aux zones de billetterie.
Je souhaite également m’attarder sur les jeux Paralympiques. Ces épreuves vont bien au-delà du sport et de la performance individuelle, tant elles véhiculent des valeurs essentielles d’inclusion et de partage. La pratique du handisport ouvre aux autres, donne confiance en soi et permet aussi de retrouver une certaine autonomie.
Nous devons veiller collectivement à donner à ces jeux Paralympiques la plus grande visibilité possible et à célébrer fièrement les quelque 4 400 athlètes qui concourront à partir du 28 août 2024.
Je salue à ce titre l’implication sans failles de la Fédération française handisport, des clubs et des associations sportives.
Les jeux Olympiques représentent aussi un formidable défi sécuritaire. Les grands rassemblements de personnes sont particulièrement menacés par le terrorisme, et nos services de sécurité sont mobilisés pour faire face à cette menace.
Nous nous félicitons que ce projet de loi renforce leur efficacité, notamment avec la généralisation du criblage, qui resserre les mailles du filet et assure une plus grande sécurité à nos concitoyens.
Il existe, en outre, des risques inhérents à ces grands rassemblements de personnes. Les mouvements de foule peuvent se révéler particulièrement dangereux. Pour prévenir ces risques, le projet de loi autorise la mise en œuvre de technologies novatrices, afin de détecter les signes avant-coureurs de telles catastrophes.
Nous saluons aussi la grande implication de la Cnil dans le développement de ces outils, ce qui augmente encore les garanties apportées par ce texte en matière de données à caractère personnel.
Ce texte et les ajustements apportés par le Parlement permettront d’assurer le bon déroulement de cette manifestation sportive d’ampleur. Nous devons tenir jusqu’au sprint final pour offrir une vaste célébration des valeurs du sport à nos concitoyens et aux 4 milliards de personnes qui suivront avec passion les Jeux aux quatre coins du globe.
Je m’en remets désormais à la célèbre devise olympique, qui a déjà été citée, mais partiellement : c itius, a ltius, f ortius – c ommuniter, c’est-à-dire : « plus vite, plus haut, plus fort – ensemble ». Espérons qu’elle guide les athlètes de l’équipe de France dans ces derniers mois d’intense préparation physique et mentale.
Applaudissements sur les travées des groupes INDEP et RDPI, ainsi que sur des travées des groupes UC et Les Républicains.
Applaudissements sur les travées du groupe GEST. – Mme Esther Benbassa applaudit également.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, nous nous retrouvons pour étudier un texte dont le but affiché est d’adapter notre arsenal juridique, du code du sport au code de la sécurité intérieure, afin de garantir une organisation fluide et sereine des jeux Olympiques de l’an prochain. Cependant, ce projet de loi va bien au-delà.
Comme l’a souligné mon collègue Thomas Dossus, notre groupe voit en ce texte une tentative sécuritaire à peine voilée, pérenne et dangereuse. Ainsi, onze des dix-neuf mesures présentes dans sa version initiale créent de nouvelles dispositions ou modifient des dispositions existantes de façon durable : pour une loi officiellement dédiée à un événement temporaire, cela peut nous alerter.
Les mesures de sécurité disproportionnées de ce projet de loi cachent de réelles atteintes aux droits des personnes et s’inscrivent bien au-delà du temps des Jeux.
Le déploiement de la vision sécuritaire et le recours massif, presque indifférencié, à la vidéosurveillance, le tout augmenté de mécanismes algorithmiques dangereux et potentiellement mis à disposition d’autres opérateurs ultérieurement, y compris non nationaux, soulèvent de nombreuses questions.
Au-delà de ce point lié à l’ambition d’une surveillance démesurée, plusieurs éléments – dont certains ne sont pas même abordés – du texte nous paraissent problématiques. Malgré la dimension sécuritaire du projet de loi, seul l’aspect technologique de la surveillance de masse semble trouver grâce aux yeux de ce gouvernement, qui ne montre, par exemple, que peu d’ambition en matière de lutte contre les cyberattaques.
Les auditions et les inquiétudes remontées du terrain ont, entre autres, mis en avant les carences liées au recours à des prestataires privés pour les événements olympiques. Les collectivités sont inquiètes et rien dans ce texte ne semble à même de les rassurer.
La vie et les autres activités sportives et culturelles continueront pendant ces Jeux. Pour sécuriser ces divers événements, les organisateurs risquent de souffrir non seulement d’un surcoût malvenu, mais aussi d’une certaine précipitation et de formations insuffisantes.
Se pose aussi la question du report de charge sur de nombreuses polices municipales : les fan zones des villes hôtes autres que Paris seront-elles sécurisées par la police nationale ? Pour les festivals et le monde de la culture, la dépense supplémentaire est particulièrement importante.
L’orientation massive des jeunes vers des formations réduites au minimum en raison des délais pour répondre à un besoin temporaire ne s’inscrit pas dans la durée. Qu’adviendra-t-il une fois les compétitions terminées ? Cette situation est révélatrice d’une vision manifestement très court-termiste de l’héritage en termes d’emploi.
Ces formations retiendront-elles les leçons du fiasco du Stade de France ? Mais je sais, madame la ministre, qu’il est difficile de tirer des leçons d’une situation qui, selon le Gouvernement, a été bien gérée…
Il est bon aussi de rappeler que la Cour des comptes avait, dès 2018, souligné les « manquements déontologiques » liés au Conseil national des activités privées de sécurité (Cnaps).
L’emploi et le droit du travail ne sont clairement pas au cœur de la réflexion qui sous-tend ce projet de loi. Prenons l’exemple de la modification injustifiée des règles d’ouverture dominicale : sous prétexte d’une temporalité courte et de la volonté de bénéficier d’un pic de consommation, le Gouvernement ouvre la porte à de nouvelles dérogations au droit du travail. Le recours au bénévolat est, lui aussi, très problématique, tout autant que le recours au secteur privé ou la concentration des moyens des forces de sécurité nationale, qui posent également la question du respect du droit du travail.
La Cour des comptes estime qu’il faudrait employer 22 000 à 33 000 agents de sécurité privée par jour pour sécuriser l’ensemble des épreuves. Ces chiffres dépassent largement les capacités disponibles dans les entreprises de la région et du pays. La question de la formation et du recrutement de ces agents n’a pas été anticipée.
Le spectre de l’expérience londonienne et de l’explosion des coûts n’est pas si éloigné. Cela nous amène au triste héritage financier et budgétaire que dessine ce texte. Ainsi, le dernier rapport de la Cour des comptes alerte clairement sur un budget qui n’est toujours pas connu et qui, selon elle, n’est pas « précisément établi ».
Les conséquences sont tout aussi inconnues sur les finances publiques locales, particulièrement en cas de perturbation : à ce jour, les villes ne disposent d’aucun chiffre réel ni d’aucune prévision en cas de baisse des recettes de billetterie – pour cause d’épidémie, par exemple.
L’héritage de ces Jeux, au centre des préoccupations affichées du comité d’organisation, n’est pas davantage environnemental, malgré les annonces et les efforts locaux. À Marseille, par exemple, sans le travail de la ville, l’ambition et les actions pour la préservation et la reconstitution de l’écosystème marin en bord de mer n’auraient pas été les mêmes.
Ce texte est à l’image des tentatives de ces dernières années d’ériger la surveillance de masse en clé de sécurité et de justifier les renoncements aux libertés individuelles et collectives par des arguments sécuritaires.
Cette vision, surtout lorsqu’elle tente de s’habiller des habits consensuels du bon déroulement des jeux Olympiques, est une farce, tout comme le titre de ce projet de loi, que nous proposons d’ailleurs de changer.
Nous ne sommes pas dupes et nous proposerons de recentrer le texte sur ce que devrait être son objet, à savoir l’encadrement des Jeux, plutôt qu’une dérive sécuritaire pérenne au détriment des droits des citoyens.
Aussi, faute de modifications significatives, particulièrement sur la temporalité de l’application des mesures qui y figurent, notre groupe votera contre ce projet de loi.
Applaudissements sur les travées du groupe GEST. – Mme Esther Benbassa applaudit également.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, dans quelques mois, la France accueillera, pour la première fois depuis près d’un siècle, les jeux Olympiques et Paralympiques d’été.
Du 24 juillet au 8 septembre prochains, 14 850 athlètes, répartis en 388 délégations et 58 sports, s’affronteront dans le cadre de 878 épreuves.
Plus de 11 millions de spectateurs, venus du monde entier, sont attendus sur les différents sites de la compétition et à leurs abords. Ils seront 4 milliards derrière leur écran. C’est une compétition populaire aux enjeux inédits.
La France doit être au rendez-vous de ces Jeux ; c’est là tout l’objectif de ce texte.
Le projet de loi relatif aux jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 doit ainsi permettre à notre pays de répondre de la manière la plus adéquate possible aux défis que pose l’organisation d’un tel événement. Il vise ainsi à satisfaire de nombreux besoins en matière de sécurité, de couverture sanitaire, de lutte contre le dopage, de formation aux gestes qui sauvent ou encore de mobilité inclusive.
Ce texte s’inscrit dans le prolongement de la loi du 26 mars 2018 relative à l’organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 sur laquelle, tout juste élu sénateur, j’avais eu l’occasion d’intervenir. Il doit être examiné au regard de la loi d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur, que nous avons adoptée le 14 décembre dernier, et qui prévoit des moyens exceptionnels en matière de sécurité des différents sites.
Le projet de loi que nous examinons aujourd’hui parachève ce cadre législatif. Les sources de satisfactions y sont nombreuses.
Ainsi, la mise en œuvre de certaines mesures, à commencer par l’ouverture le dimanche des commerces situés à proximité des sites de compétition, devrait permettre aux acteurs économiques de profiter de retombées considérables et constituer un véritable accélérateur d’investissement.
D’autres contribueront à limiter le financement public. Ce sera notamment le cas, à l’article 14, de l’extension de la dérogation légale aux interdictions de publicité dans l’espace public.
Nous constatons également avec satisfaction que les dispositifs dérogatoires et expérimentaux ont été assortis de nombreuses garanties. Nous nous réjouissons en particulier que la ligne rouge de la reconnaissance faciale n’ait pas été franchie.
Ce projet de loi nous donne par ailleurs l’occasion de mettre notre droit en conformité avec le code mondial antidopage et le droit européen sur la protection des données. Je pense notamment aux tests génétiques aux fins de lutte contre le dopage, à l’article 4, et au cadre légal de la vidéoprotection, à l’article 6.
Autre motif de satisfaction, certaines dispositions contenues dans ce texte ont un caractère permanent. Je pense ainsi à l’introduction de deux nouveaux délits dans le code du sport, ce qui permettra de lutter plus efficacement contre les infractions commises lors de compétitions sportives.
Nous nous félicitons enfin de constater que certaines mesures entreront en vigueur dès le lendemain de la publication de la loi au Journal officiel.
Le laboratoire antidopage français, la SNCF, la RATP et les organisateurs disposeront ainsi du temps nécessaire pour tester et adapter les nouveaux dispositifs que sont les analyses génétiques, les caméras augmentées ou l’application de la procédure de criblage aux fan zones et aux participants aux grands événements.
La commission des lois a adopté une trentaine d’amendements, qui sont de nature à consolider ce texte.
Le renforcement des garanties entourant l’expérimentation des traitements algorithmiques d’analyse automatisée des images de vidéosurveillance est ainsi bienvenu. Il va dans le sens des recommandations formulées par le Conseil d’État et la Cnil.
En ce qui concerne l’encadrement des tests génétiques aux fins de lutte contre le dopage, la rapporteure Canayer propose d’inscrire l’ensemble du dispositif dans le code du sport. Nous n’y voyons pas d’inconvénient : cela permettra une mise en conformité de notre droit avec le code mondial antidopage. Je me réjouis par ailleurs de l’adoption de l’amendement que j’ai défendu visant à prévoir le consentement exprès des personnes contrôlées au moyen d’un scanner corporel.
Citons enfin l’extension et l’adaptation par ordonnance des dispositions de la loi dans les territoires ultramarins et l’application à la Polynésie française, dans le texte de la commission, de certaines mesures d’enquête relatives à la lutte contre le dopage.
Mes chers collègues, ce projet de loi est un texte nécessaire ; nous avons aussi souhaité en faire un texte équilibré. Je vous invite à l’adopter pour faire des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 une réussite française, un succès pour le monde sportif et pour nos athlètes, et la grande fête populaire qu’ils doivent être.
Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.
Applaudissements sur les travées du groupe SER. – Mme Esther Benbassa applaudit également.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, nous sommes réunis ce jour pour étudier un projet de loi dont le changement d’intitulé en commission traduit bien la nature hybride. Les sénatrices et sénateurs socialistes commencent cet examen avec un objectif en tête : la réussite des jeux Olympiques et Paralympiques de Paris.
La victoire de Paris dans le processus d’attribution des Jeux de 2024 a effacé le goût amer de la défaite pour l’organisation des Jeux de 2012. Candidature déposée sous la présidence de François Hollande, victoire décrochée sous la présidence d’Emmanuel Macron : cet événement dépasse les clivages. À droite comme à gauche, on a considéré qu’il ne fallait pas politiser les candidatures visant à accueillir les événements sportifs – si vous me permettez de paraphraser Emmanuel Macron…
Nous sommes donc spontanément favorables à ce texte, car nous souhaitons la réussite des jeux Olympiques et Paralympiques. Le groupe socialiste n’a d’ailleurs pas jugé bon de déposer des amendements sur un certain nombre de dispositions, qui ne posent pas problème.
Toutefois, quelques sujets d’inquiétude demeurent. Ainsi, nombre d’articles de ce texte prévoient des mesures destinées à s’inscrire de manière pérenne dans le droit commun ; d’autres visent à mettre en place des expérimentations et d’autres encore concernent bien exclusivement les jeux Olympiques et Paralympiques. Cela nous incite à nous interroger sur l’application de l’article 45 de la Constitution : en pareil cas, il nous semble bien délicat de définir précisément le périmètre du texte. À cet égard, je remercie la commission des lois de nous avoir octroyé une victoire symbolique en rebaptisant ce texte comme portant « diverses autres dispositions ».
Je regrette cependant que ne figurent, parmi ces diverses autres dispositions, ni le montant de la taxe de séjour pendant les jeux Olympiques ni la privatisation du réseau de bus parisien.
La situation catastrophique des transports en commun franciliens peut perdurer jusqu’en 2024. La privatisation va-t-elle empirer les choses ? « Je ne vous ferai pas croire que nous n’y pensons pas », pour reprendre les termes du ministre des transports, Clément Beaune. Hélas, nous ne pourrons nous prononcer sur cette situation dans cet hémicycle, puisque les amendements du groupe socialiste sur ce sujet, qui a pourtant tout à voir avec l’objet de ce projet de loi, ont été déclarés irrecevables.
Ensuite, ce projet de loi, qui ne parle pas que des Jeux, tout en en parlant, mais sans ne parler que de cela, autorise nombre d’expérimentations. Notre premier souci est de faire en sorte que des garanties suffisantes soient apportées pour maîtriser les dérogations dans leur périmètre, dans leur durée et dans leur objet, et qu’elles soient ainsi parfaitement cadrées.
Le Conseil d’État avait proposé au Gouvernement un vade-mecum de l’expérimentation tant il est rare qu’une expérimentation ne soit pas généralisée. Est-ce à dire qu’elles sont toutes extrêmement efficaces et convaincantes ? Il est permis d’en douter…
Le Conseil d’État a donc recommandé au Gouvernement de définir, en amont des expérimentations, des critères de réussite et des objectifs clairs tout en associant le plus largement possible le public concerné. Après avoir lu l’étude d’impact de ce projet de loi, nous doutons de la définition de ces quelques critères. Mme la ministre serait-elle, par exemple, en capacité de me dire ce qui pourrait conclure à la non-généralisation de l’utilisation de la vidéoprotection automatisée ?
Certains défenseurs des libertés publiques craignent que ne se produise, à la faveur des jeux Olympiques et Paralympiques, par crainte du terrorisme, une accélération de cette évolution dont les conséquences affecteront le champ de l’ordre public et l’exercice des libertés ordinaires. Il est bien difficile de leur rétorquer qu’ils se trompent et que les mesures proposées ne sont que temporaires.
À travers les auditions de la commission, nous avons eu la confirmation que beaucoup d’acteurs se projettent déjà dans une pérennisation. Je ne dis pas que cela est incompréhensible, mais ne serait-il pas plus transparent d’indiquer, dès le départ, que la plupart des mesures proposées sont en réalité destinées à durer ?
C’est aussi l’une des raisons qui nous ont poussés à rejeter la reconnaissance faciale. Nous considérons que le sujet n’est pas anodin et qu’il mérite un débat et une expérimentation assortie de garanties élevées d’encadrement pour rendre le dispositif acceptable.
On ne peut introduire dans le droit positif des dispositions aussi lourdes par le biais d’amendements à un texte qui concerne les jeux Olympiques et Paralympiques. L’intelligence artificielle et la reconnaissance faciale sont déjà présentes dans nos vies, la plupart de nos concitoyens en sont conscients. Faut-il donc leur faire croire que ce sont les Jeux de Paris qui rendent l’expérimentation technologique nécessaire ?
Nous devons veiller à ce que le combat contre le terrorisme, bien légitime, ne conduise pas à des restrictions de libertés en matière d’ordre public.
Il convient aussi de ne pas favoriser l’extension des nouveaux standards de sécurité qui s’imposent pour les jeux Olympiques et Paralympiques à toutes les manifestations sur le territoire national.
Enfin, et ce n’est pas anodin, notamment pour nos collectivités territoriales, nous devons tenir compte des coûts pour que les mesures que nous voterons ne pèsent pas trop lourdement sur les finances locales.
Applaudissements sur les travées du groupe SER.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, ces jeux Olympiques auraient pu, auraient dû donner lieu à un élan exceptionnel en faveur d’une politique sportive ambitieuse et populaire.
La loi du 2 mars 2022 visant à démocratiser le sport en France n’y a malheureusement pas répondu et ce nouveau texte n’apportera rien en la matière. Pis, celui-ci semble servir de soupape au Gouvernement pour prendre un certain nombre de dispositions restreignant les libertés individuelles et collectives et appelées à s’appliquer de façon pérenne.
Ce projet de loi aurait pu être l’occasion d’un débat positif sur la méthode à adopter pour que la prochaine Coupe du monde de rugby ou les jeux Olympiques de Paris constituent un héritage économique et social vertueux pour la population.
Au-delà de la performance de nos athlètes et de la bonne tenue de l’événement en matière de sécurité et de transport, ces Jeux ne seront une réussite que s’ils permettent de casser les barrières sociales, territoriales et liées aux handicaps entre les usagers et la pratique sportive.
Et comment concevoir un héritage économique pour nos collectivités en matière d’équipements alors même qu’elles peinent à soutenir leur vie associative ou à maintenir ouverts leurs équipements existants du fait de la hausse des coûts de l’énergie ?
Que l’on se comprenne bien : je suis résolument pour la tenue de ces jeux Olympiques dans notre pays. La promotion faite au sport d’élite ne me gêne pas et les bonnes performances de nos athlètes nous honoreront.
Ainsi, à défaut d’un héritage social, nous devrons nous satisfaire d’un héritage sécuritaire des Jeux. Loin de nous l’idée de négliger la sécurité de millions de femmes et d’hommes venus assister aux festivités, mais les dérogations apportées au droit commun en matière de droit des justiciables risquent de saper l’élan populaire que doit amener cet événement mondial.
L’un des objectifs de ce texte est de légaliser la vidéosurveillance algorithmique. Or celle-ci a tout autant recours que la reconnaissance faciale à l’analyse biométrique, autrement dit à la détection de corps pour repérer ou identifier une personne.
Étape par étape, la population est préparée à devoir accepter ces nouvelles technologies, sous couvert de leur caractère exceptionnel et limité dans le temps, alors même que ce gouvernement a la fâcheuse tendance d’inscrire de manière pérenne dans le droit commun des dispositions relevant de l’état d’exception.
La Cnil, la Ligue des droits de l’homme ou encore le Conseil d’État se sont aussi fait l’écho de cette préoccupation, exprimée par l’ensemble des membres de mon groupe. Je pense, madame la ministre, que ces réserves méritent que l’on s’y penche de plus près.
Ce texte de loi, en sus de n’apporter aucune garantie supplémentaire de bonne gestion de l’événement pour les supporters dans les stades, s’inscrit dans une ligne du tout sécuritaire qui nous semble contre-productive. Nos amendements tendent à corriger cette orientation, notamment en matière de pointage. En effet, nous estimons nécessaire de proportionner cette mesure au regard du comportement de la personne.
S’agissant de la pyrotechnie, les supporters, partout dans le monde, utilisent des torches et des fumigènes pour animer les tribunes. Bien qu’elle soit interdite, cette pratique perdure. Or la répression a des effets opposés à ceux qui sont attendus, puisqu’elle conduit les supporters à une utilisation encore plus dangereuse.
Par ailleurs, cette gestion sécuritaire s’illustre aussi par le recours de 25 000 à 30 000 agents de sécurité privée dont les prérogatives seront étendues en vue des Jeux. Sachant qu’il faudrait recruter et former 25 000 agents en dix-huit mois, la « probable insuffisance de la sécurité privée », soulignée récemment par la Cour des comptes, est un doux euphémisme.
Dans ce contexte d’un manque criant de ressources humaines dans la filière de sécurité privée, nous serons particulièrement vigilants à ce qu’il n’y ait aucune complaisance à l’égard du travail dissimulé ou du recours aux travailleurs sans-papiers.
Faute d’une préparation sérieuse, nous en sommes amenés à devoir faire appel aux réserves de la police, de la gendarmerie et des armées. Entre les festivals de musique annulés, faute d’agents de sécurité publique et de membres des forces armées assurant le maintien de l’ordre public, je peine à distinguer l’horizon d’une quelconque communion populaire lors de ces Jeux.
S’agissant d’impréparation, je pourrais aussi rappeler les promesses de cet exécutif, qui s’est engagé à répondre de manière décarbonée aux besoins de mobilité induits par les Jeux. Elles auront du mal à être tenues, sachant que seul le prolongement de la ligne 14 du métro sera prêt à temps. Là encore, l’acceptabilité des Jeux devrait en sortir malmenée.
En raison tant des restrictions aux libertés individuelles et collectives qu’il emporte que de ses manques criants en matière de politique sportive et de l’absence de mesures concrètes sur l’héritage des Jeux, nous ne pourrons voter ce texte.
Applaudissements sur les travées des groupes CRCE, SER et GEST.
Applaudissements sur des travées du groupe UC.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, votre projet de loi, qui s’inscrit dans la dernière ligne droite avant les jeux Olympiques et Paralympiques de 2024, ambitionne d’améliorer l’organisation de cet événement et de parfaire la loi de 2018.
Il s’inscrit aussi dans la dernière ligne droite du troisième événement le plus médiatisé au monde, la Coupe du monde de rugby, qui aura lieu à l’automne.
Ce texte présente des adaptations nécessaires en matière d’offre de soins et de formation aux premiers secours, alloue des moyens pour renforcer le dispositif de lutte contre le dopage et prévoit diverses autres mesures, dont la possibilité pour la Solideo de recourir à l’intervention d’établissements publics administratifs (EPA).
Surtout, il renforce la sécurité des Jeux et des grands événements que la France accueille. Le chapitre III, au gré des mesures importantes de sécurité qu’il implique et du traitement des questions, parfois épineuses, qu’il soulève, mérite une attention particulière, comme cela a été souligné dans le rapport d’information que nous avons coécrit avec Marc-Philippe Daubresse et Jérôme Durain en mai 2022, La reconnaissance biométrique dans l ’ espace public : 30 propositions pour écarter le risque d ’ une société de surveillance. J’y reviendrai.
Quelques imprécisions ou imperfections ont été relevées dans le texte du projet de loi, notamment le fait que l’installation de systèmes de vidéoprotection n’aurait été réalisable que « dans les moyens de transport et les voies les desservant ». Je me félicite que Mme la rapporteure ait repris en commission notre amendement tendant à éclaircir le sens de ces termes, afin de préciser que l’installation de systèmes de vidéoprotection ne sera concevable que dans les gares et les seuls moyens publics de transport.
Nous aurions toutefois pu éviter de rejeter l’amendement à l’article 6 visant à maintenir le caractère obligatoire de la transmission à la Cnil d’un rapport annuel du Gouvernement sur l’activité des commissions départementales de vidéoprotection. Il est vrai que ces rapports ne sont plus rendus à la Cnil depuis 2013, ce qui emporte assez peu de conséquences pratiques. Toutefois, je suis chagriné de supprimer une obligation légale au seul motif que le Gouvernement s’y soustrait depuis des années.
M. Loïc Hervé opine.
Je me souviens d’avoir appris et réappris, en première année de droit, que le respect de la Constitution et du droit fondait la démocratie. Même quand cela n’arrange pas, la règle doit être respectée.
Il est possible d’anticiper des nominations, il est possible d’anticiper des limites d’âge, il pourrait même être organisé des tuilages avec des adjoints…
En revanche, nous pourrions envisager le cadeau d’un amendement réécrit, mieux justifié et plus démocratique.
En ce qui concerne l’article 17 du projet de loi et la possibilité offerte au commerce de déroger au repos dominical, je salue, madame la ministre, le fait que vous ayez suivi l’avis du Conseil d’État. En effet, celui-ci suggérait, au nom de l’égalité entre les entreprises, d’étendre le périmètre géographique de la mesure aux communes situées à proximité des sites de compétition et non de le restreindre aux seules communes d’implantation de ces sites et aux communes limitrophes.
Nous saluons, d’une manière générale, le travail de la rapporteure Agnès Canayer, qui a permis de trouver un équilibre. Je pense notamment à l’article 4 relatif à la lutte contre le dopage qui prévoit la réalisation d’analyses par des examens génétiques. La solution trouvée, à savoir permettre une expérimentation des tests génétiques les plus intrusifs, me paraît plus raisonnable sur le plan éthique.
De même, nous souscrivons aux garanties apportées par la commission des lois à l’installation de scanners corporels à ondes millimétriques, basées sur le volontariat à la fois des gestionnaires et des personnes contrôlées, auxquels on ne pourra imposer ce dispositif. Nous doutons cependant de la portée pratique de cette faculté au regard de la capacité des opérateurs à investir dans ces machines coûteuses et à disposer d’agents formés.
Enfin, si nous reconnaissons l’utilité de ce projet de loi, nous aurions aimé qu’il ne subisse pas, lui aussi, la sentence d’une procédure accélérée qui nuit au temps du dialogue et du débat nécessaires au bon fonctionnement démocratique.
C’est aussi parce que ce texte ne peut, faute de temps, faire l’objet de discussions plus approfondies, que nous saluons la décision du Gouvernement et celle de la commission des lois de ne recourir à l’intelligence artificielle qu’à titre expérimental et de manière limitée, dans le temps et dans l’espace, le tout dans un cadre très contraint et sans aucune utilisation de données biométriques.
Avec Marc-Philippe Daubresse et Jérôme Durain, nous avions posé, dans le rapport que j’ai mentionné, une condition de subsidiarité. Je la crois respectée ici. Le dispositif de filtrage des billets sécurisés, cher à Laurent Lafon, est une alternative efficace aux dispositifs de reconnaissance biométrique, selon les services de sécurité.
Nous ne pouvons que nous féliciter que ce texte, tel qu’il résulte des travaux de la commission, mette en œuvre les préconisations de ce rapport. Le projet de loi protégera ainsi et l’intégrité physique de nos concitoyens lors de cet événement et leurs libertés publiques.
Comme le soulignait Marc-Philippe Daubresse, il nous faudra fixer dans une nouvelle loi ad hoc les conditions dans lesquelles la reconnaissance biométrique pourra faire l’objet de nouvelles expérimentations par les acteurs publics ou dans les espaces publics.
Nous le voyons aujourd’hui, seul un débat sur cette question permettra d’apaiser les tensions et d’objectiver les positions. Nous devrons légiférer avant l’adoption du futur règlement européen.
Cette loi spécifique nous permettra également de renforcer notre souveraineté. Il est urgent de répondre à la réalité des pratiques et des cas d’usage qui se développent chaque jour dans notre pays.
Il nous faudra enfin accepter le principe d’un nouveau cadre juridique, car le régime de la protection des données ne suffit pas. Il faudra impérativement poser les interdits et les préalables. Nous en sommes convenus en commission des lois, mercredi dernier, ce dont je me réjouis tout particulièrement.
Applaudissements sur les travées du groupe UC. – M. Pierre Ouzoulias applaudit également.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, j’aurais aimé, comme Hemingway, prétendre que « Paris est une fête » et me réjouir de la tenue des jeux Olympiques sur notre territoire.
J’aurais aimé faire comme si tout allait bien, comme si l’on pouvait circuler normalement en Île-de-France, comme si les transports en commun étaient fonctionnels et sans danger.
La vérité est que je peine à imaginer Paris en pleins Jeux, alors que nous avons déjà tant de mal à sécuriser un match de football.
Rappelez-vous, madame la ministre, l’épisode du fiasco du Stade de France le 28 mai dernier. On peut espérer que le nouveau préfet évitera le pire et assurera mieux la sécurité des 13, 5 millions de spectateurs attendus.
Pour le moment, le texte qui nous est soumis prévoit de faire face à cet enjeu primordial par une série de dispositions qui posent tout de même de sérieuses questions eu égard à nos droits et libertés.
L’article 7 prévoit le recours aux caméras augmentées utilisant l’intelligence artificielle, ou vidéosurveillance algorithmique (VSA), afin de détecter des « situations anormales ». On parle alors d’une technologie qui analysera, classera, évaluera nos moindres faits et gestes dans l’espace public.
La Quadrature du Net, une association de défense et de promotion des droits et libertés sur internet, dénonce « une véritable frénésie sécuritaire » et « un projet totalement dystopique ».
Dans son avis, le Conseil d’État juge que le projet de loi est « susceptible de mettre en cause la protection de la vie privée et d’autres droits et libertés fondamentales, tels que la liberté d’aller et venir et les libertés d’opinion et de manifestation, lorsque ces dernières s’exercent à l’occasion de ces événements ». Il appelle l’intervention du législateur pour encadrer le texte de garanties rigoureuses. Et ce d’autant plus que nombre des mesures concernant la sécurité ont vocation à se pérenniser dans notre droit commun, dépassant ainsi le strict cadre des jeux Olympiques.
Nous devrons donc nous montrer particulièrement attentifs et trouver le juste équilibre entre sécurité et protection de nos libertés.
N’oublions pas non plus l’immense coût écologique de cet événement, grand producteur de CO2. Nous aurions pu nous en passer…
Je voterai contre ce texte.
Applaudissements sur les travées du groupe GEST.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, si tout le monde s’est réjoui lors de l’attribution à Paris des jeux Olympiques et Paralympiques, plusieurs événements survenus depuis nous font douter quant aux conditions de leur organisation, qu’il s’agisse des débordements au Stade de France lors de la finale de la Ligue des champions ou du déroulement de la Coupe du monde de football au Qatar.
Il faut tout faire pour que le sport sorte vainqueur de cette compétition, bien au-delà de la seule réussite commerciale de cet événement planétaire. Je veux parler du sport propre, des disciplines exigeantes et peu médiatisées, pratiquées par des athlètes admirables et exemplaires, plutôt que du « sport business » et des vecteurs commerciaux que deviennent désormais certaines stars du sport.
Notre pays doit être à la hauteur de ces jeux Olympiques et Paralympiques par la maîtrise des coûts de l’organisation, par la sécurité due aux athlètes et aux spectateurs et, enfin, par l’héritage que doit léguer cet événement.
La Cour des comptes dit ne pas être « en mesure, à ce stade, d’établir le coût global des jeux et son impact total sur les finances publiques ».
Les chiffres avancés pour le budget du Comité d’organisation des jeux Olympiques et Paralympiques (Cojop) et de la Solideo dépassent les 8 milliards d’euros, avec une part de financement public qui s’établirait à près de 2, 4 milliards d’euros.
Le coût réel des Jeux comprendra aussi les dépenses des collectivités territoriales et les dépenses de l’État relatives au dispositif de sécurité autour de l’événement et au sein des infrastructures de transport.
La commission de la culture a adopté l’amendement de son rapporteur Claude Kern tendant à ce que la Cour des comptes établisse un bilan du coût global des Jeux et présente leur héritage au travers de la réutilisation des événements et des infrastructures mises en place.
Madame la ministre, vous avez fait part de vos objectifs : vous voulez que les jeux laissent « une empreinte durable, tout d’abord matérielle, notamment en Seine-Saint-Denis, avec la construction d’équipements sportifs de proximité, de 4 000 logements accessibles ou d’aménagements routiers, piétons ou vélos d’utilité publique ». Nous veillerons à la réalisation de ces objectifs, auxquels nous adhérons.
En ce sens, la commission de la culture a adopté l’amendement de son président Laurent Lafon visant à mutualiser les moyens de la Solideo avec un autre établissement de l’État. Cela devrait permettre à la société de se maintenir durant la phase de reconversion des ouvrages en s’appuyant sur les moyens d’un autre établissement public foncier et d’aménagement.
L’accueil des Jeux suscite aussi des interrogations, voire des inquiétudes, quant à la répartition des effectifs chargés du maintien de la sécurité sur l’ensemble du territoire.
Près de 30 000 représentants des forces de l’ordre seront mobilisés chaque jour pendant les épreuves et leur présence dans les transports en commun sera doublée.
Nous regrettons que l’amendement de notre collègue du groupe RDSE Nathalie Delattre n’ait pas été retenu. Il visait à s’assurer que les personnels temporairement affectés à des missions de maintien ou de renforcement de la sécurité – nous approuvons cette démarche – retrouvent, après l’événement, leur affectation antérieure au plus tard le 31 décembre 2024.
En effet, durant la période des Jeux, aucune compagnie de CRS maîtres-nageurs sauveteurs (MNS) ne sera affectée sur les plages, du fait de leur mobilisation sur les sites olympiques. De nombreux élus craignent les conséquences de cette absence, associée à un afflux majeur de touristes. Ils redoutent aussi que l’absence des compagnies de sécurité sur les plages ne devienne pérenne.
J’en viens à l’héritage immatériel que devront laisser les jeux Olympiques et paralympiques de 2024. Au-delà du rayonnement touristique de la France, ils sont une formidable opportunité pour promouvoir la pratique sportive, par la mise en lumière non seulement de disciplines encore confidentielles dans d’autres pays, mais aussi du handisport et du sport féminin, dont nous célébrons aujourd’hui même la journée internationale.
Plus généralement, les Jeux sont un encouragement à la pratique sportive pour tous, une source d’épanouissement, d’apprentissage et de respect des règles, des arbitres et des adversaires, autant de valeurs que notre pays a bien besoin de rappeler.
Madame la ministre, vous connaissez mon entêtement à soutenir le sport scolaire et universitaire, constitutif de l’éducation, dont c’est également la journée internationale, de notre jeunesse. Il mérite d’être reconnu et encouragé bien plus qu’il ne l’est aujourd’hui, surtout en regard de la promotion des jeux Olympiques.
Loin de l’élitisme social de ses origines et du « sport business » actuel avec ses « athlètes produits », il puise dans l’esprit olympique un équilibre entre la promotion de l’activité physique et les valeurs de respect et de fraternité.
Enfin, je salue la décision de conserver France Télévisions comme diffuseur officiel des jeux Olympiques. À l’heure où certaines rencontres sportives disparaissent des chaînes du service public, il est bon que tous les Français puissent regarder, sur les chaînes de télévision publique, les Jeux au financement desquels ils contribuent.
Pour ces raisons, le groupe du RDSE votera en faveur de ce texte.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, contrairement à ce que leur nom indique, les jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024 ne se limitent pas à la seule capitale.
Plusieurs autres villes se sont engagées à accueillir des compétitions, des centres de préparation, les villages des athlètes et des médias ou encore le parcours de la flamme.
Au travers des actions mises en place, les collectivités labellisées Terre de Jeux 2024 et les établissements scolaires Génération 2024 partagent tous le double objectif de développer la pratique sportive et de faire rayonner l’olympisme sur l’ensemble du pays.
Or, à dix-huit mois du début des compétitions, force est de constater que l’enthousiasme de la population française reste pour le moins mesuré, les Français devant, pour l’heure, faire face aux crises sanitaire, sociale et de pouvoir d’achat.
Aujourd’hui, il est donc de notre responsabilité collective – Cojop, État, Parlement, collectivités, grande famille du sport français – de tout faire pour préparer dans les meilleures conditions l’organisation et l’accueil de la plus grande compétition sportive planétaire.
Pourtant, dans son dernier rapport remis voilà quelques jours, la Cour des comptes relevait un grand nombre d’incertitudes : un équilibre financier qui n’a pas encore été trouvé, des délais serrés pour la livraison de toutes les infrastructures, une organisation loin d’être dans les clous concernant l’offre de transport qui ne pourra, à ce rythme, être prête à temps, et des questions de sécurité évidentes auxquelles ce projet de loi est, à raison, largement consacré.
Ce texte a donc pour objectif d’inscrire dans la loi des mesures complémentaires de celles qui ont été adoptées dans la loi du 26 mars 2018 relative à l’organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024.
Au travers des amendements déposés par nos rapporteurs Agnès Canayer, Florence Lassarade et Claude Kern, mais aussi par d’autres collègues – je tiens à les remercier tous pour la qualité et la pertinence de leurs propositions –, le Sénat précise et renforce certains des dispositifs inscrits dans le projet de loi.
Reconnaissons que l’essentiel du texte va dans le bon sens. Il prévoit de nouveaux dispositifs et dérogations ainsi que des expérimentations en matière de soins, de sécurité, laquelle est encore renforcée, ou des mesures antidopage qui, une fois pérennisées, constitueront un héritage durable de ces Jeux. Nous pouvons en être fiers.
Il y avait en effet urgence à adapter des dispositifs complémentaires en matière de gestion des grands événements. Vidéoprotection, contrôle des entrées, renforcement des sanctions pour les faits de violence ou de fraude, sécurité dans les transports… le texte se veut tout terrain. Encore faut-il bien délimiter le périmètre des mesures exceptionnelles et celui des changements permanents.
Aussi, nous sommes favorables à ce texte qui, je l’espère, nous permettra d’éviter un nouveau fiasco semblable à celui du Stade de France, devenu le symbole de tous les dysfonctionnements possibles lors d’une rencontre internationale.
Je soulignerai tout de même deux angles morts, sur lesquels nous n’avons pas eu la possibilité d’amender le texte.
Le premier concerne les volontaires et bénévoles. L’absence de garanties sur leur accueil, qui révèle des enjeux propres à l’événement – logements peu accessibles en Île-de-France et dans Paris intra-muros –, ou l’absence de facilités de transport peuvent créer un sentiment d’exclusion, à l’opposé des valeurs de l’olympisme.
Faut-il rappeler que, au-delà des chiffres, des femmes et des hommes consacreront leur temps et leur énergie à faire de ces Jeux une réussite à tous les niveaux ? Ils doivent pouvoir le faire dans les meilleures conditions.
Le dispositif des volontaires, les conditions de candidature, les rôles assignés à chacun sont inscrits dans la charte du volontariat olympique et paralympique que nous devons à la loi de 2018.
Pour la grande majorité des bénévoles, il s’agit d’un cadre sain, clair, qui les protège autant qu’il protège les spectateurs. Mais, là encore, des doutes persistent : quelle est la valeur contraignante d’une charte pour des profils dangereux qui souhaiteraient à tout prix gâcher la fête ? En l’état, ni l’organisateur ni le Gouvernement n’apportent de réponse satisfaisante.
Par ailleurs, le Premier président de la Cour des comptes appelle à une nécessaire vigilance face aux risques juridiques associés à la charte du volontariat olympique, une requalification de certaines missions d’une partie des bénévoles en travail salarié pouvant constituer une complication juridique et financière non négligeable.
Le deuxième angle mort concerne la billetterie. Le Cojop y tient : les billets seront nominatifs. Or les partenaires comme la Ville de Paris, la région Île-de-France, les entreprises et les associations, via la billetterie sociale, se feront les acquéreurs de places pour inviter du public. À quel nom seront ces billets ? Comment s’assurer que les personnes se présentant avec un billet en sont bien les propriétaires ? Comment effectuer les contrôles ? Sans réponse précise à ces questions pourtant pratico-pratiques, tous nos grands débats seront vains.
Le billet d’entrée n’est pas un objet ordinaire : il est la clef d’accès à l’expérience olympique pour des millions de personnes venues du monde entier. Pour beaucoup de jeunes, c’est aussi le sésame vers une première rencontre avec le sport de haut niveau.
Madame la ministre, s’agissant de ces jeux Olympiques et Paralympiques, l’important n’est pas uniquement de participer, mais de s’assurer de leur succès. Il faut agir « plus vite, plus haut, plus fort » – et j’ajouterai : ensemble !
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.
Applaudissements sur les travées du groupe SER.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, après les textes de 2018 et 2019, ce troisième texte relatif à l’organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024 a été inscrit à l’ordre du jour dans la continuité de son dépôt au Sénat, le 22 décembre dernier. Ces délais contraints restreignent le temps de travail que nous pouvons lui consacrer.
La réussite des Jeux de 2024, événement tout à fait exceptionnel, est un enjeu majeur auquel nous adhérons collectivement. Pendant six semaines, 13 millions de spectateurs et 4 milliards de téléspectateurs sont attendus. L’équivalent de cinquante-quatre championnats du monde seront organisés simultanément et circonscrits à un même lieu, ou presque.
La réussite de l’événement se mesurera à l’aune de son organisation, des résultats de nos athlètes, du respect de l’équilibre budgétaire – il s’agira de limiter les dépassements au maximum –, des retombées économiques et sociales, en termes d’infrastructures – la notion d’héritage olympique doit être hiérarchisée –, à l’aune également de ses dimensions festive, inclusive, populaire, environnementale, mais aussi du rayonnement de la France et de la valorisation de ses règles communes et de ses savoir-faire.
Ce texte, qui contient des ajustements nécessaires à un événement unique, traite le sujet olympique au travers d’un prisme résolument sécuritaire. Il prévoit des dérogations à notre droit commun et à différents codes : ceux du sport, de la sécurité intérieure, du travail ou encore de la santé.
Présentées comme nécessaires, ces dérogations permettent en effet d’appliquer le cahier des charges du CIO, de respecter la Charte olympique, de mettre en œuvre les contrats de ville hôte et d’harmoniser, dans notre législation, les standards de l’Agence mondiale antidopage – je fais ici référence aux tests génétiques déjà appliqués aux Jeux de Tokyo en 2021.
Nous notons que le Gouvernement a globalement respecté l’essentiel des recommandations du Conseil d’État et de la Cnil.
Parallèlement, le projet de loi regroupe un ensemble de dispositions pérennes ou amenées à l’être après expérimentation et/ou évaluation, et qui dépassent largement le cadre olympique, en s’appliquant potentiellement à « des manifestations récréatives, sportives et culturelles » ayant lieu avant et après 2024 : Coupe du monde de rugby 2023, concerts, festivals…
Les décrets d’application définissant la nature des événements concernés ou les seuils retenus seront l’objet de notre particulière attention. C’est en ce point que réside la dimension post-olympique du texte, absente d’un intitulé réducteur, bien que précisé en commission.
Concernant l’aspect sécuritaire, il semble que les enseignements des incidents survenus lors de la finale de la Ligue des champions au Stade de France le 28 mai dernier aient été globalement tirés par les ministères concernés, par la délégation interministérielle aux grands événements sportifs (Diges) et par la délégation interministérielle aux jeux Olympiques et Paralympiques 2024 (Dijop).
Cependant, deux situations sensibles sont identifiées : la cérémonie d’ouverture et le parcours de la flamme olympique dans le pays.
La gestion de la cérémonie d’ouverture paraît d’une grande complexité et nécessite un haut degré d’anticipation, des moyens accrus et un niveau de technicité auquel nous n’avons jusqu’alors jamais recouru. Des arbitrages rapides sont nécessaires afin de susciter la sérénité dans l’opinion publique.
Ces choix stratégiques intègrent également la gestion des risques d’atteintes aux personnes et aux biens, ainsi que la politique de la délinquance du quotidien aux abords des sites accueillant des compétitions, qui pourraient menacer le caractère paisible de l’événement.
Le recours à la mobilisation d’effectifs en grand nombre, publics et privés, sera nécessaire. Dans son récent rapport budgétaire, le Premier président de la Cour des comptes n’a pas manqué d’alerter sur l’impact de ce défi, dont le financement sera à la charge exclusive du Cojop.
Pour conclure, j’appelle votre attention sur la relation entre l’organisateur et le public. Elle est uniquement appréhendée dans ce texte au travers du volet répressif, c’est-à-dire de la sanction et de la lourdeur des peines.
Certaines dispositions – usage de scanners corporels, interdictions de stade, délit d’intrusion en réunion dans les enceintes sportives et sur les aires de compétition – s’appliqueront par exemple aux matches de Ligue 1 et de Ligue 2 de football, alors que les autres volets de la relation entre les clubs et les supporters ne sont pas abordés.
Finalement, la réussite des jeux Olympiques de Paris 2024 reposera en grande partie sur l’équilibre que nous parviendrons à trouver entre la quiétude que nous devons aux habitants, spectateurs et participants et le souci de préserver la dimension fédératrice et festive de l’événement.
Applaudissements sur les travées du groupe SER. – M. Pierre Ouzoulias applaudit également.
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion du texte de la commission.
Chapitre Ier
Adaptations nécessaires en matière d’offre de soins et de formation aux premiers secours
I. – En vue d’assurer la prise en charge des membres des délégations olympiques et paralympiques et des personnes accréditées par le comité international olympique et le comité international paralympique, il est créé au sein du village olympique et paralympique, pour la durée d’accueil de ces personnes, un centre de santé dénommé « Polyclinique olympique et paralympique » dont la création et la gestion sont assurées par l’Assistance publique-hôpitaux de Paris.
Les deuxième à quatrième alinéas de l’article L. 6323-1 du code de la santé publique ne sont pas applicables à ce centre de santé.
Sous réserve du III du présent article, les articles L. 6323-1-10 et L. 6323-1-11 du code de la santé publique sont applicables.
II. – Le centre de santé mentionné au I du présent article réalise à titre exclusif des prestations à titre gratuit pour les personnes mentionnées au même I. Les articles L. 161-35, L. 162-32, L. 162-32-3 et L. 162-32-4 du code de la sécurité sociale et l’article L. 6323-1-7 du code de la santé publique ne sont pas applicables. L’accord national mentionné aux articles L. 162-32-1 et L. 162-32-2 du code de la sécurité sociale n’est pas applicable. Les modalités de financement des activités du centre de santé et de couverture des charges liées aux prestations délivrées sont prévues par une convention conclue en application de l’article L. 6134-1 du code de la santé publique entre l’Assistance publique-hôpitaux de Paris et le comité d’organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024.
Les personnes engagées en qualité de volontaires olympiques et paralympiques peuvent participer aux activités du centre de santé.
III. – Le contenu du projet de santé, du règlement de fonctionnement et de l’engagement de conformité mentionnés aux articles L. 6323-1-10 et L. 6323-1-11 du code de la santé publique, ainsi que les conditions dans lesquelles les professionnels de santé sont associés à l’élaboration du projet de santé, sont adaptés aux caractéristiques du centre de santé par arrêté du directeur général de l’agence régionale de santé d’Île-de-France.
IV. – L’installation et le fonctionnement, au sein du centre de santé mentionné au I, d’appareils d’imagerie par résonance magnétique nucléaire à utilisation médicale et d’un scanographe à utilisation médicale, sont autorisés. Les chapitres II et III du titre II du livre Ier de la sixième partie du code de la santé publique ne sont pas applicables.
L’utilisation de ces équipements respecte les conditions techniques de fonctionnement mentionnées à l’article L. 6124-1 du même code.
En cas d’urgence tenant à la sécurité des patients ou du personnel, le directeur général de l’agence régionale de santé peut prononcer l’interruption immédiate, totale ou partielle, de l’utilisation de ces équipements, dans les conditions prévues au II de l’article L. 6122-13 dudit code.
V. – Par dérogation au I des articles L. 5126-1 et L. 5126-4 du code de la santé publique, une pharmacie à usage intérieur de l’Assistance publique-hôpitaux de Paris, est autorisée à disposer de locaux au sein du centre de santé mentionné au I du présent article.
Elle peut délivrer au détail, dans des conditions fixées par décret, aux personnes mentionnées au même I, y compris lorsqu’elles ne sont pas prises en charge par le centre de santé, les médicaments et les produits ou objets mentionnés à l’article L. 4211-1 du code de la santé publique ou les dispositifs médicaux stériles, qui figurent sur une liste arrêtée par le ministre chargé de la santé après avis de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé.
VI. – Par dérogation aux articles L. 4221-1 et L. 4232-1 du code de la santé publique, les pharmaciens inscrits aux tableaux des sections A et D ou les pharmaciens d’officine inscrits au tableau de la section E peuvent également exercer au sein de la pharmacie à usage intérieur mentionnée au V du présent article, sans devoir être inscrits au tableau de la section H. Ils informent le conseil central ou le conseil régional dont ils relèvent en application de l’article L. 4222-3 du code de la santé publique.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, l’article 1er crée la polyclinique olympique et paralympique prévue par le contrat de ville hôte.
Nous avons bien compris que la création de cette polyclinique, sous forme de centre de santé, vise à préserver la bulle sécuritaire qu’est, pour les athlètes, le village olympique et paralympique, mais aussi à ne pas reporter des besoins propres à ces derniers sur l’offre de soins de la région.
En pratique, la polyclinique sera gérée par l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) et nous espérons vivement que les dépenses qu’elle engagera seront intégralement remboursées par le Comité d’organisation des jeux Olympiques et Paralympiques 2024.
Le fonctionnement de ce centre devrait reposer sur un encadrement soignant assuré par des praticiens de l’AP-HP. Toutefois, l’essentiel des professionnels de santé qui y exerceront seront des volontaires olympiques et paralympiques.
Les besoins médicaux, paramédicaux et administratifs du pic d’activité sont estimés à 193 volontaires. Compte tenu de l’état de nos hôpitaux publics, à Paris comme ailleurs, il ne faudrait pas déshabiller Pierre pour habiller Paul…
Eu égard à la situation dramatique de l’hôpital et à la crise majeure des urgences, on peut légitimement s’interroger sur les conséquences de cette charge de travail supplémentaire pour l’AP-HP, et ce d’autant plus que trois hôpitaux participeront également à la prise en charge des soins outrepassant les compétences du centre de santé olympique.
Beaucoup de questions restent en suspens. Plus globalement, la saturation des capacités d’accueil des hôpitaux à la suite des fermetures de lits d’hospitalisation et du sous-investissement de l’État suscite notre interrogation quant à la prise en charge médicale et hospitalière des sportifs, des journalistes et, bien évidemment, des supporters et touristes durant les prochains jeux Olympiques et Paralympiques.
Nos hôpitaux publics sont en grande souffrance, peut-être encore davantage pendant les périodes estivales, à Paris comme ailleurs. Aussi aimerions-nous que le Gouvernement nous rassure sur tous ces points.
L’amendement n° 52, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly, Assassi et Cukierman, M. Bacchi, Mme Brulin, M. Ouzoulias et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Remplacer le mot :
Polyclinique
par les mots :
Centre de santé
La parole est à M. Jérémy Bacchi.
La rapporteure de la commission des affaires sociales a modifié l’article 1er du projet de loi en introduisant le terme de « polyclinique » pour désigner le centre de santé créé au sein du village olympique et paralympique qui figure dans le contrat de ville hôte.
Par cet amendement de Laurence Cohen, nous demandons à revenir sur cette modification. En effet, le terme « polyclinique », qui signifie littéralement clinique où se pratiquent toutes sortes de soins, n’est pas adapté au centre de santé du village olympique et paralympique, où ne seront pratiqués que les actes de premier recours et d’imagerie. Les hospitalisations et les actes chirurgicaux seront en effet du ressort des hôpitaux Bichat, Avicenne et Pompidou.
En outre, la dénomination « centre de santé » correspond au statut juridique de l’établissement de santé qui prendra en charge les patients du village olympique et paralympique.
J’entends que Mme Cohen préfère nommer « centre de santé » la structure créée pour répondre aux besoins du village olympique et paralympique.
Celle-ci n’aurait pourtant d’un centre de santé que le nom. Il était certes souhaitable de choisir une dénomination empruntée aux modèles de structures existants et c’est le terme de « centre de santé » qui a été retenu dans le projet de loi initial. Toutefois, ce « centre de santé » ne présente aucune des caractéristiques que vous avancez : il ne sera pas ouvert à tous, mais réservé aux athlètes et personnes accréditées ; il n’y aura pas de tiers payant, puisque les actes seront réalisés à titre gratuit et financés par Paris 2024 ; l’exercice salarié n’y est pas promu non plus, puisque, outre l’encadrement salarié de l’AP-HP, les praticiens qui y exerceront seront des volontaires olympiques.
Par ailleurs, je refuse le procès qui est fait à la dénomination de « polyclinique », retenue par la commission des affaires sociales. Il ne s’agit pas de favoriser un modèle privé : nous nous bornons ici à reprendre la terminologie du CIO lui-même et celle qui a été employée dans le contrat de ville hôte.
Cette désignation générique dépasse les formes retenues et les appartenances au public ou au privé selon les pays. Ainsi, une structure équivalente était désignée comme telle aux jeux Olympiques de Londres en 2012. Par ailleurs, différents hôpitaux parisiens peuvent être dénommés « cliniques ».
La commission des affaires sociales a souhaité retenir le terme de « polyclinique » pour préciser, dans la désignation même de la structure, que des dérogations y seraient appliquées et pour souligner qu’elle ne serait pas un centre de santé de droit commun.
Pour ces raisons, je suis défavorable à cet amendement.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L’amendement n° 78, présenté par Mme Poncet Monge, MM. Benarroche, Dossus, Breuiller et Dantec, Mme de Marco, MM. Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon et Mme M. Vogel, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
La charge de ce financement repose entièrement sur le comité d’organisation des jeux Olympiques et Paralympiques 2024.
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Dans le prolongement des inquiétudes de Corinne Féret sur l’état de notre système de santé, sur son effondrement et sur ses larges besoins de financement, cet amendement a pour objet de garantir – j’y insiste – que le financement du centre de santé du village olympique ne repose en aucune manière sur l’AP-HP, mais bien en totalité sur le Comité d’organisation des jeux Olympiques et Paralympiques.
Cet amendement tend à préciser dans le texte, puisqu’on me dira peut-être qu’il est satisfait dans l’esprit, que la charge du financement repose entièrement sur le Cojop.
La commission des affaires sociales a déjà complété cet article en soulignant la nécessaire compensation, par Paris 2024, de l’ensemble des dépenses engagées pour ce centre de santé spécifique et de la prise en charge des athlètes et personnes accréditées qui seraient éventuellement orientées par ce biais au sein de l’AP-HP.
Il n’y a donc pas lieu d’ajouter cette phrase redondante : avis défavorable.
Cet amendement est déjà satisfait en raison de la prise en charge intégrale des dépenses directes par le Cojop à l’euro près et par la mise en place d’un comité de suivi, dont la mission consistera à retracer toutes les dépenses et à en assurer la bonne et pleine prise en charge par l’organisateur.
L’amendement n° 78 est retiré.
L’amendement n° 98, présenté par Mme Lassarade, est ainsi libellé :
Alinéa 12, première phrase
1° Remplacer les mots :
tableaux des sections A et D
par les mots :
sections A et D
2° Remplacer les mots :
inscrits au tableau de la section E
par les mots :
et hospitaliers inscrits à la section E du tableau de l’ordre
3° Remplacer les mots :
au tableau de la section H
par les mots :
à la section H du même tableau
La parole est à Mme la rapporteure pour avis de la commission des affaires sociales.
Cet amendement tend à apporter une précision rédactionnelle relative aux pharmaciens autorisés à exercer dans la pharmacie à usage intérieur (PUI) de la polyclinique olympique et paralympique.
L ’ amendement est adopté.
L ’ article 1 er est adopté.
L’amendement n° 53, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly, Assassi et Cukierman, M. Bacchi, Mme Brulin, M. Ouzoulias et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet au Parlement avant le 1er juin 2024 un rapport sur les besoins en capacités hospitalières durant les jeux Olympiques et Paralympiques de 2024. Ce rapport établit également le nombre de lits d’hospitalisation, les besoins en personnels sur le territoire durant la préparation et le déroulement de cette manifestation.
La parole est à M. Pierre Ouzoulias.
Vous l’avez compris, madame la ministre, la capacité du système de santé de la proche couronne parisienne à faire face à l’afflux de population et nécessairement à l’afflux de demande de soins suscite une forte interrogation.
Il faut que vous nous répondiez maintenant et que vous nous disiez quelle est la programmation de votre ministère pour satisfaire cette demande supplémentaire.
Votre collègue, M. Darmanin, nous a dit de façon extrêmement claire et tout à fait honnête que les agents des forces de police n’auraient pas de vacances en juillet et en août 2024.
Estimez-vous qu’il en sera de même pour les personnels de santé ? Si ces derniers ne peuvent prendre de vacances en juillet et en août prochains, il faut leur dire dès maintenant.
Il s’agit de responsabiliser tout le monde. Et c’est aussi à vous, madame la ministre, de prendre vos responsabilités et de nous dire si les personnels de santé sont en nombre suffisant pour accomplir le service.
Vous le savez, la commission des affaires sociales est plutôt réfractaire aux demandes de rapport.
Surtout, comme je l’avais évoqué en commission, le Gouvernement a déjà missionné l’inspection générale des affaires sociales (Igas) pour rendre un rapport sur les capacités de l’offre de soins francilienne à répondre aux besoins identifiés pour la période des Jeux de Paris 2024.
Une demande de rapport ne me semblant ni opportune ni nécessaire, je suis défavorable à cet amendement.
Les directions du ministère de la santé et de la prévention travaillent depuis de nombreux mois avec l’ensemble des acteurs – les ARS, les établissements et professionnels de santé… – pour anticiper l’arrivée d’un public nombreux.
Dans le cadre de ces travaux, une grande attention est portée à l’adaptation de l’offre hospitalière aux besoins, que ce soit en termes capacitaires, qualitatifs ou de ressources humaines.
J’ajoute que l’ouverture du centre de santé – la « polyclinique » – que vous avez validée en votant l’article 1er vise précisément à faire face à une surcharge d’activité de notre système de santé.
Par conséquent, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
Madame la ministre, vous nous dites que vous anticipez ; nous aurions donc aimé connaître vos conclusions… Or vous semblez renvoyer le soin de définir les besoins à une future mission d’inspection. Où est l’anticipation ?
De son côté, M. Darmanin a anticipé, puisqu’il nous a annoncé que toutes les forces de police seraient mobilisées pour les Jeux, y compris celles qui sont habituellement affectées aux manifestations culturelles qui seront quasiment interdites.
Si vous avez anticipé, madame la ministre, vous devriez pouvoir nous dire aujourd’hui même ce que le Gouvernement prépare en ce qui concerne l’offre de soins durant les Jeux. Nous ne devrions pas avoir à attendre.
Les jeux Olympiques, c’est demain ! Nous avons besoin de réponses aujourd’hui.
Le rapport de l’Igas est en voie de finalisation et il est prévu que, lors la réunion du comité interministériel aux jeux Olympiques et Paralympiques (Cijop) de vendredi prochain, qui se tiendra sous l’autorité de la Première ministre, nous fassions un focus sur les questions de santé et de prévention.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
I. – Les médecins des fédérations internationales de sports accrédités par le Comité international olympique, le Comité international paralympique ou le Comité d’organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024 pour assurer le contrôle des compétitions de ces jeux, qui ne justifient pas des conditions requises pour exercer leur profession en France, sont autorisés à exercer cette profession sur les sites des compétitions, à l’égard des athlètes qui participent à celles-ci.
II. – Les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du code de la santé publique accrédités par le Comité international olympique, le Comité international paralympique ou le Comité d’organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024, qui ne justifient pas des conditions requises pour exercer leur profession en France et qui accompagnent les délégations des fédérations internationales, des organismes du Mouvement olympique ou des comités paralympiques, sont autorisés à exercer leur profession à l’égard des personnels et membres de la délégation qu’ils accompagnent. Cet exercice n’est pas autorisé au sein des établissements et services de santé mentionnés à la sixième partie du même code.
Un arrêté conjoint des ministres chargés de la santé et des sports fixe la liste des organismes mentionnés au premier alinéa du présent II ainsi que la période au cours de laquelle l’autorisation d’exercice est délivrée, qui ne peut aller au-delà du 31 décembre 2024.
III. – Les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du code de la santé publique engagés en qualité de volontaires olympiques et paralympiques qui ne justifient pas des conditions requises pour exercer leur profession en France, sont autorisés à exercer cette profession au sein du centre de santé mentionné à l’article 1er.
IV. – Les professionnels mentionnés aux I, II et III du présent article sont soumis, dans l’exercice de leur profession, aux conditions applicables à cet exercice en France. –
Adopté.
Nous abordons l’examen des articles 17, 4 et 5, ainsi que de l’amendement portant article additionnel après l’article 4, appelés en priorité.
Dans les communes d’implantation des sites de compétition des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 ainsi que dans les communes limitrophes ou situées à proximité de ces sites, le représentant de l’État dans le département peut, compte tenu des besoins du public résultant de l’affluence exceptionnelle attendue de touristes et de travailleurs et sous réserve des dérogations au repos dominical applicables, autoriser un ou plusieurs établissements de vente au détail qui mettent à disposition des biens ou des services à déroger à la règle du repos dominical en attribuant le repos hebdomadaire par roulement, pour une période comprise entre le 1er juin 2024 et le 30 septembre 2024.
Cette autorisation est accordée après avis du conseil municipal, de l’organe délibérant de l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre dont la commune est membre, de la chambre de commerce et d’industrie, de la chambre des métiers et de l’artisanat, des organisations professionnelles d’employeurs et des organisations syndicales de salariés intéressées, donnés dans le délai d’un mois à compter de la saisine du représentant de l’État dans le département.
Les arrêtés préfectoraux pris sur le fondement du premier alinéa de l’article L. 3132-29 du code du travail peuvent, le cas échéant, être suspendus pendant les périodes de mise en œuvre des dérogations prévues au présent article.
La dérogation au repos dominical est mise en œuvre par l’employeur sous réserve du volontariat du salarié, tel que prévu au premier alinéa de l’article L. 3132-25-4 du même code et dans le respect du dernier alinéa du même article L. 3132-25-4. Le salarié peut revenir à tout moment sur sa décision de travailler le dimanche à condition d’en informer par écrit son employeur en respectant un délai de dix jours francs. Le salarié bénéficie des contreparties définies au premier alinéa de l’article L. 3132-27 dudit code.
L’amendement n° 56, présenté par Mmes Apourceau-Poly, Cohen, Assassi et Cukierman, M. Bacchi, Mme Brulin, M. Ouzoulias et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Jérémy Bacchi.
L’article 17 du projet de loi prévoit que, dans les communes d’implantation des sites de compétition des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024, ainsi que dans les communes limitrophes ou situées à proximité de ces sites, le préfet peut, compte tenu des besoins du public résultant de l’affluence exceptionnelle attendue de touristes et de travailleurs, autoriser un ou plusieurs établissements de vente au détail à déroger à la règle du repos dominical.
Selon l’Insee, 19 % des salariés ont travaillé en 2019 au moins un dimanche sur une période de quatre semaines. Depuis la loi de 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, dite loi Macron, l’extension du travail dominical est devenue une réalité partagée par près d’un salarié sur cinq.
Les conséquences du travail le dimanche sur la santé, la sociabilité, la famille, les relations amicales et les loisirs sont pourtant connues. Les compensations financières et en jours de repos ne suffisent pas aux travailleurs pour récupérer.
Par conséquent, nous refusons toute nouvelle dérogation au repos dominical, laquelle entraînerait nécessairement une dégradation de l’état de santé des travailleuses et des travailleurs, déjà profondément affectés.
La commission a considéré que la dérogation au repos dominical prévue à l’article 17 était justifiée par les besoins des visiteurs et des travailleurs présents pendant les Jeux et suffisamment encadrée dans le temps et dans l’espace. En outre, des garanties sont apportées aux salariés concernés.
Nous sommes donc défavorables à la suppression de cet article.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 58, présenté par Mmes Apourceau-Poly, Cohen, Assassi et Cukierman, M. Bacchi, Mme Brulin, M. Ouzoulias et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Supprimer les mots :
ainsi que dans les communes limitrophes ou situées à proximité de ces sites
La parole est à M. Jérémy Bacchi.
Cet amendement de repli vise à supprimer la possibilité de travailler le dimanche en dehors des sites de compétition des épreuves des jeux Olympiques 2024.
L’étude d’impact du projet de loi évoque une option : la création d’une dérogation préfectorale collective spécifique sans préciser les territoires concernés, à savoir les communes d’implantation de sites olympiques et les communes limitrophes. Cette option n’a pas été retenue, car tous les départements ne sont pas concernés par les épreuves olympiques et paralympiques.
La loi Macron de 2015 permet déjà de déroger au repos dominical dans les zones commerciales, dans les zones touristiques, dans les zones touristiques internationales et dans les gares.
En outre, les maires ont la possibilité de fixer une liste de douze dimanches par an permettant aux commerces de détail de déroger au repos dominical – on les appelle communément « les dimanches du maire ».
L’extension législative de la dérogation au repos dominical, même limitée dans le temps, est un nouveau pas vers une remise en cause ultérieure de ce droit. Tous les reculs sociaux se sont opérés de la sorte.
Dans ces conditions, nous demandons à limiter strictement l’ouverture du travail le dimanche aux seules communes d’implantation des sites de compétition.
L’amendement n° 57, présenté par Mmes Apourceau-Poly, Cohen, Assassi et Cukierman, M. Bacchi, Mme Brulin, M. Ouzoulias et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Supprimer les mots :
ou situées à proximité
La parole est à M. Jérémy Bacchi.
L’étendue géographique de la dérogation au repos dominical pour certains commerces prévue par l’article 17 me semble adaptée : selon les territoires, l’affluence du public pourra se trouver dans la commune d’implantation des sites de compétition, mais aussi dans des communes limitrophes ou situées à proximité en raison des infrastructures de transports, des capacités hôtelières ou encore des sites touristiques qui s’y trouvent.
Laissons la possibilité aux préfets d’autoriser certains commerces à ouvrir le dimanche dans les communes limitrophes ou situées à proximité des lieux de compétition pour s’adapter au mieux aux besoins des visiteurs.
La commission est défavorable à cet amendement.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 96 rectifié, présenté par Mmes de La Gontrie, Féret et S. Robert, MM. Durain, Lozach, Kanner et Bourgi, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie, Sueur, Assouline, Antiste, Chantrel et Magner, Mme Monier, M. Stanzione, Mmes Van Heghe et Conconne, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Lubin, Meunier, Poumirol et Rossignol, M. Devinaz et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéas 1 et 2
Remplacer les mots :
représentant de l’État dans le département
par le mot :
maire
La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie.
Nous souhaitons que l’autorité qui a compétence pour décider de l’ouverture le dimanche de certains commerces soit le ou la maire, et non le représentant de l’État dans le département.
Paris, compte déjà dix zones touristiques internationales dans lesquelles l’ouverture des commerces est possible le dimanche. Par ailleurs, un maire peut autoriser l’ouverture des commerces douze dimanches – au plus – par an.
Pourquoi les autres ouvertures dominicales devraient-elles être autorisées par l’État ? Ce serait tout de même curieux. Nous pensons qu’il faut articuler finement l’ensemble de ces ouvertures dominicales, raison pour laquelle nous proposons de confier cette compétence au maire et non au représentant de l’État.
L’amendement n° 79, présenté par Mme Poncet Monge, MM. Benarroche, Dossus, Breuiller et Dantec, Mme de Marco, MM. Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon et Mme M. Vogel, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 1
Remplacer les mots :
ou plusieurs établissements de vente au détail qui mettent
par les mots :
établissement de vente au détail qui met
II. – Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
Lorsque le préfet a autorisé un établissement à déroger au repos dominical dans les conditions fixées par le présent article, tout ou partie des établissements de la même commune exerçant la même activité peut également y déroger dans les mêmes conditions, si le préfet le décide par voie d’arrêté. Cette extension est autorisée selon les modalités fixées au deuxième alinéa.
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Sur l’initiative de sa rapporteure pour avis, la commission a voulu simplifier la procédure d’autorisation d’ouverture des commerces le dimanche, en permettant au préfet d’autoriser d’emblée plusieurs établissements à déroger à cette règle. Ainsi, des autorisations collectives pourraient être délivrées pour plusieurs établissements afin, prétendument, de répondre aux besoins du public. Nous voulons nous opposer à cette « simplification ».
Je rappelle que cette mesure concernerait non seulement les communes où se déroulerait une manifestation sportive, mais aussi les communes limitrophes et même, comme si cela ne suffisait pas, celles qui se situent « à proximité ». Ce sera bientôt toute la France !
Assouplir encore plus une proposition déjà très laxiste d’extension des dérogations au travail dominical, comme semble le vouloir la commission, n’est pas acceptable.
La proposition du Gouvernement est déjà mal cadrée dans le temps – nous y reviendrons – et dans l’espace. Il faudrait en plus que le préfet puisse accorder des autorisations collectives et non individuelles ! Où tout cela va-t-il s’arrêter ?
L’amendement n° 96 rectifié tend à confier au maire, plutôt qu’au préfet, la compétence d’autoriser les dérogations au repos dominical pour les commerces pendant les Jeux.
Nous y sommes défavorables, puisque plusieurs communes étant susceptibles d’être concernées pour un ensemble d’établissements qui répondent aux besoins d’un même public, il apparaît plus pertinent de maintenir la compétence du préfet pour délivrer les autorisations.
Je rappelle que la dérogation proposée ne se substituera pas aux dérogations existantes, dont les dimanches dits « du maire ».
Je précise aussi que j’ai sollicité l’Association des maires de France (AMF) pour connaître son avis sur la dérogation proposée. Elle n’a pas manifesté son souhait de confier cette compétence au maire.
En ce qui concerne l’amendement n° 79 de Mme Poncet Monge, la commission a cherché à simplifier la procédure d’autorisation préfectorale afin que le préfet puisse d’emblée autoriser un ou plusieurs établissements à déroger au repos dominical, au lieu de procéder par autorisation individuelle. Nous avons ainsi voulu répondre aux difficultés que les petits commerçants rencontrent dans ce type de démarche.
Cette simplification me semble bienvenue : de nombreuses demandes seront à traiter, les besoins du public sont déjà largement prévisibles et la dérogation est bien encadrée. Il n’est pas souhaitable de revenir sur cette simplification.
La commission est donc également défavorable à l’amendement n° 79.
Le Gouvernement est défavorable à l’amendement n° 96 rectifié pour les mêmes raisons que celles avancées par Mme la rapporteure pour avis.
En ce qui concerne l’amendement n° 79 de Mme Poncet Monge, le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat.
Nous comprenons la démarche de simplification adoptée par la commission. Toutefois, nous estimons que la mise en œuvre d’un mécanisme en deux temps – une décision individuelle pouvant ensuite être étendue – se justifie également.
Nous sommes à l’aise avec ces deux dispositifs. Néanmoins, le mécanisme en deux temps permet aussi au préfet, par la consultation des autorités locales, de s’assurer de l’existence des besoins.
Je veux d’abord regretter que l’amendement communiste de suppression de cet article n’ait pas été adopté.
Nous savons tous, en particulier en tant qu’élus ou anciens élus municipaux ou intercommunaux, que ce soit en zone touristique ou non, que les débats sur l’ouverture des commerces le dimanche sont souvent très clivants.
La conviction d’un certain nombre d’entre nous est que nos sociétés ont besoin d’un temps collectif de mise à distance des actes de consommation, qui peut être le dimanche. Nous devons veiller à permettre aux familles et aux amis de se retrouver à un moment donné.
On nous parle beaucoup de l’avis des commerçants, la rapporteure pour avis évoque celui de l’AMF, mais on nous parle peu de celui des travailleurs. Or l’ensemble des enquêtes d’opinion réalisées lorsque ce sujet faisait l’actualité, parfois de manière houleuse, comme en 2008, a montré que peu de gens croyaient au caractère volontaire du travail du dimanche. En outre, moins d’un quart des travailleurs interrogés se disaient intéressés par le fait de travailler le dimanche.
Je voterai l’ensemble des amendements tendant à restreindre d’une manière ou d’une autre la proposition initiale de dérogation, car je suis convaincu que les touristes et équipes sportives qui assisteront ou participeront aux jeux Olympiques viendront aussi pour comprendre la façon dont nous vivons en France.
Or le mode de vie français, c’est prendre le temps ! Et je ne vois pas l’urgence ou l’impérieuse nécessité d’ouvrir les commerces de détail le dimanche pendant les jeux Olympiques. Les joueurs de l’équipe de badminton de je ne sais quel pays n’auront aucunement besoin que les commerces soient ouverts le dimanche !
Applaudissements sur les travées du groupe SER. – M. Guy Benarroche applaudit également.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
Je suis saisie de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 80, présenté par Mme Poncet Monge, MM. Benarroche, Dossus, Breuiller et Dantec, Mme de Marco, MM. Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon et Mme M. Vogel, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Remplacer les mots :
pour une période comprise entre le 1er juin 2024 et le 30 septembre 2024
par les mots :
pour les périodes comprises entre le 25 juillet 2024 et le 12 août 2024, puis entre le 27 août 2024 et le 9 septembre 2024
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Il nous a été dit que la nouvelle dérogation au principe du repos dominical inscrit dans le code du travail était encadrée dans le temps.
Nous le savons, les deux compétitions dont nous parlons ne dureront au total que l’équivalent de quatre semaines, dont trois week-ends.
Pourtant, dans cette fuite en avant vers toujours plus de consommation et sous prétexte des jeux Olympiques, on nous propose de déroger pendant quatre mois au repos dominical, du 1er juin au 30 septembre, soit un tiers de l’année !
Cette période correspond aussi – cela n’aura échappé à personne – à l’été. La mesure dont nous débattons aura donc nécessairement un très fort impact sur les congés annuels de ceux qui travaillent dans les commerces concernés, même si les plannings sont organisés par roulement.
Chacun sait bien que le volontariat souvent mis en avant est à relativiser dans ce genre de circonstances ; ce sera pire sur une telle période, puisqu’un employeur peut refuser la demande de congés annuels posée par ses salariés – c’est l’une de ses prérogatives !
Ouvrir la possibilité de déroger au repos dominical sur dix-sept week-ends, alors même que les compétitions n’en couvrent que trois, soit un rapport de un à cinq, n’est pas sérieux.
Nous proposons de revenir à plus de sagesse et de ne pas déréguler complètement le code du travail.
L’amendement n° 92 rectifié, présenté par Mmes Féret et de La Gontrie, MM. Durain, Assouline et Lozach, Mmes S. Robert et Lubin, M. Kanner, Mme Conconne, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Antiste, Chantrel et Magner, Mme Monier, M. Stanzione, Mme Van Heghe, M. Bourgi, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie, Sueur, Devinaz et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Remplacer les mots :
1er juin 2024 et le 30 septembre
par les mots :
26 juillet 2024 et le 10 septembre
La parole est à Mme Corinne Féret.
Cet amendement vise à limiter la durée des dérogations possibles au travail le dimanche à la seule durée des jeux Olympiques et Paralympiques.
Cette nouvelle dérogation s’ajoute à celles qui existent déjà au titre des zones touristiques internationales, pour Paris au moins, des zones touristiques et des dimanches dits des maires. Du fait de ce dernier dispositif dérogatoire, la période des soldes d’été 2024, donc le mois de juillet, est déjà ouverte au travail le dimanche.
En outre, si l’on retient la durée initialement prévue dans le projet de loi, ce sont potentiellement trente dimanches sur cinquante-deux qui pourront donner lieu en 2024 à dérogation !
C’est pourquoi nous entendons circonscrire ce dispositif. L’objectif premier est en effet de répondre à l’afflux touristique le temps des Jeux, en excluant la période des soldes, qui est déjà couverte par une autre dérogation, mais en allant tout de même jusqu’au week-end suivant la fin des Jeux pour tenir compte des séjours touristiques à la semaine.
L’amendement n° 81, présenté par Mme Poncet Monge, MM. Benarroche, Dossus, Breuiller et Dantec, Mme de Marco, MM. Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon et Mme M. Vogel, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Remplacer le nombre :
par le nombre :
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Avec cet amendement de repli, nous demandons – c’est vraiment fort peu ! – que la période concernée par la nouvelle dérogation s’arrête le 20 septembre. Il n’y a aucune raison de la prolonger excessivement au-delà de la fin des épreuves.
Les touristes ne viendront pas en France sur une période de quatre mois du fait des jeux Olympiques et Paralympiques. Il est temps de revenir à quelque chose de plus raisonnable et de limiter vraiment ces dérogations dans le temps et dans l’espace.
Enfin, nous devons prendre conscience que la planète fait face à des limites – elle nous le rappelle régulièrement ! –, qui sont régulièrement dépassées, et que consommer toujours plus n’est pas compatible avec celles-ci. C’est évidemment un sujet très important pour les écologistes.
Je veux d’abord rappeler que la période prévue, du 1er juin au 30 septembre, est une durée maximale.
Ensuite, la dérogation sera mise en œuvre sous réserve du volontariat du salarié. De même, les commerces ne seront évidemment pas obligés d’ouvrir. Nous offrons une possibilité sur une certaine période.
De nombreux visiteurs, touristes et travailleurs sont attendus avant, pendant et après les Jeux. Pour ces touristes français et étrangers qui vont venir visiter le pays et pour les travailleurs mobilisés en amont et en aval pour l’organisation des Jeux, il me paraît raisonnable de maintenir cette possibilité.
L’avis est donc défavorable sur les amendements n° 80, 92 rectifié et 81.
Madame la rapporteure pour avis, encore heureux que les commerces ne seront pas obligés d’ouvrir le dimanche et les salariés de travailler ! Dans quel monde vivrions-nous si nous en arrivions là !
Par ailleurs, on ne peut prôner la sobriété, comme nous le faisons régulièrement sur l’ensemble de nos travées, et expliquer qu’il faut garder les magasins ouverts tous les jours.
Je crois qu’on peut raisonnablement discuter de la nécessité d’ouvrir les commerces le dimanche durant les Jeux – après tout, pourquoi pas ? –, mais le Gouvernement et la commission proposent de les ouvrir cinq fois plus longtemps ! Il faudrait vraiment que vous nous expliquiez pourquoi vous avez fait ce choix.
La seule motivation qui me vient à l’esprit, c’est que vous voulez pousser à la consommation, ce qui va complètement à l’encontre des positions que nous prenons ici collectivement, lorsque nous examinons nombre de projets ou de propositions de loi.
Je veux également revenir sur les arguments avancés par Mme la rapporteure pour avis : heureusement que la loi n’oblige pas à travailler chaque dimanche pendant ces quatre mois de l’été 2024 sous prétexte d’un événement sportif, fût-il mondial !
La France a un code du travail, il faut en respecter les règles et notamment recueillir l’accord des salariés.
Une dérogation de quatre mois est excessive par rapport à la durée des Jeux. Voilà pourquoi nous souhaitons fixer une période plus courte, en lien avec la longueur effective des compétitions.
Enfin, je rappelle qu’il existe déjà plusieurs dérogations s’appuyant sur différents critères. Les commerces peuvent tout à fait ouvrir le dimanche dans ce cadre.
Madame la ministre, je vous le dis avec beaucoup de bienveillance : nous sommes ensemble pour deux jours, nous sommes tous partisans des jeux Olympiques, mais vous devez nous aider à clarifier la position du Gouvernement.
Vous ne pouvez pas vous contenter de dire « même avis que la commission » ; vous devez nous donner des arguments ! Ce que nous examinons, c’est d’abord le projet du Gouvernement et nous avons besoin de dialoguer avec vous. Vous devez nous dire où vous en êtes exactement dans la préparation des jeux Olympiques.
Le Sénat n’est pas une chambre d’enregistrement : il débat, en s’appuyant sur des arguments.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 71, présenté par MM. Benarroche, Dossus, Breuiller et Dantec, Mme de Marco, MM. Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Après les mots :
après avis
insérer le mot :
favorable
La parole est à M. Guy Benarroche.
Nous avons pris acte du fait que, au nom des valeurs sportives et olympiques, les magasins devaient rester ouverts les dimanches pendant quatre mois sur un périmètre étendu.
Pour autant, nous devons éviter que les grosses multinationales, c’est-à-dire l’étendard de la société de consommation, ne profitent de cette situation. Ne nous leurrons pas : ce sont bien elles et leurs multiples établissements, et pas les petits commerçants, qui en tireront le plus de profits.
L’ouverture des commerces le dimanche ne peut que jouer en faveur des multinationales qui ne pensent qu’à encaisser un maximum de chiffre d’affaires durant la période des Jeux et à réaliser d’importants bénéfices – c’est leur logique et cela peut se concevoir de leur point de vue.
Nous devons éviter ces abus de consommation et protéger les intérêts des salariés et des petits commerçants qui, eux, ne pourront ouvrir tout le temps.
Dans cet esprit, cet amendement a pour objet d’encadrer les autorisations de dérogation au repos dominical, en les conditionnant à un avis favorable, et pas seulement à un avis simple, comme il est prévu à ce stade dans le texte, de l’établissement public de coopération intercommunale (EPCI) dont la commune concernée est membre, de la chambre de commerce et d’industrie, de la chambre de métiers et de l’artisanat et des organisations professionnelles patronales et syndicales intéressées.
Nous pensons qu’il est normal que toutes les parties directement concernées par une telle mesure donnent explicitement leur accord à son application.
L’amendement n° 95 rectifié, présenté par Mmes de La Gontrie, Féret et S. Robert, MM. Durain, Lozach, Kanner et Bourgi, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie, Sueur, Assouline, Antiste, Chantrel et Magner, Mme Monier, M. Stanzione, Mmes Van Heghe et Conconne, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Lubin, Meunier, Poumirol et Rossignol, M. Devinaz et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 2
1° Supprimer les mots :
du conseil municipal,
2° Après le mot :
intéressées
insérer les mots :
et après avis conforme du conseil municipal
La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie.
J’ai entendu la rapporteure pour avis faire l’éloge des élus locaux. Je l’encourage par conséquent à soutenir cet amendement qui vise à transformer l’avis simple du conseil municipal en un avis conforme.
L’amendement n° 71 tend à imposer un avis favorable de la commune, de l’EPCI, des chambres consulaires ainsi que des organisations patronales et syndicales pour que le préfet puisse autoriser un commerce à déroger au repos dominical.
Dans la même logique, l’amendement n° 95 rectifié vise à imposer un avis conforme du conseil municipal et de lui seul.
Demander des avis conformes avant la décision du préfet risque de bloquer toute procédure d’autorisation. Les sites de compétition étant implantés sur plusieurs communes, il est pertinent de donner compétence au préfet. Celui-ci tiendra compte des besoins du public sur le territoire, en consultant les maires.
Ce dispositif nous semble suffisamment encadré, tout en restant opérationnel : la commission est défavorable à ces deux amendements.
Le Gouvernement est également défavorable à ces deux amendements.
Le préfet appréciera naturellement les situations locales et prendra en compte la volonté des élus, les besoins du public et l’afflux prévisible de touristes et de travailleurs.
La formulation utilisée dans cet article en ce qui concerne les consultations opérées par le préfet est la même que celle du code du travail à propos des dérogations au repos dominical. Elle permet selon nous de concilier besoin de souplesse et nécessité de la concertation. Exiger un avis favorable serait au contraire de nature à entraver ou à pénaliser ces concertations.
Madame la ministre, le préfet n’est pas le représentant des élus, il est celui du ministre de l’intérieur.
Il est évidemment positif que les élus discutent avec le préfet et donnent leur avis, mais c’est encore mieux s’ils peuvent décider eux-mêmes pour leur commune.
Or, dans votre schéma, le préfet va peut-être écouter les avis des élus, mais il décidera de toute façon en fonction des instructions du ministre de l’intérieur !
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L’amendement n° 94 rectifié, présenté par Mmes Féret et de La Gontrie, MM. Durain, Assouline et Lozach, Mmes S. Robert et Lubin, M. Kanner, Mme Conconne, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Antiste, Chantrel et Magner, Mme Monier, M. Stanzione, Mme Van Heghe, M. Bourgi, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie, Sueur, Devinaz et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Elle intervient au moins deux mois avant le premier dimanche concerné.
La parole est à Mme Corinne Féret.
Afin que les travailleurs mobilisés le dimanche pour la période des jeux puissent s’organiser et concilier vie professionnelle et vie familiale, il convient, comme pour les dates modificatives des dimanches dits du maire, que l’autorisation intervienne au moins deux mois avant le premier dimanche susceptible d’être travaillé.
Cela est d’autant plus important que cette nouvelle dérogation au repos dominical interviendra durant la période des congés d’été.
Madame la présidente, je vous propose de présenter également l’amendement n° 93 rectifié.
J’appelle donc en discussion l’amendement n° 93 rectifié, présenté par Mmes Féret et de La Gontrie, MM. Durain, Assouline et Lozach, Mmes S. Robert et Lubin, M. Kanner, Mme Conconne, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Antiste, Chantrel et Magner, Mme Monier, M. Stanzione, Mme Van Heghe, M. Bourgi, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie, Sueur, Devinaz et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain et ainsi libellé :
Alinéa 3
Remplacer les mots :
peuvent, le cas échéant, être suspendus
par les mots :
ont un effet suspensif immédiat
Veuillez poursuivre, ma chère collègue.
La procédure de suspension de la dérogation au travail du dimanche sur l’initiative des salariés et de leurs représentants doit être d’effet immédiat pour pouvoir tout simplement s’appliquer dans la période concernée.
Certaines professions se sont organisées par le dialogue social et sur un territoire donné pour choisir un jour de repos hebdomadaire commun. La dérogation au repos dominical liée aux Jeux n’a pas vocation à surseoir à ces organisations particulières définies au sein d’une profession par accord syndical. Ces dernières doivent l’emporter sur le nouveau dispositif dérogatoire.
Fixer dans la loi un délai minimal de deux mois entre l’autorisation préfectorale et l’application de la dérogation au repos dominical ne me semble pas nécessaire.
Il est préférable que le Gouvernement précise par instruction, en lien avec les services des préfectures, les délais d’examen des demandes et la manière de les anticiper au mieux pour les employeurs et les salariés.
Il pourra aussi être utile que le préfet puisse adapter les autorisations de dérogation en cas d’évolution des besoins du public, si la situation le nécessite. Il n’est pas souhaitable que la loi fixe tous les détails de la procédure.
La commission est donc défavorable à l’amendement n° 94 rectifié.
Par ailleurs, si nous prévoyons, comme le souhaitent les auteurs de l’amendement n° 93 rectifié, de faire primer les arrêtés préfectoraux de fermeture hebdomadaire sur les dérogations au repos dominical possibles pendant les jeux Olympiques, nous risquons alors de rendre le dispositif inopérant.
Le préfet doit pouvoir suspendre à titre temporaire les arrêtés de fermeture hebdomadaire applicables dans certaines professions s’ils rendent impossible l’ouverture dominicale des commerces concernés. C’est ce que permet cette disposition de l’article 17, pour une meilleure articulation du dispositif, qu’il nous semble essentiel de maintenir.
La commission est donc également défavorable à l’amendement n° 93 rectifié.
Si l’autorisation est accordée trop tôt, le processus envisagé ne permettra pas d’apprécier au mieux les besoins locaux, avec l’avis de toutes les parties prenantes. Nous ne voulons pas contraindre à l’excès ce travail d’instruction et de concertation mené par les préfets.
Pour ces raisons, le Gouvernement est défavorable à l’amendement n° 94 rectifié.
S’agissant de l’amendement n° 93 rectifié, je rappelle que le but de la disposition qu’il tend à modifier est de permettre des dérogations ponctuelles au repos dominical de manière très encadrée, en respectant le principe du volontariat.
Le préfet doit être en mesure de suspendre les arrêtés de fermeture qu’il peut prononcer par ailleurs en application du code du travail, au cas par cas, selon les secteurs géographiques concernés, et avec toute la marge d’appréciation nécessaire pour tenir compte de la volonté exprimée par les organisations d’employeurs et de salariés.
Le Gouvernement est donc également défavorable à l’amendement n° 93 rectifié.
C’est le père Didon, un grand ami de Coubertin, qui en avait fait la devise du collège Albert-le-Grand, lequel proposait une éducation tout à fait moderne à l’époque.
Je regrette que, à la faveur de ce texte, nous inventions la devise durius aliquantum, un peu plus dur – et plus longtemps – pour les salariés… Cela n’était sans doute pas dans l’esprit du père Didon.
Applaudissements sur les travées du groupe GEST et sur plusieurs travées du groupe SER.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L ’ article 17 est adopté.
I A
« Art. L. 232 -12 -2. – Le laboratoire auquel il a été fait appel en application de l’article L. 232-18 peut procéder, dans l’hypothèse où les autres techniques disponibles ne permettent pas la détection des méthodes interdites visées et conformément aux normes internationales en matière de lutte contre le dopage, à la comparaison d’empreintes génétiques aux seules fins de mettre en évidence une administration de sang autologue, homologue ou hétérologue, ou une substitution d’échantillons prélevés.
« Préalablement au prélèvement, la personne contrôlée est expressément informée de la possibilité que les échantillons prélevés fassent l’objet d’une comparaison d’empreintes génétiques pour les finalités prévues au premier alinéa du présent article.
« Les analyses sont réalisées à partir de segments d’acide désoxyribonucléique non codants dans des conditions et selon les modalités précisées par décret en Conseil d’État pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés. »
B. – Au dernier alinéa de l’article L. 232-16 du code du sport, après la référence : « L. 232-12 », est insérée la référence : « L. 232-12-2 ».
C. – Après le 4° de l’article 16-11 du code civil, il est inséré un 5° ainsi rédigé :
« 5° À des fins de lutte contre le dopage, dans les conditions prévues à l’article L. 232-12-2 du code du sport. »
I. – A. – À titre expérimental et jusqu’au 30 juin 2025, le laboratoire accrédité par l’Agence mondiale antidopage en France peut procéder, par dérogation à l’article 16-10 du code civil, et aux seules fins de mettre en évidence la présence et l’usage d’une substance ou d’une méthode interdite en vertu de l’article L. 232-9 du code du sport, à partir de prélèvements sanguins ou urinaires qui lui sont transmis et dans l’hypothèse où les autres techniques disponibles ne permettent pas leur détection, à l’examen de caractéristiques génétiques pour la recherche des cas suivants :
1° et 2°
Supprimés
3° Une mutation génétique dans un gène impliqué dans la performance induisant une production endogène d’une substance interdite en vertu du même article L. 232-9 ;
4° Une manipulation génétique pouvant modifier les caractéristiques somatiques aux fins d’augmentation de la performance.
Les analyses sont effectuées sur des échantillons pseudonymisés et portent sur les seules parties du génome pertinentes au regard de la recherche des cas mentionnés aux 3° et 4° du présent A. Elles ne peuvent conduire à donner d’autres informations que celles recherchées, ni permettre d’avoir une connaissance de l’ensemble des caractéristiques génétiques de la personne. Les données analysées ne peuvent servir à l’identification ou au profilage des sportifs ni à la sélection de sportifs à partir d’une caractéristique génétique donnée.
B. – Préalablement au prélèvement, la personne contrôlée est expressément informée de la possibilité que les échantillons prélevés fassent l’objet d’un examen de caractéristiques génétiques pour les finalités prévues au A du présent I.
C. – En cas de découverte incidente de caractéristiques génétiques pouvant être responsables d’une affection justifiant des mesures de prévention ou de soins pour lui-même ou au bénéfice de membres de sa famille potentiellement concernés, et sauf s’il s’y est préalablement opposé, le sportif est informé de l’existence d’une telle découverte et invité à se rendre à une consultation chez un médecin qualifié en génétique pour une prise en charge réalisée dans les conditions fixées au chapitre Ier du titre III du livre Ier de la première partie du code de la santé publique.
D. – Les analyses prévues au A du présent I sont réalisées dans des conditions et selon les modalités précisées par décret en Conseil d’État pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés.
Le traitement des données issues de ces analyses est strictement limité aux données nécessaires à la poursuite des finalités prévues au même A.
Les données génétiques analysées sont détruites sans délai lorsqu’elles ne révèlent la présence d’aucune substance ou l’utilisation d’aucune méthode interdite ou au terme des poursuites disciplinaires ou pénales engagées, lorsqu’elles révèlent la présence d’une substance ou l’utilisation d’une méthode interdite.
E
Le Gouvernement remet au Parlement, au plus tard six mois avant le terme de l’expérimentation, un rapport d’évaluation. Ce rapport d’évaluation est également transmis au Comité consultatif national d’éthique pour les sciences de la vie et de la santé et à la Commission nationale de l’informatique et des libertés.
II à V. –
Supprimés
L’amendement n° 100, présenté par Mme Canayer, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
I. – Le code du sport est ainsi modifié :
1° Après l’article L. 232-12-1, il est inséré un article L. 232-12-2 ainsi rédigé :
« Art. L. 232 -12 -2. – I. – Aux seules fins de mettre en évidence la présence et l’usage d’une substance ou d’une méthode interdite en vertu de l’article L. 232-9, le laboratoire accrédité par l’Agence mondiale antidopage en France peut procéder, à partir de prélèvements sanguins ou urinaires qui lui sont transmis et dans l’hypothèse où les autres techniques disponibles ne permettent pas leur détection, à la comparaison d’empreintes génétiques et à l’examen de caractéristiques génétiques pour la recherche des cas suivants :
« 1° Une administration de sang homologue ;
« 2° Une substitution d’échantillons prélevés ;
« 3° Une mutation génétique dans un gène impliqué dans la performance induisant une production endogène d’une substance interdite en vertu du même article L. 232-9 ;
« 4° Une manipulation génétique pouvant modifier les caractéristiques somatiques aux fins d’augmentation de la performance.
« II. – La personne contrôlée est expressément informée, préalablement au prélèvement :
« 1° De la possibilité que les échantillons prélevés fassent l’objet des analyses prévues au I du présent article en précisant la nature de celles-ci et leurs finalités ;
« 2° De l’éventualité d’une découverte incidente de caractéristiques génétiques pouvant être responsables d’une affection justifiant des mesures de prévention ou de soins pour elle-même ou au bénéfice de membres de sa famille potentiellement concernés et de ses conséquences, selon les modalités mentionnées aux 3° et 4° du I de l’article 16-10 du code civil.
« III. – Les analyses prévues au I du présent article sont effectuées sur des échantillons pseudonymisés et portent sur les seules parties du génome pertinentes. Les données analysées ne peuvent servir à l’identification ou au profilage des sportifs ni à la sélection de sportifs à partir d’une caractéristique génétique donnée.
« Les analyses réalisées pour les finalités mentionnées aux 1° et 2° du même I sont réalisées à partir de segments d’acide désoxyribonucléique non codants.
« Les analyses réalisées pour les finalités mentionnées 3° et 4° dudit I ne peuvent conduire à donner d’autres informations que celles recherchées ni permettre d’avoir une connaissance de l’ensemble des caractéristiques génétiques de la personne.
« Les données génétiques analysées sont détruites sans délai lorsqu’elles ne révèlent la présence d’aucune substance ou l’utilisation d’aucune méthode interdite ou au terme des poursuites disciplinaires ou pénales engagées, lorsqu’elles révèlent la présence d’une substance ou l’utilisation d’une méthode interdite.
« IV. – Les analyses sont réalisées dans des conditions et selon les modalités précisées par décret en Conseil d’État pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés. Le traitement des données issues de ces analyses est strictement limité aux données nécessaires à la poursuite des finalités prévues au même I.
« V. – En cas de découverte incidente de caractéristiques génétiques pouvant être responsables d’une affection justifiant des mesures de prévention ou de soins pour elle-même ou au bénéfice de membres de sa famille potentiellement concernés, et sauf si elle s’y est préalablement opposée, la personne contrôlée est informée de l’existence d’une telle découverte et invitée à se rendre à une consultation chez un médecin qualifié en génétique pour une prise en charge réalisée dans les conditions fixées au chapitre Ier du titre III du livre Ier de la première partie du code de la santé publique. » ;
2° Au dernier alinéa de l’article L. 232-16, après la référence : « L. 232-12 », est insérée la référence : « L. 232-12-2 ».
II. – Le code civil est ainsi modifié :
1° Après le III de l’article 16-10, il est inséré un III … ainsi rédigé :
« III … – Par dérogation au I, l’examen des caractéristiques génétiques constitutionnelles d’une personne peut également être entrepris à des fins de lutte contre le dopage, dans les conditions prévues à l’article L. 232-12-2 du code du sport. » ;
2° Après le 4° de l’article 16-11, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« …° À des fins de lutte contre le dopage, dans les conditions prévues à l’article L. 232-12-2 du code du sport. »
III. – À l’article 226-25 du code pénal, après la première occurrence du mot : « scientifique, », sont insérés les mots : « ou de lutte contre le dopage, » et après le mot : « civil, », sont insérés les mots : « ou, à des fins de lutte contre le dopage, en dehors des conditions prévues à l’article L. 232-12-2 du code du sport, ».
IV. – Au plus tard le 31 décembre 2024, le Gouvernement remet au Parlement un rapport d’évaluation sur la mise en œuvre des dispositions du présent article. Ce rapport d’évaluation est également transmis au Comité consultatif national d’éthique pour les sciences de la vie et de la santé et à la Commission nationale de l’informatique et des libertés.
La parole est à Mme le rapporteur.
Cet amendement vise à réécrire pour la seconde fois l’article 4, relatif à la lutte contre le dopage et à l’introduction des tests génétiques.
En commission des lois, nous avions souhaité pérenniser la possibilité de réaliser une partie de ces tests pour mettre le droit français en conformité avec le code mondial antidopage, notamment sur les deux premières finalités : la lutte contre les substitutions d’échantillons et l’administration de sang homologue dans les échantillons prélevés sur les athlètes. Enfin, nous en resterions au stade de l’expérimentation pour les deux dernières finalités.
À l’issue de nos travaux, nous avons poursuivi nos discussions avec l’AFLD, le Gouvernement et l’instance de contrôle internationale (ITA), et nous nous sommes rendu compte que cette solution n’était pas très opérante. Aussi, avec cet amendement n° 100, nous vous proposons de réécrire cet article pour pérenniser l’autorisation de l’ensemble des tests génétiques dans le cadre de la lutte antidopage.
Il s’agit de doter la France des mêmes outils que les autres pays et de faire en sorte que nos sportifs soient soumis sur le territoire français aux mêmes règles que les autres, dans un souci d’équité et de préservation de leur santé.
Le sous-amendement n° 104, présenté par MM. Durain et Lozach, Mme Féret, M. Kanner, Mmes de La Gontrie, S. Robert et Lubin, M. Bourgi, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie, Antiste, Assouline, Chantrel et Magner, Mme Monier, M. Stanzione, Mmes Van Heghe et Conconne, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, M. Devinaz et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Amendement n° 100
I. - Alinéa 4
Après les mots :
d’empreintes génétiques et
insérer les mots :
, à titre expérimental jusqu’au 30 septembre 2024,
II. - Dernier alinéa, première phrase
Remplacer les mots :
Au plus tard le 31 décembre
par les mots :
Après le 30 septembre
La parole est à Mme Laurence Harribey.
Avec cet amendement, la commission des lois change un peu de pied au dernier moment, si vous me permettez l’expression. La succession des différentes rédactions, que vient d’expliquer Mme le rapporteur, illustre bien les ambiguïtés du texte.
Le projet de loi avait initialement prévu une expérimentation générale en matière de tests génétiques. La commission des lois avait opéré un premier distinguo entre les tests visant à réaliser une comparaison d’empreintes génétiques, qu’elle pérennise, et ceux qui permettent d’analyser une ou plusieurs caractéristiques génétiques. Il s’agissait déjà d’une première entaille au principe de l’expérimentation posé initialement.
S’agissant des échantillons prélevés en vue de l’examen des caractéristiques génétiques, la commission des lois avait tout de même retenu la voie prudente de l’expérimentation, tout en introduisant deux modifications importantes, qui étendaient considérablement le périmètre et la durée d’application de l’article 4.
La rédaction de l’amendement n° 100 nous pose problème en ce qu’elle tend à institutionnaliser des dispositifs présentés à l’origine comme temporaires. Cela revient à les banaliser et à les inscrire dans le droit commun, en prévoyant seulement une clause de revoyure. Ce n’est pas acceptable : une telle possibilité doit être strictement encadrée dans ses finalités.
C’est la raison pour laquelle nous proposons de maintenir le caractère expérimental des tests, de limiter cette expérimentation à la période olympique et paralympique et d’attendre la fin de l’expérimentation et le rapport d’évaluation pour en tirer les conclusions qui s’imposent.
L’avis est défavorable, puisque ce sous-amendement revient sur la dernière position de la commission.
Certes, madame Harribey, il y a pérennisation, mais les tests sont soumis à de nombreuses garanties : ils sont anonymes et il ne peut y avoir d’identification, les échantillons sont détruits automatiquement en l’absence de suspicion et le sportif est informé.
Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement et le sous-amendement ?
Le Gouvernement est favorable à l’amendement n° 100 de Mme le rapporteur, dans la mesure où cette évolution du texte nous permettra de nous mettre durablement en conformité avec les exigences du droit international en la matière. De plus, l’adoption de cet amendement nous éviterait de scinder en deux régimes différents les quatre cas d’usage limitativement énumérés.
Par cohérence, nous sommes défavorables au sous-amendement n° 104. Cependant, j’y insiste, un rapport d’évaluation sur l’ensemble de cet article sera rendu le 31 décembre 2024.
Le sous-amendement n ’ est pas adopté.
L ’ amendement est adopté.
En conséquence, l’article 4 est ainsi rédigé, et l’amendement n° 20 n’a plus d’objet.
L’amendement n° 42 rectifié, présenté par M. Lozach, Mme S. Robert, M. Durain, Mme Féret, MM. Kanner, Antiste, Assouline, Chantrel et Magner, Mme Monier, M. Stanzione, Mme Van Heghe, M. Bourgi, Mmes de La Gontrie et Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie et Sueur, Mme Conconne, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Lubin, Meunier, Poumirol et Rossignol, M. Devinaz et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – À l’article L. 232-20 du code du sport, après le mot : « douanes, », sont insérés les mots : « les agents du service mentionné à l’article L. 561-23 du code monétaire et financier, ».
II. – Après le 4° de l’article L. 561-31 du code monétaire et financier, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« …° À l’Agence française de lutte contre le dopage ; ».
La parole est à M. Jean-Jacques Lozach.
Dans le cadre de la préparation des jeux Olympiques et Paralympiques de Paris de 2024, l’Agence française de lutte contre le dopage mène, en lien avec d’autres administrations, une politique active de collecte de renseignements et de transmission des informations reçues en vue d’orienter les investigations antidopage.
En amont, puis lors des Jeux, en sa qualité d’organisation nationale antidopage, l’AFLD est habilitée à mettre en œuvre ces prérogatives pour établir et sanctionner les violations non analytiques des règles antidopage.
Dans cette perspective, l’ordonnance n° 2011-488 du 21 avril 2021 a clarifié le cadre légal de l’échange d’informations qu’il a autorisé entre les services de l’AFLD et différents services relevant du ministère de l’économie et des finances.
L’expérience a cependant démontré qu’il manque à cette liste la cellule de renseignement financier nationale, dite Tracfin, avec laquelle l’AFLD a pourtant engagé une coopération fructueuse. Si un article du code monétaire et financier permet à l’AFLD de communiquer des informations à Tracfin, la réciproque n’a pas été prévue, ce qui nuit à l’efficacité des enquêtes antidopage en cours et à venir dans la perspective de 2024.
C’est pourquoi cet amendement vise à autoriser les échanges d’informations, pour leurs missions respectives, entre l’AFLD et Tracfin. Nous avions rencontré une situation quelque peu analogue avec la plateforme de lutte contre la manipulation des compétitions sportives. Après sa mise en place, nous nous étions aperçus qu’il n’y avait pas d’échange d’informations possible en raison du statut des agents concernés.
La commission est favorable à cet amendement dont l’adoption permettra de combler un vide dans l’organisation et d’améliorer considérablement la lutte contre le dopage.
Le Gouvernement est également favorable à cet amendement dans la mesure où ce meilleur partage d’informations renforcera l’efficacité de la lutte contre le dopage.
L ’ amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 4.
I. – Sont homologuées, en application de l’article 21 de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d’autonomie de la Polynésie française, les peines d’emprisonnement prévues en Polynésie française par les articles LP. 21 et LP. 22 de la loi du pays n° 2015-12 du 26 novembre 2015 relative à la protection de la santé des sportifs et à la lutte contre le dopage et par l’article LP. 8 de la loi du pays n° 2015-13 du 26 novembre 2015 relative à la recherche et la constatation des infractions en matière de dopage.
II
« Art. L. 424 -2. – I. – Les articles L. 232-18-7, L. 232-18-9 à L. 232-20 et L. 232-20-2 sont applicables en Polynésie française dans leur rédaction résultant de la loi n° … du … relative aux jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 et portant diverses autres dispositions.
« II. – Pour l’application du I :
« 1° Les références au tribunal judiciaire à l’article L. 232-18-7 sont remplacées par la référence au tribunal de première instance ;
« 2° L’article L. 232-20 est ainsi rédigé :
« “Art. L. 232 -20. – Par dérogation à leurs obligations de secret professionnel, les agents de l’Agence française de lutte contre le dopage et les autorités judiciaires et administratives de l’État et de la Polynésie française chargées de la lutte contre le dopage peuvent se communiquer réciproquement tous renseignements, y compris nominatifs, obtenus dans l’accomplissement de leur mission respective et relatifs à des faits susceptibles de constituer des violations et infractions pénales en matière de lutte contre le dopage.” »
L’amendement n° 101, présenté par Mme Canayer, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme le rapporteur.
Cet amendement a été rédigé directement avec les autorités de la Polynésie française, notamment son ministère des sports.
L’alinéa premier de l’article 5 entend homologuer les peines de prison prévues par les lois du pays n° 2015-12 et 2015-13 de la Polynésie française. De nos échanges, il est ressorti que ces peines, qui ne sont pas conformes au code mondial antidopage, ne sont plus appliquées. Elles seront d’ailleurs bientôt remplacées par le nouveau code des sports polynésien.
Même si l’homologation est juridiquement nécessaire pour les peines de prison prévues par les lois du pays, il serait mal compris par les autorités polynésiennes que, près de huit ans après le vote de lois du pays, on adopte une mesure qui serait sans portée pour l’avenir. Faisons confiance à la Polynésie française en votant cette suppression.
Nous avons aussi envie de faire confiance à la Polynésie française, mais nous sommes très attentifs au bon respect de la répartition des compétences prévue par l’article 74 de la Constitution.
L’homologation par la loi nationale doit ainsi intervenir pour que soient appliquées en Polynésie française un certain nombre de sanctions pénales qui seront indispensables dans la perspective des Jeux.
Pour ces raisons, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
L ’ amendement est adopté.
L ’ article 5 est adopté.
Nous revenons au cours normal de la discussion du texte de la commission.
I. – L’article L. 726-1 du code de la sécurité intérieure est ainsi modifié :
1° À la fin, les mots : « et les services publics auxquels appartiennent les acteurs de la sécurité civile mentionnés aux premier et deuxième alinéas de l’article L. 721-2 ou par des associations de sécurité civile agréées au titre de l’article L. 725-1 » sont remplacés par les mots : «, les services publics auxquels appartiennent les acteurs de la sécurité civile mentionnés à l’article L. 721-2 et les associations ayant la formation aux premiers secours dans leur objet » ;
2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Un décret en Conseil d’État définit les conditions d’application du présent article. Il précise notamment les modalités d’habilitation des différents organismes. »
II
– Au troisième alinéa de l’article L. 312-13-1 du code de l’éducation, les mots : « ou des associations agréées » sont supprimés. –
Adopté.
Chapitre II
Mesures visant à renforcer la lutte contre le dopage
Je rappelle que l’amendement portant article additionnel après l’article 4 a été précédemment examiné.
Je rappelle que l’article 5 a été précédemment examiné.
Chapitre III
Dispositions visant à mieux garantir la sécurité
L’amendement n° 17 rectifié ter, présenté par Mme S. Robert, MM. Lozach et Durain, Mme Féret, MM. Kanner, Antiste, Assouline, Chantrel et Magner, Mme Monier, M. Stanzione, Mme Van Heghe, M. Bourgi, Mmes de La Gontrie et Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie et Sueur, Mme Conconne, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Lubin, Meunier, Poumirol et Rossignol, M. Devinaz et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Avant l’article 6
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À titre temporaire, à partir de la date de publication de la présente loi et jusqu’à la date de clôture des jeux Paralympiques, il est institué un comité de suivi national chargé de veiller à la conciliation de l’organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de Paris en 2024 avec la préservation des manifestations culturelles, sportives et récréatives. Il garantit la transparence et la cohérence des décisions mises en œuvre et s’assure de leur application dans les territoires.
Ce comité comprend un représentant du ministère des sports et des jeux Olympiques et Paralympiques, un représentant du ministère de la culture et de la communication, un représentant du ministère de l’intérieur et des outre-mer, deux représentants des collectivités territoriales, et cinq représentants des associations et organisations intervenant dans le domaine du spectacle vivant, musical et de variétés.
Les membres du comité de suivi ne perçoivent ni salaire ni indemnité.
Les membres de ce comiténe sont pas rémunérés et aucuns frais liés à son fonctionnement ne peuvent être pris en charge par une personne publique.
La parole est à Mme Sylvie Robert.
Cet amendement vise à instituer un comité de suivi national veillant à la conciliation entre l’organisation des jeux Olympiques et Paralympiques et la préservation des manifestations culturelles, sportives et récréatives.
L’intervention du ministre de l’intérieur, au mois de décembre dernier, indiquant qu’il serait difficile, voire improbable que se tiennent des festivals pendant la période olympique, a été un coup de tonnerre pour l’ensemble des acteurs culturels.
Si la circulaire relative aux événements estivaux pendant les Jeux de 2024 a apporté quelques clarifications salutaires, un certain nombre de zones d’ombre et de risques demeurent. On craint notamment l’annulation pure et simple de festivals à cause de l’encombrement provoqué par des reports massifs, comme vous l’avez sans doute tous remarqué dans vos territoires.
Ce comité de suivi national, réclamé par l’ensemble des associations et organisations ainsi que par les collectivités territoriales aurait pour vertu de porter un regard objectif sur ce qui se passe, comme un observatoire, de statuer sur la difficulté de tenir ou non certains événements et surtout d’essayer de trouver des solutions. Nous ne souhaitons pas laisser tout cela à la discrétion des préfets.
Madame la ministre, nous avons tous à cœur de faire en sorte que la période des Jeux soit une véritable fête aussi bien sportive que culturelle.
Nous comprenons l’enjeu qui sous-tend cet amendement, qui a le mérite de mettre la lumière sur la nécessaire sécurisation des nombreux événements sportifs, culturels et festifs qui auront lieu au moment des jeux Olympiques.
Les capacités de maintenir ces manifestations seront un peu entamées. Il importe donc d’entendre le Gouvernement sur les moyens humains qu’il souhaite mettre en œuvre pour assurer la sécurisation des autres événements durant la période olympique.
Pour autant, la création d’un tel comité relève du pouvoir exécutif et n’a pas sa place dans la loi : avis défavorable.
M. Daniel Breuiller renchérit.
Nous partageons cet objectif de concilier les exigences de cet événement hors norme que sont les jeux Olympiques, qui suppose un concours des forces de l’ordre tout aussi exceptionnel, et la nécessité de préserver la vie culturelle et festive de nos territoires.
Guidés par cet objectif, nous avons rédigé, avec le ministère de l’intérieur, cette circulaire du 13 décembre dernier portant sur l’organisation des manifestations durant l’été 2024 à l’intention des préfets.
D’ores et déjà, un certain nombre de dates ont été ajustées dans le domaine culturel : festival d’Avignon, festival des Vieilles Charrues, festival Interceltique… C’est également le cas dans le domaine sportif : Ligue 1 et Ligue 2 de football, Tour de France masculin et féminin, Top 14 en rugby… Nous sommes maintenant dans la dernière ligne droite de ces ajustements, sous la houlette des préfets, qui sont encouragés par la circulaire à concilier cette mobilisation exceptionnelle des forces de l’ordre avec le maintien de nos manifestations.
Le cadre est fixé et nous faisons confiance aux préfets pour parachever ce dispositif, qui est bien avancé.
Dans la mesure où cet amendement lui semble satisfait, le Gouvernement émet un avis défavorable.
Je ne suis pas tout à fait satisfaite des réponses, non seulement de Mme le rapporteur, qui aurait pu exprimer un avis de sagesse, mais surtout de Mme la ministre. Ce qui remonte aujourd’hui des territoires, c’est la différence d’appréciation selon les préfets !
Certes, la circulaire, que je connais par cœur, leur enjoint de trouver des solutions pour que les événements aient lieu, mais des préfets pointent un embouteillage des manifestations pour refuser une organisation dans certains cas, sans motivation exhaustive.
Ce comité de suivi national, réclamé par trente organisations et associations et par l’ensemble des associations de collectivités territoriales, s’efforcera d’apporter des réponses précises. Par exemple, s’il n’y a pas d’unités de force mobile dans tel territoire, c’est parce qu’un festival se déroule dans tel autre. Le comité pourrait alors prévoir le déplacement d’autres unités vers le territoire concerné. L’idée est d’avoir une vision d’ensemble, en toute transparence.
Avec la seule circulaire, des festivals se dérouleront dans certains endroits et pas dans d’autres sans que l’on sache pourquoi. Votre ministère, le ministère de l’intérieur et le ministère de la culture, au premier chef, doivent pouvoir valider collectivement que telle ou telle manifestation pourra ou non se tenir.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
Je suis saisie de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 18 rectifié, présenté par Mme S. Robert, MM. Lozach et Durain, Mme Féret, MM. Kanner, Antiste, Assouline, Chantrel et Magner, Mme Monier, M. Stanzione, Mme Van Heghe, M. Bourgi, Mmes de La Gontrie et Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie et Sueur, Mme Conconne, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Lubin, Meunier, Poumirol et Rossignol, M. Devinaz et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Avant l’article 6
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Du 23 juin 2024 au 10 septembre 2024, les manifestations culturelles, sportives et récréatives qui ne mobilisent pas d’unités de force mobile sont maintenues.
La parole est à Mme Sylvie Robert.
Je reviens sur cette fameuse circulaire de décembre dernier, que j’ai qualifiée de salutaire, puisqu’elle a apporté un certain nombre de clarifications importantes.
La ministre de la culture a dit très clairement que, du 23 juin 2024 au 10 septembre 2024, les manifestations culturelles, sportives et récréatives qui ne mobilisent pas d’unités de force mobile seraient maintenues. Afin de sécuriser cette assertion très importante, qui tire en quelque sorte les conséquences de la circulaire, il convient de l’inscrire dans la loi.
L’amendement n° 32 rectifié, présenté par Mme de Marco, MM. Benarroche, Dossus, Breuiller, Dantec, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge et MM. Salmon et J.P. Vogel, est ainsi libellé :
Avant l’article 6
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Durant toute la durée des épreuves des jeux Olympiques et Paralympiques, le représentant de l’État dans le département veille à la préservation de la vie estivale locale, en maintenant la tenue des événements culturels, festifs et sportifs dont la sécurisation est assurée par les organisateurs ou par des forces intérieures locales.
La parole est à Mme Monique de Marco.
Avec votre permission, madame la présidente, je défendrai également les deux amendements suivants.
J’appelle donc en discussion l’amendement n° 33, présenté par Mme de Marco, MM. Benarroche, Dossus, Breuiller, Dantec, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel, et ainsi libellé :
Avant l’article 6
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Durant toute la durée des épreuves des jeux Olympiques et Paralympiques, le représentant de l’État dans le département veille à la préservation de la vie estivale locale, en maintenant la tenue des événements culturels, festifs et sportifs accueillant un nombre de spectateurs dont le plafond est défini par décret, et dont la sécurisation est assurée par les organisateurs ou par des forces intérieures locales.
Et l’amendement n° 35, présenté par Mme de Marco, MM. Benarroche, Dossus, Breuiller, Dantec, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel, et ainsi libellé :
Avant l’article 6
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Durant toute la durée des épreuves des jeux Olympiques et Paralympiques, aucun événement culturel, festif ou sportif ne peut être interdit par le représentant de l’État d’un département n’accueillant pas d’épreuves.
Veuillez poursuivre, ma chère collègue.
Ces amendements, qui visent à préserver la vie estivale locale, parallèlement aux jeux Olympiques et Paralympiques, durant l’été 2024, s’inscrivent dans la continuité de ceux de ma collègue Sylvie Robert.
La présentation du dispositif des jeux Olympiques et Paralympiques au mois d’octobre dernier et l’annonce de l’obligation d’annulation ou de report de tous les événements nécessitant l’engagement d’unités de force mobile avaient suscité l’émoi des organisateurs de festivals et d’événements culturels. Je voudrais ici rappeler que le droit à la culture est un droit constitutionnel consacré par le préambule de 1946.
Pour ces secteurs, qui peinent à retrouver leur public d’avant la crise, cette nouvelle incertitude est un coup dur. Dans le spectacle vivant, le pessimisme est toujours palpable, comme nous avons pu le constater à Nantes, le 13 janvier dernier, où se tenaient les biennales de la profession.
La saison estivale offre des débouchés de diffusion indéniables à toute la filière – diffusion déjà fragilisée par l’attrition des budgets locaux du fait de la crise énergétique. L’instauration de nouvelles contraintes sécuritaires s’ajoute donc à une situation déjà critique.
La circulaire du 13 décembre 2022 relative à la sécurisation des événements culturels, festifs et sportifs de l’été 2024 a le mérite de donner un cadre de programmation à tous les organisateurs, mais elle comporte en réalité plus de zones d’ombre que de réponses.
Elle acte l’interdiction ou le report d’événements nécessitant la mobilisation d’unités de force mobile, qui seront toutes mobilisées pour la sécurisation des Jeux. Les implications sont très vastes : ainsi, les CRS habituellement affectés à la sécurisation des plages seront démobilisés, ce qui pose, notamment en Aquitaine, de gros problèmes. Madame la ministre, quelles seront les conséquences concrètes de ces mobilisations ? Irez-vous jusqu’à interdire aux gens de se baigner ou allez-vous encore demander aux collectivités de se substituer à l’État, faute d’anticipation ?
L’amendement n° 32 rectifié vise donc à réaffirmer que le maintien d’événements doit rester la règle et l’interdiction l’exception. C’est une formulation moins ambiguë que la « vocation à se maintenir » de la circulaire… Il s’agit en outre d’inscrire ce principe dans la loi, plus stable juridiquement qu’une circulaire qui peut être facilement modifiée.
Par ailleurs, comme je le disais à l’instant, on peut lire dans la circulaire que les événements de moindre ampleur « ont vocation à se maintenir », et ce à condition de ne mobiliser aucune unité de forces mobiles.
Il s’agit d’un critère difficile à appréhender à l’avance par les organisateurs : faut-il se fonder sur la sécurisation des événements passés ou sur l’état de la menace dans un an et demi pour des concertations et des programmations en cours ?
Madame la ministre, pouvez-vous vous engager ici clairement à ce que tous les événements de moindre ampleur soient bien maintenus ?
Il est également inscrit dans la circulaire que certains événements pourront bénéficier de dérogations, décidées dans le cadre national. Sur quels critères allez-vous vous fonder pour décider de ces exceptions ? En effet, ceux-ci ne figurent pas dans la circulaire. Ces événements bénéficieront-ils du concours des forces d’unités mobiles ?
Vous le voyez, la circulaire n’est pas claire ; et l’absence de clarté fragilise la liberté de création et le droit à la culture que j’évoquais précédemment. C’est la raison pour laquelle l’amendement n° 33 tend à inscrire dans la loi des seuils qui puissent être opposables à chacun.
L’objet de l’amendement n° 35 diffère de celui des deux précédents. Il s’agit de garantir que les interdictions d’événements prévues par la circulaire du 13 décembre 2022 ne puissent affecter les départements où aucune épreuve olympique ne sera organisée. C’est le cas notamment en Nouvelle-Aquitaine, où seule la ville de Bordeaux est concernée.
C’est un enjeu d’égalité territoriale. Il faut garantir une vie estivale locale riche à tous ceux qui n’auront pas la chance d’assister à des épreuves olympiques, éloignées de leur domicile.
L’organisation d’événements culturels, festifs et sportifs est un levier indéniable d’attractivité touristique pendant la belle saison pour tous nos territoires. Il est donc absolument nécessaire que la loi sécurise leur maintien dans les territoires où l’organisation des Jeux ne pourra compenser une baisse de programmation culturelle.
La commission est défavorable à ces quatre amendements.
Entendons-nous bien : je reconnais qu’ils ont le mérite de relayer l’inquiétude des territoires s’agissant de l’organisation et de la sécurisation des autres manifestations culturelles et festives qui pourraient avoir lieu en même temps que les jeux Olympiques. Madame la ministre, il est important de pouvoir rassurer tous ceux qui s’inquiètent, notamment les élus locaux, des entraves qu’ils pourraient rencontrer.
Les auteurs de ces amendements tentent de trouver des solutions. Malheureusement, nous ne pouvons accepter celles qui nous sont proposées.
L’amendement n° 18 rectifié, par exemple, tend à imposer le maintien obligatoire des manifestations ne mobilisant pas d’unités de force mobile, ce qui est compliqué en soi.
L’amendement n° 32 rectifié est une variante, et l’amendement n° 33, qui vise à introduire un critère de fréquentation, est un repli en fonction de la jauge.
Enfin, l’amendement n° 35 vise à proscrire l’interdiction d’événements sportifs dans les départements n’accueillant pas d’épreuve olympique.
Tous ces dispositifs me paraissent peu opérants. Il importe que chaque préfet puisse décider au cas par cas et qu’il y ait un vrai dialogue avec les élus locaux et les organisateurs pour essayer de trouver des solutions. Il ne me paraît pas bon de globaliser des solutions.
La commission est défavorable à ces amendements, mais nous incitons fortement le Gouvernement à tout faire pour rassurer les élus locaux et les organisateurs des manifestations concernées.
Le Gouvernement est également défavorable à ces amendements.
Nous avons vraiment la volonté de rassurer. Nous avons déjà accompli un chemin considérable avec la ministre de la culture et le ministre de l’intérieur. La circulaire découpe la période en quatre phases très opérationnelles.
Tout d’abord, la phase antérieure à l’ouverture du village olympique, le 18 juillet 2024, durant laquelle nous avons pu avancer un certain nombre de festivals et manifestations.
Ensuite, une « zone rouge », entre le 18 juillet et le 11 août, qui correspond au cœur de l’événement, une période pendant laquelle nous aurons tout de même quelques exceptions nationales, comme l’arrivée du Tour de France masculin, le 21 juillet, qui a été prévue à Nice pour éviter la congestion de Paris.
La troisième phase est la période intérimaire entre les jeux Olympiques et les jeux Paralympiques durant laquelle des exceptions et des aménagements sont possibles, comme avec le Tour de France féminin.
Enfin, la dernière période, à savoir celle des jeux Paralympiques, est un peu plus simple, dans la mesure où seule l’Île-de-France sera concernée. Les organisations de manifestations seront contraintes sur cette région, mais totalement libérées dans le reste du pays.
Nous poursuivons les discussions. Il reste la question des férias du Sud-Ouest, que s’attache à régler ma collègue Dominique Faure, avec les élus locaux et les préfets concernés. Une fois ces dernières solutions trouvées, nous aurons vraiment la capacité de donner à tous une visibilité, avec un planning global de toutes les manifestations festives, culturelles et récréatives élaboré en toute transparence.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L’amendement n° 31, présenté par Mme de Marco, MM. Benarroche, Dossus, Breuiller, Dantec, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel, est ainsi libellé :
Avant l’article 6
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
En amont et durant tout le déroulé des jeux Olympiques et Paralympiques, le représentant de l’État dans le département veille au maintien de l’activité culturelle, festive et sportive habituelle dans les communes. Il informe mensuellement les maires des résultats du travail de concertation réalisé avec les organisateurs d’événements culturels, festifs et sportifs visant à leur sécurisation.
La parole est à Mme Monique de Marco.
J’espère avoir plus de chances avec cet amendement, qui vise à inscrire dans la loi l’obligation d’information des élus locaux dans le processus de concertation.
Concrètement, les préfets seront chargés d’informer mensuellement les maires sur l’état des discussions avec les organisateurs afin de leur permettre d’intervenir en cas de décision défavorable et de participer à la recherche de solutions.
Là encore, si la circulaire du 13 décembre 2022 prévoit bien un dialogue avec les collectivités territoriales, le cadre n’en est pas clairement et juridiquement défini.
Nous comprenons la volonté de Mme de Marco de sauver la programmation culturelle de l’année 2024. Mais inscrire dans la loi l’obligation de dialogue entre le préfet et les élus locaux dans le cadre de l’organisation de manifestations culturelles, sportives et associatives reviendrait à sous-entendre que ce dialogue ne s’impose pas dans les autres cas. Or il me semble que le fait de dialoguer avec les élus locaux et de les accompagner est précisément l’une des premières missions du représentant de l’État.
Il est vrai que mon collègue Éric Kerrouche et moi-même avons eu l’occasion de pointer dans un rapport les difficultés liées à l’organisation de l’État territorial. Mais ce n’est pas le sujet du débat d’aujourd’hui.
La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
Avis défavorable. Organiser de lui-même – nul besoin de disposition normative pour cela – le dialogue avec les élus locaux pour concilier sécurité et culture lors des festivals, objectif que nous partageons tous, est au cœur de la mission du préfet, en plus de relever d’un principe de bonne administration.
M. Laurent Burgoa. Madame la ministre, je précise que les férias se tiennent non seulement dans le Sud-Ouest, mais également dans le Sud-Est. S’il y en a bien une à Mont-de-Marsan au mois de juillet – j’imagine que Mme Darrieussecq a dû vous en parler –, il y en a aussi une à Béziers au mois d’août. J’aimerais que le Sud-Est soit traité comme le Sud-Ouest !
Sourires.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L’amendement n° 34, présenté par Mme de Marco, MM. Benarroche, Dossus, Breuiller, Dantec, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel, est ainsi libellé :
Avant l’article 6
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Durant toute la durée des épreuves des jeux Olympiques et Paralympiques, les communes et communautés de communes peuvent volontairement mutualiser leurs forces de sécurité intérieures locales, pour garantir le maintien d’un événement culturel, festif ou sportif local.
Le cas échéant, le représentant de l’État dans le département coordonne cette mutualisation et est responsable de la sécurisation de l’événement concerné au moyen de ces forces locales.
Aucune commune ni aucun groupement ne peut voir ses forces réquisitionnées sans rétribution.
La parole est à Mme Monique de Marco.
Cet amendement, qui va dans le même sens que le précédent, vise à mieux associer les communes à la concertation pour préserver la vie estivale locale durant l’été 2024. Nous souhaitons leur permettre de s’organiser pour faire face à l’affectation de toutes les forces nationales de la sécurité à la sécurisation des JO de 2024, afin de maintenir des événements qui seraient menacés d’interdiction par le préfet.
Toujours dans l’objectif de protéger les collectivités locales, nous proposons également d’inscrire dans la loi que toute réquisition par l’État de forces locales pour la sécurisation d’épreuves ou d’événements mis en place par les collectivités Terre de Jeux 2024 donnera lieu à une rétribution.
En effet, nous sommes très nombreux à nous inquiéter de la charge financière que représente l’organisation de ces jeux pour les collectivités territoriales.
Si nous notons une nouvelle fois la volonté de notre collègue de trouver des solutions, mutualiser les polices municipales et les placer sous l’autorité du préfet, ce qui reviendrait ipso facto à rétablir la tutelle préfectorale sur les collectivités territoriales, ne nous paraît clairement pas souhaitable. Avis défavorable.
Le Gouvernement partage l’avis de la commission.
Au demeurant, le code de la sécurité intérieure prévoit déjà les différentes possibilités de mutualisation des services de sécurité, en visant non seulement le cas d’une « manifestation exceptionnelle, notamment à caractère culturel, récréatif ou sportif », mais également celui d’un « afflux important de population ».
En outre, la compensation réclamée au dernier alinéa de l’amendement me paraît déjà satisfaite, puisque l’article L. 2215-1 du code général des collectivités territoriales précise les conditions de réquisition par le préfet et pose le principe d’une rétribution par l’État.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
I. – Le livre II du code de la sécurité intérieure est ainsi modifié :
1° L’article L. 223-1 est ainsi modifié :
a) Au début du premier alinéa, les mots : « La transmission et l’enregistrement d’images prises sur la voie publique par le moyen de la vidéoprotection peuvent être mis en œuvre » sont remplacés par les mots : « Des systèmes de vidéoprotection peuvent être mis en œuvre sur la voie publique » ;
b) Au début du deuxième alinéa, les mots : « Il peut être également procédé à ces opérations » sont remplacés par les mots : « Ces systèmes peuvent également être mis en œuvre » ;
2° À l’article L. 223-3, la référence : « L. 252-1 (deuxième alinéa), » est supprimée ;
3° L’article L. 251-1 est ainsi rédigé :
« Art. L. 251 -1. – Les systèmes de vidéoprotection répondant aux conditions fixées à l’article L. 251-2 sont des traitements de données à caractère personnel régis par les dispositions du présent titre ainsi que par celles du règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données, et abrogeant la directive 95/46/CE et de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés. » ;
4° L’article L. 251-2 est ainsi modifié :
a) Au début du premier alinéa, les mots : « La transmission et l’enregistrement d’images prises sur la voie publique par le moyen de la vidéoprotection peuvent être mis en œuvre » sont remplacés par les mots : « Des systèmes de vidéoprotection peuvent être mis en œuvre sur la voie publique » ;
b) Au début du treizième alinéa, les mots : « Il peut être également procédé à ces opérations » sont remplacés par les mots : « Des systèmes de vidéoprotection peuvent également être mis en œuvre » ;
5° Le second alinéa de l’article L. 251-3 est supprimé ;
5° bis
6° Le second alinéa de l’article L. 252-1 est supprimé ;
7° À la fin du premier alinéa de l’article L. 252-2, les mots : « de la loi » sont remplacés par les mots : « du présent titre » ;
8° L’article L. 252-4 est ainsi modifié :
a) À la fin du deuxième alinéa, les mots : «, à compter de l’expiration d’un délai de deux ans après la publication de l’acte définissant ces normes » sont supprimés ;
b) Le dernier alinéa est supprimé ;
9° À la fin de l’intitulé du chapitre III du titre V, les mots : « et droit d’accès » sont supprimés ;
10° Au début du premier alinéa de l’article L. 253-3, les mots : « Les membres de la Commission nationale de l’informatique et des libertés, les agents de ses services habilités dans les conditions définies au dernier alinéa de l’article 10 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés ainsi que » sont supprimés ;
11° À l’article L. 253-4, les mots : «, de la Commission nationale de l’informatique et des libertés » sont supprimés ;
12° L’article L. 253-5 est ainsi modifié :
a) Le premier alinéa est supprimé ;
b) Au deuxième alinéa, les mots : « ou la Commission nationale de l’informatique et des libertés » sont supprimés ;
c) Le dernier alinéa est supprimé ;
13° L’article L. 254-1 est ainsi rédigé :
« Art. L. 254 -1. – Le fait d’entraver l’action de la commission départementale de vidéoprotection est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende. » ;
14° L’article L. 255-1 est ainsi rédigé :
« Art. L. 255 -1. – Les modalités d’application du présent titre et d’utilisation des données collectées par les systèmes de vidéoprotection sont précisées par un décret en Conseil d’État, pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés. Ce décret fixe les conditions dans lesquelles le public est informé de l’existence d’un traitement de données à caractère personnel par système de vidéoprotection et de la manière dont les personnes concernées peuvent exercer leurs droits au titre du règlement européen (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 et de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés. » ;
15°
Supprimé
16° Le dernier alinéa de l’article L. 272-2 est supprimé.
II. – L’avant-dernier alinéa de l’article L. 1632-2 du code des transports est supprimé. –
Adopté.
I. – À titre expérimental et jusqu’au 30 juin 2025, à la seule fin d’assurer la sécurité de manifestations sportives, récréatives ou culturelles qui, par leur ampleur ou leurs circonstances, sont particulièrement exposées à des risques d’actes de terrorisme ou d’atteintes graves à la sécurité des personnes, les images collectées au moyen de systèmes de vidéoprotection autorisés sur le fondement de l’article L. 252-1 du code de la sécurité intérieure et de caméras installées sur des aéronefs autorisées sur le fondement du chapitre II du titre IV du livre II du même code dans les lieux accueillant ces manifestations et à leurs abords, ainsi que dans les véhicules et emprises de transport public et sur les voies les desservant, peuvent faire l’objet de traitements algorithmiques ayant pour unique objet de détecter, en temps réel, des événements prédéterminés susceptibles de présenter ou de révéler ces risques et de les signaler en vue de la mise en œuvre des mesures nécessaires par les services de la police et de la gendarmerie nationales, les services d’incendie et de secours, les services de police municipale et les services internes de sécurité de la SNCF et de la Régie autonome des transports parisiens dans le cadre de leurs missions respectives.
II. – Les traitements mentionnés au I du présent article ainsi que les images qui sont nécessaires à leur entraînement sont régis par les dispositions applicables du règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 et de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés.
II bis
Une information générale du public sur l’emploi de traitements algorithmiques sur les images collectées au moyen de systèmes de vidéoprotection et de caméras installées sur des aéronefs est organisée par le ministre de l’intérieur.
III. – Ces traitements n’utilisent aucun système d’identification biométrique, ne traitent aucune donnée biométrique et ne mettent en œuvre aucune technique de reconnaissance faciale. Ils ne peuvent procéder à aucun rapprochement, interconnexion ou mise en relation automatisée avec d’autres traitements de données à caractère personnel.
Ils procèdent exclusivement à un signalement d’attention, strictement limité à l’indication du ou des événements prédéterminés qu’ils ont été programmés pour détecter. Ils ne produisent aucun autre résultat et ne peuvent fonder, par eux-mêmes, aucune décision individuelle ou acte de poursuite.
Ils demeurent en permanence sous le contrôle des personnes chargées de leur mise en œuvre.
IV. – Le recours à un traitement mentionné au I est, par dérogation à l’article 31 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés, autorisé par un décret pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés.
Ce décret fixe les caractéristiques essentielles du traitement. Il indique notamment les événements prédéterminés que le traitement a pour objet de signaler, le cas échéant les spécificités des situations justifiant son emploi, les services mentionnés au second alinéa du I du présent article susceptibles de le mettre en œuvre, les éventuelles conditions de leur participation financière à l’utilisation du traitement, et les conditions d’habilitation et de formation des agents pouvant accéder aux signalements du traitement. Il désigne l’autorité chargée d’établir l’attestation de conformité mentionnée au dernier alinéa du V.
Le décret est accompagné d’une analyse d’impact relative à la protection des données personnelles qui expose :
1° Le bénéfice escompté de l’emploi du traitement au service de la finalité mentionnée au I, au regard des événements prédéterminés donnant lieu à signalement par le système ;
2° L’ensemble des risques éventuellement créés par le système et les mesures envisagées afin de les minimiser et de les rendre acceptables au cours de son fonctionnement.
V. – L’État assure le développement du traitement ainsi autorisé, en confie le développement à un tiers ou l’acquiert. Dans tous les cas, le traitement doit satisfaire aux exigences suivantes :
1° Lorsque le système d’intelligence artificielle employé repose sur un apprentissage, des garanties sont apportées afin que les données d’apprentissage, de validation et de test choisies soient pertinentes, adéquates et représentatives, leur traitement loyal, objectif et de nature à identifier et prévenir l’occurrence de biais et d’erreurs. Ces données doivent demeurer accessibles et être protégées tout au long du fonctionnement du traitement ;
2° Le traitement comporte un enregistrement automatique des signalements des événements prédéterminés détectés permettant d’assurer la traçabilité de son fonctionnement ;
2° bis
3° Les modalités selon lesquelles, à tout instant, le traitement peut être interrompu sont précisées ;
4° Le traitement fait l’objet d’une phase de test conduite dans des conditions analogues à celles de son emploi tel qu’autorisé par le décret mentionné au IV, attestée par un rapport de validation.
Lorsque le traitement est développé ou fourni par un tiers, celui-ci doit en outre présenter des garanties de compétences et de continuité et fournir une documentation technique complète.
Dans le cadre du présent V, la Commission nationale de l’informatique et des libertés exerce les missions prévues au 2° du I de l’article 8 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés, en particulier en accompagnant les personnes en charge du développement du traitement.
Le respect des exigences énoncées au présent V fait l’objet d’une attestation de conformité établie par l’autorité administrative compétente. Cette attestation est publiée avant que le traitement soit mis à la disposition des services mentionnés au I qui demandent l’autorisation de l’utiliser dans les conditions prévues au VI.
VI. – L’emploi du traitement est autorisé par le représentant de l’État dans le département ou, à Paris, le préfet de police. Cette autorisation peut uniquement être accordée lorsque le recours au traitement est proportionné au regard de la finalité poursuivie.
La demande qui lui est adressée par l’un des services mentionnés au I comprend en tant que de besoin l’actualisation de l’analyse d’impact réalisée lors de l’autorisation du traitement par décret, adaptée aux circonstances du déploiement. Cette analyse actualisée est adressée à la Commission nationale de l’informatique et des libertés.
La décision d’autorisation est publiée et motivée. Elle précise :
1° Le responsable du traitement et les services associés à sa mise en œuvre ;
2° La manifestation sportive, récréative ou culturelle concernée et les motifs de la mise en œuvre du traitement au regard de la finalité mentionnée au même I ;
3° Le périmètre géographique concerné par la mise en œuvre du traitement ;
4° Les modalités d’information du public, notamment sur ses droits ou, lorsque cette information entre en contradiction avec les finalités poursuivies, les motifs pour lesquels le responsable du traitement en est dispensé ;
5° La durée d’autorisation. Cette durée ne peut excéder un mois, renouvelable selon les mêmes modalités lorsque les conditions de sa délivrance en demeurent réunies.
VII. – L’autorité responsable tient un registre des suites apportées aux signalements effectués par le traitement ainsi que des personnes ayant accès aux signalements.
Le représentant de l’État dans le département ou, à Paris, le préfet de police est tenu informé chaque semaine des conditions dans lesquelles le traitement est mis en œuvre, en tient informée régulièrement la Commission nationale de l’informatique et des libertés et peut suspendre sa décision d’autorisation ou y mettre fin à tout moment s’il constate que les conditions ayant justifié sa délivrance ne sont plus réunies.
VIII. – Les images mentionnées au I du présent article dont la durée de conservation, prévue aux articles L. 242-4 et L. 252-5 du code de la sécurité intérieure, n’est pas expirée peuvent être utilisées comme données d’apprentissage des traitements dans les conditions prévues au 1° du V du présent article jusqu’à l’expiration de leur durée de conservation.
VIII bis
IX. – La Commission nationale de l’informatique et des libertés est informée tous les trois mois des conditions de mise en œuvre de l’expérimentation. Le Gouvernement remet au Parlement, au plus tard six mois avant le terme de l’expérimentation fixé au 30 juin 2025, un rapport d’évaluation de sa mise en œuvre, dont le contenu est fixé par décret en Conseil d’État après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés. Ce décret fixe notamment les modalités de pilotage et d’évaluation pluridisciplinaire et objective de l’expérimentation et les indicateurs utilisés par celle-ci. L’évaluation associe deux députés et deux sénateurs, respectivement désignés par le Président de l’Assemblée nationale et le Président du Sénat. Le décret précise également les modalités selon lesquelles le public et les agents concernés sont informés de l’expérimentation et associés à l’évaluation. Le rapport d’évaluation est également transmis à la Commission nationale de l’informatique et des libertés.
Avec cet article 7, nous sommes au cœur du réacteur, ou du cheval de Troie.
L’expérimentation de la vidéoprotection augmentée soulève d’innombrables questions : juridiques, sur le respect des libertés et des droits fondamentaux des personnes ; technologiques et industrielles, sur la souveraineté réelle dans la phase de développement des traitements et sur les assurances pour en limiter les biais ; sociétales et politiques, sur la société vers laquelle nous tendons dès lors que l’anonymat public est levé et que la surveillance est globalisée.
Avons-nous collectivement conscience des implications d’un tel renversement ? Y souscrivons-nous ? Quelles garanties établissons-nous pour nous prémunir d’éventuelles fuites en avant ? Si l’argument utilitariste peut apparaître fondé au regard des menaces sécuritaires, il ne répond nullement à ces questions, qui concernent pourtant notre cadre commun d’existence.
Si une telle solution technologique, qui complète un arsenal sécuritaire déjà fourni, limite le risque, elle ne l’efface pas. En d’autres termes, jusqu’où sommes prêts à rogner sur notre liberté pour préserver au maximum notre sécurité ?
L’article 7 témoigne de cette recherche d’un équilibre particulièrement délicat à trouver. À cet égard, je salue le travail de la commission des lois pour mieux encadrer le dispositif, comme le recommandait la Cnil.
Toutefois, certains points mériteraient d’être éclaircis et pourront, je l’espère, faire l’objet d’améliorations.
D’abord, si la durée de l’expérimentation répond à la multiplication des risques sécuritaires pendant les jeux Olympiques et Paralympiques, pourquoi avoir choisi de la prolonger jusqu’au 30 juin 2025, soit un an après la fin de l’événement ?
Ensuite, l’évaluation de l’expérimentation, compte tenu de son importance dans la perspective d’une éventuelle généralisation, doit présenter toutes les garanties d’indépendance qu’il est légitime d’attendre.
Enfin, les conséquences financières sur les collectivités territoriales et les organisateurs des manifestations sont, à ce jour, inconnues, l’étude d’impact étant muette sur le sujet.
Mme Sylvie Robert. J’aimerais savoir pourquoi le Gouvernement a élargi le périmètre de l’expérimentation aux manifestations culturelles et récréatives alors que le texte concernait initialement uniquement les jeux Olympiques et Paralympiques.
Marques d ’ impatience sur les travées du groupe Les Républicains.
J’ai souhaité prendre la parole sur l’article 7 pour vous faire part de ma déception.
Nous examinons les articles du chapitre III, relatif aux dispositions visant à « mieux garantir la sécurité ». Or, apparemment, nous ne pouvons parler que de vidéoprotection et de traitement d’algorithmes… L’ensemble de nos amendements visant à renforcer la sécurité dans les transports ont été déclarés irrecevables au titre de l’article 45 de la Constitution. En d’autres termes, oui au renforcement de la sécurité, mais pas dans les transports !
Je ne peux pas m’en satisfaire. Entre 2021 et 2022, les vols et violences dans les transports en commun ont augmenté. Et je n’évoque même pas le fiasco du Stade de France.
Nous devons muscler le continuum de sécurité pour enrayer les incivilités, la violence et l’insécurité qui règnent dans nos transports. C’était là tout le sens de nos amendements.
Car on ne donne pas suffisamment de moyens aux acteurs de la sécurité dans les transports. Lors de l’examen du projet de loi d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur, le ministre de l’intérieur s’était engagé à renforcer le continuum de sécurité. La lecture restreinte du projet de loi montre que nous en sommes encore loin.
J’espère que les prochains textes, notamment d’initiative parlementaire, permettront que la peur change enfin de camp !
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Claude Kern applaudit également.
Je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° 47 est présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° 63 est présenté par MM. Dossus, Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco, MM. Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour présenter l’amendement n° 47.
Soyons clairs : du point de vue du droit, l’article 7 instaure un dispositif dérogatoire au règlement général sur la protection des données (RGPD), alors que la France était jusqu’à présent en pointe en la matière en Europe. Là, nous reculons, en particulier au regard des principes posés à l’article 23 du RGPD.
La Cnil, qui a réalisé un travail très important sur les caméras augmentées et les vidéos augmentées, a rendu son avis le 19 juillet 2022. Pour elle, compte tenu du RGPD et de plusieurs dispositions de défense des libertés individuelles en France, ces vidéos ne pourraient être autorisées qu’à la condition d’« intégrer des mesures permettant la suppression quasi immédiate des images sources ou la production d’informations anonymes ».
Or ce que vous nous proposez dans ce texte se limite à l’information du public. Vous ne permettez en aucun cas aux personnes qui seraient filmées de disposer d’un droit de recours ou d’opposition. Or, pour la Cnil, c’était un objectif essentiel, qu’elle souhaitait même voir garanti par une loi spécifique.
Chers collègues, ayez bien conscience que vous êtes en train de détricoter tout doucement le RGPD, quand il aurait fallu adopter une loi pour définir les droits des personnes.
Comme je l’ai déjà longuement évoqué en défendant ma motion tendant à opposer la question préalable, nous sommes face à un cavalier législatif, voire à un cheval de Troie, visant à nous faire passer un cap dans la société de surveillance globale.
Les jeux Olympiques et Paralympiques ne sont ici qu’un prétexte pour jouer aux apprentis sorciers avec ces algorithmes de surveillance. Nous savons à quel point le marché est énorme. En l’occurrence, il s’agit plus d’une aubaine pour les industriels du secteur que d’une véritable attention portée à l’ordre public.
Si c’était l’ordre public qui nous intéressait, nous n’expérimenterions pas des technologies qui ne sont absolument pas matures.
Mme la ministre des sports nous a affirmé que l’objectif était d’éviter un « nouveau Séoul », en référence au drame ayant fait plus de 150 morts dans un mouvement de foule le soir d’Halloween, au mois d’octobre 2022. Mais sachez, chers collègues, que la Corée du Sud expérimente les caméras augmentées depuis 2020. Or cela n’a pas empêché ce drame absolu, qui devait donc bien avoir d’autres causes.
Nous nous exposons par ailleurs à un risque opérationnel : si le système noie les forces de l’ordre sous une multiplication de faux positifs de notifications d’aide à la décision, cela met en danger le bon déroulement de l’événement.
Or nous profitons de cette manifestation exceptionnelle pour franchir un cap, par une loi d’exception visant à pérenniser des dispositions portant un coup de canif supplémentaire dans nos libertés publiques. Du reste, cela n’a rien d’inhabituel : à Rio en 2016 comme à Tokyo en 2020, les gouvernements concernés ont profité de l’organisation des JO pour faire passer des lois d’exception et mener des opérations sécuritaires violentes.
La Cnil et le Conseil d’État estiment que le déploiement dans l’espace public des dispositifs prévus par l’article 7 présente incontestablement des risques pour les droits et libertés fondamentaux des personnes. La Cnil juge en outre nécessaire de nous prémunir de tout phénomène d’accoutumance et de banalisation de ces technologies de plus en plus intrusives.
Pour toutes ces raisons, je vous propose de supprimer l’article 7.
À nos yeux, l’article 7, en introduisant la vidéoprotection intelligente ou les caméras augmentées, met en place une innovation majeure. Cela aidera fortement les forces de l’ordre dans leur prise de décision pour sécuriser les grandes manifestations sportives, culturelles et récréatives, a fortiori dans la perspective des jeux Olympiques.
Nous voyons bien l’utilité d’une telle expérimentation, dont les JO seront un accélérateur, eu égard à la fois au risque terroriste, encore extrêmement fort dans notre pays, et à l’ampleur de cet événement exceptionnel ; je pense en particulier à la cérémonie d’ouverture.
Le dispositif a été encadré par de nombreuses garanties instaurées lors de la réécriture consécutive à la parution des avis du Conseil d’État et de la Cnil.
La commission des lois a souhaité renforcer encore ces garanties par un contrôle plein et entier de la Cnil, notamment lors de la création des algorithmes dans les fameux « bacs à sable », afin d’éviter les biais que vous évoquez.
Le contrôle humain doit rester permanent pour nous assurer que ces algorithmes pourront détecter et signaler les événements prédéterminés et aideront nos forces de l’ordre à être plus efficaces et plus opérationnelles lors de l’organisation de grandes manifestations.
Le dispositif prévu est effectivement novateur. C’est la raison pour laquelle il est engagé de manière expérimentale. L’objectif est de donner au Gouvernement les moyens d’éviter certains incidents.
Monsieur le sénateur, vous avez évoqué ce qui s’est passé à Séoul lors d’Halloween. Nous ne disposons pas d’éléments démontrant qu’un tel dispositif expérimental ait été mis en œuvre dans le cadre de l’événement. Par ailleurs, l’histoire récente comporte d’autres exemples de mouvements de foules n’ayant pas pu être détectés, comme à Turin en 2017 ou à La Mecque en 2015, où plus de 700 personnes sont décédées.
Le dispositif ne comporte pas d’outils incluant des données personnelles, comme la reconnaissance faciale. Le Gouvernement s’est d’ailleurs appuyé pour la rédaction de l’article sur le rapport d’information déposé le 10 mai 2022 par les sénateurs Daubresse, de Belenet et Durain, qui distinguait quatre catégories dans le traitement algorithmique.
Il n’est pas question pour le Gouvernement de s’engager sur la quatrième catégorie, souvent citée en exemple : la reconnaissance faciale. Nous souhaitons simplement nous donner les moyens de détecter, le cas échéant, un mouvement de foule, un colis abandonné ou des armes longues, afin d’assurer la sécurité pendant les grands événements.
La durée de l’expérimentation interroge plusieurs d’entre vous. Pour évaluer le dispositif, le Gouvernement a besoin de le tester sur un nombre suffisant de grands événements. L’idée est donc de nous donner suffisamment de temps pour mener à bien l’évaluation.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur les amendements de suppression de l’article.
Notre groupe votera contre les deux amendements de suppression.
Nous ne sommes pas des fanatiques des nouvelles technologies en matière de surveillance. À cet égard, je me réjouis que la reconnaissance faciale n’ait pas été proposée dans l’hémicycle, car ce texte n’est pas le bon véhicule législatif pour développer la biométrie.
Avec la vidéosurveillance augmentée, intelligente, algorithmique – chacun l’appellera comme il le souhaite –, nous passons effectivement un cap en développant dans notre pays de nouvelles technologies en vue d’un événement exceptionnel. Pour notre part, nous avons fait le choix d’accompagner le mouvement en déposant de très nombreux amendements.
Si le premier travail d’encadrement qui a été produit par la rapporteure Agnès Canayer est déjà très sécurisant et solide, nos amendements visent à le renforcer encore sur plusieurs points : la durée de l’expérimentation ; la qualité de l’information du public ; la déclaration d’intérêt des prestataires extérieurs qui pourraient être appelés à développer ces systèmes ; le périmètre dans lequel ces systèmes pourraient être déployés ; l’effacement des données non pertinentes qui auraient été collectées pour ces systèmes ; l’indépendance des experts, dont nous souhaitons qu’ils remettent un rapport au Parlement.
Ainsi, nous préférons accompagner le développement de la vidéosurveillance augmentée dans de bonnes conditions, avec un bon niveau d’encadrement et dans un périmètre limité, afin d’obtenir de la puissance publique la garantie qu’elle prendra toutes ses responsabilités dans cette expérimentation, faute de quoi nous risquons de voir arriver d’autres technologies à bas bruit, de manière rampante, hors de tout contrôle législatif.
C’est le pari que nous faisons. Le sort qui sera réservé à nos amendements déterminera notre vote sur l’article.
D’aucuns parlent d’innovations technologiques. Moi, je vois surtout des innovations juridiques qui contribuent à affaiblir l’État de droit ! Cela concerne en premier lieu au droit d’opposition, qui est fondamental. La Cnil vous a alertés sur le sujet dans son analyse, mais le texte n’apporte rien en la matière, si ce n’est une information donnée au public. Le droit d’opposition est absent.
Or cette notion est fondamentale dans la gestion des données numériques. Pour le dire de manière un peu provocatrice, la surveillance à la chinoise, ce n’est vraiment pas notre tasse de thé !
Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.
Lorsqu’on met le doigt dans cet engrenage, on ne sait pas où cela prendra fin. Si l’État de droit et la défense des libertés individuelles deviennent demain un obstacle à l’organisation des grands événements sportifs, seules les dictatures pourront les organiser !
Protestations sur les mêmes travées.
Nous l’avons récemment vu avec la Coupe du monde de football, mais d’autres exemples suivront. Bientôt, les grandes fédérations organiseront leurs événements dans des pays beaucoup moins regardants sur l’État de droit, car, chez nous, il y aura une opposition massive à des mesures en contradiction totale avec certains de nos grands principes.
Depuis quelques minutes, je suis dubitative.
Les épreuves de surf des jeux Olympiques se tiendront à Tahiti, dans une petite commune située à environ deux heures trente en voiture de Papeete. Concrètement, comment comptez-vous faire appliquer de tels dispositifs de sécurité, même à titre expérimental, sous mes cocotiers ?
Rires.
Vous pouvez rire, mais, alors que nous étions enthousiastes et que nous nous préparions à accueillir à bras ouverts les épreuves de surf sur notre territoire, avec ce que j’entends depuis quelques minutes, je commence à avoir un peu peur.
Si un tel dispositif se déployait aussi chez nous, il y aurait une petite révolution ; les citoyens nous demanderaient ce que nous avons encore voté au Parlement…
Comment le Gouvernement compte-t-il appliquer un tel dispositif en Polynésie française, où se dérouleront les épreuves de surf ?
Applaudissements sur les travées des groupes GEST et CRCE.
Je remercie notre collègue polynésienne de son intervention, qui est très pertinente. Ce qui peut paraître flagrant dans son territoire est également vrai dans les autres.
Comme l’a très bien dit Sylvie Robert, c’est un véritable problème de vision de la société qui se pose. Là, c’est une vision sécuritaire, avec un contrôle par des intelligences artificielles. Big Brother is watching you !
Je comprends la position de Jérôme Durain, qui souhaite accompagner un mouvement expérimental. Mais pour aller où ? Nous ne sommes pas prêts à accompagner un mouvement vers un modèle de société qui ne convient ni à la Polynésie ni aux territoires métropolitains !
Je mets aux voix les amendements identiques n° 47 et 63.
J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
Le scrutin a lieu.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.
Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 111 :
Le Sénat n’a pas adopté.
Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 68, présenté par MM. Dossus, Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco, MM. Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 1
Remplacer les mots :
et jusqu’au 30 juin 2025
par les mots :
à compter du 1er juillet et jusqu’au 15 septembre 2024
II. – Alinéa 34, deuxième phrase
1° Remplacer le mot :
avant
par le mot :
après
2° Remplacer la date :
30 juin 2025
par la date :
15 septembre 2024
La parole est à M. Thomas Dossus.
L’article 7 prévoit un traitement algorithmique des données de vidéosurveillance sur une durée limitée, ce qui pose un certain nombre de problèmes en termes de libertés publiques. Dans son avis du 8 décembre 2022, la Cnil estime que ces « outils d’analyse automatisée des images » peuvent « conduire à un traitement massif de données à caractère personnel ». Cela comporte un risque d’atteinte à la vie privée et aux droits fondamentaux.
Cette expérimentation, au-delà de son caractère scandaleux dès lors qu’elle touche à nos libertés publiques, doit, nous dit-on, avoir une durée limitée. Mais qu’en est-il réellement ? Loin d’être une mesure circonscrite aux seuls jeux Olympiques et Paralympiques – c’est ce dont nous sommes censés discuter aujourd’hui –, elle s’étend de la promulgation de la loi jusqu’à un an après la cérémonie de clôture des jeux.
Alors que les jeux durent deux mois, nous nous retrouvons avec une expérimentation qui dure deux ans : cherchez l’erreur ! Voilà qui est révélateur des véritables intentions du Gouvernement : une fuite en avant techno-sécuritaire ! On veut gaver nos algorithmes de données. L’utilisation de ces dispositifs dans le simple cadre des jeux Olympiques et Paralympiques est, en soi, problématique. De tels délais extensifs sont dangereux.
C’est pourquoi nous proposons de ramener l’expérimentation à un cadre temporel plus raisonnable, correspondant à l’intitulé du projet de loi, c’est-à-dire la durée des jeux Olympiques et Paralympiques.
L’amendement n° 21, présenté par MM. Durain et Lozach, Mme Féret, M. Kanner, Mmes de La Gontrie, S. Robert et Lubin, M. Bourgi, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie, Sueur, Antiste, Assouline, Chantrel et Magner, Mme Monier, M. Stanzione, Mmes Van Heghe et Conconne, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier, Poumirol et Rossignol, M. Devinaz et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
I. – Alinéas 1 et 34, deuxième phrase
Remplacer la date :
30 juin 2025
par la date :
30 septembre 2024
II. – Alinéa 34, deuxième phrase
Remplacer le mot :
avant
par le mot :
après
La parole est à Mme Laurence Harribey.
Comme l’ont expliqué Mme la secrétaire d’État et mon collègue Jérôme Durain, nous sommes dans le cadre d’une expérimentation. Or une expérimentation a nécessairement un début et une fin.
Soyons logiques. Le fait qu’elle doive débuter dès la promulgation de la loi nous permettra d’avoir suffisamment de recul d’ici à l’ouverture des jeux pour, le cas échéant, affiner et formuler des conseils aux fabricants d’algorithmes, comme l’a recommandé la présidente de la Cnil. Mais, et vous l’avez très bien dit, madame la secrétaire d’État, l’expérimentation doit servir à évaluer. Cela suppose donc qu’elle s’arrête à un moment donné. Et, pour nous, ce moment, c’est la fin des jeux Olympiques. Cela nous évitera d’être saisis d’un projet de loi avant de disposer des résultats de l’évaluation, comme plusieurs intervenants en ont émis la crainte. Évaluons d’abord, et nous déciderons d’éventuelles mesures à adopter ensuite.
Tel est l’esprit de cet amendement.
Ces deux amendements visent à réduire la durée de l’expérimentation relative à la vidéoprotection intelligente.
Le principe d’une expérimentation implique effectivement une limitation dans le temps, mais également une évaluation. Et cette évaluation doit pouvoir être réalisée dans les mêmes conditions que la mise en œuvre de l’expérimentation.
Il est donc important de poursuivre l’expérimentation, certes dans un délai raisonnable, mais au-delà de la durée des jeux Olympiques, afin que les algorithmes puissent continuer à s’entraîner et que nous puissions procéder à l’évaluation.
Par ailleurs, il convient que l’expérimentation dure au-delà de la période d’évaluation pour laisser au Parlement le temps de se prononcer sur l’opportunité de sa pérennisation. À défaut, elle tomberait de fait.
Nous proposons donc que l’expérimentation dure jusqu’au 30 juin 2025, avec remise d’un rapport six mois avant cette date. C’est un bon équilibre.
La commission émet un avis défavorable sur ces deux amendements.
La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie, pour explication de vote.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. J’attendais avec beaucoup d’intérêt l’explication du Gouvernement. Si vous vous fiez à l’avis de Mme la rapporteure, ce n’est plus la peine d’occuper le banc du Gouvernement.
Exclamations sur les travées des groupes Les Républicains et UC.
Plus sérieusement, la durée de cette prétendue expérimentation est un point essentiel. C’est ce que beaucoup qualifient de cheval de Troie. Sous prétexte d’expérimentation, vous mettez en place pendant deux ans un dispositif qui n’est pas nécessaire pendant une si longue période.
D’ailleurs, si vous souhaitez entraîner les algorithmes – j’ai compris que c’était l’expression consacrée –, vous aurez tout loisir de le faire cette année, puisque nous accueillons la Coupe du monde de rugby.
Je le précise, nous serons amenés à décider de notre vote sur l’article en fonction du sort qui sera réservé à nos amendements sur le sujet, même si le travail extrêmement précis de Mme la rapporteure et de la commission a permis d’améliorer et de compléter le texte.
Madame la secrétaire d’État, je suis un esprit simple : encore une fois, je ne comprends pas par quel raisonnement on justifie de poursuivre pendant deux ans une expérimentation pour pouvoir l’évaluer. C’est sur la nécessité de cette prolongation un an après les JO que je souhaite entendre le Gouvernement.
Madame la secrétaire d’État, ce que vous nous demandez de voter, c’est un cavalier législatif !
Nous sommes réunis aujourd’hui pour examiner un texte qui prévoit des mesures exceptionnelles pour le bon déroulement des jeux Olympiques. Prolonger l’expérimentation que vous nous proposez au-delà de cet événement relève bien du cavalier législatif, et le Conseil constitutionnel aura sans doute à se prononcer à cet égard.
Si vous souhaitez une loi qui permette, par des procédés algorithmiques, de développer des systèmes de protection et de sécurité, il suffit de déposer un texte spécifique, et nous en débattrons. Mais vous ne pouvez pas utiliser celui qui concerne les jeux Olympiques pour avancer toute votre machinerie sur la gestion algorithmique des populations.
Je vous le redis avec force et solennité, madame la secrétaire d’État : ce qu’il s’agit de défendre, c’est l’acceptabilité sociale des jeux Olympiques. Si nos concitoyens ont le sentiment que l’organisation d’un tel événement est matière à problèmes de circulation, de santé, de transports, de congés et de sécurité, ils refuseront systématiquement les jeux Olympiques, et Paris sera la dernière ville à les organiser.
M. Jean-Claude Requier s ’ exclame.
Il nous faut faire preuve d’une grande vigilance s’agissant de cette expérimentation, que d’aucuns ont d’ailleurs qualifiée de changement de paradigme, peut-être même civilisationnel.
Je ne suis pas du tout convaincue par les propos de Mme la rapporteure, pour qui il faut prolonger l’expérimentation pour évaluer et faire s’entraîner les algorithmes.
Je lui pose donc cette question très simple : quelles sont, jusqu’en 2025, les manifestations qui nous permettront d’entraîner ces algorithmes ? La cohérence intellectuelle voudrait que nous fassions l’expérimentation, que nous l’arrêtions juste à la fin des jeux Olympiques, que nous l’évaluions ensuite et qu’en fonction de ce qui en sortira, nous revenions devant le Parlement pour décider de sa généralisation.
Il y a là quelque chose que je ne comprends pas.
Madame la présidente, lorsque je suis intervenue sur l’article 7, vous m’avez à juste titre interrompue, car j’avais dépassé le temps de parole qui m’était imparti. Mais je demandais à Mme la secrétaire d’État pourquoi cette expérimentation était étendue aux manifestations sportives, culturelles et récréatives. J’aimerais obtenir une réponse.
Le milieu culturel n’est pas du tout rassuré par les débats que nous avons eus sur le sujet ; j’ai reçu un certain nombre de messages en ce sens.
Madame la secrétaire d’État, il est important que vous nous apportiez des précisions et des explications.
Nous ne souhaitions pas cette expérimentation, pour les raisons que nous avons déjà évoquées ou que d’autres ont exposées.
Comme Pierre Ouzoulias et moi-même avons eu l’occasion de le dire en commission des lois, si c’était un sénateur qui avait proposé de prolonger l’expérimentation un an ou deux après les JO, son amendement aurait été déclaré irrecevable.
Pour nous, c’est cet article qui est irrecevable ! C’est un vrai cavalier, puisque vous voulez changer un certain nombre de nos règles de droit en matière de sécurité lors de l’examen d’un projet de loi sur les jeux Olympiques et Paralympiques.
Le résultat, outre un changement de paradigme, sera très clair : dans quelques années, aucune ville, aucun pays du monde, sauf les dictatures, ne sera capable d’organiser des jeux Olympiques !
Mme Sonia Backès, secrétaire d ’ État. La question du traitement des mouvements de foule dans l’organisation des jeux Olympiques et Paralympiques est au cœur des préoccupations du Gouvernement. L’article 7 y répond.
M. Guy Benarroche s ’ exclame.
Comme l’a très bien expliqué Mme la rapporteure, et c’est pour cela que je m’en suis remise à son avis, l’expérimentation vise, d’une part, à recueillir le maximum de données pour pouvoir faire une évaluation – à ce propos, je rappelle que le rapport sera remis six mois avant la fin de la période expérimentale – et, d’autre part, à avoir le terrain le plus large possible. C’est la raison pour laquelle on parle exclusivement des grands événements. Dans ces conditions, pour aboutir à une évaluation pertinente, il faut évidemment une durée suffisante.
L’élargissement aux manifestations culturelles et récréatives répond, quant à lui, à une demande du Conseil d’État, qui, pour permettre l’évaluation la plus claire possible, a souhaité ne pas se limiter aux manifestations sportives, comme cela avait été initialement proposé par le Gouvernement.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L’amendement n° 44 rectifié, présenté par Mme M. Carrère, MM. Artano, Bilhac et Cabanel, Mme N. Delattre, MM. Fialaire, Requier, Roux et Gold, Mmes Guillotin et Pantel et MM. Corbisez, Guiol et Guérini, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Après les mots :
par leur
insérer les mots :
caractère exceptionnel ainsi que leur
La parole est à M. Bernard Fialaire.
Le mécanisme que nous examinons ici n’a rien d’anodin, puisqu’il s’agit d’autoriser l’utilisation de traitements algorithmiques en matière de vidéosurveillance.
Les bouleversements qu’introduit une telle expérimentation ont déjà été soulignés. D’ailleurs, la commission des lois en a conscience, puisque le texte qu’elle nous présente a déjà intégré des mécanismes de contrôle supplémentaires.
Dans cette perspective, nous nous permettons de rappeler la prise de position de la Cnil, selon laquelle les « conditions d’application à cette nouvelle technologie des règles relatives à la protection des données et des principes protégeant les droits fondamentaux sont, en partie, incertaines ou à construire ». Aussi, face aux incertitudes, nous croyons que le dispositif doit être strictement limité et encadré.
L’article 7 introduit deux conditions retenues alternativement, pour que le dispositif puisse être engagé : l’ampleur ou les circonstances de l’événement. Cependant, comme nous ne savons pas comment seront interprétés ces critères par les administrations et les juges, peut-être serait-il raisonnable dans un premier temps de les renforcer. Aussi proposons-nous d’ajouter une troisième condition : le caractère exceptionnel de l’événement.
Avec une telle condition, les rencontres hebdomadaires des compétitions nationales de football ou de rugby seraient exclues. En revanche, des matchs exceptionnels tels que la réception au Stade de France de la finale de la Ligue des champions au mois de mai dernier auraient pu entrer dans le dispositif.
La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
Si nous comprenons la volonté de sécuriser au maximum le dispositif – c’est d’ailleurs ce que la commission des lois a tenté de faire –, encore faut-il que ce soit opérationnel. Les événements exceptionnels ne sont pas nécessairement ceux où les risques sont les plus nombreux ; on peut penser aux marchés de Noël, aux marathons, au 14 juillet, etc. Ajouter une telle condition ne permettra pas de rendre opérant le dispositif ni de couvrir l’ensemble des événements auxquels est destinée la vidéoprotection intelligente.
Le Gouvernement émet également un avis défavorable sur cet amendement.
Comme l’a souligné Mme la rapporteure, le caractère exceptionnel ne suffit pas à rendre le risque réel. Il existe des manifestations qui se tiennent régulièrement, mais dont les caractéristiques particulières nécessitent ce type de dispositif.
Ajouter un tel critère limiterait donc le champ des possibles.
M. Guy Benarroche s ’ exclame.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L’amendement n° 43 rectifié, présenté par Mme M. Carrère, MM. Artano, Bilhac et Cabanel, Mme N. Delattre, MM. Fialaire, Requier, Roux et Gold, Mmes Guillotin et Pantel et MM. Corbisez, Guiol et Guérini, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Remplacer la deuxième occurrence du mot :
ou
par le mot :
et
La parole est à M. Bernard Fialaire.
Cet amendement a le même objectif que le précédent : renforcer les contours juridiques du recours aux algorithmes pour en limiter l’usage.
Pour y parvenir, nous proposons de rendre cumulatives les deux conditions d’ampleur et de circonstances qui permettent de désigner un événement. Nous le voyons bien, si ces conditions sont alternatives, les limites seront très difficiles à tracer ; on trouvera toujours une circonstance pour dire qu’il fallait activer le dispositif.
Il faut donc avancer prudemment et progressivement, et limiter tout risque d’excès en rendant cumulatives les conditions d’ampleur et de circonstances de l’événement.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L’amendement n° 60, présenté par MM. Dossus, Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco, MM. Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 1
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
Cette expérimentation ne saurait en aucun cas préjuger d’une pérennisation de ces traitements.
La parole est à M. Thomas Dossus.
Nous sommes très attachés à la notion d’héritage des JO, et nous souhaitons que l’événement laisse une trace pérenne dans notre pays. Pour autant, nous n’acceptons pas la politique du pied dans la porte, et nous ne souhaitons pas que la société de surveillance fasse partie de cet héritage.
Pour nous, il n’y a pas de nécessité absolue à déployer une telle technologie. Nous ne sommes pas dupes : il y a dans la démarche expérimentale que l’on nous propose un moyen d’habituer la population à cette nouvelle étape vers la surveillance globale.
Premier problème, le Conseil d’État et la Cnil considèrent que les traitements algorithmiques représentent une menace pour les droits fondamentaux des individus.
D’après la Cnil, ces outils constituent non une simple évolution technologique, comme on essaie de nous le vendre depuis tout à l’heure, mais une modification de la nature des dispositifs vidéo pouvant entraîner des risques importants pour les libertés individuelles et collectives et un risque de surveillance et d’analyse dans l’espace public. La Cnil précise au passage qu’il est nécessaire d’empêcher tout phénomène d’accoutumance et de banalisation de ces technologies.
Second problème, l’utilisation des systèmes d’intelligence artificielle est aujourd’hui dépourvue de cadre légal propre, dans le droit national comme dans le droit de l’Union européenne. Une proposition de règlement européen sur les systèmes d’intelligence artificielle est en cours d’élaboration, mais rien n’existe à l’heure actuelle.
Ne nous leurrons pas devant l’objectif à peine voilé du Gouvernement d’étendre la portée de ces dispositifs par le droit : la durée extensive de l’expérimentation dont nous venons de débattre et le contenu du texte sont autant de preuves de la volonté de pérenniser ces expérimentations.
Parce que nous refusons la banalisation de ces dispositifs sécuritaires, face au risque des dérives potentielles et dans l’attente d’une actualisation de la réglementation européenne, nous proposons d’inscrire expressément dans la loi que l’expérimentation n’a pas à être pérennisée d’office.
Il faudra nécessairement une loi pour assurer la pérennisation de l’expérimentation, qui ne se fera en aucun cas de manière automatique. L’amendement est donc satisfait. Avis défavorable.
Même avis.
Le Gouvernement a opté pour le principe de l’expérimentation, qui donnera lieu à une évaluation, donc à un passage, le cas échéant, devant le Parlement pour sa pérennisation.
Je rappelle que ce texte suit les préconisations de la Cnil. Celle-ci sera informée des conditions de mise en œuvre du dispositif.
Qui plus est, sur le fondement des préconisations qu’elle a émises, le dispositif est soumis à des garanties extrêmement fortes.
D’abord, il est expérimental et utilisable uniquement pendant les grands événements.
Ensuite, des garanties sur l’utilisation du logiciel en matière d’information du public, de conservation des données, de contrôle humain, de formation des agents sont prévues. Elles ont fait l’objet d’un amendement de Mme la rapporteure adopté en commission.
En outre, les algorithmes sont soumis à des garanties au travers d’un décret pris après avis de la Cnil. De surcroît, seul l’État pourra utiliser un tel dispositif.
Enfin, c’est le préfet qui détermine, en fonction de la manifestation, du territoire géographique et d’un certain nombre d’éléments, si, oui ou non, le dispositif peut être utilisé.
Tout cela permet de cadrer le dispositif et d’avoir l’expérimentation la plus efficace possible.
Chat échaudé craint l’eau froide…
Mme la rapporteure devrait savoir à quoi je fais allusion : il n’est pas idiot de préciser dans la loi que l’expérimentation ne peut pas être automatiquement généralisée. En effet, un certain nombre d’expérimentations l’ont été avant toute évaluation. Je pense par exemple aux cours criminelles départementales, qui ont été généralisées avant même d’être évaluées ; d’ailleurs, si l’évaluation avait eu lieu, il n’y aurait sans doute pas eu de généralisation.
Préciser que ce n’est pas automatique me paraît donc une bonne idée.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L’amendement n° 97, présenté par M. Théophile et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Remplacer le mot :
entrainement
par le mot :
entraînement
La parole est à M. Dominique Théophile.
L ’ amendement est adopté.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à vingt heures, est reprise à vingt-et-une heures trente, sous la présidence de Mme Valérie Létard.