Séance en hémicycle du 9 novembre 2023 à 14h30

Résumé de la séance

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La séance

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La séance, suspendue à treize heures, est reprise à quatorze heures trente, sous la présidence de M. Alain Marc.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration (projet n° 304 [2022-2023], texte de la commission n° 434 rectifié [2022-2023], rapport n° 433 [2022-2023]).

La procédure accélérée a été engagée sur ce texte.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

Dans la discussion des articles, nous poursuivons l’examen des amendements tendant à insérer un article additionnel après l’article 7.

L’amendement n° 61 rectifié ter, présenté par Mmes V. Boyer et Belrhiti, M. H. Leroy, Mme Dumont, MM. Daubresse et Meignen, Mme Bellurot, MM. Bouchet, Tabarot et Houpert, Mme Garnier, MM. Cadec et Genet, Mme Jacques, MM. Sido et Klinger, Mmes Josende et Goy-Chavent et M. Gremillet, est ainsi libellé :

Après l’article 7

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article 175-2 du code civil est ainsi modifié :

1° Le deuxième alinéa est ainsi rédigé :

« Le procureur de la République est tenu, dans les quinze jours de sa saisine, soit de faire opposition à celui-ci, soit de décider qu’il sera sursis à sa célébration, dans l’attente des résultats de l’enquête à laquelle il fait procéder, soit de donner injonction de procéder au mariage. Il fait connaître sa décision motivée à l’officier de l’état civil et aux intéressés. À défaut de décision motivée dans le délai imparti, il est réputé avoir décidé un sursis à la célébration du mariage de deux mois. » ;

2° Au troisième alinéa, les mots : « un mois renouvelable » sont remplacés par les mots : « deux mois renouvelables ».

La parole est à Mme Valérie Boyer.

Debut de section - PermalienPhoto de Valérie Boyer

À la suite de nos échanges de la nuit dernière, en fin de séance, vers deux heures du matin, j’ai procédé à la rectification de l’amendement n° 61 rectifié bis. Sa nouvelle rédaction vise à ne plus se contenter de doubler la durée du sursis qui peut être prononcé par le procureur de la République.

L’amendement a désormais un double objet.

Premièrement, il vise à obliger le procureur de la République à prendre position en faveur du mariage envisagé s’il ne décide pas d’une opposition ou d’un sursis. L’amendement supprime la formule actuelle de « laisser procéder au mariage », qui donne à entendre une certaine passivité, tout à fait symptomatique du laisser-faire actuel.

Il faut que le procureur de la République assume véritablement la responsabilité du mariage et donne injonction au maire de le célébrer par instruction écrite en tant qu’autorité de supervision de l’état civil. En effet, le maire est un simple agent de l’État en la matière. Autant formaliser cette injonction pour qu’il soit déchargé du poids qui pèse sur ses épaules en cas de mariage frauduleux.

Deuxièmement, au cas où le procureur de la République ne se prononcerait pas, l’amendement vise à appliquer un sursis de deux mois avant d’obliger le magistrat à prendre position.

Cet amendement ne va pas aussi loin que je le souhaiterais, mais il s’agit d’une première étape. Nous devons continuer à creuser la question en vue d’élaborer des solutions pour venir en aide aux maires, soit au cours de la navette, soit dans le cadre d’un autre texte à une date que M. le ministre nous indiquera peut-être.

En effet, l’amendement ne règle pas le problème de fond. Il faut aller au bout du raisonnement : si le procureur de la République demande, en tant que responsable de l’état civil, de procéder à un mariage, il faudrait, à mon avis, qu’il l’impose. Faute de quoi, il faudrait trouver une autre formule afin que le maire ne se retrouve pas, en quelque sorte, à devoir arbitrer entre des injonctions contraires.

La position du maire est extrêmement délicate. Il se retrouve sous contrainte, obligé de procéder à un mariage même si les documents qu’il a en sa possession ou l’entretien qu’il a mené ne satisfont pas aux critères qui autorisent selon lui la cérémonie.

Par cet amendement, je veux que nous allions aujourd’hui dans le sens de la protection des maires et de la responsabilité des procureurs de la République.

Debut de section - PermalienPhoto de Muriel Jourda

Cet amendement a été rédigé hâtivement, mais non sans réflexion. Il semble faire progresser le débat sur la question qui a été soulevée par de nombreux collègues, y compris par M. le ministre, hier, en séance. Lorsque les maires officient, ils le font pour le compte de l’État. Il faut donc que celui-ci prenne ses responsabilités. Cet amendement permet, de cette façon, de satisfaire à cet objectif.

Même s’il pourra sans doute être amélioré – et ce débat se poursuivre –, en l’état, la commission émet un avis favorable sur cet amendement.

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

Je découvre la nouvelle rédaction de l’amendement de Mme Boyer. Nous avions envisagé hier de consulter la Chancellerie puisque cette compétence relève du garde des sceaux, ministre de la justice.

Sourires sur les travées des groupes SER, CRCE-K et GEST.

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

Je suis en faveur de la modification étendant – si j’ai bien compris la réflexion – le sursis à deux mois. Comme Mme la rapporteure, je promets, madame la sénatrice, de travailler avec vous en vue de l’examen de la mesure par l’Assemblée nationale. Peut-être pourrons-nous organiser une réunion avec les services du garde des sceaux ?

L’amendement va dans le bon sens puisque vous précisez le propos collectif d’hier. Le Gouvernement émet donc un avis favorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

La parole est à Mme Marie-Do Aeschlimann, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Do AESCHLIMANN

Je m’associe à cet échange pour avoir, comme notre collègue Valérie Boyer, réfléchi sur cette question.

Certes, je n’étais pas physiquement présent hier soir, mais j’ai suivi, en ligne, les débats. À cet égard, je vous remercie, monsieur le ministre, pour vos propos : vous avez su faire la part des choses.

D’un côté, vous avez pris en compte l’intérêt des maires à faire prévaloir leur volonté de ne pas célébrer des mariages non souhaités et éviter ainsi que la législation soit détournée.

D’un autre côté, vous avez tenu compte d’une certaine réalité des faits : les procureurs de la République et les parquets rencontrent des difficultés à faire face à un certain nombre de requêtes, sans doute de plus en plus nombreuses. Nonobstant le fait qu’ils disposent d’une équipe et sont assistés de substituts, ce n’est sans doute pas évident de donner suite aux demandes des maires.

J’avais défendu hier l’amendement n° 492 rectifié bis, qui allait dans le même sens que celui de Valérie Boyer. Comme les maires du département des Hauts-de-Seine et tous les autres de façon générale, soucieux que la réglementation et la législation soient respectées, je serai très attentive à ce que cette préoccupation des premiers magistrats de nos communes soit attentivement prise en compte dans le cadre de la navette, ainsi que nous l’a très aimablement proposé M. le ministre.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

La parole est à M. Bruno Retailleau, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

Nous nous étions quittés hier soir en formulant ce vœu : trouver enfin une rédaction qui soit robuste en matière de protection des maires face à ces mariages. Je salue vraiment la commission et l’engagement du ministre ; je rends à César ce qui est à César en remerciant Valérie Boyer et Marie-Do Aeschlimann, qui ont convergé vers cette idée.

Nous sommes la chambre des territoires. Nous accordons une importance fondamentale à la fonction de maire ; ces édiles sont souvent mis sous pression, y compris dans ce genre de circonstances. Nous voterons, bien entendu, avec une grande joie pour cet amendement ainsi rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

La parole est à M. Olivier Henno, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Henno

Nous revendiquerons donc nous aussi une forme de paternité, si vous le permettez !

Je remercie à mon tour la commission, le ministre et Mme Boyer. Même si cet amendement n’est pas une révolution, faire passer le sursis d’un à deux mois permettra aux maires d’avoir un peu plus de temps pour faire face à une question éminemment complexe. Pour avoir été confronté à ce type de situation, je puis attester qu’il est bien difficile de juger du bien-fondé d’un mariage, et l’on n’est jamais totalement sûr de son jugement.

Il s’agit donc d’une avancée. Elle sera appréciée. Je trouve positif que cette mesure soit issue de la chambre des territoires, pour reprendre la formule de M. Retailleau.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

La parole est à Mme Corinne Narassiguin, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne NARASSIGUIN

Les maires – je le rappelle – sont des officiers d’état civil ; à ce titre, ils ont donc le devoir d’appliquer la loi et de célébrer les mariages, quelles que soient leurs opinions politiques.

Par ailleurs, dans la législation, il existe déjà suffisamment de dispositions qui interdisent les mariages blancs et les mariages forcés.

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

Vous avez été maire ?

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne NARASSIGUIN

La question est donc non pas tant celle d’un changement de la loi que des moyens nécessaires pour la faire appliquer.

À ce propos, je souhaite dénoncer un mariage blanc qui a eu lieu hier dans cet hémicycle…

Sourires et applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE-K et GEST. – Protestations sur les travées des groupes Les Républicains et UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Yannick JADOT

M. Yannick Jadot. C’est un mariage d’amour !

Nouveaux sourires sur les travées des groupes GEST, SER et CRCE-K.

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne NARASSIGUIN

Ce mariage de papier permet à M. Retailleau et à son groupe de crier victoire, et à M. le ministre Darmanin de s’assurer un vote par le Sénat de ce projet de loi mardi prochain.

Se pose maintenant la question de l’avenir de cette transaction matrimoniale au cours de la navette.

Irons-nous vers une annulation ? L’annonce par le président de la commission des lois de l’Assemblée nationale du retour au texte initial donnera l’excuse attendue par le groupe d’Éric Ciotti pour déposer une motion de censure contre le Gouvernement. Cette dernière donnera peut-être lieu à de nouveaux types de mariage blanc…

À l’inverse, nous dirigeons-nous vers la consommation de ce mariage, monsieur Darmanin

M. Yannick Jadot sourit.

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

M. Gérald Darmanin, ministre. Je ne répondrai pas aux provocations, madame la sénatrice. Ce serait bien que vous soyez maire pour vous rendre compte de la manière dont les choses se passent dans le monde réel.

Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

La parole est à Mme Valérie Boyer, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Valérie Boyer

Il faudrait peut-être revenir sur le non-cumul !

Je remercie la commission et mes collègues du groupe Union Centriste, en particulier M. Henno, ainsi que Marie-Do Aeschlimann, qui avait interrogé hier le Gouvernement, et M. Retailleau. Ils ont permis de faire avancer ce texte.

J’avais défendu ces amendements lors de l’examen de la loi du 10 septembre 2018 pour une immigration maîtrisée, un droit d’asile effectif et une intégration réussie, dite loi Collomb. Ils avaient été rejetés d’un revers de main, avec beaucoup de mépris. Pourtant, la situation à laquelle sont exposés nos maires est difficile. Comme il a été dit, ces derniers sont sous pression face à ces affaires de mariage.

Beaucoup reste à faire. Je prends note de ce que vous avez proposé, monsieur le ministre. J’espère que nous pourrons élaborer un texte bien plus étoffé et sérieux. Cet amendement est un premier pas. Il convient d’aller bien plus loin sur cette question de la subordination du maire au procureur de la République, en tant qu’officier d’état civil. Il faut avancer et ne pas laisser, encore une fois, ces élus faire face à des injonctions contradictoires. C’est très bien que cette mesure soit prise ici, au Sénat.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

Avant de vous donner la parole, madame de La Gontrie, je rappelle un élément de procédure : lorsque M. le ministre demande la parole, il a la priorité.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Pierre de La Gontrie

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. C’est bien le problème…

M. le ministre s ’ exclame.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Pierre de La Gontrie

C’est toujours quand il veut… Le ministre de l’intérieur imagine les choses ainsi.

Je vous prie d’abord de m’excuser pour la remarque suivante, qui n’était pas l’objet de mon intervention.

Vous menez incontestablement, monsieur le ministre, ce débat avec beaucoup d’engagement et un certain talent…

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

C’est bien de le reconnaître !

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Pierre de La Gontrie

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Pour autant, lorsque Mme Narassiguin souligne l’existence sur ce texte d’un mariage arrangé entre Les Républicains et le groupe Union Centriste, je ne suis pas sûre – il faut sans doute mettre cela sur le compte de la fatigue – que vous deviez lui répondre totalement à côté. Votre association de la fonction de maire au fait de savoir de quoi nous parlons fait toujours plaisir : une femme est d’abord quelqu’un d’incompétent !

M. Ian Brossat applaudit. – Protestations sur les travées du groupe Les Républicains. – M. le ministre s ’ exclame.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Pierre de La Gontrie

Je précise que nous avons tous ici célébré des mariages, que nous ayons eu à connaître ou non ce type de difficultés. Par conséquent, épargnez-vous ce genre de remarque !

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

Vous n’avez pas été maire !

Debut de section - PermalienPhoto de Valérie Boyer

Avec La France insoumise, le mariage est-il forcé ou arrangé ?

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Pierre de La Gontrie

En outre, même si toutes ces dispositions permettent à Mme Boyer – je la reconnais là… – et à la droite de se présenter comme intransigeantes, nous savons qu’elles ne passeront pas le cap du Conseil constitutionnel ! Certes, M. Henno fronce le sourcil droit, mais, sur le plan légistique, …

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Pierre de La Gontrie

… cet amendement, en ce qu’il tend à modifier le code civil, n’a absolument aucun lien avec le projet de loi. Par conséquent, il tombe sous le coup de l’article 45 de la Constitution et le Conseil constitutionnel le censurera.

De fait, tout ce que nous sommes en train de faire sera nul et non avenu.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Pierre de La Gontrie

Qu’est-ce qui est « insupportable » ? La Constitution ? Alors, changez-la, madame Boyer !

Debut de section - PermalienPhoto de Valérie Boyer

Précisément, nous voulons un référendum !

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

Pas d’interpellation, je vous prie.

Je mets aux voix l’amendement n° 61 rectifié ter.

L ’ amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 7.

L’amendement n° 59 rectifié, présenté par Mmes V. Boyer et Belrhiti, M. H. Leroy, Mme Dumont, MM. Daubresse et Meignen, Mme Bellurot, MM. Bouchet, Tabarot, Saury, Sido et Klinger et Mmes Josende, Goy-Chavent et Aeschlimann, est ainsi libellé :

Après l’article 7

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au dernier alinéa de l’article 63 du code civil, les mots : « 3 à 30 » sont remplacés par le nombre : « 750 ».

La parole est à Mme Valérie Boyer.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

L’amendement n° 57 rectifié, présenté par Mmes V. Boyer et Belrhiti, M. H. Leroy, Mme Dumont, MM. Daubresse et Meignen, Mme Bellurot, MM. Bouchet, Tabarot, Michallet, Genet et Saury, Mme Puissat, MM. Bruyen, Sido et Klinger et Mmes Josende, Goy-Chavent et Aeschlimann, est ainsi libellé :

Après l’article 7

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :

1° L’article L. 2122-32 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Le maire désigne parmi ses adjoints officiers d’état civil un ou plusieurs référents en matière de détection des mariages envisagés dans un but autre que l’union matrimoniale chargé de les conseiller, en particulier dans la conduite des auditions prévues au 2° de l’article 63 du code civil. » ;

2° Le deuxième alinéa de l’article L. 2511-26 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Le maire d’arrondissement désigne parmi ses adjoints officiers d’état civil un référent en matière de détection des mariages envisagés dans un but autre que l’union matrimoniale chargé de les conseiller, en particulier dans la conduite des auditions prévues au 2° de l’article 63 du code civil. »

La parole est à Mme Valérie Boyer.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

L’amendement n° 56 rectifié bis, présenté par Mmes V. Boyer et Belrhiti, M. H. Leroy, Mme Dumont, MM. Daubresse et Meignen, Mme Bellurot, MM. Bouchet et Tabarot, Mme Garnier, MM. P. Martin, Genet et Saury, Mme Jacques, MM. Sido, Somon et Klinger et Mmes Josende, Goy-Chavent et Aeschlimann, est ainsi libellé :

Après l’article 7

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La première phrase du troisième alinéa de l’article L. 2123-12 du code général des collectivités territoriales est complétée par les mots : «, qui peut intégrer une formation à la détection des mariages envisagés dans un but autre que l’union matrimoniale pour ceux de ses membres qui remplissent les fonctions d’officier de l’état civil. »

La parole est à Mme Valérie Boyer.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

L’amendement n° 56 rectifié bis est retiré.

Je suis saisi de cinq amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 153 rectifié, présenté par M. Durain, Mmes de La Gontrie et Narassiguin, MM. Bourgi et Chaillou, Mme Harribey, M. Kerrouche, Mme Linkenheld, M. Roiron, Mme Brossel, M. Chantrel, Mmes Conway-Mouret et G. Jourda, MM. Kanner et Marie, Mmes S. Robert et Rossignol, MM. Stanzione, Temal, Tissot, M. Vallet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 7

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le livre IV du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est ainsi modifié :

1° Le chapitre Ier du titre II est complété par une section ainsi rédigée :

« Section … : Étranger confié au service de l’aide sociale à l’enfance

« Art. L. 421 -36. – Dans l’année qui suit son dix-huitième anniversaire, l’étranger qui a été confié au service de l’aide sociale à l’enfance entre l’âge de seize ans et l’âge de dix-huit ans, et qui justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention “salarié” ou “travailleur temporaire” d’une durée d’un an, sans que lui soit opposable, ni la situation de l’emploi, ni la condition prévue à l’article L. 412-1.

« Cette carte est délivrée sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de la formation qui lui a été prescrite et de l’avis de la structure d’accueil sur son insertion dans la société française. » ;

2° Le chapitre II du titre II est complété par une section ainsi rédigée :

« Section … : Étranger confié au service de l’aide sociale à l’enfance

« Art. L. 422 -…. – Dans l’année qui suit son dix-huitième anniversaire, l’étranger qui a été confié au service de l’aide sociale à l’enfance entre l’âge de seize ans et l’âge de dix-huit ans, et qui justifie suivre depuis au moins six mois un enseignement en France ou qu’il y fait des études, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention « étudiant » d’une durée d’un an, sans que lui soit opposable la condition prévue à l’article L. 412-1.

« Cette carte est délivrée sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation et de l’avis de la structure d’accueil sur son insertion dans la société française. » ;

3° Au 1° de l’article L. 421-35, après le mot : « articles », est insérée la référence : « L. 421-36, » ;

4° Au second alinéa de l’article L. 423-22 et à la première phrase de l’article L. 435-3, les mots : «, de la nature des liens de l’étranger avec sa famille restée dans son pays d’origine » sont supprimés ;

5° L’article L. 435-3 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Dans les mêmes conditions, l’étranger qui justifie suivre un enseignement en France ou qu’il y fait des études peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention “étudiant” si cette formation n’est pas destinée à lui apporter une qualification professionnelle. »

La parole est à M. Jérôme Durain.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Durain

Monsieur le ministre, vous déclariez à l’Assemblée en septembre 2022 : « Il y a plein de gens qui méritent sans doute des régularisations et qui ne les ont pas aujourd’hui. » Je vous présenterai un cas très concret de régularisation que nous serions bien inspirés de concrétiser.

Le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain avait soutenu dans cet hémicycle la proposition de loi tendant à sécuriser l’intégration des jeunes majeurs étrangers pris en charge par l’aide sociale à l’enfance (ASE), dite proposition de loi Ravacley. Pour mémoire, quand ils arrivent sur le sol français, les mineurs étrangers sont pris en charge par l’État au travers des départements, ces derniers ayant pour mission de s’occuper de l’enfance en danger. Ces jeunes sont hébergés, encadrés par des travailleurs sociaux et formés, pour la plupart en apprentissage. Le dispositif coûte cher : 4 500 euros par mois et par enfant.

Comme en dispose la loi, ils doivent quitter à leurs 18 ans le territoire national. Le gâchis humain et économique est immense ! Ces apprentis travaillent surtout dans des secteurs d’activité qui manquent de bras, comme l’hôtellerie-restauration, les bâtiments et travaux publics (BTP), ainsi que les métiers de bouche, par exemple la boulangerie ou la cuisine. Ils ont suivi une formation : l’État a dépensé de l’argent pour eux. Le coût national est évalué à 2 milliards d’euros pour les 40 000 étrangers mineurs chaque année. J’espère que nous aurons autant d’empathie pour les artisans que nous en avons eu à l’instant pour les maires, car les artisans et les chefs d’entreprise ont besoin de ces salariés compétents. Aussi, nous proposons de mettre fin à cette aberration.

À l’époque, lors de ma défense de la proposition de loi au nom du groupe socialiste, il nous avait été expliqué que les cas étaient réglés par les préfets. Parfois, ils le sont, mais il nous est souvent fait objection qu’une forme d’arbitraire règne : nous avons de nombreux exemples de dossiers écartés.

Par conséquent, nous souhaitons donner droit aux demandes qui sont formulées dans nos permanences, tant à droite qu’à gauche, par des patrons qui veulent garder leurs salariés. Nous souhaitons mettre fin à ce gâchis humain et économique, et faire profiter la France et son économie des richesses que ces enfants peuvent nous apporter.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

L’amendement n° 308 rectifié, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :

Après l’article 7

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article L. 423-22 du code de l’entrée et du séjour des étrangers est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, le mot : « temporaire » est remplacé par le mot : « pluriannuelle » et les mots : « d’un an » sont remplacés par les mots : « de quatre ans » ;

2° Le deuxième alinéa est supprimé.

La parole est à M. Guy Benarroche.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Benarroche

Dans le même sens que celui que vient de présenter Jérôme Durain, le présent amendement a pour objet de proposer la délivrance d’une carte de séjour pluriannuelle « vie privée et familiale » aux mineurs étrangers isolés confiés à l’ASE et devenus majeurs. Cette carte aurait une durée de validité de quatre ans.

La Défenseure des droits, dans le rapport Les mineurs non accompagnés au regard du droit, recommande la reconnaissance de l’« admission au séjour de plein droit des mineurs non accompagnés (MNA) à leur majorité […] quels que soient leurs liens avec leur famille dans leur pays d’origine ».

Un grand nombre de jeunes majeurs, anciennement mineurs isolés, se retrouvent à la rue sans soutien familial ni ressources. Pour Claire Hédon, la délivrance facilitée de titres de séjour portant la mention « vie privée et familiale », comme elle le recommande, permettrait aux mineurs non accompagnés de terminer leur cursus de formation et d’acquérir l’autonomie nécessaire à leur future vie d’adulte.

Afin de mieux assurer la continuité des droits des mineurs non accompagnés lors du passage à la majorité, d’éviter les ruptures et de mieux garantir l’accès à l’autonomie, le présent amendement a pour objet la délivrance d’une carte de séjour pluriannuelle, d’une durée de quatre ans, sans la condition de la nature des liens de l’étranger avec sa famille restée dans le pays d’origine ni la condition de l’avis de la structure d’accueil qui accompagne le mineur.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

Les deux amendements suivants sont identiques.

L’amendement n° 41 rectifié est présenté par M. Brossat, Mme Cukierman et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.

L’amendement n° 307 rectifié est présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 7

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est ainsi modifié :

1° Au second alinéa de l’article L. 423-22, les mots : « de la nature des liens de l’étranger avec sa famille restée dans son pays d’origine » sont supprimés ;

2° La première phrase de l’article L. 435-3 est ainsi modifiée :

a) Au début, les mots : « À titre exceptionnel, l’étranger » sont remplacés par les mots : « L’étranger » ;

b) Le mot : « peut » est supprimé ;

c) Le mot : « voir » est remplacé par le mot : « voit » ;

d) Les mots : «, de la nature des liens de l’étranger avec sa famille restée dans son pays d’origine » sont supprimés.

La parole est à M. Ian Brossat, pour présenter l’amendement n° 41 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Ian BROSSAT

Pour aller dans le même sens que mes deux collègues, notre amendement vise à mettre fin au caractère exceptionnel de la délivrance d’un titre de séjour aux jeunes qui ont été suivis par la protection de l’enfance et qui bénéficient d’un contrat jeune majeur.

Les mobilisations citoyennes récentes, comme celle qu’on a observée autour de la situation de Laye Fodé Traoré, boulanger à Besançon, ont montré le large soutien de la population à la régularisation de ces jeunes.

Ces derniers ont bénéficié d’un accompagnement par la puissance publique, notamment d’une formation. Malheureusement, certains sont contraints de quitter le territoire. Il s’agit d’un grand gâchis et de situations ubuesques auxquelles il conviendrait de mettre fin. Tel est le sens de notre amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

La parole est à M. Guy Benarroche, pour présenter l’amendement n° 307 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Benarroche

Les mineurs non accompagnés confiés à l’ASE ont deux possibilités de régularisation principales à leur majorité : la demande d’un titre de séjour « vie privée et familiale » pour ceux qui ont été confiés à l’ASE avant 16 ans ; la demande d’une admission exceptionnelle au séjour mention « salarié » ou « travailleur temporaire » pour ceux qui l’ont été entre 16 et 18 ans.

Dans les deux cas, certains critères sans lien avec leur intégration en France sont attachés à la délivrance du titre de séjour. Trop souvent, des jeunes pris en charge depuis plusieurs années, intégrés socialement et professionnellement, se voient délivrer une obligation de quitter le territoire français (OQTF).

Ces situations mobilisent non seulement les associations qui ont suivi ces jeunes au sein de la protection de l’enfance, mais également les enseignants et employeurs qui s’investissent dans leur formation. Outre le gâchis que représente une OQTF après des années de prise en charge, les mobilisations citoyennes autour de cas comme ceux de Laye Fodé Traoré à Besançon ou d’Armando Curri, meilleur apprenti de France en 2015, ont démontré le soutien à la régularisation de ces jeunes travailleurs.

Il conviendrait donc de sécuriser leur accès au séjour à leur majorité en garantissant la délivrance d’un titre de séjour « salarié » aux jeunes majeurs pris en charge par l’ASE entre 16 et 18 ans sur la base des seuls critères du suivi d’une formation et de l’avis de la structure l’accompagnant vers son insertion dans la société française. Le caractère exceptionnel de la délivrance de ce titre doit être supprimé.

Cet amendement va dans ce sens, de façon que le jeune de 18 ans puisse intégrer une formation ou la poursuivre. Il vise également à supprimer le critère visant les « liens de l’étranger avec sa famille restée dans son pays d’origine » pour l’octroi des titres de séjour « salarié », « travailleur temporaire », et « vie privée et familiale ».

Cet amendement a été élaboré en concertation avec France terre d’asile, avec la Fédération des acteurs de la solidarité et avec Forum réfugiés.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

L’amendement n° 360 rectifié bis, présenté par Mmes Bellurot et Aeschlimann, MM. Allizard, Bacci, Bas, Bazin et Belin, Mmes Belrhiti et Berthet, MM. E. Blanc et J. B. Blanc, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Bonhomme et Bonnus, Mme Borchio Fontimp, M. Bouchet, Mme V. Boyer, MM. Brisson, Bruyen, Burgoa, Cadec et Cambon, Mmes Canayer et Chain-Larché, M. Chaize, Mmes de Cidrac et Ciuntu, MM. Darnaud et Daubresse, Mmes Demas, Deseyne, Di Folco, Drexler, Dumont, Estrosi Sassone, Eustache-Brinio et Evren, MM. Favreau et Frassa, Mme Garnier, M. Genet, Mmes F. Gerbaud et Gosselin, MM. Gremillet et Grosperrin, Mme Gruny, MM. Gueret, Hugonet et Husson, Mmes Jacques, Josende et Joseph, MM. Karoutchi et Klinger, Mme Lassarade, MM. D. Laurent, Lefèvre, de Legge, H. Leroy et Le Rudulier, Mmes Lopez, Malet et P. Martin, M. Meignen, Mme Micouleau, MM. Milon et Mouiller, Mmes Muller-Bronn et Nédélec, M. de Nicolaÿ, Mme Noël, MM. Nougein, Panunzi, Paul, Pernot, Perrin et Piednoir, Mme Pluchet, M. Pointereau, Mmes Primas et Puissat, MM. Rapin, Reichardt, Retailleau et Reynaud, Mme Richer, MM. Rojouan, Saury, Sautarel et Savin, Mme Schalck, MM. Sido, Sol, Somon et Tabarot, Mme Ventalon, MM. C. Vial, J.P. Vogel, Cuypers et Khalifé et Mme Petrus, est ainsi libellé :

Après l’article 7

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au second alinéa de l’article L. 423-22 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, les mots : « de la nature des liens » sont remplacés par les mots : « de l’absence avérée de liens ».

La parole est à Mme Jacqueline Eustache-Brinio.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Eustache-Brinio

Le présent amendement tend à modifier les critères d’attribution d’un titre de séjour pour les jeunes majeurs qui ont été pris en charge par l’aide sociale à l’enfance avant l’âge de 16 ans. Il s’inspire d’une disposition déjà proposée dans plusieurs textes, dont la proposition de loi pour reprendre le contrôle de la politique d’immigration, d’intégration et d’asile.

Les intéressés ne devraient présenter aucun lien avec leur pays d’origine pour se voir délivrer automatiquement un titre de séjour à leur accession à la majorité. La rédaction actuelle nous semble, en effet, trop permissive et ambiguë en ce qu’elle prévoit uniquement une appréciation subjective de « la nature des liens » avec la famille restée dans le pays d’origine.

Debut de section - PermalienPhoto de Muriel Jourda

M. Durain, en présentant son amendement n° 153 rectifié, nous a indiqué l’avoir précédemment défendu devant le Sénat. Aussi, je lui donnerai la même réponse que celle qui lui avait été faite à l’époque au sujet de ces jeunes majeurs qui sont pris en charge par l’ASE après l’âge de 16 ans.

C’est un des cas dans lesquels il est possible de bénéficier de l’admission exceptionnelle au séjour. On peut le comprendre. En effet, vous avez cité l’exemple d’un jeune boulanger qui avait ému la France entière. L’admission exceptionnelle au séjour permet de régler 90 % des cas qui se présentent. Les 10 % restants sont précisément ceux pour lesquels le préfet estime que la présence des mineurs devenus majeurs ne se justifie pas sur notre territoire. Nous avons longuement échangé sur ce point. Il me paraît qu’il faut conserver la capacité des préfets à donner un avis discrétionnaire sur la situation de chaque majeur.

La commission émet un avis défavorable.

L’amendement n° 308 rectifié du groupe écologiste tend à ce qu’une carte de séjour de quatre ans soit délivrée aux MNA pris en charge avant l’âge de 16 ans tout en supprimant les conditions liées à la nature de leurs liens avec leur famille restée dans leur pays. Cela revient à admettre au séjour pour une longue durée des jeunes qui pourraient potentiellement rejoindre leur famille sans jamais s’assurer de leur capacité d’insertion au sein de notre pays.

La commission émet un avis défavorable.

Les amendements identiques n° 41 rectifié et 307 rectifié des groupes communiste et écologiste visent à rendre identiques les conditions de régularisation pour les jeunes arrivés avant 16 ans et pour ceux qui sont pris en charge après 16 ans. Il n’y a pas de raison objective à cela, d’autant que les capacités d’insertion ne sont pas appréciées de la même manière. Comme je viens de le rappeler, l’admission exceptionnelle au séjour règle 90 % des cas. Et même 100 %, à vrai dire, car cette marge de dix points correspond aux cas des personnes qui n’ont peut-être pas vocation à rester sur le territoire.

La commission émet un avis défavorable sur ces amendements identiques.

En revanche, l’avis est favorable sur l’amendement n° 360 rectifié bis qu’a présenté Mme Eustache-Brinio. Il substitue à un critère un peu ambigu un autre plus précis, de nature à apprécier les liens du mineur avec son pays d’origine qu’il a sans doute vocation à retrouver.

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

J’émets un avis défavorable sur l’ensemble de ces amendements.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

La parole est à M. Philippe Grosvalet, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe GROSVALET

Monsieur le ministre, je ne suis pas sûr qu’il faille avoir été maire pour pouvoir parler des mariages. En tout cas, moi qui ai exercé la fonction de président de département pendant de nombreuses années, je puis vous affirmer et vous confirmer que la situation actuelle conduit à un véritable gâchis.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe GROSVALET

Les préfets, madame la rapporteure, peuvent agir différemment selon les territoires. Ceux qui se succèdent dans un département peuvent même agir les uns des autres ! Moi qui ai eu à connaître quatre ou cinq d’entre eux, je puis vous dire qu’ils ne traitaient pas ces dossiers de la même façon.

Le plus souvent, les jeunes étaient accompagnés par l’ensemble de nos travailleurs sociaux, des organismes de formation et des employeurs, y compris par la chambre de métiers. Cette dernière, au travers de ses formations, soutenait nos actions. Nous devions déployer une énergie folle pour défendre les dossiers au cas par cas alors que nous avions investi pendant parfois trois à cinq ans des deniers publics dans la formation pour accompagner ces jeunes, comme la loi nous y contraint.

Parfois, nous étions bien seuls. En effet, à une époque, certains de nos voisins – n’est-ce pas, mon cher Bruno Retailleau – contestaient la circulaire Taubira du 31 mai 2013 relative aux modalités de prise en charge des jeunes isolés étrangers. De fait, nous nous sommes retrouvés bien seuls pour prendre en charge non seulement les mineurs non accompagnés de notre département, mais aussi ceux des départements voisins.

J’en appelle donc au bon sens plutôt qu’au dogmatisme. La réalité de l’expérience de terrain, de notre expérience, montre à l’évidence que ces jeunes gens apportent beaucoup à notre pays §et qu’ils méritent de s’y intégrer pleinement après les efforts financiers considérables que nous avons fournis pour les accompagner, efforts considérés comme trop importants par certains dans cet hémicycle.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

La parole est à M. Jérôme Durain, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Durain

J’ai lu cette semaine dans un article que, rencontrant Marilyne Poulain, qui vient d’être nommée préfète déléguée pour l’égalité des chances, M. le ministre l’avait interrogée sur les obstacles rencontrés dans la gestion des cas de travailleurs sans-papiers. Elle lui a répondu : l’appréciation discrétionnaire des préfets. Tout est dit ! Cet arbitraire, qui vient d’être illustré de manière très claire par mon collègue, ne devrait pas laisser insensible la droite.

Voilà quelques instants, vous vous préoccupiez, et c’est bien légitime, de la situation des maires. Mais entendez aussi tous ces patrons. Si 90 % des cas sont réglés comme on nous le dit, allons jusqu’au bout : nous ne sommes pas à 10 % près !

Le problème, c’est que ces cas ne sont pas réellement réglés : pour les régler, il faut qu’un patron rameute le ban et l’arrière-ban, qu’il mobilise tout le monde, y compris les parlementaires – dont vous-mêmes

L ’ orateur s ’ adresse à ses collègues siégeant sur la partie droite de l ’ hémicycle.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Durain

On vous parle de régularisation et vous répondez appel d’air et circulaire – j’aurais d’ailleurs bien aimé que cet appel d’air soit qualifié. Quant à la circulaire, ce n’est pas la solution : elle organise la concurrence entre territoires et maintient des gens dans des situations de no man ’ s land juridique.

Nous évoquons les gamins passés par l’ASE, mais combien d’autres cas avons-nous à traiter dans nos départements ? En ce moment, je m’occupe de trois dossiers, dont celui d’une personne qui travaille dans un garage. Sa patronne, inquiète de sa situation, me dit qu’elle ne peut se passer d’elle. Il en est de même dans les autres exemples que j’ai en tête. Que va-t-on faire de ces gens ?

Il y va pourtant de notre intérêt : c’est une question d’humanité, certes, mais c’est aussi une question d’économie. Vous avez su entendre les maires, entendez aussi les patrons, les artisans. Je vous assure que régler ces situations n’entraînera aucun appel d’air ; cela ne pourra que profiter à notre économie et rendra service à tout le monde.

Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE-K et GEST.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

La parole est à M. Yannick Jadot, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Yannick JADOT

On a évoqué le cas de Laye Fodé Traoré, dont la presse nationale s’était fait l’écho pour illustrer la situation des mineurs sans-papiers pris en charge par l’ASE.

Je voudrais évoquer un autre exemple, celui de Ronaldo Mbumba, qui était en apprentissage dans un Ehpad d’Aurillac avant de tomber sous le coup d’une OQTF. Ce sont Vincent Descoeur et Stéphane Sautarel, respectivement député et sénateur Les Républicains, qui ont porté ce dossier à votre connaissance, monsieur le ministre.

Comme l’a indiqué notre collègue Durain, cela montre bien qu’en réalité, au-delà de votre posture dans cet hémicycle, vous trouvez ces situations tout aussi insupportables que nous, parce que vous êtes tout aussi humains que nous. Pour en sortir, adoptons nos amendements !

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

La parole est à M. Stéphane Ravier, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Ravier

Merci, monsieur le président, de me permettre d’essayer d’en finir avec cette fable des mineurs non accompagnés.

Voilà plusieurs mois, voire plusieurs années, il a été souligné dans cet hémicycle qu’au moins 70 % – ce chiffre a sans doute augmenté depuis lors – de ces mineurs étaient des majeurs très accompagnés, voire accompagnés en tout.

Marques d ’ agacement sur les travées des groupes SER et GEST.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Ravier

À prendre pour argent comptant les déclarations de ces jeunes gens, on a aidé à la constitution d’une filière d’immigration clandestine : en 2015, le département des Bouches-du-Rhône dénombrait 200 prétendus mineurs non accompagnés ; aujourd’hui, c’est 2 000 dossiers pour un coût de 80 millions d’euros aux frais du contribuable.

Je cherche encore où est la richesse économique qu’évoquent nos collègues de gauche !

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Ravier

On compte aujourd’hui 40 000 prétendus mineurs non accompagnés pour un coût de 50 000 euros par dossier, soit un total de 2 milliards d’euros par an ! Si 70 % de ces jeunes sont bien en réalité des majeurs, nous pourrions économiser 1, 2 milliard d’euros. Et vous osez prétendre que cela nous rapporte ?

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Ravier

Il va bien falloir prendre la seule mesure efficace pour combattre cette filière d’immigration clandestine : obliger ces jeunes à accepter le test osseux, qui n’est ni douloureux ni invasif et qui nous permettrait de savoir s’ils sont mineurs ou non. Si tel est le cas, les départements les prendront en charge pour un temps plus ou moins court, je l’espère ; s’ils sont majeurs, il faudra les expulser.

Voilà quelle est la réalité de ces prétendus mineurs non accompagnés !

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

Beaucoup de fantasmes entourent le sujet des mineurs non accompagnés dès qu’on évoque les difficultés de l’ASE.

Ces difficultés sont réelles, parce que les familles françaises dysfonctionnent de plus en plus, parce que la pauvreté touche toujours plus de familles, parce que les violences existent… Si les départements ont des difficultés, on en tient pour responsables les mineurs non accompagnés ; si l’on évoque l’immigration, le sujet des mineurs non accompagnés ressort immédiatement !

Je ne sais pas d’où Mme Jourda sort ce chiffre de 90 % ni ce qu’il représente. C’est un chiffre totalement improbable. Vous voulez dire que 90 % des demandes de régularisation de mineurs non accompagnés aboutissent ? Et quid de toutes celles qui ne sont pas formulées, puisque les personnes concernées hésitent à aller devant les services de la préfecture ?

L’amendement de Jérôme Durain me paraît raisonnable. Voilà des années que cette discussion perdure. Je ne reviendrai pas sur ce qui a été dit, notamment sur l’investissement des collectivités. Si vous prenez la peine de rencontrer les services de la protection de l’enfance ou les personnels des maisons d’enfants à caractère social (Mecs), vous apprendrez que la quasi-totalité des mineurs non accompagnés pris en charge sont des jeunes gens sérieux.

Le problème, en réalité, ce sont les mineurs non pris en charge, ceux que l’on n’arrive pas à attraper, ceux qu’adorerait M. Ravier, parce qu’ils ne coûtent rien au pays, ceux que l’on n’arrive à tenir dans aucun dispositif ni dans aucune structure. Oui, nous avons un problème avec ces gamins-là, avec ces très jeunes enfants – car ce sont le plus souvent des mineurs de 13 ou 14 ans.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Ravier

Ce sont plutôt leurs enfants qui ont 13 ou 14 ans !

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

On les voit arriver dans les services d’urgence psychiatrique, soit parce qu’ils sont prostitués soit parce qu’ils ont fait des tentatives de suicide.

Monsieur Ravier, les mineurs non accompagnés prostitués, victimes de réseaux de traite, sont certes étrangers, mais leurs clients, eux, sont tous Français !

M. Stéphane Ravier s ’ exclame de nouveau.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

Ne vous excitez pas, monsieur Ravier ! Peut-être faudrait-il que vous déplaciez quelque peu votre angle de vue, de temps en temps !

Les chiffres ne sont pas bons, cette question perdure depuis des années et il n’est pas possible de la laisser entre les mains des seuls préfets. J’ai une solution à vous proposer, monsieur le ministre, qui pourrait vous rassurer.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

Seriez-vous d’accord pour déposer un sous-amendement visant à permettre aux préfets de refuser la régularisation lorsque le mineur concerné est fiché S, par exemple, ou qu’il est connu de la direction nationale du renseignement territorial ?

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

Il faut conclure ! Vous aurez l’occasion de vous exprimer plus tard.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

Cela permettrait de laisser une marge de manœuvre aux préfets.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Guillaume Gontard

Je voudrais revenir sur la réalité, sur ce que nous vivons au quotidien.

Selon vous, 90 % des dossiers seraient traités et il n’y aurait donc pas de souci ? Pourtant, nous entendons parler tous les jours dans nos permanences de cas qui ne sont pas réglés. Et cela concerne aussi bien les parlementaires de gauche que ceux de droite, puisque nous sommes souvent amenés à signer des courriers conjoints pour que ces jeunes puissent achever leur cursus, leur apprentissage, pour enfin trouver leur place dans l’entreprise qui les a accueillis.

Suivant l’attitude du préfet, l’importance de la mobilisation ou l’influence de l’entrepreneur, les résultats de nos démarches diffèrent. On ne peut continuer avec un tel système.

Il me semble que l’amendement n° 307 rectifié de mon collègue Guy Benarroche permet d’encadrer les choses sans aller trop loin, puisque vous avez toujours ce fantasme de l’appel d’air. Il est tout de même indispensable de sortir de cette absurdité : on prend en charge des mineurs – c’est notre devoir d’humanité et de fraternité –, que l’on forme et que l’on accompagne dans leur cursus d’apprentissage, grâce à l’argent public, mais, à 18 ans, on arrête tout et on leur délivre une OQTF ! Quel intérêt ? Quel sens donner à tout cela ?

Je fais appel à votre pragmatisme, monsieur le ministre : on a dépensé de l’argent public pour que ces jeunes, souvent très bien formés, apprennent un métier – restauration, plomberie, etc. Les entrepreneurs, de leur côté, ne demandent qu’une chose : continuer de travailler avec ces jeunes avec lesquels ils ont tissé des liens. C’est aussi une question d’humanité.

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

On peut continuer de débattre de sujets qui ne sont pas en lien direct avec le texte – d’autant plus qu’il reste 286 amendements à examiner et que le Sénat veut terminer son examen vendredi. Vous parliez de cavaliers législatifs, madame de La Gontrie, et c’est bien de cela qu’il s’agit ici.

Le projet de loi que j’avais déposé sur le bureau de la commission des lois du Sénat ne comportait en effet aucune disposition sur les mineurs : d’une part, parce que le sujet des mineurs dits « isolés », qui relèvent de l’ASE, mérite un texte spécifique ; d’autre part, parce que ces mineurs sont de la compétence non pas des services du ministère de l’intérieur, mais de l’autorité judiciaire.

À ce dernier titre, vous débattez sans doute de dispositions qui seront censurées par le Conseil constitutionnel.

J’ajouterai enfin que le débat me semble un peu vif avec M. Ravier ; imaginez ce que ce sera à l’Assemblée nationale. Au fond, peut-être s’agit-il non pas tant de résoudre un problème de fond que d’embêter quelque peu le Gouvernement lors de la discussion à venir…

Cela étant dit, je ne déposerai pas de sous-amendement. Les mineurs dits « isolés » sont de plus en plus nombreux sur le sol européen, singulièrement en France, et il est souvent difficile de distinguer les mineurs des majeurs, à quelques exceptions près.

En outre, j’ai déjà précisé, par une instruction ministérielle de septembre 2020, qu’il convenait d’examiner la régularité du séjour bien en amont du passage des 18 ans.

Mme la rapporteure a raison : dans 93 % des cas, les titres demandés sont validés ; les 7 % de refus correspondent à des fraudes documentaires.

Lorsque vous intervenez auprès du ministre de l’intérieur, vous comme d’autres, monsieur Jadot, sachez que les préfets ont refusé d’accéder aux demandes non pour des raisons politiques – cette attaque contre les préfets de la République me paraît quelque peu déplacée, et ce d’autant plus, monsieur Grosvalet, que les présidents de département peuvent avoir des visions de l’enfance extrêmement différentes et que certains ne mettent pas en place le fichier appui à l’évaluation de la minorité (AEM) réclamé par le Gouvernement –, mais parce qu’il est normal de ne pas régulariser des personnes qui ont triché.

Il peut arriver, malgré cela, que l’on régularise des personnes au nom de la dignité humaine, mais sûrement pas à la demande des patrons. Ces derniers ont bon dos, monsieur Durain. Sans doute pensiez-vous que cet argument suffirait à convaincre la partie droite de cet hémicycle… Nous n’allons pas légaliser la fraude documentaire, ce serait contraire aux intérêts de la République.

Il faut incontestablement réfléchir à un texte consacré à la question des mineurs. Je peux entendre votre proposition, madame Eustache-Brinio, mais elle ne relève pas de ce projet de loi. Je vous le dis très franchement. Cette question concerne l’autorité judiciaire, car il revient aux seuls magistrats, et non aux préfets, de renvoyer les mineurs dans leur pays d’origine.

La question n’est pas de savoir si les mineurs isolés sont accompagnés ou non par les entreprises – ils le sont la plupart du temps dans un souci de bon apprentissage. Le problème est que les services départementaux de l’ASE, engorgés par de jeunes étrangers qui ne sont pas tous mineurs, ne peuvent faire face à l’afflux de vrais mineurs, français ou étrangers, qui mériteraient la protection de la République.

C’était le cas dans mon département, lorsque j’étais conseiller départemental : on n’arrive pas à placer certains enfants dans les structures d’accueil pour cette raison – c’est un fait que personne ne peut contester.

Quelles que soient les réponses à apporter à la question des moyens, du séjour ou de l’âge, elles ne peuvent se trouver dans un texte sur l’immigration qui vise à modifier le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (Ceseda). C’est la raison pour laquelle le Gouvernement est défavorable à ces amendements.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Les amendements ne sont pas adoptés.

L ’ amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 7.

L’amendement n° 238, présenté par Mmes de La Gontrie et Narassiguin, MM. Bourgi, Durain et Chaillou, Mme Harribey, M. Kerrouche, Mme Linkenheld, M. Roiron, Mme Brossel, M. Chantrel, Mmes Conway-Mouret et G. Jourda, MM. Kanner et Marie, Mme Rossignol, MM. Stanzione, Temal, Tissot, M. Vallet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 7

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La section 8 du chapitre III du titre II de livre IV du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est ainsi modifiée :

1° Avant l’article L. 423-23, il est inséré un article L. 423-23-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 423 -23 -1. – L’étranger parent d’un enfant mineur étranger scolarisé depuis au moins trois ans, qui justifie par tout moyen d’une résidence ininterrompue, régulière ou non, d’au moins cinq années en France, se voit délivrer de plein droit une carte de séjour temporaire portant la mention “vie privée et familiale” d’une durée d’un an.

« En cas de rupture du lien conjugal ou la rupture de la vie commune, l’étranger doit justifier contribuer effectivement à l’entretien et à l’éducation de l’enfant dans les conditions prévues par l’article 371-2 du code civil.

« Les dispositions de l’article L. 412-1 du présent code ne sont pas applicables pour la délivrance de cette carte.

« Les modalités d’application du présent article sont fixées par décret en Conseil d’État. »

2° À l’article L. 423-23, les mots : « et L. 423-22 » sont remplacés par les mots : « à L. 422-23-1 »

La parole est à M. Jérôme Durain.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Durain

Les auteurs de cet amendement souhaitent consacrer dans la loi les dispositions de la circulaire Valls relatives à la délivrance de la carte de séjour « vie privée et familiale » pour les étrangers sans titre parents d’enfants scolarisés.

Reprenant les critères fixés dans cette circulaire, un étranger sans titre qui justifie d’une résidence ininterrompue d’au moins cinq années en France et qui est parent d’un enfant mineur scolarisé depuis au moins trois ans se verra délivrer de plein droit une carte de séjour temporaire d’une durée d’un an.

Conformément au droit en vigueur, ces dispositions ne sont pas applicables si la présence de l’étranger en France constitue une menace pour l’ordre public ou s’il vit en France en état de polygamie.

Debut de section - PermalienPhoto de Muriel Jourda

Je rappelle que le droit à la régularisation n’existe pas. Ce n’est pas la norme : l’admission exceptionnelle au séjour est même l’exact opposé.

Laissons le droit en l’état : avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

Même avis, monsieur le président.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

La parole est à M. Philippe Bas, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Le Gouvernement fait des émules jusque dans les rangs du groupe socialiste : l’expression « se voit délivrer de plein droit » est exactement reprise de feu l’article 3 du projet gouvernemental !

Voilà ce par quoi on a commencé ce débat et ce par quoi on le prolonge : on veut créer un droit à la régularisation pour tous, et nous nous y opposons !

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

L’amendement n° 408 rectifié, présenté par Mme M. Vogel, MM. Gontard, Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus et Fernique, Mme Guhl, M. Jadot, Mme de Marco, M. Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :

Après l’article 7

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À l’article L. 581-3 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, les mots : «, le cas échéant, » sont supprimés.

La parole est à Mme Mélanie Vogel.

Debut de section - PermalienPhoto de Mélanie Vogel

Cet amendement vise à être gentil avec les très, très gentils… Il devrait donc vous plaire !

Le dispositif proposé est assez simple : en 2001, l’Union européenne a adopté une directive sur la protection temporaire. Celle-ci a été mise en œuvre pour la première fois l’an dernier pour faire face à l’afflux en France de réfugiés ukrainiens.

Cette directive permet d’autoriser les personnes bénéficiant de cette protection temporaire à travailler dans le pays d’accueil. Il se trouve que la France a transposé la directive de manière quelque peu fragile : la loi n’accorde pas automatiquement d’autorisation de travail en même temps que la protection, ce que notre amendement vise précisément à corriger.

Je vise bien, par cet amendement, les réfugiés arrivés sur notre territoire en raison d’un conflit et qui se sont vu accorder une protection temporaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Muriel Jourda

Tout le monde partage, au moins sur le principe, les propos de Mme Vogel.

Toutefois, il me semble que cet amendement est déjà satisfait par la partie réglementaire du Ceseda. À moins que le ministre ne nous en livre une interprétation différente, je vous demanderai de bien vouloir retirer votre amendement, madame Vogel ; à défaut, j’y serai défavorable.

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

Même avis : cet amendement est déjà satisfait par le droit en vigueur.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

L’amendement n° 577 rectifié, présenté par Mme de Marco, M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :

Après l’article 7

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Après le 1° de l’article L. 3142-54-1 du code du travail, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« 1°… À tout salarié exerçant une activité bénévole auprès d’une association régie par la loi du 1er juillet 1901 s’étant donnée pour mission d’accompagner juridiquement ou socialement, ou de former linguistiquement les personnes étrangères sur le sol français. »

II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. Guy Benarroche.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Benarroche

Dans la même logique qu’un précédent amendement de Mme de Marco qui visait les fonctionnaires, il s’agit ici d’étendre le droit au congé pour engagement associatif prévu à l’article L. 3142-54-1 du code du travail aux salariés exerçant une activité bénévole auprès d’une association régie par la loi du 1er juillet 1901 s’étant donné pour mission d’accompagner juridiquement ou socialement ou de former linguistiquement les personnes étrangères sur le sol français.

Notre amendement concernant les fonctionnaires engagés dans ces activités associatives a été déclaré irrecevable, mais pas celui-ci. L’activité de bénévoles, notamment d’étudiants ou de retraités, permet de pallier les lacunes de la politique française d’accueil.

Il est essentiel de reconnaître l’importance de l’engagement de ces associations au bénéfice de toute la société française en créant un régime de congé de droit au profit des bénévoles de ces associations.

Le droit en vigueur prévoit déjà un droit au congé de trois jours pour les dirigeants de structure associative. Nous proposons de l’étendre aux salariés des associations dédiées à l’accueil des personnes étrangères, qui remplissent des missions de service public qui devraient être à la charge de l’État.

Debut de section - PermalienPhoto de Muriel Jourda

Vos propos sont pétris de bons sentiments, monsieur Benarroche. Vous soulignez, sans doute à raison, que cette mission de service public devrait être prise en charge par l’État.

Toutefois, si votre amendement était adopté, ce sont les employeurs qui prendraient en charge les six jours ouvrables de congé que vous proposez d’étendre à ces bénévoles, ce qui ne me semble pas correspondre exactement à ce que vous défendez : avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

Même avis, monsieur le président.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

(Supprimé)

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

Je suis saisi de cinq amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

Les deux premiers sont identiques.

L’amendement n° 565 est présenté par MM. Bitz et Patriat, Mme Schillinger, MM. Buis et Buval, Mmes Cazebonne et Duranton, M. Fouassin, Mme Havet, MM. Haye, Iacovelli, Kulimoetoke, Lemoyne et Lévrier, Mme Nadille, MM. Omar Oili et Patient, Mme Phinera-Horth et MM. Rambaud, Rohfritsch et Théophile.

L’amendement n° 588 est présenté par le Gouvernement.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

I. – Le chapitre III du titre V du livre II de la huitième partie du code du travail est ainsi modifié :

1° L’intitulé est ainsi rédigé : « Amende administrative » ;

2° L’article L. 8253-1 est ainsi rédigé :

« Art. L. 8253 -1. – Le ministre chargé de l’immigration prononce, au vu des procès-verbaux et des rapports qui lui sont transmis en application de l’article L. 8271-17, une amende administrative contre l’auteur d’un manquement aux dispositions des articles L. 8251-1 et L. 8251-2, sans préjudice des poursuites judiciaires pouvant être intentées à son encontre.

« Lorsqu’il prononce l’amende, le ministre chargé de l’immigration prend en compte, pour déterminer le montant de cette dernière, les capacités financières de l’auteur d’un manquement, le degré d’intentionnalité et le degré de gravité de la négligence commise.

« Le montant de l’amende est, au plus, égal à 5 000 fois le taux horaire du minimum garanti prévu à l’article L. 3231-12. Il peut être majoré en cas de réitération et est alors, au plus, égal à 15 000 fois ce même taux.

« L’amende est appliquée autant de fois qu’il y a d’étrangers concernés.

« Lorsque sont prononcées, à l’encontre de la même personne, une amende administrative en application du présent article et une sanction pénale en application des articles L. 8256-2, L. 8256-7 et L. 8256-8 à raison des mêmes faits, le montant global des amendes prononcées ne dépasse pas le maximum légal le plus élevé des sanctions encourues.

« L’État est ordonnateur de l’amende. À ce titre, il liquide et émet le titre de perception.

« Le comptable public compétent assure le recouvrement de cette amende comme en matière de créances étrangères à l’impôt et aux domaines.

« Les conditions d’application du présent article sont déterminées par décret en Conseil d’État. » ;

3° Dans la partie législative du code du travail, les mots : « la contribution spéciale » sont remplacés par les mots : « l’amende administrative ».

II. – Le chapitre IV du titre V du livre II de la huitième partie du code du travail est ainsi modifié :

1° Le 4° de l’article L. 8254-2 est abrogé ;

2° Au troisième alinéa de l’article L. 8254-2-1, les mots : «, contributions et frais » sont remplacés par les mots : « et des frais » ;

3° À l’article L. 8254-2-2, la référence : « 4° » est remplacée par la référence : « 3° » ;

4° À l’article L. 8254-4, les mots : « ainsi que la répartition de la charge de la contribution en cas de pluralité de cocontractants » sont supprimés.

III. – Le chapitre VI du titre V du livre II de la huitième partie du code du travail est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa de l’article L. 8256-2, les mots : « du premier alinéa » sont supprimés et les mots : « 15 000 » sont remplacés par les mots « 30 000 » ;

2° Au troisième alinéa de l’article L. 8256-2, les mots : « 100 000 » sont remplacés par les mots : « 200 000 ».

IV. – Le deuxième alinéa de l’article L. 8271-17 du code du travail est ainsi rédigé :

« Afin de permettre la liquidation de l’amende administrative mentionnée à l’article L. 8253-1 du présent code, le ministre chargé de l’immigration reçoit des agents mentionnés au premier alinéa du présent article une copie des rapports et des procès-verbaux relatifs à ces infractions ».

V. – L’article L. 5221-7 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les agents de contrôle visés à l’article L. 8271-17 peuvent obtenir tous renseignements et documents relatifs aux autorisations de travail. L’autorité administrative chargée d’instruire et de délivrer les autorisations de travail peut solliciter ces agents afin d’obtenir tous renseignements et documents nécessaires à l’instruction des demandes relatives à ces autorisations dans des conditions définies par décret. »

VI. – La section 2 du chapitre II du titre II du livre VIII du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est abrogée.

La parole est à M. Saïd Omar Oili, pour présenter l’amendement n° 565.

Debut de section - PermalienPhoto de Saïd OMAR OILI

Cet amendement a pour objet de rétablir, dans une rédaction différente, les dispositions relatives à la création d’une amende administrative sanctionnant les employeurs d’étrangers ne détenant pas un titre les autorisant à travailler.

Concrètement, nous proposons de remplacer la contribution spéciale prévue par le code du travail par une amende administrative, dont le montant pourrait être modulé.

Dans un souci de simplification, nous proposons également de supprimer la contribution forfaitaire de l’employeur ayant engagé un étranger en situation irrégulière.

Par ailleurs, nous proposons, en cas de cumul de l’amende administrative et de l’amende pénale, que le montant global prononcé ne dépasse pas le maximum légal le plus élevé des sanctions encourues.

L’adoption de notre amendement est d’autant plus nécessaire que l’infraction d’emploi d’un étranger non autorisé à travailler constitue la deuxième infraction de travail illégal la plus relevée par l’ensemble des corps de contrôle.

La création d’une amende administrative permettrait de sanctionner plus rapidement les auteurs de cette infraction.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

La parole est à M. le ministre, pour présenter l’amendement n° 588.

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

Cet amendement vise à rétablir l’article 8 dans les mêmes termes.

Soit la commission l’a supprimé pour des raisons juridiques et techniques, ce qui peut s’entendre dans la mesure où la rédaction du Gouvernement prévoyait deux sanctions cumulatives, alors que notre droit ne permet pas de condamner deux fois une personne pour une même infraction. Le Gouvernement propose ainsi une version modifiée de la rédaction initiale respectant ce principe. Auquel cas, nous pourrons peut-être nous entendre.

Soit la commission l’a supprimé pour des raisons plus idéologiques, afin d’éviter de sanctionner les employeurs ayant recours à des sans-papiers – mais je n’ose imaginer un seul instant que ce soit sa philosophie.

Aujourd’hui, toute entreprise ou tout particulier employant un étranger en situation irrégulière est susceptible d’être sanctionné. Toutefois, le montant de l’amende encourue est relativement faible et les sanctions pénales sont très peu prononcées, en dépit des très nombreuses procédures lancées par l’inspection du travail et par le ministère de l’intérieur au travers des préfets.

On compte ainsi moins de 500 condamnations pour ce fait, alors que les fraudes aux cotisations sociales du fait du travail irrégulier représentent quelque 6, 6 milliards d’euros de manque à gagner pour la sécurité sociale et l’assurance chômage.

Un travail très important est pourtant mené dans le cadre des comités opérationnels départementaux anti-fraude (Codaf) avec les préfets et l’ensemble des services de l’État pour traquer ces entreprises, dont environ la moitié sont dirigées par des étrangers et l’autre moitié par des structures ou des ressortissants français.

À ce titre, l’action de l’Office central de lutte contre le travail illégal (OCLTI) illustre le caractère connexe du travail illégal et de l’immigration irrégulière. Les étrangers en situation irrégulière, par conséquent sans titre, sont en effet très souvent victimes de travail dissimulé, voire de situations encore plus graves d’exploitation par le travail.

Ces délits peuvent être le fait non seulement d’entreprises ou de particuliers, mais aussi d’associations : Vies de Paris, association créée en 2011, qui compte plus de 10 000 adhérents et dont l’objet est de soutenir les personnes en situation irrégulière, a été condamnée par le tribunal correctionnel de Paris pour travail dissimulé, emploi d’étrangers sans titre et traite d’êtres humains aggravée. Quelque quarante-quatre victimes ont été identifiées. Il n’a été possible de condamner cette structure qu’après un énorme travail des services du ministère de l’intérieur.

Nous proposons de doubler les amendes pénales, qui sont aujourd’hui très faibles et peu dissuasives au regard des profits générés par le travail irrégulier, et de renforcer les sanctions administratives. Qui emploie des travailleurs étrangers irréguliers ne peut attendre autre chose de l’État qu’une action forte, à même de couper la filière d’immigration irrégulière.

Il s’agit d’en finir avec un écosystème de travail irrégulier que nous essayons de casser. Nous avons abordé cette question au travers des autoentrepreneurs et maintenant au travers des employeurs. Peut-être l’aborderons-nous aussi aujourd’hui au travers des marchands de sommeil.

Les entreprises ou les particuliers sont parfois au cœur de cet écosystème. Il s’agit de sanctionner non des personnes qui tomberaient dans l’irrégularité du fait de l’action de la préfecture, mais des individus dont nous savons qu’ils emploient sciemment une main-d’œuvre sans-papiers de manière dégradante.

Il me semble donc de bon aloi, pour la dignité des personnes et pour la lutte contre l’immigration irrégulière, d’adopter ces amendements identiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

Le sous-amendement n° 654, présenté par M. Brossat, Mme Cukierman et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Amendement n° 588, alinéa 7

1° Remplacer le nombre :

par le nombre :

2° Remplacer les mots :

peut être

par le mot :

est

3° Remplacer le nombre :

par le nombre :

La parole est à M. Ian Brossat.

Debut de section - PermalienPhoto de Ian BROSSAT

L’article 8 du projet de loi prévoyait la création d’une nouvelle sanction administrative en sus des sanctions administratives et pénales existantes en cas d’infraction à l’interdiction d’employer un étranger non autorisé à travailler. Il s’agissait plus exactement de créer une troisième amende administrative pécuniaire, dont le montant serait fixé par l’autorité administrative dans la limite de 4 000 euros pour chaque employé illégal, montant doublé en cas de récidive.

L’amendement présenté par le Gouvernement vise quant à lui à fusionner les deux amendes administratives existantes, la contribution spéciale et la contribution forfaitaire représentative des frais d’éloignement du territoire français, en une amende administrative unique dont le champ d’application serait élargi, notamment en cas de recours délibéré par l’employeur à un étranger non autorisé à travailler.

De même, le fait déclencheur de la procédure serait élargi, aux procès-verbaux d’infraction s’ajoutant désormais les rapports établis par les agents de contrôle ; la possibilité de modulation du montant de l’amende en fonction des circonstances serait de surcroît améliorée.

Cet amendement va donc selon nous dans le bon sens, puisqu’il tend en outre à rehausser le montant de l’amende pénale. Et nous proposons, par ce sous-amendement, de rehausser le montant de la nouvelle amende administrative unique et de rendre systématique la majoration prévue en cas de réitération.

Debut de section - PermalienPhoto de Muriel Jourda

Avis défavorable sur le sous-amendement n° 654 comme sur les amendements identiques n° 565 et 588.

Nous n’avons pas de désaccord de fond. Tout le monde ici est d’accord pour dire qu’une personne qui emploie sciemment un étranger en situation irrégulière doit être sanctionnée, d’autant que, dans ce genre de cas, les conditions d’emploi sont parfois indignes. Il n’y a aucune difficulté pour ce qui est de trouver un accord à ce sujet : bien évidemment, le cas échéant, des sanctions doivent être prononcées.

De multiples dispositifs de sanction existent d’ores et déjà.

Des sanctions pénales sont prévues : les peines applicables aux personnes physiques vont de cinq à dix ans de prison, ce qui n’est pas dérisoire, et de 15 000 à 100 000 euros d’amende par personne et par étranger illégalement employé, ce qui ne me paraît pas non plus dérisoire, bien que vous trouviez ces montants un peu faibles, monsieur le ministre. Parmi les sanctions pénales complémentaires figurent la fermeture de l’établissement, qui peut être définitive, et l’exclusion des marchés publics.

Il existe aussi des sanctions administratives. Certaines font miroir avec les sanctions pénales, mais leur effet est temporaire : fermeture administrative de l’établissement, interdiction de participer à des marchés publics. Deux contributions administratives sont également prévues : la contribution spéciale, dont le montant va de 1 000 fois le taux horaire du minimum garanti à 55 950 euros par salarié illégalement employé, et la contribution forfaitaire, dont l’objet est de financer le réacheminement de l’étranger dans son pays d’origine et dont le montant est fixé en fonction dudit pays d’origine.

Voilà pour les sanctions existantes ; elles ne sont tout de même pas minces.

Nous avions supprimé l’article 8, vous l’avez indiqué, monsieur le ministre, pour des raisons juridiques et rédactionnelles : nous estimions qu’il revenait à créer une amende qui existe déjà. Dont acte ! Vous avez compris que ce rejet n’emportait aucun désaccord de fond.

Ce qui me dérange dans ces deux amendements, ce n’est pas l’élargissement du périmètre de l’amende : c’est que la contribution spéciale est supprimée au profit d’une autre amende administrative. Or cette contribution spéciale sert à financer l’Office français de l’immigration et de l’intégration (Ofii) à hauteur, pour ce qui est de la dernière « récolte », de 31 millions d’euros.

Debut de section - PermalienPhoto de Muriel Jourda

L’Ofii et son budget doivent être préservés : c’est cette difficulté qui nous fait repousser ces amendements, car nous ne financerions plus correctement l’Office si nous nous privions de cette contribution spéciale.

Si la commission émet un avis défavorable sur ces amendements, c’est donc pour une raison qui n’est pas de fond, mais qui tient à la difficulté que je viens d’exposer.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

Quel est l’avis du Gouvernement sur le sous-amendement n° 654 ?

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

L’avis du Gouvernement est défavorable sur votre sous-amendement, monsieur Brossat, mais n’y voyez rien d’idéologique : à notre avis, la disposition que vous proposez n’est pas constitutionnelle. Nous doublons déjà le montant des amendes, et voyez quelle résistance oppose Mme la rapporteure… Doubler le doublement, si j’ose dire, ne serait pas proportionné, au point qu’une telle disposition serait censurée : nous serions sans doute déçus vous et moi, monsieur le sénateur, qu’en définitive les filières d’immigration irrégulière, qui exploitent les personnes étrangères, ne puissent être punies comme elles doivent l’être.

Sur le fond, donc, nous sommes parfaitement d’accord. Ce ne serait déjà pas mal que l’amendement du Gouvernement soit adopté.

Madame la rapporteure, il faut que nous nous entendions – et je me permets de préciser que le groupe RDPI a demandé un scrutin public sur ces amendements de rétablissement. Si vous pensez qu’il faut ici ou là modifier des dispositions de l’article 8, que ne l’avez-vous amendé en commission, et que n’avez-vous proposé de sous-amender, ici même, l’amendement du Gouvernement ?

Par ailleurs, concernant l’Ofii, nous cherchons précisément à résoudre la difficulté juridique qui se posait. La taxation qui a permis de récolter les 31 millions d’euros dont vous avez parlé abonde non pas l’Ofii, mais le budget de l’État, lequel, par après, en reverse les recettes à l’Ofii.

L’Ofii aura donc son versement, quoi qu’il arrive, et je vous garantis qu’il continuera à fonctionner, puisque nous en augmentons très considérablement les moyens.

Je le répète, vous n’avez pas sous-amendé l’amendement que j’ai présenté.

La vérité est que le Gouvernement s’inscrit parfaitement dans la logique qui est celle de la majorité sénatoriale en proposant de donner au préfet le pouvoir d’apprécier l’opportunité de prendre des sanctions contre des entreprises qui embauchent manifestement des personnes dont le séjour est irrégulier : cette disposition va parfaitement de pair avec celles des articles précédents !

Je veux bien que l’on dise que le code pénal est déjà très dur, mais il y a eu moins de 500 procédures engagées sur ce chef. Je n’ai pas obtenu de la part de la Chancellerie les chiffres relatifs aux condamnations effectivement prononcées – je le regrette devant la représentation nationale. Pour ce qui est, du moins, des quelques cas recensés dans mon département, les sanctions ne sont pas très élevées.

La question est la suivante : veut-on sanctionner les patrons voyous qui, sciemment, utilisent une main-d’œuvre irrégulière ?

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

Veut-on donner aux préfets les moyens d’aller vite pour les sanctionner en augmentant le montant des sanctions administratives ? Ce que nous proposons, qui ne retire rien au code pénal, est frappé au coin du bon sens s’agissant de lutter contre l’immigration irrégulière.

Si vous trouvez cet amendement mal rédigé, sous-amendez-le ! Ce n’est pas une question de sous, puisque, je vous l’ai dit, le budget de l’Ofii est garanti. Vous devriez par ailleurs être plutôt contents que l’on supprime une taxe : ce sont des charges en moins pour les entreprises. Pour tout dire, je ne comprends pas très bien votre raisonnement…

Si l’on veut être cohérent dans la lutte contre l’immigration irrégulière, et même si cela gêne un peu quelques fédérations d’employeurs – je le conçois : il est possible, après tout, que les résistances viennent de là… –, on ferait mieux d’adopter ces amendements : ce serait un très bon signal envoyé contre l’immigration irrégulière, et il sera corrigé à l’Assemblée nationale si vraiment nous trouvons un loup.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

Monsieur le président, si la discussion est claire sur le fond, reste un problème de méthode : pourriez-vous nous accorder trois minutes de suspension pour que nous puissions trouver le bon accord ?

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à quinze heures trente-huit, est reprise à quinze heures quarante-deux.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

La séance est reprise.

La parole est à M. le ministre.

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

Je veux redire ici que ces amendes administratives, dont j’espère que le nombre croîtra, car elles sont plus efficaces que les sanctions pénales, abondent le budget de l’État, qui lui-même en réaffecte le produit – 31 millions d’euros pour le dernier exercice – au budget de l’Ofii. Quoi qu’il arrive, je le précise, le montant de ces amendes est inférieur à ce que nous versons à l’Ofii, dont nous avons fait augmenter le budget de 45 % en un quinquennat – et ce budget continue d’augmenter.

Vu les engagements que nous avons pris depuis le début de l’examen de ce texte – je pense à l’avancée sur les cours gratuits, fruit d’une coconstruction du groupe communiste et du Gouvernement –, les recettes de la contribution seront très largement inférieures à ce que nous devons verser à l’Ofii, car il faudrait beaucoup trop d’amendes pour arriver aux sommes voulues.

Il s’agit, avec cet amendement, de faire en sorte que la sanction administrative à laquelle s’exposent les employeurs de travailleurs sans-papiers puisse être prononcée plus rapidement par le préfet, indépendamment des sanctions pénales qui ont été évoquées tout à l’heure.

Et, j’en prends l’engagement solennel, le produit de ces amendes administratives abondera intégralement le budget de l’Ofii : ainsi tout le monde est rassuré.

Debut de section - PermalienPhoto de Muriel Jourda

Il y avait quelques inquiétudes, M. le ministre les lève, nous lui faisons confiance : nous voterons ces amendements.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

La parole est à M. Roger Karoutchi, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Comme je suis le représentant du Sénat au conseil d’administration de l’Ofii, …

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

M. Gérald Darmanin, ministre. Et inversement !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

M. Roger Karoutchi. … je voudrais remercier nos collègues pour cet accord qui me va bien. Monsieur le ministre, en effet, le budget de l’Ofii a été augmenté de 45 % en cinq ans, mais reconnaissez aussi que le nombre de demandeurs d’asile et de sujets à traiter a lui-même considérablement augmenté. Si donc vous pouviez faire un geste supplémentaire pour 2024, je vous en serais doublement reconnaissant !

Rires.

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

M. Gérald Darmanin, ministre. Conflit d’intérêts !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

La parole est à M. Philippe Bas, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

M. Philippe Bas. Comme je suis l’ancien président du conseil d’administration de l’Ofii, je voudrais m’associer à la fois aux remerciements et à la demande de mon collègue Roger Karoutchi.

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

La parole est à M. Alexandre Ouizille, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Alexandre OUIZILLE

Je n’ai jamais eu, quant à moi, de fonctions à l’Ofii, …

Debut de section - PermalienPhoto de Alexandre OUIZILLE

… ce qui ne m’empêche pas de soutenir, avec le groupe SER, ces amendements.

Je veux rappeler l’actualité terrible qui donne son contexte à notre discussion : en septembre dernier, un certain nombre d’enquêtes ont été ouvertes, dont je donne deux exemples. À Mourmelon-le-Petit, 160 vendangeurs de nationalité ukrainienne étaient hébergés dans des conditions lamentables ; à Nesle-le-Repons, 52 travailleurs d’origines malienne, mauritanienne et sénégalaise étaient logés dans des conditions également indignes. Les arrêtés préfectoraux révèlent la présence de « literies de fortune », la « vétusté », le « délabrement », l’« insalubrité », l’« absence de nettoyage et de désinfection », l’« état répugnant des toilettes », ainsi que la prégnance des risques d’incendie.

Nous serons donc évidemment, nous, socialistes, au rendez-vous de ces amendements : il est nécessaire de pénaliser plus fortement ceux qui abusent de la faiblesse des uns et des autres.

M. Michaël Weber applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Cécile Cukierman

Comme nous l’avons dit dès l’ouverture de nos débats, lundi dernier, nous serons très attentifs au devenir de cet article 8 du projet de loi initial, non qu’il s’agisse de sanctionner pour sanctionner, mais parce qu’il y a des employeurs, que cela nous plaise ou non, qui embauchent sciemment, consciemment, des travailleurs sans-papiers. Si nous voulons que s’appliquent les règles de la République, nous nous devons de faire en sorte qu’ils soient sanctionnés, et très fortement sanctionnés !

Comme tout un chacun, j’ai pu observer le tango ou la valse, à je ne sais combien de temps, d’ailleurs, qui se danse ici même sous nos yeux. Quoi qu’il en soit, nous nous félicitons qu’il soit possible d’avancer sur ce sujet-là. Je l’ai dit depuis lundi soir : s’il y a des travailleurs sans-papiers, c’est parce qu’il y a des chefs d’entreprise qui les embauchent !

Debut de section - PermalienPhoto de Cécile Cukierman

Il faut tenir sur nos deux jambes : la première – je ne rouvre pas le débat de ces derniers jours, je vous rassure, mes chers collègues – consiste à régulariser celles et ceux qui, de fait, sont employés et travaillent en France, et représentent une force active dans la production des richesses de notre pays ; la deuxième consiste à sanctionner les chefs d’entreprise qui, prospérant sur l’exploitation de l’homme par l’homme, ne jouent pas le jeu et font baisser le coût de la main-d’œuvre par l’embauche de travailleurs sans-papiers.

Voilà le sens dans lequel nous avançons avec vous, monsieur le ministre.

M. Alexandre Ouizille applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

La parole est à M. Guy Benarroche, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Benarroche

Bien entendu, notre groupe s’associe et à l’esprit et à la lettre de cet article, donc de cet amendement, que nous voterons.

Je me permets simplement d’apporter une petite précision : c’est bien parce qu’il y a des travailleurs sans-papiers qui sont employés depuis longtemps dans notre pays et qui devraient être régularisés qu’il y a des patrons voyous qui les embauchent, et non l’inverse.

Ce n’est pas parce qu’il y a des patrons voyous qu’il y a des travailleurs sans-papiers : c’est parce qu’il y a des travailleurs sans-papiers qu’il y a des patrons voyous !

M. Akli Mellouli applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Savoldelli

Pour notre part, nous sommes très favorables à ce que l’Office français de l’immigration et de l’intégration ait les moyens de son action ; nous l’avons prouvé par nos votes lorsque la question s’est posée.

Je dis avec toute la solennité requise et avec tout le respect que je leur dois à mes collègues qui ont fait état de leurs services au sein de l’Ofii, M. Bas et M. Karoutchi, que le bristol est un peu entaché. Je n’ai pas oublié en effet que vous avez voté il y a quelques heures la disparition de l’aide médicale de l’État (AME) et l’allongement de six mois à cinq ans, pour les allocations familiales, et de trois mois à cinq ans, pour la prestation de compensation du handicap, du délai de présence sur le territoire requis pour bénéficier du versement de ces prestations.

J’y insiste, mes chers collègues : la carte de visite est un peu entachée…

Applaudissements sur les travées des groupes CRCE-K, SER et GEST. – M. Ahmed Laouedj applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

La parole est à Mme Maryse Carrère, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Maryse Carrère

Nous étions déjà favorables à ces amendements ; nous voilà confortés dans notre position par l’engagement du ministre à flécher le produit de cette contribution vers le financement de l’Ofii, cet opérateur étant en particulier essentiel à l’accueil des réfugiés.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

La parole est à M. Philippe Bas, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

M. Philippe Bas. Je voudrais signaler à notre collègue qui vient de nous faire part de ses préoccupations d’ordre social que c’est précisément l’Ofii, dans un excellent rapport que je vous recommande, qui a récemment mis le doigt sur la dérive non pas de l’AME, mais de la procédure d’obtention de visa pour motif de santé, qui coûte à la France plus de 1 milliard d’euros. Cette institution a bien fait de se préoccuper des abus dont fait l’objet le droit au séjour pour soins de la part d’étrangers qui n’y sont pas admissibles.

M. Pascal Savoldelli s ’ exclame.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

La parole est à M. Bernard Buis, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Buis

Compte tenu de la belle unanimité qui règne autour de cet amendement, je retire notre demande de scrutin public.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

M. Bruno Retailleau. C’est le ministre qui demandait le scrutin public…

Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

Il n’est pas constitutionnel…

Le sous-amendement n ’ est pas adopté.

Les amendements sont adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

En conséquence, l’article 8 est rétabli dans cette rédaction et les amendements n° 130 et 466 n’ont plus d’objet.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

L’amendement n° 177, présenté par Mmes de La Gontrie et Narassiguin, MM. Bourgi, Durain et Chaillou, Mme Harribey, M. Kerrouche, Mme Linkenheld, M. Roiron, Mme Brossel, M. Chantrel, Mmes Conway-Mouret et G. Jourda, MM. Kanner et Marie, Mmes S. Robert et Rossignol, MM. Stanzione, Temal, Tissot, M. Vallet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 8

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le 10° de l’article L. 411-4 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est abrogé.

La parole est à M. Adel Ziane.

Debut de section - PermalienPhoto de Adel ZIANE

Nous proposons que la durée de validité de droit commun de la carte de séjour pluriannuelle, qui est de quatre ans, s’applique à des cartes qui sont à l’heure actuelle soumises à un régime dérogatoire.

La loi Cazeneuve de 2016 relative au droit des étrangers en France a généralisé la carte de séjour pluriannuelle d’une durée de quatre ans. Malheureusement, cette mesure positive, qui facilite et sécurise le parcours des étrangers, connaît un certain nombre de dérogations qui ont pour effet de raccourcir cette durée de validité. Tel est le cas pour au moins trois catégories d’étrangers : les étrangers mariés à un Français ; les parents étrangers d’un enfant français mineur résidant en France ; les étrangers dont les liens personnels et familiaux en France sont tels qu’un refus de titre porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée.

Pour ces catégories d’étrangers, en effet, la durée de la carte de séjour pluriannuelle est non pas de quatre ans, mais de deux ans. Or cette durée dérogatoire n’a aucune raison d’être, d’abord parce qu’elle maintient ces étrangers dans une situation de précarité administrative, à l’heure où l’on parle d’immigration et d’intégration, ensuite parce qu’elle alourdit la charge de travail des préfectures, lesquelles doivent instruire tous les deux ans des demandes de renouvellement alors qu’elles pourraient ne le faire que tous les quatre ans, sachant que des vérifications peuvent être faites régulièrement et à tout moment.

Nous proposons donc la suppression de ce régime dérogatoire et un alignement sur la durée de quatre ans.

Debut de section - PermalienPhoto de Muriel Jourda

La commission adhère à la logique qui est celle du Ceseda : il s’agit toujours de commencer par délivrer un titre de séjour d’une durée de validité plus réduite pour ensuite, si l’intégration est acquise, allonger cette durée en délivrant un titre qui permet de rester plus longtemps sur le territoire.

Nous proposons d’en rester là : avis défavorable.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

L’amendement n° 178, présenté par Mme Conway-Mouret, M. Chantrel, Mmes de La Gontrie et Narassiguin, MM. Bourgi, Durain et Chaillou, Mme Harribey, M. Kerrouche, Mme Linkenheld, M. Roiron, Mmes Brossel et G. Jourda, MM. Kanner et Marie, Mmes S. Robert et Rossignol, MM. Stanzione, Temal, Tissot, M. Vallet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 8

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À la première phrase de l’article L. 423-2 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, après les mots : « marié en France », sont insérés les mots : « ou à l’étranger si le mariage a été transcrit préalablement sur les registres de l’état civil français ».

La parole est à Mme Hélène Conway-Mouret.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Conway-Mouret

Cet amendement vise à étendre la faculté de voir délivrer un visa de long séjour aux conjoints de Français dont le mariage a été célébré à l’étranger à condition que ledit mariage ait été préalablement transcrit sur les registres de l’état civil français.

Il s’agit de corriger une différence de traitement manifestement injustifiée.

En effet, le cadre juridique actuel réserve le droit de solliciter un visa de long séjour aux étrangers dont le mariage avec un Français a été célébré en France et exclut ceux dont le mariage avec un Français a été célébré à l’étranger.

Dans le cadre de la lutte contre les mariages de complaisance, qui constitue une préoccupation constante des pouvoirs publics, les conditions d’accès et de séjour en France ont été considérablement durcies par le législateur. Les unions entre un ressortissant français et un ressortissant étranger qui ont lieu à l’étranger font désormais l’objet de contrôles tout aussi stricts et rigoureux que ceux qui s’appliquent aux unions ayant lieu en France.

Pour me rendre régulièrement dans ma circonscription et passer beaucoup de temps dans les locaux consulaires, je puis témoigner de la minutie avec laquelle les demandes de mariage sont traitées par nos agents consulaires qui, formés à cet effet, analysent les dossiers et convoquent et auditionnent les prétendants au mariage.

Il vous suffit d’examiner les statistiques de la lutte contre la fraude pour vous rassurer, mes chers collègues.

Cet amendement se veut également un signal pour les agents qui font leur travail honnêtement. La mesure de cohérence que nous vous proposons, mes chers collègues, n’est ni plus ni moins qu’un gage de confiance à l’égard de leur travail, qu’ils effectuent avec le même sérieux qui caractérise en France celui des agents de l’état civil.

Debut de section - PermalienPhoto de Muriel Jourda

Avis défavorable, pour une raison assez technique : la rédaction du dispositif de cet amendement me paraît manquer son objet.

Vous souhaitiez, ma chère collègue, étendre les conditions de délivrance du visa de long séjour ; or vous avez rédigé votre amendement de telle façon qu’il vise une dispense de visa. Nous ne souhaitons pas, quant à nous, qu’une dispense de visa s’applique aux cas que vous avez en vue. Il nous semble en tout état de cause opportun de maintenir une différence de traitement entre le cas d’un étranger qui s’est marié à l’étranger et celui d’un étranger qui se marie en France.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

L’amendement n° 77 rectifié ter, présenté par M. Paccaud, Mmes Valente Le Hir et V. Boyer, M. Menonville, Mme Josende, MM. Bazin, Karoutchi, H. Leroy et Chasseing, Mme L. Darcos, MM. Wattebled, Tabarot et Sautarel, Mmes Berthet, Estrosi Sassone, Drexler et Belrhiti, MM. D. Laurent, Belin, Cadec et Folliot, Mme Lassarade et MM. Levi, Longeot, Panunzi, Pointereau, Saury et Sol, est ainsi libellé :

Après l’article 8

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Il est créé un diplôme de l’intégration pour distinguer les citoyens ayant acquis la nationalité française dans les cas prévus par les paragraphes 2 et 5 de la section 1 du chapitre III du titre Ier bis du livre Ier du code civil, dont le parcours de vie, l’insertion professionnelle ou les engagements associatifs et civiques témoignent d’une intégration exemplaire dans la société française.

Peuvent également être distingués les étrangers pouvant prétendre à l’acquisition de la nationalité française sur le fondement de ces mêmes dispositions.

Un décret fixe les règles d’attribution, de promotion et le statut de ce diplôme.

II. – En conséquence, faire précéder cet article d’une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigé :

Chapitre…

Distinguer les parcours d’intégration réussis

La parole est à M. Olivier Paccaud.

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Paccaud

Par cet amendement, je souhaitais initialement proposer la création d’une médaille de l’intégration, mais les conseils avisés et la sagesse du président de la commission des finances, Claude Raynal, m’ont conduit, afin d’éviter les cruelles fourches caudines de l’article 40 de la Constitution, à métamorphoser cette médaille en un plus simple diplôme.

Pourquoi donc créer un diplôme de l’intégration, que le Gouvernement pourra éventuellement transformer en médaille ?

Certains y verront peut-être une mesure anecdotique, cosmétique, voire inutile ; ce serait faire fi, à mon humble avis, des vertus de l’exemplarité, du symbole, de la méritocratie.

Améliorer l’intégration, c’est aussi distinguer ses réussites. En mettant à l’honneur ou en valeur des modèles d’intégration, on envoie un message fort quant à la conception de l’immigration que l’on souhaite faire prévaloir : on ne la considère pas, de façon caricaturale, comme un réservoir de main-d’œuvre bon marché ; on sait s’en féliciter, au contraire, lorsqu’elle incarne une plus-value sociale.

Sans nier les problèmes, il faut savoir mettre en lumière celles et ceux qui se comportent bien. Nous en connaissons tous beaucoup autour de nous, des immigrés ou des Français fraîchement naturalisés qui se dévouent admirablement au sein d’associations ou qui, professionnellement, sont irréprochables.

Ces personnes qui donnent le meilleur d’elles-mêmes, qui apportent à la République, sachons les ériger en modèles et les récompenser !

Debut de section - PermalienPhoto de Muriel Jourda

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Elle est assez partagée sur ce point. Il est vrai que nous avons souvent tendance à parler de l’immigration d’une manière assez négative…

Marques d ’ ironie sur les travées des groupes SER, CRCE-K et GEST.

Sourires sur les mêmes travées.

Debut de section - PermalienPhoto de Muriel Jourda

Il est vrai que cela ne peut constituer une vision complète de l’immigration en France, et que ce serait là une occasion de le rappeler. Mais une partie de la commission s’interrogeait sur le fait qu’on puisse remettre un diplôme à quelqu’un qui, finalement, se comporte normalement : l’intégration est le principe du comportement de l’étranger en France. C’est pourquoi, afin de ne pas sombrer dans la schizophrénie, la commission a émis un avis de sagesse sur cet amendement.

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

Il est tout à fait favorable, monsieur le président.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

La parole est à M. Alexandre Ouizille, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Alexandre OUIZILLE

Mon cher collègue Paccaud, vous êtes tout de même gonflé ! Vous proposez des médailles aux étrangers alors que, depuis maintenant trois jours, vous ne faites que leur retrancher des droits !

De fait, ce texte s’attaque à tous les compartiments de la vie des étrangers, qu’ils soient en situation irrégulière – je pense à l’AME – ou en situation régulière, puisque vous compliquez l’accès de la famille sur le territoire national, rendez plus difficile le recours aux aides au logement, cependant que Mme Boyer nous explique qu’il faut contrôler, jusque dans les mariages, la manière dont les familles se constituent.

Mme Jacqueline Eustache-Brinio proteste.

Debut de section - PermalienPhoto de Alexandre OUIZILLE

Et là, pour faire passer cette potion amère, vous proposez de distribuer des médailles. Eh bien non, monsieur Paccaud, ils ne veulent pas des médailles, ils veulent des droits, et c’est tout à fait différent !

Mme Valérie Boyer proteste.

Debut de section - PermalienPhoto de Alexandre OUIZILLE

Votre amendement vise des Français par acquisition. Mais vous le savez, dans notre République, les médailles sont pour tout le monde, que vous soyez Français par acquisition ou de naissance. Il serait incroyable de créer ainsi une médaille, en quelque sorte, de second rang, à côté de la Légion d’honneur, de l’ordre national du Mérite et toutes les médailles qui existent, notre République n’en manquant pas tant nous aimons ce genre de breloque.

Monsieur Paccaud, je pense vraiment que cet amendement a quelque chose d’indécent au regard de la nature des débats que nous avons eus durant toutes ces dernières heures.

Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE-K et GEST.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

La parole est à M. Stéphane Sautarel, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Sautarel

Je soutiens l’amendement de mon collègue Olivier Paccaud, que j’ai cosigné. Son adoption permettrait de reconnaître l’intégration au cas par cas.

Yannick Jadot m’a interpellé tout à l’heure alors que j’étais en audition, et non dans l’hémicycle. Comme vous tous, comme beaucoup, nous sommes sensibles à certaines situations individuelles, et nous souhaitons tous accompagner ceux qui se montrent exemplaires et souhaitent s’intégrer dans notre pays. C’est l’illustration même de ce que nous défendons dans ce texte : l’examen des situations cas par cas. Cet engagement est très humain, et nous avons tous envie d’accompagner et de valoriser ceux qui se montrent exemplaires dans notre pays, quelles que soient leurs origines.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

La parole est à M. Roger Karoutchi, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Je suis également cosignataire de cet amendement. J’entends bien les propos de notre collègue Ouizille, mais la vérité, c’est que l’acquisition de la nationalité française est un événement difficile, lourd d’engagement. Tous ceux qui ont participé dans des mairies aux cérémonies d’entrée dans la nationalité savent l’émotion qui y règne, et la force de ces moments. Reconnaître les mérites a un poids symbolique. La méritocratie, c’est aussi l’exemple et l’exemplarité.

Dans notre société, si nous ne voulons pas que tout soit permis, que tout soit possible, nous souhaitons que les personnes qui, ayant acquis la nationalité, sont méritantes, font preuve d’un esprit de sacrifice, s’impliquent, reçoivent, sinon une médaille, car l’article 40 s’y oppose, au moins un diplôme reconnaissant une intégration réussie.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

La parole est à M. Olivier Paccaud, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Paccaud

Je ne suis pas convaincu que je convaincrai mes collègues… Je ne sais pas si je suis gonflé, mais je ne sais pas non plus si vous êtes cohérents ! Depuis trois jours, vous nous accusez d’être particulièrement cruels envers les immigrés. Et cette mesure, qui est peut-être un petit peu moins méchante, pour reprendre votre raisonnement, vous êtes contre !

Certes, il y a eu un doute au sein de la commission. Faut-il dire merci à quelqu’un qui se comporte bien ? Mais le but de ce diplôme, c’est de dire bravo à ceux qui se comportent très bien !

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Paccaud

M. Olivier Paccaud. Sur un point, M. Ouizille a raison : il existe différents types de médaille et tout le monde peut y prétendre. Les palmes académiques, les arts et lettres, le mérite agricole correspondent à des parcours très précis. Le diplôme que nous proposons correspondrait, lui aussi, à un parcours très précis.

Mme Cécile Cukierman se récrie.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Savoldelli

Vous pourriez donc retirer votre amendement. Il est vrai que, dans son objet, vous concédez – à juste titre – qu’il « existe sans doute autant de façons différentes de s’intégrer qu’il y a de Français naturalisés », et que « certains critères peuvent aider à objectiver une intégration réussie ». Je le dis très tranquillement : l’intégration, ce n’est pas automatiquement la naturalisation.

Notre collègue a parlé d’indécence, ce qui n’est pas si blessant, car vous parlez de diplômes, de médailles, quand vous êtes incapables de donner la médaille du travail aux sans-papiers qui travaillent… La leur donnerez-vous cette médaille ?

Applaudissements sur les travées des groupes CRCE-K et SER.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

La parole est à M. Guy Benarroche, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Benarroche

À la suite des propos de M. Savoldelli, je voudrais demander une petite précision aux auteurs de l’amendement. J’ai bien compris qu’on pourrait donner ce diplôme à des personnes ayant fraîchement acquis la nationalité française ; je comprends également de vos explications qu’on pourra le délivrer aussi à des personnes qui n’ont pas la nationalité française, donc à des migrants qui gardent leur nationalité. Nous avons tous quelques exemples en tête d’étrangers en situation irrégulière en France, qui pourraient satisfaire aux critères d’obtention de ce diplôme. Pourra-t-on le donner à des étrangers en situation irrégulière qui rempliraient les critères que vous proposez ?

L ’ amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 8.

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

Je demande une courte suspension de séance, monsieur le président.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à seize heures dix, est reprise à seize heures vingt.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

La séance est reprise.

TITRE II

AMÉLIORER LE DISPOSITIF D’ÉLOIGNEMENT DES ÉTRANGERS REPRÉSENTANT UNE MENACE GRAVE POUR L’ORDRE PUBLIC

Chapitre Ier

Rendre possible l’éloignement d’étrangers constituant une menace grave pour l’ordre public

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

L’amendement n° 539 rectifié bis, présenté par M. Ravier, est ainsi libellé :

Avant l’article 9

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au 2° de l’article L. 251-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, les mots : «, actuelle et suffisamment grave » sont supprimés.

La parole est à M. Stéphane Ravier.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Ravier

Aux termes de l’article L. 251-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, l’autorité administrative compétente peut obliger les étrangers à quitter le territoire français dès lors que « leur comportement personnel constitue, du point de vue de l’ordre public ou de la sécurité publique, une menace réelle, actuelle et suffisamment grave à l’encontre d’un intérêt fondamental de la société ».

Pour rendre cette capacité d’expulser plus facilement applicable, mon amendement tend à supprimer les termes « actuelle » et « suffisamment grave ». En effet, une menace réelle pour l’ordre public et la sécurité des Français, qu’elle soit passée ou future, n’est pas tolérable. Si nous ne pouvons pas éviter le risque zéro, appliquons tout au moins la tolérance zéro.

De même, il est inutilement restrictif pour l’autorité administrative de devoir justifier de la particulière gravité de cette menace, car le principe d’une menace, tant qu’elle n’est pas réalisée, est qu’elle est tapie et imprévisible. La sécurité des Français avant tout ! Cet amendement me paraît particulièrement important.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

I. – Le chapitre Ier du titre III du livre VI du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est ainsi modifié :

1° L’article L. 631-2 est ainsi modifié :

a) L’avant-dernier alinéa est ainsi rédigé :

« Par dérogation au présent article, peut faire l’objet d’une décision d’expulsion en application de l’article L. 631-1, l’étranger mentionné aux 1° à 4° du présent article lorsqu’il a déjà fait l’objet d’une condamnation définitive pour des crimes ou des délits punis de cinq ans ou plus d’emprisonnement. » ;

b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Par dérogation au présent article, peut faire l’objet d’une décision d’expulsion en application de l’article L. 631-1, l’étranger mentionné aux 1° à 4° du présent article lorsque les faits à l’origine de la décision d’expulsion ont été commis à l’encontre de son conjoint ou de ses enfants ou de tout enfant sur lequel il exerce l’autorité parentale. » ;

2° L’article L. 631-3 est ainsi modifié :

a)

b) Le dernier alinéa est ainsi rédigé :

« Par dérogation au présent article, peut faire l’objet d’une décision d’expulsion en application de l’article L. 631-1, l’étranger mentionné aux 1° à 5° du présent article lorsqu’il a déjà fait l’objet d’une condamnation définitive pour des crimes ou délits punis de dix ans ou plus d’emprisonnement ou de cinq ans en réitération de crimes ou délits punis de la même peine. »

II. – Au chapitre II du titre V du livre II du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, le deuxième alinéa de l’article L. 252-2 est ainsi rédigé :

« Par dérogation au sixième alinéa de l’article L. 631-2, la circonstance qu’il a déjà fait l’objet d’une condamnation définitive pour des crimes ou des délits punis de cinq ans ou plus d’emprisonnement n’a pas pour effet de le priver du bénéfice des dispositions du présent article. »

III. – Le code pénal est ainsi modifié :

1° A

a) Le premier alinéa est ainsi rédigé :

« La peine d’interdiction du territoire français peut être prononcée, à titre définitif ou pour une durée de dix ans au plus, à l’encontre de tout étranger coupable d’un crime, d’un délit puni d’une peine d’emprisonnement d’une durée supérieure ou égale à cinq ans ou d’un délit pour lequel la peine d’interdiction du territoire français est prévue par la loi. » ;

b) Au troisième alinéa, les mots : «, pour la durée fixée par la décision de condamnation, » sont supprimés ;

c) Après le même troisième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« La peine d’interdiction du territoire français cesse ses effets à l’expiration de la durée fixée par la décision de condamnation. Cette durée court à compter de la date à laquelle le condamné a quitté le territoire français, constatée selon des modalités déterminées par décret en Conseil d’État. » ;

1° L’article 131-30-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« L’exigence de motivation spéciale, prévue au premier alinéa du présent article, au regard de la gravité de l’infraction et de la situation personnelle et familiale de l’étranger n’est pas applicable aux peines d’interdiction du territoire français prononcées à l’encontre d’un étranger coupable d’un délit puni d’au moins cinq ans d’emprisonnement ou d’un délit commis à l’encontre du conjoint ou des enfants de l’étranger ou de tout enfant sur lequel il exerce l’autorité parentale. » ;

2° L’article 131-30-2 est ainsi modifié :

aa)

a) Le dernier alinéa est complété par les mots : «, ni aux délits de provocation à la discrimination, à la haine ou à la violence contre une personne déterminée ou un groupe de personnes prévus aux septième et huitième alinéas de l’article 24 de la loi du 29 juillet de 1881 sur la liberté de la presse, ni aux crimes, ni aux délits punis d’au moins dix ans d’emprisonnement, ni aux délits commis en état de récidive et punis d’au moins cinq ans d’emprisonnement » ;

b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« La décision est spécialement motivée au regard de la gravité de l’infraction et de la situation personnelle et familiale de l’étranger dans ces cas. » ;

2° bis

3° À l’article 222-48, les mots : « 222-1 à 222-12, 222-14, 222-14-1, 222-14-4, 222-15, 222-15-1, 222-23 à 222-31 et 222-34 à 222-40 » sont remplacés par les mots : « 222-11 et 222-14-4 » ;

Supprimé

10°

IV

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

Mes chers collègues, j’appelle chacun et chacune d’entre vous à être concis dans ses propos, afin que nous achevions l’examen de ce texte dans les délais.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

L’amendement n° 315 rectifié, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Guy Benarroche.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Benarroche

M. Guy Benarroche. Monsieur le président, je vous remercie de cette invite au moment même où je prends la parole, moi qui suis toujours très concis.

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Benarroche

Cet article 9 nous paraît être l’un des articles les plus dangereux et les plus difficiles à accepter de ce projet de loi. Ses dispositions marquent le retour en force de la double peine pour l’ensemble des étrangers qui auraient commis une infraction. Il prévoit en effet de fragiliser la catégorie des étrangers bénéficiant de la protection dite « quasi absolue ». Cette protection concerne notamment des personnes résidant en France avant l’âge de 13 ans, ou y résidant de manière régulière depuis plus de vingt ans, ou encore les étrangers malades.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Benarroche

Il s’agirait d’abolir les protections en raison non plus de la peine prononcée, mais de la peine encourue. C’est un assouplissement excessivement large, englobant même des délits de faible gravité.

En effet, loin de viser les quelques centaines d’étrangers condamnés pour un crime – il y en a eu 451 en 2021 –, ces dispositions concernent les étrangers condamnés pour des délits, soit 99 % de ceux qui le sont.

Ce dispositif serait-il conforme aux obligations internationales de la France ? La substitution de la peine encourue – un délit passible d’une peine de cinq ans d’emprisonnement – à la peine prononcée est disproportionnée au regard des conséquences qu’une décision d’expulsion aura sur les droits fondamentaux des personnes qui en font l’objet et des membres de leurs familles.

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

L’article 9 concerne les mesures administratives d’expulsion à l’encontre d’étrangers en situation irrégulière ou régulière. Un tel arrêté peut être pris par le préfet, mais il l’est le plus souvent par le ministre de l’intérieur. On en compte moins d’un millier par an, et nous souhaitons précisément qu’il y en ait davantage – j’ai compris que vous vous y opposiez – en levant les protections qui empêchent le ministre de l’intérieur de prendre ces arrêtés. Ceux-ci, d’ailleurs, s’ils permettent une expulsion plus rapide, offrent aussi des garanties plus fortes à la personne que l’on veut expulser, notamment parce qu’ils sont soumis à l’avis de la commission d’expulsion, dans laquelle siègent des magistrats.

Le Conseil d’État a indiqué dans son avis que rien, tant dans notre bloc de constitutionnalité que dans la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH), n’empêche de revenir sur les protections qui avaient été décidées par le législateur – sur proposition, d’ailleurs, du ministre Sarkozy en 2003. Nous sommes le seul pays, dans toute l’Union européenne, à avoir mis en place ces protections, qui relèvent entièrement du domaine législatif.

Certes, l’une de ces dispositions concerne les mineurs qui commettent des actes graves pendant qu’ils sont mineurs ; mais nul ici ne propose de revenir dessus, et d’ailleurs la convention internationale des droits de l’enfant (CIDE), que nous avons ratifiée, nous en empêcherait. Mais nous pouvons modifier toutes les autres. Il y a plusieurs types de rédaction possibles, nous le verrons.

Cela ne signifie pas qu’il n’y aura pas de juge pour regarder ce que nous faisons, monsieur Benarroche : nous prenons l’arrêté ministériel d’expulsion, et c’est ensuite au juge d’examiner si la vie privée et familiale l’emporte sur le trouble grave à l’ordre public, ou si ce dernier l’emporte sur la vie privée et familiale, selon les mêmes règles que pour l’intérêt fondamental de la Nation en matière de terrorisme.

Actuellement, les protections votées par le législateur il y a vingt-cinq ans sont telles qu’il n’est parfois pas même possible pour le ministre de l’intérieur de prendre un arrêté ministériel d’expulsion.

Nos propositions sont conformes à la Constitution, en tout cas. Il y a simplement un équilibre à trouver entre le ministre de l’intérieur, qui doit pouvoir faire son travail, et le juge, qui fera le sien.

Pour toutes ces raisons, le Gouvernement a émis un avis défavorable sur votre amendement, monsieur Benarroche.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

La parole est à M. Guy Benarroche, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Benarroche

Monsieur le ministre, si les protections sont si importantes, c’est que le législateur et vos prédécesseurs l’ont voulu ainsi, évidemment. Pour la Défenseure des droits, vous procédez à un déplacement du curseur particulièrement inquiétant, non seulement parce que la référence à la peine encourue plutôt qu’à la peine prononcée va à l’encontre du principe d’individualisation de la peine, mais également parce que, dans les faits, les peines encourues sont très supérieures aux peines prononcées – M. Szpiner nous l’a expliqué hier –, si bien que la levée des protections contre l’expulsion concernera un très grand nombre de personnes, pour lesquelles la gravité de la menace qu’elles représentent sera loin d’être établie. Le risque d’atteinte sera d’autant plus important que le recours contre l’expulsion n’est pas, en principe, suspensif.

Par ailleurs, en visant les parents d’enfants français et les personnes mariées avec des conjoints français, les dispositions de l’article 9 génèrent aussi un déséquilibre entre l’objectif de sauvegarde de l’ordre public par des mesures de police administrative et le droit à mener une vie familiale, protégé par l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et les articles 3 et 9 de la CIDE.

Pour l’ensemble de ces raisons, monsieur le ministre, notre groupe demande la suppression de cet article.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

La parole est à M. le ministre, à qui je recommande la concision.

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

C’est un article important, monsieur le président, qui sera scruté par le Conseil constitutionnel.

Je comprends la position de M. Benarroche, respectable évidemment, même si ce n’est pas celle du Gouvernement, qui a besoin d’élargir les possibilités d’expulsion.

J’arrive actuellement à faire expulser environ 2 500 étrangers délinquants par an. Il y en a environ 4 000 par an que je n’arrive pas à faire expulser. Ce n’est pas faute de laissez-passer consulaires, mais parce que le juge m’empêche de le faire, à cause des réserves évoquées.

Je prendrai l’exemple d’un ressortissant d’un pays donné, entré en France en décembre 2001 à l’âge de 8 ans, qui n’est pas marié, n’a pas d’enfants sur le territoire national et ne présente aucun justificatif d’insertion professionnelle. Cette personne ne justifie d’aucun type de séjour, et a fait l’objet en neuf ans de douze condamnations – il ne s’agit pas d’accusations de la part de la police, donc –, dont la dernière à dix-huit mois de prison ferme pour conduite sans permis avec récidive, usage de stupéfiants, vols aggravés en récidive.

Puisque cette personne est entrée en France avant l’âge de 13 ans, il n’est pas possible de l’éloigner ni de l’expulser.

Mais une personne présentant le même profil, moins condamnée, qui serait arrivée en France à l’âge de 13 ans et demi, je peux l’expulser. Il n’y a aucune cohérence…

Cet individu n’a pas de lien avec notre pays. Il n’a pas d’enfant, n’est pas marié et n’est pas inséré professionnellement.

Et même s’il l’était, nous pourrions tout de même proposer son expulsion. Or, sous prétexte qu’il est arrivé en France avant l’âge de 13 ans, je ne peux pas procéder à son expulsion ni aller devant le juge.

Ce type de personnes sans lien avec notre pays commettent en général leurs méfaits après l’âge de 18 ans. Le fait qu’elles soient restées quelques années sur notre territoire ne justifie pas de les accueillir plus longtemps lorsqu’elles commettent des crimes en récidive.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

L’amendement n° 348 rectifié, présenté par M. Retailleau, Mme Aeschlimann, MM. Allizard, Anglars, Bacci, Bas, Bazin et Belin, Mmes Bellurot, Belrhiti et Berthet, MM. E. Blanc et J.B. Blanc, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Bonhomme et Bonnus, Mme Borchio Fontimp, M. Bouchet, Mme V. Boyer, MM. Brisson, Bruyen, Burgoa, Cadec et Cambon, Mmes Canayer et Chain-Larché, M. Chaize, Mmes de Cidrac et Ciuntu, MM. Darnaud et Daubresse, Mmes Demas, Deseyne, Di Folco, Drexler, Dumont, Estrosi Sassone, Eustache-Brinio et Evren, MM. Favreau et Frassa, Mme Garnier, M. Genet, Mmes F. Gerbaud et Gosselin, MM. Gremillet et Grosperrin, Mme Gruny, MM. Gueret, Hugonet et Husson, Mmes Jacques, Josende et Joseph, MM. Joyandet, Karoutchi et Klinger, Mme Lassarade, M. D. Laurent, Mme Lavarde, MM. de Legge, H. Leroy et Le Rudulier, Mmes Lopez, Malet et P. Martin, M. Meignen, Mme Micouleau, MM. Milon et Mouiller, Mmes Muller-Bronn et Nédélec, M. de Nicolaÿ, Mme Noël, MM. Nougein, Panunzi, Paul, Pellevat, Pernot, Perrin et Piednoir, Mme Pluchet, M. Pointereau, Mmes Primas et Puissat, MM. Rapin, Reichardt et Reynaud, Mme Richer, MM. Rietmann, Rojouan, Saury, Sautarel et Savin, Mme Schalck, MM. Sido, Sol, Somon, Szpiner et Tabarot, Mme Ventalon, MM. C. Vial, J.P. Vogel, Bouloux et Cuypers, Mme Imbert, MM. Khalifé et Mandelli et Mme Petrus, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

I. – Le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est ainsi modifié :

1° L’article L. 252-2 est abrogé ;

2° À l’article L. 423-19, les mots : « les catégories mentionnées aux articles L. 631-2, L. 631-3 et » sont remplacés par les mots : « la catégorie mentionnée à l’article » ;

3° Au dernier alinéa de l’article L. 426-4 et au premier alinéa de l’article L. 433-12, les mots : « des articles L. 631-2 ou L. 631-3 » sont remplacés par les mots : « de la seconde phrase de l’article L. 631-1 » ;

4° L’article L. 631-1 est ainsi modifié :

a) Les mots : « sous réserve des conditions propres aux étrangers mentionnés aux articles L. 631-2 et L. 631-3 » sont supprimés ;

b) Est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « L’autorité administrative tient compte de l’ensemble des circonstances relatives à la situation de l’étranger, en particulier de la durée de sa présence sur le territoire français, ainsi que de la nature, de l’ancienneté et de l’intensité de ses liens avec la France. » ;

5° Les articles L. 631-2 et L. 631-3 sont abrogés ;

6° À l’article L. 632-7, les mots : «, à la date de la décision d’expulsion, ils relevaient, sous les réserves prévues par ces articles, des catégories mentionnées aux 1°, 2°, 3° et 4° de l’article L. 631-3 » sont remplacés par les mots : « la nature et l’intensité de leurs liens avec la France le justifient » ;

7° À l’article L. 641-1, les mots : « les dispositions des articles 131-30, 131-30-1 et 131-30-2 » sont remplacés par les mots : « l’article 131-30 » ;

8° Au quatrième alinéa de l’article L. 742-5, les mots : « ou du 5° de l’article L. 631-3 » sont supprimés.

II. – Le code pénal est ainsi modifié :

1° L’article 131-30 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, les mots : « Lorsque qu’elle est prévue par la loi, » sont supprimés et sont ajoutés les mots et la phrase : « et sous réserve que sa situation individuelle n’y fasse pas obstacle en raison, notamment, de la durée de sa présence sur le territoire français, ainsi que de la nature, de l’ancienneté et de l’intensité de ses liens avec la France. Elle est obligatoirement prononcée à l’encontre de l’étranger coupable d’un crime ou d’un délit puni d’une peine d’emprisonnement d’une durée supérieure ou égale à deux ans. » ;

b) À la seconde phrase du troisième alinéa, les mots : «, pour la durée fixée par la décision de condamnation, » sont supprimés ;

c) Après le même troisième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« La peine d’interdiction du territoire français cesse ses effets à l’expiration de la durée fixée par la décision de condamnation. Cette durée court à compter de la date à laquelle le condamné a quitté le territoire français, constatée selon des modalités déterminées par décret en Conseil d’État. » ;

2° Les articles 131-30-1, 131-30-2, 213-2, 215-2, 221-11, 221-16, 222-48, 222-64, 223-21, 224-11, 225-21, 311-15, 312-14, 321-11, 322-16, 324-8, 414-6, 431-8, 431-12, 431-19, 431-27, 433-21-2, 433-23-1, 434-46, 441-11, 442-12, 443-7, 444-8 et 462-4 sont abrogés ;

3° Le dernier alinéa de l’article 435-14 est supprimé.

III. – Le dixième alinéa de l’article 41 du code de procédure pénale est supprimé.

La parole est à M. Bruno Retailleau.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

Les articles 9 et 10 sont très importants.

Le 13 octobre dernier, nos compatriotes ont été doublement sidérés : une première fois lorsqu’ils ont appris qu’une fois encore, un professeur de la République venait d’être assassiné ; une seconde fois lorsqu’ils ont appris que l’auteur des faits aurait pu faire l’objet d’une expulsion, mais qu’il n’a pas été expulsé au motif qu’il était arrivé sur le territoire français avant l’âge de 13 ans.

Les Français ont découvert qu’il existait une règle, l’expulsion des individus étrangers dangereux, mais que celle-ci était tellement trouée qu’elle avait été, en quelque sorte, tuée par les exceptions. Les exceptions ont tué la règle, et elles menacent désormais les Français.

Progressivement, nous avons abandonné les instruments juridiques de régulation de l’immigration. Progressivement, nous avons organisé – M. le ministre vient de l’indiquer – notre propre impuissance.

Comment voulez-vous que les Français comprennent que l’on protège des individus étrangers très dangereux qui, parfois, ont été condamnés très sévèrement, y compris pour des crimes de sang, et qu’on laisse, exposés à leur menace, à leur violence, à leur barbarie, les Français honnêtes et paisibles ?

Je sais que l’inconstitutionnalité et l’inconventionnalité me seront opposées.

Mes chers collègues, nous sommes des législateurs. Nous exprimons la volonté générale. À ce titre, le débat doit avoir lieu.

Mon amendement ne concerne pas les mineurs de moins de 18 ans. Il ne surtranspose pas – gardons-nous de le faire ! – les règles de la convention européenne des droits de l’homme (CEDH).

C’est au juge, pour l’interdiction du territoire français (ITF), ou à l’administration, pour l’arrêté d’expulsion et sous le regard des tribunaux, qu’il appartient de placer le curseur.

De grâce, ne surtransposons pas et donnons aux Français le gage d’une véritable protection !

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bonnecarrere

La commission émet un avis de sagesse.

Il faut y voir, monsieur Retailleau, le témoignage de l’attention que nous portons aux préoccupations que vous venez d’exprimer et à l’importance d’un tel sujet pour nos concitoyens.

Ces derniers ont bien sûr été sidérés par les drames auxquels vous avez fait référence. Ils ont été sidérés de comprendre ou de mesurer les conséquences de ces protections.

Dans son propos introductif, M. le ministre a évoqué le sujet en débat : la levée des protections absolues et relatives.

Il y a deux manières d’aborder la question : soit on lève l’ensemble des protections ; soit on les lève seulement dans une série de situations et l’on mesure ensemble si le champ des possibles répond aux préoccupations de nos concitoyens comme à celles que vous avez exprimées.

La question que vous posez anticipe le débat qui se tiendra au Sénat le 12 décembre prochain, à l’occasion de l’examen de la proposition de loi constitutionnelle relative à la souveraineté de la France, à la nationalité, à l’immigration et à l’asile. Nous en comprenons parfaitement la teneur, et vous en avez fixé, en quelque sorte, le cadre intellectuel.

Mes chers collègues, regardons ensemble, en parallèle, ce que nous pouvons faire dans le cadre constitutionnel actuel. Vous serez étonné par l’ampleur des possibilités, mais aussi de ce que vous avez prévu, les uns et les autres, au travers de vos amendements.

Si l’on cumule les amendements de la commission, celui de M. Karoutchi, celui de Mme Aeschlimann ou encore celui du Gouvernement, le champ des possibles est considérable. Cela répondra de manière satisfaisante, me semble-t-il, aux préoccupations que M. Retailleau a exprimées, non pas à titre personnel, mais au nom de l’ensemble de nos concitoyens.

La réserve que nous éprouvons à l’égard de la suppression sèche des protections n’est pas liée – une fois n’est pas coutume – à des raisons conventionnelles.

Elle est purement constitutionnelle : le Conseil constitutionnel nous impose en effet, dans une décision de 2005, d’assurer « une conciliation équilibrée entre la sauvegarde de l’ordre public, qui est un objectif de valeur constitutionnelle, et le droit de mener une vie familiale normale ».

Le Conseil constitutionnel se fonde ici sur le dixième alinéa du préambule de la Constitution de 1946, qui, comme vous le savez, a été intégré dans notre bloc de constitutionnalité. Dans ce cadre, le Conseil estime qu’il existe un droit à la vie privée familiale.

Sur ce point, et comme souvent en matière constitutionnelle, une tension s’exerce et une conciliation équilibrée doit être trouvée entre deux principes que vous connaissez bien : la sauvegarde de l’ordre public et la protection de la vie privée familiale.

Le législateur peut très bien, dans cet exercice de placement du curseur, mettre l’accent sur la sauvegarde de l’ordre public. Nous savons en revanche à l’avance que le Conseil constitutionnel censurera des dispositions qui pencheraient à 100 % vers la protection de l’ordre public et à 0 % vers la vie privée familiale. Or cela serait le cas si nous supprimions totalement les protections, qu’elles soient absolues ou relatives.

Regardons à présent ce que nous pouvons faire. Les amendements des rapporteurs prévoient une baisse des seuils pour la levée des protections.

Nous proposons ainsi de passer à cinq ans d’emprisonnement pour les protections absolues et à trois ans pour les protections relatives.

Monsieur Benarroche, il est exact que nous souhaitons abaisser significativement les seuils. Je rappelle qu’une peine de cinq ans correspond à un vol avec une circonstance aggravante et qu’une peine de trois ans correspond à un vol simple.

Nous pensons que nous ne pourrions pas aller en deçà sans nous heurter à la Constitution. Je ne vous le cache pas, en proposant ces dispositions, nous testons nous-mêmes les limites des positions du Conseil constitutionnel.

Le Conseil constitutionnel, je le répète, n’est pas opposé au principe de l’abaissement des seuils. En revanche, je ne saurai vous donner d’éléments sur le niveau minimum.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bonnecarrere

Au-delà de l’abaissement des seuils, la commission propose, à l’amendement n° 631, d’étendre la possibilité de lever les protections en cas de violences intrafamiliales à la situation où lesdites violences ont été commises sur un ascendant.

Nous proposons par ailleurs, via l’amendement n° 630, de donner au juge la possibilité de prononcer une ITF à l’encontre de tout étranger reconnu coupable d’un crime ou d’un délit passible de plus de trois ans d’emprisonnement.

Nous émettrons en outre un avis favorable sur l’amendement de M. Karoutchi, qui vise à écarter toute protection absolue ou relative lorsque l’étranger est en situation irrégulière.

De même, nous serons favorables à l’amendement n° 583 rectifié bis de Mme Aeschlimann, tendant à supprimer toute protection en cas de violence sur les élus et les agents publics.

Enfin, nous émettrons un avis favorable sur l’amendement n° 611 du Gouvernement, qui a pour objet de supprimer toutes les protections en cas d’atteinte aux valeurs de la République.

À nos yeux, l’ensemble des possibles ainsi ouverts répond très largement aux préoccupations que M. Bruno Retailleau a exprimées au nom d’une grande partie de nos concitoyens.

Mes chers collègues, sans vouloir influencer en aucune façon votre vote, j’appelle votre attention sur un dernier point.

Si l’amendement de M. Retailleau était adopté, tous les amendements subséquents deviendraient sans objet. Imaginons que la force de conviction du président Retailleau et de ses collègues conduise à faire en sorte que ces dispositions figurent dans le texte qui sera issu des débats parlementaires. La censure du Conseil constitutionnel serait – restons prudents – probable. L’ensemble des mesures que je viens d’énumérer disparaîtraient du texte. Gardez cela à l’esprit, mes chers collègues, quand vous prendrez votre décision.

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

La seule disposition proposée par le Gouvernement, qu’elle soit ou non modifiée par les amendements des rapporteurs, permettrait déjà d’atteindre près de 4 000 mesures d’expulsion par an, alors que nous en enregistrons aujourd’hui à peine 400 à 500.

Je rappelle que l’arrivée avant l’âge de 13 ans sur le territoire national représente 69 % des cas dans lesquels l’expulsion n’est pas possible. Vient ensuite la protection des conjoints de Français, pour 22 %. Nous tranchons là le nœud gordien en matière d’expulsion des étrangers délinquants.

Je le précise, l’article 9 concerne des personnes qui auraient été définitivement condamnées à plus de cinq ans de prison ferme, de façon définitive et après l’épuisement de tout appel. Il s’agit donc bien de délinquants ou de criminels notoires.

Le Gouvernement avait imaginé de fixer le seuil à dix ans de prison et cinq ans en cas de récidive. La commission des lois propose un seuil à cinq ans. Nous allons la suivre.

Je rejoins Bruno Retailleau. Certaines situations sont difficilement compréhensibles pour les Français.

Je prends l’exemple de deux frères de nationalité étrangère nés l’un en 1991, l’autre en 1995. Arrivés en France en 2003, ils ont toujours été en situation régulière. Le premier a été condamné à dix ans d’emprisonnement pour viol sur personne vulnérable, et le second à sept ans d’emprisonnement pour proxénétisme aggravé sur mineur de moins de 15 ans.

Or les deux frères bénéficient de la protection de la loi : ils sont arrivés en France avant l’âge de 13 ans et chacun peut se prévaloir de son lien familial avec l’autre. §Un certain nombre de dispositions – le législateur pourrait s’en convaincre – sont, de toute évidence, absurdes.

Monsieur Retailleau, je comprends tout à fait l’esprit dans lequel vous présentez votre amendement. Je ne peux pas y souscrire, et je ne pourrai émettre sur ce dernier qu’un avis défavorable, non pas pour vous être désagréable, mais parce que je tiens, comme M. le rapporteur, à l’avancée du texte.

Je souhaite notamment qu’il soit validé par le Conseil constitutionnel. En effet, je ne saurais me passer des 3 600 arrêtés ministériels d’expulsion (AME) que ce texte pourrait me permettre d’obtenir.

Ces mesures sont, me semble-t-il, bien plus importantes que les autres dispositions que nous avons longuement évoquées.

La seule question à nous poser est de nous demander quelles mesures sont constitutionnelles et lesquelles ne le sont pas.

Je comprends bien que des considérations politiques puissent conduire à pousser dans un certain sens. Je pense néanmoins que nous allons déjà assez loin, dans le respect de la Constitution.

Je souhaite d’ailleurs rappeler un élément, pour la clarté de nos débats : le Conseil d’État considère que le fait d’excepter des protections prévues des étrangers qui continuent de menacer gravement l’ordre public « ne se heurte à aucun obstacle d’ordre constitutionnel ou conventionnel, dès lors que les décisions d’expulsion sont soumises au respect du principe de nécessité et de proportionnalité et de l’article 8 de la CEDH, et qu’elles sont placées sous le contrôle du juge ».

Le Conseil d’État ayant – il faut le souligner – validé notre dispositif, nous pensons que ce dernier est constitutionnel.

Monsieur Retailleau, votre amendement va plus loin. Non seulement vous proposez de lever toutes les protections – nous souhaitons les lever uniquement pour les personnes condamnées à plus de cinq ans de prison ferme –, mais vous ajoutez des dispositions tendant à infliger des peines d’ITF automatiques.

Vous engagez le juge à prononcer des peines automatiques, ce qui est contraire, vous le savez, à la Constitution, comme au principe de la libre individualisation des peines par les magistrats.

Par ailleurs, vous aggravez les peines encourues d’une manière que nous jugeons disproportionnée. Cela peut s’entendre politiquement, mais nécessite une réforme constitutionnelle, qui ne serait peut-être même pas suffisante pour apporter les garanties souhaitées ; nous aurons l’occasion d’en débattre lors de l’examen de la proposition de loi constitutionnelle que vous avez déposée.

Monsieur Retailleau, après cet échange, je vous invite à retirer votre amendement, pour le bien du texte, qui est conforme à la Constitution et qui va suffisamment loin.

Cela ne signifie pas que nous avons épuisé le débat sur les questions constitutionnelles et conventionnelles. Mais, en l’occurrence, nous sommes en train d’élaborer la loi ordinaire.

À défaut d’un retrait, je serais contraint d’émettre un avis défavorable sur votre amendement.

J’aurai l’occasion d’émettre un avis similaire sur un certain nombre d’amendements, à l’exception de l’amendement n° 631, sur lequel l’avis du Gouvernement sera favorable.

Vous l’avez compris, ce n’est pas un désaccord de principe que j’exprime ici. Je souhaite simplement sauver ce texte, qui est très important pour la sécurité de nos compatriotes.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

La parole est à Mme Corinne Narassiguin, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne NARASSIGUIN

L’inconstitutionnalité de l’amendement n° 348 rectifié, qui est de surcroît également contraire à la convention européenne des droits de l’homme, a été, me semble-t-il, bien établie.

Nous sommes tous préoccupés par la lutte contre le terrorisme. Nous voulons tous nous assurer que l’État dispose des moyens de garantir la protection de nos concitoyens et concitoyennes face à de telles menaces.

Il serait bon que chacun évite les faux procès, les amalgames, …

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne NARASSIGUIN

… ainsi que les manipulations et l’instrumentalisation de l’attentat d’Arras, ne serait-ce que parce que le présent projet de loi a été rédigé bien avant ce dernier.

Le régime de l’expulsion, tel qu’il existe aujourd’hui, comprend déjà des dispositions qui permettent de lever les protections dans les cas où il est établi que les personnes visées participent à des entreprises terroristes.

La question n’est pas de modifier encore une fois le droit ; le vrai sujet porte sur les moyens que nous voulons bien nous donner – et peut-être ne pas perdre – dans notre administration et dans nos préfectures.

Je pense notamment au suivi du travail illégal et à la multiplication des OQTF. Mobilisons plutôt les moyens de l’État sur le suivi des individus dangereux. En un mot, mettons les moyens là où c’est nécessaire.

Enfin, rappelons-nous aussi que, selon les chiffres du ministère de l’intérieur lui-même, la grande majorité des auteurs d’attentats déjoués ou commis depuis 2015 sont français.

M. Roger Karoutchi le conteste.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

La parole est à M. Bruno Retailleau, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

Mon amendement vise à supprimer les exceptions à la règle que sont les protections dont bénéficient des étrangers ayant été condamnés, souvent, à de lourdes peines.

Il faut toujours lire les excellents rapports de la commission des lois. D’ailleurs, bien que nous ne soyons pas parfaitement sur la même longueur d’onde, je voudrais sincèrement remercier M. le rapporteur du développement qu’il vient de faire.

À la page 103 du rapport de la commission, on trouve, parmi les profils d’étrangers protégés contre l’expulsion, celui d’un « individu condamné à 42 reprises entre 1991 et 2019 pour des faits de vol, trafic de stupéfiants, violence sur conjoint, violence sur personne dépositaire de l’ordre public, outrage et agression sexuelle ». Est-ce faire un amalgame que de réclamer son expulsion ? Voilà ce dont il est question ! Nous ne pouvons pas noyer le débat dans des arguties juridiques.

Je respecte l’État de droit et la norme constitutionnelle. Mais nous devons rechercher l’équilibre entre, d’une part, l’expression de la volonté générale, la démocratie et la souveraineté populaire et, d’une part, les décisions juridictionnelles, d’autre part.

Rappelez-vous la période des attentats et les critiques dont nous avons fait l’objet. Avec notre collègue Philippe Bas, nous avions déplacé le curseur entre les libertés publiques et la sécurité, parce qu’il fallait alors faire face à des situations extrêmement dangereuses.

Par deux fois, le Conseil constitutionnel avait censuré la mesure réprimant la consultation de sites djihadistes. C’est incompréhensible !

C’est pour ces raisons que je pose un tel débat.

J’ai compris l’enjeu juridique autour de mon amendement. Je pourrais être disposé à le retirer sous réserve que M. le rapporteur et M. le ministre me donnent l’un et l’autre l’assurance que l’amendement de Roger Karoutchi, celui de la commission, celui de Mme Marie-Do Aeschlimann et celui du Gouvernement recueilleront un avis favorable.

En d’autres termes, je ne retirerai mon amendement qu’à la condition d’avoir la certitude qu’il existe une autre voie de passage.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

J’ai déjà annoncé que le Gouvernement serait favorable à l’amendement de Mme la rapporteure.

Je dois encore examiner les autres, mais il me semble que l’amendement de M. Karoutchi n’est pas constitutionnel ou qu’à tout le moins, il soulève quelques questions.

Monsieur Retailleau, le texte du Gouvernement, modifié par la commission, permet déjà de répondre à l’exemple que vous avez pris dans le rapport de la commission des lois.

L’expulsion de la personne en question serait prononcée du fait non pas de votre amendement, mais de l’article 10 dans sa rédaction actuelle, c’est-à-dire celle de la commission.

Votre amendement aurait pour effet d’obliger le juge à prononcer une peine automatique de non-retour pour cette personne. En cela, il fragiliserait juridiquement l’avancée considérable que représente l’article 10.

En résumé, si je ne peux pas expulser la personne que vous citez en exemple aujourd’hui, je le pourrai demain, grâce à l’article du Gouvernement modifié par la commission des lois. L’objectif est donc atteint.

Je vais à présent regarder d’un œil particulier l’amendement de M. Karoutchi, comme je le fais pour l’ensemble des sénateurs, mais singulièrement pour M. Karoutchi.

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

Je précise que les avis de la commission sont favorables sur les amendements n° 630, 631, 583 rectifié bis, 349 rectifié bis et 611.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

Vous avez bien compris l’esprit de mon amendement. Notre parlement s’est terriblement affaibli sous la Ve République. Si nous anticipons chaque décision du Conseil constitutionnel en nous autocensurant, nous nous affaiblirons encore davantage. Nous devons exprimer l’intérêt général et protéger les Français.

Si je comprends bien, mon amendement présente des difficultés juridiques, mais son retrait bénéficierait à d’autres amendements qui pourraient être votés par la majorité sénatoriale ? C’est à cette seule condition que je pourrais le retirer.

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

Monsieur Retailleau, je ne voudrais pas que nous passions un marché de dupes.

Je vous informe, avant que vous ne retiriez votre amendement, que je ne pourrai pas émettre un avis favorable sur celui de M. Karoutchi. L’avis du Conseil d’État m’en empêche.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

Quand ce n’est pas le Conseil constitutionnel, c’est le Conseil d’État !

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

Le ministre de l’intérieur doit s’en accommoder. Mea maxima culpa.

Le Gouvernement avait soumis à l’avis du Conseil d’État une rédaction de l’article 9 que nous pourrions considérer comme similaire à ce que vous proposez, exception faite de la peine automatique relative au retour.

Le Conseil d’État ne s’est pas opposé, je le répète, à la levée des protections. Il a néanmoins attiré notre attention sur la coexistence de deux régimes juridiques : celui de l’éloignement et celui de l’expulsion.

Le régime de l’éloignement concerne les personnes en situation irrégulière, qui peuvent faire l’objet d’une OQTF et être éloignées du territoire national.

Le régime de l’expulsion concerne les personnes en situation régulière. Les arrêtés ministériels d’expulsion s’adressent ainsi à des personnes qui ont des papiers.

Le Conseil d’État souligne que, du fait de très nombreuses évolutions juridiques et de la jurisprudence, nous avons rapproché les deux régimes. Or ce rapprochement serait selon lui risqué, car ces deux régimes ne présentent pas les mêmes garanties.

Si nous infligions systématiquement des AME aux personnes en situation irrégulière – tel est l’objet, me semble-t-il, de l’amendement de M. Karoutchi –, nous favoriserions l’AME aux dépens de l’OQTF. Nous confondrions ainsi les deux régimes et créerions, selon la gravité de la situation, des inégalités juridiques.

Le Conseil d’État nous alerte donc : le Conseil constitutionnel pourrait considérer que l’adoption de l’amendement de M. Karoutchi a pour effet d’aggraver l’unification ou le rapprochement des deux régimes, ce qui exposerait alors le texte à un risque de censure.

Loin de moi l’idée de m’opposer par principe à la position de M. Karoutchi. Mais il existe deux régimes – c’est d’ailleurs la raison pour laquelle la loi contient deux articles –, en l’occurrence un régime d’expulsion, pour les personnes en situation régulière, et un régime d’éloignement, pour les personnes en situation irrégulière.

L’article 10 prévoit l’éloignement des personnes en situation irrégulière. Nous levons les protections, comme vous le souhaitez, mais dans deux articles différents, qui correspondent aux deux régimes.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

Les OQTF sont beaucoup plus précaires que les expulsions.

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

C’est la raison pour laquelle je vous propose, monsieur Retailleau, de faciliter les expulsions des personnes en situation régulière.

Nous allons débattre de l’article 10. Nous pourrions d’ailleurs l’amender en nous inspirant des propositions de M. Karoutchi. Mais ne confondons pas les deux régimes. En infligeant des AME à des personnes en situation irrégulière, nous nous retrouverions dans la situation risquée que le Conseil d’État nous suggère d’éviter.

Ce dernier s’est d’ailleurs montré très à l’écoute de la demande du Gouvernement sur la levée des protections en général. Il aurait très bien pu appliquer je ne sais quel principe de fraternité, ce qu’il n’a pas fait ; il nous a suivis sur l’article 9, sur l’article 10 et sur l’article 13.

J’appelle votre attention sur les risques que l’on prend en voulant durcir fortement – c’est ce que veut le Gouvernement – les dispositifs en vigueur.

Il faut savoir s’arrêter aux bornes que nous indique le Conseil d’État si nous voulons obtenir la validation du Conseil constitutionnel.

Nous atteignons là sans doute, monsieur Retailleau, le moment où la loi ordinaire bute sur le bloc de constitutionnalité.

Ce débat ne manque pas d’intérêt, tant s’en faut. Simplement, il intervient au mauvais moment. Nous le mènerons plus avant à l’occasion de l’examen non pas du présent projet de loi ordinaire, mais de votre proposition de loi constitutionnelle.

Mme Sophie Primas remplace M. Alain Marc au fauteuil de la présidence.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

Madame la présidente, compte tenu de l’importance des enjeux juridiques, je sollicite une suspension de séance.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à seize heures cinquante-cinq, est reprise à seize heures cinq.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

La séance est reprise.

La parole est à M. le président de la commission.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

Pour la clarté de nos débats, j’informe nos collègues que la commission propose à M. Karoutchi de bien vouloir modifier la rédaction de son amendement n° 349 rectifié bis.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

Monsieur Retailleau, quelle est, maintenant, votre position s’agissant de l’amendement n° 348 rectifié ?

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

Madame la présidente, dans la mesure où la commission m’apporte la garantie qu’elle soutiendra les amendements visant à restreindre drastiquement les protections, aussi bien absolues que relatives, contre les mesures d’expulsion ou d’interdiction du territoire français, je retire mon amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

L’amendement n° 348 rectifié est retiré.

Je suis saisie de neuf amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 630, présenté par Mme M. Jourda et M. Bonnecarrère, au nom de la commission, est ainsi libellé :

I. - Alinéa 1

Remplacer cet alinéa par quatre alinéas ainsi rédigés :

I.- Le code de l’entrée et du séjour des étrangers est ainsi rédigé :

…° Le deuxième alinéa de l’article L. 252-2 est ainsi rédigé :

« Par dérogation au sixième alinéa de l’article L. 631-2, la circonstance qu’il a déjà fait l’objet d’une condamnation définitive pour des crimes ou des délits punis de trois ans ou plus d’emprisonnement n’a pas pour effet de le priver du bénéfice des dispositions du présent article. » ;

…° Le chapitre Ier du titre III du livre VI est ainsi modifié :

II. - Alinéa 4

remplacer le mot :

cinq

par le mot :

trois

III. - Alinéas 10 et 24

remplacer le mot :

dix

par le mot :

cinq

et le mot :

cinq

par le mot :

trois

IV. -Après l’alinéa 10

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

…) À l’article L. 641-1, la référence : «, 131-30-1 » est supprimée ;

V. - Alinéas 11 et 12

Supprimer ces alinéas.

VI. - Alinéa 16

1° Remplacer le mot :

cinq

par le mot :

trois

2° Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Sans préjudice de l’article 131-30-2, la juridiction tient compte de la durée de la présence de l’étranger sur le territoire français, ainsi que de la nature, de l’ancienneté et de l’intensité de ses liens avec la France pour décider de prononcer l’interdiction du territoire français.

VII. - Alinéas 20 et 21

Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :

1° L’article 131-30-1 est abrogé ;

VIII. - Alinéa 24

Supprimer la cinquième occurrence du mot :

de

IX. - Alinéa 27

Rédiger ainsi cet alinéa :

…° Les articles 213-2, 215-2, 221-11, 221-16, 222-48, 222-64, 223-21, 224-11, 225-21, 311-15, 312-14, 321-11, 322-16, 324-8, 414-6, 431-8, 431-12, 431-19, 431-27, 433-21-2, 433-23-1, 434-46, 442-12, 443-7 et 462-4 sont abrogés ;

X. - Alinéas 28 à 32

Supprimer ces alinéas.

XI. - Alinéa 33

Rédiger ainsi cet alinéa :

…° Le dernier alinéa de l’article 435-14 est supprimé.

XII. - Alinéa 34

Remplacer les références :

441-1, 441-3, 441-6 et 441-7

Par les références :

441-3 et 441-6

XIII. - Alinéa 35

Remplacer les mots :

aux articles 444-4 et 444-5

par les mots :

à l’article 444-5

XIV. - Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

V. - Au dixième alinéa de l’article 41 du code de procédure pénale, les mots : « les articles 131-30-1 ou 131-30-2 » sont remplacés par les mots : « l’article 130-30-2 ».

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

L’amendement n° 179 rectifié, présenté par Mmes de La Gontrie et Narassiguin, MM. Bourgi, Durain et Chaillou, Mme Harribey, M. Kerrouche, Mme Linkenheld, M. Roiron, Mme Brossel, M. Chantrel, Mmes Conway-Mouret et G. Jourda, MM. Kanner et Marie, Mmes S. Robert et Rossignol, MM. Stanzione, Temal, Tissot, M. Vallet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

I. - Alinéas 3 et 4

Supprimer ces alinéas.

II. - Alinéa 10

Remplacer les mots :

pour des crimes ou délits punis de dix ans ou plus d’emprisonnement ou de cinq ans en réitération de crimes ou délits punis de la même peine

par les mots :

à une peine d’emprisonnement ferme au moins égale à dix ans

La parole est à Mme Colombe Brossel.

Debut de section - PermalienPhoto de Colombe BROSSEL

Le sujet dont nous discutons est grave et sérieux, sur le plan tant des principes que de leur mise en œuvre.

Le projet de loi prévoit d’abolir le système existant : les protections légales contre l’expulsion dépendraient non plus de la peine prononcée, mais de la peine encourue.

Si la levée des protections doit évidemment être possible, encore faut-il respecter les principes de proportionnalité et d’individualisation des peines. Or c’est exactement ce qui est en train d’être mis à bas.

Le texte instaure une disproportion entre le motif sur lequel reposera l’expulsion et le profil des étrangers concernés. Par exemple, un étranger établi en France depuis plus de dix ans pourrait être expulsé pour des délits de faible gravité. Sa protection pourra être levée, par exemple, pour un simple vol à la tire dans le métro, puisque cette infraction constitue un vol aggravé, au sens de l’article 311-4 du code pénal, et est punie de cinq ans d’emprisonnement. Voilà une traduction concrète et opérationnelle de ce qui est en train d’être adopté.

Permettez-moi de rappeler quelques principes dont le respect définit l’État de droit. La rédaction proposée contredit ainsi le principe d’individualisation des peines, selon lequel le prononcé de la peine varie en fonction de la gravité de l’infraction et de la personnalité de son auteur. Je pourrais aussi citer l’article VIII de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, ainsi, évidemment, que l’ensemble des décisions du Conseil constitutionnel.

Nous proposons donc, par cet amendement, que la levée de la protection ne soit possible qu’au regard de la peine effectivement prononcée, en l’espèce une peine d’emprisonnement ferme au moins égale à dix ans pour les étrangers protégés au titre de l’article L. 631-3 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

La parole est à M. Guy Benarroche, pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Benarroche

Madame la présidente, j’avais demandé la parole bien avant la suspension de la séance, afin d’intervenir sur l’amendement de M. Retailleau, espérant pouvoir m’exprimer avant le passage à l’examen des amendements suivants.

Or je ne l’ai pas obtenue. Je m’en étonne. Je note que des discussions ont lieu en live dans l’hémicycle : peut-être les négociations qui ont eu lieu hier ne sont-elles pas terminées… Voilà qui me rappelle ce que nous avons connu à propos de la suppression de l’AME.

Depuis trois ans que je siège au Sénat, et au sein de la commission des lois, c’est la première fois que les discussions se font non plus sur le fondement des avis juridiques et politiques des commissaires, mais dans le cadre d’une négociation presque « à ciel ouvert » – certes, nous sommes sous une coupole !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

Mon cher collègue, j’avais bien vu que vous aviez demandé la parole. Mais comme l’amendement de M. Retailleau a été retiré, je ne pouvais plus vous donner la parole pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

Je ne peux vous donner la parole que pour explication de vote. Cela suppose que l’amendement sur lequel vous souhaitez expliquer votre vote soit maintenu. En l’occurrence, ce n’était pas le cas.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

L’amendement n° 316 rectifié, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :

I – Alinéa 4 et 6

Remplacer les mots :

par les mots :

3° et 4°

II – Alinéa 10

Remplacer les mots :

par les mots :

1°, 2° et 5°

La parole est à M.- Guy Benarroche.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Benarroche

Cet amendement de repli vise à lever les dérogations à la protection des parents d’enfants français et des personnes mariées contre l’expulsion.

Le maintien des liens de l’enfant avec ses parents doit être préservé, même lorsque ces derniers sont condamnés pénalement ou incarcérés. Cela doit s’appliquer sans discrimination pour les mineurs, que leurs parents soient Français ou étrangers en situation régulière ou irrégulière.

Le Comité des droits de l’enfant souligne : « La rupture de l’unité familiale par l’expulsion de l’un des parents ou des deux parents en raison d’une infraction aux lois relatives à l’immigration liée à l’entrée ou au séjour est disproportionnée, en ce que le sacrifice inhérent à la restriction de la vie de famille et aux conséquences sur la vie et le développement de l’enfant n’est pas compensé par les avantages obtenus par le fait de forcer le parent à quitter le territoire au motif d’une infraction à la législation relative à l’immigration. »

Le principe, qui figure dans de nombreuses dispositions déjà en vigueur, selon lequel, pour les étrangers, s’ajoute à la sanction pénale une sanction spécifique liée à leur qualité d’étranger – c’est la « double peine » – est aujourd’hui associé à des garanties spécifiques pour les personnes ayant des liens familiaux en France.

Or le projet de loi érode un peu plus ces garanties, augmentant ainsi les risques de ruptures dans l’unité familiale, ce qui n’est pas sans conséquence pour le maintien des liens familiaux et le développement de l’enfant. Ces dispositions risquent de creuser la différence de traitement entre les enfants de parents étrangers ayant menacé gravement l’ordre public et ceux dont les parents n’ont pas commis d’infractions.

Le danger est de restreindre de façon disproportionnée l’exercice des droits des étrangers parents d’enfants français et de compromettre les droits de leurs enfants mineurs.

Parce que ces dispositions sont contraires à l’article 8 de la convention européenne des droits de l’homme, relatif au droit de mener une vie familiale normale, notre groupe demande la suppression des dérogations à la protection des parents d’enfants français et des personnes mariées contre l’expulsion.

Cet amendement est inspiré des travaux de l’Unicef.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

L’amendement n° 631, présenté par Mme M. Jourda et M. Bonnecarrère, au nom de la commission, est ainsi libellé :

I.- Alinéa 6

Après le mot :

conjoint

insérer les mots :

, d’un ascendant

II.- Alinéa 8

Remplacer cet alinéa par un alinéa ainsi rédigé :

- au huitième alinéa, les mots : « 3° et 4° » sont remplacés par les mots : « 1° à 5° » et, après le mot : « conjoint », sont insérés les mots : «, d’un ascendant » ;

III.- Alinéa 23

Remplacer cet alinéa par trois alinéas ainsi rédigés :

…) Le septième alinéa est ainsi modifié :

- les mots : « au 3° et au 4° » sont remplacés par les mots : « aux 1° à 5° » ;

- après le mot : « conjoint », sont insérés les mots : «, d’un ascendant » ;

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

L’amendement n° 561 rectifié, présenté par Mme Romagny, MM. Henno, Cambier, Menonville, Houpert et Canévet, Mmes Herzog, P. Martin et Micouleau et MM. J.M. Arnaud, Duffourg et Chauvet, est ainsi libellé :

Alinéas 13 à 35

Remplacer ces alinéas par huit alinéas ainsi rédigés :

III. – Le code pénal est ainsi modifié :

1° L’article 131-30 est ainsi rédigé :

« Art. 131 -30. – Pour tout étranger coupable d’un crime ou d’un délit puni de cinq ans ou plus d’emprisonnement, la peine d’interdiction du territoire français est prononcée, à titre définitif ou pour une durée de dix ans au plus.

« Toutefois, la juridiction peut, par une décision spécialement motivée, décider de ne pas prononcer cette peine, en considération des circonstances de l’infraction et de la personnalité de son auteur.

« La peine d’interdiction du territoire français peut être prononcée, à titre définitif ou pour une durée de dix ans au plus, à l’encontre de tout étranger coupable d’un délit puni de moins de cinq ans d’emprisonnement.

« L’interdiction du territoire entraîne de plein droit la reconduite du condamné à la frontière, le cas échéant, à l’expiration de sa peine d’emprisonnement ou de réclusion.

« Lorsque l’interdiction du territoire accompagne une peine privative de liberté sans sursis, son application est suspendue pendant le délai d’exécution de la peine. Elle reprend, pour la durée fixée par la décision de condamnation, à compter du jour où la privation de liberté a pris fin. » ;

2° Les articles 131-30-1, 131-30-2 et 422-4 sont abrogés.

La parole est à Mme Anne-Sophie Romagny.

Debut de section - PermalienPhoto de Anne-Sophie ROMAGNY

Nous savons quelle sera vraisemblablement l’issue de la discussion, mais je tenais tout de même à défendre cet amendement, qui est très proche de celui de M. Retailleau.

Il s’agit de renforcer l’arsenal juridique et d’outiller la justice et l’administration pour protéger les citoyens de notre pays. Cela répond à une demande de fermeté vis-à-vis des criminels. Cette demande largement partagée par les Français, à plus raison au regard des derniers événements dramatiques qu’a connus notre pays.

Cet amendement ne vise pas à instituer une mesure d’ordre général. Il n’est ni exclusif ni fermé. Il a deux objectifs.

Premièrement, étendre l’automaticité– je sais que c’est un mot qui dérange – de la peine d’interdiction du territoire français, qui existe déjà en matière de terrorisme, à l’ensemble des crimes ou délits punis de cinq ans ou plus d’emprisonnement, sauf décision motivée du juge, qui pourra prendre en compte les circonstances de l’infraction ou la personnalité de son auteur.

Deuxièmement, supprimer l’automaticité des protections, qui, dans le droit actuel, empêchent inéluctablement le tribunal de prononcer des ITF, y compris à l’encontre des terroristes. Le juge aura toujours la possibilité de ne pas appliquer l’OQTF en fonction de circonstances motivées. L’idée, vous l’aurez compris, est d’inverser la vapeur – nous en parlons depuis suffisamment de temps maintenant –, afin que l’expulsion des criminels étrangers devienne la règle, tout en laissant au juge la faculté d’y déroger.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

L’amendement n° 134, présenté par MM. Szczurek, Durox et Hochart, est ainsi libellé :

Alinéa 16

Rédiger ainsi cet alinéa :

« La peine d’interdiction du territoire français est prononcée, à titre définitif, à l’encontre de tout étranger coupable d’un crime. Elle est prononcée pour une durée de dix ans à l’encontre de tout étranger coupable d’un délit de puni d’une peine d’emprisonnement d’une durée supérieure ou égale à deux ans ou d’un délit pour lequel la peine d’interdiction du territoire français est prévue par la loi. » ;

La parole est à M. Christopher Szczurek.

Debut de section - PermalienPhoto de Christopher SZCZUREK

Cet amendement vise à inscrire dans le marbre de la loi le principe d’une interdiction du territoire définitive à l’encontre de tout étranger coupable d’un crime, mais également celui d’une interdiction de territoire d’une durée de dix ans à l’encontre de tout étranger coupable d’un délit puni d’une peine d’emprisonnement d’une durée supérieure ou égale à deux ans.

Cet amendement vise donc à clarifier la peine d’interdiction du territoire français. Les étrangers qui ont gravement porté atteinte aux règles régissant la société française n’ont pas leur place sur le territoire national. L’interdiction définitive du territoire français doit s’appliquer à titre permanent à l’égard de ceux qui ont commis un crime.

Il est incompréhensible pour nos compatriotes qu’un étranger ayant commis un crime ait une seule chance de rester sur notre territoire à l’issue de sa peine. Un étranger doit avoir un comportement irréprochable lorsqu’il est légalement accueilli par le peuple français sur le sol national.

Ainsi, nous proposons qu’une peine d’interdiction de dix ans du territoire soit prononcée pour tout étranger coupable d’un délit puni d’une peine d’emprisonnement d’une durée supérieure ou égale à deux ans, ou d’un délit pour lequel la peine d’interdiction du territoire français est prévue par la loi.

De plus, les propres services du ministère de l’intérieur nous apprennent que 93 % des personnes mises en cause pour vol, 72 % des auteurs de vol avec violences et 32 % des condamnés pour coups et blessures sont des étrangers. Ces personnes n’ont rien à faire sur notre sol.

Mes chers collègues, nous vous appelons au bon sens et à la fermeté. L’étranger qui enfreint nos lois n’a plus sa place à nos côtés, et nous, en législateurs, devons veiller à protéger avant tout nos compatriotes, en expulsant les personnes qui méritent de l’être.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

L’amendement n° 180, présenté par Mmes de La Gontrie et Narassiguin, MM. Bourgi, Durain et Chaillou, Mme Harribey, M. Kerrouche, Mme Linkenheld, M. Roiron, Mme Brossel, M. Chantrel, Mmes Conway-Mouret et G. Jourda, MM. Kanner et Marie, Mmes S. Robert et Rossignol, MM. Stanzione, Temal, Tissot, M. Vallet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéas 20 et 21

Supprimer ces alinéas.

La parole est à M. Christophe Chaillou.

Debut de section - PermalienPhoto de Christophe CHAILLOU

À l’instar de ma collègue Colombe Brossel, je voudrais insister sur un principe qui nous semble fondamental : l’individualisation des peines.

L’article 9 prévoit que le juge n’aura plus l’obligation de motiver sa décision d’ITF dans deux cas de figure très particuliers, ce qui, très honnêtement, nous interpelle profondément, y compris au regard des principes fondamentaux du droit et de l’État de droit.

L’ITF est une peine très lourde. Il semble tout à fait légitime de considérer que le juge devrait toujours motiver sa décision lorsqu’il prononce cette peine, au regard à la fois de la gravité de l’infraction et de la situation personnelle et familiale de l’étranger.

D’ailleurs, le Conseil d’État lui-même recommande – nous attirons votre attention sur ce point, mes chers collègues – de ne pas retenir cette disposition. Il estime qu’une telle dérogation « introduit une incertitude quant au maintien de l’obligation générale de motivation qui s’impose en matière correctionnelle en application de l’article L. 132-1 du code pénal et qui est incompatible avec les exigences attachées au contrôle de proportionnalité réalisé au titre de l’article 8 de la CEDH qui impliquent que l’ensemble des éléments utiles à ce contrôle ressortent des motifs du jugement ».

C’est la raison pour laquelle il nous semble important de revenir aux principes fondamentaux du droit et de l’État de droit. Tel est l’objet de cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

L’amendement n° 103 rectifié quater, présenté par MM. L. Vogel, Bonneau, A. Marc, Guerriau, Courtial, Somon, Rochette, Brault et V. Louault, Mme Lermytte, MM. Médevielle et Capus, Mme Paoli-Gagin, M. Longeot, Mme Aeschlimann, MM. Wattebled, Verzelen et Fialaire, Mme L. Darcos et MM. Pellevat, Maurey et Gremillet, est ainsi libellé :

Alinéa 24

Remplacer les mots :

état de récidive

par le mot :

réitération

La parole est à Mme Laure Darcos.

Debut de section - PermalienPhoto de Laure Darcos

Mon collègue Louis Vogel m’a demandé de défendre cet amendement.

Considérant qu’il n’est pas tolérable que des étrangers auteurs de graves infractions puissent se maintenir impunément sur le territoire national, la commission a choisi, à l’article 9, de clarifier les critères de levée de la protection, de systématiser cette levée à l’encontre des auteurs de violences intrafamiliales et de généraliser la possibilité pour le juge de prononcer des ITF.

L’article 9 prévoit ainsi de faciliter l’expulsion des étrangers qui constituent une menace pour l’ordre public ou pour nos concitoyens. Seront notamment concernés ceux qui auront commis des infractions graves ou répétées. L’alinéa 10 fait référence à la « réitération d’infraction » tandis que l’alinéa 24 vise la « récidive ». Il semble préférable de s’en tenir à la notion de « réitération ». Le simple fait qu’un étranger soit l’objet de plusieurs condamnations définitives justifie qu’il soit expulsé.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

L’amendement n° 52 rectifié, présenté par Mmes V. Boyer et Belrhiti, M. H. Leroy, Mme Dumont, MM. Daubresse et Meignen, Mme Bellurot, MM. Bouchet, Tabarot, Genet et Saury, Mme Jacques, MM. Sido, Chasseing et Klinger, Mmes Josende, Goy-Chavent et Devésa, M. Gremillet et Mme Aeschlimann, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 27

Supprimer la référence :

II. – Après l’alinéa 32

Insérer quatre alinéas ainsi rédigés :

…° L’article 433-23-1 est ainsi modifié :

a) Les mots : « peut être » sont remplacés par le mot : « est » ;

b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Toutefois, la juridiction peut, par une décision spécialement motivée, décider de ne pas prononcer la peine mentionnée au premier alinéa du présent article en considération des circonstances de l’infraction et de la personnalité de son auteur. » ;

La parole est à Mme Valérie Boyer.

Debut de section - PermalienPhoto de Valérie Boyer

Je souhaitais que le prononcé d’une peine complémentaire d’interdiction du territoire français à l’encontre de tout étranger qui use de menaces ou de violence ou qui commet tout autre acte d’intimidation à l’égard de toute personne participant à l’exécution d’une mission de service public devienne la règle.

Toutefois, pour les raisons évoquées par le président Retailleau, et considérant que les amendements que vous proposez permettront de satisfaire cette demande, je retire cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

L’amendement n° 52 rectifié est retiré.

Quel est l’avis de la commission ?

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bonnecarrere

La commission émet un avis défavorable sur les amendements n° 179 rectifié, et 316 rectifié.

Madame Romagny, vous avez compris, je pense, que vous avez obtenu satisfaction. Notre texte permettrait d’expulser l’auteur de l’attaque au couteau d’Arras : nous avons systématisé la levée de la protection à l’encontre des auteurs de violences intrafamiliales, dont nous avons étendu le périmètre pour prendre en compte les ascendants. En outre, cette personne était en situation irrégulière. Nous demandons donc le retrait de l’amendement n° 561 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

L’amendement n° 561 rectifié est retiré.

Veuillez poursuivre, monsieur le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bonnecarrere

La commission émet un avis défavorable sur les amendements n° 134 et 180, et un avis favorable sur l’amendement n° 103 rectifié quater.

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

Avis favorable sur l’amendement n° 631, relatif à la levée des protections en cas de violences familiales sur ascendant, même si un petit risque d’ordre constitutionnel existe. Nous vérifierons ce point au cours de la navette, mais je pense que l’amendement peut être adopté dans l’immédiat.

Avis défavorable sur tous les autres amendements, soit parce qu’ils visent à supprimer des dispositions de l’article 9 ou à réduire son ambition, soit parce qu’ils ne sont pas conformes à la Constitution.

L ’ amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

En conséquence, l’amendement n° 179 rectifié n’a plus d’objet.

Je mets aux voix l’amendement n° 316 rectifié.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

L ’ amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

En conséquence, les amendements n° 134 et 180 n’ont plus d’objet.

Je mets aux voix l’amendement n° 103 rectifié quater.

L ’ amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

Je suis saisie de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 610, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. – Après l’alinéa 4

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« b) Au dernier alinéa, après les mots : « décision d’expulsion », sont insérés les mots : « en application de l’article L. 631-1 » ;

II. – Alinéa 5

Rédiger ainsi cet alinéa :

« c) Sont ajoutés deux alinéas ainsi rédigés : » ;

III. – Après l’alinéa 6

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Par dérogation au présent article, peut faire l’objet d’une décision d’expulsion en application de l’article L. 631-1, l’étranger mentionné aux 1° à 4° qui est en situation irrégulière au regard du séjour sauf si cette irrégularité résulte d’une décision de retrait de titre de séjour en application de l’article L. 432-4, d’un refus de renouvellement sur le fondement de l’article L. 412-5 ou du 1° de l’article L. 432-3. » ;

IV. – Après l’alinéa 7

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« a) Au septième alinéa, après les mots : « décision d’expulsion », sont insérés les mots : « en application de l’article L. 631-1 » ;

V. – Après l’alinéa 10

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Par dérogation au présent article, peut faire l’objet d’une décision d’expulsion en application de l’article L. 631-1, l’étranger mentionné aux 1° et 5° qui est en situation irrégulière au regard du séjour, sauf si cette irrégularité résulte d’une décision de retrait de titre de séjour en application de l’article L. 432-4, d’un refus de renouvellement sur le fondement de l’article L. 412-5 ou du 1° de l’article L. 432-3. »

La parole est à M. le ministre.

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

Cet amendement est défendu.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

L’amendement n° 583 rectifié bis, présenté par Mme Aeschlimann, MM. Belin et Duffourg, Mme Devésa, MM. Klinger et Bouchet, Mmes V. Boyer et Belrhiti, MM. Reynaud, Panunzi, Laugier et Cambier, Mme Berthet, MM. Brisson, Genet et Favreau, Mmes Jacques et Bellurot, MM. Bruyen, Tabarot, Gremillet et Menonville, Mmes Lopez et Canayer et MM. Khalifé et Karoutchi, est ainsi libellé :

I.- Après l’alinéa 6

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Par dérogation au présent article, peut faire l’objet d’une décision d’expulsion en application de l’article L. 631-1, l’étranger mentionné aux 1° à 4° du présent article lorsque les faits à l’origine de la décision d’expulsion ont été commis à l’encontre du titulaire d’un mandat électif public ou de toute personne mentionnée aux 4° et 4° bis de l’article 222-12 du code pénal ainsi qu’à l’article 222-14-5 du même code, dans l’exercice ou en raison de sa fonction. » ;

II.- Après l’alinéa 10

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

…) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Par dérogation au présent article, peut faire l’objet d’une décision d’expulsion en application de l’article L. 631-1, l’étranger mentionné aux 1° à 5° du présent article lorsque les faits à l’origine de la décision d’expulsion ont été commis à l’encontre du titulaire d’un mandat électif public ou de toute personne mentionnée aux 4° et 4° bis de l’article 222-12 du code pénal ainsi qu’à l’article 222-14-5 du même code, dans l’exercice ou en raison de sa fonction. »

La parole est à Mme Marie-Do Aeschlimann.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Do AESCHLIMANN

Cet amendement vise à lever les protections contre l’expulsion d’un étranger condamné définitivement à une peine de prison supérieure à cinq ans lorsque les faits à l’origine de cette expulsion ont été commis contre les titulaires de certaines fonctions, notamment les agents publics, les personnes dépositaires de l’autorité publique, les policiers, les pompiers, les enseignants – je ne rappellerai pas l’assassinat récent de ce professeur à Arras –, les soignants, mais aussi les avocats, les magistrats.

J’ajoute que cette levée de protection concerne autant les protections relatives que les protections absolues. On ne peut pas tolérer qu’un étranger s’attaquant à ceux qui œuvrent quotidiennement pour l’intérêt général, pour notre sécurité, pour notre État de droit, pour l’éducation de nos enfants ne puisse pas être expulsé du territoire français.

Notre République doit faire preuve de la plus grande fermeté vis-à-vis de ceux qui s’attaquent à elle, qui sapent les fondements de notre État de droit, de nos libertés et de la démocratie.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

L’amendement n° 349 rectifié ter, présenté par M. Karoutchi, Mme Aeschlimann, MM. Allizard et Bazin, Mmes Bellurot, Belrhiti et Berthet, MM. E. Blanc et J.B. Blanc, Mmes Bonfanti-Dossat et Borchio Fontimp, M. Bouchet, Mme V. Boyer, MM. Brisson, Bruyen, Burgoa et Cambon, Mmes Canayer et Chain-Larché, M. Chaize, Mmes de Cidrac et Ciuntu, M. Daubresse, Mmes Demas, Deseyne, Di Folco, Drexler, Dumont, Estrosi Sassone, Eustache-Brinio et Evren, MM. Favreau et Frassa, Mme Garnier, M. Genet, Mmes F. Gerbaud et Gosselin, MM. Gremillet et Grosperrin, Mme Gruny, MM. Gueret, Hugonet et Husson, Mmes Jacques, Josende et Joseph, MM. Joyandet et Klinger, Mme Lassarade, MM. D. Laurent, Lefèvre, de Legge, H. Leroy et Le Rudulier, Mmes Malet et P. Martin, M. Meignen, Mme Micouleau, MM. Milon et Mouiller, Mmes Muller-Bronn et Nédélec, M. de Nicolaÿ, Mme Noël, MM. Panunzi, Paul, Pellevat, Pernot et Piednoir, Mme Pluchet, M. Pointereau, Mmes Primas et Puissat, MM. Rapin, Reichardt, Retailleau, Reynaud, Rietmann, Saury, Sautarel et Savin, Mme Schalck, MM. Sol et Tabarot, Mme Ventalon, MM. C. Vial, J.P. Vogel, Bouloux et Cuypers, Mme Imbert, MM. Khalifé et Mandelli, Mme Petrus et M. Somon, est ainsi libellé :

I. – Après l’alinéa 6

Insérer un alinéa ainsi rédigé

« Par dérogation au présent article, peut faire l’objet d’une décision d’expulsion en application de l’article L. 631-1, l’étranger mentionné aux 1° à 4° qui est en situation irrégulière au regard du séjour sauf si cette irrégularité résulte d’une décision de retrait de titre de séjour en application de l’article L. 432-4, d’un refus de renouvellement sur le fondement de l’article L. 412-5 ou du 1° de l’article L. 432-3. » ;

II. – Après l’alinéa 10

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

…° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Par dérogation au présent article, peut faire l’objet d’une décision d’expulsion en application de l’article L. 631-1, l’étranger mentionné aux 1° à 4° qui est en situation irrégulière au regard du séjour sauf si cette irrégularité résulte d’une décision de retrait de titre de séjour en application de l’article L. 432-4, d’un refus de renouvellement sur le fondement de l’article L. 412-5 ou du 1° de l’article L. 432-3. » ;

La parole est à M. Roger Karoutchi.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

M. Roger Karoutchi. Je serai bref, car cet amendement a déjà été longuement débattu, avant même que je ne le présente !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Je l’ai rectifié pour tenir compte des remarques de la commission et du Gouvernement s’agissant de l’avis du Conseil d’État et de possible position du Conseil constitutionnel.

Il s’agit d’introduire, à la fin des alinéas 6 et 10, dans les deux cas, après : « l’étranger mentionné aux 1° à 4° », les mots : « qui est en situation irrégulière au regard du séjour sauf si cette irrégularité résulte d’une décision de retrait de titre de séjour en application de l’article L. 432-4, d’un refus de renouvellement sur le fondement de l’article L. 412-5 ou du 1° de l’article L. 432-3. »

Voilà qui devrait permettre de rendre cet amendement conforme à nos règles de droit. La modification introduite tient compte de l’avis du Conseil d’État pour éviter toute difficulté lors d’un éventuel examen par le Conseil constitutionnel. J’imagine que ce dernier sera dans un état d’extase devant mon amendement !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bonnecarrere

La commission émet un avis favorable sur l’amendement n° 610 du Gouvernement, sur l’amendement n° 583 rectifié bis, ainsi que sur l’amendement n° 349 rectifié ter, dont la nouvelle rédaction tient compte des réserves du Conseil d’État et est en partie identique à celle de l’amendement n° 610 du Gouvernement.

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

M. Karoutchi ayant bien voulu rectifier son amendement en reprenant une partie de l’amendement du Gouvernement, je retire le nôtre au profit du sien, et j’émets un avis favorable sur l’amendement n° 583 rectifié bis.

L ’ amendement est adopté.

L ’ amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

L’amendement n° 611, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 7

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« a) Au premier alinéa, après les mots : « intérêts fondamentaux de l’État », sont insérés les mots : « dont la violation délibérée et d’une particulière gravité des principes de la République tels qu’énoncés à l’article L. 412-7, » ;

La parole est à M. le ministre.

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

Cet amendement vise à insérer à l’article 9 une disposition qui figure déjà à l’article 13.

L’article 13 prévoit qu’une personne peut se voir retirer son titre de séjour si elle ne respecte pas les valeurs de la République. Cela s’inscrit dans le prolongement de la loi du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République, qui a été validée par le Conseil constitutionnel.

Il s’agit donc de compléter l’article 9 en précisant que la violation grave des principes républicains, tels que définis dans la loi, constitue par nature des comportements qui portent atteinte aux intérêts fondamentaux de l’État. Cette précision permettra de lever les protections en cas de non-respect des valeurs de la République.

L ’ amendement est adopté.

L ’ article 9 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

L’amendement n° 112, présenté par MM. Szczurek, Durox et Hochart, est ainsi libellé :

Après l’article 9

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À l’article L. 322-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, les mots : « peut faire » sont remplacés par le mot : « fait ».

La parole est à M. Christopher Szczurek.

Debut de section - PermalienPhoto de Christopher SZCZUREK

Madame la présidente, si vous le permettez, je présenterai en même temps les amendements n° 112 et 113.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

J’appelle donc également en discussion l’amendement n° 113, présenté par MM. Szczurek, Durox et Hochart, et ainsi libellé :

Après l’article 9

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au premier alinéa de l’article L. 322-2 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, le mot : « peut » est remplacé par le mot : « doit ».

Veuillez poursuivre, monsieur Szczurek.

Debut de section - PermalienPhoto de Christopher SZCZUREK

L’étranger faisant l’objet d’une interdiction administrative du territoire qui s’apprête à entrer en France ne doit pas pouvoir le faire. Or le droit actuel laisse penser qu’il s’agit d’une simple éventualité. Tel est l’objet de l’amendement n° 112.

L’amendement n° 113 s’inscrit dans le même esprit : lorsque l’étranger qui fait l’objet d’une interdiction administrative du territoire est présent sur le territoire français, il doit être reconduit d’office à la frontière. Dans le droit actuel, c’est également une éventualité.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bonnecarrere

Cela correspond évidemment à la pratique des services de police. La commission demande donc le retrait de ces amendements ; à défaut, l’avis serait défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

Monsieur Szczurek, les amendements n° 112 et 113 sont-ils maintenus ?

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 538 rectifié bis, présenté par M. Ravier, est ainsi libellé :

Après l’article 9

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le chapitre III du titre II du livre III du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est ainsi modifié :

1° À l’article L. 323-1, les mots : « d’un an » sont remplacés par les mots : « de cinq ans » ;

2° L’article L. 323-2 est abrogé.

La parole est à M. Stéphane Ravier.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Ravier

L’interdiction administrative du territoire est une mesure administrative prononcée par le ministre de l’intérieur lorsque la présence de l’étranger constituerait une menace grave pour l’ordre public, la sécurité intérieure ou les relations internationales de la France, avant que celui-ci ne soit sur le territoire.

Cet amendement tend à supprimer le réexamen automatique des interdictions administratives du territoire tous les cinq ans. De plus, il vise à repousser le délai minimum ouvrant à l’étranger le droit d’introduire une demande de réexamen d’un an à cinq ans.

Au vu de la multiplication des menaces extérieures, de l’afflux des étrangers sur notre sol et de l’embolie administrative, il paraît nécessaire d’alléger les procédures. Dans ce pays, les seules peines qui soient automatiques, ce sont celles qui vont à l’encontre de notre pays !

Nous n’avons pas à garantir un droit au réexamen automatique des interdictions administratives. C’est l’une des seules interdictions qui se font encore en amont de tout désordre : étendre le champ des interdictions administratives du territoire, c’est réduire le nombre d’OQTF non exécutées, ou, à vous entendre, non exécutables…

Cet amendement nous offre des marges de manœuvre. Mes chers collègues, je vous invite à ne pas nous en priver !

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

L’amendement n° 51 rectifié, présenté par Mmes V. Boyer et Belrhiti, M. H. Leroy, Mme Dumont, MM. Daubresse et Meignen, Mme Bellurot, MM. Bouchet, Tabarot et Houpert, Mme Garnier, MM. Bruyen et Cadec, Mme P. Martin, MM. Genet et Saury, Mmes Muller-Bronn et Jacques, MM. Bonneau, Sido, Chasseing et Klinger, Mmes Josende et Goy-Chavent, M. Gremillet et Mme Aeschlimann, est ainsi libellé :

Après l’article 9

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – L’article L. 323-2 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque l’interdiction administrative du territoire est prononcée pour un motif d’infraction à caractère terroriste d’une particulière gravité mentionné aux articles 421-1 à 421-8 du code pénal et à l’exception des articles 421-2-5 et 421-2-5-1 du même code, qui fait l’objet d’une inscription au sein du fichier judiciaire national automatisé des infractions terroristes, ou pour une atteinte aux intérêts fondamentaux de la nation, le réexamen prévu au premier alinéa ne peut intervenir avant dix années. »

II. – La perte de recettes résultant pour les collectivités territoriales du I est compensée, à due concurrence, par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.

III. – La perte de recettes résultant pour l’État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

IV. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à Mme Valérie Boyer.

Debut de section - PermalienPhoto de Valérie Boyer

Avec cet amendement, nous souhaitons que la demande de réexamen d’une interdiction administrative sur le territoire français ne puisse pas intervenir avant dix ans lorsqu’elle a été prononcée pour une infraction à caractère terroriste ou pour une atteinte aux intérêts fondamentaux de la Nation, contre cinq années pour l’ensemble des interdictions aujourd’hui prononcées.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

L’amendement n° 540 rectifié bis, présenté par M. Ravier, est ainsi libellé :

Après l’article 9

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article L. 613-2 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est abrogé.

La parole est à M. Stéphane Ravier.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Ravier

Dans un souci de clarté et de simplification, cet amendement tend à permettre à l’autorité administrative d’assortir à l’obligation de quitter le territoire français une interdiction de retour, sans obligation de motivation autre que celle prévue pour l’OQTF.

De plus, il vise à supprimer l’obligation de motiver séparément les décisions relatives au refus et à la fin du délai de départ volontaire et les décisions de l’OQTF.

Cet amendement n’enlève rien à personne. Il fluidifie le travail des préfets et simplifie la politique d’expulsion, qui est devenue un véritable parcours du combattant.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bonnecarrere

L’adoption de cet amendement ne clarifierait rien, du fait du mélange entre éloignement et expulsion, deux régimes juridiques différents. Avis défavorable.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

L’amendement n° 111, présenté par MM. Szczurek, Durox et Hochart, est ainsi libellé :

Après l’article 9

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À l’article L. 622-2 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, les mots : «, actuelle et suffisamment grave » sont supprimés.

La parole est à M. Christopher Szczurek.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

L’amendement n° 111 est retiré.

L’amendement n° 249 rectifié, présenté par M. Le Rudulier, Mme Guidez, MM. Menonville et Frassa, Mme Josende, MM. Rochette et Courtial, Mmes Puissat et V. Boyer, M. Paccaud, Mmes Petrus et Bellurot, M. Chasseing, Mme P. Martin, M. Wattebled, Mme Lopez, M. Bruyen, Mmes Herzog, Micouleau et Belrhiti et MM. Genet et Duffourg, est ainsi libellé :

Après l’article 9

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’article L. 631-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, il est inséré un article L. 631-1-… ainsi rédigé :

« Art. L. 631 -1 -…. – Sous réserve des conditions propres aux étrangers mentionnés aux articles L. 631-2 et L. 631-3, l’autorité administrative expulse l’étranger qui a été condamné définitivement pour un délit ou un crime. »

La parole est à Mme Pauline Martin.

Debut de section - PermalienPhoto de Pauline MARTIN

L’expulsion du territoire, mesure administrative visant à éloigner du territoire français un ressortissant étranger contrevenant à l’ordre public, apparaît comme la réponse adéquate à la commission d’un crime ou d’un délit.

Il est impossible d’accepter qu’un étranger auteur de faits de délinquance demeure sur le territoire français. Tout étranger entrant sur le sol français se doit de respecter le pacte social et les valeurs de la République qui sont au fondement du credo « faire société ».

Le présent amendement vise à rendre systématique l’expulsion d’un étranger qui a été condamné définitivement pour un délit ou un crime sauf s’il relève d’une des dérogations existantes au motif du droit à la vie privée et familiale ou de son attache à la France.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bonnecarrere

Notre collègue pointe à juste titre les difficultés de l’éloignement. Tout le monde connaît le problème d’exécution des OQTF.

Mais cet amendement porte en fait sur des mesures d’expulsion pour lesquelles les modalités juridiques d’exécution sont tout à fait correctes. Le seul débat en la matière concerne les moyens matériels et financiers que peut mettre en œuvre le ministère de l’intérieur.

C’est pourquoi la commission demande le retrait de cet amendement ; à défaut, l’avis serait défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

L’amendement n° 249 rectifié est retiré.

L’amendement n° 548 rectifié ter, présenté par M. Ravier, est ainsi libellé :

Après l’article 9

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À l’article L. 631-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, après le mot : « public », sont insérés les mots : « ou qu’il a été condamné pour une infraction mentionnée aux articles 222-34 à 222-40 du code pénal, ».

La parole est à M. Stéphane Ravier.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Ravier

Il s’agit de pouvoir expulser les étrangers condamnés pour trafic de stupéfiants. Aux États-Unis, un président avait déclaré la guerre à la drogue, en prenant des mesures d’exception.

C’est aussi ce qu’il faut faire en France, particulièrement à Marseille, où le narcotrafic devient petit à petit un narco-État. Le trafic est international ; on ne saurait donc se limiter à des mesures franco-françaises. Il faut se débarrasser des étrangers, petites mains ou grands parrains du trafic, qui servent d’intermédiaires entre les producteurs de cannabis – essentiellement, voire exclusivement maghrébins – et les distributeurs dans le sud de la France.

L’une des façons de déstabiliser le trafic est de s’attaquer à la filière via la diaspora. À Marseille, l’extension du trafic engendre désormais le recrutement soit de clandestins – ils représentent 50 % des petites mains ! –, soit de demandeurs d’asile en attente de réponse.

L’administration et la justice françaises doivent enfin les effrayer réellement. Ils ont plus peur d’être expulsés dans leur pays que de recevoir une balle ! Prenons-les au mot : asséchons le recrutement, en leur faisant bien comprendre qu’ils perdront tout s’ils se font prendre la main dans le trafic de stupéfiants !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bonnecarrere

Nous avons déjà donné à M. le ministre de l’intérieur la possibilité de prononcer des expulsions pour une menace grave à l’ordre public, en levant les protections. Et le juge pourra également prononcer une décision d’interdiction du territoire français. Cet amendement est donc, d’une certaine façon, satisfait. Avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Cécile Cukierman

J’entends ce qui vient d’être dit. Malheureusement, cela fait un écho un peu dissonant – ou peut-être trop juste ! – avec d’autres choses qui ont été dites précédemment.

Il vient d’être fait référence aux propos de l’ancien président des États-Unis, qui savait très bien user des médias et qui avait souvent les meilleures formules chocs. Est-ce que ces formules ont réglé le problème de la drogue et du narcotrafic aux États-Unis ? La réponse est non !

Évidemment, chacun peut défendre toutes les mesures qu’il veut, y compris quand elles relèvent de l’affichage. Mais il ne faut pas confondre les débats.

Depuis lundi, nous discutons de l’immigration, de l’intégration et des éventuelles sanctions, notamment pour celles et ceux qui ne veulent pas faire République avec nous.

Le débat sur le narcotrafic en est un autre. Il est vrai que le phénomène a un impact très fort sur notre pays et notre jeunesse. Le Sénat a d’ailleurs créé une commission d’enquête sur le sujet, et nous contribuerons à ses travaux.

Mais ne faisons pas d’amalgames ! Nous partageons tous ici le même souci de sincérité. Et faire croire que l’adoption de cet amendement permettrait de régler une fois pour toutes le problème des trafics subis au quotidien dans un certain nombre de nos quartiers, ce serait mentir aux Français !

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

L’amendement n° 55 rectifié, présenté par Mmes V. Boyer et Belrhiti, M. H. Leroy, Mme Dumont, MM. Daubresse et Meignen, Mme Bellurot, MM. Bouchet et Tabarot, Mme Garnier, MM. Michallet, Genet, Saury, Chasseing, Somon et Klinger, Mmes Josende et Goy-Chavent et M. Gremillet, est ainsi libellé :

Après l’article 9

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À l’article L. 631-4 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, le mot : « dix-huit » est remplacé par le mot : « seize ».

La parole est à Mme Valérie Boyer.

Debut de section - PermalienPhoto de Valérie Boyer

En France, au-dessus de 13 ans, un mineur est considéré comme responsable pénalement.

De même, à partir de 13 ans, un mineur peut être condamné à des travaux d’intérêt général, une amende ou un placement dans un centre éducatif fermé ou bien être placé sous contrôle judiciaire.

De 13 ans à 16 ans, les mineurs bénéficient de « l’excuse de minorité », qui divise par deux les peines prévues par le code pénal, tant les amendes que les peines de prison.

Pour les mineurs de 16 ans à 18 ans, l’excuse de minorité peut ne pas être appliquée, sur décision motivée du juge, et les mineurs condamnés à la peine complète, et pas à celle divisée par deux.

Dans cet esprit, cet amendement tend à prévoir que les expulsions administratives pourront être prononcées à l’encontre d’étrangers âgés d’au moins 16 ans, au lieu de 18 ans aujourd’hui, qui posent une menace à l’ordre public.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bonnecarrere

La commission, qui est d’accord avec la notion de minorité pénale, n’est pas favorable à l’extension des possibilités d’expulsion aux mineurs âgés de 16 ans à 18 ans. Avis défavorable.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

Je suis saisie de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 543 rectifié bis, présenté par M. Ravier, est ainsi libellé :

Après l’article 9

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La section 1 du chapitre II du titre III du livre VI du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est abrogée.

La parole est à M. Stéphane Ravier.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Ravier

Dans le cadre d’une procédure administrative d’expulsion, l’autorité compétente est le préfet.

Aujourd’hui, le droit prévoit la réunion d’une commission d’expulsion composée du président du tribunal judiciaire du chef-lieu du département, d’un magistrat désigné par l’assemblée générale du tribunal judiciaire du chef-lieu du département et d’un conseiller de tribunal administratif. Cette commission ne se réunit pas en cas d’urgence absolue.

Au vu de l’embolie des tribunaux, de la multiplication des séjours irréguliers et des menaces à l’ordre public par les étrangers, la procédure d’urgence absolue doit être de mise.

La réunion de cette commission impose des délais et des coûts de convocation. La mobilisation de magistrats, la possibilité de recourir à l’aide juridictionnelle : tout cela est une gabegie de plus !

Le préfet est en mesure de juger par lui-même l’objectivité d’un séjour irrégulier. Le clandestin a déjà suffisamment de voies de recours pour contester les décisions du préfet. Cette commission est une étape de trop au vu de l’embolisation du système.

C’est pourquoi cet amendement tend à supprimer la commission d’expulsion.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

L’amendement n° 114 rectifié, présenté par MM. Szczurek, Durox et Hochart, est ainsi libellé :

Après l’article 9

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le 2° de l’article L. 632-1 et l’article L. 632 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile sont abrogés.

La parole est à M. Christopher Szczurek.

Debut de section - PermalienPhoto de Christopher SZCZUREK

Dans le même esprit, nous souhaitons réaffirmer la pleine compétence des préfets en matière d’expulsion prévue par l’ordonnance du 2 novembre 1945 relative aux conditions d’entrée et de séjour des étrangers en France.

La commission d’expulsion examine le cas des étrangers que le ministre de l’intérieur a décidé d’éloigner du territoire français pour menace grave à l’ordre public depuis la loi Pasqua. Son avis n’a plus qu’une portée consultative.

C’est la raison pour laquelle nous pensons que cette commission sans réelle utilité doit être supprimée.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

L’amendement n° 317 rectifié bis, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :

Après l’article 9

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après la quatrième phrase du troisième alinéa de l’article L. 632-2 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Pour l’étranger mentionné au 1° de l’article L. 631-2 et au 4° de l’article L. 631-3 du présent code, la commission évalue l’intérêt supérieur de l’enfant mineur. »

La parole est à M. Guy Benarroche.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Benarroche

M. Guy Benarroche. Notre amendement est en discussion commune avec les deux précédents, mais – chacun l’aura compris ! – il n’a évidemment aucun rapport avec eux.

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Benarroche

Cet amendement de repli a pour objet de prévoir l’évaluation de l’intérêt supérieur de l’enfant de parents d’enfants français avant le prononcé d’une décision d’expulsion.

L’article 3 de la convention internationale des droits de l’enfant dispose : « Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu’elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l’intérêt supérieur de l’enfant doit être une considération primordiale. »

Le Comité des droits de l’enfant précise que les États parties sont tenus de veiller à ce que toute décision de renvoyer un enfant dans son pays d’origine soit fondée sur des éléments de preuve et soit prise au cas par cas, conformément à une procédure prévoyant des garanties appropriées et comprenant notamment une évaluation individuelle rigoureuse et la détermination de l’intérêt supérieur de l’enfant.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bonnecarrere

Avis défavorable sur les amendements n° 543 rectifié bis et 114 rectifié, qui tendent à supprimer la commission d’expulsion.

Les décisions d’expulsion sont exécutoires par provision. En clair, les recours ne sont pas suspensifs. Nous aimons beaucoup nos préfets, mais, sauf urgence absolue – dans ce cas, le Conseil constitutionnel a admis l’absence de recours à la commission d’expulsion –, il n’est tout de même pas raisonnable de se priver d’un minimum de contrôle. Ne renouons pas avec les lettres de cachet !

J’en viens à l’amendement n° 317 rectifié bis. La vocation même de la commission est d’examiner les dossiers au cas par cas et de tenir compte de la situation, notamment de la nature des liens familiaux à l’étranger. Il n’y a donc aucune raison d’ajouter que la commission évalue l’intérêt supérieur de l’enfant mineur. Avis défavorable.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

L’amendement n° 117, présenté par MM. Szczurek, Durox et Hochart, est ainsi libellé :

Après l’article 9

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au premier alinéa de l’article L. 733-16 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, le mot : « peut » est remplacé par le mot : « doit ».

La parole est à M. Christopher Szczurek.

Debut de section - PermalienPhoto de Christopher SZCZUREK

Par cet amendement, nous exigeons le renforcement des mesures permettant l’expulsion immédiate d’un étranger faisant l’objet d’une interdiction judiciaire de territoire.

Nous demandons que l’étranger dans une telle situation communique à l’autorité administrative l’adresse de ses locaux de résidence. Je n’ai pas de doute sur le fait que cette proposition fera l’unanimité au sein de notre Haute Assemblée.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bonnecarrere

Avis défavorable. Imaginer que nos policiers notifiant une assignation à résidence ne demandent pas l’adresse me paraît assez saugrenu…

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

L’amendement n° 541, présenté par M. Ravier, est ainsi libellé :

Après l’article 9

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article 706-25-9 du code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° À l’avant-dernier alinéa, les mots : « Les maires et » sont supprimés ;

2° Avant le dernier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Les maires sont également destinataires, par l’intermédiaire des représentants de l’État dans le département, des informations contenues dans le fichier concernant les étrangers habitants la commune. »

La parole est à M. Stéphane Ravier.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Ravier

J’ai alerté à de nombreuses reprises le ministre de l’intérieur sur le caractère islamiste de plusieurs mosquées à Marseille. Il ne m’a jamais répondu, sauf une fois, à propos de l’institut des Bleuets, dans le 13e arrondissement. Il a juste dit à la télévision que, grâce à la loi pour lutter contre l’islamisme – un texte que j’ai voté –, il allait pouvoir la faire fermer. Eh bien, monsieur le ministre, ce n’est toujours pas le cas : elle est bien ouverte ! Peut-être est-ce encore la faute des Anglais, des Kévin ou des Matteo !

Le pire dans tout cela, c’est que j’ai dû mener ma propre enquête, parce que le ministère de l’intérieur préfère laisser tranquille les mosquées islamistes plutôt que d’avertir de leur dangerosité.

Il n’est pas normal que les élus locaux soient laissés complètement de côté concernant les personnes dangereuses et fichées pour terrorisme qui vivent dans leur propre commune. Les maires connaissent tout de leur commune, du pavé qui est cassé au lampadaire qui ne fonctionne pas, mais ils ne devraient pas savoir s’ils hébergent dans leur propre commune de potentiels terroristes surveillés par les renseignements !

Le maire est officier de police judiciaire (OPJ) ; il est temps de le considérer comme tel, et pas comme un simple fonctionnaire qui doit se mettre au garde-à-vous devant les injonctions du Gouvernement. Il est un relais essentiel du travail des forces de l’ordre.

Sur les 1 370 personnes inscrites en 2021 au fichier judiciaire national automatisé des auteurs d’infractions terroristes (Fijait), 536 avaient une nationalité étrangère : ce sont 536 potentielles bombes à retardement que l’on doit surveiller au plus près, en impliquant toutes les autorités pour que les drames comme celui d’Arras ne se reproduisent pas !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bonnecarrere

Nous ne pouvons qu’encourager M. Ravier à fournir au préfet des Bouches-du-Rhône toutes les informations dont il aurait connaissance en matière de manquement aux valeurs de la République, mais son amendement porte sur un sujet différent, que nous connaissons bien dans cet hémicycle : la possibilité pour les maires d’avoir accès à certains fichiers, dans le cas présent le Fijait.

Nous ne pensons pas que ce soit le meilleur service à rendre aux maires… Avis défavorable.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

L’amendement n° 604, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Après l’article 9

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article 720 du code de procédure pénale est complété par un paragraphe ainsi rédigé :

« IV. – Lorsqu’un étranger condamné à une peine privative de liberté est l’objet d’une mesure d’interdiction du territoire français, d’interdiction administrative du territoire français, d’obligation de quitter le territoire français, d’interdiction de retour sur le territoire français, d’interdiction de circulation sur le territoire français, d’expulsion, d’extradition ou de remise sur le fondement d’un mandat d’arrêt européen, l’application du II est subordonnée à la condition que cette mesure soit exécutée. Elle peut être décidée sans son consentement. »

La parole est à M. le ministre.

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

Le présent amendement a pour objet d’adapter le régime de la libération sous contrainte à la situation administrative particulière de l’étranger ne disposant pas de droit au séjour.

Au 3 octobre 2023, on comptabilise 19 373 personnes de nationalité étrangère incarcérées sur le territoire français, soit 26 % des 74 513 détenus. Un tiers de ces détenus étrangers sont en situation irrégulière.

Vous avez voté un texte, présenté par le garde des sceaux, qui prévoit notamment qu’il n’y a pas de « sortie sèche », afin de favoriser la réinsertion. Il y a donc une libération dans les quelques mois qui précèdent la sortie de prison.

Néanmoins, on voit mal comment un étranger en situation irrégulière et condamné à de la prison pourrait s’intégrer, puisqu’il a vocation à quitter le territoire national.

Nous souhaitons que cette libération conditionnelle sous contrainte, si l’on peut dire, ne soit possible que si nous sommes certains d’avoir le laissez-passer consulaire nous permettant de mettre ces personnes en centre de rétention administrative, puis dans un avion pour repartir dans leur pays.

Si nous ne l’avons pas, nous préférons que les individus concernés restent quelques jours de plus dans l’établissement pénitentiaire, afin de récupérer le laissez-passer consulaire, puis de les mettre en centre de rétention administrative.

Contrairement aux autres détenus, ces personnes n’ont pas vocation à être intégrées à la République, puisqu’elles n’en ont pas respecté les règles. Je le redis, il s’agit de personnes qui ont été condamnées et qui sont en situation irrégulière.

Cela nous paraît constituer un amendement de bon sens, qui permet la bonne coordination entre les services de l’administration pénitentiaire, ceux du ministère de l’intérieur et ceux du ministère de l’Europe et des affaires étrangères.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bonnecarrere

Une telle mesure apporte une plus-value concrète, et nous regrettons de ne pas avoir déposé cet amendement nous-mêmes ! Avis favorable.

L ’ amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 9.

Le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est ainsi modifié :

1° L’article L. 611-3 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« L’étranger mentionné aux 2° à 9° peut également faire l’objet d’une décision portant obligation de quitter le territoire français en application de l’article L. 611-1 si son comportement constitue une menace grave pour l’ordre public. »

2° L’article L. 251-2 est ainsi modifié :

a) À la fin, sont ajoutés les mots : «, à moins que la décision ne se fonde sur des motifs graves de sécurité publique » ;

b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Il en est de même des citoyens de l’Union européenne ainsi que des membres de leur famille qui séjournent de manière légale et ininterrompue en France depuis plus de dix ans, à moins que leur éloignement ne constitue une nécessité impérieuse pour la sûreté de l’État ou la sécurité publique. »

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

Je suis saisie de deux amendements et d’un sous-amendement faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 546 rectifié bis, présenté par M. Ravier, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

Les articles L. 611-3 et L. 631-3 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile sont abrogés.

La parole est à M. Stéphane Ravier.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Ravier

Octobre 2023, un Guinéen de 17 ans, condamné pour agression sexuelle sur une fillette de 6 ans, récidive auprès d’une éducatrice de prison.

Madan, Sri Lankais de 43 ans condamné en 2021 pour une agression sexuelle, récidive en septembre 2023 et n’est toujours pas expulsé, alors que sa précédente OQTF est devenue caduque faute d’application.

Un Algérien âgé de 24 ans a été interpellé à Toulouse en avril pour vol, puis de nouveau les 10 juin et 13 juin et une dernière fois le 19 juin pour les mêmes faits. Il a de nouveau été interpellé le 20 juin pour avoir agressé des gens dans un supermarché.

Jeudi dernier, un migrant guinéen à Lyon roue de coups et viole une étudiante coréenne quelques jours après avoir tenté de violer une autre femme.

Ce ne sont que quelques exemples de criminels qui n’ont pas été expulsés et qui ont récidivé, en agressant des Français et surtout des Françaises. Je n’ai d’ailleurs entendu aucune association féministe ni aucune sénatrice dénoncer ces actes abominables.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Ravier

M. Stéphane Ravier. On a le scandale sélectif !

Protestations sur les travées des groupes CRCE-K, SER et GEST.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Ravier

Pensez-vous que ce migrant guinéen doive absolument rester parmi nous, qu’il constitue une chance pour notre pays ?

Pensez-vous que ce serait abominable s’il était renvoyé dans son pays ?

Mêmes mouvements.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Ravier

Mes chers collègues, combien d’entre vous seraient prêts à laisser leur femme ou leur fille pendant plus de dix minutes en sa compagnie ?

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Ravier

Défendez-le, camarades ! Défendez-le encore !

Debut de section - PermalienPhoto de Cécile Cukierman

Ce n’est pas ce que nous faisons, mais ce propos est insupportable !

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Ravier

M. Stéphane Ravier. Défendez les indéfendables !

Vives protestations sur les travées des groupes CRCE-K, SER et GEST.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Ravier

Il n’y a aucune raison que nous conservions sur notre sol des criminels et des délinquants d’autres pays.

Si ces pays ne veulent pas délivrer de laissez-passer consulaires, il faut être prêt à engager un bras de fer avec eux. La France a récemment engagé 100 millions d’euros pour le développement du Nigeria.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Ravier

M. Stéphane Ravier. Le Gouvernement a-t-il pris des garanties pour que ce pays accepte l’intégralité des demandes de laissez-passer consulaires ?

Vives protestations sur les travées des groupes SER, CRCE-K et GEST. – Brouhaha.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

L’amendement n° 350 rectifié, présenté par M. Retailleau, Mme Aeschlimann, MM. Allizard, Anglars, Bacci, Bas, Bazin et Belin, Mmes Bellurot, Belrhiti et Berthet, MM. E. Blanc et J.B. Blanc, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Bonhomme et Bonnus, Mme Borchio Fontimp, M. Bouchet, Mme V. Boyer, MM. Brisson, Bruyen, Burgoa, Cadec et Cambon, Mmes Canayer et Chain-Larché, M. Chaize, Mmes de Cidrac et Ciuntu, MM. Darnaud et Daubresse, Mmes Demas, Deseyne, Di Folco, Drexler, Dumont, Estrosi Sassone, Eustache-Brinio et Evren, MM. Favreau et Frassa, Mme Garnier, M. Genet, Mmes F. Gerbaud et Gosselin, MM. Gremillet et Grosperrin, Mme Gruny, MM. Gueret, Hugonet et Husson, Mmes Jacques, Josende et Joseph, MM. Joyandet, Karoutchi et Klinger, Mme Lassarade, M. D. Laurent, Mme Lavarde, MM. Lefèvre, de Legge, H. Leroy et Le Rudulier, Mmes Malet et P. Martin, M. Meignen, Mme Micouleau, MM. Milon et Mouiller, Mme Muller-Bronn, M. de Nicolaÿ, Mme Noël, MM. Nougein, Panunzi, Paul, Pellevat, Pernot, Perrin et Piednoir, Mme Pluchet, M. Pointereau, Mmes Primas et Puissat, MM. Rapin, Reichardt et Reynaud, Mme Richer, MM. Rietmann, Rojouan, Saury, Sautarel et Savin, Mme Schalck, MM. Sido, Sol, Somon et Tabarot, Mme Ventalon, MM. C. Vial, J.P. Vogel, Bouloux et Cuypers, Mme Imbert, MM. Khalifé et Mandelli et Mme Petrus, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

Le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est ainsi modifié :

1° L’article L. 611-3 est ainsi rédigé :

« Art. L. 611 -3. – L’étranger mineur de dix-huit ans ne peut faire l’objet d’une décision portant obligation de quitter le territoire français. » ;

2° Le premier alinéa de l’article L. 613-1 est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Elle est édictée en tenant notamment compte de la durée de présence de l’étranger sur le territoire français, de la nature et de l’ancienneté de ses liens avec la France et des considérations humanitaires pouvant justifier un tel droit. »

La parole est à M. Bruno Retailleau.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

J’indiquais tout à l’heure que les articles 9 et 10 étaient très importants ; ils concernent la levée de certaines protections, ce que j’ai appelé des exceptions à une règle, règle affaiblie à force d’avoir été trouée justement par ces protections.

Ces deux articles sont différents, comme le sont les deux amendements que j’ai déposés. Ils ne concernent pas la même nature d’acte. À l’article 9, il s’agissait des expulsions. Là, il s’agit des obligations de quitter le territoire. Ils ne concernent pas les mêmes publics. À l’article 10, ce ne sont pas des gens qui ont été condamnés ; ce sont surtout des étrangers en situation irrégulière.

Je voudrais dire, pour anticiper les préventions de la commission, qu’au regard de la Constitution, les conséquences ne sont pas du tout les mêmes. Pour une expulsion, le recours n’est pas suspensif ; la conséquence est donc grave pour l’individu. Pour une OQTF, le recours est suspensif ; la gravité n’est donc pas du tout la même.

Par conséquent, je pense que cet amendement devrait être voté.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

Le sous-amendement n° 650, présenté par Mme M. Jourda et M. Bonnecarrère, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Amendement n° 350, alinéa 6

Après le mot :

édictée

insérer les mots :

après vérification du droit au séjour

La parole est à M. le rapporteur, pour présenter ce sous-amendement et donner l’avis de la commission sur les amendements en discussion.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bonnecarrere

Ce sous-amendement vise à consolider la sécurité juridique de l’amendement de M. Retailleau, en introduisant, conformément au souhait du Conseil d’État et à sa jurisprudence, une référence à la vérification préalable du droit au séjour. La commission est favorable à l’amendement n° 350 rectifié, sous réserve de l’adoption de notre sous-amendement.

En revanche, l’avis est défavorable sur l’amendement n° 546 rectifié bis.

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

Avis défavorable sur l’amendement n° 350 rectifié.

Nous ne sommes pas opposés au principe que M. Retailleau pose, mais le dispositif envisagé ne nous semble pas correspondre tout à fait à l’avis du Conseil d’État et à nos discussions antérieures, même si j’ai bien noté qu’il était différent de la mesure prévue à l’amendement n° 348 rectifié.

Le Gouvernement a lui-même déposé un amendement sur cet article – c’est l’amendement n° 612, dont je suis d’ailleurs surpris qu’il ne soit pas en discussion commune –, et sa rédaction nous semble préférable. M. Retailleau retire les protections et laisse le juge faire ; nous conservons les protections, tout en insérant une référence aux menaces pour l’ordre public, afin d’essayer d’être conformes à ce que nous évoquions.

Par ailleurs, le Gouvernement est défavorable à l’amendement n° 546 rectifié bis.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

Monsieur le ministre, j’attire votre attention sur le fait qu’en cas d’adoption de l’amendement n° 350 rectifié, les autres amendements déposés sur l’article 10 deviendraient sans objet.

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

C’est pour cette raison que je regrettais qu’il n’y ait pas de discussion commune.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bonnecarrere

Je souhaitais simplement apporter la précision que vous avez vous-même faite, madame la présidente : si l’amendement n° 350 rectifié est adopté, l’amendement du Gouvernement deviendra sans objet.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

La parole est à M. Bruno Retailleau, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

J’accepte volontiers le sous-amendement de la commission, que j’avais d’ailleurs anticipé dans la défense de mon amendement. Comme je l’ai indiqué, le public visé, ce sont des étrangers en situation irrégulière : que l’on vérifie le caractère irrégulier de leur situation me semble être une mesure de bon sens.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Le sous-amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

Je mets aux voix l’amendement n° 350 rectifié, modifié.

J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.

Je rappelle que l’avis de la commission est favorable et que celui du Gouvernement est défavorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 31 :

Le Sénat a adopté.

En conséquence, l’article 10 est ainsi rédigé, et les amendements n° 544 rectifié ter, 110, 612 et 266 n’ont plus d’objet.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

L’amendement n° 542 rectifié bis, présenté par M. Ravier, est ainsi libellé :

Après l’article 10

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Aux premier et deuxième alinéas de l’article L. 612-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, le mot : « trente » est remplacé par le mot : « quinze ».

La parole est à M. Stéphane Ravier.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Ravier

Au vu du nombre d’OQTF ordonnées chaque année, soit 124 000 en 2021 selon le Conseil d’État, de l’embolie des tribunaux administratifs qui en résulte et de l’explosion de l’insécurité due à cette immigration irrégulière sous OQTF, je propose de réduire le délai de départ volontaire des OQTF de moitié. En passant ce délai de trente jours à quinze jours, nous envoyons un message de fermeté. Nos compatriotes n’acceptent plus ce délai de départ volontaire ni le délai de recours, beaucoup trop longs, car ils savent que c’est une manière de s’évanouir dans la nature. Les intéressés se passent le mot, à l’aide des associations et de leur communauté sur place, sans oublier évidemment le réseau de la gauche.

La procédure administrative française devient alors une farce pour eux. C’est ainsi que nous sommes passés de 22 % d’exécution des OQTF en 2012, ce qui n’était déjà pas fameux, à 7 % en 2022, ce qui est catastrophique.

Je le répète, nous devons envoyer un message de fermeté et ne pas laisser aux clandestins le temps de se retourner pour organiser le prolongement de leur clandestinité.

C’est pourquoi, mes chers collègues, je vous invite à soutenir cet amendement de bon sens.

Debut de section - PermalienPhoto de Muriel Jourda

La commission ne soutiendra pas votre amendement, monsieur Ravier.

En effet, nous estimons qu’au regard de la difficulté à éloigner aujourd’hui, réduire le délai n’aurait pas grand sens. Il nous paraît préférable de maintenir ce délai de départ à trente jours, en cohérence avec les nouveaux délais qui vont être prévus par la réforme du contentieux, dont nous discuterons un peu plus tard.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 537 rectifié ter, présenté par M. Ravier, est ainsi libellé :

Après l’article 10

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le second alinéa des articles L. 612-6, L. 612-7 et L. 612-8 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est supprimé.

La parole est à M. Stéphane Ravier.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Ravier

L’interdiction de retour sur le territoire français (IRTF) est une décision prise par le préfet à la suite d’une OQTF.

Dans les précédentes versions du Ceseda, les interdictions de retour sur le territoire français n’étaient pas soumises à limitation dans le temps. Je propose de revenir à cette version.

La raison va de soi : par souci de fermeté, le caractère illimité de ces interdictions doit être érigé en principe. Si on ne peut pas accueillir toute la misère du monde, et on ne le peut pas, on ne peut a fortiori pas accueillir toute la misère du monde plusieurs fois !

Avec ces limites, nous nous lions les mains, et nous nous condamnons à recommencer toujours les mêmes procédures. Un client satisfait est un client qui revient, et cela cause de la désespérance au sein de l’administration préfectorale, qui tente par tous les moyens d’assurer ses missions et d’éviter le naufrage national.

Les articles L. 613-7 et L. 613-8 du Ceseda constituent des garanties suffisantes d’abrogation de l’interdiction de retour.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

L’amendement n° 595, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Après l’article 10

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le titre Ier du livre VI du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est ainsi modifié :

1° Le second alinéa de l’article L. 612-6 est complété par les mots : «, et dix ans au cas de menace grave pour l’ordre public. » ;

2° La section 4 du chapitre III est complétée par un article L. 613-9 ainsi rédigé :

« Art. L. 613 -9. – Les motifs de la décision d’interdiction de retour sur le territoire français donnent lieu à un réexamen tous les cinq ans à compter de sa date d’édiction. L’autorité compétente tient compte de l’évolution de la menace pour l’ordre public que constitue la présence de l’intéressé en France, des changements intervenus dans sa situation personnelle et familiale et des garanties de réinsertion professionnelle ou sociale qu’il présente, en vue de prononcer éventuellement l’abrogation de cette décision. L’étranger peut présenter des observations écrites.

« À défaut de notification à l’intéressé d’une décision explicite d’abrogation dans un délai de deux mois, ce réexamen est réputé avoir conduit à une décision implicite de ne pas abroger. Cette décision est susceptible de recours. »

La parole est à M. le ministre.

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

La mesure que je propose d’ajouter au texte est assez simple. Il s’agit d’allonger la durée de l’interdiction administrative de territoire (IAT) de cinq ans à dix ans.

Aujourd’hui, lorsque vous expulsez quelqu’un du territoire national, vous lui opposez en même temps un acte administratif que l’on appelle une IAT, dont la durée est aujourd’hui de cinq ans. Elle concerne évidemment les personnes les plus dangereuses, par exemple des radicalisés inscrits au fichier de traitement des signalements pour la prévention de la radicalisation à caractère terroriste (FSPRT).

Nous avons considéré, avec les services de la direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) et de la direction des libertés publiques et des affaires juridiques (DLPAJ), dont je salue le travail au quotidien auprès du ministre de l’intérieur, qu’il fallait doubler la durée de cette IAT, tout en respectant le cadre constitutionnel.

Debut de section - PermalienPhoto de Muriel Jourda

Ces deux amendements traduisent une exigence de fermeté. Celui de M. Ravier n’est pas conforme à la directive « retour », contrairement à celui du Gouvernement. Avis défavorable sur le premier et avis favorable sur le second.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

L ’ amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 10.

L’amendement n° 545 rectifié bis, présenté par M. Ravier, est ainsi libellé :

Après l’article 10

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au 3° alinéa de l’article L. 721-4 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, les mots : «, avec l’accord de l’étranger » sont supprimés.

La parole est à M. Stéphane Ravier.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Ravier

Ce Ceseda a vraiment été rédigé à une période et par un législateur particulièrement bienveillants avec les étrangers. Ce n’est pas un mal en soi, mais c’est difficilement entendable dans la situation actuelle, compte tenu des responsabilités qui sont les nôtres.

Aujourd’hui, l’autorité administrative peut désigner comme pays de renvoi soit le pays dont l’étranger a la nationalité, soit un autre pays avec lequel il y a un accord bilatéral, soit, avec l’accord de l’étranger, tout autre pays dans lequel il est légalement admissible.

Si l’étranger fait l’objet d’un renvoi du territoire national, cela fait suite à une infraction de sa part qui justifie la fermeté de l’État.

Pour rendre ce dispositif encore plus ferme, je souhaite supprimer le consentement de l’étranger sur le choix par l’autorité administrative d’un pays de renvoi dans lequel il serait légalement admissible. L’État a aussi des droits : il doit avoir le champ le plus large possible pour exécuter les décisions d’éloignement.

Debut de section - PermalienPhoto de Muriel Jourda

Une telle disposition serait inconventionnelle. Avis défavorable.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est ainsi modifié :

1° L’article L. 331-2 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« En cas de refus caractérisé de se soumettre au relevé des empreintes digitales et à la prise de photographie prévus au 3° de l’article L. 142-1, par l’étranger contrôlé à l’occasion du franchissement d’une frontière extérieure sans remplir les conditions d’entrée prévues à l’article 6 du règlement précité ou à l’article L. 311-1 du présent code, l’officier de police judiciaire ou, sous contrôle de celui-ci, l’agent de police judiciaire peut, sur autorisation du procureur de la République que l’officier de police judiciaire a saisi préalablement, procéder à cette opération sans le consentement de l’intéressé, en présence de son avocat. L’étranger doit avoir été dûment informé des conséquences de son refus. Le recours à la contrainte, qui ne peut concerner qu’un étranger manifestement âgé d’au moins dix-huit ans, doit poursuivre les objectifs du présent article, être strictement proportionné et tenir compte de la vulnérabilité de la personne. L’article L. 821-2 demeure applicable. » ;

2° Après la première phrase de l’article L. 813-10, sont insérées quatre phrases ainsi rédigées : « Lorsque le refus de l’étranger de se soumettre aux opérations de relevé des empreintes digitales et de prise de photographie est caractérisé, l’officier de police judiciaire ou, sous contrôle de celui-ci, l’agent de police judiciaire peut, sur autorisation du procureur de la République que l’officier de police judiciaire a saisi préalablement, procéder à cette opération sans le consentement de l’intéressé, en présence de son avocat. L’étranger doit avoir été dûment informé des conséquences de son refus. Le recours à la contrainte, qui ne peut concerner qu’un étranger manifestement âgé d’au moins dix-huit ans, doit poursuivre les objectifs du présent article, être strictement proportionné et tenir compte de la vulnérabilité de la personne. Les articles L. 822-1 et L. 824-2 demeurent, selon le cas, applicables. »

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

Je suis saisie de deux amendements identiques.

L’amendement n° 291 rectifié est présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.

L’amendement n° 454 est présenté par M. Brossat, Mme Cukierman et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Guy Benarroche, pour présenter l’amendement n° 291 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Benarroche

L’article 11 du présent projet de loi a pour objet d’autoriser le recours à la coercition pour le relevé des empreintes digitales et la prise de photographies des étrangers en situation irrégulière.

Je rappelle en préambule que les articles L. 821-2, L. 822-1 et L. 824-2 du Ceseda punissent déjà d’un an d’emprisonnement le fait de refuser le relevé de ses empreintes digitales.

Comme le souligne à raison le Syndicat de la magistrature : « Ces dispositions constituent des atteintes légales inédites à plusieurs droits fondamentaux : le principe d’inviolabilité du corps humain, la liberté individuelle, le principe de la dignité de la personne humaine. »

Même si la commission des lois a atténué un peu la portée de l’article, notamment grâce à des amendements du groupe écologiste, en prévoyant l’autorisation préalable du magistrat pour cette coercition, la présence d’un avocat et l’exclusion des mineurs du champ de la mesure, nous considérons que cet article est toujours la marque d’une dérive autoritaire grave. Nous proposons donc sa suppression.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

La parole est à Mme Evelyne Corbière Naminzo, pour présenter l’amendement n° 454.

Debut de section - PermalienPhoto de Evelyne CORBIÈRE NAMINZO

La disposition proposée dans le projet de loi et acceptée par la commission des lois est, à nos yeux, problématique sur le plan du respect des droits les plus élémentaires, mais, surtout, sur celui de la conception de l’étranger qu’une telle mesure met en évidence.

Le rapport, de manière volontaire ou non, démontre clairement que le choix du Gouvernement est de pouvoir appliquer le relevé des empreintes digitales et la prise de photographies aux étrangers et étrangères, alors que, dans le droit français, jusqu’alors, cette possibilité était réservée aux personnes soupçonnées d’avoir commis des infractions d’une certaine gravité, et dans le cadre d’une enquête de flagrance. Ainsi ce texte établit-il une présomption de culpabilité à l’égard de tout étranger et de toute étrangère, même si ce dernier ou cette dernière n’est a priori coupable d’aucun délit.

Le Conseil d’État et le Conseil constitutionnel avaient rappelé la nécessité d’encadrer cette disposition pour assurer le respect des libertés publiques. La commission des lois elle-même – une fois n’est pas coutume ! – a tout de même cherché à atténuer la dureté du texte, en soustrayant notamment les mineurs de 13 ans de son champ d’application, et en rappelant la nécessaire présence d’un avocat lors du relevé des empreintes ou de la prise de photographies.

Mes chers collègues, allez jusqu’au bout de cette volonté de protection des droits en supprimant l’article 11.

Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K.

Debut de section - PermalienPhoto de Muriel Jourda

En effet, nous étions d’accord avec la possibilité de prise d’empreintes par coercition, mesure proposée par le Gouvernement pour rendre plus efficiente l’identification des étrangers en situation irrégulière.

Nous avons cherché non pas à atténuer le texte, mais à garantir une telle possibilité en tirant toutes les conséquences d’une question prioritaire de constitutionnalité qui avait été soulevée et à laquelle le Conseil constitutionnel a répondu le 23 février dernier.

Monsieur Benarroche, vous avez à juste titre indiqué que vous aviez vous-même fait voter un amendement en ce sens en commission. Je vois que vous avez changé d’avis. Pas nous ! Avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

Avis défavorable.

La proposition du Gouvernement qu’a modifiée la commission des lois vise évidemment à permettre l’identification des personnes. Sans cela, il ne peut pas y avoir éloignement, parce que l’on perd beaucoup de temps. Nous en avons donc besoin.

Les sanctions pénales prévues n’étaient pas assez dissuasives. C’est la raison pour laquelle nous vous proposons cet article.

Madame Corbière Naminzo, monsieur Benarroche, nous ne sommes pas le seul pays à pouvoir pratiquer une telle coercition : l’Autriche, la République tchèque, l’Allemagne, l’Italie, les Pays-Bas, la Pologne, la Slovaquie, le Royaume-Uni, la Norvège, la Hongrie, la Finlande, la Croatie et l’Estonie l’autorisent. C’est plutôt nous qui sommes l’exception !

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

La parole est à Mme Evelyne Corbière Naminzo, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Evelyne CORBIÈRE NAMINZO

Mme Evelyne Corbière Naminzo. Monsieur le ministre, je vous remercie d’avoir énuméré tous ces pays, mais je vous invite à regarder ce qui se passe outre-mer. Sachez qu’il y a aussi des étrangers qui sont des étrangères à La Réunion. Elles arrivent sur le territoire français parce que de bons Français sont allés les chercher dans leur pays en leur promettant monts et merveilles. Une fois en France, ils les maltraitent et les contraignent à la clandestinité. Or ce sont elles qui se retrouveront dans l’illégalité et seront contrôlées et fichées !

Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K.

Les amendements ne sont pas adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

L’amendement n° 11 rectifié bis, présenté par Mmes M. Carrère et N. Delattre, MM. Bilhac, Cabanel, Gold, Guérini, Guiol, Laouedj, Roux et Fialaire, Mmes Guillotin et Pantel et M. Masset, est ainsi libellé :

Alinéas 3 et 4, troisième phrase

Après le mot :

contrainte

insérer les mots :

dans la mesure strictement nécessaire

La parole est à M. Ahmed Laouedj.

Debut de section - PermalienPhoto de Ahmed LAOUEDJ

L’article 11 permet le relevé des empreintes digitales et la prise de photographies sans son consentement de l’étranger en séjour irrégulier ou contrôlé à l’occasion de son franchissement de la frontière alors qu’il ne satisfait pas aux conditions d’entrée sur le territoire.

Nous ne sommes pas forcément contre un tel dispositif. Cependant, nous considérons que le régime de la prise d’empreintes d’une personne en situation irrégulière ne saurait être plus liberticide que celui d’une personne suspectée d’avoir commis une infraction. Aussi, nous proposons d’introduire dans le régime des étrangers la formule consacrée par le code de procédure pénale, en son article 55-1 alinéa 5, s’agissant de la prise d’empreintes par coercition : « L’agent recourt à la contrainte dans la mesure strictement nécessaire. »

Nous avons déjà déposé un amendement dans cet esprit en commission pour prévoir l’exclusion des personnes manifestement mineures du dispositif de prise d’empreintes par coercition. Il a été adopté, et je propose, par cet amendement, de continuer d’aligner les différents régimes.

Debut de section - PermalienPhoto de Muriel Jourda

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Monsieur Laouedj, nous ne nous connaissons pas encore très bien, mais permettez-moi de vous dire que vous chipotez !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Muriel Jourda

En effet, vous souhaitez que soient ajoutés les termes « dans la mesure strictement nécessaire », alors que nous avons retenu la formule « strictement proportionné ». Dans ces conditions, je pense pouvoir dire que votre amendement est satisfait. Je vous demande donc de le retirer, faute de quoi l’avis serait défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Ahmed LAOUEDJ

Non, madame la présidente. Si je souhaitais personnellement maintenir cet amendement, mon groupe, le RDSE, préfère le retirer. Je suivrai donc la position de mon groupe.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

L’amendement n° 11 rectifié bis est retiré.

L’amendement n° 13 rectifié bis, présenté par Mmes M. Carrère et N. Delattre, MM. Bilhac, Cabanel, Gold, Guérini, Guiol, Laouedj, Roux, Fialaire et Grosvalet, Mmes Guillotin et Pantel et M. Masset, est ainsi libellé :

Alinéas 3 et 4, avant la dernière phrase

Insérer deux phrases ainsi rédigées :

Cette opération fait l’objet d’un procès-verbal, qui mentionne les raisons pour lesquelles elle constitue l’unique moyen d’identifier la personne ainsi que le jour et l’heure auxquels il y est procédé. Le procès-verbal est transmis au procureur de la République, copie en ayant été remise à l’intéressé.

La parole est à M. Michel Masset.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel MASSET

Cet amendement est dans la même veine. Il s’agit d’aligner le régime des étrangers sur celui qui existe déjà en procédure pénale. Ainsi, nous souhaitons que la prise d’empreintes par coercition fasse l’objet d’un procès-verbal. Il n’est pas excessif de demander cela dès lors qu’un acte coercitif est exercé à l’encontre d’une personne.

Debut de section - PermalienPhoto de Muriel Jourda

En effet, l’établissement d’un procès-verbal va de soi dans ce type de contrôle. Je ne suis pas sûre qu’il faille l’ajouter dans le texte. Avis défavorable.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

L’amendement n° 271, présenté par MM. Gontard et Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc, Dantec, Dossus et Fernique, Mme Guhl, M. Jadot, Mme de Marco, M. Mellouli, Mme Ollivier, M. Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Dans le cadre de cette opération, l’officier de police judiciaire ou l’agent de police judiciaire est identifié par son numéro d’immatriculation administrative, sa qualité et son service ou unité d’affectation.

La parole est à M. Jacques Fernique.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Fernique

Depuis la fermeture des frontières intérieures, consécutivement aux attentats de 2015, le rôle de la police aux frontières, notamment à la frontière italienne, s’est considérablement accru, incluant notamment la gestion du flux migratoire en provenance de l’Italie.

Le durcissement constant de la politique migratoire française et la pression des directives assignées à la police aux frontières entraînent de plus en plus d’irrégularités dans le traitement des cas individuels des personnes étrangères, notamment dans l’établissement des décisions de refus d’entrée. Un certain nombre de ces irrégularités ont été documentées.

Il apparaît dès lors de plus en plus indispensable que les agents de la police aux frontières, comme tous les agents de police et gendarmerie nationale, appliquent strictement l’obligation de port visible de leur immatriculation administrative. Conformément à l’arrêté du 24 décembre 2013, les forces de l’ordre sont soumises à l’obligation de porter leur référentiel des identités et de l’organisation (RIO) lors de l’exercice de leurs missions.

Depuis lors, cette mesure n’est que partiellement appliquée, comme l’a notamment relevé la Défenseure des droits. Ainsi, le 11 octobre dernier, le Conseil d’État ordonnait encore au ministère de l’intérieur de veiller à l’application effective de cette obligation pour les forces de l’ordre.

Dans son arrêt, le Conseil d’État juge que les dimensions actuelles du numéro d’identification portées par les forces de l’ordre lors des rassemblements sont « inadaptées ». Il s’agit de « favoriser des relations de confiance entre les forces de sécurité intérieure et la population et d’assurer, dans l’intérêt de tous, l’identification des agents », précise la juridiction, qui « enjoint que ce numéro soit agrandi afin qu’il soit suffisamment lisible, en particulier lorsque les forces de l’ordre interviennent lors de rassemblements ou d’attroupements ». Le Conseil d’État a donné douze mois au ministère de l’intérieur pour se conformer à sa décision.

Cet amendement vise donc à appliquer une telle obligation aux agents de la police aux frontières, dès l’adoption du présent projet de loi, afin de garantir un plus grand respect des droits des personnes migrantes.

Debut de section - PermalienPhoto de Muriel Jourda

La commission demande le retrait de cet amendement, faute de quoi l’avis serait défavorable.

Comme vous l’indiquez vous-même dans votre présentation, mon cher collègue, il existe déjà une obligation générale de porter le numéro d’immatriculation. Que le Conseil d’État ait estimé que cette obligation n’était pas bien déclinée aujourd’hui, c’est une question d’exécution. L’obligation existe bel et bien. Ce n’est pas en la répétant dans la loi qu’elle sera correctement appliquée.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Fernique

M. Jacques Fernique. Oui, madame la présidente : je n’oserais pas retirer un amendement dont le premier signataire est mon président de groupe !

Sourires.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

L ’ article 11 est adopté.

Le code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° Au quatrième alinéa de l’article 55-1, les mots : « d’un an » sont remplacés par les mots : « de deux ans » ;

2° À l’article 78-5, les mots : « trois mois d’emprisonnement et de 3 750 » sont remplacés par les mots : « six mois d’emprisonnement et de 7 500 ».

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

Je suis saisie de deux amendements identiques.

L’amendement n° 215 est présenté par Mmes de La Gontrie et Narassiguin, MM. Bourgi, Durain et Chaillou, Mme Harribey, M. Kerrouche, Mme Linkenheld, M. Roiron, Mme Brossel, M. Chantrel, Mmes Conway-Mouret et G. Jourda, MM. Kanner et Marie, Mmes S. Robert et Rossignol, MM. Stanzione, Temal, Tissot, M. Vallet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

L’amendement n° 289 rectifié est présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Karine Daniel, pour présenter l’amendement n° 215.

Debut de section - PermalienPhoto de Karine DANIEL

Nous demandons la suppression de cet article 11 bis, qui prévoit d’alourdir les peines encourues en cas de refus de se soumettre aux opérations de relevé d’empreintes. Cette disposition nous apparaît complètement disproportionnée, sachant que la peine actuellement encourue est d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende. Vous en conviendrez, c’est loin d’être une peine légère pour une infraction de ce type. Nous aimerions d’ailleurs connaître les peines effectivement prononcées avant de décider s’il est opportun de les rehausser ou non.

Par ailleurs, il nous semble un peu naïf de penser qu’il suffirait de porter la peine d’emprisonnement d’un an à deux ans pour mettre un terme aux cas de refus de relevé d’empreintes. Il nous apparaît préférable d’appliquer les sanctions existantes plutôt que de chercher à les alourdir.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

La parole est à M. Guy Benarroche, pour présenter l’amendement n° 289.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Benarroche

L’article 11 bis renforce les peines encourues en cas de refus de prise d’empreintes. Visant particulièrement les mineurs étrangers isolés, cet article prévoit de faire passer la peine d’emprisonnement d’un an à deux ans en cas de refus de donner ses empreintes.

Les mineurs isolés sont souvent associés à la délinquance, alors qu’il s’agit d’enfants qui, bien souvent, sont victimes de traite et contraints à commettre des délits. Au lieu de les protéger, l’article 11 bis prévoit de les punir plus sévèrement.

Si une réponse à ce délit doit être apportée, cela doit se faire sous l’angle de la protection, et non pas consister en un allongement de la peine d’emprisonnement, ce qui n’aura aucun effet dissuasif sur le développement des réseaux de trafic d’êtres humains. Cette mesure est, selon nous, révélatrice d’une dérive vers une société de surveillance, le devenir des données personnelles de mineurs, non modifiables, n’étant de surcroît pas très clair à ce stade.

Nous souhaitons donc la suppression de l’article 11 bis.

Debut de section - PermalienPhoto de Muriel Jourda

La commission a estimé que ce dispositif pouvait être plus protecteur pour les mineurs. Ces derniers n’encourant que la moitié de la peine, les réseaux pourraient être tentés d’utiliser des mineurs. Avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

La parole est à M. Guy Benarroche, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Benarroche

Si j’ai bien compris, madame la rapporteure, vous pensez que le fait d’allonger les peines pour les mineurs va dissuader les réseaux de faire de la traite avec eux. Ai-je bien compris votre position ?

Les amendements ne sont pas adoptés.

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

Madame la présidente, je sollicite une courte suspension de séance.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à dix-huit heures vingt-cinq, est reprise à dix-huit heures trente.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

La séance est reprise.

Je mets aux voix l’article 11 bis.

L ’ article 11

Après l’article L. 142-3 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, il est inséré un article L. 142-3-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 142 -3 -1. – Afin de faciliter l’identification des mineurs se déclarant privés temporairement ou définitivement de la protection de leur famille, à l’encontre desquels il existe des indices graves ou concordants rendant vraisemblable qu’ils aient pu participer, comme auteurs ou complices, à des infractions à la loi pénale, ou l’établissement d’un lien entre plusieurs infractions commises par un seul de ces mineurs, les empreintes digitales ainsi qu’une photographie de ces derniers peuvent être relevées dans les conditions prévues aux articles L. 413-16 et L. 413-17 du code de la justice pénale des mineurs, mémorisées et faire l’objet d’un traitement automatisé dans les conditions prévues par le règlement (UE) 2016/679 du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l’égard des traitements des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données et par la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés.

« Le traitement de données ne comporte pas de dispositif de reconnaissance faciale à partir de la photographie.

« Les données peuvent être relevées dès que la personne se déclare mineure. La conservation des données des personnes reconnues mineures est limitée à la durée strictement nécessaire à leur prise en charge et à leur orientation, en tenant compte de leur situation personnelle. »

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

Je suis saisie de deux amendements identiques.

L’amendement n° 181 est présenté par Mmes de La Gontrie et Narassiguin, MM. Bourgi, Durain et Chaillou, Mme Harribey, M. Kerrouche, Mme Linkenheld, M. Roiron, Mme Brossel, M. Chantrel, Mmes Conway-Mouret et G. Jourda, MM. Kanner et Marie, Mmes S. Robert et Rossignol, MM. Stanzione, Temal, Tissot, M. Vallet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

L’amendement n° 290 rectifié est présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Karine Daniel, pour présenter l’amendement n° 181.

Debut de section - PermalienPhoto de Karine DANIEL

Après la suppression de l’AME, la réduction des allocations de solidarité pour les personnes en règle, la remise en cause et l’attaque du droit du sol, nous entamons le chapitre des fichiers baroques.

Cet article est sans doute l’un des plus baroques du projet de loi. Selon l’exposé des motifs, il s’agit de créer un fichier des mineurs étrangers condamnés. Or tout est faux dans cette présentation !

D’abord, le fichier concernera non seulement les mineurs étrangers, mais également tout mineur privé temporairement ou définitivement de la protection de sa famille, sans considération de sa nationalité. Pourront donc être inscrits dans ce fichier des mineurs de nationalité française. Pourquoi inscrire une telle disposition dans le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ? Pourquoi inscrire cet article dans le projet de loi ?

Une disposition qui concerne non pas les seuls mineurs étrangers, mais l’ensemble des mineurs isolés constitue à l’évidence un cavalier législatif.

Ensuite, ce fichier ne concerne pas non plus les mineurs condamnés. Tel qu’il est prévu, ce fichier concernerait ceux « à l’encontre desquels il existe des indices graves ou concordants rendant vraisemblable » – vraisemblable ! – « qu’ils aient pu participer, comme auteurs ou complices, à des infractions à la loi pénale ».

En tout état de cause, ce fichier est inutile dès lors qu’il existe déjà un fichier de traitement des antécédents judiciaires (TAJ), qui contient des informations sur les personnes mises en cause, y compris les personnes mineures, comme auteurs ou complices d’un crime, d’un délit ou de certaines infractions de cinquième classe, soit les troubles à la sécurité ou à la tranquillité publiques, les atteintes aux personnes, aux biens ou à la sûreté de l’État.

Mes chers collègues, le bon sens nous invite à supprimer cet article.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

La parole est à M. Guy Benarroche, pour présenter l’amendement n° 290 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Benarroche

Notre amendement vise également à supprimer l’article 11 ter, qui a été introduit dans le texte au Sénat par la commission des lois pour prévoir la création d’un fichier recensant les mineurs non accompagnés délinquants.

Cet article illustre la vision très sécuritaire de la majorité sénatoriale en matière d’immigration. Les mineurs non accompagnés sont ainsi réduits aux délits qu’ils pourraient commettre. Aucune solution n’est proposée pour leur accueil, leur insertion ou leur prise en charge dans cet article, comme d’ailleurs dans l’ensemble du projet de loi.

L’article prévoit la création d’un fichier dans lequel seraient stockées les empreintes digitales et les photographies des mineurs étrangers condamnés à un ensemble très vaste d’infractions pénales.

Les auteurs du présent amendement s’opposent à ce nouveau fichage, à cette vision réductrice de l’immigration, à cette fuite en avant sécuritaire, qui ne semble avoir aucune limite, au mépris d’un certain nombre de nos valeurs et de conventions internationales.

Là encore, nous ne pouvons pas accepter cette dérive vers une société de surveillance, dans laquelle les données personnelles non modifiables de mineurs seraient stockées dans des conditions d’utilisation et de conservation qui ne sont pas encore connues.

C’est pourquoi nous vous proposons de supprimer cet article, comme vous venez de le faire pour l’article 11 bis.

Debut de section - PermalienPhoto de Muriel Jourda

Ce fichier, dont la création a été votée par la commission des lois, est la traduction d’une recommandation figurant dans le rapport d’information de 2021 de nos collègues Hussein Bourgi, Laurent Burgoa, Xavier Iacovelli et Henri Leroy sur les mineurs non accompagnés.

Dans ce rapport, nos collègues faisaient le constat, partagé et malheureusement connu, que la délinquance des jeunes en errance était en forte augmentation. Or les forces de l’ordre manquent d’outils adaptés pour y faire face.

Le fichier prévu à l’article 11 ter, même si je ne disconviens pas qu’il soit perfectible, peut constituer un outil utile pour les forces de l’ordre face à cette difficulté grandissante.

La commission émet donc un avis défavorable sur ces amendements de suppression.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

La parole est à M. Patrick Kanner, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Kanner

Nous assistons là encore aux excès de la droite sénatoriale.

Vous le savez, un fichier des antécédents judiciaires existe déjà. Un tel ajout ne servira donc à rien, sauf à marquer votre positionnement et à créer un lien dans l’esprit de nos concitoyens entre délinquance et immigration. Cela devient obsessionnel chez vous

Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Kanner

Ce fichier ne sera rien d’autre qu’un outil au service de votre idéologie particulièrement inquiétante. Votre posture politicienne devient, je vous le dis, très préoccupante pour les valeurs de notre République.

Je vous rappelle que nous parlons de mineurs, d’enfants. Au lieu de les considérer comme des enfants de la République, vous cherchez à les stigmatiser, à les cataloguer. Au lieu de penser à leur offrir une meilleure protection, une meilleure intégration, une meilleure formation, de meilleurs débouchés, vous souhaitez les rejeter, de manière obsessionnelle et caricaturale.

Pour ces raisons, nous soutiendrons les amendements présentés par Mme de La Gontrie et M. Benarroche.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

Je mets aux voix les amendements identiques n° 181 et 290 rectifié.

J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.

Exclamations amusées sur les travées des groupes SER, CRCE-K et GEST.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 32 :

Le Sénat n’a pas adopté.

Je mets aux voix l’article 11 ter.

J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.

Marques d ’ agacement sur les travées des groupes CRCE-K, SER et GEST.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 33 :

Le Sénat a adopté.

L’article L. 741-5 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est ainsi modifié :

1° Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« L’étranger accompagné d’un mineur de seize ans ne peut être placé en centre de rétention administrative. » ;

2° Au deuxième alinéa et aux première et seconde phrases du sixième alinéa, après le mot : « mineur », sont insérés les mots : « âgé de seize ans révolus ».

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

L’amendement n° 132 n’est pas soutenu.

Je suis saisie de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 182, présenté par Mmes de La Gontrie et Narassiguin, MM. Bourgi, Durain et Chaillou, Mme Harribey, M. Kerrouche, Mme Linkenheld, M. Roiron, Mme Brossel, M. Chantrel, Mmes Conway-Mouret et G. Jourda, MM. Kanner et Marie, Mmes S. Robert et Rossignol, MM. Stanzione, Temal, Tissot, M. Vallet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

L’article L. 741-5 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est ainsi rédigé :

« Art. L. 741-5. - L’étranger mineur de dix-huit ans ne peut faire l’objet d’une décision de placement en rétention. L’étranger accompagné d’un mineur de dix-huit ans ne peut pas non plus faire l’objet d’une décision de placement en rétention. »

La parole est à Mme Audrey Linkenheld.

Debut de section - PermalienPhoto de Audrey LINKENHELD

Notre amendement vise à améliorer l’article 12, auquel nous sommes partiellement favorables.

Cet article prévoit l’interdiction de placer un mineur de 16 ans en centre de rétention administrative. Une telle proposition est évidemment une bonne chose. Selon la convention internationale des droits de l’enfant, tous les enfants, sans exception, ont droit à la protection. Selon cette même convention, un enfant est un mineur de 18 ans.

Notre amendement vise à interdire le placement en centre de rétention administrative non seulement des mineurs de 16 ans, mais également de tous les mineurs, c’est-à-dire des mineurs de 18 ans. Ces derniers ont droit à cette protection, d’autant plus que les mineurs dont nous parlons ont en général été confrontés à des événements traumatisants.

Notre amendement tend également à interdire le placement des mineurs dans tous les lieux de rétention administrative, qu’il s’agisse de pièces dans un commissariat, d’hôpitaux ou d’hôtels. Un mineur de 18 ans n’a rien à faire dans de tels endroits ; il doit être protégé. Il n’y a pas de raison de faire de différence entre les OQTF, les expulsions et les centres de rétention administrative (CRA) ou les locaux de rétention administrative (LRA).

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

L’amendement n° 39 rectifié, présenté par M. Brossat, Mme Cukierman et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

L’article L. 741-5 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est ainsi rédigé :

« Art. L. 741 -5. – L’étranger mineur de moins de dix-huit ans ne peut faire l’objet d’une décision de placement en rétention. Il ne peut être placé dans aucun lieu de rétention administrative. »

La parole est à M. Ian Brossat.

Debut de section - PermalienPhoto de Ian BROSSAT

Toute personne ayant visité un centre de rétention administrative admettra, me semble-t-il, qu’il n’est pas acceptable que des enfants puissent y être placés, compte tenu des conditions dans lesquelles les personnes y sont retenues.

Notre amendement vise d’abord, comme celui qui vient d’être présenté par Audrey Linkenheld, à interdire le placement en centre de rétention de tous les mineurs, y compris de ceux qui ont entre 16 ans et 18 ans, comme le prévoyait d’ailleurs le texte initial du Gouvernement. Il tend ensuite à étendre cette interdiction aux locaux de rétention administrative.

Si on est contre la rétention des enfants, il faut aller jusqu’au bout de la logique.

Tel est le sens de cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

L’amendement n° 298 rectifié, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

L’article L. 741-5 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa est ainsi modifié :

a) Après les mots : « dix-huit ans », sont insérés les mots : « les familles comprenant un ou plusieurs mineurs, les femmes enceintes, » ;

b) Le mot : « peut » est remplacé par le mot : « peuvent » ;

2° Les deuxième à dernier alinéa sont supprimés ;

3° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Les dispositions sont applicables sur l’ensemble des territoires d’outre-mer. »

La parole est à M. Guy Benarroche.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Benarroche

Cet amendement est proche de ceux que viennent de présenter nos deux collègues.

J’ai visité en l’espace de trois ans un grand nombre de CRA, de LRA, de zones d’attente et de zones de mise à l’abri. Ces dernières sont en fait des zones de rétention, comme le disent eux-mêmes les fonctionnaires de police qui s’en occupent ; il faudra donc changer leur statut. Nous ne comprenons donc pas que le placement dans ces lieux des mineurs de 18 ans ne soit pas interdit.

De même, les femmes enceintes et les familles accompagnant les mineurs ne doivent pas être placées dans ces lieux.

Il convient de clarifier la rédaction de l’article, afin de prendre en compte l’ensemble des personnes présentant des facteurs de vulnérabilité incompatibles avec le placement en rétention administrative. Sachant que les personnes qui y sont placées ont déjà connu un parcours judiciaire, il est malsain d’y placer des mineurs âgés de 16 ans à 18 ans ou des femmes enceintes. Il convient de les préserver de l’impact de l’enfermement dans les CRA et les LRA.

Il s’agit notamment d’éviter aux femmes enceintes des ruptures dans leur suivi périnatal, les conditions de détention dans ces centres étant très détériorées et matérialisées par une surveillance policière constante, ce qui se comprend compte tenu de l’objet de ces centres de rétention.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

L’amendement n° 7 rectifié bis, présenté par Mmes M. Carrère et N. Delattre, MM. Bilhac, Cabanel, Guérini, Guiol, Laouedj, Roux et Gold, Mme Pantel et MM. Grosvalet et Masset, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

La seconde phrase du premier alinéa de l’article L. 741-5 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est ainsi rédigée : « L’étranger accompagné d’un mineur ne peut être placé en centre de rétention administrative. »

La parole est à M. Philippe Grosvalet.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe GROSVALET

Il est d’usage dans les entreprises aujourd’hui, mais aussi dans nos collectivités, de demander aux nouveaux agents un rapport d’étonnement.

Permettez-moi donc de m’étonner un peu, en tant que nouveau sénateur, que, dans une enceinte aussi prestigieuse, il faille rappeler des principes élémentaires et fondamentaux auxquels la France a l’honneur de se référer. Je pense par exemple à la convention internationale des droits de l’enfant, qui fait prévaloir l’intérêt supérieur de l’enfant.

J’avais cru comprendre que l’âge de la majorité était de 18 ans ; c’est celui auquel je suis devenu majeur. Je suppose donc que l’on est mineur jusqu’à ses 18 ans moins un jour.

Il me paraît donc totalement infondé, et surtout contraire aux grands principes de la France et de la République, de considérer qu’un jeune âgé de 16 ans à 18 ans ne serait plus un mineur.

Référons-nous aux principes de la République pour légiférer dans de bonnes conditions.

Debut de section - PermalienPhoto de Muriel Jourda

Avis défavorable. À nos yeux, un équilibre, qui vous paraît sûrement déplaisant, a été trouvé à l’article 12 tel qu’il a été adopté par la commission.

Aujourd’hui, dans les CRA – je parle sous le contrôle de M. le ministre, car, après tout, c’est lui qui pilote cette politique –, on ne trouve plus que des personnes ayant provoqué un trouble à l’ordre public. Il s’agit en réalité plus de délinquants que de personnes sans titre de séjour. De ce fait, on n’y place effectivement pas de jeunes enfants.

Pour autant, le fait d’être en situation irrégulière avec un mineur ne doit pas être un prétexte pour ne pas être éloigné du territoire. Les familles concernées sont donc placées dans des LRA.

L’équilibre qui a été trouvé vise à faire respecter la loi. Nous souhaitons qu’il soit conservé.

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

Avis favorable sur l’ensemble de ces amendements, même s’ils ne sont pas identiques.

C’est le gouvernement d’Emmanuel Macron qui vous propose d’interdire le placement de mineurs en centre de rétention administrative. J’entends les déclarations des uns et des autres, de ceux qui considèrent que c’est affreux de placer des mineurs et qui se réfèrent à la convention internationale des droits de l’enfant. Je relève simplement qu’il est dommage, alors que cette convention a été adoptée en 1989, que d’autres n’aient pas prononcé une telle interdiction lorsqu’ils étaient aux responsabilités gouvernementales.

J’ai proposé d’interdire le placement des mineurs de 16 ans, car je me doutais que les parlementaires réclameraient une interdiction pour les mineurs de 18 ans.

La plupart des LRA sont aujourd’hui situés dans des commissariats. Il s’agit effectivement d’endroits assez proches du milieu carcéral et des centres de rétention administrative. Cela étant, je ne fais mettre dans ces centres, même si cela ne figure pas dans la loi, que des personnes radicalisées ou dangereuses. La typologie des personnes placées dans ces centres a changé.

J’ai une légère préférence pour l’amendement n° 7 rectifié bis.

Je précise que l’interdiction que tendent à prévoir ces amendements ne concerne pas l’assignation à résidence. Si vous adoptez ces amendements, des mineurs continueront d’être assignés à résidence, à leur domicile ou dans un hôtel. Sinon, il ne sera plus possible de procéder à un quelconque éloignement. Il faut être précis sur ce point, pour qu’il n’y ait pas de difficultés entre nous.

Via ces amendements, vous voulez non pas empêcher les éloignements, mais faire en sorte qu’ils ne soient pas traumatisants pour les enfants ou les personnes âgées de moins de 18 ans. Les amendements de Mme Linkenheld et de M. Brossat, qui tendent à prévoir l’interdiction de placer tous les mineurs de moins de 18 ans dans tous les lieux de rétention, ne s’appliqueront pas aux assignations à résidence. Que cela soit clair.

Le Gouvernement soutient ces amendements. S’ils n’étaient pas adoptés au Sénat, nous proposerions sans doute à la majorité parlementaire de les adopter à l’Assemblée nationale.

Très bien ! et applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE-K, GEST et RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

La parole est à M. Jérôme Durain, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Durain

Je souhaite rétablir la chronologie des faits.

Certes, la gauche n’a pas procédé à une telle interdiction lorsqu’elle était au pouvoir. Mais, ici, au Sénat, notre position est constante parce que nous pensons que ce sujet est très important. Nous étions déjà favorables à une telle interdiction lors de l’examen de la loi Collomb. Quelques précurseurs l’avaient même défendue dès 2015. Cette interdiction est donc une très bonne nouvelle.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

La parole est à M. Ian Brossat, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Ian BROSSAT

Cela fait à présent des années que des associations se battent à juste titre pour qu’il n’y ait plus d’enfants dans les centres de rétention administrative.

Je prends note de l’engagement que vous venez de prendre, monsieur le ministre. Nous sommes heureux que l’on puisse enfin mettre un terme à la rétention d’enfants, et dans les CRA et dans les LRA. Ce serait une bonne nouvelle, digne de notre pays.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

Je mets aux voix l’amendement n° 182.

J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.

Protestations sur les travées des groupes SER, CRCE-K et GEST.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable et que celui du Gouvernement est favorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 34 :

Nombre de votants342Nombre de suffrages exprimés341Pour l’adoption138Contre 203Le Sénat n’a pas adopté.

Marques de satisfaction sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

Je mets aux voix l’amendement n° 39 rectifié.

J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.

Protestations sur les travées des groupes SER, CRCE-K et GEST.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable et que celui du Gouvernement est favorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 35 :

Le Sénat n’a pas adopté.

Je mets aux voix l’amendement n° 298 rectifié.

J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.

Protestations sur les travées du groupe SER.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable et que celui du Gouvernement est favorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 36 :

Le Sénat n’a pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

La parole est à M. Patrick Kanner, pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Kanner

Madame la présidente, je sollicite officiellement une suspension de séance pour permettre à nos collègues de la droite sénatoriale de rassembler leurs forces et de montrer qu’ils sont majoritaires au sein de cette assemblée, ce qui n’est physiquement pas le cas aujourd’hui, alors que nous débattons de sujets importants.

Que M. Retailleau et M. Marseille, qui n’est plus là depuis longtemps, rappellent les leurs, afin que nous puissions délibérer tranquillement.

Bravo ! et applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE-K, GEST et RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

Mme la présidente. Mon cher collègue, il nous reste de très nombreux amendements à examiner. Nous allons donc poursuivre la séance.

Vives protestations sur les travées du groupe SER.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Kanner

Vous avez accepté d’autres suspensions de séance, mais nous, nous ne vous intéressons pas ! Quelle démocratie…

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

Je mets aux voix l’amendement n° 7 rectifié bis.

J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable et que celui du Gouvernement est favorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 37 :

Le Sénat n’a pas adopté.

L’amendement n° 297 rectifié, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :

I – Alinéa 3

Supprimer les mots :

de seize ans

II – Alinéa 4

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. Guy Benarroche.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Benarroche

Cet amendement est un amendement de repli.

Notre amendement précédent visait, outre les mineurs, plusieurs catégories de personnes dont nous ne souhaitons pas le placement en CRA. Peut-être est-ce d’ailleurs pour cette raison que la « majorité » de cette assemblée ne l’a pas voté…

J’ai bien écouté le ministre, et je partage son avis.

L’amendement n° 297 rectifié vise à prévoir l’interdiction de placement en CRA aux seuls mineurs âgés de 16 ans à 18 ans. Ainsi la droite sénatoriale pourra-t-elle y adhérer.

Permettez-moi à présent de vous livrer deux réflexions.

Lors de l’examen de précédents textes, notre groupe avait demandé au Gouvernement d’inscrire dans la loi l’interdiction de placer des mineurs en CRA. Il nous a été répondu qu’une simple circulaire suffisait.

Nous voyons bien aujourd’hui qu’une simple circulaire ne suffit pas. C’est la raison pour laquelle nous sommes en train d’essayer de faire voter un amendement. Je suis d’ailleurs très heureux que le Gouvernement ait émis un avis favorable, ce dont je le remercie.

En 2021, si l’on excepte le territoire de Mayotte, soixante-treize mineurs de moins de 16 ans ont fait l’objet d’un placement en rétention.

Le présent article vise donc à mettre fin à la possibilité de placement des mineurs de moins de 16 ans en centre de rétention administrative. Cette disposition fait suite aux diverses condamnations de la France par la CEDH du fait de l’enfermement des mineurs au cours des procédures de reconduite à la frontière.

La France a été condamnée pour la neuvième fois par la CEDH dans un arrêt du 31 mars 2022, qui a condamné l’administration française pour sa politique d’enfermement des enfants.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

La parole est à M. Guy Benarroche, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Benarroche

Nous proposons de circonscrire l’interdiction aux mineurs de moins de 16 ans sans que cela soit justifié. Pour rappel, la convention relative aux droits de l’enfant de New York, ratifiée par la France, s’applique pour les mineurs jusqu’à leurs 18 ans.

Quel que soit son âge, un enfant ou un adolescent subit les conséquences dramatiques de l’enfermement sur sa santé : repli sur soi, refus de s’alimenter, insomnies et angoisses. À cela s’ajoutent des facteurs de vulnérabilité, comme la situation familiale, les parcours migratoires chaotiques, le stress post-traumatique.

Il nous semble donc impératif de généraliser – je ne comprendrais pas que certains d’entre nous s’y opposent – l’interdiction du placement en CRA pour l’ensemble des mineurs, de 0 à 18 ans.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 183, présenté par Mmes de La Gontrie et Narassiguin, MM. Bourgi, Durain et Chaillou, Mme Harribey, M. Kerrouche, Mme Linkenheld, M. Roiron, Mmes Brossel et Conway-Mouret, M. Chantrel, Mme G. Jourda, MM. Kanner et Marie, Mmes S. Robert et Rossignol, MM. Stanzione, Temal, Tissot, M. Vallet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Remplacer les mots :

être placé en centre de rétention administrative

par les mots :

faire l’objet d’une décision de placement en rétention

La parole est à Mme Hélène Conway-Mouret.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Conway-Mouret

Il s’agit d’un amendement de repli. À défaut d’avoir obtenu l’interdiction du placement en rétention des mineurs de 18 ans, nous proposons que l’interdiction de rétention des mineurs de 16 ans s’applique pour les CRA, mais également pour les LRA.

Si nous interdisons le placement en CRA des mineurs de 16 ans sans interdire également le placement en LRA, nous nous serons donné bonne conscience, mais nous nous serons surtout prêtés à un jeu de dupes !

En pratique, le placement en LRA se substituera au placement en CRA. Non seulement nous n’aurons pas progressé, mais nous aurons sans doute même reculé, puisque les LRA sont nettement moins encadrées et présentent des garanties nettement inférieures à celles des CRA.

À titre d’exemple, dans les locaux de rétention administrative, il n’est notamment pas prévu qu’une association pour l’aide à l’exercice effectif des droits puisse intervenir.

Il n’y a pas non plus d’unité médicale, ce qui est particulièrement problématique au regard de la vulnérabilité des familles avec des enfants enfermés.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

L’amendement n° 299 rectifié, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée, Souyris et Poncet Monge, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Compléter cet alinéa par les mots :

ainsi qu’en local de rétention administrative, aux abords des frontières et dans les zones d’attente

La parole est à M. Guy Benarroche.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Benarroche

Cet amendement est similaire à celui qui vient d’être défendu.

L’article 12 ne concerne que l’interdiction de placement en centre de rétention administrative et exclut explicitement les LRA aux abords des frontières et dans les zones d’attente.

Dans les LRA, les associations d’aide à l’accès aux droits et le personnel médical ne sont pas présents, contrairement aux CRA.

En cas de refus d’entrée aux frontières françaises, les familles avec enfant, ainsi que les mineurs non accompagnés peuvent être placés dans les zones d’attente, pour des durées allant jusqu’à vingt jours : zone d’attente de l’Ocean Viking, zone d’attente d’Orly ou de Marignane… J’en ai visité plusieurs.

En 2021, d’après les statistiques de la police aux frontières, au moins 372 enfants ont été placés en zone d’attente.

Les conditions de maintien dans ces zones d’attente ne sont pas plus favorables qu’en CRA ; l’enfant n’y est pas correctement pris en charge et n’est pas en sécurité. Au quotidien, dans ces lieux d’enfermement, les enfants sont confrontés à des événements traumatisants et évoluent dans un environnement d’une extrême violence.

D’après mon expérience personnelle à Nice, dans un lieu de mise à l’abri à la frontière italienne, je précise qu’il en est de même dans les LRA, qui sont également de véritables lieux de rétention.

Le placement des mineurs non accompagnés est particulièrement visé par le Comité des droits de l’enfant. Ce dernier recommande à la France d’« adopter les mesures nécessaires pour éviter le placement d’enfants en rétention dans les zones d’attente, en redoublant d’efforts pour trouver des solutions adéquates de substitution à la privation de liberté et pour assurer aux enfants un hébergement adapté, et de respecter pleinement les obligations de non-refoulement ».

Il est ainsi impératif que le Gouvernement prenne des mesures de substitution à l’égard des familles accompagnantes de mineurs, ainsi qu’à l’égard des mineurs non accompagnés.

Debut de section - PermalienPhoto de Muriel Jourda

Avis défavorable, pour les motifs évoqués précédemment.

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

Le Gouvernement est favorable à l’amendement n° 183, en cohérence avec la position qu’il a adoptée tout à l’heure.

En revanche, je suis défavorable à l’amendement n° 299 rectifié, non par principe, mais parce qu’il vise à inclure les zones d’attente. Il ne s’agit en effet pas du même type de rétention. Il faut bien qu’il existe des endroits où vérifier les identités et effectuer certains examens.

Imaginons que le bateau d’une ONG arrive sur une côte méditerranéenne. Il faut bien créer une zone d’attente, qui n’aurait rien à voir avec un centre de rétention administratif. Ce qui gêne, dans le centre de rétention administrative, ce n’est pas le fait que l’on y vérifie les identités et que l’on puisse décider d’éloigner les gens ; c’est le fait qu’il s’agit d’un endroit carcéral, contrairement à la zone d’attente. Certes, nous pourrions améliorer certaines procédures, notamment dans de vieilles structures aéroportuaires ou portuaires. Mais les zones d’attente n’ont rien à voir avec le CRA du Mesnil-Amelot ou de Vincennes.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

Je mets aux voix l’amendement n° 183.

J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable et que celui du Gouvernement est favorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 38 :

Le Sénat n’a pas adopté.

Je mets aux voix l’amendement n° 299 rectifié.

J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 39 :

Le Sénat n’a pas adopté.

Je suis saisie de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 596, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

…. – Les chapitres I et II du titre IV du livre VII du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile sont ainsi modifiés :

1° Le second alinéa de l’article L. 741-1 est complété par les mots : « ou au regard de la menace pour l’ordre public que l’étranger représente » ;

2° Au 1° de l’article L. 742-4, les mots : « d’une particulière gravité » sont supprimés ;

3° L’article L. 742-5 est ainsi modifié :

a) Après le 3°, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Le juge peut également être saisi en cas d’urgence absolue ou de menace pour l’ordre public. » ;

b) Au dernier alinéa, après les mot et référence : « ou 3° », sont insérés les mots : « ou au septième alinéa ».

La parole est à M. le ministre.

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

Depuis que j’ai l’honneur d’être ministre de l’intérieur, j’ai décidé de ne plus placer de mineurs dans les CRA, exception faite de Mayotte, où le fonctionnement est différent.

En effet, nous y mettons désormais – c’est la politique que je mène au ministère de l’intérieur – les personnes qui sont, soit radicalisées et fichées S, soit dangereuses, c’est-à-dire des personnes condamnées à des peines de prison très lourdes ou accusées de faits graves par la police elle-même.

La sociologie des personnes dans les centres de rétention administrative a donc changé. Nous n’y plaçons plus désormais d’enfants. Il s’y trouve également très peu de femmes, moins de 3 %. La quasi-intégralité des personnes placées dans ces centres sont donc dangereuses.

Cette politique porte ses fruits. Je viens de recevoir les chiffres de la délinquance. Durant les dix premiers mois de l’année, la part des étrangers mis en cause dans des faits délictuels et criminels s’élève à 37, 56 %, soit quasiment 4 points de mois par rapport à 2022 où ce taux était de 41, 43 %. Cette baisse est particulièrement vraie à Paris où le recul est de 7 points, pour atteindre 41 %, contre 48 % en 2022. Je précise que Paris et l’Île-de-France représentent quasiment 50 % de la délinquance de l’ensemble du territoire national.

Le fait de concentrer notre action contre les délinquants étrangers et de les placer systématiquement dans les centres de rétention administrative fonctionne. Cela permet d’avoir une sociologie différente dans les CRA et fait chuter les chiffres de la délinquance ; ce sont souvent les mêmes qui récidivent, comme chacun le sait…

Cela étant, nous souhaitons désormais inscrire parmi les critères pour autoriser l’administration à placer une personne dans un CRA la dangerosité des individus. C’est un point à prendre en considération en cas d’éventuels recours. Aujourd’hui, ce critère n’existe pas, ce qui pose des difficultés lorsque le ressortissant est relâché. Ce n’est en effet pas la même chose de relâcher quelqu’un que l’on ne peut pas éloigner s’il est très dangereux ; chacun ici le comprendra.

L’amendement que je vous présente me semble donc relativement équilibré, puisque je propose également d’interdire le placement des mineurs dans les CRA au vu de ce nouveau critère de dangerosité que je vous demande d’introduire.

Il s’agit donc d’un amendement très important pour le fonctionnement des centres de rétention administrative. Je pense notamment aux policiers de la police aux frontières, qui réalisent un travail difficile : quand on change la sociologie des personnes placées dans les CRA, les policiers ont évidemment plus de difficultés à les tenir. Ces zones ne sont pas drôles pour les personnes détenues, mais elles ne sont pas drôles non plus pour les fonctionnaires de police qui y travaillent.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

L’amendement n° 333 rectifié bis, présenté par MM. Dossus et Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

…. - L’article L. 742-4 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est abrogé.

La parole est à M. Thomas Dossus.

Debut de section - PermalienPhoto de Thomas Dossus

Monsieur le ministre, j’ai été attentif à vos propos, et je ne partage pas vos raccourcis sur la baisse de la délinquance, les délinquants étrangers, etc.

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

Ce sont les chiffres !

Debut de section - PermalienPhoto de Thomas Dossus

M. Thomas Dossus. Ce n’est pas parce que la délinquance baisse et que vous enfermez des étrangers qu’il y a un lien évident entre les deux !

M. le ministre le conteste.

Debut de section - PermalienPhoto de Thomas Dossus

En ce qui concerne la rétention administrative, ce régime de privation de liberté mériterait une réforme plus globale que celle que vous êtes en train de nous proposer, un peu à la hussarde, en modifiant la sociologie à l’intérieur des centres de rétention et en y changeant l’ambiance. On y constate en effet une montée de la violence. Or les agents de la police aux frontières, auxquels vous avez fait référence, ne sont pas forcément formés comme ceux de la pénitentiaire, et ils ne sont donc peut-être pas aptes à gérer les populations qui s’y trouvent enfermées et privées de liberté.

Par ailleurs, la loi pour une immigration maîtrisée, un droit d’asile effectif et une intégration réussie, dite loi Collomb, a allongé les délais de rétention.

Cet allongement n’a jamais vraiment été évalué alors que le taux d’éloignement est toujours en dessous de 50 % dans les centres de rétention. Le niveau de violence a monté, les rapports du Contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL) s’accumulent, soulignant que les conditions de vie dans les centres sont de plus en plus indignes, y compris dans les nouveaux centres de rétention. Le nouveau centre de Lyon, par exemple, qui doit servir de modèle aux futurs centres, est pointé du doigt dans le dernier rapport comme étant particulièrement indigne.

Je vous propose donc d’en revenir au régime de rétention qui prévalait avant la loi Collomb, c’est-à-dire de supprimer la deuxième période de trente jours et de ramener la durée maximale de rétention à soixante jours au lieu de quatre-vingt-dix aujourd’hui.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

L’amendement n° 187 rectifié, présenté par Mmes de La Gontrie et Narassiguin, MM. Bourgi, Durain et Chaillou, Mme Harribey, M. Kerrouche, Mme Linkenheld, M. Roiron, Mme Brossel, M. Chantrel, Mmes Conway-Mouret et G. Jourda, MM. Kanner et Marie, Mmes S. Robert et Rossignol, MM. Stanzione, Temal, Tissot, M. Vallet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

…. - Le chapitre II du titre IV du livre VII du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est ainsi modifié :

1° Au dernier alinéa de l’article L. 742-4, le mot : « trente » est remplacé par le mot : « quinze » et le mot : « soixante » est remplacé par le mot : « quarante-cinq » ;

2° L’article L. 742-5 est abrogé ;

3° À l’article L. 742-7, les mots : «, dans les conditions prévues à l’article L. 742-5 » sont supprimés.

La parole est à M. Jérôme Durain.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Durain

La loi du 10 septembre 2018 a porté le délai maximal de rétention de quarante-cinq à quatre-vingt-dix jours. L’argument qui sous-tendait cette mesure était de dire que cela laisserait le temps nécessaire pour obtenir les laissez-passer consulaires et donc permettrait d’éloigner en proportion un plus grand nombre d’étrangers retenus.

Bilan : en 2016-2017, le taux moyen d’OQTF exécutées est de 14 % ; en 2019, le taux chute à 12, 2 % ; suivent les deux années du covid-19, où le taux chute à 5 % ou à 6 %.

Le taux d’éloignement à l’issue d’un placement en CRA est également en baisse depuis 2019, donc depuis que la durée de rétention à quatre-vingt-dix jours est possible : de 50 % en 2019, il est passé à 43, 2 % en 2022.

Si 43, 2 % des étrangers qui sont retenus sont au final effectivement éloignés à l’issue de leur placement en CRA, cela signifie que plus de la moitié des étrangers retenus en CRA ne sont pas éloignés et sont finalement libérés. En d’autres termes, des individus ont été enfermés en pure perte, puisque la seule raison qui pouvait motiver leur enfermement, à savoir l’éloignement, n’a pas été accomplie.

Dans son rapport d’information de mai 2022 sur la question migratoire, le président Buffet admettait : « Dans la pratique, les effets de cette prolongation sur les éloignements sont réels, mais modestes. Sur l’année 2019, dernière année de référence avant la pandémie, 826 étrangers en situation irrégulière ont été éloignés au-delà du quarante-cinquième jour de rétention, ce qui représente une proportion de 8, 28 % des éloignés. »

Si le Gouvernement avait remis au Parlement le rapport annuel sur l’immigration, comme la loi lui en fait obligation, nous disposerions sans doute de chiffres actualisés.

En tout état de cause, le délai maximal de rétention serait utile, puisqu’il permettrait d’éloigner des étrangers au-delà de quarante-cinq jours.

Qu’est-ce qui permet d’affirmer que c’est la rétention qui a permis l’éloignement de ces étrangers ? Si 800 étrangers ont été éloignés au-delà de quarante-cinq jours, quelle part représentent-ils parmi les étrangers qui ont été retenus au-delà de quarante-cinq jours ?

Il y a donc plus de 70 % des étrangers retenus entre quarante-cinq et quatre-vingt-dix jours qui l’auront été « pour rien », puisqu’ils n’auront pas été éloignés.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

L’amendement n° 547 rectifié ter n’est pas soutenu.

Quel est l’avis de la commission ?

Debut de section - PermalienPhoto de Muriel Jourda

Avis favorable sur l’amendement n° 596 et défavorable sur les deux autres amendements, qui tendent à réduire le délai de rétention. Nous estimons que le délai actuel de quatre-vingt-dix jours est équilibré. Il est d’ailleurs approuvé par le Conseil constitutionnel.

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

J’ai du mal à comprendre le raisonnement de M. Dossus, sauf à être totalement opposé par principe au contrôle d’identité, au fait que les étrangers doivent quitter le territoire quand ils sont en situation irrégulière, en particulier lorsqu’ils sont très dangereux, et à tout enfermement dans un centre de rétention.

J’ai précisé que le fonctionnement en matière de rétention a changé. Les 1 300 places existantes – il y en avait 900 lors de mon arrivée au ministère – et les 3 000 places à terme, en 2027, grâce à la loi de programmation du ministère de l’intérieur, sont réservées à un autre type de personnes.

Nous sommes en train de changer la sociologie des étrangers placés en centre de rétention. Comme l’a souligné, M. Durain, il s’agit effectivement d’une privation de liberté – personne n’en disconvient –, qui correspond à des critères particuliers. Cela implique donc d’agir avec précaution. Nous y plaçons les personnes dangereuses pour l’ordre public.

Aujourd’hui, les personnes placées dans les CRA, hors Mayotte, sont des personnes soit radicalisées, soit dangereuses. Il n’y a plus d’enfants, même si la loi n’est pas encore votée, et il y a moins de 2 % de femmes. Celles qui sont placées dans ces centres ont commis des actes d’une grande dangerosité ou sont radicalisées.

Bref, ces individus sont placés en centres de rétention pour que nous puissions y concentrer le travail de la police et du ministère des affaires étrangères, notamment à des fins d’identification. Si une personne nie la nationalité qu’on lui attribue et prétend en avoir une autre, il faut bien demander à une mission de reconnaissance de vérifier son accent, d’examiner dans quels pays ont été passés ses coups de fil et de venir de lui poser toutes sortes de questions. Certaines personnes essaient évidemment de tricher pour ne pas repartir dans leur pays d’origine. Or nous ne pouvons pas renvoyer dans un pays X un ressortissant d’un pays Y : nous n’aurions d’ailleurs pas de laissez-passer consulaires pour cela.

Il est donc très important de placer dans les centres de rétention administrative les personnes qui doivent être sous la main du ministère de l’intérieur, afin de contrôler leur identité expressis verbis et d’obtenir le laissez-passer consulaire. Je vous rappelle que celui-ci n’est délivré que pour quelques jours ; il ne vaut pas ad vitam. Comment faire pour renvoyer ces étrangers chez eux si vous ne les avez pas sous la main et que vous dépassez le délai de validité de trente jours des laissez-passer consulaires ?

Ces centres de rétention répondent à une procédure normale, classique, et ils permettent l’action de la police. C’est la raison pour laquelle nous y plaçons aujourd’hui des personnes dangereuses. Nous les privons effectivement, comme l’a indiqué M. Durain, de liberté.

Une part très importante de délinquants étrangers multirécidivistes commettent des actes de délinquance atteignant entre 30 % et 50 % des crimes et délits sur certains territoires. Depuis un an, nous avons uniquement placé en centre de rétention les personnes dangereuses : nous les empêchons évidemment de commettre ces actes de récidive et nous obtenons leur expulsion. Certes, monsieur Durain, 100 % des personnes placées dans les CRA ne sont pas expulsées ou éloignées. Mais c’est tout de même 40 % de plus que celles qui ne sont pas dans les CRA, ce qui prouve l’efficacité de ces centres. Oui, il convient encore d’améliorer les procédures. Mais il est évident que vous devriez tous défendre collectivement la mesure proposée par le Gouvernement.

L’étranger qui est en situation irrégulière, mais qui ne commet aucun acte de délinquance doit pouvoir être raccompagné dans son pays sans passer par un centre de rétention. Et l’étranger qui commet des actes de délinquance doit être placé dans un centre de rétention, car c’est précisément lui qui doit être éloigné en premier !

J’aurais pu, moi aussi, faire comme tous les ministres de l’intérieur avant moi et placer dans les CRA uniquement les personnes qui ne posent pas de problème pour l’ordre public : elles sont plus faciles à éloigner que les personnes dangereuses. Car tous les pays posent des questions sur les ressortissants qu’on veut leur renvoyer. Moi-même, lorsqu’un pays tiers souhaite renvoyer en France un tueur, je prends le temps de vérifier qu’il est bien Français avant d’accepter : c’est normal ; j’essaie de protéger mon pays.

Je ne comprends donc pas le raisonnement de M. Dossus, qui me paraît être contre tout et qui n’entend pas la volonté du Gouvernement de protéger nos compatriotes. C’est à se demander d’ailleurs s’il veut protéger nos compatriotes ou s’il ne préfère pas régulariser les étrangers délinquants qui ont commis des crimes ou qui sont radicalisés…

M. Durain, comme à son habitude, est plus raisonnable, mais je ne saurais être d’accord avec lui : les chiffres de libération qu’il cite sont ceux de la période du covid-19.

Par ailleurs, il fait mine d’ignorer que nous avons connu une crise des visas avec la plupart des États dont les ressortissants étaient en centres de rétention administrative : 70 % des personnes placées dans les CRA sont issus des trois pays du Maghreb. Quand l’Algérie, le Maroc ou la Tunisie n’accordent plus du tout de laissez-passer consulaires du fait du rapport de force qu’a installé le Président de la République il y a un an et demi, que fait le juge des libertés et de la détention ? Il ne se soucie pas de la dangerosité de la personne ; ça, c’est l’objet de l’amendement n° 596, que j’espère vous faire adopter dans un instant. Il regarde seulement si la procédure ne risque pas d’être entachée de nullité, si quelqu’un n’a pas oublié un tampon et, surtout, si la personne peut être raisonnablement renvoyée dans son pays. Quand la France n’obtient plus de laissez-passer consulaires, comme c’est aujourd’hui le cas pour les citoyens russes placés dans les CRA, le juge libère la personne, qu’importe sa dangerosité, car nous n’avons pas le droit d’enfermer un individu sans chance sérieuse de pouvoir le renvoyer dans son pays.

Les pourcentages cités par M. Durain sont donc très amoindris par la crise du covid-19 et celle des visas. Nous avons aujourd’hui renoué avec des taux de reconduite tout à fait acceptables – j’aurais dû vous fournir ce rapport, mea maxima culpa –, qui dépassent même ceux de 2019, soit au plus haut de ce que nous étions parvenus à réaliser. Nous verrons l’année prochaine quels seront les chiffres de l’immigration pour cette année.

Je précise que nous n’avons pas étendu le délai de rétention. Aux termes de la directive européenne, nous aurions pu aller jusqu’à dix-huit mois, comme c’est notamment le cas en Grèce. Lorsque la France prévoit donc un délai de quelques mois, elle est très en deçà de ce qui est possible au sein de l’Union européenne.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Guillaume Gontard

Monsieur le ministre, mon collègue Thomas Dossus est tout aussi raisonnable que M. Durain ou que nous tous ici. ( M. le ministre manifeste son scepticisme.)

Que proposons-nous dans cet amendement n° 333 rectifié bis ? En réalité, c’est assez simple : nous voulons en revenir à ce qui se faisait avant 2018 et supprimer la deuxième période de trente jours, afin de parvenir à une durée maximale de rétention de soixante jours.

J’ai bien écouté vos propos, à chaque fois que vous évoquez les CRA, vous parlez de délinquants et de dangereux récidivistes.

Debut de section - PermalienPhoto de Guillaume Gontard

Cela me pose problème : les centres de rétention administrative ne sont pas des centres pénitentiaires ou des prisons.

Les personnes faisant l’objet d’une OQTF n’ont commis pour seul délit – si c’en est un – que d’être en situation illégale sur le territoire français. Voilà pourquoi elles sont placées en CRA.

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

Ce n’est plus ce que l’on fait !

Debut de section - PermalienPhoto de Guillaume Gontard

Il ne s’agit donc pas de délinquants, et rien ne prouve qu’ils sont dangereux.

Nous le savons, cela fait partie de vos directives. Vous êtes en train de convertir les CRA en centres pénitentiaires et de transformer ces étrangers en détenus de droit commun.

Debut de section - PermalienPhoto de Guillaume Gontard

C’est terriblement dangereux, car ce n’est pas la finalité des centres de rétention administrative. Il faudrait redéfinir leur fonction, faute de quoi vous mettriez en difficulté les agents qui y travaillent et que nous avons rencontrés !

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

La parole est à M. Guy Benarroche, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Benarroche

Monsieur le ministre, j’ai très bien compris quelle était la vocation que vous souhaitez donner aux CRA et quelles étaient les personnes que vous souhaitiez y placer en rétention.

Je suis néanmoins inquiet, car les CRA ne sont pas des centres pénitentiaires. Ils ne sont pas organisés comme tels et le personnel qui y travaille n’est pas formé comme le personnel des centres pénitentiaires. Je me fais ici le porte-parole d’un certain nombre d’agents. J’en rencontre beaucoup, et je puis vous assurer que leur inquiétude est grande. Ils sentent bien qu’aujourd’hui l’ambiance dans les CRA n’est plus la même qu’il y a un ou deux ans.

Monsieur le ministre, je n’approuve, certes, pas la transformation que vous mettez en œuvre des CRA en centres pour personnes jugées dangereuses, même si aucune condamnation n’a été prononcée à leur encontre, ce qui est quelque peu paradoxal, mais, dans ce cas, organisons les CRA à cette fin. Ne mettons en péril ni les agents qui y travaillent ni les mineurs de moins de dix-huit ans ; vous étiez d’accord avec moi avant que le Sénat ne vote contre l’amendement que je défendais en ce sens.

Chers collègues des groupes Les Républicains et Union Centriste, comment avez-vous pu décider que l’on pourrait continuer à maintenir dans les CRA des mineurs de 16 ans à 18 ans, alors qu’on vient de nous expliquer que ces CRA allaient être réservés à des délinquants potentiellement dangereux ? Cette décision devrait être revue : j’espère que vous donnerez des consignes à vos collègues de l’Assemblée nationale pour modifier cette disposition !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

M. Philippe Bas. Après ce que nous venons d’entendre, je ressens le besoin de venir au secours du Gouvernement.

Marques d ’ ironie sur les travées des groupes GEST, SER et CRCE-K.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

L’amendement du Gouvernement, si je l’ai bien compris, ne doit pas être interprété comme vous le faites. Il ne s’agit pas de dénaturer la rétention pour en faire un élément de privation de liberté et pour punir les délits. Il s’agit de prendre en compte des délits pour que le juge puisse dire si, oui ou non, il y a un risque de fuite, un risque que l’individu veuille échapper à la décision d’éloignement.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Comme l’individu en question a commis des délits, nous pouvons nous dire qu’il n’est pas très respectueux de la loi ; et puisqu’il n’est pas très respectueux de la loi, il pourrait ne pas vouloir respecter non plus la mesure d’éloignement. Mieux vaut donc l’avoir sous la main.

Au-delà de cette mésinterprétation de l’amendement du Gouvernement, je ne comprends pas ce qui peut motiver les deux autres amendements. Considérer que la loi Collomb est allée trop loin alors qu’elle était tellement en dessous de nos exigences en matière de contrôle de l’immigration, c’est tout de même, de mon point de vue, un peu paradoxal !

Les délais prévus par la loi Collomb de 2018 sont plutôt insuffisants que trop importants. Il me paraît tout à fait exclu d’accepter un retour en arrière.

Il faut laisser à l’administration le temps nécessaire pour réaliser toutes les formalités permettant le retour dans le pays d’origine. Nous ne pouvons pas laisser un étranger susceptible de prendre la fuite se soustraire à l’obligation que l’État lui impose de quitter le territoire national.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Fabien Gay

J’ai pu constater ce que vous décrivez, monsieur le ministre. Depuis que je suis sénateur, j’ai visité cinq fois le CRA du Mesnil-Amelot : la première fois, c’était en 2017 ; la dernière fois, c’était il y a dix jours. J’ai donc pu constater la différence que vous évoquez.

Il faudrait que nous puissions débattre plus longuement de la notion de dangerosité de l’individu. Mais, en tout cas, des personnes sorties de prison ou condamnées pour des actes de terrorisme se retrouvent dans des CRA.

C’est d’ailleurs un problème, que j’ai abordé avec les agents concernés : tout le monde est mélangé. Certaines personnes sortent de prison et ont de lourds problèmes psychiatriques. Dans le CRA du Mesnil-Amelot, un psychiatre passe une fois par semaine : c’est largement insuffisant, mais c’est déjà cela, me direz-vous ; car ce n’est pas le cas partout. Ce psychiatre est confronté à des cas très lourds, à la gestion desquels les agents du CRA ne sont pas formés.

Si le CRA accueille des individus dangereux et des personnes condamnées pour des actes de terroriste, la mission de ses agents est désormais très différente de celle qu’ils devaient initialement remplir, en tout cas lorsque j’ai visité pour la première fois ce CRA en 2017.

La formation, notamment, fait défaut. D’ailleurs, une brigade civile a été créée dans ce CRA pour essayer de réguler les tensions, mais cela ne suffit pas. C’est la raison pour laquelle nous estimons qu’il faut engager un débat sur le devenir des centres de rétention et sur la nécessité de former les agents.

Le débat que soulève M. Durain me semble légitime. Je me suis en effet posé la question. Au-delà de quarante-cinq jours de rétention, le taux d’éloignement est-il plus élevé ? Manifestement, cela dépend des pays, des laissez-passer consulaires. En tout cas, soit l’expulsion se fait dans les quarante-cinq premiers jours, soit elle n’a simplement pas lieu.

Notre demande d’une évaluation par le Parlement des lois que nous avons adoptées me paraît donc légitime.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

La parole est à M. Jérôme Durain, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Durain

Je voudrais répondre à M. Philippe Bas. En vous faisant part de cette réflexion et en vous soumettant ces amendements, nous ne cherchons pas à passer pour de dangereux gauchistes qui voudraient tout faciliter pour les étrangers.

Nous sommes plutôt guidés par un souci d’efficacité : l’efficacité économique, qui est l’enjeu de la régularisation des personnes qui travaillent dans ce pays ; l’efficacité de la protection des Français ; enfin l’efficacité des mesures prises sur les centres de rétention.

J’ai eu l’occasion de visiter avec M. Yan Chantrel le CRA du Mesnil-Amelot. Nous nous interrogions sur l’utilité de l’allongement du délai de rétention au-delà de quarante-cinq jours, qui représente un coût pour les finances publiques, alors que cet argent pourrait être utilisé pour autre chose.

Les réponses du ministre à cet égard ont été plutôt convaincantes. Aussi, dans la mesure où nous n’avons pas de rapport à disposition pour apprécier très concrètement le résultat de ces décisions, nos amendements ont également pour objet d’évaluer l’exécution des mesures que nous avons votées, comme le disait Fabien Gay.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

La parole est à M. Thomas Dossus, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Thomas Dossus

Le changement de population dans les CRA, que vous assumez aujourd’hui, fait clairement évoluer la fonction des centres de rétention. Il ne s’agit plus de zones de privation de liberté temporaire dans l’attente de l’obtention d’un laissez-passer ou du résultat d’un recours. Le CRA joue désormais un rôle de protection de la société, comme M. Philippe Bas l’a expliqué, et pas seulement vis-à-vis de personnes condamnées. En effet, le ministre a évoqué le cas de personnes non condamnées, mais impliquées dans des affaires de troubles à l’ordre public.

Reconnaissez au moins que le régime de rétention est en train de changer complètement. Il va donc falloir adapter les CRA. À travers quelques amendements du Gouvernement, nous sommes en train de modifier radicalement ce qui se passe dans les centres de rétention sans même adapter le dispositif.

Or, en prison, il existe des normes de dignité humaine qui ne sont même pas appliquées dans les centres de rétention. En effet, les règles sont beaucoup plus strictes en prison : l’accès à un service de soins psychiatriques y est par exemple garanti, mais pas en centre de rétention. Bien des obligations de cette nature, valables en prison, ne le sont pas en CRA.

En changeant le régime des centres de rétention sans faire évoluer leur fonctionnement, nous mettons en danger à la fois nos agents et les personnes retenues. Je vous invite à visiter les nouveaux centres de rétention : certaines chambres n’ont pas même de porte, alors que des personnes sortant de prison, parfois très violentes, y sont retenues. Je pense que c’est indigne.

L ’ amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

En conséquence, les amendements n° 333 rectifié bis et 187 rectifié n’ont plus d’objet.

Je mets aux voix l’article 12, modifié.

L ’ article 12 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

L’amendement n° 185, présenté par Mmes de La Gontrie et Narassiguin, MM. Bourgi, Durain et Chaillou, Mme Harribey, M. Kerrouche, Mme Linkenheld, M. Roiron, Mme Brossel, M. Chantrel, Mmes Conway-Mouret et G. Jourda, MM. Kanner et Marie, Mmes S. Robert et Rossignol, MM. Stanzione, Temal, Tissot, M. Vallet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 12

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code de l’entrée et du séjour des étrangers est ainsi modifié :

1° Après l’article L. 342-1, il est inséré un article L. 342-1-… ainsi rédigé :

« Art. L. 342-1- … . - Un mineur de dix-huit ans ne peut faire l’objet d’une mesure de maintien en zone d’attente. »

2° À la seconde phrase du premier alinéa de l’article L. 343-2, les deux occurrences du mot : « maintien » sont remplacées par le mot : « placement » ;

3° L’article L. 351-2 est ainsi rédigé :

« Art. L. 351-2. - Un mineur de dix-huit ans ne peut faire l’objet d’une mesure de maintien en zone d’attente. »

La parole est à Mme Colombe Brossel.

Debut de section - PermalienPhoto de Colombe BROSSEL

Par cet amendement, nous prolongeons le débat que nous avons entamé sur le nécessaire aménagement des CRA en raison des choix assumés par le ministre de l’intérieur.

Nous vous proposons ainsi d’interdire le maintien en zone d’attente des mineurs. M. le ministre est longuement revenu sur l’interdiction de rétention des mineurs, et nous en avons débattu avec mes collègues de la gauche sénatoriale.

Nous parlons ici de personnes mineures. Un de mes collègues a évoqué la convention internationale des droits de l’enfant, dont article 37 précise : « L’arrestation, la détention ou l’emprisonnement d’un enfant doit être en conformité avec la loi, n’être qu’une mesure de dernier ressort, et être d’une durée aussi brève que possible. »

Nous vous proposons donc d’adopter cet amendement, afin que le maintien en zone d’attente des mineurs soit interdit en toute hypothèse.

Je sais que cet amendement a suscité un débat lorsqu’il a été présenté en commission : j’insiste donc sur le fait qu’il concerne le maintien en zone d’attente, et non la rétention.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bonnecarrere

Avis défavorable. Les garanties existent et nous semblent suffisantes.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

L’amendement n° 592 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Après l’article 12

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. Le livre V du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est ainsi modifié :

1° L’article L. 521-14 est abrogé ;

2° Le titre II est complété par un chapitre III ainsi rédigé :

« Chapitre III

« Cas d’assignation à résidence ou de placement en rétention du demandeur d’asile

« Art. L. 523-1. – L’autorité administrative peut assigner à résidence ou, si cette mesure est insuffisante et sur la base d’une appréciation au cas par cas, placer en rétention le demandeur d’asile dont le comportement constitue une menace à l’ordre public.

« L’étranger en situation irrégulière qui présente une demande d’asile à une autorité administrative autre que celle mentionnée à l’article L. 521-1 peut faire l’objet des mesures prévues au premier alinéa afin de déterminer les éléments sur lesquels se fonde sa demande d’asile. Son placement en rétention ne peut être justifié que lorsqu’il présente un risque de fuite.

« Art. L. 523-2. – Le risque de fuite mentionné à l’article L. 523-1 peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants :

« 1° L’étranger qui est entré irrégulièrement en France ou s’y est maintenu irrégulièrement n’a pas présenté sa demande d’asile dans le délai de quatre-vingt-dix jours à compter de son entrée en France.

« 2° Le demandeur a déjà été débouté de sa demande d’asile en France ou dans un autre État membre, ou a renoncé explicitement ou implicitement à sa demande d’asile dans un autre État membre sans motif légitime ;

« 3° Le demandeur a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à la procédure d’éloignement en cas de rejet de sa demande d’asile ou s’est déjà soustrait à l’exécution d’une précédente mesure d’éloignement ;

« 4° L’étranger, entré irrégulièrement sur le territoire de l’un des États avec lesquels s’applique l’acquis de Schengen, fait l’objet d’une décision d’éloignement exécutoire prise par l’un de ces États ou s’est maintenu sur le territoire d’un de ces États sans justifier d’un droit de séjour ou sans y avoir déposé sa demande d’asile dans les délais les plus brefs ;

« 5° Le demandeur ne se présente pas aux convocations de l’autorité administrative, ne répond pas aux demandes d’information et ne se rend pas aux entretiens prévus dans le cadre de la procédure prévue au titre III sans motif légitime ;

« Art. L. 523-3. – En cas d’assignation à résidence sur le fondement de l’article L. 523-1, les dispositions des articles L. 732-1, L. 732-3, L. 732-4, L. 732-7, L. 733-1, et L. 733-3 sont applicables, ainsi que le premier alinéa de l’article L. 733-1. Le manquement aux prescriptions liées à l’assignation à résidence est sanctionné dans les conditions prévues aux articles L. 824-4 et L. 824-5.

« En cas de placement en rétention sur le fondement de l’article L. 523-1, les dispositions des articles L. 741-4 à L. 741-10, ainsi que les dispositions des chapitres II, III et IV du titre IV du livre VII sont applicables, à l’exception de la section 2 et 4 du chapitre II.

« Le maintien en rétention au-delà de quarante-huit heures à compter de la notification de la décision de placement initiale peut être autorisé pour une durée de vingt-huit jours, dans les conditions prévues au présent chapitre, par le juge des libertés et de la détention saisi à cette fin par l’autorité administrative.

« Art. L. 523-4. – Sans préjudice de l’article L. 754-2, la demande d’asile de l’étranger assigné à résidence ou placé en rétention sur le fondement de l’article L. 523-1 est examinée par l’Office français de protection des réfugiés et apatrides selon la procédure accélérée, conformément au 3° de l’article L. 531-24.

« Art. L. 523-5. – Si l’Office français de protection des réfugiés et apatrides considère qu’il ne peut examiner la demande selon la procédure accélérée mentionnée à l’article L. 523-4 ou s’il reconnaît à l’étranger la qualité de réfugié ou lui accorde le bénéfice de la protection subsidiaire, il est mis fin à la mesure prise sur le fondement de l’article L. 523-1.

« Art. L. 523-6. – En l’absence d’introduction de la demande d’asile dans un délai de cinq jours à compter de la notification de la décision de placement en rétention, ou en cas de décision de rejet ou d’irrecevabilité de la demande d’asile, la décision de placement en rétention prévue à l’article L. 523-1 peut se poursuivre pour le temps strictement nécessaire pour l’examen du droit de séjour de l’étranger et, le cas échéant, le prononcé, la notification et l’exécution d’une décision d’éloignement, et qui en tout état de cause ne peut excéder vingt-quatre heures.

« La poursuite du placement en rétention fait l’objet d’une décision écrite et motivée. Elle s’effectue dans les conditions prévues au titre IV du livre VII en cas de décision de clôture consécutive à l’absence d’introduction de la demande d’asile, ou dans les conditions prévues au chapitre II du titre V du livre VII en cas décision de rejet ou d’irrecevabilité de la demande d’asile.

« Art. L. 523-7. – Les modalités d’application du présent chapitre, et notamment les modalités de prises en compte de la vulnérabilité du demandeur d’asile et, le cas échéant, de ses besoins particuliers, sont fixées par décret en Conseil d’État. »

3° Le 3° de l’article L. 531-24 est ainsi rédigé :

« 3° Le demandeur est assigné à résidence ou placé en rétention en application de l’article L. 523-1, ou maintenu en rétention en application de l’article L. 754-3. »

La parole est à M. le ministre.

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

Cet amendement vise à répondre à une problématique assez simple.

Actuellement, une personne en rétention peut demander l’asile. En revanche, si une personne interpellée sur la voie publique, par exemple un étranger en situation irrégulière qui aurait commis un délit, demande l’asile, elle ne peut pas être placée en rétention, et l’on doit lui laisser demander l’asile.

Il y a donc un détournement du droit de l’asile. En effet, une personne qui viendrait dans notre pays pour demander l’asile le ferait spontanément ; elle n’attendrait pas des mois ou des années sur le territoire national, en situation d’irrégularité, pour finalement demander l’asile une fois interpellée par la police. Un tel procédé ne sert évidemment qu’à gagner du temps.

L’idée est que chacun puisse demander l’asile, puisque c’est un droit constitutionnel, mais que cette demande puisse être faite en rétention. Dans ce cas-là, la demande d’asile ne fait pas obstacle à l’interpellation des services de police. Elle peut être étudiée en urgence, comme c’est le cas pour les personnes qui demandent l’asile en rétention. Rapidement, une réponse favorable ou défavorable est apportée, et des mesures d’éloignement sont exécutées dans le cas où la demande est refusée.

Une telle mesure est tout à fait conforme à notre droit constitutionnel et à la directive retour. Elle entrave l’une des manières de contourner l’exécution des OQTF.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bonnecarrere

Avis favorable.

Nous considérons que la rédaction est suffisamment précise. J’attire l’attention de mes collègues sur le fait que c’est une modification substantielle du droit applicable. Mais nous considérons que la prise en compte de la menace à l’ordre du public et le risque de fuite justifient le régime proposé.

L ’ amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 12.

L’amendement n° 118 rectifié n’est pas soutenu.

L’amendement n° 597, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Après l’article 12

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le chapitre II du titre III du livre VII du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est ainsi modifié :

1° L’article L. 732-4 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, les mots : « de six mois » sont remplacés par les mots : « d’un an » ;

b) À la première phrase du deuxième alinéa, le mot : « une » est remplacé par le mot : « deux » ;

2° Au premier alinéa de l’article L. 732-5, les mots : « de six mois » sont remplacés par les mots : « d’un an ».

La parole est à M. le ministre.

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

Il s’agit de porter de six mois à un an la durée de l’assignation à résidence, avec deux renouvellements possibles sur décision du juge des libertés et de la détention (JLD).

En effet, nous avons du mal à éloigner les personnes, du fait notamment des vicissitudes de la vie diplomatiques. C’est la raison pour laquelle nous souhaiterions allonger cette durée, sachant que l’assignation à résidence n’est pas une rétention, comme nous l’avons déjà évoqué. La personne assignée à résidence doit seulement pointer au commissariat et bénéficie d’un cadre de libertés, certes, limité, mais sans en être entièrement privé. C’est ce que la plupart des voisins de la France pratiquent.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bonnecarrere

Avis favorable.

C’est une mesure dont il appartient au ministre de l’intérieur d’apprécier si elle permettra une amélioration effective de l’exécution des décisions d’éloignement. Nous pensons qu’elle créera pour ces services des obligations supplémentaires, puisqu’il faudra vérifier l’assignation à résidence pendant une durée plus importante. C’est à vous d’évaluer l’équilibre entre les avantages et les inconvénients de la solution proposée.

Nous y sommes favorables, du moins sur le plan de la technique juridique.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Pierre de La Gontrie

Nous sommes sans doute sous l’effet de la fatigue due à la longueur des débats, mais j’attire votre attention sur le fait que c’est un amendement très important !

Vous devez quand même vous rendre compte de la durée pendant laquelle vous allez infliger cette assignation à résidence ! Ne prétendez pas que cela a pour objectif d’exécuter les mesures d’éloignement. Il s’agit là d’une privation de liberté, puisque l’assignation à résidence, c’est une restriction des libertés. Elle peut être extrêmement contraignante.

Pour notre part, nous sommes défavorables à cet amendement. Je souhaite que vous ayez bien conscience de ce que vous vous apprêtez à voter.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

La parole est à M. Guy Benarroche, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Benarroche

J’abonde dans le sens de Mme de La Gontrie. On parle d’une durée d’un an. Mais comme cela peut être renouvelé deux fois, c’est en réalité trois ans : on pourra assigner des personnes à résidence durant trois ans !

Une personne est normalement assignée à résidence, parce qu’on espère pouvoir exécuter une obligation de quitter le territoire français la visant. Toutefois, si l’éloignement n’a pas eu lieu au bout de quinze jours, d’un mois ou de six mois, il est difficile d’imaginer qu’elle sera mise en œuvre après trois ans. Ou alors, c’est que l’assignation à résidence est un moyen de priver des individus de liberté des raisons autres que l’OQTF qui les cible. Dans ce cas, il faut le dire.

Je commence à être atterré par les décisions que nous sommes en train de voter. Je suis un peu surpris d’une telle demande, monsieur le ministre.

L ’ amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 12.

L’amendement n° 189, présenté par Mmes de La Gontrie et Narassiguin, MM. Bourgi, Durain et Chaillou, Mme Harribey, M. Kerrouche, Mme Linkenheld, M. Roiron, Mme Brossel, M. Chantrel, Mmes Conway-Mouret et G. Jourda, MM. Kanner et Marie, Mmes S. Robert et Rossignol, MM. Stanzione, Temal, Tissot, M. Vallet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 12

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La section 1 du chapitre I du titre IV du livre VII du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est ainsi modifiée :

1° Le second alinéa de l’article L. 741-4 est supprimé.

2° Après l’article L. 741-4, il est inséré un article L. 741-4-… ainsi rédigé :

« Art. L. 741-4- … . - L’étranger en situation de handicap ne peut faire l’objet d’une décision de placement en rétention. »

La parole est à Mme Corinne Narassiguin.

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne NARASSIGUIN

Par cet amendement, il s’agit d’interdire le placement en rétention des personnes en situation de handicap.

Aujourd’hui, les décisions de placement en rétention doivent prendre en compte l’état de vulnérabilité et tout handicap de l’étranger. Le handicap moteur, cognitif ou psychique et les besoins d’accompagnement de l’étranger sont pris en compte pour déterminer les conditions de son placement en rétention.

Malheureusement, malgré cela, introduites par la loi Collomb de 2018, tant les associations qui interviennent dans les CRA que les parlementaires, disposant un droit de visite, constatent que ces principes ne sont pas respectés.

C’est pour cela que nous voulons renforcer les dispositions et les obligations. Je pense par exemple à des personnes sourdes ou malentendantes qui sont retenues en CRA et qui ne bénéficient pas d’interprètes en langue des signes dans la langue qu’ils comprennent : elles ne peuvent donc pas communiquer ou faire valoir leurs droits.

En raison de la vulnérabilité de ces personnes et des atteintes aux droits qui sont constatées, nous souhaitons que le placement en rétention des personnes en situation de handicap soit interdit, et que lui soit substituée l’assignation à résidence.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bonnecarrere

Le Ceseda dispose déjà dans son article L. 741-4 : « La décision de placement en rétention prend en compte l’état de vulnérabilité et tout handicap de l’étranger. »

Connaissant la grande sensibilité du président de la commission des affaires sociales sur ce sujet, la commission souhaite conserver le statu quo : l’appréciation du placement en fonction du handicap se fait in concreto, au cas par cas. Nous ne souhaitons pas d’interdiction absolue. Avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Guillaume Gontard

Il s’agit de sujets importants : centres de rétention administrative, privation de liberté… Qui sont les personnes placées dans les CRA ? Une partie d’entre elles sont visées par une OQTF : sans-papiers et se trouvant sur le territoire français, elles y sont placées.

Nous devrions nous poser davantage de questions sur la rétention d’enfants ou de personnes handicapées, pour des durées parfois très longues. J’ai entendu la réponse du rapporteur, qui parle de statu quo et de cas par cas.

Or, sur de tels aspects, on ne peut pas fonctionner au cas par cas. Nous devons inscrire un principe clair dans la loi. Nous avons tous visité des centres de rétention administrative où étaient retenues des personnes en situation de handicap confrontées à de grandes difficultés.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

L’amendement n° 603, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Après l’article 12

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La première phrase de l’article L. 741-7 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est complétée par les mots : « ou, en cas de circonstance nouvelle de fait ou de droit, d’un délai de quarante-huit heures ».

La parole est à M. le ministre.

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

Cet amendement est défendu.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bonnecarrere

Avis favorable. Cette mesure permettra aux services de police, s’ils obtiennent des renseignements supplémentaires, d’intervenir avec efficacité.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Pierre de La Gontrie

Le propos du ministre a été assez laconique : j’espérais entendre ses explications. Je ne comprends pas ce que signifie une « circonstance nouvelle de fait ou de droit ». Je trouve la formule extrêmement floue : il n’y a pas de définition précise.

Au fond, on comprend bien le raisonnement. D’ailleurs, ce que vient de dire le rapporteur est intéressant : il parle finalement davantage d’enquête…

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Pierre de La Gontrie

… alors que ce n’est pas ce qui est indiqué dans le texte de l’amendement. C’est une formule un peu fourre-tout : nous aimerions comprendre précisément ce qu’elle recouvre, monsieur le ministre.

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

Il me semble que c’est une formule que nous retrouvons souvent dans le droit, madame la sénatrice.

Le sens de cet amendement est assez évident. Une personne assignée à résidence après avoir été libérée d’un centre de rétention par le JLD ne peut pas y être placée de nouveau avant un délai de sept jours. Ce cas de figure peut se présenter si nous obtenons un laissez-passer consulaire ou si la personne n’a pas respecté son assignation à résidence en ne pointant pas au commissariat, qu’elle commet un délit de fuite ou qu’elle s’approche de quelqu’un dont elle doit rester éloignée. Bref, tous ces éléments permettent de considérer que les circonstances ont évolué.

Grâce à cet amendement, il suffirait d’attendre quarante-huit heures au lieu de sept jours pour placer de nouveau la personne en centre de rétention.

L ’ amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 12.

Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 184, présenté par Mmes de La Gontrie et Narassiguin, MM. Bourgi, Durain et Chaillou, Mme Harribey, M. Kerrouche, Mme Linkenheld, M. Roiron, Mme Brossel, M. Chantrel, Mmes Conway-Mouret et G. Jourda, MM. Kanner et Marie, Mmes S. Robert et Rossignol, MM. Stanzione, Temal, Tissot, M. Vallet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 12

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le chapitre IV du livre IV du livre III du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est ainsi modifié :

1° L’article L. 744-1 est ainsi rédigé :

« Art. L. 744-1. - L’étranger retenu en application du présent titre est placé ou maintenu dans un centre de rétention administrative.

« Les centres de rétention administrative sont créés, sur proposition du ministre chargé de l’immigration, par arrêté conjoint du ministre chargé des affaires sociales, du ministre chargé de l’immigration, du ministre de l’intérieur et du ministre de la justice.

« À titre exceptionnel, lorsque l’étranger retenu en application du présent titre ne peut être placé immédiatement dans un centre de rétention administrative, le préfet peut décider de son placement dans un local de rétention administrative. L’étranger ne peut être maintenu dans un local de rétention administrative après que le juge des libertés et de la détention a prolongé sa rétention en application de l’article L. 742-3.

« Les locaux de rétention administrative sont créés, à titre permanent ou pour une durée déterminée, par arrêté préfectoral. Une copie de cet arrêté est transmise sans délai au procureur de la République et au Contrôleur général des lieux de privation de liberté.

« Les centres de rétention administrative et les locaux de rétention administrative ne peuvent être créés dans des locaux relevant de l’administration pénitentiaire. » ;

2° Le premier alinéa de l’article L. 744-6 est ainsi rédigé :

« Dans chaque lieu de rétention, l’étranger reçoit notification, dès son arrivée, des droits qu’il est susceptible d’exercer en matière de demande d’asile. » ;

3° L’article L. 744-9 est ainsi rédigé :

« Art. L. 744-9. - Pour permettre l’exercice effectif de leurs droits par les étrangers maintenus dans un centre de rétention administrative ou un local de rétention administrative, le ministre chargé de l’immigration conclut une convention avec une ou plusieurs personnes morales ayant pour mission d’informer les étrangers et de les aider à exercer leurs droits. À cette fin, la personne morale assure, dans chaque centre ou local dans lequel elle est chargée d’intervenir, des prestations d’information, par l’organisation de permanences et la mise à disposition de documentation. Ces prestations sont assurées par une seule personne morale par centre ou local. » ;

4° Le premier alinéa de l’article L. 744-12 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Ils sont informés sans délai par le représentant de l’État dans le département dont relève leur circonscription de la création d’un local de rétention administrative. »

La parole est à M. Jérôme Durain.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Durain

Par cet amendement, nous souhaitons consacrer les LRA dans la loi pour y prévoir des garanties et des droits analogues à ceux qui sont appliqués en CRA.

Nous avons déjà évoqué la situation des LRA et le fait que les droits et garanties qui y sont appliqués sont en deçà de qui est prévu pour les CRA.

Le régime des CRA est aujourd’hui fixé dans la loi, tandis que celui des LRA est de niveau réglementaire. Nous proposons donc de fixer dans la loi le régime des locaux de rétention administrative.

Premièrement, nous proposons de préciser dans la loi que le placement d’un étranger dans un local de rétention administrative ne peut avoir qu’un caractère exceptionnel.

L’assignation à résidence devra donc être privilégiée si l’étranger ne peut être placé immédiatement dans un centre de rétention administrative. Par ailleurs, un étranger ne peut être maintenu dans un local de rétention administrative si le juge décide de la prolongation de la rétention.

Deuxièmement, nous souhaitons que la publicité de ces locaux soit garantie. Le préfet devra communiquer sans délai au procureur de la République et au Contrôleur général des lieux de privation de liberté l’arrêté portant création de ce LRA. Les parlementaires du département devront également être informés sans délai de ces lieux pour qu’ils puissent exercer leur droit de visite.

Troisièmement, les droits de l’étranger retenu dans un LRA ne devront pas être inférieurs à ceux qui s’appliquent dans un CRA. La notification des droits devra être effectuée dans chaque lieu de rétention, CRA et LRA, et non uniquement dans les premiers.

Quatrièmement, comme dans les CRA, les associations qui ont pour objet d’aider les étrangers à exercer leurs droits pourront, sur la base d’une convention conclue avec le ministère de l’intérieur, intervenir dans les LRA, pour qu’ils cessent, comme le disent certaines associations, d’être des lieux de non-droit.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

L’amendement n° 275 rectifié, présenté par MM. Gontard et Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc, Dantec, Dossus et Fernique, Mme Guhl, M. Jadot, Mme de Marco, M. Mellouli, Mme Ollivier, M. Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :

Après l’article 12

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article L. 744-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« En dehors des cas relevant de l’application du présent titre, est considéré comme placé en rétention tout étranger privé de sa liberté de circulation pendant une durée supérieure à quatre heures. En conséquence, est considéré comme lieu de rétention, tout lieu où tout étranger est enfermé pendant une durée supérieure à quatre heures. »

La parole est à M. Guillaume Gontard.

Debut de section - PermalienPhoto de Guillaume Gontard

Accompagné de plusieurs de mes collègues, dont Guy Benarroche, je me suis rendu jeudi dernier à la police aux frontières de Menton pour visiter les zones dites de « mise à l’abri » des personnes migrantes. Nos observations soulèvent de graves questions.

Ce sont en réalité des locaux où des personnes migrantes, dont des mineurs, sont enfermées pendant plusieurs heures, voire plusieurs jours, dans un environnement qui relève du milieu carcéral. Différence notable, cependant : ces espaces ne présentent aucun encadrement légal.

Les conditions et la durée de restriction de liberté sont indéterminées et ne permettent donc aucun contrôle judiciaire. Aucune mention de leurs droits n’est faite aux personnes migrantes et aucune visite ne leur est accordée, qu’il s’agisse d’avocats ou de médecins. À travers cet amendement, je souhaite mettre un terme au fonctionnement arbitraire de ce qui s’apparente à des zones de non-droit.

L’ordonnance prise par le juge des référés du tribunal administratif de Nice le 8 juin 2017, à la suite de l’une de nos visites, demandait au préfet de transférer dans une zone d’attente toute personne retenue plus de quatre heures dans les locaux de la police aux frontières de Menton. Or cette disposition n’est toujours pas respectée.

À cela s’ajoute l’arrêté de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) du 21 septembre dernier. Il précise qu’une décision de refus d’entrée prononcée aux frontières intérieures doit se faire dans l’application de la directive 2008/115/CE dite Retour. Celle-ci énonce que toute personne en attente d’éloignement est placée en rétention.

Cet amendement s’appuie donc sur cette décision. Tout enfermement d’une personne migrante de plus de quatre heures doit dépendre juridiquement du régime de la rétention. Tout lieu où cette rétention est organisée est donc de facto un CRA et est encadré comme tel. Tous les droits afférents des personnes retenues doivent donc s’y appliquer.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bonnecarrere

Il faut admettre que les deux amendements de nos collègues présentent une cohérence intellectuelle dans leur manière d’appréhender les libertés publiques.

En regard de vos arguments, il faut s’interroger sur les objectifs pratiques de ce projet de loi. Les LRA offrent une forme de souplesse par rapport au régime des CRA, qui est très encadré, et à celui de l’assignation à résidence.

En demandant l’inscription du dispositif dans un cadre législatif, vous voulez supprimer cette souplesse. Nous souhaitons pour notre part privilégier les objectifs d’éloignement. À ce titre, nous ne pouvons qu’émettre un avis défavorable, tout en rendant hommage à votre cohérence intellectuelle.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Guillaume Gontard

Je remercie le rapporteur de sa remarque sur notre cohérence intellectuelle.

Cependant, nos deux amendements ne sont pas tout à fait identiques : celui que j’ai défendu concerne les lieux de « mise à l’abri », qui n’ont aucune existence juridique légale. C’est un terme qui leur a été attribué. On retrouve cette terminologie et ce type de lieu à Montgenèvre et à Menton, dont les capacités du local sont en train d’être doublées. Cela pose une vraie problématique : ces lieux ne sont définis nulle part, et on ne sait pas à quoi ils servent.

Ces lieux, semblent-ils, sont utilisés pour la rétention. Nous avons pu les visiter. Nous avons demandé si les personnes qui s’y trouvaient avaient le droit de sortir, et ce n’est pas le cas : elles sont donc bien retenues. Ces lieux sont fermés, avec des moyens très précaires, et des conditions sanitaires à revoir. Les personnes peuvent rester douze à vingt-quatre heures dans ces lieux, comme cela nous a été confirmé.

Il s’agit donc bien de lieux de rétention. Les parlementaires ont le droit de les visiter. Nous demandons que ces lieux de mise à l’abri soient clairement définis, et que tout lieu où une personne est privée de liberté durant plus de quatre heures soit régulé par les directives qui s’appliquent aux lieux de rétention.

C’est aussi important, parce que les agents de la police aux frontières sont placés dans une situation floue et compliquée, comme ils nous l’ont dit. En effet, ils ne sont pas certains du cadre juridique qui régit les lieux où ils travaillent. Leur situation est fragilisée.

Au-delà de cette cohérence intellectuelle, mon amendement a donc d’autres intérêts, qui méritent d’y prêter attention.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Fabien Gay

Quand j’ai visité le centre de rétention du Mesnil-Amelot, j’ai échangé avec les agents, ainsi qu’avec la Cimade. Ce sont eux qui m’ont parlé pour la première fois des LRA : je n’en avais jamais entendu parler, alors qu’il y a six ans que je suis sénateur.

Or, dans ces lieux, une personne peut être retenue pendant quarante-huit heures – monsieur le ministre, arrêtez-moi si je me trompe – sans accès aux droits. Selon la Cimade, il arrive que des personnes soient placées en CRA après avoir été retenues en LRA ; et parfois, le délai de contestation des décisions préfectorales est déjà écoulé. Ces personnes ne savaient pas qu’elles pouvaient faire un recours, puisqu’elles n’avaient pas accès à leurs droits en LRA.

Cet accès aux droits devrait être garanti, mais en Seine-Saint-Denis et plus particulièrement au Mesnil-Amelot, c’est très rarement le cas. Cette situation devrait nous interroger.

L’amendement de mon collègue Durain tend à rendre publique la liste des LRA. Je sais qu’il existe un LRA à Bobigny, mais il est très difficile d’obtenir davantage d’informations à son sujet. Je vais me renseigner, car je veux le visiter.

L’absence de publicité de ces lieux de rétention m’interroge ; peut-être suis-je le seul dans cet hémicycle… Mais le manque d’accès aux droits est problématique. Dès la première heure de rétention, on doit avoir accès à ses droits. Cela devrait être primordial.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

La parole est à M. Guy Benarroche, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Benarroche

Il y a deux sujets différents : les LRA et les zones de mise à l’abri.

Sur les LRA, je suis d’accord avec Fabien Gay. C’est une question compliquée. J’ai aussi cherché à en savoir davantage sur la situation dans les Bouches-du-Rhône : on m’a dit que le LRA était situé dans la zone d’attente de l’aéroport de Marseille-Provence à Marignane. Peut-être. Pourtant, j’ai récemment visité la zone d’attente, et on ne m’a pas parlé de LRA.

C’est un problème. Ne serait-ce que pour pouvoir les visiter, ce qui est notre droit, il faudrait que soit établie une liste des LRA régulièrement mise à jour, puisque ces lieux peuvent évoluer du jour au lendemain.

J’ai même cru comprendre que le logement dans un hôtel provisoire pouvait transformer l’hôtel ou la chambre en LRA.

Les zones de mise à l’abri sont très clairement des zones de rétention. J’accompagnais Guillaume Gontard lors de sa visite : les personnes placées en LRA ne sont pas libres de leurs mouvements. Je comprends qu’elles sont là pour être mises à l’abri parce qu’elles sont arrivées dans des conditions difficiles. La mise à l’abri est supposée durer quatre heures, et se déroule dans des conditions loin d’être satisfaisantes, même si on nous a dit sur place qu’il y avait eu du progrès depuis un an : au lieu d’avoir droit épisodiquement à une madeleine à leur arrivée, les personnes retenues en LRA ont une bouteille d’eau et une salade. La distribution est assurée par un prestataire extérieur que nous avons rencontré.

Malgré tout, ce ne sont pas des endroits dans lesquels on peut décemment rester plus de quatre heures. En plus, des femmes et des enfants y sont placés ; c’est une certitude absolue.

Les LRA sont même considérés par les agents de la police aux frontières qui y travaillent comme des lieux de rétention.

Lors de notre visite, la première réponse qu’on m’a donnée, c’est que les gens qui y sont retenus peuvent sortir quand ils le veulent. J’ai donc invité trois de ces personnes au café du coin pour discuter avec elles, mais on m’en a empêché, au motif que ces trois personnes étaient enfermées, qu’elles ne pouvaient pas sortir libres dans la rue avant que l’on ne s’assure qu’elles soient reçues en Italie par les carabiniers. Cela a été le cas, je l’ai vérifié moi-même : certains des gens présents à cet endroit sont laissés dans la rue et suivis, le temps qu’on s’assure qu’ils retournent en Italie.

Tout cela constitue une sorte de flou artistique. Les agents ne savent pas quel est le statut juridique des zones de privation de liberté. Nous demandons une grande clarification sur le sujet.

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

Pour répondre à vos questions, les LRA sont évidemment conformes à ce que nous permet le droit, dans le respect de la Constitution et de la convention européenne des droits de l’homme.

Que sont-ils ? Des endroits où il y a peu de places. Ils sont essentiellement situés dans les commissariats. C’est le cas à Bobigny, monsieur le sénateur ; ce n’est pas très difficile à trouver. Mais j’imagine que c’était pour votre démonstration que vous avez un petit peu grossi le trait… Ils sont évidemment mentionnés par des arrêtés publiés par les préfets. Ce n’est pas très compliqué de les trouver, il suffit d’appeler les préfectures et les sous-préfectures. C’est assez simple.

Les gens voient leurs droits notifiés, puisqu’on leur explique pourquoi ils sont retenus en LRA. Ils peuvent évidemment appeler un avocat. Vous venez de faire une petite caricature de ce que sont ces lieux.

Ce qui est sûr, c’est que ce ne sont pas des centres de rétention administrative : on n’y trouve pas plusieurs dizaines, voire centaines de personnes. Ce n’est pas parce qu’une association ne peut pas s’y rendre que l’on y a privé le monde de toute liberté : il y a un avocat, une notification des droits, des personnes connues que les parlementaires peuvent visiter, comme j’imagine que vous l’avez fait.

D’ailleurs, je ne sais pas si vous le savez, mais ce n’est pas ce gouvernement-ci qui a inventé les LRA. Je vous laisse deviner quel gouvernement l’a inventé…

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

C’est tout le temps nous ! Franchement, on aurait fait votre politique, à vous entendre !

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

L’amendement n° 186, présenté par Mmes de La Gontrie et Narassiguin, MM. Bourgi, Durain et Chaillou, Mme Harribey, M. Kerrouche, Mme Linkenheld, M. Roiron, Mme Brossel, M. Chantrel, Mmes Conway-Mouret et G. Jourda, MM. Kanner et Marie, Mmes S. Robert et Rossignol, MM. Stanzione, Temal, Tissot, M. Vallet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 12

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La section 1 du chapitre IV du titre IV du livre VII du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est complétée par un article L. 744-3-… ainsi rédigé :

« Art. L. 744-3- … . - Au sein des lieux de rétention administrative, les étrangers qui ont fait l’objet d’une détention dans un établissement pénitentiaire au cours des six mois précédant leur placement en rétention sont retenus dans des espaces distincts des autres étrangers. »

La parole est à Mme Colombe Brossel.

Debut de section - PermalienPhoto de Colombe BROSSEL

Nous continuons sur le sujet des lieux de rétention administrative, car ce débat est extrêmement important. Les choix politiques assumés par le ministre de l’intérieur, de fait, ont un impact sur leur organisation, si je puis la nommer ainsi, et sur la vie à l’intérieur de ces lieux.

Il faut avoir ce débat, et non se limiter à des avis défavorables de la commission et du ministre de l’intérieur.

Même lorsqu’un de nos amendements, par chance, reçoit un avis favorable du Gouvernement, il n’est pas adopté, du fait de certaines modalités procédurales… J’observe d’ailleurs que nos collègues de la droite sénatoriale sont revenus en séance.

Comme le ministre de l’intérieur assume de placer majoritairement en CRA des sortants de prison, nous proposons par cet amendement que les lieux de rétention contiennent des espaces dédiés à la rétention des sortants de prison.

Une chose est sûre : nous ne pouvons pas nous résoudre à voir cohabiter dans un même lieu des personnes qui – vous l’assumez – soulèvent des problèmes de dangerosité, et d’autres retenues uniquement au motif que leur séjour est irrégulier. Le délit n’est tout de même pas exactement de la même nature…

Pour cette raison, il faut des espaces dédiés distincts au sein des lieux de rétention administrative, tant pour les personnes détenues que pour les personnels.

Monsieur le ministre, vous venez de rendre un hommage à ces personnels et de les remercier. Nous nous y associons : ces personnels en souffrance doivent bénéficier d’une protection et de conditions de travail à la hauteur des enjeux.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bonnecarrere

Avis défavorable. Le sujet a été abordé à plusieurs reprises. Il nous paraît difficile de créer par voie législative plusieurs « boîtes » à l’intérieur des CRA, une pour les sortants de prison, une autre pour les personnes poursuivies pour des faits de terrorisme, etc. Cela relève de l’organisation interne de chaque CRA, et non, me semble-t-il, du domaine législatif.

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

Avis défavorable. Je rappelle que 90 % des personnes détenues dans les CRA sont soit radicalisées, soit délinquantes. Les 10 % restants ne sont pas en contact avec les autres.

Ce qui était dangereux, c’est ce qui existait auparavant, lorsque des gens délinquants étaient retenus avec des gens pas délinquants.

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

M. Gérald Darmanin, ministre. Si, c’est tout à fait vrai !

M. Savoldelli proteste.

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

Non, madame Rossignol, les LRA n’ont pas été créés lorsque vous étiez ministre, sous le gouvernement de M. Hollande. Ils l’ont été à l’époque de M. Jospin.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

Mme Laurence Rossignol. Je savais bien que je n’avais rien à voir avec cela !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Guillaume Gontard

Je remercie M. le ministre d’avoir si bien détaillé ce que sont les LRA, en disant qu’il suffisait de prendre rendez-vous avec le préfet, que ce dernier était facile à trouver. Nous savons à peu près faire notre boulot de parlementaires, et nous arrivons en général à trouver la porte de la préfecture…

Ma question porte sur les lieux de mise à l’abri, qui constituent un non-sens juridique. J’aimerais que vous reveniez sur ce sujet : il y a eu plusieurs condamnations. Nous avons pu voir de nos propres yeux les problématiques existant en matière d’encadrement juridique. Ces lieux se multiplient et s’agrandissent.

J’avais justement fait une demande écrite auprès du préfet de Nice pour visiter ce lieu de mise à l’abri, qui m’a répondu dans un premier temps que je ne pouvais pas le visiter, car il ne s’agissait pas d’un lieu de rétention. Nous y sommes tout de même allés, et nous nous sommes rendu compte qu’il s’agissait bien d’un lieu de rétention. On voit qu’il y a un petit flou.

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

M. Gérald Darmanin, ministre. Les LRA ne sont pas des lieux de rétention stricto sensu, puisque les gens ne sont pas arrivés en France, formellement et juridiquement, selon le droit européen.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie s ’ exclame.

Debut de section - Permalien
Gérald Darmanin

Il s’agit d’un lieu temporaire où on va les remettre à disposition, comme M. Benarroche l’a parfaitement expliqué. Cela ne veut pas dire qu’on ne peut pas améliorer les conditions, comme cela doit être le cas dans les Hautes-Alpes en particulier. Mais ces lieux ne sont pas des lieux de rétention.

M. Guillaume Gontard proteste.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

L’amendement n° 325 rectifié, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :

Après l'article 12

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur les données disponibles qui concernent la localisation, les conditions d’accès et l’effectivité du droit de visite des parlementaires dans les locaux de rétention administrative.

La parole est à M. Guy Benarroche.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Benarroche

Comme nous avons des difficultés pour constater un certain nombre de choses, nous nous posons la question : « Après tout, pourquoi pas un rapport ? »

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Benarroche

Bien que le droit de visite des parlementaires dans les zones d’attente et les locaux de rétention soit prévu par les dispositions de l’article 719 du code de procédure pénale, les parlementaires éprouvent des difficultés pour accéder aux locaux de rétention administrative, aux zones d’attente et plus encore dans les zones de mise à l’abri aux alentours des frontières, puisque notre demande écrite n’a pas été acceptée, même si nous avons tout de même pu visiter ces lieux grâce aux fonctionnaires concernés, ce dont je les remercie.

Le constat que nous faisons est clair : les CRA s’apparentent de plus en plus à des lieux de détention ; les zones de mise à l’abri s’apparentent de plus en plus à des CRA qui n’en seraient pas. Tout cela nous semble un peu flou.

En plus, ces lieux sont situés dans des zones frontalières où un certain nombre de droits sont bafoués, non volontairement, mais parce que l’organisation même de ces lieux n’est plus conforme au rôle qu’ils jouent dans la réalité.

Je le précise, tant dans des zones d’attente que dans des zones de mise à l’abri, on accepte et on autorise la présence d’enfants, malgré, en ce qui concerne les zones d’attente, neuf condamnations de la Cour européenne des droits de l’homme.

Il nous semble donc essentiel de dresser un bilan des conditions d’accès et l’effectivité du droit de visite des parlementaires, afin de permettre à ces derniers d’exercer un contrôle et un état des lieux de ces différents locaux. Nous le demandons en attendant une commission d’enquête du Sénat sur les lieux de rétention administrative, les zones d’attente et les zones de mise à l’abri.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bonnecarrere

Vous connaissez l’équation : demande de rapport égale avis défavorable.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures quarante.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à vingt heures dix, est reprise à vingt-et-une heures quarante, sous la présidence de M. Dominique Théophile.