Séance en hémicycle du 12 avril 2011 à 21h30

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

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La séance

Source

La séance, suspendue à dix-neuf heures trente, est reprise à vingt et une heures trente, sous la présidence de M. Guy Fischer.

(Texte de la commission)

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Nous reprenons la discussion en deuxième lecture du projet de loi, adopté avec modifications par l’Assemblée nationale, relatif à l’immigration, à l’intégration et à la nationalité.

La discussion générale a été close et les trois motions déposées sur ce texte ont été successivement repoussées.

Nous en sommes donc parvenus à la discussion des articles.

Je rappelle que, en application de l’article 48, alinéa 5, du règlement, à partir de la deuxième lecture au Sénat des projets et propositions de loi, la discussion des articles est limitée à ceux pour lesquels les deux assemblées du Parlement n’ont pas encore adopté un texte identique.

En conséquence, sont irrecevables les amendements remettant en cause les « conformes » ou les articles additionnels sans relation directe avec les dispositions restant en discussion.

TITRE IER

DISPOSITIONS RELATIVES À LA NATIONALITÉ ET À L’INTÉGRATION

Chapitre unique

I. – L’article 21-24 du code civil est ainsi modifié :

1° A Après la deuxième occurrence du mot : « française », sont insérés les mots : «, de l’histoire, de la culture et de la société françaises, dont le niveau et les modalités d’évaluation sont fixés par décret en Conseil d’État, » ;

1° Sont ajoutés les mots : « ainsi que par l’adhésion aux principes et aux valeurs essentiels de la République » ;

2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« À l’issue du contrôle de son assimilation, l’intéressé signe la charte des droits et devoirs du citoyen français. Cette charte, approuvée par décret en Conseil d’État, rappelle les principes, valeurs et symboles essentiels de la République française. »

II. –

Supprimé

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à Mme Catherine Tasca, sur l'article.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

Monsieur le ministre, l’article 2 ayant fait l’objet de longues discussions en première lecture, je me contenterai ce soir de formuler quelques remarques.

Cet article prévoit le contrôle de l’assimilation de celui qui souhaite acquérir la nationalité française. En contradiction avec l’intitulé même du projet de loi dont nous débattons, qui évoque « l’intégration », le Gouvernement s’obstine à vouloir conserver le terme « assimilation » introduit dans le code civil par la loi du 26 novembre 2003. Cela en dit long sur la philosophie du projet de loi…

Assimiler, c’est vouloir gommer les origines, les cultures, les parcours de vie. C’est penser que « fabriquer de bons Français » oblige les hommes et femmes candidats à l’intégration au sein de la communauté nationale à rompre avec leurs racines, leur histoire, avec tout ce qui, en définitive, fait d’eux des citoyens du monde.

En choisissant ce terme, monsieur le ministre, vous proposez une vision très étriquée de la société, de la citoyenneté, de la République.

Lors de nos débats de première lecture, mon collègue Louis Mermaz relevait la « connotation carnassière » du terme « assimilation », et je partage tout à fait cette lecture.

Derrière le débat sémantique, il y a à l’évidence une divergence de vues, politique et philosophique, sur le rapport à l’étranger et la diversité dans la République.

Ainsi, aux termes de l’article 2, le candidat à la nationalité française sera évalué sur son assimilation et, à l’issue de ce contrôle, devra signer la charte des droits et devoirs du citoyen français.

Sans doute est-il nécessaire de s’assurer que celui qui demande la nationalité française connaît les notions de base utiles à une pratique de la langue lui permettant d’accomplir les formalités essentielles de la vie courante et de progresser rapidement dans la maîtrise de la langue. Encore faudrait-il, monsieur le ministre, que la France soit en mesure de lui offrir les structures d’apprentissage de notre langue. Or, à ce jour et malgré les efforts de nombre d’associations, il est extrêmement difficile pour un étranger de suivre un parcours efficace d’apprentissage du français.

Sans doute l’adhésion des candidats à la nationalité française aux principes de la République est-elle utile en cette période où les valeurs républicaines sont régulièrement bafouées par des déclarations tapageuses qui stigmatisent, accusent et divisent.

On peut surtout s’interroger sur l’extension du champ du contrôle de l’assimilation. Ainsi, si l’on s’en tenait aux dispositions issues de l’Assemblée nationale, ce serait, outre la connaissance suffisante de la langue et des droits et devoirs du citoyen, « la connaissance de l’histoire, de la culture et de la société françaises » dont le candidat à la naturalisation devrait apporter la preuve. Cela reviendrait à soumettre l’étranger à un contrôle des connaissances que nul heureusement n’oserait imposer au citoyen français : quel que soit son niveau en la matière, le citoyen français fait partie intégrante de la Nation.

Ces nouvelles exigences me semblent profondément discriminatoires à l’égard des étrangers qui souhaitent devenir Français.

On le sait bien, sont ici en jeu bien plus le mode de vie, les comportements et l’adhésion aux principes de la République qu’un quelconque bagage et des connaissances. C’est, sans le dire, un mode de sélection catégoriel. C’est pourquoi les membres du groupe socialiste présenteront un amendement tendant à la suppression de l’alinéa 2 de l’article 2.

En tout état de cause, le Parlement, compétent pour ce qui concerne les règles relatives à la nationalité, aux termes de l’article 34 de la Constitution, aurait dû être saisi de ces dispositifs, qui conditionnent l’accès la nationalité. Ce n’est pas le cas. Les modalités du contrôle de l’assimilation du requérant ainsi que le contenu de la charte sont renvoyés à un décret en Conseil d’État. Nous avions pourtant demandé que la charte puisse être annexée au présent projet de loi. Il n’en est rien, ce qui semble plutôt surprenant, ce document ayant simplement pour vocation de rappeler les principes, valeurs et symboles essentiels de la République.

Pour ma part, je trouve quelque peu suspect le manque d’empressement du Gouvernement à nous communiquer cette charte.

Enfin, l’article 2, tel qu’il nous est soumis en séance, a été « allégé ». En effet, le paragraphe II, qui a été ajouté par les députés UMP, sur l’initiative des plus droitiers d’entre eux, pour imposer aux quelque 3 000 jeunes majeurs qui acquièrent automatiquement la nationalité au bénéfice du droit du sol, de demander par écrit un certificat de nationalité, a été supprimé par la commission des lois du Sénat.

Je suis loin d’être convaincue qu’une multiplication des démarches administratives permette de mesurer la réalité de l’intégration des jeunes majeurs récemment naturalisés. Cette conception, en définitive bureaucratique, est assez éloignée de l’idée que nous nous faisons de la manifestation de l’attachement à un pays.

La suppression de cet alinéa par la commission des lois est bienvenue. Je souhaite qu’elle marque un abandon définitif de dispositifs qui ne visent, en réalité, qu’à restreindre l’accès à la nationalité française.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Je suis saisi de trois amendements identiques.

L'amendement n° 146 est présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de gauche.

L'amendement n° 179 est présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et M. Desessard.

L'amendement n° 181 rectifié est présenté par MM. Mézard et Collin, Mme Escoffier, MM. Baylet et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Tropeano et Vall.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour présenter l’amendement n° 146.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Nous sommes, nous aussi, opposés au durcissement des conditions de naturalisation que comporte le présent article.

D’ores et déjà, la naturalisation – mais, monsieur le ministre, vous glissez lentement mais sûrement de la « naturalisation » vers l’« assimilation » – est soumise à des conditions d’intégration à la communauté française qui s’apprécient en fonction d’une connaissance suffisante de la langue française ainsi que des droits et devoirs conférés par la nationalité française.

L’article 2 ajoute de nouveaux critères à la naturalisation, et l’on voit bien dans quel esprit. Imposer une connaissance « de l’histoire, de la culture et de la société françaises » est pour le moins étrange. Comment l’évaluer ? Va-t-on faire passer des examens de naturalisation assortis d’un programme de révision ?

Ces critères de connaissance sont d’autre part fortement contestables. Nul ne l’ignore, la connaissance qu’a chacun de l’histoire et de la culture de son pays, notamment, n’est pas uniforme et reflète souvent des inégalités socio-économiques.

De plus, nous contestons vivement l’ajout d’une adhésion aux « principes, valeurs et symboles essentiels de la République française » qui se matérialise par la signature d’une charte des droits et devoirs du citoyen. C’est une notion floue et pour le moins subjective. Ces critères peuvent être nombreux, et chaque individu peut en avoir une conception propre, unique et, par là même, bien trop subjective pour qu’ils puissent fonder un quelconque rejet d’une demande de naturalisation.

On peut encore une fois constater le déni de choix opposé à une personne. Or, pour notre part, nous sommes favorables au libre choix. Chacun sait que la demande de naturalisation française est déposée non par hasard, mais par commodité. En effet, cohabitent sur notre territoire des personnes qui veulent obtenir la nationalité française alors que d’autres ne le souhaitent pas. Désirer acquérir la nationalité française implique que la personne qui le demande s’intègre dans notre pays.

L’article 2 fait indiscutablement peser un soupçon sur l’étranger, dont on suppose qu’il est opposé à des valeurs et à des principes dont seuls les rédacteurs de ce texte savent ce qu’ils sont. Il faudrait faire passer un examen à l’ensemble de la population pour savoir si elle partage les mêmes valeurs, les mêmes idées, les mêmes conceptions de la République. Or nous n’avons pas toujours les mêmes valeurs et nous en sommes, dans cette assemblée, l’exemple criant.

Pour toutes ces raisons, nous demandons la suppression de l’article 2.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery, pour présenter l'amendement n° 179.

Debut de section - PermalienPhoto de Alima Boumediene-Thiery

Cet amendement vise également à supprimer l’article 2 du projet de loi, qui renforce le pouvoir réglementaire en matière de contrôle de l’assimilation des nouveaux Français. Cet article crée une charte des droits et devoirs du citoyen français dépendant entièrement du pouvoir réglementaire.

D’une part, le Parlement ne dispose d’aucun regard sur le contenu de cette charte, qui prévoit un contrôle de l’assimilation des nouveaux Français par naturalisation – le terme « assimilation » résonne toujours curieusement à mes oreilles, tant il me rappelle notamment l’époque coloniale –, et sur les conséquences de son non-respect.

D’autre part, la réactivation de ce concept d’assimilation, qui rappelle cette époque révolue du code civil, est une négation symbolique de la diversité culturelle de la Nation.

Le Gouvernement aurait pu lui préférer la notion d’intégration – présente d’ailleurs dans le titre du projet de loi – ou celle d’insertion, ces deux notions qui lui ont progressivement été substituées. En effet, elles ouvrent la nationalité à la diversité et sont très souvent utilisées dans des intitulés des politiques publiques ou de programmes.

Il est donc proposé au législateur d’ajouter une condition contractuelle obligatoire, sans permettre au Parlement de contrôler la nature de ce contrat, puisque son contenu est totalement mystérieux, laissé à la subjectivité de l’agent instructeur de la préfecture qui, in fine, décidera ou non de la naturalisation !

Le pouvoir de contrôle des décisions de naturalisation sera totalement anéanti puisque les juridictions seront tenues par la loi et le décret.

Enfin, il suffira à l’administration de considérer que le candidat n’a pas adhéré à la charte pour que la décision réponde à la condition de motivation.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à Mme Anne-Marie Escoffier, pour présenter l'amendement n° 181 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Anne-Marie Escoffier

Je ne répéterai pas les arguments qu’a développés Mme Tasca, notamment sur l’assimilation et le fait que cette charte soit arrêtée par décret en Conseil d’État.

S’agissant de l’assimilation, je suis d’accord avec les propos qui viennent d’être tenus. Nous nous sommes nous aussi interrogés sur le glissement du terme « intégration », qui est dans le titre du projet de loi, à celui d’« assimilation ».

Concernant le décret, notamment sa forme, c’est effectivement à notre demande – nous le rappelons – qu’il a été précisé qu’il s’agissait non pas d’un décret simple mais d’un décret en Conseil d’État. Cette solution ne va pas aussi loin que nous l’aurions souhaité, car, il est vrai, nous avons le sentiment que le Parlement est quelque peu privé de ses moyens et que le recours à la voie réglementaire ne permettra pas de contrôler la nature de cette charte comme nous aurions pu et dû le faire.

En tout état de cause, j’ai bien retenu les informations données tout à l’heure par notre rapporteur, qui a souligné qu’il s’agissait d’une déclaration actée par le candidat à cette naturalisation.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

Pour que les choses soient bien claires, je tiens à préciser que, dans la notion d’assimilation, il n’y a évidemment aucune idée d’arasement des différences culturelles ou autres. Nous avons déjà beaucoup débattu de ce sujet.

L’avis de la commission est donc défavorable sur ces trois amendements identiques de suppression.

Debut de section - Permalien
Claude Guéant, ministre de l’intérieur, de l’outre mer, des collectivités territoriales et de l’immigration

Cette notion d’assimilation est d’ores et déjà présente dans notre code civil, qui prévoit également le contrôle de l’assimilation. Du reste, j’observe que, malgré ce contrôle, nous comptons chaque année plus de 100 000 naturalisations dans notre pays !

De plus, la signature de la charte des droits et devoirs sera certainement accueillie avec faveur par des personnes qui, entrant dans la citoyenneté française, souhaitent montrer leur attachement à ce qui la fonde.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur ces trois amendements.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Je mets aux voix les amendements identiques n° 146, 179 et 181 rectifié, qui tendent à supprimer l’article 2.

J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC-SPG.

Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que l’avis du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

Il est procédé au dépouillement du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Voici le résultat du scrutin n° 191 :

Le Sénat n'a pas adopté.

L'amendement n° 4, présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. Richard Yung.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

De nombreux propos ont déjà été tenus sur le sujet donc, pour ne pas allonger inutilement les débats, je me contenterai de développer deux points.

Premièrement, tout ce dispositif participe d’une philosophie qui n’est pas la nôtre, consistant à rendre toujours plus difficile l’accès à la nationalité, comme si, au fond, on se méfiait de ceux qui veulent devenir Français, comme si l’on ne voulait pas d’eux. Je ne pense pas que cela soit la bonne approche à adopter.

Deuxièmement, s’il est nécessaire de maîtriser la langue française pour s’intégrer, je constate que cet article ajoute la connaissance de l’histoire et de la culture françaises. J’en déduis qu’il faudra bien connaître la littérature et la philosophie, notamment Voltaire. Notre secrétaire d’État chargé du commerce et de l’artisanat aurait-il pu se qualifier à cet examen ?...

Sourires sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

Je rappelle que la liste des critères n’est pas exhaustive. En outre, la commission a souhaité apporter des précisions pour tenir compte des conditions de l’intéressé, de façon à pouvoir répondre à la question qui vient d’être posée par notre collègue Yung.

La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

Debut de section - Permalien
Claude Guéant, ministre

Le Gouvernement émet également un avis défavorable sur cet amendement.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 206 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 6

Rétablir le II dans la rédaction suivante :

II. – L’article 21-7 du même code est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, après le mot : « acquiert », sont insérés les mots : « à sa demande » ;

2° Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Cette demande, qui prend la forme d’une lettre manuscrite à l’appui de la demande de certificat de nationalité, est faite selon des modalités précisées par décret en Conseil d’État. »

La parole est à M. le ministre.

Debut de section - Permalien
Claude Guéant, ministre

Mesdames, messieurs les sénateurs, à travers cet amendement, le Gouvernement propose de rétablir un dispositif qui a été adopté par l’Assemblée nationale en deuxième lecture.

Je rappelle que, chaque année, 30 000 jeunes étrangers acquièrent la nationalité française au titre de la naissance et de la résidence en France, ce que l’on appelle communément « le droit du sol ». Parmi eux, 27 000 jeunes demandent à bénéficier de la nationalité par anticipation, à 13 ou 16 ans, selon les cas. Ceux-là, donc, manifestent une volonté.

La question se pose donc pour les 3 000 jeunes majeurs restants, qui ne découvrent souvent leur nationalité française qu'à l’occasion d’une démarche visant à obtenir des documents d'identité. C’est ce public particulier que vise l’amendement proposé par le Gouvernement.

Il paraît équitable que ces personnes, devenues françaises à 18 ans, ne puissent obtenir un certificat de nationalité que dès lors qu'elles en auraient manifesté explicitement l'intention, comme le font les plus jeunes.

Concrètement, cette manifestation de volonté prendrait la forme d’une simple lettre manuscrite, rédigée par l’intéressé lorsqu’il fait la demande d’un certificat de nationalité.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

Cet amendement tend à rétablir une disposition qui a été introduite à l’Assemblée nationale en seconde lecture et qui a été supprimée par la commission des lois de la Haute Assemblée.

Sur la forme – et non sur le fond –, c’est une mesure nouvelle, sans lien direct avec une disposition du texte en discussion, puisqu’elle concerne l’acquisition automatique de la nationalité française et non la naturalisation ou l’acquisition par déclaration.

Aussi, cette disposition ne satisfait pas la règle de l’entonnoir, raison pour laquelle la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à Mme Éliane Assassi, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Notre groupe suivra M. le rapporteur puisque, avec cet amendement, c’est une évidence, le Gouvernement veut remettre en cause le droit du sol en prenant le prétexte de ces 3 000 jeunes qui ne découvriraient leur nationalité française qu’à l’occasion d’une demande de documents d’identité.

Il nous semble que c’est la porte ouverte à la remise en cause du droit du sol et c’est la raison pour laquelle nous ne voterons pas cet amendement.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à Mme Éliane Assassi, pour explication de vote sur l’article 2.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Je profiterai de mon explication de vote sur l’article 2, qui porte sur l’intégration, pour évoquer une question qui est chère aux membres du groupe CRC-SPG, et particulièrement à moi : celle de la participation aux élections locales des étrangers résidant en France depuis une longue période.

Plutôt que de résumer l’intégration à la signature d’une charte des droits et des devoirs, il nous paraît plus opportun de développer les moyens réels de l’intégration dans la vie citoyenne du pays dans lequel un étranger réside depuis au moins cinq ans, en autorisant sa participation et son éligibilité aux scrutins municipaux.

Le Parlement européen a d'ailleurs voté le 14 février 1989 une résolution demandant aux pays membres de l’Union européenne d’accorder à l’ensemble des étrangers vivant et travaillant sur leur territoire le droit de vote aux élections locales.

Or la France reste l’un des derniers pays de l’Union à ne pas avoir appliqué cette résolution. Il nous paraît donc urgent de la mettre en œuvre, pour que la vision de l’immigration et de l’intégration de notre pays ne se résume pas aux mesures de défiance et de restriction que porte, malheureusement, ce projet de loi.

L'article 2 est adopté.

Après le mot : « doit », la fin du dernier alinéa de l’article 21-2 du même code est ainsi rédigée : « également justifier d’une connaissance suffisante, selon sa condition, de la langue française, dont le niveau et les modalités d’évaluation sont fixés par décret en Conseil d’État. »

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° 147 est présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de gauche.

L'amendement n° 182 rectifié est présenté par MM. Mézard et Collin, Mme Escoffier, MM. Baylet et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Tropeano et Vall.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Marie-Agnès Labarre, pour présenter l’amendement n° 147.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Agnès Labarre

Cet article tend à durcir les conditions de l’acquisition de la nationalité française en vertu du mariage, alors que celles-ci sont déjà encadrées et contrôlées.

Actuellement, le conjoint d’époux français doit justifier au minimum de quatre ans de vie commune et d’une maîtrise de la langue française que cet article vise à évaluer en fonction de la condition de l’étranger et selon un niveau et des modalités qui restent inconnues, car elles sont renvoyées à un décret.

Or le contexte politique dans lequel évolue aujourd'hui la majorité, caractérisé par la méfiance envers les étrangers et par la banalisation des discours habituellement tenus par le Front national, nous rend plus que méfiants à l’égard de critères inconnus.

Au regard de l’ensemble des mesures véhiculées par ce texte, cette imprécision nous semble révéler uniquement une méfiance envers les mariages mixtes, qui seraient nécessairement entachés de soupçons de fraude, ainsi qu’une volonté de durcissement des conditions d’évaluation de la langue française, pour faire de celles-ci un instrument de régulation de l’immigration.

Nous sommes donc formellement opposés à cet article, les conditions d’acquisition de la nationalité par mariage étant déjà très restrictives et largement contrôlées.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à Mme Anne-Marie Escoffier, pour présenter l'amendement n° 182 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Anne-Marie Escoffier

Cet article 2 bis durcit, me semble-t-il, les conditions d’accès à la nationalité française des demandeurs, en l’espèce, les conjoints de ressortissants français dont le niveau de connaissance de la langue française sera évalué selon des modalités une nouvelle fois fixées par le pouvoir réglementaire, et non par le Parlement.

Je dois relever que notre commission a pu au moins rétablir la précision, qui avait été supprimée par l’Assemblée nationale, selon laquelle la maîtrise de la langue française doit s’apprécier en tenant compte de la situation particulière de l’étranger, ce qui nous paraît tout de même tout à fait essentiel.

Sur le délai de l’acquisition de la nationalité française par mariage, qui constitue déjà une procédure lourde et longue, on introduit ici, à l’évidence, un obstacle supplémentaire dans le parcours imposé aux couples mixtes. Or un tel durcissement me paraît quelque peu excessif.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

Je tiens à préciser que la définition des modalités et les conditions d’évaluation de la maîtrise de la langue française par l’étranger relèvent non pas du domaine de la loi, mais de celui du règlement. Le texte du projet de loi fixe uniquement les principes selon lesquels cette évaluation s’effectue, en tenant compte de la situation de l’étranger.

Mes chers collègues, j’attire néanmoins votre attention sur les précisions qui ont été introduites dans le texte et qui donneront tout de même plus d’objectivité aux évaluations actuellement réalisées.

J’émets donc un avis défavorable sur ces deux amendements identiques de suppression.

Debut de section - Permalien
Claude Guéant, ministre

Certains voient dans ce texte un durcissement des conditions d’entrée dans la nationalité. Le Gouvernement, pour sa part, considère au contraire qu’il s'agit d’une garantie de bonne intégration et d’une optimisation des chances de réussite dans notre société.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur ces deux amendements identiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Je mets aux voix les amendements identiques n° 147 et 182 rectifié.

Les amendements ne sont pas adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 5, présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Au début de cet article, insérer trois alinéas ainsi rédigés :

Au premier alinéa de l’article 21-2 du même code, le mot : « quatre » est remplacé par le mot : « un ».

Le deuxième alinéa de l’article 21-2 du même code est ainsi rédigé :

« Le délai d’un an est supprimé lorsque naît, avant ou après le mariage, un enfant dont la filiation est établie à l'égard des deux conjoints. »

La parole est à M. Alain Anziani.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Anziani

Nous proposons de réduire le délai de vie commune qui est exigé pour l’acquisition de la nationalité française par les conjoints de Français.

Si nous étudions l’histoire législative, nous sommes surpris de constater que ce délai double avec chaque nouvelle loi sur le sujet. En 1998, il était d’un an ; en 2003, il passe à deux ans ; en 2006, il est encore une fois multiplié par deux pour atteindre quatre ans !

Naturellement – c’est là que le bât blesse –, ce nouveau doublement intervient sans évaluation ni motivation. À l’évidence, une telle évolution est purement idéologique et ne se justifie en rien. Nous proposons donc de revenir à la législation de 1998, donc de réduire le délai à un an.

En outre, nous souhaitons réserver un dispositif particulier aux conjoints qui ont un enfant, car il est absurde de leur imposer des délais aussi longs. En effet, au fond, ils attestent parfaitement de leur intégration par la naissance même de leur enfant. Ils satisfont donc à toutes les conditions requises pour bénéficier de la nationalité.

M. le ministre manifeste son scepticisme.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Anziani

Nous proposons donc qu’aucun délai ne soit exigé des conjoints ayant un enfant.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

L’amendement n° 5 vise à revenir sur l’application de la loi du 24 juillet 2006.

Je formulerai deux observations.

Tout d'abord, je le rappelle, l’allongement dont il est question avait été motivé par une volonté de lutter contre les détournements de procédures, qui étaient nombreux et qu’autorisaient les précédents délais. Il s'agit, me semble-t-il, du point essentiel : les délais actuels de quatre ans et de cinq ans permettent de s’assurer de la réalité de la situation matrimoniale des époux.

Sur ce point, la commission a estimé qu’il n’y avait pas lieu de revenir en arrière.

Ensuite, il convient de rappeler que le séjour des conjoints de Français est aujourd’hui assuré.

En ce qui concerne la seconde partie de l’amendement, qui vise le cas où la naissance d’un enfant commun établirait la réalité de l’intention matrimoniale, je formulerai, là encore, deux observations.

Premièrement, sur la forme, l’amendement, s’il était adopté dans sa rédaction actuelle, écraserait totalement l’alinéa 2 de l’article du code visé, qui prévoit le cas où le couple n’a pas eu une résidence continue en France.

Deuxièmement, la filiation ne saurait constituer une preuve absolue de la réalité de l’intention matrimoniale : elle peut être simulée, voire faire l’objet d’un désaveu ultérieur.

La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

Debut de section - Permalien
Claude Guéant, ministre

Pour les mêmes raisons que celles que vient d’exposer M. le rapporteur, le Gouvernement émet également un avis défavorable sur cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à M. Alain Anziani, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Anziani

Sans allonger inutilement nos débats, je tiens à réagir aux explications que l’on vient de nous donner. Franchement, c’est n’importe quoi !

L’argument selon lequel, parce que l’on a peur de la fraude, il faudrait quatre ans ou cinq ans pour s’assurer que le mariage correspond à une intention véritable des conjoints ne tient pas. En effet, on le sait bien, il existe déjà des procédures qui permettent de lutter contre les mariages blancs. Il est possible de saisir le tribunal aux fins d’annulation et, dans ce cas de figure, il n’est pas nécessaire d’attendre quatre ou cinq ans.

De grâce, donnez-nous une explication valable, parce que celle-là n’est pas sérieuse !

L'amendement n'est pas adopté.

L'article 2 bis est adopté.

(Suppression maintenue)

(Non modifié)

I A, I et II. –

Non modifiés

III. – À la première phrase du deuxième alinéa de l’article L. 314-2 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, les mots : « de la souscription et » sont remplacés par les mots : «, lorsqu’il a été souscrit, ».

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° 6 est présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

L'amendement n° 148 est présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de gauche.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Catherine Tasca, pour présenter l’amendement n° 6.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

Le contrat d’accueil et d’intégration s’adresse aux étrangers admis pour un séjour durable pour la première fois en France. Il est signé pour une durée d’un an renouvelable et comporte diverses obligations : une formation civique, une session d’information sur la vie en France et une formation linguistique.

L’article 5 du projet de loi précise les éléments pouvant être pris en compte pour évaluer le respect ou le non-respect des stipulations du contrat d’accueil et d’intégration par l’étranger.

Parmi les critères proposés, l’assiduité et le sérieux de la participation aux formations civique et linguistique peuvent poser problème, pour des raisons tout simplement matérielles. Par exemple, des horaires non compatibles avec ceux du travail, des difficultés de déplacement et la garde des enfants peuvent constituer autant d’obstacles pour l’étranger volontaire. En 2008, le taux d’abandon ou de report de la formation linguistique était de 30 %, y compris chez des candidats à une intégration sincère.

Le souci d’intégration des étrangers est partagé par tous. Il faut donc tout mettre en œuvre pour que les formations dispensées leur soient accessibles matériellement.

En outre, comment sera évalué de manière objective et homogène sur l’ensemble du territoire le sérieux de la participation aux formations ? À l’évidence, on entre ici dans un domaine très subjectif et dont on peut craindre qu’il n’ouvre le champ à l’arbitraire pour justifier le non-renouvellement des titres de séjour.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat, pour présenter l'amendement n° 148.

Debut de section - PermalienPhoto de Josiane Mathon-Poinat

Cet article doit être supprimé, car il durcit une fois encore les conditions de renouvellement de la carte de séjour des étrangers.

Les primo-arrivants sont tenus de conclure un contrat d’accueil et d’intégration qui se matérialise par le suivi d’une formation civique et éventuellement linguistique.

Le non-respect des obligations du contrat d’accueil est actuellement pris en compte pour le premier renouvellement de la carte de séjour, mais seront désormais précisés les éléments qui motivent le refus du renouvellement : l’absence d’assiduité et de sérieux de l’étranger dans ses formations civique et linguistique, entre autres manquements aux valeurs fondamentales de la République, dont, bien évidemment, nous avons déjà dénoncé toute la subjectivité.

Nous proposons donc la suppression de cet article.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

L’article 5 du projet de loi ne crée pas une règle nouvelle : il s'agit seulement d’une explication des cas que peut recouvrir le non-respect des stipulations du contrat d’accueil et d’intégration.

Le manque d’assiduité peut justifier le non-renouvellement du titre de séjour de l’intéressé, c’est une réalité. Toutefois, il faut le rappeler, l’autorité administrative n’a pas de compétence liée en la matière et elle distingue, sous le contrôle du juge, l’absentéisme injustifié de celui qui s’explique par de justes motifs, je tenais à le souligner.

La commission émet donc un avis défavorable sur les amendements identiques n° 6 et 148.

Debut de section - Permalien
Claude Guéant, ministre

Cet article est important, car il permet à l’autorité administrative de mieux tenir compte du non-respect éventuel des stipulations du contrat lors du renouvellement du titre de séjour, à l’issue du contrat et non pas seulement au premier renouvellement de titre.

En effet, les formations délivrées au titre du contrat d’accueil et d’intégration peuvent se dérouler sur une période d’une durée supérieure à une année. J'ajoute que ce contrôle n’est pas arbitraire, puisque le préfet prend sa décision sur information de l’Office français de l’immigration et de l’intégration, celui-ci relançant éventuellement la personne qui ferait preuve d’absentéisme.

L’avis du Gouvernement est donc défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Je mets aux voix les amendements identiques n° 6 et 148.

Les amendements ne sont pas adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 7, présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Alinéa 1

Avant le II

Insérer trois paragraphes ainsi rédigés :

I bis. - Avant le dernier alinéa du même article, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« L'Office français de l'immigration et de l'intégration a une obligation de moyen relative aux formations et aux prestations dispensées dans le cadre du contrat d'accueil et d'intégration. Les formations se déclinent sur tout le territoire. Les modalités de leur organisation tiennent compte des obligations auxquelles sont astreints les signataires du contrat, notamment l'exercice d'un travail, les temps de déplacement ou l'entretien d'enfants à charge. »

I ter. - Après le 13° de l'article L. 6313-1 du code du travail, il est inséré un 14° ainsi rédigé :

« 14° Les actions de formations linguistiques prévues par le contrat d'accueil et d'intégration tel que défini aux articles L. 311-9 à L. 311-9-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. »

I quater. - Au second alinéa de l'article L. 6111-2 du même code, après le mot : « française », sont insérés les mots : « et les formations linguistiques prévues dans le cadre du contrat d'accueil et d'intégration tel que défini aux articles L. 311-9 à L. 311-9-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ».

La parole est à Mme Bariza Khiari.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

Cet amendement traduit notre souhait d’une meilleure organisation, par l’Office français de l’immigration et de l’intégration, des sessions de formation obligatoires prévues dans le cadre du contrat d’accueil et d’intégration.

Nous demandons donc que l’OFII prenne en compte, dans ses structures et ses modules, les contraintes des publics auxquels il délivre les formations.

Les modalités d’organisation des sessions de formation devront tenir compte des obligations auxquelles sont astreints les signataires du contrat, notamment l’exercice d’un travail ou les temps de déplacement.

Par ailleurs, la maîtrise de la langue française constituant un puissant facteur d’intégration et d’émancipation, nous proposons d’insérer, dans le code du travail, un droit à la formation linguistique spécifique au titre de la formation professionnelle continue pour les étrangers.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

Nous avons déjà examiné un amendement identique en première lecture.

En réalité, il complique un peu la situation. En outre, il est largement satisfait par le droit en vigueur et la pratique actuelle de l’OFII.

La commission émet donc un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Claude Guéant, ministre

L’avis du Gouvernement est également défavorable.

En effet, dans le cahier des charges des marchés publics de l’OFII, cette diversification des formations sur des horaires adaptés est déjà prévue.

Par ailleurs, le code du travail prévoit déjà de façon tout à fait explicite que les formations linguistiques peuvent être organisées dans le cadre de la formation professionnelle continue.

L'amendement n'est pas adopté.

L'article 5 est adopté.

(Suppression maintenue)

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 8, présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

L'article 30 du code civil est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« La première délivrance d'une carte nationale d'identité ou d'un passeport certifie l'identité et la nationalité de son titulaire. Les mentions relatives à l'identité et à la nationalité inscrites sur ces derniers font foi jusqu'à preuve du contraire par l'administration.

« L'alinéa précédent est applicable aux demandes de renouvellement de carte d'identité et de passeport en cours d'instruction, ainsi qu'aux recours administratifs et contentieux pour lesquels une décision définitive n'est pas encore intervenue. »

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

M. Jean-Pierre Sueur. Chacun connaît cet amendement, et je crois que beaucoup l’apprécient…

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Il a en effet pour objet de mettre fin au véritable marasme administratif lié aux démarches de renouvellement des documents d’identité pour les Français nés à l’étranger.

Ces hommes et ces femmes – nous en connaissons tous pour en recevoir dans nos départements, mes chers collègues – se trouvent confrontés à des situations absurdes et inextricables, lourdes de conséquences sur leur quotidien.

Le Sénat, en première lecture, a reconnu la détresse de ces concitoyens qui désespèrent de fournir la preuve de leur nationalité à l’administration. C’est pourquoi il a adopté la disposition que nous proposons.

J’ai donc confiance, mes chers collègues, certain que vous allez voter à nouveau la mesure que vous avez bien voulu adopter voilà quelque temps. Le contraire serait difficile à expliquer, vous en conviendrez.

Les députés ont, hélas, supprimé ce nouvel article. Le Gouvernement a d’ailleurs dit – ce n’était pas par votre voix, monsieur le ministre – que le problème n’était qu’administratif et qu’il serait réglé par le décret du 18 mai 2010.

Malheureusement, le décret ne règle rien, et vous savez que nous avons déjà entendu de nombreuses promesses à ce sujet.

En 2007, Mme Michelle Alliot-Marie avait adressé une circulaire aux préfets soulignant les difficultés rencontrées par un certain nombre d’usagers et préconisant la simplification. Cette initiative était restée sans effet direct.

Notre collègue Mme Monique Cerisier-ben Guiga avait saisi Mme Rachida Dati, malheureusement sans effet.

En décembre 2009, face à une inertie alarmante, M. Brice Hortefeux, alors ministre de l’intérieur, rappelait, par voie de circulaire, la nécessité de mettre un terme à la pratique de certains services préfectoraux qui demandaient, de façon systématique, la production d’un certificat de nationalité française lors d’un renouvellement de carte nationale d’identité.

Cette attitude, comme le rappelait lui-même M. Hortefeux, et je me permets de le citer, allait « à l’encontre des mesures de simplification qui ont déjà été prises pour éviter de faire peser de trop fortes contraintes sur les demandeurs nés à l’étranger ou nés en France de parents étrangers ». Malheureusement, cela n’a pas eu d’effet.

Le 9 février 2010, M. Hortefeux demandait à nouveau aux services de l’État « de considérer dès à présent, s’agissant du renouvellement des cartes nationales d’identité et des passeports, que suffit à prouver la nationalité française du demandeur la présentation d’une carte nationale d’identité sécurisée […] ».

En résumé, malgré tout ce que je viens de dire, le problème n’est toujours pas réglé, ce qui est très préjudiciable à nos concitoyens nés à l’étranger.

Aussi, par cet amendement, nous vous proposons, mes chers collègues, de revenir à ce que vous avez voté, à ce que nous avons voté, en inversant une bonne fois pour toutes la charge de la preuve afin de laisser à l’administration le soin, ou plutôt la responsabilité, en cas de doute de sa part, de prouver que le doute serait fondé, et non de faire porter par le citoyen la charge de prouver sa nationalité.

Il s’agit d’une mesure de bon sens, simple, pragmatique, qu’à l’avance, je vous remercie vivement, mes chers collègues, de bien vouloir adopter, comme vous l’avez fait en première lecture, afin de soutenir tous ceux de nos concitoyens qui se heurtent à de si grandes difficultés.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

Cet amendement reprend le texte d’un amendement adopté par le Sénat en première lecture, contre l’avis de la commission, je le rappelle.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

La commission maintient son avis défavorable, et je m’en explique.

Alerté à maintes reprises par les parlementaires, le Gouvernement a publié, le 18 mai 2010, un décret relatif à la simplification de la procédure de délivrance et de renouvellement de la carte nationale d’identité et du passeport, qui prévoit que la présentation d’un passeport ou d’une carte nationale d’identité d’ancienne ou de nouvelle génération est suffisante pour prouver la nationalité du titulaire.

Ce décret a été suivi récemment d’une circulaire rappelant que la demande de production d’un certificat de nationalité ne doit plus constituer qu’une exception, les services compétents devant privilégier la preuve de la nationalité française fondée sur la possession d’état de la qualité de Français, ce qui est, à l’évidence, beaucoup plus favorable aux intéressés.

Compte tenu de ces explications, il me semble que la demande formulée par les auteurs de l’amendement est largement satisfaite par le droit en vigueur.

C’est la raison pour laquelle la commission demande le retrait de cet amendement et, s’il était maintenu, confirmerait son avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Claude Guéant, ministre

Le Gouvernement émet également un avis défavorable.

En effet, le décret du 18 mai 2010 et la circulaire citée par M. le rapporteur ont eu des effets. Selon les statistiques du ministère de la justice, on a constaté, depuis l’entrée en vigueur du décret, une baisse de plus de 60 % du nombre de demandes de certificats de nationalité.

Je puis témoigner que, pratiquement, le ministère de l’intérieur ne reçoit plus de plaintes à ce sujet.

Il nous semble que ni la carte nationale d’identité ni le passeport n’ont vocation à constituer un titre de nationalité. Il faut faire très attention à ne pas créer un risque de fraudes documentaires. Or la mesure proposée comporte ce risque.

Je prends un exemple très concret : si une personne vient demander le renouvellement d’une carte nationale d’identité périmée depuis plus de deux ans, l’administration est dans l’incapacité de vérifier l’authenticité du titre, car elle n’a pas le droit de conserver les dossiers personnels plus de douze ans. Dans un tel cas, il me semble tout à fait normal que des pièces complémentaires soient demandées.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Monsieur Sueur, l'amendement n° 8 est-il maintenu ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

J’ai bien entendu les explications de M. le rapporteur, qui ne conteste pas le fait que le Sénat a choisi d’adopter cet amendement en première lecture.

Je comprendrais mal que le Sénat se déjuge. Le décret et la circulaire, dont nous avions connaissance, ne suffisent pas à régler le problème au fond.

M. le ministre a indiqué qu’une diminution du nombre des demandes avait été constatée. Pour notre part, nous pouvons cependant témoigner qu’un certain nombre de nos concitoyens n’arrivent toujours pas à faire reconnaître leurs droits, la seule difficulté venant de ce qu’ils sont nés à l’étranger. C’est tout de même très difficile à justifier !

En outre, je ne partage pas les arguments qui ont été exposés. D’ailleurs, dans le débat sur le présent texte, il est récurrent, quasi emblématique, que l’on soupçonne les gens a priori d’être des délinquants. En l’occurrence, on souligne qu’une carte nationale d’identité ou un passeport sont falsifiables. C’est vrai, mais ce n’est pas une raison pour suspecter tout individu se présentant avec sa carte nationale d’identité ou son passeport et affirmant qu’il est français d’être un délinquant potentiel. Où va-t-on, avec un tel raisonnement ?

Le même raisonnement est tenu pour les mariages. Le fait que des personnes veuillent se marier est considéré comme suspect et présentant un risque de supercherie.

Certes, des mesures très lourdes sont prévues dans le code pénal pour réprimer les mariages de complaisance, ceux qui ont lieu pour des raisons n’ayant rien à voir avec la libre volonté des personnes. De même, le code pénal contient, fort heureusement, des mesures pour lutter contre la falsification des passeports et des cartes nationales d’identité.

Mais il ne faut pas a priori considérer que chaque demandeur est un suspect, sauf à vivre dans une société de suspicion !

Cet amendement est donc très important, parce qu’il permet à tous les Français nés à l’étranger et disposant d’un titre, de faire valoir ce dernier.

Si des tricheries apparaissent, nous considérons que les tribunaux doivent en être logiquement saisis et nous demandons que les auteurs soient sévèrement réprimés, car nous ne sommes pas des laxistes.

Il s’agit simplement de prendre des mesures pour simplifier la vie de nos concitoyens, qui ont été nombreux à se plaindre, à écrire aux journaux, à témoigner de cas concrets.

C'est pourquoi, mes chers collègues, je maintiens cet amendement et j’espère vivement que le Sénat adoptera la même position qu’en première lecture. Je ne comprendrais pas pourquoi il changerait d’avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Je soutiens cet amendement.

J’ajoute qu’il me semble déceler une contradiction entre les explications données respectivement par la commission et par le Gouvernement.

Selon M. le rapporteur, le décret et la circulaire règlent le problème. Or vous nous dites, monsieur le ministre, que la question n’est pas là : toute personne étant soupçonnée d’avoir pu falsifier ses papiers, il faut lui demander d’autres documents pour pouvoir mener des investigations.

À ce moment-là, je vous objecterais, monsieur le ministre, que toute personne, qu’elle soit née en France ou à l’étranger, de parents français ou étrangers, qui veut faire renouveler un document d’identité est susceptible de présenter des papiers falsifiés. Il faudrait alors qu’elle puisse fournir également d’autres documents. Cela pose un problème : si tout un chacun est susceptible de produire des papiers falsifiés, il faut exiger de tous des documents supplémentaires.

Par conséquent, il n’y a pas de logique dans le refus que vous opposez à cet amendement.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

On l’a voté en première lecture ! Je ne comprends pas !

TITRE II

DISPOSITIONS RELATIVES À L’ENTRÉE ET AU SÉJOUR DES ÉTRANGERS

Chapitre IER

Dispositions relatives à la zone d’attente

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 9, présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Supprimer cette division et son intitulé.

La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.

Debut de section - PermalienPhoto de Alima Boumediene-Thiery

Les dispositions du chapitre Ier font partie des mesures autonomes du présent projet de loi. Elles ne sont prescrites par aucune des trois directives déjà mentionnées et sont présentées comme la réponse à un fait divers qui s’est déroulé voilà déjà plus d’un an et qui ne s’est pas reproduit : la découverte d’une centaine de ressortissants syriens d’origine kurde sur le littoral corse.

Rien ne justifie l’assouplissement des conditions de création des zones d’attente, si ce n’est la volonté du Gouvernement d’empêcher l’accès au séjour de migrants qui sont déjà présents sur le territoire français.

En dépit des modifications adoptées à l’Assemblée nationale et en commission, les conditions de création des zones d’attente ad hoc ne sont pas acceptables.

Tout d’abord, le seuil de dix migrants ne correspond pas à la notion d’afflux massif telle qu’elle est définie par le droit communautaire.

En outre, la proposition de notre rapporteur de limiter à vingt-six jours la durée d’existence d’une zone d’attente spéciale peut être interprétée comme un allongement de la durée de maintien en zone d’attente.

Par ailleurs, il est à craindre que des régions très vastes ne soient converties en zones d’attente ad hoc.

Les dispositions du chapitre Ier portent aussi gravement atteinte au droit constitutionnel d’asile. Certes, les personnes placées dans les zones d’attente ad hoc pourraient solliciter l’admission au séjour au titre de l’asile. Cependant, elles seraient soumises à la procédure de l’asile à la frontière, qui consiste en un simple examen de la recevabilité de la demande.

Or, dans son avis du 5 juillet 2010, la Commission nationale consultative des droits de l'homme, la CNDCH, a rappelé que « cette procédure ne présente toujours pas […] de garanties suffisantes permettant aux demandeurs d’asile d’exercer pleinement leur droit d’asile ».

Je rappelle en effet que, en cas de rejet de leur demande, les candidats à l’asile placés en zone d’attente peuvent être expulsés sous réserve d’un recours suspensif dans le délai de quarante-huit heures auprès du juge administratif, sans qu’ils puissent déposer une demande d’asile auprès de l’OFPRA.

Sachant que, en 2009, seuls 26, 8 % des demandeurs d’asile à la frontière ont été autorisés à entrer sur le territoire, il est à craindre que les demandeurs d’asile qui seraient placés en zone d’attente ad hoc ne soient éloignés plus rapidement vers le pays dans lequel ils ont leur résidence habituelle, ce qui peut mettre leur vie en péril.

S’agissant des personnes placées en zone d’attente ad hoc qui ne solliciteraient pas l’asile, elles pourraient se voir notifier un refus d’entrée, exécutoire d’office, sauf si elles demandaient à bénéficier d’un jour franc, sans possibilité alors de solliciter un recours suspensif.

Enfin, les dispositions du chapitre Ier ne sont pas acceptables car des mineurs étrangers isolés pourraient être « enfermés » dans ces zones d’attente spéciales. Or, d’après le Comité des droits de l’enfant des Nations unies, le placement en zone d’attente est particulièrement inadapté pour les mineurs. La création de zones d’attente risquerait notamment de porter atteinte au droit de ces mineurs à être représentés par un administrateur ad hoc.

Pour toutes ces raisons, je vous propose, mes chers collègues, de supprimer les dispositions du chapitre Ier.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

La commission émet un avis défavorable sur cet amendement de suppression, d’autant qu’il vise l’ensemble du chapitre. L’examen des amendements suivants nous donnera l’occasion d’apporter des précisions sur les dispositions de celui-ci.

Debut de section - Permalien
Claude Guéant, ministre

Le Gouvernement émet également un avis défavorable sur cet amendement.

L'amendement n'est pas adopté.

I. – §(Non modifié) L’article L. 221-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le présent titre s’applique également à l’étranger qui arrive en Guyane par la voie fluviale ou terrestre. »

II. – Après le premier alinéa de l’article L. 221-2 du même code, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsqu’il est manifeste qu’un groupe d’au moins dix étrangers vient d’arriver en France en dehors d’un point de passage frontalier, en un même lieu ou sur un ensemble de lieux distants d’au plus dix kilomètres, la zone d’attente s’étend, pour une durée maximale de vingt-six jours, du ou des lieux de découverte des intéressés jusqu’au point de passage frontalier le plus proche. »

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à Mme Catherine Tasca, sur l'article.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

Cet article innove en ce qui concerne les zones d’attente.

Projet de loi après projet de loi – et nombreux ont été les textes relatifs à l’immigration au cours de cette mandature –le Gouvernement ajoute de nouveaux dispositifs à ceux qui sont actuellement en vigueur, sans qu’il soit toujours aisé de s’y retrouver. Mais surtout, chaque fois, le Gouvernement s’éloigne un peu plus du droit commun pour multiplier les dispositifs d’exception.

Ainsi, l’article 6 de ce projet de loi tend à instaurer les zones d’attente ad hoc afin de rendre légales des pratiques qui, hier, étaient considérées comme contraires au droit par le juge administratif.

Cet article a pour objet de transposer l’article 18 de la directive Retour, qui pose des conditions très précises à la création de zones d’attente provisoires. Nous ne le répéterons jamais assez, celle-ci n’est autorisée que « lorsqu’un nombre exceptionnellement élevé de ressortissants de pays tiers soumis à une obligation de retour fait peser une charge lourde et imprévue sur la capacité des centres de rétention d’un État membre ou sur son personnel administratif et judiciaire ».

En contradiction avec la directive, qui évoque « un nombre exceptionnellement élevé de ressortissants », le Gouvernement a fixé à « au moins dix » le nombre d’étrangers dont l’arrivée en France « en dehors d’un point de passage frontalier » autorise la constitution d’une zone d’attente d’exception.

Fixer ce seuil à dix personnes semble aussi en contradiction avec la notion de « charge lourde et imprévue » pesant sur la capacité des centres de rétention d’un État membre ou sur son personnel administratif et judiciaire évoquée par la directive. Cette contradiction explique sans doute le silence du projet de loi sur cet élément.

Enfin, le choix de fixer le seuil à ce chiffre permettant le déclenchement du dispositif de la zone d’attente interpelle ceux d’entre nous qui ont défendu la mise en œuvre du mécanisme de protection temporaire pour les réfugiés afghans au mois de février 2010. L’une des conditions nécessaires à la mise en œuvre du mécanisme de protection temporaire était un afflux massif de réfugiés qui puisse mettre en cause le bon fonctionnement des systèmes d’asile. Le Gouvernement nous avait alors répondu que, en dépit du fait que 9 000 Afghans étaient arrivés jusqu’en France au cours du premier semestre de 2009, ce nombre était insuffisant pour justifier le déclenchement de la procédure de protection temporaire.

Hier, on considérait donc que l’arrivée de 9 000 Afghans ne constituait pas un afflux massif : ils étaient trop peu nombreux pour bénéficier de la protection temporaire ; aujourd’hui, l’arrivée d’un groupe de seulement dix étrangers serait suffisante pour justifier la création d’une zone d’attente d’exception ! Il est clair que le Gouvernement a une appréciation très variable de ce que constitue une arrivée importante de migrants, selon qu’il s’agit de leur accorder des droits ou de leur appliquer des règles restrictives…

Non seulement tout lieu du territoire français constitue une zone d’attente potentielle, mais le choix a été fait par le Gouvernement de faciliter au maximum la constitution de ces zones d’attente en optant pour des critères très larges, quitte a être en contradiction avec la directive Retour. La volonté manifeste d’étendre largement le recours à ces zones d’attente marque à la fois une extension des mesures de privation de liberté et un recul du droit commun.

Ce choix me paraît contraire aux principes républicains dont vous dites pourtant faire le cœur de la charte des droits et devoirs du citoyen français que vous souhaitez imposer aux candidats à la nationalité française.

Ces zones d’attente, qui pourront surgir à tout endroit du territoire, compliqueront nécessairement le travail des associations qui apportent leur soutien aux migrants, notamment pour s’assurer du respect du droit d’asile : faut-il y voir une des motivations du dispositif ?

C’est pourquoi nous présenterons un amendement de suppression de l'article 6, ainsi que plusieurs amendements tendant à tout le moins à en récrire l’alinéa 4.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Je suis saisi de trois amendements identiques.

L'amendement n° 10 est présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

L'amendement n° 149 est présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.

L'amendement n° 183 rectifié est présenté par MM. Mézard et Collin, Mme Escoffier, MM. Baylet et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Tropeano et Vall.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Bariza Khiari, pour présenter l'amendement n° 10.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

Monsieur le président, cet amendement vient d’être fort bien défendu par ma collègue Catherine Tasca.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à Mme Éliane Assassi, pour présenter l'amendement n° 149.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Cet article vise à créer la possibilité d’instaurer une zone d’attente ad hoc en cas d’arrivée sur le territoire français en dehors d’un point de passage frontalier d’un groupe d’au moins dix étrangers.

Les zones d’attente ad hoc sont des espaces juridiques fictifs destinés à accueillir des étrangers présumés ne pas être juridiquement admis à entrer en France malgré leur présence physique sur le sol français.

La création d’une telle zone est une mesure privative de liberté. L’arrivée d’un groupe d’au moins dix étrangers suffirait à la justifier, alors que les zones d’attente ad hoc sont actuellement créées dans les ports, les aéroports, les gares internationales et à proximité des lieux de débarquement en fonction des arrivées des migrants, afin de pouvoir enfermer ces derniers.

L’adoption de cet article aboutira simplement à une réduction des droits des primo-arrivants, au prétexte de lutter contre une prétendue immigration massive. En effet, le régime du séjour irrégulier est plus protecteur que celui de l’entrée irrégulière sur le territoire. C’est pourquoi maintenir ces migrants dans une zone d’attente permet de réduire leurs possibilités d’admission au séjour au titre de l’asile, dans des conditions d’exercice de leurs droits restreintes.

Nous ne sommes donc pas pour la multiplication des zones d’attente, bien au contraire ! Cela nous conduit à demander la suppression de cet article.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à Mme Anne-Marie Escoffier, pour présenter l'amendement n° 183 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Anne-Marie Escoffier

L’institution de zones d’attente ad hoc revêt une signification particulière dans le contexte que nous avons rappelé.

La libre circulation des personnes au sein de l’espace Schengen demeure pourtant un principe essentiel de la construction européenne, qui doit s’appliquer dans le respect absolu du droit d’asile.

Nous rappelons que nous sommes fermement attachés à ce que l’État puisse assurer la maîtrise des flux migratoires, mais dans le respect de la dignité des personnes souhaitant s’établir sur notre territoire.

Or, à l’évidence, les modalités d’institution des zones d’attente transitoires prévues à l’article 6 ne satisfont pas à cette condition, a fortiori quand nos collègues députés suppriment l’ensemble des modifications qu’avait apportées le Sénat et qui ont été fort heureusement réintroduites.

Nous rappelons aussi, à la suite de Mme Tasca, que l’article 18 de la directive Retour, censé être ici transposé, pose un certain nombre de conditions très précises, que ne reprend pas le présent article. Ainsi, la directive fait référence à un nombre « exceptionnellement élevé » d’étrangers, alors que le projet de loi fait mention d’un « groupe d’au moins dix étrangers ». De même, le présent texte ne comporte pas les notions de « charge lourde et imprévue » et de « mesures d’urgence ».

En somme, nous avons le sentiment que seront instituées des zones temporaires quasiment permanentes, pouvant être constituées à tout moment, en n’importe quel point de la frontière ou presque. Cela revient à banaliser la privation de liberté en tant que « mode de gestion ordinaire de l’immigration », comme le notait d’ailleurs la Commission nationale consultative des droits de l'homme dans son avis du 6 janvier dernier.

La rétention en zone d’attente est pourtant un régime de privation de liberté. Le Conseil constitutionnel, dans sa décision du 25 février 1992, l’a clairement indiqué, considérant que conférer « à l’autorité administrative le pouvoir de maintenir durablement un étranger en zone de transit, sans réserver la possibilité pour l’autorité judiciaire d’intervenir dans les meilleurs délais [était] contraire à la Constitution ».

Nous demandons la suppression de l’article 6.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

La commission émet un avis défavorable sur ces trois amendements identiques.

Le dispositif en question a pour objet de répondre à des situations exceptionnelles. La commission des lois a veillé à ce que l’existence de ces zones d’attente ad hoc soit bien limitée dans le temps. C’est pourquoi la durée de vingt-six jours a été fixée dans le texte, ce qui permet d’apporter une garantie supplémentaire quant au caractère non pérenne de ces zones d’attente.

Enfin, il est important de redire, puisque ce point semble avoir été contesté tout à l’heure, que les migrants concernés bénéficieront de l’ensemble des droits liés aux zones d’attente, notamment celui de demander leur admission sur le territoire français au titre de l’asile.

Debut de section - Permalien
Claude Guéant, ministre

Le Gouvernement émet également un avis défavorable sur ces amendements identiques.

Premièrement, cette disposition vise à répondre à des situations concrètes, telles que l’arrivée inopinée en Corse, au mois de janvier 2010, de 123 migrants.

Deuxièmement, je ne vois pas pourquoi le Gouvernement créerait des zones d’attente quand ce n’est pas nécessaire.

Troisièmement, nous n’inventons pas un régime nouveau, le régime des zones d’attente ayant été créé par la loi Quilès du 6 juillet 1992. La disposition proposée vise à adapter ce dispositif au cas d’étrangers qui entrent sur le territoire national en dehors d’un point de passage frontalier.

Il serait assez paradoxal de ne permettre le placement en zone d’attente que des seuls étrangers qui arrivent à la frontière par un point de passage répertorié.

Quatrièmement, le dispositif préserve les droits des migrants, comme M. le rapporteur vient de le dire. Ceux-ci pourront demander l’asile, ainsi que voir un médecin, communiquer avec un avocat ou recourir à un interprète. La commission des lois a d’ailleurs eu l’idée excellente de renforcer ces garanties en fixant une durée maximale de vingt-six jours.

Enfin, je précise à l’adresse de Mme Tasca que la directive Retour ne s’applique pas aux zones d’attente.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Je mets aux voix les amendements identiques n° 10, 149 et 183 rectifié.

Les amendements ne sont pas adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L’amendement n° 11, présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Alinéas 1 et 2

Supprimer ces alinéas.

La parole est à M. Alain Anziani.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Anziani

Les alinéas 1 et 2 de l’article 6 visent à permettre la création de zones d’attente aux frontières terrestres et fluviales de la Guyane.

Cette disposition a été introduite à l’Assemblée nationale par la voie de l’adoption d’un amendement de M. Christian Estrosi. Son objet est clair : freiner l’immigration en provenance du Brésil et du Surinam.

J’observe que ce dispositif n’a pas, semble-t-il, fait l’objet de la moindre concertation avec les parlementaires de Guyane.

En outre, il s’agit de frontières situées en pleine jungle, longues de quelque 1 200 kilomètres, la Guyane étant séparée du Surinam par le fleuve Maroni et du Brésil par l’Oyapock, à l’Ouest. Comment va-t-on s’y prendre, dans de telles conditions, pour créer une gigantesque zone d’attente comportant des structures d’hébergement assurant des prestations de type hôtelier ? Des questions de bon sens se posent ! À l’évidence, il s’agit d’une mesure surréaliste, qui ne peut prospérer.

D’autres solutions étaient envisageables. On sait que le département de la Guyane, ainsi d’ailleurs que celui de Mayotte, est exposé à une forte pression migratoire, comme en témoigne le dernier rapport sur les orientations de la politique de l’immigration et de l’intégration, qui indique que le nombre d’expulsions d’étrangers entrés illégalement en Guyane a augmenté de 86 % entre 2003 et 2009. Peut-être aurait-il été plus simple de commencer par développer une coopération avec le Brésil et le Surinam, plutôt que de monter une sorte d’« usine à gaz » en pleine jungle !

Debut de section - Permalien
Claude Guéant, ministre

Avis défavorable également.

L’amendement n’est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Je suis saisi de cinq amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 12, présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Lorsqu’un nombre exceptionnellement élevé de ressortissants de pays tiers vient d’arriver en France en dehors d’un point de passage frontalier, les articles L. 811-1 à L. 811-8 s’appliquent. »

La parole est à M. Richard Yung.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

Il s’agit d’un amendement d’appel.

Nous proposons, en cas d’afflux massif de migrants, de recourir au mécanisme de la protection temporaire, qui a été instauré par une directive européenne de 2001, plutôt que de créer des zones d’attente ad hoc.

L’attribution de la protection temporaire apporte des garanties aux étrangers, qui se voient délivrer un document provisoire de séjour, assorti, le cas échéant, d’une autorisation provisoire de travail. Le bénéfice de la protection temporaire est accordé pour une période d’un an.

Par ailleurs, l’octroi de la protection temporaire ne préjuge pas la reconnaissance du statut de réfugié. À la fin de la période d’un an, les personnes concernées peuvent rentrer chez elles sans que cela pose de problèmes particuliers.

Alors qu’il est beaucoup question de l’afflux massif de ressortissants tunisiens ou libyens, nous entendons rappeler au Gouvernement l’existence d’un cadre juridique permettant de faire face au problème, à l’échelon européen qui plus est. Nul doute que nos amis Italiens apprécieraient le recours à une telle solution. Mais, pour l’instant, personne n’en parle ; peut-être ne veut-on pas résoudre ce problème…

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L’amendement n° 16, présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Dans une situation exceptionnelle, lorsqu’il est manifeste qu’un nombre exceptionnellement élevé d’étrangers vient d’arriver en France en dehors d’un point de passage frontalier en un même lieu situé à proximité d’une frontière maritime ou terrestre, la zone d’attente s’étend, pour une durée maximale de vingt-six jours, du de découverte des intéressés jusqu’au point de passage frontalier le plus proche ».

La parole est à M. Alain Anziani.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Anziani

Le présent projet de loi a notamment pour objet de transposer la directive Retour, dont le paragraphe 1 de l’article 18 dispose que « lorsqu’un nombre exceptionnellement élevé de ressortissants de pays tiers […] fait peser une charge lourde et imprévue sur la capacité des centres de rétention d’un État membre ou sur son personnel administratif et judiciaire, l’État membre en question peut, aussi longtemps que cette situation exceptionnelle persiste, décider d’accorder pour le contrôle juridictionnel des délais plus longs ».

Mais que faut-il entendre par « un nombre exceptionnellement élevé » de ressortissants de pays tiers ? Le projet de loi apporte une réponse : au moins dix. Or dix est peut-être un nombre élevé – encore que cela soit déjà discutable –, mais certainement pas exceptionnellement élevé !

Vous êtes donc en train de produire un texte qui, manifestement, sera entaché d’inconventionnalité. Nous vous mettons en garde contre ce risque et proposons une rédaction plus respectueuse de la directive.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 15, présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Au début de cet alinéa, insérer les mots :

Dans une situation exceptionnelle,

La parole est à Mme Patricia Schillinger.

Debut de section - PermalienPhoto de Patricia Schillinger

D’après l’exposé des motifs du présent projet de loi, l’assouplissement des conditions de création de zones d’attente vise à répondre à des situations exceptionnelles.

Or les dispositions de l’article 6 ne font pas ressortir le caractère exceptionnel de l’extension de la faculté d’instituer des zones d’attente. Par conséquent, nous proposons de limiter la possibilité de créer des zones d’attente ad hoc, en reprenant dans la loi les termes de la directive Retour, qui conditionne explicitement la prise de mesures dérogatoires au droit commun à l’existence d’une situation exceptionnelle.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 14, présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Remplacer les mots :

groupe d’au moins dix

par les mots :

nombre exceptionnellement élevé d’

La parole est à M. Michel Teston.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Teston

Il est proposé, à l'article 6, de permettre la création d’une zone d’attente en cas d’arrivée sur le territoire en dehors d’un point de passage frontalier d’un groupe d’au moins dix étrangers.

Or cette notion, introduite en première lecture à l’Assemblée nationale, n’a aucun fondement juridique.

Il est en outre paradoxal de vouloir fixer à dix le seuil à partir duquel on peut considérer qu’il y a une arrivée massive d’étrangers sur le territoire alors que, à la fin de 2009, le Gouvernement avait considéré que l’entrée en France de plusieurs centaines de ressortissants afghans ne constituait pas un afflux massif et ne nécessitait donc pas la mise en œuvre des dispositions de la directive 2001/55/CE du Conseil du 20 juillet 2001 relative à la protection temporaire.

Afin de surmonter cette contradiction, nous proposons de reprendre dans la loi les termes de l’article 18 de la directive Retour, qui conditionne explicitement la prise de mesures dérogatoires au droit commun à la présence d’« un nombre exceptionnellement élevé de ressortissants de pays tiers ».

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 13, présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Supprimer les mots :

ou sur un ensemble de lieux distants d'au plus dix kilomètres

La parole est à Mme Bariza Khiari.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

L’article 6 prévoit la possibilité de transformer en zone d’attente spéciale « un ensemble de lieux distants d’au plus dix kilomètres », alors que, en l’état actuel du droit, les zones d’attente s’étendent des points d’embarquement et de débarquement – que le mode de transport soit le bateau, le train ou l’aéronef – aux points de contrôle frontaliers.

En première lecture, M. le rapporteur prétendait qu’une telle délimitation spatiale permettrait aux autorités de « prendre en compte les stratégies qui peuvent être déployées par les réseaux de passeurs ».

Concrètement, l’entrée en vigueur de ces dispositions pourrait avoir pour conséquence de transformer en zones d’attente spéciales des régions entières, telles que le Calaisis ou la côte de la mer du Nord. Une telle extension n’est pas acceptable, car elle s’accompagnerait d’une restriction des droits des étrangers.

Nous proposons de réduire la possibilité de créer ces lieux de privation de liberté en supprimant les mots : « ou sur un ensemble de lieux distants d’au plus dix kilomètres ».

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

Tous ces amendements ayant déjà fait l’objet d’une discussion approfondie tant en commission qu’en séance publique à l’occasion de la première lecture, on me permettra d’être concis.

S’agissant de l’amendement n° 12, je rappellerai simplement que le dispositif de la protection temporaire et la création de zones d’attente ad hoc reposent sur deux fondements juridiques totalement différents. Mieux vaut, pour les étrangers concernés, être placés dans une zone d’attente temporaire, ce qui leur ouvre un certain nombre de droits, notamment celui de demander l’asile, que bénéficier de la protection temporaire, régime bien moins favorable et qui ne peut être mis en œuvre que sur décision du Conseil de l'Union européenne. La commission émet donc un avis défavorable.

En ce qui concerne l’amendement n° 16, notre collègue Alain Anziani s’est interrogé sur la notion de « nombre exceptionnellement élevé », qu’il juge floue. Or, précisément, la fixation d’un seuil à « au moins dix » ressortissants de pays tiers permettra aux magistrats qui auraient à connaître de recours sur ce point de s’appuyer sur un critère objectif, clair et précis pour trancher. La commission est donc défavorable à cet amendement.

Pour les mêmes raisons, elle émet un avis défavorable sur les amendements n° 15 et 14.

Enfin, concernant l’amendement n° 13, la rédaction actuelle du texte permettra aux autorités de prendre en compte les stratégies qui peuvent être éventuellement déployées par les réseaux de passeurs pour déjouer les dispositifs de contrôle mis en place. C'est pourquoi la commission émet un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Claude Guéant, ministre

Le Gouvernement est également défavorable à l'ensemble de ces amendements. J’ajouterai aux explications données par M. le rapporteur quelques éléments complémentaires.

Je rappelle, tout d’abord, que le régime de la protection temporaire est prévu par une directive communautaire de 2001 et qu’il concerne des situations très particulières, notamment des déplacements de populations lors de conflits armés. Il a été conçu dans le contexte des crises balkaniques.

Sa mise en œuvre, qui relève, comme le disait M. le rapporteur, d’une décision du Conseil de l'Union européenne prise sur proposition de la Commission, est d’ailleurs conditionnée au fait que les étrangers concernés ne peuvent rentrer dans leur pays d’origine. Les situations visées à l’article 6 n’entrent pas, à l’évidence, dans ce cadre.

Je précise une nouvelle fois que les dispositions de la directive Retour s’appliquent non pas aux zones d’attente, mais à la rétention, dont le régime est différent.

Enfin, madame Khiari, il peut arriver que des migrants se répartissent en plusieurs sous-groupes pour entrer sur notre territoire en différents points distants de moins de dix kilomètres. Ce cas de figure nous semble devoir être pris en compte.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement n'est pas adopté.

L'article 6 est adopté.

Après le premier alinéa de l’article L. 221-4 du même code, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« En cas de maintien simultané en zone d’attente d’un nombre important d’étrangers, la notification des droits mentionnés au premier alinéa s’effectue dans les meilleurs délais, compte tenu du nombre d’agents de l’autorité administrative et d’interprètes disponibles. De même, dans ces mêmes circonstances particulières, les droits notifiés s’exercent dans les meilleurs délais. »

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à Mme Catherine Tasca, sur l'article.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

L’article 7 s’inscrit dans le prolongement de l’article 6. Il vise à encadrer le défaut de notification de leurs droits aux migrants se trouvant en zone d’attente.

L’article 7 prévoit que, « en cas de maintien simultané en zone d’attente d’un nombre important d’étrangers, la notification des droits mentionnés au premier alinéa s’effectue dans les meilleurs délais, compte tenu du nombre d’agents de l’autorité administrative et d’interprètes disponibles. De même, dans ces mêmes circonstances particulières, les droits notifiés s’exercent dans les meilleurs délais. » Peut-on faire plus vague ?

Monsieur le ministre, vous venez de nous gratifier d’une explication de texte sur l’application de la directive Retour, en distinguant le droit applicable dans les centres de rétention du droit applicable dans les zones d’attente. J’avoue que, jusqu’à présent, nous n’avions absolument pas perçu cette distinction. En effet, en matière de privation de liberté, la situation des personnes retenues est la même, qu’elles se trouvent dans un centre de rétention ou dans une zone d’attente ad hoc, et leurs droits devraient donc être également identiques.

La directive Retour pose des conditions précises, et fait notamment référence à « une charge lourde et imprévue » pesant « sur la capacité des centres de rétention d’un État membre ou sur son personnel administratif et judiciaire ». Or, si ce critère a été mis de côté s’agissant de l’article 6, ce qui rend plus facile le recours aux zones d’attente, il réapparaît par un extraordinaire tour de passe-passe à l’article 7, pour justifier un éventuel défaut de notification de leurs droits aux migrants.

L’usage qui est fait de ce critère est absolument contestable. Encore une fois, ce sont la lettre et l’esprit de la directive Retour qui sont outrepassés, alors que celle-ci est déjà elle-même très restrictive.

On ne peut pas dire en même temps que l’on crée des zones d’attente ad hoc parce que les centres de rétention ordinaires ne sont pas en mesure de faire face à l’arrivée de ces nouveaux migrants et que ce n’est pas le même droit qui s’applique dans ces deux types de lieux !

Vous nous répétez suffisamment que l’administration, qu’il s’agisse du ministère de l’intérieur ou de celui de la justice, dispose de tous les moyens nécessaires à la mise en œuvre de votre politique. Comment, dès lors, comprendre la volonté du Gouvernement d’introduire pareil article ?

En réalité, l’article 7, comme le précédent, témoigne que le Gouvernement renonce à garantir le respect des droits et libertés individuels dans ces zones. À ce titre, je trouve véritablement malsaine son obsession de restreindre les droits des étrangers à l’occasion de l’examen de chaque nouveau projet de loi sur l’immigration.

Qu’il s’agisse des délais ou de la notification des droits, nous constatons que ces zones d’attente « nomades » constitueront de fait des zones de non-droit pour les étrangers.

En matière de libertés publiques, les dispositifs exorbitants du droit commun doivent toujours nous alerter, c’est pourquoi nous combattons ce projet de loi.

Je souhaiterais, monsieur le ministre, que vous reveniez sur la distinction formelle que vous faites entre le droit applicable dans les centres de rétention et le droit applicable dans les zones d’attente.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Je suis saisi de trois amendements identiques.

L'amendement n° 17 est présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

L'amendement n° 150 est présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.

L'amendement n° 184 rectifié est présenté par MM. Mézard et Collin, Mme Escoffier, MM. Baylet et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Tropeano et Vall.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Richard Yung, pour présenter l’amendement n° 17.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

Les dispositions de l’article 7 visent à assouplir encore davantage les conditions dans lesquelles s’effectue la notification de leurs droits aux étrangers maintenus en zone d’attente.

Certes, cette démarche est plus difficile quand le nombre de personnes concernées est élevé. Il est notamment ardu de trouver suffisamment d’interprètes.

Cela étant, nous considérons que la rédaction présentée est trop large et imprécise. Ainsi, aucun délai pour procéder à la notification des droits n’est fixé.

En outre, nous pensons que ce flou cache la volonté de priver les juges de la possibilité de remettre en cause des décisions pour défaut de notification des droits dans les délais.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à Mme Éliane Assassi, pour présenter l'amendement n° 150.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Non contents de prévoir la possibilité de créer de multiples zones d’attente ad hoc en fonction des besoins, vous portez atteinte aux maigres droits conférés aux étrangers concernés dès lors qu’ils s’y trouveront en « nombre important ».

Ainsi, leur information dans une langue qu’ils comprennent sur leurs droits à demander l’assistance d’un interprète ou d’un médecin, de communiquer avec un conseil ou toute personne de leur choix et de quitter à tout moment la zone d’attente pour toute destination située hors de France ne sera plus assurée qu’en fonction du nombre d’agents de l’autorité administrative et d’interprètes disponibles !

Déjà, la loi de 2003 relative à la maîtrise de l’immigration avait substitué à la notion d’information « immédiate » celle d’information « dans les meilleurs délais ». Il s’agit ici de franchir un nouveau pas dans la même direction, afin de restreindre les possibilités d’invalidation de procédure de maintien en zone d’attente par le juge judiciaire et de permettre à l’autorité administrative de mener ladite procédure comme bon lui semble.

Parce que l’administration ne saurait manquer à l’impératif de notification immédiate des droits par tous les moyens nécessaires, y compris en termes d’effectifs, nous ne pouvons accepter cet article, qui limite sa responsabilité au détriment de la garantie des droits fondamentaux des étrangers.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à Mme Anne-Marie Escoffier, pour présenter l'amendement n° 184 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Anne-Marie Escoffier

L’article 7 est la conséquence fâcheuse de l’article 6, puisqu’il tend à autoriser que la notification et l’exercice des droits des personnes retenues dans les zones d’attente puissent être retardés pour n’intervenir que « dans les meilleurs délais », dans des circonstances particulières et « compte tenu du nombre d’agents de l’autorité administrative et d’interprètes disponibles ».

En d’autres termes, c’est faire dépendre l’exercice de garanties essentielles relevant du niveau constitutionnel de modalités d’organisation de l’administration elle-même.

Les termes employés sont fort imprécis et me paraissent peu acceptables. Je rappelle que le Conseil constitutionnel avait, en 2003, validé un dispositif comparable comportant la notification des droits dans les meilleurs délais, mais en précisant que cela devait être justifié par des raisons objectives, ce que ne prévoit pas le présent texte.

La notification de leurs droits aux personnes privées de liberté est une garantie essentielle de niveau constitutionnel, qui s’inscrit au cœur du contrôle exercé par le juge. En prévoyant que cette notification des droits se fera dans les meilleurs délais possibles, l’article 7 vise à rendre régulières des mesures de privation de liberté non assorties de cette garantie et à tarir ainsi indûment le contentieux, pour des motifs tenant simplement à la régulation des flux migratoires.

Par ailleurs, comme Mme Tasca, je m’étonne que la directive Retour ne soit pas applicable aux zones d’attente ad hoc, d’autant que vous nous avez indiqué, monsieur le ministre, que celles-ci avaient pour vocation de faire face à des besoins imprévus et aléatoires ne pouvant être couverts par les centres de rétention… Je vous remercie par avance des précisions que vous voudrez bien nous apporter sur ce point.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

La commission a émis un avis défavorable sur les amendements de suppression n° 17, 150 et 184 rectifié.

L’article 7 précise les conditions dans lesquelles les étrangers se verront notifier leurs droits. La notion de « meilleurs délais » continuera à être appréciée in concreto, en fonction des circonstances et des difficultés rencontrées, auxquelles l’administration s’adaptera au mieux. Je souligne que la commission a modifié la rédaction de cet article pour la clarifier.

Debut de section - Permalien
Claude Guéant, ministre

Le Gouvernement est également défavorable à ces amendements.

Je confirme que les dispositions de l’article 18 de la directive Retour ne s’appliquent qu’aux centres de rétention : il n’y a aucune équivoque. Alors que les centres de rétention sont situés à l’intérieur du territoire, les zones d’attente relèvent de l’arrivée à la frontière : il s’agit donc de deux régimes juridiques tout à fait différents. Le Gouvernement français n’a pas le pouvoir de modifier une directive de l’Union européenne…

Je rappelle en outre que, dans ces zones d’attente provisoires, les droits des étrangers seront strictement les mêmes que dans les zones d’attente permanentes. Il s’agit, pour le Gouvernement, de répondre avec pragmatisme à des circonstances inattendues et particulières, liées à l’arrivée inopinée, en un lieu qui n’est pas organisé en zone d’attente, d’un nombre significatif d’étrangers voulant pénétrer sur notre territoire. Dans une telle situation, chacun le comprend bien, il faut mettre en œuvre les moyens nécessaires.

Le droit actuel répond très précisément, en termes de garanties juridiques, aux préoccupations des auteurs des amendements. Il prévoit en effet que le juge des libertés et de la détention s’assurera que tous les moyens ont été mis en œuvre pour notifier ses droits à chacun des intéressés dans les meilleurs délais.

Ce dispositif est strictement conforme à la jurisprudence de la Cour de cassation.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Je mets aux voix les amendements identiques n° 17, 150 et 184 rectifié.

Les amendements ne sont pas adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 18, présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Alinéa 2, première phrase

Remplacer le mot :

important

par les mots :

exceptionnellement élevé

La parole est à Mme Bariza Khiari.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

La rédaction imprécise de l’alinéa 2 de l’article 7 fait craindre que, en matière de notification des droits, le régime dérogatoire ne devienne la règle.

Les termes : « un nombre important d’étrangers » risquent en effet d’être interprétés de manière abusive par l’administration. Les dispositions prévues à l’article 7 pourraient être mises en œuvre dès lors que le nombre d’étrangers maintenus en zone d’attente sortira de l’ordinaire.

Afin de prévenir un tel risque, nous proposons de reprendre dans la loi les termes de l’article 18 de la directive Retour, qui conditionne l’application des mesures dérogatoires au droit commun à la présence d’« un nombre exceptionnellement élevé de ressortissants de pays tiers ».

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement, estimant que la notion de « nombre exceptionnellement élevé » risquerait d’être beaucoup trop restrictive. Par ailleurs, la directive Retour n’est pas applicable aux zones d’attente.

Dans tous les cas, il appartiendra à l’administration de faire état des difficultés concrètes rencontrées pour justifier tout délai dans la notification des droits et dans l’exercice de ceux-ci, en fonction des circonstances de l’espèce.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à M. Alain Anziani, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Anziani

Je voudrais relever un paradoxe.

M. le rapporteur nous a dit, au sujet de l’alinéa 4 de l’article 6, qu’il fallait inscrire dans la loi un seuil précis en termes de nombre d’étrangers arrivant à la frontière, afin de donner un critère objectif aux tribunaux.

Or cette logique ne vaut plus à l’article 7, dont la rédaction fait simplement référence à « un nombre important d’étrangers ». Soyez cohérents !

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 19, présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - L’article L. 221-5 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le mineur isolé ne peut être éloigné avant d’avoir rencontré l'administrateur ad hoc qui lui a été désigné. »

La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.

Debut de section - PermalienPhoto de Alima Boumediene-Thiery

Conformément à l’article L. 221-5 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, lorsqu’un étranger mineur non accompagné d’un représentant légal qui n’est pas autorisé à entrer en France est placé en zone d’attente, le procureur de la République, saisi par la police de l’air et des frontières, lui désigne sans délai un administrateur ad hoc qui assure sa représentation dans toutes les procédures administratives et juridictionnelles relatives au maintien en zone d’attente.

Ce dispositif, créé en 2002, connaît de nombreux dysfonctionnements, qui sont préjudiciables aux droits des mineurs étrangers isolés.

Ainsi, l’administrateur ad hoc n’est pas présent au moment de la notification au mineur du refus d’entrée qui lui est opposé et de son placement en zone d’attente.

En outre, il subit souvent une obstruction policière et doit engager une véritable course contre la montre lorsqu’il essaie d’empêcher l’éloignement d’un mineur vers un pays où il serait exposé à des risques.

Dans ces conditions, de nombreux mineurs étrangers isolés sont expulsés sans même avoir pu contester leur placement en zone d’attente, non plus que leur expulsion.

Nous craignons que ces difficultés ne s’accentuent en cas de création d’une zone d’attente spéciale. Ces inquiétudes sont partagées par la Commission nationale consultative des droits de l’homme, qui, dans un avis très critique en date du 5 juillet dernier, a affirmé que « du fait de la mobilité des zones d’attente ad hoc, les difficultés rencontrées pour désigner un administrateur ad hoc qualifié dans les meilleurs délais, comme l’exige la loi, vont être démultipliées et la représentation des mineurs risque d’être inexistante ».

Afin de garantir le respect des droits des mineurs étrangers isolés, nous proposons d’insérer un alinéa additionnel, afin de poser le principe que ces mineurs ne pourront pas être éloignés avant d’avoir rencontré un administrateur ad hoc.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement, dans la mesure où les dispositions de l’article L. 221-5 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile prévoient déjà que les mineurs isolés soient assistés par un administrateur ad hoc durant le maintien en zone d’attente. Ce dernier est chargé de faire prévaloir les droits du mineur et doit être désigné sans délai. Peut-être leur nombre est-il insuffisant, mais cette question relève du domaine réglementaire, et non de la loi.

Debut de section - Permalien
Claude Guéant, ministre

Le Gouvernement émet également un avis défavorable.

J’ajoute que l’octroi du jour franc au mineur placé en zone d’attente est désormais automatique et que ce délai donne précisément le temps d’organiser la rencontre avec l’administrateur ad hoc.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 20, présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

 - L’article L. 221-5 du même code est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« L’étranger mineur non accompagné d’un représentant légal ne peut être renvoyé dans un pays par lequel il a transité.

« Avant d’éloigner du territoire un mineur non accompagné d’un représentant légal, des démarches doivent être engagées afin de s’assurer qu’il sera remis à un membre de sa famille, à un tuteur désigné ou à des structures d’accueil adéquates dans l’État de retour. »

La parole est à M. Michel Teston.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Teston

En l’état actuel du droit, les mineurs étrangers isolés qui ne sont pas admis sur notre territoire peuvent être refoulés à l’issue d’un placement en zone d’attente. Ce régime est dérogatoire au droit commun, la législation française prohibant en effet toutes les formes d’éloignement forcé à l’égard des mineurs, qu’il s’agisse de mesures administratives – expulsion – ou judiciaires –interdiction du territoire français. Les enfants maintenus en zone d’attente sont donc traités comme des étrangers adultes !

Ce dispositif n’a pas d’équivalent dans les États européens qui enregistrent des flux migratoires entrants comparables à ceux que connaît la France. Le Royaume-Uni et l’Allemagne, par exemple, ne recourent pas au placement en zone d’attente pour les mineurs étrangers isolés et ne leur refusent pas non plus l’entrée sur le territoire.

En 2008, sur environ 1 000 mineurs étrangers isolés arrivés à l’aéroport de Roissy-Charles-de-Gaulle, 341 ont été expulsés ou ont poursuivi leur voyage vers une autre destination. Cette pratique n’est pas acceptable, car, selon le Conseil d’État, le renvoi d’un mineur étranger isolé vers son pays d’origine peut porter atteinte « à l’intérêt supérieur de l’enfant et [doit] être regardé comme contraire au 1) de l’article 3 de la Convention internationale des droits de l’enfant ».

Par ailleurs, les mineurs étrangers isolés placés en zone d’attente sont parfois éloignés vers des pays où ils n’avaient fait que transiter, sans bénéficier des garanties suffisantes assurant qu’ils ne seront pas exposés à des exactions et qu’ils seront pris en charge à leur arrivée. Ce faisant, les autorités françaises mettent ces enfants en danger.

Une telle pratique est contraire à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, qui, dans un arrêt du 12 octobre 2006, a considéré que la situation d’extrême vulnérabilité doit être déterminante et prédominer sur la qualité d’étranger en séjour illégal.

Soucieux de garantir le respect des droits de l’enfant, nous proposons d’interdire le renvoi des mineurs étrangers isolés placés en zone d’attente dans les pays par lesquels ils ont transité.

Par ailleurs, nous souhaitons laisser aux autorités compétentes le temps d’évaluer sereinement les dangers auxquels les mineurs étrangers isolés risquent d’être confrontés en cas de retour dans le pays où ils ont leur résidence habituelle. En cas d’éloignement, les autorités devraient également s’assurer que la procédure est menée avec l’accord du mineur et prend en considération prioritairement son projet de vie.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.

Les mineurs isolés qui sont maintenus en zone d’attente bénéficient de l’intervention de l’administrateur ad hoc, qui est chargé de faire prévaloir leurs droits.

Je rappelle par ailleurs que les mineurs étrangers isolés présents sur notre territoire ne peuvent être éloignés, quand bien même ils se trouveraient en situation irrégulière. De ce point de vue, les choses sont très claires.

J’ajoute que, aux yeux de la commission, l’adoption d’un tel amendement risquerait de créer un effet de filière.

Debut de section - Permalien
Claude Guéant, ministre

Avis défavorable également.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à M. Michel Teston, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Teston

Nous avons du mal à comprendre l’avis défavorable de la commission et du Gouvernement, puisque notre amendement ne fait que reprendre le dispositif de l’article 10 de la directive Retour, aux termes duquel « avant d’éloigner du territoire d’un État membre un mineur non accompagné, les autorités de cet État membre s’assurent qu’il sera remis à un membre de sa famille, à un tuteur désigné ou à des structures d’accueil adéquates dans l’État de retour ». Comment se fait-il que l’on n’applique pas cette directive, qui nous paraît protectrice des droits des mineurs ?

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à Mme Catherine Tasca, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

Je souhaiterais revenir sur la distinction entre le régime juridique des zones d’attente et celui des centres de rétention.

Je fais confiance, monsieur le ministre, à votre lecture du texte de la directive, mais je tiens à souligner une forme d’incohérence.

Alors que l’un des objets du projet de loi est la transposition de la directive Retour, comment pouvez-vous considérer que celle-ci ne s’applique pas aux zones d’attente ? Vous avez peut-être raison formellement, mais, sur le fond, je vous assure que cette position est très difficilement défendable, d’autant que vous avez indiqué à plusieurs reprises que les droits des étrangers se trouvant dans ces zones d’attente étaient garantis et seraient en fait identiques à ceux des personnes accueillies dans les centres de rétention, même si la directive ne le dit pas explicitement. Il me semble que, dans l’esprit, la directive prévoit que les mêmes droits soient applicables dans les zones d’attente et dans les centres de rétention.

Debut de section - Permalien
Claude Guéant, ministre

Je répète que la lecture de la directive Retour ne souffre aucune ambiguïté.

M. Teston confond la situation des étrangers placés en zone d’attente avec celle des étrangers en situation de rétention administrative.

Par ailleurs, l’amendement n° 20 n’est pas utile au regard du droit positif existant, puisque les mineurs étrangers isolés sont aujourd’hui traités dans le respect des droits que leur confère le statut de mineur. En effet, ils sont placés sous le couvert du régime général de protection des mineurs. Cette protection incombe à l’autorité judiciaire, et toutes les décisions concernant des mineurs sont prises conformément aux principes de la Convention internationale des droits de l’enfant.

Dans la pratique, le réacheminement est décidé, sous le contrôle de l’autorité judiciaire, vers le pays d’origine, et non vers le pays de transit. J’ajoute que, généralement, un mineur a des parents dans son pays d’origine.

L'amendement n'est pas adopté.

L'article 7 est adopté.

Après l'article L. 222-7 du même code, il est inséré un article L. 222-8 ainsi rédigé :

« Art. L. 222-8. – En cas de violation des formes prescrites par la loi à peine de nullité ou d’inobservation des formalités substantielles, toute juridiction, y compris la Cour de cassation, qui est saisie d’une demande d’annulation ou qui relève d’office une telle irrégularité ne peut prononcer la nullité que lorsque celle-ci a eu pour effet de porter atteinte aux droits de l’étranger. »

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° 21 est présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

L'amendement n° 151 est présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Richard Yung, pour présenter l’amendement n° 21.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

L’article 10 prévoit que seules les irrégularités formelles présentant un caractère substantiel, c'est-à-dire graves, et ayant pour effet de porter atteinte aux droits de l’étranger entraînent l’annulation du maintien en zone d’attente.

Sur la forme, ces dispositions ont d’ailleurs quelque peu évolué depuis la première lecture. Notre rapporteur nous propose aujourd’hui de calquer la rédaction de cet article 10 sur celle de l’article 802 du code de procédure pénale.

Nous considérons que cet ajustement ne change rien sur le fond. Ces dispositions relèvent du même esprit que celles dont nous venons de discuter : elles tendent à restreindre le champ du contrôle du juge judiciaire – nous retrouvons cette obsession de limiter la capacité des juges – et s’inscrivent dans la droite ligne des conclusions de la commission Mazeaud, qui évoquaient une « censure juridictionnelle » ; les termes sont forts !

Ces dispositions créent une hiérarchie des causes de nullité de la procédure selon la gravité supposée de leurs conséquences. Selon nous, elles ne sont pas acceptables, car toute irrégularité peut porter atteinte aux droits de l’étranger et le juge judiciaire doit pouvoir la constater.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La parole est à Mme Marie-Agnès Labarre, pour présenter l'amendement n° 151.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Agnès Labarre

Cet article tend à neutraliser le pouvoir de contrôle du juge des libertés et de la détention et à affaiblir considérablement les droits des étrangers placés en zone d’attente.

En effet, il précise que la nullité entraînant la fin du maintien d’un étranger en zone d’attente ne peut plus être prononcée que dans les cas où les violations de forme et les inobservations sont substantielles et où elles portent directement atteinte aux droits de l’étranger.

Pourtant, la Cour de cassation estime que, en matière de mesures privatives de liberté – le maintien en zone d’attente en est une –, les irrégularités doivent être considérées avec la plus grande rigueur. Ainsi, en matière de rétention, il n’appartient pas à l’étranger de fournir la preuve du préjudice. C’est le juge qui doit s’assurer que l’intéressé a été pleinement informé de ses droits et a été en mesure de les faire valoir. De plus, toute irrégularité porte potentiellement atteinte aux droits de la personne privée de liberté ; c’est le principe que consacre la Cour de cassation en matière pénale.

Un tel article vise à amoindrir la jurisprudence de la Cour de cassation, qui apporte pourtant les protections nécessaires aux personnes privées de leur liberté. C’est pourquoi nous en demandons la suppression.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

La commission émet un avis défavorable sur ces deux amendements de suppression.

Comme l’a dit tout à l’heure notre collègue Richard Yung, la commission a calqué sa rédaction de l’article 10 sur les dispositions de l’article 802 du code de procédure pénale, pour apporter le maximum de garanties. C’est la raison pour laquelle elle considère qu’il ne convient pas de supprimer cet article.

Debut de section - Permalien
Claude Guéant, ministre

Le Gouvernement partage l’avis de la commission. Il ne s’agit, en effet, que de la transcription d’un principe déjà largement appliqué aussi bien en matière civile qu’en matière pénale. Cette règle est conforme à une jurisprudence tout à fait claire de la Cour de cassation, qui exige de vérifier concrètement s’il y a eu atteinte aux droits des étrangers.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Je mets aux voix les amendements identiques n° 21 et 151.

Les amendements ne sont pas adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 216, présenté par M. Buffet, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Remplacer les mots :

ne peut prononcer la nullité

par les mots :

ne peut prononcer la mainlevée de la mesure de maintien en zone d’attente

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - Permalien
Claude Guéant, ministre

Le Gouvernement émet un avis favorable.

L'amendement est adopté.

L'article 10 est adopté.

(Supprimé)

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'article 12 a été supprimé, mais, par l’amendement n° 207, le Gouvernement propose de le rétablir dans la rédaction suivante :

La section 2 du chapitre II du titre II du livre II du même code est complétée par un article L. 222-6-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 222-6-1. - À peine d'irrecevabilité, prononcée d'office, aucune irrégularité ne peut être soulevée pour la première fois en cause d'appel, à moins que celle-ci soit postérieure à la décision du premier juge. »

La parole est à M. le ministre.

Debut de section - Permalien
Claude Guéant, ministre

Le présent amendement vise à rétablir l’article 12, qui instaure, dans le contentieux du maintien en zone d’attente, un principe de « purge des nullités » entre la première instance et l’appel. Cela signifie qu’une irrégularité qui n’a pas été soulevée en première instance ne peut pas l’être en appel, sauf si elle est postérieure à la décision du premier juge.

Ce dispositif est strictement conforme à la jurisprudence de la Cour de cassation. Son champ d’application est limité aux exceptions de procédure et il ne vise donc en aucune façon les exceptions de nullité fondées sur l’inobservation des règles de fond. Celles-ci peuvent toujours être relevées d’office par le juge.

L’utilité d’un tel dispositif semble claire dans un contentieux d’urgence où la loyauté des débats est une exigence et dans lequel il est notoire que les exceptions de nullité sont invoquées de manière systématique devant le juge des libertés et de la détention.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

Par cet amendement, le Gouvernement propose de rétablir l’article 12 que la commission avait elle-même supprimé, voulant instaurer un effet dévolutif de la peine. La commission émet donc un avis défavorable.

L'amendement n’est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Je constate que cet amendement a été rejeté à l’unanimité des présents.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'article 12 demeure supprimé.

Chapitre II

La carte de séjour temporaire portant la mention « carte bleue européenne »

(Non modifié)

I. – L’article L. 313-10 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est complété par un 6° ainsi rédigé :

« 6° À l’étranger titulaire d’un contrat de travail visé conformément au 2° de l’article L. 5221-2 du code du travail, d’une durée égale ou supérieure à un an, pour un emploi dont la rémunération annuelle brute est au moins égale à une fois et demie le salaire moyen annuel de référence, et qui est titulaire d’un diplôme sanctionnant au moins trois années d’études supérieures délivré par un établissement d’enseignement supérieur reconnu par l’État dans lequel cet établissement se situe ou qui justifie d’une expérience professionnelle d’au moins cinq ans d’un niveau comparable, sans que lui soit opposable la situation de l’emploi. Un arrêté du ministre chargé de l’immigration fixe chaque année le montant du salaire moyen annuel de référence.

« Elle porte la mention “carte bleue européenne”.

« Par dérogation aux articles L. 311-2 et L. 313-1, cette carte de séjour a une durée de validité maximale de trois ans et est renouvelable. Dans le cas où le contrat de travail est d’une durée égale ou supérieure à un an et inférieure à trois ans, la carte de séjour temporaire portant la mention “carte bleue européenne” est délivrée ou renouvelée pour la durée du contrat de travail.

« Le conjoint, s’il est âgé d’au moins dix-huit ans, et les enfants entrés mineurs en France dans l’année qui suit leur dix-huitième anniversaire ou entrant dans les prévisions de l’article L. 311-3 d’un étranger titulaire d’une carte de séjour temporaire portant la mention “carte bleue européenne” bénéficient de plein droit de la carte de séjour mentionnée au 3° de l’article L. 313-11.

« L’étranger qui justifie avoir séjourné au moins dix-huit mois dans un autre État membre de l’Union européenne sous couvert d’une carte bleue européenne délivrée par cet État obtient la carte de séjour temporaire portant la mention “carte bleue européenne”, sous réserve qu’il remplisse les conditions mentionnées au premier alinéa du présent 6° et qu’il en fasse la demande dans le mois qui suit son entrée en France, sans que soit exigé le respect de la condition prévue à l’article L. 311-7.

« Son conjoint et ses enfants tels que définis au quatrième alinéa du présent 6° lorsque la famille était déjà constituée dans l’autre État membre bénéficient de plein droit de la carte de séjour temporaire prévue au 3° de l’article L. 313-11 à condition qu’ils en fassent la demande dans le mois qui suit leur entrée en France, sans que soit exigé le respect de la condition prévue à l’article L. 311-7.

« La carte de séjour accordée conformément aux quatrième et sixième alinéas du présent 6° est renouvelée de plein droit durant la période de validité restant à courir de la “carte bleue européenne”.

« Le conjoint titulaire de la carte de séjour mentionnée au 3° de l’article L. 313-11 bénéficie de plein droit, lorsqu’il justifie d’une durée de résidence de cinq ans, du renouvellement de celle-ci indépendamment de la situation du titulaire de la carte de séjour temporaire portant la mention “carte bleue européenne” au regard du droit de séjour sans qu’il puisse se voir opposer l’absence de lien matrimonial.

« Il en va de même pour les enfants devenus majeurs qui se voient délivrer de plein droit la carte de séjour mentionnée au 3° de l’article L. 313-11 lorsqu’ils justifient d’une durée de résidence de cinq ans. »

II. –

Non modifié

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

Cette intervention vaudra également présentation de l’amendement n° 22.

L’article 13 crée une nouvelle carte de séjour temporaire, appelée, de façon d’ailleurs assez ambiguë, « carte bleue européenne ». Cette mesure trouve son origine dans la directive 2009/50/CE du 25 mai 2009, établissant les conditions d’entrée et de séjour des ressortissants de pays tiers aux fins d’occuper un emploi hautement qualifié.

S’agissant d’une transposition, nous avons essayé d’améliorer le texte qui nous est présenté plutôt que de requérir la suppression de ces dispositions. Telle avait déjà été notre attitude lors de la première lecture, malheureusement nos propositions n’avaient pas eu d’écho, aussi bien dans cet hémicycle qu’à l’Assemblée nationale. Nous prêchons dans le désert…

Pour l’essentiel, nous proposons d’étendre de trois à quatre ans la durée de validité maximale de la carte bleue européenne.

En première lecture, il nous avait été objecté que la durée de validité de la carte précitée était calquée sur celle des titres de séjour portant les mentions « salarié en mission » ou « compétences et talents » et que, par conséquent, dans un souci de cohérence et d’harmonie, la durée de validité de la carte bleue européenne ne pouvait être portée à quatre ans. Mais cet argument tient plus à la forme qu’au fond et ne nous paraît pas pertinent.

Nous rappelons en effet que l’esprit et l’objet de la directive précitée sont de rendre l’Union européenne plus attractive pour les travailleurs hautement qualifiés issus des pays tiers. S’il existe une compétition mondiale, notamment entre l’Europe et les États-Unis, pour attirer une certaine « élite migratoire » – la carte verte américaine offre un droit de résidence de dix ans sans restriction –, cette concurrence existe aussi entre les États membres de l’Union européenne : par exemple, les conditions faites par l’Allemagne à ces travailleurs sont beaucoup plus favorables que celles que leur réserve la France. Il nous semble donc judicieux d’offrir les conditions les plus favorables possibles, dans le cadre fixé par la directive.

Le point 2 de l’article 7 de la directive permet que la durée maximale de la « carte bleue » soit fixée à quatre ans ; nous invitons donc le Sénat à retenir cette durée, pour que notre territoire national soit plus attractif qu’il ne l’est aujourd'hui.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 152, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.

Debut de section - PermalienPhoto de Josiane Mathon-Poinat

Cet article constitue une transposition de la directive 2009/5/CE du 25 mai 2009. Il s’agit de promouvoir une immigration choisie, en sélectionnant, parmi les candidats à l’entrée et au séjour sur le sol européen, ceux qui sont « hautement qualifiés » et qui ont un emploi sur le territoire concerné.

Ce dispositif repose sur l’idée dangereuse que l’immigration aurait un coût pour la société et que ne serait donc admissible que celle qui rapporte, qui renforce la compétitivité et qui limite la fuite des cerveaux vers d’autres pays.

Nous nous opposons à une telle politique, qui distingue les « bons » et les « mauvais » migrants selon des critères prétendument économiques, alors que le seul effet de cette immigration choisie est de créer une discrimination entre migrants. Ce faisant, on cautionne l’idée que l’immigration en général est une menace pour l’emploi et le système social français, alors qu’elle coûte 47, 9 milliards d’euros à la France tandis que les immigrés reversent près de 61 milliards d’euros au budget de l’État ! Le solde est donc positif pour celui-ci.

Nous nous opposons à la mise en place de cette carte bleue européenne pour l’admission sur le sol français.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

La commission émet un avis défavorable.

Sur le plan formel, nous avons l’obligation constitutionnelle de transcrire la directive européenne.

Sur le fond, cette disposition permettra d’accroître l’attractivité du territoire européen pour les travailleurs qualifiés.

Debut de section - Permalien
Claude Guéant, ministre

Le Gouvernement partage l’avis de la commission.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 22, présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Alinéa 4, première et seconde phrases

Remplacer (deux fois) le mot :

trois

par le mot :

quatre

Cet amendement a déjà été défendu.

Quel est l’avis de la commission ?

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

La commission émet un avis défavorable : le système existant est cohérent.

Debut de section - Permalien
Claude Guéant, ministre

Avis défavorable.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 25, présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Alinéa 5

Après le mot :

enfants

insérer les mots :

majeurs à charge ou

La parole est à M. Roland Courteau.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Courteau

L’absence de prise en compte des enfants majeurs à charge parmi les bénéficiaires de la carte de séjour portant la mention « vie privée et familiale » va à l’encontre de l’objet de la directive 2009/50/CE, qui est « de faciliter l’admission des travailleurs hautement qualifiés et de leur famille ».

Les critères à remplir afin d’obtenir la carte bleue européenne sont extrêmement sélectifs. En effet, il faut justifier d’un diplôme de l’enseignement supérieur sanctionnant au moins trois années d’études ou de cinq années d’expérience à un poste hautement qualifié. Il faut également disposer d’un contrat de travail ou d’une promesse d’embauche ferme pour un emploi hautement qualifié d’une durée d’au moins un an et dont le salaire annuel est au moins égal à une fois et demie le salaire moyen annuel.

Il est donc prévisible qu’il y aura peu d’élus, tout comme pour la carte de séjour portant la mention « compétences et talents ».

Puisque ce dispositif ne concernera qu’un très petit nombre de personnes, il n’y a aucune raison de ne pas permettre aux enfants majeurs se trouvant à leur charge de bénéficier d’une carte de séjour temporaire.

A contrario, l’absence de prise en compte des enfants majeurs à charge risque de décourager certains travailleurs hautement qualifiés de venir en France.

D’ailleurs, en première lecture, la commission des lois de notre assemblée, par la voix de son rapporteur, avait fait part de son inquiétude à cet égard et souligné le bien-fondé de notre amendement. Néanmoins, le Gouvernement avait marqué son opposition, arguant que « les enfants majeurs à charge des titulaires de la carte bleue européenne pourront recevoir un titre de séjour en fonction de leur situation individuelle ».

Cette explication ne saurait nous satisfaire en l’état, tant elle est évasive et néfaste à l’attractivité de la France.

Il convient de rappeler que l’immigration de personnes hautement qualifiées est bénéfique pour le développement de notre économie. Nous devrions donc chercher à attirer un maximum de ces travailleurs diplômés. Dans cette optique, il nous semble essentiel de les accueillir, eux et leurs familles, dans les meilleures conditions possibles.

C’est la raison pour laquelle nous vous proposons, mes chers collègues, d’étendre aux enfants majeurs à charge des titulaires de la carte bleue européenne la possibilité de bénéficier de la carte de séjour portant la mention « vie privée et familiale », afin de garantir l’attractivité de notre pays.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

Par cohérence, la commission maintient l’avis défavorable qu’elle avait émis lors de la première lecture.

Debut de section - Permalien
Claude Guéant, ministre

Le Gouvernement est également défavorable à cet amendement.

Le dispositif retenu est suffisant, dans la mesure où ces enfants majeurs pourront recevoir, en fonction de leur situation individuelle, une carte de séjour temporaire portant la mention adaptée : « étudiant », « stagiaire » ou « visiteur ».

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 23, présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Alinéa 5

Compléter cet alinéa par deux phrases ainsi rédigées :

Celle-ci est délivrée au plus tard dans les six mois suivant la date de dépôt de la demande. À défaut, un récépissé de demande de titre de séjour est délivré aux membres de la famille.

La parole est à M. Roland Courteau.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Courteau

Le choix du Gouvernement de ne pas soumettre la famille du titulaire d’une carte bleue européenne à la procédure du regroupement familial, alors que la directive du 25 mai 2009 prévoit non pas une telle exception, mais seulement des aménagements, nous semble aller dans le bon sens.

En effet, permettre aux personnes concernées de s’installer avec leur famille en France sans trop de difficultés ni de complications est de nature à rendre notre pays plus attractif à leurs yeux.

Néanmoins, on peut regretter que se mette en place un système à deux vitesses, avec, d’une part, l’élite migratoire, que représentent les titulaires de la carte bleue européenne, gagnant environ 4 000 euros par mois et bénéficiant de procédures allégées, et, d’autre part, des immigrés moins fortunés, qui doivent patienter des années avant de pouvoir être rejoints par leur conjoint et leurs enfants.

Je tiens également à souligner la situation difficile des couples mixtes. L’attitude soupçonneuse du Gouvernement à leur égard trouve une nouvelle illustration avec l’article 21 ter, relatif aux « mariages gris ». Mais les couples mixtes ont aussi le droit de vivre normalement en famille !

Pour en revenir aux familles des titulaires de la carte bleue européenne, il nous semble important de leur offrir le plus de garanties possible, toujours dans l’optique de rendre la France attractive.

C’est pourquoi nous proposons de préciser que la carte de séjour portant la mention « vie privée et familiale » sera délivrée au conjoint et aux enfants à leur majorité, au plus tard dans les six mois suivant la date de dépôt de la demande.

Il ne s’agit ici que de se conformer de manière plus précise au 4° de l’article 15 de la directive, qui dispose que « les titres de séjour des membres de la famille sont accordés, si les conditions d’un regroupement familial sont remplies, au plus tard dans les six mois suivant la date du dépôt de la demande ».

Vous estimez, monsieur le ministre, que ce délai doit être fixé par voie réglementaire, mais nous demeurons pour notre part persuadés qu’il doit être inscrit dans la loi, eu égard à l’importance des droits qu’ouvre aux immigrés la carte de séjour portant la mention « vie privée et familiale ».

Enfin, nous proposons que, à défaut de délivrance de ce titre de séjour dans le délai indiqué, un récépissé de la demande soit délivré aux membres de la famille.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement, car elle considère que la demande formulée relève non pas du domaine législatif, mais du domaine réglementaire.

Debut de section - Permalien
Claude Guéant, ministre

Le Gouvernement partage l’avis de la commission.

Au demeurant, j’indique que la délivrance d’un récépissé à tout étranger admis à déposer une demande de première délivrance ou de renouvellement de titre de séjour est une disposition d’ordre général, qui est déjà prévue par le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 26, présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Alinéa 9

Remplacer le mot :

cinq

par le mot :

trois

La parole est à M. Alain Anziani.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Anziani

Pour bénéficier de plein droit du renouvellement de sa carte de séjour portant la mention « vie privée et familiale », le conjoint d’un titulaire de la carte bleue européenne devra justifier de cinq ans de résidence sur le territoire.

Concrètement, très peu de conjoints d’un titulaire de la carte bleue européenne pourront bénéficier d’un tel renouvellement. Cette disposition aura finalement pour principal effet d’entraver le renouvellement des cartes de séjour portant la mention « vie privée et familiale » et de faciliter les reconduites à la frontière.

Or il importe de préserver l’équilibre des migrants, qui repose sur la structure familiale. Le dispositif ne favorisera pas non plus l’intégration des immigrés dans la société.

C'est la raison pour laquelle nous proposons de réduire à trois ans la durée de résidence requise.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.

En effet, le texte prévoit déjà des dispositions en vertu desquelles le conjoint d’un titulaire de la carte bleue européenne a vocation à bénéficier d’un titre de séjour d’une durée de validité égale à celle de cette dernière.

Debut de section - Permalien
Claude Guéant, ministre

Le Gouvernement est également défavorable à cet amendement. J’ajoute que ce titre de séjour permet à son titulaire d’exercer immédiatement un emploi.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 27, présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'alinéa 9

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Le conjoint titulaire de la carte de séjour mentionnée au 3° de l'article L. 313-11 bénéficie de plein droit du renouvellement de celle-ci indépendamment de la situation du titulaire de la carte de séjour carte bleue européenne au regard du droit de séjour, sans qu'il puisse se voir opposer l'absence de lien matrimonial en cas de rupture de la vie commune consécutive à des violences conjugales.

La parole est à Mme Catherine Tasca.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

Cet amendement tend à introduire un nouvel alinéa visant à assurer le renouvellement de plein droit de la carte de séjour des conjoints de titulaire de la carte bleue européenne lorsqu’ils sont victimes de violences conjugales. Il aurait fort bien pu être présenté par notre collègue Roland Courteau, dont le travail a fait considérablement avancer la réflexion de la Haute Assemblée sur les violences conjugales.

À cet instant, permettez-moi, mes chers collègues, de rappeler quelques faits.

En 2008, 156 femmes ont été tuées par leur conjoint ou leur ex-conjoint. En 2009, 305 000 femmes ont déclaré avoir subi des violences physiques ou sexuelles au sein de leur domicile. En 2010, la lutte contre les violences faites aux femmes a été proclamée « grande cause nationale de l’année ». En 2011, nous devons rester vigilants, car les coups continuent malheureusement de pleuvoir…

Les auteurs de cet amendement n’entendent pas se contenter de grandes déclarations d’intention. Ils souhaitent que des mesures concrètes soient prises pour permettre à toutes les victimes de violences conjugales d’échapper à leur agresseur.

En première lecture, il nous a été rétorqué que le droit en vigueur était déjà « très protecteur ». Cependant, je rappelle que le rapporteur a basé son argumentation sur des hypothèses particulières, qui ne répondent en rien à une règle générale.

Par conséquent, nous réclamons la consécration d’une règle simple et générale : ne pas subordonner la première délivrance ou le renouvellement de la carte de séjour temporaire du conjoint de l’étranger titulaire d’une carte bleue européenne à une communauté de vie en cas de violences conjugales. C’est le seul moyen de protéger efficacement les femmes victimes de violences qui souhaitent s’extraire de cette terrible spirale.

De plus, en cas de séparation conjugale pour cause de violences, les conjoints de Français et les conjoints de ressortissant étranger entrés en France dans le cadre du regroupement familial bénéficient déjà de la possibilité de faire renouveler leur carte de séjour. Il s’agit donc simplement d’étendre cette protection administrative aux conjoints de titulaire de la carte bleue européenne.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

Cette question a déjà été évoquée à plusieurs reprises.

En l’état actuel du droit, le renouvellement du titre de séjour est d’ores et déjà automatique lorsque le conjoint victime de violences conjugales bénéficie d’une ordonnance de protection délivrée par le juge aux affaires familiales.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

En dehors de cette hypothèse, le préfet peut accorder le renouvellement du titre de séjour lorsque la vie commune a été rompue du fait de violences conjugales. Enfin, le conjoint aura un droit au séjour autonome à partir de cinq années de résidence.

La commission a donc estimé, comme en première lecture, que le droit général en vigueur était déjà protecteur en la matière. C’est pourquoi elle a émis un avis défavorable sur cet amendement.

Debut de section - Permalien
Claude Guéant, ministre

Le Gouvernement partage l’avis de la commission.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 24, présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Alinéa 10

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Le calcul de ces cinq années de résidence prend en compte les durées des séjours effectués en France et dans un ou plusieurs autres États membres.

La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.

Debut de section - PermalienPhoto de Alima Boumediene-Thiery

Il est prévu que le conjoint d’un titulaire de la carte bleue européenne pouvant justifier de cinq ans de résidence sur le territoire bénéficie de plein droit du renouvellement de la carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale ».

Les auteurs de cet amendement proposent que soient pris en compte, dans la durée de cinq de résidence, les séjours effectués non seulement en France, mais également dans d’autres États membres de l’Union européenne. Nous tenons à rappeler que, sur l’initiative du groupe socialiste, le Sénat avait décidé, en première lecture, d’inclure dans le calcul les périodes de résidence sur le territoire des autres États membres de l’Union européenne.

Toutefois, la commission des lois de l’Assemblée nationale est revenue sur cette mesure, rétablissant l’exigence de cinq années de résidence en France exclusivement. Il s’agit d’un net recul, reflétant la vision étriquée qui prédomine à la chambre basse.

Nous souhaitons appeler l’attention sur la logique qui sous-tend notre amendement, certes, mais aussi sur la nécessité d’être cohérents avec le vote que notre assemblée a émis lors de la première lecture.

Il faut souligner que le titre de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » est une carte européenne. La mobilité professionnelle et géographique des travailleurs hautement qualifiés est un objectif clairement affiché par la directive européenne relative à la carte bleue européenne : cette mobilité y est considérée comme un mécanisme essentiel pour améliorer l’efficacité du marché de travail, prévenir les pénuries de main-d’œuvre qualifiée et corriger les déséquilibres régionaux.

Afin de permettre la mobilité au sein de l’Union européenne de ces migrants très qualifiés, il est nécessaire que leur famille puisse les accompagner dans les différents États membres, sans que ce soit à son détriment.

Or, en ne prenant en compte que le séjour sur le territoire national dans le calcul de la durée de résidence nécessaire au renouvellement de plein droit du titre de séjour, on pénalise la famille du titulaire de la carte bleue européenne si celui-ci fait usage de son droit à la mobilité.

Par conséquent, nous vous appelons, mes chers collègues, à confirmer votre vote de la première lecture.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

Cet amendement avait en effet été adopté en première lecture par le Sénat. L’Assemblée nationale a décidé de revenir au texte initial, en insistant sur le fait que le système existant était déjà suffisamment protecteur.

La commission des lois du Sénat a modifié sa position et émis un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Claude Guéant, ministre

Le Gouvernement est également défavorable à cet amendement.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L'amendement n° 28, présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… L’article L. 313-10 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le Gouvernement présente au Parlement un rapport sur les perspectives de signature et de ratification de la Convention des Nations unies sur la protection des droits des travailleurs migrants et des membres de leur famille avant le 31 décembre 2011. »

La parole est à M. Richard Yung.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

Il s’agit en quelque sorte d’un amendement d’appel.

Certes, il est plutôt mal vu de demander au Gouvernement la présentation d’un rapport au Parlement, et je peux le comprendre, mais, en l’occurrence, nous estimons qu’une analyse approfondie doit être réalisée.

Je rappelle que la convention de l’ONU sur la protection des droits des travailleurs migrants et des membres de leur famille a été adoptée par l’Assemblée générale des Nations unies le 18 décembre 1990 et est entrée en vigueur le 1er juillet 2003. Elle a été ratifiée par quarante-deux pays, mais pas par la France, ce qui est assez curieux compte tenu de la vocation universelle de notre pays, s’agissant en particulier du respect des libertés fondamentales, de l’égalité entre migrants et ressortissants du pays, de la garantie d’accès aux soins et à l’éducation…

Dans ces conditions, il nous semble important d’appeler l’attention du Gouvernement sur la nécessité de ratifier cette convention.

Cela étant dit, monsieur le président, je retire cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L’amendement n° 28 est retiré.

Je mets aux voix l'article 13.

L'article 13 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La suite du débat est renvoyée à la prochaine séance.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au mercredi 13 avril 2011, à quatorze heures trente et le soir :

- Suite de la deuxième lecture du projet de loi, adopté avec modifications par l’Assemblée nationale, relatif à l’immigration, à l’intégration et à la nationalité (357, 2010-2011).

Rapport de M. François-Noël Buffet, fait au nom de la commission des lois (392, 2010-2011).

Texte de la commission (n° 393, 2010-2011).

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

La séance est levée le mercredi 13 avril 2011, à zéro heure trois.