La séance, suspendue à vingt heures, est reprise à vingt-deux heures cinq, sous la présidence de M. Roger Romani.
La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion de la proposition de loi renforçant la lutte contre les violences de groupes et la protection des personnes chargées d’une mission de service public.
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus, au sein de l’article 2, à l’amendement n° 19, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard et Muller, et ainsi libellé :
Alinéa 3
Compléter cet alinéa par les mots :
«, lorsque les immeubles ou groupes d'immeubles collectifs à usage d'habitation dans lesquels ils assurent les fonctions de gardiennage ou de surveillance sont particulièrement exposés à des risques d'agression ».
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
L’article 2 bis ouvre la possibilité à des agents de surveillance et de sécurité de porter des armes.
Nous sommes absolument opposés à une telle mesure, qui n’a d’autre objet que de permettre une privatisation partielle des missions de sécurité notamment dévolues à l’État.
En l’occurrence, la confusion des genres est patente : rien ne justifiera que des agents de surveillance et de sécurité puissent porter des armes, si ce n’est leur simple volonté !
Vous évoquiez la loi de 1983, mais je vous rappelle que c’est tout de même la liberté de porter des armes qui a conduit à l’augmentation catastrophique des crimes racistes et sécuritaires à l’origine de la Marche pour l’égalité et contre le racisme de 1983, dont le slogan était : « Arrêtez la chasse, nous ne sommes pas du gibier ». On le voit bien, ce port d’arme est très dangereux.
Il convient donc qu’un contrôle soit opéré, puisqu’il ne s’agit pas, contrairement à ce que l’on voudrait nous faire croire, de simplement utiliser des bâtons de type tonfa. La manœuvre va bien plus loin.
Aussi, il importe de subordonner l’autorisation du port d’arme à l’existence d’un risque.
Ce risque est simple à déterminer : nous avons vu, dans le passé, des agents de sécurité se faire attaquer sans pouvoir se défendre. Dans ce cas-là, il existe un risque, et nous ne pouvons le nier.
Je vous propose donc, par cet amendement, de subordonner une autorisation de port d’arme à un risque établi d’agression possible.
L’autorisation de port d’arme ne saurait être un blanc-seing donné à la privatisation des missions de sécurité, venant appuyer la démarche du Gouvernement qui consiste à sommer la police de faire, chaque année, plus avec moins !
L’exposé des motifs pourrait m’amener à exprimer de nombreuses réserves, mais le texte de l’amendement me paraît intéressant. Il correspond d’ailleurs à l’intention exprimée, à l’Assemblée nationale, par l’auteur de l’amendement dont est issu cet article.
La commission émet donc un avis favorable.
Exclamations sur les travées du groupe socialiste.
Le Gouvernement était a priori plus réservé.
En effet, la référence au risque particulier d’agression pouvant évidemment stigmatiser un certain nombre de territoires, l’appréciation du préfet nous paraissait plus appropriée.
Cela étant, après avoir écouté la commission, je m’en remettrai à la sagesse du Sénat.
L'amendement est adopté.
L'amendement n° 17, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard et Muller, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 3
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« L'autorisation mentionnée à l'alinéa précédent ne peut faire l'objet d'aucune délégation. »
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Il s’agit du caractère nominatif de l’autorisation de port d’arme.
Les services de surveillance et de sécurité dont il est question sont, en général, non pas créés par la copropriété, mais assurés par des entreprises sous-traitantes ; c’est d’ailleurs le cas pour près de 50 % des ceux qui existent à Paris.
L’article 2 bis prévoit une autorisation nominative. Cependant, qu’adviendra-t-il si le titulaire de l’autorisation n’exerce pas lui-même les missions prévues ? Ce n’est pas là un cas d’école.
C’est la raison pour laquelle nous vous proposons de préciser non seulement que l’autorisation est nominative, mais aussi qu’elle ne peut faire l’objet d’aucune délégation.
La précision visée par l’amendement n’apportant rien de nouveau, elle paraît inutile : l’autorisation de port d’arme relève du pouvoir de police administrative du préfet et elle est, à ce titre, nominative. Elle ne peut pas faire l’objet d’une délégation. Le Conseil d’État est vigilant, et sa jurisprudence, constante.
En outre, la rédaction serait source de difficultés si l’on en faisait une interprétation a contrario.
La commission émet donc un avis défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 16, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard et Muller, est ainsi libellé :
Alinéa 9
1° Au début de cet alinéa, insérer une phrase ainsi rédigée :
Les agents des personnes morales prévues à l'article 11-5 doivent être identifiables.
2° Remplacer les mots :
les agents des personnes morales prévues à l'article 11-5
par le mot :
ils
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Il s’agit ici du caractère identifiable des agents.
Le risque encouru par la création de véritables milices privées est celui d’une confusion des genres, que j’ai évoquée précédemment, entre agents de surveillance et police nationale.
Nous savons très bien que ce risque est probable. C’est d’ailleurs pourquoi il est prévu, dans cet article, que les tenues ne doivent entraîner aucune confusion avec celles des agents de la police nationale.
Cependant, les garanties apportées par l’article contre une telle confusion sont légères.
Tout d’abord, il n’est pas écrit explicitement que les agents doivent être identifiables. C’est pourtant un point important, car l’absence d’une telle précision signifie qu’ils pourront être en civil.
Ensuite, le dernier alinéa de l’article prévoit de manière expresse la possibilité de dispenser les agents du port de la tenue et de la carte professionnelle, ce qui est un comble ! Nous reviendrons sur ce point à l’occasion de l’amendement suivant.
À ce stade, nous vous proposons d’inscrire dans la loi que les agents habilités sont identifiables. Cet ajout évitera que les tenues ne soient de nature à créer une confusion, que ce soit avec la police ou, simplement, avec les habitants du quartier.
Cette disposition permettra de beaucoup mieux reconnaître les agents de surveillance.
Même si l’on peut considérer que l’obligation de porter une tenue et une carte professionnelle répond déjà à l’obligation que vous souhaitez inscrire dans la loi, la précision apportée par l’amendement n’apparaît ni inutile ni redondante. Aussi, la commission émet un avis favorable.
Je m’apprêtais à m’en remettre à la sagesse du Sénat pour les raisons que vient d’évoquer M. le rapporteur, mais, pour ces mêmes raisons, j’émettrai un avis favorable !
L'amendement est adopté.
L'amendement n° 18, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard et Muller, est ainsi libellé :
Alinéa 10
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Cet amendement vise à supprimer l’exonération du port de la tenue.
Nous avons bien conscience du fait que la mode est actuellement à la privatisation, mais, lorsque l’on touche aux missions fondamentales, la confusion des genres peut avoir des conséquences très graves.
Nous ne voyons aucune raison qui puisse justifier la possibilité, pour des agents de surveillance, de ne pas porter une tenue spéciale ni leur carte professionnelle, comme je l’ai dit précédemment.
Il est étonnant que, au sein de ce même article, l’accent soit d’abord mis sur l’absence de confusion entre agents de sécurité et agents de police pour, ensuite, autoriser cette confusion, voire l’encourager.
Nous avons toutes les raisons de craindre que ces dérogations ne portent en elles des risques d’excès.
Ainsi, les agents de sécurité pourraient se prendre pour des agents de police, alors qu’ils n’en ont ni la formation, ni l’expérience : ce serait leur donner un pouvoir trop important.
En outre, les dérogations risqueraient de se banaliser.
Ces agents ne doivent pas se substituer à la police nationale dans la mission de sécurisation des quartiers. Ce n’est pas leur rôle et ils ne sont pas formés pour cela. Le maintien de la paix et de la sécurité publiques reste une mission régalienne de l’État.
Ne prenons pas le risque de voir ces agents se substituer peu à peu à notre police ! Cela pourrait satisfaire le ministère de l’intérieur, mais la police nationale est avant tout une police républicaine, avec une tradition, une déontologie et, surtout, une hiérarchie. Il serait intolérable de la « court-circuiter » dans ses missions en recourant à des substituts privatisés.
L’alinéa prévoyant que, dans des cas exceptionnels définis par décret en Conseil d’État, les agents de surveillance peuvent être dispensés du port de la tenue, est calqué sur les dispositions relatives au service de sécurité de la RATP et de la SNCF.
On peut imaginer que les solutions prévues pour certains agents peuvent être adaptées à d’autres.
Dans certaines hypothèses, il paraît légitime de prévoir qu’un agent de surveillance ou de gardiennage peut être dispensé du port d’une tenue spéciale.
Je me propose de solliciter l’avis du Gouvernement.
Je ne suis pas insensible à l’argumentation de Mme Alima Boumediene-Thiery. Le sujet mérite quelques précisions.
Tout d’abord, la matière relève non de la loi mais du décret, en l’occurrence un décret en Conseil d’État.
Certains agents de la SNCF ou de la RATP sont affectés à des missions de sécurité. Il ne faut pas s’interdire d’emblée et complètement cette possibilité de dispense de port de la tenue pour des interventions très clairement délimitées et exceptionnelles.
Je suis à 99 % d’accord avec vous, madame Boumediene-Thiery, mais, me référant expressément à ces entreprises très républicaines que sont la SNCF et la RATP - même si personne n’est exempt de critique -, j’estime qu’il faut maintenir cette possibilité pour en user dans le cadre très strict que je viens de rappeler.
Votre amendement est pertinent. Néanmoins, le Gouvernement est défavorable en considération de ces cas très exceptionnels.
L'amendement n'est pas adopté.
L'article 2 bis est adopté.
Le code pénal est ainsi modifié :
1° Après le 14° des articles 222-12 et 222-13, il est inséré un 15° ainsi rédigé :
« 15° Par une personne dissimulant volontairement en tout ou partie son visage afin de ne pas être identifiée. » ;
2° Après le 9° de l’article 311-4, il est inséré un 10° ainsi rédigé :
« 10° Lorsqu’il est commis par une personne dissimulant volontairement en tout ou partie son visage afin de ne pas être identifiée. » ;
3° L’article 312-2 est complété par un 4° ainsi rédigé :
« 4° Lorsqu’elle est commise par une personne dissimulant volontairement en tout ou partie son visage afin de ne pas être identifiée. » ;
4° Après le 5° de l’article 322-3, il est inséré un 6° ainsi rédigé :
« 6° Lorsqu’elle est commise par une personne dissimulant volontairement en tout ou partie son visage afin de ne pas être identifiée. » ;
5°
Supprimé
6° L’article 431-4 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« L’infraction définie au premier alinéa est punie de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 € d’amende lorsque son auteur dissimule volontairement en tout ou partie son visage afin de ne pas être identifié. » ;
7° L’article 431-5 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Si la personne armée dissimule volontairement en tout ou partie son visage afin de ne pas être identifiée, la peine est également portée à cinq ans d’emprisonnement et à 75 000 € d’amende. »
L’article 3 prévoit une circonstance aggravante de dissimulation volontaire de visage pour un certain nombre d’infractions aux personnes et aux biens.
Le 20 juin 2009 était publié un décret créant une infraction de port de cagoule durant les manifestations publiques.
Ces deux mesures ne sont que les deux faces d’une même médaille : celle de l’affichage !
Nous nous opposons à un renforcement des dispositifs répressifs si, au préalable, ne sont pas mis à plat les outils existants, les résultats de leur mise en œuvre ainsi que leur utilité ou leur efficacité.
Le Gouvernement fabrique un millefeuille sécuritaire indigeste sans jamais poser la question de l’efficacité des lois qu’il fait voter, et ce non pas depuis 2007, mais depuis 2003. Il faudrait également s’interroger sur les décrets d’application qui restent en suspens.
Beaucoup de lois sont votées, mais peu sont appliquées !
Depuis six ans, les lois répressives s’entassent, sans que jamais la question de l’utilité, de l’effectivité ou de l’efficacité des mesures votées soit posée. Il n’y a pas d’évaluation.
Il serait opportun d’étudier ces questions avant toute nouvelle salve sécuritaire.
Vous pourrez toujours nous dire que vous n’y êtes pour rien et que cette proposition de loi est d’origine parlementaire : je vous répondrai que le parlementaire qui l’a déposée est aujourd’hui membre du Gouvernement, ce qui en dit long sur la méthode de contournement qui est ici utilisée !
Nous nous opposons à cette nouvelle disposition, tout simplement parce qu’elle est inutile : pensez-vous sérieusement qu’une personne décidera d’attaquer une banque sans cagoule parce qu’elle risque, sinon, une aggravation de peine ? Pensez-vous, avec la généralisation de la vidéosurveillance, qu’une personne renoncera à dissimuler son visage pour ne pas être punie plus sévèrement ? Évidemment, la réponse est non !
Nous ne cautionnerons pas cette nouvelle aggravation de l’inflation pénale, d’autant moins qu’il ne s’agit ici que de satisfaire un certain électorat que vous semblez vouloir chouchouter à l’approche des élections régionales.
C’est la raison pour laquelle nous demanderons la suppression de cet article.
Je suis saisi de trois amendements identiques.
L'amendement n° 3 est présenté par MM. C. Gautier et Sueur, Mmes Klès, Boumediene-Thiery et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 37 est présenté par Mmes Assassi, Mathon-Poinat, Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.
L'amendement n° 51 est présenté par MM. Mézard et Collin.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Charles Gautier, pour défendre l’amendement n° 3.
L’article 3 de la proposition de loi vise à instaurer une circonstance aggravante lorsque l’auteur de certaines violences sur des personnes ou de dégradations de biens dissimule volontairement tout ou partie de son visage afin de ne pas être identifié.
Cette circonstance aggravante s’applique à plusieurs infractions : les violences ayant entraîné une incapacité totale de travail de plus de huit jours ; les violences ayant entraîné une ITT égale ou inférieure à huit jours ; le vol aggravé ; l’extorsion aggravée ; les destructions, dégradations ou détériorations aggravées de biens appartenant à autrui ; la participation délictueuse à un attroupement ; enfin, la participation armée à un attroupement.
Cet article créant une circonstance aggravante de port de la cagoule est un palliatif pour le Gouvernement, qui est dans l’impossibilité de faire de la simple dissimulation du visage un délit.
Un décret du 19 juin 2009 punit d’une contravention de la cinquième classe le fait pour une personne, au sein ou aux abords immédiats d’une manifestation sur la voie publique, de dissimuler son visage afin de ne pas être identifiée dans des circonstances faisant craindre des atteintes à l’ordre public.
Quelle est l’utilité d’une telle circonstance aggravante ?
On peut volontairement dissimuler son visage lors d’un regroupement sans pour autant avoir de mauvaises intentions : pour se protéger du froid, pour éviter d’être reconnu dans les médias ou par les Renseignements généraux.
Pour de vrais casseurs, le port de la cagoule a certes pour but d’empêcher l’identification, mais c’est justement aussi un moyen pour les forces de l’ordre de repérer plus facilement les casseurs potentiels et de concentrer leurs effectifs sur eux.
La loi peut-elle sérieusement laisser penser que le fait de dissimuler son visage lors d’une extorsion présente le même caractère de dangerosité – justifiant une aggravation de la peine encourue de sept à dix ans d’emprisonnement – que le fait de commettre une extorsion avec violence ou sur personne vulnérable ou à raison de l’appartenance de la victime à une ethnie, une nation, une race ou une religion ou à raison de son orientation sexuelle ?
Dans l’exposé des motifs, l’auteur de la proposition de loi précise qu’il appartiendra au juge de qualifier les moyens de la dissimulation volontaire du visage.
Or la définition juridique des infractions revient au législateur, auquel le juge ne saurait se substituer. Il ne lui appartient en théorie que d’apprécier si les circonstances de fait permettent de caractériser les différents éléments constitutifs de l’infraction.
Ces dispositions n’ont aucunement vocation à prévenir des violences ou des dégradations commises par des casseurs.
De surcroît, faire de la dissimulation du visage une circonstance aggravante revient à considérer que la même infraction commise à visage découvert serait moins grave !
Il va être difficile de « définir où finit la capuche et où commence la cagoule » !
Voilà pourquoi nous proposons la suppression de cet article.
Avec cet amendement nous souhaitons nous opposer à la fameuse circonstance aggravante pour « dissimulation volontaire de tout ou partie du visage » qui est ici créée pour les atteintes aux personnes et aux biens. C’est évident, cette disposition n’aura aucun effet dissuasif, puisque les auteurs préféreront malheureusement toujours commettre leurs délits le visage dissimulé pour éviter d’être reconnus. Il paraît même très naïf de croire qu’il pourrait en être autrement.
Nous sommes donc devant une disposition de pur affichage qui n’aura aucune conséquence sur le phénomène des violences de groupes.
De plus, le juge qui aura la charge de qualifier s’il y a bien eu dissimulation volontaire de tout ou partie du visage rencontrera de grandes difficultés en raison de cette formulation très floue.
Le représentant du Conseil national des Barreaux, le bâtonnier Olivier Fouché, a critiqué cette circonstance aggravante de dissimulation du visage. Il juge « difficile de définir où finit la capuche et où commence la cagoule ».
Il y a tout lieu de penser que cette mesure sera très difficilement applicable. Elle risque même d’être détournée de son objet pour viser, par exemple, des personnes participant à des manifestations.
Cette mesure semble être une réponse aux incidents qui ont lieu en marge de certaines manifestations, je pense ici à ce qui s’est produit à Strasbourg, lors de la manifestation anti-OTAN.
Vous faites donc toujours un amalgame entre les manifestants et les casseurs, en essayant de criminaliser les premiers. Mais n’est-ce pas logique de la part d’un gouvernement qui reste sourd aux revendications de la rue, puisque, selon l’expression très chère à la droite, « ce n’est pas la rue qui gouverne » ?
Cette disposition est par ailleurs contre-productive. Elle ne permettra en rien de prévenir les troubles. Bien au contraire, elle risque de les aggraver.
Lors des auditions, les policiers eux-mêmes ont affirmé que cette disposition trouverait à s’appliquer uniquement pendant les manifestations.
Au surplus, cette mesure s’inspire d’une loi allemande qui n’a pas pu être appliquée. Gageons qu’il en sera de même ici.
Pour toutes ces raisons, notre groupe s’oppose à cet article, dont il demande la suppression.
Notre amendement a le même but que les précédents : la suppression de l’article 3.
La notion de « dissimulation volontaire en tout ou partie du visage » constitue un masque juridique pour multiplier des incriminations de manière souvent subjective, amenant inéluctablement à l’arbitraire et à des jurisprudences contradictoires.
Cet article 3, qualifié d’« article cagoule », ne vise précisément pas que les cagoules !
Une personne qui commet le type d’infraction visé par l’article 222-12 avec des lunettes fumées dissimule-t-elle en partie son visage ?
C’est un exemple parmi d’autres. Toutes les personnes portant des lunettes de soleil tomberont-elles sous le coup de cette circonstance aggravante ?
Avec une telle circonstance aggravante, l’article semblerait même inviter à commettre ces infractions, mais à visage découvert !
Le rapport de la commission comporte des éléments de bon sens. Seule la conclusion ne me paraît pas en cohérence avec l’argumentation.
Passons sur le décret du 19 juin 2009, qui est, totalement catastrophique pour les libertés. Avec l’article 3, l’opération est différente.
Mais relisons le rapport : « Le dispositif proposé par l’article 3 n’aurait ainsi pas vocation à se limiter aux seules violences de groupes ni aux violences commises sur la voie publique. ».
Cet article 3 balaie donc très large !
Je poursuis la lecture.
« Si l’effet dissuasif de cette circonstance aggravante n’emporte pas la conviction, la disposition permettra en revanche de mieux prendre en compte le traumatisme de la victime lorsque l’auteur de l’infraction a agi à visage dissimulé. ».
Au regard des principes juridiques, ce n’est pas sérieux !
Monsieur le rapporteur, vous nous l’avez dit tout à l’heure très justement, la loi pénale est d’interprétation stricte.
En l’occurrence, on pourrait faire beaucoup mieux, mais on fait très mal !
Monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, permettez-moi de vous livrer d’abord une réflexion purement personnelle : quand on est républicain, comment peut-on prétendre circuler librement sur le domaine public le visage dissimulé ?
C’est une liberté qu’il me paraît pour le moins curieux de revendiquer.
Loin de rassurer, c’est une liberté qui, au contraire, inquiète. Elle n’est donc pas légitime.
Telle est mon opinion personnelle : quand on est républicain, on circule sur le sol de la République à visage découvert, pour pouvoir être reconnu.
En règle générale, quand on porte une cagoule, ce n’est pas dans ce but !
J’en viens maintenant à l’avis de la commission sur les amendements identiques n° 3, 37 et 51.
Certes, il est toujours possible de s’interroger sur l’effet dissuasif d’une telle disposition. Cela étant, chers collègues de l’opposition, allez donc interroger les personnes qui, à Poitiers, ont vu déferler non pas des manifestants, mais bien des délinquants cagoulés dans les rues de leur ville : vous vous rendrez compte à quel point elles ont été traumatisées. Et vous verrez peut-être la situation d’un autre œil, car personne ne peut s’affranchir du principe républicain qui veut que, lorsque l’on circule sur le territoire de la République, on n’a pas honte d’être reconnu.
Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur les amendements identiques de suppression.
À l’évidence, il y a un vrai désaccord de fond entre, d'un côté, la commission et le Gouvernement, et, de l’autre, les sénateurs de l’opposition.
Pour ma part, ce n’est pas à ce niveau que je placerais notre débat.
Il y a, d’un côté, la réaction, et, de l’autre, les partisans de la liberté !
Nous sommes un certain nombre à être confrontés à ces problèmes dans nos villes, sur le terrain. Si nos concitoyens sont, pour la plupart, de parfaits républicains, de vrais progressistes, ils sont nombreux à considérer certains comportements comme tout simplement attentatoires à leurs libertés.
Sans vouloir être déplaisant à votre égard, madame, j’ai tout de même l’impression, en vous écoutant, que nous ne parlons pas des mêmes réalités.
Il y a chez certains, pour des raisons qu’il ne m’appartient pas d’analyser, comme un refus de voir les choses en face.
Je l’assume et je le dis clairement, nous sommes là au cœur de la proposition de loi. Incriminer le fait de dissimuler son visage à l’occasion de manifestations publiques est l’un des éléments clés de la lutte contre les violences de groupes.
Ne faisons pas de comparaisons hâtives avec des manifestations folkloriques ou avec des comportements individuels sans rapport avec le texte, tels que le port d’un passe-montagne ou d’une cagoule en hiver. Ne sortons pas du cadre de la loi, qui fait de la dissimulation du visage une circonstance aggravante d’actes commis dans un contexte bien précis.
Dès lors que les circonstances ne répondent pas aux exigences posées par la proposition de loi pour que l’infraction soit constituée, chacun peut s’exprimer librement, y compris dans sa tenue vestimentaire, et le Gouvernement n’a pas l’intention d’empêcher qui que ce soit de s’habiller comme il l’entend.
L’instauration d’une nouvelle circonstance aggravante est nécessaire pour prendre réellement la mesure, dans de telles situations, de la gravité des infractions. Chacun le sait, avec le visage dissimulé, une personne est d’autant plus dangereuse qu’elle est plus difficile à identifier et, donc, à poursuivre et à condamner, sans parler des risques de récidive. Il suffit de discuter avec une victime pour s’apercevoir qu’elle est plus impressionnée et donc le préjudice subi plus important quand l’agresseur a le visage dissimulé.
Par conséquent, le Gouvernement émet un avis clairement défavorable sur ces amendements identiques. Assumons notre désaccord avec leurs auteurs, tant il est vrai que l’article 3 se situe au cœur de la logique défendue dans le cadre de ce texte ô combien républicain.
Je suis pour le moins surpris par les explications que je viens d’entendre !
Monsieur le rapporteur, même à titre personnel, comment pouvez-vous trouver anormal que nos concitoyens puissent vouloir se promener avec une cagoule ou je ne sais quel autre accessoire qui leur dissimulerait partiellement le visage ? Que je sache, ce ne sont pas tous des délinquants !
Pour le coup, ce sont vos propos qui ne sont pas du tout républicains !
Heureusement que les millions de nos concitoyens qui se promènent avec un passe-montagne ou une cagoule ne sont pas tous des délinquants potentiels !
Nous ne pouvons que rester ébahis devant ce type de raisonnement !
Monsieur le secrétaire d'État, je ne peux vous laisser dire que la disposition s’applique dans un cadre très déterminé. Au contraire, il est clairement indiqué dans le rapport que cette circonstance aggravante concerne non pas les seules violences de groupes ou celle qui sont commises sur la voie publique, mais nombre d’infractions de portée beaucoup plus générale.
En nous opposant à l’extension du champ de cette circonstance aggravante à des cas qui ne se limitent justement pas à ceux que vous nous avez indiqués, nous nous posons en défenseurs du respect d’un principe républicain qui nous est cher à tous !
Les amendements ne sont pas adoptés.
L'article 3 est adopté.
L’article 34 de la loi n° 82-213 du 2 mars 1982 relative aux droits et aux libertés des communes, des départements et des régions est ainsi modifié :
1° Le dernier alinéa du III est supprimé ;
2° Il est complété par trois alinéas ainsi rédigés :
« IV. – Par dérogation aux dispositions du III, le préfet de police a en outre la charge de l’ordre public dans les départements des Hauts-de-Seine, de la Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne et y dirige l’action des services de la police nationale et des unités de la gendarmerie nationale.
« En outre, le préfet de police, en sa qualité de préfet de la zone de défense de Paris, dirige les actions et l’emploi des moyens de la police et de la gendarmerie nationales d’une part pour leurs interventions concourant à la régulation et la sécurité de la circulation sur les routes de la région d’Île-de-France dont la liste est fixée par l’autorité administrative, d’autre part pour leurs missions concourant à la sécurité des personnes et des biens dans les transports en commun de voyageurs par voie ferrée de la région d’Île-de-France.
« V. – Un décret en Conseil d’État peut déroger aux dispositions du I et du III en tant qu’elles fixent les limites territoriales de la compétence du préfet de département en matière d’ordre public. »
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 4 est présenté par MM. C. Gautier et Sueur, Mmes Klès, Boumediene-Thiery et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 38 est présenté par Mmes Assassi, Mathon-Poinat, Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour présenter l’amendement n° 4.
Monsieur le secrétaire d'État, après vous avoir bien écouté, je voudrais connaître votre opinion sur les personnes qui mettent des gants pour échapper à la recherche des empreintes ADN.
Au contraire, ce genre de comportement traduit la volonté de se soustraire à la recherche des preuves : voilà une manière pour celui qui accomplit un acte répréhensible de dissimuler son identité !
Par cohérence, vous ne pourrez donc qu’être favorable à l’aggravation des peines en de telles circonstances. Sinon, comment justifiez-vous cette différence de traitement ?
Peut-être daignerez-vous me répondre. Si vous ne le voulez pas, …
… comprenez que je ne puisse rien faire d’autre que d’en prendre acte.
J’en viens maintenant à l’amendement n° 4, qui est l’évidence même. Il ne devrait donc poser aucune difficulté.
En effet, l’article 3 bis, introduit sur votre initiative, monsieur le rapporteur, tend à compléter la loi du 2 mars 1982 relative aux droits et libertés des communes, des départements et des régions, afin de prévoir que, par dérogation aux dispositions confiant au préfet la charge de l’ordre public dans le département, le préfet de police de Paris est compétent en matière d’ordre public et de direction des forces de police dans les départements des Hauts-de-Seine, de la Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne.
Il va de soi que cette disposition n’a pas de rapport avec le présent texte.
Il serait beaucoup plus cohérent de la faire figurer dans le prochain projet de loi dit « LOPPSI 2 ». Je ne vois d’ailleurs pas quels arguments vous pourriez avancer pour vous y opposer.
J’invite donc mes collègues à voter cet amendement de suppression, de manière que nous puissions débattre de cette question, qui, d’ailleurs, ne va pas de soi, à la faveur de l'examen du texte « LOPPSI 2 ».
Mme Éliane Assassi. Monsieur le secrétaire d'État, monsieur le rapporteur, compte tenu des certitudes que vous avez exprimées à l’article précédent, j’espère que nous n’allons pas tous être obligés de porter un masque en cas de pandémie extrême de la grippe A/H1N1. Sinon, nous serons nombreux à être frappés par les dispositions que vous venez de faire voter !
Exclamations sur les bancs des commissions et du Gouvernement.
C’est que, moi aussi, au bout d’un moment, je n’ai plus d’autre solution que de raisonner par l’absurde : vous êtes tellement ancrés dans vos certitudes que les bras m’en tombent parfois !
Comme M. Sueur, nous demandons la suppression de l'article 3 bis, introduit en commission, qui vise à renforcer les pouvoirs du préfet de police de Paris.
Chers collègues de l’opposition, je croyais benoîtement que cet article 3 bis ne poserait aucune difficulté. Je suis au regret de constater que tel n’est pas le cas.
Le fait d’inscrire une telle disposition dans la présente proposition de loi n’a rien de choquant, car cette dernière – nous vous rejoignons au moins sur ce point ! – n’a pas pour seul but d’instituer de nouvelles infractions, mais a vocation à renforcer la lutte contre les violences. Cela passe aussi par l’amélioration du dispositif sur le plan organisationnel.
Aujourd'hui, seuls 43 % des individus interpellés à Paris sont des Parisiens. Il est nécessaire, à l’évidence, d’adapter l'organisation des forces de l’ordre à l’évolution de la délinquance.
La mesure que j’ai proposée me semble avoir recueilli un large consensus parmi tous ceux qui administrent les communes de la périphérie de Paris. Je dois le dire, j’ai été particulièrement conforté par la prise de position sur ce sujet de M. Bartolone, qui a publié ce matin une tribune dans la presse intitulée La sécurité ne doit pas s’arrêter aux portes de Paris, dans laquelle il écrit que l’idée d’une police d’agglomération face à une délinquance qui ne connaît pas de frontières départementales fait sens.
Voilà qui montre toute la légitimité de cet article au sein d’un texte visant à renforcer la lutte contre les violences de groupes.
En conséquence, j’émets un avis défavorable sur les amendements identiques de suppression n° 4 et 38.
Je suis également défavorable à ces amendements de suppression. En refusant d’octroyer au préfet de police de Paris une telle compétence sur l'ensemble des départements concernés, on met à mal la lutte, que le présent texte a pour vocation de faciliter, contre les violences commises par des bandes extrêmement mobiles.
Les amendements ne sont pas adoptés.
L'amendement n° 54, présenté par M. Pillet, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Après les mots :
aux dispositions
insérer les mots :
du I et
La parole est à M. le rapporteur.
L'amendement est adopté.
L'article 3 bis est adopté.
Après l’article 15-3 du code de procédure pénale, il est inséré un article 15-4 ainsi rédigé :
« Art. 15-4. – Lorsque les services et unités de police ou de gendarmerie procèdent à l’enregistrement audiovisuel d’une de leurs interventions réalisées en tous lieux, publics ou privés, aux fins de restituer le déroulement des opérations, l’enregistrement est conservé au siège du service ou de l’unité.
« Si l’intervention a conduit à l’établissement d’une procédure judiciaire ou qu’elle intervient dans le cadre d’une enquête ou d’une information judiciaire, la réalisation de cet enregistrement est mentionnée dans un procès-verbal versé au dossier de la procédure.
« En cas de contestation des conditions dans lesquelles s’est déroulée l’intervention, cet enregistrement est, sur décision du procureur de la République, du juge d'instruction ou de la juridiction de jugement, versé au dossier de la procédure afin d’être consulté. Il en est de même s’il apparaît que la consultation de cet enregistrement peut être utile pour déterminer la participation d’une ou plusieurs des personnes mises en cause ou poursuivies aux faits qui leur sont reprochés. Le versement de l’enregistrement au dossier est de droit quand il est demandé par la personne à qui est reprochée une infraction commise pendant l’intervention. Les huit derniers alinéas de l'article 114 ne sont pas applicables. Lorsqu'une partie demande la consultation de l'enregistrement, cette demande est formée et le juge d'instruction statue conformément aux deux premiers alinéas de l'article 82-1.
« Le fait, pour toute personne, de diffuser un enregistrement réalisé en application du présent article est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 € d’amende.
« Le fait qu’un enregistrement réalisé en application du présent article ne puisse être consulté en raison d’une impossibilité technique ne constitue pas une cause de nullité de la procédure.
« Un décret précise les modalités d’application du présent article. Il détermine en particulier la durée de conservation et les modalités de destruction de l’enregistrement dans les cas prévus par les trois premiers alinéas.
« Les dispositions du présent article ne sont pas applicables aux enregistrements réalisés au cours d’une procédure afin de servir comme élément de preuve, qui sont placés sous scellés conformément aux dispositions du présent code. »
L'amendement n° 39, présenté par Mmes Assassi, Mathon-Poinat, Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.
Il ne nous semble guère opportun d’insérer une telle disposition dans un texte qui vise à renforcer la lutte contre les violences de groupes.
En pratique, le dispositif instauré dans un but affiché de réduire les contestations a posteriori en permettant une plus grande transparence des opérations de police peut être réduit à néant. En effet, rien n’est prévu quant aux moyens matériels dont seront pourvues les forces de l’ordre. En outre, la nullité de procédure ne pourra être invoquée.
Par ailleurs, l’article 4 nous renvoie à un décret dont les dispositions nous sont pratiquement inconnues. Or il est toujours très désagréable de voter un article sans pouvoir en mesurer l’étendue exacte, faute d’avoir connaissance du contenu du décret auquel il renvoie.
Les violences de groupes donnent souvent lieu à des affrontements sévères avec les forces de l’ordre. Il paraît donc nécessaire de favoriser le recours à l’enregistrement audiovisuel des interventions de ces dernières, afin d’établir de façon objective les responsabilités de chacun grâce à des preuves quasi scientifiques. Pourquoi donc nous priver d’un tel progrès dans la recherche de la vérité ?
De plus, dans sa rédaction issue des travaux de la commission, l’article 4 prévoit que le versement de l’enregistrement au dossier sera de droit lorsqu’une personne aura été mise en cause au cours de l’intervention.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
On ne peut pas être d’accord avec la suppression d’une disposition qui est aussi importante pour l’équilibre du dispositif.
L’enregistrement audiovisuel de leurs interventions par les services et les unités de police ou de gendarmerie, quelle que soit la nature de l’acte, contrôle ou interpellation, doit permettre d’établir plus facilement la réalité de leurs conditions d’exécution, par exemple, dans le cas de contestation par les intéressés. De plus, les forces de l’ordre savent ainsi que leurs interventions seront filmées.
Tout cela me paraît une bonne chose pour les uns comme pour les autres.
L’expérimentation déjà menée par certains services de police, notamment en région parisienne, est apparue très positive : l’annonce sur les lieux que l’intervention de la police serait enregistrée a eu, à chaque fois, un effet apaisant en ce sens qu’elle semble avoir incité le public concerné à une certaine mesure et à un comportement plus respectueux.
Ces enregistrements sont encore plus utiles lorsque les violences de groupes se préparent. En effet, il arrive que l’intervention se déroule dans des conditions confuses et donne lieu à de nombreuses interpellations. Dans ces cas-là, l’enregistrement pourra être fort utile pour déterminer qui, parmi les personnes mises en cause, a effectivement participé aux actes de violence. Je réponds ainsi à certaines des questions que vous m’avez posées tout à l’heure sur la présence fortuite de personnes sur les lieux.
Pour moi, ces enregistrements constituent vraiment un élément important du dispositif et personne ne devrait avoir lieu de s’en plaindre.
Le Gouvernement émet un avis défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 21 rectifié, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard et Muller, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Remplacer les mots :
en tous lieux, publics ou privés
par les mots :
dans un lieu public ou ouvert au public
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Il s’agit de limiter le recours à la vidéo aux lieux publics ou ouverts au public.
L’article 4 prévoit la possibilité de filmer des interventions de police et le régime de conservation de ces enregistrements.
Si cette disposition traduit une volonté de transparence dans la conduite des opérations de police, comme c’est d’ailleurs le cas en ce qui concerne les gardes à vue, il semble toutefois nécessaire de limiter les possibilités, pour la police, de filmer tout et n’importe quoi, quel que soit le lieu.
La plupart du temps, ces enregistrements ne seront pas utilisés dans le cadre d’une poursuite ou d’une enquête pénale. Ils dormiront dans des tiroirs !
Le régime de ces enregistrements « dormants » laisse perplexe : des personnes auront pu être filmées, dans des lieux privés, chez elles, ou dans des lieux spécifiques, en totale violation de leur droit à la vie privée et à l’intimité. Et que prévoit cet article pour le droit d’accès à ces enregistrements ? Rien !
Nous sommes là devant la mise en œuvre d’un système de vidéosurveillance mobile, mais totalement déconnecté du droit commun de la vidéosurveillance : ni droit d’accès illimité, puisque celui-ci n’est possible que sous conditions, ni alignement sur le droit commun de la vidéosurveillance.
C’est la raison pour laquelle nous vous proposons de limiter la possibilité de recourir à cette méthode au seul cas d’un lieu public ou ouvert au public ; j’ai apporté cette dernière précision pour répondre à la demande de la commission.
Il est impératif de ne pas rompre avec le principe selon lequel la vidéosurveillance ne saurait aboutir, de manière détournée, à porter atteinte au droit à la vie privée de nos concitoyens.
Le dernier alinéa de l’article 4 prévoit déjà que les dispositions de cet article ne sont pas applicables aux enregistrements réalisés au cours d’une procédure afin de servir comme élément de preuve au cours d’une perquisition, par exemple.
Néanmoins, la précision apportée par l’amendement nous paraît intéressante et permettra de lever toute ambiguïté.
En outre, à la demande de la commission, vous avez accepté, madame Alima Boumediene-Thiery, de rectifier votre amendement afin de viser également les lieux ouverts au public.
La commission est donc favorable à l’amendement n° 21 rectifié.
Le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat.
L'amendement est adopté.
L'amendement n° 22 rectifié, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard et Muller, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 3
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque la Commission nationale de déontologie de la sécurité est saisie de faits susceptibles de constituer un manquement aux règles de déontologie de la sécurité, et ayant fait l'objet d'un enregistrement réalisé en application du présent article, elle peut demander la consultation de l'enregistrement audiovisuel. Il est mis à sa disposition dans les conditions prévues par un décret en Conseil d'État. »
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Il s’agit maintenant de l’accès aux enregistrements par la Commission nationale de déontologie de la sécurité.
La mise en œuvre du dispositif prévu par cet article soulève des questions importantes, notamment concernant la possibilité de produire les enregistrements dans le cadre d’une procédure pénale.
Tel qu’il est rédigé, l’alinéa 4 de l’article ne garantit pas que les enregistrements puissent être utilisés dans une procédure où la personne poursuivie est un agent de police.
De ce fait, il faut craindre que les enregistrements ne soient utilisés pour étayer une infraction de rébellion - cet exemple est d’ailleurs cité dans le rapport de la commission -, sans que l’on ait l’assurance qu’ils puissent l’être par une victime de violences policières.
Je vous proposerai dans quelques instants un amendement pour remédier à cette carence en établissant que le versement de l’enregistrement est également de droit lorsqu’il est demandé par une victime de violences policières et que l’enregistrement est de nature à étayer ses allégations.
Je souhaitais initialement donner ce pouvoir au Défenseur des droits, mais, comme on m’a objecté qu’il n’existait pas encore, j’ai choisi de permettre à la CNDS, chargée du respect de la déontologie de la sécurité, d’utiliser cet enregistrement susceptible de lui permettre d’établir l’allégation de violence policière dont elle est saisie.
J’ai donc rectifié cet amendement, me disant, après réflexion, que mieux valait renforcer les pouvoirs d’une autorité existante.
Si la vocation de cette disposition est de rendre transparentes les interventions policières, il me semble fondamental que la CNDS puisse avoir accès à ces enregistrements.
Je vous propose un mécanisme souple et très simple, qui permettra à la CNDS d’exploiter les enregistrements lorsqu’ils sont de nature à établir des faits pouvant constituer des manquements aux règles de déontologie ou des violences policières dont nous serions victimes.
La commission ne s’est pas prononcée sur cet amendement rectifié. En effet, l’amendement, dans sa rédaction initiale, visait le Défenseur des droits. Nous vous avions demandé de bien vouloir le retirer parce que la loi organique relative au Défenseur des droits n’a pas encore été adoptée.
À titre personnel, il me semble que l’amendement n° 22 rectifié fait plus ou moins double emploi avec l’amendement n° 28 rectifié bis, qui prévoit que le versement de l’enregistrement à la procédure est de droit lorsque l’intervention a donné lieu au dépôt d’une plainte.
Les garanties sont suffisantes. En outre, le Parlement va bientôt examiner l’ensemble de ces questions, dans le cadre du projet de loi organique relatif au Défenseur des droits ; ses compétences en matière de déontologie de la sécurité seront alors discutées.
J’émets donc un avis défavorable sur l’amendement n° 22 rectifié.
Cet amendement est satisfait, puisque la CNDS, comme toutes les autorités administratives indépendantes, dispose d’ores et déjà de pouvoirs d’enquête et qu’elle peut enjoindre à toute personne, publique ou privée, de communiquer toutes informations et pièces utiles ; ce sera notamment le cas des enregistrements audiovisuels des interventions de police.
C et amendement n’est pas opportun dans la mesure où la CNDS n’a pas vocation à être absorbée par le Défenseur des droits.
Cette réponse devrait vous rassurer complètement : votre amendement est satisfait. Vous pourriez le retirer.
Madame Boumediene-Thiery, l'amendement n° 22 rectifié est-il maintenu ?
Je le maintiens, monsieur le président.
L’explication de M. le secrétaire d’État me donne à penser qu’il ne faut pas le retirer. Puisque la CNDS continuera d’exister, il vaut d’autant mieux inscrire dans la loi son droit à accéder aux documents enregistrés qu’elle est très souvent sollicitée sur des problèmes de manquements et de violences policières, et il arrive qu’elle rencontre des difficultés pour obtenir certains dossiers.
En effet, même si, en tant qu’autorité indépendante, elle peut, en principe, avoir accès à ces documents, elle se heurte à de véritables barrages, notamment lorsqu’il s’agit de violences policières, comme celles que nous avons connues récemment à Argenteuil ou en Franche-Comté.
Il serait donc important de l’inscrire dans la loi. Cela permettrait de renforcer les pouvoirs de la CNDS et, partant, la déontologie qu’elle a vocation à garantir.
La CNDS a la possibilité de se procurer les enregistrements quand ils existent. (Mme Alima Boumediene-Thiery s’exclame.) Franchement, madame la sénatrice, la suspicion permanente que vous jetez sur toute la hiérarchie policière est exagérée. Vous donnez l’impression qu’elle se refuse absolument à clarifier les faits quand il y a des incidents !
C’est vrai qu’il vaut sans doute beaucoup mieux être masqué et tabasser les flics !
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 5, présenté par MM. C. Gautier et Sueur, Mmes Klès, Boumediene-Thiery et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 4, première phrase
Remplacer cette phrase par deux phrases ainsi rédigées :
Cet enregistrement est placé sous scellés. Il est versé au dossier de la procédure.
II. - Alinéa 4, troisième phrase
Supprimer cette phrase.
La parole est à M. Charles Gautier.
L’article 4 tend à permettre, lorsque les forces de l’ordre ont procédé à l’enregistrement audiovisuel de leurs interventions, le versement de ces enregistrements au dossier de la procédure selon, toutefois, une procédure dérogatoire au droit commun.
La généralisation de l’enregistrement audiovisuel des interventions de police et de gendarmerie est souhaitable. Ces enregistrements apportent des éléments de preuve qui peuvent être utiles pour établir les éléments à charge ou à décharge, ou rendre compte des circonstances d’une interpellation.
Il est paradoxal de permettre le recueil d’éléments de preuve tout en se privant de la possibilité de les utiliser. Ainsi, l’extraction de clichés à partir de ces enregistrements par les enquêteurs dans le cadre d’une enquête préliminaire ou de flagrance pour versement à la procédure serait passible d’une peine d’un an d’emprisonnement et 15 000 euros d’amende, puisque la consultation aurait lieu hors du cadre légal.
Il faudrait que ces enregistrements relèvent du régime de droit commun applicable aux pièces de procédure.
Enfin, il est pour le moins curieux de prévoir que les impossibilités techniques qui empêcheraient le visionnage des images constitueront une cause de nullité de la procédure. Cette disposition résulte d’une confusion entre règle de procédure et élément de preuve, le défaut de preuve ne conduisant, en droit français, qu’à la relaxe ou l’acquittement et, en aucun cas, à une nullité de procédure, sauf violation de règles procédurales dans le recueil de la preuve.
Nous allons vous proposer une série d’amendements pour rendre à ce dispositif toute son efficacité.
Il ne faut pas limiter le versement au dossier de la procédure de ces enregistrements aux seuls cas de contestation des conditions dans lesquelles s’est déroulée l’intervention ou lorsqu’il peut être utile pour déterminer la participation aux faits reprochés d’une ou plusieurs personnes mises en cause ou poursuivies.
Notre premier amendement tend à prévoir que le versement de ces enregistrements au dossier de la procédure est de droit afin que l’ensemble des parties puissent y avoir accès. Dans le but d’éviter toute contestation, nous proposons que cet enregistrement soit placé sous scellés.
Il ne paraît pas opportun de prévoir le versement systématique des enregistrements audiovisuels réalisés en intervention par les forces de l’ordre, et ce pour deux raisons essentielles. Premièrement, dans la grande majorité des cas, l’intervention ne donne pas lieu à contestation. Deuxièmement, un archivage systématique des données enregistrées risquerait de poser des problèmes, sinon budgétaires, du moins matériels, aux forces de police.
Pour apaiser votre inquiétude, je rappelle que l’article 4 adopté par notre commission, c’est-à-dire rectifié, prévoit un grand nombre d’hypothèses de versement de l’enregistrement à la procédure. Cela peut intervenir sur décision du procureur de la République, sur décision du juge d’instruction, sur décision de la juridiction de jugement et à la demande de toute personne mise en cause à l’occasion de l’intervention, c’est-à-dire soit du prévenu, soit de la partie civile.
L’article 4 me paraît apporter toutes les garanties suffisantes. C’est la raison pour laquelle j’émets, au nom de la commission, un avis défavorable sur cet amendement.
Je considère que cet amendement, notamment la mise systématique sous scellés des enregistrements, serait une erreur et qu’il risquerait d’être contre-productif. Il introduirait une lourdeur telle que les greffes pourraient même être dissuadés d’y recourir. Tel n’est pas l’objectif.
Le dispositif actuel présente toutes les garanties. M. le rapporteur en a fait état, je n’y reviendrai donc pas. Dans ces conditions, le Gouvernement ne peut qu’être défavorable à cet amendement.
Monsieur le secrétaire d’État, vous avez déclaré que la CNDS ne ferait pas partie du périmètre du Défenseur des droits. Je vous remercie d’avoir apporté cette précision intéressante au Sénat. À ma connaissance, aucun autre membre du Gouvernement n’a fait une telle déclaration. Il me paraît en effet souhaitable de maintenir la spécificité de la CNDS.
Lorsque nous avons débattu de la révision constitutionnelle, j’ai eu l’honneur de demander à cinq reprises à Mme Rachida Dati de bien vouloir nous dire quel serait le périmètre de la nouvelle institution du Défenseur des droits et je me suis heurté à un mutisme total.
Monsieur le président de la commission des lois, les parlementaires sont habilités à saisir la CNDS. Lorsque nous le faisons, du moins est-ce ainsi que je travaille, nous prenons beaucoup de précautions afin d’intervenir à bon escient. Il ne me paraît pas juste de voir de la méfiance ou de la défiance à l’égard de la police dans le fait de solliciter la CNDS ou de souhaiter, par voie d’amendement, qu’elle dispose ou puisse disposer d’enregistrements.
Une telle suspicion ne rendrait pas compte du respect que nous avons pour la police de notre pays.
Simplement, nous considérons que toute institution, quelle qu’elle soit, doit pouvoir être contrôlée, et la police nationale n’échappe pas à la règle. C’est en l’occurrence le rôle de la CNDS. Il n’y a donc pas lieu de nous faire un procès d’intention à cet égard.
En ce qui concerne l’amendement n° 5, nous ne sommes pas du tout convaincus par les arguments tant de la commission que du Gouvernement.
En effet, l’alinéa 4 de l’article 4 s’applique dans le cadre prévu par l’alinéa 3 du même article, dont je me permets de vous rappeler les termes : « Si l’intervention a conduit à l’établissement d’une procédure judiciaire ou qu’elle intervient dans le cadre d’une enquête ou d’une information judiciaire, la réalisation de cet enregistrement est mentionnée dans un procès-verbal, versé au dossier de la procédure ».
L’alinéa 4 prévoit que, dans le cas d’une contestation des conditions dans lesquelles s’est déroulée l’intervention, l’enregistrement est versé au dossier de la procédure.
Dès lors que l’alinéa 3 s’applique, nous considérons qu’il convient dans tous les cas que l’enregistrement soit versé au dossier de la procédure.
Le fait qu’il soit placé sous scellés constitue une garantie. Un versement systématique au dossier de la procédure est une garantie supplémentaire et majeure du respect du droit. De cette façon, toutes les parties peuvent y accéder, au même titre qu’elles ont accès à l’ensemble des pièces du dossier.
Nous n’avons pas demandé la suppression de cet article. Nous voulons l’améliorer et nous considérons que l’application du droit commun à ces enregistrements constitue une garantie très forte. Je ne vois pas à quel titre on pourrait s’y opposer.
Monsieur Sueur, en vous écoutant, j’ai pris conscience que mon intervention sur la CNDS avait été mal comprise. Peut-être ai-je commis un lapsus du fait de l’emploi d’une double négation. En tout état de cause, je constate que mon propos a été mal interprété.
Je tiens donc à dire clairement que la CNDS a bien vocation à être absorbée dans le périmètre du Défenseur des droits.
Merci de m’avoir permis d’apporter cette précision. J’avais dit que cet amendement n’était pas opportun, d’où sans doute la double négation.
Le projet de loi organique a déjà été examiné par le Conseil d’État. Je ne vous livre donc pas un scoop. Il devrait être prochainement examiné par le Parlement afin de déterminer les pouvoirs du Défenseur des droits.
Je suis désolé de vous décevoir, monsieur Sueur, mais, par honnêteté intellectuelle, je me devais d’apporter cette précision.
Monsieur le secrétaire d’État, vous savez la part que le Sénat a prise dans l’élaboration des missions du Défenseur des droits.
Le texte qui a été déposé sur le bureau du Sénat prévoit la suppression de la CNDS, puisque la loi du 6 juin 2000 est abrogée, mais aussi celle du Médiateur, du Défenseur des enfants et de l’article L 221-5 du code de l’action sociale et des familles.
Je me permets toutefois de rappeler que c’est le Parlement qui fait la loi. Certaines institutions vont sans doute disparaître, mais d’autres pourraient subsister, …
… qui ne figurent pas sur la liste proposée par le Gouvernement. Cela pourrait arriver !
Monsieur Sueur, les citoyens pourront saisir directement le Défenseur des droits sans passer par l’intermédiaire d’un parlementaire, ce qui n’est pas de peu d’intérêt. En outre, les pouvoirs du Défenseur des droits seront plus importants que ceux d’autres institutions, y compris la CNDS.
C’est dans cet esprit que nous avions, nous, au Sénat, travaillé pour étendre les pouvoirs du Médiateur de la République. À l’origine, les citoyens devaient demander à un parlementaire de transmettre leur requête. Mais nous nous sommes aperçus qu’il était préférable d’instituer une saisine directe. Il en sera de même pour le Défenseur des droits.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 28 rectifié bis, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard et Muller, est ainsi libellé :
Alinéa 4, après la troisième phrase
Insérer une phrase ainsi rédigée :
Le versement de l'enregistrement au dossier est également de droit, à la demande d'une partie, lorsque l'intervention ayant fait l'objet d'un enregistrement a donné lieu au dépôt d'une plainte et que cet enregistrement est susceptible, selon l'auteur de la plainte, d'apporter la preuve des faits qu'il allègue.
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Comme l’a rappelé M. Sueur, nous sommes nombreux dans cet hémicycle à avoir été saisis par des personnes victimes de violences policières. Je puis vous affirmer, monsieur Hyest, qu’il ne s’agit pas de fantasmes.
Je pourrais citer plusieurs exemples, pris en région parisienne, à Montreuil, au Blanc-Mesnil ou à Argenteuil, mais aussi en Franche-Comté, à Cannes et ailleurs. Des violences policières ont souvent, malheureusement, été à l’origine de situations dramatiques et nombres d’entre elles ont donné lieu à une saisine de la CNDS.
Sans entrer dans un débat de fond, je tiens néanmoins à attirer votre attention sur le phénomène, inquiétant, du classement sans suite des plaintes visant à mettre en cause de tels comportements.
La CNDS, qui travaille très souvent avec nous, a précisément été mise en place pour permettre une meilleure poursuite des manquements aux règles de déontologie de la sécurité. Elle apporte la garantie d’un certain contrôle, nécessaire dans toute République et dans toute démocratie.
Le dispositif qui nous est proposé aujourd’hui pourrait se révéler utile, voire important dans le cadre de ces procédures.
Toutefois, une analyse plus précise de la rédaction de l’article 4 montre que, en réalité, la production des enregistrements dans le cadre d’une plainte pour violence policière sera souvent impossible. Je connais des cas où, en effet, il n’a pas été possible de produire d’enregistrement.
Le versement de cet enregistrement au dossier est de droit lorsqu’il est demandé par la personne à qui il est reproché une infraction. Lorsque c’est un agent qui est soupçonné d’un manquement aux règles de déontologie, il suffit qu’il refuse le versement de l’enregistrement au dossier pour que la victime perde ainsi une chance d’établir la réalité des agissements allégués.
Une des graves lacunes de ce texte tient au caractère unilatéral du dispositif. L’égalité des armes commande qu’une pièce puisse être produite par l’une ou l’autre des parties, sans favoriser l’une par rapport à l’autre, qu’elle soit ou non dépositaire de l’autorité publique.
Si nous sommes soucieux de garantir la transparence dans la conduite des interventions de police, nous devons autoriser l’enregistrement et permettre qu’il soit produit dans le cadre d’une procédure, y compris quand elle est diligentée contre un agent des services de police. C’est à ce prix que la disposition remplira son office.
C’est la raison pour laquelle nous vous proposons que le versement de l’enregistrement soit également de droit lorsque l’intervention qui a donné lieu à l’enregistrement est suivie d’une plainte pour violence policière et que la victime estime, même contre l’avis de l’agent, que l’enregistrement est susceptible d’étayer ses dires.
En refusant cette possibilité, vous ôtez tout intérêt à l’article 4. Pis, vous immunisez certaines pratiques, au risque d’en permettre l’impunité, rare, heureusement, dans le champ de la protection pénale, mais réelle.
L’article 4 prévoit qu’en cas de contestation des conditions dans lesquelles s’est déroulée l’intervention l’enregistrement est versé au dossier de la procédure à la demande du procureur de la République, du juge d’instruction ou de la juridiction de jugement.
La commission a néanmoins considéré qu’il n’était pas inutile de préciser que l’enregistrement est de droit versé au dossier lorsqu’il est susceptible de permettre à la personne qui porte plainte d’étayer les faits qu’elle avance.
Dans mon esprit, ce n’est pas la marque d’une défiance à l’égard de la police ou des enquêteurs. Si une personne dont la vitrine a été « caillassée » au cours d’une manifestation demande le versement de l’enregistrement au dossier de l’instruction, cela peut faciliter l’identification de l’auteur des faits.
À la demande de la commission, Mme Alima Boumediene-Thiery a accepté de clarifier les termes de son amendement. Dans sa rédaction actuelle, même si l’exposé des motifs demeure inacceptable, cet amendement peut éviter des interprétations inopportunes. La commission y est donc favorable.
Pour une fois, le Gouvernement ne suivra pas l’avis de la commission, bien que je comprenne parfaitement les arguments de M. le rapporteur.
On ne peut pas, comme le fait le groupe socialiste au travers de nombreux amendements, et l’amendement n° 28 rectifié bis est de ceux-là, stigmatiser ainsi constamment le travail de la police, d’autant qu’en l’occurrence la garantie existe, et elle est assurée non seulement par le procureur de la République, mais aussi par le juge d’instruction et par la juridiction de jugement.
Le policier peut, s’il se sent mis en cause, demander le versement de l’enregistrement au dossier. Dès qu’il y a contestation, il y a plainte, et donc intervention d’un magistrat. Le versement de l’enregistrement au dossier est donc possible, avec la garantie d’un juge.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement ne peut qu’être défavorable à cet amendement.
Les garanties que souhaitent les auteurs de l’amendement existent déjà. Cette disposition serait donc redondante. Par ailleurs, elle apparaît vexatoire. En tout état de cause, elle stigmatise la police.
Je ne voterai donc pas cet amendement.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 6, présenté par MM. C. Gautier et Sueur, Mmes Klès, Boumediene-Thiery et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 4, quatrième phrase
Supprimer cette phrase.
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.
Monsieur le secrétaire d'État, nous aurons l’occasion au cours de nos nuits d’insomnie de nous pencher sur vos doubles négations, fâcheuses en l’espèce, même si vous y avez trouvé une explication, au reste quelque peu confuse, pour justifier votre précédente déclaration.
Mais, monsieur le président de la commission, nous aurons l’occasion de revenir sur le sujet en temps utile. Sachez d’ores et déjà que je ne suis pas favorable à l’absorption de la CNDS par le Défenseur des droits.
Que la saisine passe par le filtre des parlementaires me semble constituer plutôt une garantie. En effet, nous avons tous à cœur d’analyser de manière très approfondie les dossiers qui nous sont présentés avant de saisir la CNDS.
Monsieur le secrétaire d’État, vous nous accusez d’être des donneurs de leçons. Je vous prie de ne pas nous faire de procès d’intention. Vous avez vu dans nos amendements une stigmatisation de la police. Au nom du groupe socialiste, je récuse avec la dernière énergie cette accusation !
Je connais de nombreux fonctionnaires de police qui font preuve d’un grand dévouement et d’un remarquable professionnalisme. Nul ne peut nous faire dire le contraire !
Certes, il arrive, comme dans toutes, absolument toutes les professions, qu’il y ait des dérives, des bavures, des fautes. La CNDS existe justement pour les traiter. Les tribunaux ont également leur rôle à jouer. Mais on ne peut pas nous accuser de stigmatiser la police au prétexte que l’une de nos collègues a déposé un amendement permettant de donner un moyen d’agir supplémentaire à la CNDS, avec l’accord de M. le rapporteur.
Vous nous reprochez de donner des leçons, soit, mais il n’y a pas de raison de vous laisser insinuer, monsieur le secrétaire d’État, que nous stigmatisons et fustigeons les fonctionnaires de la police nationale, envers lesquels nous manifestons au contraire le plus grand respect. Je tiens à le dire hautement dans cette enceinte !
L’amendement n°6 est parfaitement cohérent, monsieur le président, avec l’amendement précédemment défendu par Charles Gautier. L'article 4 prévoit que les huit derniers alinéas de l'article 114 du code de procédure pénale ne sont pas applicables s'agissant des enregistrements. Ces alinéas prévoient qu'après la première comparution ou la première audition, les avocats des parties peuvent se faire délivrer, à leurs frais, copie de tout ou partie des pièces et des actes du dossier.
Nous proposons, par notre deuxième amendement, de supprimer cette restriction afin de faire rentrer ces enregistrements dans le droit commun. Cette logique est, à nos yeux, imparable sur le plan de l’équité et du droit.
rapporteur. Les huit derniers alinéas de l’article 114 du code de procédure pénale sont relatifs aux copies des pièces de procédure qui peuvent être délivrées aux avocats des parties tout au long de l’instruction. Il ne paraît pas opportun de permettre que les enregistrements des interventions des forces de l’ordre puissent faire l’objet de copies susceptibles d’êtres diffusées.
L’article 4 prévoit d’ailleurs que la transmission d’un enregistrement réalisé dans de telles conditions est punissable d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende. En revanche, et c’est là, me semble-t-il, que vous faites une confusion, l’enregistrement peut parfaitement être consulté selon les modalités fixées par le juge d’instruction, comme le sont toutes les pièces du dossier.
La commission émet donc un avis défavorable.
Le Gouvernement émet le même avis que la commission
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 24, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard et Muller, est ainsi libellé :
Alinéa 4, dernière phrase
Remplacer cette phrase par deux phrases ainsi rédigées :
« Lorsqu'une partie demande la consultation de l'enregistrement, cette demande est formée par écrit dans les conditions mentionnées au dixième alinéa de l'article 81 et le juge d'instruction dispose d'un délai de 5 jours ouvrables à compter de la réception de la demande pour s'opposer à la consultation de l'enregistrement par une ordonnance spécialement motivée au regard des risques de pression sur les victimes, les personnes mises en examen, leurs avocats, les témoins, les enquêteurs, les experts, ou toute autre personne concourant à la procédure. Cette décision peut être déférée, dans les deux jours de sa notification, au président de la chambre d'instruction qui statue dans un délai de 5 jours ouvrables par une décision écrite et motivée, non susceptible de recours ».
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, cet amendement concerne précisément la procédure prévue par l’article 4 pour le traitement de la demande de consultation de l'enregistrement formulée devant un juge d'instruction.
La procédure prévue est celle qui est mentionnée à l'article 82-1 du code de procédure pénale, selon laquelle les parties peuvent saisir le juge d'instruction afin que soit ordonnée la production, par l'une d'entre elles, d'une pièce utile à l'information.
D’un point de vue matériel, nous proposons une procédure semblable, à un détail près. En effet, l'article 82-1 du code de procédure pénale permet au juge d'instruction de s'opposer à cette demande, par décision motivée, dans un délai d'un mois. Mais rien n'est prévu en cas de refus !
Afin de prévenir les lenteurs inhérentes à de telles décisions, et surtout d’éviter l’absence de contrôle des refus, nous vous proposons une procédure différente de celle, rudimentaire, qui est prévue par l'article 82-1 du code de procédure pénale.
Le juge d'instruction, saisi d’une telle demande, ne pourrait ainsi refuser la consultation de l'enregistrement que dans un nombre de cas précis, notamment s’il existe des risques de pression à l'égard de la victime, des personnes mises en examen, de l'avocat, des témoins, ou des personnes participant à la procédure pénale.
Conformément au droit commun, l'ordonnance refusant la consultation devrait être spécialement motivée et être rendue dans un délai de cinq jours ouvrables. Le demandeur disposerait alors d’un délai de deux jours à partir de la notification de refus pour déférer cette décision au président de la chambre de l'instruction, qui devrait alors statuer dans les cinq jours.
Cette procédure est plus à même de respecter les droits de la défense que celle qui est prévue par l'article 4 de la proposition de loi dans la rédaction issue des travaux de la commission des lois du Sénat. Elle instaure en effet des délais plus courts, des conditions plus strictes pour le refus d'une consultation, et, surtout, un droit d'appel contre la décision de refus du juge d'instruction.
Ce sont là des principes élémentaires dans un procès équitable.
J’avoue ne pas bien comprendre la difficulté procédurale que vous évoquez. En effet, votre amendement tente d’instaurer une procédure spéciale pour la consultation des enregistrements réalisés par les forces de l’ordre.
Cette solution serait source de complications inutiles, puisque l’article 82-1 du code de procédure pénale permet d’ores et déjà à une partie de demander au juge d’instruction la consultation de l’enregistrement. Si le juge n’entend ne pas faire droit à cette demande, il rend une ordonnance motivée qui peut être déférée devant le président de la chambre de l’instruction. Il est de plus possible, si le juge d’instruction ne statue pas dans un délai d’un mois, de saisir directement le président de la chambre de l’instruction.
L’amendement que vous proposez n’apporte rien et reprend une procédure existante.
La commission émet donc un avis défavorable.
Le Gouvernement émet un avis identique à celui de la commission.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 23, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard et Muller, est ainsi libellé :
Alinéa 4
I. - Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Lorsque la juridiction de jugement a été saisie, toute personne ayant la qualité de prévenu ou d'accusé est en droit d'obtenir la délivrance, à ses frais, le cas échéant par l'intermédiaire de son avocat, de la copie de l'enregistrement audiovisuel soumis à la juridiction de jugement devant laquelle elle est appelée à comparaître.
II. - En conséquence, à la première phrase
Remplacer les mots :
, du juge d'instruction ou de la juridiction de jugement
par les mots :
ou du juge d'instruction
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Cet amendement vise à introduire une distinction dans la procédure prévue pour la consultation des enregistrements.
En effet, l'article 4 ne fait pas de différence entre une consultation au stade de l'instruction et une consultation demandée devant la juridiction de jugement. Cette distinction se justifie pourtant pour plusieurs raisons. Ainsi, les principes du secret de l'enquête et de l'instruction ne sont pas applicables devant la juridiction de jugement. Cette distinction, élémentaire, conduit naturellement à considérer la procédure de consultation selon son état d'avancement.
Cette exigence est issue, rappelons-le, non seulement de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme, relative à l'article 6, paragraphe 3, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, mais également de la position de la Cour de cassation.
Nous vous proposons donc de dissocier les fonctions de poursuite et de jugement, en conférant, devant la juridiction de jugement, un droit à obtenir une copie numérique de l'enregistrement, sans restriction autre que celle tirée de la volonté du prévenu ou de l'accusé.
Cet amendement est satisfait par l’article R-155 du code de procédure pénale, qui prévoit qu’une copie des pièces de la procédure est délivrée aux parties lorsque des poursuites ont été engagées et que la copie est demandée pour l’exercice des droits de la défense ou de la partie civile.
La commission se prononce donc pour un retrait de cet amendement et émettra, à défaut, un avis défavorable.
Le Gouvernement émet le même avis que la commission.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 7, présenté par MM. C. Gautier et Sueur, Mmes Klès, Boumediene-Thiery et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Charles Gautier.
Cet amendement tend à supprimer l'alinéa 5 qui dispose que le fait, pour toute personne, de diffuser un enregistrement réalisé en application du présent article est puni d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d’amende.
En effet, il est paradoxal de permettre le recueil d'éléments de preuve tout en se privant de la possibilité de les utiliser ! Là encore, nous proposons simplement d'appliquer le droit commun.
L'article 434-22 du code pénal sanctionne le bris de scellés et le détournement d'objet placé sous scellés. Dans le cadre de l'instruction, l'article 114-1 du code de procédure pénale dispose que « le fait, pour une partie à qui une reproduction des pièces ou actes d'une procédure d'instruction a été remise, de la diffuser auprès des tiers, est puni de 3 750 euros d'amende ». Enfin, l'article 226-13 du code pénal prévoit que « la révélation d'une information à caractère secret par une personne qui en est dépositaire soit par son état ou par profession, soit en raison d'une fonction ou d'une mission temporaire, est punie d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende ».
Les dispositions actuelles sont donc suffisantes, et il n'est pas utile d'apporter une restriction supplémentaire à l'utilisation de ces enregistrements.
L’ensemble des dispositions du code de procédure pénale relatives aux enregistrements prévoient des sanctions pénales destinées à prévenir leur diffusion. C’est ainsi le cas pour les enregistrements des gardes à vue, ceux des interrogatoires en matière criminelle ainsi que ceux des auditions de mineurs. L’objectif est de garantir une certaine confidentialité pour ces pièces de procédure. Mais ces dispositions protègent également le mineur ou le bénéficiaire de la présomption d’innocence. Il ne s’agit pas de faire passer ces pièces dans le domaine public pour que, par exemple, les déclarations du mineur soient systématiquement diffusées dans le public. À l’inverse, ces dispositions n’empêchent pas le procureur de la République de décider de rendre public l’enregistrement, afin d’éviter la propagation d’informations parcellaires ou inexactes ou faire cesser un trouble à l’ordre public.
La commission émet par conséquent un avis défavorable.
Les restrictions à la diffusion et l’infraction prévue par la loi du 15 juin 2000 renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes, ou loi Guigou, restent tout à fait pertinentes en l’occurrence.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 8, présenté par MM. C. Gautier et Sueur, Mmes Klès, Boumediene-Thiery et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 6
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.
L’alinéa 6 prévoit que « le fait qu'un enregistrement réalisé en application du présent article ne puisse être consulté en raison d'une impossibilité technique ne constitue pas une cause de nullité ».
Il nous paraît paradoxal d’imaginer que des impossibilités techniques qui empêcheraient le visionnage des images puissent constituer une cause de nullité de l’ensemble de la procédure. Cette disposition nous semble résulter d'une confusion entre règle de procédure et élément de preuve.
Le défaut de preuve ne conduit en droit français qu'à la relaxe ou à l'acquittement et en aucun cas à une nullité de procédure sauf, bien sûr, en cas de violation de règles procédurales dans le recueil de la preuve.
Nous proposons donc de supprimer cette restriction.
L’enregistrement des interventions des forces de l’ordre ne fait l’objet d’expérimentations que depuis 2008. Des difficultés techniques apparaissent encore régulièrement. Dans ces conditions, il semble tout de même important de le préciser, l’impossibilité de consulter un enregistrement pour des raisons techniques ne peut pas constituer une cause de nullité de la procédure. Il serait en effet aberrant d’annuler toute une procédure pour la seule raison qu’un enregistrement, mentionné au dossier et dont le visionnage est déterminant pour la suite de la procédure, n’est pas techniquement fiable et exploitable.
La commission émet donc un avis défavorable.
M. le rapporteur a raison, il serait aberrant que toute la procédure soit annulée pour une simple impossibilité technique.
Imaginons par exemple que, à l’occasion d’un contrôle d’identité filmé par la police – enregistrement au demeurant facultatif –, et dans des conditions tout à fait respectueuses des droits, une personne extrêmement dangereuse soit arrêtée. Devra-t-on la remettre en liberté parce que l’enregistrement est illisible ? Si le magistrat considère, dans le cadre de la procédure, qu’il ne peut pas consulter la vidéo, il en tirera toutes les conséquences, mais l’automaticité, en l’occurrence, me paraît totalement absurde.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 26, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard et Muller, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 7, première phrase
Après le mot :
décret
insérer les mots :
, pris après avis de la Commission nationale Informatiques et libertés,
II. - Alinéa 7
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Il détermine également les conditions dans lesquelles la Commission nationale informatiques et libertés contrôle la durée de conservation et la destruction de l'enregistrement dans les cas prévus au troisième alinéa.
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Cet amendement a pour objet de placer les enregistrements effectués dans le cadre de la procédure prévue par cet article dans le champ des compétences de la CNIL.
Il nous semble en effet important que la CNIL ait un droit de regard sur les enregistrements, notamment ceux qui sont conservés sans être utilisés dans le cadre d’une procédure.
À ce titre, la CNIL doit pouvoir émettre un avis sur le décret d’application du dispositif créé par cet article. Les atteintes potentielles au droit à la vie privée sont trop importantes pour que l’on s’affranchisse du contrôle de cette autorité administrative indépendante.
Par ailleurs, par cet amendement, nous vous proposons que la CNIL puisse contrôler la durée de conservation et la destruction des données qui seront stockées, car aucune autorité administrative n’est prévue par le texte.
Il ne faut pas confondre les notions en confondant les procédés.
Il n’est pas possible d’assimiler les enregistrements réalisés par les interventions des forces de l’ordre à des systèmes de vidéosurveillance ou à des traitements automatisés de données personnelles. Ce point pourra toutefois être précisé lors de l’examen du projet de loi dit « LOPPSI 2 », qui contient un certain nombre de dispositions relatives à la vidéosurveillance.
Néanmoins, en l’état du droit, la compétence de la CNIL en matière d’interventions de forces de l’ordre ne semble pas pouvoir se justifier. Je vous rappelle que la CNIL n’est pour l’instant pas compétente en matière de vidéosurveillance sur la voie publique.
La commission émet donc un avis défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 9, présenté par MM. C. Gautier et Sueur, Mmes Klès, Boumediene-Thiery et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 8
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Charles Gautier.
Il s’agit d’un amendement de conséquence, puisque nous vous avons proposé d’appliquer aux enregistrements audiovisuels des interventions des forces de l’ordre les règles de droit commun.
Une logique en vaut une autre, et le dernier alinéa de l’article 4 apporte une précision importante, puisqu’il exclut du champ de cet article les enregistrements réalisés au cours d’une procédure judiciaire, qui demeurent régis par les dispositions spécifiques du code de procédure pénale, notamment leur placement sous scellés.
La commission émet donc un avis défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
M. le président. Mes chers collègues, je tiens à vous annoncer une bonne nouvelle : la France s’est qualifiée pour participer à la Coupe du monde de football, en Afrique du Sud !
Applaudissements
L'article 4 est adopté.
Après l’article L. 126-1 du code de la construction et de l’habitation, il est inséré un article L. 126-1-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 126-1-1. – Lorsque des événements ou des situations susceptibles de nécessiter l’intervention des services de la police ou de la gendarmerie nationales ou, le cas échéant, des agents de la police municipale se produisent dans les parties communes des immeubles à usage d’habitation, les propriétaires ou exploitants de ces immeubles ou leurs représentants peuvent rendre ces services ou ces agents destinataires des images des systèmes de vidéosurveillance qu’ils mettent en œuvre dans ces parties communes.
« La transmission de ces images relève de la seule initiative des propriétaires ou exploitants d’immeubles collectifs d’habitation ou de leurs représentants. Elle s’effectue en temps réel et est strictement limitée au temps nécessaire à l’intervention des services de police ou de gendarmerie nationales ou, le cas échéant, des agents de la police municipale.
« Un décret en Conseil d’État pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés définit les conditions d’application du présent article. »
Je suis saisi de trois amendements identiques.
L'amendement n° 10 est présenté par MM. C. Gautier et Sueur, Mmes Klès, Boumediene-Thiery et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 40 est présenté par Mmes Assassi, Mathon-Poinat, Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.
L'amendement n° 53 est présenté par MM. Mézard et Collin.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour présenter l’amendement n° 10.
L’article 4 bis n’est pas anodin, car il permet aux gérants d’immeubles de transmettre les images de leurs systèmes de vidéosurveillance aux forces de l’ordre en dehors de toute logique d’investigation et de toute procédure.
Cet article ouvre cette possibilité « lorsque des événements ou des situations susceptibles de nécessiter l’intervention des services de la police ou de la gendarmerie nationales ou, le cas échéant, des agents de la police municipale se produisent dans les parties communes des immeubles à usage d’habitation ». Vous aurez remarqué un mot particulièrement important dans l’alinéa que je viens de citer, je veux dire l’adjectif « susceptibles ».
Cela signifie que, si le gérant d’un immeuble estime qu’un incident peut se produire, il a la possibilité de donner ses enregistrements à la police.
Cette formulation est désastreuse, parce qu’elle est totalement vague. Un événement est toujours « susceptible » d’advenir ! Donc, à tout moment et sans raison, tous les films produits par les systèmes de surveillance installés dans les parties communes d’immeubles collectifs d’habitation peuvent être transmis à la police.
S’il s’agit d’une remise a posteriori à titre de preuve, ce texte est inutile, car les services de police peuvent se faire remettre de tels enregistrements sur simple réquisition. Donc, il ne peut s’agir que d’une procédure a priori.
On voit mal l’intérêt d’une telle disposition pour lutter contre la délinquance puisque, par hypothèse, au moment où les enregistrements sont remis, aucune infraction n’a été commise et aucune enquête n’est ouverte.
En réalité, ce texte s’inscrit, lui, dans une logique de suspicion et de stigmatisation. (Concrètement, les bailleurs pourront désigner ceux qui, de leur point de vue, posent problème a priori, sans autre cause : soit leur figure ne leur reviendra pas, soit, en les regardant, ils se diront que ces personnes sont « susceptibles » de commettre des actes délictueux.
C’est tout à fait inacceptable ! Si vous pensez le contraire, je suis curieux d’entendre vos arguments.
À titre tout à fait subsidiaire, j’ajoute que le texte reste muet sur le mode de transmission de ces images. Si la transmission se fait par wi-fi – n’oublions pas que la technique évolue très rapidement –, il y a un risque que les données soient captées par des tiers, ce qui peut constituer une atteinte à la vie privée.
Enfin, si un débat devait avoir lieu sur une telle disposition, il devrait s’inscrire dans le cadre de l’examen du texte « LOPPSI 2 ».
Sur le fond, cet article nous paraît extrêmement dangereux.
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat, pour présenter l'amendement n° 40.
Cette disposition que nous critiquons, comme nos collègues socialistes, permettrait aux propriétaires et aux exploitants des immeubles d’habitations, ou à leurs représentants, de transmettre les images de leurs systèmes de vidéosurveillance aux services de police.
Vous insérez donc, monsieur le secrétaire d’État, une disposition qui renforce le recours à la vidéosurveillance en dehors de toute procédure d’enquête. En effet, la possibilité qui est donnée à ces personnes morales privées est ouverte lorsque des événements ou des situations sont « susceptibles » de nécessiter l’intervention des forces de l’ordre.
Nous sommes donc en présence d’une disposition assez étrange. Je sais bien que la vidéosurveillance est considérée aujourd’hui comme une arme nouvelle et infaillible pour lutter contre l’insécurité, mais ce système de contrôle omniprésent est peu probant, et de toute manière très dangereux pour nos libertés.
Dans la même logique, nous considérons que la législation actuelle est suffisante. D’ailleurs, les inquiétudes qui viennent d’être exposées sont en partie partagées par la commission, puisqu’un décret en Conseil d’État pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés doit définir précisément les conditions de mise en œuvre du présent article. Gageons en effet qu’il posera de sérieuses difficultés d’application...
Donc, il vaut mieux en rester à la situation actuelle.
Le problème qui se pose est simple.
L’article L. 126-1 du code de la construction et de l’habitation autorise d’ores et déjà les propriétaires ou exploitants d’immeubles à usage d’habitation à accorder aux forces de l’ordre un droit d’accès permanent dans les parties communes, afin de rétablir la jouissance paisible des lieux. Voilà pour l’existant.
L’article 4 bis, inséré dans le texte de la proposition de loi par la commission des lois de l’Assemblée nationale, donne aux forces de l’ordre les moyens de préparer leur intervention, en leur permettant d’accéder en temps réel aux images des systèmes de vidéosurveillance installés dans les parties communes.
Ce n’est pas une mesure de répression. Il s’agit de permettre aux forces de police de visionner les images en temps réel, afin d’éviter, le cas échéant, la commission d’une infraction plus grave. Ne croyez-vous pas que, dans le métro, il eût été utile, de temps en temps, que les forces de police puissent intervenir avant qu’un viol collectif soit commis ? C’est de la prévention, et uniquement en temps réel.
Afin de limiter les risques d’atteinte à la vie privée, notre commission des lois a strictement encadré cette possibilité et a souhaité renvoyer à un décret en Conseil d’État, pris après avis de la CNIL, pour la détermination des conditions d’application de cet article.
Les garanties apportées par la commission permettent de parvenir à un équilibre certain dans le domaine de la prévention.
C’est pourquoi la commission émet un avis défavorable sur ces trois amendements identiques de suppression.
Mesdames, messieurs les sénateurs, nous avons besoin de la possibilité complémentaire qu’apporte cet article.
En l’état actuel du droit, aucune communication d’image de vidéosurveillance prise dans des immeubles d’habitation n’est envisageable à des fins de prévention. Or cet article vise à remédier à cette lacune. Comme l’a dit M. le rapporteur, il est strictement encadré et sera précisé par un décret en Conseil d’État. Il ne faut donc pas le supprimer.
Les amendements ne sont pas adoptés.
L'amendement n° 30, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard et Muller, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 2
Supprimer les mots :
ou, le cas échéant, des agents de la police municipale
II. - Alinéa 3, seconde phrase
Supprimer les mots :
ou, le cas échéant, des agents de la police municipale
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
La possibilité, ouverte par cet article, de confier à la police municipale la compétence pour recevoir des informations recueillies par vidéosurveillance est étonnante et déborde du cadre des compétences fixées par le code de procédure pénale.
Prenons une situation simple : la police municipale est amenée à intervenir, sur transmission d’images, par un gardien d’immeuble.
Que pourra faire la police municipale ? En réalité, pas grand-chose, et c’est justement là où se situe le problème. Les policiers municipaux ne peuvent ni procéder à des contrôles d’identité ni verbaliser en dehors du champ de leur compétence.
Dans ce cas, à quoi servirait une intervention de la police municipale ?
Il est important de maintenir intacts les pouvoirs de chacune des composantes des forces de l’ordre, sans empiétement des unes sur les autres.
Ce serait sinon ouvrir la voie à un mélange des genres tout à fait nuisible, notamment lorsqu’il s’agit d’exercer les fonctions régaliennes de l’État.
C’est la raison pour laquelle nous vous proposons d’exclure la police municipale du dispositif.
La référence aux agents de police municipale figure déjà dans un article du code de la construction et de l’habitation, qui autorise les propriétaires à faire appel à la police municipale et à lui accorder un droit d’accès permanent dans les parties communes, afin de rétablir la jouissance paisible des lieux.
De plus, l’intervention des agents de police municipale se justifie par le fait qu’il s’agit vraisemblablement d’une mission de médiation, qui, on le sait bien, relève tout à fait de la compétence des policiers municipaux, en application de l’article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales.
Par conséquent, la commission émet un avis défavorable.
Le Gouvernement émet le même avis défavorable que la commission.
L'amendement n'est pas adopté.
Monsieur le président, lorsque la conférence des présidents a organisé, dans le cadre de l’espace réservé aux groupes d’opposition ainsi qu’aux groupes minoritaires, ces trois demi-journées, elle a imparti une plage de quatre heures à chaque groupe. Il n’y a donc pas de groupe qui soit privilégié.
La présente proposition de loi a été examinée de dix-sept heures à vingt heures, soit durant trois heures, et la discussion se poursuit depuis vingt-deux heures. Il est actuellement vingt-trois heures quarante-cinq. Nous avons donc déjà consacré quatre heures quarante-cinq à ce texte !
Hier soir, un dépassement a certes été admis – dont acte ! –, mais il était moins important. La discussion de la proposition de loi présentée par David Assouline a été interrompue et reportée à la prochaine demi-journée réservée au groupe socialiste.
Pour ma part, je souhaite qu’il n’y ait pas deux poids, deux mesures dans cette assemblée !
Aussi, monsieur le président, je vous demande de lever la séance, ce qui me semblerait conforme à la décision prise par la conférence des présidents.
Certes, je suis tout à fait conscient du désagrément que je vous cause et de la situation difficile dans laquelle je vous place, mais je suis dans mon rôle en vous le demandant et j’y suis contraint.
Acte vous est donné de votre rappel au règlement, monsieur Frimat.
La parole est à M. le président de la commission des lois.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Mes chers collègues, lorsqu’il s’agit d’examiner un texte important, le délai de quatre heures ne s’applique pas en tant que tel.
Exclamations sur les travées du groupe socialiste.
Je rappelle que la Constitution prévoit simplement qu’une journée par mois est réservée aux groupes d’opposition et minoritaires. Le Gouvernement pourrait, à la limite, réclamer, avec l’accord de la majorité, tout le temps restant disponible dans la semaine. On oublie un petit peu cet aspect des choses, comme s’il s’agissait d’un droit égal. Or, je suis désolé, mais ce n’est pas du tout le cas !
Monsieur Frimat, nous étions certes convenus que les groupes pouvaient permuter de mercredi à jeudi par accord entre eux, mais je ne vois pas au nom de quoi on arrêterait la discussion d’un texte dont le Gouvernement souhaite aussi qu’il soit soumis au Sénat et voté, …
Comme il l’a été à l'Assemblée nationale !
… comme ce fut effectivement le cas à l'Assemblée nationale, d’autant qu’il ne reste que quelques amendements à examiner.
C’est possible si chacun veut bien faire un effort.
Sinon, ce serait trop facile d’empêcher l’adoption des textes ! La majorité aussi a des droits ! Autrement, cela n’a aucun sens.
Monsieur le président, je vous demande de poursuivre jusqu’à son terme l’examen de cette proposition de loi.
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
Je vous remercie, monsieur le président, de me redonner la parole.
Sur le document fourni par la conférence des présidents qui fait apparaître, grâce à différentes couleurs, les espaces réservés aux groupes, on voit bien que le RDSE et l’UMP se partagent la journée d’aujourd'hui. Un accord a été passé sur un module de quatre heures.
M. le président de la commission des lois s’exclame.
Monsieur Hyest, je suis désolé, mais telle a été la position de la conférence des présidents. Votre interprétation peut être différente, mais vous ne m’empêcherez pas d’avoir la mienne !
Il s’agit ici d’un principe d’équité.
Je ne pense pas que la majorité soit particulièrement maltraitée dans cette assemblée.
Je demande simplement que la décision prise par la conférence des présidents soit respectée parce que c’est ainsi que nous a été présentée l’organisation de nos travaux. Nous en faisons, monsieur le président, une question de principe.
Maintenant, nous nous sommes suffisamment exprimés, et nous vous écoutons, monsieur le président.
Monsieur le président de la commission, monsieur Frimat, mes chers collègues, de la place qui est la mienne, j’observe, depuis la reprise de la séance, que nous travaillons dans une atmosphère excellente et que le débat est, disons-le, très intéressant et de bonne tenue.
Monsieur Frimat, s’agissant de la proposition de loi UMP qui nous est soumise, je vous rappelle qu’une quarantaine d’amendements ont été déposés par le groupe socialiste et par le groupe CRC-SPG, ce dont je me réjouis d’ailleurs, puisqu’ils ont nourri la discussion.
En toute honnêteté, je ne me vois pas interrompre un débat auquel participent avec une attention soutenue l’ensemble de nos collègues. Je prends cette décision en mon âme et conscience et, s’il le faut, j’en répondrai devant la conférence des présidents !
Très bien ! et applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
L'amendement n° 29, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard et Muller, est ainsi libellé :
Alinéa 3, première phrase
Remplacer les mots :
La transmission de ces images
par les mots :
La décision de transmission de ces images est subordonnée à l'autorisation de l'autorité préfectorale, après avis de la commission départementale, dans les conditions prévues par le III de l'article 10 de la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995 d'orientation et de programmation pour la sécurité. Elle relève...
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Cet amendement a pour objet de placer le dispositif créé par cet article sous le régime de droit commun de la vidéosurveillance.
L’article 4 bis met en place une véritable surveillance des parties communes des immeubles par un droit de réquisition des systèmes de vidéosurveillance. Aucune raison impérieuse n’est précisée en ce qui concerne l’encadrement de ces transmissions.
Cet article fait référence à des « événements ou des situations susceptibles de nécessiter l’intervention des services de la police ou de la gendarmerie nationales ». Mais qui apprécie cette nécessité ? On se paye encore une fois de mots pour justifier l’injustifiable, une violation du droit à la vie privée des habitants de l’immeuble.
Gardons bien à l’esprit que ceux qui auront à subir ce dispositif ne l’ont pas désiré. La plupart sont de simples locataires, qui verront ainsi leurs allées et venues filmées, transmises aux autorités, sans aucun droit d’accès à ces images.
Pis encore, ils ne sauront même pas, en l’état actuel du texte, qu’ils peuvent être filmés. Leur a-t-on demandé leur avis ? Non ! Et c’est, à mon avis, très grave.
La principale question soulevée par ce dispositif est celle de sa compatibilité avec le droit commun de la vidéosurveillance tel qu’il est issu de l’article 10 de la loi sur la vidéosurveillance.
Je vous rappelle que cette loi prévoit, de manière très précise, l’hypothèse d’un raccordement des forces de police à un système de vidéosurveillance.
Le dispositif que vous souhaitez créer existe déjà, mais il est soumis à un contrôle.
D’abord, l’installation d’un système de vidéosurveillance est soumise à une décision du préfet, après autorisation de la commission départementale des systèmes de vidéosurveillance. Cet article a pour objet de court-circuiter cette procédure en s’affranchissant de tout contrôle. Le résultat est étonnant et montre bien comment cette proposition de loi est un gadget politique et médiatique. La loi spéciale vient vider de son sens le droit commun.
Un tel texte n’aurait jamais passé le test du Conseil d’État s’il lui avait été soumis. C’est certainement la raison pour laquelle le Gouvernement a volontairement choisi de le présenter sous la forme d’une proposition de loi. Celui qui avait déposé cette proposition de loi est d’ailleurs aujourd’hui devenu ministre...On est en plein mélange des genres !
Nous vous proposons de supprimer cette incohérence, dangereuse, en soumettant ce dispositif au droit commun de la vidéosurveillance, qui requiert l’autorisation du préfet et celle de la commission départementale des systèmes de vidéosurveillance.
Les parties communes des immeubles constituent des lieux privés. De ce fait, ils ne relèvent pas du champ d’application de la loi de 1995. Les systèmes de vidéosurveillance implantés dans des lieux privés relèvent de la loi « Informatique et libertés » de 1978, donc de la compétence de la CNIL.
Dans ces conditions, la commission a prévu qu’un décret en Conseil d’État, pris après avis de la CNIL, déterminera les conditions d’application de l’article 4 bis.
En conséquence, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
Je mets aux voix l'amendement n° 29.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin a lieu.
Il est procédé au comptage des votes.
Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 82 :
Le Sénat n'a pas adopté.
Je mets aux voix l'article 4 bis.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin a lieu.
Il est procédé au comptage des votes.
Mes chers collègues, les scrutateurs m’informent qu’il y a lieu d’effectuer un pointage.
En attendant le résultat définitif, je vous propose de réserver le vote sur l’article 4 bis et de poursuivre la discussion des articles.
L'amendement n° 27 rectifié bis, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard et Muller, est ainsi libellé :
Après l'article 4 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 26-1 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis est rétabli dans la rédaction suivante :
« Art. 26 -1. - La transmission des images des systèmes de vidéosurveillance aux services de police ou de la gendarmerie nationale ou, le cas échéant, aux agents de la police municipale dans les cas prévus à l'article L. 126-1-1 du code de la construction et de l'habitation fait l'objet d'une autorisation générale qui est accordée par un vote à l'unanimité des voix des propriétaires. »
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Cet amendement vise à insérer un article additionnel après l’article 4 bis. Il porte sur l’autorisation de transmission des images des systèmes de vidéosurveillance qui doit être accordée par un vote de l’assemblée générale des copropriétaires.
Cet amendement a été rectifié à deux reprises.
Dans l’amendement d’origine n° 27, nous souhaitions que cette décision soit prise à l’unanimité. Puis nous avons rectifié l’amendement à la demande de la commission pour que la décision soit prise à la majorité qualifiée. Enfin, nous avons décidé de modifier à nouveau l’amendement pour en revenir à une décision prise à l’unanimité.
En effet, les images des systèmes de vidéosurveillance étant transmises aux autorités habilitées, il est à craindre que plusieurs propriétaires ne soient amenés à se faire imposer une telle décision sans pouvoir valablement s’y opposer.
La loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, qui organise les votes en assemblée générale des copropriétaires, prévoit, en son article 24, que, dans le silence de la loi, le vote est acquis à la majorité simple.
Toutefois, il existe des domaines dans lesquels l’unanimité est requise. Ainsi, est prise à l’unanimité la décision de supprimer le poste de concierge ou d’installer un interphone à la porte d’entrée d’un immeuble. Ce dernier exemple est important, puisqu’il concerne le recours aux nouvelles technologies, dont la vidéosurveillance fait partie.
Par conséquent, il serait intolérable d’imposer à un propriétaire la mise en place d’un tel système sans que son consentement ait été recueilli. C’est l’objet de cet amendement n° 27 rectifié bis, qui prévoit que la décision de transmettre les images d’un système de vidéosurveillance est soumise à une décision de l’assemblée générale des copropriétaires prise à l’unanimité des voix des propriétaires.
Ce matin, M. le rapporteur m’a suggéré de ne demander qu’un vote à la majorité des deux tiers. Après réflexion, j’ai décidé de maintenir l’exigence de l’unanimité, puisqu’il s’agit, en l’espèce, de prévoir l’accord de tous, sans exception aucune. Il serait en effet intolérable d’imposer à un propriétaire un tel système. Il me semble important de prévoir un droit de veto.
Par conséquent, je maintiens cette exigence en dépit des demandes de rectification de M. le rapporteur. Je renvoie d’ailleurs aux articles 24, 25 et 26 de la loi du 10 juillet 1965 qui prévoient l’unanimité dans de nombreux domaines, dont celui de la sécurité.
La commission avait ouvert la possibilité d’une rectification. Celle-ci n’ayant pas été opérée, l’avis est défavorable.
Je mets aux voix l'amendement n° 27 rectifié bis.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin a lieu.
Il est procédé au comptage des votes.
Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 84 :
Le Sénat a adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l’article 4 bis.
Le premier alinéa de l’article L. 126-3 du même code est ainsi rédigé :
« Art. L. 126-3. – Le fait d'occuper en réunion les espaces communs ou les toits des immeubles collectifs d'habitation en empêchant délibérément l'accès ou la libre circulation des personnes ou le bon fonctionnement des dispositifs de sécurité et de sûreté est puni de deux mois d'emprisonnement et de 3 750 € d'amende. »
L'amendement n° 41, présenté par Mmes Assassi, Mathon-Poinat, Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Éliane Assassi.
L’article 4 ter est, en fait, la simple réécriture d’une ancienne disposition phare : le délit d’occupation abusive des halls d’immeuble.
On peut tous s’étonner de voir réapparaître une mesure qui a pourtant fait la preuve de son caractère inapplicable. Mais au lieu de reconnaître cet échec, vous vous obstinez visiblement à rendre cette mesure applicable.
Je vous rappelle que cette disposition figurait à l’article L 126-3 du code de la construction et de l’habitation, mais qu’elle a été réformée depuis. En effet, d’une part, elle ne trouvait pas à s’appliquer et, d’autre part, les poursuites judiciaires sur ce fondement étaient plus que faibles.
Il n’est pas certain que le fait de remplacer le participe présent du verbe « empêcher » par celui du verbe « entraver » permette de résoudre le problème et de rendre la mesure plus effective. Il aurait à mon avis été plus sage de prendre en considération l’affirmation des représentants du Syndicat de la magistrature qui estiment qu’il s’agit d’une infraction inopérante dont les tribunaux ne savent que faire, et donc d’admettre l’inefficacité de cette mesure.
Il ne suffit pas de faire des lois pour faire des lois ; encore faut-il que celles-ci soient cohérentes et trouvent à s’appliquer ! Au nom de mon groupe, je demande la suppression de l’article 4 ter modifiant un article de loi qui a démontré toute son inconséquence et qui doit donc être abrogé.
La modification rédactionnelle introduite par l’article 4 ter a uniquement pour objet d’assouplir les éléments constitutifs de l’infraction d’occupation abusive des halls d’immeubles.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
Je mets aux voix l'amendement n° 41.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin a lieu.
Il est procédé au comptage des votes.
Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 85 :
Le Sénat n'a pas adopté.
L'amendement n° 32, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard et Muller, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
I. - L'article L. 126-3 du code de la construction et de l'habitation est abrogé.
II. - Le sixième alinéa (5°) de l'article 495 du code de procédure pénale est supprimé.
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Cet amendement vise à supprimer le délit d’occupation abusive des halls d’immeubles.
Régulièrement, nous avons droit à un « lifting » de l’article de loi relatif à ce délit. Et régulièrement, nous vous rappelons que cette disposition ne sert à rien, puisqu’elle n’est pas utilisée par les juges. Pourtant, la majorité UMP s’acharne, depuis 2003, date de création de ce délit dans la loi pour la sécurité intérieure, à le maintenir, en aménageant sa mise en œuvre, ou, comme aujourd’hui, en le toilettant, afin de rappeler au quidam qu’il existe bel et bien.
Le Gouvernement a beau chercher à encourager les condamnations prononcées sur le fondement de cette infraction, par exemple en confiant son jugement à un juge unique, rien n’y fait : les juges n’y recourent pas. Il est temps aujourd’hui de prendre acte de cet état de fait et de supprimer cette disposition, qui non seulement ne sert à rien, mais aussi stigmatise toujours les mêmes personnes : les jeunes, les habitants des cités, bref, tous ceux que votre majorité considère comme des délinquants potentiels.
Je ne suis pas certain que les habitants des cités calmes et respectueux de la loi républicaine partagent votre avis, madame Boumediene-Thiery.
Le nombre de condamnations prononcées sur le fondement de cette incrimination est en progression, puisqu’il est passé de 28 en 2003 à 127 en 2007.
Le Conseil national des villes, dans son avis rendu le 12 mars 2009, a rappelé que l’occupation abusive des halls d’immeuble « constituait une véritable difficulté ». Les magistrats que j’ai auditionnés estiment que le principal obstacle à l’application de cette incrimination réside dans l’insuffisance des dossiers transmis aux juridictions.
Considérant qu’il n’est pas opportun d’abroger cette infraction, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
Le Gouvernement est également défavorable à cet amendement.
J’ai été choqué par votre argumentation, madame Boumediene-Thiery. M. le rapporteur a eu raison de rappeler qu’il fallait à tout prix maintenir cette disposition.
Je mets aux voix l'amendement n° 32.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin a lieu.
Il est procédé au comptage des votes.
Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 86 :
Le Sénat n'a pas adopté.
Je mets aux voix l'article 4 ter.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin a lieu.
Il est procédé au comptage des votes.
Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 87 :
Le Sénat a adopté.
Tout à l’heure, notre collègue Bernard Frimat a rappelé le principe d’équité, auquel nous sommes profondément attachés.
De nouvelles règles, parfaitement claires, arrêtées au terme d’un débat auquel nous avons tous participé, instaurent un temps pour chaque groupe.
M. le président de la commission des lois le conteste
Hier, un débat portant sur une proposition de loi de deux articles, présentée par le groupe socialiste, a été interrompu, car le temps était dépassé.
Or, aujourd’hui, le temps est plus que dépassé !
Quel que soit le texte, tout sénateur peut déposer un amendement. Ce droit est imprescriptible.
Il nous semble essentiel d’appliquer de manière équitable à tous les groupes, qu’ils soient majoritaires ou minoritaires, cette règle communément adoptée. Cette position vaut pour la situation actuelle, mais aussi pour l’avenir.
Nous avons cherché, par notre attitude – vous l’avez certainement compris – à marquer notre désaccord quant à ce fonctionnement. Le règlement nous permettrait d’ailleurs de demander environ vingt scrutins publics supplémentaires.
Il n’est peut-être pas utile de continuer sur le même mode. Mais nous souhaiterions que le message soit entendu et que, à l’avenir, les règles soient respectées.
S’agissant de la suite éventuelle de cette séance, c’est évidemment à vous d’en décider, monsieur le président.
Je pense qu’il faut continuer le débat jusqu’à ce que le Sénat se soit prononcé sur ce texte, qui a donné lieu à un débat intéressant.
L’ordre du jour indiquait de surcroît que nous examinerions cette proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, à dix-huit heures trente et le soir.
Alors que certains de nos collègues sont venus spécialement pour ce débat, ce dernier serait brusquement interrompu…
Je ne pense pas que ce soit une bonne manière de légiférer.
Je prends donc mes responsabilités et je souhaite, si le Sénat en est d’accord, que nous continuions.
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour un rappel au règlement.
Ce qui se passe actuellement est déterminant pour l’avenir.
De deux choses l’une : soit, comme hier soir, on décide d’interrompre le débat une fois le temps imparti écoulé et, dans ce cas, cette règle doit s’appliquer à tous les groupes, quelle que soit la frustration légitime que son application puisse engendrer ; soit on considère que tout débat engagé sur une proposition de loi doit aller à son terme et, dans ce cas, cette jurisprudence doit s’appliquer à tous les textes, quel que soit le groupe qui en est signataire.
Cette alternative, qui nous semble très claire, devra être soumise aux instances décisionnelles de notre assemblée. Dans tous les cas, il ne peut y avoir de règlement à géométrie variable.
Nous n’interviendrons plus dans cette séance sur des questions de procédure, mais nous souhaitons, monsieur le président, que vous nous donniez acte de nos interventions, et qu’une décision soit prise, dans un sens ou dans un autre.
Je partage les propos de mon collègue Jean-Pierre Sueur.
La question n’est pas de savoir si le débat d’aujourd’hui est plus intéressant que celui d’hier, mais si les groupes de l’opposition et de la majorité sont traités de manière égalitaire.
Nous avons manifesté notre refus de certaines pratiques en multipliant les demandes de scrutins publics.
Pour ma part, je pense que nous devons être raisonnables et nous arrêter. Il n’en demeure pas moins que nous sommes confrontés à une vraie question démocratique, qu’il faudra bien résoudre.
Une question démocratique, en effet : vous empêchez l’examen des propositions de loi de la majorité !
L’article L. 126-3 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les personnes coupables des infractions prévues aux deux premiers alinéas encourent également, à titre de peine complémentaire, une peine de travail d’intérêt général. »
L'amendement n° 42, présenté par Mmes Assassi, Mathon-Poinat, Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Éliane Assassi.
La brièveté de mon intervention vous montrera que je n’empêche rien du tout, monsieur Hyest !
Cet amendement vise simplement à tirer les conséquences de la volonté que nous avons exprimée à l’article précédent.
Nous nous opposons évidemment à cette disposition qui accentue la peine encourue pour l’infraction d’occupation abusive des halls d’immeuble, en prévoyant une peine complémentaire de travail d’intérêt général.
L’intérêt de cet article est d’offrir aux magistrats la possibilité de cumuler une peine d’emprisonnement ou d’amende avec une peine de travail d’intérêt général. Le juge peut ainsi négocier la peine qu’il va infliger.
En conséquence, la commission émet un avis défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
L'article 4 quater est adopté.
Après l’avant-dernier alinéa de l’article 15-1 de l’ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l’enfance délinquante, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les sanctions éducatives prononcées en application du présent article seront exécutées dans un délai ne pouvant excéder trois mois à compter du jugement. »
L'amendement n° 43, présenté par Mmes Assassi, Mathon-Poinat, Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Éliane Assassi.
L'amendement n'est pas adopté.
L'article 4 sexies est adopté.
À l’article L. 332-8 du code du sport, après les mots : « Le fait d’introduire » sont insérés les mots : «, de détenir ou de faire usage ».
L'amendement n° 44, présenté par Mmes Assassi, Mathon-Poinat, Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Cet article vise à renforcer la répression autour des événements sportifs, laquelle, selon nous, n'a pas de rapport direct avec l'intitulé de la loi.
C’est précisément l’illustration de ce que j’indiquais tout à l’heure à propos de l’interprétation restrictive de la loi pénale, puisque cette disposition fait suite à une décision du tribunal correctionnel de Nîmes.
L’article 4 septies apporte une précision bienvenue, puisqu’il étend à la détention et à l’usage le délit d’introduction de fumigènes dans les stades. Désormais, une personne qui use de fumigènes dans une enceinte sportive pourra être poursuivie même s’il est impossible de prouver qu’elle les a elle-même introduits.
En conséquence, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
L'amendement n'est pas adopté.
L'article 4 septies est adopté.
Le code du sport est ainsi modifié :
1° À l’article L. 332-16 :
a) Au premier alinéa, après les mots : « à l’occasion de manifestations sportives » sont insérés les mots : « ou par la commission d’un acte grave à l’occasion de l’une de ces manifestations » ;
b) Au deuxième alinéa, le mot : « trois » est remplacé par le mot : « six » et l’alinéa est ainsi complété :
« Toutefois, cette durée peut être portée à douze mois si, dans les trois années précédentes, cette personne a fait l’objet d’une mesure d’interdiction. » ;
c) Au quatrième alinéa, après le mot : « puni » sont insérés les mots : « d’un an d’emprisonnement et » ;
2° Au premier alinéa de l’article L. 332-18, après le mot : « dissous » sont insérés les mots : « ou suspendu d’activité pendant douze mois au plus » et après les mots : « actes répétés » sont insérés les mots : « ou un acte d’une particulière gravité et qui sont ».
L'amendement n° 45, présenté par Mmes Assassi, Mathon-Poinat, Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Éliane Assassi.
L'amendement n'est pas adopté.
L'article 4 octies est adopté.
Mes chers collègues, je suis maintenant en mesure, après pointage, de vous donner le résultat du dépouillement du scrutin n° 83 sur l’article 4 bis :
Le Sénat a adopté.
Chapitre II
Dispositions renforçant la protection des élèves et des personnes travaillant dans les établissements d’enseignement scolaire
I. – Les 4° bis et 4° ter des articles 221-4, 222-3, 222-8, 222-10, 222-12 et 222-13 du code pénal sont ainsi rédigés :
« 4° bis Sur un enseignant ou tout membre des personnels travaillant dans les établissements d’enseignement scolaire, sur un agent d’un exploitant de réseau de transport public de voyageurs ou toute personne chargée d’une mission de service public, ainsi que sur un professionnel de santé, dans l’exercice ou du fait de ses fonctions, lorsque la qualité de la victime est apparente ou connue de l’auteur ;
« 4° ter Sur le conjoint, les ascendants ou les descendants en ligne directe ou sur toute autre personne vivant habituellement au domicile des personnes mentionnées aux 4° et 4° bis, en raison des fonctions exercées par ces dernières ; ».
II. – Après le 3° de l’article 322-3 du même code, il est inséré un 3° bis ainsi rédigé :
« 3° bis Lorsqu’elle est commise au préjudice du conjoint, d’un ascendant ou d’un descendant en ligne directe ou de toute autre personne vivant habituellement au domicile des personnes mentionnées au 3°, en raison des fonctions ou de la qualité de ces personnes ; ».
III. – L’article 433-3 du même code est ainsi modifié :
1° La dernière phrase du premier alinéa est supprimée ;
2° Au deuxième alinéa, après le mot : « voyageurs », sont insérés les mots : «, d’un enseignant ou de tout membre des personnels travaillant dans les établissements d’enseignement scolaire » ;
3° Après le deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les mêmes peines sont applicables en cas de menace proférée à l’encontre du conjoint, des ascendants ou des descendants en ligne directe des personnes mentionnées aux deux premiers alinéas ou de toute autre personne vivant habituellement à leur domicile, en raison des fonctions exercées par ces personnes. »
L'amendement n° 46, présenté par Mmes Assassi, Mathon-Poinat, Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.
Par cet amendement de suppression, nous voulons rappeler la redondance de cette disposition.
Si nous ne contestons pas le fait que les personnes qui travaillent dans les établissements scolaires doivent être particulièrement protégées, nous nous interrogeons sur la pertinence d’une mesure qui ne fait qu’expliciter une disposition déjà existante. Le rapporteur ne fait qu’admettre cet état de fait lorsqu’il affirme que notre droit prévoit « déjà des peines aggravées lorsque les violences sont commises sur une personne chargée d’une mission de service public, ce qui inclut les enseignants et les personnes travaillant dans les établissements d’enseignement scolaire ». Or le fait d’élargir cette protection aux proches de ces personnes ne repose sur aucun argument solide, ce qui confirme plutôt la thèse d’une disposition purement démagogique.
On ne voit donc pas vraiment l’utilité d’une telle mesure, sauf à penser qu’il s’agit d’apaiser vos relations avec le corps enseignant, lequel a été particulièrement affecté par vos différentes réformes.
En tout état de cause, nous rappelons notre attachement à la protection de l’ensemble des personnels travaillant dans les établissements scolaires, mais estimons que le droit actuel est assez protecteur en la matière et que la disposition proposée est donc inutile.
S’il devait exister une redondance, elle ne serait pas nouvelle en tout cas. Les textes ont commencé à énumérer toutes les « personnes chargées des missions de service public », et l’on ne voit pas pourquoi, dans ces conditions, les enseignants n’entreraient pas dans cette catégorie.
Mais, surtout, les dispositions permettent désormais d’accorder une protection particulière aux proches des enseignants. Ce ne sont malheureusement pas des cas d’école en matière d’infractions, et il ne me semble pas opportun de supprimer cette protection spéciale qui permettra, par exemple, de considérer comme aggravées les violences commises contre le fils ou la fille d’un enseignant à raison des fonctions exercées par son père ou sa mère.
En conséquence, l’avis de la commission est défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 11, présenté par MM. C. Gautier et Sueur, Mmes Klès, Boumediene-Thiery et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
L'article 706-14 du code de procédure pénale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Ces dispositions sont applicables aux personnes chargées d'une mission de service public, victimes d'une infraction ayant entraîné une interdiction temporaire de travail, commise à raison de leurs fonctions. »
La parole est à M. Charles Gautier.
L’article 5 vise, d’une part, à préciser la circonstance aggravante pour les violences commises sur les personnels dans les établissements d’enseignement scolaire à raison de leur fonction et, d’autre part, à instaurer une même circonstance aggravante lorsque ces violences sont commises sur leurs proches, à raison de l’exercice de ces mêmes fonctions.
Les enseignants et personnels font déjà l’objet d’une protection particulière au titre d’agent de service public. La loi doit-elle devenir un catalogue, auquel on ajoute régulièrement des catégories au gré des faits divers ?
Mentionner telle ou telle personne aura-t-il un effet dissuasif ? Les délinquants savent déjà ce qu’ils encourent s’ils s’en prennent à un enseignant. Il est nécessaire de renforcer la prévention, notamment par le maintien de personnels aux entrées et aux sorties des établissements.
Ces dispositions peuvent-elles tenir lieu de réponse suffisante aux phénomènes de violences scolaires qui se développent ? On peut en douter.
Si vous voulez réellement faire quelque chose pour ces personnels chargés d’une mission de service public, victimes d’une infraction commise à raison de leurs fonctions ayant entraîné une interdiction temporaire de travail, faites-les bénéficier des dispositions de l’article 706-14 du code de procédure pénale, qui prévoit une réparation intégrale des dommages ou le versement d’une indemnité !
L'amendement n° 33, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard et Muller, est ainsi libellé :
Alinéas 6 à 10
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Cet amendement concerne également la protection des personnes chargées d’une mission de service public.
Nous comprenons parfaitement l’objet des alinéas 6 à 8 de l’article 5, et nous souhaitons tous que les personnes qui assurent une mission de service public au sein des établissements soient protégées au titre de ces fonctions. Nous le souhaitons d’ailleurs tellement que, en réalité, le Parlement l’a déjà inscrit dans la loi : l’article 433-3 du code pénal vise la menace proférée à l’encontre d’une personne chargée d’une mission de service public. Les enseignants, les fonctionnaires et les agents sont donc déjà protégés par notre droit pénal contre de telles menaces.
Nous vous proposons donc de supprimer cette référence spécifique aux enseignants, qui, en l’état actuel du droit, bénéficient dans tous les cas de la même protection.
Je demande à M. le secrétaire d'État de nous expliquer ce qu’apporte au droit en vigueur cette nouvelle disposition. S’il n’existe pas de « plus-value », les alinéas 6 à 8 sont inutiles, sauf à faire croire que le Gouvernement prend des mesures en matière pénale pour des raisons d’affichage.
Monsieur Gautier, tout à l’heure, vous avez parlé de « loi d’affichage » ; je n’en ai pas pris ombrage, et je pense donc que vous ne prendrez pas ombrage que je puisse considérer qu’il existe parfois des « amendements d’affichage » !
Je rappelle que, aux termes de l’article 706-14 du code de procédure pénale, toute personne victime d’une infraction peut obtenir une indemnité allouée par la commission d’indemnisation des victimes d’infractions.
Aussi, la distinction qu’apporte votre amendement n° 11 est inutile.
Pour cette raison, la commission émet un avis défavorable.
S’agissant de l’amendement n° 33, j’opposerai les mêmes arguments que ceux que j’ai opposés à l’amendement n° 46.
Les alinéas 6 à 8 de l’article 5 visent à accorder une protection particulière aux proches des personnes chargées d’une mission de service public lorsqu’ils sont victimes de menaces proférées à raison des fonctions exercées par ces dernières.
Il ne me semble pas opportun de supprimer cette protection spéciale octroyée aux conjoints, aux ascendants et aux descendants de ces personnes chargées d’une mission de service public.
Aussi la commission émet-elle également un avis défavorable.
M. le rapporteur a fourni une réponse précise et complète. Le Gouvernement émet lui aussi un avis défavorable.
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote sur l'amendement n° 11.
M. le secrétaire d'État a déclaré qu’il partage totalement l’avis de la commission. Or j’ai écouté attentivement les propos de M. le rapporteur, et j’en conclus donc que le Gouvernement considère, d’une part, que toute personne chargée d’une mission de service public victime d’une infraction commise à raison de ses fonctions et ayant entraîné une interdiction temporaire de travail bénéficie des dispositions de l’article 706-14 du code de procédure pénale, d’autre part, que cet amendement est satisfait.
Il est important de le préciser, car ces propos, reproduits au Journal officiel, seront utiles pour interpréter la loi.
Est-ce bien la position du Gouvernement, monsieur le secrétaire d'État ?
Puisque cela m’est demandé, je vais expliciter les deux raisons pour lesquelles le Gouvernement est défavorable à l’amendement n° 11.
Tout d’abord, la suppression des dispositions de cet article, qui assure la protection spéciale que le droit pénal doit offrir aux enseignants et aux personnels d’établissement d’enseignement scolaire et à leurs proches, n’est pas justifiée.
En outre, cet amendement n’est pas conforme à la Constitution, puisque, en permettant aux victimes d’infractions commises à raison de leur fonction d’obtenir de la CIVI l’indemnisation de leur préjudice, il introduit une rupture dans l’égalité de traitement avec les autres victimes, sans que celle-ci soit objectivement justifiée.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'article 5 est adopté.
I. – Après le 9° de l’article 311-4 du code pénal, il est inséré un 11° ainsi rédigé :
« 11° Lorsqu’il est commis dans les établissements d’enseignement ou d’éducation ainsi que, lors des entrées ou sorties des élèves ou dans un temps très voisin de celles-ci, aux abords de ces établissements. »
II. – L’article 312-2 du même code est complété par un 5° ainsi rédigé :
« 5° Lorsqu’elle est commise dans les établissements d’enseignement ou d’éducation ainsi que, lors des entrées ou sorties des élèves ou dans un temps très voisin de celles-ci, aux abords de ces établissements. »
III. –
Supprimé
L'amendement n° 47, présenté par Mmes Assassi, Mathon-Poinat, Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Cet article n’est qu’une suite de mesures visant à l’aggravation des peines. Or, je le répète, nous ne souscrivons pas à cette politique répressive. C’est pourquoi notre groupe propose sa suppression.
L’article 6 vise à aggraver les peines lorsque le vol ou l’extorsion sont commis au sein d’un établissement scolaire ou aux abords de celui-ci.
Cet article participe à l’évidence de la volonté de « sanctuariser » les établissements scolaires.
Je vous rappelle que des peines aggravées sont déjà prévues pour certaines infractions commises au sein d’un établissement scolaire. C’est notamment le cas du trafic de stupéfiants.
La commission émet donc un avis défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
L'article 6 est adopté.
L'amendement n° 14, présenté par MM. C. Gautier et Sueur, Mmes Klès, Boumediene-Thiery et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article L. 211-8 du code de l'éducation, il est inséré un article L. 211-9 ainsi rédigé :
« Art. L. 211 -9 - L'État assure la sécurité des élèves et du personnel des établissements d'enseignement primaire et secondaire aux abords de ces établissements.
« Un décret en Conseil d'État fixe les conditions d'application du présent article. »
La parole est à M. Charles Gautier.
Cet amendement se justifie par son texte même. Il s’agit là d’une proposition toute simple !
À proposition simple, réponse simple : l’État dispose d’une compétence générale pour assurer la sécurité de tous nos concitoyens sur l’ensemble du territoire national. Cet amendement, s’il était adopté, ne manquerait pas d’entraîner des raisonnements a contrario qui pourraient être malvenus.
La commission émet donc un avis défavorable.
Il s’agit d’une pétition de principe qui procède à un renvoi bien trop large au pouvoir réglementaire. La proposition de loi a justement pour ambition de limiter le renvoi au pouvoir réglementaire et de fournir les outils juridiques pour que cette sécurité soit effectivement assurée.
L'amendement n'est pas adopté.
Après l’article 431-21 du code pénal, il est inséré une section 5 ainsi rédigée :
« Section 5
« De l’intrusion dans un établissement d’enseignement scolaire
« Art. 431-22. – Le fait de pénétrer ou de se maintenir dans l’enceinte d’un établissement d’enseignement scolaire sans y être habilité en vertu de dispositions législatives ou réglementaires ou y avoir été autorisé par les autorités compétentes, dans le but de troubler la tranquillité ou le bon ordre de l’établissement, est puni d’un an d’emprisonnement et de 7 500 € d’amende.
« Art. 431-23. –
Non modifié
« Art. 431-24. – Lorsque le délit prévu à l’article 431-22 est commis par une personne porteuse d’une arme, les peines sont portées à trois ans d’emprisonnement et 45 000 € d’amende.
« Art. 431-25. –
Supprimé
« Art. 431-26. – Les personnes physiques coupables de l’une des infractions prévues par la présente section encourent également les peines complémentaires suivantes :
« 1° L’interdiction des droits civiques, civils et de famille, suivant les modalités prévues par l’article 131-26 ;
« 2° L’interdiction de détenir ou de porter, pour une durée de cinq ans au plus, une arme soumise à autorisation ;
« 2° bis Une peine de travail d’intérêt général ;
« 3° La confiscation d’une ou de plusieurs armes dont le condamné est propriétaire ou dont il a la libre disposition ;
« 4° L’interdiction de séjour, suivant les modalités prévues par l’article 131-31.
« Art. 431-27. –
Supprimé
« Section 6
« De l’introduction d’armes dans un établissement scolaire
Division et intitulé supprimés
« Art. 431-28. –
Supprimé
L'amendement n° 48, présenté par Mmes Assassi, Mathon-Poinat, Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Aux termes de cet article, le fait de s’introduire dans un établissement sans en avoir reçu l’autorisation est passible d’un an d’emprisonnement ; ce durcissement très important de la loi pourrait aboutir à des situations ubuesques, comme le placement en garde à vue de simples parents d’élèves.
De plus, telle qu’elle est formulée, cette mesure risque fortement d’être détournée de son objectif pour remettre en cause la liberté de manifester.
Ainsi, vous ne pouvez pas prétendre sérieusement que la formulation « ou de se maintenir » a pour but la répression des bandes. Ces dernières n’ont aucun intérêt à rester dans l’établissement après avoir commis des violences et des dégradations.
Le fait que la commission ait adopté un amendement tendant à préciser que l’infraction ne sera caractérisée que si l’intrusion a pour but « de troubler la tranquillité ou le bon ordre de l’établissement » n’est pas en mesure de nous rassurer. En effet, il est bien évident qu’une manifestation est de nature à troubler la tranquillité.
Il semble bien que vous vouliez éviter de nouvelles occupations d’établissements scolaires, comme il y en a eu lors des derniers conflits relatifs à l’enseignement.
On perçoit donc la dérive que pourrait engendrer une telle disposition. C’est pourquoi nous en demandons la suppression.
L’article 7 a été profondément modifié par la commission afin que le délit d’intrusion dans un établissement scolaire ne soit constitué que lorsque l’intrusion a pour but de troubler la tranquillité ou le bon ordre de l’établissement.
Il n’est fait aucunement référence à une manifestation, dont on imagine d’ailleurs mal l’objet au sein d’un établissement.
La commission me semble parvenue à une rédaction équilibrée. Aussi émet-elle un avis défavorable sur l’amendement n° 48.
Cet article important de la proposition de loi est tout sauf liberticide. Il vise uniquement à mieux garantir la paix au sein des établissements scolaires et à permettre aux élèves et aux enseignants d’y travailler librement et dans des conditions propices à l’étude.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
L'amendement n'est pas adopté.
L'article 7 est adopté.
Le code de procédure pénale est ainsi modifié :
1° Au 5° de l’article 398-1, les références : « 222-12 (1° à 14°), 222-13 (1° à 14°) » sont remplacées par les références : « 222-12 (1° à 15°), 222-13 (1° à 15°) », la référence : « 311-4 (1° à 8°) » est remplacée par la référence : « 311-4 (1° à 11°) » et, après la référence : « 322-14 », sont insérées les références : «, 431-22 à 431-24 » ;
2° Au septième alinéa de l’article 837, les références : « 222-12 (1° à 13°), 222-13 (1° à 13°) » sont remplacées par les références : « 222-12 (1° à 15°), 222-13 (1° à 15°) », la référence : « 311-4 (1° à 8°) » est remplacée par la référence : « 311-4 (1° à 11°) » et, après la référence : « 322-14 », sont insérées les références : «, 431-22 à 431-24 ».
L'amendement n° 49, présenté par Mmes Assassi, Mathon-Poinat, Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Éliane Assassi.
L’article 7 bis vise, par coordination, à inclure la plupart des dispositions adoptées dans le cadre de cette proposition de loi dans les compétences du juge unique statuant en matière correctionnelle.
La commission émet donc un avis défavorable sur l’amendement n° 49.
L'amendement n'est pas adopté.
L'article 7 bis est adopté.
La présente loi est applicable dans les îles Wallis et Futuna, en Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie.
L'amendement n° 50, présenté par Mmes Assassi, Mathon-Poinat, Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Éliane Assassi.
L'amendement n'est pas adopté.
L'article 8 est adopté.
Avant de mettre aux voix l'ensemble de la proposition de loi, je donne la parole à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote.
La discussion des amendements a pleinement justifié les positions que nous avons défendues lors de la discussion générale.
La plupart des articles de cette proposition de loi n’apportent aucun élément nouveau par rapport aux dispositions en vigueur du code pénal. De fait, ce texte est non seulement redondant, mais, pis, dangereux, puisque sa philosophie est de punir les intentions.
Or notre tradition juridique est très claire : on punit et on réprime des actes, des faits, mais non des intentions. Il s’agit donc, à notre avis, d’une dérive de notre droit.
Une autre dérive aboutira à la dilution de la responsabilité individuelle, le groupe devenant, comme le disait M. le rapporteur, le moyen d’une action, une sorte d’arme par destination. On se trouvera donc dans des situations très arbitraires, qui susciteront chez les magistrats une grande perplexité.
Ce texte est à notre avis inconstitutionnel sur nombre de points, et il sera donc utile de saisir le Conseil constitutionnel.
Enfin, il est apparu aux yeux de tous que ce texte ne prévoyait pas de moyens. Vous m’objecterez, monsieur le secrétaire d’État, que tel n’est pas son objet. Nous sommes convaincus, pour notre part, que la plupart des problèmes soulevés par cette proposition de loi posent la question des moyens, qu’il s’agisse de moyens de répression, de police ou d’investigation. Ainsi les événements de Poitiers ont-ils démontré qu’il existait, dans certains cas, un déficit des moyens d’investigation. La solution à ce problème passe par des moyens matériels et surtout humains. De même, l’ensemble des moyens relatifs à l’éducation et à la prévention, notamment ceux dont devraient bénéficier les personnels des établissements scolaires, sont tout à fait décisifs.
Cette proposition de loi, qui n’est malheureusement qu’un texte d’affichage, n’aura que des effets de ce type, ce qui pose des difficultés de fait, de droit et d’ordre constitutionnel.
Nous maintenons par conséquent, au terme de ce débat, le vote négatif annoncé par mes collègues Charles Gautier et Alima Boumediene-Thiery lors de la discussion générale.
Je confirme l’opposition de notre groupe à ce texte, et j’en ai donné les raisons à plusieurs reprises.
Pour autant, je ne me suis pas contentée de le condamner, puisque j’ai également formulé lors de la discussion générale un certain nombre de propositions, notamment quant à la prévention des violences. Mais la prévention ne fait visiblement pas partie de votre vocabulaire. Pour vous, seule la répression a force de loi ; je le regrette profondément, car, tout comme vous, je condamne toutes les formes de violence, qu’elles émanent ou non de bandes organisées. Mais je persiste à penser qu’il existe des solutions différentes de celles que prévoit ce texte.
Cette proposition de loi, dont l’auteur est bien connu, est un texte d’opportunité, flou et confus. Nous n’avons cessé de souligner les dangers qu’il recèle, tant il pourra être détourné de l’objectif qu’il affiche.
Je réaffirme donc, à l’issue de ce débat, notre farouche opposition à cette proposition de loi.
Au nom du groupe UMP, je souhaite tout d’abord remercier M. le président de la commission des lois, Jean-Jacques Hyest, pour sa qualité d’écoute qui nous a permis de débattre dans de bonnes conditions, même si, comme l’équipe de France de football, nous avons quelque peu joué les prolongations… Ces remerciements s’adressent aussi, naturellement, à M. le rapporteur, François Pillet, dont le travail de grande qualité a permis d’enrichir la proposition de loi.
Nos concitoyens sont légitimement attachés à leur République, fondée sur un principe fondamental : la sécurité.
Si la lutte contre l’insécurité, depuis 2002, a fait l’objet d’un volontarisme sans faille de la part du chef de l’État, celle-ci doit rester une priorité. En effet, la sécurité est l’affaire de tous, et nous ne saurions laisser certains porter atteinte à l’unité de notre société. C’est pourquoi nous soutenons pleinement le double objectif de cette proposition de loi : mieux réprimer les actes commis par les bandes violentes et mieux protéger les élèves et les personnes travaillant dans les établissements d’enseignement et d’éducation.
Les mesures proposées concilient les deux impératifs de prévention et de répression, sur lesquels toute réforme portant sur la sécurité doit se fonder. Ce double impératif a orienté tous nos votes dans le sens d’une aggravation des peines, à la fois lorsque les actes de violences ont été commis et avant qu’ils aient pu être perpétrés.
Le principe de prévention ne doit toutefois pas porter atteinte à nos libertés publiques. Nous nous félicitons ainsi que la commission, soucieuse de cet équilibre, ait su compléter certains des articles afin de limiter les risques d’atteinte à la vie privée.
Nous nous réjouissons en outre que, sur l’initiative de Laurent Béteille et François-Noël Buffet, les violences de groupe commises dans le contexte des manifestations sportives aient mieux été prises en compte.
Hier matin, dans ma région, un adolescent de treize ans scolarisé dans un lycée de Beauvais, muni d’un fusil de chasse et de vingt-cinq cartouches, projetait de tuer ses professeurs. Ce nouvel événement ne fait que traduire l’urgence qu’il y a à agir. C’est la raison pour laquelle nous approuvons l’ensemble des dispositions visant à sanctuariser nos écoles et nos structures d’éducation.
Je tiens donc à vous faire part, monsieur le secrétaire d’État, de notre soutien à ce texte et, plus généralement, à vos efforts et à ceux du Gouvernement pour renforcer la sécurité au service de nos concitoyens. Les membres du groupe UMP voteront donc cette proposition de loi.
La majorité du groupe RDSE votera contre ce texte. Comme je l’ai rappelé lors de la discussion générale, nous sommes tous ici convaincus de la nécessité de lutter contre toutes les formes de violence. Ce qui nous sépare, ce sont des conceptions de fond.
Nous estimons, pour notre part, que trop de lois tue la loi.
Nous considérons qu’il faut donner les moyens d’appliquer la loi et de simplifier nos textes juridiques, en particulier les codes, qui sont devenus illisibles et peu praticables. Je dois reconnaître – et je ne dis pas cela pour faire plaisir à M. Hyest – que le travail accompli sur la prescription était exemplaire à cet égard.
En matière pénale, on accumule les textes, sans grand souci de cohérence et en réagissant trop promptement sur des sujets qui touchent l’opinion publique. Notre collègue de l’UMP vient de nous dire que, hier, un adolescent a failli commettre des actes graves. Certes. Mais ce texte n’empêchera pas ce type de comportement…
C’est cela, la réalité !
Nous sommes convaincus que le texte sur lequel nous allons nous prononcer posera des problèmes en matière de libertés publiques. Nous assistons à un glissement inquiétant de l’équilibre de notre droit pénal, qui s’oriente vers la répression de l’intention de commission du délit. Par ailleurs, ce texte, et notamment son article 3, donnera lieu à des jurisprudences tout à fait contradictoires. Où est le progrès ?
Nous devons avoir des objectifs clairs et disposer d’une véritable codification, et non pas d’une accumulation de textes n’aboutissant qu’à un affichage médiatique. Certes, la loi est faite pour être affichée ; il n’en reste pas moins que ce n’est pas la bonne solution !
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l’ensemble de la proposition de loi.
La proposition de loi est adoptée.
Je tiens à remercier le Sénat d’avoir voté ce texte et, m’associant à M. le ministre chargé des relations avec le Parlement, à saluer la qualité du travail de la commission des lois.
Le texte que vous avez voté ne ressemble pas, bien au contraire, à la description qui en a été faite par certains. Ce texte pragmatique, en plus de fournir un cadre juridique, permettra de répondre, à l’aide des moyens adéquats, à l’évolution de la délinquance et aux attentes de nos concitoyens. Pour toutes ces raisons, il représente une avancée.
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au jeudi 19 novembre 2009, à onze heures, à quatorze heures trente et le soir :
Sous réserve de sa transmission, projet de loi de finances pour 2010.
Rapport de M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances.
- Discussion générale ;
- Débat général sur les recettes des collectivités territoriales et la suppression de la taxe professionnelle (articles 2 à 3 et 13 à 20).
Délai limite pour le dépôt des amendements aux articles de la première partie : jeudi 19 novembre 2009 à onze heures.
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
La séance est levée le jeudi 19 novembre 2009, à une heure dix.