La séance est ouverte à quatorze heures trente.
Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
J’informe le Sénat que la proposition de loi favorisant l’accès au logement social pour le plus grand nombre (n° 256, 2015–2016), dont la commission des finances est saisie au fond, est envoyée pour avis, à sa demande, à la commission des affaires économiques.
L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages (projet n° 359 [2014-2015], texte de la commission n° 608 [2014-2015], rapport n° 607, tomes I et II [2014-2015], avis n° 549 et 581 [2014-2015]) et de la proposition de loi organique, adoptée par l’Assemblée nationale, relative à la nomination à la présidence du conseil d’administration de l’Agence française pour la biodiversité (projet n° 364 rectifié [2014-2015], texte de la commission n° 609 [2014-2015], rapport n° 607, tomes I et II [2014-2015]).
Nous poursuivons l’examen des articles du projet de loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages.
TITRE Ier
PRINCIPES FONDAMENTAUX
Nous en sommes parvenus, au sein du titre Ier, à l’article 4.
Le titre Ier du livre Ier du même code est complété par un article L. 110-3 ainsi rédigé :
« Art. L. 110–3. – Les stratégies nationale et régionales pour la biodiversité contribuent à la cohérence des politiques publiques en matière de préservation de la biodiversité.
« En vue d’assurer la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité, la stratégie nationale pour la biodiversité est élaborée par l’État en concertation avec des représentants de collectivités territoriales et de leurs groupements, de la communauté scientifique, d’acteurs socio-économiques et d’organisations de protection de l’environnement.
« L’Agence française pour la biodiversité apporte son soutien à l’État pour l’élaboration de la stratégie nationale et assure le suivi de sa mise en œuvre.
« Les régions définissent et mettent en œuvre une stratégie régionale pour la biodiversité tenant compte des orientations de la stratégie nationale et élaborée dans les mêmes conditions de concertation. Les collectivités territoriales et leurs groupements participent à la définition et à la mise en œuvre de cette stratégie à l’échelon de leur territoire.
« Les délégations territoriales de l’Agence française pour la biodiversité, prévues à l’article L. 131-11 du présent code, apportent leur soutien aux régions pour l’élaboration de leur stratégie et assurent le suivi de leur mise en œuvre.
« La stratégie nationale de la biodiversité couvre deux périodes successives de cinq ans, sauf celle établie en 2015 qui couvre deux périodes successives de, respectivement, trois et cinq ans.
« Elle définit les objectifs quantitatifs et qualitatifs de conservation et d’utilisation durable de la biodiversité, de la programmation et l’enveloppe maximale indicative des ressources publiques de l’État et de ses établissements publics mobilisées pour les atteindre. Cette enveloppe est fixée en engagements et en réalisations.
« Chacune des espèces classées sur la liste rouge de l’Union internationale pour la conservation de la nature présente sur le territoire français fait l’objet d’un plan d’action spécifique en vue d’assurer sa préservation, intégré à la stratégie nationale pour la biodiversité prévue à l’article L. 110-3 du code de l’environnement. »
Cet article 4 vise à introduire un nouvel article dans les principes généraux du code de l’environnement. Il donne, en particulier, une base législative à la stratégie nationale pour la biodiversité pour la période 2011–2020, ainsi qu’aux stratégies régionales pour la biodiversité. Il a été retravaillé par la commission. Au total, les modifications apportées sont au nombre de cinq.
D’abord, cet article donne un rôle à l’Agence française pour la biodiversité dans la stratégie nationale, ce qui introduit de la cohérence.
Ensuite, il accorde un rôle aux délégations territoriales de l’Agence française pour la biodiversité dans les stratégies régionales, ce qui donne également de la cohérence aux actions.
Par ailleurs, il définit les horizons de temps de la stratégie nationale.
En outre, il définit les objectifs quantitatifs de cette stratégie nationale.
Enfin, il rend obligatoire un plan d’action pour chaque espèce classée sur les listes rouges.
Il s’agit d’un article tout à fait essentiel, car il apporte de la clarté et de la précision. Il fixe également un calendrier d’action pour la réalisation de la stratégie nationale. Surtout, il introduit une cohérence entre le cadrage national et la liberté d’initiative des territoires.
M. Éric Bocquet. J’interviens en remplacement de mon collègue Paul Vergès, qui n’a malheureusement pas pu se rendre disponible aujourd'hui. Je vous prie de bien vouloir l’en excuser. C’est donc le Nord qui représente l’hémisphère Sud !
Sourires.
Protéger la biodiversité sur nos territoires, c’est un premier pas. C’est même un impératif pour les territoires ultramarins. Mais ce n’est pas simplement une question franco-française, chacun le comprend bien.
Pour bien saisir les enjeux, je prendrai l’exemple de la pêche.
Premièrement, dans l’océan Indien, 90 % des prises sont effectuées par des flottes n’appartenant pas aux pays riverains. C’est la question de la gouvernance des mers et des océans qui est alors posée.
Deuxièmement, dans les autres océans, 80 % des poissons sont surexploités ou au bord de la surexploitation. Au rythme actuel, les océans pourraient être vides de poissons dès 2048, indiquait récemment l’ONG Greenpeace. C’est la question de la gestion raisonnée des espèces qui est donc également posée.
La protection de la biodiversité prend ainsi obligatoirement une dimension interrégionale.
En juillet 2008, nous avions organisé à La Réunion, en partenariat avec l’UICN, l’Union internationale pour la conservation de la nature, l’ONERC, l’Observatoire national sur les effets du réchauffement climatique, la région et des ministères une conférence consacrée aux changements climatiques et à la perte de biodiversité à l’échelle des outre-mer européens. Six ans plus tard, la Guadeloupe organisait un événement similaire.
C’est d’ailleurs en réponse à l’appel de La Réunion qu’est né le programme BEST, le programme volontaire pour la biodiversité, les écosystèmes et les services écosystémiques dans les territoires d’outre-mer européens.
Les deux événements se sont conclus par des appels demandant l’élaboration de stratégies répondant conjointement aux besoins spécifiques de chaque entité, mais aussi aux préoccupations des îles ou pays de leur zone géographique.
Nous constatons que l’article 4 de ce projet de loi ne prend pas du tout en compte le codéveloppement. Il ne s’agit pas simplement de mutualiser les connaissances, les moyens ou les méthodes, mais il s’agit d’élaborer une stratégie à l’échelon de chaque zone géographique, l’océan Indien en ce qui concerne La Réunion.
Madame la ministre, j’ai l’espoir que cela sera prévu dans les décrets que vous prendrez ultérieurement.
Je suis saisie de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les trois premiers sont identiques.
L'amendement n° 59 rectifié est présenté par M. Pointereau, Mme Morhet-Richaud, MM. Chaize, Commeinhes et Mouiller, Mme Cayeux, MM. Pinton, de Nicolaÿ, Milon et Mayet, Mme Deromedi, MM. Cardoux, Vaspart et Cornu, Mme Primas, MM. Poniatowski et D. Laurent, Mme Lamure, MM. Danesi et Bockel, Mme Troendlé, MM. Bizet, César, Laménie et Pierre, Mme Canayer, MM. Lenoir, P. Leroy et Bas, Mme Gruny et MM. Raison, Savary, Kennel et Gremillet.
L'amendement n° 248 rectifié est présenté par Mme Billon, M. Cadic, Mme Loisier et MM. Luche, L. Hervé, Guerriau, Longeot, D. Dubois, Roche et Lasserre.
L'amendement n° 485 rectifié ter est présenté par MM. Kern et Bonnecarrère.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 8
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Philippe Mouiller, pour présenter l’amendement n° 59 rectifié.
La stratégie nationale pour la biodiversité 2011–2020, comme la stratégie de 2004–2010, a été coélaborée entre l’État et le comité national de révision de la stratégie nationale pour la biodiversité, composé de différentes parties prenantes.
Elle résulte d’un processus constructif et consensuel. Chaque orientation stratégique, chaque objectif ont fait l’objet de discussions au sein de ce comité.
Il n’a pas été prévu de lui donner une vocation réglementaire, et donc coercitive. Cette stratégie est issue d’une volonté partagée des acteurs d’agir pour la biodiversité et de trouver des solutions pour préserver le vivant. Fixer des objectifs quantitatifs et qualitatifs dans cette stratégie lui conférerait un caractère contraignant non voulu par les parties prenantes, qui ont choisi de s’investir dans cette stratégie et d’y adhérer volontairement.
D’autres outils existent pour se fixer des objectifs contraignants en matière de biodiversité : la trame verte et bleue, Natura 2000, le programme d’actions de la future Agence française pour la biodiversité, les politiques du ministère de l’écologie.
À l’heure où le bilan du dispositif d’engagement dans la stratégie nationale suggère de rénover le dispositif pour le rendre plus attrayant pour les parties prenantes, il ne semble pas opportun d’utiliser cet outil pour fixer les objectifs de l’État en matière de préservation de la biodiversité.
La parole est à M. Daniel Dubois, pour présenter l'amendement n° 248 rectifié.
La parole est à M. Philippe Bonnecarrère, pour présenter l'amendement n° 485 rectifié ter.
L'amendement n° 581, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 8
Après le mot
biodiversité
rédiger ainsi la fin de cet alinéa :
et la programmation.
La parole est à Mme la ministre.
L'amendement n° 581 est retiré.
Quel est l’avis de la commission sur les trois amendements identiques n° 59 rectifié, 248 rectifié et 485 rectifié ter ?
La commission a émis un avis favorable.
Nous avions adopté en commission un amendement de notre collègue Dantec qui apportait une précision concernant la stratégie nationale pour la biodiversité. Il prévoyait qu’elle définit les objectifs quantitatifs et qualitatifs de conservation et d’utilisation durable de la biodiversité, de la programmation ainsi qu’une enveloppe maximale.
J’avais émis un avis plutôt défavorable en commission et je rejoins les arguments des auteurs des trois amendements en discussion, qui prévoient de supprimer une telle précision.
Nous sommes tous attachés à la dimension partenariale et consensuelle de l’élaboration de la stratégie. Or lui fixer des objectifs contraignants n’est pas conforme à la philosophie d’adhésion volontaire des acteurs et crée des contraintes qui peuvent être décourageantes.
Je ne comprends pas tout à fait la logique défendue ici.
Nous avons ajouté dans le texte, j’en assume la responsabilité, les termes « quantitatifs et qualitatifs ». Or il est ici proposé de supprimer la totalité de l’alinéa. Pourquoi s’attaquer à l’ensemble de l’alinéa ? La logique, peut-être consensuelle, serait, à mon avis, de supprimer uniquement ces deux adjectifs.
Je mets aux voix les amendements identiques n° 59 rectifié, 248 rectifié et 485 rectifié ter.
Les amendements sont adoptés.
Je suis saisie de cinq amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 343 rectifié, présenté par MM. Bizet et Gremillet, est ainsi libellé :
Alinéa 9
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Jean Bizet.
Cet alinéa prévoit qu’un plan d’action spécifique soit élaboré en vue d’assurer la préservation de chacune des espèces classées sur la liste rouge de l’Union internationale pour la conservation de la nature, l’UICN, présente sur le territoire français, et intégré à la stratégie nationale pour la biodiversité.
Or bien que la liste rouge de l’UICN soit reconnue par la convention sur la diversité biologique comme une référence mondiale pour la classification des espèces selon leur risque d’extinction, il est à souligner que le Comité scientifique, technique et économique des pêches de la Commission européenne a estimé en 2006 que les critères développés par l’UICN pour la classification des menaces sur les espèces terrestres et les mammifères marins ne sont pas appropriés pour les poissons et autres espèces marines exploitées par l’homme.
En clair, la classification de l’UICN s’avère même en contradiction avec les principes de gestion durable des activités de pêche.
Voilà pourquoi, devant tant d’incohérences et de lacunes, il serait pertinent de supprimer cet article, afin d’éviter de nous retrouver demain en porte à faux avec le Comité scientifique, technique et économique des pêches émanant de la Commission européenne.
L’amendement n° 217, présenté par MM. Antiste, Cornano et Karam, est ainsi libellé :
Alinéa 9
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Chacune des espèces classées sur la liste rouge nationale des espèces menacées, établie selon les critères de l’Union internationale pour la conservation de la nature, fait l’objet d’un plan d’action spécifique ou de mesures de protection renforcées en vue d’assurer sa préservation, répondant à l’objectif 4 de la stratégie nationale pour la biodiversité prévue à l’article L. 110–3 du code de l’environnement. »
La parole est à M. Maurice Antiste.
L’alinéa 9 de l’article 4 concernant les espèces menacées nécessite quelques ajustements, notamment terminologiques. Il est en effet important d’inscrire la liste rouge nationale des espèces menacées comme référence, telle qu'elle est établie selon les critères de l’Union internationale pour la conservation de la nature.
En effet, toutes les espèces menacées de notre territoire doivent bénéficier d’une protection au titre de la réglementation sur les espèces protégées. Cependant, si plusieurs d’entre elles doivent aussi bénéficier d’un plan d’action spécifique – les plans nationaux d’action sur les espèces menacées –, il ne paraît pas pertinent que toutes les espèces fassent l’objet d’un tel plan. C’est pourquoi il est préférable d’intégrer également des mesures de protection renforcée, au-delà de la réglementation sur les espèces protégées. Cela peut être le cas d’espèces menacées à distribution réduite dont l’habitat naturel peut faire l’objet d’un classement en aire protégée.
L’amendement n° 251 rectifié bis, présenté par Mmes Claireaux et Conway-Mouret, MM. Lalande, Desplan, Patient et Karam, Mmes Yonnet et Herviaux, MM. S. Larcher et F. Marc, Mme Bataille et M. J. Gillot, est ainsi libellé :
Alinéa 9
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Chacune des espèces terrestres présentes sur le territoire français et classées sur la liste rouge nationale des espèces menacées de l’Union internationale pour la conservation de la nature, fait l’objet, en vue d’assurer sa préservation, d’un plan d’action spécifique ou de mesures de protection, adaptés à son statut de préoccupation, et intégrés à la stratégie nationale pour la biodiversité prévue au présent article. »
La parole est à Mme Karine Claireaux.
Cet alinéa tend à prévoir qu’un plan d’action spécifique soit élaboré en vue d’assurer la préservation de chacune des espèces classées sur la liste rouge de l’Union internationale pour la conservation de la nature, l’UICN.
Bien que cette liste rouge soit reconnue comme une référence mondiale pour la classification des espèces selon leur risque d’extinction, les critères développés par l’UICN pour la classification des menaces sur les espèces terrestres et les mammifères marins ne semblent pas appropriés pour les poissons et autres espèces marines exploitées par l’homme.
Compte tenu des lacunes et incohérences que présente le système de classification des espèces marines menacées de l’UICN, il n’est donc ni pertinent ni souhaitable que les dispositifs de préservation des espèces marines reposent de manière systématique sur la liste rouge de l’UICN.
En outre, la stratégie nationale pour la biodiversité ne constitue pas le cadre d’action unique de préservation des espèces. En l’occurrence, s’agissant des espèces marines exploitées, le cadre de référence est la politique commune de la pêche, qui seule permet de prendre en compte la dimension internationale de la question de la préservation des stocks halieutiques dans le cadre d’une pêche durable.
L’amendement n° 310 rectifié bis, présenté par M. Dantec, Mme Blandin, M. Labbé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 9
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Les espèces menacées présentes sur le territoire national classées dans les catégories « en danger critique » et « en danger » de la liste rouge mondiale des espèces menacées, établie selon les critères de l’Union internationale pour la conservation de la nature, font l’objet de plans d’actions opérationnels, spécifiques ou par groupes d’espèces, ou de mesures de protection renforcées prises dans le cadre des politiques sectorielles et environnementales, afin de restaurer et maintenir leur état de conservation, répondant à l’objectif 4 de la stratégie nationale pour la biodiversité prévue à l’article L. 110–3 du code de l’environnement et à l’objectif 12 du plan stratégique pour la diversité biologique 2011–2020 de la Convention sur la diversité biologique. »
La parole est à M. Ronan Dantec.
Je donne raison à Jean Bizet – nous sommes dans une dynamique de consensus ! – sur les faiblesses du premier amendement que nous avions présenté en commission ; il avait néanmoins le mérite d’ouvrir le débat.
Mme la ministre l’a dit, cet amendement a été très bien accueilli par les associations et le monde de la protection de l’environnement. Cependant, il est beaucoup trop large, comme l’a dit Jean Bizet.
Peut-être ne vais-je pas me faire que des amis dans le monde de la protection de l’environnement, mais je pense même – cela restera entre nous ! §– que les autres amendements en discussion commune ont, eux aussi, un champ d’action trop large.
Celui que je propose, et que j’ai retravaillé avec un certain nombre d’associations, vise à prévoir seulement deux catégories d’espèces menacées : celles qui sont « en danger critique » et celles qui sont « en danger ». Nous n’avons même pas inscrit la catégorie « espèces vulnérables », car cela aurait par trop allongé la liste rouge.
Par ailleurs, et c’est une véritable différence avec les autres amendements, sont évoquées dans le nôtre une liste rouge non pas nationale, mais mondiale, visant uniquement les espèces en danger au niveau mondial présentes sur le territoire français, ce qui est très limitatif : même l’ours d’Europe, dont vous savez que l’avenir me préoccupe beaucoup, n’y figure pas.
Cet amendement est également né à la suite des auditions relatives aux territoires ultramarins que nous avons menées. Sont donc uniquement visées dans cette rédaction des espèces plutôt présentes outre-mer et qui ne sont pas protégées par un plan d’action ou – c’est encore plus limitatif – par des mesures de protection renforcée, notamment un classement par zone géographique.
Depuis notre premier débat sur le sujet, nous avons essayé de rédiger un amendement très opérationnel qui concerne non plus des milliers d’espèces, mais quelques-unes.
C’est en prévoyant des plans d’action pour des espèces véritablement en danger au niveau mondial et présentes sur son territoire – notamment les espèces endémiques – que la France pourra assumer sa part de la biodiversité mondiale.
M. Jean Desessard applaudit.
L’amendement n° 610, présenté par M. Bignon, au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, est ainsi libellé :
Alinéa 9
Remplacer la référence :
à l'article L. 110–3 du code de l'environnement
par la référence :
au présent article
La parole est à M. le rapporteur pour présenter cet amendement et pour donner l’avis de la commission sur les amendements n° 343 rectifié, 217, 251 rectifié bis et 310 rectifié bis.
L’alinéa 9 de l’article 4, introduit en commission dans le projet de loi sur l’initiative de Ronan Dantec, prévoit que chacune des espèces figurant sur la liste rouge et présente sur le territoire français fait l’objet d’un plan d’action spécifique, intégré à la SNB – stratégie nationale pour la biodiversité –, en vue d’assurer sa préservation.
Au cours d’une table ronde sur la biodiversité outre-mer à laquelle j’ai participé avec Ronan Dantec, nous avions pu constater que ces plans d’action donnaient des résultats pour les espèces en danger critique. Ainsi, l’albatros d’Amsterdam, espèce qui a bénéficié d’un plan d’action efficace mis en place par les Terres australes et antarctiques françaises sur l’île d’Amsterdam, est désormais moins en danger.
Après en avoir discuté avec les acteurs intéressés, je rejoins la position de M. Ronan Dantec : le champ de l’alinéa paraît trop large. Il ne s’agit pas de dire que toutes les espèces ne doivent pas être protégées, mais, comme dit l’adage, qui trop embrasse mal étreint. C’est une question d’efficacité. Mieux vaut cibler les mesures.
Par ailleurs, la liste rouge comporte des gradations, lesquelles sont majeures, critiques ou mineures. Il n’est donc pas nécessaire de déployer la même énergie et les mêmes moyens. Il faut plutôt adapter l’action à la qualification de la préoccupation relative à l’espèce concernée.
Face à cette difficulté, Jean Bizet préconise au travers de l’amendement n° 343 rectifié de supprimer purement et simplement l’alinéa 9 de l’article 4, au motif que son champ d’application est trop large.
Je considère, pour ma part, qu’il vaut mieux restreindre cet alinéa plutôt que de le supprimer. J’émets donc un avis défavorable sur l’amendement, même si je comprends la problématique posée par notre collègue. Il est vrai que maintenir l’alinéa en l’état n’aurait pas eu de sens, mais nous préférons apporter une réponse différente.
Quant à l’amendement n° 217 présenté par Maurice Antiste, il ne permet pas de résoudre la difficulté de la trop grande largeur de champ de l’alinéa, pas davantage que l’amendement n° 251 rectifié bis de Mme Claireaux, lequel tend pourtant à proposer une solution indiscutablement intéressante ; la référence à « la liste rouge nationale » est cependant problématique.
Je souhaite, comme je l’ai dit dans mon propos liminaire, privilégier l’amendement n° 310 rectifié bis de Ronan Dantec, qui a rectifié sa proposition initiale. Sont désormais visées de façon plus précise les espèces menacées présentes sur notre territoire, notamment celles en danger critique, ce qui permettra de mener des actions spécifiques.
J’émets donc un avis favorable sur cet amendement, sous réserve de le rectifier en y intégrant l’amendement n° 610 de la commission. Ainsi modifiée, sa rédaction sera, légistiquement parlant, de bonne qualité.
Il me paraît difficile de prévoir la disparition d’une obligation relative aux espèces menacées et d’exclure de la disposition les espèces marines.
Je suggère donc le retrait des amendements n° 343 rectifié, 217 et 251 rectifié bis, au bénéfice de l’amendement n° 310 rectifié bis, qui vise à mettre en place des actions proportionnées en faveur des espèces menacées. La nécessité de préciser la juste adaptation des décisions en fonction du degré de menace sur les espèces est en effet prise en considération, sans pour autant que le dispositif soit totalement supprimé.
J’ai bien entendu les propositions de M. le rapporteur et l’invitation qui m’est faite de retirer mon amendement au bénéfice de celui de Ronan Dantec, qui a été jugé très positif.
Je souhaite revenir sur l’avis du Comité scientifique, technique et économique des pêches de la Commission européenne, auquel il ne me semble pas que l’amendement n° 310 rectifié bis soit conforme. Si tel est cependant le cas – j’aimerais que l’on m’apporte quelques précisions –, je retirerai mon amendement sans problème. Je souhaite néanmoins souligner que nous ne devons pas, au Sénat, avoir des positions incohérentes par rapport à celles des comités techniques d’instances européennes ; ce serait source de contentieux et nous n’en finirions pas.
Cela étant dit, je voterai sans difficulté l’amendement n° 310 rectifié bis s’il est conforme àl’avis du comité précité.
Je suis quelque peu désarmé par la référence à cet avis, émis en 2006, du Comité scientifique, technique et économique des pêches de la Commission européenne. Peut-être l’UICN a-t-elle évolué sur ce point, mais j’avoue que je n’en sais rien.
L’objectif est de protéger les espèces emblématiques, en danger majeur ou critique, qui sont ciblées par l’UICN. Lorsque nous aurons réglé ce problème, nous verrons ce qu’il en est des espèces suivies par la Commission européenne.
Ne rien faire serait dommageable pour la biodiversité et l’avenir de ces espèces qui sont véritablement en danger critique. Je rappelle qu’il ne restait que trente couples d’albatros d’Amsterdam ; cette espèce magnifique et emblématique était en train de disparaître !
Ne rien faire ou ne pas se donner les moyens d’agir me paraît pire que de commettre l’erreur éventuelle consistant à prévoir une disposition en contradiction avec la préconisation d’un comité. En outre, je ne sais pas si cet avis, émis en 2006, est toujours d’actualité en 2016. Il faut mettre les deux en balance, quitte à rectifier notre position le cas échéant.
Si Ronan Dantec en était d’accord, l’amendement n° 310 rectifié bis pourrait être rectifié afin d’y introduire la référence à l’avis du Comité scientifique, technique et économique des pêches de la Commission européenne. L’affaire serait réglée !
Il serait trop compliqué de faire ici ce travail de commission, mon cher collègue.
La parole est à M. Ronan Dantec.
Le terme « territoire » renvoyait clairement aux espèces terrestres.
Je propose à Jean Bizet que nous adoptions cet alinéa aujourd’hui – après tout, nous sommes seulement en première lecture – et que nous examinions ensemble non pas la possibilité d’introduire la référence à un avis différent, mais ce problème sous l’angle de la biodiversité marine. Le cas échéant, nous pourrons alors ajouter un élément complémentaire.
L’amendement n° 343 rectifié est retiré.
Monsieur Antiste, l’amendement n° 217 est-il maintenu ?
L’amendement n° 217 est retiré.
Madame Claireaux, l’amendement n° 251 rectifié bis est-il maintenu ?
L’amendement n° 251 rectifié bis est retiré.
Monsieur Dantec, acceptez-vous de rectifier l’amendement n° 310 rectifié bis dans le sens proposé par M. le rapporteur ?
Oui, madame la présidente, je rectifie mon amendement pour y intégrer le dispositif de l’amendement n° 610.
Je suis donc saisie d’un amendement n° 310 rectifié ter, présenté par M. Dantec, Mme Blandin, M. Labbé et les membres du groupe écologiste, et ainsi libellé :
Alinéa 9
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Les espèces menacées présentes sur le territoire national classées dans les catégories « en danger critique » et « en danger » de la liste rouge mondiale des espèces menacées, établie selon les critères de l’Union internationale pour la conservation de la nature, font l’objet de plans d’actions opérationnels, spécifiques ou par groupes d’espèces, ou de mesures de protection renforcées prises dans le cadre des politiques sectorielles et environnementales, afin de restaurer et maintenir leur état de conservation, répondant à l’objectif 4 de la stratégie nationale pour la biodiversité prévue au présent article et à l’objectif 12 du plan stratégique pour la diversité biologique 2011–2020 de la Convention sur la diversité biologique. »
Je le mets aux voix.
L'amendement est adopté.
L'article 4 est adopté.
Je suis saisie de deux amendements identiques.
L'amendement n° 52 est présenté par Mme Didier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 469 est présenté par M. Labbé, Mme Blandin, M. Dantec et les membres du groupe écologiste.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 531-2-1 du code de l’environnement est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les produits issus d’une ou de plusieurs nouvelles techniques de modification génétique d’une manière qui ne s’effectue pas naturellement par multiplication ou recombinaison naturelles et qui n’ont pas fait l’objet d’une utilisation traditionnelle sans inconvénient avéré pour la santé et l’environnement ne peuvent en aucun cas être exonérés de l’application du présent titre et des articles L. 125-3 et L. 515-13. »
La parole est à Mme Évelyne Didier, pour présenter l'amendement n° 52.
Nous avons évoqué les nouvelles techniques de modifications génétiques, dites techniques d’édition ou de réécriture du génome.
En 2008, sept ans après la directive OGM, la Commission européenne a listé huit nouvelles techniques de modification génétique des plantes, dont la mutagenèse. Je vous fais grâce, mes chers collègues, de la liste exhaustive de ces techniques.
Un groupe d’experts avait à l’époque été saisi afin de déterminer si ces techniques produisent ou non des OGM. Il semblerait cependant qu’il n’ait pas pu parvenir à une conclusion unanime concernant chaque technique.
La Direction générale de la santé, chargée de ce dossier au sein de la Commission, devait produire un avis juridique concernant les sept premières techniques, pour préparer une « communication de la Commission » annoncée pour la fin de l’année 2015. Nous n’avons pas eu accès à ce document. Peut-être, madame la ministre, pourriez-vous nous donner des précisions sur l’avancée de ces travaux ?
En attendant, on nous dit que certains produits issus de ces techniques font d’ores et déjà l’objet de demandes de mise sur le marché, avant même que nous disposions des conclusions. Or nous pensons qu’il faut au minimum assurer à nos concitoyens et à nous, parlementaires, une information sur ces produits et garantir leur traçabilité.
C’est pourquoi, au travers de notre amendement, nous proposons, comme mesure de transition et par précaution, d’appliquer à ces produits la réglementation applicable aux organismes génétiquement modifiés.
Cet amendement fait partie d’une série de cinq amendements que nous avons déposés sur un sujet extrêmement important, puisqu’il s’agit d’éviter que des entreprises privées ne puissent s’approprier l’utilisation des mécanismes naturels, aussi bien biologiques que génétiques.
Ce débat ne concerne pas seulement la protection de notre recherche publique, il concerne également la protection de nos agriculteurs et de nos éleveurs, qui se retrouveraient dans une situation paradoxale, puisqu’ils seraient contraints de payer une redevance à une entreprise ou à un laboratoire qui aurait réussi à faire breveter l’un de ces mécanismes naturels ou une séquence génétique présente de manière naturelle dans une plante ou un animal. Il est crucial de distinguer ce qui est de l’ordre de la découverte et ce qui relève de l’invention.
Je tiens à préciser que, pour cette série d’amendements, nous avons travaillé – nous ne sommes pas le seul groupe à l’avoir fait –, avec un collectif, le réseau « Semons la biodiversité », dont les membres font office de résistants à cette course à la financiarisation et au brevetage de tout ce qui est vivant. Ils nous ont apporté une expertise extrêmement intéressante.
En ce qui concerne l’amendement n° 469, de nouvelles techniques de génie génétique se développent, qui n’impliquent pas nécessairement l’ajout d’un gène extérieur. On est capable de modifier des séquences génétiques, de les déplacer, de les recomposer. Néanmoins, le statut de ces modifications n’est aujourd’hui pas clair, car il ne relève pas de la réglementation sur les OGM.
Contrairement à la transgenèse, ces nouvelles techniques permettent d’obtenir des produits brevetés que rien ne distingue, dans la description donnée par le brevet, de produits existant naturellement ou susceptibles d’être obtenus par des procédés traditionnels de sélection.
L’absence de traçabilité qui résulterait de leur éventuelle déréglementation permettrait d’étendre la protection des brevets sur ces plantes génétiquement modifiées – puisqu’elles le sont effectivement – aux plantes contenant naturellement des « traits natifs » semblables au trait breveté.
La commission est défavorable à ces deux amendements identiques, qui visent à faire entrer les produits issus de nouvelles techniques de modification génétique dans le champ de la directive de 2001 sur les OGM et du titre du code de l’environnement correspondant.
Il nous semble que cette problématique relève plutôt de l’échelon européen. Comme cela est d’ailleurs indiqué dans l’exposé des motifs de l'amendement n° 52, ces produits ne sont pas explicitement cités dans l’annexe de la directive. C’est à ce niveau-là que l’action est possible.
En revanche, Mme la ministre pourra sans doute, comme Mme Didier l’y a invitée, nous indiquer où en sont les discussions.
Le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat, en soulignant qu’il serait néanmoins cohérent d’étendre les obligations de traçabilité des OGM aux organismes issus de nouvelles techniques de modification génétique, et donc de renforcer la traçabilité.
Pour l’instant, des discussions sont effectivement en cours avec les autres États membres européens. Il faudrait que nous disposions de bases scientifiques plus « serrées ». Pour répondre à Mme Didier, j’ai saisi l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, l’ANSES, de la question des variétés tolérantes aux herbicides produites par mutagènes. Un rapport est actuellement en préparation. Si les amendements étaient votés, le principe serait posé, mais, de toute façon, pour son application, il faudrait attendre le dépôt de ce rapport afin de prévoir des protocoles de traçabilité précis pour les OGM.
Je le répète, vous pouvez très bien voter le principe. Il faudra ensuite bien évidemment travailler à son application, laquelle ne pourra pas se faire du jour au lendemain puisque nous attendons le rapport de l’ANSES. Mais, en effet, il faut renforcer les processus de traçabilité.
Ces deux amendements identiques ont pour objet de faire admettre que les nouvelles techniques de sélection variétale pourraient s’apparenter aux techniques d’élaboration des OGM prévues dans la directive 2001/18/CE. Aussi, je serai de l’avis du rapporteur : ne nous engageons pas dans une approche qui nous fragiliserait au niveau européen, alors même que nous sommes dans une compétition mondiale qui nous conduit, de gré ou de force, à évoluer.
Nous sommes en train de travailler sur le traité transatlantique. Si nous fragilisons l’industrie semencière européenne, et en particulier française, en homologuant ces nouvelles techniques dans le cadre d’une approche comme celle de la directive 2001/18/CE, on fragiliserait toute l’agriculture et tout l’agroalimentaire français.
Je suivrai donc l’avis du rapporteur : je ne voterai pas ces deux amendements.
Pour ma part, je soutiendrai ces amendements. Je voudrais expliquer à mes collègues qu’il s’agit d’une question non pas de choix politique, mais de citoyenneté et de transparence.
Chacun s’accordera à reconnaître que de la tulipe panachée jusqu’à la plante génétiquement modifiée, il y a tout un gradient de transformations qui passent par les clémentines sans pépins, la sélection de pommes qui se tachent moins vite, les organismes à qui l’on greffe leurs propres gènes pour transformer une séquence et les poissons non fluorescents à qui l’on greffe les gènes fluorescents d’un autre poisson pour qu’ils le deviennent…
Face à ce gradient, il y a une dizaine d’instances de suivi, de contrôle et de mise sur le marché : cela va du simple certificat d’obtention végétale, ou COV, pour une semence mise au point et cataloguée, jusqu’à l’autorisation accordée par le Haut Conseil des biotechnologies.
J’avais demandé, au nom de mon groupe, au président Larcher de saisir l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques, l’OPECST, d’une demande d’inventaire de toutes les modifications de patrimoine, naturel ou pas, existantes et des instances de contrôle. On m’a informé que l’Office avait déjà été saisi d’une demande similaire, et que ma requête n’était donc pas recevable. Sauf que l’autre demande émane de M. Chanteguet et porte sur les avantages économiques et sociaux des biotechnologies, ce qui n’est pas tout à fait pareil…
Heureusement – soyez rassurés, mes chers collègues ! –, notre talentueuse collègue Catherine Procaccia a été chargée, avec M. Le Déaut, du rapport. Elle s’est engagée à faire cet d’inventaire qui me semble indispensable pour assurer la transparence à laquelle a droit le consommateur. Néanmoins, en attendant, il n’y a rien dans la loi : je voterai donc ces amendements.
Si nous voulons avoir un avis autorisé sur cette question qui est tout de même – il faut bien l’avouer – un peu technique, il faut comprendre au moins une chose : tout ce que Mme Blandin vient d’évoquer se faisait dans la nature. Les agriculteurs croisaient les plantes et créaient des espèces à partir de plantes existantes avec des techniques naturelles.
Ce qui est en jeu ici, c’est la différence qui existe entre une invention et une découverte. Je m’explique : quand vous avez trouvé une technique, c'est une invention pour laquelle il est normal que vous déposiez un brevet et que vous en tiriez des bénéfices.
En revanche, si vous examinez de près un génome et que vous découvrez qu’une partie de celui-ci est l’expression de tel ou tel caractère, c’est simplement une découverte : il n’y a eu aucune invention. Vous vous êtes contenté de lire un peu plus tôt que les autres le génome pour en tirer des conclusions : j’ai découvert quelque chose qui va me rapporter des royalties. C'est à cette situation que correspondent les brevets actuellement déposés sur le vivant.
C’est pourquoi nous disons que le vivant est un bien commun. De quel droit une personne disposant peut-être d’un meilleur microscope par exemple que le voisin se permettrait de dire que cette découverte – car elle n’a rien inventé ! – lui appartient et qu’elle devrait toucher des royalties ? Voilà ce qui est en jeu ici !
Il s’agit certes aussi d’une question économique, mais pas seulement. Cela pose vraiment une question de principe. Prêtons attention à nos propos : au nom de la traçabilité, ou tout simplement de la transparence, nous devons savoir si nous sommes en train de fabriquer des plantes ou des animaux avec n’importe quoi ou s’il s’agit simplement de croisements. Selon les cas, nous ne pouvons pas avoir la même attitude. Attention aux apprentis sorciers !
Ayant entendu l’intervention de M. Labbé, je tiens à préciser que nous avons entamé hier soir un certain nombre d’auditions dans le cadre de l’OPECST, sur une nouvelle technique, appelée en anglais CRISPR-Cas9, qui permet d’intervenir sur le génome sans laisser aucune trace. Il n’y a donc plus aucune traçabilité possible. C’est une pure technique d’ingénierie.
Je veux rassurer Marie-Christine Blandin : avec Jean-Yves Le Déaut, dans le cadre de l’OPECST, nous allons bien procéder à l’inventaire qu’elle évoquait. L’étude de faisabilité n’est pas encore déposée, mais nous allons creuser la question s’agissant de cette technique qui conduira à la disparition des OGM d’ici à dix ans puisque ceux-ci ne seront plus traçables.
Une véritable réflexion doit être menée au niveau non pas français, mais européen et mondial.
Mme la ministre a indiqué fort à propos que cet amendement pourrait être voté sur le principe, puisque la question devra être retravaillée par la suite.
Les discussions sont extrêmement techniques, et il faudrait être un expert d’un point de vue tant technique que juridique. Il faut aussi faire preuve de bon sens au regard de l’évolution de l’agriculture et des productions alimentaires.
M. Bizet l’a dit, il s’agit pour lui de préparer les discussions du TAFTA, …
… pour que notre agriculture soit compétitive par rapport à l’agriculture américaine. Les enjeux sont effectivement là : pour nous, il s’agit non pas d’être passéistes, …
… mais de travailler en prenant en compte les processus naturels, les équilibres naturels. Sur ce point, il y a véritablement une recherche à mener.
Avec ces histoires, on est dans la fuite en avant ! Un intervenant a parlé d’apprentis sorciers ; c’est exactement à cela que je pensais ! Beaucoup de mal a déjà été fait. Alors, de grâce, réorientons notre recherche vers les équilibres, vers les productions agro-écologiques, vers le mix polyculture-élevage – l’avenir est là, c’est une évidence – et vers la relocalisation de l’alimentation, dans l’intérêt de nos paysans et de nos concitoyens.
M. Ronan Dantec applaudit.
L’un des points importants de cette discussion réside dans le combat, si je puis dire, entre le certificat d’obtention végétale – qui est français et européen et qui est notre mode de protection spécifique pour les variétés végétales – et le brevet – qui est le mode anglo-saxon, notamment américain, de protection. À cet égard, nous devons serrer les rangs, si j’ose dire, derrière le certificat d’obtention végétale ; c’est un outil fort, ayant permis à l’industrie semencière française d’être la seconde dans le monde et l’une des toutes premières en matière d’exportation.
Voilà pour l’argument économique.
Par ailleurs, sur le fond, pour répondre à Mme Didier, le brevet ne porte pas sur la découverte de telle ou telle séquence d’ADN ou de génome, mais sur deux possibilités : soit sur la technique qui permet le séquençage – il faut alors, normalement, une contribution technique ou inventive –, soit sur les effets – lorsque telle modification d’une séquence de génome a pour effet de permettre, par exemple, à une variété de maïs de résister à telle ou telle cigale ou à une tomate de résister à la sécheresse. C’est sur ce point que portent la découverte et donc le brevet.
Ensuite, on peut discuter sur la question de savoir si cela est bien ou non – on va d’ailleurs le faire parce que beaucoup d’amendements à venir traitent de la question –, mais ce qui est brevetable, ce n’est pas simplement la découverte de ce qui est dans la nature, ce sont ses effets.
Je partage complètement le point de vue de M. le rapporteur et les propos tenus tout à l’heure par notre collègue Jean Bizet, pour deux raisons.
Première raison : adopter ces amendements identiques reviendrait à isoler complètement la France, une fois de plus, par rapport à la position qui doit être adoptée à l’échelon européen ; la position européenne doit être forte en vue de la négociation, pour protéger la propriété intellectuelle et, en un sens, la biodiversité.
Seconde raison : en adoptant ces amendements, contrairement à ce que l’on peut imaginer, on amoindrirait la biodiversité, objet du présent projet de loi. Une telle décision entraînerait en France un appauvrissement de la biodiversité alors qu’il est nécessaire de maintenir sa richesse.
Je ne voterai donc pas ces deux amendements.
Les amendements ne sont pas adoptés.
Je suis saisie de huit amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 579, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le 3° du I de l’article L. 611–19 du code de la propriété intellectuelle est ainsi rédigé :
« 3° Les procédés essentiellement biologiques pour l’obtention des végétaux et des animaux ainsi que les produits qui en sont issus ; sont considérés comme tels les procédés basés essentiellement sur des phénomènes naturels comme la sélection et l’hybridation, même si des fonctionnalités secondaires de ces procédés font appel à l’utilisation de dispositifs techniques ; »
La parole est à Mme la ministre.
Il y a plusieurs amendements sur le même sujet ; il s’agit d’interdire le brevetage de produits issus de procédés essentiellement biologiques, les gènes natifs. L’objectif est d’empêcher l’appropriation privée de résultats de méthodes classiques de sélection, de phénomènes naturels ou de techniques issues d’expériences agricoles.
Le rapport du Haut Conseil des biotechnologies intitulé Biotechnologies végétales et propriété industrielle signalait dès 2013 un cas tout à fait emblématique des freins portés à l’innovation et à la diffusion de variétés nouvelles par le brevetage des gènes natifs. L’exemple est très simple – vous le connaissez bien, d’ailleurs, mesdames, messieurs les sénateurs : des agriculteurs utilisaient depuis de nombreuses années des lignées de laitues résistantes à un puceron ; tout d’un coup, une entreprise néerlandaise a identifié chez une espèce sauvage de laitue le même caractère de résistance, elle a breveté la manière d’obtenir ce caractère et a ensuite exigé des redevances à tous les utilisateurs de ces laitues résistantes, que le caractère soit porté par la plante naturellement ou à la suite d’une modification génétique.
Cette situation est amenée à se reproduire en raison de la multiplication des dépôts de brevets sur le vivant et de la concentration croissante des détenteurs de ces brevets. En effet, aujourd’hui, trois multinationales contrôlent plus du tiers du marché mondial des semences.
Par ailleurs, le réchauffement climatique entraîne beaucoup d’échanges de pratiques entre agriculteurs de divers pays pour choisir des plantes résistantes, par exemple, à la sécheresse ou à de nombreux autres phénomènes. Il est donc très important que les produits issus de procédés essentiellement biologiques – les gènes natifs – ne puissent donner lieu à un brevet.
Cela dit, le Gouvernement, ayant pris connaissance des amendements déposés par les sénateurs à ce sujet-là, retire son amendement au profit des amendements identiques n° 46, 466 et 508 rectifié.
L’amendement n° 579 est retiré.
Les trois amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 46 est présenté par Mme Didier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L’amendement n° 466 est présenté par M. Labbé, Mme Blandin, M. Dantec et les membres du groupe écologiste.
L’amendement n° 508 rectifié est présenté par MM. Mézard, Amiel, Arnell, Bertrand, Castelli, Collin, Collombat, Esnol, Fortassin, Guérini et Hue, Mmes Jouve, Laborde et Malherbe et MM. Requier et Vall.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au 3° du I de l’article L. 611-19 du code de la propriété intellectuelle, après le mot : « animaux », sont insérés les mots : «, les produits qui en sont issus, ainsi que leurs parties et leurs composantes génétiques ».
La parole est à Mme Évelyne Didier, pour présenter l’amendement n° 46.
J’ai défendu en commission un amendement tendant à modifier le code de la propriété intellectuelle afin d’interdire le dépôt de brevet sur des plantes et des animaux issus de procédés d’obtention « essentiellement biologiques », ainsi que sur leurs parties ou composantes génétiques, c’est-à-dire leurs traits natifs.
En théorie, les procédés essentiellement biologiques ne sont pas brevetables. Ainsi, un procédé d’obtention de végétaux ou d’animaux fondé sur le croisement par voie sexuée de génomes complets et sur la sélection ultérieure de végétaux ou d’animaux est exclu de la brevetabilité comme étant essentiellement biologique. En revanche, un procédé qui prévoit l’insertion d’un gène ou d’un caractère dans un végétal au moyen de techniques du génie génétique est brevetable.
Le 25 mars 2015, la grande chambre de recours de l’Office européen des brevets, l’OEB, a validé le dépôt de brevets sur des plantes conventionnelles obtenues par un procédé de sélection classique. Elle l’a fait au motif qu’ils portent non pas sur une variété, mais sur un nouveau procédé complexe – évoqué précédemment par notre collègue – qui permet d’incorporer des caractères particuliers. Lors des débats sur la loi du 13 octobre 2014 d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt, nous avions appelé l’attention du Sénat sur le risque d’une telle jurisprudence.
L’amendement du Gouvernement répond bien à cette question, mais, au travers de notre amendement, nous demandons, en plus, d’interdire la brevetabilité des gènes natifs. En effet, les progrès du séquençage permettent d’isoler assez facilement dans une plante des paramètres génétiques ou chimiques héréditaires. Si l’on établit un lien entre ce gène et une fonction particulière de la plante – ce qui se fait maintenant couramment pour toutes sortes de fonctions –, par exemple sa résistance à la sécheresse, alors même que ce trait existait déjà à l’état naturel et ne constitue donc pas en soi une invention, mais une simple découverte, ce trait est brevetable. Ensuite, le brevet s’étend forcément, automatiquement, à toutes les plantes et à tous les animaux porteurs du même trait génétique.
De fait, on s’approprie ainsi un trait caractéristique existant dans la nature ;…
… on dépose un brevet dessus en arguant qu’on l’a découvert, puis, toutes les variétés contenant ce trait tomberont à leur tour sous le coup du brevet.
M. Joël Labbé. Cet amendement est identique au précédent, qui a été bien présenté par Mme Évelyne Didier, mais je vais le défendre aussi, avec mes mots.
Exclamations amusées sur plusieurs travées du groupe Les Républicains.
La multiplication, ces dernières années, de nouveaux brevets portant sur des plantes et des animaux issus de procédés essentiellement biologiques d’obtention et naturellement porteurs de séquences génétiques fonctionnelles ou d’autres traits natifs justifiant l’octroi d’un brevet constitue une immense menace pour la biodiversité et pour l’innovation indispensable à son renouvellement. Dès qu’un tel brevet est déposé, les sélectionneurs ou les agriculteurs qui conservent et cultivent ces plantes sont obligés de cesser leur activité ou d’obtenir, à un prix souvent très élevé, un droit de licence afin de pouvoir la poursuivre. Sinon, ils risquent d’être poursuivis comme de vulgaires contrefacteurs.
C’est ainsi qu’un sélectionneur français s’est vu contraint de négocier un droit de licence avec le détenteur d’un nouveau brevet portant sur une résistance naturelle de salades à des pucerons. Il y a été contraint, lorsque ce brevet a été déposé, afin de pouvoir continuer à vendre les semences de variétés qu’il avait lui-même sélectionnées et qu’il commercialisait depuis plusieurs années.
Ces brevets sur les traits natifs sont le résultat de progrès récents des outils de séquençage génétique, qui n’avaient pas eu lieu lorsque l’actuel code de la propriété intellectuelle a été rédigé. Il ne suffit pas d’interdire la brevetabilité des produits végétaux et des animaux issus de procédés essentiellement biologiques car cela ne résoudrait qu’une infime partie du problème et cette interdiction pourrait toujours être facilement contournée par les demandeurs de brevets, qui se jouent déjà aujourd’hui de la non-brevetabilité des variétés végétales.
Les procédés essentiellement biologiques, comme le croisement et la sélection, ne permettent en effet d’obtenir que des plantes ou des animaux entiers, constitués de la totalité du génome qui caractérise une variété ou une race. Les brevets sur les variétés végétales et les races animales sont déjà interdits. Un brevet ne peut être déposé que sur un caractère héréditaire – ou sur plusieurs – des plantes ou des animaux, et leur protection s’étend ensuite à toutes les plantes et à tous les animaux qui en sont porteurs.
La portée de ces brevets est donc encore plus large que s’ils ne portaient que sur une variété végétale ou sur une race animale. Il est donc nécessaire d’exclure explicitement de la brevetabilité non seulement les plantes et les animaux issus de procédés essentiellement biologiques, mais aussi leurs parties et composantes génétiques.
La parole est à M. Guillaume Arnell, pour présenter l’amendement n° 508 rectifié.
Il s’agit d’un amendement identique aux deux précédents, qui ont été relativement bien défendus ; néanmoins, je veux apporter une précision à la Haute Assemblée.
L’article L. 611-19 du code de la propriété intellectuelle exclut de la brevetabilité les « procédés essentiellement biologiques pour l’obtention des végétaux et des animaux ». En interdisant les brevets sur ces procédés, qui font exclusivement appel à des phénomènes naturels, comme le croisement ou la sélection, cette disposition devait protéger l’innovation en matière de modifications génétiques et surtout garantir l’accès de tous aux ressources naturelles.
Pourtant, les techniques actuelles de modification génétique permettent de contourner cette réglementation. L’Office européen des brevets délivre ainsi des brevets sur de tels procédés. Conformément à l’esprit de la résolution sur la mise sur le marché et la brevetabilité des semences et obtentions végétales, adoptée par le Sénat le 17 janvier 2014, le présent amendement vise – telle est la précision que je souhaitais apporter – à interdire la brevetabilité des plantes et des animaux, des produits qui en sont issus et de leurs composantes génétiques résultant de procédés essentiellement biologiques.
L’amendement n° 275 rectifié bis, présenté par MM. Yung, Raoul, Madrelle et Poher, Mme Bonnefoy, MM. Guillaume, Bérit-Débat, Camani, Cornano et Filleul, Mme Herviaux, MM. J.C. Leroy, Miquel et Roux, Mme Tocqueville, MM. Cabanel, Daunis et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le 3° du I de l’article L. 611-19 du code de la propriété intellectuelle, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« …° Les produits issus de procédés essentiellement biologiques tels que définis au 3° de cet article ; »
La parole est à M. Richard Yung.
Le présent amendement rejoint l’objet des amendements identiques qui viennent d’être présentés ainsi que celui qui a été présenté et retiré par le Gouvernement.
Son objet est un peu redondant avec le droit existant, puisque tout cela est déjà présent dans le droit : les procédés essentiellement biologiques, en matière animale et végétale, ne sont pas brevetables. Cela apparaît ainsi dans une directive européenne et dans la convention sur le brevet européen.
Néanmoins, on éprouve le besoin de le redire. Pourquoi ? Parce que des jurisprudences contradictoires existent en la matière, en particulier dans les chambres de recours – les « tribunaux » internes de l’OEB, pour ainsi dire, qui disent le droit. Dans certains cas, ces chambres ont affirmé que cela n’est pas brevetable et appliquent bien le droit ; dans d’autres cas, notamment à travers la décision de 2015 qui a été citée, il en est allé différemment, les produits dérivés de l’invention ayant été déclarés brevetables. Il existe donc en la matière un conflit.
Sa réaffirmation dans le droit français ne changerait pas grand-chose, mais ce serait un message à destination tant des pays partenaires de la France au niveau européen que des chambres de recours de l’OEB, lesquelles pourraient ainsi être incitées à mettre de l’ordre dans leur façon de juger.
Je reviendrai sur la question des gènes natifs à l’occasion d’un autre amendement que je défendrai tout à l'heure.
Les deux amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 36 est présenté par Mme Didier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 509 rectifié est présenté par MM. Mézard, Amiel, Arnell, Bertrand, Castelli, Collin, Collombat, Esnol, Fortassin, Guérini et Hue, Mmes Jouve, Laborde et Malherbe et MM. Requier et Vall.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le I de l’article L. 611-19 du code de la propriété intellectuelle est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« …° Les inventions portant sur un produit constitué en totalité ou en partie de matière biologique végétale ou animale ou sur un procédé permettant de produire, de traiter ou d’utiliser une telle matière biologique, lorsque cette matière biologique préexiste à l’état naturel ou lorsque elle a été obtenue ou peut être obtenue par l’utilisation de procédés essentiellement biologiques qui font exclusivement appel à des phénomènes naturels comme le croisement ou la sélection.
« Est considérée comme matière biologique la matière qui contient des informations génétiques et peut se reproduire ou être reproduite dans un système biologique. »
La parole est à Mme Évelyne Didier, pour présenter l’amendement n° 36.
Ainsi que notre collègue vient de le dire, les nouvelles techniques de modification génétique impliquent de réviser notre législation, afin de garantir une interdiction effective des brevets sur les gènes natifs des végétaux et des animaux.
Ces techniques s’effectuent de façon non naturelle, mais en utilisant des méthodes naturelles. En réalité, par la technique, on ne fait qu’accélérer ou provoquer un processus naturel.
On peut s’approprier les traits découverts en les décrivant dans un brevet, comme je l’expliquais tout à l'heure. Il ne s’agit pourtant pas d’une invention : ces traits existent déjà, soit à l’état naturel, soit après sélection. Et le brevet va s’étendre à toute plante ou tout animal qui posséderait ce trait. Au reste, ces techniques sont décrites d’une façon qui ne permet pas de les distinguer des modifications naturelles.
Au travers de notre amendement, mes chers collègues, nous vous demandons par conséquent de modifier le code de la propriété intellectuelle afin que ne soient pas brevetables « les inventions portant sur un produit constitué en totalité ou en partie de matière biologique végétale ou animale ou sur un procédé permettant de produire, de traiter ou d’utiliser une telle matière biologique, lorsque cette matière biologique préexiste à l’état naturel ou lorsqu’elle a été obtenue ou peut être obtenue par l’utilisation de procédés essentiellement biologiques qui font exclusivement appel à des phénomènes naturels comme le croisement ou la sélection. » Cet amendement rejoint la proposition de résolution européenne sur la mise sur le marché et la brevetabilité des semences et obtentions végétales, adoptée par le Sénat le 17 janvier 2014, selon laquelle « devraient être exclus de la brevetabilité les plantes issues de procédés essentiellement biologiques et les gènes natifs ». C’est le choix qu’a fait la France !
Nous sommes tout bonnement en train de revenir, par petites touches, sur les certificats d’obtention végétale, les COV, voulus sur toutes les travées de cet hémicycle.
C’est pourquoi nous vous proposons d’adopter cet amendement.
La parole est à M. Guillaume Arnell, pour présenter l’amendement n° 509 rectifié.
Il n’est pas utile, à mon sens, de prolonger les débats concernant cet amendement, qui a été très bien défendu par Mme Didier.
L'amendement n° 467, présenté par M. Labbé, Mme Blandin, M. Dantec et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Après l'article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le I de l'article L. 611-19 du code de la propriété intellectuelle est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« …° Les inventions portant sur un produit constitué en totalité ou en partie de matière biologique végétale ou animale ou sur un procédé permettant de produire, de traiter ou d'utiliser une telle matière biologique, lorsque cette matière biologique préexiste à l'état naturel ou lorsqu'elle a été obtenue ou peut être obtenue par l'utilisation de procédés essentiellement biologiques qui font exclusivement appel à des phénomènes naturels comme le croisement ou la sélection. »
La parole est à M. Joël Labbé.
Pour ce qui me concerne, je présenterai mon amendement non pas pour prolonger les débats, mais pour espérer trouver une majorité.
Entre les grosses multinationales et nos petites structures agricoles – ou semencières, d'ailleurs –, la course est véritablement engagée.
Des techniques de modification génétique non essentiellement biologiques, brevetables et exclues de la réglementation OGM et donc non traçables permettent aujourd'hui de revendiquer la protection par brevets de traits décrits de manière que rien ne les distingue de traits natifs issus de procédés essentiellement biologiques ou existant naturellement dans des plantes cultivées, des animaux d'élevage ou des plantes et des animaux sauvages apparentés. Et la protection des brevets sur ces traits s'étend à toute la plante ou tout animal qui en sont porteurs, qu’ils soient issus de procédés brevetés, d'un procédé essentiellement biologique ou de sélections naturelles.
Les sélectionneurs utilisateurs de ces techniques disent qu’elles ne leur servent qu’à accélérer les phénomènes naturels de croisement et de sélection qui caractérisent les procédés essentiellement biologiques et qu’ils obtiennent absolument la même chose que ce qui existe déjà au sein de la variabilité de la biodiversité naturelle.
Si c’est le cas, les produits revendiqués ne peuvent pas être brevetés, puisqu’ils ne constituent alors que des découvertes de ce qui existe déjà, et non des inventions. Si ce n’est pas le cas, ces sélectionneurs doivent justifier la brevetabilité de leur invention, en montrant qu’elle se distingue de traits natifs obtenus ou pouvant être obtenus par un procédé essentiellement biologique ou pouvant déjà exister naturellement. Mais ils ne peuvent pas dire à la fois que c’est naturel et que c’est brevetable parce que ce n’est pas naturel !
Une série d’amendements aux objets proches viennent de nous être présentés. Ils posent tous la question fondamentale de la brevetabilité du vivant, sujet très contemporain et tout à fait passionnant.
L’Office européen des brevets a rendu plusieurs décisions assez contestables, notamment en délivrant un brevet à un type de brocoli spécialement adapté pour en faciliter la récolte. Ce brevet couvre pourtant une caractéristique technique susceptible de s’appliquer à toute une série de variétés végétales. La même décision a été prise pour une variété de tomate.
Ces décisions posent une question de fond : les plantes obtenues par des procédés non brevetables peuvent-elles bénéficier d’un brevet européen ?
On constate, à cet égard, une évolution inquiétante. En attribuant des brevets sur des gènes et des traits natifs de certains végétaux ou sur des végétaux obtenus par des procédés essentiellement biologiques, on menace le processus d’innovation, surtout pour les petites et moyennes entreprises et les agriculteurs, au profit d’une concentration du secteur autour de quelques grandes multinationales. Cela a été dit à plusieurs reprises au moment de la présentation des différents amendements.
Un sélectionneur de semences agricoles qui obtiendrait, par un processus classique de croisement, une nouvelle variété comportant un gène breveté pourrait alors déposer un certificat d’obtention végétale, mais il serait certainement poursuivi pour contrefaçon puisqu’il aurait utilisé un gène protégé, alors même que ce gène existe à l’état naturel.
Les semenciers français se sont d’ailleurs fortement inquiétés, à juste titre, de cette évolution. Notre collègue Richard Yung a rappelé tout à l'heure le poids et la place des semenciers dans l’économie française.
Ces amendements visent à exclure clairement de la brevetabilité les plantes issues de procédés essentiellement biologiques et les gènes natifs.
Le sujet est consensuel. Il a notamment fait l’objet d’un groupe de travail animé par le ministère de l’agriculture sur la propriété intellectuelle. Notre assemblée y a beaucoup travaillé, sur l’initiative notamment de nos collègues Jean Bizet et Richard Yung, qui sont intervenus sur ce point.
Mes chers collègues, je vous propose d’agir avec ambition sur cette question fondamentale. C’est pourquoi je vous invite à adopter plutôt les amendements identiques n° 46, 466 et 508 rectifié, auxquels je suis favorable. Il me semble que ces amendements vont plus loin, dans la mesure où ils règlent à la fois la question des produits issus de procédés essentiellement biologiques, mais aussi celle des gènes natifs.
Je sollicite le retrait des autres amendements en discussion commune – les amendements n° 275 rectifié bis, 36, 509 rectifié et 467 –, qui se trouveraient alors satisfaits.
Je rappelle, pour finir, que ce sujet n’est pas exclusivement français. Il faut avoir conscience que ce que nous voterons aujourd’hui ne s’appliquera qu’à l’Institut national de la propriété industrielle, l’INPI, qui a déjà la même interprétation que nous sur la brevetabilité du vivant. Le sujet est, bien entendu, européen, et ce n’est pas la moindre des difficultés qui se présentent à nous. Ce que nous devrions voter dans un instant – du moins l’espérons-nous, compte tenu du retrait annoncé de votre amendement, madame la ministre, au profit des trois amendements identiques sur lesquels j’ai émis un avis favorable, au nom de la commission – constituera un signal politique fort, sur lequel le Gouvernement pourra s’appuyer lors des discussions qui seront organisées sur le sujet dans le courant de l’année 2016, à l’occasion de la future présidence néerlandaise de l’Union européenne.
Je terminerai par un point plus anecdotique – encore que… Notre collègue Joël Labbé a mentionné les relations privilégiées qu’il entretenait avec l’association Sauvons la biodiversité, qui l’a sollicité. Comme beaucoup de nos collègues, j’ai reçu des centaines de mails de cette association.
M. Jérôme Bignon, rapporteur. Si je conçois que les membres de cette association fassent valoir leurs arguments par voie de mail – ils en ont bien le droit –, pourriez-vous, monsieur Labbé, leur demander, de notre part, qu’ils privilégient l’envoi d’un mail signé par six cents ou huit cents personnes plutôt que de six cents ou huit cents mails signés par une seule personne ? Ne pas avoir à supprimer de telles avalanches de mails nous permettrait de gagner un temps précieux !
Applaudissementssur de nombreuses travées.
Je rappelle simplement que j’ai retiré l’amendement n° 579 au profit des amendements identiques n° 46, 466 et 508 rectifié.
Nous allons évidemment retirer nos deux amendements.
Cependant, je regrette, madame la ministre, que vous ayez retiré le vôtre, dont la rédaction – je le dis sans vouloir fâcher Mme Didier – me paraissait plus complète et, en tout cas, en phase avec la déclaration unanime des ministres de l’agriculture qui a été déjà évoquée.
Au reste, quand on voit les progrès de l’épigénétique, je peux vous dire, mes chers collègues, que nous ne sommes pas au bout de nos peines ! Il faudra être très vigilant sur les évolutions en la matière.
Quand on voit que les stations de Jouy-en-Josas de l’Institut national de la recherche agronomique, l’Inra, obtiennent, avec un même génome, des plantes de structure complètement différente, on se rend compte que le « distinct, homogène et stable », ou DHS, n’a plus de sens. Il va falloir revisiter le certificat d’obtention végétale : face aux évolutions technologiques, les limites seront très subtiles !
Madame Didier, je suis d’accord avec vous pour dire que la découverte diffère de l’invention. En revanche, comment s’en sortira-t-on quand un chercheur en épigénétique réussira, peut-être même par un procédé biologique, à inhiber la fonction d’un gène ou, au contraire, à provoquer son expression ?
Je suivrai l’avis du rapporteur. Je ne reviendrai pas sur toutes les raisons techniques et environnementales qui ont été largement évoquées.
Je ne sais pas si, comme je l’ai entendu, la brevetabilité sert aujourd'hui à la biodiversité. Je constate simplement qu’en un siècle nous avons perdu plus des trois quarts de toutes nos espèces maraîchères…
Je veux m’en tenir à l’argument économique évoqué par notre excellent collègue Jean Bizet. Au-delà du problème de compétitivité de notre industrie semencière par rapport, notamment, aux industries d’outre-Atlantique, nous avons aussi un problème de partage de la valeur ajoutée entre les producteurs, les fournisseurs et les distributeurs.
Ce n’est pas parce que des firmes américaines pourraient accaparer illégitimement des brevets et des propriétés intellectuelles sur des produits issus, parfois, de croisements ou de sélections très anciens qu’il faut le permettre aux nôtres, au détriment de nos cultivateurs ou de nos maraîchers ! Nous devons être très soucieux de défendre la liberté et même la survie des agriculteurs, pour leur permettre de conserver une part de la valeur ajoutée dans la chaîne de distribution, mais également dans le processus de production.
J’y insiste, mes chers collègues, l’appropriation illégitime de brevets altère aussi la liberté et la survie de nos producteurs !
M. Joël Labbé applaudit.
La présentation des différents amendements a donné lieu à beaucoup de propos pertinents – certains l’étaient un peu moins.
Il est vrai que la distinction entre invention et découverte doit être très claire. Nous sommes très loin désormais du fameux arrêt Chakrabarty, du nom de ce biologiste américain qui considérait que tout ce qui se fait sous le soleil de la main de l’homme est brevetable. Heureusement, cette époque est révolue – je vois que Mme Didier acquiesce – et nous sommes arrivés aujourd'hui à un point où nous devons réaffirmer très clairement que les espèces végétales ou animales ne sont pas brevetables.
Un certain nombre d’environnementalistes quelque peu radicaux ont déclaré inconsidérément que le triptyque gène-fonction-implication était seul brevetable.
Cela étant dit, je suis tout à fait d’accord avec vous, madame Didier, sur le fait que les gènes natifs ne doivent pas être brevetables. D’abord, il s’agit non pas d’une invention, mais d’une découverte. Ensuite, on ne va pas tout breveter.
Cependant, je regrette que Daniel Raoul et Richard Yung retirent leurs deux amendements, qui me semblaient mieux circonscrits et plus pertinents. Je le regrette d’autant plus que, dans le cadre de la commission des affaires européennes, nos deux collègues sont chargés d’animer un groupe de travail qui a pour but de réfléchir à l’évolution du certificat d’obtention végétale.
Il est clair que les deux types de propriétés intellectuelles, végétales ou animales, sont complémentaires.
L’approche française va plutôt dans le sens du COV parce qu’il ne fige pas la recherche, alors que l’approche anglo-saxonne, américaine en particulier, celle du brevet, est un peu plus brutale. Je pense qu’au fil du temps nous avions trouvé un équilibre et que cette chambre s’honorerait d’inventer le COV du XXIe siècle.
Le COV actuel est en effet un peu vieillot, car le temps de la recherche va extrêmement vite. Mme Catherine Procaccia a évoqué la technologie CRISPR-Cas9 : il est vrai que, très rapidement et pour beaucoup moins d’argent, on peut aujourd'hui créer à travers la génomique des variétés végétales très pertinentes, qui ne découlent pas de la transgenèse, mais de la mutagenèse dirigée, donc d’un processus moins transgressif.
Je le répète, je suis donc désolé que nos collègues retirent ces amendements que je m’apprêtais à voter, non pas des deux mains, je n’en ai pas le droit, mais très fermement.
De toute façon, il faudra bien que le message que nous envoyons aux instances communautaires et aux vingt-huit États membres soit retranscrit. En effet, la France lance des messages, c’est bien, mais on sait que toutes les négociations commerciales se négocient à vingt-huit. Je pose sans doute un dilemme au rapporteur, mais voilà…
Monsieur le rapporteur, votre argumentaire nous a convaincus. Lorsque l’on dépose des amendements, on le fait dans l’espoir qu’ils vont être retenus, mais il n’y a aucun ressenti, surtout en ce qui concerne la biodiversité, dès lors que ce que vous avez dit semble correspondre parfaitement à notre analyse de la situation, qui nous impose un devoir de vigilance, de surveillance, de réactions aux petites divergences qui peuvent exister entre notre territoire national et le reste de l’Union européenne.
C’est donc tout naturellement que nous retirons notre amendement au profit de celui de Mme Didier.
L'amendement n° 509 rectifié est retiré.
Je mets aux voix les amendements identiques n° 46, 466 et 508 rectifié.
Les amendements sont adoptés.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 4, et les amendements n° 275 rectifié bis, 36 et 467 n'ont plus d'objet.
Je suis saisie de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 35, présenté par Mme Didier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code de la propriété intellectuelle est ainsi modifié :
1° Après le premier alinéa de l’article L. 613-2-2, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation au premier alinéa, la protection conférée par un brevet à un produit contenant une information génétique ou consistant en une information génétique ne s’étend pas aux produits contenant ou pouvant contenir l’information génétique brevetée, ou aux produits consistant ou pouvant consister en l’information génétique brevetée, de manière naturelle, ou suite à l’utilisation de procédés essentiellement biologiques qui font exclusivement appel à des phénomènes naturels comme le croisement ou la sélection. » ;
2° L’article L. 613-2-3 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation au premier alinéa, la protection conférée par un brevet relatif à une matière biologique dotée, du fait de l’invention, de propriétés déterminées ne s’étend ni aux matières biologiques dotées ou pouvant être dotées desdites propriétés déterminées d’une manière naturelle ou à la suite de l’utilisation de procédés essentiellement biologiques qui font exclusivement appel à des phénomènes naturels comme le croisement ou la sélection, ni aux matières biologiques obtenues à partir de ces dernières, par reproduction ou multiplication. »
La parole est à Mme Évelyne Didier.
Les auteurs de cet amendement souhaitent modifier le code de la propriété intellectuelle afin d’encadrer les brevets et de juguler la tendance actuelle à accepter la brevetabilité du vivant.
D’une part, il s’agit de compléter l’article L. 613-2-2, qui concerne la protection conférée par un brevet à un produit contenant une information génétique ou consistant en une information génétique. Cette protection s’étend à toute matière dans laquelle le produit est incorporé et dans laquelle l’information génétique est contenue et exerce la fonction indiquée.
Nous proposons que la protection ne s’étende pas aux gènes dits natifs ou à des produits issus de procédés essentiellement biologiques, par exemple la sélection.
D’autre part, il s’agit de compléter dans le même sens l’article L. 613-2-3 relatif aux brevets sur la matière biologique ou aux procédés permettant de produire une matière biologique.
Pour rebondir sur le dernier vote, bien entendu, nous n’allons pas nous approprier à nous seuls le débat et le résultat auquel il a abouti. Pour ma part, je remercie Mme la ministre de son geste.
Je dois dire que, lorsque j’ai découvert ces articles, je n’y connaissais rien, mais je crois qu’il est du devoir des parlementaires d’essayer de comprendre, …
… car il faut absolument que nous ne laissions pas ces débats, qui sont lourds de conséquences, aux seuls scientifiques. Nous en avons parmi nous qui peuvent nous aider et nous aiguiller, mais, en tout état de cause, c’est parce que ces sujets sont compliqués que nous devons nous en emparer.
Il y aura encore une deuxième lecture. Si le texte peut encore être amélioré, pourquoi pas ? L’important est que nous ayons avancé.
L'amendement n° 468, présenté par M. Labbé, Mme Blandin, M. Dantec et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code de la propriété intellectuelle est ainsi modifié :
1° Après le premier alinéa de l'article L. 613-2-2, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation au premier alinéa, la protection conférée par un brevet à un produit contenant une information génétique ou consistant en une information génétique ne s'étend pas aux produits végétaux et animaux contenant ou pouvant contenir l'information génétique brevetée, ni aux produits consistant ou pouvant consister en l'information génétique brevetée et qui ont été obtenus de manière naturelle ou suite à l'utilisation de procédés essentiellement biologiques qui font exclusivement appel à des phénomènes naturels comme le croisement ou la sélection. » ;
2° Après le premier alinéa de l'article L. 613-2-3, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation au premier alinéa, la protection conférée par un brevet relatif à une matière biologique dotée, du fait de l'invention, de propriétés déterminées ne s'étend pas aux matières biologiques végétales ou animales dotées ou pouvant être dotées des dites propriétés déterminées et qui ont été obtenues d'une manière naturelle ou suite à l'utilisation de procédés essentiellement biologiques qui font exclusivement appel à des phénomènes naturels comme le croisement ou la sélection, ni aux matières biologiques obtenues à partir de ces dernières, par reproduction ou multiplication. »
La parole est à M. Joël Labbé.
Cet amendement est très proche du précédent, qui a été bien défendu.
Je dirai simplement quelques mots de « Semons la biodiversité », parce que je ne suis pas le porte-parole de ses membres. En revanche, je les ai écoutés – et entendus – parce qu’ils font un véritable travail de terrain et, je le répète, de résistance, une résistance nécessaire.
J’ai le sentiment que, sur un sujet de ce type, il faudrait un grand débat national. Les sondages font apparaître que la population française, que nous avons été élus pour représenter ici, ne souhaite absolument pas le brevetage du vivant. M. Bizet a évoqué le traité transatlantique : une grande majorité de la population française, notamment sur les sujets agricoles et alimentaires, n’en veut absolument pas.
S’agissant des « avalanches de mails », je n’irai pas dire aux membres de « Semons la biodiversité » que ce sont des méthodes qu’il ne faut pas utiliser, je l’ai dit, mais, monsieur le rapporteur – cher Jérôme –, ils vous auront entendu, puisque tous nos débats sont publics ! Ils vont continuer leur action, bousculer le monde politique : pour que les choses évoluent, il va falloir que la société se mette en ébullition, …
M. Joël Labbé. … et c’est à nous de les écouter et de les entendre, parce que c’est nous qui les représentons, et cela d’une façon tranquille, objective et en ayant le seul souci du bien public, de l’intérêt public et des générations futures.
M. Bernard Lalande applaudit.
L'amendement n° 510 rectifié, présenté par MM. Mézard, Arnell, Bertrand, Castelli, Collin, Collombat, Esnol, Fortassin, Guérini et Hue, Mmes Laborde et Malherbe et MM. Requier et Vall, est ainsi libellé :
Après l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code de la propriété intellectuelle est ainsi modifié :
1° Après le premier alinéa de l’article L. 613-2-2, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation au premier alinéa, la protection conférée par un brevet à un produit contenant une information génétique ou consistant en une information génétique ne s’étend pas aux produits végétaux ou animaux contenant ou pouvant contenir l’information génétique brevetée, ou aux produits consistant ou pouvant consister en l’information génétique brevetée, de manière naturelle, ou suite à l’utilisation de procédés essentiellement biologiques qui font exclusivement appel à des phénomènes naturels comme le croisement ou la sélection. » ;
2° L’article L. 613-2-3 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation au premier alinéa, la protection conférée par un brevet relatif à une matière biologique dotée, du fait de l’invention, de propriétés déterminées ne s’étend ni aux matières biologiques dotées ou pouvant être dotées desdites propriétés déterminées d’une manière naturelle ou à la suite de l’utilisation de procédés essentiellement biologiques qui font exclusivement appel à des phénomènes naturels comme le croisement ou la sélection, ni aux matières biologiques obtenues à partir de ces dernières, par reproduction ou multiplication. »
La parole est à M. Guillaume Arnell.
Dans le même esprit que les amendements précédemment présentés, cet amendement de repli vise à restreindre la protection conférée par les brevets sur les produits végétaux ou animaux. Celle-ci serait écartée pour les traits « natifs » et les produits issus de procédés essentiellement biologiques.
L'amendement n° 276 rectifié bis, présenté par MM. Yung, Raoul, Madrelle et Poher, Mme Bonnefoy, MM. Guillaume, Bérit-Débat, Camani, Cornano et Filleul, Mme Herviaux, MM. J.C. Leroy, Miquel et Roux, Mme Tocqueville, MM. Cabanel, Daunis et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 613-2-3 du code de la propriété intellectuelle est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« La protection conférée par un brevet relatif à une matière biologique dotée, du fait de l’invention, de propriétés déterminées ne s’étend pas aux matières biologiques dotées ou pouvant être dotées desdites propriétés déterminées, par procédé essentiellement biologique, ni aux matières biologiques obtenues à partir de ces dernières, par reproduction ou multiplication. »
La parole est à M. Richard Yung.
Obtenu de façon essentiellement biologique, cela signifie obtenu par des procédés naturels, comme l’hybridation ou la sélection, procédés que les hommes utilisent depuis des millénaires pour améliorer l’agriculture.
L’idée essentielle qui sous-tend cet amendement, lequel est déjà satisfait d’une certaine manière, est que l’obtention d’un brevet sur un produit ou un procédé permettant d’obtenir tels effets n’autorise pas son détenteur à aller voir ceux qui, grâce à un savoir ancestral, utilisent une plante aux mêmes effets – je pense aux tribus Guarani, au bord de l’Amazone – et leur interdire l’usage de cette plante, par exemple pour guérir la fièvre, sans payer des royalties sur le brevet.
Je crois que l’accord sur ce point est assez général, sauf peut-être parmi les détenteurs de brevets…
Ces amendements, qui, s’ils ne sont pas identiques, présentent beaucoup de traits communs, sont plutôt des amendements de repli, …
… comme l’ont dit de façon claire aux moins deux des intervenants sur quatre. J’invite donc leurs auteurs à considérer qu’ils sont satisfaits par le vote des amendements précédents et à bien vouloir les retirer, car leur adoption compliquerait terriblement le texte en introduisant surabondance et risque probable de bribes de contradiction.
Elle affaiblirait une position assez unanime qui a été soutenue par le Gouvernement. Leur retrait me paraît donc aller dans le sens de l’intérêt du débat, quitte à les réexaminer lors de la discussion en deuxième lecture qu’auront d’abord nos amis députés puis nous-mêmes. Nous avons donc un peu de temps. S’il n’y avait qu’une seule lecture, je ne serais pas contre l’idée de compléter le texte dès maintenant, mais nous pourrons peut-être profiter de la réflexion que vous avez menée sur ces amendements de repli au moment de la deuxième lecture.
S’ils n’étaient pas retirés, j’émettrai donc un avis défavorable.
Ce sont en effet essentiellement des amendements de repli qui sont satisfaits par les amendements qui viennent d’être adoptés. Je suggère donc également leur retrait.
L'amendement n° 468 est retiré.
Monsieur Arnell, l'amendement n° 510 rectifié est-il maintenu ?
L'amendement n° 510 rectifié est retiré.
Monsieur Yung, l'amendement n° 276 rectifié bis est-il maintenu ?
L'amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 4.
Je suis saisie de deux amendements identiques.
L'amendement n° 400 rectifié bis est présenté par M. Grosdidier, Mme Deseyne, M. Chaize, Mmes Goy-Chavent et Lopez, M. Laménie, Mme Keller, M. Houpert, Mme Duchêne, MM. Guerriau, G. Bailly, Bockel, Danesi et Pellevat, Mmes Hummel et Garriaud-Maylam et MM. Laufoaulu, Kennel, J.P. Fournier et Portelli.
L'amendement n° 475 est présenté par MM. Labbé et Dantec, Mme Blandin et les membres du groupe écologiste.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le 3° de l'article L. 623-2 du code de la propriété intellectuelle est complété par les mots : «, et dont sa semence est reproductible en milieu naturel ».
La parole est à M. François Grosdidier, pour présenter l’amendement n° 400 rectifié bis.
Les brevets sur le vivant, particulièrement sur les gènes, même hors transgenèse, qui sont issus de plusieurs siècles et parfois de plusieurs millénaires de pratique, constituent un accaparement illégitime du travail des éleveurs et cultivateurs ainsi que de l’évolution biologique.
Les agriculteurs ne peuvent plus produire leurs propres semences. Ils doivent acheter et cultiver des variétés brevetées, variétés qui sont aujourd'hui stériles et qui, en conséquence, ne peuvent pas être replantées d’une année sur l’autre en milieu naturel.
Cette situation entrave agriculteurs et maraîchers, qui se trouvent de plus en plus dans l’impossibilité de replanter autre chose que des graines hybrides, ce qui provoque à terme un affaiblissement de la qualité des fruits et légumes, et leur raréfaction.
Les semences industrielles étant non reproductibles, les agriculteurs ou maraîchers sont dans l’obligation d’en racheter chaque année.
Si vous le permettez, madame la présidente, je présenterai dans la foulée l’amendement n° 399 rectifié ter.
Les jardiniers sont les seuls à pouvoir semer et échanger librement les variétés non issues des semenciers industriels.
Il faut permettre l’entraide entre agriculteurs. Elle est aujourd'hui autorisée entre membres d’un groupe d’intérêt économique, mais pas à ceux qui ne le sont pas. Ils doivent pouvoir échanger les semences reproductibles et non hybrides.
Il faut permettre aux maraîchers de cultiver et de produire, d’une année sur l’autre, à partir de semences reproductibles, adaptées à l’environnement, sans que celles-ci soient obligatoirement brevetées. Les semences reproductibles sont de plus en plus rares sur le marché, ce qui conduit à la situation de monopole qu’un certain nombre d’entre nous regrette.
Une fois encore, il s’agit de défendre la liberté des cultivateurs et des maraîchers. Cette liberté, qui a toujours existé, est aujourd’hui directement menacée par la jurisprudence la plus récente.
Il existe une association dénommée Comme une idée, animée par des jeunes qui ont envie de prendre leur destin en mains, ce qui fait plaisir à voir. Ils m’ont apporté une pétition signée par 69 754 personnes réclamant la noble liberté de semer.
En déposant cet amendement, nous souhaitons que les semences commerciales, protégées par le mécanisme des certificats d’obtention végétale – ou COV – qui permet de rémunérer le travail des semenciers, répondent à un certain nombre de critères. Comme M. Grosdidier l’a rappelé voilà quelques instants, ces semences doivent être distinctes, homogènes, stables…
L’autorisation des graines non reproductibles favorise une organisation oligopolistique du marché des semences et met les agriculteurs, obligés de racheter chaque année des semences pour leur production agricole, en situation de dépendance à l’égard des semenciers industriels.
Les graines non reproductibles sont adaptées à des modes de culture industriels, consommateurs d’intrants, et responsables – il faut le dire ! – de l’érosion de nos sols et de celle de la biodiversité cultivée.
La commission est favorable à un retrait de ces amendements (Sourires.) ;…
… à défaut, je me verrai contraint d’émettre un avis défavorable.
La commission n’est pas opposée, par principe, aux idées développées au travers de ces amendements – à titre personnel, je n’ai rien contre l’idée de refondre le système des COV –, mais tel n’est pas l’objet de ce texte dont nous nous éloignons encore un peu plus. Nous en viendrons bientôt à débattre d’un texte d’orientation agricole hors de la présence du ministre de l’agriculture !
Le Gouvernement émet un avis favorable sur ces deux amendements identiques, qui émanent de la droite et de la gauche de cet hémicycle.
Je sais quelles contrariétés ont subi les agriculteurs qui n’avaient pas la liberté d’utiliser chaque année un certain nombre de semences. Il s’agissait d’une entorse au bon sens et à l’expérience des agriculteurs, aux traditions, aux échanges de bonnes pratiques.
Ces amendements, ainsi que les deux amendements suivants, vont dans le bon sens. Ils sont attendus depuis longtemps. Leur adoption permettra d’étendre les droits d’échanges de plants et de semences, accordés jusqu’à présent aux seuls groupements d’intérêt économique et environnemental, les GIEE, afin d’autoriser leur libre utilisation par tous les agriculteurs.
M. Joël Labbé. Je voudrais simplement répondre à M. le rapporteur qu’il ne faut surtout pas retirer une graine semée dans une terre fertile qui s’apprête à germer !
Sourires.
Je suis favorable à ces amendements. Il y va du respect de la tradition et de la liberté de culture.
Si je devais donner un nom à ces amendements, je les appellerais les amendements « Larousse », en hommage à la devise des célèbres dictionnaires : « je sème à tout vent ».
Sourires. – MM. Daniel Raoul et Joël Labbé applaudissent.
Je ne souhaite pas retirer mon amendement, même si je ne doute pas du résultat du vote.
Monsieur le rapporteur, ces amendements ne sont pas sans rapport avec l’objet du texte, car c’est justement la liberté qui protège la biodiversité ! C’est donc au nom de la liberté des agriculteurs et de la biodiversité que je maintiens cet amendement. Je veux bien succomber, mais avec panache !
Je mets aux voix les amendements identiques n° 400 rectifié bis et 475.
Les amendements sont adoptés.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 4. (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste.)
Je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° 354 rectifié bis est présenté par Mme Blandin, MM. Labbé, Dantec et les membres du groupe écologiste.
L’amendement n° 399 rectifié ter est présenté par MM. Grosdidier, G. Bailly, Bockel, Danesi et Pellevat, Mmes Hummel, Garriaud-Maylam et Deseyne, M. Chaize, Mmes Goy-Chavent et Lopez, M. Laménie, Mme Keller, M. Houpert, Mme Duchêne et MM. Guerriau, Laufoaulu, Kennel, J.P. Fournier et Portelli.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au second alinéa de l’article L. 315-5 du code rural et de la pêche maritime, les mots : « membres d’un groupement d’intérêt économique et environnemental » sont supprimés.
La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour présenter l’amendement n° 354 rectifié bis.
Cet amendement vise à garantir le droit d’échange des semences n’appartenant pas à une variété protégée par un COV et produites sur une exploitation hors de tout contrat de multiplication.
Depuis l’adoption de la loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt, ces échanges sont possibles à la condition que les agriculteurs soient membres d’un GIEE. Si l’intention était bonne, il s’avère que cette disposition n’est pas opérationnelle. À ce jour, il n’existe que trois GIEE en voie d’agrément, soit une dizaine d’agriculteurs concernés, alors qu’il s’agit de pratiques très répandues.
Avec cet amendement, nous souhaitons étendre ce droit d’échange à tous les agriculteurs. Si ce droit ne représente qu’un poids économique ridicule, il n’en est pas moins fondamental en matière de biodiversité.
Ces variétés, parfois anciennes, parfois typiquement locales – on parle de variétés « de pays » – sont aussi parfois porteuses d’avenir. Ceux qui les possèdent et qui les sèment de nouveau les laissent se transformer : n’étant ni figées ni protégées par un COV, elles sont potentiellement porteuses d’ébauches d’adaptation aux évolutions climatiques.
Parmi toutes ces semences, on peut donc trouver de divines surprises, peut-être semblables à ce qu’ont été les mammifères à l’époque des dinosaures : de petites choses fragiles qui s’avèrent cependant représenter l’avenir de la vie sur terre.
La parole est à M. François Grosdidier, pour présenter l’amendement n° 399 rectifié ter.
Cet amendement, signé par plus d’une de vingtaines de sénateurs des groupes Les Républicains et UDI-UC, n’a rien de clivant. Il s’agit, une fois encore, de rendre leur liberté aux maraîchers et aux cultivateurs.
Alors que nous sommes nombreux, dans cet hémicycle, à regretter que ces derniers croulent sous les contraintes, pourquoi leur imposer d’appartenir à un GIEE pour exercer cette liberté d’échange qu’ils ont toujours possédée ?
Allégeons les contraintes qui pèsent sur les agriculteurs en votant cet amendement !
La Haute Assemblée ne sera pas surprise que la commission émette le même avis défavorable que sur les deux amendements précédents.
Nous sortons du texte doucement, mais sûrement. Encore deux, trois amendements de ce genre et nous débattrons véritablement d’un projet de loi agricole !
Par cohérence avec les deux amendements précédents, le Gouvernement émet un avis favorable sur ces deux amendements identiques.
Cette mesure, attendue depuis très longtemps par les agriculteurs et les maraîchers, va permettre de fluidifier le marché, d’échanger des plants et des semences et d’améliorer ainsi les pratiques culturales.
Cette mesure permettra également de créer des emplois en milieu rural. Les économies ainsi faites vont dans la bonne direction. Il s’agit d’une grande avancée.
Je mets aux voix les amendements identiques n° 354 rectifié bis et 399 rectifié ter.
Les amendements sont adoptés.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 4.
TITRE II
GOUVERNANCE DE LA BIODIVERSITÉ
Je suis saisie de trois amendements identiques.
L’amendement n° 4 rectifié quater est présenté par M. Cardoux, Mme Cayeux, M. Vasselle, Mme Canayer, MM. Gilles, Pointereau, Milon, Mouiller, Panunzi et Dufaut, Mme Gruny, M. Kennel, Mme Lopez, MM. Bouchet, Laufoaulu, D. Laurent, Trillard, Mandelli, César, Mayet, Lemoyne, Cornu, Morisset et Laménie, Mmes Micouleau et Primas, M. Commeinhes, Mme Giudicelli, M. Charon, Mme Lamure, MM. Vaspart, Doligé, J.P. Fournier, Poniatowski, Genest, Danesi, Gremillet, Grand, Bizet, Pillet, Pellevat, Pinton, de Nicolaÿ, Revet et Lefèvre, Mme Des Esgaulx, MM. B. Fournier, Longuet, Bas, Pintat, Vial et Darnaud, Mme Morhet-Richaud, MM. Allizard, Delattre, Masclet, P. Leroy et Lenoir, Mme Deseyne et MM. A. Marc, Dassault, Chasseing, Béchu, Luche, Houpert, Savary, Médevielle, Husson, Guerriau, D. Dubois et Gournac.
L’amendement n° 83 rectifié ter est présenté par MM. Bérit-Débat, Patriat et Carrère, Mmes Cartron et D. Michel, MM. Vaugrenard, Camani, Labazée, Roux et Manable, Mmes Jourda, Herviaux et Bataille, MM. Montaugé, Lalande, Lorgeoux, J.C. Leroy, Jeansannetas, Chiron et Courteau, Mme Riocreux et MM. Mazuir, Madrelle, Cazeau et Raynal.
L’amendement n° 534 rectifié est présenté par MM. Bertrand, Barbier, Castelli, Collin, Collombat, Esnol, Fortassin, Guérini et Hue, Mmes Laborde et Malherbe et MM. Mézard, Requier et Vall.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Avant l’article 5
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La section 1 du chapitre Ier du titre II du livre IV du code de l’environnement est complétée par un article L. 421-1 A ainsi rédigé :
« Art. L. 421-1 A. – Le Conseil national de la chasse et de la faune sauvage exerce une fonction consultative auprès des ministres chargés respectivement de la chasse et de l’agriculture. Il se prononce sur l’ensemble des textes relatifs à l’exercice de la chasse et la gestion de la faune sauvage, et à la protection de la nature lorsqu’ils ont une incidence directe ou indirecte sur l’exercice de la chasse. »
La parole est à M. Jean-Noël Cardoux, pour présenter l’amendement n° 4 rectifié quater.
À plusieurs reprises, lors de nos débats d’hier, j’ai souligné l’importance de la filière chasse en matière de biodiversité – le mot « filière » signifie qu’il s’agit d’un ensemble comprenant plusieurs approches.
Le Conseil national de la chasse et de la faune sauvage, ou CNCFS, dans sa représentation actuelle, correspond à la définition que je viens de donner. Si la chasse comporte une composante « biodiversité » et « biologique », elle ne s’y résume pas pour autant. Elle englobe également une dimension socio-économique et culturelle à travers les différents sujets qu’elle aborde. Je songe, par exemple, aux armes, à la balistique, à la cynophilie, aux auxiliaires de chasse, ou encore à l’organisation territoriale dont nous verrons l’importance lorsque nous aborderons la question des associations communales de chasse agréées, les ACCA…
Le CNCFS existe depuis 1972 et fonctionne correctement. Contrairement à ce qui a pu être affirmé, il n’a jamais demandé à devenir un diverticule de la biodiversité – dans une délibération du 26 septembre 2013, il s’est opposé à sa propre disparition – et les chasseurs n’y sont pas majoritaires.
Par ailleurs, il constitue un terrain de rencontre entre chasseurs et associations environnementales, le ministère de l’environnement ayant pris l’habitude d’organiser des préréunions au sein de ce conseil, afin de faciliter le déroulement des réunions plénières.
Le fonctionnement du Conseil national de la chasse et de la faune sauvage ne se résume pas à sa composante « biodiversité » ; il représente beaucoup plus que cela.
Cet organisme indépendant a conservé toute son importance. Il n’y a pas lieu de le faire disparaître. Un certain nombre des problèmes qu’il aborde, en particulier la dimension économique de la chasse, risqueraient d’être occultés s’il devait se fondre dans une vague sous-section de l’Agence française pour la biodiversité.
La parole est à M. Claude Bérit-Débat, pour présenter l’amendement n° 83 rectifié ter.
Cet amendement étant identique au précédent, mon argumentaire sera semblable à celui de mon collègue.
Le CNCFS est incontournable, tant par le contenu de ses travaux que par sa structuration ancrée dans les territoires ruraux. Sa disparition constituerait une erreur pour la biodiversité en général et la chasse en particulier, car cette instance consultative produit une expertise unique sur les questions cynégétiques. C’est l’un des instruments de gouvernance spécifiques à cette filière.
Par ailleurs, le CNCFS est un lieu de concertation privilégié de l’ensemble des représentants des fonctionnalités écologiques, que sont, au-delà des seuls chasseurs, les agriculteurs, les forestiers, les représentants des services écosystémiques ou les associations écologistes.
Il permet surtout de rassembler et de confronter des avis et des visions scientifiques. Comme l’a dit mon collègue Jean-Noël Cardoux, c’est une instance indispensable, qu’il ne faut surtout pas faire disparaître.
La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour présenter l’amendement n° 534 rectifié.
Le Conseil national de la chasse et de la faune sauvage exerce une fonction consultative auprès du ministre chargé de la chasse. Il donne son avis sur les moyens visant à préserver la faune sauvage, développer le capital cynégétique dans le respect des équilibres biologiques et améliorer les conditions d’exercice de la chasse. Il est en outre consulté, cela a été dit, sur les projets de textes relatifs à la chasse.
Au regard de ses fonctions spécifiques, il ne nous paraît pas souhaitable d’intégrer cet organisme au sein de l’Agence française pour la biodiversité. Le présent amendement vise donc à consacrer l’existence du CNCFS au niveau législatif.
Si je ne suis pas chasseur, cet amendement me permet aujourd’hui, je le précise, de défendre la chasse.
Ces amendements identiques, qui avaient déjà été rejetés lors de l’adoption du texte de la commission en juillet dernier, visent à créer un article dans la partie législative du code de l’environnement, pour établir le Conseil national de la chasse et de la faune sauvage, qui se prononce sur les textes relatifs à l’exercice de la chasse et à la gestion de la faune sauvage. Ce conseil fait actuellement l’objet d’un article relevant de la partie réglementaire du code de l’environnement. Ces amendements identiques visent donc à lui donner une existence législative.
Une telle volonté ne me paraît pas totalement pertinente, dans la mesure où ce conseil a justement vocation, selon l’étude d’impact déposée par le Gouvernement à l’appui de ce projet de loi, à constituer une commission permanente « chasse » au sein du Comité national de la biodiversité, où siègeront les propriétaires, les usagers de la nature tels que les chasseurs, les administrations, etc. Cette commission serait chargée d’assurer, dans les mêmes conditions, les missions auparavant confiées au CNCFS.
On peut toujours dire qu’il faut transformer, réorganiser, faire travailler les gens ensemble… Pourtant, à la fin, on s’oppose à toute évolution ! On m’a expliqué pas plus tard qu’aujourd’hui qu’il n’est pas nécessaire de créer une agence pour la biodiversité, car nous n’avons pas besoin d’organismes nouveaux. Simplement, ceux qui affirment cela oublient de préciser que l’organisme nouveau en question est la conjugaison, le renforcement, de plusieurs organismes amenés à disparaître.
On ne fait pas disparaître le Conseil national de la chasse et de la faune sauvage ; on ne lui fait perdre ni son originalité ni sa fonctionnalité ! On l’intègre simplement à un organisme plus vaste, dans un objectif de rationalisation.
J’entends souvent dire que notre organisation est complexe, qu’on dépense trop d’argent et qu’on manque de fonctionnaires pour organiser les services de l’État. L’idée, c’est qu’il faut rationaliser. Seulement, chaque fois que l’on avance une proposition en ce sens, certains s’y opposent. Pourtant, ce projet de loi ne vise à amoindrir aucune compétence du CNCFS, bien au contraire !
Le choix est assez simple. Soit on maintient le Conseil national de la chasse et de la faune sauvage, constitué de 28 membres, dont je lis attentivement les avis et qui joue bien évidemment un rôle important, soit les chasseurs ont envie de savoir ce qui passera au sein du Comité national de la biodiversité. Si nous avions exclu les chasseurs de ce comité, ils auraient été les premiers à protester, nous reprochant d’être ostracisés.
Il y a un choix à faire : soit les chasseurs entrent au sein du Comité national de la biodiversité, donnent leur avis, délibèrent, participent à la définition de la stratégie nationale et des actions opérationnelles associées, soit ils se font marginaliser, en conservant le Conseil national de la chasse et de la faune sauvage, qui émettra des avis parallèles.
J’estime tout de même plus intelligent d’intégrer le Comité national de la biodiversité, qui sera l’interlocuteur privilégié s’agissant de la stratégie et de l’application des politiques relatives à la biodiversité, plutôt que de rester à la marge.
Au demeurant, je comprends la préoccupation des auteurs de ces amendements. Dans le cadre de ce projet de loi, je n’ai jamais voulu laisser les chasseurs de côté ou ignorer leurs préoccupations. J’ai passé mon enfance dans un milieu rural et j’ai plus tard été élue en milieu rural. Je sais donc que la chasse y joue un rôle très important et c’est un loisir que je respecte en tant que tel. En outre, les chasseurs jouent un rôle très important en matière de biodiversité, de défense des paysages et d’éducation à l’environnement.
Les chasseurs sont des partenaires en matière de biodiversité, sujet sur lequel nous sommes en train de franchir une nouvelle étape. Vous le savez, nous n’avons pas fusionné l’Office national de la chasse et de la faune sauvage avec l’Agence française pour la biodiversité. En revanche, renoncer à entrer au sein du Comité national de la biodiversité me paraît constituer une véritable erreur. En effet, c’est là que se dérouleront les débats, que seront émis les avis et où, par conséquent, un certain nombre de décisions seront prises.
Je prends ici l’engagement que le Conseil national de la chasse ne sera pas dissous dans une structure plus vaste, mais se constituera en commission spécialisée au sein du Comité national de la biodiversité.
Une fois qu’une base législative aura été donnée au Conseil national de la chasse, celui-ci ne pourra plus intégrer le Comité national de la biodiversité, dont les chasseurs seront donc exclus. Il faut faire un choix ! Certes, ce texte fera l’objet d’une deuxième lecture, et nous avons donc un peu de temps pour réfléchir. Pour ma part, je vous propose – cela ne figure pas dans le projet de loi – que le Conseil national de la chasse constitue une commission structurée à l’intérieur du Comité national de la biodiversité. En effet, rester totalement hors de ce comité serait selon moi une erreur stratégique des chasseurs.
Je rejoins totalement Mme la ministre sur ce point. Selon moi, nous ouvrons avec ce texte un nouveau cycle. Il est important que l’ensemble des défenseurs de la nature, y compris les chasseurs, se retrouvent pour discuter. C’est le sens de ce projet de loi et c’est le sens de l’histoire.
Pour en revenir à l’énumération de notre collègue Jean-Noël Cardoux, le conseil d’administration de l’Office national de la chasse et de la faune sauvage, qu’on a maintenu, ne traitera-t-il pas une partie de ces questions spécifiques ? Dans une telle optique, l’architecture me paraît claire, quitte à ce que l’Office crée des commissions ad hoc s’il y a un sujet particulier à traiter.
Je le répète, je rejoins totalement Mme la ministre s’agissant de la nécessité de discuter ensemble.
Après avoir entendu l’ensemble de ces arguments, je souhaite répondre.
Tout d’abord, vous affirmez, monsieur le rapporteur, que nous sommes contre toute tentative de mutualisation ou de rationalisation. Mais il n’est pas besoin de rationaliser quelque chose qui fonctionne bien, comme c’est le cas – je l’ai dit tout à l’heure – du Conseil national de la chasse.
M. Dantec vient de le rappeler, il existe des passerelles – j’ai pris la précaution de l’expliquer – au sein du Conseil national de la chasse entre associations environnementales et chasseurs. Le dialogue existe, et il n’est donc pas utile de modifier quelque chose qui fonctionne.
Ensuite, monsieur le rapporteur, ce n’est pas à un parlementaire chevronné et à un juriste comme vous que j’apprendrai qu’un organisme indépendant qui possède ses structures propres et son conseil d’administration et une commission, ce n’est pas tout à fait la même chose ! Or nous tenons par-dessus tout à notre indépendance.
Je souscris aux arguments que vous venez de nous exposer, madame la ministre. Il faut que nous discutions, il faut veiller à maintenir une passerelle. Dans la mesure où ce texte fera l’objet d’une seconde lecture, pourquoi ne pas imaginer une passerelle entre le Comité national de la biodiversité et le CNCFS, à condition de préserver l’originalité et l’indépendance de ce dernier, dans le cadre d’un schéma qui permette à chacun de collaborer, afin que le dialogue se poursuive entre associations environnementales et chasseurs ?
Réduire le Conseil national, qui fonctionne bien et remplit son rôle, car il a su, depuis 1972, instaurer ce dialogue, parfois avec difficulté, pour le remplacer par une commission dont on ne connaît actuellement ni les compétences, ni le fonctionnement, ni les représentants, n’emporte pas notre accord. Cela va trop vite ; nous voulons conserver une indépendance à laquelle nous tenons jalousement.
Je souhaite apporter une précision par rapport à la notion d’indépendance que vous venez d’évoquer, monsieur Cardoux, pour qu’il ne subsiste aucune ambiguïté.
Le Conseil national de la chasse et de la faune sauvage n’est pas indépendant, puisqu’il est passé sous la présidence de la ministre chargée de la chasse. Il n’a pas de budget. C’est un conseil administratif consultatif, dont les missions ne sont pas rémunérées et où siègent 28 membres, notamment les directeurs de l’administration centrale, les représentants des lieutenants de louveterie et les présidents des fédérations de chasse.
Ces personnes se retrouveront au sein d’un Comité national de la biodiversité, qui aura l’envergure pour décider des stratégies liées à la biodiversité, ce qui me semble tout à fait logique.
Quoi qu’il en soit, ce texte fera l’objet de deux lectures. Nous n’avons aucune volonté de supprimer quelque chose qui appartiendrait aux chasseurs. Si une telle ambiguïté subsiste, il faut laisser mûrir les choses, pour trouver une solution d’atterrissage permettant de ne pas laisser le sentiment aux chasseurs qu’on supprime une instance à laquelle ils sont attachés, sans les laisser en marge du Comité national de la biodiversité, ce qui constituerait selon moi une erreur.
Comme l’a dit M. Cardoux, il n’est pas question pour le moment de supprimer un Conseil national de la chasse et de la faune sauvage qui a une vraie légitimité et dont les avis, réputés, sont écoutés.
Mme la ministre nous propose de réfléchir ensemble, avant la deuxième lecture de ce texte, à la transformation du Conseil national de la chasse, ce qui nous permettrait de trouver un point d’accord. Car, même si le Conseil ne disposait pas de véritables moyens, vous venez de le rappeler, madame la ministre, ses avis étaient incontestables.
En l’état actuel du débat, nous maintenons bien entendu l’amendement n° 83 rectifié ter.
Je mets aux voix les amendements identiques n° 4 rectifié quater, 83 rectifié ter et 534 rectifié.
Les amendements sont adoptés.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, avant l’article 5.
Le titre III du livre Ier du code de l’environnement est complété par un chapitre IV ainsi rédigé :
« CHAPITRE IV
« Institutions relatives à la biodiversité
« Art. L. 134 -1. – Le Comité national de la biodiversité constitue une instance d’information, d’échanges et de consultation sur les questions stratégiques liées à la biodiversité. À cette fin, il organise des concertations régulières avec les autres instances de consultation et de réflexion, dont les missions sont relatives à la biodiversité.
« Il est consulté par le Gouvernement sur tout projet de texte législatif ou réglementaire concernant, à titre principal, la biodiversité.
« Il peut se saisir de toute question d’intérêt national concernant la biodiversité ou ayant un effet notable sur celle-ci.
« Il donne son avis sur les orientations stratégiques de l’Agence française pour la biodiversité.
« Le Comité national de la biodiversité est composé de représentants des collectivités territoriales et de leurs groupements, des établissements publics nationaux œuvrant dans le champ de la biodiversité, des organismes socio-professionnels concernés, des propriétaires et des usagers de la nature, des associations, organismes ou fondations œuvrant pour la préservation de la biodiversité, des gestionnaires d’espaces naturels, de scientifiques ou représentants d’organismes de recherche et de personnalités qualifiées. La composition du Comité concourt à une représentation équilibrée des femmes et des hommes, dans des conditions fixées par décret. Elle concourt également à la représentation de tous les départements et collectivités d’outre-mer.
« Les compétences, le fonctionnement et la composition du Comité sont précisés par décret en Conseil d’État.
« Art. L. 134 -2. – Le Conseil national de la protection de la nature a pour mission d’apporter, par ses avis, une expertise scientifique et technique.
« Il peut être consulté sur les projets de loi, d’ordonnance et de décret concernant ses domaines de compétence et les travaux scientifiques et techniques y afférents. Il peut également se saisir d’office.
« Un décret prévoit les compétences, le fonctionnement et la composition du Conseil national de la protection de la nature, ainsi que les conditions dans lesquelles sa composition concourt à une représentation équilibrée entre les femmes et les hommes.
« La composition du Conseil national de la protection de la nature concourt à une représentation significative de spécialistes de la biodiversité ultramarine.
« Art. L. 134-3. –
Non modifié
Nous abordons l’examen du titre II de ce projet de loi de reconquête de la biodiversité.
L’article 5 est consacré à la gouvernance de la biodiversité, tant au niveau national que régional. Il traduit l’engagement pris par le Gouvernement dans la feuille de route issue de la conférence environnementale de mettre en place une nouvelle gouvernance de la biodiversité : une gouvernance claire, à la hauteur des différents enjeux et défis sur lesquels nous débattons depuis le début de l’examen de ce projet de loi, et dont la vocation sera d’accompagner l’action publique dans l’appréhension des différents problèmes, tant scientifiques et techniques que sociétaux, liés à la reconquête de la biodiversité.
Les évolutions prévues permettront de simplifier les instances administratives nationales pour les rendre plus lisibles et plus efficaces, par le regroupement d’un certain nombre de celles qui existent actuellement.
Sont créées à la fois une instance unique de concertation, qui sera chargée de l’élaboration et du suivi de la stratégie nationale pour la diversité – c’est le Comité national de la biodiversité dont nous venons de parler –, et une instance unique d’expertise de haut niveau, dont le ministère a besoin pour prendre des décisions justes et éclairées. Cette dernière mission sera confiée au Conseil national de la protection de la nature, qui trouve dans ce texte une consécration législative.
Quant à la cohérence avec les politiques régionales, qui est de grande importance, elle est garantie par l’évolution des comités régionaux : les comités régionaux « trames verte et bleue » deviennent les « comités régionaux de la biodiversité ». Il n’est pas question de créer de nouveaux échelons administratifs, mais bien de coordonner, de mettre en synergie l’existant.
Votre commission a d’ores et déjà apporté des compléments au texte du Gouvernement, et je ne doute pas que le débat que nous nous apprêtons à avoir permettra de l’enrichir encore.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, nous partageons, sur le principe, l’idée de créer un Comité national de la biodiversité en lieu et place de l’ancien Comité national « trames verte et bleue ».
En effet, la création d’une structure commune rassemblant l’ensemble des instances existantes ouvre une possibilité d’échanges et de discussions plus riches entre les différents acteurs. Il me semble aujourd’hui que, pour avancer, il n’est plus possible que chacun reste dans son coin !
Je le dis aux chasseurs, ainsi qu’à M. Cardoux : essayons au moins de nous parler le plus possible ! Peut-être serons-nous heureusement surpris des collaborations que nous serons en mesure de mettre en œuvre, et que j’appelle de mes vœux.
Par ailleurs, nous sommes satisfaits que cette instance nouvelle soit consultée sur tout projet de loi « concernant, à titre principal, la biodiversité ». Cette disposition nous paraît de bon sens.
Quant à la réécriture faite en commission concernant les liens entre ce comité national et la future AFB, l’Agence française pour la biodiversité, elle nous convient.
Nous aurions aimé disposer de davantage de précisions relatives à la composition et au fonctionnement précis de ce comité. Peut-être allons-nous ici même affiner ce travail ; il serait en tout cas souhaitable que, d’ici la deuxième lecture, ces précisions nous soient communiquées – c’est le souhait que j’émets à ce stade du débat.
Avant que notre débat sur la gouvernance de la biodiversité soit ouvert, je tenais à saluer la forte implication de Mme la ministre Ségolène Royal, qui a permis un rééquilibrage majeur des références aux outre-mer dans ce texte.
En effet, mes collègues et moi-même avions vivement regretté, au moment de sa présentation, que l’avant-projet de loi ne contienne aucune prise en compte de nos territoires ultramarins, alors même que leur répartition sur l’ensemble des aires marines et territoriales du globe leur confère la représentation de 80 % de la biodiversité française.
La diversité du système environnemental de nos outre-mer et son exposition aux conditions les plus difficiles y font de la biodiversité un enjeu vital au fort potentiel de développement, sur les plans économique, écologique, social et culturel.
Il était donc primordial d’inscrire dans le présent projet de loi le principe de la représentation des outre-mer tant au sein des organismes d’expertise technique que des instances de concertation. Cette revendication a été entendue, et je m’en félicite.
La composition du Comité national de la biodiversité ainsi que celle du Conseil national de la protection de la nature seront telles qu’elles concourront à une représentation significative des spécialistes de la biodiversité ultramarine.
De plus, nos collègues députés ont obtenu que l’autorité administrative chargée de délivrer les autorisations puisse être la collectivité locale. Cette avancée attribue une responsabilité accrue aux territoires décentralisés, ce qui va dans le sens d’une plus grande cohérence entre la définition de la stratégie de reconquête de la biodiversité et sa mise en œuvre.
Les outre-mer seront également partie prenante de l’Agence française de la biodiversité, grand établissement public qui permettra l’application concrète des objectifs politiques. Pour que les outre-mer puissent y exercer un rôle important, il est primordial qu’une partie de son conseil d’administration soit rompue aux enjeux de ces territoires. Il conviendra donc d’être vigilant lors de la constitution de ses effectifs.
De manière générale, je salue l’approche territoriale retenue pour ce texte, qui représente un acte majeur pour la France, pour ses outre-mer et, surtout, pour l’ensemble de la planète !
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.
Je suis saisie de trois amendements identiques.
L’amendement n° 8 rectifié ter est présenté par M. Cardoux, Mme Cayeux, M. Vasselle, Mme Canayer, MM. Gilles, Pointereau, Milon, Mouiller et Dufaut, Mme Gruny, M. Kennel, Mme Lopez, MM. Bouchet, D. Laurent, Trillard, Mandelli, César, Mayet, Lemoyne, Cornu, Morisset et Laménie, Mmes Micouleau et Primas, M. Commeinhes, Mme Giudicelli, M. Charon, Mme Lamure, MM. Vaspart, Doligé, J.P. Fournier, Poniatowski, Genest, Danesi, Gremillet, Grand, Bizet, Pillet, Pellevat, Pinton, de Nicolaÿ, Revet et Lefèvre, Mme Des Esgaulx, MM. B. Fournier, Longuet, Pintat, Vial et Darnaud, Mme Morhet-Richaud, MM. Allizard, Delattre, Masclet, P. Leroy et Lenoir, Mme Deseyne et MM. A. Marc, Dassault, Chasseing, Béchu, Luche, Houpert, Savary, Médevielle, Guerriau et D. Dubois.
L’amendement n° 84 rectifié ter est présenté par MM. Bérit-Débat, Patriat et Carrère, Mmes Cartron et D. Michel, MM. Vaugrenard, Camani, Labazée, Roux et Manable, Mmes Jourda, Herviaux et Bataille, MM. Montaugé, Lalande, Lorgeoux, J.C. Leroy, Jeansannetas, Chiron et Courteau, Mme Riocreux et MM. Mazuir, Madrelle, Cazeau et Raynal.
L’amendement n° 535 rectifié est présenté par MM. Bertrand, Arnell, Barbier, Castelli, Collin, Collombat, Esnol, Fortassin, Guérini et Hue, Mmes Laborde et Malherbe et MM. Mézard, Requier et Vall.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 5
Compléter cet alinéa par les mots :
, sans préjudice de l’application de l’article L. 421-1 A du code de l’environnement
La parole est à M. Jean-Noël Cardoux, pour présenter l’amendement n° 8 rectifié ter.
Il s’agit d’un amendement de coordination avec l’amendement visant à maintenir le Conseil national de la chasse et de la faune sauvage.
J’en profite, madame la ministre, pour préciser que le CNCFS n’est certes pas indépendant à proprement parler, mais qu’il bénéficie néanmoins, bien que cette qualité soit immatérielle, d’une indépendance morale et intellectuelle que lui confèrent son ancienneté – sa création remonte à 1972 – et son bon fonctionnement, reconnu par tous.
Lorsqu’on décide de toucher à quelque chose qui fonctionne bien, on le fait avec beaucoup de doigté, et seulement à la marge !
Je souscris à la proposition de notre collègue Claude Bérit-Débat. Notre position ne consiste pas à refuser de dialoguer, bien au contraire ! Je l’ai dit hier à l’occasion de mon intervention à la tribune. En revanche, nous souhaitons continuer à bénéficier des acquis et de l’indépendance morale du CNCFS, sans préjuger des méthodes de fonctionnement de ce nouveau Comité national de la biodiversité, dont nous ne connaissons pas encore tous les contours ni toutes les compétences.
Nous sommes prêts à aborder de nouveau ce problème en deuxième lecture, à partir des indications que vous nous donnerez et des propositions que vous feront les chasseurs quant à la pérennité du fonctionnement – qui a bien sûr vocation à être amélioré – du Conseil national de la chasse et de la faune sauvage. Cette proposition me semble raisonnable.
La parole est à M. Claude Bérit-Débat, pour présenter l’amendement n° 84 rectifié ter.
La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour présenter l’amendement n° 535 rectifié.
La commission a émis un avis défavorable, madame la présidente, conformément à l’avis précédemment émis sur les amendements n° 4 rectifié quater, 83 rectifié ter et 534 rectifié.
Il me serait difficile de me livrer à une gymnastique intellectuelle pour laquelle je ne suis d’ailleurs pas mandaté. L’avis est donc bien défavorable.
Je mets aux voix les amendements identiques n° 8 rectifié ter, 84 rectifié ter et 535 rectifié.
Les amendements sont adoptés.
L’amendement n° 270 rectifié, présenté par MM. Cabanel, Poher, Madrelle et Guillaume, Mme Bonnefoy, MM. Bérit-Débat, Camani, Cornano et Filleul, Mme Herviaux, MM. J.C. Leroy, Miquel et Roux, Mme Tocqueville, MM. Yung, Daunis et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Il peut être saisi pour avis par la commission concernée de l’Assemblée nationale ou du Sénat de toute proposition de loi déposée sur le bureau de l’une ou l’autre des deux assemblées parlementaires, avant l’examen du texte en commission, concernant, à titre principal, la biodiversité.
La parole est à M. Henri Cabanel.
L’article 5 a pour objet de rénover les instances de gouvernance de la biodiversité. Le texte prévoit ainsi de mettre en place deux instances nationales distinctes, qui regroupent un grand nombre d’institutions actuelles.
Un comité scientifique est instauré : le Conseil national de la protection de la nature. Il apportera une expertise technique.
Parallèlement, un comité sociétal est mis en place : le Comité national de la biodiversité. Parfois qualifié de « parlement de la biodiversité », il a vocation à devenir une instance de dialogue, de concertation et de débat sur l’ensemble des questions stratégiques liées à la biodiversité. Il pourra s’autosaisir « de toute question d’intérêt national concernant la biodiversité ou ayant un effet notable sur celle-ci ».
Le texte prévoit également une possibilité de consultation du Comité national de la biodiversité par le Gouvernement « sur tout projet de texte législatif ou réglementaire concernant, à titre principal, la biodiversité ».
Cet amendement vise à compléter ces dispositions en ouvrant la même faculté au Parlement. Il a en effet pour objet de permettre à une commission parlementaire – celles, au premier chef, du développement durable ou des affaires économiques – de saisir pour avis le Comité national de la biodiversité de toute proposition de loi concernant, à titre principal, la biodiversité.
L’amendement est adopté.
Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à seize heures quarante, est reprise à seize heures cinquante-cinq.
La séance est reprise.
L’amendement n° 9 rectifié ter, présenté par M. Cardoux, Mme Cayeux, M. Vasselle, Mme Canayer, MM. Gilles, Pointereau, Milon, Mouiller et Panunzi, Mme Gruny, M. Kennel, Mme Lopez, MM. Bouchet, D. Laurent, Trillard, Mandelli, César, Mayet, Lemoyne, Cornu, Morisset et Laménie, Mme Micouleau, M. Commeinhes, Mme Giudicelli, M. Charon, Mme Lamure, MM. Vaspart, Doligé, J.P. Fournier, Poniatowski, Genest, Danesi, Grand, Bizet, Pillet, Pellevat, Pinton, de Nicolaÿ, Revet, Lefèvre, B. Fournier, Longuet, Pintat, Vial et Darnaud, Mme Morhet-Richaud, MM. Allizard, Delattre, Masclet, P. Leroy et Lenoir, Mme Deseyne et MM. A. Marc, Chasseing, Raison, Luche, Gremillet, Houpert, Savary, Médevielle, Guerriau et D. Dubois, est ainsi libellé :
Alinéa 6
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Il peut se saisir des sujets qui sont relatifs à la biodiversité ou en lien avec celle-ci et qui n’entrent pas dans le champ de compétences d’autres organismes publics ou commissions consultatives existantes.
La parole est à M. Jean-Noël Cardoux.
Il s’agit, là aussi, d’un amendement de coordination avec ce que nous venons de voter.
Je le répète, aujourd’hui, nous ne connaissons pas les contours exacts du Comité national de la biodiversité.
Nous ne voulons pas qu’il puisse se saisir d’office de n’importe quel sujet en se substituant à des commissions consultatives existantes, comme le Conseil supérieur de la forêt, des produits forestiers et de la transformation du bois ou le Conseil national de la chasse et de la faune sauvage, dont nous avons décidé le maintien. Nous proposons donc d’encadrer sa sphère de compétence.
Bien entendu, notre amendement est, dans l’immédiat, défensif. Mais des évolutions en cours de navette sont possibles, en fonction des négociations qui auront été menées et des propositions qui seront alors formulées.
Amendement « défensif », dites-vous ? Je le trouve plutôt très offensif !
Vous proposez de restreindre fortement les compétences du Comité national de la biodiversité, en limitant son pouvoir d’autosaisine aux seuls cas dans lesquels aucun autre organisme compétent n’est à même de statuer.
La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
Cet amendement n’est pas opérationnel. Nous n’allons pas remettre en cause la capacité d’autosaisine du Comité national de la biodiversité.
Quel sens cela aurait-il ? Le Comité national de la biodiversité ne pourrait pas se saisir de questions relatives au grand tétras, qui serait réservé au Conseil supérieur de la chasse ? Il pourrait émettre un avis sur le lièvre variable, mais pas sur le lièvre de plaine ? Cela ne peut pas fonctionner !
Apparemment, pour certains, ce serait une catastrophe que le Comité national de la biodiversité puisse se saisir de problématiques liées à la chasse. Mais cessons d’avoir peur ! Il faut que les uns et les autres discutent ensemble !
Cet amendement, dont l’adoption aurait pour effet de remettre en cause l’architecture complète du Comité national de la biodiversité, me semble un mauvais signal de la part des chasseurs.
Puisque vous êtes des défenseurs de la nature, ayez un vrai dialogue avec les autres défenseurs de la nature !
Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, n’adopte pas l’amendement.
L’amendement n° 19, présenté par Mme Didier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 7
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Il donne un avis sur la cohérence d’ensemble des stratégies régionales pour la biodiversité.
La parole est à Mme Évelyne Didier.
Chaque stratégie régionale pour la biodiversité est soumise pour avis au comité régional. Afin d’assurer une cohérence d’ensemble de la mise en œuvre de ces stratégies régionales sur le territoire, il est proposé que le Comité national de la biodiversité émette un avis, à l’instar de ce que fait actuellement le Comité national « trames verte et bleue » sur les schémas régionaux de cohérence écologique. Une telle disposition semble relever du simple bon sens.
Je m’étonne enfin, chers collègues de la majorité sénatoriale, que vous ayez si peur, alors que vous avez pourtant fréquemment l’habitude de manier un fusil de chasse !
Sourires sur les travées du groupe CRC. - Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.
À mon grand regret, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement présenté par Mme Didier.
Il n’apparaît pas nécessaire d’apporter une telle précision dans la loi, car l’article 4 prévoit déjà que les stratégies régionales pour la biodiversité sont élaborées « en tenant compte des orientations de la stratégie nationale », elle-même élaborée en concertation avec tous les représentants des acteurs concernés, qui siègent au Comité national de la biodiversité.
Cet amendement me semble donc en grande partie satisfait.
En effet, cet amendement est d’ores et déjà satisfait par le texte.
L’amendement n° 19 est retiré.
Je suis saisie de huit amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 582, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 8
1° Deuxième phrase
Supprimer cette phrase.
2° Dernière phrase
Remplacer les mots :
Elle
par les mots :
Il
II. – Alinéa 9
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Ce décret précise également les conditions dans lesquelles la composition du Comité concourt à une représentation équilibrée des femmes et des hommes.
III. – Alinéa 12
Après le mot :
décret
insérer les mots :
en Conseil d’État
La parole est à Mme la ministre.
Cet amendement rédactionnel vise à fusionner deux décrets, afin de ne pas multiplier les textes d’application et de permettre une mise en œuvre rapide de la loi.
Les deux amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 11 rectifié ter est présenté par M. Cardoux, Mme Cayeux, M. Vasselle, Mme Canayer, MM. Gilles, Pointereau, Milon et Mouiller, Mme Gruny, M. Kennel, Mme Lopez, MM. Bouchet, D. Laurent, Trillard, Mandelli, César, Mayet, Lemoyne, Cornu, Morisset et Laménie, Mmes Micouleau et Primas, M. Commeinhes, Mme Giudicelli, M. Charon, Mme Lamure, MM. Vaspart, Doligé, J.P. Fournier, Poniatowski, Genest, Danesi, Grand, Bizet, Pillet, Pellevat, Pinton, de Nicolaÿ, Revet, Lefèvre, B. Fournier, Longuet, Pintat, Vial et Darnaud, Mme Morhet-Richaud, MM. Allizard, Delattre, Masclet, P. Leroy et Lenoir, Mme Deseyne et MM. A. Marc, Dassault, Chasseing, Raison, Luche, Gremillet, Houpert, Savary, Médevielle, Husson, Guerriau et D. Dubois.
L’amendement n° 537 rectifié est présenté par MM. Bertrand, Arnell, Castelli, Collin, Collombat, Esnol, Fortassin, Guérini et Hue, Mmes Laborde et Malherbe et MM. Mézard, Requier et Vall.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I.- Alinéas 10 à 13
Supprimer ces alinéas.
II. - En conséquence, alinéa 14
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Art. L. 134 -3. – Lorsque le Comité national de la biodiversité est saisi d’un projet, son avis est rendu public.
La parole est à M. Jean-Noël Cardoux, pour présenter l’amendement n° 11 rectifié ter.
Cet amendement vise à simplifier la rédaction de l’article 5, qui prévoit de créer le Comité national de la biodiversité, organe ayant vocation à reprendre les compétences du Comité national « trames verte et bleue ».
Le Conseil national de la protection de la nature, ou CNPN, qui conservera seulement des compétences scientifiques et techniques, verra son action se superposer à celle de structures existantes comme l’Office national de la chasse et de la faune sauvage, le Muséum national d’histoire naturelle ou l’Agence française pour la biodiversité.
Au titre de la simplification, nous proposons donc de supprimer le CNPN.
La parole est à M. Guillaume Arnell, pour présenter l’amendement n° 537 rectifié.
Les deux amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 10 rectifié ter est présenté par M. Cardoux, Mme Cayeux, M. Vasselle, Mme Canayer, MM. Gilles, Pointereau, Milon, Mouiller et Panunzi, Mme Gruny, M. Kennel, Mme Lopez, MM. Bouchet, D. Laurent, Trillard, Mandelli, César, Mayet, Lemoyne, Cornu, Morisset et Laménie, Mme Micouleau, M. Commeinhes, Mme Giudicelli, M. Charon, Mme Lamure, MM. Vaspart, Doligé, J.P. Fournier, Poniatowski, Genest, Danesi, Grand, Bizet, Pillet, Pellevat, Pinton, de Nicolaÿ, Revet, Lefèvre, B. Fournier, Longuet, Pintat, Vial et Darnaud, Mme Morhet-Richaud, MM. Allizard, Delattre, Masclet, P. Leroy et Lenoir, Mme Deseyne et MM. A. Marc, Chasseing, Raison, Luche, Gremillet, Houpert, Savary, Médevielle, Guerriau et D. Dubois.
L’amendement n° 538 rectifié est présenté par MM. Bertrand, Arnell, Castelli, Collin, Collombat, Esnol, Fortassin, Guérini et Hue, Mmes Laborde et Malherbe et MM. Mézard, Requier et Vall.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 11, seconde phrase
Compléter cette phrase par les mots :
des sujets qui sont relatifs à la biodiversité ou en lien avec celle-ci et qui n’entrent pas dans le champ de compétences d’autres organismes publics ou commissions consultatives existantes
La parole est à M. Jean-Noël Cardoux, pour présenter l’amendement n° 10 rectifié ter.
Cet amendement vient en repli de l’amendement n° 9 rectifié ter, relatif à l’autosaisine du Comité national de la biodiversité.
Le présent amendement s’appliquerait pour sa part au seul Conseil national de la protection de la nature, sur le fondement des mêmes arguments.
La parole est à M. Guillaume Arnell, pour présenter l’amendement n° 538 rectifié.
Les deux amendements suivants sont également identiques.
L’amendement n° 12 rectifié ter est présenté par M. Cardoux, Mme Cayeux, M. Vasselle, Mme Canayer, MM. Gilles, Pointereau, Milon, Mouiller et Panunzi, Mme Gruny, M. Kennel, Mme Lopez, MM. Bouchet, D. Laurent, Trillard, Mandelli, César, Mayet, Lemoyne, Cornu, Morisset et Laménie, Mmes Micouleau et Primas, M. Commeinhes, Mme Giudicelli, M. Charon, Mme Lamure, MM. Vaspart, Doligé, J.P. Fournier, Poniatowski, Genest, Danesi, Grand, Bizet, Pillet, Pellevat, Pinton, de Nicolaÿ, Revet, Lefèvre, B. Fournier, Longuet, Pintat, Vial et Darnaud, Mme Morhet-Richaud, MM. Allizard, Delattre, Masclet, P. Leroy et Lenoir, Mme Deseyne et MM. A. Marc, Dassault, Chasseing, Luche, Gremillet, Houpert, Savary, Médevielle, Husson, Guerriau et D. Dubois.
L’amendement n° 540 rectifié est présenté par MM. Bertrand, Amiel, Arnell, Castelli, Collin, Collombat, Esnol, Fortassin, Guérini et Hue, Mmes Jouve, Laborde et Malherbe et MM. Mézard, Requier et Vall.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 12
Compléter cet alinéa par deux phrases ainsi rédigées :
Ce même décret assure aux sciences du vivant et aux sciences humaines une représentation équilibrée. Il fixe les règles de transparence applicables aux experts du Conseil national de la protection de la nature.
La parole est à M. Jean-Noël Cardoux, pour présenter l’amendement n° 12 rectifié ter.
Cet amendement de repli, un peu plus important que le précédent à nos yeux, concerne la représentation de ceux qui s’expriment au nom des sciences du vivant et des sciences humaines au sein du CNPN.
Depuis quelques années, nous avons constaté une certaine dérive de la qualification d’« expert ». Le plus souvent, ces experts gravitent toujours dans les mêmes milieux, sont toujours très proches des associations de protection de l’environnement et rendent surtout des expertises à charge. Nous voudrions que la représentation soit plus juste et moins déséquilibrée à l’égard d’autres utilisateurs, en particulier les chasseurs.
Ce matin, la commission des affaires sociales entendait des professeurs et des médecins sur les problèmes de transparence et d’incompatibilités dans la recherche médicale. L’un des intervenants a estimé que les experts ne devraient pas avoir le droit de siéger au sein d’instances consultatives.
Sans prôner ce jusqu’au-boutisme, nous souhaitons une répartition équilibrée des personnes appelées à apporter leur expertise au sein du Conseil national de la protection de la nature.
La parole est à M. Guillaume Arnell, pour présenter l’amendement n° 540 rectifié.
Cet amendement, en tout point identique au précédent, vise aussi à garantir une représentation équilibrée.
L’amendement n° 327 rectifié, présenté par Mmes Loisier, Billon et les membres du groupe Union des démocrates et indépendants-UC, est ainsi libellé :
Alinéa 13
Compléter cet alinéa par les mots :
et du milieu forestier
La parole est à M. Claude Kern.
L’objet de cet amendement est d’assurer la présence d’un représentant du Centre national de la propriété forestière dans la composition du Conseil national de la protection de la nature, à l’instar de ce que prévoit le texte en ce qui concerne la représentation significative de spécialistes de la biodiversité ultramarine.
Au regard de la grande diversité de la forêt, qui couvre un tiers du territoire national, et qui est détenue à 74 % par des propriétaires privés, il convient qu’un expert praticien en matière de sylviculture et de gestion forestière aborde la complexité de cet écosystème dans toutes ses dimensions – diversité des contextes bioclimatiques, occupation des sols, mais aussi pratiques sylvicoles et structures foncières.
La diversité de l’écosystème forestier se manifeste notamment par un nombre important d’essences – 137 très exactement –, réparties en 58 % d’essences feuillues, représentant 67 % des peuplements en surface, et 42 % d’essences résineuses, représentant 21 % des peuplements en surface, les 12 % restants étant constitués de peuplements mixtes.
Il est également important de rappeler que la forêt est la deuxième source de biodiversité. Elle capte 15 % des émissions naturelles de CO2, contre 25 % pour les océans.
La commission a émis un avis favorable sur l’amendement n° 582.
Les amendements n° 11 et 537 tendent à supprimer le Conseil national de la protection de la nature. Je ne surprendrai personne en disant que j’y suis défavorable. La commission a suivi cet avis.
Le CNPN existe déjà en tant que commission administrative à caractère consultatif, sans être redondant avec des organismes existants. En outre, une telle suppression irait à l’encontre de ce que l’on veut construire avec ce texte. Nous voulons inscrire dans la loi, d’une part une instance consultative de débat et de concertation, regroupant tous les acteurs et élaborant la politique de la biodiversité, d’autre part une enceinte d’expertise technique, le CNPN.
Je suis désolé de devoir rectifier l’appréciation portée à l’instant par notre collègue Jean-Noël Cardoux, mais ce n’est pas parce que les scientifiques n’ont pas exactement les mêmes avis que les chasseurs qu’ils deviennent « douteux » ! Un scientifique ne devient pas douteux parce qu’il n’est pas de votre avis ; on peut contester son avis scientifique, mais on ne doit pas pour autant chercher à le discréditer. Ce n’est pas très aimable à l’égard de tous ceux qui passent du temps à siéger dans ces organismes consultatifs pour défendre les intérêts de la science, qu’ils viennent du Muséum, du CNRS ou de l’université. Cette mise au point me paraît nécessaire.
Les amendements n° 10 rectifié ter et 538 rectifié visent à restreindre l’autosaisine du CNPN. Ces amendements se situent dans le prolongement de l’amendement n° 9 rectifié ter, qui tendait pour sa part à restreindre l’autosaisine du Comité national de la biodiversité aux seuls sujets qui n’entrent dans le champ de compétence d’aucun autre organisme consultatif. Les auteurs de ces amendements formulent la même proposition pour le CNPN et, pour les mêmes raisons, j’y suis défavorable. Le CNPN doit pouvoir donner un avis sur des problèmes qui concernent la chasse ; c’est même l’une de ses missions. La faune fait partie de la biodiversité et il est légitime que le CNPN puisse donner un avis scientifique sur ces sujets.
Les amendements n° 12 rectifié ter et 540 rectifié tendent à préciser que le décret prévoyant les compétences, le fonctionnement et la composition du CNPN devrait également assurer aux sciences du vivant et aux sciences humaines une représentation équilibrée et fixer les règles de transparence applicables aux experts du CNPN.
Je ne peux que souscrire à cette idée, mais je ne vois pas en quoi la composition du CNPN ne respecte pas actuellement cette prescription. Cet amendement me semble d’ores et déjà satisfait par la façon dont l’État organise actuellement son fonctionnement.
Enfin, l’amendement n° 327 rectifié vise à introduire, au sein du CNPN, un représentant du milieu forestier. Il avait déjà été présenté en commission et rejeté. Cette représentation devra évidemment être assurée. Toutefois, il n’y a pas lieu de citer les seuls représentants du Centre national de la propriété forestière. De surcroît, cette précision relève du niveau réglementaire, et non de la loi, sauf à vouloir priver cette dernière de son sens. Dès lors que les représentants du Conseil national des forêts siègent au sein du CNPN, je suggère le retrait de cet amendement.
Le Gouvernement demande le retrait de l’ensemble de ces amendements, à l’exception des amendements n° 12 rectifié ter et 540 rectifié pour lesquels il s’en remet à la sagesse de la Haute Assemblée.
Le Conseil national de la protection de la nature émet des avis officiels, par exemple sur la création d’espaces protégés. Cette instance est donc absolument indispensable.
J’ai écouté avec attention les arguments qui viennent d’être échangés, en parallèle à la discussion que nous venons d’avoir sur le Conseil national de la chasse et de la faune sauvage. Je vous parle franchement et je reconnais que l’article 5 du projet de loi donne une existence législative au Conseil national de la protection de la nature, qui est actuellement régi par un décret.
Je souhaite d’ailleurs lever toute ambiguïté, en vous indiquant qu’il n’a jamais été question de supprimer le Conseil national de la chasse et de la faune sauvage, dont l’existence repose sur un texte réglementaire.
Il est vrai que les représentants des chasseurs peuvent s’interroger sur la différence ainsi établie, du point de vue de la hiérarchie des normes, entre le Conseil national de la protection de la nature et celui de la chasse et de la faune sauvage. Dans ces conditions, pourquoi ne pas donner, par équilibre, une existence législative à ce dernier ? En tout état de cause, le Comité national de la biodiversité sera saisi des sujets examinés par l’un et l’autre de ces conseils.
Je souhaite insister sur le rôle absolument indispensable du Conseil national de la protection de la nature, qui aura une existence législative et dont on ne pourra réduire les compétences.
En outre, je peux vous dire que, dans un souci d’équilibre et pour montrer qu’il n’y a aucun ostracisme à l’égard des associations de chasse, je ne reviendrai pas, à l’Assemblée nationale, sur le vote qui vient d’avoir lieu en ce qui concerne la base juridique du Conseil national de la chasse et de la faune sauvage. Ainsi, nous faisons la même chose pour les deux instances, étant entendu que les sujets qui viennent devant elles pourront également recueillir l’avis du Comité national de la biodiversité.
Le débat va se poursuivre entre les deux assemblées. Je crois qu’il faut mettre un terme aux oppositions et tensions entre les défenseurs des chasseurs et ceux de la biodiversité. Il est nécessaire de trouver un équilibre, dans le respect qui est dû à chacun.
Par conséquent, je soutiendrai à l’Assemblée nationale ce qui vient d’être voté par la Haute Assemblée sur la reconnaissance législative du Conseil national de la chasse et de la faune sauvage, qu’il n’a jamais été question – je le répète – de supprimer. En revanche, nous devrons travailler pour associer les milieux de la chasse au Conseil national de la biodiversité.
Ce sont les principales raisons qui m’amènent à vous demander le retrait des différents amendements relatifs au Conseil national de la protection de la nature.
Le Conseil national de la protection de la nature et le Conseil national de la chasse et de la faune sauvage, qui émettent des avis officiels, respectivement sur un certain nombre de décisions administratives et sur les arrêtés de chasse, garderont leurs compétences et traiteront des différents sujets liés à la biodiversité.
Je souligne d’ailleurs que le Conseil national de la chasse et de la faune sauvage restera compétent en matière d’arrêtés de chasse et que ce pouvoir ne sera pas transmis au Conseil national de la biodiversité.
Approbations sur les travées du groupe socialiste et républicain.
L’amendement est adopté.
En conséquence, les amendements n° 11 rectifié ter et 537 rectifié n’ont plus d’objet.
Je mets aux voix les amendements identiques n° 10 rectifié ter et 538 rectifié.
Les amendements ne sont pas adoptés.
Je mets aux voix les amendements identiques n° 12 rectifié ter et 540 rectifié.
Les amendements sont adoptés.
C’est un amendement du groupe UDI-UC que nous ne retirons pas, madame la présidente. Selon l’alinéa 13 de l’article 5, la composition du Conseil national de la protection de la nature concourt à une représentation significative de spécialistes de la biodiversité ultramarine. Nous souhaitons compléter cette phrase en y ajoutant les spécialistes du milieu forestier. Je vous rappelle en effet que la forêt représente la deuxième source de biodiversité.
L’amendement n’est pas adopté.
Madame la présidente, je demande une suspension de séance d’un quart d’heure.
La séance, suspendue à dix-sept heures vingt, est reprise à dix-sept heures cinquante-cinq.
J’informe le Sénat que la proposition de loi organique, adoptée par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, de modernisation des règles applicables à l’élection présidentielle (n° 278, 2015-2016) et la proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, de modernisation des règles applicables à l’élection présidentielle (n° 279, 2015-2016), dont la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale est saisie au fond, sont envoyées pour avis, à sa demande, à la commission de la culture, de l’éducation et de la communication.
Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages.
Nous poursuivons la discussion du texte de la commission.
Au sein de l’article 5, nous en sommes parvenus à l’examen de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 269 rectifié, présenté par M. Poher, Mme Bonnefoy, MM. Madrelle, Guillaume, Bérit-Débat, Camani, Cornano et Filleul, Mme Herviaux, MM. J.C. Leroy, Miquel et Roux, Mme Tocqueville, MM. Cabanel, Yung, Daunis et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Compléter cet article par deux alinéas ainsi rédigés :
« Art. L. 134 - … – Un comité départemental de la biodiversité est instauré dans chaque département. Il assure le suivi de la mise en œuvre des politiques de l’État et des collectivités territoriales en matière de biodiversité à l’échelle départementale.
« Son domaine de compétence, sa composition et son fonctionnement sont fixés par décret. »
La parole est à M. Hervé Poher.
Dans le cadre de la réorganisation de la gouvernance et dans un but de lisibilité et de clarté, on nous propose de faire disparaître une multitude de comités, de conseils, de groupes au niveau national, mais aussi au niveau local ou régional.
Il s’agit d’une louable intention, qui permet de mettre en avant l’existence et le rôle du Comité national de la biodiversité et des comités régionaux de la biodiversité. Néanmoins, ce réaménagement appelle quelques remarques.
Tout d’abord, avec la création des grandes régions, les comités régionaux seront parfois bien éloignés de certains territoires.
Ensuite, il y avait jusqu’à présent, au niveau départemental comme au niveau régional, quelques commissions qui s’occupaient de la biodiversité et des paysages, au sens large du terme, et qui étaient relativement efficaces. Ces commissions permettaient de réunir autour de la table les services de l’État, les élus locaux, le monde associatif, des professionnels, et le travail y était bien souvent intelligent et productif.
Par ailleurs, les départements ne sont pas encore morts et, jusqu’à preuve du contraire, ils ont gardé la compétence sur les espaces naturels sensibles, les ENS. Or, dans certains départements, ce réseau d’ENS pèse lourd dans la gestion de la biodiversité, la définition des trames verte et bleue et la notion de continuité écologique.
En outre, puisque la biodiversité doit être une reconquête, celle-ci ne sera réussie que si elle résulte d’une dynamique collective, ce qui est quand même plus facile à créer à l’échelle – je dis bien : « l’échelle » – d’un EPCI, voire d’un département.
De surcroît, je rappelle que certains départements ont des spécificités environnementales, qu’il faut traiter comme telles. La formidable biodiversité des bacs à schlamm, au pied des terrils, ou la grouillante biodiversité des polders de la plaine des Flandres méritent un regard très particulier.
Enfin, nous avons découvert voilà quelques années le principe de subsidiarité, qui est « une maxime politique et sociale selon laquelle la responsabilité d’une action publique, lorsqu’elle est nécessaire, doit être allouée à la plus petite entité capable de résoudre le problème d’elle-même », et ce pour une plus grande efficacité.
Madame la ministre, croyez-vous que la subsidiarité au niveau régional soit le meilleur moyen de créer une dynamique collective et de reconquérir la biodiversité ? Nous sommes plusieurs à avoir des doutes, et c’est pourquoi nous proposons la création de comités départementaux de la biodiversité.
L’amendement n° 311, présenté par M. Dantec, Mme Blandin, M. Labbé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Compléter cet article par trois alinéas ainsi rédigés :
« Art. L. 134 - … – Un comité départemental de la biodiversité est instauré dans chaque département. Il assure le suivi de la mise en œuvre des politiques de l’État et des collectivités territoriales en matière de biodiversité à l’échelle départementale.
« Le comité départemental de la biodiversité est présidé par le représentant de l’État dans le département. Ce comité comprend notamment des représentants des collectivités territoriales concernées et de leurs groupements, des représentants de l’État et de ses établissements publics, des organismes socio-professionnels intéressés, des propriétaires et des usagers de la nature, des gestionnaires d’espaces naturels et des associations de protection de la nature au sens des articles L. 141-1 et L. 141-3 du code de l’environnement, de la fédération départementale ou interdépartementale des chasseurs, de la fédération départementale ou interdépartementale pour la pêche et pour la protection des milieux aquatiques, ainsi que des scientifiques ou représentants d’organismes de recherche, d’études ou d’appui aux politiques publiques et des personnalités qualifiées.
« Son domaine de compétence, sa composition et son fonctionnement sont fixés par décret. »
La parole est à M. Ronan Dantec.
Sourires.
Nouveaux sourires.
Néanmoins, force est de reconnaître, dans le droit fil des débats que nous avons eus sur la loi NOTRe, que les départements ont gardé la cassette avec la taxe départementale des espaces naturels sensibles, la TDENS, c’est-à-dire qu’ils ont l’argent. Si nous voulons que cet argent soit bien utilisé, il nous faut mettre en cohérence l’action sur les questions d’environnement et de biodiversité à l’échelle des départements.
De plus, je dois dire que ma position a un peu évolué en raison de l’apparition des très grandes régions, qui ont, comme l’a rappelé Hervé Poher, des caractéristiques environnementales plus diverses que les anciennes régions à quatre ou cinq départements. En effet, on ne gère pas les Landes comme le Limousin.
Aussi, je pense que ce comité départemental a tout son sens, le département ayant les recettes et la compétence « espaces naturels sensibles ». C’est également l’occasion de faire évoluer un certain nombre de comités qui existaient à l’échelle départementale pour avoir un comité unique, l’idée étant toujours la même, à savoir la mise en cohérence de l’ensemble des acteurs et de l’action publique à tous les niveaux.
Ces amendements visant à créer un comité départemental de la biodiversité, en plus du comité national et du comité régional, avaient été rejetés lorsque nous avions examiné le texte en commission au mois de juillet.
Pour ma part, et c’est aussi l’avis de la commission, je ne suis pas complètement convaincu qu’il soit nécessaire de multiplier les instances et les niveaux. Il est vrai que les départements ont des richesses. Pour avoir été pendant plus de trente-cinq ans conseiller départemental – j’ai d’ailleurs eu le plaisir de connaître Hervé Poher dans l’exercice de ce mandat –, je sais bien que les départements avaient des responsabilités importantes en matière d’espaces naturels avant la loi NOTRe. Ils ont certes gardé la responsabilité des espaces naturels sensibles, mais est-ce que cette compétence justifie à elle seule la création d’un comité départemental de la biodiversité ?
Il s’agit toujours du même sujet qui nous a occupés à plusieurs reprises, cet après-midi et hier : pour gagner en efficacité, vaut-il mieux multiplier les comités ou essayer d’organiser et de rationaliser ceux qui existent déjà ? À une époque où l’on dispose de moins de fonctionnaires, de temps et d’argent, je pense que nous avons peut-être intérêt à essayer d’organiser un peu mieux toutes ces instances.
Nous ne pouvons pas à la fois tenir un discours sur le désengagement de l’État et la réduction des dépenses publiques à tous les niveaux et faire de la comitologie, même si cela peut parfois être utile. Peut-être les comités régionaux pourraient-ils charger une partie de leurs membres de se pencher plus spécifiquement sur la situation de la biodiversité dans chaque département ? Cette solution me paraîtrait plus rationnelle que la création d’un nouveau comité, avec de nouveaux bureaux, de nouvelles réunions, de nouveaux frais de route, etc.
Je suis donc extrêmement réservé sur ces amendements, tout comme la commission, qui a donné un avis défavorable à leur adoption.
Je demande aux auteurs de ces amendements de bien vouloir les retirer. Ne créons pas une nouvelle usine à gaz et un nouveau décret d’application !
Le dispositif prévu dans le projet de loi a à la fois un caractère national et une articulation régionale. Pourquoi créer un nouveau comité placé sous l’autorité du préfet de département – les préfets n’en peuvent déjà plus avec les innombrables comités qu’ils ont à réunir –, alors qu’il existe déjà des structures départementales adaptées au suivi des politiques en matière de biodiversité ? Laissons-les fonctionner ! S’il y a besoin d’élargir leurs compétences pour les encourager à travailler sur les questions stratégiques liées à la biodiversité, une circulaire suffira.
Je pense qu’il existe dans les territoires des acteurs suffisamment intelligents et structurés pour pouvoir se saisir des sujets ayant trait à la biodiversité. Ne créons pas une nouvelle instance, qui générera des contraintes administratives supplémentaires ! Tel n’est vraiment pas l’objectif du projet de loi, qui vise à regrouper les structures existantes sans en créer de nouvelles. Voilà qui permettra de passer rapidement à l’action !
Moi non plus, je ne pense pas qu’il soit nécessaire de créer des structures, ce qui revient à dépenser de l’argent et à mobiliser des fonctionnaires. N’oublions pas pour autant que c’est à l’échelle du département que nous sommes confrontés aux problèmes concrets : remembrement, passage d’une route… Il me paraîtrait donc absolument rationnel de voter ces amendements. Il s’agit non pas de créer des dépenses supplémentaires et inutiles, mais de reconnaître que l’on doit traiter les problèmes là où ils se posent.
M. Hervé Poher. Je suis tenté de dire que les combats inutiles sont les plus beaux…
Sourires.
Je suis intimement persuadé qu’il faut rester au plus près du terrain. Localement, la biodiversité, c’est un ensemble de petits sous-ensembles. La richesse du département du Pas-de-Calais, dont je suis élu, ce sont 5 000 hectares de petits morceaux de terrain éparpillés. Ce n’est pas à l’échelle d’une grande région que cela se gère.
Dans la mesure où M. Poher a maintenu son amendement, je maintiens également le mien.
J’ai bien entendu Mme la ministre, mais je ne partage pas son analyse : on ne crée rien, on fait évoluer des structures existantes. On a deux structures aujourd’hui : on n’en fait qu’une, avec deux collèges en son sein.
J’ai un peu peur que si l’on n’envisage pas la biodiversité à l’échelle du département, on risque d’avoir un vrai conflit entre un département qui gère une cagnotte et une région avec un regard un peu lointain. Les deux niveaux ne dialogueront pas forcément.
En apposant à la commission actuelle des sites et des paysages le tampon « biodiversité », nous proposons de dire plus clairement que celle-ci doit rentrer dans la logique régionale et nationale de la biodiversité.
Loin d’avoir l’impression de créer une nouvelle structure, j’ai le sentiment de créer quelque chose de plus cohérent. Honnêtement, on ne rajoute rien !
Effectivement, c’est à l’échelon départemental que les choses se déroulent. J’en veux pour preuve le fait que les départements ont conservé la taxe pour la préservation des espaces naturels sensibles. Ils ont donc encore la responsabilité des espaces naturels.
Soyons pratiques : pour que nos concitoyens puissent adhérer à cette politique, il faut un échelon de proximité. Qui vont-ils aller voir, sinon les présidents de département ? En tant qu’élu de la Marne, département rattaché à la grande région Alsace-Champagne-Ardenne-Lorraine, je ne suis pas sûr que les personnes confrontées à un problème d’aménagement aillent jusqu’à Strasbourg pour rencontrer le président de région quand il suffit de faire quelques kilomètres pour voir le président du département.
Les départements sont directement confrontés à la réalité du terrain. C’est véritablement leur vocation de garantir la solidarité des territoires, notamment en assurant leur développement durable. Cette mission est inscrite dans les gènes des départements, dont un certain nombre de compétences ont été confortées. Faisons preuve de souplesse ! Là où peut se créer un comité départemental, il faut que la loi le permette.
Madame la ministre, si l’on veut faire des économies, on peut, à ce moment-là, se poser la question des comités régionaux, qui coexistent avec des comités départementaux. Ce serait un moyen d’éviter des structures supplémentaires !
Je rappelle qu’un certain nombre de schémas, comme les schémas de cohérence écologique – on a d'ailleurs créé beaucoup de schémas –, et de services de l’État ont été régionalisés.
Ces amendements n’ouvrent pas une possibilité : ils imposent la création d’un comité départemental de la biodiversité. Or la vraie question est de savoir s’il revient ou non aux départements de gérer directement les espaces naturels et sensibles. Je sais que nombre d’entre eux préféreraient se tourner pour cela vers la région, tout en voulant bien continuer à percevoir la taxe…
En outre, ces amendements visent à confier la gestion de ce comité au préfet de département. Comme les instances régionales sont codirigées, il y aurait donc un schéma régional coconstruit entre le président de région et le préfet de région et un comité départemental placé sous la houlette du préfet de département. Moi qui suis très attachée à la décentralisation, cela me paraît un peu bizarre.
Je veux dissiper un malentendu.
J’entends certains sénateurs demander que l’échelon départemental s’occupe de la biodiversité, ce qui me paraît tout à fait judicieux. Or, là, nous ne sommes pas du tout dans ce cas de figure. Malgré la confusion du libellé des amendements, il s’agit non pas du département, mais de l’organisation des services de l’État dans le département. Ces amendements ont en effet pour objet d’obliger le préfet à présider un nouveau comité chargé de la biodiversité, dont la composition sera arrêtée par décret.
Le préfet a déjà en charge de multiples commissions. Il pourra les réunir afin de se saisir des questions stratégiques liées à la biodiversité. Je peux également rédiger une circulaire pour lui demander de réunir les parties prenantes de la politique de biodiversité afin de décliner cette dernière sur le territoire.
Il ne s’agit donc pas de l’organisation de l’assemblée départementale, qui est parfaitement compétente pour créer toutes les structures qu’elle souhaite créer. Il faut d’ailleurs que les assemblées départementales – le président, des élus, des structures – travaillent en liaison avec les régions sur les politiques de biodiversité ; c’est d'ailleurs déjà le cas.
Que les assemblées s’organisent comme elles le veulent, c’est une chose. C’en est une autre que d’obliger, par la loi, les préfets à présider un nouveau comité, qui demandera de prendre de nouveaux décrets pour arrêter sa composition, sans compter les conflits que cela ne manquera pas de provoquer sur le point de savoir qui doit y siéger. À titre d’exemple, on pourra s’interroger sur l’opportunité de retenir la participation des chasseurs.
J’invite de nouveau les auteurs de ces amendements à les retirer. Si ces dispositions étaient adoptées, je ne les soutiendrai pas dans la suite de nos travaux. En effet, nous sommes déjà suffisamment touchés par la réunionite et nous avons déjà suffisamment de décrets à prendre. J’ai retiré les ordonnances pour ne pas multiplier les textes d’application et, là, on me remet un décret destiné à prévoir les modalités de fonctionnement d’une nouvelle structure placée sous l’autorité de l’État. À mon sens, les préfets sont assez grands pour savoir comment ils vont s’organiser en vue de mettre en œuvre les politiques de l’État.
Je le répète, les assemblées départementales ne sont pas concernées par ces amendements.
À titre personnel, je soutiendrai ces deux amendements, qui ont le mérite de soulever des problèmes de gouvernance. J’en conviens, il existe déjà à l’échelle départementale de nombreuses structures placées sous l’autorité des représentants de l’État – préfets ou sous-préfets, dont je tiens à saluer, au passage, tout le travail qu’ils accomplissent. Reste qu’il existe des structures qui ne se réunissent pas très souvent – il faut le dire. Peut-être faudrait-il réfléchir à leur remplacement.
Un comité départemental de la biodiversité destiné à mettre en œuvre les politiques de l’État et des collectivités territoriales me paraîtrait constituer un signal fort. Il importe cependant de n’oublier personne et de veiller à respecter l’intérêt général. Il faut en effet prendre en compte les préoccupations des agriculteurs, des chasseurs, penser au domaine forestier et soutenir et encourager l’activité économique.
J’ai écouté attentivement les collègues qui se sont exprimés sur ce sujet. J’ai entendu également le rapporteur, lequel a le mérite de suivre une ligne droite. Ce n’est pas si mal !
Ce que je veux dire par là, c’est que nous demandons très souvent de simplifier les structures. La plupart du temps, nous demandons de ne pas multiplier les organismes qui se superposent. Là, on se trouve confronté à la proposition de créer une strate supplémentaire, demande que nous combattons la plupart du temps.
Peut-être pouvons-nous essayer de trouver une autre solution. Étant moi aussi girondin, je comprends que l’on ait besoin de rester au plus près du terrain. Or la création des grandes régions va rendre les choses parfois difficiles.
Dans cet état d’esprit, rien n’empêche de créer non pas un comité départemental dirigé par le préfet, mais une structure dédiée à la biodiversité au sein du conseil départemental qui pourrait dialoguer avec le conseil régional ou – je me rapproche du conseiller territorial… – de prévoir que des représentants du département siègent au conseil régional.
M. Éric Doligé. J’attendais, pour intervenir, de trouver un moment où je serais tout à fait en accord avec Mme la ministre.
Sourires.
Monsieur Dantec, je voudrais reprendre deux de vos propos. En effet, on dit un certain nombre de choses dans le débat, puis, après, cela chemine…
Vous avez dit vouloir que cet argent soit bien utilisé. Comme si les départements utilisaient mal leur argent ! Certes, il n’existe pas de structures particulières pour gérer ces sommes, mais, dans le cadre de la politique départementale, les départements gèrent bien le produit de la TDENS.
Vous avez également fait allusion à la gestion d’une cagnotte. Ce n’est pas une cagnotte !
Non, c’est une ressource qui permet au département de mener un certain nombre de politiques ! Il faut arrêter de toujours glisser dans les débats un certain nombre de sous-entendus qui ne correspondent pas à la réalité !
Je ne vous suivrai pas sur votre amendement. J’espère qu’il ne passera pas la barre, car son adoption reviendrait à créer une nouvelle structure, de surcroît une structure d’État, qui dépendrait du préfet, lequel dispose déjà de beaucoup de moyens pour agir sur le plan départemental.
Ceux qui me connaissent bien savent à quel point je suis attaché aux territoires et aux départements. Pour autant, je crois qu’il nous faut gagner en cohérence.
Je rejoins les propos de notre collègue Jouanno : aujourd’hui, tous les schémas qui ont trait à l’écologie sont décidés au niveau régional, et cela doit rester ainsi. Cela ne saurait empêcher que les régions trouvent des accords avec les départements : laissons donc les élus régionaux, s’ils le souhaitent, se mettre en cohérence avec les départements par la constitution de relais locaux qui feront en sorte que les politiques resteront au plus près du terrain et gagneront en efficacité !
L’amendement n’est pas adopté.
L’amendement n’est pas adopté.
L’article 5 est adopté.
(Non modifié)
I. – Après le mot : « avec », la fin du premier alinéa de l’article L. 371-2 du code de l’environnement est ainsi rédigée : « le Comité national de la biodiversité. »
II. – Le I du présent article entre en vigueur à la date de publication du décret en Conseil d’État mentionné au deuxième alinéa de l’article L. 134-1 du code de l’environnement, et au plus tard six mois après la promulgation de la présente loi.
L’article 6 poursuit la logique de simplification des structures et donc des procédures.
Le comité national « trames verte et bleue » est composé de cinquante membres répartis en cinq collèges. Depuis la fin de 2011, il a tenu douze réunions et rendu cinq avis sur divers projets de textes traitant des continuités écologiques ou susceptibles d’avoir un effet notable sur celles-ci.
Dans la logique de fusion des structures existantes, afin de renforcer à la fois leur efficacité, leur rapidité d’action et leur cohérence, il vous est proposé d’intégrer le comité national « trames verte et bleue » au futur Comité national de la biodiversité.
L’amendement n° 611, présenté par M. Bignon, au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Remplacer le mot :
deuxième
par le mot :
dernier
La parole est à M. le rapporteur.
L’amendement est adopté.
L’article 6 est adopté.
I. – L’article L. 371-3 du code de l’environnement est ainsi modifié :
1° À la première phrase du premier alinéa, les mots : « trames verte et bleue » sont remplacés par les mots : « de la biodiversité » ;
2° Après la première phrase du premier alinéa, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Ce comité est associé à l’élaboration de la stratégie régionale pour la biodiversité. » ;
3° Au début de la deuxième phrase du premier alinéa, avant les mots : « Ce comité comprend », sont insérés les mots : « Avec une représentation équilibrée par collège des différentes parties prenantes, » ;
4° Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le comité régional de la biodiversité donne son avis sur les orientations stratégiques prises par les délégations territoriales de l’Agence française pour la biodiversité prévues par l’article L. 131-11. Il organise des concertations régulières avec les autres instances territoriales de consultation et de réflexion, dont les missions concernent les questions relatives à la biodiversité. »
II. –
Non modifié
II bis A
II bis. – L’article L. 213-13-1 du code de l’environnement est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le comité de l’eau et de la biodiversité assure, dans les départements d’outre-mer, les missions dévolues au comité régional de la biodiversité mentionné à l’article L. 371-3. Il constitue une instance d’information, d’échange et de consultation sur l’ensemble des sujets liés à la biodiversité terrestre, littorale ou marine, notamment en matière de continuités écologiques. Il peut être consulté sur tout sujet susceptible d’avoir un effet notable sur la biodiversité. »
III. –
Non modifié
Dans un souci de parallélisme entre les instances de gouvernance régionales et nationales, l’article 7 vise à transformer les comités régionaux « trames verte et bleue » métropolitains en comités régionaux de la biodiversité. Là encore, il s’agit de simplifier et de gagner en cohérence. Des mesures transitoires sont prévues pour faire en sorte que ces fusions et réorganisations se passent le mieux possible.
Dans les outre-mer – vous savez l’importance de ces territoires pour la biodiversité –, il est proposé que les comités de bassin deviennent des comités de l’eau et de la biodiversité. Ces derniers rempliront des missions équivalentes à celles des comités régionaux de la biodiversité en métropole. Là encore, nous nous appuyons sur des structures existantes, tout en élargissant leurs compétences à la biodiversité. Le changement se fera donc assez vite et de façon fluide.
Je suis saisie de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 313, présenté par M. Dantec, Mme Blandin, M. Labbé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
I. – Alinéas 3 et 4
Supprimer ces alinéas.
II. – Après l’alinéa 7
Insérer trois alinéas ainsi rédigés :
Dans chaque département ou région d’outre-mer, il est créé un comité régional de la biodiversité, lieu d’information, d’échanges et de consultation sur l’ensemble des sujets de biodiversité, terrestres et marins, notamment en matière de continuités écologiques. Il donne son avis sur les orientations stratégiques prises par les délégations territoriales de l’Agence française pour la biodiversité prévues par l’article L. 131-11 du code de l’environnement. Il peut être consulté sur tous sujets susceptibles d’avoir un effet notable sur la biodiversité. Un décret définit sa composition, son fonctionnement et son domaine de compétences, en veillant à une représentation équilibrée des différentes catégories d’acteurs.
Les comités régionaux de la biodiversité remplacent les comités de bassin et sont élargis aux acteurs de la biodiversité marine. Des comités territoriaux de la biodiversité peuvent être créés dans les autres collectivités d’outre-mer.
La parole est à M. Ronan Dantec.
Nous partageons la logique consistant à transformer les comités de bassin en comités régionaux de la biodiversité. En revanche, quelques difficultés subsistent quant à la composition de ces comités. Ainsi, à Mayotte, les associations de protection de la nature et les experts scientifiques, notamment du milieu marin – c’est un point extrêmement important pour les outre-mer –, sont faiblement représentés : respectivement 5 % et 9 % des sièges. Nous proposons donc que la représentation au sein des comités régionaux de la biodiversité soit immédiatement élargie aux acteurs de la biodiversité marine.
L’amendement tend par ailleurs à préciser les sujets sur lesquels ces comités rendent des avis.
L’amendement n° 218 rectifié bis, présenté par MM. Antiste, Cornano, Karam et Desplan, est ainsi libellé :
Alinéa 10
Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :
« Dans chaque département et région d’outre-mer, il est créé un comité régional de l'eau et de la biodiversité, lieu d’information, d’échanges et de consultation sur l’ensemble des sujets de biodiversité, terrestres et marins, notamment en matière de continuités écologiques et de politiques de l'eau. Il donne son avis sur les orientations stratégiques prises par les délégations territoriales de l’Agence française pour la biodiversité prévues par l’article L. 131-11. Il peut être consulté sur tous sujets susceptibles d’avoir un effet notable sur la biodiversité. Un décret définit sa composition, son fonctionnement et son domaine de compétences, en veillant à une représentation équilibrée des différentes catégories d’acteurs.
« Les comités régionaux de l’eau et de la biodiversité remplacent les comités de bassin, dont ils assurent les missions telles qu'elles sont définies par le présent code, et sont élargis aux acteurs de la biodiversité y compris marine. Des comités territoriaux de la biodiversité peuvent être créés dans les autres collectivités d’outre-mer. »
La parole est à M. Maurice Antiste.
L’article 7, au sein du titre II du projet de loi, propose que les comités de bassin en outre-mer, renommés en commission par le Sénat « comités de l'eau et de la biodiversité », assurent les missions dévolues aux comités régionaux de la biodiversité.
Il convient de s’interroger sur la composition des actuels comités de bassin, au sein desquels la représentation des associations de protection de la nature et des experts scientifiques, notamment pour le milieu marin, peut être faible. Ainsi, à Mayotte, ces acteurs disposent respectivement de 5 % et 9 % des sièges. C’est pourquoi il apparaît nécessaire d'ouvrir la composition de ces comités aux acteurs de la mer et de compléter l'article par une disposition incitant à la constitution de comités territoriaux de l’eau et de la biodiversité dans les autres collectivités d’outre-mer.
L’amendement n° 345 rectifié, présenté par MM. Patient, J. Gillot, S. Larcher, Karam et Cornano, Mme Claireaux et M. Desplan, est ainsi libellé :
Alinéa 10
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Le comité de bassin peut assurer, en outre-mer, les missions dévolues au comité régional de la biodiversité mentionné à l’article L. 371–3, sur demande des collectivités territoriales concernées. »
La parole est à M. Jacques Cornano.
Les régions sont responsables de l’élaboration du schéma régional de cohérence écologique, conjointement avec l’État et le comité régional de la biodiversité. Ainsi, les régions sont les chefs de file de la gestion de la biodiversité. Dès lors, pourquoi substituer au comité régional, dans les outre-mer, un comité de bassin placé sous la tutelle du préfet ? Il y a incohérence à confier l’ensemble de la dynamique de la biodiversité à la région tout en maintenant un comité qui ne dépend pas d’elle.
Les amendements n° 313 et 218 rectifié bis, qui sont presque identiques, visent à créer un comité régional de la biodiversité dans chaque département et région d’outre-mer, alors que nous avons prévu que, dans ces collectivités, ce sont les comités de bassin qui exerceront ces missions. Nous les avons d’ailleurs rebaptisés « comités de l’eau et de la biodiversité », à la suite de l’adoption d’un amendement en commission.
Par ailleurs, je ne comprends pas pourquoi supprimer, comme le proposent les auteurs de l’amendement n° 313, l’association des comités régionaux en général à l’élaboration de la stratégie nationale pour la biodiversité ou encore la représentation équilibrée de toutes les parties prenantes en leur sein. Mon incompréhension est d’autant plus grande que M. Dantec, si je ne m’abuse, était lui-même à l’origine de ces ajouts, qu’il propose à présent de supprimer.
La commission a donc émis un avis défavorable sur ces deux amendements.
La commission a également émis un avis défavorable sur l’amendement n° 345 rectifié. Le texte actuel prévoit de renforcer les compétences et les missions des comités de bassin dans les collectivités d’outre-mer afin que ces comités exercent les missions du comité régional de la biodiversité. La gouvernance de l’eau et celle de la biodiversité sont en effet largement imbriquées sur ces territoires ; cette mesure permet donc une souplesse avec l’existant qui me semble préférable à l’option proposée dans cet amendement. Nous avons d’ailleurs rebaptisé ces comités, je le répète, « comités de l’eau et de la biodiversité ».
À vrai dire, je ne comprends pas très bien la crainte qui motive les auteurs de cet amendement, car le texte de loi me semble satisfaisant en l’état. Si M. Cornano souhaite nous expliquer les raisons de son inquiétude, nous pourrions peut-être réfléchir à une autre rédaction.
Je veux avant toute chose remercier Maurice Antiste et Jacques Cornano pour le travail considérable qu’ils ont accompli. J’ai étudié avec une grande attention les nombreux amendements qu’ils ont déposés en faveur d’une meilleure prise en compte des outre-mer. Je dois dire que, déjà, à l’Assemblée nationale, le débat avait été très fourni avec les élus des outre-mer. Je ne saurais trop rappeler que 80 % de la biodiversité française s’y trouve.
Cette biodiversité doit faire l’objet de beaucoup de soin et d’attention. Son potentiel considérable est d’ailleurs reconnu sur le plan international, comme on a pu le voir au cours de la COP 21, où la France avait fait inscrire le sujet de l’océan à l’ordre du jour officiel de l’Agenda des solutions.
J’en viens aux amendements.
Le Gouvernement est favorable à l’amendement n° 218 rectifié bis, qui tient compte de la disparition des comités de bassin. Cet amendement vise donc non pas à créer une structure supplémentaire, mais à la dénommer autrement. Ce choix de vocabulaire est conforme à l’esprit du projet de loi. En revanche, l’élargissement aux comités de bassin des missions dévolues aux comités régionaux de la biodiversité prête à confusion. Je demande donc aux auteurs de l’amendement n° 345 rectifié de bien vouloir le retirer.
Je demande également aux auteurs de l’amendement n° 313 de se rallier à l’amendement n° 218 rectifié bis, qui précise clairement que les comités de bassin sont remplacés par les comités régionaux de l’eau et de la biodiversité. Son adoption permettrait à la fois d’améliorer la rédaction de l’article et de maintenir une cohérence ainsi qu’une unité de lieu pour les questions de l’eau, du milieu marin et de la biodiversité.
Non, madame la présidente, je le retire au profit de l’amendement n° 218 rectifié bis. En effet, entre ces deux amendements, seul l’intitulé du comité régional change. Je trouve symboliquement préférable et d’ailleurs plus logique que soit adopté un amendement déposé par des sénateurs ultramarins.
Je tiens à répondre au rapporteur : ce que nous proposons, c’est de ne pas faire disparaître de comités du tout ! En revanche, nous conservons le caractère facultatif de ces structures uniquement pour les petites collectivités ultramarines.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 345 rectifié est retiré.
L'amendement n° 619, présenté par M. Bignon, au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 6
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Il assure, en outre, pour le bassin hydrographique de chaque département d'outre-mer, le rôle et les missions du comité de bassin tels qu'ils sont définis dans le présent code.
II. – Après l'alinéa 7
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
… – La section 5 du chapitre III du titre Ier du livre II du code de l'environnement est ainsi modifiée :
1° À l'intitulé, les mots : « comités de bassin » sont remplacés par les mots : « comités de l'eau et de la biodiversité » ;
III. – Alinéa 8
1° Remplacer la référence :
II bis A. –
par la référence :
2° Remplacer les mots :
Au deuxième alinéa de l'article L. 213-13
par les mots :
À la première phrase du deuxième alinéa, au cinquième alinéa et au dernier alinéa du I de l'article L. 213-3
La parole est à M. le rapporteur.
L'amendement est adopté.
L'amendement n° 312, présenté par M. Dantec, Mme Blandin, M. Labbé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 6
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Le comité régional de la biodiversité est associé à l’élaboration et au suivi de la stratégie régionale pour la biodiversité et peut être consulté sur tout sujet relatif à la biodiversité ou ayant un effet notable sur celle-ci dans la région concernée. Il donne son avis sur les orientations stratégiques prises par les délégations territoriales de l’Agence française pour la biodiversité prévues à l’article L. 131-11. »
La parole est à M. Ronan Dantec.
Dans la rédaction actuelle de l’article 7, les missions des comités régionaux de la biodiversité restent centrées sur la mise en place, le suivi et l’évaluation des schémas régionaux de cohérence écologique. Ne pas associer ces comités en amont à l’élaboration des SRCE semble d’autant plus illogique que le Comité national de la biodiversité fonctionne ainsi. Il paraît donc de bonne gouvernance d’apporter cette précision.
De plus, comme aucune structure départementale n’a été créée, de fait, la structure régionale voit ses missions renforcées. Il faut donc que les comités régionaux de la biodiversité puissent être associés en amont à l’élaboration du SRCE. J’en profite pour préciser qu’à l’amendement précédent on ne créait rien : on fusionnait des structures existantes, lesquelles auraient donc continué à exister. Mes chers collègues, si vous aviez lu l’amendement jusqu’au bout, vous l’auriez compris ! Mais ce débat est derrière nous…
Cet amendement tend à associer les comités régionaux de la biodiversité à l’élaboration et au suivi de la stratégie régionale pour la biodiversité – c’est déjà prévu à l’alinéa 3 pour l’élaboration –, à leur permettre de donner leur avis sur les orientations stratégiques prises par les délégations territoriales de l’Agence française pour la biodiversité – c’est déjà prévu à l’alinéa 6. Il vise aussi à prévoir qu’ils puissent être consultés sur tout sujet relatif à la biodiversité ou ayant un effet notable sur celle-ci dans la région concernée : je ne vois pas l’intérêt d’ajouter cette disposition dans la mesure où des concertations régulières avec les autres instances de concertation sont déjà prévues, auxquelles les représentants de toutes les parties prenantes sont associés.
Pour toutes ces raisons, cet amendement est largement satisfait.
Comme vient de le dire M. le rapporteur, cet amendement est satisfait.
L'amendement n° 312 est retiré.
Je suis saisie de deux amendements identiques.
L'amendement n° 271 rectifié bis est présenté par M. Poher, Mme Bonnefoy, MM. Madrelle, Guillaume, Bérit-Débat, Camani, Cornano et Filleul, Mme Herviaux, MM. J.C. Leroy, Miquel et Roux, Mme Tocqueville, MM. Yung, Daunis et les membres du groupe socialiste et républicain.
L'amendement n° 314 rectifié est présenté par M. Dantec, Mme Blandin, M. Labbé et les membres du groupe écologiste.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’alinéa 7
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
… – Le trente et unième alinéa du 2° du I de l'article 10 de la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République est ainsi rédigé :
« Préalablement à son élaboration, le conseil régional consulte le comité régional de la biodiversité et débat sur les objectifs du schéma. »
La parole est à M. Hervé Poher, pour présenter l’amendement n° 271 rectifié bis.
M. Hervé Poher. L’objet de cet amendement peut sembler une évidence, mais, pour qu’une évidence devienne telle, encore faut-il qu’elle soit écrite…
Sourires.
La loi NOTRe a tué les SRADDT, pour donner naissance aux SRADDET, les schémas régionaux d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires, qui fusionneront avec d’autres schémas régionaux ou qui les absorberont.
Les SRADDT incluaient énormément de domaines : l’aménagement du territoire, l’urbanisme, les transports, mais aussi un volet environnement, biodiversité et patrimoine naturel important. De plus, pour élaborer cette démarche, la région s’appuyait sur des groupes et des comités qui, avec la réforme de la gouvernance, vont disparaître. C’est pourquoi, dans l’élaboration du volet biodiversité et environnement des nouveaux SRADDET, il semble indispensable, incontournable, donc évident, que soit consulté le nouveau comité régional de la biodiversité. Or le projet de loi prévoit que le conseil régional peut consulter tout autre organisme. Cet amendement vise donc à rendre obligatoire la consultation du comité régional de la biodiversité par le conseil régional.
La parole est à M. Ronan Dantec, pour présenter l'amendement n° 314 rectifié.
En commission, nous avions souhaité que ces deux amendements identiques soient rectifiés pour tenir compte de l’entrée en vigueur de la loi NOTRe et que la disposition prévue soit déplacée après l’alinéa 7. Cette rectification ayant eu lieu, je ne peux que confirmer l’avis favorable de la commission.
Je mets aux voix les amendements identiques n° 271 rectifié bis et 314 rectifié.
Les amendements sont adoptés.
L'amendement n° 612, présenté par M. Bignon, au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, est ainsi libellé :
Alinéa 11
Remplacer le mot :
deuxième
par le mot :
dernier
La parole est à M. le rapporteur.
L'amendement est adopté.
L'article 7 est adopté.
(Non modifié)
Le premier alinéa du I de l’article L. 371-1 du code de l’environnement est complété par les mots : « ainsi que la gestion de la lumière artificielle la nuit ». –
Adopté.
(Supprimé)
I. – L’article L. 421-1 du code de l’environnement est ainsi modifié :
1° À la première phrase du premier alinéa du I, la seconde occurrence des mots : « la chasse » est remplacée par les mots : « l’écologie » ;
2° Le premier alinéa du II est ainsi modifié :
a) À la première phrase, le nombre : « vingt-deux » est remplacé par le nombre : « vingt-six » ;
b) À la seconde phrase, après le mot : « forestiers », sont insérés les mots : «, un représentant des régions, un représentant des départements et un représentant des communes, des représentants » ;
II
– Les nouveaux membres qui siègent au sein du conseil d’administration de l’Office national de la chasse et de la faune sauvage en application du a du 2° du I du présent article ne perçoivent en cette qualité aucune rémunération ni indemnité. –
Adopté.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux en raison de la cérémonie de vœux du président du Sénat ; nous les reprendrons à vingt et une heures.
Nous avons examiné 57 amendements cet après-midi ; il en reste 480 à examiner.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à dix-huit heures quarante, est reprise à vingt-et-une heures cinq, sous la présidence de M. Jean-Pierre Caffet.